1 1932, Articles divers (1932-1935). « Mouvement », « La morte ou la nue », « Ainsi » (16 avril 1932)
1 el c’est par ici dépêchons-nous ! L’explosion sera retardée si vous m’aimez assez on peut conserver quelque espoir
2 peaux dans une aube sans frontières nos corps sont dans l’autre nuit mais c’est ici que je t’ai touchée pour la prem
2 1932, Articles divers (1932-1935). Sur la violence bourgeoise (15 mai 1932)
3 s avons interrogé M. Durand-Dupont. — Pourquoi n’ êtes -vous pas révolutionnaire ? M. Durand-Dupont ne s’est pas fait prier p
4 -vous pas révolutionnaire ? M. Durand-Dupont ne s’ est pas fait prier pour nous répondre. Il est curieux de tout ce que font
5 nt ne s’est pas fait prier pour nous répondre. Il est curieux de tout ce que font « les jeunes ». Il a été jeune, lui aussi
6 curieux de tout ce que font « les jeunes ». Il a été jeune, lui aussi. Du moins il l’affirme. — Pourquoi je ne suis pas ré
7 ui aussi. Du moins il l’affirme. — Pourquoi je ne suis pas révolutionnaire ? nous a-t-il déclaré — Parce que je suis un honn
8 olutionnaire ? nous a-t-il déclaré — Parce que je suis un honnête homme, fermement attaché aux vieux principes libéraux, enn
9 la réponse de M. Durand-Dupont. M. Durand-Dupont est persuadé qu’il exprime une opinion tout à fait courante et par là mêm
10 u’à l’évidence. Prenons sa phrase pour ce qu’elle est , dans sa simplicité : tout un programme. Et définissons à grands trai
11 ce programme du sens commun. ⁂ 1° « Parce que je suis un honnête homme… » Et d’abord il n’y a pas d’honnêtes gens. L’honnêt
12 d’abord il n’y a pas d’honnêtes gens. L’honnêteté est une vertu héroïque et qui suppose un courage exceptionnel. Si nous te
13 ue chose de ferme. La fermeté de M. Durand-Dupont étant toute verbale, ne relève donc que de l’analyse logique, et doit être
14 ne relève donc que de l’analyse logique, et doit être rejetée à ce titre comme impliquant une contradiction dans les termes
15 … libéraux, … ». Le libéralisme de la bourgeoisie est un mensonge. Car, dans la mesure où il veut être effectif, il doit ac
16 e est un mensonge. Car, dans la mesure où il veut être effectif, il doit accepter libéralement d’être radicalement supprimé
17 ut être effectif, il doit accepter libéralement d’ être radicalement supprimé par l’adversaire. Si au contraire il dure, c’es
18 dversaire. Si au contraire il dure, c’est qu’il s’ est défendu par des moyens qui trahissent ses principes. (M. Chiappe.). 5
19 nemi de la violence, tel que nous le connaissons, est un monsieur qui soutient la police, chargée de réprimer violemment ce
20 la police contre la révolution. Non-violence, tel est le prétexte typique, grossier et courant, derrière lequel se réfugie
21 ui se préludent contre nous de leur « humanité », sont en réalité les complices de cette violence jamais avouée. Il est fau
22 es complices de cette violence jamais avouée. Il est faux et contraire aux faits les plus patents, de prétendre que le cho
23 faits les plus patents, de prétendre que le choix est entre non-violence et violence. Le seul choix qui nous reste est entr
24 iolence et violence. Le seul choix qui nous reste est entre la violence bourgeoise et capitaliste, infiniment diverse dans
25 re, franchement acceptée, de l’autre. Notre temps est celui de la violence, inéluctable. Climat salubre des aventures spiri
26 Climat salubre des aventures spirituelles. ⁂ Tout est devenu tellement abstrait dans une société où règnent le bavardage et
27 agination des peuples. On le sait à Genève : tout est affaire de mots. Il n’y a pas de « guerre » en Chine, l’ordre règne à
28 u entre les dents.) Ainsi, la violence bourgeoise est caractérisée par son hypocrisie, ou encore par son abstraction. Il im
29 isation, sauvegarder des « valeurs » que l’on dit être « de culture ». Il importe qu’elle ne revête jamais un aspect proprem
30 is un aspect proprement brutal, à moins que ce ne soit à de grandes distances, et bien au-delà du cercle qui intéresse concr
31 par quel sophisme un régime d’opinion put jamais être confondu avec un régime de liberté. La liberté d’opposition est tout
32 vec un régime de liberté. La liberté d’opposition est tout à fait illusoire, même chez nous (sic). Et ceux qui seraient ten
33 fait illusoire, même chez nous (sic). Et ceux qui seraient tentés d’en user n’aboutiraient qu’à faire apparaître la violence lat
34 pas les vertus d’une illusoire non-violence : ce serait en réalité faire le jeu des maîtres de l’heure. Nous proclamons une v
35 amons une violence spirituelle absolue, dont nous sommes prêts à accepter les suites inéluctables, jusque dans l’ordre matérie
36 ppartient, dès maintenant, d’orienter. Sans doute est -il absurde de prétendre que par là même, nous optons librement pour d
37 ons pas à la légère le drame de la Révolution. Il est des crises nécessaires1. Mais c’est à nous précisément de préparer le
38 tales et destructives. Toutes les révolutions ont été sabotées. Elles ont été livrées à la police ou à la foule. Mais nous
39 outes les révolutions ont été sabotées. Elles ont été livrées à la police ou à la foule. Mais nous qui le savons, c’est à n
40 ssent trouver place. Rappelons deux principes qui furent énoncés ici même2 : 1° une Révolution est sanglante dans la mesure où
41 qui furent énoncés ici même2 : 1° une Révolution est sanglante dans la mesure où elle est mal préparée. 2° le sang répandu
42 e Révolution est sanglante dans la mesure où elle est mal préparée. 2° le sang répandu par la Révolution est la marque de s
43 al préparée. 2° le sang répandu par la Révolution est la marque de son imperfection naturelle. Le sang ! Et tous les « Miro
44 de terreur. La peur du sang, le goût du sang : ce sont là deux aspects morbides d’une même maladie bourgeoise. C’est à quoi
45 spire l’hypocrisie régnante. Non, la Révolution n’ est pas le sang versé. Mais nous disons qu’il est plus sain d’être blessé
46 n n’est pas le sang versé. Mais nous disons qu’il est plus sain d’être blessé que lentement stérilisé. Nous ne sommes pas i
47 ang versé. Mais nous disons qu’il est plus sain d’ être blessé que lentement stérilisé. Nous ne sommes pas idéalistes : l’« i
48 in d’être blessé que lentement stérilisé. Nous ne sommes pas idéalistes : l’« imperfection naturelle » ne sera jamais supprimé
49 pas idéalistes : l’« imperfection naturelle » ne sera jamais supprimée dans l’œuvre humaine3. Mais la santé révolutionnaire
50 anté révolutionnaire consiste à faire apparaître, fût -ce brutalement, ce que l’« ordre » bourgeois prétend mensongèrement a
51 ulisé et refoulé l’idée de violence physique, ils sont empoisonnés jusque dans leurs pensées et leurs amours. Ils sont deven
52 és jusque dans leurs pensées et leurs amours. Ils sont devenus méchants comme des châtiés. Il faut que la violence soit sain
53 chants comme des châtiés. Il faut que la violence soit saine, c’est-à-dire : d’abord spirituelle. « Le combat spirituel est
54 dire : d’abord spirituelle. « Le combat spirituel est aussi dur que la bataille d’hommes », écrit Rimbaud. Mais le bourgeoi
55 ace de moutons dont parlait Élisée Reclus, et qui sont plus néfastes que les plus violents cataclysmes, car là où ils passèr
56 il ne ferait pas de mal à une mouche. » Peut-être est -il prudent de corriger cette exagération légère. Léon-Paul Fargue, à
57 e, à propos du bourgeois, disait un jour : « Il n’ est pas d’une méchanceté cérastoïde. Il ne ferait pas de mal à un lion. »
3 1932, Articles divers (1932-1935). Les « petits purs » (15 juin 1932)
58 olutionnaire, qui pour certains d’entre eux, déjà est une tentation, pour d’autres au contraire un prétexte par trop facile
59 om de la stricte observance d’une doctrine qu’ils sont incapables de dominer, condamnent ce qui fait la vie même de la Révol
60 tes les doctrines régnantes, y compris celles qui sont officiellement révolutionnaires. Petits purs, ceux qui opposent des t
61 es dépassons, petits purs ceux dont la violence n’ est que rancœur de faibles accrochés à des dogmes, alors que la vraie vio
62 gmes, alors que la vraie violence révolutionnaire est une affirmation toujours nouvelle de la vie. Le petit purisme est un
63 ion toujours nouvelle de la vie. Le petit purisme est un danger permanent au sein de la jeunesse intellectuelle bourgeoise
64 i préfère la stérilité au risque. Les petits purs sont tout simplement les petits bourgeois de la Révolution. Puis du fait q
65 tons-le en passant, excusait lesdits rédacteurs d’ être eux-mêmes des fripons en peau de bourgeois ou des requins à l’eau de
66 lisent leurs loisirs à s’accuser réciproquement d’ être de la police, ou bien à décréter sans rire que tel petit copain devie
67 naires que l’on séduit par le mépris. Certes, ils sont conformistes pis qu’à la gauche, mais pas plus loin comme disait l’au
68 s défendent un système, au lieu d’attaquer ce qui est  ; ils témoignent de plus de mépris que d’amour vrai des hommes, ils a
69 espirable, alors que justement la révolution doit être la plus ample et puissante respiration purificatrice, le parti de la
70 nous chaut une pureté dépourvue de violence. Nous sommes bien décidés à ne pas rancir dans une doctrine donnée. La seule puret
71 à toutes les abstractions systématiques, qu’elles soient importées d’Amérique où elles sont mortelles, où de Russie, où pour l
72 es, qu’elles soient importées d’Amérique où elles sont mortelles, où de Russie, où pour l’heure elles sont vitales, peu impo
73 nt mortelles, où de Russie, où pour l’heure elles sont vitales, peu importe. Ce n’est pas la pureté d’une conception cohéren
74 our l’heure elles sont vitales, peu importe. Ce n’ est pas la pureté d’une conception cohérente et rationnelle que nous défe
75 t que l’état social actuel l’empêche atrocement d’ être humain. Seule cette revendication perpétuelle de l’humain contre l’in
