1
Max Brod,
Le
Royaume enchanté de l’amour (1936)d Aucun ouvrage ne se passe mieu
2
Max Brod, Le Royaume enchanté de
l’
amour (1936)d Aucun ouvrage ne se passe mieux de préface qu’un bon
3
passe mieux de préface qu’un bon roman. Pourtant
la
réussite de Max Brod n’est pas seulement de l’ordre romanesque : elle
4
nt la réussite de Max Brod n’est pas seulement de
l’
ordre romanesque : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour le so
5
e : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour
le
souvenir et davantage, la présence d’un être vrai, qui apporte à tout
6
à un beau drame d’amour le souvenir et davantage,
la
présence d’un être vrai, qui apporte à toute l’œuvre une émouvante pr
7
, la présence d’un être vrai, qui apporte à toute
l’
œuvre une émouvante précision. Le personnage de Garta, dont le lecteur
8
apporte à toute l’œuvre une émouvante précision.
Le
personnage de Garta, dont le lecteur ne tardera pas à voir qu’il figu
9
émouvante précision. Le personnage de Garta, dont
le
lecteur ne tardera pas à voir qu’il figure la conscience exigeante, e
10
ont le lecteur ne tardera pas à voir qu’il figure
la
conscience exigeante, et comme le juge incorruptible et amical du hér
11
ir qu’il figure la conscience exigeante, et comme
le
juge incorruptible et amical du héros et de son débat, ce personnage
12
: Franz Kafka. De cet esprit incomparable — qu’on
l’
entende aux deux sens du terme —, un seul ouvrage a paru en français22
13
ançais22. Ce serait assez pour donner une idée de
l’
ordre de grandeur spirituelle et de la singularité de l’œuvre entière.
14
une idée de l’ordre de grandeur spirituelle et de
la
singularité de l’œuvre entière. Mais bien peu en ont eu connaissance,
15
e de grandeur spirituelle et de la singularité de
l’
œuvre entière. Mais bien peu en ont eu connaissance, et moins encore s
16
réserve. Une sorte de stupéfaction respectueuse ;
le
mutisme de l’homme qui s’est senti touché dans une région de l’être d
17
orte de stupéfaction respectueuse ; le mutisme de
l’
homme qui s’est senti touché dans une région de l’être dont il ignorai
18
l’homme qui s’est senti touché dans une région de
l’
être dont il ignorait presque l’existence, et qui demande un peu de te
19
ans une région de l’être dont il ignorait presque
l’
existence, et qui demande un peu de temps pour formuler sa réaction, v
20
temps pour formuler sa réaction, voilà sans doute
l’
explication qu’il faut donner à l’espèce de résistance que rencontre K
21
oilà sans doute l’explication qu’il faut donner à
l’
espèce de résistance que rencontre Kafka parmi nous. Rien ne me paraît
22
Kafka parmi nous. Rien ne me paraît plus propre à
la
réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie roman
23
s. Rien ne me paraît plus propre à la réduire que
le
détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie romanesque, l’approc
24
réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ;
la
biographie romanesque, l’approche vivante de la personne même de Kafk
25
el a recouru Max Brod ; la biographie romanesque,
l’
approche vivante de la personne même de Kafka dans ce qu’elle eut de q
26
; la biographie romanesque, l’approche vivante de
la
personne même de Kafka dans ce qu’elle eut de quotidien et de très si
27
ifice gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut
l’
ami le plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’est chargé de publi
28
gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut l’ami
le
plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’est chargé de publier ses
29
grande part inédites, et que Kafka lui-même, par
l’
excès d’un scrupule à la fois artistique et religieux, souhaitait que
30
à la fois artistique et religieux, souhaitait que
l’
on détruisît. Max Brod s’est expliqué sur ce point délicat dans une no
31
liqué sur ce point délicat dans une note jointe à
l’
édition posthume du Procès : je doute que les lecteurs de ce livre éto
32
nte à l’édition posthume du Procès : je doute que
les
lecteurs de ce livre étonnant, le plus profond qu’on puisse imaginer,
33
: je doute que les lecteurs de ce livre étonnant,
le
plus profond qu’on puisse imaginer, aient le courage de le lui reproc
34
ant, le plus profond qu’on puisse imaginer, aient
le
courage de le lui reprocher. La piété même que voue Max Brod à la mém
35
rofond qu’on puisse imaginer, aient le courage de
le
lui reprocher. La piété même que voue Max Brod à la mémoire de son am
36
e imaginer, aient le courage de le lui reprocher.
La
piété même que voue Max Brod à la mémoire de son ami le retint d’entr
37
té même que voue Max Brod à la mémoire de son ami
le
retint d’entreprendre au lendemain de la mort de Kafka sa biographie
38
son ami le retint d’entreprendre au lendemain de
la
mort de Kafka sa biographie objective. Mais par une sorte de compensa
39
on tout inconsciente, c’est au désir de prolonger
le
merveilleux dialogue interrompu que l’auteur du Royaume enchanté attr
40
prolonger le merveilleux dialogue interrompu que
l’
auteur du Royaume enchanté attribue aujourd’hui l’inspiration de ce ro
41
l’auteur du Royaume enchanté attribue aujourd’hui
l’
inspiration de ce roman. Sachons-lui gré d’accorder par là même, à un
42
d’accorder par là même, à un public plus étendu,
l’
avance nécessaire, le gage tout humain dont certains lecteurs ont beso
43
me, à un public plus étendu, l’avance nécessaire,
le
gage tout humain dont certains lecteurs ont besoin, pour se risquer à
44
quer à découvrir un génie tellement « étranger »…
Le
récit de Max Brod est librement imaginé. Toutefois le personnage de G
45
écit de Max Brod est librement imaginé. Toutefois
le
personnage de Garta, ses propos, sa vision du monde, ses expériences
46
onde, ses expériences et préoccupations sociales,
les
lectures qu’il fait à son ami, la brève idylle de Weimar… tout cela c
47
ions sociales, les lectures qu’il fait à son ami,
la
brève idylle de Weimar… tout cela compose une description exacte de l
48
imar… tout cela compose une description exacte de
la
jeunesse de Kafka. Quelques faits et deux ou trois dates suffiront dé
49
aquit à Prague en 1883. Il passa dans cette ville
la
plus grande partie de sa vie. Docteur en droit, il travailla d’abord
50
les, puis d’une compagnie d’assurances ouvrières.
Le
travail manuel l’attirait ; il s’essaya dans un atelier de menuiserie
51
mpagnie d’assurances ouvrières. Le travail manuel
l’
attirait ; il s’essaya dans un atelier de menuiserie, puis dans une en
52
nombre de récits. Mais on trouva dans ses papiers
les
manuscrits presque complets de trois romans : Le Procès, Le Château,
53
les manuscrits presque complets de trois romans :
Le
Procès, Le Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde
54
its presque complets de trois romans : Le Procès,
Le
Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde est d’une
55
rois romans : Le Procès, Le Château, et Amérique.
Le
regard qu’il y porte sur le monde est d’une précision proprement ango
56
Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur
le
monde est d’une précision proprement angoissante. Il considère notre
57
issante. Il considère notre vie quotidienne, mais
avec
une minutie telle qu’on ne tarde pas à pressentir que la plupart de n
58
ndent et masquent à peine une foncière absurdité.
L’
état d’extrême lucidité que suscite en nous cette vision ressemble à s
59
ar. Mais alors que tant de poètes s’efforçaient à
la
même époque de délirer méthodiquement, et de brouiller tous les plans
60
e de délirer méthodiquement, et de brouiller tous
les
plans du réel à seule fin de s’en évader — durant le temps de leur iv
61
plans du réel à seule fin de s’en évader — durant
le
temps de leur ivresse tout au moins — Kafka nous ramène sans cesse, a
62
sse tout au moins — Kafka nous ramène sans cesse,
avec
une sorte d’humour inflexible, à la conscience la plus sobre de notre
63
sans cesse, avec une sorte d’humour inflexible, à
la
conscience la plus sobre de notre humaine condition. On dirait qu’il
64
ec une sorte d’humour inflexible, à la conscience
la
plus sobre de notre humaine condition. On dirait qu’il incite ses hér
65
dirait qu’il incite ses héros à pratiquer contre
la
vie bourgeoise une espèce de « grève perlée » : c’est à force de cons
66
orce de conscience, de naturel, d’exactitude dans
l’
exercice de leurs tâches banales et de leurs relations sociales, qu’il
67
ns sociales, qu’ils en découvrent et en dénoncent
l’
impossibilité foncière. À serrer de si près le réel, on le convainc ra
68
ent l’impossibilité foncière. À serrer de si près
le
réel, on le convainc rapidement de monstruosité et de scandale métaph
69
ibilité foncière. À serrer de si près le réel, on
le
convainc rapidement de monstruosité et de scandale métaphysique. Et d
70
Et dès lors tout devient étrangement signifiant,
le
fait divers s’agrandit peu à peu aux proportions d’une parabole de l’
71
andit peu à peu aux proportions d’une parabole de
l’
existence. Ou bien c’est le contraire : partant d’un fait inexplicable
72
ions d’une parabole de l’existence. Ou bien c’est
le
contraire : partant d’un fait inexplicable et monstrueux23 survenu da
73
un fait inexplicable et monstrueux23 survenu dans
la
vie de son héros, Kafka nous amène à penser que le détail de l’existe
74
venu dans la vie de son héros, Kafka nous amène à
penser
que le détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui
75
a vie de son héros, Kafka nous amène à penser que
le
détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois
76
héros, Kafka nous amène à penser que le détail de
l’
existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois l’accompagne
77
à penser que le détail de l’existence banale, et
le
sentiment d’étrangeté qui parfois l’accompagne en sourdine s’explique
78
e banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois
l’
accompagne en sourdine s’expliquent de la manière la plus logique sitô
79
parfois l’accompagne en sourdine s’expliquent de
la
manière la plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial my
80
accompagne en sourdine s’expliquent de la manière
la
plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial mystérieux et
81
liquent de la manière la plus logique sitôt qu’on
les
rapporte à un fait initial mystérieux et d’apparence extravagante. De
82
rence extravagante. Derrière cette psychologie de
l’
angoisse quotidienne, l’on pressent chez Kafka des intentions morales,
83
ière cette psychologie de l’angoisse quotidienne,
l’
on pressent chez Kafka des intentions morales, une philosophie, et la
84
Kafka des intentions morales, une philosophie, et
la
recherche au moins d’une théologie. Tout cela, qui n’est pas exprimé
85
trahi par certaines bizarreries du récit, donne à
l’
œuvre une grandeur poétique, un pouvoir d’inquiéter presque morbide au
86
mais aussi, pour qui sait comprendre, salutaire…
Les
lectures favorites et les préoccupations sociales de « Garta », telle
87
comprendre, salutaire… Les lectures favorites et
les
préoccupations sociales de « Garta », telles que nous les décrit Max
88
ccupations sociales de « Garta », telles que nous
les
décrit Max Brod, aideront à deviner la nature assez rare du dessein s
89
que nous les décrit Max Brod, aideront à deviner
la
nature assez rare du dessein secret de Kafka. Sa passion de l’absolu
90
ez rare du dessein secret de Kafka. Sa passion de
l’
absolu moral et religieux, sa psychologie de l’angoisse dérivent sans
91
de l’absolu moral et religieux, sa psychologie de
l’
angoisse dérivent sans doute de Kierkegaard, qu’il fut l’un des premie
92
’utilité, d’éducation des forces spirituelles par
l’
activité pratique et sociale, volonté qui se manifeste tout au long de
93
este tout au long de son existence, et qui devait
l’
amener entre autres, à son projet de participation au jeune mouvement
94
sans doute assez pour faire entrevoir au lecteur
l’
arrière-plan et les prolongements de l’aventure du « vieux Pragois »,
95
pour faire entrevoir au lecteur l’arrière-plan et
les
prolongements de l’aventure du « vieux Pragois », héros non tout à fa
96
au lecteur l’arrière-plan et les prolongements de
l’
aventure du « vieux Pragois », héros non tout à fait imaginaire, lui a
97
ait imaginaire, lui aussi, du Royaume enchanté de
l’
amour. 22. Le Procès, roman traduit de l’allemand par A. Vialatte.
98
lui aussi, du Royaume enchanté de l’amour. 22.
Le
Procès, roman traduit de l’allemand par A. Vialatte. Deux autres réci
99
té de l’amour. 22. Le Procès, roman traduit de
l’
allemand par A. Vialatte. Deux autres récits de Kafka ont été publiés
100
. Deux autres récits de Kafka ont été publiés par
la
Nouvelle Revue française : La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par
101
t été publiés par la Nouvelle Revue française :
La
Métamorphose et Le Terrier. 23. Par exemple : la métamorphose subite
102
a Nouvelle Revue française : La Métamorphose et
Le
Terrier. 23. Par exemple : la métamorphose subite d’un jeune homme e
103
La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par exemple :
la
métamorphose subite d’un jeune homme en une bête innommable et même i
104
une bête innommable et même indescriptible (dans
La
Métamorphose). Ou encore : l’inculpation inexplicable qui pèse sur le
105
ndescriptible (dans La Métamorphose). Ou encore :
l’
inculpation inexplicable qui pèse sur le héros du Procès. d. Rougemo
106
encore : l’inculpation inexplicable qui pèse sur
le
héros du Procès. d. Rougemont Denis de, Brod Max, « [Préface] Max B
107
ugemont Denis de, Brod Max, « [Préface] Max Brod,
Le
Royaume enchanté de l’amour », dans Le Royaume enchanté de l’amour,
108
Max, « [Préface] Max Brod, Le Royaume enchanté de
l’
amour », dans Le Royaume enchanté de l’amour, Paris, Édition « Je ser
109
Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour », dans
Le
Royaume enchanté de l’amour, Paris, Édition « Je sers », 1936, p. 9-1
110
chanté de l’amour », dans Le Royaume enchanté de
l’
amour, Paris, Édition « Je sers », 1936, p. 9-12.
111
Forme et transformation, ou
l’
acte selon Kierkegaard (janvier 1936)c « Toute mon activité d’auteu
112
Car on n’est pas chrétien, et même on ne peut pas
l’
être, mais il faut le devenir. Et le problème, alors, devient celui de
113
tien, et même on ne peut pas l’être, mais il faut
le
devenir. Et le problème, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire
114
n ne peut pas l’être, mais il faut le devenir. Et
le
problème, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire de la création
115
devenir. Et le problème, alors, devient celui de
l’
acte, c’est-à-dire de la création d’une possibilité nouvelle, sans pré
116
, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire de
la
création d’une possibilité nouvelle, sans précédent. Y a-t-il des act
117
té nouvelle, sans précédent. Y a-t-il des actes ?
L’
homme d’aujourd’hui ne le croit pas. Il croit aux lois, et il se veut
118
nt. Y a-t-il des actes ? L’homme d’aujourd’hui ne
le
croit pas. Il croit aux lois, et il se veut déterminé. Or il l’est da
119
Il croit aux lois, et il se veut déterminé. Or il
l’
est dans la mesure exacte où il l’accepte ; mais dans cette mesure mêm
120
x lois, et il se veut déterminé. Or il l’est dans
la
mesure exacte où il l’accepte ; mais dans cette mesure même, il se pe
121
éterminé. Or il l’est dans la mesure exacte où il
l’
accepte ; mais dans cette mesure même, il se peut qu’il cesse d’être h
122
e même, il se peut qu’il cesse d’être humain. Car
l’
homme n’a d’existence proprement humaine que lorsqu’il participe à la
123
ence proprement humaine que lorsqu’il participe à
la
transformation du monde. Autrement, il est animal, et soumis à la for
124
n du monde. Autrement, il est animal, et soumis à
la
forme des choses, — à la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas
125
est animal, et soumis à la forme des choses, — à
la
commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à l’acte, c’est qu’ils n
126
la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à
l’
acte, c’est qu’ils ne connaissent plus aucun chemin. Comment marcher,
127
on appelle ainsi leur anxiété. En vérité, toutes
les
démonstrations savantes qu’on nous a faites depuis un siècle pour nou
128
s a faites depuis un siècle pour nous prouver que
l’
acte est impossible et que le tout de l’homme est soumis au calcul, to
129
our nous prouver que l’acte est impossible et que
le
tout de l’homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et
130
ouver que l’acte est impossible et que le tout de
l’
homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et des sociol
131
ciences et des sociologies établit à grands frais
l’
évidence du désespoir : l’homme moderne a perdu « le chemin ». Je sui
132
établit à grands frais l’évidence du désespoir :
l’
homme moderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et
133
évidence du désespoir : l’homme moderne a perdu «
le
chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1
134
: l’homme moderne a perdu « le chemin ». Je suis
le
chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le che
135
oderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin,
la
vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Chr
136
u « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et
la
vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vé
137
n ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit
le
Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce
138
chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1.
La
vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la
139
rité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est
le
chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la
140
rist. 1. La vérité est le chemin Christ est
la
Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la seule explication vraie
141
min Christ est la Vérité dans ce sens qu’être
la
vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c
142
est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est
la
seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître
143
’être la vérité est la seule explication vraie de
la
vérité… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aur
144
est la seule explication vraie de la vérité… Être
la
vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu
145
aie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître
la
vérité, et le Christ n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas
146
té… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et
le
Christ n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été la vérité
147
tre la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu
la
vérité s’il n’avait pas été la vérité ; et nul homme ne connaît davan
148
urait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été
la
vérité ; et nul homme ne connaît davantage de vérité qu’il n’en incar
149
ntage de vérité qu’il n’en incarne.3 Voici donc
le
mystère : s’il n’y a pas de chemin, nous ne pouvons marcher, mais si
150
si nous ne marchons pas, il n’y a pas de chemin.
La
foi au Christ nous permet seule de franchir ce cercle enchanté où nou
151
de franchir ce cercle enchanté où nous maintient
l’
argument du démon — le serpent qui se mord la queue. La foi au Christ
152
enchanté où nous maintient l’argument du démon —
le
serpent qui se mord la queue. La foi au Christ est la condition néces
153
ient l’argument du démon — le serpent qui se mord
la
queue. La foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de
154
ument du démon — le serpent qui se mord la queue.
La
foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de tout acte
155
erpent qui se mord la queue. La foi au Christ est
la
condition nécessaire et suffisante de tout acte véritable, de toute m
156
marche, de toute création, de toute victoire sur
la
Nécessité. « Je suis le chemin ». Mais un chemin n’est un chemin que
157
on, de toute victoire sur la Nécessité. « Je suis
le
chemin ». Mais un chemin n’est un chemin que si on y marche4. Sinon i
158
inon il n’est qu’un point de vue ; ou bien encore
le
lieu d’un pur possible, et sur ces lieux règne le désespoir. Il nous
159
le lieu d’un pur possible, et sur ces lieux règne
le
désespoir. Il nous faut donc agir, si nous voulons la vérité, agir en
160
ésespoir. Il nous faut donc agir, si nous voulons
la
vérité, agir en vérité, c’est-à-dire agir dans le Christ. La possibil
161
la vérité, agir en vérité, c’est-à-dire agir dans
le
Christ. La possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y
162
agir en vérité, c’est-à-dire agir dans le Christ.
La
possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc auc
163
est-à-dire agir dans le Christ. La possibilité de
l’
acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc aucun acte possible,
164
possible, aucun acte vrai et vivant en dehors de
la
foi au Christ. Mais croire au Christ, c’est croire au Paradoxe de l’i
165
ais croire au Christ, c’est croire au Paradoxe de
l’
incarnation, c’est croire que Dieu a revêtu la forme de ce monde, c’es
166
de l’incarnation, c’est croire que Dieu a revêtu
la
forme de ce monde, c’est croire donc que cette forme peut être transf
167
transformée. — à vrai dire, en vertu du paradoxe
le
plus fou. Nous ne pouvons agir « qu’en vertu de l’absurde » ; mais ce
168
e plus fou. Nous ne pouvons agir « qu’en vertu de
l’
absurde » ; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alors les règles,
169
; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alors
les
règles, les morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même
170
seul donne un sens à nos vies. Alors les règles,
les
morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même temps qu’el
171
sens à nos vies. Alors les règles, les morales et
les
lois qui nous disaient d’agir dans le même temps qu’elles nous privai
172
morales et les lois qui nous disaient d’agir dans
le
même temps qu’elles nous privaient de tout pouvoir, s’évanouissent et
173
, s’évanouissent et meurent aux pages des livres.
L’
action de l’homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les
174
sent et meurent aux pages des livres. L’action de
l’
homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les normes. Au p
175
ges des livres. L’action de l’homme devient aussi
la
vérité ; et la norme de toutes les normes. Au premier pas que nous fa
176
L’action de l’homme devient aussi la vérité ; et
la
norme de toutes les normes. Au premier pas que nous faisons dans notr
177
e devient aussi la vérité ; et la norme de toutes
les
normes. Au premier pas que nous faisons dans notre nuit, voici que le
178
r pas que nous faisons dans notre nuit, voici que
le
chemin s’éclaire et que les perspectives se dégagent. Et nous allons
179
notre nuit, voici que le chemin s’éclaire et que
les
perspectives se dégagent. Et nous allons connaître maintenant que seu
180
ent. Et nous allons connaître maintenant que seul
l’
acte de foi est création, transformation, nouveauté pure dans le monde
181
est création, transformation, nouveauté pure dans
le
monde, vocation et personne éternelle, prophétie de l’éternité qui vi
182
nde, vocation et personne éternelle, prophétie de
l’
éternité qui vient à nous. 2. Il n’est d’action que prophétique
183
ophétique Qu’est-ce que prophétiser sinon dire
la
Parole qui détermine notre avenir ? Mais la Parole n’est dite que dan
184
dire la Parole qui détermine notre avenir ? Mais
la
Parole n’est dite que dans la foi, la foi n’existe que dans l’acte, e
185
notre avenir ? Mais la Parole n’est dite que dans
la
foi, la foi n’existe que dans l’acte, et cet acte devient alors notre
186
enir ? Mais la Parole n’est dite que dans la foi,
la
foi n’existe que dans l’acte, et cet acte devient alors notre chemin
187
st dite que dans la foi, la foi n’existe que dans
l’
acte, et cet acte devient alors notre chemin et notre loi. Ainsi nous
188
e pouvons connaître que ce que nous prophétisons.
Le
chrétien marche dans la nuit en créant sa lumière et son chemin5, lum
189
ce que nous prophétisons. Le chrétien marche dans
la
nuit en créant sa lumière et son chemin5, lumière qui n’est pas sa lu
190
min toujours imprévisible, certitude que devinent
les
pas, chemin qui se dérobe au doute et à l’orgueil, mais que parfois l
191
inent les pas, chemin qui se dérobe au doute et à
l’
orgueil, mais que parfois la prophétie fait briller devant lui comme u
192
dérobe au doute et à l’orgueil, mais que parfois
la
prophétie fait briller devant lui comme un éclair. « Sachez qu’à l’or
193
briller devant lui comme un éclair. « Sachez qu’à
l’
origine, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes les créatures,
194
e, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes
les
créatures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et
195
s un dialogue de Kassner6 — toutes les créatures,
le
Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres pa
196
ue de Kassner6 — toutes les créatures, le Soleil,
la
Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et
197
ner6 — toutes les créatures, le Soleil, la Terre,
la
Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisa
198
utes les créatures, le Soleil, la Terre, la Lune,
les
plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisaient, pare
199
tures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes,
les
animaux et les pierres parlaient et prophétisaient, pareils aux proph
200
l, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et
les
pierres parlaient et prophétisaient, pareils aux prophètes. C’est de
201
qui dans sa fin possède son commencement ». Mais
l’
homme déchu de son origine éternelle a perdu la vision de sa fin. Le v
202
is l’homme déchu de son origine éternelle a perdu
la
vision de sa fin. Le voici prisonnier des formes et des nombres, escl
203
on origine éternelle a perdu la vision de sa fin.
Le
voici prisonnier des formes et des nombres, esclave des lois d’un mon
204
un monde sur lequel il devrait régner. Seule peut
l’
en délivrer la Parole prophétique qui lui advient comme un appel dans
205
equel il devrait régner. Seule peut l’en délivrer
la
Parole prophétique qui lui advient comme un appel dans les ténèbres.
206
e prophétique qui lui advient comme un appel dans
les
ténèbres. Certains reçoivent l’ordre de parler, et c’est là leur acti
207
me un appel dans les ténèbres. Certains reçoivent
l’
ordre de parler, et c’est là leur action, leur prophétie et leur salut
208
tion, leur prophétie et leur salut. Cependant que
les
hommes les frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, d
209
prophétie et leur salut. Cependant que les hommes
les
frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la voca
210
salut. Cependant que les hommes les frappent sur
la
bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la vocation prophétique
211
la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont
la
vocation prophétique pareille à celle des hommes de Dieu qui se lèven
212
lle à celle des hommes de Dieu qui se lèvent sous
l’
Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui les conduira au marty
213
ui se lèvent sous l’Ancienne Alliance, se confond
avec
la parole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin
214
lèvent sous l’Ancienne Alliance, se confond avec
la
parole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, l
215
’Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui
les
conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, leur vérité et l
216
nfond avec la parole qui les conduira au martyre.
La
Parole dite est leur chemin, leur vérité et leur vie dans ce monde ;
217
vérité et leur vie dans ce monde ; ils meurent de
l’
avoir dite, et n’ont pas d’autre tâche7. Le chemin est imprévisible ;
218
ent de l’avoir dite, et n’ont pas d’autre tâche7.
Le
chemin est imprévisible ; le nôtre, disons-nous, n’est pas celui de c
219
nous, n’est pas celui de ces prophètes. Cependant
la
question demeure : comment agir, et comment transformer, c’est-à-dire
220
comment transformer, c’est-à-dire comment obéir à
la
Parole qui prophétise ? Le chemin est imprévisible. Ce que nous conna
221
à-dire comment obéir à la Parole qui prophétise ?
Le
chemin est imprévisible. Ce que nous connaissons, c’est pourtant son
222
connaissons, c’est pourtant son point de départ.
Le
chemin commence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ordre q
223
mence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à
l’
ordre qu’il reçoit de Dieu, — n’importe où et n’importe qui, à n’impor
224
n’importe quelle règle d’action chrétienne, — ose
la
mettre en pratique. L’action que tu introduiras ainsi dans la réalité
225
d’action chrétienne, — ose la mettre en pratique.
L’
action que tu introduiras ainsi dans la réalité portera la marque de l
226
pratique. L’action que tu introduiras ainsi dans
la
réalité portera la marque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qu
227
que tu introduiras ainsi dans la réalité portera
la
marque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement
228
duiras ainsi dans la réalité portera la marque de
l’
absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement chrétien (Jo
229
la réalité portera la marque de l’absolu : c’est
la
marque de tout ce qui est véritablement chrétien (Journal). Vends ton
230
ritablement chrétien (Journal). Vends ton bien et
le
donne aux pauvres, par exemple, ou si tu ne possèdes pas de bien, ces
231
si tu ne possèdes pas de bien, cesse d’en désirer
la
possession, et vis comme un chrétien : au jour le jour, sans assuranc
232
la possession, et vis comme un chrétien : au jour
le
jour, sans assurances et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans l
233
r le jour, sans assurances et sans préparation, à
la
grâce de Dieu, dans la confiance et l’inquiétude, — on pourrait dire,
234
ces et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans
la
confiance et l’inquiétude, — on pourrait dire, dans une sorte d’humou
235
aration, à la grâce de Dieu, dans la confiance et
l’
inquiétude, — on pourrait dire, dans une sorte d’humour — dans l’avent
236
on pourrait dire, dans une sorte d’humour — dans
l’
aventure de celui que rien ne protège et la prudence de celui qui écou
237
— dans l’aventure de celui que rien ne protège et
la
prudence de celui qui écoute, dans le tourment et dans la joie d’une
238
protège et la prudence de celui qui écoute, dans
le
tourment et dans la joie d’une découverte quotidienne du chemin, — to
239
nce de celui qui écoute, dans le tourment et dans
la
joie d’une découverte quotidienne du chemin, — ton chemin, sur lequel
240
on chemin, sur lequel tu es seul, parce qu’il est
la
parole de ta vie, sa mesure et sa vocation, son risque à chaque insta
241
secret du risque. 3. Nous n’avons pas à suivre
le
chemin, mais bien à l’inventer à chaque pas Tant que nous considér
242
Nous n’avons pas à suivre le chemin, mais bien à
l’
inventer à chaque pas Tant que nous considérons le Christ avec des
243
nventer à chaque pas Tant que nous considérons
le
Christ avec des yeux de moralistes, comme une personnalité morale de
244
chaque pas Tant que nous considérons le Christ
avec
des yeux de moralistes, comme une personnalité morale de premier plan
245
premier plan qu’il ne resterait plus qu’à imiter,
l’
acte demeure un pur possible, un modèle d’acte, une abstraction, c’est
246
sans pour autant nous transformer, et c’est bien
la
définition de « l’inactuel ». Se conformer à ce pieux idéal, non seul
247
ous transformer, et c’est bien la définition de «
l’
inactuel ». Se conformer à ce pieux idéal, non seulement ce n’est poin
248
oint agir, non seulement c’est limiter par avance
le
rôle de la foi, c’est-à-dire refuser la foi, mais c’est peut-être sim
249
non seulement c’est limiter par avance le rôle de
la
foi, c’est-à-dire refuser la foi, mais c’est peut-être simplement « s
250
ar avance le rôle de la foi, c’est-à-dire refuser
la
foi, mais c’est peut-être simplement « singer » un modèle flatteur et
251
flatteur et rassurant. Et pourquoi ? Parce que «
le
chemin » est invisible tant qu’on n’y est pas engagé. Parce que c’est
252
y est pas engagé. Parce que c’est un blasphème de
l’
homme pieux, du moraliste, que de prétendre imiter le modèle que ses y
253
omme pieux, du moraliste, que de prétendre imiter
le
modèle que ses yeux voient et que sa chair perçoit (à la lecture des
254
le que ses yeux voient et que sa chair perçoit (à
la
lecture des évangiles par exemple) au lieu d’écouter l’ordre, au lieu
255
ture des évangiles par exemple) au lieu d’écouter
l’
ordre, au lieu de croire et de faire un pas dans la nuit, sur ce « che
256
’ordre, au lieu de croire et de faire un pas dans
la
nuit, sur ce « chemin » qui est le Christ présent. Il y a abîmes entr
257
re un pas dans la nuit, sur ce « chemin » qui est
le
Christ présent. Il y a abîmes entre ces deux exigences : l’abîme entr
258
présent. Il y a abîmes entre ces deux exigences :
l’
abîme entre les mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation
259
a abîmes entre ces deux exigences : l’abîme entre
les
mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte, l’a
260
exigences : l’abîme entre les mérites humains et
la
grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre la religion
261
: l’abîme entre les mérites humains et la grâce,
l’
abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi
262
re les mérites humains et la grâce, l’abîme entre
l’
imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le te
263
humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation et
l’
acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instan
264
et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte,
l’
abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instant créate
265
’abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre
la
religion et la foi — entre le temps et l’instant créateur —, entre la
266
imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et
la
foi — entre le temps et l’instant créateur —, entre la forme et la tr
267
acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre
le
temps et l’instant créateur —, entre la forme et la transformation. I
268
e entre la religion et la foi — entre le temps et
l’
instant créateur —, entre la forme et la transformation. Il ne faut pa
269
i — entre le temps et l’instant créateur —, entre
la
forme et la transformation. Il ne faut pas commencer par l’imitation,
270
temps et l’instant créateur —, entre la forme et
la
transformation. Il ne faut pas commencer par l’imitation, mais par la
271
t la transformation. Il ne faut pas commencer par
l’
imitation, mais par la grâce. L’imitation suivra comme un fruit de la
272
l ne faut pas commencer par l’imitation, mais par
la
grâce. L’imitation suivra comme un fruit de la reconnaissance… Tout c
273
pas commencer par l’imitation, mais par la grâce.
L’
imitation suivra comme un fruit de la reconnaissance… Tout commence pa
274
ar la grâce. L’imitation suivra comme un fruit de
la
reconnaissance… Tout commence par la joie d’être aimé — et ensuite vi
275
un fruit de la reconnaissance… Tout commence par
la
joie d’être aimé — et ensuite vient l’effort de plaire, constamment e
276
mmence par la joie d’être aimé — et ensuite vient
l’
effort de plaire, constamment exalté par la certitude que l’on est aim
277
vient l’effort de plaire, constamment exalté par
la
certitude que l’on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8
278
e plaire, constamment exalté par la certitude que
l’
on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8. Parce qu’il est
279
ertitude que l’on est aimé maintenant, et même si
l’
effort échoue »8. Parce qu’il est aimé maintenant, aller maintenant, p
280
qu’il est aimé maintenant, aller maintenant, par
la
foi, sur ce chemin qui commence à ses pas, — c’est là le destin du ch
281
sur ce chemin qui commence à ses pas, — c’est là
le
destin du chrétien, c’est son « impossible » destin, le seul acte pos
282
tin du chrétien, c’est son « impossible » destin,
le
seul acte possible à l’homme. Et c’est l’acte que Dieu initie. 4.
283
on « impossible » destin, le seul acte possible à
l’
homme. Et c’est l’acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’absolu
284
destin, le seul acte possible à l’homme. Et c’est
l’
acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’absolu, il n’existe qu’u
285
est l’acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à
l’
absolu, il n’existe qu’un seul temps : le présent »9 Nous ne conna
286
apport à l’absolu, il n’existe qu’un seul temps :
le
présent »9 Nous ne connaissons rien du Christ, du « chemin », en
287
ssons rien du Christ, du « chemin », en dehors de
l’
acte de foi qui, supprimant toute distance historique, nous rend conte
288
nous rend contemporains de Son incarnation. Ainsi
l’
acte de foi détruit le temps où il a lieu mais comme la plénitude détr
289
s de Son incarnation. Ainsi l’acte de foi détruit
le
temps où il a lieu mais comme la plénitude détruit le relatif. Il est
290
e de foi détruit le temps où il a lieu mais comme
la
plénitude détruit le relatif. Il est ce contact impensable de l’étern
291
emps où il a lieu mais comme la plénitude détruit
le
relatif. Il est ce contact impensable de l’éternité avec notre durée,
292
truit le relatif. Il est ce contact impensable de
l’
éternité avec notre durée, et l’on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’e
293
latif. Il est ce contact impensable de l’éternité
avec
notre durée, et l’on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’est produit, e
294
act impensable de l’éternité avec notre durée, et
l’
on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’est produit, et qu’il peut se pro
295
re. « Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là
la
santé de la foi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans la foi
296
eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de
la
foi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans la foi, il n’y aur
297
t là la santé de la foi »10. Si nous vivions dans
l’
obéissance et dans la foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais le Jo
298
oi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans
la
foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais le Jour éternel de la prés
299
ans la foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais
le
Jour éternel de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le mon
300
aurait ni passé ni futur, mais le Jour éternel de
la
présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et l’unité du ge
301
de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur
le
monde et l’unité du genre humain. Si nous vivons dans l’obéissance et
302
ce à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et
l’
unité du genre humain. Si nous vivons dans l’obéissance et dans la foi
303
e et l’unité du genre humain. Si nous vivons dans
l’
obéissance et dans la foi, l’histoire s’arrêterait comme l’Aspiration
304
humain. Si nous vivons dans l’obéissance et dans
la
foi, l’histoire s’arrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par
305
Si nous vivons dans l’obéissance et dans la foi,
l’
histoire s’arrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par la beaut
306
nce et dans la foi, l’histoire s’arrêterait comme
l’
Aspiration d’un homme saisi par la beauté, et le temps immobile s’abîm
307
rrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par
la
beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans l’amen éternel. Æternit
308
e l’Aspiration d’un homme saisi par la beauté, et
le
temps immobile s’abîmerait dans l’amen éternel. Æternitas non est tem
309
la beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans
l’
amen éternel. Æternitas non est temporis successio sine fine, sed nunc
310
est temporis successio sine fine, sed nunc stans.
L’
éternité a marché sur la terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais n
311
ine fine, sed nunc stans. L’éternité a marché sur
la
terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’étern
312
c stans. L’éternité a marché sur la terre : ainsi
le
Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’éternel et nous lui pr
313
rnité a marché sur la terre : ainsi le Christ est
le
chemin. Mais nous avons refusé l’éternel et nous lui préférons nos vi
314
i le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé
l’
éternel et nous lui préférons nos vies : c’est pourquoi nous vivons da
315
férons nos vies : c’est pourquoi nous vivons dans
l’
Histoire, et dans l’absence, ou dans la nostalgie des temps qui vienne
316
est pourquoi nous vivons dans l’Histoire, et dans
l’
absence, ou dans la nostalgie des temps qui viennent ; c’est pourquoi
317
ivons dans l’Histoire, et dans l’absence, ou dans
la
nostalgie des temps qui viennent ; c’est pourquoi nous n’avons plus d
318
; c’est pourquoi nous n’avons plus d’être que par
la
foi, « substance des choses espérées », et c’est pourquoi la Parole,
319
ubstance des choses espérées », et c’est pourquoi
la
Parole, parmi nous, n’est que promesse et vigilante prophétie de l’in
320
ous, n’est que promesse et vigilante prophétie de
l’
invisible. De Séir, une voix crie au prophète11 : « Sentinelle, que di
321
crie au prophète11 : « Sentinelle, que dis-tu de
la
nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu
322
que dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de
la
nuit ? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi !
323
e la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? —
La
sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi ! Si vous vou
324
e dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu :
Le
matin vient, et la nuit aussi ! Si vous voulez interroger, interrogez
325
? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et
la
nuit aussi ! Si vous voulez interroger, interrogez ; convertissez-vou
326
er, interrogez ; convertissez-vous et revenez ! »
La
forme du monde est durée, et c’est la forme du péché, du refus de l’i
327
revenez ! » La forme du monde est durée, et c’est
la
forme du péché, du refus de l’instant éternel12, — le temps, la succe
328
st durée, et c’est la forme du péché, du refus de
l’
instant éternel12, — le temps, la succession et le désir. C’est le ret
329
orme du péché, du refus de l’instant éternel12, —
le
temps, la succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le ret
330
ché, du refus de l’instant éternel12, — le temps,
la
succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Di
331
l’instant éternel12, — le temps, la succession et
le
désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le dout
332
l12, — le temps, la succession et le désir. C’est
le
retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpos
333
ps, la succession et le désir. C’est le retard de
l’
acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le sa
334
cession et le désir. C’est le retard de l’acte et
le
retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et le
335
le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est
le
doute qui s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est la lâchet
336
ait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre
le
savoir et le faire, et c’est la lâcheté de l’homme qui se repose sur
337
c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et
le
faire, et c’est la lâcheté de l’homme qui se repose sur ses œuvres et
338
s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est
la
lâcheté de l’homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son
339
tre le savoir et le faire, et c’est la lâcheté de
l’
homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec
340
té de l’homme qui se repose sur ses œuvres et qui
les
juge : son alliance avec le serpent. De quelles étranges et secrètes
341
ose sur ses œuvres et qui les juge : son alliance
avec
le serpent. De quelles étranges et secrètes façons le temps est lié a
342
ur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec
le
serpent. De quelles étranges et secrètes façons le temps est lié au p
343
e serpent. De quelles étranges et secrètes façons
le
temps est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de la
344
ges et secrètes façons le temps est lié au péché,
le
pécheur seul le sait, dans l’instant de la foi, où par grâce il peut
345
façons le temps est lié au péché, le pécheur seul
le
sait, dans l’instant de la foi, où par grâce il peut rompre ce lien.
346
s est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans
l’
instant de la foi, où par grâce il peut rompre ce lien. « Si vous voul
347
péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de
la
foi, où par grâce il peut rompre ce lien. « Si vous voulez interroger
348
« Si vous voulez interroger, interrogez ! », mais
la
réponse est : « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte
349
, mais la réponse est : « Convertissez-vous ! » À
la
lumière jaillie de l’acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ;
350
: « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de
l’
acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau
351
tissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte de
la
foi, le mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau prend son
352
ous ! » À la lumière jaillie de l’acte de la foi,
le
mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau prend son cours,
353
et sa mesure est plus mystérieuse encore. Voici :
le
pécheur pardonné vit dans le temps comme à contre-courant de sa durée
354
euse encore. Voici : le pécheur pardonné vit dans
le
temps comme à contre-courant de sa durée, vit d’acte en acte. Et son
355
rrait dire : sa patience. Car il se tient où Dieu
l’
a mis, et ce n’est plus une dérive. Il vit dans la forme du monde, mai
356
l’a mis, et ce n’est plus une dérive. Il vit dans
la
forme du monde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de la « vie
357
Il vit dans la forme du monde, mais il est ce qui
la
transforme. Vertige de la « vie chrétienne », cette histoire de Dieu
358
nde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de
la
« vie chrétienne », cette histoire de Dieu dans le temps, cette histo
359
a « vie chrétienne », cette histoire de Dieu dans
le
temps, cette histoire de l’éternité ! « Il suffit d’un courage pureme
360
histoire de Dieu dans le temps, cette histoire de
l’
éternité ! « Il suffit d’un courage purement humain pour renoncer le t
361
suffit d’un courage purement humain pour renoncer
le
temps afin de gagner l’éternité : car je la gagne et ne puis plus de
362
ment humain pour renoncer le temps afin de gagner
l’
éternité : car je la gagne et ne puis plus de toute éternité la renonc
363
oncer le temps afin de gagner l’éternité : car je
la
gagne et ne puis plus de toute éternité la renoncer ; et c’est le par
364
car je la gagne et ne puis plus de toute éternité
la
renoncer ; et c’est le paradoxe ; mais il faut un courage paradoxal e
365
uis plus de toute éternité la renoncer ; et c’est
le
paradoxe ; mais il faut un courage paradoxal et humble pour embrasser
366
aut un courage paradoxal et humble pour embrasser
le
temps en vertu de l’absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Pa
367
xal et humble pour embrasser le temps en vertu de
l’
absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par la foi Abraham ne p
368
vertu de l’absurde 13. Et ce courage est celui de
la
foi. Par la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’ab
369
bsurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par
la
foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord qu’il le
370
la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par
la
foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissa
371
rdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord qu’il
le
reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissance, initiation Le
372
’est par la foi d’abord qu’il le reçut »14. 5.
Le
temps de l’acte est renaissance, initiation Les deux moments réels
373
foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de
l’
acte est renaissance, initiation Les deux moments réels d’une vie d
374
Le temps de l’acte est renaissance, initiation
Les
deux moments réels d’une vie d’homme, s’il est vrai que Dieu Seul est
375
me, s’il est vrai que Dieu Seul est réel, ce sont
la
naissance et la mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la n
376
i que Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et
la
mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et la m
377
mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre
la
naissance et la mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant
378
ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et
la
mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de la durée : en
379
Entre la naissance et la mort — ou plutôt puisque
l’
acte est à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance
380
ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de
la
durée : entre la mort et la naissance — toute la réalité de l’homme e
381
e l’acte est à contre-courant de la durée : entre
la
mort et la naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte.
382
t à contre-courant de la durée : entre la mort et
la
naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte
383
la durée : entre la mort et la naissance — toute
la
réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tensio
384
tre la mort et la naissance — toute la réalité de
l’
homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tension, — passage d
385
e. Tout acte est Passage et tension, — passage de
la
mort à la vie, tension entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire
386
te est Passage et tension, — passage de la mort à
la
vie, tension entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire de la Paro
387
entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire de
la
Parole sur la chair, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la
388
résiste et ce qui crée, victoire de la Parole sur
la
chair, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la loi individue
389
, victoire de la Parole sur la chair, autorité de
la
personne sur l’anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici qu’on t
390
Parole sur la chair, autorité de la personne sur
l’
anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici qu’on touche au mystère
391
ir, autorité de la personne sur l’anarchie et sur
la
loi individuelle. C’est ici qu’on touche au mystère, sans lequel tout
392
e, sans lequel tout serait absurde : acte détruit
le
temps, puisqu’il est dans le même instant et la mort et la vie des êt
393
surde : acte détruit le temps, puisqu’il est dans
le
même instant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existenc
394
t le temps, puisqu’il est dans le même instant et
la
mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant
395
puisqu’il est dans le même instant et la mort et
la
vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant le temps,
396
ant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à
l’
existence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le rédime puisqu
397
tres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant
le
temps, il le recrée et le rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un
398
omet à l’existence ; mais détruisant le temps, il
le
recrée et le rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en le
399
tence ; mais détruisant le temps, il le recrée et
le
rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en le liant au dest
400
ime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en
le
liant au destin personnel. Ainsi l’acte absolu serait création absolu
401
un rythme en le liant au destin personnel. Ainsi
l’
acte absolu serait création absolue, mais un acte de l’homme n’est jam
402
e absolu serait création absolue, mais un acte de
l’
homme n’est jamais qu’une rédemption. Distinction de théologien, et qu
403
. Distinction de théologien, et qui veut prévenir
l’
orgueil. Mais la vision de celui qui agit n’est point un jugement des
404
théologien, et qui veut prévenir l’orgueil. Mais
la
vision de celui qui agit n’est point un jugement des résultats, — des
405
elle n’est pas davantage appréciation des causes.
L’
acte n’est jamais conséquence, il est toujours initiation. La vision d
406
t jamais conséquence, il est toujours initiation.
La
vision de celui qui agit est tout entière absorbée par l’instant, par
407
n de celui qui agit est tout entière absorbée par
l’
instant, par le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel.
408
agit est tout entière absorbée par l’instant, par
le
passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel. « Celui qui doi
409
r le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par
le
réel. « Celui qui doit agir, s’il veut juger de soi selon le succès q
410
Celui qui doit agir, s’il veut juger de soi selon
le
succès qu’il remporte, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si
411
e, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si
le
succès pouvait réjouir le monde entier, il ne sert de rien au héros ;
412
n entreprendre. Même si le succès pouvait réjouir
le
monde entier, il ne sert de rien au héros ; car le héros n’a connu so
413
e monde entier, il ne sert de rien au héros ; car
le
héros n’a connu son succès que lorsque tout était fini ; et ce n’est
414
e lorsque tout était fini ; et ce n’est point par
le
succès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15. Le temps de l’ac
415
cès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15.
Le
temps de l’acte vient s’inscrire sur les traits du visage héroïque. D
416
t héros, mais par son entreprise »15. Le temps de
l’
acte vient s’inscrire sur les traits du visage héroïque. Dans cette ch
417
rise »15. Le temps de l’acte vient s’inscrire sur
les
traits du visage héroïque. Dans cette chair qui doit vieillir, la ten
418
age héroïque. Dans cette chair qui doit vieillir,
la
tension de la mort et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’es
419
Dans cette chair qui doit vieillir, la tension de
la
mort et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que la pe
420
ir qui doit vieillir, la tension de la mort et de
la
vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que la personne ? C’est
421
vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que
la
personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vision contre so
422
s victorieuses. Qu’est-ce que la personne ? C’est
la
vision et le visage du héros, sa vision contre son visage, sa vision
423
s. Qu’est-ce que la personne ? C’est la vision et
le
visage du héros, sa vision contre son visage, sa vision qui crée son
424
contre son visage, sa vision qui crée son visage.
Le
visage appartient au temps, mais la vision à la parole dont elle proc
425
e son visage. Le visage appartient au temps, mais
la
vision à la parole dont elle procède, et si la face d’un homme est be
426
. Le visage appartient au temps, mais la vision à
la
parole dont elle procède, et si la face d’un homme est belle, c’est p
427
is la vision à la parole dont elle procède, et si
la
face d’un homme est belle, c’est parce qu’elle est un acte et un dest
428
qu’elle est un acte et un destin, une initiale de
l’
histoire, une effigie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de l’
429
estin, une initiale de l’histoire, une effigie de
la
Parole créatrice. 6. Le contraire de l’acte, c’est le désespoir
430
stoire, une effigie de la Parole créatrice. 6.
Le
contraire de l’acte, c’est le désespoir Nous savons tous cela, com
431
gie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de
l’
acte, c’est le désespoir Nous savons tous cela, comme nous savons q
432
le créatrice. 6. Le contraire de l’acte, c’est
le
désespoir Nous savons tous cela, comme nous savons qu’il faut mour
433
r : sans y croire. À vrai dire, nous avons toutes
les
raisons d’en douter, s’il est vrai que le doute est révolte, et qu’il
434
toutes les raisons d’en douter, s’il est vrai que
le
doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de
435
i que le doute est révolte, et qu’il faut pour se
l’
avouer la joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écriv
436
doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer
la
joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son tr
437
t qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de
l’
acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de la Maladie m
438
ut pour se l’avouer la joie qui naît de l’acte de
la
foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de la Maladie mortelle 16
439
la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de
la
Maladie mortelle 16, il venait justement de dépasser cette illusion d
440
usion du désespoir, qui consiste à s’imaginer que
l’
acte est puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui
441
consiste à s’imaginer que l’acte est puissance de
l’
homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que la foi vint saisir s
442
aginer que l’acte est puissance de l’homme : d’où
l’
impossibilité de l’oser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant
443
st puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de
l’
oser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le c
444
homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que
la
foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le contraire du désesp
445
Celui que la foi vint saisir sait maintenant que
l’
acte est le contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre f
446
la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est
le
contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que le
447
que l’acte est le contraire du désespoir. Mais il
le
sait d’une tout autre façon que le désespéré ne l’imagine. Parce que
448
spoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que
le
désespéré ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’
449
e sait d’une tout autre façon que le désespéré ne
l’
imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’est pas seulemen
450
re façon que le désespéré ne l’imagine. Parce que
le
rapport du désespoir à l’acte n’est pas seulement renversement, mais
451
ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à
l’
acte n’est pas seulement renversement, mais création irréversible. Et
452
ment, mais création irréversible. Et cela tient à
la
nature de l’acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’abso
453
éation irréversible. Et cela tient à la nature de
l’
acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de la Pers
454
cte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à
l’
absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simpl
455
encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de
la
Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homm
456
origine. Cela tient à l’absolu de la Personne qui
l’
initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homme dépourvu de fo
457
ela tient à l’absolu de la Personne qui l’initie.
Le
désespéré, le douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’homme
458
absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré,
le
douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’homme détendu, vagu
459
l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement
l’
homme dépourvu de foi, l’homme détendu, vague et fiévreux qui peuple n
460
e douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi,
l’
homme détendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités, l’homme sans vi
461
détendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités,
l’
homme sans visage et sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine que
462
sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine que
l’
acte viendra comme un sursaut de joie, comme une révolte, comme une af
463
une affirmation désespérée de son orgueil, comme
la
preuve enfin de son moi, — mais il sait bien qu’il n’en a pas, ou que
464
t pas et qu’il ne croit à aucun acte. Il vit dans
le
désir et dans la nostalgie, et son regard n’est pas une vision dans u
465
croit à aucun acte. Il vit dans le désir et dans
la
nostalgie, et son regard n’est pas une vision dans un visage, mais un
466
ans un visage, mais une manière de loucher vers «
les
autres », une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de la classe
467
re de loucher vers « les autres », une chaîne qui
le
lie à la coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait
468
cher vers « les autres », une chaîne qui le lie à
la
coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait-il faire
469
une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de
la
classe. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est
470
Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car
l’
acte est décision, rupture, isolation, quand l’être même du désespéré
471
ar l’acte est décision, rupture, isolation, quand
l’
être même du désespéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à la
472
spéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à
la
réalité des liens et de la masse, à la réalité des autres dans l’ense
473
ns, dans sa croyance à la réalité des liens et de
la
masse, à la réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pou
474
croyance à la réalité des liens et de la masse, à
la
réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pourrait-il fai
475
iens et de la masse, à la réalité des autres dans
l’
ensemble. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est
476
Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car
l’
acte est immédiat, création et initiation, c’est-à-dire sobriété pure,
477
t initiation, c’est-à-dire sobriété pure, — quand
l’
être même du désespéré est calcul, préméditation, sensualité et envie…
478
calcul, préméditation, sensualité et envie… Ainsi
l’
acte absolu qu’il imagine serait sa mort, — et c’est pourquoi il n’y c
479
c’est pourquoi il n’y croit pas. Nul n’échappe à
la
forme du monde. Mais la subir, c’est justement désespérer. Il faudrai
480
roit pas. Nul n’échappe à la forme du monde. Mais
la
subir, c’est justement désespérer. Il faudrait donc… la créer ? « L’h
481
ir, c’est justement désespérer. Il faudrait donc…
la
créer ? « L’homme ne peut faire qu’une seule chose en toute sobriété,
482
tement désespérer. Il faudrait donc… la créer ? «
L’
homme ne peut faire qu’une seule chose en toute sobriété, c’est l’abso
483
faire qu’une seule chose en toute sobriété, c’est
l’
absolu »17. Entre le désespéré et l’absolu, il y a tout ce romantisme
484
hose en toute sobriété, c’est l’absolu »17. Entre
le
désespéré et l’absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’acte
485
briété, c’est l’absolu »17. Entre le désespéré et
l’
absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’acte soit puissance e
486
l’absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que
l’
acte soit puissance et jouissance, il y a ce moi de désir qui veut que
487
t jouissance, il y a ce moi de désir qui veut que
l’
acte — l’instant ! — soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos vi
488
nce, il y a ce moi de désir qui veut que l’acte —
l’
instant ! — soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos vies nous m
489
veut que l’acte — l’instant ! — soit durée… Mais
l’
absolu qui vient jucher nos vies nous meut parce qu’il est un ordre, u
490
, désirer et décrire ; une rupture et une vision.
La
présence de l’absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’ins
491
crire ; une rupture et une vision. La présence de
l’
absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’instant, c’est l’o
492
pture et une vision. La présence de l’absolu dans
la
sobriété parfaite et insensible de l’instant, c’est l’obéissance à la
493
absolu dans la sobriété parfaite et insensible de
l’
instant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l
494
briété parfaite et insensible de l’instant, c’est
l’
obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’
495
et insensible de l’instant, c’est l’obéissance à
la
Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’est-il donc pas
496
nstant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, —
la
prophétie dans l’immédiat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul su
497
éissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans
l’
immédiat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul sur le chemin ; mais
498
diat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul sur
le
chemin ; mais je vois des visages fraternels où s’agitait la foule co
499
mais je vois des visages fraternels où s’agitait
la
foule confuse et menaçante. Nous ne voyons aucun visage ailleurs que
500
te. Nous ne voyons aucun visage ailleurs que dans
l’
acte d’aimer. 7. Toute vocation est sans précédent Car elle est
501
Car elle est prophétie justement ! — et c’est de
la
seule prophétie que relèvent la réalité et le sérieux, le risque et l
502
t ! — et c’est de la seule prophétie que relèvent
la
réalité et le sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L
503
de la seule prophétie que relèvent la réalité et
le
sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’homme se dist
504
prophétie que relèvent la réalité et le sérieux,
le
risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’homme se distingue du sin
505
e relèvent la réalité et le sérieux, le risque et
la
splendeur d’une vie d’homme. L’homme se distingue du singe en ce qu’i
506
eux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme.
L’
homme se distingue du singe en ce qu’il prophétise, uniquement, et dès
507
singe en ce qu’il prophétise, uniquement, et dès
l’
origine. C’est pourquoi l’homme a un visage et une vision, ce que n’on
508
ise, uniquement, et dès l’origine. C’est pourquoi
l’
homme a un visage et une vision, ce que n’ont pas les animaux ; c’est
509
homme a un visage et une vision, ce que n’ont pas
les
animaux ; c’est pourquoi l’homme est héroïque. Il faut noter ici un t
510
on, ce que n’ont pas les animaux ; c’est pourquoi
l’
homme est héroïque. Il faut noter ici un trait bien remarquable : Kier
511
articulier de son destin qui qualifie précisément
la
vocation : l’invraisemblable. Ses plus amers reproches au « christian
512
son destin qui qualifie précisément la vocation :
l’
invraisemblable. Ses plus amers reproches au « christianisme de la chr
513
e. Ses plus amers reproches au « christianisme de
la
chrétienté », à cette « inconcevable illusion des sens », ne s’adress
514
on des sens », ne s’adressent-ils pas justement à
la
« vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à la portée de « la
515
vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à
la
portée de « la masse », alors que la foi véritable est celle du solit
516
» doctrinale d’une religion mise à la portée de «
la
masse », alors que la foi véritable est celle du solitaire que plus r
517
igion mise à la portée de « la masse », alors que
la
foi véritable est celle du solitaire que plus rien ne soutient, hors
518
elle du solitaire que plus rien ne soutient, hors
la
foi ? « Celui qui ne renonce pas à la vraisemblance n’entre jamais en
519
tient, hors la foi ? « Celui qui ne renonce pas à
la
vraisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu. L’audace religieu
520
pas à la vraisemblance n’entre jamais en relation
avec
Dieu. L’audace religieuse, à plus forte raison l’audace chrétienne, e
521
aisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu.
L’
audace religieuse, à plus forte raison l’audace chrétienne, est au-del
522
ec Dieu. L’audace religieuse, à plus forte raison
l’
audace chrétienne, est au-delà de toute vraisemblance, là où préciséme
523
au-delà de toute vraisemblance, là où précisément
l’
on renonce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, n
524
e vraisemblance, là où précisément l’on renonce à
la
vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas le suivr
525
ce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer
le
chemin, non pas le suivre ; parce que l’acte est initiateur ; parce q
526
ce »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas
le
suivre ; parce que l’acte est initiateur ; parce que la dignité de l’
527
ut créer le chemin, non pas le suivre ; parce que
l’
acte est initiateur ; parce que la dignité de l’homme est de marcher d
528
vre ; parce que l’acte est initiateur ; parce que
la
dignité de l’homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser
529
e l’acte est initiateur ; parce que la dignité de
l’
homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de
530
rce que la dignité de l’homme est de marcher dans
l’
invisible et de prophétiser « en vertu de l’absurde ». L’homme ne peut
531
dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de
l’
absurde ». L’homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par « le
532
ible et de prophétiser « en vertu de l’absurde ».
L’
homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par « le monde », il
533
ne peut être déterminé que par son Dieu ou par «
le
monde », il faut choisir. Il faut être un chrétien ou un bourgeois. L
534
hoisir. Il faut être un chrétien ou un bourgeois.
Le
bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à l’acte et il meurt au
535
Le bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à
l’
acte et il meurt au hasard, sans avoir rencontré personne ni soi-même2
536
oir rencontré personne ni soi-même20. Il vit dans
la
forme du monde : et ce n’est point qu’elle soit pour lui réelle, elle
537
qu’elle soit pour lui réelle, elle est seulement
la
moins invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans la nouveauté
538
elle est seulement la moins invraisemblable. Mais
le
chrétien qui marche dans la nouveauté ne prend mesure que de ce qu’il
539
invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans
la
nouveauté ne prend mesure que de ce qu’il transforme. Sa connaissance
540
. Sa connaissance est acte et vision prophétique.
La
mesure du temps de sa vie réside dans la seule vocation qu’il incarne
541
hétique. La mesure du temps de sa vie réside dans
la
seule vocation qu’il incarne. Sur le chemin qui commence à ses pas, i
542
réside dans la seule vocation qu’il incarne. Sur
le
chemin qui commence à ses pas, il ne meurt jamais par surprise : et c
543
par surprise : et ce n’est point qu’il ait connu
le
jour et l’heure, mais il connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cau
544
se : et ce n’est point qu’il ait connu le jour et
l’
heure, mais il connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cause de l’ins
545
’il ait connu le jour et l’heure, mais il connaît
l’
instant, s’il vit de Parole. À cause de l’instant éternel, « le héros
546
connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cause de
l’
instant éternel, « le héros meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C
547
il vit de Parole. À cause de l’instant éternel, «
le
héros meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C’est le secret dernie
548
os meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C’est
le
secret dernier de l’acte, et le sceau de l’amour chrétien. 3. App
549
nt qu’il ne meure »21. C’est le secret dernier de
l’
acte, et le sceau de l’amour chrétien. 3. Apprentissage du christi
550
meure »21. C’est le secret dernier de l’acte, et
le
sceau de l’amour chrétien. 3. Apprentissage du christianisme. 4.
551
C’est le secret dernier de l’acte, et le sceau de
l’
amour chrétien. 3. Apprentissage du christianisme. 4. Dans ce sen
552
Apprentissage du christianisme. 4. Dans ce sens,
la
catégorie récemment « découverte » par les psychologues de ce qui « s
553
e sens, la catégorie récemment « découverte » par
les
psychologues de ce qui « se fait se faisant » est une antilogie chrét
554
premier chef, et non pas hindoue, comme certains
l’
ont voulu croire. Chez les hindous, elle n’est encore qu’une forme de
555
hindoue, comme certains l’ont voulu croire. Chez
les
hindous, elle n’est encore qu’une forme de l’agitation humaine. Pour
556
ez les hindous, elle n’est encore qu’une forme de
l’
agitation humaine. Pour le chrétien seul elle signifie une transformat
557
encore qu’une forme de l’agitation humaine. Pour
le
chrétien seul elle signifie une transformation effective. Ou mieux en
558
e transformation effective. Ou mieux encore, pour
l’
hindou, cette catégorie suppose la primauté d’un Esprit sans contenu ;
559
ux encore, pour l’hindou, cette catégorie suppose
la
primauté d’un Esprit sans contenu ; pour le chrétien, la primauté d’u
560
ppose la primauté d’un Esprit sans contenu ; pour
le
chrétien, la primauté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à
561
auté d’un Esprit sans contenu ; pour le chrétien,
la
primauté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à mes pieds, u
562
sentier » 6. Die Chimäre, trad. française dans
les
Éléments de la grandeur humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et t
563
Die Chimäre, trad. française dans les Éléments de
la
grandeur humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et tombe avec sa mi
564
les Éléments de la grandeur humaine (NRF). 7. «
Le
prophète se lève et tombe avec sa mission » (Karl Barth). Il n’a pas
565
humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et tombe
avec
sa mission » (Karl Barth). Il n’a pas de biographie. Rien ne serait p
566
en ne serait plus ridicule que de tenter de faire
la
psychologie d’un prophète, ou bien alors elle se réduirait à la gramm
567
d’un prophète, ou bien alors elle se réduirait à
la
grammaire et à la syntaxe particulière de son message. 8. Journal.
568
bien alors elle se réduirait à la grammaire et à
la
syntaxe particulière de son message. 8. Journal. « L’imitation suiv
569
taxe particulière de son message. 8. Journal. «
L’
imitation suivra », en allemand, « Die Nachfolge wird nachfolgen ». 9
570
Isaïe 21, 11. 12. Lorsque Schopenhauer écrit : «
Le
temps n’a pas son origine dans les choses, mais dans le sujet connais
571
hauer écrit : « Le temps n’a pas son origine dans
les
choses, mais dans le sujet connaissant », nous retrouvons cette défin
572
ps n’a pas son origine dans les choses, mais dans
le
sujet connaissant », nous retrouvons cette définition du temps comme
573
trouvons cette définition du temps comme refus de
l’
instant et de l’obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est
574
éfinition du temps comme refus de l’instant et de
l’
obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est seulement formel
575
refus de l’instant et de l’obéissance immédiate à
la
Parole. La ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre
576
instant et de l’obéissance immédiate à la Parole.
La
ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre Kierkegaar
577
a Parole. La ressemblance est seulement formelle.
Le
temps dont souffre Kierkegaard est engendré par la lâcheté du pécheur
578
e temps dont souffre Kierkegaard est engendré par
la
lâcheté du pécheur, tandis que le temps de Schopenhauer est « l’idéal
579
st engendré par la lâcheté du pécheur, tandis que
le
temps de Schopenhauer est « l’idéalité » du sujet connaissant, — une
580
écheur, tandis que le temps de Schopenhauer est «
l’
idéalité » du sujet connaissant, — une chimère spiritualiste, une nost
581
mère spiritualiste, une nostalgie. C’est pourquoi
le
temps de Kierkegaard peut connaître une rédemption par l’acte, quand
582
de Kierkegaard peut connaître une rédemption par
l’
acte, quand celui de Schopenhauer s’évanouit en pure absence. 13. K.
583
. K. entend : en vertu de ce paradoxe impensable,
l’
Incarnation historique de Dieu. Pas de réponse rationnelle au « Cur De
584
lme. 14. Crainte et tremblement. 15. Actes de
l’
amour. 16. Traduction française sous le titre de Traité du désespoir.
585
Actes de l’amour. 16. Traduction française sous
le
titre de Traité du désespoir. C’est une laïcisation ! Kierkegaard se
586
st une laïcisation ! Kierkegaard se rapportait de
la
façon la plus précise à Jean XI. 4. 17. Richtet selbst. 18. Ibid.
587
ïcisation ! Kierkegaard se rapportait de la façon
la
plus précise à Jean XI. 4. 17. Richtet selbst. 18. Ibid. 19. Tou
588
Richtet selbst. 18. Ibid. 19. Toutefois dans
le
Journal des années 1846 à 1848, on trouve de nombreuses notations de
589
ue sa consigne est de « tenir bon en souffrant ».
Le
presbytère de campagne serait une solution commode, surtout en regard
590
it trop bien que lui vaudront ses attaques contre
l’
Église établie. 20. Ce qui est particulièrement affligeant dans l’exi
591
20. Ce qui est particulièrement affligeant dans
l’
existence du bourgeois c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’
592
c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’à
la
mort, mais que la mort survient comme une absurdité, la première dans
593
entièrement déterminée jusqu’à la mort, mais que
la
mort survient comme une absurdité, la première dans l’histoire du bou
594
rt survient comme une absurdité, la première dans
l’
histoire du bourgeois, mais décisive. À une enquête dont le sujet étai
595
e du bourgeois, mais décisive. À une enquête dont
le
sujet était : La rencontre la plus importante de votre vie ? M. Cléme
596
ais décisive. À une enquête dont le sujet était :
La
rencontre la plus importante de votre vie ? M. Clément Vautel qui per
597
À une enquête dont le sujet était : La rencontre
la
plus importante de votre vie ? M. Clément Vautel qui personnifie de n
598
? M. Clément Vautel qui personnifie de nos jours
le
Bourgeois, répondit avec une pertinence géniale : « Je n’ai jamais re
599
i personnifie de nos jours le Bourgeois, répondit
avec
une pertinence géniale : « Je n’ai jamais rencontré personne ». 21.
600
Rougemont Denis de, « Forme et transformation, ou
l’
acte selon Kierkegaard », Hermès, Bruxelles-Paris, janvier 1936, p. 83
601
ent qu’ils vous assourdissent. Ils ne suivent pas
la
règle du jeu et je ne sais même pas s’ils savent qu’il y en a une. Al
602
y en a une. Alice au Pays des Merveilles On peut
penser
que notre langue est plus malade que n’était le latin à l’époque de l
603
nser que notre langue est plus malade que n’était
le
latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet
604
tre langue est plus malade que n’était le latin à
l’
époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était enco
605
st plus malade que n’était le latin à l’époque de
la
Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était encore une rhéto
606
n’était le latin à l’époque de la Renaissance24.
Le
latin de Bembo et de Sadolet était encore une rhétorique des lieux co
607
— mais forme encore et convention admise par tous
les
clercs européens. On ne saurait en dire autant du langage de nos bons
608
rivains. Car non seulement il est mal entendu par
la
grande masse des lecteurs ordinaires, disons des lecteurs de journaux
609
une foule de dialectes ésotériques. Non seulement
l’
écrivain moderne use d’une langue dont le lecteur moyen trouve parfait
610
eulement l’écrivain moderne use d’une langue dont
le
lecteur moyen trouve parfaitement normal de déclarer que « c’est du l
611
philosophiques, que de théories politiques. Ainsi
les
mots n’ont plus le même sens pour les intellectuels et pour la masse
612
de théories politiques. Ainsi les mots n’ont plus
le
même sens pour les intellectuels et pour la masse — cela s’est vu en
613
ques. Ainsi les mots n’ont plus le même sens pour
les
intellectuels et pour la masse — cela s’est vu en d’autres siècles. I
614
plus le même sens pour les intellectuels et pour
la
masse — cela s’est vu en d’autres siècles. Ils n’ont plus le même sen
615
cela s’est vu en d’autres siècles. Ils n’ont plus
le
même sens pour les divers partis intellectuels — c’est plus nouveau.
