1 1936, Articles divers (1936-1938). Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour (1936)
1 Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour (1936)d Aucun ouvrage ne se passe mieu
2 Max Brod, Le Royaume enchanté de l’ amour (1936)d Aucun ouvrage ne se passe mieux de préface qu’un bon
3 passe mieux de préface qu’un bon roman. Pourtant la réussite de Max Brod n’est pas seulement de l’ordre romanesque : elle
4 nt la réussite de Max Brod n’est pas seulement de l’ ordre romanesque : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour le so
5 e : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour le souvenir et davantage, la présence d’un être vrai, qui apporte à tout
6 à un beau drame d’amour le souvenir et davantage, la présence d’un être vrai, qui apporte à toute l’œuvre une émouvante pr
7 , la présence d’un être vrai, qui apporte à toute l’ œuvre une émouvante précision. Le personnage de Garta, dont le lecteur
8 apporte à toute l’œuvre une émouvante précision. Le personnage de Garta, dont le lecteur ne tardera pas à voir qu’il figu
9 émouvante précision. Le personnage de Garta, dont le lecteur ne tardera pas à voir qu’il figure la conscience exigeante, e
10 ont le lecteur ne tardera pas à voir qu’il figure la conscience exigeante, et comme le juge incorruptible et amical du hér
11 ir qu’il figure la conscience exigeante, et comme le juge incorruptible et amical du héros et de son débat, ce personnage
12 : Franz Kafka. De cet esprit incomparable — qu’on l’ entende aux deux sens du terme —, un seul ouvrage a paru en français22
13 ançais22. Ce serait assez pour donner une idée de l’ ordre de grandeur spirituelle et de la singularité de l’œuvre entière.
14 une idée de l’ordre de grandeur spirituelle et de la singularité de l’œuvre entière. Mais bien peu en ont eu connaissance,
15 e de grandeur spirituelle et de la singularité de l’ œuvre entière. Mais bien peu en ont eu connaissance, et moins encore s
16 réserve. Une sorte de stupéfaction respectueuse ; le mutisme de l’homme qui s’est senti touché dans une région de l’être d
17 orte de stupéfaction respectueuse ; le mutisme de l’ homme qui s’est senti touché dans une région de l’être dont il ignorai
18 l’homme qui s’est senti touché dans une région de l’ être dont il ignorait presque l’existence, et qui demande un peu de te
19 ans une région de l’être dont il ignorait presque l’ existence, et qui demande un peu de temps pour formuler sa réaction, v
20 temps pour formuler sa réaction, voilà sans doute l’ explication qu’il faut donner à l’espèce de résistance que rencontre K
21 oilà sans doute l’explication qu’il faut donner à l’ espèce de résistance que rencontre Kafka parmi nous. Rien ne me paraît
22 Kafka parmi nous. Rien ne me paraît plus propre à la réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie roman
23 s. Rien ne me paraît plus propre à la réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie romanesque, l’approc
24 réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie romanesque, l’approche vivante de la personne même de Kafk
25 el a recouru Max Brod ; la biographie romanesque, l’ approche vivante de la personne même de Kafka dans ce qu’elle eut de q
26 ; la biographie romanesque, l’approche vivante de la personne même de Kafka dans ce qu’elle eut de quotidien et de très si
27 ifice gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut l’ ami le plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’est chargé de publi
28 gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut l’ami le plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’est chargé de publier ses
29 grande part inédites, et que Kafka lui-même, par l’ excès d’un scrupule à la fois artistique et religieux, souhaitait que
30 à la fois artistique et religieux, souhaitait que l’ on détruisît. Max Brod s’est expliqué sur ce point délicat dans une no
31 liqué sur ce point délicat dans une note jointe à l’ édition posthume du Procès : je doute que les lecteurs de ce livre éto
32 nte à l’édition posthume du Procès : je doute que les lecteurs de ce livre étonnant, le plus profond qu’on puisse imaginer,
33 : je doute que les lecteurs de ce livre étonnant, le plus profond qu’on puisse imaginer, aient le courage de le lui reproc
34 ant, le plus profond qu’on puisse imaginer, aient le courage de le lui reprocher. La piété même que voue Max Brod à la mém
35 rofond qu’on puisse imaginer, aient le courage de le lui reprocher. La piété même que voue Max Brod à la mémoire de son am
36 e imaginer, aient le courage de le lui reprocher. La piété même que voue Max Brod à la mémoire de son ami le retint d’entr
37 té même que voue Max Brod à la mémoire de son ami le retint d’entreprendre au lendemain de la mort de Kafka sa biographie
38 son ami le retint d’entreprendre au lendemain de la mort de Kafka sa biographie objective. Mais par une sorte de compensa
39 on tout inconsciente, c’est au désir de prolonger le merveilleux dialogue interrompu que l’auteur du Royaume enchanté attr
40 prolonger le merveilleux dialogue interrompu que l’ auteur du Royaume enchanté attribue aujourd’hui l’inspiration de ce ro
41 l’auteur du Royaume enchanté attribue aujourd’hui l’ inspiration de ce roman. Sachons-lui gré d’accorder par là même, à un
42 d’accorder par là même, à un public plus étendu, l’ avance nécessaire, le gage tout humain dont certains lecteurs ont beso
43 me, à un public plus étendu, l’avance nécessaire, le gage tout humain dont certains lecteurs ont besoin, pour se risquer à
44 quer à découvrir un génie tellement « étranger »… Le récit de Max Brod est librement imaginé. Toutefois le personnage de G
45 écit de Max Brod est librement imaginé. Toutefois le personnage de Garta, ses propos, sa vision du monde, ses expériences
46 onde, ses expériences et préoccupations sociales, les lectures qu’il fait à son ami, la brève idylle de Weimar… tout cela c
47 ions sociales, les lectures qu’il fait à son ami, la brève idylle de Weimar… tout cela compose une description exacte de l
48 imar… tout cela compose une description exacte de la jeunesse de Kafka. Quelques faits et deux ou trois dates suffiront dé
49 aquit à Prague en 1883. Il passa dans cette ville la plus grande partie de sa vie. Docteur en droit, il travailla d’abord
50 les, puis d’une compagnie d’assurances ouvrières. Le travail manuel l’attirait ; il s’essaya dans un atelier de menuiserie
51 mpagnie d’assurances ouvrières. Le travail manuel l’ attirait ; il s’essaya dans un atelier de menuiserie, puis dans une en
52 nombre de récits. Mais on trouva dans ses papiers les manuscrits presque complets de trois romans : Le Procès, Le Château,
53 les manuscrits presque complets de trois romans : Le Procès, Le Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde
54 its presque complets de trois romans : Le Procès, Le Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde est d’une
55 rois romans : Le Procès, Le Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde est d’une précision proprement ango
56 Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde est d’une précision proprement angoissante. Il considère notre
57 issante. Il considère notre vie quotidienne, mais avec une minutie telle qu’on ne tarde pas à pressentir que la plupart de n
58 ndent et masquent à peine une foncière absurdité. L’ état d’extrême lucidité que suscite en nous cette vision ressemble à s
59 ar. Mais alors que tant de poètes s’efforçaient à la même époque de délirer méthodiquement, et de brouiller tous les plans
60 e de délirer méthodiquement, et de brouiller tous les plans du réel à seule fin de s’en évader — durant le temps de leur iv
61 plans du réel à seule fin de s’en évader — durant le temps de leur ivresse tout au moins — Kafka nous ramène sans cesse, a
62 sse tout au moins — Kafka nous ramène sans cesse, avec une sorte d’humour inflexible, à la conscience la plus sobre de notre
63 sans cesse, avec une sorte d’humour inflexible, à la conscience la plus sobre de notre humaine condition. On dirait qu’il
64 ec une sorte d’humour inflexible, à la conscience la plus sobre de notre humaine condition. On dirait qu’il incite ses hér
65 dirait qu’il incite ses héros à pratiquer contre la vie bourgeoise une espèce de « grève perlée » : c’est à force de cons
66 orce de conscience, de naturel, d’exactitude dans l’ exercice de leurs tâches banales et de leurs relations sociales, qu’il
67 ns sociales, qu’ils en découvrent et en dénoncent l’ impossibilité foncière. À serrer de si près le réel, on le convainc ra
68 ent l’impossibilité foncière. À serrer de si près le réel, on le convainc rapidement de monstruosité et de scandale métaph
69 ibilité foncière. À serrer de si près le réel, on le convainc rapidement de monstruosité et de scandale métaphysique. Et d
70 Et dès lors tout devient étrangement signifiant, le fait divers s’agrandit peu à peu aux proportions d’une parabole de l’
71 andit peu à peu aux proportions d’une parabole de l’ existence. Ou bien c’est le contraire : partant d’un fait inexplicable
72 ions d’une parabole de l’existence. Ou bien c’est le contraire : partant d’un fait inexplicable et monstrueux23 survenu da
73 un fait inexplicable et monstrueux23 survenu dans la vie de son héros, Kafka nous amène à penser que le détail de l’existe
74 venu dans la vie de son héros, Kafka nous amène à penser que le détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui
75 a vie de son héros, Kafka nous amène à penser que le détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois
76 héros, Kafka nous amène à penser que le détail de l’ existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois l’accompagne
77 à penser que le détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois l’accompagne en sourdine s’explique
78 e banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois l’ accompagne en sourdine s’expliquent de la manière la plus logique sitô
79 parfois l’accompagne en sourdine s’expliquent de la manière la plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial my
80 accompagne en sourdine s’expliquent de la manière la plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial mystérieux et
81 liquent de la manière la plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial mystérieux et d’apparence extravagante. De
82 rence extravagante. Derrière cette psychologie de l’ angoisse quotidienne, l’on pressent chez Kafka des intentions morales,
83 ière cette psychologie de l’angoisse quotidienne, l’ on pressent chez Kafka des intentions morales, une philosophie, et la
84 Kafka des intentions morales, une philosophie, et la recherche au moins d’une théologie. Tout cela, qui n’est pas exprimé
85 trahi par certaines bizarreries du récit, donne à l’ œuvre une grandeur poétique, un pouvoir d’inquiéter presque morbide au
86 mais aussi, pour qui sait comprendre, salutaire… Les lectures favorites et les préoccupations sociales de « Garta », telle
87 comprendre, salutaire… Les lectures favorites et les préoccupations sociales de « Garta », telles que nous les décrit Max
88 ccupations sociales de « Garta », telles que nous les décrit Max Brod, aideront à deviner la nature assez rare du dessein s
89 que nous les décrit Max Brod, aideront à deviner la nature assez rare du dessein secret de Kafka. Sa passion de l’absolu
90 ez rare du dessein secret de Kafka. Sa passion de l’ absolu moral et religieux, sa psychologie de l’angoisse dérivent sans
91 de l’absolu moral et religieux, sa psychologie de l’ angoisse dérivent sans doute de Kierkegaard, qu’il fut l’un des premie
92 ’utilité, d’éducation des forces spirituelles par l’ activité pratique et sociale, volonté qui se manifeste tout au long de
93 este tout au long de son existence, et qui devait l’ amener entre autres, à son projet de participation au jeune mouvement
94 sans doute assez pour faire entrevoir au lecteur l’ arrière-plan et les prolongements de l’aventure du « vieux Pragois »,
95 pour faire entrevoir au lecteur l’arrière-plan et les prolongements de l’aventure du « vieux Pragois », héros non tout à fa
96 au lecteur l’arrière-plan et les prolongements de l’ aventure du « vieux Pragois », héros non tout à fait imaginaire, lui a
97 ait imaginaire, lui aussi, du Royaume enchanté de l’ amour. 22. Le Procès, roman traduit de l’allemand par A. Vialatte.
98 lui aussi, du Royaume enchanté de l’amour. 22. Le Procès, roman traduit de l’allemand par A. Vialatte. Deux autres réci
99 té de l’amour. 22. Le Procès, roman traduit de l’ allemand par A. Vialatte. Deux autres récits de Kafka ont été publiés
100 . Deux autres récits de Kafka ont été publiés par la Nouvelle Revue française  : La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par
101 t été publiés par la Nouvelle Revue française  : La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par exemple : la métamorphose subite
102 a Nouvelle Revue française  : La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par exemple : la métamorphose subite d’un jeune homme e
103 La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par exemple : la métamorphose subite d’un jeune homme en une bête innommable et même i
104 une bête innommable et même indescriptible (dans La Métamorphose). Ou encore : l’inculpation inexplicable qui pèse sur le
105 ndescriptible (dans La Métamorphose). Ou encore : l’ inculpation inexplicable qui pèse sur le héros du Procès. d. Rougemo
106 encore : l’inculpation inexplicable qui pèse sur le héros du Procès. d. Rougemont Denis de, Brod Max, « [Préface] Max B
107 ugemont Denis de, Brod Max, « [Préface] Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour  », dans Le Royaume enchanté de l’amour,
108 Max, « [Préface] Max Brod, Le Royaume enchanté de l’ amour  », dans Le Royaume enchanté de l’amour, Paris, Édition « Je ser
109 Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour  », dans Le Royaume enchanté de l’amour, Paris, Édition « Je sers », 1936, p. 9-1
110 chanté de l’amour  », dans Le Royaume enchanté de l’ amour, Paris, Édition « Je sers », 1936, p. 9-12.
2 1936, Articles divers (1936-1938). Forme et transformation, ou l’acte selon Kierkegaard (janvier 1936)
111 Forme et transformation, ou l’ acte selon Kierkegaard (janvier 1936)c « Toute mon activité d’auteu
112 Car on n’est pas chrétien, et même on ne peut pas l’ être, mais il faut le devenir. Et le problème, alors, devient celui de
113 tien, et même on ne peut pas l’être, mais il faut le devenir. Et le problème, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire
114 n ne peut pas l’être, mais il faut le devenir. Et le problème, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire de la création
115 devenir. Et le problème, alors, devient celui de l’ acte, c’est-à-dire de la création d’une possibilité nouvelle, sans pré
116 , alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire de la création d’une possibilité nouvelle, sans précédent. Y a-t-il des act
117 té nouvelle, sans précédent. Y a-t-il des actes ? L’ homme d’aujourd’hui ne le croit pas. Il croit aux lois, et il se veut
118 nt. Y a-t-il des actes ? L’homme d’aujourd’hui ne le croit pas. Il croit aux lois, et il se veut déterminé. Or il l’est da
119 Il croit aux lois, et il se veut déterminé. Or il l’ est dans la mesure exacte où il l’accepte ; mais dans cette mesure mêm
120 x lois, et il se veut déterminé. Or il l’est dans la mesure exacte où il l’accepte ; mais dans cette mesure même, il se pe
121 éterminé. Or il l’est dans la mesure exacte où il l’ accepte ; mais dans cette mesure même, il se peut qu’il cesse d’être h
122 e même, il se peut qu’il cesse d’être humain. Car l’ homme n’a d’existence proprement humaine que lorsqu’il participe à la
123 ence proprement humaine que lorsqu’il participe à la transformation du monde. Autrement, il est animal, et soumis à la for
124 n du monde. Autrement, il est animal, et soumis à la forme des choses, — à la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas
125 est animal, et soumis à la forme des choses, — à la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à l’acte, c’est qu’ils n
126 la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à l’ acte, c’est qu’ils ne connaissent plus aucun chemin. Comment marcher,
127 on appelle ainsi leur anxiété. En vérité, toutes les démonstrations savantes qu’on nous a faites depuis un siècle pour nou
128 s a faites depuis un siècle pour nous prouver que l’ acte est impossible et que le tout de l’homme est soumis au calcul, to
129 our nous prouver que l’acte est impossible et que le tout de l’homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et
130 ouver que l’acte est impossible et que le tout de l’ homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et des sociol
131 ciences et des sociologies établit à grands frais l’ évidence du désespoir : l’homme moderne a perdu « le chemin ». Je sui
132 établit à grands frais l’évidence du désespoir : l’ homme moderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et
133 évidence du désespoir : l’homme moderne a perdu «  le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1
134 : l’homme moderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le che
135 oderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Chr
136 u « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vé
137 n ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce
138 chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la
139 rité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la
140 rist. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la seule explication vraie
141 min Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c
142 est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître
143 ’être la vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aur
144 est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu
145 aie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas
146 té… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été la vérité
147 tre la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été la vérité ; et nul homme ne connaît davan
148 urait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été la vérité ; et nul homme ne connaît davantage de vérité qu’il n’en incar
149 ntage de vérité qu’il n’en incarne.3 Voici donc le mystère : s’il n’y a pas de chemin, nous ne pouvons marcher, mais si
150 si nous ne marchons pas, il n’y a pas de chemin. La foi au Christ nous permet seule de franchir ce cercle enchanté où nou
151 de franchir ce cercle enchanté où nous maintient l’ argument du démon — le serpent qui se mord la queue. La foi au Christ
152 enchanté où nous maintient l’argument du démon — le serpent qui se mord la queue. La foi au Christ est la condition néces
153 ient l’argument du démon — le serpent qui se mord la queue. La foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de
154 ument du démon — le serpent qui se mord la queue. La foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de tout acte
155 erpent qui se mord la queue. La foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de tout acte véritable, de toute m
156 marche, de toute création, de toute victoire sur la Nécessité. « Je suis le chemin ». Mais un chemin n’est un chemin que
157 on, de toute victoire sur la Nécessité. « Je suis le chemin ». Mais un chemin n’est un chemin que si on y marche4. Sinon i
158 inon il n’est qu’un point de vue ; ou bien encore le lieu d’un pur possible, et sur ces lieux règne le désespoir. Il nous
159 le lieu d’un pur possible, et sur ces lieux règne le désespoir. Il nous faut donc agir, si nous voulons la vérité, agir en
160 ésespoir. Il nous faut donc agir, si nous voulons la vérité, agir en vérité, c’est-à-dire agir dans le Christ. La possibil
161 la vérité, agir en vérité, c’est-à-dire agir dans le Christ. La possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y
162 agir en vérité, c’est-à-dire agir dans le Christ. La possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc auc
163 est-à-dire agir dans le Christ. La possibilité de l’ acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc aucun acte possible,
164 possible, aucun acte vrai et vivant en dehors de la foi au Christ. Mais croire au Christ, c’est croire au Paradoxe de l’i
165 ais croire au Christ, c’est croire au Paradoxe de l’ incarnation, c’est croire que Dieu a revêtu la forme de ce monde, c’es
166 de l’incarnation, c’est croire que Dieu a revêtu la forme de ce monde, c’est croire donc que cette forme peut être transf
167 transformée. — à vrai dire, en vertu du paradoxe le plus fou. Nous ne pouvons agir « qu’en vertu de l’absurde » ; mais ce
168 e plus fou. Nous ne pouvons agir « qu’en vertu de l’ absurde » ; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alors les règles,
169  ; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alors les règles, les morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même
170 seul donne un sens à nos vies. Alors les règles, les morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même temps qu’el
171 sens à nos vies. Alors les règles, les morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même temps qu’elles nous privai
172 morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même temps qu’elles nous privaient de tout pouvoir, s’évanouissent et
173 , s’évanouissent et meurent aux pages des livres. L’ action de l’homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les
174 sent et meurent aux pages des livres. L’action de l’ homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les normes. Au p
175 ges des livres. L’action de l’homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les normes. Au premier pas que nous fa
176 L’action de l’homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les normes. Au premier pas que nous faisons dans notr
177 e devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les normes. Au premier pas que nous faisons dans notre nuit, voici que le
178 r pas que nous faisons dans notre nuit, voici que le chemin s’éclaire et que les perspectives se dégagent. Et nous allons
179 notre nuit, voici que le chemin s’éclaire et que les perspectives se dégagent. Et nous allons connaître maintenant que seu
180 ent. Et nous allons connaître maintenant que seul l’ acte de foi est création, transformation, nouveauté pure dans le monde
181 est création, transformation, nouveauté pure dans le monde, vocation et personne éternelle, prophétie de l’éternité qui vi
182 nde, vocation et personne éternelle, prophétie de l’ éternité qui vient à nous. 2. Il n’est d’action que prophétique
183 ophétique Qu’est-ce que prophétiser sinon dire la Parole qui détermine notre avenir ? Mais la Parole n’est dite que dan
184 dire la Parole qui détermine notre avenir ? Mais la Parole n’est dite que dans la foi, la foi n’existe que dans l’acte, e
185 notre avenir ? Mais la Parole n’est dite que dans la foi, la foi n’existe que dans l’acte, et cet acte devient alors notre
186 enir ? Mais la Parole n’est dite que dans la foi, la foi n’existe que dans l’acte, et cet acte devient alors notre chemin
187 st dite que dans la foi, la foi n’existe que dans l’ acte, et cet acte devient alors notre chemin et notre loi. Ainsi nous
188 e pouvons connaître que ce que nous prophétisons. Le chrétien marche dans la nuit en créant sa lumière et son chemin5, lum
189 ce que nous prophétisons. Le chrétien marche dans la nuit en créant sa lumière et son chemin5, lumière qui n’est pas sa lu
190 min toujours imprévisible, certitude que devinent les pas, chemin qui se dérobe au doute et à l’orgueil, mais que parfois l
191 inent les pas, chemin qui se dérobe au doute et à l’ orgueil, mais que parfois la prophétie fait briller devant lui comme u
192 dérobe au doute et à l’orgueil, mais que parfois la prophétie fait briller devant lui comme un éclair. « Sachez qu’à l’or
193 briller devant lui comme un éclair. « Sachez qu’à l’ origine, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes les créatures,
194 e, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes les créatures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et
195 s un dialogue de Kassner6 — toutes les créatures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres pa
196 ue de Kassner6 — toutes les créatures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et
197 ner6 — toutes les créatures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisa
198 utes les créatures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisaient, pare
199 tures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisaient, pareils aux proph
200 l, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisaient, pareils aux prophètes. C’est de
201 qui dans sa fin possède son commencement ». Mais l’ homme déchu de son origine éternelle a perdu la vision de sa fin. Le v
202 is l’homme déchu de son origine éternelle a perdu la vision de sa fin. Le voici prisonnier des formes et des nombres, escl
203 on origine éternelle a perdu la vision de sa fin. Le voici prisonnier des formes et des nombres, esclave des lois d’un mon
204 un monde sur lequel il devrait régner. Seule peut l’ en délivrer la Parole prophétique qui lui advient comme un appel dans
205 equel il devrait régner. Seule peut l’en délivrer la Parole prophétique qui lui advient comme un appel dans les ténèbres.
206 e prophétique qui lui advient comme un appel dans les ténèbres. Certains reçoivent l’ordre de parler, et c’est là leur acti
207 me un appel dans les ténèbres. Certains reçoivent l’ ordre de parler, et c’est là leur action, leur prophétie et leur salut
208 tion, leur prophétie et leur salut. Cependant que les hommes les frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, d
209 prophétie et leur salut. Cependant que les hommes les frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la voca
210 salut. Cependant que les hommes les frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la vocation prophétique
211 la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la vocation prophétique pareille à celle des hommes de Dieu qui se lèven
212 lle à celle des hommes de Dieu qui se lèvent sous l’ Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui les conduira au marty
213 ui se lèvent sous l’Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin
214 lèvent sous l’Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, l
215 ’Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, leur vérité et l
216 nfond avec la parole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, leur vérité et leur vie dans ce monde ;
217 vérité et leur vie dans ce monde ; ils meurent de l’ avoir dite, et n’ont pas d’autre tâche7. Le chemin est imprévisible ;
218 ent de l’avoir dite, et n’ont pas d’autre tâche7. Le chemin est imprévisible ; le nôtre, disons-nous, n’est pas celui de c
219 nous, n’est pas celui de ces prophètes. Cependant la question demeure : comment agir, et comment transformer, c’est-à-dire
220 comment transformer, c’est-à-dire comment obéir à la Parole qui prophétise ? Le chemin est imprévisible. Ce que nous conna
221 à-dire comment obéir à la Parole qui prophétise ? Le chemin est imprévisible. Ce que nous connaissons, c’est pourtant son
222 connaissons, c’est pourtant son point de départ. Le chemin commence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ordre q
223 mence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ ordre qu’il reçoit de Dieu, — n’importe où et n’importe qui, à n’impor
224 n’importe quelle règle d’action chrétienne, — ose la mettre en pratique. L’action que tu introduiras ainsi dans la réalité
225 d’action chrétienne, — ose la mettre en pratique. L’ action que tu introduiras ainsi dans la réalité portera la marque de l
226 pratique. L’action que tu introduiras ainsi dans la réalité portera la marque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qu
227 que tu introduiras ainsi dans la réalité portera la marque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement
228 duiras ainsi dans la réalité portera la marque de l’ absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement chrétien (Jo
229 la réalité portera la marque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement chrétien (Journal). Vends ton
230 ritablement chrétien (Journal). Vends ton bien et le donne aux pauvres, par exemple, ou si tu ne possèdes pas de bien, ces
231 si tu ne possèdes pas de bien, cesse d’en désirer la possession, et vis comme un chrétien : au jour le jour, sans assuranc
232 la possession, et vis comme un chrétien : au jour le jour, sans assurances et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans l
233 r le jour, sans assurances et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans la confiance et l’inquiétude, — on pourrait dire,
234 ces et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans la confiance et l’inquiétude, — on pourrait dire, dans une sorte d’humou
235 aration, à la grâce de Dieu, dans la confiance et l’ inquiétude, — on pourrait dire, dans une sorte d’humour — dans l’avent
236  on pourrait dire, dans une sorte d’humour — dans l’ aventure de celui que rien ne protège et la prudence de celui qui écou
237 — dans l’aventure de celui que rien ne protège et la prudence de celui qui écoute, dans le tourment et dans la joie d’une
238 protège et la prudence de celui qui écoute, dans le tourment et dans la joie d’une découverte quotidienne du chemin, — to
239 nce de celui qui écoute, dans le tourment et dans la joie d’une découverte quotidienne du chemin, — ton chemin, sur lequel
240 on chemin, sur lequel tu es seul, parce qu’il est la parole de ta vie, sa mesure et sa vocation, son risque à chaque insta
241 secret du risque. 3. Nous n’avons pas à suivre le chemin, mais bien à l’inventer à chaque pas Tant que nous considér
242 Nous n’avons pas à suivre le chemin, mais bien à l’ inventer à chaque pas Tant que nous considérons le Christ avec des
243 nventer à chaque pas Tant que nous considérons le Christ avec des yeux de moralistes, comme une personnalité morale de
244 chaque pas Tant que nous considérons le Christ avec des yeux de moralistes, comme une personnalité morale de premier plan
245 premier plan qu’il ne resterait plus qu’à imiter, l’ acte demeure un pur possible, un modèle d’acte, une abstraction, c’est
246 sans pour autant nous transformer, et c’est bien la définition de « l’inactuel ». Se conformer à ce pieux idéal, non seul
247 ous transformer, et c’est bien la définition de «  l’ inactuel ». Se conformer à ce pieux idéal, non seulement ce n’est poin
248 oint agir, non seulement c’est limiter par avance le rôle de la foi, c’est-à-dire refuser la foi, mais c’est peut-être sim
249 non seulement c’est limiter par avance le rôle de la foi, c’est-à-dire refuser la foi, mais c’est peut-être simplement « s
250 ar avance le rôle de la foi, c’est-à-dire refuser la foi, mais c’est peut-être simplement « singer » un modèle flatteur et
251 flatteur et rassurant. Et pourquoi ? Parce que «  le chemin » est invisible tant qu’on n’y est pas engagé. Parce que c’est
252 y est pas engagé. Parce que c’est un blasphème de l’ homme pieux, du moraliste, que de prétendre imiter le modèle que ses y
253 omme pieux, du moraliste, que de prétendre imiter le modèle que ses yeux voient et que sa chair perçoit (à la lecture des
254 le que ses yeux voient et que sa chair perçoit (à la lecture des évangiles par exemple) au lieu d’écouter l’ordre, au lieu
255 ture des évangiles par exemple) au lieu d’écouter l’ ordre, au lieu de croire et de faire un pas dans la nuit, sur ce « che
256 ’ordre, au lieu de croire et de faire un pas dans la nuit, sur ce « chemin » qui est le Christ présent. Il y a abîmes entr
257 re un pas dans la nuit, sur ce « chemin » qui est le Christ présent. Il y a abîmes entre ces deux exigences : l’abîme entr
258 présent. Il y a abîmes entre ces deux exigences : l’ abîme entre les mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation
259 a abîmes entre ces deux exigences : l’abîme entre les mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte, l’a
260 exigences : l’abîme entre les mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre la religion
261  : l’abîme entre les mérites humains et la grâce, l’ abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi
262 re les mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’ imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le te
263 humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’ acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instan
264 et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte, l’ abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instant créate
265 ’abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instant créateur —, entre la
266 imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instant créateur —, entre la forme et la tr
267 acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instant créateur —, entre la forme et la transformation. I
268 e entre la religion et la foi — entre le temps et l’ instant créateur —, entre la forme et la transformation. Il ne faut pa
269 i — entre le temps et l’instant créateur —, entre la forme et la transformation. Il ne faut pas commencer par l’imitation,
270 temps et l’instant créateur —, entre la forme et la transformation. Il ne faut pas commencer par l’imitation, mais par la
271 t la transformation. Il ne faut pas commencer par l’ imitation, mais par la grâce. L’imitation suivra comme un fruit de la
272 l ne faut pas commencer par l’imitation, mais par la grâce. L’imitation suivra comme un fruit de la reconnaissance… Tout c
273 pas commencer par l’imitation, mais par la grâce. L’ imitation suivra comme un fruit de la reconnaissance… Tout commence pa
274 ar la grâce. L’imitation suivra comme un fruit de la reconnaissance… Tout commence par la joie d’être aimé — et ensuite vi
275 un fruit de la reconnaissance… Tout commence par la joie d’être aimé — et ensuite vient l’effort de plaire, constamment e
276 mmence par la joie d’être aimé — et ensuite vient l’ effort de plaire, constamment exalté par la certitude que l’on est aim
277 vient l’effort de plaire, constamment exalté par la certitude que l’on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8
278 e plaire, constamment exalté par la certitude que l’ on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8. Parce qu’il est
279 ertitude que l’on est aimé maintenant, et même si l’ effort échoue »8. Parce qu’il est aimé maintenant, aller maintenant, p
280 qu’il est aimé maintenant, aller maintenant, par la foi, sur ce chemin qui commence à ses pas, — c’est là le destin du ch
281 sur ce chemin qui commence à ses pas, — c’est là le destin du chrétien, c’est son « impossible » destin, le seul acte pos
282 tin du chrétien, c’est son « impossible » destin, le seul acte possible à l’homme. Et c’est l’acte que Dieu initie. 4.
283 on « impossible » destin, le seul acte possible à l’ homme. Et c’est l’acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’absolu
284 destin, le seul acte possible à l’homme. Et c’est l’ acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’absolu, il n’existe qu’u
285 est l’acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’ absolu, il n’existe qu’un seul temps : le présent »9 Nous ne conna
286 apport à l’absolu, il n’existe qu’un seul temps : le présent »9 Nous ne connaissons rien du Christ, du « chemin », en
287 ssons rien du Christ, du « chemin », en dehors de l’ acte de foi qui, supprimant toute distance historique, nous rend conte
288 nous rend contemporains de Son incarnation. Ainsi l’ acte de foi détruit le temps où il a lieu mais comme la plénitude détr
289 s de Son incarnation. Ainsi l’acte de foi détruit le temps où il a lieu mais comme la plénitude détruit le relatif. Il est
290 e de foi détruit le temps où il a lieu mais comme la plénitude détruit le relatif. Il est ce contact impensable de l’étern
291 emps où il a lieu mais comme la plénitude détruit le relatif. Il est ce contact impensable de l’éternité avec notre durée,
292 truit le relatif. Il est ce contact impensable de l’ éternité avec notre durée, et l’on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’e
293 latif. Il est ce contact impensable de l’éternité avec notre durée, et l’on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’est produit, e
294 act impensable de l’éternité avec notre durée, et l’ on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’est produit, et qu’il peut se pro
295 re. « Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans la foi
296 eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans la foi, il n’y aur
297 t là la santé de la foi »10. Si nous vivions dans l’ obéissance et dans la foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais le Jo
298 oi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans la foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais le Jour éternel de la prés
299 ans la foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais le Jour éternel de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le mon
300 aurait ni passé ni futur, mais le Jour éternel de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et l’unité du ge
301 de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et l’unité du genre humain. Si nous vivons dans l’obéissance et
302 ce à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et l’ unité du genre humain. Si nous vivons dans l’obéissance et dans la foi
303 e et l’unité du genre humain. Si nous vivons dans l’ obéissance et dans la foi, l’histoire s’arrêterait comme l’Aspiration
304 humain. Si nous vivons dans l’obéissance et dans la foi, l’histoire s’arrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par
305 Si nous vivons dans l’obéissance et dans la foi, l’ histoire s’arrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par la beaut
306 nce et dans la foi, l’histoire s’arrêterait comme l’ Aspiration d’un homme saisi par la beauté, et le temps immobile s’abîm
307 rrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par la beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans l’amen éternel. Æternit
308 e l’Aspiration d’un homme saisi par la beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans l’amen éternel. Æternitas non est tem
309 la beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans l’ amen éternel. Æternitas non est temporis successio sine fine, sed nunc
310 est temporis successio sine fine, sed nunc stans. L’ éternité a marché sur la terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais n
311 ine fine, sed nunc stans. L’éternité a marché sur la terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’étern
312 c stans. L’éternité a marché sur la terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’éternel et nous lui pr
313 rnité a marché sur la terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’éternel et nous lui préférons nos vi
314 i le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’ éternel et nous lui préférons nos vies : c’est pourquoi nous vivons da
315 férons nos vies : c’est pourquoi nous vivons dans l’ Histoire, et dans l’absence, ou dans la nostalgie des temps qui vienne
316 est pourquoi nous vivons dans l’Histoire, et dans l’ absence, ou dans la nostalgie des temps qui viennent ; c’est pourquoi
317 ivons dans l’Histoire, et dans l’absence, ou dans la nostalgie des temps qui viennent ; c’est pourquoi nous n’avons plus d
318 ; c’est pourquoi nous n’avons plus d’être que par la foi, « substance des choses espérées », et c’est pourquoi la Parole,
319 ubstance des choses espérées », et c’est pourquoi la Parole, parmi nous, n’est que promesse et vigilante prophétie de l’in
320 ous, n’est que promesse et vigilante prophétie de l’ invisible. De Séir, une voix crie au prophète11 : « Sentinelle, que di
321 crie au prophète11 : « Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu 
322 que dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi !
323 e la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? —  La sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi ! Si vous vou
324 e dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi ! Si vous voulez interroger, interrogez
325  ? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi ! Si vous voulez interroger, interrogez ; convertissez-vou
326 er, interrogez ; convertissez-vous et revenez ! » La forme du monde est durée, et c’est la forme du péché, du refus de l’i
327 revenez ! » La forme du monde est durée, et c’est la forme du péché, du refus de l’instant éternel12, — le temps, la succe
328 st durée, et c’est la forme du péché, du refus de l’ instant éternel12, — le temps, la succession et le désir. C’est le ret
329 orme du péché, du refus de l’instant éternel12, —  le temps, la succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le ret
330 ché, du refus de l’instant éternel12, — le temps, la succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Di
331 l’instant éternel12, — le temps, la succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le dout
332 l12, — le temps, la succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpos
333 ps, la succession et le désir. C’est le retard de l’ acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le sa
334 cession et le désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et le
335 le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est la lâchet
336 ait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est la lâcheté de l’homme qui se repose sur
337 c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est la lâcheté de l’homme qui se repose sur ses œuvres et
338 s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est la lâcheté de l’homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son
339 tre le savoir et le faire, et c’est la lâcheté de l’ homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec
340 té de l’homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec le serpent. De quelles étranges et secrètes
341 ose sur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec le serpent. De quelles étranges et secrètes façons le temps est lié a
342 ur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec le serpent. De quelles étranges et secrètes façons le temps est lié au p
343 e serpent. De quelles étranges et secrètes façons le temps est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de la
344 ges et secrètes façons le temps est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de la foi, où par grâce il peut
345 façons le temps est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de la foi, où par grâce il peut rompre ce lien.
346 s est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans l’ instant de la foi, où par grâce il peut rompre ce lien. « Si vous voul
347 péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de la foi, où par grâce il peut rompre ce lien. « Si vous voulez interroger
348 « Si vous voulez interroger, interrogez ! », mais la réponse est : « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte
349 , mais la réponse est : « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ;
350 : « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’ acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau
351 tissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau prend son
352 ous ! » À la lumière jaillie de l’acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau prend son cours,
353 et sa mesure est plus mystérieuse encore. Voici : le pécheur pardonné vit dans le temps comme à contre-courant de sa durée
354 euse encore. Voici : le pécheur pardonné vit dans le temps comme à contre-courant de sa durée, vit d’acte en acte. Et son
355 rrait dire : sa patience. Car il se tient où Dieu l’ a mis, et ce n’est plus une dérive. Il vit dans la forme du monde, mai
356 l’a mis, et ce n’est plus une dérive. Il vit dans la forme du monde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de la « vie
357 Il vit dans la forme du monde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de la « vie chrétienne », cette histoire de Dieu
358 nde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de la « vie chrétienne », cette histoire de Dieu dans le temps, cette histo
359 a « vie chrétienne », cette histoire de Dieu dans le temps, cette histoire de l’éternité ! « Il suffit d’un courage pureme
360 histoire de Dieu dans le temps, cette histoire de l’ éternité ! « Il suffit d’un courage purement humain pour renoncer le t
361 suffit d’un courage purement humain pour renoncer le temps afin de gagner l’éternité : car je la gagne et ne puis plus de
362 ment humain pour renoncer le temps afin de gagner l’ éternité : car je la gagne et ne puis plus de toute éternité la renonc
363 oncer le temps afin de gagner l’éternité : car je la gagne et ne puis plus de toute éternité la renoncer ; et c’est le par
364 car je la gagne et ne puis plus de toute éternité la renoncer ; et c’est le paradoxe ; mais il faut un courage paradoxal e
365 uis plus de toute éternité la renoncer ; et c’est le paradoxe ; mais il faut un courage paradoxal et humble pour embrasser
366 aut un courage paradoxal et humble pour embrasser le temps en vertu de l’absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Pa
367 xal et humble pour embrasser le temps en vertu de l’ absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par la foi Abraham ne p
368 vertu de l’absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’ab
369 bsurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord qu’il le
370 la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissa
371 rdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissance, initiation Le
372 ’est par la foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissance, initiation Les deux moments réels
373 foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de l’ acte est renaissance, initiation Les deux moments réels d’une vie d
374 Le temps de l’acte est renaissance, initiation Les deux moments réels d’une vie d’homme, s’il est vrai que Dieu Seul est
375 me, s’il est vrai que Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et la mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la n
376 i que Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et la mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et la m
377 mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et la mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant
378 ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et la mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de la durée : en
379 Entre la naissance et la mort — ou plutôt puisque l’ acte est à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance
380 ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance — toute la réalité de l’homme e
381 e l’acte est à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte.
382 t à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte
383 la durée : entre la mort et la naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tensio
384 tre la mort et la naissance — toute la réalité de l’ homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tension, — passage d
385 e. Tout acte est Passage et tension, — passage de la mort à la vie, tension entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire
386 te est Passage et tension, — passage de la mort à la vie, tension entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire de la Paro
387 entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire de la Parole sur la chair, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la
388 résiste et ce qui crée, victoire de la Parole sur la chair, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la loi individue
389 , victoire de la Parole sur la chair, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici qu’on t
390 Parole sur la chair, autorité de la personne sur l’ anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici qu’on touche au mystère
391 ir, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici qu’on touche au mystère, sans lequel tout
392 e, sans lequel tout serait absurde : acte détruit le temps, puisqu’il est dans le même instant et la mort et la vie des êt
393 surde : acte détruit le temps, puisqu’il est dans le même instant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existenc
394 t le temps, puisqu’il est dans le même instant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant
395 puisqu’il est dans le même instant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant le temps,
396 ant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’ existence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le rédime puisqu
397 tres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un
398 omet à l’existence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en le
399 tence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en le liant au dest
400 ime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en le liant au destin personnel. Ainsi l’acte absolu serait création absolu
401 un rythme en le liant au destin personnel. Ainsi l’ acte absolu serait création absolue, mais un acte de l’homme n’est jam
402 e absolu serait création absolue, mais un acte de l’ homme n’est jamais qu’une rédemption. Distinction de théologien, et qu
403 . Distinction de théologien, et qui veut prévenir l’ orgueil. Mais la vision de celui qui agit n’est point un jugement des
404 théologien, et qui veut prévenir l’orgueil. Mais la vision de celui qui agit n’est point un jugement des résultats, — des
405 elle n’est pas davantage appréciation des causes. L’ acte n’est jamais conséquence, il est toujours initiation. La vision d
406 t jamais conséquence, il est toujours initiation. La vision de celui qui agit est tout entière absorbée par l’instant, par
407 n de celui qui agit est tout entière absorbée par l’ instant, par le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel.
408 agit est tout entière absorbée par l’instant, par le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel. « Celui qui doi
409 r le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel. « Celui qui doit agir, s’il veut juger de soi selon le succès q
410 Celui qui doit agir, s’il veut juger de soi selon le succès qu’il remporte, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si
411 e, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si le succès pouvait réjouir le monde entier, il ne sert de rien au héros ;
412 n entreprendre. Même si le succès pouvait réjouir le monde entier, il ne sert de rien au héros ; car le héros n’a connu so
413 e monde entier, il ne sert de rien au héros ; car le héros n’a connu son succès que lorsque tout était fini ; et ce n’est
414 e lorsque tout était fini ; et ce n’est point par le succès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15. Le temps de l’ac
415 cès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15. Le temps de l’acte vient s’inscrire sur les traits du visage héroïque. D
416 t héros, mais par son entreprise »15. Le temps de l’ acte vient s’inscrire sur les traits du visage héroïque. Dans cette ch
417 rise »15. Le temps de l’acte vient s’inscrire sur les traits du visage héroïque. Dans cette chair qui doit vieillir, la ten
418 age héroïque. Dans cette chair qui doit vieillir, la tension de la mort et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’es
419 Dans cette chair qui doit vieillir, la tension de la mort et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que la pe
420 ir qui doit vieillir, la tension de la mort et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que la personne ? C’est
421 vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que la personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vision contre so
422 s victorieuses. Qu’est-ce que la personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vision contre son visage, sa vision
423 s. Qu’est-ce que la personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vision contre son visage, sa vision qui crée son
424 contre son visage, sa vision qui crée son visage. Le visage appartient au temps, mais la vision à la parole dont elle proc
425 e son visage. Le visage appartient au temps, mais la vision à la parole dont elle procède, et si la face d’un homme est be
426 . Le visage appartient au temps, mais la vision à la parole dont elle procède, et si la face d’un homme est belle, c’est p
427 is la vision à la parole dont elle procède, et si la face d’un homme est belle, c’est parce qu’elle est un acte et un dest
428 qu’elle est un acte et un destin, une initiale de l’ histoire, une effigie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de l’
429 estin, une initiale de l’histoire, une effigie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de l’acte, c’est le désespoir
430 stoire, une effigie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de l’acte, c’est le désespoir Nous savons tous cela, com
431 gie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de l’ acte, c’est le désespoir Nous savons tous cela, comme nous savons q
432 le créatrice. 6. Le contraire de l’acte, c’est le désespoir Nous savons tous cela, comme nous savons qu’il faut mour
433 r : sans y croire. À vrai dire, nous avons toutes les raisons d’en douter, s’il est vrai que le doute est révolte, et qu’il
434 toutes les raisons d’en douter, s’il est vrai que le doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de
435 i que le doute est révolte, et qu’il faut pour se l’ avouer la joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écriv
436 doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son tr
437 t qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de l’ acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de la Maladie m
438 ut pour se l’avouer la joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de la Maladie mortelle 16
439 la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de la Maladie mortelle 16, il venait justement de dépasser cette illusion d
440 usion du désespoir, qui consiste à s’imaginer que l’ acte est puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui
441 consiste à s’imaginer que l’acte est puissance de l’ homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que la foi vint saisir s
442 aginer que l’acte est puissance de l’homme : d’où l’ impossibilité de l’oser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant
443 st puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de l’ oser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le c
444 homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le contraire du désesp
445 Celui que la foi vint saisir sait maintenant que l’ acte est le contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre f
446 la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que le
447 que l’acte est le contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que le désespéré ne l’imagine. Parce que
448 spoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que le désespéré ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’
449 e sait d’une tout autre façon que le désespéré ne l’ imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’est pas seulemen
450 re façon que le désespéré ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’est pas seulement renversement, mais
451 ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’ acte n’est pas seulement renversement, mais création irréversible. Et
452 ment, mais création irréversible. Et cela tient à la nature de l’acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’abso
453 éation irréversible. Et cela tient à la nature de l’ acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de la Pers
454 cte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’ absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simpl
455 encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homm
456 origine. Cela tient à l’absolu de la Personne qui l’ initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homme dépourvu de fo
457 ela tient à l’absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’homme
458 absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’homme détendu, vagu
459 l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’ homme dépourvu de foi, l’homme détendu, vague et fiévreux qui peuple n
460 e douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’ homme détendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités, l’homme sans vi
461 détendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités, l’ homme sans visage et sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine que
462 sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine que l’ acte viendra comme un sursaut de joie, comme une révolte, comme une af
463 une affirmation désespérée de son orgueil, comme la preuve enfin de son moi, — mais il sait bien qu’il n’en a pas, ou que
464 t pas et qu’il ne croit à aucun acte. Il vit dans le désir et dans la nostalgie, et son regard n’est pas une vision dans u
465 croit à aucun acte. Il vit dans le désir et dans la nostalgie, et son regard n’est pas une vision dans un visage, mais un
466 ans un visage, mais une manière de loucher vers «  les autres », une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de la classe
467 re de loucher vers « les autres », une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait
468 cher vers « les autres », une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait-il faire
469 une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est
470 Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’ acte est décision, rupture, isolation, quand l’être même du désespéré
471 ar l’acte est décision, rupture, isolation, quand l’ être même du désespéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à la
472 spéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à la réalité des liens et de la masse, à la réalité des autres dans l’ense
473 ns, dans sa croyance à la réalité des liens et de la masse, à la réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pou
474 croyance à la réalité des liens et de la masse, à la réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pourrait-il fai
475 iens et de la masse, à la réalité des autres dans l’ ensemble. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est
476 Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’ acte est immédiat, création et initiation, c’est-à-dire sobriété pure,
477 t initiation, c’est-à-dire sobriété pure, — quand l’ être même du désespéré est calcul, préméditation, sensualité et envie…
478 calcul, préméditation, sensualité et envie… Ainsi l’ acte absolu qu’il imagine serait sa mort, — et c’est pourquoi il n’y c
479 c’est pourquoi il n’y croit pas. Nul n’échappe à la forme du monde. Mais la subir, c’est justement désespérer. Il faudrai
480 roit pas. Nul n’échappe à la forme du monde. Mais la subir, c’est justement désespérer. Il faudrait donc… la créer ? « L’h
481 ir, c’est justement désespérer. Il faudrait donc… la créer ? « L’homme ne peut faire qu’une seule chose en toute sobriété,
482 tement désespérer. Il faudrait donc… la créer ? «  L’ homme ne peut faire qu’une seule chose en toute sobriété, c’est l’abso
483 faire qu’une seule chose en toute sobriété, c’est l’ absolu »17. Entre le désespéré et l’absolu, il y a tout ce romantisme
484 hose en toute sobriété, c’est l’absolu »17. Entre le désespéré et l’absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’acte
485 briété, c’est l’absolu »17. Entre le désespéré et l’ absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’acte soit puissance e
486 l’absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’ acte soit puissance et jouissance, il y a ce moi de désir qui veut que
487 t jouissance, il y a ce moi de désir qui veut que l’ acte — l’instant ! — soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos vi
488 nce, il y a ce moi de désir qui veut que l’acte — l’ instant ! — soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos vies nous m
489 veut que l’acte — l’instant ! — soit durée… Mais l’ absolu qui vient jucher nos vies nous meut parce qu’il est un ordre, u
490 , désirer et décrire ; une rupture et une vision. La présence de l’absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’ins
491 crire ; une rupture et une vision. La présence de l’ absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’instant, c’est l’o
492 pture et une vision. La présence de l’absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’instant, c’est l’obéissance à la
493 absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’ instant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l
494 briété parfaite et insensible de l’instant, c’est l’ obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’
495 et insensible de l’instant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’est-il donc pas
496 nstant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, —  la prophétie dans l’immédiat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul su
497 éissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l’ immédiat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul sur le chemin ; mais
498 diat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul sur le chemin ; mais je vois des visages fraternels où s’agitait la foule co
499 mais je vois des visages fraternels où s’agitait la foule confuse et menaçante. Nous ne voyons aucun visage ailleurs que
500 te. Nous ne voyons aucun visage ailleurs que dans l’ acte d’aimer. 7. Toute vocation est sans précédent Car elle est
501 Car elle est prophétie justement ! — et c’est de la seule prophétie que relèvent la réalité et le sérieux, le risque et l
502 t ! — et c’est de la seule prophétie que relèvent la réalité et le sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L
503 de la seule prophétie que relèvent la réalité et le sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’homme se dist
504 prophétie que relèvent la réalité et le sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’homme se distingue du sin
505 e relèvent la réalité et le sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’homme se distingue du singe en ce qu’i
506 eux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’ homme se distingue du singe en ce qu’il prophétise, uniquement, et dès
507 singe en ce qu’il prophétise, uniquement, et dès l’ origine. C’est pourquoi l’homme a un visage et une vision, ce que n’on
508 ise, uniquement, et dès l’origine. C’est pourquoi l’ homme a un visage et une vision, ce que n’ont pas les animaux ; c’est
509 homme a un visage et une vision, ce que n’ont pas les animaux ; c’est pourquoi l’homme est héroïque. Il faut noter ici un t
510 on, ce que n’ont pas les animaux ; c’est pourquoi l’ homme est héroïque. Il faut noter ici un trait bien remarquable : Kier
511 articulier de son destin qui qualifie précisément la vocation : l’invraisemblable. Ses plus amers reproches au « christian
512 son destin qui qualifie précisément la vocation : l’ invraisemblable. Ses plus amers reproches au « christianisme de la chr
513 e. Ses plus amers reproches au « christianisme de la chrétienté », à cette « inconcevable illusion des sens », ne s’adress
514 on des sens », ne s’adressent-ils pas justement à la « vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à la portée de « la
515  vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à la portée de « la masse », alors que la foi véritable est celle du solit
516 » doctrinale d’une religion mise à la portée de «  la masse », alors que la foi véritable est celle du solitaire que plus r
517 igion mise à la portée de « la masse », alors que la foi véritable est celle du solitaire que plus rien ne soutient, hors
518 elle du solitaire que plus rien ne soutient, hors la foi ? « Celui qui ne renonce pas à la vraisemblance n’entre jamais en
519 tient, hors la foi ? « Celui qui ne renonce pas à la vraisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu. L’audace religieu
520 pas à la vraisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu. L’audace religieuse, à plus forte raison l’audace chrétienne, e
521 aisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu. L’ audace religieuse, à plus forte raison l’audace chrétienne, est au-del
522 ec Dieu. L’audace religieuse, à plus forte raison l’ audace chrétienne, est au-delà de toute vraisemblance, là où préciséme
523 au-delà de toute vraisemblance, là où précisément l’ on renonce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, n
524 e vraisemblance, là où précisément l’on renonce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas le suivr
525 ce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas le suivre ; parce que l’acte est initiateur ; parce q
526 ce »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas le suivre ; parce que l’acte est initiateur ; parce que la dignité de l’
527 ut créer le chemin, non pas le suivre ; parce que l’ acte est initiateur ; parce que la dignité de l’homme est de marcher d
528 vre ; parce que l’acte est initiateur ; parce que la dignité de l’homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser
529 e l’acte est initiateur ; parce que la dignité de l’ homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de
530 rce que la dignité de l’homme est de marcher dans l’ invisible et de prophétiser « en vertu de l’absurde ». L’homme ne peut
531 dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de l’ absurde ». L’homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par « le
532 ible et de prophétiser « en vertu de l’absurde ». L’ homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par « le monde », il
533 ne peut être déterminé que par son Dieu ou par «  le monde », il faut choisir. Il faut être un chrétien ou un bourgeois. L
534 hoisir. Il faut être un chrétien ou un bourgeois. Le bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à l’acte et il meurt au
535 Le bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à l’ acte et il meurt au hasard, sans avoir rencontré personne ni soi-même2
536 oir rencontré personne ni soi-même20. Il vit dans la forme du monde : et ce n’est point qu’elle soit pour lui réelle, elle
537 qu’elle soit pour lui réelle, elle est seulement la moins invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans la nouveauté
538 elle est seulement la moins invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans la nouveauté ne prend mesure que de ce qu’il
539 invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans la nouveauté ne prend mesure que de ce qu’il transforme. Sa connaissance
540 . Sa connaissance est acte et vision prophétique. La mesure du temps de sa vie réside dans la seule vocation qu’il incarne
541 hétique. La mesure du temps de sa vie réside dans la seule vocation qu’il incarne. Sur le chemin qui commence à ses pas, i
542 réside dans la seule vocation qu’il incarne. Sur le chemin qui commence à ses pas, il ne meurt jamais par surprise : et c
543 par surprise : et ce n’est point qu’il ait connu le jour et l’heure, mais il connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cau
544 se : et ce n’est point qu’il ait connu le jour et l’ heure, mais il connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cause de l’ins
545 ’il ait connu le jour et l’heure, mais il connaît l’ instant, s’il vit de Parole. À cause de l’instant éternel, « le héros
546 connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cause de l’ instant éternel, « le héros meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C
547 il vit de Parole. À cause de l’instant éternel, «  le héros meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C’est le secret dernie
548 os meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C’est le secret dernier de l’acte, et le sceau de l’amour chrétien. 3. App
549 nt qu’il ne meure »21. C’est le secret dernier de l’ acte, et le sceau de l’amour chrétien. 3. Apprentissage du christi
550 meure »21. C’est le secret dernier de l’acte, et le sceau de l’amour chrétien. 3. Apprentissage du christianisme. 4.
551 C’est le secret dernier de l’acte, et le sceau de l’ amour chrétien. 3. Apprentissage du christianisme. 4. Dans ce sen
552 Apprentissage du christianisme. 4. Dans ce sens, la catégorie récemment « découverte » par les psychologues de ce qui « s
553 e sens, la catégorie récemment « découverte » par les psychologues de ce qui « se fait se faisant » est une antilogie chrét
554 premier chef, et non pas hindoue, comme certains l’ ont voulu croire. Chez les hindous, elle n’est encore qu’une forme de
555 hindoue, comme certains l’ont voulu croire. Chez les hindous, elle n’est encore qu’une forme de l’agitation humaine. Pour
556 ez les hindous, elle n’est encore qu’une forme de l’ agitation humaine. Pour le chrétien seul elle signifie une transformat
557 encore qu’une forme de l’agitation humaine. Pour le chrétien seul elle signifie une transformation effective. Ou mieux en
558 e transformation effective. Ou mieux encore, pour l’ hindou, cette catégorie suppose la primauté d’un Esprit sans contenu ;
559 ux encore, pour l’hindou, cette catégorie suppose la primauté d’un Esprit sans contenu ; pour le chrétien, la primauté d’u
560 ppose la primauté d’un Esprit sans contenu ; pour le chrétien, la primauté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à
561 auté d’un Esprit sans contenu ; pour le chrétien, la primauté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à mes pieds, u
562 sentier » 6. Die Chimäre, trad. française dans les Éléments de la grandeur humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et t
563 Die Chimäre, trad. française dans les Éléments de la grandeur humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et tombe avec sa mi
564 les Éléments de la grandeur humaine (NRF). 7. «  Le prophète se lève et tombe avec sa mission » (Karl Barth). Il n’a pas
565 humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et tombe avec sa mission » (Karl Barth). Il n’a pas de biographie. Rien ne serait p
566 en ne serait plus ridicule que de tenter de faire la psychologie d’un prophète, ou bien alors elle se réduirait à la gramm
567 d’un prophète, ou bien alors elle se réduirait à la grammaire et à la syntaxe particulière de son message. 8. Journal.
568 bien alors elle se réduirait à la grammaire et à la syntaxe particulière de son message. 8. Journal. « L’imitation suiv
569 taxe particulière de son message. 8. Journal. «  L’ imitation suivra », en allemand, « Die Nachfolge wird nachfolgen ». 9
570 Isaïe 21, 11. 12. Lorsque Schopenhauer écrit : «  Le temps n’a pas son origine dans les choses, mais dans le sujet connais
571 hauer écrit : « Le temps n’a pas son origine dans les choses, mais dans le sujet connaissant », nous retrouvons cette défin
572 ps n’a pas son origine dans les choses, mais dans le sujet connaissant », nous retrouvons cette définition du temps comme
573 trouvons cette définition du temps comme refus de l’ instant et de l’obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est
574 éfinition du temps comme refus de l’instant et de l’ obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est seulement formel
575 refus de l’instant et de l’obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre
576 instant et de l’obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre Kierkegaar
577 a Parole. La ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre Kierkegaard est engendré par la lâcheté du pécheur
578 e temps dont souffre Kierkegaard est engendré par la lâcheté du pécheur, tandis que le temps de Schopenhauer est « l’idéal
579 st engendré par la lâcheté du pécheur, tandis que le temps de Schopenhauer est « l’idéalité » du sujet connaissant, — une
580 écheur, tandis que le temps de Schopenhauer est «  l’ idéalité » du sujet connaissant, — une chimère spiritualiste, une nost
581 mère spiritualiste, une nostalgie. C’est pourquoi le temps de Kierkegaard peut connaître une rédemption par l’acte, quand
582 de Kierkegaard peut connaître une rédemption par l’ acte, quand celui de Schopenhauer s’évanouit en pure absence. 13. K.
583 . K. entend : en vertu de ce paradoxe impensable, l’ Incarnation historique de Dieu. Pas de réponse rationnelle au « Cur De
584 lme. 14. Crainte et tremblement. 15. Actes de l’ amour. 16. Traduction française sous le titre de Traité du désespoir.
585 Actes de l’amour. 16. Traduction française sous le titre de Traité du désespoir. C’est une laïcisation ! Kierkegaard se
586 st une laïcisation ! Kierkegaard se rapportait de la façon la plus précise à Jean XI. 4. 17. Richtet selbst. 18. Ibid.
587 ïcisation ! Kierkegaard se rapportait de la façon la plus précise à Jean XI. 4. 17. Richtet selbst. 18. Ibid. 19. Tou
588 Richtet selbst. 18. Ibid. 19. Toutefois dans le Journal des années 1846 à 1848, on trouve de nombreuses notations de
589 ue sa consigne est de « tenir bon en souffrant ». Le presbytère de campagne serait une solution commode, surtout en regard
590 it trop bien que lui vaudront ses attaques contre l’ Église établie. 20. Ce qui est particulièrement affligeant dans l’exi
591 20. Ce qui est particulièrement affligeant dans l’ existence du bourgeois c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’
592 c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’à la mort, mais que la mort survient comme une absurdité, la première dans
593 entièrement déterminée jusqu’à la mort, mais que la mort survient comme une absurdité, la première dans l’histoire du bou
594 rt survient comme une absurdité, la première dans l’ histoire du bourgeois, mais décisive. À une enquête dont le sujet étai
595 e du bourgeois, mais décisive. À une enquête dont le sujet était : La rencontre la plus importante de votre vie ? M. Cléme
596 ais décisive. À une enquête dont le sujet était : La rencontre la plus importante de votre vie ? M. Clément Vautel qui per
597 À une enquête dont le sujet était : La rencontre la plus importante de votre vie ? M. Clément Vautel qui personnifie de n
598  ? M. Clément Vautel qui personnifie de nos jours le Bourgeois, répondit avec une pertinence géniale : « Je n’ai jamais re
599 i personnifie de nos jours le Bourgeois, répondit avec une pertinence géniale : « Je n’ai jamais rencontré personne ». 21.
600 Rougemont Denis de, « Forme et transformation, ou l’ acte selon Kierkegaard », Hermès, Bruxelles-Paris, janvier 1936, p. 83
3 1936, Articles divers (1936-1938). Décadence des lieux communs (décembre 1936)
601 ent qu’ils vous assourdissent. Ils ne suivent pas la règle du jeu et je ne sais même pas s’ils savent qu’il y en a une. Al
602 y en a une. Alice au Pays des Merveilles On peut penser que notre langue est plus malade que n’était le latin à l’époque de l
603 nser que notre langue est plus malade que n’était le latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet
604 tre langue est plus malade que n’était le latin à l’ époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était enco
605 st plus malade que n’était le latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était encore une rhéto
606 n’était le latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était encore une rhétorique des lieux co
607 — mais forme encore et convention admise par tous les clercs européens. On ne saurait en dire autant du langage de nos bons
608 rivains. Car non seulement il est mal entendu par la grande masse des lecteurs ordinaires, disons des lecteurs de journaux
609 une foule de dialectes ésotériques. Non seulement l’ écrivain moderne use d’une langue dont le lecteur moyen trouve parfait
610 eulement l’écrivain moderne use d’une langue dont le lecteur moyen trouve parfaitement normal de déclarer que « c’est du l
611 philosophiques, que de théories politiques. Ainsi les mots n’ont plus le même sens pour les intellectuels et pour la masse
612 de théories politiques. Ainsi les mots n’ont plus le même sens pour les intellectuels et pour la masse — cela s’est vu en
613 ques. Ainsi les mots n’ont plus le même sens pour les intellectuels et pour la masse — cela s’est vu en d’autres siècles. I
614 plus le même sens pour les intellectuels et pour la masse — cela s’est vu en d’autres siècles. Ils n’ont plus le même sen
615 cela s’est vu en d’autres siècles. Ils n’ont plus le même sens pour les divers partis intellectuels — c’est plus nouveau.
616 ’autres siècles. Ils n’ont plus le même sens pour les divers partis intellectuels — c’est plus nouveau. Mais surtout, ils n
617 auquel on puisse se référer et qui fixe vraiment l’ usage : un sens commun. La plupart des débats qui nous occupent, qu’il
618 ique, de religion ou de littérature, nous offrent l’ image d’un jeu dont les différents partenaires changent la règle à leu
619 e littérature, nous offrent l’image d’un jeu dont les différents partenaires changent la règle à leur fantaisie, chacun cro
620 d’un jeu dont les différents partenaires changent la règle à leur fantaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que les
621 ntaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que les autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas la partie de croquet dan
622 les autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas la partie de croquet dans Alice au pays des merveilles ? Les boules étai
623 ie de croquet dans Alice au pays des merveilles ? Les boules étaient des hérissons vivants, et les soldats s’arc-boutaient
624 es ? Les boules étaient des hérissons vivants, et les soldats s’arc-boutaient sur le sol pour former des arceaux vivants. Q
625 ssons vivants, et les soldats s’arc-boutaient sur le sol pour former des arceaux vivants. Quand Alice avait réussi à mettr
626 à mettre en boule son hérisson, et se préparait à le frapper avec la tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la re
627 boule son hérisson, et se préparait à le frapper avec la tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la regardait d’un
628 e son hérisson, et se préparait à le frapper avec la tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la regardait d’un air
629 a tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la regardait d’un air d’ahurissement profond. Quand elle l’avait remis e
630 rdait d’un air d’ahurissement profond. Quand elle l’ avait remis en position, c’était le hérisson qui se déroulait et coura
631 nd. Quand elle l’avait remis en position, c’était le hérisson qui se déroulait et courait dans la haie voisine. Si par has
632 tait le hérisson qui se déroulait et courait dans la haie voisine. Si par hasard la boule et le maillet restaient en place
633 it et courait dans la haie voisine. Si par hasard la boule et le maillet restaient en place, c’était alors l’arceau-soldat
634 t dans la haie voisine. Si par hasard la boule et le maillet restaient en place, c’était alors l’arceau-soldat qui se leva
635 e et le maillet restaient en place, c’était alors l’ arceau-soldat qui se levait et s’en allait un peu plus loin. Tandis qu
636 evait et s’en allait un peu plus loin. Tandis que la Reine, au comble de la fureur, parcourait le terrain en hurlant au ha
637 peu plus loin. Tandis que la Reine, au comble de la fureur, parcourait le terrain en hurlant au hasard son cri de guerre 
638 que la Reine, au comble de la fureur, parcourait le terrain en hurlant au hasard son cri de guerre : « Qu’on lui coupe la
639 t au hasard son cri de guerre : « Qu’on lui coupe la tête ! » — Ainsi nos mots se déforment entre nos mains, nos problèmes
640 tête ! » — Ainsi nos mots se déforment entre nos mains , nos problèmes se déforment au hasard, chacun joue sa partie comme il
641 forment au hasard, chacun joue sa partie comme il le peut, sans souci de la règle commune, et la terreur domine cette anar
642 un joue sa partie comme il le peut, sans souci de la règle commune, et la terreur domine cette anarchie, distribuant des c
643 me il le peut, sans souci de la règle commune, et la terreur domine cette anarchie, distribuant des condamnations d’autant
644 xcessives d’ailleurs que personne ne se soucie de les mettre à exécution25. « Vous n’avez pas idée, conclut Alice, combien
645 e, conclut Alice, combien c’est affolant de jouer avec des choses vivantes. » ⁂ Prenons cinq mots parmi les plus fréquents d
646 des choses vivantes. » ⁂ Prenons cinq mots parmi les plus fréquents dans le langage et les écrits de notre temps : esprit,
647 ⁂ Prenons cinq mots parmi les plus fréquents dans le langage et les écrits de notre temps : esprit, révolution, liberté, o
648 mots parmi les plus fréquents dans le langage et les écrits de notre temps : esprit, révolution, liberté, ordre, patrie. V
649 esprit, révolution, liberté, ordre, patrie. Voilà les instruments du jeu philosophique, ou politique que nous sommes en tra
650 écrivains ou lecteurs, citoyens ou hommes d’État. Les uns tiennent le parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les
651 eurs, citoyens ou hommes d’État. Les uns tiennent le parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de
652 ns ou hommes d’État. Les uns tiennent le parti de l’ esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révoluti
653 d’État. Les uns tiennent le parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révolution, les autre
654 nnent le parti de l’esprit et les autres celui de l’ ordre, les uns le parti de la révolution, les autres celui de la patri
655 parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns
656 l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudra
657 les autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudraient la libe
658 ui de l’ordre, les uns le parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre
659 ns le parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution
660 de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’esprit
661 les autres celui de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’esprit, ou un esprit pat
662 de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ ordre, ou la révolution par l’esprit, ou un esprit patriotique, ou une
663 e… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’esprit, ou un esprit patriotique, ou une patrie spir
664 ent la liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’ esprit, ou un esprit patriotique, ou une patrie spirituelle… Tandis qu
665 patrie spirituelle… Tandis que d’autres opposent l’ esprit à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de
666 rituelle… Tandis que d’autres opposent l’esprit à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à
667 s que d’autres opposent l’esprit à la révolution, l’ ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la
668 tres opposent l’esprit à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolutio
669 à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinais
670 n, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces per
671 à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces permutations
672 , ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces permutations seraient néan
673 raient néanmoins assez simples à débrouiller dans la pratique, et pourraient définir utilement le parti, si seulement chac
674 dans la pratique, et pourraient définir utilement le parti, si seulement chacun de ces mots avait le même sens pour tout l
675 t le parti, si seulement chacun de ces mots avait le même sens pour tout le monde. Ou, parmi plusieurs sens variés, un sen
676 t chacun de ces mots avait le même sens pour tout le monde. Ou, parmi plusieurs sens variés, un sens prépondérant sur lequ
677 , un sens prépondérant sur lequel puisse se faire l’ accord. Or, sans parler des 29 sens que Littré donne, pour le seul mot
678 r, sans parler des 29 sens que Littré donne, pour le seul mot : esprit, si j’interroge au hasard ceux qui veulent défendre
679 j’interroge au hasard ceux qui veulent défendre «  l’ esprit » contre les menaces dites matérialistes, je constate qu’on ent
680 ard ceux qui veulent défendre « l’esprit » contre les menaces dites matérialistes, je constate qu’on entend par ce mot tant
681 istes, je constate qu’on entend par ce mot tantôt l’ intelligence, tantôt le Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tan
682 n entend par ce mot tantôt l’intelligence, tantôt le Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tantôt les facultés créatr
683 ôt l’intelligence, tantôt le Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tantôt les facultés créatrices de l’homme, ou enco
684 Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tantôt les facultés créatrices de l’homme, ou encore une sagesse asiatique, ou u
685 e des délicats, tantôt les facultés créatrices de l’ homme, ou encore une sagesse asiatique, ou une mentalité de classe ou
686 e, ou une mentalité de classe ou simplement toute la culture et ses produits. Une simple équivoque sémantique dresse parfo
687 bourgeoise ; pour l’autre, présence effective de la pensée et de la foi à nos misères, activité concrète et créatrice, et
688 ur l’autre, présence effective de la pensée et de la foi à nos misères, activité concrète et créatrice, et garantie contre
689 ctivité concrète et créatrice, et garantie contre les préjugés intéressés. « Voyez, gémit Alice, l’arceau sous lequel je do
690 re les préjugés intéressés. « Voyez, gémit Alice, l’ arceau sous lequel je dois passer se promène à l’autre bout du jeu et
691 mène à l’autre bout du jeu et j’aurais dû croquer le hérisson de la Reine s’il ne s’était mis à courir juste au moment où
692 bout du jeu et j’aurais dû croquer le hérisson de la Reine s’il ne s’était mis à courir juste au moment où j’allais jouer.
693 Mais là, aux neuf sens très précis que nous donne le dictionnaire, il nous faut ajouter une dizaine de sens parfois contra
694 izaine de sens parfois contradictoires, créés par la crise actuelle et très mal distingués les uns des autres par la plupa
695 réés par la crise actuelle et très mal distingués les uns des autres par la plupart de ceux qui les prononcent. Ainsi révol
696 ués les uns des autres par la plupart de ceux qui les prononcent. Ainsi révolution signifiera selon les cas : émeute, prise
697 les prononcent. Ainsi révolution signifiera selon les cas : émeute, prise de pouvoir légal, désordre et anarchie, établisse
698 de mesures économiques, trans­mutation de toutes les valeurs morales, etc. Et tous ces sens se chevauchent pour former dan
699 Et tous ces sens se chevauchent pour former dans l’ esprit des polémistes les plus étranges surimpressions26. La liberté s
700 vauchent pour former dans l’esprit des polémistes les plus étranges surimpressions26. La liberté sera invoquée par la concu
701 es polémistes les plus étranges surimpressions26. La liberté sera invoquée par la concurrence et l’oppression capitalistes
702 es surimpressions26. La liberté sera invoquée par la concurrence et l’oppression capitalistes, par les intellectuels anarc
703 6. La liberté sera invoquée par la concurrence et l’ oppression capitalistes, par les intellectuels anarchistes ou libéraux
704 la concurrence et l’oppression capitalistes, par les intellectuels anarchistes ou libéraux, par la presse d’opposition, pa
705 ar les intellectuels anarchistes ou libéraux, par la presse d’opposition, par Staline qui fait taire cette presse au nom d
706 par Staline qui fait taire cette presse au nom de la Révolution, par Hitler dénonçant le Diktat de Versailles, par l’Itali
707 sse au nom de la Révolution, par Hitler dénonçant le Diktat de Versailles, par l’Italie partant à la conquête de l’Éthiopi
708 par Hitler dénonçant le Diktat de Versailles, par l’ Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt l
709 t le Diktat de Versailles, par l’Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si abs
710 Versailles, par l’Italie partant à la conquête de l’ Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, t
711 ’Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc. L’ ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictatur
712 conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictature brutale et arbitra
713 a tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictature brutale et arbitraire, plus rarement la revendication d’un
714 la dictature brutale et arbitraire, plus rarement la revendication d’un équilibre vrai, d’une hiérarchie naturelle et féco
715 naturelle et féconde. Et quant au mot patrie, on le voit confondu, dans les discours et les articles de journaux, avec ét
716 Et quant au mot patrie, on le voit confondu, dans les discours et les articles de journaux, avec état, nation, mystique rac
717 patrie, on le voit confondu, dans les discours et les articles de journaux, avec état, nation, mystique raciale, peuple et
718 u, dans les discours et les articles de journaux, avec état, nation, mystique raciale, peuple et coutumes, ou terre natale,
719 et coutumes, ou terre natale, clocher, etc. D’où l’ embrouillamini de la politique et des partis, et la confusion meurtriè
720 re natale, clocher, etc. D’où l’embrouillamini de la politique et des partis, et la confusion meurtrière de termes dangere
721 ’embrouillamini de la politique et des partis, et la confusion meurtrière de termes dangereusement chargés de passion et d
722 er et aggraver cette crise du sens des mots et de la sémantique vivante. D’une part la somme des échanges écrits ou verbau
723 des mots et de la sémantique vivante. D’une part la somme des échanges écrits ou verbaux a crû depuis la Renaissance dans
724 somme des échanges écrits ou verbaux a crû depuis la Renaissance dans des proportions formidables. D’autre part, le public
725 e dans des proportions formidables. D’autre part, le public capable de goûter une œuvre rigoureuse ou novatrice, et qui po
726 Péguy n’ont guère eu davantage de lecteurs durant la période de leur vie ou paraissaient leurs œuvres capitales. Et je dou
727 scartes n’en convainquit de son vivant. Cependant les journaux du soir à cinq-cent-mille exemplaires et la radio atteignent
728 journaux du soir à cinq-cent-mille exemplaires et la radio atteignent des millions d’auditeurs. Dans cette disproportion i
729 s. Dans cette disproportion impressionnante entre l’ aire de la vraie culture créatrice et régulatrice et l’aire des sous-p
730 tte disproportion impressionnante entre l’aire de la vraie culture créatrice et régulatrice et l’aire des sous-produits st
731 e de la vraie culture créatrice et régulatrice et l’ aire des sous-produits standardisés de la culture de consommation, on
732 trice et l’aire des sous-produits standardisés de la culture de consommation, on aperçoit la raison immédiate de la crise
733 rdisés de la culture de consommation, on aperçoit la raison immédiate de la crise actuelle du langage. La presse, la radio
734 consommation, on aperçoit la raison immédiate de la crise actuelle du langage. La presse, la radio, l’éloquence politique
735 raison immédiate de la crise actuelle du langage. La presse, la radio, l’éloquence politique et les ouvrages populaires à
736 diate de la crise actuelle du langage. La presse, la radio, l’éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirag
737 a crise actuelle du langage. La presse, la radio, l’ éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirage, voilà t
738 ge. La presse, la radio, l’éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirage, voilà tout un domaine que l’écriv
739 ulaires à grand tirage, voilà tout un domaine que l’ écrivain digne du nom ne contrôle pas, ne forme pas, n’atteint même pa
740 e culturelle » préparait peu à peu un public pour les auteurs du niveau supérieur. Cette accession démocratique des grandes
741 Cette accession démocratique des grandes masses à la vie de l’esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actuel d
742 ssion démocratique des grandes masses à la vie de l’ esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actuel du régime.