76 une garantie révolutionnaire évidente. Seule elle sera capable d’entraîner les masses. Mais en voilà assez, n’abusons pas de
77 zan, les tienne en particulière méfiance, mon but était simplement de définir une expression qui par la suite pourra nous êtr
78 finir une expression qui par la suite pourra nous être utile. Petits purs, petits purs, faut-il rire ou se fâcher ? Ceux qui
79 l rire ou se fâcher ? Ceux qui se demandent si je suis bien « dans la ligne », ceux qui se demandent si je « remplis les con
80 nt en vérité des fantômes tués par leurs modèles, sont les orthodoxes qui momifient Lénine pour oser enfin l’adorer, tous le
81 s qui parlent de dialectique et croient que Hegel est arrivé, tous ceux qui haïssent la religion parce qu’elle les met à nu
82 n’ont pas inventés, car la véritable invective n’ est qu’une forme polémique de la générosité. Hélas, fallait-il perdre une
4 1933, Articles divers (1932-1935). Sur un certain front unique (15 février 1933)
83 certain front unique (15 février 1933)d e Ce n’ est pas, Nizan, une querelle de personnes que je veux vous faire. Vous pa
84 n de toute solidarité entre « vous » et « nous », sont de nature à induire en erreur un lecteur qui ignorerait — ce dont vou
85 tion et l’esprit du Cahier de revendications vous furent exposés par moi le jour même où nous convînmes de votre collaboration
86 Bref, s’il y eut, à votre sens, « manœuvre » elle fut , comme vous le dites, « trop claire » pour qu’un esprit tel que le vô
5 1933, Articles divers (1932-1935). « La jeunesse française devant l’Allemagne » [Réponse à une enquête] (mai 1933)
87 , en face d’une Russie dont le dynamisme juvénile est assez puissant pour animer la plus sclérosée des doctrines étatistes,
88 e gros ventres et de chapeaux melons. La France n’ est plus contemporaine des nations qui l’entourent et qui la menacent. Te
89 s nations qui l’entourent et qui la menacent. Tel est le fait. Elle souffre d’une carence aiguë de la jeunesse. C’est pourq
90 c le problème de notre génération. La sécurité ne sera jamais garantie par la signature des vieillards ; elle repose sur la
91 science active et concrète de l’époque ; et c’eût été le premier pas vers le salut. Mais les uns se perdirent en eux-mêmes,
92 De l’inquiétude à la Légion d’honneur, la route n’ est pas si pénible qu’on peut le croire : elle comporte moins de sacrific
93 ère. Cette jeunesse a terriblement vieilli : elle est déjà jeune-radicale. On dit aussi, je le sais bien, que l’idéologie r
94 unesse française, le problème de notre révolution est ailleurs. Il est précis. Il se pose en termes historiques bien défini
95 le problème de notre révolution est ailleurs. Il est précis. Il se pose en termes historiques bien définis : c’est le prob
96 c’est-à-dire la négation de toutes les raisons d’ être personnelles. (Je m’excuse du pléonasme.) Telle est la cause profonde
97 e personnelles. (Je m’excuse du pléonasme.) Telle est la cause profonde du déclin d’un prestige universel. Et voici notre t
98 ons à relever le défi que fascistes et hitlériens sont justifiés à nous jeter. Nous ne le ferons pas en défendant des instit
99 s en défendant des institutions démocratiques qui sont le témoignage de notre démission ; nous ne le ferons pas en nous mett
100 istes et leurs guerres. Ainsi notre accusation ne sera pas l’égoïste résistance du bien « particulier » au bien public, l’ég
101 spirituel, c’est-à-dire au bien du prochain. Elle sera au contraire la revendication universelle de l’humain contre tout ce
102 ’impose en vertu du sadisme de la lâcheté. Telles sont les bases de l’Ordre nouveau pour lequel nous sommes prêts à combattr
103 ont les bases de l’Ordre nouveau pour lequel nous sommes prêts à combattre. Et c’est à lui que désormais s’adresseront ceux qu
104 r. Le problème de notre attitude devant la guerre est subordonné à celui de notre révolution. La guerre des capitalistes es
105 i de notre révolution. La guerre des capitalistes est une pièce de leur système. Ces massacres pour des gros sous ne mérite
106 . 7-9. g. Précédé de la notice suivante : « Nous sommes particulièrement heureux de donner ici le témoignage de M. Denis de R
107 écrivains révolutionnaires. M. Denis de Rougemont est protestant, et collaborateur à la NRF , etc. »
6 1933, Articles divers (1932-1935). Positions d’attaque pour l’ordre nouveau (décembre 1933)
108 beaucoup de bruit sur les places. C’est que nous sommes et voulons être avant tout des doctrinaires. Cette volonté a scandali
109 sur les places. C’est que nous sommes et voulons être avant tout des doctrinaires. Cette volonté a scandalisé certains de n
110 , « la précédence du matériel, l’antériorité de l’ être par rapport à la pensée ». En d’autres termes moins obscurs, il affir
111 ais nous disons que le commencement du désordre n’ est pas dans les faits matériels dont nous souffrons, n’est pas dans le m
112 s dans les faits matériels dont nous souffrons, n’ est pas dans le machinisme, par exemple, mais bien dans les doctrines qui
113 sité d’un travail doctrinal radical nous apparaît être la tâche la plus concrète et la plus immédiate de l’heure ; la seule
114 a seule tâche efficacement révolutionnaire. Quels sont les caractères spécifiques de notre effort de doctrine ? C’est d’abor
115 umaine : politique, économique et culturel. Telle est la base de notre ordre. Cet ordre est nouveau en ceci qu’il ne peut ê
116 urel. Telle est la base de notre ordre. Cet ordre est nouveau en ceci qu’il ne peut être établi que par un changement de pl
117 rdre. Cet ordre est nouveau en ceci qu’il ne peut être établi que par un changement de plan. Changer de plan, pour nous, c’e
118 questions qui divisent capitalistes et marxistes sont insolubles sur le terrain positiviste où ils les placent. Elles ne pr
119 e. Mais leur dispute se passe sur un plan où elle est par définition sans issue : le plan matérialiste. Qui pourra jamais f
120 portions considérables selon la valeur morale des êtres ou les habitudes de la race. À supposer qu’une science, encore à crée
121 rend son sens que dans le plan de la personne qui est , nous allons le voir, le plan de la liberté créatrice ; que ce problè
122 de la liberté créatrice ; que ce problème ne peut être défini correctement qu’à partir de la personne ; que seule la doctrin
123 mes une raison de vivre que les systèmes régnants sont en train de leur ôter. ⁂ Nous avons ainsi défini par la double volont
124 s encore de la façon très rapide dont nous allons être obligés de décrire le contenu de nos constructions et la méthode pers
125 me de l’homme. Tension, risque, choix, acte, tels sont les éléments de toute liberté réelle et créatrice, partant, de toute
126 s elle nous oblige à combattre et à renverser. Ce sont , en premier lieu, les institutions démocratiques aux­quelles donne na
127 ait-il ? C’est pourtant sur cet homme abstrait qu’ est bâti tout le système démocratique. Et l’erreur initiale, doctrinale,
128 peler, d’autre part, que l’individualisme libéral est responsable de l’essor anarchique d’une économie devenue inhumaine, e
129 sonne nous oppose à tout soviétisme stalinien. Il est trop facile, en effet, de distinguer dans le stalinisme un retourneme
130 conceptions positives et pseudo-scientifiques qui étaient déjà contenues dans la définition de l’individu libéral. Il nous est
131 dans la définition de l’individu libéral. Il nous est possible maintenant de désigner d’un seul mot l’objectif de nos attaq
132 st la lutte contre l’étatisme moderne tel qu’il s’ est constitué depuis Marx, phénomène beaucoup plus concret, plus universe
133 mieux défini que la lutte des classes. ⁂ Quelles sont donc les institutions qui nous permettront de rompre avec tout étatis
134 savons que le premier aspect de toute révolution est dans un renoncement. Mais pour que l’acte soit réel, encore faut-il u
135 ion est dans un renoncement. Mais pour que l’acte soit réel, encore faut-il une doctrine et des institutions qui le traduise
136 hommes ou presque en demandent. Seulement, il en est d’injustifiés. Et c’est ce que nous voulons déterminer d’abord. On no
137 déterminer d’abord. On nous a aussi reproché de n’ être qu’un groupe d’intellectuels « bourgeois ». Comme ce reproche nous vi
138 une citation de Lénine : La doctrine socialiste est née des théories philosophiques, historiques, économiques élaborées p
139 alisme scientifique contemporain, Marx et Engels, étaient des intellectuels bourgeois. De même, en Russie, la doctrine sociale-
140 roissance spontanée du mouvement ouvrier ; elle y fut le résultat naturel et fatal du développement de la pensée chez les i
141 la pensée chez les intellectuels.5 Peut-être ne serait -il pas inutile, pour conclure, de dégager clairement les thèses impli
142 inissent la personne en acte. 6° Ces institutions sont  : — dans le domaine politique : la petite patrie décentralisatrice et
143 fait naître le capitalisme matérialiste. 9° Nous sommes avec le prolétariat, par-dessus la tête de ses vieux meneurs, contre
144 ats et de leurs frontières, on peut dire qu’elles seront universelles, mais particulières. Alors seulement, au lieu de s’entre
7 1933, Articles divers (1932-1935). Jeune Europe (4 décembre 1933)
145 unissement d’une importante partie du continent ? Est -ce une opération artificielle, qu’il faudrait comparer à la chirurgie
146 à la chirurgie esthétique actuellement en vogue ? Est -ce au contraire le signe d’un renouveau organique, d’un afflux de sèv
147 x de sèves saines ? Ce visage étrange de l’Europe est -il celui d’un nouveau venu, ou bien y distingue-t-on déjà, sous le fa
148 te une réponse d’autant plus intéressante qu’elle est très significative du nouvel état d’esprit de la jeunesse française.