616
’autres siècles. Ils n’ont plus le même sens pour
les
divers partis intellectuels — c’est plus nouveau. Mais surtout, ils n
617
auquel on puisse se référer et qui fixe vraiment
l’
usage : un sens commun. La plupart des débats qui nous occupent, qu’il
618
ique, de religion ou de littérature, nous offrent
l’
image d’un jeu dont les différents partenaires changent la règle à leu
619
e littérature, nous offrent l’image d’un jeu dont
les
différents partenaires changent la règle à leur fantaisie, chacun cro
620
d’un jeu dont les différents partenaires changent
la
règle à leur fantaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que les
621
ntaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que
les
autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas la partie de croquet dan
622
les autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas
la
partie de croquet dans Alice au pays des merveilles ? Les boules étai
623
ie de croquet dans Alice au pays des merveilles ?
Les
boules étaient des hérissons vivants, et les soldats s’arc-boutaient
624
es ? Les boules étaient des hérissons vivants, et
les
soldats s’arc-boutaient sur le sol pour former des arceaux vivants. Q
625
ssons vivants, et les soldats s’arc-boutaient sur
le
sol pour former des arceaux vivants. Quand Alice avait réussi à mettr
626
à mettre en boule son hérisson, et se préparait à
le
frapper avec la tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la re
627
boule son hérisson, et se préparait à le frapper
avec
la tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la regardait d’un
628
e son hérisson, et se préparait à le frapper avec
la
tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la regardait d’un air
629
a tête du héron, celui-ci tordait son long cou et
la
regardait d’un air d’ahurissement profond. Quand elle l’avait remis e
630
rdait d’un air d’ahurissement profond. Quand elle
l’
avait remis en position, c’était le hérisson qui se déroulait et coura
631
nd. Quand elle l’avait remis en position, c’était
le
hérisson qui se déroulait et courait dans la haie voisine. Si par has
632
tait le hérisson qui se déroulait et courait dans
la
haie voisine. Si par hasard la boule et le maillet restaient en place
633
it et courait dans la haie voisine. Si par hasard
la
boule et le maillet restaient en place, c’était alors l’arceau-soldat
634
t dans la haie voisine. Si par hasard la boule et
le
maillet restaient en place, c’était alors l’arceau-soldat qui se leva
635
e et le maillet restaient en place, c’était alors
l’
arceau-soldat qui se levait et s’en allait un peu plus loin. Tandis qu
636
evait et s’en allait un peu plus loin. Tandis que
la
Reine, au comble de la fureur, parcourait le terrain en hurlant au ha
637
peu plus loin. Tandis que la Reine, au comble de
la
fureur, parcourait le terrain en hurlant au hasard son cri de guerre
638
que la Reine, au comble de la fureur, parcourait
le
terrain en hurlant au hasard son cri de guerre : « Qu’on lui coupe la
639
t au hasard son cri de guerre : « Qu’on lui coupe
la
tête ! » — Ainsi nos mots se déforment entre nos mains, nos problèmes
640
tête ! » — Ainsi nos mots se déforment entre nos
mains
, nos problèmes se déforment au hasard, chacun joue sa partie comme il
641
forment au hasard, chacun joue sa partie comme il
le
peut, sans souci de la règle commune, et la terreur domine cette anar
642
un joue sa partie comme il le peut, sans souci de
la
règle commune, et la terreur domine cette anarchie, distribuant des c
643
me il le peut, sans souci de la règle commune, et
la
terreur domine cette anarchie, distribuant des condamnations d’autant
644
xcessives d’ailleurs que personne ne se soucie de
les
mettre à exécution25. « Vous n’avez pas idée, conclut Alice, combien
645
e, conclut Alice, combien c’est affolant de jouer
avec
des choses vivantes. » ⁂ Prenons cinq mots parmi les plus fréquents d
646
des choses vivantes. » ⁂ Prenons cinq mots parmi
les
plus fréquents dans le langage et les écrits de notre temps : esprit,
647
⁂ Prenons cinq mots parmi les plus fréquents dans
le
langage et les écrits de notre temps : esprit, révolution, liberté, o
648
mots parmi les plus fréquents dans le langage et
les
écrits de notre temps : esprit, révolution, liberté, ordre, patrie. V
649
esprit, révolution, liberté, ordre, patrie. Voilà
les
instruments du jeu philosophique, ou politique que nous sommes en tra
650
écrivains ou lecteurs, citoyens ou hommes d’État.
Les
uns tiennent le parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les
651
eurs, citoyens ou hommes d’État. Les uns tiennent
le
parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de
652
ns ou hommes d’État. Les uns tiennent le parti de
l’
esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révoluti
653
d’État. Les uns tiennent le parti de l’esprit et
les
autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révolution, les autre
654
nnent le parti de l’esprit et les autres celui de
l’
ordre, les uns le parti de la révolution, les autres celui de la patri
655
parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre,
les
uns le parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns
656
l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns
le
parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudra
657
les autres celui de l’ordre, les uns le parti de
la
révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudraient la libe
658
ui de l’ordre, les uns le parti de la révolution,
les
autres celui de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre
659
ns le parti de la révolution, les autres celui de
la
patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution
660
de la révolution, les autres celui de la patrie…
Les
uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’esprit
661
les autres celui de la patrie… Les uns voudraient
la
liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’esprit, ou un esprit pat
662
de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans
l’
ordre, ou la révolution par l’esprit, ou un esprit patriotique, ou une
663
e… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou
la
révolution par l’esprit, ou un esprit patriotique, ou une patrie spir
664
ent la liberté dans l’ordre, ou la révolution par
l’
esprit, ou un esprit patriotique, ou une patrie spirituelle… Tandis qu
665
patrie spirituelle… Tandis que d’autres opposent
l’
esprit à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de
666
rituelle… Tandis que d’autres opposent l’esprit à
la
révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à
667
s que d’autres opposent l’esprit à la révolution,
l’
ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la
668
tres opposent l’esprit à la révolution, l’ordre à
la
liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolutio
669
à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore
les
patries de l’ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinais
670
n, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de
l’
ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces per
671
à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à
la
patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces permutations
672
, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de
la
révolution… Toutes ces combinaisons et ces permutations seraient néan
673
raient néanmoins assez simples à débrouiller dans
la
pratique, et pourraient définir utilement le parti, si seulement chac
674
dans la pratique, et pourraient définir utilement
le
parti, si seulement chacun de ces mots avait le même sens pour tout l
675
t le parti, si seulement chacun de ces mots avait
le
même sens pour tout le monde. Ou, parmi plusieurs sens variés, un sen
676
t chacun de ces mots avait le même sens pour tout
le
monde. Ou, parmi plusieurs sens variés, un sens prépondérant sur lequ
677
, un sens prépondérant sur lequel puisse se faire
l’
accord. Or, sans parler des 29 sens que Littré donne, pour le seul mot
678
r, sans parler des 29 sens que Littré donne, pour
le
seul mot : esprit, si j’interroge au hasard ceux qui veulent défendre
679
j’interroge au hasard ceux qui veulent défendre «
l’
esprit » contre les menaces dites matérialistes, je constate qu’on ent
680
ard ceux qui veulent défendre « l’esprit » contre
les
menaces dites matérialistes, je constate qu’on entend par ce mot tant
681
istes, je constate qu’on entend par ce mot tantôt
l’
intelligence, tantôt le Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tan
682
n entend par ce mot tantôt l’intelligence, tantôt
le
Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tantôt les facultés créatr
683
ôt l’intelligence, tantôt le Saint-Esprit, tantôt
le
luxe des délicats, tantôt les facultés créatrices de l’homme, ou enco
684
Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tantôt
les
facultés créatrices de l’homme, ou encore une sagesse asiatique, ou u
685
e des délicats, tantôt les facultés créatrices de
l’
homme, ou encore une sagesse asiatique, ou une mentalité de classe ou
686
e, ou une mentalité de classe ou simplement toute
la
culture et ses produits. Une simple équivoque sémantique dresse parfo
687
bourgeoise ; pour l’autre, présence effective de
la
pensée et de la foi à nos misères, activité concrète et créatrice, et
688
ur l’autre, présence effective de la pensée et de
la
foi à nos misères, activité concrète et créatrice, et garantie contre
689
ctivité concrète et créatrice, et garantie contre
les
préjugés intéressés. « Voyez, gémit Alice, l’arceau sous lequel je do
690
re les préjugés intéressés. « Voyez, gémit Alice,
l’
arceau sous lequel je dois passer se promène à l’autre bout du jeu et
691
mène à l’autre bout du jeu et j’aurais dû croquer
le
hérisson de la Reine s’il ne s’était mis à courir juste au moment où
692
bout du jeu et j’aurais dû croquer le hérisson de
la
Reine s’il ne s’était mis à courir juste au moment où j’allais jouer.
693
Mais là, aux neuf sens très précis que nous donne
le
dictionnaire, il nous faut ajouter une dizaine de sens parfois contra
694
izaine de sens parfois contradictoires, créés par
la
crise actuelle et très mal distingués les uns des autres par la plupa
695
réés par la crise actuelle et très mal distingués
les
uns des autres par la plupart de ceux qui les prononcent. Ainsi révol
696
ués les uns des autres par la plupart de ceux qui
les
prononcent. Ainsi révolution signifiera selon les cas : émeute, prise
697
les prononcent. Ainsi révolution signifiera selon
les
cas : émeute, prise de pouvoir légal, désordre et anarchie, établisse
698
de mesures économiques, transmutation de toutes
les
valeurs morales, etc. Et tous ces sens se chevauchent pour former dan
699
Et tous ces sens se chevauchent pour former dans
l’
esprit des polémistes les plus étranges surimpressions26. La liberté s
700
vauchent pour former dans l’esprit des polémistes
les
plus étranges surimpressions26. La liberté sera invoquée par la concu
701
es polémistes les plus étranges surimpressions26.
La
liberté sera invoquée par la concurrence et l’oppression capitalistes
702
es surimpressions26. La liberté sera invoquée par
la
concurrence et l’oppression capitalistes, par les intellectuels anarc
703
6. La liberté sera invoquée par la concurrence et
l’
oppression capitalistes, par les intellectuels anarchistes ou libéraux
704
la concurrence et l’oppression capitalistes, par
les
intellectuels anarchistes ou libéraux, par la presse d’opposition, pa
705
ar les intellectuels anarchistes ou libéraux, par
la
presse d’opposition, par Staline qui fait taire cette presse au nom d
706
par Staline qui fait taire cette presse au nom de
la
Révolution, par Hitler dénonçant le Diktat de Versailles, par l’Itali
707
sse au nom de la Révolution, par Hitler dénonçant
le
Diktat de Versailles, par l’Italie partant à la conquête de l’Éthiopi
708
par Hitler dénonçant le Diktat de Versailles, par
l’
Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt l
709
t le Diktat de Versailles, par l’Italie partant à
la
conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si abs
710
Versailles, par l’Italie partant à la conquête de
l’
Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, t
711
’Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc.
L’
ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictatur
712
conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt
le
statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictature brutale et arbitra
713
a tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt
la
dictature brutale et arbitraire, plus rarement la revendication d’un
714
la dictature brutale et arbitraire, plus rarement
la
revendication d’un équilibre vrai, d’une hiérarchie naturelle et féco
715
naturelle et féconde. Et quant au mot patrie, on
le
voit confondu, dans les discours et les articles de journaux, avec ét
716
Et quant au mot patrie, on le voit confondu, dans
les
discours et les articles de journaux, avec état, nation, mystique rac
717
patrie, on le voit confondu, dans les discours et
les
articles de journaux, avec état, nation, mystique raciale, peuple et
718
u, dans les discours et les articles de journaux,
avec
état, nation, mystique raciale, peuple et coutumes, ou terre natale,
719
et coutumes, ou terre natale, clocher, etc. D’où
l’
embrouillamini de la politique et des partis, et la confusion meurtriè
720
re natale, clocher, etc. D’où l’embrouillamini de
la
politique et des partis, et la confusion meurtrière de termes dangere
721
’embrouillamini de la politique et des partis, et
la
confusion meurtrière de termes dangereusement chargés de passion et d
722
er et aggraver cette crise du sens des mots et de
la
sémantique vivante. D’une part la somme des échanges écrits ou verbau
723
des mots et de la sémantique vivante. D’une part
la
somme des échanges écrits ou verbaux a crû depuis la Renaissance dans
724
somme des échanges écrits ou verbaux a crû depuis
la
Renaissance dans des proportions formidables. D’autre part, le public
725
e dans des proportions formidables. D’autre part,
le
public capable de goûter une œuvre rigoureuse ou novatrice, et qui po
726
Péguy n’ont guère eu davantage de lecteurs durant
la
période de leur vie ou paraissaient leurs œuvres capitales. Et je dou
727
scartes n’en convainquit de son vivant. Cependant
les
journaux du soir à cinq-cent-mille exemplaires et la radio atteignent
728
journaux du soir à cinq-cent-mille exemplaires et
la
radio atteignent des millions d’auditeurs. Dans cette disproportion i
729
s. Dans cette disproportion impressionnante entre
l’
aire de la vraie culture créatrice et régulatrice et l’aire des sous-p
730
tte disproportion impressionnante entre l’aire de
la
vraie culture créatrice et régulatrice et l’aire des sous-produits st
731
e de la vraie culture créatrice et régulatrice et
l’
aire des sous-produits standardisés de la culture de consommation, on
732
trice et l’aire des sous-produits standardisés de
la
culture de consommation, on aperçoit la raison immédiate de la crise
733
rdisés de la culture de consommation, on aperçoit
la
raison immédiate de la crise actuelle du langage. La presse, la radio
734
consommation, on aperçoit la raison immédiate de
la
crise actuelle du langage. La presse, la radio, l’éloquence politique
735
raison immédiate de la crise actuelle du langage.
La
presse, la radio, l’éloquence politique et les ouvrages populaires à
736
diate de la crise actuelle du langage. La presse,
la
radio, l’éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirag
737
a crise actuelle du langage. La presse, la radio,
l’
éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirage, voilà t
738
ge. La presse, la radio, l’éloquence politique et
les
ouvrages populaires à grand tirage, voilà tout un domaine que l’écriv
739
ulaires à grand tirage, voilà tout un domaine que
l’
écrivain digne du nom ne contrôle pas, ne forme pas, n’atteint même pa
740
e culturelle » préparait peu à peu un public pour
les
auteurs du niveau supérieur. Cette accession démocratique des grandes
741
Cette accession démocratique des grandes masses à
la
vie de l’esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actuel d
742
ssion démocratique des grandes masses à la vie de
l’
esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actuel du régime.
743
ble dans l’état actuel du régime. Elle est à tout
le
moins vérifiable. Par contre, on peut très nettement constater le déf
744
ble. Par contre, on peut très nettement constater
le
déficit que représente pour la culture, la création de ces grandes zo
745
ettement constater le déficit que représente pour
la
culture, la création de ces grandes zones d’échanges incontrôlés. Ces
746
stater le déficit que représente pour la culture,
la
création de ces grandes zones d’échanges incontrôlés. Ces échanges en
747
ges en effet aboutissent rapidement à démonétiser
les
mots. Le vocabulaire des journaux est vague, impropre, sans saveur et
748
et aboutissent rapidement à démonétiser les mots.
Le
vocabulaire des journaux est vague, impropre, sans saveur et sans pou
749
faits, des choses, ou des idées. Il flatte ainsi
la
paresse de l’esprit, décourage le sens critique, décontenance les exp
750
oses, ou des idées. Il flatte ainsi la paresse de
l’
esprit, décourage le sens critique, décontenance les expressions les p
751
Il flatte ainsi la paresse de l’esprit, décourage
le
sens critique, décontenance les expressions les plus concrètes. Ainsi
752
’esprit, décourage le sens critique, décontenance
les
expressions les plus concrètes. Ainsi les mots perdent leur force et
753
ge le sens critique, décontenance les expressions
les
plus concrètes. Ainsi les mots perdent leur force et leur délicatesse
754
tenance les expressions les plus concrètes. Ainsi
les
mots perdent leur force et leur délicatesse d’appel. Et les bons écri
755
erdent leur force et leur délicatesse d’appel. Et
les
bons écrivains, qui n’ont pas d’autres armes, se voient privés de tou
756
istant. Et leurs conseils paraissent obscurs dans
la
mesure où ils se veulent scrupuleux. C’est pourquoi la plupart renonc
757
formel et précis, dont ils sont seuls à connaître
les
règles. (Encore ne sont-ils guère d’accord pour enregistrer les réuss
758
ncore ne sont-ils guère d’accord pour enregistrer
les
réussites ou les tricheries !) Leur style devient de plus en plus « e
759
guère d’accord pour enregistrer les réussites ou
les
tricheries !) Leur style devient de plus en plus « exquis » et par su
760
re une volonté d’action bientôt jugée vulgaire. ⁂
La
civilisation occidentale aurait-elle donc des fins dernières à quoi e
761
donc des fins dernières à quoi elle tend ? Quand
le
peuple d’Israël oublie sa vocation et se détourne de l’Éternel son Di
762
ple d’Israël oublie sa vocation et se détourne de
l’
Éternel son Dieu, il perd aussi le sens des noms et bientôt sa langue
763
se détourne de l’Éternel son Dieu, il perd aussi
le
sens des noms et bientôt sa langue délire : « Il prononce des paroles
764
des paroles vaines, des serments faux ! » s’écrie
le
prophète Osée. Quand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être les
765
serments faux ! » s’écrie le prophète Osée. Quand
les
clercs de la Cour de Rome cessent d’être les dociles instruments de l
766
! » s’écrie le prophète Osée. Quand les clercs de
la
Cour de Rome cessent d’être les dociles instruments de la vocation ca
767
uand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être
les
dociles instruments de la vocation catholique, pour devenir de raffin
768
de Rome cessent d’être les dociles instruments de
la
vocation catholique, pour devenir de raffinés rhéteurs, ils perdent l
769
iment dans des langues nouvelles, au détriment de
l’
unité sacrée. Ainsi toujours : pour peu que le sens des fins vienne à
770
de l’unité sacrée. Ainsi toujours : pour peu que
le
sens des fins vienne à faiblir et que la mesure commune cesse d’être
771
peu que le sens des fins vienne à faiblir et que
la
mesure commune cesse d’être effectivement perçue et observée, l’on as
772
ne cesse d’être effectivement perçue et observée,
l’
on assiste à la même dégradation des instruments de la culture : — d’u
773
effectivement perçue et observée, l’on assiste à
la
même dégradation des instruments de la culture : — d’une part les écr
774
assiste à la même dégradation des instruments de
la
culture : — d’une part les écrivains se mettent à raffiner l’expressi
775
tion des instruments de la culture : — d’une part
les
écrivains se mettent à raffiner l’expression propre de chaque chose s
776
— d’une part les écrivains se mettent à raffiner
l’
expression propre de chaque chose séparée, au détriment de l’expressio
777
n propre de chaque chose séparée, au détriment de
l’
expression générale, d’autre part, la grande masse des usagers de la l
778
détriment de l’expression générale, d’autre part,
la
grande masse des usagers de la langue cesse d’exercer aucun contrôle
779
ale, d’autre part, la grande masse des usagers de
la
langue cesse d’exercer aucun contrôle sur son parler, qu’elle ne soum
780
elle ne soumet plus à un but unanime. Si bien que
les
écrivains ne sont plus compris du peuple, et que la langue vulgaire s
781
écrivains ne sont plus compris du peuple, et que
la
langue vulgaire s’encombre d’équivoques, de confusions et de malenten
782
confusions et de malentendus parfois tragiques :
l’
oubli des fins dernières entraîne nécessairement la ruine de la commun
783
’oubli des fins dernières entraîne nécessairement
la
ruine de la communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cet
784
ins dernières entraîne nécessairement la ruine de
la
communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cette absence d
785
îne nécessairement la ruine de la communauté, par
le
seul fait qu’il ruine le langage. Cette absence d’un principe commun
786
ne de la communauté, par le seul fait qu’il ruine
le
langage. Cette absence d’un principe communautaire vivant et puissan
787
unautaire vivant et puissant dans nos vies, c’est
le
drame de la civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous le
788
vant et puissant dans nos vies, c’est le drame de
la
civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous les hommes de
789
s nos vies, c’est le drame de la civilisation, de
la
culture, de la cité modernes. Tous les hommes de ce temps, s’ils ont
790
st le drame de la civilisation, de la culture, de
la
cité modernes. Tous les hommes de ce temps, s’ils ont quelque conscie
791
isation, de la culture, de la cité modernes. Tous
les
hommes de ce temps, s’ils ont quelque conscience, souffrent obscuréme
792
sont ensemble et ils sont seuls. Ils sont pressés
les
uns contre les autres et étrangers. Ils échangent des paroles en plus
793
t ils sont seuls. Ils sont pressés les uns contre
les
autres et étrangers. Ils échangent des paroles en plus grand nombre q
794
te. « Paroles vaines, serments faux ! » Or, quand
la
parole se détruit, quand elle n’est plus le don qu’un homme fait à un
795
quand la parole se détruit, quand elle n’est plus
le
don qu’un homme fait à un homme, et qui engage quelque chose de son ê
796
e, et qui engage quelque chose de son être, c’est
l’
amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est l’inquiétude des masses. El
797
’est l’amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est
l’
inquiétude des masses. Elle n’est pas d’abord matérielle, elle est d’a
798
, elle est d’abord cette inquiétude du cœur et de
l’
esprit qui naît de la mort des amitiés. Plus angoissante encore, elle
799
tte inquiétude du cœur et de l’esprit qui naît de
la
mort des amitiés. Plus angoissante encore, elle règne innommée et pan
800
encore, elle règne innommée et panique partout où
l’
amitié humaine n’a jamais rien noué, rien engagé, rien sacrifié, là où
801
gé, rien sacrifié, là où elle n’a pas même laissé
les
traces d’une coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce que l’homm
802
laissé les traces d’une coutume ancestrale : dans
les
villes. Mais ce que l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fa
803
coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce que
l’
homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fait à sa place, et contr
804
les villes. Mais ce que l’homme ne fait pas pour
l’
homme, le diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et
805
es. Mais ce que l’homme ne fait pas pour l’homme,
le
diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et qu’il tr
806
e que l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable
le
fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et qu’il trompe. Cett
807
l’homme, le diable le fait à sa place, et contre
l’
homme qu’il séduit et qu’il trompe. Cette fin commune, cet idéal commu
808
déal commun que nous devions servir ensemble dans
la
fraternité que crée l’œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et
809
vions servir ensemble dans la fraternité que crée
l’
œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et sans le savoir, dans la
810
dans la fraternité que crée l’œuvre unanime, nous
les
cherchions en vain, et sans le savoir, dans la cité qu’on nous a fait
811
vre unanime, nous les cherchions en vain, et sans
le
savoir, dans la cité qu’on nous a faite. C’est une faim, une soif, un
812
s les cherchions en vain, et sans le savoir, dans
la
cité qu’on nous a faite. C’est une faim, une soif, une nostalgie que
813
Mais quelqu’un s’en est aperçu. Quelqu’un a formé
le
projet de tromper cette faim et cette soif. Au païen ignorant du vrai
814
im et cette soif. Au païen ignorant du vrai Dieu,
les
prêtres donnent des idoles faites à l’image des terreurs de l’homme.
815
rai Dieu, les prêtres donnent des idoles faites à
l’
image des terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images, le peuple
816
nnent des idoles faites à l’image des terreurs de
l’
homme. Dans le culte de ces images, le peuple croit trouver son unité,
817
es faites à l’image des terreurs de l’homme. Dans
le
culte de ces images, le peuple croit trouver son unité, et il y retro
818
terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images,
le
peuple croit trouver son unité, et il y retrouve en effet le symbole
819
roit trouver son unité, et il y retrouve en effet
le
symbole agrandi d’un désespoir qu’il sent vivre dans tous les cœurs.
820
agrandi d’un désespoir qu’il sent vivre dans tous
les
cœurs. L’homme d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il
821
n désespoir qu’il sent vivre dans tous les cœurs.
L’
homme d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il faut pense
822
ans tous les cœurs. L’homme d’aujourd’hui méprise
les
religions. Il sait ce qu’il faut penser des prêtres et des sorciers.
823
’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il faut
penser
des prêtres et des sorciers. On lui donnera donc autre chose : les mê
824
t des sorciers. On lui donnera donc autre chose :
les
mêmes choses sous d’autres noms, des mystiques et des dictateurs. Les
825
s d’autres noms, des mystiques et des dictateurs.
Les
lieux communs sont morts et embaumés : déjà, on leur fait des musées.
826
publicitaires, mots d’ordre politiques, tels sont
les
ersatz pitoyables que nous proposent l’Argent et l’État. Gîovinezza !
827
els sont les ersatz pitoyables que nous proposent
l’
Argent et l’État. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que l
828
ersatz pitoyables que nous proposent l’Argent et
l’
État. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que l’Amérique !
829
îovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que
l’
Amérique ! Achetez français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est ave
830
érique ! Achetez français ! Passez vos vacances à
la
mer ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, le
831
z français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est
avec
ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsom
832
vos vacances à la mer ! C’est avec ça qu’on fait
les
bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bo
833
er ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes,
les
bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bourgeois disciplinés.
834
ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis,
les
vertueux komsomols, les petits bourgeois disciplinés. C’est ce confor
835
ascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols,
les
petits bourgeois disciplinés. C’est ce conformisme enthousiaste qui t
836
ennes, quel que soit leur régime politique. Ainsi
la
mesure n’est plus cette loi qui vit en l’homme réel et personnel, cet
837
. Ainsi la mesure n’est plus cette loi qui vit en
l’
homme réel et personnel, cette alliance du peuple avec sa vocation qui
838
homme réel et personnel, cette alliance du peuple
avec
sa vocation qui faisait la grandeur des cultures authentiques. Elle e
839
e alliance du peuple avec sa vocation qui faisait
la
grandeur des cultures authentiques. Elle est devenue la loi inexorabl
840
ndeur des cultures authentiques. Elle est devenue
la
loi inexorable et mécanique qui plie l’individu à des calculs de mass
841
t devenue la loi inexorable et mécanique qui plie
l’
individu à des calculs de masses, à des disciplines extérieures, à des
842
ieures, à des ambitions inhumaines. Nous vivons à
l’
âge des mots d’ordre. L’on peut penser que c’est une espèce de progrès
843
inhumaines. Nous vivons à l’âge des mots d’ordre.
L’
on peut penser que c’est une espèce de progrès sur l’âge des clichés b
844
. Nous vivons à l’âge des mots d’ordre. L’on peut
penser
que c’est une espèce de progrès sur l’âge des clichés bourgeois. Mais
845
n peut penser que c’est une espèce de progrès sur
l’
âge des clichés bourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si l’o
846
progrès sur l’âge des clichés bourgeois. Mais si
les
mots d’ordre sont faux ? Si l’ordre qu’ils imposent est arbitraire, o
847
ourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si
l’
ordre qu’ils imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur l’indign
848
imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur
l’
indignité humaine ? Et si la propagande et la publicité qui ont pris l
849
s’il ne mise que sur l’indignité humaine ? Et si
la
propagande et la publicité qui ont pris la place des lieux communs sp
850
sur l’indignité humaine ? Et si la propagande et
la
publicité qui ont pris la place des lieux communs spirituels et effec
851
Et si la propagande et la publicité qui ont pris
la
place des lieux communs spirituels et effectifs ne nous ordonnent qu’
852
onnent qu’à des fins provisoires ou dégradantes :
l’
État totalitaire, et la richesse matérielle ? Que vaut alors cette com
853
ovisoires ou dégradantes : l’État totalitaire, et
la
richesse matérielle ? Que vaut alors cette communauté de réflexes et
854
nos défaites intimes, de nos dénis d’humanité, —
le
contraire absolu de la culture, si la culture est justement la part a
855
de nos dénis d’humanité, — le contraire absolu de
la
culture, si la culture est justement la part active que prend l’homme
856
humanité, — le contraire absolu de la culture, si
la
culture est justement la part active que prend l’homme à tout ce qui
857
absolu de la culture, si la culture est justement
la
part active que prend l’homme à tout ce qui est création dans la natu
858
la culture est justement la part active que prend
l’
homme à tout ce qui est création dans la nature, dans l’histoire, dans
859
que prend l’homme à tout ce qui est création dans
la
nature, dans l’histoire, dans la vie de l’esprit ? 24. Extrait d’u
860
e à tout ce qui est création dans la nature, dans
l’
histoire, dans la vie de l’esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitu
861
st création dans la nature, dans l’histoire, dans
la
vie de l’esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitulé Penser avec l
862
n dans la nature, dans l’histoire, dans la vie de
l’
esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitulé Penser avec les mains ,
863
ec les mains , à paraître chez Albin Michel. 25.
Les
injures et les marques de mépris hautain dont se gratinent les poètes
864
à paraître chez Albin Michel. 25. Les injures et
les
marques de mépris hautain dont se gratinent les poètes, les essayiste
865
t les marques de mépris hautain dont se gratinent
les
poètes, les essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur s
866
s de mépris hautain dont se gratinent les poètes,
les
essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur sans exemple
867
n dont se gratinent les poètes, les essayistes et
les
politiciens modernes, avec une fureur sans exemple dans l’histoire de
868
ètes, les essayistes et les politiciens modernes,
avec
une fureur sans exemple dans l’histoire de la culture, trahissent en
869
ciens modernes, avec une fureur sans exemple dans
l’
histoire de la culture, trahissent en somme l’impuissance pratique de
870
, avec une fureur sans exemple dans l’histoire de
la
culture, trahissent en somme l’impuissance pratique de notre langue.
871
ans l’histoire de la culture, trahissent en somme
l’
impuissance pratique de notre langue. Si les mots « portaient » réelle
872
somme l’impuissance pratique de notre langue. Si
les
mots « portaient » réellement, les écrivains seraient moins excités,
873
tre langue. Si les mots « portaient » réellement,
les
écrivains seraient moins excités, moins excessifs. La Terreur qui règ
874
crivains seraient moins excités, moins excessifs.
La
Terreur qui règne en permanence dans les revues d’avant-garde est le
875
xcessifs. La Terreur qui règne en permanence dans
les
revues d’avant-garde est le signe d’une rupture de contact, d’un impu
876
e en permanence dans les revues d’avant-garde est
le
signe d’une rupture de contact, d’un impuissant dépit, d’un profond p
877
d’un impuissant dépit, d’un profond pessimisme de
la
pensée qui désespère d’atteindre et de mouvoir effectivement les homm
878
désespère d’atteindre et de mouvoir effectivement
les
hommes. Cas de Nietzsche, des surréalistes, etc. Ce sont des êtres is
879
Contrairement à ce qui se passe normalement dans
les
cas d’homonymie ou de polysémie. Ainsi l’on ne risque pas de confondr
880
t dans les cas d’homonymie ou de polysémie. Ainsi
l’
on ne risque pas de confondre le vol à la tire et le vol plané dans la
881
polysémie. Ainsi l’on ne risque pas de confondre
le
vol à la tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis
882
e. Ainsi l’on ne risque pas de confondre le vol à
la
tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis que les d
883
on ne risque pas de confondre le vol à la tire et
le
vol plané dans la conversation courante ; tandis que les débats polit
884
e confondre le vol à la tire et le vol plané dans
la
conversation courante ; tandis que les débats politiques ou électorau
885
plané dans la conversation courante ; tandis que
les
débats politiques ou électoraux abondent en confusion de cette espèce
886
en confusion de cette espèce et s’en nourrissent.
L’
opération fameuse qui consiste à additionner les casseroles et les har
887
t. L’opération fameuse qui consiste à additionner
les
casseroles et les haricots est à la base de l’éloquence démagogique.
888
euse qui consiste à additionner les casseroles et
les
haricots est à la base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Den
889
additionner les casseroles et les haricots est à
la
base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Décadence
890
r les casseroles et les haricots est à la base de
l’
éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Décadence des lieux
891
Changer
la
vie ou changer l’homme ? (1937)u Variations du communisme Opp
892
Changer la vie ou changer
l’
homme ? (1937)u Variations du communisme Opposez les dogmes ch
893
(1937)u Variations du communisme Opposez
les
dogmes chrétiens aux axiomes de Marx et d’Engels, les communistes vou
894
dogmes chrétiens aux axiomes de Marx et d’Engels,
les
communistes vous répondront, non sans apparence d’à-propos, que l’opé
895
us répondront, non sans apparence d’à-propos, que
l’
opération les laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histoire
896
t, non sans apparence d’à-propos, que l’opération
les
laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histoire, non des vér
897
les laisse indifférents : ils sont sur le plan de
l’
histoire, non des vérités éternelles. Placez-vous donc sur ce plan his
898
ez en URSS par exemple. Constatez, comme beaucoup
l’
ont fait (qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que la dictatu
899
me beaucoup l’ont fait (qui sont sans aucun doute
les
plus honnêtes), que la dictature de Staline se rapproche des régimes
900
qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que
la
dictature de Staline se rapproche des régimes fascistes. Essayez d’en
901
des régimes fascistes. Essayez d’en conclure que
le
communisme c’est cela, s’il se confond, comme on nous l’affirmait, av
902
unisme c’est cela, s’il se confond, comme on nous
l’
affirmait, avec ses effets historiques. On vous répond que vous vous t
903
cela, s’il se confond, comme on nous l’affirmait,
avec
ses effets historiques. On vous répond que vous vous trompez du tout
904
n’entendez rien au « devenir dialectique », dont
la
dictature actuelle n’est qu’un stade nécessaire mais provisoire. Vous
905
pprendrez qu’elle fut inventée par Hegel, qui eut
le
tort de la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur
906
u’elle fut inventée par Hegel, qui eut le tort de
la
fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : q
907
entée par Hegel, qui eut le tort de la fonder sur
l’
Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : que le génie de
908
e la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement
la
poser sur la tête : que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en
909
ur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur
la
tête : que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant su
910
e qui était proprement la poser sur la tête : que
le
génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière é
911
ement la poser sur la tête : que le génie de Marx
l’
a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière économique ; qu’ai
912
que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en
la
fondant sur la matière économique ; qu’ainsi lestée, elle a pu se met
913
e Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur
la
matière économique ; qu’ainsi lestée, elle a pu se mettre en marche e
914
du réel ; que son but primitif était de détruire
l’
État au profit de l’homme concret, non sans avoir d’abord renforcé cet
915
ut primitif était de détruire l’État au profit de
l’
homme concret, non sans avoir d’abord renforcé cet État jusqu’à l’extr
916
non sans avoir d’abord renforcé cet État jusqu’à
l’
extrême qu’on nomme dictature ; et qu’enfin cette dictature disparaîtr
917
ictature disparaîtra nécessairement, d’elle-même,
avec
les derniers opposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le ré
918
ure disparaîtra nécessairement, d’elle-même, avec
les
derniers opposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le réel :
919
t, d’elle-même, avec les derniers opposants. Vous
pensiez
être dans l’histoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en
920
ec les derniers opposants. Vous pensiez être dans
l’
histoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en pas croire v
921
pposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans
le
réel : on vous invite maintenant à n’en pas croire vos yeux, qui voie
922
ets, annonce une constitution qui renforce encore
l’
étatisme, et ne parle même plus de sa suppression future. Au contraire
923
arlent. On vous répond que c’est une nécessité de
la
tactique, dûment prévue d’ailleurs par les dialecticiens. Alors, peut
924
sité de la tactique, dûment prévue d’ailleurs par
les
dialecticiens. Alors, peut-être, vous commencez à entrevoir ce que si
925
oir ce que signifie : dialectique. C’est en fait,
l’
obéissance au parti, l’obéissance aveugle à Staline, dépositaire uniqu
926
ialectique. C’est en fait, l’obéissance au parti,
l’
obéissance aveugle à Staline, dépositaire unique de la doctrine. Quitt
927
éissance aveugle à Staline, dépositaire unique de
la
doctrine. Quitter le plan des vérités éternelles pour entrer dans le
928
aline, dépositaire unique de la doctrine. Quitter
le
plan des vérités éternelles pour entrer dans le plan de l’histoire, c
929
r le plan des vérités éternelles pour entrer dans
le
plan de l’histoire, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la
930
es vérités éternelles pour entrer dans le plan de
l’
histoire, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la vérité, et
931
re, cela signifiait donc, précisément, renoncer à
la
vérité, et ne croire plus qu’à la tactique d’un dictateur, lequel cha
932
ent, renoncer à la vérité, et ne croire plus qu’à
la
tactique d’un dictateur, lequel changera la vérité tous les six mois.
933
qu’à la tactique d’un dictateur, lequel changera
la
vérité tous les six mois. Mais alors de quoi donc parle-t-on lorsqu’o
934
ue d’un dictateur, lequel changera la vérité tous
les
six mois. Mais alors de quoi donc parle-t-on lorsqu’on parle de commu
935
onc parle-t-on lorsqu’on parle de communisme ? Où
le
prendre ? En quoi peut résider l’identité d’une doctrine qui prétend
936
communisme ? Où le prendre ? En quoi peut résider
l’
identité d’une doctrine qui prétend justifier théoriquement, à quelque
937
er théoriquement, à quelques années d’intervalle,
la
démocratie des Soviets, puis la dictature de Staline ; le pacifisme à
938
ées d’intervalle, la démocratie des Soviets, puis
la
dictature de Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et l’impér
939
ratie des Soviets, puis la dictature de Staline ;
le
pacifisme à tout prix des débuts et l’impérialisme actuel (si mal dég
940
Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et
l’
impérialisme actuel (si mal déguisé par la IIIe Internationale) ; la l
941
buts et l’impérialisme actuel (si mal déguisé par
la
IIIe Internationale) ; la lutte contre l’État, et en même temps, le c
942
uel (si mal déguisé par la IIIe Internationale) ;
la
lutte contre l’État, et en même temps, le capitalisme d’État de Lénin
943
isé par la IIIe Internationale) ; la lutte contre
l’
État, et en même temps, le capitalisme d’État de Lénine ; l’expropriat
944
nale) ; la lutte contre l’État, et en même temps,
le
capitalisme d’État de Lénine ; l’expropriation des patrons en 1918, p
945
en même temps, le capitalisme d’État de Lénine ;
l’
expropriation des patrons en 1918, puis la restauration de la propriét
946
énine ; l’expropriation des patrons en 1918, puis
la
restauration de la propriété privée en 1933 ; la suppression de l’hér
947
tion des patrons en 1918, puis la restauration de
la
propriété privée en 1933 ; la suppression de l’héritage puis son réta
948
la restauration de la propriété privée en 1933 ;
la
suppression de l’héritage puis son rétablissement ; l’antimilitarisme
949
e la propriété privée en 1933 ; la suppression de
l’
héritage puis son rétablissement ; l’antimilitarisme et la création en
950
ppression de l’héritage puis son rétablissement ;
l’
antimilitarisme et la création enthousiaste d’une armée abondamment po
951
ge puis son rétablissement ; l’antimilitarisme et
la
création enthousiaste d’une armée abondamment pourvue de maréchaux ;
952
te d’une armée abondamment pourvue de maréchaux ;
l’
égalité sociale absolue puis la course aux salaires et aux grades ; la
953
vue de maréchaux ; l’égalité sociale absolue puis
la
course aux salaires et aux grades ; la ruine de la famille puis sa ré
954
solue puis la course aux salaires et aux grades ;
la
ruine de la famille puis sa réfection systématique ; la critique acer
955
a course aux salaires et aux grades ; la ruine de
la
famille puis sa réfection systématique ; la critique acerbe de la SDN
956
ne de la famille puis sa réfection systématique ;
la
critique acerbe de la SDN puis l’entrée dans cet organisme ? Tout cel
957
sa réfection systématique ; la critique acerbe de
la
SDN puis l’entrée dans cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je
958
systématique ; la critique acerbe de la SDN puis
l’
entrée dans cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je l’entends b
959
ns cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je
l’
entends bien, par des nécessités pratiques et contingentes, et je n’ai
960
d’intellectuels défendre ces manœuvres au nom de
la
doctrine, et les justifier à tout coup (avec léger retard sur l’événe
961
défendre ces manœuvres au nom de la doctrine, et
les
justifier à tout coup (avec léger retard sur l’événement !) par des n
962
nom de la doctrine, et les justifier à tout coup (
avec
léger retard sur l’événement !) par des nécessités dites « dialectiqu
963
les justifier à tout coup (avec léger retard sur
l’
événement !) par des nécessités dites « dialectiques »… Les communiste
964
ent !) par des nécessités dites « dialectiques »…
Les
communistes sincères comprendront-ils que cette méthode figure aux ye
965
balance » (Pascal). Je m’en voudrais d’exploiter
l’
équivoque. Mais il fallait au moins rappeler son existence, sous peine
966
son existence, sous peine de tomber aussitôt dans
les
pièges grossiers qu’elle nous tend. (Pièges dans lesquels tombent les
967
qu’elle nous tend. (Pièges dans lesquels tombent
les
neuf dixièmes des adversaires du marxisme — et combien de marxistes e
968
tes eux-mêmes !) Si maintenant j’essaie de saisir
l’
identité foncière et la continuité de l’attitude communiste, au traver
969
ntenant j’essaie de saisir l’identité foncière et
la
continuité de l’attitude communiste, au travers des contradictions vi
970
de saisir l’identité foncière et la continuité de
l’
attitude communiste, au travers des contradictions violentes de ses té
971
en fin de compte, une grande volonté invariable :
la
volonté de changer le monde. Or une telle volonté ne saurait prendre
972
grande volonté invariable : la volonté de changer
le
monde. Or une telle volonté ne saurait prendre son élan que dans le s
973
elle volonté ne saurait prendre son élan que dans
le
sentiment insupportable d’un défaut inhérent au monde. Connaître qu’i
974
onc transformer toutes choses, tel est, je crois,
l’
acte initial mais aussi la passion constante du communiste conscient e
975
ses, tel est, je crois, l’acte initial mais aussi
la
passion constante du communiste conscient et conséquent. C’est ce mou
976
t profond qui légitime, à ses yeux tout au moins,
les
détours les plus tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’act
977
i légitime, à ses yeux tout au moins, les détours
les
plus tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’action du parti
978
au moins, les détours les plus tortueux, mettons
les
détours dialectiques, de l’action du parti communiste41. La « cause »
979
us tortueux, mettons les détours dialectiques, de
l’
action du parti communiste41. La « cause » justifie les moyens… Mais a
980
dialectiques, de l’action du parti communiste41.
La
« cause » justifie les moyens… Mais alors, comment ne pas voir que ce
981
tion du parti communiste41. La « cause » justifie
les
moyens… Mais alors, comment ne pas voir que ce mouvement présente, da
982
as voir que ce mouvement présente, dans sa forme,
avec
le mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus
983
ir que ce mouvement présente, dans sa forme, avec
le
mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus fra
984
le mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre
le
péché) les plus frappantes analogies ? Sur ce plan seul, il m’apparaî
985
nt du chrétien (qui est sa lutte contre le péché)
les
plus frappantes analogies ? Sur ce plan seul, il m’apparaît qu’une co
986
m’apparaît qu’une confrontation soit possible.
L’
homme d’abord, ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chr
987
nfrontation soit possible. L’homme d’abord, ou
le
monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que
988
ble. L’homme d’abord, ou le monde d’abord ?
Le
marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que l’homme n’existe pas
989
ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme
le
chrétien, a reconnu que l’homme n’existe pas isolément, qu’il est un
990
e marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que
l’
homme n’existe pas isolément, qu’il est un être « en relation », qu’il
991
», qu’il est lié à une société42. Mais encore, à
l’
instar du chrétien, le marxiste croit que la société présente n’a pas
992
e société42. Mais encore, à l’instar du chrétien,
le
marxiste croit que la société présente n’a pas le droit de déterminer
993
re, à l’instar du chrétien, le marxiste croit que
la
société présente n’a pas le droit de déterminer le tout de l’homme, e
994
le marxiste croit que la société présente n’a pas
le
droit de déterminer le tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle e
995
a société présente n’a pas le droit de déterminer
le
tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-
996
résente n’a pas le droit de déterminer le tout de
l’
homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-même, et fa
997
le droit de déterminer le tout de l’homme, et ne
le
peut pas. Car elle est divisée contre elle-même, et fait de l’homme q
998
Car elle est divisée contre elle-même, et fait de
l’
homme qui s’abandonne à elle un être antinomique, « divisé », et comme
999
aliéné » de ce qu’il y a de plus humain en lui. À
la
découverte de « cette aliénation de soi », qui selon Marx serait le f
1000
cette aliénation de soi », qui selon Marx serait
le
fait de toutes les sociétés passées, y compris le communisme primitif
1001
de soi », qui selon Marx serait le fait de toutes
les
sociétés passées, y compris le communisme primitif, correspond formel
1002
le fait de toutes les sociétés passées, y compris
le
communisme primitif, correspond formellement, dans le diagnostic chré
1003
ommunisme primitif, correspond formellement, dans
le
diagnostic chrétien, la reconnaissance d’une corruption fondamentale,
1004
espond formellement, dans le diagnostic chrétien,
la
reconnaissance d’une corruption fondamentale, qui est le péché origin
1005
nnaissance d’une corruption fondamentale, qui est
le
péché originel. Il s’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que pour
1006
, qui est le péché originel. Il s’ensuit que pour
le
marxiste, aussi bien que pour le chrétien, l’homme ne pourra trouver
1007
’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que pour
le
chrétien, l’homme ne pourra trouver sa plénitude et se « regagner tot
1008
our le marxiste, aussi bien que pour le chrétien,
l’
homme ne pourra trouver sa plénitude et se « regagner totalement »43 q
1009
sa plénitude et se « regagner totalement »43 qu’à
la
faveur d’une économie44 radicalement renouvelée. Une réaction semblab
1010
emblable — toujours dans sa forme — dressera donc
le
chrétien et le marxiste contre toute espèce de statisme, contre toute
1011
ours dans sa forme — dressera donc le chrétien et
le
marxiste contre toute espèce de statisme, contre toute spéculation id
1012
ger quelque chose, — à lutter efficacement contre
le
mal universel. Cette volonté fondamentale de transformation, je la tr
1013
Cette volonté fondamentale de transformation, je
la
trouve formulée et résumée, de part et d’autre, par deux propositions
1014
tions parfaitement claires qui, tout en affirmant
avec
vigueur la nécessité d’un « changement », et d’un changement pratique
1015
ement claires qui, tout en affirmant avec vigueur
la
nécessité d’un « changement », et d’un changement pratique, concret,
1016
, quant aux voies et moyens qu’elles préconisent.
La
2e thèse de Marx sur Feuerbach affirme : Les philosophes n’ont fait
1017
ent. La 2e thèse de Marx sur Feuerbach affirme :
Les
philosophes n’ont fait jusqu’ici qu’interpréter diversement le monde
1018
s n’ont fait jusqu’ici qu’interpréter diversement
le
monde ; or il s’agit maintenant de le transformer. Et l’apôtre Paul
1019
diversement le monde ; or il s’agit maintenant de
le
transformer. Et l’apôtre Paul écrit dans sa Lettre aux Romains (12,
1020
; or il s’agit maintenant de le transformer. Et
l’
apôtre Paul écrit dans sa Lettre aux Romains (12, 2) : Ne vous confor
1021
s à ce siècle présent, mais soyez transformés par
le
renouvellement de votre sens, afin que vous discerniez quelle est la
1022
e votre sens, afin que vous discerniez quelle est
la
volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans les deux
1023
Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans
les
deux cas, il s’agit du même mot : transformer ; et il s’agit de trans
1024
sformer ; et il s’agit de transformer en tant que
l’
on est proprement humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à l’Espr
1025
n est proprement humain (c’est-à-dire en tant que
l’
on obéit à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution
1026
ent humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à
l’
Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution, pour Marx).
1027
l’on obéit à l’Esprit, pour Paul, et en tant que
l’
on fait la révolution, pour Marx). Il s’agit donc d’action. Il s’agit
1028
t à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait
la
révolution, pour Marx). Il s’agit donc d’action. Il s’agit d’attester
1029
l s’agit donc d’action. Il s’agit d’attester soit
la
foi, par une réalisation des volontés de Dieu, contrariant celles du
1030
tés de Dieu, contrariant celles du siècle, — soit
la
pensée, par une action45 qui ne peut être que révolutionnaire. Et cep
1031
ui ne peut être que révolutionnaire. Et cependant
l’
opposition de Marx et de l’apôtre éclate en ceci : que Paul veut trans
1032
ionnaire. Et cependant l’opposition de Marx et de
l’
apôtre éclate en ceci : que Paul veut transformer l’homme d’abord — et
1033
apôtre éclate en ceci : que Paul veut transformer
l’
homme d’abord — et le monde par lui — tandis que Marx veut transformer
1034
: que Paul veut transformer l’homme d’abord — et
le
monde par lui — tandis que Marx veut transformer le monde d’abord, —
1035
monde par lui — tandis que Marx veut transformer
le
monde d’abord, — et l’homme par lui. C’est sur le fait de cette oppos
1036
que Marx veut transformer le monde d’abord, — et
l’
homme par lui. C’est sur le fait de cette opposition centrale qu’il im
1037
le monde d’abord, — et l’homme par lui. C’est sur
le
fait de cette opposition centrale qu’il importe d’être bien au clair,
1038
n centrale qu’il importe d’être bien au clair, si
l’
on veut comprendre pourquoi la pratique et les fins du communisme cont
1039
e bien au clair, si l’on veut comprendre pourquoi
la
pratique et les fins du communisme contredisent radicalement la prati
1040
, si l’on veut comprendre pourquoi la pratique et
les
fins du communisme contredisent radicalement la pratique et les fins
1041
les fins du communisme contredisent radicalement
la
pratique et les fins du christianisme, dont elles dérivent d’ailleurs
1042
mmunisme contredisent radicalement la pratique et
les
fins du christianisme, dont elles dérivent d’ailleurs obscurément, ma
1043
nels, abandonnées aux seules lois du Temps. De
la
polémique antispiritualiste à la doctrine marxiste On ne répétera
1044
du Temps. De la polémique antispiritualiste à
la
doctrine marxiste On ne répétera jamais assez que la doctrine orig
1045
trine marxiste On ne répétera jamais assez que
la
doctrine originelle de Marx est avant tout la mise en forme d’une pol
1046
que la doctrine originelle de Marx est avant tout
la
mise en forme d’une polémique. Elle est, très consciemment, condition
1047
ue. Elle est, très consciemment, conditionnée par
la
situation de l’Europe occidentale vers le milieu du xixe siècle, et
1048
ès consciemment, conditionnée par la situation de
l’
Europe occidentale vers le milieu du xixe siècle, et par la volonté d
1049
née par la situation de l’Europe occidentale vers
le
milieu du xixe siècle, et par la volonté de la changer. En particuli
1050
ccidentale vers le milieu du xixe siècle, et par
la
volonté de la changer. En particulier, elle n’est « matérialiste », a
1051
s le milieu du xixe siècle, et par la volonté de
la
changer. En particulier, elle n’est « matérialiste », au sens vulgair
1052
’est « matérialiste », au sens vulgaire, que dans
la
mesure où la mentalité de l’époque peut être qualifiée — et se qualif
1053
aliste », au sens vulgaire, que dans la mesure où
la
mentalité de l’époque peut être qualifiée — et se qualifie elle-même
1054
s vulgaire, que dans la mesure où la mentalité de
l’
époque peut être qualifiée — et se qualifie elle-même — de spiritualis
1055
se qualifie elle-même — de spiritualiste, au sens
le
plus contestable du terme. Quelle était, du point de vue religieux, l
1056
u terme. Quelle était, du point de vue religieux,
la
situation qui se présentait à Marx ? C’était celle de la Restauration
1057
ation qui se présentait à Marx ? C’était celle de
la
Restauration. Professeurs et bourgeois libéraux, grands patrons du ca
1058
ant en Angleterre et en Allemagne, théologiens de
l’
école hégélienne, ou adversaires du christianisme, tous, dans un commu
1059
ssaient entendre, par leur attitude pratique, que
la
religion concerne « l’homme intérieur » et rien que lui. C’était une
1060
eur attitude pratique, que la religion concerne «
l’
homme intérieur » et rien que lui. C’était une « affaire privée » ; et
1061
ait une « affaire privée » ; et Marx n’a fait que
le
constater. Elle n’empêchait nullement de faire des affaires. Ni d’opp
1062
it nullement de faire des affaires. Ni d’opprimer
les
ouvriers. Ni d’appeler justice, au besoin, ce qui était utile aux maî
1063
stice, au besoin, ce qui était utile aux maîtres.
La
religion ne semblait plus gêner personne46. Elle sanctionnait et prot
1064
gêner personne46. Elle sanctionnait et protégeait
l’
ordre établi. Elle traduisait cet établissement même, et non plus ce q
1065
uisait cet établissement même, et non plus ce qui
l’
eût jugé. Marx ne perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à la
1066
l’eût jugé. Marx ne perd pas son temps à dénoncer
l’
erreur qui est à la base d’une pareille imposture : il la sait trop pr
1067
perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à
la
base d’une pareille imposture : il la sait trop profondément enraciné
1068
r qui est à la base d’une pareille imposture : il
la
sait trop profondément enracinée dans l’homme pour être atteinte par
1069
ure : il la sait trop profondément enracinée dans
l’
homme pour être atteinte par une simple critique philosophique47. Or c
1070
losophique47. Or cette critique philosophique est
la
seule arme dont il disposerait sur le plan de l’« esprit », car il es
1071
la seule arme dont il disposerait sur le plan de
l’
« esprit », car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas l’« esprit
1072
», car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas
l’
« esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme, que les spiritualistes aba
1073
ce n’est pas l’« esprit » qu’il veut sauver, mais
l’
homme, que les spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhu
1074
l’« esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme, que
les
spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhumain. Il lui f
1075
recourir à un autre ordre d’arguments : ceux que
l’
on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part la violence prolétarien
1076
l’on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part
la
violence prolétarienne, d’autre part la « science » infaillible des l
1077
’une part la violence prolétarienne, d’autre part
la
« science » infaillible des lois de l’évolution économique, qu’il for
1078
autre part la « science » infaillible des lois de
l’
évolution économique, qu’il formule. Je résume et je simplifie ce proc
1079
fie ce processus : ceux qui prétendent réformer «
l’
intérieur » se gardent bien de toucher à l’extérieur. Marx dira donc,
1080
rmer « l’intérieur » se gardent bien de toucher à
l’
extérieur. Marx dira donc, contre eux, qu’il faut d’abord transformer
1081
donc, contre eux, qu’il faut d’abord transformer
l’
extérieur — et le reste suivra nécessairement. Pour sauver le reste —
1082
, qu’il faut d’abord transformer l’extérieur — et
le
reste suivra nécessairement. Pour sauver le reste — disons : la cultu
1083
— et le reste suivra nécessairement. Pour sauver
le
reste — disons : la culture, l’esprit, et l’âme si l’on y tient — il
1084
a nécessairement. Pour sauver le reste — disons :
la
culture, l’esprit, et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par l
1085
ment. Pour sauver le reste — disons : la culture,
l’
esprit, et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’«
1086
uver le reste — disons : la culture, l’esprit, et
l’
âme si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’« esprit » du b
1087
este — disons : la culture, l’esprit, et l’âme si
l’
on y tient — il faut commencer par le nier. L’« esprit » du bourgeois
1088
et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par
le
nier. L’« esprit » du bourgeois spiritualiste n’est qu’une caricature
1089
si l’on y tient — il faut commencer par le nier.
L’
« esprit » du bourgeois spiritualiste n’est qu’une caricature, mais se
1090
nt déjà tels qu’on ne peut plus songer à rétablir
la
vérité par des moyens purement spirituels. Au mensonge spiritualiste,
1091
t spirituels. Au mensonge spiritualiste, opposons
l’
argument frappant d’un matérialisme polémique : nous l’appellerons mat
1092
ument frappant d’un matérialisme polémique : nous
l’
appellerons matérialisme dialectique, pour indiquer qu’il n’est que pr
1093
instrumental, qu’il doit servir au bout du compte
la
vérité — laquelle contient aussi l’« esprit » — bref qu’il n’est en
1094
t du compte la vérité — laquelle contient aussi
l’
« esprit » — bref qu’il n’est en somme qu’une tactique. Faisons de néc
1095
ons de nécessité vertu. Proposons-nous de changer
les
choses et leurs rapports, de changer « le monde », c’est-à-dire les r
1096
hanger les choses et leurs rapports, de changer «
le
monde », c’est-à-dire les rapports économiques et sociaux. Et s’il no
1097
s rapports, de changer « le monde », c’est-à-dire
les
rapports économiques et sociaux. Et s’il nous reste encore du temps,
1098
s’il nous reste encore du temps, nous changerons
l’
homme. D’ailleurs, peut-être suffit-il de changer le cadre matériel po
1099
homme. D’ailleurs, peut-être suffit-il de changer
le
cadre matériel pour que le contenu se transforme ? N’a-t-on pas démon
1100
e suffit-il de changer le cadre matériel pour que
le
contenu se transforme ? N’a-t-on pas démontré déjà que la culture, pa
1101
nu se transforme ? N’a-t-on pas démontré déjà que
la
culture, par exemple, n’est qu’un « reflet » du processus économique
1102
e prend à son jeu polémique. Ce ne fut guère qu’à
la
fin de sa carrière que son ami Engels en découvrit le danger. « Marx
1103
in de sa carrière que son ami Engels en découvrit
le
danger. « Marx et moi — écrit-il en 1890 — nous sommes peut-être resp
1104
disciples ont insisté plus qu’il ne convenait sur
les
facteurs économiques. Nous étions forcés d’insister sur leur caractèr
1105
fondamental, par opposition à nos adversaires qui
le
niaient, et nous n’eûmes pas toujours le temps ni l’occasion de rendr
1106
ires qui le niaient, et nous n’eûmes pas toujours
le
temps ni l’occasion de rendre justice aux autres facteurs. » De la
1107
niaient, et nous n’eûmes pas toujours le temps ni
l’
occasion de rendre justice aux autres facteurs. » De la doctrine ma
1108
on de rendre justice aux autres facteurs. » De
la
doctrine marxiste à la tactique stalinienne En effet, de ce « mens
1109
x autres facteurs. » De la doctrine marxiste à
la
tactique stalinienne En effet, de ce « mensonge » opportuniste qu’
1110
n effet, de ce « mensonge » opportuniste qu’était
le
matérialisme polémique, promu par un glissement inévitable au rang de
1111
table au rang de doctrine du parti, devait sortir
la
« vérité » tactique du matérialisme vulgaire, celui que la presse bou
1112
té » tactique du matérialisme vulgaire, celui que
la
presse bourgeoise a si beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore qu’el
1113
beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore qu’elle
le
pratique elle-même sans vergogne, tout en le niant pour les besoins d
1114
elle le pratique elle-même sans vergogne, tout en
le
niant pour les besoins de sa cause. Ce matérialisme vulgaire, que Mar
1115
ue elle-même sans vergogne, tout en le niant pour
les
besoins de sa cause. Ce matérialisme vulgaire, que Marx avait tout d’
1116
u exactement symétrique de celui des idéalistes :
la
croyance que si l’on change l’ordre des choses, on change automatique
1117
ique de celui des idéalistes : la croyance que si
l’
on change l’ordre des choses, on change automatiquement la réalité hum
1118
i des idéalistes : la croyance que si l’on change
l’
ordre des choses, on change automatiquement la réalité humaine. Obligé
1119
nge l’ordre des choses, on change automatiquement
la
réalité humaine. Obligé par ses adversaires à proclamer la primauté d
1120
é humaine. Obligé par ses adversaires à proclamer
la
primauté du matériel, Marx ne se rendit pas compte qu’il allait décha
1121
rreur non moins grave que celle des défenseurs de
l’
esprit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous
1122
grave que celle des défenseurs de l’esprit pur :
l’
erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous ses malheurs es
1123
s défenseurs de l’esprit pur : l’erreur qui porte
l’
homme à croire que la cause de tous ses malheurs est dans les choses,
1124
rit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire que
la
cause de tous ses malheurs est dans les choses, et non dans lui. (Il
1125
croire que la cause de tous ses malheurs est dans
les
choses, et non dans lui. (Il n’en fut pas conscient, et pourtant il e
1126
nsable, nous reviendrons plus tard sur ce point.)
Le
peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas le
1127
viendrons plus tard sur ce point.) Le peuple — et
la
bourgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas le moine, et que
1128
Le peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète que
l’
habit ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur. Pr
1129
urgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas
le
moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit
1130
— répète que l’habit ne fait pas le moine, et que
l’
argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer qu
1131
ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas
le
bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer que l’habit fait le moi
1132
bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer que
l’
habit fait le moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui ex
1133
iquement, il croit dur comme fer que l’habit fait
le
moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15
1134
it dur comme fer que l’habit fait le moine et que
l’
argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15 volumes — dont
1135
er que l’habit fait le moine et que l’argent fait
le
bonheur. Marx vient lui expliquer en 15 volumes — dont on a fait des
1136
Marx vient lui démontrer que ceux qui prétendent
le
contraire, et qui prêchent que l’argent ne fait pas le bonheur, sont
1137
qui prétendent le contraire, et qui prêchent que
l’
argent ne fait pas le bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui on
1138
ntraire, et qui prêchent que l’argent ne fait pas
le
bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui ont l’argent et qui veu
1139
bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui ont
l’
argent et qui veulent le garder — justement parce qu’il fait leur bonh
1140
des exploiteurs, qui ont l’argent et qui veulent
le
garder — justement parce qu’il fait leur bonheur ! Alors, il n’y a pl
1141
ors, il n’y a plus qu’une seule voie : instituons
le
plan quinquennal, créons une industrie puissante, faisons mieux que l
1142
créons une industrie puissante, faisons mieux que
l’
Amérique, devenons encore plus riches, car l’argent distribué aux mass
1143
que l’Amérique, devenons encore plus riches, car
l’
argent distribué aux masses ne manque pas de créer du bonheur. Pour ré
1144
nheur. Pour réussir, il faut une discipline. Pour
la
maintenir, il faut un dictateur. Libre aux bourgeois, aux scrupuleux,
1145
e lui-même de s’indigner : il faut ce qu’il faut.
L’
étatisme dictatorial contredit la doctrine de Marx ? Qu’importe, puisq
1146
t ce qu’il faut. L’étatisme dictatorial contredit
la
doctrine de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est la richesse,
1147
ntredit la doctrine de Marx ? Qu’importe, puisque
le
but final est la richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce que vo
1148
ne de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est
la
richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce que voulait Marx ? Résu
1149
que voulait Marx ? Résumons : Marx n’a pas voulu
le
matérialisme vulgaire. Mais les nécessités de la polémique d’une part
1150
Marx n’a pas voulu le matérialisme vulgaire. Mais
les
nécessités de la polémique d’une part, — et sa définition de l’homme
1151
le matérialisme vulgaire. Mais les nécessités de
la
polémique d’une part, — et sa définition de l’homme concret, purement
1152
de la polémique d’une part, — et sa définition de
l’
homme concret, purement social, d’autre part, l’ont amené à mettre l’a
1153
e l’homme concret, purement social, d’autre part,
l’
ont amené à mettre l’accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet
1154
rement social, d’autre part, l’ont amené à mettre
l’
accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet accent que « les mass
1155
, d’autre part, l’ont amené à mettre l’accent sur
les
facteurs matérialistes. C’est cet accent que « les masses » ont senti
1156
es facteurs matérialistes. C’est cet accent que «
les
masses » ont senti, parce que tout les y prédisposait. Le résultat, c
1157
cent que « les masses » ont senti, parce que tout
les
y prédisposait. Le résultat, c’est l’URSS de Staline, régime dont je
1158
s » ont senti, parce que tout les y prédisposait.
Le
résultat, c’est l’URSS de Staline, régime dont je voudrais bien qu’on
1159
e que tout les y prédisposait. Le résultat, c’est
l’
URSS de Staline, régime dont je voudrais bien qu’on me démontre en quo
1160
ontre en quoi il diffère du fascisme, dans ce que
le
fascisme a de plus oppressif pour l’homme et pour sa liberté. L’at
1161
dans ce que le fascisme a de plus oppressif pour
l’
homme et pour sa liberté. L’attitude chrétienne devant le « monde »
1162
lus oppressif pour l’homme et pour sa liberté.
L’
attitude chrétienne devant le « monde » On parle avec raison de « d
1163
pour sa liberté. L’attitude chrétienne devant
le
« monde » On parle avec raison de « doctrine » marxiste, d’« idéol
1164
titude chrétienne devant le « monde » On parle
avec
raison de « doctrine » marxiste, d’« idéologie », de « tactique » com
1165
ire une confusion irrémédiable que de parler dans
le
même sens d’une « doctrine » du christianisme. Le chrétien, et surtou
1166
le même sens d’une « doctrine » du christianisme.
Le
chrétien, et surtout le protestant, répugne absolument à concevoir qu
1167
trine » du christianisme. Le chrétien, et surtout
le
protestant, répugne absolument à concevoir que les dogmes théologique
1168
le protestant, répugne absolument à concevoir que
les
dogmes théologiques puissent figurer la théorie d’une pratique49. Le
1169
voir que les dogmes théologiques puissent figurer
la
théorie d’une pratique49. Le christianisme n’est pas un programme ; n
1170
ues puissent figurer la théorie d’une pratique49.
Le
christianisme n’est pas un programme ; ni, comme le disent certains p
1171
christianisme n’est pas un programme ; ni, comme
le
disent certains primaires marxistes, une « idéologie » ; ni une tacti
1172
attitude totale. (Je dirais bien totalitaire, si
le
mot n’avait été pareillement perverti par les caricatures séculières
1173
, si le mot n’avait été pareillement perverti par
les
caricatures séculières de la révolution chrétienne.) La vie et la pen
1174
lement perverti par les caricatures séculières de
la
révolution chrétienne.) La vie et la pensée chrétiennes, en effet, se
1175
icatures séculières de la révolution chrétienne.)
La
vie et la pensée chrétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant
1176
éculières de la révolution chrétienne.) La vie et
la
pensée chrétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant à ce qui d
1177
, se réfèrent à chaque instant à ce qui détermine
le
tout de l’homme : son origine, sa fin, et sa mission présente. Le chr
1178
nt à chaque instant à ce qui détermine le tout de
l’
homme : son origine, sa fin, et sa mission présente. Le chrétien sait
1179
me : son origine, sa fin, et sa mission présente.
Le
chrétien sait qu’il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers le Roy
1180
n présente. Le chrétien sait qu’il vient de Dieu,
le
Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et q
1181
qu’il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers
le
Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et qu’il a pour mission actuelle
1182
, le Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu,
le
Réconciliateur ; et qu’il a pour mission actuelle d’obéir à une Parol
1183
tuelle d’obéir à une Parole qui est Jésus-Christ,
le
Médiateur. Mais cette Parole juge « le monde » qui l’a rejetée. Elle
1184
us-Christ, le Médiateur. Mais cette Parole juge «
le
monde » qui l’a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre les hommes qu
1185
édiateur. Mais cette Parole juge « le monde » qui
l’
a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre les hommes qui refusent tota
1186
» qui l’a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre
les
hommes qui refusent totalement ce monde et s’attendent totalement au
1187
ume. Ce refus, cette attente active50 constituent
la
révolution la plus radicale qui soit, disons mieux : la seule radical
1188
cette attente active50 constituent la révolution
la
plus radicale qui soit, disons mieux : la seule radicale. Et toutes l
1189
olution la plus radicale qui soit, disons mieux :
la
seule radicale. Et toutes les autres, dans notre Occident troublé par
1190
soit, disons mieux : la seule radicale. Et toutes
les
autres, dans notre Occident troublé par un message qu’il méconnaît, n
1191
oublé par un message qu’il méconnaît, ne sont que
les
reflets énigmatiques de cet événement primordial — ses succédanés tem
1192
ordial — ses succédanés temporels, en dérive vers
le
néant. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transf
1193
… » Cela ne signifie pas, pour un chrétien, que «
le
monde » soit abandonné. Cela ne signifie pas qu’une fois opérée cette
1194
fois opérée cette transformation personnelle que
l’
on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à sub
1195
e cette transformation personnelle que l’on nomme
la
conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémis
1196
rmation personnelle que l’on nomme la conversion,
le
chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémissant les lois d
1197
n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémissant
les
lois d’un monde qu’il condamne ! Car alors, où serait son refus ? Et
1198
du conformisme triomphant ? C’est bien là ce que
pensent
les marxistes, mais c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur
1199
ormisme triomphant ? C’est bien là ce que pensent
les
marxistes, mais c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur l’ho
1200
c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur
l’
homme. Leur ignorance ou leur aveuglement quant au devoir, et au pouvo
1201
ur aveuglement quant au devoir, et au pouvoir, de
l’
homme transformé par la foi. L’homme nouveau, selon l’Évangile, est un
1202
devoir, et au pouvoir, de l’homme transformé par
la
foi. L’homme nouveau, selon l’Évangile, est un homme qui a changé de
1203
et au pouvoir, de l’homme transformé par la foi.
