1 1932, Articles divers (1932-1935). Sur la violence bourgeoise (15 mai 1932)
1 upont ne s’est pas fait prier pour nous répondre. Il est curieux de tout ce que font « les jeunes ». Il a été jeune, lui a
2 l est curieux de tout ce que font « les jeunes ». Il a été jeune, lui aussi. Du moins il l’affirme. — Pourquoi je ne suis
3 les jeunes ». Il a été jeune, lui aussi. Du moins il l’affirme. — Pourquoi je ne suis pas révolutionnaire ? nous a-t-il dé
4 ourquoi je ne suis pas révolutionnaire ? nous a-t- il déclaré — Parce que je suis un honnête homme, fermement attaché aux v
5 r à ses propres yeux la bourgeoisie démocratique. Elle réside avant tout dans l’inconscience formidable que traduit la répon
6 . Durand-Dupont. M. Durand-Dupont est persuadé qu’ il exprime une opinion tout à fait courante et par là même justifiée jus
7 jusqu’à l’évidence. Prenons sa phrase pour ce qu’ elle est, dans sa simplicité : tout un programme. Et définissons à grands
8  Parce que je suis un honnête homme… » Et d’abord il n’y a pas d’honnêtes gens. L’honnêteté est une vertu héroïque et qui
9 urgeoisie est un mensonge. Car, dans la mesure où il veut être effectif, il doit accepter libéralement d’être radicalement
10 ge. Car, dans la mesure où il veut être effectif, il doit accepter libéralement d’être radicalement supprimé par l’adversa
11 lement supprimé par l’adversaire. Si au contraire il dure, c’est qu’il s’est défendu par des moyens qui trahissent ses pri
12 r l’adversaire. Si au contraire il dure, c’est qu’ il s’est défendu par des moyens qui trahissent ses principes. (M. Chiapp
13 la non-violence mérite un examen plus approfondi. Elle constitue en effet l’argument le plus efficace de la bourgeoisie cons
14 le plus efficace de la bourgeoisie conservatrice. Elle pose devant la conscience de « l’honnête homme » un problème que tout
15 laisser faire à d’autres, et par d’autres, ce qu’ il ne voudrait pas faire, ni subir. C’est-à-dire qu’il se décide pour la
16 ne voudrait pas faire, ni subir. C’est-à-dire qu’ il se décide pour la police contre la révolution. Non-violence, tel est
17 ans une apologie philosophique de la violence, qu’ il critiquerait avec talent, au nom de l’« humanité ». Nous avons plus s
18 dégoût de la violence, nous prétendons, nous, qu’ il témoigne d’une inconscience monstrueuse, ou qu’il commet une cynique
19 il témoigne d’une inconscience monstrueuse, ou qu’ il commet une cynique imposture. Car nous vivons en vérité sous un régim
20 é les complices de cette violence jamais avouée. Il est faux et contraire aux faits les plus patents, de prétendre que le
21 . On le sait à Genève : tout est affaire de mots. Il n’y a pas de « guerre » en Chine, l’ordre règne à Varsovie, et en Fra
22 ar son hypocrisie, ou encore par son abstraction. Il importe qu’elle ne s’avoue jamais, qu’elle invoque toujours un prétex
23 sie, ou encore par son abstraction. Il importe qu’ elle ne s’avoue jamais, qu’elle invoque toujours un prétexte élevé : maint
24 raction. Il importe qu’elle ne s’avoue jamais, qu’ elle invoque toujours un prétexte élevé : maintenir l’ordre, porter au loi
25 des « valeurs » que l’on dit être « de culture ». Il importe qu’elle ne revête jamais un aspect proprement brutal, à moins
26 » que l’on dit être « de culture ». Il importe qu’ elle ne revête jamais un aspect proprement brutal, à moins que ce ne soit
27 à faire apparaître la violence latente du régime. Il suffit d’un Léon Daudet, d’une Marthe Hanau, pour que l’on sente touj
28 ergure n’auraient pas de quoi nous troubler. Mais il arrive que l’ordre bourgeois, protecteur de la non-violence chère à s
29 active, et de l’épouvantable désordre dans lequel il vit. ⁂ Contre une violence absurde, dénaturée et hypocrite, nous ne d
30 re matériel. Suites encore imprévisibles, mais qu’ il nous appartient, dès maintenant, d’orienter. Sans doute est-il absurd
31 tient, dès maintenant, d’orienter. Sans doute est- il absurde de prétendre que par là même, nous optons librement pour de s
32 renons pas à la légère le drame de la Révolution. Il est des crises nécessaires1. Mais c’est à nous précisément de prépare
33 uctives. Toutes les révolutions ont été sabotées. Elles ont été livrées à la police ou à la foule. Mais nous qui le savons, c
34 a foule. Mais nous qui le savons, c’est à nous qu’ il incombe, dès maintenant, de préparer une Révolution assez totale, pou
35 1° une Révolution est sanglante dans la mesure où elle est mal préparée. 2° le sang répandu par la Révolution est la marque
36 tion n’est pas le sang versé. Mais nous disons qu’ il est plus sain d’être blessé que lentement stérilisé. Nous ne sommes p
37 idiculisé et refoulé l’idée de violence physique, ils sont empoisonnés jusque dans leurs pensées et leurs amours. Ils sont
38 sonnés jusque dans leurs pensées et leurs amours. Ils sont devenus méchants comme des châtiés. Il faut que la violence soit
39 urs. Ils sont devenus méchants comme des châtiés. Il faut que la violence soit saine, c’est-à-dire : d’abord spirituelle.
40 violence avec la brutalité physique imbécile. Et il condamne cette brutalité dans tous les cas où elle ne sert pas à assu
41 il condamne cette brutalité dans tous les cas où elle ne sert pas à assurer sa sécurité. Encore ne l’utilise-t-il pas lui-m
42 pas à assurer sa sécurité. Encore ne l’utilise-t- il pas lui-même dans ces cas. En effet, ce qui lui répugne le plus, dans
43 qui donne un coup se met à portée d’une riposte. Ils préfèrent couvrir de fleurs les lombes des « victimes du devoir ». Gr
44 stes que les plus violents cataclysmes, car là où ils passèrent et répandirent leurs excréments, la terre même reste stéril
45 rand-Dupont cherchait à nous persuader. 6. « … qu’ il ne ferait pas de mal à une mouche. » Peut-être est-il prudent de corr
46 e ferait pas de mal à une mouche. » Peut-être est- il prudent de corriger cette exagération légère. Léon-Paul Fargue, à pro
47 Fargue, à propos du bourgeois, disait un jour : «  Il n’est pas d’une méchanceté cérastoïde. Il ne ferait pas de mal à un l
48 our : « Il n’est pas d’une méchanceté cérastoïde. Il ne ferait pas de mal à un lion. » 1. Interventions chirurgicales.
