1 1932, Articles divers (1932-1935). « Mouvement », « La morte ou la nue », « Ainsi » (16 avril 1932)
1 on peut conserver quelque espoir à condition de ne plus dire un mot de ne plus rien. La morte ou la nue Quan
2 espoir à condition de ne plus dire un mot de ne plus rien. La morte ou la nue Quand tes yeux se confondent
2 1932, Articles divers (1932-1935). Sur la violence bourgeoise (15 mai 1932)
3 ous avons interrogé M. Durand-Dupont. — Pourquoi n’ êtes-vous pas révolutionnaire ? M. Durand-Dupont ne s’est pas fait pri
4 ’êtes-vous pas révolutionnaire ? M. Durand-Dupont ne s’est pas fait prier pour nous répondre. Il est curieux de tout ce qu
5 , lui aussi. Du moins il l’affirme. — Pourquoi je ne suis pas révolutionnaire ? nous a-t-il déclaré — Parce que je suis un
6 ncipes libéraux, ennemi de toute violence, et qui ne ferait pas de mal à une mouche. ⁂ Des millions de gens vous répondro
7 répondront cela. Des millions d’hommes dont vous n’ avez aucune raison de suspecter la bonne foi, ni même la bonne volonté
8 sitions. En vérité, la force de l’anti-révolution ne réside pas dans l’argumentation des philosophes chargés d’illustrer à
9 rce que je suis un honnête homme… » Et d’abord il n’ y a pas d’honnêtes gens. L’honnêteté est une vertu héroïque et qui sup
10 e sécurité, etc.). 2. « … fermement attaché… » On ne peut tenir fermement qu’à quelque chose de ferme. La fermeté de M. Du
11 fermeté de M. Durand-Dupont étant toute verbale, ne relève donc que de l’analyse logique, et doit être rejetée à ce titre
12 a police, chargée de réprimer violemment ceux qui n’ acceptent pas de crever de faim en douceur. ⁂ Mais cette action très p
13 isser faire à d’autres, et par d’autres, ce qu’il ne voudrait pas faire, ni subir. C’est-à-dire qu’il se décide pour la po
14 pier-monnaie que les réalités les plus sanglantes n’ arrivent plus à réveiller l’imagination des peuples. On le sait à Genè
15 n le sait à Genève : tout est affaire de mots. Il n’ y a pas de « guerre » en Chine, l’ordre règne à Varsovie, et en France
16 Chine, l’ordre règne à Varsovie, et en France on ne se tue plus que par amour. (Mais à Moscou, les petits Russes naissent
17 ou encore par son abstraction. Il importe qu’elle ne s’avoue jamais, qu’elle invoque toujours un prétexte élevé : mainteni
18 l’on dit être « de culture ». Il importe qu’elle ne revête jamais un aspect proprement brutal, à moins que ce ne soit à d
19 amais un aspect proprement brutal, à moins que ce ne soit à de grandes distances, et bien au-delà du cercle qui intéresse
20 nous (sic). Et ceux qui seraient tentés d’en user n’ aboutiraient qu’à faire apparaître la violence latente du régime. Il s
21 té : des violences épisodiques de cette envergure n’ auraient pas de quoi nous troubler. Mais il arrive que l’ordre bourgeo
22 olence d’assez de mensonges pour que le bourgeois ne se rende plus compte de sa responsabilité, de sa complicité active, e
23 ne violence absurde, dénaturée et hypocrite, nous ne défendrons pas les vertus d’une illusoire non-violence : ce serait en
24 marque à nos yeux de décadentisme bourgeois. Nous ne prenons pas à la légère le drame de la Révolution. Il est des crises
25 volution assez totale, pour que de telles erreurs n’ y puissent trouver place. Rappelons deux principes qui furent énoncés
26 inspire l’hypocrisie régnante. Non, la Révolution n’ est pas le sang versé. Mais nous disons qu’il est plus sain d’être ble
27 sain d’être blessé que lentement stérilisé. Nous ne sommes pas idéalistes : l’« imperfection naturelle » ne sera jamais s
28 mes pas idéalistes : l’« imperfection naturelle » ne sera jamais supprimée dans l’œuvre humaine3. Mais la santé révolution
29 d’hommes », écrit Rimbaud. Mais le bourgeois qui ne s’en doute guère confond la violence avec la brutalité physique imbéc
30 ondamne cette brutalité dans tous les cas où elle ne sert pas à assurer sa sécurité. Encore ne l’utilise-t-il pas lui-même
31 où elle ne sert pas à assurer sa sécurité. Encore ne l’utilise-t-il pas lui-même dans ces cas. En effet, ce qui lui répugn
32 d-Dupont cherchait à nous persuader. 6. « … qu’il ne ferait pas de mal à une mouche. » Peut-être est-il prudent de corrige
33 gue, à propos du bourgeois, disait un jour : « Il n’ est pas d’une méchanceté cérastoïde. Il ne ferait pas de mal à un lion
34  : « Il n’est pas d’une méchanceté cérastoïde. Il ne ferait pas de mal à un lion. » 1. Interventions chirurgicales. 2.
