1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 unité comme on peut », avoue-t-il franchement. Il me semble bien paradoxal de vouloir unir dans une même philosophie la mo
2 maîtres d’eux-mêmes, c’est-à-dire libres. Et cela me semble d’autant plus paradoxal que M. de Montherlant est justement un
3 ons, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’ avoue bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur le monde à laque
4 ’il n’est pas une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlan
5 sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de
6 utent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre terre et ciel. Mais sa foulée, bondissante et posée, est p
7 du désir de l’air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la dom
8 e dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : «  Je ne demande pas qu’on m’aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils d
9 ui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’ aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils disent : « Tu es notre ca
10 à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils disent : « Tu es notre capitaine.
11  Je ne demande pas qu’on m’aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils disent : « Tu es notre capitaine. » Ces choses ne
12 que parcourent de jeunes et purs courages, donnez- moi votre silence jusqu’à l’heure. Que je taise votre mot de ralliement,
13 es, donnez-moi votre silence jusqu’à l’heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épées. Rien de
14 cision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien ce qu’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’app
15 . Ce qu’on en peut retenir, c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église romaine, quoi qu’
16 n » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’ admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa morale viril
2 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
17 qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du sang. Tout
18 revient souvent lorsqu’on parle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
19 ple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette conclusion pratique : inutile de publier des poèmes. Éluar
20 cation est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poiss
21 n à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’ y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuit
22 se de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidenc
23 fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien  ? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’être pa
24 coïncidence entre l’univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’être parfait
25 ends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’ être parfaitement impénétrables. Je crois même voir que M. Breton sera
26 qui devraient m’être parfaitement impénétrables. Je crois même voir que M. Breton serait un très curieux poète s’il ne s’
27 poème doit être une dictée non corrigée du Rêve. Je reconnais à chaque ligne de Poisson soluble cette « vieillerie poétiq
28 une grande part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dè
29 part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’ empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dès lors, tou
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
30 ie lui-même : « Il y a quelque chose au-dedans de moi . Qu’est-ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont de gauches co
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
31 meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtou
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
32 l’Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
33 ’impartialité. Son art bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman san
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
34 iste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’ imagine son étonnement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois la
35 à son propre corps de doctrines critiques. Dirai- je pourtant que je crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inc
36 rps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant que je crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à g
37 moral, c’est-à-dire rationnel, dit M. Seillière — me paraît infiniment plus forte que celle d’un Maurras ou que celle d’un
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
38 e tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à l
39 utel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seulement co-génération ? Pour
40 cho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’ avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble
41 l’univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’infini
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
42 ts, Synge, Joyce même… Trois noms qui permettent, je crois, de parler d’un grand siècle littéraire irlandais ; ce que d’ai
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
43 on d’idées en faits ou en situations dramatiques. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou
44 e faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi . Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-être du monde d
45 e est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’ embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne
46  : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empir
12 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
47 trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un Romier, un Bainville, quelques a
48 a bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à la place ? Nos pens
49 aient à l’action, c’est encore pour cultiver leur moi . Ils y cherchent un fortifiant, je ne sais quelle excitation, quelle
50 cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortifiant, je ne sais quelle excitation, quelle révélation ou quel oubli. C’est un
51 listes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de ro
52 n d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur.
53 souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi , pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités ne
54 équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons po
55 rs ». « Pour nous, le salut n’est nulle part… » «  Je comprends la révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu »
56 end en vain sa Révélation : « C’est peut-être que je suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché
57 ne s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’
58 ’est vertu que de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cult
59 e de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultaném
60 n moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’
61 ient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfendable de tout point de vue…
62 ’acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’ avais goûté à l’alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous ch
63 ectuel sur lequel tout apparaît inutile et vain ? Je cite ces phrases, tirées d’un récit d’ailleurs admirable4, de Louis A
64 es, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m
65 pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’empêchero
66 i toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’ empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’orgueil
67 d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’orgueil, sachant une chose si forte, de
68 ien que l’orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si hau
69 la perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité psychologique d’une attitude par aill
70 on sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur
71 d’Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « g
72 lides suffirait à restaurer une élite, efficace. ( Je vois Jean Prévost, deux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois
13 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
73 uer Mme Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai- je que l’abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes l
74 s les femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’ agace un peu ? C’est une vétille. s. « C.-C. Rivier : L’Athée (Payot
14 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
75 tre qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthéti
76 es fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et
15 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
77 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la dé
78 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale
79 ite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me per
80 ssagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vér
81 je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se re
82 ous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan v
83 de tout ce qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où el
84 vait-il le courage de prier… u. « René Crevel : Mon corps et moi », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
85 urage de prier… u. « René Crevel : Mon corps et moi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 
16 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
86 a de plus protestant — mais oui, M. Journet — et je ne crois pas qu’il puisse se produire ailleurs qu’en terre romande. C
87 vaincre. Après les exposés de Janson, de Brémond, j’ en sais plusieurs qui ont ainsi « lâché » pas mal de préjugés en matiè
88 ue chose de définitif à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacqu
89 rochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50,
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
90 tence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contemporaine ». Pures géométries de ver
18 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
91 einte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi , qui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de toute vie. Ha 
92 ois mots commence le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je sens très bien cette force — ic
93 ce le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du p
94 e. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied —, ces désirs, ce c
95 très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied —, ces désirs, ce corps… J’ai un passé à moi, un milieu,
96 e — ici, je tape du pied —, ces désirs, ce corps… J’ ai un passé à moi, un milieu, des amis, ce tic. Mais encore, tant d’au
97 du pied —, ces désirs, ce corps… J’ai un passé à moi , un milieu, des amis, ce tic. Mais encore, tant d’autres forces et ta
98 tant de bonheurs ou de dégoûts étranges viennent m’ habiter ; je ne sais plus… Je suis beaucoup de personnages, faudrait c
99 heurs ou de dégoûts étranges viennent m’habiter ; je ne sais plus… Je suis beaucoup de personnages, faudrait choisir. Vous
100 ts étranges viennent m’habiter ; je ne sais plus… Je suis beaucoup de personnages, faudrait choisir. Vous me direz qui je
101 s beaucoup de personnages, faudrait choisir. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent v
102 personnages, faudrait choisir. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages
103 ges, faudrait choisir. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je pui
104 qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le mon
105 st le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la
106  les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’on me fit comp
107 s choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’on me fit compren
108 abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une habit
109 er follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ; je devins si faible et démuni, livré
110 e autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ; je devins si faible et démuni, livré aux regards d’une foule absurde, bi
111 nir un secret très simple, et un peu narquois ils me considéraient avec une pitié curieuse : je me sentis nu, tout le mond
112 is ils me considéraient avec une pitié curieuse : je me sentis nu, tout le monde devait voir en moi une tare que j’étais s
113 ils me considéraient avec une pitié curieuse : je me sentis nu, tout le monde devait voir en moi une tare que j’étais seul
114 e : je me sentis nu, tout le monde devait voir en moi une tare que j’étais seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qu
115 nu, tout le monde devait voir en moi une tare que j’ étais seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qui me rendait tou
116 moi une tare que j’étais seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qui me rendait toutes choses si méticuleusement ins
117 seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qui me rendait toutes choses si méticuleusement insupportables, si cruelleme
118 sentes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer
119 , je la soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à combattre des imperfections de détail dont je
120 onnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à combattre des imperfections de détail dont je m’exagérais l
121 rrer à combattre des imperfections de détail dont je m’exagérais l’importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressa
122 r à combattre des imperfections de détail dont je m’ exagérais l’importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais,
123 rais l’importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jour où je m’avouai un trouble que je me refusa
124 par feintes que je progressais, jusqu’au jour où je m’avouai un trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire.
125 r feintes que je progressais, jusqu’au jour où je m’ avouai un trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire. Ce
126 sais, jusqu’au jour où je m’avouai un trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire. Cette amertume au fond de
127 s, jusqu’au jour où je m’avouai un trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire. Cette amertume au fond de tou
128 e tous les plaisirs, cette envie de rire quand il m’ arrivait un ennui, cette incapacité à jouir de mes victoires, à pleure
129 m’arrivait un ennui, cette incapacité à jouir de mes victoires, à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait les pers
130 ncapacité à jouir de mes victoires, à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait les personnages auxquels je me prêtai
131 s, ce malaise seul liait les personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon êt
132 ce malaise seul liait les personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon être
133 es auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’éta
134 ais en même temps que je le découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était levée. Ce fut elle qui m’e
135 veugle de violence s’était levée. Ce fut elle qui m’ entraîna sur les stades où je connus quelle confiance sourde aux contr
136 vée. Ce fut elle qui m’entraîna sur les stades où je connus quelle confiance sourde aux contradictions intimes exige un ac
137 saient brusquement les éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était un des pr
138 rusquement les éléments désaccordés de ce moi que j’ avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était un des premiers
139 s de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant, m’ écriai-je — c’était un des premiers jours du printemps —, l’heure est
140 oi que j’avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai- je — c’était un des premiers jours du printemps —, l’heure est venue de
141 omme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui
142 e, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus une do
143 mpte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus une douleur rare que j’aimai
144 ui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus une douleur rare que j’aimais dans ces brut
145 ma joie ! » Ce n’était plus une douleur rare que j’ aimais dans ces brutalités, c’était ma liberté agissante. J’allais pli
146 ur rare que j’aimais dans ces brutalités, c’était ma liberté agissante. J’allais plier des résistances à mon gré, agir sur
147 ans ces brutalités, c’était ma liberté agissante. J’ allais plier des résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le s
148 berté agissante. J’allais plier des résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans
149 ur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’ étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’important, c’
150 t de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me voici devant quelques problèmes dont je sais qu’il est absolument vai
151 t résolu. Me voici devant quelques problèmes dont je sais qu’il est absolument vain de prétendre les résoudre, mais que je
152 solument vain de prétendre les résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’appelle vivre. Problème
153 qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base. J’ aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a que ce but
154 re. Problème de Dieu, à la base. J’aurai garde de m’ y perdre au début d’une recherche qui n’a que ce but de me rendre mieu
155 re au début d’une recherche qui n’a que ce but de me rendre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je m’arrête parfois,
156 rendre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore
157 ndre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je m’ arrête parfois, heureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore une
158 ment. En priant, je m’arrête parfois, heureux : «  J’ ai donc la foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne f
159 i donc la foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas attendre immobile dans sa prière, qu’une révé
160 tion vienne chercher l’âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir, et
161 ne recevrai pas une foi, mais peut-être arriverai- je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me
162 c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi
163 révélation, c’est en me rendant plus parfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que
164 rfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi. Je ne suis dign
165 oies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce que je puis devenir
166 d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi . Je ne suis digne que par ce que je puis devenir. Se perfectionner :
167 ord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce que je puis devenir. Se perfectionner : cela
168 ecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce que je puis devenir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver l’instinct
169 e peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les cultiver pour cela
170 s les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels :
171 pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma
172 Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complic
173 cher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin. D’abord do
174 eplacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin. D’abord donc, choisir Mes instincts,
175 ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite, les éduquer, se
176 es complices de mon destin. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le conco
177 quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver ces limites : la v
178 osent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver ces limites : la vie moderne,
179 nt le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’ attache particulièrement à retrouver ces limites : la vie moderne, méc
180 uivant les directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter
181 les directions de moindre résistance. Mais je ne m’ emprisonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter plus
182 Mais je ne m’emprisonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres
183 est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce lent effort naît une modestie que je m’enorgue
184 records. De ce lent effort naît une modestie que je m’enorgueillis un peu de connaître ; et de cette volonté d’un meilleu
185 cords. De ce lent effort naît une modestie que je m’ enorgueillis un peu de connaître ; et de cette volonté d’un meilleur m
186 de connaître ; et de cette volonté d’un meilleur moi , une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’appa
187 meilleur moi, une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel
188 méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’ apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, une vue stupid
189 m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, une vue stupide sur mon état qui peut m’être dangereuse. (On don
190 arrêt artificiel dans ma vie, une vue stupide sur mon état qui peut m’être dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en l
191 ans ma vie, une vue stupide sur mon état qui peut m’ être dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en la nommant ; or je
192 On donne corps à une faiblesse en la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans le monde
193 es4.) Et demain peut-être, agir dans le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme elle veut un
194 .) Et demain peut-être, agir dans le monde, si je m’ en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme elle veut une c
195 époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un ensemble social et dans la mesure où j’en dépends, j
196 partie d’un ensemble social et dans la mesure où j’ en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transform
197 nsemble social et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il
198 mble social et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y
199 et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’ employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y faut une do
200 à sa transformation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on. L’avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur
201 ais il y faut une doctrine, me dit-on. L’avouerai- je , quand je médite sur une doctrine possible, sur une systématisation d
202 aut une doctrine, me dit-on. L’avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systématisation de mes peti
203 une doctrine possible, sur une systématisation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite le sentiment d’être dans un débat
204 r une systématisation de mes petites certitudes5, j’ éprouve vite le sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable
205 re dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vie : comment surmonter un malaise sans cesse renaissant, comment m’a
206 rmonter un malaise sans cesse renaissant, comment m’ adapter à l’existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, e
207 e renaissant, comment m’adapter à l’existence que m’ imposent mon corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puiss
208 t, comment m’adapter à l’existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puissance de joui
209 corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même temps que ma puissance d’agir. Que tout c
210 ugmenter ma puissance de jouir, en même temps que ma puissance d’agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comp
211 d’agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nou
212 comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’ emporte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre l’offensive — au
213 r gage du divin… Reprendre l’offensive — au soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà je sens un sou
214 age du divin… Reprendre l’offensive — au soir, je m’ amuserai à mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà je sens un sourir
215 u soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà je sens un sourire — en songeant à ces raisonnements que
216 serai à mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà je sens un sourire — en songeant à ces raisonnements que je me tiens — p
217 un sourire — en songeant à ces raisonnements que je me tiens — plisser un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je l
218 sourire — en songeant à ces raisonnements que je me tiens — plisser un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le d
219 es raisonnements que je me tiens — plisser un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme un écho p
220 ser un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’ancienne
221 es folies… Combat, oscillations silencieuses dans ma demi-conscience. Joie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide.
222 ant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l’emportent d’
223 iste, qu’ils l’emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ; je pense au monde. Chant
224 flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’ écoute le vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’é
225 , mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent… Je vais é
226 onde. Chant des horizons, images qui s’éclairent… Je vais écrire autre chose que moi, je vais m’oublier, me perdre dans un
227 s qui s’éclairent… Je vais écrire autre chose que moi , je vais m’oublier, me perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est s
228 s’éclairent… Je vais écrire autre chose que moi, je vais m’oublier, me perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est se su
229 rent… Je vais écrire autre chose que moi, je vais m’ oublier, me perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est se surpasser)
230 is écrire autre chose que moi, je vais m’oublier, me perdre dans une vie nouvelle : (Créer, c’est se surpasser). J’entends
231 s une vie nouvelle : (Créer, c’est se surpasser). J’ entends des phrases qu’il ne faut pas encore comprendre — tout est si
232 s encore comprendre — tout est si fragile —, mais je sais quelle légèreté puissante, quelle confiance vont guider ce corps
233 … Créer, ou glisser au plaisir ? Êtes-vous belle, mon amie, — et vous, ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne v
234 u plaisir ? Êtes-vous belle, mon amie, — et vous, ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne vous désire. (Ce dési
235 belle, mon amie, — et vous, ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne vous désire. (Ce désir qui me rend fort pou
236 ous, ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne vous désire. (Ce désir qui me rend fort pour — autre chose…) Ô lux
237 s aime moins que je ne vous désire. (Ce désir qui me rend fort pour — autre chose…) Ô luxe, ne pas aimer son plaisir ? Je
238 autre chose…) Ô luxe, ne pas aimer son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4. La sincérité absolue, « scientifique »
239 alut. 4. La sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Une attention trop directe et soutenue modif
240 irecte et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi , la sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis por
241 érité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à écrire des idées qui m’aideront. Une fois écrites elles
242 spontanément je suis porté à écrire des idées qui m’ aideront. Une fois écrites elles prennent un caractère de certitude qu
243 ère de certitude qu’elles n’avaient pas encore en moi . C’est en quoi ma sincérité est tendancieuse. 5. Quant à adhérer à u
244 ’elles n’avaient pas encore en moi. C’est en quoi ma sincérité est tendancieuse. 5. Quant à adhérer à une doctrine toute
245 5. Quant à adhérer à une doctrine toute faite, ce me semble une dérision complète. Je m’étonne qu’après tant d’expériences
246 toute faite, ce me semble une dérision complète. Je m’étonne qu’après tant d’expériences ratées on puisse encore se persu
247 ute faite, ce me semble une dérision complète. Je m’ étonne qu’après tant d’expériences ratées on puisse encore se persuade
248 tème n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toute
249 ns et les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je juge bon d’éli
250 raissent légitimes chez d’autres, même celles que je juge bon d’éliminer de moi. Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mo
251 autres, même celles que je juge bon d’éliminer de moi . Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mouvement normal » de vie. f
19 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
252 s, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)g Je ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violenc
253 (10 juillet 1926)g Je ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de volupté », je me sen
254 s de ce « long songe de violence et de volupté », je me sens envahi par un rythme impérieux au point qu’il faut que certai
255 e ce « long songe de violence et de volupté », je me sens envahi par un rythme impérieux au point qu’il faut que certaines
256 périeux au point qu’il faut que certaines voix en moi taisent leur protestation, étouffées par des forces qui se lèvent. Ca
257 la fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence t
258 t de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui é
259 é de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciser
20 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
260 orte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces confusions.
261 ’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines pages sur Jérusalem qui touchent particulièrement u
262 e et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’Occidental,
263 nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux autres part
264 la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’ aurais voulu le faire des deux autres parties du volume, d’une importa
265 te le ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’ avoue que m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait
266 suré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’ a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir part
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
267 Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)w Je ne crois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil d’essais, M. F
268 e biais l’œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusion. Mais s’il est bien établi que les lois
269 r toute communication directe entre l’œuvre et le moi , comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le
270 l’Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses beaucoup trop absolues. M. Fern
271 st-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une discussion de ces thèses subtiles, d’autant q
272 autant que la position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment l’inter
273 l’homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thème qui revient dans la plupart de ce
274 homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thème qui revient dans la plupart de ces e
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
275 Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)x J’ éprouve quelque gêne à porter un jugement littéraire sur ce nouveau to
276 s prairies espagnoles pleines de simple grandeur, j’ ai supporté mille fastidieux détails techniques et des délires taurolo
277 ctacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’ admire dans ces Bestiaires, presque malgré leur sujet trop pittoresque
278 de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloire future sur des valeurs plus humai
23 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
279 mières et des odeurs, espérant entrer là-bas dans je ne sais quelle harmonie plus reposante. Cette imparfaite accoutumance
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
280 paraison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence européenne libre peut souscrire aux crit
25 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
281 s votre idéal ou envers les fluctuations de votre moi  ? Votre sincérité est-elle consentement immédiat à toute impulsion sp
282 rit ailleurs : « En chaque être, le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne e
283 u fond de l’âme humaine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéres
284 e, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je défends l’acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà
285 ndis qu’en littérature je défends l’acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en s
286 voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere. Premier exemple. — Je m’assieds à mon bureau, je prends u
287 oi-même Noli me tangere. Premier exemple. —  Je m’assieds à mon bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire
288 même Noli me tangere. Premier exemple. — Je m’ assieds à mon bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire ce
289 me tangere. Premier exemple. — Je m’assieds à mon bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire ce que je trouv
290 Premier exemple. — Je m’assieds à mon bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire ce que je trouve en moi (s
291 ieds à mon bureau, je prends une feuille blanche, je vais écrire ce que je trouve en moi (sentiments, idées, souvenirs, dé
292 prends une feuille blanche, je vais écrire ce que je trouve en moi (sentiments, idées, souvenirs, désirs, élans, hésitatio
293 uille blanche, je vais écrire ce que je trouve en moi (sentiments, idées, souvenirs, désirs, élans, hésitations, obscurités
294 ns, hésitations, obscurités, etc.). Supposons que j’ éprouve un désir d’action vive, un élan vers certain but précis. Ou b
295 n vive, un élan vers certain but précis. Ou bien j’ aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettr
296 ste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, pui
297 le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisqu
298 mettrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gest
299 plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences ma
300 quences matérielles. Ce n’est plus l’élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est le frein lui-mêm
301 lan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est le frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de
302 alement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’ aboutis : ce quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que l’élan ap
303 ne faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’ a retenu d’accomplir ce que l’élan appelait.   Second exemple. — J’ép
304 plir ce que l’élan appelait.   Second exemple. —  J’ éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ?
