1
unité comme on peut », avoue-t-il franchement. Il
me
semble bien paradoxal de vouloir unir dans une même philosophie la mo
2
maîtres d’eux-mêmes, c’est-à-dire libres. Et cela
me
semble d’autant plus paradoxal que M. de Montherlant est justement un
3
ons, qu’on les appelle ou non idées générales, et
j’
avoue bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur le monde à laque
4
’il n’est pas une opinion sur le monde à laquelle
je
ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlan
5
sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ».
Je
préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de
6
utent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi
mon
art, entre terre et ciel. Mais sa foulée, bondissante et posée, est p
7
du désir de l’air. Danse-t-il sur une musique que
je
n’entends pas ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la dom
8
e dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : «
Je
ne demande pas qu’on m’aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils d
9
ui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on
m’
aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils disent : « Tu es notre ca
10
à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime.
Je
demande qu’on me soit dévoué. » Ils disent : « Tu es notre capitaine.
11
Je ne demande pas qu’on m’aime. Je demande qu’on
me
soit dévoué. » Ils disent : « Tu es notre capitaine. » Ces choses ne
12
que parcourent de jeunes et purs courages, donnez-
moi
votre silence jusqu’à l’heure. Que je taise votre mot de ralliement,
13
es, donnez-moi votre silence jusqu’à l’heure. Que
je
taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épées. Rien de
14
cision. » On évitera ainsi tout niais romantisme.
Je
sais bien ce qu’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’app
15
. Ce qu’on en peut retenir, c’est la méthode, car
je
crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église romaine, quoi qu’
16
n » que lui ont enseigné le sport et les anciens.
J’
admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa morale viril
17
qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis
je
ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du sang. Tout
18
revient souvent lorsqu’on parle de cette œuvre :
je
ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité
19
ple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits,
je
tire cette conclusion pratique : inutile de publier des poèmes. Éluar
20
cation est dans la logique de ses principes, mais
je
lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poiss
21
n à sa défense de la poésie pure. Les beautés que
j’
y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuit
22
se de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne
me
seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidenc
23
fortuite coïncidence entre l’univers du poète et
le mien
? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’être pa
24
coïncidence entre l’univers du poète et le mien ?
Je
comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’être parfait
25
ends trop de choses dans ces poèmes qui devraient
m’
être parfaitement impénétrables. Je crois même voir que M. Breton sera
26
qui devraient m’être parfaitement impénétrables.
Je
crois même voir que M. Breton serait un très curieux poète s’il ne s’
27
poème doit être une dictée non corrigée du Rêve.
Je
reconnais à chaque ligne de Poisson soluble cette « vieillerie poétiq
28
une grande part dans l’« alchimie du verbe » ; et
je
ne puis m’empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dè
29
part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis
m’
empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dès lors, tou
30
ie lui-même : « Il y a quelque chose au-dedans de
moi
. Qu’est-ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont de gauches co
31
meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt,
je
crois, une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtou
32
l’Asie est le subconscient du monde, formule qui,
je
pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles
33
’impartialité. Son art bénéficie de cette vision.
Je
ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman san
34
iste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et
j’
imagine son étonnement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois la
35
à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-
je
pourtant que je crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inc
36
rps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant que
je
crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à g
37
moral, c’est-à-dire rationnel, dit M. Seillière —
me
paraît infiniment plus forte que celle d’un Maurras ou que celle d’un
38
e tous les jours aux vivants et aux morts : Mère,
je
sais très mal comme l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à l
39
utel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…).
Je
cite des noms : y a-t-il influence ou seulement co-génération ? Pour
40
cho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles.
J’
avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble
41
l’univers intérieur où il lui arrive de graviter
me
trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’infini
42
ts, Synge, Joyce même… Trois noms qui permettent,
je
crois, de parler d’un grand siècle littéraire irlandais ; ce que d’ai
43
on d’idées en faits ou en situations dramatiques.
Je
donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou
44
e faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour
moi
. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-être du monde d
45
e est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ?
m’
embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne
46
: va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrasser ou
me
tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empir
47
trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer.
Je
parle en général, sachant bien qu’un Romier, un Bainville, quelques a
48
a bêtise de tous les partis, on comprendra ce que
je
veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à la place ? Nos pens
49
aient à l’action, c’est encore pour cultiver leur
moi
. Ils y cherchent un fortifiant, je ne sais quelle excitation, quelle
50
cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortifiant,
je
ne sais quelle excitation, quelle révélation ou quel oubli. C’est un
51
listes adonnés à la culture et à la libération du
moi
paraissent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de ro
52
n d’étonnant : ils ne sont que les projections du
moi
de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur.
53
souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son
moi
, pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités ne
54
équilibres entre la raison et les sens, entre le
moi
et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons po
55
rs ». « Pour nous, le salut n’est nulle part… » «
Je
comprends la révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu »
56
end en vain sa Révélation : « C’est peut-être que
je
suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché
57
ne s’est autant attachée à chercher dans le seul
moi
les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’
58
’est vertu que de favoriser son expansion. — Mais
je
trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cult
59
e de favoriser son expansion. — Mais je trouve en
moi
ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultaném
60
n moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si
je
les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’
61
ient la suprême liberté. Le désir se précisait en
moi
de commettre enfin l’acte vraiment indéfendable de tout point de vue…
62
’acte vraiment indéfendable de tout point de vue…
J’
avais goûté à l’alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous ch
63
ectuel sur lequel tout apparaît inutile et vain ?
Je
cite ces phrases, tirées d’un récit d’ailleurs admirable4, de Louis A
64
es, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de
moi
ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m
65
pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de
mes
rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’empêchero
66
i toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui
m’
empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’orgueil
67
d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que
je
désire ; ni rien — rien que l’orgueil, sachant une chose si forte, de
68
ien que l’orgueil, sachant une chose si forte, de
me
sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si hau
69
la perversion d’une vertu qui se brûle elle-même.
Je
ne vais point nier la fécondité psychologique d’une attitude par aill
70
on sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas
je
vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur
71
d’Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle.
Je
ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « g
72
lides suffirait à restaurer une élite, efficace. (
Je
vois Jean Prévost, deux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois
73
uer Mme Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-
je
que l’abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes l
74
s les femmes auteur, et qui plaît aux lectrices —
m’
agace un peu ? C’est une vétille. s. « C.-C. Rivier : L’Athée (Payot
75
tre qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui
me
paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthéti
76
es fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même
je
le crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et
77
René Crevel,
Mon
corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la dé
78
René Crevel, Mon corps et
moi
(mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale
79
ite par curiosité passagère, il monologue. « Oui,
je
le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me per
80
ssagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous
mes
essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vér
81
je le redirai, tous mes essais furent prétextes à
me
dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se re
82
ous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à
me
perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan v
83
de tout ce qui est constructif et créateur, voilà
je
pense le véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où el
84
vait-il le courage de prier… u. « René Crevel :
Mon
corps et moi », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
85
urage de prier… u. « René Crevel : Mon corps et
moi
», Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p.
86
a de plus protestant — mais oui, M. Journet — et
je
ne crois pas qu’il puisse se produire ailleurs qu’en terre romande. C
87
vaincre. Après les exposés de Janson, de Brémond,
j’
en sais plusieurs qui ont ainsi « lâché » pas mal de préjugés en matiè
88
ue chose de définitif à la fois et d’intelligent,
je
le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacqu
89
rochure de la conférence3 pour savoir tout ce que
je
n’ai pas dit dans ces quelques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50,
90
tence… construire les villes de notre temps ». Et
je
déplie ce plan d’une « ville contemporaine ». Pures géométries de ver
91
einte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais
moi
, qui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de toute vie. Ha
92
ois mots commence le drame de toute vie. Ha ! Qui
je
suis ? Mais je le sens très bien ! je sens très bien cette force — ic
93
ce le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais
je
le sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du p
94
e. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien !
je
sens très bien cette force — ici, je tape du pied —, ces désirs, ce c
95
très bien ! je sens très bien cette force — ici,
je
tape du pied —, ces désirs, ce corps… J’ai un passé à moi, un milieu,
96
e — ici, je tape du pied —, ces désirs, ce corps…
J’
ai un passé à moi, un milieu, des amis, ce tic. Mais encore, tant d’au
97
du pied —, ces désirs, ce corps… J’ai un passé à
moi
, un milieu, des amis, ce tic. Mais encore, tant d’autres forces et ta
98
tant de bonheurs ou de dégoûts étranges viennent
m’
habiter ; je ne sais plus… Je suis beaucoup de personnages, faudrait c
99
heurs ou de dégoûts étranges viennent m’habiter ;
je
ne sais plus… Je suis beaucoup de personnages, faudrait choisir. Vous
100
ts étranges viennent m’habiter ; je ne sais plus…
Je
suis beaucoup de personnages, faudrait choisir. Vous me direz qui je
101
s beaucoup de personnages, faudrait choisir. Vous
me
direz qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent v
102
personnages, faudrait choisir. Vous me direz qui
je
suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages
103
ges, faudrait choisir. Vous me direz qui je suis,
mes
amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je pui
104
qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils
me
proposent vingt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le mon
105
st le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que
je
puis à peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la
106
les choses, les faits, la vie, comme ils disent.
Je
me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’on me fit comp
107
s choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je
me
suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’on me fit compren
108
abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’on
me
fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une habit
109
er follement d’une habitude dans une autre. Il ne
me
resta qu’une fatigue profonde ; je devins si faible et démuni, livré
110
e autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ;
je
devins si faible et démuni, livré aux regards d’une foule absurde, bi
111
nir un secret très simple, et un peu narquois ils
me
considéraient avec une pitié curieuse : je me sentis nu, tout le mond
112
is ils me considéraient avec une pitié curieuse :
je
me sentis nu, tout le monde devait voir en moi une tare que j’étais s
113
ils me considéraient avec une pitié curieuse : je
me
sentis nu, tout le monde devait voir en moi une tare que j’étais seul
114
e : je me sentis nu, tout le monde devait voir en
moi
une tare que j’étais seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qu
115
nu, tout le monde devait voir en moi une tare que
j’
étais seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qui me rendait tou
116
moi une tare que j’étais seul à ignorer, était-ce
ma
fatigue seulement qui me rendait toutes choses si méticuleusement ins
117
seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qui
me
rendait toutes choses si méticuleusement insupportables, si cruelleme
118
sentes et dures ? La cause de cette inadaptation,
je
la soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer
119
, je la soupçonnais si grave, si fondamentale que
je
préférais me leurrer à combattre des imperfections de détail dont je
120
onnais si grave, si fondamentale que je préférais
me
leurrer à combattre des imperfections de détail dont je m’exagérais l
121
rrer à combattre des imperfections de détail dont
je
m’exagérais l’importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressa
122
r à combattre des imperfections de détail dont je
m’
exagérais l’importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais,
123
rais l’importance. Et c’est ainsi par feintes que
je
progressais, jusqu’au jour où je m’avouai un trouble que je me refusa
124
par feintes que je progressais, jusqu’au jour où
je
m’avouai un trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire.
125
r feintes que je progressais, jusqu’au jour où je
m’
avouai un trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire. Ce
126
sais, jusqu’au jour où je m’avouai un trouble que
je
me refusai pourtant à nommer peur de rire. Cette amertume au fond de
127
s, jusqu’au jour où je m’avouai un trouble que je
me
refusai pourtant à nommer peur de rire. Cette amertume au fond de tou
128
e tous les plaisirs, cette envie de rire quand il
m’
arrivait un ennui, cette incapacité à jouir de mes victoires, à pleure
129
m’arrivait un ennui, cette incapacité à jouir de
mes
victoires, à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait les pers
130
ncapacité à jouir de mes victoires, à pleurer sur
mes
déboires, ce malaise seul liait les personnages auxquels je me prêtai
131
s, ce malaise seul liait les personnages auxquels
je
me prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon êt
132
ce malaise seul liait les personnages auxquels je
me
prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon être
133
es auxquels je me prêtais. Mais en même temps que
je
le découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’éta
134
ais en même temps que je le découvrais, dans tout
mon
être une force aveugle de violence s’était levée. Ce fut elle qui m’e
135
veugle de violence s’était levée. Ce fut elle qui
m’
entraîna sur les stades où je connus quelle confiance sourde aux contr
136
vée. Ce fut elle qui m’entraîna sur les stades où
je
connus quelle confiance sourde aux contradictions intimes exige un ac
137
saient brusquement les éléments désaccordés de ce
moi
que j’avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était un des pr
138
rusquement les éléments désaccordés de ce moi que
j’
avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était un des premiers
139
s de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant,
m’
écriai-je — c’était un des premiers jours du printemps —, l’heure est
140
oi que j’avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai-
je
— c’était un des premiers jours du printemps —, l’heure est venue de
141
omme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit
ma
force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui
142
e, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en
moi
de trop grand pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus une do
143
mpte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour
ma
vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus une douleur rare que j’aimai
144
ui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute
ma
joie ! » Ce n’était plus une douleur rare que j’aimais dans ces brut
145
ma joie ! » Ce n’était plus une douleur rare que
j’
aimais dans ces brutalités, c’était ma liberté agissante. J’allais pli
146
ur rare que j’aimais dans ces brutalités, c’était
ma
liberté agissante. J’allais plier des résistances à mon gré, agir sur
147
ans ces brutalités, c’était ma liberté agissante.
J’
allais plier des résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le s
148
berté agissante. J’allais plier des résistances à
mon
gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans
149
ur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement
j’
étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’important, c’
150
t de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu.
Me
voici devant quelques problèmes dont je sais qu’il est absolument vai
151
t résolu. Me voici devant quelques problèmes dont
je
sais qu’il est absolument vain de prétendre les résoudre, mais que je
152
solument vain de prétendre les résoudre, mais que
je
dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’appelle vivre. Problème
153
qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base.
J’
aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a que ce but
154
re. Problème de Dieu, à la base. J’aurai garde de
m’
y perdre au début d’une recherche qui n’a que ce but de me rendre mieu
155
re au début d’une recherche qui n’a que ce but de
me
rendre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je m’arrête parfois,
156
rendre mieux apte à vivre pleinement. En priant,
je
m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore
157
ndre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je
m’
arrête parfois, heureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore une
158
ment. En priant, je m’arrête parfois, heureux : «
J’
ai donc la foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne f
159
i donc la foi ? » Mais c’est encore une question…
Je
crois qu’il ne faut pas attendre immobile dans sa prière, qu’une révé
160
tion vienne chercher l’âme qui se sent misérable.
Je
ne recevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir, et
161
ne recevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-
je
à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me
162
c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en
me
rendant plus parfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi
163
révélation, c’est en me rendant plus parfait que
je
lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que
164
rfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur
moi
d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi. Je ne suis dign
165
oies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que
je
respecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce que je puis devenir
166
d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout en
moi
. Je ne suis digne que par ce que je puis devenir. Se perfectionner :
167
ord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi.
Je
ne suis digne que par ce que je puis devenir. Se perfectionner : cela
168
ecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce que
je
puis devenir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver l’instinct
169
e peut dicter que les gestes les plus favorables.
J’
ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les cultiver pour cela
170
s les plus favorables. J’ai d’autres instincts et
je
n’entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels :
171
pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu.
Ma
vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma
172
Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de
me
replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complic
173
cher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de
ma
vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin. D’abord do
174
eplacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes
mes
forces complices de mon destin. D’abord donc, choisir Mes instincts,
175
ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de
mon
destin. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite, les éduquer, se
176
es complices de mon destin. D’abord donc, choisir
Mes
instincts, ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le conco
177
quoi se composent le plaisir et la conscience de
Mes
limites. Je m’attache particulièrement à retrouver ces limites : la v
178
osent le plaisir et la conscience de Mes limites.
Je
m’attache particulièrement à retrouver ces limites : la vie moderne,
179
nt le plaisir et la conscience de Mes limites. Je
m’
attache particulièrement à retrouver ces limites : la vie moderne, méc
180
uivant les directions de moindre résistance. Mais
je
ne m’emprisonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter
181
les directions de moindre résistance. Mais je ne
m’
emprisonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter plus
182
Mais je ne m’emprisonnerai pas dans ces limites.
Ma
liberté est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres
183
est de les porter plus loin sans cesse, de battre
mes
propres records. De ce lent effort naît une modestie que je m’enorgue
184
records. De ce lent effort naît une modestie que
je
m’enorgueillis un peu de connaître ; et de cette volonté d’un meilleu
185
cords. De ce lent effort naît une modestie que je
m’
enorgueillis un peu de connaître ; et de cette volonté d’un meilleur m
186
de connaître ; et de cette volonté d’un meilleur
moi
, une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’appa
187
meilleur moi, une certaine méfiance vis-à-vis de
ma
sincérité. La sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel
188
méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité
m’
apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, une vue stupid
189
m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans
ma
vie, une vue stupide sur mon état qui peut m’être dangereuse. (On don
190
arrêt artificiel dans ma vie, une vue stupide sur
mon
état qui peut m’être dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en l
191
ans ma vie, une vue stupide sur mon état qui peut
m’
être dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en la nommant ; or je
192
On donne corps à une faiblesse en la nommant ; or
je
ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans le monde
193
es4.) Et demain peut-être, agir dans le monde, si
je
m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme elle veut un
194
.) Et demain peut-être, agir dans le monde, si je
m’
en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme elle veut une c
195
époque nous veut, comme elle veut une conscience.
Je
fais partie d’un ensemble social et dans la mesure où j’en dépends, j
196
partie d’un ensemble social et dans la mesure où
j’
en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transform
197
nsemble social et dans la mesure où j’en dépends,
je
me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il
198
mble social et dans la mesure où j’en dépends, je
me
dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y
199
et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de
m’
employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y faut une do
200
à sa transformation. Mais il y faut une doctrine,
me
dit-on. L’avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur
201
ais il y faut une doctrine, me dit-on. L’avouerai-
je
, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systématisation d
202
aut une doctrine, me dit-on. L’avouerai-je, quand
je
médite sur une doctrine possible, sur une systématisation de mes peti
203
une doctrine possible, sur une systématisation de
mes
petites certitudes5, j’éprouve vite le sentiment d’être dans un débat
204
r une systématisation de mes petites certitudes5,
j’
éprouve vite le sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable
205
re dans un débat étranger à ce véritable débat de
ma
vie : comment surmonter un malaise sans cesse renaissant, comment m’a
206
rmonter un malaise sans cesse renaissant, comment
m’
adapter à l’existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, e
207
e renaissant, comment m’adapter à l’existence que
m’
imposent mon corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puiss
208
t, comment m’adapter à l’existence que m’imposent
mon
corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puissance de joui
209
corps et les lois du monde, et comment augmenter
ma
puissance de jouir, en même temps que ma puissance d’agir. Que tout c
210
ugmenter ma puissance de jouir, en même temps que
ma
puissance d’agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comp
211
d’agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant,
je
le comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nou
212
comprends par éclairs, mais une secrète espérance
m’
emporte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre l’offensive — au
213
r gage du divin… Reprendre l’offensive — au soir,
je
m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà je sens un sou
214
age du divin… Reprendre l’offensive — au soir, je
m’
amuserai à mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà je sens un sourir
215
u soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur
mes
actes… Déjà je sens un sourire — en songeant à ces raisonnements que
216
serai à mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà
je
sens un sourire — en songeant à ces raisonnements que je me tiens — p
217
un sourire — en songeant à ces raisonnements que
je
me tiens — plisser un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je l
218
sourire — en songeant à ces raisonnements que je
me
tiens — plisser un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le d
219
es raisonnements que je me tiens — plisser un peu
mes
lèvres, et s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme un écho p
220
ser un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que
je
le décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’ancienne
221
es folies… Combat, oscillations silencieuses dans
ma
demi-conscience. Joie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide.
222
ant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de
mes
désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l’emportent d’
223
iste, qu’ils l’emportent d’un flot fou ! Revenez,
mes
joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ; je pense au monde. Chant
224
flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens,
j’
écoute le vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’é
225
, mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ;
je
pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent… Je vais é
226
onde. Chant des horizons, images qui s’éclairent…
Je
vais écrire autre chose que moi, je vais m’oublier, me perdre dans un
227
s qui s’éclairent… Je vais écrire autre chose que
moi
, je vais m’oublier, me perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est s
228
s’éclairent… Je vais écrire autre chose que moi,
je
vais m’oublier, me perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est se su
229
rent… Je vais écrire autre chose que moi, je vais
m’
oublier, me perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est se surpasser)
230
is écrire autre chose que moi, je vais m’oublier,
me
perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est se surpasser). J’entends
231
s une vie nouvelle : (Créer, c’est se surpasser).
J’
entends des phrases qu’il ne faut pas encore comprendre — tout est si
232
s encore comprendre — tout est si fragile —, mais
je
sais quelle légèreté puissante, quelle confiance vont guider ce corps
233
… Créer, ou glisser au plaisir ? Êtes-vous belle,
mon
amie, — et vous, ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne v
234
u plaisir ? Êtes-vous belle, mon amie, — et vous,
ma
vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne vous désire. (Ce dési
235
belle, mon amie, — et vous, ma vie ? Certes, mais
je
vous aime moins que je ne vous désire. (Ce désir qui me rend fort pou
236
ous, ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que
je
ne vous désire. (Ce désir qui me rend fort pour — autre chose…) Ô lux
237
s aime moins que je ne vous désire. (Ce désir qui
me
rend fort pour — autre chose…) Ô luxe, ne pas aimer son plaisir ? Je
238
autre chose…) Ô luxe, ne pas aimer son plaisir ?
Je
reste candidat au salut. 4. La sincérité absolue, « scientifique »
239
alut. 4. La sincérité absolue, « scientifique »
me
paraît aller contre fin. Une attention trop directe et soutenue modif
240
irecte et soutenue modifie son objet vivant. Pour
moi
, la sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis por
241
érité ne peut être que spontanée. Et spontanément
je
suis porté à écrire des idées qui m’aideront. Une fois écrites elles
242
spontanément je suis porté à écrire des idées qui
m’
aideront. Une fois écrites elles prennent un caractère de certitude qu
243
ère de certitude qu’elles n’avaient pas encore en
moi
. C’est en quoi ma sincérité est tendancieuse. 5. Quant à adhérer à u
244
’elles n’avaient pas encore en moi. C’est en quoi
ma
sincérité est tendancieuse. 5. Quant à adhérer à une doctrine toute
245
5. Quant à adhérer à une doctrine toute faite, ce
me
semble une dérision complète. Je m’étonne qu’après tant d’expériences
246
toute faite, ce me semble une dérision complète.
Je
m’étonne qu’après tant d’expériences ratées on puisse encore se persu
247
ute faite, ce me semble une dérision complète. Je
m’
étonne qu’après tant d’expériences ratées on puisse encore se persuade
248
tème n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi
je
ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toute
249
ns et les intransigeances. Toutes les aspirations
me
paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je juge bon d’éli
250
raissent légitimes chez d’autres, même celles que
je
juge bon d’éliminer de moi. Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mo
251
autres, même celles que je juge bon d’éliminer de
moi
. Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mouvement normal » de vie. f
252
s, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)g
Je
ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violenc
253
(10 juillet 1926)g Je ferme les Bestiaires, et
me
tirant hors de ce « long songe de violence et de volupté », je me sen
254
s de ce « long songe de violence et de volupté »,
je
me sens envahi par un rythme impérieux au point qu’il faut que certai
255
e ce « long songe de violence et de volupté », je
me
sens envahi par un rythme impérieux au point qu’il faut que certaines
256
périeux au point qu’il faut que certaines voix en
moi
taisent leur protestation, étouffées par des forces qui se lèvent. Ca
257
la fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part,
je
le trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence t
258
t de la gravité que dans les choses voluptueuses,
je
n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui é
259
é de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188)
Je
n’ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciser
260
orte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe,
me
paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces confusions.
261
’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois —
je
pense à certaines pages sur Jérusalem qui touchent particulièrement u
262
e et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que
je
trouve si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’Occidental,
263
nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place
me
manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux autres part
264
la nôtre. » La place me manque pour parler comme
j’
aurais voulu le faire des deux autres parties du volume, d’une importa
265
te le ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais
j’
avoue que m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait
266
suré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que
m’
a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir part
267
Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)w
Je
ne crois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil d’essais, M. F
268
e biais l’œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre
me
paraît liée à cette confusion. Mais s’il est bien établi que les lois
269
r toute communication directe entre l’œuvre et le
moi
, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le
270
l’Autobiographie et le Roman, dont pour ma part
je
suis loin d’admettre plusieurs thèses beaucoup trop absolues. M. Fern
271
st-elle pas une façon particulière de s’essayer ?
Je
ne puis amorcer ici une discussion de ces thèses subtiles, d’autant q
272
autant que la position de l’auteur dans cet essai
me
paraît encore ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment l’inter
273
l’homme dans l’élan qui fait sa véritable unité.
Je
me borne à signaler encore un thème qui revient dans la plupart de ce
274
homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je
me
borne à signaler encore un thème qui revient dans la plupart de ces e
275
Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)x
J’
éprouve quelque gêne à porter un jugement littéraire sur ce nouveau to
276
s prairies espagnoles pleines de simple grandeur,
j’
ai supporté mille fastidieux détails techniques et des délires taurolo
277
ctacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que
j’
admire dans ces Bestiaires, presque malgré leur sujet trop pittoresque
278
de haut avec la nonchalance des vrais puissants,
je
compte qu’il saura fonder sa gloire future sur des valeurs plus humai
279
mières et des odeurs, espérant entrer là-bas dans
je
ne sais quelle harmonie plus reposante. Cette imparfaite accoutumance
280
paraison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais
je
crois que toute intelligence européenne libre peut souscrire aux crit
281
s votre idéal ou envers les fluctuations de votre
moi
? Votre sincérité est-elle consentement immédiat à toute impulsion sp
282
rit ailleurs : « En chaque être, le pire instinct
me
paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne e
283
u fond de l’âme humaine ? Que si l’on s’étonne de
me
voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéres
284
e, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature
je
défends l’acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà
285
ndis qu’en littérature je défends l’acte gratuit,
je
réponds que la littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en s
286
voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli
me
tangere. Premier exemple. — Je m’assieds à mon bureau, je prends u
287
oi-même Noli me tangere. Premier exemple. —
Je
m’assieds à mon bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire
288
même Noli me tangere. Premier exemple. — Je
m’
assieds à mon bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire ce
289
me tangere. Premier exemple. — Je m’assieds à
mon
bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire ce que je trouv
290
Premier exemple. — Je m’assieds à mon bureau,
je
prends une feuille blanche, je vais écrire ce que je trouve en moi (s
291
ieds à mon bureau, je prends une feuille blanche,
je
vais écrire ce que je trouve en moi (sentiments, idées, souvenirs, dé
292
prends une feuille blanche, je vais écrire ce que
je
trouve en moi (sentiments, idées, souvenirs, désirs, élans, hésitatio
293
uille blanche, je vais écrire ce que je trouve en
moi
(sentiments, idées, souvenirs, désirs, élans, hésitations, obscurités
294
ns, hésitations, obscurités, etc.). Supposons que
j’
éprouve un désir d’action vive, un élan vers certain but précis. Ou b
295
n vive, un élan vers certain but précis. Ou bien
j’
aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettr
296
ste le temps de le noter avant de partir. Ou bien
je
me mettrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, pui
297
le temps de le noter avant de partir. Ou bien je
me
mettrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisqu
298
mettrai à l’analyser plus longuement. Mais alors
je
le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gest
299
plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque
je
le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences ma
300
quences matérielles. Ce n’est plus l’élan pur que
je
décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est le frein lui-mêm
301
lan pur que je décris : c’est un élan freiné dans
mon
esprit, c’est le frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de
302
alement c’est à la découverte d’une faiblesse que
j’
aboutis : ce quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que l’élan ap
303
ne faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui
m’
a retenu d’accomplir ce que l’élan appelait. Second exemple. — J’ép
304
plir ce que l’élan appelait. Second exemple. —
J’
éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ?