3 1932, Articles divers (1932-1935). Les « petits purs » (15 juin 1932)
35 autres au contraire un prétexte par trop facile à ne pas prendre place à nos côtés. Il s’agit de ce que nous baptiserons l
36 les dépassons, petits purs ceux dont la violence n’ est que rancœur de faibles accrochés à des dogmes, alors que la vraie
37 s deviennent un danger pour la Révolution ou pour ne rien exagérer un poids mort, un facteur d’énervement, et une cible fa
38 commencer par bon nombre de révolutionnaires qui ne paraissent « pas très comme il faut », et, pour tout dire, « confusio
39  » à ces terroristes de café. À les en croire, il n’ y aurait rien d’autre à faire que d’installer des mitrailleuses tout l
40 che, mais pas plus loin comme disait l’autre. Ils n’ ont pas le format physique et moral nécessaire pour intégrer, rejeter,
41 l’apport des révolutions d’hier et leurs leçons. Ne nous y trompons pas : leur refus de penser par eux-mêmes en fonction
42 se qu’ils s’épuisèrent à combattre sachant qu’ils ne pourraient que périr avec elle, ils vont chercher dans la lecture, po
43 dépourvue de violence. Nous sommes bien décidés à ne pas rancir dans une doctrine donnée. La seule pureté vraiment révolut
44 celle de la violence spirituelle créatrice ; nous ne nous lasserons pas de le redire. Il y a des petits malins qui ont tro
45 ire d’un matérialisme d’ailleurs mal compris, ils ne bougent plus le petit doigt, s’arrêtent de penser et attendent l’avèn
46 pour l’heure elles sont vitales, peu importe. Ce n’ est pas la pureté d’une conception cohérente et rationnelle que nous d
47 able d’entraîner les masses. Mais en voilà assez, n’ abusons pas des vérités premières, encore que la pensée bourgeoise con
48 ux qui poursuivent l’humanité de sarcasmes qu’ils n’ ont pas inventés, car la véritable invective n’est qu’une forme polémi
49 ls n’ont pas inventés, car la véritable invective n’ est qu’une forme polémique de la générosité. Hélas, fallait-il perdre
50 . Hélas, fallait-il perdre une page à dire qu’ils ne méritent pas de vous dégoûter de la Révolution, jeunes gens que la vi
4 1933, Articles divers (1932-1935). Sur un certain front unique (15 février 1933)
51 n certain front unique (15 février 1933)d e Ce n’ est pas, Nizan, une querelle de personnes que je veux vous faire. Vous
52 rlez au pluriel, en ce qui vous concerne, et vous n’ attaquez qu’au pluriel les « sergents recruteurs » et les « ramasseurs
53 recruteurs » et les « ramasseurs de disciples ». Ne perdons pas notre temps à polémiquer sur des épithètes passe-partout.
54 endre attentif à ceci : que ces généreux pluriels n’ ont pas empêché certains lecteurs d’Europe — j’en ai reçu maints témoi
55 ors vous sourire plus qu’à moi, je l’avoue, et je n’ en persistai pas moins à souligner sa rupture dans mes conclusions. N
56 aissait encore plus indésirable qu’impossible. Je ne répondrai pas ici à votre accusation de fascisme, je sais trop bien q
57 première partie de votre étude. Pour le reste, je ne puis mieux faire que de renvoyer ces lecteurs à l’article de Jean-Ric
5 1933, Articles divers (1932-1935). « La jeunesse française devant l’Allemagne » [Réponse à une enquête] (mai 1933)
58 de gros ventres et de chapeaux melons. La France n’ est plus contemporaine des nations qui l’entourent et qui la menacent.
59 avec le problème de notre génération. La sécurité ne sera jamais garantie par la signature des vieillards ; elle repose su
60 uns se perdirent en eux-mêmes, les autres dans on ne sait quelles brigues innommables. De l’inquiétude à la Légion d’honne
61 . De l’inquiétude à la Légion d’honneur, la route n’ est pas si pénible qu’on peut le croire : elle comporte moins de sacri
62 ors des craintes du bon père : personne en France ne peut croire sérieusement aux vertus « révolutionnaires » d’une doctri
63 s et hitlériens sont justifiés à nous jeter. Nous ne le ferons pas en défendant des institutions démocratiques qui sont le
64 qui sont le témoignage de notre démission ; nous ne le ferons pas en nous mettant à la remorque du marxisme, fils d’une d
65 n nationalisme traître à la patrie. Notre réponse ne prendra pas la forme d’une justification, mais d’une accusation. Au n
66 nalistes et leurs guerres. Ainsi notre accusation ne sera pas l’égoïste résistance du bien « particulier » au bien public,
67 de leur système. Ces massacres pour des gros sous ne méritent pas le nom de guerre. Nous réservons ce nom pour désigner le
68 la guerre capitaliste. Par tous les moyens. Elle ne peut que retarder l’accession aux conflits nécessaires. f. Rougemo
6 1933, Articles divers (1932-1935). Positions d’attaque pour l’ordre nouveau (décembre 1933)
69 (décembre 1933)h Le groupe de l’Ordre nouveau n’ a pas fait jusqu’ici beaucoup de bruit sur les places. C’est que nous
70 Mais nous disons que le commencement du désordre n’ est pas dans les faits matériels dont nous souffrons, n’est pas dans l
71 pas dans les faits matériels dont nous souffrons, n’ est pas dans le machinisme, par exemple, mais bien dans les doctrines
72 eut tuer ces racines et surtout empêcher qu’elles ne se reforment. La nécessité d’un travail doctrinal radical nous appara
73 notre ordre. Cet ordre est nouveau en ceci qu’il ne peut être établi que par un changement de plan. Changer de plan, pour
74 le terrain positiviste où ils les placent. Elles ne prennent leur vrai sens que dans le plan de la personne, où nous les
75 sons que le problème du minimum de vie matérielle ne prend son sens que dans le plan de la personne qui est, nous allons l
76 le plan de la liberté créatrice ; que ce problème ne peut être défini correctement qu’à partir de la personne ; que seule
77 a partie la plus élaborée de notre effort et l’on ne peut songer à en donner ici qu’une formule nécessairement simplifiée.
78 uer ici notre opposition au parlementarisme. Nous ne combattrons pas le Parlement avec des discours, mais bien en créant u
79 e humain, aucune doctrine totale et transcendante ne pouvait intervenir au xixe siècle pour orienter et humaniser ce déve
80 ui permet à la personne de courir sa chance. Nous ne pouvons songer à développer ici ces thèmes constructifs, et encore mo
81 ais à leurs côtés, se dressent des gens qui, eux, ne comptent renoncer à rien, s’emparent des privilèges abandonnés, sabot
82 s déterminer d’abord. On nous a aussi reproché de n’ être qu’un groupe d’intellectuels « bourgeois ». Comme ce reproche nou
83 de la pensée chez les intellectuels.5 Peut-être ne serait-il pas inutile, pour conclure, de dégager clairement les thèse
84 révolutionnaire, pas d’action révolutionnaire. On ne saurait trop insister sur cette vérité, à une époque où l’engouement
85 ine, 1902.) 2° Dans l’état présent des choses, il n’ y a pas d’ordre concevable sur le plan capitaliste, au déterminisme du
86 n capitaliste, au déterminisme duquel les soviets n’ échappent pas. 3° La dialectique historique ne peut que rendre compte
87 ets n’échappent pas. 3° La dialectique historique ne peut que rendre compte du passé — mais seul l’acte créateur opère le
7 1933, Articles divers (1932-1935). Jeune Europe (4 décembre 1933)
88 e l’Europe ait changé, depuis dix ans, plus qu’il ne l’avait fait depuis Napoléon, c’est une évidence acquise et qui peut
89 les mœurs au moment où éclata la guerre, mais qui n’ avait pas encore trouvé, à cette époque, une forme politique adéquate.