743 ble dans l’état actuel du régime. Elle est à tout le moins vérifiable. Par contre, on peut très nettement constater le déf
744 ble. Par contre, on peut très nettement constater le déficit que représente pour la culture, la création de ces grandes zo
745 ettement constater le déficit que représente pour la culture, la création de ces grandes zones d’échanges incontrôlés. Ces
746 stater le déficit que représente pour la culture, la création de ces grandes zones d’échanges incontrôlés. Ces échanges en
747 ges en effet aboutissent rapidement à démonétiser les mots. Le vocabulaire des journaux est vague, impropre, sans saveur et
748 et aboutissent rapidement à démonétiser les mots. Le vocabulaire des journaux est vague, impropre, sans saveur et sans pou
749 faits, des choses, ou des idées. Il flatte ainsi la paresse de l’esprit, décourage le sens critique, décontenance les exp
750 oses, ou des idées. Il flatte ainsi la paresse de l’ esprit, décourage le sens critique, décontenance les expressions les p
751 Il flatte ainsi la paresse de l’esprit, décourage le sens critique, décontenance les expressions les plus concrètes. Ainsi
752 ’esprit, décourage le sens critique, décontenance les expressions les plus concrètes. Ainsi les mots perdent leur force et
753 ge le sens critique, décontenance les expressions les plus concrètes. Ainsi les mots perdent leur force et leur délicatesse
754 tenance les expressions les plus concrètes. Ainsi les mots perdent leur force et leur délicatesse d’appel. Et les bons écri
755 erdent leur force et leur délicatesse d’appel. Et les bons écrivains, qui n’ont pas d’autres armes, se voient privés de tou
756 istant. Et leurs conseils paraissent obscurs dans la mesure où ils se veulent scrupuleux. C’est pourquoi la plupart renonc
757 formel et précis, dont ils sont seuls à connaître les règles. (Encore ne sont-ils guère d’accord pour enregistrer les réuss
758 ncore ne sont-ils guère d’accord pour enregistrer les réussites ou les tricheries !) Leur style devient de plus en plus « e
759 guère d’accord pour enregistrer les réussites ou les tricheries !) Leur style devient de plus en plus « exquis » et par su
760 re une volonté d’action bientôt jugée vulgaire. ⁂ La civilisation occidentale aurait-elle donc des fins dernières à quoi e
761 donc des fins dernières à quoi elle tend ? Quand le peuple d’Israël oublie sa vocation et se détourne de l’Éternel son Di
762 ple d’Israël oublie sa vocation et se détourne de l’ Éternel son Dieu, il perd aussi le sens des noms et bientôt sa langue
763 se détourne de l’Éternel son Dieu, il perd aussi le sens des noms et bientôt sa langue délire : « Il prononce des paroles
764 des paroles vaines, des serments faux ! » s’écrie le prophète Osée. Quand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être les
765 serments faux ! » s’écrie le prophète Osée. Quand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être les dociles instruments de l
766 ! » s’écrie le prophète Osée. Quand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être les dociles instruments de la vocation ca
767 uand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être les dociles instruments de la vocation catholique, pour devenir de raffin
768 de Rome cessent d’être les dociles instruments de la vocation catholique, pour devenir de raffinés rhéteurs, ils perdent l
769 iment dans des langues nouvelles, au détriment de l’ unité sacrée. Ainsi toujours : pour peu que le sens des fins vienne à
770 de l’unité sacrée. Ainsi toujours : pour peu que le sens des fins vienne à faiblir et que la mesure commune cesse d’être
771 peu que le sens des fins vienne à faiblir et que la mesure commune cesse d’être effectivement perçue et observée, l’on as
772 ne cesse d’être effectivement perçue et observée, l’ on assiste à la même dégradation des instruments de la culture : — d’u
773 effectivement perçue et observée, l’on assiste à la même dégradation des instruments de la culture : — d’une part les écr
774 assiste à la même dégradation des instruments de la culture : — d’une part les écrivains se mettent à raffiner l’expressi
775 tion des instruments de la culture : — d’une part les écrivains se mettent à raffiner l’expression propre de chaque chose s
776 — d’une part les écrivains se mettent à raffiner l’ expression propre de chaque chose séparée, au détriment de l’expressio
777 n propre de chaque chose séparée, au détriment de l’ expression générale, d’autre part, la grande masse des usagers de la l
778 détriment de l’expression générale, d’autre part, la grande masse des usagers de la langue cesse d’exercer aucun contrôle
779 ale, d’autre part, la grande masse des usagers de la langue cesse d’exercer aucun contrôle sur son parler, qu’elle ne soum
780 elle ne soumet plus à un but unanime. Si bien que les écrivains ne sont plus compris du peuple, et que la langue vulgaire s
781 écrivains ne sont plus compris du peuple, et que la langue vulgaire s’encombre d’équivoques, de confusions et de malenten
782 confusions et de malentendus parfois tragiques : l’ oubli des fins dernières entraîne nécessairement la ruine de la commun
783 ’oubli des fins dernières entraîne nécessairement la ruine de la communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cet
784 ins dernières entraîne nécessairement la ruine de la communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cette absence d
785 îne nécessairement la ruine de la communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cette absence d’un principe commun
786 ne de la communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cette absence d’un principe communautaire vivant et puissan
787 unautaire vivant et puissant dans nos vies, c’est le drame de la civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous le
788 vant et puissant dans nos vies, c’est le drame de la civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous les hommes de
789 s nos vies, c’est le drame de la civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous les hommes de ce temps, s’ils ont
790 st le drame de la civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous les hommes de ce temps, s’ils ont quelque conscie
791 isation, de la culture, de la cité modernes. Tous les hommes de ce temps, s’ils ont quelque conscience, souffrent obscuréme
792 sont ensemble et ils sont seuls. Ils sont pressés les uns contre les autres et étrangers. Ils échangent des paroles en plus
793 t ils sont seuls. Ils sont pressés les uns contre les autres et étrangers. Ils échangent des paroles en plus grand nombre q
794 te. « Paroles vaines, serments faux ! » Or, quand la parole se détruit, quand elle n’est plus le don qu’un homme fait à un
795 quand la parole se détruit, quand elle n’est plus le don qu’un homme fait à un homme, et qui engage quelque chose de son ê
796 e, et qui engage quelque chose de son être, c’est l’ amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est l’inquiétude des masses. El
797 ’est l’amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est l’ inquiétude des masses. Elle n’est pas d’abord matérielle, elle est d’a
798 , elle est d’abord cette inquiétude du cœur et de l’ esprit qui naît de la mort des amitiés. Plus angoissante encore, elle
799 tte inquiétude du cœur et de l’esprit qui naît de la mort des amitiés. Plus angoissante encore, elle règne innommée et pan
800 encore, elle règne innommée et panique partout où l’ amitié humaine n’a jamais rien noué, rien engagé, rien sacrifié, là où
801 gé, rien sacrifié, là où elle n’a pas même laissé les traces d’une coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce que l’homm
802 laissé les traces d’une coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce que l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fa
803 coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce que l’ homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fait à sa place, et contr
804 les villes. Mais ce que l’homme ne fait pas pour l’ homme, le diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et
805 es. Mais ce que l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et qu’il tr
806 e que l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et qu’il trompe. Cett
807 l’homme, le diable le fait à sa place, et contre l’ homme qu’il séduit et qu’il trompe. Cette fin commune, cet idéal commu
808 déal commun que nous devions servir ensemble dans la fraternité que crée l’œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et
809 vions servir ensemble dans la fraternité que crée l’ œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et sans le savoir, dans la
810 dans la fraternité que crée l’œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et sans le savoir, dans la cité qu’on nous a fait
811 vre unanime, nous les cherchions en vain, et sans le savoir, dans la cité qu’on nous a faite. C’est une faim, une soif, un
812 s les cherchions en vain, et sans le savoir, dans la cité qu’on nous a faite. C’est une faim, une soif, une nostalgie que
813 Mais quelqu’un s’en est aperçu. Quelqu’un a formé le projet de tromper cette faim et cette soif. Au païen ignorant du vrai
814 im et cette soif. Au païen ignorant du vrai Dieu, les prêtres donnent des idoles faites à l’image des terreurs de l’homme.
815 rai Dieu, les prêtres donnent des idoles faites à l’ image des terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images, le peuple
816 nnent des idoles faites à l’image des terreurs de l’ homme. Dans le culte de ces images, le peuple croit trouver son unité,
817 es faites à l’image des terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images, le peuple croit trouver son unité, et il y retro
818 terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images, le peuple croit trouver son unité, et il y retrouve en effet le symbole
819 roit trouver son unité, et il y retrouve en effet le symbole agrandi d’un désespoir qu’il sent vivre dans tous les cœurs.
820 agrandi d’un désespoir qu’il sent vivre dans tous les cœurs. L’homme d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il
821 n désespoir qu’il sent vivre dans tous les cœurs. L’ homme d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il faut pense
822 ans tous les cœurs. L’homme d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il faut penser des prêtres et des sorciers.
823 ’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il faut penser des prêtres et des sorciers. On lui donnera donc autre chose : les mê
824 t des sorciers. On lui donnera donc autre chose : les mêmes choses sous d’autres noms, des mystiques et des dictateurs. Les
825 s d’autres noms, des mystiques et des dictateurs. Les lieux communs sont morts et embaumés : déjà, on leur fait des musées.
826 publicitaires, mots d’ordre politiques, tels sont les ersatz pitoyables que nous proposent l’Argent et l’État. Gîovinezza !
827 els sont les ersatz pitoyables que nous proposent l’ Argent et l’État. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que l
828 ersatz pitoyables que nous proposent l’Argent et l’ État. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que l’Amérique !
829 îovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que l’ Amérique ! Achetez français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est ave
830 érique ! Achetez français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, le
831 z français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsom
832 vos vacances à la mer ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bo
833 er ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bourgeois disciplinés.
834 ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bourgeois disciplinés. C’est ce confor
835 ascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bourgeois disciplinés. C’est ce conformisme enthousiaste qui t
836 ennes, quel que soit leur régime politique. Ainsi la mesure n’est plus cette loi qui vit en l’homme réel et personnel, cet
837 . Ainsi la mesure n’est plus cette loi qui vit en l’ homme réel et personnel, cette alliance du peuple avec sa vocation qui
838 homme réel et personnel, cette alliance du peuple avec sa vocation qui faisait la grandeur des cultures authentiques. Elle e
839 e alliance du peuple avec sa vocation qui faisait la grandeur des cultures authentiques. Elle est devenue la loi inexorabl
840 ndeur des cultures authentiques. Elle est devenue la loi inexorable et mécanique qui plie l’individu à des calculs de mass
841 t devenue la loi inexorable et mécanique qui plie l’ individu à des calculs de masses, à des disciplines extérieures, à des
842 ieures, à des ambitions inhumaines. Nous vivons à l’ âge des mots d’ordre. L’on peut penser que c’est une espèce de progrès
843 inhumaines. Nous vivons à l’âge des mots d’ordre. L’ on peut penser que c’est une espèce de progrès sur l’âge des clichés b
844 . Nous vivons à l’âge des mots d’ordre. L’on peut penser que c’est une espèce de progrès sur l’âge des clichés bourgeois. Mais
845 n peut penser que c’est une espèce de progrès sur l’ âge des clichés bourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si l’o
846 progrès sur l’âge des clichés bourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si l’ordre qu’ils imposent est arbitraire, o
847 ourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si l’ ordre qu’ils imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur l’indign
848 imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur l’ indignité humaine ? Et si la propagande et la publicité qui ont pris l
849 s’il ne mise que sur l’indignité humaine ? Et si la propagande et la publicité qui ont pris la place des lieux communs sp
850 sur l’indignité humaine ? Et si la propagande et la publicité qui ont pris la place des lieux communs spirituels et effec
851 Et si la propagande et la publicité qui ont pris la place des lieux communs spirituels et effectifs ne nous ordonnent qu’
852 onnent qu’à des fins provisoires ou dégradantes : l’ État totalitaire, et la richesse matérielle ? Que vaut alors cette com
853 ovisoires ou dégradantes : l’État totalitaire, et la richesse matérielle ? Que vaut alors cette communauté de réflexes et
854 nos défaites intimes, de nos dénis d’humanité, —  le contraire absolu de la culture, si la culture est justement la part a
855 de nos dénis d’humanité, — le contraire absolu de la culture, si la culture est justement la part active que prend l’homme
856 humanité, — le contraire absolu de la culture, si la culture est justement la part active que prend l’homme à tout ce qui
857 absolu de la culture, si la culture est justement la part active que prend l’homme à tout ce qui est création dans la natu
858 la culture est justement la part active que prend l’ homme à tout ce qui est création dans la nature, dans l’histoire, dans
859 que prend l’homme à tout ce qui est création dans la nature, dans l’histoire, dans la vie de l’esprit ? 24. Extrait d’u
860 e à tout ce qui est création dans la nature, dans l’ histoire, dans la vie de l’esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitu
861 st création dans la nature, dans l’histoire, dans la vie de l’esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitulé Penser avec l
862 n dans la nature, dans l’histoire, dans la vie de l’ esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitulé Penser avec les mains ,
863 ec les mains , à paraître chez Albin Michel. 25. Les injures et les marques de mépris hautain dont se gratinent les poètes
864 à paraître chez Albin Michel. 25. Les injures et les marques de mépris hautain dont se gratinent les poètes, les essayiste
865 t les marques de mépris hautain dont se gratinent les poètes, les essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur s
866 s de mépris hautain dont se gratinent les poètes, les essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur sans exemple
867 n dont se gratinent les poètes, les essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur sans exemple dans l’histoire de
868 ètes, les essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur sans exemple dans l’histoire de la culture, trahissent en
869 ciens modernes, avec une fureur sans exemple dans l’ histoire de la culture, trahissent en somme l’impuissance pratique de
870 , avec une fureur sans exemple dans l’histoire de la culture, trahissent en somme l’impuissance pratique de notre langue.
871 ans l’histoire de la culture, trahissent en somme l’ impuissance pratique de notre langue. Si les mots « portaient » réelle
872 somme l’impuissance pratique de notre langue. Si les mots « portaient » réellement, les écrivains seraient moins excités,
873 tre langue. Si les mots « portaient » réellement, les écrivains seraient moins excités, moins excessifs. La Terreur qui règ
874 crivains seraient moins excités, moins excessifs. La Terreur qui règne en permanence dans les revues d’avant-garde est le
875 xcessifs. La Terreur qui règne en permanence dans les revues d’avant-garde est le signe d’une rupture de contact, d’un impu
876 e en permanence dans les revues d’avant-garde est le signe d’une rupture de contact, d’un impuissant dépit, d’un profond p
877 d’un impuissant dépit, d’un profond pessimisme de la pensée qui désespère d’atteindre et de mouvoir effectivement les homm
878 désespère d’atteindre et de mouvoir effectivement les hommes. Cas de Nietzsche, des surréalistes, etc. Ce sont des êtres is
879 Contrairement à ce qui se passe normalement dans les cas d’homonymie ou de polysémie. Ainsi l’on ne risque pas de confondr
880 t dans les cas d’homonymie ou de polysémie. Ainsi l’ on ne risque pas de confondre le vol à la tire et le vol plané dans la
881 polysémie. Ainsi l’on ne risque pas de confondre le vol à la tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis
882 e. Ainsi l’on ne risque pas de confondre le vol à la tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis que les d
883 on ne risque pas de confondre le vol à la tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis que les débats polit
884 e confondre le vol à la tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis que les débats politiques ou électorau
885 plané dans la conversation courante ; tandis que les débats politiques ou électoraux abondent en confusion de cette espèce
886 en confusion de cette espèce et s’en nourrissent. L’ opération fameuse qui consiste à additionner les casseroles et les har
887 t. L’opération fameuse qui consiste à additionner les casseroles et les haricots est à la base de l’éloquence démagogique.
888 euse qui consiste à additionner les casseroles et les haricots est à la base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Den
889 additionner les casseroles et les haricots est à la base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Décadence
890 r les casseroles et les haricots est à la base de l’ éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Décadence des lieux
4 1937, Articles divers (1936-1938). Changer la vie ou changer l’homme ? (1937)
891 Changer la vie ou changer l’homme ? (1937)u Variations du communisme Opp
892 Changer la vie ou changer l’ homme ? (1937)u Variations du communisme Opposez les dogmes ch
893 (1937)u Variations du communisme Opposez les dogmes chrétiens aux axiomes de Marx et d’Engels, les communistes vou
894 dogmes chrétiens aux axiomes de Marx et d’Engels, les communistes vous répondront, non sans apparence d’à-propos, que l’opé
895 us répondront, non sans apparence d’à-propos, que l’ opération les laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histoire
896 t, non sans apparence d’à-propos, que l’opération les laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histoire, non des vér
897 les laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’ histoire, non des vérités éternelles. Placez-vous donc sur ce plan his
898 ez en URSS par exemple. Constatez, comme beaucoup l’ ont fait (qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que la dictatu
899 me beaucoup l’ont fait (qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que la dictature de Staline se rapproche des régimes
900 qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que la dictature de Staline se rapproche des régimes fascistes. Essayez d’en
901 des régimes fascistes. Essayez d’en conclure que le communisme c’est cela, s’il se confond, comme on nous l’affirmait, av
902 unisme c’est cela, s’il se confond, comme on nous l’ affirmait, avec ses effets historiques. On vous répond que vous vous t
903 cela, s’il se confond, comme on nous l’affirmait, avec ses effets historiques. On vous répond que vous vous trompez du tout
904 n’entendez rien au « devenir dialectique », dont la dictature actuelle n’est qu’un stade nécessaire mais provisoire. Vous
905 pprendrez qu’elle fut inventée par Hegel, qui eut le tort de la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur
906 u’elle fut inventée par Hegel, qui eut le tort de la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : q
907 entée par Hegel, qui eut le tort de la fonder sur l’ Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : que le génie de
908 e la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en
909 ur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant su
910 e qui était proprement la poser sur la tête : que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière é
911 ement la poser sur la tête : que le génie de Marx l’ a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière économique ; qu’ai
912 que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière économique ; qu’ainsi lestée, elle a pu se met
913 e Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière économique ; qu’ainsi lestée, elle a pu se mettre en marche e
914 du réel ; que son but primitif était de détruire l’ État au profit de l’homme concret, non sans avoir d’abord renforcé cet
915 ut primitif était de détruire l’État au profit de l’ homme concret, non sans avoir d’abord renforcé cet État jusqu’à l’extr
916 non sans avoir d’abord renforcé cet État jusqu’à l’ extrême qu’on nomme dictature ; et qu’enfin cette dictature disparaîtr
917 ictature disparaîtra nécessairement, d’elle-même, avec les derniers opposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le ré
918 ure disparaîtra nécessairement, d’elle-même, avec les derniers opposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le réel :
919 t, d’elle-même, avec les derniers opposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en
920 ec les derniers opposants. Vous pensiez être dans l’ histoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en pas croire v
921 pposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en pas croire vos yeux, qui voie
922 ets, annonce une constitution qui renforce encore l’ étatisme, et ne parle même plus de sa suppression future. Au contraire
923 arlent. On vous répond que c’est une nécessité de la tactique, dûment prévue d’ailleurs par les dialecticiens. Alors, peut
924 sité de la tactique, dûment prévue d’ailleurs par les dialecticiens. Alors, peut-être, vous commencez à entrevoir ce que si
925 oir ce que signifie : dialectique. C’est en fait, l’ obéissance au parti, l’obéissance aveugle à Staline, dépositaire uniqu
926 ialectique. C’est en fait, l’obéissance au parti, l’ obéissance aveugle à Staline, dépositaire unique de la doctrine. Quitt
927 éissance aveugle à Staline, dépositaire unique de la doctrine. Quitter le plan des vérités éternelles pour entrer dans le
928 aline, dépositaire unique de la doctrine. Quitter le plan des vérités éternelles pour entrer dans le plan de l’histoire, c
929 r le plan des vérités éternelles pour entrer dans le plan de l’histoire, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la
930 es vérités éternelles pour entrer dans le plan de l’ histoire, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la vérité, et
931 re, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la vérité, et ne croire plus qu’à la tactique d’un dictateur, lequel cha
932 ent, renoncer à la vérité, et ne croire plus qu’à la tactique d’un dictateur, lequel changera la vérité tous les six mois.
933 qu’à la tactique d’un dictateur, lequel changera la vérité tous les six mois. Mais alors de quoi donc parle-t-on lorsqu’o
934 ue d’un dictateur, lequel changera la vérité tous les six mois. Mais alors de quoi donc parle-t-on lorsqu’on parle de commu
935 onc parle-t-on lorsqu’on parle de communisme ? Où le prendre ? En quoi peut résider l’identité d’une doctrine qui prétend
936 communisme ? Où le prendre ? En quoi peut résider l’ identité d’une doctrine qui prétend justifier théoriquement, à quelque
937 er théoriquement, à quelques années d’intervalle, la démocratie des Soviets, puis la dictature de Staline ; le pacifisme à
938 ées d’intervalle, la démocratie des Soviets, puis la dictature de Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et l’impér
939 ratie des Soviets, puis la dictature de Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et l’impérialisme actuel (si mal dég
940 Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et l’ impérialisme actuel (si mal déguisé par la IIIe Internationale) ; la l
941 buts et l’impérialisme actuel (si mal déguisé par la IIIe Internationale) ; la lutte contre l’État, et en même temps, le c
942 uel (si mal déguisé par la IIIe Internationale) ; la lutte contre l’État, et en même temps, le capitalisme d’État de Lénin
943 isé par la IIIe Internationale) ; la lutte contre l’ État, et en même temps, le capitalisme d’État de Lénine ; l’expropriat
944 nale) ; la lutte contre l’État, et en même temps, le capitalisme d’État de Lénine ; l’expropriation des patrons en 1918, p
945 en même temps, le capitalisme d’État de Lénine ; l’ expropriation des patrons en 1918, puis la restauration de la propriét
946 énine ; l’expropriation des patrons en 1918, puis la restauration de la propriété privée en 1933 ; la suppression de l’hér
947 tion des patrons en 1918, puis la restauration de la propriété privée en 1933 ; la suppression de l’héritage puis son réta
948 la restauration de la propriété privée en 1933 ; la suppression de l’héritage puis son rétablissement ; l’antimilitarisme
949 e la propriété privée en 1933 ; la suppression de l’ héritage puis son rétablissement ; l’antimilitarisme et la création en
950 ppression de l’héritage puis son rétablissement ; l’ antimilitarisme et la création enthousiaste d’une armée abondamment po
951 ge puis son rétablissement ; l’antimilitarisme et la création enthousiaste d’une armée abondamment pourvue de maréchaux ;
952 te d’une armée abondamment pourvue de maréchaux ; l’ égalité sociale absolue puis la course aux salaires et aux grades ; la
953 vue de maréchaux ; l’égalité sociale absolue puis la course aux salaires et aux grades ; la ruine de la famille puis sa ré
954 solue puis la course aux salaires et aux grades ; la ruine de la famille puis sa réfection systématique ; la critique acer
955 a course aux salaires et aux grades ; la ruine de la famille puis sa réfection systématique ; la critique acerbe de la SDN
956 ne de la famille puis sa réfection systématique ; la critique acerbe de la SDN puis l’entrée dans cet organisme ? Tout cel
957 sa réfection systématique ; la critique acerbe de la SDN puis l’entrée dans cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je
958 systématique ; la critique acerbe de la SDN puis l’ entrée dans cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je l’entends b
959 ns cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je l’ entends bien, par des nécessités pratiques et contingentes, et je n’ai
960 d’intellectuels défendre ces manœuvres au nom de la doctrine, et les justifier à tout coup (avec léger retard sur l’événe
961 défendre ces manœuvres au nom de la doctrine, et les justifier à tout coup (avec léger retard sur l’événement !) par des n
962 nom de la doctrine, et les justifier à tout coup ( avec léger retard sur l’événement !) par des nécessités dites « dialectiqu
963 les justifier à tout coup (avec léger retard sur l’ événement !) par des nécessités dites « dialectiques »… Les communiste
964 ent !) par des nécessités dites « dialectiques »… Les communistes sincères comprendront-ils que cette méthode figure aux ye
965 balance » (Pascal). Je m’en voudrais d’exploiter l’ équivoque. Mais il fallait au moins rappeler son existence, sous peine
966 son existence, sous peine de tomber aussitôt dans les pièges grossiers qu’elle nous tend. (Pièges dans lesquels tombent les
967 qu’elle nous tend. (Pièges dans lesquels tombent les neuf dixièmes des adversaires du marxisme — et combien de marxistes e
968 tes eux-mêmes !) Si maintenant j’essaie de saisir l’ identité foncière et la continuité de l’attitude communiste, au traver
969 ntenant j’essaie de saisir l’identité foncière et la continuité de l’attitude communiste, au travers des contradictions vi
970 de saisir l’identité foncière et la continuité de l’ attitude communiste, au travers des contradictions violentes de ses té
971 en fin de compte, une grande volonté invariable : la volonté de changer le monde. Or une telle volonté ne saurait prendre
972 grande volonté invariable : la volonté de changer le monde. Or une telle volonté ne saurait prendre son élan que dans le s
973 elle volonté ne saurait prendre son élan que dans le sentiment insupportable d’un défaut inhérent au monde. Connaître qu’i
974 onc transformer toutes choses, tel est, je crois, l’ acte initial mais aussi la passion constante du communiste conscient e
975 ses, tel est, je crois, l’acte initial mais aussi la passion constante du communiste conscient et conséquent. C’est ce mou
976 t profond qui légitime, à ses yeux tout au moins, les détours les plus tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’act
977 i légitime, à ses yeux tout au moins, les détours les plus tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’action du parti
978 au moins, les détours les plus tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’action du parti communiste41. La « cause »
979 us tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’ action du parti communiste41. La « cause » justifie les moyens… Mais a
980 dialectiques, de l’action du parti communiste41. La « cause » justifie les moyens… Mais alors, comment ne pas voir que ce
981 tion du parti communiste41. La « cause » justifie les moyens… Mais alors, comment ne pas voir que ce mouvement présente, da
982 as voir que ce mouvement présente, dans sa forme, avec le mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus
983 ir que ce mouvement présente, dans sa forme, avec le mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus fra
984 le mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus frappantes analogies ? Sur ce plan seul, il m’apparaî
985 nt du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus frappantes analogies ? Sur ce plan seul, il m’apparaît qu’une co
986 m’apparaît qu’une confrontation soit possible. L’ homme d’abord, ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chr
987 nfrontation soit possible. L’homme d’abord, ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que
988 ble. L’homme d’abord, ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que l’homme n’existe pas
989 ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que l’homme n’existe pas isolément, qu’il est un
990 e marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que l’ homme n’existe pas isolément, qu’il est un être « en relation », qu’il
991  », qu’il est lié à une société42. Mais encore, à l’ instar du chrétien, le marxiste croit que la société présente n’a pas
992 e société42. Mais encore, à l’instar du chrétien, le marxiste croit que la société présente n’a pas le droit de déterminer
993 re, à l’instar du chrétien, le marxiste croit que la société présente n’a pas le droit de déterminer le tout de l’homme, e
994 le marxiste croit que la société présente n’a pas le droit de déterminer le tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle e
995 a société présente n’a pas le droit de déterminer le tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-
996 résente n’a pas le droit de déterminer le tout de l’ homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-même, et fa
997 le droit de déterminer le tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-même, et fait de l’homme q
998 Car elle est divisée contre elle-même, et fait de l’ homme qui s’abandonne à elle un être antinomique, « divisé », et comme
999 aliéné » de ce qu’il y a de plus humain en lui. À la découverte de « cette aliénation de soi », qui selon Marx serait le f
1000  cette aliénation de soi », qui selon Marx serait le fait de toutes les sociétés passées, y compris le communisme primitif
1001 de soi », qui selon Marx serait le fait de toutes les sociétés passées, y compris le communisme primitif, correspond formel
1002 le fait de toutes les sociétés passées, y compris le communisme primitif, correspond formellement, dans le diagnostic chré
1003 ommunisme primitif, correspond formellement, dans le diagnostic chrétien, la reconnaissance d’une corruption fondamentale,
1004 espond formellement, dans le diagnostic chrétien, la reconnaissance d’une corruption fondamentale, qui est le péché origin
1005 nnaissance d’une corruption fondamentale, qui est le péché originel. Il s’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que pour
1006 , qui est le péché originel. Il s’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que pour le chrétien, l’homme ne pourra trouver
1007 ’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que pour le chrétien, l’homme ne pourra trouver sa plénitude et se « regagner tot
1008 our le marxiste, aussi bien que pour le chrétien, l’ homme ne pourra trouver sa plénitude et se « regagner totalement »43 q
1009 sa plénitude et se « regagner totalement »43 qu’à la faveur d’une économie44 radicalement renouvelée. Une réaction semblab
1010 emblable — toujours dans sa forme — dressera donc le chrétien et le marxiste contre toute espèce de statisme, contre toute
1011 ours dans sa forme — dressera donc le chrétien et le marxiste contre toute espèce de statisme, contre toute spéculation id
1012 ger quelque chose, — à lutter efficacement contre le mal universel. Cette volonté fondamentale de transformation, je la tr
1013 Cette volonté fondamentale de transformation, je la trouve formulée et résumée, de part et d’autre, par deux propositions
1014 tions parfaitement claires qui, tout en affirmant avec vigueur la nécessité d’un « changement », et d’un changement pratique
1015 ement claires qui, tout en affirmant avec vigueur la nécessité d’un « changement », et d’un changement pratique, concret,
1016 , quant aux voies et moyens qu’elles préconisent. La 2e thèse de Marx sur Feuerbach affirme : Les philosophes n’ont fait
1017 ent. La 2e thèse de Marx sur Feuerbach affirme : Les philosophes n’ont fait jusqu’ici qu’interpréter diversement le monde 
1018 s n’ont fait jusqu’ici qu’interpréter diversement le monde ; or il s’agit maintenant de le transformer. Et l’apôtre Paul
1019 diversement le monde ; or il s’agit maintenant de le transformer. Et l’apôtre Paul écrit dans sa Lettre aux Romains (12,
1020  ; or il s’agit maintenant de le transformer. Et l’ apôtre Paul écrit dans sa Lettre aux Romains (12, 2) : Ne vous confor
1021 s à ce siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de votre sens, afin que vous discerniez quelle est la
1022 e votre sens, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans les deux
1023 Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans les deux cas, il s’agit du même mot : transformer ; et il s’agit de trans
1024 sformer ; et il s’agit de transformer en tant que l’ on est proprement humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à l’Espr
1025 n est proprement humain (c’est-à-dire en tant que l’ on obéit à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution
1026 ent humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à l’ Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution, pour Marx).
1027 l’on obéit à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’ on fait la révolution, pour Marx). Il s’agit donc d’action. Il s’agit
1028 t à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution, pour Marx). Il s’agit donc d’action. Il s’agit d’attester
1029 l s’agit donc d’action. Il s’agit d’attester soit la foi, par une réalisation des volontés de Dieu, contrariant celles du
1030 tés de Dieu, contrariant celles du siècle, — soit la pensée, par une action45 qui ne peut être que révolutionnaire. Et cep
1031 ui ne peut être que révolutionnaire. Et cependant l’ opposition de Marx et de l’apôtre éclate en ceci : que Paul veut trans
1032 ionnaire. Et cependant l’opposition de Marx et de l’ apôtre éclate en ceci : que Paul veut transformer l’homme d’abord — et
1033 apôtre éclate en ceci : que Paul veut transformer l’ homme d’abord — et le monde par lui — tandis que Marx veut transformer
1034  : que Paul veut transformer l’homme d’abord — et le monde par lui — tandis que Marx veut transformer le monde d’abord, — 
1035 monde par lui — tandis que Marx veut transformer le monde d’abord, — et l’homme par lui. C’est sur le fait de cette oppos
1036 que Marx veut transformer le monde d’abord, — et l’ homme par lui. C’est sur le fait de cette opposition centrale qu’il im
1037 le monde d’abord, — et l’homme par lui. C’est sur le fait de cette opposition centrale qu’il importe d’être bien au clair,
1038 n centrale qu’il importe d’être bien au clair, si l’ on veut comprendre pourquoi la pratique et les fins du communisme cont
1039 e bien au clair, si l’on veut comprendre pourquoi la pratique et les fins du communisme contredisent radicalement la prati
1040 , si l’on veut comprendre pourquoi la pratique et les fins du communisme contredisent radicalement la pratique et les fins
1041 les fins du communisme contredisent radicalement la pratique et les fins du christianisme, dont elles dérivent d’ailleurs
1042 mmunisme contredisent radicalement la pratique et les fins du christianisme, dont elles dérivent d’ailleurs obscurément, ma
1043 nels, abandonnées aux seules lois du Temps. De la polémique antispiritualiste à la doctrine marxiste On ne répétera
1044 du Temps. De la polémique antispiritualiste à la doctrine marxiste On ne répétera jamais assez que la doctrine orig
1045 trine marxiste On ne répétera jamais assez que la doctrine originelle de Marx est avant tout la mise en forme d’une pol
1046 que la doctrine originelle de Marx est avant tout la mise en forme d’une polémique. Elle est, très consciemment, condition
1047 ue. Elle est, très consciemment, conditionnée par la situation de l’Europe occidentale vers le milieu du xixe siècle, et
1048 ès consciemment, conditionnée par la situation de l’ Europe occidentale vers le milieu du xixe siècle, et par la volonté d
1049 née par la situation de l’Europe occidentale vers le milieu du xixe siècle, et par la volonté de la changer. En particuli
1050 ccidentale vers le milieu du xixe siècle, et par la volonté de la changer. En particulier, elle n’est « matérialiste », a
1051 s le milieu du xixe siècle, et par la volonté de la changer. En particulier, elle n’est « matérialiste », au sens vulgair
1052 ’est « matérialiste », au sens vulgaire, que dans la mesure où la mentalité de l’époque peut être qualifiée — et se qualif
1053 aliste », au sens vulgaire, que dans la mesure où la mentalité de l’époque peut être qualifiée — et se qualifie elle-même
1054 s vulgaire, que dans la mesure où la mentalité de l’ époque peut être qualifiée — et se qualifie elle-même — de spiritualis
1055 se qualifie elle-même — de spiritualiste, au sens le plus contestable du terme. Quelle était, du point de vue religieux, l
1056 u terme. Quelle était, du point de vue religieux, la situation qui se présentait à Marx ? C’était celle de la Restauration
1057 ation qui se présentait à Marx ? C’était celle de la Restauration. Professeurs et bourgeois libéraux, grands patrons du ca
1058 ant en Angleterre et en Allemagne, théologiens de l’ école hégélienne, ou adversaires du christianisme, tous, dans un commu
1059 ssaient entendre, par leur attitude pratique, que la religion concerne « l’homme intérieur » et rien que lui. C’était une
1060 eur attitude pratique, que la religion concerne «  l’ homme intérieur » et rien que lui. C’était une « affaire privée » ; et
1061 ait une « affaire privée » ; et Marx n’a fait que le constater. Elle n’empêchait nullement de faire des affaires. Ni d’opp
1062 it nullement de faire des affaires. Ni d’opprimer les ouvriers. Ni d’appeler justice, au besoin, ce qui était utile aux maî
1063 stice, au besoin, ce qui était utile aux maîtres. La religion ne semblait plus gêner personne46. Elle sanctionnait et prot
1064 gêner personne46. Elle sanctionnait et protégeait l’ ordre établi. Elle traduisait cet établissement même, et non plus ce q
1065 uisait cet établissement même, et non plus ce qui l’ eût jugé. Marx ne perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à la
1066 l’eût jugé. Marx ne perd pas son temps à dénoncer l’ erreur qui est à la base d’une pareille imposture : il la sait trop pr
1067 perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à la base d’une pareille imposture : il la sait trop profondément enraciné
1068 r qui est à la base d’une pareille imposture : il la sait trop profondément enracinée dans l’homme pour être atteinte par
1069 ure : il la sait trop profondément enracinée dans l’ homme pour être atteinte par une simple critique philosophique47. Or c
1070 losophique47. Or cette critique philosophique est la seule arme dont il disposerait sur le plan de l’« esprit », car il es
1071 la seule arme dont il disposerait sur le plan de l’ « esprit », car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas l’« esprit 
1072 », car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas l’ « esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme, que les spiritualistes aba
1073 ce n’est pas l’« esprit » qu’il veut sauver, mais l’ homme, que les spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhu
1074 l’« esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme, que les spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhumain. Il lui f
1075 recourir à un autre ordre d’arguments : ceux que l’ on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part la violence prolétarien
1076 l’on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part la violence prolétarienne, d’autre part la « science » infaillible des l
1077 ’une part la violence prolétarienne, d’autre part la « science » infaillible des lois de l’évolution économique, qu’il for
1078 autre part la « science » infaillible des lois de l’ évolution économique, qu’il formule. Je résume et je simplifie ce proc
1079 fie ce processus : ceux qui prétendent réformer «  l’ intérieur » se gardent bien de toucher à l’extérieur. Marx dira donc,
1080 rmer « l’intérieur » se gardent bien de toucher à l’ extérieur. Marx dira donc, contre eux, qu’il faut d’abord transformer
1081 donc, contre eux, qu’il faut d’abord transformer l’ extérieur — et le reste suivra nécessairement. Pour sauver le reste —
1082 , qu’il faut d’abord transformer l’extérieur — et le reste suivra nécessairement. Pour sauver le reste — disons : la cultu
1083 — et le reste suivra nécessairement. Pour sauver le reste — disons : la culture, l’esprit, et l’âme si l’on y tient — il
1084 a nécessairement. Pour sauver le reste — disons : la culture, l’esprit, et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par l
1085 ment. Pour sauver le reste — disons : la culture, l’ esprit, et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’« 
1086 uver le reste — disons : la culture, l’esprit, et l’ âme si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’« esprit » du b
1087 este — disons : la culture, l’esprit, et l’âme si l’ on y tient — il faut commencer par le nier. L’« esprit » du bourgeois
1088 et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’« esprit » du bourgeois spiritualiste n’est qu’une caricature
1089 si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’ « esprit » du bourgeois spiritualiste n’est qu’une caricature, mais se
1090 nt déjà tels qu’on ne peut plus songer à rétablir la vérité par des moyens purement spirituels. Au mensonge spiritualiste,
1091 t spirituels. Au mensonge spiritualiste, opposons l’ argument frappant d’un matérialisme polémique : nous l’appellerons mat
1092 ument frappant d’un matérialisme polémique : nous l’ appellerons matérialisme dialectique, pour indiquer qu’il n’est que pr
1093 instrumental, qu’il doit servir au bout du compte la vérité ­­— laquelle contient aussi l’« esprit » — bref qu’il n’est en
1094 t du compte la vérité ­­— laquelle contient aussi l’ « esprit » — bref qu’il n’est en somme qu’une tactique. Faisons de néc
1095 ons de nécessité vertu. Proposons-nous de changer les choses et leurs rapports, de changer « le monde », c’est-à-dire les r
1096 hanger les choses et leurs rapports, de changer «  le monde », c’est-à-dire les rapports économiques et sociaux. Et s’il no
1097 s rapports, de changer « le monde », c’est-à-dire les rapports économiques et sociaux. Et s’il nous reste encore du temps,
1098 s’il nous reste encore du temps, nous changerons l’ homme. D’ailleurs, peut-être suffit-il de changer le cadre matériel po
1099 homme. D’ailleurs, peut-être suffit-il de changer le cadre matériel pour que le contenu se transforme ? N’a-t-on pas démon
1100 e suffit-il de changer le cadre matériel pour que le contenu se transforme ? N’a-t-on pas démontré déjà que la culture, pa
1101 nu se transforme ? N’a-t-on pas démontré déjà que la culture, par exemple, n’est qu’un « reflet » du processus économique 
1102 e prend à son jeu polémique. Ce ne fut guère qu’à la fin de sa carrière que son ami Engels en découvrit le danger. « Marx
1103 in de sa carrière que son ami Engels en découvrit le danger. « Marx et moi — écrit-il en 1890 — nous sommes peut-être resp
1104 disciples ont insisté plus qu’il ne convenait sur les facteurs économiques. Nous étions forcés d’insister sur leur caractèr
1105 fondamental, par opposition à nos adversaires qui le niaient, et nous n’eûmes pas toujours le temps ni l’occasion de rendr
1106 ires qui le niaient, et nous n’eûmes pas toujours le temps ni l’occasion de rendre justice aux autres facteurs. » De la
1107 niaient, et nous n’eûmes pas toujours le temps ni l’ occasion de rendre justice aux autres facteurs. » De la doctrine ma
1108 on de rendre justice aux autres facteurs. » De la doctrine marxiste à la tactique stalinienne En effet, de ce « mens
1109 x autres facteurs. » De la doctrine marxiste à la tactique stalinienne En effet, de ce « mensonge » opportuniste qu’
1110 n effet, de ce « mensonge » opportuniste qu’était le matérialisme polémique, promu par un glissement inévitable au rang de
1111 table au rang de doctrine du parti, devait sortir la « vérité » tactique du matérialisme vulgaire, celui que la presse bou
1112 té » tactique du matérialisme vulgaire, celui que la presse bourgeoise a si beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore qu’el
1113 beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore qu’elle le pratique elle-même sans vergogne, tout en le niant pour les besoins d
1114 elle le pratique elle-même sans vergogne, tout en le niant pour les besoins de sa cause. Ce matérialisme vulgaire, que Mar
1115 ue elle-même sans vergogne, tout en le niant pour les besoins de sa cause. Ce matérialisme vulgaire, que Marx avait tout d’
1116 u exactement symétrique de celui des idéalistes : la croyance que si l’on change l’ordre des choses, on change automatique
1117 ique de celui des idéalistes : la croyance que si l’ on change l’ordre des choses, on change automatiquement la réalité hum
1118 i des idéalistes : la croyance que si l’on change l’ ordre des choses, on change automatiquement la réalité humaine. Obligé
1119 nge l’ordre des choses, on change automatiquement la réalité humaine. Obligé par ses adversaires à proclamer la primauté d
1120 é humaine. Obligé par ses adversaires à proclamer la primauté du matériel, Marx ne se rendit pas compte qu’il allait décha
1121 rreur non moins grave que celle des défenseurs de l’ esprit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous
1122 grave que celle des défenseurs de l’esprit pur : l’ erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous ses malheurs es
1123 s défenseurs de l’esprit pur : l’erreur qui porte l’ homme à croire que la cause de tous ses malheurs est dans les choses,
1124 rit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous ses malheurs est dans les choses, et non dans lui. (Il
1125 croire que la cause de tous ses malheurs est dans les choses, et non dans lui. (Il n’en fut pas conscient, et pourtant il e
1126 nsable, nous reviendrons plus tard sur ce point.) Le peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas le
1127 viendrons plus tard sur ce point.) Le peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas le moine, et que
1128 Le peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète que l’ habit ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur. Pr
1129 urgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit
1130 — répète que l’habit ne fait pas le moine, et que l’ argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer qu
1131 ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer que l’habit fait le moi
1132 bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer que l’ habit fait le moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui ex
1133 iquement, il croit dur comme fer que l’habit fait le moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15
1134 it dur comme fer que l’habit fait le moine et que l’ argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15 volumes — dont
1135 er que l’habit fait le moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15 volumes — dont on a fait des
1136 Marx vient lui démontrer que ceux qui prétendent le contraire, et qui prêchent que l’argent ne fait pas le bonheur, sont
1137 qui prétendent le contraire, et qui prêchent que l’ argent ne fait pas le bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui on
1138 ntraire, et qui prêchent que l’argent ne fait pas le bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui ont l’argent et qui veu
1139 bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui ont l’ argent et qui veulent le garder — justement parce qu’il fait leur bonh
1140 des exploiteurs, qui ont l’argent et qui veulent le garder — justement parce qu’il fait leur bonheur ! Alors, il n’y a pl
1141 ors, il n’y a plus qu’une seule voie : instituons le plan quinquennal, créons une industrie puissante, faisons mieux que l
1142 créons une industrie puissante, faisons mieux que l’ Amérique, devenons encore plus riches, car l’argent distribué aux mass
1143 que l’Amérique, devenons encore plus riches, car l’ argent distribué aux masses ne manque pas de créer du bonheur. Pour ré
1144 nheur. Pour réussir, il faut une discipline. Pour la maintenir, il faut un dictateur. Libre aux bourgeois, aux scrupuleux,
1145 e lui-même de s’indigner : il faut ce qu’il faut. L’ étatisme dictatorial contredit la doctrine de Marx ? Qu’importe, puisq
1146 t ce qu’il faut. L’étatisme dictatorial contredit la doctrine de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est la richesse,
1147 ntredit la doctrine de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est la richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce que vo
1148 ne de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est la richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce que voulait Marx ? Résu
1149 que voulait Marx ? Résumons : Marx n’a pas voulu le matérialisme vulgaire. Mais les nécessités de la polémique d’une part
1150 Marx n’a pas voulu le matérialisme vulgaire. Mais les nécessités de la polémique d’une part, — et sa définition de l’homme
1151 le matérialisme vulgaire. Mais les nécessités de la polémique d’une part, — et sa définition de l’homme concret, purement
1152 de la polémique d’une part, — et sa définition de l’ homme concret, purement social, d’autre part, l’ont amené à mettre l’a
1153 e l’homme concret, purement social, d’autre part, l’ ont amené à mettre l’accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet
1154 rement social, d’autre part, l’ont amené à mettre l’ accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet accent que « les mass
1155 , d’autre part, l’ont amené à mettre l’accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet accent que « les masses » ont senti
1156 es facteurs matérialistes. C’est cet accent que «  les masses » ont senti, parce que tout les y prédisposait. Le résultat, c
1157 cent que « les masses » ont senti, parce que tout les y prédisposait. Le résultat, c’est l’URSS de Staline, régime dont je
1158 s » ont senti, parce que tout les y prédisposait. Le résultat, c’est l’URSS de Staline, régime dont je voudrais bien qu’on
1159 e que tout les y prédisposait. Le résultat, c’est l’ URSS de Staline, régime dont je voudrais bien qu’on me démontre en quo
1160 ontre en quoi il diffère du fascisme, dans ce que le fascisme a de plus oppressif pour l’homme et pour sa liberté. L’at
1161 dans ce que le fascisme a de plus oppressif pour l’ homme et pour sa liberté. L’attitude chrétienne devant le « monde »
1162 lus oppressif pour l’homme et pour sa liberté. L’ attitude chrétienne devant le « monde » On parle avec raison de « d
1163 pour sa liberté. L’attitude chrétienne devant le « monde » On parle avec raison de « doctrine » marxiste, d’« idéol
1164 titude chrétienne devant le « monde » On parle avec raison de « doctrine » marxiste, d’« idéologie », de « tactique » com
1165 ire une confusion irrémédiable que de parler dans le même sens d’une « doctrine » du christianisme. Le chrétien, et surtou
1166 le même sens d’une « doctrine » du christianisme. Le chrétien, et surtout le protestant, répugne absolument à concevoir qu
1167 trine » du christianisme. Le chrétien, et surtout le protestant, répugne absolument à concevoir que les dogmes théologique
1168 le protestant, répugne absolument à concevoir que les dogmes théologiques puissent figurer la théorie d’une pratique49. Le
1169 voir que les dogmes théologiques puissent figurer la théorie d’une pratique49. Le christianisme n’est pas un programme ; n
1170 ues puissent figurer la théorie d’une pratique49. Le christianisme n’est pas un programme ; ni, comme le disent certains p
1171 christianisme n’est pas un programme ; ni, comme le disent certains primaires marxistes, une « idéologie » ; ni une tacti
1172 attitude totale. (Je dirais bien totalitaire, si le mot n’avait été pareillement perverti par les caricatures séculières
1173 , si le mot n’avait été pareillement perverti par les caricatures séculières de la révolution chrétienne.) La vie et la pen
1174 lement perverti par les caricatures séculières de la révolution chrétienne.) La vie et la pensée chrétiennes, en effet, se
1175 icatures séculières de la révolution chrétienne.) La vie et la pensée chrétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant
1176 éculières de la révolution chrétienne.) La vie et la pensée chrétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant à ce qui d
1177 , se réfèrent à chaque instant à ce qui détermine le tout de l’homme : son origine, sa fin, et sa mission présente. Le chr
1178 nt à chaque instant à ce qui détermine le tout de l’ homme : son origine, sa fin, et sa mission présente. Le chrétien sait
1179 me : son origine, sa fin, et sa mission présente. Le chrétien sait qu’il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers le Roy
1180 n présente. Le chrétien sait qu’il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et q
1181 qu’il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et qu’il a pour mission actuelle
1182 , le Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et qu’il a pour mission actuelle d’obéir à une Parol
1183 tuelle d’obéir à une Parole qui est Jésus-Christ, le Médiateur. Mais cette Parole juge « le monde » qui l’a rejetée. Elle
1184 us-Christ, le Médiateur. Mais cette Parole juge «  le monde » qui l’a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre les hommes qu
1185 édiateur. Mais cette Parole juge « le monde » qui l’ a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre les hommes qui refusent tota
1186 » qui l’a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre les hommes qui refusent totalement ce monde et s’attendent totalement au
1187 ume. Ce refus, cette attente active50 constituent la révolution la plus radicale qui soit, disons mieux : la seule radical
1188 cette attente active50 constituent la révolution la plus radicale qui soit, disons mieux : la seule radicale. Et toutes l
1189 olution la plus radicale qui soit, disons mieux : la seule radicale. Et toutes les autres, dans notre Occident troublé par
1190 soit, disons mieux : la seule radicale. Et toutes les autres, dans notre Occident troublé par un message qu’il méconnaît, n
1191 oublé par un message qu’il méconnaît, ne sont que les reflets énigmatiques de cet événement primordial — ses succédanés tem
1192 ordial — ses succédanés temporels, en dérive vers le néant. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transf
1193 … » Cela ne signifie pas, pour un chrétien, que «  le monde » soit abandonné. Cela ne signifie pas qu’une fois opérée cette
1194 fois opérée cette transformation personnelle que l’ on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à sub
1195 e cette transformation personnelle que l’on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémis
1196 rmation personnelle que l’on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémissant les lois d
1197 n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémissant les lois d’un monde qu’il condamne ! Car alors, où serait son refus ? Et
1198 du conformisme triomphant ? C’est bien là ce que pensent les marxistes, mais c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur
1199 ormisme triomphant ? C’est bien là ce que pensent les marxistes, mais c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur l’ho
1200 c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur l’ homme. Leur ignorance ou leur aveuglement quant au devoir, et au pouvo
1201 ur aveuglement quant au devoir, et au pouvoir, de l’ homme transformé par la foi. L’homme nouveau, selon l’Évangile, est un
1202 devoir, et au pouvoir, de l’homme transformé par la foi. L’homme nouveau, selon l’Évangile, est un homme qui a changé de
1203 et au pouvoir, de l’homme transformé par la foi. L’ homme nouveau, selon l’Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il
1204 mme transformé par la foi. L’homme nouveau, selon l’ Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il est orienté autrement,
1205 a changé de sens. Il est orienté autrement, comme l’ indique le mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse,
1206 e sens. Il est orienté autrement, comme l’indique le mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse, il reconn
1207 t, comme l’indique le mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup l’origine et l
1208 e que Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup l’ origine et le but de sa vie : il connaît dès lors son péché, tout ce q
1209 i adresse, il reconnaît du même coup l’origine et le but de sa vie : il connaît dès lors son péché, tout ce qui l’écartait
1210 vie : il connaît dès lors son péché, tout ce qui l’ écartait de sa voie. Mais il se connaît du même coup responsable à l’e
1211 ie. Mais il se connaît du même coup responsable à l’ endroit du monde. Car si le monde s’est livré à l’injustice et au déso
1212 ême coup responsable à l’endroit du monde. Car si le monde s’est livré à l’injustice et au désordre, c’est par la faute de
1213 l’endroit du monde. Car si le monde s’est livré à l’ injustice et au désordre, c’est par la faute de l’homme, qui était son
1214 est livré à l’injustice et au désordre, c’est par la faute de l’homme, qui était son roi, et qui a trahi. Et tout péché in
1215 l’injustice et au désordre, c’est par la faute de l’ homme, qui était son roi, et qui a trahi. Et tout péché individuel rép
1216 ute. Ainsi : conscience du péché, connaissance de la fin et de l’origine, obligation d’agir pour racheter le mal commis, s
1217 conscience du péché, connaissance de la fin et de l’ origine, obligation d’agir pour racheter le mal commis, sont trois mom
1218 et de l’origine, obligation d’agir pour racheter le mal commis, sont trois moments indivisibles de la « transformation »
1219 le mal commis, sont trois moments indivisibles de la « transformation » dont parle Paul. L’un n’est pas concevable, sérieu
1220 utre. « Toute droite connaissance de Dieu naît de l’ obéissance », écrit Calvin. Et que serait une obéissance qui ne se man
1221 rait une obéissance qui ne se manifesterait pas ? La transformation personnelle, au sens total de l’Évangile, ne peut donc
1222 ? La transformation personnelle, au sens total de l’ Évangile, ne peut donc se traduire, si elle s’est faite, que par une a
1223 st faite, que par une action du chrétien : contre le monde dans sa forme présente, et pour le monde restauré dans la Prome
1224 : contre le monde dans sa forme présente, et pour le monde restauré dans la Promesse. Il faut aller plus loin que cette af
1225 sa forme présente, et pour le monde restauré dans la Promesse. Il faut aller plus loin que cette affirmation tout évidente
1226 ue cette affirmation tout évidente. Non seulement l’ homme converti devient transformateur du monde — ou sinon il n’est pas
1227 as converti — mais encore toute transformation de la forme actuelle des choses, qui ne serait pas l’effet d’une conversion
1228 e la forme actuelle des choses, qui ne serait pas l’ effet d’une conversion des hommes, ne doit être aux yeux du chrétien,
1229 Voilà qui paraîtra plus scandaleux. Et cependant l’ Évangile est formel : « Que servirait à un homme de gagner le monde, s
1230 est formel : « Que servirait à un homme de gagner le monde, s’il perdait son âme ? » Son âme, c’est-à-dire la conscience d
1231 e, s’il perdait son âme ? » Son âme, c’est-à-dire la conscience de son origine et de sa fin, du sens même de son action, d
1232 ns pas de vérités « purement théologiques » comme le dirait un incroyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit le chré
1233 s » comme le dirait un incroyant. Que servirait à l’ homme, tel que le voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et mor
1234 it un incroyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à
1235 croyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à la guer
1236 sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule
1237 e matérielle et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose nécess
1238 et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à l’ oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose nécessaire », le se
1239 a misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse «  la seule chose nécessaire », le seul gage du salut total ? Alors, va-t-o
1240 l ignore ou refuse « la seule chose nécessaire », le seul gage du salut total ? Alors, va-t-on, si l’on est converti, lais
1241 le seul gage du salut total ? Alors, va-t-on, si l’ on est converti, laisser le monde aller son train, et les guerres se d
1242 l ? Alors, va-t-on, si l’on est converti, laisser le monde aller son train, et les guerres se déchaîner, et les chômeurs m
1243 st converti, laisser le monde aller son train, et les guerres se déchaîner, et les chômeurs mourir de faim ? Ce serait prou
1244 aller son train, et les guerres se déchaîner, et les chômeurs mourir de faim ? Ce serait prouver qu’on n’est pas converti.
1245 t pas converti. J’agirai donc, toutefois non pour le monde, et non pour sauver quelque bien, mais parce que je me sais res
1246 je ne puis supporter mon péché et ses effets dans le monde réel où vivent les hommes — où meurent les hommes. Reproches
1247 péché et ses effets dans le monde réel où vivent les hommes — où meurent les hommes. Reproches réciproques que s’adress
1248 s le monde réel où vivent les hommes — où meurent les hommes. Reproches réciproques que s’adressent les chrétiens et les
1249 hommes. Reproches réciproques que s’adressent les chrétiens et les marxistes Telle étant donc la conception chrétien
1250 ches réciproques que s’adressent les chrétiens et les marxistes Telle étant donc la conception chrétienne de l’homme, se
1251 es chrétiens et les marxistes Telle étant donc la conception chrétienne de l’homme, seul responsable du mal qui est dan
1252 s Telle étant donc la conception chrétienne de l’ homme, seul responsable du mal qui est dans le monde, on comprendra qu
1253 de l’homme, seul responsable du mal qui est dans le monde, on comprendra que l’état d’esprit marxiste lui apparaisse néce
1254 e du mal qui est dans le monde, on comprendra que l’ état d’esprit marxiste lui apparaisse nécessairement borné. Je me serv
1255 nécessairement borné. Je me servirai d’une image. L’ enfant qui rate son coup, ou qui se heurte contre un meuble, se fâche
1256 u qui se heurte contre un meuble, se fâche contre les choses et les rend responsables. Il croit que c’est elles qu’il faut
1257 e contre un meuble, se fâche contre les choses et les rend responsables. Il croit que c’est elles qu’il faut changer. Il ba
1258 croit que c’est elles qu’il faut changer. Il bat la table, comme Xerxès faisait battre l’Hellespont. C’est ce préjugé inf
1259 ger. Il bat la table, comme Xerxès faisait battre l’ Hellespont. C’est ce préjugé infantile que le marxisme devait consolid
1260 ttre l’Hellespont. C’est ce préjugé infantile que le marxisme devait consolider dans la conscience prolétarienne. Déviatio
1261 infantile que le marxisme devait consolider dans la conscience prolétarienne. Déviation grossière, dira-t-on ; mais pouva
1262 it-il pas dit qu’il fallait commencer par changer l’ ordre matériel, l’ordre des choses, et que les hommes ensuite deviendr
1263 l fallait commencer par changer l’ordre matériel, l’ ordre des choses, et que les hommes ensuite deviendraient plus habiles
1264 nger l’ordre matériel, l’ordre des choses, et que les hommes ensuite deviendraient plus habiles à s’entendre et à vivre heu
1265 biles à s’entendre et à vivre heureux ? « Changer la vie », criait l’enfant Rimbaud ! Et les intellectuels de gauche repre
1266 e et à vivre heureux ? « Changer la vie », criait l’ enfant Rimbaud ! Et les intellectuels de gauche reprennent aujourd’hui
1267 « Changer la vie », criait l’enfant Rimbaud ! Et les intellectuels de gauche reprennent aujourd’hui cette devise, pour l’o
1268 gauche reprennent aujourd’hui cette devise, pour l’ opposer au « spiritualisme » autant qu’à la routine et au cynisme des
1269 , pour l’opposer au « spiritualisme » autant qu’à la routine et au cynisme des conservateurs. Saint Paul n’a pas cette tra
1270 cette tragique naïveté. Il ne se fâche pas contre l’ Empire romain, et ne désigne pas sa destruction comme premier objectif
1271 on comme premier objectif aux chrétiens. Pourtant l’ Empire leur ôte toute liberté, et bientôt leur ôtera la vie ! Ne faut-
1272 ire leur ôte toute liberté, et bientôt leur ôtera la vie ! Ne faut-il pas « aller au plus pressé », sauver d’abord sa peau
1273 plus pressé », sauver d’abord sa peau, renverser les tyrans ? Ainsi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre
1274 ord sa peau, renverser les tyrans ? Ainsi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé la lutte sur c
1275 verser les tyrans ? Ainsi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’
1276 insi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si l’ Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’on dit réaliste, à su
1277 ens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer que le « parti
1278 l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’ on dit réaliste, à supposer que le « parti chrétien » eût triomphé, ri
1279 ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer que le « parti chrétien » eût triomphé, rien ne l’eût empêché de subir le so
1280 r que le « parti chrétien » eût triomphé, rien ne l’ eût empêché de subir le sort fatal des révoltes politiques : il eût re
1281 en » eût triomphé, rien ne l’eût empêché de subir le sort fatal des révoltes politiques : il eût revêtu les formes du pouv
1282 ort fatal des révoltes politiques : il eût revêtu les formes du pouvoir déposé51 et renvoyant à des temps plus paisibles l’
1283 déposé51 et renvoyant à des temps plus paisibles l’ évangélisation — sa raison d’être — il se fût consacré aux tâches plus
1284 lus urgentes : donner du pain et des spectacles à la foule. Mais Paul était apôtre et non pas dictateur. C’est pourquoi so
1285 st encore prêché. Il annonçait aux hommes non pas la haine et le cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la
1286 êché. Il annonçait aux hommes non pas la haine et le cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la nouvelle, a
1287 pas la haine et le cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la nouvelle, absolument nouvelle, venant d’aill
1288 me — qui appartiennent à la forme du monde — mais la nouvelle, absolument nouvelle, venant d’ailleurs, d’au-delà de ce mon
1289 nne vivante et de son amour éternel. Il annonçait l’ homme changé. Trop beau tout cela ! Trop beau pour être vrai, dit le m
1290 op beau tout cela ! Trop beau pour être vrai, dit le marxiste. (Chrétien, changé, je suis encore assez « vieil homme » pou
1291 changé, je suis encore assez « vieil homme » pour le comprendre.) Sur quoi repose cette transformation dont vous parlez ?
1292 e, et qu’elle m’ordonne d’ignorer. Je ne vois pas les effets d’une telle foi dans l’histoire de notre Occident52. Si je n’a
1293 r. Je ne vois pas les effets d’une telle foi dans l’ histoire de notre Occident52. Si je n’ai pas votre foi, je ne les vois
1294 notre Occident52. Si je n’ai pas votre foi, je ne les vois pas. Je vois une Église établie, opprimant toutes les dissidence
1295 pas. Je vois une Église établie, opprimant toutes les dissidences, pactisant avec les puissants, soutenant partout les régi
1296 blie, opprimant toutes les dissidences, pactisant avec les puissants, soutenant partout les régimes rétrogrades et prêchant
1297 opprimant toutes les dissidences, pactisant avec les puissants, soutenant partout les régimes rétrogrades et prêchant la r
1298 , pactisant avec les puissants, soutenant partout les régimes rétrogrades et prêchant la résignation. C’est vraiment trop f
1299 enant partout les régimes rétrogrades et prêchant la résignation. C’est vraiment trop facile de se mettre en règle avec sa
1300 C’est vraiment trop facile de se mettre en règle avec sa mauvaise conscience, en prétextant que l’intérieur importe seul, e
1301 le avec sa mauvaise conscience, en prétextant que l’ intérieur importe seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir l’h
1302 n prétextant que l’intérieur importe seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir l’homme ! Peut-être suffit-il à vous
1303 seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir l’ homme ! Peut-être suffit-il à vous nourrir, personnellement, mais ce n
1304 sonnellement, mais ce n’est pas cela qui supprime la misère, qui empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut le dire
1305 ’est pas cela qui supprime la misère, qui empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous c
1306 rime la misère, qui empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproch
1307 empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproches apparaissent jus
1308 hrétiens : ces reproches apparaissent justifiés à la grande masse des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi les « 
1309 justifiés à la grande masse des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi les « exploités » un tel soulèvement d’espé
1310 des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi les « exploités » un tel soulèvement d’espérances, de telles vagues d’adh
1311 c’est qu’il s’est trouvé seul à protester contre le monde tel qu’il va. On dira : c’est d’abord qu’il a su rejeter sur l’
1312 a. On dira : c’est d’abord qu’il a su rejeter sur l’ oppression capitaliste, trop réelle, tout le malheur inhérent à l’exis
1313 r sur l’oppression capitaliste, trop réelle, tout le malheur inhérent à l’existence, tout le malheur dont en vérité le péc
1314 italiste, trop réelle, tout le malheur inhérent à l’ existence, tout le malheur dont en vérité le péché de chacun est respo
1315 lle, tout le malheur inhérent à l’existence, tout le malheur dont en vérité le péché de chacun est responsable. L’observat
1316 ent à l’existence, tout le malheur dont en vérité le péché de chacun est responsable. L’observation est juste ; elle est i
1317 ont en vérité le péché de chacun est responsable. L’ observation est juste ; elle est insuffisante. Ce qui explique en dern
1318 insuffisante. Ce qui explique en dernier ressort le succès « religieux » du marxisme, c’est sa volonté proclamée, concrèt
1319 immédiate, de changer tout ; et non pas seulement l’ « esprit » ou l’« intérieur ». Or si le marxisme a réussi cela, s’il a
1320 anger tout ; et non pas seulement l’« esprit » ou l’ « intérieur ». Or si le marxisme a réussi cela, s’il a pu paraître cel
1321 seulement l’« esprit » ou l’« intérieur ». Or si le marxisme a réussi cela, s’il a pu paraître cela, c’est dans la mesure
1322 réussi cela, s’il a pu paraître cela, c’est dans la mesure où le christianisme, aux yeux des masses, n’a plus osé se mont
1323 s’il a pu paraître cela, c’est dans la mesure où le christianisme, aux yeux des masses, n’a plus osé se montrer chrétien.
1324 sses, n’a plus osé se montrer chrétien. C’est que le sel a perdu sa saveur, et son amertume salutaire. C’est que la seule
1325 u sa saveur, et son amertume salutaire. C’est que la seule espérance véritable et certaine n’a plus été prêchée au monde a
1326 ritable et certaine n’a plus été prêchée au monde avec une force d’attaque assez gênante et bouleversante. C’est que l’« esp
1327 attaque assez gênante et bouleversante. C’est que l’ « esprit » qui devait être l’agent du changement total, perpétuel et s
1328 eversante. C’est que l’« esprit » qui devait être l’ agent du changement total, perpétuel et seul réel, est devenu le gardi
1329 ngement total, perpétuel et seul réel, est devenu le gardien des conformismes, ou du moins n’a pas su, par excès de pruden
1330 s n’a pas su, par excès de prudence, empêcher que les foules le considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus respons
1331 u, par excès de prudence, empêcher que les foules le considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus responsables des
1332 empêcher que les foules le considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus responsables des succès de Marx auprès des f
1333 nsables des succès de Marx auprès des foules, que le marxisme n’est responsable du déclin des Églises dans le monde modern
1334 isme n’est responsable du déclin des Églises dans le monde moderne. C’est pourquoi les reproches du marxiste au chrétien s
1335 des Églises dans le monde moderne. C’est pourquoi les reproches du marxiste au chrétien sont humainement bien plus valables
1336 isciples (que ce soit en paroles ou en actes). Si les chrétiens gardaient une conscience plus fidèle, partant plus douloure
1337 e ce fait, je crois qu’ils éviteraient d’attaquer le marxisme dans les mêmes termes que la réaction. Mais ceci dit, et mai
1338 is qu’ils éviteraient d’attaquer le marxisme dans les mêmes termes que la réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste qu
1339 d’attaquer le marxisme dans les mêmes termes que la réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste qu’en doctrine, et ind
1340 doctrine, et indépendamment de toutes nos fautes, l’ objection marxiste ne vaut rien, alors que l’objection chrétienne est
1341 tes, l’objection marxiste ne vaut rien, alors que l’ objection chrétienne est imparable. Quand un marxiste me reproche de m
1342 angement tout spirituel, et qui n’affecte en rien le cours des choses, je suis fondé à lui répondre : « Ton reproche s’adr
1343 eté, à mon absence de foi, mais non pas du tout à la foi. Car la foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a pas
1344 bsence de foi, mais non pas du tout à la foi. Car la foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a pas impunément,
1345 foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’ a pas impunément, et si on l’a, cela se voit, des choses changent. Ce
1346 ose inquiète”, on ne l’a pas impunément, et si on l’ a, cela se voit, des choses changent. Ce que tu me reproches, c’est, e
1347 e n’être pas assez chrétien ! Tu m’incites donc à le devenir davantage, quand tu croyais réfuter ma religion. Ton athéisme
1348 d’aventure, pour un dialecticien ! Si tu dis que le chrétien est celui qui ne fait rien, tu prouves simplement que tu ign
1349  : vous n’êtes pas assez marxistes ! Je dis : dès le départ, dès l’origine doctrinale, intrinsèquement, et dans la mesure
1350 pas assez marxistes ! Je dis : dès le départ, dès l’ origine doctrinale, intrinsèquement, et dans la mesure exacte où l’on
1351 ès l’origine doctrinale, intrinsèquement, et dans la mesure exacte où l’on est un marxiste convaincu, non point dans la me
1352 ale, intrinsèquement, et dans la mesure exacte où l’ on est un marxiste convaincu, non point dans la mesure où l’on trahit
1353 où l’on est un marxiste convaincu, non point dans la mesure où l’on trahit le marxisme, on fait une erreur fatale, irrévoc
1354 n marxiste convaincu, non point dans la mesure où l’ on trahit le marxisme, on fait une erreur fatale, irrévocable, aujourd
1355 onvaincu, non point dans la mesure où l’on trahit le marxisme, on fait une erreur fatale, irrévocable, aujourd’hui manifes
1356 e, irrévocable, aujourd’hui manifeste. Erreur sur l’ homme et sa mission cosmique. Erreur sur la personne — dans mon vocabu
1357 ur sur l’homme et sa mission cosmique. Erreur sur la personne — dans mon vocabulaire. Ma critique porte sur l’essentiel du
1358 nne — dans mon vocabulaire. Ma critique porte sur l’ essentiel du marxisme, alors que la critique marxiste porte sur un chr
1359 ique porte sur l’essentiel du marxisme, alors que la critique marxiste porte sur un christianisme dénaturé. Et l’essentiel
1360 marxiste porte sur un christianisme dénaturé. Et l’ essentiel du marxisme, je le répète, c’est sa volonté de changer le mo
1361 tianisme dénaturé. Et l’essentiel du marxisme, je le répète, c’est sa volonté de changer le monde, le monde d’abord, et no
1362 rxisme, je le répète, c’est sa volonté de changer le monde, le monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et le monde par
1363 le répète, c’est sa volonté de changer le monde, le monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et le monde par lui. Or un
1364 de changer le monde, le monde d’abord, et non pas l’ homme d’abord, et le monde par lui. Or une telle volonté ne peut condu
1365 le monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et le monde par lui. Or une telle volonté ne peut conduire qu’à l’excès du
1366 r lui. Or une telle volonté ne peut conduire qu’à l’ excès du matérialisme, non point par la malice de Staline, mais par l’
1367 duire qu’à l’excès du matérialisme, non point par la malice de Staline, mais par l’effet des conditions physiques et spiri
1368 sme, non point par la malice de Staline, mais par l’ effet des conditions physiques et spirituelles de l’homme en ce qu’ell
1369 effet des conditions physiques et spirituelles de l’ homme en ce qu’elles ont d’irréductibles à toute détermination sociale
1370 ermination sociale ou historique imaginable, dans le passé, le présent ou l’avenir53. Le problème des fins dernières :
1371 sociale ou historique imaginable, dans le passé, le présent ou l’avenir53. Le problème des fins dernières : Royaume de
1372 storique imaginable, dans le passé, le présent ou l’ avenir53. Le problème des fins dernières : Royaume de Dieu ou parad
1373 able, dans le passé, le présent ou l’avenir53. Le problème des fins dernières : Royaume de Dieu ou paradis terrestre ?