305
ouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-
je
, qui suis-je ? Je revois des actes accomplis, je revis plus ou moins
306
n de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-
je
? Je revois des actes accomplis, je revis plus ou moins fortement des
307
faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ?
Je
revois des actes accomplis, je revis plus ou moins fortement des sent
308
-je, qui suis-je ? Je revois des actes accomplis,
je
revis plus ou moins fortement des sentiments que je crois avoir éprou
309
revis plus ou moins fortement des sentiments que
je
crois avoir éprouvés à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —,
310
ments que je crois avoir éprouvés à tel moment de
mon
passé. Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certaines s
311
à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —,
je
parviens à me souvenir de certaines sensations profondes et indéfinie
312
de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens à
me
souvenir de certaines sensations profondes et indéfinies (telle sensa
313
rrures, personne ne sait la richesse de ta vie…).
J’
écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes, je retrouve un
314
ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes,
je
retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se pr
315
Les gestes et les sentiments qui se proposaient à
mon
souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur
316
souvenir ont été passés au crible de la minute où
je
me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plus précise, ce
317
venir ont été passés au crible de la minute où je
me
penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plus précise, cette
318
ssés au crible de la minute où je me penchais sur
mon
passé. Ou, pour user d’une image plus précise, cette minute est baign
319
e du souvenir. Si l’un de ces deux procédés peut
m’
apprendre quelque chose, c’est bien le second. La qualité des souvenir
320
st bien le second. La qualité des souvenirs qu’il
me
livre me renseigne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le m
321
e second. La qualité des souvenirs qu’il me livre
me
renseigne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le moment que
322
l me livre me renseigne assez exactement, non sur
mon
passé, mais sur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne sau
323
tement, non sur mon passé, mais sur le moment que
je
vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la vérité sur so
324
uée dans le premier exemple. C’est un cas-limite,
j’
en conviens. Pourtant, n’est-ce pas le schéma de tout un genre littéra
325
st le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant.
J’
ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient re
326
iration du néant. J’ai revu à l’envers le film de
mon
passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation de mes désirs
327
e qui était élan devient recul, et l’évocation de
mes
désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais
328
nt recul, et l’évocation de mes désirs anciens ne
me
restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais me regarder sans rien
329
e mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût.
J’
ai cru que je pourrais me regarder sans rien toucher en moi. En réalit
330
anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que
je
pourrais me regarder sans rien toucher en moi. En réalité, je n’assis
331
e restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais
me
regarder sans rien toucher en moi. En réalité, je n’assiste pas à moi
332
que je pourrais me regarder sans rien toucher en
moi
. En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de mo
333
me regarder sans rien toucher en moi. En réalité,
je
n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les
334
uction de moi-même. Par les fissures, un instant,
j’
ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corp
335
nner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos.
Mon
corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstrati
336
ondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et
moi
, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cy
337
Crevel, est la démonstration la plus cynique que
je
connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’il s’acha
338
qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
J’
ai dit : ravages du sincérisme. C’est plus exactement faillite qu’il f
339
littérature et en morale. Impossibilité de faire
mon
autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon auto
340
. Impossibilité de faire mon autoportrait moral :
je
bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me c
341
t moral : je bouge tout le temps. Danger de faire
mon
autoportrait moral : je me compose plus laid que nature. Faut-il conc
342
e temps. Danger de faire mon autoportrait moral :
je
me compose plus laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : « L’ana
343
emps. Danger de faire mon autoportrait moral : je
me
compose plus laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : « L’analys
344
vec Gide : « L’analyse psychologique a perdu pour
moi
tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il
345
ologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où
je
me suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non.
346
gique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je
me
suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Ca
347
es en regard des dangers que la sincérité du noli
me
tangere fait courir, tant dans le domaine littéraire que dans celui d
348
t Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du
moi
, moins le principe unificateur ». De quelques sophismes libérateur
349
echerche, puis l’acceptation de toute tendance du
moi
, je réponds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin
350
che, puis l’acceptation de toute tendance du moi,
je
réponds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de m
351
nds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle
mon
besoin de mentir. Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne
352
ologie ou que le « style » est de l’homme même
J’
en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût
353
homme même J’en étais à peu près à ce point de
mes
notes — à ce point de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’
354
peu près à ce point de mes notes — à ce point de
mon
dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’appeler sincérité et qui m
355
beaucoup continuaient d’appeler sincérité et qui
me
devenait inintelligible en même temps qu’odieux. Au hasard de quelque
356
temps qu’odieux. Au hasard de quelques lectures,
je
pris note des passages suivants (les paraphraser serait d’une ingrati
357
refusent à toute intervention qui altérerait leur
moi
; ils ne souhaitent que d’être leur propre témoin, intelligent mais i
358
pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.) Si
j’
en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle
359
j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
moi
idéal que j’appelle en chaque minute de ma joie est plus réel que cel
360
intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que
j’
appelle en chaque minute de ma joie est plus réel que celui qu’une ana
361
e, ce moi idéal que j’appelle en chaque minute de
ma
joie est plus réel que celui qu’une analyse désolée s’imaginait reten
362
pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-
je
que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ?
363
que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
ma
sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nomme
364
ces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit,
j’
accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hypocrisie Non, non
365
ela de l’hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt
j’
annonce : Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère su
366
on, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez,
mon
corps, brisez cette forme pensive ! .................................
367
enter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein de
ma
triste lucidité, je t’avais déjà invoquée, hypocrisie consolante et l
368
Valéry. Certes, du sein de ma triste lucidité,
je
t’avais déjà invoquée, hypocrisie consolante et libératrice. Mais tu
369
ée, hypocrisie consolante et libératrice. Mais tu
m’
offrais un visage un peu crispé, signe d’une ironie secrète et pour mo
370
un peu crispé, signe d’une ironie secrète et pour
moi
douloureuse encore. Pitoyable, trop visiblement, tu prêtais bien quel
371
op visiblement, tu prêtais bien quelques voiles à
mon
dégoût d’un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyranni
372
tu prêtais bien quelques voiles à mon dégoût d’un
moi
que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant
373
quelques voiles à mon dégoût d’un moi que la vie
me
montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais un pli
374
Mais un pli de ta lèvre, un peu sceptique, quand
mon
esprit partait dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma
375
ans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de
ma
jeune angoisse… Je t’ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une sy
376
éal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse…
Je
t’ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une symphonie de joies ém
377
haque être un plus prenant sourire. Cependant que
ma
joie — un état de grâce, un amour — ne pouvait se satisfaire de telle
378
rivée. Alors, acquiesçant vivement à l’invite que
je
soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’ell
379
nvite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu,
je
m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, ve
380
te que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je
m’
élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers
381
iche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle
m’
ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que momentanément je ch
382
ant de rires amis, vers tout ce que momentanément
je
choisissais de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût
383
qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à
ma
jubilation, non pas ce but peut-être dérisoire vers quoi je me portai
384
ion, non pas ce but peut-être dérisoire vers quoi
je
me portais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me concilia
385
, non pas ce but peut-être dérisoire vers quoi je
me
portais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me conciliais
386
rs quoi je me portais, mais bien ces figurants de
mon
bonheur que je me conciliais pour des retours possibles. C’est ainsi
387
rtais, mais bien ces figurants de mon bonheur que
je
me conciliais pour des retours possibles. C’est ainsi que fidèle à so
388
is, mais bien ces figurants de mon bonheur que je
me
conciliais pour des retours possibles. C’est ainsi que fidèle à soi-m
389
oit que ce constant et secret assujettissement au
moi
idéal exige une politique des sentiments plus subtile et, je pense, m
390
ige une politique des sentiments plus subtile et,
je
pense, moins vulgaire que cette agilité offensive qu’on appelle dans
391
arti. La sincérité crée en nous un fait accompli.
J’
appelle hypocrisie envers soi-même une volonté — si profonde qu’elle n
392
s besoin de s’expliciter pour être efficace — qui
m’
interdit de nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’est peu
393
être efficace — qui m’interdit de nommer ce dont
je
ne veux plus souffrir. (Car il n’est peut-être qu’une espèce de souff
394
rté plus précieuse que toute certitude… Ô vérité,
ma
vérité, non pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme je veux
395
te certitude… Ô vérité, ma vérité, non pas ce que
je
suis, mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable
396
ité, non pas ce que je suis, mais ce que de toute
mon
âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé
397
pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme
je
veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le
398
mier exemple, ce serait le récit des gestes qu’il
m’
aurait fait commettre. Manifester est plus sincère qu’analyser. 2. D’
399
mpathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après
moi
, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler no
400
Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab «
Je
n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne s
401
nvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne
mes
paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité d
402
Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on
me
les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi
403
ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre
moi
et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glab
404
on d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils
m’
ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux
405
sans rire : « À mort ceux qui paraphrasent ce que
je
dis ». Il y a chez Aragon une folie de la persécution, qui se cherche
406
sse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne
m’
empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi
407
la jeune littérature française. Il le proclame «
J’
appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut,
408
un des plus significatifs du romantisme nouveau.
J’
ai nommé Rousseau, Nerval Musset : mais voyez un Rousseau sans tendres
409
i fume… Et tu laisses, ô col roide, En souffrance
mes
baisers. L’amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô
410
lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensonge tu,
Je
m’enfuis vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous. L’horaire
411
vres sitôt que jointes, Ô dernier mensonge tu, Je
m’
enfuis vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous. L’horaire dic
412
icte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors
je
baise votre main Comme on signe d’un faux nom. c. « Billets aigre
413
ies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce
me
semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme
414
Les journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que
je
m’excuse : c’est un peu prétentieux de vous écrire au moment où je va
415
journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je
m’
excuse : c’est un peu prétentieux de vous écrire au moment où je vais
416
st un peu prétentieux de vous écrire au moment où
je
vais me suicider, d’autant plus que vous n’y croirez pas — et pourtan
417
u prétentieux de vous écrire au moment où je vais
me
suicider, d’autant plus que vous n’y croirez pas — et pourtant… Il fa
418
n’y croirez pas — et pourtant… Il faut aussi que
je
vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris
419
aussi que je vous dise qu’il fait très froid dans
ma
chambre : le feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la p
420
s cette phrase quelque allusion de mauvais goût.)
Je
vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, com
421
iles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
j’
ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus
422
lement ; l’écho n’en fut que plus douloureux dans
mon
cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et
423
n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis
je
vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et c’est là que
424
reux dans mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis
je
vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ai découvert que vous e
425
is je vous ai revue, aux courses, et c’est là que
j’
ai découvert que vous existiez en moi, à certain désagrément que j’eus
426
c’est là que j’ai découvert que vous existiez en
moi
, à certain désagrément que j’eus de vous voir si entourée… D’autres f
427
e vous existiez en moi, à certain désagrément que
j’
eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage d
428
ue j’eus de vous voir si entourée… D’autres fois…
je
n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’ava
429
ourage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal.
J’
avais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il
430
n, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de
mes
amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la prom
431
s demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de
me
présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent
432
mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il
m’
en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d
433
vait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent
les miens
plus d’une fois pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous les
434
racher à une obsession secrètement attirante ; et
je
pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez v
435
ètement attirante ; et je pensais que la force de
mon
désir était telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je dis m
436
telle que vous en éprouviez vaguement la menace.
Je
dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sans doute pl
437
iez vaguement la menace. Je dis menace, parce que
mes
airs sombres vous effrayaient sans doute plus qu’ils ne vous attiraie
438
plus qu’ils ne vous attiraient. Mais, maintenant,
je
pense que ces regards croisés n’avaient aucune signification et que m
439
rds croisés n’avaient aucune signification et que
mon
anxiété seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin l’orchestre
440
lque intention. Quand enfin l’orchestre s’arrêta,
je
me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit un signe discret, et dé
441
e intention. Quand enfin l’orchestre s’arrêta, je
me
trouvais tout près de vous. Mon ami me fit un signe discret, et déjà
442
estre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous.
Mon
ami me fit un signe discret, et déjà il se préparait à vous rendre at
443
arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami
me
fit un signe discret, et déjà il se préparait à vous rendre attentive
444
et déjà il se préparait à vous rendre attentive à
ma
présence… Mais, alors, je ne sais quel démon du malheur me paralysa.
445
vous rendre attentive à ma présence… Mais, alors,
je
ne sais quel démon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’im
446
ce… Mais, alors, je ne sais quel démon du malheur
me
paralysa. Je venais d’entrevoir l’image d’un couple heureux et banal,
447
rs, je ne sais quel démon du malheur me paralysa.
Je
venais d’entrevoir l’image d’un couple heureux et banal, votre sourir
448
uple heureux et banal, votre sourire répondant au
mien
, comme on voit au dénouement des films populaires et sur des cartes p
449
strées. Déjà la foule des danseurs nous séparait,
mon
ami se détournait, un peu vexé ; vous disparaissiez au milieu d’un co
450
ge de rires empressés. Une autre danse reprenait.
Je
sentis une invincible lassitude me saisir et m’assis à l’écart. On me
451
nse reprenait. Je sentis une invincible lassitude
me
saisir et m’assis à l’écart. On me demandait, en passant, si j’étais
452
. Je sentis une invincible lassitude me saisir et
m’
assis à l’écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je dé
453
ible lassitude me saisir et m’assis à l’écart. On
me
demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’un geste inc
454
’assis à l’écart. On me demandait, en passant, si
j’
étais malade. Je désignais d’un geste incertain quelques bouteilles de
455
. On me demandait, en passant, si j’étais malade.
Je
désignais d’un geste incertain quelques bouteilles de champagne vides
456
nne l’ivresse, mais non certaines douleurs. Même,
je
fus obligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jo
457
eurs. Même, je fus obligé de confier à un ami que
j’
en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelai
458
que j’en avais repris … Les archets jouaient sur
mes
nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillère
459
archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait
mon
désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées, le cie
460
ssue, pesant comme l’envie d’un sommeil sans fin…
J’
avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aub
461
fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liquide
me
soulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et le
462
ans un matin sourd, frileux, qui avait la nausée.
Je
rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table en désordr
463
nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que
j’
écrivis à ma table en désordre où je venais de jeter mon col de smokin
464
rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à
ma
table en désordre où je venais de jeter mon col de smoking et un œill
465
ques mots que j’écrivis à ma table en désordre où
je
venais de jeter mon col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d
466
ivis à ma table en désordre où je venais de jeter
mon
col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme don
467
esse d’une autre femme dont le seul défaut fut de
m’
aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée, et ce refus au somme
468
us grand que le chant des violons. Aube dure ! En
ma
tête rôde ton souvenir, comme une femme nue dans une chambre étroite…
469
ir, comme une femme nue dans une chambre étroite…
J’
ai dormi quelques heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par la cr
470
ste, tout enfiévré par la crainte du réveil. Puis
je
suis revenu dans ces rues où je vous rencontrais parfois, du temps qu
471
e du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où
je
vous rencontrais parfois, du temps que j’ignorais vous aimer. En sort
472
rues où je vous rencontrais parfois, du temps que
j’
ignorais vous aimer. En sortant du bal, au vestiaire, je vous avais en
473
rais vous aimer. En sortant du bal, au vestiaire,
je
vous avais entendue donner un rendez-vous au thé du Printemps. J’ai r
474
tendue donner un rendez-vous au thé du Printemps.
J’
ai rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasse
475
p souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures,
me
disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, je pourrai l
476
devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-
je
elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, je pourrai lui dire tr
477
« Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et,
me
glissant auprès d’elle, je pourrai lui dire très vite quelques mots s
478
je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle,
je
pourrai lui dire très vite quelques mots si bouleversants qu’avant le
479
ots si bouleversants qu’avant le dernier étage… »
Je
délirais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient
480
’avant le dernier étage… » Je délirais, bien sûr.
Je
m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impude
481
ant le dernier étage… » Je délirais, bien sûr. Je
m’
imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemme
482
irais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses
me
dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais paraître si per
483
es me dévisageaient de plus en plus impudemment :
je
devais paraître si perdu. Chaque fois qu’un paquet de dix personnes s
484
ngouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait,
j’
éprouvais un petit arrachement, comme précisément un enfant qui monte
485
sément un enfant qui monte pour la première fois…
Je
me disais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en
486
ent un enfant qui monte pour la première fois… Je
me
disais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en rou
487
e pour la première fois… Je me disais encore : Si
je
prends cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ascenseur de
488
disais encore : Si je prends cet ascenseur et que
je
la croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monte
489
i laqué, souriante… Enfin, un peu après 6 heures,
je
suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie
490
es autobus passaient par groupes. Plusieurs fois,
j’
ai cru vous reconnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’av
491
econnaître dans la foule qui se précipitait, mais
je
n’avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais pa
492
précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro,
je
ne pouvais pas monter. Je finissais par vous voir partout. Chaque vis
493
ais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter.
Je
finissais par vous voir partout. Chaque visage de femme révélait soud
494
pendant ce temps, vous pouviez paraître enfin où
mon
désir surmené vous appelait encore, haletant. Et le temps passait, à
495
chant désespéré qui vous appelait, assourdissant
mes
pensées ; et ces élans réticents, maladroits, contradictoires… Un aut
496
s… Un autobus de luxe s’était arrêté tout près de
moi
. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai.
497
autobus de luxe s’était arrêté tout près de moi.
Je
vis un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n
498
un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre…
Je
montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune fem
499
e qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais
je
n’osais presque pas la regarder, à cause d’une incertitude qui redonn
500
d’une incertitude qui redonnait tout son empire à
ma
timidité. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de
501
on empire à ma timidité. Peut-être était-ce vous.
Je
ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en
502
l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en
me
frôlant, sans me regarder. Je descendis derrière elle. Mais tout de s
503
ce Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans
me
regarder. Je descendis derrière elle. Mais tout de suite des paraplui
504
el, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder.
Je
descendis derrière elle. Mais tout de suite des parapluies la dérobèr
505
Mais tout de suite des parapluies la dérobèrent à
mes
yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrêtaient avec un si
506
ies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro
m’
attira. Les rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement dou
507
ent avec un sifflement particulièrement doux pour
ma
fatigue, et ces gens pressés et songeurs respectaient la folie doulou
508
taient la folie douloureuse qui devait contracter
mon
visage. Je promenais sur tous des regards angoissés, avides, imploran
509
lie douloureuse qui devait contracter mon visage.
Je
promenais sur tous des regards angoissés, avides, implorants. Oh ! to
510
s, avides, implorants. Oh ! toutes les femmes que
j’
ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À minuit, telle
511
g regard de damné. À minuit, tellement épuisé que
je
mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des af
512
damné. À minuit, tellement épuisé que je mêlais à
mes
pensées des fragments de rêves et les personnages des affiches, tout
513
s fin dans les couloirs implacablement brillants,
je
me pris à parler à haute voix, par bribes de phrases incohérentes. Je
514
in dans les couloirs implacablement brillants, je
me
pris à parler à haute voix, par bribes de phrases incohérentes. Je vo
515
à haute voix, par bribes de phrases incohérentes.
Je
voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter
516
employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on
m’
entraîna de force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue.
517
n m’entraîna de force sur un trottoir roulant qui
me
remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promes
518
me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume
m’
apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me lais
519
aîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que
je
fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais co
520
la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que
je
me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y p
521
brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je
me
sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parv
522
a promesse que je fis que je me sentais mieux, on
me
laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’a
523
e je me sentais mieux, on me laissa rentrer seul.
Je
ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’ai marché plusieurs heure
524
ux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment
j’
y parvins. Je crois que j’ai marché plusieurs heures avant de retrouve
525
ssa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parvins.
Je
crois que j’ai marché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il
526
eul. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que
j’
ai marché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il doit être mai
527
e j’ai marché plusieurs heures avant de retrouver
ma
rue. Il doit être maintenant 5 heures du matin. Premiers appels d’aut
528
n. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il
me
semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigineusement, par cet
529
ais il me semble que toutes choses s’éloignent de
moi
vertigineusement, par cette aube incolore. Il y a vingt-quatre heures
530
e aube incolore. Il y a vingt-quatre heures donc,
j’
étais encore au bal. Cette constatation machinale ne correspond à rien
531
constatation machinale ne correspond à rien dans
mon
esprit. Peut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souvien
532
correspond à rien dans mon esprit. Peut-être que
j’
ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette décep
533
rit. Peut-être que j’ai perdu la notion du temps.
Je
ne me souviens plus que de cette déception insupportable et définitiv
534
eut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne
me
souviens plus que de cette déception insupportable et définitive de m
535
de cette déception insupportable et définitive de
mon
désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoquer vo
536
ception insupportable et définitive de mon désir.
Je
ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoquer votre visage
537
e mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si
je
puis encore évoquer votre visage. Peut-être ne vous ai-je pas vraimen
538
encore évoquer votre visage. Peut-être ne vous ai-
je
pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destruction, ce r
539
pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de
ma
destruction, ce rongement, cette sournoise recherche de tout ce qui m
540
ngement, cette sournoise recherche de tout ce qui
me
navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette t
541
cherche de tout ce qui me navre au plus intime de
mon
être… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre
542
n être… Le revolver est chargé, sur cette table. (
Je
le caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort a
543
, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de
ma
mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends plus
544
hrases.) Mais voici que ce geste de ma mort aussi
me
lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je de
545
e ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image que
je
m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquo
546
e geste de ma mort aussi me lasse, l’image que je
m’
en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi j
547
a mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme…
Je
ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi je souffre, c
548
que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi
je
devrais me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance,
549
n forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais
me
tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance, ce que c’e
550
prends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi
je
souffre, ce que c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie, ma
551
ce que c’est que la souffrance, ce que c’est que
ma
vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin
552
c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie,
ma
mort. Mon Dieu, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin… Il fau
553
qu’un glissement gris, sans fin… Il faudrait que
je
dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne
554
y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime,
je
ne vous dirai pas son nom. f. « Lettre du survivant », Revue de Bell
555
n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui
me
gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux interprétations sym
556
erprétations symboliques au moins ; de ne pouvoir
m’
empêcher d’y songer sans cesse en lisant cette « tragédie » ; de ne po
557
esse en lisant cette « tragédie » ; de ne pouvoir
m’
empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus ou moins consc
558
sez simples dont l’étude charme le psychanalyste.
Je
pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calem
559
licité à chausse-trappes, cette habileté surtout.
Je
ne sais si ce malicieux Gagnebin (non pas Elie) pensait à quelqu’un l
560
rop exercé avant de se lancer sur la corde raide.
Je
suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes, les qual
561
la corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas.
J’
admire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de cette pièce sont
562
s qualités scéniques de cette pièce sont grandes.
Je
ne saurais même indiquer aucun endroit par où elle pèche contre les p
563
l voulait. Et pourtant cette admirable machine ne
m’
inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprise
564
ant cette admirable machine ne m’inquiète guère :
je
sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces my
565
ù il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères
me
dépassent, feignons d’en être l’organisateur », disait le photographe
566
s parfum. (Tout de même, Cocteau est un poète :
j’
en verrais une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais pa
567
teau est un poète : j’en verrais une preuve, pour
mon
compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par m
568
ais une preuve, pour mon compte, dans le fait que
je
ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5. M. Zimmer,
569
Edmond Jaloux, Ô toi que
j’
eusse aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’exemple rare d’
570
ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux,
j’
y vois un signe charmant d’amitié de l’aîné au plus jeune, lequel envo
571
’amis inconnus. af. « Edmond Jaloux : Ô toi que
j’
eusse aimée… (Plon, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Gen
572
re, légèrement coloré. Le principe est simple : «
Je
vous aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ;
573
Quelques miracles qui suivent sont embrumés dans
mon
souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégage
574
el renversé, maisons obliques, montagnes russes. (
J’
ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin
575
et nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais
je
ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même essence que le n
576
is le moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin,
mon
voisin, un agent, murmure : « On va tous devenir fous ! » — « Hé ! lu
577
: « On va tous devenir fous ! » — « Hé ! lui dis-
je
, si seulement. » Mais tout de même, là par exemple, où nous ne pouvon
578
é Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et
je
ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginair
579
e le Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à
mon
gré). Qu’une sorcière transforme un homme en chien, cela n’a rien d’é
580
ées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour
moi
qui chaque soir crée ma chambre en tournant un commutateur. Le vrai m
581
avec leur baguette, pour moi qui chaque soir crée
ma
chambre en tournant un commutateur. Le vrai miracle du cinéma, c’est,
582
et l’espace en relation se modifie pour maintenir
je
ne sais quelle harmonie… C’est une réalité aussi réelle que celle don
583
la dispersion autant qu’à l’approfondissement du
moi
, soif de tout et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’ab
584
. Rops a-t-il trop négligé le rôle extérieur, que
je
crois décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini
585
s Aragon, le beau prétexte (avril 1927)j Ah !
je
sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de mon être et a saisi
586
sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de
mon
être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut
587
n être et a saisi les cordes les plus secrètes de
mon
âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fantaisie, même si cela
588
ésormais vibrer à sa fantaisie, même si cela doit
m’
anéantir. Hoffmann. I (Notes écrites en décembre 1925, au sorti
589
férence sur le Salut de l’humanité.) Ce soir en
moi
trépigne une rage. Sur quelles épaules jeter ce manteau de flammes, p
590
manteau de flammes, puis à qui dédier l’ennui de
ma
révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon échappé de
591
à-bas dans un rayon échappé des Enfers — auxquels
je
crois encore, et pas seulement pour le pittoresque. — Attrape ! Il
592
la Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de «
Je
ne comprends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et l’on pense :
593
» au lieu de « Je ne comprends pas ». On dit : «
Je
ne comprends pas », et l’on pense : « C’est donc incompréhensible ».
