1
ontherlant est considéré par plusieurs comme l’un
des
héritiers de Barrès. Le rapprochement est peut-être prématuré, tout a
2
œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus qu’
un
agrément purement littéraire : une leçon d’énergie. Il se pique de n’
3
s offre plus qu’un agrément purement littéraire :
une
leçon d’énergie. Il se pique de n’avoir pas connu, jusqu’à ce jour au
4
s, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux,
des
âmes exceptionnellement compliquées, qui s’exprimaient en une langue
5
eptionnellement compliquées, qui s’exprimaient en
une
langue plus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a
6
de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’
une
façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité
7
vons tous. Écœuré du désordre général, il cherche
des
remèdes, et nous tend les premiers qui lui tombent sous la main : le
8
de logique, admirablement masqués d’ailleurs par
des
façons cavalières un peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à
9
ment masqués d’ailleurs par des façons cavalières
un
peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à l’ombre des épées 1,
10
des façons cavalières un peu intimidantes. Toute
une
partie du Paradis à l’ombre des épées 1, son dernier livre, est consa
11
timidantes. Toute une partie du Paradis à l’ombre
des
épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans une unité s
12
son dernier livre, est consacrée à « fondre dans
une
unité supérieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit
13
Il me semble bien paradoxal de vouloir unir dans
une
même philosophie la morale jésuite, faite de règles et de contraintes
14
berté et l’initiative individuelles, et la morale
des
sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtres d’eux-mêmes
15
morale des sports anglais, morale qui veut former
des
hommes maîtres d’eux-mêmes, c’est-à-dire libres. Et cela me semble d’
16
lus paradoxal que M. de Montherlant est justement
un
des premiers Français qui ait compris que le but du sport n’est pas l
17
paradoxal que M. de Montherlant est justement un
des
premiers Français qui ait compris que le but du sport n’est pas la pe
18
rales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’est pas
une
opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère
19
rlant son admirable lyrisme de poète du stade. En
un
style d’une fermeté presque brutale parfois, un style de sportif, mai
20
dmirable lyrisme de poète du stade. En un style d’
une
fermeté presque brutale parfois, un style de sportif, mais qu’on sent
21
n un style d’une fermeté presque brutale parfois,
un
style de sportif, mais qu’on sent humaniste et poète, un style à la f
22
e de sportif, mais qu’on sent humaniste et poète,
un
style à la fois bref et chaud, imagé et réaliste, M. de Montherlant c
23
rlant chante cette « violence ordonnée et calme »
des
« grands corps athlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les
24
es, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer
un
coureur : « À peine a-t-il touché la piste d’herbe, c’est une allégre
25
: « À peine a-t-il touché la piste d’herbe, c’est
une
allégresse héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et
26
sée, est pleine du désir de l’air. Danse-t-il sur
une
musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que le corps en mouvemen
27
ion qui est le but véritable du sport. On accepte
une
règle ; on l’assimile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à l
28
e ; on l’assimile, à tel point qu’elle n’est plus
une
entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la
29
du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit
un
ballon. Si l’on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on
30
un ballon. Si l’on considère la vie sociale comme
un
jeu sérieux dont on respecte les règles, non plus comme une lutte sau
31
rieux dont on respecte les règles, non plus comme
une
lutte sauvage et déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale
32
mble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment
des
hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’on pense). E
33
tié est plus grande que le tout ». Le sport comme
un
apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a
34
vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a
un
brin du myrte civique tressé dans vos couronnes de laurier. Vous n’êt
35
taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre
des
épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrisme sobre e
36
« La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à
un
lacédémonisme renouvelé que nous conduirait cette « éthique du sport
37
qu’il rejoint Kant, Kant qui écrit : « C’est sur
des
maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeu
38
sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite
des
jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment l’esp
39
ant illustre sa propre pensée de cette citation d’
un
dominicain : « Formez des jeunes filles assez fortes pour pouvoir tou
40
nsée de cette citation d’un dominicain : « Formez
des
jeunes filles assez fortes pour pouvoir tout lire, et il n’y aura plu
41
man catholique. » C’est ce qu’on pourrait appeler
une
« morale constructive » : porter l’effort sur ce qui doit être, et ce
42
ortive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici
un
homme, et non plus seulement un homme de lettres. Un homme en qui s’é
43
Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement
un
homme de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà l’enthousiasme d
44
homme, et non plus seulement un homme de lettres.
Un
homme en qui s’équilibrent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine e
45
homme en qui s’équilibrent déjà l’enthousiasme d’
une
jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que l
46
autre écrivain catholique. Et son lyrisme, encore
un
peu brutal, il saura le dompter, et atteindre au classicisme véritabl
47
ter, et atteindre au classicisme véritable. Voici
un
constructeur, un entraîneur, et qui joue franc jeu. S’il faut lutter
48
au classicisme véritable. Voici un constructeur,
un
entraîneur, et qui joue franc jeu. S’il faut lutter contre lui, nous
49
il observera les règles. Saluons-le donc du salut
des
équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de Montherlant, hip,
50
ris. 2. L’attitude de M. de Montherlant légitime
une
telle « simplification ». a. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] M
51
r, dans la salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla
des
écoles qui représentent la peinture française, des débuts du xixe si
52
es écoles qui représentent la peinture française,
des
débuts du xixe siècle à nos jours. Partis du classicisme de David et
53
es français ont accompli, durant le xixe siècle,
une
exploration merveilleuse dans les domaines du romantisme, du naturali
54
e souvent le public), ils préparent l’avènement d’
un
classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de la pe
55
évidence cette courbe de la peinture moderne avec
une
netteté et un relief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a
56
courbe de la peinture moderne avec une netteté et
un
relief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la R
57
philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, devant
un
très nombreux public, la série des conférences que nous promet le gro
58
l’aula, devant un très nombreux public, la série
des
conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la p
59
onférences que nous promet le groupe neuchâtelois
des
« Amis de la pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qu
60
e la pensée protestante ». M. Guisan avait choisi
un
sujet qui permet de façon particulièrement frappante la comparaison d
61
e façon particulièrement frappante la comparaison
des
points de vue catholique et protestant : la notion de « Saint » et so
62
la notion de « Saint » et son évolution au cours
des
siècles. Primitivement, le Saint est un homme que Dieu a mis à part p
63
au cours des siècles. Primitivement, le Saint est
un
homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve. Mais très vit
64
Le peuple, encore païen, voit dans la vénération
des
pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’adoration de die
65
tion des pèlerins pour les tombes de leurs saints
une
forme d’adoration de dieux protecteurs. Cette croyance se répand, fav
66
preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter
des
traditions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge l’évolution s
67
s le même sens. On spécialise les « compétences »
des
saints, ou de leurs reliques qui se multiplient prodigieusement. Alor
68
choses antérieur. Donc l’Église continue à faire
des
saints, tandis que ce terme n’a plus qu’un sens relatif pour nous pro
69
faire des saints, tandis que ce terme n’a plus qu’
un
sens relatif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ? Les cathol
70
ère qui s’est sacrifiée aux siens, n’était-ce pas
une
sainte, comme ce missionnaire et cette diaconesse ? S’il n’y a pas de
71
? S’il n’y a pas de saints protestants, il existe
des
saints dans le protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de
72
nque pour louer comme il conviendrait la clarté d’
un
exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien et de chrétie
73
ses conclusions cette sécurité dont trop souvent
un
brillant appareil dialectique ne sait produire que l’illusion. C’est
74
e du fameux scrupule protestant, qui ne peut être
un
danger lorsqu’il n’est, comme ici, que la loyauté d’un esprit animé p
75
nger lorsqu’il n’est, comme ici, que la loyauté d’
un
esprit animé par une foi agissante. c. Rougemont Denis de, « Confé
76
, comme ici, que la loyauté d’un esprit animé par
une
foi agissante. c. Rougemont Denis de, « Conférence Guisan », Suiss
77
emps, et non plus à Sainte-Croix, mais à Aubonne.
Un
plein succès a répondu à cette innovation. Le sujet de la première pa
78
cette innovation. Le sujet de la première partie
des
conférences, les Objections des intellectuels au Dieu chrétien, fut i
79
a première partie des conférences, les Objections
des
intellectuels au Dieu chrétien, fut introduit par M. Raymond de Sauss
80
igieux admettent à côté de l’explication mystique
une
explication scientifique. C’est donc à la seule volonté de choisir. M
81
ant de vigueur dialectique et de largeur d’idées.
Une
soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discussions phi
82
ux travaux. Avec la conférence de M. Jean Cadier,
un
jeune pasteur français, on descendit — ou l’on monta suivant M. A. Lé
83
oderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur
des
expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un de
84
s pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un
des
artisans les plus actifs. Pour remplacer un travail promis par M. A.
85
l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer
un
travail promis par M. A. Reymond malheureusement indisposé, M. Pierre
86
nd malheureusement indisposé, M. Pierre Maury fit
une
causerie émouvante sur l’Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui
87
e de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien
des
points laissés en suspens dans la première partie de la conférence. P
88
lut en montrant la nécessité et les difficultés d’
une
action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fait
89
s milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à
des
questions de partis, avec une passion contenue d’hommes qui ont vu, q
90
Cap. Sans toucher à des questions de partis, avec
une
passion contenue d’hommes qui ont vu, qui ont souffert, et qui ne se
91
que nos syndicats. Cercle vicieux, l’augmentation
des
salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de la p
92
radante condition, et nous n’y arriverons que par
un
travail d’éducation lent et souvent dangereux. Vous, étudiants, venez
93
l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur
un
ballon ou bien l’on poursuit hors du village une discussion toujours
94
r un ballon ou bien l’on poursuit hors du village
une
discussion toujours trop courte. Et les repas réunissent tout le mond
95
monde dans la gaieté la plus charmante. On y vit
un
ouvrier en maillot rouge assis entre un banquier et un philosophe au
96
On y vit un ouvrier en maillot rouge assis entre
un
banquier et un philosophe au milieu d’une centaine d’étudiants et de
97
vrier en maillot rouge assis entre un banquier et
un
philosophe au milieu d’une centaine d’étudiants et de professeurs sui
98
is entre un banquier et un philosophe au milieu d’
une
centaine d’étudiants et de professeurs suisses et français. Miracle q
99
suisses et français. Miracle qui nous fit croire
un
instant à la fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis d
100
1926 (mai 1926)f Cette conférence s’ouvrit par
une
bise qu’on peut bien dire du diable et se termina sous le plus beau s
101
au soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir
un
symbole. On ne saurait exagérer l’importance des conditions météorolo
102
r un symbole. On ne saurait exagérer l’importance
des
conditions météorologiques du succès d’une telle rencontre : tout all
103
rtance des conditions météorologiques du succès d’
une
telle rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que la bise tombée
104
nse, à Aubonne on se sent prêt à tout lâcher pour
une
vérité nouvelle, on tient moins à convaincre qu’à se convaincre. Aprè
105
oi, qu’ils incarnaient les voix contradictoires d’
un
débat que tous menaient en eux-mêmes loyalement. Et ce désir d’arrive
106
ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle
des
réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la chapelle où on
107
ux et méditations. Dehors, on honore la liberté d’
un
culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut
108
offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’
une
salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses attend
109
e salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur
des
paillasses attendraient en vain le lever d’un rideau sur une pièce in
110
ur des paillasses attendraient en vain le lever d’
un
rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l’on vit app
111
ses attendraient en vain le lever d’un rideau sur
une
pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l’on vit apparaître un faki
112
tante. Enfin le dernier soir, l’on vit apparaître
un
fakir… Il y eut aussi une assemblée délibérative en pleine forêt, où
113
oir, l’on vit apparaître un fakir… Il y eut aussi
une
assemblée délibérative en pleine forêt, où Henriod debout sur un tron
114
libérative en pleine forêt, où Henriod debout sur
un
tronc coupé n’eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’équ
115
de toute sa souplesse pour maintenir l’équilibre
des
discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore un dîner trè
116
ions et de sa propre personne. Et il y eut encore
un
dîner très démocratique pendant lequel le philosophe Abauzit chanta «
117
bauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’
une
main sur l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des p
118
ule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air
des
phrases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtre, vint
119
Écrire, pas plus que vivre, n’est de nos jours
un
art d’agrément. Nous sommes devenus si savants sur nous-mêmes, et si
120
usés. Nous choisissons les idées comme on choisit
un
amour dont on est anxieux de prévoir l’influence, avant de s’y jeter,
121
ce de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible
des
choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je ? Par ces trois mots comm
122
ci, je tape du pied —, ces désirs, ce corps… J’ai
un
passé à moi, un milieu, des amis, ce tic. Mais encore, tant d’autres
123
ied —, ces désirs, ce corps… J’ai un passé à moi,
un
milieu, des amis, ce tic. Mais encore, tant d’autres forces et tant d
124
désirs, ce corps… J’ai un passé à moi, un milieu,
des
amis, ce tic. Mais encore, tant d’autres forces et tant d’autres faib
125
utres désirs contradictoires ; au gré du temps, d’
un
sourire, d’un sommeil, tant de bonheurs ou de dégoûts étranges vienne
126
ontradictoires ; au gré du temps, d’un sourire, d’
un
sommeil, tant de bonheurs ou de dégoûts étranges viennent m’habiter ;
127
ndre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’
une
habitude dans une autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ; je
128
ue le jeu de sauter follement d’une habitude dans
une
autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ; je devins si faible e
129
d’une habitude dans une autre. Il ne me resta qu’
une
fatigue profonde ; je devins si faible et démuni, livré aux regards d
130
e devins si faible et démuni, livré aux regards d’
une
foule absurde, bienveillante, repue, — tous paraissaient détenir un s
131
bienveillante, repue, — tous paraissaient détenir
un
secret très simple, et un peu narquois ils me considéraient avec une
132
us paraissaient détenir un secret très simple, et
un
peu narquois ils me considéraient avec une pitié curieuse : je me sen
133
ple, et un peu narquois ils me considéraient avec
une
pitié curieuse : je me sentis nu, tout le monde devait voir en moi un
134
je me sentis nu, tout le monde devait voir en moi
une
tare que j’étais seul à ignorer, était-ce ma fatigue seulement qui me
135
damentale que je préférais me leurrer à combattre
des
imperfections de détail dont je m’exagérais l’importance. Et c’est ai
136
que je progressais, jusqu’au jour où je m’avouai
un
trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire. Cette amert
137
plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait
un
ennui, cette incapacité à jouir de mes victoires, à pleurer sur mes d
138
me temps que je le découvrais, dans tout mon être
une
force aveugle de violence s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna s
139
confiance sourde aux contradictions intimes exige
un
acte victorieux. Autour de cette brutalité s’organisaient brusquement
140
s tant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était
un
des premiers jours du printemps —, l’heure est venue de la violence.
