1 1936, Articles divers (1936-1938). Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour (1936)
1 ’un bon roman. Pourtant la réussite de Max Brod n’ est pas seulement de l’ordre romanesque : elle est d’avoir mêlé à un beau
2 n’est pas seulement de l’ordre romanesque : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour le souvenir et davantage, la pré
3 ’amour le souvenir et davantage, la présence d’un être vrai, qui apporte à toute l’œuvre une émouvante précision. Le personn
4 terme —, un seul ouvrage a paru en français22. Ce serait assez pour donner une idée de l’ordre de grandeur spirituelle et de l
5 en peu en ont eu connaissance, et moins encore se sont risqués à en parler. Rien d’étonnant d’ailleurs à cette réserve. Une
6 action respectueuse ; le mutisme de l’homme qui s’ est senti touché dans une région de l’être dont il ignorait presque l’exi
7 homme qui s’est senti touché dans une région de l’ être dont il ignorait presque l’existence, et qui demande un peu de temps
8 municable. Encore faut-il montrer que ce détour n’ est pas un artifice gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut l’ami le
9 artifice gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut l’ami le plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’est chargé de pu
10 mi le plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’ est chargé de publier ses œuvres, pour une très grande part inédites, et
11 igieux, souhaitait que l’on détruisît. Max Brod s’ est expliqué sur ce point délicat dans une note jointe à l’édition posthu
12 énie tellement « étranger »… Le récit de Max Brod est librement imaginé. Toutefois le personnage de Garta, ses propos, sa v
13 Berlin pour s’y vouer totalement à son œuvre, il était déjà condamné par une tuberculose du larynx dont il mourut à Vienne e
14 et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde est d’une précision proprement angoissante. Il considère notre vie quotid
15 herche au moins d’une théologie. Tout cela, qui n’ est pas exprimé mais voilé et seulement trahi par certaines bizarreries d
16 ngoisse dérivent sans doute de Kierkegaard, qu’il fut l’un des premiers à découvrir au xxe siècle. D’autre part, sa volont
17 certainement à son admiration pour Goethe. Rien n’ est plus suggestif que cette rencontre en un seul homme de deux influence
18 par A. Vialatte. Deux autres récits de Kafka ont été publiés par la Nouvelle Revue française  : La Métamorphose et Le Ter
2 1936, Articles divers (1936-1938). Forme et transformation, ou l’acte selon Kierkegaard (janvier 1936)
19 l problème : comment devenir chrétien ». Car on n’ est pas chrétien, et même on ne peut pas l’être, mais il faut le devenir.
20 r on n’est pas chrétien, et même on ne peut pas l’ être , mais il faut le devenir. Et le problème, alors, devient celui de l’a
21 croit aux lois, et il se veut déterminé. Or il l’ est dans la mesure exacte où il l’accepte ; mais dans cette mesure même,
22 dans cette mesure même, il se peut qu’il cesse d’ être humain. Car l’homme n’a d’existence proprement humaine que lorsqu’il
23 icipe à la transformation du monde. Autrement, il est animal, et soumis à la forme des choses, — à la commune dégradation.
24 tes depuis un siècle pour nous prouver que l’acte est impossible et que le tout de l’homme est soumis au calcul, tout cet e
25 e l’acte est impossible et que le tout de l’homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et des sociologies éta
26 poir : l’homme moderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le
27 a vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est
28 e Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la seule explication vra
29 e chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’ être la vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité
30 rist est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c’est connaî
31 rité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aurait jamais co
32 n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été la vérité ; et nul homme ne connaît davantage de vérité qu’il n’en in
33 le serpent qui se mord la queue. La foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de tout acte véritable, de tout
34 réation, de toute victoire sur la Nécessité. « Je suis le chemin ». Mais un chemin n’est un chemin que si on y marche4. Sino
35 écessité. « Je suis le chemin ». Mais un chemin n’ est un chemin que si on y marche4. Sinon il n’est qu’un point de vue ; ou
36 n n’est un chemin que si on y marche4. Sinon il n’ est qu’un point de vue ; ou bien encore le lieu d’un pur possible, et sur
37 ire agir dans le Christ. La possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc aucun acte possible, aucun ac
38 ce monde, c’est croire donc que cette forme peut être transformée. — à vrai dire, en vertu du paradoxe le plus fou. Nous ne
39 llons connaître maintenant que seul l’acte de foi est création, transformation, nouveauté pure dans le monde, vocation et p
40 phétie de l’éternité qui vient à nous. 2. Il n’ est d’action que prophétique Qu’est-ce que prophétiser sinon dire la P
41 us. 2. Il n’est d’action que prophétique Qu’ est -ce que prophétiser sinon dire la Parole qui détermine notre avenir ?
42 ole qui détermine notre avenir ? Mais la Parole n’ est dite que dans la foi, la foi n’existe que dans l’acte, et cet acte de
43 n créant sa lumière et son chemin5, lumière qui n’ est pas sa lumière, chemin toujours imprévisible, certitude que devinent
44 ture languit après ce commencement et bienheureux est celui qui dans sa fin possède son commencement ». Mais l’homme déchu
45 es hommes les frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la vocation prophétique pareille à celle des ho
46 arole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, leur vérité et leur vie dans ce monde ; ils meurent de l
47 voir dite, et n’ont pas d’autre tâche7. Le chemin est imprévisible ; le nôtre, disons-nous, n’est pas celui de ces prophète
48 hemin est imprévisible ; le nôtre, disons-nous, n’ est pas celui de ces prophètes. Cependant la question demeure : comment a
49 ment obéir à la Parole qui prophétise ? Le chemin est imprévisible. Ce que nous connaissons, c’est pourtant son point de dé
50 rque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement chrétien (Journal). Vends ton bien et le donne aux pauv
51 uotidienne du chemin, — ton chemin, sur lequel tu es seul, parce qu’il est la parole de ta vie, sa mesure et sa vocation,
52 — ton chemin, sur lequel tu es seul, parce qu’il est la parole de ta vie, sa mesure et sa vocation, son risque à chaque in
53 Se conformer à ce pieux idéal, non seulement ce n’ est point agir, non seulement c’est limiter par avance le rôle de la foi,
54 rassurant. Et pourquoi ? Parce que « le chemin » est invisible tant qu’on n’y est pas engagé. Parce que c’est un blasphème
55 ce que « le chemin » est invisible tant qu’on n’y est pas engagé. Parce que c’est un blasphème de l’homme pieux, du moralis
56 faire un pas dans la nuit, sur ce « chemin » qui est le Christ présent. Il y a abîmes entre ces deux exigences : l’abîme e
57 de la reconnaissance… Tout commence par la joie d’ être aimé — et ensuite vient l’effort de plaire, constamment exalté par la
58 ire, constamment exalté par la certitude que l’on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8. Parce qu’il est aimé
59 enant, et même si l’effort échoue »8. Parce qu’il est aimé maintenant, aller maintenant, par la foi, sur ce chemin qui comm
60 eu mais comme la plénitude détruit le relatif. Il est ce contact impensable de l’éternité avec notre durée, et l’on n’en pe
61 durée, et l’on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’ est produit, et qu’il peut se produire sans que rien y prépare. « Car Die
62 le s’abîmerait dans l’amen éternel. Æternitas non est temporis successio sine fine, sed nunc stans. L’éternité a marché sur
63 ’éternité a marché sur la terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’éternel et nous lui préférons nos
64 qui viennent ; c’est pourquoi nous n’avons plus d’ être que par la foi, « substance des choses espérées », et c’est pourquoi
65 ées », et c’est pourquoi la Parole, parmi nous, n’ est que promesse et vigilante prophétie de l’invisible. De Séir, une voix
66 onvertissez-vous et revenez ! » La forme du monde est durée, et c’est la forme du péché, du refus de l’instant éternel12, —
67 . De quelles étranges et secrètes façons le temps est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de la foi, où p
68 oulez interroger, interrogez ! », mais la réponse est  : « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte de la foi, l
69 is un temps nouveau prend son cours, et sa mesure est plus mystérieuse encore. Voici : le pécheur pardonné vit dans le temp
70 t de sa durée, vit d’acte en acte. Et son temps n’ est plus son péché, mais on pourrait dire : sa patience. Car il se tient
71 atience. Car il se tient où Dieu l’a mis, et ce n’ est plus une dérive. Il vit dans la forme du monde, mais il est ce qui la
72 ne dérive. Il vit dans la forme du monde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de la « vie chrétienne », cette histoir
73 le temps en vertu de l’absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par
74 bord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissance, initiation Les deux moments réels d’une vie d’homme,
75 Les deux moments réels d’une vie d’homme, s’il est vrai que Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et la mort, parce q
76 ls d’une vie d’homme, s’il est vrai que Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et la mort, parce qu’ils sont des actes de
77 d’homme, s’il est vrai que Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et la mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre l
78 el, ce sont la naissance et la mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et la mort — ou plutôt puisque
79 a naissance et la mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance — toute
80 ort et la naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tension, — passage de la mort
81 a réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tension, — passage de la mort à la vie, tension entre ce q
82 est ici qu’on touche au mystère, sans lequel tout serait absurde : acte détruit le temps, puisqu’il est dans le même instant e
83 serait absurde : acte détruit le temps, puisqu’il est dans le même instant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’
84 est dans le même instant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant le temps, il le recrée e
85 le liant au destin personnel. Ainsi l’acte absolu serait création absolue, mais un acte de l’homme n’est jamais qu’une rédempt
86 erait création absolue, mais un acte de l’homme n’ est jamais qu’une rédemption. Distinction de théologien, et qui veut prév
87 nir l’orgueil. Mais la vision de celui qui agit n’ est point un jugement des résultats, — des créatures ; elle n’est pas dav
88 jugement des résultats, — des créatures ; elle n’ est pas davantage appréciation des causes. L’acte n’est jamais conséquenc
89 t pas davantage appréciation des causes. L’acte n’ est jamais conséquence, il est toujours initiation. La vision de celui qu
90 n des causes. L’acte n’est jamais conséquence, il est toujours initiation. La vision de celui qui agit est tout entière abs
91 toujours initiation. La vision de celui qui agit est tout entière absorbée par l’instant, par le passage de ce qui meurt à
92 ar le héros n’a connu son succès que lorsque tout était fini ; et ce n’est point par le succès qu’il fut héros, mais par son
93 son succès que lorsque tout était fini ; et ce n’ est point par le succès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15. Le
94 tait fini ; et ce n’est point par le succès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15. Le temps de l’acte vient s’inscri
95 t et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’ est -ce que la personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vision
96 arole dont elle procède, et si la face d’un homme est belle, c’est parce qu’elle est un acte et un destin, une initiale de
97 la face d’un homme est belle, c’est parce qu’elle est un acte et un destin, une initiale de l’histoire, une effigie de la P
98 , nous avons toutes les raisons d’en douter, s’il est vrai que le doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer la joie
99 s raisons d’en douter, s’il est vrai que le doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de l’acte de
100 u désespoir, qui consiste à s’imaginer que l’acte est puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que la f
101 que la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que
102 ine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’ est pas seulement renversement, mais création irréversible. Et cela tient
103 ais il sait bien qu’il n’en a pas, ou que son moi est désespoir, c’est-à-dire qu’il n’y croit pas et qu’il ne croit à aucun
104 ns le désir et dans la nostalgie, et son regard n’ est pas une vision dans un visage, mais une manière de loucher vers « les
105 cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est décision, rupture, isolation, quand l’être même du désespéré consiste
106 l’acte est décision, rupture, isolation, quand l’ être même du désespéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à la réal
107 cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est immédiat, création et initiation, c’est-à-dire sobriété pure, — quand
108 initiation, c’est-à-dire sobriété pure, — quand l’ être même du désespéré est calcul, préméditation, sensualité et envie… Ain
109 e sobriété pure, — quand l’être même du désespéré est calcul, préméditation, sensualité et envie… Ainsi l’acte absolu qu’il
110 alité et envie… Ainsi l’acte absolu qu’il imagine serait sa mort, — et c’est pourquoi il n’y croit pas. Nul n’échappe à la for
111 lu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’acte soit puissance et jouissance, il y a ce moi de désir qui veut que l’acte —
112 moi de désir qui veut que l’acte — l’instant ! —  soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos vies nous meut parce qu’il
113 u qui vient jucher nos vies nous meut parce qu’il est un ordre, une Parole reçue d’ailleurs, une rupture de tout drame huma
114 le de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’ est -il donc passé ? Me voici seul sur le chemin ; mais je vois des visage
115 urs que dans l’acte d’aimer. 7. Toute vocation est sans précédent Car elle est prophétie justement ! — et c’est de la
116 7. Toute vocation est sans précédent Car elle est prophétie justement ! — et c’est de la seule prophétie que relèvent l
117 ue n’ont pas les animaux ; c’est pourquoi l’homme est héroïque. Il faut noter ici un trait bien remarquable : Kierkegaard a
118 ocation et ne s’en distingue jamais. Cependant il est hors de doute qu’il eut conscience de cet aspect particulier de son d
119 ortée de « la masse », alors que la foi véritable est celle du solitaire que plus rien ne soutient, hors la foi ? « Celui q
120 igieuse, à plus forte raison l’audace chrétienne, est au-delà de toute vraisemblance, là où précisément l’on renonce à la v
121 r le chemin, non pas le suivre ; parce que l’acte est initiateur ; parce que la dignité de l’homme est de marcher dans l’in
122 est initiateur ; parce que la dignité de l’homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de l’absurde
123 étiser « en vertu de l’absurde ». L’homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par « le monde », il faut choisir. Il f
124 ieu ou par « le monde », il faut choisir. Il faut être un chrétien ou un bourgeois. Le bourgeois est sans vocation, il ne cr
125 ut être un chrétien ou un bourgeois. Le bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à l’acte et il meurt au hasard, sans a
126 i-même20. Il vit dans la forme du monde : et ce n’ est point qu’elle soit pour lui réelle, elle est seulement la moins invra
127 ans la forme du monde : et ce n’est point qu’elle soit pour lui réelle, elle est seulement la moins invraisemblable. Mais le
128 ce n’est point qu’elle soit pour lui réelle, elle est seulement la moins invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans
129 esure que de ce qu’il transforme. Sa connaissance est acte et vision prophétique. La mesure du temps de sa vie réside dans
130 es pas, il ne meurt jamais par surprise : et ce n’ est point qu’il ait connu le jour et l’heure, mais il connaît l’instant,
131 les psychologues de ce qui « se fait se faisant » est une antilogie chrétienne au premier chef, et non pas hindoue, comme c
132 ains l’ont voulu croire. Chez les hindous, elle n’ est encore qu’une forme de l’agitation humaine. Pour le chrétien seul ell
133 tien, la primauté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à mes pieds, une lumière sur mon sentier » 6. Die Chimäre
134 » (Karl Barth). Il n’a pas de biographie. Rien ne serait plus ridicule que de tenter de faire la psychologie d’un prophète, ou
135 obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre Kierkegaard est engendré pa
136 ement formelle. Le temps dont souffre Kierkegaard est engendré par la lâcheté du pécheur, tandis que le temps de Schopenhau
137 é du pécheur, tandis que le temps de Schopenhauer est « l’idéalité » du sujet connaissant, — une chimère spiritualiste, une
138 ve de nombreuses notations de ce genre : « Grande sera ma responsabilité si je rejette une mission de cette sorte » — c’est-
139 agne, par exemple. C’est, dit-il, que sa consigne est de « tenir bon en souffrant ». Le presbytère de campagne serait une s
140 nir bon en souffrant ». Le presbytère de campagne serait une solution commode, surtout en regard des souffrances qu’il sait tr
141 ses attaques contre l’Église établie. 20. Ce qui est particulièrement affligeant dans l’existence du bourgeois c’est qu’el
142 geant dans l’existence du bourgeois c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’à la mort, mais que la mort survient com
143 geois, mais décisive. À une enquête dont le sujet était  : La rencontre la plus importante de votre vie ? M. Clément Vautel qu
3 1936, Articles divers (1936-1938). Décadence des lieux communs (décembre 1936)
144 s des Merveilles On peut penser que notre langue est plus malade que n’était le latin à l’époque de la Renaissance24. Le l
145 eut penser que notre langue est plus malade que n’ était le latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sado
146 la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était encore une rhétorique des lieux communs. Forme vide, forme idolâtrée,
147 ngage de nos bons écrivains. Car non seulement il est mal entendu par la grande masse des lecteurs ordinaires, disons des l
148 disons des lecteurs de journaux, mais encore il s’ est divisé en une foule de dialectes ésotériques. Non seulement l’écrivai
149 pour les intellectuels et pour la masse — cela s’ est vu en d’autres siècles. Ils n’ont plus le même sens pour les divers p
150 çon, et que les autres trichent ou font défaut. N’ est -ce pas la partie de croquet dans Alice au pays des merveilles ? Les b
151 et dans Alice au pays des merveilles ? Les boules étaient des hérissons vivants, et les soldats s’arc-boutaient sur le sol pour
152 ments du jeu philosophique, ou politique que nous sommes en train de jouer, écrivains ou lecteurs, citoyens ou hommes d’État.
153 tion… Toutes ces combinaisons et ces permutations seraient néanmoins assez simples à débrouiller dans la pratique, et pourraient
154 rais dû croquer le hérisson de la Reine s’il ne s’ était mis à courir juste au moment où j’allais jouer. » ⁂ Tout le monde ou
155 es les plus étranges surimpressions26. La liberté sera invoquée par la concurrence et l’oppression capitalistes, par les int
156 partant à la conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictature brutale
157 etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit -il, tantôt la dictature brutale et arbitraire, plus rarement la reven
158 eurs œuvres capitales. Et je doute qu’un Meyerson sont sérieusement compris et discuté par beaucoup plus de personnes que De
159 ait improbable dans l’état actuel du régime. Elle est à tout le moins vérifiable. Par contre, on peut très nettement consta
160 démonétiser les mots. Le vocabulaire des journaux est vague, impropre, sans saveur et sans pouvoir d’évocation active du vr
161 milieu d’une rumeur générale, où leurs paroles ne sont plus distinguées du bavardage quotidien. Ils se retirent dans leurs a
162 tirent dans leurs appartements. Écrire dès lors n’ est pour eux que tromper un besoin d’expression qui n’a plus de mission r
163 n réelle. C’est un jeu formel et précis, dont ils sont seuls à connaître les règles. (Encore ne sont-ils guère d’accord pour
164 ils sont seuls à connaître les règles. (Encore ne sont -ils guère d’accord pour enregistrer les réussites ou les tricheries !
165 ée. Quand les clercs de la Cour de Rome cessent d’ être les dociles instruments de la vocation catholique, pour devenir de ra
166 vienne à faiblir et que la mesure commune cesse d’ être effectivement perçue et observée, l’on assiste à la même dégradation
167 us à un but unanime. Si bien que les écrivains ne sont plus compris du peuple, et que la langue vulgaire s’encombre d’équivo
168 ce, souffrent obscurément de leur séparation. Ils sont ensemble et ils sont seuls. Ils sont pressés les uns contre les autre
169 ment de leur séparation. Ils sont ensemble et ils sont seuls. Ils sont pressés les uns contre les autres et étrangers. Ils é
170 aration. Ils sont ensemble et ils sont seuls. Ils sont pressés les uns contre les autres et étrangers. Ils échangent des par
171  ! » Or, quand la parole se détruit, quand elle n’ est plus le don qu’un homme fait à un homme, et qui engage quelque chose
172 it à un homme, et qui engage quelque chose de son être , c’est l’amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est l’inquiétude des
173 e, c’est l’amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est l’inquiétude des masses. Elle n’est pas d’abord matérielle, elle est
174 ruit. ⁂ Telle est l’inquiétude des masses. Elle n’ est pas d’abord matérielle, elle est d’abord cette inquiétude du cœur et
175 s masses. Elle n’est pas d’abord matérielle, elle est d’abord cette inquiétude du cœur et de l’esprit qui naît de la mort d
176 es, à notre insu, trahissent. Mais quelqu’un s’en est aperçu. Quelqu’un a formé le projet de tromper cette faim et cette so
177 es mystiques et des dictateurs. Les lieux communs sont morts et embaumés : déjà, on leur fait des musées. Ou pire : ils n’on
178 leur fait des musées. Ou pire : ils n’ont jamais été vivants pour cette génération sans but. On nous en donnera donc de no
179 ns » publicitaires, mots d’ordre politiques, tels sont les ersatz pitoyables que nous proposent l’Argent et l’État. Gîovinez
180 commune aux grandes masses européennes, quel que soit leur régime politique. Ainsi la mesure n’est plus cette loi qui vit e
181 que soit leur régime politique. Ainsi la mesure n’ est plus cette loi qui vit en l’homme réel et personnel, cette alliance d
182 isait la grandeur des cultures authentiques. Elle est devenue la loi inexorable et mécanique qui plie l’individu à des calc
183 e des clichés bourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si l’ordre qu’ils imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que
184 ts d’ordre sont faux ? Si l’ordre qu’ils imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur l’indignité humaine ? Et si la pr
185 s cette communauté de réflexes et d’obsession ? N’ est -elle pas une somme de nos défaites intimes, de nos dénis d’humanité,
186  le contraire absolu de la culture, si la culture est justement la part active que prend l’homme à tout ce qui est création
187 nt la part active que prend l’homme à tout ce qui est création dans la nature, dans l’histoire, dans la vie de l’esprit ?