594
incompréhensible !, trois mots dont l’un savant.
Je
ne connais pas de meilleur remède contre Dieu. Monsieur, vous avez di
595
st incompréhensible ! » — avec une indignation où
j’
admire une pointe d’ironie vraiment supérieure. Car rien ne pouvait mi
596
et dire qu’elle est née dans un café de Paris. «
Je
n’attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Riez-en donc, p
597
s un café de Paris. « Je n’attends rien du monde,
je
n’attends rien de rien. » Riez-en donc, pantins officiels, et vous re
598
iels, et vous repus, et vous, dubitatives barbes.
Je
viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtr
599
ous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si
j’
essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je m
600
bassement ingénieux : « Si j’essaie un instant de
m’
élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puiss
601
t de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon,
je
me révolte qu’elle puisse en aucun cas servir d’argument à un homme.
602
e m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je
me
révolte qu’elle puisse en aucun cas servir d’argument à un homme. » V
603
spérer plus aucun pardon. II Novembre 1926.
Je
viens de retrouver quelques pages écrites il y a un an, tel soir de c
604
ur, son incontestable « séduction ». Pour un peu,
je
découvrais une manière de prophète un brin janséniste chez ce poète.
605
te un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui,
je
le verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un
606
de son tempérament vif, insolent et ombrageux. «
J’
appartiens à la grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce
607
des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ?
Je
ne sais qu’un Montherlant qui pourrait l’oser dire comme Aragon sans
608
l’oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que
je
prenais pour le ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de
609
ique — mais la plus belle, — ce qui tressaille et
m’
atteint au vif, c’est tout de même un désespoir en quoi je ne vais pas
610
t au vif, c’est tout de même un désespoir en quoi
je
ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de
611
tout de même un désespoir en quoi je ne vais pas
m’
empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespo
612
te de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique.
Je
me souviens d’une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapproche
613
de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je
me
souviens d’une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochemen
614
pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-
je
: le salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cet
615
le que Clément Vautel — et si ce nom revient sous
ma
plume, comme une mouche qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’ell
616
le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité
j’
ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité
617
mobile ne retient rien de la réalité vivante ; si
je
dénie à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme é
618
comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même
je
récuse ici certain sens critique dont on voudrait que soient justicia
619
d Jaloux.) Entre un monsieur en noir : Permettez-
moi
de me présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critiq
620
x.) Entre un monsieur en noir : Permettez-moi de
me
présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critique. M
621
urs une ancienne connaissance… le Sens Critique.
Moi
(gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà
622
in temps déjà que nous ne nous sommes revus. Mais
je
suis vos travaux avec intérêt, et il m’a paru que depuis quelque temp
623
vus. Mais je suis vos travaux avec intérêt, et il
m’
a paru que depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me suis
624
u que depuis quelque temps… enfin, comment dirais-
je
… je me suis dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelq
625
e depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je…
je
me suis dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque u
626
epuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je
me
suis dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque util
627
mps… enfin, comment dirais-je… je me suis dit que
je
pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque utilité… Moi. — Ah
628
en quelque sorte, vous être de quelque utilité…
Moi
. — Ah ! oui, oui… c’est cela, utilité,… en effet,… oui, oui, très int
629
en effet,… oui, oui, très intéressant. Seulement,
mon
cher Monsieur, nous n’avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop
630
mer, et vous savez ce que cela suppose. Comprenez-
moi
: submergés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’aurais en q
631
ergés, absolument… Le Sens Critique. — Justement
j’
aurais en quelque manière la prétention… Moi. — Que voilà un singulie
632
ement j’aurais en quelque manière la prétention…
Moi
. — Que voilà un singulier impertinent de votre part. (Le reconduisant
633
tre part. (Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à
mon
estime la plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous
634
», c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous
me
faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Mais plus tard, plus ta
635
hode ! (Sort le Sens Critique, un peu bousculé.)
Moi
. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derr
636
Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez,
ma
vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). —
637
s oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). —
J’
attends votre plaisir… III Il y a des gens qui croient avoir tou
638
er du concept de l’esprit celui de Révolution. Et
j’
entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-tre
639
à nous, dans tel domaine. Et c’est même ceci que
je
ne puis pardonner aux surréalistes : qu’ils aient voulu s’allier aux
640
voulu s’allier aux dogmatiques d’extrême gauche.
Je
ne dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli de crier merde pou
641
ous ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine,
je
le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’es
642
ait trop à dire, et puis l’on croirait encore que
je
suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton et leurs amis alternativem
643
cher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du
moi
avec ses recettes garanties, chapelets d’optimisme, tyranniques évide
644
abe, examens de conscience toujours ratés — on ne
m’
y prendra plus ! — morales américaines et hygiéniques en tous genres,
645
. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont
Ma
vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derri
646
livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et
mon
œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennen
647
ndus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
Mon
curé chez les riches. Très loin derrière viennent des France et des B
648
ues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de
mes
songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ailleur
649
ement ivre, et Bettina lui disait à l’oreille : «
Mon
chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne e
650
Bettina lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si
j’
aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de
651
j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela
me
donne encore plus de plaisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que
652
menade en bateau À Grego More. Il disait : «
Je
suis né pour la mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur d
653
Et l’eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr,
je
n’ai pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant je suis seul dè
654
pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant
je
suis seul dès cette heure, et mes amis fuiront un lâche. Parce que je
655
amitié. Pourtant je suis seul dès cette heure, et
mes
amis fuiront un lâche. Parce que je reviens seul. Mais moi, qui regar
656
te heure, et mes amis fuiront un lâche. Parce que
je
reviens seul. Mais moi, qui regarde comme de l’autre bord, je songe q
657
fuiront un lâche. Parce que je reviens seul. Mais
moi
, qui regarde comme de l’autre bord, je songe qu’il est des visites à
658
eul. Mais moi, qui regarde comme de l’autre bord,
je
songe qu’il est des visites à de certaines grandes dames où je préfér
659
l est des visites à de certaines grandes dames où
je
préférais — et lui aussi — me rendre seul et sans argent. Je ne voula
660
es grandes dames où je préférais — et lui aussi —
me
rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouva
661
s — et lui aussi — me rendre seul et sans argent.
Je
ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces
662
eul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir,
Je
ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure.
663
tre prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose
me
paraît indiquer que l’un au moins des deux éléments nécessaires à ce
664
ir autour d’eux des mœurs un peu bourgeoises dont
je
ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pou
665
ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent,
me
semble-t-il, pour une part, la dispersion des efforts artistiques. To
666
fils d’un tel père. « Voilà le train du monde… »
Je
ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine résistance est néces
667
pe. N’était certain petit plaisir d’impertinence,
je
me fusse dispensé de redire ces lieux communs, auxquels pourtant nos
668
N’était certain petit plaisir d’impertinence, je
me
fusse dispensé de redire ces lieux communs, auxquels pourtant nos cir
669
moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On ne
m’
en voudra pas de ne citer ni dates de naissance, ni traits d’enfance g
670
, c’est par leurs œuvres avant tout. D’autre part
je
préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie.
671
t un merveilleux foyer de contagion contre lequel
je
ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugeme
672
ux foyer de contagion contre lequel je ne saurais
me
prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis q
673
rticle consacré aux jeunes artistes neuchâtelois,
je
vous présente Conrad Meili, un Zurichois qui nous arriva de Genève il
674
On ne pourrait pas se tromper plus. ⁂ À vrai dire
j’
en vois peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture
675
es qui vouent tout leur amour à la peinture pure.
Je
crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la grâce décorative,
676
nsinue dans toute sa palette, ce charme enfin, ce
je
ne sais quoi qu’on cherche en vain chez beaucoup des meilleurs de nos
677
ris une complicité de sentiments ou d’état d’âme.
Je
ne verrais guère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on le pui
678
ères précipitations » annonce le bulletin. Tiens,
me
dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religieux, il se cherche en
679
écipitations » annonce le bulletin. Tiens, me dis-
je
, Bouvier va peindre. Comme peintre religieux, il se cherche encore. O
680
révélant un tempérament très rassurant. C’était,
je
crois, le vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une
681
gement et d’une abondance très sûrement ordonnée.
Je
crois qu’on doit beaucoup attendre de ce tempérament qui fait jaillir
682
ge. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas
je
pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoi
683
r son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on
m’
assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. Il administre une feuill
684
r évolué vers une plus grande harmonie de lignes.
Je
pense surtout à ses bas-reliefs du BIT où se manifeste un heureux équ
685
père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils
m’
oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi.
686
re sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils
me
méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassem
687
inqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent !
Je
les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque
688
blient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner.
Je
salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description
689
t dont le profond ricanement se prolonge en nous.
Je
crois entendre Jacob qui se retourne, méprisant : « Mais oui, je ne n
690
re Jacob qui se retourne, méprisant : « Mais oui,
je
ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez do
691
retourne, méprisant : « Mais oui, je ne nie rien,
je
suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner
692
e ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît
mon
orgueil : osez donc me condamner d’être plus fort que cette bourgeois
693
ans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc
me
condamner d’être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suiv
694
geoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous
m’
avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. « Bernar
695
ivre le destin que vous m’avez assigné à force de
m’
humilier et de me craindre. » ah. « Bernard Lecache : Jacob (NRF, Pa
696
e vous m’avez assigné à force de m’humilier et de
me
craindre. » ah. « Bernard Lecache : Jacob (NRF, Paris) », Bibliothè
697
’on en vient à une conception de la sincérité qui
me
paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’exigence d
698
e », c’est encore l’« élan mortel » que décrivait
Mon
Corps et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de
699
core l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps et
Moi
. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de
700
de document humain, nuit à sa valeur littéraire.
Je
n’aime guère ce style abstrait, semé de redites et d’expressions tout
701
e tache de couleur, plus sentimental que cruel. «
J’
ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragiq
702
s le fond quelque chose de solide, d’authentique.
J’
aime cette violence de redressement où je distingue bien autre chose q
703
entique. J’aime cette violence de redressement où
je
distingue bien autre chose que les « éclats de l’impuissance ». Un pl
704
onner quelque vitalité à notre civilisation, — et
je
sais bien que c’est là un des signes de sa décadence. Il y a du chiru
705
cit du pickpocket (fragment) (mai 1927)m … et
je
jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’a appris à voler. Aristo
706
… et je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on
m’
a appris à voler. Aristophane (« Les Chevaliers »). Dès qu’on eut dé
707
ue l’esprit s’établit sur ses positions. Or donc,
j’
avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet
708
it sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans.
Je
vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet âge, logé, nourri,
709
tions. Or donc, j’avais vingt ans. Je vivais chez
mes
parents, comme tant d’autres à cet âge, logé, nourri, blanchi, mais n
710
e, logé, nourri, blanchi, mais non point diverti.
J’
étais bon, Monsieur, normalement bon. L’idée, par exemple, d’étrangler
711
par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir
me
répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennemi, — car ce
712
d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait.
Je
détestais de peiner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le m
713
peiner quelque être, même ennemi, — car celui-là
je
le méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me rega
714
trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme
me
regarda longuement. » Mes parents me savaient vierge et c’était la jo
715
cette époque, une femme me regarda longuement. »
Mes
parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils ai
716
e, une femme me regarda longuement. » Mes parents
me
savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en m
717
c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en
moi
par-dessus tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détourna
718
ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que
je
leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des yeux de cette
719
essus tout la vertu que je leur devais. Pourtant,
je
ne détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne
720
que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas
mes
yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de
721
tte femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de
moi
. Un soir qu’elle pleurait, je l’embrassai si fort… En un quart d’heur
722
ouffrît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait,
je
l’embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans
723
ait, je l’embrassai si fort… En un quart d’heure,
je
connaissais l’amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à l
724
scendait dans la ville, on marchait dans le bleu.
Je
sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très jolis de b
725
ait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui
m’
aimait, et nous étions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le
726
ouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir,
mon
père savait tout. Il effleura mon front de ses lèvres sans une parole
727
son. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura
mon
front de ses lèvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bo
728
ura mon front de ses lèvres sans une parole quand
je
vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légè
729
emain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il
me
regardait avec une terreur ou je crus distinguer je ne sais quelle dé
730
ment blanchi. Il me regardait avec une terreur ou
je
crus distinguer je ne sais quelle déchirante nostalgie. Pour lui, san
731
regardait avec une terreur ou je crus distinguer
je
ne sais quelle déchirante nostalgie. Pour lui, sans doute, j’étais pe
732
uelle déchirante nostalgie. Pour lui, sans doute,
j’
étais perdu. Mais il souffrait d’autre chose encore : il se savait vie
733
chose encore : il se savait vieux, maintenant. »
Je
songeais justement à un sourire de mon amie quand il voulut m’adresse
734
intenant. » Je songeais justement à un sourire de
mon
amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertigineu
735
ustement à un sourire de mon amie quand il voulut
m’
adresser la parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et
736
er la parole après un silence vertigineux. Il vit
mon
sourire et pleura. Alors une rage s’empara de mon corps tout entier,
737
mon sourire et pleura. Alors une rage s’empara de
mon
corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus dans
738
Alors une rage s’empara de mon corps tout entier,
je
criai un juron, claquai la porte et courus dans ma chambre. Une demi-
739
e criai un juron, claquai la porte et courus dans
ma
chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare, j’écrivais un m
740
courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard,
j’
étais à la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit e
741
bre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare,
j’
écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je partais dans u
742
d, j’étais à la gare, j’écrivais un mot d’adieu à
ma
maîtresse d’une nuit et je partais dans une direction quelconque. Il
743
ivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et
je
partais dans une direction quelconque. Il advint que ce fut celle de
744
advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière,
mon
pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j
745
celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! —
Je
vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers
746
vécus d’articles sur la mode et la politique, que
j’
envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un quotidien de mon pa
747
ers journaux. Un jour, parcourant un quotidien de
mon
pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosses le
748
. Un jour, parcourant un quotidien de mon pays où
je
cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosses lettres : c’é
749
rcourant un quotidien de mon pays où je cherchais
mon
dernier papier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était l’annonce
750
n de mon pays où je cherchais mon dernier papier,
je
lus mon nom en grosses lettres : c’était l’annonce du décès de mon pè
751
n pays où je cherchais mon dernier papier, je lus
mon
nom en grosses lettres : c’était l’annonce du décès de mon père. » J’
752
n grosses lettres : c’était l’annonce du décès de
mon
père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une brise
753
ttres : c’était l’annonce du décès de mon père. »
J’
étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et
754
rise passa, et une femme en robe bleue légère qui
me
regarda un instant, si doucement… Je me levai sans payer, je partis p
755
e légère qui me regarda un instant, si doucement…
Je
me levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commen
756
égère qui me regarda un instant, si doucement… Je
me
levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commençai
757
un instant, si doucement… Je me levai sans payer,
je
partis par les rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre
758
rtis par les rues, une joie violente commençait à
m’
envahir, contre laquelle je luttais obscurément pour augmenter ma volu
759
violente commençait à m’envahir, contre laquelle
je
luttais obscurément pour augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me t
760
re laquelle je luttais obscurément pour augmenter
ma
volupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un é
761
is obscurément pour augmenter ma volupté. Bientôt
je
ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un établissement luxueux
762
ment pour augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus
me
tenir de chantonner. J’entrai dans un établissement luxueux d’où sort
763
olupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner.
J’
entrai dans un établissement luxueux d’où sortaient à chaque tour du t
764
eflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que
j’
ouvris firent tourner des soleils sur les parois claires. Du balcon, o
765
avenir de bonheur fiévreux — celui justement que
j’
entrevoyais. » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai. Je ne trou
766
que j’entrevoyais. » Quand elle se fut endormie,
je
me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’ét
767
e j’entrevoyais. » Quand elle se fut endormie, je
me
rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’était
768
s. » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai.
Je
ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’était assez pour me
769
0 francs dans son sac à main : c’était assez pour
me
permettre d’entreprendre quelques beaux vols… » Dès lors, je vécus, c
770
e d’entreprendre quelques beaux vols… » Dès lors,
je
vécus, comme vous me voyez vivre encore, dans un état de sincérité pe
771
ques beaux vols… » Dès lors, je vécus, comme vous
me
voyez vivre encore, dans un état de sincérité perpétuelle envers tous
772
dans un état de sincérité perpétuelle envers tous
mes
élans, accueillant avec un enthousiasme juvénile, c’est-à-dire cyniqu
773
ffres du hasard, ce poète immoral et malicieux. »
Je
ne sais dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’on est fo
774
’on est forcé de prendre conscience de soi-même —
je
découvris une nuit, au moment de m’endormir, que ma passion du vol n’
775
de soi-même — je découvris une nuit, au moment de
m’
endormir, que ma passion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’
776
découvris une nuit, au moment de m’endormir, que
ma
passion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’avait-on pas dér
777
assion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne
m’
avait-on pas dérobé des années de joie au profit d’une vertu que tout
778
années de joie au profit d’une vertu que tout en
moi
reniait obscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vert
779
d’une vertu que tout en moi reniait obscurément.
Je
sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’ava
780
ue le ressort secret de la vertu dans laquelle on
m’
avait emprisonné c’était un bas opportunisme social, résultante des pa
781
lles filles, sans capitalistes et sans gendarmes.
Je
sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur so
782
istes et sans gendarmes. Je sais bien ce que vous
me
direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront
783
sais bien ce que vous me direz : Les millions que
je
pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette escroquerie mor
784
compenseront jamais cette escroquerie morale dont
je
fus la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Ma
785
la victime, ce vol de quelques joies parfaites de
ma
jeunesse… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalit
786
p tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de
ma
vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être engag
787
vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où
je
parais être engagé, du plan moral avec l’économique, qu’une expressio
788
e expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de
mon
mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes d
789
avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que
j’
édifiai à mes parents un tombeau sur lequel je fis graver : Prêté — re
790
uit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à
mes
parents un tombeau sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour la
791
que j’édifiai à mes parents un tombeau sur lequel
je
fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but
792
ise. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) »
Je
vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hô
793
ous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de
ma
vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelque
794
eepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois,
je
m’amuse à jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse
795
ings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je
m’
amuse à jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, d
796
, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à
mon
sens l’un des plus vulgaires et des plus généralement répandus, j’ai
797
plus vulgaires et des plus généralement répandus,
j’
ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions éléme
798
généralement répandus, j’ai vite fait de classer
mon
monde d’après les quelques réactions élémentaires qui ne manquent jam
799
ne manquent jamais de succéder au moindre vol. »
J’
ajouterai, cher Monsieur, que l’analyse psychologique n’est pas mon fo
800
r Monsieur, que l’analyse psychologique n’est pas
mon
fort. Je me contente de quelques observations théoriques que je tiens
801
, que l’analyse psychologique n’est pas mon fort.
Je
me contente de quelques observations théoriques que je tiens pour vra
802
ue l’analyse psychologique n’est pas mon fort. Je
me
contente de quelques observations théoriques que je tiens pour vraies
803
contente de quelques observations théoriques que
je
tiens pour vraies, et j’en vérifie les manifestations vivantes avec u
804
ervations théoriques que je tiens pour vraies, et
j’
en vérifie les manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves
805
ves, contre-épreuves, variantes et enjolivures où
je
vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une ce
806
et enjolivures où je vois le véritable intérêt de
ma
vie. C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’événement na
807
taine caresse de l’événement naissant peut encore
m’
émouvoir. C’est un plaisir de chaque minute auquel succède immédiateme
808
e minute auquel succède immédiatement le sommeil.
Je
rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai p
809
ment le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique,
m’
a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allai
810
. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que
j’
ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me n
811
e peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. »
J’
allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint-Julien. Vous n’ignore
812
e imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on
me
nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que l’on considère ce saint
813
l’agacer en maint endroit. « Une chose avant tout
me
frappe — dit-il, lâchant tout de suite ses compliments, ce qui est de
814
ie. Elle est sans bavures, sans réticences ; elle
m’
apparaît comme un divertissement perpétuel et dénué d’inquiétude. Et c
815
uel et dénué d’inquiétude. Et cela n’est pas sans
me
charmer, croyez-moi. Car, enfin, si je suis ici à vous écouter, c’est
816
iétude. Et cela n’est pas sans me charmer, croyez-
moi
. Car, enfin, si je suis ici à vous écouter, c’est que je cherche ce q
817
t pas sans me charmer, croyez-moi. Car, enfin, si
je
suis ici à vous écouter, c’est que je cherche ce qu’on est convenu d’
818
, enfin, si je suis ici à vous écouter, c’est que
je
cherche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’e
819
ourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais,
je
vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les con
820
ne règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui
me
retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle pa
821
t impliquer, c’est ce caractère de, comment dirai-
je
…, de juvénile insouciance, pour ne pas dire inconscience ! qui s’atta
822
n actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » —
Je
vous entends, interrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont l
823
l paraissait lui-même gêné. En deux mots, vous ne
me
trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre.
824
ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave.
Je
ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire que si vous me trouvez u
825
Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre.
Je
pourrais vous dire que si vous me trouvez un peu potache, il n’est pa
826
ais y répondre. Je pourrais vous dire que si vous
me
trouvez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’a
827
que le potache n’ait point raison. Mais justement
je
n’éprouve aucun désir d’avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce
828
ustement je n’éprouve aucun désir d’avoir raison.
Je
sens aussi bien que vous ce que mes principes peuvent avoir de « bien
829
’avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que
mes
principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis,
830
our quiconque est aussi profondément persuadé que
moi
de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre ge
831
apprendrez-vous à découvrir derrière certaines de
mes
plaisanteries la dérision secrète qu’elles masquent par caprice. ....
832
vous n’aviez pas lu ce livre ? Ah ! sans hésiter,
je
vous ferais un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’on n’e
833
e (juillet 1927)o I Parler littérature Si
je
prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu…
834
Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si
je
dis : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de
835
is : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur
moi
les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nou
836
sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si
je
cite tel auteur dont nous fîmes notre nourriture une saison de naguèr
837
re. Alors, quelque paysan du Danube survenant : —
Je
vous croyais écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué la lit
838
croyais écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais
j’
ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abando
839
! soupirez-vous. Mais j’ai tué la littérature en
moi
, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé
840
j’ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus,
j’
en sors, je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez
841
littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors,
je
l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quo
842
ous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or
je
pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un p
843
? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part
moi
: j’ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’est-c
844
quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi :
j’
ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’est-ce pas
845
ense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez
ma
franchise. Un peu grosse, n’est-ce pas ? D’autres prennent soin que l
846
’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar où
je
vous suis. Vous y entrez plein de mépris pour Paul Morand par qui déc
847
sa gueule de bois pour en faire des poèmes. Alors
je
cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une cita
848
herche les raisons de votre indignation, quand il
m’
échappe une citation. Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?
849
La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant
je
vais me fâcher chaque fois que vous direz : « extravagant », « invrai
850
— proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais
me
fâcher chaque fois que vous direz : « extravagant », « invraisemblabl
851
atitude salutaire, c’est refus de limiter le mal.
Je
vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdire de nom
852
ous vois envahi par des démons que vous prétendez
m’
interdire de nommer. Mais moi je partage avec certains Orientaux cette
853
ns que vous prétendez m’interdire de nommer. Mais
moi
je partage avec certains Orientaux cette croyance : nommer une chose,
854
ue vous prétendez m’interdire de nommer. Mais moi
je
partage avec certains Orientaux cette croyance : nommer une chose, c’
855
r puissance sur elle. Images, pensées des autres,
je
vous ai mis un collier avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur
856
du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que
j’
éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vo
857
un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de
ma
main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me surpre
858
r la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main.
Je
vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me surprendre par-
859
e j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens.
Je
sais où vous êtes. Vous n’allez pas me surprendre par-derrière. Une f
860
ous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas
me
surprendre par-derrière. Une fois — et ce n’est pas que je m’en vante
861
ndre par-derrière. Une fois — et ce n’est pas que
je
m’en vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les
862
e par-derrière. Une fois — et ce n’est pas que je
m’
en vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les to
863
. Une fois — et ce n’est pas que je m’en vante, —
j’
ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, pa
864
, parler littérature, c’est faire la part du feu.
Je
dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : tout cela jaillit,
865
cela jaillit, s’entrechoque, s’annule. Poussière.
Ma
vie est ailleurs. L’addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir
866
ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de
ma
pensée, je crois ce mépris et cette attente également exagérés. Vous
867
attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée,
je
crois ce mépris et cette attente également exagérés. Vous savez bien
868
exprimer ; depuis le temps qu’on l’oublie.) Vous
me
direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connais
869
elle était réalisée, on ne s’en apercevrait pas.
Je
pressens encore dans vos poèmes les plus obscurs des allusions furtiv
870
ger sans fièvre, pour en circonscrire les effets.
J’
avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fournit un me
871
II Sur l’utilité de la littérature Montherlant
me
paraît être le moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Qua
872
los de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça,
je
ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus
873
isse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé. On
m’
affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un autre : et qu’un beau soi
874
ça, je ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que
je
n’y échapperai pas plus qu’un autre : et qu’un beau soir il faille éc
875
culeuses. Voici donc les seules révélations que
j’
attende de la littérature : que celle des autres m’aide à prendre cons
876
’attende de la littérature : que celle des autres
m’
aide à prendre conscience de moi-même ; que la mienne m’aide à découvr
877
à prendre conscience de moi-même ; que la mienne
m’
aide à découvrir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mép
878
onde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration.
J’
ai défini une « maladie » dont je parviens à tirer quelque bien pour m
879
ni d’adoration. J’ai défini une « maladie » dont
je
parviens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’el
880
adie » dont je parviens à tirer quelque bien pour
ma
vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices p
881
n pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige
me
coûteront des sacrifices plus grands que les bienfaits que j’en escom
882
des sacrifices plus grands que les bienfaits que
j’
en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m’en guérir. Vous
883
escompte, il sera temps de songer sérieusement à
m’
en guérir. Vous me demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je
884
temps de songer sérieusement à m’en guérir. Vous
me
demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de v
885
m’en guérir. Vous me demanderez « alors » ce que
j’
attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathi
886
Vous me demanderez « alors » ce que j’attends de
ma
vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philippe
887
demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie.