149 n de la jeune génération », la France jusqu’ici s’ était bornée à les traduire et à les critiquer avec un scepticisme plus ou
150 nt là-dessus, dans une préface vigoureuse. Quelle est leur thèse fondamentale ? Au risque de schématiser quelque peu leur d
151 turément » bouleversé un ordre social, qu’elles n’ étaient pas encore en mesure de rénover radicalement. Mal préparées, dans la
152 a dignité de fins en soi, d’absolus, au lieu de n’ être considérés que comme des moyens ». Et c’est ainsi que la jeunesse s’e
153 me des moyens ». Et c’est ainsi que la jeunesse s’ est trouvée embrigadée, avec tout son élan, avec toute sa passion rénovat
154 ’on lui demande — ou à cause d’eux — ne sauraient être mises en doute. Mais qu’adviendra-t-il, le jour peut-être prochain où
155 nos auteurs, les jeunesses soviétique et fasciste sont bien moins révolutionnaires, dans le sens créateur du terme, que conf
156 ur du terme, que conformistes. Leur conformisme n’ est pas celui des jeunes bourgeois, qui s’accommode fort bien d’une « rou
157 ut ce qui fonde la dignité proprement humaine. Où est le remède ? Les auteurs de Jeune Europe n’hésitent pas à le voir dans
158 s conclusions constructives peuvent sans peine en être déduites. Au reste, René Dupuis et Alexandre Marc n’ont pas écrit un
8 1934, Articles divers (1932-1935). Carl Koch, Søren Kierkegaard (1934)
159 Carl Koch, Søren Kierkegaard (1934)l Je serais bien en peine de faire l’éloge de ce livre. Parfois, je le voudrais t
160 re. Parfois, je le voudrais tout autre. Tel qu’il est cependant, on n’en peut désirer de plus utile. Expliquons-nous. Carl
161 sirer de plus utile. Expliquons-nous. Carl Koch s’ est inspiré surtout des Stades sur le chemin de la vie, c’est-à-dire d’un
162 e chemin de la vie, c’est-à-dire d’un ouvrage qui est à la fois le plus paradoxal, le plus autobiographique et le plus arti
163 l’exposé judicieux, parfois même bonhomique. Ce n’ est pas le moindre intérêt du livre. Kierkegaard a personnifié dans les S
164 la fois du Journal du Séducteur. Mais Kierkegaard est surtout un chrétien, et c’est ce qu’il eût fallu montrer d’abord. Un
165 fait aux mystères dialectiques. Le livre de Koch est la démonstration de l’emprise que peut exercer Kierkegaard sur un chr
166 épuise tous les thèmes de son œuvre. Kierkegaard est un événement. Voici un homme qui vient nous dire, en toute simplicité
167 e simplicité, qu’il a vu l’événement, et qu’il en est encore tout remué. On le croira sans peine : il n’a pas l’air d’avoir
168 n auteur nouveau. Koch n’a pas simplifié ce qui n’ est pas simple chez Kierkegaard, mais il a su le décrire sans pédantisme
169 fois rétablie la perspective hors de laquelle il est impossible de rien comprendre à Kierkegaard — j’entends la perspectiv
170 ssionnant, son ascétisme antivital. Cet ascétisme serait la défaillance secrète d’une pensée par ailleurs authentiquement chré
171 miter la portée. La thèse extrême8 de Kierkegaard est si peu séparable de l’ensemble de ses conceptions, qu’en vérité, celu
172 , celui qui la rejette, rejette aussi sa raison d’ être et sa vocation prophétique. Il existe, dira Karl Barth, dont la théol
173 finie » entre Dieu et l’homme. Le tout de l’homme est négation de Dieu. C’est pourquoi l’homme n’arrive à Dieu et à la Vie
174 n ne sût déjà : à savoir que le sens de la vérité est en train d’abdiquer parmi nous devant le culte de la vie. « Le christ
175 isme tel que Kierkegaard le représentait, ne peut être réellement adopté et assimilé par la vie humaine ; il reste pour elle
176 ’écrie Carl Koch, visiblement scandalisé. Mais où est le critère, et qui juge ? Nicodème aussi estimait qu’une telle doctri
177 e ? Nicodème aussi estimait qu’une telle doctrine est impensable, et ne peut être utilement intégrée à notre patrimoine mor
178 qu’une telle doctrine est impensable, et ne peut être utilement intégrée à notre patrimoine moral, culturel, social, nation
179 d en tant que chrétien sait que la vie de l’homme est au péché. Il sait aussi que le contraire du péché « ce n’est pas la v
180 é. Il sait aussi que le contraire du péché « ce n’ est pas la vertu, mais la foi ». C’est une étrange confusion que de bapti
181 ttitude qui se fonde dans la foi. (Schopenhauer n’ est pas un argument. Ou alors Freud en serait un, dans l’autre sens !) Ou
182 penhauer n’est pas un argument. Ou alors Freud en serait un, dans l’autre sens !) Oui, cette foi est « impensable », comme l’é
183 en serait un, dans l’autre sens !) Oui, cette foi est « impensable », comme l’éternité pour le temps. Oui, c’est un « parad
184 ’est un « paradoxe étrange » qui veut que l’homme soit sauvé par sa perte. Mais que vient faite ici cette ardeur de durer, d
185 , de trouver des raisons ? Ne sent-on pas qu’elle est trop tiède, et propre au plus à écœurer celui qui veut non la durée m
186 quelque chose qu’elle ne puisse pas penser ». Il est curieux que les esprits moyens reprochent aux grands de mépriser l’es
187 d de n’avoir pas incarné sa doctrine. Mais quelle était son exigence ? Nos vérités nous justifient, parce qu’elles nous sont
188 Nos vérités nous justifient, parce qu’elles nous sont accessibles ; mais la vérité nous accuse, parce que nos désirs sont m
189 mais la vérité nous accuse, parce que nos désirs sont menteurs. N’est pas « témoin de la vérité » qui veut. Ce n’est pas là
190 ous accuse, parce que nos désirs sont menteurs. N’ est pas « témoin de la vérité » qui veut. Ce n’est pas là un choix de l’h
191 N’est pas « témoin de la vérité » qui veut. Ce n’ est pas là un choix de l’homme. Kierkegaard a choisi d’être « un poète et
192 as là un choix de l’homme. Kierkegaard a choisi d’ être « un poète et un penseur particulier ». Mais ce poète, ce penseur, do
193 né de la vérité ? 7. Tout cela, bien entendu, n’ est qu’apparences, psychologie. Le seul fait, c’est la foi qui soutient t
194 s : « Il tient sa maladie pour mortelle ; sa mort serait nécessaire à l’accomplissement de la tâche à laquelle il a consacré t
9 1934, Articles divers (1932-1935). « Pour qui écrivez-vous ? » [Réponse à une enquête] (janvier-février 1934)
195 ux qui attendent courageusement une réponse. Ce n’ est pas que je puisse donner cette réponse, loin de là. Je voudrais seule
196 e au sérieux leur question. J’écris pour ceux qui sont en marche, pauvres hommes, pauvres impuissants, restant de la Colère
197 combien d’hommes, ni pour quels hommes j’aurai pu être « le prochain » (Luc 10. 36/37), — le prochain de ces misérables qui
198 ’a pas répondu à notre question, il fait métier d’ être incapable de répondre aux questions. Aussi quittant le ton des prophè
199 vrier 1934, p. 571-572. k. Le texte de Rougemont est entrecoupé d’un commentaire de la rédaction de Commune.
10 1934, Articles divers (1932-1935). La Révolution nécessaire, par Arnaud Dandieu et Robert Aron (juin 1934)
200 (juin 1934)m Au cours d’une conversation, cet été , Nicolas Berdiaev faisait observer que notre époque dominée par les «
201 ent. Car pour « l’économiste distingué », nous en sommes pourvus, fort au-delà du nécessaire. (Il y a même quelques députés.)