2 1932, Articles divers (1932-1935). Les « petits purs » (15 juin 1932)
49 r trop facile à ne pas prendre place à nos côtés. Il s’agit de ce que nous baptiserons le petit-purisme. Définition des
50 au nom de la stricte observance d’une doctrine qu’ ils sont incapables de dominer, condamnent ce qui fait la vie même de la
51 etits bourgeois de la Révolution. Puis du fait qu’ ils se disent révolutionnaires, ces bons petits intellectuels deviennent
52 ur les réactionnaires. Et c’est bien pour cela qu’ il nous paraît urgent de leur coller une étiquette qui les distingue, sa
53 d’humain. Petits purs, conformistes à rebours, qu’ ils aillent grossir les rangs de ceux que les rédacteurs de l’Ami du Peup
54 volutionnaires qui ne paraissent « pas très comme il faut », et, pour tout dire, « confusionnistes » à ces terroristes de
55 tes » à ces terroristes de café. À les en croire, il n’y aurait rien d’autre à faire que d’installer des mitrailleuses tou
56 te théorique se révélant pour l’instant malaisée, ils utilisent leurs loisirs à s’accuser réciproquement d’être de la polic
57 l petit copain devient dangereusement trotskiste. Ils apportent une véritable coquetterie à souligner leur conformisme et l
58 er leur conformisme et leur touchante orthodoxie. Ils se soumettent éperdument à toutes les directives même si comme on le
59 tionnaires que l’on séduit par le mépris. Certes, ils sont conformistes pis qu’à la gauche, mais pas plus loin comme disait
60 gauche, mais pas plus loin comme disait l’autre. Ils n’ont pas le format physique et moral nécessaire pour intégrer, rejet
61 des nécessités concrètes de l’heure et du lieu où ils vivent, la France de 1932, non la Russie de 1917, révèle un désespoir
62 impuissance. Victimes de la pensée bourgeoise qu’ ils s’épuisèrent à combattre sachant qu’ils ne pourraient que périr avec
63 geoise qu’ils s’épuisèrent à combattre sachant qu’ ils ne pourraient que périr avec elle, ils vont chercher dans la lecture,
64 attre sachant qu’ils ne pourraient que périr avec elle , ils vont chercher dans la lecture, pour eux très aride, de Marx, d’E
65 sachant qu’ils ne pourraient que périr avec elle, ils vont chercher dans la lecture, pour eux très aride, de Marx, d’Engels
66 s toutes les tares de l’orthodoxie les menacent : ils défendent un système, au lieu d’attaquer ce qui est ; ils témoignent
67 ndent un système, au lieu d’attaquer ce qui est ; ils témoignent de plus de mépris que d’amour vrai des hommes, ils abusent
68 nt de plus de mépris que d’amour vrai des hommes, ils abusent de l’empire et de la condamnation style Saint-Just, bref, ils
69 ire et de la condamnation style Saint-Just, bref, ils rendent l’atmosphère révolutionnaire irrespirable, alors que justemen
70 tenaire d’un matérialisme d’ailleurs mal compris, ils ne bougent plus le petit doigt, s’arrêtent de penser et attendent l’a
71 ateur s’inquiète peu d’une discipline théorique ; elle trouve ses disciplines vivantes dans la résistance des faits, elle a
72 isciplines vivantes dans la résistance des faits, elle a son ressort dans la personne même, en tant que cette personne s’opp
73 ppose à toutes les abstractions systématiques, qu’ elles soient importées d’Amérique où elles sont mortelles, où de Russie, où
74 matiques, qu’elles soient importées d’Amérique où elles sont mortelles, où de Russie, où pour l’heure elles sont vitales, peu
75 les sont mortelles, où de Russie, où pour l’heure elles sont vitales, peu importe. Ce n’est pas la pureté d’une conception co
76 même une garantie révolutionnaire évidente. Seule elle sera capable d’entraîner les masses. Mais en voilà assez, n’abusons p
77 a nous être utile. Petits purs, petits purs, faut- il rire ou se fâcher ? Ceux qui se demandent si je suis bien « dans la l
78 rivé, tous ceux qui haïssent la religion parce qu’ elle les met à nu, prend en pitié leur sale caractère : tous ceux qui pour
79 s ceux qui poursuivent l’humanité de sarcasmes qu’ ils n’ont pas inventés, car la véritable invective n’est qu’une forme pol
80 forme polémique de la générosité. Hélas, fallait- il perdre une page à dire qu’ils ne méritent pas de vous dégoûter de la
81 sité. Hélas, fallait-il perdre une page à dire qu’ ils ne méritent pas de vous dégoûter de la Révolution, jeunes gens que la
3 1933, Articles divers (1932-1935). Sur un certain front unique (15 février 1933)
82 38). Bref, s’il y eut, à votre sens, « manœuvre » elle fut, comme vous le dites, « trop claire » pour qu’un esprit tel que l
83 bien que, sous la plume d’un stalinien de Paris, elle exprime le désir de déconsidérer à peu de frais l’adversaire, plutôt
4 1933, Articles divers (1932-1935). « La jeunesse française devant l’Allemagne » [Réponse à une enquête] (mai 1933)
84 l’entourent et qui la menacent. Tel est le fait. Elle souffre d’une carence aiguë de la jeunesse. C’est pourquoi le problèm
85 jamais garantie par la signature des vieillards ; elle repose sur la puissance révolutionnaire, c’est-à-dire sur la jeunesse
86 de la nation. Mais la jeunesse française existe-t- elle  ? On put le croire vers 1925. C’était, l’on s’en souvient, le temps d
87 e. Le désordre des choses s’imposait aux esprits, ils s’appliquaient à le refléter dans leurs œuvres ; un peu plus de viole
88 route n’est pas si pénible qu’on peut le croire : elle comporte moins de sacrifices que de prix littéraires et de coups de p
89 derrière. Cette jeunesse a terriblement vieilli : elle est déjà jeune-radicale. On dit aussi, je le sais bien, que l’idéolog
90 rine destinée à périr avec le système régnant, qu’ elle croit combattre, et dont elle figure le dernier stade de décompositio
91 système régnant, qu’elle croit combattre, et dont elle figure le dernier stade de décomposition spirituelle. Non, le problèm
92 se, le problème de notre révolution est ailleurs. Il est précis. Il se pose en termes historiques bien définis : c’est le
93 de notre révolution est ailleurs. Il est précis. Il se pose en termes historiques bien définis : c’est le problème de la
94 tie l’a sabotée, ruinée et trahie. De la personne elle a fait l’individu, ouvrant ainsi les voies aux collectivismes qui tri
95 pe de l’Est. De la patrie, centre de rayonnement, elle a fait la nation-carcan. Et de l’universalité de la personne, elle a
96 tion-carcan. Et de l’universalité de la personne, elle a permis qu’on tire l’internationalisme, c’est-à-dire la négation de
97 rdre spirituel, c’est-à-dire au bien du prochain. Elle sera au contraire la revendication universelle de l’humain contre tou
98 re de l’existence, contre toutes les tyrannies qu’ il s’impose en vertu du sadisme de la lâcheté. Telles sont les bases de
99 x qui veulent s’adresser à la jeunesse d’un pays. Ils trouveront enfin à qui parler. Le problème de notre attitude devant l
100 otons la guerre capitaliste. Par tous les moyens. Elle ne peut que retarder l’accession aux conflits nécessaires. f. Roug
5 1933, Articles divers (1932-1935). Positions d’attaque pour l’ordre nouveau (décembre 1933)
101 evendiquait récemment, à la suite de Marx, disait- il , « la précédence du matériel, l’antériorité de l’être par rapport à l
102 à la pensée ». En d’autres termes moins obscurs, il affirmait qu’il faut « commencer par le commencement ». Nous accepter
103 En d’autres termes moins obscurs, il affirmait qu’ il faut « commencer par le commencement ». Nous accepterons volontiers c
104 « les racines du malheur », c’est lui d’abord qu’ il faut détruire si l’on veut tuer ces racines et surtout empêcher qu’el
105 l’on veut tuer ces racines et surtout empêcher qu’ elles ne se reforment. La nécessité d’un travail doctrinal radical nous app