L’
homme nouveau, selon l’Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il
1204
mme transformé par la foi. L’homme nouveau, selon
l’
Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il est orienté autrement,
1205
a changé de sens. Il est orienté autrement, comme
l’
indique le mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse,
1206
e sens. Il est orienté autrement, comme l’indique
le
mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse, il reconn
1207
t, comme l’indique le mot conversion. Obéissant à
la
Parole que Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup l’origine et l
1208
e que Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup
l’
origine et le but de sa vie : il connaît dès lors son péché, tout ce q
1209
i adresse, il reconnaît du même coup l’origine et
le
but de sa vie : il connaît dès lors son péché, tout ce qui l’écartait
1210
vie : il connaît dès lors son péché, tout ce qui
l’
écartait de sa voie. Mais il se connaît du même coup responsable à l’e
1211
ie. Mais il se connaît du même coup responsable à
l’
endroit du monde. Car si le monde s’est livré à l’injustice et au déso
1212
ême coup responsable à l’endroit du monde. Car si
le
monde s’est livré à l’injustice et au désordre, c’est par la faute de
1213
l’endroit du monde. Car si le monde s’est livré à
l’
injustice et au désordre, c’est par la faute de l’homme, qui était son
1214
est livré à l’injustice et au désordre, c’est par
la
faute de l’homme, qui était son roi, et qui a trahi. Et tout péché in
1215
l’injustice et au désordre, c’est par la faute de
l’
homme, qui était son roi, et qui a trahi. Et tout péché individuel rép
1216
ute. Ainsi : conscience du péché, connaissance de
la
fin et de l’origine, obligation d’agir pour racheter le mal commis, s
1217
conscience du péché, connaissance de la fin et de
l’
origine, obligation d’agir pour racheter le mal commis, sont trois mom
1218
et de l’origine, obligation d’agir pour racheter
le
mal commis, sont trois moments indivisibles de la « transformation »
1219
le mal commis, sont trois moments indivisibles de
la
« transformation » dont parle Paul. L’un n’est pas concevable, sérieu
1220
utre. « Toute droite connaissance de Dieu naît de
l’
obéissance », écrit Calvin. Et que serait une obéissance qui ne se man
1221
rait une obéissance qui ne se manifesterait pas ?
La
transformation personnelle, au sens total de l’Évangile, ne peut donc
1222
? La transformation personnelle, au sens total de
l’
Évangile, ne peut donc se traduire, si elle s’est faite, que par une a
1223
st faite, que par une action du chrétien : contre
le
monde dans sa forme présente, et pour le monde restauré dans la Prome
1224
: contre le monde dans sa forme présente, et pour
le
monde restauré dans la Promesse. Il faut aller plus loin que cette af
1225
sa forme présente, et pour le monde restauré dans
la
Promesse. Il faut aller plus loin que cette affirmation tout évidente
1226
ue cette affirmation tout évidente. Non seulement
l’
homme converti devient transformateur du monde — ou sinon il n’est pas
1227
as converti — mais encore toute transformation de
la
forme actuelle des choses, qui ne serait pas l’effet d’une conversion
1228
e la forme actuelle des choses, qui ne serait pas
l’
effet d’une conversion des hommes, ne doit être aux yeux du chrétien,
1229
Voilà qui paraîtra plus scandaleux. Et cependant
l’
Évangile est formel : « Que servirait à un homme de gagner le monde, s
1230
est formel : « Que servirait à un homme de gagner
le
monde, s’il perdait son âme ? » Son âme, c’est-à-dire la conscience d
1231
e, s’il perdait son âme ? » Son âme, c’est-à-dire
la
conscience de son origine et de sa fin, du sens même de son action, d
1232
ns pas de vérités « purement théologiques » comme
le
dirait un incroyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit le chré
1233
s » comme le dirait un incroyant. Que servirait à
l’
homme, tel que le voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et mor
1234
it un incroyant. Que servirait à l’homme, tel que
le
voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à
1235
croyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit
le
chrétien, de sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à la guer
1236
sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à
la
guerre, à la misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule
1237
e matérielle et morale, d’échapper à la guerre, à
la
misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose nécess
1238
et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à
l’
oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose nécessaire », le se
1239
a misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse «
la
seule chose nécessaire », le seul gage du salut total ? Alors, va-t-o
1240
l ignore ou refuse « la seule chose nécessaire »,
le
seul gage du salut total ? Alors, va-t-on, si l’on est converti, lais
1241
le seul gage du salut total ? Alors, va-t-on, si
l’
on est converti, laisser le monde aller son train, et les guerres se d
1242
l ? Alors, va-t-on, si l’on est converti, laisser
le
monde aller son train, et les guerres se déchaîner, et les chômeurs m
1243
st converti, laisser le monde aller son train, et
les
guerres se déchaîner, et les chômeurs mourir de faim ? Ce serait prou
1244
aller son train, et les guerres se déchaîner, et
les
chômeurs mourir de faim ? Ce serait prouver qu’on n’est pas converti.
1245
t pas converti. J’agirai donc, toutefois non pour
le
monde, et non pour sauver quelque bien, mais parce que je me sais res
1246
je ne puis supporter mon péché et ses effets dans
le
monde réel où vivent les hommes — où meurent les hommes. Reproches
1247
péché et ses effets dans le monde réel où vivent
les
hommes — où meurent les hommes. Reproches réciproques que s’adress
1248
s le monde réel où vivent les hommes — où meurent
les
hommes. Reproches réciproques que s’adressent les chrétiens et les
1249
hommes. Reproches réciproques que s’adressent
les
chrétiens et les marxistes Telle étant donc la conception chrétien
1250
ches réciproques que s’adressent les chrétiens et
les
marxistes Telle étant donc la conception chrétienne de l’homme, se
1251
es chrétiens et les marxistes Telle étant donc
la
conception chrétienne de l’homme, seul responsable du mal qui est dan
1252
s Telle étant donc la conception chrétienne de
l’
homme, seul responsable du mal qui est dans le monde, on comprendra qu
1253
de l’homme, seul responsable du mal qui est dans
le
monde, on comprendra que l’état d’esprit marxiste lui apparaisse néce
1254
e du mal qui est dans le monde, on comprendra que
l’
état d’esprit marxiste lui apparaisse nécessairement borné. Je me serv
1255
nécessairement borné. Je me servirai d’une image.
L’
enfant qui rate son coup, ou qui se heurte contre un meuble, se fâche
1256
u qui se heurte contre un meuble, se fâche contre
les
choses et les rend responsables. Il croit que c’est elles qu’il faut
1257
e contre un meuble, se fâche contre les choses et
les
rend responsables. Il croit que c’est elles qu’il faut changer. Il ba
1258
croit que c’est elles qu’il faut changer. Il bat
la
table, comme Xerxès faisait battre l’Hellespont. C’est ce préjugé inf
1259
ger. Il bat la table, comme Xerxès faisait battre
l’
Hellespont. C’est ce préjugé infantile que le marxisme devait consolid
1260
ttre l’Hellespont. C’est ce préjugé infantile que
le
marxisme devait consolider dans la conscience prolétarienne. Déviatio
1261
infantile que le marxisme devait consolider dans
la
conscience prolétarienne. Déviation grossière, dira-t-on ; mais pouva
1262
it-il pas dit qu’il fallait commencer par changer
l’
ordre matériel, l’ordre des choses, et que les hommes ensuite deviendr
1263
l fallait commencer par changer l’ordre matériel,
l’
ordre des choses, et que les hommes ensuite deviendraient plus habiles
1264
nger l’ordre matériel, l’ordre des choses, et que
les
hommes ensuite deviendraient plus habiles à s’entendre et à vivre heu
1265
biles à s’entendre et à vivre heureux ? « Changer
la
vie », criait l’enfant Rimbaud ! Et les intellectuels de gauche repre
1266
e et à vivre heureux ? « Changer la vie », criait
l’
enfant Rimbaud ! Et les intellectuels de gauche reprennent aujourd’hui
1267
« Changer la vie », criait l’enfant Rimbaud ! Et
les
intellectuels de gauche reprennent aujourd’hui cette devise, pour l’o
1268
gauche reprennent aujourd’hui cette devise, pour
l’
opposer au « spiritualisme » autant qu’à la routine et au cynisme des
1269
, pour l’opposer au « spiritualisme » autant qu’à
la
routine et au cynisme des conservateurs. Saint Paul n’a pas cette tra
1270
cette tragique naïveté. Il ne se fâche pas contre
l’
Empire romain, et ne désigne pas sa destruction comme premier objectif
1271
on comme premier objectif aux chrétiens. Pourtant
l’
Empire leur ôte toute liberté, et bientôt leur ôtera la vie ! Ne faut-
1272
ire leur ôte toute liberté, et bientôt leur ôtera
la
vie ! Ne faut-il pas « aller au plus pressé », sauver d’abord sa peau
1273
plus pressé », sauver d’abord sa peau, renverser
les
tyrans ? Ainsi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre
1274
ord sa peau, renverser les tyrans ? Ainsi parlent
le
bon sens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé la lutte sur c
1275
verser les tyrans ? Ainsi parlent le bon sens, et
le
marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’
1276
insi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si
l’
Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’on dit réaliste, à su
1277
ens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé
la
lutte sur ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer que le « parti
1278
l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que
l’
on dit réaliste, à supposer que le « parti chrétien » eût triomphé, ri
1279
ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer que
le
« parti chrétien » eût triomphé, rien ne l’eût empêché de subir le so
1280
r que le « parti chrétien » eût triomphé, rien ne
l’
eût empêché de subir le sort fatal des révoltes politiques : il eût re
1281
en » eût triomphé, rien ne l’eût empêché de subir
le
sort fatal des révoltes politiques : il eût revêtu les formes du pouv
1282
ort fatal des révoltes politiques : il eût revêtu
les
formes du pouvoir déposé51 et renvoyant à des temps plus paisibles l’
1283
déposé51 et renvoyant à des temps plus paisibles
l’
évangélisation — sa raison d’être — il se fût consacré aux tâches plus
1284
lus urgentes : donner du pain et des spectacles à
la
foule. Mais Paul était apôtre et non pas dictateur. C’est pourquoi so
1285
st encore prêché. Il annonçait aux hommes non pas
la
haine et le cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la
1286
êché. Il annonçait aux hommes non pas la haine et
le
cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la nouvelle, a
1287
pas la haine et le cynisme — qui appartiennent à
la
forme du monde — mais la nouvelle, absolument nouvelle, venant d’aill
1288
me — qui appartiennent à la forme du monde — mais
la
nouvelle, absolument nouvelle, venant d’ailleurs, d’au-delà de ce mon
1289
nne vivante et de son amour éternel. Il annonçait
l’
homme changé. Trop beau tout cela ! Trop beau pour être vrai, dit le m
1290
op beau tout cela ! Trop beau pour être vrai, dit
le
marxiste. (Chrétien, changé, je suis encore assez « vieil homme » pou
1291
changé, je suis encore assez « vieil homme » pour
le
comprendre.) Sur quoi repose cette transformation dont vous parlez ?
1292
e, et qu’elle m’ordonne d’ignorer. Je ne vois pas
les
effets d’une telle foi dans l’histoire de notre Occident52. Si je n’a
1293
r. Je ne vois pas les effets d’une telle foi dans
l’
histoire de notre Occident52. Si je n’ai pas votre foi, je ne les vois
1294
notre Occident52. Si je n’ai pas votre foi, je ne
les
vois pas. Je vois une Église établie, opprimant toutes les dissidence
1295
pas. Je vois une Église établie, opprimant toutes
les
dissidences, pactisant avec les puissants, soutenant partout les régi
1296
blie, opprimant toutes les dissidences, pactisant
avec
les puissants, soutenant partout les régimes rétrogrades et prêchant
1297
opprimant toutes les dissidences, pactisant avec
les
puissants, soutenant partout les régimes rétrogrades et prêchant la r
1298
, pactisant avec les puissants, soutenant partout
les
régimes rétrogrades et prêchant la résignation. C’est vraiment trop f
1299
enant partout les régimes rétrogrades et prêchant
la
résignation. C’est vraiment trop facile de se mettre en règle avec sa
1300
C’est vraiment trop facile de se mettre en règle
avec
sa mauvaise conscience, en prétextant que l’intérieur importe seul, e
1301
le avec sa mauvaise conscience, en prétextant que
l’
intérieur importe seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir l’h
1302
n prétextant que l’intérieur importe seul, et que
le
« pain de vie » suffit à nourrir l’homme ! Peut-être suffit-il à vous
1303
seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir
l’
homme ! Peut-être suffit-il à vous nourrir, personnellement, mais ce n
1304
sonnellement, mais ce n’est pas cela qui supprime
la
misère, qui empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut le dire
1305
’est pas cela qui supprime la misère, qui empêche
la
guerre, qui change le monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous c
1306
rime la misère, qui empêche la guerre, qui change
le
monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproch
1307
empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut
le
dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproches apparaissent jus
1308
hrétiens : ces reproches apparaissent justifiés à
la
grande masse des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi les «
1309
justifiés à la grande masse des travailleurs. Si
le
marxisme a provoqué parmi les « exploités » un tel soulèvement d’espé
1310
des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi
les
« exploités » un tel soulèvement d’espérances, de telles vagues d’adh
1311
c’est qu’il s’est trouvé seul à protester contre
le
monde tel qu’il va. On dira : c’est d’abord qu’il a su rejeter sur l’
1312
a. On dira : c’est d’abord qu’il a su rejeter sur
l’
oppression capitaliste, trop réelle, tout le malheur inhérent à l’exis
1313
r sur l’oppression capitaliste, trop réelle, tout
le
malheur inhérent à l’existence, tout le malheur dont en vérité le péc
1314
italiste, trop réelle, tout le malheur inhérent à
l’
existence, tout le malheur dont en vérité le péché de chacun est respo
1315
lle, tout le malheur inhérent à l’existence, tout
le
malheur dont en vérité le péché de chacun est responsable. L’observat
1316
ent à l’existence, tout le malheur dont en vérité
le
péché de chacun est responsable. L’observation est juste ; elle est i
1317
ont en vérité le péché de chacun est responsable.
L’
observation est juste ; elle est insuffisante. Ce qui explique en dern
1318
insuffisante. Ce qui explique en dernier ressort
le
succès « religieux » du marxisme, c’est sa volonté proclamée, concrèt
1319
immédiate, de changer tout ; et non pas seulement
l’
« esprit » ou l’« intérieur ». Or si le marxisme a réussi cela, s’il a
1320
anger tout ; et non pas seulement l’« esprit » ou
l’
« intérieur ». Or si le marxisme a réussi cela, s’il a pu paraître cel
1321
seulement l’« esprit » ou l’« intérieur ». Or si
le
marxisme a réussi cela, s’il a pu paraître cela, c’est dans la mesure
1322
réussi cela, s’il a pu paraître cela, c’est dans
la
mesure où le christianisme, aux yeux des masses, n’a plus osé se mont
1323
s’il a pu paraître cela, c’est dans la mesure où
le
christianisme, aux yeux des masses, n’a plus osé se montrer chrétien.
1324
sses, n’a plus osé se montrer chrétien. C’est que
le
sel a perdu sa saveur, et son amertume salutaire. C’est que la seule
1325
u sa saveur, et son amertume salutaire. C’est que
la
seule espérance véritable et certaine n’a plus été prêchée au monde a
1326
ritable et certaine n’a plus été prêchée au monde
avec
une force d’attaque assez gênante et bouleversante. C’est que l’« esp
1327
attaque assez gênante et bouleversante. C’est que
l’
« esprit » qui devait être l’agent du changement total, perpétuel et s
1328
eversante. C’est que l’« esprit » qui devait être
l’
agent du changement total, perpétuel et seul réel, est devenu le gardi
1329
ngement total, perpétuel et seul réel, est devenu
le
gardien des conformismes, ou du moins n’a pas su, par excès de pruden
1330
s n’a pas su, par excès de prudence, empêcher que
les
foules le considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus respons
1331
u, par excès de prudence, empêcher que les foules
le
considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus responsables des
1332
empêcher que les foules le considèrent comme tel.
Les
chrétiens sont bien plus responsables des succès de Marx auprès des f
1333
nsables des succès de Marx auprès des foules, que
le
marxisme n’est responsable du déclin des Églises dans le monde modern
1334
isme n’est responsable du déclin des Églises dans
le
monde moderne. C’est pourquoi les reproches du marxiste au chrétien s
1335
des Églises dans le monde moderne. C’est pourquoi
les
reproches du marxiste au chrétien sont humainement bien plus valables
1336
isciples (que ce soit en paroles ou en actes). Si
les
chrétiens gardaient une conscience plus fidèle, partant plus douloure
1337
e ce fait, je crois qu’ils éviteraient d’attaquer
le
marxisme dans les mêmes termes que la réaction. Mais ceci dit, et mai
1338
is qu’ils éviteraient d’attaquer le marxisme dans
les
mêmes termes que la réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste qu
1339
d’attaquer le marxisme dans les mêmes termes que
la
réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste qu’en doctrine, et ind
1340
doctrine, et indépendamment de toutes nos fautes,
l’
objection marxiste ne vaut rien, alors que l’objection chrétienne est
1341
tes, l’objection marxiste ne vaut rien, alors que
l’
objection chrétienne est imparable. Quand un marxiste me reproche de m
1342
angement tout spirituel, et qui n’affecte en rien
le
cours des choses, je suis fondé à lui répondre : « Ton reproche s’adr
1343
eté, à mon absence de foi, mais non pas du tout à
la
foi. Car la foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a pas
1344
bsence de foi, mais non pas du tout à la foi. Car
la
foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a pas impunément,
1345
foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne
l’
a pas impunément, et si on l’a, cela se voit, des choses changent. Ce
1346
ose inquiète”, on ne l’a pas impunément, et si on
l’
a, cela se voit, des choses changent. Ce que tu me reproches, c’est, e
1347
e n’être pas assez chrétien ! Tu m’incites donc à
le
devenir davantage, quand tu croyais réfuter ma religion. Ton athéisme
1348
d’aventure, pour un dialecticien ! Si tu dis que
le
chrétien est celui qui ne fait rien, tu prouves simplement que tu ign
1349
: vous n’êtes pas assez marxistes ! Je dis : dès
le
départ, dès l’origine doctrinale, intrinsèquement, et dans la mesure
1350
pas assez marxistes ! Je dis : dès le départ, dès
l’
origine doctrinale, intrinsèquement, et dans la mesure exacte où l’on
1351
ès l’origine doctrinale, intrinsèquement, et dans
la
mesure exacte où l’on est un marxiste convaincu, non point dans la me
1352
ale, intrinsèquement, et dans la mesure exacte où
l’
on est un marxiste convaincu, non point dans la mesure où l’on trahit
1353
où l’on est un marxiste convaincu, non point dans
la
mesure où l’on trahit le marxisme, on fait une erreur fatale, irrévoc
1354
n marxiste convaincu, non point dans la mesure où
l’
on trahit le marxisme, on fait une erreur fatale, irrévocable, aujourd
1355
onvaincu, non point dans la mesure où l’on trahit
le
marxisme, on fait une erreur fatale, irrévocable, aujourd’hui manifes
1356
e, irrévocable, aujourd’hui manifeste. Erreur sur
l’
homme et sa mission cosmique. Erreur sur la personne — dans mon vocabu
1357
ur sur l’homme et sa mission cosmique. Erreur sur
la
personne — dans mon vocabulaire. Ma critique porte sur l’essentiel du
1358
nne — dans mon vocabulaire. Ma critique porte sur
l’
essentiel du marxisme, alors que la critique marxiste porte sur un chr
1359
ique porte sur l’essentiel du marxisme, alors que
la
critique marxiste porte sur un christianisme dénaturé. Et l’essentiel
1360
marxiste porte sur un christianisme dénaturé. Et
l’
essentiel du marxisme, je le répète, c’est sa volonté de changer le mo
1361
tianisme dénaturé. Et l’essentiel du marxisme, je
le
répète, c’est sa volonté de changer le monde, le monde d’abord, et no
1362
rxisme, je le répète, c’est sa volonté de changer
le
monde, le monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et le monde par
1363
le répète, c’est sa volonté de changer le monde,
le
monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et le monde par lui. Or un
1364
de changer le monde, le monde d’abord, et non pas
l’
homme d’abord, et le monde par lui. Or une telle volonté ne peut condu
1365
le monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et
le
monde par lui. Or une telle volonté ne peut conduire qu’à l’excès du
1366
r lui. Or une telle volonté ne peut conduire qu’à
l’
excès du matérialisme, non point par la malice de Staline, mais par l’
1367
duire qu’à l’excès du matérialisme, non point par
la
malice de Staline, mais par l’effet des conditions physiques et spiri
1368
sme, non point par la malice de Staline, mais par
l’
effet des conditions physiques et spirituelles de l’homme en ce qu’ell
1369
effet des conditions physiques et spirituelles de
l’
homme en ce qu’elles ont d’irréductibles à toute détermination sociale
1370
ermination sociale ou historique imaginable, dans
le
passé, le présent ou l’avenir53. Le problème des fins dernières :
1371
sociale ou historique imaginable, dans le passé,
le
présent ou l’avenir53. Le problème des fins dernières : Royaume de
1372
storique imaginable, dans le passé, le présent ou
l’
avenir53. Le problème des fins dernières : Royaume de Dieu ou parad
1373
able, dans le passé, le présent ou l’avenir53.
Le
problème des fins dernières : Royaume de Dieu ou paradis terrestre ?
1374
ivoque grossière dissipée en principe, au lieu de
la
véritable décision. Certains, frappés comme je le suis, par les resse
1375
la véritable décision. Certains, frappés comme je
le
suis, par les ressemblances formelles indiscutables que présentent la
1376
décision. Certains, frappés comme je le suis, par
les
ressemblances formelles indiscutables que présentent la volonté du vr
1377
semblances formelles indiscutables que présentent
la
volonté du vrai chrétien et celle du communiste militant, ont tenté l
1378
rétien et celle du communiste militant, ont tenté
la
synthèse pratique des deux croyances, qu’ils estimaient complémentair
1379
complémentaires. D’autres, plus nombreux qu’on ne
le
pense, souhaitent au moins et appellent cette synthèse, paraissant re
1380
plémentaires. D’autres, plus nombreux qu’on ne le
pense
, souhaitent au moins et appellent cette synthèse, paraissant redouter
1381
malheur pour leur foi, ou pour son « succès », si
l’
on ne parvient pas à l’opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise
1382
ou pour son « succès », si l’on ne parvient pas à
l’
opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le probl
1383
uccès », si l’on ne parvient pas à l’opérer. Dans
la
jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le problème se posait a
1384
la jeunesse universitaire chinoise et japonaise,
le
problème se posait avec urgence, aux environs de 1933, de réunir dans
1385
aire chinoise et japonaise, le problème se posait
avec
urgence, aux environs de 1933, de réunir dans un même enthousiasme, «
1386
s de 1933, de réunir dans un même enthousiasme, «
les
deux Karl », c’est-à-dire Barth et Marx !54 C’est ici qu’une critique
1387
nt théologique se révèle seule capable de marquer
les
limites existant en fait, et les distinctions décisives. La pratique
1388
pable de marquer les limites existant en fait, et
les
distinctions décisives. La pratique du communisme n’est justiciable,
1389
existant en fait, et les distinctions décisives.
La
pratique du communisme n’est justiciable, en soi, que d’une critique
1390
nomique, historique, etc.55 Et je ne vois pas que
le
chrétien comme tel ait des lumières particulières sur ces sujets, qui
1391
oir technique. Mais ce qui tombe directement sous
le
coup de la seule critique théologique, ce sont les buts derniers du c
1392
ue. Mais ce qui tombe directement sous le coup de
la
seule critique théologique, ce sont les buts derniers du communisme e
1393
le coup de la seule critique théologique, ce sont
les
buts derniers du communisme et les postulats qu’il suppose. Qu’on me
1394
gique, ce sont les buts derniers du communisme et
les
postulats qu’il suppose. Qu’on me permette ici d’être un peu schémati
1395
schématique pour plus de clarté. Il me paraît que
l’
opposition finale entre la croyance marxiste et la foi personnelle du
1396
larté. Il me paraît que l’opposition finale entre
la
croyance marxiste et la foi personnelle du chrétien suffit à explique
1397
l’opposition finale entre la croyance marxiste et
la
foi personnelle du chrétien suffit à expliquer tout le reste. Le comm
1398
i personnelle du chrétien suffit à expliquer tout
le
reste. Le communisme prépare un paradis terrestre, le paradis tempore
1399
lle du chrétien suffit à expliquer tout le reste.
Le
communisme prépare un paradis terrestre, le paradis temporel de l’hom
1400
este. Le communisme prépare un paradis terrestre,
le
paradis temporel de l’homme ; le christianisme prépare un Royaume éte
1401
pare un paradis terrestre, le paradis temporel de
l’
homme ; le christianisme prépare un Royaume éternel, qui sera celui de
1402
radis terrestre, le paradis temporel de l’homme ;
le
christianisme prépare un Royaume éternel, qui sera celui de Dieu, non
1403
n Royaume éternel, qui sera celui de Dieu, non de
la
Terre. Tous deux sont eschatologiques, en ce sens qu’ils rapportent l
1404
lation, d’une longue passion temporelle. Et c’est
la
« foi », substance des choses espérées, qui permet seule de supporter
1405
es choses espérées, qui permet seule de supporter
les
maux que l’on endure au nom du but dernier. (Le chrétien chante sur s
1406
érées, qui permet seule de supporter les maux que
l’
on endure au nom du but dernier. (Le chrétien chante sur son bûcher, l
1407
les maux que l’on endure au nom du but dernier. (
Le
chrétien chante sur son bûcher, le komsomol accepte un salaire de fam
1408
but dernier. (Le chrétien chante sur son bûcher,
le
komsomol accepte un salaire de famine s’il faut cela pour sauver l’UR
1409
e un salaire de famine s’il faut cela pour sauver
l’
URSS.) Mais l’eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel,
1410
e famine s’il faut cela pour sauver l’URSS.) Mais
l’
eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel, et par là même
1411
immédiatement présent dans notre cœur56 alors que
l’
eschaton marxiste, temporel, s’enfuit dans un futur indéfini, — cent a
1412
e ans ? — et ne peut exister hic et nunc. Comment
l’
opposition radicale de ces deux fins, la temporelle et l’éternelle, va
1413
. Comment l’opposition radicale de ces deux fins,
la
temporelle et l’éternelle, va-t-elle maintenant se manifester dans no
1414
ition radicale de ces deux fins, la temporelle et
l’
éternelle, va-t-elle maintenant se manifester dans notre siècle ? Le p
1415
elle maintenant se manifester dans notre siècle ?
Le
phénomène de la « conversion » le fait bien voir. Un homme qui se con
1416
se manifester dans notre siècle ? Le phénomène de
la
« conversion » le fait bien voir. Un homme qui se convertit au christ
1417
notre siècle ? Le phénomène de la « conversion »
le
fait bien voir. Un homme qui se convertit au christianisme, c’est un
1418
tianisme, c’est un homme qui reçoit et qui saisit
la
Révélation en Personne. Et du coup le Royaume est au-dedans de lui. C
1419
qui saisit la Révélation en Personne. Et du coup
le
Royaume est au-dedans de lui. Cet homme n’est plus le maître de sa vi
1420
oyaume est au-dedans de lui. Cet homme n’est plus
le
maître de sa vie. Il est l’agent d’une vocation venue d’ailleurs, mai
1421
Cet homme n’est plus le maître de sa vie. Il est
l’
agent d’une vocation venue d’ailleurs, mais pour lui seul et ici-bas,
1422
s, et qui anime désormais ses gestes et sa pensée
la
plus intime. Dès maintenant sa personne est recréée. Dès maintenant,
1423
st recréée. Dès maintenant, elle entre en conflit
avec
le monde et ses formes mauvaises. Dès maintenant, elle porte témoigna
1424
créée. Dès maintenant, elle entre en conflit avec
le
monde et ses formes mauvaises. Dès maintenant, elle porte témoignage
1425
faveur du fait accompli d’une révolution humaine.
Le
chrétien converti commence donc par la fin que visait l’espérance com
1426
n humaine. Le chrétien converti commence donc par
la
fin que visait l’espérance communiste. Il possède déjà l’essentiel, q
1427
tien converti commence donc par la fin que visait
l’
espérance communiste. Il possède déjà l’essentiel, que Marx voyait au
1428
ue visait l’espérance communiste. Il possède déjà
l’
essentiel, que Marx voyait au terme de l’histoire : la personne. Et al
1429
ède déjà l’essentiel, que Marx voyait au terme de
l’
histoire : la personne. Et alors, il attaque le monde ! Mais un homme
1430
sentiel, que Marx voyait au terme de l’histoire :
la
personne. Et alors, il attaque le monde ! Mais un homme qui se conver
1431
de l’histoire : la personne. Et alors, il attaque
le
monde ! Mais un homme qui se convertit au communisme ne se rattache p
1432
pas à une Présence actuelle. Il fait un pari dont
l’
objet n’est pas accessible aujourd’hui. Il mise son action immédiate s
1433
ion immédiate sur un fait qui n’est pas accompli,
l’
histoire n’ayant jamais connu de réalisation de communisme. Ainsi, des
1434
réalisation de communisme. Ainsi, des deux, c’est
le
marxiste qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réalist
1435
nisme. Ainsi, des deux, c’est le marxiste qui est
l’
utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien :
1436
, c’est le marxiste qui est l’utopiste ; et c’est
le
chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable
1437
qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est
le
réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…) Le marxiste dit :
1438
e chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien :
le
chrétien véritable…) Le marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi
1439
aliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…)
Le
marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi dans l’invisible, mais s
1440
marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi dans
l’
invisible, mais sur des faits concrets qu’il faut changer. Chaque réfo
1441
tion réalisée, me montre dès maintenant un peu de
la
réalité de mes espérances. » Mais l’espérance finale du communisme, c
1442
nt un peu de la réalité de mes espérances. » Mais
l’
espérance finale du communisme, c’est la libération de l’homme. Et moi
1443
s. » Mais l’espérance finale du communisme, c’est
la
libération de l’homme. Et moi je lui montre un homme libéré, tandis q
1444
ance finale du communisme, c’est la libération de
l’
homme. Et moi je lui montre un homme libéré, tandis qu’il ne peut me m
1445
autre différence, non moins radicale et urgente.
Le
chrétien converti a déjà l’essentiel : par là même, il se voit contra
1446
radicale et urgente. Le chrétien converti a déjà
l’
essentiel : par là même, il se voit contraint à chaque instant de tran
1447
sait qu’il est membre d’un corps qui porte toutes
les
marques du péché. Il est alors en face du monde, et au nom même de sa
1448
en face du monde, et au nom même de sa foi, dans
la
posture d’un révolutionnaire permanent. Non seulement il se voit cont
1449
en aide à son prochain, mais encore rien ne peut
le
satisfaire de ce qu’il obtient, par cet effort, s’il compare ce mieux
1450
it qu’il a reçu en Christ. Il possède en lui-même
la
mesure d’une perpétuelle transformation, nécessaire dans tous les dom
1451
perpétuelle transformation, nécessaire dans tous
les
domaines où son activité peut se développer57. Mais le marxiste, quel
1452
maines où son activité peut se développer57. Mais
le
marxiste, quelles que soient la souffrance et la colère qu’il éprouve
1453
évelopper57. Mais le marxiste, quelles que soient
la
souffrance et la colère qu’il éprouve devant les injustices présentes
1454
le marxiste, quelles que soient la souffrance et
la
colère qu’il éprouve devant les injustices présentes, du fait qu’il c
1455
t la souffrance et la colère qu’il éprouve devant
les
injustices présentes, du fait qu’il croit que l’intérêt de l’homme es
1456
les injustices présentes, du fait qu’il croit que
l’
intérêt de l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoi
1457
s présentes, du fait qu’il croit que l’intérêt de
l’
homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoit, être socia
1458
que l’intérêt de l’homme est seul en jeu — et de
l’
homme tel qu’il le conçoit, être social — se verra fatalement neutrali
1459
l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il
le
conçoit, être social — se verra fatalement neutralisé dans son effort
1460
e verra fatalement neutralisé dans son effort par
les
gains peu à peu obtenus. Une balance s’établit entre les intérêts soc
1461
ns peu à peu obtenus. Une balance s’établit entre
les
intérêts sociaux présents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’
1462
s’établit entre les intérêts sociaux présents et
le
désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’à l’accomplissement final. Car c
1463
ents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’à
l’
accomplissement final. Car cet accomplissement, ou plénitude, n’est ja
1464
s qu’un futur théorique, — si passionnée que soit
l’
espérance du marxiste — et non pas une présence exigeante et totalemen
1465
nce exigeante et totalement animatrice. C’est ici
la
raison profonde des déviations dites « réformistes » ou « étatistes »
1466
iations dites « réformistes » ou « étatistes » de
la
révolution matérialiste. Pour qu’une telle pesanteur ne gagne pas san
1467
u’une telle pesanteur ne gagne pas sans cesse sur
les
élans révolutionnaires spasmodiques qui agitent l’humanité (comme en
1468
s élans révolutionnaires spasmodiques qui agitent
l’
humanité (comme en 1789 et en 1917), il faudrait que l’homme soit déli
1469
anité (comme en 1789 et en 1917), il faudrait que
l’
homme soit délivré de son péché, « changé », sorti du plan, précisémen
1470
péché, « changé », sorti du plan, précisément, où
le
marxisme le maintient. Moyens d’action du chrétien et du marxiste
1471
ngé », sorti du plan, précisément, où le marxisme
le
maintient. Moyens d’action du chrétien et du marxiste Préparer
1472
s d’action du chrétien et du marxiste Préparer
le
royaume de l’homme, ou témoigner par des actes visibles en faveur du
1473
chrétien et du marxiste Préparer le royaume de
l’
homme, ou témoigner par des actes visibles en faveur du retour d’un Ro
1474
tiquement une volonté de changer tout ce qui peut
l’
être ; mais aussi, cela suppose certains moyens d’action qui ne saurai
1475
se certains moyens d’action qui ne sauraient être
les
mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fi
1476
ens d’action qui ne sauraient être les mêmes dans
les
deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos
1477
ne sauraient être les mêmes dans les deux cas, si
la
fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de l’action du c
1478
mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie
les
moyens58. La fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royau
1479
deux cas, si la fin seule justifie les moyens58.
La
fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royaume de justice
1480
si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou
le
télos de l’action du chrétien, c’est le royaume de justice et d’amour
1481
ule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de
l’
action du chrétien, c’est le royaume de justice et d’amour. Tout acte
1482
a fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est
le
royaume de justice et d’amour. Tout acte qui contredirait, dans le pr
1483
tice et d’amour. Tout acte qui contredirait, dans
le
présent, la loi d’amour et de justice, même s’il était commis au nom
1484
our. Tout acte qui contredirait, dans le présent,
la
loi d’amour et de justice, même s’il était commis au nom des intérêts
1485
ce, même s’il était commis au nom des intérêts de
l’
Église chrétienne, détruirait en fait cette Église en tant qu’elle vit
1486
es membres, et non pas dans un ciel abstrait. Car
le
gage de l’action chrétienne n’est pas futur, mais éternel et donc pré
1487
et non pas dans un ciel abstrait. Car le gage de
l’
action chrétienne n’est pas futur, mais éternel et donc présent. Si, p
1488
ur, mais éternel et donc présent. Si, pour sauver
le
futur de l’Église, je désobéis dans le présent, je perds tout du même
1489
rnel et donc présent. Si, pour sauver le futur de
l’
Église, je désobéis dans le présent, je perds tout du même coup, prése
1490
our sauver le futur de l’Église, je désobéis dans
le
présent, je perds tout du même coup, présent, futur, éternité. Je cru
1491
même coup, présent, futur, éternité. Je crucifie
le
Christ et je m’oppose à son retour. Il n’est donc pas d’« opportunism
1492
s d’« opportunisme » chrétien qui tienne, et tous
les
moyens du chrétien doivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est
1493
oivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est
le
cas du marxiste. N’ayant pas derrière lui de modèle accompli, ni en l
1494
Présence souveraine, il se sent libre d’appliquer
les
moyens qu’il juge adéquats aux intérêts momentanés de son Parti et de
1495
ime son étatisme totalitaire en arguant que c’est
le
seul moyen d’accéder à un stade économique plus favorable au développ
1496
ien conséquents, et que leur indignation traduise
la
vraie volonté du marxisme, plutôt qu’un reste d’humanisme libéral. Le
1497
marxisme, plutôt qu’un reste d’humanisme libéral.
Le
fait est que la grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il
1498
qu’un reste d’humanisme libéral. Le fait est que
la
grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il résulte à l’évi
1499
é des communistes suit Staline. D’où il résulte à
l’
évidence que pour la grosse majorité des communistes, le mensonge, la
1500
it Staline. D’où il résulte à l’évidence que pour
la
grosse majorité des communistes, le mensonge, la haine, l’oppression,
1501
ence que pour la grosse majorité des communistes,
le
mensonge, la haine, l’oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raiso
1502
la grosse majorité des communistes, le mensonge,
la
haine, l’oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raison d’État », e
1503
majorité des communistes, le mensonge, la haine,
l’
oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à
1504
communistes, le mensonge, la haine, l’oppression,
l’
hypocrisie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à la guerre s’il
1505
isie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à
la
guerre s’il le faut, sont des moyens parfaitement acceptables en tant
1506
mmée « raison d’État », et jusqu’à la guerre s’il
le
faut, sont des moyens parfaitement acceptables en tant qu’ils servent
1507
s parfaitement acceptables en tant qu’ils servent
le
progrès prolétarien, et préparent un avenir conforme à la doctrine59.
1508
ès prolétarien, et préparent un avenir conforme à
la
doctrine59. Que leur importe une « faute » personnelle et actuelle, p
1509
il n’y a pas de salut présent ni éternel, puisque
le
salut n’est pas pour eux de toute façon, mais pour les descendants de
1510
alut n’est pas pour eux de toute façon, mais pour
les
descendants de leurs descendants ? C’est ainsi qu’on a vu Zinoviev, p
1511
noviev, par « fidélité » au Parti, c’est-à-dire à
l’
avenir du Parti, proférer des aveux mensongers qu’il croyait tactiquem
1512
au parti communiste ou de militer en sa faveur :
l’
alternative où il se place est sans issue. Car ou bien il accepte les
1513
l se place est sans issue. Car ou bien il accepte
les
disciplines d’action que lui impose son parti, et qui comportent la h
1514
ction que lui impose son parti, et qui comportent
la
haine et le mensonge : mais alors pour sauver le monde, il perd sa ra
1515
i impose son parti, et qui comportent la haine et
le
mensonge : mais alors pour sauver le monde, il perd sa raison d’être
1516
la haine et le mensonge : mais alors pour sauver
le
monde, il perd sa raison d’être personnelle, et renie justement cette
1517
stement cette foi qu’il croyait mieux servir dans
le
communisme ; ou bien il tâche de n’agir qu’en chrétien ; mais alors i
1518
, un « trotzkyste » ou un « saboteur », et à tout
le
moins un militant suspect. Tout cela repose sur un fait unique, que n
1519
it unique, que nous pouvons formuler simplement :
la
fin dernière du chrétien est présente en chacun de ses actes, ou bien
1520
acun de ses actes, ou bien n’est pas ; tandis que
la
fin dernière du marxiste est un avenir absolument hétérogène aux acti
1521
aujourd’hui, dans un ordre non socialiste. Par où
l’
on voit qu’en dépit du langage, la transcendance de la foi chrétienne
1522
ialiste. Par où l’on voit qu’en dépit du langage,
la
transcendance de la foi chrétienne se manifeste ici et maintenant et
1523
voit qu’en dépit du langage, la transcendance de
la
foi chrétienne se manifeste ici et maintenant et engage le tout de l’
1524
rétienne se manifeste ici et maintenant et engage
le
tout de l’homme ; tandis que l’immanence de la croyance marxiste renv
1525
manifeste ici et maintenant et engage le tout de
l’
homme ; tandis que l’immanence de la croyance marxiste renvoie sans ce
1526
ntenant et engage le tout de l’homme ; tandis que
l’
immanence de la croyance marxiste renvoie sans cesse le fait humain to
1527
ge le tout de l’homme ; tandis que l’immanence de
la
croyance marxiste renvoie sans cesse le fait humain total dans un ave
1528
anence de la croyance marxiste renvoie sans cesse
le
fait humain total dans un avenir indéfini, et n’engage que certaines
1529
défini, et n’engage que certaines dispositions de
l’
être, celles-là précisément que l’avenir socialiste, la société sans c
1530
dispositions de l’être, celles-là précisément que
l’
avenir socialiste, la société sans classes, doit supprimer ! Le marxis
1531
e, celles-là précisément que l’avenir socialiste,
la
société sans classes, doit supprimer ! Le marxiste croit que le bien
1532
aliste, la société sans classes, doit supprimer !
Le
marxiste croit que le bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien
1533
s classes, doit supprimer ! Le marxiste croit que
le
bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien naît du parfait. D
1534
mer ! Le marxiste croit que le bien sort du mal ;
le
chrétien sait que le bien naît du parfait. D’une conséquence polit
1535
it que le bien sort du mal ; le chrétien sait que
le
bien naît du parfait. D’une conséquence politique de la foi Je
1536
aît du parfait. D’une conséquence politique de
la
foi Je m’adresserai maintenant aux chrétiens déclarés. J’en vois b
1537
ens déclarés. J’en vois beaucoup qui estiment que
la
transformation de l’homme importe seule, puisqu’elle est, en effet, l
1538
is beaucoup qui estiment que la transformation de
l’
homme importe seule, puisqu’elle est, en effet, l’essentiel, et le but
1539
l’homme importe seule, puisqu’elle est, en effet,
l’
essentiel, et le but de tout autre changement. J’en vois beaucoup qui
1540
seule, puisqu’elle est, en effet, l’essentiel, et
le
but de tout autre changement. J’en vois beaucoup qui jugent que l’act
1541
tre changement. J’en vois beaucoup qui jugent que
l’
action personnelle de charité et de sacrifice, pour le mieux-être du p
1542
tion personnelle de charité et de sacrifice, pour
le
mieux-être du prochain, suffit à compléter, si je puis dire, l’action
1543
du prochain, suffit à compléter, si je puis dire,
l’
action proprement religieuse. Et j’entends bien que les sacrifices qu’
1544
tion proprement religieuse. Et j’entends bien que
les
sacrifices qu’ils font ne sont pas seulement « spirituels », entraîne
1545
ntraînent des risques financiers, et même parfois
l’
abandon de tous biens et d’intérêts humains très chers. Mais je demand
1546
itiques qu’implique en fait leur attitude ? Et je
pense
en particulier aux membres du Mouvement des Groupes, qui représentent
1547
bres du Mouvement des Groupes, qui représentent à
l’
heure actuelle le christianisme le plus « activiste ». Pourquoi refuse
1548
des Groupes, qui représentent à l’heure actuelle
le
christianisme le plus « activiste ». Pourquoi refusent-ils de s’occup
1549
représentent à l’heure actuelle le christianisme
le
plus « activiste ». Pourquoi refusent-ils de s’occuper de politique ?
1550
oup de problèmes se poseront autrement… » Je veux
les
croire. Ils courent au plus pressé. Mais le marxiste aussi me tenait
1551
veux les croire. Ils courent au plus pressé. Mais
le
marxiste aussi me tenait ce raisonnement, pour justifier une action t
1552
ement, pour justifier une action tout inverse. Je
pense
qu’il faut aller plus loin60. La déviation matérialiste du marxisme n
1553
t inverse. Je pense qu’il faut aller plus loin60.
La
déviation matérialiste du marxisme ne doit pas seulement nous inciter
1554
s : elle doit nous avertir de corriger sans trêve
la
déviation spiritualiste qui menace notre vie chrétienne, et qui est l
1555
liste qui menace notre vie chrétienne, et qui est
la
cause certaine des succès du marxisme. Tant que les chrétiens ne comp
1556
a cause certaine des succès du marxisme. Tant que
les
chrétiens ne comprendront pas que leur foi doit se manifester sur tou
1557
ront pas que leur foi doit se manifester sur tous
les
plans de l’activité humaine, y compris le plan politique, ils ne répo
1558
leur foi doit se manifester sur tous les plans de
l’
activité humaine, y compris le plan politique, ils ne répondront pas a
1559
r tous les plans de l’activité humaine, y compris
le
plan politique, ils ne répondront pas au défi du marxisme, qui s’en t
1560
tique chrétienne, déduite une fois pour toutes de
la
théologie. Mais je crois que le christianisme, aussitôt qu’il se mani
1561
is pour toutes de la théologie. Mais je crois que
le
christianisme, aussitôt qu’il se manifeste en vérité, entre en confli
1562
ôt qu’il se manifeste en vérité, entre en conflit
avec
certaines structures politiques, et contribue, par son action la plus
1563
ructures politiques, et contribue, par son action
la
plus intime, à la création d’autres formes. Il importe de savoir lesq
1564
s, et contribue, par son action la plus intime, à
la
création d’autres formes. Il importe de savoir lesquelles, et de les
1565
es formes. Il importe de savoir lesquelles, et de
les
préparer consciemment. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes
1566
les préparer consciemment. Sinon nous laisserons
le
champ libre à toutes les entreprises désespérées qui passionnent les
1567
nt. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes
les
entreprises désespérées qui passionnent les masses incroyantes. Il se
1568
outes les entreprises désespérées qui passionnent
les
masses incroyantes. Il se pose là, me semble-t-il, une question de so
1569
une question de solidarité, qui est une forme de
la
charité. Parfois aussi le devoir chrétien peut apparaître plus histor
1570
é, qui est une forme de la charité. Parfois aussi
le
devoir chrétien peut apparaître plus historiquement défini et localis
1571
monde sait, ou pressent au moins, ce que signifie
la
menace totalitaire, qu’elle soit fasciste ou soviétique : c’est la «
1572
aire, qu’elle soit fasciste ou soviétique : c’est
la
« mise au pas » de nos vies et de tous les aspects de nos vies, tant
1573
: c’est la « mise au pas » de nos vies et de tous
les
aspects de nos vies, tant spirituels que matériels, au service de l’É
1574
ies, tant spirituels que matériels, au service de
l’
État déifié. Cette situation n’est pas sans rappeler celle de l’Empire
1575
Cette situation n’est pas sans rappeler celle de
l’
Empire romain au premier âge du christianisme, telle que nous l’évoqui
1576
n au premier âge du christianisme, telle que nous
l’
évoquions plus haut. Toutefois, l’un des facteurs au moins s’est modif
1577
des facteurs au moins s’est modifié notablement :
les
chrétiens ne forment plus des groupuscules obscurs, ils ont constitué
1578
chrétiennes. Tout cela se trouve mis au défi par
l’
exigence totalitaire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne. L’É
1579
uve mis au défi par l’exigence totalitaire, comme
le
prouve le spectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore
1580
défi par l’exigence totalitaire, comme le prouve
le
spectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore, sinon dé
1581
ence totalitaire, comme le prouve le spectacle de
l’
Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore, sinon déjà dans des form
1582
ire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne.
L’
État nouveau veut qu’on l’adore, sinon déjà dans des formes religieuse
1583
ectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on
l’
adore, sinon déjà dans des formes religieuses, du moins dans des forme
1584
ents du Décalogue, et au devoir d’amour chrétien.
Le
conflit est inévitable. Suffira-t-il dès lors de se laisser persécute
1585
persécuter ? N’avons-nous rien à faire qu’à subir
le
martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de l’État une attitude d’objecteu
1586
à subir le martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de
l’
État une attitude d’objecteurs de conscience ? N’avons-nous rien que n
1587
sées sont pour une part, peut-être capitale, dans
le
malheur universel qui vient ? Or toute attente passive, si courageuse
1588
passive, si courageuse qu’elle soit, devient dans
le
cas présent une complicité. L’État totalitaire ne saurait s’instaurer
1589
soit, devient dans le cas présent une complicité.
L’
État totalitaire ne saurait s’instaurer contre l’opinion générale. Cel
1590
L’État totalitaire ne saurait s’instaurer contre
l’
opinion générale. Celle-ci se laisse séduire par les seuls constructeu
1591
’opinion générale. Celle-ci se laisse séduire par
les
seuls constructeurs. Mais alors, quel point de vue constructif le chr
1592
cteurs. Mais alors, quel point de vue constructif
le
chrétien peut-il soutenir, s’il ne veut pas rester l’objecteur que j’
1593
hrétien peut-il soutenir, s’il ne veut pas rester
l’
objecteur que j’ai dit ? Un protestant, et je précise : un calviniste,
1594
e, doit être ici en mesure de répondre. De toutes
les
églises chrétiennes, l’église calviniste est en effet la plus antitot
1595
e de répondre. De toutes les églises chrétiennes,
l’
église calviniste est en effet la plus antitotalitaire par essence. Je
1596
ses chrétiennes, l’église calviniste est en effet
la
plus antitotalitaire par essence. Je ne rappelle qu’en passant les dr
1597
litaire par essence. Je ne rappelle qu’en passant
les
dragonnades et les guerres de religion qui les précèdent : on sait as
1598
. Je ne rappelle qu’en passant les dragonnades et
les
guerres de religion qui les précèdent : on sait assez que ce fut la l
1599
nt les dragonnades et les guerres de religion qui
les
précèdent : on sait assez que ce fut la lutte d’une royauté déjà « to
1600
gion qui les précèdent : on sait assez que ce fut
la
lutte d’une royauté déjà « totalitaire » contre des groupes, loyalist
1601
abusif de déduire d’une situation déterminée par
la
persécution brutale, que les églises calvinistes défendaient alors, p
1602
uation déterminée par la persécution brutale, que
les
églises calvinistes défendaient alors, par principe, un régime fédéra
1603
François Ier, c’est-à-dire jusqu’à une époque où
la
passion totalitaire des gouvernants n’avait pas encore pu s’affirmer
1604
nants n’avait pas encore pu s’affirmer comme elle
le
fit sous Louis XIV, nous constatons que la première discipline que se
1605
statons que la première discipline que se donnent
les
églises calvinistes revêt une forme consciemment fédérative61. Or il
1606
’agit plus ici de contingences historiques. C’est
le
fond même de la doctrine calviniste qui s’exprime par cette structure
1607
e contingences historiques. C’est le fond même de
la
doctrine calviniste qui s’exprime par cette structure. L’importance a
1608
ine calviniste qui s’exprime par cette structure.
L’
importance attachée par Calvin à la notion de vocation personnelle suf
1609
tte structure. L’importance attachée par Calvin à
la
notion de vocation personnelle suffit à expliquer ce processus. À une
1610
nd nécessairement une organisation fédéraliste de
l’
Église, et même de l’État. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tou
1611
organisation fédéraliste de l’Église, et même de
l’
État. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tous les manuels, une so
1612
e, et même de l’État. Calvin n’a pas fondé, comme
le
répètent tous les manuels, une société théocratique, mais bien une so
1613
tat. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tous
les
manuels, une société théocratique, mais bien une société de type fédé
1614
is bien une société de type fédératif, respectant
les
diversités, voulues par Dieu, dans l’unité spirituelle. Et les suites
1615
respectant les diversités, voulues par Dieu, dans
l’
unité spirituelle. Et les suites de cette création sont encore visible
1616
s, voulues par Dieu, dans l’unité spirituelle. Et
les
suites de cette création sont encore visibles aujourd’hui : nulle par
1617
ion sont encore visibles aujourd’hui : nulle part
l’
esprit totalitaire n’a trouvé moins de complicité et plus de résistanc
1618
omplicité et plus de résistance déclarée que dans
les
pays calvinistes, où la notion de l’autonomie des groupes reste vivac
1619
stance déclarée que dans les pays calvinistes, où
la
notion de l’autonomie des groupes reste vivace (Angleterre, Écosse, S
1620
ée que dans les pays calvinistes, où la notion de
l’
autonomie des groupes reste vivace (Angleterre, Écosse, Suisse, Hollan
1621
leterre, Écosse, Suisse, Hollande). En Allemagne,
la
lutte des églises contre l’emprise morale de l’État fut menée, on le
1622
lande). En Allemagne, la lutte des églises contre
l’
emprise morale de l’État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est
1623
, la lutte des églises contre l’emprise morale de
l’
État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est-à-dire par un calvi
1624
s contre l’emprise morale de l’État fut menée, on
le
sait, par Karl Barth : c’est-à-dire par un calviniste… Je ne voudrais
1625
par un calviniste… Je ne voudrais pas restreindre
la
portée de ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à l’esprit u
1626
voudrais pas restreindre la portée de ce fait en
l’
opposant, comme il serait facile, à l’esprit unitaire et impérial qui
1627
ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à
l’
esprit unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome. Le grand souci
1628
facile, à l’esprit unitaire et impérial qui anime
l’
Église de Rome. Le grand souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner to
1629
unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome.
Le
grand souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner toutes les églises,
1630
souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner toutes
les
églises, est une promesse à laquelle nous devons croire de toute la f
1631
e promesse à laquelle nous devons croire de toute
la
force de notre foi. Aussi ne veux-je tirer de mon exemple qu’une conc
1632
diversité, toute autonomie spirituelle au sein de
la
communauté. Il y va de notre tout, personnel, mais aussi de la valeur
1633
. Il y va de notre tout, personnel, mais aussi de
la
valeur de la communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût
1634
notre tout, personnel, mais aussi de la valeur de
la
communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût-ce que pour
1635
ais aussi de la valeur de la communauté pour tous
les
hommes qui la composent. Ne fût-ce que pour cette seule raison — et j
1636
valeur de la communauté pour tous les hommes qui
la
composent. Ne fût-ce que pour cette seule raison — et j’en ai mention
1637
n chrétien ne peut pas approuver, comme chrétien,
la
forme politique du communisme63. Il lui faut donc en préparer une aut
1638
autre, et prendre enfin parti, positivement, dans
l’
immense lutte qui va mettre aux prises l’étatisme totalitaire et le fé
1639
nt, dans l’immense lutte qui va mettre aux prises
l’
étatisme totalitaire et le fédéralisme libre. Responsabilité des ch
1640
ui va mettre aux prises l’étatisme totalitaire et
le
fédéralisme libre. Responsabilité des chrétiens vis-à-vis des marx
1641
s chrétiens vis-à-vis des marxistes On connaît
la
« croisade antimarxiste » qu’organise dans le monde entier la panique
1642
aît la « croisade antimarxiste » qu’organise dans
le
monde entier la panique des capitalismes. Cette croisade a pour vraie
1643
e antimarxiste » qu’organise dans le monde entier
la
panique des capitalismes. Cette croisade a pour vraie devise : divide
1644
: dividendes d’abord ! Mais elle entend utiliser
le
spirituel comme masque. Elle entraîne beaucoup de braves gens au serv
1645
e une valeur de pères de famille. C’est en vérité
la
croisade du matérialisme hypocrite contre le matérialisme généreux. C
1646
rité la croisade du matérialisme hypocrite contre
le
matérialisme généreux. C’est aussi la croisade des fascismes contre l
1647
rite contre le matérialisme généreux. C’est aussi
la
croisade des fascismes contre leur frère, le stalinisme : une guerre
1648
ussi la croisade des fascismes contre leur frère,
le
stalinisme : une guerre de religions qui ne sont pas les nôtres. Je p
1649
rends ici parti contre une telle entreprise, pour
les
mêmes raisons, mais aggravées, qui me faisaient prendre parti contre
1650
aggravées, qui me faisaient prendre parti contre
le
régime communiste. On nous donne à choisir entre deux sortes de matér
1651
à choisir entre deux sortes de matérialisme. Mais
le
communisme, au moins, voulait changer le monde… Contre les arguments
1652
me. Mais le communisme, au moins, voulait changer
le
monde… Contre les arguments démagogiques de nos croisés, je répète, a
1653
nisme, au moins, voulait changer le monde… Contre
les
arguments démagogiques de nos croisés, je répète, après Berdiaev, apr
1654
croisés, je répète, après Berdiaev, après Gide :
la
« vérité » du communisme résulte de la trahison du christianisme par
1655
rès Gide : la « vérité » du communisme résulte de
la
trahison du christianisme par la chrétienté. Toutes les aspirations v
1656
nisme résulte de la trahison du christianisme par
la
chrétienté. Toutes les aspirations valables et généreuses du marxisme
1657
ahison du christianisme par la chrétienté. Toutes
les
aspirations valables et généreuses du marxisme sont autant d’essais d
1658
s chrétiennes égarées, déformées, ou « mises sous
le
boisseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de l’aspiration tota
1659
arées, déformées, ou « mises sous le boisseau par
les
chrétiens ». Cela est vrai même de l’aspiration totalitaire, qui est
1660
isseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de
l’
aspiration totalitaire, qui est monstrueuse dans ses formes actuelles,
1661
actuelles, mais qui traduit encore, obscurément,
l’
aspiration d’un Occident jadis chrétien, vers une économie sauvée : le
1662
cident jadis chrétien, vers une économie sauvée :
le
Royaume où Dieu est « tout en tous ». Si les églises chrétiennes ont
1663
vée : le Royaume où Dieu est « tout en tous ». Si
les
églises chrétiennes ont à souffrir demain par le fait d’un État tyran
1664
les églises chrétiennes ont à souffrir demain par
le
fait d’un État tyrannique, il faut qu’elles sachent qu’elles en sont
1665
elles sachent qu’elles en sont responsables, dans
la
mesure où elles cédèrent, jadis, aux tentations théocratiques ou sécu
1666
s, aux tentations théocratiques ou séculières. Si
la
culture et si nos libertés civiques sont brimées, par le fait d’une d
1667
ure et si nos libertés civiques sont brimées, par
le
fait d’une doctrine et d’un État « matérialistes », il faut savoir qu
1668
atérialistes », il faut savoir que nous en sommes
les
responsables, dans la mesure où nous cultivons un esprit détaché du r
1669
savoir que nous en sommes les responsables, dans
la
mesure où nous cultivons un esprit détaché du réel, une liberté abste
1670
l, une liberté abstentionniste et inféconde. Tout
le
mal vient de notre esprit. C’est à lui de faire pénitence, car c’étai
1671
primauté salutaire. Mais il faut aussi repartir.
La
tragédie de Marx et du marxisme, c’est de n’avoir pas su, ou pas pu o
1672
su, ou pas pu opposer au mensonge spiritualiste,
la
vérité du spirituel. Nous n’avons pas à nous dresser contre la « véri
1673
spirituel. Nous n’avons pas à nous dresser contre
la
« vérité » déviée de Marx, contre une vérité orpheline, coupée des li
1674
ne vérité orpheline, coupée des liens vivants qui
l’
attachaient en Dieu à ses fins et à ses origines. Mais nous devons pro
1675
ins et à ses origines. Mais nous devons proclamer
la
vérité parfaite dont nous avons, nous les premiers, dévié. « Malheur
1676
é. « Malheur à moi si je n’évangélise ! », disait
l’
Apôtre. Malheur à moi si je refuse de réaliser l’Évangile dans tous le
1677
l’Apôtre. Malheur à moi si je refuse de réaliser
l’
Évangile dans tous les domaines de la vie. La seule lutte efficace con
1678
moi si je refuse de réaliser l’Évangile dans tous
les
domaines de la vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c
1679
de réaliser l’Évangile dans tous les domaines de
la
vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte q
1680
iser l’Évangile dans tous les domaines de la vie.
La
seule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte qu’il nou
1681
omaines de la vie. La seule lutte efficace contre
le
matérialisme, c’est la lutte qu’il nous faut mener contre la tentatio
1682
eule lutte efficace contre le matérialisme, c’est
la
lutte qu’il nous faut mener contre la tentation spiritualiste. 41.
1683
isme, c’est la lutte qu’il nous faut mener contre
la
tentation spiritualiste. 41. « Le communisme n’est pas pour nous u
1684
mener contre la tentation spiritualiste. 41. «
Le
communisme n’est pas pour nous un état qui doive être créé, un idéal…
1685
ive être créé, un idéal… Nous appelons communisme
le
mouvement effectif qui supprimera la réalité présente. Les conditions
1686
s communisme le mouvement effectif qui supprimera
la
réalité présente. Les conditions de ce mouvement sont données par cet
1687
ment effectif qui supprimera la réalité présente.
Les
conditions de ce mouvement sont données par cette situation » (Marx,
1688
tsche Ideologie). 42. « Nous sommes tous membres
les
uns des autres » (Rom., 12, 5). D’autre part, Marx n’a pas cessé de c
1689
5). D’autre part, Marx n’a pas cessé de critiquer
l’
« individu isolé et abstrait » (Thèses sur Feuerbach). 43. Marx, Crit
1690
» (Thèses sur Feuerbach). 43. Marx, Critique de
la
philosophie hégélienne du droit. 44. Au sens le plus large du terme,
1691
la philosophie hégélienne du droit. 44. Au sens
le
plus large du terme, qui peut désigner aussi bien la « société sans c
1692
plus large du terme, qui peut désigner aussi bien
la
« société sans classes » de Marx, que le « Royaume de Dieu » chrétien
1693
ssi bien la « société sans classes » de Marx, que
le
« Royaume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique, l’homme doit p
1694
que le « Royaume de Dieu » chrétien. 45. « Dans
la
pratique, l’homme doit prouver la vérité de sa pensée, c’est-à-dire s
1695
aume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique,
l’
homme doit prouver la vérité de sa pensée, c’est-à-dire sa réalité et
1696
en. 45. « Dans la pratique, l’homme doit prouver
la
vérité de sa pensée, c’est-à-dire sa réalité et sa puissance concrète
1697
alité et sa puissance concrète. Réalité ou non de
la
pensée humaine isolée du domaine pratique, c’est querelle de pure sco
1698
ue » (Marx, 2e thèse sur Feuerbach). De même pour
le
chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et
1699
e thèse sur Feuerbach). De même pour le chrétien,
la
foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n
1700
Feuerbach). De même pour le chrétien, la foi sans
les
œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n’a jamais dit
1701
our le chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas
la
foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n’a jamais dit autre chose, contra
1702
ations de polémistes ignorants, ou qui jouent sur
les
deux sens du mot œuvres (œuvres pies et action concrète). 46. Je par
1703
action concrète). 46. Je parle, bien entendu, de
la
religion telle que Marx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dan
1704
arle, bien entendu, de la religion telle que Marx
la
voyait, telle qu’elle lui apparaissait dans le corps social. Je n’oub
1705
rx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dans
le
corps social. Je n’oublie pas que la même époque a vu le grand réveil
1706
aissait dans le corps social. Je n’oublie pas que
la
même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la criti
1707
s social. Je n’oublie pas que la même époque a vu
le
grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la critique ne peut évidemme
1708
même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. «
L’
armée de la critique ne peut évidemment remplacer la critique des arme
1709
a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de
la
critique ne peut évidemment remplacer la critique des armes » (Marx,
1710
armée de la critique ne peut évidemment remplacer
la
critique des armes » (Marx, Critique de le philosophie hégélienne). I
1711
placer la critique des armes » (Marx, Critique de
le
philosophie hégélienne). Il faut en user, certes, mais elle ne suffit
1712
ne suffit pas. « Être radical consiste à attaquer
le
mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour l’homme même » (Id., i
1713
s. « Être radical consiste à attaquer le mal dans
la
racine. Mais la racine, c’est pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est
1714
l consiste à attaquer le mal dans la racine. Mais
la
racine, c’est pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire l’homme
1715
le mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour
l’
homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire l’homme concret, produit socia
1716
st pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire
l’
homme concret, produit social selon Marx, et non pas créature spiritue
1717
irituelle et charnelle. 48. En particulier, dans
les
Thèses sur Feuerbach. On peut y lire une phrase qui prouve que Marx n
1718
prouve que Marx ne prétendait nullement négliger
les
facteurs humains personnels, sans quoi le matérialisme ne serait pas
1719
gliger les facteurs humains personnels, sans quoi
le
matérialisme ne serait pas « dialectique ». « La coïncidence de la mo
1720
le matérialisme ne serait pas « dialectique ». «
La
coïncidence de la modification des circonstances et de la modificatio
1721
e serait pas « dialectique ». « La coïncidence de
la
modification des circonstances et de la modification de l’activité hu
1722
idence de la modification des circonstances et de
la
modification de l’activité humaine, ou transformation personnelle, ne
1723
cation des circonstances et de la modification de
l’
activité humaine, ou transformation personnelle, ne peut être rationne
1724
e activité révolutionnaire. » Phrase importante à
l’
extrême ! Mais combien oubliée par le communiste moyen de nos jours !
1725
importante à l’extrême ! Mais combien oubliée par
le
communiste moyen de nos jours ! 49. Selon Karl Barth, par exemple, l
1726
e nos jours ! 49. Selon Karl Barth, par exemple,
la
dogmatique n’est qu’une question perpétuelle, une autocritique si l’o
1727
qu’une question perpétuelle, une autocritique si
l’
on veut, que l’Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de
1728
n perpétuelle, une autocritique si l’on veut, que
l’
Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de corriger sans
1729
our fonction de corriger sans cesse, de rectifier
le
message annoncé par la prédication et par les sacrements. C’est un ac
1730
r sans cesse, de rectifier le message annoncé par
la
prédication et par les sacrements. C’est un acte d’obéissance, et c’e
1731
fier le message annoncé par la prédication et par
les
sacrements. C’est un acte d’obéissance, et c’est aussi un acte d’humi
1732
inadéquate en soi, et ne peut être qu’un renvoi à
la
Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’est ains
1733
i à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ.
La
« doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique que l’Église prend de
1734
doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique que
l’
Église prend de son message sous le rapport de sa fidélité à son fonde
1735
n contenu et à son but. Elle ne présente rien que
l’
on puisse comparer, fût-ce le plus superficiellement, à un programme t
1736
ne présente rien que l’on puisse comparer, fût-ce
le
plus superficiellement, à un programme théorique qu’il s’agirait main
1737
qu’il s’agirait maintenant d’appliquer. En bref,
la
doctrine chrétienne, si l’on veut établir un parallèle — sans doute d
1738
d’appliquer. En bref, la doctrine chrétienne, si
l’
on veut établir un parallèle — sans doute dangereux — ce serait la Per
1739
r un parallèle — sans doute dangereux — ce serait
la
Personne vivante de Jésus-Christ, et non pas la théologie, simple aut
1740
t la Personne vivante de Jésus-Christ, et non pas
la
théologie, simple autocritique de l’Église et du message que l’on prê
1741
, et non pas la théologie, simple autocritique de
l’
Église et du message que l’on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre
1742
simple autocritique de l’Église et du message que
l’
on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre à… » veut dire ici : « tend
1743
ue de l’Église et du message que l’on prêche dans
l’
Église. 50. « S’attendre à… » veut dire ici : « tendre vers… » 51. M
1744
nstantin par des moyens légaux, il est vrai, mais
avec
les mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de l’histoire en ce s
1745
tin par des moyens légaux, il est vrai, mais avec
les
mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de l’histoire en ce sens
1746
es mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de
l’
histoire en ce sens qu’on retrouve les mêmes mécanismes partout où l’e
1747
des lois de l’histoire en ce sens qu’on retrouve
les
mêmes mécanismes partout où l’esprit démissionne ! 52. « Je ne vois
1748
ns qu’on retrouve les mêmes mécanismes partout où
l’
esprit démissionne ! 52. « Je ne vois jamais le christianisme devenir
1749
ù l’esprit démissionne ! 52. « Je ne vois jamais
le
christianisme devenir révolutionnaire ! » S’exclamait naguère Jean Gu
1750
! » S’exclamait naguère Jean Guéhenno (Union pour
la
Vérité, 22 mars 1930). À quoi un socialiste allemand, le professeur H
1751
té, 22 mars 1930). À quoi un socialiste allemand,
le
professeur Hans Mühlestein, rétorquait : « Toutes les révolutions de
1752
professeur Hans Mühlestein, rétorquait : « Toutes
les
révolutions de l’histoire de l’Occident, sont sorties de la religion
1753
lestein, rétorquait : « Toutes les révolutions de
l’
histoire de l’Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute
1754
quait : « Toutes les révolutions de l’histoire de
l’
Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute autre cause es
1755
ions de l’histoire de l’Occident, sont sorties de
la
religion chrétienne. Toute autre cause est secondaire. » Et Henri de
1756
’il n’y a pas de socialisme en Asie, cela tient à
l’
absence du christianisme. » Je note ici, à l’appui des dires de de Man
1757
nt à l’absence du christianisme. » Je note ici, à
l’
appui des dires de de Man, que le mouvement syndicaliste au Japon a ét
1758
» Je note ici, à l’appui des dires de de Man, que
le
mouvement syndicaliste au Japon a été fondé par un chrétien, Kagawa.