188 les mots « portaient » réellement, les écrivains seraient moins excités, moins excessifs. La Terreur qui règne en permanence da
189 règne en permanence dans les revues d’avant-garde est le signe d’une rupture de contact, d’un impuissant dépit, d’un profon
190 mmes. Cas de Nietzsche, des surréalistes, etc. Ce sont des êtres isolés, qui crient très fort parce qu’ils se sentent très l
191 de Nietzsche, des surréalistes, etc. Ce sont des êtres isolés, qui crient très fort parce qu’ils se sentent très loin de ceu
192 iste à additionner les casseroles et les haricots est à la base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Déca
4 1937, Articles divers (1936-1938). Changer la vie ou changer l’homme ? (1937)
193 os, que l’opération les laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histoire, non des vérités éternelles. Placez-vous do
194 xemple. Constatez, comme beaucoup l’ont fait (qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que la dictature de Staline se r
195 venir dialectique », dont la dictature actuelle n’ est qu’un stade nécessaire mais provisoire. Vous voilà rejeté sur le plan
196 tte fameuse dialectique : vous apprendrez qu’elle fut inventée par Hegel, qui eut le tort de la fonder sur l’Esprit, ce qui
197 qui eut le tort de la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : que le génie de Marx l’a remise sur
198 et agir au niveau du réel ; que son but primitif était de détruire l’État au profit de l’homme concret, non sans avoir d’abo
199 e-même, avec les derniers opposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en pas
200 ici, un jugement d’allure politique. Mais ce qui est grave, c’est de voir tant d’intellectuels défendre ces manœuvres au n
201 sert alors de discuter, de confronter ? « Rien ne sera juste à cette balance » (Pascal). Je m’en voudrais d’exploiter l’équi
202 et qu’il faut donc transformer toutes choses, tel est , je crois, l’acte initial mais aussi la passion constante du communis
203 dans sa forme, avec le mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus frappantes analogies ? Sur ce plan
204 ce plan seul, il m’apparaît qu’une confrontation soit possible. L’homme d’abord, ou le monde d’abord ? Le marxiste, t
205 reconnu que l’homme n’existe pas isolément, qu’il est un être « en relation », qu’il est lié à une société42. Mais encore,
206 que l’homme n’existe pas isolément, qu’il est un être « en relation », qu’il est lié à une société42. Mais encore, à l’inst
207 olément, qu’il est un être « en relation », qu’il est lié à une société42. Mais encore, à l’instar du chrétien, le marxiste
208 r le tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-même, et fait de l’homme qui s’abandonne à elle u
209 ême, et fait de l’homme qui s’abandonne à elle un être antinomique, « divisé », et comme « aliéné » de ce qu’il y a de plus
210 te de « cette aliénation de soi », qui selon Marx serait le fait de toutes les sociétés passées, y compris le communisme primi
211 reconnaissance d’une corruption fondamentale, qui est le péché originel. Il s’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que p
212 Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de votre sens, afin que vous discer
213 nt de votre sens, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans les de
214 discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans les deux cas, il s’agit du même mot :
215 er ; et il s’agit de transformer en tant que l’on est proprement humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à l’Esprit, po
216 x). Il s’agit donc d’action. Il s’agit d’attester soit la foi, par une réalisation des volontés de Dieu, contrariant celles
217 volontés de Dieu, contrariant celles du siècle, —  soit la pensée, par une action45 qui ne peut être que révolutionnaire. Et
218 e, — soit la pensée, par une action45 qui ne peut être que révolutionnaire. Et cependant l’opposition de Marx et de l’apôtre
219 fait de cette opposition centrale qu’il importe d’ être bien au clair, si l’on veut comprendre pourquoi la pratique et les fi
220 a jamais assez que la doctrine originelle de Marx est avant tout la mise en forme d’une polémique. Elle est, très consciemm
221 avant tout la mise en forme d’une polémique. Elle est , très consciemment, conditionnée par la situation de l’Europe occiden
222 la volonté de la changer. En particulier, elle n’ est « matérialiste », au sens vulgaire, que dans la mesure où la mentalit
223 e dans la mesure où la mentalité de l’époque peut être qualifiée — et se qualifie elle-même — de spiritualiste, au sens le p
224 ste, au sens le plus contestable du terme. Quelle était , du point de vue religieux, la situation qui se présentait à Marx ? C
225 ouvriers. Ni d’appeler justice, au besoin, ce qui était utile aux maîtres. La religion ne semblait plus gêner personne46. Ell
226 arx ne perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à la base d’une pareille imposture : il la sait trop profondément enr
227 ait trop profondément enracinée dans l’homme pour être atteinte par une simple critique philosophique47. Or cette critique p
228 philosophique47. Or cette critique philosophique est la seule arme dont il disposerait sur le plan de l’« esprit », car il
229 l disposerait sur le plan de l’« esprit », car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas l’« esprit » qu’il veut sauver, m
230  esprit », car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’ est pas l’« esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme, que les spiritualis
231 guments : ceux que l’on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part la violence prolétarienne, d’autre part la « science » inf
232 e nier. L’« esprit » du bourgeois spiritualiste n’ est qu’une caricature, mais ses ravages sont déjà tels qu’on ne peut plus
233 ualiste n’est qu’une caricature, mais ses ravages sont déjà tels qu’on ne peut plus songer à rétablir la vérité par des moye
234 s matérialisme dialectique, pour indiquer qu’il n’ est que provisoire, instrumental, qu’il doit servir au bout du compte la
235 quelle contient aussi l’« esprit » — bref qu’il n’ est en somme qu’une tactique. Faisons de nécessité vertu. Proposons-nous
236 pas démontré déjà que la culture, par exemple, n’ est qu’un « reflet » du processus économique ? On voit ainsi comment Marx
237 Marx lui-même se prend à son jeu polémique. Ce ne fut guère qu’à la fin de sa carrière que son ami Engels en découvrit le d
238 e danger. « Marx et moi — écrit-il en 1890 — nous sommes peut-être responsables de ce que parfois nos disciples ont insisté pl
239 l ne convenait sur les facteurs économiques. Nous étions forcés d’insister sur leur caractère fondamental, par opposition à no
240 e En effet, de ce « mensonge » opportuniste qu’ était le matérialisme polémique, promu par un glissement inévitable au rang
241 vulgaire, que Marx avait tout d’abord combattu48, est devenu, après lui, un mensonge absolu exactement symétrique de celui
242 ’homme à croire que la cause de tous ses malheurs est dans les choses, et non dans lui. (Il n’en fut pas conscient, et pour
243 rs est dans les choses, et non dans lui. (Il n’en fut pas conscient, et pourtant il en est responsable, nous reviendrons pl
244 ui. (Il n’en fut pas conscient, et pourtant il en est responsable, nous reviendrons plus tard sur ce point.) Le peuple — et
245 qui prêchent que l’argent ne fait pas le bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui ont l’argent et qui veulent le garder
246 ctrine de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est la richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce que voulait Marx ? R
247 le but final est la richesse, mère du bonheur. N’ est -ce pas là ce que voulait Marx ? Résumons : Marx n’a pas voulu le maté
248 idéologie », de « tactique » communistes. Mais ce serait introduire une confusion irrémédiable que de parler dans le même sens
249 r la théorie d’une pratique49. Le christianisme n’ est pas un programme ; ni, comme le disent certains primaires marxistes,
250 e. (Je dirais bien totalitaire, si le mot n’avait été pareillement perverti par les caricatures séculières de la révolution
251 a pour mission actuelle d’obéir à une Parole qui est Jésus-Christ, le Médiateur. Mais cette Parole juge « le monde » qui l
252 50 constituent la révolution la plus radicale qui soit , disons mieux : la seule radicale. Et toutes les autres, dans notre O
253 cident troublé par un message qu’il méconnaît, ne sont que les reflets énigmatiques de cet événement primordial — ses succéd
254 « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transformés… » Cela ne signifie pas, pour un chrétien, que « le monde
255 signifie pas, pour un chrétien, que « le monde » soit abandonné. Cela ne signifie pas qu’une fois opérée cette transformati
256 es lois d’un monde qu’il condamne ! Car alors, où serait son refus ? Et quelle preuve aurions-nous de sa transformation ? Une
257 mé par la foi. L’homme nouveau, selon l’Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il est orienté autrement, comme l’indi
258 l’Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il est orienté autrement, comme l’indique le mot conversion. Obéissant à la
259 sponsable à l’endroit du monde. Car si le monde s’ est livré à l’injustice et au désordre, c’est par la faute de l’homme, qu
260 t au désordre, c’est par la faute de l’homme, qui était son roi, et qui a trahi. Et tout péché individuel répète et aggrave c
261 e, obligation d’agir pour racheter le mal commis, sont trois moments indivisibles de la « transformation » dont parle Paul.
262 de la « transformation » dont parle Paul. L’un n’ est pas concevable, sérieusement, sans l’autre. « Toute droite connaissan
263 Dieu naît de l’obéissance », écrit Calvin. Et que serait une obéissance qui ne se manifesterait pas ? La transformation person
264 e l’Évangile, ne peut donc se traduire, si elle s’ est faite, que par une action du chrétien : contre le monde dans sa forme
265 i devient transformateur du monde — ou sinon il n’ est pas converti — mais encore toute transformation de la forme actuelle
266 formation de la forme actuelle des choses, qui ne serait pas l’effet d’une conversion des hommes, ne doit être aux yeux du chr
267 pas l’effet d’une conversion des hommes, ne doit être aux yeux du chrétien, qu’une réforme sans grande portée. Voilà qui pa
268 paraîtra plus scandaleux. Et cependant l’Évangile est formel : « Que servirait à un homme de gagner le monde, s’il perdait
269 eul gage du salut total ? Alors, va-t-on, si l’on est converti, laisser le monde aller son train, et les guerres se déchaîn
270 se déchaîner, et les chômeurs mourir de faim ? Ce serait prouver qu’on n’est pas converti. J’agirai donc, toutefois non pour l
271 ômeurs mourir de faim ? Ce serait prouver qu’on n’ est pas converti. J’agirai donc, toutefois non pour le monde, et non pour
272 formé. Si je n’avais pas cette reconnaissance, ce serait que j’ignore mon salut. Mais si je connais mon salut, je ne puis supp
273 adressent les chrétiens et les marxistes Telle étant donc la conception chrétienne de l’homme, seul responsable du mal qui
274 hrétienne de l’homme, seul responsable du mal qui est dans le monde, on comprendra que l’état d’esprit marxiste lui apparai
275 éviation grossière, dira-t-on ; mais pouvait-elle être évitée ? Marx n’avait-il pas dit qu’il fallait commencer par changer
276 mps plus paisibles l’évangélisation — sa raison d’ être — il se fût consacré aux tâches plus urgentes : donner du pain et des
277 ibles l’évangélisation — sa raison d’être — il se fût consacré aux tâches plus urgentes : donner du pain et des spectacles
278 r du pain et des spectacles à la foule. Mais Paul était apôtre et non pas dictateur. C’est pourquoi son message nous est enco
279 on pas dictateur. C’est pourquoi son message nous est encore prêché. Il annonçait aux hommes non pas la haine et le cynisme
280 omme changé. Trop beau tout cela ! Trop beau pour être vrai, dit le marxiste. (Chrétien, changé, je suis encore assez « viei
281 être vrai, dit le marxiste. (Chrétien, changé, je suis encore assez « vieil homme » pour le comprendre.) Sur quoi repose cet
282 fit-il à vous nourrir, personnellement, mais ce n’ est pas cela qui supprime la misère, qui empêche la guerre, qui change le
283 stes, si aveuglement enthousiastes, c’est qu’il s’ est trouvé seul à protester contre le monde tel qu’il va. On dira : c’est
284 tout le malheur dont en vérité le péché de chacun est responsable. L’observation est juste ; elle est insuffisante. Ce qui
285 le péché de chacun est responsable. L’observation est juste ; elle est insuffisante. Ce qui explique en dernier ressort le
286 n est responsable. L’observation est juste ; elle est insuffisante. Ce qui explique en dernier ressort le succès « religieu
287 la seule espérance véritable et certaine n’a plus été prêchée au monde avec une force d’attaque assez gênante et bouleversa
288 bouleversante. C’est que l’« esprit » qui devait être l’agent du changement total, perpétuel et seul réel, est devenu le ga
289 gent du changement total, perpétuel et seul réel, est devenu le gardien des conformismes, ou du moins n’a pas su, par excès
290 es foules le considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus responsables des succès de Marx auprès des foules, que le m
291 ccès de Marx auprès des foules, que le marxisme n’ est responsable du déclin des Églises dans le monde moderne. C’est pourqu
292 st pourquoi les reproches du marxiste au chrétien sont humainement bien plus valables que ceux du chrétien au marxiste. En g
293 Marx se trompe et réussit, c’est parce que Christ est mal prêché par ses disciples (que ce soit en paroles ou en actes). Si
294 e Christ est mal prêché par ses disciples (que ce soit en paroles ou en actes). Si les chrétiens gardaient une conscience pl
295 te ne vaut rien, alors que l’objection chrétienne est imparable. Quand un marxiste me reproche de me contenter d’un changem
296 et qui n’affecte en rien le cours des choses, je suis fondé à lui répondre : « Ton reproche s’adresse à mon hypocrisie, à m
297 non pas du tout à la foi. Car la foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a pas impunément, et si on l’a, cela se
298 ent. Ce que tu me reproches, c’est, en fait, de n’ être pas assez chrétien ! Tu m’incites donc à le devenir davantage, quand
299 pour un dialecticien ! Si tu dis que le chrétien est celui qui ne fait rien, tu prouves simplement que tu ignores tout du
300 ores tout du christianisme. » (Je répète que ce n’ est pas sa faute, à ce marxiste, mais notre faute, et tout d’abord la mie
301 aliste actuelle, je ne passe pas à côté de ce qui est essentiel chez Marx. Je ne critique pas une erreur contingente. Je ne
302 as une erreur contingente. Je ne dis pas : vous n’ êtes pas assez marxistes ! Je dis : dès le départ, dès l’origine doctrinal
303 intrinsèquement, et dans la mesure exacte où l’on est un marxiste convaincu, non point dans la mesure où l’on trahit le mar
304 véritable décision. Certains, frappés comme je le suis , par les ressemblances formelles indiscutables que présentent la volo
305 stinctions décisives. La pratique du communisme n’ est justiciable, en soi, que d’une critique politique, économique, histor
306 sous le coup de la seule critique théologique, ce sont les buts derniers du communisme et les postulats qu’il suppose. Qu’on
307 postulats qu’il suppose. Qu’on me permette ici d’ être un peu schématique pour plus de clarté. Il me paraît que l’opposition
308 le christianisme prépare un Royaume éternel, qui sera celui de Dieu, non de la Terre. Tous deux sont eschatologiques, en ce
309 ui sera celui de Dieu, non de la Terre. Tous deux sont eschatologiques, en ce sens qu’ils rapportent leur accomplissement à
310 ela pour sauver l’URSS.) Mais l’eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel, et par là même peut être immédiatem
311 Mais l’eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel, et par là même peut être immédiatement présent dans notre cœ
312 elà de ce temps, est éternel, et par là même peut être immédiatement présent dans notre cœur56 alors que l’eschaton marxiste
313 la Révélation en Personne. Et du coup le Royaume est au-dedans de lui. Cet homme n’est plus le maître de sa vie. Il est l’
314 coup le Royaume est au-dedans de lui. Cet homme n’ est plus le maître de sa vie. Il est l’agent d’une vocation venue d’aille
315 lui. Cet homme n’est plus le maître de sa vie. Il est l’agent d’une vocation venue d’ailleurs, mais pour lui seul et ici-ba
316 pensée la plus intime. Dès maintenant sa personne est recréée. Dès maintenant, elle entre en conflit avec le monde et ses f
317 Présence actuelle. Il fait un pari dont l’objet n’ est pas accessible aujourd’hui. Il mise son action immédiate sur un fait
318 i. Il mise son action immédiate sur un fait qui n’ est pas accompli, l’histoire n’ayant jamais connu de réalisation de commu
319 ommunisme. Ainsi, des deux, c’est le marxiste qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réaliste. (J’entends bie
320 ste qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…) Le marxiste di
321 de lui ce qui s’oppose à son bien souverain. S’il est chrétien, il sait qu’il est membre d’un corps qui porte toutes les ma
322 bien souverain. S’il est chrétien, il sait qu’il est membre d’un corps qui porte toutes les marques du péché. Il est alors
323 n corps qui porte toutes les marques du péché. Il est alors en face du monde, et au nom même de sa foi, dans la posture d’u
324 ut se développer57. Mais le marxiste, quelles que soient la souffrance et la colère qu’il éprouve devant les injustices présen
325 tes, du fait qu’il croit que l’intérêt de l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoit, être social — se ve
326 seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoit, être social — se verra fatalement neutralisé dans son effort par les gains
327 t final. Car cet accomplissement, ou plénitude, n’ est jamais qu’un futur théorique, — si passionnée que soit l’espérance du
328 jamais qu’un futur théorique, — si passionnée que soit l’espérance du marxiste — et non pas une présence exigeante et totale
329 omme en 1789 et en 1917), il faudrait que l’homme soit délivré de son péché, « changé », sorti du plan, précisément, où le m
330 quement une volonté de changer tout ce qui peut l’ être  ; mais aussi, cela suppose certains moyens d’action qui ne sauraient
331 suppose certains moyens d’action qui ne sauraient être les mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. L
332 présent, la loi d’amour et de justice, même s’il était commis au nom des intérêts de l’Église chrétienne, détruirait en fait
333 el abstrait. Car le gage de l’action chrétienne n’ est pas futur, mais éternel et donc présent. Si, pour sauver le futur de
334 cifie le Christ et je m’oppose à son retour. Il n’ est donc pas d’« opportunisme » chrétien qui tienne, et tous les moyens d
335 ui tienne, et tous les moyens du chrétien doivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est le cas du marxiste. N’ayant pas
336 en doivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est le cas du marxiste. N’ayant pas derrière lui de modèle accompli, ni e
337 p de marxistes s’en indigner mais je doute qu’ils soient bien conséquents, et que leur indignation traduise la vraie volonté d
338 , plutôt qu’un reste d’humanisme libéral. Le fait est que la grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il résulte
339 ison d’État », et jusqu’à la guerre s’il le faut, sont des moyens parfaitement acceptables en tant qu’ils servent le progrès
340 s de salut présent ni éternel, puisque le salut n’ est pas pour eux de toute façon, mais pour les descendants de leurs desce
341 liter en sa faveur : l’alternative où il se place est sans issue. Car ou bien il accepte les disciplines d’action que lui i
342 s alors pour sauver le monde, il perd sa raison d’ être personnelle, et renie justement cette foi qu’il croyait mieux servir
343 formuler simplement : la fin dernière du chrétien est présente en chacun de ses actes, ou bien n’est pas ; tandis que la fi
344 en est présente en chacun de ses actes, ou bien n’ est pas ; tandis que la fin dernière du marxiste est un avenir absolument
345 ’est pas ; tandis que la fin dernière du marxiste est un avenir absolument hétérogène aux actions qu’il peut faire aujourd’
346 fini, et n’engage que certaines dispositions de l’ être , celles-là précisément que l’avenir socialiste, la société sans class
347 nsformation de l’homme importe seule, puisqu’elle est , en effet, l’essentiel, et le but de tout autre changement. J’en vois
348 j’entends bien que les sacrifices qu’ils font ne sont pas seulement « spirituels », entraînent des risques financiers, et m
349 ne peut pas tout faire ! Quand beaucoup d’hommes seront changés, beaucoup de problèmes se poseront autrement… » Je veux les c
350 itualiste qui menace notre vie chrétienne, et qui est la cause certaine des succès du marxisme. Tant que les chrétiens ne c
351 , me semble-t-il, une question de solidarité, qui est une forme de la charité. Parfois aussi le devoir chrétien peut appara
352 s, ce que signifie la menace totalitaire, qu’elle soit fasciste ou soviétique : c’est la « mise au pas » de nos vies et de t
353 s, au service de l’État déifié. Cette situation n’ est pas sans rappeler celle de l’Empire romain au premier âge du christia
354 lus haut. Toutefois, l’un des facteurs au moins s’ est modifié notablement : les chrétiens ne forment plus des groupuscules
355 alogue, et au devoir d’amour chrétien. Le conflit est inévitable. Suffira-t-il dès lors de se laisser persécuter ? N’avons-
356 ous-mêmes à sauver, alors que nos erreurs passées sont pour une part, peut-être capitale, dans le malheur universel qui vien
