1 1936, Articles divers (1936-1938). Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour (1936)
1 ent de l’ordre romanesque : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour le souvenir et davantage, la présence d’un être
2 avantage, la présence d’un être vrai, qui apporte à toute l’œuvre une émouvante précision. Le personnage de Garta, dont l
3 eu connaissance, et moins encore se sont risqués à en parler. Rien d’étonnant d’ailleurs à cette réserve. Une sorte de s
4 t risqués à en parler. Rien d’étonnant d’ailleurs à cette réserve. Une sorte de stupéfaction respectueuse ; le mutisme de
5 voilà sans doute l’explication qu’il faut donner à l’espèce de résistance que rencontre Kafka parmi nous. Rien ne me par
6 e Kafka parmi nous. Rien ne me paraît plus propre à la réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie ro
7 xpliqué sur ce point délicat dans une note jointe à l’édition posthume du Procès : je doute que les lecteurs de ce livre
8 ce roman. Sachons-lui gré d’accorder par là même, à un public plus étendu, l’avance nécessaire, le gage tout humain dont
9 ont certains lecteurs ont besoin, pour se risquer à découvrir un génie tellement « étranger »… Le récit de Max Brod est l
10 préoccupations sociales, les lectures qu’il fait à son ami, la brève idylle de Weimar… tout cela compose une description
11 faits et deux ou trois dates suffiront désormais à situer ce fragment de biographie. Franz Kafka naquit à Prague en 1883
12 uer ce fragment de biographie. Franz Kafka naquit à Prague en 1883. Il passa dans cette ville la plus grande partie de sa
13 ise de jardinage. Lorsque enfin il voulut émigrer à Berlin pour s’y vouer totalement à son œuvre, il était déjà condamné
14 voulut émigrer à Berlin pour s’y vouer totalement à son œuvre, il était déjà condamné par une tuberculose du larynx dont
15 amné par une tuberculose du larynx dont il mourut à Vienne en 1924. Il n’avait publié de son vivant qu’un petit nombre de
16 e, mais avec une minutie telle qu’on ne tarde pas à pressentir que la plupart de nos démarches sous-entendent et masquent
17 cidité que suscite en nous cette vision ressemble à s’y méprendre à un cauchemar. Mais alors que tant de poètes s’efforça
18 te en nous cette vision ressemble à s’y méprendre à un cauchemar. Mais alors que tant de poètes s’efforçaient à la même é
19 emar. Mais alors que tant de poètes s’efforçaient à la même époque de délirer méthodiquement, et de brouiller tous les pl
20 diquement, et de brouiller tous les plans du réel à seule fin de s’en évader — durant le temps de leur ivresse tout au mo
21 e sans cesse, avec une sorte d’humour inflexible, à la conscience la plus sobre de notre humaine condition. On dirait qu’
22 maine condition. On dirait qu’il incite ses héros à pratiquer contre la vie bourgeoise une espèce de « grève perlée » : c
23 ouvrent et en dénoncent l’impossibilité foncière. À serrer de si près le réel, on le convainc rapidement de monstruosité
24 urvenu dans la vie de son héros, Kafka nous amène à penser que le détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrange
25 manière la plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial mystérieux et d’apparence extravagante. Derrière cett
26 t trahi par certaines bizarreries du récit, donne à l’œuvre une grandeur poétique, un pouvoir d’inquiéter presque morbide
27  », telles que nous les décrit Max Brod, aideront à deviner la nature assez rare du dessein secret de Kafka. Sa passion d
28 doute de Kierkegaard, qu’il fut l’un des premiers à découvrir au xxe siècle. D’autre part, sa volonté de sobriété, d’uti
29 n existence, et qui devait l’amener entre autres, à son projet de participation au jeune mouvement sioniste, se rattache
30 ment sioniste, se rattache non moins certainement à son admiration pour Goethe. Rien n’est plus suggestif que cette renco
31 homme de deux influences aussi contradictoires et à tant d’égards exclusives… Il y aurait fort à dire là-dessus… Mais en
32 s et à tant d’égards exclusives… Il y aurait fort à dire là-dessus… Mais en voilà sans doute assez pour faire entrevoir a
33 e l’aventure du « vieux Pragois », héros non tout à fait imaginaire, lui aussi, du Royaume enchanté de l’amour. 22. Le
2 1936, Articles divers (1936-1938). Forme et transformation, ou l’acte selon Kierkegaard (janvier 1936)
34 ité d’auteur — nous dit Kierkegaard — se rapporte à ce seul problème : comment devenir chrétien ». Car on n’est pas chrét
35 stence proprement humaine que lorsqu’il participe à la transformation du monde. Autrement, il est animal, et soumis à la
36 ion du monde. Autrement, il est animal, et soumis à la forme des choses, — à la commune dégradation. Ceux qui ne croient
37 il est animal, et soumis à la forme des choses, —  à la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à l’acte, c’est qu’il
38 à la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à l’acte, c’est qu’ils ne connaissent plus aucun chemin. Comment marche
39 et effort des sciences et des sociologies établit à grands frais l’évidence du désespoir : l’homme moderne a perdu « le c
40 le Christ. La possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc aucun acte possible, aucun acte vrai et v
41 rtu de l’absurde » ; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alors les règles, les morales et les lois qui nous disaient
42 onne éternelle, prophétie de l’éternité qui vient à nous. 2. Il n’est d’action que prophétique Qu’est-ce que prophé
43 evinent les pas, chemin qui se dérobe au doute et à l’orgueil, mais que parfois la prophétie fait briller devant lui comm
44 t briller devant lui comme un éclair. « Sachez qu’ à l’origine, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes les créatur
45 s croyants, dont la vocation prophétique pareille à celle des hommes de Dieu qui se lèvent sous l’Ancienne Alliance, se c
46 t comment transformer, c’est-à-dire comment obéir à la Parole qui prophétise ? Le chemin est imprévisible. Ce que nous co
47 pourtant son point de départ. Le chemin commence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ordre qu’il reçoit de Die
48 ommence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ordre qu’il reçoit de Dieu, — n’importe où et n’importe qui, à n’im
49 reçoit de Dieu, — n’importe où et n’importe qui, à n’importe quel ordre reçu, et sans nulle préparation. « Comment un h
50 our le jour, sans assurances et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans la confiance et l’inquiétude, — on pourrait di
51 e de ta vie, sa mesure et sa vocation, son risque à chaque instant visible, et sa sécurité, cachée au plus secret du risq
52 au plus secret du risque. 3. Nous n’avons pas à suivre le chemin, mais bien à l’inventer à chaque pas Tant que nou
53 3. Nous n’avons pas à suivre le chemin, mais bien à l’inventer à chaque pas Tant que nous considérons le Christ avec d
54 ns pas à suivre le chemin, mais bien à l’inventer à chaque pas Tant que nous considérons le Christ avec des yeux de mo
55 morale de premier plan qu’il ne resterait plus qu’ à imiter, l’acte demeure un pur possible, un modèle d’acte, une abstrac
56 ien la définition de « l’inactuel ». Se conformer à ce pieux idéal, non seulement ce n’est point agir, non seulement c’es
57 dèle que ses yeux voient et que sa chair perçoit ( à la lecture des évangiles par exemple) au lieu d’écouter l’ordre, au l
58 aintenant, par la foi, sur ce chemin qui commence à ses pas, — c’est là le destin du chrétien, c’est son « impossible » d
59 son « impossible » destin, le seul acte possible à l’homme. Et c’est l’acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’abs
60 ire sans que rien y prépare. « Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi »10. Si nous vivions dans l
61 ssé ni futur, mais le Jour éternel de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et l’unité du genre humain.
62 ur, mais le Jour éternel de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et l’unité du genre humain. Si nous v
63  », mais la réponse est : « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte de la foi, le mystère du temps se dévoil
64 ici : le pécheur pardonné vit dans le temps comme à contre-courant de sa durée, vit d’acte en acte. Et son temps n’est pl
65 issance et la mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance — toute la
66 acte est Passage et tension, — passage de la mort à la vie, tension entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire de la P
67 stant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le rédime pui
68 bée par l’instant, par le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel. « Celui qui doit agir, s’il veut juger de
69 selon le succès qu’il remporte, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si le succès pouvait réjouir le monde entier,
70 ge. Le visage appartient au temps, mais la vision à la parole dont elle procède, et si la face d’un homme est belle, c’es
71 épasser cette illusion du désespoir, qui consiste à s’imaginer que l’acte est puissance de l’homme : d’où l’impossibilité
72 é ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’est pas seulement renversement, mais création irréversible.
73 sement, mais création irréversible. Et cela tient à la nature de l’acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’a
74 ela tient à la nature de l’acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de la Personne qui l’initie. Le dé
75 ’acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou si
76 ’est-à-dire qu’il n’y croit pas et qu’il ne croit à aucun acte. Il vit dans le désir et dans la nostalgie, et son regard
77 oucher vers « les autres », une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait-il fa
78 sespéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à la réalité des liens et de la masse, à la réalité des autres dans l’e
79 a croyance à la réalité des liens et de la masse, à la réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pourrait-il
80 et c’est pourquoi il n’y croit pas. Nul n’échappe à la forme du monde. Mais la subir, c’est justement désespérer. Il faud
81 te et insensible de l’instant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’est-il donc
82 reproches au « christianisme de la chrétienté », à cette « inconcevable illusion des sens », ne s’adressent-ils pas just
83 sion des sens », ne s’adressent-ils pas justement à la « vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à la portée de « 
84 « vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à la portée de « la masse », alors que la foi véritable est celle du so
85 outient, hors la foi ? « Celui qui ne renonce pas à la vraisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu. L’audace relig
86 amais en relation avec Dieu. L’audace religieuse, à plus forte raison l’audace chrétienne, est au-delà de toute vraisembl
87 ute vraisemblance, là où précisément l’on renonce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas le su
88 . Le bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à l’acte et il meurt au hasard, sans avoir rencontré personne ni soi-mê
89 ocation qu’il incarne. Sur le chemin qui commence à ses pas, il ne meurt jamais par surprise : et ce n’est point qu’il ai
90 uté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à mes pieds, une lumière sur mon sentier » 6. Die Chimäre, trad. fran
91 ie d’un prophète, ou bien alors elle se réduirait à la grammaire et à la syntaxe particulière de son message. 8. Journa
92 ou bien alors elle se réduirait à la grammaire et à la syntaxe particulière de son message. 8. Journal. « L’imitation s
93 e refus de l’instant et de l’obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souf
94 kegaard se rapportait de la façon la plus précise à Jean XI. 4. 17. Richtet selbst. 18. Ibid. 19. Toutefois dans le
95 d. 19. Toutefois dans le Journal des années 1846 à 1848, on trouve de nombreuses notations de ce genre : « Grande sera m
96 is c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’ à la mort, mais que la mort survient comme une absurdité, la première d
97 ière dans l’histoire du bourgeois, mais décisive. À une enquête dont le sujet était : La rencontre la plus importante de
3 1936, Articles divers (1936-1938). Décadence des lieux communs (décembre 1936)
98 notre langue est plus malade que n’était le latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était e
99 dont les différents partenaires changent la règle à leur fantaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que les autres t
100 la règle à leur fantaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que les autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas la
101 mer des arceaux vivants. Quand Alice avait réussi à mettre en boule son hérisson, et se préparait à le frapper avec la tê
102 i à mettre en boule son hérisson, et se préparait à le frapper avec la tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la
103 ’ailleurs que personne ne se soucie de les mettre à exécution25. « Vous n’avez pas idée, conclut Alice, combien c’est aff
104 pirituelle… Tandis que d’autres opposent l’esprit à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre
105 autres opposent l’esprit à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolu
106 re à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces permutatio
107 ces permutations seraient néanmoins assez simples à débrouiller dans la pratique, et pourraient définir utilement le part
108 tre, présence effective de la pensée et de la foi à nos misères, activité concrète et créatrice, et garantie contre les p
109 e, l’arceau sous lequel je dois passer se promène à l’autre bout du jeu et j’aurais dû croquer le hérisson de la Reine s’
110 oquer le hérisson de la Reine s’il ne s’était mis à courir juste au moment où j’allais jouer. » ⁂ Tout le monde ou presqu
111 ant le Diktat de Versailles, par l’Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si
112 isme, nationalisme, impérialisme… ⁂ Tout concourt à créer et aggraver cette crise du sens des mots et de la sémantique vi
113 uit de son vivant. Cependant les journaux du soir à cinq-cent-mille exemplaires et la radio atteignent des millions d’aud
114 l’éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirage, voilà tout un domaine que l’écrivain digne du nom ne co
115 . Cette accession démocratique des grandes masses à la vie de l’esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actue
116 randes masses à la vie de l’esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actuel du régime. Elle est à tout le moin
117 improbable dans l’état actuel du régime. Elle est à tout le moins vérifiable. Par contre, on peut très nettement constate
118 lés. Ces échanges en effet aboutissent rapidement à démonétiser les mots. Le vocabulaire des journaux est vague, impropre
119 t scrupuleux. C’est pourquoi la plupart renoncent à enseigner au milieu d’une rumeur générale, où leurs paroles ne sont p
120 ’est un jeu formel et précis, dont ils sont seuls à connaître les règles. (Encore ne sont-ils guère d’accord pour enregis
121 nt de plus en plus « exquis » et par suite inapte à traduire une volonté d’action bientôt jugée vulgaire. ⁂ La civilisati
122 n occidentale aurait-elle donc des fins dernières à quoi elle tend ? Quand le peuple d’Israël oublie sa vocation et se dé
