1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 littéraire : une leçon d’énergie. Il se pique de n’ avoir pas connu, jusqu’à ce jour au moins, cette inquiétude libératric
2 r, il a bravement affirmé son unité. Car le temps n’ est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des âmes exce
3 nal dans cette conception simpliste du monde, qui n’ est en rien différente de celle de l’Action française ; remarquons tou
4 emarquons toutefois cette séparation, que Maurras n’ a pas faite aussi franchement, du catholicisme et du christianisme, le
5 ns le même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’ est décidément pas philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour le
6 erlant n’est décidément pas philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quit
7 et chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’ a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’un
8 maine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est même pas demandé si ces deux contrepoisons pouvaient être admin
9 n faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’ a pas été sans quelques tours de passe-passe de logique, admirablement
10 iers Français qui ait compris que le but du sport n’ est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la f
11 ublier la partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable : « Ces simplifications valent ce que valen
12 idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’ est pas une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ».
13 n’est pas une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant s
14 désir de l’air. Danse-t-il sur une musique que je n’ entends pas ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la domina
15 te une règle ; on l’assimile, à tel point qu’elle n’ est plus une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du
16 ivique tressé dans vos couronnes de laurier. Vous n’ êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du
17 aît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui.
18 resse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils dise
19 ls disent : « Tu es notre capitaine. » Ces choses ne sont pas dites en vain. Stades que parcourent de jeunes et purs coura
20 filles assez fortes pour pouvoir tout lire, et il n’ y aura plus besoin de roman catholique. » C’est ce qu’on pourrait appe
21 : porter l’effort sur ce qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à l’entraînement n
22 era de soi-même. Ainsi l’athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : il développe ses
23 les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa morale virile nous est néanmoins plus proche que
2 1924, Articles divers (1924–1930). Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)
24 rès à leur point de départ. Mais leurs recherches n’ ont pas été vaines. Ils en reviennent chargés de chefs-d’œuvre, et plu
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
25 est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du sang. Tout cel
26 . Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas nous tromper en nous inquiétant de faire, à notre place modeste,
27 rs pour les vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’ en pas trop descendre ». N’est-ce pas une éclatante mise au point ? Et
28 et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’ est-ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de l’auteur du Song
29 « descendirent » du front dans notre paix lassée, ne prend-elle pas une pathétique signification ? Pourtant ici encore tra
30 vient souvent lorsqu’on parle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité rév
31 même temps que dans la guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les romans « intéressants » ou « curi
32 elle paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamm
33 is, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
34 ores quiconque chercherait une idée là-dessous, —  ne réussit pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée.
35 n esthétique ou morale. » (p. 42). Le surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes généralisée ? Point
36 fense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncid
37 r que M. Breton serait un très curieux poète s’il ne s’efforçait de donner raison aux 75 pages où il voulut nous persuader
38 grande part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dès l
39 cette mystification : la plupart des surréalistes n’ ont rien à dire, mais savent admirablement parler. Ils érigent donc en
40 s érigent donc en doctrine leur impuissance. « Il n’ y a pas de pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de mét
41 aisonnements. Plaisante ironie, si cette attitude n’ était qu’une protestation contre nos poncifs intellectuels. Mais elle
42 tériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’ est pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont les causes semble
43 Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’est grand dommage pour les lettres
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
44 uches copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin,
45 mption frénétique terrassant un corps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de do
46 leur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’ avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions qui
47 charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’ a pas cherché à expliquer ce miracle. Il nous laisse à notre émotion d
48 notre émotion devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
49 ans si bouillonnants, si mal équarris. Certes, ce n’ est pas lui qui se refuserait à écrire — comme le fait son maître : « 
50 ais il s’en permet d’autres qui le sont moins. On n’ écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser des maladresses et
51 isser des maladresses et des négligences. Mais on ne demande pas non plus au puissant boxeur sur le ring d’être bien peign
52 ple rustique de France ». En effet — le phénomène n’ est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redeven
53 Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’absence de style, n’ est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je croi
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
54 documents. La littérature de ces dernières années n’ est qu’une forme de reportage international. L’Europe menant cette imm
55 e bien que dans le domaine de la culture le péril n’ existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question asiatique »
56 résentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’ as qu’une valeur de symbole », a dit A. Breton. C’est de cet Orient qu
57 Arabie, Indes et Chine sous une dénomination qui n’ a de sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain de tenter un clas
58 ui à la suite de Claudel estiment que la question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le christianisme, r
59 s. (Mais le christianisme, religion missionnaire, ne peut nous donner qu’une supériorité provisoire et qui porte en son pr
60 mbinent toutes ces opinions ; et ceux qui avouent n’ en point avoir, sincérité trop rare… Presque toutes les réponses, conc
61 , conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’ être pas suffisamment motivées par des faits et des documents. Pour be
62 s faits et des documents. Pour beaucoup, l’Orient n’ est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massis, par ex
63 d nombre de citations à l’appui de ses sophismes, ne se livre pas moins à des déductions in abstracto qui le mènent à des
64 l’éducation historique des peuples chrétiens qui n’ ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
65 s sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit
66 rminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’ en est pas moins probante. Une œuvre d’art que ce petit livre ? C’est
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
67 partialité. Son art bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman sans e
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
68 estive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’ est que dans sa discrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera la
69 té. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : elles nous transportent au cœur d
70 aussi bien être celui d’une pièce de Pirandello. N’ annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelles « sont réels,
71 ent eux-mêmes dans leur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, subiss
72 pression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’ y a pas les couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
73 la pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’ est-il pas trop tard pour parler du Vinet de M. Seillière, de ce nouve
74 lement chrétien sur le mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’imagine son étonnement à découv
75 ce qui concerne le Vinet juge des romantiques, il n’ a pas eu trop de peine à l’annexer à son propre corps de doctrines cri
76 critiques. Dirai-je pourtant que je crains qu’il n’ ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à gauchir légèremen
77 isme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’ est pas sans gêner M. Seillière. C’est peut-être pourquoi il insiste s
78 roit-il éluder ainsi le protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protestant qu’une telle attitude ? Ma
79 protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’ est plus protestant qu’une telle attitude ? Mais ces réserves sont de
80 e exaspérés, pour notre nouveau mal du siècle, il n’ est peut-être pas de pensée plus vivante, ni de plus tonique que celle
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
81 x lente aux méandres songeurs, une simplicité qui n’ est pas familière. C’est bien la poésie d’une époque tourmentée dans s
82 tion du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’on
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
83 tion en faveur du passé, révolution tout de même, ne pouvait produire qu’une littérature très neuve de forme et traditiona
84 re irlandais ; ce que d’ailleurs Mlle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter l’emballement et conserver dans l’admi
14 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
85 , lui, commence son roman quelques mois avant que n’ éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle
86 ntôt dans une église, pour constater que la foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’un de ces
87 doit sauter quelques semaines. Qu’on veuille bien ne voir autre chose dans ces « procédés », d’ailleurs assez peu choquant
88 er instantanément en révolte. Aucun cadre logique ne détermine l’avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endor
89 logique ne détermine l’avenir le plus proche. Il n’ y a pas même des forces endormies dans l’âme russe : mais des possibil
90 des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du tr
15 1926, Articles divers (1924–1930). Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)
91 continue à faire des saints, tandis que ce terme n’ a plus qu’un sens relatif pour nous protestants. Est-ce là nous juger 
92 teté ». Cette mère qui s’est sacrifiée aux siens, n’ était-ce pas une sainte, comme ce missionnaire et cette diaconesse ? S
93 comme ce missionnaire et cette diaconesse ? S’il n’ y a pas de saints protestants, il existe des saints dans le protestant
94 existe des saints dans le protestantisme. Mais il n’ est pas de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence qu
95 s de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il
96 tes les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a pas de saints, mais il faut
97 e sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’ y a pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’enseignement d
98 ont trop souvent un brillant appareil dialectique ne sait produire que l’illusion. C’est la revanche du fameux scrupule pr
99 st la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut être un danger lorsqu’il n’est, comme ici, que la loyauté d’un e
100 protestant, qui ne peut être un danger lorsqu’il n’ est, comme ici, que la loyauté d’un esprit animé par une foi agissante
16 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
101 mars 1926)o L’époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur devant soi, dans un progrès mal défini
102 tiver leur moi. Ils y cherchent un fortifiant, je ne sais quelle excitation, quelle révélation ou quel oubli. C’est un dil
103 foi en la valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que l’époque réclame 1. C’est au
104 que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d’importance à leurs tentatives morales, si sin
105 ans le chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’ existe pas d’esprit du siècle, hors un certain « confusionnisme ». Mai
106 avec une profonde conviction ; par vertu. Ce qui n’ a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs au
107 ion ; par vertu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est ve
108 re d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les séparer. On n’écrit plus pour s’amuser : ni pour amus
109 déjà reconnaissent ne pas pouvoir les séparer. On n’ écrit plus pour s’amuser : ni pour amuser un public. Un livre est une
110 ir des possibilités neuves, — pour le libérer. Il n’ est pas question de rechercher ici les origines historiques d’une conc
111 rait une raison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est
112 e l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’ a pas fallu longtemps aux Français pour pousser à bout l’expérience3.
113 ût, parce qu’on se connaît trop, et que plus rien ne retient. (Or on ne crée que contre quelque chose, contre soi, contre
114 connaît trop, et que plus rien ne retient. (Or on ne crée que contre quelque chose, contre soi, contre une difficulté.) Dé
115 ord. Révolution toujours ». « Pour nous, le salut n’ est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et quelles priè
116 us faire du pain ; et c’est très beau, Aragon, de ne plus rien attendre du monde, mais on voudrait que de moins de gloriol
117 s derniers venus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’ a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la
118 x qu’il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’ en finissent pas de peindre leur déséquilibre. Il serait temps de fair
119 paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et plus immorale, parce qu’aucune ne s’est
120 ois plus morale et plus immorale, parce qu’aucune ne s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’un
121 martyre… Cette lassitude facile à juger du dehors n’ était pas ce qu’il y a vingt ans on nommait blasé. Rien n’était émouss
122 pas ce qu’il y a vingt ans on nommait blasé. Rien n’ était émoussé en nous, mais pouvions-nous faire abstraction du plan in
123 ratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’ a fallu que le temps pour une folie de s’emballer. La plupart des roma
124 nces extérieures qu’il méprise toutes également ; n’ attendant rien que de ses impulsions et contemplant avec une lucidité
125 ait déjà une singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pude
126 vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’ est pas si douce encore, n’est pas si bonne que de céder à vous, désir
127 ne si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’ est pas si bonne que de céder à vous, désirs, et d’être vaincu sans ba
128 de sophismes conduit ce mouvement de l’esprit qui n’ utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’est par humilité
129 xcès toute chose, au-delà de toutes limites. « Il n’ y a que les excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fure
130 perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité psychologique d’une attitude par ailleur
131 ait perdu le sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ensembles7 : symptôme de fatigue. Mais tout cela : d
132 s pensées et des actes, rêves éveillés, tout cela ne dérive-t-il pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser le ryth
133 oppe une civilisation mécanicienne. (Les machines n’ ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plu
134 logues est cet état presque inhumain de celui qui n’ a pas dormi et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations, à ses autom
135 e d’aujourd’hui, parce que nous sommes à bout. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier l’immense effort pour se libér
136 selle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent aux suivantes que leur lassitude : sachons au contraire profi
137 jeunes hommes l’ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour lutter il faut des
138 ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas la culture ; sans autre parti pris que celui de vivre,
139 maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’ y a de pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de libert
140 e pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’ y a de liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur ef
141  ; et leur effort est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer 1
142 ns la lumière. « Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les grands traits de sa nature, ne connaître que les
143 voir d’abord que les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard d
144 sence, non de nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes qu’ils écrivent des odes civiques. Mai
145 Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût
146 de construire et de nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi,
17 1926, Articles divers (1924–1930). Conférences d’Aubonne (7 avril 1926)
147 nue d’hommes qui ont vu, qui ont souffert, et qui ne se payent plus de mots ni d’utopies, Clerville, Janson et Brémond ont
148 u-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’ y arriverons que par un travail d’éducation lent et souvent dangereux.