141
ant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était un
des
premiers jours du printemps —, l’heure est venue de la violence. Jeun
142
pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus
une
douleur rare que j’aimais dans ces brutalités, c’était ma liberté agi
143
tés, c’était ma liberté agissante. J’allais plier
des
résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur to
144
? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’
un
désordre où l’on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se
145
à la base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’
une
recherche qui n’a que ce but de me rendre mieux apte à vivre pleineme
146
eureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore
une
question… Je crois qu’il ne faut pas attendre immobile dans sa prière
147
ne faut pas attendre immobile dans sa prière, qu’
une
révélation vienne chercher l’âme qui se sent misérable. Je ne recevra
148
r l’âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas
une
foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il
149
verai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est
une
révélation, c’est en me rendant plus parfait que je lui préparerai le
150
ur cela seul qu’ils sont naturels : la nature est
un
champ de luttes, de tendances vers la destruction et vers la construc
151
rs la destruction et vers la construction ; c’est
un
mélange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à l’intelligence d
152
hoisir Mes instincts, ensuite, les éduquer, selon
des
lois établies par le concours de l’expérience et d’un sentiment de co
153
ois établies par le concours de l’expérience et d’
un
sentiment de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscie
154
tionnement de l’esprit, puisqu’elle ne permet que
des
associations suivant les directions de moindre résistance. Mais je ne
155
attre mes propres records. De ce lent effort naît
une
modestie que je m’enorgueillis un peu de connaître ; et de cette volo
156
illis un peu de connaître ; et de cette volonté d’
un
meilleur moi, une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sin
157
onnaître ; et de cette volonté d’un meilleur moi,
une
certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’apparaît
158
sincérité. La sincérité m’apparaît parfois comme
un
arrêt artificiel dans ma vie, une vue stupide sur mon état qui peut m
159
ît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie,
une
vue stupide sur mon état qui peut m’être dangereuse. (On donne corps
160
tat qui peut m’être dangereuse. (On donne corps à
une
faiblesse en la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et dema
161
rendu digne. L’époque nous veut, comme elle veut
une
conscience. Je fais partie d’un ensemble social et dans la mesure où
162
comme elle veut une conscience. Je fais partie d’
un
ensemble social et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’em
163
sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y faut
une
doctrine, me dit-on. L’avouerai-je, quand je médite sur une doctrine
164
ne, me dit-on. L’avouerai-je, quand je médite sur
une
doctrine possible, sur une systématisation de mes petites certitudes5
165
e, quand je médite sur une doctrine possible, sur
une
systématisation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite le sentime
166
titudes5, j’éprouve vite le sentiment d’être dans
un
débat étranger à ce véritable débat de ma vie : comment surmonter un
167
ce véritable débat de ma vie : comment surmonter
un
malaise sans cesse renaissant, comment m’adapter à l’existence que m’
168
fond de néant, je le comprends par éclairs, mais
une
secrète espérance m’emporte de nouveau, premier gage du divin… Repren
169
dre l’offensive — au soir, je m’amuserai à mettre
des
étiquettes sur mes actes… Déjà je sens un sourire — en songeant à ces
170
mettre des étiquettes sur mes actes… Déjà je sens
un
sourire — en songeant à ces raisonnements que je me tiens — plisser u
171
ant à ces raisonnements que je me tiens — plisser
un
peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme u
172
s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme
un
écho profond, une attirance aussi d’anciennes folies… Combat, oscilla
173
ure que je le décris. Mais comme un écho profond,
une
attirance aussi d’anciennes folies… Combat, oscillations silencieuses
174
mi-conscience. Joie, dégoût, lueurs éteintes dans
une
nuit froide. Les notes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin l
175
lueurs éteintes dans une nuit froide. Les notes d’
un
chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’il
176
nent battre ce corps triste, qu’ils l’emportent d’
un
flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ; j
177
iens, j’écoute le vent ; je pense au monde. Chant
des
horizons, images qui s’éclairent… Je vais écrire autre chose que moi,
178
chose que moi, je vais m’oublier, me perdre dans
une
vie nouvelle : (Créer, c’est se surpasser). J’entends des phrases qu’
179
nouvelle : (Créer, c’est se surpasser). J’entends
des
phrases qu’il ne faut pas encore comprendre — tout est si fragile —,
180
lue, « scientifique » me paraît aller contre fin.
Une
attention trop directe et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi
181
spontanée. Et spontanément je suis porté à écrire
des
idées qui m’aideront. Une fois écrites elles prennent un caractère de
182
s qui m’aideront. Une fois écrites elles prennent
un
caractère de certitude qu’elles n’avaient pas encore en moi. C’est en
183
sincérité est tendancieuse. 5. Quant à adhérer à
une
doctrine toute faite, ce me semble une dérision complète. Je m’étonne
184
adhérer à une doctrine toute faite, ce me semble
une
dérision complète. Je m’étonne qu’après tant d’expériences ratées on
185
tées on puisse encore se persuader de la vérité d’
un
système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C
186
ader de la vérité d’un système, hors la religion.
Un
système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je ne puis compr
187
e violence et de volupté », je me sens envahi par
un
rythme impérieux au point qu’il faut que certaines voix en moi taisen
188
x en moi taisent leur protestation, étouffées par
des
forces qui se lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’épr
189
d trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle
un
« poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce
190
’auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur
un
roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit des premiers combats de t
191
ur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit
des
premiers combats de taureaux du jeune Montherlant est en réalité un n
192
s de taureaux du jeune Montherlant est en réalité
un
nouveau tome de ses mémoires lyriques. Une œuvre d’une seule coulée,
193
réalité un nouveau tome de ses mémoires lyriques.
Une
œuvre d’une seule coulée, presque sans intrigue, sans cette orchestra
194
ouveau tome de ses mémoires lyriques. Une œuvre d’
une
seule coulée, presque sans intrigue, sans cette orchestration de thèm
195
e thèmes qui faisait la richesse du Songe, mais d’
une
ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi. Le sujet était pérille
196
richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’
une
unité plus pure aussi. Le sujet était périlleux : si particulier, il
197
et était périlleux : si particulier, il prêtait à
des
abus de pittoresque, de couleur locale, de détails techniques ou de f
198
on le traite de naturaliste. Mais comment montrer
des
taureaux sans que cela sente un peu l’étable ? L’étonnant, c’est de v
199
comment montrer des taureaux sans que cela sente
un
peu l’étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant res
200
peut atteindre à pareille intensité de réalisme.
Une
perpétuelle palpitation de vie anime ce livre et lui donne un rythme
201
le palpitation de vie anime ce livre et lui donne
un
rythme tel qu’il s’accorde d’emblée avec ce qu’il y a de plus bondiss
202
irecte sur notre énergie physique. Partout rôdent
des
présences animales. Tandis que sur la plaine s’élève le long beugleme
203
ndis que sur la plaine s’élève le long beuglement
des
taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux ent
204
e le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé
des
bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus de la mer », i
205
des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme
un
chant mystérieux entendu au-dessus de la mer », il y a toujours dans
206
tendu au-dessus de la mer », il y a toujours dans
un
coin du tableau des ruades, des chevaux qui partent tout droit, la tê
207
la mer », il y a toujours dans un coin du tableau
des
ruades, des chevaux qui partent tout droit, la tête dressée, des vach
208
y a toujours dans un coin du tableau des ruades,
des
chevaux qui partent tout droit, la tête dressée, des vachettes qui se
209
chevaux qui partent tout droit, la tête dressée,
des
vachettes qui se mordillent et se frôlent amoureusement, des chiens «
210
es qui se mordillent et se frôlent amoureusement,
des
chiens « qui vous faufilent des douceurs au bas des jambes », jusqu’à
211
nt amoureusement, des chiens « qui vous faufilent
des
douceurs au bas des jambes », jusqu’à ces chats qui griffent et lèche
212
s chiens « qui vous faufilent des douceurs au bas
des
jambes », jusqu’à ces chats qui griffent et lèchent alternativement,
213
nt alternativement, « en vraies bêtes de désir ».
Une
intelligence si profonde de la vie animale suppose entre l’homme et l
214
e la vie animale suppose entre l’homme et la bête
une
sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’est « par la d
215
les taureaux cet amour tourne en adoration ou en
une
véritable horreur sacrée. Voici Alban devant une bête qu’il devra com
216
une véritable horreur sacrée. Voici Alban devant
une
bête qu’il devra combattre le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud
217
aligaud ! » Il l’apostrophait ainsi tout bas, sur
un
ton révérenciel, et comme on déroule une litanie. Sous les grands cil
218
bas, sur un ton révérenciel, et comme on déroule
une
litanie. Sous les grands cils brillants, lustrés par la lumière desce
219
cendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient
un
reflet bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de l’inconnu. Null
220
nconnu. Nulle part mieux que dans la description
des
taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le plus hardi à un ly
221
manifeste ce passage du réalisme le plus hardi à
un
lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du taureau dit « le M
222
sa destinée. Quelques secondes encore elle cligna
des
yeux et on vit sa respiration. Puis ses pattes se tendirent peu à peu
223
on. Puis ses pattes se tendirent peu à peu, comme
un
corps qu’on gonflerait à la pompe, tandis que dans cet agrandissement
224
ent les articulations grinçaient, avec le bruit d’
un
câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à
225
vec le bruit d’un câble de navire qu’on serre sur
un
treuil. Elle arriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’hom
226
erlant décolle de la réalité, c’est tout de suite
une
orgie d’évocations antiques, de rapprochements superstitieux, de gran
227
, de grands symboles païens, et l’on se perd dans
un
syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureaux et Alban confond
228
es taureaux et Alban confondent leurs génies dans
une
sorte de cauchemar de soleil et de sang. On peut penser ce qu’on veut
229
eut de ce paganisme exalté, tout ivre de la fumée
des
sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu humain et
230
je le trouve assez peu humain et comme obsédé par
une
idée de violence tonique certes, mais décidément un peu pauvre pour f
231
idée de violence tonique certes, mais décidément
un
peu pauvre pour fonder une religion. Mais ce n’est peut-être qu’un rê
232
certes, mais décidément un peu pauvre pour fonder
une
religion. Mais ce n’est peut-être qu’un rêve de poète. Il y a un autr
233
r fonder une religion. Mais ce n’est peut-être qu’
un
rêve de poète. Il y a un autre Montherlant, plutôt stoïcien, celui-là
234
is ce n’est peut-être qu’un rêve de poète. Il y a
un
autre Montherlant, plutôt stoïcien, celui-là. Et c’est un moraliste d
235
Montherlant, plutôt stoïcien, celui-là. Et c’est
un
moraliste de grande race, qui peut nous mener à des hauteurs où devie
236
n moraliste de grande race, qui peut nous mener à
des
hauteurs où devient naturel ce cri de sagesse orgueilleuse : « Qu’avo
237
e sagesse orgueilleuse : « Qu’avons-nous besoin d’
un
autre amour que celui que nous donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne
238
est impossible de ne voir dans les Bestiaires qu’
une
évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page
239
ue page, ce qui peu à peu obsède dans l’inflexion
des
phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tableaux de viol
240
ux de violence et de passion, c’est la présence d’
un
tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, a
241
nt sans fin, avant que d’être, Montherlant impose
un
tempérament lyrique d’une puissance contagieuse. Il y a là de quoi fa
242
être, Montherlant impose un tempérament lyrique d’
une
puissance contagieuse. Il y a là de quoi faire oublier des défauts qu
243
ance contagieuse. Il y a là de quoi faire oublier
des
défauts qui tueraient tout autre que lui. Certes, il ne soulève direc
244
que lui. Certes, il ne soulève directement aucun
des
grands problèmes de l’heure. La violence même qui sourd dans son être
245
rd dans son être intime l’en empêche, le préserve
des
états d’incertitude douloureux, où ces problèmes viennent se poser à
246
le chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’
une
telle attitude agace des gens qui se soucient avant tout de trouver d
247
nse plus. On comprend qu’une telle attitude agace
des
gens qui se soucient avant tout de trouver des réponses de l’intellig
248
ce des gens qui se soucient avant tout de trouver
des
réponses de l’intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de
249
». Mais cette personnalité dont il manifeste avec
une
magnifique insolence les forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être é
250
n témoignage pour notre exaltation ? Comme la vue
des
athlètes en action, un tel livre communique une puissance physique, u
251
exaltation ? Comme la vue des athlètes en action,
un
tel livre communique une puissance physique, un mouvement vers la vie
252
e des athlètes en action, un tel livre communique
une
puissance physique, un mouvement vers la vie ardente qui peut entraîn
253
, un tel livre communique une puissance physique,
un
mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan d
254
vers la vie ardente qui peut entraîner l’âme dans
un
élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plutôt que d’ou
255
er l’âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point
une
solution aussi ? Plutôt que d’oublier de vivre à force d’y vouloir tr
256
ue d’oublier de vivre à force d’y vouloir trouver
un
sens, ne vaudrait-il pas autant s’abandonner parfois à ces forces obs
257
ligence de l’instinct universel et nous élèvent à
une
vie plus âpre et violemment contractée, par la grâce de l’éternel Dés
258
n. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique
une
chenille précisément aux trois-centres nerveux, et sa victime « une s
259
sément aux trois-centres nerveux, et sa victime «
une
sympathie (au sens étymologique du mot) qui la renseigne du dedans, p
260
Soir de Florence (13 novembre 1926)i
Des
cris mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façade
261
derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est,
des
collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où s’en vo
262
trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas
des
Cascine. Vers sept heures, il n’y en eut presque plus. Nous étions se
263
euls sur le pavé qui exhalait sa chaleur, au long
des
quais sans bancs pour notre lassitude. Florence s’éloignait derrière
264
romenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles,
des
nuages rouges et le vert dur des berges : un malaise montait dans l’a
265
comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur
des
berges : un malaise montait dans l’air plus frais, avec l’odeur du li
266
es, des nuages rouges et le vert dur des berges :
un
malaise montait dans l’air plus frais, avec l’odeur du limon. Nous ma
267
nt du fleuve, parmi les dissonances mélancoliques
des
lumières et des odeurs, espérant entrer là-bas dans je ne sais quelle
268
rmi les dissonances mélancoliques des lumières et
des
odeurs, espérant entrer là-bas dans je ne sais quelle harmonie plus r
269
s où nous étions baignés nous promettait pourtant
une
connaissance plus intime de certaine tristesse. Seule une maison blan
270
aissance plus intime de certaine tristesse. Seule
une
maison blanche est arrêtée tout près de l’eau. Mais ce n’est pas d’el
271
hanson jamais entendue qui nous accompagne depuis
un
moment sur le chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avan
272
s un moment sur le chemin de l’autre rive. Il y a
un
homme debout à l’avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme une
273
l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’
un
char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu parlais de
274
y a un homme debout à l’avant d’un char tiré par
des
bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu parlais de chromos, de romant
275
’avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme
une
apparition. (Tu parlais de chromos, de romantisme… nous voici dans un
276
arlais de chromos, de romantisme… nous voici dans
une
réalité bien plus étrange.) Une atmosphère de triste volupté emplit n
277
… nous voici dans une réalité bien plus étrange.)