1759
ndé par un chrétien, Kagawa. 53. Je ne dis pas «
les
conditions physiques et spirituelles en ce qu’elles ont de permanent
1760
les en ce qu’elles ont de permanent », car alors,
le
marxiste me ferait observer que des facteurs très essentiels de l’êtr
1761
rait observer que des facteurs très essentiels de
l’
être même peuvent varier selon les milieux et la nature des institutio
1762
ès essentiels de l’être même peuvent varier selon
les
milieux et la nature des institutions. (Ainsi le besoin prétendu « pr
1763
e l’être même peuvent varier selon les milieux et
la
nature des institutions. (Ainsi le besoin prétendu « primordial » de
1764
les milieux et la nature des institutions. (Ainsi
le
besoin prétendu « primordial » de propriété, peut très bien être anéa
1765
» de propriété, peut très bien être anéanti chez
l’
homme par un régime communiste.) Que reste-t-il dans l’être humain d’a
1766
me par un régime communiste.) Que reste-t-il dans
l’
être humain d’absolument irréductible à toute transformation sociale ?
1767
ent irréductible à toute transformation sociale ?
La
mort physique et le péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créat
1768
oute transformation sociale ? La mort physique et
le
péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de l’esprit. En
1769
iale ? La mort physique et le péché. Mais aussi :
la
qualité, la fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout l’essentie
1770
rt physique et le péché. Mais aussi : la qualité,
la
fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout l’essentiel ! — Je dis
1771
Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de
l’
esprit. En somme, tout l’essentiel ! — Je dis que toute doctrine qui n
1772
la fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout
l’
essentiel ! — Je dis que toute doctrine qui ne tient pas compte d’une
1773
e de ces conditions conduit nécessairement soit à
l’
idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme totalit
1774
’idéalisme, soit à son renversement matérialiste.
Le
stalinisme totalitaire résulte nécessairement d’une conception de l’h
1775
itaire résulte nécessairement d’une conception de
l’
homme purement social, qui néglige la fonction spirituelle (créatrice)
1776
onception de l’homme purement social, qui néglige
la
fonction spirituelle (créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu
1777
i néglige la fonction spirituelle (créatrice), et
la
pesanteur du péché. Tandis qu’à l’inverse, on ne saurait établir que
1778
créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu’à
l’
inverse, on ne saurait établir que la sécularisation du christianisme
1779
Tandis qu’à l’inverse, on ne saurait établir que
la
sécularisation du christianisme résulte nécessairement de l’Évangile
1780
sation du christianisme résulte nécessairement de
l’
Évangile ! 54. Déclaration d’un étudiant chinois au congrès mondial d
1781
ation d’un étudiant chinois au congrès mondial de
la
Fédération des étudiants chrétiens. (Cf. Student World, automne 1933.
1782
(Cf. Student World, automne 1933.) 55. Telle que
l’
ont opérée par exemple un Werner Sombart, un de Man, et en France, le
1783
emple un Werner Sombart, un de Man, et en France,
le
groupe de l’Ordre nouveau. (Cf. en particulier la Révolution nécessai
1784
le groupe de l’Ordre nouveau. (Cf. en particulier
la
Révolution nécessaire, par Aron et Dandieu, et sa critique de la noti
1785
écessaire, par Aron et Dandieu, et sa critique de
la
notion d’échange chez Marx.) 56. « Les pharisiens lui ayant demandé
1786
ritique de la notion d’échange chez Marx.) 56. «
Les
pharisiens lui ayant demandé quand viendrait le Royaume de Dieu, Jésu
1787
Les pharisiens lui ayant demandé quand viendrait
le
Royaume de Dieu, Jésus leur répondit : Le Royaume de Dieu ne vient pa
1788
endrait le Royaume de Dieu, Jésus leur répondit :
Le
Royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards et l’on
1789
Royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper
les
regards et l’on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car v
1790
ne vient pas de manière à frapper les regards et
l’
on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que le Ro
1791
: il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que
le
Royaume de Dieu est au-dedans de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. Je p
1792
de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. Je parle ici,
l’
on m’entend bien, de ce que doit être un chrétien conséquent. Il est t
1793
s certaines activités, celles-là précisément dont
le
marxisme a dû faire sa spécialité, en vertu de notre carence : la pol
1794
faire sa spécialité, en vertu de notre carence :
la
politique, nos affaires, nos intérêts dits matériels, et ceux des aut
1795
matériels, et ceux des autres ! Exemple typique :
l’
auteur d’un des cantiques les plus pieux du recueil anglais, sir John
1796
s ! Exemple typique : l’auteur d’un des cantiques
les
plus pieux du recueil anglais, sir John Browning, est le même homme q
1797
pieux du recueil anglais, sir John Browning, est
le
même homme qui contraignit la Chine, sous la menace des canons, à s’o
1798
John Browning, est le même homme qui contraignit
la
Chine, sous la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’opium.
1799
est le même homme qui contraignit la Chine, sous
la
menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’opium. Un tel fait don
1800
s la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de
l’
opium. Un tel fait donne raison en apparence à la critique marxiste. E
1801
l’opium. Un tel fait donne raison en apparence à
la
critique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à la
1802
itique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’à
l’
homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’e
1803
. En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à
la
foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression dans
1804
il ne donne tort qu’à l’homme, non à la foi dont
l’
homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression dans ce sens, qui
1805
rt qu’à l’homme, non à la foi dont l’homme refuse
les
ordres. 58. Je prends l’expression dans ce sens, qui n’est pas le se
1806
oi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends
l’
expression dans ce sens, qui n’est pas le sens jésuite courant : que l
1807
e prends l’expression dans ce sens, qui n’est pas
le
sens jésuite courant : que la fin seule doit indiquer les moyens just
1808
sens, qui n’est pas le sens jésuite courant : que
la
fin seule doit indiquer les moyens justes qui la préparent. Et non pa
1809
jésuite courant : que la fin seule doit indiquer
les
moyens justes qui la préparent. Et non pas justifier des moyens qui s
1810
la fin seule doit indiquer les moyens justes qui
la
préparent. Et non pas justifier des moyens qui seraient en soi contra
1811
ifier des moyens qui seraient en soi contraires à
la
justice, — ou à l’essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ic
1812
i seraient en soi contraires à la justice, — ou à
l’
essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie polé
1813
soi contraires à la justice, — ou à l’essence de
la
fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie polémique des bou
1814
ce de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à
l’
imagerie polémique des bourgeois, aux yeux desquels tout bolcheviste e
1815
ls tout bolcheviste est un criminel en puissance.
Les
communistes représentent chez nous, en général, l’élite de leur class
1816
s communistes représentent chez nous, en général,
l’
élite de leur classe. Je ne les traite pas de menteurs, d’hypocrites,
1817
z nous, en général, l’élite de leur classe. Je ne
les
traite pas de menteurs, d’hypocrites, etc. Mais je dis qu’en tant qu’
1818
es, etc. Mais je dis qu’en tant qu’ils approuvent
la
politique de Staline et ses moyens, connus de tous, ils approuvent le
1819
ine et ses moyens, connus de tous, ils approuvent
le
mensonge (affaire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans la SDN), l’opp
1820
s, ils approuvent le mensonge (affaire Zinoviev),
l’
hypocrisie (entrée dans la SDN), l’oppression (déportation des paysans
1821
nge (affaire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans
la
SDN), l’oppression (déportation des paysans, des écrivains), la haine
1822
ire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans la SDN),
l’
oppression (déportation des paysans, des écrivains), la haine de class
1823
ression (déportation des paysans, des écrivains),
la
haine de classe (prêchée par Marx) et la guerre (pour peu qu’elle soi
1824
ivains), la haine de classe (prêchée par Marx) et
la
guerre (pour peu qu’elle soit censée défendre l’URSS). 60. Je n’ente
1825
la guerre (pour peu qu’elle soit censée défendre
l’
URSS). 60. Je n’entends pas porter ici un jugement quelconque sur les
1826
entends pas porter ici un jugement quelconque sur
les
groupes dits d’Oxford. Je ne les cite qu’au seul titre d’exemple topi
1827
t quelconque sur les groupes dits d’Oxford. Je ne
les
cite qu’au seul titre d’exemple topique. 61. Le rédacteur de cette «
1828
les cite qu’au seul titre d’exemple topique. 61.
Le
rédacteur de cette « discipline » paraît avoir été le pasteur Antoine
1829
édacteur de cette « discipline » paraît avoir été
le
pasteur Antoine de Chandieu, mais l’intervention personnelle de Calvi
1830
ît avoir été le pasteur Antoine de Chandieu, mais
l’
intervention personnelle de Calvin dans l’élaboration du document ne f
1831
u, mais l’intervention personnelle de Calvin dans
l’
élaboration du document ne fait pas de doute. « C’est, dit F. de Schic
1832
on démocratique, fédérative et parlementaire. » À
la
base de tout, il y a l’église locale, ou paroisse. Ces églises se féd
1833
ive et parlementaire. » À la base de tout, il y a
l’
église locale, ou paroisse. Ces églises se fédèrent par région. L’inst
1834
ou paroisse. Ces églises se fédèrent par région.
L’
instance d’appel est « la cour suprême du synode national ». (John Vié
1835
se fédèrent par région. L’instance d’appel est «
la
cour suprême du synode national ». (John Viénot, Histoire de la Réfor
1836
e du synode national ». (John Viénot, Histoire de
la
Réforme française, I, p. 271.) 62. C’est-à-dire : fondée sur la noti
1837
çaise, I, p. 271.) 62. C’est-à-dire : fondée sur
la
notion de vocation. 63. L’URSS est le seul État totalement totalitai
1838
t-à-dire : fondée sur la notion de vocation. 63.
L’
URSS est le seul État totalement totalitaire, disait récemment Victor
1839
fondée sur la notion de vocation. 63. L’URSS est
le
seul État totalement totalitaire, disait récemment Victor Serge, écri
1840
on en Sibérie. u. Rougemont Denis de, « Changer
la
vie ou changer l’homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Pl
1841
Rougemont Denis de, « Changer la vie ou changer
l’
homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-2
1842
enis de, « Changer la vie ou changer l’homme ? »,
Le
Communisme et les chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-233.
1843
r la vie ou changer l’homme ? », Le Communisme et
les
chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-233.
1844
ocation et destin d’Israël (1937)v Sens de «
l’
histoire » d’Israël Un prophète, a écrit Karl Barth, est un homme s
1845
r une oreille habituée : « Il se lève et il tombe
avec
sa mission. » Nous ne savons rien du reste de sa vie, et n’avons nul
1846
s nul besoin d’en rien connaître pour reconnaître
la
portée de son message puisque c’est le message de Dieu. Jérémie n’eût
1847
econnaître la portée de son message puisque c’est
le
message de Dieu. Jérémie n’eût été qu’un berger bègue si l’Éternel n’
1848
de Dieu. Jérémie n’eût été qu’un berger bègue si
l’
Éternel n’avait parlé par lui. Voici qui est digne de remarque : le se
1849
parlé par lui. Voici qui est digne de remarque :
le
seul détail précis que rapporte la Bible à son sujet, c’est cette dif
1850
de remarque : le seul détail précis que rapporte
la
Bible à son sujet, c’est cette difficulté à s’exprimer. Non seulement
1851
r. Non seulement rien d’historiquement notable ne
le
prédestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, — les psychologues
1852
historiquement notable ne le prédestinait à jouer
le
rôle d’un grand prophète, — les psychologues s’y épuiseront — mais en
1853
édestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, —
les
psychologues s’y épuiseront — mais encore il y avait cet obstacle, et
1854
cet obstacle, et celui-là précisément qui paraît
le
plus décisif, à vues humaines, s’agissant d’un homme appelé au minist
1855
nes, s’agissant d’un homme appelé au ministère de
la
Parole. Ce qui est vrai du prophète l’est aussi de son peuple, — peup
1856
nistère de la Parole. Ce qui est vrai du prophète
l’
est aussi de son peuple, — peuple entre tous prophétique. Ce qui est v
1857
peuple entre tous prophétique. Ce qui est vrai de
la
biographie d’un homme que l’Éternel choisit n’est pas moins vrai de l
1858
. Ce qui est vrai de la biographie d’un homme que
l’
Éternel choisit n’est pas moins vrai de l’histoire profane des Juifs,
1859
mme que l’Éternel choisit n’est pas moins vrai de
l’
histoire profane des Juifs, porteurs eux aussi d’une mission que rien
1860
ion que rien en eux ne semblait préparer. On peut
le
dire sans paradoxe : Israël n’eût pas eu d’histoire sans la promesse
1861
ns paradoxe : Israël n’eût pas eu d’histoire sans
la
promesse que Dieu fit à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » ave
1862
u fit à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe »
avec
la mission qu’elle incarne : « Préparer les voies du Seigneur », espé
1863
à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » avec
la
mission qu’elle incarne : « Préparer les voies du Seigneur », espérer
1864
be » avec la mission qu’elle incarne : « Préparer
les
voies du Seigneur », espérer et prêcher le Messie, attendre activemen
1865
parer les voies du Seigneur », espérer et prêcher
le
Messie, attendre activement l’invisible et plus que cela : le jamais
1866
espérer et prêcher le Messie, attendre activement
l’
invisible et plus que cela : le jamais vu, ce qu’aucun autre peuple au
1867
ttendre activement l’invisible et plus que cela :
le
jamais vu, ce qu’aucun autre peuple au monde n’a jamais pu seulement
1868
ne répond à nul besoin historiquement déterminé…
L’
histoire, au sens hégélien ou tainien, ou matérialiste-dialectique, se
1869
-dialectique, se donne pour tâche de reconstituer
l’
évolution immanente d’un peuple, telle qu’on peut vraisemblablement la
1870
e d’un peuple, telle qu’on peut vraisemblablement
la
styliser et la chiffrer, c’est-à-dire, telle qu’elle fut déterminée p
1871
telle qu’on peut vraisemblablement la styliser et
la
chiffrer, c’est-à-dire, telle qu’elle fut déterminée par des facteurs
1872
te. Que nous apprend une science de cet ordre sur
le
destin auquel étaient promises les infimes tribus nomades qui constit
1873
e cet ordre sur le destin auquel étaient promises
les
infimes tribus nomades qui constituaient, aux origines, la nation jui
1874
s tribus nomades qui constituaient, aux origines,
la
nation juive ? Une similitude facile nous permet de l’imaginer : l’hi
1875
tion juive ? Une similitude facile nous permet de
l’
imaginer : l’histoire n’a pas la plus petite raison de supposer que le
1876
Une similitude facile nous permet de l’imaginer :
l’
histoire n’a pas la plus petite raison de supposer que le peuple d’Isr
1877
le nous permet de l’imaginer : l’histoire n’a pas
la
plus petite raison de supposer que le peuple d’Israël, s’il n’avait p
1878
ire n’a pas la plus petite raison de supposer que
le
peuple d’Israël, s’il n’avait pas été « élu », eût évolué d’une autre
1879
bus d’Arabie qui nous offrent encore aujourd’hui,
avec
une persistance bien remarquable tous les traits caractéristiques de
1880
d’hui, avec une persistance bien remarquable tous
les
traits caractéristiques de la coutume pastorale des temps d’Abraham.
1881
n remarquable tous les traits caractéristiques de
la
coutume pastorale des temps d’Abraham. Nous ne possédons pas un rense
1882
nt conservateur, qui a pesé jusqu’à nos jours sur
les
habitants du désert. Désignée entre mille, sans raison. Ou sans autre
1883
ance étonnante à construire et à conquérir… Ainsi
les
annales d’Israël sont celles d’une puissance imprévue et humainement
1884
que nous connaissons de leur « histoire » — mais
le
mot prend ici un sens nouveau — c’est la suite des gestes de Dieu don
1885
» — mais le mot prend ici un sens nouveau — c’est
la
suite des gestes de Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais
1886
a suite des gestes de Dieu dont ils ne furent que
les
instruments. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans
1887
Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais
les
instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce
1888
Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce qui
les
rabat à leur destin, ce sont leurs révoltes constantes, leurs faux pa
1889
Et toute leur grandeur est à Dieu, c’est-à-dire à
la
vocation qui les arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre enve
1890
andeur est à Dieu, c’est-à-dire à la vocation qui
les
arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre envergure. Foi et
1891
de très piètre envergure. Foi et idolâtrie
La
considération du conflit séculaire que décrit l’Ancien Testament nous
1892
La considération du conflit séculaire que décrit
l’
Ancien Testament nous ramène avec une insistance innombrable et vraime
1893
culaire que décrit l’Ancien Testament nous ramène
avec
une insistance innombrable et vraiment grandiose à cette opposition f
1894
lle on ne peut rien comprendre de ce qui touche à
la
nation des Juifs. Destin nomade, vocation messianique. Destin visible
1895
ion invisible et triomphante : celle que prêchent
les
prophètes au peuple et qui seule l’élève, l’assemble et donne un sens
1896
que prêchent les prophètes au peuple et qui seule
l’
élève, l’assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errai
1897
ent les prophètes au peuple et qui seule l’élève,
l’
assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errait sans «
1898
qui seule l’élève, l’assemble et donne un sens à
la
vie de chacun. Ce peuple errait sans « fin » dans le désert, sans but
1899
vie de chacun. Ce peuple errait sans « fin » dans
le
désert, sans but jusqu’à ce que Dieu l’élise. Désormais sa voie est f
1900
in » dans le désert, sans but jusqu’à ce que Dieu
l’
élise. Désormais sa voie est fixée, mais ce n’est plus sa « propre » v
1901
voie. Il vient de Dieu, il va vers Dieu, et c’est
la
loi de Dieu qui l’y conduit. C’est pourquoi son télos (sa fin dernièr
1902
ieu, il va vers Dieu, et c’est la loi de Dieu qui
l’
y conduit. C’est pourquoi son télos (sa fin dernière), est transcendan
1903
n son essence, comme Dieu, et comme Dieu objet de
la
foi seule. De la foi, et non de la vue ! Catégories absolument nouvel
1904
mme Dieu, et comme Dieu objet de la foi seule. De
la
foi, et non de la vue ! Catégories absolument nouvelles, et qui jouer
1905
Dieu objet de la foi seule. De la foi, et non de
la
vue ! Catégories absolument nouvelles, et qui joueront un rôle déterm
1906
uvelles, et qui joueront un rôle déterminant dans
l’
éthique de l’Occident, même sous les noms paganisés d’idéalisme et de
1907
ui joueront un rôle déterminant dans l’éthique de
l’
Occident, même sous les noms paganisés d’idéalisme et de réalisme au s
1908
terminant dans l’éthique de l’Occident, même sous
les
noms paganisés d’idéalisme et de réalisme au sens courant. Mais le co
1909
d’idéalisme et de réalisme au sens courant. Mais
le
conflit de la foi et de la vue n’est en somme qu’un autre aspect du c
1910
t de réalisme au sens courant. Mais le conflit de
la
foi et de la vue n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de la v
1911
au sens courant. Mais le conflit de la foi et de
la
vue n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de la vocation et du
1912
e n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de
la
vocation et du destin. Il fait comprendre l’esprit de révolte qui tou
1913
t de la vocation et du destin. Il fait comprendre
l’
esprit de révolte qui tourmenta sans fin les douze tribus. Car un but
1914
rendre l’esprit de révolte qui tourmenta sans fin
les
douze tribus. Car un but invisible aux mortels est une menace et une
1915
au moins autant qu’une promesse. Une menace pour
les
« intérêts immédiats » qui se voient par trop négligés au profit d’on
1916
Et une angoisse contre laquelle il est fatal que
l’
on cherche à se protéger par quelque chose de visible et de tangible.
1917
ar quelque chose de visible et de tangible. Ainsi
les
Hébreux se rebellent, ils fuient dans le culte des faux dieux, rassur
1918
. Ainsi les Hébreux se rebellent, ils fuient dans
le
culte des faux dieux, rassurants parce que « faits de main d’homme »…
1919
e des faux dieux, rassurants parce que « faits de
main
d’homme »… Mais sans relâche, des prophètes reviennent pour railler d
1920
es reviennent pour railler durement ces idoles et
les
traîtres qui les adorent : Mon peuple consulte son bois Et c’est s
1921
r railler durement ces idoles et les traîtres qui
les
adorent : Mon peuple consulte son bois Et c’est son bâton qui lui
1922
n bois Et c’est son bâton qui lui parle ! Car
l’
esprit de prostitution égare Et ils se prostituent loin de leur Dieu
1923
ir, et qui pourtant fait toute sa grandeur, c’est
la
révolte du destin profane contre la vocation libératrice. Et de même
1924
andeur, c’est la révolte du destin profane contre
la
vocation libératrice. Et de même que cette révolte, et ce destin, et
1925
ce besoin de voir, sont symbolisés au concret par
les
statues des idoles étrangères — car c’est le voisin qu’on imite lorsq
1926
par les statues des idoles étrangères — car c’est
le
voisin qu’on imite lorsqu’on doute de sa vocation — de même cette voc
1927
doute de sa vocation — de même cette vocation et
la
foi qu’elle implique ont un symbole, unique et univoque : l’Arche de
1928
lle implique ont un symbole, unique et univoque :
l’
Arche de l’Alliance présente au sein du peuple, aussi nommée arche du
1929
e ont un symbole, unique et univoque : l’Arche de
l’
Alliance présente au sein du peuple, aussi nommée arche du témoignage,
1930
nommée arche du témoignage, parce qu’elle atteste
les
volontés de Dieu, les conditions de son alliance. La mesure Dan
1931
nage, parce qu’elle atteste les volontés de Dieu,
les
conditions de son alliance. La mesure Dans l’Arche sont les Tab
1932
ontés de Dieu, les conditions de son alliance.
La
mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mes
1933
conditions de son alliance. La mesure Dans
l’
Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’e
1934
e son alliance. La mesure Dans l’Arche sont
les
Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui ra
1935
. La mesure Dans l’Arche sont les Tables de
la
Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la f
1936
mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi.
La
Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’or
1937
ans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est
la
« mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’origine et la
1938
sure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois
l’
origine et la fin du peuple en tant qu’il est un « nouveau » peuple, é
1939
: c’est elle qui rappelle à la fois l’origine et
la
fin du peuple en tant qu’il est un « nouveau » peuple, élu par Dieu e
1940
aissé au hasard, tout est « mesuré » et jugé dans
la
perspective de la fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et
1941
out est « mesuré » et jugé dans la perspective de
la
fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi
1942
gé dans la perspective de la fin assignée à toute
la
nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’Alliance n
1943
erspective de la fin assignée à toute la nation :
l’
Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’Alliance nous apparaît
1944
la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi
l’
Arche de l’Alliance nous apparaît comme l’exemple à peu près idéal de
1945
: l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de
l’
Alliance nous apparaît comme l’exemple à peu près idéal de ce que l’on
1946
. Ainsi l’Arche de l’Alliance nous apparaît comme
l’
exemple à peu près idéal de ce que l’on peut nommer (d’un terme d’aill
1947
paraît comme l’exemple à peu près idéal de ce que
l’
on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à l’antiquité helléniqu
1948
’on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à
l’
antiquité hellénique) la mesure d’une civilisation, le canon d’une cul
1949
rme d’ailleurs emprunté à l’antiquité hellénique)
la
mesure d’une civilisation, le canon d’une culture et d’un ordre socia
1950
tiquité hellénique) la mesure d’une civilisation,
le
canon d’une culture et d’un ordre social, le principe initial et fina
1951
ion, le canon d’une culture et d’un ordre social,
le
principe initial et final régulateur et en même temps animateur de to
1952
l régulateur et en même temps animateur de toutes
les
œuvres d’une nation, tant matérielles que politiques et spirituelles6
1953
ant matérielles que politiques et spirituelles65.
L’
histoire des civilisations nous offre certes d’autres exemples assez g
1954
en et aztèque, Chine des grandes dynasties.) Mais
la
mesure des tribus hébraïques se distingue de toutes les autres en ce
1955
sure des tribus hébraïques se distingue de toutes
les
autres en ce qu’elle est une vocation adressée par un Dieu personnel,
1956
el, unique, éternel, transcendant. Elle n’est pas
le
produit normal d’une évolution historique fécondée et cristallisée pa
1957
évolution historique fécondée et cristallisée par
l’
intervention d’un grand chef. Elle est donc plus « totalitaire » que t
1958
retrait ou de dépassement. Aucun refuge « loin de
la
face de l’Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu
1959
de dépassement. Aucun refuge « loin de la face de
l’
Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éter
1960
loin de la face de l’Éternel ». Parce qu’elle est
la
loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience f
1961
ce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est
l’
Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu
1962
est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel,
la
Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est l
1963
de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est
la
conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est la loi de Di
1964
nce finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est
la
loi de Dieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle la règle pe
1965
Et parce qu’elle est la loi de Dieu — qui définit
la
vérité —, elle porte en elle la règle permanente de toute action et d
1966
ieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle
la
règle permanente de toute action et de toute pensée. Vraie mesure don
1967
ie mesure donc, et parfaitement commune. On porte
l’
Arche au-devant des armées, dans la guerre, comme le symbole de l’unit
1968
mune. On porte l’Arche au-devant des armées, dans
la
guerre, comme le symbole de l’unité du peuple, mais son usage est int
1969
Arche au-devant des armées, dans la guerre, comme
le
symbole de l’unité du peuple, mais son usage est interdit pendant les
1970
t des armées, dans la guerre, comme le symbole de
l’
unité du peuple, mais son usage est interdit pendant les guerres civil
1971
té du peuple, mais son usage est interdit pendant
les
guerres civiles : c’est que la mesure est indivisible. Dieu est au ci
1972
interdit pendant les guerres civiles : c’est que
la
mesure est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et
1973
est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur
la
terre, et les prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et si ces
1974
le. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et
les
prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et si ces « clercs » vie
1975
la terre, et les prêtres sont là pour veiller sur
l’
Alliance. Et si ces « clercs » viennent à trahir, cédant à leur pencha
1976
hant immémorial et bien connu, s’ils oublient que
le
Dieu qu’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux », les Prophète
1977
’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux »,
les
Prophètes se lèvent contre eux et dénoncent leur idolâtrie66. Remarqu
1978
eux et dénoncent leur idolâtrie66. Remarquons que
la
notion d’idolâtrie déborde ici singulièrement le culte des images d’o
1979
la notion d’idolâtrie déborde ici singulièrement
le
culte des images d’où elle tire son nom. Elle embrasse tout ce qui n’
1980
on d’un autre bien. Idole tout ce qui détourne de
la
seule vocation. Idole toute action ou pensée, si belle ou si féconde
1981
euple élu. Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à
la
fin que les prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolât
1982
Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à la fin que
les
prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolâtries, c’est
1983
in que les prophètes annoncent sans relâche. Mais
la
pire des idolâtries, c’est celle qui prend pour objet de son culte la
1984
es, c’est celle qui prend pour objet de son culte
la
mesure même, la Loi en soi, abstraite des fins pour lesquelles elle e
1985
qui prend pour objet de son culte la mesure même,
la
Loi en soi, abstraite des fins pour lesquelles elle existe. C’est l’i
1986
raite des fins pour lesquelles elle existe. C’est
l’
idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à la « lettre » d’une légis
1987
xiste. C’est l’idolâtrie qui consiste à soumettre
l’
homme à la « lettre » d’une législation divine, mais dont l’homme s’es
1988
st l’idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à
la
« lettre » d’une législation divine, mais dont l’homme s’est emparé,
1989
la « lettre » d’une législation divine, mais dont
l’
homme s’est emparé, et dont il fait sa chose, oubliant son Auteur. C’e
1990
it sa chose, oubliant son Auteur. C’est alors que
la
lettre tue l’homme, au lieu de le secourir en incarnant l’esprit. Et
1991
ubliant son Auteur. C’est alors que la lettre tue
l’
homme, au lieu de le secourir en incarnant l’esprit. Et c’est à cette
1992
C’est alors que la lettre tue l’homme, au lieu de
le
secourir en incarnant l’esprit. Et c’est à cette ultime tentation que
1993
tue l’homme, au lieu de le secourir en incarnant
l’
esprit. Et c’est à cette ultime tentation que devaient succomber les p
1994
t à cette ultime tentation que devaient succomber
les
plus grands rigoristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que le p
1995
ue devaient succomber les plus grands rigoristes,
les
savants docteurs de la Loi, ceux que le peuple honorait à peu près co
1996
s plus grands rigoristes, les savants docteurs de
la
Loi, ceux que le peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard
1997
oristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que
le
peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard des Pères de l’É
1998
, ceux que le peuple honorait à peu près comme on
le
fit plus tard des Pères de l’Église, des évêques et des cardinaux : l
1999
Pères de l’Église, des évêques et des cardinaux :
les
pharisiens. Condamnant au nom de la Loi celui-là même qui l’avait don
2000
cardinaux : les pharisiens. Condamnant au nom de
la
Loi celui-là même qui l’avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de
2001
ns. Condamnant au nom de la Loi celui-là même qui
l’
avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de la lettre, celui dont ce
2002
i l’avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de
la
lettre, celui dont cette lettre préparait la venue, et qui seul lui d
2003
m de la lettre, celui dont cette lettre préparait
la
venue, et qui seul lui donnait son sens… ⁂ Rien ne me paraît plus pro
2004
t plus propre à confirmer cette interprétation de
la
Loi, comme mesure du peuple hébreu, qu’un texte que je trouve dans le
2005
du peuple hébreu, qu’un texte que je trouve dans
le
plus grand des historiens profanes des Juifs : Josèphe. « Notre légis
2006
ïse), écrit-il dans sa Réponse à Appion 67, a été
le
seul dont les actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a
2007
l dans sa Réponse à Appion 67, a été le seul dont
les
actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a pas seulement
2008
se à Appion 67, a été le seul dont les actions et
les
paroles ont été conformes. » Car il n’a pas seulement formulé des loi
2009
le conformité, parce que rien n’est si capable de
la
faire naître et de l’entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de
2010
ue rien n’est si capable de la faire naître et de
l’
entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, e
2011
e la faire naître et de l’entretenir, que d’avoir
les
mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, et d’être élevés dans une mê
2012
l’entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de
la
grandeur de Dieu, et d’être élevés dans une même manière de vivre, et
2013
re élevés dans une même manière de vivre, et dans
les
mêmes coutumes ; car on n’entend point parmi nous parler diversement
2014
parler diversement de Dieu, comme il arrive parmi
les
autres peuples, non seulement entre les personnes du commun qui disen
2015
ive parmi les autres peuples, non seulement entre
les
personnes du commun qui disent chacun au hasard ce qui leur vient dan
2016
ui disent chacun au hasard ce qui leur vient dans
l’
esprit ; mais entre les philosophes… Nous croyons que Dieu voit tout c
2017
sard ce qui leur vient dans l’esprit ; mais entre
les
philosophes… Nous croyons que Dieu voit tout ce qui se passe dans le
2018
s croyons que Dieu voit tout ce qui se passe dans
le
monde. Nos femmes et nos serviteurs en sont persuadés comme nous : on
2019
dés comme nous : on peut apprendre de leur bouche
les
règles de la conduite de notre vie, et que toutes nos actions doivent
2020
: on peut apprendre de leur bouche les règles de
la
conduite de notre vie, et que toutes nos actions doivent avoir pour o
2021
t matériel, aussi fanatiquement lié et suspendu à
l’
invisible. Le moderne en ressent comme une offense à cette liberté cré
2022
ussi fanatiquement lié et suspendu à l’invisible.
Le
moderne en ressent comme une offense à cette liberté créatrice dans l
2023
d’inventions négligées, méprisées ! Nous adorons
la
Vie et le Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure n
2024
ons négligées, méprisées ! Nous adorons la Vie et
le
Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à
2025
s, méprisées ! Nous adorons la Vie et le Progrès,
le
foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu
2026
adorons la Vie et le Progrès, le foisonnement et
la
diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu’une occasion de dé
2027
t à nos yeux qu’une occasion de dépassement… Oui,
la
Richesse est notre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de l’ex
2028
chesse est notre dernier dieu, et c’est peut-être
le
secret de l’expansion, mais aussi de l’anarchie finale de notre cultu
2029
tre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de
l’
expansion, mais aussi de l’anarchie finale de notre culture moderne. C
2030
peut-être le secret de l’expansion, mais aussi de
l’
anarchie finale de notre culture moderne. Culture dont les éléments pr
2031
hie finale de notre culture moderne. Culture dont
les
éléments progressivement désunis, puis coupés de toute base commune,
2032
t à ne plus même pouvoir communiquer, ni s’animer
les
uns les autres, chacun se refermant sur sa spécialité, se forgeant un
2033
lus même pouvoir communiquer, ni s’animer les uns
les
autres, chacun se refermant sur sa spécialité, se forgeant une langue
2034
et convoquant enfin, à grands frais d’inventions,
la
vieille malédiction de la tour de Babel, qui est la dispersion du gen
2035
nds frais d’inventions, la vieille malédiction de
la
tour de Babel, qui est la dispersion du genre humain. Le dilemme qui
2036
vieille malédiction de la tour de Babel, qui est
la
dispersion du genre humain. Le dilemme qui se trouve posé à toute civ
2037
de Babel, qui est la dispersion du genre humain.
Le
dilemme qui se trouve posé à toute civilisation, et d’une manière trè
2038
ute civilisation, et d’une manière très urgente à
la
nôtre, est assez clairement défini par la comparaison que l’on peut f
2039
gente à la nôtre, est assez clairement défini par
la
comparaison que l’on peut faire de notre richesse anarchique, et rend
2040
st assez clairement défini par la comparaison que
l’
on peut faire de notre richesse anarchique, et rendue presque vaine pa
2041
narchique, et rendue presque vaine par ses excès,
avec
la pauvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël
2042
ique, et rendue presque vaine par ses excès, avec
la
pauvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. C
2043
auvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait
la
Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une
2044
t de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. Ce que
l’
on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce do
2045
osait la Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce que
l’
on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont l’exemple juif no
2046
gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont
l’
exemple juif nous permettra mieux que tout autre de juger. Que devient
2047
eux que tout autre de juger. Que devient en effet
la
culture, dans un monde où n’est tolérée que « la seule chose nécessai
2048
la culture, dans un monde où n’est tolérée que «
la
seule chose nécessaire ? » L’homme qui a une vocation n’est pas bon
2049
’est tolérée que « la seule chose nécessaire ? »
L’
homme qui a une vocation n’est pas bon à autre chose. Israël portait d
2050
s bon à autre chose. Israël portait dans son sein
l’
avenir religieux du monde. Dès qu’il était tenté de s’oublier dans les
2051
du monde. Dès qu’il était tenté de s’oublier dans
les
voies vulgaires des autres peuples, une sorte de génie sombre lui mon
2052
s peuples, une sorte de génie sombre lui montrait
l’
envers de toute chose, et avec des accents d’amère ironie, proclamait
2053
e sombre lui montrait l’envers de toute chose, et
avec
des accents d’amère ironie, proclamait que la justice à l’ancienne ma
2054
t avec des accents d’amère ironie, proclamait que
la
justice à l’ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ain
2055
cents d’amère ironie, proclamait que la justice à
l’
ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ainsi toute tent
2056
it assimilée à une révolte d’orgueil contre Dieu.
La
culture d’Israël sera pauvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté
2057
uvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté sera
la
condition de sa grandeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui comble l
2058
andeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui comble
la
mesure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais
2059
c’est ce qui comble la mesure, et non pas ce qui
la
dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas l
2060
esure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’est pas
la
richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes ma
2061
ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais
la
fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais les moyens mesu
2062
pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas
les
moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par la fin. C’est pourquo
2063
lité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais
les
moyens mesurés par la fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit l
2064
s moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par
la
fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit la fidélité de la cultu
2065
la fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit
la
fidélité de la culture du peuple hébreu. C’est une ascèse : il s’agit
2066
pourquoi sa pauvreté même garantit la fidélité de
la
culture du peuple hébreu. C’est une ascèse : il s’agit de détruire en
2067
ce qui comblerait trop tôt, ou trop humainement,
la
grande attente messianique. Point d’abstractions : c’est que le culte
2068
nte messianique. Point d’abstractions : c’est que
le
culte qu’il faut rendre au Dieu vivant est une obéissance directe « e
2069
ité ». Or abstraire, c’est d’abord s’abstraire de
l’
immédiat. Et c’est aussi, dans une certaine mesure, douter… Ainsi donc
2070
ans une certaine mesure, douter… Ainsi donc, pour
l’
Hébreu, se borner au concret, c’est rester fidèle à la Loi. D’ailleurs
2071
breu, se borner au concret, c’est rester fidèle à
la
Loi. D’ailleurs son langage même s’ordonne dès l’origine à cette voca
2072
la Loi. D’ailleurs son langage même s’ordonne dès
l’
origine à cette vocation supérieure ; dénué de termes abstraits, impro
2073
its, impropre à toute métaphysique69 il contraint
les
auteurs sacrés à l’invention de métaphores qui enrobent les notions l
2074
métaphysique69 il contraint les auteurs sacrés à
l’
invention de métaphores qui enrobent les notions les plus hautes dans
2075
s sacrés à l’invention de métaphores qui enrobent
les
notions les plus hautes dans un vêtement quotidien ; on dirait : un v
2076
’invention de métaphores qui enrobent les notions
les
plus hautes dans un vêtement quotidien ; on dirait : un vêtement de t
2077
hètes, a-t-il besoin de philosophes ? — est ainsi
l’
aspect négatif d’une splendeur poétique inégalée. (La poésie de l’Occi
2078
spect négatif d’une splendeur poétique inégalée. (
La
poésie de l’Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera
2079
d’une splendeur poétique inégalée. (La poésie de
l’
Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera biblique ou
2080
La poésie de l’Occident chrétien sera grande dans
la
mesure où elle sera biblique ou grecque, sublime dans la mesure où la
2081
re où elle sera biblique ou grecque, sublime dans
la
mesure où la synthèse des deux traditions sera dominée par l’élément
2082
ra biblique ou grecque, sublime dans la mesure où
la
synthèse des deux traditions sera dominée par l’élément biblique.) Se
2083
la synthèse des deux traditions sera dominée par
l’
élément biblique.) Seuls les grands discours prophétiques, parmi tous
2084
tions sera dominée par l’élément biblique.) Seuls
les
grands discours prophétiques, parmi tous les chants de la terre, ont
2085
euls les grands discours prophétiques, parmi tous
les
chants de la terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié l’étymo
2086
s discours prophétiques, parmi tous les chants de
la
terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié l’étymologie grecque
2087
ous les chants de la terre, ont réellement rythmé
l’
action et vérifié l’étymologie grecque de poésie, qui est agir. Point
2088
terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié
l’
étymologie grecque de poésie, qui est agir. Point d’arts figuratifs ou
2089
est agir. Point d’arts figuratifs ou imaginatifs.
La
loi les interdit par le deuxième et le troisième commandement. « Tu n
2090
r. Point d’arts figuratifs ou imaginatifs. La loi
les
interdit par le deuxième et le troisième commandement. « Tu ne te fer
2091
e représentation des choses qui sont en haut dans
les
cieux, en bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que la terre. »
2092
hoses qui sont en haut dans les cieux, en bas sur
la
terre, et dans les eaux plus bas que la terre. » Cela condamne toute
2093
haut dans les cieux, en bas sur la terre, et dans
les
eaux plus bas que la terre. » Cela condamne toute espèce d’art plasti
2094
n bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que
la
terre. » Cela condamne toute espèce d’art plastique. « Tu n’auras pas
2095
s d’autres dieux devant ma face » — cela condamne
la
mythologie et la fabulation, où les Aryens puisent leur art de trompe
2096
devant ma face » — cela condamne la mythologie et
la
fabulation, où les Aryens puisent leur art de tromper et de se satisf
2097
cela condamne la mythologie et la fabulation, où
les
Aryens puisent leur art de tromper et de se satisfaire d’illusions. P
2098
’illusions. Point de science purement technique :
la
sagesse de Salomon n’est pas une connaissance des « causes » mais bie
2099
ignatures » naturelles. Elle ne veut pas utiliser
les
choses, mais distinguer en elles les intentions divines, pour les off
2100
pas utiliser les choses, mais distinguer en elles
les
intentions divines, pour les offrir en holocauste spirituel au Créate
2101
distinguer en elles les intentions divines, pour
les
offrir en holocauste spirituel au Créateur70. Enfin, remarque encore
2102
l au Créateur70. Enfin, remarque encore Renan : «
L’
esprit prophétique, et les institutions qui en naissent, au moins virt
2103
emarque encore Renan : « L’esprit prophétique, et
les
institutions qui en naissent, au moins virtuellement, interdisaient l
2104
n naissent, au moins virtuellement, interdisaient
le
développement commercial71 et industriel. » Que reste-t-il de ce que
2105
tes, science, industrie, tout cela est sacrifié à
la
seule chose nécessaire : l’accomplissement d’une vocation spirituelle
2106
t cela est sacrifié à la seule chose nécessaire :
l’
accomplissement d’une vocation spirituelle. Et les moyens de cet accom
2107
l’accomplissement d’une vocation spirituelle. Et
les
moyens de cet accomplissement sont les moyens les plus élémentaires q
2108
tuelle. Et les moyens de cet accomplissement sont
les
moyens les plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’écri
2109
les moyens de cet accomplissement sont les moyens
les
plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’écriture, la pa
2110
ssement sont les moyens les plus élémentaires que
les
hommes ont de commercer : l’écriture, la parole et l’action, — la tra
2111
us élémentaires que les hommes ont de commercer :
l’
écriture, la parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guer
2112
res que les hommes ont de commercer : l’écriture,
la
parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet
2113
ommes ont de commercer : l’écriture, la parole et
l’
action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénu
2114
commercer : l’écriture, la parole et l’action, —
la
tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénuement, ce ré
2115
’écriture, la parole et l’action, — la tradition,
la
prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénuement, ce résidu d’exclusi
2116
parole et l’action, — la tradition, la prophétie,
la
guerre… Mais cet extrême dénuement, ce résidu d’exclusions fanatiques
2117
clusions fanatiques, se trouve sauver et garantir
la
possession de ce que notre Occident lui-même a défini comme le bien s
2118
de ce que notre Occident lui-même a défini comme
le
bien souverain : l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la
2119
ident lui-même a défini comme le bien souverain :
l’
harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet q
2120
défini comme le bien souverain : l’harmonie dans
le
dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que la destinatio
2121
le bien souverain : l’harmonie dans le dynamisme,
le
Sens général de la vie. Si l’on admet que la destination de toute cul
2122
l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de
la
vie. Si l’on admet que la destination de toute culture, c’est de conc
2123
dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si
l’
on admet que la destination de toute culture, c’est de concentrer les
2124
sme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que
la
destination de toute culture, c’est de concentrer les puissances de l
2125
destination de toute culture, c’est de concentrer
les
puissances de la nature et de la société dans les, mains de l’homme r
2126
te culture, c’est de concentrer les puissances de
la
nature et de la société dans les, mains de l’homme responsable, et do
2127
t de concentrer les puissances de la nature et de
la
société dans les, mains de l’homme responsable, et dont l’esprit conn
2128
les puissances de la nature et de la société dans
les
, mains de l’homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel
2129
uissances de la nature et de la société dans les,
mains
de l’homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel il déd
2130
de la nature et de la société dans les, mains de
l’
homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel il dédie tou
2131
é dans les, mains de l’homme responsable, et dont
l’
esprit connaît un but auquel il dédie toutes ses œuvres, l’on voit que
2132
connaît un but auquel il dédie toutes ses œuvres,
l’
on voit que la culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu,
2133
auquel il dédie toutes ses œuvres, l’on voit que
la
culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la
2134
dédie toutes ses œuvres, l’on voit que la culture
la
plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la plus conven
2135
pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi
la
plus convenable aux fins suprêmes de l’esprit. Toutefois, non tant à
2136
fut aussi la plus convenable aux fins suprêmes de
l’
esprit. Toutefois, non tant à cause de sa pauvreté même, qu’à cause de
2137
n tant à cause de sa pauvreté même, qu’à cause de
l’
absolu de sa mesure, et de la promesse qu’elle portait. ⁂ Revenons enc
2138
même, qu’à cause de l’absolu de sa mesure, et de
la
promesse qu’elle portait. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce q
2139
it. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce que
l’
on nous reproche comme un grand défaut, de ne nous point étudier à inv
2140
tudier à inventer des choses nouvelles, soit dans
les
arts, ou dans le langage, au lieu que les autres peuples méritent bea
2141
des choses nouvelles, soit dans les arts, ou dans
le
langage, au lieu que les autres peuples méritent beaucoup de louange
2142
it dans les arts, ou dans le langage, au lieu que
les
autres peuples méritent beaucoup de louange d’y apporter de continuel
2143
à vertu et prudence, de demeurer constamment dans
l’
observation des lois et des coutumes de nos ancêtres, parce que c’est
2144
l n’y a que celles qui n’ont pas cet avantage que
l’
on soit obligé de changer, lorsque l’expérience fait connaître le beso
2145
avantage que l’on soit obligé de changer, lorsque
l’
expérience fait connaître le besoin d’en corriger les défauts. Ainsi,
2146
é de changer, lorsque l’expérience fait connaître
le
besoin d’en corriger les défauts. Ainsi, comme nous ne doutons point
2147
expérience fait connaître le besoin d’en corriger
les
défauts. Ainsi, comme nous ne doutons point que ce ne soit Dieu qui n
2148
que ce ne soit Dieu qui nous a donné ces lois par
l’
entremise de Moïse, pourrions-nous, sans impiété, ne nous pas efforcer
2149
rions-nous, sans impiété, ne nous pas efforcer de
les
observer très religieusement ? Et quelle conduite peut être plus just
2150
s sainte, que celle dont ce souverain Monarque de
l’
univers est l’auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus
2151
celle dont ce souverain Monarque de l’univers est
l’
auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus parfaite que
2152
de gouvernement peut donc être plus parfaite que
la
nôtre, et quels plus grands honneurs peut-on rendre à Dieu, puisque n
2153
e, et que toutes choses ne sont pas mieux réglées
le
jour d’une fête solennelle, qu’elles le sont toujours parmi nous ?
2154
x réglées le jour d’une fête solennelle, qu’elles
le
sont toujours parmi nous ? Chute d’Israël Tout était suspendu
2155
ous ? Chute d’Israël Tout était suspendu à
la
Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messianique donnée p
2156
uspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à
la
promesse messianique donnée par Dieu dès les temps primitifs72. Mais
2157
due à la promesse messianique donnée par Dieu dès
les
temps primitifs72. Mais cette promesse, enfin, s’est incarnée. Et les
2158
2. Mais cette promesse, enfin, s’est incarnée. Et
les
juifs l’ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cette « ombre des bi
2159
tte promesse, enfin, s’est incarnée. Et les juifs
l’
ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cette « ombre des biens à ven
2160
. Et les juifs l’ont méconnue prenant prétexte de
la
Loi, cette « ombre des biens à venir. » (Héb. 10, 1), pour repousser
2161
des biens à venir. » (Héb. 10, 1), pour repousser
le
Christ, qui était « l’esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lo
2162
éb. 10, 1), pour repousser le Christ, qui était «
l’
esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomp
2163
ur repousser le Christ, qui était « l’esprit » et
la
réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le
2164
t, qui était « l’esprit » et la réalité finale de
la
Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui
2165
sprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors,
la
Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’e
2166
la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme
le
dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’est d’une double manière : parce
2167
lie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle
l’
est d’une double manière : parce qu’elle a abouti — le Messie est venu
2168
t d’une double manière : parce qu’elle a abouti —
le
Messie est venu — et parce qu’elle a perdu son sens en condamnant cel
2169
ette Alliance, et ce sont ceux qui adorent encore
l’
ancienne Loi, « déclarée vieillie », qui sont maintenant les idolâtres
2170
e Loi, « déclarée vieillie », qui sont maintenant
les
idolâtres. Voilà pourquoi le peuple juif, qui n’a pas cru à sa victoi
2171
qui sont maintenant les idolâtres. Voilà pourquoi
le
peuple juif, qui n’a pas cru à sa victoire, et qui repousse la nouvel
2172
f, qui n’a pas cru à sa victoire, et qui repousse
la
nouvelle mesure, c’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui l
2173
et qui repousse la nouvelle mesure, c’est-à-dire
la
Nouvelle Alliance, est aujourd’hui le peuple sans mesure, sans limite
2174
’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui
le
peuple sans mesure, sans limites et sans foyer. Sans espérance, il cr
2175
es qui ne viendront pas… Héritage d’Israël
Le
christianisme par sa nature même, brisait avec le nationalisme exclus
2176
Le christianisme par sa nature même, brisait
avec
le nationalisme exclusif du judaïsme et assumait une mission de porté
2177
Le christianisme par sa nature même, brisait avec
le
nationalisme exclusif du judaïsme et assumait une mission de portée u
2178
verselle. Il revendiquait toutefois en même temps
l’
héritage d’Israël, et l’attraction qu’il exerçait venait non des princ
2179
t toutefois en même temps l’héritage d’Israël, et
l’
attraction qu’il exerçait venait non des principes généraux de la pens
2180
’il exerçait venait non des principes généraux de
la
pensée hellénistique, mais de la pure tradition hébraïque, représenté
2181
ipes généraux de la pensée hellénistique, mais de
la
pure tradition hébraïque, représentée par la Loi et les Prophètes. L’
2182
s de la pure tradition hébraïque, représentée par
la
Loi et les Prophètes. L’Église primitive se regardait comme le second
2183
re tradition hébraïque, représentée par la Loi et
les
Prophètes. L’Église primitive se regardait comme le second Israël, l’
2184
braïque, représentée par la Loi et les Prophètes.
L’
Église primitive se regardait comme le second Israël, l’héritière du R
2185
se primitive se regardait comme le second Israël,
l’
héritière du Royaume promis au Peuple de Dieu. Aussi conserva-t-elle à
2186
conciliable opposition dont s’était nourrie toute
la
tradition judaïque. C’est précisément ce sens de la continuité histor
2187
tradition judaïque. C’est précisément ce sens de
la
continuité historique et de la solidarité sociale qui distingua l’égl
2188
isément ce sens de la continuité historique et de
la
solidarité sociale qui distingua l’église chrétienne des religions à
2189
torique et de la solidarité sociale qui distingua
l’
église chrétienne des religions à mystères et des autres cultes orient
2190
ette époque, et qui fit d’elle dès son apparition
la
seule rivale véritable et la seule remplaçante possible de la religio
2191
e dès son apparition la seule rivale véritable et
la
seule remplaçante possible de la religion officielle de l’Empire73.
2192
ale véritable et la seule remplaçante possible de
la
religion officielle de l’Empire73. Ces quelques lignes de Dawson me
2193
remplaçante possible de la religion officielle de
l’
Empire73. Ces quelques lignes de Dawson me paraissent définir en racc
2194
gnes de Dawson me paraissent définir en raccourci
le
double héritage que l’Église et l’Europe ont repris des mains d’Israë
2195
ssent définir en raccourci le double héritage que
l’
Église et l’Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l
2196
r en raccourci le double héritage que l’Église et
l’
Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l’« élection
2197
héritage que l’Église et l’Europe ont repris des
mains
d’Israël : héritage divin de l’« élection collective », d’une part, —
2198
ont repris des mains d’Israël : héritage divin de
l’
« élection collective », d’une part, — car la postérité d’Abraham, apr
2199
n de l’« élection collective », d’une part, — car
la
postérité d’Abraham, après le Christ, c’est l’ensemble de tous les cr
2200
, d’une part, — car la postérité d’Abraham, après
le
Christ, c’est l’ensemble de tous les croyants, gentils ou Juifs conve
2201
ar la postérité d’Abraham, après le Christ, c’est
l’
ensemble de tous les croyants, gentils ou Juifs convertis, donc l’Égli
2202
braham, après le Christ, c’est l’ensemble de tous
les
croyants, gentils ou Juifs convertis, donc l’Église — héritage humain
2203
us les croyants, gentils ou Juifs convertis, donc
l’
Église — héritage humain, d’autre part, de cette notion de la mesure «
2204
héritage humain, d’autre part, de cette notion de
la
mesure « totalitaire » qui devait assurer la grandeur de l’Église — m
2205
n de la mesure « totalitaire » qui devait assurer
la
grandeur de l’Église — mais dont les déviations et perversions ravage
2206
« totalitaire » qui devait assurer la grandeur de
l’
Église — mais dont les déviations et perversions ravagent l’Europe dep
2207
evait assurer la grandeur de l’Église — mais dont
les
déviations et perversions ravagent l’Europe depuis le xviie siècle,
2208
mais dont les déviations et perversions ravagent
l’
Europe depuis le xviie siècle, et menacent aujourd’hui de la détruire
2209
éviations et perversions ravagent l’Europe depuis
le
xviie siècle, et menacent aujourd’hui de la détruire74. Il ne saurai
2210
puis le xviie siècle, et menacent aujourd’hui de
la
détruire74. Il ne saurait être question de retracer ici dans son ense
2211
t être question de retracer ici dans son ensemble
l’
évolution des éléments culturels et civilisateurs qui survécurent à la
2212
ents culturels et civilisateurs qui survécurent à
la
chute d’Israël, au moins aussi fondamentaux pour l’Occident que la ra
2213
chute d’Israël, au moins aussi fondamentaux pour
l’
Occident que la raison des Grecs et l’ordre des Romains. Il m’appartie
2214
, au moins aussi fondamentaux pour l’Occident que
la
raison des Grecs et l’ordre des Romains. Il m’appartient seulement de
2215
entaux pour l’Occident que la raison des Grecs et
l’
ordre des Romains. Il m’appartient seulement de préciser en quelques t
2216
partient seulement de préciser en quelques traits
le
sens que prend l’héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante
2217
de préciser en quelques traits le sens que prend
l’
héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante. On sait le rôle
2218
traits le sens que prend l’héritage d’Israël pour
la
foi chrétienne protestante. On sait le rôle joué dans la Réforme par
2219
sraël pour la foi chrétienne protestante. On sait
le
rôle joué dans la Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux t
2220
chrétienne protestante. On sait le rôle joué dans
la
Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux traditions prophéti
2221
estante. On sait le rôle joué dans la Réforme par
le
retour à l’Ancien Testament et aux traditions prophétiques. Mais sait
2222
sait le rôle joué dans la Réforme par le retour à
l’
Ancien Testament et aux traditions prophétiques. Mais sait-on à quel p
2223
is sait-on à quel point tout cela vit encore dans
les
églises évangéliques de nos jours ? Dès les bancs de « l’école du dim
2224
dans les églises évangéliques de nos jours ? Dès
les
bancs de « l’école du dimanche », tout jeune protestant est nourri au
2225
es évangéliques de nos jours ? Dès les bancs de «
l’
école du dimanche », tout jeune protestant est nourri aux sources même
2226
seph vendu par ses frères, Jonas dans sa baleine,
l’
ânesse de Balaam, David et Jonathan, Absalon pris par les cheveux, le
2227
se de Balaam, David et Jonathan, Absalon pris par
les
cheveux, le jeune Samuel appelé trois fois par Jéhovah, — que ce soit
2228
David et Jonathan, Absalon pris par les cheveux,
le
jeune Samuel appelé trois fois par Jéhovah, — que ce soit histoire ou
2229
ages lui sont incomparablement plus familiers que
les
métamorphoses des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75 que l’Ancie
2230
s des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75 que
l’
Ancien Testament était la vraie Antiquité des peuples de l’Europe prot
2231
en qu’on a pu dire75 que l’Ancien Testament était
la
vraie Antiquité des peuples de l’Europe protestante. Mais il y a bien
2232
Testament était la vraie Antiquité des peuples de
l’
Europe protestante. Mais il y a bien davantage que cet arrière-plan po
2233
e morale parfois scandaleusement antibourgeoise !
Le
thème de la vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuv
2234
fois scandaleusement antibourgeoise ! Le thème de
la
vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus
2235
ement antibourgeoise ! Le thème de la vocation et
le
thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément la
2236
le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent
le
plus profondément la « sensibilité spirituelle » d’un réformé. Le
2237
lu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément
la
« sensibilité spirituelle » d’un réformé. Le « peuple élu » Le
2238
t la « sensibilité spirituelle » d’un réformé.
Le
« peuple élu » Le simple fait que le calvinisme ait été dès le déb
2239
irituelle » d’un réformé. Le « peuple élu »
Le
simple fait que le calvinisme ait été dès le début une église minorit
2240
formé. Le « peuple élu » Le simple fait que
le
calvinisme ait été dès le début une église minoritaire, en butte à la
2241
» Le simple fait que le calvinisme ait été dès
le
début une église minoritaire, en butte à la persécution, ne suffit pa
2242
é dès le début une église minoritaire, en butte à
la
persécution, ne suffit pas à expliquer les ressemblances si souvent s
2243
butte à la persécution, ne suffit pas à expliquer
les
ressemblances si souvent signalées entre le sort des tribus dispersée
2244
quer les ressemblances si souvent signalées entre
le
sort des tribus dispersées et celui du « petit troupeau » longtemps c
2245
etit troupeau » longtemps chassé de son pays ; ni
les
ressemblances entre les formes d’activité et d’attitude sociale adopt
2246
s chassé de son pays ; ni les ressemblances entre
les
formes d’activité et d’attitude sociale adoptées par les deux « natio
2247
mes d’activité et d’attitude sociale adoptées par
les
deux « nations »76. Ce qui est déterminant pour cette analogie, ce qu
2248
gie, ce qui lui donne son seul sens acceptable et
la
situe dans son ordre réel, c’est que, dans les deux cas, la persécuti
2249
et la situe dans son ordre réel, c’est que, dans
les
deux cas, la persécution et l’isolement minoritaire sont considérés c
2250
ans son ordre réel, c’est que, dans les deux cas,
la
persécution et l’isolement minoritaire sont considérés comme « normau
2251
, c’est que, dans les deux cas, la persécution et
l’
isolement minoritaire sont considérés comme « normaux » : ils exprimen
2252
sont considérés comme « normaux » : ils expriment
le
destin spirituel, dans un monde incrédule et rebelle, de ceux que Die
2253
lise. En vertu de cette « élection » dont ils ont
l’
assurance d’être l’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, le
2254
ette « élection » dont ils ont l’assurance d’être
l’
objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès
2255
d’être l’objet, par une grâce périlleuse, et dans
la
foi, les calvinistes, dès la fin du xvie siècle, se considèrent comm
2256
’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi,
les
calvinistes, dès la fin du xvie siècle, se considèrent comme chargés
2257
périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès
la
fin du xvie siècle, se considèrent comme chargés d’une mission au se
2258
nde pécheur que Dieu n’abandonne pas. De même que
la
loi de Moïse maintenait le peuple juif, malgré le péché, dans une éco
2259
donne pas. De même que la loi de Moïse maintenait
le
peuple juif, malgré le péché, dans une économie provisoirement vivabl
2260
la loi de Moïse maintenait le peuple juif, malgré
le
péché, dans une économie provisoirement vivable et propre à entreteni
2261
mie provisoirement vivable et propre à entretenir
l’
attente active du Messie, de même l’éthique charismatique77 des calvin
2262
à entretenir l’attente active du Messie, de même
l’
éthique charismatique77 des calvinistes les amène à la conception d’un
2263
de même l’éthique charismatique77 des calvinistes
les
amène à la conception d’une intendance des biens terrestres, dont ils
2264
hique charismatique77 des calvinistes les amène à
la
conception d’une intendance des biens terrestres, dont ils auraient à
2265
des biens terrestres, dont ils auraient à assumer
l’
office : usant de ces richesses « comme n’en usant pas », au nom et pa
2266
richesses « comme n’en usant pas », au nom et par
la
charge du Seigneur qui est venu, et qui doit revenir. Telle est sans
2267
t venu, et qui doit revenir. Telle est sans doute
la
racine authentique du puritanisme qui apparaît dans le courant du xvi
2268
cine authentique du puritanisme qui apparaît dans
le
courant du xviie siècle. Max Weber, dans une thèse célèbre, a souten
2269
dans une thèse célèbre, a soutenu que c’était là
l’
origine du capitalisme moderne et de ses principales valeurs éthiques.
2270
les valeurs éthiques. Mais Sombart lui répond que
le
capitalisme est plus ancien, et qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’
2271
qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’est pas ici
le
lieu de prendre parti entre ces deux explications d’un phénomène écon
2272
leurs personne — non pas même Marx, quoi qu’on en
pense
souvent — n’a su définir clairement. Mais je retiens que l’une et l’a
2273
e retiens que l’une et l’autre hypothèse rattache
le
capitalisme à des attitudes religieuses, d’où serait partie l’impulsi
2274
e à des attitudes religieuses, d’où serait partie
l’
impulsion, attitudes analogues en ceci tout au moins qu’elles mettent
2275
analogues en ceci tout au moins qu’elles mettent
l’
accent sur le fait de l’élection. Il est curieux de noter que le paral
2276
ceci tout au moins qu’elles mettent l’accent sur
le
fait de l’élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se po
2277
au moins qu’elles mettent l’accent sur le fait de
l’
élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se poursuit même
2278
e fait de l’élection. Il est curieux de noter que
le
parallélisme se poursuit même, — et peut-être surtout — dans les dévi
2279
e se poursuit même, — et peut-être surtout — dans
les
déviations qualifiées que subirent l’éthique juive et l’éthique purit
2280
out — dans les déviations qualifiées que subirent
l’
éthique juive et l’éthique puritaine, à mesure qu’elles « réussissaien
2281
ations qualifiées que subirent l’éthique juive et
l’
éthique puritaine, à mesure qu’elles « réussissaient ». Le spiritualis
2282
e puritaine, à mesure qu’elles « réussissaient ».
Le
spiritualisme transcendant des Juifs d’Orient au contact des coutumes
2283
, se mue peu à peu en son contraire exact : c’est
le
matérialisme jouisseur et cynique que les nazis reprochent aux Juifs
2284
: c’est le matérialisme jouisseur et cynique que
les
nazis reprochent aux Juifs allemands capitalistes, avec d’autant plus
2285
azis reprochent aux Juifs allemands capitalistes,
avec
d’autant plus d’amertume que cette attitude provocante fut souvent pr
2286
que cette attitude provocante fut souvent prise à
l’
étranger pour un trait de caractère germanique. Mais c’est aussi l’int
2287
n trait de caractère germanique. Mais c’est aussi
l’
intellectualisme stérilisant, l’esprit d’abstraction inhumaine et chim
2288
Mais c’est aussi l’intellectualisme stérilisant,
l’
esprit d’abstraction inhumaine et chimérique, au surplus troublé de se
2289
rique, au surplus troublé de sentimentalisme, que
l’
on dénonce à droite chez les auteurs d’origine juive, mais qui ont ces
2290
e sentimentalisme, que l’on dénonce à droite chez
les
auteurs d’origine juive, mais qui ont cessé de croire à la mission de
2291
s d’origine juive, mais qui ont cessé de croire à
la
mission de leur peuple, et qui exercent désormais à vide les facultés
2292
de leur peuple, et qui exercent désormais à vide
les
facultés psychologiques fortement développées dans leur race par des
2293
ppées dans leur race par des siècles d’attente de
l’
invisible. De même, l’ascétisme vigoureux, le pessimisme actif des pur
2294
ar des siècles d’attente de l’invisible. De même,
l’
ascétisme vigoureux, le pessimisme actif des puritains anglais, cédant
2295
e de l’invisible. De même, l’ascétisme vigoureux,
le
pessimisme actif des puritains anglais, cédant aux tentations du succ
2296
ès immédiat et contrôlable, s’est transformé dans
le
Nouveau Monde d’une part en volonté de puissance abstraite (les fonda
2297
nde d’une part en volonté de puissance abstraite (
les
fondateurs des trusts au siècle dernier), d’autre part en utilitarism
2298
otale perte de conscience des fins religieuses de
l’
éthique puritaine, et transformant en tyrannie absurde ce qui était à
2299
t transformant en tyrannie absurde ce qui était à
l’
origine une attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à soi-mê
2300
qui était à l’origine une attitude d’obéissance à
la
foi, et de renoncement à soi-même. Corruptio optimi pessima… La vo
2301
oncement à soi-même. Corruptio optimi pessima…
La
vocation collective Ces quelques indications, qui appelleraient d’
2302
indications, qui appelleraient d’ailleurs toutes
les
nuances qu’on imagine, nous amènent au problème central que pose à la
2303
gine, nous amènent au problème central que pose à
la
pensée d’un protestant, et particulièrement d’un calviniste, l’exempl
2304
protestant, et particulièrement d’un calviniste,
l’
exemple d’Israël et de sa chute. Toute la théologie éthique de Calvin
2305
viniste, l’exemple d’Israël et de sa chute. Toute
la
théologie éthique de Calvin est centrée sur la vocation : vocation du
2306
te la théologie éthique de Calvin est centrée sur
la
vocation : vocation du « petit troupeau » ou de l’Église ; vocation p
2307
a vocation : vocation du « petit troupeau » ou de
l’
Église ; vocation personnelle de chaque membre de l’Église. Or, Israël
2308
Église ; vocation personnelle de chaque membre de
l’
Église. Or, Israël qui était le peuple élu, a trahi sa mission et s’es
2309
e chaque membre de l’Église. Or, Israël qui était
le
peuple élu, a trahi sa mission et s’est livré à son destin. Sa disper
2310
et s’est livré à son destin. Sa dispersion en est
le
châtiment. Serait-il donc possible de perdre sa vocation ? Et que dev
2311
de perdre sa vocation ? Et que devient celui qui
la
trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il la prenne pour idol
2312
trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il
la
prenne pour idole, refusant d’en reconnaître la vraie fin lorsqu’elle
2313
l la prenne pour idole, refusant d’en reconnaître
la
vraie fin lorsqu’elle lui apparaît incarnée ? Est-il rejeté à tout ja
2314
mais ? Une vocation est-elle donc « amissible » ?
Le
refus de l’homme serait-il donc capable de modifier un arrêt éternel,
2315
ocation est-elle donc « amissible » ? Le refus de
l’
homme serait-il donc capable de modifier un arrêt éternel, alors que D
2316
problème n’est pas gratuit : il touche au cœur de
la
foi réformée. Or c’est lui justement que traite saint Paul au chapitr
2317
justement que traite saint Paul au chapitre XI de
l’
Épître aux Romains. Et sans doute ce texte illumine aussi profondément
2318
te illumine aussi profondément qu’il est possible
le
mystère dernier d’Israël. « Je demande maintenant : Dieu a-t-il rejet
2319
? Non certes, car je suis moi-même israélite, de
la
postérité d’Abraham, de la tribu de Benjamin. Dieu n’a point rejeté s
2320
moi-même israélite, de la postérité d’Abraham, de
la
tribu de Benjamin. Dieu n’a point rejeté son peuple qu’il a connu d’a
2321
« Israël n’a point obtenu ce qu’il cherche : mais
les
élus l’ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c
2322
n’a point obtenu ce qu’il cherche : mais les élus
l’
ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par
2323
ce qu’il cherche : mais les élus l’ont obtenu et
les
autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par suite de la faut
2324
té endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par suite de
la
faute des enfants d’Israël que le salut est parvenu aux païens, afin
2325
st par suite de la faute des enfants d’Israël que
le
salut est parvenu aux païens, afin d’exciter leur propre émulation »
2326
propre émulation » (v. 11). En tuant leur Messie,
les
Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont
2327
v. 11). En tuant leur Messie, les Juifs ont forcé
les
Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice n
2328
Messie, les Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher
le
message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice national, comme exclus
2329
s à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu
le
bénéfice national, comme exclusif, de la Révélation. Mais c’est ici q
2330
nt perdu le bénéfice national, comme exclusif, de
la
Révélation. Mais c’est ici que saint Paul indique le mystérieux renve
2331
Révélation. Mais c’est ici que saint Paul indique
le
mystérieux renversement des rôles au dernier jour : « Or, si leur fau
2332
ôles au dernier jour : « Or, si leur faute a fait
la
richesse du monde, et leur amoindrissement la richesse des païens, qu
2333
ait la richesse du monde, et leur amoindrissement
la
richesse des païens, que ne fera pas leur complet relèvement ! » (v.