1374 ivoque grossière dissipée en principe, au lieu de la véritable décision. Certains, frappés comme je le suis, par les resse
1375 la véritable décision. Certains, frappés comme je le suis, par les ressemblances formelles indiscutables que présentent la
1376 décision. Certains, frappés comme je le suis, par les ressemblances formelles indiscutables que présentent la volonté du vr
1377 semblances formelles indiscutables que présentent la volonté du vrai chrétien et celle du communiste militant, ont tenté l
1378 rétien et celle du communiste militant, ont tenté la synthèse pratique des deux croyances, qu’ils estimaient complémentair
1379 complémentaires. D’autres, plus nombreux qu’on ne le pense, souhaitent au moins et appellent cette synthèse, paraissant re
1380 plémentaires. D’autres, plus nombreux qu’on ne le pense , souhaitent au moins et appellent cette synthèse, paraissant redouter
1381 malheur pour leur foi, ou pour son « succès », si l’ on ne parvient pas à l’opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise
1382 ou pour son « succès », si l’on ne parvient pas à l’ opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le probl
1383 uccès », si l’on ne parvient pas à l’opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le problème se posait a
1384 la jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le problème se posait avec urgence, aux environs de 1933, de réunir dans
1385 aire chinoise et japonaise, le problème se posait avec urgence, aux environs de 1933, de réunir dans un même enthousiasme, «
1386 s de 1933, de réunir dans un même enthousiasme, «  les deux Karl », c’est-à-dire Barth et Marx !54 C’est ici qu’une critique
1387 nt théologique se révèle seule capable de marquer les limites existant en fait, et les distinctions décisives. La pratique
1388 pable de marquer les limites existant en fait, et les distinctions décisives. La pratique du communisme n’est justiciable,
1389 existant en fait, et les distinctions décisives. La pratique du communisme n’est justiciable, en soi, que d’une critique
1390 nomique, historique, etc.55 Et je ne vois pas que le chrétien comme tel ait des lumières particulières sur ces sujets, qui
1391 oir technique. Mais ce qui tombe directement sous le coup de la seule critique théologique, ce sont les buts derniers du c
1392 ue. Mais ce qui tombe directement sous le coup de la seule critique théologique, ce sont les buts derniers du communisme e
1393 le coup de la seule critique théologique, ce sont les buts derniers du communisme et les postulats qu’il suppose. Qu’on me
1394 gique, ce sont les buts derniers du communisme et les postulats qu’il suppose. Qu’on me permette ici d’être un peu schémati
1395 schématique pour plus de clarté. Il me paraît que l’ opposition finale entre la croyance marxiste et la foi personnelle du
1396 larté. Il me paraît que l’opposition finale entre la croyance marxiste et la foi personnelle du chrétien suffit à explique
1397 l’opposition finale entre la croyance marxiste et la foi personnelle du chrétien suffit à expliquer tout le reste. Le comm
1398 i personnelle du chrétien suffit à expliquer tout le reste. Le communisme prépare un paradis terrestre, le paradis tempore
1399 lle du chrétien suffit à expliquer tout le reste. Le communisme prépare un paradis terrestre, le paradis temporel de l’hom
1400 este. Le communisme prépare un paradis terrestre, le paradis temporel de l’homme ; le christianisme prépare un Royaume éte
1401 pare un paradis terrestre, le paradis temporel de l’ homme ; le christianisme prépare un Royaume éternel, qui sera celui de
1402 radis terrestre, le paradis temporel de l’homme ; le christianisme prépare un Royaume éternel, qui sera celui de Dieu, non
1403 n Royaume éternel, qui sera celui de Dieu, non de la Terre. Tous deux sont eschatologiques, en ce sens qu’ils rapportent l
1404 lation, d’une longue passion temporelle. Et c’est la « foi », substance des choses espérées, qui permet seule de supporter
1405 es choses espérées, qui permet seule de supporter les maux que l’on endure au nom du but dernier. (Le chrétien chante sur s
1406 érées, qui permet seule de supporter les maux que l’ on endure au nom du but dernier. (Le chrétien chante sur son bûcher, l
1407 les maux que l’on endure au nom du but dernier. ( Le chrétien chante sur son bûcher, le komsomol accepte un salaire de fam
1408 but dernier. (Le chrétien chante sur son bûcher, le komsomol accepte un salaire de famine s’il faut cela pour sauver l’UR
1409 e un salaire de famine s’il faut cela pour sauver l’ URSS.) Mais l’eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel,
1410 e famine s’il faut cela pour sauver l’URSS.) Mais l’ eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel, et par là même
1411 immédiatement présent dans notre cœur56 alors que l’ eschaton marxiste, temporel, s’enfuit dans un futur indéfini, — cent a
1412 e ans ? — et ne peut exister hic et nunc. Comment l’ opposition radicale de ces deux fins, la temporelle et l’éternelle, va
1413 . Comment l’opposition radicale de ces deux fins, la temporelle et l’éternelle, va-t-elle maintenant se manifester dans no
1414 ition radicale de ces deux fins, la temporelle et l’ éternelle, va-t-elle maintenant se manifester dans notre siècle ? Le p
1415 elle maintenant se manifester dans notre siècle ? Le phénomène de la « conversion » le fait bien voir. Un homme qui se con
1416 se manifester dans notre siècle ? Le phénomène de la « conversion » le fait bien voir. Un homme qui se convertit au christ
1417 notre siècle ? Le phénomène de la « conversion » le fait bien voir. Un homme qui se convertit au christianisme, c’est un
1418 tianisme, c’est un homme qui reçoit et qui saisit la Révélation en Personne. Et du coup le Royaume est au-dedans de lui. C
1419 qui saisit la Révélation en Personne. Et du coup le Royaume est au-dedans de lui. Cet homme n’est plus le maître de sa vi
1420 oyaume est au-dedans de lui. Cet homme n’est plus le maître de sa vie. Il est l’agent d’une vocation venue d’ailleurs, mai
1421 Cet homme n’est plus le maître de sa vie. Il est l’ agent d’une vocation venue d’ailleurs, mais pour lui seul et ici-bas,
1422 s, et qui anime désormais ses gestes et sa pensée la plus intime. Dès maintenant sa personne est recréée. Dès maintenant,
1423 st recréée. Dès maintenant, elle entre en conflit avec le monde et ses formes mauvaises. Dès maintenant, elle porte témoigna
1424 créée. Dès maintenant, elle entre en conflit avec le monde et ses formes mauvaises. Dès maintenant, elle porte témoignage
1425 faveur du fait accompli d’une révolution humaine. Le chrétien converti commence donc par la fin que visait l’espérance com
1426 n humaine. Le chrétien converti commence donc par la fin que visait l’espérance communiste. Il possède déjà l’essentiel, q
1427 tien converti commence donc par la fin que visait l’ espérance communiste. Il possède déjà l’essentiel, que Marx voyait au
1428 ue visait l’espérance communiste. Il possède déjà l’ essentiel, que Marx voyait au terme de l’histoire : la personne. Et al
1429 ède déjà l’essentiel, que Marx voyait au terme de l’ histoire : la personne. Et alors, il attaque le monde ! Mais un homme
1430 sentiel, que Marx voyait au terme de l’histoire : la personne. Et alors, il attaque le monde ! Mais un homme qui se conver
1431 de l’histoire : la personne. Et alors, il attaque le monde ! Mais un homme qui se convertit au communisme ne se rattache p
1432 pas à une Présence actuelle. Il fait un pari dont l’ objet n’est pas accessible aujourd’hui. Il mise son action immédiate s
1433 ion immédiate sur un fait qui n’est pas accompli, l’ histoire n’ayant jamais connu de réalisation de communisme. Ainsi, des
1434 réalisation de communisme. Ainsi, des deux, c’est le marxiste qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réalist
1435 nisme. Ainsi, des deux, c’est le marxiste qui est l’ utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien :
1436 , c’est le marxiste qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable
1437 qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…) Le marxiste dit :
1438 e chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…) Le marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi
1439 aliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…) Le marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi dans l’invisible, mais s
1440 marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi dans l’ invisible, mais sur des faits concrets qu’il faut changer. Chaque réfo
1441 tion réalisée, me montre dès maintenant un peu de la réalité de mes espérances. » Mais l’espérance finale du communisme, c
1442 nt un peu de la réalité de mes espérances. » Mais l’ espérance finale du communisme, c’est la libération de l’homme. Et moi
1443 s. » Mais l’espérance finale du communisme, c’est la libération de l’homme. Et moi je lui montre un homme libéré, tandis q
1444 ance finale du communisme, c’est la libération de l’ homme. Et moi je lui montre un homme libéré, tandis qu’il ne peut me m
1445 autre différence, non moins radicale et urgente. Le chrétien converti a déjà l’essentiel : par là même, il se voit contra
1446 radicale et urgente. Le chrétien converti a déjà l’ essentiel : par là même, il se voit contraint à chaque instant de tran
1447 sait qu’il est membre d’un corps qui porte toutes les marques du péché. Il est alors en face du monde, et au nom même de sa
1448 en face du monde, et au nom même de sa foi, dans la posture d’un révolutionnaire permanent. Non seulement il se voit cont
1449 en aide à son prochain, mais encore rien ne peut le satisfaire de ce qu’il obtient, par cet effort, s’il compare ce mieux
1450 it qu’il a reçu en Christ. Il possède en lui-même la mesure d’une perpétuelle transformation, nécessaire dans tous les dom
1451 perpétuelle transformation, nécessaire dans tous les domaines où son activité peut se développer57. Mais le marxiste, quel
1452 maines où son activité peut se développer57. Mais le marxiste, quelles que soient la souffrance et la colère qu’il éprouve
1453 évelopper57. Mais le marxiste, quelles que soient la souffrance et la colère qu’il éprouve devant les injustices présentes
1454 le marxiste, quelles que soient la souffrance et la colère qu’il éprouve devant les injustices présentes, du fait qu’il c
1455 t la souffrance et la colère qu’il éprouve devant les injustices présentes, du fait qu’il croit que l’intérêt de l’homme es
1456 les injustices présentes, du fait qu’il croit que l’ intérêt de l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoi
1457 s présentes, du fait qu’il croit que l’intérêt de l’ homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoit, être socia
1458 que l’intérêt de l’homme est seul en jeu — et de l’ homme tel qu’il le conçoit, être social — se verra fatalement neutrali
1459 l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoit, être social — se verra fatalement neutralisé dans son effort
1460 e verra fatalement neutralisé dans son effort par les gains peu à peu obtenus. Une balance s’établit entre les intérêts soc
1461 ns peu à peu obtenus. Une balance s’établit entre les intérêts sociaux présents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’
1462 s’établit entre les intérêts sociaux présents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’à l’accomplissement final. Car c
1463 ents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’à l’ accomplissement final. Car cet accomplissement, ou plénitude, n’est ja
1464 s qu’un futur théorique, — si passionnée que soit l’ espérance du marxiste — et non pas une présence exigeante et totalemen
1465 nce exigeante et totalement animatrice. C’est ici la raison profonde des déviations dites « réformistes » ou « étatistes »
1466 iations dites « réformistes » ou « étatistes » de la révolution matérialiste. Pour qu’une telle pesanteur ne gagne pas san
1467 u’une telle pesanteur ne gagne pas sans cesse sur les élans révolutionnaires spasmodiques qui agitent l’humanité (comme en
1468 s élans révolutionnaires spasmodiques qui agitent l’ humanité (comme en 1789 et en 1917), il faudrait que l’homme soit déli
1469 anité (comme en 1789 et en 1917), il faudrait que l’ homme soit délivré de son péché, « changé », sorti du plan, précisémen
1470 péché, « changé », sorti du plan, précisément, où le marxisme le maintient. Moyens d’action du chrétien et du marxiste
1471 ngé », sorti du plan, précisément, où le marxisme le maintient. Moyens d’action du chrétien et du marxiste Préparer
1472 s d’action du chrétien et du marxiste Préparer le royaume de l’homme, ou témoigner par des actes visibles en faveur du
1473 chrétien et du marxiste Préparer le royaume de l’ homme, ou témoigner par des actes visibles en faveur du retour d’un Ro
1474 tiquement une volonté de changer tout ce qui peut l’ être ; mais aussi, cela suppose certains moyens d’action qui ne saurai
1475 se certains moyens d’action qui ne sauraient être les mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fi
1476 ens d’action qui ne sauraient être les mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos
1477 ne sauraient être les mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de l’action du c
1478 mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royau
1479 deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royaume de justice
1480 si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royaume de justice et d’amour
1481 ule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de l’ action du chrétien, c’est le royaume de justice et d’amour. Tout acte
1482 a fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royaume de justice et d’amour. Tout acte qui contredirait, dans le pr
1483 tice et d’amour. Tout acte qui contredirait, dans le présent, la loi d’amour et de justice, même s’il était commis au nom
1484 our. Tout acte qui contredirait, dans le présent, la loi d’amour et de justice, même s’il était commis au nom des intérêts
1485 ce, même s’il était commis au nom des intérêts de l’ Église chrétienne, détruirait en fait cette Église en tant qu’elle vit
1486 es membres, et non pas dans un ciel abstrait. Car le gage de l’action chrétienne n’est pas futur, mais éternel et donc pré
1487 et non pas dans un ciel abstrait. Car le gage de l’ action chrétienne n’est pas futur, mais éternel et donc présent. Si, p
1488 ur, mais éternel et donc présent. Si, pour sauver le futur de l’Église, je désobéis dans le présent, je perds tout du même
1489 rnel et donc présent. Si, pour sauver le futur de l’ Église, je désobéis dans le présent, je perds tout du même coup, prése
1490 our sauver le futur de l’Église, je désobéis dans le présent, je perds tout du même coup, présent, futur, éternité. Je cru
1491 même coup, présent, futur, éternité. Je crucifie le Christ et je m’oppose à son retour. Il n’est donc pas d’« opportunism
1492 s d’« opportunisme » chrétien qui tienne, et tous les moyens du chrétien doivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est
1493 oivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est le cas du marxiste. N’ayant pas derrière lui de modèle accompli, ni en l
1494 Présence souveraine, il se sent libre d’appliquer les moyens qu’il juge adéquats aux intérêts momentanés de son Parti et de
1495 ime son étatisme totalitaire en arguant que c’est le seul moyen d’accéder à un stade économique plus favorable au développ
1496 ien conséquents, et que leur indignation traduise la vraie volonté du marxisme, plutôt qu’un reste d’humanisme libéral. Le
1497 marxisme, plutôt qu’un reste d’humanisme libéral. Le fait est que la grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il
1498 qu’un reste d’humanisme libéral. Le fait est que la grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il résulte à l’évi
1499 é des communistes suit Staline. D’où il résulte à l’ évidence que pour la grosse majorité des communistes, le mensonge, la
1500 it Staline. D’où il résulte à l’évidence que pour la grosse majorité des communistes, le mensonge, la haine, l’oppression,
1501 ence que pour la grosse majorité des communistes, le mensonge, la haine, l’oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raiso
1502 la grosse majorité des communistes, le mensonge, la haine, l’oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raison d’État », e
1503 majorité des communistes, le mensonge, la haine, l’ oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à
1504 communistes, le mensonge, la haine, l’oppression, l’ hypocrisie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à la guerre s’il
1505 isie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à la guerre s’il le faut, sont des moyens parfaitement acceptables en tant
1506 mmée « raison d’État », et jusqu’à la guerre s’il le faut, sont des moyens parfaitement acceptables en tant qu’ils servent
1507 s parfaitement acceptables en tant qu’ils servent le progrès prolétarien, et préparent un avenir conforme à la doctrine59.
1508 ès prolétarien, et préparent un avenir conforme à la doctrine59. Que leur importe une « faute » personnelle et actuelle, p
1509 il n’y a pas de salut présent ni éternel, puisque le salut n’est pas pour eux de toute façon, mais pour les descendants de
1510 alut n’est pas pour eux de toute façon, mais pour les descendants de leurs descendants ? C’est ainsi qu’on a vu Zinoviev, p
1511 noviev, par « fidélité » au Parti, c’est-à-dire à l’ avenir du Parti, proférer des aveux mensongers qu’il croyait tactiquem
1512 au parti communiste ou de militer en sa faveur : l’ alternative où il se place est sans issue. Car ou bien il accepte les
1513 l se place est sans issue. Car ou bien il accepte les disciplines d’action que lui impose son parti, et qui comportent la h
1514 ction que lui impose son parti, et qui comportent la haine et le mensonge : mais alors pour sauver le monde, il perd sa ra
1515 i impose son parti, et qui comportent la haine et le mensonge : mais alors pour sauver le monde, il perd sa raison d’être
1516 la haine et le mensonge : mais alors pour sauver le monde, il perd sa raison d’être personnelle, et renie justement cette
1517 stement cette foi qu’il croyait mieux servir dans le communisme ; ou bien il tâche de n’agir qu’en chrétien ; mais alors i
1518 , un « trotzkyste » ou un « saboteur », et à tout le moins un militant suspect. Tout cela repose sur un fait unique, que n
1519 it unique, que nous pouvons formuler simplement : la fin dernière du chrétien est présente en chacun de ses actes, ou bien
1520 acun de ses actes, ou bien n’est pas ; tandis que la fin dernière du marxiste est un avenir absolument hétérogène aux acti
1521 aujourd’hui, dans un ordre non socialiste. Par où l’ on voit qu’en dépit du langage, la transcendance de la foi chrétienne
1522 ialiste. Par où l’on voit qu’en dépit du langage, la transcendance de la foi chrétienne se manifeste ici et maintenant et
1523 voit qu’en dépit du langage, la transcendance de la foi chrétienne se manifeste ici et maintenant et engage le tout de l’
1524 rétienne se manifeste ici et maintenant et engage le tout de l’homme ; tandis que l’immanence de la croyance marxiste renv
1525 manifeste ici et maintenant et engage le tout de l’ homme ; tandis que l’immanence de la croyance marxiste renvoie sans ce
1526 ntenant et engage le tout de l’homme ; tandis que l’ immanence de la croyance marxiste renvoie sans cesse le fait humain to
1527 ge le tout de l’homme ; tandis que l’immanence de la croyance marxiste renvoie sans cesse le fait humain total dans un ave
1528 anence de la croyance marxiste renvoie sans cesse le fait humain total dans un avenir indéfini, et n’engage que certaines
1529 défini, et n’engage que certaines dispositions de l’ être, celles-là précisément que l’avenir socialiste, la société sans c
1530 dispositions de l’être, celles-là précisément que l’ avenir socialiste, la société sans classes, doit supprimer ! Le marxis
1531 e, celles-là précisément que l’avenir socialiste, la société sans classes, doit supprimer ! Le marxiste croit que le bien
1532 aliste, la société sans classes, doit supprimer ! Le marxiste croit que le bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien
1533 s classes, doit supprimer ! Le marxiste croit que le bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien naît du parfait. D
1534 mer ! Le marxiste croit que le bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien naît du parfait. D’une conséquence polit
1535 it que le bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien naît du parfait. D’une conséquence politique de la foi Je
1536 aît du parfait. D’une conséquence politique de la foi Je m’adresserai maintenant aux chrétiens déclarés. J’en vois b
1537 ens déclarés. J’en vois beaucoup qui estiment que la transformation de l’homme importe seule, puisqu’elle est, en effet, l
1538 is beaucoup qui estiment que la transformation de l’ homme importe seule, puisqu’elle est, en effet, l’essentiel, et le but
1539 l’homme importe seule, puisqu’elle est, en effet, l’ essentiel, et le but de tout autre changement. J’en vois beaucoup qui
1540 seule, puisqu’elle est, en effet, l’essentiel, et le but de tout autre changement. J’en vois beaucoup qui jugent que l’act
1541 tre changement. J’en vois beaucoup qui jugent que l’ action personnelle de charité et de sacrifice, pour le mieux-être du p
1542 tion personnelle de charité et de sacrifice, pour le mieux-être du prochain, suffit à compléter, si je puis dire, l’action
1543 du prochain, suffit à compléter, si je puis dire, l’ action proprement religieuse. Et j’entends bien que les sacrifices qu’
1544 tion proprement religieuse. Et j’entends bien que les sacrifices qu’ils font ne sont pas seulement « spirituels », entraîne
1545 ntraînent des risques financiers, et même parfois l’ abandon de tous biens et d’intérêts humains très chers. Mais je demand
1546 itiques qu’implique en fait leur attitude ? Et je pense en particulier aux membres du Mouvement des Groupes, qui représentent
1547 bres du Mouvement des Groupes, qui représentent à l’ heure actuelle le christianisme le plus « activiste ». Pourquoi refuse
1548 des Groupes, qui représentent à l’heure actuelle le christianisme le plus « activiste ». Pourquoi refusent-ils de s’occup
1549 représentent à l’heure actuelle le christianisme le plus « activiste ». Pourquoi refusent-ils de s’occuper de politique ?
1550 oup de problèmes se poseront autrement… » Je veux les croire. Ils courent au plus pressé. Mais le marxiste aussi me tenait
1551 veux les croire. Ils courent au plus pressé. Mais le marxiste aussi me tenait ce raisonnement, pour justifier une action t
1552 ement, pour justifier une action tout inverse. Je pense qu’il faut aller plus loin60. La déviation matérialiste du marxisme n
1553 t inverse. Je pense qu’il faut aller plus loin60. La déviation matérialiste du marxisme ne doit pas seulement nous inciter
1554 s : elle doit nous avertir de corriger sans trêve la déviation spiritualiste qui menace notre vie chrétienne, et qui est l
1555 liste qui menace notre vie chrétienne, et qui est la cause certaine des succès du marxisme. Tant que les chrétiens ne comp
1556 a cause certaine des succès du marxisme. Tant que les chrétiens ne comprendront pas que leur foi doit se manifester sur tou
1557 ront pas que leur foi doit se manifester sur tous les plans de l’activité humaine, y compris le plan politique, ils ne répo
1558 leur foi doit se manifester sur tous les plans de l’ activité humaine, y compris le plan politique, ils ne répondront pas a
1559 r tous les plans de l’activité humaine, y compris le plan politique, ils ne répondront pas au défi du marxisme, qui s’en t
1560 tique chrétienne, déduite une fois pour toutes de la théologie. Mais je crois que le christianisme, aussitôt qu’il se mani
1561 is pour toutes de la théologie. Mais je crois que le christianisme, aussitôt qu’il se manifeste en vérité, entre en confli
1562 ôt qu’il se manifeste en vérité, entre en conflit avec certaines structures politiques, et contribue, par son action la plus
1563 ructures politiques, et contribue, par son action la plus intime, à la création d’autres formes. Il importe de savoir lesq
1564 s, et contribue, par son action la plus intime, à la création d’autres formes. Il importe de savoir lesquelles, et de les
1565 es formes. Il importe de savoir lesquelles, et de les préparer consciemment. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes
1566 les préparer consciemment. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes les entreprises désespérées qui passionnent les
1567 nt. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes les entreprises désespérées qui passionnent les masses incroyantes. Il se
1568 outes les entreprises désespérées qui passionnent les masses incroyantes. Il se pose là, me semble-t-il, une question de so
1569 une question de solidarité, qui est une forme de la charité. Parfois aussi le devoir chrétien peut apparaître plus histor
1570 é, qui est une forme de la charité. Parfois aussi le devoir chrétien peut apparaître plus historiquement défini et localis
1571 monde sait, ou pressent au moins, ce que signifie la menace totalitaire, qu’elle soit fasciste ou soviétique : c’est la « 
1572 aire, qu’elle soit fasciste ou soviétique : c’est la « mise au pas » de nos vies et de tous les aspects de nos vies, tant
1573 : c’est la « mise au pas » de nos vies et de tous les aspects de nos vies, tant spirituels que matériels, au service de l’É
1574 ies, tant spirituels que matériels, au service de l’ État déifié. Cette situation n’est pas sans rappeler celle de l’Empire
1575 Cette situation n’est pas sans rappeler celle de l’ Empire romain au premier âge du christianisme, telle que nous l’évoqui
1576 n au premier âge du christianisme, telle que nous l’ évoquions plus haut. Toutefois, l’un des facteurs au moins s’est modif
1577 des facteurs au moins s’est modifié notablement : les chrétiens ne forment plus des groupuscules obscurs, ils ont constitué
1578 chrétiennes. Tout cela se trouve mis au défi par l’ exigence totalitaire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne. L’É
1579 uve mis au défi par l’exigence totalitaire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore
1580 défi par l’exigence totalitaire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore, sinon dé
1581 ence totalitaire, comme le prouve le spectacle de l’ Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore, sinon déjà dans des form
1582 ire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne. L’ État nouveau veut qu’on l’adore, sinon déjà dans des formes religieuse
1583 ectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’ adore, sinon déjà dans des formes religieuses, du moins dans des forme
1584 ents du Décalogue, et au devoir d’amour chrétien. Le conflit est inévitable. Suffira-t-il dès lors de se laisser persécute
1585 persécuter ? N’avons-nous rien à faire qu’à subir le martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de l’État une attitude d’objecteu
1586 à subir le martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de l’ État une attitude d’objecteurs de conscience ? N’avons-nous rien que n
1587 sées sont pour une part, peut-être capitale, dans le malheur universel qui vient ? Or toute attente passive, si courageuse
1588 passive, si courageuse qu’elle soit, devient dans le cas présent une complicité. L’État totalitaire ne saurait s’instaurer
1589 soit, devient dans le cas présent une complicité. L’ État totalitaire ne saurait s’instaurer contre l’opinion générale. Cel
1590 L’État totalitaire ne saurait s’instaurer contre l’ opinion générale. Celle-ci se laisse séduire par les seuls constructeu
1591 ’opinion générale. Celle-ci se laisse séduire par les seuls constructeurs. Mais alors, quel point de vue constructif le chr
1592 cteurs. Mais alors, quel point de vue constructif le chrétien peut-il soutenir, s’il ne veut pas rester l’objecteur que j’
1593 hrétien peut-il soutenir, s’il ne veut pas rester l’ objecteur que j’ai dit ? Un protestant, et je précise : un calviniste,
1594 e, doit être ici en mesure de répondre. De toutes les églises chrétiennes, l’église calviniste est en effet la plus antitot
1595 e de répondre. De toutes les églises chrétiennes, l’ église calviniste est en effet la plus antitotalitaire par essence. Je
1596 ses chrétiennes, l’église calviniste est en effet la plus antitotalitaire par essence. Je ne rappelle qu’en passant les dr
1597 litaire par essence. Je ne rappelle qu’en passant les dragonnades et les guerres de religion qui les précèdent : on sait as
1598 . Je ne rappelle qu’en passant les dragonnades et les guerres de religion qui les précèdent : on sait assez que ce fut la l
1599 nt les dragonnades et les guerres de religion qui les précèdent : on sait assez que ce fut la lutte d’une royauté déjà « to
1600 gion qui les précèdent : on sait assez que ce fut la lutte d’une royauté déjà « totalitaire » contre des groupes, loyalist
1601 abusif de déduire d’une situation déterminée par la persécution brutale, que les églises calvinistes défendaient alors, p
1602 uation déterminée par la persécution brutale, que les églises calvinistes défendaient alors, par principe, un régime fédéra
1603 François Ier, c’est-à-dire jusqu’à une époque où la passion totalitaire des gouvernants n’avait pas encore pu s’affirmer
1604 nants n’avait pas encore pu s’affirmer comme elle le fit sous Louis XIV, nous constatons que la première discipline que se
1605 statons que la première discipline que se donnent les églises calvinistes revêt une forme consciemment fédérative61. Or il
1606 ’agit plus ici de contingences historiques. C’est le fond même de la doctrine calviniste qui s’exprime par cette structure
1607 e contingences historiques. C’est le fond même de la doctrine calviniste qui s’exprime par cette structure. L’importance a
1608 ine calviniste qui s’exprime par cette structure. L’ importance attachée par Calvin à la notion de vocation personnelle suf
1609 tte structure. L’importance attachée par Calvin à la notion de vocation personnelle suffit à expliquer ce processus. À une
1610 nd nécessairement une organisation fédéraliste de l’ Église, et même de l’État. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tou
1611 organisation fédéraliste de l’Église, et même de l’ État. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tous les manuels, une so
1612 e, et même de l’État. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tous les manuels, une société théocratique, mais bien une so
1613 tat. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tous les manuels, une société théocratique, mais bien une société de type fédé
1614 is bien une société de type fédératif, respectant les diversités, voulues par Dieu, dans l’unité spirituelle. Et les suites
1615 respectant les diversités, voulues par Dieu, dans l’ unité spirituelle. Et les suites de cette création sont encore visible
1616 s, voulues par Dieu, dans l’unité spirituelle. Et les suites de cette création sont encore visibles aujourd’hui : nulle par
1617 ion sont encore visibles aujourd’hui : nulle part l’ esprit totalitaire n’a trouvé moins de complicité et plus de résistanc
1618 omplicité et plus de résistance déclarée que dans les pays calvinistes, où la notion de l’autonomie des groupes reste vivac
1619 stance déclarée que dans les pays calvinistes, où la notion de l’autonomie des groupes reste vivace (Angleterre, Écosse, S
1620 ée que dans les pays calvinistes, où la notion de l’ autonomie des groupes reste vivace (Angleterre, Écosse, Suisse, Hollan
1621 leterre, Écosse, Suisse, Hollande). En Allemagne, la lutte des églises contre l’emprise morale de l’État fut menée, on le
1622 lande). En Allemagne, la lutte des églises contre l’ emprise morale de l’État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est
1623 , la lutte des églises contre l’emprise morale de l’ État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est-à-dire par un calvi
1624 s contre l’emprise morale de l’État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est-à-dire par un calviniste… Je ne voudrais
1625 par un calviniste… Je ne voudrais pas restreindre la portée de ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à l’esprit u
1626 voudrais pas restreindre la portée de ce fait en l’ opposant, comme il serait facile, à l’esprit unitaire et impérial qui
1627 ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à l’ esprit unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome. Le grand souci
1628 facile, à l’esprit unitaire et impérial qui anime l’ Église de Rome. Le grand souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner to
1629 unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome. Le grand souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner toutes les églises,
1630 souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner toutes les églises, est une promesse à laquelle nous devons croire de toute la f
1631 e promesse à laquelle nous devons croire de toute la force de notre foi. Aussi ne veux-je tirer de mon exemple qu’une conc
1632 diversité, toute autonomie spirituelle au sein de la communauté. Il y va de notre tout, personnel, mais aussi de la valeur
1633 . Il y va de notre tout, personnel, mais aussi de la valeur de la communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût
1634 notre tout, personnel, mais aussi de la valeur de la communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût-ce que pour
1635 ais aussi de la valeur de la communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût-ce que pour cette seule raison — et j
1636 valeur de la communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût-ce que pour cette seule raison — et j’en ai mention
1637 n chrétien ne peut pas approuver, comme chrétien, la forme politique du communisme63. Il lui faut donc en préparer une aut
1638 autre, et prendre enfin parti, positivement, dans l’ immense lutte qui va mettre aux prises l’étatisme totalitaire et le fé
1639 nt, dans l’immense lutte qui va mettre aux prises l’ étatisme totalitaire et le fédéralisme libre. Responsabilité des ch
1640 ui va mettre aux prises l’étatisme totalitaire et le fédéralisme libre. Responsabilité des chrétiens vis-à-vis des marx
1641 s chrétiens vis-à-vis des marxistes On connaît la « croisade antimarxiste » qu’organise dans le monde entier la panique
1642 aît la « croisade antimarxiste » qu’organise dans le monde entier la panique des capitalismes. Cette croisade a pour vraie
1643 e antimarxiste » qu’organise dans le monde entier la panique des capitalismes. Cette croisade a pour vraie devise : divide
1644  : dividendes d’abord ! Mais elle entend utiliser le spirituel comme masque. Elle entraîne beaucoup de braves gens au serv
1645 e une valeur de pères de famille. C’est en vérité la croisade du matérialisme hypocrite contre le matérialisme généreux. C
1646 rité la croisade du matérialisme hypocrite contre le matérialisme généreux. C’est aussi la croisade des fascismes contre l
1647 rite contre le matérialisme généreux. C’est aussi la croisade des fascismes contre leur frère, le stalinisme : une guerre
1648 ussi la croisade des fascismes contre leur frère, le stalinisme : une guerre de religions qui ne sont pas les nôtres. Je p
1649 rends ici parti contre une telle entreprise, pour les mêmes raisons, mais aggravées, qui me faisaient prendre parti contre
1650 aggravées, qui me faisaient prendre parti contre le régime communiste. On nous donne à choisir entre deux sortes de matér
1651 à choisir entre deux sortes de matérialisme. Mais le communisme, au moins, voulait changer le monde… Contre les arguments
1652 me. Mais le communisme, au moins, voulait changer le monde… Contre les arguments démagogiques de nos croisés, je répète, a
1653 nisme, au moins, voulait changer le monde… Contre les arguments démagogiques de nos croisés, je répète, après Berdiaev, apr
1654 croisés, je répète, après Berdiaev, après Gide : la « vérité » du communisme résulte de la trahison du christianisme par
1655 rès Gide : la « vérité » du communisme résulte de la trahison du christianisme par la chrétienté. Toutes les aspirations v
1656 nisme résulte de la trahison du christianisme par la chrétienté. Toutes les aspirations valables et généreuses du marxisme
1657 ahison du christianisme par la chrétienté. Toutes les aspirations valables et généreuses du marxisme sont autant d’essais d
1658 s chrétiennes égarées, déformées, ou « mises sous le boisseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de l’aspiration tota
1659 arées, déformées, ou « mises sous le boisseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de l’aspiration totalitaire, qui est
1660 isseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de l’ aspiration totalitaire, qui est monstrueuse dans ses formes actuelles,
1661 actuelles, mais qui traduit encore, obscurément, l’ aspiration d’un Occident jadis chrétien, vers une économie sauvée : le
1662 cident jadis chrétien, vers une économie sauvée : le Royaume où Dieu est « tout en tous ». Si les églises chrétiennes ont
1663 vée : le Royaume où Dieu est « tout en tous ». Si les églises chrétiennes ont à souffrir demain par le fait d’un État tyran
1664 les églises chrétiennes ont à souffrir demain par le fait d’un État tyrannique, il faut qu’elles sachent qu’elles en sont
1665 elles sachent qu’elles en sont responsables, dans la mesure où elles cédèrent, jadis, aux tentations théocratiques ou sécu
1666 s, aux tentations théocratiques ou séculières. Si la culture et si nos libertés civiques sont brimées, par le fait d’une d
1667 ure et si nos libertés civiques sont brimées, par le fait d’une doctrine et d’un État « matérialistes », il faut savoir qu
1668 atérialistes », il faut savoir que nous en sommes les responsables, dans la mesure où nous cultivons un esprit détaché du r
1669 savoir que nous en sommes les responsables, dans la mesure où nous cultivons un esprit détaché du réel, une liberté abste
1670 l, une liberté abstentionniste et inféconde. Tout le mal vient de notre esprit. C’est à lui de faire pénitence, car c’étai
1671 primauté salutaire. Mais il faut aussi repartir. La tragédie de Marx et du marxisme, c’est de n’avoir pas su, ou pas pu o
1672 su, ou pas pu opposer au mensonge spiritualiste, la vérité du spirituel. Nous n’avons pas à nous dresser contre la « véri
1673 spirituel. Nous n’avons pas à nous dresser contre la « vérité » déviée de Marx, contre une vérité orpheline, coupée des li
1674 ne vérité orpheline, coupée des liens vivants qui l’ attachaient en Dieu à ses fins et à ses origines. Mais nous devons pro
1675 ins et à ses origines. Mais nous devons proclamer la vérité parfaite dont nous avons, nous les premiers, dévié. « Malheur
1676 é. « Malheur à moi si je n’évangélise ! », disait l’ Apôtre. Malheur à moi si je refuse de réaliser l’Évangile dans tous le
1677 l’Apôtre. Malheur à moi si je refuse de réaliser l’ Évangile dans tous les domaines de la vie. La seule lutte efficace con
1678 moi si je refuse de réaliser l’Évangile dans tous les domaines de la vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c
1679 de réaliser l’Évangile dans tous les domaines de la vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte q
1680 iser l’Évangile dans tous les domaines de la vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte qu’il nou
1681 omaines de la vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte qu’il nous faut mener contre la tentatio
1682 eule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte qu’il nous faut mener contre la tentation spiritualiste. 41.
1683 isme, c’est la lutte qu’il nous faut mener contre la tentation spiritualiste. 41. « Le communisme n’est pas pour nous u
1684 mener contre la tentation spiritualiste. 41. «  Le communisme n’est pas pour nous un état qui doive être créé, un idéal…
1685 ive être créé, un idéal… Nous appelons communisme le mouvement effectif qui supprimera la réalité présente. Les conditions
1686 s communisme le mouvement effectif qui supprimera la réalité présente. Les conditions de ce mouvement sont données par cet
1687 ment effectif qui supprimera la réalité présente. Les conditions de ce mouvement sont données par cette situation » (Marx,
1688 tsche Ideologie). 42. « Nous sommes tous membres les uns des autres » (Rom., 12, 5). D’autre part, Marx n’a pas cessé de c
1689 5). D’autre part, Marx n’a pas cessé de critiquer l’ « individu isolé et abstrait » (Thèses sur Feuerbach). 43. Marx, Crit
1690  » (Thèses sur Feuerbach). 43. Marx, Critique de la philosophie hégélienne du droit. 44. Au sens le plus large du terme,
1691 la philosophie hégélienne du droit. 44. Au sens le plus large du terme, qui peut désigner aussi bien la « société sans c
1692 plus large du terme, qui peut désigner aussi bien la « société sans classes » de Marx, que le « Royaume de Dieu » chrétien
1693 ssi bien la « société sans classes » de Marx, que le « Royaume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique, l’homme doit p
1694 que le « Royaume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique, l’homme doit prouver la vérité de sa pensée, c’est-à-dire s
1695 aume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique, l’ homme doit prouver la vérité de sa pensée, c’est-à-dire sa réalité et
1696 en. 45. « Dans la pratique, l’homme doit prouver la vérité de sa pensée, c’est-à-dire sa réalité et sa puissance concrète
1697 alité et sa puissance concrète. Réalité ou non de la pensée humaine isolée du domaine pratique, c’est querelle de pure sco
1698 ue » (Marx, 2e thèse sur Feuerbach). De même pour le chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et
1699 e thèse sur Feuerbach). De même pour le chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n
1700 Feuerbach). De même pour le chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n’a jamais dit
1701 our le chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n’a jamais dit autre chose, contra
1702 ations de polémistes ignorants, ou qui jouent sur les deux sens du mot œuvres (œuvres pies et action concrète). 46. Je par
1703 action concrète). 46. Je parle, bien entendu, de la religion telle que Marx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dan
1704 arle, bien entendu, de la religion telle que Marx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dans le corps social. Je n’oub
1705 rx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dans le corps social. Je n’oublie pas que la même époque a vu le grand réveil
1706 aissait dans le corps social. Je n’oublie pas que la même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la criti
1707 s social. Je n’oublie pas que la même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la critique ne peut évidemme
1708 même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. «  L’ armée de la critique ne peut évidemment remplacer la critique des arme
1709 a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la critique ne peut évidemment remplacer la critique des armes » (Marx,
1710 armée de la critique ne peut évidemment remplacer la critique des armes » (Marx, Critique de le philosophie hégélienne). I
1711 placer la critique des armes » (Marx, Critique de le philosophie hégélienne). Il faut en user, certes, mais elle ne suffit
1712 ne suffit pas. « Être radical consiste à attaquer le mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour l’homme même » (Id., i
1713 s. « Être radical consiste à attaquer le mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est
1714 l consiste à attaquer le mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire l’homme
1715 le mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour l’ homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire l’homme concret, produit socia
1716 st pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire l’ homme concret, produit social selon Marx, et non pas créature spiritue
1717 irituelle et charnelle. 48. En particulier, dans les Thèses sur Feuerbach. On peut y lire une phrase qui prouve que Marx n
1718 prouve que Marx ne prétendait nullement négliger les facteurs humains personnels, sans quoi le matérialisme ne serait pas
1719 gliger les facteurs humains personnels, sans quoi le matérialisme ne serait pas « dialectique ». « La coïncidence de la mo
1720 le matérialisme ne serait pas « dialectique ». «  La coïncidence de la modification des circonstances et de la modificatio
1721 e serait pas « dialectique ». « La coïncidence de la modification des circonstances et de la modification de l’activité hu
1722 idence de la modification des circonstances et de la modification de l’activité humaine, ou transformation personnelle, ne
1723 cation des circonstances et de la modification de l’ activité humaine, ou transformation personnelle, ne peut être rationne
1724 e activité révolutionnaire. » Phrase importante à l’ extrême ! Mais combien oubliée par le communiste moyen de nos jours !
1725 importante à l’extrême ! Mais combien oubliée par le communiste moyen de nos jours ! 49. Selon Karl Barth, par exemple, l
1726 e nos jours ! 49. Selon Karl Barth, par exemple, la dogmatique n’est qu’une question perpétuelle, une autocritique si l’o
1727 qu’une question perpétuelle, une autocritique si l’ on veut, que l’Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de
1728 n perpétuelle, une autocritique si l’on veut, que l’ Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de corriger sans
1729 our fonction de corriger sans cesse, de rectifier le message annoncé par la prédication et par les sacrements. C’est un ac
1730 r sans cesse, de rectifier le message annoncé par la prédication et par les sacrements. C’est un acte d’obéissance, et c’e
1731 fier le message annoncé par la prédication et par les sacrements. C’est un acte d’obéissance, et c’est aussi un acte d’humi
1732 inadéquate en soi, et ne peut être qu’un renvoi à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’est ains
1733 i à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique que l’Église prend de
1734 doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique que l’ Église prend de son message sous le rapport de sa fidélité à son fonde
1735 n contenu et à son but. Elle ne présente rien que l’ on puisse comparer, fût-ce le plus superficiellement, à un programme t
1736 ne présente rien que l’on puisse comparer, fût-ce le plus superficiellement, à un programme théorique qu’il s’agirait main
1737 qu’il s’agirait maintenant d’appliquer. En bref, la doctrine chrétienne, si l’on veut établir un parallèle — sans doute d
1738 d’appliquer. En bref, la doctrine chrétienne, si l’ on veut établir un parallèle — sans doute dangereux — ce serait la Per
1739 r un parallèle — sans doute dangereux — ce serait la Personne vivante de Jésus-Christ, et non pas la théologie, simple aut
1740 t la Personne vivante de Jésus-Christ, et non pas la théologie, simple autocritique de l’Église et du message que l’on prê
1741 , et non pas la théologie, simple autocritique de l’ Église et du message que l’on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre
1742 simple autocritique de l’Église et du message que l’ on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre à… » veut dire ici : « tend
1743 ue de l’Église et du message que l’on prêche dans l’ Église. 50. « S’attendre à… » veut dire ici : « tendre vers… » 51. M
1744 nstantin par des moyens légaux, il est vrai, mais avec les mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de l’histoire en ce s
1745 tin par des moyens légaux, il est vrai, mais avec les mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de l’histoire en ce sens
1746 es mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de l’ histoire en ce sens qu’on retrouve les mêmes mécanismes partout où l’e
1747 des lois de l’histoire en ce sens qu’on retrouve les mêmes mécanismes partout où l’esprit démissionne ! 52. « Je ne vois
1748 ns qu’on retrouve les mêmes mécanismes partout où l’ esprit démissionne ! 52. « Je ne vois jamais le christianisme devenir
1749 ù l’esprit démissionne ! 52. « Je ne vois jamais le christianisme devenir révolutionnaire ! » S’exclamait naguère Jean Gu
1750 ! » S’exclamait naguère Jean Guéhenno (Union pour la Vérité, 22 mars 1930). À quoi un socialiste allemand, le professeur H
1751 té, 22 mars 1930). À quoi un socialiste allemand, le professeur Hans Mühlestein, rétorquait : « Toutes les révolutions de
1752 professeur Hans Mühlestein, rétorquait : « Toutes les révolutions de l’histoire de l’Occident, sont sorties de la religion
1753 lestein, rétorquait : « Toutes les révolutions de l’ histoire de l’Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute
1754 quait : « Toutes les révolutions de l’histoire de l’ Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute autre cause es
1755 ions de l’histoire de l’Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute autre cause est secondaire. » Et Henri de
1756 ’il n’y a pas de socialisme en Asie, cela tient à l’ absence du christianisme. » Je note ici, à l’appui des dires de de Man
1757 nt à l’absence du christianisme. » Je note ici, à l’ appui des dires de de Man, que le mouvement syndicaliste au Japon a ét
1758 » Je note ici, à l’appui des dires de de Man, que le mouvement syndicaliste au Japon a été fondé par un chrétien, Kagawa.
1759 ndé par un chrétien, Kagawa. 53. Je ne dis pas «  les conditions physiques et spirituelles en ce qu’elles ont de permanent 
1760 les en ce qu’elles ont de permanent », car alors, le marxiste me ferait observer que des facteurs très essentiels de l’êtr
1761 rait observer que des facteurs très essentiels de l’ être même peuvent varier selon les milieux et la nature des institutio
1762 ès essentiels de l’être même peuvent varier selon les milieux et la nature des institutions. (Ainsi le besoin prétendu « pr
1763 e l’être même peuvent varier selon les milieux et la nature des institutions. (Ainsi le besoin prétendu « primordial » de
1764 les milieux et la nature des institutions. (Ainsi le besoin prétendu « primordial » de propriété, peut très bien être anéa
1765  » de propriété, peut très bien être anéanti chez l’ homme par un régime communiste.) Que reste-t-il dans l’être humain d’a
1766 me par un régime communiste.) Que reste-t-il dans l’ être humain d’absolument irréductible à toute transformation sociale ?
1767 ent irréductible à toute transformation sociale ? La mort physique et le péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créat
1768 oute transformation sociale ? La mort physique et le péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de l’esprit. En
1769 iale ? La mort physique et le péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout l’essentie
1770 rt physique et le péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout l’essentiel ! — Je dis
1771 Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de l’ esprit. En somme, tout l’essentiel ! — Je dis que toute doctrine qui n
1772 la fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout l’ essentiel ! — Je dis que toute doctrine qui ne tient pas compte d’une
1773 e de ces conditions conduit nécessairement soit à l’ idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme totalit
1774 ’idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme totalitaire résulte nécessairement d’une conception de l’h
1775 itaire résulte nécessairement d’une conception de l’ homme purement social, qui néglige la fonction spirituelle (créatrice)
1776 onception de l’homme purement social, qui néglige la fonction spirituelle (créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu
1777 i néglige la fonction spirituelle (créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu’à l’inverse, on ne saurait établir que
1778 créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu’à l’ inverse, on ne saurait établir que la sécularisation du christianisme
1779 Tandis qu’à l’inverse, on ne saurait établir que la sécularisation du christianisme résulte nécessairement de l’Évangile 
1780 sation du christianisme résulte nécessairement de l’ Évangile ! 54. Déclaration d’un étudiant chinois au congrès mondial d
1781 ation d’un étudiant chinois au congrès mondial de la Fédération des étudiants chrétiens. (Cf. Student World, automne 1933.
1782 (Cf. Student World, automne 1933.) 55. Telle que l’ ont opérée par exemple un Werner Sombart, un de Man, et en France, le
1783 emple un Werner Sombart, un de Man, et en France, le groupe de l’Ordre nouveau. (Cf. en particulier la Révolution nécessai
1784 le groupe de l’Ordre nouveau. (Cf. en particulier la Révolution nécessaire, par Aron et Dandieu, et sa critique de la noti
1785 écessaire, par Aron et Dandieu, et sa critique de la notion d’échange chez Marx.) 56. « Les pharisiens lui ayant demandé
1786 ritique de la notion d’échange chez Marx.) 56. «  Les pharisiens lui ayant demandé quand viendrait le Royaume de Dieu, Jésu
1787  Les pharisiens lui ayant demandé quand viendrait le Royaume de Dieu, Jésus leur répondit : Le Royaume de Dieu ne vient pa
1788 endrait le Royaume de Dieu, Jésus leur répondit : Le Royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards et l’on
1789 Royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards et l’on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car v
1790 ne vient pas de manière à frapper les regards et l’ on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que le Ro
1791 : il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que le Royaume de Dieu est au-dedans de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. Je p
1792 de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. Je parle ici, l’ on m’entend bien, de ce que doit être un chrétien conséquent. Il est t
1793 s certaines activités, celles-là précisément dont le marxisme a dû faire sa spécialité, en vertu de notre carence : la pol
1794 faire sa spécialité, en vertu de notre carence : la politique, nos affaires, nos intérêts dits matériels, et ceux des aut
1795 matériels, et ceux des autres ! Exemple typique : l’ auteur d’un des cantiques les plus pieux du recueil anglais, sir John
1796 s ! Exemple typique : l’auteur d’un des cantiques les plus pieux du recueil anglais, sir John Browning, est le même homme q
1797 pieux du recueil anglais, sir John Browning, est le même homme qui contraignit la Chine, sous la menace des canons, à s’o
1798 John Browning, est le même homme qui contraignit la Chine, sous la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’opium.
1799 est le même homme qui contraignit la Chine, sous la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’opium. Un tel fait don
1800 s la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’ opium. Un tel fait donne raison en apparence à la critique marxiste. E
1801 l’opium. Un tel fait donne raison en apparence à la critique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à la
1802 itique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’à l’ homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’e
1803 . En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression dans
1804 il ne donne tort qu’à l’homme, non à la foi dont l’ homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression dans ce sens, qui
1805 rt qu’à l’homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression dans ce sens, qui n’est pas le se
1806 oi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’ expression dans ce sens, qui n’est pas le sens jésuite courant : que l
1807 e prends l’expression dans ce sens, qui n’est pas le sens jésuite courant : que la fin seule doit indiquer les moyens just
1808 sens, qui n’est pas le sens jésuite courant : que la fin seule doit indiquer les moyens justes qui la préparent. Et non pa
1809 jésuite courant : que la fin seule doit indiquer les moyens justes qui la préparent. Et non pas justifier des moyens qui s
1810 la fin seule doit indiquer les moyens justes qui la préparent. Et non pas justifier des moyens qui seraient en soi contra
1811 ifier des moyens qui seraient en soi contraires à la justice, — ou à l’essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ic
1812 i seraient en soi contraires à la justice, — ou à l’ essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie polé
1813 soi contraires à la justice, — ou à l’essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie polémique des bou
1814 ce de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’ imagerie polémique des bourgeois, aux yeux desquels tout bolcheviste e
1815 ls tout bolcheviste est un criminel en puissance. Les communistes représentent chez nous, en général, l’élite de leur class
1816 s communistes représentent chez nous, en général, l’ élite de leur classe. Je ne les traite pas de menteurs, d’hypocrites,
1817 z nous, en général, l’élite de leur classe. Je ne les traite pas de menteurs, d’hypocrites, etc. Mais je dis qu’en tant qu’
1818 es, etc. Mais je dis qu’en tant qu’ils approuvent la politique de Staline et ses moyens, connus de tous, ils approuvent le
1819 ine et ses moyens, connus de tous, ils approuvent le mensonge (affaire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans la SDN), l’opp
1820 s, ils approuvent le mensonge (affaire Zinoviev), l’ hypocrisie (entrée dans la SDN), l’oppression (déportation des paysans
1821 nge (affaire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans la SDN), l’oppression (déportation des paysans, des écrivains), la haine
1822 ire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans la SDN), l’ oppression (déportation des paysans, des écrivains), la haine de class
1823 ression (déportation des paysans, des écrivains), la haine de classe (prêchée par Marx) et la guerre (pour peu qu’elle soi
1824 ivains), la haine de classe (prêchée par Marx) et la guerre (pour peu qu’elle soit censée défendre l’URSS). 60. Je n’ente
1825 la guerre (pour peu qu’elle soit censée défendre l’ URSS). 60. Je n’entends pas porter ici un jugement quelconque sur les
1826 entends pas porter ici un jugement quelconque sur les groupes dits d’Oxford. Je ne les cite qu’au seul titre d’exemple topi
1827 t quelconque sur les groupes dits d’Oxford. Je ne les cite qu’au seul titre d’exemple topique. 61. Le rédacteur de cette «
1828 les cite qu’au seul titre d’exemple topique. 61. Le rédacteur de cette « discipline » paraît avoir été le pasteur Antoine
1829 édacteur de cette « discipline » paraît avoir été le pasteur Antoine de Chandieu, mais l’intervention personnelle de Calvi
1830 ît avoir été le pasteur Antoine de Chandieu, mais l’ intervention personnelle de Calvin dans l’élaboration du document ne f
1831 u, mais l’intervention personnelle de Calvin dans l’ élaboration du document ne fait pas de doute. « C’est, dit F. de Schic
1832 on démocratique, fédérative et parlementaire. » À la base de tout, il y a l’église locale, ou paroisse. Ces églises se féd
1833 ive et parlementaire. » À la base de tout, il y a l’ église locale, ou paroisse. Ces églises se fédèrent par région. L’inst
1834 ou paroisse. Ces églises se fédèrent par région. L’ instance d’appel est « la cour suprême du synode national ». (John Vié
1835 se fédèrent par région. L’instance d’appel est «  la cour suprême du synode national ». (John Viénot, Histoire de la Réfor
1836 e du synode national ». (John Viénot, Histoire de la Réforme française, I, p. 271.) 62. C’est-à-dire : fondée sur la noti
1837 çaise, I, p. 271.) 62. C’est-à-dire : fondée sur la notion de vocation. 63. L’URSS est le seul État totalement totalitai
1838 t-à-dire : fondée sur la notion de vocation. 63. L’ URSS est le seul État totalement totalitaire, disait récemment Victor
1839 fondée sur la notion de vocation. 63. L’URSS est le seul État totalement totalitaire, disait récemment Victor Serge, écri
1840 on en Sibérie. u. Rougemont Denis de, « Changer la vie ou changer l’homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Pl
1841 Rougemont Denis de, « Changer la vie ou changer l’ homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-2
1842 enis de, « Changer la vie ou changer l’homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-233.
1843 r la vie ou changer l’homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-233.
5 1937, Articles divers (1936-1938). Vocation et destin d’Israël (1937)
1844 ocation et destin d’Israël (1937)v Sens de «  l’ histoire » d’Israël Un prophète, a écrit Karl Barth, est un homme s
1845 r une oreille habituée : « Il se lève et il tombe avec sa mission. » Nous ne savons rien du reste de sa vie, et n’avons nul
1846 s nul besoin d’en rien connaître pour reconnaître la portée de son message puisque c’est le message de Dieu. Jérémie n’eût
1847 econnaître la portée de son message puisque c’est le message de Dieu. Jérémie n’eût été qu’un berger bègue si l’Éternel n’
1848 de Dieu. Jérémie n’eût été qu’un berger bègue si l’ Éternel n’avait parlé par lui. Voici qui est digne de remarque : le se
1849 parlé par lui. Voici qui est digne de remarque : le seul détail précis que rapporte la Bible à son sujet, c’est cette dif
1850 de remarque : le seul détail précis que rapporte la Bible à son sujet, c’est cette difficulté à s’exprimer. Non seulement
1851 r. Non seulement rien d’historiquement notable ne le prédestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, — les psychologues
1852 historiquement notable ne le prédestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, — les psychologues s’y épuiseront — mais en
1853 édestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, —  les psychologues s’y épuiseront — mais encore il y avait cet obstacle, et
1854 cet obstacle, et celui-là précisément qui paraît le plus décisif, à vues humaines, s’agissant d’un homme appelé au minist
1855 nes, s’agissant d’un homme appelé au ministère de la Parole. Ce qui est vrai du prophète l’est aussi de son peuple, — peup
1856 nistère de la Parole. Ce qui est vrai du prophète l’ est aussi de son peuple, — peuple entre tous prophétique. Ce qui est v
1857 peuple entre tous prophétique. Ce qui est vrai de la biographie d’un homme que l’Éternel choisit n’est pas moins vrai de l
1858 . Ce qui est vrai de la biographie d’un homme que l’ Éternel choisit n’est pas moins vrai de l’histoire profane des Juifs,
1859 mme que l’Éternel choisit n’est pas moins vrai de l’ histoire profane des Juifs, porteurs eux aussi d’une mission que rien
1860 ion que rien en eux ne semblait préparer. On peut le dire sans paradoxe : Israël n’eût pas eu d’histoire sans la promesse
1861 ns paradoxe : Israël n’eût pas eu d’histoire sans la promesse que Dieu fit à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » ave
1862 u fit à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » avec la mission qu’elle incarne : « Préparer les voies du Seigneur », espé
1863 à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » avec la mission qu’elle incarne : « Préparer les voies du Seigneur », espérer
1864 be » avec la mission qu’elle incarne : « Préparer les voies du Seigneur », espérer et prêcher le Messie, attendre activemen
1865 parer les voies du Seigneur », espérer et prêcher le Messie, attendre activement l’invisible et plus que cela : le jamais
1866 espérer et prêcher le Messie, attendre activement l’ invisible et plus que cela : le jamais vu, ce qu’aucun autre peuple au
1867 ttendre activement l’invisible et plus que cela : le jamais vu, ce qu’aucun autre peuple au monde n’a jamais pu seulement
1868 ne répond à nul besoin historiquement déterminé… L’ histoire, au sens hégélien ou tainien, ou matérialiste-dialectique, se
1869 -dialectique, se donne pour tâche de reconstituer l’ évolution immanente d’un peuple, telle qu’on peut vraisemblablement la
1870 e d’un peuple, telle qu’on peut vraisemblablement la styliser et la chiffrer, c’est-à-dire, telle qu’elle fut déterminée p
1871 telle qu’on peut vraisemblablement la styliser et la chiffrer, c’est-à-dire, telle qu’elle fut déterminée par des facteurs
1872 te. Que nous apprend une science de cet ordre sur le destin auquel étaient promises les infimes tribus nomades qui constit
1873 e cet ordre sur le destin auquel étaient promises les infimes tribus nomades qui constituaient, aux origines, la nation jui
1874 s tribus nomades qui constituaient, aux origines, la nation juive ? Une similitude facile nous permet de l’imaginer : l’hi
1875 tion juive ? Une similitude facile nous permet de l’ imaginer : l’histoire n’a pas la plus petite raison de supposer que le
1876 Une similitude facile nous permet de l’imaginer : l’ histoire n’a pas la plus petite raison de supposer que le peuple d’Isr
1877 le nous permet de l’imaginer : l’histoire n’a pas la plus petite raison de supposer que le peuple d’Israël, s’il n’avait p
1878 ire n’a pas la plus petite raison de supposer que le peuple d’Israël, s’il n’avait pas été « élu », eût évolué d’une autre
1879 bus d’Arabie qui nous offrent encore aujourd’hui, avec une persistance bien remarquable tous les traits caractéristiques de
1880 d’hui, avec une persistance bien remarquable tous les traits caractéristiques de la coutume pastorale des temps d’Abraham.
1881 n remarquable tous les traits caractéristiques de la coutume pastorale des temps d’Abraham. Nous ne possédons pas un rense
1882 nt conservateur, qui a pesé jusqu’à nos jours sur les habitants du désert. Désignée entre mille, sans raison. Ou sans autre
1883 ance étonnante à construire et à conquérir… Ainsi les annales d’Israël sont celles d’une puissance imprévue et humainement
1884 que nous connaissons de leur « histoire » — mais le mot prend ici un sens nouveau — c’est la suite des gestes de Dieu don
1885 » — mais le mot prend ici un sens nouveau — c’est la suite des gestes de Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais
1886 a suite des gestes de Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans
1887 Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce
1888 Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce qui les rabat à leur destin, ce sont leurs révoltes constantes, leurs faux pa
1889 Et toute leur grandeur est à Dieu, c’est-à-dire à la vocation qui les arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre enve
1890 andeur est à Dieu, c’est-à-dire à la vocation qui les arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre envergure. Foi et
1891 de très piètre envergure. Foi et idolâtrie La considération du conflit séculaire que décrit l’Ancien Testament nous
1892 La considération du conflit séculaire que décrit l’ Ancien Testament nous ramène avec une insistance innombrable et vraime
1893 culaire que décrit l’Ancien Testament nous ramène avec une insistance innombrable et vraiment grandiose à cette opposition f
1894 lle on ne peut rien comprendre de ce qui touche à la nation des Juifs. Destin nomade, vocation messianique. Destin visible
1895 ion invisible et triomphante : celle que prêchent les prophètes au peuple et qui seule l’élève, l’assemble et donne un sens
1896 que prêchent les prophètes au peuple et qui seule l’ élève, l’assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errai
1897 ent les prophètes au peuple et qui seule l’élève, l’ assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errait sans « 
1898 qui seule l’élève, l’assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errait sans « fin » dans le désert, sans but
1899 vie de chacun. Ce peuple errait sans « fin » dans le désert, sans but jusqu’à ce que Dieu l’élise. Désormais sa voie est f
1900 in » dans le désert, sans but jusqu’à ce que Dieu l’ élise. Désormais sa voie est fixée, mais ce n’est plus sa « propre » v
1901 voie. Il vient de Dieu, il va vers Dieu, et c’est la loi de Dieu qui l’y conduit. C’est pourquoi son télos (sa fin dernièr
1902 ieu, il va vers Dieu, et c’est la loi de Dieu qui l’ y conduit. C’est pourquoi son télos (sa fin dernière), est transcendan
1903 n son essence, comme Dieu, et comme Dieu objet de la foi seule. De la foi, et non de la vue ! Catégories absolument nouvel
1904 mme Dieu, et comme Dieu objet de la foi seule. De la foi, et non de la vue ! Catégories absolument nouvelles, et qui jouer
1905 Dieu objet de la foi seule. De la foi, et non de la vue ! Catégories absolument nouvelles, et qui joueront un rôle déterm
1906 uvelles, et qui joueront un rôle déterminant dans l’ éthique de l’Occident, même sous les noms paganisés d’idéalisme et de
1907 ui joueront un rôle déterminant dans l’éthique de l’ Occident, même sous les noms paganisés d’idéalisme et de réalisme au s
1908 terminant dans l’éthique de l’Occident, même sous les noms paganisés d’idéalisme et de réalisme au sens courant. Mais le co
1909 d’idéalisme et de réalisme au sens courant. Mais le conflit de la foi et de la vue n’est en somme qu’un autre aspect du c
1910 t de réalisme au sens courant. Mais le conflit de la foi et de la vue n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de la v
1911 au sens courant. Mais le conflit de la foi et de la vue n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de la vocation et du
1912 e n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de la vocation et du destin. Il fait comprendre l’esprit de révolte qui tou
1913 t de la vocation et du destin. Il fait comprendre l’ esprit de révolte qui tourmenta sans fin les douze tribus. Car un but
1914 rendre l’esprit de révolte qui tourmenta sans fin les douze tribus. Car un but invisible aux mortels est une menace et une
1915 au moins autant qu’une promesse. Une menace pour les « intérêts immédiats » qui se voient par trop négligés au profit d’on
1916 Et une angoisse contre laquelle il est fatal que l’ on cherche à se protéger par quelque chose de visible et de tangible.