123 i toujours : pour peu que le sens des fins vienne à faiblir et que la mesure commune cesse d’être effectivement perçue et
124 re effectivement perçue et observée, l’on assiste à la même dégradation des instruments de la culture : — d’une part les
125 a culture : — d’une part les écrivains se mettent à raffiner l’expression propre de chaque chose séparée, au détriment de
126 n contrôle sur son parler, qu’elle ne soumet plus à un but unanime. Si bien que les écrivains ne sont plus compris du peu
127 it, quand elle n’est plus le don qu’un homme fait à un homme, et qui engage quelque chose de son être, c’est l’amitié hum
128 homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et qu’il trompe. Cette fin c
129 aim, une soif, une nostalgie que tous nos gestes, à notre insu, trahissent. Mais quelqu’un s’en est aperçu. Quelqu’un a f
130 vrai Dieu, les prêtres donnent des idoles faites à l’image des terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images, le peup
131 ut. On nous en donnera donc de nouveaux fabriqués à notre mesure, — et quelle misérable mesure ! « Slogans » publicitaire
132 Amérique ! Achetez français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis,
133 a loi inexorable et mécanique qui plie l’individu à des calculs de masses, à des disciplines extérieures, à des ambitions
134 ique qui plie l’individu à des calculs de masses, à des disciplines extérieures, à des ambitions inhumaines. Nous vivons
135 calculs de masses, à des disciplines extérieures, à des ambitions inhumaines. Nous vivons à l’âge des mots d’ordre. L’on
136 érieures, à des ambitions inhumaines. Nous vivons à l’âge des mots d’ordre. L’on peut penser que c’est une espèce de prog
137 muns spirituels et effectifs ne nous ordonnent qu’ à des fins provisoires ou dégradantes : l’État totalitaire, et la riche
138 re est justement la part active que prend l’homme à tout ce qui est création dans la nature, dans l’histoire, dans la vie
139 it d’un ouvrage intitulé Penser avec les mains , à paraître chez Albin Michel. 25. Les injures et les marques de mépris
140 mie. Ainsi l’on ne risque pas de confondre le vol à la tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis que le
141 ’en nourrissent. L’opération fameuse qui consiste à additionner les casseroles et les haricots est à la base de l’éloquen
142 à additionner les casseroles et les haricots est à la base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Décade
4 1937, Articles divers (1936-1938). Changer la vie ou changer l’homme ? (1937)
143 t, non sans avoir d’abord renforcé cet État jusqu’ à l’extrême qu’on nomme dictature ; et qu’enfin cette dictature dispara
144 istoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en pas croire vos yeux, qui voient Staline, mais à croire une proph
145 ’en pas croire vos yeux, qui voient Staline, mais à croire une prophétie. Cependant vous demeurez sceptique : Staline, ap
146 s dialecticiens. Alors, peut-être, vous commencez à entrevoir ce que signifie : dialectique. C’est en fait, l’obéissance
147 fait, l’obéissance au parti, l’obéissance aveugle à Staline, dépositaire unique de la doctrine. Quitter le plan des vérit
148 oire, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la vérité, et ne croire plus qu’à la tactique d’un dictateur, lequel
149 ément, renoncer à la vérité, et ne croire plus qu’ à la tactique d’un dictateur, lequel changera la vérité tous les six mo
150 une doctrine qui prétend justifier théoriquement, à quelques années d’intervalle, la démocratie des Soviets, puis la dict
151 iets, puis la dictature de Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et l’impérialisme actuel (si mal déguisé par la
152 essités pratiques et contingentes, et je n’ai pas à porter, ici, un jugement d’allure politique. Mais ce qui est grave, c
153 manœuvres au nom de la doctrine, et les justifier à tout coup (avec léger retard sur l’événement !) par des nécessités di
154 de discuter, de confronter ? « Rien ne sera juste à cette balance » (Pascal). Je m’en voudrais d’exploiter l’équivoque. M
155 séquent. C’est ce mouvement profond qui légitime, à ses yeux tout au moins, les détours les plus tortueux, mettons les dé
156 qu’il est un être « en relation », qu’il est lié à une société42. Mais encore, à l’instar du chrétien, le marxiste croit
157 on », qu’il est lié à une société42. Mais encore, à l’instar du chrétien, le marxiste croit que la société présente n’a p
158 tre elle-même, et fait de l’homme qui s’abandonne à elle un être antinomique, « divisé », et comme « aliéné » de ce qu’il
159 « aliéné » de ce qu’il y a de plus humain en lui. À la découverte de « cette aliénation de soi », qui selon Marx serait l
160 r sa plénitude et se « regagner totalement »43 qu’ à la faveur d’une économie44 radicalement renouvelée. Une réaction semb
161 i ne concourrait pas, d’une façon ou d’une autre, à transformer, à changer quelque chose, — à lutter efficacement contre
162 t pas, d’une façon ou d’une autre, à transformer, à changer quelque chose, — à lutter efficacement contre le mal universe
163 autre, à transformer, à changer quelque chose, —  à lutter efficacement contre le mal universel. Cette volonté fondamenta
164 ttre aux Romains (12, 2) : Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de vo
165 ement humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution, pour Mar
166 is du Temps. De la polémique antispiritualiste à la doctrine marxiste On ne répétera jamais assez que la doctrine o
167 de vue religieux, la situation qui se présentait à Marx ? C’était celle de la Restauration. Professeurs et bourgeois lib
168 lus ce qui l’eût jugé. Marx ne perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à la base d’une pareille imposture : il la
169 ne perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à la base d’une pareille imposture : il la sait trop profondément enrac
170 mais l’homme, que les spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhumain. Il lui faudra donc recourir à un autr
171 ujours plus inhumain. Il lui faudra donc recourir à un autre ordre d’arguments : ceux que l’on dit « matérialistes ». Ce
172 former « l’intérieur » se gardent bien de toucher à l’extérieur. Marx dira donc, contre eux, qu’il faut d’abord transform
173 ravages sont déjà tels qu’on ne peut plus songer à rétablir la vérité par des moyens purement spirituels. Au mensonge sp
174 ue ? On voit ainsi comment Marx lui-même se prend à son jeu polémique. Ce ne fut guère qu’à la fin de sa carrière que son
175 se prend à son jeu polémique. Ce ne fut guère qu’ à la fin de sa carrière que son ami Engels en découvrit le danger. « Ma
176 aux autres facteurs. » De la doctrine marxiste à la tactique stalinienne En effet, de ce « mensonge » opportuniste
177 nt la réalité humaine. Obligé par ses adversaires à proclamer la primauté du matériel, Marx ne se rendit pas compte qu’il
178 eurs de l’esprit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous ses malheurs est dans les choses, et non
179 ncret, purement social, d’autre part, l’ont amené à mettre l’accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet accent que
180 ien, et surtout le protestant, répugne absolument à concevoir que les dogmes théologiques puissent figurer la théorie d’u
181 e et la pensée chrétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant à ce qui détermine le tout de l’homme : son origine, s
182 rétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant à ce qui détermine le tout de l’homme : son origine, sa fin, et sa miss
183 iateur ; et qu’il a pour mission actuelle d’obéir à une Parole qui est Jésus-Christ, le Médiateur. Mais cette Parole juge
184 en dérive vers le néant. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transformés… » Cela ne signifie pas, po
185 on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus qu’ à attendre, et à subir en gémissant les lois d’un monde qu’il condamne 
186 version, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémissant les lois d’un monde qu’il condamne ! Car alors, où
187 ent, comme l’indique le mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup l’origine e
188 voie. Mais il se connaît du même coup responsable à l’endroit du monde. Car si le monde s’est livré à l’injustice et au d
189 à l’endroit du monde. Car si le monde s’est livré à l’injustice et au désordre, c’est par la faute de l’homme, qui était
190 cependant l’Évangile est formel : « Que servirait à un homme de gagner le monde, s’il perdait son âme ? » Son âme, c’est-
191 ues » comme le dirait un incroyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et
192 de sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la se
193 vie matérielle et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose néc
194 e et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose nécessaire », le
195 que les hommes ensuite deviendraient plus habiles à s’entendre et à vivre heureux ? « Changer la vie », criait l’enfant R
196 nsuite deviendraient plus habiles à s’entendre et à vivre heureux ? « Changer la vie », criait l’enfant Rimbaud ! Et les
197 se, pour l’opposer au « spiritualisme » autant qu’ à la routine et au cynisme des conservateurs. Saint Paul n’a pas cette
198 cé la lutte sur ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer que le « parti chrétien » eût triomphé, rien ne l’eût empêch
199 evêtu les formes du pouvoir déposé51 et renvoyant à des temps plus paisibles l’évangélisation — sa raison d’être — il se
200 plus urgentes : donner du pain et des spectacles à la foule. Mais Paul était apôtre et non pas dictateur. C’est pourquoi
201 on pas la haine et le cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la nouvelle, absolument nouvelle, venant d’a
202 ur importe seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir l’homme ! Peut-être suffit-il à vous nourrir, personnellement
203  » suffit à nourrir l’homme ! Peut-être suffit-il à vous nourrir, personnellement, mais ce n’est pas cela qui supprime la
204 la guerre, qui change le monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproches apparaissent justifiés
205 change le monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproches apparaissent justifiés à la grande mas
206 chrétiens : ces reproches apparaissent justifiés à la grande masse des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi les
207 ment enthousiastes, c’est qu’il s’est trouvé seul à protester contre le monde tel qu’il va. On dira : c’est d’abord qu’il
208 apitaliste, trop réelle, tout le malheur inhérent à l’existence, tout le malheur dont en vérité le péché de chacun est re
209 ffecte en rien le cours des choses, je suis fondé à lui répondre : « Ton reproche s’adresse à mon hypocrisie, à ma lâchet
210 s fondé à lui répondre : « Ton reproche s’adresse à mon hypocrisie, à ma lâcheté, à mon absence de foi, mais non pas du t
211 ndre : « Ton reproche s’adresse à mon hypocrisie, à ma lâcheté, à mon absence de foi, mais non pas du tout à la foi. Car
212 eproche s’adresse à mon hypocrisie, à ma lâcheté, à mon absence de foi, mais non pas du tout à la foi. Car la foi, dit Lu
213 cheté, à mon absence de foi, mais non pas du tout à la foi. Car la foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a p
214 de n’être pas assez chrétien ! Tu m’incites donc à le devenir davantage, quand tu croyais réfuter ma religion. Ton athéi
215 tianisme. » (Je répète que ce n’est pas sa faute, à ce marxiste, mais notre faute, et tout d’abord la mienne.) Par contre
216 par lui. Or une telle volonté ne peut conduire qu’ à l’excès du matérialisme, non point par la malice de Staline, mais par
217 les de l’homme en ce qu’elles ont d’irréductibles à toute détermination sociale ou historique imaginable, dans le passé,
218 , ou pour son « succès », si l’on ne parvient pas à l’opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le pr
219 marxiste et la foi personnelle du chrétien suffit à expliquer tout le reste. Le communisme prépare un paradis terrestre,
220 en ce sens qu’ils rapportent leur accomplissement à un état dernier et invariable, à un terme futur et total, accessible
221 accomplissement à un état dernier et invariable, à un terme futur et total, accessible au travers d’une longue tribulati
222 qui se convertit au communisme ne se rattache pas à une Présence actuelle. Il fait un pari dont l’objet n’est pas accessi
223 à l’essentiel : par là même, il se voit contraint à chaque instant de transformer autour de lui ce qui s’oppose à son bie
224 tant de transformer autour de lui ce qui s’oppose à son bien souverain. S’il est chrétien, il sait qu’il est membre d’un
225 n seulement il se voit contraint de venir en aide à son prochain, mais encore rien ne peut le satisfaire de ce qu’il obti
226 ésents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’ à l’accomplissement final. Car cet accomplissement, ou plénitude, n’est
227 r, éternité. Je crucifie le Christ et je m’oppose à son retour. Il n’est donc pas d’« opportunisme » chrétien qui tienne,
228 aire en arguant que c’est le seul moyen d’accéder à un stade économique plus favorable au développement du socialisme. Je
229 ité des communistes suit Staline. D’où il résulte à l’évidence que pour la grosse majorité des communistes, le mensonge,
230 crisie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’ à la guerre s’il le faut, sont des moyens parfaitement acceptables en t
231 grès prolétarien, et préparent un avenir conforme à la doctrine59. Que leur importe une « faute » personnelle et actuelle
232 Zinoviev, par « fidélité » au Parti, c’est-à-dire à l’avenir du Parti, proférer des aveux mensongers qu’il croyait tactiq
233 pposant, un « trotzkyste » ou un « saboteur », et à tout le moins un militant suspect. Tout cela repose sur un fait uniqu
234 sacrifice, pour le mieux-être du prochain, suffit à compléter, si je puis dire, l’action proprement religieuse. Et j’ente
235 et d’intérêts humains très chers. Mais je demande à ces chrétiens « changés » s’ils ont un souci suffisant des suites soc
236 embres du Mouvement des Groupes, qui représentent à l’heure actuelle le christianisme le plus « activiste ». Pourquoi ref
237 te du marxisme ne doit pas seulement nous inciter à des condamnations toutes théoriques : elle doit nous avertir de corri
238 en trouvera justifié pour autant. Je ne crois pas à une politique chrétienne, déduite une fois pour toutes de la théologi
239 ues, et contribue, par son action la plus intime, à la création d’autres formes. Il importe de savoir lesquelles, et de l
240 onsciemment. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes les entreprises désespérées qui passionnent les masses incroya
241 anisées (parfois trop bien organisées). On parle, à tort ou à raison, d’États chrétiens, ou de nations, de forces, de civ
242 arfois trop bien organisées). On parle, à tort ou à raison, d’États chrétiens, ou de nations, de forces, de civilisation
243 lors de se laisser persécuter ? N’avons-nous rien à faire qu’à subir le martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de l’État une
244 laisser persécuter ? N’avons-nous rien à faire qu’ à subir le martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de l’État une attitude d
245 s-nous rien à faire qu’à subir le martyre ? Ou qu’ à revêtir vis-à-vis de l’État une attitude d’objecteurs de conscience ?