305 ouve le besoin de faire le point : à quoi en suis- je , qui suis-je ? Je revois des actes accomplis, je revis plus ou moins
306 n de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis- je  ? Je revois des actes accomplis, je revis plus ou moins fortement des
307 faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accomplis, je revis plus ou moins fortement des sent
308 -je, qui suis-je ? Je revois des actes accomplis, je revis plus ou moins fortement des sentiments que je crois avoir éprou
309 revis plus ou moins fortement des sentiments que je crois avoir éprouvés à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —,
310 ments que je crois avoir éprouvés à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certaines s
311 à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certaines sensations profondes et indéfinie
312 de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certaines sensations profondes et indéfinies (telle sensa
313 rrures, personne ne sait la richesse de ta vie…). J’ écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes, je retrouve un
314 ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes, je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se pr
315 Les gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur
316 souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plus précise, ce
317 venir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plus précise, cette
318 ssés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plus précise, cette minute est baign
319 e du souvenir. Si l’un de ces deux procédés peut m’ apprendre quelque chose, c’est bien le second. La qualité des souvenir
320 st bien le second. La qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le m
321 e second. La qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le moment que
322 l me livre me renseigne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne sau
323 tement, non sur mon passé, mais sur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la vérité sur so
324 uée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’ en conviens. Pourtant, n’est-ce pas le schéma de tout un genre littéra
325 st le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient re
326 iration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation de mes désirs
327 e qui était élan devient recul, et l’évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais
328 nt recul, et l’évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais me regarder sans rien
329 e mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ ai cru que je pourrais me regarder sans rien toucher en moi. En réalit
330 anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais me regarder sans rien toucher en moi. En réalité, je n’assis
331 e restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais me regarder sans rien toucher en moi. En réalité, je n’assiste pas à moi
332 que je pourrais me regarder sans rien toucher en moi . En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de mo
333 me regarder sans rien toucher en moi. En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les
334 uction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corp
335 nner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstrati
336 ondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi , le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cy
337 Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’il s’acha
338 qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui. J’ ai dit : ravages du sincérisme. C’est plus exactement faillite qu’il f
339 littérature et en morale. Impossibilité de faire mon autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon auto
340 . Impossibilité de faire mon autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me c
341 t moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus laid que nature. Faut-il conc
342 e temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : « L’ana
343 emps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : « L’analys
344 vec Gide : « L’analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il
345 ologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non.
346 gique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Ca
347 es en regard des dangers que la sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littéraire que dans celui d
348 t Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi , moins le principe unificateur ». De quelques sophismes libérateur
349 echerche, puis l’acceptation de toute tendance du moi , je réponds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin
350 che, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de m
351 nds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne
352 ologie ou que le « style » est de l’homme même J’ en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût
353 homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’
354 peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’appeler sincérité et qui m
355 beaucoup continuaient d’appeler sincérité et qui me devenait inintelligible en même temps qu’odieux. Au hasard de quelque
356 temps qu’odieux. Au hasard de quelques lectures, je pris note des passages suivants (les paraphraser serait d’une ingrati
357 refusent à toute intervention qui altérerait leur moi  ; ils ne souhaitent que d’être leur propre témoin, intelligent mais i
358 pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’ en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle
359 j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque minute de ma joie est plus réel que cel
360 intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’ appelle en chaque minute de ma joie est plus réel que celui qu’une ana
361 e, ce moi idéal que j’appelle en chaque minute de ma joie est plus réel que celui qu’une analyse désolée s’imaginait reten
362 pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais- je que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ?
363 que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nomme
364 ces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’ accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hypocrisie Non, non 
365 ela de l’hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’ annonce : Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère su
366 on, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .................................
367 enter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’avais déjà invoquée, hypocrisie consolante et l
368 Valéry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’avais déjà invoquée, hypocrisie consolante et libératrice. Mais tu
369 ée, hypocrisie consolante et libératrice. Mais tu m’ offrais un visage un peu crispé, signe d’une ironie secrète et pour mo
370 un peu crispé, signe d’une ironie secrète et pour moi douloureuse encore. Pitoyable, trop visiblement, tu prêtais bien quel
371 op visiblement, tu prêtais bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyranni
372 tu prêtais bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant
373 quelques voiles à mon dégoût d’un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais un pli
374 Mais un pli de ta lèvre, un peu sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma
375 ans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une sy
376 éal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une symphonie de joies ém
377 haque être un plus prenant sourire. Cependant que ma joie — un état de grâce, un amour — ne pouvait se satisfaire de telle
378 rivée. Alors, acquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’ell
379 nvite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, ve
380 te que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’ élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers
381 iche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que momentanément je ch
382 ant de rires amis, vers tout ce que momentanément je choisissais de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût
383 qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilation, non pas ce but peut-être dérisoire vers quoi je me portai
384 ion, non pas ce but peut-être dérisoire vers quoi je me portais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me concilia
385 , non pas ce but peut-être dérisoire vers quoi je me portais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me conciliais
386 rs quoi je me portais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me conciliais pour des retours possibles. C’est ainsi
387 rtais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me conciliais pour des retours possibles. C’est ainsi que fidèle à so
388 is, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me conciliais pour des retours possibles. C’est ainsi que fidèle à soi-m
389 oit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exige une politique des sentiments plus subtile et, je pense, m
390 ige une politique des sentiments plus subtile et, je pense, moins vulgaire que cette agilité offensive qu’on appelle dans
391 arti. La sincérité crée en nous un fait accompli. J’ appelle hypocrisie envers soi-même une volonté — si profonde qu’elle n
392 s besoin de s’expliciter pour être efficace — qui m’ interdit de nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’est peu
393 être efficace — qui m’interdit de nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’est peut-être qu’une espèce de souff
394 rté plus précieuse que toute certitude… Ô vérité, ma vérité, non pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme je veux
395 te certitude… Ô vérité, ma vérité, non pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable
396 ité, non pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé
397 pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le
398 mier exemple, ce serait le récit des gestes qu’il m’ aurait fait commettre. Manifester est plus sincère qu’analyser. 2. D’
26 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
399 mpathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi , le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler no
27 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
400 Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab «  Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne s
401 nvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité d
402 Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi
403 ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glab
404 on d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux
405 sans rire : « À mort ceux qui paraphrasent ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de la persécution, qui se cherche
406 sse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’ empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi
407 la jeune littérature française. Il le proclame «  J’ appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut,
408 un des plus significatifs du romantisme nouveau. J’ ai nommé Rousseau, Nerval Musset : mais voyez un Rousseau sans tendres
28 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Billets aigres-doux (janvier 1927)
409 i fume… Et tu laisses, ô col roide, En souffrance mes baisers. L’amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô
410 lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensonge tu, Je m’enfuis vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous. L’horaire
411 vres sitôt que jointes, Ô dernier mensonge tu, Je m’ enfuis vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous. L’horaire dic
412 icte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’un faux nom. c. « Billets aigre
29 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
413 ies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme
30 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
414 Les journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un peu prétentieux de vous écrire au moment où je va
415 journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’ excuse : c’est un peu prétentieux de vous écrire au moment où je vais
416 st un peu prétentieux de vous écrire au moment où je vais me suicider, d’autant plus que vous n’y croirez pas — et pourtan
417 u prétentieux de vous écrire au moment où je vais me suicider, d’autant plus que vous n’y croirez pas — et pourtant… Il fa
418 n’y croirez pas — et pourtant… Il faut aussi que je vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris
419 aussi que je vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la p
420 s cette phrase quelque allusion de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, com
421 iles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus
422 lement ; l’écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et
423 n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et c’est là que
424 reux dans mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ai découvert que vous e
425 is je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ ai découvert que vous existiez en moi, à certain désagrément que j’eus
426 c’est là que j’ai découvert que vous existiez en moi , à certain désagrément que j’eus de vous voir si entourée… D’autres f
427 e vous existiez en moi, à certain désagrément que j’ eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage d
428 ue j’eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’ava
429 ourage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’ avais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il
430 n, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la prom
431 s demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent
432 mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’ en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d
433 vait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous les
434 racher à une obsession secrètement attirante ; et je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez v
435 ètement attirante ; et je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je dis m
436 telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sans doute pl
437 iez vaguement la menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sans doute plus qu’ils ne vous attiraie
438 plus qu’ils ne vous attiraient. Mais, maintenant, je pense que ces regards croisés n’avaient aucune signification et que m
439 rds croisés n’avaient aucune signification et que mon anxiété seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin l’orchestre
440 lque intention. Quand enfin l’orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit un signe discret, et dé
441 e intention. Quand enfin l’orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit un signe discret, et déjà
442 estre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit un signe discret, et déjà il se préparait à vous rendre at
443 arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit un signe discret, et déjà il se préparait à vous rendre attentive
444 et déjà il se préparait à vous rendre attentive à ma présence… Mais, alors, je ne sais quel démon du malheur me paralysa.
445 vous rendre attentive à ma présence… Mais, alors, je ne sais quel démon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’im
446 ce… Mais, alors, je ne sais quel démon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’image d’un couple heureux et banal,
447 rs, je ne sais quel démon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’image d’un couple heureux et banal, votre sourir
448 uple heureux et banal, votre sourire répondant au mien , comme on voit au dénouement des films populaires et sur des cartes p
449 strées. Déjà la foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé ; vous disparaissiez au milieu d’un co
450 ge de rires empressés. Une autre danse reprenait. Je sentis une invincible lassitude me saisir et m’assis à l’écart. On me
451 nse reprenait. Je sentis une invincible lassitude me saisir et m’assis à l’écart. On me demandait, en passant, si j’étais
452 . Je sentis une invincible lassitude me saisir et m’ assis à l’écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je dé
453 ible lassitude me saisir et m’assis à l’écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’un geste inc
454 ’assis à l’écart. On me demandait, en passant, si j’ étais malade. Je désignais d’un geste incertain quelques bouteilles de
455 . On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’un geste incertain quelques bouteilles de champagne vides
456 nne l’ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jo
457 eurs. Même, je fus obligé de confier à un ami que j’ en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelai
458 que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillère
459 archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées, le cie
460 ssue, pesant comme l’envie d’un sommeil sans fin… J’ avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aub
461 fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et le
462 ans un matin sourd, frileux, qui avait la nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table en désordr
463 nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’ écrivis à ma table en désordre où je venais de jeter mon col de smokin
464 rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table en désordre où je venais de jeter mon col de smoking et un œill
465 ques mots que j’écrivis à ma table en désordre où je venais de jeter mon col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d
466 ivis à ma table en désordre où je venais de jeter mon col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme don
467 esse d’une autre femme dont le seul défaut fut de m’ aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée, et ce refus au somme
468 us grand que le chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme une femme nue dans une chambre étroite…
469 ir, comme une femme nue dans une chambre étroite… J’ ai dormi quelques heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par la cr
470 ste, tout enfiévré par la crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous rencontrais parfois, du temps qu
471 e du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous rencontrais parfois, du temps que j’ignorais vous aimer. En sort
472 rues où je vous rencontrais parfois, du temps que j’ ignorais vous aimer. En sortant du bal, au vestiaire, je vous avais en
473 rais vous aimer. En sortant du bal, au vestiaire, je vous avais entendue donner un rendez-vous au thé du Printemps. J’ai r
474 tendue donner un rendez-vous au thé du Printemps. J’ ai rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasse
475 p souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, je pourrai l
476 devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais- je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, je pourrai lui dire tr
477 « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, je pourrai lui dire très vite quelques mots s
478 je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, je pourrai lui dire très vite quelques mots si bouleversants qu’avant le
479 ots si bouleversants qu’avant le dernier étage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient
480 ’avant le dernier étage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impude
481 ant le dernier étage… » Je délirais, bien sûr. Je m’ imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemme
482 irais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais paraître si per
483 es me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais paraître si perdu. Chaque fois qu’un paquet de dix personnes s
484 ngouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’ éprouvais un petit arrachement, comme précisément un enfant qui monte
485 sément un enfant qui monte pour la première fois… Je me disais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en
486 ent un enfant qui monte pour la première fois… Je me disais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en rou
487 e pour la première fois… Je me disais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ascenseur de
488 disais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monte
489 i laqué, souriante… Enfin, un peu après 6 heures, je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie
490 es autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ ai cru vous reconnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’av
491 econnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais pa
492 précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par vous voir partout. Chaque vis
493 ais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par vous voir partout. Chaque visage de femme révélait soud
494 pendant ce temps, vous pouviez paraître enfin où mon désir surmené vous appelait encore, haletant. Et le temps passait, à
495 chant désespéré qui vous appelait, assourdissant mes pensées ; et ces élans réticents, maladroits, contradictoires… Un aut
496 s… Un autobus de luxe s’était arrêté tout près de moi . Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai.
497 autobus de luxe s’était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n
498 un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune fem
499 e qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas la regarder, à cause d’une incertitude qui redonn
500 d’une incertitude qui redonnait tout son empire à ma timidité. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de
501 on empire à ma timidité. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en
502 l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je descendis derrière elle. Mais tout de s
503 ce Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je descendis derrière elle. Mais tout de suite des paraplui
504 el, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je descendis derrière elle. Mais tout de suite des parapluies la dérobèr
505 Mais tout de suite des parapluies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrêtaient avec un si
506 ies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’ attira. Les rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement dou
507 ent avec un sifflement particulièrement doux pour ma fatigue, et ces gens pressés et songeurs respectaient la folie doulou
508 taient la folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur tous des regards angoissés, avides, imploran
509 lie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur tous des regards angoissés, avides, implorants. Oh ! to
510 s, avides, implorants. Oh ! toutes les femmes que j’ ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À minuit, telle
511 g regard de damné. À minuit, tellement épuisé que je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des af
512 damné. À minuit, tellement épuisé que je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des affiches, tout
513 s fin dans les couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix, par bribes de phrases incohérentes. Je
514 in dans les couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix, par bribes de phrases incohérentes. Je vo
515 à haute voix, par bribes de phrases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter
516 employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’ entraîna de force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue.
517 n m’entraîna de force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promes
518 me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’ apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me lais
519 aîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais co
520 la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y p
521 brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parv
522 a promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’a
523 e je me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’ai marché plusieurs heure
524 ux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’ y parvins. Je crois que j’ai marché plusieurs heures avant de retrouve
525 ssa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’ai marché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il
526 eul. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’ ai marché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il doit être mai
527 e j’ai marché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il doit être maintenant 5 heures du matin. Premiers appels d’aut
528 n. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigineusement, par cet
529 ais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigineusement, par cette aube incolore. Il y a vingt-quatre heures
530 e aube incolore. Il y a vingt-quatre heures donc, j’ étais encore au bal. Cette constatation machinale ne correspond à rien
531 constatation machinale ne correspond à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souvien
532 correspond à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette décep
533 rit. Peut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupportable et définitiv
534 eut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupportable et définitive de m
535 de cette déception insupportable et définitive de mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoquer vo
536 ception insupportable et définitive de mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoquer votre visage
537 e mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoquer votre visage. Peut-être ne vous ai-je pas vraimen
538 encore évoquer votre visage. Peut-être ne vous ai- je pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destruction, ce r
539 pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destruction, ce rongement, cette sournoise recherche de tout ce qui m
540 ngement, cette sournoise recherche de tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette t
541 cherche de tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre
542 n être… Le revolver est chargé, sur cette table. ( Je le caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort a
543 , entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends plus
544 hrases.) Mais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je de
545 e ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquo
546 e geste de ma mort aussi me lasse, l’image que je m’ en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi j
547 a mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi je souffre, c
548 que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance,
549 n forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance, ce que c’e
550 prends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie, ma
551 ce que c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin
552 c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin… Il fau
553 qu’un glissement gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne
554 y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai pas son nom. f. « Lettre du survivant », Revue de Bell
31 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
555 n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux interprétations sym
556 erprétations symboliques au moins ; de ne pouvoir m’ empêcher d’y songer sans cesse en lisant cette « tragédie » ; de ne po
557 esse en lisant cette « tragédie » ; de ne pouvoir m’ empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus ou moins consc
558 sez simples dont l’étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calem
559 licité à chausse-trappes, cette habileté surtout. Je ne sais si ce malicieux Gagnebin (non pas Elie) pensait à quelqu’un l
560 rop exercé avant de se lancer sur la corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes, les qual
561 la corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’ admire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de cette pièce sont
562 s qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même indiquer aucun endroit par où elle pèche contre les p
563 l voulait. Et pourtant cette admirable machine ne m’ inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprise
564 ant cette admirable machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces my
565 ù il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépassent, feignons d’en être l’organisateur », disait le photographe
566 s parfum.   (Tout de même, Cocteau est un poète : j’ en verrais une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais pa
567 teau est un poète : j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par m
568 ais une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5. M. Zimmer,
32 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
569 Edmond Jaloux, Ô toi que j’ eusse aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’exemple rare d’
570 ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux, j’ y vois un signe charmant d’amitié de l’aîné au plus jeune, lequel envo
571 ’amis inconnus. af. « Edmond Jaloux : Ô toi que j’ eusse aimée… (Plon, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Gen
33 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
572 re, légèrement coloré. Le principe est simple : «  Je vous aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ;
573 Quelques miracles qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégage
574 el renversé, maisons obliques, montagnes russes. ( J’ ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin
575 et nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même essence que le n
576 is le moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, murmure : « On va tous devenir fous ! » — « Hé ! lu
577  : « On va tous devenir fous ! » — « Hé ! lui dis- je , si seulement. » Mais tout de même, là par exemple, où nous ne pouvon
578 é Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginair
579 e le Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcière transforme un homme en chien, cela n’a rien d’é
580 ées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soir crée ma chambre en tournant un commutateur. Le vrai m
581 avec leur baguette, pour moi qui chaque soir crée ma chambre en tournant un commutateur. Le vrai miracle du cinéma, c’est,
582 et l’espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmonie… C’est une réalité aussi réelle que celle don
34 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
583 la dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi , soif de tout et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’ab
584 . Rops a-t-il trop négligé le rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini
35 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
585 s Aragon, le beau prétexte (avril 1927)j Ah ! je sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de mon être et a saisi
586 sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut
587 n être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fantaisie, même si cela
588 ésormais vibrer à sa fantaisie, même si cela doit m’ anéantir. Hoffmann. I (Notes écrites en décembre 1925, au sorti
589 férence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jeter ce manteau de flammes, p
590 manteau de flammes, puis à qui dédier l’ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon échappé de
591 à-bas dans un rayon échappé des Enfers — auxquels je crois encore, et pas seulement pour le pittoresque. — Attrape !   Il
592 la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de «  Je ne comprends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et l’on pense :
593  » au lieu de « Je ne comprends pas ». On dit : «  Je ne comprends pas », et l’on pense : « C’est donc incompréhensible ».
594 incompréhensible !, trois mots dont l’un savant. Je ne connais pas de meilleur remède contre Dieu. Monsieur, vous avez di
595 st incompréhensible ! » — avec une indignation où j’ admire une pointe d’ironie vraiment supérieure. Car rien ne pouvait mi
596 et dire qu’elle est née dans un café de Paris. «  Je n’attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Riez-en donc, p
597 s un café de Paris. « Je n’attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Riez-en donc, pantins officiels, et vous re
598 iels, et vous repus, et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtr
599 ous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’ essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je m
600 bassement ingénieux : « Si j’essaie un instant de m’ élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puiss
601 t de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun cas servir d’argument à un homme. 
602 e m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun cas servir d’argument à un homme. » V
603 spérer plus aucun pardon. II Novembre 1926. Je viens de retrouver quelques pages écrites il y a un an, tel soir de c
604 ur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais une manière de prophète un brin janséniste chez ce poète.
