1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 au plus peut-on dire qu’à l’heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus qu’un agrément purement
2 atrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a bravement affirmé so
3 s’est montré tout entier, il a bravement affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec
4 ous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est même pas demandé si ces d
5 oute une partie du Paradis à l’ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans une unité supérieure » l
6 t catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il franchement. Il me semble bien para
7 . Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du stade. En un style d’une fermeté presqu
8 ’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputen
9 l’autre. Ainsi mon art, entre terre et ciel. Mais sa foulée, bondissante et posée, est pleine du désir de l’air. Danse-t-i
10 rale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axiome formulé par Hésiode et qui go
11 là forment l’esprit. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citation d’un dominicain : « Formez des jeunes
12 s à combattre certaines faiblesses : il développe ses qualités, le reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a
13 stance de la contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale s
14 nt enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa morale virile nous est néa
15 s que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa morale virile nous est néanmoins plus proche que la sensualité vaguem
16 t chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura le dompter, et atteindre au c
2 1926, Articles divers (1924–1930). Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)
17 holique et protestant : la notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivement, le Saint est un homme
18 seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est replacé en Chris
19 ennent dans l’Église. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiques. Mais c’est pour affirmer avec d’au
20 et de sympathie que le sien propre. Cela donne à ses conclusions cette sécurité dont trop souvent un brillant appareil dia
3 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
21 sons : c’est bien plus que la liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’
22 ent de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses désirées. T
23 debout sur un tronc coupé n’eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’équilibre des discussions et de sa propre
24 pour maintenir l’équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore un dîner très démocratique pendan
4 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
25 Je crois qu’il ne faut pas attendre immobile dans sa prière, qu’une révélation vienne chercher l’âme qui se sent misérable
26 esure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y faut une doctrine, me di
27 ds, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on. L’avouerai-je
28 nd fort pour — autre chose…) Ô luxe, ne pas aimer son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4. La sincérité absolue, « sc
29 n. Une attention trop directe et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi, la sincérité ne peut être que spontanée. Et s
30 celles que je juge bon d’éliminer de moi. Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mouvement normal » de vie. g. Rougemont
31 éliminer de moi. Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mouvement normal » de vie. g. Rougemont Denis de, « Confession te
5 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
32 une Montherlant est en réalité un nouveau tome de ses mémoires lyriques. Une œuvre d’une seule coulée, presque sans intrigu
33 ans l’allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent parlé d’excès de lyrisme à propos des premiers ou
34 raidir, enfin croula sur le flanc, accomplissant sa destinée. Quelques secondes encore elle cligna des yeux et on vit sa
35 es secondes encore elle cligna des yeux et on vit sa respiration. Puis ses pattes se tendirent peu à peu, comme un corps q
36 le cligna des yeux et on vit sa respiration. Puis ses pattes se tendirent peu à peu, comme un corps qu’on gonflerait à la p
37 un treuil. Elle arriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y
38 la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme divine s’éch
39 plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère
40 a immobile. Et son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abon
41 lèmes de l’heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserve des états d’incertitude doulour
42 blèmes viennent se poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban
43 henille précisément aux trois-centres nerveux, et sa victime « une sympathie (au sens étymologique du mot) qui la renseign
6 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
44 plus. Nous étions seuls sur le pavé qui exhalait sa chaleur, au long des quais sans bancs pour notre lassitude. Florence
45 lit notre monde à ce chant. L’odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peint
46 L’odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des po
47 rfaite répond encore au couchant. San Miniato sur sa colline. Derrière nous, les arbres se brouillent dans une buée sans c
48 lus guérir… Mais nous voyons la ville debout dans ses lumières. Architectures ! langage des dieux, ô joies pour notre joie
49 , angles purs, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut
50 des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des
51 s le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au p
7 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