1917 ar quelque chose de visible et de tangible. Ainsi les Hébreux se rebellent, ils fuient dans le culte des faux dieux, rassur
1918 . Ainsi les Hébreux se rebellent, ils fuient dans le culte des faux dieux, rassurants parce que « faits de main d’homme »…
1919 e des faux dieux, rassurants parce que « faits de main d’homme »… Mais sans relâche, des prophètes reviennent pour railler d
1920 es reviennent pour railler durement ces idoles et les traîtres qui les adorent : Mon peuple consulte son bois Et c’est s
1921 r railler durement ces idoles et les traîtres qui les adorent : Mon peuple consulte son bois Et c’est son bâton qui lui
1922 n bois Et c’est son bâton qui lui parle ! Car l’ esprit de prostitution égare Et ils se prostituent loin de leur Dieu
1923 ir, et qui pourtant fait toute sa grandeur, c’est la révolte du destin profane contre la vocation libératrice. Et de même
1924 andeur, c’est la révolte du destin profane contre la vocation libératrice. Et de même que cette révolte, et ce destin, et
1925 ce besoin de voir, sont symbolisés au concret par les statues des idoles étrangères — car c’est le voisin qu’on imite lorsq
1926 par les statues des idoles étrangères — car c’est le voisin qu’on imite lorsqu’on doute de sa vocation — de même cette voc
1927 doute de sa vocation — de même cette vocation et la foi qu’elle implique ont un symbole, unique et univoque : l’Arche de
1928 lle implique ont un symbole, unique et univoque : l’ Arche de l’Alliance présente au sein du peuple, aussi nommée arche du
1929 e ont un symbole, unique et univoque : l’Arche de l’ Alliance présente au sein du peuple, aussi nommée arche du témoignage,
1930 nommée arche du témoignage, parce qu’elle atteste les volontés de Dieu, les conditions de son alliance. La mesure Dan
1931 nage, parce qu’elle atteste les volontés de Dieu, les conditions de son alliance. La mesure Dans l’Arche sont les Tab
1932 ontés de Dieu, les conditions de son alliance. La mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mes
1933 conditions de son alliance. La mesure Dans l’ Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’e
1934 e son alliance. La mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui ra
1935 . La mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la f
1936 mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’or
1937 ans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’origine et la
1938 sure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’ origine et la fin du peuple en tant qu’il est un « nouveau » peuple, é
1939  : c’est elle qui rappelle à la fois l’origine et la fin du peuple en tant qu’il est un « nouveau » peuple, élu par Dieu e
1940 aissé au hasard, tout est « mesuré » et jugé dans la perspective de la fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et
1941 out est « mesuré » et jugé dans la perspective de la fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi
1942 gé dans la perspective de la fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’Alliance n
1943 erspective de la fin assignée à toute la nation : l’ Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’Alliance nous apparaît
1944 la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’ Arche de l’Alliance nous apparaît comme l’exemple à peu près idéal de
1945 : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’ Alliance nous apparaît comme l’exemple à peu près idéal de ce que l’on
1946 . Ainsi l’Arche de l’Alliance nous apparaît comme l’ exemple à peu près idéal de ce que l’on peut nommer (d’un terme d’aill
1947 paraît comme l’exemple à peu près idéal de ce que l’ on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à l’antiquité helléniqu
1948 ’on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à l’ antiquité hellénique) la mesure d’une civilisation, le canon d’une cul
1949 rme d’ailleurs emprunté à l’antiquité hellénique) la mesure d’une civilisation, le canon d’une culture et d’un ordre socia
1950 tiquité hellénique) la mesure d’une civilisation, le canon d’une culture et d’un ordre social, le principe initial et fina
1951 ion, le canon d’une culture et d’un ordre social, le principe initial et final régulateur et en même temps animateur de to
1952 l régulateur et en même temps animateur de toutes les œuvres d’une nation, tant matérielles que politiques et spirituelles6
1953 ant matérielles que politiques et spirituelles65. L’ histoire des civilisations nous offre certes d’autres exemples assez g
1954 en et aztèque, Chine des grandes dynasties.) Mais la mesure des tribus hébraïques se distingue de toutes les autres en ce
1955 sure des tribus hébraïques se distingue de toutes les autres en ce qu’elle est une vocation adressée par un Dieu personnel,
1956 el, unique, éternel, transcendant. Elle n’est pas le produit normal d’une évolution historique fécondée et cristallisée pa
1957 évolution historique fécondée et cristallisée par l’ intervention d’un grand chef. Elle est donc plus « totalitaire » que t
1958 retrait ou de dépassement. Aucun refuge « loin de la face de l’Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu
1959 de dépassement. Aucun refuge « loin de la face de l’ Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éter
1960 loin de la face de l’Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience f
1961 ce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’ Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu
1962 est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est l
1963 de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est la loi de Di
1964 nce finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est la loi de Dieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle la règle pe
1965 Et parce qu’elle est la loi de Dieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle la règle permanente de toute action et d
1966 ieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle la règle permanente de toute action et de toute pensée. Vraie mesure don
1967 ie mesure donc, et parfaitement commune. On porte l’ Arche au-devant des armées, dans la guerre, comme le symbole de l’unit
1968 mune. On porte l’Arche au-devant des armées, dans la guerre, comme le symbole de l’unité du peuple, mais son usage est int
1969 Arche au-devant des armées, dans la guerre, comme le symbole de l’unité du peuple, mais son usage est interdit pendant les
1970 t des armées, dans la guerre, comme le symbole de l’ unité du peuple, mais son usage est interdit pendant les guerres civil
1971 té du peuple, mais son usage est interdit pendant les guerres civiles : c’est que la mesure est indivisible. Dieu est au ci
1972 interdit pendant les guerres civiles : c’est que la mesure est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et
1973 est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et les prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et si ces
1974 le. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et les prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et si ces « clercs » vie
1975 la terre, et les prêtres sont là pour veiller sur l’ Alliance. Et si ces « clercs » viennent à trahir, cédant à leur pencha
1976 hant immémorial et bien connu, s’ils oublient que le Dieu qu’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux », les Prophète
1977 ’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux », les Prophètes se lèvent contre eux et dénoncent leur idolâtrie66. Remarqu
1978 eux et dénoncent leur idolâtrie66. Remarquons que la notion d’idolâtrie déborde ici singulièrement le culte des images d’o
1979 la notion d’idolâtrie déborde ici singulièrement le culte des images d’où elle tire son nom. Elle embrasse tout ce qui n’
1980 on d’un autre bien. Idole tout ce qui détourne de la seule vocation. Idole toute action ou pensée, si belle ou si féconde
1981 euple élu. Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à la fin que les prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolât
1982 Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à la fin que les prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolâtries, c’est
1983 in que les prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolâtries, c’est celle qui prend pour objet de son culte la
1984 es, c’est celle qui prend pour objet de son culte la mesure même, la Loi en soi, abstraite des fins pour lesquelles elle e
1985 qui prend pour objet de son culte la mesure même, la Loi en soi, abstraite des fins pour lesquelles elle existe. C’est l’i
1986 raite des fins pour lesquelles elle existe. C’est l’ idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à la « lettre » d’une légis
1987 xiste. C’est l’idolâtrie qui consiste à soumettre l’ homme à la « lettre » d’une législation divine, mais dont l’homme s’es
1988 st l’idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à la « lettre » d’une législation divine, mais dont l’homme s’est emparé,
1989 la « lettre » d’une législation divine, mais dont l’ homme s’est emparé, et dont il fait sa chose, oubliant son Auteur. C’e
1990 it sa chose, oubliant son Auteur. C’est alors que la lettre tue l’homme, au lieu de le secourir en incarnant l’esprit. Et
1991 ubliant son Auteur. C’est alors que la lettre tue l’ homme, au lieu de le secourir en incarnant l’esprit. Et c’est à cette
1992 C’est alors que la lettre tue l’homme, au lieu de le secourir en incarnant l’esprit. Et c’est à cette ultime tentation que
1993 tue l’homme, au lieu de le secourir en incarnant l’ esprit. Et c’est à cette ultime tentation que devaient succomber les p
1994 t à cette ultime tentation que devaient succomber les plus grands rigoristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que le p
1995 ue devaient succomber les plus grands rigoristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que le peuple honorait à peu près co
1996 s plus grands rigoristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que le peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard
1997 oristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que le peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard des Pères de l’É
1998 , ceux que le peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard des Pères de l’Église, des évêques et des cardinaux : l
1999 Pères de l’Église, des évêques et des cardinaux : les pharisiens. Condamnant au nom de la Loi celui-là même qui l’avait don
2000 cardinaux : les pharisiens. Condamnant au nom de la Loi celui-là même qui l’avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de
2001 ns. Condamnant au nom de la Loi celui-là même qui l’ avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de la lettre, celui dont ce
2002 i l’avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de la lettre, celui dont cette lettre préparait la venue, et qui seul lui d
2003 m de la lettre, celui dont cette lettre préparait la venue, et qui seul lui donnait son sens… ⁂ Rien ne me paraît plus pro
2004 t plus propre à confirmer cette interprétation de la Loi, comme mesure du peuple hébreu, qu’un texte que je trouve dans le
2005 du peuple hébreu, qu’un texte que je trouve dans le plus grand des historiens profanes des Juifs : Josèphe. « Notre légis
2006 ïse), écrit-il dans sa Réponse à Appion 67, a été le seul dont les actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a
2007 l dans sa Réponse à Appion 67, a été le seul dont les actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a pas seulement
2008 se à Appion 67, a été le seul dont les actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a pas seulement formulé des loi
2009 le conformité, parce que rien n’est si capable de la faire naître et de l’entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de
2010 ue rien n’est si capable de la faire naître et de l’ entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, e
2011 e la faire naître et de l’entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, et d’être élevés dans une mê
2012 l’entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, et d’être élevés dans une même manière de vivre, et
2013 re élevés dans une même manière de vivre, et dans les mêmes coutumes ; car on n’entend point parmi nous parler diversement
2014 parler diversement de Dieu, comme il arrive parmi les autres peuples, non seulement entre les personnes du commun qui disen
2015 ive parmi les autres peuples, non seulement entre les personnes du commun qui disent chacun au hasard ce qui leur vient dan
2016 ui disent chacun au hasard ce qui leur vient dans l’ esprit ; mais entre les philosophes… Nous croyons que Dieu voit tout c
2017 sard ce qui leur vient dans l’esprit ; mais entre les philosophes… Nous croyons que Dieu voit tout ce qui se passe dans le
2018 s croyons que Dieu voit tout ce qui se passe dans le monde. Nos femmes et nos serviteurs en sont persuadés comme nous : on
2019 dés comme nous : on peut apprendre de leur bouche les règles de la conduite de notre vie, et que toutes nos actions doivent
2020  : on peut apprendre de leur bouche les règles de la conduite de notre vie, et que toutes nos actions doivent avoir pour o
2021 t matériel, aussi fanatiquement lié et suspendu à l’ invisible. Le moderne en ressent comme une offense à cette liberté cré
2022 ussi fanatiquement lié et suspendu à l’invisible. Le moderne en ressent comme une offense à cette liberté créatrice dans l
2023 d’inventions négligées, méprisées ! Nous adorons la Vie et le Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure n
2024 ons négligées, méprisées ! Nous adorons la Vie et le Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à
2025 s, méprisées ! Nous adorons la Vie et le Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu
2026 adorons la Vie et le Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu’une occasion de dé
2027 t à nos yeux qu’une occasion de dépassement… Oui, la Richesse est notre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de l’ex
2028 chesse est notre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de l’expansion, mais aussi de l’anarchie finale de notre cultu
2029 tre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de l’ expansion, mais aussi de l’anarchie finale de notre culture moderne. C
2030 peut-être le secret de l’expansion, mais aussi de l’ anarchie finale de notre culture moderne. Culture dont les éléments pr
2031 hie finale de notre culture moderne. Culture dont les éléments progressivement désunis, puis coupés de toute base commune,
2032 t à ne plus même pouvoir communiquer, ni s’animer les uns les autres, chacun se refermant sur sa spécialité, se forgeant un
2033 lus même pouvoir communiquer, ni s’animer les uns les autres, chacun se refermant sur sa spécialité, se forgeant une langue
2034 et convoquant enfin, à grands frais d’inventions, la vieille malédiction de la tour de Babel, qui est la dispersion du gen
2035 nds frais d’inventions, la vieille malédiction de la tour de Babel, qui est la dispersion du genre humain. Le dilemme qui
2036 vieille malédiction de la tour de Babel, qui est la dispersion du genre humain. Le dilemme qui se trouve posé à toute civ
2037 de Babel, qui est la dispersion du genre humain. Le dilemme qui se trouve posé à toute civilisation, et d’une manière trè
2038 ute civilisation, et d’une manière très urgente à la nôtre, est assez clairement défini par la comparaison que l’on peut f
2039 gente à la nôtre, est assez clairement défini par la comparaison que l’on peut faire de notre richesse anarchique, et rend
2040 st assez clairement défini par la comparaison que l’ on peut faire de notre richesse anarchique, et rendue presque vaine pa
2041 narchique, et rendue presque vaine par ses excès, avec la pauvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël
2042 ique, et rendue presque vaine par ses excès, avec la pauvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. C
2043 auvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une
2044 t de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. Ce que l’ on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce do
2045 osait la Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce que l’ on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont l’exemple juif no
2046 gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont l’ exemple juif nous permettra mieux que tout autre de juger. Que devient
2047 eux que tout autre de juger. Que devient en effet la culture, dans un monde où n’est tolérée que « la seule chose nécessai
2048 la culture, dans un monde où n’est tolérée que «  la seule chose nécessaire ? » L’homme qui a une vocation n’est pas bon
2049 ’est tolérée que « la seule chose nécessaire ? » L’ homme qui a une vocation n’est pas bon à autre chose. Israël portait d
2050 s bon à autre chose. Israël portait dans son sein l’ avenir religieux du monde. Dès qu’il était tenté de s’oublier dans les
2051 du monde. Dès qu’il était tenté de s’oublier dans les voies vulgaires des autres peuples, une sorte de génie sombre lui mon
2052 s peuples, une sorte de génie sombre lui montrait l’ envers de toute chose, et avec des accents d’amère ironie, proclamait
2053 e sombre lui montrait l’envers de toute chose, et avec des accents d’amère ironie, proclamait que la justice à l’ancienne ma
2054 t avec des accents d’amère ironie, proclamait que la justice à l’ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ain
2055 cents d’amère ironie, proclamait que la justice à l’ ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ainsi toute tent
2056 it assimilée à une révolte d’orgueil contre Dieu. La culture d’Israël sera pauvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté
2057 uvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté sera la condition de sa grandeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui comble l
2058 andeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui comble la mesure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais
2059 c’est ce qui comble la mesure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas l
2060 esure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes ma
2061 ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais les moyens mesu
2062 pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par la fin. C’est pourquo
2063 lité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par la fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit l
2064 s moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par la fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit la fidélité de la cultu
2065 la fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit la fidélité de la culture du peuple hébreu. C’est une ascèse : il s’agit
2066 pourquoi sa pauvreté même garantit la fidélité de la culture du peuple hébreu. C’est une ascèse : il s’agit de détruire en
2067 ce qui comblerait trop tôt, ou trop humainement, la grande attente messianique. Point d’abstractions : c’est que le culte
2068 nte messianique. Point d’abstractions : c’est que le culte qu’il faut rendre au Dieu vivant est une obéissance directe « e
2069 ité ». Or abstraire, c’est d’abord s’abstraire de l’ immédiat. Et c’est aussi, dans une certaine mesure, douter… Ainsi donc
2070 ans une certaine mesure, douter… Ainsi donc, pour l’ Hébreu, se borner au concret, c’est rester fidèle à la Loi. D’ailleurs
2071 breu, se borner au concret, c’est rester fidèle à la Loi. D’ailleurs son langage même s’ordonne dès l’origine à cette voca
2072 la Loi. D’ailleurs son langage même s’ordonne dès l’ origine à cette vocation supérieure ; dénué de termes abstraits, impro
2073 its, impropre à toute métaphysique69 il contraint les auteurs sacrés à l’invention de métaphores qui enrobent les notions l
2074 métaphysique69 il contraint les auteurs sacrés à l’ invention de métaphores qui enrobent les notions les plus hautes dans
2075 s sacrés à l’invention de métaphores qui enrobent les notions les plus hautes dans un vêtement quotidien ; on dirait : un v
2076 ’invention de métaphores qui enrobent les notions les plus hautes dans un vêtement quotidien ; on dirait : un vêtement de t
2077 hètes, a-t-il besoin de philosophes ? — est ainsi l’ aspect négatif d’une splendeur poétique inégalée. (La poésie de l’Occi
2078 spect négatif d’une splendeur poétique inégalée. ( La poésie de l’Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera
2079 d’une splendeur poétique inégalée. (La poésie de l’ Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera biblique ou
2080 La poésie de l’Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera biblique ou grecque, sublime dans la mesure où la
2081 re où elle sera biblique ou grecque, sublime dans la mesure où la synthèse des deux traditions sera dominée par l’élément
2082 ra biblique ou grecque, sublime dans la mesure où la synthèse des deux traditions sera dominée par l’élément biblique.) Se
2083 la synthèse des deux traditions sera dominée par l’ élément biblique.) Seuls les grands discours prophétiques, parmi tous
2084 tions sera dominée par l’élément biblique.) Seuls les grands discours prophétiques, parmi tous les chants de la terre, ont
2085 euls les grands discours prophétiques, parmi tous les chants de la terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié l’étymo
2086 s discours prophétiques, parmi tous les chants de la terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié l’étymologie grecque
2087 ous les chants de la terre, ont réellement rythmé l’ action et vérifié l’étymologie grecque de poésie, qui est agir. Point
2088 terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié l’ étymologie grecque de poésie, qui est agir. Point d’arts figuratifs ou
2089 est agir. Point d’arts figuratifs ou imaginatifs. La loi les interdit par le deuxième et le troisième commandement. « Tu n
2090 r. Point d’arts figuratifs ou imaginatifs. La loi les interdit par le deuxième et le troisième commandement. « Tu ne te fer
2091 e représentation des choses qui sont en haut dans les cieux, en bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que la terre. »
2092 hoses qui sont en haut dans les cieux, en bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que la terre. » Cela condamne toute
2093 haut dans les cieux, en bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que la terre. » Cela condamne toute espèce d’art plasti
2094 n bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que la terre. » Cela condamne toute espèce d’art plastique. « Tu n’auras pas
2095 s d’autres dieux devant ma face » — cela condamne la mythologie et la fabulation, où les Aryens puisent leur art de trompe
2096 devant ma face » — cela condamne la mythologie et la fabulation, où les Aryens puisent leur art de tromper et de se satisf
2097 cela condamne la mythologie et la fabulation, où les Aryens puisent leur art de tromper et de se satisfaire d’illusions. P
2098 ’illusions. Point de science purement technique : la sagesse de Salomon n’est pas une connaissance des « causes » mais bie
2099 ignatures » naturelles. Elle ne veut pas utiliser les choses, mais distinguer en elles les intentions divines, pour les off
2100 pas utiliser les choses, mais distinguer en elles les intentions divines, pour les offrir en holocauste spirituel au Créate
2101 distinguer en elles les intentions divines, pour les offrir en holocauste spirituel au Créateur70. Enfin, remarque encore
2102 l au Créateur70. Enfin, remarque encore Renan : «  L’ esprit prophétique, et les institutions qui en naissent, au moins virt
2103 emarque encore Renan : « L’esprit prophétique, et les institutions qui en naissent, au moins virtuellement, interdisaient l
2104 n naissent, au moins virtuellement, interdisaient le développement commercial71 et industriel. » Que reste-t-il de ce que
2105 tes, science, industrie, tout cela est sacrifié à la seule chose nécessaire : l’accomplissement d’une vocation spirituelle
2106 t cela est sacrifié à la seule chose nécessaire : l’ accomplissement d’une vocation spirituelle. Et les moyens de cet accom
2107 l’accomplissement d’une vocation spirituelle. Et les moyens de cet accomplissement sont les moyens les plus élémentaires q
2108 tuelle. Et les moyens de cet accomplissement sont les moyens les plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’écri
2109 les moyens de cet accomplissement sont les moyens les plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’écriture, la pa
2110 ssement sont les moyens les plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’écriture, la parole et l’action, — la tra
2111 us élémentaires que les hommes ont de commercer : l’ écriture, la parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guer
2112 res que les hommes ont de commercer : l’écriture, la parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet
2113 ommes ont de commercer : l’écriture, la parole et l’ action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénu
2114 commercer : l’écriture, la parole et l’action, —  la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénuement, ce ré
2115 ’écriture, la parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénuement, ce résidu d’exclusi
2116 parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénuement, ce résidu d’exclusions fanatiques
2117 clusions fanatiques, se trouve sauver et garantir la possession de ce que notre Occident lui-même a défini comme le bien s
2118 de ce que notre Occident lui-même a défini comme le bien souverain : l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la
2119 ident lui-même a défini comme le bien souverain : l’ harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet q
2120 défini comme le bien souverain : l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que la destinatio
2121 le bien souverain : l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que la destination de toute cul
2122 l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que la destination de toute culture, c’est de conc
2123 dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’ on admet que la destination de toute culture, c’est de concentrer les
2124 sme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que la destination de toute culture, c’est de concentrer les puissances de l
2125 destination de toute culture, c’est de concentrer les puissances de la nature et de la société dans les, mains de l’homme r
2126 te culture, c’est de concentrer les puissances de la nature et de la société dans les, mains de l’homme responsable, et do
2127 t de concentrer les puissances de la nature et de la société dans les, mains de l’homme responsable, et dont l’esprit conn
2128 les puissances de la nature et de la société dans les , mains de l’homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel
2129 uissances de la nature et de la société dans les, mains de l’homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel il déd
2130 de la nature et de la société dans les, mains de l’ homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel il dédie tou
2131 é dans les, mains de l’homme responsable, et dont l’ esprit connaît un but auquel il dédie toutes ses œuvres, l’on voit que
2132 connaît un but auquel il dédie toutes ses œuvres, l’ on voit que la culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu,
2133 auquel il dédie toutes ses œuvres, l’on voit que la culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la
2134 dédie toutes ses œuvres, l’on voit que la culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la plus conven
2135 pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la plus convenable aux fins suprêmes de l’esprit. Toutefois, non tant à
2136 fut aussi la plus convenable aux fins suprêmes de l’ esprit. Toutefois, non tant à cause de sa pauvreté même, qu’à cause de
2137 n tant à cause de sa pauvreté même, qu’à cause de l’ absolu de sa mesure, et de la promesse qu’elle portait. ⁂ Revenons enc
2138 même, qu’à cause de l’absolu de sa mesure, et de la promesse qu’elle portait. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce q
2139 it. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce que l’ on nous reproche comme un grand défaut, de ne nous point étudier à inv
2140 tudier à inventer des choses nouvelles, soit dans les arts, ou dans le langage, au lieu que les autres peuples méritent bea
2141 des choses nouvelles, soit dans les arts, ou dans le langage, au lieu que les autres peuples méritent beaucoup de louange
2142 it dans les arts, ou dans le langage, au lieu que les autres peuples méritent beaucoup de louange d’y apporter de continuel
2143 à vertu et prudence, de demeurer constamment dans l’ observation des lois et des coutumes de nos ancêtres, parce que c’est
2144 l n’y a que celles qui n’ont pas cet avantage que l’ on soit obligé de changer, lorsque l’expérience fait connaître le beso
2145 avantage que l’on soit obligé de changer, lorsque l’ expérience fait connaître le besoin d’en corriger les défauts. Ainsi,
2146 é de changer, lorsque l’expérience fait connaître le besoin d’en corriger les défauts. Ainsi, comme nous ne doutons point
2147 expérience fait connaître le besoin d’en corriger les défauts. Ainsi, comme nous ne doutons point que ce ne soit Dieu qui n
2148 que ce ne soit Dieu qui nous a donné ces lois par l’ entremise de Moïse, pourrions-nous, sans impiété, ne nous pas efforcer
2149 rions-nous, sans impiété, ne nous pas efforcer de les observer très religieusement ? Et quelle conduite peut être plus just
2150 s sainte, que celle dont ce souverain Monarque de l’ univers est l’auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus
2151 celle dont ce souverain Monarque de l’univers est l’ auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus parfaite que
2152 de gouvernement peut donc être plus parfaite que la nôtre, et quels plus grands honneurs peut-on rendre à Dieu, puisque n
2153 e, et que toutes choses ne sont pas mieux réglées le jour d’une fête solennelle, qu’elles le sont toujours parmi nous ?
2154 x réglées le jour d’une fête solennelle, qu’elles le sont toujours parmi nous ? Chute d’Israël Tout était suspendu
2155 ous ? Chute d’Israël Tout était suspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messianique donnée p
2156 uspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messianique donnée par Dieu dès les temps primitifs72. Mais
2157 due à la promesse messianique donnée par Dieu dès les temps primitifs72. Mais cette promesse, enfin, s’est incarnée. Et les
2158 2. Mais cette promesse, enfin, s’est incarnée. Et les juifs l’ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cette « ombre des bi
2159 tte promesse, enfin, s’est incarnée. Et les juifs l’ ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cette « ombre des biens à ven
2160 . Et les juifs l’ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cette « ombre des biens à venir. » (Héb. 10, 1), pour repousser
2161 des biens à venir. » (Héb. 10, 1), pour repousser le Christ, qui était « l’esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lo
2162 éb. 10, 1), pour repousser le Christ, qui était «  l’ esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomp
2163 ur repousser le Christ, qui était « l’esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le
2164 t, qui était « l’esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui
2165 sprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’e
2166 la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’est d’une double manière : parce
2167 lie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’ est d’une double manière : parce qu’elle a abouti — le Messie est venu
2168 t d’une double manière : parce qu’elle a abouti — le Messie est venu — et parce qu’elle a perdu son sens en condamnant cel
2169 ette Alliance, et ce sont ceux qui adorent encore l’ ancienne Loi, « déclarée vieillie », qui sont maintenant les idolâtres
2170 e Loi, « déclarée vieillie », qui sont maintenant les idolâtres. Voilà pourquoi le peuple juif, qui n’a pas cru à sa victoi
2171 qui sont maintenant les idolâtres. Voilà pourquoi le peuple juif, qui n’a pas cru à sa victoire, et qui repousse la nouvel
2172 f, qui n’a pas cru à sa victoire, et qui repousse la nouvelle mesure, c’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui l
2173 et qui repousse la nouvelle mesure, c’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui le peuple sans mesure, sans limite
2174 ’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui le peuple sans mesure, sans limites et sans foyer. Sans espérance, il cr
2175 es qui ne viendront pas… Héritage d’Israël Le christianisme par sa nature même, brisait avec le nationalisme exclus
2176 Le christianisme par sa nature même, brisait avec le nationalisme exclusif du judaïsme et assumait une mission de porté
2177 Le christianisme par sa nature même, brisait avec le nationalisme exclusif du judaïsme et assumait une mission de portée u
2178 verselle. Il revendiquait toutefois en même temps l’ héritage d’Israël, et l’attraction qu’il exerçait venait non des princ
2179 t toutefois en même temps l’héritage d’Israël, et l’ attraction qu’il exerçait venait non des principes généraux de la pens
2180 ’il exerçait venait non des principes généraux de la pensée hellénistique, mais de la pure tradition hébraïque, représenté
2181 ipes généraux de la pensée hellénistique, mais de la pure tradition hébraïque, représentée par la Loi et les Prophètes. L’
2182 s de la pure tradition hébraïque, représentée par la Loi et les Prophètes. L’Église primitive se regardait comme le second
2183 re tradition hébraïque, représentée par la Loi et les Prophètes. L’Église primitive se regardait comme le second Israël, l’
2184 braïque, représentée par la Loi et les Prophètes. L’ Église primitive se regardait comme le second Israël, l’héritière du R
2185 se primitive se regardait comme le second Israël, l’ héritière du Royaume promis au Peuple de Dieu. Aussi conserva-t-elle à
2186 conciliable opposition dont s’était nourrie toute la tradition judaïque. C’est précisément ce sens de la continuité histor
2187 tradition judaïque. C’est précisément ce sens de la continuité historique et de la solidarité sociale qui distingua l’égl
2188 isément ce sens de la continuité historique et de la solidarité sociale qui distingua l’église chrétienne des religions à
2189 torique et de la solidarité sociale qui distingua l’ église chrétienne des religions à mystères et des autres cultes orient
2190 ette époque, et qui fit d’elle dès son apparition la seule rivale véritable et la seule remplaçante possible de la religio
2191 e dès son apparition la seule rivale véritable et la seule remplaçante possible de la religion officielle de l’Empire73.
2192 ale véritable et la seule remplaçante possible de la religion officielle de l’Empire73. Ces quelques lignes de Dawson me
2193 remplaçante possible de la religion officielle de l’ Empire73. Ces quelques lignes de Dawson me paraissent définir en racc
2194 gnes de Dawson me paraissent définir en raccourci le double héritage que l’Église et l’Europe ont repris des mains d’Israë
2195 ssent définir en raccourci le double héritage que l’ Église et l’Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l
2196 r en raccourci le double héritage que l’Église et l’ Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l’« élection
2197 héritage que l’Église et l’Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l’« élection collective », d’une part, —
2198 ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l’ « élection collective », d’une part, — car la postérité d’Abraham, apr
2199 n de l’« élection collective », d’une part, — car la postérité d’Abraham, après le Christ, c’est l’ensemble de tous les cr
2200 , d’une part, — car la postérité d’Abraham, après le Christ, c’est l’ensemble de tous les croyants, gentils ou Juifs conve
2201 ar la postérité d’Abraham, après le Christ, c’est l’ ensemble de tous les croyants, gentils ou Juifs convertis, donc l’Égli
2202 braham, après le Christ, c’est l’ensemble de tous les croyants, gentils ou Juifs convertis, donc l’Église — héritage humain
2203 us les croyants, gentils ou Juifs convertis, donc l’ Église — héritage humain, d’autre part, de cette notion de la mesure «
2204 héritage humain, d’autre part, de cette notion de la mesure « totalitaire » qui devait assurer la grandeur de l’Église — m
2205 n de la mesure « totalitaire » qui devait assurer la grandeur de l’Église — mais dont les déviations et perversions ravage
2206 « totalitaire » qui devait assurer la grandeur de l’ Église — mais dont les déviations et perversions ravagent l’Europe dep
2207 evait assurer la grandeur de l’Église — mais dont les déviations et perversions ravagent l’Europe depuis le xviie siècle,
2208 mais dont les déviations et perversions ravagent l’ Europe depuis le xviie siècle, et menacent aujourd’hui de la détruire
2209 éviations et perversions ravagent l’Europe depuis le xviie siècle, et menacent aujourd’hui de la détruire74. Il ne saurai
2210 puis le xviie siècle, et menacent aujourd’hui de la détruire74. Il ne saurait être question de retracer ici dans son ense
2211 t être question de retracer ici dans son ensemble l’ évolution des éléments culturels et civilisateurs qui survécurent à la
2212 ents culturels et civilisateurs qui survécurent à la chute d’Israël, au moins aussi fondamentaux pour l’Occident que la ra
2213 chute d’Israël, au moins aussi fondamentaux pour l’ Occident que la raison des Grecs et l’ordre des Romains. Il m’appartie
2214 , au moins aussi fondamentaux pour l’Occident que la raison des Grecs et l’ordre des Romains. Il m’appartient seulement de
2215 entaux pour l’Occident que la raison des Grecs et l’ ordre des Romains. Il m’appartient seulement de préciser en quelques t
2216 partient seulement de préciser en quelques traits le sens que prend l’héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante
2217 de préciser en quelques traits le sens que prend l’ héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante. On sait le rôle
2218 traits le sens que prend l’héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante. On sait le rôle joué dans la Réforme par
2219 sraël pour la foi chrétienne protestante. On sait le rôle joué dans la Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux t
2220 chrétienne protestante. On sait le rôle joué dans la Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux traditions prophéti
2221 estante. On sait le rôle joué dans la Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux traditions prophétiques. Mais sait
2222 sait le rôle joué dans la Réforme par le retour à l’ Ancien Testament et aux traditions prophétiques. Mais sait-on à quel p
2223 is sait-on à quel point tout cela vit encore dans les églises évangéliques de nos jours ? Dès les bancs de « l’école du dim
2224 dans les églises évangéliques de nos jours ? Dès les bancs de « l’école du dimanche », tout jeune protestant est nourri au
2225 es évangéliques de nos jours ? Dès les bancs de «  l’ école du dimanche », tout jeune protestant est nourri aux sources même
2226 seph vendu par ses frères, Jonas dans sa baleine, l’ ânesse de Balaam, David et Jonathan, Absalon pris par les cheveux, le
2227 se de Balaam, David et Jonathan, Absalon pris par les cheveux, le jeune Samuel appelé trois fois par Jéhovah, — que ce soit
2228 David et Jonathan, Absalon pris par les cheveux, le jeune Samuel appelé trois fois par Jéhovah, — que ce soit histoire ou
2229 ages lui sont incomparablement plus familiers que les métamorphoses des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75 que l’Ancie
2230 s des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75 que l’ Ancien Testament était la vraie Antiquité des peuples de l’Europe prot
2231 en qu’on a pu dire75 que l’Ancien Testament était la vraie Antiquité des peuples de l’Europe protestante. Mais il y a bien
2232 Testament était la vraie Antiquité des peuples de l’ Europe protestante. Mais il y a bien davantage que cet arrière-plan po
2233 e morale parfois scandaleusement antibourgeoise ! Le thème de la vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuv
2234 fois scandaleusement antibourgeoise ! Le thème de la vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus
2235 ement antibourgeoise ! Le thème de la vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément la
2236 le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément la « sensibilité spirituelle » d’un réformé. Le
2237 lu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément la « sensibilité spirituelle » d’un réformé. Le « peuple élu » Le
2238 t la « sensibilité spirituelle » d’un réformé. Le « peuple élu » Le simple fait que le calvinisme ait été dès le déb
2239 irituelle » d’un réformé. Le « peuple élu » Le simple fait que le calvinisme ait été dès le début une église minorit
2240 formé. Le « peuple élu » Le simple fait que le calvinisme ait été dès le début une église minoritaire, en butte à la
2241 » Le simple fait que le calvinisme ait été dès le début une église minoritaire, en butte à la persécution, ne suffit pa
2242 é dès le début une église minoritaire, en butte à la persécution, ne suffit pas à expliquer les ressemblances si souvent s
2243 butte à la persécution, ne suffit pas à expliquer les ressemblances si souvent signalées entre le sort des tribus dispersée
2244 quer les ressemblances si souvent signalées entre le sort des tribus dispersées et celui du « petit troupeau » longtemps c
2245 etit troupeau » longtemps chassé de son pays ; ni les ressemblances entre les formes d’activité et d’attitude sociale adopt
2246 s chassé de son pays ; ni les ressemblances entre les formes d’activité et d’attitude sociale adoptées par les deux « natio
2247 mes d’activité et d’attitude sociale adoptées par les deux « nations »76. Ce qui est déterminant pour cette analogie, ce qu
2248 gie, ce qui lui donne son seul sens acceptable et la situe dans son ordre réel, c’est que, dans les deux cas, la persécuti
2249 et la situe dans son ordre réel, c’est que, dans les deux cas, la persécution et l’isolement minoritaire sont considérés c
2250 ans son ordre réel, c’est que, dans les deux cas, la persécution et l’isolement minoritaire sont considérés comme « normau
2251 , c’est que, dans les deux cas, la persécution et l’ isolement minoritaire sont considérés comme « normaux » : ils exprimen
2252 sont considérés comme « normaux » : ils expriment le destin spirituel, dans un monde incrédule et rebelle, de ceux que Die
2253 lise. En vertu de cette « élection » dont ils ont l’ assurance d’être l’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, le
2254 ette « élection » dont ils ont l’assurance d’être l’ objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès
2255 d’être l’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès la fin du xvie siècle, se considèrent comm
2256 ’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès la fin du xvie siècle, se considèrent comme chargés
2257 périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès la fin du xvie siècle, se considèrent comme chargés d’une mission au se
2258 nde pécheur que Dieu n’abandonne pas. De même que la loi de Moïse maintenait le peuple juif, malgré le péché, dans une éco
2259 donne pas. De même que la loi de Moïse maintenait le peuple juif, malgré le péché, dans une économie provisoirement vivabl
2260 la loi de Moïse maintenait le peuple juif, malgré le péché, dans une économie provisoirement vivable et propre à entreteni
2261 mie provisoirement vivable et propre à entretenir l’ attente active du Messie, de même l’éthique charismatique77 des calvin
2262 à entretenir l’attente active du Messie, de même l’ éthique charismatique77 des calvinistes les amène à la conception d’un
2263 de même l’éthique charismatique77 des calvinistes les amène à la conception d’une intendance des biens terrestres, dont ils
2264 hique charismatique77 des calvinistes les amène à la conception d’une intendance des biens terrestres, dont ils auraient à
2265 des biens terrestres, dont ils auraient à assumer l’ office : usant de ces richesses « comme n’en usant pas », au nom et pa
2266 richesses « comme n’en usant pas », au nom et par la charge du Seigneur qui est venu, et qui doit revenir. Telle est sans
2267 t venu, et qui doit revenir. Telle est sans doute la racine authentique du puritanisme qui apparaît dans le courant du xvi
2268 cine authentique du puritanisme qui apparaît dans le courant du xviie siècle. Max Weber, dans une thèse célèbre, a souten
2269 dans une thèse célèbre, a soutenu que c’était là l’ origine du capitalisme moderne et de ses principales valeurs éthiques.
2270 les valeurs éthiques. Mais Sombart lui répond que le capitalisme est plus ancien, et qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’
2271 qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’est pas ici le lieu de prendre parti entre ces deux explications d’un phénomène écon
2272 leurs personne — non pas même Marx, quoi qu’on en pense souvent — n’a su définir clairement. Mais je retiens que l’une et l’a
2273 e retiens que l’une et l’autre hypothèse rattache le capitalisme à des attitudes religieuses, d’où serait partie l’impulsi
2274 e à des attitudes religieuses, d’où serait partie l’ impulsion, attitudes analogues en ceci tout au moins qu’elles mettent
2275 analogues en ceci tout au moins qu’elles mettent l’ accent sur le fait de l’élection. Il est curieux de noter que le paral
2276 ceci tout au moins qu’elles mettent l’accent sur le fait de l’élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se po
2277 au moins qu’elles mettent l’accent sur le fait de l’ élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se poursuit même
2278 e fait de l’élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se poursuit même, — et peut-être surtout — dans les dévi
2279 e se poursuit même, — et peut-être surtout — dans les déviations qualifiées que subirent l’éthique juive et l’éthique purit
2280 out — dans les déviations qualifiées que subirent l’ éthique juive et l’éthique puritaine, à mesure qu’elles « réussissaien
2281 ations qualifiées que subirent l’éthique juive et l’ éthique puritaine, à mesure qu’elles « réussissaient ». Le spiritualis
2282 e puritaine, à mesure qu’elles « réussissaient ». Le spiritualisme transcendant des Juifs d’Orient au contact des coutumes
2283 , se mue peu à peu en son contraire exact : c’est le matérialisme jouisseur et cynique que les nazis reprochent aux Juifs
2284  : c’est le matérialisme jouisseur et cynique que les nazis reprochent aux Juifs allemands capitalistes, avec d’autant plus
2285 azis reprochent aux Juifs allemands capitalistes, avec d’autant plus d’amertume que cette attitude provocante fut souvent pr
2286 que cette attitude provocante fut souvent prise à l’ étranger pour un trait de caractère germanique. Mais c’est aussi l’int
2287 n trait de caractère germanique. Mais c’est aussi l’ intellectualisme stérilisant, l’esprit d’abstraction inhumaine et chim
2288 Mais c’est aussi l’intellectualisme stérilisant, l’ esprit d’abstraction inhumaine et chimérique, au surplus troublé de se
2289 rique, au surplus troublé de sentimentalisme, que l’ on dénonce à droite chez les auteurs d’origine juive, mais qui ont ces
2290 e sentimentalisme, que l’on dénonce à droite chez les auteurs d’origine juive, mais qui ont cessé de croire à la mission de
2291 s d’origine juive, mais qui ont cessé de croire à la mission de leur peuple, et qui exercent désormais à vide les facultés
2292 de leur peuple, et qui exercent désormais à vide les facultés psychologiques fortement développées dans leur race par des
2293 ppées dans leur race par des siècles d’attente de l’ invisible. De même, l’ascétisme vigoureux, le pessimisme actif des pur
2294 ar des siècles d’attente de l’invisible. De même, l’ ascétisme vigoureux, le pessimisme actif des puritains anglais, cédant
2295 e de l’invisible. De même, l’ascétisme vigoureux, le pessimisme actif des puritains anglais, cédant aux tentations du succ
2296 ès immédiat et contrôlable, s’est transformé dans le Nouveau Monde d’une part en volonté de puissance abstraite (les fonda
2297 nde d’une part en volonté de puissance abstraite ( les fondateurs des trusts au siècle dernier), d’autre part en utilitarism
2298 otale perte de conscience des fins religieuses de l’ éthique puritaine, et transformant en tyrannie absurde ce qui était à
2299 t transformant en tyrannie absurde ce qui était à l’ origine une attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à soi-mê
2300 qui était à l’origine une attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à soi-même. Corruptio optimi pessima… La vo
2301 oncement à soi-même. Corruptio optimi pessima… La vocation collective Ces quelques indications, qui appelleraient d’
2302 indications, qui appelleraient d’ailleurs toutes les nuances qu’on imagine, nous amènent au problème central que pose à la
2303 gine, nous amènent au problème central que pose à la pensée d’un protestant, et particulièrement d’un calviniste, l’exempl
2304 protestant, et particulièrement d’un calviniste, l’ exemple d’Israël et de sa chute. Toute la théologie éthique de Calvin
2305 viniste, l’exemple d’Israël et de sa chute. Toute la théologie éthique de Calvin est centrée sur la vocation : vocation du
2306 te la théologie éthique de Calvin est centrée sur la vocation : vocation du « petit troupeau » ou de l’Église ; vocation p
2307 a vocation : vocation du « petit troupeau » ou de l’ Église ; vocation personnelle de chaque membre de l’Église. Or, Israël
2308 Église ; vocation personnelle de chaque membre de l’ Église. Or, Israël qui était le peuple élu, a trahi sa mission et s’es
2309 e chaque membre de l’Église. Or, Israël qui était le peuple élu, a trahi sa mission et s’est livré à son destin. Sa disper
2310 et s’est livré à son destin. Sa dispersion en est le châtiment. Serait-il donc possible de perdre sa vocation ? Et que dev
2311 de perdre sa vocation ? Et que devient celui qui la trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il la prenne pour idol
2312 trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il la prenne pour idole, refusant d’en reconnaître la vraie fin lorsqu’elle
2313 l la prenne pour idole, refusant d’en reconnaître la vraie fin lorsqu’elle lui apparaît incarnée ? Est-il rejeté à tout ja
2314 mais ? Une vocation est-elle donc « amissible » ? Le refus de l’homme serait-il donc capable de modifier un arrêt éternel,
2315 ocation est-elle donc « amissible » ? Le refus de l’ homme serait-il donc capable de modifier un arrêt éternel, alors que D
2316 problème n’est pas gratuit : il touche au cœur de la foi réformée. Or c’est lui justement que traite saint Paul au chapitr
2317 justement que traite saint Paul au chapitre XI de l’ Épître aux Romains. Et sans doute ce texte illumine aussi profondément
2318 te illumine aussi profondément qu’il est possible le mystère dernier d’Israël. « Je demande maintenant : Dieu a-t-il rejet
2319  ? Non certes, car je suis moi-même israélite, de la postérité d’Abraham, de la tribu de Benjamin. Dieu n’a point rejeté s
2320 moi-même israélite, de la postérité d’Abraham, de la tribu de Benjamin. Dieu n’a point rejeté son peuple qu’il a connu d’a
2321 « Israël n’a point obtenu ce qu’il cherche : mais les élus l’ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c
2322 n’a point obtenu ce qu’il cherche : mais les élus l’ ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par
2323 ce qu’il cherche : mais les élus l’ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par suite de la faut
2324 té endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par suite de la faute des enfants d’Israël que le salut est parvenu aux païens, afin
2325 st par suite de la faute des enfants d’Israël que le salut est parvenu aux païens, afin d’exciter leur propre émulation »
2326 propre émulation » (v. 11). En tuant leur Messie, les Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont
2327 v. 11). En tuant leur Messie, les Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice n
2328 Messie, les Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice national, comme exclus
2329 s à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice national, comme exclusif, de la Révélation. Mais c’est ici q
2330 nt perdu le bénéfice national, comme exclusif, de la Révélation. Mais c’est ici que saint Paul indique le mystérieux renve
2331 Révélation. Mais c’est ici que saint Paul indique le mystérieux renversement des rôles au dernier jour : « Or, si leur fau
2332 ôles au dernier jour : « Or, si leur faute a fait la richesse du monde, et leur amoindrissement la richesse des païens, qu
2333 ait la richesse du monde, et leur amoindrissement la richesse des païens, que ne fera pas leur complet relèvement ! » (v.
2334 se : c’est qu’une partie d’Israël est tombée dans l’ endurcissement jusqu’à ce que la totalité des païens soit entrée (dans
2335 l est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce que la totalité des païens soit entrée (dans l’Église) ; et ainsi tout Israë
2336 à ce que la totalité des païens soit entrée (dans l’ Église) ; et ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les don
2337 ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum
2338 sraël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les dons et l’ appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum praeclarum 
2339 os de ce dernier verset, dans son Commentaire sur l’ Épître aux Romains. Et Calvin dit du même verset que c’est « une fort
2340 rset que c’est « une fort belle sentence ». Ainsi la vocation, du moins cette vocation79 — est réellement inamissible, c’e
2341 ire ne peut être perdue, même si celui qui en est l’ objet s’y oppose de toutes ses forces ! Car sa révolte même se trouve
2342 ses forces ! Car sa révolte même se trouve servir les desseins éternels de Dieu. Elle étend à l’humanité entière le bénéfic
2343 ervir les desseins éternels de Dieu. Elle étend à l’ humanité entière le bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependant q
2344 éternels de Dieu. Elle étend à l’humanité entière le bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependant que son destin final
2345 u. Elle étend à l’humanité entière le bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependant que son destin final demeure entre
2346 çue, cependant que son destin final demeure entre les mains du plus secret conseil de Dieu. « Quant à moi, écrit Calvin, j’
2347 cependant que son destin final demeure entre les mains du plus secret conseil de Dieu. « Quant à moi, écrit Calvin, j’étends
2348 oi, écrit Calvin, j’étends ce nom d’Israël à tout le peuple de Dieu, en ce sens, après que les gentils seront entrés dedan
2349 l à tout le peuple de Dieu, en ce sens, après que les gentils seront entrés dedans (l’Église), lors les Juifs aussi se reti
2350 sens, après que les gentils seront entrés dedans ( l’ Église), lors les Juifs aussi se retirant de leur révoltement, se rang
2351 les gentils seront entrés dedans (l’Église), lors les Juifs aussi se retirant de leur révoltement, se rangeront à l’obéissa
2352 i se retirant de leur révoltement, se rangeront à l’ obéissance de la foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier lie
2353 leur révoltement, se rangeront à l’obéissance de la foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant l
2354 rangeront à l’obéissance de la foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant les enfants aînés en la
2355 les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant les enfants aînés en la maison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.
2356 le premier lieu, comme étant les enfants aînés en la maison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.) Le sort du monde,
2357 aison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.) Le sort du monde, et l’on pourrait même dire : la date de son salut fina
2358 mentaires, sur Rom. II, 26.) Le sort du monde, et l’ on pourrait même dire : la date de son salut final, dépend ainsi de la
2359 .) Le sort du monde, et l’on pourrait même dire : la date de son salut final, dépend ainsi de la conversion des Juifs. Et
2360 ire : la date de son salut final, dépend ainsi de la conversion des Juifs. Et ceci nous révèle la plus profonde raison des
2361 i de la conversion des Juifs. Et ceci nous révèle la plus profonde raison des sentiments « ambivalents », comme dirait Fre
2362 s », comme dirait Freud, qu’ont eus de tout temps les chrétiens à l’égard du peuple d’Israël. Tout dépend de lui, et il ref
2363 d’Israël. Tout dépend de lui, et il refuse ! D’où la haine sourde, et en même temps le respect religieux qu’on lui porte.
2364 l refuse ! D’où la haine sourde, et en même temps le respect religieux qu’on lui porte. Peut-être n’est-il pas excessif de
2365 xcessif de voir dans cette passion contradictoire le secret des soudaines explosions de rancune qui apparurent périodiquem
2366 ne sais si cette explication vaudrait encore pour l’ antisémitisme des hitlériens, qui n’en serait en tout cas que le plus
2367 e des hitlériens, qui n’en serait en tout cas que le plus impur exemple. Il reste que la chrétienté non seulement ne pourr
2368 tout cas que le plus impur exemple. Il reste que la chrétienté non seulement ne pourra jamais se désintéresser du sort de
2369 e se doit de juger Israël autrement que ne fait «  le monde ». Ce n’est pas au nom d’intérêts passagers que nous avons à pr
2370 à prendre position, mais au nom des promesses de la foi, et dans une perspective missionnaire qui réduit à leurs justes p
2371 issionnaire qui réduit à leurs justes proportions les thèses des politiques nationalistes. Le drame est bien plus vaste que
2372 portions les thèses des politiques nationalistes. Le drame est bien plus vaste que ne peuvent le concevoir nos polémiques.
2373 stes. Le drame est bien plus vaste que ne peuvent le concevoir nos polémiques. Et son issue ne dépend ni de nous seuls, ni
2374 dépend ni de nous seuls, ni d’eux seuls. On dit : les Juifs sont ceci, les Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos rich
2375 ls, ni d’eux seuls. On dit : les Juifs sont ceci, les Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos richesses, etc. Mais de q
2376 richesses, etc. Mais de quels biens se préoccupe le croyant ? Leur faute a fait la richesse du monde. Et cette richesse s
2377 biens se préoccupe le croyant ? Leur faute a fait la richesse du monde. Et cette richesse s’appelle le salut. 64. Il fa
2378 la richesse du monde. Et cette richesse s’appelle le salut. 64. Il faut bien voir que le « racisme » juif n’est justifi
2379 s’appelle le salut. 64. Il faut bien voir que le « racisme » juif n’est justifié à l’origine que par la vocation spiri
2380 ien voir que le « racisme » juif n’est justifié à l’ origine que par la vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas du
2381 racisme » juif n’est justifié à l’origine que par la vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas du tout biologique. I
2382 ce peuple. Il n’est pas du tout biologique. Il ne le devient qu’accessoirement, à mesure que l’on prend les « signes » de
2383 Il ne le devient qu’accessoirement, à mesure que l’ on prend les « signes » de la vocation pour des réalités valables en e
2384 evient qu’accessoirement, à mesure que l’on prend les « signes » de la vocation pour des réalités valables en elles-mêmes.
2385 rement, à mesure que l’on prend les « signes » de la vocation pour des réalités valables en elles-mêmes. Mais sans doute c
2386 ns doute ce glissement fatal s’est-il dessiné dès le début, à mesure que l’on codifiait les relations des « élus » et des
2387 fatal s’est-il dessiné dès le début, à mesure que l’ on codifiait les relations des « élus » et des « gentils ». On sait à
2388 dessiné dès le début, à mesure que l’on codifiait les relations des « élus » et des « gentils ». On sait à quel point cette
2389 sait à quel point cette codification fut poussée. L’ historien juif Josèphe écrit dans sa Réponse à Appion (I, 2) qu’un reg
2390 artenant aux familles des prêtres) était tenu par les sacrificateurs. « Et ils n’en épousaient point qui aient été captives
2391 ves, de peur qu’elles n’aient eu quelque commerce avec des étrangers. Peut-il y avoir rien de plus exact pour exempter des r
2392 e plus exact pour exempter des races tout mélange avec d’autres, puisque nos sacrificateurs peuvent, par des pièces si authe
2393 Que si quelqu’un manque d’observer cet ordre, on le sépare de l’autel, sans qu’il lui soit plus permis de faire aucune de
2394 u’un manque d’observer cet ordre, on le sépare de l’ autel, sans qu’il lui soit plus permis de faire aucune des fonctions s
2395 ons sacerdotales. » — Il est curieux de noter que les lois racistes hitlériennes privent de tous droits civiques les person
2396 stes hitlériennes privent de tous droits civiques les personnes qui ne peuvent prouver par les registres la pureté de leurs
2397 civiques les personnes qui ne peuvent prouver par les registres la pureté de leurs origines : c’est que l’exercice des droi
2398 ersonnes qui ne peuvent prouver par les registres la pureté de leurs origines : c’est que l’exercice des droits civiques e
2399 registres la pureté de leurs origines : c’est que l’ exercice des droits civiques est bien une sorte de « sacerdoce » natio
2400 orte de « sacerdoce » national. On voit ainsi que l’ eugénisme n’est pas le seul motif de la législation raciste. 65. Sur
2401 national. On voit ainsi que l’eugénisme n’est pas le seul motif de la législation raciste. 65. Sur l’importance capitale
2402 ainsi que l’eugénisme n’est pas le seul motif de la législation raciste. 65. Sur l’importance capitale de cette notion d
2403 le seul motif de la législation raciste. 65. Sur l’ importance capitale de cette notion de commune mesure pour toute cultu
2404 ns un volume intitulé Penser avec les mains , où l’ on trouvera un raccourci de la présente étude. Du point de vue de l’hi
2405 avec les mains , où l’on trouvera un raccourci de la présente étude. Du point de vue de l’histoire du peuple juif, ce racc
2406 accourci de la présente étude. Du point de vue de l’ histoire du peuple juif, ce raccourci souffre, entre autres, d’une trè
2407 très grave lacune en ce qu’il paraît conclure sur l’ abandon final d’Israël à son destin, après la mort de Jésus-Christ. Je
2408 sur l’abandon final d’Israël à son destin, après la mort de Jésus-Christ. Je suis heureux de pouvoir donner ci-après un d
2409 ent qui n’avait pas sa place dans mon livre. 66. La rédaction des livres mosaïques est attribuée par Wellhausen et son éc
2410 es disciples des grands prophètes. Ce serait donc le prophétisme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de la religion
2411 ètes. Ce serait donc le prophétisme, c’est-à-dire l’ élément le plus finaliste de la religion d’Israël qui aurait donné au
2412 erait donc le prophétisme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de la religion d’Israël qui aurait donné au peuple l’e
2413 isme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de la religion d’Israël qui aurait donné au peuple l’expression légale de s
2414 e la religion d’Israël qui aurait donné au peuple l’ expression légale de sa commune mesure : le Décalogue. Ainsi la fin cr
2415 peuple l’expression légale de sa commune mesure : le Décalogue. Ainsi la fin crée ses moyens. Cette hypothèse est aujourd’
2416 légale de sa commune mesure : le Décalogue. Ainsi la fin crée ses moyens. Cette hypothèse est aujourd’hui démodée. On revi
2417 e hypothèse est aujourd’hui démodée. On revient à la conception ancienne : un chef hébreu — celui que la Bible appelle Moï
2418 conception ancienne : un chef hébreu — celui que la Bible appelle Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de la Lo
2419 la Bible appelle Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophè
2420 Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alo
2421 donné les rudiments de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent le
2422 de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent le peuple au culte du vr
2423 Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent le peuple au culte du vrai Dieu — contre les prêtres des dieux étrangers
2424 ppellent le peuple au culte du vrai Dieu — contre les prêtres des dieux étrangers — mais aussi ceux qui dénoncent les excès
2425 s dieux étrangers — mais aussi ceux qui dénoncent les excès du légalisme. 67. Livre II, chap. VI, trad. d’Arnaud d’Andilly
2426 istoire du peuple d’Israël, t. II, p. 265. 69. «  L’ embarras de l’hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plu
2427 ple d’Israël, t. II, p. 265. 69. « L’embarras de l’ hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plus simples, dan
2428 265. 69. « L’embarras de l’hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plus simples, dans le Livre de Job, dans l
2429 ’hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plus simples, dans le Livre de Job, dans l’Ecclésiaste, est quelque c
2430 les notions philosophiques les plus simples, dans le Livre de Job, dans l’Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’
2431 ques les plus simples, dans le Livre de Job, dans l’ Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’image physique qui, da
2432 s l’Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’ image physique qui, dans les langues sémitiques, est encore à fleur de
2433 e chose de surprenant. L’image physique qui, dans les langues sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit la déduction
2434 sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit la déduction abstraite… » (Renan, op. cit., I, p. 49). Où Renan voit un
2435 p. 49). Où Renan voit un obscurcissement, je vois le gage d’une vive actualité, ou efficacité, du langage des clercs, iden
2436 ui des bergers. 70. Voir sur ce point : Colloque avec Salomon, par Albert-Marie Schmidt, dans la revue Hic et Nunc , n° 9-
2437 oque avec Salomon, par Albert-Marie Schmidt, dans la revue Hic et Nunc , n° 9-10. 71. Des études plus récentes semblent
2438 ier jugement de Renan. Mais il reste valable pour la période primitive. 72. Abraham déjà, et les prophètes, ont vu « le j
2439 pour la période primitive. 72. Abraham déjà, et les prophètes, ont vu « le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de
2440 ve. 72. Abraham déjà, et les prophètes, ont vu «  le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de l’Épître aux Hébreux (c
2441 es, ont vu « le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’ auteur de l’Épître aux Hébreux (chap. II) insistent fortement sur cett
2442  le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de l’ Épître aux Hébreux (chap. II) insistent fortement sur cette unicité de
2443 hap. II) insistent fortement sur cette unicité de la Révélation. C’est un grand lieu commun de la théologie réformée que d
2444 é de la Révélation. C’est un grand lieu commun de la théologie réformée que de voir dans l’Ancien Testament l’histoire du
2445 commun de la théologie réformée que de voir dans l’ Ancien Testament l’histoire du Christ avant qu’il vienne, dans les Pro
2446 ogie réformée que de voir dans l’Ancien Testament l’ histoire du Christ avant qu’il vienne, dans les Prophètes, des Apôtres
2447 ent l’histoire du Christ avant qu’il vienne, dans les Prophètes, des Apôtres avant le Christ, dans les Apôtres, des Prophèt
2448 ’il vienne, dans les Prophètes, des Apôtres avant le Christ, dans les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bib
2449 les Prophètes, des Apôtres avant le Christ, dans les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autr
2450 le Christ, dans les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autre sens que de désigner l’Incarna
2451 les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autre sens que de désigner l’Incarnation qui est son
2452 nsi la Bible n’a pas d’autre sens que de désigner l’ Incarnation qui est son centre, au-delà d’elle-même. Tolle Christum e
2453 er : De servo arbitrio.) 73. Christopher Dawson, Les Origines de l’Europe et de la civilisation européenne, trad. français
2454 bitrio.) 73. Christopher Dawson, Les Origines de l’ Europe et de la civilisation européenne, trad. française, chez Rieder,
2455 hristopher Dawson, Les Origines de l’Europe et de la civilisation européenne, trad. française, chez Rieder, 1934, p. 43.
2456 ançaise, chez Rieder, 1934, p. 43. 74. Sitôt que la mesure cesse d’être transcendante, devient humaine, contingente et pa
2457 ant plus totale, se veut encore totalitaire, on a l’ État-nation-Police de type fasciste ou stalinien. Bien entendu, il ser
2458 sponsable de ce qui n’est que « profanations » de la notion de mesure totalitaire. 75. Cf. Ramuz. 76. Par exemple : cohé
2459 ’autres auteurs, tels que Labriola, font remonter le phénomène capitaliste à l’« accumulation » de richesses des couvents
2460 abriola, font remonter le phénomène capitaliste à l’ « accumulation » de richesses des couvents anglais au Moyen Âge, et au
2461 couvents anglais au Moyen Âge, et aux banques de l’ Italie du Nord. Les responsabilités se partageraient donc équitablemen
2462 au Moyen Âge, et aux banques de l’Italie du Nord. Les responsabilités se partageraient donc équitablement entre les trois r
2463 bilités se partageraient donc équitablement entre les trois religions ! 79. Calvin, toujours soucieux de ne pas spéculer a
2464 rs soucieux de ne pas spéculer arbitrairement sur les textes, note en effet cette restriction : « Et aussi ne faut-il pas e
2465 celle par laquelle Dieu a adopté en son alliance la postérité d’Abraham : vu que le propos était nommément et spécialemen
2466 é en son alliance la postérité d’Abraham : vu que le propos était nommément et spécialement d’icelle vocation. » (Commenta
2467 gemont Denis de, « Vocation et destin d’Israël », Les Juifs, Paris, Plon, 1937, p. 143-165.
6 1937, Articles divers (1936-1938). Luther, Traité du serf arbitre (1937)
2468 gnore Luther en France serait exagérer, mais dans le sens contraire de celui qu’on imagine. Car on fait pis que de l’ignor
2469 re de celui qu’on imagine. Car on fait pis que de l’ ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamai
2470 . Car on fait pis que de l’ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut,
2471 et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’ avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
2472 oir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru les Propos de table, présentés au public français comme un ouvrage capita
2473 ssières, de platitudes, de contradictions. Est-ce avec cela que s’est faite la Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésite
2474 contradictions. Est-ce avec cela que s’est faite la Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à soutenir que Lu
2475 nir que Luther fut un démagogue, un exploiteur de l’ éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romai
2476 gogue, un exploiteur de l’éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffon
2477 ’éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès g
2478 mande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès grandiose d’assimiler Luther et M. Hit
2479 iose d’assimiler Luther et M. Hitler, par goût de la rime sans doute. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que la p
2480 t M. Hitler, par goût de la rime sans doute. Pour l’ opinion moyenne sur Luther, je crois que la phrase suivante en donne u
2481 . Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que la phrase suivante en donne une juste idée : « En somme, qu’est-ce que L
2482 ion du livre d’un critique littéraire connu, dont les revues n’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure e
2483 ’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste
2484 as lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste d’insister s
2485 héologique… Ceci dit, il est juste d’insister sur la grande valeur des travaux de quelques spécialistes français qui, au n
2486 quelques spécialistes français qui, au niveau de la haute culture, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je pense a
2487 u niveau de la haute culture, ont largement sauvé l’ honneur de leur pays. Je pense aux ouvrages publiés par MM. Henri Stro
2488 e, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je pense aux ouvrages publiés par MM. Henri Strohl, J. Vignaud et Lucien Febvr
2489 son, pour ne rien dire — mais cela va de soi — de l’ activité des professeurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de l’
2490 sseurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de l’ Église dans les trois facultés françaises de théologie protestante. Il
2491 atique luthérienne ou d’histoire de l’Église dans les trois facultés françaises de théologie protestante. Il n’en reste pas
2492 héologie protestante. Il n’en reste pas moins que l’ ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes
2493 tante. Il n’en reste pas moins que l’ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes aux diverses ca
2494 ies recueillies par des biographes amateurs, et à l’ action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
2495 ies par des biographes amateurs, et à l’action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent le public f
2496 e catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent le public français en état d’infériorité assez grave, ne fût-ce que sur
2497 riorité assez grave, ne fût-ce que sur le plan de la culture générale. Car ignorer ou méconnaître Luther, c’est ignorer ou
2498 onnaître un des deux ou trois moments décisifs de la tradition fondamentale de l’Occident, c’est s’interdire de rien compr
2499 moments décisifs de la tradition fondamentale de l’ Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion
2500 ’Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans la
2501 n comprendre à la grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son dynamis
2502 re, à la grande tension spirituelle dans laquelle l’ Europe a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre
2503 rope a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre arbitre, opposant Érasme à Luther, permet de définir s
2504 Érasme à Luther, permet de définir symboliquement les pôles : pensée « pure » et pensée « engagée », ou encore attitude du
2505 ion qui, sur le plan théologique, ou mieux : dans la totalité de l’être, revient à celle d’un christianisme qui se met au
2506 plan théologique, ou mieux : dans la totalité de l’ être, revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’hu
2507 celle d’un christianisme qui se met au service de l’ humain (j’entends bien de l’humain purifié, « divinisé » par les effor
2508 se met au service de l’humain (j’entends bien de l’ humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant
2509 ntends bien de l’humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un chris
2510 l’humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absol
2511 r les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absolu, qu’on déclare volontiers « inh
2512 o C’est sans doute dans cette perspective que le lecteur, peu familiarisé avec la pensée luthérienne, parviendra le pl
2513 cette perspective que le lecteur, peu familiarisé avec la pensée luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’importa
2514 perspective que le lecteur, peu familiarisé avec la pensée luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’importance
2515 amiliarisé avec la pensée luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’importance centrale du traité que nous publi
2516 luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’ importance centrale du traité que nous publions : je le vois au centre
2517 ortance centrale du traité que nous publions : je le vois au centre du débat occidental par excellence, mais au centre, au
2518 idental par excellence, mais au centre, aussi, de la Réforme, et de l’effort dogmatique de Luther30. On croit d’abord à un
2519 ence, mais au centre, aussi, de la Réforme, et de l’ effort dogmatique de Luther30. On croit d’abord à un pamphlet, encore
2520 e que son volume matériel soit bien écrasant pour le genre. Mais on s’aperçoit sans tarder que la discussion avec Érasme e
2521 pour le genre. Mais on s’aperçoit sans tarder que la discussion avec Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée), n’est e
2522 Mais on s’aperçoit sans tarder que la discussion avec Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée), n’est en fait que le su
2523 iatribe (souvent personnifiée), n’est en fait que le support apparent d’une réflexion de plus vaste envergure, d’un témoig
2524 lle, excité (bien plutôt que « désarmé » comme il le dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du scepti
2525 ésarmé » comme il le dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme,
2526 l le dit aux premières pages) par les procédés de l’ humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme, Luther en vien
2527 ient, de proche en proche, à ressaisir et reposer avec puissance toutes les affirmations fondamentales de la Réforme : justi
2528 che, à ressaisir et reposer avec puissance toutes les affirmations fondamentales de la Réforme : justification par la foi,
2529 uissance toutes les affirmations fondamentales de la Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de D
2530 s fondamentales de la Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul ; opposition de cette
2531 Dieu seul ; opposition de cette justice de Dieu à la justice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la n
2532 ice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Pa
2533 mes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivant
2534 uvres ; opposition de la grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition c
2535 tion de la grâce à la nature, selon les termes de l’ Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sen
2536 ure, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale e
2537 s de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un no
2538 Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout moye
2539 erme ou médiation plus ou moins rationnelle entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ;
2540 lle entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage, et du témoign
2541 témoignage, et du témoignage fidèle, certifié par l’ Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme
2542 et du témoignage fidèle, certifié par l’Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme entre les ma
2543 certifié par l’Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont le
2544 Bible, et constituant la véritable « action » de l’ homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ou
2545 stituant la véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’
2546 uant la véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont
2547 n » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en forme,
2548 du mot, mais qu’ils s’impliquent très étroitement les uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et
2549 mais qu’ils s’impliquent très étroitement les uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et perpétue
2550 autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’ unique et perpétuelle question que nous posent toutes les pages de la
2551 ue et perpétuelle question que nous posent toutes les pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont
2552 elle question que nous posent toutes les pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les refl
2553 renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la
2554 ment réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la question du Christ : « … et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si t
2555 « … et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
2556 crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luthe
2557 la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luther, ni dans sa négation joyeuse du libre arbitre. S
2558 arbitre. Ses coups violents n’ébranlent plus que le « vieil homme », celui qu’il nous faut dépouiller. Folie pour les
2559 , celui qu’il nous faut dépouiller. Folie pour les sages Mais il s’en faut de presque tout que les grandes thèses pau
2560 es sages Mais il s’en faut de presque tout que les grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simple
2561 esque tout que les grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simplement connues !) par nos contempora
2562 s. Il s’en faut de beaucoup, de presque tout, que les arguments d’un Érasme nous apparaissent comme autant de sophismes. No
2563 ent comme autant de sophismes. Non seulement tous les humanistes — des marxistes aux vieux libéraux — y applaudissent ouver
2564 pplaudissent ouvertement, mais encore jusque chez les chrétiens, ces arguments se voient réinventés, admis, parfois même pr
2565 e voient réinventés, admis, parfois même prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique s
2566 prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique se doit, en bonne logique, de les faire si
2567 e : tout catholique se doit, en bonne logique, de les faire siens, puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous les prote
2568 s, puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous les protestants qui jugent encore que Calvin et Luther ont fait leur temp
2569 e Paul, bien plus ancien — tous ceux qui tiennent la prédestination pour un dogme immoral ou périmé ; ceux qui traduisent
2570 mmoral ou périmé ; ceux qui traduisent « Paix sur la terre aux hommes que Dieu agrée » par « Paix aux hommes de bonne volo
2571 s de bonne volonté », tous ceux-là sont, en fait, avec Érasme et son armée de grands docteurs de tous les siècles, pour sout
2572 ec Érasme et son armée de grands docteurs de tous les siècles, pour soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le po
2573 rands docteurs de tous les siècles, pour soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de
2574 soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts e
2575 itre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’ homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres morales.
2576 Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitu
2577 qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’ élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « gr
2578 r en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « grave », d’une di
2579 i va droit au point décisif, envisage honnêtement les objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans iro
2580 sif, envisage honnêtement les objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans ironie toutefois, et sait
2581 nie toutefois, et sait enfin conférer à son choix la force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue
2582 s, et sait enfin conférer à son choix la force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue purement es
2583 r assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui refuse l’ essentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le to
2584 ssentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous m
2585 tout de même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, sépar
2586 me attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, séparer le fond
2587 s ne savons que trop bien, nous modernes, séparer le fond de la forme, admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vic
2588 que trop bien, nous modernes, séparer le fond de la forme, admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vice versa.) M
2589 lleurs du chef d’un grand mouvement (comme dirait le jargon d’aujourd’hui), tout est fait, dans notre Traité, pour heurter
2590 st fait, dans notre Traité, pour heurter de front le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des
2591 le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des Apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’es
2592 rtage pas la foi de Paul et des Apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’est pas proprement luthérien, mais que Lut
2593 t obligé d’utiliser pour débrouiller et supprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait l’embarrasser31. Ensuite, ce re
2594 ur débrouiller et supprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait l’embarrasser31. Ensuite, ce refus total, ou mieux,
2595 pprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait l’ embarrasser31. Ensuite, ce refus total, ou mieux, cette négligence tra
2596 (Un tel homme est bien trop vivant pour faire de la psychologie ; trop engagé dans le réel pour prendre au sérieux ses re
2597 t pour faire de la psychologie ; trop engagé dans le réel pour prendre au sérieux ses reflets dans la conscience du specta
2598 le réel pour prendre au sérieux ses reflets dans la conscience du spectateur.) Ce qui ne manquera pas de faire crier au d
2599 faire crier au dogmatisme. Tout se passe ici « à l’ intérieur » du christianisme, de l’Église. L’humanisme laïque, autonom
2600 passe ici « à l’intérieur » du christianisme, de l’ Église. L’humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une ab
2601 « à l’intérieur » du christianisme, de l’Église. L’ humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une absurdité, u
2602 nié, comme une absurdité, une contradiction dans les termes. C’est à Érasme, en tant que théologien, que Luther s’applique
2603 que Luther s’applique à répondre ; et c’est même la plus dure ironie — quoique involontaire, je le suppose — dont il pouv
2604 me la plus dure ironie — quoique involontaire, je le suppose — dont il pouvait en l’occurrence, l’accabler. On ne saurait
2605 involontaire, je le suppose — dont il pouvait en l’ occurrence, l’accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trai
2606 je le suppose — dont il pouvait en l’occurrence, l’ accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trait : c’est enco
2607 en philosophe ou en métaphysicien, que Luther nie le libre arbitre. Ceci pourrait suffire et doit suffire en droit, à réfu
2608 rrait suffire et doit suffire en droit, à réfuter l’ objection d’un moderne, l’objection parfaitement anachronique, mais qu
2609 ire en droit, à réfuter l’objection d’un moderne, l’ objection parfaitement anachronique, mais que je sais inévitable, et q
2610 à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais le sérieux théologique est chose trop rare, et pour beaucoup trop diffic
2611 e écarter cette objection par un simple rappel de l’ ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, t
2612 ction par un simple rappel de l’ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dia
2613 imple rappel de l’ordre dans lequel le Traité fut pensé . Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dialogue d’une « con
2614 nsé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dialogue d’une « conscience moderne », douée d’exigence spirituelle,
2615 nscience moderne », douée d’exigence spirituelle, avec un partisan du « serf arbitre » luthérien. (On peut admettre qu’un te
2616 ’un tel dialogue se déroule même à l’intérieur de la pensée d’un homme qui veut croire…) Dialogue Car Dieu peut tout
2617 ue Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi. Kierkegaard Une conscience moderne. — Selon Luthe
2618 eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi. Kierkegaard Une conscience moderne. — Selon Luther, nous n’av
2619 selon sa prévision. Luther ne pose pas seulement l’ omnipotence, mais l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qu
2620 Luther ne pose pas seulement l’omnipotence, mais l’ omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir à
2621 as seulement l’omnipotence, mais l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir à sa promesse, et a
2622 erons plus ! Nous refusons de jouer si, d’avance, le vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos
2623 oits ! Un luthérien. — Mais connais-tu seulement les vraies règles du jeu ? Qui t’a fait croire que ta vie était une parti
2624 que ta vie était une partie à jouer entre toi et le monde, par exemple ; ou encore entre l’individu et le Sort, cette ido
2625 re toi et le monde, par exemple ; ou encore entre l’ individu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le
2626 onde, par exemple ; ou encore entre l’individu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le croire pour ag
2627 rt, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi
2628 e ta science ne s’occupe-t-elle pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dign
2629 le pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dignité consiste à lutter contre
2630 à lutter contre de telles forces, une fois que je les ai reconnues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée m
2631 qui crée ma liberté, par un acte de révolte, s’il le faut ! L. — Tu crois donc détenir un tel pouvoir ? C. M. — Il me su
2632 un tel pouvoir ? C. M. — Il me suffit de vouloir l’ affirmer. L. — Soit, c’est une hypothèse de travail… Pour moi, je cro
2633 e de travail… Pour moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, f
2634 vail… Pour moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures ;
2635 moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures ; car elles
2636 passées, présentes, futures ; car elles sont dans le temps, Dieu dans l’éternité qui est avant le temps, qui est en lui, e
2637 futures ; car elles sont dans le temps, Dieu dans l’ éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore apr
2638 dans le temps, Dieu dans l’éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu
2639 gard de Dieu, donc, « tout est accompli », depuis la mort du Christ sur la croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C.
2640 tout est accompli », depuis la mort du Christ sur la croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C. M. — Si c’était vrai,
2641 core nier ce Dieu, qui prétend voir plus loin que le terme de mes actions, ce qui, avouons-le, les ridiculise complètement
2642 loin que le terme de mes actions, ce qui, avouons- le , les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : ca
2643 que le terme de mes actions, ce qui, avouons-le, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : car je
2644 e qui, avouons-le, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : car je sens, malgré tout, que je les f
2645 fin de compte : car je sens, malgré tout, que je les fais librement, et tu viens me dire qu’elles sont prévues ! Et prévue
2646 tzsche a proclamé qu’il avait fait. L. — Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ?
2647 ’il avait fait. L. — Comment le temps tuerait-il l’ Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer q
2648 — Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’
2649 rait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’ Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’elle s’en formait… Mai
2650 air tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’ idée fausse qu’elle s’en formait… Mais tu affirmes que si Dieu prévoit
2651 tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’est plus la peine de faire aucun effort. C’est peut-être mal raisonner. Si ton ef
2652 ton effort aussi était prévu ? Pourrais-tu ne pas le fournir ? Et si tu décidais : « je suis, donc Dieu n’est pas ! »32 qu
2653 ui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à l’ éternelle prévision ? Qui t’assurerait qu’en prononçant ces mots, tu n
2654 ant ces mots, tu ne prononcerais pas sur toi-même l’ arrêt éternel de Dieu te rejetant vers le néant, en sorte que Dieu, vr
2655 toi-même l’arrêt éternel de Dieu te rejetant vers le néant, en sorte que Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer l
2656 e Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’est pas la supprimer en fait. Mais c’est p
2657 i ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’est pas la supprimer en fait. Mais c’est peut-être se priver de son secours, ou
2658 est peut-être se priver de son secours, ou encore la transformer en une menace obscure… Il y a une double prédestination :
2659 double prédestination : l’une au salut, l’autre à la damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au temps
2660 justement être rivé au temps sans fin, et refuser l’ éternité qui vient nous délivrer du temps ? C. M. — Mais mon temps es
2661 eauté, de création ! Ton éternité immobile, c’est l’ image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philo
2662 on ! Ton éternité immobile, c’est l’image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la rai
2663 l’image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’ éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que mort
2664 de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bib
2665 ue savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’ell
2666 ternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’ imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que
2667 t la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort
2668 ner que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve q
2669 n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’ éternité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’e
2670 que ? Qui nous dit qu’elle n’est pas au contraire la source de tout acte et de toute création, une invention totale et per
2671 totale et perpétuelle, une actualité permanente, la seule chose qui change quelque chose au déroulement calculable du tem
2672 se au déroulement calculable du temps, quand elle le touche dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul
2673 nt calculable du temps, quand elle le touche dans l’ instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul) ?33 Qui t’ass
2674 dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’ écrit Paul) ?33 Qui t’assure que notre raison tout attachée à notre ch
2675 ? C’est un mystère plus profond que notre vie, et la raison n’est qu’un faible élément de notre vie. C’est un mystère que
2676 faible élément de notre vie. C’est un mystère que le croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’
2677 que le croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous
2678 et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’ on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le cro
2679 la prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a
2680 a », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu
2681 t-il pas ce paradoxe et ce mystère : croire que «  l’ Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu — peut
2682 peut aussi tout changer en un instant aux yeux de l’ homme, sans que rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il d
2683 de ce qu’il décide ou de ce qu’il décidera ? Car l’ Éternel ne connaît pas de « temps », il n’est pas lié comme nous à une
2684 ire, nos divers temps et successions procèdent de l’ Éternel et lui sont liés : nous venons de lui, nous retournons à lui,
2685 ui, nous retournons à lui, il est en nous lorsque l’ Esprit dit : la Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous f
2686 nons à lui, il est en nous lorsque l’Esprit dit : la Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous ferait croire qu
2687 ge illusion nous ferait croire qu’une décision de l’ Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui dé
2688 u’une décision de l’Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui définit notre présent ! Est-ce que
2689 t notre crainte du « fatalisme » ne reposent pas, le plus souvent, sur cette erreur des plus grossières ?… C. M. — On peu
2690 es plus grossières ?… C. M. — On peut aussi nier l’ éternité, et affirmer que seul existe notre temps. Dans ce cas, tu n’a
2691 — On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on l’ accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peu
2692 rien de ce qui est essentiel ; on l’accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peut nous conduire
2693 ns pas dialogué en vain, si nous avons pu dégager l’ alternative du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans les termes ex
2694 tive du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans les termes extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’Éternel qui
2695 s extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’ Éternel qui commande — ou c’est moi. Il n’y a pas là de difficultés in
2696 s là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que la résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours trè
2697 que la résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours très moraux, et même très pieux, qu’invoque notre
2698 révolte… Réalité radicale du problème Dans l’ Église, une fois acceptés le Credo et son fondement, qui est la Parole
2699 e du problème Dans l’Église, une fois acceptés le Credo et son fondement, qui est la Parole dite en nous par l’Esprit e
2700 fois acceptés le Credo et son fondement, qui est la Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’Écriture, — or, ce
2701 son fondement, qui est la Parole dite en nous par l’ Esprit et attestée par l’Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-m
2702 Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’ Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l
2703 te Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l’ opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la d
2704 r n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la démonstration purement biblique qu’on en trouvera dans ce traité, mal
2705 s exégétiques discutables, suffit à établir, pour le chrétien, la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qu
2706 discutables, suffit à établir, pour le chrétien, la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur
2707 her n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de l’ Évangile. L’apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiast
2708 inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile. L’ apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiastique » ; et
2709 qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul l’ a formulé avant toute « tradition ecclésiastique » ; et tous les Pères
2710 vant toute « tradition ecclésiastique » ; et tous les Pères et tous les siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien 
2711 tion ecclésiastique » ; et tous les Pères et tous les siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien : « Travaillez à v
2712 n’y changeront rien : « Travaillez à votre salut avec crainte et tremblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous le vou
2713 emblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire » (Phil. 2, 12-13). C’est parce que Dieu fait tou
2714 sque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire » (Phil. 2, 12-13). C’est parce que Dieu fait tout que nous dev
2715 fait tout que nous devons agir, selon qu’il nous l’ a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, e
2716 tout prévu que nous avons en lui, et en lui seul, la liberté. Mais cela n’apparaît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extr
2717 ît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insi
2718 aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insiste sur cet « extrémisme » évangél
2719 connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insiste sur cet « extrémisme » évangélique, que les sophi
2720 r insiste sur cet « extrémisme » évangélique, que les sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au
2721 orriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jus
2722 « évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut so
2723 oix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ho
2724 ue dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ homme possède au moins « un faible libre arbitre »34 dans les choses d
2725 ssède au moins « un faible libre arbitre »34 dans les choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême
2726 re arbitre »34 dans les choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême — pour nous sauver, fait voir
2727 e liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et à l’ inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du pé
2728 ’inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du péché pour voir qu’il n’y a de liberté possible que d
2729 our voir qu’il n’y a de liberté possible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le mom
2730 sible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute l’ argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les
2731 u nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se com
2732 Toute l’argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se complaire Érasme
2733 Luther vise le moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se complaire Érasme. Le problème du salut es
2734 les moyens termes où voulait se complaire Érasme. Le problème du salut est un problème de vie ou de mort. Or il est seul e
2735 e de vie ou de mort. Or il est seul en cause pour le théologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris que Luther ne ni
2736 use pour le théologien. Et tout est clair lorsque l’ on a compris que Luther ne nie pas du tout notre faculté de vouloir, m
2737 e seulement qu’elle puisse suffire à nous obtenir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie,
2738 ir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie, littérature et scolastique. Il n’en reste pas
2739 olastique. Il n’en reste pas moins qu’aux yeux de la raison — cette folle, comme le répète Luther — ce que nous nommons ic
2740 ins qu’aux yeux de la raison — cette folle, comme le répète Luther — ce que nous nommons ici un paradoxe demeure une pure
2741 s alors, on peut se demander si ceux qui refusent le christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contrair
2742 ui refusent le christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais dans
2743 ent à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais dans un plan où elle reste insoluble. Érasme éta
2744 me était encore catholique ; son humanisme mesuré l’ empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adve
2745 tholique ; son humanisme mesuré l’empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adversaires du christi
2746 l’empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adversaires du christianisme dans les temps modernes,
2747 plus grand des adversaires du christianisme dans les temps modernes, Nietzsche, aboutit à un dilemme qui me paraît corresp
2748 e, terme à terme, à celui que Luther et Paul — et l’ Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a poussé comme Luther, jusq
2749 oussé comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de l’ homme, jusqu’aux questions dernières que peut envisager notre pensée.