2334
se : c’est qu’une partie d’Israël est tombée dans
l’
endurcissement jusqu’à ce que la totalité des païens soit entrée (dans
2335
l est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce que
la
totalité des païens soit entrée (dans l’Église) ; et ainsi tout Israë
2336
à ce que la totalité des païens soit entrée (dans
l’
Église) ; et ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les don
2337
ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car
les
dons et l’appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum
2338
sraël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les dons et
l’
appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum praeclarum
2339
os de ce dernier verset, dans son Commentaire sur
l’
Épître aux Romains. Et Calvin dit du même verset que c’est « une fort
2340
rset que c’est « une fort belle sentence ». Ainsi
la
vocation, du moins cette vocation79 — est réellement inamissible, c’e
2341
ire ne peut être perdue, même si celui qui en est
l’
objet s’y oppose de toutes ses forces ! Car sa révolte même se trouve
2342
ses forces ! Car sa révolte même se trouve servir
les
desseins éternels de Dieu. Elle étend à l’humanité entière le bénéfic
2343
ervir les desseins éternels de Dieu. Elle étend à
l’
humanité entière le bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependant q
2344
éternels de Dieu. Elle étend à l’humanité entière
le
bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependant que son destin final
2345
u. Elle étend à l’humanité entière le bénéfice de
la
Promesse qu’il a reçue, cependant que son destin final demeure entre
2346
çue, cependant que son destin final demeure entre
les
mains du plus secret conseil de Dieu. « Quant à moi, écrit Calvin, j’
2347
cependant que son destin final demeure entre les
mains
du plus secret conseil de Dieu. « Quant à moi, écrit Calvin, j’étends
2348
oi, écrit Calvin, j’étends ce nom d’Israël à tout
le
peuple de Dieu, en ce sens, après que les gentils seront entrés dedan
2349
l à tout le peuple de Dieu, en ce sens, après que
les
gentils seront entrés dedans (l’Église), lors les Juifs aussi se reti
2350
sens, après que les gentils seront entrés dedans (
l’
Église), lors les Juifs aussi se retirant de leur révoltement, se rang
2351
les gentils seront entrés dedans (l’Église), lors
les
Juifs aussi se retirant de leur révoltement, se rangeront à l’obéissa
2352
i se retirant de leur révoltement, se rangeront à
l’
obéissance de la foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier lie
2353
leur révoltement, se rangeront à l’obéissance de
la
foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant l
2354
rangeront à l’obéissance de la foi… toutefois que
les
Juifs tiendront le premier lieu, comme étant les enfants aînés en la
2355
les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant
les
enfants aînés en la maison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.
2356
le premier lieu, comme étant les enfants aînés en
la
maison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.) Le sort du monde,
2357
aison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.)
Le
sort du monde, et l’on pourrait même dire : la date de son salut fina
2358
mentaires, sur Rom. II, 26.) Le sort du monde, et
l’
on pourrait même dire : la date de son salut final, dépend ainsi de la
2359
.) Le sort du monde, et l’on pourrait même dire :
la
date de son salut final, dépend ainsi de la conversion des Juifs. Et
2360
ire : la date de son salut final, dépend ainsi de
la
conversion des Juifs. Et ceci nous révèle la plus profonde raison des
2361
i de la conversion des Juifs. Et ceci nous révèle
la
plus profonde raison des sentiments « ambivalents », comme dirait Fre
2362
s », comme dirait Freud, qu’ont eus de tout temps
les
chrétiens à l’égard du peuple d’Israël. Tout dépend de lui, et il ref
2363
d’Israël. Tout dépend de lui, et il refuse ! D’où
la
haine sourde, et en même temps le respect religieux qu’on lui porte.
2364
l refuse ! D’où la haine sourde, et en même temps
le
respect religieux qu’on lui porte. Peut-être n’est-il pas excessif de
2365
xcessif de voir dans cette passion contradictoire
le
secret des soudaines explosions de rancune qui apparurent périodiquem
2366
ne sais si cette explication vaudrait encore pour
l’
antisémitisme des hitlériens, qui n’en serait en tout cas que le plus
2367
e des hitlériens, qui n’en serait en tout cas que
le
plus impur exemple. Il reste que la chrétienté non seulement ne pourr
2368
tout cas que le plus impur exemple. Il reste que
la
chrétienté non seulement ne pourra jamais se désintéresser du sort de
2369
e se doit de juger Israël autrement que ne fait «
le
monde ». Ce n’est pas au nom d’intérêts passagers que nous avons à pr
2370
à prendre position, mais au nom des promesses de
la
foi, et dans une perspective missionnaire qui réduit à leurs justes p
2371
issionnaire qui réduit à leurs justes proportions
les
thèses des politiques nationalistes. Le drame est bien plus vaste que
2372
portions les thèses des politiques nationalistes.
Le
drame est bien plus vaste que ne peuvent le concevoir nos polémiques.
2373
stes. Le drame est bien plus vaste que ne peuvent
le
concevoir nos polémiques. Et son issue ne dépend ni de nous seuls, ni
2374
dépend ni de nous seuls, ni d’eux seuls. On dit :
les
Juifs sont ceci, les Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos rich
2375
ls, ni d’eux seuls. On dit : les Juifs sont ceci,
les
Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos richesses, etc. Mais de q
2376
richesses, etc. Mais de quels biens se préoccupe
le
croyant ? Leur faute a fait la richesse du monde. Et cette richesse s
2377
biens se préoccupe le croyant ? Leur faute a fait
la
richesse du monde. Et cette richesse s’appelle le salut. 64. Il fa
2378
la richesse du monde. Et cette richesse s’appelle
le
salut. 64. Il faut bien voir que le « racisme » juif n’est justifi
2379
s’appelle le salut. 64. Il faut bien voir que
le
« racisme » juif n’est justifié à l’origine que par la vocation spiri
2380
ien voir que le « racisme » juif n’est justifié à
l’
origine que par la vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas du
2381
racisme » juif n’est justifié à l’origine que par
la
vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas du tout biologique. I
2382
ce peuple. Il n’est pas du tout biologique. Il ne
le
devient qu’accessoirement, à mesure que l’on prend les « signes » de
2383
Il ne le devient qu’accessoirement, à mesure que
l’
on prend les « signes » de la vocation pour des réalités valables en e
2384
evient qu’accessoirement, à mesure que l’on prend
les
« signes » de la vocation pour des réalités valables en elles-mêmes.
2385
rement, à mesure que l’on prend les « signes » de
la
vocation pour des réalités valables en elles-mêmes. Mais sans doute c
2386
ns doute ce glissement fatal s’est-il dessiné dès
le
début, à mesure que l’on codifiait les relations des « élus » et des
2387
fatal s’est-il dessiné dès le début, à mesure que
l’
on codifiait les relations des « élus » et des « gentils ». On sait à
2388
dessiné dès le début, à mesure que l’on codifiait
les
relations des « élus » et des « gentils ». On sait à quel point cette
2389
sait à quel point cette codification fut poussée.
L’
historien juif Josèphe écrit dans sa Réponse à Appion (I, 2) qu’un reg
2390
artenant aux familles des prêtres) était tenu par
les
sacrificateurs. « Et ils n’en épousaient point qui aient été captives
2391
ves, de peur qu’elles n’aient eu quelque commerce
avec
des étrangers. Peut-il y avoir rien de plus exact pour exempter des r
2392
e plus exact pour exempter des races tout mélange
avec
d’autres, puisque nos sacrificateurs peuvent, par des pièces si authe
2393
Que si quelqu’un manque d’observer cet ordre, on
le
sépare de l’autel, sans qu’il lui soit plus permis de faire aucune de
2394
u’un manque d’observer cet ordre, on le sépare de
l’
autel, sans qu’il lui soit plus permis de faire aucune des fonctions s
2395
ons sacerdotales. » — Il est curieux de noter que
les
lois racistes hitlériennes privent de tous droits civiques les person
2396
stes hitlériennes privent de tous droits civiques
les
personnes qui ne peuvent prouver par les registres la pureté de leurs
2397
civiques les personnes qui ne peuvent prouver par
les
registres la pureté de leurs origines : c’est que l’exercice des droi
2398
ersonnes qui ne peuvent prouver par les registres
la
pureté de leurs origines : c’est que l’exercice des droits civiques e
2399
registres la pureté de leurs origines : c’est que
l’
exercice des droits civiques est bien une sorte de « sacerdoce » natio
2400
orte de « sacerdoce » national. On voit ainsi que
l’
eugénisme n’est pas le seul motif de la législation raciste. 65. Sur
2401
national. On voit ainsi que l’eugénisme n’est pas
le
seul motif de la législation raciste. 65. Sur l’importance capitale
2402
ainsi que l’eugénisme n’est pas le seul motif de
la
législation raciste. 65. Sur l’importance capitale de cette notion d
2403
le seul motif de la législation raciste. 65. Sur
l’
importance capitale de cette notion de commune mesure pour toute cultu
2404
ns un volume intitulé Penser avec les mains , où
l’
on trouvera un raccourci de la présente étude. Du point de vue de l’hi
2405
avec les mains , où l’on trouvera un raccourci de
la
présente étude. Du point de vue de l’histoire du peuple juif, ce racc
2406
accourci de la présente étude. Du point de vue de
l’
histoire du peuple juif, ce raccourci souffre, entre autres, d’une trè
2407
très grave lacune en ce qu’il paraît conclure sur
l’
abandon final d’Israël à son destin, après la mort de Jésus-Christ. Je
2408
sur l’abandon final d’Israël à son destin, après
la
mort de Jésus-Christ. Je suis heureux de pouvoir donner ci-après un d
2409
ent qui n’avait pas sa place dans mon livre. 66.
La
rédaction des livres mosaïques est attribuée par Wellhausen et son éc
2410
es disciples des grands prophètes. Ce serait donc
le
prophétisme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de la religion
2411
ètes. Ce serait donc le prophétisme, c’est-à-dire
l’
élément le plus finaliste de la religion d’Israël qui aurait donné au
2412
erait donc le prophétisme, c’est-à-dire l’élément
le
plus finaliste de la religion d’Israël qui aurait donné au peuple l’e
2413
isme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de
la
religion d’Israël qui aurait donné au peuple l’expression légale de s
2414
e la religion d’Israël qui aurait donné au peuple
l’
expression légale de sa commune mesure : le Décalogue. Ainsi la fin cr
2415
peuple l’expression légale de sa commune mesure :
le
Décalogue. Ainsi la fin crée ses moyens. Cette hypothèse est aujourd’
2416
légale de sa commune mesure : le Décalogue. Ainsi
la
fin crée ses moyens. Cette hypothèse est aujourd’hui démodée. On revi
2417
e hypothèse est aujourd’hui démodée. On revient à
la
conception ancienne : un chef hébreu — celui que la Bible appelle Moï
2418
conception ancienne : un chef hébreu — celui que
la
Bible appelle Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de la Lo
2419
la Bible appelle Moïse — aurait bel et bien donné
les
rudiments de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophè
2420
Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de
la
Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alo
2421
donné les rudiments de la Loi au peuple juif dès
la
sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent le
2422
de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte.
Les
prophètes seraient alors ceux qui rappellent le peuple au culte du vr
2423
Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent
le
peuple au culte du vrai Dieu — contre les prêtres des dieux étrangers
2424
ppellent le peuple au culte du vrai Dieu — contre
les
prêtres des dieux étrangers — mais aussi ceux qui dénoncent les excès
2425
s dieux étrangers — mais aussi ceux qui dénoncent
les
excès du légalisme. 67. Livre II, chap. VI, trad. d’Arnaud d’Andilly
2426
istoire du peuple d’Israël, t. II, p. 265. 69. «
L’
embarras de l’hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plu
2427
ple d’Israël, t. II, p. 265. 69. « L’embarras de
l’
hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plus simples, dan
2428
265. 69. « L’embarras de l’hébreu pour expliquer
les
notions philosophiques les plus simples, dans le Livre de Job, dans l
2429
’hébreu pour expliquer les notions philosophiques
les
plus simples, dans le Livre de Job, dans l’Ecclésiaste, est quelque c
2430
les notions philosophiques les plus simples, dans
le
Livre de Job, dans l’Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’
2431
ques les plus simples, dans le Livre de Job, dans
l’
Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’image physique qui, da
2432
s l’Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant.
L’
image physique qui, dans les langues sémitiques, est encore à fleur de
2433
e chose de surprenant. L’image physique qui, dans
les
langues sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit la déduction
2434
sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit
la
déduction abstraite… » (Renan, op. cit., I, p. 49). Où Renan voit un
2435
p. 49). Où Renan voit un obscurcissement, je vois
le
gage d’une vive actualité, ou efficacité, du langage des clercs, iden
2436
ui des bergers. 70. Voir sur ce point : Colloque
avec
Salomon, par Albert-Marie Schmidt, dans la revue Hic et Nunc , n° 9-
2437
oque avec Salomon, par Albert-Marie Schmidt, dans
la
revue Hic et Nunc , n° 9-10. 71. Des études plus récentes semblent
2438
ier jugement de Renan. Mais il reste valable pour
la
période primitive. 72. Abraham déjà, et les prophètes, ont vu « le j
2439
pour la période primitive. 72. Abraham déjà, et
les
prophètes, ont vu « le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de
2440
ve. 72. Abraham déjà, et les prophètes, ont vu «
le
jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de l’Épître aux Hébreux (c
2441
es, ont vu « le jour du Seigneur ». Saint Paul et
l’
auteur de l’Épître aux Hébreux (chap. II) insistent fortement sur cett
2442
le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de
l’
Épître aux Hébreux (chap. II) insistent fortement sur cette unicité de
2443
hap. II) insistent fortement sur cette unicité de
la
Révélation. C’est un grand lieu commun de la théologie réformée que d
2444
é de la Révélation. C’est un grand lieu commun de
la
théologie réformée que de voir dans l’Ancien Testament l’histoire du
2445
commun de la théologie réformée que de voir dans
l’
Ancien Testament l’histoire du Christ avant qu’il vienne, dans les Pro
2446
ogie réformée que de voir dans l’Ancien Testament
l’
histoire du Christ avant qu’il vienne, dans les Prophètes, des Apôtres
2447
ent l’histoire du Christ avant qu’il vienne, dans
les
Prophètes, des Apôtres avant le Christ, dans les Apôtres, des Prophèt
2448
’il vienne, dans les Prophètes, des Apôtres avant
le
Christ, dans les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bib
2449
les Prophètes, des Apôtres avant le Christ, dans
les
Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autr
2450
le Christ, dans les Apôtres, des Prophètes après
le
Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autre sens que de désigner l’Incarna
2451
les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi
la
Bible n’a pas d’autre sens que de désigner l’Incarnation qui est son
2452
nsi la Bible n’a pas d’autre sens que de désigner
l’
Incarnation qui est son centre, au-delà d’elle-même. Tolle Christum e
2453
er : De servo arbitrio.) 73. Christopher Dawson,
Les
Origines de l’Europe et de la civilisation européenne, trad. français
2454
bitrio.) 73. Christopher Dawson, Les Origines de
l’
Europe et de la civilisation européenne, trad. française, chez Rieder,
2455
hristopher Dawson, Les Origines de l’Europe et de
la
civilisation européenne, trad. française, chez Rieder, 1934, p. 43.
2456
ançaise, chez Rieder, 1934, p. 43. 74. Sitôt que
la
mesure cesse d’être transcendante, devient humaine, contingente et pa
2457
ant plus totale, se veut encore totalitaire, on a
l’
État-nation-Police de type fasciste ou stalinien. Bien entendu, il ser
2458
sponsable de ce qui n’est que « profanations » de
la
notion de mesure totalitaire. 75. Cf. Ramuz. 76. Par exemple : cohé
2459
’autres auteurs, tels que Labriola, font remonter
le
phénomène capitaliste à l’« accumulation » de richesses des couvents
2460
abriola, font remonter le phénomène capitaliste à
l’
« accumulation » de richesses des couvents anglais au Moyen Âge, et au
2461
couvents anglais au Moyen Âge, et aux banques de
l’
Italie du Nord. Les responsabilités se partageraient donc équitablemen
2462
au Moyen Âge, et aux banques de l’Italie du Nord.
Les
responsabilités se partageraient donc équitablement entre les trois r
2463
bilités se partageraient donc équitablement entre
les
trois religions ! 79. Calvin, toujours soucieux de ne pas spéculer a
2464
rs soucieux de ne pas spéculer arbitrairement sur
les
textes, note en effet cette restriction : « Et aussi ne faut-il pas e
2465
celle par laquelle Dieu a adopté en son alliance
la
postérité d’Abraham : vu que le propos était nommément et spécialemen
2466
é en son alliance la postérité d’Abraham : vu que
le
propos était nommément et spécialement d’icelle vocation. » (Commenta
2467
gemont Denis de, « Vocation et destin d’Israël »,
Les
Juifs, Paris, Plon, 1937, p. 143-165.
2468
gnore Luther en France serait exagérer, mais dans
le
sens contraire de celui qu’on imagine. Car on fait pis que de l’ignor
2469
re de celui qu’on imagine. Car on fait pis que de
l’
ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamai
2470
. Car on fait pis que de l’ignorer et même que de
le
méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut,
2471
et même que de le méconnaître : on prétend, sans
l’
avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
2472
oir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
les
Propos de table, présentés au public français comme un ouvrage capita
2473
ssières, de platitudes, de contradictions. Est-ce
avec
cela que s’est faite la Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésite
2474
contradictions. Est-ce avec cela que s’est faite
la
Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à soutenir que Lu
2475
nir que Luther fut un démagogue, un exploiteur de
l’
éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romai
2476
gogue, un exploiteur de l’éternel ressentiment de
la
race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffon
2477
’éternel ressentiment de la race allemande contre
la
civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès g
2478
mande contre la civilisation romaine. On a poussé
la
bouffonnerie jusqu’à cet excès grandiose d’assimiler Luther et M. Hit
2479
iose d’assimiler Luther et M. Hitler, par goût de
la
rime sans doute. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que la p
2480
t M. Hitler, par goût de la rime sans doute. Pour
l’
opinion moyenne sur Luther, je crois que la phrase suivante en donne u
2481
. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que
la
phrase suivante en donne une juste idée : « En somme, qu’est-ce que L
2482
ion du livre d’un critique littéraire connu, dont
les
revues n’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure e
2483
’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer
la
mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste
2484
as lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et
la
sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste d’insister s
2485
héologique… Ceci dit, il est juste d’insister sur
la
grande valeur des travaux de quelques spécialistes français qui, au n
2486
quelques spécialistes français qui, au niveau de
la
haute culture, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je pense a
2487
u niveau de la haute culture, ont largement sauvé
l’
honneur de leur pays. Je pense aux ouvrages publiés par MM. Henri Stro
2488
e, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je
pense
aux ouvrages publiés par MM. Henri Strohl, J. Vignaud et Lucien Febvr
2489
son, pour ne rien dire — mais cela va de soi — de
l’
activité des professeurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de l’
2490
sseurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de
l’
Église dans les trois facultés françaises de théologie protestante. Il
2491
atique luthérienne ou d’histoire de l’Église dans
les
trois facultés françaises de théologie protestante. Il n’en reste pas
2492
héologie protestante. Il n’en reste pas moins que
l’
ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes
2493
tante. Il n’en reste pas moins que l’ignorance ou
la
méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes aux diverses ca
2494
ies recueillies par des biographes amateurs, et à
l’
action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
2495
ies par des biographes amateurs, et à l’action de
la
polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent le public f
2496
e catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
le
public français en état d’infériorité assez grave, ne fût-ce que sur
2497
riorité assez grave, ne fût-ce que sur le plan de
la
culture générale. Car ignorer ou méconnaître Luther, c’est ignorer ou
2498
onnaître un des deux ou trois moments décisifs de
la
tradition fondamentale de l’Occident, c’est s’interdire de rien compr
2499
moments décisifs de la tradition fondamentale de
l’
Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion
2500
’Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à
la
grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans la
2501
n comprendre à la grande discussion millénaire, à
la
grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son dynamis
2502
re, à la grande tension spirituelle dans laquelle
l’
Europe a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre
2503
rope a puisé son dynamisme créateur. Tension dont
le
débat du libre arbitre, opposant Érasme à Luther, permet de définir s
2504
Érasme à Luther, permet de définir symboliquement
les
pôles : pensée « pure » et pensée « engagée », ou encore attitude du
2505
ion qui, sur le plan théologique, ou mieux : dans
la
totalité de l’être, revient à celle d’un christianisme qui se met au
2506
plan théologique, ou mieux : dans la totalité de
l’
être, revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’hu
2507
celle d’un christianisme qui se met au service de
l’
humain (j’entends bien de l’humain purifié, « divinisé » par les effor
2508
se met au service de l’humain (j’entends bien de
l’
humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant
2509
ntends bien de l’humain purifié, « divinisé » par
les
efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un chris
2510
l’humain purifié, « divinisé » par les efforts de
la
religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absol
2511
r les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de
la
raison), et d’un christianisme absolu, qu’on déclare volontiers « inh
2512
o C’est sans doute dans cette perspective que
le
lecteur, peu familiarisé avec la pensée luthérienne, parviendra le pl
2513
cette perspective que le lecteur, peu familiarisé
avec
la pensée luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’importa
2514
perspective que le lecteur, peu familiarisé avec
la
pensée luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’importance
2515
amiliarisé avec la pensée luthérienne, parviendra
le
plus aisément à saisir l’importance centrale du traité que nous publi
2516
luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir
l’
importance centrale du traité que nous publions : je le vois au centre
2517
ortance centrale du traité que nous publions : je
le
vois au centre du débat occidental par excellence, mais au centre, au
2518
idental par excellence, mais au centre, aussi, de
la
Réforme, et de l’effort dogmatique de Luther30. On croit d’abord à un
2519
ence, mais au centre, aussi, de la Réforme, et de
l’
effort dogmatique de Luther30. On croit d’abord à un pamphlet, encore
2520
e que son volume matériel soit bien écrasant pour
le
genre. Mais on s’aperçoit sans tarder que la discussion avec Érasme e
2521
pour le genre. Mais on s’aperçoit sans tarder que
la
discussion avec Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée), n’est e
2522
Mais on s’aperçoit sans tarder que la discussion
avec
Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée), n’est en fait que le su
2523
iatribe (souvent personnifiée), n’est en fait que
le
support apparent d’une réflexion de plus vaste envergure, d’un témoig
2524
lle, excité (bien plutôt que « désarmé » comme il
le
dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du scepti
2525
ésarmé » comme il le dit aux premières pages) par
les
procédés de l’humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme,
2526
l le dit aux premières pages) par les procédés de
l’
humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme, Luther en vien
2527
ient, de proche en proche, à ressaisir et reposer
avec
puissance toutes les affirmations fondamentales de la Réforme : justi
2528
che, à ressaisir et reposer avec puissance toutes
les
affirmations fondamentales de la Réforme : justification par la foi,
2529
uissance toutes les affirmations fondamentales de
la
Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de D
2530
s fondamentales de la Réforme : justification par
la
foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul ; opposition de cette
2531
Dieu seul ; opposition de cette justice de Dieu à
la
justice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la n
2532
ice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de
la
grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Pa
2533
mes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à
la
nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivant
2534
uvres ; opposition de la grâce à la nature, selon
les
termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition c
2535
tion de la grâce à la nature, selon les termes de
l’
Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sen
2536
ure, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de
la
Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale e
2537
s de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à
la
tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un no
2538
Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de
la
décision totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout moye
2539
erme ou médiation plus ou moins rationnelle entre
les
règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ;
2540
lle entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de
la
foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage, et du témoign
2541
témoignage, et du témoignage fidèle, certifié par
l’
Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme
2542
et du témoignage fidèle, certifié par l’Esprit et
la
Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme entre les ma
2543
certifié par l’Esprit et la Bible, et constituant
la
véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont le
2544
Bible, et constituant la véritable « action » de
l’
homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ou
2545
stituant la véritable « action » de l’homme entre
les
mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’
2546
uant la véritable « action » de l’homme entre les
mains
de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont
2547
n » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont
les
thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en forme,
2548
du mot, mais qu’ils s’impliquent très étroitement
les
uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et
2549
mais qu’ils s’impliquent très étroitement les uns
les
autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et perpétue
2550
autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans
l’
unique et perpétuelle question que nous posent toutes les pages de la
2551
ue et perpétuelle question que nous posent toutes
les
pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont
2552
elle question que nous posent toutes les pages de
la
Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les refl
2553
renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que
les
reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la
2554
ment réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à
la
question du Christ : « … et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si t
2555
« … et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si tu
le
crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
2556
crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu
la
foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luthe
2557
la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
les
assertions de Luther, ni dans sa négation joyeuse du libre arbitre. S
2558
arbitre. Ses coups violents n’ébranlent plus que
le
« vieil homme », celui qu’il nous faut dépouiller. Folie pour les
2559
, celui qu’il nous faut dépouiller. Folie pour
les
sages Mais il s’en faut de presque tout que les grandes thèses pau
2560
es sages Mais il s’en faut de presque tout que
les
grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simple
2561
esque tout que les grandes thèses pauliniennes de
la
Réforme soient acceptées (ou simplement connues !) par nos contempora
2562
s. Il s’en faut de beaucoup, de presque tout, que
les
arguments d’un Érasme nous apparaissent comme autant de sophismes. No
2563
ent comme autant de sophismes. Non seulement tous
les
humanistes — des marxistes aux vieux libéraux — y applaudissent ouver
2564
pplaudissent ouvertement, mais encore jusque chez
les
chrétiens, ces arguments se voient réinventés, admis, parfois même pr
2565
e voient réinventés, admis, parfois même prêchés.
Le
laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique s
2566
prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout
le
monopole : tout catholique se doit, en bonne logique, de les faire si
2567
e : tout catholique se doit, en bonne logique, de
les
faire siens, puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous les prote
2568
s, puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous
les
protestants qui jugent encore que Calvin et Luther ont fait leur temp
2569
e Paul, bien plus ancien — tous ceux qui tiennent
la
prédestination pour un dogme immoral ou périmé ; ceux qui traduisent
2570
mmoral ou périmé ; ceux qui traduisent « Paix sur
la
terre aux hommes que Dieu agrée » par « Paix aux hommes de bonne volo
2571
s de bonne volonté », tous ceux-là sont, en fait,
avec
Érasme et son armée de grands docteurs de tous les siècles, pour sout
2572
ec Érasme et son armée de grands docteurs de tous
les
siècles, pour soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le po
2573
rands docteurs de tous les siècles, pour soutenir
le
libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de
2574
soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire
le
pouvoir qu’aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts e
2575
itre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait
l’
homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres morales.
2576
Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous
le
goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitu
2577
qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ;
l’
élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « gr
2578
r en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial,
la
violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « grave », d’une di
2579
i va droit au point décisif, envisage honnêtement
les
objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans iro
2580
sif, envisage honnêtement les objections, donne à
la
thèse adverse toutes ses chances, non sans ironie toutefois, et sait
2581
nie toutefois, et sait enfin conférer à son choix
la
force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue
2582
s, et sait enfin conférer à son choix la force et
la
simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue purement es
2583
r assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui refuse
l’
essentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le to
2584
ssentiel soit tout de même attiré et subjugué par
le
style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous m
2585
tout de même attiré et subjugué par le style, par
le
ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, sépar
2586
me attiré et subjugué par le style, par le ton de
l’
ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, séparer le fond
2587
s ne savons que trop bien, nous modernes, séparer
le
fond de la forme, admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vic
2588
que trop bien, nous modernes, séparer le fond de
la
forme, admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vice versa.) M
2589
lleurs du chef d’un grand mouvement (comme dirait
le
jargon d’aujourd’hui), tout est fait, dans notre Traité, pour heurter
2590
st fait, dans notre Traité, pour heurter de front
le
lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des
2591
le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas
la
foi de Paul et des Apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’es
2592
rtage pas la foi de Paul et des Apôtres. D’abord,
le
langage scolastique, qui n’est pas proprement luthérien, mais que Lut
2593
t obligé d’utiliser pour débrouiller et supprimer
les
faux problèmes où la Diatribe voulait l’embarrasser31. Ensuite, ce re
2594
ur débrouiller et supprimer les faux problèmes où
la
Diatribe voulait l’embarrasser31. Ensuite, ce refus total, ou mieux,
2595
pprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait
l’
embarrasser31. Ensuite, ce refus total, ou mieux, cette négligence tra
2596
(Un tel homme est bien trop vivant pour faire de
la
psychologie ; trop engagé dans le réel pour prendre au sérieux ses re
2597
t pour faire de la psychologie ; trop engagé dans
le
réel pour prendre au sérieux ses reflets dans la conscience du specta
2598
le réel pour prendre au sérieux ses reflets dans
la
conscience du spectateur.) Ce qui ne manquera pas de faire crier au d
2599
faire crier au dogmatisme. Tout se passe ici « à
l’
intérieur » du christianisme, de l’Église. L’humanisme laïque, autonom
2600
passe ici « à l’intérieur » du christianisme, de
l’
Église. L’humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une ab
2601
« à l’intérieur » du christianisme, de l’Église.
L’
humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une absurdité, u
2602
nié, comme une absurdité, une contradiction dans
les
termes. C’est à Érasme, en tant que théologien, que Luther s’applique
2603
que Luther s’applique à répondre ; et c’est même
la
plus dure ironie — quoique involontaire, je le suppose — dont il pouv
2604
me la plus dure ironie — quoique involontaire, je
le
suppose — dont il pouvait en l’occurrence, l’accabler. On ne saurait
2605
involontaire, je le suppose — dont il pouvait en
l’
occurrence, l’accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trai
2606
je le suppose — dont il pouvait en l’occurrence,
l’
accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trait : c’est enco
2607
en philosophe ou en métaphysicien, que Luther nie
le
libre arbitre. Ceci pourrait suffire et doit suffire en droit, à réfu
2608
rrait suffire et doit suffire en droit, à réfuter
l’
objection d’un moderne, l’objection parfaitement anachronique, mais qu
2609
ire en droit, à réfuter l’objection d’un moderne,
l’
objection parfaitement anachronique, mais que je sais inévitable, et q
2610
à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais
le
sérieux théologique est chose trop rare, et pour beaucoup trop diffic
2611
e écarter cette objection par un simple rappel de
l’
ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, t
2612
ction par un simple rappel de l’ordre dans lequel
le
Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dia
2613
imple rappel de l’ordre dans lequel le Traité fut
pensé
. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dialogue d’une « con
2614
nsé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins,
le
dialogue d’une « conscience moderne », douée d’exigence spirituelle,
2615
nscience moderne », douée d’exigence spirituelle,
avec
un partisan du « serf arbitre » luthérien. (On peut admettre qu’un te
2616
’un tel dialogue se déroule même à l’intérieur de
la
pensée d’un homme qui veut croire…) Dialogue Car Dieu peut tout
2617
ue Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là
la
santé de la foi. Kierkegaard Une conscience moderne. — Selon Luthe
2618
eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de
la
foi. Kierkegaard Une conscience moderne. — Selon Luther, nous n’av
2619
selon sa prévision. Luther ne pose pas seulement
l’
omnipotence, mais l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qu
2620
Luther ne pose pas seulement l’omnipotence, mais
l’
omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir à
2621
as seulement l’omnipotence, mais l’omniscience et
la
prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir à sa promesse, et a
2622
erons plus ! Nous refusons de jouer si, d’avance,
le
vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos
2623
oits ! Un luthérien. — Mais connais-tu seulement
les
vraies règles du jeu ? Qui t’a fait croire que ta vie était une parti
2624
que ta vie était une partie à jouer entre toi et
le
monde, par exemple ; ou encore entre l’individu et le Sort, cette ido
2625
re toi et le monde, par exemple ; ou encore entre
l’
individu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le
2626
onde, par exemple ; ou encore entre l’individu et
le
Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le croire pour ag
2627
rt, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de
le
croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi
2628
e ta science ne s’occupe-t-elle pas, justement, à
les
découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dign
2629
le pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à
les
inventer ? C. M. — Certes, mais ma dignité consiste à lutter contre
2630
à lutter contre de telles forces, une fois que je
les
ai reconnues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée m
2631
qui crée ma liberté, par un acte de révolte, s’il
le
faut ! L. — Tu crois donc détenir un tel pouvoir ? C. M. — Il me su
2632
un tel pouvoir ? C. M. — Il me suffit de vouloir
l’
affirmer. L. — Soit, c’est une hypothèse de travail… Pour moi, je cro
2633
e de travail… Pour moi, je crois que Dieu connaît
la
fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, f
2634
vail… Pour moi, je crois que Dieu connaît la fin,
la
somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures ;
2635
moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme,
la
valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures ; car elles
2636
passées, présentes, futures ; car elles sont dans
le
temps, Dieu dans l’éternité qui est avant le temps, qui est en lui, e
2637
futures ; car elles sont dans le temps, Dieu dans
l’
éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore apr
2638
dans le temps, Dieu dans l’éternité qui est avant
le
temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu
2639
gard de Dieu, donc, « tout est accompli », depuis
la
mort du Christ sur la croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C.
2640
tout est accompli », depuis la mort du Christ sur
la
croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C. M. — Si c’était vrai,
2641
core nier ce Dieu, qui prétend voir plus loin que
le
terme de mes actions, ce qui, avouons-le, les ridiculise complètement
2642
loin que le terme de mes actions, ce qui, avouons-
le
, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : ca
2643
que le terme de mes actions, ce qui, avouons-le,
les
ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : car je
2644
e qui, avouons-le, les ridiculise complètement et
les
rend vaines en fin de compte : car je sens, malgré tout, que je les f
2645
fin de compte : car je sens, malgré tout, que je
les
fais librement, et tu viens me dire qu’elles sont prévues ! Et prévue
2646
tzsche a proclamé qu’il avait fait. L. — Comment
le
temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ?
2647
’il avait fait. L. — Comment le temps tuerait-il
l’
Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer q
2648
— Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment
la
chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’
2649
rait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle
l’
Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’elle s’en formait… Mai
2650
air tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que
l’
idée fausse qu’elle s’en formait… Mais tu affirmes que si Dieu prévoit
2651
tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’est plus
la
peine de faire aucun effort. C’est peut-être mal raisonner. Si ton ef
2652
ton effort aussi était prévu ? Pourrais-tu ne pas
le
fournir ? Et si tu décidais : « je suis, donc Dieu n’est pas ! »32 qu
2653
ui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à
l’
éternelle prévision ? Qui t’assurerait qu’en prononçant ces mots, tu n
2654
ant ces mots, tu ne prononcerais pas sur toi-même
l’
arrêt éternel de Dieu te rejetant vers le néant, en sorte que Dieu, vr
2655
toi-même l’arrêt éternel de Dieu te rejetant vers
le
néant, en sorte que Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer l
2656
e Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer
les
yeux sur une réalité, ce n’est pas la supprimer en fait. Mais c’est p
2657
i ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’est pas
la
supprimer en fait. Mais c’est peut-être se priver de son secours, ou
2658
est peut-être se priver de son secours, ou encore
la
transformer en une menace obscure… Il y a une double prédestination :
2659
double prédestination : l’une au salut, l’autre à
la
damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au temps
2660
justement être rivé au temps sans fin, et refuser
l’
éternité qui vient nous délivrer du temps ? C. M. — Mais mon temps es
2661
eauté, de création ! Ton éternité immobile, c’est
l’
image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philo
2662
on ! Ton éternité immobile, c’est l’image même de
la
mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la rai
2663
l’image même de la mort. L. — Que savons-nous de
l’
éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que mort
2664
de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ?
Les
philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bib
2665
ue savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et
la
raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’ell
2666
ternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent
l’
imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que
2667
t la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais
la
Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort
2668
ner que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est
la
Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve q
2669
n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que
l’
éternité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’e
2670
que ? Qui nous dit qu’elle n’est pas au contraire
la
source de tout acte et de toute création, une invention totale et per
2671
totale et perpétuelle, une actualité permanente,
la
seule chose qui change quelque chose au déroulement calculable du tem
2672
se au déroulement calculable du temps, quand elle
le
touche dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul
2673
nt calculable du temps, quand elle le touche dans
l’
instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul) ?33 Qui t’ass
2674
dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme
l’
écrit Paul) ?33 Qui t’assure que notre raison tout attachée à notre ch
2675
? C’est un mystère plus profond que notre vie, et
la
raison n’est qu’un faible élément de notre vie. C’est un mystère que
2676
faible élément de notre vie. C’est un mystère que
le
croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’
2677
que le croyant pressent et vit au seul moment de
la
prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous
2678
et vit au seul moment de la prière. « Demandez et
l’
on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le cro
2679
la prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit
le
même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a
2680
a », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand
le
croyant, qui sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu
2681
t-il pas ce paradoxe et ce mystère : croire que «
l’
Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu — peut
2682
peut aussi tout changer en un instant aux yeux de
l’
homme, sans que rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il d
2683
de ce qu’il décide ou de ce qu’il décidera ? Car
l’
Éternel ne connaît pas de « temps », il n’est pas lié comme nous à une
2684
ire, nos divers temps et successions procèdent de
l’
Éternel et lui sont liés : nous venons de lui, nous retournons à lui,
2685
ui, nous retournons à lui, il est en nous lorsque
l’
Esprit dit : la Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous f
2686
nons à lui, il est en nous lorsque l’Esprit dit :
la
Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous ferait croire qu
2687
ge illusion nous ferait croire qu’une décision de
l’
Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui dé
2688
u’une décision de l’Éternel est une décision dans
le
passé ! Quand c’est elle seule qui définit notre présent ! Est-ce que
2689
t notre crainte du « fatalisme » ne reposent pas,
le
plus souvent, sur cette erreur des plus grossières ?… C. M. — On peu
2690
es plus grossières ?… C. M. — On peut aussi nier
l’
éternité, et affirmer que seul existe notre temps. Dans ce cas, tu n’a
2691
— On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on
l’
accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peu
2692
rien de ce qui est essentiel ; on l’accepte ou on
le
refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peut nous conduire
2693
ns pas dialogué en vain, si nous avons pu dégager
l’
alternative du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans les termes ex
2694
tive du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans
les
termes extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’Éternel qui
2695
s extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est
l’
Éternel qui commande — ou c’est moi. Il n’y a pas là de difficultés in
2696
s là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que
la
résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours trè
2697
que la résistance acharnée du « vieil homme », et
les
prétextes toujours très moraux, et même très pieux, qu’invoque notre
2698
révolte… Réalité radicale du problème Dans
l’
Église, une fois acceptés le Credo et son fondement, qui est la Parole
2699
e du problème Dans l’Église, une fois acceptés
le
Credo et son fondement, qui est la Parole dite en nous par l’Esprit e
2700
fois acceptés le Credo et son fondement, qui est
la
Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’Écriture, — or, ce
2701
son fondement, qui est la Parole dite en nous par
l’
Esprit et attestée par l’Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-m
2702
Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par
l’
Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l
2703
te Parole est Christ lui-même, — il me paraît que
l’
opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la d
2704
r n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et
la
démonstration purement biblique qu’on en trouvera dans ce traité, mal
2705
s exégétiques discutables, suffit à établir, pour
le
chrétien, la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qu
2706
discutables, suffit à établir, pour le chrétien,
la
vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur
2707
her n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de
l’
Évangile. L’apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiast
2708
inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile.
L’
apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiastique » ; et
2709
qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul
l’
a formulé avant toute « tradition ecclésiastique » ; et tous les Pères
2710
vant toute « tradition ecclésiastique » ; et tous
les
Pères et tous les siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien
2711
tion ecclésiastique » ; et tous les Pères et tous
les
siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien : « Travaillez à v
2712
n’y changeront rien : « Travaillez à votre salut
avec
crainte et tremblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous le vou
2713
emblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous
le
vouloir et le faire » (Phil. 2, 12-13). C’est parce que Dieu fait tou
2714
sque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et
le
faire » (Phil. 2, 12-13). C’est parce que Dieu fait tout que nous dev
2715
fait tout que nous devons agir, selon qu’il nous
l’
a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, e
2716
tout prévu que nous avons en lui, et en lui seul,
la
liberté. Mais cela n’apparaît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extr
2717
ît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de
la
connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insi
2718
aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de
la
connaissance de la foi. Luther insiste sur cet « extrémisme » évangél
2719
connaissance de soi-même et de la connaissance de
la
foi. Luther insiste sur cet « extrémisme » évangélique, que les sophi
2720
r insiste sur cet « extrémisme » évangélique, que
les
sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au
2721
orriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer
la
Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jus
2722
« évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé
la
doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut so
2723
oix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de
la
pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ho
2724
ue dans son sérieux dernier, on peut soutenir que
l’
homme possède au moins « un faible libre arbitre »34 dans les choses d
2725
ssède au moins « un faible libre arbitre »34 dans
les
choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême
2726
re arbitre »34 dans les choses du salut. Mais que
le
Christ ait dû mourir — cet acte extrême — pour nous sauver, fait voir
2727
e liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et à
l’
inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du pé
2728
’inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de
la
connaissance du péché pour voir qu’il n’y a de liberté possible que d
2729
our voir qu’il n’y a de liberté possible que dans
la
grâce que Dieu nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le mom
2730
sible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute
l’
argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les
2731
u nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise
le
moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se com
2732
Toute l’argumentation de Luther vise le moment de
la
décision, et néglige les moyens termes où voulait se complaire Érasme
2733
Luther vise le moment de la décision, et néglige
les
moyens termes où voulait se complaire Érasme. Le problème du salut es
2734
les moyens termes où voulait se complaire Érasme.
Le
problème du salut est un problème de vie ou de mort. Or il est seul e
2735
e de vie ou de mort. Or il est seul en cause pour
le
théologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris que Luther ne ni
2736
use pour le théologien. Et tout est clair lorsque
l’
on a compris que Luther ne nie pas du tout notre faculté de vouloir, m
2737
e seulement qu’elle puisse suffire à nous obtenir
le
salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie,
2738
ir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout
le
reste est psychologie, littérature et scolastique. Il n’en reste pas
2739
olastique. Il n’en reste pas moins qu’aux yeux de
la
raison — cette folle, comme le répète Luther — ce que nous nommons ic
2740
ins qu’aux yeux de la raison — cette folle, comme
le
répète Luther — ce que nous nommons ici un paradoxe demeure une pure
2741
s alors, on peut se demander si ceux qui refusent
le
christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contrair
2742
ui refusent le christianisme échappent vraiment à
la
difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais dans
2743
ent à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne
la
retrouvent pas, mais dans un plan où elle reste insoluble. Érasme éta
2744
me était encore catholique ; son humanisme mesuré
l’
empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adve
2745
tholique ; son humanisme mesuré l’empêche de voir
le
vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adversaires du christi
2746
l’empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais
le
plus grand des adversaires du christianisme dans les temps modernes,
2747
plus grand des adversaires du christianisme dans
les
temps modernes, Nietzsche, aboutit à un dilemme qui me paraît corresp
2748
e, terme à terme, à celui que Luther et Paul — et
l’
Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a poussé comme Luther, jusq
2749
oussé comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de
l’
homme, jusqu’aux questions dernières que peut envisager notre pensée.
2750
ager notre pensée. Pour échapper au nihilisme qui
l’
étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagi
2751
’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il
l’
a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel pa
2752
Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagine
le
Retour éternel. Et comme ce Retour éternel paraît exclure toute liber
2753
xclure toute liberté humaine, il se met à prêcher
l’
amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable.
2754
liberté humaine, il se met à prêcher l’amor fati,
l’
adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans c
2755
r l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à
la
fatalité inéluctable. C’est dans cette volonté de reconnaître notre t
2756
irresponsabilité, qu’il croit trouver et regagner
la
dignité suprême de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éte
2757
l croit trouver et regagner la dignité suprême de
l’
homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éternité de son destin. (
2758
e de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir
l’
éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’est accepter en acte l’ét
2759
re, c’est vouloir l’éternité de son destin. (Pour
le
chrétien, c’est accepter en acte l’éternelle prévision du Dieu qui sa
2760
destin. (Pour le chrétien, c’est accepter en acte
l’
éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du par
2761
en acte l’éternelle prévision du Dieu qui sauve.)
La
similitude étonnante du paradoxe luthérien et du paradoxe nietzschéen
2762
vérité, c’est bien du même problème qu’il s’agit.
Le
seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. A
2763
ème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de
la
vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsc
2764
iens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsche oppose
le
« je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppo
2765
oncé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de
l’
homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppose sa propre exist
2766
ppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à
l’
existence de Dieu, il oppose sa propre existence35. Mais la difficulté
2767
ce de Dieu, il oppose sa propre existence35. Mais
la
difficulté fondamentale que posent les rapports de notre volonté et d
2768
nce35. Mais la difficulté fondamentale que posent
les
rapports de notre volonté et de l’éternité souveraine, demeure entièr
2769
le que posent les rapports de notre volonté et de
l’
éternité souveraine, demeure entière. La différence, c’est que Nietzsc
2770
nté et de l’éternité souveraine, demeure entière.
La
différence, c’est que Nietzsche nous propose d’adorer un Destin muet,
2771
muet, tandis que nous adorons une Providence dont
la
Parole vivante s’est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous !
2772
le vivante s’est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu
avec
nous ! 30. À la proposition qu’on lui faisait, en 1587, d’éditer s
2773
rnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 30. À
la
proposition qu’on lui faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complètes
2774
faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complètes,
le
réformateur répondit : « Je ne reconnais aucun de mes livres pour adé
2775
de mes livres pour adéquat, si ce n’est peut-être
le
de servo arbitrio et le Catéchisme. » 31. Luther avertit à chaque fo
2776
at, si ce n’est peut-être le de servo arbitrio et
le
Catéchisme. » 31. Luther avertit à chaque fois : « nécessité conditi
2777
absolue, comme ils disent », et ce ils désigne «
les
sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 32. Comme l’anarchiste B
2778
et ce ils désigne « les sophistes », c’est-à-dire
les
scolastiques. 32. Comme l’anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52.
2779
stes », c’est-à-dire les scolastiques. 32. Comme
l’
anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52. Les traductions françaises
2780
omme l’anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52.
Les
traductions françaises donnent en général : « Nous serons transformés
2781
L’
Acte comme point de départ (1936-1937)a b Nous partons de l’impress
2782
point de départ (1936-1937)a b Nous partons de
l’
impression qu’il existe, entre certains systèmes qu’on a coutume d’opp
2783
systèmes qu’on a coutume d’opposer très nettement
les
uns aux autres, un commun dénominateur d’erreur, que nous ne pourrion
2784
re parti. C’est ainsi qu’on peut distinguer, dans
l’
idéalisme et dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans le prag
2785
i qu’on peut distinguer, dans l’idéalisme et dans
le
réalisme, ou dans le rationalisme et dans le pragmatisme, etc., un en
2786
er, dans l’idéalisme et dans le réalisme, ou dans
le
rationalisme et dans le pragmatisme, etc., un ensemble de supposition
2787
dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans
le
pragmatisme, etc., un ensemble de suppositions communes qui nous para
2788
ppositions communes qui nous paraissent renfermer
la
véritable raison de rejeter l’un et l’autre système, sans plus nous a
2789
tacher à combattre leurs erreurs respectives dans
le
plan sur lequel ils s’opposent. Cette impossibilité de prendre parti
2790
« changement de plan »), qui seule nous restitue
l’
unité de vision, la plénitude de volonté et en quelque sorte la bonne
2791
an »), qui seule nous restitue l’unité de vision,
la
plénitude de volonté et en quelque sorte la bonne conscience nécessai
2792
sion, la plénitude de volonté et en quelque sorte
la
bonne conscience nécessaire à toute œuvre constructive. Les quelques
2793
conscience nécessaire à toute œuvre constructive.
Les
quelques pages qui suivent n’ont d’autre but que d’en indiquer le pri
2794
s qui suivent n’ont d’autre but que d’en indiquer
le
principe de permanente actualité. C’est précisément ce sentiment de b
2795
es se présentent à nous. Avant même d’en pénétrer
le
détail et d’en critiquer la structure propre, nous nous sentons repou
2796
nt même d’en pénétrer le détail et d’en critiquer
la
structure propre, nous nous sentons repoussés par quelque chose qui n
2797
opèrent dans un monde dépourvu de correspondances
avec
notre situation concrète. Ce n’est pas leur abstraction qui nous inqu
2798
e parfaite qui nous semble absurde. Il semble que
l’
esprit ait proclamé, lui aussi, son autarchie, et qu’il puisse se donn
2799
se donner des lois qui ne tiennent plus compte de
la
crise du monde, et de celle de l’esprit dans ce monde. L’esprit s’est
2800
plus compte de la crise du monde, et de celle de
l’
esprit dans ce monde. L’esprit s’est dégagé des coordonnées du moment,
2801
du monde, et de celle de l’esprit dans ce monde.
L’
esprit s’est dégagé des coordonnées du moment, c’est dire que son exer
2802
ncrètement. D’où ce sentiment, quand nous voulons
penser
telle idéologie, de nous trouver diminués dans notre énergie totale.
2803
nous trouver diminués dans notre énergie totale.
La
pensée n’est plus le moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à
2804
s dans notre énergie totale. La pensée n’est plus
le
moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à ses dépens. On peut
2805
énergie totale. La pensée n’est plus le moteur de
l’
action ; au contraire, elle tourne à ses dépens. On peut continuer la
2806
aire, elle tourne à ses dépens. On peut continuer
la
métaphore et dire que la pensée dont nous souffrons est une pensée dé
2807
épens. On peut continuer la métaphore et dire que
la
pensée dont nous souffrons est une pensée débrayée. Un moteur débrayé
2808
ntative d’embrayage serait immédiatement fatale à
la
machine, et ferait voler en éclats les engrenages. La merveilleuse su
2809
nt fatale à la machine, et ferait voler en éclats
les
engrenages. La merveilleuse subtilité d’une certaine pensée critique,
2810
achine, et ferait voler en éclats les engrenages.
La
merveilleuse subtilité d’une certaine pensée critique, aujourd’hui, n
2811
s exactement cette impression ? Ne pourrions-nous
la
caractériser maintenant par un seul mot, qui exprime à la fois son ma
2812
que de coordonnées, d’une part, et, d’autre part,
le
sentiment de division et de diminution qu’elle favorise en nous : ce
2813
s au sens temporel, mais au sens de rupture entre
la
pensée et l’acte. ⁂ Que la pensée moderne repose sur un postulat d’in
2814
porel, mais au sens de rupture entre la pensée et
l’
acte. ⁂ Que la pensée moderne repose sur un postulat d’inactualité, il
2815
sens de rupture entre la pensée et l’acte. ⁂ Que
la
pensée moderne repose sur un postulat d’inactualité, il suffit, pour
2816
de se demander un instant ce qui arriverait dans
le
cas contraire. Si notre monde tient encore debout, c’est que les phil
2817
re. Si notre monde tient encore debout, c’est que
les
philosophies qui le partagent restent gratuites, relativistes et inac
2818
ent encore debout, c’est que les philosophies qui
le
partagent restent gratuites, relativistes et inactuelles dans leur en
2819
, relativistes et inactuelles dans leur ensemble.
Le
« libéralisme » idéaliste, ce « laisser passer, laisser faire », supp
2820
te, ce « laisser passer, laisser faire », suppose
le
débrayage de la pensée, sinon nous vivrions dans la plus effroyable a
2821
passer, laisser faire », suppose le débrayage de
la
pensée, sinon nous vivrions dans la plus effroyable anarchie matériel
2822
débrayage de la pensée, sinon nous vivrions dans
la
plus effroyable anarchie matérielle. On nous dira que, cependant, si
2823
rchie matérielle. On nous dira que, cependant, si
le
désordre du monde est réel, il se peut qu’il provienne, précisément,
2824
es que nous repoussons ? Nous serions mal venus à
le
nier. Si le monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a d
2825
repoussons ? Nous serions mal venus à le nier. Si
le
monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a dans le monde
2826
c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a dans
le
monde plus d’actualité que nos philosophies n’en peuvent concevoir. E
2827
moins inopérantes que souvent elles ne voudraient
l’
être. Mais, chose étrange, la raison pour laquelle le désordre n’est p
2828
elles ne voudraient l’être. Mais, chose étrange,
la
raison pour laquelle le désordre n’est pas total, c’est la raison mêm
2829
tre. Mais, chose étrange, la raison pour laquelle
le
désordre n’est pas total, c’est la raison même de ce désordre : c’est
2830
pour laquelle le désordre n’est pas total, c’est
la
raison même de ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et l’ac
2831
otal, c’est la raison même de ce désordre : c’est
la
rupture entre la pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce l’
2832
ison même de ce désordre : c’est la rupture entre
la
pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre
2833
ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et
l’
acte, rupture qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre part, la fre
2834
pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce
l’
anarchie, d’autre part, la freine et la prive pour le moment de virule
2835
qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre part,
la
freine et la prive pour le moment de virulence. Cet état d’équilibre
2836
rt, amorce l’anarchie, d’autre part, la freine et
la
prive pour le moment de virulence. Cet état d’équilibre entre le micr
2837
narchie, d’autre part, la freine et la prive pour
le
moment de virulence. Cet état d’équilibre entre le microbe et la mala
2838
e moment de virulence. Cet état d’équilibre entre
le
microbe et la maladie ne peut mener qu’à une consomption lente, ou à
2839
rulence. Cet état d’équilibre entre le microbe et
la
maladie ne peut mener qu’à une consomption lente, ou à des accidents
2840
rophiques. Un tel diagnostic indique par lui-même
la
thérapeutique que nous voudrions proposer, et qui serait un traitemen
2841
oposer, et qui serait un traitement préventif par
l’
actualisation, c’est-à-dire par l’effort et la volonté de confondre l’
2842
t préventif par l’actualisation, c’est-à-dire par
l’
effort et la volonté de confondre l’opération propre de la pensée avec
2843
par l’actualisation, c’est-à-dire par l’effort et
la
volonté de confondre l’opération propre de la pensée avec l’acte qui
2844
st-à-dire par l’effort et la volonté de confondre
l’
opération propre de la pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dir
2845
et la volonté de confondre l’opération propre de
la
pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette
2846
onté de confondre l’opération propre de la pensée
avec
l’acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté son
2847
de confondre l’opération propre de la pensée avec
l’
acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté sont d
2848
e l’opération propre de la pensée avec l’acte qui
la
certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté sont déjà présent
2849
nté sont déjà présents, avant toute analyse, dans
le
sentiment que nous disions tout à l’heure éprouver en face d’une conc
2850
nalyse, dans le sentiment que nous disions tout à
l’
heure éprouver en face d’une conception purement critique, ou idéalist
2851
rement critique, ou idéaliste, ou relativiste, de
l’
activité du philosophe. ⁂ Mais cette réalité salutaire, cet acte, comm
2852
pte ? Nous ne disons pas : comment pourrions-nous
le
définir, nous disons seulement — et littéralement — comment pourrions
2853
en vérité, il n’y a pas pour nous de problème de
l’
acte mais il y a problème de ce qui s’oppose à l’acte. (En d’autres te
2854
l’acte mais il y a problème de ce qui s’oppose à
l’
acte. (En d’autres termes, il n’y a pas de problème de la personne, ma
2855
(En d’autres termes, il n’y a pas de problème de
la
personne, mais bien des « choses », de l’impersonnel.) L’acte, étant
2856
lème de la personne, mais bien des « choses », de
l’
impersonnel.) L’acte, étant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesse
2857
nne, mais bien des « choses », de l’impersonnel.)
L’
acte, étant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesser d’être acte, ê
2858
as, sans cesser d’être acte, être posé en face de
l’
acteur. On ne peut pas photographier un acte, et donner ensuite la des
2859
peut pas photographier un acte, et donner ensuite
la
description de la photo comme la description d’un acte. On pourrait d
2860
hier un acte, et donner ensuite la description de
la
photo comme la description d’un acte. On pourrait dire tout au plus (
2861
t donner ensuite la description de la photo comme
la
description d’un acte. On pourrait dire tout au plus (métaphoriquemen
2862
pourrait dire tout au plus (métaphoriquement) que
l’
acte révélé par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la photo c
2863
au plus (métaphoriquement) que l’acte révélé par
le
cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la photo constitue l’un des
2864
riquement) que l’acte révélé par le cliché, c’est
l’
éclair de magnésium dont la photo constitue l’un des effets. Quant à l
2865
é par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont
la
photo constitue l’un des effets. Quant à la scène représentée par la
2866
dont la photo constitue l’un des effets. Quant à
la
scène représentée par la photo, elle n’est plus qu’un objectif, inact
2867
l’un des effets. Quant à la scène représentée par
la
photo, elle n’est plus qu’un objectif, inactuel en soi, et problémati
2868
ion importante introduite par M. Gabriel Marcel à
la
fin de son article intitulé : Existence et objectivité. M. Marcel dis
2869
tence et objectivité. M. Marcel distingue « entre
les
données susceptibles de fournir la matière d’un problème, données qui
2870
ingue « entre les données susceptibles de fournir
la
matière d’un problème, données qui sont par là même objectives, et ce
2871
objectives, et celles sur lesquelles il faut que
l’
esprit s’appuie pour poser un problème quelconque ». L’acte, tel que n
2872
rit s’appuie pour poser un problème quelconque ».
L’
acte, tel que nous l’entendons, est évidemment une donnée de ce deuxiè
2873
er un problème quelconque ». L’acte, tel que nous
l’
entendons, est évidemment une donnée de ce deuxième type, la donnée pa
2874
s, est évidemment une donnée de ce deuxième type,
la
donnée par excellence. En réalité, toute définition s’appuie sur une
2875
irait Heidegger. Toute tentative de définition de
l’
acte lui-même supposerait un arrêt, un retour sur l’acte, c’est-à-dire
2876
acte lui-même supposerait un arrêt, un retour sur
l’
acte, c’est-à-dire un retour contre l’acte, qui en neutraliserait auss
2877
retour sur l’acte, c’est-à-dire un retour contre
l’
acte, qui en neutraliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur l’
2878
our contre l’acte, qui en neutraliserait aussitôt
le
dynamisme. La réflexion sur l’acte ne pouvant intervenir qu’a posteri
2879
cte, qui en neutraliserait aussitôt le dynamisme.
La
réflexion sur l’acte ne pouvant intervenir qu’a posteriori, elle n’es
2880
aliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur
l’
acte ne pouvant intervenir qu’a posteriori, elle n’est, en réalité, qu
2881
ori, elle n’est, en réalité, qu’une réflexion sur
les
effets de l’acte. Si, au moment de sauter, l’athlète essaie de défini
2882
t, en réalité, qu’une réflexion sur les effets de
l’
acte. Si, au moment de sauter, l’athlète essaie de définir le saut, il
2883
ur les effets de l’acte. Si, au moment de sauter,
l’
athlète essaie de définir le saut, il ne sautera pas. Tous ceux qui on
2884
au moment de sauter, l’athlète essaie de définir
le
saut, il ne sautera pas. Tous ceux qui ont pratiqué un minimum de cul
2885
ture physique connaissent ce genre d’échec. C’est
la
conscience défaillante qui refuse l’obstacle. Il ne reste alors qu’à
2886
échec. C’est la conscience défaillante qui refuse
l’
obstacle. Il ne reste alors qu’à se consoler par la certitude que l’an
2887
’obstacle. Il ne reste alors qu’à se consoler par
la
certitude que l’analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas
2888
reste alors qu’à se consoler par la certitude que
l’
analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas sauter. Et c’est
2889
par la certitude que l’analyse philosophique est
avec
celui qui ne peut pas sauter. Et c’est peut-être cela précisément que
2890
s sauter. Et c’est peut-être cela précisément que
la
sagesse vulgaire appelle « prendre les choses avec philosophie »… Cec
2891
isément que la sagesse vulgaire appelle « prendre
les
choses avec philosophie »… Ceci nous amène à constater que : 1° Si on
2892
la sagesse vulgaire appelle « prendre les choses
avec
philosophie »… Ceci nous amène à constater que : 1° Si on ne part pas
2893
s amène à constater que : 1° Si on ne part pas de
l’
acte, on ne part pas du tout. 2° Si on ne part pas tout de suite, on
2894
ne part pas tout de suite, on ne partira jamais.
Le
jeu des mots traduit ici le jeu des faits. Impossible de parler de l’
2895
on ne partira jamais. Le jeu des mots traduit ici
le
jeu des faits. Impossible de parler de l’acte dans un langage arrêté
2896
uit ici le jeu des faits. Impossible de parler de
l’
acte dans un langage arrêté ou détendu. Tout discours sur l’acte conti
2897
s un langage arrêté ou détendu. Tout discours sur
l’
acte contiendra nécessairement des mots tels que « départ », « partir
2898
partir » et « tout de suite ». Tout discours sur
l’
acte manifestera ce trouble, cette vibration, cette « nouveauté » déco
2899
ion, cette « nouveauté » déconcertante qui révèle
la
proximité de la réalité créante. Force nous est de reconnaître qu’un
2900
veauté » déconcertante qui révèle la proximité de
la
réalité créante. Force nous est de reconnaître qu’un tel discours, da
2901
nous est de reconnaître qu’un tel discours, dans
l’
état de notre philosophie, paraîtra peu philosophique. Personne, mieux
2902
té essentielle, et d’apparence scandaleuse, entre
l’
expression et l’existence. Bornons-nous à citer de lui une phrase bien
2903
et d’apparence scandaleuse, entre l’expression et
l’
existence. Bornons-nous à citer de lui une phrase bien typique par sa
2904
qui, par ailleurs, peut éclairer notre débat : «
L’
éthique ne commence pas dans une ignorance qu’il faudrait muer en savo
2905
réalisation. » Nous dirions en d’autres termes :
l’
acte n’est pas un problème, mais une donnée initiale, le seul donné qu
2906
n’est pas un problème, mais une donnée initiale,
le
seul donné qui se donne à soi-même. Or, cette donnée, d’une part, n’e
2907
donnée, d’une part, n’est pas réductible à ce qui
la
précède, d’autre part, n’est pas épuisée par l’analyse de ses effets.
2908
i la précède, d’autre part, n’est pas épuisée par
l’
analyse de ses effets. L’acte est à la fois créateur, et transcendant
2909
t, n’est pas épuisée par l’analyse de ses effets.
L’
acte est à la fois créateur, et transcendant à sa création. Il est cré
2910
ion. Il est créateur en ceci qu’il introduit dans
les
choses un rapport nouveau instituant une situation irréversible ; et
2911
e rapport nouveau on ne trouvera rien d’autre que
la
matière d’une problématique nouvelle, un donné, ou plutôt un « abando
2912
erminations objectives, et s’offrant à son tour à
l’
éclair bouleversant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte que dans le p
2913
ant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte que dans
le
présent, dans l’instant créateur, dans ce contact entre l’éternité et
2914
cte. Il n’y a eu d’acte que dans le présent, dans
l’
instant créateur, dans ce contact entre l’éternité et le temps, qui es
2915
t, dans l’instant créateur, dans ce contact entre
l’
éternité et le temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’
2916
ant créateur, dans ce contact entre l’éternité et
le
temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’on ne puisse r
2917
ce contact entre l’éternité et le temps, qui est
le
mystère même. Cela n’entraîne pas qu’on ne puisse rien dire des réact
2918
e puisse rien dire des réactions psychologiques à
l’
acte « as it’s known as », réactions qui, elles, se manifestent dans u
2919
manifestent dans une certaine durée de vibration.
Le
sentiment qui accompagne l’acte, c’est le sentiment d’indivision inté
2920
e durée de vibration. Le sentiment qui accompagne
l’
acte, c’est le sentiment d’indivision intérieure, d’indivision entre l
2921
ration. Le sentiment qui accompagne l’acte, c’est
le
sentiment d’indivision intérieure, d’indivision entre le vouloir et l
2922
iment d’indivision intérieure, d’indivision entre
le
vouloir et le pouvoir. On pourrait presque dire que c’est la sensatio
2923
sion intérieure, d’indivision entre le vouloir et
le
pouvoir. On pourrait presque dire que c’est la sensation de l’unité,
2924
et le pouvoir. On pourrait presque dire que c’est
la
sensation de l’unité, ou, plus exactement, de son accomplissement. C’
2925
n pourrait presque dire que c’est la sensation de
l’
unité, ou, plus exactement, de son accomplissement. C’est l’euphorie d
2926
u, plus exactement, de son accomplissement. C’est
l’
euphorie de celui qui éprouve simultanément la résistance d’un objet e
2927
est l’euphorie de celui qui éprouve simultanément
la
résistance d’un objet et la victoire sur cette résistance. Moment mys
2928
éprouve simultanément la résistance d’un objet et
la
victoire sur cette résistance. Moment mystérieux entre tous, où le ma
2929
ette résistance. Moment mystérieux entre tous, où
le
maximum de risque s’identifie au maximum de sécurité, dans la conscie
2930
e risque s’identifie au maximum de sécurité, dans
la
conscience de celui qui agit. Nous appellerions volontiers cet instan
2931
ui agit. Nous appellerions volontiers cet instant
le
saint des saints de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si la «
2932
ons volontiers cet instant le saint des saints de
la
réalité humaine, le lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comm
2933
nstant le saint des saints de la réalité humaine,
le
lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaar
2934
aint des saints de la réalité humaine, le lieu de
la
pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le
2935
s de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si
la
« pureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le vouloir uniqu
2936
ieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme
le
veut Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant l’être vivant et
2937
ureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est
le
vouloir unique, unifiant l’être vivant et le confondant un instant av
2938
ut Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant
l’
être vivant et le confondant un instant avec l’objet de son désir. On
2939
’est le vouloir unique, unifiant l’être vivant et
le
confondant un instant avec l’objet de son désir. On comprendra peut-ê
2940
nifiant l’être vivant et le confondant un instant
avec
l’objet de son désir. On comprendra peut-être mieux maintenant le rep
2941
nt l’être vivant et le confondant un instant avec
l’
objet de son désir. On comprendra peut-être mieux maintenant le reproc
2942
n désir. On comprendra peut-être mieux maintenant
le
reproche d’inactualité essentielle que nous adressions dès le début à
2943
d’inactualité essentielle que nous adressions dès
le
début à certains systèmes par ailleurs fort divers, mais dont l’exerc
2944
ains systèmes par ailleurs fort divers, mais dont
l’
exercice se trouve être lié à une division préalable de notre être, pa
2945
devenir historique, ou encore à une autonomie de
la
raison critique. Division qui a pour effet, généralement, de volatili
2946
on qui a pour effet, généralement, de volatiliser
les
points d’application de notre volonté, de relativiser tout effort cré
2947
r tout effort créateur, enfin de « dés-orienter »
l’
activité spécifique de la pensée. L’acte, étant essentiellement l’affi
2948
nfin de « dés-orienter » l’activité spécifique de
la
pensée. L’acte, étant essentiellement l’affirmation simultanée de l’u
2949
és-orienter » l’activité spécifique de la pensée.
L’
acte, étant essentiellement l’affirmation simultanée de l’un et du div
2950
fique de la pensée. L’acte, étant essentiellement
l’
affirmation simultanée de l’un et du divers, affirmation absurde en la
2951
philosophique sera amené, par son jeu logique, à
l’
éliminer ou à la disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la r
2952
era amené, par son jeu logique, à l’éliminer ou à
la
disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la réalité centrale,
2953
disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de
la
réalité centrale, impensable et qui permet de penser. Nous voudrions
2954
la réalité centrale, impensable et qui permet de
penser
. Nous voudrions dégager ici, à titre d’exemple, quelques-unes des con
2955
otre position. ⁂ Nous ne pouvons faire comprendre
la
véritable valeur d’une philosophie de l’acte qu’en montrant comment s
2956
mprendre la véritable valeur d’une philosophie de
l’
acte qu’en montrant comment ses caractères principaux, tels que nous v
2957
es caractères principaux, tels que nous venons de
les
indiquer, se retrouvent — comme reflétés — dans ses effets immédiats.