149 en trois jours, cela peut paraître excessif à qui n’ a pas connu l’atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus a
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
150 ogiques et les vieilles dames à principes. Voilà, n’ est-ce pas, un amusant sujet de conte moral, avec ses personnages un p
151 grand peintre. Pourtant, malgré des longueurs, on ne lira pas sans plaisir ce livre où l’on voit un homme appeler en vain
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
152 est moins fatigant. « Le paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi le prosateur charmant d
20 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
153 et montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite que s
154 malheur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jo
155 pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une machine lu
156 ses fleurs de cristal, si elles sont sans parfum, ne se faneront pas. t. « Jean Cocteau : Rappel à l’ordre (Stock, Paris
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
157 , Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mai
158 et, quoi qu’ils en disent, « artistiqués », — ils n’ osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel
159 de sa génération. Terrible aveu d’impuissance, il n’ a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec
160 dre. Une intelligence parvenue au point où elle «  ne semble avoir rien d’autre à faire que son propre procès », une intel
22 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
161 intemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagérer l’importance des conditions météorologiques du succè
162 de plus protestant — mais oui, M. Journet — et je ne crois pas qu’il puisse se produire ailleurs qu’en terre romande. C’es
163 liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne on se sent prêt à tout lâcher pour une vérité nouvel
164 n honore la liberté d’un culte moins platonique : n’ est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger les Associations qu’à
165 platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ?
166 leine forêt, où Henriod debout sur un tronc coupé n’ eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’équilibre des disc
167 hure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ ai pas dit dans ces quelques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50, no
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
168 t, est aujourd’hui une catastrophe menaçante pour n’ avoir pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use et conduit len
169 ment l’usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’ est plus adaptée aux conditions nouvelles de travail ou de repos, ni d
170 au 100 à l’heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et minces en regard de leu
24 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
171 cieuse (mai 1926)f Écrire, pas plus que vivre, n’ est de nos jours un art d’agrément. Nous sommes devenus si savants sur
172 êmes, et si craintifs en même temps, si jaloux de ne pas nous déformer artificiellement : nous comprenons que nos œuvres,
173 ous obsède de craintes et de réticences dont nous ne comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscien
174 rs ou de dégoûts étranges viennent m’habiter ; je ne sais plus… Je suis beaucoup de personnages, faudrait choisir. Vous me
175 rd, jusqu’au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’ est que le jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il n
176 auter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ; je devins si faible et démuni, liv
177 stincts combatifs et dominateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’e
178 de trop grand pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’ était plus une douleur rare que j’aimais dans ces brutalités, c’était
179 ù l’on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me voici devant quelques pr
180 ’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’ était résolu. Me voici devant quelques problèmes dont je sais qu’il es
181 garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’ a que ce but de me rendre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je
182  » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas attendre immobile dans sa prière, qu’une révélation vienne c
183 n vienne chercher l’âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’
184 préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce qu
185 . Il ne faut plus que je respecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce que je puis devenir. Se perfectionner : cela co
186 us profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ai d’autres instinc
187 es plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’ entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la
188 à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’ est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu. Ma vertu est de
189 pose au perfectionnement de l’esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les directions de moindre résista
190 ant les directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter pl
191 donne corps à une faiblesse en la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans le monde, s
192 c’est se surpasser). J’entends des phrases qu’il ne faut pas encore comprendre — tout est si fragile —, mais je sais quel
193 , ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne vous désire. (Ce désir qui me rend fort pour — autre chose…) Ô luxe,
194 sir qui me rend fort pour — autre chose…) Ô luxe, ne pas aimer son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4. La sincérité
195 modifie son objet vivant. Pour moi, la sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à écrire des i
196 elles prennent un caractère de certitude qu’elles n’ avaient pas encore en moi. C’est en quoi ma sincérité est tendancieuse
197 vérité d’un système, hors la religion. Un système n’ est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre les e
198 e n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toutes l
25 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
199 cations nécessaires, défauts auxquels Montherlant n’ a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne
200 escription la plus réaliste de la vie animale. Et n’ est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il peut atteindre à pare
201 ait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux sont d’immenses a
202 e part mieux que dans la description des taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le plus hardi à un lyrisme plein
203 t un peu pauvre pour fonder une religion. Mais ce n’ est peut-être qu’un rêve de poète. Il y a un autre Montherlant, plutôt
204 celui que nous donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie ta
205 auts qui tueraient tout autre que lui. Certes, il ne soulève directement aucun des grands problèmes de l’heure. La violenc
206 ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) — il n’ « accroche » pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée d
207 rt ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit l
208 e la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui écha
209 t les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Mais c’es
210 s c’est parce qu’il est poète : le chant fini, il n’ y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agace des gens qui se
211 c une magnifique insolence les forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être élevée en témoignage pour notre exaltation ? Com
212 ui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’ est-ce point une solution aussi ? Plutôt que d’oublier de vivre à forc
213 ier de vivre à force d’y vouloir trouver un sens, ne vaudrait-il pas autant s’abandonner parfois à ces forces obscures qui
214 e la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraie
26 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
215 de intellectuel une « Question d’Orient » dont on ne peut plus méconnaître l’urgence. Des prophètes — hindous à demi-europ
216 petits chapitres à la fois si concis et achevés, n’ est ni un album de vues pittoresques, ni le journal plus ou moins lyri
217 t une sensibilité protestante — si passionné. Nul n’ est moins oriental que de Traz, et c’est ce qui donne à ses notations
218 e qui donne à ses notations tout leur prix. Elles ne nous renseignent pas sur une partie orientale de lui-même, comme c’es
219 mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’ est guère de comparaison valable qu’entre individus, et comme type d’i
220 et comme type d’individu européen Robert de Traz ne pouvait trouver mieux que lui-même. S’il dit des Égyptiens : « Le men
221  » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation fondamental
222 e que « notre intelligence et celle de l’Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer, comment se co
223 matière si complexe — sont plutôt optimistes. Il ne paraît pas croire à un péril oriental très pressant, ni surtout que n
224 mine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’ est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pag
225 naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constamment critique de
226 elles, révèle sa personnalité peut-être mieux que ne le feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il
227 , ici, comme le type du voyageur intelligent, qui n’ accepte d’être séduit que pour « mieux comprendre », assez « fidèle »
27 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
228 Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)w Je ne crois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil d’essais, M. Fern
229 itique philosophique » qu’il voudrait inaugurer «  ne se contenterait pas d’étudier les œuvres pour elles-mêmes dans leur s
230 e sont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne les condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé cat
231 llement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute communication direct
232 ez tente de prouver par exemple que l’œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après quoi il écrit :
233 concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l’œuvre n’ est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis amorcer
234 elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une discussion de ces thèses subtiles, d’autant que
235 re le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’ a pas ménagé les critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa form
236 eu gauche encore dans les positions conquises. Il n’ empêche que son livre manifeste une belle unité de pensée, et qu’il pr
28 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
237 venaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’ y en eut presque plus. Nous étions seuls sur le pavé qui exhalait sa c
238 res et des odeurs, espérant entrer là-bas dans je ne sais quelle harmonie plus reposante. Cette imparfaite accoutumance au
239 n blanche est arrêtée tout près de l’eau. Mais ce n’ est pas d’elle que vient cette chanson jamais entendue qui nous accomp
240 âmé dans une beauté que saluent tant de souvenirs n’ a d’autre nom que celui de l’instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ai
241 i simplement. Sans pensée, perdus dans un soir de n’ importe où, un soir de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe de
242 un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’ a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes
243 e n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’ est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et musiques sourdes
244 omme cette brume, une vie étrangère, une paix qui n’ est pas humaine, et qui nous laisse gourds et faibles, caressant en no
245 lante vaguement heureuse d’être pliée au vent qui ne parle jamais. Nous fûmes si près de choir dans ton silence. Nature !
246 harmés d’un repos sans rêves une langueur dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons la ville debout dans ses lumiè
247 ibilité de bonheur par personne et les devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propose un mystère
29 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
248 e… Mais ce cœur fatigué se reprend à souffrir, il ne sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d’un
249 e que son silence devient insupportable : « Orpha ne comprenait pas comment on pouvait tant souffrir et ne plus aimer ». C
250 omprenait pas comment on pouvait tant souffrir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir le livre. Livre charmant et b
251 araît parfois et nous fait regretter que l’auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique assez neuf.
30 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
252 nois et sympathiser avec son idéal de culture. Il n’ y a pas là deux points de vue irréductibles, du moins M. Malraux a fai
253 x a fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait
254 qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’ est-il pas de position plus périlleuse, puisqu’elle risque de ne laiss
255 e position plus périlleuse, puisqu’elle risque de ne laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la destruction et d
31 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
256 t bien tirer quelque vertu d’une anarchie dont on ne veut pas avouer qu’elle est plus nécessaire — provisoirement — que sa
257 aturaliste de l’âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu les
258 s’est pas encore mêlé de l’affaire. Au reste, on n’ a pas attendu les éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien c
259 attendu les éclaircissements du subtil abbé pour n’ y plus rien comprendre. ⁂ Qu’on imagine un personnage de tableau se me
260 ité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songeait pas qu’il allait faire école. Le fait est que ce geste symbo
261 : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprennent pas. Il faudrait s’entendre. Et, ici encore, prenons gard
262 ion peut paraître gratuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas
263 tout sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’ y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais q
264 s de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’ est jamais que le résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateu
265 onnage que ses actions les mieux concertées. Rien n’ est gratuit que relativement à un système restreint de références. Il
266 livrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n’ est plus l’élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon espr
267 s visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancie
268 ur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la vérité sur soi » en se servant de la méthode i
269 le. C’est un cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’ est-ce pas le schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce
270 vient recul, et l’évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourrais me regarder sans r
271 regarder sans rien toucher en moi. En réalité, je n’ assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fis
272 Non. Car à supposer que l’analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon certaines lois où se retr
273 er que l’analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’ importe comment, mais selon certaines lois où se retrouve notre indivi
274 s avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’ est-ce pas lui-même qui ajoutait que l’homme sincère « en vient à ne p
275 ême qui ajoutait que l’homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être différent », ce qui est la négatio
276 revel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il ne s’en suit pas que contenue dans des limites assez étroites empiriquem
277 e sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire découvrir quelques richesses et ne serve parfois de cont
278 e ne puisse faire découvrir quelques richesses et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais les bénéfices sont maigres e
279 r. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’ a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop
280 Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne soit sincère. Peut-on véritablement se mentir à soi-même, et surtout
281 ent. « L’art est un mensonge, mais un bon artiste n’ est pas menteur », dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes l
282 est avoir toutes les pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce « mensonge », ce choix faux mais
283 e », ce choix faux mais bon, nécessaire à la vie, n’ est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous tire aus
284 montrer plus de style. (Georges Duhamel.) … Nous ne sommes pas, nous nous créons. Certains se refusent à toute interventi
285 toute intervention qui altérerait leur moi ; ils ne souhaitent que d’être leur propre témoin, intelligent mais immobile :
286 tant que personnes. Comment se trouveraient-ils, n’ existant pas ? (François Mauriac.) La valeur morale de M. Godeau serai
287 is que certains, peut-être, jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il
288 analyse désolée s’imaginait retenir. Dès lors, ce n’ est pas lâcher la proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dir
289 endant que ma joie — un état de grâce, un amour — ne pouvait se satisfaire de telle possession particulière, ne pouvait no
290 t se satisfaire de telle possession particulière, ne pouvait non plus s’imaginer qu’elle en pût être privée. Alors, acquie
291 tre ses actions et ses désirs, un quant-à-soi qui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement les décisions et les rend
292 réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et jongleries verbales. Regards au-dessus
293 envers soi-même une volonté — si profonde qu’elle n’ a pas besoin de s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de no
294 re efficace — qui m’interdit de nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’est peut-être qu’une espèce de souffran
295 nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’ est peut-être qu’une espèce de souffrance véritablement insupportable,
32 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
296 me. Sans doute, les différences s’accusent : mais n’ est-ce pas la meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemm
297 de nous accorder une confiance sans laquelle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons l’espérer, ne sera pas sans leur
298 e saurions aller, et qui, nous voulons l’espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Certes, nous ne
299 r donner quelque bénéfice en retour. Certes, nous ne demandons pas qu’on prenne toutes nos obscurités pour des profondeurs
300 utes nos obscurités pour des profondeurs. Et nous n’ allons pas procéder à quelque sensationnelle révision des valeurs. Nou
301 e révision des valeurs. Nous savons bien que nous ne faisons que passer, après tant d’autres, avant tant d’autres. « Amis,
302 faire réfléchir utilement sur ses causes…   Nous ne proposerons pas, lecteur bénévole, un exercice mensuel à votre facult
303 but et notre excuse en publiant cette revue. Nous ne sommes pas « une revue littéraire de plus » ; nous ne voulons pas êtr
304 ommes pas « une revue littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être « l’expression de la jeunesse romande ». Nous sommes
305 elles-Lettres est toujours « autre chose ».) Nous ne prétendons pas plus être « bien bellettriens » — prétention éminemmen