Je
serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philippe Soupault
888
citation.) Mais non, cher ami, voici qu’une envie
me
prend de vous conter un peu cette histoire. Seulement, allons ailleur
889
ur. 15. Variante : des puissances d’action. 16.
J’
en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte que leurs mémoi
890
une étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce
je
ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’auteur lui-même appelle « ce
891
ire, intermittente, un peu émiettée, éventée, que
je
trouve dans une ancienne réalité ressuscitée… » Sachons gré à M. Vaud
892
œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai,
je
veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît comme un
893
u nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour
moi
qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis R
894
us que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que
je
vis Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un o
895
poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke,
je
compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un objet de songe
896
que je vis Rilke, je compris que cet univers dont
je
rêvais n’était pas un objet de songe mais d’expérience ». Mais une te
897
is d’expérience ». Mais une telle « expérience »,
je
crois, ne peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somm
898
« fatale », « si arbitraire et si facultative »,
je
me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette
899
fatale », « si arbitraire et si facultative », je
me
dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette att
900
bliés sur le marbre vulgaire d’une table de café.
Je
venais de m’asseoir et de commander une consommation. Comme d’habitud
901
marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de
m’
asseoir et de commander une consommation. Comme d’habitude, un peu apr
902
ation. Comme d’habitude, un peu après six heures.
J’
étais seul. Le café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que
903
est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que
ma
chambre où m’attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les
904
onyme bien plus propice au rêve que ma chambre où
m’
attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insuppor
905
ue ma chambre où m’attendent tous les soirs quand
je
rentre du bureau, les gages insupportablement familiers d’une vie hon
906
ongeries les plus étranges qu’appelle la musique.
Je
me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouv
907
eries les plus étranges qu’appelle la musique. Je
me
gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir
908
s Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur
mon
esprit. Non que cela m’intéresse au fond : les faits-divers, rien de
909
n pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que cela
m’
intéresse au fond : les faits-divers, rien de moins divers. Mais je su
910
nd : les faits-divers, rien de moins divers. Mais
je
suis pris dans l’absurde réseau des lignes, et cette mécanique me res
911
s l’absurde réseau des lignes, et cette mécanique
me
restitue chaque fois un peu plus de lassitude, un peu plus d’ennui. J
912
is un peu plus de lassitude, un peu plus d’ennui.
J’
essayai donc de rêver. Mais cette rose oubliée me gênait : perdre une
913
J’essayai donc de rêver. Mais cette rose oubliée
me
gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas
914
me gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et
je
ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra un
915
lentement vers la mienne et s’assit sans paraître
me
voir. Une grande figure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia l
916
journal et se mit à lire les pages d’annonces. On
m’
apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de boire, mes pensées plus ra
917
es d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand
j’
eus fini de boire, mes pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers
918
pporta une liqueur. Et quand j’eus fini de boire,
mes
pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers l’avenir et j’osai que
919
lus rapides s’en allèrent un peu vers l’avenir et
j’
osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite automobile
920
vers l’avenir et j’osai quelques rêves. C’était,
je
m’en souviens, une petite automobile qui roulait dans la banlieue pri
921
rs l’avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je
m’
en souviens, une petite automobile qui roulait dans la banlieue printa
922
te salle à manger ; des jaquettes de couleur pour
ma
femme… Mais l’homme avait posé son journal. Soudain, portant la main
923
es traits. Puis il reprit les dés brusquement, et
me
fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise va
924
re : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise vainquit
ma
timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nou
925
! ordonna-t-il. La surprise vainquit ma timidité,
je
pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis av
926
Vous avez gagné, c’est admirable, ah ! mon Dieu,
je
vous remercie, Monsieur… Il saisit son journal. Il en parcourait rapi
927
ges, la proie d’une agitation visible. Bientôt il
m’
offrit de jouer un moment. Nous fixâmes comme enjeu nos consommations.
928
ment. Nous fixâmes comme enjeu nos consommations.
Je
gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres
929
consommations. Je gagnai. Il demanda des portos.
Je
les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à oscil
930
e gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et
je
les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Le
931
os. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore.
Ma
tête commençait à osciller vaguement. Les couleurs du bar me rempliss
932
mençait à osciller vaguement. Les couleurs du bar
me
remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusais sans cesse aux q
933
s du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et
je
me refusais sans cesse aux questions qu’en moi-même posait ma raison
934
u bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je
me
refusais sans cesse aux questions qu’en moi-même posait ma raison eff
935
is sans cesse aux questions qu’en moi-même posait
ma
raison effarée. L’étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épa
936
si : une fièvre faisait s’épanouir sur son visage
je
ne sais quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l’esprit li
937
ommandement de la main. Ce soir-là, une confiance
me
possédait, telle que je savais très clairement que je gagnerais à tou
938
Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que
je
savais très clairement que je gagnerais à tout coup. L’étranger se mi
939
ossédait, telle que je savais très clairement que
je
gagnerais à tout coup. L’étranger se mit à discourir. Et dans mon ivr
940
tout coup. L’étranger se mit à discourir. Et dans
mon
ivresse, ses paroles peignaient des tableaux mouvants où je me voyais
941
, ses paroles peignaient des tableaux mouvants où
je
me voyais figurer comme une sorte de « personnage aux dés ». Ce furen
942
es paroles peignaient des tableaux mouvants où je
me
voyais figurer comme une sorte de « personnage aux dés ». Ce furent d
943
s bientôt : — « Destin, s’écria-t-il, tu pourrais
me
remercier. Vois quels chemins de perdition j’ouvre sans cesse à ta co
944
ais me remercier. Vois quels chemins de perdition
j’
ouvre sans cesse à ta course aveugle ; tu n’aurais pas trouvé ça tout
945
s airs pessimistes. De nouveau, d’un coup de dés,
je
bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voi
946
corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que
j’
allais me cramponner à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la
947
ur les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais
me
cramponner à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la possessi
948
onheur qu’ils croient lié à la possession, et que
j’
allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu
949
’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que
j’
allais adhérer à l’idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je so
950
à l’idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand
je
songe à tous ces gens qui perdent leur vie à la gagner9, et leur faço
951
autre, de douleurs en ivresses avec la même joie,
mon
cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que je vais m’endor
952
rs en ivresses avec la même joie, mon cheval fou,
mon
beau Désir s’ébroue et part sitôt que je vais m’endormir, ah ! galope
953
al fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que
je
vais m’endormir, ah ! galope, caracole, éclabousse, ils n’y comprendr
954
mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que je vais
m’
endormir, ah ! galope, caracole, éclabousse, ils n’y comprendront jama
955
comprendront jamais rien, écoutez-les, comme ils
me
jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça les déran
956
blement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à
mes
dépens, témoin ce brave homme qui est en train de me soutirer les que
957
dépens, témoin ce brave homme qui est en train de
me
soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sor
958
de me soutirer les quelque billets de mille dont
je
venais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la
959
ais de régler le sort, puisque demain dès l’aube,
j’
irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait
960
ient un brouillard de fumée, et la musique noyait
mes
pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre table, en robe roug
961
llard de fumée, et la musique noyait mes pensées.
Je
vis qu’une femme était assise à notre table, en robe rouge, et très f
962
uilla sur les dés, et partit d’un long rire. Elle
me
regardait et l’étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’é
963
e. Elle me regardait et l’étranger aussi se mit à
me
regarder bizarrement et j’étais possédé de joies et de peurs. Il fall
964
tranger aussi se mit à me regarder bizarrement et
j’
étais possédé de joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le c
965
ssus des rues parcourues de longs cris en voyage.
Je
me sentis perdre pied délicieusement. Et de cette nuit peut-être, je
966
s des rues parcourues de longs cris en voyage. Je
me
sentis perdre pied délicieusement. Et de cette nuit peut-être, je ne
967
pied délicieusement. Et de cette nuit peut-être,
je
ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemain je n’avais plus un sou)
968
je ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemain
je
n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je
969
… (sinon qu’au lendemain je n’avais plus un sou).
Je
n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou
970
sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois
je
songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-ce que celles de mes fol
971
paroles — ou peut-être n’étaient-ce que celles de
mes
folies ? Je me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’en dé
972
peut-être n’étaient-ce que celles de mes folies ?
Je
me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma v
973
t-être n’étaient-ce que celles de mes folies ? Je
me
répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma vie
974
me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à
m’
en délivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très b
975
adoxes, mais cela ne suffit plus à m’en délivrer.
Ma
vie m’a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devr
976
mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma vie
m’
a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais ten
977
e suffit plus à m’en délivrer. Ma vie m’a repris,
je
ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais tenter quelque
978
ivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureux.
Je
sais très bien que je devrais tenter quelque chose. Je suis plein de
979
is, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que
je
devrais tenter quelque chose. Je suis plein de rêves, certains soirs.
980
is très bien que je devrais tenter quelque chose.
Je
suis plein de rêves, certains soirs. Il faut pourtant rentrer chez mo
981
es, certains soirs. Il faut pourtant rentrer chez
moi
, et ma femme m’embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je n
982
ains soirs. Il faut pourtant rentrer chez moi, et
ma
femme m’embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis
983
s. Il faut pourtant rentrer chez moi, et ma femme
m’
embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis plus tout
984
rtant rentrer chez moi, et ma femme m’embrasse et
me
regarde avec inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le mêm
985
embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que
je
ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le l
986
ue je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle
me
laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’
987
laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans
ma
chambre, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux da
988
er. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper,
je
m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvo
989
Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je
m’
abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir
990
ma chambre, avant d’aller souper, je m’abats sur
mon
lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur m
991
abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et
je
voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostrophe, soudain
992
ans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur
ma
lâcheté. Et je t’apostrophe, soudain plein de mépris et de désespoir,
993
Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et
je
t’apostrophe, soudain plein de mépris et de désespoir, ô vie sans fau
994
joie… Ah ! plus amère, plus amère encore, saurai-
je
un jour te désirer, te haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note
995
On a trop dit que notre époque est chaotique.
Je
crois bien, au contraire, que l’histoire n’a pas connu de période où
996
’en croire nos yeux. I. L’homme qui a réussi
Je
prends Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et le meilleur,
997
en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne
m’
accuse donc pas de caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l
998
on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de
ma
critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce que
999
bjet de ma critique pour faciliter l’accusation :
je
prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici l
1000
usation : je prends pour la juger ce que l’époque
m’
offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte da
1001
Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans
Ma
vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à joue
1002
ie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et
mon
œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à jouer avec des
1003
outière. « Depuis l’instant où, enfant de 12 ans,
j’
aperçus cette machine de route, jusqu’au jour présent, ma grande et co
1004
us cette machine de route, jusqu’au jour présent,
ma
grande et constante ambition a été de construire une bonne machine ro
1005
lutte des classes. Il se dégage de la lecture de
Ma
vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté.
1006
classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et
mon
œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’on aj
1007
t. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à
mon
sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le cli
1008
cient des buts et de l’avenir de son effort. Pour
mon
compte, je crois que l’idée fixe de produire peut très bien envahir u
1009
ts et de l’avenir de son effort. Pour mon compte,
je
crois que l’idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau m
1010
rs, voici des déclarations plus nettes encore : «
Je
ne considère pas les machines Ford simplement comme des machines. J’y
1011
les machines Ford simplement comme des machines.
J’
y vois la réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce mo
1012
e salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que
j’
ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en prat
1013
ale aux plus grands esprits de tous les temps. On
me
dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si
1014
dira que Ford a mieux à faire que de philosopher.
Je
le veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souli
1015
x à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si
j’
insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligner ce hiatus étran
1016
ela ratait, on gardait toutes les autres chances.
J’
accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par
1017
ésirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions.
Je
dis que les êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle dev
1018
ouvez servir Dieu et Mammon », dit l’Écriture. ⁂
Je
ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consisterait à vouloir
1019
es termes avec netteté et courage. Pour le reste,
je
pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête faite à Genève
1020
que les livres les plus lus du grand public sont
Ma
vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vau
1021
ivres les plus lus du grand public sont Ma vie et
mon
œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans l
1022
grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et
Mon
curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue alle
1023
s est encore plus grand, et de meilleure qualité.
Je
ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford,
1024
mérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford,
Ma
vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembr
1025
2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et
mon
œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4.
1026
À Pierre Jeanneret et à son étoile nervalienne.
Je
vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dan
1027
assez de passants pour qu’on la sentît déserte ne
me
proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fallait-il accuser de c
1028
cuser de cette duperie, qui rendre responsable de
ma
déception, sinon moi-même, me dis-je bientôt. Car je professe qu’un d
1029
ndre responsable de ma déception, sinon moi-même,
me
dis-je bientôt. Car je professe qu’un désir vraiment pur parvient tou
1030
sponsable de ma déception, sinon moi-même, me dis-
je
bientôt. Car je professe qu’un désir vraiment pur parvient toujours à
1031
déception, sinon moi-même, me dis-je bientôt. Car
je
professe qu’un désir vraiment pur parvient toujours à créer son objet
1032
es. Donc, n’ayant pas renoncé à certaine idée que
j’
avais d’un romantisme viennois, je fus conduit, par une sorte de compr
1033
rtaine idée que j’avais d’un romantisme viennois,
je
fus conduit, par une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où l’o
1034
à l’Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann.
Je
comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans mon esprit Vienne et
1035
e comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans
mon
esprit Vienne et Hoffmann : c’était le souvenir de Gérard de Nerval.
1036
n : c’était le souvenir de Gérard de Nerval. Mais
je
pense que je n’avais même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque
1037
e souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que
je
n’avais même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque je m’assis da
1038
s même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque
je
m’assis dans l’ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouv
1039
ême pas prononcé intérieurement ce nom lorsque je
m’
assis dans l’ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver
1040
s l’ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de
me
trouver à côté d’une place vide : la jolie femme qu’on attend dans ce
1041
ces, une fois de plus manquait le rendez-vous que
j’
avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’e
1042
. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout
mon
être — ainsi d’autres deviennent patriotes au son d’une fanfare milit
1043
t patriotes au son d’une fanfare militaire, ainsi
je
m’abandonne au rêve d’un monde que suscite en moi seul peut-être cett
1044
atriotes au son d’une fanfare militaire, ainsi je
m’
abandonne au rêve d’un monde que suscite en moi seul peut-être cette p
1045
je m’abandonne au rêve d’un monde que suscite en
moi
seul peut-être cette plainte heureuse des violons. Le diable sort des
1046
aturelle. Et tout cela chanté dans une langue que
je
comprends mal. Je me penche vers un voisin pour lui demander je ne sa
1047
cela chanté dans une langue que je comprends mal.
Je
me penche vers un voisin pour lui demander je ne sais plus quoi. Mais
1048
a chanté dans une langue que je comprends mal. Je
me
penche vers un voisin pour lui demander je ne sais plus quoi. Mais sa
1049
al. Je me penche vers un voisin pour lui demander
je
ne sais plus quoi. Mais sans doute évadé dans son rêve, beaucoup plus
1050
doute évadé dans son rêve, beaucoup plus loin que
moi
, il n’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre.
1051
rêve, beaucoup plus loin que moi, il n’entend pas
ma
question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abando
1052
oin que moi, il n’entend pas ma question. L’envie
me
prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’u
1053
question. L’envie me prend d’aller le rejoindre.
Me
voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquement mêlé à des
1054
orme blanche, sous un brusque faisceau de lumière
m’
apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement
1055
ceau de lumière m’apparaît avec le visage même de
mon
amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revoir,
1056
ière m’apparaît avec le visage même de mon amour.
Je
me sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revoir, vertige de
1057
e m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je
me
sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revoir, vertige de te
1058
’est toi, parce que c’est bien toi de nouveau qui
m’
appelles et qui vas me quitter… — C’est une chose singulière, prononce
1059
est bien toi de nouveau qui m’appelles et qui vas
me
quitter… — C’est une chose singulière, prononce une voix, à côté de m
1060
ne chose singulière, prononce une voix, à côté de
moi
, c’est une chose singulière que le pouvoir de cette musique. Voici qu
1061
que. Voici que vous êtes tout près de comprendre…
Mon
voisin avait parlé tout haut ; personne pourtant ne se détournait. Co
1062
rsonne pourtant ne se détournait. Comment pouvais-
je
être le seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vo
1063
vais-je être le seul à l’avoir entendu ? — C’est,
me
répondit-il, que seul vous venez d’atteindre au monde des êtres vérit
1064
des êtres véritables. Nous nous rencontrons. Vous
me
voyez parce que vous comprenez certaines choses par votre souffrance…
1065
scène, un reflet balaya le parterre, le visage de
mon
voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis que
1066
eflet balaya le parterre, le visage de mon voisin
m’
apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’avai
1067
m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire.
Je
sentis que je l’avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre,
1068
le dans son collier de barbe noire. Je sentis que
je
l’avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1
1069
s toute sa personne rien de positivement démodé ;
je
n’eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’aille
1070
ue ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où
m’
avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison d’intervenir e
1071
ù m’avait jeté la première reconnaissance empêcha
ma
raison d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris
1072
mpêcha ma raison d’intervenir entre la réalité de
ma
vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d
1073
son d’intervenir entre la réalité de ma vision et
mon
cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d’évidences opa
1074
es. Nous sortîmes de l’Opéra, Gérard de Nerval et
moi
, sans nous être rien dit d’autre, comme des amis qui se connaissent d
1075
ameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois,
me
dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de leurs petits
1076
is, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de
me
moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’en suis pas fâché. » Il
1077
açon de me moquer de leurs petits chiens musclés…
Je
n’en suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans les rues. Des je
1078
p s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-
je
, songeant aux Amours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré les
1079
eur de l’étreinte… C’est d’ailleurs une chose que
je
comprends assez bien, ajouta-t-il, mais pour d’autres raisons qu’eux,
1080
nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour
moi
, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où la question fidélité o
1081
itude, des gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard,
je
situe l’amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne
1082
té ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez,
je
n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant bien, mais
1083
deux attributs différents. Toutes les femmes qui
m’
ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient cet amour, c’
1084
qu’elles évoquaient cet amour, c’était parce que
je
découvrais en elles de secrètes ressemblances, qui pour d’autres para
1085
lle n’était qu’un regard, un certain regard, mais
j’
ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela
1086
’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais
je
bavarde, je philosophe, et vous allez me dire que c’est trop facile p
1087
ul qui donna un sens au monde. — Mais je bavarde,
je
philosophe, et vous allez me dire que c’est trop facile pour un homme
1088
. — Mais je bavarde, je philosophe, et vous allez
me
dire que c’est trop facile pour un homme retiré du monde depuis si lo
1089
vrons-nous plutôt à une petite malice dont l’idée
me
vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite bossue
1090
héo nommaient « biondo et grassotto », et qu’avec
mes
amis nous devions baptiser en style viennois « Mehlspeis-Schlagobers
1091
t que de prendre des femmes au hasard, disait-il.
Je
sens très bien que nous allons nous ennuyer terriblement. Du moins, m
1092
nous allons nous ennuyer terriblement. Du moins,
moi
. Pour vous, c’est différent, vous êtes moderne, vous vous contentez p
1093
ux de plaisir — autre façon de parler. On dit que
j’
ai vécu d’illusions, avouez que les miennes étaient de meilleure quali
1094
chercher ici avec le premier être venu. — Certes,
je
comprends que l’Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser.
1095
je comprends que l’Europe est en décadence quand
je
la regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances se
1096
pe est en décadence quand je la regarde s’amuser.
Je
vois se perdre ce sens des correspondances secrètes et spontanées du
1097
be mauve, avec tant de gravité et de détachement.
Je
viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la
1098
la regarder, à cause de la noblesse de sa danse.
Je
la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’
1099
qu’avec un sentiment religieux de la beauté. Mais
je
crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bu
1100
mbre de cette ville illusoire est la plus douce à
mes
vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes filets dans l’eau des
1101
us douce à mes vagabondages sans but. Vous savez,
je
lance mes filets dans l’eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des
1102
à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance
mes
filets dans l’eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux a
1103
e mes filets dans l’eau des nuits, et quelquefois
j’
en ramène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire les signes. »
1104
fois j’en ramène des animaux aux yeux bizarres où
je
sais lire les signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous somm
1105
yeux bizarres où je sais lire les signes. » Comme
je
ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’ai
1106
ondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-t-il.
Moi
pas. D’ailleurs j’ai oublié mes clefs il y a très, très longtemps… Et
1107
-vous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’ailleurs
j’
ai oublié mes clefs il y a très, très longtemps… Et pas de Lune ce soi
1108
l ? demanda-t-il. Moi pas. D’ailleurs j’ai oublié
mes
clefs il y a très, très longtemps… Et pas de Lune ce soir, il serait
1109
erait dangereux de s’endormir. » Se penchant vers
moi
il prononça : « La nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque
1110
il prononça : « La nuit sera noire et blanche. »
Je
ressentis quelque émotion à l’ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite,
1111
motion à l’ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite,
je
pensai qu’il arrive aux meilleurs de se répéter, et que c’était la pr
1112
ctavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par
je
ne sais quelle erreur d’images, — ce serait la gravité énigmatique d’
1113
rai drame de son destin est ailleurs. Il se met à
m’
expliquer des signes, des généalogies étourdissantes qui commencent à
1114
l leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il
m’
enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nou
1115
sme et son exaltation. Il semble se rapprocher de
moi
. Il me raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que pour n
1116
on exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il
me
raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que pour nos sava
1117
u’il y a sous le soleil, et même ailleurs. Croyez-
moi
, ce qu’il faudrait écrire, c’est une Vie simultanée de Gérard, qui ti
1118
e à chaque instant, le homard se réveilla. Gérard
m’
expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que l’animal devenait nerve
1119
nt d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi,
je
me balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en
1120
d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi, je
me
balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en cr
1121
nt pour des baise-mains silencieux et mécaniques.
Je
reconnus des princes aux faces maigres qui ressemblaient terriblement
1122
ré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée,
je
m’aperçus que j’étais seul. Une dernière auto, extraordinairement sil
1123
: Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je
m’
aperçus que j’étais seul. Une dernière auto, extraordinairement silenc
1124
. Quand la place se fut apaisée, je m’aperçus que
j’
étais seul. Une dernière auto, extraordinairement silencieuse, absolum
1125
t silencieuse, absolument silencieuse fila devant
moi
; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rid
1126
ncieuse, absolument silencieuse fila devant moi ;
je
reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux
1127
matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse,
m’
éclaboussant de neige et de titres dépourvus de sens. Je dormais debou
1128
boussant de neige et de titres dépourvus de sens.
Je
dormais debout. 10. Quelque chose comme « pâtisserie-crème fouettée
1129
logue ? Laisserons-nous Jules Verne aux enfants ?
J’
allais oublier que la littérature enfantine est le dernier bateau. Pou
1130
est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui ne
m’
empêchera pas d’y monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo so
1131
ffit que cet obsédant capitaine Nemo soit à bord,
je
soupçonne que ce bateau n’est autre que La Liberté. ar. « M. Allott
1132
seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à
mes
yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 6
1133
i le rendrait digne à mes yeux, de considération.
J’
admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultan
1134
arties d’échecs simultanément, et c’est naturel :
je
m’en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne
1135
ies d’échecs simultanément, et c’est naturel : je
m’
en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne de
1136
et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et
m’
en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que des
1137
s éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible.
Je
ne demande aux écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils les fa
1138
ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi
j’
ai lu ce livre, malgré son premier chapitre, variation sur un mot bien
1139
itte à renaître heureusement) sur des gens qui ne
m’
intéressent pas ou bien qui ne sont pas atteints par ces épithètes drô
1140
es chefs (c’est lui qui parle au nom de l’auteur,
je
pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en fais
1141
ui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : « Il
me
semble que je lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fai
1142
u nom de l’auteur, je pense) : « Il me semble que
je
lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’éva
1143
lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que
je
fais ici… » L’évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvé
1144
lables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé.
Je
regrette seulement que Daniel-Rops se soit borné à une courte nouvell
1145
e : il n’écrit pas de livre pour y pourchasser un
moi
qui feint toujours de se cacher derrière le feuillet suivant, entraîn
1146
nuant vertigineusement et l’égarent dans sa nuit.
Je
saute quelques délires et pas mal de superstitions. Enfin cette expér
1147
leur réponse, il répète à plusieurs reprises : «
Je
ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu pl
1148
répète à plusieurs reprises : « Je ne sais pas :
je
suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut u
1149
lusieurs reprises : « Je ne sais pas : je suis !…
Je
ne sais plus… mais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut un jour de g
1150
Je ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais
je
suis ! » Un peu plus tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes
1151
Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage
me
cache tous les miroirs » — à une femme qu’il aimait. m. « Miroirs,
1152
Sherwood Anderson,
Mon
père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se se
1153
Sherwood Anderson, Mon père et
moi
et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé e
1154
Sherwood Anderson, Mon père et moi et
Je
suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légè
1155
ndre d’un air connaisseur que c’est bien composé.
J’
avoue prendre cette autobiographie tellement au sérieux que j’ai été b
1156
dre cette autobiographie tellement au sérieux que
j’
ai été bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un h
1157
doucement comique, si émouvant : « À cette époque
je
croyais fortement en l’existence d’une espèce de secrète et à peu prè
1158
gosses à laquelle nous nous livrons, voilà tout,
moi
et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’
1159
ous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”,
me
disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivais presque à
1160
ivrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-
je
parfois, et il y avait des moments où j’arrivais presque à me convain
1161
e disais-je parfois, et il y avait des moments où
j’
arrivais presque à me convaincre que si je m’approchais tout à coup pa
1162
et il y avait des moments où j’arrivais presque à
me
convaincre que si je m’approchais tout à coup par-derrière d’un homme
1163
ents où j’arrivais presque à me convaincre que si
je
m’approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou d’une femme quelc
1164
s où j’arrivais presque à me convaincre que si je
m’
approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou d’une femme quelconq
1165
sais “houu !” il ou elle se secouerait enfin, que
moi
aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras
1166
!” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi
je
me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras dessous e
1167
il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je
me
secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras dessous en r
1168
a contribué davantage que n’importe quel autre de
mon
temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrai
1169
. Quelle décadence ! ax. « Sherwood Anderson :
Mon
père et moi et Je suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universe
1170
cadence ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et
moi
et Je suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue
1171
! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et moi et
Je
suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Ge
1172
e où la poésie est compréhensible et légitime. 4.