605 te un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je le verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un
606 de son tempérament vif, insolent et ombrageux. «  J’ appartiens à la grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce
607 des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait l’oser dire comme Aragon sans
608 l’oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de
609 ique — mais la plus belle, — ce qui tressaille et m’ atteint au vif, c’est tout de même un désespoir en quoi je ne vais pas
610 t au vif, c’est tout de même un désespoir en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de
611 tout de même un désespoir en quoi je ne vais pas m’ empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespo
612 te de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapproche
613 de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochemen
614 pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais- je  : le salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cet
615 le que Clément Vautel — et si ce nom revient sous ma plume, comme une mouche qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’ell
616 le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité
617 mobile ne retient rien de la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme é
618 comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici certain sens critique dont on voudrait que soient justicia
619 d Jaloux.) Entre un monsieur en noir : Permettez- moi de me présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critiq
620 x.) Entre un monsieur en noir : Permettez-moi de me présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critique. M
621 urs une ancienne connaissance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà
622 in temps déjà que nous ne nous sommes revus. Mais je suis vos travaux avec intérêt, et il m’a paru que depuis quelque temp
623 vus. Mais je suis vos travaux avec intérêt, et il m’ a paru que depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me suis
624 u que depuis quelque temps… enfin, comment dirais- je … je me suis dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelq
625 e depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me suis dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque u
626 epuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me suis dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque util
627 mps… enfin, comment dirais-je… je me suis dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque utilité… Moi. — Ah 
628 en quelque sorte, vous être de quelque utilité… Moi . — Ah ! oui, oui… c’est cela, utilité,… en effet,… oui, oui, très int
629 en effet,… oui, oui, très intéressant. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop
630 mer, et vous savez ce que cela suppose. Comprenez- moi  : submergés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’aurais en q
631 ergés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’ aurais en quelque manière la prétention… Moi. — Que voilà un singulie
632 ement j’aurais en quelque manière la prétention… Moi . — Que voilà un singulier impertinent de votre part. (Le reconduisant
633 tre part. (Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous
634  », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Mais plus tard, plus ta
635 hode ! (Sort le Sens Critique, un peu bousculé.) Moi . — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derr
636 Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — 
637 s oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). —  J’ attends votre plaisir… III Il y a des gens qui croient avoir tou
638 er du concept de l’esprit celui de Révolution. Et j’ entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-tre
639 à nous, dans tel domaine. Et c’est même ceci que je ne puis pardonner aux surréalistes : qu’ils aient voulu s’allier aux
640 voulu s’allier aux dogmatiques d’extrême gauche. Je ne dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli de crier merde pou
641 ous ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’es
642 ait trop à dire, et puis l’on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton et leurs amis alternativem
643 cher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du moi avec ses recettes garanties, chapelets d’optimisme, tyranniques évide
644 abe, examens de conscience toujours ratés — on ne m’ y prendra plus ! — morales américaines et hygiéniques en tous genres,
645 . 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derri
646 livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennen
647 ndus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennent des France et des B
36 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
648 ues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ailleur
649 ement ivre, et Bettina lui disait à l’oreille : «  Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne e
650 Bettina lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’ aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de
651 j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que
652 menade en bateau À Grego More. Il disait : «  Je suis né pour la mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur d
653 Et l’eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant je suis seul dè
654 pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant je suis seul dès cette heure, et mes amis fuiront un lâche. Parce que je
655 amitié. Pourtant je suis seul dès cette heure, et mes amis fuiront un lâche. Parce que je reviens seul. Mais moi, qui regar
656 te heure, et mes amis fuiront un lâche. Parce que je reviens seul. Mais moi, qui regarde comme de l’autre bord, je songe q
657 fuiront un lâche. Parce que je reviens seul. Mais moi , qui regarde comme de l’autre bord, je songe qu’il est des visites à
658 eul. Mais moi, qui regarde comme de l’autre bord, je songe qu’il est des visites à de certaines grandes dames où je préfér
659 l est des visites à de certaines grandes dames où je préférais — et lui aussi — me rendre seul et sans argent. Je ne voula
660 es grandes dames où je préférais — et lui aussi — me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouva
661 s — et lui aussi — me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces
662 eul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure.
37 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
663 tre prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des deux éléments nécessaires à ce
664 ir autour d’eux des mœurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pou
665 ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la dispersion des efforts artistiques. To
666 fils d’un tel père. « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine résistance est néces
667 pe. N’était certain petit plaisir d’impertinence, je me fusse dispensé de redire ces lieux communs, auxquels pourtant nos
668 N’était certain petit plaisir d’impertinence, je me fusse dispensé de redire ces lieux communs, auxquels pourtant nos cir
669 moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On ne m’ en voudra pas de ne citer ni dates de naissance, ni traits d’enfance g
670 , c’est par leurs œuvres avant tout. D’autre part je préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie.
671 t un merveilleux foyer de contagion contre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugeme
672 ux foyer de contagion contre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis q
673 rticle consacré aux jeunes artistes neuchâtelois, je vous présente Conrad Meili, un Zurichois qui nous arriva de Genève il
674 On ne pourrait pas se tromper plus. ⁂ À vrai dire j’ en vois peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture
675 es qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la grâce décorative,
676 nsinue dans toute sa palette, ce charme enfin, ce je ne sais quoi qu’on cherche en vain chez beaucoup des meilleurs de nos
677 ris une complicité de sentiments ou d’état d’âme. Je ne verrais guère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on le pui
678 ères précipitations » annonce le bulletin. Tiens, me dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religieux, il se cherche en
679 écipitations » annonce le bulletin. Tiens, me dis- je , Bouvier va peindre. Comme peintre religieux, il se cherche encore. O
680 révélant un tempérament très rassurant. C’était, je crois, le vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une
681 gement et d’une abondance très sûrement ordonnée. Je crois qu’on doit beaucoup attendre de ce tempérament qui fait jaillir
682 ge. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoi
683 r son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’ assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. Il administre une feuill
684 r évolué vers une plus grande harmonie de lignes. Je pense surtout à ses bas-reliefs du BIT où se manifeste un heureux équ
38 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
685 père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’ oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi.
686 re sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassem
687 inqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque
688 blient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description
689 t dont le profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui se retourne, méprisant : « Mais oui, je ne n
690 re Jacob qui se retourne, méprisant : « Mais oui, je ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez do
691 retourne, méprisant : « Mais oui, je ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner
692 e ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner d’être plus fort que cette bourgeois
693 ans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner d’être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suiv
694 geoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’ avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. « Bernar
695 ivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’ humilier et de me craindre. » ah. « Bernard Lecache : Jacob (NRF, Pa
696 e vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. « Bernard Lecache : Jacob (NRF, Paris) », Bibliothè
39 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
697 ’on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’exigence d
698 e », c’est encore l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de
699 core l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi . Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de
700 de document humain, nuit à sa valeur littéraire. Je n’aime guère ce style abstrait, semé de redites et d’expressions tout
40 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
701 e tache de couleur, plus sentimental que cruel. «  J’ ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragiq
41 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
702 s le fond quelque chose de solide, d’authentique. J’ aime cette violence de redressement où je distingue bien autre chose q
703 entique. J’aime cette violence de redressement où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’impuissance ». Un pl
704 onner quelque vitalité à notre civilisation, — et je sais bien que c’est là un des signes de sa décadence. Il y a du chiru
42 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
705 cit du pickpocket (fragment) (mai 1927)m … et je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’a appris à voler. Aristo
706 … et je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’ a appris à voler. Aristophane (« Les Chevaliers »). Dès qu’on eut dé
707 ue l’esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’ avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet
708 it sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet âge, logé, nourri,
709 tions. Or donc, j’avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet âge, logé, nourri, blanchi, mais n
710 e, logé, nourri, blanchi, mais non point diverti. J’ étais bon, Monsieur, normalement bon. L’idée, par exemple, d’étrangler
711 par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennemi, — car ce
712 d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le m
713 peiner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me rega
714 trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda longuement. » Mes parents me savaient vierge et c’était la jo
715 cette époque, une femme me regarda longuement. » Mes parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils ai
716 e, une femme me regarda longuement. » Mes parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en m
717 c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détourna
718 ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des yeux de cette
719 essus tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne
720 que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de
721 tte femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de moi . Un soir qu’elle pleurait, je l’embrassai si fort… En un quart d’heur
722 ouffrît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je l’embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans
723 ait, je l’embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à l
724 scendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très jolis de b
725 ait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ aimait, et nous étions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le
726 ouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses lèvres sans une parole
727 son. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses lèvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bo
728 ura mon front de ses lèvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légè
729 emain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait avec une terreur ou je crus distinguer je ne sais quelle dé
730 ment blanchi. Il me regardait avec une terreur ou je crus distinguer je ne sais quelle déchirante nostalgie. Pour lui, san
731 regardait avec une terreur ou je crus distinguer je ne sais quelle déchirante nostalgie. Pour lui, sans doute, j’étais pe
732 uelle déchirante nostalgie. Pour lui, sans doute, j’ étais perdu. Mais il souffrait d’autre chose encore : il se savait vie
733 chose encore : il se savait vieux, maintenant. » Je songeais justement à un sourire de mon amie quand il voulut m’adresse
734 intenant. » Je songeais justement à un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertigineu
735 ustement à un sourire de mon amie quand il voulut m’ adresser la parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et
736 er la parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Alors une rage s’empara de mon corps tout entier,
737 mon sourire et pleura. Alors une rage s’empara de mon corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus dans
738 Alors une rage s’empara de mon corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus dans ma chambre. Une demi-
739 e criai un juron, claquai la porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare, j’écrivais un m
740 courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’ étais à la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit e
741 bre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare, j’ écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je partais dans u
742 d, j’étais à la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je partais dans une direction quelconque. Il
743 ivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je partais dans une direction quelconque. Il advint que ce fut celle de
744 advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j
745 celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! —  Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers
746 vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’ envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un quotidien de mon pa
747 ers journaux. Un jour, parcourant un quotidien de mon pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosses le
748 . Un jour, parcourant un quotidien de mon pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosses lettres : c’é
749 rcourant un quotidien de mon pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était l’annonce
750 n de mon pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était l’annonce du décès de mon pè
751 n pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était l’annonce du décès de mon père. » J’
752 n grosses lettres : c’était l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une brise
753 ttres : c’était l’annonce du décès de mon père. » J’ étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et
754 rise passa, et une femme en robe bleue légère qui me regarda un instant, si doucement… Je me levai sans payer, je partis p
755 e légère qui me regarda un instant, si doucement… Je me levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commen
756 égère qui me regarda un instant, si doucement… Je me levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commençai
757 un instant, si doucement… Je me levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre
758 rtis par les rues, une joie violente commençait à m’ envahir, contre laquelle je luttais obscurément pour augmenter ma volu
759 violente commençait à m’envahir, contre laquelle je luttais obscurément pour augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me t
760 re laquelle je luttais obscurément pour augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un é
761 is obscurément pour augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un établissement luxueux
762 ment pour augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un établissement luxueux d’où sort
763 olupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’ entrai dans un établissement luxueux d’où sortaient à chaque tour du t
764 eflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’ ouvris firent tourner des soleils sur les parois claires. Du balcon, o
765 avenir de bonheur fiévreux — celui justement que j’ entrevoyais. » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai. Je ne trou
766 que j’entrevoyais. » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’ét
767 e j’entrevoyais. » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’était
768 s. » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’était assez pour me
769 0 francs dans son sac à main : c’était assez pour me permettre d’entreprendre quelques beaux vols… » Dès lors, je vécus, c
770 e d’entreprendre quelques beaux vols… » Dès lors, je vécus, comme vous me voyez vivre encore, dans un état de sincérité pe
771 ques beaux vols… » Dès lors, je vécus, comme vous me voyez vivre encore, dans un état de sincérité perpétuelle envers tous
772 dans un état de sincérité perpétuelle envers tous mes élans, accueillant avec un enthousiasme juvénile, c’est-à-dire cyniqu
773 ffres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’on est fo
774 ’on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit, au moment de m’endormir, que ma passion du vol n’
775 de soi-même — je découvris une nuit, au moment de m’ endormir, que ma passion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’
776 découvris une nuit, au moment de m’endormir, que ma passion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’avait-on pas dér
777 assion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’ avait-on pas dérobé des années de joie au profit d’une vertu que tout
778 années de joie au profit d’une vertu que tout en moi reniait obscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vert
779 d’une vertu que tout en moi reniait obscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’ava
780 ue le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’ avait emprisonné c’était un bas opportunisme social, résultante des pa
781 lles filles, sans capitalistes et sans gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur so
782 istes et sans gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront
783 sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette escroquerie mor
784 compenseront jamais cette escroquerie morale dont je fus la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Ma
785 la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalit
786 p tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être engag
787 vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique, qu’une expressio
788 e expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes d
789 avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’ édifiai à mes parents un tombeau sur lequel je fis graver : Prêté — re
790 uit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un tombeau sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour la
791 que j’édifiai à mes parents un tombeau sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but
792 ise. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hô
793 ous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelque
794 eepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse
795 ings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je m’ amuse à jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, d
796 , croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généralement répandus, j’ai
797 plus vulgaires et des plus généralement répandus, j’ ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions éléme
798 généralement répandus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élémentaires qui ne manquent jam
799 ne manquent jamais de succéder au moindre vol. » J’ ajouterai, cher Monsieur, que l’analyse psychologique n’est pas mon fo
800 r Monsieur, que l’analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques observations théoriques que je tiens
801 , que l’analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques observations théoriques que je tiens pour vra
802 ue l’analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques observations théoriques que je tiens pour vraies
803 contente de quelques observations théoriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie les manifestations vivantes avec u
804 ervations théoriques que je tiens pour vraies, et j’ en vérifie les manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves
805 ves, contre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une ce
806 et enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’événement na
807 taine caresse de l’événement naissant peut encore m’ émouvoir. C’est un plaisir de chaque minute auquel succède immédiateme
808 e minute auquel succède immédiatement le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai p
809 ment le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’ a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allai
810 . Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me n
811 e peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’ allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint-Julien. Vous n’ignore
812 e imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que l’on considère ce saint
813 l’agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâchant tout de suite ses compliments, ce qui est de
814 ie. Elle est sans bavures, sans réticences ; elle m’ apparaît comme un divertissement perpétuel et dénué d’inquiétude. Et c
815 uel et dénué d’inquiétude. Et cela n’est pas sans me charmer, croyez-moi. Car, enfin, si je suis ici à vous écouter, c’est
816 iétude. Et cela n’est pas sans me charmer, croyez- moi . Car, enfin, si je suis ici à vous écouter, c’est que je cherche ce q
817 t pas sans me charmer, croyez-moi. Car, enfin, si je suis ici à vous écouter, c’est que je cherche ce qu’on est convenu d’
818 , enfin, si je suis ici à vous écouter, c’est que je cherche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’e
819 ourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les con
820 ne règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle pa
821 t impliquer, c’est ce caractère de, comment dirai- je …, de juvénile insouciance, pour ne pas dire inconscience ! qui s’atta
822 n actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous entends, interrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont l
823 l paraissait lui-même gêné. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre.
824 ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire que si vous me trouvez u
825 Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire que si vous me trouvez un peu potache, il n’est pa
826 ais y répondre. Je pourrais vous dire que si vous me trouvez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’a
827 que le potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce
828 ustement je n’éprouve aucun désir d’avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que mes principes peuvent avoir de « bien
829 ’avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que mes principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis,
830 our quiconque est aussi profondément persuadé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre ge
831 apprendrez-vous à découvrir derrière certaines de mes plaisanteries la dérision secrète qu’elles masquent par caprice. ....
43 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
832 vous n’aviez pas lu ce livre ? Ah ! sans hésiter, je vous ferais un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’on n’e
44 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
833 e (juillet 1927)o I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… 
834 Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de
835 is : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nou
836 sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fîmes notre nourriture une saison de naguèr
837 re. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous croyais écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué la lit
838 croyais écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abando
839  ! soupirez-vous. Mais j’ai tué la littérature en moi , n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé
840 j’ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’ en sors, je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez
841 littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quo
842 ous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un p
843 ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi  : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’est-c
844 quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’ ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’est-ce pas
845 ense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’est-ce pas ? D’autres prennent soin que l
846 ’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar où je vous suis. Vous y entrez plein de mépris pour Paul Morand par qui déc
847 sa gueule de bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une cita
848 herche les raisons de votre indignation, quand il m’ échappe une citation. Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?  
849 La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaque fois que vous direz : « extravagant », « invrai
850 — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaque fois que vous direz : « extravagant », « invraisemblabl
851 atitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdire de nom
852 ous vois envahi par des démons que vous prétendez m’ interdire de nommer. Mais moi je partage avec certains Orientaux cette
853 ns que vous prétendez m’interdire de nommer. Mais moi je partage avec certains Orientaux cette croyance : nommer une chose,
854 ue vous prétendez m’interdire de nommer. Mais moi je partage avec certains Orientaux cette croyance : nommer une chose, c’
855 r puissance sur elle. Images, pensées des autres, je vous ai mis un collier avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur
856 du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’ éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vo
857 un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me surpre
858 r la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me surprendre par-
859 e j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me surprendre par-derrière. Une f
860 ous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me surprendre par-derrière. Une fois — et ce n’est pas que je m’en vante
861 ndre par-derrière. Une fois — et ce n’est pas que je m’en vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les
862 e par-derrière. Une fois — et ce n’est pas que je m’ en vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les to
863 . Une fois — et ce n’est pas que je m’en vante, —  j’ ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, pa
864 , parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : tout cela jaillit,
865 cela jaillit, s’entrechoque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs. L’addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir
866 ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exagérés. Vous
867 attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exagérés. Vous savez bien
868 exprimer ; depuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connais
869 elle était réalisée, on ne s’en apercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes les plus obscurs des allusions furtiv
870 ger sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’ avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fournit un me
871 II Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Qua
872 los de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus
873 isse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé. On m’ affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un autre : et qu’un beau soi
874 ça, je ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un autre : et qu’un beau soir il faille éc
875 culeuses.   Voici donc les seules révélations que j’ attende de la littérature : que celle des autres m’aide à prendre cons
876 ’attende de la littérature : que celle des autres m’ aide à prendre conscience de moi-même ; que la mienne m’aide à découvr
877 à prendre conscience de moi-même ; que la mienne m’ aide à découvrir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mép
878 onde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ ai défini une « maladie » dont je parviens à tirer quelque bien pour m
879 ni d’adoration. J’ai défini une « maladie » dont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’el
880 adie » dont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices p
881 n pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les bienfaits que j’en escom
882 des sacrifices plus grands que les bienfaits que j’ en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m’en guérir. Vous
883 escompte, il sera temps de songer sérieusement à m’ en guérir. Vous me demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je
884 temps de songer sérieusement à m’en guérir. Vous me demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de v
885 m’en guérir. Vous me demanderez « alors » ce que j’ attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathi
886 Vous me demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philippe
887 demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philippe Soupault
888 citation.) Mais non, cher ami, voici qu’une envie me prend de vous conter un peu cette histoire. Seulement, allons ailleur
889 ur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’ en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte que leurs mémoi
45 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
890 une étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’auteur lui-même appelle « ce
891 ire, intermittente, un peu émiettée, éventée, que je trouve dans une ancienne réalité ressuscitée… » Sachons gré à M. Vaud
46 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
892 œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît comme un
893 u nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis R
894 us que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un o
895 poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un objet de songe
896 que je vis Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un objet de songe mais d’expérience ». Mais une te
897 is d’expérience ». Mais une telle « expérience », je crois, ne peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somm
47 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
898 « fatale », « si arbitraire et si facultative », je me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette
899 fatale », « si arbitraire et si facultative », je me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette att
48 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
900 bliés sur le marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de commander une consommation. Comme d’habitud
901 marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’ asseoir et de commander une consommation. Comme d’habitude, un peu apr
902 ation. Comme d’habitude, un peu après six heures. J’ étais seul. Le café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que
903 est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où m’attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les
904 onyme bien plus propice au rêve que ma chambre où m’ attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insuppor
905 ue ma chambre où m’attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familiers d’une vie hon
906 ongeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouv
907 eries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir
908 s Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond : les faits-divers, rien de
909 n pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que cela m’ intéresse au fond : les faits-divers, rien de moins divers. Mais je su
910 nd : les faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde réseau des lignes, et cette mécanique me res
911 s l’absurde réseau des lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois un peu plus de lassitude, un peu plus d’ennui. J
912 is un peu plus de lassitude, un peu plus d’ennui. J’ essayai donc de rêver. Mais cette rose oubliée me gênait : perdre une
913 J’essayai donc de rêver. Mais cette rose oubliée me gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas
914 me gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra un
915 lentement vers la mienne et s’assit sans paraître me voir. Une grande figure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia l
916 journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’ apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de boire, mes pensées plus ra
917 es d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’ eus fini de boire, mes pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers
918 pporta une liqueur. Et quand j’eus fini de boire, mes pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers l’avenir et j’osai que
919 lus rapides s’en allèrent un peu vers l’avenir et j’ osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite automobile
920 vers l’avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite automobile qui roulait dans la banlieue pri
921 rs l’avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’ en souviens, une petite automobile qui roulait dans la banlieue printa
922 te salle à manger ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais l’homme avait posé son journal. Soudain, portant la main
923 es traits. Puis il reprit les dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise va
924 re : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nou
925 ! ordonna-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis av
926 Vous avez gagné, c’est admirable, ah ! mon Dieu, je vous remercie, Monsieur… Il saisit son journal. Il en parcourait rapi
927 ges, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’ offrit de jouer un moment. Nous fixâmes comme enjeu nos consommations.