33 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
306 agon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’ admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont
307 ’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la
308 e mieux encore : après une kyrielle d’injures qui ne font pas honneur à l’imagination d’autres fois si prestigieuse du poè
309 tresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus har
310 s, des pages d’un lyrisme inouï. Que Louis Aragon ne se croie pas tenu de justifier ses visions par le moyen d’une métaphy
311 s est une suite de promenades dont la composition n’ est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui
312 te de nuit, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’ est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des
34 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
313 ’Urbain, premier du nom dans sa famille, laquelle n’ avait compté jusqu’alors que d’authentiques avocats et un chapelier do
314 un chapelier dont tous s’accordaient à dire qu’il ne péchait que par excès de bonne humeur printanière, Urbain donc, premi
315 es bénie — par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait ge
316 t le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées de leur po
35 1927, Articles divers (1924–1930). Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)
317 ème préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne le croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté co
318 forte diminution du nombre des protestants. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de l’émigration des fidèles qui su
319 e Évangile ». Et les persécutions contre ceux qui n’ ont commis d’autre crime que de « déplaire au roi » vont reprendre de
320 s de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans l’ouvrage qu’il va
36 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
321 bjet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait plus leur im
322 cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne ressent pl
323 lus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de la Malad
324 t qu’on les attendrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacque
325 une image qu’on garde comme un pressentiment. Ce n’ est qu’à force de discrétion dans les moyens qu’il parvient à une cert
326 Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’ évoquer plus que des visions où se condense le sentiment du récit. Dan
37 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
327 ad L’on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’un
328 clar est l’auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comprend que ce journal bientôt les rejoindra da
329 ndra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste en toute occasion de sa vie est peut-êtr
330 de l’homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se connaît avec une sorte de froi
331 de froideur que l’on dirait désintéressée si elle n’ avait pour effet de souligner, plus que ses succès, certaines faibless
332 mence où souvent l’on finit. Et peut-être l’amour n’ est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n’a pas e
333 ible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n’ a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle, et peut-être tendre
334 ment leur amour, à force de petites blessures. Ce n’ est pas le moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombr
335 on littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre d’une résonance si humaine, est mie
38 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
336 nt où je vais me suicider, d’autant plus que vous n’ y croirez pas — et pourtant… Il faut aussi que je vous dise qu’il fait
337 se qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’ a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne p
338 chambre : le feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’ en vaut plus la peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque
339 ’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de mauvais goût.) Je vous
340 suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’ en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Pui
341 j’eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais
342 s sombres vous effrayaient sans doute plus qu’ils ne vous attiraient. Mais, maintenant, je pense que ces regards croisés n
343 ais, maintenant, je pense que ces regards croisés n’ avaient aucune signification et que mon anxiété seule leur prêtait que
344 s rendre attentive à ma présence… Mais, alors, je ne sais quel démon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’image
345 i rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’ osant pas repasser trop souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures
346 nnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’ avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par v
347 écipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par vous voir partout. Chaque visage
348 intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’ y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’était
349 … Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Ma
350 ui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’ osais presque pas la regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait
351 empire à ma timidité. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me
352 e me sentais mieux, on me laissa rentrer seul. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’ai marché plusieurs heures a
353 étais encore au bal. Cette constatation machinale ne correspond à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu la notion
354 . Peut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupportable et définitive d
355 tion insupportable et définitive de mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoquer votre visage. P
356 si je puis encore évoquer votre visage. Peut-être ne vous ai-je pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destru
357 ort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me tuer, pourquoi je souffre, ce q
358 e, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’ y a plus qu’un glissement gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : i
359 ent gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n’ y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai pas
360 urait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai pas son nom. f. « Lettre du survivant », Revue de Belles-
39 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
361 Cet âge est sans pitié. » « Le véritable symbole n’ est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans la préface des
362 e note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’ y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’es
363 es deux interprétations symboliques au moins ; de ne pouvoir m’empêcher d’y songer sans cesse en lisant cette « tragédie »
364 nger sans cesse en lisant cette « tragédie » ; de ne pouvoir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus ou
365 « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’ est pas une phrase, s’écrie-t-il, c’est un poème, un poème du rêve, un
366 … Art chrétien, a-t-on dit5. Certes, cette pièce n’ est pas dépourvue de certaines des qualités qui, selon Max Jacob, perm
367 ité à chausse-trappes, cette habileté surtout. Je ne sais si ce malicieux Gagnebin (non pas Elie) pensait à quelqu’un lors
368 e se lancer sur la corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de
369 ualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même indiquer aucun endroit par où elle pèche contre les prin
370 vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’ est pas maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’un
371 u’il voulait. Et pourtant cette admirable machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surpr
372 e photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce
373 ne fois de plus que l’atmosphère de l’« art pur » n’ est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon peut-être cette
374 osphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon peut-être cette indispensable « part de D
375 une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dan
376 ne tragédie de l’amour conjugal ». Vraiment, nous n’ en demandions pas tant… g. « Orphée sans charme », Revue de Belles-Le
40 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
377 us pouvons faire quelque chose. Que diable ! nous ne sommes pas des imbéciles, nous ne sommes pas de ces gens qui croient
378 e diable ! nous ne sommes pas des imbéciles, nous ne sommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confond
379 ves qui hantait les limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinématoma. Naissance de Cinématoma
380 silence. « Well ! », dit enfin Dardel. Les autres n’ en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario né entre
381 aces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’ a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montag
382 met désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Pourtant, au mil
41 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
383 Parfois l’on se demande si l’Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café en face des personnages de Jaloux. Et peut-
384 l Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’ aura pas été tentée de lui faire ces confidences qu’elle livre si faci
385 tend de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une
386 de ce qui détermine nos actes avant que la raison n’ intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoués, rêves é
387 mper sur tout ce qui est profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’un réali
388 s drames tout intérieurs dont il dit : « Personne ne peut juger du drame qui se joue entre deux êtres, personne, pas même
389 nt, des amours impossibles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fai
42 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
390 , montagnes russes. (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les m
391 teint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraînement d
392 nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même essence que le nôtr
393 atement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’ est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attende
394 bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’ attendent que le moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que
395 disant : « C’que c’est cochon ! » Mais le moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, murmure : « O
396 ent. » Mais tout de même, là par exemple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer l’utilisation artistique ingénieuse e
397 de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’ a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il
398 tural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour le film 1905,
399 lair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginaire e
400 u’une sorcière transforme un homme en chien, cela n’ a rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne
401 au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; ce n’est pas encore un miracle de
402 ose qui ne serait étonnante que dans le réel ; ce n’ est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent vieux jeu av
403 l’espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmonie… C’est une réalité aussi réelle que celle dont n
404 t de découvrir la richesse immédiate. Surréel qui n’ est pas synonyme d’incompréhensible, non Madame, car alors quoi de plu
405 ors quoi de plus surréaliste que le film 1905. Ce n’ est peut-être qu’une question d’imagination ; il reste qu’un film comm
43 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
406 une certitude trop vite atteinte, où sa jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit la « génération nouvelle » avec
407 ujourd’hui. Il constate que l’une (celle de Gide) ne fait que différer notre inquiétude, tandis que l’autre « ne ruine not
408 e différer notre inquiétude, tandis que l’autre «  ne ruine notre angoisse qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu 
409 e ruine notre angoisse qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque
410 ude paraît sans remède. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’ a-t-il pas cédé à la tentation de créer des dilemmes irréductibles, su
411 lles vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’ étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétu
412 se l’inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’ est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase qui formule admirableme
44 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
413 s seulement pour le pittoresque. — Attrape !   Il n’ existe pas de théorie du salut. Il n’existe que des systèmes pour fair
414 trape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’ existe que des systèmes pour faire taire en nous l’appel vertigineux d
415 Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et l’on pense : « 
416 au lieu de « Je ne comprends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et l’on pense : « C’est donc incompréhensible ». On
417 compréhensible !, trois mots dont l’un savant. Je ne connais pas de meilleur remède contre Dieu. Monsieur, vous avez dit :
418 une pointe d’ironie vraiment supérieure. Car rien ne pouvait mieux exciter, signe d’aise extrême, vos glandes salivaires,
419 elques hommes y pénètrent, et le goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir. Le dernier rire d’Ar
420 lat : « Ô grand Rêve, au matin pâle des édifices, ne quitte plus, attiré par les premiers sophismes de l’aurore, ces corni
421 us courons enfin l’Aventure. « Le salut pour nous n’ est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que plus rien ne peut
422 rt9 ». Ultime affirmation d’une foi que plus rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être
423 duper. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’ y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine, et
424 dire qu’elle est née dans un café de Paris. « Je n’ attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Riez-en donc, pant
425 n café de Paris. « Je n’attends rien du monde, je n’ attends rien de rien. » Riez-en donc, pantins officiels, et vous repus
426 prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’ est pas à genoux qu’on attendra : pour que cela eût un sens, il faudra
427 our que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’ avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore
428 grandeur, c’est qu’il lui faut atteindre Dieu ou n’ espérer plus aucun pardon. II Novembre 1926. Je viens de retrouv
429 e rendait seules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir la part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait
430 e du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’ être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore un Musset, seu
431 la grande race des torrents. » Une belle phrase, n’ est-ce pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait l’oser dire com
432 s torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait l’oser dire comme Aragon sans rid
433 le. Et ce que je prenais pour le ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme assez fréquent dans
434 u vif, c’est tout de même un désespoir en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vi
435 tianisme dans les âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » « Le salut pour nous n’est nulle par
436 pas devenues chrétiennes. » « Le salut pour nous n’ est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut n’est pas là, ou l
437 t nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut n’ est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette doctrine, d
438 ssez basses, nous le savons… Mais pour Aragon, ce n’ est point façon de parler. Son « nulle part » est sans dérobade possib
439 t Crevel. Pourtant, le plus irrévocable désespoir n’ est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux
440 nom revient sous ma plume, comme une mouche qu’on n’ a jamais fini de chasser parce qu’elle n’a pas mérité du premier coup
441 he qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’elle n’ a pas mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c
442 ie montrèrent les ravages bien plus étendus qu’on n’ osait le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu
443 cérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le
444 pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’ épouse pas le rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de
445 mper sur ce qu’il y a de profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré. » (Edmond Jaloux.) Entre un monsieur
446 Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes revus. Mais je suis vos travaux avec intérêt, et il m’a p
447 s intéressant. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’ avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop
448 aujourd’hui… Quoi ?… Bon, bon, c’est entendu, on ne peut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que « l’artiste serait
449 st entendu, on ne peut rien faire sans vous. Mais n’ oubliez pas que « l’artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur
450 liez pas que « l’artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez
451 « saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et
452 ’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’ est qu’une manifestation de ce divorce radical entre l’époque et les q
453 ’esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de l’esprit celui de Révolution. Et
454 forme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite révolution à nous, dans tel domain
455 nous, dans tel domaine. Et c’est même ceci que je ne puis pardonner aux surréalistes : qu’ils aient voulu s’allier aux dog
456 ulu s’allier aux dogmatiques d’extrême gauche. Je ne dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli de crier merde pour H
457 chand des œuvres complètes de Karl Marx ? Si vous ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je le dirai pour vous. Qua
458 a entrepris la Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10 ans, une rév
459 fonction du capitalisme. Est-ce que vraiment vous ne pouvez vous libérer de cette manie française, la politique, et ne voy
460 ibérer de cette manie française, la politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec
461 , comme tout ce qui est parisien, hait Paris mais ne saurait vivre ailleurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis l’
462 crabe, examens de conscience toujours ratés — on ne m’y prendra plus ! — morales américaines et hygiéniques en tous genre
463 la gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’ étaient pas des êtres, mais leurs abstractions que nous haïssions. Not
464 ue nous haïssions. Notre haine de certaine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’on mesurait odieusement une sym
465 aimions la révolution comme on aime l’amour. Nous n’ aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — parce que ce n’
466 révolution — la russe, par exemple — parce que ce n’ est pas encore assez révolution ; parce que cette révolution ne demand
467 ore assez révolution ; parce que cette révolution ne demandait qu’à s’asseoir et que son siège était fait. Nous aimions la
468 mes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. « Il s’y
469 t un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. 