Je
suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essentiellement une m
1173
réhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid,
je
dis : Belles-Lettres est essentiellement une mystique. Mais parce que
1174
est essentiellement une mystique. Mais parce que
je
suis de sang-froid, je ne puis dire grand-chose de plus. On ne se com
1175
e mystique. Mais parce que je suis de sang-froid,
je
ne puis dire grand-chose de plus. On ne se comprend bien qu’entre jeu
1176
poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais
je
tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu tou
1177
… Ailleurs Colombes lumineuses des mains de
mon
amour écloses voyageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez le
1178
n retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de
mon
cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’on meurt. Étoile de
1179
épété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous,
je
suis bourgeois ! », l’on peut se permettre quelques malices, quelques
1180
disproportionnés avec son mérite ». Il ajoute : «
j’
ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singuli
1181
ner très jeune, avec une clairvoyance singulière,
mes
propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C
1182
clairvoyance singulière, mes propres limites, et
j’
ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’éco
1183
La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)n «
Je
lui ai raconté qu’il habite une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’i
1184
encore, et c’est là-dessus qu’il improvise, oh !
j’
aimerais tant aller là-bas, cette folie m’apparaît comme une chose si
1185
e, oh ! j’aimerais tant aller là-bas, cette folie
m’
apparaît comme une chose si douce et si grande… »11 Et Bettina termin
1186
é les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ;
j’
ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin, mais il est plus di
1187
dre par un sot que par un fou. » L’hiver dernier,
m’
occupant assez longuement d’un des poètes auxquels notre temps doit vo
1188
s d’entre nous se préparent à tenter le climat, —
j’
avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sans doute asse
1189
ez profondément pour qu’aujourd’hui le hasard qui
m’
amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était la Pen
1190
encore quelques cris brisés : « Ô vieux démon ! —
je
te rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mai
1191
racle. — C’était l’époque des amateurs de ruines.
Je
suis descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de la maison, en at
1192
ure. Il y a là une station de canots de louage où
j’
ai vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté d’un « Hypérion ».
1193
lderlin » à côté d’un « Hypérion ». En cherchant,
je
trouverais bien aussi un « Nietzsche » à fond plat. Des saules se pen
1194
s d’armoires. Un couloir, la chambre. L’homme qui
me
conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? —
1195
vous devez connaître ces portraits ? — (et comme
je
considère un ravissant médaillon de marbre) — Ça, c’est Diotima. » On
1196
— Ça, c’est Diotima. » On rougirait à moins. — «
Je
ne puis pas parler de lui, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aus
1197
n grand accès de fièvre… L’agrément de ce monde,
je
l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longt
1198
ont fui. Avril et mai et juin sont lointains,
Je
ne suis plus rien, je n’aime plus vivre. Il y avait encore plus de p
1199
i et juin sont lointains, Je ne suis plus rien,
je
n’aime plus vivre. Il y avait encore plus de paix que maintenant. La
1200
de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain
m’
angoisse. Mais le gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dan
1201
ui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh ! répond-il,
je
pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de visit
1202
tues et les contreforts de l’Église du Chapitre :
je
vois s’y engager chaque jour le fou au profil de vieille femme qui pr
1203
approchent, tournoyent lentement dans la musique.
Je
n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pag
1204
nts serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »).
J’
aime les bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne
1205
. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de
je
ne sais quelle revanche du médiocre dont ils se sentent bénéficiaires
1206
c que l’un des deux soit absurde, de ces mondes à
mes
yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle
1207
que vulgaire, par quel hasard, donne l’accord qui
m’
ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échappe ô douceur
1208
donne l’accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà
je
leur échappe — je t’échappe ô douceur de vivre ! Tout redevient autou
1209
m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe —
je
t’échappe ô douceur de vivre ! Tout redevient autour de moi insuffisa
1210
ppe ô douceur de vivre ! Tout redevient autour de
moi
insuffisant, transitoire, allusif. Tout se remet à signifier l’absenc
1211
isme à son mépris pour la révélation évangélique.
Je
ne vois là que l’indice d’une confusion bien française, hélas. ba.
1212
la défense contre ses adversaires de tous bords.
Je
voudrais souligner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Ju
1213
de répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure.
Je
suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philo
1214
nda, sur le plan philosophique en particulier, où
je
me sens bien plus près de M. Gabriel Marcel, qu’il attaque. (M. Benda
1215
, sur le plan philosophique en particulier, où je
me
sens bien plus près de M. Gabriel Marcel, qu’il attaque. (M. Benda tr
1216
ahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que
moi
ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la c
1217
n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui
me
viennent l’esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous app
1218
les précieuses trouvaient cela d’un romantisme !
ma
chère, d’un mauvais goût ! Cependant le jeune homme agitait ses ailes
1219
rt d’un poète en état, sans doute, d’inspiration.
Je
trouve dans une enveloppe qu’hier vous m’adressâtes une déclaration d
1220
ration. Je trouve dans une enveloppe qu’hier vous
m’
adressâtes une déclaration d’amour destinée à une femme blonde. Je sui
1221
déclaration d’amour destinée à une femme blonde.
Je
suis noire. Mais je sais qui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un
1222
destinée à une femme blonde. Je suis noire. Mais
je
sais qui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un jour m’a laissé ente
1223
me blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’est.
J’
ai fait suivre. Alexandrine un jour m’a laissé entendre qu’elle vous a
1224
qui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un jour
m’
a laissé entendre qu’elle vous aime. Elle attend votre lettre depuis d
1225
s aime. Elle attend votre lettre depuis des mois.
Je
pense que ces lignes vous trouveront réunis. Avec ma bénédiction, je
1226
pense que ces lignes vous trouveront réunis. Avec
ma
bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » — Le poète reprit son ma
1227
gnes vous trouveront réunis. Avec ma bénédiction,
je
suis votre amie Joséphine. » — Le poète reprit son manuscrit et concl
1228
sez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi
je
me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux pe
1229
pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je
me
bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petit
1230
tion publique deux petits livres1 excellents dont
je
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. A
1231
gnement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
Mon
dessein est assez différent, moins philosophique et point du tout tec
1232
, moins philosophique et point du tout technique.
J’
apporte un témoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marqu
1233
émoignage personnel, une réaction de tempérament.
Je
marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liais
1234
marque d’autre part la nécessité de tout cela qui
me
blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste
1235
fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste
ma
liberté et sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je
1236
doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément,
je
ressemble. Nous vivons sous un régime radical à sécrétion socialiste
1237
e à elle prolonge abusivement sa terne existence.
Je
l’ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment tou
1238
e pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
Je
serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce pe
1239
nt toutes les haines. Je serai méchant, parce que
j’
en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à r
1240
— Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel
je
compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le
1241
tient des idées qui ne rapportent rien. En effet,
je
ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne.
1242
ffet, je ne représente aucun parti, aucune firme.
Je
ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma
1243
parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne.
Je
ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas l
1244
ersonne. Je ne prétends pas même parler au nom de
ma
génération, ne m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût
1245
tends pas même parler au nom de ma génération, ne
m’
étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur,
1246
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur,
me
donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droite comme à g
1247
gueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant
je
sais qu’à droite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le p
1248
ond miraculeusement, gémir n’est pas un argument.
Je
demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans condition
1249
s un argument. Je demande le droit de démolir. Et
me
l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer u
1250
molir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions.
Mon
rôle n’est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me conten
1251
est pas de proposer une nouvelle forme politique.
Je
me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe
1252
pas de proposer une nouvelle forme politique. Je
me
contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe es
1253
rme politique. Je me contente de vitupérer ce que
je
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
1254
s capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais
j’
aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et org
1255
se ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que
je
dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
1256
s, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car
j’
ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en dou
1257
signalent bien souvent nos tolérants par inertie,
je
ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je
1258
uvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais
je
m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les class
1259
nt nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je
m’
attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer
1260
m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et
je
tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler
1261
à les classer par avance en deux catégories dont
je
vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me r
1262
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de
me
resservir ces arguments, bien que dûment prévus et réduits à néant ic
1263
réduits à néant ici même ; mais — gain de temps —
je
n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du
1264
es qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits.
Je
leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces f
1265
aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent
me
dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu m
1266
ticisme quant à la valeur réformatrice des idées,
m’
accuser de faire une critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à
1267
e faire une critique dangereuse. 3° que néanmoins
je
crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découvert
1268
tolérante qui se livrent à ces excès de langage,
je
les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du p
1269
langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où
je
traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question
1270
la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour
moi
qui cherche à démêler la vérité sans égard aux dérangements, même vio
1271
violents, que cela ne manque jamais de provoquer,
je
me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droi
1272
lents, que cela ne manque jamais de provoquer, je
me
propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ;
1273
classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi
je
considérerai d’abord l’instruction publique dans ses réalisations act
1274
lles, puis au terme de ce recensement lamentable,
je
poserai la question de savoir si tant de laideurs et d’outrages au bo
1275
par le but final de notre institution-tabou. 1.
Je
ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
1276
1.
Mes
prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs
1277
pissier par le prix du mètre courant. Encore que
je
prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je
1278
ents trop au sérieux pour faire ici du sentiment,
je
suis sensible au charme de cette fantaisie. Mais ce qui fait très bie
1279
grandes personnes ? Mais l’enfance est ailleurs.
Je
revois ce fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile m
1280
dissonance douloureuse2. Deux angoisses dominent
mon
enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce ma
1281
règle méchante, ce souci qui renaît chaque jour,
je
pense que tout cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans,
1282
tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans,
j’
avais appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée. L’année suivant
1283
chette, avec une sœur aînée. L’année suivante, on
me
mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréabl
1284
e c’est la loi. La première classe fut agréable :
j’
alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusemen
1285
fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvant à
je
ne sais quoi, j’étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en t
1286
’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi,
j’
étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en tabliers bleus qui
1287
urs bâtons en rêvant à leur manière. Un jour cela
m’
ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après sy
1288
eur manière. Un jour cela m’ennuya. Sachant lire,
je
ne pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements de
1289
déchiffraient les premières phrases exemplaires. (
J’
aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait
1290
lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait
mon
tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproche
1291
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour,
je
savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproches acides,
1292
n tour, je savais rarement où l’on en était. Cela
m’
attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il
1293
bles exemples cet axiome qui devint la formule de
mes
premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait su
1294
douleurs morales. Après six ans de ce régime, on
m’
avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléi
1295
régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que
je
ne montrasse plus aucune velléité d’originalité. Mais pour être rentr
1296
e velléité d’originalité. Mais pour être rentrée,
ma
colère n’en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, ver
1297
ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’école
me
rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse
1298
une importance.) Quant à l’autre « évidence » que
je
viens de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterm
1299
ant à l’autre « évidence » que je viens de citer,
je
découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre mal
1300
ntient la cause déterminante de notre malaise. Il
me
fallut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais cette
1301
notre malaise. Il me fallut un certain temps pour
m’
habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’en servir cra
1302
ut un certain temps pour m’habituer à cette idée.
Je
tenais cette clef et n’osais m’en servir craignant peut-être des déco
1303
uer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais
m’
en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop d
1304
eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin
j’
ouvris, c’est-à-dire que je me posai la question : est-ce vrai que tou
1305
itudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que
je
me posai la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être é
1306
des apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je
me
posai la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égau
1307
onquêtes. C’était découvrir notre asservissement.
Je
songeai aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçai
1308
de la relativité des décrets humains. Le prix de
mes
souffrances était donc ce conformisme indispensable aux « immortels p
1309
rmisme indispensable aux « immortels principes ».
Je
n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour
1310
suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour
je
compris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut ma seconde déco
1311
ris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut
ma
seconde découverte : ce monde simplifié, si évident, si parfaitement
1312
exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais
moi
, j’avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois mat
1313
érait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi,
j’
avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matérie
1314
délivré, en supporter longtemps encore l’action.
Je
n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit
1315
vissement de l’esprit et ces mythes stériles, que
je
les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les
1316
ythes stériles, que je les rendis responsables de
ma
perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.
1317
2. Description du monstre Le service militaire
me
permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai auss
1318
ermit de retrouver quelques-unes de ces réalités.
J’
y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’anciens camarades d’école
1319
ernité véritable. Mais c’est en caserne aussi que
je
devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et po
1320
ne question d’âge, non d’expérience vécue. Ce que
je
vais dire est sans doute injuste et faux dans un très grand nombre de
1321
ans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai-
je
envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par
1322
ensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais
je
n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me p
1323
aysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de
m’
échauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’o
1324
plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on
me
poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
1325
chauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu,
je
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs ga
1326
ilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que
je
m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causen
1327
ment. Si l’on me poussait un peu, je crois que je
m’
oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent a
1328
i signent des manifestes en mauvais français — et
je
ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au vill
1329
que c’est là son affaire : Monsieur en un mot est
M’
sieu l’Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profon
1330
s posthumes : l’artiste photographe et le régent.
J’
ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédago
1331
s témoigne de la même maladresse professionnelle.
J’
en connaissais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de
1332
e dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : «
J’
ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vo
1333
ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de
ma
section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l
1334
bien su mater les quarante hommes de ma section,
je
saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’enseignemen
1335
les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.)
Je
n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils
1336
que certaines autres maladies dites « sociales ».
Je
reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décr
1337
reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant
je
ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
1338
rridors et les habits des écoliers empeste encore
mes
souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’éta
1339
3. Anatomie du monstre Ayant épanché un peu de
ma
rancune, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ai entrepris d
1340
cune, à seule fin de montrer pour quelles raisons
j’
ai entrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera
1341
epris de combattre l’instruction publique — on ne
me
contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personnell
1342
on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles
me
sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignag
1343
n témoignage, ni plus ni moins — il est temps que
je
fasse passer un petit examen aux principes de cette institution passi
1344
ssée : mais celles-là sont les plus vives. Enfin,
je
tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que
1345
plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici
je
ne cherche point l’équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pr
1346
s plus que vous qui défendez de parti pris ce que
j’
attaque. L’esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujo
1347
pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or
je
ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bour
1348
ordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise.
Je
tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la
1349
que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud.
Je
me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruct
1350
déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je
me
bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction
1351
justement par cette psychologie de l’enfant dont
je
disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qu
1352
s de deux que de mille, dit un sage oriental dont
j’
ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut
1353
ut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail.
Je
doute qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on d
1354
ue notre peuple met dans cette expression !) Pour
moi
ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est un
1355
uple met dans cette expression !) Pour moi ce que
je
retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est une grosse v
1356
n !) Pour moi ce que je retire de plus évident de
mon
expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eût pa
1357
scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens
m’
eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible ta
1358
e possible tant que la loi est la même pour tous.
Je
ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré
1359
ie. Il y a là une préméditation de médiocrité que
je
ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a
1360
là une préméditation de médiocrité que je ne puis
m’
empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons poi
1361
es bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-
moi
tous ces petits phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés, les
1362
’avantage des gens en place, vieille histoire. On
m’
objectera sans doute quelques « brillantes carrières » fournies par d’
1363
ces brillants météores ne troublent pas beaucoup
ma
superstition, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasi
1364
tion publique qu’ils ont subies. Le dilemme
J’
ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident q
1365
cident qu’accidentellement avec ceux du bon sens.
Je
m’en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serai
1366
ent qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je
m’
en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serait f
1367
entendu, tout cela a été dit. (Un peu autrement,
j’
en conviens.) On n’a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travai
1368
peu autrement, j’en conviens.) On n’a pas attendu
ma
colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il suffit pour s’e
1369
e mettra à marcher dans le couloir en s’écriant :
je
marche, ou : j’arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je si
1370
er dans le couloir en s’écriant : je marche, ou :
j’
arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je siège ; un troisiè
1371
’arpente ; un autre restera assis, en affirmant :
je
siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au
1372
je siège ; un troisième lèvera la main, et dira :
je
lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à crai
1373
la faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant :
je
sors ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à
1374
graves, parce qu’elles sont comiques précisément.
Je
ferai à l’école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend
1375
de réaction vive de la part des écoliers. Enfin,
je
n’aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’
1376
n enfant de 6 ans… Mettez ensemble trois enfants…
Je
reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifi
1377
ssés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen.
Moi
je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereu
1378
. Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi
je
voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux.
1379
Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins
je
soupçonne dans tous ces mouvements des possibilités lointaines qui so
1380
vements des possibilités lointaines qui sont pour
me
plaire ; un grignotement du système officiel qui pourrait bien un jou
1381
qui pourrait bien un jour l’atteindre au cœur, et
je
vois tout ce que cela entraînerait, dans une ruine d’où renaîtrait pe
1382
s une ruine d’où renaîtrait peut-être l’humanité…
Je
songe à un enseignement sans école. Je songe au maître antique, dont
1383
’humanité… Je songe à un enseignement sans école.
Je
songe au maître antique, dont toute la personne était un enseignement
1384
ui sait ?… En attendant, puisqu’il faut attendre,
je
salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’
1385
es joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute
mon
amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plus libremen
1386
de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Cela
me
permet de leur faire remarquer d’autant plus librement qu’ils trahiss
1387
rie de petits démocrates conscients et organisés.
Je
crains que ce malentendu ne soit décidément trop gros pour échapper p
1388
plus longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles.
Je
le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malen
1389
MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-
je
; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant es
1390
à cependant une possibilité pratique d’en sortir,
je
ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de r
1391
tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que
je
donne à ce mot.
1392
5. La machine à fabriquer des électeurs
Je
crois à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi
1393
à l’absurdité de fait de l’instruction publique.
Je
crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu
1394
Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
Je
demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et se perpétu
1395
ut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on
m’
explique pourquoi il triomphe et se perpétue ; de quel droit il nous é
1396
qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque.
J’
entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans
1397
y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne
me
conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets o
1398
s idéologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que
j’
ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à
1399
s, cette idée que j’ai l’honneur de partager avec
mes
adversaires se trouve correspondre à des faits patents et simples ; i
1400
tion publique est pratiquement irréalisable. Ici,
je
demanderai poliment au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la
1401
e vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon
je
me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tel
1402
ouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je
me
verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tellem
1403
e satisfaction sordide et mal dissimulée. Certes,
je
ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu
1404
eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et
je
les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été
1405
u’ils faisaient — et je les excuse pour autant10.
Je
dis simplement ceci : leur œuvre n’a été possible que parce qu’elle é
1406
utés pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-
je
, la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’
1407
on non moins flagrante, dans ses suites normales.
Je
n’en veux pas d’autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notr
1408
s (si possible radicaux, en tout cas démocrates).
Je
me souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œ
1409
si possible radicaux, en tout cas démocrates). Je
me
souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œuvr
1410
ter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant
je
vous demande un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner l’instru
1411
Tout se tient, comme vous dites, sans doute pour
m’
ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de
1412
our m’ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit.
J’
aime les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette
1413
’aime les tremblements de terre, vous tombez mal.
J’
appartiens à cette espèce de gens qui font confiance à leur sensibilit
1414
qu’aux idées des autres. Or, c’est une révolte de
ma
sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent
1415
tres. Or, c’est une révolte de ma sensibilité qui
me
dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après
1416
e de ma sensibilité qui me dresse contre l’École.
Mes
arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les dé
1417
qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous,
ma
rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définiti
1418
iez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime.
Je
lui donne raison par définition. Après tout, peu m’importent les idéo
1419
lui donne raison par définition. Après tout, peu
m’
importent les idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École
1420
peu m’importent les idéologies politiques, et peu
m’
importerait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie
1421
oit une machine à fabriquer de la démocratie — si
je
ne sentais menacées dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles
1422
dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles
je
tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement d
1423
valeurs d’âme auxquelles je tiens plus qu’à tout.
Ma
haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je vie
1424
émocratie est l’aboutissement de l’évolution dont
je
viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinue
1425
es douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir
me
dire ça chez moi, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la
1426
eunes bourgeois. Essayer de venir me dire ça chez
moi
, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je part
1427
sayer de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas,
mes
agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écœura
1428
s, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où
je
participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’
1429
participais de l’écœurant optimisme bourgeois que
je
m’accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquem
1430
ticipais de l’écœurant optimisme bourgeois que je
m’
accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquement
1431
ièges, ils comprendront le sens des images.) 9.
J’
emploie ce mot au sens fort, au sens enivrant, 100 %. Beaucoup de gens
1432
opposés coïncident en tant de points — voilà qui
m’
inquiéterait, à votre place.
1433
nous promet de tous côtés de belles catastrophes.
Je
suis de ceux qui s’en réjouissent mauvaisement. (« C’est bien fait. C
1434
rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent.
Je
ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais j
1435
antitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas
me
poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’adresse aux
1436
er ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais
je
m’adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières », et q
1437
ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je
m’
adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières », et qui
1438
s ça, à la famille, « cette cellule sociale ». Et
je
les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci
1439
». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez
mon
extrême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille étai
1440
mon extrême modération. Ceci fait, constatez avec
moi
que la famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le coll
1441
Il est vrai qu’elle est anormalement insatiable…
Je
crois qu’elle a surtout besoin d’une purge violente qui chasse ce ver
1442
sse ce ver solitaire du matérialisme. Et quand on
m’
aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à o
1443
que exigent une organisation à outrance du monde,
je
répondrai que dans la mesure où cette exigence est satisfaite naît un
1444
ardisation de toutes les mesquineries naturelles (
je
ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivé
1445
le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce
je
ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux,
1446
s vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ?
J’
en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre
1447
éreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant
j’
ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne
1448
-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur que
mon
progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dan
1449
ri duquel on distille du radicalisme intégral. On
me
fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialiste
1450
cialistes : voilà qui ne change pas le rendement,
j’
imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès
1451
pprend les questions aussi bien que les réponses.
J’
avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la c
1452
uestions aussi bien que les réponses. J’avoue que
je
trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il
1453
us allez feindre de trouver bien bonne celle-ci :
je
prétends que l’instruction publique est une puissance conservatrice.
1454
ratie peut se conserver des siècles encore… Or si
je
dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste
1455
ser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier.
Je
distingue dans cette opération deux temps : d’abord critiquer ce qui
1456
l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer.
Je
ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle dans cet amou
1457
de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis
m’
empêcher de voir une intention providentielle dans cet amour de la des
1458
it est la jalousie rancie armée de pédantisme, et
je
ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habit
1459
rité des électeurs les considèrent comme tels. Et
je
ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la p
1460
es électeurs les considèrent comme tels. Et je ne
me
tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la plupart
1461
els. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
m’
aura fait remarquer que la plupart des intellectuels sont convertis de
1462
pposons tout cela fait. Respirons. Mais déjà vous
m’
attendez à ce tournant et vous me sommez de dire comment, maintenant,
1463
. Mais déjà vous m’attendez à ce tournant et vous
me
sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer
1464
nt et vous me sommez de dire comment, maintenant,
je
vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. A
1465
us me sommez de dire comment, maintenant, je vais
m’
y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je
1466
éparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-
je
la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui rés
1467
é non moins énorme d’esquisser ici la réponse que
je
lui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de
1468
complète, à un degré supérieur d’inconscience, si
je
puis dire. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison.
1469
sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison.
Je
crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès ve
1470
tout ce qui entrave cet avènement. C’est pourquoi
je
réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On
1471
de la congrégation radicale des instituteurs. On
me
demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne prop
1472
ale des instituteurs. On me demande encore ce que
je
mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis,
1473
ncore ce que je mettrais à la place. Et parce que
je
ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’aurais v
1474
e rien de bien précis, on triomphe grossièrement.
J’
aurais voulu vous voir demander à un sujet de Louis XIV ce qu’il conce
1475
. Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que
j’
ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassure
1476
faire rigoler, si cela peut vous rassurer quant à
ma
santé mentale.) La question est de savoir si nous serons des hommes d
1477
gré les mots14, des anarchistes et des utopistes.
J’
appelle anarchiste, tout ce qui est violemment et intégralement humain
1478
espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que
j’
aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou un amour) et qui
1479
(ou un amour) et qui s’y consacre. (Mais alors !…
Je
vois à votre mine stupidement rassurée que vous vous dites : c’est to
1480
rassurée que vous vous dites : c’est tout à fait
moi
! — Détrompez-vous. Vous ne savez pas ce que c’est que libre, ou cons
1481
Que faire, diront les gens de bonne volonté dont
mon
imagination romantique suppose l’existence. Que faire ? Voir et pense
1482
les effets suivront infailliblement. Par exemple,
je
vous demande une fois pour toutes si vous tenez, oui ou non, M. W. Ro
1483
de moins qu’une rédemption du journalisme, ce que
je
propose-là. Et c’est ainsi qu’on peut imaginer sans trop d’invraisemb
1484
trop d’invraisemblance de petites réformes. Mais
j’
en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possi
1485
ais j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu :
je
ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une rév
1486
és. On croit devoir se défendre : on se moque. On
me
dit : vous ne voyez tout de même pas une classe de gamins répétant la
1487
nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes,
je
vous jure que je m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yog
1488
a. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que
je
m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes
1489
Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je
m’
en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les
1490
r une grande intensité avec un minimum de moyens.
J’
en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire
1491
yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit.
Je
sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires. Tout comm
1492
n l’applique généralement. Ces gens-là diront que
je
veux militariser l’enseignement ou transformer les collèges en couven
1493
stent cachées aux agités ; la nature par exemple.
Je
ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on n
1494
e le temps de la regarder. De faire connaissance.
Je
ne sais s’il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à poss
1495
avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant,
je
ne crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière.
1496
sse quelque chose comme l’instruction privée : et
moi
je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déj
1497
quelque chose comme l’instruction privée : et moi
je
la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà r
1498
e de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse.
Je
préciserai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens
1499
mbre du conseil de paroisse. Je préciserai donc :
je
tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les institut
1500
rai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais
je
ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font b
1501
ste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de
mes
attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le genre d
1502
pparaissent ici que pour impressionner le public.
Je
n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en e
1503
promet des confitures à l’enfant, s’il est sage.
Moi
je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1504
met des confitures à l’enfant, s’il est sage. Moi
je
m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1505
des confitures à l’enfant, s’il est sage. Moi je
m’
en moque. Je n’aime que la liberté.
1506
res à l’enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque.
Je
n’aime que la liberté.