90 scepticisme plus ou moins sympathique ; mais elle n’ avait pas répondu au défi qu’ils lui adressaient. MM. Dupuis et Marc c
91 maturément » bouleversé un ordre social, qu’elles n’ étaient pas encore en mesure de rénover radicalement. Mal préparées, d
92 vre et le désespoir de situations économiques qui ne permettaient pas d’élaborer avec la lucidité nécessaire des solutions
93 la dignité de fins en soi, d’absolus, au lieu de n’ être considérés que comme des moyens ». Et c’est ainsi que la jeunesse
94 sacrifices qu’on lui demande — ou à cause d’eux — ne sauraient être mises en doute. Mais qu’adviendra-t-il, le jour peut-ê
95 teur du terme, que conformistes. Leur conformisme n’ est pas celui des jeunes bourgeois, qui s’accommode fort bien d’une « 
96 e. Où est le remède ? Les auteurs de Jeune Europe n’ hésitent pas à le voir dans l’esprit libertaire et « personnaliste » d
97 déduites. Au reste, René Dupuis et Alexandre Marc n’ ont pas écrit un livre de doctrine. S’adressant au grand public avec a
8 1934, Articles divers (1932-1935). Carl Koch, Søren Kierkegaard (1934)
98 voudrais tout autre. Tel qu’il est cependant, on n’ en peut désirer de plus utile. Expliquons-nous. Carl Koch s’est inspir
99 i l’exposé judicieux, parfois même bonhomique. Ce n’ est pas le moindre intérêt du livre. Kierkegaard a personnifié dans le
100 ligion. Et le Jeune Homme perdu d’inquiétude, qui ne découvre sa joie que dans le risque extrême de la foi, c’est le chrét
101 d’une trempe exceptionnelle ; mais non tant qu’il ne puisse « édifier » — pour user d’un vocable auquel il sut rendre un s
102 ance pour les subtilités du « Séducteur », et qui n’ a pas la tête philosophique. J’ai peut-être tort de penser qu’on aurai
103 n aurait pu s’y prendre autrement. Après tout, il ne faut pas souhaiter à Kierkegaard une introduction systématique et qui
104 t encore tout remué. On le croira sans peine : il n’ a pas l’air d’avoir pu inventer ce qu’il raconte. Cela donne envie d’a
105 Cela donne envie d’aller voir. Or, je tiens qu’il n’ y a rien de plus urgent pour nous que d’aller voir ce qui se passe dan
106 u’il s’agit, et non pas d’un auteur nouveau. Koch n’ a pas simplifié ce qui n’est pas simple chez Kierkegaard, mais il a su
107 ’un auteur nouveau. Koch n’a pas simplifié ce qui n’ est pas simple chez Kierkegaard, mais il a su le décrire sans pédantis
108 tte défaillance expliquerait pourquoi Kierkegaard ne devint pas lui-même le « témoin de la vérité » qu’il annonçait, mais
109  un poète ». Double reproche, plus grave que Koch ne veut le croire. C’est en vain qu’il s’efforce tardivement d’en limite
110 omme est négation de Dieu. C’est pourquoi l’homme n’ arrive à Dieu et à la Vie qu’en mourant totalement à soi-même. Periiss
111 écho à ce cri de Thérèse d’Avila : « Je meurs de ne pas mourir. » Qu’un humanisme religieux, qui trop souvent exprime la
112 bien plus, qu’il la déclare antichrétienne ; cela ne prouve rien que l’on ne sût déjà : à savoir que le sens de la vérité
113 are antichrétienne ; cela ne prouve rien que l’on ne sût déjà : à savoir que le sens de la vérité est en train d’abdiquer
114 hristianisme tel que Kierkegaard le représentait, ne peut être réellement adopté et assimilé par la vie humaine ; il reste
115 estimait qu’une telle doctrine est impensable, et ne peut être utilement intégrée à notre patrimoine moral, culturel, soci
116 ché. Il sait aussi que le contraire du péché « ce n’ est pas la vertu, mais la foi ». C’est une étrange confusion que de ba
117 attitude qui se fonde dans la foi. (Schopenhauer n’ est pas un argument. Ou alors Freud en serait un, dans l’autre sens !)