470 nasille : Nous avons tous fait ça Plus ou moins, n’ est-ce pas ? Et puis l’aiguille divague vers des souvenirs, quand nou
471 , de laquelle il se demande vainement pourquoi il n’ arrive pas à se contenter13 ». Acculés à ce choix : inconscience de ru
472 amusés avec vos chers principes. Révolution, ce n’ est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est l’épanouissement vio
473 rincipes. Révolution, ce n’est plus détruire, ce n’ est plus combattre, c’est l’épanouissement violent d’une immense fleur
474 raculeusement d’aigrettes de folies et de joies ; n’ allez pas nous toucher, nous sommes dangereux. Un orage de tendresse v
475 cruels, nous parlerons vos langues aériennes. On n’ acceptera plus que des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’es
476 Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’ est pas se libérer que de brasser ces chaînes sonores. 9. Lettre à Pa
45 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
477 tresse. École savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la sui
478 s de profils jusqu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la v
479 de lui le sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’ arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’est pas elle. Il pensa que c’étai
480 tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’ est pas elle. Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la rech
481 aisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que ce n’ était pas lui. L’enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marqu
482 use des objets et des êtres véritables. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers le soleil du haut-lac. Justement, voic
483 ir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et l’eau n’ est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est une qu
484 l’eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ ai pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant je suis seul dès c
485 et lui aussi — me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces ph
486 et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure.
46 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
487 rai dire assez singulier. Nos artistes, en effet, n’ ignorent rien des courants les plus modernes, et sont bien situés pour
488 rants les plus modernes, et sont bien situés pour n’ en prendre que le meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat
489 autour d’eux des mœurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour u
490 e ailleurs le premier public des jeunes artistes, n’ existant pas ici, le peintre se trouve placé d’emblée en face de ce qu
491 rtune faite, tout le monde s’accorde à dire qu’on n’ attendait pas moins du fils d’un tel père. « Voilà le train du monde… 
492 ls d’un tel père. « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine résistance est nécessai
493 ce est nécessaire pour que la force se développe. N’ était certain petit plaisir d’impertinence, je me fusse dispensé de re
494 et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On ne m’en voudra pas de ne citer ni dates de naissance, ni traits d’enfanc
495 nsion que de timidité. ⁂ On ne m’en voudra pas de ne citer ni dates de naissance, ni traits d’enfance géniaux et prophétiq
496 n merveilleux foyer de contagion contre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugements
497 re pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas un certain mystère. Cette cour sans issue, cette tulipe bizar
498 ouvent au Neuchâtelois. S’il casse des vitres, ce n’ est pas seulement pour le plaisir, mais plutôt par amour du courant d’
499 elques frileux, mais les autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme celle de Neuchâtel 1927 7 i
500 n d’autres rapprochements moins paradoxaux. Donzé n’ est pas de ceux pour qui la peinture consiste à habiller une idée. Voy
501 biller une idée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une
502 r russe, à cause de sa chevelure, sans doute ! On ne pourrait pas se tromper plus. ⁂ À vrai dire j’en vois peu parmi les j
503 nzé touché à son tour par la grâce décorative, il n’ en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eugène Bouvier. Ce garçon
504 ironie mélancolique et qui voient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde p
505 ise : un lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui ne s’affiche pas, mais s’insinue dans toute sa palette, ce charme enfin,
506 nue dans toute sa palette, ce charme enfin, ce je ne sais quoi qu’on cherche en vain chez beaucoup des meilleurs de nos ar
507 chez beaucoup des meilleurs de nos artistes. Mais n’ allez pas croire à des grâces faciles ou sentimentales. Il y a une sor
508 une complicité de sentiments ou d’état d’âme. Je ne verrais guère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on le puisse
509 un temps où l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait d
510 goût au milieu d’harmonies funèbres, comme un qui n’ attendrait pas que l’enterrement s’éloigne pour entonner une chanson à
511 ise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’ est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une belle rich
512 nt le visage. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’ est pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il
513 Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurions trouver guide plus pittoresque. Celui-ci s’était égaré en av
514 ige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous pensiez n’ être qu’une épure : c’est intitulé « nature morte ». Pourquoi pas nais
515 ’on fait une découverte. Attention qu’André Evard n’ aille trouver une de ces machines à explorer l’au-delà. En vérité il f
516 tionnelle, d’un style pourtant assez large et que n’ entravait pas son scrupule réaliste. ⁂ Mais voici dans son costume d’a
517 e, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’ atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon Perrin se
518 usement féminine, une élégance aiguë. Notre revue n’ est certes pas complète. Mais elle a du moins l’avantage de grouper de
519 te de classicisme moderne dont les frères Barraud ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés. Un avenir peut-être pr
520 ui, notre but serait suffisamment atteint si nous n’ avions fait qu’affirmer l’existence et la vitalité d’une jeune peintur
521 e des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douceurs
47 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
522 1927)ah Voici un livre dur et sans grâces, qui ne manque pas d’une beauté assez brutale, pour nous choquer et s’imposer
523 présente le problème juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le
524 est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’ a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’aîné se révolte. Sensualit
525 Jacob qui se retourne, méprisant : « Mais oui, je ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc
48 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
526 uer pour s’en délivrer peut-être. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet
527 milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’auteur n’ est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La
528 document humain, nuit à sa valeur littéraire. Je n’ aime guère ce style abstrait, semé de redites et d’expressions toutes
49 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
529 d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’ évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai
530 un certain tragique, mais au filet si acéré qu’on ne sent presque pas sa blessure. Mais c’est ici qu’il s’agit de ne pas c
531 e pas sa blessure. Mais c’est ici qu’il s’agit de ne pas confondre inexplicable avec incompréhensible. aj. « Paul Éluard
50 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
532 et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’ est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encore dans le f
533 gnifiquement jetés. Mais cette imperfection, s’il ne peut encore s’en tirer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise qui
534 rieu d’avoir échappé au surréalisme en tant qu’il n’ est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en g
51 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
535 us tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne so
536 mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je l’embrassai si
537 gardait avec une terreur ou je crus distinguer je ne sais quelle déchirante nostalgie. Pour lui, sans doute, j’étais perdu
538 obscurément pour augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un établissement luxueux d’
539 ontions ensemble dans une chambre d’hôtel où l’on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que reflét
540 » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’était assez pour me pe
541 es du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’on est forcé
542 t, au moment de m’endormir, que ma passion du vol n’ était qu’une longue vengeance. Ne m’avait-on pas dérobé des années de
543 a passion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’avait-on pas dérobé des années de joie au profit d’une vertu que to
544 ez : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette escroquerie morale dont je fus la victime,
545 critiquer les modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l
546 e d’après les quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsi
547 terai, cher Monsieur, que l’analyse psychologique n’ est pas mon fort. Je me contente de quelques observations théoriques q
548 er de vous dire qu’on me nomme Saint-Julien. Vous n’ ignorez point que l’on considère ce saint comme le patron des voyageur
549 moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’ avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chose avant t
550 issement perpétuel et dénué d’inquiétude. Et cela n’ est pas sans me charmer, croyez-moi. Car, enfin, si je suis ici à vous
551 comment dirai-je…, de juvénile insouciance, pour ne pas dire inconscience ! qui s’attache à vos faits et gestes. L’on cro
552 récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels…
553 t il paraissait lui-même gêné. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répond
554 me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire que si vous me trouvez un p
555 us dire que si vous me trouvez un peu potache, il n’ est pas prouvé par là que le potache n’ait point raison. Mais justemen
556 otache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’ ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’avoir rais
557 le potache n’ait point raison. Mais justement je n’ éprouve aucun désir d’avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que
558 es-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’ engagent pas sa responsabilité. (N. de la R.) »
52 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
559 ésente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs
560 énomènes sociaux de notre temps que cette méthode ne suffirait pas à supprimer. Or, ils nous paraissent entraîner assez na
561 reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’ est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce conseil que vous a
562 Y. Z., de ce conseil que vous avouez modestement n’ être pas inédit. Mais point n’est besoin de rappeler Candide : nous pe
563 avouez modestement n’être pas inédit. Mais point n’ est besoin de rappeler Candide : nous pensons que bien avant Voltaire
53 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
564 rd : lui seul connaît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous venger, vous lui dites que,
565 enger, vous lui dites que, « d’abord », son livre n’ est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que le lyrisme des noms géogr
566 us parlez de « procédés lassants ». Pierre Girard n’ écoute plus : il pense à des Vénézuéliennes ou à Gérard de Nerval. Bie
567 responsable de cette douceur de vivre. Déjà vous ne niez plus sa drôlerie, son aisance. Vous accordez que s’il force un p
568 « Tous nos ennuis nous seraient épargnés si nous ne regardions que les jambes des femmes », dit-il, pour vous apprendre !
569 , pour vous apprendre ! — sans se douter que rien ne saurait vous ravir autant que ses impertinences. À ce moment s’approc
570 ui parle toujours de Weber… Mais au fait, si vous n’ aviez pas lu ce livre ? Ah ! sans hésiter, je vous ferais un devoir de
571 evoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’on n’ est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à Pate
572 ir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela es
54 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
573 upirez-vous. Mais j’ai tué la littérature en moi, n’ en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : —
574 quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’ est-ce pas ? D’autres prennent soin que leurs sincérités gardent au mo
575 au, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’ est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se ba
576 her. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils trouvent ça
577 d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de l’impossibilité des mir
578 jourd’hui de la simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la simplicité est simple simplement. La
579 n goût du bizarre qui révèle le littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous refusez de compter a
580 e littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ ayons rien lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littér
581 (dangereuse tant que vous voudrez). Mais ce refus n’ est pas seulement comme vous pensez, d’une ingratitude salutaire, c’es
582 a main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’ allez pas me surprendre par-derrière. Une fois — et ce n’est pas que j
583 pas me surprendre par-derrière. Une fois — et ce n’ est pas que je m’en vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le
584 On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne tolère pas qu’on lui parle littérature. Mais il y a des mépris qui so
585 s, c’est-à-dire agissantes, que nulle poésie même ne peut dire, parce que rien de ce qui nous importe véritablement n’est
586 rce que rien de ce qui nous importe véritablement n’ est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle
587 e concrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable 
588 , on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en apercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes les plus obs
589 ière. Avouons-le : rien de ce qu’on peut exprimer n’ a d’importance véritable. Alors, cessons de nous battre contre des mou
590 plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde
591 rature : un vice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’ est pas en l’ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire,
592 contre, c’est d’un ridicule écrasant : mais rien n’ est plus facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littératu
593 drôle de voir le malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses familiarités avec une Muse qu’ils n’
594 ce toréador ses familiarités avec une Muse qu’ils n’ ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou
595 de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu
596 je ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’ y échapperai pas plus qu’un autre : et qu’un beau soir il faille écrir
597 plus. » Chercher des hommes ! Ah ! cher ami, nous ne sommes pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de l’esprit. Et
598 hommes ! Ah ! cher ami, nous ne sommes pas tant, n’ est-ce pas, à poursuivre une quête de l’esprit. Et vous savez ce qu’el
599 aines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne veulent y voir que révoltes contre leurs morales, ou me
600 uses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne veulent y voir que révoltes contre leurs morales, ou menaces pour leu
601 uvent encore se reconnaître. Quand bien même elle n’ aurait plus d’autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’e
602 ’aide à découvrir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une « maladie » don
603 iches de Morand, et ils en sont tout fiers : « Il n’ y a plus qu’à les écrire ». o. « La part du feu. Lettres sur le mépri
55 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
604 é librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’ en pouvoir citer, faute de place, que ces quelques phrases de Drieu :
605 ’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’ avaient pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. p. « Les
56 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
606 on — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’ est pas que nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que l’indignati
607 e homme qui recherche activement la Sagesse (« Ça n’ est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandalise des « énormit
608 rivez ! ») En définitive, il semble que certains n’ attendent de nous que d’innocentes farces — ou bien de ces affirmation
609 — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’on n’ a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est
610 préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’ en est aucune qui ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, le
611 r les conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitud
612 rilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’ avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun re
613 es par des cris intempestifs. Il y a des gens qui n’ ont pas encore admis que jeunesse = révolution Tous les malentendus vi
614 de là. Nous sommes assez sages et assez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter les conséquences. Et puis, de temps
615 re, voici que nous parvient un signe d’amitié qui ne trompe pas. Deux ou trois mots, on s’est compris. Que pouvions-nous e
616 Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils sont
57 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
617 ières amours (août 1927)an Ces trois nouvelles n’ ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes rémin
618 étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’auteur lui-même appelle « cette
58 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
619 aie que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît comme une de ces âmes mystiques et raffin
620 Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’ était pas un objet de songe mais d’expérience ». Mais une telle « expé
621 ience ». Mais une telle « expérience », je crois, ne peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somme inutile 
622 réalités sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuve
623 . On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ ont plus besoin de preuves. Il reste qu’un livre comme celui-ci tend u
624 gazetiers ; au cœur de ces sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. « Edmo
59 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
625 au milieu d’une effusion « lyrique », histoire de n’ avoir pas l’air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes
626 i arbitraire et si facultative », je me dis qu’il n’ en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette attitude scienti
627 édales ! Mais il a su mettre plus de choses qu’il n’ y paraît d’abord dans ces 50 pages. Beaucoup sont excellentes et leur
60 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
628 gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra un hom
629 : une fièvre faisait s’épanouir sur son visage je ne sais quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l’esprit libre
630 ition j’ouvre sans cesse à ta course aveugle ; tu n’ aurais pas trouvé ça tout seul, avec tes airs pessimistes. De nouveau,
631 es pour durer, et tu te réjouissais, parce que tu n’ as pas beaucoup d’imagination, et que tu es un pauvre vaudevilliste qu
632 ’endormir, ah ! galope, caracole, éclabousse, ils n’ y comprendront jamais rien, écoutez-les, comme ils me jugent et leurs
633 e qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ ont plus que des baisers au goût d’adieu, et l’avenir où se mêlent inc
634 ed délicieusement. Et de cette nuit peut-être, je ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemain je n’avais plus un sou). J
635 ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemain je n’ avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je son
636 sinon qu’au lendemain je n’avais plus un sou). Je n’ ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peu
637 Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’ étaient-ce que celles de mes folies ? Je me répète : paradoxes, mais c
638 mes folies ? Je me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureu
639 uffit plus à m’en délivrer. Ma vie m’a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais tenter quelque cho