Une
atmosphère de triste volupté emplit notre monde à ce chant. L’odeur d
278
bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie
des
poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans une beauté que saluent tan
279
ie des poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans
une
beauté que saluent tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de l’i
280
Vivre ainsi simplement. Sans pensée, perdus dans
un
soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’homme chante une plaint
281
Sans pensée, perdus dans un soir de n’importe où,
un
soir de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux
282
’importe où, un soir de la Nature… L’homme chante
une
plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans l’air lo
283
sir en nous de comprendre ce lamento. Le ciel est
un
silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presque plus de se
284
musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme
une
barre droite au travers d’un tableau. Nos yeux ont regardé longtemps
285
it sacrilège, comme une barre droite au travers d’
un
tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va l’âme durant ces minu
286
ide, parfums à peine sensibles, bruissement vague
des
roseaux aux feuilles sèches… Puis la brume est venue comme une envie
287
ux feuilles sèches… Puis la brume est venue comme
une
envie de sommeil. Une lampe dans la maison blanche nous a révélé proc
288
is la brume est venue comme une envie de sommeil.
Une
lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous
289
ières sur les champs sombres du ciel de l’est, et
une
façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur sa colline
290
ine. Derrière nous, les arbres se brouillent dans
une
buée sans couleurs, nous quittons un mystère à jamais impénétrable po
291
illent dans une buée sans couleurs, nous quittons
un
mystère à jamais impénétrable pour l’homme, nous fuyons ces bords où
292
pour l’homme, nous fuyons ces bords où conspirent
des
ombres informes et des harmonies troubles de parfums et de courbes co
293
ns ces bords où conspirent des ombres informes et
des
harmonies troubles de parfums et de courbes compliquées. Nous secouon
294
parfums et de courbes compliquées. Nous secouons
un
sortilège pénétrant comme cette brume, une vie étrangère, une paix qu
295
ecouons un sortilège pénétrant comme cette brume,
une
vie étrangère, une paix qui n’est pas humaine, et qui nous laisse gou
296
e pénétrant comme cette brume, une vie étrangère,
une
paix qui n’est pas humaine, et qui nous laisse gourds et faibles, car
297
entir l’esprit se défaire et couler sans fin vers
un
sommeil à l’odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heur
298
ans fin vers un sommeil à l’odeur fade de fleuve,
un
sommeil de plante vaguement heureuse d’être pliée au vent qui ne parl
299
à nos sens, fatigués de l’esprit qui les exerce,
des
voluptés plus faciles — pour infuser dans nos corps charmés d’un repo
300
s faciles — pour infuser dans nos corps charmés d’
un
repos sans rêves une langueur dont on ne voudrait plus guérir… Mais n
301
user dans nos corps charmés d’un repos sans rêves
une
langueur dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons la ville d
302
debout dans ses lumières. Architectures ! langage
des
dieux, ô joies pour notre joie mesurées, courbes qu’épousent nos ferv
303
açade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’
un
équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait l’im
304
sur le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé.
Un
grand pont de fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte et des
305
er, près de nous, érigeait l’image de la lutte et
des
forces humaines, et rendait sous des coups un son qui nous évoqua les
306
la lutte et des forces humaines, et rendait sous
des
coups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y ava
307
et des forces humaines, et rendait sous des coups
un
son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie
308
les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie
des
hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant de nous
309
s hommes pour demain, et il était beau d’y songer
un
peu avant de nous abandonner à l’oubli luxueux des rues. Le long de l
310
un peu avant de nous abandonner à l’oubli luxueux
des
rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’e
311
formes devinées dans l’espace nous environnent d’
une
obscure confiance. Livrons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-gest
312
nt d’une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux
des
hommes-qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin les notes mêl
313
s. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’
une
symphonie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un
314
peut-être composer tous les bruits de la ville en
un
chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par personne et le
315
bruits de la ville en un chant immense. Il passe
une
possibilité de bonheur par personne et les devantures ne cherchent qu
316
t qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propose
un
mystère qu’on oublie pour celui des regards étrangers. Et voici la pl
317
roisée propose un mystère qu’on oublie pour celui
des
regards étrangers. Et voici la place régulière, les galeries, les caf
318
qui pleure délicieusement jusque dans les gestes
des
passantes. Sous cette agitation aimable et monotone nous allons voir
319
e et monotone nous allons voir courir l’arabesque
des
sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir
320
tuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans
un
système d’ondes de forces qui tisse la nuit vibrante, intérêts, polit
321
tiques, regards, musiques — cette vie rapide dans
un
décor qui est le rêve éternisé des plus voluptueuses intelligences —
322
vie rapide dans un décor qui est le rêve éternisé
des
plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux dans le noir des
323
es intelligences — tous les tableaux dans le noir
des
musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, pour être
324
Dés ou la clef
des
champs (1927)l « On sent l’absurdité d’un semblable système. » M
325
ef des champs (1927)l « On sent l’absurdité d’
un
semblable système. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur le
326
t l’absurdité d’un semblable système. » Musset.
Une
rose et un journal oubliés sur le marbre vulgaire d’une table de café
327
é d’un semblable système. » Musset. Une rose et
un
journal oubliés sur le marbre vulgaire d’une table de café. Je venais
328
se et un journal oubliés sur le marbre vulgaire d’
une
table de café. Je venais de m’asseoir et de commander une consommatio
329
e de café. Je venais de m’asseoir et de commander
une
consommation. Comme d’habitude, un peu après six heures. J’étais seul
330
de commander une consommation. Comme d’habitude,
un
peu après six heures. J’étais seul. Le café est un lieu anonyme bien
331
n peu après six heures. J’étais seul. Le café est
un
lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où m’attendent
332
u bureau, les gages insupportablement familiers d’
une
vie honnête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’un apéro,
333
e de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’
un
apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges qu
334
prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin
des
songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc
335
nc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont
un
pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond :
336
s divers. Mais je suis pris dans l’absurde réseau
des
lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois un peu plus de las
337
ignes, et cette mécanique me restitue chaque fois
un
peu plus de lassitude, un peu plus d’ennui. J’essayai donc de rêver.
338
me restitue chaque fois un peu plus de lassitude,
un
peu plus d’ennui. J’essayai donc de rêver. Mais cette rose oubliée me
339
rêver. Mais cette rose oubliée me gênait : perdre
une
rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si bel
340
le plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors :
une
si belle rose.) Le tambour livra un homme élégant et tragique, qui se
341
pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra
un
homme élégant et tragique, qui se tint un moment immobile, cherchant
342
r livra un homme élégant et tragique, qui se tint
un
moment immobile, cherchant une table, puis s’avança lentement vers la
343
agique, qui se tint un moment immobile, cherchant
une
table, puis s’avança lentement vers la mienne et s’assit sans paraîtr
344
vers la mienne et s’assit sans paraître me voir.
Une
grande figure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia le journal
345
se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta
une
liqueur. Et quand j’eus fini de boire, mes pensées plus rapides s’en
346
de boire, mes pensées plus rapides s’en allèrent
un
peu vers l’avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens
347
j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens,
une
petite automobile qui roulait dans la banlieue printanière ; des soup
348
mobile qui roulait dans la banlieue printanière ;
des
soupers d’amis dans notre modeste salle à manger ; des jaquettes de c
349
oupers d’amis dans notre modeste salle à manger ;
des
jaquettes de couleur pour ma femme… Mais l’homme avait posé son journ
350
jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta.