1507
sez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi
je
me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux pe
1508
pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je
me
bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petit
1509
tion publique deux petits livres1 excellents dont
je
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. A
1510
gnement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
Mon
dessein est assez différent, moins philosophique et point du tout tec
1511
, moins philosophique et point du tout technique.
J’
apporte un témoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marqu
1512
émoignage personnel, une réaction de tempérament.
Je
marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liais
1513
marque d’autre part la nécessité de tout cela qui
me
blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste
1514
fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste
ma
liberté et sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je
1515
doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément,
je
ressemble. Nous vivons sous un régime radical à sécrétion socialiste,
1516
e à elle prolonge abusivement sa terne existence.
Je
l’ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment tou
1517
e pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
Je
serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce pet
1518
nt toutes les haines. Je serai méchant, parce que
j’
en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à ri
1519
— Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel
je
compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le
1520
tient des idées qui ne rapportent rien. En effet,
je
ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne.
1521
ffet, je ne représente aucun parti, aucune firme.
Je
ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma
1522
parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne.
Je
ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas l
1523
ersonne. Je ne prétends pas même parler au nom de
ma
génération, ne m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût
1524
tends pas même parler au nom de ma génération, ne
m’
étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur,
1525
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur,
me
donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droite comme à ga
1526
igueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant
je
sais qu’à droite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le p
1527
ond miraculeusement, gémir n’est pas un argument.
Je
demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans condition
1528
s un argument. Je demande le droit de démolir. Et
me
l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer u
1529
molir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions.
Mon
rôle n’est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me conten
1530
est pas de proposer une nouvelle forme politique.
Je
me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe
1531
pas de proposer une nouvelle forme politique. Je
me
contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe es
1532
rme politique. Je me contente de vitupérer ce que
je
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
1533
s capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais
j’
aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et org
1534
se ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que
je
dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
1535
2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car
j’
ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en dou
1536
signalent bien souvent nos tolérants par inertie,
je
ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je
1537
uvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais
je
m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les class
1538
nt nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je
m’
attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer
1539
m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et
je
tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler
1540
à les classer par avance en deux catégories dont
je
vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me r
1541
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de
me
resservir ces arguments, bien que dûment prévus et réduits à néant ic
1542
réduits à néant ici même ; mais — gain de temps —
je
n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du
1543
es qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits.
Je
leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces f
1544
aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent
me
dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu m
1545
ticisme quant à la valeur réformatrice des idées,
m’
accuser de faire une critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à
1546
faire une critique dangereuse ; 3° que néanmoins
je
crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découvert
1547
tolérante qui se livrent à ces excès de langage.
Je
les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du p
1548
langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où
je
traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question
1549
la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour
moi
qui cherche à démêler la vérité sans égards aux dérangements, même vi
1550
violents, que cela ne manque jamais de provoquer,
je
me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droi
1551
lents, que cela ne manque jamais de provoquer, je
me
propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ;
1552
classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi
je
considérerai d’abord l’instruction publique dans ses réalisations act
1553
lles, puis au terme de ce recensement lamentable,
je
poserai la question de savoir si tant de laideurs et d’outrages au bo
1554
r le but final de notre institution-tabou. 1.
Je
ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
1555
1.
Mes
prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs
1556
pissier par le prix du mètre courant. Encore que
je
prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je
1557
ents trop au sérieux pour faire ici du sentiment,
je
suis sensible au charme de cette fantaisie. Mais ce qui fait très bie
1558
grandes personnes ? Mais l’enfance est ailleurs.
Je
revois ce fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile m
1559
dissonance douloureuse. 3 Deux angoisses dominent
mon
enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce ma
1560
règle méchante, ce souci qui renaît chaque jour,
je
pense que tout cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans,
1561
tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans,
j’
avais appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’année suivante,
1562
À 5 ans, j’avais appris à lire, en cachette avec
ma
sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la
1563
cachette avec ma sœur aînée. L’année suivante, on
me
mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréabl
1564
e c’est la loi. La première classe fut agréable :
j’
alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusemen
1565
fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvant à
je
ne sais quoi, j’étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en t
1566
’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi,
j’
étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en tabliers bleus qui
1567
urs bâtons en rêvant à leur manière. Un jour cela
m’
ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après sy
1568
eur manière. Un jour cela m’ennuya. Sachant lire,
je
ne pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements de
1569
déchiffraient les premières phrases exemplaires. (
J’
aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait
1570
lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait
mon
tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproche
1571
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour,
je
savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproches acides,
1572
n tour, je savais rarement où l’on en était. Cela
m’
attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il
1573
bles exemples cet axiome qui devint la formule de
mes
premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait su
1574
douleurs morales. Après six ans de ce régime, on
m’
avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléi
1575
régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que
je
ne montrasse plus aucune velléité d’originalité. Mais pour être rent
1576
velléité d’originalité. Mais pour être rentrée,
ma
colère n’en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, ver
1577
ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’école
me
rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse
1578
une importance.) Quant à l’autre « évidence » que
je
viens de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterm
1579
ant à l’autre « évidence » que je viens de citer,
je
découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre mal
1580
ntient la cause déterminante de notre malaise. Il
me
fallut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais cette
1581
notre malaise. Il me fallut un certain temps pour
m’
habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’en servir cra
1582
ut un certain temps pour m’habituer à cette idée.
Je
tenais cette clef et n’osais m’en servir craignant peut-être des déco
1583
uer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais
m’
en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop d
1584
eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin
j’
ouvris, c’est-à-dire que je me posais la question : est-ce vrai que to
1585
itudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que
je
me posais la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être
1586
des apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je
me
posais la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être éga
1587
onquêtes. C’était découvrir notre asservissement.
Je
songeai aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçai
1588
de la relativité des décrets humains. Le prix de
mes
souffrances était donc ce conformisme indispensable aux « immortels p
1589
rmisme indispensable aux « immortels principes ».
Je
n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour
1590
suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour
je
compris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut ma seconde déco
1591
ris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut
ma
seconde découverte : ce monde simplifié, si évident, si parfaitement
1592
exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais
moi
, j’avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois mat
1593
érait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi,
j’
avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matérie
1594
délivré, en supporter longtemps encore l’action.
Je
n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit
1595
vissement de l’esprit et ces mythes stériles, que
je
les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les
1596
ythes stériles, que je les rendis responsables de
ma
perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.
1597
2. Description du monstre Le service militaire
me
permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai auss
1598
ermit de retrouver quelques-unes de ces réalités.
J’
y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’anciens camarades d’école
1599
ernité véritable. Mais c’est en caserne aussi que
je
devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et po
1600
ne question d’âge, non d’expérience vécue. Ce que
je
vais dire est sans doute injuste et faux dans un très grand nombre de
1601
ans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai-
je
envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par
1602
sensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais
je
n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me p
1603
paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de
m’
échauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’o
1604
plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on
me
poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
1605
chauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu,
je
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs ga
1606
ilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que
je
m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causen
1607
ment. Si l’on me poussait un peu, je crois que je
m’
oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent a
1608
i signent des manifestes en mauvais français — et
je
ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fa
1609
peine à d’excellents garçons. Revenons au civil.
J’
ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédago
1610
s témoigne de la même maladresse professionnelle.
J’
en connais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10
1611
e dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : «
J’
ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vo
1612
ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de
ma
section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l
1613
bien su mater les quarante hommes de ma section,
je
saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’enseignemen
1614
les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.)
Je
n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils
1615
que certaines autres maladies dites « sociales ».
Je
reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décr
1616
reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant
je
ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
1617
rridors et les habits des écoliers empeste encore
mes
souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’éta
1618
3. Anatomie du monstre Ayant épanché un peu de
ma
rancune, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ai entrepris d
1619
cune, à seule fin de montrer pour quelles raisons
j’
ai entrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera
1620
epris de combattre l’instruction publique — on ne
me
contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personnell
1621
on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles
me
sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignag
1622
n témoignage, ni plus ni moins — il est temps que
je
fasse passer un petit examen aux principes de cette institution passi
1623
téressée : mais celle-là est la plus vive. Enfin,
je
tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que
1624
a plus vive. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici
je
ne cherche point l’équité. Pas plus que vous, qui défendez de parti p
1625
plus que vous, qui défendez de parti pris ce que
j’
attaque. L’esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujo
1626
pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or
je
ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bour
1627
ordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise.
Je
tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la
1628
que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud.
Je
me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruct
1629
déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je
me
bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction
1630
justement par cette psychologie de l’enfant dont
je
disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qu
1631
s de deux que de mille, dit un sage oriental dont
j’
ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut
1632
ut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail.
Je
doute qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on d
1633
ue notre peuple met dans cette expression !) Pour
moi
, ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est u
1634
ple met dans cette expression !) Pour moi, ce que
je
retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est une grosse v
1635
!) Pour moi, ce que je retire de plus évident de
mon
expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eût pa
1636
scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens
m’
eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible ta
1637
e possible tant que la loi est la même pour tous.
Je
ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré
1638
ie. Il y a là une préméditation de médiocrité que
je
ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a
1639
là une préméditation de médiocrité que je ne puis
m’
empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons po
1640
es bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-
moi
tous ces petits phonographes… ographes… graphes… graphes… Enfoncés, l
1641
’avantage des gens en place, vieille histoire. On
m’
objectera sans doute quelques « brillantes carrières » fournies par d’
1642
ces brillants météores ne troublent pas beaucoup
ma
superstition, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasi
1643
publique qu’ils ont subies. 3.h. Le dilemme
J’
ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident q
1644
cident qu’accidentellement avec ceux du bon sens.
Je
m’en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serai
1645
ent qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je
m’
en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serait f
1646
entendu, tout cela a été dit. (Un peu autrement,
j’
en conviens). On n’a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travai
1647
peu autrement, j’en conviens). On n’a pas attendu
ma
colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il suffit pour s’e
1648
e mettra à marcher dans le couloir en s’écriant :
je
marche, ou : j’arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je si
1649
er dans le couloir en s’écriant : je marche, ou :
j’
arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je siège ; un troisiè
1650
’arpente ; un autre restera assis, en affirmant :
je
siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au
1651
je siège ; un troisième lèvera la main, et dira :
je
lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à crai
1652
la faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant :
je
sors ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à
1653
graves, parce qu’elles sont comiques précisément.
Je
ferai à l’école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend
1654
de réaction vive de la part des écoliers. Enfin,
je
n’aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’
1655
n enfant de 6 ans… Mettez ensemble trois enfants…
Je
reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifi
1656
ssés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen.
Moi
, je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangere
1657
Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi,
je
voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux.
1658
Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins,
je
soupçonne dans tous ces mouvements des possibilités lointaines qui so
1659
vements des possibilités lointaines qui sont pour
me
plaire ; un grignotement du système officiel qui pourrait bien un jou
1660
qui pourrait bien un jour l’atteindre au cœur, et
je
vois tout ce que cela entraînerait, dans une ruine d’où renaîtrait pe
1661
s une ruine d’où renaîtrait peut-être l’humanité…
Je
songe à un enseignement sans école. Je songe au maître antique, dont
1662
’humanité… Je songe à un enseignement sans école.
Je
songe au maître antique, dont toute la personne était un enseignement
1663
ui sait ?… En attendant, puisqu’il faut attendre,
je
salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’
1664
les classes sont de vraies foires ; ils ont toute
mon
amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plus libremen
1665
de vraies foires ; ils ont toute mon amitié. Cela
me
permet de leur faire remarquer d’autant plus librement qu’ils trahiss
1666
rie de petits démocrates conscients et organisés.
Je
crains que ce malentendu ne soit décidément trop gros pour échapper p
1667
plus longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles.
Je
le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malen
1668
MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-
je
; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant es
1669
à cependant une possibilité pratique d’en sortir,
je
ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de r
1670
tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que
je
donne à ce mot, p. 57.
1671
5. La machine à fabriquer des électeurs
Je
crois à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi
1672
à l’absurdité de fait de l’instruction publique.
Je
crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu
1673
Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
Je
demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et se perpétu
1674
ut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on
m’
explique pourquoi il triomphe et se perpétue ; de quel droit il nous é
1675
qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque.
J’
entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans
1676
y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne
me
conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets o
1677
s idéologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que
j’
ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à
1678
s, cette idée que j’ai l’honneur de partager avec
mes
adversaires se trouve correspondre à des faits patents et simples ; i
1679
tion publique est pratiquement irréalisable. Ici,
je
demanderai poliment au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la
1680
e vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon
je
me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tel
1681
ouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je
me
verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tellem
1682
ne satisfaction sordide et mal dissimulée. Certes
je
ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient ple
1683
ent pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et
je
les excuse pour autant 10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a ét
1684
’ils faisaient — et je les excuse pour autant 10.
Je
dis simplement ceci : leur œuvre n’a été possible que parce qu’elle é
1685
utés pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-
je
, la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’a
1686
on non moins flagrante, dans ses suites normales.
Je
n’en veux pas d’autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notr
1687
s (si possible radicaux, en tout cas démocrates).
Je
me souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œ
1688
si possible radicaux, en tout cas démocrates). Je
me
souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œuvr
1689
ter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant
je
vous demande un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner l’instru
1690
Tout se tient, comme vous dites, sans doute pour
m’
ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime bien les tremblemen
1691
our m’ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit.
J’
aime bien les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à c
1692
bien les tremblements de terre, vous tombez mal.
J’
appartiens à cette espèce de gens qui font confiance à leur sensibilit
1693
qu’aux idées des autres. Or, c’est une révolte de
ma
sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent
1694
tres. Or, c’est une révolte de ma sensibilité qui
me
dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après
1695
e de ma sensibilité qui me dresse contre l’École.
Mes
arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les dé
1696
qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous,
ma
rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définiti
1697
iez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime.
Je
lui donne raison par définition. Après tout, peu m’importent les idéo
1698
lui donne raison par définition. Après tout, peu
m’
importent les idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École
1699
peu m’importent les idéologies politiques, et peu
m’
importerait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie
1700
oit une machine à fabriquer de la démocratie — si
je
ne sentais menacées dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles
1701
dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles
je
tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement d
1702
valeurs d’âme auxquelles je tiens plus qu’à tout.
Ma
haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je vie
1703
émocratie est l’aboutissement de l’évolution dont
je
viens de décrire la marche nécessaire 11. On ne manquera pas d’insinu
1704
tes douleurs de jeune bourgeois. Essayez de venir
me
dire ça chez moi, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la
1705
jeune bourgeois. Essayez de venir me dire ça chez
moi
, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je part
1706
sayez de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas,
mes
agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écoeur
1707
s, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où
je
participais de l’écoeurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d
1708
articipais de l’écoeurant optimisme bourgeois que
je
m’accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquem
1709
icipais de l’écoeurant optimisme bourgeois que je
m’
accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquement
1710
ièges, ils comprendront le sens des images.) 9.
J’
emploie ce mot au sens fort, au sens enivrant, 100 %. Beaucoup de gens
1711
opposés coïncident en tant de points — voilà qui
m’
inquiéterait, à votre place.
1712
nous promet de tous côtés de belles catastrophes.
Je
suis de ceux qui s’en réjouissent mauvaisement. (« C’est bien fait. C
1713
rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent.
Je
ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais j
1714
antitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas
me
poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’adresse aux
1715
er ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais
je
m’adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières » et qu
1716
ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je
m’
adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières » et qui p
1717
s ça, à la famille, « cette cellule sociale ». Et
je
les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci
1718
». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez
mon
extrême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille étai
1719
mon extrême modération. Ceci fait, constatez avec
moi
que la famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le coll
1720
Il est vrai qu’elle est anormalement insatiable…
Je
crois qu’elle a surtout besoin d’une purge violente qui chasse ce ver
1721
sse ce ver solitaire du matérialisme. Et quand on
m’
aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à o
1722
que exigent une organisation à outrance du monde,
je
répondrai que dans la mesure où cette exigence est satisfaite naît un
1723
ardisation de toutes les mesquineries naturelles (
je
ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivé
1724
le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce
je
ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux,
1725
, vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ?
J’
en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre
1726
éreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant
j’
ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne
1727
-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur que
mon
progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dan
1728
ri duquel on distille du radicalisme intégral. On
me
fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialiste
1729
ervateurs : voilà qui ne change pas le rendement,
j’
imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès
1730
pprend les questions aussi bien que les réponses.
J’
avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la c
1731
uestions aussi bien que les réponses. J’avoue que
je
trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il
1732
us allez feindre de trouver bien bonne celle-ci :
je
prétends que l’instruction publique est une puissance conservatrice.
1733
ratie peut se conserver des siècles encore… Or si
je
dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste
1734
ser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier.
Je
distingue dans cette opération deux temps : d’abord critiquer ce qui
1735
humanité de demain ne peut manquer de s’inventer.
Je
ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle dans cet amou
1736
demain ne peut manquer de s’inventer. Je ne puis
m’
empêcher de voir une intention providentielle dans cet amour de la des
1737
it est la jalousie rancie armée de pédantisme, et
je
ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habit
1738
rité des électeurs les considèrent comme tels. Et
je
ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la p
1739
es électeurs les considèrent comme tels. Et je ne
me
tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la plupart
1740
els. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
m’
aura fait remarquer que la plupart des intellectuels se sont convertis
1741
pposons tout cela fait. Respirons. Mais déjà vous
m’
attendez à ce tournant et vous me sommez de dire comment, maintenant,
1742
. Mais déjà vous m’attendez à ce tournant et vous
me
sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer
1743
nt et vous me sommez de dire comment, maintenant,
je
vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. A
1744
us me sommez de dire comment, maintenant, je vais
m’
y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je
1745
éparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-
je
la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui rés
1746
é non moins énorme d’esquisser ici la réponse que
je
lui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de
1747
complète, à un degré supérieur d’inconscience, si
je
puis dire. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison.
1748
sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison.
Je
crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès ve
1749
tout ce qui entrave cet avènement. C’est pourquoi
je
réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On
1750
de la congrégation radicale des instituteurs. On
me
demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne prop
1751
ale des instituteurs. On me demande encore ce que
je
mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis,
1752
ncore ce que je mettrais à la place. Et parce que
je
ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’aurais v
1753
e rien de bien précis, on triomphe grossièrement.
J’
aurais voulu vous voir demander à un sujet de Louis XIV ce qu’il conce
1754
. Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que
j’
ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassure
1755
faire rigoler, si cela peut vous rassurer quant à
ma
santé morale.) La question est de savoir si nous serons des hommes de
1756
ré les mots 14, des anarchistes et des utopistes.
J’
appelle anarchiste, tout ce qui est violemment et intégralement humain
1757
espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que
j’
aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou un amour) et qui
1758
(ou un amour) et qui s’y consacre. (Mais alors !…
Je
vois à votre mine stupidement rassurée que vous vous dites : c’est to
1759
rassurée que vous vous dites : c’est tout à fait
moi
! — Détrompez-vous. Vous ne savez pas ce que c’est que libre ou consa
1760
Que faire, diront les gens de bonne volonté dont
mon
imagination romantique suppose l’existence. Que faire ? Voir et pense
1761
les effets suivront infailliblement. Par exemple,
je
vous demande une fois pour toutes si vous tenez, oui ou non, M. W. Ro
1762
de moins qu’une rédemption du journalisme, ce que
je
propose-là. Et c’est ainsi qu’on peut imaginer sans trop d’invraisemb
1763
trop d’invraisemblance de petites réformes. Mais
j’
en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possi
1764
ais j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu :
je
ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une rév
1765
és. On croit devoir se défendre : on se moque. On
me
dit : vous ne voyez tout de même pas une classe de gamins répétant la
1766
nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes,
je
vous jure que je m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yog
1767
a. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que
je
m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes
1768
Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je
m’
en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les
1769
r une grande intensité avec un minimum de moyens.
J’
en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire
1770
yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit.
Je
sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires. Tout comm
1771
n l’applique généralement. Ces gens-là diront que
je
veux militariser l’enseignement ou transformer les collèges en couven
1772
stent cachées aux agités ; la nature par exemple.
Je
ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on n
1773
e le temps de la regarder. De faire connaissance.
Je
ne sais s’il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à poss
1774
avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant,
je
ne crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière.
1775
sse quelque chose comme l’instruction privée : et
moi
je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déj
1776
quelque chose comme l’instruction privée : et moi
je
la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà r
1777
e de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse.
Je
préciserai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens
1778
mbre du conseil de paroisse. Je préciserai donc :
je
tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les institut
1779
rai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais
je
ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font b
1780
ste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de
mes
attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le genre d
1781
pparaissent ici que pour impressionner le public.
Je
n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en e
1782
n promet des confitures à l’enfant s’il est sage.
Moi
je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1783
omet des confitures à l’enfant s’il est sage. Moi
je
m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1784
t des confitures à l’enfant s’il est sage. Moi je
m’
en moque. Je n’aime que la liberté.
1785
ures à l’enfant s’il est sage. Moi je m’en moque.
Je
n’aime que la liberté.
1786
Henri Michaux,
Mes
propriétés (mars 1930)bd Si vous avez la curiosité, mieux, le goût
1787
r que l’esprit pénètre dans la poésie, vous lirez
Mes
Propriétés. Il se peut que vous les trouviez médiocrement riantes, au
1788
émouvante bizarrerie (Mort d’un Page). Cependant
je
préfère ses proses : il y a ici plus qu’une manière et qu’un ton, il
1789
mps — depuis les Trivia de Logan Pearsall Smith —
je
n’avais pas lu de livre où s’exprimât avec une pareille sécurité dans
1790
e » et de plus quotidien. bd. « Henri Michaux :
Mes
propriétés (O. Fourcade, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue
1791
matin plein de mouettes — « Un beau bruit d’ailes
me
fait un ciel » — la vaporeuse beauté du lac de Neuchâtel. Mlle Kikou
1792
e genre de livres — ils se multiplient — vient, à
mon
sens, de quelque chose qu’ils expriment sans doute inconsciemment et
1793
coupole errante des prières à dieux perdus. II
Je
ne sais pas où tu m’entends mais ces hauts murs d’ombre et de vent au
1794
rières à dieux perdus. II Je ne sais pas où tu
m’
entends mais ces hauts murs d’ombre et de vent autour du monde où nous
1795
us qui rôdent à la recherche d’un corps faible.
Je
ne sais pas où tu m’attends mais je sais comment tu pleurais. Au carr
1796
cherche d’un corps faible. Je ne sais pas où tu
m’
attends mais je sais comment tu pleurais. Au carrefour des cris perdus
1797
rps faible. Je ne sais pas où tu m’attends mais
je
sais comment tu pleurais. Au carrefour des cris perdus j’écoute encor
1798
comment tu pleurais. Au carrefour des cris perdus
j’
écoute encore une voix nue qui vient de dire ton nom même avec l’accen
1799
dire ton nom même avec l’accent de notre amour et
mon
visage est immobile tourné vers l’ombre où tu m’entends. III Fais
1800
mon visage est immobile tourné vers l’ombre où tu
m’
entends. III Fais rentrer dans leur peau d’ombre ces mots qui voud
1801
lèvres battent doucement écoute-les. IV Tends
moi
la main à travers cette ombre rapide si je te joins nous la tiendrons
1802
Tends moi la main à travers cette ombre rapide si
je
te joins nous la tiendrons captive écoute les cloches et le scintille
1803
x profondes qui échangent leurs douceurs. Tiens
moi
bien nous allons partir l’air s’entrouvre un feu rose éclôt voici ton
1804
rose éclôt voici ton heure au regard le plus pur
je
suis à toi dans le triomphe du silence sereine tu es toujours plus se
1805
V Oh qui a retiré tes mains des miennes quand
je
te regardais trop profond pour te voir ? Maintenant je suis seul à re
1806
regardais trop profond pour te voir ? Maintenant
je
suis seul à redescendre au jour dans l’aube sans refuges… VI Prison
1807
iquement française — et nul ne s’en déclare gêné,
me
semble-t-il… 3. Si nous jetons sur les lettres parisiennes un regard
1808
istrait mais circulaire, comme dirait Aragon — et
je
suppose que Beausire et Simond se livrèrent à ce petit jeu avant d’éc
1809
mythe ; des philosophes sans pente ni grandeur ; (
Je
mets au concours ce problème, d’ailleurs insoluble : « Peut-on discer
1810
nnie Besant. Et c’est charmant, disent les dames.
Je
ne suis pas aussi dur que les dames. … et M. Maurois, comme disent be
1811
nq ou six poètes. 4. « Quelque grande que soit »
mon
envie — comme disent Beausire et la Grammaire — mon envie, ma passion
1812
n envie — comme disent Beausire et la Grammaire —
mon
envie, ma passion d’admirer, je cherche en vain l’homme qui brisant «
1813
omme disent Beausire et la Grammaire — mon envie,
ma
passion d’admirer, je cherche en vain l’homme qui brisant « les grill
1814
t la Grammaire — mon envie, ma passion d’admirer,
je
cherche en vain l’homme qui brisant « les grilles de la raison » libè
1815
« les grilles de la raison » libère « le lion de
mes
certitudes » — comme disent Simond et ce grand potache de Maldoror. «
1816
serait-ce avec des pamphlets qu’on la lui rend ?
Je
le trouve en tout cas bien tonique, celui que Beausire et Simond vien
1817
y a bien quelques outrances dans tout ceci. Mais
je
voudrais que s’en offusquent ceux-là seuls que l’outrancière habileté
1818
que tout. Plutôt donc que de discuter ces thèses,
je
voudrais suivre leurs prolongements au-delà — au-dessous — de leurs p
1819
lan. C’est mal vu. » Ou si on les pose, ajouterai-
je
, c’est pour les résoudre aussitôt et d’une manière aussi peu comprome
1820
à Barrès de quitter sa chambre, son cigare ou son
moi
. » 8. « La France… n’a pas su faire la révolution morale… parce qu’e
1821
morale. Voilà notre aphorisme démontré. 9. Enfin
je
citerai deux petites phrases qui suffisent presque à situer la positi
1822
à Valéry ou au Surhomme, jamais absent d’ici, et
je
reprends ma liberté. Beausire admire Léonard d’avoir « tracé peut-êtr
1823
au Surhomme, jamais absent d’ici, et je reprends
ma
liberté. Beausire admire Léonard d’avoir « tracé peut-être pour toujo
1824
s au point où cessent d’eux-mêmes nos bavardages.