640 rasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait
61 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
641 que ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’ est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve aux prem
642 ns lyriques à leur propos. Mais dans ce roman, il n’ y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibili
643 assez peu intéressante à vrai dire, parce qu’elle n’ est pas à l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la techn
644 es spirituelles, malicieuses ou poétiques ; et ce n’ est pas qu’il ne s’y glisse quelque préciosité ou quelques « pointes »
645 malicieuses ou poétiques ; et ce n’est pas qu’il ne s’y glisse quelque préciosité ou quelques « pointes » faciles mais ce
646 té ou quelques « pointes » faciles mais cela même ne manque pas de naturel… On peut regretter que ce livre ne réalise pas
647 ue pas de naturel… On peut regretter que ce livre ne réalise pas une synthèse plus organique du roman et des mémoires. Mai
648 son début permet de croire que le Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de l
62 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
649 ique. Je crois bien, au contraire, que l’histoire n’ a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaisse
650 l’avènement de cette organisation toute-puissante n’ est plus qu’une question de quelques années. Mais peut-être est-il tem
651 audrait d’abord prendre conscience du péril. Nous ne tentons rien d’autre ici. Il y a une lâcheté, croyons-nous, dans cet
652 monde moderne, et le meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type idéal de l’industriel et du capit
653 ti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de ma critique pour facilite
654 ards qu’il possède, ou plutôt qu’il gère, mais ce n’ est pour lui qu’un résultat secondaire de son activité. Le but de sa v
655 ltat secondaire de son activité. Le but de sa vie n’ a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’a réalisé c
656 rmenage et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’ a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les sociali
657 e les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale
658 , il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrinaires de gauche, lesquels ont coutume
659 ’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les industriels
660 . Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’ en veulent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la
661 de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La pass
662 ncée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant que de lui donner une apparence d’utilité publ
663 du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n’ a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’on abaisse suffisammen
664 cette petite phrase qui n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve t
665 ra que, si l’on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marché. » Il sem
666 elles de cet abaissement de prix — la concurrence n’ étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’état du marché
667 . Dire que l’état du marché est tel que le client n’ achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est momentanémen
668 it ou a disparu. Il semble alors que l’industriel n’ ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de
669 nt disparu, la production devant se maintenir, il n’ y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les pri
670 par la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en ach
671 s moins chers un objet que, sans cette baisse, il n’ eût pas acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’
672 perie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’ est pas que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le client à fai
673 », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâc
674 t créer de besoins et de loisirs. Or, l’industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine a des limite
675 ion de finalité. Mais cet aveuglement fondamental n’ empêche pas notre industriel de philosopher sur les sujets les plus di
676 idéale réduite au rôle d’huile dans les rouages, n’ est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette admirable sim
677 besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom philosophique : c’est
678 philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom philosophique : c’est au plus pur, au plus naïf matérial
679 ns affaire ici. Et ses prétentions « idéalistes » n’ y changeront rien. D’ailleurs, voici des déclarations plus nettes enco
680 voici des déclarations plus nettes encore : « Je ne considère pas les machines Ford simplement comme des machines. J’y vo
681 montrer que les idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais comp
682 s nous absorbons trop dans ce que nous faisons et ne pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre
683 elle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des conséquences, alors
684 t se remet à discuter des points de technique. Il n’ a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’ail
685 parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite l
686 la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’ est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement aigu. Est-ce
687 la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais le « rien
688 res chances. J’accorderai que le progrès matériel n’ est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’il a prise dans notre
689 rces humaines, il travaille contre l’Esprit. Rien n’ est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la matière du prix
690 l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’ en pourrait citer un exemple individuel ? Nous savons assez en quel mé
691 de cette littérature ». Plus tard, « puisqu’elle n’ est pas utile, elle est nuisible ». « … Tableaux, symphonies, ou autre
692 de très sympathique et pas dangereux du tout. On n’ en fait pas une philosophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en pren
693 une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en être Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l
694 monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à la technique et s’abrutir sp
695 sé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’ éprouve plus même cette carence ; seulement, peu à peu, il découvre qu
696 er la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le se
697 sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le monde, lui attribuer s
698 i-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits entre les choses. Il ne compre
699 r que des rapports abstraits entre les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’Occidenta
700 hnique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant l
701 la Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de l’a
702 s un monde fordisé, des anarchistes. Car l’Esprit n’ est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos moments d
703 des anarchistes. Car l’Esprit n’est pas un luxe, n’ est pas une faculté destinée à amuser nos moments de loisir, il a des
704  ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles les
705 romis possible de ce côté. Mais du nôtre ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit l’Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu
706 ez servir Dieu et Mammon », dit l’Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consisterait à vouloir en
707 happatoire utopique. Nous avons mieux à faire, il n’ est plus temps de se désintéresser simplement des buts — si bas soient
708 st encore plus grand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma
63 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
709 avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les dancings, un peuple de fêtards modér
710 te assez de passants pour qu’on la sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fallait-il accuser d
711 ai que les notions réaliste et idéaliste du monde ne sont séparées que par un léger décalage dans la chronologie de nos se
712 onologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ ayant pas renoncé à certaine idée que j’avais d’un romantisme viennois
713 ouvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’ avais même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans
714 Je me penche vers un voisin pour lui demander je ne sais plus quoi. Mais sans doute évadé dans son rêve, beaucoup plus lo
715 adé dans son rêve, beaucoup plus loin que moi, il n’ entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voic
716 Elle rôde ici comme une tristesse amoureuse. Elle n’ est plus que l’approche d’une grandeur où se perdraient nos amours ter
717 voisin avait parlé tout haut ; personne pourtant ne se détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’avoir entendu ? —
718 votre souffrance… Mais le temps approche où vous n’ aurez plus besoin de souffrir pour comprendre. Le faisceau de lumière
719 pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’ y avait dans toute sa personne rien de positivement démodé ; je n’eus
720 oute sa personne rien de positivement démodé ; je n’ eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs
721 n de me moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’ en suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans les rues. Des jeune
722 eunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je, songeant
723 s, l’air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’ a guère changé, dis-je, songeant aux Amours de Vienne. — Certes, répon
724 s un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux
725 ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n’ ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant bien, mais peu
726 rement mystiques… Mais vous savez, « les autres » n’ y comprennent jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femme ! elle n’é
727 ais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femme ! elle n’ était qu’un regard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver la se
728 ps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc par accepter et vi
729 rant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’ y avait plus qu’à lui prendre chacun un bras, une femme pour deux homm
730 plaisir. Autant dire que ceux qui les fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent au hasard des l
731 plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ ont pas été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni
732 s qui n’ont pas été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il
733 en ferait une chose extrêmement précieuse, qu’on n’ approcherait qu’avec un sentiment religieux de la beauté. Mais je croi
734 té. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisaient, aux dernières mesures d
735 asseoir auprès de nous. Gérard songeait, muet, et n’ en buvait pas moins. « Pourquoi vous ne dites rien ? » fit-elle d’un t
736 , muet, et n’en buvait pas moins. « Pourquoi vous ne dites rien ? » fit-elle d’un ton de reproche, évidemment scandalisée
737 it-il doucement, pauvre colombe dépareillée, vous n’ avez pas de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fil
738 e, et c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fille ne comprenant pas, il y eut un moment pénible, comme toujours lorsqu’un
739 x bizarres où je sais lire les signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’aille
740 vie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait la gravité énigmatique d’Adr
741 croyons seules réelles, illusions des reflets qui ne livrent que le côté terrestre des choses dont l’autre moitié sera tou
742 quelque chose d’éternel. Tous les drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée des sentiments, ils n
743 uvants dans la lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles : le vrai drame de son destin es
744 toutes les formes animales. Pour lui, les choses n’ ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité e
745 er de moi. Il me raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que pour nos savants retombés en pleine barbarie spir
746 d’autos s’appelaient dans la nuit froide. Gérard ne disait presque plus rien ; à peine, de temps en temps, s’il parlait à
747 cela s’empila dans des autos ; en dix minutes, il n’ y eut plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’éta
64 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
748 r les autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules Verne qu’un précurseur ? Jules Verne est un cré
749 ntions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Ve
750 itablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus grand c
751 ravers desquels ils respiraient l’air du monde ». N’ en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous sommes dans une civili
752 n de nos plus grands conteurs sous prétexte qu’il n’ est styliste ni psychologue ? Laisserons-nous Jules Verne aux enfants 
753 ne est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui ne m’empêchera pas d’y monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo
754 aine Nemo soit à bord, je soupçonne que ce bateau n’ est autre que La Liberté. ar. « M. Allotte De La Fuye : Jules Verne,
65 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
755 Aragon, Traité du style (août 1928)as Ce n’ est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux,
756 loigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils les favor
757 s locales. (Quant à Goethe, traité de clown, cela ne va pas loin.) C’est une belle rage (ô combien partagée !) vainement p
758 (quitte à renaître heureusement) sur des gens qui ne m’intéressent pas ou bien qui ne sont pas atteints par ces épithètes
759 sur des gens qui ne m’intéressent pas ou bien qui ne sont pas atteints par ces épithètes drôles ou quelconques. Mais la se
760 rtie du livre est admirable ; il suffit. Le titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’exemples qui méritent
66 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
761 oir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne doit pas entraîner, à leur point de vue, celui d’autrui sur eux-mêmes
762 nt détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette ré
763 rès beau style contre un monde très laid dont ils n’ ont pas encore renoncé à chatouiller le snobisme. at. « Pierre Navil
67 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
764 fs pour l’une ou l’autre de ces attitudes. (Elles ne sont pas essentiellement contradictoires : elles représentent deux ma
765 us nerveux, sans doute aussi plus sensible. Et il ne se borne pas à des effets pittoresques : ce récit coloré et précis, a
766 Garine est décisif : « La Révolution… tout ce qui n’ est pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite, l’absurde retrouve
68 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
767 comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l’ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’
768 ges de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’ est-ce point trop demander à une existence bien indécise, que son éche
769 à une existence bien indécise, que son échec même ne relève pas, et qui tire sa grandeur de celle du décor ? Guy de Pourta
770 sa grandeur de celle du décor ? Guy de Pourtalès n’ hésite pas à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitu
771 lusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’ est pas forcément prince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien
772 La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’ est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu
773 st qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’ a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc
774 atres proposeraient de moins jolis mots ; mais ce n’ est pas la moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre
775 s, réussir un livre attrayant sur une vie manquée n’ était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès l’a résolu d’une façon f
69 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
776 e mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’ étonnera pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes. Le cas mérit
777 Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’ épuise pas une question dont l’importance dépasse celle du cas patholo
778 se tout, peut conduire à préférer un mensonge qui n’ est, hélas, qu’une déformation de cette réalité détestée. Le mythomane
70 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
779 s gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur les autos. Il préfère s’intéresser aux divers typ
780 rop impatient, demande-t-il aux êtres plus qu’ils ne peuvent donner… D’ailleurs on ne lui doit rien, n’est-ce pas ? Il en
781 tres plus qu’ils ne peuvent donner… D’ailleurs on ne lui doit rien, n’est-ce pas ? Il en tombe d’accord ; accepte d’attend
782 e peuvent donner… D’ailleurs on ne lui doit rien, n’ est-ce pas ? Il en tombe d’accord ; accepte d’attendre comme un enfant
783 le de rentrer en lui-même. « Il se ramène en soi, n’ ayant plus où se prendre » comme parle un de nos classiques. Repoussé
784 nos classiques. Repoussé par le monde parce qu’il n’ est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savoir ce qu’il est. C’es
785 génération. Mais là encore il se singularise : il n’ écrit pas de livre pour y pourchasser un moi qui feint toujours de se
786 usqu’à la dernière page, et là déclare froidement ne pas exister. Non : il a remarqué que l’époque peut être définie par l
787 rendre à tout instant. Cet exercice — essayez ! —  ne tarde pas à devenir obsédant. Stéphane passe des heures entières à se
788 p d’autres hiatus de ce genre, qui l’intriguent à n’ en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir encore cette fat
789 ’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’ importe quel passant, il se sent comme séparé de soi, et si profondéme
790 yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et n’ y trouve que le désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son
791 Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ? Il n’ y a plus que cette incantation à soi-même qui pourrait lui rendre la c
792 voulu se constater. Va-t-il découvrir aussi qu’on ne comprend que ce qu’on dépasse ? Et qu’il faut sortir de soi pour se v
793 a dans l’homme moderne un besoin de vérifier qui n’ est plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’
794 aduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n’ a pas eu confiance. Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane n
795 Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est. Semblablement, il ne sait plus aimer. (Ces je
796 hane ne sait plus ce qu’il est. Semblablement, il ne sait plus aimer. (Ces jeunes gens ne veulent pas se fatiguer pour rie
797 ablement, il ne sait plus aimer. (Ces jeunes gens ne veulent pas se fatiguer pour rien.) Cette histoire idiote, d’ailleurs
798 e lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’ avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette
799 ont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’ est pas une vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’é
800 -tu sous un autre visage. Car oublier son visage, ne serait-ce pas devenir un centre de pur esprit ? » C’est un premier fi
801 d’eau vive qui perce le sol aride : mais Stéphane n’ entend pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser
802 ur réponse, il répète à plusieurs reprises : « Je ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu plus
803 ieurs reprises : « Je ne sais pas : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut un jour de gran
71 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
804 crit la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers
805 este, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui
806 cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’ ont plus que leur raison, ce monde où l’on ne sait plus créer avec joi
807 qui n’ont plus que leur raison, ce monde où l’on ne sait plus créer avec joie des formes belles, ce monde qui devient imp
808 nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’ importe quel autre de mon temps à faire aboutir la standardization à s
809 aire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré un jour comme le grand tueur de son ép
72 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
810 cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’ est compréhensible et légitime que dans la mesure où la poésie est com
811 ystique. Mais parce que je suis de sang-froid, je ne puis dire grand-chose de plus. On ne se comprend bien qu’entre jeunes
812 ng-froid, je ne puis dire grand-chose de plus. On ne se comprend bien qu’entre jeunes hommes ivres. Mais alors point n’est
813 en qu’entre jeunes hommes ivres. Mais alors point n’ est besoin de formuler cette ivresse ; autrement que par des cris. 5.