106 de notre ordre. Cet ordre est nouveau en ceci qu’ il ne peut être établi que par un changement de plan. Changer de plan, p
107 tes sont insolubles sur le terrain positiviste où ils les placent. Elles ne prennent leur vrai sens que dans le plan de la
108 es sur le terrain positiviste où ils les placent. Elles ne prennent leur vrai sens que dans le plan de la personne, où nous l
109 s prétendent, chacun à leur manière, le résoudre. Ils se disputent sur la manière. Mais leur dispute se passe sur un plan o
110 anière. Mais leur dispute se passe sur un plan où elle est par définition sans issue : le plan matérialiste. Qui pourra jama
111 absolument ce fameux minimum de vie nécessaire ? Il varie dans des proportions considérables selon la valeur morale des ê
112 e ; que seule la doctrine personnaliste, parce qu’ elle le transcende et le replace dans une totalité vivante, lui donne un s
113 t théorique que prend forcément cet exposé, et qu’ il perdrait si nous avions la place nécessaire pour développer. Nous nou
114 lle doctrine, voyons d’abord quelles institutions elle nous oblige à combattre et à renverser. Ce sont, en premier lieu, les
115 l’a-t-on vu ? qui l’a vu ? et comment existerait- il  ? C’est pourtant sur cet homme abstrait qu’est bâti tout le système d
116 uve à tous les étages du système. C’est à cause d’ elle qu’il s’écroulera. Il suffira sans doute d’indiquer ici notre opposit
117 us les étages du système. C’est à cause d’elle qu’ il s’écroulera. Il suffira sans doute d’indiquer ici notre opposition au
118 système. C’est à cause d’elle qu’il s’écroulera. Il suffira sans doute d’indiquer ici notre opposition au parlementarisme
119 vec des discours, mais bien en créant un monde où il apparaîtra sous son vrai jour, comme le conservatoire de la politique
120 unistes, figurants indispensables et inoffensifs. Il suffira de rappeler, d’autre part, que l’individualisme libéral est r
121 personne nous oppose à tout soviétisme stalinien. Il est trop facile, en effet, de distinguer dans le stalinisme un retour
122 ntenues dans la définition de l’individu libéral. Il nous est possible maintenant de désigner d’un seul mot l’objectif de
123 , c’est la lutte contre l’étatisme moderne tel qu’ il s’est constitué depuis Marx, phénomène beaucoup plus concret, plus un
124 e réaliser une révolution effective ? Ici encore, il nous faut nous borner à deux indications très générales : Dans le dom
125 peut-être de la voir si peu romantique. C’est qu’ il sévit actuellement, parmi certains groupes d’intellectuels, un vérita
126 ment. Mais pour que l’acte soit réel, encore faut- il une doctrine et des institutions qui le traduisent en faits. Les aris
127 us les hommes ou presque en demandent. Seulement, il en est d’injustifiés. Et c’est ce que nous voulons déterminer d’abord
128 de la croissance spontanée du mouvement ouvrier ; elle y fut le résultat naturel et fatal du développement de la pensée chez
129 ée chez les intellectuels.5 Peut-être ne serait- il pas inutile, pour conclure, de dégager clairement les thèses impliqué
130 Lénine, 1902.) 2° Dans l’état présent des choses, il n’y a pas d’ordre concevable sur le plan capitaliste, au déterminisme
131 urs États et de leurs frontières, on peut dire qu’ elles seront universelles, mais particulières. Alors seulement, au lieu de
132 ères. Alors seulement, au lieu de s’entrechoquer, elles devront se compléter. 5. Lénine : Que faire ? h. Rougemont Denis d
6 1933, Articles divers (1932-1935). Jeune Europe (4 décembre 1933)
133 e de l’Europe ait changé, depuis dix ans, plus qu’ il ne l’avait fait depuis Napoléon, c’est une évidence acquise et qui pe
134 dans les régimes fascistes ou soviétiques. C’est elle qui constitue leur parenté la plus profonde. Mais il y a entre ces tr
135 continent ? Est-ce une opération artificielle, qu’ il faudrait comparer à la chirurgie esthétique actuellement en vogue ? E
136 sèves saines ? Ce visage étrange de l’Europe est- il celui d’un nouveau venu, ou bien y distingue-t-on déjà, sous le fard,
137 apporte une réponse d’autant plus intéressante qu’ elle est très significative du nouvel état d’esprit de la jeunesse françai
138 rit de la jeunesse française. En effet, tandis qu’ il nous venait d’Allemagne et de Russie plusieurs livres fameux proclama
139 c un scepticisme plus ou moins sympathique ; mais elle n’avait pas répondu au défi qu’ils lui adressaient. MM. Dupuis et Mar
140 thique ; mais elle n’avait pas répondu au défi qu’ ils lui adressaient. MM. Dupuis et Marc comblent aujourd’hui une lacune q
141 s des revues comme L’Ordre nouveau ou Esprit . Ils ont voulu faire œuvre d’information d’abord mais aussi de critique co
142 n d’abord mais aussi de critique constructive, et ils s’expliquent très franchement là-dessus, dans une préface vigoureuse.
143 schématiser quelque peu leur doctrine, disons qu’ ils reprochent avant tout aux trois révolutions établies d’avoir « prémat
144 « prématurément » bouleversé un ordre social, qu’ elles n’étaient pas encore en mesure de rénover radicalement. Mal préparées
145 ssaire des solutions vraiment neuves et fécondes, elles devaient, dès la prise du pouvoir, dégénérer en dictatures. « L’État,
146 ce, dans des cadres bien plus rigides que ceux qu’ elle venait de renverser. Provisoirement, elle accepte de consacrer son en
147 ceux qu’elle venait de renverser. Provisoirement, elle accepte de consacrer son enthousiasme aux tâches de reconstruction qu
148 auraient être mises en doute. Mais qu’adviendra-t- il , le jour peut-être prochain où ces jeunes hommes s’apercevront que le
149 es jeunes hommes s’apercevront que les régimes qu’ ils servent, loin d’avoir créé un ordre nouveau, ont bien plutôt consolid
150 on que pouvait en permettre un sujet aussi vaste, ils ont réussi à brosser le panorama habilement suggestif, plein de vie e
7 1934, Articles divers (1932-1935). Carl Koch, Søren Kierkegaard (1934)
151 livre. Parfois, je le voudrais tout autre. Tel qu’ il est cependant, on n’en peut désirer de plus utile. Expliquons-nous. C
152 rtificiel de tous les ouvrages de Kierkegaard. Et il en a tiré la monographie la plus logique, la plus objective et la plu
153 c l’assesseur Wilhelm. Mais voilà justement ce qu’ il nous faut. Du personnage complexe de Kierkegaard, on nous a présenté
154 erkegaard est surtout un chrétien, et c’est ce qu’ il eût fallu montrer d’abord. Un chrétien peu rassurant, certes, et d’un
155 et d’une trempe exceptionnelle ; mais non tant qu’ il ne puisse « édifier » — pour user d’un vocable auquel il sut rendre u
156 uisse « édifier » — pour user d’un vocable auquel il sut rendre un sens énergique — le croyant le moins fait aux mystères
157 u’on aurait pu s’y prendre autrement. Après tout, il ne faut pas souhaiter à Kierkegaard une introduction systématique et
158 omme qui vient nous dire, en toute simplicité, qu’ il a vu l’événement, et qu’il en est encore tout remué. On le croira san
159 n toute simplicité, qu’il a vu l’événement, et qu’ il en est encore tout remué. On le croira sans peine : il n’a pas l’air
160 est encore tout remué. On le croira sans peine : il n’a pas l’air d’avoir pu inventer ce qu’il raconte. Cela donne envie
161 eine : il n’a pas l’air d’avoir pu inventer ce qu’ il raconte. Cela donne envie d’aller voir. Or, je tiens qu’il n’y a rien
162 e. Cela donne envie d’aller voir. Or, je tiens qu’ il n’y a rien de plus urgent pour nous que d’aller voir ce qui se passe
163 e mérite décisif de ce livre, c’est que peut-être il fera faite la moue aux spécialistes de l’histoire des systèmes, aux a
164 èmes, aux amateurs d’élégances formelles, mais qu’ il saura certainement émouvoir ceux qui cherchent à vivre leur pensée. «