246 de conscience ? N’avons-nous rien que nous-mêmes à sauver, alors que nos erreurs passées sont pour une part, peut-être c
247 roupes, loyalistes il est vrai, mais réfractaires à certaine mise au pas. Il serait peut-être abusif de déduire d’une sit
248 usqu’au règne de François Ier, c’est-à-dire jusqu’ à une époque où la passion totalitaire des gouvernants n’avait pas enco
249 cette structure. L’importance attachée par Calvin à la notion de vocation personnelle suffit à expliquer ce processus. À
250 Calvin à la notion de vocation personnelle suffit à expliquer ce processus. À une éthique charismatique62 correspond néce
251 tion personnelle suffit à expliquer ce processus. À une éthique charismatique62 correspond nécessairement une organisatio
252 de ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à l’esprit unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome. Le grand so
253 oyons gagner toutes les églises, est une promesse à laquelle nous devons croire de toute la force de notre foi. Aussi ne
254 nclusion que je crois valable pour tout chrétien, à quelque église qu’il appartienne. Nous avons tous reçu de Dieu un app
255 parti contre le régime communiste. On nous donne à choisir entre deux sortes de matérialisme. Mais le communisme, au moi
256 « tout en tous ». Si les églises chrétiennes ont à souffrir demain par le fait d’un État tyrannique, il faut qu’elles sa
257 féconde. Tout le mal vient de notre esprit. C’est à lui de faire pénitence, car c’était lui qui devait témoigner de sa pr
258 ualiste, la vérité du spirituel. Nous n’avons pas à nous dresser contre la « vérité » déviée de Marx, contre une vérité o
259 oupée des liens vivants qui l’attachaient en Dieu à ses fins et à ses origines. Mais nous devons proclamer la vérité parf
260 s vivants qui l’attachaient en Dieu à ses fins et à ses origines. Mais nous devons proclamer la vérité parfaite dont nous
261 t nous avons, nous les premiers, dévié. « Malheur à moi si je n’évangélise ! », disait l’Apôtre. Malheur à moi si je refu
262 si je n’évangélise ! », disait l’Apôtre. Malheur à moi si je refuse de réaliser l’Évangile dans tous les domaines de la
263 mais elle ne suffit pas. « Être radical consiste à attaquer le mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour l’homme mê
264 une activité révolutionnaire. » Phrase importante à l’extrême ! Mais combien oubliée par le communiste moyen de nos jours
265 autocritique si l’on veut, que l’Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de corriger sans cesse, de rectifie
266 t inadéquate en soi, et ne peut être qu’un renvoi à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’est a
267 être qu’un renvoi à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique que
268 end de son message sous le rapport de sa fidélité à son fondement, à son contenu et à son but. Elle ne présente rien que
269 e sous le rapport de sa fidélité à son fondement, à son contenu et à son but. Elle ne présente rien que l’on puisse compa
270 de sa fidélité à son fondement, à son contenu et à son but. Elle ne présente rien que l’on puisse comparer, fût-ce le pl
271 uisse comparer, fût-ce le plus superficiellement, à un programme théorique qu’il s’agirait maintenant d’appliquer. En bre
272 que l’on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre à … » veut dire ici : « tendre vers… » 51. Ma supposition n’est pas tou
273 an Guéhenno (Union pour la Vérité, 22 mars 1930). À quoi un socialiste allemand, le professeur Hans Mühlestein, rétorquai
274 S’il n’y a pas de socialisme en Asie, cela tient à l’absence du christianisme. » Je note ici, à l’appui des dires de de
275 ient à l’absence du christianisme. » Je note ici, à l’appui des dires de de Man, que le mouvement syndicaliste au Japon a
276 t-il dans l’être humain d’absolument irréductible à toute transformation sociale ? La mort physique et le péché. Mais aus
277 une de ces conditions conduit nécessairement soit à l’idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme tota
278 s conduit nécessairement soit à l’idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme totalitaire résulte néce
279 (créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu’ à l’inverse, on ne saurait établir que la sécularisation du christianis
280 ndit : Le Royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards et l’on ne dira pas : il est ici, ou bien : il es
281 contraignit la Chine, sous la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’opium. Un tel fait donne raison en apparenc
282 de l’opium. Un tel fait donne raison en apparence à la critique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à
283 critique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’ à l’homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends
284 te. En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression da
285 stifier des moyens qui seraient en soi contraires à la justice, — ou à l’essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas
286 qui seraient en soi contraires à la justice, — ou à l’essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie p
287 ence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie polémique des bourgeois, aux yeux desquels tout bolchevist
288 tion démocratique, fédérative et parlementaire. » À la base de tout, il y a l’église locale, ou paroisse. Ces églises se
5 1937, Articles divers (1936-1938). Vocation et destin d’Israël (1937)
289 que : le seul détail précis que rapporte la Bible à son sujet, c’est cette difficulté à s’exprimer. Non seulement rien d’
290 orte la Bible à son sujet, c’est cette difficulté à s’exprimer. Non seulement rien d’historiquement notable ne le prédest
291 rien d’historiquement notable ne le prédestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, — les psychologues s’y épuiseront
292 celui-là précisément qui paraît le plus décisif, à vues humaines, s’agissant d’un homme appelé au ministère de la Parole
293 t pas eu d’histoire sans la promesse que Dieu fit à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » avec la mission qu’elle inc
294 ’a jamais pu seulement imaginer, ce qui ne répond à nul besoin historiquement déterminé… L’histoire, au sens hégélien ou
295 exceptionnellement conservateur, qui a pesé jusqu’ à nos jours sur les habitants du désert. Désignée entre mille, sans rai
296 aison, peut-être, que cette impuissance étonnante à construire et à conquérir… Ainsi les annales d’Israël sont celles d’u
297 , que cette impuissance étonnante à construire et à conquérir… Ainsi les annales d’Israël sont celles d’une puissance imp
298 ents. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce qui les rabat à leur destin, ce sont
299 t à eux, dans ces annales, c’est ce qui les rabat à leur destin, ce sont leurs révoltes constantes, leurs faux pas, leurs
300 rs accès d’incroyance. Et toute leur grandeur est à Dieu, c’est-à-dire à la vocation qui les arrache, malgré eux, à ce de
301 . Et toute leur grandeur est à Dieu, c’est-à-dire à la vocation qui les arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre e
302 à-dire à la vocation qui les arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre envergure. Foi et idolâtrie La considé
303 une insistance innombrable et vraiment grandiose à cette opposition fondamentale d’une vocation et d’un destin, hors de
304 uelle on ne peut rien comprendre de ce qui touche à la nation des Juifs. Destin nomade, vocation messianique. Destin visi
305 et qui seule l’élève, l’assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errait sans « fin » dans le désert, sans
306 rrait sans « fin » dans le désert, sans but jusqu’ à ce que Dieu l’élise. Désormais sa voie est fixée, mais ce n’est plus
307 sse contre laquelle il est fatal que l’on cherche à se protéger par quelque chose de visible et de tangible. Ainsi les Hé
308 dolâtrie qui renaît dès qu’Israël cesse de croire à ce que ses yeux ne peuvent voir, et qui pourtant fait toute sa grande
309 » peuple, élu par Dieu et « mis à part »64. C’est à elle que tout acte se réfère, et non seulement tout geste, mais toute
310  » et jugé dans la perspective de la fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’A
311 l’on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à l’antiquité hellénique) la mesure d’une civilisation, le canon d’une
312 ler sur l’Alliance. Et si ces « clercs » viennent à trahir, cédant à leur penchant immémorial et bien connu, s’ils oublie
313 e. Et si ces « clercs » viennent à trahir, cédant à leur penchant immémorial et bien connu, s’ils oublient que le Dieu qu
314 peuple élu. Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à la fin que les prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des ido
315 elles elle existe. C’est l’idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à la « lettre » d’une législation divine, mais dont
316 ’est l’idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à la « lettre » d’une législation divine, mais dont l’homme s’est empar
317 eu de le secourir en incarnant l’esprit. Et c’est à cette ultime tentation que devaient succomber les plus grands rigoris
318 donnait son sens… ⁂ Rien ne me paraît plus propre à confirmer cette interprétation de la Loi, comme mesure du peuple hébr
319 tre législateur (Moïse), écrit-il dans sa Réponse à Appion 67, a été le seul dont les actions et les paroles ont été conf
320 s, complètes et très détaillées, mais il a veillé à ce qu’elles fussent connues de tous. Cette connaissance produit parm
321 es nos actions doivent avoir pour objet de plaire à Dieu. Une culture pauvre, mais fidèle Un homme du xxe siècle
322 et matériel, aussi fanatiquement lié et suspendu à l’invisible. Le moderne en ressent comme une offense à cette liberté
323 nvisible. Le moderne en ressent comme une offense à cette liberté créatrice dans laquelle il met son orgueil. Que de rich
324 nement et la diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu’une occasion de dépassement… Oui, la Richesse est notre d
325 s, puis coupés de toute base commune, en viennent à ne plus même pouvoir communiquer, ni s’animer les uns les autres, cha
326 ris de tout « sens » commun, et convoquant enfin, à grands frais d’inventions, la vieille malédiction de la tour de Babel
327 on du genre humain. Le dilemme qui se trouve posé à toute civilisation, et d’une manière très urgente à la nôtre, est ass
328 toute civilisation, et d’une manière très urgente à la nôtre, est assez clairement défini par la comparaison que l’on peu
329 i d’Israël. Ce que l’on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont l’exemple juif nous permett
330 Ce que l’on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont l’exemple juif nous permettra mieux que
331 ire ? » L’homme qui a une vocation n’est pas bon à autre chose. Israël portait dans son sein l’avenir religieux du monde
332 accents d’amère ironie, proclamait que la justice à l’ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ainsi toute t
333 te tentative de culture profane se voit assimilée à une révolte d’orgueil contre Dieu. La culture d’Israël sera pauvre à
334 ueil contre Dieu. La culture d’Israël sera pauvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté sera la condition de sa grandeu
335 Hébreu, se borner au concret, c’est rester fidèle à la Loi. D’ailleurs son langage même s’ordonne dès l’origine à cette v
336 ailleurs son langage même s’ordonne dès l’origine à cette vocation supérieure ; dénué de termes abstraits, impropre à tou
337 supérieure ; dénué de termes abstraits, impropre à toute métaphysique69 il contraint les auteurs sacrés à l’invention de
338 te métaphysique69 il contraint les auteurs sacrés à l’invention de métaphores qui enrobent les notions les plus hautes da
339 rites, science, industrie, tout cela est sacrifié à la seule chose nécessaire : l’accomplissement d’une vocation spiritue
340 de la promesse qu’elle portait. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce que l’on nous reproche comme un grand défaut, d
341 lle portait. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce que l’on nous reproche comme un grand défaut, de ne nous point étu
342 e comme un grand défaut, de ne nous point étudier à inventer des choses nouvelles, soit dans les arts, ou dans le langage
343 tinuels changements, nous attribuons au contraire à vertu et prudence, de demeurer constamment dans l’observation des loi
344 tre, et quels plus grands honneurs peut-on rendre à Dieu, puisque nous sommes toujours préparés à nous acquitter du culte
345 dre à Dieu, puisque nous sommes toujours préparés à nous acquitter du culte que nous lui devons ; que nos Sacrificateurs
346 crificateurs sont établis pour veiller sans cesse à ce qu’il ne se fasse rien qui y soit contraire, et que toutes choses
347 nous ? Chute d’Israël Tout était suspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messianique donné
348 suspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messianique donnée par Dieu dès les temps primitifs72. Ma
349 enant prétexte de la Loi, cette « ombre des biens à venir. » (Héb. 10, 1), pour repousser le Christ, qui était « l’esprit
350 s. Voilà pourquoi le peuple juif, qui n’a pas cru à sa victoire, et qui repousse la nouvelle mesure, c’est-à-dire la Nouv
351 e qui distingua l’église chrétienne des religions à mystères et des autres cultes orientaux de cette époque, et qui fit d
352 éments culturels et civilisateurs qui survécurent à la chute d’Israël, au moins aussi fondamentaux pour l’Occident que la
353 n sait le rôle joué dans la Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux traditions prophétiques. Mais sait-on à que
354 ment et aux traditions prophétiques. Mais sait-on à quel point tout cela vit encore dans les églises évangéliques de nos
355 été dès le début une église minoritaire, en butte à la persécution, ne suffit pas à expliquer les ressemblances si souven
356 ritaire, en butte à la persécution, ne suffit pas à expliquer les ressemblances si souvent signalées entre le sort des tr
357 ans une économie provisoirement vivable et propre à entretenir l’attente active du Messie, de même l’éthique charismatiqu
358 éthique charismatique77 des calvinistes les amène à la conception d’une intendance des biens terrestres, dont ils auraien
359 ntendance des biens terrestres, dont ils auraient à assumer l’office : usant de ces richesses « comme n’en usant pas », a
360 ’une et l’autre hypothèse rattache le capitalisme à des attitudes religieuses, d’où serait partie l’impulsion, attitudes
361 subirent l’éthique juive et l’éthique puritaine, à mesure qu’elles « réussissaient ». Le spiritualisme transcendant des
362 e que cette attitude provocante fut souvent prise à l’étranger pour un trait de caractère germanique. Mais c’est aussi l’
363 plus troublé de sentimentalisme, que l’on dénonce à droite chez les auteurs d’origine juive, mais qui ont cessé de croire
364 urs d’origine juive, mais qui ont cessé de croire à la mission de leur peuple, et qui exercent désormais à vide les facul
365 mission de leur peuple, et qui exercent désormais à vide les facultés psychologiques fortement développées dans leur race
366 et transformant en tyrannie absurde ce qui était à l’origine une attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à soi
367 e qui était à l’origine une attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à soi-même. Corruptio optimi pessima… La
368 attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à soi-même. Corruptio optimi pessima… La vocation collective Ces
369 magine, nous amènent au problème central que pose à la pensée d’un protestant, et particulièrement d’un calviniste, l’exe