814 es-Lettres est une liberté. Une rude épreuve : on n’ en sort que pour mourir ou pour entrer en religion : rond de cuir ou p
815 les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ont pas cru, c’
816 nnaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses
817 de blasphème, selon. Mais ce qui importe d’abord, n’ est-ce point de se livrer, purement et simplement. 7. (Secret). r. «
73 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
818 r écloses voyageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où
74 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
819 s rares qui ont réussi à se connaître et que cela n’ a point stérilisé : sa nature, il est vrai, s’y prêtait, peu complexe
820 t comme réduite à deux dimensions ; la conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y exciter un es
821 re, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise que c
822 tal. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’ en demande pas tant dans les familles. Et qu’importe si la perspective
823 i la perspective manque souvent à ces récits : ce n’ est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais l’anecdote bien tourn
824 de chair. Et de rêve. Est-ce qu’en ce temps-là on ne se nourrissait vraiment que de petits mots d’esprit et de malices ? N
75 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
825 vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression. Vienne : assis sur les
826 nts de crème, avec une apathie qu’aucun orchestre ne vient troubler, aucune voix haute, aucune couleur vive. Les journaux
827 s rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’ y comprenez rien, mais le charme des voix hongroises féminines suffit
828 sible, rient et s’enivrent comme plus un Européen ne sait le faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui dev
76 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
829 e les signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’ offre aux sens que peu d’images (à peine quelques « motifs », objets u
830 douce et virile ; et quel beau titre ! « Saisir » n’ est-ce point l’acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’
831 e essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’ est-elle pas proprement « saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est
77 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
832 r qu’aujourd’hui le hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de
833 ent à peine sensible dans son œuvre. Car ce poète n’ est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, q
834 eu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il règne dans ses H
835 hauts et sombres, qui paraîtraient immenses s’ils n’ étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’homme q
836 iant — bon, bon, parce qu’il y en a qui viennent, n’ est-ce pas, ils ne savent pas trop qui c’était… Alors vous devez conna
837 arce qu’il y en a qui viennent, n’est-ce pas, ils ne savent pas trop qui c’était… Alors vous devez connaître ces portraits
838 Ça, c’est Diotima. » On rougirait à moins. — « Je ne puis pas parler de lui, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussit
839 fui. Avril et mai et juin sont lointains, Je ne suis plus rien, je n’aime plus vivre. Il y avait encore plus de paix
840 t juin sont lointains, Je ne suis plus rien, je n’ aime plus vivre. Il y avait encore plus de paix que maintenant. La gr
841 de paix que maintenant. La grande allée sur l’île n’ existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et des c
842 vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’ a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mai
843 il, je pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Une rue étouffée
844 rochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’ aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagaye
845 plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent pas bien ramer et qui lisent des magazines au fil de l’eau, ce
846 se de terrible, où il a perdu son âme. Et puis il n’ est revenu qu’un vieux corps radotant. — Qu’en pensez-vous, bonnes gen
847 e à trouver malsain ce genre de tentatives : cela ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent la phr
848 ans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du médiocre dont ils se sentent bénéficiaires. A
849 nés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’ est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle paraît ici bien établie, trio
850 âmes indulgentes à leur banalité ? Est-ce qu’ils ne soupçonnent jamais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand l’amou
78 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
851 onges (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’ est à personne paru l’année dernière — un livre assez troublant et qu’
852 it rencontrer des êtres bizarres avec lesquels il n’ hésite pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux
853 souvenirs attristés par le temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheurs qui signifient plus de
854 bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en doutent… C’est un dévergondage sentimental, plein de malices et
855 personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’ importe quoi, cet air dangereux et tendre que prennent les hommes en l
856 ndre que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux dernières pages du livre, un p
857 un peu amers… On voudrait un livre de Cassou qui ne serait fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci de vraisemblanc
858 r de tout souci de vraisemblance extérieure ; qui ne serait qu’invention, qui inventerait sa vérité. Ce serait un de ces m
859 nous avons besoin pour croire que le monde actuel n’ est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre de Jean Cassou,
79 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
860 st bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui sont encore capables d’une tel
861 rt l’œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’ élargisse pas plus une question aussi centrale — qui est, si l’on veut
862 l’état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’ est pas plus admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le catholi
863 e à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bien française, hélas. ba. « A
80 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
864 enda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’ est plus l’heure de venir prendre position dans un débat où les voix l
865 son des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tous bords. J
866 nd cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi ne manqueront
867 pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la chut
868 joue de la raison ratiocinante tout comme si elle n’ était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s
869 traire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer choses et idées en catégories « rationnel
870 te que soit souvent son adresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’audace tranquille et admirable de son point d
871 de l’impossible. Et quand bien même elle croirait n’ en avoir plus besoin. Cet extrémisme de la pensée intemporelle, en but
872 sarcasmes des extrémistes de droite et de gauche, n’ en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent l’esprit :
873 s qu’il fallait attendre de ces auteurs. Ce qu’on ne viendra pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de la vérité tou
874 nde où tout est bon à quelque chose, où rien plus n’ est tenu pour vrai que relativement à un rendement. Rien, pas même la
81 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
875  ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses ailes. On le félicita de son retour à
876 ra persécuté à cause de ses ailes, mais celui qui n’ en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Sei
877 ais celui qui n’en a pas sera méprisé parce qu’il n’ en a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien compl
878 d Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent point à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient la Dé
879 la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’ y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les q
880 r les questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti, l’ange trouva son salut dans un subterfuge 
82 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Avant-propos
881 Avant-propos Le dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante petites pages tous les méfaits
882 l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’ aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science
883 homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, a
884 ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel
885 — Justement. Il est un reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde mod
886 nde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rien. En effet, je ne représente aucun parti, aucune firme
887 nt des idées qui ne rapportent rien. En effet, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je
888 t, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma gén
889 rti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas livr
890 prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueu
891 oite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’in
892 ’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’ est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde a
893 me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’ est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vi
894 la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’ est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçois là-
895 nalent bien souvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tie
896 dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’ empêchera personne de me resservir ces arguments, bien que dûment prév
897 uits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’ aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du typ
898 x lettres A ou B, selon. A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce
899 ui croient aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent,
900 me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformat
901 s égard aux dérangements, même violents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distincti
902 le but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Le
83 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 1. Mes prisons
903 guy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il n’ y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces bell
904 tiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’ est pas une fantaisie pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
905 monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel
906 réguliers… L’École, dans ce concert de souvenirs, n’ est qu’une dissonance douloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfanc
907 t agréable : j’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en tabl
908 manière. Un jour cela m’ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des é
909 gime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’originalité. Mais pour être rentrée,
910 d’originalité. Mais pour être rentrée, ma colère n’ en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de
911 de contre moi-même à cause des autres desquels il ne fallait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau satu
912 ut. Deux fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus, toutes choses égales d’ailleurs,
913 e comprendre avec enthousiasme que ces vérités-là n’ ont aucune importance.) Quant à l’autre « évidence » que je viens de c
914 m’habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’ osais m’en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruin
915 sme indispensable aux « immortels principes ». Je n’ allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je
916 mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’ étaient que des principes. Et ce fut ma seconde découverte : ce monde
917 établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avion
918 s aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’ avions plus de « superstitions grossières » comme celles qui touchent
919 t des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
920 rier est l’égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus m
921 livré, en supporter longtemps encore l’action. Je n’ eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit et
84 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 2. Description du monstre
922 que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’ avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’éc
923 Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’ étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon élèv
924 se : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’un à l’autre i
925 on élève qu’un instituteur : de l’un à l’autre il n’ y a pas de solution de continuité, la différence n’étant qu’une questi
926 ’y a pas de solution de continuité, la différence n’ étant qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce que je vais di
927 tés par le gouvernement) de la manne égalitaire —  ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’apparte
928 ela se voit de loin. Il faut dire que ce ridicule n’ échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l
929 ibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’ en dirai pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me pous
930 mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils son
931 urgeois. Ils sont au moins aussi sympathiques que n’ importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeo
932 iendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le
933 les personnes, le décor. La laideur des collèges n’ est pas accidentelle. C’est celle même du régime. l’architecture de no
934 ont dans nos villes l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés.
935 t ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’ en est pas un : mais l’absence de style est encore un style ; c’est mê
85 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 3. Anatomie du monstre
936 ntrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personn
937 bles. Il serait plus juste de dire que la passion n’ a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les plus vives.
938 us vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris
939 ue. L’esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’ est pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas d
940 toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeo
941 plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’ atteignent dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalit
942 aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’ est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfants
943 l’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’ a point accordés à l’actuelle division horaire des journées… Monsieur,
944 responsables, vous savez par expérience que nous ne comprenons pas la plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ail
945 notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse
946 sprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’ en meurent pas. Les examens Ce sont en principe des « contrôles 
947 ses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n’ a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « 
948 dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’ est pas exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens.