118 eur de durer, de penser, de trouver des raisons ? Ne sent-on pas qu’elle est trop tiède, et propre au plus à écœurer celui
119 pensée, c’est de découvrir quelque chose qu’elle ne puisse pas penser ». Il est curieux que les esprits moyens reprochent
120 té des incroyants ont fait grief à Kierkegaard de n’ avoir pas incarné sa doctrine. Mais quelle était son exigence ? Nos vé
121 nous accuse, parce que nos désirs sont menteurs. N’ est pas « témoin de la vérité » qui veut. Ce n’est pas là un choix de
122 s. N’est pas « témoin de la vérité » qui veut. Ce n’ est pas là un choix de l’homme. Kierkegaard a choisi d’être « un poète
123 tre tous l’impossibilité humaine du témoignage, —  n’ a-t-il point, par sa mort justement, témoigné de la vérité ? 7. Tout
124 igné de la vérité ? 7. Tout cela, bien entendu, n’ est qu’apparences, psychologie. Le seul fait, c’est la foi qui soutien
125 t vu. 8. « Le christianisme du Nouveau Testament n’ existe pas », voir Conclusion. 9. Dans le livre de Georges Brandès :
126 sa force intellectuelle et toute son œuvre… S’il ne meurt pas, dit-il, il devra poursuivre sa lutte religieuse, mais elle
9 1934, Articles divers (1932-1935). « Pour qui écrivez-vous ? » [Réponse à une enquête] (janvier-février 1934)
127 nt des oreilles pour entendre, amis que ma parole n’ atteindrait pas, mais ce message. J’écris pour ceux qui attendent cour
128 ceux qui attendent courageusement une réponse. Ce n’ est pas que je puisse donner cette réponse, loin de là. Je voudrais se
129 de la Colère de Dieu, aussi de sa miséricorde. Il n’ y a pas de communion humaine hors l’unanime attente trébuchante, hors
130 humble et violent. Voilà ce que je veux. Mais je ne sais pas ce que je puis. Je ne sais pas pour combien d’hommes, ni pou
131 e je veux. Mais je ne sais pas ce que je puis. Je ne sais pas pour combien d’hommes, ni pour quels hommes j’aurai pu être
132 t cela, M. de Rougemont, malgré ses appels à Luc, n’ a pas répondu à notre question, il fait métier d’être incapable de rép
10 1934, Articles divers (1932-1935). La Révolution nécessaire, par Arnaud Dandieu et Robert Aron (juin 1934)
133 par les « problèmes économiques », comme on dit, ne possède pas d’économistes. Il entendait par là, bien entendu, des cré
134 lité, au sens littéral du terme ; et c’est ce que ne font pas, et ne peuvent pas faire, nos professeurs idéalistes et tous
135 ttéral du terme ; et c’est ce que ne font pas, et ne peuvent pas faire, nos professeurs idéalistes et tous nos prêtres de
136 libératrices qu’on leur propose ; et c’est ce que ne font pas les brigadiers et les embrigadés de toute farine que nous vo
137 ions d’ordre politique et social. Ces conclusions ne manqueront pas d’impressionner certain public au détriment des princi
138 laisse aller. Craignons que ce mépris, toutefois, ne tourne en habitude, ne se fige en une convention faussement « réalist
139 que ce mépris, toutefois, ne tourne en habitude, ne se fige en une convention faussement « réaliste » qui trompe sur la v
140 olutionnaire, écrivait Lénine dans Que faire ? On ne saurait trop insister sur cette vérité, à une époque où l’engouement
141 s’opposer. À force de considérer d’une part qu’il n’ est d’autre révolution que la révolution matérialiste, à force d’autre
142 mme la révolution, s’exprime par la violence : ce n’ est pas une faculté d’usage interne, qui mène à l’intérieur des cadres
143 voir un « spiritualisme » dont leur matérialisme n’ est que l’empreinte négative. On abuse singulièrement du mot « esprit 
144 ice11 que le « contresens habituel sur l’esprit » n’ a jamais été son fait, mais bien celui, intéressé, de certains de ses
145 ersaires, de certains de ses louangeurs. L’esprit ne saurait désigner que la totalité créatrice de l’homme, corps et intel
146 l’autre, sur des constructions rationalistes qui ne peuvent rendre compte du saut révolutionnaire. « En réalité, la dicta
147 toutes les revendications en promettant la lune, ne peut servir qu’à masquer sur le terrain pratique l’échec d’une révolu
148 le terrain pratique l’échec d’une révolution qui ne sait pas où elle va. » Cartésienne ou hégélienne, la dialectique sur
149 sur laquelle se fondent ces révolutions avortées ne peut rendre compte que des données antérieures à tout acte, non de l’
150 ur Aron et Dandieu, la Révolution véritable. Cela ne signifie point que sa violence se dégrade nécessairement en aventures
151 t être une science proprement révolutionnaire. Ce n’ est point par hasard qu’on tentait de nous la réduire à cette descript
152 scription résignée des altérations du langage. Je ne voudrais pas clore ces quelques notes, qui sont loin d’épuiser la rev
153 « la personnalité concrète peut se réaliser dans n’ importe quelles conditions données… et peut faire bon ménage avec la s
154 trine de l’Ordre nouveau définit une personne qui n’ a rien à voir avec cet individu. Une personne qui n’est pas plus l’hom
155 a rien à voir avec cet individu. Une personne qui n’ est pas plus l’homme naturel de Rousseau, comme le suppose Fernandez,
156 doctrines de la Révolution nécessaire. Fernandez ne croit pas à l’existence concrète14 de la personne telle que nous la d
157 e la personne telle que nous la définissons. Elle n’ est pour lui qu’un mythe, dont il met en doute la puissance de soulève
158 u’un bourgeois risque sa peau pour la sauver : on ne comprend pas qu’il s’arrache la peau dans l’espoir qu’une meilleure l
159 » du bourgeois pour laquelle il mourrait, dit-on, ne peut être qu’un symbole de son argent.) Mais ce que je sais, c’est qu
160 tout court, ou même l’homme noble, ou prolétaire, n’ a jamais risqué sa peau pour des intérêts. On ne se bat et on ne meurt
161 , n’a jamais risqué sa peau pour des intérêts. On ne se bat et on ne meurt que pour des « folies » qualifiées. Celle que l
162 qué sa peau pour des intérêts. On ne se bat et on ne meurt que pour des « folies » qualifiées. Celle que l’Ordre nouveau p
163 cellence, la qualité créatrice de la personne. Je n’ en vois pas de plus haute dans notre ordre, ni de plus digne de conquê
164 Cf. le numéro 3 de sa revue). 12. et qui surtout ne rendent pas justice au style de la pensée, plus encore que de l’écrit
11 1934, Articles divers (1932-1935). Où sont les jeunes protestants ? Remarques sur le protestantisme et les doctrines politiques (juillet-août 1934)
165 ontrera sans doute. Il faut avouer pourtant qu’il n’ est pas très facile de repérer leurs positions, sur le plan de l’actio
166 s positions, sur le plan de l’action publique. On ne connaît pas en France de parti protestant comparable aux nombreux gro
167 En dépit de certaine polémique bourgeoise, il n’ existe pas de théorie du désordre. Toute doctrine sociale, fût-elle la
168 ale. C’est une doctrine optimiste, dont la mesure n’ est pas dans le présent injuste, mais dans le futur libérateur. Politi
169 cendant, fort bien exprimé par Pascal : « L’homme n’ est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait
170 ire l’ange fait la bête. »16 Qu’est l’homme ? Il ne se connaît pas. L’Évangile le révèle à lui-même, comme perdu, et par
171 du, et par cette révélation, sauvé. Ainsi l’homme n’ est humain que dans un paradoxe ; il est perdu lorsqu’il se croit sauv