202 on de l’inhumaine « condition prolétarienne ». Il est bon de noter que cette conception dépasse les rêveries marxistes dans
203 dans leur domaine de prédilection. Mais voilà qui est plus important : elle se révèle immédiatement réalisable. Les travaux
204 e ce temps conservent dans leur cœur la volonté d’ être hommes, et sachent s’emparer des puissances libératrices qu’on leur p
205 riment des principes dont elles procèdent, et qui sont à mes yeux beaucoup plus graves et significatifs. Le mépris dans lequ
206 is dans lequel on tient aujourd’hui le théoricien est peut-être la juste punition d’une intelligentsia dont toute la « dist
207 aise révolutionnaire et la confusion des idées en sont arrivés à un tel point que les deux mots ont l’air bien souvent de s’
208 opposer. À force de considérer d’une part qu’il n’ est d’autre révolution que la révolution matérialiste, à force d’autre pa
209 r l’esprit le contresens habituel qui le réduit à être une faculté purement intellectuelle, sans contact avec les événements
210 ct avec les événements, sans action effective, on est parvenu à stériliser l’un et l’autre, en privant la révolution de son
211 e la révolution, s’exprime par la violence : ce n’ est pas une faculté d’usage interne, qui mène à l’intérieur des cadres de
212 uci de conservation et d’expansion. » Ce langage est clair. Seuls les « petits purs » jugeront sans doute utile et astucie
213 oir un « spiritualisme » dont leur matérialisme n’ est que l’empreinte négative. On abuse singulièrement du mot « esprit » d
214 e « contresens habituel sur l’esprit » n’a jamais été son fait, mais bien celui, intéressé, de certains de ses adversaires,
215 orps, la divinisation hégélienne de l’esprit pur, sont en réalité à l’origine même du désordre actuellement établi, qu’il se
216 aissons désormais le monstrueux visage ? — « Nous sommes sur la terre décisive… » Antithétique — an-archique —, seule et par e
217 hique —, seule et par elle-même transitive, telle est , pour Aron et Dandieu, la Révolution véritable. Cela ne signifie poin
218 défaut de préparation doctrinale, — ce mot devant être entendu, répétons-le, dans l’acception la plus littéralement « actuel
219 ’Esquisse d’une théorie générale de la Révolution est un effort pour retrouver le contenu concret et précis du grand mot de
220 créatrice, c’est bien cette faculté de libérer l’ être des mots. Cessons d’épiloguer sur les vieilles armures, et recherchon
221 ns plutôt les conflits vitaux pour lesquels elles furent inventées. La sémantique ainsi comprise peut être une science proprem
222 rent inventées. La sémantique ainsi comprise peut être une science proprement révolutionnaire. Ce n’est point par hasard qu’
223 être une science proprement révolutionnaire. Ce n’ est point par hasard qu’on tentait de nous la réduire à cette description
224 Je ne voudrais pas clore ces quelques notes, qui sont loin d’épuiser la revue des principaux thèmes de l’œuvre12, sans soul
225 pour la construction de Dandieu : « Une personne est un homme qui unifie les diverses parties de lui-même à l’intérieur de
226 u le ressort de la Révolution nécessaire. Mais qu’ est -ce que cette définition, sinon celle même du vieil individu idéaliste
227 rien à voir avec cet individu. Une personne qui n’ est pas plus l’homme naturel de Rousseau, comme le suppose Fernandez, que
228 que l’homme intérieur de l’idéalisme, puisqu’elle est à la fois conquête et rencontre, engagement et actualité. Une personn
229 e, engagement et actualité. Une personne qui peut être définie comme le prochain de l’Évangile. La seconde objection concern
230 la personne telle que nous la définissons. Elle n’ est pour lui qu’un mythe, dont il met en doute la puissance de soulèvemen
231 donné la description la plus exacte. (Il faudrait être Bloy pour montrer comment cette « peau » du bourgeois pour laquelle i
232 rgeois pour laquelle il mourrait, dit-on, ne peut être qu’un symbole de son argent.) Mais ce que je sais, c’est que l’homme
233 de savoir combien, parmi nous, tiennent encore à être des hommes. 10. Il faut même noter que le chapitre intitulé Échange
234 puyant sur une documentation dont la formule même est une trouvaille. 11. Et au groupe de l’Ordre nouveau, le seul qui se
235 . Et au groupe de l’Ordre nouveau, le seul qui se soit exprimé sur ce point avec netteté (Cf. le numéro 3 de sa revue). 12.
236 mépris de toute rhétorique. 13. « La Révolution est -elle nécessaire ? », NRF de janvier 1934. L’article est d’ailleurs sy
237 le nécessaire ? », NRF de janvier 1934. L’article est d’ailleurs sympathique. Il a surtout le grand mérite d’aller droit au
11 1934, Articles divers (1932-1935). Où sont les jeunes protestants ? Remarques sur le protestantisme et les doctrines politiques (juillet-août 1934)
238 sont les jeunes protestants ? Remarques sur le protestantisme et les doctr
239 trera sans doute. Il faut avouer pourtant qu’il n’ est pas très facile de repérer leurs positions, sur le plan de l’action p
240 ues à fins politiques ou sociales15. Si les faits sont pauvres, profitons-en pour porter un regard plus direct sur les possi
241 d plus direct sur les possibilités théoriques. Qu’ est -ce que la foi des protestants leur permet d’affirmer dans le domaine
242 s de théorie du désordre. Toute doctrine sociale, fût -elle la plus subversive, est la doctrine d’un certain ordre terrestre
243 te doctrine sociale, fût-elle la plus subversive, est la doctrine d’un certain ordre terrestre, d’un certain aménagement de
244 stre suppose une conception de l’homme, tel qu’il est ou tel qu’il devrait être. Tel qu’il est : c’est la conception réact
245 on de l’homme, tel qu’il est ou tel qu’il devrait être . Tel qu’il est : c’est la conception réactionnaire, ou statique, la
246 l qu’il est ou tel qu’il devrait être. Tel qu’il est  : c’est la conception réactionnaire, ou statique, la politique de la
247 tique de la camisole de force. Tel qu’il devrait être  : c’est la conception révolutionnaire, ou dynamique, la politique du
248 e. C’est une doctrine optimiste, dont la mesure n’ est pas dans le présent injuste, mais dans le futur libérateur. Politique
249 itique millénariste. À droite, on dit que l’homme est une bête, que c’est là son partage et qu’il faut s’y tenir. À gauche,
250 l faut s’y tenir. À gauche, on dit que si l’homme est une bête, son but est toutefois de devenir un ange. Le christianisme
251 uche, on dit que si l’homme est une bête, son but est toutefois de devenir un ange. Le christianisme intervient dans cette
252 ndant, fort bien exprimé par Pascal : « L’homme n’ est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la
253 t que qui veut faire l’ange fait la bête. »16 Qu’ est l’homme ? Il ne se connaît pas. L’Évangile le révèle à lui-même, comm
254 , et par cette révélation, sauvé. Ainsi l’homme n’ est humain que dans un paradoxe ; il est perdu lorsqu’il se croit sauvé,
255 si l’homme n’est humain que dans un paradoxe ; il est perdu lorsqu’il se croit sauvé, il est sauvé lorsqu’il se sait perdu.