928 ment. Nous fixâmes comme enjeu nos consommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres
929 consommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à oscil
930 e gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Le
931 os. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les couleurs du bar me rempliss
932 mençait à osciller vaguement. Les couleurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusais sans cesse aux q
933 s du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusais sans cesse aux questions qu’en moi-même posait ma raison
934 u bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusais sans cesse aux questions qu’en moi-même posait ma raison eff
935 is sans cesse aux questions qu’en moi-même posait ma raison effarée. L’étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épa
936 si : une fièvre faisait s’épanouir sur son visage je ne sais quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l’esprit li
937 ommandement de la main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais très clairement que je gagnerais à tou
938 Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais très clairement que je gagnerais à tout coup. L’étranger se mi
939 ossédait, telle que je savais très clairement que je gagnerais à tout coup. L’étranger se mit à discourir. Et dans mon ivr
940 tout coup. L’étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaient des tableaux mouvants où je me voyais
941 , ses paroles peignaient des tableaux mouvants où je me voyais figurer comme une sorte de « personnage aux dés ». Ce furen
942 es paroles peignaient des tableaux mouvants où je me voyais figurer comme une sorte de « personnage aux dés ». Ce furent d
943 s bientôt : — « Destin, s’écria-t-il, tu pourrais me remercier. Vois quels chemins de perdition j’ouvre sans cesse à ta co
944 ais me remercier. Vois quels chemins de perdition j’ ouvre sans cesse à ta course aveugle ; tu n’aurais pas trouvé ça tout
945 s airs pessimistes. De nouveau, d’un coup de dés, je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voi
946 corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’ allais me cramponner à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la
947 ur les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponner à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la possessi
948 onheur qu’ils croient lié à la possession, et que j’ allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu
949 ’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’ allais adhérer à l’idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je so
950 à l’idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je songe à tous ces gens qui perdent leur vie à la gagner9, et leur faço
951 autre, de douleurs en ivresses avec la même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que je vais m’endor
952 rs en ivresses avec la même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que je vais m’endormir, ah ! galope
953 al fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que je vais m’endormir, ah ! galope, caracole, éclabousse, ils n’y comprendr
954 mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que je vais m’ endormir, ah ! galope, caracole, éclabousse, ils n’y comprendront jama
955 comprendront jamais rien, écoutez-les, comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça les déran
956 blement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dépens, témoin ce brave homme qui est en train de me soutirer les que
957 dépens, témoin ce brave homme qui est en train de me soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sor
958 de me soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la
959 ais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’ irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait
960 ient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre table, en robe roug
961 llard de fumée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre table, en robe rouge, et très f
962 uilla sur les dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’é
963 e. Elle me regardait et l’étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de joies et de peurs. Il fall
964 tranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’ étais possédé de joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le c
965 ssus des rues parcourues de longs cris en voyage. Je me sentis perdre pied délicieusement. Et de cette nuit peut-être, je
966 s des rues parcourues de longs cris en voyage. Je me sentis perdre pied délicieusement. Et de cette nuit peut-être, je ne
967 pied délicieusement. Et de cette nuit peut-être, je ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemain je n’avais plus un sou)
968 je ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemain je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je
969 … (sinon qu’au lendemain je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou
970 sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-ce que celles de mes fol
971 paroles — ou peut-être n’étaient-ce que celles de mes folies ? Je me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’en dé
972 peut-être n’étaient-ce que celles de mes folies ? Je me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma v
973 t-être n’étaient-ce que celles de mes folies ? Je me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma vie
974 me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’ en délivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très b
975 adoxes, mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devr
976 mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma vie m’ a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais ten
977 e suffit plus à m’en délivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais tenter quelque
978 ivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais tenter quelque chose. Je suis plein de
979 is, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais tenter quelque chose. Je suis plein de rêves, certains soirs.
980 is très bien que je devrais tenter quelque chose. Je suis plein de rêves, certains soirs. Il faut pourtant rentrer chez mo
981 es, certains soirs. Il faut pourtant rentrer chez moi , et ma femme m’embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je n
982 ains soirs. Il faut pourtant rentrer chez moi, et ma femme m’embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis
983 s. Il faut pourtant rentrer chez moi, et ma femme m’ embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis plus tout
984 rtant rentrer chez moi, et ma femme m’embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le mêm
985 embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le l
986 ue je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’
987 laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux da
988 er. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvo
989 Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’ abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir
990 ma chambre, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur m
991 abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostrophe, soudain
992 ans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostrophe, soudain plein de mépris et de désespoir,
993 Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostrophe, soudain plein de mépris et de désespoir, ô vie sans fau
994 joie… Ah ! plus amère, plus amère encore, saurai- je un jour te désirer, te haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note
49 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
995 On a trop dit que notre époque est chaotique. Je crois bien, au contraire, que l’histoire n’a pas connu de période où
996 ’en croire nos yeux. I. L’homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et le meilleur,
997 en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’ accuse donc pas de caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l
998 on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce que
999 bjet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici l
1000 usation : je prends pour la juger ce que l’époque m’ offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte da
1001 Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à joue
1002 ie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à jouer avec des
1003 outière. « Depuis l’instant où, enfant de 12 ans, j’ aperçus cette machine de route, jusqu’au jour présent, ma grande et co
1004 us cette machine de route, jusqu’au jour présent, ma grande et constante ambition a été de construire une bonne machine ro
1005 lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté.
1006 classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’on aj
1007 t. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le cli
1008 cient des buts et de l’avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de produire peut très bien envahir u
1009 ts et de l’avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau m
1010 rs, voici des déclarations plus nettes encore : «  Je ne considère pas les machines Ford simplement comme des machines. J’y
1011 les machines Ford simplement comme des machines. J’ y vois la réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce mo
1012 e salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en prat
1013 ale aux plus grands esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si
1014 dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souli
1015 x à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’ insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligner ce hiatus étran
1016 ela ratait, on gardait toutes les autres chances. J’ accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par
1017 ésirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle dev
1018 ouvez servir Dieu et Mammon », dit l’Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consisterait à vouloir
1019 es termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête faite à Genève
1020 que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vau
1021 ivres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans l
1022 grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue alle
1023 s est encore plus grand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford,
1024 mérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembr
1025 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4.
50 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
1026 À Pierre Jeanneret et à son étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dan
1027 assez de passants pour qu’on la sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fallait-il accuser de c
1028 cuser de cette duperie, qui rendre responsable de ma déception, sinon moi-même, me dis-je bientôt. Car je professe qu’un d
1029 ndre responsable de ma déception, sinon moi-même, me dis-je bientôt. Car je professe qu’un désir vraiment pur parvient tou
1030 sponsable de ma déception, sinon moi-même, me dis- je bientôt. Car je professe qu’un désir vraiment pur parvient toujours à
1031 déception, sinon moi-même, me dis-je bientôt. Car je professe qu’un désir vraiment pur parvient toujours à créer son objet
1032 es. Donc, n’ayant pas renoncé à certaine idée que j’ avais d’un romantisme viennois, je fus conduit, par une sorte de compr
1033 rtaine idée que j’avais d’un romantisme viennois, je fus conduit, par une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où l’o
1034 à l’Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans mon esprit Vienne et
1035 e comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le souvenir de Gérard de Nerval.
1036 n : c’était le souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque
1037 e souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque je m’assis da
1038 s même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans l’ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouv
1039 ême pas prononcé intérieurement ce nom lorsque je m’ assis dans l’ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver
1040 s l’ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide : la jolie femme qu’on attend dans ce
1041 ces, une fois de plus manquait le rendez-vous que j’ avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’e
1042 . Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patriotes au son d’une fanfare milit
1043 t patriotes au son d’une fanfare militaire, ainsi je m’abandonne au rêve d’un monde que suscite en moi seul peut-être cett
1044 atriotes au son d’une fanfare militaire, ainsi je m’ abandonne au rêve d’un monde que suscite en moi seul peut-être cette p
1045 je m’abandonne au rêve d’un monde que suscite en moi seul peut-être cette plainte heureuse des violons. Le diable sort des
1046 aturelle. Et tout cela chanté dans une langue que je comprends mal. Je me penche vers un voisin pour lui demander je ne sa
1047 cela chanté dans une langue que je comprends mal. Je me penche vers un voisin pour lui demander je ne sais plus quoi. Mais
1048 a chanté dans une langue que je comprends mal. Je me penche vers un voisin pour lui demander je ne sais plus quoi. Mais sa
1049 al. Je me penche vers un voisin pour lui demander je ne sais plus quoi. Mais sans doute évadé dans son rêve, beaucoup plus
1050 doute évadé dans son rêve, beaucoup plus loin que moi , il n’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre.
1051 rêve, beaucoup plus loin que moi, il n’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abando
1052 oin que moi, il n’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’u
1053 question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquement mêlé à des
1054 orme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’ apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement
1055 ceau de lumière m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revoir,
1056 ière m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revoir, vertige de
1057 e m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revoir, vertige de te
1058 ’est toi, parce que c’est bien toi de nouveau qui m’ appelles et qui vas me quitter… — C’est une chose singulière, prononce
1059 est bien toi de nouveau qui m’appelles et qui vas me quitter… — C’est une chose singulière, prononce une voix, à côté de m
1060 ne chose singulière, prononce une voix, à côté de moi , c’est une chose singulière que le pouvoir de cette musique. Voici qu
1061 que. Voici que vous êtes tout près de comprendre… Mon voisin avait parlé tout haut ; personne pourtant ne se détournait. Co
1062 rsonne pourtant ne se détournait. Comment pouvais- je être le seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vo
1063 vais-je être le seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteindre au monde des êtres vérit
1064 des êtres véritables. Nous nous rencontrons. Vous me voyez parce que vous comprenez certaines choses par votre souffrance…
1065 scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis que
1066 eflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’ apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’avai
1067 m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre,
1068 le dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1
1069 s toute sa personne rien de positivement démodé ; je n’eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’aille
1070 ue ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où m’ avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison d’intervenir e
1071 ù m’avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris
1072 mpêcha ma raison d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d
1073 son d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d’évidences opa
1074 es. Nous sortîmes de l’Opéra, Gérard de Nerval et moi , sans nous être rien dit d’autre, comme des amis qui se connaissent d
1075 ameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de leurs petits
1076 is, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’en suis pas fâché. » Il
1077 açon de me moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’en suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans les rues. Des je
1078 p s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis- je , songeant aux Amours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré les
1079 eur de l’étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, ajouta-t-il, mais pour d’autres raisons qu’eux,
1080 nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour moi , dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où la question fidélité o
1081 itude, des gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne
1082 té ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant bien, mais
1083 deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient cet amour, c’
1084 qu’elles évoquaient cet amour, c’était parce que je découvrais en elles de secrètes ressemblances, qui pour d’autres para
1085 lle n’était qu’un regard, un certain regard, mais j’ ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela
1086 ’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bavarde, je philosophe, et vous allez me dire que c’est trop facile p
1087 ul qui donna un sens au monde. — Mais je bavarde, je philosophe, et vous allez me dire que c’est trop facile pour un homme
1088 . — Mais je bavarde, je philosophe, et vous allez me dire que c’est trop facile pour un homme retiré du monde depuis si lo
1089 vrons-nous plutôt à une petite malice dont l’idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite bossue
1090 héo nommaient « biondo et grassotto », et qu’avec mes amis nous devions baptiser en style viennois « Mehlspeis-Schlagobers 
1091 t que de prendre des femmes au hasard, disait-il. Je sens très bien que nous allons nous ennuyer terriblement. Du moins, m
1092 nous allons nous ennuyer terriblement. Du moins, moi . Pour vous, c’est différent, vous êtes moderne, vous vous contentez p
1093 ux de plaisir — autre façon de parler. On dit que j’ ai vécu d’illusions, avouez que les miennes étaient de meilleure quali
1094 chercher ici avec le premier être venu. — Certes, je comprends que l’Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser.
1095 je comprends que l’Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances se
1096 pe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances secrètes et spontanées du
1097 be mauve, avec tant de gravité et de détachement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la
1098 la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’
1099 qu’avec un sentiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bu
1100 mbre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes filets dans l’eau des
1101 us douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes filets dans l’eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des
1102 à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes filets dans l’eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux a
1103 e mes filets dans l’eau des nuits, et quelquefois j’ en ramène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire les signes. »
1104 fois j’en ramène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire les signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous somm
1105 yeux bizarres où je sais lire les signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’ai
1106 ondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’ailleurs j’ai oublié mes clefs il y a très, très longtemps… Et
1107 -vous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’ailleurs j’ ai oublié mes clefs il y a très, très longtemps… Et pas de Lune ce soi
1108 l ? demanda-t-il. Moi pas. D’ailleurs j’ai oublié mes clefs il y a très, très longtemps… Et pas de Lune ce soir, il serait
1109 erait dangereux de s’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : « La nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque
1110 il prononça : « La nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite,
1111 motion à l’ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meilleurs de se répéter, et que c’était la pr
1112 ctavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait la gravité énigmatique d’
1113 rai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’ expliquer des signes, des généalogies étourdissantes qui commencent à
1114 l leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’ enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nou
1115 sme et son exaltation. Il semble se rapprocher de moi . Il me raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que pour n
1116 on exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il me raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que pour nos sava
1117 u’il y a sous le soleil, et même ailleurs. Croyez- moi , ce qu’il faudrait écrire, c’est une Vie simultanée de Gérard, qui ti
1118 e à chaque instant, le homard se réveilla. Gérard m’ expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que l’animal devenait nerve
1119 nt d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en
1120 d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en cr
1121 nt pour des baise-mains silencieux et mécaniques. Je reconnus des princes aux faces maigres qui ressemblaient terriblement
1122 ré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul. Une dernière auto, extraordinairement sil
1123 : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je m’ aperçus que j’étais seul. Une dernière auto, extraordinairement silenc
1124 . Quand la place se fut apaisée, je m’aperçus que j’ étais seul. Une dernière auto, extraordinairement silencieuse, absolum
1125 t silencieuse, absolument silencieuse fila devant moi  ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rid
1126 ncieuse, absolument silencieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux
1127 matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse, m’ éclaboussant de neige et de titres dépourvus de sens. Je dormais debou
1128 boussant de neige et de titres dépourvus de sens. Je dormais debout. 10. Quelque chose comme « pâtisserie-crème fouettée
51 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
1129 logue ? Laisserons-nous Jules Verne aux enfants ? J’ allais oublier que la littérature enfantine est le dernier bateau. Pou
1130 est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui ne m’ empêchera pas d’y monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo so
1131 ffit que cet obsédant capitaine Nemo soit à bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que La Liberté. ar. « M. Allott
52 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
1132 seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 6
1133 i le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’ admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultan
1134 arties d’échecs simultanément, et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne
1135 ies d’échecs simultanément, et c’est naturel : je m’ en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne de
1136 et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et m’ en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que des
1137 s éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils les fa
1138 ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ ai lu ce livre, malgré son premier chapitre, variation sur un mot bien
1139 itte à renaître heureusement) sur des gens qui ne m’ intéressent pas ou bien qui ne sont pas atteints par ces épithètes drô
53 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
1140 es chefs (c’est lui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en fais
1141 ui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fai
1142 u nom de l’auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’éva
1143 lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvé
54 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
1144 lables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se soit borné à une courte nouvell
55 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
1145 e : il n’écrit pas de livre pour y pourchasser un moi qui feint toujours de se cacher derrière le feuillet suivant, entraîn
1146 nuant vertigineusement et l’égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de superstitions. Enfin cette expér
1147 leur réponse, il répète à plusieurs reprises : «  Je ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu pl
1148 répète à plusieurs reprises : « Je ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut u
1149 lusieurs reprises : « Je ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut un jour de g
1150 Je ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes
1151 Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une femme qu’il aimait. m. « Miroirs,
56 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
1152 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se se
1153 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé e
1154 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légè
1155 ndre d’un air connaisseur que c’est bien composé. J’ avoue prendre cette autobiographie tellement au sérieux que j’ai été b
1156 dre cette autobiographie tellement au sérieux que j’ ai été bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un h
1157 doucement comique, si émouvant : « À cette époque je croyais fortement en l’existence d’une espèce de secrète et à peu prè
1158 gosses à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’
1159 ous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivais presque à
1160 ivrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais- je parfois, et il y avait des moments où j’arrivais presque à me convain
1161 e disais-je parfois, et il y avait des moments où j’ arrivais presque à me convaincre que si je m’approchais tout à coup pa
1162 et il y avait des moments où j’arrivais presque à me convaincre que si je m’approchais tout à coup par-derrière d’un homme
1163 ents où j’arrivais presque à me convaincre que si je m’approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou d’une femme quelc
1164 s où j’arrivais presque à me convaincre que si je m’ approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou d’une femme quelconq
1165 sais “houu !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras
1166  !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras dessous e
1167 il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras dessous en r
1168 a contribué davantage que n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrai
1169 . Quelle décadence ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et moi et Je suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universe
1170 cadence ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et moi et Je suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue
1171  ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et moi et Je suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Ge
57 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
1172 e où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essentiellement une m
1173 réhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essentiellement une mystique. Mais parce que
1174 est essentiellement une mystique. Mais parce que je suis de sang-froid, je ne puis dire grand-chose de plus. On ne se com
1175 e mystique. Mais parce que je suis de sang-froid, je ne puis dire grand-chose de plus. On ne se comprend bien qu’entre jeu
1176 poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu tou
58 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
1177 … Ailleurs Colombes lumineuses des mains de mon amour écloses voyageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez le
1178 n retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’on meurt. Étoile de
59 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
1179 épété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! », l’on peut se permettre quelques malices, quelques
1180 disproportionnés avec son mérite ». Il ajoute : «  j’ ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singuli
1181 ner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C
1182 clairvoyance singulière, mes propres limites, et j’ ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’éco
60 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
1183 La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)n «  Je lui ai raconté qu’il habite une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’i
1184 encore, et c’est là-dessus qu’il improvise, oh ! j’ aimerais tant aller là-bas, cette folie m’apparaît comme une chose si
1185 e, oh ! j’aimerais tant aller là-bas, cette folie m’ apparaît comme une chose si douce et si grande… »11 Et Bettina termin
1186 é les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin, mais il est plus di
1187 dre par un sot que par un fou. » L’hiver dernier, m’ occupant assez longuement d’un des poètes auxquels notre temps doit vo
1188 s d’entre nous se préparent à tenter le climat, —  j’ avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sans doute asse
1189 ez profondément pour qu’aujourd’hui le hasard qui m’ amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était la Pen
1190 encore quelques cris brisés : « Ô vieux démon ! —  je te rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mai
1191 racle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de la maison, en at
1192 ure. Il y a là une station de canots de louage où j’ ai vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté d’un « Hypérion ».
1193 lderlin » à côté d’un « Hypérion ». En cherchant, je trouverais bien aussi un « Nietzsche » à fond plat. Des saules se pen
1194 s d’armoires. Un couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? — 
1195 vous devez connaître ces portraits ? — (et comme je considère un ravissant médaillon de marbre) — Ça, c’est Diotima. » On
1196 — Ça, c’est Diotima. » On rougirait à moins. — «  Je ne puis pas parler de lui, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aus
1197 n grand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longt
1198 ont fui. Avril et mai et juin sont lointains, Je ne suis plus rien, je n’aime plus vivre. Il y avait encore plus de p
1199 i et juin sont lointains, Je ne suis plus rien, je n’aime plus vivre. Il y avait encore plus de paix que maintenant. La
1200 de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m’ angoisse. Mais le gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dan
1201 ui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de visit
1202 tues et les contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil de vieille femme qui pr
1203 approchent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pag
1204 nts serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’ aime les bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne
1205 . Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du médiocre dont ils se sentent bénéficiaires
1206 c que l’un des deux soit absurde, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle
1207 que vulgaire, par quel hasard, donne l’accord qui m’ ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échappe ô douceur
1208 donne l’accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échappe ô douceur de vivre ! Tout redevient autou
1209 m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échappe ô douceur de vivre ! Tout redevient autour de moi insuffisa
1210 ppe ô douceur de vivre ! Tout redevient autour de moi insuffisant, transitoire, allusif. Tout se remet à signifier l’absenc
61 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
1211 isme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bien française, hélas. ba.