172 nt toujours imprévisibles, instantanés, et qu’ils ne souffrent point d’être d’avance limités par un système, par un progra
173 fins, ou prend les moyens pour des fins ; la foi ne veut connaître que les fins, et en vient à dévaloriser les moyens. Ou
174 abli ou d’un ordre à établir. Pour le croyant, il ne s’agit, d’abord, que d’un ordre reçu. Mais dès que l’ordre est vérita
175 mieux. Comme le marxiste, il sait que sa doctrine n’ a pas à expliquer le monde, mais à le transformer — seulement, il sait
176 e le réactionnaire, il affirme que l’ordre établi ne saurait être en aucun cas définitif ni suffisant. Contre le marxiste,
177 e marxiste, il affirme que l’évolution nécessaire n’ entraîne pas une amélioration du genre humain, ne conduit pas mécaniqu
178 n’entraîne pas une amélioration du genre humain, ne conduit pas mécaniquement au paradis terrestre. Aux uns et aux autres
179 as comme la subissant. Nous sommes au monde comme n’ étant pas du monde ; dans le péché, mais comme ayant reçu la promesse
180 s un système politique ni aucune synthèse humaine n’ aura de droit sur nous en tant que personnes, en tant que vocations. S
181 ue vocations. Surtout, jamais un succès politique ne pourra, pour nous, se confondre avec un progrès de salut. Principe d’
182 nt Dieu) est au-dessus de la collectivité. » Cela ne signifie pas que le croyant doive s’isoler de la communauté, mais bie
183 ra bien considérer que ce qu’on vient de lui dire n’ est pas original, et bien moins encore matière d’enquête. (On n’enquêt
184 inal, et bien moins encore matière d’enquête. (On n’ enquête pas sur la doctrine chrétienne.) Mais la disposition de ces év
185 restée assez limitée. Cette tentative désespérée n’ est pas sans noblesse. Et l’on ne saurait trop louer l’insistance avec
186 ative désespérée n’est pas sans noblesse. Et l’on ne saurait trop louer l’insistance avec laquelle certaines déclarations
187 plus éloignée de l’Action française que La Cause ne l’est de L’Écho de Paris. Du point de vue de notre foi, il me semble
188 monarchiste peut être justifiée plus facilement — ne fût-ce que par l’exemple des actuelles monarchies protestantes — que
189 c’est une activité dont, à coup sûr, le bienfait ne sera jamais perdu, pour ceux d’abord qui en prennent l’initiative. Ma
190 ratique » ? Et toute activité auprès des ouvriers ne pose-t-elle pas des problèmes de doctrine économique et sociale qu’on
191 problèmes de doctrine économique et sociale qu’on ne saurait esquiver sans manquer à son tour de réalisme ? La plupart des
192 s directives papales, et plus conscients que nous ne sommes souvent des implications générales d’une attitude particulière
193 lieu de souligner le plus fortement ce danger. Je n’ ai pas, ici, à juger l’objection de conscience. Je me bornerai à deux
194 ardés jusqu’ici de toute espèce de propagande, et ne tombent nullement sous le coup de la grave critique d’incohérence et
195 le paradoxe défini dans ma première partie. Elle ne saurait être mise en symétrie avec aucune des autres attitudes que j’
196 se l’ensemble de l’organisation économique, et de ne pas se contenter de réformes partielles ; affirmation enfin d’un nouv
197 de la crise confirmera leurs prévisions. Mais il ne suffit pas qu’un point de départ soit juste. Il faut encore partir, —
198 la jeunesse, mais la jeunesse qu’ils ont atteinte n’ est pas celle qui voulait être flattée. Et ce n’est pas l’exaspération
199 e n’est pas celle qui voulait être flattée. Et ce n’ est pas l’exaspération du ton qui mesure l’efficacité d’une prise de c
200 ons. Telle est la « primauté du spirituel » qu’il ne cesse d’invoquer au risque, il faut le dire, de créer provisoirement,
201 malentendus. On a cru, ou feint de croire, qu’il ne s’agissait là que d’un « spiritualisme ». De même, on a trop souvent
202 an ont été lancés par l’ON qui a eu l’adresse de ne pas en faire une sorte de propriété privée. Parmi eux, je citerai le
203 n premier numéro une conception spiritualiste qui n’ a rien de commun avec cela qu’ont voulu voir en elle les critiques de
204 che, victimes de la confusion que j’ai dite. « Ce ne sont pas ceux qui disent Esprit ! Esprit !… » Mais tandis que l’Ordre
205 re l’ordre chrétien et le désordre établi. Esprit n’ en reste pas moins le lieu de rencontre d’une centaine de jeunes écriv
206 t misère du pauvre, misère du riche. Un tel titre n’ évoque-t-il pas un souvenir fameux ? Cette revue jouera-t-elle un rôle
207 ent l’activité d’Esprit et de L’Ordre nouveau, ce n’ est pas seulement parce qu’ils sont appelés à jouer un rôle de plus en
208 outes nos tentatives de rénovation. Je crois bien n’ être pas sorti du cadre précis de cette enquête en marquant la coïncid
209 end d’aborder aucune question confessionnelle. Il n’ en reste pas moins que le fondement spirituel commun à ces deux groupe
210 rotestant peut assigner à son action publique. Je ne me dissimule pas certaines incompatibilités. Plusieurs textes parus d
211 aggravés et compliqués de bien pires erreurs dans n’ importe quel parti, aussi bien à gauche qu’à droite22. Avec cette diff
212 férence qu’au sein de partis si nombreux, sa voix n’ aurait aucun effet… Dans la perspective que nous considérons ici, la l
213 s faits me paraît simple : les jeunes protestants n’ ont pas à fonder un parti. Leur foi n’est pas de celles que l’on met e
214 protestants n’ont pas à fonder un parti. Leur foi n’ est pas de celles que l’on met en systèmes. Le fût-elle, leur très pet
215 oser ce parti à l’ensemble de la nation. Le temps n’ est pas aux rêves, et ce n’est pas l’affirmation d’une position politi
216 de la nation. Le temps n’est pas aux rêves, et ce n’ est pas l’affirmation d’une position politique qui permettra de « fair
217 héologie nous ordonne d’agir, et de nous engager. N’ attendons pas que d’autres aient édifié des systèmes irréprochables et
218 e travail. Cf. le n° 8 de L’Ordre nouveau . 20. N’ est-ce pas ainsi que l’Évangile définit la notion fondamentale de proc
219 ain, c’est celui qui pratique la miséricorde ; ce n’ est pas le simple voisin. Cf. le numéro 5 de Hic et Nunc , tout entie
220 f et un protestant. 22. Je pense qu’André Philip ne me contredirait pas sur ce point. C’est le seul d’entre les jeunes pr
12 1934, Articles divers (1932-1935). Jeunesse déracinée (novembre 1934)
221 schéisme mal digéré. Les excuses qu’on leur offre ne sont guère plus reluisantes : ils n’ont plus le temps de se cultiver,
222 n leur offre ne sont guère plus reluisantes : ils n’ ont plus le temps de se cultiver, ils ne trouvent pas de situations… A
223 tes : ils n’ont plus le temps de se cultiver, ils ne trouvent pas de situations… Arguments justes peut-être, pour certains
224 guments justes peut-être, pour certains, mais qui ne sont pas à l’échelle du phénomène qu’on voudrait expliquer. A-t-on pr
225 pression « à la maison », l’habitation des villes ne diffère pas essentiellement de celle d’une province. Supprimez l’héri
226 « deux pièces » qu’on loue sans bail parce qu’on ne sait pas si dans six mois… Et vous aurez bien travaillé pour la révol
227 une patrie concrète, si restreinte soit-elle. Il n’ y aura plus le frein à l’entraînement de la vie citadine ; à cette esp
228 e pas entre les conditions sociales que l’on sait n’ être plus immuables… Perspectives d’aventure. Ambition. Ressentiment.