256 adoxe ; il est perdu lorsqu’il se croit sauvé, il est sauvé lorsqu’il se sait perdu. Je dis que seul ce paradoxe le fait hu
257 eut se voir perdu, c’est qu’il croit, c’est qu’il est dans la foi ; mais être dans la foi, c’est faire la volonté de Dieu,
258 t qu’il croit, c’est qu’il est dans la foi ; mais être dans la foi, c’est faire la volonté de Dieu, c’est agir, c’est donc a
259 ester sa dignité proprement humaine. La foi seule est un acte absolu ; le croyant seul, véritablement homme. Dans ce parado
260 qui nous serviront de critères : d’une part, elle est seule humaine, au sens évangélique du terme ; d’autre part, elle est
261 au sens évangélique du terme ; d’autre part, elle est intenable. Elle est seule humaine, parce que seule elle pose la quest
262 du terme ; d’autre part, elle est intenable. Elle est seule humaine, parce que seule elle pose la question dernière du dest
263 ition actuelle. Mais il faut savoir aussi qu’elle est intenable, parce que les ordres de la foi sont toujours imprévisibles
264 lle est intenable, parce que les ordres de la foi sont toujours imprévisibles, instantanés, et qu’ils ne souffrent point d’ê
265 bles, instantanés, et qu’ils ne souffrent point d’ être d’avance limités par un système, par un programme, par des solutions
266 ’abord, que d’un ordre reçu. Mais dès que l’ordre est véritablement reçu, et accepté, il s’agit de l’exécuter. L’ordre reçu
267 ’agit de l’exécuter. L’ordre reçu par le chrétien est dans l’instant, hic et nunc ; l’ordre imposé par une politique est da
268 t, hic et nunc ; l’ordre imposé par une politique est dans l’histoire, dans la durée. Mais il faut que l’ordre reçu s’insèr
269 oit rester subordonné à l’origine et à la fin, en est cependant inséparable. Il est donc non seulement possible, mais néces
270 ine et à la fin, en est cependant inséparable. Il est donc non seulement possible, mais nécessaire, que le chrétien prenne
271 éactionnaire, il veut connaître l’homme tel qu’il est — seulement il le connaît mieux. Comme le marxiste, il sait que sa do
272 onnaire, il affirme que l’ordre établi ne saurait être en aucun cas définitif ni suffisant. Contre le marxiste, il affirme q
273 ar ignorance de sa nature véritable. Certes, nous sommes dans l’histoire, mais non pas comme la subissant. Nous sommes au mond
274 l’histoire, mais non pas comme la subissant. Nous sommes au monde comme n’étant pas du monde ; dans le péché, mais comme ayant
275 comme la subissant. Nous sommes au monde comme n’ étant pas du monde ; dans le péché, mais comme ayant reçu la promesse d’êtr
276 ans le péché, mais comme ayant reçu la promesse d’ être sauvés de son empire. L’action politique nous est nécessaire, comme m
277 tre sauvés de son empire. L’action politique nous est nécessaire, comme manger, travailler et penser, mais jamais un systèm
278 litique chrétienne : « L’homme seul (devant Dieu) est au-dessus de la collectivité. » Cela ne signifie pas que le croyant d
279 unauté, mais bien que la communauté doit toujours être subordonnée à cette fin la plus haute de l’homme qu’est sa foi, — sa
280 bordonnée à cette fin la plus haute de l’homme qu’ est sa foi, — sa situation personnelle devant Dieu. Non seulement le chré
281 ule communauté réelle et humainement bienfaisante est celle qui se fonde dans ce rapport originel de l’homme à Dieu, d’où d
282 bien considérer que ce qu’on vient de lui dire n’ est pas original, et bien moins encore matière d’enquête. (On n’enquête p
283 ranchées, et par là les plus instructives, qui se soient manifestées jusqu’ici dans la jeunesse protestante. À droite, je dist
284 cts et de brochures, dont la diffusion, je crois, est restée assez limitée. Cette tentative désespérée n’est pas sans noble
285 estée assez limitée. Cette tentative désespérée n’ est pas sans noblesse. Et l’on ne saurait trop louer l’insistance avec la
286 rise les efforts de La Cause. L’Association Sully est beaucoup plus éloignée de l’Action française que La Cause ne l’est de
287 éloignée de l’Action française que La Cause ne l’ est de L’Écho de Paris. Du point de vue de notre foi, il me semble d’aill
288 emble d’ailleurs qu’une position monarchiste peut être justifiée plus facilement — ne fût-ce que par l’exemple des actuelles
289 archiste peut être justifiée plus facilement — ne fût -ce que par l’exemple des actuelles monarchies protestantes — que la p
290 est une activité dont, à coup sûr, le bienfait ne sera jamais perdu, pour ceux d’abord qui en prennent l’initiative. Mais ic
291 irectives papales, et plus conscients que nous ne sommes souvent des implications générales d’une attitude particulière. C’est
292 emarques seulement. Dans la mesure où l’objection est l’expression d’une vocation particulière, elle tend à échapper à la p
293 ent, le moins qu’on en puisse dire, c’est qu’elle est dangereusement insuffisante : elle impliquerait, en effet, logiquemen
294 mpresse d’ajouter que les objecteurs chrétiens se sont gardés jusqu’ici de toute espèce de propagande, et ne tombent nulleme
295 e défini dans ma première partie. Elle ne saurait être mise en symétrie avec aucune des autres attitudes que j’ai indiquées.
296 tenant une attitude constructive à laquelle je me suis rallié pour ma part. III. Qu’allons-nous faire ? Ni ange ni bêt
297 lusions. Droits supérieurs de la personne. Telles sont quelques-unes des formules que je proposais tout à l’heure pour défin
298 e chrétienne devant les exigences de César. Elles sont en singulière consonance avec les principes directeurs de deux mouvem
299 jà d’innombrables adhésions, si seulement elles s’ étaient données pour des doctrines de droite, ou de gauche. Mais c’est précis
300 on marxiste et anticapitaliste, qui depuis lors s’ est précisée et développée. Les deux groupes de tête de cette révolution
301 e tête de cette révolution que je considère comme étant la seule réelle et vraiment novatrice, sont Esprit et l’Ordre nouveau
302 omme étant la seule réelle et vraiment novatrice, sont Esprit et l’Ordre nouveau. Cherchons à voir d’abord ce qui les unit e
303 ieurs à ceux de l’État, qui doit normalement leur être subordonné ; affirmation de la primauté nécessaire du spirituel (qu’i
304 e même dans la civilisation mécanique. Ainsi pour être moins bruyant et moins démagogique, le combat qu’ils mènent est beauc
305 ant et moins démagogique, le combat qu’ils mènent est beaucoup plus radical au sens étymologique du terme : c’est aux racin
306 ions. Mais il ne suffit pas qu’un point de départ soit juste. Il faut encore partir, — sinon le point de départ se transform
307 . Et c’est ici que nos deux groupes divergent. Qu’ est -ce que l’Ordre nouveau ? Un comité d’écrivains et de techniciens. Aut
308 paraît sous ce titre depuis le mois de mai 1933, est essentiellement orienté vers la création. C’est en vain que l’on cher
309 jeunesse, mais la jeunesse qu’ils ont atteinte n’ est pas celle qui voulait être flattée. Et ce n’est pas l’exaspération du
310 e qu’ils ont atteinte n’est pas celle qui voulait être flattée. Et ce n’est pas l’exaspération du ton qui mesure l’efficacit
311 n’est pas celle qui voulait être flattée. Et ce n’ est pas l’exaspération du ton qui mesure l’efficacité d’une prise de cons
312 mun pour cette génération : la violence véritable est celle des constructeurs. Le premier manifeste publié par l’Ordre nouv
313 Économique ensuite, Politique à leur service. Il est facile d’indiquer rapidement le principe de cohésion de ces trois ord
314 volution nécessaire. Sa revendication essentielle est l’abolition de la condition prolétarienne par le moyen du service civ
315 e. L’assimilation de la personne à un acte20, tel est donc le fait spirituel, le fait humain par excellence auquel l’Ordre
316 ne façon immédiate toutes ses institutions. Telle est la « primauté du spirituel » qu’il ne cesse d’invoquer au risque, il
317 lectique. L’influence des idées « ordre nouveau » est beaucoup plus considérable qu’on le croirait à lire la presse politic
318 la jeunesse française fait siens depuis un an ont été lancés par l’ON qui a eu l’adresse de ne pas en faire une sorte de pr
319 r les ligues d’anciens combattants (dont l’action sera peut-être décisive l’année prochaine) ; l’idée de la « mission person
320 , victimes de la confusion que j’ai dite. « Ce ne sont pas ceux qui disent Esprit ! Esprit !… » Mais tandis que l’Ordre nouv
321 l » qualifiant l’acte personnel — et cette nuance est capitale —, il est incontestable que l’« esprit » d’ Esprit est d’in
322 te personnel — et cette nuance est capitale —, il est incontestable que l’« esprit » d’ Esprit est d’inspiration spécifiqu
323 il est incontestable que l’« esprit » d’ Esprit est d’inspiration spécifiquement chrétienne. La revue a d’ailleurs franch
324 , idiotes, de la critique bien pensante. Si je me suis un peu étendu sur les principes spirituels qui animent l’activité d’E
325 t l’activité d’Esprit et de L’Ordre nouveau, ce n’ est pas seulement parce qu’ils sont appelés à jouer un rôle de plus en pl
326 rdre nouveau, ce n’est pas seulement parce qu’ils sont appelés à jouer un rôle de plus en plus important dans la vie politiq
327 tes nos tentatives de rénovation. Je crois bien n’ être pas sorti du cadre précis de cette enquête en marquant la coïncidence
328 s que nous pouvons déduire de la Réforme. Esprit est en majeure partie d’inspiration catholique, je veux dire que ses coll
329 n catholique, je veux dire que ses collaborateurs sont pour la plupart catholiques21. L’Ordre nouveau se défend d’aborder au
330 otestants n’ont pas à fonder un parti. Leur foi n’ est pas de celles que l’on met en systèmes. Le fût-elle, leur très petit
331 n’est pas de celles que l’on met en systèmes. Le fût -elle, leur très petit nombre les empêcherait d’imposer ce parti à l’e
332 er ce parti à l’ensemble de la nation. Le temps n’ est pas aux rêves, et ce n’est pas l’affirmation d’une position politique
333 la nation. Le temps n’est pas aux rêves, et ce n’ est pas l’affirmation d’une position politique qui permettra de « faire l
334 l’homme, succède une dictature. Certain fascisme est d’autant plus « bestial » en ses débuts que la doctrine libérale qu’i
335 es débuts que la doctrine libérale qu’il renverse était plus « angélique » dans ses prétentions. 17. Et depuis peu, plusieur
336  Nous voulons ». Inspirés par l’Ordre nouveau ils sont cependant autonomes. 18. Titre d’un essai d’Arnaud Daudin et D. de R
337 ts de notre destin (Spes). Une dizaine de volumes sont en préparation. 19. L’origine « philosophique » de cette institution