Une
indécision parut sur ses traits. Puis il reprit les dés brusquement,
351
il reprit les dés brusquement, et me fixant avec
un
léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise vainquit ma timid
352
tai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec
une
légère exaltation : — Vous avez gagné, c’est admirable, ah ! mon Dieu
353
Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’
une
agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment. Nous fixâm
354
e agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer
un
moment. Nous fixâmes comme enjeu nos consommations. Je gagnai. Il dem
355
me enjeu nos consommations. Je gagnai. Il demanda
des
portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commenç
356
vaguement. Les couleurs du bar me remplissaient d’
une
joie inconnue. Et je me refusais sans cesse aux questions qu’en moi-m
357
t ma raison effarée. L’étranger s’animait aussi :
une
fièvre faisait s’épanouir sur son visage je ne sais quel plaisir crue
358
son visage je ne sais quel plaisir cruel. C’était
un
jeu très simple où l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers l
359
de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’
un
hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-là, une confianc
360
qui opère au commandement de la main. Ce soir-là,
une
confiance me possédait, telle que je savais très clairement que je ga
361
urir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaient
des
tableaux mouvants où je me voyais figurer comme une sorte de « person
362
s tableaux mouvants où je me voyais figurer comme
une
sorte de « personnage aux dés ». Ce furent d’abord des images décousu
363
orte de « personnage aux dés ». Ce furent d’abord
des
images décousues de sa vie, brillantes ou misérables, passionnées. Ma
364
ut seul, avec tes airs pessimistes. De nouveau, d’
un
coup de dés, je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le voi
365
ilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire
des
bassesses pour durer, et tu te réjouissais, parce que tu n’as pas bea
366
tu n’as pas beaucoup d’imagination, et que tu es
un
pauvre vaudevilliste qui use à tort et à travers de situations complè
367
à la gagner9, et leur façon inexplicable de lier
des
valeurs morales aux cours de bourse. « Heureux quoique pauvre » comme
368
e à la leur. Ils voudraient que leur vie garantît
un
5 % régulier de plaisirs, avec assurance contre faillites morales et
369
ls ont inventé les caisses d’épargne, monuments d’
une
bassesse morale inconcevable, temples de leurs paresses et de leurs l
370
és, glorification de leur impuissance à concevoir
un
autre bonheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et l’Habitude,
371
st toujours à qui perd gagne ! Sauter follement d’
une
destinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec la même joie, mon
372
ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent
une
angoisse. Ça les dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginen
373
t une angoisse. Ça les dérange terriblement, sauf
un
ou deux qui s’imaginent gagner à mes dépens, témoin ce brave homme qu
374
aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait
des
soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que des baisers au goût
375
soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que
des
baisers au goût d’adieu, et l’avenir où se mêlent incertaines, une te
376
ût d’adieu, et l’avenir où se mêlent incertaines,
une
tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Le
377
resse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur
des
visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique n
378
ma les yeux sur des visions. Les lustres doraient
un
brouillard de fumée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une
379
umée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’
une
femme était assise à notre table, en robe rouge, et très fardée. Elle
380
Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour
un
dernier enjeu. Alors la femme lança sur la table cette rose qui s’eff
381
tte rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’
un
long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi se mit à me regarder
382
r, traverser le café dans la musique et la rumeur
des
clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient follement au-des
383
lames lumineuses dialoguaient follement au-dessus
des
rues parcourues de longs cris en voyage. Je me sentis perdre pied dél
384
mais rien… (sinon qu’au lendemain je n’avais plus
un
sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à ses paro
385
ie… Ah ! plus amère, plus amère encore, saurai-je
un
jour te désirer, te haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de
386
e un jour te désirer, te haïr… 9. Calembour sur
une
idée juste. (Note de l’éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef
387
l’éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef
des
champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, arts appliqués, architecture,
388
Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté
des
lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle des Conféren
389
de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle
des
Conférences, devant un très bel auditoire, est un des plus passionnan
390
di soir à la Grande salle des Conférences, devant
un
très bel auditoire, est un des plus passionnants et des plus controve
391
es Conférences, devant un très bel auditoire, est
un
des plus passionnants et des plus controversés de l’histoire. L’un de
392
Conférences, devant un très bel auditoire, est un
des
plus passionnants et des plus controversés de l’histoire. L’un de ceu
393
ès bel auditoire, est un des plus passionnants et
des
plus controversés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le pl
394
causes et les effets vérifiables, et non d’après
un
système préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne le croit, de
395
n même temps de quitter le pays, Louis XIV commit
un
des actes les plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après a
396
ême temps de quitter le pays, Louis XIV commit un
des
actes les plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir
397
que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait
un
tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente
398
re ; puis ce sont les conseillers intimes du roi,
un
jésuite, le père Lachaise, un archevêque libertin, Harlay de Champval
399
ers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise,
un
archevêque libertin, Harlay de Champvallon, et surtout Madame de Main
400
el, persuadent Louis XIV que la révocation serait
une
œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner les erreu
401
e pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, «
un
niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la princesse
402
les statistiques faussées peuvent faire croire à
une
très forte diminution du nombre des protestants. Aussi ne s’effraye-t
403
aire croire à une très forte diminution du nombre
des
protestants. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de l’émigrat
404
’effraye-t-on pas trop, au début, de l’émigration
des
fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On espère bien converti
405
. Mais bientôt l’on voit la France se dépeupler ;
des
industries sont presque anéanties ; les conséquences funestes de l’ac
406
sion d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré
des
félicitations arrachées par Louis XIV au pape, les catholiques sont l
407
à louer la révocation. L’un d’eux s’indigne, dans
une
lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été les meilleurs prédi
408
aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’en faire
un
tableau qu’il suppose présent à l’esprit de ses auditeurs. Il termine
409
orel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque
une
déviation dans l’histoire de la France. Déviation telle, en effet, qu
410
IV l’exposé si dénué de parti pris, si libre et d’
une
si élégante science du sympathique professeur de Grenoble. j. Roug
411
elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister à
un
regroupement de ses forces créatrices ? La question est peut-être pré
412
elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins
des
deux éléments nécessaires à ce regroupement existe : il y a de jeunes
413
ingulier. Nos artistes, en effet, n’ignorent rien
des
courants les plus modernes, et sont bien situés pour n’en prendre que
414
mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux
des
mœurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès, mais qu
415
insi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs
un
peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès, mais qui expliqu
416
procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour
une
part, la dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs
417
ent, me semble-t-il, pour une part, la dispersion
des
efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de découvertes, de snob
418
rdinales, et qui forme ailleurs le premier public
des
jeunes artistes, n’existant pas ici, le peintre se trouve placé d’emb
419
s s’en vont à Paris, ou bien ils se retirent dans
une
solitude plus effective, quitte à nous revenir munis du passeport ind
420
à nous revenir munis du passeport indispensable d’
une
consécration étrangère. Un jour en effet l’on apprend que tel tableau
421
eport indispensable d’une consécration étrangère.
Un
jour en effet l’on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez
422
pprend que tel tableau de jeune est « coté » chez
un
gros marchand. Aussitôt, les feuilles locales retentissent de touchan
423
es retentissent de touchants échos : « C’est avec
un
légitime orgueil que notre petit pays accueillera cette consécration
424
llera cette consécration bien méritée du talent d’
un
de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une
425
» Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans
une
Rolls-Royce et fortune faite, tout le monde s’accorde à dire qu’on n’
426
orde à dire qu’on n’attendait pas moins du fils d’
un
tel père. « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faill
427
u monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir.
Une
certaine résistance est nécessaire pour que la force se développe. N’
428
ns, auxquels pourtant nos circonstances confèrent
une
actualité toujours vive. D’ailleurs, sachons le reconnaître, il y a m
429
à l’histoire comme la peinture à la photographie.
Une
œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion contre lequel je ne
430
a peinture à la photographie. Une œuvre d’art est
un
merveilleux foyer de contagion contre lequel je ne saurais me prémuni
431
de ces appareils à jugements garantis qui posent
un
critique d’art diplômé. Premier péché contre l’histoire : au seuil d’
432
ômé. Premier péché contre l’histoire : au seuil d’
un
article consacré aux jeunes artistes neuchâtelois, je vous présente C
433
stes neuchâtelois, je vous présente Conrad Meili,
un
Zurichois qui nous arriva de Genève il y a de cela cinq ou six ans. I
434
il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors
des
natures mortes, de petits paysages, il dessinait des nus aux crayons
435
natures mortes, de petits paysages, il dessinait
des
nus aux crayons de fard. C’était un peu plus Blanchet que Barraud, pl
436
il dessinait des nus aux crayons de fard. C’était
un
peu plus Blanchet que Barraud, plus Picasso que Matisse ; mais il y a
437
sso que Matisse ; mais il y avait encore du flou,
des
courbes complaisantes. Meili est devenu plus net, plus cruel aussi. À
438
illes, aux cactus qui ornaient les fenêtres, dans
une
chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants batiks, il s’est l
439
batiks, il s’est livré pendant quelques années à
des
recherches un peu théoriques et abstraites. De cette époque datent de
440
st livré pendant quelques années à des recherches
un
peu théoriques et abstraites. De cette époque datent des toiles comme
441
théoriques et abstraites. De cette époque datent
des
toiles comme le Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent
442
nir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’
une
matière idéale. Tout est lisse et parfait. Trop parfait seulement. Il
443
ces espaces définis par quelques plans ne tue pas
un
certain mystère. Cette cour sans issue, cette tulipe bizarre, cette t
444
ombien l’épuration rigoriste de sa technique sert
une
vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il
445
ures sur bois colorées qu’il intitule la cité est
un
petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art très volontair
446
n petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’
un
art très volontaire, qui connaît ses ressources et sait en user avec
447
la conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore
une
bannière, fabrique une poupée, compose une affiche ou une mosaïque, c
448
qu’il touche, qu’il décore une bannière, fabrique
une
poupée, compose une affiche ou une mosaïque, c’est elle qui permettra
449
décore une bannière, fabrique une poupée, compose
une
affiche ou une mosaïque, c’est elle qui permettra de reconnaître une
450
ière, fabrique une poupée, compose une affiche ou
une
mosaïque, c’est elle qui permettra de reconnaître une de ses œuvres.
451
mosaïque, c’est elle qui permettra de reconnaître
une
de ses œuvres. Et aussi ce brin de comique un peu bizarre qu’il gliss
452
re une de ses œuvres. Et aussi ce brin de comique
un
peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend le moins. Conra
453
l’attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous
une
inspiration neuve, d’origine germanique, mais qui a choisi de s’astre
454
use rigueur latine, et qui tout en s’épurant dans
des
formes claires a su les renouveler. Il nous apporte aussi cet élément
455
i manque trop souvent au Neuchâtelois. S’il casse
des
vitres, ce n’est pas seulement pour le plaisir, mais plutôt par amour
456
autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant
une
initiative comme celle de Neuchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa pla
457
elois. Actuellement, Meili achève la décoration d’
une
salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui eût cru que ce pa
458
de ceux pour qui la peinture consiste à habiller
une
idée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’in
459
et par l’intérieur, mais il taille ce visage dans
une
pâte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la rédu
460
, mais il taille ce visage dans une pâte riche et
un
peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’
461
la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs,
une
sensualité qui sait se faire délicate quand du haut de San Miniato ou
462
San Miniato ou de Fiesole, il peint Florence avec
des
roses et des jaunes jamais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes
463
u de Fiesole, il peint Florence avec des roses et
des
jaunes jamais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui le prenne
464
et des jaunes jamais mièvres, sous l’œil méfiant
des
fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chev
465
l’œil méfiant des fascistes qui le prennent pour
un
agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute ! On ne pourrait
466
on tour par la grâce décorative, il n’en reste qu’
un
, du moins à Neuchâtel même : Eugène Bouvier. Ce garçon aux allures di
467
garçon aux allures discrètes promène sur le monde
des
yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient plus loin qu
468
rètes promène sur le monde des yeux de Japonais d’
une
ironie mélancolique et qui voient plus loin qu’on ne croit, mais il a
469
chose de nouveau dans la peinture neuchâteloise :
un
lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui ne s’affiche pas, mais s’ins
470
uveau dans la peinture neuchâteloise : un lyrisme
un
peu amer, d’une tristesse qui ne s’affiche pas, mais s’insinue dans t
471
einture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’
une
tristesse qui ne s’affiche pas, mais s’insinue dans toute sa palette,
472
ne sais quoi qu’on cherche en vain chez beaucoup
des
meilleurs de nos artistes. Mais n’allez pas croire à des grâces facil
473
lleurs de nos artistes. Mais n’allez pas croire à
des
grâces faciles ou sentimentales. Il y a une sorte d’aristocratique di
474
ire à des grâces faciles ou sentimentales. Il y a
une
sorte d’aristocratique dissimulation dans l’œuvre de Bouvier. Sa tech
475
s. Ce qui d’abord vous prend et vous retient dans
un
tableau de Bouvier, c’est toujours une sorte de dissonance, un défaut
476
etient dans un tableau de Bouvier, c’est toujours
une
sorte de dissonance, un défaut par où l’on va peut-être se glisser da
477
Bouvier, c’est toujours une sorte de dissonance,
un
défaut par où l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuv
478
. Ce lyrique, ce mystique exige pour être compris
une
complicité de sentiments ou d’état d’âme. Je ne verrais guère que Lou
479
és, dont on le puisse rapprocher, parce qu’il est
un
des rares peintres de ce pays pour qui la couleur existe avant tout.
480
dont on le puisse rapprocher, parce qu’il est un
des
rares peintres de ce pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais
481
la nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues
des
jardins de sourires qui s’épanouissent sur les toiles de Meuron. Il s
482
et sait rendre mieux que personne la liquidité d’
un
lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temps couvert, calm
483
tant l’impression, à voir ses dernières toiles, d’
une
plus grande certitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les c
484
passe en cinq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut
un
temps où l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’un
485
craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’
une
école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures mortes qui
486
ne école du gris-noir neurasthénique. Il peignait
des
natures mortes qui décidément l’étaient, à faire froid dans le dos ;
487
nt l’étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien
des
scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops et d’Ensor ; pensa
488
à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’
une
bizarre fantaisie, un mélange de Rops et d’Ensor ; pensait-on… Déjà i
489
dos ; ou bien des scènes d’une bizarre fantaisie,
un
mélange de Rops et d’Ensor ; pensait-on… Déjà il avait des disciples
490
ge de Rops et d’Ensor ; pensait-on… Déjà il avait
des
disciples (Madeleine Woog, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissaient
491
e revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann)
des
dessins d’un dynamisme impétueux révélant un tempérament très rassura
492
avait fondée avec J. P. Zimmermann) des dessins d’
un
dynamisme impétueux révélant un tempérament très rassurant. C’était,
493
nn) des dessins d’un dynamisme impétueux révélant
un
tempérament très rassurant. C’était, je crois, le vrai Humbert qui co
494
umbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut
une
période intermédiaire, un peu pénible. Dans des bouquets d’une opulen
495
ffirmer. Puis il y eut une période intermédiaire,
un
peu pénible. Dans des bouquets d’une opulence assez désordonnée, des
496
t une période intermédiaire, un peu pénible. Dans
des
bouquets d’une opulence assez désordonnée, des rouges trop violents é
497
ntermédiaire, un peu pénible. Dans des bouquets d’
une
opulence assez désordonnée, des rouges trop violents éclataient avec
498
ns des bouquets d’une opulence assez désordonnée,
des
rouges trop violents éclataient avec un certain mauvais goût au milie
499
rdonnée, des rouges trop violents éclataient avec
un
certain mauvais goût au milieu d’harmonies funèbres, comme un qui n’a
500
auvais goût au milieu d’harmonies funèbres, comme
un
qui n’attendrait pas que l’enterrement s’éloigne pour entonner une ch
501
ait pas que l’enterrement s’éloigne pour entonner
une
chanson à boire. Et sa technique auparavant volontairement maigre se
502
ême. Il atteint son équilibre et sa maîtrise avec
une
toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureu
503
s encore aussi plantureuse que les formes, il y a
une
belle richesse de lueurs sur une matière traitée largement et d’une a
504
s formes, il y a une belle richesse de lueurs sur
une
matière traitée largement et d’une abondance très sûrement ordonnée.