229 talité des gérants, qui fait si bien sentir qu’on n’ est plus chez soi nulle part, que l’on est toléré comme un élément « d
230 comme un élément « de rapport », balayé dès qu’il ne rapporte plus à temps. Nomadisme. Et derrière la concierge, derrière
231 ù la vie prend un visage tellement abstrait qu’on n’ arrive plus même à s’y aimer : Colette a décrit cela dans la Chatte. O
232 ces faits. On les connaît bien dans le détail. Je ne vois pas qu’on ait tiré de leur ensemble aucune conclusion pratique,
233 ntre quelque chose. Des gens qui souffrent et qui n’ ont plus d’attaches sont rapprochés d’abord par leur opposition à l’or
234 i de gens habitués à conduire leurs affaires. Ils ne se contenteront pas de dire un non désespéré. Ils chercheront un nouv
235 utant que de refus. Risquons ici un parallèle qui n’ est peut-être pas simplement une image. Reprenant la distinction préci
236 t Aron et Arnaud Dandieu entre patrie et nation ; ne pourrait-on pas dire que les communautés fondées par l’attachement au
237 naires ? Le mot nation dans son acception moderne n’ a-t-il pas désigné d’abord l’idéal de la Révolution française, une com
238 s partielles, qui comportent chacune leur vérité, ne viennent à s’opposer d’une façon meurtrière. Quel remède à ce péril q
239 ces jeunes citadins jacobinisés malgré eux, vous n’ en ferez pas des paysans. L’expérience allemande l’a montré, et l’éche
240 la patrie et la nation. La révolution nécessaire ne sera ordre qu’à ce prix. C’est là son vrai problème. p. Rougemont
13 1935, Articles divers (1932-1935). Mystère de la Vision (fragments d’un Traité de la vision physionomique du monde) (mars 1935)
241 e, ou développé pendant toute une vie. Aussi bien n’ ai-je pas l’intention de l’expliquer, moins encore de le démontrer. Ma
242 rontière, et lieu de contact des extrêmes dont on ne sait plus s’ils s’opposent ou s’ils s’appuient l’un contre l’autre. E
243 l’autre. Elle est drame, elle est événement. Elle ne connaît rien que des formes, et ne croit rien que ce qui apparaît. « 
244 vénement. Elle ne connaît rien que des formes, et ne croit rien que ce qui apparaît. « Rien n’est, dit-elle qui ne se mani
245 mes, et ne croit rien que ce qui apparaît. « Rien n’ est, dit-elle qui ne se manifeste ». C’est pourquoi dans le monde de l
246 n que ce qui apparaît. « Rien n’est, dit-elle qui ne se manifeste ». C’est pourquoi dans le monde de la vision, il n’y a n
247  ». C’est pourquoi dans le monde de la vision, il n’ y a ni mensonge ni feintes ; rien qui se cache ou rien qui s’exagère,
248 qu’elle est, c’est-à-dire pour ce qu’elle paraît. N’ est-ce pas ainsi que meurt une illusion ? Or toutes ces choses et bien
249 , on peut les dire du visage. La langue allemande ne connaît qu’un mot pour visage et vision : Gesicht. Quelle est donc ce
250 on siège au centre même du visage. Sans visage il n’ est plus de vision. Ou l’inverse. Ainsi le je et le tu sont distincts,
251 i le je et le tu sont distincts, sans lesquels il n’ est pas d’amour. Mais si leur être est justement l’amour ? Peut-on les
252 », mais comme on fait devant un tribunal, — et ce n’ était pas leur coutume… L’aventure est assez curieuse. Métaphysiciens
253 s, cédant à un trouble penchant pour une paix qui n’ était rien que leur faiblesse. Mais aujourd’hui qu’ils relèvent la têt
254 ychologue moderne25 nous a démontré que la vision n’ est pas une sensation, mais un décret de l’intellect. Il n’y a pas de
255 une sensation, mais un décret de l’intellect. Il n’ y a pas de sensations, il n’y a pas d’images, il n’y a pas d’associati
256 et de l’intellect. Il n’y a pas de sensations, il n’ y a pas d’images, il n’y a pas d’associations mentales : il n’y a que
257 ’y a pas de sensations, il n’y a pas d’images, il n’ y a pas d’associations mentales : il n’y a que des jugements. Toute pe
258 images, il n’y a pas d’associations mentales : il n’ y a que des jugements. Toute pensée est « judicatoire », et tout, en l
259 ssentiellement intermédiaire, l’on conçoit que ce n’ est que justice. Que nous apprend l’observation lorsqu’elle se porte s
260 n littérateur de l’espèce par exemple d’Amiel, il n’ y verra qu’un état d’âme ; s’il est un général, il ne verra qu’un cham
261 verra qu’un état d’âme ; s’il est un général, il ne verra qu’un champ de manœuvres ; s’il est un ingénieur, un territoire
262 le voit par la portière de son wagon, le paysage n’ est pas le même ; car le regard est jugement26. La vision est métam
263 « Nous qui sommes du jour… » (I Thess. 5.8) Rien ne serait plus facile que de multiplier les citations de passages de sai
264 s-unes des relations que je viens de désigner, il n’ est pas superflu de recourir à ces « origines » sacrées, comme à une s
265 Au commencement est la lumière (physique) On ne voit que ce qui est vu. Mais peut-être faut-il aller plus loin : on n
266 t vu. Mais peut-être faut-il aller plus loin : on ne voit rien que ce qui voit. Car seule est visible la forme, et la form
267 sible la forme, et la forme naît du mouvement. On ne peut voir ainsi que les choses qui se meuvent, ou qui sont mues, — en
268 e même elle devient à nos yeux reconnaissable. Il n’ est pas d’autre mouvement que cet élan vers la lumière — ou pour la fu
269 abord, a été vu par la lumière créatrice. « L’œil ne verrait pas le soleil s’il n’était de nature solaire », dit Goethe. U
270 créatrice. « L’œil ne verrait pas le soleil s’il n’ était de nature solaire », dit Goethe. Une telle parole devance notre
271 , qui devient un simple point de vue. Ces vérités ne sont guère « explicables » au sens de l’indiscret moderne, de celui q
272 dans ce vide ou cette « profondeur » ou plus rien n’ arrête la parole. Mais les mystiques et les poètes ont, de tout temps,
273 Faiblesse ou force : te voilà, c’est la force. Tu ne sais ni où tu vas, ni pourquoi tu vas, entre partout, réponds à tout.