357 ? Or toute attente passive, si courageuse qu’elle soit , devient dans le cas présent une complicité. L’État totalitaire ne sa
358 n protestant, et je précise : un calviniste, doit être ici en mesure de répondre. De toutes les églises chrétiennes, l’églis
359 utes les églises chrétiennes, l’église calviniste est en effet la plus antitotalitaire par essence. Je ne rappelle qu’en pa
360 religion qui les précèdent : on sait assez que ce fut la lutte d’une royauté déjà « totalitaire » contre des groupes, loyal
361 « totalitaire » contre des groupes, loyalistes il est vrai, mais réfractaires à certaine mise au pas. Il serait peut-être a
362 rai, mais réfractaires à certaine mise au pas. Il serait peut-être abusif de déduire d’une situation déterminée par la persécu
363 nité spirituelle. Et les suites de cette création sont encore visibles aujourd’hui : nulle part l’esprit totalitaire n’a tro
364 tte des églises contre l’emprise morale de l’État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est-à-dire par un calviniste… J
365 ndre la portée de ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à l’esprit unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome. L
366 nisme, que nous voyons gagner toutes les églises, est une promesse à laquelle nous devons croire de toute la force de notre
367 strictement personnel, un « charisme » dont nous sommes responsables. Nous ne pouvons donc pas approuver une forme d’État qui
368 munauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût -ce que pour cette seule raison — et j’en ai mentionné plusieurs autre
369 e, le stalinisme : une guerre de religions qui ne sont pas les nôtres. Je prends ici parti contre une telle entreprise, pour
370 es aspirations valables et généreuses du marxisme sont autant d’essais de sauvetage de vérités chrétiennes égarées, déformée
371  mises sous le boisseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de l’aspiration totalitaire, qui est monstrueuse dans ses f
372 la est vrai même de l’aspiration totalitaire, qui est monstrueuse dans ses formes actuelles, mais qui traduit encore, obscu
373 en, vers une économie sauvée : le Royaume où Dieu est « tout en tous ». Si les églises chrétiennes ont à souffrir demain pa
374 tyrannique, il faut qu’elles sachent qu’elles en sont responsables, dans la mesure où elles cédèrent, jadis, aux tentations
375 lières. Si la culture et si nos libertés civiques sont brimées, par le fait d’une doctrine et d’un État « matérialistes », i
376 tat « matérialistes », il faut savoir que nous en sommes les responsables, dans la mesure où nous cultivons un esprit détaché
377 tentation spiritualiste. 41. « Le communisme n’ est pas pour nous un état qui doive être créé, un idéal… Nous appelons co
378 communisme n’est pas pour nous un état qui doive être créé, un idéal… Nous appelons communisme le mouvement effectif qui su
379 réalité présente. Les conditions de ce mouvement sont données par cette situation » (Marx, Deutsche Ideologie). 42. « Nous
380 tuation » (Marx, Deutsche Ideologie). 42. « Nous sommes tous membres les uns des autres » (Rom., 12, 5). D’autre part, Marx n
381 e même pour le chrétien, la foi sans les œuvres n’ est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n’a jamais dit autre chose,
382 faut en user, certes, mais elle ne suffit pas. «  Être radical consiste à attaquer le mal dans la racine. Mais la racine, c’
383 humains personnels, sans quoi le matérialisme ne serait pas « dialectique ». « La coïncidence de la modification des circonst
384 é humaine, ou transformation personnelle, ne peut être rationnellement comprise que comme une activité révolutionnaire. » Ph
385 9. Selon Karl Barth, par exemple, la dogmatique n’ est qu’une question perpétuelle, une autocritique si l’on veut, que l’Égl
386 te d’humilité ; car toute parole humaine sur Dieu est nécessairement inadéquate en soi, et ne peut être qu’un renvoi à la R
387 est nécessairement inadéquate en soi, et ne peut être qu’un renvoi à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doc
388 seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’ est ainsi qu’une mesure critique que l’Église prend de son message sous l
389 . Elle ne présente rien que l’on puisse comparer, fût -ce le plus superficiellement, à un programme théorique qu’il s’agirai
390 établir un parallèle — sans doute dangereux — ce serait la Personne vivante de Jésus-Christ, et non pas la théologie, simple
391 dire ici : « tendre vers… » 51. Ma supposition n’ est pas toute gratuite : elle s’est réalisée plus tard sous Constantin pa
392 Ma supposition n’est pas toute gratuite : elle s’ est réalisée plus tard sous Constantin par des moyens légaux, il est vrai
393 us tard sous Constantin par des moyens légaux, il est vrai, mais avec les mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de l’
394 utes les révolutions de l’histoire de l’Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute autre cause est secondaire. 
395 ties de la religion chrétienne. Toute autre cause est secondaire. » Et Henri de Man : « Je crois qu’il n’y a jamais eu de t
396 jamais eu de tentative révolutionnaire qui n’ait été d’origine chrétienne. S’il n’y a pas de socialisme en Asie, cela tien
397 de Man, que le mouvement syndicaliste au Japon a été fondé par un chrétien, Kagawa. 53. Je ne dis pas « les conditions ph
398 it observer que des facteurs très essentiels de l’ être même peuvent varier selon les milieux et la nature des institutions.
399 tendu « primordial » de propriété, peut très bien être anéanti chez l’homme par un régime communiste.) Que reste-t-il dans l
400 par un régime communiste.) Que reste-t-il dans l’ être humain d’absolument irréductible à toute transformation sociale ? La
401 te d’une de ces conditions conduit nécessairement soit à l’idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme to
402 itions conduit nécessairement soit à l’idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme totalitaire résulte né
403 re à frapper les regards et l’on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que le Royaume de Dieu est au-de
404 ds et l’on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que le Royaume de Dieu est au-dedans de vous ! » (Luc,
405 en : il est là ! Car voici que le Royaume de Dieu est au-dedans de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. Je parle ici, l’on m’ent
406 Je parle ici, l’on m’entend bien, de ce que doit être un chrétien conséquent. Il est trop clair que nous restons, tous tant
407 n, de ce que doit être un chrétien conséquent. Il est trop clair que nous restons, tous tant que nous sommes, bien en arriè
408 t trop clair que nous restons, tous tant que nous sommes , bien en arrière de notre vocation. La plupart de nos trahisons vienn
409 plus pieux du recueil anglais, sir John Browning, est le même homme qui contraignit la Chine, sous la menace des canons, à
410 . 58. Je prends l’expression dans ce sens, qui n’ est pas le sens jésuite courant : que la fin seule doit indiquer les moye
411 la préparent. Et non pas justifier des moyens qui seraient en soi contraires à la justice, — ou à l’essence de la fin souhaitée.
412 des bourgeois, aux yeux desquels tout bolcheviste est un criminel en puissance. Les communistes représentent chez nous, en
413 (prêchée par Marx) et la guerre (pour peu qu’elle soit censée défendre l’URSS). 60. Je n’entends pas porter ici un jugement
414 Le rédacteur de cette « discipline » paraît avoir été le pasteur Antoine de Chandieu, mais l’intervention personnelle de Ca
415 glises se fédèrent par région. L’instance d’appel est « la cour suprême du synode national ». (John Viénot, Histoire de la
416 e : fondée sur la notion de vocation. 63. L’URSS est le seul État totalement totalitaire, disait récemment Victor Serge, é
5 1937, Articles divers (1936-1938). Vocation et destin d’Israël (1937)
417 re » d’Israël Un prophète, a écrit Karl Barth, est un homme sans biographie. « Er steht und fallt mit seiner Mission »,
418 e puisque c’est le message de Dieu. Jérémie n’eût été qu’un berger bègue si l’Éternel n’avait parlé par lui. Voici qui est
419 gue si l’Éternel n’avait parlé par lui. Voici qui est digne de remarque : le seul détail précis que rapporte la Bible à son
420 un homme appelé au ministère de la Parole. Ce qui est vrai du prophète l’est aussi de son peuple, — peuple entre tous proph
421 stère de la Parole. Ce qui est vrai du prophète l’ est aussi de son peuple, — peuple entre tous prophétique. Ce qui est vrai
422 n peuple, — peuple entre tous prophétique. Ce qui est vrai de la biographie d’un homme que l’Éternel choisit n’est pas moin
423 la biographie d’un homme que l’Éternel choisit n’ est pas moins vrai de l’histoire profane des Juifs, porteurs eux aussi d’
424 liser et la chiffrer, c’est-à-dire, telle qu’elle fut déterminée par des facteurs en partie mesurables (géographiques, écon
425 end une science de cet ordre sur le destin auquel étaient promises les infimes tribus nomades qui constituaient, aux origines,
426 supposer que le peuple d’Israël, s’il n’avait pas été « élu », eût évolué d’une autre sorte que tant de tribus d’Arabie qui
427 truire et à conquérir… Ainsi les annales d’Israël sont celles d’une puissance imprévue et humainement imprévisible, qui ne f
428 ance imprévue et humainement imprévisible, qui ne fut jamais immanente aux conditions médiocres des Hébreux. Ce que nous co
429 u — c’est la suite des gestes de Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eu
430 truments. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce qui les rabat à leur destin, ce son
431 annales, c’est ce qui les rabat à leur destin, ce sont leurs révoltes constantes, leurs faux pas, leurs accès d’incroyance.
432 leurs accès d’incroyance. Et toute leur grandeur est à Dieu, c’est-à-dire à la vocation qui les arrache, malgré eux, à ce
433 ut jusqu’à ce que Dieu l’élise. Désormais sa voie est fixée, mais ce n’est plus sa « propre » voie. Il vient de Dieu, il va
434 u l’élise. Désormais sa voie est fixée, mais ce n’ est plus sa « propre » voie. Il vient de Dieu, il va vers Dieu, et c’est
435 duit. C’est pourquoi son télos (sa fin dernière), est transcendant et mystérieux comme Dieu, unique en son essence, comme D
436 courant. Mais le conflit de la foi et de la vue n’ est en somme qu’un autre aspect du conflit de la vocation et du destin. I
437 es douze tribus. Car un but invisible aux mortels est une menace et une angoisse, au moins autant qu’une promesse. Une mena
438 it quel futur. Et une angoisse contre laquelle il est fatal que l’on cherche à se protéger par quelque chose de visible et
439 ette révolte, et ce destin, et ce besoin de voir, sont symbolisés au concret par les statues des idoles étrangères — car c’e
440 ons de son alliance. La mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qu
441 Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’origine et
442 fois l’origine et la fin du peuple en tant qu’il est un « nouveau » peuple, élu par Dieu et « mis à part »64. C’est à elle
443 n seulement tout geste, mais toute pensée. Rien n’ est plus neutre ou laissé au hasard, tout est « mesuré » et jugé dans la
444 Rien n’est plus neutre ou laissé au hasard, tout est « mesuré » et jugé dans la perspective de la fin assignée à toute la
445 s se distingue de toutes les autres en ce qu’elle est une vocation adressée par un Dieu personnel, unique, éternel, transce
446 personnel, unique, éternel, transcendant. Elle n’ est pas le produit normal d’une évolution historique fécondée et cristall
447 tallisée par l’intervention d’un grand chef. Elle est donc plus « totalitaire » que toute mesure humainement concevable, pu
448 e « loin de la face de l’Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscienc
449 Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce
450 loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est la loi de
451 science finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est la loi de Dieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle la règle
452 e le symbole de l’unité du peuple, mais son usage est interdit pendant les guerres civiles : c’est que la mesure est indivi
453 pendant les guerres civiles : c’est que la mesure est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et les prêtre
454 viles : c’est que la mesure est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et les prêtres sont là pour veiller
455 mesure est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et les prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et
456 au ciel, sa loi est sur la terre, et les prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et si ces « clercs » viennent à trahi
457 connu, s’ils oublient que le Dieu qu’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux », les Prophètes se lèvent contre eux e
458 où elle tire son nom. Elle embrasse tout ce qui n’ est pas foi, mais vue, tout ce qui est refus d’obéissance, et imagination
459 tout ce qui n’est pas foi, mais vue, tout ce qui est refus d’obéissance, et imagination d’un autre bien. Idole tout ce qui
460 action ou pensée, si belle ou si féconde qu’elle soit , qui ne puisse être consacrée au ministère sacerdotal du peuple élu.
461 i belle ou si féconde qu’elle soit, qui ne puisse être consacrée au ministère sacerdotal du peuple élu. Idole, tout ce qui n
462 re sacerdotal du peuple élu. Idole, tout ce qui n’ est pas ordonné à la fin que les prophètes annoncent sans relâche. Mais l
463 e » d’une législation divine, mais dont l’homme s’ est emparé, et dont il fait sa chose, oubliant son Auteur. C’est alors qu
464 (Moïse), écrit-il dans sa Réponse à Appion 67, a été le seul dont les actions et les paroles ont été conformes. » Car il n
465 a été le seul dont les actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a pas seulement formulé des lois justes, complè
466 t très détaillées, mais il a veillé à ce qu’elles fussent connues de tous. Cette connaissance produit parmi nous une admirable
467 i nous une admirable conformité, parce que rien n’ est si capable de la faire naître et de l’entretenir, que d’avoir les mêm
468 les mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, et d’ être élevés dans une même manière de vivre, et dans les mêmes coutumes ; c
469 se dans le monde. Nos femmes et nos serviteurs en sont persuadés comme nous : on peut apprendre de leur bouche les règles de
470 foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu’une occasion de dépassement… Oui, la Richesse est notre
471 qu’une occasion de dépassement… Oui, la Richesse est notre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de l’expansion, mais
472 , la vieille malédiction de la tour de Babel, qui est la dispersion du genre humain. Le dilemme qui se trouve posé à toute
473 sation, et d’une manière très urgente à la nôtre, est assez clairement défini par la comparaison que l’on peut faire de not
474 e devient en effet la culture, dans un monde où n’ est tolérée que « la seule chose nécessaire ? » L’homme qui a une vocati
475 hose nécessaire ? » L’homme qui a une vocation n’ est pas bon à autre chose. Israël portait dans son sein l’avenir religieu
476 s son sein l’avenir religieux du monde. Dès qu’il était tenté de s’oublier dans les voies vulgaires des autres peuples, une s
477 la justice à l’ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ainsi toute tentative de culture profane se voit assim
478 évolte d’orgueil contre Dieu. La culture d’Israël sera pauvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté sera la condition de s
479 ra pauvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté sera la condition de sa grandeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui combl
480 reté sera la condition de sa grandeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui comble la mesure, et non pas ce qui la dépasse. C
481 ble la mesure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’ est pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-m
482 Ce n’est pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par la fin. C’est
483 est que le culte qu’il faut rendre au Dieu vivant est une obéissance directe « en esprit et en vérité ». Or abstraire, c’es
484 a des prophètes, a-t-il besoin de philosophes ? —  est ainsi l’aspect négatif d’une splendeur poétique inégalée. (La poésie
485 tique inégalée. (La poésie de l’Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera biblique ou grecque, sublime dans
486 ident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera biblique ou grecque, sublime dans la mesure où la synthèse des deux t
487 dans la mesure où la synthèse des deux traditions sera dominée par l’élément biblique.) Seuls les grands discours prophétiqu
488 on et vérifié l’étymologie grecque de poésie, qui est agir. Point d’arts figuratifs ou imaginatifs. La loi les interdit par
489 mage taillée, ni de représentation des choses qui sont en haut dans les cieux, en bas sur la terre, et dans les eaux plus ba
490 ence purement technique : la sagesse de Salomon n’ est pas une connaissance des « causes » mais bien des « signatures » natu
491 , fictions écrites, science, industrie, tout cela est sacrifié à la seule chose nécessaire : l’accomplissement d’une vocati
492 spirituelle. Et les moyens de cet accomplissement sont les moyens les plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’
493 res, l’on voit que la culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la plus convenable aux fins suprême
494 e la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la plus convenable aux fins suprêmes de l’esprit. Toutefois, no
495 us point étudier à inventer des choses nouvelles, soit dans les arts, ou dans le langage, au lieu que les autres peuples mér
496 ancêtres, parce que c’est une preuve qu’elles ont été parfaitement bien établies, puisqu’il n’y a que celles qui n’ont pas
497 a que celles qui n’ont pas cet avantage que l’on soit obligé de changer, lorsque l’expérience fait connaître le besoin d’en
498 uts. Ainsi, comme nous ne doutons point que ce ne soit Dieu qui nous a donné ces lois par l’entremise de Moïse, pourrions-no
499 ver très religieusement ? Et quelle conduite peut être plus juste, plus excellente et plus sainte, que celle dont ce souvera
500 que celle dont ce souverain Monarque de l’univers est l’auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus parfaite q
501 l’auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus parfaite que la nôtre, et quels plus grands honneurs peut-on ren
502 ands honneurs peut-on rendre à Dieu, puisque nous sommes toujours préparés à nous acquitter du culte que nous lui devons ; que
503 ulte que nous lui devons ; que nos Sacrificateurs sont établis pour veiller sans cesse à ce qu’il ne se fasse rien qui y soi
504 ller sans cesse à ce qu’il ne se fasse rien qui y soit contraire, et que toutes choses ne sont pas mieux réglées le jour d’u
505 ien qui y soit contraire, et que toutes choses ne sont pas mieux réglées le jour d’une fête solennelle, qu’elles le sont tou
506 églées le jour d’une fête solennelle, qu’elles le sont toujours parmi nous ? Chute d’Israël Tout était suspendu à la
507 toujours parmi nous ? Chute d’Israël Tout était suspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messia
508 ute d’Israël Tout était suspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messianique donnée par Dieu dès les
509 temps primitifs72. Mais cette promesse, enfin, s’ est incarnée. Et les juifs l’ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cet
510 ir. » (Héb. 10, 1), pour repousser le Christ, qui était « l’esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « a
511 et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’est d’une
512 e » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’ est d’une double manière : parce qu’elle a abouti — le Messie est venu —
513 uble manière : parce qu’elle a abouti — le Messie est venu — et parce qu’elle a perdu son sens en condamnant celui qu’elle
514 re, fondant ainsi un nouvel Israël. Bien plus, il est lui-même cette mesure, cette Alliance, et ce sont ceux qui adorent en
515 est lui-même cette mesure, cette Alliance, et ce sont ceux qui adorent encore l’ancienne Loi, « déclarée vieillie », qui so
516 encore l’ancienne Loi, « déclarée vieillie », qui sont maintenant les idolâtres. Voilà pourquoi le peuple juif, qui n’a pas
517 uvelle mesure, c’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui le peuple sans mesure, sans limites et sans foyer. Sans e
518 l, cet esprit d’irréconciliable opposition dont s’ était nourrie toute la tradition judaïque. C’est précisément ce sens de la
519 acent aujourd’hui de la détruire74. Il ne saurait être question de retracer ici dans son ensemble l’évolution des éléments c
520 de « l’école du dimanche », tout jeune protestant est nourri aux sources mêmes du judaïsme préchrétien. C’est là sa Fable,
521 ne Samuel appelé trois fois par Jéhovah, — que ce soit histoire ou légende, ces personnages lui sont incomparablement plus f
522 ce soit histoire ou légende, ces personnages lui sont incomparablement plus familiers que les métamorphoses des dieux païen
523 Si bien qu’on a pu dire75 que l’Ancien Testament était la vraie Antiquité des peuples de l’Europe protestante. Mais il y a b
524 Le thème de la vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément la « sensibilité spirituell
525 ple élu » Le simple fait que le calvinisme ait été dès le début une église minoritaire, en butte à la persécution, ne su
526 ciale adoptées par les deux « nations »76. Ce qui est déterminant pour cette analogie, ce qui lui donne son seul sens accep
527 ux cas, la persécution et l’isolement minoritaire sont considérés comme « normaux » : ils expriment le destin spirituel, dan
528 un monde incrédule et rebelle, de ceux que Dieu s’ est « choisis » pour témoins, en tant que collectivité, peuple ou église.