52 de couleur pour ma femme… Mais l’homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il en retira trois dés
53 vait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brill
54 ux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis il reprit les dés brusquement, et me fixant avec un lége
55 ! mon Dieu, je vous remercie, Monsieur… Il saisit son journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitat
56 animait aussi : une fièvre faisait s’épanouir sur son visage je ne sais quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l
57 étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaient des tableaux mouvants où je me voyais figurer comm
58 dés ». Ce furent d’abord des images décousues de sa vie, brillantes ou misérables, passionnées. Mais bientôt : — « Destin
59 ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-ce que celles de mes folies ? Je me
8 1927, Articles divers (1924–1930). Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)
60 n. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis ce sont les conseillers intimes du
61 et capable de lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa be
62 oi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la princesse palatine, se laisse facilement convaincre. D
63 re un tableau qu’il suppose présent à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui
9 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
64 passé ? Allons-nous assister à un regroupement de ses forces créatrices ? La question est peut-être prématurée. Mais le seu
65 cette consécration bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-
66 lle de constater combien l’épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur b
67 lisé. C’est d’un art très volontaire, qui connaît ses ressources et sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’
68 e, c’est elle qui permettra de reconnaître une de ses œuvres. Et aussi ce brin de comique un peu bizarre qu’il glisse si so
69 mme celle de Neuchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la
70 i la peinture consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il
71 e ce visage dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a
72 oit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate quand du haut de
73 i le prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute ! On ne pourrait pas se tromper plus. ⁂ À vrai
74 ture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchât
75 mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchâtel la troisiè
76 la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène Bouvier quelque
77 e qui ne s’affiche pas, mais s’insinue dans toute sa palette, ce charme enfin, ce je ne sais quoi qu’on cherche en vain ch
78 tocratique dissimulation dans l’œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses intentions, en réal
79 Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses intentions, en réalité les exprime par ses défauts mêmes ou ses fauss
80 asquer ses intentions, en réalité les exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il faut pour comprend
81 , en réalité les exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il faut pour comprendre cet art emprunter
82 e. Je ne verrais guère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on le puisse rapprocher, parce qu’il est un des rares pei
83 herche encore. On a pourtant l’impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande certitude intérieure. Les visages
84 t s’éloigne pour entonner une chanson à boire. Et sa technique auparavant volontairement maigre se faisait trop lâche. Mai
85 opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleu
86 est rendu à lui-même. Il atteint son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas enco
87 la Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il y en a plus encore chez un Aurèle Barraud. Il su
88 an, dans le beau sens ancien du terme, tout comme son frère Charles Barraud, qui lui, passe ses journées à vendre des coule
89 t comme son frère Charles Barraud, qui lui, passe ses journées à vendre des couleurs, à encadrer des glaces. Et plaise aux
90 t ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant le sujet, de l’autre ce q
91 œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Barraud, le plus jeune des frères. Il v
92 vant, sans s’en apercevoir, peut-être. Il suivait son petit bonhomme de chemin sans se douter qu’il avait pris quelques ann
93 ter qu’il avait pris quelques années d’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présent
94 n apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit
95 Paris des tableaux mystérieux qu’il relègue dans son atelier, pêle-mêle avec les siens. Vous retournez une toile appuyée a
96 r, qui est mort jeune, sans avoir pu donner toute sa mesure. Il a laissé surtout des dessins, d’une sûreté un peu traditio
97 style pourtant assez large et que n’entravait pas son scrupule réaliste. ⁂ Mais voici dans son costume d’aviateur, retour d
98 vait pas son scrupule réaliste. ⁂ Mais voici dans son costume d’aviateur, retour de Vienne, un sculpteur qui saura s’impose
99 en plans. C’est ainsi qu’il atteint d’emblée dans ses statues à un beau style dépouillé et hardi. Mais il y avait quelque l
100 lète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon Perrin semble avoir évolué vers une plus gra
101 lus grande harmonie de lignes. Je pense surtout à ses bas-reliefs du BIT où se manifeste un heureux équilibre entre le réal
102 le cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique. C’est dans la manière cubiste encore que Perrin d
103 ublication dont cette revue entretenait récemment ses lecteurs. 8. Voir sur cet artiste neuchâtelois, de son vrai nom Ch.