370 le peuple élu, a trahi sa mission et s’est livré à son destin. Sa dispersion en est le châtiment. Serait-il donc possibl
371 lorsqu’elle lui apparaît incarnée ? Est-il rejeté à tout jamais ? Une vocation est-elle donc « amissible » ? Le refus de
372 uant leur Messie, les Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice national, c
373 e d’Israël est tombée dans l’endurcissement jusqu’ à ce que la totalité des païens soit entrée (dans l’Église) ; et ainsi
374 servir les desseins éternels de Dieu. Elle étend à l’humanité entière le bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependan
375 les mains du plus secret conseil de Dieu. « Quant à moi, écrit Calvin, j’étends ce nom d’Israël à tout le peuple de Dieu,
376 ant à moi, écrit Calvin, j’étends ce nom d’Israël à tout le peuple de Dieu, en ce sens, après que les gentils seront entr
377 ssi se retirant de leur révoltement, se rangeront à l’obéissance de la foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier
378 st pas au nom d’intérêts passagers que nous avons à prendre position, mais au nom des promesses de la foi, et dans une pe
379 , et dans une perspective missionnaire qui réduit à leurs justes proportions les thèses des politiques nationalistes. Le
380 bien voir que le « racisme » juif n’est justifié à l’origine que par la vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas
381 t biologique. Il ne le devient qu’accessoirement, à mesure que l’on prend les « signes » de la vocation pour des réalités
382 e glissement fatal s’est-il dessiné dès le début, à mesure que l’on codifiait les relations des « élus » et des « gentils
383 elations des « élus » et des « gentils ». On sait à quel point cette codification fut poussée. L’historien juif Josèphe é
384 e. L’historien juif Josèphe écrit dans sa Réponse à Appion (I, 2) qu’un registre des « femmes sacerdotales » (c’est-à-dir
385 u’il paraît conclure sur l’abandon final d’Israël à son destin, après la mort de Jésus-Christ. Je suis heureux de pouvoir
386 saïques est attribuée par Wellhausen et son école à des disciples des grands prophètes. Ce serait donc le prophétisme, c’
387 tte hypothèse est aujourd’hui démodée. On revient à la conception ancienne : un chef hébreu — celui que la Bible appelle
388 ique qui, dans les langues sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit la déduction abstraite… » (Renan, op. cit., I
389 , ou efficacité, du langage des clercs, identique à celui des bergers. 70. Voir sur ce point : Colloque avec Salomon, pa
390 Labriola, font remonter le phénomène capitaliste à l’« accumulation » de richesses des couvents anglais au Moyen Âge, et
6 1937, Articles divers (1936-1938). Luther, Traité du serf arbitre (1937)
391 forme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à soutenir que Luther fut un démagogue, un exploiteur de l’éternel ress
392 sation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’ à cet excès grandiose d’assimiler Luther et M. Hitler, par goût de la r
393 revues n’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il
394 mnies recueillies par des biographes amateurs, et à l’action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mett
395 l’Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans
396 ien comprendre à la grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son dyna
397 n dont le débat du libre arbitre, opposant Érasme à Luther, permet de définir symboliquement les pôles : pensée « pure »
398 e, ou mieux : dans la totalité de l’être, revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’humain (j’entends
399 inisé » par les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absolu, qu’on déclare volon
400 volontiers « inhumain » parce qu’il attribue tout à Dieu. Importance du De servo arbitrio C’est sans doute dans ce
401 a pensée luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’importance centrale du traité que nous publions : je le vois
402 l’effort dogmatique de Luther30. On croit d’abord à un pamphlet, encore que son volume matériel soit bien écrasant pour l
403 tre Érasme, Luther en vient, de proche en proche, à ressaisir et reposer avec puissance toutes les affirmations fondament
404 e Dieu seul ; opposition de cette justice de Dieu à la justice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à l
405 mes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un
406 toutes les pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les reflets, diversement réfractés p
407 sement réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la question du Christ : « … et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — S
408 à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres morales. Que trouveront-ils,
409 cisif, envisage honnêtement les objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans ironie toutefois, et sa
410 non sans ironie toutefois, et sait enfin conférer à son choix la force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un
411 de faire crier au dogmatisme. Tout se passe ici «  à l’intérieur » du christianisme, de l’Église. L’humanisme laïque, auto
412 surdité, une contradiction dans les termes. C’est à Érasme, en tant que théologien, que Luther s’applique à répondre ; et
413 me, en tant que théologien, que Luther s’applique à répondre ; et c’est même la plus dure ironie — quoique involontaire,
414 . Ceci pourrait suffire et doit suffire en droit, à réfuter l’objection d’un moderne, l’objection parfaitement anachroniq
415 que, mais que je sais inévitable, et qui consiste à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais le sérieux théologique
416 chose trop rare, et pour beaucoup trop difficile à concevoir, pour qu’on puisse écarter cette objection par un simple ra
417 i veut croire…) Dialogue Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi. Kierkegaard Une conscie
418 prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir à sa promesse, et auquel nul obstacle ne s’oppose. Que devient alors no
419 ? Qui t’a fait croire que ta vie était une partie à jouer entre toi et le monde, par exemple ; ou encore entre l’individu
420 ute ta science ne s’occupe-t-elle pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma
421 elle pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dignité consiste à lutter con
422 enter ? C. M. — Certes, mais ma dignité consiste à lutter contre de telles forces, une fois que je les ai reconnues ; à
423 telles forces, une fois que je les ai reconnues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée ma liberté, par un
424 qui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à l’éternelle prévision ? Qui t’assurerait qu’en prononçant ces mots, t
425 e double prédestination : l’une au salut, l’autre à la damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au tem
426 le est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’éternité est quelque chose d’immobile
427 ) ?33 Qui t’assure que notre raison tout attachée à notre chair, à notre temps où elle s’est constituée, soit capable de
428 ure que notre raison tout attachée à notre chair, à notre temps où elle s’est constituée, soit capable de concevoir ce pa
429 sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu, au nom de sa promesse, une prière précise et instante, ne vit-i
430 aît pas de « temps », il n’est pas lié comme nous à une succession. Mais au contraire, nos divers temps et successions pr
431 i sont liés : nous venons de lui, nous retournons à lui, il est en nous lorsque l’Esprit dit : la Parole dans notre cœur.
432 paraît que l’opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la démonstration purement biblique qu’on
433 quelques détails exégétiques discutables, suffit à établir, pour le chrétien, la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas
434 réclame Érasme n’y changeront rien : « Travaillez à votre salut avec crainte et tremblement, puisque c’est Dieu qui produ
435 en lui seul, la liberté. Mais cela n’apparaît qu’ à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de la connaissance de soi-même
436 ique, que les sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer la Croix ». Tant q
437 sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas e
438 une liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et à l’inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du
439 ouloir, mais nie seulement qu’elle puisse suffire à nous obtenir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste
440 qui refusent le christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais d
441 nisme dans les temps modernes, Nietzsche, aboutit à un dilemme qui me paraît correspondre, terme à terme, à celui que Lut
442 ilemme qui me paraît correspondre, terme à terme, à celui que Luther et Paul — et l’Évangile — posent à notre foi. C’est
443 celui que Luther et Paul — et l’Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a poussé comme Luther, jusqu’aux extrêmes limi
444 l paraît exclure toute liberté humaine, il se met à prêcher l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité i
445 her l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans cette volonté de reconnaître notr
446 t du paradoxe nietzschéen ne saurait être ramenée à quelque influence inconsciente, encore bien moins à une coïncidence.
447 quelque influence inconsciente, encore bien moins à une coïncidence. En vérité, c’est bien du même problème qu’il s’agit.
448 u’il s’agit. Le seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est
449 oppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppose sa propre existence35. Mais la difficu
450 carnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 30. À la proposition qu’on lui faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complè
7 1937, Articles divers (1936-1938). L’Acte comme point de départ (1936-1937)
451 l’un et l’autre système, sans plus nous attacher à combattre leurs erreurs respectives dans le plan sur lequel ils s’opp
452 pratiquement une impasse absolue, nous contraint à une conception proprement révolutionnaire (ou « changement de plan »)
453 t en quelque sorte la bonne conscience nécessaire à toute œuvre constructive. Les quelques pages qui suivent n’ont d’autr
454 e et d’aujourd’hui, telles qu’elles se présentent à nous. Avant même d’en pénétrer le détail et d’en critiquer la structu
455 moment, c’est dire que son exercice n’engage plus à rien, concrètement. D’où ce sentiment, quand nous voulons penser tell
456 le moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à ses dépens. On peut continuer la métaphore et dire que la pensée dont
457 tentative d’embrayage serait immédiatement fatale à la machine, et ferait voler en éclats les engrenages. La merveilleuse
458 hies que nous repoussons ? Nous serions mal venus à le nier. Si le monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y
459 e entre le microbe et la maladie ne peut mener qu’ à une consomption lente, ou à des accidents violents, catastrophiques.
460 adie ne peut mener qu’à une consomption lente, ou à des accidents violents, catastrophiques. Un tel diagnostic indique pa
461 analyse, dans le sentiment que nous disions tout à l’heure éprouver en face d’une conception purement critique, ou idéal
462 it ? Nous allons être obligés ici d’avoir recours à une méthode rigoureusement indirecte, et en quelque sorte négative. C
463 de l’acte mais il y a problème de ce qui s’oppose à l’acte. (En d’autres termes, il n’y a pas de problème de la personne,
464 um dont la photo constitue l’un des effets. Quant à la scène représentée par la photo, elle n’est plus qu’un objectif, in
465 ction importante introduite par M. Gabriel Marcel à la fin de son article intitulé : Existence et objectivité. M. Marcel
466 lante qui refuse l’obstacle. Il ne reste alors qu’ à se consoler par la certitude que l’analyse philosophique est avec cel
467 re les choses avec philosophie »… Ceci nous amène à constater que : 1° Si on ne part pas de l’acte, on ne part pas du tou
468 , entre l’expression et l’existence. Bornons-nous à citer de lui une phrase bien typique par sa forme même, et qui, par a
469 s une donnée initiale, le seul donné qui se donne à soi-même. Or, cette donnée, d’une part, n’est pas réductible à ce qui
470 r, cette donnée, d’une part, n’est pas réductible à ce qui la précède, d’autre part, n’est pas épuisée par l’analyse de s
471 s. L’acte est à la fois créateur, et transcendant à sa création. Il est créateur en ceci qu’il introduit dans les choses
472 velle, un donné, ou plutôt un « abandonné » livré à ses déterminations objectives, et s’offrant à son tour à l’éclair bou
473 vré à ses déterminations objectives, et s’offrant à son tour à l’éclair bouleversant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte
474 éterminations objectives, et s’offrant à son tour à l’éclair bouleversant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte que dans l
475 ne puisse rien dire des réactions psychologiques à l’acte « as it’s known as », réactions qui, elles, se manifestent dan
476 lité essentielle que nous adressions dès le début à certains systèmes par ailleurs fort divers, mais dont l’exercice se t
477 t divers, mais dont l’exercice se trouve être lié à une division préalable de notre être, par exemple à une objectivation
478 une division préalable de notre être, par exemple à une objectivation du corps — de mon corps — ou à une objectivation du
479 à une objectivation du corps — de mon corps — ou à une objectivation du devenir historique, ou encore à une autonomie de
480 ne objectivation du devenir historique, ou encore à une autonomie de la raison critique. Division qui a pour effet, génér
481 me philosophique sera amené, par son jeu logique, à l’éliminer ou à la disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de l
482 sera amené, par son jeu logique, à l’éliminer ou à la disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la réalité centra
483 n jeu logique, à l’éliminer ou à la disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la réalité centrale, impensable et q
484 qui permet de penser. Nous voudrions dégager ici, à titre d’exemple, quelques-unes des conséquences (méthodologiques) de
485 st le contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de ses effets, rappelons encore deux caractéristiques de l’a
486 la notion de force, on est obligé de faire appel à l’idée de choc, de rupture, en un mot de violence (voir à cet égard S
487 pas isolé de son caractère agonique. Ce n’est pas à dire que la lumière et les ténèbres soient données avant l’acte, car
488 e chaos, la discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est l’ordr
489 dre, c’est l’ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait humainement le séparer du premier d’entre
490 ire en changeant de plan, en allant de l’angoisse à la création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnal
491 ’angoisse à la création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore la tension. Le nouve
492 prestige du positivisme et du néo-pragmatisme qu’ à celui du moulin à prières. Il est plus difficile de maintenir sur le
493 ivisme et du néo-pragmatisme qu’à celui du moulin à prières. Il est plus difficile de maintenir sur le qui-vive un empire
494 qui-vive un empire qu’une cité étroite. En effet, à l’intérieur même de l’empire, s’établit un danger qu’ignorent les pay
495 nalité consécutif au relâchement de la tension et à la perte du sentiment du risque véritable. À côté de la réalité de la
496 alité de la personne, une autre réalité immédiate à l’acte, c’est évidemment la connaissance. Non seulement la pensée est
497 apparaît ainsi comme un va-et-vient du « donné » à l’abstrait. (Conflit de l’identité et de la réalité, voir Meyerson).