338 mistes. Mais déjà toute une équipe d’ingénieurs s’ est attachée à chiffrer et à définir dans le détail l’application du serv
339 travail. Cf. le n° 8 de L’Ordre nouveau . 20. N’ est -ce pas ainsi que l’Évangile définit la notion fondamentale de prochai
340 n, c’est celui qui pratique la miséricorde ; ce n’ est pas le simple voisin. Cf. le numéro 5 de Hic et Nunc , tout entier c
341 rincipes de départ. o. Rougemont Denis de, « Où sont les jeunes protestants ? Remarques sur le protestantisme et les doctr
12 1934, Articles divers (1932-1935). Jeunesse déracinée (novembre 1934)
342 éisme mal digéré. Les excuses qu’on leur offre ne sont guère plus reluisantes : ils n’ont plus le temps de se cultiver, ils
343 ents justes peut-être, pour certains, mais qui ne sont pas à l’échelle du phénomène qu’on voudrait expliquer. A-t-on pris ga
344 ent un homme à une patrie concrète, si restreinte soit -elle. Il n’y aura plus le frein à l’entraînement de la vie citadine ;
345 eptivité normale. D’où la fatigue, la sensation d’ être vidé, d’être dominé par un milieu qu’on se prend à mépriser parce qu’
346 ale. D’où la fatigue, la sensation d’être vidé, d’ être dominé par un milieu qu’on se prend à mépriser parce qu’il vous tient
347 pas entre les conditions sociales que l’on sait n’ être plus immuables… Perspectives d’aventure. Ambition. Ressentiment. Il y
348 lité des gérants, qui fait si bien sentir qu’on n’ est plus chez soi nulle part, que l’on est toléré comme un élément « de r
349 ir qu’on n’est plus chez soi nulle part, que l’on est toléré comme un élément « de rapport », balayé dès qu’il ne rapporte
350 s gens qui souffrent et qui n’ont plus d’attaches sont rapprochés d’abord par leur opposition à l’ordre qui les moleste. Mai
351 Ils chercheront un nouvel ordre. Leur communauté sera donc une communauté d’idéal autant que de refus. Risquons ici un para
352 ant que de refus. Risquons ici un parallèle qui n’ est peut-être pas simplement une image. Reprenant la distinction précisée
353 aux intérêts locaux — communautés patriotiques — sont naturellement conservatrices, alors que les communautés fondées par l
354 vendication d’un idéal — communautés nationales — sont essentiellement révolutionnaires ? Le mot nation dans son acception m
355 nt ? On a dit : retour à la terre. Le mot d’ordre est bien équivoque. Répandez dans la campagne ces jeunes citadins jacobin
356 emande l’a montré, et l’échec des « Wandervogel » est significatif. Ils se disaient les « oiseaux migrateurs ». Ce nom même
357 patrie et la nation. La révolution nécessaire ne sera ordre qu’à ce prix. C’est là son vrai problème. p. Rougemont Deni
13 1935, Articles divers (1932-1935). Mystère de la Vision (fragments d’un Traité de la vision physionomique du monde) (mars 1935)
358 de) (mars 1935)q r Ce que je voudrais dire ici est simple, fondamental, et comme toutes les choses simples et fondamenta
359 utes les choses simples et fondamentales, devrait être dit en une phrase, ou développé pendant toute une vie. Aussi bien n’a
360 nt je voudrais maintenant m’approcher : la vision est un acte. Vision et visage La vision relie et sépare. Passant du
361 frontières, il les délimite à nouveau. La vision est passage et frontière, et lieu de contact des extrêmes dont on ne sait
362 ent ou s’ils s’appuient l’un contre l’autre. Elle est drame, elle est événement. Elle ne connaît rien que des formes, et ne
363 ppuient l’un contre l’autre. Elle est drame, elle est événement. Elle ne connaît rien que des formes, et ne croit rien que
364 s, et ne croit rien que ce qui apparaît. « Rien n’ est , dit-elle qui ne se manifeste ». C’est pourquoi dans le monde de la v
365 lorsqu’elle se risque à subsister dans la lumière est prise impitoyablement pour ce qu’elle est, c’est-à-dire pour ce qu’el
366 lumière est prise impitoyablement pour ce qu’elle est , c’est-à-dire pour ce qu’elle paraît. N’est-ce pas ainsi que meurt un
367 ’elle est, c’est-à-dire pour ce qu’elle paraît. N’ est -ce pas ainsi que meurt une illusion ? Or toutes ces choses et bien d’
368 qu’un mot pour visage et vision : Gesicht. Quelle est donc cette parenté des apparences ? Si la vision voit le visage, et d
369 siège au centre même du visage. Sans visage il n’ est plus de vision. Ou l’inverse. Ainsi le je et le tu sont distincts, sa
370 lus de vision. Ou l’inverse. Ainsi le je et le tu sont distincts, sans lesquels il n’est pas d’amour. Mais si leur être est
371 le je et le tu sont distincts, sans lesquels il n’ est pas d’amour. Mais si leur être est justement l’amour ? Peut-on les is
372 sans lesquels il n’est pas d’amour. Mais si leur être est justement l’amour ? Peut-on les isoler sans du même coup les sépa
373 lesquels il n’est pas d’amour. Mais si leur être est justement l’amour ? Peut-on les isoler sans du même coup les séparer
374 les séparer de leur existence même ? La vision est un jugement (psychologie) Entre la vieille métaphysique et la nouv
375 la parole, la vision et l’entendement. La Parole est l’objet de la théologie, la vision est le monde de la physionomie23.
376 La Parole est l’objet de la théologie, la vision est le monde de la physionomie23. Je crois bien que le psychologue s’est
377 physionomie23. Je crois bien que le psychologue s’ est introduit dans la vision, s’est installé à la place du drame, avec l’
378 le psychologue s’est introduit dans la vision, s’ est installé à la place du drame, avec l’étrange prétention d’arbitrer le
379 mais comme on fait devant un tribunal, — et ce n’ était pas leur coutume… L’aventure est assez curieuse. Métaphysiciens et sa
380 nal, — et ce n’était pas leur coutume… L’aventure est assez curieuse. Métaphysiciens et savants ont toléré quelque temps ce
381 cédant à un trouble penchant pour une paix qui n’ était rien que leur faiblesse. Mais aujourd’hui qu’ils relèvent la tête, le
382 uns le méprisent, et les autres — le mangent. Il sera donc mangé, et le drame pourra se poursuivre24. Ceci soit dit pour si
383 c mangé, et le drame pourra se poursuivre24. Ceci soit dit pour situer certains résultats provisoires acquis par cette éphém
384 hologue moderne25 nous a démontré que la vision n’ est pas une sensation, mais un décret de l’intellect. Il n’y a pas de sen
385 ntales : il n’y a que des jugements. Toute pensée est « judicatoire », et tout, en l’homme dépend de la pensée. Voir, c’est
386 oit restitué dans son rôle de simple observateur. Étant donnée sa position essentiellement intermédiaire, l’on conçoit que ce
387 entiellement intermédiaire, l’on conçoit que ce n’ est que justice. Que nous apprend l’observation lorsqu’elle se porte sur
388 rents. Supposons qu’il contemple un paysage. S’il est un grand poète, il y verra des mythes, et s’il est un littérateur de
389 st un grand poète, il y verra des mythes, et s’il est un littérateur de l’espèce par exemple d’Amiel, il n’y verra qu’un ét
390 ple d’Amiel, il n’y verra qu’un état d’âme ; s’il est un général, il ne verra qu’un champ de manœuvres ; s’il est un ingéni
391 éral, il ne verra qu’un champ de manœuvres ; s’il est un ingénieur, un territoire à exploiter ; s’il fuit la société de ses
392 e voit par la portière de son wagon, le paysage n’ est pas le même ; car le regard est jugement26. La vision est métamorp
393 gon, le paysage n’est pas le même ; car le regard est jugement26. La vision est métamorphose (métaphysique) Voir, c’e
394 même ; car le regard est jugement26. La vision est métamorphose (métaphysique) Voir, c’est juger en même temps que fo
395 lation et de l’action. Une notion claire de ce qu’ est la vision eût peut-être évité bien des malentendus illustres. L’actio
396 re évité bien des malentendus illustres. L’action est un moment de la contemplation essentiellement active et transformatri
397 rmatrice. La métaphysique de l’Ancienne Alliance, étant celle de la prophétie, est dominée par l’audition de la Parole. Mais
398 l’Ancienne Alliance, étant celle de la prophétie, est dominée par l’audition de la Parole. Mais la métaphysique de la Nouve
399 Mais la métaphysique de la Nouvelle Alliance, qui est celle de l’Incarnation, est dominée par la vision ; il semble que tou
400 ouvelle Alliance, qui est celle de l’Incarnation, est dominée par la vision ; il semble que tout s’y ramène à l’opposition
401 n des ténèbres et de la lumière. « Autrefois vous étiez ténèbres, et maintenant vous êtes lumière » (Éph. 5.8) ou encore : « 
402 Autrefois vous étiez ténèbres, et maintenant vous êtes lumière » (Éph. 5.8) ou encore : « Nous qui sommes du jour… » (I Thes
403 êtes lumière » (Éph. 5.8) ou encore : « Nous qui sommes du jour… » (I Thess. 5.8) Rien ne serait plus facile que de multiplie
404 Nous qui sommes du jour… » (I Thess. 5.8) Rien ne serait plus facile que de multiplier les citations de passages de saint Paul
405 unes des relations que je viens de désigner, il n’ est pas superflu de recourir à ces « origines » sacrées, comme à une sort
406 logie de l’imagination moderne. Sur la vision qui est jugement et action : « Quiconque regarde une femme avec convoitise a
407 tère avec elle. » (Matt. 5. 28) Sur la vision qui est transformation : « Nous serons semblables à lui parce que nous le ver
408 28) Sur la vision qui est transformation : « Nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est. » (I. Jean
409 blables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est . » (I. Jean 3.2) « L’homme nouveau se renouvelle dans la connaissance
410 comme dans un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de clarté en clarté, comme par l’Esprit
411 is en partie, mais alors je connaîtrai comme j’ai été connu. » (I Cor. 13.12) À la question de notre psychologue — sinon ce
412 ôtre lorsqu’il écrit : « Je connaîtrai comme j’ai été connu ». Au commencement est la lumière (physique) On ne voit q
413 aîtrai comme j’ai été connu ». Au commencement est la lumière (physique) On ne voit que ce qui est vu. Mais peut-être
414 st la lumière (physique) On ne voit que ce qui est vu. Mais peut-être faut-il aller plus loin : on ne voit rien que ce q
415 loin : on ne voit rien que ce qui voit. Car seule est visible la forme, et la forme naît du mouvement. On ne peut voir ains
416 voir ainsi que les choses qui se meuvent, ou qui sont mues, — en un mot : ce qui change. « Car les choses visibles sont pas
417 un mot : ce qui change. « Car les choses visibles sont passagères, mais seules les invisibles sont éternelles ». (II Cor. 4.