274 ourquoi tu vas, entre partout, réponds à tout. On ne te tuera pas plus que si tu étais cadavre”. Au matin j’avais le regar
275 contenance si morte, que ceux que j’ai rencontrés ne m’ont peut-être pas vu ».28 D’autres fois, c’est la claire connaissa
276 Face de Dieu, le second qu’elle réside in amore ? N’ était-ce pas se tromper à la fois sur la nature de l’amour et sur cell
277 le d’ailleurs ; voir Dieu c’est aller à lui. Nous ne voyons que ce qui nous regarde : voir Dieu, c’est être regardé par lu
278 de la vision : c’est donc aimer. Et nulle vision ne serait « admirable » si elle n’était en même temps transformation, mo
279 . Et nulle vision ne serait « admirable » si elle n’ était en même temps transformation, mouvement de l’amour. Augustin qui
280 . Je vous ai vue, je vous ai aimée : car personne ne vous aime, s’il ne commence par vous voir, et personne ne vous voit,
281 e vous ai aimée : car personne ne vous aime, s’il ne commence par vous voir, et personne ne vous voit, si ce n’est celui q
282 aime, s’il ne commence par vous voir, et personne ne vous voit, si ce n’est celui qui vous aime. Ah je vous ai trop tard a
283 ce par vous voir, et personne ne vous voit, si ce n’ est celui qui vous aime. Ah je vous ai trop tard aimée, beauté toujour
284 ent, mais accomplissement, et splendeur de ce qui n’ est pour nous qu’ombre et reflet, fragment et trouble. « Aujourd’hui j
285 alors est la plénitude d’un aujourd’hui que nous ne connaissons que par ses limites et ses formes. Ainsi donc, dépasser l
286 et ses formes. Ainsi donc, dépasser la vision, ce ne peut être que la définir dans l’absolu, à la frontière de la mort et
287 s sa signification actuelle. « Ce que nous sommes n’ a pas encore été manifesté », dit Jean. Et de même, notre vocation n’e
288 manifesté », dit Jean. Et de même, notre vocation n’ est jamais totalement incarnée. Entre la forme pure de notre vocation
289  les yeux de la foi », il semble que notre visage n’ en soit qu’une mauvaise épreuve, déjà brûlée, ici et là, ridée froissé
290 mordue par le temps et modelée par la lumière, ce n’ est pas le regard troublé qui erre sur les miroirs de la ville, à la r
291 nt nos questions ? « Si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons avec persévérance », dit encore Paul. Ce
292 donner à l’imagination qui crée. Si l’imagination n’ est pas ce fantôme des psychologues, une simple définition dont tous l
293 ont tous les termes sont problématiques ; si elle n’ est pas non plus ce rêve de l’indiscret, ou cette revanche sur le réel
294 mbolique d’une certaine image du monde, dont elle ne saurait constituer le centre ni le fondement causal, mais au sein duq
295 es, — sur les formes. Second principe : Une forme ne peut pas être « expliquée » par le recours à ces abstractions usuelle
296 s parties. Interpréter les formes par les formes, n’ est-ce pas ouvrir les portes à une nouvelle mythologie, dans le sens d
297 pression géniale de cette hérésie romantique, qui ne tendait à rien de moins qu’à la glorification progressive d’une natur
298 la condition essentiellement dramatique. Mais je ne puis m’étendre davantage sur cet aspect du romantisme, qui le déborde
299 types, — bref, en énoncés rationnels. Rien alors ne peut égaler la pénétration de son regard, si ce n’est son impuissance
300 e peut égaler la pénétration de son regard, si ce n’ est son impuissance à saisir la personne dans sa totalité concrète et
301 igne à Pascal, à La Rochefoucauld, à Chamfort, on ne rencontre pas une phrase qui se rapporte à l’expression ou au visage.