62 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
1212 la défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Ju
1213 de répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philo
1214 nda, sur le plan philosophique en particulier, où je me sens bien plus près de M. Gabriel Marcel, qu’il attaque. (M. Benda
1215 , sur le plan philosophique en particulier, où je me sens bien plus près de M. Gabriel Marcel, qu’il attaque. (M. Benda tr
1216 ahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la c
1217 n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent l’esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous app
63 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
1218 les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant le jeune homme agitait ses ailes
1219 rt d’un poète en état, sans doute, d’inspiration. Je trouve dans une enveloppe qu’hier vous m’adressâtes une déclaration d
1220 ration. Je trouve dans une enveloppe qu’hier vous m’ adressâtes une déclaration d’amour destinée à une femme blonde. Je sui
1221 déclaration d’amour destinée à une femme blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un
1222 destinée à une femme blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un jour m’a laissé ente
1223 me blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’est. J’ ai fait suivre. Alexandrine un jour m’a laissé entendre qu’elle vous a
1224 qui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un jour m’ a laissé entendre qu’elle vous aime. Elle attend votre lettre depuis d
1225 s aime. Elle attend votre lettre depuis des mois. Je pense que ces lignes vous trouveront réunis. Avec ma bénédiction, je
1226 pense que ces lignes vous trouveront réunis. Avec ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » — Le poète reprit son ma
1227 gnes vous trouveront réunis. Avec ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » — Le poète reprit son manuscrit et concl
64 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Avant-propos
1228 sez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux pe
1229 pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petit
1230 tion publique deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. A
1231 gnement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est assez différent, moins philosophique et point du tout tec
1232 , moins philosophique et point du tout technique. J’ apporte un témoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marqu
1233 émoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liais
1234 marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste
1235 fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je
1236 doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je ressemble. Nous vivons sous un régime radical à sécrétion socialiste
1237 e à elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment tou
1238 e pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce pe
1239 nt toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’ en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à r
1240 — Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le
1241 tient des idées qui ne rapportent rien. En effet, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne.
1242 ffet, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma
1243 parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas l
1244 ersonne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût
1245 tends pas même parler au nom de ma génération, ne m’ étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur,
1246 enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droite comme à g
1247 gueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le p
1248 ond miraculeusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans condition
1249 s un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer u
1250 molir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me conten
1251 est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe
1252 pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe es
1253 rme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
1254 s capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’ aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et org
1255 se ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que je dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
1256 s, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en dou
1257 signalent bien souvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je
1258 uvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les class
1259 nt nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’ attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer
1260 m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler
1261 à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me r
1262 compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces arguments, bien que dûment prévus et réduits à néant ic
1263 réduits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du
1264 es qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces f
1265 aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu m
1266 ticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’ accuser de faire une critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à
1267 e faire une critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découvert
1268 tolérante qui se livrent à ces excès de langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du p
1269 langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question
1270 la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égard aux dérangements, même vio
1271 violents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droi
1272 lents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ;
1273 classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’instruction publique dans ses réalisations act
1274 lles, puis au terme de ce recensement lamentable, je poserai la question de savoir si tant de laideurs et d’outrages au bo
1275 par le but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
65 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 1. Mes prisons
1276 1. Mes prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs
1277 pissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je
1278 ents trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensible au charme de cette fantaisie. Mais ce qui fait très bie
1279 grandes personnes ? Mais l’enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile m
1280 dissonance douloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce ma
1281 règle méchante, ce souci qui renaît chaque jour, je pense que tout cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans,
1282 tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’ avais appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée. L’année suivant
1283 chette, avec une sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréabl
1284 e c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusemen
1285 fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en t
1286 ’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’ étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en tabliers bleus qui
1287 urs bâtons en rêvant à leur manière. Un jour cela m’ ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après sy
1288 eur manière. Un jour cela m’ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements de
1289 déchiffraient les premières phrases exemplaires. ( J’ aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait
1290 lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproche
1291 fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproches acides,
1292 n tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’ attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il
1293 bles exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait su
1294 douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’ avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléi
1295 régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’originalité. Mais pour être rentr
1296 e velléité d’originalité. Mais pour être rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, ver
1297 ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse
1298 une importance.) Quant à l’autre « évidence » que je viens de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterm
1299 ant à l’autre « évidence » que je viens de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre mal
1300 ntient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais cette
1301 notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’ habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’en servir cra
1302 ut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’en servir craignant peut-être des déco
1303 uer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’ en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop d
1304 eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin j’ ouvris, c’est-à-dire que je me posai la question : est-ce vrai que tou
1305 itudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je me posai la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être é
1306 des apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je me posai la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égau
1307 onquêtes. C’était découvrir notre asservissement. Je songeai aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçai
1308 de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux « immortels p
1309 rmisme indispensable aux « immortels principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour
1310 suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut ma seconde déco
1311 ris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut ma seconde découverte : ce monde simplifié, si évident, si parfaitement
1312 exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi , j’avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois mat
1313 érait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’ avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matérie
1314 délivré, en supporter longtemps encore l’action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit
1315 vissement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les
1316 ythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.
66 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 2. Description du monstre
1317 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai auss
1318 ermit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’ y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’anciens camarades d’école
1319 ernité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et po
1320 ne question d’âge, non d’expérience vécue. Ce que je vais dire est sans doute injuste et faux dans un très grand nombre de
1321 ans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai- je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par
1322 ensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me p
1323 aysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’ échauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’o
1324 plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
1325 chauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs ga
1326 ilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causen
1327 ment. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’ oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent a
1328 i signent des manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au vill
1329 que c’est là son affaire : Monsieur en un mot est M’ sieu l’Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profon
1330 s posthumes : l’artiste photographe et le régent. J’ ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédago
1331 s témoigne de la même maladresse professionnelle. J’ en connaissais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de
1332 e dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : «  J’ ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vo
1333 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l
1334 bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’enseignemen
1335 les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils
1336 que certaines autres maladies dites « sociales ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décr
1337 reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
1338 rridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’éta
67 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 3. Anatomie du monstre
1339 3. Anatomie du monstre Ayant épanché un peu de ma rancune, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ai entrepris d
1340 cune, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ ai entrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera
1341 epris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personnell
1342  on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignag
1343 n témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse passer un petit examen aux principes de cette institution passi
1344 ssée : mais celles-là sont les plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que
1345 plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pr
1346 s plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’ attaque. L’esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujo
1347 pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bour
1348 ordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la
1349 que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruct
1350 déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction
1351 justement par cette psychologie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qu
1352 s de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut
1353 ut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on d
1354 ue notre peuple met dans cette expression !) Pour moi ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est un
1355 uple met dans cette expression !) Pour moi ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est une grosse v
1356 n !) Pour moi ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eût pa
1357 scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’ eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible ta
1358 e possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré
1359 ie. Il y a là une préméditation de médiocrité que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a
1360 là une préméditation de médiocrité que je ne puis m’ empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons poi
1361 es bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez- moi tous ces petits phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés, les
1362 ’avantage des gens en place, vieille histoire. On m’ objectera sans doute quelques « brillantes carrières » fournies par d’
1363 ces brillants météores ne troublent pas beaucoup ma superstition, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasi
1364 tion publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident q
1365 cident qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je m’en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serai
1366 ent qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je m’ en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serait f
68 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 4. L’illusion réformiste
1367 entendu, tout cela a été dit. (Un peu autrement, j’ en conviens.) On n’a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travai
1368 peu autrement, j’en conviens.) On n’a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il suffit pour s’e
1369 e mettra à marcher dans le couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je si
1370 er dans le couloir en s’écriant : je marche, ou : j’ arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je siège ; un troisiè
1371 ’arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au
1372 je siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à crai
1373 la faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à
1374 graves, parce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à l’école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend
1375 de réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’
1376 n enfant de 6 ans… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifi
1377 ssés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereu
1378 . Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux.
1379 Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je soupçonne dans tous ces mouvements des possibilités lointaines qui so
1380 vements des possibilités lointaines qui sont pour me plaire ; un grignotement du système officiel qui pourrait bien un jou
1381 qui pourrait bien un jour l’atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une ruine d’où renaîtrait pe
1382 s une ruine d’où renaîtrait peut-être l’humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître antique, dont
1383 ’humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître antique, dont toute la personne était un enseignement
1384 ui sait ?… En attendant, puisqu’il faut attendre, je salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’
1385 es joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plus libremen
1386 de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plus librement qu’ils trahiss
1387 rie de petits démocrates conscients et organisés. Je crains que ce malentendu ne soit décidément trop gros pour échapper p
1388 plus longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malen
1389 MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis- je  ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant es
1390 à cependant une possibilité pratique d’en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de r
1391 tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que je donne à ce mot.
69 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 5. La machine à fabriquer des électeurs
1392 5. La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi
1393 à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu
1394 Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et se perpétu
1395 ut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on m’ explique pourquoi il triomphe et se perpétue ; de quel droit il nous é
1396 qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’ entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans
1397 y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets o
1398 s idéologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à
1399 s, cette idée que j’ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des faits patents et simples ; i
1400 tion publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai poliment au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la
1401 e vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tel
1402 ouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tellem
1403 e satisfaction sordide et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu
1404 eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été
1405 u’ils faisaient — et je les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été possible que parce qu’elle é
1406 utés pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis- je , la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’
1407 on non moins flagrante, dans ses suites normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notr
1408 s (si possible radicaux, en tout cas démocrates). Je me souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œ
1409 si possible radicaux, en tout cas démocrates). Je me souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œuvr
1410 ter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner l’instru
1411 Tout se tient, comme vous dites, sans doute pour m’ ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de
1412 our m’ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’ aime les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette
1413 ’aime les tremblements de terre, vous tombez mal. J’ appartiens à cette espèce de gens qui font confiance à leur sensibilit
1414 qu’aux idées des autres. Or, c’est une révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent
1415 tres. Or, c’est une révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après
1416 e de ma sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les dé
1417 qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définiti
1418 iez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définition. Après tout, peu m’importent les idéo
1419 lui donne raison par définition. Après tout, peu m’ importent les idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École
1420 peu m’importent les idéologies politiques, et peu m’ importerait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie
1421 oit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles
1422 dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement d
1423 valeurs d’âme auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je vie
1424 émocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinue
1425 es douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la
1426 eunes bourgeois. Essayer de venir me dire ça chez moi , n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je part
1427 sayer de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écœura
1428 s, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’
1429 participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquem
1430 ticipais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’ accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquement
1431 ièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’ emploie ce mot au sens fort, au sens enivrant, 100 %. Beaucoup de gens
1432 opposés coïncident en tant de points — voilà qui m’ inquiéterait, à votre place.
70 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 6. La trahison de l’instruction publique
1433 nous promet de tous côtés de belles catastrophes. Je suis de ceux qui s’en réjouissent mauvaisement. (« C’est bien fait. C
1434  rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais j
1435 antitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’adresse aux
1436 er ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières », et q
1437 ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’ adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières », et qui
1438 s ça, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci
1439 ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille étai
1440 mon extrême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le coll
1441 Il est vrai qu’elle est anormalement insatiable… Je crois qu’elle a surtout besoin d’une purge violente qui chasse ce ver
1442 sse ce ver solitaire du matérialisme. Et quand on m’ aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à o
1443 que exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que dans la mesure où cette exigence est satisfaite naît un
1444 ardisation de toutes les mesquineries naturelles ( je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivé
71 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 7. L’Instruction publique contre le progrès
1445 le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux,
1446 s vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ? J’ en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre
1447 éreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne
1448 -ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dan
1449 ri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialiste
1450 cialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’ imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès
1451 pprend les questions aussi bien que les réponses. J’ avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la c
1452 uestions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il
1453 us allez feindre de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que l’instruction publique est une puissance conservatrice.
1454 ratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste
1455 ser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’abord critiquer ce qui
1456 l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle dans cet amou
1457 de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’ empêcher de voir une intention providentielle dans cet amour de la des
1458 it est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habit
1459 rité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la p
1460 es électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la plupart
1461 els. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’ aura fait remarquer que la plupart des intellectuels sont convertis de
1462 pposons tout cela fait. Respirons. Mais déjà vous m’ attendez à ce tournant et vous me sommez de dire comment, maintenant,
1463 . Mais déjà vous m’attendez à ce tournant et vous me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer
1464 nt et vous me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. A
1465 us me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’ y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je
1466 éparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai- je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui rés
1467 é non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de
1468 complète, à un degré supérieur d’inconscience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison.
1469 sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès ve
1470 tout ce qui entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On
1471 de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne prop
1472 ale des instituteurs. On me demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis,
1473 ncore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’aurais v
1474 e rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’ aurais voulu vous voir demander à un sujet de Louis XIV ce qu’il conce
72 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Appendice. Utopie
1475 . Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassure
1476 faire rigoler, si cela peut vous rassurer quant à ma santé mentale.) La question est de savoir si nous serons des hommes d
1477 gré les mots14, des anarchistes et des utopistes. J’ appelle anarchiste, tout ce qui est violemment et intégralement humain
1478 espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’ aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou un amour) et qui
1479 (ou un amour) et qui s’y consacre. (Mais alors !… Je vois à votre mine stupidement rassurée que vous vous dites : c’est to
1480 rassurée que vous vous dites : c’est tout à fait moi  ! — Détrompez-vous. Vous ne savez pas ce que c’est que libre, ou cons
1481 Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’existence. Que faire ? Voir et pense
1482 les effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une fois pour toutes si vous tenez, oui ou non, M. W. Ro
1483 de moins qu’une rédemption du journalisme, ce que je propose-là. Et c’est ainsi qu’on peut imaginer sans trop d’invraisemb
1484 trop d’invraisemblance de petites réformes. Mais j’ en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possi
1485 ais j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une rév
1486 és. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous ne voyez tout de même pas une classe de gamins répétant la
1487 nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yog
1488 a. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes
1489 Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’ en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les
1490 r une grande intensité avec un minimum de moyens. J’ en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire
1491 yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires. Tout comm
1492 n l’applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’enseignement ou transformer les collèges en couven
1493 stent cachées aux agités ; la nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on n
1494 e le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à poss
1495 avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière.
1496 sse quelque chose comme l’instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déj
1497 quelque chose comme l’instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà r
1498 e de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens
1499 mbre du conseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les institut
1500 rai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font b
1501 ste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le genre d
1502 pparaissent ici que pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en e
1503 promet des confitures à l’enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1504 met des confitures à l’enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1505 des confitures à l’enfant, s’il est sage. Moi je m’ en moque. Je n’aime que la liberté.
1506 res à l’enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
73 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Avant-propos
1507 sez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux pe
1508 pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petit
1509 tion publique deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. A
1510 gnement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est assez différent, moins philosophique et point du tout tec
1511 , moins philosophique et point du tout technique. J’ apporte un témoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marqu
1512 émoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liais
1513 marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste
1514 fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je
1515 doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je ressemble. Nous vivons sous un régime radical à sécrétion socialiste,
1516 e à elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment tou
1517 e pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce pet
1518 nt toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’ en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à ri
1519 — Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le
1520 tient des idées qui ne rapportent rien. En effet, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne.
1521 ffet, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma
1522 parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas l
1523 ersonne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût
1524 tends pas même parler au nom de ma génération, ne m’ étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur,
1525 enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droite comme à ga
1526 igueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le p
1527 ond miraculeusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans condition
1528 s un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer u
1529 molir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me conten
1530 est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe
1531 pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe es
1532 rme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
1533 s capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’ aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et org
1534 se ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que je dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
1535 2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en dou
1536 signalent bien souvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je
1537 uvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les class
1538 nt nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’ attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer
1539 m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler
1540 à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me r
1541 compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces arguments, bien que dûment prévus et réduits à néant ic
1542 réduits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du
1543 es qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces f
1544 aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu m
1545 ticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’ accuser de faire une critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à
1546 faire une critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découvert
1547 tolérante qui se livrent à ces excès de langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du p
1548 langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question
1549 la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égards aux dérangements, même vi
1550 violents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droi
1551 lents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ;
1552 classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’instruction publique dans ses réalisations act
1553 lles, puis au terme de ce recensement lamentable, je poserai la question de savoir si tant de laideurs et d’outrages au bo
1554 r le but final de notre institution-tabou.   1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
74 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 1. Mes prisons
1555 1. Mes prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs
1556 pissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je
1557 ents trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensible au charme de cette fantaisie. Mais ce qui fait très bie
1558 grandes personnes ? Mais l’enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile m
1559 dissonance douloureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce ma
1560 règle méchante, ce souci qui renaît chaque jour, je pense que tout cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans,
1561 tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’ avais appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’année suivante,
1562 À 5 ans, j’avais appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la
1563 cachette avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréabl
1564 e c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusemen
1565 fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en t
1566 ’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’ étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en tabliers bleus qui
1567 urs bâtons en rêvant à leur manière. Un jour cela m’ ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après sy
1568 eur manière. Un jour cela m’ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements de
1569 déchiffraient les premières phrases exemplaires. ( J’ aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait
1570 lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproche
1571 fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’attira des reproches acides,
1572 n tour, je savais rarement où l’on en était. Cela m’ attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il
1573 bles exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait su
1574 douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’ avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléi
1575 régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’originalité. Mais pour être rent
1576 velléité d’originalité. Mais pour être rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, ver
1577 ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse
1578 une importance.) Quant à l’autre « évidence » que je viens de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterm
1579 ant à l’autre « évidence » que je viens de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre mal
1580 ntient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais cette
1581 notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’ habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’en servir cra
1582 ut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’en servir craignant peut-être des déco
1583 uer à cette idée. Je tenais cette clef et n’osais m’ en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop d
1584 eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin j’ ouvris, c’est-à-dire que je me posais la question : est-ce vrai que to
1585 itudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je me posais la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être
1586 des apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je me posais la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être éga
1587 onquêtes. C’était découvrir notre asservissement. Je songeai aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçai
1588 de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux « immortels p
1589 rmisme indispensable aux « immortels principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour
1590 suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut ma seconde déco
1591 ris que ce n’étaient que des principes. Et ce fut ma seconde découverte : ce monde simplifié, si évident, si parfaitement
1592 exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi , j’avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois mat
1593 érait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’ avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matérie
1594 délivré, en supporter longtemps encore l’action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit
1595 vissement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les
1596 ythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.  
75 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 2. Description du monstre
1597 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai auss
1598 ermit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’ y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’anciens camarades d’école
1599 ernité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et po
1600 ne question d’âge, non d’expérience vécue. Ce que je vais dire est sans doute injuste et faux dans un très grand nombre de
1601 ans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai- je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par
1602 sensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me p
1603 paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’ échauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’o
1604 plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
1605 chauffer inutilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs ga
1606 ilement. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causen
1607 ment. Si l’on me poussait un peu, je crois que je m’ oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent a
1608 i signent des manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fa
1609 peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédago
1610 s témoigne de la même maladresse professionnelle. J’ en connais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10
1611 e dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : «  J’ ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vo
1612 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l
1613 bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’enseignemen
1614 les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils
1615 que certaines autres maladies dites « sociales ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décr
1616 reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
1617 rridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’éta
76 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 3. Anatomie du monstre
1618 3. Anatomie du monstre Ayant épanché un peu de ma rancune, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ai entrepris d
1619 cune, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ ai entrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera
1620 epris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personnell
1621  on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignag
1622 n témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse passer un petit examen aux principes de cette institution passi
1623 téressée : mais celle-là est la plus vive. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que
1624 a plus vive. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que vous, qui défendez de parti p
1625 plus que vous, qui défendez de parti pris ce que j’ attaque. L’esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujo
1626 pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bour
1627 ordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la
1628 que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruct
1629 déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction
1630 justement par cette psychologie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qu
1631 s de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut
1632 ut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on d
1633 ue notre peuple met dans cette expression !) Pour moi , ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est u
1634 ple met dans cette expression !) Pour moi, ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est une grosse v
1635  !) Pour moi, ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eût pa
1636 scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’ eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible ta
1637 e possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré
1638 ie. Il y a là une préméditation de médiocrité que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a
1639 là une préméditation de médiocrité que je ne puis m’ empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons po
1640 es bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez- moi tous ces petits phonographes… ographes… graphes… graphes… Enfoncés, l
1641 ’avantage des gens en place, vieille histoire. On m’ objectera sans doute quelques « brillantes carrières » fournies par d’
1642 ces brillants météores ne troublent pas beaucoup ma superstition, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasi
1643 publique qu’ils ont subies. 3.h. Le dilemme J’ ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident q
1644 cident qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je m’en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serai
1645 ent qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je m’ en tiendrai là, renonçant pour cette fois à démontrer, ce qui serait f
77 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 4. L’illusion réformiste
1646 entendu, tout cela a été dit. (Un peu autrement, j’ en conviens). On n’a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travai
1647 peu autrement, j’en conviens). On n’a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il suffit pour s’e
1648 e mettra à marcher dans le couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je si
1649 er dans le couloir en s’écriant : je marche, ou : j’ arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je siège ; un troisiè
1650 ’arpente ; un autre restera assis, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au
1651 je siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à crai
1652 la faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à
1653 graves, parce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à l’école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend
1654 de réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’
1655 n enfant de 6 ans… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifi
1656 ssés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi , je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangere
1657 Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi, je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux.