505
de lueurs sur une matière traitée largement et d’
une
abondance très sûrement ordonnée. Je crois qu’on doit beaucoup attend
506
ce tempérament qui fait jaillir en lui sans cesse
des
possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de la Renaissance » ch
507
lui sans cesse des possibilités imprévues. Il y a
un
côté « homme de la Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa f
508
. Il y a un côté « homme de la Renaissance » chez
un
Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il y en a plus encore ch
509
à sa fougue originale. Il y en a plus encore chez
un
Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint par lui-même pour s’en ass
510
ux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’
un
si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout cela communi
511
du poids et nulle lourdeur, tout cela communique
une
impression de puissance domptée et qui semble se faire une volupté de
512
ssion de puissance domptée et qui semble se faire
une
volupté de la discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore p
513
plus « Renaissance » : le costume est drapé avec
un
soin minutieux, mais une grande mèche insolente retombe devant le vis
514
le costume est drapé avec un soin minutieux, mais
une
grande mèche insolente retombe devant le visage. Aurèle tient un livr
515
insolente retombe devant le visage. Aurèle tient
un
livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il le lise, mais il aime ca
516
les Barraud, qui lui, passe ses journées à vendre
des
couleurs, à encadrer des glaces. Et plaise aux dieux que les visages
517
se ses journées à vendre des couleurs, à encadrer
des
glaces. Et plaise aux dieux que les visages qui s’y reflèteront soien
518
pe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’
un
œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis v
519
i). Et puis voici François Barraud, le plus jeune
des
frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent beaucoup aux pe
520
raud, le plus jeune des frères. Il vient apporter
des
dessins qui ressemblent beaucoup aux petites huiles de Charles, moins
521
ce l’expression. Décidément ces trois frères sont
une
école. Délaissant un moment ce trésor du meilleur réalisme, que nous
522
ément ces trois frères sont une école. Délaissant
un
moment ce trésor du meilleur réalisme, que nous saurons désormais ret
523
ue nous saurons désormais retrouver, allons errer
un
peu dans le royaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire, et no
524
s quelques années d’avance sur ses contemporains.
Un
jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André E
525
s dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu
des
choses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mai
526
il se nourrit de noix et d’oranges. Il administre
une
feuille religieuse. Il déniche à Paris des tableaux mystérieux qu’il
527
nistre une feuille religieuse. Il déniche à Paris
des
tableaux mystérieux qu’il relègue dans son atelier, pêle-mêle avec le
528
atelier, pêle-mêle avec les siens. Vous retournez
une
toile appuyée au mur, c’est un Renoir… Retournez-en une autre, ce doi
529
s. Vous retournez une toile appuyée au mur, c’est
un
Renoir… Retournez-en une autre, ce doit être un dessin d’horlogerie,
530
ile appuyée au mur, c’est un Renoir… Retournez-en
une
autre, ce doit être un dessin d’horlogerie, ou quelque plan d’une mac
531
t un Renoir… Retournez-en une autre, ce doit être
un
dessin d’horlogerie, ou quelque plan d’une machine à mouvement perpét
532
it être un dessin d’horlogerie, ou quelque plan d’
une
machine à mouvement perpétuel. Une autre encore : cette fois-ci c’est
533
quelque plan d’une machine à mouvement perpétuel.
Une
autre encore : cette fois-ci c’est un Evard : des roses noires sur un
534
perpétuel. Une autre encore : cette fois-ci c’est
un
Evard : des roses noires sur une table, dans un espace bizarrement lu
535
Une autre encore : cette fois-ci c’est un Evard :
des
roses noires sur une table, dans un espace bizarrement lumineux où se
536
tte fois-ci c’est un Evard : des roses noires sur
une
table, dans un espace bizarrement lumineux où se coupent des plans tr
537
t un Evard : des roses noires sur une table, dans
un
espace bizarrement lumineux où se coupent des plans transparents, cel
538
dans un espace bizarrement lumineux où se coupent
des
plans transparents, cellule de quelque palais de glaces en miniature,
539
s en miniature, sorte de boîte à miracles où sous
un
éclairage très net, mais inusité, l’objet le plus banal se charge de
540
igué, vous reprenez ce que vous pensiez n’être qu’
une
épure : c’est intitulé « nature morte ». Pourquoi pas naissance d’un
541
titulé « nature morte ». Pourquoi pas naissance d’
un
songe ? C’est en effet un rêve de précision qui s’incarne dans ces mo
542
ourquoi pas naissance d’un songe ? C’est en effet
un
rêve de précision qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour le
543
lles songeries ! Ces horlogeries impossibles sont
des
pièges à chimères. C’est ainsi qu’on fait une découverte. Attention q
544
ont des pièges à chimères. C’est ainsi qu’on fait
une
découverte. Attention qu’André Evard n’aille trouver une de ces machi
545
ouverte. Attention qu’André Evard n’aille trouver
une
de ces machines à explorer l’au-delà. En vérité il faut être sorcier
546
ir pu donner toute sa mesure. Il a laissé surtout
des
dessins, d’une sûreté un peu traditionnelle, d’un style pourtant asse
547
ute sa mesure. Il a laissé surtout des dessins, d’
une
sûreté un peu traditionnelle, d’un style pourtant assez large et que
548
re. Il a laissé surtout des dessins, d’une sûreté
un
peu traditionnelle, d’un style pourtant assez large et que n’entravai
549
es dessins, d’une sûreté un peu traditionnelle, d’
un
style pourtant assez large et que n’entravait pas son scrupule réalis
550
ci dans son costume d’aviateur, retour de Vienne,
un
sculpteur qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout le parti qu
551
errin a compris tout le parti qu’on pouvait tirer
des
principes cubistes dans un art dont la genèse même est cubiste en que
552
i qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans
un
art dont la genèse même est cubiste en quelque sorte, supposant une d
553
nèse même est cubiste en quelque sorte, supposant
une
décomposition primitive en plans. C’est ainsi qu’il atteint d’emblée
554
t ainsi qu’il atteint d’emblée dans ses statues à
un
beau style dépouillé et hardi. Mais il y avait quelque lourdeur dans
555
é et hardi. Mais il y avait quelque lourdeur dans
des
morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plu
556
pre. Depuis, Léon Perrin semble avoir évolué vers
une
plus grande harmonie de lignes. Je pense surtout à ses bas-reliefs du
557
surtout à ses bas-reliefs du BIT où se manifeste
un
heureux équilibre entre le réalisme imposé par les sujets et un style
558
ilibre entre le réalisme imposé par les sujets et
un
style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépourvue de puissa
559
r les sujets et un style qui sait rester ample, d’
une
simplicité non dépourvue de puissance. Une fois de plus l’on peut adm
560
encore que Perrin décora naguère fort plaisamment
une
pendule de Ditisheim ; que Vincent Vincent, peintre, romancier et cri
561
nt, peintre, romancier et critique d’art, compose
des
coussins, des couvertures de livres, des étoffes, d’une somptueuse fa
562
omancier et critique d’art, compose des coussins,
des
couvertures de livres, des étoffes, d’une somptueuse fantaisie ; et q
563
compose des coussins, des couvertures de livres,
des
étoffes, d’une somptueuse fantaisie ; et qu’Alice Perrenoud combine d
564
ussins, des couvertures de livres, des étoffes, d’
une
somptueuse fantaisie ; et qu’Alice Perrenoud combine de petits tablea
565
bine de petits tableaux en papiers découpés, avec
une
ingéniosité délicieusement féminine, une élégance aiguë. Notre revue
566
és, avec une ingéniosité délicieusement féminine,
une
élégance aiguë. Notre revue n’est certes pas complète. Mais elle a du
567
plète. Mais elle a du moins l’avantage de grouper
des
artistes qui, par le fait des circonstances peut-être plus que par de
568
avantage de grouper des artistes qui, par le fait
des
circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités, se trou
569
e par de naturelles affinités, se trouvent former
un
mouvement actif déjà, et dont Neuchâtel 1927 sera la première manifes
570
guer d’autres plus organiques ? D’une part il y a
des
préoccupations décoratives qui pourraient aboutir peut-être à la form
571
qui pourraient aboutir peut-être à la formation d’
un
groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des œ
572
activité serait féconde en ce pays. D’autre part,
des
œuvres aussi différentes par leur objet et le domaine où elles se réa
573
busier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes
une
recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un
574
simplicité savante et de la perfection du métier,
un
goût pour la construction rigoureuse qui sont des éléments peut-être
575
un goût pour la construction rigoureuse qui sont
des
éléments peut-être insuffisants pour caractériser une école, mais qui
576
éléments peut-être insuffisants pour caractériser
une
école, mais qui révèlent tout de même une orientation générale vers u
577
tériser une école, mais qui révèlent tout de même
une
orientation générale vers une sorte de classicisme moderne dont les f
578
vèlent tout de même une orientation générale vers
une
sorte de classicisme moderne dont les frères Barraud ne seraient pas
579
ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés.
Un
avenir peut-être proche dira dans quelle mesure de tels groupements c
580
quelle mesure de tels groupements correspondent à
une
réalité artistique. Pour aujourd’hui, notre but serait suffisamment a
581
ons fait qu’affirmer l’existence et la vitalité d’
une
jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop souvent plu à
582
t la vitalité d’une jeune peinture originale dans
un
pays qu’on s’est trop souvent plu à dire si âpre, prosaïque et d’une
583
t trop souvent plu à dire si âpre, prosaïque et d’
une
maigre végétation artistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à
584
ays où l’on préfère la netteté utile à l’harmonie
des
lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant
585
; où pourtant les hivers les plus durs réservent
des
douceurs secrètes. 7. Publication dont cette revue entretenait réce
586
e neuchâtelois, de son vrai nom Ch. E. Jeanneret,
un
article paru dans le numéro de février de cette revue. k. Rougemont
587
Un
soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)m À Pierre Jeanneret et à
588
’on ne trouve plus nulle part. Dans les dancings,
un
peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la Petite-Enten
589
ais Le Beau Danube bleu, en commémoration polie d’
un
passé imaginaire, ou peut-être pour essayer de se prendre encore au r
590
que cela vaudrait bien d’autres stupéfiants. Mais
un
tour de tourniquet anéantissait cette Vienne tout occupée à ressemble
591
u vent glacial, crée autour du centre de la ville
une
insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des balles pe
592
rité qui fait songer à la Russie et au sifflement
des
balles perdues d’une révolution. Sept heures du soir : le moment étai
593
à la Russie et au sifflement des balles perdues d’
une
révolution. Sept heures du soir : le moment était venu d’arrêter le p
594
s pour qu’on la sentît déserte ne me proposait qu’
une
frileuse nostalgie. Mais qui fallait-il accuser de cette duperie, qui
595
n moi-même, me dis-je bientôt. Car je professe qu’
un
désir vraiment pur parvient toujours à créer son objet, de même qu’at
596
de même qu’atteignant certain degré d’intensité,
un
état d’âme crée une situation qui l’exprime — bien qu’on pense généra
597
ant certain degré d’intensité, un état d’âme crée
une
situation qui l’exprime — bien qu’on pense généralement le contraire.
598
te et idéaliste du monde ne sont séparées que par
un
léger décalage dans la chronologie de nos sentiments et de nos actes.
599
n’ayant pas renoncé à certaine idée que j’avais d’
un
romantisme viennois, je fus conduit, par une sorte de compromis senti
600
ais d’un romantisme viennois, je fus conduit, par
une
sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait les Contes
601
ue je m’assis dans l’ombre du théâtre, en retard,
un
peu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide : la jolie femme qu’
602
, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’
une
place vide : la jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, une
603
re — ainsi d’autres deviennent patriotes au son d’
une
fanfare militaire, ainsi je m’abandonne au rêve d’un monde que suscit
604
fanfare militaire, ainsi je m’abandonne au rêve d’
un
monde que suscite en moi seul peut-être cette plainte heureuse des vi
605
cite en moi seul peut-être cette plainte heureuse
des
violons. Le diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héro
606
ette plainte heureuse des violons. Le diable sort
des
parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à son piano, c’est u
607
anc, la ravissante héroïne est à son piano, c’est
un
duo des ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords
608
ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo
des
ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une ha
609
e la pureté où vibrent par instants les accords d’
une
harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une langue que je com
610
e harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans
une
langue que je comprends mal. Je me penche vers un voisin pour lui dem
611
ne langue que je comprends mal. Je me penche vers
un
voisin pour lui demander je ne sais plus quoi. Mais sans doute évadé
612
ejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’
un
amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais la
613
onné à l’évocation d’un amour tragiquement mêlé à
des
forces inconnues et menaçantes. Mais la musique est si légère, la voi
614
ême en devient moins brutale. Elle rôde ici comme
une
tristesse amoureuse. Elle n’est plus que l’approche d’une grandeur où
615
tesse amoureuse. Elle n’est plus que l’approche d’
une
grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’imprévisibles
616
, mais inconnus. Voilà que la forme blanche, sous
un
brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le visage même de mon amo
617
eau qui m’appelles et qui vas me quitter… — C’est
une
chose singulière, prononce une voix, à côté de moi, c’est une chose s
618
e quitter… — C’est une chose singulière, prononce
une
voix, à côté de moi, c’est une chose singulière que le pouvoir de cet
619
ngulière, prononce une voix, à côté de moi, c’est
une
chose singulière que le pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes
620
ndit-il, que seul vous venez d’atteindre au monde
des
êtres véritables. Nous nous rencontrons. Vous me voyez parce que vous
621
mprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène,
un
reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle da
622
Je sentis que je l’avais déjà reconnu. Il portait
une
cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passe
623
e de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour
une
élégance très moderne. Il n’y avait dans toute sa personne rien de po
624
al et moi, sans nous être rien dit d’autre, comme
des
amis qui se connaissent depuis si longtemps qu’un échange tacite suff
625
es amis qui se connaissent depuis si longtemps qu’
un
échange tacite suffit aux petites décisions de la vie quotidienne. Gé
626
xe les Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient
une
façon de me moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’en suis pas f
627
fâché. » Il y avait peu de monde dans les rues.