165 ssablement Kierkegaard. C’est de toi, lecteur, qu’ il s’agit, et non pas d’un auteur nouveau. Koch n’a pas simplifié ce qui
166 ié ce qui n’est pas simple chez Kierkegaard, mais il a su le décrire sans pédantisme et sans littérature. Tant de biograph
167 une fois rétablie la perspective hors de laquelle il est impossible de rien comprendre à Kierkegaard — j’entends la perspe
168 ici un nouveau malentendu, d’autant plus grave qu’ il porterait cette fois sut le centre même de l’œuvre, et non plus sur l
169 en France. Carl Koch reproche à Kierkegaard ce qu’ il baptise, d’un terme impressionnant, son ascétisme antivital. Cet ascé
170 devint pas lui-même le « témoin de la vérité » qu’ il annonçait, mais resta simplement « un poète ». Double reproche, plus
171 rave que Koch ne veut le croire. C’est en vain qu’ il s’efforce tardivement d’en limiter la portée. La thèse extrême8 de Ki
172 ussi sa raison d’être et sa vocation prophétique. Il existe, dira Karl Barth, dont la théologie procède ici de Kierkegaard
173 de la mort au monde et à soi-même, bien plus, qu’ il la déclare antichrétienne ; cela ne prouve rien que l’on ne sût déjà 
174 éellement adopté et assimilé par la vie humaine ; il reste pour elle un paradoxe étrange et effrayant », s’écrie Carl Koch
175 té et assimilé par la vie humaine ; il reste pour elle un paradoxe étrange et effrayant », s’écrie Carl Koch, visiblement sc
176 chrétien sait que la vie de l’homme est au péché. Il sait aussi que le contraire du péché « ce n’est pas la vertu, mais la
177 enser, de trouver des raisons ? Ne sent-on pas qu’ elle est trop tiède, et propre au plus à écœurer celui qui veut non la dur
178 de la pensée, c’est de découvrir quelque chose qu’ elle ne puisse pas penser ». Il est curieux que les esprits moyens reproch
179 rir quelque chose qu’elle ne puisse pas penser ». Il est curieux que les esprits moyens reprochent aux grands de mépriser
180 exigence ? Nos vérités nous justifient, parce qu’ elles nous sont accessibles ; mais la vérité nous accuse, parce que nos dés
181 . Mais ce poète, ce penseur, dont on peut dire qu’ il mourut en martyr9 d’avoir défendu contre tous l’impossibilité humaine
182 us l’impossibilité humaine du témoignage, — n’a-t- il point, par sa mort justement, témoigné de la vérité ? 7. Tout cela,
183 dérik où Kierkegaard passa ses derniers jours : «  Il tient sa maladie pour mortelle ; sa mort serait nécessaire à l’accomp
184 ssaire à l’accomplissement de la tâche à laquelle il a consacré toute sa force intellectuelle et toute son œuvre… S’il ne
185 ute sa force intellectuelle et toute son œuvre… S’ il ne meurt pas, dit-il, il devra poursuivre sa lutte religieuse, mais e
186 tuelle et toute son œuvre… S’il ne meurt pas, dit- il , il devra poursuivre sa lutte religieuse, mais elle s’en trouvera aff
187 le et toute son œuvre… S’il ne meurt pas, dit-il, il devra poursuivre sa lutte religieuse, mais elle s’en trouvera affaibl
188 il, il devra poursuivre sa lutte religieuse, mais elle s’en trouvera affaiblie ; au contraire, sa mort lui assurera une forc
189 ort lui assurera une force nouvelle ; et, pense-t- il , la victoire. » l. Rougemont Denis de, Koch Carl, « [Préface] Carl
8 1934, Articles divers (1932-1935). « Pour qui écrivez-vous ? » [Réponse à une enquête] (janvier-février 1934)
190 nt de la Colère de Dieu, aussi de sa miséricorde. Il n’y a pas de communion humaine hors l’unanime attente trébuchante, ho
191 s appels à Luc, n’a pas répondu à notre question, il fait métier d’être incapable de répondre aux questions. Aussi quittan
192 ons. Aussi quittant le ton des prophètes ajoute-t- il à l’usage des importuns qui posent des questions un petit post-script
193 ur quelle espèce d’hommes on écrit, en fait, mais il faudrait des statistiques difficiles à établir. Par exemple : combien
9 1934, Articles divers (1932-1935). La Révolution nécessaire, par Arnaud Dandieu et Robert Aron (juin 1934)
194 es », comme on dit, ne possède pas d’économistes. Il entendait par là, bien entendu, des créateurs de valeurs neuves, ou m
195 ement, des hommes qui dominent les questions dont ils traitent. Car pour « l’économiste distingué », nous en sommes pourvus
196 On répondit à Berdiaev : mais nous avons Dandieu… Il nous reste, du moins, sa dernière œuvre. Aussi, les éléments d’une su
197 t que Robert Aron va mener à son termen. Telle qu’ il nous l’a laissée, l’œuvre d’Arnaud Dandieu apporte non seulement des
198 ssion de l’inhumaine « condition prolétarienne ». Il est bon de noter que cette conception dépasse les rêveries marxistes
199 prédilection. Mais voilà qui est plus important : elle se révèle immédiatement réalisable. Les travaux d’un groupe d’ingénie
200 l exemple du pouvoir des philosophes. Encore faut- il que les philosophes pensent dans le réel, c’est-à-dire dans l’actuali
201 s et tous nos prêtres de l’insoluble. Encore faut- il que les hommes de ce temps conservent dans leur cœur la volonté d’êtr
202 où l’on savait au moins, même en les adorant, qu’ elles se nourrissent du sang de l’homme. On pourrait montrer facilement, à
203 er certain public au détriment des principes dont elles procèdent, et qui sont à mes yeux beaucoup plus graves et significati
204 rsonnel, quitte à se lamenter sur le monde tel qu’ il va, — il faudrait dire : tel qu’on le laisse aller. Craignons que ce
205 quitte à se lamenter sur le monde tel qu’il va, —  il faudrait dire : tel qu’on le laisse aller. Craignons que ce mépris, t
206 de s’opposer. À force de considérer d’une part qu’ il n’est d’autre révolution que la révolution matérialiste, à force d’au
207 L’Aube au Figaro , les en félicitent gravement.) Il faut rendre à Dandieu cette justice11 que le « contresens habituel su
208 ’origine même du désordre actuellement établi, qu’ il se dénomme ordre bourgeois ou dictature. Ce processus peut apparaître
209 re assez paradoxal. Pour en découvrir la logique, il suffit pourtant d’étudier la marche des révolutions bourgeoise et pro
210 ationaliste. Pourquoi les révolutions aboutissent- elles à des dictatures, c’est-à-dire à la négation de leur élan originel, a
211 lan originel, an-archique, antiétatiste. Parce qu’ elles reposent l’une et l’autre, sur des constructions rationalistes qui ne
212 tique l’échec d’une révolution qui ne sait pas où elle va. » Cartésienne ou hégélienne, la dialectique sur laquelle se fonde
213 cte, non de l’acte lui-même. Au moment de sauter, elles hésitent et reculent. Elles tombent alors dans l’illusion d’une synth
214 Au moment de sauter, elles hésitent et reculent. Elles tombent alors dans l’illusion d’une synthèse qu’elles veulent croire
215 s tombent alors dans l’illusion d’une synthèse qu’ elles veulent croire transitive, conciliant les contradictions réelles sur
216 l vient s’incarner dans notre génération. Saura-t- elle le pousser jusqu’à ses confins créateurs, — ou va-t-elle, une fois de
217 pousser jusqu’à ses confins créateurs, — ou va-t- elle , une fois de plus, s’endormir dans le rêve d’un « troisième terme » d
218 herchons plutôt les conflits vitaux pour lesquels elles furent inventées. La sémantique ainsi comprise peut être une science
219 ême à l’intérieur de lui-même », écrit Fernandez. Il en déduit naturellement que « la personnalité concrète peut se réalis
220 dez, que l’homme intérieur de l’idéalisme, puisqu’ elle est à la fois conquête et rencontre, engagement et actualité. Une per
221 e14 de la personne telle que nous la définissons. Elle n’est pour lui qu’un mythe, dont il met en doute la puissance de soul
222 éfinissons. Elle n’est pour lui qu’un mythe, dont il met en doute la puissance de soulèvement. « On comprend qu’un bourgeo