2750 ager notre pensée. Pour échapper au nihilisme qui l’ étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagi
2751 ’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’ a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel pa
2752  Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel paraît exclure toute liber
2753 xclure toute liberté humaine, il se met à prêcher l’ amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable.
2754 liberté humaine, il se met à prêcher l’amor fati, l’ adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans c
2755 r l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans cette volonté de reconnaître notre t
2756 irresponsabilité, qu’il croit trouver et regagner la dignité suprême de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éte
2757 l croit trouver et regagner la dignité suprême de l’ homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éternité de son destin. (
2758 e de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’ éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’est accepter en acte l’ét
2759 re, c’est vouloir l’éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’est accepter en acte l’éternelle prévision du Dieu qui sa
2760 destin. (Pour le chrétien, c’est accepter en acte l’ éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du par
2761 en acte l’éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du paradoxe luthérien et du paradoxe nietzschéen
2762 vérité, c’est bien du même problème qu’il s’agit. Le seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. A
2763 ème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsc
2764 iens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppo
2765 oncé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de l’ homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppose sa propre exist
2766 ppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’ existence de Dieu, il oppose sa propre existence35. Mais la difficulté
2767 ce de Dieu, il oppose sa propre existence35. Mais la difficulté fondamentale que posent les rapports de notre volonté et d
2768 nce35. Mais la difficulté fondamentale que posent les rapports de notre volonté et de l’éternité souveraine, demeure entièr
2769 le que posent les rapports de notre volonté et de l’ éternité souveraine, demeure entière. La différence, c’est que Nietzsc
2770 nté et de l’éternité souveraine, demeure entière. La différence, c’est que Nietzsche nous propose d’adorer un Destin muet,
2771 muet, tandis que nous adorons une Providence dont la Parole vivante s’est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous !
2772 le vivante s’est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 30. À la proposition qu’on lui faisait, en 1587, d’éditer s
2773 rnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 30. À la proposition qu’on lui faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complètes
2774 faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complètes, le réformateur répondit : « Je ne reconnais aucun de mes livres pour adé
2775 de mes livres pour adéquat, si ce n’est peut-être le de servo arbitrio et le Catéchisme. » 31. Luther avertit à chaque fo
2776 at, si ce n’est peut-être le de servo arbitrio et le Catéchisme. » 31. Luther avertit à chaque fois : « nécessité conditi
2777 absolue, comme ils disent », et ce ils désigne «  les sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 32. Comme l’anarchiste B
2778 et ce ils désigne « les sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 32. Comme l’anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52.
2779 stes », c’est-à-dire les scolastiques. 32. Comme l’ anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52. Les traductions françaises
2780 omme l’anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52. Les traductions françaises donnent en général : « Nous serons transformés
7 1937, Articles divers (1936-1938). L’Acte comme point de départ (1936-1937)
2781 L’ Acte comme point de départ (1936-1937)a b Nous partons de l’impress
2782 point de départ (1936-1937)a b Nous partons de l’ impression qu’il existe, entre certains systèmes qu’on a coutume d’opp
2783 systèmes qu’on a coutume d’opposer très nettement les uns aux autres, un commun dénominateur d’erreur, que nous ne pourrion
2784 re parti. C’est ainsi qu’on peut distinguer, dans l’ idéalisme et dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans le prag
2785 i qu’on peut distinguer, dans l’idéalisme et dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans le pragmatisme, etc., un en
2786 er, dans l’idéalisme et dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans le pragmatisme, etc., un ensemble de supposition
2787 dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans le pragmatisme, etc., un ensemble de suppositions communes qui nous para
2788 ppositions communes qui nous paraissent renfermer la véritable raison de rejeter l’un et l’autre système, sans plus nous a
2789 tacher à combattre leurs erreurs respectives dans le plan sur lequel ils s’opposent. Cette impossibilité de prendre parti
2790 « changement de plan »), qui seule nous restitue l’ unité de vision, la plénitude de volonté et en quelque sorte la bonne
2791 an »), qui seule nous restitue l’unité de vision, la plénitude de volonté et en quelque sorte la bonne conscience nécessai
2792 sion, la plénitude de volonté et en quelque sorte la bonne conscience nécessaire à toute œuvre constructive. Les quelques
2793 conscience nécessaire à toute œuvre constructive. Les quelques pages qui suivent n’ont d’autre but que d’en indiquer le pri
2794 s qui suivent n’ont d’autre but que d’en indiquer le principe de permanente actualité. C’est précisément ce sentiment de b
2795 es se présentent à nous. Avant même d’en pénétrer le détail et d’en critiquer la structure propre, nous nous sentons repou
2796 nt même d’en pénétrer le détail et d’en critiquer la structure propre, nous nous sentons repoussés par quelque chose qui n
2797 opèrent dans un monde dépourvu de correspondances avec notre situation concrète. Ce n’est pas leur abstraction qui nous inqu
2798 e parfaite qui nous semble absurde. Il semble que l’ esprit ait proclamé, lui aussi, son autarchie, et qu’il puisse se donn
2799 se donner des lois qui ne tiennent plus compte de la crise du monde, et de celle de l’esprit dans ce monde. L’esprit s’est
2800 plus compte de la crise du monde, et de celle de l’ esprit dans ce monde. L’esprit s’est dégagé des coordonnées du moment,
2801 du monde, et de celle de l’esprit dans ce monde. L’ esprit s’est dégagé des coordonnées du moment, c’est dire que son exer
2802 ncrètement. D’où ce sentiment, quand nous voulons penser telle idéologie, de nous trouver diminués dans notre énergie totale.
2803 nous trouver diminués dans notre énergie totale. La pensée n’est plus le moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à
2804 s dans notre énergie totale. La pensée n’est plus le moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à ses dépens. On peut
2805 énergie totale. La pensée n’est plus le moteur de l’ action ; au contraire, elle tourne à ses dépens. On peut continuer la
2806 aire, elle tourne à ses dépens. On peut continuer la métaphore et dire que la pensée dont nous souffrons est une pensée dé
2807 épens. On peut continuer la métaphore et dire que la pensée dont nous souffrons est une pensée débrayée. Un moteur débrayé
2808 ntative d’embrayage serait immédiatement fatale à la machine, et ferait voler en éclats les engrenages. La merveilleuse su
2809 nt fatale à la machine, et ferait voler en éclats les engrenages. La merveilleuse subtilité d’une certaine pensée critique,
2810 achine, et ferait voler en éclats les engrenages. La merveilleuse subtilité d’une certaine pensée critique, aujourd’hui, n
2811 s exactement cette impression ? Ne pourrions-nous la caractériser maintenant par un seul mot, qui exprime à la fois son ma
2812 que de coordonnées, d’une part, et, d’autre part, le sentiment de division et de diminution qu’elle favorise en nous : ce
2813 s au sens temporel, mais au sens de rupture entre la pensée et l’acte. ⁂ Que la pensée moderne repose sur un postulat d’in
2814 porel, mais au sens de rupture entre la pensée et l’ acte. ⁂ Que la pensée moderne repose sur un postulat d’inactualité, il
2815 sens de rupture entre la pensée et l’acte. ⁂ Que la pensée moderne repose sur un postulat d’inactualité, il suffit, pour
2816 de se demander un instant ce qui arriverait dans le cas contraire. Si notre monde tient encore debout, c’est que les phil
2817 re. Si notre monde tient encore debout, c’est que les philosophies qui le partagent restent gratuites, relativistes et inac
2818 ent encore debout, c’est que les philosophies qui le partagent restent gratuites, relativistes et inactuelles dans leur en
2819 , relativistes et inactuelles dans leur ensemble. Le « libéralisme » idéaliste, ce « laisser passer, laisser faire », supp
2820 te, ce « laisser passer, laisser faire », suppose le débrayage de la pensée, sinon nous vivrions dans la plus effroyable a
2821 passer, laisser faire », suppose le débrayage de la pensée, sinon nous vivrions dans la plus effroyable anarchie matériel
2822 débrayage de la pensée, sinon nous vivrions dans la plus effroyable anarchie matérielle. On nous dira que, cependant, si
2823 rchie matérielle. On nous dira que, cependant, si le désordre du monde est réel, il se peut qu’il provienne, précisément,
2824 es que nous repoussons ? Nous serions mal venus à le nier. Si le monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a d
2825 repoussons ? Nous serions mal venus à le nier. Si le monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a dans le monde
2826 c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a dans le monde plus d’actualité que nos philosophies n’en peuvent concevoir. E
2827 moins inopérantes que souvent elles ne voudraient l’ être. Mais, chose étrange, la raison pour laquelle le désordre n’est p
2828 elles ne voudraient l’être. Mais, chose étrange, la raison pour laquelle le désordre n’est pas total, c’est la raison mêm
2829 tre. Mais, chose étrange, la raison pour laquelle le désordre n’est pas total, c’est la raison même de ce désordre : c’est
2830 pour laquelle le désordre n’est pas total, c’est la raison même de ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et l’ac
2831 otal, c’est la raison même de ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce l’
2832 ison même de ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre
2833 ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et l’ acte, rupture qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre part, la fre
2834 pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce l’ anarchie, d’autre part, la freine et la prive pour le moment de virule
2835 qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre part, la freine et la prive pour le moment de virulence. Cet état d’équilibre
2836 rt, amorce l’anarchie, d’autre part, la freine et la prive pour le moment de virulence. Cet état d’équilibre entre le micr
2837 narchie, d’autre part, la freine et la prive pour le moment de virulence. Cet état d’équilibre entre le microbe et la mala
2838 e moment de virulence. Cet état d’équilibre entre le microbe et la maladie ne peut mener qu’à une consomption lente, ou à
2839 rulence. Cet état d’équilibre entre le microbe et la maladie ne peut mener qu’à une consomption lente, ou à des accidents
2840 rophiques. Un tel diagnostic indique par lui-même la thérapeutique que nous voudrions proposer, et qui serait un traitemen
2841 oposer, et qui serait un traitement préventif par l’ actualisation, c’est-à-dire par l’effort et la volonté de confondre l’
2842 t préventif par l’actualisation, c’est-à-dire par l’ effort et la volonté de confondre l’opération propre de la pensée avec
2843 par l’actualisation, c’est-à-dire par l’effort et la volonté de confondre l’opération propre de la pensée avec l’acte qui
2844 st-à-dire par l’effort et la volonté de confondre l’ opération propre de la pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dir
2845 et la volonté de confondre l’opération propre de la pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette
2846 onté de confondre l’opération propre de la pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté son
2847 de confondre l’opération propre de la pensée avec l’ acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté sont d
2848 e l’opération propre de la pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté sont déjà présent
2849 nté sont déjà présents, avant toute analyse, dans le sentiment que nous disions tout à l’heure éprouver en face d’une conc
2850 nalyse, dans le sentiment que nous disions tout à l’ heure éprouver en face d’une conception purement critique, ou idéalist
2851 rement critique, ou idéaliste, ou relativiste, de l’ activité du philosophe. ⁂ Mais cette réalité salutaire, cet acte, comm
2852 pte ? Nous ne disons pas : comment pourrions-nous le définir, nous disons seulement — et littéralement — comment pourrions
2853 en vérité, il n’y a pas pour nous de problème de l’ acte mais il y a problème de ce qui s’oppose à l’acte. (En d’autres te
2854 l’acte mais il y a problème de ce qui s’oppose à l’ acte. (En d’autres termes, il n’y a pas de problème de la personne, ma
2855 (En d’autres termes, il n’y a pas de problème de la personne, mais bien des « choses », de l’impersonnel.) L’acte, étant
2856 lème de la personne, mais bien des « choses », de l’ impersonnel.) L’acte, étant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesse
2857 nne, mais bien des « choses », de l’impersonnel.) L’ acte, étant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesser d’être acte, ê
2858 as, sans cesser d’être acte, être posé en face de l’ acteur. On ne peut pas photographier un acte, et donner ensuite la des
2859 peut pas photographier un acte, et donner ensuite la description de la photo comme la description d’un acte. On pourrait d
2860 hier un acte, et donner ensuite la description de la photo comme la description d’un acte. On pourrait dire tout au plus (
2861 t donner ensuite la description de la photo comme la description d’un acte. On pourrait dire tout au plus (métaphoriquemen
2862 pourrait dire tout au plus (métaphoriquement) que l’ acte révélé par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la photo c
2863 au plus (métaphoriquement) que l’acte révélé par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la photo constitue l’un des
2864 riquement) que l’acte révélé par le cliché, c’est l’ éclair de magnésium dont la photo constitue l’un des effets. Quant à l
2865 é par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la photo constitue l’un des effets. Quant à la scène représentée par la
2866 dont la photo constitue l’un des effets. Quant à la scène représentée par la photo, elle n’est plus qu’un objectif, inact
2867 l’un des effets. Quant à la scène représentée par la photo, elle n’est plus qu’un objectif, inactuel en soi, et problémati
2868 ion importante introduite par M. Gabriel Marcel à la fin de son article intitulé : Existence et objectivité. M. Marcel dis
2869 tence et objectivité. M. Marcel distingue « entre les données susceptibles de fournir la matière d’un problème, données qui
2870 ingue « entre les données susceptibles de fournir la matière d’un problème, données qui sont par là même objectives, et ce
2871 objectives, et celles sur lesquelles il faut que l’ esprit s’appuie pour poser un problème quelconque ». L’acte, tel que n
2872 rit s’appuie pour poser un problème quelconque ». L’ acte, tel que nous l’entendons, est évidemment une donnée de ce deuxiè
2873 er un problème quelconque ». L’acte, tel que nous l’ entendons, est évidemment une donnée de ce deuxième type, la donnée pa
2874 s, est évidemment une donnée de ce deuxième type, la donnée par excellence. En réalité, toute définition s’appuie sur une
2875 irait Heidegger. Toute tentative de définition de l’ acte lui-même supposerait un arrêt, un retour sur l’acte, c’est-à-dire
2876 acte lui-même supposerait un arrêt, un retour sur l’ acte, c’est-à-dire un retour contre l’acte, qui en neutraliserait auss
2877 retour sur l’acte, c’est-à-dire un retour contre l’ acte, qui en neutraliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur l’
2878 our contre l’acte, qui en neutraliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur l’acte ne pouvant intervenir qu’a posteri
2879 cte, qui en neutraliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur l’acte ne pouvant intervenir qu’a posteriori, elle n’es
2880 aliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur l’ acte ne pouvant intervenir qu’a posteriori, elle n’est, en réalité, qu
2881 ori, elle n’est, en réalité, qu’une réflexion sur les effets de l’acte. Si, au moment de sauter, l’athlète essaie de défini
2882 t, en réalité, qu’une réflexion sur les effets de l’ acte. Si, au moment de sauter, l’athlète essaie de définir le saut, il
2883 ur les effets de l’acte. Si, au moment de sauter, l’ athlète essaie de définir le saut, il ne sautera pas. Tous ceux qui on
2884 au moment de sauter, l’athlète essaie de définir le saut, il ne sautera pas. Tous ceux qui ont pratiqué un minimum de cul
2885 ture physique connaissent ce genre d’échec. C’est la conscience défaillante qui refuse l’obstacle. Il ne reste alors qu’à
2886 échec. C’est la conscience défaillante qui refuse l’ obstacle. Il ne reste alors qu’à se consoler par la certitude que l’an
2887 ’obstacle. Il ne reste alors qu’à se consoler par la certitude que l’analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas
2888 reste alors qu’à se consoler par la certitude que l’ analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas sauter. Et c’est
2889 par la certitude que l’analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas sauter. Et c’est peut-être cela précisément que
2890 s sauter. Et c’est peut-être cela précisément que la sagesse vulgaire appelle « prendre les choses avec philosophie »… Cec
2891 isément que la sagesse vulgaire appelle « prendre les choses avec philosophie »… Ceci nous amène à constater que : 1° Si on
2892 la sagesse vulgaire appelle « prendre les choses avec philosophie »… Ceci nous amène à constater que : 1° Si on ne part pas
2893 s amène à constater que : 1° Si on ne part pas de l’ acte, on ne part pas du tout. 2° Si on ne part pas tout de suite, on
2894 ne part pas tout de suite, on ne partira jamais. Le jeu des mots traduit ici le jeu des faits. Impossible de parler de l’
2895 on ne partira jamais. Le jeu des mots traduit ici le jeu des faits. Impossible de parler de l’acte dans un langage arrêté
2896 uit ici le jeu des faits. Impossible de parler de l’ acte dans un langage arrêté ou détendu. Tout discours sur l’acte conti
2897 s un langage arrêté ou détendu. Tout discours sur l’ acte contiendra nécessairement des mots tels que « départ », « partir 
2898  partir » et « tout de suite ». Tout discours sur l’ acte manifestera ce trouble, cette vibration, cette « nouveauté » déco
2899 ion, cette « nouveauté » déconcertante qui révèle la proximité de la réalité créante. Force nous est de reconnaître qu’un
2900 veauté » déconcertante qui révèle la proximité de la réalité créante. Force nous est de reconnaître qu’un tel discours, da
2901 nous est de reconnaître qu’un tel discours, dans l’ état de notre philosophie, paraîtra peu philosophique. Personne, mieux
2902 té essentielle, et d’apparence scandaleuse, entre l’ expression et l’existence. Bornons-nous à citer de lui une phrase bien
2903 et d’apparence scandaleuse, entre l’expression et l’ existence. Bornons-nous à citer de lui une phrase bien typique par sa
2904 qui, par ailleurs, peut éclairer notre débat : «  L’ éthique ne commence pas dans une ignorance qu’il faudrait muer en savo
2905 réalisation. » Nous dirions en d’autres termes : l’ acte n’est pas un problème, mais une donnée initiale, le seul donné qu
2906 n’est pas un problème, mais une donnée initiale, le seul donné qui se donne à soi-même. Or, cette donnée, d’une part, n’e
2907 donnée, d’une part, n’est pas réductible à ce qui la précède, d’autre part, n’est pas épuisée par l’analyse de ses effets.
2908 i la précède, d’autre part, n’est pas épuisée par l’ analyse de ses effets. L’acte est à la fois créateur, et transcendant
2909 t, n’est pas épuisée par l’analyse de ses effets. L’ acte est à la fois créateur, et transcendant à sa création. Il est cré
2910 ion. Il est créateur en ceci qu’il introduit dans les choses un rapport nouveau instituant une situation irréversible ; et
2911 e rapport nouveau on ne trouvera rien d’autre que la matière d’une problématique nouvelle, un donné, ou plutôt un « abando
2912 erminations objectives, et s’offrant à son tour à l’ éclair bouleversant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte que dans le p
2913 ant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte que dans le présent, dans l’instant créateur, dans ce contact entre l’éternité et
2914 cte. Il n’y a eu d’acte que dans le présent, dans l’ instant créateur, dans ce contact entre l’éternité et le temps, qui es
2915 t, dans l’instant créateur, dans ce contact entre l’ éternité et le temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’
2916 ant créateur, dans ce contact entre l’éternité et le temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’on ne puisse r
2917 ce contact entre l’éternité et le temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’on ne puisse rien dire des réact
2918 e puisse rien dire des réactions psychologiques à l’ acte « as it’s known as », réactions qui, elles, se manifestent dans u
2919 manifestent dans une certaine durée de vibration. Le sentiment qui accompagne l’acte, c’est le sentiment d’indivision inté
2920 e durée de vibration. Le sentiment qui accompagne l’ acte, c’est le sentiment d’indivision intérieure, d’indivision entre l
2921 ration. Le sentiment qui accompagne l’acte, c’est le sentiment d’indivision intérieure, d’indivision entre le vouloir et l
2922 iment d’indivision intérieure, d’indivision entre le vouloir et le pouvoir. On pourrait presque dire que c’est la sensatio
2923 sion intérieure, d’indivision entre le vouloir et le pouvoir. On pourrait presque dire que c’est la sensation de l’unité,
2924 et le pouvoir. On pourrait presque dire que c’est la sensation de l’unité, ou, plus exactement, de son accomplissement. C’
2925 n pourrait presque dire que c’est la sensation de l’ unité, ou, plus exactement, de son accomplissement. C’est l’euphorie d
2926 u, plus exactement, de son accomplissement. C’est l’ euphorie de celui qui éprouve simultanément la résistance d’un objet e
2927 est l’euphorie de celui qui éprouve simultanément la résistance d’un objet et la victoire sur cette résistance. Moment mys
2928 éprouve simultanément la résistance d’un objet et la victoire sur cette résistance. Moment mystérieux entre tous, où le ma
2929 ette résistance. Moment mystérieux entre tous, où le maximum de risque s’identifie au maximum de sécurité, dans la conscie
2930 e risque s’identifie au maximum de sécurité, dans la conscience de celui qui agit. Nous appellerions volontiers cet instan
2931 ui agit. Nous appellerions volontiers cet instant le saint des saints de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si la «
2932 ons volontiers cet instant le saint des saints de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comm
2933 nstant le saint des saints de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaar
2934 aint des saints de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le
2935 s de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le vouloir uniqu
2936 ieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant l’être vivant et
2937 ureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant l’être vivant et le confondant un instant av
2938 ut Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant l’ être vivant et le confondant un instant avec l’objet de son désir. On
2939 ’est le vouloir unique, unifiant l’être vivant et le confondant un instant avec l’objet de son désir. On comprendra peut-ê
2940 nifiant l’être vivant et le confondant un instant avec l’objet de son désir. On comprendra peut-être mieux maintenant le rep
2941 nt l’être vivant et le confondant un instant avec l’ objet de son désir. On comprendra peut-être mieux maintenant le reproc
2942 n désir. On comprendra peut-être mieux maintenant le reproche d’inactualité essentielle que nous adressions dès le début à
2943 d’inactualité essentielle que nous adressions dès le début à certains systèmes par ailleurs fort divers, mais dont l’exerc
2944 ains systèmes par ailleurs fort divers, mais dont l’ exercice se trouve être lié à une division préalable de notre être, pa
2945 devenir historique, ou encore à une autonomie de la raison critique. Division qui a pour effet, généralement, de volatili
2946 on qui a pour effet, généralement, de volatiliser les points d’application de notre volonté, de relativiser tout effort cré
2947 r tout effort créateur, enfin de « dés-orienter » l’ activité spécifique de la pensée. L’acte, étant essentiellement l’affi
2948 nfin de « dés-orienter » l’activité spécifique de la pensée. L’acte, étant essentiellement l’affirmation simultanée de l’u
2949 és-orienter » l’activité spécifique de la pensée. L’ acte, étant essentiellement l’affirmation simultanée de l’un et du div
2950 fique de la pensée. L’acte, étant essentiellement l’ affirmation simultanée de l’un et du divers, affirmation absurde en la
2951 philosophique sera amené, par son jeu logique, à l’ éliminer ou à la disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la r
2952 era amené, par son jeu logique, à l’éliminer ou à la disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la réalité centrale,
2953 disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la réalité centrale, impensable et qui permet de penser. Nous voudrions
2954 la réalité centrale, impensable et qui permet de penser . Nous voudrions dégager ici, à titre d’exemple, quelques-unes des con
2955 otre position. ⁂ Nous ne pouvons faire comprendre la véritable valeur d’une philosophie de l’acte qu’en montrant comment s
2956 mprendre la véritable valeur d’une philosophie de l’ acte qu’en montrant comment ses caractères principaux, tels que nous v
2957 es caractères principaux, tels que nous venons de les indiquer, se retrouvent — comme reflétés — dans ses effets immédiats.
2958 voir affirmer qu’il n’y a pas de transition entre l’ acte et ses effets. C’est l’acte lui-même qui se trouve être transitif
2959 s de transition entre l’acte et ses effets. C’est l’ acte lui-même qui se trouve être transitif et novateur, sans qu’il y a
2960 , paradoxalement : il n’y a de transition que par l’ acte, mais l’acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à
2961 ent : il n’y a de transition que par l’acte, mais l’ acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de
2962 y a de transition que par l’acte, mais l’acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de ses effets,
2963 le contraire d’une transition. Avant de passer à l’ examen de ses effets, rappelons encore deux caractéristiques de l’acte
2964 effets, rappelons encore deux caractéristiques de l’ acte, impliquées d’ailleurs dans ce qui précède, et que nous allons ut
2965 , et que nous allons utiliser. La première, c’est la violence de l’acte. Quand on descend au fond de la notion de force, o
2966 llons utiliser. La première, c’est la violence de l’ acte. Quand on descend au fond de la notion de force, on est obligé de
2967 a violence de l’acte. Quand on descend au fond de la notion de force, on est obligé de faire appel à l’idée de choc, de ru
2968 a notion de force, on est obligé de faire appel à l’ idée de choc, de rupture, en un mot de violence (voir à cet égard Sore
2969 n’y a pas d’évolution créatrice sans révolution. L’ acte sera donc agonique. D’autre part, l’acte implique un élan vers, p
2970 olution. L’acte sera donc agonique. D’autre part, l’ acte implique un élan vers, pour reprendre l’expression du Dr Minkowsk
2971 art, l’acte implique un élan vers, pour reprendre l’ expression du Dr Minkowski. L’acte est l’éclatement d’une tension orie
2972 ers, pour reprendre l’expression du Dr Minkowski. L’ acte est l’éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi inten
2973 eprendre l’expression du Dr Minkowski. L’acte est l’ éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi intention. Il n’
2974 ci que nous retrouvons, sous un aspect dynamique, la distinction esprit-matière que nous avions écartée tout d’abord. L’ac
2975 rit-matière que nous avions écartée tout d’abord. L’ acte créateur sépare la lumière des ténèbres. Son caractère dichotomiq
2976 ions écartée tout d’abord. L’acte créateur sépare la lumière des ténèbres. Son caractère dichotomique n’est pas isolé de s
2977 e son caractère agonique. Ce n’est pas à dire que la lumière et les ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il ne
2978 e agonique. Ce n’est pas à dire que la lumière et les ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il ne serait pas créa
2979 e la lumière et les ténèbres soient données avant l’ acte, car sinon il ne serait pas créateur, c’est-à-dire qu’il ne serai
2980 créateur, c’est-à-dire qu’il ne serait pas acte. L’ acte n’a qu’un point d’application, le chaos, la discorde, le non-être
2981 t pas acte. L’acte n’a qu’un point d’application, le chaos, la discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui e
2982 . L’acte n’a qu’un point d’application, le chaos, la discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau
2983 qu’un point d’application, le chaos, la discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pa
2984 end à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est l’ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets q
2985 qui est nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est l’ ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait hum
2986 nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est l’ordre. L’ acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait humainement
2987 ent lié à ses effets qu’on ne saurait humainement le séparer du premier d’entre eux, qui est l’affirmation de la personnal
2988 nement le séparer du premier d’entre eux, qui est l’ affirmation de la personnalité. Nous définissons la personne comme l’i
2989 du premier d’entre eux, qui est l’affirmation de la personnalité. Nous définissons la personne comme l’individu qui se sa
2990 ’affirmation de la personnalité. Nous définissons la personne comme l’individu qui se sait et se veut engagé dans le confl
2991 personnalité. Nous définissons la personne comme l’ individu qui se sait et se veut engagé dans le conflit créateur. Mais
2992 mme l’individu qui se sait et se veut engagé dans le conflit créateur. Mais en s’affirmant, c’est-à-dire en changeant de p
2993 , c’est-à-dire en changeant de plan, en allant de l’ angoisse à la création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la
2994 e en changeant de plan, en allant de l’angoisse à la création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité
2995 e plan, en allant de l’angoisse à la création, de l’ impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore
2996 tion, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore la tension. Le nouvel état du conflit es
2997 l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore la tension. Le nouvel état du conflit est plus aigu que l’ancien. Au fur
2998 veau, la personnalité accentue encore la tension. Le nouvel état du conflit est plus aigu que l’ancien. Au fur et à mesure
2999 sion. Le nouvel état du conflit est plus aigu que l’ ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère, la personnalité se risqu
3000 e l’ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère, la personnalité se risque de plus en plus. C’est pourquoi les époques de
3001 nnalité se risque de plus en plus. C’est pourquoi les époques de conciliation sont des époques de décadence. Le salut n’est
3002 es de conciliation sont des époques de décadence. Le salut n’est jamais dans le repli, dans le refus du conflit concret. L
3003 époques de décadence. Le salut n’est jamais dans le repli, dans le refus du conflit concret. L’invention de l’homme « int
3004 adence. Le salut n’est jamais dans le repli, dans le refus du conflit concret. L’invention de l’homme « intérieur » suppos
3005 dans le repli, dans le refus du conflit concret. L’ invention de l’homme « intérieur » suppose et permet celle du « robot 
3006 dans le refus du conflit concret. L’invention de l’ homme « intérieur » suppose et permet celle du « robot » d’affaires. L
3007 suppose et permet celle du « robot » d’affaires. L’ autisme est un fléchissement de la personnalité. D’une manière général
3008 t » d’affaires. L’autisme est un fléchissement de la personnalité. D’une manière générale, l’acte personnel revêtira donc
3009 ement de la personnalité. D’une manière générale, l’ acte personnel revêtira donc deux aspects, symbolisant les pôles de ce
3010 personnel revêtira donc deux aspects, symbolisant les pôles de cette tension qui constitue le ressort de l’activité elle-mê
3011 bolisant les pôles de cette tension qui constitue le ressort de l’activité elle-même. D’un côté, il y aura une joie créatr
3012 ôles de cette tension qui constitue le ressort de l’ activité elle-même. D’un côté, il y aura une joie créatrice, une consc
3013 e créatrice, une conscience de libération qui est la jouissance spécifiquement humaine. De l’autre côté, on trouvera une é
3014 aits. D’un côté, un champ plus libre conquis pour l’ esprit, de l’autre une pression accrue sur l’inerte. Risque par conséq
3015 pour l’esprit, de l’autre une pression accrue sur l’ inerte. Risque par conséquent accru aussi, puisque la tentation de l’i
3016 nerte. Risque par conséquent accru aussi, puisque la tentation de l’inertie augmentera en raison même de la plus grande do
3017 r conséquent accru aussi, puisque la tentation de l’ inertie augmentera en raison même de la plus grande docilité de l’iner
3018 ntation de l’inertie augmentera en raison même de la plus grande docilité de l’inerte. Il est plus difficile d’échapper au
3019 tera en raison même de la plus grande docilité de l’ inerte. Il est plus difficile d’échapper au prestige du positivisme et
3020 à prières. Il est plus difficile de maintenir sur le qui-vive un empire qu’une cité étroite. En effet, à l’intérieur même
3021 i-vive un empire qu’une cité étroite. En effet, à l’ intérieur même de l’empire, s’établit un danger qu’ignorent les pays d
3022 une cité étroite. En effet, à l’intérieur même de l’ empire, s’établit un danger qu’ignorent les pays de marche. Le sentime
3023 même de l’empire, s’établit un danger qu’ignorent les pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de l’ennui, du vide, tra
3024 établit un danger qu’ignorent les pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de l’ennui, du vide, traduit un fléchisseme
3025 r qu’ignorent les pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de l’ennui, du vide, traduit un fléchissement de la tension
3026 s pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de l’ ennui, du vide, traduit un fléchissement de la tension. L’adoration de
3027 de l’ennui, du vide, traduit un fléchissement de la tension. L’adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’inv
3028 du vide, traduit un fléchissement de la tension. L’ adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’
3029 it un fléchissement de la tension. L’adoration de l’ abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’acte gratuit, c
3030 nsion. L’adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans p
3031 ration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’ invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans point d’appui
3032 trait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’ acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans point d’appui et sans orient
3033 e, l’invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de l’ acte sans point d’appui et sans orientation, autrement dit de l’acte i
3034 int d’appui et sans orientation, autrement dit de l’ acte impossible, sont des exemples de ce fléchissement. La tentation d
3035 mpossible, sont des exemples de ce fléchissement. La tentation de l’acte gratuit n’est qu’une forme moderne de la tentatio
3036 des exemples de ce fléchissement. La tentation de l’ acte gratuit n’est qu’une forme moderne de la tentation de l’inerte. C
3037 n de l’acte gratuit n’est qu’une forme moderne de la tentation de l’inerte. C’est un vertige de la personnalité consécutif
3038 uit n’est qu’une forme moderne de la tentation de l’ inerte. C’est un vertige de la personnalité consécutif au relâchement
3039 de la tentation de l’inerte. C’est un vertige de la personnalité consécutif au relâchement de la tension et à la perte du
3040 e de la personnalité consécutif au relâchement de la tension et à la perte du sentiment du risque véritable. À côté de la
3041 lité consécutif au relâchement de la tension et à la perte du sentiment du risque véritable. À côté de la réalité de la pe
3042 perte du sentiment du risque véritable. À côté de la réalité de la personne, une autre réalité immédiate à l’acte, c’est é
3043 ment du risque véritable. À côté de la réalité de la personne, une autre réalité immédiate à l’acte, c’est évidemment la c
3044 ité de la personne, une autre réalité immédiate à l’ acte, c’est évidemment la connaissance. Non seulement la pensée est ac
3045 utre réalité immédiate à l’acte, c’est évidemment la connaissance. Non seulement la pensée est acte, mais elle est ce qu’i
3046 , c’est évidemment la connaissance. Non seulement la pensée est acte, mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans l’ac
3047 , mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans l’ acte. Ce qui a pu tromper sur ce point, c’est précisément que, la pens
3048 a pu tromper sur ce point, c’est précisément que, la pensée étant la plus immédiate des mises en ordre, la raison est tent
3049 ce point, c’est précisément que, la pensée étant la plus immédiate des mises en ordre, la raison est tentée de confondre
3050 ensée étant la plus immédiate des mises en ordre, la raison est tentée de confondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet,
3051 confondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet, avec le dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de la pensée créat
3052 ondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet, avec le dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de la pensée créatric
3053 ynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de la pensée créatrice, c’est cela que nous appelons sa faculté dichotomiqu
3054 t cela que nous appelons sa faculté dichotomique. La science nous en donnera un bon exemple. En tant qu’activité, elle peu
3055 le. En tant qu’activité, elle peut se définir par l’ invention de l’abstrait, c’est-à-dire de l’homogénéité mathématique. E
3056 activité, elle peut se définir par l’invention de l’ abstrait, c’est-à-dire de l’homogénéité mathématique. Elle apparaît ai
3057 ir par l’invention de l’abstrait, c’est-à-dire de l’ homogénéité mathématique. Elle apparaît ainsi comme un va-et-vient du
3058 pparaît ainsi comme un va-et-vient du « donné » à l’ abstrait. (Conflit de l’identité et de la réalité, voir Meyerson). Il
3059 a-et-vient du « donné » à l’abstrait. (Conflit de l’ identité et de la réalité, voir Meyerson). Il n’y a de paradoxe épisté
3060 onné » à l’abstrait. (Conflit de l’identité et de la réalité, voir Meyerson). Il n’y a de paradoxe épistémologique que pou
3061 oxe épistémologique que pour qui refuse d’aborder le problème de la connaissance à partir de l’acte. Mais, au contraire, l
3062 ique que pour qui refuse d’aborder le problème de la connaissance à partir de l’acte. Mais, au contraire, la science, cons
3063 border le problème de la connaissance à partir de l’ acte. Mais, au contraire, la science, considérée maintenant comme monu
3064 naissance à partir de l’acte. Mais, au contraire, la science, considérée maintenant comme monument ou système de règles, n
3065 e qu’un aspect provisoirement favorable du chaos. La vérité scientifique est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint le
3066 vorable du chaos. La vérité scientifique est dans l’ abstrait ; la science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que
3067 aos. La vérité scientifique est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que pour le sava
3068 ue est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que pour le savant seulement au moment où
3069 e rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que pour le savant seulement au moment où il crée ; pour les autres hommes, la sc
3070 r le savant seulement au moment où il crée ; pour les autres hommes, la science se traduit par une économie d’énergie et de
3071 nt au moment où il crée ; pour les autres hommes, la science se traduit par une économie d’énergie et de pensée, d’où cett
3072 onomie d’énergie et de pensée, d’où cette zone où l’ homme marche sur de l’art humain en toute sécurité et en plein automat
3073 pensée, d’où cette zone où l’homme marche sur de l’ art humain en toute sécurité et en plein automatisme (exemple : les gr
3074 toute sécurité et en plein automatisme (exemple : les grandes villes). Le progrès scientifique accroît sans cesse ce risque
3075 plein automatisme (exemple : les grandes villes). Le progrès scientifique accroît sans cesse ce risque d’automatisme, ranç
3076 oît sans cesse ce risque d’automatisme, rançon de la conquête2. À tous les étages et dans tous les domaines de l’effort de
3077 que d’automatisme, rançon de la conquête2. À tous les étages et dans tous les domaines de l’effort de pensée nous retrouvon
3078 n de la conquête2. À tous les étages et dans tous les domaines de l’effort de pensée nous retrouvons ce risque, né du carac
3079 2. À tous les étages et dans tous les domaines de l’ effort de pensée nous retrouvons ce risque, né du caractère ordonnateu
3080 rouvons ce risque, né du caractère ordonnateur de l’ activité humaine. Ainsi dans l’organisation du travail. La machine ten
3081 ère ordonnateur de l’activité humaine. Ainsi dans l’ organisation du travail. La machine tend à détruire l’artisanat, c’est
3082 té humaine. Ainsi dans l’organisation du travail. La machine tend à détruire l’artisanat, c’est-à-dire la zone du travail
3083 ganisation du travail. La machine tend à détruire l’ artisanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où l’œuvre garde un
3084 machine tend à détruire l’artisanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où l’œuvre garde un caractère plus ou moins ne
3085 isanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où l’ œuvre garde un caractère plus ou moins net de totalité. En d’autres te
3086 lus ou moins net de totalité. En d’autres termes, la machine sépare le travail qualifié, qu’elle repousse vers l’activité
3087 e totalité. En d’autres termes, la machine sépare le travail qualifié, qu’elle repousse vers l’activité spirituelle, du tr
3088 sépare le travail qualifié, qu’elle repousse vers l’ activité spirituelle, du travail non qualifié, où l’homme ne joue plus
3089 activité spirituelle, du travail non qualifié, où l’ homme ne joue plus qu’un rôle d’exécuteur. Remarquons que la machine n
3090 joue plus qu’un rôle d’exécuteur. Remarquons que la machine n’est que le prolongement d’un schéma mathématique, et qu’ell
3091 d’exécuteur. Remarquons que la machine n’est que le prolongement d’un schéma mathématique, et qu’elle est elle-même prolo
3092 hématique, et qu’elle est elle-même prolongée par la rationalisation. Nous avons là un exemple saisissant de la progressio
3093 alisation. Nous avons là un exemple saisissant de la progression par dichotomie. Progression réelle, créant un double risq
3094 le, créant un double risque non moins réel, ou si l’ on veut, une double tentation. Car, d’une part, renoncer à la machine
3095 une double tentation. Car, d’une part, renoncer à la machine ce serait en quelque sorte renoncer au sens même de l’activit
3096 serait en quelque sorte renoncer au sens même de l’ activité humaine ; mais, d’autre part, la domination de la machine ser
3097 même de l’activité humaine ; mais, d’autre part, la domination de la machine serait le résultat fatal du renoncement à la
3098 té humaine ; mais, d’autre part, la domination de la machine serait le résultat fatal du renoncement à la valeur éthique d
3099 d’autre part, la domination de la machine serait le résultat fatal du renoncement à la valeur éthique de la science en ta
3100 machine serait le résultat fatal du renoncement à la valeur éthique de la science en tant qu’acte (tentation à laquelle no
3101 ultat fatal du renoncement à la valeur éthique de la science en tant qu’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder l
3102 ’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder l’ expérimentalisme positiviste). Un troisième exemple de tension et d’ac
3103 exemple de tension et d’acte nous est fourni par l’ homme considéré du point de vue social. D’un côté, nous trouvons l’att
3104 du point de vue social. D’un côté, nous trouvons l’ attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambian
3105 social. D’un côté, nous trouvons l’attachement de l’ homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’hom
3106 un côté, nous trouvons l’attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut
3107 s trouvons l’attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renon
3108 ttachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans brise
3109 de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans briser son resso
3110 e, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’ homme ne peut pas y renoncer sans briser son ressort. Remarquons que c
3111 r son ressort. Remarquons que cet attachement est la marque de l’humanité. Mais, d’autre part, l’homme n’existe personnell
3112 . Remarquons que cet attachement est la marque de l’ humanité. Mais, d’autre part, l’homme n’existe personnellement qu’auta
3113 est la marque de l’humanité. Mais, d’autre part, l’ homme n’existe personnellement qu’autant qu’il s’affirme en acte. Quan
3114 eur humaine, c’est à une société de personnes que l’ on pense. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Ori
3115 umaine, c’est à une société de personnes que l’on pense . L’homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Originalité
3116 c’est à une société de personnes que l’on pense. L’ homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Originalité écl
3117 té de personnes que l’on pense. L’homme n’atteint l’ universel qu’à travers le personnel. Originalité éclatante, inoubliabl
3118 pense. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Originalité éclatante, inoubliable, paradoxale, de la soci
3119 riginalité éclatante, inoubliable, paradoxale, de la société humaine, qui lui permet de se dépasser elle-même. L’homme con
3120 humaine, qui lui permet de se dépasser elle-même. L’ homme concret, l’homme vivant, l’homme en acte est l’affirmation d’une
3121 permet de se dépasser elle-même. L’homme concret, l’ homme vivant, l’homme en acte est l’affirmation d’une tension permanen
3122 asser elle-même. L’homme concret, l’homme vivant, l’ homme en acte est l’affirmation d’une tension permanente entre ces deu
3123 omme concret, l’homme vivant, l’homme en acte est l’ affirmation d’une tension permanente entre ces deux pôles de l’amour :
3124 d’une tension permanente entre ces deux pôles de l’ amour : l’attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l
3125 sion permanente entre ces deux pôles de l’amour : l’ attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l’universel
3126 entre ces deux pôles de l’amour : l’attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l’universel par la charité
3127 amour : l’attachement à la diversité concrète, et l’ actualisation de l’universel par la charité personnaliste. ⁂ Pour évit
3128 nt à la diversité concrète, et l’actualisation de l’ universel par la charité personnaliste. ⁂ Pour éviter un malentendu es
3129 é concrète, et l’actualisation de l’universel par la charité personnaliste. ⁂ Pour éviter un malentendu essentiel, nous te
3130 tiel, nous tenons à souligner encore en terminant le caractère d’instantanéité de l’acte créateur. Nous affirmons ainsi ce
3131 core en terminant le caractère d’instantanéité de l’ acte créateur. Nous affirmons ainsi ce qui nous paraît spécifique de l
3132 affirmons ainsi ce qui nous paraît spécifique de l’ effort et de la pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le
3133 i ce qui nous paraît spécifique de l’effort et de la pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le
3134 t spécifique de l’effort et de la pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le plus humain. Mais
3135 e la pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’ acte le plus pur et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos
3136 nsée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos yeux c
3137 a pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos yeux ce qui n’est pas
3138 présenter à nos yeux ce qui n’est pas immédiat à l’ acte ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de t
3139 ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de toute médiation ? Assurément l’évidence de l’acte, non seu
3140 à nier la réalité de toute médiation ? Assurément l’ évidence de l’acte, non seulement prime tout pour nous, mais constitue
3141 ité de toute médiation ? Assurément l’évidence de l’ acte, non seulement prime tout pour nous, mais constitue, comme nous l
3142 prime tout pour nous, mais constitue, comme nous l’ avons dit, le point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus
3143 our nous, mais constitue, comme nous l’avons dit, le point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus favorable à
3144 nous l’avons dit, le point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus favorable à l’édification de toute construc
3145 point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus favorable à l’édification de toute construction humaine, même et
3146 essaire, la supra-rationalité la plus favorable à l’ édification de toute construction humaine, même et surtout rationnelle
3147 elle. Mais si nous rejetons toute médiation entre l’ acte et ses manifestations humaines, nous ne saurions écarter la réali
3148 manifestations humaines, nous ne saurions écarter la réalité des résistances à cette activité. Ce n’est que dans certains
3149 n’est que dans certains domaines très étroits de la pensée que ces résistances sont assez nettement brisées pour conférer
3150 nces sont assez nettement brisées pour conférer à la création issue de l’acte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs
3151 ment brisées pour conférer à la création issue de l’ acte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs, les résistances son
3152 cte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs, les résistances sont étroitement mêlées à toutes les manifestations d’act
3153 les résistances sont étroitement mêlées à toutes les manifestations d’activité. La médiation ne se manifeste pour nous que
3154 nt mêlées à toutes les manifestations d’activité. La médiation ne se manifeste pour nous que sous forme de résistance. Il
3155 ésistances plus ou moins favorables au ressort de l’ activité, comme certains climats ou certains pays se prêtent mieux au
3156 mais ce ne sont jamais que des résistances. Entre les deux pôles de la tension, il n’y a ni identité, ni égalité, justement
3157 mais que des résistances. Entre les deux pôles de la tension, il n’y a ni identité, ni égalité, justement parce que l’un d
3158 ité, justement parce que l’un d’entre eux attache l’ homme aux autres formes de la vie, tandis que le second affirme la tra
3159 d’entre eux attache l’homme aux autres formes de la vie, tandis que le second affirme la transcendance de l’acte. Étant o
3160 es formes de la vie, tandis que le second affirme la transcendance de l’acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humai
3161 tandis que le second affirme la transcendance de l’ acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humaine ne saurait donc c
3162 e la transcendance de l’acte. Étant orientée vers l’ acte, la tension humaine ne saurait donc considérer toute médiation qu
3163 nscendance de l’acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humaine ne saurait donc considérer toute médiation que comme
3164 istance à son effort immédiat, ou, pour reprendre l’ expression vigoureuse de Kierkegaard, comme « un attentat métaphysique
3165 rkegaard, comme « un attentat métaphysique contre l’ éthique ». Il faut, certes, que l’homme trouve des points d’appui et g
3166 physique contre l’éthique ». Il faut, certes, que l’ homme trouve des points d’appui et garde une participation avec ce qui
3167 uve des points d’appui et garde une participation avec ce qui n’est pas personnel. Mais cette nécessité ne reprend sa valeur
3168 ais cette nécessité ne reprend sa valeur que dans la tension active dirigée tout entière vers l’affirmation du personnalis
3169 dans la tension active dirigée tout entière vers l’ affirmation du personnalisme. Dans les divers ordres de l’activité hum
3170 entière vers l’affirmation du personnalisme. Dans les divers ordres de l’activité humaine, l’acte instantané ne fera brille
3171 ation du personnalisme. Dans les divers ordres de l’ activité humaine, l’acte instantané ne fera briller son éclair que bie
3172 me. Dans les divers ordres de l’activité humaine, l’ acte instantané ne fera briller son éclair que bien rarement. Les conf
3173 ané ne fera briller son éclair que bien rarement. Les conflits contre le temps, contre l’espace, contre la matière, qui rep
3174 son éclair que bien rarement. Les conflits contre le temps, contre l’espace, contre la matière, qui reprennent ici en tant
3175 en rarement. Les conflits contre le temps, contre l’ espace, contre la matière, qui reprennent ici en tant que résistance à
3176 conflits contre le temps, contre l’espace, contre la matière, qui reprennent ici en tant que résistance à l’effort une sor
3177 ière, qui reprennent ici en tant que résistance à l’ effort une sorte de réalité indépendante, ne donnent que rarement l’oc
3178 de réalité indépendante, ne donnent que rarement l’ occasion d’une victoire évidente ; mais dans tous les domaines de l’ac
3179 occasion d’une victoire évidente ; mais dans tous les domaines de l’activité humaine la pensée dichotomique maintiendra cet
3180 ictoire évidente ; mais dans tous les domaines de l’ activité humaine la pensée dichotomique maintiendra cette volonté : li
3181 mais dans tous les domaines de l’activité humaine la pensée dichotomique maintiendra cette volonté : libérer la personnali
3182 dichotomique maintiendra cette volonté : libérer la personnalité, dégager l’instantanéité de l’acte. 1. Ce qui ne signi
3183 cette volonté : libérer la personnalité, dégager l’ instantanéité de l’acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que la pe
3184 bérer la personnalité, dégager l’instantanéité de l’ acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que la pensée doive être sou
3185 e l’acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que la pensée doive être soumise à l’action — bien au contraire ! — mais que
3186 ie pas du tout que la pensée doive être soumise à l’ action — bien au contraire ! — mais que le risque de penser est actuel
3187 umise à l’action — bien au contraire ! — mais que le risque de penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les papier
3188 ion — bien au contraire ! — mais que le risque de penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les papiers posthumes d’Arn
3189 penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les papiers posthumes d’Arnaud Dandieu quelques lignes qui me paraissent
3190 opres à éclairer ce dernier paragraphe (D. R.). «  Le seuil qui sépare le prélogique du logique, où est-il donc ? Le point
3191 dernier paragraphe (D. R.). « Le seuil qui sépare le prélogique du logique, où est-il donc ? Le point est d’importance car
3192 sépare le prélogique du logique, où est-il donc ? Le point est d’importance car il nous éclairera un peu sur la nature int
3193 est d’importance car il nous éclairera un peu sur la nature intime de l’acte créateur, dans la mesure où elle est saisissa
3194 il nous éclairera un peu sur la nature intime de l’ acte créateur, dans la mesure où elle est saisissable. En effet, de to
3195 peu sur la nature intime de l’acte créateur, dans la mesure où elle est saisissable. En effet, de tous les seuils irration
3196 mesure où elle est saisissable. En effet, de tous les seuils irrationnels que l’homme puisse passer, c’est sans doute le se
3197 le. En effet, de tous les seuils irrationnels que l’ homme puisse passer, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas la
3198 nnels que l’homme puisse passer, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas la vie. Or, ce seuil, comme le montre clair
3199 er, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas la vie. Or, ce seuil, comme le montre clairement M. Lévy-Bruhl, notammen
3200 qui ne lui coûte pas la vie. Or, ce seuil, comme le montre clairement M. Lévy-Bruhl, notamment dans la conférence qu’il a
3201 e montre clairement M. Lévy-Bruhl, notamment dans la conférence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il le passe chaque
3202 amment dans la conférence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il pense, encore que peut-êtr
3203 érence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il pense, encore que peut-être l’acte de penser,
3204 rd, le 19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il pense , encore que peut-être l’acte de penser, au sens plein et cartésien du
3205 sse chaque fois qu’il pense, encore que peut-être l’ acte de penser, au sens plein et cartésien du mot, soit infiniment plu
3206 fois qu’il pense, encore que peut-être l’acte de penser , au sens plein et cartésien du mot, soit infiniment plus difficile et
3207 n, il est indispensable de marquer très fortement l’ influence qu’exerce ce seuil sur toute la vie humaine et, probablement
3208 ortement l’influence qu’exerce ce seuil sur toute la vie humaine et, probablement, sur la vie en général. Cela est d’autan
3209 il sur toute la vie humaine et, probablement, sur la vie en général. Cela est d’autant plus nécessaire que de même que la
3210 Cela est d’autant plus nécessaire que de même que la science a longtemps refusé de faire entrer dans ses constructions le
3211 mps refusé de faire entrer dans ses constructions le principe de Carnot, et qu’elle n’a accepté l’irréversibilité qu’il re
3212 ons le principe de Carnot, et qu’elle n’a accepté l’ irréversibilité qu’il recèle, que pour en tourner l’irrationalité fonc
3213 irréversibilité qu’il recèle, que pour en tourner l’ irrationalité foncière à l’aide d’une loi statistique, de même la méth
3214 e, que pour en tourner l’irrationalité foncière à l’ aide d’une loi statistique, de même la méthode sociologique qui a cond
3215 foncière à l’aide d’une loi statistique, de même la méthode sociologique qui a conduit à la découverte de la véritable na
3216 , de même la méthode sociologique qui a conduit à la découverte de la véritable nature de la mentalité prélogique, hésite
3217 ode sociologique qui a conduit à la découverte de la véritable nature de la mentalité prélogique, hésite à faire la part d
3218 conduit à la découverte de la véritable nature de la mentalité prélogique, hésite à faire la part de l’orientation humaine
3219 nature de la mentalité prélogique, hésite à faire la part de l’orientation humaine qui s’exprime par une affirmation crois
3220 a mentalité prélogique, hésite à faire la part de l’ orientation humaine qui s’exprime par une affirmation croissante de la
3221 e qui s’exprime par une affirmation croissante de la discontinuité explosive sous forme d’individualisation ou de création
3222 de création intellectuelle. Notre science n’est à l’ aise que dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle mul
3223 llectuelle. Notre science n’est à l’aise que dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle multiplie par son p
3224 à l’aise que dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle multiplie par son progrès même. Elle ne connaît qu
3225 aît que du probable et, en tant qu’acte, elle est l’ improbabilité essentielle. Paradoxe que M. Meyerson a décrit sous le n
3226 sentielle. Paradoxe que M. Meyerson a décrit sous le nom de paradoxe épistémologique. » (Arnaud Dandieu). a. Rougemont
3227 . » (Arnaud Dandieu). a. Rougemont Denis de, «  L’ Acte comme point de départ », Recherches philosophiques, Paris, 1936–1
3228 73, p. 55-64. b. Texte daté de 1933 et co-rédigé avec Arnaud Dandieu.
8 1937, Articles divers (1936-1938). Formons des Clubs de presse (30 janvier 1937)
3229 ons des Clubs de presse (30 janvier 1937)f g Les raisons Chacun sait et éprouve chaque jour, que l’état des dépenda
3230 aisons Chacun sait et éprouve chaque jour, que l’ état des dépendances financières ou des partisanneries politiques qui
3231 ou des partisanneries politiques qui est celui de la presse française, rend à peu près impossibles une documentation objec
3232 cumentation objective et une information sincère. Le procès de la presse n’est plus à faire. Sa réforme pose tant de probl
3233 bjective et une information sincère. Le procès de la presse n’est plus à faire. Sa réforme pose tant de problèmes et entra
3234 nt de problèmes et entraîne de telles incidences ( les dangers d’une information d’État : Tass ou DNB sont aussi graves que
3235 dre qu’elle ne puisse s’accomplir isolément. Seul le redressement radical et général d’un régime économique où règne aujou
3236 néral d’un régime économique où règne aujourd’hui l’ argent, libérera l’information. Ce n’est qu’en attaquant l’ensemble de
3237 conomique où règne aujourd’hui l’argent, libérera l’ information. Ce n’est qu’en attaquant l’ensemble des trusts qu’on atte
3238 libérera l’information. Ce n’est qu’en attaquant l’ ensemble des trusts qu’on atteindra celui des journaux. Le but L
3239 des trusts qu’on atteindra celui des journaux. Le but L’objet des « Clubs de presse », en même temps que de préparer
3240 qu’on atteindra celui des journaux. Le but L’ objet des « Clubs de presse », en même temps que de préparer et d’accé
3241 ournir dès à présent à tous ceux qui en éprouvent le pressant besoin, les premiers éléments d’une information honnête, et
3242 onditions et aux méthodes aujourd’hui faussées de la grande presse imprimée. Le principe Ce sont les mêmes procédés
3243 urd’hui faussées de la grande presse imprimée. Le principe Ce sont les mêmes procédés techniques (imprimerie, grand
3244 grande presse imprimée. Le principe Ce sont les mêmes procédés techniques (imprimerie, grand tirage, publicité, centr
3245 ge, publicité, centralisation, etc.) qui ont fait le succès de la presse moderne, qui font aujourd’hui son servage. « L’im
3246 , centralisation, etc.) qui ont fait le succès de la presse moderne, qui font aujourd’hui son servage. « L’imprimé » qui é
3247 esse moderne, qui font aujourd’hui son servage. «  L’ imprimé » qui était, il y a trente ans, synonyme dans l’opinion popula
3248 imé » qui était, il y a trente ans, synonyme dans l’ opinion populaire, de vérité, est devenu pour le public, synonyme de m
3249 s l’opinion populaire, de vérité, est devenu pour le public, synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant que la question
3250 synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant que la question puisse être attaquée et résolue de front — de tourner la dif
3251 se être attaquée et résolue de front — de tourner la difficulté en remontant à la source, en renouvelant le mode primitif
3252 e front — de tourner la difficulté en remontant à la source, en renouvelant le mode primitif de l’information, l’informati
3253 fficulté en remontant à la source, en renouvelant le mode primitif de l’information, l’information directe, personnelle et
3254 t à la source, en renouvelant le mode primitif de l’ information, l’information directe, personnelle et orale. Déjà aujourd
3255 en renouvelant le mode primitif de l’information, l’ information directe, personnelle et orale. Déjà aujourd’hui, devant la
3256 e, personnelle et orale. Déjà aujourd’hui, devant la carence ou la subversion de l’information officielle, chercher à obte
3257 et orale. Déjà aujourd’hui, devant la carence ou la subversion de l’information officielle, chercher à obtenir, par des c
3258 ujourd’hui, devant la carence ou la subversion de l’ information officielle, chercher à obtenir, par des contacts personnel
3259 ée qui se crée spontanément, d’établir dans toute la France, un vaste réseau entre les hommes de bonne volonté. Les org
3260 ablir dans toute la France, un vaste réseau entre les hommes de bonne volonté. Les organismes On constitue, dans le p
3261 aste réseau entre les hommes de bonne volonté. Les organismes On constitue, dans le plus grand nombre possible de loc
3262 volonté. Les organismes On constitue, dans le plus grand nombre possible de localités un « Club de presse ». Les ad
3263 mbre possible de localités un « Club de presse ». Les adhérents se réunissent une fois par semaine, pour recevoir et apport
3264 t une fois par semaine, pour recevoir et apporter les éléments de cette nouvelle forme d’informations. Le travail est centr
3265 éléments de cette nouvelle forme d’informations. Le travail est centralisé par un « Comité central des informations », si
3266 que semaine un bulletin dactylographié condensant les résultats acquis. Il s’établit ainsi, en quelque sorte, un double cou
3267 ainsi, en quelque sorte, un double courant entre la base et le sommet, qui, après recoupements et vérifications, permet d
3268 quelque sorte, un double courant entre la base et le sommet, qui, après recoupements et vérifications, permet d’élaborer u
3269 e matière définitive. Il convient de préciser que le bulletin n’est pas distribué. Il est adressé personnellement et confi
3270 ement au président responsable de chaque club qui le communique à ses adhérents. Ceux-ci ne sont pas de simples lecteurs p
3271 actifs, qui participent à une œuvre commune, dans le cadre du Club privé dont ils acceptent les statuts. Il faut encore aj
3272 e, dans le cadre du Club privé dont ils acceptent les statuts. Il faut encore ajouter que le « Comité central d’information
3273 acceptent les statuts. Il faut encore ajouter que le « Comité central d’informations » qui rédige le bulletin, n’a pas seu
3274 e le « Comité central d’informations » qui rédige le bulletin, n’a pas seulement à sa disposition les renseignements que l
3275 e le bulletin, n’a pas seulement à sa disposition les renseignements que lui fournissent les clubs de base. Composé lui-mêm
3276 isposition les renseignements que lui fournissent les clubs de base. Composé lui-même de journalistes, d’économistes, de fi
3277 s, de financiers, de militants, il utilise toutes les Informations directes dans les agences, les rédactions, le parlement,
3278 il utilise toutes les Informations directes dans les agences, les rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux fin
3279 outes les Informations directes dans les agences, les rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par
3280 ations directes dans les agences, les rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de
3281 s dans les agences, les rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de sa composition
3282 ces, les rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de sa composition professionnell
3283 ement, les syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de sa composition professionnelle, par l’étendue de ses ram
3284 diversité de sa composition professionnelle, par l’ étendue de ses ramifications, il vise à ne délaisser aucune source, à
3285 e délaisser aucune source, à tenir compte de tous les points de vue. Le programme Le bulletin se divise en trois part
3286 rce, à tenir compte de tous les points de vue. Le programme Le bulletin se divise en trois parties 1° une partie pol
3287 pte de tous les points de vue. Le programme Le bulletin se divise en trois parties 1° une partie politique positive 
3288 appréciations, sur chacun des faits importants de la semaine. Cette première partie doit donner aux membres des clubs, une
3289 sorte de revue de presse commentée. On y relèvera les contradictions et les déformations de la grande presse ou de la press
3290 se commentée. On y relèvera les contradictions et les déformations de la grande presse ou de la presse d’opinion, en donnan
3291 elèvera les contradictions et les déformations de la grande presse ou de la presse d’opinion, en donnant chaque fois les r
3292 ons et les déformations de la grande presse ou de la presse d’opinion, en donnant chaque fois les raisons politiques ou fi
3293 ou de la presse d’opinion, en donnant chaque fois les raisons politiques ou financières de telle campagne et aussi de tel s
3294 hérents, des moyens de comprendre et de redresser la documentation que continuera à leur fournir la presse. Elle pourrait
3295 er la documentation que continuera à leur fournir la presse. Elle pourrait être une sorte d’école permanente des lecteurs
3296 eurs de journaux ; 3° une partie documentaire sur la presse. Tout en cherchant à remédier à l’action néfaste de la presse
3297 ire sur la presse. Tout en cherchant à remédier à l’ action néfaste de la presse imprimée en se plaçant hors de son domaine
3298 out en cherchant à remédier à l’action néfaste de la presse imprimée en se plaçant hors de son domaine, les « Clubs » n’ou
3299 resse imprimée en se plaçant hors de son domaine, les « Clubs » n’oublient pas que la réforme organique de la presse est le
3300 de son domaine, les « Clubs » n’oublient pas que la réforme organique de la presse est le but final. Dans cette partie, o
3301 lubs » n’oublient pas que la réforme organique de la presse est le but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit,
3302 ent pas que la réforme organique de la presse est le but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit, une documenta
3303 nira petit à petit, une documentation précise sur la structure et le mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les
3304 it, une documentation précise sur la structure et le mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les modifications da
3305 ation précise sur la structure et le mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les modifications dans la commandite
3306 mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les modifications dans la commandite, la direction, la tendance, etc. des
3307 . Soit en signalant toutes les modifications dans la commandite, la direction, la tendance, etc. des journaux existants ;
3308 lant toutes les modifications dans la commandite, la direction, la tendance, etc. des journaux existants ; soit par des ét
3309 s modifications dans la commandite, la direction, la tendance, etc. des journaux existants ; soit par des études plus géné
3310 xistants ; soit par des études plus générales sur les problèmes financiers, professionnels, législatifs, que pose la réform
3311 financiers, professionnels, législatifs, que pose la réforme de la presse. Dès à présent, de tels documents facilitent aux
3312 ofessionnels, législatifs, que pose la réforme de la presse. Dès à présent, de tels documents facilitent aux adhérents l’o
3313 ésent, de tels documents facilitent aux adhérents l’ objet de la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum
3314 els documents facilitent aux adhérents l’objet de la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum de duperie,
3315 t de la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum de duperie, une presse truquée. L’esprit Il est évid
3316 la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum de duperie, une presse truquée. L’esprit Il est évident
3317 vec le minimum de duperie, une presse truquée. L’ esprit Il est évident que la portée d’une telle entreprise dépend d
3318 presse truquée. L’esprit Il est évident que la portée d’une telle entreprise dépend de la valeur professionnelle et
3319 nt que la portée d’une telle entreprise dépend de la valeur professionnelle et morale et de l’honnêteté intellectuelle de
3320 pend de la valeur professionnelle et morale et de l’ honnêteté intellectuelle de ses réalisateurs. Le côté confidentiel et
3321 e l’honnêteté intellectuelle de ses réalisateurs. Le côté confidentiel et privé de la méthode rend la question particulièr
3322 es réalisateurs. Le côté confidentiel et privé de la méthode rend la question particulièrement importante. L’expérience se
3323 Le côté confidentiel et privé de la méthode rend la question particulièrement importante. L’expérience seule permettra au
3324 ode rend la question particulièrement importante. L’ expérience seule permettra aux adhérents des clubs de vérifier le séri
3325 ule permettra aux adhérents des clubs de vérifier le sérieux et l’indépendance du bulletin. Toutefois les adhérents trouve
3326 aux adhérents des clubs de vérifier le sérieux et l’ indépendance du bulletin. Toutefois les adhérents trouveront au départ
3327 sérieux et l’indépendance du bulletin. Toutefois les adhérents trouveront au départ une première garantie dans les groupem
3328 s trouveront au départ une première garantie dans les groupements qui ont pris l’initiative de la création et du fonctionne
3329 emière garantie dans les groupements qui ont pris l’ initiative de la création et du fonctionnement des clubs de presse. Le
3330 dans les groupements qui ont pris l’initiative de la création et du fonctionnement des clubs de presse. Les « Clubs de pre
3331 réation et du fonctionnement des clubs de presse. Les « Clubs de presse » sont fondés et dirigés par Denis de Rougemont et
3332 Esprit . Ceux-ci n’entendent nullement impliquer la ligne politique propre des mouvements auxquels ils appartiennent, dan
3333 e veut être qu’une œuvre stricte d’information, à l’ exclusivité de tout commentaire et de tout jugement. Mais ils s’engage
3334 re et de tout jugement. Mais ils s’engagent, dans les « clubs de presse », à défendre les principes qui leur sont communs :
3335 ngagent, dans les « clubs de presse », à défendre les principes qui leur sont communs : primauté de la personne humaine, re
3336 les principes qui leur sont communs : primauté de la personne humaine, respect de la vérité et lutte contre la tyrannie de
3337 uns : primauté de la personne humaine, respect de la vérité et lutte contre la tyrannie de l’argent. Louis E. Galey, Jacqu
3338 nne humaine, respect de la vérité et lutte contre la tyrannie de l’argent. Louis E. Galey, Jacques Madaule, Jean Maze, R.-
3339 spect de la vérité et lutte contre la tyrannie de l’ argent. Louis E. Galey, Jacques Madaule, Jean Maze, R.-Philippe Millet
3340 gemont Denis de, « Formons des clubs de presse », La Flèche, Paris, 30 janvier 1937, p. 2. g. Précédé de la notice suivan
3341 che, Paris, 30 janvier 1937, p. 2. g. Précédé de la notice suivante : « Nous présentons ci-dessous à tous nos camarades e
3342 ns ci-dessous à tous nos camarades et lecteurs de La Flèche le manifeste des clubs de presse en formation. À l’heure où la
3343 ous à tous nos camarades et lecteurs de La Flèche le manifeste des clubs de presse en formation. À l’heure où la grande pr
3344 le manifeste des clubs de presse en formation. À l’ heure où la grande presse française se constitue chaque jour davantage
3345 te des clubs de presse en formation. À l’heure où la grande presse française se constitue chaque jour davantage en trusts,
3346 ses mensonges et ses trahisons. Il faut passer à l’ action. Sur un terrain parfaitement précis et limité, celui de l’infor
3347 n terrain parfaitement précis et limité, celui de l’ information, nous avons pensé que nous devions collaborer avec des cam
3348 cis et limité, celui de l’information, nous avons pensé que nous devions collaborer avec des camarades venant d’autres organi
3349 ion, nous avons pensé que nous devions collaborer avec des camarades venant d’autres organisations. Ce sera certainement par
3350 organisations. Ce sera certainement par ailleurs l’ occasion d’un échange de vues qui ne peut être que fructueux pour tous
3351 tistes ou non frontistes, pour qu’ils comprennent l’ intérêt exceptionnel que présente la formation des clubs, pour qu’ils
3352 s comprennent l’intérêt exceptionnel que présente la formation des clubs, pour qu’ils y collaborent activement, pour que d
3353 calité, si éloignée, si peu importante soit-elle, le club de presse dont ils seront les instigateurs devienne rapidement u
3354 ante soit-elle, le club de presse dont ils seront les instigateurs devienne rapidement un organisme craint et respecté. À l
3355 nne rapidement un organisme craint et respecté. À l’ heure où l’Argent-roi investit complètement la presse française, à l’h
3356 ent un organisme craint et respecté. À l’heure où l’ Argent-roi investit complètement la presse française, à l’heure où Hav
3357 . À l’heure où l’Argent-roi investit complètement la presse française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion
3358 -roi investit complètement la presse française, à l’ heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le pa
3359 la presse française, à l’heure où Havas règne, à l’ heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio
3360 française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais
3361 eure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, n
3362 règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obl
3363 heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de rev
3364 diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de revenir à une
3365 de revenir à une forme antique de transmission : l’ information orale. C’est la seule possible aujourd’hui. Camarades, si
3366 ique de transmission : l’information orale. C’est la seule possible aujourd’hui. Camarades, si vous voulez savoir, aidez-n
3367 Pour tous renseignements, adressez provisoirement les lettres à La Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin
3368 eignements, adressez provisoirement les lettres à La Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin la mention :
3369 Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin la mention : clubs de presse.) »
3370 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin la mention : clubs de presse.) »
9 1937, Articles divers (1936-1938). À qui la liberté ? (5 mars 1937)
3371 À qui la liberté ? (5 mars 1937)h Tout le monde parle de la culture et de l
3372 iberté ? (5 mars 1937)h Tout le monde parle de la culture et de la défense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce q
3373 1937)h Tout le monde parle de la culture et de la défense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce que signifie cultu
3374 le monde parle de la culture et de la défense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce que signifie culture. C’est que
3375 n ne sait plus ce que signifie culture. C’est que la culture est en pleine crise, et que cette crise ne sévit plus seuleme
3376 , et que cette crise ne sévit plus seulement dans les élites, mais se manifeste dans la vie publique, et dans les couches p
3377 seulement dans les élites, mais se manifeste dans la vie publique, et dans les couches profondes de la nation. Je dis que
3378 , mais se manifeste dans la vie publique, et dans les couches profondes de la nation. Je dis que la crise de la culture est
3379 la vie publique, et dans les couches profondes de la nation. Je dis que la crise de la culture est dans la rue. Je dis que
3380 ns les couches profondes de la nation. Je dis que la crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le tr
3381 es profondes de la nation. Je dis que la crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et q
3382 ation. Je dis que la crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est la politiqu
3383 a crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est la politique qui s’est chargée
3384 lture est dans la rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est la politique qui s’est chargée de réglementer
3385 dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est la politique qui s’est chargée de réglementer à sa manière la prostituti
3386 que qui s’est chargée de réglementer à sa manière la prostitution des mots-clés, des lieux communs fondamentaux sur lesque
3387 ux communs fondamentaux sur lesquelles s’édifiait la culture. M. de la Rocque défend ce qu’il appelle « la primauté de l’e
3388 ulture. M. de la Rocque défend ce qu’il appelle «  la primauté de l’esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour la défe
3389 a Rocque défend ce qu’il appelle « la primauté de l’ esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour la défense de la liber
3390 l’esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour la défense de la liberté ». M. Vaillant-Couturier publie un manifeste in
3391 fait placarder des affiches « Pour la défense de la liberté ». M. Vaillant-Couturier publie un manifeste intitulé Au serv
3392 turier publie un manifeste intitulé Au service de l’ esprit, où il est question à chaque page de défendre la liberté. Dans
3393 rit, où il est question à chaque page de défendre la liberté. Dans l’état présent du langage, de la culture, et de la poli
3394 estion à chaque page de défendre la liberté. Dans l’ état présent du langage, de la culture, et de la politique, on peut êt
3395 re la liberté. Dans l’état présent du langage, de la culture, et de la politique, on peut être à peu près certain que ces
3396 s l’état présent du langage, de la culture, et de la politique, on peut être à peu près certain que ces deux messieurs déf
3397 rtain que ces deux messieurs défendent en réalité le contraire de l’esprit et de la liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent
3398 ux messieurs défendent en réalité le contraire de l’ esprit et de la liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent l’un et l’autre
3399 fendent en réalité le contraire de l’esprit et de la liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent l’un et l’autre un régime d’ét
3400 un régime d’étatisme oppressif et de dictature de l’ économique. Le résultat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et l
3401 atisme oppressif et de dictature de l’économique. Le résultat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et l’on en voit dé
3402 ltat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et l’ on en voit déjà les premiers signes : parlez de la liberté, posez-vous
3403 l’on en voit déjà les premiers signes : parlez de la liberté, posez-vous en défenseur de cet idéal permanent de la Révolut
3404 posez-vous en défenseur de cet idéal permanent de la Révolution humaine, vous passerez bientôt pour fasciste. On dit que l
3405 , vous passerez bientôt pour fasciste. On dit que les mots n’ont plus de sens. Ce serait trop beau, ce serait trop facile,
3406 trop beau, ce serait trop facile, ce serait enfin la trêve des démagogues. En réalité, les mots prennent tous les sens qu’
3407 serait enfin la trêve des démagogues. En réalité, les mots prennent tous les sens qu’on veut dans la bouche des politiciens
3408 es démagogues. En réalité, les mots prennent tous les sens qu’on veut dans la bouche des politiciens. Ils prennent de préfé
3409 , les mots prennent tous les sens qu’on veut dans la bouche des politiciens. Ils prennent de préférence un sens contraire
3410 ennent de préférence un sens contraire à celui de l’ usage courant. (Staline dit : « Je ne suis pas un dictateur » ; Mussol
3411 « Je ne suis pas un dictateur » ; Mussolini fait la conquête de l’Éthiopie au nom de ce qu’il appelle sa liberté, etc.) M
3412 as un dictateur » ; Mussolini fait la conquête de l’ Éthiopie au nom de ce qu’il appelle sa liberté, etc.) Mais ils prennen
3413 t aussi toutes sortes de sens intermédiaires dans la bouche de nos députés et journalistes, qui flétrissent (à droite) ou
3414 i flétrissent (à droite) ou approuvent (à gauche) les lois sociales parce qu’ils les qualifient de socialistes, et qui appr
3415 rouvent (à gauche) les lois sociales parce qu’ils les qualifient de socialistes, et qui approuveraient (à droite), ou flétr
3416 ouveraient (à droite), ou flétriraient (à gauche) les mêmes lois si on les qualifiait de fascistes. Alors qu’elles sont, en
3417 , ou flétriraient (à gauche) les mêmes lois si on les qualifiait de fascistes. Alors qu’elles sont, en fait, l’un et l’autr
3418 s. Alors qu’elles sont, en fait, l’un et l’autre. La politique actuelle s’occupe bien moins des faits que des mystiques do
3419 s mots. Ces mots suffirent longtemps à départager les opinions réelles : on disait liberté à gauche, patrie et autorité à d
3420 berté à gauche, patrie et autorité à droite. Mais la surenchère politicienne en est venue à ce point que, par une double d
3421 à droite ; patrie, autorité et liberté à gauche. La politique a prostitué le langage. La culture n’a pas été assez forte
3422 ité et liberté à gauche. La politique a prostitué le langage. La culture n’a pas été assez forte pour interdire cette pros
3423 té à gauche. La politique a prostitué le langage. La culture n’a pas été assez forte pour interdire cette prostitution. Il
3424 r interdire cette prostitution. Il en résulte que la culture qui joue tant sur le sens des mots et sur leur acception comm
3425 n. Il en résulte que la culture qui joue tant sur le sens des mots et sur leur acception commune, se trouve ruinée par la
3426 sur leur acception commune, se trouve ruinée par la politique. Et que la politique, qui a tourné en mystique, parle pour
3427 ommune, se trouve ruinée par la politique. Et que la politique, qui a tourné en mystique, parle pour ne rien dire ou pour
3428 n se demande pourquoi, dans de telles conditions, l’ on s’obstinerait encore à écrire, à parler, si par hasard on est de bo
3429 n’est pas de problème culturel qui ne dépende de la politique. Cela revient à écrire, si l’on me comprend, pour éduquer l
3430 épende de la politique. Cela revient à écrire, si l’ on me comprend, pour éduquer la méfiance du lecteur. h. Rougemont D
3431 vient à écrire, si l’on me comprend, pour éduquer la méfiance du lecteur. h. Rougemont Denis de, « À qui la liberté ? »
3432 nce du lecteur. h. Rougemont Denis de, « À qui la liberté ? », À nous la liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
3433 ougemont Denis de, « À qui la liberté ? », À nous la liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
10 1937, Articles divers (1936-1938). Romanciers publicitaires ou la contagion romanesque (13 mars 1937)
3434 Romanciers publicitaires ou la contagion romanesque (13 mars 1937)i Je n’apprendrai rien à person
3435 Je n’apprendrai rien à personne en affirmant que le roman est le plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’entends
3436 rai rien à personne en affirmant que le roman est le plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’entends celui qui ex
3437 os genres littéraires, j’entends celui qui exerce l’ influence la plus directe et la plus intime sur nos mœurs, sur notre v
3438 ttéraires, j’entends celui qui exerce l’influence la plus directe et la plus intime sur nos mœurs, sur notre vie privée. S
3439 s celui qui exerce l’influence la plus directe et la plus intime sur nos mœurs, sur notre vie privée. Songez aux plus gran
3440 x plus avilies, à ces jeunes gens qui choisissent le néant et la folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suici
3441 es, à ces jeunes gens qui choisissent le néant et la folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suicidés après We
3442 jeunes gens qui choisissent le néant et la folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suicidés après Werther ; ou
3443 de Balzac ; aux boursiers dont Stendhal enfièvre l’ ambition ; aux jeunes bourgeois qui se défont à rechercher leur « Temp
3444 à rechercher leur « Temps perdu » ; enfin, à tous les adultères que le roman à trois personnages, genre français par excell
3445 « Temps perdu » ; enfin, à tous les adultères que le roman à trois personnages, genre français par excellence, a provoqués
3446 excellence, a provoqués et justifiés dans toutes les sous-préfectures. Ce pouvoir contagieux est, bien sûr, tout à l’honne
3447 ures. Ce pouvoir contagieux est, bien sûr, tout à l’ honneur des écrivains qui savent le communiquer à leur œuvre, et des l
3448 en sûr, tout à l’honneur des écrivains qui savent le communiquer à leur œuvre, et des lecteurs assez ardents pour le subir
3449 à leur œuvre, et des lecteurs assez ardents pour le subir autrement qu’en imagination. Et rien n’est plus légitime, voire
3450 voire désirable, que cette contagion pratique de l’ art, tant qu’il s’agit véritablement d’art, tant qu’il s’agit, pour un
3451 , tant qu’il s’agit, pour un auteur, d’influencer le public par des moyens choisis, et de lui transmettre une certaine vis
3452 onde plus profonde, plus riche et plus vraie, que la vision banale de la vie quotidienne. Il est très bon que le romancier
3453 plus riche et plus vraie, que la vision banale de la vie quotidienne. Il est très bon que le romancier et ses romans agiss
3454 banale de la vie quotidienne. Il est très bon que le romancier et ses romans agissent, de cette manière intime et souterra
3455 ls à dire ? Dans quel sens entendent-ils agir sur les mœurs de leurs contemporains ? Ils prétendent faire de pures et simpl
3456 tendent faire de pures et simples descriptions de la Vie (avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant que l’œuvre à thèse.