302 Même La Bruyère, physionomiste par tempérament, ne voit partout que le costume, la grimace, ce qu’on nomme « l’extérieur
303 s anecdotes et sont toujours prêts à en raconter, ne savent pas voir les visages32. Le moraliste voit des types, le physi
304 s barrières sociales, sans costumes, où les types ne sont plus des repères. Notre mesure est donc devenue personnelle, et
305 mots que je souligne dans le texte de Paul Valéry ne sont-ils pas l’éblouissante formule d’une image physionomique de l’un
306 logie » dans cette œuvre qui cependant paraissait ne prêter à rien d’autre : Les Affinités électives. Tout y est formes, a
307 se laissent aller parce qu’ils se figurent qu’il n’ y a personne qui soit capable de les voir, sous leur musique) (p. 198)
308 ivre de Job, de ce profond traité théologique qui ne fait pas intervenir un seul concept abstrait, et qui ne connaît d’aut
309 t pas intervenir un seul concept abstrait, et qui ne connaît d’autres arguments que les parties du corps humain, les plant
310 plutôt une image du monde, dont l’étude du visage n’ est qu’un particulier, à vrai dire privilégié. 24. La réaction antips
311 n antipsychologique qui se dessine un peu partout ne saurait faire fi des résultats d’observation acquis par les travaux d
312 ticulières, se développent lentement des yeux qui n’ existaient auparavant qu’à l’état de germes sous-cutanés. (Travaux pub
313 liloques de saint Augustin, chapitre XXXI. 30. «  N’ advient-il pas aussi, parmi les hommes, lorsque l’un d’eux regarde l’a
14 1935, Articles divers (1932-1935). Les autres et nous : I — Esprit (avril 1935)
314 n de séparer ces deux temps de l’action, et qu’on n’ aille pas croire que L’ON n’a pas établi ses constructions sur une e
315 l’action, et qu’on n’aille pas croire que L’ON n’ a pas établi ses constructions sur une enquête permanente, large et pr
316 uête permanente, large et précise, ou qu’ Esprit n’ ambitionne pas d’aboutir à des constructions. Il n’en reste pas moins
317 ’ambitionne pas d’aboutir à des constructions. Il n’ en reste pas moins que les années d’avance qu’a prises L’ON lui perm
318 nt, à des tentatives de réalisation dont Esprit n’ a voulu donner, jusqu’ici, que les fondements moraux ou religieux, et
319 e à faire. Dans les 32 pages de notre revue, nous ne pouvons pas commenter la Révolution, nous nous bornons à la construir
320 (Voir notre Lettre à Hitler par exemple.) Mais ce n’ est pas en exauçant des vœux, d’ailleurs humainement sympathiques, qu’
15 1935, Articles divers (1932-1935). Lettre à la rédaction de Commune (mai 1935)
321  ».) Vous mentez donc et assez bêtement, car vous ne tromperez personne sur mon compte et ridiculiserez la cause que vous
16 1935, Articles divers (1932-1935). Nous ne mangeons pas de ce pain-là : à propos du 14 juillet (15 juillet 1935)
322 Nous ne mangeons pas de ce pain-là : à propos du 14 juillet (15 juillet 1935)
323 a confusion de la Révolution et des Soviets. Nous ne nous battrons ni pour les Forges, ni pour les agents de Moscou : les
324 lutte des « nationaux » contre les « populaires » ne fait que prolonger dans la rue l’opposition stérile et périmée de la
325 les gauches auront compris que la peur de Chiappe n’ est pas un programme, sonnera l’heure de l’Ordre nouveau. v. Rougem
326 l’Ordre nouveau. v. Rougemont Denis de, « Nous ne mangeons pas de ce pain-là (à propos du 14 juillet) », Bulletin de li
17 1935, Articles divers (1932-1935). Montherlant : Service inutile (15 novembre 1935)
327 chaque fois qu’il entreprend de s’expliquer : on ne lui en demande pas tant, ou plutôt on lui en demande beaucoup plus :
328 aussi, disons-le, de courage, car il en faut pour ne montrer que du bon sens en ces matières. Deux morceaux dans le goût c
329 t l’air de haïr davantage la cause adverse qu’ils n’ aiment la leur.) Quelle est l’attitude pratique que Montherlant a cru
330 s d’abord qu’une pareille attitude a le mérite de ne point sacrifier à l’excitation générale. Très haut mérite. Exemple né
331 que le sentiment poignant de cette vanité finale n’ empêche pas de servir quand il faut. C’est ce que j’appelle du pessimi
332 actif. Et c’est la devise du Taciturne : « Point n’ est besoin d’espérer pour entreprendre… » Mais encore faut-il entrepre
333 se mettre en condition de faire son œuvre, et de ne servir qu’à bon escient. À quoi Montherlant répondrait qu’il n’écrit
334 bon escient. À quoi Montherlant répondrait qu’il n’ écrit pas pour défendre ceci ou cela, mais parce qu’il a envie d’écrir
335 « L’Écrivain digne de ce nom doit, dans son art, ne faire que ce qui lui est agréable. Ce qu’il ferait dans d’autres cond
336 ait mal fait. » Est-ce que ce beau mot d’agréable ne prête pas ici à confusion ? L’on croirait qu’il s’agit simplement de
337 er l’auteur. Mais « un écrivain digne de ce nom » ne va pas, pour prendre un exemple, déconcerter son public à plaisir ; c
338 alut. Les plus grands ont été les moins libres de n’ en faire qu’à leur agrément. En bref, on peut reprocher à Montherlant
339 Je force un peu mon objection pour être clair. Je n’ entends pas que ce recueil n’apporte rien de positif, comme on dit. Il
340 pour être clair. Je n’entends pas que ce recueil n’ apporte rien de positif, comme on dit. Il apporte d’abord un ton, ce n
341 itif, comme on dit. Il apporte d’abord un ton, ce n’ est pas peu, si ce n’est pas toujours assez. Il apporte une qualité mo
342 l apporte d’abord un ton, ce n’est pas peu, si ce n’ est pas toujours assez. Il apporte une qualité morale, une propreté et
343 ge du bonheur qui scandalisera beaucoup moins que ne paraît le craindre Montherlant. « Pourquoi n’y a-t-il pas une École d
344 que ne paraît le craindre Montherlant. « Pourquoi n’ y a-t-il pas une École de bonheur ? au lieu des écoles de latin et de
345 t : qu’on y apprenne le régime de son âme. » Cela n’ est pas de Montherlant, mais bien du Prince de Ligne, on pourrait s’y
346 lant, qu’on a qualifié d’homme de la Renaissance, ne serait-il pas tout aussi bien — s’il refuse le siècle précédent — un
347 sance me promet d’être heureux, ce qui fait qu’il ne me coûte pas d’en être aussitôt privé ». Et par contre ceci, que je l
348 par contre ceci, que je lis dans Service inutile, n’ est-ce pas l’écho de la virile légèreté du grand seigneur : « Lénine,
349 onheur, chez l’un et l’autre, ces mêmes façons de ne se piquer de rien, cette même désinvolture tempérée de respect vis-à-
350 nces que l’on voudra, mais pas si fortes qu’elles ne nous permettent de prendre une vue plus juste de ce qui est propre à
351 le allure. À quoi l’on voudrait bien pourtant que ne se réduisît point l’héroïsme français : ce n’est qu’une de ses tentat
352 que ne se réduisît point l’héroïsme français : ce n’ est qu’une de ses tentations. 33. Grasset, éditeur. w. Rougemont