529 de cette « élection » dont ils ont l’assurance d’ être l’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, d
530 nt pas », au nom et par la charge du Seigneur qui est venu, et qui doit revenir. Telle est sans doute la racine authentique
531 Seigneur qui est venu, et qui doit revenir. Telle est sans doute la racine authentique du puritanisme qui apparaît dans le
532 iques. Mais Sombart lui répond que le capitalisme est plus ancien, et qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’est pas ici le l
533 pond que le capitalisme est plus ancien, et qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’est pas ici le lieu de prendre parti entre
534 s ancien, et qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’ est pas ici le lieu de prendre parti entre ces deux explications d’un phé
535 es mettent l’accent sur le fait de l’élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se poursuit même, — et peut-être
536 ant plus d’amertume que cette attitude provocante fut souvent prise à l’étranger pour un trait de caractère germanique. Mai
537 x tentations du succès immédiat et contrôlable, s’ est transformé dans le Nouveau Monde d’une part en volonté de puissance a
538 taine, et transformant en tyrannie absurde ce qui était à l’origine une attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à s
539 de sa chute. Toute la théologie éthique de Calvin est centrée sur la vocation : vocation du « petit troupeau » ou de l’Égli
540 elle de chaque membre de l’Église. Or, Israël qui était le peuple élu, a trahi sa mission et s’est livré à son destin. Sa dis
541 qui était le peuple élu, a trahi sa mission et s’ est livré à son destin. Sa dispersion en est le châtiment. Serait-il donc
542 ion et s’est livré à son destin. Sa dispersion en est le châtiment. Serait-il donc possible de perdre sa vocation ? Et que
543 à son destin. Sa dispersion en est le châtiment. Serait -il donc possible de perdre sa vocation ? Et que devient celui qui la
544 sa vocation ? Et que devient celui qui la trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il la prenne pour idole, refusant d
545 lui qui la trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il la prenne pour idole, refusant d’en reconnaître la vraie fin lo
546 la vraie fin lorsqu’elle lui apparaît incarnée ? Est -il rejeté à tout jamais ? Une vocation est-elle donc « amissible » ?
547 rnée ? Est-il rejeté à tout jamais ? Une vocation est -elle donc « amissible » ? Le refus de l’homme serait-il donc capable
548 est-elle donc « amissible » ? Le refus de l’homme serait -il donc capable de modifier un arrêt éternel, alors que Dieu prédesti
549 avant sa naissance et ses œuvres ? Ce problème n’ est pas gratuit : il touche au cœur de la foi réformée. Or c’est lui just
550 doute ce texte illumine aussi profondément qu’il est possible le mystère dernier d’Israël. « Je demande maintenant : Dieu
551 ieu a-t-il rejeté son peuple ? Non certes, car je suis moi-même israélite, de la postérité d’Abraham, de la tribu de Benjami
552 he : mais les élus l’ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par suite de la faute des enfants d
553 ite de la faute des enfants d’Israël que le salut est parvenu aux païens, afin d’exciter leur propre émulation » (v. 11). E
554 p de votre sagesse : c’est qu’une partie d’Israël est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce que la totalité des païens so
555 urcissement jusqu’à ce que la totalité des païens soit entrée (dans l’Église) ; et ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26)
556 oit entrée (dans l’Église) ; et ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les dons et l’appel de Dieu sont irrévocab
557  » (v. 25-26) … « Car les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum praeclarum ! Voilà une parole
558 l’appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum praeclarum ! Voilà une parole admirable, s’écrie Luther, à pro
559 ». Ainsi la vocation, du moins cette vocation79 — est réellement inamissible, c’est-à-dire ne peut être perdue, même si cel
560 est réellement inamissible, c’est-à-dire ne peut être perdue, même si celui qui en est l’objet s’y oppose de toutes ses for
561 -à-dire ne peut être perdue, même si celui qui en est l’objet s’y oppose de toutes ses forces ! Car sa révolte même se trou
562 peuple de Dieu, en ce sens, après que les gentils seront entrés dedans (l’Église), lors les Juifs aussi se retirant de leur ré
563 is que les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant les enfants aînés en la maison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II,
564 le respect religieux qu’on lui porte. Peut-être n’ est -il pas excessif de voir dans cette passion contradictoire le secret d
565 ore pour l’antisémitisme des hitlériens, qui n’en serait en tout cas que le plus impur exemple. Il reste que la chrétienté non
566 r Israël autrement que ne fait « le monde ». Ce n’ est pas au nom d’intérêts passagers que nous avons à prendre position, ma
567 les thèses des politiques nationalistes. Le drame est bien plus vaste que ne peuvent le concevoir nos polémiques. Et son is
568 de nous seuls, ni d’eux seuls. On dit : les Juifs sont ceci, les Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos richesses, etc.
569 ux seuls. On dit : les Juifs sont ceci, les Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos richesses, etc. Mais de quels biens
570 les Juifs sont ceci, les Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos richesses, etc. Mais de quels biens se préoccupe le cr
571 64. Il faut bien voir que le « racisme » juif n’ est justifié à l’origine que par la vocation spirituelle de ce peuple. Il
572 ue par la vocation spirituelle de ce peuple. Il n’ est pas du tout biologique. Il ne le devient qu’accessoirement, à mesure
573 lles-mêmes. Mais sans doute ce glissement fatal s’ est -il dessiné dès le début, à mesure que l’on codifiait les relations de
574 entils ». On sait à quel point cette codification fut poussée. L’historien juif Josèphe écrit dans sa Réponse à Appion (I,
575 ’est-à-dire appartenant aux familles des prêtres) était tenu par les sacrificateurs. « Et ils n’en épousaient point qui aient
576 cateurs. « Et ils n’en épousaient point qui aient été captives, de peur qu’elles n’aient eu quelque commerce avec des étran
577 et ordre, on le sépare de l’autel, sans qu’il lui soit plus permis de faire aucune des fonctions sacerdotales. » — Il est cu
578 e faire aucune des fonctions sacerdotales. » — Il est curieux de noter que les lois racistes hitlériennes privent de tous d
579 igines : c’est que l’exercice des droits civiques est bien une sorte de « sacerdoce » national. On voit ainsi que l’eugénis
580 rdoce » national. On voit ainsi que l’eugénisme n’ est pas le seul motif de la législation raciste. 65. Sur l’importance ca
581 l à son destin, après la mort de Jésus-Christ. Je suis heureux de pouvoir donner ci-après un développement qui n’avait pas s
582 mon livre. 66. La rédaction des livres mosaïques est attribuée par Wellhausen et son école à des disciples des grands prop
583 on école à des disciples des grands prophètes. Ce serait donc le prophétisme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de la r
584 ue. Ainsi la fin crée ses moyens. Cette hypothèse est aujourd’hui démodée. On revient à la conception ancienne : un chef hé
585 peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent le peuple au culte du vrai Dieu — contre le
586 imples, dans le Livre de Job, dans l’Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’image physique qui, dans les langues s
587 ’image physique qui, dans les langues sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit la déduction abstraite… » (Renan, op
588 as d’autre sens que de désigner l’Incarnation qui est son centre, au-delà d’elle-même. Tolle Christum e scripturis, quid am
589 er, 1934, p. 43. 74. Sitôt que la mesure cesse d’ être transcendante, devient humaine, contingente et partielle, et n’étant
590 , devient humaine, contingente et partielle, et n’ étant plus totale, se veut encore totalitaire, on a l’État-nation-Police de
591 e de type fasciste ou stalinien. Bien entendu, il serait absurde de rendre Israël responsable de ce qui n’est que « profanatio
592 absurde de rendre Israël responsable de ce qui n’ est que « profanations » de la notion de mesure totalitaire. 75. Cf. Ram
593 lliance la postérité d’Abraham : vu que le propos était nommément et spécialement d’icelle vocation. » (Commentaires, sur Rom
6 1937, Articles divers (1936-1938). Luther, Traité du serf arbitre (1937)
594 her inconnu Dire qu’on ignore Luther en France serait exagérer, mais dans le sens contraire de celui qu’on imagine. Car on
595 on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut , qui il est. Certains ont parcouru les Propos de table, présentés au
596 sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est . Certains ont parcouru les Propos de table, présentés au public franç
597 ois grossières, de platitudes, de contradictions. Est -ce avec cela que s’est faite la Réforme ? D’autres, moins exigeants,
598 itudes, de contradictions. Est-ce avec cela que s’ est faite la Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à souten
599 s exigeants, n’hésitent pas à soutenir que Luther fut un démagogue, un exploiteur de l’éternel ressentiment de la race alle
600 suivante en donne une juste idée : « En somme, qu’ est -ce que Luther ? Un moine qui a voulu se marier. » J’extrais cette déc
601 la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste d’insister sur la grande valeur des travaux de quelques spécial
602 ic français en état d’infériorité assez grave, ne fût -ce que sur le plan de la culture générale. Car ignorer ou méconnaître
603 lan théologique, ou mieux : dans la totalité de l’ être , revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’humain
604 ord à un pamphlet, encore que son volume matériel soit bien écrasant pour le genre. Mais on s’aperçoit sans tarder que la di
605 c Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée), n’ est en fait que le support apparent d’une réflexion de plus vaste envergu
606 s de l’humaniste et du sceptique que se vantait d’ être Érasme, Luther en vient, de proche en proche, à ressaisir et reposer
607 les de la Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul ; opposition de cette justice de Di
608 action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en for
609 ont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en forme, c’est qu’ils ne constituent pas un système, au
610 rès étroitement les uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et perpétuelle question que nous posen
611 ble. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renvoient to
612  ? » — Si tu le crois, si tu as reçu la foi, il n’ est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luther, ni dans sa
613 que les grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simplement connues !) par nos contemporains, même chrét
614  Paix aux hommes de bonne volonté », tous ceux-là sont , en fait, avec Érasme et son armée de grands docteurs de tous les siè
615 un point de vue purement esthétique, ces qualités sont assez rares, et chez Luther assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui
616 rantes, pour qu’un lecteur qui refuse l’essentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage
617 ment (comme dirait le jargon d’aujourd’hui), tout est fait, dans notre Traité, pour heurter de front le lecteur incroyant,
618 s Apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’ est pas proprement luthérien, mais que Luther est obligé d’utiliser pour
619 i n’est pas proprement luthérien, mais que Luther est obligé d’utiliser pour débrouiller et supprimer les faux problèmes où
620 èce de considération psychologique. (Un tel homme est bien trop vivant pour faire de la psychologie ; trop engagé dans le r
621 nisme, de l’Église. L’humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une absurdité, une contradiction dans les terme
622 inévitable, et qui consiste à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais le sérieux théologique est chose trop rare, et
623 est « déterministe ». Mais le sérieux théologique est chose trop rare, et pour beaucoup trop difficile à concevoir, pour qu
624 un simple rappel de l’ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dialogue d’une
625 us refusons de jouer si, d’avance, le vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos exploits ! Un
626 es règles du jeu ? Qui t’a fait croire que ta vie était une partie à jouer entre toi et le monde, par exemple ; ou encore ent
627 J’ai besoin de le croire pour agir. L. — Mais qu’ est -ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi qui agis ? Ou n’es-tu pas toi-même a
628 croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est -ce vraiment toi qui agis ? Ou n’es-tu pas toi-même agi par de puissan
629 -ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi qui agis ? Ou n’ es -tu pas toi-même agi par de puissantes forces sociales, historiques et
630 C. M. — Il me suffit de vouloir l’affirmer. L. — Soit , c’est une hypothèse de travail… Pour moi, je crois que Dieu connaît
631 s actions passées, présentes, futures ; car elles sont dans le temps, Dieu dans l’éternité qui est avant le temps, qui est e
632 lles sont dans le temps, Dieu dans l’éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regar
633 Dieu dans l’éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu, donc, « tout
634 té qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu, donc, « tout est accompli », dep
635 encore après lui. Au regard de Dieu, donc, « tout est accompli », depuis la mort du Christ sur la croix. Non seulement prév
636 les fais librement, et tu viens me dire qu’elles sont prévues ! Et prévues par un Dieu éternel, qui alors se joue de moi in
637 it… Mais tu affirmes que si Dieu prévoit tout, tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’est plus la peine de faire aucun e
638 it tout, tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’ est plus la peine de faire aucun effort. C’est peut-être mal raisonner. S
639 ’est peut-être mal raisonner. Si ton effort aussi était prévu ? Pourrais-tu ne pas le fournir ? Et si tu décidais : « je suis
640 s-tu ne pas le fournir ? Et si tu décidais : « je suis , donc Dieu n’est pas ! »32 qui t’assurerait que cet acte de révolte é
641 rnir ? Et si tu décidais : « je suis, donc Dieu n’ est pas ! »32 qui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à l’éterne
642 pour toi ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’ est pas la supprimer en fait. Mais c’est peut-être se priver de son secou
643 ination : l’une au salut, l’autre à la damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au temps sans fin, et ref
644 au salut, l’autre à la damnation. Être damné, ne serait -ce pas justement être rivé au temps sans fin, et refuser l’éternité q
645 damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au temps sans fin, et refuser l’éternité qui vient nous délivrer
646 nous délivrer du temps ? C. M. — Mais mon temps est vivant, et plein de nouveauté, de création ! Ton éternité immobile, c
647 maginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouv
648 e nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’ est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’éternité est quelque ch
649 e mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’éternité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’elle n’est pa
650 d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’elle n’ est pas au contraire la source de tout acte et de toute création, une inv
651 t attachée à notre chair, à notre temps où elle s’ est constituée, soit capable de concevoir ce paradoxe ou ce scandale d’un
652 re chair, à notre temps où elle s’est constituée, soit capable de concevoir ce paradoxe ou ce scandale d’une éternité seule
653 ystère plus profond que notre vie, et la raison n’ est qu’un faible élément de notre vie. C’est un mystère que le croyant pr
654 e paradoxe et ce mystère : croire que « l’Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu — peut aussi tout
655 en un instant aux yeux de l’homme, sans que rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il décide ou de ce qu’il déci
656 ? Car l’Éternel ne connaît pas de « temps », il n’ est pas lié comme nous à une succession. Mais au contraire, nos divers te
657 emps et successions procèdent de l’Éternel et lui sont liés : nous venons de lui, nous retournons à lui, il est en nous lors
658 s : nous venons de lui, nous retournons à lui, il est en nous lorsque l’Esprit dit : la Parole dans notre cœur. Quelle étra
659 n nous ferait croire qu’une décision de l’Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui définit notre
660 uand c’est elle seule qui définit notre présent ! Est -ce que nos objections « philosophiques » et notre crainte du « fatali
661 as rien prouvé. L. — On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on l’accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pur
662 une fois acceptés le Credo et son fondement, qui est la Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’Écriture, — or,
663 it et attestée par l’Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l’opinion de Luther n’est pas suj
664 ui-même, — il me paraît que l’opinion de Luther n’ est pas sujette à de sérieuses objections. Et la démonstration purement b
665 ’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul l’a formulé avant toute « t
666 t « extrémisme » évangélique, que les sophistes n’ étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer
667 voulait se complaire Érasme. Le problème du salut est un problème de vie ou de mort. Or il est seul en cause pour le théolo
668 du salut est un problème de vie ou de mort. Or il est seul en cause pour le théologien. Et tout est clair lorsque l’on a co
669 il est seul en cause pour le théologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris que Luther ne nie pas du tout notre facu
670 t qu’elle puisse suffire à nous obtenir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie, littérature
671 ut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie, littérature et scolastique. Il n’en reste pas moins qu’a
672 mais dans un plan où elle reste insoluble. Érasme était encore catholique ; son humanisme mesuré l’empêche de voir le vrai tr
673 r au nihilisme qui l’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme c
674 regagner la dignité suprême de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’e
675 e luthérien et du paradoxe nietzschéen ne saurait être ramenée à quelque influence inconsciente, encore bien moins à une coï
676 cale de la vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de l’homme divinis
677 s adorons une Providence dont la Parole vivante s’ est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 30. À la proposition
678 connais aucun de mes livres pour adéquat, si ce n’ est peut-être le de servo arbitrio et le Catéchisme. » 31. Luther averti
679 raductions françaises donnent en général : « Nous serons transformés en un instant, en un clin d’œil… » 34. Modiculum et min
7 1937, Articles divers (1936-1938). L’Acte comme point de départ (1936-1937)
680 s sentons repoussés par quelque chose qui ne peut être facilement nommé, parce que cela affecte, peut-être, notre tout. Nos
681 rrespondances avec notre situation concrète. Ce n’ est pas leur abstraction qui nous inquiète, loin de là, c’est bien plutôt
682 et de celle de l’esprit dans ce monde. L’esprit s’ est dégagé des coordonnées du moment, c’est dire que son exercice n’engag
683 r diminués dans notre énergie totale. La pensée n’ est plus le moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à ses dépens.
684 taphore et dire que la pensée dont nous souffrons est une pensée débrayée. Un moteur débrayé n’en ronfle que mieux, d’aille
685 il tourne si vite que toute tentative d’embrayage serait immédiatement fatale à la machine, et ferait voler en éclats les engr
686 t de diminution qu’elle favorise en nous : ce mot serait celui d’inactualité, entendu, non pas au sens temporel, mais au sens
687 nous dira que, cependant, si le désordre du monde est réel, il se peut qu’il provienne, précisément, d’actualisations parti
688 elles des philosophies que nous repoussons ? Nous serions mal venus à le nier. Si le monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’
689 s’il y a du désordre, c’est que ces philosophies sont tout de même moins inopérantes que souvent elles ne voudraient l’être
690 ins inopérantes que souvent elles ne voudraient l’ être . Mais, chose étrange, la raison pour laquelle le désordre n’est pas t
691 se étrange, la raison pour laquelle le désordre n’ est pas total, c’est la raison même de ce désordre : c’est la rupture ent
692 thérapeutique que nous voudrions proposer, et qui serait un traitement préventif par l’actualisation, c’est-à-dire par l’effor
693 rtifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté sont déjà présents, avant toute analyse, dans le sentiment que nous dision
694 faire comprendre de quoi il s’agit ? Nous allons être obligés ici d’avoir recours à une méthode rigoureusement indirecte, e
695 s bien des « choses », de l’impersonnel.) L’acte, étant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesser d’être acte, être posé en
696 ant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesser d’ être acte, être posé en face de l’acteur. On ne peut pas photographier un
697 t au sujet, ne peut pas, sans cesser d’être acte, être posé en face de l’acteur. On ne peut pas photographier un acte, et do
698 Quant à la scène représentée par la photo, elle n’ est plus qu’un objectif, inactuel en soi, et problématique. Qu’on nous pe
699 de fournir la matière d’un problème, données qui sont par là même objectives, et celles sur lesquelles il faut que l’esprit
700 e quelconque ». L’acte, tel que nous l’entendons, est évidemment une donnée de ce deuxième type, la donnée par excellence.