3457 faire de pures et simples descriptions de la Vie ( avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant que l’œuvre à thèse. Ils se dé
3458 (avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant que l’ œuvre à thèse. Ils se défendent de toutes leurs forces d’avoir une mét
3459 ndant, leur influence n’est pas moins grande, sur la vie privée du lecteur. Ils ne veulent rien dire, mais, pourtant, ils
3460 udrait imposer, se contentent d’un opportunisme à la petite semaine, et ménagent les opinions plutôt que les intérêts de l
3461 ’un opportunisme à la petite semaine, et ménagent les opinions plutôt que les intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme
3462 tite semaine, et ménagent les opinions plutôt que les intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme à courte vue caractéris
3463 t opportunisme à courte vue caractérise très bien le romancier bourgeois. Refuser toute espèce de thèse, cela signifie sim
3464 hèse, cela signifie simplement ménager et flatter le lecteur, la conscience bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de
3465 ignifie simplement ménager et flatter le lecteur, la conscience bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de la lectrice,
3466 nce bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de la lectrice, car en France, paraît-il, ce sont les femmes qui lisent et
3467 de la lectrice, car en France, paraît-il, ce sont les femmes qui lisent et qui se passionnent pour les romans. Ainsi, à for
3468 les femmes qui lisent et qui se passionnent pour les romans. Ainsi, à force de ménager les préjugés moraux et immoraux, à
3469 onnent pour les romans. Ainsi, à force de ménager les préjugés moraux et immoraux, à force de flatter les instincts les plu
3470 s préjugés moraux et immoraux, à force de flatter les instincts les plus faciles à flatter, à force de ne vouloir rien affi
3471 aux et immoraux, à force de flatter les instincts les plus faciles à flatter, à force de ne vouloir rien affirmer de trop v
3472 e trop réellement révolutionnaire et constructif, le « romancier à succès », de nos jours, est devenu un simple reflet de
3473 s », de nos jours, est devenu un simple reflet de la conscience bourgeoise moyenne. Il ne fait que traduire les humeurs, l
3474 ience bourgeoise moyenne. Il ne fait que traduire les humeurs, les goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible
3475 ise moyenne. Il ne fait que traduire les humeurs, les goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherc
3476 . Il ne fait que traduire les humeurs, les goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à le
3477 traduire les humeurs, les goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à les combattre, à l
3478 apeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à les combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal person
3479 is sensible, il ne cherche pas à les combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins enc
3480 cherche pas à les combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins encore au nom d’un idé
3481 istes — fait de notre romancier, tout simplement, le propagandiste des goûts de sa classe. Rien n’est plus dangereusement
3482 u’un écrivain qui n’ose pas affirmer sa tendance. La contagion du roman réaliste ou psychologique actuel s’exerce uniqueme
3483 dantes et de leurs coutumes. Il n’est que de voir l’ importance démesurée que nos romanciers attachent à la description des
3484 portance démesurée que nos romanciers attachent à la description des vêtements, des ameublements, des marques d’autos, et
3485 e cigarettes (Paul Reboux) de leurs personnages ! Le romancier bourgeois qui s’imaginait, naïvement et confortablement, qu
3486 st condamné lui-même, en fait, à ne plus être que l’ agent de publicité — plus ou moins bénévole — des fournisseurs d’une c
3487 rnisseurs d’une certaine classe. Ce romancier, et la culture qu’il représente, on comprend que la jeunesse actuelle ne mar
3488 , et la culture qu’il représente, on comprend que la jeunesse actuelle ne marche plus pour les défendre. La crise du livre
3489 rend que la jeunesse actuelle ne marche plus pour les défendre. La crise du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord
3490 unesse actuelle ne marche plus pour les défendre. La crise du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord la crise du r
3491 du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord la crise du roman, et du roman fait à l’usage des bourgeois, de leurs lo
3492 est d’abord la crise du roman, et du roman fait à l’ usage des bourgeois, de leurs loisirs improductifs. Une telle crise ne
3493 des lois plus ou moins astucieuses. C’est toutes les bases de la culture actuelle qui sont en crise. Faites-nous des œuvre
3494 s ou moins astucieuses. C’est toutes les bases de la culture actuelle qui sont en crise. Faites-nous des œuvres qui affirm
3495 Rougemont Denis de, « Romanciers publicitaires ou la contagion romanesque », À nous la liberté, Paris, 13 mars 1937, p. 10
3496 ublicitaires ou la contagion romanesque », À nous la liberté, Paris, 13 mars 1937, p. 10.
11 1937, Articles divers (1936-1938). Vers une littérature personnaliste (20 mars 1937)
3497 n a très vivement critiqué le dernier chapitre de l’ Histoire de la littérature française de Thibaudetk : celui qui est con
3498 ent critiqué le dernier chapitre de l’Histoire de la littérature française de Thibaudetk : celui qui est consacré à l’aprè
3499 rançaise de Thibaudetk : celui qui est consacré à l’ après-guerre. II est vrai que beaucoup de noms y sont omis, que beauco
3500 petites histoires de leur milieu… »). On a dit : le chapitre est bâclé. Je me demande si l’époque méritait mieux. Époque
3501 n a dit : le chapitre est bâclé. Je me demande si l’ époque méritait mieux. Époque bâclée, elle aussi, littérature bâclée,
3502 e bâclée, elle aussi, littérature bâclée, surtout la romanesque. Jamais on ne l’avait vu et constaté aussi nettement qu’à
3503 ature bâclée, surtout la romanesque. Jamais on ne l’ avait vu et constaté aussi nettement qu’à la lecture de ce bilan désin
3504 on ne l’avait vu et constaté aussi nettement qu’à la lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre, la product
3505 a lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre, la production écrite des hommes qui revenaient du front — 20
3506 e ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre, la production écrite des hommes qui revenaient du front — 20 à 35 ans —
3507 s — connut un véritable boom commercial. « À nous la liberté ! » s’écriait cette génération : elle ignorait apparemment qu
3508 cette génération : elle ignorait apparemment que la liberté est une conquête, et non pas une facilité. Tout concourait d’
3509 toute une génération tuée à remplacer. Il y avait l’ inflation, et la prospérité des nouveaux riches, une avidité de sensat
3510 tion tuée à remplacer. Il y avait l’inflation, et la prospérité des nouveaux riches, une avidité de sensations, une libéra
3511 bération érotique, des mécènes américains… Ce fut la grande Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de 19
3512 mécènes américains… Ce fut la grande Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de 1930. Il nous en reste u
3513 e Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de 1930. Il nous en reste une génération de gloires rapides et
3514 ampleur, des « noms » qu’un seul livre imposa, et l’ on acceptait les suivants parce que c’était commode, et parce que les
3515 noms » qu’un seul livre imposa, et l’on acceptait les suivants parce que c’était commode, et parce que les critiques sont a
3516 suivants parce que c’était commode, et parce que les critiques sont admirablement disciplinés. (D’ailleurs, tous se connai
3517  : auteurs, critiques et éditeurs ; pratiquement, la franchise n’est pas possible.) De ces années, et de celles de la cris
3518 est pas possible.) De ces années, et de celles de la crise qui les suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plu
3519 ble.) De ces années, et de celles de la crise qui les suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plus aiguës : Coc
3520 la crise qui les suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plus aiguës : Cocteau, Max Jacob, les premiers surréa
3521 s suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plus aiguës : Cocteau, Max Jacob, les premiers surréalistes composero
3522 blement une anthologie de « mineurs » qui prendra le charme d’un style, et très vite, une patine rassurante. Quant au roma
3523 , son premier historien, ne tente d’en sauver que les plus gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ». Le roman-cycle
3524 en sauver que les plus gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ». Le roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution qu
3525 gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ». Le roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution qu’adoptent naturellemen
3526 ans-cycles ». Le roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution qu’adoptent naturellement les écrivains lassés de l’improvis
3527 emble-t-il, la solution qu’adoptent naturellement les écrivains lassés de l’improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher
3528 qu’adoptent naturellement les écrivains lassés de l’ improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher la densité, en profonde
3529 l’improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher la densité, en profondeur, ils trouvent plus commode de donner en surfac
3530 ndir un personnage jusqu’au type, ils multiplient les personnages. Au lieu de marquer d’une empreinte durable un moment don
3531 arquer d’une empreinte durable un moment donné de l’ histoire sociale, ils s’étalent dans la durée et vagabondent à travers
3532 t donné de l’histoire sociale, ils s’étalent dans la durée et vagabondent à travers les générations. Notons qu’ils s’attar
3533 s’étalent dans la durée et vagabondent à travers les générations. Notons qu’ils s’attardent presque tous aux générations d
3534 ent presque tous aux générations d’avant-guerre : le temps de leur jeunesse, remarque Thibaudet. Et il attribue ce phénomè
3535 . Et il attribue ce phénomène de « refoulement de la durée vers l’amont » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à
3536 ue ce phénomène de « refoulement de la durée vers l’ amont » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité c
3537 ène de « refoulement de la durée vers l’amont » à l’ incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité croissante de
3538 » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité croissante de vivre sur ses réserves, enfin à une crise et
3539 s réserves, enfin à une crise et à une carence de la création. Malgré ces difficultés, conclut-il, on ne saurait guère do
3540 ultés, conclut-il, on ne saurait guère douter que le super-cycle de ces sept romans-cycles (Martin du Gard, Duhamel, Franc
3541 rancis, Lacretelle, Chardonne, Romains, Béhaine), le Tour de France des romanciers cyclistes, ne reste un trait capital de
3542 omanciers cyclistes, ne reste un trait capital de l’ histoire du roman, du paysage, du roman, pour cette tranche de siècle
3543 roman, pour cette tranche de siècle que meublera la génération de 1914. Il est caractéristique que le livre de Thibaudet
3544 a génération de 1914. Il est caractéristique que le livre de Thibaudet se termine sur une note pessimiste, et sur l’expre
3545 baudet se termine sur une note pessimiste, et sur l’ expression de « dégradation de la littérature, au sens où les physicie
3546 ssimiste, et sur l’expression de « dégradation de la littérature, au sens où les physiciens s’intéressent à la dégradation
3547 on de « dégradation de la littérature, au sens où les physiciens s’intéressent à la dégradation de l’énergie ». Mais cette
3548 rature, au sens où les physiciens s’intéressent à la dégradation de l’énergie ». Mais cette dégradation littéraire, après
3549 les physiciens s’intéressent à la dégradation de l’ énergie ». Mais cette dégradation littéraire, après tout, ne fait que
3550 éraire, après tout, ne fait que traduire celle de la société. Tous ces romans-cycles sont, en effet, des procès-verbaux de
3551 tion du monde bourgeois : de Proust à Lacretelle, les salons se défont, les classes se mêlent, les propriétés sont vendues
3552 s : de Proust à Lacretelle, les salons se défont, les classes se mêlent, les propriétés sont vendues aux enchères ou rachet
3553 lle, les salons se défont, les classes se mêlent, les propriétés sont vendues aux enchères ou rachetées par une coucherie,
3554 dues aux enchères ou rachetées par une coucherie, les fils renient leurs pères, les hommes leur sexe, les personnes leur id
3555 par une coucherie, les fils renient leurs pères, les hommes leur sexe, les personnes leur identité. Comment imaginer la na
3556 s fils renient leurs pères, les hommes leur sexe, les personnes leur identité. Comment imaginer la naissance, d’une grande
3557 xe, les personnes leur identité. Comment imaginer la naissance, d’une grande œuvre romanesque dans un pareil état social ?
3558 uvre romanesque dans un pareil état social ? Tous les chefs-d’œuvre du genre, au xixe siècle, étaient issus d’une société
3559 taient issus d’une société solidement établie, où les types étaient fixes et stables, et les relations codifiées, tyranniqu
3560 tablie, où les types étaient fixes et stables, et les relations codifiées, tyranniques : il y avait encore intérêt à passer
3561 non ce qui s’écroule — et cela ne peut pas donner les éléments d’un art, si l’art est une construction. Il semble bien que
3562 cela ne peut pas donner les éléments d’un art, si l’ art est une construction. Il semble bien que la littérature la plus ré
3563 si l’art est une construction. Il semble bien que la littérature la plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes. Les
3564 e construction. Il semble bien que la littérature la plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes. Les gros romans soc
3565 plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes. Les gros romans sociaux de huit-cents pages que nous assènent les Céline,
3566 ans sociaux de huit-cents pages que nous assènent les Céline, Aragon ou Plisnier sont bien plus des pamphlets que des roman
3567 etrouvent un public. Il semble, d’autre part, que les documentaires entremêlés de réflexions et de jugements personnels, co
3568 ons et de jugements personnels, comme par exemple les derniers livres d’Henri Petit et de Marius Richard soient promis à de
3569 s profonds. Nous avons à refaire un inventaire de l’ homme, préparation modeste et nécessaire à une littérature vraiment pe
3570 e, « Vers une littérature personnaliste », À nous la liberté, Paris, 20 mars 1937, p. 10. k. Rougemont a rendu compte de
12 1937, Articles divers (1936-1938). C’est jeune (10 avril 1937)
3571 C’est jeune (10 avril 1937)l L’ ironie est parfois la meilleure des prudences. C’est la conclusion que
3572 st jeune (10 avril 1937)l L’ironie est parfois la meilleure des prudences. C’est la conclusion que je tire d’un article
3573 nie est parfois la meilleure des prudences. C’est la conclusion que je tire d’un article de M. Vandérem (dans Candide) où
3574 ire d’un article de M. Vandérem (dans Candide) où la critique des critiques actuels que j’avais esquissée, ici même, se tr
3575 à mon aise et que je néglige un peu cavalièrement les contingences. Si j’étais plus avancé dans la vie — écrit-il —, je me
3576 nt les contingences. Si j’étais plus avancé dans la vie — écrit-il —, je me rendrais compte de tous les aléas que représe
3577 a vie — écrit-il —, je me rendrais compte de tous les aléas que représenteraient pour la critique un chambardement de ce ge
3578 ompte de tous les aléas que représenteraient pour la critique un chambardement de ce genre. Ce serait toute une série de n
3579 demandant des mois. On ne saurait mieux dire que le mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si l’on en doutait encore,
3580 rait mieux dire que le mal est aussi grave que je l’ indiquais. Et si l’on en doutait encore, c’est M. Fernandez qui me fou
3581 le mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si l’ on en doutait encore, c’est M. Fernandez qui me fournirait le plus sav
3582 tait encore, c’est M. Fernandez qui me fournirait le plus savoureux argument. Dans sa chronique littéraire de Marianne, il
3583 rivains, M. Arnoux, de n’avoir pas su s’imposer «  avec assez de force au public ». Car, précisait-il, « on sait que la force
3584 rce au public ». Car, précisait-il, « on sait que la force, en ces matières, cela veut dire surtout la chance et la tactiq
3585 la force, en ces matières, cela veut dire surtout la chance et la tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est sup
3586 ces matières, cela veut dire surtout la chance et la tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est supérieur à sa t
3587 urtout la chance et la tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est supérieur à sa tactique ». Faut-il être jeune,
3588 t-il être jeune, tout de même, et peu avancé dans la vie, pour s’ébahir, comme je le fais, d’une… « constatation » de cet
3589 t peu avancé dans la vie, pour s’ébahir, comme je le fais, d’une… « constatation » de cet ordre ! Comprenez-vous ce qu’ell
3590 ce qu’elle avoue sereinement, ce qu’elle déclare avec tant de naturel ? Sentez-vous, à la lire, quelque chose qui s’agite e
3591 lle déclare avec tant de naturel ? Sentez-vous, à la lire, quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétude,
3592 la lire, quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétude, et le dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. F
3593 quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire, l’ inquiétude, et le dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez,
3594 s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétude, et le dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez, qu’en pensait-il
3595 Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez, qu’en pensait -il, écrivant cela ? Dans quelle illusion ai-je vécu ? Ce n’est rien d
3596 e œuvre, de croire qu’on a quelque chose à dire ; le but de l’écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public. Et cela d
3597 e croire qu’on a quelque chose à dire ; le but de l’ écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public. Et cela demande de
3598 à dire ; le but de l’écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public. Et cela demande de la tactique ! Je le vois bien. Je
3599 ’imposer avec force au Public. Et cela demande de la tactique ! Je le vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique la tacti
3600 ce au Public. Et cela demande de la tactique ! Je le vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique la tactique. En quoi cela
3601 Je le vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique la tactique. En quoi cela peut-il consister ? Aucune idée. L’angoisse m’
3602 ue. En quoi cela peut-il consister ? Aucune idée. L’ angoisse m’étreint. Je suis comme un enfant devant le mystère de « la
3603 ngoisse m’étreint. Je suis comme un enfant devant le mystère de « la vie… ». Profitant de mon innocence, que j’espère d’ai
3604 t. Je suis comme un enfant devant le mystère de «  la vie… ». Profitant de mon innocence, que j’espère d’ailleurs provisoir
3605 ieillirai — je voudrais dire ceci à M. Vandérem : la « réinstallation complète » dont nous parlions ne demandera pas seule
3606 chose de beaucoup plus dangereux et difficile que l’ avancement dans la vie : quelque chose que nous autres appelons, dans
3607 plus dangereux et difficile que l’avancement dans la vie : quelque chose que nous autres appelons, dans ce journal, une ré
3608 appelons, dans ce journal, une révolution. Quand les clercs en sont arrivés — et l’élite — à subordonner leur mission à la
3609 révolution. Quand les clercs en sont arrivés — et l’ élite — à subordonner leur mission à la « tactique » du succès commerc
3610 rivés — et l’élite — à subordonner leur mission à la « tactique » du succès commercial, c’est le moment de fourrer les pie
3611 ion à la « tactique » du succès commercial, c’est le moment de fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser les convive
3612 du succès commercial, c’est le moment de fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser les convives. Nous ferons notre p
3613 ercial, c’est le moment de fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser les convives. Nous ferons notre pain nous-mêmes
3614 e fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser les convives. Nous ferons notre pain nous-mêmes. l. Rougemont Denis de
3615 l. Rougemont Denis de, « C’est jeune », À nous la liberté, Paris, 10 avril 1937, p. 10.
13 1937, Articles divers (1936-1938). Journal d’un intellectuel en chômage (fragments) (15 avril 1937)
3616 ecret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pas l’ air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris q
3617 s m’avaient appris que cette ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concie
3618 ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concierges, des lieux-sombres-et-po
3619 des lieux-sombres-et-populeux où il faut pénétrer l’ âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « A
3620 es-et-populeux où il faut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en »
3621 aut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en », et restent faute d’i
3622 pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main . Tant d’autres disent : « Allons-nous-en », et restent faute d’imagin
3623 . Et pourtant il suffit de bien peu pour partir : la France a des milliers de maisons vides. Dites autour de vous que vous
3624 pays. Il est très pauvre, sec et lumineux. Toutes les nuances du gris, herbes, pierres, oliviers, et quelques touches de ve
3625 les premières pentes des Cévennes, où commencent les châtaigneraies. Au sud, on voit un coin de plaine entre des collines
3626 vettes étagées, quelques cyprès en silhouette sur les crêtes, et des toits de ce rose émouvant des tuiles romaines sous un
3627 ciel doux. Au nord, derrière notre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très
3628 Au nord, derrière notre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux
3629 otre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux murs de gros moello
3630 revêtus. Il y a trois pièces au premier étage, où l’ on entre de plain-pied par-derrière. Au-dessous, c’est une grande remi
3631 grande remise. Au second quatre petites chambres. Le tout encombré de fauteuils, de chaises de velours, tables rondes et o
3632 uge. La plupart des fenêtres donnent au midi dans le branchage bleu d’un tilleul. Au bord de la terrasse, une fontaine abo
3633 i dans le branchage bleu d’un tilleul. Au bord de la terrasse, une fontaine abondante coule dans un fort grand bassin rect
3634 fort grand bassin rectangulaire aux eaux sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmier
3635 re aux eaux sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute
3636 sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute aussi, blan
3637 anchie, presque sans fenêtres. Un voile vert clôt la porte d’entrée, où l’on accède par quelques marches et un balcon de p
3638 enêtres. Un voile vert clôt la porte d’entrée, où l’ on accède par quelques marches et un balcon de pierre. L’on descend pa
3639 cède par quelques marches et un balcon de pierre. L’ on descend par d’étroits escaliers aux quatre autres terrasses du jard
3640 ux quatre autres terrasses du jardin, étagées sur le versant nord d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droi
3641 d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques touffues d’oli
3642 mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’horizon
3643 hauteur sur la droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’horizon immédiat. Au sud-
3644 d, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’ horizon immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la
3645 immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invi
3646 Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, mas
3647 nous avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied
3648 e échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied des rochers,
3649 sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied des rochers, en retrait
3650 gare, un coup de trompe d’auto, des cris de coq. L’ odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous
3651 des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les laurier
3652 deur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jau
3653 é monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jaune brille au bord d
3654 remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de
3655 rs. Un grand vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de l’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la ch
3656 vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de l’ eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’éc
3657 sin. Le reflet de l’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice
3658 u tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice de rentrée terminé :
3659 on petit exercice de rentrée terminé : « Décrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons que le jardinier s’appelle Simard,
3660 écrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons que le jardinier s’appelle Simard, sa femme Marguerite, son chien basset Per
3661 lle sorte qu’on puisse y travailler. Nous faisons l’ inventaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de chacune des pi
3662 ravailler. Nous faisons l’inventaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de chacune des pièces du premier, avant de
3663 actuel de chacune des pièces du premier, avant de les vider et de transporter leur contenu à l’étage supérieur. 23 septembr
3664 ant de les vider et de transporter leur contenu à l’ étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d’un
3665 à l’étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a ét
3666 s murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a été débarrassé du tapis. J’ai dressé ma table sur des
3667 et des chaises de paille trouvées dans un coin de la remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminé
3668 de paille trouvées dans un coin de la remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux
3669 ans un coin de la remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensé
3670 remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensées — ont été les
3671 ée — vingt-deux pièces dûment recensées — ont été les remplacer. Seul vestige des splendeurs bourgeoises de ce salon : un l
3672 e. Mais on va pouvoir respirer. 25 septembre 1934 La traduction d’un considérable ouvrage allemand nous permettra de passe
3673 ois mois ou quatre sans trop de soucis matériels. La vie paraît assez peu chère. Mais bien trop chère encore pour les gens
3674 assez peu chère. Mais bien trop chère encore pour les gens du pays. Les petites entreprises qui leur donnaient du travail f
3675 ais bien trop chère encore pour les gens du pays. Les petites entreprises qui leur donnaient du travail font faillite l’une
3676 r : nos voisins n’ont sur leur table, quand on va les voir à midi, que des châtaignes, des olives, des radis et quelques lé
3677 considèrent comme des privilégiés, cela se sent à la manière dont ils nous parlent de quelques familles des environs qui n
3678 t de quelques familles des environs qui n’ont pas la ressource d’un jardin, ou qui ne « savent pas y faire ». (Légère nuan
3679 iale chez Simard). Nos hôtes nous avaient signalé la famille d’un mineur retraité, dont la femme fait des journées. Consid
3680 ent signalé la famille d’un mineur retraité, dont la femme fait des journées. Considérant que richesse oblige — car je gag
3681 eu près 1.000 francs par mois — nous avons engagé la mère Calixte pour donner un coup de main le matin et faire les lessiv
3682 ngagé la mère Calixte pour donner un coup de main le matin et faire les lessives. C’est une toute petite vieille noueuse,
3683 xte pour donner un coup de main le matin et faire les lessives. C’est une toute petite vieille noueuse, à la sagesse senten
3684 ssives. C’est une toute petite vieille noueuse, à la sagesse sentencieuse et imagée. Étonnamment active. Bonne protestante
3685 nnamment active. Bonne protestante et qui tient à le dire. Sa cordialité demeure digne, trait notable à partir des Cévenne
3686 ou de force, c’est certain, nous saurons tout sur les gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une p
3687 c’est certain, nous saurons tout sur les gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi de roc
3688 de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouc
3689 te cité tassée à la base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouche d’une gorge étroite, cité coul
3690 paraît en ruine, prouve sa vie par ses odeurs et la saleté de ses ruelles. Un ruisseau coule au milieu du pavé, charriant
3691 arriant des ordures, des papiers, du sang près de la boucherie, du lait verdi. C’est à peine si l’on peut marcher à pied s
3692 de la boucherie, du lait verdi. C’est à peine si l’ on peut marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils,
3693 ’est à peine si l’on peut marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils, des groupes de femmes en noir jacas
3694 marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils, des groupes de femmes en noir jacassent pendant des heures. D
3695 enfants en sarraus noirs jouent au football dans le ruisseau avec un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits
3696 sarraus noirs jouent au football dans le ruisseau avec un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits visages qui ne
3697 it beau et fin mais incroyablement crasseux. Vers la gare, il y a bien un parc municipal, le jardin d’un couvent désaffect
3698 eux. Vers la gare, il y a bien un parc municipal, le jardin d’un couvent désaffecté, mais je n’y vois jamais que des vieil
3699 s jamais que des vieillards en pantoufles. Devant le parc, un mail couvert d’une épaisse couche de poussière : là, de nouv
3700 upçon qui m’est venu en maintes autres régions de la France : les provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssen
3701 est venu en maintes autres régions de la France : les provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssent la couleur
3702 aux ignorent obstinément, peut-être même haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir.
3703 nément, peut-être même haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J
3704 t-être même haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe au
3705 haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils
3706 te, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils s’arrangent pour vivre p
3707 leil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils s’arrangent pour vivre plus mal que
3708 aussi qu’ils s’arrangent pour vivre plus mal que la population des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie sain
3709 e la population des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que da
3710 on des faubourgs des grandes villes. Le goût de «  la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banli
3711 goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé
3712  » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé d’URSS, et récemment.
3713 dit qu’ici trois maisons seulement, sur 200, ont l’ eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule
3714 s maisons seulement, sur 200, ont l’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la
3715 ent, sur 200, ont l’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la grande place, ju
3716 ’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la grande place, juste à côté de la
3717 des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la grande place, juste à côté de la pissotière et de l’arrêt des autocar
3718 le son filet sur la grande place, juste à côté de la pissotière et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire…
3719 grande place, juste à côté de la pissotière et de l’ arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire… 8 octobre 1934 Du r
3720 et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de la raison. Je vois la misèr
3721 peut le dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de la raison. Je vois la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les
3722 obre 1934 Du rôle pratique de la raison. Je vois la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les détruit. Je vois ce
3723 la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les détruit. Je vois ces enfants sales abandonnés par leurs parents aux h
3724 sales abandonnés par leurs parents aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’
3725 ts aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’éducation primaire, bienfaisante
3726 ien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’ éducation primaire, bienfaisante en principe il est vrai, mais tristem
3727 te, étroite, appauvrissante en fait. Je vois tous les espoirs et toutes les « assurances » de cette population balayée péri
3728 sante en fait. Je vois tous les espoirs et toutes les « assurances » de cette population balayée périodiquement par la fail
3729  » de cette population balayée périodiquement par la faillite des entreprises où elle travaille, ou par quelque décret d’É
3730 travaille, ou par quelque décret d’État. Je vois le chômage s’étendre et s’installer, comme se sont installés dans ces vi
3731 stallés dans ces villages malsains et mal soignés la tuberculose, l’alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’au
3732 villages malsains et mal soignés la tuberculose, l’ alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en par
3733 ns et mal soignés la tuberculose, l’alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant la feuil
3734 ditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant la feuille locale, qu’il naît encore pas mal d’enfants dans ces foyers q
3735 ’enfants dans ces foyers que tout menace. Faisons la part des « accidents », des « imprudences ». Il reste encore une marg
3736 des risques, de confiance obscurément accordée à l’ instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malg
3737 onfiance obscurément accordée à l’instinct ou à «  la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant
3738 ément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici
3739 l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’ espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « raiso
3740 èce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « raisonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’Europ
3741 sonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’ Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bourre
3742 nne en exemple aux barbares de l’Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine e
3743 uple qui sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chos
3744 re son budget, bourrer le bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chose est claire : faire des en
3745 s. Une chose est claire : faire des enfants, dans les conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique.
3746 ants, dans les conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir
3747 conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir vague et profon
3748 à quelque espoir vague et profond. Or tout ce que l’ État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridi
3749 profond. Or tout ce que l’État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre
3750 tout ce que l’État nous apprend, par le moyen de l’ école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre d’espoirs. Q
3751 ruine ce genre d’espoirs. Qui voudrait condamner l’ usage pratique de la raison ? Simplement je constate qu’en fait, et da
3752 poirs. Qui voudrait condamner l’usage pratique de la raison ? Simplement je constate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il
3753 nstate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il est, la morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que
3754 s ce pays tel qu’il est, la morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que le rêve des vieux célibat
3755 t les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que le rêve des vieux célibataires assez fortunés, ou ascètes. Ceux qui n’on
3756 nt plus besoin de calculer, ceux-là calculent. Et les autres acceptent leurs risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malg
3757 risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malgré l’ État laïque qui leur conseille plutôt l’épargne. 15 octobre 1934 On a
3758 e, malgré l’État laïque qui leur conseille plutôt l’ épargne. 15 octobre 1934 On a terminé les vendanges, et la récolte des
3759 le plutôt l’épargne. 15 octobre 1934 On a terminé les vendanges, et la récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver appara
3760 e. 15 octobre 1934 On a terminé les vendanges, et la récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus
3761 é les vendanges, et la récolte des figues d’été. ( Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus petites et toujours vertes ; o
3762 ent déjà, plus petites et toujours vertes ; on ne les mange pas). Simard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la co
3763 mard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la colline du sud, où nous pourrons acheter une provision d’« œillades »
3764 ommes allés hier au soir. Des hauteurs, on voyait la plaine rose et violacée entre des monticules pointus tout frisés d’ol
3765 sés d’oliviers, un paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nou
3766 paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis
3767 taliens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur la terrasse, au p
3768 re, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur la terrasse, au pied d’un grand micocoulier. Bientôt un chien furieux su
3769 d micocoulier. Bientôt un chien furieux surgit de la maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est la propriétaire, Mada
3770 a maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est la propriétaire, Madame Turc. Elle nous fait entrer. Pour la vente du ra
3771 iétaire, Madame Turc. Elle nous fait entrer. Pour la vente du raisin, il faut attendre sa fille qui va rentrer des champs,
3772 va rentrer des champs, où elle travaille jusqu’à la nuit tombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais la fermière n
3773 ombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais la fermière nous reçoit comme une « dame », ou plutôt un peu mieux, avec
3774 eçoit comme une « dame », ou plutôt un peu mieux, avec une politesse pleine de réserve et d’attentions. On parle du domaine.
3775 de réserve et d’attentions. On parle du domaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont u
3776 ’attentions. On parle du domaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine
3777 omaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il para
3778 uis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il paraît qu’on en trouve de moins en moins. — « Mais,
3779 a mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il paraît qu’on en trouve de moins en moins. — « Mais, lui
3780 rouve de moins en moins. — « Mais, lui dis-je, et les chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a 400 à A ? » La mère, vivement : « 
3781 es chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a 400 à A ? » La mère, vivement : « Jamais je n’ai engagé de chômeurs, Monsieur, c’est
3782 ncipe. Nous ne voulons que des ouvriers honnêtes. Pensez donc, deux femmes seules ! — C’est que je suis chômeur moi-même, Mada
3783 ur moi-même, Madame… » Elle sourit à son tour, de l’ air de dire : Oh, vous, ce n’est pas la même chose. Elle a sans doute
3784 n tour, de l’air de dire : Oh, vous, ce n’est pas la même chose. Elle a sans doute entendu parler de nous. Rien à faire :
3785 de nous. Rien à faire : je suis un « monsieur ». La fille rentre : une forte femme, environ 35 ans, un peu masculine. Ell
3786 ron 35 ans, un peu masculine. Elle nous conduit à la chambre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : « C’
3787 bre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : « C’est pour qui, Monsieur, sans indiscrétion ? » Je dis mon
3788 re auxquelles je collabore, en effet. — Vous avez le temps de lire beaucoup ? — Oh, on le prend. Comme nous ne voyons jama
3789 — Vous avez le temps de lire beaucoup ? — Oh, on le prend. Comme nous ne voyons jamais personne… (En France, cela étonne.
3790 ations. Leur niveau de culture, fort au-dessus de la moyenne, ne m’étonne guère, s’agissant de protestantes. Ce ne sont pa
3791 al d’exception. Combien y a-t-il de classes entre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’opposition que veulent v
3792 -il de classes entre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’opposition que veulent voir les marxistes entre bourg
3793 tre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’ opposition que veulent voir les marxistes entre bourgeois, ou maîtres,
3794 et le prolétariat ? L’opposition que veulent voir les marxistes entre bourgeois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs,
3795 ois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs, je la trouve fausse dans tous les cas concrets, dès que je sors des très gr
3796 ires ou serviteurs, je la trouve fausse dans tous les cas concrets, dès que je sors des très grandes villes et de leur cari
3797 illes et de leur caricature de société. — Simard, le jardinier, est à demi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé
3798 ayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on le lui dise. Il s’estime fort au-dessus d’un mineur retraité, par exempl
3799 fort au-dessus d’un mineur retraité, par exemple. Les instituteurs d’A… ? Ils sont du peuple. Oui, mais bourgeois par leur
3800 uple. Oui, mais bourgeois par leur profession. Et les Calixte ? Prolétaires sans doute, mais d’une tout autre espèce, on di
3801 autre espèce, on dirait même d’une autre race que les métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le mar
3802 d’une autre race que les métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’u
3803 oliques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’une supériorité qu’ils ne peuvent attrib
3804 ion. En vérité, ce qui compte dans ce pays, c’est la religion — celle des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et le mé
3805 religion — celle des ancêtres, tout au moins ! —  l’ éducation et le métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches,
3806 le des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et le métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches, des différences
3807 différences et des affinités, au moins autant que les conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de c
3808 les conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de ce canton si l’on fait abstraction de tout cela do
3809 omprend rien à la réalité sociale de ce canton si l’ on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, justement, se doit
3810 canton si l’on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, justement, se doit de ne pas tenir compte. Un communiste tr
3811 it de ne pas tenir compte. Un communiste traitera les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de stati
3812 a les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de statistiques et de relations numériques (salaires, p
3813 stime donc scientifique. Il ne part pas de ce que les hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur é
3814 part pas de ce que les hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le prin
3815 lobale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le principal, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle le jeu des
3816 l, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle le jeu des relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme t
3817 est ce qui règle le jeu des relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme traite tout cela de nuances vaines,
3818 s relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme traite tout cela de nuances vaines, d’illusions, voire de « 
3819 ns, voire de « mystification ». Il part de ce que les hommes sont malgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la St
3820 lgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la Statistique. Et il prétend fonder là-dessus non seulement des mesures
3821 morale, un art et une métaphysique ! Problème de la politique actuelle : sera-t-elle l’affaire du meilleur statisticien,
3822 ! Problème de la politique actuelle : sera-t-elle l’ affaire du meilleur statisticien, ou au contraire de l’homme le plus h
3823 aire du meilleur statisticien, ou au contraire de l’ homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle
3824 meilleur statisticien, ou au contraire de l’homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle est véc
3825 e l’homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle est vécue et voulue par les hommes réels et con
3826 la réalité telle qu’elle est vécue et voulue par les hommes réels et concrets, ou bien sur la réalité telle qu’elle est ch
3827 lue par les hommes réels et concrets, ou bien sur la réalité telle qu’elle est chiffrable, inévitable, impersonnelle ? 2 n
3828 ersonnelle ? 2 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la p
3829 2 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâ
3830 rminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâillée. Une dernière bûche fume,
3831 rnée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâillée. Une dernière bûche fume, il fait presque froid. D
3832 e, il fait presque froid. Dans ce silence vide de la nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts
3833 a nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts, l’esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veil
3834 voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts, l’ esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veillée trop lucide peut-ê
3835 solitaire, veillée trop lucide peut-être, puisque le monde n’y porte plus d’ombres. Je me souviens de ces nuits de Paris,
3836 ces veillées fiévreuses, assiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pa
3837 ssiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-ce que l’ heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des ma
3838 st-ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nos
3839 e les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’ on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nostalgies. ?
3840 de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’ heure des mauvaises nostalgies. ? Qui pourrait nous écrire une histoir
3841 urrait nous écrire une histoire des inventions de l’ insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissance
3842 de l’insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’ histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questi
3843  ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates
3844 lement l’histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates. C’est pourquoi, dans cette
3845 ns cette heure suspendue, il vaut mieux cesser de penser . Que penserais-je, ici, d’humain, d’actif ? Ici où je suis sans proch
3846 re suspendue, il vaut mieux cesser de penser. Que penserais -je, ici, d’humain, d’actif ? Ici où je suis sans prochain, à cette he
3847 is sans prochain, à cette heure ou mes frères (?) les hommes sont plus éloignés que jamais ? « La nuit est faite pour dormi
3848 (?) les hommes sont plus éloignés que jamais ? «  La nuit est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ordre qui m’a
3849 est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d
3850 ait un gardien de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux noctu
3851 n de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux nocturnes. Ma pol
3852 e opposerais-je, quelle arrière-pensée rode ici ? La mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères préc
3853 arrière-pensée rode ici ? La mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères précises ? 10 novembre 1934 Obse
3854  ? La mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères précises ? 10 novembre 1934 Observations nouvelles
3855 ses ? 10 novembre 1934 Observations nouvelles sur les gens. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a la grip
3856 servations nouvelles sur les gens. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisin
3857 ns. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Ell
3858 ais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Elles se plai
3859 n nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le four
3860 t que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le fourneau est ro
3861 ille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le fourneau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le
3862 e plaignent du froid. Le fourneau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis
3863 ge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longt
3864 la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longtemps ava
3865 es siècles, et en tout cas depuis longtemps avant la construction de cette maison… On n’y avait pas pensé ? Je passe au fo
3866 la construction de cette maison… On n’y avait pas pensé  ? Je passe au fond, dans une chambre obscure mais qui me paraît propr
3867 ambre obscure mais qui me paraît propre et sobre. La mère Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les p
3868 e Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je
3869 st au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je crois bien s
3870 ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je crois bien sa blouse noire aussi. Elle me dit qu’elle
3871 assez mal. On devait lui retirer son linge toutes les deux heures. Quand elle sortait sa main du lit, cela fumait. « Vous a
3872 nge toutes les deux heures. Quand elle sortait sa main du lit, cela fumait. « Vous avez eu de la fièvre ! » Elle ne sait pas
3873 it sa main du lit, cela fumait. « Vous avez eu de la fièvre ! » Elle ne sait pas. Elle ne veut pas de médecin. Sa fille di
3874 fille dit : « Elle ne voulait même plus toucher à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon r
3875 « Elle ne voulait même plus toucher à la viande, pensez  ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon remède comme on
3876 r à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du poule
3877 oire que la viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du poulet, elle n’y avait pas goût. Alors j’ai pe
3878 it du poulet, elle n’y avait pas goût. Alors j’ai pensé lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de l’avantage. Voyez !
3879 lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de l’ avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour le
3880 fait de l’avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire u
3881 Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour r
3882 ades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour remplacer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre le
3883 acer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce.
3884 de corde pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont pl
3885 e mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les récolter. « Voy
3886 mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les récolter. « Voyez-vous ! c’est qu’il a fait un vent cette nuit ! » 11
3887 re générale, ils ne sont pas conscients de porter la responsabilité des accidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans
3888 ccidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans le détail. C’est assez sage dans l’ensemble. Ils seraient moins pauvres,
3889 peut agacer dans le détail. C’est assez sage dans l’ ensemble. Ils seraient moins pauvres, moins malades, etc., s’ils étaie
3890 ’ils étaient plus « pratiques » comme on dit dans la bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple so
3891 pratiques » comme on dit dans la bourgeoisie — où l’ on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adro
3892 a bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouillard
3893 gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains , débrouillards et pleins de ressources mystérieuses. Mais ils seraien
3894 des états parce qu’ils ont cassé deux assiettes. La mère Calixte, qui casse tout ce que l’on veut, a coutume de dire en c
3895 assiettes. La mère Calixte, qui casse tout ce que l’ on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je cr
3896 ce que l’on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je croyais la tenir cette assiette ! » De telle
3897 en constatant le mal : « Voyez-vous ! je croyais la tenir cette assiette ! » De telle manière qu’on entend bien que c’est
3898 que rien au monde dépend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont
3899 pend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce
3900 nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il f
3901 les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il faut, elles qui travai
3902 qui décident, elles qui lisent, elles qui vont à l’ église ou au temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour les homme
3903 u temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour les hommes, c’est tout autre chose. Ils sont éloquents et naïfs, revendic
3904 icaces. La plupart ne font rien, ou « travaillent le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — la derniè
3905 , ou « travaillent le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — la dernière qui marche encore — et gagnen
3906 le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — la dernière qui marche encore — et gagnent leurs 7 francs
3907 gagnent leurs 7 francs par jour. Pendant ce temps les hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce son
3908 cs par jour. Pendant ce temps les hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et l
3909 les hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçant
3910 ace et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnai
3911 t contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent
3912 rnement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la
3913 souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par l’imprimerie du journal local,
3914 ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par l’ imprimerie du journal local, par les garages ou à la Mairie, sont comm
3915 nt occupés par l’imprimerie du journal local, par les garages ou à la Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pa
3916 imprimerie du journal local, par les garages ou à la Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à t
3917 arages ou à la Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la paro
3918 et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la parole au Cercle d’hommes, citent des livres
3919 pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur la politique. 12 nov
3920 parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur la politique. 12 novembre 1934 J’ai relevé quelques chiffres dans un ouv
3921 vé quelques chiffres dans un ouvrage sur A…, dû à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570, le mûrier, importé
3922 rage sur A…, dû à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570, le mûrier, importé de Chine, fait son apparition d
3923 lume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570, le mûrier, importé de Chine, fait son apparition dans le Midi. État du p
3924 ûrier, importé de Chine, fait son apparition dans le Midi. État du pays en 1820 : douze filatures, deux fabriques de chape
3925 mportant de produits soyeux manufacturés. Lors de la dédicace du nouveau temple, en 1822, quinze mille protestants accoure
3926 1822, quinze mille protestants accourent de toute la contrée pour suivre des cérémonies dont leurs descendants parlent enc
3927 temple chaque dimanche. Je complète : vers 1900, la soie artificielle fait son apparition dans la vallée du Rhône. Fondat
3928 00, la soie artificielle fait son apparition dans la vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de la région lyonnaise.
3929 vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de la région lyonnaise. Apparition du grand capital. État du pays en 1935 :
3930 ours par semaine à une centaine d’ouvrières, dont le salaire moyen est de 7 francs par jour. Faillite de la dernière bonne
3931 e de la dernière bonnetterie, ces derniers jours. Le tiers des maisons est en ruines, — tout le centre. On croirait une vi
3932 jours. Le tiers des maisons est en ruines, — tout le centre. On croirait une ville bombardée, 2300 habitants. Cent personn
3933 ée, 2300 habitants. Cent personnes au culte. Dans la campagne environnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934, la soie
3934 vironnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934, la soie japonaise a fait son apparition sur le marché lyonnais. Faillite
3935 1934, la soie japonaise a fait son apparition sur le marché lyonnais. Faillite de plusieurs des grosses entreprises de soi
3936 urs des grosses entreprises de soie artificielle. Le cycle normal du progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute la
3937 progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute la richesse indigène de ce département. Et cette richesse à son tour va
3938 tement. Et cette richesse à son tour va reprendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : Que res
3939 tte richesse à son tour va reprendre le chemin de l’ Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : Que reste-t-il pour
3940 rendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : Que reste-t-il pour entreprendre ici une révolutio
3941 on constructive ? 21 novembre 1934 Leur langage. La mère Calixte devait faire notre lessive la semaine prochaine. Elle vi
3942 ngage. La mère Calixte devait faire notre lessive la semaine prochaine. Elle vient s’excuser : « Qui sait, Madame, j’aimer
3943 jour ça vous préférerait ? » (En prononçant tous les e muets). Simart, à propos de la récente baisse des salaires à la fil
3944 prononçant tous les e muets). Simart, à propos de la récente baisse des salaires à la filature : « Je vous dis, c’est mira
3945 art, à propos de la récente baisse des salaires à la filature : « Je vous dis, c’est miraculeux ce qu’on leur donne ! Sept
3946 après tout. Tradition laïque.) L’autre jour, dans l’ autocar, une femme dont j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit hôt
3947 jamais fait ce rapprochement ? Ce petit fait, si l’ on y réfléchit, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans no
3948 notre société présente. Et c’est encore une fois le drame de la culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de
3949 té présente. Et c’est encore une fois le drame de la culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de ce fait, à v
3950 ce fait, à vrai dire minuscule, qu’une évidence. Les mots que nous disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels,
3951 rivons, nous autres intellectuels, éveillent dans l’ esprit populaire des harmoniques que nous ne savons plus prévoir. Litt
3952 s que nous ne savons plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraie
3953 plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le p
3954 téralement, les mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple que j
3955 le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple que je viens de citer, c’est une espèce de calembour qu
3956 i ne joue que sur des sons. Mais il est clair que le sens des termes dont nous usons doit subir des métamorphoses non moin
3957 richesse et pauvreté, tous ces vocables dont nous pensions qu’ils exprimaient les lieux communs sur quoi repose, tacitement, la
3958 es vocables dont nous pensions qu’ils exprimaient les lieux communs sur quoi repose, tacitement, la vie sociale, sont aujou
3959 nt les lieux communs sur quoi repose, tacitement, la vie sociale, sont aujourd’hui vidés de leur signification à la fois s
3960 symbolique et précise. Ils n’éveillent plus chez l’ homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts, que chez nous. L
3961 cise. Ils n’éveillent plus chez l’homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts, que chez nous. Leur résonance senti
3962 nt plus chez l’homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts, que chez nous. Leur résonance sentimentale est différe
3963 rquoi leur sens est différent, en dépit de ce que l’ on pourrait déduire, dans le fait, d’une discussion raisonnable, c’est
3964 t, en dépit de ce que l’on pourrait déduire, dans le fait, d’une discussion raisonnable, c’est-à-dire truquée, avec tel ou
3965 une discussion raisonnable, c’est-à-dire truquée, avec tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps la traduction du lan
3966 c’est-à-dire truquée, avec tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps la traduction du langage surveillé des écrivains da
3967 tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps la traduction du langage surveillé des écrivains dans le langage parlé d
3968 raduction du langage surveillé des écrivains dans le langage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voir
3969 e fut affectée de malentendus de ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était
3970 e ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’ école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois
3971 Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse
3972 , avant l’école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les co
3973 de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la
3974  », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’uti
3975 a noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église
3976 les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait
3977 t la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église
3978 rai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’ utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens c
3979 e les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’ Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens concret de
3980 dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens concret des lieux communs.
3981 re de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’ Église gardienne du sens concret des lieux communs. Aujourd’hui ces do
3982 mmuns. Aujourd’hui ces données sont bouleversées. L’ instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la
3983 nées sont bouleversées. L’instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de l
3984 instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’éte
3985 ue et la Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il n
3986 inon le goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps l
3987 , du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps limité, éduqu
3988 . Un chacun peut en être, et juger comme il veut. Le droit de se tromper, et de tromper grâce au langage, est un des droit
3989 oits imprescriptibles que se trouve avoir décrété la Convention. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni l
3990 ntion. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni l’ Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plu
3991 il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité
3992 e mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni l’ École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de
3993 i l’Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bie
3994 prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’ esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas di
3995 remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans le v
3996 ien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans le vide (il vaudrait mieux que ce soit le vide, dans bien des cas), quel
3997 dire dans le vide (il vaudrait mieux que ce soit le vide, dans bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rigueu
3998 bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rigueur et vers l’adaptation de notre style à notre action. On serait
3999 ls que soient nos efforts vers la rigueur et vers l’ adaptation de notre style à notre action. On serait même tenté d’estim
4000 notre action. On serait même tenté d’estimer que la plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et l’inverse. Par
4001 nté d’estimer que la plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et l’inverse. Par où l’on voit que le contraire d
4002 grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et l’ inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle »,
4003 raîne la moindre efficacité, et l’inverse. Par où l’ on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public 
4004 re efficacité, et l’inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie s
4005 t l’inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie spirituelle et ce
4006 e le contraire de la « vie spirituelle », c’est «  le public ». Cette vie spirituelle et ce public nous posent des exigence
4007 tradictoires. Or, de ces deux antagonistes, c’est l’ esprit qui sera vaincu. Non point qu’il s’avilisse partout ni qu’il se
4008 partout ni qu’il se laisse toujours persuader par la tentation du succès. Mais simplement on ne l’entend plus, il n’agit p
4009 par la tentation du succès. Mais simplement on ne l’ entend plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de l
4010 plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est l’ absence de l’esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents
4011 git plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de l’ esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque tou
4012 on « entend », c’est l’absence de l’esprit, c’est l’ appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque toujours contraires
4013 de compte, aux intérêts réels… 1er décembre 1934 Le pasteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise le samedi soir, da
4014 asteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise le samedi soir, dans une salle attenante au temple, pour les hommes de s
4015 di soir, dans une salle attenante au temple, pour les hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il.
4016 u temple, pour les hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n
4017 s hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n’en vient qu’une d
4018 le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’ aurez remarqué, il n’en vient qu’une dizaine au culte. C’est trop comp
4019 sur un sujet neutre, nous en avons toujours dans les 40 à 50. Et une fois qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d
4020 achevaient de boire leur tasse de café au fond de la salle, dans un coin arrangé en cabinet de lecture. Journaux et illust
4021 cture. Journaux et illustrés, quelques livres sur la table. Puis on s’est assis sur des chaises alignées, pour entendre le
4022 est assis sur des chaises alignées, pour entendre le « conférencier »27. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quinc
4023 e « conférencier »27. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraité
4024 ier »27. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraités qui « trava
4025 eurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraités qui « travaillent le mazet » dans nos para
4026 e la mairie, quelques retraités qui « travaillent le mazet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs, les trois institut
4027 azet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs, les trois instituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’Écriture.
4028 un ou deux cultivateurs, les trois instituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a é
4029 nstituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’ Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des instituteur
4030 a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de « l
4031 uit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de «  l’ histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démarré qu
4032 ’agissait de « l’histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démarré que lorsqu’on s’est mis à parler d’au
4033 ose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de l’ enseignement, des journaux, des traditions et anecdotes locales. Discu
4034 necdotes locales. Discussion n’est d’ailleurs pas le mot : c’étaient surtout des questions, des affirmations de partis pri
4035 és locales, provoquant chaque fois de gros rires. L’ homme du peuple — et je pense qu’il en va de même du bourgeois peu cul
4036 que fois de gros rires. L’homme du peuple — et je pense qu’il en va de même du bourgeois peu cultivé, et sans doute de tout c
4037 es répétitions n’ont d’autre but que de laisser à l’ esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de
4038 tions n’ont d’autre but que de laisser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue
4039 e « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous les
4040 e des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que tou
4041 vains français qu’il est exact de dire, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que toujours ell
4042 gue de discussion, parce que toujours elle vise à la formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu’un
4043 elle vise à la formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus éco
4044 droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire28. Or, cette langue d’écha
4045 dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire28. Or, cette langue d’échanges dial
4046 une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire28. Or, cette langue d’échanges dialectiques rapides se tr
4047 ques rapides se trouve par là même inefficace sur le « peuple ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprise
4048  ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprises, les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflex
4049 e de durée. Évitant méticuleusement les reprises, les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflexion spontanée,
4050 les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflexion spontanée, qui est « péguyste » et non « classique ». Écriv
4051 t non « classique ». Écrivains inutilisables dans la mesure où ils veulent être de bons écrivains français.) — Que de bonn
4052 écrivains français.) — Que de bonne volonté chez les hommes de ce Cercle ! comme ils s’appliquent à comprendre, comme ils
4053 r expliquer des choses, amicalement ; de partager avec eux ce que l’on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs air
4054 choses, amicalement ; de partager avec eux ce que l’ on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à
4055 ment ; de partager avec eux ce que l’on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à leurs vagues souri
4056 t cela met entre celui qui parle et son public ! ( Le « conférencier » en tournée se présente comme un séducteur, c’est la
4057 en tournée se présente comme un séducteur, c’est la loi du genre, et cela rend les échanges bien pauvres…) Quand nous nou
4058 un séducteur, c’est la loi du genre, et cela rend les échanges bien pauvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir, le
4059 uvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir, le facteur ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé,
4060 us sommes levés pour sortir, le facteur ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeu
4061 dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé avec plusieurs jeunes
4062 s yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé avec plusieurs jeunes gens. Quelles opinions politiques, dans ce cercle ?
4063 ns politiques, dans ce cercle ? — Il y a de tout. Le quincaillier est royaliste, un des instituteurs est objecteur de cons
4064 re. Il paraît que ça chauffe certains soirs. Mais le pasteur préside et on le respecte : 40 ans ; genre ancien combattant 
4065 ffe certains soirs. Mais le pasteur préside et on le respecte : 40 ans ; genre ancien combattant ; « très large », dit-on.
4066 t-on. Et « il cause bien ». 16 décembre 1934 À N… la mairie est tout entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont
4067 out entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part les châtelains. Il
4068 ont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part les châtelains. Ils votent radical ou socialiste, et se font battre à pla
4069 à plate couture, régulièrement. Mais faut-il donc penser que les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent
4070 ture, régulièrement. Mais faut-il donc penser que les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marx
4071 ser que les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela
4072 eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela du tout, vous verrez. Ê
4073 ans ce pays, c’est tout simplement être à gauche, le plus à gauche possible. S’il en est bien ainsi, me dis-je, on peut re
4074 peut redouter que ces hommes ne sachent pas faire la distinction entre le marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-il
4075 hommes ne sachent pas faire la distinction entre le marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictat
4076 ent pas faire la distinction entre le marxisme et l’ anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictateur qui se prés
4077 oser au dictateur qui se présentera un jour comme l’ homme de gauche à poigne ? J’ai questionné à ce sujet quelqu’un qui co
4078 à ce sujet quelqu’un qui connaît bien son monde. La vie même de cet homme consiste en effet à connaître intimement le plu
4079 et homme consiste en effet à connaître intimement le plus grand nombre de familles de N., leurs circonstances matérielles,
4080 eurs traditions et leurs rancunes — c’est souvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et
4081 s — c’est souvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste
4082 uvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître
4083 chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître ces choses,
4084 consiste à connaître ces choses, il faut prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas
4085 connaître ces choses, il faut prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur
4086 e ces choses, il faut prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple
4087 t prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’ homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple curieux ou spectate
4088 s, quelqu’un qui a pour mission de leur enseigner le sens dernier des circonstances de leur vie. C’est le pasteur. Sa paro
4089 sens dernier des circonstances de leur vie. C’est le pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habit
4090 leur vie. C’est le pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habite. V., c’est un vieux nid d’aigle,
4091 , une pierraille couronnant des hauteurs ventées. Les rues sont étroites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que le vent
4092 roites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur un
4093 teuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur une galerie d’où l’o
4094 mmes installés au presbytère sur une galerie d’où l’ on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des
4095 rie d’où l’on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’horizon
4096 à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’ horizon des collines vers Uzès, où quelques ruines de castels et quelq
4097 e castels et quelques cheminées d’usines grattent le bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parm
4098 e bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeu
4099 aune. On distingue à peine le village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route noire pour dé
4100 es rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route noire pour découvrir enfin l’amas brunâtre des maisons au-desso
4101 ivre des yeux la route noire pour découvrir enfin l’ amas brunâtre des maisons au-dessous d’une tache blanche dans un pré,
4102 -dessous d’une tache blanche dans un pré, qui est le château. Joie de voir un pays dans son ensemble, dans son unité natur
4103 et ancienne. Une même patine de crépuscule réunit les champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des co
4104 Une même patine de crépuscule réunit les champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. J
4105 tine de crépuscule réunit les champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. Je demande au
4106 gens que je connais si bien ? C’est difficile de les classer et je n’aime pas beaucoup ça… Il y en a de toutes sortes, bie
4107 Il y en a de toutes sortes, bien sûr, et plus on les voit de près… — Je comprends qu’il soit difficile de parler en généra
4108 dire, oui et non. — Enfin, viennent-ils au temple le dimanche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas, les hommes d’ici
4109 anche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas, les hommes d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas l’envie qui man
4110 es d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas l’ envie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours la question de la
4111 vie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours la question de la place à traverser. — ??? — Oui, vous savez que nos tem
4112 mais ils ont peur. C’est toujours la question de la place à traverser. — ??? — Oui, vous savez que nos temples du Midi so
4113 os temples du Midi sont construits en général sur la place du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses
4114 ur la place du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hom
4115 du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont
4116 e ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis.
4117 a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au cu
4118 errasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au culte, il faut défiler
4119 he matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’ on va au culte, il faut défiler devant les terrasses, c’est gênant. Un
4120 stis. Si l’on va au culte, il faut défiler devant les terrasses, c’est gênant. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsie
4121 t. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsieur le pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacris
4122 e pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et
4123 i on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux, le
4124 ndrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux, les voyez-vous ? Pouvez-vous discuter avec eux ? — Guère. Là encore, ce s
4125 t chez eux, les voyez-vous ? Pouvez-vous discuter avec eux ? — Guère. Là encore, ce sont surtout les femmes qu’on voit. Eux
4126 er avec eux ? — Guère. Là encore, ce sont surtout les femmes qu’on voit. Eux sont au travail, ou au café. — Pourquoi n’irie
4127 , ou au café. — Pourquoi n’iriez-vous pas au café avec eux ? — C’est difficile ! Moi, ça ne me gênerait pas. Mais eux on les
4128 fficile ! Moi, ça ne me gênerait pas. Mais eux on les étonnerait, et surtout ils y sont entre eux. Je n’ai aucune envie d’a
4129 ont entre eux. Je n’ai aucune envie d’aller faire l’ intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne
4130 x. Je n’ai aucune envie d’aller faire l’intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne dis pas. Ma
4131 atiquement, je vous assure, c’est difficile. — Et les salutistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On les connaît… — A
4132 utistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On les connaît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des c
4133 rme. C’est classé. On les connaît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des conférences que j’organise. V
4134 naît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’ occasion des conférences que j’organise. Vous avez déjà parlé dans des
4135 déjà parlé dans des cercles d’hommes. Vous voyez le genre. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête
4136 s des cercles d’hommes. Vous voyez le genre. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête. Et ils discute
4137 re. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête. Et ils discutent, et même très bien. Je me rappelle pa
4138 en. Je me rappelle par exemple une discussion sur l’ incroyance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens
4139 elle par exemple une discussion sur l’incroyance. L’ orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroya
4140 cussion sur l’incroyance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas le
4141 ance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas les chrétiens se condui
4142 vait dit que la différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas les chrétiens se conduisent mieux que le
4143 les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas les chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est qu’ils se co
4144 est que pas les chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est qu’ils se confient en Dieu, et qu’ils attendent to
4145 ils se confient en Dieu, et qu’ils attendent tous les ordres de lui. À la fin, un des communistes se lève et résume le déba
4146 eu, et qu’ils attendent tous les ordres de lui. À la fin, un des communistes se lève et résume le débat : « En somme, dit-
4147 i. À la fin, un des communistes se lève et résume le débat : « En somme, dit-il, si nous ne croyons pas en Dieu, nous autr
4148 trop orgueilleux ? » En général, on peut dire que les communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux, et eu
4149 En général, on peut dire que les communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux, et eux seuls, qui proposen
4150 réformes pratiques, qui demandent qu’on installe l’ eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé e
4151 pratiques, qui demandent qu’on installe l’eau et l’ électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entrepr
4152 andent qu’on installe l’eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de la populati
4153 eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’ élément réveillé et entreprenant de la population. — Mais savent-ils c
4154 etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de la population. — Mais savent-ils ce que c’est, le marxisme ? — Ils essai
4155 de la population. — Mais savent-ils ce que c’est, le marxisme ? — Ils essaient ; peut-être plus qu’on ne croirait. J’en co
4156 eurs qui lisent des brochures de vulgarisation de la doctrine. Ils me posent quelquefois des questions. Mais ce n’est pas
4157 quelquefois des questions. Mais ce n’est pas par la lecture qu’ils viennent au parti. L’affaire, pour eux, c’est d’abord
4158 ’est pas par la lecture qu’ils viennent au parti. L’ affaire, pour eux, c’est d’abord de se grouper afin d’entreprendre que
4159 , de résister aux gros propriétaires qui tiennent la région, et de leur imposer des mesures de progrès, de bon sens… — Au
4160 ses, d’où viennent-ils ? — Pour la plupart — tous les chefs en tous cas —, ce sont de petits propriétaires ou des ouvriers
4161 leur compte. — En somme, vous vous entendez bien avec eux ? — Ils savent que je suis de leur côté, en gros, dans les questi
4162 ls savent que je suis de leur côté, en gros, dans les questions locales où il faut prendre position. Quant à la doctrine, c
4163 ions locales où il faut prendre position. Quant à la doctrine, c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils la connais
4164 c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils la connaissent mal, ensuite et surtout parce qu’elle ne joue pratiquemen
4165 er raisonnablement. Mais rien ne se présente pour les soutenir. Ils vont au parti communiste parce qu’il n’y a rien d’autre
4166 d’autre et personne d’autre… Ce seraient souvent les meilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises tê
4167 aient souvent les meilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises têtes ». 17 décembre 1934 Le grand tor
4168 eilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises têtes ». 17 décembre 1934 Le grand tort des chrétiens, c’
4169 devenir les « mauvaises têtes ». 17 décembre 1934 Le grand tort des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux l’incroyan
4170 t des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux l’ incroyance de leurs contemporains. Au fond, ils en ont peur. Or ils de
4171 nteux, honteux d’une foi qu’il n’a pas ! Car s’il l’ avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et
4172 s ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint
4173 , il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint pas Dieu, mais qu’il
4174 qu’il n’est pas un des leurs… Je voudrais définir le croyant véritable : celui qui sait qu’il ne croit pas aux dieux du mo
4175 ait qu’il ne croit pas aux dieux du monde, et qui le prouve. Comment le prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en an
4176 pas aux dieux du monde, et qui le prouve. Comment le prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en annonçant aux hommes
4177 simplement en témoignant, en annonçant aux hommes la vérité et le chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, su
4178 témoignant, en annonçant aux hommes la vérité et le chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, surhumaines : s
4179 mieux. 12 janvier 1935 Ces cochons-là ! — Simard le jardinier s’est fait une forte entaille au doigt en travaillant. Ce g
4180 é d’ordinaire, en est tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne c
4181 naire, en est tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas
4182 tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas de meilleur
4183 dionaux qui ne connaît pas de meilleur remède que la parlotte. Tout de suite, c’est la question des assurances qu’il abord
4184 leur remède que la parlotte. Tout de suite, c’est la question des assurances qu’il aborde avec autorité, tout en tenant so
4185 te, c’est la question des assurances qu’il aborde avec autorité, tout en tenant son doigt blessé droit en l’air, dans une at
4186 utorité, tout en tenant son doigt blessé droit en l’ air, dans une attitude doctorale. La question des assurances est une q
4187 essé droit en l’air, dans une attitude doctorale. La question des assurances est une question complexe, comme toutes les q
4188 ssurances est une question complexe, comme toutes les questions capitales. Les gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, pa
4189 n complexe, comme toutes les questions capitales. Les gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je l’en cro
4190 ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je l’ en crois, n’a guère vendu depuis un mois que pour 50 francs de légumes
4191 depuis un mois que pour 50 francs de légumes. Or la vente des produits de son jardin est son seul moyen de gagner). Carré
4192 en de gagner). Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et an
4193 ). Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en l’ air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et analogues — av
4194 de cuisine, le doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et analogues — avec lesquelles il est en co
4195 evue les compagnies d’assurances — et analogues — avec lesquelles il est en compte. Je dis compagnies d’assurances, mais lui
4196 compte. Je dis compagnies d’assurances, mais lui les nomme plus couramment « ces cochons-là ». Ces cochons-là sont donc au
4197 en totalise sept pour son compte, et sa dame fait le petit appoint. Elle s’est « coupé » la jambe, cela fait bien cinq ans
4198 dame fait le petit appoint. Elle s’est « coupé » la jambe, cela fait bien cinq ans déjà, et « touche » pour cette jambe c
4199 claré que tout allait bien, c’est-à-dire qu’ils «  l’ ont diminuée à 17 sous par jour ». Pour se venger, il leur a retiré so
4200 venger, il leur a retiré son assurance à lui, et l’ a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances sociales, v
4201 et l’a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances sociales, vie, décès, « avec doublage », vieillesse, accid
4202 bonheur : les assurances sociales, vie, décès, «  avec doublage », vieillesse, accidents du travail, incendie et une histoir
4203 re très compliquée de capitalisation-loterie, qui l’ excite particulièrement. Tout cela rend plus ou moins. Dans certains c
4204 re. « Ce cochon-là » n’a pas répondu, et pourtant la lettre était recommandée. Alors il a été voir « une personne encore p
4205 illé d’écrire une nouvelle lettre recommandée « à la charge du destinataire ». Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Répons
4206 Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Réponse dans les quatre jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que la personne com
4207 re jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que la personne compétente lui dit : « Ce cochon-là t’a refait de 299 francs
4208 cochon-là t’a refait de 299 francs, consulte voir le barème ! » Il a fallu récrire deux fois pour obtenir gain de cause. E
4209 50 francs. Autrement, vous savez ce qui se passe, les employés là-bas, au ministère, ils mettent l’argent dans leur poche.