223 ue sa peau pour la sauver : on ne comprend pas qu’ il s’arrache la peau dans l’espoir qu’une meilleure lui pousse. » Fernan
224 ogie du bourgeois, animal visqueux et féroce dont il me semble que Léon Bloy a donné la description la plus exacte. (Il fa
225 Léon Bloy a donné la description la plus exacte. ( Il faudrait être Bloy pour montrer comment cette « peau » du bourgeois p
226 comment cette « peau » du bourgeois pour laquelle il mourrait, dit-on, ne peut être qu’un symbole de son argent.) Mais ce
227 mi nous, tiennent encore à être des hommes. 10. Il faut même noter que le chapitre intitulé Échange et Crédit bouleverse
228 plus encore que de l’écriture, d’Aron et Dandieu. Il faudrait pouvoir citer ici la page finale que Dandieu ajouta de sa ma
229 ris de toute rhétorique. 13. « La Révolution est- elle nécessaire ? », NRF de janvier 1934. L’article est d’ailleurs sympath
230 nvier 1934. L’article est d’ailleurs sympathique. Il a surtout le grand mérite d’aller droit aux problèmes réels que pose
10 1934, Articles divers (1932-1935). Où sont les jeunes protestants ? Remarques sur le protestantisme et les doctrines politiques (juillet-août 1934)
231 octrines politiques (juillet-août 1934)o Y a-t- il des jeunes protestants ? Cette enquête le démontrera sans doute. Il f
232 estants ? Cette enquête le démontrera sans doute. Il faut avouer pourtant qu’il n’est pas très facile de repérer leurs pos
233 démontrera sans doute. Il faut avouer pourtant qu’ il n’est pas très facile de repérer leurs positions, sur le plan de l’ac
234 ire En dépit de certaine polémique bourgeoise, il n’existe pas de théorie du désordre. Toute doctrine sociale, fût-elle
235 théorie du désordre. Toute doctrine sociale, fût- elle la plus subversive, est la doctrine d’un certain ordre terrestre, d’u
236 rrestre suppose une conception de l’homme, tel qu’ il est ou tel qu’il devrait être. Tel qu’il est : c’est la conception r
237 ne conception de l’homme, tel qu’il est ou tel qu’ il devrait être. Tel qu’il est : c’est la conception réactionnaire, ou
238 tel qu’il est ou tel qu’il devrait être. Tel qu’ il est : c’est la conception réactionnaire, ou statique, la politique de
239 e, une politique de la camisole de force. Tel qu’ il devrait être : c’est la conception révolutionnaire, ou dynamique, la
240 omme est une bête, que c’est là son partage et qu’ il faut s’y tenir. À gauche, on dit que si l’homme est une bête, son but
241 faire l’ange fait la bête. »16 Qu’est l’homme ? Il ne se connaît pas. L’Évangile le révèle à lui-même, comme perdu, et p
242 Ainsi l’homme n’est humain que dans un paradoxe ; il est perdu lorsqu’il se croit sauvé, il est sauvé lorsqu’il se sait pe
243 humain que dans un paradoxe ; il est perdu lorsqu’ il se croit sauvé, il est sauvé lorsqu’il se sait perdu. Je dis que seul
244 paradoxe ; il est perdu lorsqu’il se croit sauvé, il est sauvé lorsqu’il se sait perdu. Je dis que seul ce paradoxe le fai
245 rdu lorsqu’il se croit sauvé, il est sauvé lorsqu’ il se sait perdu. Je dis que seul ce paradoxe le fait humain : car si l’
246 ain : car si l’homme peut se voir perdu, c’est qu’ il croit, c’est qu’il est dans la foi ; mais être dans la foi, c’est fai
247 e peut se voir perdu, c’est qu’il croit, c’est qu’ il est dans la foi ; mais être dans la foi, c’est faire la volonté de Di
248 aits qui nous serviront de critères : d’une part, elle est seule humaine, au sens évangélique du terme ; d’autre part, elle
249 ine, au sens évangélique du terme ; d’autre part, elle est intenable. Elle est seule humaine, parce que seule elle pose la q
250 ique du terme ; d’autre part, elle est intenable. Elle est seule humaine, parce que seule elle pose la question dernière du
251 ntenable. Elle est seule humaine, parce que seule elle pose la question dernière du destin de l’homme, en même temps qu’elle
252 n dernière du destin de l’homme, en même temps qu’ elle connaît et saisit l’homme dans sa condition actuelle. Mais il faut sa
253 t saisit l’homme dans sa condition actuelle. Mais il faut savoir aussi qu’elle est intenable, parce que les ordres de la f
254 condition actuelle. Mais il faut savoir aussi qu’ elle est intenable, parce que les ordres de la foi sont toujours imprévisi
255 i sont toujours imprévisibles, instantanés, et qu’ ils ne souffrent point d’être d’avance limités par un système, par un pro
256 er les moyens. Ou encore : pour le politique pur, il s’agit toujours d’un ordre établi ou d’un ordre à établir. Pour le cr
257 établi ou d’un ordre à établir. Pour le croyant, il ne s’agit, d’abord, que d’un ordre reçu. Mais dès que l’ordre est vér
258 s que l’ordre est véritablement reçu, et accepté, il s’agit de l’exécuter. L’ordre reçu par le chrétien est dans l’instant
259 olitique est dans l’histoire, dans la durée. Mais il faut que l’ordre reçu s’insère aussitôt dans l’histoire ; et le probl
260 ôt dans l’histoire ; et le problème des moyens, s’ il doit rester subordonné à l’origine et à la fin, en est cependant insé
261 rigine et à la fin, en est cependant inséparable. Il est donc non seulement possible, mais nécessaire, que le chrétien pre
262 nne position en présence des partis politiques. S’ il rejette les partis pris, c’est qu’il doit sans cesse, à nouveau, pren
263 olitiques. S’il rejette les partis pris, c’est qu’ il doit sans cesse, à nouveau, prendre parti. Comme le réactionnaire, il
264 à nouveau, prendre parti. Comme le réactionnaire, il veut connaître l’homme tel qu’il est — seulement il le connaît mieux.
265 e réactionnaire, il veut connaître l’homme tel qu’ il est — seulement il le connaît mieux. Comme le marxiste, il sait que s
266 veut connaître l’homme tel qu’il est — seulement il le connaît mieux. Comme le marxiste, il sait que sa doctrine n’a pas
267 seulement il le connaît mieux. Comme le marxiste, il sait que sa doctrine n’a pas à expliquer le monde, mais à le transfor
268 quer le monde, mais à le transformer — seulement, il sait que cette transformation s’appelle le Royaume de Dieu, non le ro
269 oyaume de l’homme moyen. Contre le réactionnaire, il affirme que l’ordre établi ne saurait être en aucun cas définitif ni
270 n cas définitif ni suffisant. Contre le marxiste, il affirme que l’évolution nécessaire n’entraîne pas une amélioration du
271 ment au paradis terrestre. Aux uns et aux autres, il reproche de déshumaniser l’homme, par ignorance de sa nature véritabl
272 a personne par rapport à l’ensemble ; mais encore il pourra et devra affirmer que la seule communauté réelle et humainemen
273 de L’Écho de Paris. Du point de vue de notre foi, il me semble d’ailleurs qu’une position monarchiste peut être justifiée
274 es économiques qui nous pressent. Un chrétien a-t- il le droit de rêver ? Que faire alors, dans l’état de choses qui s’offr
275 ? Et toute activité auprès des ouvriers ne pose-t- elle pas des problèmes de doctrine économique et sociale qu’on ne saurait
276 ion est l’expression d’une vocation particulière, elle tend à échapper à la politique et sort du domaine de cette enquête. D
277 rt du domaine de cette enquête. Dans la mesure où elle devient l’expression d’un mouvement, le moins qu’on en puisse dire, c
278 ouvement, le moins qu’on en puisse dire, c’est qu’ elle est dangereusement insuffisante : elle impliquerait, en effet, logiqu
279 , c’est qu’elle est dangereusement insuffisante : elle impliquerait, en effet, logiquement, bien d’autres objections au régi
280 grave critique d’incohérence et de sectarisme qu’ il faudrait sans cela leur adresser. L’attitude des objecteurs porte à s
281 trême le paradoxe défini dans ma première partie. Elle ne saurait être mise en symétrie avec aucune des autres attitudes que