2958
voir affirmer qu’il n’y a pas de transition entre
l’
acte et ses effets. C’est l’acte lui-même qui se trouve être transitif
2959
s de transition entre l’acte et ses effets. C’est
l’
acte lui-même qui se trouve être transitif et novateur, sans qu’il y a
2960
, paradoxalement : il n’y a de transition que par
l’
acte, mais l’acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à
2961
ent : il n’y a de transition que par l’acte, mais
l’
acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de
2962
y a de transition que par l’acte, mais l’acte est
le
contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de ses effets,
2963
le contraire d’une transition. Avant de passer à
l’
examen de ses effets, rappelons encore deux caractéristiques de l’acte
2964
effets, rappelons encore deux caractéristiques de
l’
acte, impliquées d’ailleurs dans ce qui précède, et que nous allons ut
2965
, et que nous allons utiliser. La première, c’est
la
violence de l’acte. Quand on descend au fond de la notion de force, o
2966
llons utiliser. La première, c’est la violence de
l’
acte. Quand on descend au fond de la notion de force, on est obligé de
2967
a violence de l’acte. Quand on descend au fond de
la
notion de force, on est obligé de faire appel à l’idée de choc, de ru
2968
a notion de force, on est obligé de faire appel à
l’
idée de choc, de rupture, en un mot de violence (voir à cet égard Sore
2969
n’y a pas d’évolution créatrice sans révolution.
L’
acte sera donc agonique. D’autre part, l’acte implique un élan vers, p
2970
olution. L’acte sera donc agonique. D’autre part,
l’
acte implique un élan vers, pour reprendre l’expression du Dr Minkowsk
2971
art, l’acte implique un élan vers, pour reprendre
l’
expression du Dr Minkowski. L’acte est l’éclatement d’une tension orie
2972
ers, pour reprendre l’expression du Dr Minkowski.
L’
acte est l’éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi inten
2973
eprendre l’expression du Dr Minkowski. L’acte est
l’
éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi intention. Il n’
2974
ci que nous retrouvons, sous un aspect dynamique,
la
distinction esprit-matière que nous avions écartée tout d’abord. L’ac
2975
rit-matière que nous avions écartée tout d’abord.
L’
acte créateur sépare la lumière des ténèbres. Son caractère dichotomiq
2976
ions écartée tout d’abord. L’acte créateur sépare
la
lumière des ténèbres. Son caractère dichotomique n’est pas isolé de s
2977
e son caractère agonique. Ce n’est pas à dire que
la
lumière et les ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il ne
2978
e agonique. Ce n’est pas à dire que la lumière et
les
ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il ne serait pas créa
2979
e la lumière et les ténèbres soient données avant
l’
acte, car sinon il ne serait pas créateur, c’est-à-dire qu’il ne serai
2980
créateur, c’est-à-dire qu’il ne serait pas acte.
L’
acte n’a qu’un point d’application, le chaos, la discorde, le non-être
2981
t pas acte. L’acte n’a qu’un point d’application,
le
chaos, la discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui e
2982
. L’acte n’a qu’un point d’application, le chaos,
la
discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau
2983
qu’un point d’application, le chaos, la discorde,
le
non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pa
2984
end à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pas
le
désordre, c’est l’ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets q
2985
qui est nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est
l’
ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait hum
2986
nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est l’ordre.
L’
acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait humainement
2987
ent lié à ses effets qu’on ne saurait humainement
le
séparer du premier d’entre eux, qui est l’affirmation de la personnal
2988
nement le séparer du premier d’entre eux, qui est
l’
affirmation de la personnalité. Nous définissons la personne comme l’i
2989
du premier d’entre eux, qui est l’affirmation de
la
personnalité. Nous définissons la personne comme l’individu qui se sa
2990
’affirmation de la personnalité. Nous définissons
la
personne comme l’individu qui se sait et se veut engagé dans le confl
2991
personnalité. Nous définissons la personne comme
l’
individu qui se sait et se veut engagé dans le conflit créateur. Mais
2992
mme l’individu qui se sait et se veut engagé dans
le
conflit créateur. Mais en s’affirmant, c’est-à-dire en changeant de p
2993
, c’est-à-dire en changeant de plan, en allant de
l’
angoisse à la création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la
2994
e en changeant de plan, en allant de l’angoisse à
la
création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité
2995
e plan, en allant de l’angoisse à la création, de
l’
impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore
2996
tion, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau,
la
personnalité accentue encore la tension. Le nouvel état du conflit es
2997
l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore
la
tension. Le nouvel état du conflit est plus aigu que l’ancien. Au fur
2998
veau, la personnalité accentue encore la tension.
Le
nouvel état du conflit est plus aigu que l’ancien. Au fur et à mesure
2999
sion. Le nouvel état du conflit est plus aigu que
l’
ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère, la personnalité se risqu
3000
e l’ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère,
la
personnalité se risque de plus en plus. C’est pourquoi les époques de
3001
nnalité se risque de plus en plus. C’est pourquoi
les
époques de conciliation sont des époques de décadence. Le salut n’est
3002
es de conciliation sont des époques de décadence.
Le
salut n’est jamais dans le repli, dans le refus du conflit concret. L
3003
époques de décadence. Le salut n’est jamais dans
le
repli, dans le refus du conflit concret. L’invention de l’homme « int
3004
adence. Le salut n’est jamais dans le repli, dans
le
refus du conflit concret. L’invention de l’homme « intérieur » suppos
3005
dans le repli, dans le refus du conflit concret.
L’
invention de l’homme « intérieur » suppose et permet celle du « robot
3006
dans le refus du conflit concret. L’invention de
l’
homme « intérieur » suppose et permet celle du « robot » d’affaires. L
3007
suppose et permet celle du « robot » d’affaires.
L’
autisme est un fléchissement de la personnalité. D’une manière général
3008
t » d’affaires. L’autisme est un fléchissement de
la
personnalité. D’une manière générale, l’acte personnel revêtira donc
3009
ement de la personnalité. D’une manière générale,
l’
acte personnel revêtira donc deux aspects, symbolisant les pôles de ce
3010
personnel revêtira donc deux aspects, symbolisant
les
pôles de cette tension qui constitue le ressort de l’activité elle-mê
3011
bolisant les pôles de cette tension qui constitue
le
ressort de l’activité elle-même. D’un côté, il y aura une joie créatr
3012
ôles de cette tension qui constitue le ressort de
l’
activité elle-même. D’un côté, il y aura une joie créatrice, une consc
3013
e créatrice, une conscience de libération qui est
la
jouissance spécifiquement humaine. De l’autre côté, on trouvera une é
3014
aits. D’un côté, un champ plus libre conquis pour
l’
esprit, de l’autre une pression accrue sur l’inerte. Risque par conséq
3015
pour l’esprit, de l’autre une pression accrue sur
l’
inerte. Risque par conséquent accru aussi, puisque la tentation de l’i
3016
nerte. Risque par conséquent accru aussi, puisque
la
tentation de l’inertie augmentera en raison même de la plus grande do
3017
r conséquent accru aussi, puisque la tentation de
l’
inertie augmentera en raison même de la plus grande docilité de l’iner
3018
ntation de l’inertie augmentera en raison même de
la
plus grande docilité de l’inerte. Il est plus difficile d’échapper au
3019
tera en raison même de la plus grande docilité de
l’
inerte. Il est plus difficile d’échapper au prestige du positivisme et
3020
à prières. Il est plus difficile de maintenir sur
le
qui-vive un empire qu’une cité étroite. En effet, à l’intérieur même
3021
i-vive un empire qu’une cité étroite. En effet, à
l’
intérieur même de l’empire, s’établit un danger qu’ignorent les pays d
3022
une cité étroite. En effet, à l’intérieur même de
l’
empire, s’établit un danger qu’ignorent les pays de marche. Le sentime
3023
même de l’empire, s’établit un danger qu’ignorent
les
pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de l’ennui, du vide, tra
3024
établit un danger qu’ignorent les pays de marche.
Le
sentiment de la sécurité, de l’ennui, du vide, traduit un fléchisseme
3025
r qu’ignorent les pays de marche. Le sentiment de
la
sécurité, de l’ennui, du vide, traduit un fléchissement de la tension
3026
s pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de
l’
ennui, du vide, traduit un fléchissement de la tension. L’adoration de
3027
de l’ennui, du vide, traduit un fléchissement de
la
tension. L’adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’inv
3028
du vide, traduit un fléchissement de la tension.
L’
adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’
3029
it un fléchissement de la tension. L’adoration de
l’
abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’acte gratuit, c
3030
nsion. L’adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de
la
formule, l’invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans p
3031
ration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule,
l’
invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans point d’appui
3032
trait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de
l’
acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans point d’appui et sans orient
3033
e, l’invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de
l’
acte sans point d’appui et sans orientation, autrement dit de l’acte i
3034
int d’appui et sans orientation, autrement dit de
l’
acte impossible, sont des exemples de ce fléchissement. La tentation d
3035
mpossible, sont des exemples de ce fléchissement.
La
tentation de l’acte gratuit n’est qu’une forme moderne de la tentatio
3036
des exemples de ce fléchissement. La tentation de
l’
acte gratuit n’est qu’une forme moderne de la tentation de l’inerte. C
3037
n de l’acte gratuit n’est qu’une forme moderne de
la
tentation de l’inerte. C’est un vertige de la personnalité consécutif
3038
uit n’est qu’une forme moderne de la tentation de
l’
inerte. C’est un vertige de la personnalité consécutif au relâchement
3039
de la tentation de l’inerte. C’est un vertige de
la
personnalité consécutif au relâchement de la tension et à la perte du
3040
e de la personnalité consécutif au relâchement de
la
tension et à la perte du sentiment du risque véritable. À côté de la
3041
lité consécutif au relâchement de la tension et à
la
perte du sentiment du risque véritable. À côté de la réalité de la pe
3042
perte du sentiment du risque véritable. À côté de
la
réalité de la personne, une autre réalité immédiate à l’acte, c’est é
3043
ment du risque véritable. À côté de la réalité de
la
personne, une autre réalité immédiate à l’acte, c’est évidemment la c
3044
ité de la personne, une autre réalité immédiate à
l’
acte, c’est évidemment la connaissance. Non seulement la pensée est ac
3045
utre réalité immédiate à l’acte, c’est évidemment
la
connaissance. Non seulement la pensée est acte, mais elle est ce qu’i
3046
, c’est évidemment la connaissance. Non seulement
la
pensée est acte, mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans l’ac
3047
, mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans
l’
acte. Ce qui a pu tromper sur ce point, c’est précisément que, la pens
3048
a pu tromper sur ce point, c’est précisément que,
la
pensée étant la plus immédiate des mises en ordre, la raison est tent
3049
ce point, c’est précisément que, la pensée étant
la
plus immédiate des mises en ordre, la raison est tentée de confondre
3050
ensée étant la plus immédiate des mises en ordre,
la
raison est tentée de confondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet,
3051
confondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet,
avec
le dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de la pensée créat
3052
ondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet, avec
le
dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de la pensée créatric
3053
ynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de
la
pensée créatrice, c’est cela que nous appelons sa faculté dichotomiqu
3054
t cela que nous appelons sa faculté dichotomique.
La
science nous en donnera un bon exemple. En tant qu’activité, elle peu
3055
le. En tant qu’activité, elle peut se définir par
l’
invention de l’abstrait, c’est-à-dire de l’homogénéité mathématique. E
3056
activité, elle peut se définir par l’invention de
l’
abstrait, c’est-à-dire de l’homogénéité mathématique. Elle apparaît ai
3057
ir par l’invention de l’abstrait, c’est-à-dire de
l’
homogénéité mathématique. Elle apparaît ainsi comme un va-et-vient du
3058
pparaît ainsi comme un va-et-vient du « donné » à
l’
abstrait. (Conflit de l’identité et de la réalité, voir Meyerson). Il
3059
a-et-vient du « donné » à l’abstrait. (Conflit de
l’
identité et de la réalité, voir Meyerson). Il n’y a de paradoxe épisté
3060
onné » à l’abstrait. (Conflit de l’identité et de
la
réalité, voir Meyerson). Il n’y a de paradoxe épistémologique que pou
3061
oxe épistémologique que pour qui refuse d’aborder
le
problème de la connaissance à partir de l’acte. Mais, au contraire, l
3062
ique que pour qui refuse d’aborder le problème de
la
connaissance à partir de l’acte. Mais, au contraire, la science, cons
3063
border le problème de la connaissance à partir de
l’
acte. Mais, au contraire, la science, considérée maintenant comme monu
3064
naissance à partir de l’acte. Mais, au contraire,
la
science, considérée maintenant comme monument ou système de règles, n
3065
e qu’un aspect provisoirement favorable du chaos.
La
vérité scientifique est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint le
3066
vorable du chaos. La vérité scientifique est dans
l’
abstrait ; la science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que
3067
aos. La vérité scientifique est dans l’abstrait ;
la
science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que pour le sava
3068
ue est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint
le
donné. Mais cela n’est vrai que pour le savant seulement au moment où
3069
e rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que pour
le
savant seulement au moment où il crée ; pour les autres hommes, la sc
3070
r le savant seulement au moment où il crée ; pour
les
autres hommes, la science se traduit par une économie d’énergie et de
3071
nt au moment où il crée ; pour les autres hommes,
la
science se traduit par une économie d’énergie et de pensée, d’où cett
3072
onomie d’énergie et de pensée, d’où cette zone où
l’
homme marche sur de l’art humain en toute sécurité et en plein automat
3073
pensée, d’où cette zone où l’homme marche sur de
l’
art humain en toute sécurité et en plein automatisme (exemple : les gr
3074
toute sécurité et en plein automatisme (exemple :
les
grandes villes). Le progrès scientifique accroît sans cesse ce risque
3075
plein automatisme (exemple : les grandes villes).
Le
progrès scientifique accroît sans cesse ce risque d’automatisme, ranç
3076
oît sans cesse ce risque d’automatisme, rançon de
la
conquête2. À tous les étages et dans tous les domaines de l’effort de
3077
que d’automatisme, rançon de la conquête2. À tous
les
étages et dans tous les domaines de l’effort de pensée nous retrouvon
3078
n de la conquête2. À tous les étages et dans tous
les
domaines de l’effort de pensée nous retrouvons ce risque, né du carac
3079
2. À tous les étages et dans tous les domaines de
l’
effort de pensée nous retrouvons ce risque, né du caractère ordonnateu
3080
rouvons ce risque, né du caractère ordonnateur de
l’
activité humaine. Ainsi dans l’organisation du travail. La machine ten
3081
ère ordonnateur de l’activité humaine. Ainsi dans
l’
organisation du travail. La machine tend à détruire l’artisanat, c’est
3082
té humaine. Ainsi dans l’organisation du travail.
La
machine tend à détruire l’artisanat, c’est-à-dire la zone du travail
3083
ganisation du travail. La machine tend à détruire
l’
artisanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où l’œuvre garde un
3084
machine tend à détruire l’artisanat, c’est-à-dire
la
zone du travail manuel où l’œuvre garde un caractère plus ou moins ne
3085
isanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où
l’
œuvre garde un caractère plus ou moins net de totalité. En d’autres te
3086
lus ou moins net de totalité. En d’autres termes,
la
machine sépare le travail qualifié, qu’elle repousse vers l’activité
3087
e totalité. En d’autres termes, la machine sépare
le
travail qualifié, qu’elle repousse vers l’activité spirituelle, du tr
3088
sépare le travail qualifié, qu’elle repousse vers
l’
activité spirituelle, du travail non qualifié, où l’homme ne joue plus
3089
activité spirituelle, du travail non qualifié, où
l’
homme ne joue plus qu’un rôle d’exécuteur. Remarquons que la machine n
3090
joue plus qu’un rôle d’exécuteur. Remarquons que
la
machine n’est que le prolongement d’un schéma mathématique, et qu’ell
3091
d’exécuteur. Remarquons que la machine n’est que
le
prolongement d’un schéma mathématique, et qu’elle est elle-même prolo
3092
hématique, et qu’elle est elle-même prolongée par
la
rationalisation. Nous avons là un exemple saisissant de la progressio
3093
alisation. Nous avons là un exemple saisissant de
la
progression par dichotomie. Progression réelle, créant un double risq
3094
le, créant un double risque non moins réel, ou si
l’
on veut, une double tentation. Car, d’une part, renoncer à la machine
3095
une double tentation. Car, d’une part, renoncer à
la
machine ce serait en quelque sorte renoncer au sens même de l’activit
3096
serait en quelque sorte renoncer au sens même de
l’
activité humaine ; mais, d’autre part, la domination de la machine ser
3097
même de l’activité humaine ; mais, d’autre part,
la
domination de la machine serait le résultat fatal du renoncement à la
3098
té humaine ; mais, d’autre part, la domination de
la
machine serait le résultat fatal du renoncement à la valeur éthique d
3099
d’autre part, la domination de la machine serait
le
résultat fatal du renoncement à la valeur éthique de la science en ta
3100
machine serait le résultat fatal du renoncement à
la
valeur éthique de la science en tant qu’acte (tentation à laquelle no
3101
ultat fatal du renoncement à la valeur éthique de
la
science en tant qu’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder l
3102
’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder
l’
expérimentalisme positiviste). Un troisième exemple de tension et d’ac
3103
exemple de tension et d’acte nous est fourni par
l’
homme considéré du point de vue social. D’un côté, nous trouvons l’att
3104
du point de vue social. D’un côté, nous trouvons
l’
attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambian
3105
social. D’un côté, nous trouvons l’attachement de
l’
homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’hom
3106
un côté, nous trouvons l’attachement de l’homme à
la
terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut
3107
s trouvons l’attachement de l’homme à la terre, à
la
famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renon
3108
ttachement de l’homme à la terre, à la famille, à
la
race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans brise
3109
de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à
l’
ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans briser son resso
3110
e, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale.
L’
homme ne peut pas y renoncer sans briser son ressort. Remarquons que c
3111
r son ressort. Remarquons que cet attachement est
la
marque de l’humanité. Mais, d’autre part, l’homme n’existe personnell
3112
. Remarquons que cet attachement est la marque de
l’
humanité. Mais, d’autre part, l’homme n’existe personnellement qu’auta
3113
est la marque de l’humanité. Mais, d’autre part,
l’
homme n’existe personnellement qu’autant qu’il s’affirme en acte. Quan
3114
eur humaine, c’est à une société de personnes que
l’
on pense. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Ori
3115
umaine, c’est à une société de personnes que l’on
pense
. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Originalité
3116
c’est à une société de personnes que l’on pense.
L’
homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Originalité écl
3117
té de personnes que l’on pense. L’homme n’atteint
l’
universel qu’à travers le personnel. Originalité éclatante, inoubliabl
3118
pense. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers
le
personnel. Originalité éclatante, inoubliable, paradoxale, de la soci
3119
riginalité éclatante, inoubliable, paradoxale, de
la
société humaine, qui lui permet de se dépasser elle-même. L’homme con
3120
humaine, qui lui permet de se dépasser elle-même.
L’
homme concret, l’homme vivant, l’homme en acte est l’affirmation d’une
3121
permet de se dépasser elle-même. L’homme concret,
l’
homme vivant, l’homme en acte est l’affirmation d’une tension permanen
3122
asser elle-même. L’homme concret, l’homme vivant,
l’
homme en acte est l’affirmation d’une tension permanente entre ces deu
3123
omme concret, l’homme vivant, l’homme en acte est
l’
affirmation d’une tension permanente entre ces deux pôles de l’amour :
3124
d’une tension permanente entre ces deux pôles de
l’
amour : l’attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l
3125
sion permanente entre ces deux pôles de l’amour :
l’
attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l’universel
3126
entre ces deux pôles de l’amour : l’attachement à
la
diversité concrète, et l’actualisation de l’universel par la charité
3127
amour : l’attachement à la diversité concrète, et
l’
actualisation de l’universel par la charité personnaliste. ⁂ Pour évit
3128
nt à la diversité concrète, et l’actualisation de
l’
universel par la charité personnaliste. ⁂ Pour éviter un malentendu es
3129
é concrète, et l’actualisation de l’universel par
la
charité personnaliste. ⁂ Pour éviter un malentendu essentiel, nous te
3130
tiel, nous tenons à souligner encore en terminant
le
caractère d’instantanéité de l’acte créateur. Nous affirmons ainsi ce
3131
core en terminant le caractère d’instantanéité de
l’
acte créateur. Nous affirmons ainsi ce qui nous paraît spécifique de l
3132
affirmons ainsi ce qui nous paraît spécifique de
l’
effort et de la pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le
3133
i ce qui nous paraît spécifique de l’effort et de
la
pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le
3134
t spécifique de l’effort et de la pensée humaine.
La
pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le plus humain. Mais
3135
e la pensée humaine. La pensée créatrice est donc
l’
acte le plus pur et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos
3136
nsée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte
le
plus pur et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos yeux c
3137
a pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et
le
plus humain. Mais comment va se présenter à nos yeux ce qui n’est pas
3138
présenter à nos yeux ce qui n’est pas immédiat à
l’
acte ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de t
3139
? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier
la
réalité de toute médiation ? Assurément l’évidence de l’acte, non seu
3140
à nier la réalité de toute médiation ? Assurément
l’
évidence de l’acte, non seulement prime tout pour nous, mais constitue
3141
ité de toute médiation ? Assurément l’évidence de
l’
acte, non seulement prime tout pour nous, mais constitue, comme nous l
3142
prime tout pour nous, mais constitue, comme nous
l’
avons dit, le point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus
3143
our nous, mais constitue, comme nous l’avons dit,
le
point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus favorable à
3144
nous l’avons dit, le point de départ nécessaire,
la
supra-rationalité la plus favorable à l’édification de toute construc
3145
point de départ nécessaire, la supra-rationalité
la
plus favorable à l’édification de toute construction humaine, même et
3146
essaire, la supra-rationalité la plus favorable à
l’
édification de toute construction humaine, même et surtout rationnelle
3147
elle. Mais si nous rejetons toute médiation entre
l’
acte et ses manifestations humaines, nous ne saurions écarter la réali
3148
manifestations humaines, nous ne saurions écarter
la
réalité des résistances à cette activité. Ce n’est que dans certains
3149
n’est que dans certains domaines très étroits de
la
pensée que ces résistances sont assez nettement brisées pour conférer
3150
nces sont assez nettement brisées pour conférer à
la
création issue de l’acte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs
3151
ment brisées pour conférer à la création issue de
l’
acte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs, les résistances son
3152
cte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs,
les
résistances sont étroitement mêlées à toutes les manifestations d’act
3153
les résistances sont étroitement mêlées à toutes
les
manifestations d’activité. La médiation ne se manifeste pour nous que
3154
nt mêlées à toutes les manifestations d’activité.
La
médiation ne se manifeste pour nous que sous forme de résistance. Il
3155
ésistances plus ou moins favorables au ressort de
l’
activité, comme certains climats ou certains pays se prêtent mieux au
3156
mais ce ne sont jamais que des résistances. Entre
les
deux pôles de la tension, il n’y a ni identité, ni égalité, justement
3157
mais que des résistances. Entre les deux pôles de
la
tension, il n’y a ni identité, ni égalité, justement parce que l’un d
3158
ité, justement parce que l’un d’entre eux attache
l’
homme aux autres formes de la vie, tandis que le second affirme la tra
3159
d’entre eux attache l’homme aux autres formes de
la
vie, tandis que le second affirme la transcendance de l’acte. Étant o
3160
es formes de la vie, tandis que le second affirme
la
transcendance de l’acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humai
3161
tandis que le second affirme la transcendance de
l’
acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humaine ne saurait donc c
3162
e la transcendance de l’acte. Étant orientée vers
l’
acte, la tension humaine ne saurait donc considérer toute médiation qu
3163
nscendance de l’acte. Étant orientée vers l’acte,
la
tension humaine ne saurait donc considérer toute médiation que comme
3164
istance à son effort immédiat, ou, pour reprendre
l’
expression vigoureuse de Kierkegaard, comme « un attentat métaphysique
3165
rkegaard, comme « un attentat métaphysique contre
l’
éthique ». Il faut, certes, que l’homme trouve des points d’appui et g
3166
physique contre l’éthique ». Il faut, certes, que
l’
homme trouve des points d’appui et garde une participation avec ce qui
3167
uve des points d’appui et garde une participation
avec
ce qui n’est pas personnel. Mais cette nécessité ne reprend sa valeur
3168
ais cette nécessité ne reprend sa valeur que dans
la
tension active dirigée tout entière vers l’affirmation du personnalis
3169
dans la tension active dirigée tout entière vers
l’
affirmation du personnalisme. Dans les divers ordres de l’activité hum
3170
entière vers l’affirmation du personnalisme. Dans
les
divers ordres de l’activité humaine, l’acte instantané ne fera brille
3171
ation du personnalisme. Dans les divers ordres de
l’
activité humaine, l’acte instantané ne fera briller son éclair que bie
3172
me. Dans les divers ordres de l’activité humaine,
l’
acte instantané ne fera briller son éclair que bien rarement. Les conf
3173
ané ne fera briller son éclair que bien rarement.
Les
conflits contre le temps, contre l’espace, contre la matière, qui rep
3174
son éclair que bien rarement. Les conflits contre
le
temps, contre l’espace, contre la matière, qui reprennent ici en tant
3175
en rarement. Les conflits contre le temps, contre
l’
espace, contre la matière, qui reprennent ici en tant que résistance à
3176
conflits contre le temps, contre l’espace, contre
la
matière, qui reprennent ici en tant que résistance à l’effort une sor
3177
ière, qui reprennent ici en tant que résistance à
l’
effort une sorte de réalité indépendante, ne donnent que rarement l’oc
3178
de réalité indépendante, ne donnent que rarement
l’
occasion d’une victoire évidente ; mais dans tous les domaines de l’ac
3179
occasion d’une victoire évidente ; mais dans tous
les
domaines de l’activité humaine la pensée dichotomique maintiendra cet
3180
ictoire évidente ; mais dans tous les domaines de
l’
activité humaine la pensée dichotomique maintiendra cette volonté : li
3181
mais dans tous les domaines de l’activité humaine
la
pensée dichotomique maintiendra cette volonté : libérer la personnali
3182
dichotomique maintiendra cette volonté : libérer
la
personnalité, dégager l’instantanéité de l’acte. 1. Ce qui ne signi
3183
cette volonté : libérer la personnalité, dégager
l’
instantanéité de l’acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que la pe
3184
bérer la personnalité, dégager l’instantanéité de
l’
acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que la pensée doive être sou
3185
e l’acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que
la
pensée doive être soumise à l’action — bien au contraire ! — mais que
3186
ie pas du tout que la pensée doive être soumise à
l’
action — bien au contraire ! — mais que le risque de penser est actuel
3187
umise à l’action — bien au contraire ! — mais que
le
risque de penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les papier
3188
ion — bien au contraire ! — mais que le risque de
penser
est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les papiers posthumes d’Arn
3189
penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans
les
papiers posthumes d’Arnaud Dandieu quelques lignes qui me paraissent
3190
opres à éclairer ce dernier paragraphe (D. R.). «
Le
seuil qui sépare le prélogique du logique, où est-il donc ? Le point
3191
dernier paragraphe (D. R.). « Le seuil qui sépare
le
prélogique du logique, où est-il donc ? Le point est d’importance car
3192
sépare le prélogique du logique, où est-il donc ?
Le
point est d’importance car il nous éclairera un peu sur la nature int
3193
est d’importance car il nous éclairera un peu sur
la
nature intime de l’acte créateur, dans la mesure où elle est saisissa
3194
il nous éclairera un peu sur la nature intime de
l’
acte créateur, dans la mesure où elle est saisissable. En effet, de to
3195
peu sur la nature intime de l’acte créateur, dans
la
mesure où elle est saisissable. En effet, de tous les seuils irration
3196
mesure où elle est saisissable. En effet, de tous
les
seuils irrationnels que l’homme puisse passer, c’est sans doute le se
3197
le. En effet, de tous les seuils irrationnels que
l’
homme puisse passer, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas la
3198
nnels que l’homme puisse passer, c’est sans doute
le
seul qui ne lui coûte pas la vie. Or, ce seuil, comme le montre clair
3199
er, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas
la
vie. Or, ce seuil, comme le montre clairement M. Lévy-Bruhl, notammen
3200
qui ne lui coûte pas la vie. Or, ce seuil, comme
le
montre clairement M. Lévy-Bruhl, notamment dans la conférence qu’il a
3201
e montre clairement M. Lévy-Bruhl, notamment dans
la
conférence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il le passe chaque
3202
amment dans la conférence qu’il a faite à Oxford,
le
19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il pense, encore que peut-êtr
3203
érence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il
le
passe chaque fois qu’il pense, encore que peut-être l’acte de penser,
3204
rd, le 19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il
pense
, encore que peut-être l’acte de penser, au sens plein et cartésien du
3205
sse chaque fois qu’il pense, encore que peut-être
l’
acte de penser, au sens plein et cartésien du mot, soit infiniment plu
3206
fois qu’il pense, encore que peut-être l’acte de
penser
, au sens plein et cartésien du mot, soit infiniment plus difficile et
3207
n, il est indispensable de marquer très fortement
l’
influence qu’exerce ce seuil sur toute la vie humaine et, probablement
3208
ortement l’influence qu’exerce ce seuil sur toute
la
vie humaine et, probablement, sur la vie en général. Cela est d’autan
3209
il sur toute la vie humaine et, probablement, sur
la
vie en général. Cela est d’autant plus nécessaire que de même que la
3210
Cela est d’autant plus nécessaire que de même que
la
science a longtemps refusé de faire entrer dans ses constructions le
3211
mps refusé de faire entrer dans ses constructions
le
principe de Carnot, et qu’elle n’a accepté l’irréversibilité qu’il re
3212
ons le principe de Carnot, et qu’elle n’a accepté
l’
irréversibilité qu’il recèle, que pour en tourner l’irrationalité fonc
3213
irréversibilité qu’il recèle, que pour en tourner
l’
irrationalité foncière à l’aide d’une loi statistique, de même la méth
3214
e, que pour en tourner l’irrationalité foncière à
l’
aide d’une loi statistique, de même la méthode sociologique qui a cond
3215
foncière à l’aide d’une loi statistique, de même
la
méthode sociologique qui a conduit à la découverte de la véritable na
3216
, de même la méthode sociologique qui a conduit à
la
découverte de la véritable nature de la mentalité prélogique, hésite
3217
ode sociologique qui a conduit à la découverte de
la
véritable nature de la mentalité prélogique, hésite à faire la part d
3218
conduit à la découverte de la véritable nature de
la
mentalité prélogique, hésite à faire la part de l’orientation humaine
3219
nature de la mentalité prélogique, hésite à faire
la
part de l’orientation humaine qui s’exprime par une affirmation crois
3220
a mentalité prélogique, hésite à faire la part de
l’
orientation humaine qui s’exprime par une affirmation croissante de la
3221
e qui s’exprime par une affirmation croissante de
la
discontinuité explosive sous forme d’individualisation ou de création
3222
de création intellectuelle. Notre science n’est à
l’
aise que dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle mul
3223
llectuelle. Notre science n’est à l’aise que dans
le
continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle multiplie par son p
3224
à l’aise que dans le continu et elle fait surgir
le
discontinu qu’elle multiplie par son progrès même. Elle ne connaît qu
3225
aît que du probable et, en tant qu’acte, elle est
l’
improbabilité essentielle. Paradoxe que M. Meyerson a décrit sous le n
3226
sentielle. Paradoxe que M. Meyerson a décrit sous
le
nom de paradoxe épistémologique. » (Arnaud Dandieu). a. Rougemont
3227
. » (Arnaud Dandieu). a. Rougemont Denis de, «
L’
Acte comme point de départ », Recherches philosophiques, Paris, 1936–1
3228
73, p. 55-64. b. Texte daté de 1933 et co-rédigé
avec
Arnaud Dandieu.
3229
ons des Clubs de presse (30 janvier 1937)f g
Les
raisons Chacun sait et éprouve chaque jour, que l’état des dépenda
3230
aisons Chacun sait et éprouve chaque jour, que
l’
état des dépendances financières ou des partisanneries politiques qui
3231
ou des partisanneries politiques qui est celui de
la
presse française, rend à peu près impossibles une documentation objec
3232
cumentation objective et une information sincère.
Le
procès de la presse n’est plus à faire. Sa réforme pose tant de probl
3233
bjective et une information sincère. Le procès de
la
presse n’est plus à faire. Sa réforme pose tant de problèmes et entra
3234
nt de problèmes et entraîne de telles incidences (
les
dangers d’une information d’État : Tass ou DNB sont aussi graves que
3235
dre qu’elle ne puisse s’accomplir isolément. Seul
le
redressement radical et général d’un régime économique où règne aujou
3236
néral d’un régime économique où règne aujourd’hui
l’
argent, libérera l’information. Ce n’est qu’en attaquant l’ensemble de
3237
conomique où règne aujourd’hui l’argent, libérera
l’
information. Ce n’est qu’en attaquant l’ensemble des trusts qu’on atte
3238
libérera l’information. Ce n’est qu’en attaquant
l’
ensemble des trusts qu’on atteindra celui des journaux. Le but L
3239
des trusts qu’on atteindra celui des journaux.
Le
but L’objet des « Clubs de presse », en même temps que de préparer
3240
qu’on atteindra celui des journaux. Le but
L’
objet des « Clubs de presse », en même temps que de préparer et d’accé
3241
ournir dès à présent à tous ceux qui en éprouvent
le
pressant besoin, les premiers éléments d’une information honnête, et
3242
onditions et aux méthodes aujourd’hui faussées de
la
grande presse imprimée. Le principe Ce sont les mêmes procédés
3243
urd’hui faussées de la grande presse imprimée.
Le
principe Ce sont les mêmes procédés techniques (imprimerie, grand
3244
grande presse imprimée. Le principe Ce sont
les
mêmes procédés techniques (imprimerie, grand tirage, publicité, centr
3245
ge, publicité, centralisation, etc.) qui ont fait
le
succès de la presse moderne, qui font aujourd’hui son servage. « L’im
3246
, centralisation, etc.) qui ont fait le succès de
la
presse moderne, qui font aujourd’hui son servage. « L’imprimé » qui é
3247
esse moderne, qui font aujourd’hui son servage. «
L’
imprimé » qui était, il y a trente ans, synonyme dans l’opinion popula
3248
imé » qui était, il y a trente ans, synonyme dans
l’
opinion populaire, de vérité, est devenu pour le public, synonyme de m
3249
s l’opinion populaire, de vérité, est devenu pour
le
public, synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant que la question
3250
synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant que
la
question puisse être attaquée et résolue de front — de tourner la dif
3251
se être attaquée et résolue de front — de tourner
la
difficulté en remontant à la source, en renouvelant le mode primitif
3252
e front — de tourner la difficulté en remontant à
la
source, en renouvelant le mode primitif de l’information, l’informati
3253
fficulté en remontant à la source, en renouvelant
le
mode primitif de l’information, l’information directe, personnelle et
3254
t à la source, en renouvelant le mode primitif de
l’
information, l’information directe, personnelle et orale. Déjà aujourd
3255
en renouvelant le mode primitif de l’information,
l’
information directe, personnelle et orale. Déjà aujourd’hui, devant la
3256
e, personnelle et orale. Déjà aujourd’hui, devant
la
carence ou la subversion de l’information officielle, chercher à obte
3257
et orale. Déjà aujourd’hui, devant la carence ou
la
subversion de l’information officielle, chercher à obtenir, par des c
3258
ujourd’hui, devant la carence ou la subversion de
l’
information officielle, chercher à obtenir, par des contacts personnel
3259
ée qui se crée spontanément, d’établir dans toute
la
France, un vaste réseau entre les hommes de bonne volonté. Les org
3260
ablir dans toute la France, un vaste réseau entre
les
hommes de bonne volonté. Les organismes On constitue, dans le p
3261
aste réseau entre les hommes de bonne volonté.
Les
organismes On constitue, dans le plus grand nombre possible de loc
3262
volonté. Les organismes On constitue, dans
le
plus grand nombre possible de localités un « Club de presse ». Les ad
3263
mbre possible de localités un « Club de presse ».
Les
adhérents se réunissent une fois par semaine, pour recevoir et apport
3264
t une fois par semaine, pour recevoir et apporter
les
éléments de cette nouvelle forme d’informations. Le travail est centr
3265
éléments de cette nouvelle forme d’informations.
Le
travail est centralisé par un « Comité central des informations », si
3266
que semaine un bulletin dactylographié condensant
les
résultats acquis. Il s’établit ainsi, en quelque sorte, un double cou
3267
ainsi, en quelque sorte, un double courant entre
la
base et le sommet, qui, après recoupements et vérifications, permet d
3268
quelque sorte, un double courant entre la base et
le
sommet, qui, après recoupements et vérifications, permet d’élaborer u
3269
e matière définitive. Il convient de préciser que
le
bulletin n’est pas distribué. Il est adressé personnellement et confi
3270
ement au président responsable de chaque club qui
le
communique à ses adhérents. Ceux-ci ne sont pas de simples lecteurs p
3271
actifs, qui participent à une œuvre commune, dans
le
cadre du Club privé dont ils acceptent les statuts. Il faut encore aj
3272
e, dans le cadre du Club privé dont ils acceptent
les
statuts. Il faut encore ajouter que le « Comité central d’information
3273
acceptent les statuts. Il faut encore ajouter que
le
« Comité central d’informations » qui rédige le bulletin, n’a pas seu
3274
e le « Comité central d’informations » qui rédige
le
bulletin, n’a pas seulement à sa disposition les renseignements que l
3275
e le bulletin, n’a pas seulement à sa disposition
les
renseignements que lui fournissent les clubs de base. Composé lui-mêm
3276
isposition les renseignements que lui fournissent
les
clubs de base. Composé lui-même de journalistes, d’économistes, de fi
3277
s, de financiers, de militants, il utilise toutes
les
Informations directes dans les agences, les rédactions, le parlement,
3278
il utilise toutes les Informations directes dans
les
agences, les rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux fin
3279
outes les Informations directes dans les agences,
les
rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par
3280
ations directes dans les agences, les rédactions,
le
parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de
3281
s dans les agences, les rédactions, le parlement,
les
syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de sa composition
3282
ces, les rédactions, le parlement, les syndicats,
les
milieux financiers… Par la diversité de sa composition professionnell
3283
ement, les syndicats, les milieux financiers… Par
la
diversité de sa composition professionnelle, par l’étendue de ses ram
3284
diversité de sa composition professionnelle, par
l’
étendue de ses ramifications, il vise à ne délaisser aucune source, à
3285
e délaisser aucune source, à tenir compte de tous
les
points de vue. Le programme Le bulletin se divise en trois part
3286
rce, à tenir compte de tous les points de vue.
Le
programme Le bulletin se divise en trois parties 1° une partie pol
3287
pte de tous les points de vue. Le programme
Le
bulletin se divise en trois parties 1° une partie politique positive
3288
appréciations, sur chacun des faits importants de
la
semaine. Cette première partie doit donner aux membres des clubs, une
3289
sorte de revue de presse commentée. On y relèvera
les
contradictions et les déformations de la grande presse ou de la press
3290
se commentée. On y relèvera les contradictions et
les
déformations de la grande presse ou de la presse d’opinion, en donnan
3291
elèvera les contradictions et les déformations de
la
grande presse ou de la presse d’opinion, en donnant chaque fois les r
3292
ons et les déformations de la grande presse ou de
la
presse d’opinion, en donnant chaque fois les raisons politiques ou fi
3293
ou de la presse d’opinion, en donnant chaque fois
les
raisons politiques ou financières de telle campagne et aussi de tel s
3294
hérents, des moyens de comprendre et de redresser
la
documentation que continuera à leur fournir la presse. Elle pourrait
3295
er la documentation que continuera à leur fournir
la
presse. Elle pourrait être une sorte d’école permanente des lecteurs
3296
eurs de journaux ; 3° une partie documentaire sur
la
presse. Tout en cherchant à remédier à l’action néfaste de la presse
3297
ire sur la presse. Tout en cherchant à remédier à
l’
action néfaste de la presse imprimée en se plaçant hors de son domaine
3298
out en cherchant à remédier à l’action néfaste de
la
presse imprimée en se plaçant hors de son domaine, les « Clubs » n’ou
3299
resse imprimée en se plaçant hors de son domaine,
les
« Clubs » n’oublient pas que la réforme organique de la presse est le
3300
de son domaine, les « Clubs » n’oublient pas que
la
réforme organique de la presse est le but final. Dans cette partie, o
3301
lubs » n’oublient pas que la réforme organique de
la
presse est le but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit,
3302
ent pas que la réforme organique de la presse est
le
but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit, une documenta
3303
nira petit à petit, une documentation précise sur
la
structure et le mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les
3304
it, une documentation précise sur la structure et
le
mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les modifications da
3305
ation précise sur la structure et le mécanisme de
la
presse. Soit en signalant toutes les modifications dans la commandite
3306
mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes
les
modifications dans la commandite, la direction, la tendance, etc. des
3307
. Soit en signalant toutes les modifications dans
la
commandite, la direction, la tendance, etc. des journaux existants ;
3308
lant toutes les modifications dans la commandite,
la
direction, la tendance, etc. des journaux existants ; soit par des ét
3309
s modifications dans la commandite, la direction,
la
tendance, etc. des journaux existants ; soit par des études plus géné
3310
xistants ; soit par des études plus générales sur
les
problèmes financiers, professionnels, législatifs, que pose la réform
3311
financiers, professionnels, législatifs, que pose
la
réforme de la presse. Dès à présent, de tels documents facilitent aux
3312
ofessionnels, législatifs, que pose la réforme de
la
presse. Dès à présent, de tels documents facilitent aux adhérents l’o
3313
ésent, de tels documents facilitent aux adhérents
l’
objet de la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum
3314
els documents facilitent aux adhérents l’objet de
la
partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum de duperie,
3315
t de la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire
avec
le minimum de duperie, une presse truquée. L’esprit Il est évid
3316
la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec
le
minimum de duperie, une presse truquée. L’esprit Il est évident
3317
vec le minimum de duperie, une presse truquée.
L’
esprit Il est évident que la portée d’une telle entreprise dépend d
3318
presse truquée. L’esprit Il est évident que
la
portée d’une telle entreprise dépend de la valeur professionnelle et
3319
nt que la portée d’une telle entreprise dépend de
la
valeur professionnelle et morale et de l’honnêteté intellectuelle de
3320
pend de la valeur professionnelle et morale et de
l’
honnêteté intellectuelle de ses réalisateurs. Le côté confidentiel et
3321
e l’honnêteté intellectuelle de ses réalisateurs.
Le
côté confidentiel et privé de la méthode rend la question particulièr
3322
es réalisateurs. Le côté confidentiel et privé de
la
méthode rend la question particulièrement importante. L’expérience se
3323
Le côté confidentiel et privé de la méthode rend
la
question particulièrement importante. L’expérience seule permettra au
3324
ode rend la question particulièrement importante.
L’
expérience seule permettra aux adhérents des clubs de vérifier le séri
3325
ule permettra aux adhérents des clubs de vérifier
le
sérieux et l’indépendance du bulletin. Toutefois les adhérents trouve
3326
aux adhérents des clubs de vérifier le sérieux et
l’
indépendance du bulletin. Toutefois les adhérents trouveront au départ
3327
sérieux et l’indépendance du bulletin. Toutefois
les
adhérents trouveront au départ une première garantie dans les groupem
3328
s trouveront au départ une première garantie dans
les
groupements qui ont pris l’initiative de la création et du fonctionne
3329
emière garantie dans les groupements qui ont pris
l’
initiative de la création et du fonctionnement des clubs de presse. Le
3330
dans les groupements qui ont pris l’initiative de
la
création et du fonctionnement des clubs de presse. Les « Clubs de pre
3331
réation et du fonctionnement des clubs de presse.
Les
« Clubs de presse » sont fondés et dirigés par Denis de Rougemont et
3332
Esprit . Ceux-ci n’entendent nullement impliquer
la
ligne politique propre des mouvements auxquels ils appartiennent, dan
3333
e veut être qu’une œuvre stricte d’information, à
l’
exclusivité de tout commentaire et de tout jugement. Mais ils s’engage
3334
re et de tout jugement. Mais ils s’engagent, dans
les
« clubs de presse », à défendre les principes qui leur sont communs :
3335
ngagent, dans les « clubs de presse », à défendre
les
principes qui leur sont communs : primauté de la personne humaine, re
3336
les principes qui leur sont communs : primauté de
la
personne humaine, respect de la vérité et lutte contre la tyrannie de
3337
uns : primauté de la personne humaine, respect de
la
vérité et lutte contre la tyrannie de l’argent. Louis E. Galey, Jacqu
3338
nne humaine, respect de la vérité et lutte contre
la
tyrannie de l’argent. Louis E. Galey, Jacques Madaule, Jean Maze, R.-
3339
spect de la vérité et lutte contre la tyrannie de
l’
argent. Louis E. Galey, Jacques Madaule, Jean Maze, R.-Philippe Millet
3340
gemont Denis de, « Formons des clubs de presse »,
La
Flèche, Paris, 30 janvier 1937, p. 2. g. Précédé de la notice suivan
3341
che, Paris, 30 janvier 1937, p. 2. g. Précédé de
la
notice suivante : « Nous présentons ci-dessous à tous nos camarades e
3342
ns ci-dessous à tous nos camarades et lecteurs de
La
Flèche le manifeste des clubs de presse en formation. À l’heure où la
3343
ous à tous nos camarades et lecteurs de La Flèche
le
manifeste des clubs de presse en formation. À l’heure où la grande pr
3344
le manifeste des clubs de presse en formation. À
l’
heure où la grande presse française se constitue chaque jour davantage
3345
te des clubs de presse en formation. À l’heure où
la
grande presse française se constitue chaque jour davantage en trusts,
3346
ses mensonges et ses trahisons. Il faut passer à
l’
action. Sur un terrain parfaitement précis et limité, celui de l’infor
3347
n terrain parfaitement précis et limité, celui de
l’
information, nous avons pensé que nous devions collaborer avec des cam
3348
cis et limité, celui de l’information, nous avons
pensé
que nous devions collaborer avec des camarades venant d’autres organi
3349
ion, nous avons pensé que nous devions collaborer
avec
des camarades venant d’autres organisations. Ce sera certainement par
3350
organisations. Ce sera certainement par ailleurs
l’
occasion d’un échange de vues qui ne peut être que fructueux pour tous
3351
tistes ou non frontistes, pour qu’ils comprennent
l’
intérêt exceptionnel que présente la formation des clubs, pour qu’ils
3352
s comprennent l’intérêt exceptionnel que présente
la
formation des clubs, pour qu’ils y collaborent activement, pour que d
3353
calité, si éloignée, si peu importante soit-elle,
le
club de presse dont ils seront les instigateurs devienne rapidement u
3354
ante soit-elle, le club de presse dont ils seront
les
instigateurs devienne rapidement un organisme craint et respecté. À l
3355
nne rapidement un organisme craint et respecté. À
l’
heure où l’Argent-roi investit complètement la presse française, à l’h
3356
ent un organisme craint et respecté. À l’heure où
l’
Argent-roi investit complètement la presse française, à l’heure où Hav
3357
. À l’heure où l’Argent-roi investit complètement
la
presse française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion
3358
-roi investit complètement la presse française, à
l’
heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le pa
3359
la presse française, à l’heure où Havas règne, à
l’
heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio
3360
française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où
la
diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais
3361
eure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de
la
pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, n
3362
règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par
le
papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obl
3363
heure où la diffusion de la pensée par le papier,
le
film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de rev
3364
diffusion de la pensée par le papier, le film et
la
radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de revenir à une
3365
de revenir à une forme antique de transmission :
l’
information orale. C’est la seule possible aujourd’hui. Camarades, si
3366
ique de transmission : l’information orale. C’est
la
seule possible aujourd’hui. Camarades, si vous voulez savoir, aidez-n
3367
Pour tous renseignements, adressez provisoirement
les
lettres à La Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin
3368
eignements, adressez provisoirement les lettres à
La
Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin la mention :
3369
Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans
le
coin la mention : clubs de presse.) »
3370
7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin
la
mention : clubs de presse.) »
3371
À qui
la
liberté ? (5 mars 1937)h Tout le monde parle de la culture et de l
3372
iberté ? (5 mars 1937)h Tout le monde parle de
la
culture et de la défense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce q
3373
1937)h Tout le monde parle de la culture et de
la
défense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce que signifie cultu
3374
le monde parle de la culture et de la défense de
la
culture. C’est qu’on ne sait plus ce que signifie culture. C’est que
3375
n ne sait plus ce que signifie culture. C’est que
la
culture est en pleine crise, et que cette crise ne sévit plus seuleme
3376
, et que cette crise ne sévit plus seulement dans
les
élites, mais se manifeste dans la vie publique, et dans les couches p
3377
seulement dans les élites, mais se manifeste dans
la
vie publique, et dans les couches profondes de la nation. Je dis que
3378
, mais se manifeste dans la vie publique, et dans
les
couches profondes de la nation. Je dis que la crise de la culture est
3379
la vie publique, et dans les couches profondes de
la
nation. Je dis que la crise de la culture est dans la rue. Je dis que
3380
ns les couches profondes de la nation. Je dis que
la
crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le tr
3381
es profondes de la nation. Je dis que la crise de
la
culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et q
3382
ation. Je dis que la crise de la culture est dans
la
rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est la politiqu
3383
a crise de la culture est dans la rue. Je dis que
la
culture fait le trottoir. Et que c’est la politique qui s’est chargée
3384
lture est dans la rue. Je dis que la culture fait
le
trottoir. Et que c’est la politique qui s’est chargée de réglementer
3385
dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est
la
politique qui s’est chargée de réglementer à sa manière la prostituti
3386
que qui s’est chargée de réglementer à sa manière
la
prostitution des mots-clés, des lieux communs fondamentaux sur lesque
3387
ux communs fondamentaux sur lesquelles s’édifiait
la
culture. M. de la Rocque défend ce qu’il appelle « la primauté de l’e
3388
ulture. M. de la Rocque défend ce qu’il appelle «
la
primauté de l’esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour la défe
3389
a Rocque défend ce qu’il appelle « la primauté de
l’
esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour la défense de la liber
3390
l’esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour
la
défense de la liberté ». M. Vaillant-Couturier publie un manifeste in
3391
fait placarder des affiches « Pour la défense de
la
liberté ». M. Vaillant-Couturier publie un manifeste intitulé Au serv
3392
turier publie un manifeste intitulé Au service de
l’
esprit, où il est question à chaque page de défendre la liberté. Dans
3393
rit, où il est question à chaque page de défendre
la
liberté. Dans l’état présent du langage, de la culture, et de la poli
3394
estion à chaque page de défendre la liberté. Dans
l’
état présent du langage, de la culture, et de la politique, on peut êt
3395
re la liberté. Dans l’état présent du langage, de
la
culture, et de la politique, on peut être à peu près certain que ces
3396
s l’état présent du langage, de la culture, et de
la
politique, on peut être à peu près certain que ces deux messieurs déf
3397
rtain que ces deux messieurs défendent en réalité
le
contraire de l’esprit et de la liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent
3398
ux messieurs défendent en réalité le contraire de
l’
esprit et de la liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent l’un et l’autre
3399
fendent en réalité le contraire de l’esprit et de
la
liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent l’un et l’autre un régime d’ét
3400
un régime d’étatisme oppressif et de dictature de
l’
économique. Le résultat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et l
3401
atisme oppressif et de dictature de l’économique.
Le
résultat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et l’on en voit dé
3402
ltat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et
l’
on en voit déjà les premiers signes : parlez de la liberté, posez-vous
3403
l’on en voit déjà les premiers signes : parlez de
la
liberté, posez-vous en défenseur de cet idéal permanent de la Révolut
3404
posez-vous en défenseur de cet idéal permanent de
la
Révolution humaine, vous passerez bientôt pour fasciste. On dit que l
3405
, vous passerez bientôt pour fasciste. On dit que
les
mots n’ont plus de sens. Ce serait trop beau, ce serait trop facile,
3406
trop beau, ce serait trop facile, ce serait enfin
la
trêve des démagogues. En réalité, les mots prennent tous les sens qu’
3407
serait enfin la trêve des démagogues. En réalité,
les
mots prennent tous les sens qu’on veut dans la bouche des politiciens
3408
es démagogues. En réalité, les mots prennent tous
les
sens qu’on veut dans la bouche des politiciens. Ils prennent de préfé
3409
, les mots prennent tous les sens qu’on veut dans
la
bouche des politiciens. Ils prennent de préférence un sens contraire
3410
ennent de préférence un sens contraire à celui de
l’
usage courant. (Staline dit : « Je ne suis pas un dictateur » ; Mussol
3411
« Je ne suis pas un dictateur » ; Mussolini fait
la
conquête de l’Éthiopie au nom de ce qu’il appelle sa liberté, etc.) M
3412
as un dictateur » ; Mussolini fait la conquête de
l’
Éthiopie au nom de ce qu’il appelle sa liberté, etc.) Mais ils prennen
3413
t aussi toutes sortes de sens intermédiaires dans
la
bouche de nos députés et journalistes, qui flétrissent (à droite) ou
3414
i flétrissent (à droite) ou approuvent (à gauche)
les
lois sociales parce qu’ils les qualifient de socialistes, et qui appr
3415
rouvent (à gauche) les lois sociales parce qu’ils
les
qualifient de socialistes, et qui approuveraient (à droite), ou flétr
3416
ouveraient (à droite), ou flétriraient (à gauche)
les
mêmes lois si on les qualifiait de fascistes. Alors qu’elles sont, en
3417
, ou flétriraient (à gauche) les mêmes lois si on
les
qualifiait de fascistes. Alors qu’elles sont, en fait, l’un et l’autr
3418
s. Alors qu’elles sont, en fait, l’un et l’autre.
La
politique actuelle s’occupe bien moins des faits que des mystiques do
3419
s mots. Ces mots suffirent longtemps à départager
les
opinions réelles : on disait liberté à gauche, patrie et autorité à d
3420
berté à gauche, patrie et autorité à droite. Mais
la
surenchère politicienne en est venue à ce point que, par une double d
3421
à droite ; patrie, autorité et liberté à gauche.
La
politique a prostitué le langage. La culture n’a pas été assez forte
3422
ité et liberté à gauche. La politique a prostitué
le
langage. La culture n’a pas été assez forte pour interdire cette pros
3423
té à gauche. La politique a prostitué le langage.
La
culture n’a pas été assez forte pour interdire cette prostitution. Il
3424
r interdire cette prostitution. Il en résulte que
la
culture qui joue tant sur le sens des mots et sur leur acception comm
3425
n. Il en résulte que la culture qui joue tant sur
le
sens des mots et sur leur acception commune, se trouve ruinée par la
3426
sur leur acception commune, se trouve ruinée par
la
politique. Et que la politique, qui a tourné en mystique, parle pour
3427
ommune, se trouve ruinée par la politique. Et que
la
politique, qui a tourné en mystique, parle pour ne rien dire ou pour
3428
n se demande pourquoi, dans de telles conditions,
l’
on s’obstinerait encore à écrire, à parler, si par hasard on est de bo
3429
n’est pas de problème culturel qui ne dépende de
la
politique. Cela revient à écrire, si l’on me comprend, pour éduquer l
3430
épende de la politique. Cela revient à écrire, si
l’
on me comprend, pour éduquer la méfiance du lecteur. h. Rougemont D
3431
vient à écrire, si l’on me comprend, pour éduquer
la
méfiance du lecteur. h. Rougemont Denis de, « À qui la liberté ? »
3432
nce du lecteur. h. Rougemont Denis de, « À qui
la
liberté ? », À nous la liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
3433
ougemont Denis de, « À qui la liberté ? », À nous
la
liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
3434
Romanciers publicitaires ou
la
contagion romanesque (13 mars 1937)i Je n’apprendrai rien à person
3435
Je n’apprendrai rien à personne en affirmant que
le
roman est le plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’entends
3436
rai rien à personne en affirmant que le roman est
le
plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’entends celui qui ex
3437
os genres littéraires, j’entends celui qui exerce
l’
influence la plus directe et la plus intime sur nos mœurs, sur notre v
3438
ttéraires, j’entends celui qui exerce l’influence
la
plus directe et la plus intime sur nos mœurs, sur notre vie privée. S
3439
s celui qui exerce l’influence la plus directe et
la
plus intime sur nos mœurs, sur notre vie privée. Songez aux plus gran
3440
x plus avilies, à ces jeunes gens qui choisissent
le
néant et la folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suici
3441
es, à ces jeunes gens qui choisissent le néant et
la
folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suicidés après We
3442
jeunes gens qui choisissent le néant et la folie
avec
Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suicidés après Werther ; ou
3443
de Balzac ; aux boursiers dont Stendhal enfièvre
l’
ambition ; aux jeunes bourgeois qui se défont à rechercher leur « Temp
3444
à rechercher leur « Temps perdu » ; enfin, à tous
les
adultères que le roman à trois personnages, genre français par excell
3445
« Temps perdu » ; enfin, à tous les adultères que
le
roman à trois personnages, genre français par excellence, a provoqués
3446
excellence, a provoqués et justifiés dans toutes
les
sous-préfectures. Ce pouvoir contagieux est, bien sûr, tout à l’honne
3447
ures. Ce pouvoir contagieux est, bien sûr, tout à
l’
honneur des écrivains qui savent le communiquer à leur œuvre, et des l
3448
en sûr, tout à l’honneur des écrivains qui savent
le
communiquer à leur œuvre, et des lecteurs assez ardents pour le subir
3449
à leur œuvre, et des lecteurs assez ardents pour
le
subir autrement qu’en imagination. Et rien n’est plus légitime, voire
3450
voire désirable, que cette contagion pratique de
l’
art, tant qu’il s’agit véritablement d’art, tant qu’il s’agit, pour un
3451
, tant qu’il s’agit, pour un auteur, d’influencer
le
public par des moyens choisis, et de lui transmettre une certaine vis
3452
onde plus profonde, plus riche et plus vraie, que
la
vision banale de la vie quotidienne. Il est très bon que le romancier
3453
plus riche et plus vraie, que la vision banale de
la
vie quotidienne. Il est très bon que le romancier et ses romans agiss
3454
banale de la vie quotidienne. Il est très bon que
le
romancier et ses romans agissent, de cette manière intime et souterra
3455
ls à dire ? Dans quel sens entendent-ils agir sur
les
mœurs de leurs contemporains ? Ils prétendent faire de pures et simpl
3456
tendent faire de pures et simples descriptions de
la
Vie (avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant que l’œuvre à thèse.
3457
faire de pures et simples descriptions de la Vie (
avec
majuscule). Ils ne redoutent rien tant que l’œuvre à thèse. Ils se dé
3458
(avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant que
l’
œuvre à thèse. Ils se défendent de toutes leurs forces d’avoir une mét
3459
ndant, leur influence n’est pas moins grande, sur
la
vie privée du lecteur. Ils ne veulent rien dire, mais, pourtant, ils
3460
udrait imposer, se contentent d’un opportunisme à
la
petite semaine, et ménagent les opinions plutôt que les intérêts de l
3461
’un opportunisme à la petite semaine, et ménagent
les
opinions plutôt que les intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme
3462
tite semaine, et ménagent les opinions plutôt que
les
intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme à courte vue caractéris
3463
t opportunisme à courte vue caractérise très bien
le
romancier bourgeois. Refuser toute espèce de thèse, cela signifie sim
3464
hèse, cela signifie simplement ménager et flatter
le
lecteur, la conscience bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de
3465
ignifie simplement ménager et flatter le lecteur,
la
conscience bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de la lectrice,
3466
nce bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de
la
lectrice, car en France, paraît-il, ce sont les femmes qui lisent et
3467
de la lectrice, car en France, paraît-il, ce sont
les
femmes qui lisent et qui se passionnent pour les romans. Ainsi, à for
3468
les femmes qui lisent et qui se passionnent pour
les
romans. Ainsi, à force de ménager les préjugés moraux et immoraux, à
3469
onnent pour les romans. Ainsi, à force de ménager
les
préjugés moraux et immoraux, à force de flatter les instincts les plu
3470
s préjugés moraux et immoraux, à force de flatter
les
instincts les plus faciles à flatter, à force de ne vouloir rien affi
3471
aux et immoraux, à force de flatter les instincts
les
plus faciles à flatter, à force de ne vouloir rien affirmer de trop v
3472
e trop réellement révolutionnaire et constructif,
le
« romancier à succès », de nos jours, est devenu un simple reflet de
3473
s », de nos jours, est devenu un simple reflet de
la
conscience bourgeoise moyenne. Il ne fait que traduire les humeurs, l
3474
ience bourgeoise moyenne. Il ne fait que traduire
les
humeurs, les goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible
3475
ise moyenne. Il ne fait que traduire les humeurs,
les
goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherc
3476
. Il ne fait que traduire les humeurs, les goûts,
les
craintes et les vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à le
3477
traduire les humeurs, les goûts, les craintes et
les
vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à les combattre, à l
3478
apeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à
les
combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal person
3479
is sensible, il ne cherche pas à les combattre, à
les
transformer, à les dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins enc
3480
cherche pas à les combattre, à les transformer, à
les
dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins encore au nom d’un idé
3481
istes — fait de notre romancier, tout simplement,
le
propagandiste des goûts de sa classe. Rien n’est plus dangereusement
3482
u’un écrivain qui n’ose pas affirmer sa tendance.
La
contagion du roman réaliste ou psychologique actuel s’exerce uniqueme
3483
dantes et de leurs coutumes. Il n’est que de voir
l’
importance démesurée que nos romanciers attachent à la description des
3484
portance démesurée que nos romanciers attachent à
la
description des vêtements, des ameublements, des marques d’autos, et
3485
e cigarettes (Paul Reboux) de leurs personnages !
Le
romancier bourgeois qui s’imaginait, naïvement et confortablement, qu
3486
st condamné lui-même, en fait, à ne plus être que
l’
agent de publicité — plus ou moins bénévole — des fournisseurs d’une c
3487
rnisseurs d’une certaine classe. Ce romancier, et
la
culture qu’il représente, on comprend que la jeunesse actuelle ne mar
3488
, et la culture qu’il représente, on comprend que
la
jeunesse actuelle ne marche plus pour les défendre. La crise du livre
3489
rend que la jeunesse actuelle ne marche plus pour
les
défendre. La crise du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord
3490
unesse actuelle ne marche plus pour les défendre.
La
crise du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord la crise du r
3491
du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord
la
crise du roman, et du roman fait à l’usage des bourgeois, de leurs lo
3492
est d’abord la crise du roman, et du roman fait à
l’
usage des bourgeois, de leurs loisirs improductifs. Une telle crise ne
3493
des lois plus ou moins astucieuses. C’est toutes
les
bases de la culture actuelle qui sont en crise. Faites-nous des œuvre
3494
s ou moins astucieuses. C’est toutes les bases de
la
culture actuelle qui sont en crise. Faites-nous des œuvres qui affirm
3495
Rougemont Denis de, « Romanciers publicitaires ou
la
contagion romanesque », À nous la liberté, Paris, 13 mars 1937, p. 10
3496
ublicitaires ou la contagion romanesque », À nous
la
liberté, Paris, 13 mars 1937, p. 10.
3497
n a très vivement critiqué le dernier chapitre de
l’
Histoire de la littérature française de Thibaudetk : celui qui est con
3498
ent critiqué le dernier chapitre de l’Histoire de
la
littérature française de Thibaudetk : celui qui est consacré à l’aprè
3499
rançaise de Thibaudetk : celui qui est consacré à
l’
après-guerre. II est vrai que beaucoup de noms y sont omis, que beauco
3500
petites histoires de leur milieu… »). On a dit :
le
chapitre est bâclé. Je me demande si l’époque méritait mieux. Époque
3501
n a dit : le chapitre est bâclé. Je me demande si
l’
époque méritait mieux. Époque bâclée, elle aussi, littérature bâclée,
3502
e bâclée, elle aussi, littérature bâclée, surtout
la
romanesque. Jamais on ne l’avait vu et constaté aussi nettement qu’à
3503
ature bâclée, surtout la romanesque. Jamais on ne
l’
avait vu et constaté aussi nettement qu’à la lecture de ce bilan désin
3504
on ne l’avait vu et constaté aussi nettement qu’à
la
lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre, la product
3505
a lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de
la
guerre, la production écrite des hommes qui revenaient du front — 20
3506
e ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre,
la
production écrite des hommes qui revenaient du front — 20 à 35 ans —
3507
s — connut un véritable boom commercial. « À nous
la
liberté ! » s’écriait cette génération : elle ignorait apparemment qu
3508
cette génération : elle ignorait apparemment que
la
liberté est une conquête, et non pas une facilité. Tout concourait d’
3509
toute une génération tuée à remplacer. Il y avait
l’
inflation, et la prospérité des nouveaux riches, une avidité de sensat
3510
tion tuée à remplacer. Il y avait l’inflation, et
la
prospérité des nouveaux riches, une avidité de sensations, une libéra
3511
bération érotique, des mécènes américains… Ce fut
la
grande Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de 19
3512
mécènes américains… Ce fut la grande Permission,
la
Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de 1930. Il nous en reste u
3513
e Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à
la
crise de 1930. Il nous en reste une génération de gloires rapides et
3514
ampleur, des « noms » qu’un seul livre imposa, et
l’
on acceptait les suivants parce que c’était commode, et parce que les
3515
noms » qu’un seul livre imposa, et l’on acceptait
les
suivants parce que c’était commode, et parce que les critiques sont a
3516
suivants parce que c’était commode, et parce que
les
critiques sont admirablement disciplinés. (D’ailleurs, tous se connai
3517
: auteurs, critiques et éditeurs ; pratiquement,
la
franchise n’est pas possible.) De ces années, et de celles de la cris
3518
est pas possible.) De ces années, et de celles de
la
crise qui les suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plu
3519
ble.) De ces années, et de celles de la crise qui
les
suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plus aiguës : Coc
3520
la crise qui les suit, on ne retiendra guère que
les
bizarreries les plus aiguës : Cocteau, Max Jacob, les premiers surréa
3521
s suit, on ne retiendra guère que les bizarreries
les
plus aiguës : Cocteau, Max Jacob, les premiers surréalistes composero
3522
blement une anthologie de « mineurs » qui prendra
le
charme d’un style, et très vite, une patine rassurante. Quant au roma
3523
, son premier historien, ne tente d’en sauver que
les
plus gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ». Le roman-cycle
3524
en sauver que les plus gros morceaux — au poids —
les
« romans-cycles ». Le roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution qu
3525
gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ».