701 cte ne pouvant intervenir qu’a posteriori, elle n’ est , en réalité, qu’une réflexion sur les effets de l’acte. Si, au moment
702 oler par la certitude que l’analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas sauter. Et c’est peut-être cela précisémen
703 le la proximité de la réalité créante. Force nous est de reconnaître qu’un tel discours, dans l’état de notre philosophie,
704 ion. » Nous dirions en d’autres termes : l’acte n’ est pas un problème, mais une donnée initiale, le seul donné qui se donne
705 donne à soi-même. Or, cette donnée, d’une part, n’ est pas réductible à ce qui la précède, d’autre part, n’est pas épuisée p
706 s réductible à ce qui la précède, d’autre part, n’ est pas épuisée par l’analyse de ses effets. L’acte est à la fois créateu
707 t pas épuisée par l’analyse de ses effets. L’acte est à la fois créateur, et transcendant à sa création. Il est créateur en
708 fois créateur, et transcendant à sa création. Il est créateur en ceci qu’il introduit dans les choses un rapport nouveau i
709 eau instituant une situation irréversible ; et il est transcendant parce que dans ce rapport nouveau on ne trouvera rien d’
710 dans ce contact entre l’éternité et le temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’on ne puisse rien dire des ré
711 Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant l’ être vivant et le confondant un instant avec l’objet de son désir. On comp
712 leurs fort divers, mais dont l’exercice se trouve être lié à une division préalable de notre être, par exemple à une objecti
713 trouve être lié à une division préalable de notre être , par exemple à une objectivation du corps — de mon corps — ou à une o
714 ter » l’activité spécifique de la pensée. L’acte, étant essentiellement l’affirmation simultanée de l’un et du divers, affirm
715 en langage rationnel, tout système philosophique sera amené, par son jeu logique, à l’éliminer ou à la disqualifier. À moin
716 t ses effets. C’est l’acte lui-même qui se trouve être transitif et novateur, sans qu’il y ait pour cela de « médiation ». O
717 l n’y a de transition que par l’acte, mais l’acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de ses effe
718 uand on descend au fond de la notion de force, on est obligé de faire appel à l’idée de choc, de rupture, en un mot de viol
719 pas d’évolution créatrice sans révolution. L’acte sera donc agonique. D’autre part, l’acte implique un élan vers, pour repre
720 ur reprendre l’expression du Dr Minkowski. L’acte est l’éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi intention. Il
721 acte est l’éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi intention. Il n’est pas seulement agonique, mais encore or
722 sion orientée ; il est donc aussi intention. Il n’ est pas seulement agonique, mais encore ordonnateur. C’est un conflit et
723 umière des ténèbres. Son caractère dichotomique n’ est pas isolé de son caractère agonique. Ce n’est pas à dire que la lumiè
724 e n’est pas isolé de son caractère agonique. Ce n’ est pas à dire que la lumière et les ténèbres soient données avant l’acte
725 e n’est pas à dire que la lumière et les ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il ne serait pas créateur, c’est-à-di
726 bres soient données avant l’acte, car sinon il ne serait pas créateur, c’est-à-dire qu’il ne serait pas acte. L’acte n’a qu’un
727 il ne serait pas créateur, c’est-à-dire qu’il ne serait pas acte. L’acte n’a qu’un point d’application, le chaos, la discorde
728 , le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est l’ordre. L’acte est si étroi
729 ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’ est pas le désordre, c’est l’ordre. L’acte est si étroitement lié à ses e
730 , ce n’est pas le désordre, c’est l’ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait humainement le sépar
731 umainement le séparer du premier d’entre eux, qui est l’affirmation de la personnalité. Nous définissons la personne comme
732 ntue encore la tension. Le nouvel état du conflit est plus aigu que l’ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère, la pers
733 plus. C’est pourquoi les époques de conciliation sont des époques de décadence. Le salut n’est jamais dans le repli, dans l
734 liation sont des époques de décadence. Le salut n’ est jamais dans le repli, dans le refus du conflit concret. L’invention d
735 t permet celle du « robot » d’affaires. L’autisme est un fléchissement de la personnalité. D’une manière générale, l’acte p
736 joie créatrice, une conscience de libération qui est la jouissance spécifiquement humaine. De l’autre côté, on trouvera un
737 n même de la plus grande docilité de l’inerte. Il est plus difficile d’échapper au prestige du positivisme et du néo-pragma
738 éo-pragmatisme qu’à celui du moulin à prières. Il est plus difficile de maintenir sur le qui-vive un empire qu’une cité étr
739 orientation, autrement dit de l’acte impossible, sont des exemples de ce fléchissement. La tentation de l’acte gratuit n’es
740 e fléchissement. La tentation de l’acte gratuit n’ est qu’une forme moderne de la tentation de l’inerte. C’est un vertige de
741 idemment la connaissance. Non seulement la pensée est acte, mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans l’acte. Ce qui
742 ance. Non seulement la pensée est acte, mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans l’acte. Ce qui a pu tromper sur ce
743 er sur ce point, c’est précisément que, la pensée étant la plus immédiate des mises en ordre, la raison est tentée de confond
744 t la plus immédiate des mises en ordre, la raison est tentée de confondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet, avec le dy
745 son est tentée de confondre cet ordre même, qui n’ est qu’un effet, avec le dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre
746 , qui n’est qu’un effet, avec le dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de la pensée créatrice, c’est cela que nou
747 t comme monument ou système de règles, ne saurait être qu’un aspect provisoirement favorable du chaos. La vérité scientifiqu
748 rement favorable du chaos. La vérité scientifique est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est
749  ; la science-faite rejoint le donné. Mais cela n’ est vrai que pour le savant seulement au moment où il crée ; pour les aut
750 ’un rôle d’exécuteur. Remarquons que la machine n’ est que le prolongement d’un schéma mathématique, et qu’elle est elle-mêm
751 prolongement d’un schéma mathématique, et qu’elle est elle-même prolongée par la rationalisation. Nous avons là un exemple
752 tation. Car, d’une part, renoncer à la machine ce serait en quelque sorte renoncer au sens même de l’activité humaine ; mais,
753 ; mais, d’autre part, la domination de la machine serait le résultat fatal du renoncement à la valeur éthique de la science en
754 ). Un troisième exemple de tension et d’acte nous est fourni par l’homme considéré du point de vue social. D’un côté, nous
755 riser son ressort. Remarquons que cet attachement est la marque de l’humanité. Mais, d’autre part, l’homme n’existe personn
756 L’homme concret, l’homme vivant, l’homme en acte est l’affirmation d’une tension permanente entre ces deux pôles de l’amou
757 fort et de la pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le plus humain. Mais comment va se présent
758 Mais comment va se présenter à nos yeux ce qui n’ est pas immédiat à l’acte ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à ni
759 r à nos yeux ce qui n’est pas immédiat à l’acte ? Est -ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de toute média
760 immédiat à l’acte ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de toute médiation ? Assurément l’évidence d
761 la réalité des résistances à cette activité. Ce n’ est que dans certains domaines très étroits de la pensée que ces résistan
762 nes très étroits de la pensée que ces résistances sont assez nettement brisées pour conférer à la création issue de l’acte c
763 rme d’éternité. Partout ailleurs, les résistances sont étroitement mêlées à toutes les manifestations d’activité. La médiati
764 prêtent mieux au personnalisme social, mais ce ne sont jamais que des résistances. Entre les deux pôles de la tension, il n’
765 que le second affirme la transcendance de l’acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humaine ne saurait donc considérer t
766 d’appui et garde une participation avec ce qui n’ est pas personnel. Mais cette nécessité ne reprend sa valeur que dans la
767 e qui ne signifie pas du tout que la pensée doive être soumise à l’action — bien au contraire ! — mais que le risque de pens
768 ien au contraire ! — mais que le risque de penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les papiers posthumes d’Arnaud
769  Le seuil qui sépare le prélogique du logique, où est -il donc ? Le point est d’importance car il nous éclairera un peu sur
770 prélogique du logique, où est-il donc ? Le point est d’importance car il nous éclairera un peu sur la nature intime de l’a
771 intime de l’acte créateur, dans la mesure où elle est saisissable. En effet, de tous les seuils irrationnels que l’homme pu
772 cte de penser, au sens plein et cartésien du mot, soit infiniment plus difficile et plus rare qu’on ne se figure communément
773 Avant de chercher à répondre à cette question, il est indispensable de marquer très fortement l’influence qu’exerce ce seui
774 ine et, probablement, sur la vie en général. Cela est d’autant plus nécessaire que de même que la science a longtemps refus
775 on ou de création intellectuelle. Notre science n’ est à l’aise que dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’ell
776 connaît que du probable et, en tant qu’acte, elle est l’improbabilité essentielle. Paradoxe que M. Meyerson a décrit sous l
8 1937, Articles divers (1936-1938). Formons des Clubs de presse (30 janvier 1937)
777 financières ou des partisanneries politiques qui est celui de la presse française, rend à peu près impossibles une documen
778 une information sincère. Le procès de la presse n’ est plus à faire. Sa réforme pose tant de problèmes et entraîne de telles
779 es dangers d’une information d’État : Tass ou DNB sont aussi graves que celles d’un monopole privé) qu’il est à craindre qu’
780 ussi graves que celles d’un monopole privé) qu’il est à craindre qu’elle ne puisse s’accomplir isolément. Seul le redressem
781 ujourd’hui l’argent, libérera l’information. Ce n’ est qu’en attaquant l’ensemble des trusts qu’on atteindra celui des journ
782 préparer et d’accélérer cette réforme nécessaire, est de fournir dès à présent à tous ceux qui en éprouvent le pressant bes
783 e la grande presse imprimée. Le principe Ce sont les mêmes procédés techniques (imprimerie, grand tirage, publicité, c
784 i font aujourd’hui son servage. « L’imprimé » qui était , il y a trente ans, synonyme dans l’opinion populaire, de vérité, est
785 ns, synonyme dans l’opinion populaire, de vérité, est devenu pour le public, synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant q
786 ge. Il s’agit en attendant que la question puisse être attaquée et résolue de front — de tourner la difficulté en remontant
787 e cette nouvelle forme d’informations. Le travail est centralisé par un « Comité central des informations », siégeant à Par
788 nitive. Il convient de préciser que le bulletin n’ est pas distribué. Il est adressé personnellement et confidentiellement a
789 préciser que le bulletin n’est pas distribué. Il est adressé personnellement et confidentiellement au président responsabl
790 lub qui le communique à ses adhérents. Ceux-ci ne sont pas de simples lecteurs passifs, mais des membres actifs, qui partici
791 ontinuera à leur fournir la presse. Elle pourrait être une sorte d’école permanente des lecteurs de journaux ; 3° une partie
792 ublient pas que la réforme organique de la presse est le but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit, une docume
793 se sur la structure et le mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les modifications dans la commandite, la directio
794 ction, la tendance, etc. des journaux existants ; soit par des études plus générales sur les problèmes financiers, professio
795 de duperie, une presse truquée. L’esprit Il est évident que la portée d’une telle entreprise dépend de la valeur prof
796 ment des clubs de presse. Les « Clubs de presse » sont fondés et dirigés par Denis de Rougemont et R.-Philippe Millet de L’
797 ls appartiennent, dans une entreprise qui ne veut être qu’une œuvre stricte d’information, à l’exclusivité de tout commentai
798 bs de presse », à défendre les principes qui leur sont communs : primauté de la personne humaine, respect de la vérité et lu
799 c des camarades venant d’autres organisations. Ce sera certainement par ailleurs l’occasion d’un échange de vues qui ne peut
800 leurs l’occasion d’un échange de vues qui ne peut être que fructueux pour tous. Nous faisons un appel pressant auprès de tou
801 ans leur localité, si éloignée, si peu importante soit -elle, le club de presse dont ils seront les instigateurs devienne rap
802 importante soit-elle, le club de presse dont ils seront les instigateurs devienne rapidement un organisme craint et respecté.
803 sée par le papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de revenir à une forme antique de tran
804 e film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de revenir à une forme antique de transmission : l’informatio
9 1937, Articles divers (1936-1938). À qui la liberté ? (5 mars 1937)
805 lus ce que signifie culture. C’est que la culture est en pleine crise, et que cette crise ne sévit plus seulement dans les
806 s de la nation. Je dis que la crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est la
807 fait le trottoir. Et que c’est la politique qui s’ est chargée de réglementer à sa manière la prostitution des mots-clés, de
808 manifeste intitulé Au service de l’esprit, où il est question à chaque page de défendre la liberté. Dans l’état présent du
809 ngage, de la culture, et de la politique, on peut être à peu près certain que ces deux messieurs défendent en réalité le con
810 ciste. On dit que les mots n’ont plus de sens. Ce serait trop beau, ce serait trop facile, ce serait enfin la trêve des démago
811 mots n’ont plus de sens. Ce serait trop beau, ce serait trop facile, ce serait enfin la trêve des démagogues. En réalité, les
812 s. Ce serait trop beau, ce serait trop facile, ce serait enfin la trêve des démagogues. En réalité, les mots prennent tous les
813 celui de l’usage courant. (Staline dit : « Je ne suis pas un dictateur » ; Mussolini fait la conquête de l’Éthiopie au nom
814 si on les qualifiait de fascistes. Alors qu’elles sont , en fait, l’un et l’autre. La politique actuelle s’occupe bien moins
815 rité à droite. Mais la surenchère politicienne en est venue à ce point que, par une double démagogie, on dit aujourd’hui li
816 itique a prostitué le langage. La culture n’a pas été assez forte pour interdire cette prostitution. Il en résulte que la c
817 erait encore à écrire, à parler, si par hasard on est de bonne foi et si de plus on a des choses précises à exprimer. Je ré
818 blème tout d’abord. Écrivons pour montrer qu’il n’ est pas de problème politique plus urgent que celui des mots ; et qu’il n
819 tique plus urgent que celui des mots ; et qu’il n’ est pas de problème culturel qui ne dépende de la politique. Cela revient
10 1937, Articles divers (1936-1938). Romanciers publicitaires ou la contagion romanesque (13 mars 1937)
820 rendrai rien à personne en affirmant que le roman est le plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’entends celui qui
821 et la folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’ étaient suicidés après Werther ; ou qui entreprennent de gagner un million au
822 outes les sous-préfectures. Ce pouvoir contagieux est , bien sûr, tout à l’honneur des écrivains qui savent le communiquer à
823 r le subir autrement qu’en imagination. Et rien n’ est plus légitime, voire désirable, que cette contagion pratique de l’art
824 e, que la vision banale de la vie quotidienne. Il est très bon que le romancier et ses romans agissent, de cette manière in
825 teurs marxistes.) Et, cependant, leur influence n’ est pas moins grande, sur la vie privée du lecteur. Ils ne veulent rien d
826 ment de la lectrice, car en France, paraît-il, ce sont les femmes qui lisent et qui se passionnent pour les romans. Ainsi, à
827 tructif, le « romancier à succès », de nos jours, est devenu un simple reflet de la conscience bourgeoise moyenne. Il ne fa
828 se, pour un propagandiste. Cette crainte — qui ne fut jamais celle des grands artistes — fait de notre romancier, tout simp
829 , le propagandiste des goûts de sa classe. Rien n’ est plus dangereusement tendancieux qu’un écrivain qui n’ose pas affirmer
830 es classes possédantes et de leurs coutumes. Il n’ est que de voir l’importance démesurée que nos romanciers attachent à la
831 ce que cela porte à conséquences, ce romancier s’ est condamné lui-même, en fait, à ne plus être que l’agent de publicité —
832 ncier s’est condamné lui-même, en fait, à ne plus être que l’agent de publicité — plus ou moins bénévole — des fournisseurs
833 urs loisirs improductifs. Une telle crise ne peut être résolue par des mesures de propagande, ni par des lois plus ou moins
834 C’est toutes les bases de la culture actuelle qui sont en crise. Faites-nous des œuvres qui affirment, qui combattent, qui m
11 1937, Articles divers (1936-1938). Vers une littérature personnaliste (20 mars 1937)
835 a littérature française de Thibaudetk : celui qui est consacré à l’après-guerre. II est vrai que beaucoup de noms y sont om
836 etk : celui qui est consacré à l’après-guerre. II est vrai que beaucoup de noms y sont omis, que beaucoup de nos gloires y
837 ’après-guerre. II est vrai que beaucoup de noms y sont omis, que beaucoup de nos gloires y sont traitées cavalièrement (Maur
838 e noms y sont omis, que beaucoup de nos gloires y sont traitées cavalièrement (Maurois-Mauriac : « manque de substance, d’ép
839 toires de leur milieu… »). On a dit : le chapitre est bâclé. Je me demande si l’époque méritait mieux. Époque bâclée, elle
840 ration : elle ignorait apparemment que la liberté est une conquête, et non pas une facilité. Tout concourait d’ailleurs à f
841 e libération érotique, des mécènes américains… Ce fut la grande Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de
842 e que c’était commode, et parce que les critiques sont admirablement disciplinés. (D’ailleurs, tous se connaissent trop bien
843 tiques et éditeurs ; pratiquement, la franchise n’ est pas possible.) De ces années, et de celles de la crise qui les suit,
844 atine rassurante. Quant au roman contemporain, il est curieux que Thibaudet, son premier historien, ne tente d’en sauver qu
845 de siècle que meublera la génération de 1914. Il est caractéristique que le livre de Thibaudet se termine sur une note pes
846 duire celle de la société. Tous ces romans-cycles sont , en effet, des procès-verbaux de dissolution du monde bourgeois : de
847 se défont, les classes se mêlent, les propriétés sont vendues aux enchères ou rachetées par une coucherie, les fils renient
848 Tous les chefs-d’œuvre du genre, au xixe siècle, étaient issus d’une société solidement établie, où les types étaient fixes et
849 us d’une société solidement établie, où les types étaient fixes et stables, et les relations codifiées, tyranniques : il y avai
850 quand il n’y a plus de convention ? Lorsque tout est brouillé, lorsque tout est permis ? Que décrire, sinon ce qui s’écrou
851 vention ? Lorsque tout est brouillé, lorsque tout est permis ? Que décrire, sinon ce qui s’écroule — et cela ne peut pas do
852 e peut pas donner les éléments d’un art, si l’art est une construction. Il semble bien que la littérature la plus récente s
853 que nous assènent les Céline, Aragon ou Plisnier sont bien plus des pamphlets que des romans, des essais illustrés d’exempl
854 erniers livres d’Henri Petit et de Marius Richard soient promis à des succès moins tapageurs, mais plus profonds. Nous avons à
12 1937, Articles divers (1936-1938). C’est jeune (10 avril 1937)
855 C’est jeune (10 avril 1937)l L’ironie est parfois la meilleure des prudences. C’est la conclusion que je tire d
856 t sans doute approuvée in petto… Mais M. Vandérem est réaliste : il trouve que j’en prends à mon aise et que je néglige un
857 lige un peu cavalièrement les contingences. Si j’ étais plus avancé dans la vie — écrit-il —, je me rendrais compte de tous l
858 pour la critique un chambardement de ce genre. Ce serait toute une série de notions à acquérir, d’opinions à se former, de cla
859 nt des mois. On ne saurait mieux dire que le mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si l’on en doutait encore, c’est M
860 tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est supérieur à sa tactique ». Faut-il être jeune, tout de même, et peu a
861 e M. Amoux est supérieur à sa tactique ». Faut-il être jeune, tout de même, et peu avancé dans la vie, pour s’ébahir, comme
862 ant cela ? Dans quelle illusion ai-je vécu ? Ce n’ est rien d’écrire, de faire une œuvre, de croire qu’on a quelque chose à
863 consister ? Aucune idée. L’angoisse m’étreint. Je suis comme un enfant devant le mystère de « la vie… ». Profitant de mon in
864 s ce journal, une révolution. Quand les clercs en sont arrivés — et l’élite — à subordonner leur mission à la « tactique » d
13 1937, Articles divers (1936-1938). Journal d’un intellectuel en chômage (fragments) (15 avril 1937)
865 tuel en chômage (fragments) (15 avril 1937)m J’ étais chômeur depuis trois mois. On m’offrait un abri quelque part, une mai
866 tte ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concierges, des lieux-sombres-et
867 nt, d’affirmer que cela peut se faire, que cela s’ est fait, qu’il y a là un bonheur… 22 septembre 1934. À… (Gard) Arrivés h
868 attendais, ni ce que j’ai pu rêver de ce pays. Il est très pauvre, sec et lumineux. Toutes les nuances du gris, herbes, pie
869 supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a été débarras
870 ’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a été débarrassé du tapis. J’ai dressé ma table sur des tréteaux. Il ne res
871 eminée — vingt-deux pièces dûment recensées — ont été les remplacer. Seul vestige des splendeurs bourgeoises de ce salon :
872 oques de verre taillé. Fascinant, ce lustre. Nous sommes éreintés et couverts de poussière. Mais on va pouvoir respirer. 25 se
873 d’emballage. Pas un de ces petits visages qui ne soit beau et fin mais incroyablement crasseux. Vers la gare, il y a bien u
874 un nuage… Cela tend à confirmer un soupçon qui m’ est venu en maintes autres régions de la France : les provinciaux ignoren
875 l’éducation primaire, bienfaisante en principe il est vrai, mais tristement abstraite, étroite, appauvrissante en fait. Je
876 ois le chômage s’étendre et s’installer, comme se sont installés dans ces villages malsains et mal soignés la tuberculose, l
877 ir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chose est claire : faire des enfants, dans les conditions actuelles, c’est défi
878 je constate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il est , la morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère
879 rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’ est guère que le rêve des vieux célibataires assez fortunés, ou ascètes.