949 e de divers maîtres primaires et secondaires. Ils n’ en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui ju
950 plaisanteries de gros calibre, car à la vérité ce n’ est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les esprits au con
951 les esprits au contrôle de l’État, voyons donc, —  n’ avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans cesse des vérités auss
952 épaisseur, mais il faut reconnaître que jamais on n’ avait songé à leur donner une extension universelle et un caractère ob
953 ntissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école s’at
954 résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui soit de pr
955 es manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui soit de première main, rien qui soit authentique.
956 t ils traitent. Or la valeur éducative des choses n’ apparaît qu’à celui qui entre en commerce intime avec elles. On appren
957 nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils
958 sont forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’ a qu’une valeur éducatrice : s’il n’est pas modèle, il est absurde. Ma
959 Or ce travail n’a qu’une valeur éducatrice : s’il n’ est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de
960 que la discipline perd tout son sens éducatif et n’ est plus qu’une entrave énervante, un système de vexations mesquines,
961 fer toute spontanéité chez un peuple qui vraiment ne péchait point par l’excès de cette vertu. La discipline primaire form
962 e enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’ aurez rien qui ressemble en quoi que ce soit à aucun état social exist
963 ’elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentiellement négative. Elle con
964 que le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’ y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tou
965 ossible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré qu
966 ncienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis, quelle est cette préparation à
967 ’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu’il soit tout de noblesse, de vertu et de grandeur.
968 de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’il n’ est que ridicule et mesquinerie. Il y a là une préméditation de médioc
969 Il y a là une préméditation de médiocrité que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de
970 isme d’imbéciles ou d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à l’avantage des gens en place, vieille histoire. On m’o
971 enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être assez spéciales. Il arrive en effet que nos p
972 e une belle carrière. Mais ces brillants météores ne troublent pas beaucoup ma superstition, par ailleurs fort grande. Tou
973 diqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je m’en tiendra
974 ait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement les meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M.
86 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 4. L’illusion réformiste
975 a été dit. (Un peu autrement, j’en conviens.) On n’ a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il
976 e prévaut, il est à craindre que l’école nouvelle n’ apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre aux bambins à ma
977 du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à tout jama
978 s ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur part
979 le meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spontanéité nécessaire p
980 , que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces exagérations ne sont pas bien graves,
981 ça ne soit pas une lourde farce. Ces exagérations ne sont pas bien graves, parce qu’elles sont comiques précisément. Je fe
982 plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On n’ impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez que cela revient
983 us grave que la brutalité primaire, parce qu’elle n’ excite pas de réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’aime
984 réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’ aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’obt
985 n remarque chez l’enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez ensemble
986 t toute la personne était un enseignement, et qui n’ avait pas des élèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise le dé
987 seul favorise le développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui dépose une semence spirituelle. Qui
988 scients et organisés. Je crains que ce malentendu ne soit décidément trop gros pour échapper plus longtemps à MM. les Insp
989 s des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse)
990 s (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle n’ échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette é
991 ependant une possibilité pratique d’en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reco
87 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 5. La machine à fabriquer des électeurs
992 t de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourqu
993 t l’une, c’est savoir ce que l’autre pense. Elles ne mourront qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends q
994 l’autre pense. Elles ne mourront qu’ensemble. Il n’ y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas cett
995 n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquet
996 t il y aurait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigar
997 je demanderai poliment au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliqu
998 nombre de vérités tellement évidentes — que cela n’ irait pas sans quelque indécence. Et d’abord, il faut pouvoir lire, éc
999 leçons, et le plus longtemps possible, pour qu’on n’ ait pas le temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour q
1000 ndre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d
1001 milliard de façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a emb
1002 émocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’ est de la part de notre Institutrice qu’un rendu. Car dans ce monde-là
1003 atisfaction sordide et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu ple
1004 our autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’ a été possible que parce qu’elle était liée aux intérêts de la démocra
1005 mocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’ était encore au xviiie siècle qu’une utopie de partisans. Il ne serai
1006 au xviiie siècle qu’une utopie de partisans. Il ne serait guère plus fou de proposer aujourd’hui qu’on répande universel
1007 axophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour prendre corps, que l’appui intéress
1008 non moins flagrante, dans ses suites normales. Je n’ en veux pas d’autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notre i
1009 otre instrument de progrès par excellence. Car il n’ est qu’une explication vraisemblable de cette incurie : l’école, sous
1010 vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dans son fonctionnement. Cet avantage i
1011 au naturel explique que les autorités compétentes n’ aient point hésité à l’adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Main
1012 z les enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme scolaire, pol
1013 ouvernements. La réforme scolaire, politiquement, n’ est pas rentable. Il est clair que si le but principal de l’instructio
1014 les gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révo
1015 ient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution scolaire ; car
1016 ’heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais les gouve
1017 ilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous
1018 coup. Et quand vous les démoliriez tous, ma rage n’ en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définition. Aprè
1019 une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles je
1020 nt je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de
1021 bourgeois. Essayer de venir me dire ça chez moi, n’ est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je particip
1022 ple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ ont pas d’eux-mêmes une connaissance aussi sensible. Ils ignorent ce q
1023 re le signal de la grande débâcle printanière. Il n’ y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on cu
1024 in de déclarer formellement qu’une telle attitude n’ est en aucune façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à la mode.
88 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 6. La trahison de l’instruction publique
1025 paiera cher ce crime contre la civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales, eh bien ! elle appre
1026 s, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’ a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suff
1027 le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un danger pour le déso
1028 a production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement » quantitatif de ceux qui s’y livren
1029 ndement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m
1030 la famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civili
1031 isation de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée p
89 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 7. L’Instruction publique contre le progrès
1032 reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux, ce
1033 !… et d’ailleurs vous aimez les idées généreuses, n’ est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne so
1034 en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dans une direc
1035 ogrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir
1036 e conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’ aimez pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction p
1037 s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors n’ a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronf
1038 de 1880 et depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’ en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout empester. Et
1039 public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’ est qu’un camouflage à l’abri duquel on distille du radicalisme intégr
1040 rvants de la machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrété
1041 rétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris par cœur la répon
1042 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’ aient appris par cœur la réponse. Regardez un écolier préparer ses dev
1043 un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’un régime établi dans de
1044 consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’humanité, comme vous
1045 de l’évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce sens exquis du cliché q
1046 n pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intention
1047 humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle dans cet amour d
1048 ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais la considératio
1049 est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habitude
1050 é des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la plup
1051 ionalistes. En vérité, démocratie et rationalisme ne sont que deux aspects, l’un politique, l’autre intellectuel, d’une mê
1052 est développée au xviiie dans l’aristocratie qui n’ y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bo
1053 re ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’aurais voul
1054 se de Saint-Guy politique dont rien de leur temps ne pouvait offrir la moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette
1055 sme sont d’un ridicule écrasant, sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a
1056 périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’ a que de lointains rapports de parenté avec ce maigre descendant nommé
90 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Appendice. Utopie
1057 catastrophiques pour peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas : le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’h
1058 ue qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’ est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d’aucune grandeur
1059 randeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’ engendre pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combinais
1060 ion publique. Cela promet des grabuges inouïs. Il ne tient peut-être qu’à une forte équipe d’idéalistes pratiques d’en fai
1061 dès maintenant se constituent ces élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage
1062  : c’est tout à fait moi ! — Détrompez-vous. Vous ne savez pas ce que c’est que libre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’i
1063 des possibilités nouvelles. Tenir compte du réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat. L’utopiste est celui qui ne s
1064 y soumettre sans combat. L’utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour le « mieux » contre le
1065 pos : que les journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’i
1066 mais à ne publier plus un seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’instruction publique. Ils peuvent dire ce qu
1067 e. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n’ importe quoi, comme on sait, et ils auraient là l’occasion de racheter
1068 ent là l’occasion de racheter bien des choses. Ce n’ est rien de moins qu’une rédemption du journalisme, ce que je propose-
1069 j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolu
1070 le devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de pensée. Un entraînement de l’es
1071 evoir se défendre : on se moque. On me dit : vous ne voyez tout de même pas une classe de gamins répétant la syllabe sacré
1072 à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure
1073 respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’Occident
1074 ailleurs. Tant mieux. Il y a beaucoup de gens qui ne peuvent pas séparer une méthode des fins auxquelles on l’applique gén
1075 stants, il s’épargnerait de longs énervements. Il n’ y a pas là de quoi se tordre. Car tout cela nous donnerait des années
1076 nt cachées aux agités ; la nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous
1077 e temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à posséde
1078 ns vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière. Dan
1079 gitimeraient du même coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire la diversité des besoins individuels. Méditez un pe
1080 les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblables accusations. Du moment que n’importe qui jug
1081 vent que de semblables accusations. Du moment que n’ importe qui juge et contrôle n’importe quoi, il faut bien inventer des
1082 ons. Du moment que n’importe qui juge et contrôle n’ importe quoi, il faut bien inventer des dessous pour redonner quelque
1083 elque saveur à ses jugements. C’est pourquoi l’on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans son activité publique sans q
1084 donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font beau
1085 t des catastrophes que beaucoup de rigueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B La culture de notre sensibilité nous
1086 tte nouvelle attitude de l’âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur efficace que dans un système
1087 onque a une foi et la conscience de cette foi, il n’ est d’enseignement véritable que religieux. Mais les questions confess
1088 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’ apparaissent ici que pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin
1089 raissent ici que pour impressionner le public. Je n’ ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en effe
1090 fet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ils n’ en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ce
1091 s, ou plutôt des grenades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine
1092 gogiques encore très actuels, du fait que l’école n’ a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant, s’il est
1093 à l’enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’ aime que la liberté.
91 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Avant-propos
1094 Avant-propos Le dire une bonne fois.   Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’i
1095 l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’ aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science
1096 homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, a
1097 n ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel
1098 — Justement. Il est un reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde mod
1099 nde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rien. En effet, je ne représente aucun parti, aucune firme
1100 nt des idées qui ne rapportent rien. En effet, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je
1101 t, je ne représente aucun parti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma gén
1102 rti, aucune firme. Je ne voyage pour personne. Je ne prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas livr
1103 prétends pas même parler au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueu
1104 oite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’in
1105 ’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’ est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde a
1106 me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’ est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vi
1107 la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’ est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçois là-
1108 nalent bien souvent nos tolérants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tie
1109 dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’ empêchera personne de me resservir ces arguments, bien que dûment prév
1110 uits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’ aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du typ
1111 x lettres A ou B, selon. A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce
1112 ui croient aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent,
1113 me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformat
1114 égards aux dérangements, même violents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distincti
1115 e but final de notre institution-tabou.   1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Le
92 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 1. Mes prisons
1116 uy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « il n’ y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces bell
1117 tiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’ est pas une fantaisie pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
1118 monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel
1119 réguliers… L’École, dans ce concert de souvenirs, n’ est qu’une dissonance douloureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfan
1120 t agréable : j’alignais des bâtons en rêvant à je ne sais quoi, j’étais délicieusement seul parmi ces petits êtres en tabl
1121 manière. Un jour cela m’ennuya. Sachant lire, je ne pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des é
1122 gime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’originalité. Mais pour être rentrée
1123 d’originalité. Mais pour être rentrée, ma colère n’ en fut que plus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de
1124 de contre moi-même à cause des autres desquels il ne fallait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau satu
1125 ut. Deux fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus, toutes choses égales d’ailleurs,
1126 e comprendre avec enthousiasme que ces vérités-là n’ ont aucune importance.) Quant à l’autre « évidence » que je viens de c
1127 m’habituer à cette idée. Je tenais cette clef et n’ osais m’en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruin
1128 sme indispensable aux « immortels principes ». Je n’ allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je
1129 mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’ étaient que des principes. Et ce fut ma seconde découverte : ce monde
1130 établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avion
1131 s aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’ avions plus de « superstitions grossières » comme celles qui touchent
1132 t des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
1133 rier est l’égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus m
1134 livré, en supporter longtemps encore l’action. Je n’ eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit et
93 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 2. Description du monstre
1135 que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’ avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’éc
1136 Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’ étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon élèv
1137 se : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’un à l’autre,
1138 n élève qu’un instituteur : de l’un à l’autre, il n’ y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une questi
1139 ’y a pas de solution de continuité, la différence n’ était qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce que je vais di
1140 tés par le gouvernement) de la manne égalitaire —  ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’apparte
1141 ela se voit de loin. Il faut dire que ce ridicule n’ échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l
1142 sibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’ en dirai pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’on me pous
1143 mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils son
1144 urgeois. Ils sont au moins aussi sympathiques que n’ importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeo
1145 iendrai peut-être sur ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le
1146 personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’ est pas accidentelle. C’est celle même du régime. L’architecture de no
1147 ont dans nos villes l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés.