Des
jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas trop s’amus
628
peu de monde dans les rues. Des jeunes gens avec
une
femme à chaque bras, l’air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n
629
malgré les apparences, cette vie sentimentale est
une
des seules réalités qui correspondent encore à l’image classique de V
630
ré les apparences, cette vie sentimentale est une
des
seules réalités qui correspondent encore à l’image classique de Vienn
631
épourvu d’ironie, mais non pas de légèreté. C’est
une
sorte d’inconstance folâtre qui cache une incapacité définitive à se
632
. C’est une sorte d’inconstance folâtre qui cache
une
incapacité définitive à se passionner pour quoi que ce soit. Cette vi
633
caresses, a peur de l’étreinte… C’est d’ailleurs
une
chose que je comprends assez bien, ajouta-t-il, mais pour d’autres ra
634
probablement… À ce moment, comme nous traversions
une
rue sillonnée de taxis rapides, le homard refusa obstinément de progr
635
le homard avait rougi : il conserva toute la nuit
une
magnifique couleur orangée. Gérard semblait habitué à ces sortes de s
636
de l’inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à
une
certaine anémie des sentiments, à un manque de caractère aussi. La fi
637
nnoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie
des
sentiments, à un manque de caractère aussi. La fidélité véritable est
638
ttribuait à une certaine anémie des sentiments, à
un
manque de caractère aussi. La fidélité véritable est une œuvre d’art
639
que de caractère aussi. La fidélité véritable est
une
œuvre d’art qui demande un long effort, et les Viennois sont, par nat
640
idélité véritable est une œuvre d’art qui demande
un
long effort, et les Viennois sont, par nature et par attitude, des ge
641
et les Viennois sont, par nature et par attitude,
des
gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde
642
és. — Pour moi, dit Gérard, je situe l’amour dans
un
monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le
643
e ne se pose plus. Vous le savez, je n’ai aimé qu’
une
femme — au plus deux, en y réfléchissant bien, mais peut-être était-c
644
ts différents. Toutes les femmes qui m’ont retenu
un
instant, c’était parce qu’elles évoquaient cet amour, c’était parce q
645
ès qu’on aime… Oh ! cette femme ! elle n’était qu’
un
regard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver la sensation jus
646
me… Oh ! cette femme ! elle n’était qu’un regard,
un
certain regard, mais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans le
647
ue dans les choses — et c’est cela seul qui donna
un
sens au monde. — Mais je bavarde, je philosophe, et vous allez me dir
648
et vous allez me dire que c’est trop facile pour
un
homme retiré du monde depuis si longtemps. Livrons-nous plutôt à une
649
monde depuis si longtemps. Livrons-nous plutôt à
une
petite malice dont l’idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleu
650
euse de fleurs. C’était la petite bossue qui vend
des
roses et des œillets dans la rue de Carinthie. Gérard lui paya quelqu
651
s. C’était la petite bossue qui vend des roses et
des
œillets dans la rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillets ro
652
passerait seule. Nous nous arrêtâmes non loin, à
une
devanture de robes de soie, nous amusant à imaginer les corps précieu
653
précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés
une
jeune femme, chapeau rouge et manteau de fourrure brune, inévitableme
654
elle finit donc par accepter et vint à nous avec
un
sourire du type le plus courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs
655
urs ! » Il n’y avait plus qu’à lui prendre chacun
un
bras, une femme pour deux hommes — et ce fut bien dans cette anecdote
656
l n’y avait plus qu’à lui prendre chacun un bras,
une
femme pour deux hommes — et ce fut bien dans cette anecdote dont Géra
657
-Rouge, souterrain où nous nous engouffrâmes dans
un
grand bruit de saxophones et de cors anglais jouant la Marche de Tann
658
anglais jouant la Marche de Tannhäuser en tango,
un
Balkanique très lisse nous délivra de notre conquête pour la durée de
659
isse nous délivra de notre conquête pour la durée
des
danses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prendre des fem
660
rd bâillait : « Voilà ce que c’est que de prendre
des
femmes au hasard, disait-il. Je sens très bien que nous allons nous e
661
ntez peut-être de cette pêche miraculeuse — c’est
une
façon de parler — à laquelle on se livre dans ces lieux de plaisir —
662
miennes étaient de meilleure qualité : car c’est
une
pauvre illusion que le plaisir qu’on vient chercher ici avec le premi
663
je la regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens
des
correspondances secrètes et spontanées du plaisir qui seules faisaien
664
citadins blasés s’amusent plus grossièrement que
des
barbares, ils s’imaginent pouvoir faire une place dans leur vie aux “
665
t que des barbares, ils s’imaginent pouvoir faire
une
place dans leur vie aux “divertissements” entre 10 heures du soir et
666
ures du matin, moyennant tant de schillings, dans
un
décor banal et imposé, avec des femmes qui élargissent des sourires à
667
e schillings, dans un décor banal et imposé, avec
des
femmes qui élargissent des sourires à la mesure de votre générosité.
668
banal et imposé, avec des femmes qui élargissent
des
sourires à la mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des
669
sure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont
des
sortes de distributeurs automatiques de plaisir. Autant dire que ceux
670
que c’est que le plaisir. Ils prennent au hasard
des
liqueurs qui n’ont pas été préparées pour leur soif. Ils ne savent pl
671
Ce sont vos contemporains livrés à la démocratie
des
plaisirs achetés au détail dans une foire éclatante de faux luxe. La
672
la démocratie des plaisirs achetés au détail dans
une
foire éclatante de faux luxe. La misère est de voir ici des femmes au
673
éclatante de faux luxe. La misère est de voir ici
des
femmes aussi ravissantes que celle-là qui danse en robe mauve, avec t
674
parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’
une
créature aussi parfaite soit touchée par les mains outrageusement bag
675
tiers alourdis de “Knödl”. En Orient on en ferait
une
chose extrêmement précieuse, qu’on n’approcherait qu’avec un sentimen
676
trêmement précieuse, qu’on n’approcherait qu’avec
un
sentiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’Orient est deve
677
rient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. »
Des
bugles agonisaient, aux dernières mesures d’un tango. Notre encombran
678
» Des bugles agonisaient, aux dernières mesures d’
un
tango. Notre encombrante conquête revint s’asseoir auprès de nous. Gé
679
ins. « Pourquoi vous ne dites rien ? » fit-elle d’
un
ton de reproche, évidemment scandalisée par cette atteinte aux lois d
680
us conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec
une
certaine pitié : « Chère enfant, dit-il doucement, pauvre colombe dép
681
ra. » La pauvre fille ne comprenant pas, il y eut
un
moment pénible, comme toujours lorsqu’un peu de simple humanité vient
682
orsqu’un peu de simple humanité vient interrompre
une
comédie aux attitudes convenues et donner l’air bête aux acteurs. Pui
683
sités grossières de la part des garçons. « Encore
une
proie inutile lâchée pour l’ombre, dit Gérard d’un ton rêveur et mali
684
e proie inutile lâchée pour l’ombre, dit Gérard d’
un
ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est la
685
s but. Vous savez, je lance mes filets dans l’eau
des
nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarres où je
686
dans l’eau des nuits, et quelquefois j’en ramène
des
animaux aux yeux bizarres où je sais lire les signes. » Comme je ne r
687
notre sang. Nos pensées devenaient légères comme
des
ballons. La rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’in
688
sibilité et l’Illusion étendait sur toutes choses
une
aile d’ombre flatteuse aux caprices redoutables. Cette nuit-là nous r
689
ices redoutables. Cette nuit-là nous rencontrâmes
des
anges au coin des ruelles, des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissou
690
Cette nuit-là nous rencontrâmes des anges au coin
des
ruelles, des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans le vent. To
691
nous rencontrâmes des anges au coin des ruelles,
des
oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans le vent. Tout était refl
692
tait reflet, passages, allusions. Plus tard, dans
un
petit bar laqué de noir jusqu’à mi-hauteur, puis couvert de glaces qu
693
à caissons dorés, l’étendent indéfiniment — c’est
un
ciel suspendu assez bas sur nos têtes. Lumière orangée, tamisée ; un
694
sez bas sur nos têtes. Lumière orangée, tamisée ;
un
piano dissimulé joue très doucement. Nous sommes assis autour d’une p
695
é joue très doucement. Nous sommes assis autour d’
une
petite table lumineuse, verdâtre, et Gérard, penché sur cet aquarium
696
enne, mais dans le lointain, Aurélia lui répond d’
un
regard pareil. Des visages naissent comme des étoiles dans un halo, c
697
lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil.
Des
visages naissent comme des étoiles dans un halo, comme les couleurs s
698
nd d’un regard pareil. Des visages naissent comme
des
étoiles dans un halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargi
699
reil. Des visages naissent comme des étoiles dans
un
halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fonden
700
s’élargissent, se fondent, se superposent. Cinéma
des
sentiments qui montre vivantes dans la même minute toutes les incarna
701
tes dans la même minute toutes les incarnations d’
un
amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéi
702
ltanéité de ses manifestations. Gérard parle avec
une
liberté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’es
703
e songes avec toutes leurs illusions, — illusions
des
formes passagères que nous croyons seules réelles, illusions des refl
704
agères que nous croyons seules réelles, illusions
des
reflets qui ne livrent que le côté terrestre des choses dont l’autre
705
des reflets qui ne livrent que le côté terrestre
des
choses dont l’autre moitié sera toujours cachée, ainsi la Lune et sa
706
et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en
un
instant dans cette vision, il connaît enfin la substance véritable et
707
e sont que décors mouvants dans la lueur bariolée
des
sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles : le vrai dra
708
son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer
des
signes, des généalogies étourdissantes qui commencent à des dieux et
709
est ailleurs. Il se met à m’expliquer des signes,
des
généalogies étourdissantes qui commencent à des dieux et finissent au
710
, des généalogies étourdissantes qui commencent à
des
dieux et finissent aux pierres précieuses en passant par toutes les f
711
plaisante. Il dit que la vie ressemble surtout à
un
film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voi
712
ilm où les épisodes s’appellent par le simple jeu
des
images, se voient par transparence au travers de l’autre. Il dit : «
713
es correspondances, chaque geste, chaque minute d’
une
vie résume cette vie entière et fait allusion à tout ce qu’il y a sou
714
eurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est
une
Vie simultanée de Gérard, qui tiendrait toute en une heure, en un lie
715
Vie simultanée de Gérard, qui tiendrait toute en
une
heure, en un lieu, en une vision. » Nous sortîmes. Seules des trompe
716
e de Gérard, qui tiendrait toute en une heure, en
un
lieu, en une vision. » Nous sortîmes. Seules des trompes d’autos s’a
717
qui tiendrait toute en une heure, en un lieu, en
une
vision. » Nous sortîmes. Seules des trompes d’autos s’appelaient dan
718
un lieu, en une vision. » Nous sortîmes. Seules
des
trompes d’autos s’appelaient dans la nuit froide. Gérard ne disait pr
719
rs endormi. En passant par la Freyung, nous vîmes
un
palais aux fenêtres illuminées. Des autos attendaient devant le porch
720
ng, nous vîmes un palais aux fenêtres illuminées.
Des
autos attendaient devant le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisa
721
a neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’
une
boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au léger sifflement du
722
avait dû le mettre au caviar. Il en demanda donc
une
petite portion et la fit prendre au homard avec toutes sortes de soin
723
tes sortes de soins. Les chauffeurs regardaient d’
un
œil las, trop las pour s’étonner. Transi, je me balançais d’un pied s
724
rop las pour s’étonner. Transi, je me balançais d’
un
pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en croquant une de c
725
autre dans de la neige fondante, tout en croquant
une
de ces saucisses à la moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et a
726
cour du palais, descendaient les invités du bal.
Des
femmes sans chapeau couraient vers les voitures, les hommes s’inclina
727
vers les voitures, les hommes s’inclinaient pour
des
baise-mains silencieux et mécaniques. Je reconnus des princes aux fac
728
baise-mains silencieux et mécaniques. Je reconnus
des
princes aux faces maigres qui ressemblaient terriblement à d’anciens
729
ressemblaient terriblement à d’anciens Habsbourg,
des
comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse d
730
t le manteau de velours rose laissait découvertes
des
jambes extrêmement hautes tandis que sa tête frisée jetait des insole
731
trêmement hautes tandis que sa tête frisée jetait
des
insolences sur les chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empil
732
x noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans
des
autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne, la place s’éteignit
733
Ses yeux s’étaient fixés intensément, à la sortie
des
invités, sur une femme qui s’en allait toute seule vers une auto à l’
734
t fixés intensément, à la sortie des invités, sur
une
femme qui s’en allait toute seule vers une auto à l’écart des autres.
735
s, sur une femme qui s’en allait toute seule vers
une
auto à l’écart des autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, a
736
i s’en allait toute seule vers une auto à l’écart
des
autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle, l’air
737
t toute seule vers une auto à l’écart des autres.
Une
femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle, l’air d’autrefois
738
ce se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul.