282 c aucune des autres attitudes que j’ai indiquées. Elle comporte un risque, un engagement concret, un acte de foi, qui transc
283 nscendent le plan de toute doctrine sociale. Mais il fallait en parler ici : elle marque le pôle du refus, dans notre « po
284 doctrine sociale. Mais il fallait en parler ici : elle marque le pôle du refus, dans notre « politique du pessimisme actif »
285 ttitude chrétienne devant les exigences de César. Elles sont en singulière consonance avec les principes directeurs de deux m
286 e gauche également condamnées. Par ce seul refus, elles opèrent déjà ce que le vocabulaire de l’Ordre nouveau nomme un « chan
287 e plan », — c’est-à-dire un acte révolutionnaire. Elles se dressent ainsi contre le préjugé le plus nocif de la mentalité pol
288 té politique française. C’est un volume entier qu’ il faudrait consacrer à la critique des méfaits de ce préjugé, si profon
289 nquis déjà d’innombrables adhésions, si seulement elles s’étaient données pour des doctrines de droite, ou de gauche. Mais c’
290 où les malentendus, parfois bien réjouissants, qu’ ils ont provoqués de tous côtés. « Petits penseurs qui travaillent pour l
291 ulture bourgeoise et de la distinction commode qu’ elle suppose et implique entre la pensée et l’action. 2. Quelques affirmat
292 mation de la primauté nécessaire du spirituel (qu’ ils définissent d’ailleurs assez diversement) ; affirmation de la nécessi
293 issent l’attitude spirituelle des jeunes groupes. Ils indiquent assez la nouveauté de leur point de départ. Alors que les p
294 moins bruyant et moins démagogique, le combat qu’ ils mènent est beaucoup plus radical au sens étymologique du terme : c’es
295 ymologique du terme : c’est aux racines du mal qu’ ils s’attaquent. D’où leur force d’entraînement lente et profonde, dont l
296 ent de la crise confirmera leurs prévisions. Mais il ne suffit pas qu’un point de départ soit juste. Il faut encore partir
297 l ne suffit pas qu’un point de départ soit juste. Il faut encore partir, — sinon le point de départ se transforme en un si
298 lus pour flatter la jeunesse, mais la jeunesse qu’ ils ont atteinte n’est pas celle qui voulait être flattée. Et ce n’est pa
299 rd, Économique ensuite, Politique à leur service. Il est facile d’indiquer rapidement le principe de cohésion de ces trois
300 utions. Telle est la « primauté du spirituel » qu’ il ne cesse d’invoquer au risque, il faut le dire, de créer provisoireme
301 spirituel » qu’il ne cesse d’invoquer au risque, il faut le dire, de créer provisoirement, dans certains cerveaux, les pl
302 ves malentendus. On a cru, ou feint de croire, qu’ il ne s’agissait là que d’un « spiritualisme ». De même, on a trop souve
303 cette affirmation dans la revue Esprit . S’agit- il là, encore, du spirituel comme acte ? Certes, Emmanuel Mounier, direc
304 n’a rien de commun avec cela qu’ont voulu voir en elle les critiques de droite et de gauche, victimes de la confusion que j’
305 ’acte personnel — et cette nuance est capitale —, il est incontestable que l’« esprit » d’ Esprit est d’inspiration spéci
306 un ambitieux effort de reconstruction culturelle. Il faut citer ici les numéros volumineux consacrés à la question du Trav
307 pauvre, misère du riche. Un tel titre n’évoque-t- il pas un souvenir fameux ? Cette revue jouera-t-elle un rôle comparable
308 -il pas un souvenir fameux ? Cette revue jouera-t- elle un rôle comparable à celui des Cahiers de la quinzaine ? Elle a su se
309 comparable à celui des Cahiers de la quinzaine ? Elle a su se garder assez bien de la démagogie, des à peu près journalisti
310 L’Ordre nouveau, ce n’est pas seulement parce qu’ ils sont appelés à jouer un rôle de plus en plus important dans la vie po
311 défend d’aborder aucune question confessionnelle. Il n’en reste pas moins que le fondement spirituel commun à ces deux gro
312 st pas de celles que l’on met en systèmes. Le fût- elle , leur très petit nombre les empêcherait d’imposer ce parti à l’ensemb
313 stial » en ses débuts que la doctrine libérale qu’ il renverse était plus « angélique » dans ses prétentions. 17. Et depui
314 ue « Nous voulons ». Inspirés par l’Ordre nouveau ils sont cependant autonomes. 18. Titre d’un essai d’Arnaud Daudin et D.
11 1934, Articles divers (1932-1935). Jeunesse déracinée (novembre 1934)
315 qu’on leur offre ne sont guère plus reluisantes : ils n’ont plus le temps de se cultiver, ils ne trouvent pas de situations
316 isantes : ils n’ont plus le temps de se cultiver, ils ne trouvent pas de situations… Arguments justes peut-être, pour certa
317 n homme à une patrie concrète, si restreinte soit- elle . Il n’y aura plus le frein à l’entraînement de la vie citadine ; à ce
318 e à une patrie concrète, si restreinte soit-elle. Il n’y aura plus le frein à l’entraînement de la vie citadine ; à cette
319 par un milieu qu’on se prend à mépriser parce qu’ il vous tient. Neurasthénie. Il y a aussi ces comparaisons qui s’imposen
320 ré comme un élément « de rapport », balayé dès qu’ il ne rapporte plus à temps. Nomadisme. Et derrière la concierge, derriè
321 r leur opposition à l’ordre qui les moleste. Mais il s’agit ici de gens habitués à conduire leurs affaires. Ils ne se cont
322 t ici de gens habitués à conduire leurs affaires. Ils ne se contenteront pas de dire un non désespéré. Ils chercheront un n
323 ne se contenteront pas de dire un non désespéré. Ils chercheront un nouvel ordre. Leur communauté sera donc une communauté
324  ? Le mot nation dans son acception moderne n’a-t- il pas désigné d’abord l’idéal de la Révolution française, une communaut
325 et l’échec des « Wandervogel » est significatif. Ils se disaient les « oiseaux migrateurs ». Ce nom même indiquait leur or
326 se résoudre l’angoissant problème des cités. Mais il faudrait d’abord transformer la province et la rendre habitable… Il f
327 d transformer la province et la rendre habitable… Il faudrait recréer un lien patriotique sans rien perdre du dynamisme « 
328 tique sans rien perdre du dynamisme « national ». Il faudrait un régime qui sauvegarde la tension nécessaire et féconde en
12 1935, Articles divers (1932-1935). Mystère de la Vision (fragments d’un Traité de la vision physionomique du monde) (mars 1935)
329 sion relie et sépare. Passant du sujet à l’objet, elle les unit dans le temps même qu’elle les distingue. Car si l’œil se co
330 et à l’objet, elle les unit dans le temps même qu’ elle les distingue. Car si l’œil se conforme à ce qu’il voit, il sait auss
331 e les distingue. Car si l’œil se conforme à ce qu’ il voit, il sait aussi qu’il voit, et mesure la distance. Ainsi, franchi
332 tingue. Car si l’œil se conforme à ce qu’il voit, il sait aussi qu’il voit, et mesure la distance. Ainsi, franchissant les
333 œil se conforme à ce qu’il voit, il sait aussi qu’ il voit, et mesure la distance. Ainsi, franchissant les frontières, il l
334 la distance. Ainsi, franchissant les frontières, il les délimite à nouveau. La vision est passage et frontière, et lieu d
335 eu de contact des extrêmes dont on ne sait plus s’ ils s’opposent ou s’ils s’appuient l’un contre l’autre. Elle est drame, e
336 trêmes dont on ne sait plus s’ils s’opposent ou s’ ils s’appuient l’un contre l’autre. Elle est drame, elle est événement. E
337 opposent ou s’ils s’appuient l’un contre l’autre. Elle est drame, elle est événement. Elle ne connaît rien que des formes, e
338 s s’appuient l’un contre l’autre. Elle est drame, elle est événement. Elle ne connaît rien que des formes, et ne croit rien
339 ntre l’autre. Elle est drame, elle est événement. Elle ne connaît rien que des formes, et ne croit rien que ce qui apparaît.