J’
ai senti mes oreilles se déboucher, nous gagnons l’altitude. Les probl
1825
où cessent d’eux-mêmes nos bavardages. J’ai senti
mes
oreilles se déboucher, nous gagnons l’altitude. Les problèmes qu’il s
1826
oésie, et la France c’est la Chambre des Députés,
je
n’en veux pas démordre, et la Légion d’honneur — je vous la laisse, l
1827
n’en veux pas démordre, et la Légion d’honneur —
je
vous la laisse, la Légion d’honneur. Quand vous prenez un taxi passé
1828
lemand, — et l’allemand littéraire y suffit. Pour
moi
, je ne me sens pas trop embarrassé ; comme j’habite l’Odéon, c’est to
1829
d, — et l’allemand littéraire y suffit. Pour moi,
je
ne me sens pas trop embarrassé ; comme j’habite l’Odéon, c’est toujou
1830
t l’allemand littéraire y suffit. Pour moi, je ne
me
sens pas trop embarrassé ; comme j’habite l’Odéon, c’est toujours le
1831
ur moi, je ne me sens pas trop embarrassé ; comme
j’
habite l’Odéon, c’est toujours le fantôme de l’Odéon qui m’accompagne
1832
l’Odéon, c’est toujours le fantôme de l’Odéon qui
m’
accompagne et nous ne disons presque rien, nous savons les mêmes histo
1833
t des noctambules préfèrent d’aller à pied ; mais
moi
je me méfie ; se promener seul la nuit dans une ville étrangère, n’es
1834
s noctambules préfèrent d’aller à pied ; mais moi
je
me méfie ; se promener seul la nuit dans une ville étrangère, n’est-c
1835
octambules préfèrent d’aller à pied ; mais moi je
me
méfie ; se promener seul la nuit dans une ville étrangère, n’est-ce p
1836
-ce point la définition même de la luxure ? Quand
je
vais à pied, j’oublie en chemin les meilleures phrases que j’avais pr
1837
inition même de la luxure ? Quand je vais à pied,
j’
oublie en chemin les meilleures phrases que j’avais préparées pour sub
1838
ed, j’oublie en chemin les meilleures phrases que
j’
avais préparées pour subjuguer mes amies, je m’intéresse aux cravates,
1839
ures phrases que j’avais préparées pour subjuguer
mes
amies, je m’intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se
1840
s que j’avais préparées pour subjuguer mes amies,
je
m’intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se dégrade as
1841
ue j’avais préparées pour subjuguer mes amies, je
m’
intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se dégrade assez
1842
er mes amies, je m’intéresse aux cravates, enfin,
je
sens mon esprit qui se dégrade assez rapidement et se dissout dans un
1843
mies, je m’intéresse aux cravates, enfin, je sens
mon
esprit qui se dégrade assez rapidement et se dissout dans une sentime
1844
n’est pas venue… (C’est ici le lieu de l’avouer :
je
ne saurais entretenir que mes rapports de politesse distante avec les
1845
e lieu de l’avouer : je ne saurais entretenir que
mes
rapports de politesse distante avec les personnes qui ont dit, ne fût
1846
ui ont dit, ne fût-ce qu’une fois en leur vie : «
J’
ai horreur de la sentimentalité ».) Nous voici donc en taxi, « nous de
1847
s deux le fantôme » comme on disait au village où
je
suis né, qui n’est pas ma patrie. Ce soir-là, le fantôme ayant envie
1848
on disait au village où je suis né, qui n’est pas
ma
patrie. Ce soir-là, le fantôme ayant envie de manger ferme a donné au
1849
ur l’adresse d’un ogre. C’est tout près parce que
j’
ai peur. En même temps c’est très loin parce que je me réjouis. La Mai
1850
’ai peur. En même temps c’est très loin parce que
je
me réjouis. La Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous
1851
peur. En même temps c’est très loin parce que je
me
réjouis. La Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous le
1852
is. La Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ;
je
ne vous le confie pas sans un secret tremblement. Nous embarquons Jea
1853
t d’un poète authentique. Le pittoresque. D’abord
je
crains que la notion n’en soit toute relative aux modes de « vie » bo
1854
« vie » bourgeois ; et puis la, comédie n’est pas
mon
fort, même la triste. Je n’aime plus que les choses lentement émouvan
1855
s la, comédie n’est pas mon fort, même la triste.
Je
n’aime plus que les choses lentement émouvantes, monotones et aiguës,
1856
ail jusqu’à l’aube, la naissance d’un visage dans
ma
mémoire (d’heure en heure ces yeux plus vivants…) De là, je le suppos
1857
(d’heure en heure ces yeux plus vivants…) De là,
je
le suppose, une certaine misanthropie en germe : les êtres changent t
1858
nthropie en germe : les êtres changent trop vite,
je
n’ai pas le temps de me laisser envoûter ou de les rendre esclaves, h
1859
êtres changent trop vite, je n’ai pas le temps de
me
laisser envoûter ou de les rendre esclaves, hors de quoi je ne sais p
1860
envoûter ou de les rendre esclaves, hors de quoi
je
ne sais pas de commerce humain qui vaille la peine, qui vaille l’amou
1861
d enfin qu’il est perdu, il découvre la liberté. (
Je
pense à la boussole autant qu’au sens moral.) Le goût de se perdre es
1862
des plus profonds mystères de notre condition, et
je
ne crois pas trop absurde d’y chercher l’origine non seulement des pa
1863
rquoi ne pas se perdre sans arrière-pensée ? S’il
me
reste un espoir au sein de mes erreurs les moins préméditées, c’est s
1864
rière-pensée ? S’il me reste un espoir au sein de
mes
erreurs les moins préméditées, c’est sans doute celui d’être trouvé.
1865
réméditées, c’est sans doute celui d’être trouvé.
J’
ai toujours méprisé le geste de l’homme qui, le soir dans sa chambre d
1866
uble tour. Ah ! qu’une nuit enfin, à la faveur de
mon
sommeil, on me vole à moi-même ! Que des êtres rêvés m’emportent ! —
1867
qu’une nuit enfin, à la faveur de mon sommeil, on
me
vole à moi-même ! Que des êtres rêvés m’emportent ! — Ils me conduira
1868
meil, on me vole à moi-même ! Que des êtres rêvés
m’
emportent ! — Ils me conduiraient là où je ne sais pas que j’ai si gra
1869
oi-même ! Que des êtres rêvés m’emportent ! — Ils
me
conduiraient là où je ne sais pas que j’ai si grand désir d’aller… Es
1870
s rêvés m’emportent ! — Ils me conduiraient là où
je
ne sais pas que j’ai si grand désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde
1871
! — Ils me conduiraient là où je ne sais pas que
j’
ai si grand désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde autour de moi : des
1872
pas que j’ai si grand désir d’aller… Est-ce ici ?
Je
regarde autour de moi : des murs sans yeux dominent des baraques épar
1873
désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde autour de
moi
: des murs sans yeux dominent des baraques éparses dans une brousse o
1874
bouger les jambes. Nous suivons à tâtons. Ce que
je
pressentais ne tarde pas à se produire : des aboiements fous et une e
1875
le : c’est tout de suite écœurant et prétentieux.
Je
suis de ceux qui mangent sans faire d’histoires. Je remarque simpleme
1876
suis de ceux qui mangent sans faire d’histoires.
Je
remarque simplement qu’on n’est jamais mieux pour parler qu’en face d
1877
pure. Edmond Jaloux préside à cette agape dont il
m’
est impossible de nommer tous les officiants visibles ou virtuels, et
1878
ticulier à le parfaire ? — il est bientôt minuit.
Mon
fantôme est là. Un chien, Dick, est là. Pierre Girard n’est pas là, n
1879
Chenevière pourrait très bien être là, puisqu’en
ma
voisine, je reconnais la Jeune fille de neige. On la sent prête à fon
1880
pourrait très bien être là, puisqu’en ma voisine,
je
reconnais la Jeune fille de neige. On la sent prête à fondre de tendr
1881
es Petit, égaré, en ayant soin d’ajouter ceux que
j’
oublie, vous obtiendrez le chiffre exact des participants ; calculez l
1882
de l’Italie et une certaine qualité de désespoir,
je
retrouve les contes d’Hoffmann. Mais il s’agit de les vivre plutôt qu
1883
vivre plutôt que d’en parler vous voyez bien que
j’
ai quitté cette table écroulée, dans la fumée et les évocations, sous
1884
ui cachait le front des palais, une nuit d’hiver,
je
chantonnais la Barcarolle en descendant le Grand Canal, — c’est une r
1885
ériennes, des chansons populaires qui sont ce que
je
connais de plus indiciblement nostalgique. Und solltest du im Leben
1886
nes. Un grand verre de bière à l’auberge déserte,
ma
pipe et mon chien qui bougonne. La petite maison du colonel en retrai
1887
nd verre de bière à l’auberge déserte, ma pipe et
mon
chien qui bougonne. La petite maison du colonel en retraite a des fen
1888
l est temps de mettre à ces fariboles un terme19.
J’
ai du solide à équarrir. Et auparavant, j’aimerais lire un peu. Mes au
1889
erme19. J’ai du solide à équarrir. Et auparavant,
j’
aimerais lire un peu. Mes auteurs ? Goethe en tout temps ; Rodolphe To
1890
équarrir. Et auparavant, j’aimerais lire un peu.
Mes
auteurs ? Goethe en tout temps ; Rodolphe Toepffer (admiré par Goethe
1891
« Vos fantômes ne sont pas
les miens
… » [Réponse à l’enquête « Les vrais fantômes »] (juillet 1930)q I
1892
»] (juillet 1930)q I Vos fantômes ne sont pas
les miens
, et qui saura jamais s’ils ne sont pas pour moi « des choses » — et r
1893
miens, et qui saura jamais s’ils ne sont pas pour
moi
« des choses » — et réciproquement. La distinction entre « choses » e
1894
à des habitudes individuelles, en dehors de quoi
je
ne lui vois pas de signification générale. Certains fantômes m’appara
1895
pas de signification générale. Certains fantômes
m’
apparaissent quand je suis faible, malade ou ivre, c’est-à-dire quand
1896
générale. Certains fantômes m’apparaissent quand
je
suis faible, malade ou ivre, c’est-à-dire quand je suis dominé par le
1897
e suis faible, malade ou ivre, c’est-à-dire quand
je
suis dominé par le monde. Ils ont tous le même air absurde. Des fantô
1898
nnants d’allusions indéfinies, naissent autour de
moi
quand la passion ou la prière me font centre de mon univers. La visi
1899
ssent autour de moi quand la passion ou la prière
me
font centre de mon univers. La vision « autre » dont vous parlez tra
1900
i quand la passion ou la prière me font centre de
mon
univers. La vision « autre » dont vous parlez traduit simplement une
1901
vous parlez traduit simplement une variation dans
mes
relations avec le monde. En quoi cette première question est assez in
1902
utre que la qualité du regard qui le perçoit. Dis-
moi
qui te hante… Ainsi, la vulgarité évidente des fantômes décrits par l
1903
e la psychologie. q. « Vos fantômes ne sont pas
les miens
… » [Réponse à l’enquête « Les vrais fantômes »], Raison d’être, Paris
1904
on un peu hâtive à une « jeunesse » déjà démodée…
Je
crois que la jeunesse d’aujourd’hui s’éloigne plutôt de la grandiloqu
1905
de ministres en retraite que de fauteuils. Et on
me
regarde. J’ai beau feindre l’intérêt le plus singulier pour ce châtea
1906
s en retraite que de fauteuils. Et on me regarde.
J’
ai beau feindre l’intérêt le plus singulier pour ce château sur la riv
1907
ur la rive, ils en ont tant vu ! Ils aiment mieux
me
faire honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où
1908
ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte de
mon
visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi.
1909
re honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides
me
demandent où je n’ai pas dormi. Le seul refuge est à l’avant, parmi d
1910
visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où
je
n’ai pas dormi. Le seul refuge est à l’avant, parmi des cordages, des
1911
ue la phrase, l’unique phrase que Richard Strauss
m’
aura jamais adressée en cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatig
1912
mais adressée en cette vie : « Bonsoir, Monsieur,
je
suis fatigué, je vais au lit… » C’était au vestiaire, il enfilait une
1913
cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatigué,
je
vais au lit… » C’était au vestiaire, il enfilait une manche de pardes
1914
u vestiaire, il enfilait une manche de pardessus,
me
donnait l’autre à serrer, la main n’étant pas encore sortie… Dormir a
1915
ns cette foule et ces musiques, deux visages amis
me
sourient. Ô liberté aérienne des arrivées, premiers regards aux rues
1916
qui font des signes pour demain, présentations de
mes
Espoirs aux jeunes Promesses nationales (on n’a pas bien compris les
1917
tendresse pour tous les possibles, qu’on appelle,
je
crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme
1918
ossibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse…
Je
me suis endormi dans une grande maison calme aux voûtes sombres, qui
1919
ibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je
me
suis endormi dans une grande maison calme aux voûtes sombres, qui est
1920
. La recherche de l’objet inconnu Personne n’a
mon
adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en
1921
e de l’objet inconnu Personne n’a mon adresse,
je
n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en ce premier
1922
on adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à
ma
chance hongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la
1923
ce hongroise en ce premier réveil — délivré. Chez
moi
je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’at
1924
ongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi
je
suis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’atten
1925
z moi je suis la proie de l’angoisse du courrier.
J’
attends la lettre, j’attends je ne sais quoi de très important… Trois
1926
e de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre,
j’
attends je ne sais quoi de très important… Trois déceptions par jour n
1927
oisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends
je
ne sais quoi de très important… Trois déceptions par jour ne peuvent
1928
par jour ne peuvent qu’énerver le désir. Parfois
j’
imagine que le facteur va m’apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciat
1929
ver le désir. Parfois j’imagine que le facteur va
m’
apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciateur d’une miraculeuse et roy
1930
le Venue. Dans le silence de l’adoration comblée,
j’
en sortirais de ces objets sans nom, inutilisables, bouleversants de p
1931
us pur. Le voyage trompe un temps cette angoisse.
J’
irai chercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes les avances, l
1932
n temps cette angoisse. J’irai chercher moi-même,
me
suis-je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qu
1933
cette angoisse. J’irai chercher moi-même, me suis-
je
dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sait s
1934
goisse. J’irai chercher moi-même, me suis-je dit,
je
ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sait si tant d
1935
choses pouvait offrir asile à l’objet inconnu que
je
chercherai sans doute jusqu’à la fin des fins… Mais voici mes amis. E
1936
ai sans doute jusqu’à la fin des fins… Mais voici
mes
amis. Et la question terrible, tout de suite : « Mais qui, mais qu’êt
1937
u’êtes-vous venu chercher jusque chez nous ? » On
me
demandera donc toujours des passeports ? Dussè-je les inventer… Ah !
1938
me demandera donc toujours des passeports ? Dussè-
je
les inventer… Ah ! l’embarras de voyager n’est rien auprès de celui d
1939
i d’expliquer pourquoi l’on est parti. Cependant,
mes
regards errant sur une bibliothèque, je crois y trouver mon salut : «
1940
pendant, mes regards errant sur une bibliothèque,
je
crois y trouver mon salut : « Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabo
1941
s errant sur une bibliothèque, je crois y trouver
mon
salut : « Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’éc
1942
Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes,
m’
écrié-je, mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’
1943
hl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’écrié-
je
, mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’user, ne
1944
et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’écrié-je,
mes
frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’user, ne tard
1945
vre. Mais combien votre sort, ô grands empêtrés !
me
paraît enviable : vous au moins connaissiez ce qui causait votre malh
1946
moins connaissiez ce qui causait votre malheur ;
moi
, non. Barnabooth savait bien ce qu’il ne pouvait perdre, et c’était s
1947
ait ce qu’il avait perdu, c’était son ombre. Mais
moi
qui cherche un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos et qui me voue à
1948
e un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos et qui
me
voue à toutes les magies ! Les désirs les plus incompréhensibles s’em
1949
s désirs les plus incompréhensibles s’emparent de
moi
comme des superstitions. Tout mon avoir se fond dans une loterie qui
1950
s s’emparent de moi comme des superstitions. Tout
mon
avoir se fond dans une loterie qui peut-être n’a pas de gros lot, et
1951
rie qui peut-être n’a pas de gros lot, et jamais,
je
crains bien, jamais je ne parviendrai à le regretter… » L’ironie indu
1952
as de gros lot, et jamais, je crains bien, jamais
je
ne parviendrai à le regretter… » L’ironie indulgente et cette pitié à
1953
jeunesse démodée se peignirent sur les traits de
mes
auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubles distingués.
1954
ent sur les traits de mes auditeurs. — Vous êtes,
me
dit-on, un amateur de troubles distingués. Peu de sens du réel. Mais
1955
ou tout au moins ce qu’il en reste. Sur quoi l’on
m’
entraîna dans un musée sans sièges. Le Musée de Budapest enferme quelq
1956
andis que nous y rôdions, un soir étouffant, vous
m’
avez montré en passant des murs brunis qui rougeoyaient au sommet du R
1957
sommes rentrés en Europe. Mais dès le lendemain,
m’
échappant du programme, il a bien fallu que je recherche le chemin du
1958
in, m’échappant du programme, il a bien fallu que
je
recherche le chemin du Rozsadomb. « Vous n’y verrez, m’avait-on dit,
1959
herche le chemin du Rozsadomb. « Vous n’y verrez,
m’
avait-on dit, qu’une paire de babouches dans une mosquée vide que pers
1960
stère. Montant au Rozsadomb par ce matin brûlant,
je
savais bien que j’obéissais à ce que nos psychologues appellent une c
1961
ozsadomb par ce matin brûlant, je savais bien que
j’
obéissais à ce que nos psychologues appellent une conduite magique. Or
1962
justifiable : c’est le plaisir même de l’enfance.
Je
portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je fer
1963
est le plaisir même de l’enfance. Je portais donc
ma
vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au
1964
l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et
je
grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinag
1965
ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme
je
ferai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet incon
1966
d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai,
je
pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. On pas
1967
is gravement comme je ferai, je pense, au jour de
mon
pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. On passe une barrière, une c
1968
au est vide. Et les babouches ? Pas de babouches.
Je
sais bien que ce n’est pas l’heure de visiter : le Père des roses est
1969
t devenu le jardinier du Rozsadomb… Mais qu’eussè-
je
pu contempler de plus « objectivement » étrange que ce lieu — inquiét
1970
ntransigeant serait la seule conduite féconde. Il
me
semble que la servitude de l’homme moderne apparaît ici sous un aspec
1971
la sensibilité même qu’on impose une livrée. — «
Je
comprends, me dit-on. Vous êtes pour la fantaisie, c’est bien joli !…
1972
é même qu’on impose une livrée. — « Je comprends,
me
dit-on. Vous êtes pour la fantaisie, c’est bien joli !… » — Non, Mons
1973
sieur, ce n’est pas joli, ce n’est pas fantaisie.
Je
parle simplement de vérité et de mensonge, opposant une réalité vivan
1974
t, disait-on, du temps que l’on parlait français.
J’
expliquais donc que je ne voyage qu’au hasard, et pour rien ni personn
1975
que l’on parlait français. J’expliquais donc que
je
ne voyage qu’au hasard, et pour rien ni personne. Sur quoi : « Monsie
1976
devoirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui :
je
me ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre cons
1977
voirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui : je
me
ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre conserv
1978
h bien oui : je me ferai un mérite de perdre tout
mon
temps, si toutefois perdre conserve ici le sens qu’il a pris dans ce
1979
onserve ici le sens qu’il a pris dans ce monde, —
j’
entends : leur monde, avec leurs « problèmes du plus haut intérêt », l
1980
payer cher. Tout cela est langage de bourse. Pour
moi
, je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la fac
1981
cher. Tout cela est langage de bourse. Pour moi,
je
poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la face de
1982
a est langage de bourse. Pour moi, je poursuivrai
mon
discours en faveur de l’inutile, et ceci à la face des bouffons qui p
1983
es mains dans leurs vastes poches insulaires pour
m’
informer de cette irrécusable vérité : les affaires sont les affaires,
1984
t les affaires, axiome qui constitue à leurs yeux
ma
condamnation et celle des minus habentes qui me ressemblent. Au risqu
1985
x ma condamnation et celle des minus habentes qui
me
ressemblent. Au risque de les voir trépigner, je continuerai à cherch
1986
me ressemblent. Au risque de les voir trépigner,
je
continuerai à chercher mon bien de midi à quatorze heures, temps qu’i
1987
de les voir trépigner, je continuerai à chercher
mon
bien de midi à quatorze heures, temps qu’ils réservent à la masticati
1988
l’on ose dire, à assurer cette mastication. Mais
je
m’égare, laissons-là ces moutons. 5. Café amer En Hongrie l’on
1989
on ose dire, à assurer cette mastication. Mais je
m’
égare, laissons-là ces moutons. 5. Café amer En Hongrie l’on est
1990
e que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que
je
trouve ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je me défends d
1991
ve ce raisonnement fin, encore que juste, mais si
je
me défends du pittoresque, ce n’est qu’amour jaloux du merveilleux, a
1992
ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je
me
défends du pittoresque, ce n’est qu’amour jaloux du merveilleux, avec
1993
es presque excusables de ne le point apercevoir.)
Je
vais cependant dire quelque chose d’une scène pittoresque. Mais c’est
1994
scène pittoresque. Mais c’est une autre fois que
je
l’ai vue, à Pest, lors d’un autre séjour, dans la semaine qui suit No
1995
ffreusement belle dans un peignoir noir et blanc…
Je
ne puis avaler mon verre de ce café trop amer qui pince la gorge. Deh
1996
dans un peignoir noir et blanc… Je ne puis avaler
mon
verre de ce café trop amer qui pince la gorge. Dehors, nous ne parlon
1997
mâchoire. 6. Doutes sur la nature du Sujet
Je
crois qu’il faut que je raconte mon voyage « à la suite », renonçant
1998
sur la nature du Sujet Je crois qu’il faut que
je
raconte mon voyage « à la suite », renonçant à écrire d’abord les cha
1999
re du Sujet Je crois qu’il faut que je raconte
mon
voyage « à la suite », renonçant à écrire d’abord les chapitres qui e
2000
t envie, puis ceux qui en auront envie : car cela
m’
inciterait à chercher après coup des transitions, et c’est alors que l
2001
d’un pays apparaissant en général au voyageur de
ma
sorte sous ses modalités sentimentales plus que documentaires, peut-ê
2002
us que documentaires, peut-être serait-il bon que
je
parsème ce texte de quelques noms impossibles et de beaucoup de chiff
2003
si le lecteur superficiel aurait l’impression que
je
suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon suje
2004
el aurait l’impression que je suis zur Sache, que
je
parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce q
2005
impression que je suis zur Sache, que je parle de
mon
sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît
2006
che, que je parle de mon sujet, — étant admis que
mon
sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît infiniment baroque, à peine c
2007
étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui
me
paraît infiniment baroque, à peine compréhensible, car on ne choisit
2008
ndeloque insolite l’étrangeté de son éclat. Alors
je
m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais f
2009
loque insolite l’étrangeté de son éclat. Alors je
m’
en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais fein
2010
e son éclat. Alors je m’en vais oublier le But de
mon
voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux ce
2011
oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause.
Je
vais feindre de prendre au sérieux ce que je vois. Ruse connue : c’es
2012
use. Je vais feindre de prendre au sérieux ce que
je
vois. Ruse connue : c’est l’histoire du mot que vous avez sous la lan
2013
l’histoire du mot que vous avez sous la langue ;
je
vous conseille de n’y plus penser quelque temps… Car on ne trouve vra
2014
rand et gratuit, sacrifice.) … feuilletons un peu
ma
Hongrie. 7. Les magnats en taxis La place Saint-Georges, à Bude
2015
iducs, quel décor à rêver le cortège d’un sacre !
J’
y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour de l’élection d’un des
2016
s instable des huit reflets de leur dignité. Mais
je
n’oublierai pas le sourire de ce vieux prince : un vrai sourire, adre
2017
— et le mot « affable » reprend ici sa noblesse.
Mon
voisin qui a la tête de François-Joseph, dont il fut peut-être valet,
2018
is semaines, à Freudenau, lors du Derby viennois,
je
les ai vus portant cylindre gris à la terrasse du Jockey-Club. Mainte
2019
thes sentimentaux qui gouverne les arguments. Ici
je
rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosm
2020
ux qui gouverne les arguments. Ici je rentre dans
mes
chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme : la politique
2021
ents. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche
mon
cor. Macrocosme et microcosme : la politique des peuples ressemble à
2022
Tendre d’après le traité de Trianon ! Ces choses,
je
les ai rêvées sur un divan, à cause d’un coussin où s’étalait le sour
2023
. Le roi. » 10. Visite à Babits Personne, à
ma
connaissance, ne se plaint de ce qu’il y a peu de poètes par le monde
2024
ts « bien hongrois » dans un style académique qui
me
paraît être le contraire du style hongrois. Il y a aussi une extrême
2025
la plus vivante du génie littéraire de cette race
me
paraît bien avoir été donnée par le groupe important du Nyugât (l’Occ
2026
Babits est aujourd’hui le chef de file. Des amis
m’
emmènent le voir à Esztergóm, où il passe ses étés. Esztergóm est la p
2027
t la plus vieille capitale de la Hongrie. Attila,
me
dit-on, y régna. Aujourd’hui c’est la résidence du Prince Primat. Au-
2028
le la plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est,
je
grimpe au cerisier sauvage, derrière la maison, un peintre tout en bl
2029
non point à celle des arrivistes. 14. Parce que
j’
« exalte les valeurs de passion » — pour parler comme le seul Clerc qu
2030
ler comme le seul Clerc qui n’ait pas trahi — qui
me
paraissent être la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je sui
2031
me paraissent être la grandeur de la Hongrie, on
m’
expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin cet état d’esprit
2032
re la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que
je
suis pour la guerre, puisque enfin cet état d’esprit que j’admire est
2033
ur la guerre, puisque enfin cet état d’esprit que
j’
admire est, entre autres, belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne
2034
it que j’admire est, entre autres, belliqueux. Or
je
suis pacifiste. Comment ne pas l’être ? Mais je crois que les pacifis
2035
r je suis pacifiste. Comment ne pas l’être ? Mais
je
crois que les pacifistes qui veulent assurer la paix par la mutilatio
2036
Les quatrains sont ici précédés de Fragments dont
je
me demande s’il était bien légitime de les traduire. On a respecté sc
2037
quatrains sont ici précédés de Fragments dont je
me
demande s’il était bien légitime de les traduire. On a respecté scrup
2038
mots isolés, des bribes de phrases… Or, si comme
je
le crois et voudrais l’établir plus longuement, le sens des poèmes de
2039
les d’éveiller le sentiment rare et grandiose que
j’
appellerais celui du tragique de la pensée. « Insensé, — penses-tu de
2040
nnel tu vois que la veilleuse brûle toujours — et
moi
, parmi les reflets fuyants de toutes sortes de faces et de paysages s
2041
de faces et de paysages soudainement invisibles,
je
distingue le doux feu bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand
2042
ment invisibles, je distingue le doux feu bleu de
mon
obsession. L’Objet Inconnu, — quand je pense à ce qu’en imagineraient
2043
u bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand
je
pense à ce qu’en imagineraient les autres, si je leur en parlais… Il
2044
je pense à ce qu’en imagineraient les autres, si
je
leur en parlais… Il leur suffirait de l’image d’un bibelot d’une sort
2045
t inconnu et tellement fascinant à la fois, qu’il
me
préserve de tout amour pour quelque bien particulier où je serais ten
2046
ve de tout amour pour quelque bien particulier où
je
serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le
2047
ur quelque bien particulier où je serais tenté de
me
complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde dan
2048
ticulier où je serais tenté de me complaire. Oh !
je
sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde dans sa fumée, on resp
2049
je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! —
Je
ne sais plus. — Le train s’attarde dans sa fumée, on respire une lour
2050
on respire une lourde obscurité qui sent l’enfer.