Une
dernière auto, extraordinairement silencieuse, absolument silencieuse
739
nt baissés. Déjà on criait les journaux du matin,
des
triporteurs passèrent à toute vitesse, m’éclaboussant de neige et de
740
erie-crème fouettée ». m. Rougemont Denis de, «
Un
soir à Vienne avec Gérard », La Nouvelle Semaine artistique et littér
741
? Il en tombe d’accord ; accepte d’attendre comme
un
enfant sage que le monde lui donne, en son temps, sa petite part. On
742
en soi, n’ayant plus où se prendre » comme parle
un
de nos classiques. Repoussé par le monde parce qu’il n’est pas encore
743
un, Stéphane cherche à savoir ce qu’il est. C’est
une
autre manie de sa génération. Mais là encore il se singularise : il n
744
rise : il n’écrit pas de livre pour y pourchasser
un
moi qui feint toujours de se cacher derrière le feuillet suivant, ent
745
ué que l’époque peut être définie par l’abondance
des
autobiographies, mais aussi bien par celle des miroirs. C’est pourquo
746
ce des autobiographies, mais aussi bien par celle
des
miroirs. C’est pourquoi il en installe un sur sa table de travail, de
747
celle des miroirs. C’est pourquoi il en installe
un
sur sa table de travail, de façon à pouvoir s’y surprendre à tout ins
748
— ne tarde pas à devenir obsédant. Stéphane passe
des
heures entières à se regarder dans les yeux. Il varie sur son visage
749
les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre
une
sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire décourage
750
lus secrètement à son aventure. Nous vivons dans
un
décor flamboyant de glaces. À chaque pas, on offre à Stéphane sa tête
751
face de lui par l’ascenseur, elle le suit au long
des
trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poup
752
e suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre
des
souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le précède au restaurant
753
des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers,
des
étiquettes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue br
754
il l’aperçoit entre des souliers, des étiquettes,
des
poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au pass
755
de au restaurant, le nargue brièvement au passage
des
autos, le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’a
756
le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec
une
sorte d’angoisse qu’il la recherche. Il veut se voir tel qu’il est pa
757
ystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche
une
révélation et n’y trouve que le désir d’une révélation. Peut-on s’hyp
758
erche une révélation et n’y trouve que le désir d’
une
révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ? Il n’y a pl
759
rendre la certitude d’être. Mais il s’épuise dans
une
perspective de reflets qui vont en diminuant vertigineusement et l’ég
760
rstitions. Enfin cette expérience folle le mène à
une
découverte sur les sept sens de laquelle il convient de méditer : la
761
nt de méditer : la personne se dissout dans l’eau
des
miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu se cons
762
e soi pour se voir ? Il y a dans l’homme moderne
un
besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’instant qu’il se tra
763
hane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est
un
acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est. Semblablement, il n
764
raie, se borne à décrire l’aspect psychologique d’
une
aventure qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que le lecteur
765
crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’
un
texte, trouve parfois de cette incompréhension des marques certaines.
766
un texte, trouve parfois de cette incompréhension
des
marques certaines. Si le rapport intime qui unit la phrase suivante a
767
sidérations précédentes lui échappe, qu’il y voie
une
de ces marques. Stéphane a oublié jusqu’au mot de prière. Orphée per
768
. À chaque regard dans notre miroir, nous perdons
une
Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle
769
tre la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas
une
vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. U
770
ort dans la transparence glaciale de l’évidence.
Un
jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : « Il faudrait br
771
ais en vérité. Peut-être te reconnaîtrais-tu sous
un
autre visage. Car oublier son visage, ne serait-ce pas devenir un cen
772
Car oublier son visage, ne serait-ce pas devenir
un
centre de pur esprit ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce
773
c’est pourquoi il fait peur à certaines femmes.
Un
soir, après quelques alcools et un échange de pensées au même titre a
774
aines femmes. Un soir, après quelques alcools et
un
échange de pensées au même titre avec une amie d’une beauté de plus e
775
cools et un échange de pensées au même titre avec
une
amie d’une beauté de plus en plus frappante, il croit saisir dans un
776
échange de pensées au même titre avec une amie d’
une
beauté de plus en plus frappante, il croit saisir dans un regard de c
777
é de plus en plus frappante, il croit saisir dans
un
regard de cette femme l’écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd da
778
l se perd dans ces yeux, mais comme on meurt dans
une
naissance. Stéphane naît à l’amour et à lui-même conjointement. Plusi
779
s : je suis !… Je ne sais plus… mais je suis ! »
Un
peu plus tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes les verrerie
780
plus… mais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut
un
jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fen
781
it : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à
une
femme qu’il aimait. n. Rougemont Denis de, « Miroirs, ou Comment o
782
uillet 1929)o « Je lui ai raconté qu’il habite
une
chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort les portes ouvertes, et p
783
i ai raconté qu’il habite une chaumière au bord d’
un
ruisseau, qu’il dort les portes ouvertes, et pendant des heures récit
784
sseau, qu’il dort les portes ouvertes, et pendant
des
heures récite des odes grecques au murmure de l’eau ; la Princesse de
785
les portes ouvertes, et pendant des heures récite
des
odes grecques au murmure de l’eau ; la Princesse de Homburg lui a fai
786
eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’
un
piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plusi
787
s tant aller là-bas, cette folie m’apparaît comme
une
chose si douce et si grande… »11 Et Bettina terminant sa lettre sur
788
il est plus difficile de se faire comprendre par
un
sot que par un fou. » L’hiver dernier, m’occupant assez longuement d’
789
fficile de se faire comprendre par un sot que par
un
fou. » L’hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes a
790
» L’hiver dernier, m’occupant assez longuement d’
un
des poètes auxquels notre temps doit vouer l’attention la plus grave
791
L’hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un
des
poètes auxquels notre temps doit vouer l’attention la plus grave — ca
792
i confinent peut-être à l’Esprit et dont certains
des
plus purs d’entre nous se préparent à tenter le climat, — j’avais rêv
793
sard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement
un
hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie.
794
posée sur Hölderlin et qui l’a consumé… Digne ? —
Un
adolescent au visage de jeune fille qui rimait sagement des odes à la
795
cent au visage de jeune fille qui rimait sagement
des
odes à la liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour
796
ète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’
une
poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa
797
ui parle par sa bouche ? Il règne dans ses Hymnes
une
sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monolog
798
vieux démon ! — je te rappelle — Ou bien envoie —
un
héros — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souff
799
x croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’
un
coup l’envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagn
800
’insolation ; sa folie d’un coup l’envahit. C’est
une
sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et durant trente années
801
donné vivra dans la petite tour de Tubingue, chez
un
charpentier — vivra très doucement, inexplicablement, une vie monoton
802
pentier — vivra très doucement, inexplicablement,
une
vie monotone de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu s
803
Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli
des
quatrains qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler la victime
804
aux visiteurs venus pour contempler la victime d’
un
miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je suis descendu
805
mpler la victime d’un miracle. — C’était l’époque
des
amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un peu au-dess
806
urs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau,
un
peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a
807
ison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là
une
station de canots de louage où j’ai vite découvert un « Friedrich Höl
808
tation de canots de louage où j’ai vite découvert
un
« Friedrich Hölderlin » à côté d’un « Hypérion ». En cherchant, je tr
809
ite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté d’
un
« Hypérion ». En cherchant, je trouverais bien aussi un « Nietzsche »
810
ypérion ». En cherchant, je trouverais bien aussi
un
« Nietzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers l’eau lente. S
811
ouverais bien aussi un « Nietzsche » à fond plat.
Des
saules se penchent vers l’eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d
812
ers l’eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’
une
longue île, des étudiants au crâne rasé se promènent un roman jaune à
813
Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île,
des
étudiants au crâne rasé se promènent un roman jaune à la main. L’un a
814
gue île, des étudiants au crâne rasé se promènent
un
roman jaune à la main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour
815
clochers de la ville sonnent deux heures. Allons.
Un
de ces corridors de vieille maison souabe, hauts et sombres, qui para
816
nses s’ils n’étaient à demi encombrés d’armoires.
Un
couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actue
817
onnaître ces portraits ? — (et comme je considère
un
ravissant médaillon de marbre) — Ça, c’est Diotima. » On rougirait à
818
ses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé
une
femme, pour écrire Hypérion, et pour les gens d’ici, aimer, c’est seu
819
ier… » — Et puis plus tard on encadre les lettres
des
amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers en promenade
820
s des amants, on propose le couple à l’admiration
des
écoliers en promenade, et le guide désigne familièrement l’image d’un
821
nade, et le guide désigne familièrement l’image d’
une
femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites
822
Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux,
une
pipe qui traîne sur l’appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas
823
Tout est familier, paisible au soleil. Il passait
des
heures à cette fenêtre, à marmotter. Vingt-sept ans dans cette chambr
824
l’eau et cette complainte de malade épuisé après
un
grand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les j
825
’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait
des
prairies et des collines basses, de l’autre côté de l’eau jaune et ve
826
n face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
des
collines basses, de l’autre côté de l’eau jaune et verte… Quel est do
827
ent pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4…
Une
rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts de l’Églis
828
rs, et seulement de 2 à 4… Une rue étouffée entre
des
maisons pointues et les contreforts de l’Église du Chapitre : je vois
829
e doucement dans cette calme Tubingue le secret d’
une
épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent au
830
grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’
une
grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À qu
831
s. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer
des
ringues charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai. Les bateaux
832
»). J’aime les bateaux plats et incertains, avec
des
Daphnés dedans, qui ne savent pas bien ramer et qui lisent des magazi
833
edans, qui ne savent pas bien ramer et qui lisent
des
magazines au fil de l’eau, ce qui est le comble des vacances. À une t
834
s magazines au fil de l’eau, ce qui est le comble
des
vacances. À une table voisine, des adolescents balafrés font des sign
835
il de l’eau, ce qui est le comble des vacances. À
une
table voisine, des adolescents balafrés font des signes énergiques à
836
est le comble des vacances. À une table voisine,
des
adolescents balafrés font des signes énergiques à une compagnie de ca
837
une table voisine, des adolescents balafrés font
des
signes énergiques à une compagnie de cavaliers qui passe devant la st
838
adolescents balafrés font des signes énergiques à
une
compagnie de cavaliers qui passe devant la statue d’Eberhard le Barbu
839
s qui passe devant la statue d’Eberhard le Barbu.
Des
bourgeois se rient contre par-dessus leurs chopes. « Gemütlichkeit ».
840
où il a perdu son âme. Et puis il n’est revenu qu’
un
vieux corps radotant. — Qu’en pensez-vous, bonnes gens ?… Il a eu tor
841
Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autorisé
des
générations de « bourgeois cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agi
842
té est plus humaine, est plus divine, quand c’est
une
telle femme qui la confesse : « Celui qui entre en commerce trop étro
843
e est tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un
des
deux soit absurde, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le
844
e tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’
un
oubli. Et pourtant, comme elle paraît ici bien établie, triomphante,
845
n, peut-être, seulement, quand l’amour leur donne
une
petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse où ils ont cru presse
846
aire, par quel hasard, donne l’accord qui m’ouvre
un
vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échappe ô douceur de vivre
847
r. Madame Gontard est la Diotima de l’Hypérion et
des
poèmes. o. Rougemont Denis de, « La tour de Hölderlin », La Quinzai
848
les marées à flots perdus sous la coupole errante
des
prières à dieux perdus. II Je ne sais pas où tu m’entends mais ces
849
parquent les visages les sons brassent les lueurs
des
messages et des sanglots perdus qui rôdent à la recherche d’un corps
850
ages les sons brassent les lueurs des messages et
des
sanglots perdus qui rôdent à la recherche d’un corps faible. Je ne
851
t des sanglots perdus qui rôdent à la recherche d’
un
corps faible. Je ne sais pas où tu m’attends mais je sais comment t
852
ds mais je sais comment tu pleurais. Au carrefour
des
cris perdus j’écoute encore une voix nue qui vient de dire ton nom mê
853
ais. Au carrefour des cris perdus j’écoute encore
une
voix nue qui vient de dire ton nom même avec l’accent de notre amour
854
fleurir tourne le dos ferme les poings ne fais qu’
un
ou deux pas que les souvenirs s’épousent entre eux pendant que tes
855
que tes yeux s’ouvrent n’attends rien d’autre qu’
un
désert qu’un sol dur aux genoux tends les mains au vent captif déli
856
s’ouvrent n’attends rien d’autre qu’un désert qu’
un
sol dur aux genoux tends les mains au vent captif délivre un souffl
857
x genoux tends les mains au vent captif délivre
un
souffle tes lèvres battent doucement écoute-les. IV Tends moi la
858
ns captive écoute les cloches et le scintillement
des
étoiles les eaux profondes qui échangent leurs douceurs. Tiens moi
859
ens moi bien nous allons partir l’air s’entrouvre
un
feu rose éclôt voici ton heure au regard le plus pur je suis à toi da
860
feu et de la joie. V Oh qui a retiré tes mains
des
miennes quand je te regardais trop profond pour te voir ? Maintenant
861
es… VI Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’
un
ange prisonnier dans ta tête mais libre comme avant cette naissance a
862
quand la nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’
une
saison morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence se
863
se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
des
fleurs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide tu pleu
864
vide tu pleurerais mais la grâce est facile comme
un
matin d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit
865
t dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’
un
grand été qui consent… p. Rougemont Denis de, « Le prisonnier de
866
Au sujet « d’
un
certain esprit français » (1er mai 1930)q r 1. Un petit volume « l
867
certain esprit français » (1er mai 1930)q r 1.
Un
petit volume « lourd de pensée », comme disent bizarrement les journa
868
: où que se portent nos regards, ils rencontrent
des
talents distingués. À cet ordre d’ambition convient seule l’activité
869
d’eux, s’écrient nos auteurs, « qu’on nous montre
un
seul Français qui n’ait pas le cœur sur les lèvres, qui ait quelque c
870
sur les lèvres, qui ait quelque chose à dire, ou
une
qualité, une richesse d’âme comparable à celle d’un Goethe ou simplem
871
es, qui ait quelque chose à dire, ou une qualité,
une
richesse d’âme comparable à celle d’un Goethe ou simplement d’un Rilk
872
qualité, une richesse d’âme comparable à celle d’
un
Goethe ou simplement d’un Rilke, par exemple… » — Exigence et reproch
873
me comparable à celle d’un Goethe ou simplement d’
un
Rilke, par exemple… » — Exigence et reproche également démesurés, mai
874
l… 3. Si nous jetons sur les lettres parisiennes
un
regard distrait mais circulaire, comme dirait Aragon — et je suppose
875
jeu avant d’écrire —, que voyons-nous en effet ?