1658 Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins, je soupçonne dans tous ces mouvements des possibilités lointaines qui so
1659 vements des possibilités lointaines qui sont pour me plaire ; un grignotement du système officiel qui pourrait bien un jou
1660 qui pourrait bien un jour l’atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une ruine d’où renaîtrait pe
1661 s une ruine d’où renaîtrait peut-être l’humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître antique, dont
1662 ’humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître antique, dont toute la personne était un enseignement
1663 ui sait ?… En attendant, puisqu’il faut attendre, je salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’
1664 les classes sont de vraies foires ; ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plus libremen
1665 de vraies foires ; ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plus librement qu’ils trahiss
1666 rie de petits démocrates conscients et organisés. Je crains que ce malentendu ne soit décidément trop gros pour échapper p
1667 plus longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malen
1668 MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis- je  ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant es
1669 à cependant une possibilité pratique d’en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de r
1670 tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que je donne à ce mot, p. 57.
78 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 5. La machine à fabriquer des électeurs
1671 5. La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi
1672 à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu
1673 Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et se perpétu
1674 ut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on m’ explique pourquoi il triomphe et se perpétue ; de quel droit il nous é
1675 qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’ entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans
1676 y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets o
1677 s idéologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à
1678 s, cette idée que j’ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des faits patents et simples ; i
1679 tion publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai poliment au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la
1680 e vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tel
1681 ouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tellem
1682 ne satisfaction sordide et mal dissimulée. Certes je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient ple
1683 ent pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour autant 10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a ét
1684 ’ils faisaient — et je les excuse pour autant 10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été possible que parce qu’elle é
1685 utés pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis- je , la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’a
1686 on non moins flagrante, dans ses suites normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notr
1687 s (si possible radicaux, en tout cas démocrates). Je me souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œ
1688 si possible radicaux, en tout cas démocrates). Je me souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œuvr
1689 ter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner l’instru
1690 Tout se tient, comme vous dites, sans doute pour m’ ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime bien les tremblemen
1691 our m’ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’ aime bien les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à c
1692 bien les tremblements de terre, vous tombez mal. J’ appartiens à cette espèce de gens qui font confiance à leur sensibilit
1693 qu’aux idées des autres. Or, c’est une révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent
1694 tres. Or, c’est une révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après
1695 e de ma sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les dé
1696 qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définiti
1697 iez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définition. Après tout, peu m’importent les idéo
1698 lui donne raison par définition. Après tout, peu m’ importent les idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École
1699 peu m’importent les idéologies politiques, et peu m’ importerait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie
1700 oit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles
1701 dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement d
1702 valeurs d’âme auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je vie
1703 émocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire 11. On ne manquera pas d’insinu
1704 tes douleurs de jeune bourgeois. Essayez de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la
1705 jeune bourgeois. Essayez de venir me dire ça chez moi , n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je part
1706 sayez de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écoeur
1707 s, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écoeurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d
1708 articipais de l’écoeurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquem
1709 icipais de l’écoeurant optimisme bourgeois que je m’ accommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquement
1710 ièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’ emploie ce mot au sens fort, au sens enivrant, 100 %. Beaucoup de gens
1711 opposés coïncident en tant de points — voilà qui m’ inquiéterait, à votre place.
79 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 6. La trahison de l’instruction publique
1712 nous promet de tous côtés de belles catastrophes. Je suis de ceux qui s’en réjouissent mauvaisement. (« C’est bien fait. C
1713  rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais j
1714 antitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’adresse aux
1715 er ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières » et qu
1716 ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m’ adresse aux démocrates convaincus, partisans des « lumières » et qui p
1717 s ça, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci
1718 ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille étai
1719 mon extrême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le coll
1720 Il est vrai qu’elle est anormalement insatiable… Je crois qu’elle a surtout besoin d’une purge violente qui chasse ce ver
1721 sse ce ver solitaire du matérialisme. Et quand on m’ aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à o
1722 que exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que dans la mesure où cette exigence est satisfaite naît un
1723 ardisation de toutes les mesquineries naturelles ( je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivé
80 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 7. L’instruction publique contre le progrès
1724 le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux,
1725 , vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ? J’ en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre
1726 éreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne
1727 -ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dan
1728 ri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialiste
1729 ervateurs : voilà qui ne change pas le rendement, j’ imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès
1730 pprend les questions aussi bien que les réponses. J’ avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la c
1731 uestions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il
1732 us allez feindre de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que l’instruction publique est une puissance conservatrice.
1733 ratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste
1734 ser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’abord critiquer ce qui
1735 humanité de demain ne peut manquer de s’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle dans cet amou
1736 demain ne peut manquer de s’inventer. Je ne puis m’ empêcher de voir une intention providentielle dans cet amour de la des
1737 it est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habit
1738 rité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la p
1739 es électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la plupart
1740 els. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’ aura fait remarquer que la plupart des intellectuels se sont convertis
1741 pposons tout cela fait. Respirons. Mais déjà vous m’ attendez à ce tournant et vous me sommez de dire comment, maintenant,
1742 . Mais déjà vous m’attendez à ce tournant et vous me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer
1743 nt et vous me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. A
1744 us me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’ y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je
1745 éparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai- je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui rés
1746 é non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de
1747 complète, à un degré supérieur d’inconscience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison.
1748 sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès ve
1749 tout ce qui entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On
1750 de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne prop
1751 ale des instituteurs. On me demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis,
1752 ncore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’aurais v
1753 e rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’ aurais voulu vous voir demander à un sujet de Louis XIV ce qu’il conce
81 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Appendice. Utopie
1754 . Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassure
1755 faire rigoler, si cela peut vous rassurer quant à ma santé morale.) La question est de savoir si nous serons des hommes de
1756 ré les mots 14, des anarchistes et des utopistes. J’ appelle anarchiste, tout ce qui est violemment et intégralement humain
1757 espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’ aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou un amour) et qui
1758 (ou un amour) et qui s’y consacre. (Mais alors !… Je vois à votre mine stupidement rassurée que vous vous dites : c’est to
1759 rassurée que vous vous dites : c’est tout à fait moi  ! — Détrompez-vous. Vous ne savez pas ce que c’est que libre ou consa
1760 Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’existence. Que faire ? Voir et pense
1761 les effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une fois pour toutes si vous tenez, oui ou non, M. W. Ro
1762 de moins qu’une rédemption du journalisme, ce que je propose-là. Et c’est ainsi qu’on peut imaginer sans trop d’invraisemb
1763 trop d’invraisemblance de petites réformes. Mais j’ en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possi
1764 ais j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une rév
1765 és. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous ne voyez tout de même pas une classe de gamins répétant la
1766 nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yog
1767 a. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes
1768 Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’ en doute. Mais l’Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les
1769 r une grande intensité avec un minimum de moyens. J’ en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire
1770 yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires. Tout comm
1771 n l’applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’enseignement ou transformer les collèges en couven
1772 stent cachées aux agités ; la nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on n
1773 e le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à poss
1774 avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière.
1775 sse quelque chose comme l’instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déj
1776 quelque chose comme l’instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà r
1777 e de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens
1778 mbre du conseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les institut
1779 rai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font b
1780 ste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le genre d
1781 pparaissent ici que pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en e
1782 n promet des confitures à l’enfant s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1783 omet des confitures à l’enfant s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
1784 t des confitures à l’enfant s’il est sage. Moi je m’ en moque. Je n’aime que la liberté.
1785 ures à l’enfant s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
82 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)
1786 Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)bd Si vous avez la curiosité, mieux, le goût
1787 r que l’esprit pénètre dans la poésie, vous lirez Mes Propriétés. Il se peut que vous les trouviez médiocrement riantes, au
1788 émouvante bizarrerie (Mort d’un Page). Cependant je préfère ses proses : il y a ici plus qu’une manière et qu’un ton, il
1789 mps — depuis les Trivia de Logan Pearsall Smith — je n’avais pas lu de livre où s’exprimât avec une pareille sécurité dans
1790 e » et de plus quotidien. bd. « Henri Michaux : Mes propriétés (O. Fourcade, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue
83 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Kikou Yamata, Saisons suisses (mars 1930)
1791 matin plein de mouettes — « Un beau bruit d’ailes me fait un ciel » — la vaporeuse beauté du lac de Neuchâtel. Mlle Kikou
84 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Jullien du Breuil, Kate (avril 1930)
1792 e genre de livres — ils se multiplient — vient, à mon sens, de quelque chose qu’ils expriment sans doute inconsciemment et
85 1930, Articles divers (1924–1930). Le prisonnier de la nuit (avril 1930)
1793 coupole errante des prières à dieux perdus. II Je ne sais pas où tu m’entends mais ces hauts murs d’ombre et de vent au
1794 rières à dieux perdus. II Je ne sais pas où tu m’ entends mais ces hauts murs d’ombre et de vent autour du monde où nous
1795 us qui rôdent à la recherche d’un corps faible. Je ne sais pas où tu m’attends mais je sais comment tu pleurais. Au carr
1796 cherche d’un corps faible. Je ne sais pas où tu m’ attends mais je sais comment tu pleurais. Au carrefour des cris perdus
1797 rps faible. Je ne sais pas où tu m’attends mais je sais comment tu pleurais. Au carrefour des cris perdus j’écoute encor
1798 comment tu pleurais. Au carrefour des cris perdus j’ écoute encore une voix nue qui vient de dire ton nom même avec l’accen
1799 dire ton nom même avec l’accent de notre amour et mon visage est immobile tourné vers l’ombre où tu m’entends. III Fais
1800 mon visage est immobile tourné vers l’ombre où tu m’ entends. III Fais rentrer dans leur peau d’ombre ces mots qui voud
1801 lèvres battent doucement écoute-les. IV Tends moi la main à travers cette ombre rapide si je te joins nous la tiendrons
1802 Tends moi la main à travers cette ombre rapide si je te joins nous la tiendrons captive écoute les cloches et le scintille
1803 x profondes qui échangent leurs douceurs. Tiens moi bien nous allons partir l’air s’entrouvre un feu rose éclôt voici ton
1804 rose éclôt voici ton heure au regard le plus pur je suis à toi dans le triomphe du silence sereine tu es toujours plus se
1805 V Oh qui a retiré tes mains des miennes quand je te regardais trop profond pour te voir ? Maintenant je suis seul à re
1806 regardais trop profond pour te voir ? Maintenant je suis seul à redescendre au jour dans l’aube sans refuges… VI Prison
86 1930, Articles divers (1924–1930). Au sujet « d’un certain esprit français » (1er mai 1930)
1807 iquement française — et nul ne s’en déclare gêné, me semble-t-il… 3. Si nous jetons sur les lettres parisiennes un regard
1808 istrait mais circulaire, comme dirait Aragon — et je suppose que Beausire et Simond se livrèrent à ce petit jeu avant d’éc
1809 mythe ; des philosophes sans pente ni grandeur ; ( Je mets au concours ce problème, d’ailleurs insoluble : « Peut-on discer
1810 nnie Besant. Et c’est charmant, disent les dames. Je ne suis pas aussi dur que les dames. … et M. Maurois, comme disent be
1811 nq ou six poètes. 4. « Quelque grande que soit » mon envie — comme disent Beausire et la Grammaire — mon envie, ma passion
1812 n envie — comme disent Beausire et la Grammaire — mon envie, ma passion d’admirer, je cherche en vain l’homme qui brisant «
1813 omme disent Beausire et la Grammaire — mon envie, ma passion d’admirer, je cherche en vain l’homme qui brisant « les grill
1814 t la Grammaire — mon envie, ma passion d’admirer, je cherche en vain l’homme qui brisant « les grilles de la raison » libè
1815 « les grilles de la raison » libère « le lion de mes certitudes » — comme disent Simond et ce grand potache de Maldoror. «
1816 serait-ce avec des pamphlets qu’on la lui rend ? Je le trouve en tout cas bien tonique, celui que Beausire et Simond vien
1817 y a bien quelques outrances dans tout ceci. Mais je voudrais que s’en offusquent ceux-là seuls que l’outrancière habileté
1818 que tout. Plutôt donc que de discuter ces thèses, je voudrais suivre leurs prolongements au-delà — au-dessous — de leurs p
1819 lan. C’est mal vu. » Ou si on les pose, ajouterai- je , c’est pour les résoudre aussitôt et d’une manière aussi peu comprome
1820 à Barrès de quitter sa chambre, son cigare ou son moi . » 8. « La France… n’a pas su faire la révolution morale… parce qu’e
1821 morale. Voilà notre aphorisme démontré. 9. Enfin je citerai deux petites phrases qui suffisent presque à situer la positi
1822 à Valéry ou au Surhomme, jamais absent d’ici, et je reprends ma liberté. Beausire admire Léonard d’avoir « tracé peut-êtr
1823 au Surhomme, jamais absent d’ici, et je reprends ma liberté. Beausire admire Léonard d’avoir « tracé peut-être pour toujo
1824 s au point où cessent d’eux-mêmes nos bavardages. J’ ai senti mes oreilles se déboucher, nous gagnons l’altitude. Les probl
1825 où cessent d’eux-mêmes nos bavardages. J’ai senti mes oreilles se déboucher, nous gagnons l’altitude. Les problèmes qu’il s
87 1930, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les soirées du Brambilla-club (mai 1930)
1826 oésie, et la France c’est la Chambre des Députés, je n’en veux pas démordre, et la Légion d’honneur — je vous la laisse, l
1827 n’en veux pas démordre, et la Légion d’honneur — je vous la laisse, la Légion d’honneur. Quand vous prenez un taxi passé
1828 lemand, — et l’allemand littéraire y suffit. Pour moi , je ne me sens pas trop embarrassé ; comme j’habite l’Odéon, c’est to
1829 d, — et l’allemand littéraire y suffit. Pour moi, je ne me sens pas trop embarrassé ; comme j’habite l’Odéon, c’est toujou
1830 t l’allemand littéraire y suffit. Pour moi, je ne me sens pas trop embarrassé ; comme j’habite l’Odéon, c’est toujours le
1831 ur moi, je ne me sens pas trop embarrassé ; comme j’ habite l’Odéon, c’est toujours le fantôme de l’Odéon qui m’accompagne
1832 l’Odéon, c’est toujours le fantôme de l’Odéon qui m’ accompagne et nous ne disons presque rien, nous savons les mêmes histo
1833 t des noctambules préfèrent d’aller à pied ; mais moi je me méfie ; se promener seul la nuit dans une ville étrangère, n’es
1834 s noctambules préfèrent d’aller à pied ; mais moi je me méfie ; se promener seul la nuit dans une ville étrangère, n’est-c
1835 octambules préfèrent d’aller à pied ; mais moi je me méfie ; se promener seul la nuit dans une ville étrangère, n’est-ce p
1836 -ce point la définition même de la luxure ? Quand je vais à pied, j’oublie en chemin les meilleures phrases que j’avais pr
1837 inition même de la luxure ? Quand je vais à pied, j’ oublie en chemin les meilleures phrases que j’avais préparées pour sub
1838 ed, j’oublie en chemin les meilleures phrases que j’ avais préparées pour subjuguer mes amies, je m’intéresse aux cravates,
1839 ures phrases que j’avais préparées pour subjuguer mes amies, je m’intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se
1840 s que j’avais préparées pour subjuguer mes amies, je m’intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se dégrade as
1841 ue j’avais préparées pour subjuguer mes amies, je m’ intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se dégrade assez
1842 er mes amies, je m’intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se dégrade assez rapidement et se dissout dans un
1843 mies, je m’intéresse aux cravates, enfin, je sens mon esprit qui se dégrade assez rapidement et se dissout dans une sentime
1844 n’est pas venue… (C’est ici le lieu de l’avouer : je ne saurais entretenir que mes rapports de politesse distante avec les
1845 e lieu de l’avouer : je ne saurais entretenir que mes rapports de politesse distante avec les personnes qui ont dit, ne fût
1846 ui ont dit, ne fût-ce qu’une fois en leur vie : «  J’ ai horreur de la sentimentalité ».) Nous voici donc en taxi, « nous de
1847 s deux le fantôme » comme on disait au village où je suis né, qui n’est pas ma patrie. Ce soir-là, le fantôme ayant envie
1848 on disait au village où je suis né, qui n’est pas ma patrie. Ce soir-là, le fantôme ayant envie de manger ferme a donné au
1849 ur l’adresse d’un ogre. C’est tout près parce que j’ ai peur. En même temps c’est très loin parce que je me réjouis. La Mai
1850 ’ai peur. En même temps c’est très loin parce que je me réjouis. La Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous
1851 peur. En même temps c’est très loin parce que je me réjouis. La Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous le
1852 is. La Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous le confie pas sans un secret tremblement. Nous embarquons Jea
1853 t d’un poète authentique. Le pittoresque. D’abord je crains que la notion n’en soit toute relative aux modes de « vie » bo
1854 « vie » bourgeois ; et puis la, comédie n’est pas mon fort, même la triste. Je n’aime plus que les choses lentement émouvan
1855 s la, comédie n’est pas mon fort, même la triste. Je n’aime plus que les choses lentement émouvantes, monotones et aiguës,
1856 ail jusqu’à l’aube, la naissance d’un visage dans ma mémoire (d’heure en heure ces yeux plus vivants…) De là, je le suppos
1857 (d’heure en heure ces yeux plus vivants…) De là, je le suppose, une certaine misanthropie en germe : les êtres changent t
1858 nthropie en germe : les êtres changent trop vite, je n’ai pas le temps de me laisser envoûter ou de les rendre esclaves, h
1859 êtres changent trop vite, je n’ai pas le temps de me laisser envoûter ou de les rendre esclaves, hors de quoi je ne sais p
1860 envoûter ou de les rendre esclaves, hors de quoi je ne sais pas de commerce humain qui vaille la peine, qui vaille l’amou
1861 d enfin qu’il est perdu, il découvre la liberté. ( Je pense à la boussole autant qu’au sens moral.) Le goût de se perdre es
1862 des plus profonds mystères de notre condition, et je ne crois pas trop absurde d’y chercher l’origine non seulement des pa
1863 rquoi ne pas se perdre sans arrière-pensée ? S’il me reste un espoir au sein de mes erreurs les moins préméditées, c’est s
1864 rière-pensée ? S’il me reste un espoir au sein de mes erreurs les moins préméditées, c’est sans doute celui d’être trouvé.