Je
ne pense plus qu’ « au souffle »… Mais alors tout s’allume et voici l
2051
ne sont qu’une ivresse aux cent visages, lorsque
j’
entre dans l’atelier du peintre. Je ne tarde pas à oublier ce qui est
2052
sages, lorsque j’entre dans l’atelier du peintre.
Je
ne tarde pas à oublier ce qui est lent ou fixe ou pas-à-pas. Tout s’é
2053
s la danse, ils incarnent l’allégresse rythmique.
Je
les vois frapper le sol du talon en levant un bras, la main à la nuqu
2054
horizontales, soutenues par un long souffle vif.
J’
observe que les paroles autant que les gestes sont gouvernées par la s
2055
selon les lois d’une plastique exubérante. Quand
je
dis que j’observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’
2056
lois d’une plastique exubérante. Quand je dis que
j’
observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’on en ferme
2057
plastique exubérante. Quand je dis que j’observe,
je
n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’on en ferme les yeux.
2058
gs coups d’ailes en silence au-dessus du gouffre.
Je
vole sur place, mais tout se met à fuir, alors il faut voler plus vit
2059
vite pour rattraper ces apparences adorables… Si
je
« lâchais » un instant, toutes choses disparaîtraient… Le vertige (la
2060
aisser choir dans le Gris ? Rejoindre ?… Derrière
mes
paupières, dans ce désordre lumineux, le verrai-je naître à mon désir
2061
s paupières, dans ce désordre lumineux, le verrai-
je
naître à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans No
2062
dans ce désordre lumineux, le verrai-je naître à
mon
désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans Noms, ça ne ser
2063
tre à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière
ma
tête, Sans Noms, ça ne sera pas encore pour cette fois. 13. Chanso
2064
es mains pleines de drôleries ou de supplication.
Je
ne sais ce que disent les paroles. Je vois des chevauchées sous le so
2065
pplication. Je ne sais ce que disent les paroles.
Je
vois des chevauchées sous le soleil, des campements nocturnes où le s
2066
ue, conserve quelque espoir de t’en tirer. Sinon…
je
t’envierais presque. Celui qui part pour la Hongrie sans talisman, s’
2067
borodinesque, mais l’erreur n’est imputable qu’à
mon
instabilité rythmique. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que j
2068
à mon instabilité rythmique. (Trop souvent ce que
je
vois traverse ce que j’entends.) La plaine hongroise n’est pas monoto
2069
que. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que
j’
entends.) La plaine hongroise n’est pas monotone, parce qu’elle est d’
2070
i fasse répétition. C’est ici le premier pays que
je
n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choi
2071
emier pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont
je
ne me compose pas de morceaux choisis16. Il y a une grande ville, un
2072
pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne
me
compose pas de morceaux choisis16. Il y a une grande ville, un grand
2073
estions sociales. La Puszta est une terre vierge,
je
veux dire que la bourgeoisie ne s’y est pas encore répandue. Il y a p
2074
et artiste de la prodigalité. — « Ah ! répond-il,
j’
aimerais bien pouvoir vivre comme je vis ! » Voici les cigognes, dont
2075
! répond-il, j’aimerais bien pouvoir vivre comme
je
vis ! » Voici les cigognes, dont Andersen assure qu’elles parlent en
2076
gue qu’elles apprennent de leurs mères ». Combien
j’
aime ces sœurs des Tziganes ! Les Tziganes vinrent en Europe conduits
2077
allemand, c’est : Zigeuner ; hongrois : cigány ;
mien
: cigognes. D’ailleurs ces Égyptiens venaient des Indes, qui nous app
2078
nous n’avons qu’au prix de tout ce qu’à Debrecen
je
viens admirer. On aime les Hongrois comme on aime l’enfance : or le r
2079
’enfant, c’est de devenir une grande personne. On
me
l’a dit, c’est vrai : cette ville historique est aussi l’autre « Rome
2080
sitaire tout rajeuni dans des jardins luisants ne
m’
empêchera pas de m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’E
2081
i dans des jardins luisants ne m’empêchera pas de
m’
y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’Europe. Le hasard a
2082
u bord extrême de l’Europe. Le hasard a voulu que
j’
y entende, un soir, une présentation de musiques hongroises, turques e
2083
nte et basse, prolongée. Peut-être ce soir-là, ai-
je
compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches d
2084
e compris la Grande Plaine, et que par sa musique
j’
étais aux marches de l’Asie. En sortant du concert, j’ai erré aux terr
2085
ais aux marches de l’Asie. En sortant du concert,
j’
ai erré aux terrasses des hôtels, dans le grandiose bavardage des Tzig
2086
oici qu’une autre vient d’ailleurs, entraînée par
je
ne sais quel vent sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et d’un
2087
de celui qui succombe à l’excès du sommeil) — et
me
voici plus seul, avec une nostalgie qui ne veut pas de la romance à m
2088
vec une nostalgie qui ne veut pas de la romance à
mon
oreille d’un violoneux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond d
2089
as de la romance à mon oreille d’un violoneux qui
me
croit triste. Ils l’ont amené du fond d’une Inde. Ils l’ont égaré, co
2090
ux fades du Balaton Deux jours après, dégrisé,
je
nageais dans les eaux fades du Balaton. Ces eaux, je crois, s’en vont
2091
nageais dans les eaux fades du Balaton. Ces eaux,
je
crois, s’en vont à la mer Noire, et je n’en connais pas les fées, c’e
2092
Ces eaux, je crois, s’en vont à la mer Noire, et
je
n’en connais pas les fées, c’est pourquoi je nageais à brasses pruden
2093
, et je n’en connais pas les fées, c’est pourquoi
je
nageais à brasses prudentes avec, aux jambes, l’imperceptible angoiss
2094
presque belles dans leurs petits sweaters — vais-
je
pour vous m’arrêter quelques jours ? On ferait connaissance à table d
2095
es dans leurs petits sweaters — vais-je pour vous
m’
arrêter quelques jours ? On ferait connaissance à table d’hôte, on ira
2096
ant qu’ici la vie a parfois moins de hargne… Déjà
je
suis repris par le malaise que m’infligent les lieux faciles. Ô trist
2097
de hargne… Déjà je suis repris par le malaise que
m’
infligent les lieux faciles. Ô tristesse des crèmeries et des jardins
2098
s jardins ! C’est devant une glace panachée qu’il
m’
arrive de douter de la vie, comme d’autres aux approches du mal de mer
2099
d’autres aux approches du mal de mer. À la nuit,
j’
ai rôdé dans la campagne aux collines basses, d’apparence rocheuse — c
2100
la Lune et toutes lustrées de rêches végétations.
J’
ai traversé l’angoisse lunaire des villages vides aux portes aveugles
2101
e lunaire des villages vides aux portes aveugles (
j’
avais peur du bruit de mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers da
2102
des aux portes aveugles (j’avais peur du bruit de
mes
pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers dans les champs de maïs, épi
2103
es (j’avais peur du bruit de mes pas). Au hasard,
j’
ai suivi des sentiers dans les champs de maïs, épiant la venue d’une j
2104
te où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que
je
me heurte, comme réveillé dans l’absurdité d’être n’importe où. Une p
2105
où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je
me
heurte, comme réveillé dans l’absurdité d’être n’importe où. Une pani
2106
rdu… Un train dormait devant la gare campagnarde.
Je
me suis étendu dans un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri
2107
… Un train dormait devant la gare campagnarde. Je
me
suis étendu dans un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri de
2108
de la lune. Le contrôleur a dû jouer un rôle dans
mes
cauchemars. L’aube m’éveille dans les faubourgs de Budapest, cheveux
2109
ur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube
m’
éveille dans les faubourgs de Budapest, cheveux en désordre, pantalon
2110
on plissé, et cet abruti de contrôleur qui rit et
me
dit je ne sais quoi, — alors que justement j’allais rattraper, comme
2111
sé, et cet abruti de contrôleur qui rit et me dit
je
ne sais quoi, — alors que justement j’allais rattraper, comme un pan
2112
et me dit je ne sais quoi, — alors que justement
j’
allais rattraper, comme un pan de la nuit fuyante, un songe où j’ai dû
2113
per, comme un pan de la nuit fuyante, un songe où
j’
ai dû voir l’objet pour la première fois — ou bien était-ce un être ?
2114
s — ou bien était-ce un être ? 17. Insomnie
J’
éteignais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon d’une momie bl
2115
Insomnie J’éteignais la lampe et la veilleuse
me
rendait compagnon d’une momie bleuâtre, mais peut-on se reposer vraim
2116
vraiment à cent à l’heure. Par-dessous le store,
je
voyais la Lune faire des bonds courts sur la plaine inondée de nuit.
2117
e des bonds courts sur la plaine inondée de nuit.
J’
essayais de penser par-dessous le rythme obstiné de cette hurlante bou
2118
ulade sur place qu’est un voyage en express. Mais
je
ne trouvais pas la pente de mon esprit, et tout en le parcourant avec
2119
e en express. Mais je ne trouvais pas la pente de
mon
esprit, et tout en le parcourant avec une soif qui annonçait le déser
2120
parcourant avec une soif qui annonçait le désert,
je
traçais des plans d’œuvres sablonneuses. Je composais un traité des v
2121
sert, je traçais des plans d’œuvres sablonneuses.
Je
composais un traité des voyages : les titres en étaient de Sénèque ou
2122
les titres en étaient de Sénèque ou de Swift, et
je
voyais très bien ce qu’en eussent tiré Sterne ou Goethe, mais, sembla
2123
ne ou Goethe, mais, semblable à Gérard de Nerval,
je
sentais qu’il s’agissait d’autre chose… Il s’agit toujours d’autre ch
2124
depuis un moment, c’est que la ligne est droite.
Je
ne sais plus dans quel sens je roule. J’aime ces heures désorientées
2125
ligne est droite. Je ne sais plus dans quel sens
je
roule. J’aime ces heures désorientées ; le sentiment du « non-sens »
2126
droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule.
J’
aime ces heures désorientées ; le sentiment du « non-sens » de la vie
2127
s, naturellement… (Encore un qui se réveille dans
ma
tête.) — On ne voyage jamais que dans son propre sens ! — Mais il fau
2128
er). Se peut-il qu’on cherche le sens de la vie !
Je
sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable
2129
cherche le sens de la vie ! Je sais seulement que
ma
vie a un but. M’approcher de mon être véritable. Seul au milieu des m
2130
e la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but.
M’
approcher de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais
2131
ais seulement que ma vie a un but. M’approcher de
mon
être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’avais
2132
de mon être véritable. Seul au milieu des miens,
j’
oubliais ma race, j’avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Ide
2133
e véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais
ma
race, j’avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mo
2134
le. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race,
j’
avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre.
2135
llusion de n’être rien que… moi-même. Identique à
mon
centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon a
2136
tique à mon centre. Ici, comparé à tant d’autres,
je
perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un
2137
on centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds
mes
préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type huma
2138
omparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur
mon
apparence, je me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’é
2139
’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence,
je
me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’étais presque i
2140
tres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je
me
découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’étais presque infi
2141
découvre localisé dans un type humain. Immobile,
j’
étais presque infiniment variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui
2142
ent variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui
me
fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert
2143
ble, indéterminé. Et c’est le voyage qui me fixe.
Je
rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puis
2144
Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on
me
dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puissances d’évasion
2145
Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps,
j’
ai découvert mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je presse
2146
on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert
mes
puissances d’évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe
2147
t mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent
je
pressens qu’il existe une clef : délivré de moi, j’entrerais en plein
2148
nt je pressens qu’il existe une clef : délivré de
moi
, j’entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettr
2149
pressens qu’il existe une clef : délivré de moi,
j’
entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait
2150
e une clef : délivré de moi, j’entrerais en plein
Moi
… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait de combler l’écart ent
2151
rais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui
me
permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réal
2152
ela » qui me permettrait de combler l’écart entre
moi
et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un ê
2153
ui me permettrait de combler l’écart entre moi et
Moi
qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un être ? L
2154
que… Une chose ? Un être ? L’Objet ? — Est-ce que
je
dors dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain d’un éclat bleu
2155
e ? Un être ? L’Objet ? — Est-ce que je dors dans
mes
pensées ? La veilleuse fleurit soudain d’un éclat bleu douloureux, le
2156
est obstruée par un douanier, tant qu’à la fin on
me
refoule dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends b
2157
un douanier, tant qu’à la fin on me refoule dans
mon
compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends bien qu’il faudrai
2158
le dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ?
Je
comprends bien qu’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ai perdu mes
2159
ends bien qu’il faudrait ouvrir ces valises, mais
j’
ai perdu mes clefs. L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’
2160
u’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ai perdu
mes
clefs. L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’ai le feu à
2161
. L’œil du douanier conseille des aveux complets.
J’
ai le feu à la tête, mais je suis innocent puisque enfin il n’est pas
2162
e des aveux complets. J’ai le feu à la tête, mais
je
suis innocent puisque enfin il n’est pas dans ma valise, ce n’est que
2163
je suis innocent puisque enfin il n’est pas dans
ma
valise, ce n’est que trop certain. Cependant, « rien à déclarer » apr
2164
e ? Cela va paraître improbable. On a dû voir sur
moi
que je le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs
2165
va paraître improbable. On a dû voir sur moi que
je
le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans me
2166
pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans
mes
onze poches. Seulement ce papier timbré d’un ministère… mais déjà l’œ
2167
is qu’a-t-on jamais pu « déclarer » d’important ?
Je
ne sais plus parler en vers et la prose n’indique que les choses les
2168
est bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois
je
me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre philosophale. Pe
2169
bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois je
me
suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre philosophale. Peut-
2170
ces deux mots suffiraient-ils à l’indiquer quand
je
m’en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui ex
2171
s deux mots suffiraient-ils à l’indiquer quand je
m’
en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui exige
2172
’en parle ? Tout en donnant le change à celles de
mes
pensées qui exigent des apparences positives. Ainsi donc, j’ai cherch
2173
qui exigent des apparences positives. Ainsi donc,
j’
ai cherché la Pierre des philosophes. D’autres aussi, peut-être, la ch
2174
sirer de la voir, apparaît la « Loge » invisible.
J’
attends, j’appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi
2175
voir, apparaît la « Loge » invisible. J’attends,
j’
appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte l
2176
isible. J’attends, j’appelle quelqu’un qui vienne
me
prendre par la main. Ainsi je quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce
2177
uelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi
je
quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle m’a donné ? Cette not
2178
e quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle
m’
a donné ? Cette notion plus vive d’un univers où la présence de l’Obje
2179
l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bien n’ai-
je
su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieur
2180
ien n’ai-je su voir autre chose que la Hongrie de
mes
rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depuis to
2181
su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves,
ma
Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depuis toujours ce
2182
nnaître sont un seul et même acte. Peut-être l’ai-
je
aimée d’un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et en qui l’
2183
cun être ? Et s’il fallait attendre pour aimer !…
Je
me souviens de ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et
2184
être ? Et s’il fallait attendre pour aimer !… Je
me
souviens de ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et d’
2185
rande Plaine encore rougeâtre de soleil couchant.
J’
y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et po
2186
couchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ;
je
me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécu
2187
uchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je
me
suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécurit
2188
flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant
je
n’éprouve qu’une étrange sécurité. Présence, présence réelle… Comme j
2189
trange sécurité. Présence, présence réelle… Comme
j’
ai peine à m’imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière
2190
té. Présence, présence réelle… Comme j’ai peine à
m’
imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière en ce lieu,
2191
le… Comme j’ai peine à m’imaginer que jamais plus
je
ne la reverrai, cette lumière en ce lieu, secrète et familière. Songe
2192
cette minute et à d’autres semblables, en voyage,
je
me dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncièr
2193
te minute et à d’autres semblables, en voyage, je
me
dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière q
2194
blables, en voyage, je me dis que c’est de là que
j’
ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive d’éprouver en
2195
j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il
m’
arrive d’éprouver en face d’une action purement raisonnable. Ah ! quel
2196
tu perds les clefs de tes valises… (Cela encore :
m’
arrêter à Vienne à cause des serrures… Peut-être y passer une nuit — r
2197
Lune le renvoie sur Terre en forme de pluie. » Si
je
trouvais un jour l’Objet, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussi
2198
de pluie. » Si je trouvais un jour l’Objet, il ne
me
resterait qu’à le détruire. (Aussitôt je commence à comprendre ce qu’
2199
t, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussitôt
je
commence à comprendre ce qu’il est : cela qui me rendrait acceptable
2200
je commence à comprendre ce qu’il est : cela qui
me
rendrait acceptable ce monde…) Malheur à celui qui ne cherche pas. Ma
2201
os, Approximations, 4e série (novembre 1930)bk
Je
n’ai jamais cherché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en m’iden
2202
n’ai jamais cherché rien d’autre que d’approcher
mon
sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m’était possible, non seul
2203
herché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en
m’
identifiant d’aussi près qu’il m’était possible, non seulement au poin
2204
er mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il
m’
était possible, non seulement au point de vue, mais à la complexion, à
2205
nt implicite que, sur le plan de la qualité pure,
je
persiste à tenir pour le plus efficace. Ce n’est peut-être pas fortui
2206
le problème de l’homme dans sa totalité, et c’est
je
crois l’éloge de choix. Mais de ce problème central, qui déborde le p
2207
on pourrait l’appeler une critique des obstacles.
Je
veux dire par là que M. Du Bos parvient à recréer comme pour son comp
2208
pensée qui par ailleurs participe de la liberté :
j’
entends la pensée mystique. L’expérience mystique a la même extension
2209
tte fatalité qui est le signe du monde matériel.
Je
vois l’humanisme nouveau sous l’aspect d’une culture des facultés mys
2210
particulière, antérieure à n’importe quel dogme.
Je
ne crois pas qu’il existe d’autres facultés capables d’équilibrer en
2211
ables d’équilibrer en nous l’esprit de géométrie.
J’
imagine une méthode, une façon d’appréhender la vie, de hiérarchiser n
2212
it pas de l’existence la poésie, ce sens du Réel.
Je
vois se composer en cette méthode — peut-être séculairement — ce que
2213
sans doute… Mais tout commence par des rêves. Et
je
ne vois rien d’autre. Quoi qu’il en soit d’ailleurs du contenu d’un n
2214
faux dieux — le fascinant éclat de ce vide ? 5.
Je
songe à la « psychologie scientifique » et à ce leurre qu’est l’attit
2215
t à ce leurre qu’est l’attitude paralléliste. 6.
J’
exagère probablement, car la sincérité de ce néo-scientisme tempéré —
2216
t de l’action par un intellectualisme anarchique.
Je
tiens au contraire le cas Malraux pour hautement significatif de notr
2217
la plus forte que M. Malraux se fait de lui-même.
Je
suis tenté de dire : son moi idéal, celui auquel il donne sa plus pro
2218
se fait de lui-même. Je suis tenté de dire : son
moi
idéal, celui auquel il donne sa plus profonde et intime adhésion. Nou
2219
qui pourrait se définir : « Dieu n’est pas, donc
je
suis » ; l’homme seul ; areligieux, relié à rien. Plutôt aventurier q
2220
aucune transcendance où s’abîmer, d’où renaître.
Je
ne sais pas aujourd’hui le livre « bien pensant » qui pose avec une p
2221
propriété officielle de bas-reliefs cambodgiens.
Je
donne l’histoire comme une fable. Il est peut-être curieux de noter q
2222
qui donneront le ton et les thèmes principaux :
J’
avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel â
2223
on et les thèmes principaux : J’avais vingt ans.
Je
ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie… — Où
2224
être poétique, c’est avoir besoin d’illusions ».
Je
soutiendrais volontiers le contraire, mais M. Nizan est de ces gens,
2225
lisme qu’elle combat avec raison ? D’ailleurs, si
je
vois bien que le propos de M. Nizan n’est pas de nous rendre le goût
2226
de ce qui, en Europe, « allongeait la solution »,
je
ne puis m’empêcher de penser que cette peinture d’Aden est assez fait
2227
en Europe, « allongeait la solution », je ne puis
m’
empêcher de penser que cette peinture d’Aden est assez faite pour y co
2228
ale des conditions matérielles de la vie humaine.
Je
crois que l’homme ne peut être transformé que spirituellement. Et cet
2229
de loin le château d’If et N.-D. de la Garde : «
J’
étais servi — s’écrie-t-il. — Les premiers emblèmes venus à ma rencont
2230
i — s’écrie-t-il. — Les premiers emblèmes venus à
ma
rencontre étaient justement les deux objets les plus révoltants de la
2231
se demande M. G. Marcel. L’orgueil tout d’abord,
je
n’hésite pas à le déclarer. On m’arrêtera en me faisant observer que
2232
l tout d’abord, je n’hésite pas à le déclarer. On
m’
arrêtera en me faisant observer que cet orgueil n’a pas un caractère p
2233
, je n’hésite pas à le déclarer. On m’arrêtera en
me
faisant observer que cet orgueil n’a pas un caractère personnel, puis
2234
hvicg nous entretient n’est l’Esprit de personne.
Je
répondrai tout d’abord que c’est ou que cela veut être l’Esprit de to
2235
ns la sphère des abstractions les plus exsangues.
Je
pense quant à moi qu’un idéalisme de cette espèce est inévitablement
2236
abstractions les plus exsangues. Je pense quant à
moi
qu’un idéalisme de cette espèce est inévitablement coincé entre une p
2237
e matérialisme historique de l’autre. La preuve,
je
m’amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communist
2238
atérialisme historique de l’autre. La preuve, je
m’
amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communiste,
2239
ion, celui, en somme, de l’imperfection du monde.
Je
pense que tout chrétien conscient des problèmes de ce temps, souscrir
2240
besoin plus que quiconque de principes définis —
je
ne dis pas de cadres — qui lui servent de thèmes dans ses variations,
2241
Si vous désirez savoir comment cela s’applique à
mon
histoire, dit l’auteur dans sa préface, lisez-la, et si vous la lisez
2242
rrive avant qu’ils n’aient lu eux-mêmes le livre.
J’
espère que les critiques ne le diront pas non plus ; mais je sais que
2243
ue les critiques ne le diront pas non plus ; mais
je
sais que c’est beaucoup leur demander. » Eh bien ! non, c’est au cont
2244
notre auteur : « La veille de la Chandeleur 1909,
je
fus reçu dans le sein de l’Église catholique… le seul acte de ma vie
2245
s le sein de l’Église catholique… le seul acte de
ma
vie que je suis parfaitement certain de n’avoir jamais regretté. » Bl
2246
e l’Église catholique… le seul acte de ma vie que
je
suis parfaitement certain de n’avoir jamais regretté. » Blanche, angl
2247
ait point ébranlé sa foi, la princesse répond : «
Je
ne crois pas, j’espère que non ; bien qu’il soit difficile, quelquefo
2248
sa foi, la princesse répond : « Je ne crois pas,
j’
espère que non ; bien qu’il soit difficile, quelquefois, me semble-t-i
2249
que non ; bien qu’il soit difficile, quelquefois,
me
semble-t-il, de savoir exactement quelle foi on a. » Plus tard elle a
2250
ard elle avoue franchement : « … dans nos églises
j’
éprouve un sentiment de détresse aiguë, ou bien je m’y ennuie. » Et l’
2251
j’éprouve un sentiment de détresse aiguë, ou bien
je
m’y ennuie. » Et l’on découvre soudain que cette femme, qui a subi sa
2252
prouve un sentiment de détresse aiguë, ou bien je
m’
y ennuie. » Et l’on découvre soudain que cette femme, qui a subi sans
2253
ez à l’église le dimanche ? — Oui, tante Harriet,
j’
y vais. — Tante Harriet eut un soupir de soulagement. La question étai
2254
ger, induits en tentation, induits en discussion.
Je
sais bien que tout changement de confession ramène les mêmes argument
2255
au père Michaël.) Vous comprenez tout à présent.
Je
vous demande seulement de prier pour moi, car j’ai parfois la sensati
2256
présent. Je vous demande seulement de prier pour
moi
, car j’ai parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux
2257
Je vous demande seulement de prier pour moi, car
j’
ai parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux supporte
2258
prier pour moi, car j’ai parfois la sensation que
ma
misère est plus que je ne peux supporter. La vie humaine me paraît in
2259
i parfois la sensation que ma misère est plus que
je
ne peux supporter. La vie humaine me paraît intolérable. — Elle l’est
2260
est plus que je ne peux supporter. La vie humaine
me
paraît intolérable. — Elle l’est presque, mais pas tout à fait. Il fa
2261
resque la même chose dans le Podere à Florence. —
Je
sens, il est vrai, que j’ai commis des erreurs irréparables. — Vous a
2262
le Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que
j’
ai commis des erreurs irréparables. — Vous avez le droit de vous laiss
2263
-être, en France tout au moins, — du plus actuel,
je
dirais même du plus urgent de tous. Søren Kierkegaard naquit à Copenh
2264
ielle pour Kierkegaard était : Comment deviendrai-
je
chrétien ? Seul un protestant pouvait trouver pareille formule. Le hé
2265
Revue française , chez Fourcade et aux Éditions «
Je
sers ». h. « Kierkegaard », Foi et Vie, Paris, n° 27, mai 1931, p. 3
2266
rature. « Celui qui sait respirer l’atmosphère de
mon
œuvre sait que c’est une atmosphère des hauteurs, que l’air y est vif