Le
roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution qu’adoptent naturellemen
3526
ans-cycles ». Le roman-cycle, c’est, semble-t-il,
la
solution qu’adoptent naturellement les écrivains lassés de l’improvis
3527
emble-t-il, la solution qu’adoptent naturellement
les
écrivains lassés de l’improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher
3528
qu’adoptent naturellement les écrivains lassés de
l’
improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher la densité, en profonde
3529
l’improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher
la
densité, en profondeur, ils trouvent plus commode de donner en surfac
3530
ndir un personnage jusqu’au type, ils multiplient
les
personnages. Au lieu de marquer d’une empreinte durable un moment don
3531
arquer d’une empreinte durable un moment donné de
l’
histoire sociale, ils s’étalent dans la durée et vagabondent à travers
3532
t donné de l’histoire sociale, ils s’étalent dans
la
durée et vagabondent à travers les générations. Notons qu’ils s’attar
3533
s’étalent dans la durée et vagabondent à travers
les
générations. Notons qu’ils s’attardent presque tous aux générations d
3534
ent presque tous aux générations d’avant-guerre :
le
temps de leur jeunesse, remarque Thibaudet. Et il attribue ce phénomè
3535
. Et il attribue ce phénomène de « refoulement de
la
durée vers l’amont » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à
3536
ue ce phénomène de « refoulement de la durée vers
l’
amont » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité c
3537
ène de « refoulement de la durée vers l’amont » à
l’
incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité croissante de
3538
» à l’incertitude du lendemain (et du présent), à
la
nécessité croissante de vivre sur ses réserves, enfin à une crise et
3539
s réserves, enfin à une crise et à une carence de
la
création. Malgré ces difficultés, conclut-il, on ne saurait guère do
3540
ultés, conclut-il, on ne saurait guère douter que
le
super-cycle de ces sept romans-cycles (Martin du Gard, Duhamel, Franc
3541
rancis, Lacretelle, Chardonne, Romains, Béhaine),
le
Tour de France des romanciers cyclistes, ne reste un trait capital de
3542
omanciers cyclistes, ne reste un trait capital de
l’
histoire du roman, du paysage, du roman, pour cette tranche de siècle
3543
roman, pour cette tranche de siècle que meublera
la
génération de 1914. Il est caractéristique que le livre de Thibaudet
3544
a génération de 1914. Il est caractéristique que
le
livre de Thibaudet se termine sur une note pessimiste, et sur l’expre
3545
baudet se termine sur une note pessimiste, et sur
l’
expression de « dégradation de la littérature, au sens où les physicie
3546
ssimiste, et sur l’expression de « dégradation de
la
littérature, au sens où les physiciens s’intéressent à la dégradation
3547
on de « dégradation de la littérature, au sens où
les
physiciens s’intéressent à la dégradation de l’énergie ». Mais cette
3548
rature, au sens où les physiciens s’intéressent à
la
dégradation de l’énergie ». Mais cette dégradation littéraire, après
3549
les physiciens s’intéressent à la dégradation de
l’
énergie ». Mais cette dégradation littéraire, après tout, ne fait que
3550
éraire, après tout, ne fait que traduire celle de
la
société. Tous ces romans-cycles sont, en effet, des procès-verbaux de
3551
tion du monde bourgeois : de Proust à Lacretelle,
les
salons se défont, les classes se mêlent, les propriétés sont vendues
3552
s : de Proust à Lacretelle, les salons se défont,
les
classes se mêlent, les propriétés sont vendues aux enchères ou rachet
3553
lle, les salons se défont, les classes se mêlent,
les
propriétés sont vendues aux enchères ou rachetées par une coucherie,
3554
dues aux enchères ou rachetées par une coucherie,
les
fils renient leurs pères, les hommes leur sexe, les personnes leur id
3555
par une coucherie, les fils renient leurs pères,
les
hommes leur sexe, les personnes leur identité. Comment imaginer la na
3556
s fils renient leurs pères, les hommes leur sexe,
les
personnes leur identité. Comment imaginer la naissance, d’une grande
3557
xe, les personnes leur identité. Comment imaginer
la
naissance, d’une grande œuvre romanesque dans un pareil état social ?
3558
uvre romanesque dans un pareil état social ? Tous
les
chefs-d’œuvre du genre, au xixe siècle, étaient issus d’une société
3559
taient issus d’une société solidement établie, où
les
types étaient fixes et stables, et les relations codifiées, tyranniqu
3560
tablie, où les types étaient fixes et stables, et
les
relations codifiées, tyranniques : il y avait encore intérêt à passer
3561
non ce qui s’écroule — et cela ne peut pas donner
les
éléments d’un art, si l’art est une construction. Il semble bien que
3562
cela ne peut pas donner les éléments d’un art, si
l’
art est une construction. Il semble bien que la littérature la plus ré
3563
si l’art est une construction. Il semble bien que
la
littérature la plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes. Les
3564
e construction. Il semble bien que la littérature
la
plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes. Les gros romans soc
3565
plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes.
Les
gros romans sociaux de huit-cents pages que nous assènent les Céline,
3566
ans sociaux de huit-cents pages que nous assènent
les
Céline, Aragon ou Plisnier sont bien plus des pamphlets que des roman
3567
etrouvent un public. Il semble, d’autre part, que
les
documentaires entremêlés de réflexions et de jugements personnels, co
3568
ons et de jugements personnels, comme par exemple
les
derniers livres d’Henri Petit et de Marius Richard soient promis à de
3569
s profonds. Nous avons à refaire un inventaire de
l’
homme, préparation modeste et nécessaire à une littérature vraiment pe
3570
e, « Vers une littérature personnaliste », À nous
la
liberté, Paris, 20 mars 1937, p. 10. k. Rougemont a rendu compte de
3571
C’est jeune (10 avril 1937)l
L’
ironie est parfois la meilleure des prudences. C’est la conclusion que
3572
st jeune (10 avril 1937)l L’ironie est parfois
la
meilleure des prudences. C’est la conclusion que je tire d’un article
3573
nie est parfois la meilleure des prudences. C’est
la
conclusion que je tire d’un article de M. Vandérem (dans Candide) où
3574
ire d’un article de M. Vandérem (dans Candide) où
la
critique des critiques actuels que j’avais esquissée, ici même, se tr
3575
à mon aise et que je néglige un peu cavalièrement
les
contingences. Si j’étais plus avancé dans la vie — écrit-il —, je me
3576
nt les contingences. Si j’étais plus avancé dans
la
vie — écrit-il —, je me rendrais compte de tous les aléas que représe
3577
a vie — écrit-il —, je me rendrais compte de tous
les
aléas que représenteraient pour la critique un chambardement de ce ge
3578
ompte de tous les aléas que représenteraient pour
la
critique un chambardement de ce genre. Ce serait toute une série de n
3579
demandant des mois. On ne saurait mieux dire que
le
mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si l’on en doutait encore,
3580
rait mieux dire que le mal est aussi grave que je
l’
indiquais. Et si l’on en doutait encore, c’est M. Fernandez qui me fou
3581
le mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si
l’
on en doutait encore, c’est M. Fernandez qui me fournirait le plus sav
3582
tait encore, c’est M. Fernandez qui me fournirait
le
plus savoureux argument. Dans sa chronique littéraire de Marianne, il
3583
rivains, M. Arnoux, de n’avoir pas su s’imposer «
avec
assez de force au public ». Car, précisait-il, « on sait que la force
3584
rce au public ». Car, précisait-il, « on sait que
la
force, en ces matières, cela veut dire surtout la chance et la tactiq
3585
la force, en ces matières, cela veut dire surtout
la
chance et la tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est sup
3586
ces matières, cela veut dire surtout la chance et
la
tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est supérieur à sa t
3587
urtout la chance et la tactique, il me semble que
le
talent de M. Amoux est supérieur à sa tactique ». Faut-il être jeune,
3588
t-il être jeune, tout de même, et peu avancé dans
la
vie, pour s’ébahir, comme je le fais, d’une… « constatation » de cet
3589
t peu avancé dans la vie, pour s’ébahir, comme je
le
fais, d’une… « constatation » de cet ordre ! Comprenez-vous ce qu’ell
3590
ce qu’elle avoue sereinement, ce qu’elle déclare
avec
tant de naturel ? Sentez-vous, à la lire, quelque chose qui s’agite e
3591
lle déclare avec tant de naturel ? Sentez-vous, à
la
lire, quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétude,
3592
la lire, quelque chose qui s’agite en vous, entre
le
rire, l’inquiétude, et le dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. F
3593
quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire,
l’
inquiétude, et le dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez,
3594
s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétude, et
le
dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez, qu’en pensait-il
3595
Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez, qu’en
pensait
-il, écrivant cela ? Dans quelle illusion ai-je vécu ? Ce n’est rien d
3596
e œuvre, de croire qu’on a quelque chose à dire ;
le
but de l’écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public. Et cela d
3597
e croire qu’on a quelque chose à dire ; le but de
l’
écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public. Et cela demande de
3598
à dire ; le but de l’écrivain, c’est de s’imposer
avec
force au Public. Et cela demande de la tactique ! Je le vois bien. Je
3599
’imposer avec force au Public. Et cela demande de
la
tactique ! Je le vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique la tacti
3600
ce au Public. Et cela demande de la tactique ! Je
le
vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique la tactique. En quoi cela
3601
Je le vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique
la
tactique. En quoi cela peut-il consister ? Aucune idée. L’angoisse m’
3602
ue. En quoi cela peut-il consister ? Aucune idée.
L’
angoisse m’étreint. Je suis comme un enfant devant le mystère de « la
3603
ngoisse m’étreint. Je suis comme un enfant devant
le
mystère de « la vie… ». Profitant de mon innocence, que j’espère d’ai
3604
t. Je suis comme un enfant devant le mystère de «
la
vie… ». Profitant de mon innocence, que j’espère d’ailleurs provisoir
3605
ieillirai — je voudrais dire ceci à M. Vandérem :
la
« réinstallation complète » dont nous parlions ne demandera pas seule
3606
chose de beaucoup plus dangereux et difficile que
l’
avancement dans la vie : quelque chose que nous autres appelons, dans
3607
plus dangereux et difficile que l’avancement dans
la
vie : quelque chose que nous autres appelons, dans ce journal, une ré
3608
appelons, dans ce journal, une révolution. Quand
les
clercs en sont arrivés — et l’élite — à subordonner leur mission à la
3609
révolution. Quand les clercs en sont arrivés — et
l’
élite — à subordonner leur mission à la « tactique » du succès commerc
3610
rivés — et l’élite — à subordonner leur mission à
la
« tactique » du succès commercial, c’est le moment de fourrer les pie
3611
ion à la « tactique » du succès commercial, c’est
le
moment de fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser les convive
3612
du succès commercial, c’est le moment de fourrer
les
pieds dans le plat et d’éclabousser les convives. Nous ferons notre p
3613
ercial, c’est le moment de fourrer les pieds dans
le
plat et d’éclabousser les convives. Nous ferons notre pain nous-mêmes
3614
e fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser
les
convives. Nous ferons notre pain nous-mêmes. l. Rougemont Denis de
3615
l. Rougemont Denis de, « C’est jeune », À nous
la
liberté, Paris, 10 avril 1937, p. 10.
3616
ecret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pas
l’
air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris q
3617
s m’avaient appris que cette ville, au moins pour
la
jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concie
3618
ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est
la
ville des gérants ignobles et des concierges, des lieux-sombres-et-po
3619
des lieux-sombres-et-populeux où il faut pénétrer
l’
âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « A
3620
es-et-populeux où il faut pénétrer l’âme basse et
la
petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en »
3621
aut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à
la
main. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en », et restent faute d’i
3622
pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la
main
. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en », et restent faute d’imagin
3623
. Et pourtant il suffit de bien peu pour partir :
la
France a des milliers de maisons vides. Dites autour de vous que vous
3624
pays. Il est très pauvre, sec et lumineux. Toutes
les
nuances du gris, herbes, pierres, oliviers, et quelques touches de ve
3625
les premières pentes des Cévennes, où commencent
les
châtaigneraies. Au sud, on voit un coin de plaine entre des collines
3626
vettes étagées, quelques cyprès en silhouette sur
les
crêtes, et des toits de ce rose émouvant des tuiles romaines sous un
3627
ciel doux. Au nord, derrière notre maison, c’est
le
rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très
3628
Au nord, derrière notre maison, c’est le rocher,
la
montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux
3629
otre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée.
La
maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux murs de gros moello
3630
revêtus. Il y a trois pièces au premier étage, où
l’
on entre de plain-pied par-derrière. Au-dessous, c’est une grande remi
3631
grande remise. Au second quatre petites chambres.
Le
tout encombré de fauteuils, de chaises de velours, tables rondes et o
3632
uge. La plupart des fenêtres donnent au midi dans
le
branchage bleu d’un tilleul. Au bord de la terrasse, une fontaine abo
3633
i dans le branchage bleu d’un tilleul. Au bord de
la
terrasse, une fontaine abondante coule dans un fort grand bassin rect
3634
fort grand bassin rectangulaire aux eaux sombres.
La
maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmier
3635
re aux eaux sombres. La maison du jardinier ferme
la
cour sur la droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute
3636
sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur
la
droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute aussi, blan
3637
anchie, presque sans fenêtres. Un voile vert clôt
la
porte d’entrée, où l’on accède par quelques marches et un balcon de p
3638
enêtres. Un voile vert clôt la porte d’entrée, où
l’
on accède par quelques marches et un balcon de pierre. L’on descend pa
3639
cède par quelques marches et un balcon de pierre.
L’
on descend par d’étroits escaliers aux quatre autres terrasses du jard
3640
ux quatre autres terrasses du jardin, étagées sur
le
versant nord d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droi
3641
d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur
la
droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques touffues d’oli
3642
mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que
le
versant sud, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’horizon
3643
hauteur sur la droite, tandis que le versant sud,
avec
ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’horizon immédiat. Au sud-
3644
d, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme
l’
horizon immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la
3645
immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur
la
fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invi
3646
Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de
la
vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, mas
3647
nous avons une échappée sur la fin de la vallée,
la
rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied
3648
e échappée sur la fin de la vallée, la rivière et
la
plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied des rochers,
3649
sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine.
La
petite ville reste invisible, massée au pied des rochers, en retrait
3650
gare, un coup de trompe d’auto, des cris de coq.
L’
odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous
3651
des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de
la
cour, et remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les laurier
3652
deur du raisin foulé monte de la cour, et remplit
l’
ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jau
3653
é monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous
le
tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jaune brille au bord d
3654
remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et
les
lauriers. Un grand vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de
3655
rs. Un grand vase jaune brille au bord du bassin.
Le
reflet de l’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la ch
3656
vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de
l’
eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’éc
3657
sin. Le reflet de l’eau tremble au plafond et sur
les
murs verdâtres de la chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice
3658
u tremble au plafond et sur les murs verdâtres de
la
chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice de rentrée terminé :
3659
on petit exercice de rentrée terminé : « Décrivez
la
maison de vos vacances… » Ajoutons que le jardinier s’appelle Simard,
3660
écrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons que
le
jardinier s’appelle Simard, sa femme Marguerite, son chien basset Per
3661
lle sorte qu’on puisse y travailler. Nous faisons
l’
inventaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de chacune des pi
3662
ravailler. Nous faisons l’inventaire minutieux et
le
plan d’arrangement actuel de chacune des pièces du premier, avant de
3663
actuel de chacune des pièces du premier, avant de
les
vider et de transporter leur contenu à l’étage supérieur. 23 septembr
3664
ant de les vider et de transporter leur contenu à
l’
étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d’un
3665
à l’étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant
les
murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a ét
3666
s murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair.
Le
carreau rouge a été débarrassé du tapis. J’ai dressé ma table sur des
3667
et des chaises de paille trouvées dans un coin de
la
remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminé
3668
de paille trouvées dans un coin de la remise, où
les
chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux
3669
ans un coin de la remise, où les chaises brodées,
les
guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensé
3670
remise, où les chaises brodées, les guéridons et
le
dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensées — ont été les
3671
ée — vingt-deux pièces dûment recensées — ont été
les
remplacer. Seul vestige des splendeurs bourgeoises de ce salon : un l
3672
e. Mais on va pouvoir respirer. 25 septembre 1934
La
traduction d’un considérable ouvrage allemand nous permettra de passe
3673
ois mois ou quatre sans trop de soucis matériels.
La
vie paraît assez peu chère. Mais bien trop chère encore pour les gens
3674
assez peu chère. Mais bien trop chère encore pour
les
gens du pays. Les petites entreprises qui leur donnaient du travail f
3675
ais bien trop chère encore pour les gens du pays.
Les
petites entreprises qui leur donnaient du travail font faillite l’une
3676
r : nos voisins n’ont sur leur table, quand on va
les
voir à midi, que des châtaignes, des olives, des radis et quelques lé
3677
considèrent comme des privilégiés, cela se sent à
la
manière dont ils nous parlent de quelques familles des environs qui n
3678
t de quelques familles des environs qui n’ont pas
la
ressource d’un jardin, ou qui ne « savent pas y faire ». (Légère nuan
3679
iale chez Simard). Nos hôtes nous avaient signalé
la
famille d’un mineur retraité, dont la femme fait des journées. Consid
3680
ent signalé la famille d’un mineur retraité, dont
la
femme fait des journées. Considérant que richesse oblige — car je gag
3681
eu près 1.000 francs par mois — nous avons engagé
la
mère Calixte pour donner un coup de main le matin et faire les lessiv
3682
ngagé la mère Calixte pour donner un coup de main
le
matin et faire les lessives. C’est une toute petite vieille noueuse,
3683
xte pour donner un coup de main le matin et faire
les
lessives. C’est une toute petite vieille noueuse, à la sagesse senten
3684
ssives. C’est une toute petite vieille noueuse, à
la
sagesse sentencieuse et imagée. Étonnamment active. Bonne protestante
3685
nnamment active. Bonne protestante et qui tient à
le
dire. Sa cordialité demeure digne, trait notable à partir des Cévenne
3686
ou de force, c’est certain, nous saurons tout sur
les
gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une p
3687
c’est certain, nous saurons tout sur les gens de
la
ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi de roc
3688
de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à
la
base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouc
3689
te cité tassée à la base d’une paroi de rocher et
le
long d’une rivière rapide qui débouche d’une gorge étroite, cité coul
3690
paraît en ruine, prouve sa vie par ses odeurs et
la
saleté de ses ruelles. Un ruisseau coule au milieu du pavé, charriant
3691
arriant des ordures, des papiers, du sang près de
la
boucherie, du lait verdi. C’est à peine si l’on peut marcher à pied s
3692
de la boucherie, du lait verdi. C’est à peine si
l’
on peut marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils,
3693
’est à peine si l’on peut marcher à pied sec dans
les
passages étroits. Sur les seuils, des groupes de femmes en noir jacas
3694
marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur
les
seuils, des groupes de femmes en noir jacassent pendant des heures. D
3695
enfants en sarraus noirs jouent au football dans
le
ruisseau avec un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits
3696
sarraus noirs jouent au football dans le ruisseau
avec
un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits visages qui ne
3697
it beau et fin mais incroyablement crasseux. Vers
la
gare, il y a bien un parc municipal, le jardin d’un couvent désaffect
3698
eux. Vers la gare, il y a bien un parc municipal,
le
jardin d’un couvent désaffecté, mais je n’y vois jamais que des vieil
3699
s jamais que des vieillards en pantoufles. Devant
le
parc, un mail couvert d’une épaisse couche de poussière : là, de nouv
3700
upçon qui m’est venu en maintes autres régions de
la
France : les provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssen
3701
est venu en maintes autres régions de la France :
les
provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssent la couleur
3702
aux ignorent obstinément, peut-être même haïssent
la
couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir.
3703
nément, peut-être même haïssent la couleur verte,
le
soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J
3704
t-être même haïssent la couleur verte, le soleil,
la
nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe au
3705
haïssent la couleur verte, le soleil, la nature,
la
propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils
3706
te, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment
le
noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils s’arrangent pour vivre p
3707
leil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir.
Avec
fanatisme. J’observe aussi qu’ils s’arrangent pour vivre plus mal que
3708
aussi qu’ils s’arrangent pour vivre plus mal que
la
population des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie sain
3709
e la population des faubourgs des grandes villes.
Le
goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que da
3710
on des faubourgs des grandes villes. Le goût de «
la
vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banli
3711
goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne
le
trouverez que dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé
3712
» et du grand air, vous ne le trouverez que dans
la
« banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé d’URSS, et récemment.
3713
dit qu’ici trois maisons seulement, sur 200, ont
l’
eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule
3714
s maisons seulement, sur 200, ont l’eau courante.
Les
femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la
3715
ent, sur 200, ont l’eau courante. Les femmes vont
avec
des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la grande place, ju
3716
’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à
la
fontaine qui coule son filet sur la grande place, juste à côté de la
3717
des cruches à la fontaine qui coule son filet sur
la
grande place, juste à côté de la pissotière et de l’arrêt des autocar
3718
le son filet sur la grande place, juste à côté de
la
pissotière et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire…
3719
grande place, juste à côté de la pissotière et de
l’
arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire… 8 octobre 1934 Du r
3720
et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut
le
dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de la raison. Je vois la misèr
3721
peut le dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de
la
raison. Je vois la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les
3722
obre 1934 Du rôle pratique de la raison. Je vois
la
misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les détruit. Je vois ce
3723
la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui
les
détruit. Je vois ces enfants sales abandonnés par leurs parents aux h
3724
sales abandonnés par leurs parents aux hasards de
la
rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’
3725
ts aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de
la
famille, mais aussi aux hasards de l’éducation primaire, bienfaisante
3726
ien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de
l’
éducation primaire, bienfaisante en principe il est vrai, mais tristem
3727
te, étroite, appauvrissante en fait. Je vois tous
les
espoirs et toutes les « assurances » de cette population balayée péri
3728
sante en fait. Je vois tous les espoirs et toutes
les
« assurances » de cette population balayée périodiquement par la fail
3729
» de cette population balayée périodiquement par
la
faillite des entreprises où elle travaille, ou par quelque décret d’É
3730
travaille, ou par quelque décret d’État. Je vois
le
chômage s’étendre et s’installer, comme se sont installés dans ces vi
3731
stallés dans ces villages malsains et mal soignés
la
tuberculose, l’alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’au
3732
villages malsains et mal soignés la tuberculose,
l’
alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en par
3733
ns et mal soignés la tuberculose, l’alcoolisme et
la
misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant la feuil
3734
ditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant
la
feuille locale, qu’il naît encore pas mal d’enfants dans ces foyers q
3735
’enfants dans ces foyers que tout menace. Faisons
la
part des « accidents », des « imprudences ». Il reste encore une marg
3736
des risques, de confiance obscurément accordée à
l’
instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malg
3737
onfiance obscurément accordée à l’instinct ou à «
la
Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant
3738
ément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à
la
solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici
3739
l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de
l’
espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « raiso
3740
èce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici
le
peuple « raisonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’Europ
3741
sonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de
l’
Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bourre
3742
nne en exemple aux barbares de l’Europe centrale.
Le
peuple qui sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine e
3743
uple qui sait calculer, faire son budget, bourrer
le
bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chos
3744
re son budget, bourrer le bas de laine et nourrir
la
bouteille aux pièces de dix sous. Une chose est claire : faire des en
3745
s. Une chose est claire : faire des enfants, dans
les
conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique.
3746
ants, dans les conditions actuelles, c’est défier
le
bon sens et la raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir
3747
conditions actuelles, c’est défier le bon sens et
la
raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir vague et profon
3748
à quelque espoir vague et profond. Or tout ce que
l’
État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridi
3749
profond. Or tout ce que l’État nous apprend, par
le
moyen de l’école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre
3750
tout ce que l’État nous apprend, par le moyen de
l’
école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre d’espoirs. Q
3751
ruine ce genre d’espoirs. Qui voudrait condamner
l’
usage pratique de la raison ? Simplement je constate qu’en fait, et da
3752
poirs. Qui voudrait condamner l’usage pratique de
la
raison ? Simplement je constate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il
3753
nstate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il est,
la
morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que
3754
s ce pays tel qu’il est, la morale rationnelle et
les
mesures qu’elle propose, ce n’est guère que le rêve des vieux célibat
3755
t les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que
le
rêve des vieux célibataires assez fortunés, ou ascètes. Ceux qui n’on
3756
nt plus besoin de calculer, ceux-là calculent. Et
les
autres acceptent leurs risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malg
3757
risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malgré
l’
État laïque qui leur conseille plutôt l’épargne. 15 octobre 1934 On a
3758
e, malgré l’État laïque qui leur conseille plutôt
l’
épargne. 15 octobre 1934 On a terminé les vendanges, et la récolte des
3759
le plutôt l’épargne. 15 octobre 1934 On a terminé
les
vendanges, et la récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver appara
3760
e. 15 octobre 1934 On a terminé les vendanges, et
la
récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus
3761
é les vendanges, et la récolte des figues d’été. (
Les
figues d’hiver apparaissent déjà, plus petites et toujours vertes ; o
3762
ent déjà, plus petites et toujours vertes ; on ne
les
mange pas). Simard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la co
3763
mard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de
la
colline du sud, où nous pourrons acheter une provision d’« œillades »
3764
ommes allés hier au soir. Des hauteurs, on voyait
la
plaine rose et violacée entre des monticules pointus tout frisés d’ol
3765
sés d’oliviers, un paysage de primitifs italiens.
Le
mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nou
3766
paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de
la
colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis
3767
taliens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans
l’
ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur la terrasse, au p
3768
re, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur
la
terrasse, au pied d’un grand micocoulier. Bientôt un chien furieux su
3769
d micocoulier. Bientôt un chien furieux surgit de
la
maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est la propriétaire, Mada
3770
a maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est
la
propriétaire, Madame Turc. Elle nous fait entrer. Pour la vente du ra
3771
iétaire, Madame Turc. Elle nous fait entrer. Pour
la
vente du raisin, il faut attendre sa fille qui va rentrer des champs,
3772
va rentrer des champs, où elle travaille jusqu’à
la
nuit tombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais la fermière n
3773
ombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais
la
fermière nous reçoit comme une « dame », ou plutôt un peu mieux, avec
3774
eçoit comme une « dame », ou plutôt un peu mieux,
avec
une politesse pleine de réserve et d’attentions. On parle du domaine.
3775
de réserve et d’attentions. On parle du domaine.
Les
deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont u
3776
’attentions. On parle du domaine. Les deux femmes
le
dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine
3777
omaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis
la
mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il para
3778
uis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine
avec
les ouvriers. Il paraît qu’on en trouve de moins en moins. — « Mais,
3779
a mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec
les
ouvriers. Il paraît qu’on en trouve de moins en moins. — « Mais, lui
3780
rouve de moins en moins. — « Mais, lui dis-je, et
les
chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a 400 à A ? » La mère, vivement : «
3781
es chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a 400 à A ? »
La
mère, vivement : « Jamais je n’ai engagé de chômeurs, Monsieur, c’est
3782
ncipe. Nous ne voulons que des ouvriers honnêtes.
Pensez
donc, deux femmes seules ! — C’est que je suis chômeur moi-même, Mada
3783
ur moi-même, Madame… » Elle sourit à son tour, de
l’
air de dire : Oh, vous, ce n’est pas la même chose. Elle a sans doute
3784
n tour, de l’air de dire : Oh, vous, ce n’est pas
la
même chose. Elle a sans doute entendu parler de nous. Rien à faire :
3785
de nous. Rien à faire : je suis un « monsieur ».
La
fille rentre : une forte femme, environ 35 ans, un peu masculine. Ell
3786
ron 35 ans, un peu masculine. Elle nous conduit à
la
chambre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : « C’
3787
bre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait
la
pesée : « C’est pour qui, Monsieur, sans indiscrétion ? » Je dis mon
3788
re auxquelles je collabore, en effet. — Vous avez
le
temps de lire beaucoup ? — Oh, on le prend. Comme nous ne voyons jama
3789
— Vous avez le temps de lire beaucoup ? — Oh, on
le
prend. Comme nous ne voyons jamais personne… (En France, cela étonne.
3790
ations. Leur niveau de culture, fort au-dessus de
la
moyenne, ne m’étonne guère, s’agissant de protestantes. Ce ne sont pa
3791
al d’exception. Combien y a-t-il de classes entre
la
bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’opposition que veulent v
3792
-il de classes entre la bourgeoisie des villes et
le
prolétariat ? L’opposition que veulent voir les marxistes entre bourg
3793
tre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ?
L’
opposition que veulent voir les marxistes entre bourgeois, ou maîtres,
3794
et le prolétariat ? L’opposition que veulent voir
les
marxistes entre bourgeois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs,
3795
ois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs, je
la
trouve fausse dans tous les cas concrets, dès que je sors des très gr
3796
ires ou serviteurs, je la trouve fausse dans tous
les
cas concrets, dès que je sors des très grandes villes et de leur cari
3797
illes et de leur caricature de société. — Simard,
le
jardinier, est à demi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé
3798
ayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on
le
lui dise. Il s’estime fort au-dessus d’un mineur retraité, par exempl
3799
fort au-dessus d’un mineur retraité, par exemple.
Les
instituteurs d’A… ? Ils sont du peuple. Oui, mais bourgeois par leur
3800
uple. Oui, mais bourgeois par leur profession. Et
les
Calixte ? Prolétaires sans doute, mais d’une tout autre espèce, on di
3801
autre espèce, on dirait même d’une autre race que
les
métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le mar
3802
d’une autre race que les métayers catholiques de
la
montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’u
3803
oliques de la montagne qu’on voit venir à A… pour
le
marché. Et très conscients d’une supériorité qu’ils ne peuvent attrib
3804
ion. En vérité, ce qui compte dans ce pays, c’est
la
religion — celle des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et le mé
3805
religion — celle des ancêtres, tout au moins ! —
l’
éducation et le métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches,
3806
le des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et
le
métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches, des différences
3807
différences et des affinités, au moins autant que
les
conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de c
3808
les conditions économiques. On ne comprend rien à
la
réalité sociale de ce canton si l’on fait abstraction de tout cela do
3809
omprend rien à la réalité sociale de ce canton si
l’
on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, justement, se doit
3810
canton si l’on fait abstraction de tout cela dont
le
marxisme, justement, se doit de ne pas tenir compte. Un communiste tr
3811
it de ne pas tenir compte. Un communiste traitera
les
dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de stati
3812
a les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit.
Le
marxisme part de statistiques et de relations numériques (salaires, p
3813
stime donc scientifique. Il ne part pas de ce que
les
hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur é
3814
part pas de ce que les hommes veulent être, ni de
la
conscience globale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le prin
3815
lobale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant
le
principal, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle le jeu des
3816
l, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle
le
jeu des relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme t
3817
est ce qui règle le jeu des relations humaines et
les
opinions politiques). Le marxisme traite tout cela de nuances vaines,
3818
s relations humaines et les opinions politiques).
Le
marxisme traite tout cela de nuances vaines, d’illusions, voire de «
3819
ns, voire de « mystification ». Il part de ce que
les
hommes sont malgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la St
3820
lgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de
la
Statistique. Et il prétend fonder là-dessus non seulement des mesures
3821
morale, un art et une métaphysique ! Problème de
la
politique actuelle : sera-t-elle l’affaire du meilleur statisticien,
3822
! Problème de la politique actuelle : sera-t-elle
l’
affaire du meilleur statisticien, ou au contraire de l’homme le plus h
3823
aire du meilleur statisticien, ou au contraire de
l’
homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle
3824
meilleur statisticien, ou au contraire de l’homme
le
plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle est véc
3825
e l’homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur
la
réalité telle qu’elle est vécue et voulue par les hommes réels et con
3826
la réalité telle qu’elle est vécue et voulue par
les
hommes réels et concrets, ou bien sur la réalité telle qu’elle est ch
3827
lue par les hommes réels et concrets, ou bien sur
la
réalité telle qu’elle est chiffrable, inévitable, impersonnelle ? 2 n
3828
ersonnelle ? 2 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé
la
tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la p
3829
2 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche de
la
journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâ
3830
rminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans
la
chambre dont je vois la porte entrebâillée. Une dernière bûche fume,
3831
rnée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois
la
porte entrebâillée. Une dernière bûche fume, il fait presque froid. D
3832
e, il fait presque froid. Dans ce silence vide de
la
nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts
3833
a nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé,
les
yeux bien ouverts, l’esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veil
3834
voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts,
l’
esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veillée trop lucide peut-ê
3835
solitaire, veillée trop lucide peut-être, puisque
le
monde n’y porte plus d’ombres. Je me souviens de ces nuits de Paris,
3836
ces veillées fiévreuses, assiégées. Est-ce que je
les
regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pa
3837
ssiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-ce que
l’
heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des ma
3838
st-ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de
la
nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nos
3839
e les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où
l’
on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nostalgies. ?
3840
de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours
l’
heure des mauvaises nostalgies. ? Qui pourrait nous écrire une histoir
3841
urrait nous écrire une histoire des inventions de
l’
insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissance
3842
de l’insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement
l’
histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questi
3843
? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de
la
naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates
3844
lement l’histoire de la naissance de nos démons ?
La
nuit ne pose pas de questions immédiates. C’est pourquoi, dans cette
3845
ns cette heure suspendue, il vaut mieux cesser de
penser
. Que penserais-je, ici, d’humain, d’actif ? Ici où je suis sans proch
3846
re suspendue, il vaut mieux cesser de penser. Que
penserais
-je, ici, d’humain, d’actif ? Ici où je suis sans prochain, à cette he
3847
is sans prochain, à cette heure ou mes frères (?)
les
hommes sont plus éloignés que jamais ? « La nuit est faite pour dormi
3848
(?) les hommes sont plus éloignés que jamais ? «
La
nuit est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ordre qui m’a
3849
est faite pour dormir », me disait un gardien de
l’
ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d
3850
ait un gardien de l’ordre qui m’avait surpris sur
les
quais de la Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux noctu
3851
n de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de
la
Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux nocturnes. Ma pol
3852
e opposerais-je, quelle arrière-pensée rode ici ?
La
mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères préc
3853
arrière-pensée rode ici ? La mauvaise habitude de
penser
« librement » ? Le goût des chimères précises ? 10 novembre 1934 Obse
3854
? La mauvaise habitude de penser « librement » ?
Le
goût des chimères précises ? 10 novembre 1934 Observations nouvelles
3855
ses ? 10 novembre 1934 Observations nouvelles sur
les
gens. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a la grip
3856
servations nouvelles sur les gens. — Je vais chez
les
Calixte. On nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisin
3857
ns. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que
la
mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Ell
3858
ais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a
la
grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Elles se plai
3859
n nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à
la
cuisine la fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le four
3860
t que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine
la
fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le fourneau est ro
3861
ille et une voisine. Elles se plaignent du froid.
Le
fourneau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le
3862
e plaignent du froid. Le fourneau est rouge, mais
la
porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis
3863
ge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient
le
vent le plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longt
3864
la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent
le
plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longtemps ava
3865
es siècles, et en tout cas depuis longtemps avant
la
construction de cette maison… On n’y avait pas pensé ? Je passe au fo
3866
la construction de cette maison… On n’y avait pas
pensé
? Je passe au fond, dans une chambre obscure mais qui me paraît propr
3867
ambre obscure mais qui me paraît propre et sobre.
La
mère Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les p
3868
e Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur
le
ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je
3869
st au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre,
les
pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je crois bien s
3870
ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur
les
épaules, et je crois bien sa blouse noire aussi. Elle me dit qu’elle
3871
assez mal. On devait lui retirer son linge toutes
les
deux heures. Quand elle sortait sa main du lit, cela fumait. « Vous a
3872
nge toutes les deux heures. Quand elle sortait sa
main
du lit, cela fumait. « Vous avez eu de la fièvre ! » Elle ne sait pas
3873
it sa main du lit, cela fumait. « Vous avez eu de
la
fièvre ! » Elle ne sait pas. Elle ne veut pas de médecin. Sa fille di
3874
fille dit : « Elle ne voulait même plus toucher à
la
viande, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon r
3875
« Elle ne voulait même plus toucher à la viande,
pensez
! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon remède comme on
3876
r à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire que
la
viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du poule
3877
oire que la viande soit un si bon remède comme on
le
dit. Je lui ai fait du poulet, elle n’y avait pas goût. Alors j’ai pe
3878
it du poulet, elle n’y avait pas goût. Alors j’ai
pensé
lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de l’avantage. Voyez !
3879
lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de
l’
avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour le
3880
fait de l’avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai que
la
viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire u
3881
Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour
les
malades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour r
3882
ades. » Elle accepte de venir faire une lessive à
la
maison pour remplacer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre le
3883
acer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre
le
linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce.
3884
de corde pour étendre le linge ; elle imagine de
le
mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont pl
3885
e mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous
les
mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les récolter. « Voy
3886
mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va
les
récolter. « Voyez-vous ! c’est qu’il a fait un vent cette nuit ! » 11
3887
re générale, ils ne sont pas conscients de porter
la
responsabilité des accidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans
3888
ccidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans
le
détail. C’est assez sage dans l’ensemble. Ils seraient moins pauvres,
3889
peut agacer dans le détail. C’est assez sage dans
l’
ensemble. Ils seraient moins pauvres, moins malades, etc., s’ils étaie
3890
’ils étaient plus « pratiques » comme on dit dans
la
bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple so
3891
pratiques » comme on dit dans la bourgeoisie — où
l’
on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adro
3892
a bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que
les
gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouillard
3893
gens du peuple sont spécialement adroits de leurs
mains
, débrouillards et pleins de ressources mystérieuses. Mais ils seraien
3894
des états parce qu’ils ont cassé deux assiettes.
La
mère Calixte, qui casse tout ce que l’on veut, a coutume de dire en c
3895
assiettes. La mère Calixte, qui casse tout ce que
l’
on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je cr
3896
ce que l’on veut, a coutume de dire en constatant
le
mal : « Voyez-vous ! je croyais la tenir cette assiette ! » De telle
3897
en constatant le mal : « Voyez-vous ! je croyais
la
tenir cette assiette ! » De telle manière qu’on entend bien que c’est
3898
que rien au monde dépend de nous. Ceci vaut pour
les
femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont
3899
pend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont
la
part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce
3900
nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part
la
plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il f
3901
les femmes, qui sont la part la plus civilisée de
la
population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il faut, elles qui travai
3902
qui décident, elles qui lisent, elles qui vont à
l’
église ou au temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour les homme
3903
u temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour
les
hommes, c’est tout autre chose. Ils sont éloquents et naïfs, revendic
3904
icaces. La plupart ne font rien, ou « travaillent
le
mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — la derniè
3905
, ou « travaillent le mazet », ce qui n’est rien.
Les
femmes vont à la filature — la dernière qui marche encore — et gagnen
3906
le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à
la
filature — la dernière qui marche encore — et gagnent leurs 7 francs
3907
gagnent leurs 7 francs par jour. Pendant ce temps
les
hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce son
3908
cs par jour. Pendant ce temps les hommes sont sur
la
place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et l
3909
les hommes sont sur la place et protestent contre
le
gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçant
3910
ace et protestent contre le gouvernement. Ce sont
les
radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnai
3911
t contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et
les
socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent
3912
rnement. Ce sont les radicaux et les socialistes.
Les
commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la
3913
souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de
la
place. Enfin ceux qui sont occupés par l’imprimerie du journal local,
3914
ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par
l’
imprimerie du journal local, par les garages ou à la Mairie, sont comm
3915
nt occupés par l’imprimerie du journal local, par
les
garages ou à la Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pa
3916
imprimerie du journal local, par les garages ou à
la
Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à t
3917
arages ou à la Mairie, sont communistes et mènent
les
affaires du pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la paro
3918
et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes
les
conférences, prennent la parole au Cercle d’hommes, citent des livres
3919
pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent
la
parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur la politique. 12 nov
3920
parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur
la
politique. 12 novembre 1934 J’ai relevé quelques chiffres dans un ouv
3921
vé quelques chiffres dans un ouvrage sur A…, dû à
la
plume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570, le mûrier, importé
3922
rage sur A…, dû à la plume d’un de ses pasteurs à
la
retraite. En 1570, le mûrier, importé de Chine, fait son apparition d
3923
lume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570,
le
mûrier, importé de Chine, fait son apparition dans le Midi. État du p
3924
ûrier, importé de Chine, fait son apparition dans
le
Midi. État du pays en 1820 : douze filatures, deux fabriques de chape
3925
mportant de produits soyeux manufacturés. Lors de
la
dédicace du nouveau temple, en 1822, quinze mille protestants accoure
3926
1822, quinze mille protestants accourent de toute
la
contrée pour suivre des cérémonies dont leurs descendants parlent enc
3927
temple chaque dimanche. Je complète : vers 1900,
la
soie artificielle fait son apparition dans la vallée du Rhône. Fondat
3928
00, la soie artificielle fait son apparition dans
la
vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de la région lyonnaise.
3929
vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de
la
région lyonnaise. Apparition du grand capital. État du pays en 1935 :
3930
ours par semaine à une centaine d’ouvrières, dont
le
salaire moyen est de 7 francs par jour. Faillite de la dernière bonne
3931
e de la dernière bonnetterie, ces derniers jours.
Le
tiers des maisons est en ruines, — tout le centre. On croirait une vi
3932
jours. Le tiers des maisons est en ruines, — tout
le
centre. On croirait une ville bombardée, 2300 habitants. Cent personn
3933
ée, 2300 habitants. Cent personnes au culte. Dans
la
campagne environnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934, la soie
3934
vironnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934,
la
soie japonaise a fait son apparition sur le marché lyonnais. Faillite
3935
1934, la soie japonaise a fait son apparition sur
le
marché lyonnais. Faillite de plusieurs des grosses entreprises de soi
3936
urs des grosses entreprises de soie artificielle.
Le
cycle normal du progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute la
3937
progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute
la
richesse indigène de ce département. Et cette richesse à son tour va
3938
tement. Et cette richesse à son tour va reprendre
le
chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : Que res
3939
tte richesse à son tour va reprendre le chemin de
l’
Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : Que reste-t-il pour
3940
rendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois
le
mûrier. Question : Que reste-t-il pour entreprendre ici une révolutio
3941
on constructive ? 21 novembre 1934 Leur langage.
La
mère Calixte devait faire notre lessive la semaine prochaine. Elle vi
3942
ngage. La mère Calixte devait faire notre lessive
la
semaine prochaine. Elle vient s’excuser : « Qui sait, Madame, j’aimer
3943
jour ça vous préférerait ? » (En prononçant tous
les
e muets). Simart, à propos de la récente baisse des salaires à la fil
3944
prononçant tous les e muets). Simart, à propos de
la
récente baisse des salaires à la filature : « Je vous dis, c’est mira
3945
art, à propos de la récente baisse des salaires à
la
filature : « Je vous dis, c’est miraculeux ce qu’on leur donne ! Sept
3946
après tout. Tradition laïque.) L’autre jour, dans
l’
autocar, une femme dont j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit hôt
3947
jamais fait ce rapprochement ? Ce petit fait, si
l’
on y réfléchit, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans no
3948
notre société présente. Et c’est encore une fois
le
drame de la culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de
3949
té présente. Et c’est encore une fois le drame de
la
culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de ce fait, à v
3950
ce fait, à vrai dire minuscule, qu’une évidence.
Les
mots que nous disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels,
3951
rivons, nous autres intellectuels, éveillent dans
l’
esprit populaire des harmoniques que nous ne savons plus prévoir. Litt
3952
s que nous ne savons plus prévoir. Littéralement,
les
mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraie
3953
plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus
le
même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le p
3954
téralement, les mots n’ont plus le même sens pour
le
peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple que j
3955
le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler.
Le
petit exemple que je viens de citer, c’est une espèce de calembour qu
3956
i ne joue que sur des sons. Mais il est clair que
le
sens des termes dont nous usons doit subir des métamorphoses non moin
3957
richesse et pauvreté, tous ces vocables dont nous
pensions
qu’ils exprimaient les lieux communs sur quoi repose, tacitement, la
3958
es vocables dont nous pensions qu’ils exprimaient
les
lieux communs sur quoi repose, tacitement, la vie sociale, sont aujou
3959
nt les lieux communs sur quoi repose, tacitement,
la
vie sociale, sont aujourd’hui vidés de leur signification à la fois s
3960
symbolique et précise. Ils n’éveillent plus chez
l’
homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts, que chez nous. L
3961
cise. Ils n’éveillent plus chez l’homme du peuple
les
mêmes espoirs, les mêmes dégoûts, que chez nous. Leur résonance senti
3962
nt plus chez l’homme du peuple les mêmes espoirs,
les
mêmes dégoûts, que chez nous. Leur résonance sentimentale est différe
3963
rquoi leur sens est différent, en dépit de ce que
l’
on pourrait déduire, dans le fait, d’une discussion raisonnable, c’est
3964
t, en dépit de ce que l’on pourrait déduire, dans
le
fait, d’une discussion raisonnable, c’est-à-dire truquée, avec tel ou
3965
une discussion raisonnable, c’est-à-dire truquée,
avec
tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps la traduction du lan
3966
c’est-à-dire truquée, avec tel ou tel ouvrier. On
pensera
que de tout temps la traduction du langage surveillé des écrivains da
3967
tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps
la
traduction du langage surveillé des écrivains dans le langage parlé d
3968
raduction du langage surveillé des écrivains dans
le
langage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voir
3969
e fut affectée de malentendus de ce genre. Voire.
Le
peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était
3970
e ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant
l’
école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois
3971
Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot.
Le
« public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse
3972
, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était
la
noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les co
3973
de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et
les
bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la
3974
», c’était la noblesse, et les bourgeois imitant
la
noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’uti
3975
a noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse.
Le
vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église
3976
les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple
les
comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait
3977
t la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans
la
seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église
3978
rai peuple les comprenait dans la seule mesure de
l’
utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens c
3979
e les comprenait dans la seule mesure de l’utile.
L’
Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens concret de
3980
dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait
le
trait d’union, l’Église gardienne du sens concret des lieux communs.
3981
re de l’utile. L’Église faisait le trait d’union,
l’
Église gardienne du sens concret des lieux communs. Aujourd’hui ces do
3982
mmuns. Aujourd’hui ces données sont bouleversées.
L’
instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la
3983
nées sont bouleversées. L’instruction publique et
la
Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de l
3984
instruction publique et la Presse répandent sinon
le
goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’éte
3985
ue et la Presse répandent sinon le goût, du moins
la
pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il n
3986
inon le goût, du moins la pratique quotidienne de
la
lecture. Le public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps l
3987
, du moins la pratique quotidienne de la lecture.
Le
public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps limité, éduqu
3988
. Un chacun peut en être, et juger comme il veut.
Le
droit de se tromper, et de tromper grâce au langage, est un des droit
3989
oits imprescriptibles que se trouve avoir décrété
la
Convention. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni l
3990
ntion. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni
l’
Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plu
3991
il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni
la
Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité
3992
e mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni
l’
École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de
3993
i l’Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend
les
remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bie
3994
prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur
l’
esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas di
3995
remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de
la
lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans le v
3996
ien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans
le
vide (il vaudrait mieux que ce soit le vide, dans bien des cas), quel
3997
dire dans le vide (il vaudrait mieux que ce soit
le
vide, dans bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rigueu
3998
bien des cas), quels que soient nos efforts vers
la
rigueur et vers l’adaptation de notre style à notre action. On serait
3999
ls que soient nos efforts vers la rigueur et vers
l’
adaptation de notre style à notre action. On serait même tenté d’estim
4000
notre action. On serait même tenté d’estimer que
la
plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et l’inverse. Par
4001
nté d’estimer que la plus grande rigueur entraîne
la
moindre efficacité, et l’inverse. Par où l’on voit que le contraire d
4002
grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et
l’
inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle »,
4003
raîne la moindre efficacité, et l’inverse. Par où
l’
on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public
4004
re efficacité, et l’inverse. Par où l’on voit que
le
contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie s
4005
t l’inverse. Par où l’on voit que le contraire de
la
« vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie spirituelle et ce
4006
e le contraire de la « vie spirituelle », c’est «
le
public ». Cette vie spirituelle et ce public nous posent des exigence
4007
tradictoires. Or, de ces deux antagonistes, c’est
l’
esprit qui sera vaincu. Non point qu’il s’avilisse partout ni qu’il se
4008
partout ni qu’il se laisse toujours persuader par
la
tentation du succès. Mais simplement on ne l’entend plus, il n’agit p
4009
par la tentation du succès. Mais simplement on ne
l’
entend plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de l
4010
plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est
l’
absence de l’esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents
4011
git plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de
l’
esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque tou
4012
on « entend », c’est l’absence de l’esprit, c’est
l’
appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque toujours contraires
4013
de compte, aux intérêts réels… 1er décembre 1934
Le
pasteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise le samedi soir, da
4014
asteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise
le
samedi soir, dans une salle attenante au temple, pour les hommes de s
4015
di soir, dans une salle attenante au temple, pour
les
hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il.
4016
u temple, pour les hommes de sa paroisse. « C’est
le
seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n
4017
s hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de
les
avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n’en vient qu’une d
4018
le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous
l’
aurez remarqué, il n’en vient qu’une dizaine au culte. C’est trop comp
4019
sur un sujet neutre, nous en avons toujours dans
les
40 à 50. Et une fois qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d
4020
achevaient de boire leur tasse de café au fond de
la
salle, dans un coin arrangé en cabinet de lecture. Journaux et illust
4021
cture. Journaux et illustrés, quelques livres sur
la
table. Puis on s’est assis sur des chaises alignées, pour entendre le
4022
est assis sur des chaises alignées, pour entendre
le
« conférencier »27. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quinc
4023
e « conférencier »27. J’ai reconnu deux facteurs,
le
libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraité
4024
ier »27. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire,
le
quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraités qui « trava
4025
eurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de
la
mairie, quelques retraités qui « travaillent le mazet » dans nos para
4026
e la mairie, quelques retraités qui « travaillent
le
mazet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs, les trois institut
4027
azet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs,
les
trois instituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’Écriture.
4028
un ou deux cultivateurs, les trois instituteurs.
Le
pasteur a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a é
4029
nstituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de
l’
Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des instituteur
4030
a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi
le
sujet a été introduit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de « l
4031
uit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de «
l’
histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démarré qu
4032
’agissait de « l’histoire de notre département ».
La
discussion n’a vraiment démarré que lorsqu’on s’est mis à parler d’au
4033
ose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de
l’
enseignement, des journaux, des traditions et anecdotes locales. Discu
4034
necdotes locales. Discussion n’est d’ailleurs pas
le
mot : c’étaient surtout des questions, des affirmations de partis pri
4035
és locales, provoquant chaque fois de gros rires.
L’
homme du peuple — et je pense qu’il en va de même du bourgeois peu cul
4036
que fois de gros rires. L’homme du peuple — et je
pense
qu’il en va de même du bourgeois peu cultivé, et sans doute de tout c
4037
es répétitions n’ont d’autre but que de laisser à
l’
esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de
4038
tions n’ont d’autre but que de laisser à l’esprit
le
temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue
4039
e « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de
la
langue des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous les
4040
e des écrivains français qu’il est exact de dire,
avec
tous les manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que tou
4041
vains français qu’il est exact de dire, avec tous
les
manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que toujours ell
4042
gue de discussion, parce que toujours elle vise à
la
formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu’un
4043
elle vise à la formule décisive, et ne s’accorde
le
droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus éco
4044
droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de
la
façon la plus économique et la plus claire28. Or, cette langue d’écha
4045
dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon
la
plus économique et la plus claire28. Or, cette langue d’échanges dial
4046
une seule fois, de la façon la plus économique et
la
plus claire28. Or, cette langue d’échanges dialectiques rapides se tr
4047
ques rapides se trouve par là même inefficace sur
le
« peuple ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprise
4048
». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement
les
reprises, les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflex
4049
e de durée. Évitant méticuleusement les reprises,
les
retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflexion spontanée,
4050
les retours, elle s’accorde très mal au rythme de
la
réflexion spontanée, qui est « péguyste » et non « classique ». Écriv
4051
t non « classique ». Écrivains inutilisables dans
la
mesure où ils veulent être de bons écrivains français.) — Que de bonn
4052
écrivains français.) — Que de bonne volonté chez
les
hommes de ce Cercle ! comme ils s’appliquent à comprendre, comme ils
4053
r expliquer des choses, amicalement ; de partager
avec
eux ce que l’on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs air
4054
choses, amicalement ; de partager avec eux ce que
l’
on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à
4055
ment ; de partager avec eux ce que l’on sait ! Je
pense
aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à leurs vagues souri
4056
t cela met entre celui qui parle et son public ! (
Le
« conférencier » en tournée se présente comme un séducteur, c’est la
4057
en tournée se présente comme un séducteur, c’est
la
loi du genre, et cela rend les échanges bien pauvres…) Quand nous nou
4058
un séducteur, c’est la loi du genre, et cela rend
les
échanges bien pauvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir, le
4059
uvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir,
le
facteur ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé,
4060
us sommes levés pour sortir, le facteur ronflait,
le
front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeu
4061
dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté
les
yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé avec plusieurs jeunes
4062
s yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé
avec
plusieurs jeunes gens. Quelles opinions politiques, dans ce cercle ?
4063
ns politiques, dans ce cercle ? — Il y a de tout.
Le
quincaillier est royaliste, un des instituteurs est objecteur de cons
4064
re. Il paraît que ça chauffe certains soirs. Mais
le
pasteur préside et on le respecte : 40 ans ; genre ancien combattant
4065
ffe certains soirs. Mais le pasteur préside et on
le
respecte : 40 ans ; genre ancien combattant ; « très large », dit-on.
4066
t-on. Et « il cause bien ». 16 décembre 1934 À N…
la
mairie est tout entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont
4067
out entière communiste. Ceux des habitants qui ne
le
sont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part les châtelains. Il
4068
ont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part
les
châtelains. Ils votent radical ou socialiste, et se font battre à pla
4069
à plate couture, régulièrement. Mais faut-il donc
penser
que les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent
4070
ture, régulièrement. Mais faut-il donc penser que
les
communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marx
4071
ser que les communistes, eux, savent pourquoi ils
le
sont, et connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela
4072
eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent
le
marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela du tout, vous verrez. Ê
4073
ans ce pays, c’est tout simplement être à gauche,
le
plus à gauche possible. S’il en est bien ainsi, me dis-je, on peut re
4074
peut redouter que ces hommes ne sachent pas faire
la
distinction entre le marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-il
4075
hommes ne sachent pas faire la distinction entre
le
marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictat
4076
ent pas faire la distinction entre le marxisme et
l’
anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictateur qui se prés
4077
oser au dictateur qui se présentera un jour comme
l’
homme de gauche à poigne ? J’ai questionné à ce sujet quelqu’un qui co
4078
à ce sujet quelqu’un qui connaît bien son monde.
La
vie même de cet homme consiste en effet à connaître intimement le plu
4079
et homme consiste en effet à connaître intimement
le
plus grand nombre de familles de N., leurs circonstances matérielles,
4080
eurs traditions et leurs rancunes — c’est souvent
la
même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et
4081
s — c’est souvent la même chose — leurs idées sur
la
vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste
4082
uvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur
la
mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître
4083
chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur
le
mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître ces choses,
4084
consiste à connaître ces choses, il faut prendre
le
mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas
4085
connaître ces choses, il faut prendre le mot dans
le
sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur
4086
e ces choses, il faut prendre le mot dans le sens
le
plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple
4087
t prendre le mot dans le sens le plus actif : car
l’
homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple curieux ou spectate
4088
s, quelqu’un qui a pour mission de leur enseigner
le
sens dernier des circonstances de leur vie. C’est le pasteur. Sa paro
4089
sens dernier des circonstances de leur vie. C’est
le
pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habit
4090
leur vie. C’est le pasteur. Sa paroisse comprend
les
villages de N. et de V. où il habite. V., c’est un vieux nid d’aigle,
4091
, une pierraille couronnant des hauteurs ventées.
Les
rues sont étroites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que le vent
4092
roites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que
le
vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur un
4093
teuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de
les
balayer. Nous sommes installés au presbytère sur une galerie d’où l’o
4094
mmes installés au presbytère sur une galerie d’où
l’
on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des
4095
rie d’où l’on domine un ample paysage horizontal.
La
plaine est à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’horizon
4096
à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à
l’
horizon des collines vers Uzès, où quelques ruines de castels et quelq
4097
e castels et quelques cheminées d’usines grattent
le
bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parm
4098
e bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine
le
village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeu
4099
aune. On distingue à peine le village de N. parmi
les
rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route noire pour dé
4100
es rangées de peupliers : il faut suivre des yeux
la
route noire pour découvrir enfin l’amas brunâtre des maisons au-desso
4101
ivre des yeux la route noire pour découvrir enfin
l’
amas brunâtre des maisons au-dessous d’une tache blanche dans un pré,
4102
-dessous d’une tache blanche dans un pré, qui est
le
château. Joie de voir un pays dans son ensemble, dans son unité natur
4103
et ancienne. Une même patine de crépuscule réunit
les
champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des co
4104
Une même patine de crépuscule réunit les champs,
les
arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. J
4105
tine de crépuscule réunit les champs, les arbres,
les
maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. Je demande au
4106
gens que je connais si bien ? C’est difficile de
les
classer et je n’aime pas beaucoup ça… Il y en a de toutes sortes, bie
4107
Il y en a de toutes sortes, bien sûr, et plus on
les
voit de près… — Je comprends qu’il soit difficile de parler en généra
4108
dire, oui et non. — Enfin, viennent-ils au temple
le
dimanche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas, les hommes d’ici
4109
anche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas,
les
hommes d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas l’envie qui man
4110
es d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas
l’
envie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours la question de la
4111
vie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours
la
question de la place à traverser. — ??? — Oui, vous savez que nos tem
4112
mais ils ont peur. C’est toujours la question de
la
place à traverser. — ??? — Oui, vous savez que nos temples du Midi so
4113
os temples du Midi sont construits en général sur
la
place du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses
4114
ur la place du village. En face ou à côté, il y a
les
cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hom
4115
du village. En face ou à côté, il y a les cafés,
les
terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont
4116
e ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous
les
platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis.
4117
a les cafés, les terrasses sous les platanes, et
le
dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au cu
4118
errasses sous les platanes, et le dimanche matin,
les
hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au culte, il faut défiler
4119
he matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si
l’
on va au culte, il faut défiler devant les terrasses, c’est gênant. Un
4120
stis. Si l’on va au culte, il faut défiler devant
les
terrasses, c’est gênant. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsie
4121
t. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsieur
le
pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacris
4122
e pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par
la
porte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et
4123
i on pouvait entrer par-derrière, par la porte de
la
sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux, le
4124
ndrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux,
les
voyez-vous ? Pouvez-vous discuter avec eux ? — Guère. Là encore, ce s
4125
t chez eux, les voyez-vous ? Pouvez-vous discuter
avec
eux ? — Guère. Là encore, ce sont surtout les femmes qu’on voit. Eux
4126
er avec eux ? — Guère. Là encore, ce sont surtout
les
femmes qu’on voit. Eux sont au travail, ou au café. — Pourquoi n’irie
4127
, ou au café. — Pourquoi n’iriez-vous pas au café
avec
eux ? — C’est difficile ! Moi, ça ne me gênerait pas. Mais eux on les
4128
fficile ! Moi, ça ne me gênerait pas. Mais eux on
les
étonnerait, et surtout ils y sont entre eux. Je n’ai aucune envie d’a
4129
ont entre eux. Je n’ai aucune envie d’aller faire
l’
intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne
4130
x. Je n’ai aucune envie d’aller faire l’intrus ou
le
bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne dis pas. Ma
4131
atiquement, je vous assure, c’est difficile. — Et
les
salutistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On les connaît… — A
4132
utistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On
les
connaît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des c
4133
rme. C’est classé. On les connaît… — Alors, quand
les
voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des conférences que j’organise. V
4134
naît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à
l’
occasion des conférences que j’organise. Vous avez déjà parlé dans des
4135
déjà parlé dans des cercles d’hommes. Vous voyez
le
genre. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête
4136
s des cercles d’hommes. Vous voyez le genre. — Et
les
communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête. Et ils discute
4137
re. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr,
le
maire en tête. Et ils discutent, et même très bien. Je me rappelle pa
4138
en. Je me rappelle par exemple une discussion sur
l’
incroyance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens
4139
elle par exemple une discussion sur l’incroyance.
L’
orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroya
4140
cussion sur l’incroyance. L’orateur avait dit que
la
différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas le
4141
ance. L’orateur avait dit que la différence entre
les
chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas les chrétiens se condui
4142
vait dit que la différence entre les chrétiens et
les
incroyants, ce n’est que pas les chrétiens se conduisent mieux que le
4143
les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas
les
chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est qu’ils se co
4144
est que pas les chrétiens se conduisent mieux que
les
autres, mais c’est qu’ils se confient en Dieu, et qu’ils attendent to
4145
ils se confient en Dieu, et qu’ils attendent tous
les
ordres de lui. À la fin, un des communistes se lève et résume le déba
4146
eu, et qu’ils attendent tous les ordres de lui. À
la
fin, un des communistes se lève et résume le débat : « En somme, dit-
4147
i. À la fin, un des communistes se lève et résume
le
débat : « En somme, dit-il, si nous ne croyons pas en Dieu, nous autr
4148
trop orgueilleux ? » En général, on peut dire que
les
communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux, et eu
4149
En général, on peut dire que les communistes sont
les
plus intelligents du village. Ce sont eux, et eux seuls, qui proposen
4150
réformes pratiques, qui demandent qu’on installe
l’
eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé e
4151
pratiques, qui demandent qu’on installe l’eau et
l’
électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entrepr
4152
andent qu’on installe l’eau et l’électricité dans
les
maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de la populati
4153
eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est
l’
élément réveillé et entreprenant de la population. — Mais savent-ils c
4154
etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de
la
population. — Mais savent-ils ce que c’est, le marxisme ? — Ils essai
4155
de la population. — Mais savent-ils ce que c’est,
le
marxisme ? — Ils essaient ; peut-être plus qu’on ne croirait. J’en co
4156
eurs qui lisent des brochures de vulgarisation de
la
doctrine. Ils me posent quelquefois des questions. Mais ce n’est pas
4157
quelquefois des questions. Mais ce n’est pas par
la
lecture qu’ils viennent au parti. L’affaire, pour eux, c’est d’abord
4158
’est pas par la lecture qu’ils viennent au parti.
L’
affaire, pour eux, c’est d’abord de se grouper afin d’entreprendre que
4159
, de résister aux gros propriétaires qui tiennent
la
région, et de leur imposer des mesures de progrès, de bon sens… — Au
4160
ses, d’où viennent-ils ? — Pour la plupart — tous
les
chefs en tous cas —, ce sont de petits propriétaires ou des ouvriers
4161
leur compte. — En somme, vous vous entendez bien
avec
eux ? — Ils savent que je suis de leur côté, en gros, dans les questi
4162
ls savent que je suis de leur côté, en gros, dans
les
questions locales où il faut prendre position. Quant à la doctrine, c
4163
ions locales où il faut prendre position. Quant à
la
doctrine, c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils la connais
4164
c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils
la
connaissent mal, ensuite et surtout parce qu’elle ne joue pratiquemen
4165
er raisonnablement. Mais rien ne se présente pour
les
soutenir. Ils vont au parti communiste parce qu’il n’y a rien d’autre
4166
d’autre et personne d’autre… Ce seraient souvent
les
meilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises tê
4167
aient souvent les meilleures têtes du pays, et on
les
laisse devenir les « mauvaises têtes ». 17 décembre 1934 Le grand tor
4168
eilleures têtes du pays, et on les laisse devenir
les
« mauvaises têtes ». 17 décembre 1934 Le grand tort des chrétiens, c’
4169
devenir les « mauvaises têtes ». 17 décembre 1934
Le
grand tort des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux l’incroyan
4170
t des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux
l’
incroyance de leurs contemporains. Au fond, ils en ont peur. Or ils de
4171
nteux, honteux d’une foi qu’il n’a pas ! Car s’il
l’
avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et
4172
s ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à
la
confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint
4173
, il n’aurait plus de honte à la confesser devant
les
hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint pas Dieu, mais qu’il
4174
qu’il n’est pas un des leurs… Je voudrais définir
le
croyant véritable : celui qui sait qu’il ne croit pas aux dieux du mo
4175
ait qu’il ne croit pas aux dieux du monde, et qui
le
prouve. Comment le prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en an
4176
pas aux dieux du monde, et qui le prouve. Comment
le
prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en annonçant aux hommes
4177
simplement en témoignant, en annonçant aux hommes
la
vérité et le chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, su
4178
témoignant, en annonçant aux hommes la vérité et
le
chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, surhumaines : s
4179
mieux. 12 janvier 1935 Ces cochons-là ! — Simard
le
jardinier s’est fait une forte entaille au doigt en travaillant. Ce g
4180
é d’ordinaire, en est tout pâle. Je vais discuter
le
coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne c
4181
naire, en est tout pâle. Je vais discuter le coup
avec
lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas
4182
tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour
le
ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas de meilleur
4183
dionaux qui ne connaît pas de meilleur remède que
la
parlotte. Tout de suite, c’est la question des assurances qu’il abord
4184
leur remède que la parlotte. Tout de suite, c’est
la
question des assurances qu’il aborde avec autorité, tout en tenant so
4185
te, c’est la question des assurances qu’il aborde
avec
autorité, tout en tenant son doigt blessé droit en l’air, dans une at
4186
utorité, tout en tenant son doigt blessé droit en
l’
air, dans une attitude doctorale. La question des assurances est une q
4187
essé droit en l’air, dans une attitude doctorale.
La
question des assurances est une question complexe, comme toutes les q
4188
ssurances est une question complexe, comme toutes
les
questions capitales. Les gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, pa
4189
n complexe, comme toutes les questions capitales.
Les
gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je l’en cro
4190
ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je
l’
en crois, n’a guère vendu depuis un mois que pour 50 francs de légumes
4191
depuis un mois que pour 50 francs de légumes. Or
la
vente des produits de son jardin est son seul moyen de gagner). Carré
4192
en de gagner). Carré sur son tabouret de cuisine,
le
doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et an
4193
). Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en
l’
air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et analogues — av
4194
de cuisine, le doigt en l’air, il passe en revue
les
compagnies d’assurances — et analogues — avec lesquelles il est en co
4195
evue les compagnies d’assurances — et analogues —
avec
lesquelles il est en compte. Je dis compagnies d’assurances, mais lui
4196
compte. Je dis compagnies d’assurances, mais lui
les
nomme plus couramment « ces cochons-là ». Ces cochons-là sont donc au
4197
en totalise sept pour son compte, et sa dame fait
le
petit appoint. Elle s’est « coupé » la jambe, cela fait bien cinq ans
4198
dame fait le petit appoint. Elle s’est « coupé »
la
jambe, cela fait bien cinq ans déjà, et « touche » pour cette jambe c
4199
claré que tout allait bien, c’est-à-dire qu’ils «
l’
ont diminuée à 17 sous par jour ». Pour se venger, il leur a retiré so
4200
venger, il leur a retiré son assurance à lui, et
l’
a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances sociales, v
4201
et l’a passée à d’autres. Il reste par bonheur :
les
assurances sociales, vie, décès, « avec doublage », vieillesse, accid
4202
bonheur : les assurances sociales, vie, décès, «
avec
doublage », vieillesse, accidents du travail, incendie et une histoir
4203
re très compliquée de capitalisation-loterie, qui
l’
excite particulièrement. Tout cela rend plus ou moins. Dans certains c
4204
re. « Ce cochon-là » n’a pas répondu, et pourtant
la
lettre était recommandée. Alors il a été voir « une personne encore p
4205
illé d’écrire une nouvelle lettre recommandée « à
la
charge du destinataire ». Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Répons
4206
Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Réponse dans
les
quatre jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que la personne com
4207
re jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que
la
personne compétente lui dit : « Ce cochon-là t’a refait de 299 francs
4208
cochon-là t’a refait de 299 francs, consulte voir
le
barème ! » Il a fallu récrire deux fois pour obtenir gain de cause. E
4209
50 francs. Autrement, vous savez ce qui se passe,
les
employés là-bas, au ministère, ils mettent l’argent dans leur poche.
4210
e, les employés là-bas, au ministère, ils mettent
l’
argent dans leur poche. — Tous les mas et mazets des environs sont hab
4211
ère, ils mettent l’argent dans leur poche. — Tous
les
mas et mazets des environs sont habités par des retraités, des pensio
4212
ités, des pensionnés, des assurés qui vivent dans
la
rouspétance contre ces « cochons-là » et dans la crainte de la vieill
4213
e contre ces « cochons-là » et dans la crainte de
la
vieillesse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de la mévente c
4214
sse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de
la
mévente croissante, on vit sur le dos de l’État, on suit des enterrem
4215
ner, à cause de la mévente croissante, on vit sur
le
dos de l’État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfa
4216
se de la mévente croissante, on vit sur le dos de
l’
État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfants pour d
4217
l’État, on suit des enterrements, on se brouille
avec
ses enfants pour des questions d’argent, on ne croit plus ni à Dieu n
4218
ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à
la
politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages,
4219
ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique,
l’
hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages, et ces cochons
4220
t à peine à la politique, l’hiver est « pourri »,
la
« pulmonie » fait des ravages, et ces cochons-là vous diminuent. Sima
4221
s-là vous diminuent. Simard m’explique encore que
les
gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme partout.