1148 t ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’ en est pas un : mais l’absence de style est encore un style : c’est mê
94 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 3. Anatomie du monstre
1149 ntrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elles me sont absolument personn
1150 bles. Il serait plus juste de dire que la passion n’ a qu’une clairvoyance intéressée : mais celle-là est la plus vive. Enf
1151 lus vive. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’équité. Pas plus que vous, qui défendez de parti pris
1152 ue. L’esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’ est pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas d
1153 toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeo
1154 plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’ atteignent dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalit
1155 aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’ est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfants
1156 l’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’ a point accordés à l’actuelle division horaire des journées… Monsieur,
1157 responsables, vous savez par expérience que nous ne comprenons pas la plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ail
1158 notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse
1159 sprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’ en meurent pas. 3.b. Les examens Ce sont en principe des « contr
1160 ses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n’ a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « 
1161 dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’ est pas exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens.
1162 e de divers maîtres primaires et secondaires. Ils n’ en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui ju
1163 plaisanteries de gros calibre, car à la vérité ce n’ est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les esprits au con
1164 les esprits au contrôle de l’État, voyons donc, —  n’ avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans cesse des vérités auss
1165 épaisseur, mais il faut reconnaître que jamais on n’ avait songé à leur donner une extension universelle et un caractère ob
1166 ntissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne convient donc qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école
1167 résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui soit de pr
1168 es manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui soit de première main, rien qui soit authentique.
1169 t ils traitent. Or la valeur éducative des choses n’ apparaît qu’à celui qui entre en commerce intime avec elles. On appren
1170 nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils
1171 sont forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’ a qu’une valeur éducatrice : s’il n’est pas modèle, il est absurde. Ma
1172 Or ce travail n’a qu’une valeur éducatrice : s’il n’ est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de
1173 que la discipline perd tout son sens éducatif et n’ est plus qu’une entrave énervante, un système de vexations mesquines,
1174 fer toute spontanéité chez un peuple qui vraiment ne péchait point par l’excès de cette vertu. La discipline primaire form
1175 e enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’ aurez rien qui ressemble en quoi que ce soit à aucun état social exist
1176 ’elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentiellement négative. Elle con
1177 que le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’ y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tou
1178 ossible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré qu
1179 ncienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis, quelle est cette préparation à
1180 ’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu’il soit tout de noblesse, de vertu et de grandeur.
1181 de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’il n’ est que ridicule et mesquinerie. Il y a là une préméditation de médioc
1182 Il y a là une préméditation de médiocrité que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de
1183 isme d’imbéciles ou d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à l’avantage des gens en place, vieille histoire. On m’o
1184 enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être assez spéciales. Il arrive en effet que nos p
1185 e une belle carrière. Mais ces brillants météores ne troublent pas beaucoup ma superstition, par ailleurs fort grande. Tou
1186 diqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bon sens. Je m’en tiendra
1187 t M. Prudhomme, un bien grave dilemme.   4. Ce ne sont pas seulement les meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M.
95 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 4. L’illusion réformiste
1188 a été dit. (Un peu autrement, j’en conviens). On n’ a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il
1189 e prévaut, il est à craindre que l’école nouvelle n’ apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre aux bambins à ma
1190 du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à tout jama
1191 s ! ne traduise incontinent ce verbe en action et ne disparaisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur part
1192 le meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spontanéité nécessaire p
1193 , que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces exagérations ne sont pas bien graves,
1194 ça ne soit pas une lourde farce. Ces exagérations ne sont pas bien graves, parce qu’elles sont comiques précisément. Je fe
1195 plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On n’ impose plus de résultats, on les fait trouver. Notez que cela revient
1196 us grave que la brutalité primaire, parce qu’elle n’ excite pas de réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’aime
1197 réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’ aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’obt
1198 n remarque chez l’enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez ensemble
1199 t toute la personne était un enseignement, et qui n’ avait pas des élèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise le dé
1200 seul favorise le développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui dépose une semence spirituelle. Qui
1201 scients et organisés. Je crains que ce malentendu ne soit décidément trop gros pour échapper plus longtemps à MM. les Insp
1202 s des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse.
1203 s (si tant est qu’il progresse.) L’école nouvelle n’ échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette é
1204 ependant une possibilité pratique d’en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reco
96 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 5. La machine à fabriquer des électeurs
1205 t de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourqu
1206 t l’une, c’est savoir ce que l’autre pense. Elles ne mourront qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends q
1207 l’autre pense. Elles ne mourront qu’ensemble. Il n’ y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas cett
1208 n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquet
1209 t il y aurait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigar
1210 je demanderai poliment au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliqu
1211 nombre de vérités tellement évidentes — que cela n’ irait pas sans quelque indécence. Et d’abord, il faut pouvoir lire, éc
1212 leçons, et le plus longtemps possible, pour qu’on n’ ait pas le temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour q
1213 ndre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d
1214 milliard de façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ ait pas le temps de découvrir la Liberté 9, parce que celui qui l’a em
1215 émocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’ est de la part de notre Institutrice qu’un rendu. Car dans ce monde-là
1216 satisfaction sordide et mal dissimulée. Certes je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient pleine
1217 ur autant 10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’ a été possible que parce qu’elle était liée aux intérêts de la démocra
1218 mocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’ était encore au xviiie siècle qu’une utopie de partisans. Il ne serai
1219 au xviiie siècle qu’une utopie de partisans. Il ne serait guère plus fou de proposer aujourd’hui qu’on répande universel
1220 axophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour prendre corps, que l’appui intéress
1221 non moins flagrante, dans ses suites normales. Je n’ en veux pas d’autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notre i
1222 otre instrument de progrès par excellence. Car il n’ est qu’une explication vraisemblable de cette incurie : l’école, sous
1223 vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dans son fonctionnement. Cet avantage i
1224 au naturel explique que les autorités compétentes n’ aient point hésité à l’adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Main
1225 z les enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme scolaire, pol
1226 ouvernements. La réforme scolaire, politiquement, n’ est pas rentable. Il est clair que si le but principal de l’instructio
1227 les gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révo
1228 ient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution scolaire ; car
1229 ’heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais les gouve
1230 ilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous
1231 coup. Et quand vous les démoliriez tous, ma rage n’ en serait pas moins légitime. Je lui donne raison par définition. Aprè
1232 une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeurs d’âme auxquelles je
1233 t je viens de décrire la marche nécessaire 11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de
1234 bourgeois. Essayez de venir me dire ça chez moi, n’ est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je particip
1235 ple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ ont pas d’eux-mêmes une connaissance aussi sensible. Mais attendez, si
1236 re le signal de la grande débâcle printanière. Il n’ y a pas de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’o
1237 in de déclarer formellement qu’une telle attitude n’ est en aucune façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à la mode.
97 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 6. La trahison de l’instruction publique
1238 paiera cher ce crime contre la civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales, eh bien ! elle appre
1239 s, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’ a pas de pardon, c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suf
1240 le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un danger pour le déso
1241 a production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement » quantitatif de ceux qui s’y livren
1242 ndement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me poser ici en défenseur des vertus patriarcales. Mais je m
1243 la famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civili
1244 isation de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée p
98 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 7. L’instruction publique contre le progrès
1245 reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux, ce
1246 … et d’ailleurs, vous aimez les idées généreuses, n’ est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne so
1247 en étais sûr. Cependant j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dans une direc
1248 ogrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir
1249 e conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’ aimez pas le risque, vous préférez le surplace. Ainsi l’instruction pu
1250 s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors n’ a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de consommer, ronfler
1251 de 1880 et depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’ en continue pas moins de consommer, ronfler et de tout empester. Et pe
1252 le public perçoit que « l’instrument de progrès » n’ est qu’un camouflage à l’abri duquel on distille du radicalisme intégr
1253 ine sont socialistes ou conservateurs : voilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrété
1254 étés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris par cœur la répon
1255 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’ aient appris par cœur la réponse. Regardez un écolier préparer ses dev
1256 un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’un régime établi dans de
1257 consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’humanité, comme vous
1258 de l’évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce sens du cliché qui est
1259 n pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer de s’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intenti
1260 anité de demain ne peut manquer de s’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle dans cet amour d
1261 ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais la considératio
1262 est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habitude
1263 é des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que la plup
1264 ionalistes. En vérité, démocratie et rationalisme ne sont que deux aspects, l’un politique, l’autre intellectuel, d’une mê
1265 est développée au xviiie dans l’aristocratie qui n’ y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bo
1266 re ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’aurais voul
1267 se de Saint-Guy politique dont rien de leur temps ne pouvait offrir la moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette
1268 sme sont d’un ridicule écrasant, sous lequel vous ne tarderez pas à périr.   12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’
1269 rir.   12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’ a que de lointains rapports de parenté avec ce maigre descendant nommé
99 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Appendice. Utopie
1270 catastrophiques pour peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas : le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’h
1271 ue qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’ est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d’aucune grandeur
1272 randeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’ engendre pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combinais
1273 ion publique. Cela promet des grabuges inouïs. Il ne tient peut-être qu’à une forte équipe d’idéalistes pratiques d’en fai
1274 dès maintenant se constituent ces élites et cela ne se peut que si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage
1275  : c’est tout à fait moi ! — Détrompez-vous. Vous ne savez pas ce que c’est que libre ou consacré.) L’utopiste, c’est l’in
1276 des possibilités nouvelles. Tenir compte du réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat. L’utopiste est celui qui ne s
1277 y soumettre sans combat. L’utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état des choses. Il est pour le « mieux » contre l
1278 pos : que les journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’i
1279 mais à ne publier plus un seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’instruction publique. Ils peuvent dire ce qu
1280 e. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n’ importe quoi, comme on sait, et ils auraient là l’occasion de racheter
1281 ent là l’occasion de racheter bien des choses. Ce n’ est rien de moins qu’une rédemption du journalisme, ce que je propose-
1282 j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolu
1283 le devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de pensées. Un entraînement de l’e
1284 evoir se défendre : on se moque. On me dit : vous ne voyez tout de même pas une classe de gamins répétant la syllabe sacré
1285 à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure
1286 respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’Occident
1287 ailleurs. Tant mieux. Il y a beaucoup de gens qui ne peuvent pas séparer une méthode des fins auxquelles on l’applique gén
1288 stants, il s’épargnerait de longs énervements. Il n’ y a pas là de quoi se tordre. Car tout cela nous donnerait des années
1289 nt cachées aux agités ; la nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous
1290 e temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à posséde
1291 ns vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière. Dan
1292 gitimeraient du même coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire la diversité des besoins individuels. Méditez un pe
1293 les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblables accusations. Du moment que n’importe qui jug
1294 vent que de semblables accusations. Du moment que n’ importe qui juge et contrôle n’importe quoi, il faut bien inventer des
1295 ons. Du moment que n’importe qui juge et contrôle n’ importe quoi, il faut bien inventer des dessous pour redonner quelque
1296 elque saveur à ses jugements. C’est pourquoi l’on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans ses activités publiques sans
1297 donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font beau
1298 t des catastrophes que beaucoup de rigueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B La culture de notre sensibilité nous
1299 tte nouvelle attitude de l’âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur efficace que dans un système
1300 onque a une foi et la conscience de cette foi, il n’ est d’enseignement véritable que religieux. Mais les questions confess
1301 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’ apparaissent ici que pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin
1302 raissent ici que pour impressionner le public. Je n’ ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en effe
1303 fet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ils n’ en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ce
1304 s, ou plutôt des grenades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine
1305 gogiques encore très actuels, du fait que l’école n’ a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant s’il est
1306 s à l’enfant s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’ aime que la liberté.
100 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)
1307 ménager dans un jardin à la française. Mais vous ne tarderez pas à remarquer que tout, ici, est original, indigène, tant
1308 urs, que les animaux qui circulent. Un auteur qui n’ imite personne court bientôt le risque de s’imiter soi-même : il sembl
1309 , ou qu’il invente des animaux dont la complexité ne le cède en rien à celle de l’introspection la plus poussée. Il invent
1310 — depuis les Trivia de Logan Pearsall Smith — je n’ avais pas lu de livre où s’exprimât avec une pareille sécurité dans l’