104 cteurs. 8. Voir sur cet artiste neuchâtelois, de son vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans le numéro de février
10 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
105 érard (24 mars 1928)m À Pierre Jeanneret et à son étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais les
106 u’un désir vraiment pur parvient toujours à créer son objet, de même qu’atteignant certain degré d’intensité, un état d’âme
107 mon être — ainsi d’autres deviennent patriotes au son d’une fanfare militaire, ainsi je m’abandonne au rêve d’un monde que
108 arois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de la pureté où vibrent par insta
109 je ne sais plus quoi. Mais sans doute évadé dans son rêve, beaucoup plus loin que moi, il n’entend pas ma question. L’envi
110 rre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’avais déjà reconnu. Il por
111 ne élégance très moderne. Il n’y avait dans toute sa personne rien de positivement démodé ; je n’eus même pas le sentiment
112 ité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’Opér
113 s paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nui
114 tes et spontanées du plaisir qui seules faisaient sa dignité humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts les plus hau
115 ns souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est
116 Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Oc
117 apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté magnifique et angoissan
118 tre moitié sera toujours cachée, ainsi la Lune et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans cette visi
119 enfin la substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous les drames du
120 ue reflets, épisodes, symboles : le vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des signes, des généalog
121 de leurs moindres coïncidences. La fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il me raco
122 res coïncidences. La fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il me raconte de ces supe
123 e, de temps en temps, s’il parlait à voix basse à son homard, qui semblait d’ailleurs endormi. En passant par la Freyung, n
124 ouvertes des jambes extrêmement hautes tandis que sa tête frisée jetait des insolences sur les chapeaux noirs de ses caval
125 e jetait des insolences sur les chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ; en dix minutes, il n’y
126 plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément, à la sortie des invités, sur une fe
11 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
127 phane est maniaque, comme tous les jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur les autos
128 rs types humains. Mais on lui sait peu de grés de sa curiosité. Sans doute est-il trop impatient, demande-t-il aux êtres p
129 e comme un enfant sage que le monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait la mériter et
130 enfant sage que le monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait la mériter et tâcher de
131 e à savoir ce qu’il est. C’est une autre manie de sa génération. Mais là encore il se singularise : il n’écrit pas de livr
132 des miroirs. C’est pourquoi il en installe un sur sa table de travail, de façon à pouvoir s’y surprendre à tout instant. C
133 ntières à se regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de
134 timents. Il découvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres
135 s fatigué, il veut voir encore cette fatigue dans son regard : appuyé sur lui-même il se perd en méditations éléates. Le so
136 veu qu’il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons dans un décor flamboyant de glaces. À chaque p
137 yant de glaces. À chaque pas, on offre à Stéphane sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans l’acte de se raser, de se
138 laces. À chaque pas, on offre à Stéphane sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans l’acte de se raser, de se baigner ;
139 se voit dans l’acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par l’ascenseur, elle le suit au long de
140 parmi les autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’importe quel passant, il se sent comme séparé d
141 ment différent de cette apparence, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une r
142 e, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le dé
143 désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ? Il n’y a plus que cette incantation à soi-même qui po
144 t en diminuant vertigineusement et l’égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de superstitions. Enfin ce
145 econnaîtrais-tu sous un autre visage. Car oublier son visage, ne serait-ce pas devenir un centre de pur esprit ? » C’est un
146 notiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherche dans d’autres yeux, c’est pourquoi il fa
147 urs ivresses l’ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mo