880 terminé les vendanges, et la récolte des figues d’ été . (Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus petites et toujours vert
881 « œillades ». C’est leur gros raisin bleu. Nous y sommes allés hier au soir. Des hauteurs, on voyait la plaine rose et violacé
882 , déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur la terrasse, au pied d’un grand micocoulier. Bientôt un chi
883 s, où elle travaille jusqu’à la nuit tombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais la fermière nous reçoit comme une « da
884 Pensez donc, deux femmes seules ! — C’est que je suis chômeur moi-même, Madame… » Elle sourit à son tour, de l’air de dire 
885 rit à son tour, de l’air de dire : Oh, vous, ce n’ est pas la même chose. Elle a sans doute entendu parler de nous. Rien à f
886 s doute entendu parler de nous. Rien à faire : je suis un « monsieur ». La fille rentre : une forte femme, environ 35 ans, u
887 Monsieur, sans indiscrétion ? » Je dis mon nom. —  Est -ce que vous écrivez des articles ? J’en ai lu signés de ce nom-là. Et
888 m’étonne guère, s’agissant de protestantes. Ce ne sont pas des bourgeoises, certes, et pourtant elles en sont encore à estim
889 pas des bourgeoises, certes, et pourtant elles en sont encore à estimer que chômeur est synonyme de vagabond dangereux. Elle
890 urtant elles en sont encore à estimer que chômeur est synonyme de vagabond dangereux. Elles font partie des « travailleurs 
891 ont partie des « travailleurs » et pourtant elles sont propriétaires. Je vois en elles un type très classique de Françaises 
892 ur caricature de société. — Simard, le jardinier, est à demi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on le lui di
893 iété. — Simard, le jardinier, est à demi métayer. Est -ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on le lui dise. Il s’estime fort
894 er, est à demi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on le lui dise. Il s’estime fort au-dessus d’un mineur retrai
895 etraité, par exemple. Les instituteurs d’A… ? Ils sont du peuple. Oui, mais bourgeois par leur profession. Et les Calixte ?
896 te traitera les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de statistiques et de relations numériques (sal
897 ique. Il ne part pas de ce que les hommes veulent être , ni de la conscience globale qu’ils ont de leur état (et c’est pourta
898 e « mystification ». Il part de ce que les hommes sont malgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la Statistique. E
899 ssus non seulement des mesures techniques, ce qui serait parfaitement légitime, mais une morale, un art et une métaphysique !
900 étaphysique ! Problème de la politique actuelle : sera-t -elle l’affaire du meilleur statisticien, ou au contraire de l’homme l
901 ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle est vécue et voulue par les hommes réels et concrets, ou bien sur la réal
902 et concrets, ou bien sur la réalité telle qu’elle est chiffrable, inévitable, impersonnelle ? 2 novembre 1934 Minuit. J’ai
903 ssourdis ; de ces veillées fiévreuses, assiégées. Est -ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dor
904 évreuses, assiégées. Est-ce que je les regrette ? Est -ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’he
905 t-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’ est pas toujours l’heure des mauvaises nostalgies. ? Qui pourrait nous éc
906 re une histoire des inventions de l’insomnie ? Ne serait -ce pas tout simplement l’histoire de la naissance de nos démons ? La
907 penserais-je, ici, d’humain, d’actif ? Ici où je suis sans prochain, à cette heure ou mes frères (?) les hommes sont plus é
908 chain, à cette heure ou mes frères (?) les hommes sont plus éloignés que jamais ? « La nuit est faite pour dormir », me disa
909 hommes sont plus éloignés que jamais ? « La nuit est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ordre qui m’avait surp
910 voisine. Elles se plaignent du froid. Le fourneau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus
911 is qui me paraît propre et sobre. La mère Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les pieds découverts,
912 bien sa blouse noire aussi. Elle me dit qu’elle a été assez mal. On devait lui retirer son linge toutes les deux heures. Qu
913 nde, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du poulet, elle n’y
914 poulet, ça lui a fait de l’avantage. Voyez ! Ce n’ est pas vrai que la viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte
915 avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire une lessive
916 her sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les récolter. « Voyez-vous ! c’est
917 » 11 novembre 1934 D’une manière générale, ils ne sont pas conscients de porter la responsabilité des accidents qui leur arr
918 le détail. C’est assez sage dans l’ensemble. Ils seraient moins pauvres, moins malades, etc., s’ils étaient plus « pratiques »
919 eraient moins pauvres, moins malades, etc., s’ils étaient plus « pratiques » comme on dit dans la bourgeoisie — où l’on s’imagi
920 l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouillards et pleins de resso
921 ds et pleins de ressources mystérieuses. Mais ils seraient moins dignes aussi. Leur dignité est de subir sans se tourmenter. Ils
922 ais ils seraient moins dignes aussi. Leur dignité est de subir sans se tourmenter. Ils ne se mettront jamais dans des états
923 de dépend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent
924 nt la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il faut, elles qui travaillent, elles qui déc
925 ent. Pour les hommes, c’est tout autre chose. Ils sont éloquents et naïfs, revendicateurs et inefficaces. La plupart ne font
926 font rien, ou « travaillent le mazet », ce qui n’ est rien. Les femmes vont à la filature — la dernière qui marche encore —
927 rs 7 francs par jour. Pendant ce temps les hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radica
928 la place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactio
929 les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la place. Enfin ceu
930 se mêlent peu à ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par l’imprimerie du journal local, par les garages ou à la Ma
931 du journal local, par les garages ou à la Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes les con
932 à une centaine d’ouvrières, dont le salaire moyen est de 7 francs par jour. Faillite de la dernière bonnetterie, ces dernie
933 etterie, ces derniers jours. Le tiers des maisons est en ruines, — tout le centre. On croirait une ville bombardée, 2300 ha
934 ificielle. Le cycle normal du progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute la richesse indigène de ce département. Et
935  » (Il voulait dire : scandaleux. Mais un miracle est un scandale, après tout. Tradition laïque.) L’autre jour, dans l’auto
936 t, si l’on y réfléchit, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans notre société présente. Et c’est encore une foi
937 e calembour qui ne joue que sur des sons. Mais il est clair que le sens des termes dont nous usons doit subir des métamorph
938 muns sur quoi repose, tacitement, la vie sociale, sont aujourd’hui vidés de leur signification à la fois symbolique et préci
939 goûts, que chez nous. Leur résonance sentimentale est différente, et c’est pourquoi leur sens est différent, en dépit de ce
940 ntale est différente, et c’est pourquoi leur sens est différent, en dépit de ce que l’on pourrait déduire, dans le fait, d’
941 llé des écrivains dans le langage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas,
942 oncret des lieux communs. Aujourd’hui ces données sont bouleversées. L’instruction publique et la Presse répandent sinon le
943 sein des conventions communes. Un chacun peut en être , et juger comme il veut. Le droit de se tromper, et de tromper grâce
944 it de se tromper, et de tromper grâce au langage, est un des droits imprescriptibles que se trouve avoir décrété la Convent
945 se trouve avoir décrété la Convention. Bref, il n’ est plus de mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni l’École qui p
946 e pas dire dans le vide (il vaudrait mieux que ce soit le vide, dans bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rig
947 ue ce soit le vide, dans bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rigueur et vers l’adaptation de notre style à not
948 rs l’adaptation de notre style à notre action. On serait même tenté d’estimer que la plus grande rigueur entraîne la moindre e
949 osent des exigences dont il faut admirer qu’elles soient aussi exactement contradictoires. Or, de ces deux antagonistes, c’est
950 Or, de ces deux antagonistes, c’est l’esprit qui sera vaincu. Non point qu’il s’avilisse partout ni qu’il se laisse toujour
951 ons toujours dans les 40 à 50. Et une fois qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d’autant plus volontiers que, deva
952 cembre 1934 Soirée au « Cercle d’hommes ». — Ils étaient en effet une quarantaine hier soir. Je suis entré comme ils achevaien
953 ls étaient en effet une quarantaine hier soir. Je suis entré comme ils achevaient de boire leur tasse de café au fond de la
954 llustrés, quelques livres sur la table. Puis on s’ est assis sur des chaises alignées, pour entendre le « conférencier »27.
955 ues passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de « l’histoire de
956 a discussion n’a vraiment démarré que lorsqu’on s’ est mis à parler d’autre chose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout :
957 des traditions et anecdotes locales. Discussion n’ est d’ailleurs pas le mot : c’étaient surtout des questions, des affirmat
958 geois peu cultivé, et sans doute de tout ce qui n’ est pas « intellectuel » — ne « discute » pas à proprement parler. Son la
959 nt parler. Son langage en tout cas s’y prête mal, soit à cause de sa lenteur, soit à cause de ses répétitions pressées. Or c
960 ut cas s’y prête mal, soit à cause de sa lenteur, soit à cause de ses répétitions pressées. Or cette lenteur et ces répétiti
961 sser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue des écrivains français qu’il est e
962 ulement de la langue des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de discu
963 est exact de dire, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que toujours elle vise à la formule d
964 très mal au rythme de la réflexion spontanée, qui est « péguyste » et non « classique ». Écrivains inutilisables dans la me
965 vains inutilisables dans la mesure où ils veulent être de bons écrivains français.) — Que de bonne volonté chez les hommes d
966  ! comme ils s’appliquent à comprendre, comme ils sont vifs et peu timides, camarades, malicieux et indulgents — leurs bons
967 rend les échanges bien pauvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir, le facteur ronflait, le front sur un dossier de ch
968 ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’ est relevé, s’est frotté les yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai pa
969 ront sur un dossier de chaise. Il s’est relevé, s’ est frotté les yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé avec plusi
970 e chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé avec plusieurs jeunes gens. Que
971 ans ce cercle ? — Il y a de tout. Le quincaillier est royaliste, un des instituteurs est objecteur de conscience, la plupar
972 e quincaillier est royaliste, un des instituteurs est objecteur de conscience, la plupart sont radicaux ou socialistes. Il
973 tituteurs est objecteur de conscience, la plupart sont radicaux ou socialistes. Il vient aussi des communistes, de temps à a
974  il cause bien ». 16 décembre 1934 À N… la mairie est tout entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont pas ne sav
975 entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part les châtelains. Ils vot
976 s qui ne le sont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont , à part les châtelains. Ils votent radical ou socialiste, et se font
977 que les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont , et connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela du t
978 t connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’ est pas cela du tout, vous verrez. Être communiste dans ce pays, c’est to
979 ait dit : ce n’est pas cela du tout, vous verrez. Être communiste dans ce pays, c’est tout simplement être à gauche, le plus
980 re communiste dans ce pays, c’est tout simplement être à gauche, le plus à gauche possible. S’il en est bien ainsi, me dis-j
981 être à gauche, le plus à gauche possible. S’il en est bien ainsi, me dis-je, on peut redouter que ces hommes ne sachent pas
982 sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’ est pas un enquêteur, simple curieux ou spectateur. C’est bien plutôt un
983 ’aide morale et parfois matérielle, quelqu’un qui est responsable de connaître ces gens mieux qu’ils ne se connaissent eux-
984 rraille couronnant des hauteurs ventées. Les rues sont étroites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de
985 odeurs dès que le vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur une galerie d’où l’on domine un ample pay
986 ’on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’horizon des collin
987 s au-dessous d’une tache blanche dans un pré, qui est le château. Joie de voir un pays dans son ensemble, dans son unité na
988 et plus on les voit de près… — Je comprends qu’il soit difficile de parler en général de ses paroissiens. Mais s’ils sont co
989 parler en général de ses paroissiens. Mais s’ils sont communistes, ils ne doivent tout de même pas faire partie de votre ég
990 les hommes d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’ est pas l’envie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours la question
991 . — ??? — Oui, vous savez que nos temples du Midi sont construits en général sur la place du village. En face ou à côté, il
992 orte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux, les voyez-vous ? Pouvez-vous discuter avec eu
993 z-vous discuter avec eux ? — Guère. Là encore, ce sont surtout les femmes qu’on voit. Eux sont au travail, ou au café. — Pou
994 ncore, ce sont surtout les femmes qu’on voit. Eux sont au travail, ou au café. — Pourquoi n’iriez-vous pas au café avec eux 
995 pas. Mais eux on les étonnerait, et surtout ils y sont entre eux. Je n’ai aucune envie d’aller faire l’intrus ou le bon apôt
996 ’intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne dis pas. Mais pratiquement, je vous assure, c’est diff
997 rence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’ est que pas les chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est
998 , si nous ne croyons pas en Dieu, nous autres, ce serait que nous sommes trop orgueilleux ? » En général, on peut dire que les
999 yons pas en Dieu, nous autres, ce serait que nous sommes trop orgueilleux ? » En général, on peut dire que les communistes son
1000  ? » En général, on peut dire que les communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux, et eux seuls, qui prop
1001 unistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux, et eux seuls, qui proposent des réformes pratiques, qui demanden
1002 ls me posent quelquefois des questions. Mais ce n’ est pas par la lecture qu’ils viennent au parti. L’affaire, pour eux, c’e
1003 our la plupart — tous les chefs en tous cas —, ce sont de petits propriétaires ou des ouvriers travaillant à leur compte. —
1004 vous entendez bien avec eux ? — Ils savent que je suis de leur côté, en gros, dans les questions locales où il faut prendre
1005 ur donne, en fait de doctrine. En réalité, ils ne sont pas plus marxistes que moi. Ils veulent avant tout vivre et travaille
1006 qu’il n’y a rien d’autre et personne d’autre… Ce seraient souvent les meilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « 
1007 ement des incroyants, tout en s’imaginant qu’il n’ est pas un des leurs… Je voudrais définir le croyant véritable : celui qu
1008 onçant aux hommes la vérité et le chemin. Point n’ est besoin d’actions extraordinaires, surhumaines : se rire des dieux du
1009 inaires, surhumaines : se rire des dieux du monde est assez héroïque, dans notre monde, pour qu’il soit vain de chercher mi
1010 est assez héroïque, dans notre monde, pour qu’il soit vain de chercher mieux. 12 janvier 1935 Ces cochons-là ! — Simard le
1011 er 1935 Ces cochons-là ! — Simard le jardinier s’ est fait une forte entaille au doigt en travaillant. Ce gros homme, viola
1012 availlant. Ce gros homme, violacé d’ordinaire, en est tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour le ravigoter. C’est
1013 ne attitude doctorale. La question des assurances est une question complexe, comme toutes les questions capitales. Les gens
1014 e légumes. Or la vente des produits de son jardin est son seul moyen de gagner). Carré sur son tabouret de cuisine, le doig
1015 d’assurances — et analogues — avec lesquelles il est en compte. Je dis compagnies d’assurances, mais lui les nomme plus co
1016 lus couramment « ces cochons-là ». Ces cochons-là sont donc au nombre de sept ou huit. Il en totalise sept pour son compte,
1017 compte, et sa dame fait le petit appoint. Elle s’ est « coupé » la jambe, cela fait bien cinq ans déjà, et « touche » pour
1018 ochon-là » n’a pas répondu, et pourtant la lettre était recommandée. Alors il a été voir « une personne encore plus compétent
1019 pourtant la lettre était recommandée. Alors il a été voir « une personne encore plus compétente » que lui Simard, et cette
1020 ndée « à la charge du destinataire ». Eh bien, qu’ est -ce que vous croyez ? Réponse dans les quatre jours ! ah, ils sont com
1021 croyez ? Réponse dans les quatre jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que la personne compétente lui dit : « Ce cocho
1022 leur poche. — Tous les mas et mazets des environs sont habités par des retraités, des pensionnés, des assurés qui vivent dan
1023 eu ni à diable et à peine à la politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages, et ces cochons-là vous
1024 comme nous autres. » Arriérés, illettrés. Je n’en suis plus au temps où j’approuvais certains « Éloges de l’ignorance » plus
1025 l’ignorance — oui, au sens de l’école primaire — est un mal qu’il faudrait guérir. Mais je ne puis m’empêcher de penser qu
1026 e puis m’empêcher de penser que ces « illettrés » sont peut-être moins bas que ces « assurés ». Ce peuple à la retraite qui
1027 Ligne écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est le moins croyable, étant superstitieux sur tout plein d’objets. » Mal
1028 roit à rien excepté ce qui est le moins croyable, étant superstitieux sur tout plein d’objets. » Malchance affreuse du peuple
1029 mbe. 3 février 1935 Déclassé. — L’intellectuel l’ est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière, dispersée comme
1030 ssé. — L’intellectuel l’est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les
1031 classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur
1032 cacher ce fait que l’intellectuel en tant que tel est un hors-classe, un être à part, auquel on ne croit pas. (D’où sans do
1033 tellectuel en tant que tel est un hors-classe, un être à part, auquel on ne croit pas. (D’où sans doute l’angoisse qui pouss
1034 ituation bien définie dans le corps social). Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes intellectuels, et acceptés — o
1035 ial). Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans la mesure où nous réu
1036 cle d’hommes. — Hier soir le sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascis
1037 s simplement que je pus, que le problème fasciste est un problème avant tout national ; qu’il s’est posé en Italie dans des
1038 ste est un problème avant tout national ; qu’il s’ est posé en Italie dans des termes particuliers à ce pays, et qu’en tout
1039 e manière de prévenir utilement un fascisme, ce n’ était pas de condamner les Italiens et leurs admirateurs français, position
1040 ne prend point parti. Mais l’électeur veut qu’on soit pour ou contre, et il se méfie par principe de celui qui distingue et
1041 oviets, de mettre en épigraphe à mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu que l’article expose le pour et le contre, qu
1042 l’article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me classera fasciste ou communiste. Et p
1043 mmuniste. Et pourtant, la mission de l’écrivain n’ est -elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l’amener à réfl
1044 l d’un intellectuel en chômage , ces pages que je suis en train de rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur le résu
1045 que je suis en train de rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur le résultat de cette entreprise. Pour des raisons
1046 as mentir. — Mais pourquoi n’aime-t-on pas ce qui est vrai ? — Parce que c’est gênant. Cela oblige à conclure, une histoire
1047 scret, de ma part, ce journal. Un tel jugement ne serait pas très franc, d’ailleurs. L’indiscrétion, en soi, ne gêne pas beauc
1048 urtout la vérité sur une situation matérielle. Il est entendu qu’on ne doit pas parler de « questions matérielles » dans un
1049 lement, il se trouve que mon propos, précisément, est de montrer, entre autres, la décadence de ce tabou. Je trouve moins i
1050 e désirer.) R. me disait aussi : En somme, vous n’ êtes pas un vrai chômeur, puisque vous avez la possibilité de travailler.