340 croit rien que ce qui apparaît. « Rien n’est, dit- elle qui ne se manifeste ». C’est pourquoi dans le monde de la vision, il
341 ste ». C’est pourquoi dans le monde de la vision, il n’y a ni mensonge ni feintes ; rien qui se cache ou rien qui s’exagèr
342 de « moral » — ou d’immoral. Et l’illusion lorsqu’ elle se risque à subsister dans la lumière est prise impitoyablement pour
343 s la lumière est prise impitoyablement pour ce qu’ elle est, c’est-à-dire pour ce qu’elle paraît. N’est-ce pas ainsi que meur
344 ment pour ce qu’elle est, c’est-à-dire pour ce qu’ elle paraît. N’est-ce pas ainsi que meurt une illusion ? Or toutes ces cho
345 et de la sorte, s’en distingue, rappelons-nous qu’ elle a son siège au centre même du visage. Sans visage il n’est plus de vi
346 a son siège au centre même du visage. Sans visage il n’est plus de vision. Ou l’inverse. Ainsi le je et le tu sont distinc
347 insi le je et le tu sont distincts, sans lesquels il n’est pas d’amour. Mais si leur être est justement l’amour ? Peut-on
348 hologues ! Mais aux dépens de quoi s’installaient- ils  ? Entre l’aspect spirituel et l’aspect matériel de l’homme, il existe
349 aspect spirituel et l’aspect matériel de l’homme, il existe deux traits d’union : la vue et la parole, la vision et l’ente
350 es deux antagonistes : de leur permettre, pensait- il , de « s’expliquer », mais comme on fait devant un tribunal, — et ce n
351 tait rien que leur faiblesse. Mais aujourd’hui qu’ ils relèvent la tête, le psychologue se voit en mauvaise posture : car le
352 les uns le méprisent, et les autres — le mangent. Il sera donc mangé, et le drame pourra se poursuivre24. Ceci soit dit po
353 pas une sensation, mais un décret de l’intellect. Il n’y a pas de sensations, il n’y a pas d’images, il n’y a pas d’associ
354 écret de l’intellect. Il n’y a pas de sensations, il n’y a pas d’images, il n’y a pas d’associations mentales : il n’y a q
355 l n’y a pas de sensations, il n’y a pas d’images, il n’y a pas d’associations mentales : il n’y a que des jugements. Toute
356 d’images, il n’y a pas d’associations mentales : il n’y a que des jugements. Toute pensée est « judicatoire », et tout, e
357  ! Une fois rendus à qui de droit les honneurs qu’ il avait empruntés, le psychologue se voit restitué dans son rôle de sim
358 ue justice. Que nous apprend l’observation lorsqu’ elle se porte sur l’acte même de la vision ? Selon que l’homme qui regarde
359 gard saisira des aspects différents. Supposons qu’ il contemple un paysage. S’il est un grand poète, il y verra des mythes,
360 fférents. Supposons qu’il contemple un paysage. S’ il est un grand poète, il y verra des mythes, et s’il est un littérateur
361 il contemple un paysage. S’il est un grand poète, il y verra des mythes, et s’il est un littérateur de l’espèce par exempl
362 l est un grand poète, il y verra des mythes, et s’ il est un littérateur de l’espèce par exemple d’Amiel, il n’y verra qu’u
363 t un littérateur de l’espèce par exemple d’Amiel, il n’y verra qu’un état d’âme ; s’il est un général, il ne verra qu’un c
364 xemple d’Amiel, il n’y verra qu’un état d’âme ; s’ il est un général, il ne verra qu’un champ de manœuvres ; s’il est un in
365 n’y verra qu’un état d’âme ; s’il est un général, il ne verra qu’un champ de manœuvres ; s’il est un ingénieur, un territo
366 général, il ne verra qu’un champ de manœuvres ; s’ il est un ingénieur, un territoire à exploiter ; s’il fuit la société de
367 l est un ingénieur, un territoire à exploiter ; s’ il fuit la société de ses semblables, il verra des retraites solitaires,
368 ploiter ; s’il fuit la société de ses semblables, il verra des retraites solitaires, et s’il la cherche, un désert qu’il f
369 mblables, il verra des retraites solitaires, et s’ il la cherche, un désert qu’il faut fuir. Ainsi, selon que l’homme doit
370 ites solitaires, et s’il la cherche, un désert qu’ il faut fuir. Ainsi, selon que l’homme doit y entrer ou qu’il le quitte,
371 uir. Ainsi, selon que l’homme doit y entrer ou qu’ il le quitte, ou qu’il le voit par la portière de son wagon, le paysage
372 e l’homme doit y entrer ou qu’il le quitte, ou qu’ il le voit par la portière de son wagon, le paysage n’est pas le même ;
373 lle de l’Incarnation, est dominée par la vision ; il semble que tout s’y ramène à l’opposition des ténèbres et de la lumiè
374 ques-unes des relations que je viens de désigner, il n’est pas superflu de recourir à ces « origines » sacrées, comme à un
375 ise a déjà, dans son cœur, commis l’adultère avec elle . » (Matt. 5. 28) Sur la vision qui est transformation : « Nous serons
376 semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’ il est. » (I. Jean 3.2) « L’homme nouveau se renouvelle dans la connaiss
377 la question de notre psychologue — sinon celle qu’ il se pose, du moins celle qu’il se trouve nous poser — sur le sens dern
378 ue — sinon celle qu’il se pose, du moins celle qu’ il se trouve nous poser — sur le sens dernier du jugement, toute la méta
379 ement, toute la métaphysique chrétienne, et après elle toute philosophie qui postule la transcendance de l’éternel, réponden
380 Celle peut-être à laquelle répond l’apôtre lorsqu’ il écrit : « Je connaîtrai comme j’ai été connu ». Au commencement es
381 On ne voit que ce qui est vu. Mais peut-être faut- il aller plus loin : on ne voit rien que ce qui voit. Car seule est visi
382 cher, aussitôt se meut et se forme, et de même qu’ elle a été « connue » par la lumière, de même elle devient à nos yeux reco
383 qu’elle a été « connue » par la lumière, de même elle devient à nos yeux reconnaissable. Il n’est pas d’autre mouvement que
384 , de même elle devient à nos yeux reconnaissable. Il n’est pas d’autre mouvement que cet élan vers la lumière — ou pour la
385 ère créatrice. « L’œil ne verrait pas le soleil s’ il n’était de nature solaire », dit Goethe. Une telle parole devance not
386 la contemplation de la Face de Dieu, le second qu’ elle réside in amore ? N’était-ce pas se tromper à la fois sur la nature d
387 aimer. Et nulle vision ne serait « admirable » si elle n’était en même temps transformation, mouvement de l’amour. Augustin
388 , je vous ai aimée : car personne ne vous aime, s’ il ne commence par vous voir, et personne ne vous voit, si ce n’est celu
389 par la vue », nous dit saint Paul. La foi serait- elle donc négation de la vision ? Ou la vie éternelle, négation de l’incar
390 notre être et que voient « les yeux de la foi », il semble que notre visage n’en soit qu’une mauvaise épreuve, déjà brûlé
391 ville, à la recherche d’une illusion de soi-même. Il faut une force qui le braque, une école sévère et un maître. Car celu
392 rante, cette action d’espérance, voilà le sens qu’ il faut donner à l’imagination qui crée. Si l’imagination n’est pas ce f
393 ion dont tous les termes sont problématiques ; si elle n’est pas non plus ce rêve de l’indiscret, ou cette revanche sur le r
394 de l’indiscret, ou cette revanche sur le réel qu’ elle figure aux yeux du romantique ; si elle est au contraire une force co
395 e réel qu’elle figure aux yeux du romantique ; si elle est au contraire une force concrète, elle est cela : une vision d’esp
396 ue ; si elle est au contraire une force concrète, elle est cela : une vision d’espérance, un prolongement, une marche vers l
397 mation ; et c’est alors, mais alors seulement, qu’ elle peut poursuivre sans s’égarer dans la nuit. La loi de formation : le
398 tes les formes que nous offre la face de l’homme, il faut entendre qu’elle reste symbolique d’une certaine image du monde,
399 ous offre la face de l’homme, il faut entendre qu’ elle reste symbolique d’une certaine image du monde, dont elle ne saurait
400 te symbolique d’une certaine image du monde, dont elle ne saurait constituer le centre ni le fondement causal, mais au sein
401 entre ni le fondement causal, mais au sein duquel elle demeure cependant le cas privilégié par excellence. Au cours des page
402 nt le péché rend le regard trouble et menteur, qu’ il nous faut attacher nos yeux non plus sur les idées en tant que telles
403 is même promise à une prochaine renaissance. Mais il importe d’en marquer le danger, disons plus : le péché, qui l’a stéri
404 sons plus : le péché, qui l’a stérilisée avant qu’ elle eût développé tous les effets que les acquisitions modernes nous auto
405 taille admirablement les motifs, mais ce faisant, il détend les ressorts de l’imprévisible événement — tensions instituées
406 t ramené à la parole, à l’anecdote. Quant à nous, il nous faut choisir : ou l’anecdote, ou le visage. L’expérience montre
407 e est donc devenue personnelle, et c’est pourquoi il nous faut la chercher dans la vocation créatrice, non plus dans cette
408 iale impersonnelle que représente la raison. Faut- il conclure que notre esprit qu’on dit « latin » est incapable de s’assi
409 rait oublier Léonard et son génie physionomiste. Il garde cet esprit symbolique — écrit Paul Valéry dans sa fameuse Intro
410 et qui grandit selon l’extension de son domaine… Il est le maître des visages, des anatomies, des machines. Il sait de qu
411 maître des visages, des anatomies, des machines. Il sait de quoi se fait un sourire ; il peut le mettre sur la face d’une
412 es machines. Il sait de quoi se fait un sourire ; il peut le mettre sur la face d’une maison, aux plis d’un jardin… Et e
413 je souligne dans le texte de Paul Valéry ne sont- ils pas l’éblouissante formule d’une image physionomique de l’univers ? O
414 en musique les hommes se laissent aller parce qu’ ils se figurent qu’il n’y a personne qui soit capable de les voir, sous l
415 mes se laissent aller parce qu’ils se figurent qu’ il n’y a personne qui soit capable de les voir, sous leur musique) (p. 1
416 montagne, et comme sur tout cela, par son regard, il exerce sa puissance et sa conquête… Et le Zarathoustra ! Une œuvre p
417 Et le Zarathoustra ! Une œuvre plus concrète a-t- elle donc vu le jour depuis les temps du Livre de Job, de ce profond trait
418 compris, souffrent du même vice de constitution : elles considèrent les faits psychiques indépendamment de la personne, comme
419 dépendamment de la personne, comme des cas. Ainsi elles laissent perdre l’humain, elles sortent du concret, — du drame. 25.