498 ce risque d’automatisme, rançon de la conquête2. À tous les étages et dans tous les domaines de l’effort de pensée nous
499 i dans l’organisation du travail. La machine tend à détruire l’artisanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où l’œuv
500 , une double tentation. Car, d’une part, renoncer à la machine ce serait en quelque sorte renoncer au sens même de l’acti
501 a machine serait le résultat fatal du renoncement à la valeur éthique de la science en tant qu’acte (tentation à laquelle
502 éthique de la science en tant qu’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder l’expérimentalisme positiviste). Un tr
503 tant qu’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder l’expérimentalisme positiviste). Un troisième exemple de tensio
504 D’un côté, nous trouvons l’attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne p
505 ous trouvons l’attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y re
506 ’attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans br
507 t de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans briser son re
508 e de solidarité humaine, de valeur humaine, c’est à une société de personnes que l’on pense. L’homme n’atteint l’universe
509 e entre ces deux pôles de l’amour : l’attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l’universel par la chari
510 Pour éviter un malentendu essentiel, nous tenons à souligner encore en terminant le caractère d’instantanéité de l’acte
511 r et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos yeux ce qui n’est pas immédiat à l’acte ? Est-ce que nous n’allon
512 se présenter à nos yeux ce qui n’est pas immédiat à l’acte ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité d
513 l’acte ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de toute médiation ? Assurément l’évidence de l’acte,
514 écessaire, la supra-rationalité la plus favorable à l’édification de toute construction humaine, même et surtout rationne
515 us ne saurions écarter la réalité des résistances à cette activité. Ce n’est que dans certains domaines très étroits de l
516 tances sont assez nettement brisées pour conférer à la création issue de l’acte comme une forme d’éternité. Partout aille
517 ailleurs, les résistances sont étroitement mêlées à toutes les manifestations d’activité. La médiation ne se manifeste po
518 nsidérer toute médiation que comme une résistance à son effort immédiat, ou, pour reprendre l’expression vigoureuse de Ki
519 atière, qui reprennent ici en tant que résistance à l’effort une sorte de réalité indépendante, ne donnent que rarement l
520 ifie pas du tout que la pensée doive être soumise à l’action — bien au contraire ! — mais que le risque de penser est act
521 Dandieu quelques lignes qui me paraissent propres à éclairer ce dernier paragraphe (D. R.). « Le seuil qui sépare le prél
522 Bruhl, notamment dans la conférence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il pense, encore q
523 qu’on ne se figure communément. Avant de chercher à répondre à cette question, il est indispensable de marquer très forte
524 figure communément. Avant de chercher à répondre à cette question, il est indispensable de marquer très fortement l’infl
525 èle, que pour en tourner l’irrationalité foncière à l’aide d’une loi statistique, de même la méthode sociologique qui a c
526 ue, de même la méthode sociologique qui a conduit à la découverte de la véritable nature de la mentalité prélogique, hési
527 ritable nature de la mentalité prélogique, hésite à faire la part de l’orientation humaine qui s’exprime par une affirmat
528 u de création intellectuelle. Notre science n’est à l’aise que dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle
8 1937, Articles divers (1936-1938). Formons des Clubs de presse (30 janvier 1937)
529 mation sincère. Le procès de la presse n’est plus à faire. Sa réforme pose tant de problèmes et entraîne de telles incide
530 graves que celles d’un monopole privé) qu’il est à craindre qu’elle ne puisse s’accomplir isolément. Seul le redressemen
531 réforme nécessaire, est de fournir dès à présent à tous ceux qui en éprouvent le pressant besoin, les premiers éléments
532 de front — de tourner la difficulté en remontant à la source, en renouvelant le mode primitif de l’information, l’inform
533 subversion de l’information officielle, chercher à obtenir, par des contacts personnels, des renseignements aux sources
534 un « Comité central des informations », siégeant à Paris, qui envoie chaque semaine un bulletin dactylographié condensan
535 dent responsable de chaque club qui le communique à ses adhérents. Ceux-ci ne sont pas de simples lecteurs passifs, mais
536 passifs, mais des membres actifs, qui participent à une œuvre commune, dans le cadre du Club privé dont ils acceptent les
537 tions » qui rédige le bulletin, n’a pas seulement à sa disposition les renseignements que lui fournissent les clubs de ba
538 elle, par l’étendue de ses ramifications, il vise à ne délaisser aucune source, à tenir compte de tous les points de vue.
539 ifications, il vise à ne délaisser aucune source, à tenir compte de tous les points de vue. Le programme Le bulleti
540 e et de redresser la documentation que continuera à leur fournir la presse. Elle pourrait être une sorte d’école permanen
541 tie documentaire sur la presse. Tout en cherchant à remédier à l’action néfaste de la presse imprimée en se plaçant hors
542 taire sur la presse. Tout en cherchant à remédier à l’action néfaste de la presse imprimée en se plaçant hors de son doma
543 le but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit, une documentation précise sur la structure et le mécanisme de
544 ne veut être qu’une œuvre stricte d’information, à l’exclusivité de tout commentaire et de tout jugement. Mais ils s’eng
545 ais ils s’engagent, dans les « clubs de presse », à défendre les principes qui leur sont communs : primauté de la personn
546 la notice suivante : « Nous présentons ci-dessous à tous nos camarades et lecteurs de La Flèche le manifeste des clubs de
547 he le manifeste des clubs de presse en formation. À l’heure où la grande presse française se constitue chaque jour davant
548 er ses mensonges et ses trahisons. Il faut passer à l’action. Sur un terrain parfaitement précis et limité, celui de l’in
549 ienne rapidement un organisme craint et respecté. À l’heure où l’Argent-roi investit complètement la presse française, à
550 nt-roi investit complètement la presse française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le
551 nt la presse française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la rad
552 ais été si grande, nous sommes obligés de revenir à une forme antique de transmission : l’information orale. C’est la seu
553 nseignements, adressez provisoirement les lettres à La Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin la mentio
9 1937, Articles divers (1936-1938). À qui la liberté ? (5 mars 1937)
554 À qui la liberté ? (5 mars 1937)h Tout le monde parle de la culture
555 est la politique qui s’est chargée de réglementer à sa manière la prostitution des mots-clés, des lieux communs fondament
556 titulé Au service de l’esprit, où il est question à chaque page de défendre la liberté. Dans l’état présent du langage, d
557 ens. Ils prennent de préférence un sens contraire à celui de l’usage courant. (Staline dit : « Je ne suis pas un dictateu
558 de nos députés et journalistes, qui flétrissent ( à droite) ou approuvent (à gauche) les lois sociales parce qu’ils les q
559 listes, qui flétrissent (à droite) ou approuvent ( à gauche) les lois sociales parce qu’ils les qualifient de socialistes,
560 qualifient de socialistes, et qui approuveraient ( à droite), ou flétriraient (à gauche) les mêmes lois si on les qualifia
561 t qui approuveraient (à droite), ou flétriraient ( à gauche) les mêmes lois si on les qualifiait de fascistes. Alors qu’el
562 s que des mystiques dont on se sert pour masquer, à gauche et à droite, une impuissance profonde à rien changer aux faits
563 stiques dont on se sert pour masquer, à gauche et à droite, une impuissance profonde à rien changer aux faits. Or, ces my
564 r, à gauche et à droite, une impuissance profonde à rien changer aux faits. Or, ces mystiques reposent sur des mots. Ces
565 posent sur des mots. Ces mots suffirent longtemps à départager les opinions réelles : on disait liberté à gauche, patrie
566 partager les opinions réelles : on disait liberté à gauche, patrie et autorité à droite. Mais la surenchère politicienne
567  : on disait liberté à gauche, patrie et autorité à droite. Mais la surenchère politicienne en est venue à ce point que,
568 ite. Mais la surenchère politicienne en est venue à ce point que, par une double démagogie, on dit aujourd’hui liberté et
569 démagogie, on dit aujourd’hui liberté et autorité à droite ; patrie, autorité et liberté à gauche. La politique a prostit
570 t autorité à droite ; patrie, autorité et liberté à gauche. La politique a prostitué le langage. La culture n’a pas été a
571 s de telles conditions, l’on s’obstinerait encore à écrire, à parler, si par hasard on est de bonne foi et si de plus on
572 s conditions, l’on s’obstinerait encore à écrire, à parler, si par hasard on est de bonne foi et si de plus on a des chos
573 bonne foi et si de plus on a des choses précises à exprimer. Je réponds : écrivons pour poser ce problème tout d’abord.
574 urel qui ne dépende de la politique. Cela revient à écrire, si l’on me comprend, pour éduquer la méfiance du lecteur. h
575 méfiance du lecteur. h. Rougemont Denis de, «  À qui la liberté ? », À nous la liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
576 h. Rougemont Denis de, « À qui la liberté ? », À nous la liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
10 1937, Articles divers (1936-1938). Romanciers publicitaires ou la contagion romanesque (13 mars 1937)
577 omanesque (13 mars 1937)i Je n’apprendrai rien à personne en affirmant que le roman est le plus « contagieux » de nos
578 privée. Songez aux plus grands romanciers, songez à leurs meilleurs lecteurs, aux plus crédules, aux plus avilies, à ces
579 rs lecteurs, aux plus crédules, aux plus avilies, à ces jeunes gens qui choisissent le néant et la folie avec Ivan Karama
580 e l’ambition ; aux jeunes bourgeois qui se défont à rechercher leur « Temps perdu » ; enfin, à tous les adultères que le
581 défont à rechercher leur « Temps perdu » ; enfin, à tous les adultères que le roman à trois personnages, genre français p
582 erdu » ; enfin, à tous les adultères que le roman à trois personnages, genre français par excellence, a provoqués et just
583 ctures. Ce pouvoir contagieux est, bien sûr, tout à l’honneur des écrivains qui savent le communiquer à leur œuvre, et de
584 l’honneur des écrivains qui savent le communiquer à leur œuvre, et des lecteurs assez ardents pour le subir autrement qu’
585 ime et souterraine, tant qu’ils ont quelque chose à dire. Mais nos romanciers d’après-guerre, qu’ont-ils à dire ? Dans qu
586 e. Mais nos romanciers d’après-guerre, qu’ont-ils à dire ? Dans quel sens entendent-ils agir sur les mœurs de leurs conte
587 ajuscule). Ils ne redoutent rien tant que l’œuvre à thèse. Ils se défendent de toutes leurs forces d’avoir une métaphysiq
588 pas vouloir influencer, ils ressemblent beaucoup à ces gouvernements libéraux qui, par crainte de s’imposer ou par ignor
589 faudrait imposer, se contentent d’un opportunisme à la petite semaine, et ménagent les opinions plutôt que les intérêts d
590 les intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme à courte vue caractérise très bien le romancier bourgeois. Refuser tout
591 à force de flatter les instincts les plus faciles à flatter, à force de ne vouloir rien affirmer de trop volontaire, de t
592 nt révolutionnaire et constructif, le « romancier à succès », de nos jours, est devenu un simple reflet de la conscience
593 vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à les combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal pe
594 eois sensible, il ne cherche pas à les combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins
595 e cherche pas à les combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins encore au nom d’un
596 n « pur artiste », celle de passer pour un auteur à thèse, pour un propagandiste. Cette crainte — qui ne fut jamais celle
597 importance démesurée que nos romanciers attachent à la description des vêtements, des ameublements, des marques d’autos,
598 eut écrire n’importe quoi, sans ce que cela porte à conséquences, ce romancier s’est condamné lui-même, en fait, à ne plu
599 s, ce romancier s’est condamné lui-même, en fait, à ne plus être que l’agent de publicité — plus ou moins bénévole — des
600 c’est d’abord la crise du roman, et du roman fait à l’usage des bourgeois, de leurs loisirs improductifs. Une telle crise
601 ’un ordre vrai, donnez-nous des romans qui riment à quelque chose, il n’y aura plus de crise du livre. i. Rougemont De
602 ciers publicitaires ou la contagion romanesque », À nous la liberté, Paris, 13 mars 1937, p. 10.
11 1937, Articles divers (1936-1938). Vers une littérature personnaliste (20 mars 1937)
603 française de Thibaudetk : celui qui est consacré à l’après-guerre. II est vrai que beaucoup de noms y sont omis, que bea
604 s on ne l’avait vu et constaté aussi nettement qu’ à la lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre, la prod
605 on écrite des hommes qui revenaient du front — 20 à 35 ans — connut un véritable boom commercial. « À nous la liberté ! »
606 à 35 ans — connut un véritable boom commercial. «  À nous la liberté ! » s’écriait cette génération : elle ignorait appare
607 non pas une facilité. Tout concourait d’ailleurs à faire passer cette erreur pour une évidence. Il y avait des places vi
608 avait des places vides, toute une génération tuée à remplacer. Il y avait l’inflation, et la prospérité des nouveaux rich
609 nde Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’ à la crise de 1930. Il nous en reste une génération de gloires rapides
610 omène de « refoulement de la durée vers l’amont » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité croissante
611 t » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité croissante de vivre sur ses réserves, enfin à une crise
612 ssité croissante de vivre sur ses réserves, enfin à une crise et à une carence de la création. Malgré ces difficultés, c
613 e de vivre sur ses réserves, enfin à une crise et à une carence de la création. Malgré ces difficultés, conclut-il, on n
614 térature, au sens où les physiciens s’intéressent à la dégradation de l’énergie ». Mais cette dégradation littéraire, apr
615 aux de dissolution du monde bourgeois : de Proust à Lacretelle, les salons se défont, les classes se mêlent, les propriét
616 odifiées, tyranniques : il y avait encore intérêt à passer outre aux conventions. Mais quand il n’y a plus de convention 
617 d’Henri Petit et de Marius Richard soient promis à des succès moins tapageurs, mais plus profonds. Nous avons à refaire
618 s moins tapageurs, mais plus profonds. Nous avons à refaire un inventaire de l’homme, préparation modeste et nécessaire à
619 ire de l’homme, préparation modeste et nécessaire à une littérature vraiment personnaliste. j. Rougemont Denis de, « V
620 Denis de, « Vers une littérature personnaliste », À nous la liberté, Paris, 20 mars 1937, p. 10. k. Rougemont a rendu co
12 1937, Articles divers (1936-1938). C’est jeune (10 avril 1937)
621 Vandérem est réaliste : il trouve que j’en prends à mon aise et que je néglige un peu cavalièrement les contingences. Si
622 de ce genre. Ce serait toute une série de notions à acquérir, d’opinions à se former, de classements à établir, bref une
623 toute une série de notions à acquérir, d’opinions à se former, de classements à établir, bref une réinstallation complète
624 acquérir, d’opinions à se former, de classements à établir, bref une réinstallation complète demandant des mois. On ne
625 téraire de Marianne, il reprochait tout récemment à l’un de nos bons écrivains, M. Arnoux, de n’avoir pas su s’imposer « 
626 me semble que le talent de M. Amoux est supérieur à sa tactique ». Faut-il être jeune, tout de même, et peu avancé dans l
627 ’elle déclare avec tant de naturel ? Sentez-vous, à la lire, quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétu
628 faire une œuvre, de croire qu’on a quelque chose à dire ; le but de l’écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public.