1865 réméditées, c’est sans doute celui d’être trouvé. J’ ai toujours méprisé le geste de l’homme qui, le soir dans sa chambre d
1866 uble tour. Ah ! qu’une nuit enfin, à la faveur de mon sommeil, on me vole à moi-même ! Que des êtres rêvés m’emportent ! — 
1867 qu’une nuit enfin, à la faveur de mon sommeil, on me vole à moi-même ! Que des êtres rêvés m’emportent ! — Ils me conduira
1868 meil, on me vole à moi-même ! Que des êtres rêvés m’ emportent ! — Ils me conduiraient là où je ne sais pas que j’ai si gra
1869 oi-même ! Que des êtres rêvés m’emportent ! — Ils me conduiraient là où je ne sais pas que j’ai si grand désir d’aller… Es
1870 s rêvés m’emportent ! — Ils me conduiraient là où je ne sais pas que j’ai si grand désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde
1871  ! — Ils me conduiraient là où je ne sais pas que j’ ai si grand désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde autour de moi : des
1872 pas que j’ai si grand désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde autour de moi : des murs sans yeux dominent des baraques épar
1873 désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde autour de moi  : des murs sans yeux dominent des baraques éparses dans une brousse o
1874 bouger les jambes. Nous suivons à tâtons. Ce que je pressentais ne tarde pas à se produire : des aboiements fous et une e
1875 le : c’est tout de suite écœurant et prétentieux. Je suis de ceux qui mangent sans faire d’histoires. Je remarque simpleme
1876 suis de ceux qui mangent sans faire d’histoires. Je remarque simplement qu’on n’est jamais mieux pour parler qu’en face d
1877 pure. Edmond Jaloux préside à cette agape dont il m’ est impossible de nommer tous les officiants visibles ou virtuels, et
1878 ticulier à le parfaire ? — il est bientôt minuit. Mon fantôme est là. Un chien, Dick, est là. Pierre Girard n’est pas là, n
1879 Chenevière pourrait très bien être là, puisqu’en ma voisine, je reconnais la Jeune fille de neige. On la sent prête à fon
1880 pourrait très bien être là, puisqu’en ma voisine, je reconnais la Jeune fille de neige. On la sent prête à fondre de tendr
1881 es Petit, égaré, en ayant soin d’ajouter ceux que j’ oublie, vous obtiendrez le chiffre exact des participants ; calculez l
1882 de l’Italie et une certaine qualité de désespoir, je retrouve les contes d’Hoffmann. Mais il s’agit de les vivre plutôt qu
1883 vivre plutôt que d’en parler vous voyez bien que j’ ai quitté cette table écroulée, dans la fumée et les évocations, sous
1884 ui cachait le front des palais, une nuit d’hiver, je chantonnais la Barcarolle en descendant le Grand Canal, — c’est une r
1885 ériennes, des chansons populaires qui sont ce que je connais de plus indiciblement nostalgique. Und solltest du im Leben
1886 nes. Un grand verre de bière à l’auberge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne. La petite maison du colonel en retrai
1887 nd verre de bière à l’auberge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne. La petite maison du colonel en retraite a des fen
1888 l est temps de mettre à ces fariboles un terme19. J’ ai du solide à équarrir. Et auparavant, j’aimerais lire un peu. Mes au
1889 erme19. J’ai du solide à équarrir. Et auparavant, j’ aimerais lire un peu. Mes auteurs ? Goethe en tout temps ; Rodolphe To
1890 équarrir. Et auparavant, j’aimerais lire un peu. Mes auteurs ? Goethe en tout temps ; Rodolphe Toepffer (admiré par Goethe
88 1930, Articles divers (1924–1930). « Vos fantômes ne sont pas les miens… » [Réponse à l’enquête « Les vrais fantômes »] (juillet 1930)
1891 « Vos fantômes ne sont pas les miens … » [Réponse à l’enquête « Les vrais fantômes »] (juillet 1930)q I
1892  »] (juillet 1930)q I Vos fantômes ne sont pas les miens , et qui saura jamais s’ils ne sont pas pour moi « des choses » — et r
1893 miens, et qui saura jamais s’ils ne sont pas pour moi « des choses » — et réciproquement. La distinction entre « choses » e
1894 à des habitudes individuelles, en dehors de quoi je ne lui vois pas de signification générale. Certains fantômes m’appara
1895 pas de signification générale. Certains fantômes m’ apparaissent quand je suis faible, malade ou ivre, c’est-à-dire quand
1896 générale. Certains fantômes m’apparaissent quand je suis faible, malade ou ivre, c’est-à-dire quand je suis dominé par le
1897 e suis faible, malade ou ivre, c’est-à-dire quand je suis dominé par le monde. Ils ont tous le même air absurde. Des fantô
1898 nnants d’allusions indéfinies, naissent autour de moi quand la passion ou la prière me font centre de mon univers. La visi
1899 ssent autour de moi quand la passion ou la prière me font centre de mon univers. La vision « autre » dont vous parlez tra
1900 i quand la passion ou la prière me font centre de mon univers. La vision « autre » dont vous parlez traduit simplement une
1901 vous parlez traduit simplement une variation dans mes relations avec le monde. En quoi cette première question est assez in
1902 utre que la qualité du regard qui le perçoit. Dis- moi qui te hante… Ainsi, la vulgarité évidente des fantômes décrits par l
1903 e la psychologie. q. « Vos fantômes ne sont pas les miens … » [Réponse à l’enquête « Les vrais fantômes »], Raison d’être, Paris
89 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu (septembre 1930)
1904 on un peu hâtive à une « jeunesse » déjà démodée… Je crois que la jeunesse d’aujourd’hui s’éloigne plutôt de la grandiloqu
90 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie I (octobre 1930)
1905 de ministres en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau feindre l’intérêt le plus singulier pour ce châtea
1906 s en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ ai beau feindre l’intérêt le plus singulier pour ce château sur la riv
1907 ur la rive, ils en ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où
1908 ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi.
1909 re honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi. Le seul refuge est à l’avant, parmi d
1910 visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi. Le seul refuge est à l’avant, parmi des cordages, des
1911 ue la phrase, l’unique phrase que Richard Strauss m’ aura jamais adressée en cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatig
1912 mais adressée en cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatigué, je vais au lit… » C’était au vestiaire, il enfilait une
1913 cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatigué, je vais au lit… » C’était au vestiaire, il enfilait une manche de pardes
1914 u vestiaire, il enfilait une manche de pardessus, me donnait l’autre à serrer, la main n’étant pas encore sortie… Dormir a
1915 ns cette foule et ces musiques, deux visages amis me sourient. Ô liberté aérienne des arrivées, premiers regards aux rues
1916 qui font des signes pour demain, présentations de mes Espoirs aux jeunes Promesses nationales (on n’a pas bien compris les
1917 tendresse pour tous les possibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme
1918 ossibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme aux voûtes sombres, qui
1919 ibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme aux voûtes sombres, qui est
1920 . La recherche de l’objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en
1921 e de l’objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en ce premier
1922 on adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la
1923 ce hongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’at
1924 ongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’atten
1925 z moi je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’ attends la lettre, j’attends je ne sais quoi de très important… Trois
1926 e de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’ attends je ne sais quoi de très important… Trois déceptions par jour n
1927 oisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends je ne sais quoi de très important… Trois déceptions par jour ne peuvent
1928 par jour ne peuvent qu’énerver le désir. Parfois j’ imagine que le facteur va m’apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciat
1929 ver le désir. Parfois j’imagine que le facteur va m’ apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciateur d’une miraculeuse et roy
1930 le Venue. Dans le silence de l’adoration comblée, j’ en sortirais de ces objets sans nom, inutilisables, bouleversants de p
1931 us pur. Le voyage trompe un temps cette angoisse. J’ irai chercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes les avances, l
1932 n temps cette angoisse. J’irai chercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qu
1933 cette angoisse. J’irai chercher moi-même, me suis- je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sait s
1934 goisse. J’irai chercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sait si tant d
1935 choses pouvait offrir asile à l’objet inconnu que je chercherai sans doute jusqu’à la fin des fins… Mais voici mes amis. E
1936 ai sans doute jusqu’à la fin des fins… Mais voici mes amis. Et la question terrible, tout de suite : « Mais qui, mais qu’êt
1937 u’êtes-vous venu chercher jusque chez nous ? » On me demandera donc toujours des passeports ? Dussè-je les inventer… Ah !
1938 me demandera donc toujours des passeports ? Dussè- je les inventer… Ah ! l’embarras de voyager n’est rien auprès de celui d
1939 i d’expliquer pourquoi l’on est parti. Cependant, mes regards errant sur une bibliothèque, je crois y trouver mon salut : «
1940 pendant, mes regards errant sur une bibliothèque, je crois y trouver mon salut : « Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabo
1941 s errant sur une bibliothèque, je crois y trouver mon salut : « Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’éc
1942 Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’ écrié-je, mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’
1943 hl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’écrié- je , mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’user, ne
1944 et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’écrié-je, mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’user, ne tard
1945 vre. Mais combien votre sort, ô grands empêtrés ! me paraît enviable : vous au moins connaissiez ce qui causait votre malh
1946 moins connaissiez ce qui causait votre malheur ; moi , non. Barnabooth savait bien ce qu’il ne pouvait perdre, et c’était s
1947 ait ce qu’il avait perdu, c’était son ombre. Mais moi qui cherche un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos et qui me voue à
1948 e un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos et qui me voue à toutes les magies ! Les désirs les plus incompréhensibles s’em
1949 s désirs les plus incompréhensibles s’emparent de moi comme des superstitions. Tout mon avoir se fond dans une loterie qui
1950 s s’emparent de moi comme des superstitions. Tout mon avoir se fond dans une loterie qui peut-être n’a pas de gros lot, et
1951 rie qui peut-être n’a pas de gros lot, et jamais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à le regretter… » L’ironie indu
1952 as de gros lot, et jamais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à le regretter… » L’ironie indulgente et cette pitié à
1953 jeunesse démodée se peignirent sur les traits de mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubles distingués.
1954 ent sur les traits de mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubles distingués. Peu de sens du réel. Mais
1955 ou tout au moins ce qu’il en reste. Sur quoi l’on m’ entraîna dans un musée sans sièges. Le Musée de Budapest enferme quelq
1956 andis que nous y rôdions, un soir étouffant, vous m’ avez montré en passant des murs brunis qui rougeoyaient au sommet du R
1957 sommes rentrés en Europe. Mais dès le lendemain, m’ échappant du programme, il a bien fallu que je recherche le chemin du
1958 in, m’échappant du programme, il a bien fallu que je recherche le chemin du Rozsadomb. « Vous n’y verrez, m’avait-on dit,
1959 herche le chemin du Rozsadomb. « Vous n’y verrez, m’ avait-on dit, qu’une paire de babouches dans une mosquée vide que pers
1960 stère. Montant au Rozsadomb par ce matin brûlant, je savais bien que j’obéissais à ce que nos psychologues appellent une c
1961 ozsadomb par ce matin brûlant, je savais bien que j’ obéissais à ce que nos psychologues appellent une conduite magique. Or
1962 justifiable : c’est le plaisir même de l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je fer
1963 est le plaisir même de l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au
1964 l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinag
1965 ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet incon
1966 d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. On pas
1967 is gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. On passe une barrière, une c
1968 au est vide. Et les babouches ? Pas de babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heure de visiter : le Père des roses est
1969 t devenu le jardinier du Rozsadomb… Mais qu’eussè- je pu contempler de plus « objectivement » étrange que ce lieu — inquiét
1970 ntransigeant serait la seule conduite féconde. Il me semble que la servitude de l’homme moderne apparaît ici sous un aspec
1971 la sensibilité même qu’on impose une livrée. — «  Je comprends, me dit-on. Vous êtes pour la fantaisie, c’est bien joli !…
1972 é même qu’on impose une livrée. — « Je comprends, me dit-on. Vous êtes pour la fantaisie, c’est bien joli !… » — Non, Mons
1973 sieur, ce n’est pas joli, ce n’est pas fantaisie. Je parle simplement de vérité et de mensonge, opposant une réalité vivan
1974 t, disait-on, du temps que l’on parlait français. J’ expliquais donc que je ne voyage qu’au hasard, et pour rien ni personn
1975 que l’on parlait français. J’expliquais donc que je ne voyage qu’au hasard, et pour rien ni personne. Sur quoi : « Monsie
1976 devoirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui : je me ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre cons
1977 voirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui : je me ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre conserv
1978 h bien oui : je me ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre conserve ici le sens qu’il a pris dans ce
1979 onserve ici le sens qu’il a pris dans ce monde, —  j’ entends : leur monde, avec leurs « problèmes du plus haut intérêt », l
1980 payer cher. Tout cela est langage de bourse. Pour moi , je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la fac
1981 cher. Tout cela est langage de bourse. Pour moi, je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la face de
1982 a est langage de bourse. Pour moi, je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la face des bouffons qui p
1983 es mains dans leurs vastes poches insulaires pour m’ informer de cette irrécusable vérité : les affaires sont les affaires,
1984 t les affaires, axiome qui constitue à leurs yeux ma condamnation et celle des minus habentes qui me ressemblent. Au risqu
1985 x ma condamnation et celle des minus habentes qui me ressemblent. Au risque de les voir trépigner, je continuerai à cherch
1986 me ressemblent. Au risque de les voir trépigner, je continuerai à chercher mon bien de midi à quatorze heures, temps qu’i
1987 de les voir trépigner, je continuerai à chercher mon bien de midi à quatorze heures, temps qu’ils réservent à la masticati
1988 l’on ose dire, à assurer cette mastication. Mais je m’égare, laissons-là ces moutons. 5. Café amer En Hongrie l’on
1989 on ose dire, à assurer cette mastication. Mais je m’ égare, laissons-là ces moutons. 5. Café amer En Hongrie l’on est
1990 e que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que je trouve ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je me défends d
1991 ve ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je me défends du pittoresque, ce n’est qu’amour jaloux du merveilleux, a
1992 ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je me défends du pittoresque, ce n’est qu’amour jaloux du merveilleux, avec
1993 es presque excusables de ne le point apercevoir.) Je vais cependant dire quelque chose d’une scène pittoresque. Mais c’est
1994 scène pittoresque. Mais c’est une autre fois que je l’ai vue, à Pest, lors d’un autre séjour, dans la semaine qui suit No
1995 ffreusement belle dans un peignoir noir et blanc… Je ne puis avaler mon verre de ce café trop amer qui pince la gorge. Deh
1996 dans un peignoir noir et blanc… Je ne puis avaler mon verre de ce café trop amer qui pince la gorge. Dehors, nous ne parlon
1997 mâchoire. 6. Doutes sur la nature du Sujet Je crois qu’il faut que je raconte mon voyage « à la suite », renonçant
1998 sur la nature du Sujet Je crois qu’il faut que je raconte mon voyage « à la suite », renonçant à écrire d’abord les cha
1999 re du Sujet Je crois qu’il faut que je raconte mon voyage « à la suite », renonçant à écrire d’abord les chapitres qui e
2000 t envie, puis ceux qui en auront envie : car cela m’ inciterait à chercher après coup des transitions, et c’est alors que l
2001 d’un pays apparaissant en général au voyageur de ma sorte sous ses modalités sentimentales plus que documentaires, peut-ê
2002 us que documentaires, peut-être serait-il bon que je parsème ce texte de quelques noms impossibles et de beaucoup de chiff
2003 si le lecteur superficiel aurait l’impression que je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon suje
2004 el aurait l’impression que je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce q
2005 impression que je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît
2006 che, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît infiniment baroque, à peine c
2007 étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît infiniment baroque, à peine compréhensible, car on ne choisit
2008 ndeloque insolite l’étrangeté de son éclat. Alors je m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais f
2009 loque insolite l’étrangeté de son éclat. Alors je m’ en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais fein
2010 e son éclat. Alors je m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux ce
2011 oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux ce que je vois. Ruse connue : c’es
2012 use. Je vais feindre de prendre au sérieux ce que je vois. Ruse connue : c’est l’histoire du mot que vous avez sous la lan
2013 l’histoire du mot que vous avez sous la langue ; je vous conseille de n’y plus penser quelque temps… Car on ne trouve vra
2014 rand et gratuit, sacrifice.) … feuilletons un peu ma Hongrie. 7. Les magnats en taxis La place Saint-Georges, à Bude
2015 iducs, quel décor à rêver le cortège d’un sacre ! J’ y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour de l’élection d’un des
2016 s instable des huit reflets de leur dignité. Mais je n’oublierai pas le sourire de ce vieux prince : un vrai sourire, adre
2017 — et le mot « affable » reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a la tête de François-Joseph, dont il fut peut-être valet,
2018 is semaines, à Freudenau, lors du Derby viennois, je les ai vus portant cylindre gris à la terrasse du Jockey-Club. Mainte
2019 thes sentimentaux qui gouverne les arguments. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosm
2020 ux qui gouverne les arguments. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme : la politique
2021 ents. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme : la politique des peuples ressemble à
2022 Tendre d’après le traité de Trianon ! Ces choses, je les ai rêvées sur un divan, à cause d’un coussin où s’étalait le sour
2023 . Le roi. » 10. Visite à Babits Personne, à ma connaissance, ne se plaint de ce qu’il y a peu de poètes par le monde
2024 ts « bien hongrois » dans un style académique qui me paraît être le contraire du style hongrois. Il y a aussi une extrême
2025 la plus vivante du génie littéraire de cette race me paraît bien avoir été donnée par le groupe important du Nyugât (l’Occ
2026 Babits est aujourd’hui le chef de file. Des amis m’ emmènent le voir à Esztergóm, où il passe ses étés. Esztergóm est la p
2027 t la plus vieille capitale de la Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. Aujourd’hui c’est la résidence du Prince Primat. Au-
2028 le la plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est, je grimpe au cerisier sauvage, derrière la maison, un peintre tout en bl
2029 non point à celle des arrivistes. 14. Parce que j’ « exalte les valeurs de passion » — pour parler comme le seul Clerc qu
2030 ler comme le seul Clerc qui n’ait pas trahi — qui me paraissent être la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je sui
2031 me paraissent être la grandeur de la Hongrie, on m’ expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin cet état d’esprit
2032 re la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin cet état d’esprit que j’admire est
2033 ur la guerre, puisque enfin cet état d’esprit que j’ admire est, entre autres, belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne
2034 it que j’admire est, entre autres, belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne pas l’être ? Mais je crois que les pacifis
2035 r je suis pacifiste. Comment ne pas l’être ? Mais je crois que les pacifistes qui veulent assurer la paix par la mutilatio
91 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la folie (octobre 1930)
2036 Les quatrains sont ici précédés de Fragments dont je me demande s’il était bien légitime de les traduire. On a respecté sc
2037 quatrains sont ici précédés de Fragments dont je me demande s’il était bien légitime de les traduire. On a respecté scrup
2038 mots isolés, des bribes de phrases… Or, si comme je le crois et voudrais l’établir plus longuement, le sens des poèmes de
2039 les d’éveiller le sentiment rare et grandiose que j’ appellerais celui du tragique de la pensée. « Insensé, — penses-tu de
92 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie II (novembre 1930)
2040 nnel tu vois que la veilleuse brûle toujours — et moi , parmi les reflets fuyants de toutes sortes de faces et de paysages s
2041 de faces et de paysages soudainement invisibles, je distingue le doux feu bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand
2042 ment invisibles, je distingue le doux feu bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand je pense à ce qu’en imagineraient
2043 u bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand je pense à ce qu’en imagineraient les autres, si je leur en parlais… Il
2044 je pense à ce qu’en imagineraient les autres, si je leur en parlais… Il leur suffirait de l’image d’un bibelot d’une sort
2045 t inconnu et tellement fascinant à la fois, qu’il me préserve de tout amour pour quelque bien particulier où je serais ten
2046 ve de tout amour pour quelque bien particulier où je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le
2047 ur quelque bien particulier où je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde dan
2048 ticulier où je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde dans sa fumée, on resp
2049 je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! —  Je ne sais plus. — Le train s’attarde dans sa fumée, on respire une lour
2050 on respire une lourde obscurité qui sent l’enfer. Je ne pense plus qu’ « au souffle »… Mais alors tout s’allume et voici l
2051 ne sont qu’une ivresse aux cent visages, lorsque j’ entre dans l’atelier du peintre. Je ne tarde pas à oublier ce qui est
2052 sages, lorsque j’entre dans l’atelier du peintre. Je ne tarde pas à oublier ce qui est lent ou fixe ou pas-à-pas. Tout s’é
2053 s la danse, ils incarnent l’allégresse rythmique. Je les vois frapper le sol du talon en levant un bras, la main à la nuqu
2054 horizontales, soutenues par un long souffle vif. J’ observe que les paroles autant que les gestes sont gouvernées par la s
2055 selon les lois d’une plastique exubérante. Quand je dis que j’observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’
2056 lois d’une plastique exubérante. Quand je dis que j’ observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’on en ferme
2057 plastique exubérante. Quand je dis que j’observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’on en ferme les yeux.