4210 e, les employés là-bas, au ministère, ils mettent l’ argent dans leur poche. — Tous les mas et mazets des environs sont hab
4211 ère, ils mettent l’argent dans leur poche. — Tous les mas et mazets des environs sont habités par des retraités, des pensio
4212 ités, des pensionnés, des assurés qui vivent dans la rouspétance contre ces « cochons-là » et dans la crainte de la vieill
4213 e contre ces « cochons-là » et dans la crainte de la vieillesse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de la mévente c
4214 sse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de la mévente croissante, on vit sur le dos de l’État, on suit des enterrem
4215 ner, à cause de la mévente croissante, on vit sur le dos de l’État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfa
4216 se de la mévente croissante, on vit sur le dos de l’ État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfants pour d
4217 l’État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfants pour des questions d’argent, on ne croit plus ni à Dieu n
4218 ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages,
4219 ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique, l’ hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages, et ces cochons
4220 t à peine à la politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages, et ces cochons-là vous diminuent. Sima
4221 s-là vous diminuent. Simard m’explique encore que les gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme partout.
4222 re que les gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme partout. Bon. Alors les catholiques descendent de
4223 iller à la ville. C’est comme partout. Bon. Alors les catholiques descendent de la montagne et viennent prendre la place. «
4224 partout. Bon. Alors les catholiques descendent de la montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illet
4225 ues descendent de la montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des
4226 de la montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés,
4227 t viennent prendre la place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont
4228 que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont pas l’ instruction comme nous autres. » Arriérés, illettrés. Je n’en suis plu
4229 lus au temps où j’approuvais certains « Éloges de l’ ignorance » plus sentimentaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais q
4230 entaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais que l’ ignorance — oui, au sens de l’école primaire — est un mal qu’il faudra
4231 liques. Je sais que l’ignorance — oui, au sens de l’ école primaire — est un mal qu’il faudrait guérir. Mais je ne puis m’e
4232 il faudrait guérir. Mais je ne puis m’empêcher de penser que ces « illettrés » sont peut-être moins bas que ces « assurés ». C
4233 t-être moins bas que ces « assurés ». Ce peuple à la retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait plus
4234 uple à la retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de la vie
4235 ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage »…
4236 davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage »… 20 janvier 1935 Superstition. — C
4237 e écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est le moins croyable, étant superstitieux sur tout plein d’objets. » Malcha
4238  : il n’échappe aux jésuites que pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois,
4239 aux jésuites que pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de
4240 pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée
4241 c sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée contre la coque des bateaux neufs, etc.
4242 du bois, la bouteille de champagne brisée contre la coque des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute la situation : c’
4243 que des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute la situation : c’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de la Lot
4244 ’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de la Loterie nationale, s’inclinant sur la tombe du Soldat inconnu. Juste
4245 gagnant de la Loterie nationale, s’inclinant sur la tombe du Soldat inconnu. Juste hommage au collègue, au gagnant d’une
4246 collègue, au gagnant d’une autre loterie ! Toute la grande presse en a parlé. Personne ne rit. Léon Bloy rugit dans sa to
4247 rugit dans sa tombe. 3 février 1935 Déclassé. —  L’ intellectuel l’est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière
4248 tombe. 3 février 1935 Déclassé. — L’intellectuel l’ est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière, dispersée com
4249 il est d’une classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment
4250 ne classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la f
4251 ticulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce ch
4252 e les Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a
4253 entils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette ambi
4254 fallu m’éloigner de cette ambiance bourgeoise où l’ on a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que l’intellectuel en
4255 a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que l’ intellectuel en tant que tel est un hors-classe, un être à part, auque
4256 à part, auquel on ne croit pas. (D’où sans doute l’ angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à
4257 ’angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’ argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : pour
4258 tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à l’ Académie, voire à jouer un rôle politique : pour faire figure, pour ac
4259 re, pour acquérir une situation bien définie dans le corps social). Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes int
4260 dans le corps social). Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans
4261 s intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans la mesure où nous réussissons à nous faire passer pour des bourgeois ou
4262 at. 17 février 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir le sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion d
4263 er 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir le sujet de l’ entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt
4264 hommes. — Hier soir le sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme.
4265 soir le sujet de l’entretien était le problème de l’ autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos
4266 t de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos de partis pr
4267 e de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos de partis pris, d’erreurs de faits et de form
4268 de faits et de formules électorales ! Je demandai la parole pour expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème
4269 ectorales ! Je demandai la parole pour expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème fasciste est un problème
4270 our expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème fasciste est un problème avant tout national ; qu’il s’est p
4271 ays, et qu’en tout cas il ne peut pas se poser de la même façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir uti
4272 poser de la même façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir utilement un fascisme, ce n’était pas de co
4273 tilement un fascisme, ce n’était pas de condamner les Italiens et leurs admirateurs français, position négative, paresseuse
4274 e, et donc faible, mais d’essayer de résoudre « à la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante an
4275 le, mais d’essayer de résoudre « à la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocra
4276 yer de résoudre « à la française » le problème de l’ autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlementai
4277 la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlementaire, et toute une tra
4278 e libertés. Bref, un petit sermon élémentaire sur le thème « liberté oblige ». Au sortir de la réunion, je surprends cette
4279 ire sur le thème « liberté oblige ». Au sortir de la réunion, je surprends cette phrase d’un homme, dans la cour, tandis q
4280 union, je surprends cette phrase d’un homme, dans la cour, tandis qu’il donne du feu à son copain : Pour moi, c’est un fas
4281 es raisons il prend ou ne prend point parti. Mais l’ électeur veut qu’on soit pour ou contre, et il se méfie par principe d
4282 osition fondamentale. Peut-être ferais-je bien, à l’ avenir, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, d
4283 je bien, à l’avenir, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : J
4284 , si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : Je suis contre. Sinon
4285 mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu que l’ article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma con
4286 suis contre. Sinon, pour peu que l’article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me cl
4287 . Sinon, pour peu que l’article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me classera fasc
4288 me classera fasciste ou communiste. Et pourtant, la mission de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur,
4289 asciste ou communiste. Et pourtant, la mission de l’ écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l
4290 de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses par
4291 pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l’ amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? Mars 1935 (à M
4292 le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? Mars 1935 (à Marseille) J’ai parlé à R.
4293 le) J’ai parlé à R. de mon projet de publier sous le titre de Journal d’un intellectuel en chômage , ces pages que je sui
4294 rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur le résultat de cette entreprise. Pour des raisons que je devine plus sen
4295 des raisons que je devine plus sentimentales que les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est qu’
4296 s que les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est qu’on lui raconte une histoire, me dit R. — Ma
4297 , me dit R. — Mais si je raconte mon histoire ? —  Le lecteur veut des histoires inventées. — Mais si je lui dis que j’inve
4298 vous met en question, cela vous invite à comparer les situations… À cause de la solidarité humaine, probablement. — (Voilà
4299 vous invite à comparer les situations… À cause de la solidarité humaine, probablement. — (Voilà pourquoi l’on trouvera san
4300 lidarité humaine, probablement. — (Voilà pourquoi l’ on trouvera sans doute, indiscret, de ma part, ce journal. Un tel juge
4301 el jugement ne serait pas très franc, d’ailleurs. L’ indiscrétion, en soi, ne gêne pas beaucoup de gens, au contraire. Ce q
4302 de gens, au contraire. Ce qui gêne, c’est plutôt la vérité telle quelle, surtout la vérité sur une situation matérielle.
4303 êne, c’est plutôt la vérité telle quelle, surtout la vérité sur une situation matérielle. Il est entendu qu’on ne doit pas
4304 ropos, précisément, est de montrer, entre autres, la décadence de ce tabou. Je trouve moins indiscret de parler en public
4305 e tant d’autres, de mes amours, en donnant toutes les précisions qu’un collégien puisse désirer.) R. me disait aussi : En s
4306 ous n’êtes pas un vrai chômeur, puisque vous avez la possibilité de travailler. — Je me suis fait moi-même cette objection
4307 on. Il est clair qu’un intellectuel aura toujours la possibilité de travailler, pour autant que son vrai travail est de pe
4308 availler, pour autant que son vrai travail est de penser . Mais je l’appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la pos
4309 utant que son vrai travail est de penser. Mais je l’ appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la possibilité de
4310 pelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la possibilité de s’assurer un gagne-pain régulier par son travail, s’il
4311 plus d’emploi, et ne sait plus de quoi sera fait le lendemain. — Admettez que cela ne vous empêche pas de vivre assez bie
4312 atisfait de votre situation. Ce n’est fichtre pas le cas des vrais chômeurs ! — Ah, c’est vrai, je suis bien content, malg
4313 s pas du tout à être un « vrai chômeur », je vous l’ assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit que cela me serait pratiquement impo
4314 le, sauf gâtisme précoce. Ce n’est pas un mal, je pense , si je suis heureux, bien que sans ressources. Mais d’autre part, est
4315 ue sans ressources. Mais d’autre part, est-ce que le fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’a
4316 nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder la frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pourrais faire un
4317 regarder la frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pourrais faire une carrière dans le monde, à supposer que l
4318 s avec ça que je pourrais faire une carrière dans le monde, à supposer que l’envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire
4319 faire une carrière dans le monde, à supposer que l’ envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire dans mon journal, c’est
4320 ssi romantique et excitant que mon titre pourrait le faire croire. L’intéressant à mon point de vue, c’est de montrer une
4321 excitant que mon titre pourrait le faire croire. L’ intéressant à mon point de vue, c’est de montrer une fois que c’est vr
4322 ’est vrai, et de montrer comment c’est vrai, dans le détail… ⁂ Cette conversation avec R. m’a rendu attentif à un fait qui
4323 c’est vrai, dans le détail… ⁂ Cette conversation avec R. m’a rendu attentif à un fait qui m’apparaît soudain fondamental ;
4324 n fait qui m’apparaît soudain fondamental ; c’est l’ affectivité quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à l’argent,
4325 é quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à l’ argent, et qui se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la ri
4326 se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irrit
4327 rticulier à tout échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauva
4328 t échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauvaise conscience,
4329 ’imbroglio passionnel plus idéalement favorable à l’ apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur e
4330 ent favorable à l’apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur et nervosité qui révèlent surtout u
4331 estions. Plusieurs générations de bourgeoisie, et la crise de cette bourgeoisie ont accouché d’un des plus beaux complexes
4332 ie ont accouché d’un des plus beaux complexes que le diable ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contr
4333 ue le diable ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contre les autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en
4334 ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contre les autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en guérir ? — C
4335 concevoir pour dresser les humains les uns contre les autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en guérir ? — Commençons par n
4336 uer, passons outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés e
4337 outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés en fonction d
4338 aire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à l’ argent son rôle mineur de moyen, d’impur et simple moyen… 31 mars 1935
4339 — Je lis dans un journal socialiste du Midi, sous la rubrique « La vie régionale », qui chaque jour m’apporte d’inénarrabl
4340 un journal socialiste du Midi, sous la rubrique «  La vie régionale », qui chaque jour m’apporte d’inénarrables sujets de m
4341 ur m’apporte d’inénarrables sujets de méditation, le petit communiqué que voici : Bouillargues. — Les « exclus » vieux tr
4342 le petit communiqué que voici : Bouillargues. —  Les « exclus » vieux travailleurs. Demain dimanche, à 10 heures, sera d
4343 let 1930 29 . Tous ceux qui ne bénéficient pas de la loi des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L
4344 des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L’organisation lutte afin de faire accorder une retraite
4345 sociales ont intérêt à assister à la conférence. L’ organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
4346 der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez la propagande afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendicat
4347 donnée aux légitimes revendications des vieux ! «  L’ organisation lutte… Unissez-vous ! Activez la propagande ! » Ô merveil
4348  ! « L’organisation lutte… Unissez-vous ! Activez la propagande ! » Ô merveille du pathos révolutionnaire ! ô gloire de la
4349 merveille du pathos révolutionnaire ! ô gloire de la phraséologie marxiste ! Ô triomphe des mots d’ordre sur l’inertie des
4350 ologie marxiste ! Ô triomphe des mots d’ordre sur l’ inertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme cl
4351 iomphe des mots d’ordre sur l’inertie des masses, l’ égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical — la conférence
4352 ertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois, l’ obscurantisme clérical — la conférence est à 10 heures, dimanche matin
4353 des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical — la conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réac
4354 conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réactionnaires ! Ô liberté, égalité, fraternité, Déclarat
4355 des droits de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que
4356 de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je le j
4357 re appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je le jour ! C’est l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le cou
4358 ous ses espoirs ! Mais que dis-je le jour ! C’est l’ heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le coup de dix heures,
4359 l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le coup de dix heures, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de
4360 ner : demain dimanche, sur le coup de dix heures, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de luttes, de sacrifices
4361 ce grand mot sera prononcé, proclamé, acclamé par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos mil
4362 par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos militants héroïques n’ont pas perdu leur peine
4363 olique mot d’ordre sera donné comme un soufflet à la Réaction insolente : « Place aux Vieux ! » — On se demande s’il est a
4364 se demande s’il est au monde un seul pays, hormis la France, où cette phrase soit possible. Où les partis qui se disent « 
4365 rmis la France, où cette phrase soit possible. Où les partis qui se disent « avancés » osent le proposer comme objectif de
4366 le. Où les partis qui se disent « avancés » osent le proposer comme objectif de « lutte ». Où la publication d’un communiq
4367 osent le proposer comme objectif de « lutte ». Où la publication d’un communiqué de ce genre ne soit pas accueillie par un
4368 une traînée de rigolade irrépressible dans toutes les couches de la population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la p
4369 rigolade irrépressible dans toutes les couches de la population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine enquê
4370 opulation, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets de
4371 ou « réactionnaire ». À la prochaine enquête sur l’ état politique de la France, je me promets de répondre par cette simpl
4372 ». À la prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets de répondre par cette simple déclaration : « La
4373 mets de répondre par cette simple déclaration : «  La France est un pays comblé qui a résolu tous les problèmes économiques
4374 « La France est un pays comblé qui a résolu tous les problèmes économiques urgents. La preuve en est fournie par ces phras
4375 a résolu tous les problèmes économiques urgents. La preuve en est fournie par ces phrases cueillies dans un journal révol
4376 ases cueillies dans un journal révolutionnaire : ‟ L’ organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
4377 der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez la propagande, afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendica
4378 cations des vieux !” Quand on en est à cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que l’état social est à peu près parad
4379 cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que l’ état social est à peu près paradisiaque. » J’ajouterais peut-être ceci
4380 voue tous ses enthousiasmes aux soins que réclame la vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journaux, est act
4381 a vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journaux, est actuellement dominée par le souci des élections académi
4382 croire les journaux, est actuellement dominée par le souci des élections académiques et des retraites aux sexagénaires. N’
4383 as beau, rassurant, émouvant, dans une Europe que l’ on croyait en proie aux brutales jeunesses bottées ? » 25 avril 1935
4384 ses bottées ? » 25 avril 1935 Communisme. — Dans la petite librairie grande ouverte sur la rue principale, je parcours, c
4385 me. — Dans la petite librairie grande ouverte sur la rue principale, je parcours, comme chaque jour, la plupart des journa
4386 bonhomme au nez violacé traîne ses pantoufles par la boutique et grogne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement la p
4387 gne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement la patronne qui ne répond pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il fau
4388 d pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il faut le laisser frapper le sol de sa canne et redresser sa casquette pour pon
4389 itué, il est comme ça. Il faut le laisser frapper le sol de sa canne et redresser sa casquette pour ponctuer ses raisonnem
4390 ntelligent. — Vous avez mon Huma ? — Bou die ! je les ai toutes vendues, Monsieur Dumas ! (C’est jour de foire). — Allons,
4391 (C’est jour de foire). — Allons, tant mieux, fait l’ homme. Et si des fois on vous en demande de trop, vous n’avez qu’à don
4392 n’avez qu’à donner la mienne, vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteu
4393 vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. « Et
4394 Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu
4395 re de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’ arrête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à
4396 e va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? »
4397 « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? » L’homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux
4398 on bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? » L’ homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par l
4399 L’homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des s
4400 au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers :
4401 gre fait un geste réticent. Le vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers : « Tu m’enten
4402 le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers : « Tu m’entends ? Nous ôtres, nous allons vous pas
4403 s ôtres, nous allons vous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit l’homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit
4404 ous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit l’ homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit ! — Notre droit ? Peu
4405 (Il glousse d’un air malin). — On sait bien, dit le communiste, que vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les
4406 dit le communiste, que vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc
4407 vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez
4408 ours soutenu les gros qui pressent les petits ! —  Les gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez toute notre ar
4409 ez toute notre argent, depuis quatre ans que vous l’ avez, le pouvoir ! » L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou p
4410 notre argent, depuis quatre ans que vous l’avez, le pouvoir ! » L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou peut-être
4411 e ces deux hommes, je n’hésite pas : je vote pour le communiste. C’est un Méridional du type sérieux, un de ces hommes qui
4412 de ces hommes qui pourraient sauver sa région de la totale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de
4413 ient sauver sa région de la totale décrépitude où l’ ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcool
4414 région de la totale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait parti
4415 tale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà l’aspec
4416 Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà l’ aspect local et personnel de la question, sur le plan des prochaines é
4417 fait partie. Voilà l’aspect local et personnel de la question, sur le plan des prochaines élections municipales. Mais il y
4418 . Simple question de tempérament. Peut-être aussi le communiste n’est-il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant qu
4419 encore parvenu à « mettre de côté » autant qu’il le voudrait. Mais ce n’est pas sûr. Je sais bien une douzaine de ses cam
4420 une douzaine de ses camarades qui comptent parmi les mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment
4421 t parmi les mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment tout simplement des attitudes morales différ
4422 mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment tout simplement des attitudes morales différentes ?
4423 i avais acheté, innocemment, le dernier numéro de l’ Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers,
4424 eté, innocemment, le dernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquag
4425 ernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquage habituel des titres,
4426 encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquage habituel des titres, une sauce aigre où nagent de grandes vé
4427 ujours bonnes à dire, mais mal dites. J’accepte à la rigueur cette division du monde en gros et en petits, si c’est le seu
4428 division du monde en gros et en petits, si c’est le seul moyen pratique de faire valoir les droits élémentaires d’une par
4429 , si c’est le seul moyen pratique de faire valoir les droits élémentaires d’une partie de la population. Mais quelle trahis
4430 re valoir les droits élémentaires d’une partie de la population. Mais quelle trahison des « petits » représente alors ce j
4431 ésente alors ce journal ! Leur seule force contre les capitalistes et surtout contre leurs suppôts, ces retraités radicaux
4432 traités radicaux ou socialistes, ce serait d’être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hom
4433 caux ou socialistes, ce serait d’être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bourge
4434 e parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la p
4435 vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la politique et l
4436 mmes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la politique et la combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit les
4437 ou intellectuels — qui détestent la politique et la combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit les révoltes les mie
4438 combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit les révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les a
4439 torale. Au lieu de quoi on pervertit les révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une
4440 n pervertit les révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une prose abstraite, brutale
4441 ieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — e
4442 abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — et si possible, plus médiocre que celle des grands jo
4443 tion. On leur impose une mystique confectionnée à l’ usage des moujiks… Quel est l’homme sain qui oserait affirmer que ce q
4444 que confectionnée à l’usage des moujiks… Quel est l’ homme sain qui oserait affirmer que ce quotidien lamentable, hérissé d
4445 able, hérissé de clichés hargneux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait
4446 neux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si l’ on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas l
4447 e bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas le cas des intellectuel
4448 le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas le cas des intellectuels qui « adhèrent » aux disciplines staliniennes e
4449 s staliniennes en haine d’une société qu’ils sont les seuls à croire encore « chrétienne » — il faut bien dire que le parti
4450 ire encore « chrétienne » — il faut bien dire que le parti communiste est une sinistre trahison des pauvres hommes. Beauco
4451 inistre trahison des pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résistent à l’intoxication, mais cela prouve simplement, une fo
4452 pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résistent à l’ intoxication, mais cela prouve simplement, une fois de plus, que l’hom
4453 ais cela prouve simplement, une fois de plus, que l’ homme du peuple ne comprend pas profondément ce qu’on lui donne à lire
4454 ne voit pas que son journal est sans rapport réel avec cette situation. Mais les intellectuels, dont le métier est de compre
4455 est sans rapport réel avec cette situation. Mais les intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est d
4456 vec cette situation. Mais les intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, do
4457 llectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir fo
4458 est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une p
4459 re, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, — 
4460 érité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, — on se demande par quelle rancune vague
4461 viennent à s’imaginer qu’ils défendent eux aussi les « petits » en défendant ces exploiteurs de la bassesse et du mensonge
4462 si les « petits » en défendant ces exploiteurs de la bassesse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bleue
4463 e la bassesse et du mensonge en service commandé. L’ homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort m
4464 sse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort maladroit e
4465 en service commandé. L’homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans l
4466 . L’homme à la veste bleue, je le comprends et je l’ aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’ai
4467 aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Réflexion de « 
4468 fort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’ aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Réflexion de « personnaliste ».
4469 28 avril 1935 Réflexion de « personnaliste ». —  Le peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritab
4470 exion de « personnaliste ». — Le peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritables. Mais c’est qu’i
4471 intérêts véritables. Mais c’est qu’il ne peut pas les exprimer très aisément. Question de langage. Revenez voir ces mêmes h
4472 e j’ai dit, revenez deux fois, vingt fois, prenez- les sur le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs a
4473 it, revenez deux fois, vingt fois, prenez-les sur le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs au sens
4474 le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez- les attentifs au sens de leurs clichés. Mieux encore, parlez-leur de leur
4475 e de sensé, de vécu, de réel, — et qui renversera les conclusions cyniques des partisans de la dictature. Ils vous diront d
4476 versera les conclusions cyniques des partisans de la dictature. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’e
4477 sans de la dictature. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’ennui. Ils expliqueront presque toujours ce
4478 ous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’ ennui. Ils expliqueront presque toujours cet ennui par les conditions
4479 . Ils expliqueront presque toujours cet ennui par les conditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : no
4480 ennui par les conditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impos
4481 onditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impossibilité de « su
4482 isé, de s’attacher à ce qu’on fait ; nécessité où l’ on se trouve de bâcler son ouvrage, pour gagner de quoi vivre, tentati
4483 ondition. Ils vous diront aussi qu’ils n’ont plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la mer
4484 plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incap
4485 uvrage, quand ils savent que les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diro
4486 t d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois s
4487 d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de l’ État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois sans rien savoir
4488 de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois sans rien savoir des situations locales. Parfois ils proposeront
4489 s proposeront quelque réforme pratique : faire de la place aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer
4490 tique : faire de la place aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer et l’administration ; faire des
4491 lace aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer et l’administration ; faire des lois régionales pour l
4492 issant la limite d’âge dans les chemins de fer et l’ administration ; faire des lois régionales pour la viticulture ; mettr
4493 l’administration ; faire des lois régionales pour la viticulture ; mettre en commun les terres d’un petit village ; vendre
4494 régionales pour la viticulture ; mettre en commun les terres d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries
4495 en commun les terres d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des
4496 s d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des succédanés fabriqués
4497 succédanés fabriqués dans des « caves centrales » avec des vins d’Afrique et des produits chimiques (« que vous avez la gorg
4498 frique et des produits chimiques (« que vous avez la gorge brûlante après un verre »). Enfin ils se plaindront de ce que,
4499 laisir. On n’est plus fier d’en être, on approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! »
4500 r d’en être, on approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! » — phrase entendue un peu
4501 n approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! » — phrase entendue un peu partout dans l
4502 rt, ici ! » — phrase entendue un peu partout dans la province). Et puis « leur » politique, parlez-moi de « leurs combines
4503 ’en tiendra aux clichés du journal. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder d
4504 aux clichés du journal. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités.
4505 al. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même l’ idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités. Donc, par amour du
4506 s plus ses assemblées, ce n’est pas lui. Écoutons les observations que formulent des individus pris à part, dans leur vie c
4507 e concrète. Je constate qu’elles vont toutes dans le sens de ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région
4508 lles vont toutes dans le sens de ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région naturelle, communalisme, synd
4509 e que proposent les personnalistes : autonomie de la région naturelle, communalisme, syndicats locaux, rajeunissement des
4510 oyens de circuler et de s’instruire, résistance à l’ état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le mo
4511 ruire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être
4512 e à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être ; c’est bien mo
4513 pes d’hommes nouveaux, jeunes et sortis de toutes les classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les
4514 de toutes les classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle
4515 classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle des travaille
4516 imer ce que taisent les journaux, les orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle des travailleurs, trahis par
4517 urnaux, les orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle des travailleurs, trahis par le langage politicien. La
4518 st la volonté réelle des travailleurs, trahis par le langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui re
4519 s travailleurs, trahis par le langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peu
4520 rahis par le langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature ou
4521 la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La d
4522 ’éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La dictature est très facile. Elle n’a qu’un
4523 re ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La dictature est très facile. Elle n’a qu’un argument très puissant cont
4524 classe, sur quels intérêts ? — Nous comptons sur l’ effort des hommes les plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d
4525 ntérêts ? — Nous comptons sur l’effort des hommes les plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d’autre n’est vrai… 6
4526 s-vous. Mais rien d’autre n’est vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. — La maison de Simard recèle un
4527 s rien d’autre n’est vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. — La maison de Simard recèle un effrayant se
4528 vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. — La maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait
4529 i 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. —  La maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait laissé igno
4530 e. Nous apprenons son existence en même temps que l’ imminence de sa mort — et voici qui éveillera peut-être des réflexions
4531 éveillera peut-être des réflexions fécondes dans l’ esprit du lecteur philosophe. Déjà huit mois que nous sommes ici, et c
4532 et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la grande cuisine qui était, pensions-nous, tout leur logis — nous avion
4533 nous pas entrés dans la grande cuisine qui était, pensions -nous, tout leur logis — nous avions cru comprendre que les autres piè
4534 tout leur logis — nous avions cru comprendre que les autres pièces étaient vides ou ne servaient que de débarras —, et rie
4535 ire soupçonner cette présence à côté. Hier matin, la mère Calixte arrive tout agitée : « Madame se meurt ! s’écrie-t-elle.
4536 se meurt ! s’écrie-t-elle. C’est Madame Bastide, la belle-mère. — Qu’a-t-elle ? — Oh, elle m’a bien reconnue, mais elle v
4537 uit, vous savez, elle est toute chargée, bou die, l’ estomac et tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle !
4538 toute chargée, bou die, l’estomac et tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissai
4539 parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissaient de l’ emballer, la vieille ! » Ils n’auront plus à languir bien longtemps. O
4540 e ! — Peuchère ! ils languissaient de l’emballer, la vieille ! » Ils n’auront plus à languir bien longtemps. On peut dire
4541 t plus à languir bien longtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effr
4542 gtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on l’ entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables discussions nous
4543 e est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simar
4544 bruit d’effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé, et on partage. C’est to
4545 é, et on partage. C’est toujours assez compliqué. La nuit, par un dernier respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour
4546 z compliqué. La nuit, par un dernier respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dan
4547 lent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans la remise qui est au-dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix n
4548 ence : sans auto, sans argent, sans amis proches, la solitude devient un isolement. Il y a « les gens », bien sûr. C’est i
4549 oches, la solitude devient un isolement. Il y a «  les gens », bien sûr. C’est instructif. Mais le désir de s’instruire a de
4550 a « les gens », bien sûr. C’est instructif. Mais le désir de s’instruire a des limites. Déjà les relations se stabilisent
4551 Mais le désir de s’instruire a des limites. Déjà les relations se stabilisent, les « courtes habitudes » épuisent leur ver
4552 a des limites. Déjà les relations se stabilisent, les « courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est le moment de lever s
4553 « courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est le moment de lever son camp. Plus tard, peut-être, quand toutes ces mais
4554 de se plaindre des villes, où ils s’incrustent — la province deviendra vivable. La révolution sera faite. Nous reviendron
4555 ils s’incrustent — la province deviendra vivable. La révolution sera faite. Nous reviendrons… — Demain, il faut remettre e
4556 reviendrons… — Demain, il faut remettre en place les aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, no
4557 Demain, il faut remettre en place les aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous
4558 emettre en place les aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous fuyons. 27. Mo
4559 . 27. Monsieur X… « orateur distingué », disait la convocation. 28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Rév
4560  orateur distingué », disait la convocation. 28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut c
4561 la convocation. 28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en so
4562 28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’appli
4563 et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’ application du style français à la chose militaire. 29. Ils ont donc
4564 st en somme que l’application du style français à la chose militaire. 29. Ils ont donc au moins 66 ans aujourd’hui, où l’
4565 29. Ils ont donc au moins 66 ans aujourd’hui, où l’ article paraît. m. Rougemont Denis de, «  Journal d’un intellectuel
14 1937, Articles divers (1936-1938). Lénine, Staline et la littérature (17 avril 1937)
4566 Lénine, Staline et la littérature (17 avril 1937)n Pour lutter contre le fascisme, les c
4567 ittérature (17 avril 1937)n Pour lutter contre le fascisme, les communistes paraissent avoir compris qu’il faut défendr
4568 7 avril 1937)n Pour lutter contre le fascisme, les communistes paraissent avoir compris qu’il faut défendre la culture.
4569 stes paraissent avoir compris qu’il faut défendre la culture. Le malheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense que de
4570 ent avoir compris qu’il faut défendre la culture. Le malheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense que des moyens fas
4571 r cette défense que des moyens fascistes. « Toute la littérature sociale-démocrate — écrit Lénine en 1905 déjà ! — doit de
4572 tion totalitaire ; dans un discours aux cadets de l’ Académie de l’Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans les circonst
4573 re ; dans un discours aux cadets de l’Académie de l’ Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans les circonstances actuelle
4574 de l’Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans les circonstances actuelles, les cadres décident de tout ! » Compris ? Ce
4575  : « Chez nous, dans les circonstances actuelles, les cadres décident de tout ! » Compris ? Ces deux phrases sont tirées d’
4576 d’un choix de propos de Lénine et de Staline Sur la littérature et l’art. Disons tout de suite que le Père des peuples n’
4577 pos de Lénine et de Staline Sur la littérature et l’ art. Disons tout de suite que le Père des peuples n’a fourni pour sa p
4578 la littérature et l’art. Disons tout de suite que le Père des peuples n’a fourni pour sa part qu’une dizaine de pages (sur
4579 e par sa veuve : « En Russie, Ilitch ne goûta pas l’ art nouveau, qui lui demeurait étranger. » Il préférait de beaucoup à
4580 étranger. » Il préférait de beaucoup à Maïakovski le « Salut au 17e » : Salut, salut à vous, braves soldats du 17e… ou e
4581 , salut à vous, braves soldats du 17e… ou encore la chanson patriotarde sur l’Alsace-Lorraine : Vous avez pu germaniser
4582 ats du 17e… ou encore la chanson patriotarde sur l’ Alsace-Lorraine : Vous avez pu germaniser nos plaines Mais notre cœ
4583 ermaniser nos plaines Mais notre cœur — vous ne l’ aurez jamais ! Dans un article de 1922, il loue cependant un poème de
4584 , il loue cependant un poème de Maïakovski contre les bureaucrates. Je n’appartiens pas, dit-il, aux admirateurs de son ta
4585 tratif. Dans son poème, il raille impitoyablement les réunions et se moque des communistes qui ne font que siéger et siéger
4586 siéger et siéger encore. Je ne sais ce qu’il faut penser de la poésie, mais pour ce qui est de la politique, je m’en porte gar
4587 siéger encore. Je ne sais ce qu’il faut penser de la poésie, mais pour ce qui est de la politique, je m’en porte garant, c
4588 faut penser de la poésie, mais pour ce qui est de la politique, je m’en porte garant, c’est parfaitement vrai. Voilà qui
4589 , c’est parfaitement vrai. Voilà qui donne toute la mesure (la dernière phrase surtout) de Lénine « fondateur de la nouve
4590 dernière phrase surtout) de Lénine « fondateur de la nouvelle culture ». Au moins, c’est franc, sans prétention, et cela r
4591 moins, c’est franc, sans prétention, et cela rend l’ homme plutôt sympathique. Mais, en 1935, le ton des « dirigeants » a b
4592 a rend l’homme plutôt sympathique. Mais, en 1935, le ton des « dirigeants » a bien changé. Voici ce qu’écrit, à cette date
4593 » a bien changé. Voici ce qu’écrit, à cette date, le Père des peuples, sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure le
4594 qu’écrit, à cette date, le Père des peuples, sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure le poète le meilleur, le pl
4595 sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure le poète le meilleur, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’i
4596 ême Maïakovski : Il a été et il demeure le poète le meilleur, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’indifféren
4597 i : Il a été et il demeure le poète le meilleur, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’indifférence à sa mémoi
4598 r, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’ indifférence à sa mémoire et à ses œuvres est un crime. Vous reconnai
4599 et à ses œuvres est un crime. Vous reconnaissez le ton du policier, et du fonctionnaire arrivé. « L’indifférence à ses œ
4600 le ton du policier, et du fonctionnaire arrivé. «  L’ indifférence à ses œuvres est un crime. » Heureusement pour lui que Lé
4601 st déjà mort et momifié ! Je ne sais quelle était l’ intention des éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à l’évid
4602 éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à l’ évidence que les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en gén
4603 istes de ce choix. Il en ressort à l’évidence que les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en général saines, ban
4604 sort à l’évidence que les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en général saines, banales, un peu courtes, et qu
4605 re et d’attardé, ou de brutalement primaire, pour le planifier à l’échelle de son empire national-socialiste. À nous de re
4606 , ou de brutalement primaire, pour le planifier à l’ échelle de son empire national-socialiste. À nous de relever la vraie
4607 son empire national-socialiste. À nous de relever la vraie défense de la culture, et d’une culture créatrice, novatrice, c
4608 socialiste. À nous de relever la vraie défense de la culture, et d’une culture créatrice, novatrice, contre ses fossoyeurs
4609 totalitaires, et contre ce distributeur de prix à l’ Académie de l’Armée rouge, l’homme des « cadres qui décident de tout »
4610 et contre ce distributeur de prix à l’Académie de l’ Armée rouge, l’homme des « cadres qui décident de tout ». n. Rougem
4611 stributeur de prix à l’Académie de l’Armée rouge, l’ homme des « cadres qui décident de tout ». n. Rougemont Denis de, «
4612 ». n. Rougemont Denis de, « Lénine, Staline et la littérature », À nous la liberté, Paris, 17 avril 1937, p. 10.
4613 de, « Lénine, Staline et la littérature », À nous la liberté, Paris, 17 avril 1937, p. 10.
15 1937, Articles divers (1936-1938). Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)
4614 Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)p L’énigme Vers 1813,
4615 Chamisso et le Mythe de l’ Ombre perdue (mai-juin 1937)p L’énigme Vers 1813, un personnag
4616 le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)p L’ énigme Vers 1813, un personnage assez hagard aborde l’imagination d
4617 e Vers 1813, un personnage assez hagard aborde l’ imagination de Chamisso ; il déclare avoir perdu son ombre. Le second
4618 feste une anxiété plus sérieusement troublante. «  L’ homme sans ombre » rôdait depuis longtemps dans les régions obscures d
4619 L’homme sans ombre » rôdait depuis longtemps dans les régions obscures de la légende populaire. S’il se risque à paraître d
4620 ait depuis longtemps dans les régions obscures de la légende populaire. S’il se risque à paraître devant Chamisso, c’est p
4621 aître devant Chamisso, c’est peut-être poussé par l’ envie d’être enfin deviné, expliqué. Chamisso est français de naissanc
4622 ntricité du sort a fait de lui un poète allemand. Les autres ont toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans le savoir
4623 toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans le savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de l’homme sa
4624 le savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de l’homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer au
4625 hamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de l’ homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer au soleil : c’e
4626 t le premier saisi par ce frisson d’absurdité que l’ on baptise inspiration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’épro
4627 piration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’ éprouve, le désir de s’en délivrer en l’exprimant. Et c’est ainsi que
4628 rsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’éprouve, le désir de s’en délivrer en l’exprimant. Et c’est ainsi que Chamisso in
4629 celui qui l’éprouve, le désir de s’en délivrer en l’ exprimant. Et c’est ainsi que Chamisso introduisit dans la conscience
4630 ant. Et c’est ainsi que Chamisso introduisit dans la conscience moderne le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous le
4631 e Chamisso introduisit dans la conscience moderne le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques e
4632 ntroduisit dans la conscience moderne le mythe de l’ homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques et naïfs du c
4633 e le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques et naïfs du célèbre Peter Schlemihl. De Chamisso à
4634 êle une assez opaque science, sans détriment pour le mystère, qui reste entier. Cependant, à voir tant d’auteurs s’exercer
4635 ntier. Cependant, à voir tant d’auteurs s’exercer l’ imagination sur un sujet qui défie l’expérience, l’on s’étonne qu’aucu
4636 rs s’exercer l’imagination sur un sujet qui défie l’ expérience, l’on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justif
4637 ’imagination sur un sujet qui défie l’expérience, l’ on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier. L’on s’ét
4638 qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier. L’ on s’étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formuler le symbole enfe
4639 étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formuler le symbole enfermé dans le mythe. Serait-ce pudeur d’artistes ? Pudeur t
4640 n’ait essayé de formuler le symbole enfermé dans le mythe. Serait-ce pudeur d’artistes ? Pudeur tout court ? Ou faut-il c
4641 eurs contes sans jamais se poser de questions sur le sens d’un tel accident — dont à vrai dire les suites sont assez pitto
4642 sur le sens d’un tel accident — dont à vrai dire les suites sont assez pittoresques pour qu’un « poète » — au sens banal d
4643 e » — au sens banal du terme — préfère en ignorer la cause ? L’on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et
4644 ns banal du terme — préfère en ignorer la cause ? L’ on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et l’expressi
4645 r la cause ? L’on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et l’expression littéraire du mythe : Chamisso, An
4646 e enfin de ce lien entre le domaine germanique et l’ expression littéraire du mythe : Chamisso, Andersen, Hofmannsthal, et
4647 , Hofmannsthal, et bien d’autres imitateurs, dont le moindre n’est pas Hoffmann… ⁂ L’énigme commença de m’inquiéter lors d
4648 imitateurs, dont le moindre n’est pas Hoffmann… ⁂ L’ énigme commença de m’inquiéter lors d’un séjour allemand au cours duqu
4649 emand au cours duquel je pus observer mainte fois l’ extraordinaire popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à l’Opér
4650 popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à l’ Opéra. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas le livret d’Hofm
4651 a. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas le livret d’Hofmannsthal, et compris mal l’intrigue de la Femme sans omb
4652 sais pas le livret d’Hofmannsthal, et compris mal l’ intrigue de la Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la sc
4653 vret d’Hofmannsthal, et compris mal l’intrigue de la Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la scène en hurlant
4654 Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la scène en hurlant : elle tirait après soi un grand morceau d’étoffe qu
4655 grand morceau d’étoffe qui figurait son ombre et l’ embarrassait fort. Aux entractes, on parlait de Freud. La musique m’en
4656 rassait fort. Aux entractes, on parlait de Freud. La musique m’ennuyait, indéfinie. Plus tard je lus le livre qui me parut
4657 a musique m’ennuyait, indéfinie. Plus tard je lus le livre qui me parut splendide… Qu’est-ce qu’une ombre ? me demandais-j
4658 e demandais-je. Quelque chose d’assez méprisable. Les Latins la ridiculisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est
4659 -je. Quelque chose d’assez méprisable. Les Latins la ridiculisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus que l
4660 sable. Les Latins la ridiculisent. C’est pour eux l’ irréalité même. (« Il n’est plus que l’ombre de lui-même ! ») Mais je
4661 t pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus que l’ ombre de lui-même ! ») Mais je vois bien qu’ils exagèrent : si nous ét
4662 purs esprits, nous ne projetterions pas d’ombre. L’ ombre est la preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du
4663 s, nous ne projetterions pas d’ombre. L’ombre est la preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du moins qui, p
4664 pas d’ombre. L’ombre est la preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans le
4665 air — humiliante pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans le monde des dieux, voudraient bien être pris pour des ge
4666 e pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans le monde des dieux, voudraient bien être pris pour des gens raisonnables
4667 pris pour des gens raisonnables. Voilà pourquoi, pensais -je, ils méprisent l’ombre, et la mésestiment gravement. Mais encore ?
4668 nables. Voilà pourquoi, pensais-je, ils méprisent l’ ombre, et la mésestiment gravement. Mais encore ? Ils en ont tous une,
4669 à pourquoi, pensais-je, ils méprisent l’ombre, et la mésestiment gravement. Mais encore ? Ils en ont tous une, et s’entend
4670 u plaisir que dispense un corps. Ils prisent fort la « transparence », mais tolèrent très bien cette chair, — oui, même ce
4671 là qui déplorent qu’elle se fasse, aux regards de la convoitise, « opaque »36. Que pouvais-je tirer de tout cela ? Rien qu
4672 e tout cela ? Rien qu’une évidence assez pauvre : l’ ombre est le fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’es
4673 ? Rien qu’une évidence assez pauvre : l’ombre est le fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’est mourir, et
4674 vant, et sa présence si gênante, que je tentai de le contraindre, quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux. Il y avait la psy
4675 quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux. Il y avait la psychanalyse. Mais avant d’en venir à cette extrémité, on pouvait ess
4676 ssayer d’un pédantisme moins barbare. Je rédigeai la note qui suit, en m’appliquant à écarter les conseils de pitié que me
4677 igeai la note qui suit, en m’appliquant à écarter les conseils de pitié que me dictait mon cœur. Signalement de Peter Sc
4678 Peter Schlemihl Peter est un naïf : il croit à la fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à l’homme une dignité.
4679 fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à l’ homme une dignité. C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce, le
4680 sure à l’homme une dignité. C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie les bourgeois r
4681 C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient le sentim
4682 dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur. L
4683 pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur. Le diable sait cela : c’est par l
4684 D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur. Le diable sait cela : c’est par là qu’il le tient. Peter lui donne son o
4685 férieur. Le diable sait cela : c’est par là qu’il le tient. Peter lui donne son ombre contre une bourse magique, d’où il p
4686 Désormais riche, mais privé d’ombre, il se croit le maître du monde. Point du tout : on se moque de lui. Comblé, le voici
4687 onde. Point du tout : on se moque de lui. Comblé, le voici plus qu’avant inadmissible. Le complexe d’infériorité à peine d
4688 lui. Comblé, le voici plus qu’avant inadmissible. Le complexe d’infériorité à peine défait par la fortune subite, se renou
4689 ble. Le complexe d’infériorité à peine défait par la fortune subite, se renoue, cette fois-ci sans remède. Il ne tarde pas
4690 au délire de persécution. Tout effraye Peter, et le moleste en mille manières. Les jeux des enfants dans la rue, les vale
4691 t effraye Peter, et le moleste en mille manières. Les jeux des enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes q
4692 este en mille manières. Les jeux des enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout l
4693 mille manières. Les jeux des enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière
4694 Les jeux des enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et m
4695 s enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et même la clarté
4696 i le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et même la clarté de la lune. Il recherche la solitu
4697 il rencontre, surtout la lumière du jour, et même la clarté de la lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexio
4698 surtout la lumière du jour, et même la clarté de la lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexions désespérée
4699 jour, et même la clarté de la lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexions désespérées. Souvent il éclate e
4700 ions désespérées. Souvent il éclate en sanglots à l’ idée du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous les autres semb
4701 du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous les autres semblent détenir le secret, jalousement, méchamment, contre lu
4702 ce bonheur dont tous les autres semblent détenir le secret, jalousement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce l’est bie
4703 lousement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce l’ est bien pour eux, comme toutes les choses trop naturelles que l’on po
4704 ! Un secret, ce l’est bien pour eux, comme toutes les choses trop naturelles que l’on possède. Peter, lui, le connaît, mais
4705 eux, comme toutes les choses trop naturelles que l’ on possède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne c
4706 ses trop naturelles que l’on possède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient
4707 ossède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il l’ a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que
4708 on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que l’ on connaît, comme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc le typ
4709 Et perd-on ce que l’on connaît, comme Adam et Ève l’ innocence ?) Schlemihl est donc le type classique de l’homme qui perd
4710 mme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc le type classique de l’homme qui perd le contact social. L’or même ne su
4711 ocence ?) Schlemihl est donc le type classique de l’ homme qui perd le contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir t
4712 hl est donc le type classique de l’homme qui perd le contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts.
4713 classique de l’homme qui perd le contact social. L’ or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il les é
4714 t social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il les établit en apparences, mais dirait-on, san
4715 it pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il les établit en apparences, mais dirait-on, sans réciprocité. La moindre é
4716 en apparences, mais dirait-on, sans réciprocité. La moindre épreuve trahit cette fêlure : on aime Schlemihl pour tout ce
4717 pour tout ce qu’il a, qui n’est pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social le
4718 st pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social le plus réel ? Admettons que ce
4719 s femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtou
4720 endu, qui le devinent. Quel est le rapport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtout pour ce philisti
4721 pport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes les ruses de Peter échou
4722 t le mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes les ruses de Peter échouent devant cet obstacle dernier. Il a beau n’alle
4723 er. Il a beau n’aller que de nuit aux rendez-vous avec Mina. Le jour venu de signer le contrat, devant témoins, lorsque son
4724 au n’aller que de nuit aux rendez-vous avec Mina. Le jour venu de signer le contrat, devant témoins, lorsque son imposture
4725 aux rendez-vous avec Mina. Le jour venu de signer le contrat, devant témoins, lorsque son imposture éclate au grand soleil
4726 Mina s’écrie : « Oh ! mon pressentiment ! Oui, je le savais depuis longtemps, il n’a pas d’ombre ! » Que reste-t-il à un t
4727 a pas d’ombre ! » Que reste-t-il à un tel homme ? Le suicide ? Rien n’est plus loin de sa pensée. Sa vision du monde serai
4728 un philistin sans exigences, et qui veut croire à la vertu, — s’il n’y avait, au centre de lui-même, cette absence. En tou
4729 f en ce je ne sais quoi qui n’est rien et devient l’ essentiel, notre philistin méconnu se voit chassé de la communauté des
4730 entiel, notre philistin méconnu se voit chassé de la communauté des siens. Et par sa faute ! c’est là son amertume. Ici in
4731 sa faute ! c’est là son amertume. Ici intervient l’ évasion. Il achète — par économie — une paire de bottes usagées. Mais
4732 ottes usagées. Mais voilà bien sa chance, ce sont les bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à la vie, au voisinage e
4733 es bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à la vie, au voisinage et au dialogue. Son existence réelle se confond ave
4734 e et au dialogue. Son existence réelle se confond avec tous les vagabondages qu’il imagine. Il peut même retrouver une espèc
4735 alogue. Son existence réelle se confond avec tous les vagabondages qu’il imagine. Il peut même retrouver une espèce d’activ
4736 écanique : il dresse un vaste catalogue de toutes les plantes de la terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand n
4737 resse un vaste catalogue de toutes les plantes de la terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand nous perdons sa
4738 ve d’interprétation Je reproche pour ma part à la psychanalyse de flatter notre propension à localiser les symboles. Ca
4739 chanalyse de flatter notre propension à localiser les symboles. Car, pour la vie spirituelle, il n’est pas de lieux séparés
4740 re propension à localiser les symboles. Car, pour la vie spirituelle, il n’est pas de lieux séparés, on peut toujours pass
4741 ours passer de l’un à l’autre par quelque ruse de la métamorphose, qui est la vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lor
4742 utre par quelque ruse de la métamorphose, qui est la vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cel
4743 e ruse de la métamorphose, qui est la vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand l’inv
4744 oi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand l’ inverse est au moins aussi probable. Et quand rien ne dépend à coup sû
4745 rien ne dépend à coup sûr que du tout ? Ceci dit, la psychanalyse peut nous donner des descriptions utiles, et quelques « 
4746 xuelle »37. Nous venons de voir que Schlemihl est le type même de l’inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au so
4747 venons de voir que Schlemihl est le type même de l’ inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au soleil », et qui n
4748 ver sa place au soleil », et qui ne subsiste dans la compagnie de ses semblables que par un subterfuge toujours menacé. D’
4749 rration maximum. Pour confirmer notre soupçon sur la nature de cette aberration, il conviendrait de rappeler ici que Peter
4750 conviendrait de rappeler ici que Peter parvient à la cacher à tous sauf aux deux femmes qu’il voudrait épouser. Mais n’all
4751 it épouser. Mais n’allons pas conclure trop vite. Les états d’âme d’un malade ou d’un fou diffèrent-ils essentiellement des
4752 s à se muer en leur contraire ? Plus précisément, l’ état de Peter Schlemihl n’est-il pas comparable à celui d’un esprit et
4753 e à celui d’un esprit et d’un corps sains après «  l’ amour » ? Durant quelques moments, l’homme éprouve une sensation de vi
4754 ains après « l’amour » ? Durant quelques moments, l’ homme éprouve une sensation de vide, de légèreté et en même temps de l
4755 tait un peu en arrière des choses, lent à démêler le monde où il revient, et qui l’accable de présences bizarres, ou douce
4756 es, lent à démêler le monde où il revient, et qui l’ accable de présences bizarres, ou douces, mais aussi quelques fois, ho
4757 ence de ce qu’on nommera chez un malade, folie de la persécution). Il arrive aussi que cet homme se sente trop lucide, per
4758 , perçant toutes choses à jour, et lui-même, d’où l’ impression qu’il a d’être mal défendu contre les regards qu’il rencont
4759 où l’impression qu’il a d’être mal défendu contre les regards qu’il rencontre, transparent dirait-on, — sans ombre ! Voilà,
4760 ques qu’à des Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toutes les réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de la questi
4761 s Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toutes les réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de la question que nous
4762 réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de la question que nous posait l’origine germanique du mythe38. Dès le débu
4763 en nous souvenant de la question que nous posait l’ origine germanique du mythe38. Dès le début, j’avais pressenti qu’une
4764 nous posait l’origine germanique du mythe38. Dès le début, j’avais pressenti qu’une fable à ce point célèbre dans un peup
4765 er qu’un fait humain élémentaire. J’étais déçu de le voir se réduire à quelque chose d’aussi précis, et que mille préjugés
4766 asard à cette époque, vint heureusement me donner la clé d’une interprétation autrement riche et inquiétante. Je traduis c
4767 ce fragment littéralement : « On ne peut comparer la Liquor vitae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi,
4768 ment : « On ne peut comparer la Liquor vitae dans l’ homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vien
4769 tae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de l’homme et se forme d’après lui : te
4770 une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de l’ homme et se forme d’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est « l
4771 l’homme et se forme d’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est « l’ombre intérieure. » Une lecture plus poussée de P
4772 ’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est «  l’ ombre intérieure. » Une lecture plus poussée de Paracelse devait bient
4773 poussée de Paracelse devait bientôt m’apprendre, avec bien d’autres choses curieuses et profondes, que la portée de ce pass
4774 bien d’autres choses curieuses et profondes, que la portée de ce passage était en vérité beaucoup plus vaste que tout ce
4775 plus vaste que tout ce que permettait d’imaginer l’ obtus physiologisme de ce siècle. La « Liquor vitae », selon Paracelse
4776 it d’imaginer l’obtus physiologisme de ce siècle. La « Liquor vitae », selon Paracelse, c’est en effet le principe d’activ
4777 « Liquor vitae », selon Paracelse, c’est en effet le principe d’activité vitale répandu dans tous nos organes. Elle figure
4778 vitale répandu dans tous nos organes. Elle figure le « miroir auquel la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agen
4779 tous nos organes. Elle figure le « miroir auquel la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique, la
4780 el la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’ agent microcosmique, la puissance même de notre créativité dans tous l
4781 en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique, la puissance même de notre créativité dans tous les ordres. Elle est ce
4782 , la puissance même de notre créativité dans tous les ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans le corps tout entier
4783 ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans le corps tout entier et dans l’homme. » Je la rapproche alors de ce Selb
4784 a de plus noble dans le corps tout entier et dans l’ homme. » Je la rapproche alors de ce Selbst (ou soi-même) dont parle C
4785 e dans le corps tout entier et dans l’homme. » Je la rapproche alors de ce Selbst (ou soi-même) dont parle Chamisso vers l
4786 ce Selbst (ou soi-même) dont parle Chamisso vers la fin de son conte. Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39. La
4787 la fin de son conte. Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39. La créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui e
4788 . Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39. La créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui est vraiment grave da
4789 out ce qui est vraiment grave dans notre vie ; et la fameuse « question sexuelle » ne tire son importance démesurée que du
4790 ique du pouvoir créateur spirituel. Comme on peut le voir par l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’
4791 oir créateur spirituel. Comme on peut le voir par l’ examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup
4792 spirituel. Comme on peut le voir par l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres la c
4793 ar l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres la créativité paraît avoir son siège da
4794 it-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres la créativité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que la pudeur s’
4795 d’êtres la créativité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que la pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour
4796 ité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que la pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que
4797 sée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que l’ homme cherche à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les
4798 -ce point pour cette raison que l’homme cherche à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les deux fils de Noé
4799 e dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les deux fils de Noé couvrirent la nudité de leur père ivre en marchant v
4800 de sacré, et que les deux fils de Noé couvrirent la nudité de leur père ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez
4801 ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez l’ homme qui parvient à la conscience de sa mission spirituelle, le centr
4802 lui à reculons ? Mais chez l’homme qui parvient à la conscience de sa mission spirituelle, le centre de la créativité para
4803 rvient à la conscience de sa mission spirituelle, le centre de la créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le
4804 onscience de sa mission spirituelle, le centre de la créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur. La pud
4805 e centre de la créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les se
4806 tivité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle
4807 raît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle « d’étala
4808 rveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle « d’étalage impudique » lorsqu’un au
4809 ns le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle « d’étalage impudique » lorsqu’un auteur exhibe
4810 (Il peut être d’ailleurs, au sens courant du mot, le plus « pudibond » des bourgeois : un Amiel). Cependant ces remarques
4811 . Cependant ces remarques n’expliquent pas encore l’ essentiel. Que l’on cache son secret le plus profond, le plus sacré, q
4812 emarques n’expliquent pas encore l’essentiel. Que l’ on cache son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir
4813 pas encore l’essentiel. Que l’on cache son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on
4814 ntiel. Que l’on cache son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on possède, c’est na
4815 on secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on possède, c’est naturel ; mais non du tou
4816 le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’ on possède, c’est naturel ; mais non du tout qu’on en ait honte, sembl
4817 tout qu’on en ait honte, semble-t-il. En vérité, la mauvaise pudeur provient de ce que le corps et l’âme se distinguent d
4818 En vérité, la mauvaise pudeur provient de ce que le corps et l’âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être refl
4819 la mauvaise pudeur provient de ce que le corps et l’ âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être reflets l’un de
4820 et cessent d’être reflets l’un de l’autre. Alors le corps a honte de sa pensée, et celle-ci des désirs de son corps — com
4821 ssement sans amour, ou d’un amour qui se refuse à l’ étreinte. Et pourquoi la pudeur cesse-t-elle d’exister — normalement —
4822 ’un amour qui se refuse à l’étreinte. Et pourquoi la pudeur cesse-t-elle d’exister — normalement — quand deux êtres s’aime
4823 rmalement — quand deux êtres s’aiment ? Parce que le sexe reprend alors sa « propriété » symbolique. (Ce qui est douteux,
4824 , m’est étranger). Revenons alors à notre mythe : la transparence, c’est l’absence d’ombre, donc de secret. Or le secret «
4825 nons alors à notre mythe : la transparence, c’est l’ absence d’ombre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant le lieu
4826 ence, c’est l’absence d’ombre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, cel
4827 bre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre,
4828 e secret. Or le secret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre, se promène
4829 ret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre, se promène parmi les hommes av
4830 ne, celui qui a perdu son ombre, se promène parmi les hommes avec l’angoisse de voir révélée au grand jour non son secret,
4831 ui a perdu son ombre, se promène parmi les hommes avec l’angoisse de voir révélée au grand jour non son secret, mais justeme
4832 perdu son ombre, se promène parmi les hommes avec l’ angoisse de voir révélée au grand jour non son secret, mais justement
4833 élée au grand jour non son secret, mais justement l’ absence en lui de son secret, sa transparence : spirituellement, ou de
4834 e autre sorte, il n’est plus un homme créateur. À l’ inverse, la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme son
4835 te, il n’est plus un homme créateur. À l’inverse, la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme son élan vers
4836 la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’ homme son élan vers le monde. Elle le porte au-devant de tout, comme u
4837 le ou corporelle) rénove en l’homme son élan vers le monde. Elle le porte au-devant de tout, comme un peu en avant de lui-
4838 e) rénove en l’homme son élan vers le monde. Elle le porte au-devant de tout, comme un peu en avant de lui-même, là où il
4839 vant de lui-même, là où il peut dominer sa vie et la construire avec tout son instinct à l’image d’une vision de l’esprit.
4840 me, là où il peut dominer sa vie et la construire avec tout son instinct à l’image d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul
4841 sa vie et la construire avec tout son instinct à l’ image d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme
4842 avec tout son instinct à l’image d’une vision de l’ esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’u
4843 son instinct à l’image d’une vision de l’esprit. ( L’ esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de l
4844 ge d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit
4845 ion de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’ âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit offensif et
4846 seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’ unisson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se s
4847 e corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein d
4848 âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’ esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein dans sa peau »
4849 sson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein dans sa peau », partagent les richesses du
4850 rps qui se sent « plein dans sa peau », partagent les richesses du désir. Et l’homme a retrouvé son ombre. Suite et fin
4851 s sa peau », partagent les richesses du désir. Et l’ homme a retrouvé son ombre. Suite et fin de la fable Peter Schle
4852 l’homme a retrouvé son ombre. Suite et fin de la fable Peter Schlemihl nous apparaît maintenant une émouvante et tr
4853 nant une émouvante et très précise description de l’ individu romantique, dans ce qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à
4854 qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à saisir le monde pour le former à son image40, et d’évasif devant sa vocation :
4855 missionnaire, d’impuissant à saisir le monde pour le former à son image40, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de
4856 r à son image40, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les trait
4857 0, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de l’ incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les traits physiques et
4858 l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les traits physiques et moraux de ce que l’on appellera plus tard le vagu
4859 ter tous les traits physiques et moraux de ce que l’ on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague
4860 ques et moraux de ce que l’on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hof
4861 aux de ce que l’on appellera plus tard le vague à l’ âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal
4862 plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le
4863 à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le tourment d’une fem
4864 e roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le tourment d’une femme stérile, l’impératrice qui a perdu son ombre et
4865 épreuve — décrit le tourment d’une femme stérile, l’ impératrice qui a perdu son ombre et qui emprunte celle d’une fille du
4866 rsen, comme on pouvait s’y attendre, fait dominer l’ aspect « spirituel » du mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole
4867 ner l’aspect « spirituel » du mythe. Son conte de l’ Ombre, c’est le symbole de la puissance de création qui vient à se dét
4868 spirituel » du mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole de la puissance de création qui vient à se détacher de l’aute
4869 mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole de la puissance de création qui vient à se détacher de l’auteur pour prendr
4870 puissance de création qui vient à se détacher de l’ auteur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et le poème ensuite —
4871 à se détacher de l’auteur pour prendre corps dans l’ œuvre poétique. Et le poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’i
4872 teur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et le poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’individu qui l’a conçu
4873 t le poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’ individu qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrait p
4874 ite — plus beau et plus vivant que l’individu qui l’ a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrait puissant d’un dé
4875 qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’ attrait puissant d’un désir — reviendra s’asservir le poète… ⁂ C’est u
4876 ttrait puissant d’un désir — reviendra s’asservir le poète… ⁂ C’est une des gloires du romantisme allemand que d’avoir su
4877 ires du romantisme allemand que d’avoir su élever les faiblesses de l’homme, et quelques-unes de ses plus folles illusions,
4878 allemand que d’avoir su élever les faiblesses de l’ homme, et quelques-unes de ses plus folles illusions, à la hauteur du
4879 et quelques-unes de ses plus folles illusions, à la hauteur du mythe, et de la Fable, plus profondément vrais que la vie.
4880 us folles illusions, à la hauteur du mythe, et de la Fable, plus profondément vrais que la vie. (Plus riches d’enseignemen
4881 ythe, et de la Fable, plus profondément vrais que la vie. (Plus riches d’enseignements concrets, et d’invites à la métamor
4882 s riches d’enseignements concrets, et d’invites à la métamorphose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est le paradoxe
4883 phose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est le paradoxe génial, l’audace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso
4884 rme ce qui nous défait, c’est le paradoxe génial, l’ audace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso. Les amateurs d’abs
4885 dace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso. Les amateurs d’absurdités lyriques, j’en suis parfois, devraient se garde
4886 t à leur coutume qu’une « fantaisie gratuite » de l’ art. Nul doute que l’art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleu
4887 ne « fantaisie gratuite » de l’art. Nul doute que l’ art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleurs qu’il soit vraimen
4888 son image, il en diffère toutefois par ceci qu’il l’ a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont la nouveauté reste en
4889 ’a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont la nouveauté reste entière. Et j’y songe : ce Schlemihl éternel, ce symb
4890 ieues qui traverse encore notre vie, n’est-ce pas l’ ombre de Chamisso ? Une ombre qui a perdu son homme, cette fois, mais
4891 te fois, mais non pas ses charmes profonds. C’est le siècle où je vis qui n’a plus d’ombre, et c’est pour lui que je garde
4892 s, il veut du vraisemblable ! Il est retombé dans le roman insignifiant. P.-S. Je n’ai pas voulu alourdir cette esquisse
4893 ut un appareil de références bibliographiques. On les trouve d’ailleurs réunies dans le Don Juan d’Otto Rank (Stock). Cet é
4894 graphiques. On les trouve d’ailleurs réunies dans le Don Juan d’Otto Rank (Stock). Cet érudit psychanalyste ne recense pas
4895 ne cinquantaine d’auteurs célèbres qui ont traité le mythe de l’ombre perdue dans leurs romans, pièces, ou contes fantasti
4896 ine d’auteurs célèbres qui ont traité le mythe de l’ ombre perdue dans leurs romans, pièces, ou contes fantastiques. Notons
4897 français. Encore ceux-ci s’orientent plutôt vers l’ aspect individuel du mythe de l’ombre, rejoignant le mythe voisin du d
4898 ntent plutôt vers l’aspect individuel du mythe de l’ ombre, rejoignant le mythe voisin du double. (Maupassant par exemple).
4899 aspect individuel du mythe de l’ombre, rejoignant le mythe voisin du double. (Maupassant par exemple). Barrès, dans ses Ca
4900 par exemple). Barrès, dans ses Cahiers, recueille la lettre d’un descendant français de Chamisso, selon lequel l’idée de P
4901 ’un descendant français de Chamisso, selon lequel l’ idée de Peter Schlemihl aurait été donnée à son auteur par un de ses p
4902 un de ses parents, au cours d’un séjour à Paris. L’ origine du conte célèbre serait donc bien française, et Barrès s’en ré
4903 t Barrès s’en réjouit. Il va jusqu’à soutenir que l’ ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par Cha
4904 Il va jusqu’à soutenir que l’ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents r
4905 soutenir que l’ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents réunis par Rank
4906 ole de la patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents réunis par Rank — et que j’ignorais d’ailleurs au moment où
4907 e nationaliste. Rank insiste longuement, comme je l’ ai fait, sur l’antiquité nordique du mythe, auquel se rattachent de tr
4908 Rank insiste longuement, comme je l’ai fait, sur l’ antiquité nordique du mythe, auquel se rattachent de très nombreuses c
4909 je convoite se fait opaque, par cela même que je le convoite… », A. Gide : Les Nouvelles Nourritures. 37. Freud : Trois
4910 e, par cela même que je le convoite… », A. Gide : Les Nouvelles Nourritures. 37. Freud : Trois essais sur la théorie de la
4911 velles Nourritures. 37. Freud : Trois essais sur la théorie de la sexualité. La définition du normal est donc ici : adapt
4912 ures. 37. Freud : Trois essais sur la théorie de la sexualité. La définition du normal est donc ici : adapté au milieu so
4913 ud : Trois essais sur la théorie de la sexualité. La définition du normal est donc ici : adapté au milieu social. Qui ne v
4914 ourrait tirer de cette « vérité d’expérience » si l’ on voulait en faire une règle, comme nous en menacent les conformismes
4915 oulait en faire une règle, comme nous en menacent les conformismes totalitaires ? On ne peut accepter une « vérité » de ce
4916 er une « vérité » de ce genre qu’en insistant sur le contraire : l’anormal peut être créateur d’un nouveau type de rapport
4917  » de ce genre qu’en insistant sur le contraire : l’ anormal peut être créateur d’un nouveau type de rapports sociaux, c’es
4918 c’est-à-dire d’une nouvelle normalité. 38. Dans le conte intitulé « l’Ombre », Andersen raconte comment un philosophe « 
4919 nouvelle normalité. 38. Dans le conte intitulé «  l’ Ombre », Andersen raconte comment un philosophe « Venant des froides r
4920 ne femme qu’il perçoit de sa fenêtre. « Mais dans les climats chauds, les choses croissent très vite, et après qu’une semai
4921 it de sa fenêtre. « Mais dans les climats chauds, les choses croissent très vite, et après qu’une semaine eut passé, il vit
4922 commençait à croître lorsqu’il se promenait dans le soleil. » Ici donc, pas de fixation morbide, comme dans Schlemihl. Au
4923 xation morbide, comme dans Schlemihl. Aussi bien, le diable n’est-il pas dans l’affaire, cette fois-ci. 39. Selon Paracel
4924 chlemihl. Aussi bien, le diable n’est-il pas dans l’ affaire, cette fois-ci. 39. Selon Paracelse toujours, l’élément sexue
4925 re, cette fois-ci. 39. Selon Paracelse toujours, l’ élément sexuel se distingue de la Liquor vitae « comme l’écume d’une s
4926 acelse toujours, l’élément sexuel se distingue de la Liquor vitae « comme l’écume d’une soupe ». La créativité se purifie
4927 nt sexuel se distingue de la Liquor vitae « comme l’ écume d’une soupe ». La créativité se purifie donc en le localisant. I
4928 de la Liquor vitae « comme l’écume d’une soupe ». La créativité se purifie donc en le localisant. Il paraît alors que le f
4929 e d’une soupe ». La créativité se purifie donc en le localisant. Il paraît alors que le freudisme ne s’occupe que de l’écu
4930 urifie donc en le localisant. Il paraît alors que le freudisme ne s’occupe que de l’écume d’une soupe ! (ou bien l’appelle
4931 paraît alors que le freudisme ne s’occupe que de l’ écume d’une soupe ! (ou bien l’appelle-t-il libido ?). 40. Ces traits
4932 ne s’occupe que de l’écume d’une soupe ! (ou bien l’ appelle-t-il libido ?). 40. Ces traits ne sauraient définir qu’un asp
4933 bien d’autres, et de tout contraire parfois : que l’ on songe à Hegel, à Fichte, à Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Cha
4934 Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue », Les Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 19
4935 p. Rougemont Denis de, « Chamisso et le Mythe de l’ Ombre perdue », Les Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 1937, p. 282‑2
4936 s de, « Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue », Les Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 1937, p. 282‑291.