1051 e vous avez la possibilité de travailler. — Je me suis fait moi-même cette objection. Il est clair qu’un intellectuel aura t
1052 r. — Je me suis fait moi-même cette objection. Il est clair qu’un intellectuel aura toujours la possibilité de travailler,
1053 é de travailler, pour autant que son vrai travail est de penser. Mais je l’appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a p
1054 , s’il n’a plus d’emploi, et ne sait plus de quoi sera fait le lendemain. — Admettez que cela ne vous empêche pas de vivre a
1055 vez l’air très satisfait de votre situation. Ce n’ est fichtre pas le cas des vrais chômeurs ! — Ah, c’est vrai, je suis bie
1056 le cas des vrais chômeurs ! — Ah, c’est vrai, je suis bien content, malgré tout. — Alors, vous n’êtes donc pas un vrai chôm
1057 e suis bien content, malgré tout. — Alors, vous n’ êtes donc pas un vrai chômeur. — Mais je ne tiens pas du tout à être un « 
1058 un vrai chômeur. — Mais je ne tiens pas du tout à être un « vrai chômeur », je vous l’assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit que
1059 s l’assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit que cela me serait pratiquement impossible, sauf gâtisme précoce. Ce n’est pas un mal, j
1060 atiquement impossible, sauf gâtisme précoce. Ce n’ est pas un mal, je pense, si je suis heureux, bien que sans ressources. M
1061 sme précoce. Ce n’est pas un mal, je pense, si je suis heureux, bien que sans ressources. Mais d’autre part, est-ce que le f
1062 eux, bien que sans ressources. Mais d’autre part, est -ce que le fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir 
1063 ces. Mais d’autre part, est-ce que le fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder
1064 vez qu’à regarder la frange de mon pantalon. Ce n’ est pas avec ça que je pourrais faire une carrière dans le monde, à suppo
1065 je compte dire dans mon journal, c’est qu’on peut être très content d’un sort matériel très médiocre. Ce n’est pas nouveau.
1066 ès content d’un sort matériel très médiocre. Ce n’ est pas nouveau. Et il faut bien reconnaître que ce n’est pas aussi roman
1067 pas nouveau. Et il faut bien reconnaître que ce n’ est pas aussi romantique et excitant que mon titre pourrait le faire croi
1068 eux travailleurs. Demain dimanche, à 10 heures, sera donnée une conférence au profit des vieux, hommes et femmes, âgés de
1069 vous, activez la propagande afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendications des vieux ! « L’organisation lutt
1070 urgeois, l’obscurantisme clérical — la conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réactionnaires ! Ô
1071 raternité, Déclaration des droits de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que la Volonté populaire appelait de tous s
1072 claration des droits de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs !
1073 de Justice et de passion libertaire, ce grand mot sera prononcé, proclamé, acclamé par les travailleurs de Bouillargues, pro
1074 epuis 89 ! Oui, dis-je, ce symbolique mot d’ordre sera donné comme un soufflet à la Réaction insolente : « Place aux Vieux !
1075 ente : « Place aux Vieux ! » — On se demande s’il est au monde un seul pays, hormis la France, où cette phrase soit possibl
1076 e un seul pays, hormis la France, où cette phrase soit possible. Où les partis qui se disent « avancés » osent le proposer c
1077 Où la publication d’un communiqué de ce genre ne soit pas accueillie par une traînée de rigolade irrépressible dans toutes
1078 pondre par cette simple déclaration : « La France est un pays comblé qui a résolu tous les problèmes économiques urgents. L
1079 s les problèmes économiques urgents. La preuve en est fournie par ces phrases cueillies dans un journal révolutionnaire : ‟
1080 ous, activez la propagande, afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendications des vieux !” Quand on en est à ce
1081 légitimes revendications des vieux !” Quand on en est à cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que l’état social est
1082 partis d’extrême gauche, c’est que l’état social est à peu près paradisiaque. » J’ajouterais peut-être ceci : « En tout ca
1083 ut-être ceci : « En tout cas, tout péril fasciste est écarté d’emblée pour une nation qui dévoue tous ses enthousiasmes aux
1084 Notre opinion publique, à en croire les journaux, est actuellement dominée par le souci des élections académiques et des re
1085 académiques et des retraites aux sexagénaires. N’ est -ce pas beau, rassurant, émouvant, dans une Europe que l’on croyait en
1086 patronne qui ne répond pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il faut le laisser frapper le sol de sa canne et redresser
1087 ais il y a bien d’autres aspects. Ces deux hommes sont du même niveau social, sans doute parents, de mœurs et de langage par
1088 langage pareils. S’ils s’opposent, c’est que l’un est avare et légèrement maboul, l’autre énergique et assez sensé. Simple
1089 n de tempérament. Peut-être aussi le communiste n’ est -il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant qu’il le voudrait.
1090 tre de côté » autant qu’il le voudrait. Mais ce n’ est pas sûr. Je sais bien une douzaine de ses camarades qui comptent parm
1091 simplement des attitudes morales différentes ? Ce serait nouveau… Il y a au fond tout autre chose. C’est moi qui avais acheté,
1092 uppôts, ces retraités radicaux ou socialistes, ce serait d’être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux to
1093 es retraités radicaux ou socialistes, ce serait d’ être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les
1094 reuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — et si possible, plus médiocre que celle des grands journau
1095 ystique confectionnée à l’usage des moujiks… Quel est l’homme sain qui oserait affirmer que ce quotidien lamentable, hériss
1096 s lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas le cas des intellectuels qui « adhèr
1097 sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’ est pas le cas des intellectuels qui « adhèrent » aux disciplines stalini
1098 plines staliniennes en haine d’une société qu’ils sont les seuls à croire encore « chrétienne » — il faut bien dire que le p
1099 nne » — il faut bien dire que le parti communiste est une sinistre trahison des pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résis
1100 rend sa situation, et ne voit pas que son journal est sans rapport réel avec cette situation. Mais les intellectuels, dont
1101 situation. Mais les intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule
1102 dont le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le p
1103 r est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, — on se demande par
1104 ore, parlez-leur de leur travail, de celui qu’ils sont en train de faire tandis que vous causez, vous arriverez à leur tirer
1105 leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous
1106 uand ils savent que les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront que le m
1107 ue les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de l’Éta
1108 plus de vie, d’initiative, de vrai plaisir. On n’ est plus fier d’en être, on approuve la jeunesse qui délaisse la terre po
1109 tiative, de vrai plaisir. On n’est plus fier d’en être , on approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’es
1110 r du peuple, n’écoutons plus ses assemblées, ce n’ est pas lui. Écoutons les observations que formulent des individus pris à
1111 la lutte contre le capitalisme, tout le monde en est , ou feint d’en être ; c’est bien moins concret qu’il ne semble.) Conc
1112 capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être  ; c’est bien moins concret qu’il ne semble.) Conclusion : il appartie
1113 s journaux, les orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle des travailleurs, trahis par le langage politicien.
1114 s, trahis par le langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature
1115 on, voilà le dilemme du xxe siècle. La dictature est très facile. Elle n’a qu’un argument très puissant contre nous : sur
1116 mains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d’autre n’ est vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. — La maison
1117 it du lecteur philosophe. Déjà huit mois que nous sommes ici, et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la grande cuis
1118 t mois que nous sommes ici, et combien de fois ne sommes -nous pas entrés dans la grande cuisine qui était, pensions-nous, tout
1119 sommes-nous pas entrés dans la grande cuisine qui était , pensions-nous, tout leur logis — nous avions cru comprendre que les
1120  nous avions cru comprendre que les autres pièces étaient vides ou ne servaient que de débarras —, et rien ne pouvait nous fair
1121 mais elle va passer cette nuit, vous savez, elle est toute chargée, bou die, l’estomac et tout. — Mais les Simard ne m’ava
1122 languir bien longtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables di
1123 parvient de la cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé, et on partage. C’est toujours assez compliqué. La nuit, par u
1124 la moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans la remise qui est au-dessous de notre chambre, et
1125 rôle, ils sont venus discuter dans la remise qui est au-dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix nous ont plusieu
1126 être, quand toutes ces maisons vides des environs seront habitées par des colonies de jeunes gens — si jamais ils en ont assez
1127 nt — la province deviendra vivable. La révolution sera faite. Nous reviendrons… — Demain, il faut remettre en place les aqua
1128 naugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’application du style françai
1129 e la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’ est en somme que l’application du style français à la chose militaire. 2
14 1937, Articles divers (1936-1938). Lénine, Staline et la littérature (17 avril 1937)
1130 ompris qu’il faut défendre la culture. Le malheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense que des moyens fascistes. « To
1131 s décident de tout ! » Compris ? Ces deux phrases sont tirées d’un choix de propos de Lénine et de Staline Sur la littératur
1132 éus et Barbusse). Son inculture, dans ce domaine, est d’ailleurs franchement avouée par sa veuve : « En Russie, Ilitch ne g
1133 qu’il faut penser de la poésie, mais pour ce qui est de la politique, je m’en porte garant, c’est parfaitement vrai. Voil
1134 Père des peuples, sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure le poète le meilleur, le plus talentueux de notre époqu
1135 ique. L’indifférence à sa mémoire et à ses œuvres est un crime. Vous reconnaissez le ton du policier, et du fonctionnaire
1136 nctionnaire arrivé. « L’indifférence à ses œuvres est un crime. » Heureusement pour lui que Lénine est déjà mort et momifié
1137 est un crime. » Heureusement pour lui que Lénine est déjà mort et momifié ! Je ne sais quelle était l’intention des éditeu
1138 nine est déjà mort et momifié ! Je ne sais quelle était l’intention des éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à l’é
1139 ce que les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en général saines, banales, un peu courtes, et que Staline s’est char
1140 saines, banales, un peu courtes, et que Staline s’ est chargé d’en extraire ce qu’elles avaient de réactionnaire et d’attard
15 1937, Articles divers (1936-1938). Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)
1141 nt Chamisso, c’est peut-être poussé par l’envie d’ être enfin deviné, expliqué. Chamisso est français de naissance et d’éduca
1142 r l’envie d’être enfin deviné, expliqué. Chamisso est français de naissance et d’éducation. Une excentricité du sort a fait
1143 sans le savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de l’homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer
1144 ’un étranger s’initiant aux croyances d’un peuple soit le premier saisi par ce frisson d’absurdité que l’on baptise inspirat
1145 ayé de formuler le symbole enfermé dans le mythe. Serait -ce pudeur d’artistes ? Pudeur tout court ? Ou faut-il croire qu’ils o
1146 s d’un tel accident — dont à vrai dire les suites sont assez pittoresques pour qu’un « poète » — au sens banal du terme — pr
1147 l, et bien d’autres imitateurs, dont le moindre n’ est pas Hoffmann… ⁂ L’énigme commença de m’inquiéter lors d’un séjour all
1148 inaire popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à l’Opéra. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas le livret d
1149 s tard je lus le livre qui me parut splendide… Qu’ est -ce qu’une ombre ? me demandais-je. Quelque chose d’assez méprisable.
1150 ulisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’ est plus que l’ombre de lui-même ! ») Mais je vois bien qu’ils exagèrent 
1151 ! ») Mais je vois bien qu’ils exagèrent : si nous étions de purs esprits, nous ne projetterions pas d’ombre. L’ombre est la pr
1152 prits, nous ne projetterions pas d’ombre. L’ombre est la preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du moins qui
1153 a Raison dans le monde des dieux, voudraient bien être pris pour des gens raisonnables. Voilà pourquoi, pensais-je, ils mépr
1154 ela ? Rien qu’une évidence assez pauvre : l’ombre est le fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’est mourir,
1155 chair, c’est mourir, et cet infortuné Schlemihl n’ était tout de même pas mort d’avoir perdu son ombre… Il était même si vivan
1156 tout de même pas mort d’avoir perdu son ombre… Il était même si vivant, et sa présence si gênante, que je tentai de le contra
1157 cœur. Signalement de Peter Schlemihl Peter est un naïf : il croit à la fortune. Il croit surtout qu’elle seule assur
1158 urgeois riches. D’où vient le sentiment qu’il a d’ être inférieur. Le diable sait cela : c’est par là qu’il le tient. Peter l
1159 usement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce l’ est bien pour eux, comme toutes les choses trop naturelles que l’on possè
1160 nnaît, comme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc le type classique de l’homme qui perd le contact social. L’or mê
1161 e : on aime Schlemihl pour tout ce qu’il a, qui n’ est pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est
1162 emihl pour tout ce qu’il a, qui n’est pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social
1163 t les femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage sur
1164 le rapport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes les ruses de Peter éc
1165 e reste-t-il à un tel homme ? Le suicide ? Rien n’ est plus loin de sa pensée. Sa vision du monde serait exactement celle d’
1166 n’est plus loin de sa pensée. Sa vision du monde serait exactement celle d’un philistin sympathique, d’un philistin sans exig
1167 reil aux autres, sauf en ce je ne sais quoi qui n’ est rien et devient l’essentiel, notre philistin méconnu se voit chassé d
1168 de bottes usagées. Mais voilà bien sa chance, ce sont les bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à la vie, au voisina
1169 er une espèce d’activité, purement descriptive il est vrai, solitaire, presque mécanique : il dresse un vaste catalogue de
1170 maniaque (ou universitaire-érudite)… Nul doute n’ est plus permis : Schlemihl est schizoïde. Chamisso, heureusement pour lu
1171 érudite)… Nul doute n’est plus permis : Schlemihl est schizoïde. Chamisso, heureusement pour lui, n’en savait rien. Il sava
1172 les symboles. Car, pour la vie spirituelle, il n’ est pas de lieux séparés, on peut toujours passer de l’un à l’autre par q
1173 l’autre par quelque ruse de la métamorphose, qui est la vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de
1174 même de la vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand l’inverse est au moins aussi probable. Et quand
1175 s lors : ceci est cause de cela ? Quand l’inverse est au moins aussi probable. Et quand rien ne dépend à coup sûr que du to
1176 tation : « Celui qui, dans un domaine quelconque, est considéré comme anormal au point de vue social et moral, celui-là peu
1177 al au point de vue social et moral, celui-là peut être considéré comme anormal dans sa vie sexuelle »37. Nous venons de voir
1178 e sexuelle »37. Nous venons de voir que Schlemihl est le type même de l’inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au
1179 entiellement des états d’âme d’un homme sain ? Ne sont -ils pas plutôt de simples fixations d’états qui, normalement, ne tard
1180 e ? Plus précisément, l’état de Peter Schlemihl n’ est -il pas comparable à celui d’un esprit et d’un corps sains après « l’a
1181 légèreté et en même temps de lourdeur, comme s’il était un peu en arrière des choses, lent à démêler le monde où il revient,
1182 mais aussi quelques fois, hostiles. (Et cela peut être comme une première influence de ce qu’on nommera chez un malade, foli
1183 à jour, et lui-même, d’où l’impression qu’il a d’ être mal défendu contre les regards qu’il rencontre, transparent dirait-on
1184 pouvait exprimer qu’un fait humain élémentaire. J’ étais déçu de le voir se réduire à quelque chose d’aussi précis, et que mil
1185 vient de l’homme et se forme d’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est « l’ombre intérieure. » Une lecture plus pou
1186 orme d’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est « l’ombre intérieure. » Une lecture plus poussée de Paracelse devait
1187 rieuses et profondes, que la portée de ce passage était en vérité beaucoup plus vaste que tout ce que permettait d’imaginer l
1188 iroir auquel la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique, la puissance même de notre créativité da
1189 me de notre créativité dans tous les ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans le corps tout entier et dans l’homme.