2058 gs coups d’ailes en silence au-dessus du gouffre. Je vole sur place, mais tout se met à fuir, alors il faut voler plus vit
2059 vite pour rattraper ces apparences adorables… Si je « lâchais » un instant, toutes choses disparaîtraient… Le vertige (la
2060 aisser choir dans le Gris ? Rejoindre ?… Derrière mes paupières, dans ce désordre lumineux, le verrai-je naître à mon désir
2061 s paupières, dans ce désordre lumineux, le verrai- je naître à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans No
2062 dans ce désordre lumineux, le verrai-je naître à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans Noms, ça ne ser
2063 tre à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans Noms, ça ne sera pas encore pour cette fois. 13. Chanso
2064 es mains pleines de drôleries ou de supplication. Je ne sais ce que disent les paroles. Je vois des chevauchées sous le so
2065 pplication. Je ne sais ce que disent les paroles. Je vois des chevauchées sous le soleil, des campements nocturnes où le s
2066 ue, conserve quelque espoir de t’en tirer. Sinon… je t’envierais presque. Celui qui part pour la Hongrie sans talisman, s’
2067 borodinesque, mais l’erreur n’est imputable qu’à mon instabilité rythmique. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que j
2068 à mon instabilité rythmique. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que j’entends.) La plaine hongroise n’est pas monoto
2069 que. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que j’ entends.) La plaine hongroise n’est pas monotone, parce qu’elle est d’
2070 i fasse répétition. C’est ici le premier pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choi
2071 emier pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choisis16. Il y a une grande ville, un
2072 pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choisis16. Il y a une grande ville, un grand
2073 estions sociales. La Puszta est une terre vierge, je veux dire que la bourgeoisie ne s’y est pas encore répandue. Il y a p
2074 et artiste de la prodigalité. — « Ah ! répond-il, j’ aimerais bien pouvoir vivre comme je vis ! » Voici les cigognes, dont
2075  ! répond-il, j’aimerais bien pouvoir vivre comme je vis ! » Voici les cigognes, dont Andersen assure qu’elles parlent en
2076 gue qu’elles apprennent de leurs mères ». Combien j’ aime ces sœurs des Tziganes ! Les Tziganes vinrent en Europe conduits
2077 allemand, c’est : Zigeuner ; hongrois : cigány ; mien  : cigognes. D’ailleurs ces Égyptiens venaient des Indes, qui nous app
2078 nous n’avons qu’au prix de tout ce qu’à Debrecen je viens admirer. On aime les Hongrois comme on aime l’enfance : or le r
2079 ’enfant, c’est de devenir une grande personne. On me l’a dit, c’est vrai : cette ville historique est aussi l’autre « Rome
2080 sitaire tout rajeuni dans des jardins luisants ne m’ empêchera pas de m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’E
2081 i dans des jardins luisants ne m’empêchera pas de m’ y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’Europe. Le hasard a
2082 u bord extrême de l’Europe. Le hasard a voulu que j’ y entende, un soir, une présentation de musiques hongroises, turques e
2083 nte et basse, prolongée. Peut-être ce soir-là, ai- je compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches d
2084 e compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’ étais aux marches de l’Asie. En sortant du concert, j’ai erré aux terr
2085 ais aux marches de l’Asie. En sortant du concert, j’ ai erré aux terrasses des hôtels, dans le grandiose bavardage des Tzig
2086 oici qu’une autre vient d’ailleurs, entraînée par je ne sais quel vent sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et d’un
2087 de celui qui succombe à l’excès du sommeil) — et me voici plus seul, avec une nostalgie qui ne veut pas de la romance à m
2088 vec une nostalgie qui ne veut pas de la romance à mon oreille d’un violoneux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond d
2089 as de la romance à mon oreille d’un violoneux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond d’une Inde. Ils l’ont égaré, co
2090 ux fades du Balaton Deux jours après, dégrisé, je nageais dans les eaux fades du Balaton. Ces eaux, je crois, s’en vont
2091 nageais dans les eaux fades du Balaton. Ces eaux, je crois, s’en vont à la mer Noire, et je n’en connais pas les fées, c’e
2092 Ces eaux, je crois, s’en vont à la mer Noire, et je n’en connais pas les fées, c’est pourquoi je nageais à brasses pruden
2093 , et je n’en connais pas les fées, c’est pourquoi je nageais à brasses prudentes avec, aux jambes, l’imperceptible angoiss
2094 presque belles dans leurs petits sweaters — vais- je pour vous m’arrêter quelques jours ? On ferait connaissance à table d
2095 es dans leurs petits sweaters — vais-je pour vous m’ arrêter quelques jours ? On ferait connaissance à table d’hôte, on ira
2096 ant qu’ici la vie a parfois moins de hargne… Déjà je suis repris par le malaise que m’infligent les lieux faciles. Ô trist
2097 de hargne… Déjà je suis repris par le malaise que m’ infligent les lieux faciles. Ô tristesse des crèmeries et des jardins 
2098 s jardins ! C’est devant une glace panachée qu’il m’ arrive de douter de la vie, comme d’autres aux approches du mal de mer
2099 d’autres aux approches du mal de mer. À la nuit, j’ ai rôdé dans la campagne aux collines basses, d’apparence rocheuse — c
2100 la Lune et toutes lustrées de rêches végétations. J’ ai traversé l’angoisse lunaire des villages vides aux portes aveugles
2101 e lunaire des villages vides aux portes aveugles ( j’ avais peur du bruit de mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers da
2102 des aux portes aveugles (j’avais peur du bruit de mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers dans les champs de maïs, épi
2103 es (j’avais peur du bruit de mes pas). Au hasard, j’ ai suivi des sentiers dans les champs de maïs, épiant la venue d’une j
2104 te où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je me heurte, comme réveillé dans l’absurdité d’être n’importe où. Une p
2105 où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je me heurte, comme réveillé dans l’absurdité d’être n’importe où. Une pani
2106 rdu… Un train dormait devant la gare campagnarde. Je me suis étendu dans un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri
2107 … Un train dormait devant la gare campagnarde. Je me suis étendu dans un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri de
2108 de la lune. Le contrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube m’éveille dans les faubourgs de Budapest, cheveux
2109 ur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube m’ éveille dans les faubourgs de Budapest, cheveux en désordre, pantalon
2110 on plissé, et cet abruti de contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j’allais rattraper, comme
2111 sé, et cet abruti de contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j’allais rattraper, comme un pan
2112 et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j’ allais rattraper, comme un pan de la nuit fuyante, un songe où j’ai dû
2113 per, comme un pan de la nuit fuyante, un songe où j’ ai dû voir l’objet pour la première fois — ou bien était-ce un être ?
2114 s — ou bien était-ce un être ? 17. Insomnie J’ éteignais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon d’une momie bl
2115 Insomnie J’éteignais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon d’une momie bleuâtre, mais peut-on se reposer vraim
2116 vraiment à cent à l’heure. Par-dessous le store, je voyais la Lune faire des bonds courts sur la plaine inondée de nuit.
2117 e des bonds courts sur la plaine inondée de nuit. J’ essayais de penser par-dessous le rythme obstiné de cette hurlante bou
2118 ulade sur place qu’est un voyage en express. Mais je ne trouvais pas la pente de mon esprit, et tout en le parcourant avec
2119 e en express. Mais je ne trouvais pas la pente de mon esprit, et tout en le parcourant avec une soif qui annonçait le déser
2120 parcourant avec une soif qui annonçait le désert, je traçais des plans d’œuvres sablonneuses. Je composais un traité des v
2121 sert, je traçais des plans d’œuvres sablonneuses. Je composais un traité des voyages : les titres en étaient de Sénèque ou
2122 les titres en étaient de Sénèque ou de Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré Sterne ou Goethe, mais, sembla
2123 ne ou Goethe, mais, semblable à Gérard de Nerval, je sentais qu’il s’agissait d’autre chose… Il s’agit toujours d’autre ch
2124 depuis un moment, c’est que la ligne est droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’aime ces heures désorientées 
2125 ligne est droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’aime ces heures désorientées ; le sentiment du « non-sens »
2126 droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’ aime ces heures désorientées ; le sentiment du « non-sens » de la vie
2127 s, naturellement… (Encore un qui se réveille dans ma tête.) — On ne voyage jamais que dans son propre sens ! — Mais il fau
2128 er). Se peut-il qu’on cherche le sens de la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable
2129 cherche le sens de la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable. Seul au milieu des m
2130 e la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’ approcher de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais
2131 ais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’avais
2132 de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’ oubliais ma race, j’avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Ide
2133 e véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mo
2134 le. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’ avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre.
2135 llusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon a
2136 tique à mon centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un
2137 on centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type huma
2138 omparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’é
2139 ’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’étais presque i
2140 tres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’étais presque infi
2141 découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’ étais presque infiniment variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui
2142 ent variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert
2143 ble, indéterminé. Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puis
2144 Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puissances d’évasion
2145 Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ ai découvert mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je presse
2146 on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe
2147 t mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe une clef : délivré de moi, j’entrerais en plein
2148 nt je pressens qu’il existe une clef : délivré de moi , j’entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettr
2149 pressens qu’il existe une clef : délivré de moi, j’ entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait
2150 e une clef : délivré de moi, j’entrerais en plein Moi … Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait de combler l’écart ent
2151 rais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réal
2152 ela » qui me permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un ê
2153 ui me permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un être ? L
2154 que… Une chose ? Un être ? L’Objet ? — Est-ce que je dors dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain d’un éclat bleu
2155 e ? Un être ? L’Objet ? — Est-ce que je dors dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain d’un éclat bleu douloureux, le
2156 est obstruée par un douanier, tant qu’à la fin on me refoule dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends b
2157 un douanier, tant qu’à la fin on me refoule dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends bien qu’il faudrai
2158 le dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends bien qu’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ai perdu mes
2159 ends bien qu’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ ai perdu mes clefs. L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’
2160 u’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ai perdu mes clefs. L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’ai le feu à
2161 . L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’ ai le feu à la tête, mais je suis innocent puisque enfin il n’est pas
2162 e des aveux complets. J’ai le feu à la tête, mais je suis innocent puisque enfin il n’est pas dans ma valise, ce n’est que
2163 je suis innocent puisque enfin il n’est pas dans ma valise, ce n’est que trop certain. Cependant, « rien à déclarer » apr
2164 e ? Cela va paraître improbable. On a dû voir sur moi que je le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs
2165 va paraître improbable. On a dû voir sur moi que je le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans me
2166 pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans mes onze poches. Seulement ce papier timbré d’un ministère… mais déjà l’œ
2167 is qu’a-t-on jamais pu « déclarer » d’important ? Je ne sais plus parler en vers et la prose n’indique que les choses les
2168 est bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre philosophale. Pe
2169 bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre philosophale. Peut-
2170 ces deux mots suffiraient-ils à l’indiquer quand je m’en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui ex
2171 s deux mots suffiraient-ils à l’indiquer quand je m’ en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui exige
2172 ’en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui exigent des apparences positives. Ainsi donc, j’ai cherch
2173 qui exigent des apparences positives. Ainsi donc, j’ ai cherché la Pierre des philosophes. D’autres aussi, peut-être, la ch
2174 sirer de la voir, apparaît la « Loge » invisible. J’ attends, j’appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi
2175 voir, apparaît la « Loge » invisible. J’attends, j’ appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte l
2176 isible. J’attends, j’appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce
2177 uelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle m’a donné ? Cette not
2178 e quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle m’ a donné ? Cette notion plus vive d’un univers où la présence de l’Obje
2179 l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bien n’ai- je su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieur
2180 ien n’ai-je su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depuis to
2181 su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depuis toujours ce
2182 nnaître sont un seul et même acte. Peut-être l’ai- je aimée d’un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et en qui l’
2183 cun être ? Et s’il fallait attendre pour aimer !… Je me souviens de ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et
2184 être ? Et s’il fallait attendre pour aimer !… Je me souviens de ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et d’
2185 rande Plaine encore rougeâtre de soleil couchant. J’ y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et po
2186 couchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécu
2187 uchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécurit
2188 flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécurité. Présence, présence réelle… Comme j
2189 trange sécurité. Présence, présence réelle… Comme j’ ai peine à m’imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière
2190 té. Présence, présence réelle… Comme j’ai peine à m’ imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière en ce lieu,
2191 le… Comme j’ai peine à m’imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière en ce lieu, secrète et familière. Songe
2192 cette minute et à d’autres semblables, en voyage, je me dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncièr
2193 te minute et à d’autres semblables, en voyage, je me dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière q
2194 blables, en voyage, je me dis que c’est de là que j’ ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive d’éprouver en
2195 j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’ arrive d’éprouver en face d’une action purement raisonnable. Ah ! quel
2196 tu perds les clefs de tes valises… (Cela encore : m’ arrêter à Vienne à cause des serrures… Peut-être y passer une nuit — r
2197 Lune le renvoie sur Terre en forme de pluie. » Si je trouvais un jour l’Objet, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussi
2198 de pluie. » Si je trouvais un jour l’Objet, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussitôt je commence à comprendre ce qu’
2199 t, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussitôt je commence à comprendre ce qu’il est : cela qui me rendrait acceptable
2200 je commence à comprendre ce qu’il est : cela qui me rendrait acceptable ce monde…) Malheur à celui qui ne cherche pas. Ma
93 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Charles Du Bos, Approximations, 4e série (novembre 1930)
2201 os, Approximations, 4e série (novembre 1930)bk Je n’ai jamais cherché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en m’iden
2202 n’ai jamais cherché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m’était possible, non seul
2203 herché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en m’ identifiant d’aussi près qu’il m’était possible, non seulement au poin
2204 er mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m’ était possible, non seulement au point de vue, mais à la complexion, à
2205 nt implicite que, sur le plan de la qualité pure, je persiste à tenir pour le plus efficace. Ce n’est peut-être pas fortui
2206 le problème de l’homme dans sa totalité, et c’est je crois l’éloge de choix. Mais de ce problème central, qui déborde le p
2207 on pourrait l’appeler une critique des obstacles. Je veux dire par là que M. Du Bos parvient à recréer comme pour son comp
94 1930, Foi et Vie, articles (1928–1977). « Pour un humanisme nouveau » [Réponse à une enquête] (1930)
2208 pensée qui par ailleurs participe de la liberté : j’ entends la pensée mystique. L’expérience mystique a la même extension
2209 tte fatalité qui est le signe du monde matériel. Je vois l’humanisme nouveau sous l’aspect d’une culture des facultés mys
2210 particulière, antérieure à n’importe quel dogme. Je ne crois pas qu’il existe d’autres facultés capables d’équilibrer en
2211 ables d’équilibrer en nous l’esprit de géométrie. J’ imagine une méthode, une façon d’appréhender la vie, de hiérarchiser n
2212 it pas de l’existence la poésie, ce sens du Réel. Je vois se composer en cette méthode — peut-être séculairement — ce que
2213 sans doute… Mais tout commence par des rêves. Et je ne vois rien d’autre. Quoi qu’il en soit d’ailleurs du contenu d’un n
2214 faux dieux — le fascinant éclat de ce vide ? 5. Je songe à la « psychologie scientifique » et à ce leurre qu’est l’attit
2215 t à ce leurre qu’est l’attitude paralléliste. 6. J’ exagère probablement, car la sincérité de ce néo-scientisme tempéré — 
95 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). André Malraux, La Voie royale (février 1931)
2216 t de l’action par un intellectualisme anarchique. Je tiens au contraire le cas Malraux pour hautement significatif de notr
2217 la plus forte que M. Malraux se fait de lui-même. Je suis tenté de dire : son moi idéal, celui auquel il donne sa plus pro
2218 se fait de lui-même. Je suis tenté de dire : son moi idéal, celui auquel il donne sa plus profonde et intime adhésion. Nou
2219 qui pourrait se définir : « Dieu n’est pas, donc je suis » ; l’homme seul ; areligieux, relié à rien. Plutôt aventurier q
2220 aucune transcendance où s’abîmer, d’où renaître. Je ne sais pas aujourd’hui le livre « bien pensant » qui pose avec une p
2221 propriété officielle de bas-reliefs cambodgiens. Je donne l’histoire comme une fable. Il est peut-être curieux de noter q
96 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Sécularisme (mars 1931)
2222 qui donneront le ton et les thèmes principaux : J’ avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel â
2223 on et les thèmes principaux : J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie… — Où
2224  être poétique, c’est avoir besoin d’illusions ». Je soutiendrais volontiers le contraire, mais M. Nizan est de ces gens,
2225 lisme qu’elle combat avec raison ? D’ailleurs, si je vois bien que le propos de M. Nizan n’est pas de nous rendre le goût
2226 de ce qui, en Europe, « allongeait la solution », je ne puis m’empêcher de penser que cette peinture d’Aden est assez fait
2227 en Europe, « allongeait la solution », je ne puis m’ empêcher de penser que cette peinture d’Aden est assez faite pour y co
2228 ale des conditions matérielles de la vie humaine. Je crois que l’homme ne peut être transformé que spirituellement. Et cet
2229 de loin le château d’If et N.-D. de la Garde : «  J’ étais servi — s’écrie-t-il. — Les premiers emblèmes venus à ma rencont
2230 i — s’écrie-t-il. — Les premiers emblèmes venus à ma rencontre étaient justement les deux objets les plus révoltants de la
2231 se demande M. G. Marcel. L’orgueil tout d’abord, je n’hésite pas à le déclarer. On m’arrêtera en me faisant observer que
2232 l tout d’abord, je n’hésite pas à le déclarer. On m’ arrêtera en me faisant observer que cet orgueil n’a pas un caractère p
2233 , je n’hésite pas à le déclarer. On m’arrêtera en me faisant observer que cet orgueil n’a pas un caractère personnel, puis
2234 hvicg nous entretient n’est l’Esprit de personne. Je répondrai tout d’abord que c’est ou que cela veut être l’Esprit de to
2235 ns la sphère des abstractions les plus exsangues. Je pense quant à moi qu’un idéalisme de cette espèce est inévitablement
2236 abstractions les plus exsangues. Je pense quant à moi qu’un idéalisme de cette espèce est inévitablement coincé entre une p
2237 e matérialisme historique de l’autre. La preuve, je m’amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communist
2238 atérialisme historique de l’autre. La preuve, je m’ amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communiste,
2239 ion, celui, en somme, de l’imperfection du monde. Je pense que tout chrétien conscient des problèmes de ce temps, souscrir
97 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Une exposition d’artistes protestants modernes (avril 1931)
2240 besoin plus que quiconque de principes définis — je ne dis pas de cadres — qui lui servent de thèmes dans ses variations,
98 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Au sujet d’un grand roman : La Princesse Blanche par Maurice Baring (mai 1931)
2241  Si vous désirez savoir comment cela s’applique à mon histoire, dit l’auteur dans sa préface, lisez-la, et si vous la lisez
2242 rrive avant qu’ils n’aient lu eux-mêmes le livre. J’ espère que les critiques ne le diront pas non plus ; mais je sais que
2243 ue les critiques ne le diront pas non plus ; mais je sais que c’est beaucoup leur demander. » Eh bien ! non, c’est au cont
2244 notre auteur : « La veille de la Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de l’Église catholique… le seul acte de ma vie
2245 s le sein de l’Église catholique… le seul acte de ma vie que je suis parfaitement certain de n’avoir jamais regretté. » Bl
2246 e l’Église catholique… le seul acte de ma vie que je suis parfaitement certain de n’avoir jamais regretté. » Blanche, angl
2247 ait point ébranlé sa foi, la princesse répond : «  Je ne crois pas, j’espère que non ; bien qu’il soit difficile, quelquefo
2248 sa foi, la princesse répond : « Je ne crois pas, j’ espère que non ; bien qu’il soit difficile, quelquefois, me semble-t-i
2249 que non ; bien qu’il soit difficile, quelquefois, me semble-t-il, de savoir exactement quelle foi on a. » Plus tard elle a
2250 ard elle avoue franchement : « … dans nos églises j’ éprouve un sentiment de détresse aiguë, ou bien je m’y ennuie. » Et l’
2251 j’éprouve un sentiment de détresse aiguë, ou bien je m’y ennuie. » Et l’on découvre soudain que cette femme, qui a subi sa
2252 prouve un sentiment de détresse aiguë, ou bien je m’ y ennuie. » Et l’on découvre soudain que cette femme, qui a subi sans
2253 ez à l’église le dimanche ? — Oui, tante Harriet, j’ y vais. — Tante Harriet eut un soupir de soulagement. La question étai
2254 ger, induits en tentation, induits en discussion. Je sais bien que tout changement de confession ramène les mêmes argument
2255 au père Michaël.) Vous comprenez tout à présent. Je vous demande seulement de prier pour moi, car j’ai parfois la sensati
2256 présent. Je vous demande seulement de prier pour moi , car j’ai parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux
2257 Je vous demande seulement de prier pour moi, car j’ ai parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux supporte
2258 prier pour moi, car j’ai parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux supporter. La vie humaine me paraît in
2259 i parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux supporter. La vie humaine me paraît intolérable. — Elle l’est
2260 est plus que je ne peux supporter. La vie humaine me paraît intolérable. — Elle l’est presque, mais pas tout à fait. Il fa
2261 resque la même chose dans le Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que j’ai commis des erreurs irréparables. — Vous a
2262 le Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que j’ ai commis des erreurs irréparables. — Vous avez le droit de vous laiss
99 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Kierkegaard (mai 1931)
2263 -être, en France tout au moins, — du plus actuel, je dirais même du plus urgent de tous. Søren Kierkegaard naquit à Copenh
2264 ielle pour Kierkegaard était : Comment deviendrai- je chrétien ? Seul un protestant pouvait trouver pareille formule. Le hé
2265 Revue française , chez Fourcade et aux Éditions «  Je sers ». h. « Kierkegaard », Foi et Vie, Paris, n° 27, mai 1931, p. 3
100 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Littérature alpestre (juillet 1931)
2266 rature. « Celui qui sait respirer l’atmosphère de mon œuvre sait que c’est une atmosphère des hauteurs, que l’air y est vif