148 êchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers, appels qui reçoivent en même temps leur rép
12 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
149 si douce et si grande… »11 Et Bettina terminant sa lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé les cordes, c’est v
150 il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin, mais il es
151 ait sagement des odes à la liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du chant prophétique, confondant
152 dame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’une
153 uvre. Car ce poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Q
154 , — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il règne dans ses Hymnes une séréni
155 ait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il règne dans ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vi
156 n auteur. Qui parle par sa bouche ? Il règne dans ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de
157 presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encore quelques c
158 de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup l’envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît
159 met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femme, pour écrire Hypérion
160 ne pipe qui traîne sur l’appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est familier, paisible a
161 traîne sur l’appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est familier, paisible au soleil. Il
162 t arrivé quelque chose de terrible, où il a perdu son âme. Et puis il n’est revenu qu’un vieux corps radotant. — Qu’en pens
13 1930, Articles divers (1924–1930). Le prisonnier de la nuit (avril 1930)
163 930)p I Depuis le temps qu’on tire du canon à son perdu depuis le temps que sonnent les marées à flots perdus sous la c
164 du monde où nous vivons parquent les visages les sons brassent les lueurs des messages et des sanglots perdus qui rôdent à
14 1930, Articles divers (1924–1930). Au sujet « d’un certain esprit français » (1er mai 1930)
165 eut-on discerner avec certitude, après lecture de ses œuvres, si M. Brunschwicg croit ou non à la divinisation finale de l’
166 roit ou ne croit pas selon les sautes brusques de son tempérament. Attendons encore un peu avec ceux-là… Enfin, l’ultime ra
167 geables beaucoup de nouilles. Mais si le sel perd sa saveur, serait-ce avec des pamphlets qu’on la lui rend ? Je le trouve
168 r, ceux-là mêmes, bien sûr, qui, sous prétexte de sa difficulté, récusent l’art. Il y avait une fois un journaliste, un li
169 ’esprit moins facile à formuler qu’à décrire dans ses effets, et qui paraît affecter d’un commun penchant au libertinage me
170 aires partout ailleurs divergents : « Barrès dans son éthique, Maurras dans son esthétique, les Surréalistes dans leur méta
171 ergents : « Barrès dans son éthique, Maurras dans son esthétique, les Surréalistes dans leur métaphysique, font preuve de l
172 ur permettrait d’envisager ce problème dans toute son ampleur et sa force. » Ainsi Beausire nous montre un Barrès tout cris
173 d’envisager ce problème dans toute son ampleur et sa force. » Ainsi Beausire nous montre un Barrès tout crispé sur quelque
174 mpardonnable confusion des valeurs que représente son positivisme esthétique, ce désir de connaissance, puis désigne chez l
175 ls, semble-t-il, nul Français ne saurait accepter sa révolte. Il y a bien quelques outrances dans tout ceci. Mais je voudr
176 de Beausire : « Barrès se plaint très souvent de ses migraines, de ses gastrites, de sa fatigue. Pour abolir des obstacles
177 arrès se plaint très souvent de ses migraines, de ses gastrites, de sa fatigue. Pour abolir des obstacles de cette envergur
178 ès souvent de ses migraines, de ses gastrites, de sa fatigue. Pour abolir des obstacles de cette envergure, il suffit d’un
179 arches. Mais ne demandons pas à Barrès de quitter sa chambre, son cigare ou son moi. » 8. « La France… n’a pas su faire l
180 ne demandons pas à Barrès de quitter sa chambre, son cigare ou son moi. » 8. « La France… n’a pas su faire la révolution
181 pas à Barrès de quitter sa chambre, son cigare ou son moi. » 8. « La France… n’a pas su faire la révolution morale… parce
182 ’attaque de nos auteurs : « Tout créateur néglige sa personnalité » et « Kant est un peu plus redoutable que Robespierre »
183 l’homme à « assumer » d’autant plus héroïquement sa vérité — une vérité qu’il doit se créer de toute sa volonté, telle in
184 vérité — une vérité qu’il doit se créer de toute sa volonté, telle inéluctablement qu’elle est en Dieu — et soit qu’il sa
15 1930, Articles divers (1924–1930). « Vos fantômes ne sont pas les miens… » [Réponse à l’enquête « Les vrais fantômes »] (juillet 1930)
185 ssant nos sens par notre intelligence, celle-ci à son tour par une volonté qui l’oriente vers certains états dont il arrive
186 mi nous les verront, dont l’esprit parviendra par sa puissance d’adoration, à se créer une part angélique. III L’amour, l