1190 a créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui est vraiment grave dans notre vie ; et la fameuse « question sexuelle » n
1191 son importance démesurée que du seul fait qu’elle est une image physique du pouvoir créateur spirituel. Comme on peut le vo
1192 mme on peut le voir par l’examen de la pudeur. Ne serait -ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres la créativité paraît a
1193 e serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’ êtres la créativité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que la pudeur
1194 voir son siège dans le seul sexe, que la pudeur s’ est localisée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que l’homme cherc
1195 seul sexe, que la pudeur s’est localisée là ? Ne serait -ce point pour cette raison que l’homme cherche à le dissimuler comme
1196 une excessive sincérité dans ses écrits. (Il peut être d’ailleurs, au sens courant du mot, le plus « pudibond » des bourgeoi
1197 he son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on possède, c’est naturel ; mais non du
1198 ’âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’ être reflets l’un de l’autre. Alors le corps a honte de sa pensée, et cell
1199 cesse-t-elle d’exister — normalement — quand deux êtres s’aiment ? Parce que le sexe reprend alors sa « propriété » symboliqu
1200 eprend alors sa « propriété » symbolique. (Ce qui est douteux, non propre, c’est ce qui, en moi, m’est étranger). Revenons
1201 est douteux, non propre, c’est ce qui, en moi, m’ est étranger). Revenons alors à notre mythe : la transparence, c’est l’ab
1202 e d’ombre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombr
1203 spirituellement, ou de quelque autre sorte, il n’ est plus un homme créateur. À l’inverse, la chasteté (spirituelle ou corp
1204 l’on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal — contre-épreu
1205 hamisso. Les amateurs d’absurdités lyriques, j’en suis parfois, devraient se garder d’affadir une telle œuvre, n’y admirant
1206 hamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleurs qu’il soit vraiment un art — tout effort digne de ce nom établit d’abord une act
1207 ordre, un sens donné… C’est par là que Chamisso s’ est sauvé de lui-même : s’il a fait Schlemihl comme on sait, en grande pa
1208 s de sept lieues qui traverse encore notre vie, n’ est -ce pas l’ombre de Chamisso ? Une ombre qui a perdu son homme, cette f
1209 il n’en veut plus, il veut du vraisemblable ! Il est retombé dans le roman insignifiant. P.-S. Je n’ai pas voulu alourdir
1210 so, selon lequel l’idée de Peter Schlemihl aurait été donnée à son auteur par un de ses parents, au cours d’un séjour à Par
1211 s d’un séjour à Paris. L’origine du conte célèbre serait donc bien française, et Barrès s’en réjouit. Il va jusqu’à soutenir q
1212 éjouit. Il va jusqu’à soutenir que l’ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par Chamisso. Les document
1213 théorie de la sexualité. La définition du normal est donc ici : adapté au milieu social. Qui ne voit ce qu’on pourrait tir
1214 qu’en insistant sur le contraire : l’anormal peut être créateur d’un nouveau type de rapports sociaux, c’est-à-dire d’une no
1215 de, comme dans Schlemihl. Aussi bien, le diable n’ est -il pas dans l’affaire, cette fois-ci. 39. Selon Paracelse toujours,
16 1937, Articles divers (1936-1938). Journal d’un intellectuel en chômage (25 juillet 1937)
1216 ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux planches b
1217 t des treilles pour la pêche aux crevettes. Je me suis procuré un petit tonneau de vin blanc de l’île. C’est un clairet asse
1218 aisse peut-être un léger goût iodé, au moins l’on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux q
1219 eau vertige de liberté. Depuis six jours que nous sommes arrivés, je n’ai lu que les Règles de Descartes, comme on ferait un m
1220 a place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révo
1221 à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux exemplaire dans sa symétrie architectu
1222 e. Il domine toutes les maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style rom ant
1223 d on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dans les jambes, et m’en par
1224 on de rester ici tout l’hiver ? — C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais
1225 xpliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’ est -ce que cela signifie ? Écrire pour les journaux, sans doute, mais il
1226 aient en silence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiver el
1227 ler de l’autre côté de la place, chez Mélie. Ce n’ est pas simple d’éviter d’être vu par l’une, entrant chez l’autre. Mais c
1228 place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’ être vu par l’une, entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me l’a dit
1229 es augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par la réprobat
1230 ’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par la réprobation sournoise d’une épicière. 21 novembre 19
1231 avec une grande enveloppe contenant un manuscrit. Est -ce une lettre ? — Non. — Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à la m
1232 tenant un manuscrit. Est-ce une lettre ? — Non. —  Est -ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à la machine. — Est-ce qu’il n’y a
1233 ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à la machine. —  Est -ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a des corrections
1234 elle me tend une formule de télégramme, mais ce n’ est pas un télégramme, c’est une notification officielle d’avoir à verser
1235 l faut donc que je m’exécute, sinon c’est lui qui sera forcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’autobus pour ar
1236 e cause un peu, pour me faire pardonner. Pédenaud est mutilé de guerre. Il boite. On lui a donné cette recette auxiliaire à
1237 n comptant tout ». Sa femme fait des lessives. En été ils pêchent des palourdes et les vendent aux baigneurs. Bien entendu,
1238 de Colette. Je n’avais pas encore lu ce livre. Il est exactement de l’espèce que j’aime, et l’un des plus charmants dans ce
1239 n des plus charmants dans cette espèce, mais ce n’ est point pour cela que j’en parle ici. C’est pour une raison très précis
1240 lumière. Lundi dernier, au petit matin, nous nous sommes réveillés couverts de puces. J’exagère à peine : pour mon compte, j’e
1241 r. Je n’en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue nous voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause
1242 herchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il est vrai qu’on a beau porter un nombre excessif de jupons, cela ne devrai
1243 s. Or, peu de jours auparavant, un petit hérisson était venu se mettre en boule dans la plate-bande qui borde la maison, sous
1244 olette, je sais maintenant pourquoi notre chambre était pleine de puces. Cela n’a l’air de rien, mais je vois là comme un sym
1245 je vois là comme un symbole. Les livres devraient être utiles. 23 décembre 1933 J’écris ceci sur une table de café. À traver
1246 ndant le départ de l’autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis un bon moment déjà, tout contents de revoir le va
1247 ec de notre première tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à gagner assez vite ce qu’il nous fallait pour subsister a
1248 otre réserve. J’ai travaillé beaucoup, mais je ne serai pas payé avant un mois. Or, un mois, ou même une semaine, cela compte
1249 n jour près la date d’arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier de ma retraite stratégique, mais tout de même bien déci
1250 ce du directeur de la Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs la primeur de quelques pages de ce
1251 pages, l’auteur peint notamment le milieu où il s’ est retiré, une petite île vendéenne. »
17 1937, Articles divers (1936-1938). Extraits de… Journal d’un intellectuel en chômage (15 août 1937)
1252 rtance des autocars et des transformations qu’ils sont en train de causer dans la vie provinciale. Je n’ai pas compté le nom
1253 er dans plusieurs départements de l’Ouest qu’il n’ est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une ou deux ou même t
1254 l’Ouest qu’il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une ou deux ou même trois compagnies de transports locau
1255 ent « la coutume » de la France rurale. Mais ce n’ est pas encore assez dire : l’autocar modifie complètement le mode de con
1256 llait à Paris ou qu’on en venait. Tout le reste n’ était que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’on se sentait relég
1257 que village. Aujourd’hui, les stations d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on part au milieu d’une grand
1258 l’on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle la traversait abstraitemen
1259 art sans remarquer que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à une autre, ce n’es
1260 me sorte, et que d’une province à une autre, ce n’ est pas seulement le paysage qui change. N’était-ce pas là l’une des rais
1261 , ce n’est pas seulement le paysage qui change. N’ était -ce pas là l’une des raisons qui faisait, si facilement nier la subsis
1262 ent au départ avec force recommandations ; et ils sont rares, ceux qui n’ont pas deux mots à dire par la portière entr’ouver
1263 cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’ est plus sympathique qu’un conducteur de car. Cela tient évidemment à leu
1264 r de car. Cela tient évidemment à leur métier. Ce sont en général de jeunes gaillards solides et gais, et qui ont toutes les
1265 accordées à ceux qui commandent et disposent, ne fût -ce que pour une heure, de leur vie. Oui, voilà bien les hommes avec l
1266 et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au « peuple » en général. Sans compt
1267 r les moyens techniques dont ils disposent et qui seraient décisifs lors d’une action rapide. Mais loin de moi ces ambitions : c
1268 ux qui les ont n’en parlent pas, dit-on. Et je ne suis qu’un écrivain. Ceci me rappelle un bout de conversation que j’aurais
1269 é dans l’autocar de Taillefer voulait savoir quel était mon métier. Et quand j’eus dit que je n’en avais aucun, et que je n’é
1270 nd j’eus dit que je n’en avais aucun, et que je n’ étais qu’un écrivain, et chômeur par-dessus le marché, il s’écria : « Ah !
1271 s. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain est par nature un empêtré. Et voilà le paradoxe et l’injustice : c’est qu
18 1937, Articles divers (1936-1938). « Subjectivité et transcendance », Lettre de M. Denis de Rougemont (décembre 1937)
1272 e les sciences dites exactes, dont les fondements sont renversés tous les vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que l
1273 e ne pense pas que la transcendance puisse jamais être « simplement la nature ». Voyez chez Goethe, chez Tolstoï, chez Nietz
1274 Tolstoï, chez Nietzsche : dans la mesure où elle est un élément de transcendance, la nature devient divinité (et ne peut p
19 1938, Articles divers (1936-1938). Réponse à Pierre Beausire (15 janvier 1938)
1275 l’on se proposait justement de combattre, et qui est celle de l’État totalitaire. Or, pour convaincre, il faut entre autre
1276 Beausire. C’est au nom du personnalisme. Mais qu’ est -ce que le personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de l’humanité. » E
1277 sme, c’est l’amour concret des hommes réels. Ce n’ est pas « la bonté, la charité (vertus toutes passives et féminines) » (a
1278 romand ; (qu’il me pardonne !). Le personnalisme est bien plus qu’une morale, s’il en suppose une. Il est, à mon sens, la
1279 bien plus qu’une morale, s’il en suppose une. Il est , à mon sens, la tradition centrale de l’Occident, l’élément civilisat
1280 nir. Et l’individualisme et les collectivismes ne sont que les déviations complémentaires et périodiques de cette ligne de p
1281 rande efficacité. Le mouvement personnaliste ne s’ est constitué comme tel, et n’a pris ce nom, que parce que dans l’Europe
1282 nscience active de ce qui, depuis nos origines, n’ était que le sous-entendu de tous nos efforts créateurs. Cette prise de con
1283 rts créateurs. Cette prise de conscience active s’ est effectuée diversement selon les milieux et les groupes. En France, el
1284 lon les milieux et les groupes. En France, elle s’ est traduite surtout en termes catholiques et en termes proudhoniens ; ch
1285 anarchisme, etc. Comme l’Europe, le personnalisme est essentiellement pluraliste, c’est-à-dire : fédéraliste. Il exalte les
1286 de la cité qui leur permette de s’exprimer. Telle est la forme que revêt « la charité personnaliste », pour reprendre une f
1287 ndre une formule d’Arnaud Dandieu (qui d’ailleurs était nietzschéen). Que le christianisme vrai revive dans ce mouvement, je
1288 e christianisme vrai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à le nier. En tant que protestant personnaliste, je tiens qu
1289 naissent l’Histoire, et savent de quoi l’Europe s’ est faite. Pierre Beausire ne craint pas de proclamer que « si l’on veut
1290 t ». Je ne craindrai pas de lui répondre que ce n’ est pas là parler en homme, ni en enfant, mais en adolescent impénitent.
1291 he. Mais non pas encore dans l’Histoire ? Si ce n’ est pas une utopie de plus, un refuge pour les faibles et les sceptiques,
1292 ’engageant, et préfèrent la littérature ; si ce n’ est pas une manière de « grève perlée » que de n’accepter la lutte que da
1293 epter la lutte que dans ces termes ; si cet idéal est possible, si Beausire connaît de tels chefs, ou désire en devenir un,
20 1938, Articles divers (1936-1938). Søren Kierkegaard (février 1938)
1294 ne du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur un tertre et il avait maudit le Dieu Tout-Puissant qui le l
1295 a vie, et la révélation qu’en eut plus tard Søren fut décisive pour son développement religieux. Mais le défi jeté à Dieu s
1296 rompues au bout d’un an. L’idée que Kierkegaard s’ était formée du mariage était trop absolue pour comporter une réalisation p
1297 L’idée que Kierkegaard s’était formée du mariage était trop absolue pour comporter une réalisation pratique. Le « tout ou ri
1298 une réalisation pratique. Le « tout ou rien » qui est sa devise devait fatalement le conduire au refus d’une perspective de
1299 trop longs. Mais on savait aussi que cet original était le plus grand écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un immense
1300 us… » Le seul événement extérieur de sa vie avait été la rupture de ses fiançailles. Mais l’acte qui résume toute son œuvre
1301 ut mourir certain d’avoir accompli sa mission, ce fut l’attaque qu’il mena contre l’Église établie et contre dix-huit siècl
1302 on ne naît pas chrétien, et même on ne peut pas l’ être , il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de la fo
1303 enir, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme
1304 ien. Il se trouvait devant un monde où tout avait été brouille : sérieux et plaisanterie, valeurs éternelles et opportunism
1305 énorme scandale. Il décrivait la vie de Nynster. Était -ce celle d’un témoin de la vérité ? Non, s’écriait Kierkegaard : Un
1306 n témoin de la vérité, c’est un homme dont la vie est familière avec toute espèce de souffrance, … un homme qui témoigne da
1307 méconnu, déteste, insulté, bafoué — un homme qui est flagellé, torturé, traîné en prison, et puis enfin — car c’est bien d
1308 jeté par le bourreau dans un endroit écarté, sans être enterré. Voilà un témoin de la vérité, sa vie et son existence, sa mo
1309 on enterrement, et l’évêque Nynster, nous dit-on, fut un des vrais témoins de la vérité ! En vérité, il y a quelque chose d
1310 , et de jouer ensuite au jeu que l’évêque Nynster était un témoin de la vérité. Cas symbolique aux yeux de Kierkegaard. Il f
1311 pel à l’ordre. Il le devint lui-même, de tout son être . Et il savait ce que cela devait lui coûter. Car le monde ne tolère j
1312 ependant, s’aperçoivent que l’entreprise pourrait être mortellement compromettante. Aussi l’histoire de la pensée n’est-elle
1313 t compromettante. Aussi l’histoire de la pensée n’ est -elle peut-être que la chronique de ses retraites éloquentes. Très peu
1314 de sa passion et l’accomplissement de sa foi, tel fut le sort de Kierkegaard, son incommensurable grandeur. Un acharnement
1315 les innombrables tentations d’une religion qui n’ est pas Dieu ; et soudain, sur son lit de mort, cette phrase : Je ne pen
1316 t de mort, cette phrase : Je ne pense pas que ce soit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pour l’écarter, et
1317 dernier de cette vie et de cette mort. Le premier est de Kierkegaard : Forcer les hommes à être attentifs et à juger, c’es
1318 premier est de Kierkegaard : Forcer les hommes à être attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemin du vrai mart
1319 l’aide de son impuissance. Il force les hommes à être attentifs. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, ils le tuent. M
1320 de) : Il tient sa maladie pour mortelle. Sa mort serait nécessaire à l’action à laquelle il a consacré toutes ses forces spir
1321 ra sa lutte religieuse, mais il craint qu’elle ne soit alors affaiblie. Au contraire sa mort donnera de la force à son attaq
1322 84 ⁂ De cette œuvre considérable, il ne saurait être question, ici, de résumer ne fût-ce que les thèmes directeurs. Il fau
1323 , il ne saurait être question, ici, de résumer ne fût -ce que les thèmes directeurs. Il faut y aller voir dans ses livres tr
1324 entale que Jean Wahl publie ces jours-ci. Mais il sera peut-être utile d’insister sur deux caractères qui ne peuvent manquer
1325 alectique du sérieux et de l’ironie. Kierkegaard est difficile parce qu’il est simple. « La pureté du cœur, c’est de voulo
1326 l’ironie. Kierkegaard est difficile parce qu’il est simple. « La pureté du cœur, c’est de vouloir une seule chose », écri
1327 conformismes, et même à nos plus hauts désirs. Il est désespéré, mais c’est à cause de la foi. Et s’il espère, c’est « en v
1328 taire, dont nul ne trouvera l’antidote : qu’il en soit mort, atteste ce fait capital que la pensée humaine ne peut être irré
1329 ste ce fait capital que la pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous les autres, sauf Empédocle et Nietzsche, ont refus
1330 oievsky. Oui, même ceux-là ! Même ces deux-là qui sont allés si loin dans la passion de l’absolu chrétien, mais seul Kierkeg
1331 on de l’absolu chrétien, mais seul Kierkegaard en est mort. Une pureté presque inhumaine, voilà ce qui définit sa grandeur.
1332 surhomme. Quant au « sérieux » de Kierkegaard, il est de nature à tromper le lecteur mille manières. On peut se laisser pre
1333 par l’ironie de l’éternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle le temps finira bien par succombe
1334 ue de sérieux. C’était bien vu. Mais notre auteur était -il sérieux lui-même en écrivant cela, ou bien faisait-il une phrase ?
1335 vant cela, ou bien faisait-il une phrase ? Ce qui est sérieux, est seul important, mais tant de gens « font les importants 
1336 bien faisait-il une phrase ? Ce qui est sérieux, est seul important, mais tant de gens « font les importants ». Où est la
1337 nt, mais tant de gens « font les importants ». Où est la différence ? C’est que le sérieux vrai est en définitive dans le s
1338 Où est la différence ? C’est que le sérieux vrai est en définitive dans le seul acte de foi, qui jette sur nos sérieux, po
1339 aisantes en général), un « soupçon » d’ironie qui est infiniment pire qu’une ironie. Car peut-être que l’acte de foi n’exis
1340 . Car peut-être que l’acte de foi n’existe pas, n’ est qu’une figure de rhétorique pieuse, une illusion, un mythe, un saut d
1341 uvé dans la foi, ou mieux : tant que la foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé. Kierkegaard a eu trois descendances spir
1342 a eu trois descendances spirituelles. La première est littéraire : ce sont les dramaturges et les poètes du Nord, dont le p
1343 ces spirituelles. La première est littéraire : ce sont les dramaturges et les poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibs
1344 ges et les poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen. La seconde philosophique : l’école « existentielle » d’Allemag
1345 e dialectique, qui sous l’impulsion de Karl Barth est en train de sauver l’honneur et l’existence même des églises allemand
1346 re des centaines d’ouvrages et d’articles. Ce qui est certain, c’est qu’à la différence de Nietzsche, personne ne parviendr
1347 e puis l’exprimer par cette seule phrase : ‟Je ne fus pas comme les autres” ». 83. Point de vue explicatif sur mon activi
21 1938, Articles divers (1936-1938). Nouvelles pages du Journal d’un intellectuel en chômage (avril 1938)
1348 reprise hardie que d’aller dire aux hommes qu’ils sont peu de chose », s’écrie Bossuet (Sermon sur la mort, 22 mars 1662). Q
1349 à celui qui doit se montrer aux hommes tel qu’il est  ? S’entendre dire que l’homme en général est peu de chose, n’est pas
1350 u’il est ? S’entendre dire que l’homme en général est peu de chose, n’est pas trop humiliant pour qui se flatte d’une image
1351 e dire que l’homme en général est peu de chose, n’ est pas trop humiliant pour qui se flatte d’une image de soi composée dan
1352 e soi composée dans la solitude : tant qu’on ne s’ est pas avoué devant les autres, on peut toujours s’estimer singulier, c’
1353 ulier, c’est-à-dire supérieur à la masse. Et ce n’ est pas encore franchement s’avouer que de se comparer aux seuls humains
1354 ous met en mesure d’approcher. L’épreuve décisive est celle que l’on subit au contact de voisins que rien en nous, que rien
1355 dans notre vie n’attendait et ne prévoyait. Ce n’ est qu’au prix d’un désordre social — selon les préjugés du régime établi
1356 , tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel est ce certain degré ? À quel niveau placer cette limite inférieure ? La
1357 concret d’une vie connue. Prenons deux hommes qui furent tous deux de prodigieux producteurs d’idées : deux hommes qui ont écr
1358 de dix ans : Kierkegaard et Nietzsche. Le premier était riche et dépensait sans compter85. Le second était si pauvre, au mome
1359 tait riche et dépensait sans compter85. Le second était si pauvre, au moment où il écrivit ses plus grandes œuvres qu’il ne l
1360 contre ses effroyables maux de tête. De plus, il était à demi aveugle… Confort et culture. — À ceux qui n’ont rien, il fau
1361 ose, il faut rappeler que la recherche du confort est ce qui s’oppose le plus radicalement à toute culture véritable. Île
1362 Je l’avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’ est pas cette mort opaque dont il faut redouter je ne sais quelle invisib
1363 menaces originelles. Par temps clair, les étoiles sont très grosses et molles au-dessus du jardin. Mais il arrive que le noi
1364 s au-dessus du jardin. Mais il arrive que le noir soit compact. Je me dirige à peu près le long de l’allée unique, entre les
1365 s cette nuit. Fin de séjour à A… (Gard). — Tout est en place. Je garderai toutefois le plan d’aménagement et de décoratio
1366 … Les vingt-deux pièces du dessus de cheminée ont été replacées au millimètre, dans une symétrie impeccable. Mais tout l’ef
1367 cable. Mais tout l’effet de notre labeur risque d’ être détruit par une odieuse malice du sort. Nous avions descendu du deuxi
1368 lourd sommier pour en faire un divan. L’escalier est étroit. La descente s’était opérée sans trop de mal lors de notre arr
1369 re un divan. L’escalier est étroit. La descente s’ était opérée sans trop de mal lors de notre arrivée. Mais nous n’avions pas
1370 une heure. Quand la propriétaire reviendra pour l’ été , elle se heurtera à ce sommier monumental dans sa pose scandale et ma
1371 monumental dans sa pose scandale et ma réputation sera faite ! Fuyons, fuyons ! (Été à Paris). Impossibilité du libre-écha
1372 et ma réputation sera faite ! Fuyons, fuyons ! ( Été à Paris). Impossibilité du libre-échange humain. — Considération irri
1373 , aux mains, à l’attitude distraite et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends le métro, malgré l’odeur de buanderie et
1374 ins parfums de femmes, rien que pour regarder des êtres et vivre un moment auprès d’eux, le temps de trois stations, le temps
1375 ai sans doute vécues, adolescent — et sûrement ce serait bien autre chose… La femme descend sans se retourner ; l’homme déplie
1376 rs, je pense à autre chose, à quelque chose qui n’ est pas d’ici. Et déjà je ne comprends plus pourquoi j’ai eu ce fort dési
1377 ans le métro, de tutoyer mes compagnons de route. Était -ce envie de donner ou de recevoir ? Il me semble maintenant que j’écr
1378 ur. La même déception de l’amour, parce rien ne s’ est produit, rien ne peut se produire, pour tant de mauvaises raisons qui
1379 t se produire, pour tant de mauvaises raisons qui sont plus fortes que nous tous. — Et alors, dira-t-on : « Faire la révolut
1380 be à fleurs sur le quai désert du métro, enfin un être vrai. Conclusion. — S’occuper des « petits-faits-vrais » vaut mieux
1381 pas qu’il vaut moins qu’un grand fait vrai, comme serait , par exemple, une grande idée embrassée avec force au mépris de soi-m
1382 nom, un fait qui commande tous les autres et qui est la mesure de tout. Quand tu l’auras connu et accepté — tu es seul à p
1383 e de tout. Quand tu l’auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir le connaître — lève-toi et regarde les choses, les ges
1384 jamais qu’un appel à devenir toi-même ce fait qui est plus fort que toi. Car il est tout ce que le monde attend, attend de
1385 oi-même ce fait qui est plus fort que toi. Car il est tout ce que le monde attend, attend de toute éternité pour aujourd’hu
1386 alisée en argent liquide, chez son beau-frère. Il était adversaire du prêt à l’intérêt, condamné par l’église primitive. Il d