420 me des cas. Ainsi elles laissent perdre l’humain, elles sortent du concret, — du drame. 25. M. Spaier, dans la Pensée concrè
421 e saint Augustin, chapitre XXXI. 30. « N’advient- il pas aussi, parmi les hommes, lorsque l’un d’eux regarde l’autre réell
422 que l’un d’eux regarde l’autre réellement, tel qu’ il est dans le mouvement de sa forme en devenir, que d’une manière étran
423 n devenir, que d’une manière étrange et délicate, il l’aide à parvenir à soi-même, en sorte que la force de l’imagination
424  ? » (Th. Spoerri : Über Einbildung, p. 25.) 31. Il convient de débarrasser ce mot de tout pathos romantique. Le drame, c
425 se passe fort bien d’appréciations sentimentales. Il est d’ailleurs d’autant moins « terrifiant » qu’on y est plus réellem
13 1935, Articles divers (1932-1935). Les autres et nous : I — Esprit (avril 1935)
426 n’ambitionne pas d’aboutir à des constructions. Il n’en reste pas moins que les années d’avance qu’a prises L’ON lui p
427 truire. Nous poussons notre pointe dans l’avenir. Il est bon, et sans aucun doute nécessaire, que d’autres s’occupent d’él
14 1935, Articles divers (1932-1935). Nous ne mangeons pas de ce pain-là : à propos du 14 juillet (15 juillet 1935)
428 s-culottes comprennent : « Vive la Révolution ! » Ils ont raison. Pour nous, la vraie nation française c’est la communauté
429 pparence seulement) un seul et même but concret : ils veulent une dictature, un « état fort ». La dictature mène à la guerr
430 La dictature mène à la guerre entre autres. Faut- il préciser contre qui ? Leurs intérêts pratiques se rejoignent très bie
431 ignent très bien par-delà les massacres de rue qu’ ils nous préparent, — par-dessus la tête de leurs troupes. Nous nous batt
15 1935, Articles divers (1932-1935). Montherlant : Service inutile (15 novembre 1935)
432 de son temps durant ces dix dernières années, est- il bien nécessaire à ce beau livre33. Je crois que Montherlant se fait d
433 is que Montherlant se fait du tort chaque fois qu’ il entreprend de s’expliquer : on ne lui en demande pas tant, ou plutôt
434 mande beaucoup plus : ces romans ou ces pièces qu’ il tient dans ses tiroirs. Qu’il se moque de ce qu’on pense de sa condui
435 ns ou ces pièces qu’il tient dans ses tiroirs. Qu’ il se moque de ce qu’on pense de sa conduite, c’est parfait ; qu’il le d
436 ce qu’on pense de sa conduite, c’est parfait ; qu’ il le dise, c’est moins bien. Quoi qu’il en soit, retenons de cette préf
437 arfait ; qu’il le dise, c’est moins bien. Quoi qu’ il en soit, retenons de cette préface sa morale : « Dès l’instant où l’o
438 ve gentille, et aussi, disons-le, de courage, car il en faut pour ne montrer que du bon sens en ces matières. Deux morceau
439 s ont l’air de haïr davantage la cause adverse qu’ ils n’aiment la leur.) Quelle est l’attitude pratique que Montherlant a c
440 lant a cru bon d’adopter ? C’est celle du clerc — il dirait : du poète —, qui se réserve pour son œuvre, estimant s’acquit
441 e, estimant s’acquitter de la sorte de tout ce qu’ il doit, en principe, à César. Sans préjudice d’une prise de position oc
442 cette vanité finale n’empêche pas de servir quand il faut. C’est ce que j’appelle du pessimisme actif. Et c’est la devise
443 n d’espérer pour entreprendre… » Mais encore faut- il entreprendre. D’abord servir, sachant que c’est inutile ; ensuite per
444 de cette œuvre, ou l’objectif de cette action, qu’ il importe avant tout de connaître. Et non pas seulement que l’auteur a
445 u’à bon escient. À quoi Montherlant répondrait qu’ il n’écrit pas pour défendre ceci ou cela, mais parce qu’il a envie d’éc
446 rit pas pour défendre ceci ou cela, mais parce qu’ il a envie d’écrire. (On le lui pardonne mieux qu’à d’autres). « Les œuv
447 art, ne faire que ce qui lui est agréable. Ce qu’ il ferait dans d’autres conditions serait mal fait. » Est-ce que ce beau
448 e ne prête pas ici à confusion ? L’on croirait qu’ il s’agit simplement de ce qui peut amuser l’auteur. Mais « un écrivain
449 l’amuse, c’est peut-être zéro pour le lecteur. S’ il a le droit de déconcerter, c’est pour mieux souligner ce qu’il apport
450 de déconcerter, c’est pour mieux souligner ce qu’ il apporte ; et c’est sur cela seul qu’on le jugera. Je veux savoir pour
451 régime !) et de qualifier d’inutile un service qu’ il faudrait d’abord rendre. Je force un peu mon objection pour être clai
452 recueil n’apporte rien de positif, comme on dit. Il apporte d’abord un ton, ce n’est pas peu, si ce n’est pas toujours as
453 ce n’est pas peu, si ce n’est pas toujours assez. Il apporte une qualité morale, une propreté et une franchise qui rafraic
454 araît le craindre Montherlant. « Pourquoi n’y a-t- il pas une École de bonheur ? au lieu des écoles de latin et de droit :
455 n a qualifié d’homme de la Renaissance, ne serait- il pas tout aussi bien — s’il refuse le siècle précédent — un contempora
456 Renaissance, ne serait-il pas tout aussi bien — s’ il refuse le siècle précédent — un contemporain spirituel de cet « homme
457 uissance me promet d’être heureux, ce qui fait qu’ il ne me coûte pas d’en être aussitôt privé ». Et par contre ceci, que j
458 ifférences que l’on voudra, mais pas si fortes qu’ elles ne nous permettent de prendre une vue plus juste de ce qui est propre
459 ue plus juste de ce qui est propre à Montherlant. Il est bien moins curieux d’autrui que Ligne — ce voyageur traqué par sa
460 ne — ce voyageur traqué par sa passion mondaine — il est plus grave et plus lyrique, plus janséniste aussi, et il faut sou
461 grave et plus lyrique, plus janséniste aussi, et il faut souligner ce dernier trait. Mais comparez leur « écriture », c’e