418 ibles sont passagères, mais seules les invisibles sont éternelles ». (II Cor. 4.18) Or nous savons, de science et de prescie
419 re. La première parole de Dieu : « Que la lumière soit  » est aussi le premier moteur de l’univers. Toute substance que la lu
420 première parole de Dieu : « Que la lumière soit » est aussi le premier moteur de l’univers. Toute substance que la lumière
421 ussitôt se meut et se forme, et de même qu’elle a été « connue » par la lumière, de même elle devient à nos yeux reconnaiss
422 même elle devient à nos yeux reconnaissable. Il n’ est pas d’autre mouvement que cet élan vers la lumière — ou pour la fuir
423 out ce que nous voyons a vu ; et tout, d’abord, a été vu par la lumière créatrice. « L’œil ne verrait pas le soleil s’il n’
424 réatrice. « L’œil ne verrait pas le soleil s’il n’ était de nature solaire », dit Goethe. Une telle parole devance notre scien
425 ui devient un simple point de vue. Ces vérités ne sont guère « explicables » au sens de l’indiscret moderne, de celui qui ve
426 réponds à tout. On ne te tuera pas plus que si tu étais cadavre”. Au matin j’avais le regard si perdu et la contenance si mor
427 ce de Dieu, le second qu’elle réside in amore ? N’ était -ce pas se tromper à la fois sur la nature de l’amour et sur celle de
428 voyons que ce qui nous regarde : voir Dieu, c’est être regardé par lui. Mais alors, c’est aussi être aimé, et c’est se rendr
429 est être regardé par lui. Mais alors, c’est aussi être aimé, et c’est se rendre à la transformation de la vision : c’est don
430 la vision : c’est donc aimer. Et nulle vision ne serait « admirable » si elle n’était en même temps transformation, mouvement
431 Et nulle vision ne serait « admirable » si elle n’ était en même temps transformation, mouvement de l’amour. Augustin qui, plu
432 la « beauté » de Dieu, savait que vision et amour sont un seul acte et une seule réponse : « Lumière du monde, vous m’avez é
433 par vous voir, et personne ne vous voit, si ce n’ est celui qui vous aime. Ah je vous ai trop tard aimée, beauté toujours a
434 oi, non par la vue », nous dit saint Paul. La foi serait -elle donc négation de la vision ? Ou la vie éternelle, négation de l’
435 t, mais accomplissement, et splendeur de ce qui n’ est pour nous qu’ombre et reflet, fragment et trouble. « Aujourd’hui je c
436 is en partie, mais alors je connaîtrai comme j’ai été connu ». Cet alors est la plénitude d’un aujourd’hui que nous ne conn
437 s je connaîtrai comme j’ai été connu ». Cet alors est la plénitude d’un aujourd’hui que nous ne connaissons que par ses lim
438 ormes. Ainsi donc, dépasser la vision, ce ne peut être que la définir dans l’absolu, à la frontière de la mort et de la vie 
439 tre dans sa signification actuelle. « Ce que nous sommes n’a pas encore été manifesté », dit Jean. Et de même, notre vocation
440 ion actuelle. « Ce que nous sommes n’a pas encore été manifesté », dit Jean. Et de même, notre vocation n’est jamais totale
441 nifesté », dit Jean. Et de même, notre vocation n’ est jamais totalement incarnée. Entre la forme pure de notre vocation et
442 du temps. Dans le monde de la mesure idéale, qui est le monde païen, le monde antique, le monde des philosophes, la forme
443 antique, le monde des philosophes, la forme pure est celle de l’idée platonicienne. Mais dans le monde de l’incarnation —
444 ’incarnation — le monde chrétien —, la forme pure est la parole que chacun de nous a reçue, en son lieu, en son temps uniqu
445 gure de notre vocation, forme informante de notre être et que voient « les yeux de la foi », il semble que notre visage n’en
446 yeux de la foi », il semble que notre visage n’en soit qu’une mauvaise épreuve, déjà brûlée, ici et là, ridée froissée, et r
447 rdue par le temps et modelée par la lumière, ce n’ est pas le regard troublé qui erre sur les miroirs de la ville, à la rech
448 nner à l’imagination qui crée. Si l’imagination n’ est pas ce fantôme des psychologues, une simple définition dont tous les
449 ogues, une simple définition dont tous les termes sont problématiques ; si elle n’est pas non plus ce rêve de l’indiscret, o
450 t tous les termes sont problématiques ; si elle n’ est pas non plus ce rêve de l’indiscret, ou cette revanche sur le réel qu
451 l qu’elle figure aux yeux du romantique ; si elle est au contraire une force concrète, elle est cela : une vision d’espéran
452 si elle est au contraire une force concrète, elle est cela : une vision d’espérance, un prolongement, une marche vers la pl
453 a personnification de la parole, la finalité de l’ être vivant, qui se révèle au regard de l’amour. Qu’est-ce que l’homme de
454 re vivant, qui se révèle au regard de l’amour. Qu’ est -ce que l’homme de l’esprit, sinon celui qui voit l’esprit dans son ac
455 e la métamorphose ? Et si l’on sait que la vision est acte, on saura maintenant quel est celui qui peut aider30. L’imaginat
456 que la vision est acte, on saura maintenant quel est celui qui peut aider30. L’imagination de la forme est sympathie avec
457 celui qui peut aider30. L’imagination de la forme est sympathie avec la création. Mais nous tenons ici la clef du monde de
458 e lien vivant qui unit le créant au créé, et nous sommes enfin parvenus à l’origine de l’œuvre de l’esprit, au lieu très saint
459 t, au lieu très saint de notre humanité. Ici tout est réel, tout est action et résistance, tout est drame. Et les correspon
460 saint de notre humanité. Ici tout est réel, tout est action et résistance, tout est drame. Et les correspondances sont emb
461 out est réel, tout est action et résistance, tout est drame. Et les correspondances sont embrassées d’un seul regard. Les f
462 ésistance, tout est drame. Et les correspondances sont embrassées d’un seul regard. Les formes naissent, tableaux, poèmes, s
463 L’image physionomique de l’Univers Quelle que soit la vénération qu’on éprouve en présence de cette forme de toutes les
464 cellence. Au cours des pages qui précèdent, je me suis attaché à définir, plutôt que les principes particuliers d’une étude
465 rdre de la marche. Premier principe : Tout ce qui est réel est moteur, et donc informateur ou créateur de formes. Ce qui si
466 a marche. Premier principe : Tout ce qui est réel est moteur, et donc informateur ou créateur de formes. Ce qui signifierai
467 r un homme entièrement spirituel, que tout ce qui est réel se voit. Ce qui signifie plus modestement, pour nous tous, homme
468 s formes. Second principe : Une forme ne peut pas être « expliquée » par le recours à ces abstractions usuelles, à ces catég
469 ous croyons « toutes naturelles ». Une forme peut être seulement interprétée, symboliquement et concrètement, par d’autres f
470 que qui sert de guide dans le monde physionomique est celui des correspondances, et non pas celui des « causes » conçues in
471  causes » conçues indépendamment des effets. Nous sommes ici dans un ordre dramatique31 et non conceptuel. Nous sommes ici dan
472 ans un ordre dramatique31 et non conceptuel. Nous sommes ici dans l’ordre humain, dans la totalité, et non dans l’ordre scient
473 a totalité, et non dans l’ordre scientifique, qui est celui du démontage mécanique, de l’isolation des parties. Interpréter
474 parties. Interpréter les formes par les formes, n’ est -ce pas ouvrir les portes à une nouvelle mythologie, dans le sens d’un
475 d’un Schelling et déjà d’un Herder ? Certes nous sommes ici très près de l’Organismusgedanke qui est la clef de tout le roman
476 s sommes ici très près de l’Organismusgedanke qui est la clef de tout le romantisme allemand de cette grandiose conception
477 e cette grandiose conception d’un univers où tout est correspondance organique, où la réalité naît de l’union des contradic
478 l’union des contradictions naturelles, où l’homme est microcosme de la Création. Paracelse, Bruno, Nicolas de Cuse dominent
479 re dans l’esthétisme décadent des symbolistes. Je suis bien loin de croire que cette pensée ait épuisé sa vérité. Je la vois
480 erdre dans une fièvre nostalgique. Schleiermacher est l’expression géniale de cette hérésie romantique, qui ne tendait à ri
481 peut égaler la pénétration de son regard, si ce n’ est son impuissance à saisir la personne dans sa totalité concrète et cré
482 ous les autres (à l’exception de Pascal), l’homme est entièrement ramené à la parole, à l’anecdote. Quant à nous, il nous f
483 amment que les hommes qui savent des anecdotes et sont toujours prêts à en raconter, ne savent pas voir les visages32. Le m
484 arrières sociales, sans costumes, où les types ne sont plus des repères. Notre mesure est donc devenue personnelle, et c’est
485 les types ne sont plus des repères. Notre mesure est donc devenue personnelle, et c’est pourquoi il nous faut la chercher
486 -il conclure que notre esprit qu’on dit « latin » est incapable de s’assimiler les secrets d’une ontologie de la forme ? Ce
487 iler les secrets d’une ontologie de la forme ? Ce serait oublier Léonard et son génie physionomiste. Il garde cet esprit symb
488 qui grandit selon l’extension de son domaine… Il est le maître des visages, des anatomies, des machines. Il sait de quoi s
489 ses de la connaissance et les opérations de l’art sont également possibles ; les échanges heureux entre l’analyse et les act
490 s que je souligne dans le texte de Paul Valéry ne sont -ils pas l’éblouissante formule d’une image physionomique de l’univers
491 ects de sacrifier à la logique cartésienne, quels sont les plus illustres physionomistes des idées ? Goethe et Nietzsche, ce
492 à rien d’autre : Les Affinités électives. Tout y est formes, actions, symboles ; et tout est vision créatrice. Goethe est
493 s. Tout y est formes, actions, symboles ; et tout est vision créatrice. Goethe est un œil. Et le chant de Lyncée sur sa tou
494 , symboles ; et tout est vision créatrice. Goethe est un œil. Et le chant de Lyncée sur sa tour — c’est le chant du bonheur
495 r. Ihr glücklichen Augen Was je ihr gesehen Es sei wie es wolle Es war doch so schön ! « Ô mes yeux bienheureux !