629 ovisoire, — je vieillirai — je voudrais dire ceci à M. Vandérem : la « réinstallation complète » dont nous parlions ne de
630 . Quand les clercs en sont arrivés — et l’élite — à subordonner leur mission à la « tactique » du succès commercial, c’es
631 arrivés — et l’élite — à subordonner leur mission à la « tactique » du succès commercial, c’est le moment de fourrer les
632 mêmes. l. Rougemont Denis de, « C’est jeune », À nous la liberté, Paris, 10 avril 1937, p. 10.
13 1937, Articles divers (1936-1938). Journal d’un intellectuel en chômage (fragments) (15 avril 1937)
633 faut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en », et restent faute
634 aut-il savoir comment on y peut « vivre » ? C’est à cette question judicieuse que j’ai voulu répondre. Peut-être mon réci
635 fait, qu’il y a là un bonheur… 22 septembre 1934. À … (Gard) Arrivés hier matin, par Nîmes. Déjà je ne sais plus ce que j’
636 de velours, tables rondes et ovaloïdes, guéridons à photos, meubles à musique — sans piano —, bibliothèques vitrées, cana
637 rondes et ovaloïdes, guéridons à photos, meubles à musique — sans piano —, bibliothèques vitrées, canapés, sofas, rideau
638 —, bibliothèques vitrées, canapés, sofas, rideaux à franges, tabourets brodés et objets d’art. Aux murs, plusieurs douzai
639 sur le versant nord d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que le versant sud, avec ses rest
640 avant de les vider et de transporter leur contenu à l’étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d
641 oisins n’ont sur leur table, quand on va les voir à midi, que des châtaignes, des olives, des radis et quelques légumes d
642 e considèrent comme des privilégiés, cela se sent à la manière dont ils nous parlent de quelques familles des environs qu
643 lessives. C’est une toute petite vieille noueuse, à la sagesse sentencieuse et imagée. Étonnamment active. Bonne protesta
644 tonnamment active. Bonne protestante et qui tient à le dire. Sa cordialité demeure digne, trait notable à partir des Céve
645 dire. Sa cordialité demeure digne, trait notable à partir des Cévennes. Mais bavarde ! De gré ou de force, c’est certain
646 ns de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui déb
647 du lait verdi. C’est à peine si l’on peut marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils, des groupes de fe
648 des de joueurs de balle, dans un nuage… Cela tend à confirmer un soupçon qui m’est venu en maintes autres régions de la F
649 l’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la grande place, juste à côté de
650 on des risques, de confiance obscurément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, m
651 de confiance obscurément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pour
652 urément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien i
653 n sens et la raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir vague et profond. Or tout ce que l’État nous apprend,
654 ui va rentrer des champs, où elle travaille jusqu’ à la nuit tombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais la fermièr
655 je, et les chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a 400 à A ? » La mère, vivement : « Jamais je n’ai engagé de chômeurs, Monsie
656 e je suis chômeur moi-même, Madame… » Elle sourit à son tour, de l’air de dire : Oh, vous, ce n’est pas la même chose. El
657 e. Elle a sans doute entendu parler de nous. Rien à faire : je suis un « monsieur ». La fille rentre : une forte femme, e
658 viron 35 ans, un peu masculine. Elle nous conduit à la chambre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : «
659 ne.) 16 octobre 1934 Complexité des « Classes ». À quelle classe appartiennent ces deux femmes ? Je résume mes renseigne
660 geoises, certes, et pourtant elles en sont encore à estimer que chômeur est synonyme de vagabond dangereux. Elles font pa
661 aricature de société. — Simard, le jardinier, est à demi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on le lui dise
662 ayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’une supériorité qu’ils ne peu
663 cial ni au salaire, c’est évident, mais seulement à leur religion. En vérité, ce qui compte dans ce pays, c’est la religi
664 e les conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de ce canton si l’on fait abstraction de tout cela
665 d’humain, d’actif ? Ici où je suis sans prochain, à cette heure ou mes frères (?) les hommes sont plus éloignés que jamai
666 On nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le f
667 a fille dit : « Elle ne voulait même plus toucher à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bo
668 alades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour remplacer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre
669 pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont plus ou moi
670 dit dans la bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains,
671 es qui décident, elles qui lisent, elles qui vont à l’église ou au temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour les ho
672 nt le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — la dernière qui marche encore — et gagnent leurs 7 fran
673 ants sont souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par l’imprimerie du jou
674 l’imprimerie du journal local, par les garages ou à la Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont
675 munistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la parole au Cercle d’hommes, citent
676 levé quelques chiffres dans un ouvrage sur A…, dû à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570, le mûrier, impo
677 uvrage sur A…, dû à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570, le mûrier, importé de Chine, fait son apparitio
678 fournit encore du travail cinq jours par semaine à une centaine d’ouvrières, dont le salaire moyen est de 7 francs par j
679 sse indigène de ce département. Et cette richesse à son tour va reprendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le m
680 ’excuser : « Qui sait, Madame, j’aimerais d’aller à Alès, quelle jour ça vous préférerait ? » (En prononçant tous les e m
681 imart, à propos de la récente baisse des salaires à la filature : « Je vous dis, c’est miraculeux ce qu’on leur donne ! S
682 j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit hôtel à Saint-Jean-du-Gard, expliquait à sa voisine qui paraissait malade : «
683 t un petit hôtel à Saint-Jean-du-Gard, expliquait à sa voisine qui paraissait malade : « Tu demanderas bien un espécialis
684 iste, rappelle-toi ! Si tu oublies, tu n’auras qu’ à te rappeler épicerie. » Épicerie pour spécialiste, vous n’auriez jama
685 rs la rigueur et vers l’adaptation de notre style à notre action. On serait même tenté d’estimer que la plus grande rigue
686 sujet neutre, nous en avons toujours dans les 40 à 50. Et une fois qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d’auta
687 sion n’a vraiment démarré que lorsqu’on s’est mis à parler d’autre chose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de l’
688 partis pris ou des récits entremêlés d’allusions à des célébrités locales, provoquant chaque fois de gros rires. L’homme
689 ces répétitions n’ont d’autre but que de laisser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement
690 angue de discussion, parce que toujours elle vise à la formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu
691 les hommes de ce Cercle ! comme ils s’appliquent à comprendre, comme ils sont vifs et peu timides, camarades, malicieux
692 ue l’on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à leurs vagues sourires, à leurs timidités et au
693 aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à leurs vagues sourires, à leurs timidités et aux distances télescopiqu
694 , à leurs airs entendus, à leurs vagues sourires, à leurs timidités et aux distances télescopiques que tout cela met entr
695 alistes. Il vient aussi des communistes, de temps à autre. Il paraît que ça chauffe certains soirs. Mais le pasteur prési
696 », dit-on. Et « il cause bien ». 16 décembre 1934 À N… la mairie est tout entière communiste. Ceux des habitants qui ne l
697 s votent radical ou socialiste, et se font battre à plate couture, régulièrement. Mais faut-il donc penser que les commun
698 mmuniste dans ce pays, c’est tout simplement être à gauche, le plus à gauche possible. S’il en est bien ainsi, me dis-je,
699 ays, c’est tout simplement être à gauche, le plus à gauche possible. S’il en est bien ainsi, me dis-je, on peut redouter
700 qui se présentera un jour comme l’homme de gauche à poigne ? J’ai questionné à ce sujet quelqu’un qui connaît bien son mo
701 omme l’homme de gauche à poigne ? J’ai questionné à ce sujet quelqu’un qui connaît bien son monde. La vie même de cet hom
702 monde. La vie même de cet homme consiste en effet à connaître intimement le plus grand nombre de familles de N., leurs ci
703 r le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître ces choses, il faut prendre le mot dans le sens le plus act
704 domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’horizon des collines
705 st à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’ à l’horizon des collines vers Uzès, où quelques ruines de castels et qu
706 ont peur. C’est toujours la question de la place à traverser. — ??? — Oui, vous savez que nos temples du Midi sont const
707 ts en général sur la place du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanc
708 onnaît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des conférences que j’organise. Vous avez déjà parlé dans
709 Dieu, et qu’ils attendent tous les ordres de lui. À la fin, un des communistes se lève et résume le débat : « En somme, d
710 petits propriétaires ou des ouvriers travaillant à leur compte. — En somme, vous vous entendez bien avec eux ? — Ils sav
711 stions locales où il faut prendre position. Quant à la doctrine, c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils la conn
712 re position. Quant à la doctrine, c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils la connaissent mal, ensuite et surtout
713 rôle dans leur action, et qu’elle n’a rien changé à leur croyance ou plutôt à leur incroyance. Tout de même, on se dit so
714 qu’elle n’a rien changé à leur croyance ou plutôt à leur incroyance. Tout de même, on se dit souvent que ces hommes mérit
715 pas ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne crai
716 allait bien, c’est-à-dire qu’ils « l’ont diminuée à 17 sous par jour ». Pour se venger, il leur a retiré son assurance à
717 ». Pour se venger, il leur a retiré son assurance à lui, et l’a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances
718 leur a retiré son assurance à lui, et l’a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances sociales, vie, décès,
719 seillé d’écrire une nouvelle lettre recommandée «  à la charge du destinataire ». Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Rép
720 pour des questions d’argent, on ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique, l’hiver est « pourri », l
721 questions d’argent, on ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique, l’hiver est « pourri », la « pulmon
722 on ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravage
723 core que les gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme partout. Bon. Alors les catholiques descendent
724 eut-être moins bas que ces « assurés ». Ce peuple à la retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait p
725 C’est de Casanova que Ligne écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est le moins croyable, étant superstitieux sur to
726 er dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée contre
727 gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’ à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette a
728 sans doute l’angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle poli
729 qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : pour faire fig
730 e tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : pour faire figure, pour
731 gagner de l’argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : pour faire figure, pour acquérir une situat
732 ou utilisés — dans la mesure où nous réussissons à nous faire passer pour des bourgeois ou des défenseurs du prolétariat
733 s’est posé en Italie dans des termes particuliers à ce pays, et qu’en tout cas il ne peut pas se poser de la même façon e
734 use, et donc faible, mais d’essayer de résoudre «  à la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante
735 un homme, dans la cour, tandis qu’il donne du feu à son copain : Pour moi, c’est un fasciste ! Toutes nos confusions poli
736 pposition fondamentale. Peut-être ferais-je bien, à l’avenir, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets
737 scisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu que l’article expose le
738 ement d’éduquer le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? Mars 1935 (à Marseille
739 r sur les raisons de ses partis pris ? Mars 1935 ( à Marseille) J’ai parlé à R. de mon projet de publier sous le titre de
740 partis pris ? Mars 1935 (à Marseille) J’ai parlé à R. de mon projet de publier sous le titre de Journal d’un intellectu
741 ômage , ces pages que je suis en train de rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur le résultat de cette entrepri
742 est vrai ? — Parce que c’est gênant. Cela oblige à conclure, une histoire vraie. Cela vous met en question, cela vous in
743 raie. Cela vous met en question, cela vous invite à comparer les situations… À cause de la solidarité humaine, probableme
744 que cela ne vous empêche pas de vivre assez bien, à votre idée. Vous avez l’air très satisfait de votre situation. Ce n’e
745 s un vrai chômeur. — Mais je ne tiens pas du tout à être un « vrai chômeur », je vous l’assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit
746 rt, est-ce que le fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder la frange de mon
747 e fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder la frange de mon pantalon. Ce n’
748 uffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’ à regarder la frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pourr
749 que je pourrais faire une carrière dans le monde, à supposer que l’envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire dans mon
750 mon titre pourrait le faire croire. L’intéressant à mon point de vue, c’est de montrer une fois que c’est vrai, et de mon
751 … ⁂ Cette conversation avec R. m’a rendu attentif à un fait qui m’apparaît soudain fondamental ; c’est l’affectivité quas
752 ité quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à l’argent, et qui se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la
753 urd’hui à l’argent, et qui se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Méla
754 d’imbroglio passionnel plus idéalement favorable à l’apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreu
755 rir ? — Commençons par nous avouer, passons outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de la cure. Ensuite il faudra e
756 efaire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à l’argent son rôle mineur de moyen, d’impur et simple moyen… 31 mars 1
757 « exclus » vieux travailleurs. Demain dimanche, à 10 heures, sera donnée une conférence au profit des vieux, hommes et
758 pas de la loi des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L’organisation lutte afin de faire accorder
759 oi des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L’organisation lutte afin de faire accorder une retrai
760 ois, l’obscurantisme clérical — la conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réactionnaires ! Ô li
761 mé par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos militants héroïques n’ont pas perdu leur pei
762 mbolique mot d’ordre sera donné comme un soufflet à la Réaction insolente : « Place aux Vieux ! » — On se demande s’il es
763 population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets
764 times revendications des vieux !” Quand on en est à cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que l’état social est à
765 ue réclame la vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journaux, est actuellement dominée par le souci des éle
766 s fois on vous en demande de trop, vous n’avez qu’ à donner la mienne, vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de l
767 l. « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? » L’homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vie
768 u m’entends ? Nous ôtres, nous allons vous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit l’homme, si vous y arrivez, c’es
769 e aussi le communiste n’est-il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant qu’il le voudrait. Mais ce n’est pas sûr. J
770 gent de grandes vérités brutales, toujours bonnes à dire, mais mal dites. J’accepte à la rigueur cette division du monde
771 toujours bonnes à dire, mais mal dites. J’accepte à la rigueur cette division du monde en gros et en petits, si c’est le
772 mation. On leur impose une mystique confectionnée à l’usage des moujiks… Quel est l’homme sain qui oserait affirmer que c
773 nnes en haine d’une société qu’ils sont les seuls à croire encore « chrétienne » — il faut bien dire que le parti communi
774 s pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résistent à l’intoxication, mais cela prouve simplement, une fois de plus, que l’
775 e ne comprend pas profondément ce qu’on lui donne à lire ou à entendre. Il comprend sa situation, et ne voit pas que son
776 end pas profondément ce qu’on lui donne à lire ou à entendre. Il comprend sa situation, et ne voit pas que son journal es
777 ent démoniaque, et surtout vaine, ils en viennent à s’imaginer qu’ils défendent eux aussi les « petits » en défendant ces
778 sesse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort maladroi
779 n de faire tandis que vous causez, vous arriverez à leur tirer quelque chose de sensé, de vécu, de réel, — et qui renvers
780 « suivre » un effort bien localisé, de s’attacher à ce qu’on fait ; nécessité où l’on se trouve de bâcler son ouvrage, po
781 . Ils vous diront aussi qu’ils n’ont plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la merci soit
782 ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous d
783 parlez-moi de « leurs combines » — il n’y a rien à y comprendre. Dans une assemblée populaire, on ne dira pas un mot de
784 moyens de circuler et de s’instruire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le
785 struire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en ê
786 cret qu’il ne semble.) Conclusion : il appartient à des équipes d’hommes nouveaux, jeunes et sortis de toutes les classes
787 n ne pouvait nous faire soupçonner cette présence à côté. Hier matin, la mère Calixte arrive tout agitée : « Madame se me
788 t de l’emballer, la vieille ! » Ils n’auront plus à languir bien longtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on l’e
789 dernier respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans la remise qui est au-desso
790 mai 1935 … Et un beau jour, plus moyen d’échapper à cette humiliante évidence : sans auto, sans argent, sans amis proches
791 ’est en somme que l’application du style français à la chose militaire. 29. Ils ont donc au moins 66 ans aujourd’hui, où
14 1937, Articles divers (1936-1938). Lénine, Staline et la littérature (17 avril 1937)
792 ti. » Et Staline fait écho, trente ans plus tard, à cette déclaration totalitaire ; dans un discours aux cadets de l’Acad
793 Mais cela permet toutefois de comparer sa manière à celle de Lénine. Lénine affiche en littérature des goûts tantôt tradi
794 ui demeurait étranger. » Il préférait de beaucoup à Maïakovski le « Salut au 17e » : Salut, salut à vous, braves soldats
795 à Maïakovski le « Salut au 17e » : Salut, salut à vous, braves soldats du 17e… ou encore la chanson patriotarde sur l’
796 son talent poétique, bien que je reconnaisse tout à fait mon incompétence dans ce domaine. Mais depuis longtemps, je n’av
797 « dirigeants » a bien changé. Voici ce qu’écrit, à cette date, le Père des peuples, sur le même Maïakovski : Il a été e
798 ntueux de notre époque soviétique. L’indifférence à sa mémoire et à ses œuvres est un crime. Vous reconnaissez le ton du
799 époque soviétique. L’indifférence à sa mémoire et à ses œuvres est un crime. Vous reconnaissez le ton du policier, et du
800 ier, et du fonctionnaire arrivé. « L’indifférence à ses œuvres est un crime. » Heureusement pour lui que Lénine est déjà
801 s éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à l’évidence que les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en
802 dé, ou de brutalement primaire, pour le planifier à l’échelle de son empire national-socialiste. À nous de relever la vra
803 er à l’échelle de son empire national-socialiste. À nous de relever la vraie défense de la culture, et d’une culture créa
804 s totalitaires, et contre ce distributeur de prix à l’Académie de l’Armée rouge, l’homme des « cadres qui décident de tou