16 1937, Articles divers (1936-1938). Journal d’un intellectuel en chômage (25 juillet 1937)
4937 novembre 1933 Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé d
4938 embre 1933 Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la main . Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans l
4939 ne, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux trétea
4940 table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ; j’ai dressé cela
4941 planches bien rabotées ; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je l
4942  ; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la c
4943 verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
4944 vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du p
4945 r de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à d
4946 du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager,
4947 une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bo
4948 lle chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de ro
4949 er, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers. L’ allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par d
4950 osent de tous côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel la
4951 côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oi
4952 uste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oiseaux, et parfois traversé par
4953 , et de petites dunes broussailleuses qui ferment l’ horizon bas. Peu de terre et beaucoup de ciel, et partout cette humide
4954 met des ombres si légères, vertes et bleues, sur les murailles rosées. La maison compte deux chambres au rez-de-chaussée,
4955 ères, vertes et bleues, sur les murailles rosées. La maison compte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisin
4956 pte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un peti
4957 e, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’ étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la
4958 de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’ on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deu
4959 rvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deux autres chambres assez vastes et presque vides, auxquell
4960 hambres assez vastes et presque vides, auxquelles le toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’aime. Des murs bla
4961 et gai, oui vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de lau
4962 i vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier. On di
4963 ne pénétrante odeur de laurier. On distingue dans l’ ombre des amas de branchages, des outils et des treilles pour la pêche
4964 as de branchages, des outils et des treilles pour la pêche aux crevettes. Je me suis procuré un petit tonneau de vin blanc
4965 me suis procuré un petit tonneau de vin blanc de l’ île. C’est un clairet assez acide, qui laisse peut-être un léger goût
4966 qui laisse peut-être un léger goût iodé, au moins l’ on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablon
4967 re un léger goût iodé, au moins l’on est tenté de l’ imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume
4968 oût iodé, au moins l’on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume avec du vare
4969 la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’ on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux ri
4970 roît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux rien dire enco
4971 n sol sablonneux que l’on fume avec du varech. De l’ île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse to
4972 ’on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse tout cela se mêler à ma
4973 ore : je laisse tout cela se mêler à ma vie, dans l’ heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour mes pensées, je le
4974 mêler à ma vie, dans l’heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de p
4975 ment de la lumière maritime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de petits exercices formels, sans nul rapport a
4976 t à de petits exercices formels, sans nul rapport avec ce beau vertige de liberté. Depuis six jours que nous sommes arrivés,
4977 six jours que nous sommes arrivés, je n’ai lu que les Règles de Descartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le temp
4978 scartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le temps avant un rendez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts avec
4979 rendez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts avec les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la p
4980 ez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts avec les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte
4981 novembre 1933 Premiers contacts avec les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte, on enfile
4982 village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte, on enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse
4983 enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cet
4984 etite rue toute blanche qui contourne la panse de l’ église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qu
4985 qui contourne la panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangl
4986 place, qui est un vaste rectangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme
4987 tangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, m
4988 habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux exemplaire dans
4989 dans sa symétrie architecturale. Il domine toutes les maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le
4990 e architecturale. Il domine toutes les maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
4991 ocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style rom antique, avec tous ses détails et toute so
4992 l au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style rom antique, avec tous ses détails et toute son opulence, frisé
4993 e voudrais le dessiner dans le style rom antique, avec tous ses détails et toute son opulence, frisé comme une perruque du g
4994 e une perruque du grand siècle. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, pei
4995 le. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, peintes en tons clairs et simple
4996 en tons clairs et simples, blanc, jaune ou vert. La couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’une manière subti
4997 jaune ou vert. La couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’une manière subtile et précise qui en dit long sur l’
4998 ne manière subtile et précise qui en dit long sur l’ âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour
4999 en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est l’ impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle cor
5000 cret. C’est l’impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée
5001 tenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée notre épicière. Car il faut bien, héla
5002 épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par l’ épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est én
5003 hélas, commencer par l’épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a de
5004 cer par l’épicière, quand on aborde le village où l’ on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dan
5005 est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dans les jambes, et m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens b
5006 bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer le prix du chou-fleur, des enveloppes jaunes, du peloton de ficelle et d
5007 lo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne la renseignent pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manif
5008 s râpés, ne la renseignent pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’hive
5009 nt. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste l’ intention de rester ici tout l’hiver ? — C’est plutôt en été qu’on vie
5010 en » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’ hiver ? — C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prud
5011 chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’
5012 m’en demander davantage. Et moi, je recule devant l’ entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’e
5013 i, je recule devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écri
5014 rire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour les journaux, sans doute, mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pay
5015 s il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays… Je l’ ai laissée en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les c
5016 en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que
5017 lein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je s
5018 ment avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujo
5019 ence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiver elle fait pe
5020 le fait peu de réserves de produits alimentaires, les habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainag
5021 les habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’autre
5022 es épices. Alors il faut aller de l’autre côté de la place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’être vu par l’une,
5023 , entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me l’ a dit. Car elles ne baisseront pas leurs prix pour garder un client, e
5024 eront pas leurs prix pour garder un client, elles les augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans comp
5025 n client, elles les augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueil
5026 Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par la réprobation sournoise d’une épicière. 21 novembre 1933 Le bureau de p
5027 bation sournoise d’une épicière. 21 novembre 1933 Le bureau de poste. — Trois mètres sur trois, et grille épaisse au milie
5028 sur trois, et grille épaisse au milieu. Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
5029 et grille épaisse au milieu. Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Tr
5030 rière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’ impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il
5031 ge de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande
5032 i l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenan
5033 Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenant un manuscrit. Est-ce une lettre ? — No
5034 — Non. — Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a d
5035 à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit
5036 a machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main  ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit pour
5037 la main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit pour la nième fois son tarif, fait son calcul su
5038 main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main . Pédenaud relit pour la nième fois son tarif, fait son calcul sur un
5039 orrections écrites à la main. Pédenaud relit pour la nième fois son tarif, fait son calcul sur un bout de papier, et concl
5040 llets. Il en paraît lui-même consterné. J’affirme avec vivacité que ça ne peut pas aller. Il faut tout recommencer. Finaleme
5041 t pas aller. Il faut tout recommencer. Finalement l’ on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port :
5042 out recommencer. Finalement l’on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port : quatre francs soixant
5043 aleur. Port : quatre francs soixante-quinze. Dans l’ après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte
5044 tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’
5045 able, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une
5046 tification officielle d’avoir à verser sans délai la somme de Fr. 67.25 restant due sur l’envoi de ce matin. En effet, Péd
5047 sans délai la somme de Fr. 67.25 restant due sur l’ envoi de ce matin. En effet, Pédenaud, qui a voulu en avoir le cœur ne
5048 e matin. En effet, Pédenaud, qui a voulu en avoir le cœur net, a pris des instructions par téléphone au chef-lieu. Son sup
5049 rcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’ autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut t
5050 oche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu,
5051 ilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’ autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu, faire rouvri
5052 téléphoner au chef-lieu, faire rouvrir au passage le sac postal, discuter passionnément, trouver une formule d’apaisement
5053 rouver une formule d’apaisement qui ménage toutes les susceptibilités, et finalement ne rien payer de plus. Je note ceci pa
5054 ne assez typique du malentendu qui apparaît entre les gens d’ici et moi dès qu’il s’agit de mon travail et de ses condition
5055 nuis sans gravité, bien sûr. Mais quel drame dans la vie d’un buraliste de recette auxiliaire ! Depuis lors, il rougit et
5056 des lessives. En été ils pêchent des palourdes et les vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien
5057 agère, même pour un riche. Je me sens rejeté dans la catégorie bourgeoise. Ma bonne conscience de pauvre n’aura pas duré b
5058 as duré bien longtemps. 16 décembre 1933 Derrière la même pile d’assiettes où je crois avoir déjà dit que j’avais trouvé d
5059 e, j’ai déniché ce matin une édition populaire de La Naissance du jour, de Colette. Je n’avais pas encore lu ce livre. Il
5060 vais pas encore lu ce livre. Il est exactement de l’ espèce que j’aime, et l’un des plus charmants dans cette espèce, mais
5061 ur une raison très précise et qui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les y
5062 e raison très précise et qui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux
5063 ui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils dé
5064 voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’ édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comm
5065 ttéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces d’un hérisson
5066 les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces d’un hérisson mort. » Cette phrase a fait dans mon esprit ce qu
5067 mon compte, j’en ai pris sept sur mon pyjama dans l’ espace de deux minutes, ce qui doit constituer une sorte de record. D’
5068 ituer une sorte de record. D’autres sautaient sur le couvre-pied. D’autres sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comm
5069 autres sautaient sur le couvre-pied. D’autres sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue
5070 sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue nous voir la veille, nous ne cherchâmes pas p
5071 large. Comme la mère Renaud était venue nous voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il es
5072 voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il est vrai qu’on a beau porter un nombre excessi
5073 petit hérisson était venu se mettre en boule dans la plate-bande qui borde la maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très v
5074 se mettre en boule dans la plate-bande qui borde la maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très vite, il avait l’air malad
5075 e. Il soufflait très vite, il avait l’air malade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépul
5076 ès vite, il avait l’air malade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépulture, caché sous d
5077 alade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je l’ avais oublié là, sans sépulture, caché sous des feuillages brunis. Si
5078 caché sous des feuillages brunis. Si j’ajoute que la porte d’entrée joint mal le seuil, tout s’explique sans peine désorma
5079 unis. Si j’ajoute que la porte d’entrée joint mal le seuil, tout s’explique sans peine désormais, grâce à la phrase de Col
5080 il, tout s’explique sans peine désormais, grâce à la phrase de Colette. Je rapporte cette anecdote parce qu’elle comporte
5081 necdote parce qu’elle comporte une conclusion qui la dépasse d’ailleurs notablement et qui me paraît assez frappante. Voic
5082 s, je viens de trouver dans un ouvrage littéraire la solution d’une question précise. Grâce à Colette, je sais maintenant
5083 l’air de rien, mais je vois là comme un symbole. Les livres devraient être utiles. 23 décembre 1933 J’écris ceci sur une t
5084 933 J’écris ceci sur une table de café. À travers la vitrine, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche
5085 une table de café. À travers la vitrine, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche de notre île, et où
5086 ne, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche de notre île, et où nous devons encore passer deux heures
5087 ous devons encore passer deux heures en attendant le départ de l’autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis u
5088 core passer deux heures en attendant le départ de l’ autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis un bon moment
5089 epuis un bon moment déjà, tout contents de revoir le va-et-vient d’un lieu public, de lire les journaux de Paris et de fum
5090 e revoir le va-et-vient d’un lieu public, de lire les journaux de Paris et de fumer des cigarettes américaines au goût de m
5091 es américaines au goût de miel, introuvables dans l’ île. Pendant que ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer le fi
5092 e ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer le fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de notre pr
5093 fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’ échec de notre première tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à
5094 z vite ce qu’il nous fallait pour subsister après l’ épuisement de notre réserve. J’ai travaillé beaucoup, mais je ne serai
5095 uand on n’a plus rien. Pour celui qui vit au jour le jour, il s’agit essentiellement d’éviter les lacunes de cette sorte.
5096 jour le jour, il s’agit essentiellement d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que l’on nomme « difficultés de trésoreri
5097 ment d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que l’ on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient ici,
5098 que l’on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient ici, évidemment, un obstacle absolu.) Assuré au moi
5099 au moins de quelque argent à venir, j’ai accepté l’ invitation d’un ami qui nous offre de passer trois semaines chez lui.
5100 bite à une petite journée de voyage de notre île. La leçon pratique de cette première expérience de deux mois, c’est que l
5101 cette première expérience de deux mois, c’est que la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode, et
5102 est que la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’attaque, pr
5103 berté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’attaque, prévoyant à un jo
5104 il faut la conquérir avec méthode, et organiser à l’ avance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée d
5105 vance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier de ma retraite
5106 s de, «  Journal d’un intellectuel en chômage  », La Revue du dimanche, supplément hebdomadaire de la Revue de Lausanne ,
5107 La Revue du dimanche, supplément hebdomadaire de la Revue de Lausanne , Lausanne, 25 juillet 1937, p. 1. r. Précédé de l
5108 , Lausanne, 25 juillet 1937, p. 1. r. Précédé de la note suivante : « Par les soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, pa
5109 37, p. 1. r. Précédé de la note suivante : « Par les soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, paraîtra très prochainement
5110 Précédé de la note suivante : « Par les soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, paraîtra très prochainement un ouvrage d
5111 ès prochainement un ouvrage de notre compatriote, l’ excellent écrivain neuchâtelois Denis de Rougement : Journal d’un int
5112 : Journal d’un intellectuel en chômage . Grâce à la complaisance du directeur de la Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes en
5113 chômage . Grâce à la complaisance du directeur de la Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs
5114 ud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs la primeur de quelques pages de ce livre. Dans ces pages, l’auteur peint
5115 ur de quelques pages de ce livre. Dans ces pages, l’ auteur peint notamment le milieu où il s’est retiré, une petite île ve
5116 e livre. Dans ces pages, l’auteur peint notamment le milieu où il s’est retiré, une petite île vendéenne. »
17 1937, Articles divers (1936-1938). Extraits de… Journal d’un intellectuel en chômage (15 août 1937)
5117 Il faut parler des « autocars ». Je ne sais si l’ on se doute à Paris de l’importance des autocars et des transformation
5118 utocars ». Je ne sais si l’on se doute à Paris de l’ importance des autocars et des transformations qu’ils sont en train de
5119 ansformations qu’ils sont en train de causer dans la vie provinciale. Je n’ai pas compté le nombre de lignes actuellement
5120 auser dans la vie provinciale. Je n’ai pas compté le nombre de lignes actuellement exploitées. Mais j’ai pu constater dans
5121 j’ai pu constater dans plusieurs départements de l’ Ouest qu’il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une
5122 t modifier plus rapidement et plus profondément «  la coutume » de la France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire :
5123 rapidement et plus profondément « la coutume » de la France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’autocar modifi
5124 nce rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’ autocar modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et l
5125 ncore assez dire : l’autocar modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, qua
5126 car modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, quand on n’avait que les che
5127 plètement le mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, quand on n’avait que les chemins de fer, to
5128 la province. Naguère encore, quand on n’avait que les chemins de fer, tout convergeait vers Paris, non seulement du fait d’
5129 viaire centralisée, mais encore sentimentalement. Le confort relatif des grandes lignes indiquait qu’on allait à Paris ou
5130 ait qu’on allait à Paris ou qu’on en venait. Tout le reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’on se
5131 reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’ heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulatio
5132 t que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’ on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on n
5133 s, jamais à l’heure, où l’on se sentait relégué à l’ écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gar
5134 l’heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gares, ce qu’i
5135 relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’ on ne voyait guère que des gares, ce qu’il y a de plus attristant dans
5136 plus attristant dans chaque village. Aujourd’hui, les stations d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on p
5137 ge. Aujourd’hui, les stations d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on part au milieu d’une grande afflu
5138 rrive à grands sons de trompe, c’est enfin ce que l’ on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insu
5139 ands sons de trompe, c’est enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la v
5140 t enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle la trave
5141 pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans ten
5142 était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans tenir compte de ses circ
5143 e locale ; elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans tenir compte de ses circonstances. Sur ses bords ne vivait
5144 s ne vivait qu’une population nomade, qui portait l’ uniforme de l’État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois
5145 ’une population nomade, qui portait l’uniforme de l’ État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de
5146 nomade, qui portait l’uniforme de l’État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de part en part san
5147 artout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de part en part sans remarquer que les gens qui l’habitent ne
5148 fois la France de part en part sans remarquer que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une p
5149 e de part en part sans remarquer que les gens qui l’ habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à un
5150 r que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à une autre, ce n’est pas seulement
5151 ’une province à une autre, ce n’est pas seulement le paysage qui change. N’était-ce pas là l’une des raisons qui faisait,
5152 l’une des raisons qui faisait, si facilement nier la subsistance des « petites patries » dans la nation abstraitement unif
5153 nier la subsistance des « petites patries » dans la nation abstraitement unifiée ? La ligne d’autocar fait partie du pays
5154 patries » dans la nation abstraitement unifiée ? La ligne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie phy
5155 gne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie physique mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos la
5156 que mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos la route nationale pour des chemins secondaires ou des ruelles à peine p
5157 econdaires ou des ruelles à peine plus larges que la voiture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale, d
5158 ture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale, du calendrier des marées, de l’heure matinale des foires,
5159 es de la vie locale, du calendrier des marées, de l’ heure matinale des foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l
5160 des marées, de l’heure matinale des foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines
5161 foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l’ entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d
5162 s districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d’utiliser ce mo
5163 ’entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d’utiliser ce moyen de transport vous met en contact
5164 tiliser ce moyen de transport vous met en contact avec toutes sortes d’habitudes locales. D’abord il faut aller dans deux ou
5165 pour obtenir un minimum de précisions concernant l’ heure du prochain départ et la destination des diverses voitures qui s
5166 écisions concernant l’heure du prochain départ et la destination des diverses voitures qui stationnent, sur la place… Et q
5167 nation des diverses voitures qui stationnent, sur la place… Et que dire maintenant du voyage lui-même ? C’est une résurrec
5168 C’est une résurrection de ce que Vigny pleurait, la poésie des diligences, mais aérée. C’est fait d’une foule d’incidents
5169 de conversations absurdes et rapidement intimes, avec ce personnage enfoui à côté de vous dans un luxueux fauteuil de cuir
5170 vif, et qui change de tête plusieurs fois pendant le trajet, de coups de main aux voyageurs chargés de paquets ou d’un jeu
5171 et admiré, d’arrêts et de détours imprévus — car les chauffeurs acceptent volontiers toutes sortes de petites commissions
5172 ons que de vieilles dames leur confient au départ avec force recommandations ; et ils sont rares, ceux qui n’ont pas deux mo
5173 nt rares, ceux qui n’ont pas deux mots à dire par la portière entr’ouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui
5174 à dire par la portière entr’ouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux
5175 la portière entr’ouverte un instant à la fille de l’ auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent, sur
5176 nstant à la fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’
5177 e l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique
5178 ttend le passage du car, les cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car
5179 ssage du car, les cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car. Cela tien
5180 unes gaillards solides et gais, et qui ont toutes les raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est
5181 es et gais, et qui ont toutes les raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous
5182 i ont toutes les raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans l’espr
5183 c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans l’ esprit des populations, on se sent maître à bord de sa puissante machi
5184 se sent maître à bord de sa puissante machine, et l’ on bénéficie de ces petites faveurs que les femmes ont toujours accord
5185 ine, et l’on bénéficie de ces petites faveurs que les femmes ont toujours accordées à ceux qui commandent et disposent, ne
5186 que pour une heure, de leur vie. Oui, voilà bien les hommes avec lesquels je rêverais d’entreprendre une belle révolution,
5187 ne heure, de leur vie. Oui, voilà bien les hommes avec lesquels je rêverais d’entreprendre une belle révolution, qui rajeuni
5188 entreprendre une belle révolution, qui rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et l
5189 le révolution, qui rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit
5190 i rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois
5191 a France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont
5192 a bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuen
5193 sme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au « peuple »
5194 par erreur au « peuple » en général. Sans compter les moyens techniques dont ils disposent et qui seraient décisifs lors d’
5195 rapide. Mais loin de moi ces ambitions : ceux qui les ont n’en parlent pas, dit-on. Et je ne suis qu’un écrivain. Ceci me r
5196 t de conversation que j’aurais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans l’autocar de Taillefer voulait savoir quel ét
5197 ais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans l’ autocar de Taillefer voulait savoir quel était mon métier. Et quand j’
5198 je n’étais qu’un écrivain, et chômeur par-dessus le marché, il s’écria : « Ah ! cher monsieur, je vous envie ! Vous avez
5199 envie ! Vous avez un rôle magnifique à jouer dans la société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos
5200 ôle magnifique à jouer dans la société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos lumières, et sans vou
5201 normal, mettons qu’un fonctionnaire c’était pour le flatter, et cela tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans le
5202 latter, et cela tient aux circonstances mêmes qui l’ ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne pe
5203 tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, e
5204 s qui l’ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’ on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faibless
5205 ns le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’ on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faiblesse ou d’une ambitio
5206 ’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est l’ aveu d’une faiblesse ou d’une ambition excessive, deux choses qui comp
5207 ition excessive, deux choses qui compliquent fort la vie, je crois ; ou bien l’on écrit des choses intelligentes, et c’est
5208 s qui compliquent fort la vie, je crois ; ou bien l’ on écrit des choses intelligentes, et c’est encore l’aveu d’une inadap
5209 n écrit des choses intelligentes, et c’est encore l’ aveu d’une inadaptation cruelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; on
5210 uelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; on bien l’ on écrit simplement pour gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moy
5211 implement pour gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imagine
5212 chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédac
5213 e vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédactionnels.
5214 ère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédactionnels. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain
5215 e imaginer, dans les antres rédactionnels. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain est par nature un empêtré. Et voi
5216 , un écrivain est par nature un empêtré. Et voilà le paradoxe et l’injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces
5217 st par nature un empêtré. Et voilà le paradoxe et l’ injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces gens-là des ve
5218 me de ces gens-là des vertus au-dessus du commun, la révélation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indig
5219 ation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indignes, et ingénieux les plus balourds, enfin je ne sais quell
5220 à rendre heureux les plus indignes, et ingénieux les plus balourds, enfin je ne sais quelle supériorité humaine, quel luxe
5221 ne, quel luxe d’énergie ou d’invention qui, s’ils les possédaient vraiment, feraient de leurs détenteurs non point des écri
5222 quand vous aurez compris cela, vous cesserez, je le crains, d’envier ma condition… s. Rougemont Denis de, « Extraits d
5223 aits de… Journal d’un intellectuel en chômage  », Le Journal, 15 août 1937, p. 2. t. Précédé de la notice suivante : « Br
5224 », Le Journal, 15 août 1937, p. 2. t. Précédé de la notice suivante : « Brillant essayiste dans deux ouvrages déjà remarq
5225 ], M. Denis de Rougemont vient d’illustrer ce que l’ on peut appeler sa « doctrine », en nous donnant, sous le titre de Jou
5226 ut appeler sa « doctrine », en nous donnant, sous le titre de Journal d’un intellectuel en chômage, un recueil de réflexio
5227 ale — qui s’impose aux nouvelles générations. Par les menues expériences d’une vie diminuée et matériellement difficile, M.
5228 t tracer un tableau très vivant et très nuancé de la province française, ainsi qu’en témoigne cet extrait. »
18 1937, Articles divers (1936-1938). « Subjectivité et transcendance », Lettre de M. Denis de Rougemont (décembre 1937)
5229 x Pourquoi voulez-vous — ou veulent-ils — que la philosophie se purifie de théologie ? La théologie vaut bien la scien
5230 ls — que la philosophie se purifie de théologie ? La théologie vaut bien la science. C’est même une science bien moins var
5231 se purifie de théologie ? La théologie vaut bien la science. C’est même une science bien moins variable que les sciences
5232 e. C’est même une science bien moins variable que les sciences dites exactes, dont les fondements sont renversés tous les v
5233 ins variable que les sciences dites exactes, dont les fondements sont renversés tous les vingt ans de fond en comble. Je ne
5234 exactes, dont les fondements sont renversés tous les vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que la transcendance pui
5235 ersés tous les vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que la transcendance puisse jamais être « simplement la nature ».
5236 vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que la transcendance puisse jamais être « simplement la nature ». Voyez chez
5237 la transcendance puisse jamais être « simplement la nature ». Voyez chez Goethe, chez Tolstoï, chez Nietzsche : dans la m
5238 chez Goethe, chez Tolstoï, chez Nietzsche : dans la mesure où elle est un élément de transcendance, la nature devient div
5239 a mesure où elle est un élément de transcendance, la nature devient divinité (et ne peut pas ne pas le devenir). Pour ma p
5240 la nature devient divinité (et ne peut pas ne pas le devenir). Pour ma part, je ne conçois pas de relation concrète à la t
5241 ma part, je ne conçois pas de relation concrète à la transcendance où manquerait le sentiment du divin, du sacré. Mais vot
5242 elation concrète à la transcendance où manquerait le sentiment du divin, du sacré. Mais votre communication nous oriente u
5243 us oriente utilement vers une nouvelle analyse de la transcendance dans son rapport aux puissances de l’imagination et non
5244 transcendance dans son rapport aux puissances de l’ imagination et non seulement dans son rapport à l’éthique. w. Rouge
5245 l’imagination et non seulement dans son rapport à l’ éthique. w. Rougemont Denis de, « Lettre de M. Denis de Rougemont »
5246 « Lettre de M. Denis de Rougemont », Bulletin de la Société française de philosophie, Paris, décembre 1937, p. 204. x. L
5247 , décembre 1937, p. 204. x. Lettre publiée parmi les réactions à la conférence de Jean Wahl, « Subjectivité et transcendan
5248 p. 204. x. Lettre publiée parmi les réactions à la conférence de Jean Wahl, « Subjectivité et transcendance ».
19 1938, Articles divers (1936-1938). Réponse à Pierre Beausire (15 janvier 1938)
5249 oint perdre leur temps et leurs forces à discuter avec leurs adversaires ». Il leur demande ensuite de prendre le pouvoir. M
5250 adversaires ». Il leur demande ensuite de prendre le pouvoir. Mais avant de prendre le pouvoir, il faut convaincre, sinon
5251 uite de prendre le pouvoir. Mais avant de prendre le pouvoir, il faut convaincre, sinon l’on se verra contraint d’exercer
5252 de prendre le pouvoir, il faut convaincre, sinon l’ on se verra contraint d’exercer cette dictature que l’on se proposait
5253 se verra contraint d’exercer cette dictature que l’ on se proposait justement de combattre, et qui est celle de l’État tot
5254 osait justement de combattre, et qui est celle de l’ État totalitaire. Or, pour convaincre, il faut entre autres dissiper l
5255 r, pour convaincre, il faut entre autres dissiper les malentendus, désarmer autant que possible les adversaires, donc discu
5256 per les malentendus, désarmer autant que possible les adversaires, donc discuter. Au surplus, je ne sais pas si le terme d’
5257 res, donc discuter. Au surplus, je ne sais pas si le terme d’adversaire convient à M. Pierre Beausire. Il approuve notre r
5258 te en parlant de leurs auteurs : « On ne peut que les suivre et les approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour
5259 de leurs auteurs : « On ne peut que les suivre et les approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour l’essentiel d
5260 ver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour l’ essentiel de ce que nous avons dit dans notre numéro spécial81. S’il n
5261 C’est au nom du personnalisme. Mais qu’est-ce que le personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de l’humanité. » Erreur tota
5262 me. Mais qu’est-ce que le personnalisme ? « C’est l’ amour abstrait de l’humanité. » Erreur totale et malentendu maximum. S
5263 ue le personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de l’ humanité. » Erreur totale et malentendu maximum. S’il fallait à tout p
5264 tendu maximum. S’il fallait à tout prix reprendre les termes choisis par M. Beausire lui-même pour définir notre attitude,
5265 lui-même pour définir notre attitude, je dirais : Le personnalisme, c’est l’amour concret des hommes réels. Ce n’est pas «
5266 tre attitude, je dirais : Le personnalisme, c’est l’ amour concret des hommes réels. Ce n’est pas « la bonté, la charité (v
5267 l’amour concret des hommes réels. Ce n’est pas «  la bonté, la charité (vertus toutes passives et féminines) » (au sentime
5268 oncret des hommes réels. Ce n’est pas « la bonté, la charité (vertus toutes passives et féminines) » (au sentiment de l’au
5269 toutes passives et féminines) » (au sentiment de l’ auteur), mais c’est, au contraire, la volonté d’agir dans le sens de c
5270 sentiment de l’auteur), mais c’est, au contraire, la volonté d’agir dans le sens de ce qui libère en l’homme les forces de
5271 mais c’est, au contraire, la volonté d’agir dans le sens de ce qui libère en l’homme les forces de résistance et de créat
5272 a volonté d’agir dans le sens de ce qui libère en l’ homme les forces de résistance et de création, systématiquement déprim
5273 é d’agir dans le sens de ce qui libère en l’homme les forces de résistance et de création, systématiquement déprimées par l
5274 ce et de création, systématiquement déprimées par les tyrannies que l’on sait. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dan
5275 systématiquement déprimées par les tyrannies que l’ on sait. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dans le seul plan « 
5276 it. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dans le seul plan « moral » où M. Beausire nous situe, par un réflexe bien ro
5277 r un réflexe bien romand ; (qu’il me pardonne !). Le personnalisme est bien plus qu’une morale, s’il en suppose une. Il es
5278 morale, s’il en suppose une. Il est, à mon sens, la tradition centrale de l’Occident, l’élément civilisateur de notre civ
5279 une. Il est, à mon sens, la tradition centrale de l’ Occident, l’élément civilisateur de notre civilisation, le caractère s
5280 à mon sens, la tradition centrale de l’Occident, l’ élément civilisateur de notre civilisation, le caractère spécifique de
5281 nt, l’élément civilisateur de notre civilisation, le caractère spécifique de la pensée et de la vie des hommes qui ont fai
5282 de notre civilisation, le caractère spécifique de la pensée et de la vie des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent l
5283 ation, le caractère spécifique de la pensée et de la vie des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent la maintenir. Et
5284 de la pensée et de la vie des hommes qui ont fait l’ Europe et qui veulent la maintenir. Et l’individualisme et les collect
5285 e des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent la maintenir. Et l’individualisme et les collectivismes ne sont que les
5286 ont fait l’Europe et qui veulent la maintenir. Et l’ individualisme et les collectivismes ne sont que les déviations complé
5287 qui veulent la maintenir. Et l’individualisme et les collectivismes ne sont que les déviations complémentaires et périodiq
5288 ’individualisme et les collectivismes ne sont que les déviations complémentaires et périodiques de cette ligne de plus gran
5289 odiques de cette ligne de plus grande efficacité. Le mouvement personnaliste ne s’est constitué comme tel, et n’a pris ce
5290 comme tel, et n’a pris ce nom, que parce que dans l’ Europe actuelle se déchaînent des puissances de mort, spirituelles et
5291 matérielles, radicalement contraires au génie de l’ Occident. Ces puissances nous ont obligés, par leurs menaces instantes
5292 ctive de ce qui, depuis nos origines, n’était que le sous-entendu de tous nos efforts créateurs. Cette prise de conscience
5293 nscience active s’est effectuée diversement selon les milieux et les groupes. En France, elle s’est traduite surtout en ter
5294 s’est effectuée diversement selon les milieux et les groupes. En France, elle s’est traduite surtout en termes catholiques
5295 en termes surtout protestants ; en Espagne, avant l’ invasion des idéologies totalitaires, en termes proches de l’anarchism
5296 des idéologies totalitaires, en termes proches de l’ anarchisme, etc. Comme l’Europe, le personnalisme est essentiellement
5297 es, en termes proches de l’anarchisme, etc. Comme l’ Europe, le personnalisme est essentiellement pluraliste, c’est-à-dire 
5298 mes proches de l’anarchisme, etc. Comme l’Europe, le personnalisme est essentiellement pluraliste, c’est-à-dire : fédérali
5299 pluraliste, c’est-à-dire : fédéraliste. Il exalte les différences en ce qu’elles ont de créateur. Il veut une organisation
5300 lles ont de créateur. Il veut une organisation de la cité qui leur permette de s’exprimer. Telle est la forme que revêt « 
5301 a cité qui leur permette de s’exprimer. Telle est la forme que revêt « la charité personnaliste », pour reprendre une form
5302 tte de s’exprimer. Telle est la forme que revêt «  la charité personnaliste », pour reprendre une formule d’Arnaud Dandieu
5303 d Dandieu (qui d’ailleurs était nietzschéen). Que le christianisme vrai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à le
5304 ai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à le nier. En tant que protestant personnaliste, je tiens que seule la foi
5305 que protestant personnaliste, je tiens que seule la foi réelle — celle qui agit, et non celle qui endort — donne à notre
5306 tude son sens dernier. Beaucoup de mes camarades, la majorité même, ne partagent pas cette certitude. Ils en ont d’autres,
5307 n ont d’autres, que je crois insuffisantes, et je le leur dis en toute franchise. Du moins ne tiennent-ils pas le christia
5308 en toute franchise. Du moins ne tiennent-ils pas le christianisme dont je parle pour une niaiserie sentimentale. À défaut
5309 arle pour une niaiserie sentimentale. À défaut de la foi, ils connaissent l’Histoire, et savent de quoi l’Europe s’est fai
5310 sentimentale. À défaut de la foi, ils connaissent l’ Histoire, et savent de quoi l’Europe s’est faite. Pierre Beausire ne c
5311 oi, ils connaissent l’Histoire, et savent de quoi l’ Europe s’est faite. Pierre Beausire ne craint pas de proclamer que « s
5312 erre Beausire ne craint pas de proclamer que « si l’ on veut parler à des hommes, et non à des enfants, il faut renoncer à
5313 et non à des enfants, il faut renoncer à invoquer le Christ ». Je ne craindrai pas de lui répondre que ce n’est pas là par
5314 ment du pouvoir dans cet État, et, en manifestant la noblesse de leur caractère, nous délivrent du triste spectacle que no
5315 délivrent du triste spectacle que nous avons sous les yeux. » Car la noblesse qu’il nous suppose, purement « morale », sent
5316 ste spectacle que nous avons sous les yeux. » Car la noblesse qu’il nous suppose, purement « morale », sentimentale, idéal
5317  », sentimentale, idéaliste, ne saurait suffire à la tâche. « Le peuple a besoin — nous dit l’auteur — de chefs d’une souv
5318 tale, idéaliste, ne saurait suffire à la tâche. «  Le peuple a besoin — nous dit l’auteur — de chefs d’une souveraine digni
5319 ffire à la tâche. « Le peuple a besoin — nous dit l’ auteur — de chefs d’une souveraine dignité, d’une intelligence froide
5320 d’un jugement droit. » Où trouve-t-on cela ? Dans les livres de Nietzsche. Mais non pas encore dans l’Histoire ? Si ce n’es
5321 les livres de Nietzsche. Mais non pas encore dans l’ Histoire ? Si ce n’est pas une utopie de plus, un refuge pour les faib
5322 i ce n’est pas une utopie de plus, un refuge pour les faibles et les sceptiques, pour ceux qui craignent de se perdre en s’
5323 une utopie de plus, un refuge pour les faibles et les sceptiques, pour ceux qui craignent de se perdre en s’engageant, et p
5324 aignent de se perdre en s’engageant, et préfèrent la littérature ; si ce n’est pas une manière de « grève perlée » que de
5325 une manière de « grève perlée » que de n’accepter la lutte que dans ces termes ; si cet idéal est possible, si Beausire co
5326 un, qu’il nous amène ce précieux renfort, et nous le saluerons d’un vivat ! Nous saurons très bien nous entendre avec tous
5327 d’un vivat ! Nous saurons très bien nous entendre avec tous ceux qui veulent sauver non point nos âmes — c’est l’affaire de
5328 eux qui veulent sauver non point nos âmes — c’est l’ affaire de Dieu seul — mais bien la possibilité de vivre et de créer s
5329 s âmes — c’est l’affaire de Dieu seul — mais bien la possibilité de vivre et de créer sa vérité — bonne ou mauvaise — cont
5330 t de créer sa vérité — bonne ou mauvaise — contre les fous totalitaires de droite ou de gauche, leurs guerres et leurs cult
5331 d’État. 80. Voir numéro du 1er décembre 1937 : Le Personnalisme en Suisse. 81. La réserve indiquée sur « le Suisse »,
5332 décembre 1937 : Le Personnalisme en Suisse. 81. La réserve indiquée sur « le Suisse », auquel Beausire croit que je croi
5333 nalisme en Suisse. 81. La réserve indiquée sur «  le Suisse », auquel Beausire croit que je crois, résulte d’un malentendu
5334 e je crois, résulte d’un malentendu. Je crois à «  l’ idée suisse » telle que l’exprime Liehburg. Idée qui exclut l’existenc
5335 alentendu. Je crois à « l’idée suisse » telle que l’ exprime Liehburg. Idée qui exclut l’existence d’un type suisse racial,
5336 e » telle que l’exprime Liehburg. Idée qui exclut l’ existence d’un type suisse racial, ou « national » au sens unitaire. J
5337 tional » au sens unitaire. Je ne crois même pas à l’ homo alpinus, création polémique de Ramuz. y. Rougemont Denis de, « 
20 1938, Articles divers (1936-1938). Søren Kierkegaard (février 1938)
5338 n 1813. Son père avait passé son enfance à garder les moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il
5339 avait passé son enfance à garder les moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur
5340 s dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur un tertre et il avait maudit le Dieu Tout-
5341 , il était monté sur un tertre et il avait maudit le Dieu Tout-Puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assom
5342 rtre et il avait maudit le Dieu Tout-Puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assombrit sa vie, et la révélat
5343 mourir de faim. Ce blasphème assombrit sa vie, et la révélation qu’en eut plus tard Søren fut décisive pour son développem
5344 t décisive pour son développement religieux. Mais le défi jeté à Dieu sembla porter bonheur au père de Kierkegaard. Il dev
5345 e sa fortune, il ne voulut tirer nul intérêt : il la confia à l’un de ses frères, pour éviter d’avoir affaire aux banques,
5346 d’avoir affaire aux banques, et lorsqu’il mourut, l’ on s’aperçut qu’il n’en restait que 200 francs. Cette fortune provenai
5347 rancs. Cette fortune provenait d’une malédiction, pensait -il. Il l’avait donc dilapidée sans compter, mais surtout en dons géné
5348 rtune provenait d’une malédiction, pensait-il. Il l’ avait donc dilapidée sans compter, mais surtout en dons généreux. À 27
5349 terminait ses études de théologie, et se fiançait avec une jeune fille de 18 ans, Régine Olsen. Tout le monde connaît le dra
5350 le de 18 ans, Régine Olsen. Tout le monde connaît le drame de ces fiançailles douloureusement rompues au bout d’un an. L’i
5351 nçailles douloureusement rompues au bout d’un an. L’ idée que Kierkegaard s’était formée du mariage était trop absolue pour
5352 absolue pour comporter une réalisation pratique. Le « tout ou rien » qui est sa devise devait fatalement le conduire au r
5353 out ou rien » qui est sa devise devait fatalement le conduire au refus d’une perspective de bonheur dans laquelle il ne po
5354 ctive de bonheur dans laquelle il ne pouvait voir le vrai tout de son existence singulière. (Que d’autres y cherchent des
5355 ture, il partit pour Berlin où il désirait suivre les cours de Schelling. Il y demeura quelques mois, puis il revint à Cope
5356 ort, en 1835. Il travaillait une grande partie de la nuit. Georg Brandes raconte qu’on pouvait le voir, de la rue, arpente
5357 e de la nuit. Georg Brandes raconte qu’on pouvait le voir, de la rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vas
5358 . Georg Brandes raconte qu’on pouvait le voir, de la rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vastes appartem
5359 n pouvait le voir, de la rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vastes appartements. Dans chaque chambre il
5360 ir noter, au cours de son interminable promenade, les phrases qu’il venait de composer tout en marchant. À l’aube, il s’acc
5361 ases qu’il venait de composer tout en marchant. À l’ aube, il s’accordait quelque répit, errait sur les quais déserts du po
5362 l’aube, il s’accordait quelque répit, errait sur les quais déserts du port, ou gagnait les forêts qui avoisinent la capita
5363 errait sur les quais déserts du port, ou gagnait les forêts qui avoisinent la capitale. Puis il se remettait à écrire. Ver
5364 rts du port, ou gagnait les forêts qui avoisinent la capitale. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parc
5365 ale. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir les rues les plus animées de la ville, parlant, rian
5366 ttait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir les rues les plus animées de la ville, parlant, riant et discutant avec l
5367 crire. Vers midi, on le voyait parcourir les rues les plus animées de la ville, parlant, riant et discutant avec les bourge
5368 le voyait parcourir les rues les plus animées de la ville, parlant, riant et discutant avec les bourgeois, avec des jeune
5369 animées de la ville, parlant, riant et discutant avec les bourgeois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le pe
5370 ées de la ville, parlant, riant et discutant avec les bourgeois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit
5371 , parlant, riant et discutant avec les bourgeois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit peuple qu’il aim
5372 utant avec les bourgeois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit peuple qu’il aimait par-dessus tout. Tou
5373 eois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit peuple qu’il aimait par-dessus tout. Tout le monde, à Copenh
5374 avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit peuple qu’il aimait par-dessus tout. Tout le monde, à Copenhagu
5375 ongs. Mais on savait aussi que cet original était le plus grand écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un immense suc
5376 Sa première œuvre eut un immense succès : c’était l’ Alternative, qu’il publia en 1843. La même année parurent deux autres
5377 ès : c’était l’Alternative, qu’il publia en 1843. La même année parurent deux autres ouvrages, signés de pseudonymes (La R
5378 rent deux autres ouvrages, signés de pseudonymes ( La Répétition, Crainte et Tremblement) et deux recueils de Discours édif
5379 e son nom. Mais à mesure qu’il faisait mieux voir le fond chrétien de sa pensée, le public s’écarta, effrayé. Et lorsqu’en
5380 faisait mieux voir le fond chrétien de sa pensée, le public s’écarta, effrayé. Et lorsqu’en 1831, il se mit à attaquer ave
5381 effrayé. Et lorsqu’en 1831, il se mit à attaquer avec une extrême violence, le christianisme officiel et ses évêques, il se
5382 , il se mit à attaquer avec une extrême violence, le christianisme officiel et ses évêques, il se vit abandonné dans la pl
5383 officiel et ses évêques, il se vit abandonné dans la plus complète solitude qu’ait sans doute jamais connue un grand espri
5384 nue un grand esprit. Un an plus tard, accablé par la lutte qu’il menait seul contre tous, il tombait d’épuisement au cours
5385 ’épuisement au cours d’une promenade en ville. On le transporta à l’hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul
5386 ours d’une promenade en ville. On le transporta à l’ hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul ami, le pasteur
5387 il mourut paisiblement en disant à son seul ami, le pasteur Boesen : « Salue tous les hommes de tua part, je les aimais b
5388 à son seul ami, le pasteur Boesen : « Salue tous les hommes de tua part, je les aimais bien, tous… » Le seul événement ext
5389 Boesen : « Salue tous les hommes de tua part, je les aimais bien, tous… » Le seul événement extérieur de sa vie avait été
5390 s hommes de tua part, je les aimais bien, tous… » Le seul événement extérieur de sa vie avait été la rupture de ses fiança
5391 » Le seul événement extérieur de sa vie avait été la rupture de ses fiançailles. Mais l’acte qui résume toute son œuvre, c
5392 vie avait été la rupture de ses fiançailles. Mais l’ acte qui résume toute son œuvre, cet acte après lequel, semblable au p
5393 ourir certain d’avoir accompli sa mission, ce fut l’ attaque qu’il mena contre l’Église établie et contre dix-huit siècles
5394 li sa mission, ce fut l’attaque qu’il mena contre l’ Église établie et contre dix-huit siècles de chrétienté officielle — a
5395 siècles de chrétienté officielle — attaque contre le « monde chrétien » au nom du Christ des évangiles. ⁂ Toute mon activi
5396 r on ne naît pas chrétien, et même on ne peut pas l’ être, il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de l
5397 et même on ne peut pas l’être, il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de
5398 eut pas l’être, il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéis
5399 il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans l’ instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéissance. Cessons d
5400 cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le
5401 , et le devenir dans l’instant de la foi, qui est l’ instant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme « 
5402 ir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de l’ acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme « à bon marché 
5403 nstant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme « à bon marché », comme les évêques. Pensée centrale de
5404 prendre le christianisme « à bon marché », comme les évêques. Pensée centrale de l’œuvre énorme de Kierkegaard (40 volumes
5405 n marché », comme les évêques. Pensée centrale de l’ œuvre énorme de Kierkegaard (40 volumes en douze années). Pensée qu’il
5406 . Pensée qu’il défendit et qu’il servit de toutes les forces de son génie universel de poète, de philosophe, d’ironiste et
5407 confort moral, témoignage, discours académiques. L’ évêque Nynster venait de mourir, comblé d’honneurs et de gloire mondai
5408 t de gloire mondaine. Sur sa tombe son successeur le qualifia, selon l’usage, de « grand témoin de la vérité ». Kierkegaar
5409 e. Sur sa tombe son successeur le qualifia, selon l’ usage, de « grand témoin de la vérité ». Kierkegaard écrivit alors un
5410 le qualifia, selon l’usage, de « grand témoin de la vérité ». Kierkegaard écrivit alors un article indigné, qui provoqua
5411 né, qui provoqua un énorme scandale. Il décrivait la vie de Nynster. Était-ce celle d’un témoin de la vérité ? Non, s’écri
5412 la vie de Nynster. Était-ce celle d’un témoin de la vérité ? Non, s’écriait Kierkegaard : Un témoin de la vérité, c’est
5413 rité ? Non, s’écriait Kierkegaard : Un témoin de la vérité, c’est un homme dont la vie est familière avec toute espèce de
5414 rd : Un témoin de la vérité, c’est un homme dont la vie est familière avec toute espèce de souffrance, … un homme qui tém
5415 vérité, c’est un homme dont la vie est familière avec toute espèce de souffrance, … un homme qui témoigne dans le dénuement
5416 spèce de souffrance, … un homme qui témoigne dans le dénuement, la misère et l’humiliation, méconnu, déteste, insulté, baf
5417 rance, … un homme qui témoigne dans le dénuement, la misère et l’humiliation, méconnu, déteste, insulté, bafoué — un homme
5418 omme qui témoigne dans le dénuement, la misère et l’ humiliation, méconnu, déteste, insulté, bafoué — un homme qui est flag
5419 s enfin — car c’est bien d’un véritable témoin de la vérité qu’on nous parle — et puis enfin crucifié, décapité, brûlé ou
5420 ié, décapité, brûlé ou rôti sur un gril, jeté par le bourreau dans un endroit écarté, sans être enterré. Voilà un témoin d
5421 oit écarté, sans être enterré. Voilà un témoin de la vérité, sa vie et son existence, sa mort et son enterrement, et l’évê
5422 et son existence, sa mort et son enterrement, et l’ évêque Nynster, nous dit-on, fut un des vrais témoins de la vérité ! E
5423 Nynster, nous dit-on, fut un des vrais témoins de la vérité ! En vérité, il y a quelque chose de plus contraire au christi
5424 et c’est de jouer au christianisme, d’en écarter les dangers, et de jouer ensuite au jeu que l’évêque Nynster était un tém
5425 arter les dangers, et de jouer ensuite au jeu que l’ évêque Nynster était un témoin de la vérité. Cas symbolique aux yeux
5426 te au jeu que l’évêque Nynster était un témoin de la vérité. Cas symbolique aux yeux de Kierkegaard. Il fallait un rappel
5427 e aux yeux de Kierkegaard. Il fallait un rappel à l’ ordre. Il le devint lui-même, de tout son être. Et il savait ce que ce
5428 e Kierkegaard. Il fallait un rappel à l’ordre. Il le devint lui-même, de tout son être. Et il savait ce que cela devait lu
5429 . Et il savait ce que cela devait lui coûter. Car le monde ne tolère jamais la passion spirituelle qui se déclare dans sa
5430 devait lui coûter. Car le monde ne tolère jamais la passion spirituelle qui se déclare dans sa pureté. La plupart des gen
5431 oivent pas de malaise. D’autres, qui s’essaient à penser en fin de semaine, comme on fait un peu d’ordre dans l’appartement, r
5432 fin de semaine, comme on fait un peu d’ordre dans l’ appartement, reculent bientôt devant l’énormité — l’absence de normes
5433 ordre dans l’appartement, reculent bientôt devant l’ énormité — l’absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent.
5434 appartement, reculent bientôt devant l’énormité — l’ absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent. Ils se rendo
5435 ntôt devant l’énormité — l’absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent. Ils se rendorment, ou bien édifient d
5436 té — l’absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent. Ils se rendorment, ou bien édifient des systèmes (qu’ils
5437 Ceux qui persistent cependant, s’aperçoivent que l’ entreprise pourrait être mortellement compromettante. Aussi l’histoire
5438 pourrait être mortellement compromettante. Aussi l’ histoire de la pensée n’est-elle peut-être que la chronique de ses ret
5439 mortellement compromettante. Aussi l’histoire de la pensée n’est-elle peut-être que la chronique de ses retraites éloquen
5440 l’histoire de la pensée n’est-elle peut-être que la chronique de ses retraites éloquentes. Très peu vont jusqu’au bout de
5441 nt jusqu’au bout de leur emportement. L’un, c’est la mort accidentelle, l’autre, la folie qui l’abat. Un seul, je crois, p
5442 ement. L’un, c’est la mort accidentelle, l’autre, la folie qui l’abat. Un seul, je crois, parvint dans l’intégrité de sa f
5443 c’est la mort accidentelle, l’autre, la folie qui l’ abat. Un seul, je crois, parvint dans l’intégrité de sa force à une mo
5444 folie qui l’abat. Un seul, je crois, parvint dans l’ intégrité de sa force à une mort que toute son œuvre provoquait et qui
5445 ui vaincue par une telle victime, lui révéla dans les derniers instants le vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui
5446 le victime, lui révéla dans les derniers instants le vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui aboutissait là. Conte
5447 i révéla dans les derniers instants le vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui aboutissait là. Contempler dans sa
5448 ers instants le vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui aboutissait là. Contempler dans sa mort la « fin » de sa p
5449 ensée qui aboutissait là. Contempler dans sa mort la « fin » de sa passion et l’accomplissement de sa foi, tel fut le sort
5450 ntempler dans sa mort la « fin » de sa passion et l’ accomplissement de sa foi, tel fut le sort de Kierkegaard, son incomme
5451 a passion et l’accomplissement de sa foi, tel fut le sort de Kierkegaard, son incommensurable grandeur. Un acharnement san
5452 ble grandeur. Un acharnement sans pareil à forcer l’ esprit sur l’obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’existence ;
5453 Un acharnement sans pareil à forcer l’esprit sur l’ obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’existence ; toute une vie
5454 forcer l’esprit sur l’obstacle du désespoir et de l’ absurdité de l’existence ; toute une vie tendue vers l’impossible, tou
5455 sur l’obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’ existence ; toute une vie tendue vers l’impossible, toute une œuvre de
5456 urdité de l’existence ; toute une vie tendue vers l’ impossible, toute une œuvre de sarcasmes précis contre les innombrable
5457 sible, toute une œuvre de sarcasmes précis contre les innombrables tentations d’une religion qui n’est pas Dieu ; et soudai
5458 udain, sur son lit de mort, cette phrase : Je ne pense pas que ce soit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pou
5459 que ce soit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne l’ ai dit que pour l’écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! All
5460 is, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pour l’ écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! Alléluia !82 Deux d
5461 lléluia ! Alléluia !82 Deux documents éclairent le mystère de ce triomphe, le sens dernier de cette vie et de cette mort
5462 ux documents éclairent le mystère de ce triomphe, le sens dernier de cette vie et de cette mort. Le premier est de Kierkeg
5463 tte mort. Le premier est de Kierkegaard : Forcer les hommes à être attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemi
5464 re attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemin du vrai martyre. Un vrai martyr n’a jamais eu recours à la vio
5465 i martyre. Un vrai martyr n’a jamais eu recours à la violence, il combat à l’aide de son impuissance. Il force les hommes
5466 , il combat à l’aide de son impuissance. Il force les hommes à être attentifs. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, i
5467 s. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, ils le tuent. Mais c’est là ce qu’il voulait. Il n’a jamais cru que sa mort
5468 oui, que cette action ne commencerait vraiment qu’ avec sa mort !83 On trouve le second document dans le journal de l’hôpit
5469 c sa mort !83 On trouve le second document dans le journal de l’hôpital où vint mourir Kierkegaard (c’est un interne qui
5470 On trouve le second document dans le journal de l’ hôpital où vint mourir Kierkegaard (c’est un interne qui transcrit les
5471 ourir Kierkegaard (c’est un interne qui transcrit les déclarations du malade) : Il tient sa maladie pour mortelle. Sa mort
5472 aladie pour mortelle. Sa mort serait nécessaire à l’ action à laquelle il a consacré toutes ses forces spirituelles et tout
5473 alors affaiblie. Au contraire sa mort donnera de la force à son attaque, et lui assurera, pense-t-il, la victoire.84 ⁂
5474 nnera de la force à son attaque, et lui assurera, pense-t -il, la victoire.84 ⁂ De cette œuvre considérable, il ne saurait êtr
5475 force à son attaque, et lui assurera, pense-t-il, la victoire.84 ⁂ De cette œuvre considérable, il ne saurait être quest
5476 rait être question, ici, de résumer ne fût-ce que les thèmes directeurs. Il faut y aller voir dans ses livres traduits, et
5477 ut y aller voir dans ses livres traduits, et dans l’ étude monumentale que Jean Wahl publie ces jours-ci. Mais il sera peut
5478 nt manquer de frapper, de retenir ou de repousser le lecteur non prévenu : la « difficulté » de Kierkegaard et sa dialecti
5479 retenir ou de repousser le lecteur non prévenu : la « difficulté » de Kierkegaard et sa dialectique du sérieux et de l’ir
5480 de Kierkegaard et sa dialectique du sérieux et de l’ ironie. Kierkegaard est difficile parce qu’il est simple. « La pureté
5481 erkegaard est difficile parce qu’il est simple. «  La pureté du cœur, c’est de vouloir une seule chose », écrit-il. Mais ce
5482 s désirs. Il est désespéré, mais c’est à cause de la foi. Et s’il espère, c’est « en vertu de l’absurde », c’est-à-dire de
5483 se de la foi. Et s’il espère, c’est « en vertu de l’ absurde », c’est-à-dire de l’incarnation de Dieu en Christ. On ne peut
5484 c’est « en vertu de l’absurde », c’est-à-dire de l’ incarnation de Dieu en Christ. On ne peut pas le comprendre : on le so
5485 e l’incarnation de Dieu en Christ. On ne peut pas le comprendre : on le souffre. On l’aime, on l’injurie, on se débat sous
5486 Dieu en Christ. On ne peut pas le comprendre : on le souffre. On l’aime, on l’injurie, on se débat sous son regard, on arg
5487 On ne peut pas le comprendre : on le souffre. On l’ aime, on l’injurie, on se débat sous son regard, on argumente contre s
5488 pas le comprendre : on le souffre. On l’aime, on l’ injurie, on se débat sous son regard, on argumente contre sa souffranc
5489 tte capitulation. On n’étudie pas Kierkegaard, on l’ attrape comme une maladie. Cet homme sécrète un poison salutaire, dont
5490 sécrète un poison salutaire, dont nul ne trouvera l’ antidote : qu’il en soit mort, atteste ce fait capital que la pensée h
5491 : qu’il en soit mort, atteste ce fait capital que la pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous les autres, sauf Empéd
5492 la pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous les autres, sauf Empédocle et Nietzsche, ont refusé de signer de leur san
5493 e et Nietzsche, ont refusé de signer de leur sang le pacte qui lie le penseur à Méphisto : expérimentateurs qui se ménagen
5494 nt refusé de signer de leur sang le pacte qui lie le penseur à Méphisto : expérimentateurs qui se ménagent un dernier reto
5495 énagent un dernier retour, guerriers qui déposent les armes avant la décision mortelle. Concession, la raison de Pascal, et
5496 er retour, guerriers qui déposent les armes avant la décision mortelle. Concession, la raison de Pascal, et lors même qu’i
5497 les armes avant la décision mortelle. Concession, la raison de Pascal, et lors même qu’il y renonce : concession, la pitié
5498 ascal, et lors même qu’il y renonce : concession, la pitié parfois presque sadique de Dostoievsky. Oui, même ceux-là ! Mêm
5499 là ! Même ces deux-là qui sont allés si loin dans la passion de l’absolu chrétien, mais seul Kierkegaard en est mort. Une
5500 deux-là qui sont allés si loin dans la passion de l’ absolu chrétien, mais seul Kierkegaard en est mort. Une pureté presque
5501 icité conquise aux dépens de tout ce qui soutient l’ homme contre Dieu. Et cependant, dans le pire désespoir, jamais de déf
5502 soutient l’homme contre Dieu. Et cependant, dans le pire désespoir, jamais de défi, ni d’« hybris ». Pureté du chrétien,
5503 ieux » de Kierkegaard, il est de nature à tromper le lecteur mille manières. On peut se laisser prendre à la fantaisie bar
5504 teur mille manières. On peut se laisser prendre à la fantaisie baroque de certaines paraboles, de certaines ironies polémi
5505 ’aperçoit qu’elles nous jettent en plein drame de l’ existence. Kierkegaard déconsidère le sérieux « humain », par l’ironie
5506 ein drame de l’existence. Kierkegaard déconsidère le sérieux « humain », par l’ironie de l’éternité. L’éternité, pour lui,
5507 ierkegaard déconsidère le sérieux « humain », par l’ ironie de l’éternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temp
5508 éconsidère le sérieux « humain », par l’ironie de l’ éternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquell
5509 e sérieux « humain », par l’ironie de l’éternité. L’ éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle le temps f
5510 ternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle le temps finira bien par succomber. Mais, ayant tué
5511 pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle le temps finira bien par succomber. Mais, ayant tué en lui toute autre v
5512 t tué en lui toute autre vanité que celle de haïr le temps — c’est là son dépit amoureux — Kierkegaard peut enfin parler a
5513 on dépit amoureux — Kierkegaard peut enfin parler avec un sérieux total, dont l’écrivain d’aujourd’hui n’a même plus l’idée.
5514 ard peut enfin parler avec un sérieux total, dont l’ écrivain d’aujourd’hui n’a même plus l’idée. Un de nos meilleurs auteu
5515 otal, dont l’écrivain d’aujourd’hui n’a même plus l’ idée. Un de nos meilleurs auteurs déclarait récemment que le palais de
5516 de nos meilleurs auteurs déclarait récemment que le palais de Versailles manque de sérieux. C’était bien vu. Mais notre a
5517 eux, est seul important, mais tant de gens « font les importants ». Où est la différence ? C’est que le sérieux vrai est en
5518 mais tant de gens « font les importants ». Où est la différence ? C’est que le sérieux vrai est en définitive dans le seul
5519 es importants ». Où est la différence ? C’est que le sérieux vrai est en définitive dans le seul acte de foi, qui jette su
5520 C’est que le sérieux vrai est en définitive dans le seul acte de foi, qui jette sur nos sérieux, poses et amusettes (ou «
5521 infiniment pire qu’une ironie. Car peut-être que l’ acte de foi n’existe pas, n’est qu’une figure de rhétorique pieuse, un
5522 ique pieuse, une illusion, un mythe, un saut dans le vide, etc. Et alors il n’y a plus nulle part de « vrai » sérieux. Mai
5523 ieux dans ma vie tant que je n’ai pas trouvé dans la foi, ou mieux : tant que la foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé
5524 n’ai pas trouvé dans la foi, ou mieux : tant que la foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé. Kierkegaard a eu trois des
5525 pirituelles. La première est littéraire : ce sont les dramaturges et les poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen.
5526 mière est littéraire : ce sont les dramaturges et les poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen. La seconde philosop
5527 sont les dramaturges et les poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen. La seconde philosophique : l’école « existe
5528 s grand nom est Ibsen. La seconde philosophique : l’ école « existentielle » d’Allemagne, avec Martin Heidegger et Karl Jas
5529 sophique : l’école « existentielle » d’Allemagne, avec Martin Heidegger et Karl Jaspers. La troisième théologique : l’école
5530 egger et Karl Jaspers. La troisième théologique : l’ école dialectique, qui sous l’impulsion de Karl Barth est en train de
5531 sième théologique : l’école dialectique, qui sous l’ impulsion de Karl Barth est en train de sauver l’honneur et l’existenc
5532 l’impulsion de Karl Barth est en train de sauver l’ honneur et l’existence même des églises allemandes. Nul ne peut mesure
5533 de Karl Barth est en train de sauver l’honneur et l’ existence même des églises allemandes. Nul ne peut mesurer aujourd’hui
5534 lises allemandes. Nul ne peut mesurer aujourd’hui le développement promis à l’influence de Kierkegaard sur notre temps : o
5535 eut mesurer aujourd’hui le développement promis à l’ influence de Kierkegaard sur notre temps : on le redécouvre après cent
5536 à l’influence de Kierkegaard sur notre temps : on le redécouvre après cent ans, on le traduit partout, on publie sur son œ
5537 notre temps : on le redécouvre après cent ans, on le traduit partout, on publie sur son œuvre des centaines d’ouvrages et
5538 ges et d’articles. Ce qui est certain, c’est qu’à la différence de Nietzsche, personne ne parviendra jamais à « utiliser »
5539 itiques et temporelles. Il se dresse, au seuil de l’ époque comme la plus formidable accusation vivante contre nos lâchetés
5540 orelles. Il se dresse, au seuil de l’époque comme la plus formidable accusation vivante contre nos lâchetés collectivistes
5541 re danois, on peut lire cette inscription nue : «  Le Solitaire ». Le rire et la passion sévère, le ricanement puissant et
5542 ut lire cette inscription nue : « Le Solitaire ». Le rire et la passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amo
5543 te inscription nue : « Le Solitaire ». Le rire et la passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amour de Kierk
5544 : « Le Solitaire ». Le rire et la passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amour de Kierkegaard traversent n
5545 e et la passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amour de Kierkegaard traversent notre âge comme cette pierr
5546 ur silence d’éternité. 82. « Alléluia » : Louez l’ Éternel. Kierkegaard avait aussi noté, peu de jours auparavant : « Il
5547 sme, une seule tâche comparable à la mienne. Dans la ‟chrétienté”, elle apparaît pour la première fois. Je le sais, je sai
5548 étienté”, elle apparaît pour la première fois. Je le sais, je sais aussi ce qu’il m’en a coûté, ce que j’ai souffert, je p
5549 qu’il m’en a coûté, ce que j’ai souffert, je puis l’ exprimer par cette seule phrase : ‟Je ne fus pas comme les autres” ».
5550 mer par cette seule phrase : ‟Je ne fus pas comme les autres” ». 83. Point de vue explicatif sur mon activité d’auteur (1
21 1938, Articles divers (1936-1938). Nouvelles pages du Journal d’un intellectuel en chômage (avril 1938)
5551 sont peu de chose », s’écrie Bossuet (Sermon sur la mort, 22 mars 1662). Que dirions-nous alors du sort fait à celui qui
5552 er aux hommes tel qu’il est ? S’entendre dire que l’ homme en général est peu de chose, n’est pas trop humiliant pour qui s
5553 ur qui se flatte d’une image de soi composée dans la solitude : tant qu’on ne s’est pas avoué devant les autres, on peut t
5554 a solitude : tant qu’on ne s’est pas avoué devant les autres, on peut toujours s’estimer singulier, c’est-à-dire supérieur
5555 urs s’estimer singulier, c’est-à-dire supérieur à la masse. Et ce n’est pas encore franchement s’avouer que de se comparer
5556 s’avouer que de se comparer aux seuls humains que le métier ou notre rang social nous met en mesure d’approcher. L’épreuve
5557 notre rang social nous met en mesure d’approcher. L’ épreuve décisive est celle que l’on subit au contact de voisins que ri
5558 ure d’approcher. L’épreuve décisive est celle que l’ on subit au contact de voisins que rien en nous, que rien dans notre v
5559 Ce n’est qu’au prix d’un désordre social — selon les préjugés du régime établi — que ces rencontres deviennent possibles,
5560 t à la fois se reconnaître en vérité et rejoindre l’ humanité. Chômage. — On dit souvent qu’il faut à l’homme un minimum
5561 umanité. Chômage. — On dit souvent qu’il faut à l’ homme un minimum de confort ou d’aisance matérielle pour pouvoir réflé
5562  intellectuel » au chômage absolu, c’est-à-dire à l’ arrêt de la pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel es
5563 el » au chômage absolu, c’est-à-dire à l’arrêt de la pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel est ce certai
5564 t-à-dire à l’arrêt de la pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel est ce certain degré ? À quel niveau plac
5565  ? À quel niveau placer cette limite inférieure ? La question paraît insoluble dès qu’on la pose dans le concret d’une vie
5566 férieure ? La question paraît insoluble dès qu’on la pose dans le concret d’une vie connue. Prenons deux hommes qui furent
5567 question paraît insoluble dès qu’on la pose dans le concret d’une vie connue. Prenons deux hommes qui furent tous deux de
5568 mes qui ont écrit chacun une vingtaine de volumes l’ espace de dix ans : Kierkegaard et Nietzsche. Le premier était riche e
5569 il ne lui restait plus même une chemise entière : les morceaux du bras avant servi à rapiécer les épaules et le plastron. L
5570 ère : les morceaux du bras avant servi à rapiécer les épaules et le plastron. Le peu d’argent de sa retraite de professeur
5571 aux du bras avant servi à rapiécer les épaules et le plastron. Le peu d’argent de sa retraite de professeur servait à paye
5572 vant servi à rapiécer les épaules et le plastron. Le peu d’argent de sa retraite de professeur servait à payer ses logeuse
5573 seur servait à payer ses logeuses successives, et les remèdes contre ses effroyables maux de tête. De plus, il était à demi
5574 sent concevoir d’autres buts à leur existence que la recherche d’un gain précaire. Mais à ceux qui ont quelque chose, il f
5575 ceux qui ont quelque chose, il faut rappeler que la recherche du confort est ce qui s’oppose le plus radicalement à toute
5576 r que la recherche du confort est ce qui s’oppose le plus radicalement à toute culture véritable. Île de R. — La nuit !
5577 calement à toute culture véritable. Île de R. —  La nuit ! Je l’avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette
5578 ute culture véritable. Île de R. — La nuit ! Je l’ avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette mort opaque
5579 Île de R. — La nuit ! Je l’avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette mort opaque dont il faut redouter je
5580 ge et circulante, pleine de rumeurs, comparable à la fièvre. Plus lucide souvent que les jours. Ici, tout repose complètem
5581 , comparable à la fièvre. Plus lucide souvent que les jours. Ici, tout repose complètement. Un silence implacable et mat en
5582 omplètement. Un silence implacable et mat enserre l’ homme qui chemine sur la route incertaine, au milieu des menaces origi
5583 implacable et mat enserre l’homme qui chemine sur la route incertaine, au milieu des menaces originelles. Par temps clair,
5584 milieu des menaces originelles. Par temps clair, les étoiles sont très grosses et molles au-dessus du jardin. Mais il arri
5585 et molles au-dessus du jardin. Mais il arrive que le noir soit compact. Je me dirige à peu près le long de l’allée unique,
5586 soit compact. Je me dirige à peu près le long de l’ allée unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la
5587 irige à peu près le long de l’allée unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans l’o
5588 e unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici le
5589 re les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici les rues du vil
5590 ve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans l’ odeur des lauriers épais. Voici les rues du village, illuminées comme
5591 e du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici les rues du village, illuminées comme un décor blanc et vert. Des chiens
5592 horriblement, tournent autour de moi, me flairent avec angoisse, et fuient soudain en gémissant. J’ai des lettres à porter à
5593 soudain en gémissant. J’ai des lettres à porter à l’ autobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et l’écho
5594 utobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et l’écho de mes pas contre les murs des maisons mortes. Je me
5595 aut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et l’ écho de mes pas contre les murs des maisons mortes. Je me glisse dans
5596 . De nouveau le noir, et l’écho de mes pas contre les murs des maisons mortes. Je me glisse dans le hangar de la grosse voi
5597 re les murs des maisons mortes. Je me glisse dans le hangar de la grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’à ce que je renc
5598 es maisons mortes. Je me glisse dans le hangar de la grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’à ce que je rencontre l’ouver
5599 re et tâte ses flancs jusqu’à ce que je rencontre l’ ouverture de la boîte aux lettres. De loin, le village apparaît fantas
5600 flancs jusqu’à ce que je rencontre l’ouverture de la boîte aux lettres. De loin, le village apparaît fantastique : les bec
5601 tre l’ouverture de la boîte aux lettres. De loin, le village apparaît fantastique : les becs de gaz, très bas, éclairent q
5602 ttres. De loin, le village apparaît fantastique : les becs de gaz, très bas, éclairent quelques façades blanches, carrés et
5603 arrés et rectangles détachés violemment au bas de l’ énorme nuit. On ne voit que ces figures géométriques, dominées par le
5604 e voit que ces figures géométriques, dominées par le clocher à toit plat, et des fragments de silhouettes d’arbres devant
5605 , et des fragments de silhouettes d’arbres devant les maisons. La rumeur de la mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouve
5606 ments de silhouettes d’arbres devant les maisons. La rumeur de la mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouveau cet étran
5607 ouettes d’arbres devant les maisons. La rumeur de la mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouveau cet étrange écho des p
5608 nouveau cet étrange écho des pas, si proche dans les rues vides, et les mêmes chiens qui reviennent, et pas une âme. « Val
5609 e écho des pas, si proche dans les rues vides, et les mêmes chiens qui reviennent, et pas une âme. « Vallée de l’ombre de l
5610 hiens qui reviennent, et pas une âme. « Vallée de l’ ombre de la mort… étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus que
5611 eviennent, et pas une âme. « Vallée de l’ombre de la mort… étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus que dans cette
5612 e de l’ombre de la mort… étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus que dans cette nuit. Fin de séjour à A… (Gard)
5613 Gard). — Tout est en place. Je garderai toutefois le plan d’aménagement et de décoration des trois chambres du premier éta
5614 ois chambres du premier étage, on ne sait jamais… Les vingt-deux pièces du dessus de cheminée ont été replacées au millimèt
5615 llimètre, dans une symétrie impeccable. Mais tout l’ effet de notre labeur risque d’être détruit par une odieuse malice du
5616 deuxième un lourd sommier pour en faire un divan. L’ escalier est étroit. La descente s’était opérée sans trop de mal lors
5617 er pour en faire un divan. L’escalier est étroit. La descente s’était opérée sans trop de mal lors de notre arrivée. Mais
5618 rs de notre arrivée. Mais nous n’avions pas prévu la remontée ! Épuisés par une demi-heure d’efforts haletants, qui n’ont
5619 ’efforts haletants, qui n’ont abouti qu’à coincer le sommier au tournant, entre la balustrade et les parois de la cage d’e
5620 abouti qu’à coincer le sommier au tournant, entre la balustrade et les parois de la cage d’escalier — au surplus fortement
5621 er le sommier au tournant, entre la balustrade et les parois de la cage d’escalier — au surplus fortement rayées — nous avo
5622 au tournant, entre la balustrade et les parois de la cage d’escalier — au surplus fortement rayées — nous avons couru impl
5623 plus fortement rayées — nous avons couru implorer l’ aide de Simard. « Ce cochon-là » refuse, prétextant une hernie ; sa fe
5624 sa jambe « coupée ». (Bonne occasion pourtant de la décrocher un peu pour toucher davantage à l’assurance !) Il a bien fa
5625 t de la décrocher un peu pour toucher davantage à l’ assurance !) Il a bien fallu se rendre à l’évidence : ce sommier impla
5626 tage à l’assurance !) Il a bien fallu se rendre à l’ évidence : ce sommier implacable restera dans l’escalier comme témoin
5627 à l’évidence : ce sommier implacable restera dans l’ escalier comme témoin des bouleversements que nous avons infligés à la
5628 oin des bouleversements que nous avons infligés à la maison. Pas question d’aller quérir du renfort à A. Il faut encore bo
5629 ler quérir du renfort à A. Il faut encore boucler les valises, descendre mes caisses de livres à la gare, etc., et le train
5630 er les valises, descendre mes caisses de livres à la gare, etc., et le train part dans une heure. Quand la propriétaire re
5631 scendre mes caisses de livres à la gare, etc., et le train part dans une heure. Quand la propriétaire reviendra pour l’été
5632 are, etc., et le train part dans une heure. Quand la propriétaire reviendra pour l’été, elle se heurtera à ce sommier monu
5633 s une heure. Quand la propriétaire reviendra pour l’ été, elle se heurtera à ce sommier monumental dans sa pose scandale et
5634 te des « gens » en général — quand je ne fais que les jauger d’un regard — et sympathie violente, « élan vers », dès que mo
5635 ement à un visage, au corps et aux vêtements, aux mains , à l’attitude distraite et vraie d’un être isolé près de moi. Je pren
5636 n visage, au corps et aux vêtements, aux mains, à l’ attitude distraite et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends le
5637 e et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends le métro, malgré l’odeur de buanderie et ce relent de fauves de certains
5638 tre isolé près de moi. Je prends le métro, malgré l’ odeur de buanderie et ce relent de fauves de certains parfums de femme
5639 garder des êtres et vivre un moment auprès d’eux, le temps de trois stations, le temps d’imaginer une rencontre, un échang
5640 moment auprès d’eux, le temps de trois stations, le temps d’imaginer une rencontre, un échange spontané, une de ces décou
5641 lescent — et sûrement ce serait bien autre chose… La femme descend sans se retourner ; l’homme déplie un journal que je n’
5642 autre chose… La femme descend sans se retourner ; l’ homme déplie un journal que je n’aime pas, qu’il a peut-être acheté to
5643 is on se juge tout de même là-dessus… Je sors, je pense à autre chose, à quelque chose qui n’est pas d’ici. Et déjà je ne com
5644 plus pourquoi j’ai eu ce fort désir soudain, dans le métro, de tutoyer mes compagnons de route. Était-ce envie de donner o
5645 le maintenant que j’écris, que c’est profondément le même mouvement, l’amour. La même déception de l’amour, parce rien ne
5646 ’écris, que c’est profondément le même mouvement, l’ amour. La même déception de l’amour, parce rien ne s’est produit, rien
5647 ue c’est profondément le même mouvement, l’amour. La même déception de l’amour, parce rien ne s’est produit, rien ne peut
5648 le même mouvement, l’amour. La même déception de l’ amour, parce rien ne s’est produit, rien ne peut se produire, pour tan
5649 es que nous tous. — Et alors, dira-t-on : « Faire la révolution ! » — Ce substitut, ce renvoi aux calendes de la Grande Co
5650 ion ! » — Ce substitut, ce renvoi aux calendes de la Grande Communication… Montparnasse. — Stupidité triste, parfois ins
5651 , « bagnoles », « Paris-Soir », « on se défend… » La grosse petite bonne qui tire sa robe à fleurs sur le quai désert du m
5652 grosse petite bonne qui tire sa robe à fleurs sur le quai désert du métro, enfin un être vrai. Conclusion. — S’occuper d
5653 uper des « petits-faits-vrais » vaut mieux que de les ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force
5654 faits-vrais » vaut mieux que de les ignorer. Mais l’ excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on
5655 es ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on les a bien connus, dans leur réali
5656 Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on les a bien connus, dans leur réalité sordide. U
5657 parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on les a bien connus, dans leur réalité sordide. Un petit fait vrai vaut plu
5658 me serait, par exemple, une grande idée embrassée avec force au mépris de soi-même et de l’utilité. Car elle peut devenir le
5659 embrassée avec force au mépris de soi-même et de l’ utilité. Car elle peut devenir le fait dominateur. En vérité, il n’y a
5660 e soi-même et de l’utilité. Car elle peut devenir le fait dominateur. En vérité, il n’y a pas de faits grands ou petits en
5661 u près digne de ce nom, un fait qui commande tous les autres et qui est la mesure de tout. Quand tu l’auras connu et accept
5662 , un fait qui commande tous les autres et qui est la mesure de tout. Quand tu l’auras connu et accepté — tu es seul à pouv
5663 les autres et qui est la mesure de tout. Quand tu l’ auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir le connaître — lève-toi
5664 u l’auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir le connaître — lève-toi et regarde les choses, les gestes incongrus et m
5665 seul à pouvoir le connaître — lève-toi et regarde les choses, les gestes incongrus et mécaniques des autres : écoute bien c
5666 ir le connaître — lève-toi et regarde les choses, les gestes incongrus et mécaniques des autres : écoute bien ce qu’ils dis
5667 s autres : écoute bien ce qu’ils disent à travers les paroles qu’ils croient dire : essaie de les comprendre quand ils se p
5668 avers les paroles qu’ils croient dire : essaie de les comprendre quand ils se plaignent ou quand ils rient : tu ne verras,
5669 qui est plus fort que toi. Car il est tout ce que le monde attend, attend de toute éternité pour aujourd’hui et de toi seu
5670 hez son beau-frère. Il était adversaire du prêt à l’ intérêt, condamné par l’église primitive. Il donnait à qui voulait. Ap
5671 tait adversaire du prêt à l’intérêt, condamné par l’ église primitive. Il donnait à qui voulait. Après sa mort, on s’aperçu
5672 on s’aperçut qu’il ne restait que 250 francs dans le coffre. aa. Rougemont Denis de, « Nouvelles pages du Journal d’un i