496 ücklichen Augen Was je ihr gesehen Es sei wie es wolle Es war doch so schön ! « Ô mes yeux bienheureux ! » Mais les
497 ugen Was je ihr gesehen Es sei wie es wolle Es war doch so schön ! « Ô mes yeux bienheureux ! » Mais les pauvres ye
498 e architecture d’après le mode de notre âme (nous sommes trop lâches pour cela) : — le labyrinthe devrait être notre prototype
499 trop lâches pour cela) : — le labyrinthe devrait être notre prototype ! La musique qui nous est propre et qui nous exprime
500 evrait être notre prototype ! La musique qui nous est propre et qui nous exprime véritablement laisse déjà deviner le labyr
501 parce qu’ils se figurent qu’il n’y a personne qui soit capable de les voir, sous leur musique) (p. 198). Ou ceci dans le Ga
502 es visages de générations passées — cette contrée est couverte par les images d’hommes intrépides et souverains… J’ai toujo
503 n regard se repose sur tout ce qui, près et loin, est construit autour de lui, et aussi sur la ville, la mer et la ligne de
504 utôt une image du monde, dont l’étude du visage n’ est qu’un particulier, à vrai dire privilégié. 24. La réaction antipsych
505 epuis l’impressionnisme, nous savons que la neige est bleue ; éducation du jugement visuel par les arts, etc. 27. Je songe
506 l’un d’eux regarde l’autre réellement, tel qu’il est dans le mouvement de sa forme en devenir, que d’une manière étrange e
507 passe fort bien d’appréciations sentimentales. Il est d’ailleurs d’autant moins « terrifiant » qu’on y est plus réellement
508 d’ailleurs d’autant moins « terrifiant » qu’on y est plus réellement engagé. 32. Das physiognomische Weltbild (Delphin V
14 1935, Articles divers (1932-1935). Les autres et nous : I — Esprit (avril 1935)
509 (avril 1935)s On me demande souvent : « Quelle est la différence entre Esprit et L’Ordre nouveau  ? » Les noms mêmes
510 inconvénients que l’on pouvait craindre. Esprit est surtout une enquête. L’Ordre nouveau , surtout une construction. Pas
511 ire. Nous poussons notre pointe dans l’avenir. Il est bon, et sans aucun doute nécessaire, que d’autres s’occupent d’élargi
512 empêche une collaboration, — au contraire, et je suis bien placé pour le dire — rien qui traduise autre chose qu’une raison
513 x revues me paraissent exagérées. Ce qui pourrait être plus grave au point de vue de la révolution, c’est la fluidité excess
514 es pages. Certes, le fascisme et le stalinisme se sont faits à coups de simplifications brutales et abstraites, nous les avo
515 oir notre Lettre à Hitler par exemple.) Mais ce n’ est pas en exauçant des vœux, d’ailleurs humainement sympathiques, qu’on
15 1935, Articles divers (1932-1935). Lettre à la rédaction de Commune (mai 1935)
516 nt la politique de l’Église (chap. 7) ; 2° que je suis protestant. (Pour vos « curés ».) Vous mentez donc et assez bêtement,
517 la salle des délégués marxistes et hitlériens qui étaient nos camarades au sens le plus courant du terme. t. Rougemont Denis
16 1935, Articles divers (1932-1935). Nous ne mangeons pas de ce pain-là : à propos du 14 juillet (15 juillet 1935)
518 ctature aux ordres des nationalistes russes. Nous sommes contre un système capitaliste, à droite, ou étatiste, à gauche, qui t
519 ple français aura compris que l’adversaire unique est le capitalisme centralisateur, anonyme aujourd’hui — à droite, étatis
520 rces vives du pays. À l’heure présente, une chose est claire : le Front populaire travaille pour M. Litvinoff, le Front nat
521 priorité du « plan d’action » sur la doctrine, on est sûr que cette gauche et cette droite travaillent en fait pour le déso
522 néficiaires de luttes civiles aussi mal orientées seront en fait les gros bailleurs de fonds. Erreur sur la mystique : la lut
523 es droites auront compris que la Banque de France est contre la patrie, quand les gauches auront compris que la peur de Chi
524 s gauches auront compris que la peur de Chiappe n’ est pas un programme, sonnera l’heure de l’Ordre nouveau. v. Rougemont
17 1935, Articles divers (1932-1935). Montherlant : Service inutile (15 novembre 1935)
525 loi de son temps durant ces dix dernières années, est -il bien nécessaire à ce beau livre33. Je crois que Montherlant se fai
526  ; qu’il le dise, c’est moins bien. Quoi qu’il en soit , retenons de cette préface sa morale : « Dès l’instant où l’on se réc
527 sur le peuple, le bourgeois et la noblesse : cela est neuf et vrai, bien vu et bien dit, plein d’une verve gentille, et aus
528 la cause adverse qu’ils n’aiment la leur.) Quelle est l’attitude pratique que Montherlant a cru bon d’adopter ? C’est celle
529 ctif. Et c’est la devise du Taciturne : « Point n’ est besoin d’espérer pour entreprendre… » Mais encore faut-il entreprendr
530 erme de son titre. C’est le concours des deux qui est vrai. L’œuvre avant tout ? Oui, mais toute œuvre est une action, et c
531 vrai. L’œuvre avant tout ? Oui, mais toute œuvre est une action, et c’est le contenu de cette œuvre, ou l’objectif de cett
532 ux qu’à d’autres). « Les œuvres des écrivains ont été faites par le besoin organique qu’ont les écrivains de s’exprimer ».
533 e nom doit, dans son art, ne faire que ce qui lui est agréable. Ce qu’il ferait dans d’autres conditions serait mal fait. »
534 gréable. Ce qu’il ferait dans d’autres conditions serait mal fait. » Est-ce que ce beau mot d’agréable ne prête pas ici à conf
535 erait dans d’autres conditions serait mal fait. » Est -ce que ce beau mot d’agréable ne prête pas ici à confusion ? L’on cro
536 là-dessus — au sens le plus noble de chance, qui est bien proche de salut. Les plus grands ont été les moins libres de n’e
537 qui est bien proche de salut. Les plus grands ont été les moins libres de n’en faire qu’à leur agrément. En bref, on peut r
538 ’abord rendre. Je force un peu mon objection pour être clair. Je n’entends pas que ce recueil n’apporte rien de positif, com
539 if, comme on dit. Il apporte d’abord un ton, ce n’ est pas peu, si ce n’est pas toujours assez. Il apporte une qualité moral
540 apporte d’abord un ton, ce n’est pas peu, si ce n’ est pas toujours assez. Il apporte une qualité morale, une propreté et un
541 : qu’on y apprenne le régime de son âme. » Cela n’ est pas de Montherlant, mais bien du Prince de Ligne, on pourrait s’y tro
542 t, qu’on a qualifié d’homme de la Renaissance, ne serait -il pas tout aussi bien — s’il refuse le siècle précédent — un contemp
543 essaisir de tout ce que la jouissance me promet d’ être heureux, ce qui fait qu’il ne me coûte pas d’en être aussitôt privé »
544 e heureux, ce qui fait qu’il ne me coûte pas d’en être aussitôt privé ». Et par contre ceci, que je lis dans Service inutile
545 r contre ceci, que je lis dans Service inutile, n’ est -ce pas l’écho de la virile légèreté du grand seigneur : « Lénine, qui
546 ermettent de prendre une vue plus juste de ce qui est propre à Montherlant. Il est bien moins curieux d’autrui que Ligne —
547 plus juste de ce qui est propre à Montherlant. Il est bien moins curieux d’autrui que Ligne — ce voyageur traqué par sa pas
548 — ce voyageur traqué par sa passion mondaine — il est plus grave et plus lyrique, plus janséniste aussi, et il faut soulign
549 e ne se réduisît point l’héroïsme français : ce n’ est qu’une de ses tentations. 33. Grasset, éditeur. w. Rougemont Den