805 Denis de, « Lénine, Staline et la littérature », À nous la liberté, Paris, 17 avril 1937, p. 10.
15 1937, Articles divers (1936-1938). Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)
806 obscures de la légende populaire. S’il se risque à paraître devant Chamisso, c’est peut-être poussé par l’envie d’être e
807 ui un poète allemand. Les autres ont toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans le savoir. Chamisso, lui, s’en éton
808 et naïfs du célèbre Peter Schlemihl. De Chamisso à Hofmannsthal, plusieurs ont repris cette histoire. Le dernier même y
809 e, l’on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier. L’on s’étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formule
810 re popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à l’Opéra. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas le livret d’H
811 Mais encore ? Ils en ont tous une, et s’entendent à tirer parti du plaisir que dispense un corps. Ils prisent fort la « t
812 Il y avait la psychanalyse. Mais avant d’en venir à cette extrémité, on pouvait essayer d’un pédantisme moins barbare. Je
813 re. Je rédigeai la note qui suit, en m’appliquant à écarter les conseils de pitié que me dictait mon cœur. Signalement
814 e Peter Schlemihl Peter est un naïf : il croit à la fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à l’homme une digni
815 la fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à l’homme une dignité. C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce,
816 enoue, cette fois-ci sans remède. Il ne tarde pas à tourner au délire de persécution. Tout effraye Peter, et le moleste e
817 exions désespérées. Souvent il éclate en sanglots à l’idée du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous les autres s
818 qu’il l’a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que l’on connaît, comme Adam et Ève l’innocen
819 i perd le contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il les établit en apparences, m
820 longtemps, il n’a pas d’ombre ! » Que reste-t-il à un tel homme ? Le suicide ? Rien n’est plus loin de sa pensée. Sa vis
821 d’un philistin sans exigences, et qui veut croire à la vertu, — s’il n’y avait, au centre de lui-même, cette absence. En
822 les bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à la vie, au voisinage et au dialogue. Son existence réelle se confond
823 atalogue de toutes les plantes de la terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand nous perdons sa trace. Résumon
824 tive d’interprétation Je reproche pour ma part à la psychanalyse de flatter notre propension à localiser les symboles.
825 art à la psychanalyse de flatter notre propension à localiser les symboles. Car, pour la vie spirituelle, il n’est pas de
826 de lieux séparés, on peut toujours passer de l’un à l’autre par quelque ruse de la métamorphose, qui est la vie même de l
827 l conviendrait de rappeler ici que Peter parvient à la cacher à tous sauf aux deux femmes qu’il voudrait épouser. Mais n’
828 it de rappeler ici que Peter parvient à la cacher à tous sauf aux deux femmes qu’il voudrait épouser. Mais n’allons pas c
829 ions d’états qui, normalement, ne tarderaient pas à se muer en leur contraire ? Plus précisément, l’état de Peter Schlemi
830 l’état de Peter Schlemihl n’est-il pas comparable à celui d’un esprit et d’un corps sains après « l’amour » ? Durant quel
831 mme s’il était un peu en arrière des choses, lent à démêler le monde où il revient, et qui l’accable de présences bizarre
832 homme se sente trop lucide, perçant toutes choses à jour, et lui-même, d’où l’impression qu’il a d’être mal défendu contr
833 ndication. Elle paraîtra sans doute plus probante à des adolescents qu’à des adultes, à des mélancoliques qu’à des sangui
834 tra sans doute plus probante à des adolescents qu’ à des adultes, à des mélancoliques qu’à des sanguins, et même à des Nor
835 plus probante à des adolescents qu’à des adultes, à des mélancoliques qu’à des sanguins, et même à des Nordiques qu’à des
836 lescents qu’à des adultes, à des mélancoliques qu’ à des sanguins, et même à des Nordiques qu’à des Méridionaux, pourrions
837 s, à des mélancoliques qu’à des sanguins, et même à des Nordiques qu’à des Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toute
838 ues qu’à des sanguins, et même à des Nordiques qu’ à des Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toutes les réserves qu’o
839 e38. Dès le début, j’avais pressenti qu’une fable à ce point célèbre dans un peuple ne pouvait exprimer qu’un fait humain
840 n élémentaire. J’étais déçu de le voir se réduire à quelque chose d’aussi précis, et que mille préjugés, français surtout
841 que mille préjugés, français surtout, concourent à ridiculiser. Un fragment de Paracelse, lu par hasard à cette époque,
842 iculiser. Un fragment de Paracelse, lu par hasard à cette époque, vint heureusement me donner la clé d’une interprétation
843  On ne peut comparer la Liquor vitae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de l’
844 rer la Liquor vitae dans l’homme à autre chose qu’ à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de l’homme et se forme
845 r enfin le vrai problème39. La créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui est vraiment grave dans notre vie ; et la
846 it-ce point pour cette raison que l’homme cherche à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les deux fils de N
847 la nudité de leur père ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez l’homme qui parvient à la conscience de sa missi
848 s lui à reculons ? Mais chez l’homme qui parvient à la conscience de sa mission spirituelle, le centre de la créativité p
849 rassement sans amour, ou d’un amour qui se refuse à l’étreinte. Et pourquoi la pudeur cesse-t-elle d’exister — normalemen
850 t ce qui, en moi, m’est étranger). Revenons alors à notre mythe : la transparence, c’est l’absence d’ombre, donc de secre
851 que autre sorte, il n’est plus un homme créateur. À l’inverse, la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme
852 er sa vie et la construire avec tout son instinct à l’image d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’
853 , dans ce qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à saisir le monde pour le former à son image40, et d’évasif devant sa v
854 re, d’impuissant à saisir le monde pour le former à son image40, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de l’incarna
855 n : le mystère de l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les traits physiques et moraux de ce que l’on appeller
856 oraux de ce que l’on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hoffmannsth
857 le symbole de la puissance de création qui vient à se détacher de l’auteur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et
858 e, et quelques-unes de ses plus folles illusions, à la hauteur du mythe, et de la Fable, plus profondément vrais que la v
859 lus riches d’enseignements concrets, et d’invites à la métamorphose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est le parado
860 se garder d’affadir une telle œuvre, n’y admirant à leur coutume qu’une « fantaisie gratuite » de l’art. Nul doute que l’
861 a fait Schlemihl comme on sait, en grande partie à son image, il en diffère toutefois par ceci qu’il l’a fait, témoignan
862 equel l’idée de Peter Schlemihl aurait été donnée à son auteur par un de ses parents, au cours d’un séjour à Paris. L’ori
863 uteur par un de ses parents, au cours d’un séjour à Paris. L’origine du conte célèbre serait donc bien française, et Barr
864 en française, et Barrès s’en réjouit. Il va jusqu’ à soutenir que l’ombre perdue serait le symbole de la patrie (française
865 rs au moment où j’écrivis cette étude — réduisent à néant cette fantaisie nationaliste. Rank insiste longuement, comme je
866 lusieurs siècles, voire d’un ou deux millénaires, à Chamisso. 36. « J’éprouve que chaque objet de cette terre que je c
867 s vite, et après qu’une semaine eut passé, il vit à sa grande joie qu’une nouvelle ombre partant de ses pieds commençait
868 ne nouvelle ombre partant de ses pieds commençait à croître lorsqu’il se promenait dans le soleil. » Ici donc, pas de fix
869 es, et de tout contraire parfois : que l’on songe à Hegel, à Fichte, à Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Chamisso et l
870 tout contraire parfois : que l’on songe à Hegel, à Fichte, à Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Chamisso et le Mythe d
871 raire parfois : que l’on songe à Hegel, à Fichte, à Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Chamisso et le Mythe de l’Ombre
16 1937, Articles divers (1936-1938). Journal d’un intellectuel en chômage (25 juillet 1937)
872 ’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la
873 s à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaq
874 té d’une allée bordée de rosiers. L’allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par des lauriers épa
875 e de rosiers. L’allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par des lauriers épais. De hauts murs bl
876 llée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par des lauriers épais. De hauts murs blancs enclosent de
877 is traversé par un nuage rapide. En me retournant à droite, je vois par une autre fenêtre un coin de lande, et de petites
878 sée, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de
879 oui vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier. On
880 x rien dire encore : je laisse tout cela se mêler à ma vie, dans l’heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour me
881 ime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de petits exercices formels, sans nul rapport avec ce beau vertige de
882 he qui contourne la panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste recta
883 ectangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque
884 ces ! J’ai du travail chez moi, des tas de choses à écrire… Elle n’ose pas m’en demander davantage. Et moi, je recule dev
885 s journaux, sans doute, mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays… Je l’ai laissée en plein mystère. Elle a dû en
886  ? — Non. — Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y
887 é à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud re
888 à la main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit pour la nième fois son tarif, fait son calcul
889 calcul sur un bout de papier, et conclut que j’ai à payer 72 francs, pour un envoi, ce jour-là, d’une centaine de feuille
890 nte-quinze. Dans l’après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Péd
891 gramme, c’est une notification officielle d’avoir à verser sans délai la somme de Fr. 67.25 restant due sur l’envoi de ce
892 forcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il fau
893 ire ! Depuis lors, il rougit et transpire rien qu’ à me voir entrer. Je cause un peu, pour me faire pardonner. Pédenaud es
894 dent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien ce petit commerce lui rapporte, « ça dépend des années
895 considère comme riche (sinon dépenserais-je tant à son guichet ?), mais s’il savait que j’ai dépensé près de 600 francs
896 qui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils
897 e excessif de jupons, cela ne devrait pas suffire à rendre vraisemblable une hypothèse à ce point injurieuse. Pourtant no
898 pas suffire à rendre vraisemblable une hypothèse à ce point injurieuse. Pourtant nous n’en trouvions pas d’autres. Or, p
899 téraire la solution d’une question précise. Grâce à Colette, je sais maintenant pourquoi notre chambre était pleine de pu
900 renouer le fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de notre première tentative d’autonomie. Je ne suis
901 ière tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à gagner assez vite ce qu’il nous fallait pour subsister après l’épuise
902 stacle absolu.) Assuré au moins de quelque argent à venir, j’ai accepté l’invitation d’un ami qui nous offre de passer tr
903 ffre de passer trois semaines chez lui. Il habite à une petite journée de voyage de notre île. La leçon pratique de cette
904 u’il faut la conquérir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivé
905 organiser à l’avance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier
906 traite stratégique, mais tout de même bien décidé à renouveler ma tentative, dans un mois. q. Rougemont Denis de, «  J
907 suivante : « Par les soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, paraîtra très prochainement un ouvrage de notre compatriote
908 t : Journal d’un intellectuel en chômage . Grâce à la complaisance du directeur de la Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes
909 de, M. A. Mermoud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs la primeur de quelques pages de ce livre. Dans ces pages
17 1937, Articles divers (1936-1938). Extraits de… Journal d’un intellectuel en chômage (15 août 1937)
910 ler des « autocars ». Je ne sais si l’on se doute à Paris de l’importance des autocars et des transformations qu’ils sont
911 utilisé une vingtaine de ces lignes. Je commence à connaître leurs coutumes : rien ne pouvait modifier plus rapidement e
912 relatif des grandes lignes indiquait qu’on allait à Paris ou qu’on en venait. Tout le reste n’était que tortillards cahot
913 e reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circula
914 nts, jamais à l’heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des
915 rande affluence de badauds, c’est là qu’on arrive à grands sons de trompe, c’est enfin ce que l’on voit le mieux de chaqu
916 ue pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans
917 pas tous de la même sorte, et que d’une province à une autre, ce n’est pas seulement le paysage qui change. N’était-ce p
918 ographie physique mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos la route nationale pour des chemins secondaires ou des ru
919 ’une foule d’incidents entrevus, que tout dispose à romancer ; de conversations absurdes et rapidement intimes, avec ce p
920 ; et ils sont rares, ceux qui n’ont pas deux mots à dire par la portière entr’ouverte un instant à la fille de l’auberge
921 ts à dire par la portière entr’ouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheve
922 ue qu’un conducteur de car. Cela tient évidemment à leur métier. Ce sont en général de jeunes gaillards solides et gais,
923 tes faveurs que les femmes ont toujours accordées à ceux qui commandent et disposent, ne fût-ce que pour une heure, de le
924 eur, je vous envie ! Vous avez un rôle magnifique à jouer dans la société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous fai
925 je, qu’un écrivain a bien deux fois plus de peine à vivre qu’un homme normal, mettons qu’un fonctionnaire c’était pour le
926 commun, la révélation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indignes, et ingénieux les plus balourds, enf
18 1937, Articles divers (1936-1938). « Subjectivité et transcendance », Lettre de M. Denis de Rougemont (décembre 1937)
927 r ma part, je ne conçois pas de relation concrète à la transcendance où manquerait le sentiment du divin, du sacré. Mais
928 e l’imagination et non seulement dans son rapport à l’éthique. w. Rougemont Denis de, « Lettre de M. Denis de Rougemon
929 7, p. 204. x. Lettre publiée parmi les réactions à la conférence de Jean Wahl, « Subjectivité et transcendance ».