Une
grande nuée de romanciers à peine plus réels que leurs personnages ;
876
nciers à peine plus réels que leurs personnages ;
des
êtres gris, marqués d’un point rouge, professeurs, journalistes, spéc
877
que leurs personnages ; des êtres gris, marqués d’
un
point rouge, professeurs, journalistes, spécialistes de tout au monde
878
rs, journalistes, spécialistes de tout au monde ;
des
jeunes gens qui ont fait leurs études à la Nouvelle Revue française
879
et qui ont, sur un tas de sujets pas importants,
des
idées « pertinentes », comme dit M. Charly Clerc ; des révolutionnair
880
dées « pertinentes », comme dit M. Charly Clerc ;
des
révolutionnaires sans idéal et sans puissances de mythe ; des philoso
881
onnaires sans idéal et sans puissances de mythe ;
des
philosophes sans pente ni grandeur ; (Je mets au concours ce problème
882
la divinisation finale de l’homme par le progrès
des
sciences exactes ? ») d’aimables biographes : M. de Pourtalès, qui pa
883
rtalès, qui parle toujours excellemment du « cœur
des
autres » comme dit M. Gabriel Marcel, présente Nietzsche en Nouveau M
884
sent beaucoup de gens, qui persiste à passer pour
un
écrivain ; alors qu’il est plutôt ce qu’autrefois l’on nommait jolime
885
est plutôt ce qu’autrefois l’on nommait joliment
un
fin lettré. (Vraiment le jeu est trop facile. Allez donc vous mettre
886
colère. Ah ! nous ne risquons pas d’être tués par
des
statues !) Tout d’un coup, trois hommes qui ont du cran. Deux qui vie
887
isquons pas d’être tués par des statues !) Tout d’
un
coup, trois hommes qui ont du cran. Deux qui viennent : Bernanos et M
888
u cran. Deux qui viennent : Bernanos et Malraux ;
un
qui s’éloigne : Montherlant. Très suspects dans les « milieux » litté
889
tes brusques de son tempérament. Attendons encore
un
peu avec ceux-là… Enfin, l’ultime raison de ne pas désespérer, cinq o
890
ce grand potache de Maldoror. « Qu’on nous montre
un
homme… » Un ou deux. Il suffit de très peu de sel pour rendre mangeab
891
ache de Maldoror. « Qu’on nous montre un homme… »
Un
ou deux. Il suffit de très peu de sel pour rendre mangeables beaucoup
892
es. Mais si le sel perd sa saveur, serait-ce avec
des
pamphlets qu’on la lui rend ? Je le trouve en tout cas bien tonique,
893
Simond viennent d’écrire au sujet de quelques-uns
des
meilleurs esprits que la France ait su rendre inoffensifs. Il se pour
894
très bien qu’à cette génération ne soit échue qu’
une
œuvre de critique, impitoyable de rigueur et d’enthousiasme. 5. La c
895
a difficulté, récusent l’art. Il y avait une fois
un
journaliste, un libéral et un jeanfoutre qui regardaient travailler u
896
cusent l’art. Il y avait une fois un journaliste,
un
libéral et un jeanfoutre qui regardaient travailler un maçon. Le maço
897
Il y avait une fois un journaliste, un libéral et
un
jeanfoutre qui regardaient travailler un maçon. Le maçon creusait et
898
béral et un jeanfoutre qui regardaient travailler
un
maçon. Le maçon creusait et défonçait, or on lui avait commandé une m
899
n creusait et défonçait, or on lui avait commandé
une
maison. Nos trois compères se moquaient fort. Le journaliste expliqua
900
s mal compris. 6. Il s’agit ici de la critique d’
un
certain état d’esprit moins facile à formuler qu’à décrire dans ses e
901
décrire dans ses effets, et qui paraît affecter d’
un
commun penchant au libertinage mental trois phénomènes littéraires pa
902
a même impuissance. Ils désirent également donner
une
solution décisive au problème de l’homme ; ils manquent également de
903
ampleur et sa force. » Ainsi Beausire nous montre
un
Barrès tout crispé sur quelques certitudes et quelques doutes immédia
904
nd dénonce chez Maurras l’impardonnable confusion
des
valeurs que représente son positivisme esthétique, ce désir de connai
905
essous — de leurs prétextes. 7. Nous souffrons d’
une
terrible carence d’héroïsme intellectuel. Ces messieurs — et qui pens
906
— et qui pensent — ont la chance de vivre à l’une
des
époques les plus violentes de l’histoire humaine ; ils assistent à de
907
violentes de l’histoire humaine ; ils assistent à
des
bouleversements sociaux, moraux et surtout spirituels d’une portée pl
908
ersements sociaux, moraux et surtout spirituels d’
une
portée planétaire, mais ils trouvent d’excellentes raisons pour ne po
909
pose plus, en France, de questions qui dépassent
un
certain plan. C’est mal vu. » Ou si on les pose, ajouterai-je, c’est
910
outerai-je, c’est pour les résoudre aussitôt et d’
une
manière aussi peu compromettante que possible. Direz-vous que les All
911
peuvent résoudre sur-le-champ. Ils mettent en jeu
des
systèmes de valeurs plus ramifiés, plus organiques. Ils ne sont pas o
912
tram, Gundolf, Rudolf Kassner… En France, hélas !
une
logique verbale et le clair génie que l’on sait se chargent de tout r
913
ur paraît ridicule. Soit, mais il faudrait donner
une
œuvre. Il faudrait créer, si rien n’existe qui vaille qu’on s’y dévou
914
même à paraître ennuyeux13… Ils recherchent tous
un
équilibre, le trouvent bien vite, comme de juste, s’en lassent, cherc
915
te, comme de juste, s’en lassent, cherchent alors
un
déséquilibre, s’en effraient, repartent vers la foi et s’arrêtent che
916
fraient, repartent vers la foi et s’arrêtent chez
un
éditeur. Cela fait un roman de plus. Il obtiendra le prix d’assiduité
917
s la foi et s’arrêtent chez un éditeur. Cela fait
un
roman de plus. Il obtiendra le prix d’assiduité et l’approbation de t
918
obation de tous les prudents qui ont fait le tour
des
choses comme on fait le tour des galeries du Lido : bien décidé à ne
919
ont fait le tour des choses comme on fait le tour
des
galeries du Lido : bien décidé à ne rien acheter qui mette en péril l
920
de la mesure ! (Mais où les audaces souveraines d’
un
Racine, d’un Descartes ?) D’ailleurs, c’est bien simple, si vous pers
921
! (Mais où les audaces souveraines d’un Racine, d’
un
Descartes ?) D’ailleurs, c’est bien simple, si vous persistez à dédai
922
s est assez bien vu ; mais tenter de leur opposer
un
effort digne de ce qu’ils furent… Cela demanderait certains sacrifice
923
éfinit ce qu’on nomme à Paris prétention. Méditez
un
peu cette note de Beausire : « Barrès se plaint très souvent de ses m
924
nes, de ses gastrites, de sa fatigue. Pour abolir
des
obstacles de cette envergure, il suffit d’un peu de décision. Jules C
925
créateur néglige sa personnalité » et « Kant est
un
peu plus redoutable que Robespierre ». Bien. Ah ! très bien ! Mais qu
926
limites de l’humaine liberté ». Simond réclame «
un
parti pris…, un ordre de valeurs, si arbitraire qu’il soit, mais volo
927
maine liberté ». Simond réclame « un parti pris…,
un
ordre de valeurs, si arbitraire qu’il soit, mais volontairement, assu
928
existence du Christ donne à « l’humaine liberté »
des
limites d’une nature que Léonard ne soupçonna même pas ; — que ces li
929
hrist donne à « l’humaine liberté » des limites d’
une
nature que Léonard ne soupçonna même pas ; — que ces limites rendent
930
; — que ces limites rendent absurde l’adoption d’
un
ordre de valeurs « arbitraire », mais obligent l’homme à « assumer »
931
assumer » d’autant plus héroïquement sa vérité —
une
vérité qu’il doit se créer de toute sa volonté, telle inéluctablement
932
, tout de même… Mais ceci, comme dit Kipling, est
une
autre histoire. 10. Nous voici parvenus au point où cessent d’eux-mê
933
» comme dit Zarathoustra — développant sans doute
une
vue évangélique. Que ce petit écrit d’un mouvement naturel nous ramèn
934
s doute une vue évangélique. Que ce petit écrit d’
un
mouvement naturel nous ramène au centre des seuls problèmes qui ne so
935
crit d’un mouvement naturel nous ramène au centre
des
seuls problèmes qui ne soient pas insignifiants, voilà qui suffira pe
936
. C’est ici que paraît tout de même la grandeur d’
un
Ramuz, dont Beausire ne veut voir que le maniérisme, non la substance
937
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Au sujet D’
un
certain esprit français », Aujourd’hui, Lausanne, 1 mai 1930, p. 4.
938
et qui saura jamais s’ils ne sont pas pour moi «
des
choses » — et réciproquement. La distinction entre « choses » et « fa
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n entre « choses » et « fantômes » est relative à
des
habitudes individuelles, en dehors de quoi je ne lui vois pas de sign
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é par le monde. Ils ont tous le même air absurde.
Des
fantômes d’une autre sorte, ceux-là tout rayonnants d’allusions indéf
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Ils ont tous le même air absurde. Des fantômes d’
une
autre sorte, ceux-là tout rayonnants d’allusions indéfinies, naissent
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ion « autre » dont vous parlez traduit simplement
une
variation dans mes relations avec le monde. En quoi cette première qu
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mes nés du relâchement de leur esprit ou de celui
des
autres. Nous avons vu des amateurs de pittoresque essayer, au hasard,
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leur esprit ou de celui des autres. Nous avons vu
des
amateurs de pittoresque essayer, au hasard, des incantations tout jus
945
u des amateurs de pittoresque essayer, au hasard,
des
incantations tout juste bonnes à évoquer la basse pègre du monde spir
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en nous efforçant de délirer que nous atteindrons
une
réalité supérieure, mais bien en surpassant nos sens par notre intell
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s par notre intelligence, celle-ci à son tour par
une
volonté qui l’oriente vers certains états dont il arrive que la gratu
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il arrive que la gratuité apparente nous fascine.
Un
fantôme ne manifeste rien d’autre que la qualité du regard qui le per
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is-moi qui te hante… Ainsi, la vulgarité évidente
des
fantômes décrits par la psychologie moderne révèle-t-elle une déficie
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décrits par la psychologie moderne révèle-t-elle
une
déficience de méthode, laquelle correspond à une certaine sécheresse
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une déficience de méthode, laquelle correspond à
une
certaine sécheresse d’âme. Car on ne voit que ce qu’on mérite. — Les
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rviendra par sa puissance d’adoration, à se créer
une
part angélique. III L’amour, loin de causer une « désorganisation du
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une part angélique. III L’amour, loin de causer
une
« désorganisation du moral », multiplie à nos yeux les correspondance
954
Comprenons à ce signe qu’il nous transporte dans
un
monde plus hautement organisé, c’est-à-dire plus réel. (L’absurdité d
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nt organisé, c’est-à-dire plus réel. (L’absurdité
des
choses mesurait seulement notre impuissance à les aimer.) Dès lors, i
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ront, mais de leur égaler notre conscience. C’est
un
effort de création — car toute découverte du monde spirituel revêt po
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pirituel revêt pour nous, normalement, l’aspect d’
une
création. Il s’agit de maintenir cet effort sous le signe de la sobri
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prière nous font entendre l’accord fondamental d’
une
éthique des fantômes, dont la poésie moderne n’est peut-être que la p
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font entendre l’accord fondamental d’une éthique
des
fantômes, dont la poésie moderne n’est peut-être que la psychologie.
960
ychologie. s. Rougemont Denis de, « [Réponse à
une
enquête] Vos fantômes ne sont pas les miens… », Raison d’être, Paris,
961
né Crevel et Denis de Rougemont, sont précédées d’
une
introduction dont nous reproduisons l’extrait suivant : « “Y a-t-il u
962
nous reproduisons l’extrait suivant : « “Y a-t-il
une
faculté de perception indépendante des sens, qui, s’exerçant par le m
963
“Y a-t-il une faculté de perception indépendante
des
sens, qui, s’exerçant par le moyen d’un organe interne, puisse nous d
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pendante des sens, qui, s’exerçant par le moyen d’
un
organe interne, puisse nous donner des connaissances plus complètes q
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le moyen d’un organe interne, puisse nous donner
des
connaissances plus complètes que l’expérience commune ?” Depuis (et m
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mulé cette question, qu’il n’osait résoudre, bien
des
mystiques, des poètes, des philosophes, des psychiatres, des moralist
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tion, qu’il n’osait résoudre, bien des mystiques,
des
poètes, des philosophes, des psychiatres, des moralistes et des charl
968
n’osait résoudre, bien des mystiques, des poètes,
des
philosophes, des psychiatres, des moralistes et des charlatans ont ha
969
bien des mystiques, des poètes, des philosophes,
des
psychiatres, des moralistes et des charlatans ont hasardé des réponse
970
es, des poètes, des philosophes, des psychiatres,
des
moralistes et des charlatans ont hasardé des réponses à cette interro
971
s philosophes, des psychiatres, des moralistes et
des
charlatans ont hasardé des réponses à cette interrogation que posent
972
res, des moralistes et des charlatans ont hasardé
des
réponses à cette interrogation que posent tacitement toute forme de v
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lucinations (à l’état pathologique), pour prendre
des
états concrets. »