19 1938, Articles divers (1936-1938). Réponse à Pierre Beausire (15 janvier 1938)
930 Réponse à Pierre Beausire (15 janvier 1938)y M. Pierre Beausire80 demande au
931 s « de ne point perdre leur temps et leurs forces à discuter avec leurs adversaires ». Il leur demande ensuite de prendre
932 je ne sais pas si le terme d’adversaire convient à M. Pierre Beausire. Il approuve notre réaction (qu’il dit « parfaitem
933 vre et les approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour l’essentiel de ce que nous avons dit dans notre numéro
934 Erreur totale et malentendu maximum. S’il fallait à tout prix reprendre les termes choisis par M. Beausire lui-même pour
935 plus qu’une morale, s’il en suppose une. Il est, à mon sens, la tradition centrale de l’Occident, l’élément civilisateur
936 obligés, par leurs menaces instantes et brutales, à prendre une conscience active de ce qui, depuis nos origines, n’était
937 vrai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à le nier. En tant que protestant personnaliste, je tiens que seule la
938 — celle qui agit, et non celle qui endort — donne à notre attitude son sens dernier. Beaucoup de mes camarades, la majori
939 craint pas de proclamer que « si l’on veut parler à des hommes, et non à des enfants, il faut renoncer à invoquer le Chri
940 er que « si l’on veut parler à des hommes, et non à des enfants, il faut renoncer à invoquer le Christ ». Je ne craindrai
941 es hommes, et non à des enfants, il faut renoncer à invoquer le Christ ». Je ne craindrai pas de lui répondre que ce n’es
942 sais trop quelle dose d’ironie M. Beausire joint à son vœu final : « Qu’ils s’emparent hardiment du pouvoir dans cet Éta
943 le », sentimentale, idéaliste, ne saurait suffire à la tâche. « Le peuple a besoin — nous dit l’auteur — de chefs d’une s
944 t que je crois, résulte d’un malentendu. Je crois à « l’idée suisse » telle que l’exprime Liehburg. Idée qui exclut l’exi
945 national » au sens unitaire. Je ne crois même pas à l’homo alpinus, création polémique de Ramuz. y. Rougemont Denis de,
946 ique de Ramuz. y. Rougemont Denis de, « Réponse à Pierre Beausire », Suisse romande, Morges, 15 janvier 1938, p. 182-18
20 1938, Articles divers (1936-1938). Søren Kierkegaard (février 1938)
947 Kierkegaard (février 1938)z Kierkegaard naquit à Copenhague en 1813. Son père avait passé son enfance à garder les mou
948 enhague en 1813. Son père avait passé son enfance à garder les moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la
949 ur son développement religieux. Mais le défi jeté à Dieu sembla porter bonheur au père de Kierkegaard. Il devint commerça
950 ne, il ne voulut tirer nul intérêt : il la confia à l’un de ses frères, pour éviter d’avoir affaire aux banques, et lorsq
951 idée sans compter, mais surtout en dons généreux. À 27 ans, il terminait ses études de théologie, et se fiançait avec une
952 lling. Il y demeura quelques mois, puis il revint à Copenhague pour y mener une existence solitaire, jusqu’à sa mort, en
953 hague pour y mener une existence solitaire, jusqu’ à sa mort, en 1835. Il travaillait une grande partie de la nuit. Georg
954 hrases qu’il venait de composer tout en marchant. À l’aube, il s’accordait quelque répit, errait sur les quais déserts du
955 qui avoisinent la capitale. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir les rues les plus animées d
956 uple qu’il aimait par-dessus tout. Tout le monde, à Copenhague, connaissait sa silhouette, son grand chapeau, ses pantalo
957 ls de Discours édifiants, signés de son nom. Mais à mesure qu’il faisait mieux voir le fond chrétien de sa pensée, le pub
958 c s’écarta, effrayé. Et lorsqu’en 1831, il se mit à attaquer avec une extrême violence, le christianisme officiel et ses
959 cours d’une promenade en ville. On le transporta à l’hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul ami, le past
960 a à l’hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul ami, le pasteur Boesen : « Salue tous les hommes de tua part
961 int de vue explicatif sur mon œuvre — se rapporte à ce seul problème : « comment peut-on devenir chrétien ». Car on ne na
962 obéissance. Cessons de prendre le christianisme «  à bon marché », comme les évêques. Pensée centrale de l’œuvre énorme de
963 que aux yeux de Kierkegaard. Il fallait un rappel à l’ordre. Il le devint lui-même, de tout son être. Et il savait ce que
964 nçoivent pas de malaise. D’autres, qui s’essaient à penser en fin de semaine, comme on fait un peu d’ordre dans l’apparte
965 l, je crois, parvint dans l’intégrité de sa force à une mort que toute son œuvre provoquait et qui vaincue par une telle
966 ommensurable grandeur. Un acharnement sans pareil à forcer l’esprit sur l’obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’ex
967 e ne l’ai dit que pour l’écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! Alléluia !82 Deux documents éclairent le myst
968 e premier est de Kierkegaard : Forcer les hommes à être attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemin du vrai
969 rkegaard : Forcer les hommes à être attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemin du vrai martyre. Un vrai ma
970 rai martyre. Un vrai martyr n’a jamais eu recours à la violence, il combat à l’aide de son impuissance. Il force les homm
971 à l’aide de son impuissance. Il force les hommes à être attentifs. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, ils le tue
972 maladie pour mortelle. Sa mort serait nécessaire à l’action à laquelle il a consacré toutes ses forces spirituelles et t
973 ur mortelle. Sa mort serait nécessaire à l’action à laquelle il a consacré toutes ses forces spirituelles et toute son œu
974 faiblie. Au contraire sa mort donnera de la force à son attaque, et lui assurera, pense-t-il, la victoire.84 ⁂ De cette
975 it-il. Mais cette seule chose nécessaire s’oppose à tous nos conformismes, et même à nos plus hauts désirs. Il est désesp
976 essaire s’oppose à tous nos conformismes, et même à nos plus hauts désirs. Il est désespéré, mais c’est à cause de la foi
977 e signer de leur sang le pacte qui lie le penseur à Méphisto : expérimentateurs qui se ménagent un dernier retour, guerri
978 t au « sérieux » de Kierkegaard, il est de nature à tromper le lecteur mille manières. On peut se laisser prendre à la fa
979 ecteur mille manières. On peut se laisser prendre à la fantaisie baroque de certaines paraboles, de certaines ironies pol
980 ’éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle le temps finira bien par succomber. Mais, ayant tué en lui t
981 peut mesurer aujourd’hui le développement promis à l’influence de Kierkegaard sur notre temps : on le redécouvre après c
982 rages et d’articles. Ce qui est certain, c’est qu’ à la différence de Nietzsche, personne ne parviendra jamais à « utilise
983 rence de Nietzsche, personne ne parviendra jamais à « utiliser » Kierkegaard pour des fins politiques et temporelles. Il
984 ans de christianisme, une seule tâche comparable à la mienne. Dans la ‟chrétienté”, elle apparaît pour la première fois.
21 1938, Articles divers (1936-1938). Nouvelles pages du Journal d’un intellectuel en chômage (avril 1938)
985 2 mars 1662). Que dirions-nous alors du sort fait à celui qui doit se montrer aux hommes tel qu’il est ? S’entendre dire
986 jours s’estimer singulier, c’est-à-dire supérieur à la masse. Et ce n’est pas encore franchement s’avouer que de se compa
987 ’humanité. Chômage. — On dit souvent qu’il faut à l’homme un minimum de confort ou d’aisance matérielle pour pouvoir ré
988 « intellectuel » au chômage absolu, c’est-à-dire à l’arrêt de la pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel
989 ensée créatrice. Mais quel est ce certain degré ? À quel niveau placer cette limite inférieure ? La question paraît insol
990 hemise entière : les morceaux du bras avant servi à rapiécer les épaules et le plastron. Le peu d’argent de sa retraite d
991 peu d’argent de sa retraite de professeur servait à payer ses logeuses successives, et les remèdes contre ses effroyables
992 e ses effroyables maux de tête. De plus, il était à demi aveugle… Confort et culture. — À ceux qui n’ont rien, il faut
993 il était à demi aveugle… Confort et culture. —  À ceux qui n’ont rien, il faut donner du confort, afin qu’ils puissent
994 ort, afin qu’ils puissent concevoir d’autres buts à leur existence que la recherche d’un gain précaire. Mais à ceux qui o
995 istence que la recherche d’un gain précaire. Mais à ceux qui ont quelque chose, il faut rappeler que la recherche du conf
996 confort est ce qui s’oppose le plus radicalement à toute culture véritable. Île de R. — La nuit ! Je l’avais oubliée à
997 table. Île de R. — La nuit ! Je l’avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette mort opaque dont il faut re
998 ouge et circulante, pleine de rumeurs, comparable à la fièvre. Plus lucide souvent que les jours. Ici, tout repose complè
999 de l’allée unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans l’odeur des lauriers épai
1000 et fuient soudain en gémissant. J’ai des lettres à porter à l’autobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau le noir
1001 t soudain en gémissant. J’ai des lettres à porter à l’autobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et l’éc
1002 gar de la grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’ à ce que je rencontre l’ouverture de la boîte aux lettres. De loin, le
1003 ces figures géométriques, dominées par le clocher à toit plat, et des fragments de silhouettes d’arbres devant les maison
1004 Jamais plus que dans cette nuit. Fin de séjour à A… (Gard). — Tout est en place. Je garderai toutefois le plan d’aména
1005 mi-heure d’efforts haletants, qui n’ont abouti qu’ à coincer le sommier au tournant, entre la balustrade et les parois de
1006 ant de la décrocher un peu pour toucher davantage à l’assurance !) Il a bien fallu se rendre à l’évidence : ce sommier im
1007 antage à l’assurance !) Il a bien fallu se rendre à l’évidence : ce sommier implacable restera dans l’escalier comme témo
1008 émoin des bouleversements que nous avons infligés à la maison. Pas question d’aller quérir du renfort à A. Il faut encore
1009 la maison. Pas question d’aller quérir du renfort à A. Il faut encore boucler les valises, descendre mes caisses de livre
1010 cler les valises, descendre mes caisses de livres à la gare, etc., et le train part dans une heure. Quand la propriétaire
1011 opriétaire reviendra pour l’été, elle se heurtera à ce sommier monumental dans sa pose scandale et ma réputation sera fai
1012 a réputation sera faite ! Fuyons, fuyons ! (Été à Paris). Impossibilité du libre-échange humain. — Considération irrité
1013 », dès que mon regard s’attache un peu longuement à un visage, au corps et aux vêtements, aux mains, à l’attitude distrai
1014 un visage, au corps et aux vêtements, aux mains, à l’attitude distraite et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends
1015 ut-être acheté tout par hasard, comme il m’arrive à moi aussi, mais on se juge tout de même là-dessus… Je sors, je pense
1016 se juge tout de même là-dessus… Je sors, je pense à autre chose, à quelque chose qui n’est pas d’ici. Et déjà je ne compr
1017 même là-dessus… Je sors, je pense à autre chose, à quelque chose qui n’est pas d’ici. Et déjà je ne comprends plus pourq
1018 défend… » La grosse petite bonne qui tire sa robe à fleurs sur le quai désert du métro, enfin un être vrai. Conclusion.
1019 les ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on les a bien connus, dans leur r
1020 t. Quand tu l’auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir le connaître — lève-toi et regarde les choses, les gestes inc
1021 entendras et tu ne comprendras jamais qu’un appel à devenir toi-même ce fait qui est plus fort que toi. Car il est tout c
1022 érêt, condamné par l’église primitive. Il donnait à qui voulait. Après sa mort, on s’aperçut qu’il ne restait que 250 fra