4222
re que les gens s’en vont d’ici pour travailler à
la
ville. C’est comme partout. Bon. Alors les catholiques descendent de
4223
iller à la ville. C’est comme partout. Bon. Alors
les
catholiques descendent de la montagne et viennent prendre la place. «
4224
partout. Bon. Alors les catholiques descendent de
la
montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illet
4225
ues descendent de la montagne et viennent prendre
la
place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des
4226
de la montagne et viennent prendre la place. « On
les
appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés,
4227
t viennent prendre la place. « On les appelle ici
les
illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont
4228
que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont pas
l’
instruction comme nous autres. » Arriérés, illettrés. Je n’en suis plu
4229
lus au temps où j’approuvais certains « Éloges de
l’
ignorance » plus sentimentaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais q
4230
entaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais que
l’
ignorance — oui, au sens de l’école primaire — est un mal qu’il faudra
4231
liques. Je sais que l’ignorance — oui, au sens de
l’
école primaire — est un mal qu’il faudrait guérir. Mais je ne puis m’e
4232
il faudrait guérir. Mais je ne puis m’empêcher de
penser
que ces « illettrés » sont peut-être moins bas que ces « assurés ». C
4233
t-être moins bas que ces « assurés ». Ce peuple à
la
retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait plus
4234
uple à la retraite qui meurt en rouspétant contre
les
bureaucrates ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de la vie
4235
ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de
la
vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage »…
4236
davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de
la
mort qui rapporte « en doublage »… 20 janvier 1935 Superstition. — C
4237
e écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est
le
moins croyable, étant superstitieux sur tout plein d’objets. » Malcha
4238
: il n’échappe aux jésuites que pour tomber dans
le
fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois,
4239
aux jésuites que pour tomber dans le fétichisme :
le
franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de
4240
pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré,
les
idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée
4241
c sacré, les idées à majuscules, toucher du bois,
la
bouteille de champagne brisée contre la coque des bateaux neufs, etc.
4242
du bois, la bouteille de champagne brisée contre
la
coque des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute la situation : c’
4243
que des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute
la
situation : c’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de la Lot
4244
’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de
la
Loterie nationale, s’inclinant sur la tombe du Soldat inconnu. Juste
4245
gagnant de la Loterie nationale, s’inclinant sur
la
tombe du Soldat inconnu. Juste hommage au collègue, au gagnant d’une
4246
collègue, au gagnant d’une autre loterie ! Toute
la
grande presse en a parlé. Personne ne rit. Léon Bloy rugit dans sa to
4247
rugit dans sa tombe. 3 février 1935 Déclassé. —
L’
intellectuel l’est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière
4248
tombe. 3 février 1935 Déclassé. — L’intellectuel
l’
est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière, dispersée com
4249
il est d’une classe particulière, dispersée comme
les
Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment
4250
ne classe particulière, dispersée comme les Juifs
le
sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la f
4251
ticulière, dispersée comme les Juifs le sont chez
les
gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce ch
4252
e les Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne
l’
ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a
4253
entils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à
la
faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette ambi
4254
fallu m’éloigner de cette ambiance bourgeoise où
l’
on a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que l’intellectuel en
4255
a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que
l’
intellectuel en tant que tel est un hors-classe, un être à part, auque
4256
à part, auquel on ne croit pas. (D’où sans doute
l’
angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à
4257
’angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de
l’
argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : pour
4258
tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à
l’
Académie, voire à jouer un rôle politique : pour faire figure, pour ac
4259
re, pour acquérir une situation bien définie dans
le
corps social). Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes int
4260
dans le corps social). Nous sommes méprisés dans
la
mesure où nous sommes intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans
4261
s intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans
la
mesure où nous réussissons à nous faire passer pour des bourgeois ou
4262
at. 17 février 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir
le
sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion d
4263
er 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir le sujet de
l’
entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt
4264
hommes. — Hier soir le sujet de l’entretien était
le
problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme.
4265
soir le sujet de l’entretien était le problème de
l’
autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos
4266
t de l’entretien était le problème de l’autorité.
La
discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos de partis pr
4267
e de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers
le
fascisme. Un beau chaos de partis pris, d’erreurs de faits et de form
4268
de faits et de formules électorales ! Je demandai
la
parole pour expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème
4269
ectorales ! Je demandai la parole pour expliquer,
le
plus simplement que je pus, que le problème fasciste est un problème
4270
our expliquer, le plus simplement que je pus, que
le
problème fasciste est un problème avant tout national ; qu’il s’est p
4271
ays, et qu’en tout cas il ne peut pas se poser de
la
même façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir uti
4272
poser de la même façon en France. Je conclus que
la
seule manière de prévenir utilement un fascisme, ce n’était pas de co
4273
tilement un fascisme, ce n’était pas de condamner
les
Italiens et leurs admirateurs français, position négative, paresseuse
4274
e, et donc faible, mais d’essayer de résoudre « à
la
française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante an
4275
le, mais d’essayer de résoudre « à la française »
le
problème de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocra
4276
yer de résoudre « à la française » le problème de
l’
autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlementai
4277
la française » le problème de l’autorité, tel que
le
posent cinquante années de démocratie parlementaire, et toute une tra
4278
e libertés. Bref, un petit sermon élémentaire sur
le
thème « liberté oblige ». Au sortir de la réunion, je surprends cette
4279
ire sur le thème « liberté oblige ». Au sortir de
la
réunion, je surprends cette phrase d’un homme, dans la cour, tandis q
4280
union, je surprends cette phrase d’un homme, dans
la
cour, tandis qu’il donne du feu à son copain : Pour moi, c’est un fas
4281
es raisons il prend ou ne prend point parti. Mais
l’
électeur veut qu’on soit pour ou contre, et il se méfie par principe d
4282
osition fondamentale. Peut-être ferais-je bien, à
l’
avenir, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, d
4283
je bien, à l’avenir, si j’écris quelque chose sur
le
fascisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : J
4284
, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur
les
soviets, de mettre en épigraphe à mon article : Je suis contre. Sinon
4285
mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu que
l’
article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma con
4286
suis contre. Sinon, pour peu que l’article expose
le
pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me cl
4287
. Sinon, pour peu que l’article expose le pour et
le
contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me classera fasc
4288
me classera fasciste ou communiste. Et pourtant,
la
mission de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur,
4289
asciste ou communiste. Et pourtant, la mission de
l’
écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l
4290
de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer
le
lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses par
4291
pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de
l’
amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? Mars 1935 (à M
4292
le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur
les
raisons de ses partis pris ? Mars 1935 (à Marseille) J’ai parlé à R.
4293
le) J’ai parlé à R. de mon projet de publier sous
le
titre de Journal d’un intellectuel en chômage , ces pages que je sui
4294
rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur
le
résultat de cette entreprise. Pour des raisons que je devine plus sen
4295
des raisons que je devine plus sentimentales que
les
arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est qu’
4296
s que les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que
le
lecteur demande, c’est qu’on lui raconte une histoire, me dit R. — Ma
4297
, me dit R. — Mais si je raconte mon histoire ? —
Le
lecteur veut des histoires inventées. — Mais si je lui dis que j’inve
4298
vous met en question, cela vous invite à comparer
les
situations… À cause de la solidarité humaine, probablement. — (Voilà
4299
vous invite à comparer les situations… À cause de
la
solidarité humaine, probablement. — (Voilà pourquoi l’on trouvera san
4300
lidarité humaine, probablement. — (Voilà pourquoi
l’
on trouvera sans doute, indiscret, de ma part, ce journal. Un tel juge
4301
el jugement ne serait pas très franc, d’ailleurs.
L’
indiscrétion, en soi, ne gêne pas beaucoup de gens, au contraire. Ce q
4302
de gens, au contraire. Ce qui gêne, c’est plutôt
la
vérité telle quelle, surtout la vérité sur une situation matérielle.
4303
êne, c’est plutôt la vérité telle quelle, surtout
la
vérité sur une situation matérielle. Il est entendu qu’on ne doit pas
4304
ropos, précisément, est de montrer, entre autres,
la
décadence de ce tabou. Je trouve moins indiscret de parler en public
4305
e tant d’autres, de mes amours, en donnant toutes
les
précisions qu’un collégien puisse désirer.) R. me disait aussi : En s
4306
ous n’êtes pas un vrai chômeur, puisque vous avez
la
possibilité de travailler. — Je me suis fait moi-même cette objection
4307
on. Il est clair qu’un intellectuel aura toujours
la
possibilité de travailler, pour autant que son vrai travail est de pe
4308
availler, pour autant que son vrai travail est de
penser
. Mais je l’appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la pos
4309
utant que son vrai travail est de penser. Mais je
l’
appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la possibilité de
4310
pelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus
la
possibilité de s’assurer un gagne-pain régulier par son travail, s’il
4311
plus d’emploi, et ne sait plus de quoi sera fait
le
lendemain. — Admettez que cela ne vous empêche pas de vivre assez bie
4312
atisfait de votre situation. Ce n’est fichtre pas
le
cas des vrais chômeurs ! — Ah, c’est vrai, je suis bien content, malg
4313
s pas du tout à être un « vrai chômeur », je vous
l’
assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit que cela me serait pratiquement impo
4314
le, sauf gâtisme précoce. Ce n’est pas un mal, je
pense
, si je suis heureux, bien que sans ressources. Mais d’autre part, est
4315
ue sans ressources. Mais d’autre part, est-ce que
le
fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’a
4316
nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder
la
frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pourrais faire un
4317
regarder la frange de mon pantalon. Ce n’est pas
avec
ça que je pourrais faire une carrière dans le monde, à supposer que l
4318
s avec ça que je pourrais faire une carrière dans
le
monde, à supposer que l’envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire
4319
faire une carrière dans le monde, à supposer que
l’
envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire dans mon journal, c’est
4320
ssi romantique et excitant que mon titre pourrait
le
faire croire. L’intéressant à mon point de vue, c’est de montrer une
4321
excitant que mon titre pourrait le faire croire.
L’
intéressant à mon point de vue, c’est de montrer une fois que c’est vr
4322
’est vrai, et de montrer comment c’est vrai, dans
le
détail… ⁂ Cette conversation avec R. m’a rendu attentif à un fait qui
4323
c’est vrai, dans le détail… ⁂ Cette conversation
avec
R. m’a rendu attentif à un fait qui m’apparaît soudain fondamental ;
4324
n fait qui m’apparaît soudain fondamental ; c’est
l’
affectivité quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à l’argent,
4325
é quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à
l’
argent, et qui se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la ri
4326
se mêle en particulier à tout échange d’idées sur
la
richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irrit
4327
rticulier à tout échange d’idées sur la richesse,
la
pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauva
4328
t échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou
le
chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauvaise conscience,
4329
’imbroglio passionnel plus idéalement favorable à
l’
apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur e
4330
ent favorable à l’apparition de délires subits de
la
pensée ou des sentiments. Aigreur et nervosité qui révèlent surtout u
4331
estions. Plusieurs générations de bourgeoisie, et
la
crise de cette bourgeoisie ont accouché d’un des plus beaux complexes
4332
ie ont accouché d’un des plus beaux complexes que
le
diable ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contr
4333
ue le diable ait jamais pu concevoir pour dresser
les
humains les uns contre les autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en
4334
ait jamais pu concevoir pour dresser les humains
les
uns contre les autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en guérir ? — C
4335
concevoir pour dresser les humains les uns contre
les
autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en guérir ? — Commençons par n
4336
uer, passons outre à nos vieilles pudeurs : c’est
le
début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés e
4337
outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de
la
cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés en fonction d
4338
aire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à
l’
argent son rôle mineur de moyen, d’impur et simple moyen… 31 mars 1935
4339
— Je lis dans un journal socialiste du Midi, sous
la
rubrique « La vie régionale », qui chaque jour m’apporte d’inénarrabl
4340
un journal socialiste du Midi, sous la rubrique «
La
vie régionale », qui chaque jour m’apporte d’inénarrables sujets de m
4341
ur m’apporte d’inénarrables sujets de méditation,
le
petit communiqué que voici : Bouillargues. — Les « exclus » vieux tr
4342
le petit communiqué que voici : Bouillargues. —
Les
« exclus » vieux travailleurs. Demain dimanche, à 10 heures, sera d
4343
let 1930 29 . Tous ceux qui ne bénéficient pas de
la
loi des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L
4344
des assurances sociales ont intérêt à assister à
la
conférence. L’organisation lutte afin de faire accorder une retraite
4345
sociales ont intérêt à assister à la conférence.
L’
organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
4346
der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez
la
propagande afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendicat
4347
donnée aux légitimes revendications des vieux ! «
L’
organisation lutte… Unissez-vous ! Activez la propagande ! » Ô merveil
4348
! « L’organisation lutte… Unissez-vous ! Activez
la
propagande ! » Ô merveille du pathos révolutionnaire ! ô gloire de la
4349
merveille du pathos révolutionnaire ! ô gloire de
la
phraséologie marxiste ! Ô triomphe des mots d’ordre sur l’inertie des
4350
ologie marxiste ! Ô triomphe des mots d’ordre sur
l’
inertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme cl
4351
iomphe des mots d’ordre sur l’inertie des masses,
l’
égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical — la conférence
4352
ertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois,
l’
obscurantisme clérical — la conférence est à 10 heures, dimanche matin
4353
des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical —
la
conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réac
4354
conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et
les
oligarchies réactionnaires ! Ô liberté, égalité, fraternité, Déclarat
4355
des droits de l’homme ! Il est venu, il est venu
le
jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que
4356
de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que
la
Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je le j
4357
re appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je
le
jour ! C’est l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le cou
4358
ous ses espoirs ! Mais que dis-je le jour ! C’est
l’
heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le coup de dix heures,
4359
l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur
le
coup de dix heures, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de
4360
ner : demain dimanche, sur le coup de dix heures,
le
grand mot qui résume cent années d’efforts, de luttes, de sacrifices
4361
ce grand mot sera prononcé, proclamé, acclamé par
les
travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos mil
4362
par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à
la
face du monde que nos militants héroïques n’ont pas perdu leur peine
4363
olique mot d’ordre sera donné comme un soufflet à
la
Réaction insolente : « Place aux Vieux ! » — On se demande s’il est a
4364
se demande s’il est au monde un seul pays, hormis
la
France, où cette phrase soit possible. Où les partis qui se disent «
4365
rmis la France, où cette phrase soit possible. Où
les
partis qui se disent « avancés » osent le proposer comme objectif de
4366
le. Où les partis qui se disent « avancés » osent
le
proposer comme objectif de « lutte ». Où la publication d’un communiq
4367
osent le proposer comme objectif de « lutte ». Où
la
publication d’un communiqué de ce genre ne soit pas accueillie par un
4368
une traînée de rigolade irrépressible dans toutes
les
couches de la population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la p
4369
rigolade irrépressible dans toutes les couches de
la
population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine enquê
4370
opulation, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À
la
prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets de
4371
ou « réactionnaire ». À la prochaine enquête sur
l’
état politique de la France, je me promets de répondre par cette simpl
4372
». À la prochaine enquête sur l’état politique de
la
France, je me promets de répondre par cette simple déclaration : « La
4373
mets de répondre par cette simple déclaration : «
La
France est un pays comblé qui a résolu tous les problèmes économiques
4374
« La France est un pays comblé qui a résolu tous
les
problèmes économiques urgents. La preuve en est fournie par ces phras
4375
a résolu tous les problèmes économiques urgents.
La
preuve en est fournie par ces phrases cueillies dans un journal révol
4376
ases cueillies dans un journal révolutionnaire : ‟
L’
organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
4377
der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez
la
propagande, afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendica
4378
cations des vieux !” Quand on en est à cela, dans
les
partis d’extrême gauche, c’est que l’état social est à peu près parad
4379
cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que
l’
état social est à peu près paradisiaque. » J’ajouterais peut-être ceci
4380
voue tous ses enthousiasmes aux soins que réclame
la
vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journaux, est act
4381
a vieillesse. Notre opinion publique, à en croire
les
journaux, est actuellement dominée par le souci des élections académi
4382
croire les journaux, est actuellement dominée par
le
souci des élections académiques et des retraites aux sexagénaires. N’
4383
as beau, rassurant, émouvant, dans une Europe que
l’
on croyait en proie aux brutales jeunesses bottées ? » 25 avril 1935
4384
ses bottées ? » 25 avril 1935 Communisme. — Dans
la
petite librairie grande ouverte sur la rue principale, je parcours, c
4385
me. — Dans la petite librairie grande ouverte sur
la
rue principale, je parcours, comme chaque jour, la plupart des journa
4386
bonhomme au nez violacé traîne ses pantoufles par
la
boutique et grogne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement la p
4387
gne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement
la
patronne qui ne répond pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il fau
4388
d pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il faut
le
laisser frapper le sol de sa canne et redresser sa casquette pour pon
4389
itué, il est comme ça. Il faut le laisser frapper
le
sol de sa canne et redresser sa casquette pour ponctuer ses raisonnem
4390
ntelligent. — Vous avez mon Huma ? — Bou die ! je
les
ai toutes vendues, Monsieur Dumas ! (C’est jour de foire). — Allons,
4391
(C’est jour de foire). — Allons, tant mieux, fait
l’
homme. Et si des fois on vous en demande de trop, vous n’avez qu’à don
4392
n’avez qu’à donner la mienne, vous savez. Plus on
la
lit… Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteu
4393
vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de
la
cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. « Et
4394
Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque
le
vieux gâteux l’arrête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu
4395
re de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux
l’
arrête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à
4396
e va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur
le
seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? »
4397
« Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à
la
mairie ? » L’homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux
4398
on bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? »
L’
homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par l
4399
L’homme au visage maigre fait un geste réticent.
Le
vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des s
4400
au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux
le
tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers :
4401
gre fait un geste réticent. Le vieux le tient par
la
manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers : « Tu m’enten
4402
le tient par la manche et lui martèle de sa canne
le
bout des souliers : « Tu m’entends ? Nous ôtres, nous allons vous pas
4403
s ôtres, nous allons vous passer à tabaque, toute
la
bande ! — Oh ! dit l’homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit
4404
ous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit
l’
homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit ! — Notre droit ? Peu
4405
(Il glousse d’un air malin). — On sait bien, dit
le
communiste, que vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les
4406
dit le communiste, que vous avez toujours soutenu
les
gros qui pressent les petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc
4407
vous avez toujours soutenu les gros qui pressent
les
petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez
4408
ours soutenu les gros qui pressent les petits ! —
Les
gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez toute notre ar
4409
ez toute notre argent, depuis quatre ans que vous
l’
avez, le pouvoir ! » L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou p
4410
notre argent, depuis quatre ans que vous l’avez,
le
pouvoir ! » L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou peut-être
4411
e ces deux hommes, je n’hésite pas : je vote pour
le
communiste. C’est un Méridional du type sérieux, un de ces hommes qui
4412
de ces hommes qui pourraient sauver sa région de
la
totale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de
4413
ient sauver sa région de la totale décrépitude où
l’
ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcool
4414
région de la totale décrépitude où l’ont laissée
les
radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait parti
4415
tale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et
les
créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà l’aspec
4416
Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà
l’
aspect local et personnel de la question, sur le plan des prochaines é
4417
fait partie. Voilà l’aspect local et personnel de
la
question, sur le plan des prochaines élections municipales. Mais il y
4418
. Simple question de tempérament. Peut-être aussi
le
communiste n’est-il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant qu
4419
encore parvenu à « mettre de côté » autant qu’il
le
voudrait. Mais ce n’est pas sûr. Je sais bien une douzaine de ses cam
4420
une douzaine de ses camarades qui comptent parmi
les
mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment
4421
t parmi les mieux rentés de ce pays. Faut-il donc
penser
que les partis expriment tout simplement des attitudes morales différ
4422
mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que
les
partis expriment tout simplement des attitudes morales différentes ?
4423
i avais acheté, innocemment, le dernier numéro de
l’
Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers,
4424
eté, innocemment, le dernier numéro de l’Huma. De
la
haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquag
4425
ernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de
la
haine, quelques mensonges grossiers, le truquage habituel des titres,
4426
encore de la haine, quelques mensonges grossiers,
le
truquage habituel des titres, une sauce aigre où nagent de grandes vé
4427
ujours bonnes à dire, mais mal dites. J’accepte à
la
rigueur cette division du monde en gros et en petits, si c’est le seu
4428
division du monde en gros et en petits, si c’est
le
seul moyen pratique de faire valoir les droits élémentaires d’une par
4429
, si c’est le seul moyen pratique de faire valoir
les
droits élémentaires d’une partie de la population. Mais quelle trahis
4430
re valoir les droits élémentaires d’une partie de
la
population. Mais quelle trahison des « petits » représente alors ce j
4431
ésente alors ce journal ! Leur seule force contre
les
capitalistes et surtout contre leurs suppôts, ces retraités radicaux
4432
traités radicaux ou socialistes, ce serait d’être
le
parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hom
4433
caux ou socialistes, ce serait d’être le parti de
la
vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bourge
4434
e parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient
avec
eux tous les hommes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la p
4435
vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous
les
hommes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la politique et l
4436
mmes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent
la
politique et la combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit les
4437
ou intellectuels — qui détestent la politique et
la
combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit les révoltes les mie
4438
combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit
les
révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les a
4439
torale. Au lieu de quoi on pervertit les révoltes
les
mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une
4440
n pervertit les révoltes les mieux justifiées, on
les
étourdit de mensonges, on les abreuve d’une prose abstraite, brutale
4441
ieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on
les
abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — e
4442
abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui
le
sont si peu ! — et si possible, plus médiocre que celle des grands jo
4443
tion. On leur impose une mystique confectionnée à
l’
usage des moujiks… Quel est l’homme sain qui oserait affirmer que ce q
4444
que confectionnée à l’usage des moujiks… Quel est
l’
homme sain qui oserait affirmer que ce quotidien lamentable, hérissé d
4445
able, hérissé de clichés hargneux, travaille pour
le
bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait
4446
neux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si
l’
on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas l
4447
e bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux
le
sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas le cas des intellectuel
4448
le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas
le
cas des intellectuels qui « adhèrent » aux disciplines staliniennes e
4449
s staliniennes en haine d’une société qu’ils sont
les
seuls à croire encore « chrétienne » — il faut bien dire que le parti
4450
ire encore « chrétienne » — il faut bien dire que
le
parti communiste est une sinistre trahison des pauvres hommes. Beauco
4451
inistre trahison des pauvres hommes. Beaucoup, je
le
sais, résistent à l’intoxication, mais cela prouve simplement, une fo
4452
pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résistent à
l’
intoxication, mais cela prouve simplement, une fois de plus, que l’hom
4453
ais cela prouve simplement, une fois de plus, que
l’
homme du peuple ne comprend pas profondément ce qu’on lui donne à lire
4454
ne voit pas que son journal est sans rapport réel
avec
cette situation. Mais les intellectuels, dont le métier est de compre
4455
est sans rapport réel avec cette situation. Mais
les
intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est d
4456
vec cette situation. Mais les intellectuels, dont
le
métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, do
4457
llectuels, dont le métier est de comprendre, dont
le
métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir fo
4458
est de comprendre, dont le métier est de vouloir
la
vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une p
4459
re, dont le métier est de vouloir la vérité, dont
la
seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, —
4460
érité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans
le
pouvoir d’une pensée droite, — on se demande par quelle rancune vague
4461
viennent à s’imaginer qu’ils défendent eux aussi
les
« petits » en défendant ces exploiteurs de la bassesse et du mensonge
4462
si les « petits » en défendant ces exploiteurs de
la
bassesse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bleue
4463
e la bassesse et du mensonge en service commandé.
L’
homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort m
4464
sse et du mensonge en service commandé. L’homme à
la
veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort maladroit e
4465
en service commandé. L’homme à la veste bleue, je
le
comprends et je l’aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans l
4466
. L’homme à la veste bleue, je le comprends et je
l’
aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’ai
4467
aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans
la
mesure où je l’aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Réflexion de «
4468
fort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je
l’
aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Réflexion de « personnaliste ».
4469
28 avril 1935 Réflexion de « personnaliste ». —
Le
peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritab
4470
exion de « personnaliste ». — Le peuple tel qu’on
le
voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritables. Mais c’est qu’i
4471
intérêts véritables. Mais c’est qu’il ne peut pas
les
exprimer très aisément. Question de langage. Revenez voir ces mêmes h
4472
e j’ai dit, revenez deux fois, vingt fois, prenez-
les
sur le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs a
4473
it, revenez deux fois, vingt fois, prenez-les sur
le
fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs au sens
4474
le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-
les
attentifs au sens de leurs clichés. Mieux encore, parlez-leur de leur
4475
e de sensé, de vécu, de réel, — et qui renversera
les
conclusions cyniques des partisans de la dictature. Ils vous diront d
4476
versera les conclusions cyniques des partisans de
la
dictature. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’e
4477
sans de la dictature. Ils vous diront d’abord que
le
fond de leur vie, c’est l’ennui. Ils expliqueront presque toujours ce
4478
ous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est
l’
ennui. Ils expliqueront presque toujours cet ennui par les conditions
4479
. Ils expliqueront presque toujours cet ennui par
les
conditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : no
4480
ennui par les conditions du travail créées depuis
la
guerre dans les campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impos
4481
onditions du travail créées depuis la guerre dans
les
campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impossibilité de « su
4482
isé, de s’attacher à ce qu’on fait ; nécessité où
l’
on se trouve de bâcler son ouvrage, pour gagner de quoi vivre, tentati
4483
ondition. Ils vous diront aussi qu’ils n’ont plus
le
cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la mer
4484
plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que
les
résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incap
4485
uvrage, quand ils savent que les résultats sont à
la
merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diro
4486
t d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront que
le
mal vient de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois s
4487
d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de
l’
État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois sans rien savoir
4488
de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font
les
lois sans rien savoir des situations locales. Parfois ils proposeront
4489
s proposeront quelque réforme pratique : faire de
la
place aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer
4490
tique : faire de la place aux jeunes en abaissant
la
limite d’âge dans les chemins de fer et l’administration ; faire des
4491
lace aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans
les
chemins de fer et l’administration ; faire des lois régionales pour l
4492
issant la limite d’âge dans les chemins de fer et
l’
administration ; faire des lois régionales pour la viticulture ; mettr
4493
l’administration ; faire des lois régionales pour
la
viticulture ; mettre en commun les terres d’un petit village ; vendre
4494
régionales pour la viticulture ; mettre en commun
les
terres d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries
4495
en commun les terres d’un petit village ; vendre
le
vin du pays dans les épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des
4496
s d’un petit village ; vendre le vin du pays dans
les
épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des succédanés fabriqués
4497
succédanés fabriqués dans des « caves centrales »
avec
des vins d’Afrique et des produits chimiques (« que vous avez la gorg
4498
frique et des produits chimiques (« que vous avez
la
gorge brûlante après un verre »). Enfin ils se plaindront de ce que,
4499
laisir. On n’est plus fier d’en être, on approuve
la
jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! »
4500
r d’en être, on approuve la jeunesse qui délaisse
la
terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! » — phrase entendue un peu
4501
n approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour
la
ville. (« C’est mort, ici ! » — phrase entendue un peu partout dans l
4502
rt, ici ! » — phrase entendue un peu partout dans
la
province). Et puis « leur » politique, parlez-moi de « leurs combines
4503
’en tiendra aux clichés du journal. On n’aura pas
le
temps ni le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder d
4504
aux clichés du journal. On n’aura pas le temps ni
le
courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités.
4505
al. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même
l’
idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités. Donc, par amour du
4506
s plus ses assemblées, ce n’est pas lui. Écoutons
les
observations que formulent des individus pris à part, dans leur vie c
4507
e concrète. Je constate qu’elles vont toutes dans
le
sens de ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région
4508
lles vont toutes dans le sens de ce que proposent
les
personnalistes : autonomie de la région naturelle, communalisme, synd
4509
e que proposent les personnalistes : autonomie de
la
région naturelle, communalisme, syndicats locaux, rajeunissement des
4510
oyens de circuler et de s’instruire, résistance à
l’
état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le mo
4511
ruire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant à
la
lutte contre le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être
4512
e à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre
le
capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être ; c’est bien mo
4513
pes d’hommes nouveaux, jeunes et sortis de toutes
les
classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les
4514
de toutes les classes, d’exprimer ce que taisent
les
journaux, les orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle
4515
classes, d’exprimer ce que taisent les journaux,
les
orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle des travaille
4516
imer ce que taisent les journaux, les orateurs et
les
affiches — et qui est la volonté réelle des travailleurs, trahis par
4517
urnaux, les orateurs et les affiches — et qui est
la
volonté réelle des travailleurs, trahis par le langage politicien. La
4518
st la volonté réelle des travailleurs, trahis par
le
langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui re
4519
s travailleurs, trahis par le langage politicien.
La
dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peu
4520
rahis par le langage politicien. La dictature est
la
seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature ou
4521
la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer
le
peuple. Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La d
4522
’éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà
le
dilemme du xxe siècle. La dictature est très facile. Elle n’a qu’un
4523
re ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle.
La
dictature est très facile. Elle n’a qu’un argument très puissant cont
4524
classe, sur quels intérêts ? — Nous comptons sur
l’
effort des hommes les plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d
4525
ntérêts ? — Nous comptons sur l’effort des hommes
les
plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d’autre n’est vrai… 6
4526
s-vous. Mais rien d’autre n’est vrai… 6 mai 1935
La
mort et les cérémonies dans le Gard. — La maison de Simard recèle un
4527
s rien d’autre n’est vrai… 6 mai 1935 La mort et
les
cérémonies dans le Gard. — La maison de Simard recèle un effrayant se
4528
vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans
le
Gard. — La maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait
4529
i 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. —
La
maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait laissé igno
4530
e. Nous apprenons son existence en même temps que
l’
imminence de sa mort — et voici qui éveillera peut-être des réflexions
4531
éveillera peut-être des réflexions fécondes dans
l’
esprit du lecteur philosophe. Déjà huit mois que nous sommes ici, et c
4532
et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans
la
grande cuisine qui était, pensions-nous, tout leur logis — nous avion
4533
nous pas entrés dans la grande cuisine qui était,
pensions
-nous, tout leur logis — nous avions cru comprendre que les autres piè
4534
tout leur logis — nous avions cru comprendre que
les
autres pièces étaient vides ou ne servaient que de débarras —, et rie
4535
ire soupçonner cette présence à côté. Hier matin,
la
mère Calixte arrive tout agitée : « Madame se meurt ! s’écrie-t-elle.
4536
se meurt ! s’écrie-t-elle. C’est Madame Bastide,
la
belle-mère. — Qu’a-t-elle ? — Oh, elle m’a bien reconnue, mais elle v
4537
uit, vous savez, elle est toute chargée, bou die,
l’
estomac et tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle !
4538
toute chargée, bou die, l’estomac et tout. — Mais
les
Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissai
4539
parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissaient de
l’
emballer, la vieille ! » Ils n’auront plus à languir bien longtemps. O
4540
e ! — Peuchère ! ils languissaient de l’emballer,
la
vieille ! » Ils n’auront plus à languir bien longtemps. On peut dire
4541
t plus à languir bien longtemps. On peut dire que
la
chose est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effr
4542
gtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on
l’
entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables discussions nous
4543
e est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour,
le
bruit d’effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simar
4544
bruit d’effroyables discussions nous parvient de
la
cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé, et on partage. C’est to
4545
é, et on partage. C’est toujours assez compliqué.
La
nuit, par un dernier respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour
4546
z compliqué. La nuit, par un dernier respect pour
la
moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dan
4547
lent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans
la
remise qui est au-dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix n
4548
ence : sans auto, sans argent, sans amis proches,
la
solitude devient un isolement. Il y a « les gens », bien sûr. C’est i
4549
oches, la solitude devient un isolement. Il y a «
les
gens », bien sûr. C’est instructif. Mais le désir de s’instruire a de
4550
a « les gens », bien sûr. C’est instructif. Mais
le
désir de s’instruire a des limites. Déjà les relations se stabilisent
4551
Mais le désir de s’instruire a des limites. Déjà
les
relations se stabilisent, les « courtes habitudes » épuisent leur ver
4552
a des limites. Déjà les relations se stabilisent,
les
« courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est le moment de lever s
4553
« courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est
le
moment de lever son camp. Plus tard, peut-être, quand toutes ces mais
4554
de se plaindre des villes, où ils s’incrustent —
la
province deviendra vivable. La révolution sera faite. Nous reviendron
4555
ils s’incrustent — la province deviendra vivable.
La
révolution sera faite. Nous reviendrons… — Demain, il faut remettre e
4556
reviendrons… — Demain, il faut remettre en place
les
aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, no
4557
Demain, il faut remettre en place les aquarelles,
les
guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous
4558
emettre en place les aquarelles, les guéridons et
les
dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous fuyons. 27. Mo
4559
. 27. Monsieur X… « orateur distingué », disait
la
convocation. 28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Rév
4560
orateur distingué », disait la convocation. 28.
La
stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut c
4561
la convocation. 28. La stratégie qu’inaugurèrent
les
généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en so
4562
28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de
la
Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’appli
4563
et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que
l’
application du style français à la chose militaire. 29. Ils ont donc
4564
st en somme que l’application du style français à
la
chose militaire. 29. Ils ont donc au moins 66 ans aujourd’hui, où l’
4565
29. Ils ont donc au moins 66 ans aujourd’hui, où
l’
article paraît. m. Rougemont Denis de, « Journal d’un intellectuel
4566
Lénine, Staline et
la
littérature (17 avril 1937)n Pour lutter contre le fascisme, les c
4567
ittérature (17 avril 1937)n Pour lutter contre
le
fascisme, les communistes paraissent avoir compris qu’il faut défendr
4568
7 avril 1937)n Pour lutter contre le fascisme,
les
communistes paraissent avoir compris qu’il faut défendre la culture.
4569
stes paraissent avoir compris qu’il faut défendre
la
culture. Le malheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense que de
4570
ent avoir compris qu’il faut défendre la culture.
Le
malheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense que des moyens fas
4571
r cette défense que des moyens fascistes. « Toute
la
littérature sociale-démocrate — écrit Lénine en 1905 déjà ! — doit de
4572
tion totalitaire ; dans un discours aux cadets de
l’
Académie de l’Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans les circonst
4573
re ; dans un discours aux cadets de l’Académie de
l’
Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans les circonstances actuelle
4574
de l’Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans
les
circonstances actuelles, les cadres décident de tout ! » Compris ? Ce
4575
: « Chez nous, dans les circonstances actuelles,
les
cadres décident de tout ! » Compris ? Ces deux phrases sont tirées d’
4576
d’un choix de propos de Lénine et de Staline Sur
la
littérature et l’art. Disons tout de suite que le Père des peuples n’
4577
pos de Lénine et de Staline Sur la littérature et
l’
art. Disons tout de suite que le Père des peuples n’a fourni pour sa p
4578
la littérature et l’art. Disons tout de suite que
le
Père des peuples n’a fourni pour sa part qu’une dizaine de pages (sur
4579
e par sa veuve : « En Russie, Ilitch ne goûta pas
l’
art nouveau, qui lui demeurait étranger. » Il préférait de beaucoup à
4580
étranger. » Il préférait de beaucoup à Maïakovski
le
« Salut au 17e » : Salut, salut à vous, braves soldats du 17e… ou e
4581
, salut à vous, braves soldats du 17e… ou encore
la
chanson patriotarde sur l’Alsace-Lorraine : Vous avez pu germaniser
4582
ats du 17e… ou encore la chanson patriotarde sur
l’
Alsace-Lorraine : Vous avez pu germaniser nos plaines Mais notre cœ
4583
ermaniser nos plaines Mais notre cœur — vous ne
l’
aurez jamais ! Dans un article de 1922, il loue cependant un poème de
4584
, il loue cependant un poème de Maïakovski contre
les
bureaucrates. Je n’appartiens pas, dit-il, aux admirateurs de son ta
4585
tratif. Dans son poème, il raille impitoyablement
les
réunions et se moque des communistes qui ne font que siéger et siéger
4586
siéger et siéger encore. Je ne sais ce qu’il faut
penser
de la poésie, mais pour ce qui est de la politique, je m’en porte gar
4587
siéger encore. Je ne sais ce qu’il faut penser de
la
poésie, mais pour ce qui est de la politique, je m’en porte garant, c
4588
faut penser de la poésie, mais pour ce qui est de
la
politique, je m’en porte garant, c’est parfaitement vrai. Voilà qui
4589
, c’est parfaitement vrai. Voilà qui donne toute
la
mesure (la dernière phrase surtout) de Lénine « fondateur de la nouve
4590
dernière phrase surtout) de Lénine « fondateur de
la
nouvelle culture ». Au moins, c’est franc, sans prétention, et cela r
4591
moins, c’est franc, sans prétention, et cela rend
l’
homme plutôt sympathique. Mais, en 1935, le ton des « dirigeants » a b
4592
a rend l’homme plutôt sympathique. Mais, en 1935,
le
ton des « dirigeants » a bien changé. Voici ce qu’écrit, à cette date
4593
» a bien changé. Voici ce qu’écrit, à cette date,
le
Père des peuples, sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure le
4594
qu’écrit, à cette date, le Père des peuples, sur
le
même Maïakovski : Il a été et il demeure le poète le meilleur, le pl
4595
sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure
le
poète le meilleur, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’i
4596
ême Maïakovski : Il a été et il demeure le poète
le
meilleur, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’indifféren
4597
i : Il a été et il demeure le poète le meilleur,
le
plus talentueux de notre époque soviétique. L’indifférence à sa mémoi
4598
r, le plus talentueux de notre époque soviétique.
L’
indifférence à sa mémoire et à ses œuvres est un crime. Vous reconnai
4599
et à ses œuvres est un crime. Vous reconnaissez
le
ton du policier, et du fonctionnaire arrivé. « L’indifférence à ses œ
4600
le ton du policier, et du fonctionnaire arrivé. «
L’
indifférence à ses œuvres est un crime. » Heureusement pour lui que Lé
4601
st déjà mort et momifié ! Je ne sais quelle était
l’
intention des éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à l’évid
4602
éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à
l’
évidence que les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en gén
4603
istes de ce choix. Il en ressort à l’évidence que
les
« idées » de Lénine sur la littérature étaient en général saines, ban
4604
sort à l’évidence que les « idées » de Lénine sur
la
littérature étaient en général saines, banales, un peu courtes, et qu
4605
re et d’attardé, ou de brutalement primaire, pour
le
planifier à l’échelle de son empire national-socialiste. À nous de re
4606
, ou de brutalement primaire, pour le planifier à
l’
échelle de son empire national-socialiste. À nous de relever la vraie
4607
son empire national-socialiste. À nous de relever
la
vraie défense de la culture, et d’une culture créatrice, novatrice, c
4608
socialiste. À nous de relever la vraie défense de
la
culture, et d’une culture créatrice, novatrice, contre ses fossoyeurs
4609
totalitaires, et contre ce distributeur de prix à
l’
Académie de l’Armée rouge, l’homme des « cadres qui décident de tout »
4610
et contre ce distributeur de prix à l’Académie de
l’
Armée rouge, l’homme des « cadres qui décident de tout ». n. Rougem
4611
stributeur de prix à l’Académie de l’Armée rouge,
l’
homme des « cadres qui décident de tout ». n. Rougemont Denis de, «
4612
». n. Rougemont Denis de, « Lénine, Staline et
la
littérature », À nous la liberté, Paris, 17 avril 1937, p. 10.
4613
de, « Lénine, Staline et la littérature », À nous
la
liberté, Paris, 17 avril 1937, p. 10.
4614
Chamisso et
le
Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)p L’énigme Vers 1813,
4615
Chamisso et le Mythe de
l’
Ombre perdue (mai-juin 1937)p L’énigme Vers 1813, un personnag
4616
le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)p
L’
énigme Vers 1813, un personnage assez hagard aborde l’imagination d
4617
e Vers 1813, un personnage assez hagard aborde
l’
imagination de Chamisso ; il déclare avoir perdu son ombre. Le second
4618
feste une anxiété plus sérieusement troublante. «
L’
homme sans ombre » rôdait depuis longtemps dans les régions obscures d
4619
L’homme sans ombre » rôdait depuis longtemps dans
les
régions obscures de la légende populaire. S’il se risque à paraître d
4620
ait depuis longtemps dans les régions obscures de
la
légende populaire. S’il se risque à paraître devant Chamisso, c’est p
4621
aître devant Chamisso, c’est peut-être poussé par
l’
envie d’être enfin deviné, expliqué. Chamisso est français de naissanc
4622
ntricité du sort a fait de lui un poète allemand.
Les
autres ont toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans le savoir
4623
toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans
le
savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de l’homme sa
4624
le savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est
le
calcul de l’homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer au
4625
hamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de
l’
homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer au soleil : c’e
4626
t le premier saisi par ce frisson d’absurdité que
l’
on baptise inspiration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’épro
4627
piration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui
l’
éprouve, le désir de s’en délivrer en l’exprimant. Et c’est ainsi que
4628
rsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’éprouve,
le
désir de s’en délivrer en l’exprimant. Et c’est ainsi que Chamisso in
4629
celui qui l’éprouve, le désir de s’en délivrer en
l’
exprimant. Et c’est ainsi que Chamisso introduisit dans la conscience
4630
ant. Et c’est ainsi que Chamisso introduisit dans
la
conscience moderne le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous le
4631
e Chamisso introduisit dans la conscience moderne
le
mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques e
4632
ntroduisit dans la conscience moderne le mythe de
l’
homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques et naïfs du c
4633
e le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous
les
traits pathétiques et naïfs du célèbre Peter Schlemihl. De Chamisso à
4634
êle une assez opaque science, sans détriment pour
le
mystère, qui reste entier. Cependant, à voir tant d’auteurs s’exercer
4635
ntier. Cependant, à voir tant d’auteurs s’exercer
l’
imagination sur un sujet qui défie l’expérience, l’on s’étonne qu’aucu
4636
rs s’exercer l’imagination sur un sujet qui défie
l’
expérience, l’on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justif
4637
’imagination sur un sujet qui défie l’expérience,
l’
on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier. L’on s’ét
4638
qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier.
L’
on s’étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formuler le symbole enfe
4639
étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formuler
le
symbole enfermé dans le mythe. Serait-ce pudeur d’artistes ? Pudeur t
4640
n’ait essayé de formuler le symbole enfermé dans
le
mythe. Serait-ce pudeur d’artistes ? Pudeur tout court ? Ou faut-il c
4641
eurs contes sans jamais se poser de questions sur
le
sens d’un tel accident — dont à vrai dire les suites sont assez pitto
4642
sur le sens d’un tel accident — dont à vrai dire
les
suites sont assez pittoresques pour qu’un « poète » — au sens banal d
4643
e » — au sens banal du terme — préfère en ignorer
la
cause ? L’on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et
4644
ns banal du terme — préfère en ignorer la cause ?
L’
on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et l’expressi
4645
r la cause ? L’on s’étonne enfin de ce lien entre
le
domaine germanique et l’expression littéraire du mythe : Chamisso, An
4646
e enfin de ce lien entre le domaine germanique et
l’
expression littéraire du mythe : Chamisso, Andersen, Hofmannsthal, et
4647
, Hofmannsthal, et bien d’autres imitateurs, dont
le
moindre n’est pas Hoffmann… ⁂ L’énigme commença de m’inquiéter lors d
4648
imitateurs, dont le moindre n’est pas Hoffmann… ⁂
L’
énigme commença de m’inquiéter lors d’un séjour allemand au cours duqu
4649
emand au cours duquel je pus observer mainte fois
l’
extraordinaire popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à l’Opér
4650
popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à
l’
Opéra. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas le livret d’Hofm
4651
a. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas
le
livret d’Hofmannsthal, et compris mal l’intrigue de la Femme sans omb
4652
sais pas le livret d’Hofmannsthal, et compris mal
l’
intrigue de la Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la sc
4653
vret d’Hofmannsthal, et compris mal l’intrigue de
la
Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la scène en hurlant
4654
Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir
la
scène en hurlant : elle tirait après soi un grand morceau d’étoffe qu
4655
grand morceau d’étoffe qui figurait son ombre et
l’
embarrassait fort. Aux entractes, on parlait de Freud. La musique m’en
4656
rassait fort. Aux entractes, on parlait de Freud.
La
musique m’ennuyait, indéfinie. Plus tard je lus le livre qui me parut
4657
a musique m’ennuyait, indéfinie. Plus tard je lus
le
livre qui me parut splendide… Qu’est-ce qu’une ombre ? me demandais-j
4658
e demandais-je. Quelque chose d’assez méprisable.
Les
Latins la ridiculisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est
4659
-je. Quelque chose d’assez méprisable. Les Latins
la
ridiculisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus que l
4660
sable. Les Latins la ridiculisent. C’est pour eux
l’
irréalité même. (« Il n’est plus que l’ombre de lui-même ! ») Mais je
4661
t pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus que
l’
ombre de lui-même ! ») Mais je vois bien qu’ils exagèrent : si nous ét
4662
purs esprits, nous ne projetterions pas d’ombre.
L’
ombre est la preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du
4663
s, nous ne projetterions pas d’ombre. L’ombre est
la
preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du moins qui, p
4664
pas d’ombre. L’ombre est la preuve humiliante de
la
chair — humiliante pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans le
4665
air — humiliante pour ceux, du moins qui, plaçant
la
Raison dans le monde des dieux, voudraient bien être pris pour des ge
4666
e pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans
le
monde des dieux, voudraient bien être pris pour des gens raisonnables
4667
pris pour des gens raisonnables. Voilà pourquoi,
pensais
-je, ils méprisent l’ombre, et la mésestiment gravement. Mais encore ?
4668
nables. Voilà pourquoi, pensais-je, ils méprisent
l’
ombre, et la mésestiment gravement. Mais encore ? Ils en ont tous une,
4669
à pourquoi, pensais-je, ils méprisent l’ombre, et
la
mésestiment gravement. Mais encore ? Ils en ont tous une, et s’entend
4670
u plaisir que dispense un corps. Ils prisent fort
la
« transparence », mais tolèrent très bien cette chair, — oui, même ce
4671
là qui déplorent qu’elle se fasse, aux regards de
la
convoitise, « opaque »36. Que pouvais-je tirer de tout cela ? Rien qu
4672
e tout cela ? Rien qu’une évidence assez pauvre :
l’
ombre est le fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’es
4673
? Rien qu’une évidence assez pauvre : l’ombre est
le
fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’est mourir, et
4674
vant, et sa présence si gênante, que je tentai de
le
contraindre, quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux. Il y avait la psy
4675
quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux. Il y avait
la
psychanalyse. Mais avant d’en venir à cette extrémité, on pouvait ess
4676
ssayer d’un pédantisme moins barbare. Je rédigeai
la
note qui suit, en m’appliquant à écarter les conseils de pitié que me
4677
igeai la note qui suit, en m’appliquant à écarter
les
conseils de pitié que me dictait mon cœur. Signalement de Peter Sc
4678
Peter Schlemihl Peter est un naïf : il croit à
la
fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à l’homme une dignité.
4679
fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à
l’
homme une dignité. C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce, le
4680
sure à l’homme une dignité. C’est un bourgeois de
la
plus dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie les bourgeois r
4681
C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce,
le
bourgeois pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient le sentim
4682
dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie
les
bourgeois riches. D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur. L
4683
pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient
le
sentiment qu’il a d’être inférieur. Le diable sait cela : c’est par l
4684
D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur.
Le
diable sait cela : c’est par là qu’il le tient. Peter lui donne son o
4685
férieur. Le diable sait cela : c’est par là qu’il
le
tient. Peter lui donne son ombre contre une bourse magique, d’où il p
4686
Désormais riche, mais privé d’ombre, il se croit
le
maître du monde. Point du tout : on se moque de lui. Comblé, le voici
4687
onde. Point du tout : on se moque de lui. Comblé,
le
voici plus qu’avant inadmissible. Le complexe d’infériorité à peine d
4688
lui. Comblé, le voici plus qu’avant inadmissible.
Le
complexe d’infériorité à peine défait par la fortune subite, se renou
4689
ble. Le complexe d’infériorité à peine défait par
la
fortune subite, se renoue, cette fois-ci sans remède. Il ne tarde pas
4690
au délire de persécution. Tout effraye Peter, et
le
moleste en mille manières. Les jeux des enfants dans la rue, les vale
4691
t effraye Peter, et le moleste en mille manières.
Les
jeux des enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes q
4692
este en mille manières. Les jeux des enfants dans
la
rue, les valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout l
4693
mille manières. Les jeux des enfants dans la rue,
les
valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière
4694
Les jeux des enfants dans la rue, les valets qui
le
servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et m
4695
s enfants dans la rue, les valets qui le servent,
les
femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et même la clarté
4696
i le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout
la
lumière du jour, et même la clarté de la lune. Il recherche la solitu
4697
il rencontre, surtout la lumière du jour, et même
la
clarté de la lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexio
4698
surtout la lumière du jour, et même la clarté de
la
lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexions désespérée
4699
jour, et même la clarté de la lune. Il recherche
la
solitude pour y mener des réflexions désespérées. Souvent il éclate e
4700
ions désespérées. Souvent il éclate en sanglots à
l’
idée du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous les autres semb
4701
du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous
les
autres semblent détenir le secret, jalousement, méchamment, contre lu
4702
ce bonheur dont tous les autres semblent détenir
le
secret, jalousement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce l’est bie
4703
lousement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce
l’
est bien pour eux, comme toutes les choses trop naturelles que l’on po
4704
! Un secret, ce l’est bien pour eux, comme toutes
les
choses trop naturelles que l’on possède. Peter, lui, le connaît, mais
4705
eux, comme toutes les choses trop naturelles que
l’
on possède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne c
4706
ses trop naturelles que l’on possède. Peter, lui,
le
connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient
4707
ossède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il
l’
a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que
4708
on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que
l’
on connaît, comme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc le typ
4709
Et perd-on ce que l’on connaît, comme Adam et Ève
l’
innocence ?) Schlemihl est donc le type classique de l’homme qui perd
4710
mme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc
le
type classique de l’homme qui perd le contact social. L’or même ne su
4711
ocence ?) Schlemihl est donc le type classique de
l’
homme qui perd le contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir t
4712
hl est donc le type classique de l’homme qui perd
le
contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts.
4713
classique de l’homme qui perd le contact social.
L’
or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il les é
4714
t social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous
les
contacts. Ou plutôt il les établit en apparences, mais dirait-on, san
4715
it pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il
les
établit en apparences, mais dirait-on, sans réciprocité. La moindre é
4716
en apparences, mais dirait-on, sans réciprocité.
La
moindre épreuve trahit cette fêlure : on aime Schlemihl pour tout ce
4717
pour tout ce qu’il a, qui n’est pas lui. Ce sont
les
femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social le
4718
st pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui
le
devinent. Quel est le rapport social le plus réel ? Admettons que ce
4719
s femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est
le
rapport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtou
4720
endu, qui le devinent. Quel est le rapport social
le
plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtout pour ce philisti
4721
pport social le plus réel ? Admettons que ce soit
le
mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes les ruses de Peter échou
4722
t le mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes
les
ruses de Peter échouent devant cet obstacle dernier. Il a beau n’alle
4723
er. Il a beau n’aller que de nuit aux rendez-vous
avec
Mina. Le jour venu de signer le contrat, devant témoins, lorsque son
4724
au n’aller que de nuit aux rendez-vous avec Mina.
Le
jour venu de signer le contrat, devant témoins, lorsque son imposture
4725
aux rendez-vous avec Mina. Le jour venu de signer
le
contrat, devant témoins, lorsque son imposture éclate au grand soleil
4726
Mina s’écrie : « Oh ! mon pressentiment ! Oui, je
le
savais depuis longtemps, il n’a pas d’ombre ! » Que reste-t-il à un t
4727
a pas d’ombre ! » Que reste-t-il à un tel homme ?
Le
suicide ? Rien n’est plus loin de sa pensée. Sa vision du monde serai
4728
un philistin sans exigences, et qui veut croire à
la
vertu, — s’il n’y avait, au centre de lui-même, cette absence. En tou
4729
f en ce je ne sais quoi qui n’est rien et devient
l’
essentiel, notre philistin méconnu se voit chassé de la communauté des
4730
entiel, notre philistin méconnu se voit chassé de
la
communauté des siens. Et par sa faute ! c’est là son amertume. Ici in
4731
sa faute ! c’est là son amertume. Ici intervient
l’
évasion. Il achète — par économie — une paire de bottes usagées. Mais
4732
ottes usagées. Mais voilà bien sa chance, ce sont
les
bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à la vie, au voisinage e
4733
es bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à
la
vie, au voisinage et au dialogue. Son existence réelle se confond ave
4734
e et au dialogue. Son existence réelle se confond
avec
tous les vagabondages qu’il imagine. Il peut même retrouver une espèc
4735
alogue. Son existence réelle se confond avec tous
les
vagabondages qu’il imagine. Il peut même retrouver une espèce d’activ
4736
écanique : il dresse un vaste catalogue de toutes
les
plantes de la terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand n
4737
resse un vaste catalogue de toutes les plantes de
la
terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand nous perdons sa
4738
ve d’interprétation Je reproche pour ma part à
la
psychanalyse de flatter notre propension à localiser les symboles. Ca
4739
chanalyse de flatter notre propension à localiser
les
symboles. Car, pour la vie spirituelle, il n’est pas de lieux séparés
4740
re propension à localiser les symboles. Car, pour
la
vie spirituelle, il n’est pas de lieux séparés, on peut toujours pass
4741
ours passer de l’un à l’autre par quelque ruse de
la
métamorphose, qui est la vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lor
4742
utre par quelque ruse de la métamorphose, qui est
la
vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cel
4743
e ruse de la métamorphose, qui est la vie même de
la
vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand l’inv
4744
oi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand
l’
inverse est au moins aussi probable. Et quand rien ne dépend à coup sû
4745
rien ne dépend à coup sûr que du tout ? Ceci dit,
la
psychanalyse peut nous donner des descriptions utiles, et quelques «
4746
xuelle »37. Nous venons de voir que Schlemihl est
le
type même de l’inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au so
4747
venons de voir que Schlemihl est le type même de
l’
inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au soleil », et qui n
4748
ver sa place au soleil », et qui ne subsiste dans
la
compagnie de ses semblables que par un subterfuge toujours menacé. D’
4749
rration maximum. Pour confirmer notre soupçon sur
la
nature de cette aberration, il conviendrait de rappeler ici que Peter
4750
conviendrait de rappeler ici que Peter parvient à
la
cacher à tous sauf aux deux femmes qu’il voudrait épouser. Mais n’all
4751
it épouser. Mais n’allons pas conclure trop vite.
Les
états d’âme d’un malade ou d’un fou diffèrent-ils essentiellement des
4752
s à se muer en leur contraire ? Plus précisément,
l’
état de Peter Schlemihl n’est-il pas comparable à celui d’un esprit et
4753
e à celui d’un esprit et d’un corps sains après «
l’
amour » ? Durant quelques moments, l’homme éprouve une sensation de vi
4754
ains après « l’amour » ? Durant quelques moments,
l’
homme éprouve une sensation de vide, de légèreté et en même temps de l
4755
tait un peu en arrière des choses, lent à démêler
le
monde où il revient, et qui l’accable de présences bizarres, ou douce
4756
es, lent à démêler le monde où il revient, et qui
l’
accable de présences bizarres, ou douces, mais aussi quelques fois, ho
4757
ence de ce qu’on nommera chez un malade, folie de
la
persécution). Il arrive aussi que cet homme se sente trop lucide, per
4758
, perçant toutes choses à jour, et lui-même, d’où
l’
impression qu’il a d’être mal défendu contre les regards qu’il rencont
4759
où l’impression qu’il a d’être mal défendu contre
les
regards qu’il rencontre, transparent dirait-on, — sans ombre ! Voilà,
4760
ques qu’à des Méridionaux, pourrions-nous ajouter
avec
toutes les réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de la questi
4761
s Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toutes
les
réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de la question que nous
4762
réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de
la
question que nous posait l’origine germanique du mythe38. Dès le débu
4763
en nous souvenant de la question que nous posait
l’
origine germanique du mythe38. Dès le début, j’avais pressenti qu’une
4764
nous posait l’origine germanique du mythe38. Dès
le
début, j’avais pressenti qu’une fable à ce point célèbre dans un peup
4765
er qu’un fait humain élémentaire. J’étais déçu de
le
voir se réduire à quelque chose d’aussi précis, et que mille préjugés
4766
asard à cette époque, vint heureusement me donner
la
clé d’une interprétation autrement riche et inquiétante. Je traduis c
4767
ce fragment littéralement : « On ne peut comparer
la
Liquor vitae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi,
4768
ment : « On ne peut comparer la Liquor vitae dans
l’
homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vien
4769
tae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur
la
paroi, laquelle (ombre) vient de l’homme et se forme d’après lui : te
4770
une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de
l’
homme et se forme d’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est « l
4771
l’homme et se forme d’après lui : telle est aussi
la
Liquor, qui est « l’ombre intérieure. » Une lecture plus poussée de P
4772
’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est «
l’
ombre intérieure. » Une lecture plus poussée de Paracelse devait bient
4773
poussée de Paracelse devait bientôt m’apprendre,
avec
bien d’autres choses curieuses et profondes, que la portée de ce pass
4774
bien d’autres choses curieuses et profondes, que
la
portée de ce passage était en vérité beaucoup plus vaste que tout ce
4775
plus vaste que tout ce que permettait d’imaginer
l’
obtus physiologisme de ce siècle. La « Liquor vitae », selon Paracelse
4776
it d’imaginer l’obtus physiologisme de ce siècle.
La
« Liquor vitae », selon Paracelse, c’est en effet le principe d’activ
4777
« Liquor vitae », selon Paracelse, c’est en effet
le
principe d’activité vitale répandu dans tous nos organes. Elle figure
4778
vitale répandu dans tous nos organes. Elle figure
le
« miroir auquel la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agen
4779
tous nos organes. Elle figure le « miroir auquel
la
nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique, la
4780
el la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi
l’
agent microcosmique, la puissance même de notre créativité dans tous l
4781
en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique,
la
puissance même de notre créativité dans tous les ordres. Elle est ce
4782
, la puissance même de notre créativité dans tous
les
ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans le corps tout entier
4783
ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans
le
corps tout entier et dans l’homme. » Je la rapproche alors de ce Selb
4784
a de plus noble dans le corps tout entier et dans
l’
homme. » Je la rapproche alors de ce Selbst (ou soi-même) dont parle C
4785
e dans le corps tout entier et dans l’homme. » Je
la
rapproche alors de ce Selbst (ou soi-même) dont parle Chamisso vers l
4786
ce Selbst (ou soi-même) dont parle Chamisso vers
la
fin de son conte. Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39. La
4787
la fin de son conte. Voilà qui peut situer enfin
le
vrai problème39. La créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui e
4788
. Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39.
La
créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui est vraiment grave da
4789
out ce qui est vraiment grave dans notre vie ; et
la
fameuse « question sexuelle » ne tire son importance démesurée que du
4790
ique du pouvoir créateur spirituel. Comme on peut
le
voir par l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’
4791
oir créateur spirituel. Comme on peut le voir par
l’
examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup
4792
spirituel. Comme on peut le voir par l’examen de
la
pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres la c
4793
ar l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour
la
raison qu’en beaucoup d’êtres la créativité paraît avoir son siège da
4794
it-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres
la
créativité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que la pudeur s’
4795
d’êtres la créativité paraît avoir son siège dans
le
seul sexe, que la pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour
4796
ité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que
la
pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que
4797
sée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que
l’
homme cherche à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les
4798
-ce point pour cette raison que l’homme cherche à
le
dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les deux fils de Noé
4799
e dissimuler comme quelque chose de sacré, et que
les
deux fils de Noé couvrirent la nudité de leur père ivre en marchant v
4800
de sacré, et que les deux fils de Noé couvrirent
la
nudité de leur père ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez
4801
ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez
l’
homme qui parvient à la conscience de sa mission spirituelle, le centr
4802
lui à reculons ? Mais chez l’homme qui parvient à
la
conscience de sa mission spirituelle, le centre de la créativité para
4803
rvient à la conscience de sa mission spirituelle,
le
centre de la créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le
4804
onscience de sa mission spirituelle, le centre de
la
créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur. La pud
4805
e centre de la créativité paraît se déplacer dans
le
cerveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les se
4806
tivité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans
le
cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle
4807
raît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur.
La
pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle « d’étala
4808
rveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte
la
pensée, les sentiments. On parle « d’étalage impudique » lorsqu’un au
4809
ns le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée,
les
sentiments. On parle « d’étalage impudique » lorsqu’un auteur exhibe
4810
(Il peut être d’ailleurs, au sens courant du mot,
le
plus « pudibond » des bourgeois : un Amiel). Cependant ces remarques
4811
. Cependant ces remarques n’expliquent pas encore
l’
essentiel. Que l’on cache son secret le plus profond, le plus sacré, q
4812
emarques n’expliquent pas encore l’essentiel. Que
l’
on cache son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir
4813
pas encore l’essentiel. Que l’on cache son secret
le
plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on
4814
ntiel. Que l’on cache son secret le plus profond,
le
plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on possède, c’est na
4815
on secret le plus profond, le plus sacré, qui est
le
pouvoir de création que l’on possède, c’est naturel ; mais non du tou
4816
le plus sacré, qui est le pouvoir de création que
l’
on possède, c’est naturel ; mais non du tout qu’on en ait honte, sembl
4817
tout qu’on en ait honte, semble-t-il. En vérité,
la
mauvaise pudeur provient de ce que le corps et l’âme se distinguent d
4818
En vérité, la mauvaise pudeur provient de ce que
le
corps et l’âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être refl
4819
la mauvaise pudeur provient de ce que le corps et
l’
âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être reflets l’un de
4820
et cessent d’être reflets l’un de l’autre. Alors
le
corps a honte de sa pensée, et celle-ci des désirs de son corps — com
4821
ssement sans amour, ou d’un amour qui se refuse à
l’
étreinte. Et pourquoi la pudeur cesse-t-elle d’exister — normalement —
4822
’un amour qui se refuse à l’étreinte. Et pourquoi
la
pudeur cesse-t-elle d’exister — normalement — quand deux êtres s’aime
4823
rmalement — quand deux êtres s’aiment ? Parce que
le
sexe reprend alors sa « propriété » symbolique. (Ce qui est douteux,
4824
, m’est étranger). Revenons alors à notre mythe :
la
transparence, c’est l’absence d’ombre, donc de secret. Or le secret «
4825
nons alors à notre mythe : la transparence, c’est
l’
absence d’ombre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant le lieu
4826
ence, c’est l’absence d’ombre, donc de secret. Or
le
secret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, cel
4827
bre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant
le
lieu de la créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre,
4828
e secret. Or le secret « sacré » étant le lieu de
la
créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre, se promène
4829
ret « sacré » étant le lieu de la créativité dans
la
personne, celui qui a perdu son ombre, se promène parmi les hommes av
4830
ne, celui qui a perdu son ombre, se promène parmi
les
hommes avec l’angoisse de voir révélée au grand jour non son secret,
4831
ui a perdu son ombre, se promène parmi les hommes
avec
l’angoisse de voir révélée au grand jour non son secret, mais justeme
4832
perdu son ombre, se promène parmi les hommes avec
l’
angoisse de voir révélée au grand jour non son secret, mais justement
4833
élée au grand jour non son secret, mais justement
l’
absence en lui de son secret, sa transparence : spirituellement, ou de
4834
e autre sorte, il n’est plus un homme créateur. À
l’
inverse, la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme son
4835
te, il n’est plus un homme créateur. À l’inverse,
la
chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme son élan vers
4836
la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en
l’
homme son élan vers le monde. Elle le porte au-devant de tout, comme u
4837
le ou corporelle) rénove en l’homme son élan vers
le
monde. Elle le porte au-devant de tout, comme un peu en avant de lui-
4838
e) rénove en l’homme son élan vers le monde. Elle
le
porte au-devant de tout, comme un peu en avant de lui-même, là où il
4839
vant de lui-même, là où il peut dominer sa vie et
la
construire avec tout son instinct à l’image d’une vision de l’esprit.
4840
me, là où il peut dominer sa vie et la construire
avec
tout son instinct à l’image d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul
4841
sa vie et la construire avec tout son instinct à
l’
image d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme
4842
avec tout son instinct à l’image d’une vision de
l’
esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’u
4843
son instinct à l’image d’une vision de l’esprit. (
L’
esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de l
4844
ge d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit)
Le
corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit
4845
ion de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et
l’
âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit offensif et
4846
seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans
l’
unisson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se s
4847
e corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de
la
chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein d
4848
âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté.
L’
esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein dans sa peau »
4849
sson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux,
le
corps qui se sent « plein dans sa peau », partagent les richesses du
4850
rps qui se sent « plein dans sa peau », partagent
les
richesses du désir. Et l’homme a retrouvé son ombre. Suite et fin
4851
s sa peau », partagent les richesses du désir. Et
l’
homme a retrouvé son ombre. Suite et fin de la fable Peter Schle
4852
l’homme a retrouvé son ombre. Suite et fin de
la
fable Peter Schlemihl nous apparaît maintenant une émouvante et tr
4853
nant une émouvante et très précise description de
l’
individu romantique, dans ce qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à
4854
qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à saisir
le
monde pour le former à son image40, et d’évasif devant sa vocation :
4855
missionnaire, d’impuissant à saisir le monde pour
le
former à son image40, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de
4856
r à son image40, et d’évasif devant sa vocation :
le
mystère de l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les trait
4857
0, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de
l’
incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les traits physiques et
4858
l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous
les
traits physiques et moraux de ce que l’on appellera plus tard le vagu
4859
ter tous les traits physiques et moraux de ce que
l’
on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague
4860
ques et moraux de ce que l’on appellera plus tard
le
vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hof
4861
aux de ce que l’on appellera plus tard le vague à
l’
âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal
4862
plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien
le
vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le
4863
à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps…
Le
roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le tourment d’une fem
4864
e roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit
le
tourment d’une femme stérile, l’impératrice qui a perdu son ombre et
4865
épreuve — décrit le tourment d’une femme stérile,
l’
impératrice qui a perdu son ombre et qui emprunte celle d’une fille du
4866
rsen, comme on pouvait s’y attendre, fait dominer
l’
aspect « spirituel » du mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole
4867
ner l’aspect « spirituel » du mythe. Son conte de
l’
Ombre, c’est le symbole de la puissance de création qui vient à se dét
4868
spirituel » du mythe. Son conte de l’Ombre, c’est
le
symbole de la puissance de création qui vient à se détacher de l’aute
4869
mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole de
la
puissance de création qui vient à se détacher de l’auteur pour prendr
4870
puissance de création qui vient à se détacher de
l’
auteur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et le poème ensuite —
4871
à se détacher de l’auteur pour prendre corps dans
l’
œuvre poétique. Et le poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’i
4872
teur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et
le
poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’individu qui l’a conçu
4873
t le poème ensuite — plus beau et plus vivant que
l’
individu qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrait p
4874
ite — plus beau et plus vivant que l’individu qui
l’
a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrait puissant d’un dé
4875
qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par
l’
attrait puissant d’un désir — reviendra s’asservir le poète… ⁂ C’est u
4876
ttrait puissant d’un désir — reviendra s’asservir
le
poète… ⁂ C’est une des gloires du romantisme allemand que d’avoir su
4877
ires du romantisme allemand que d’avoir su élever
les
faiblesses de l’homme, et quelques-unes de ses plus folles illusions,
4878
allemand que d’avoir su élever les faiblesses de
l’
homme, et quelques-unes de ses plus folles illusions, à la hauteur du
4879
et quelques-unes de ses plus folles illusions, à
la
hauteur du mythe, et de la Fable, plus profondément vrais que la vie.
4880
us folles illusions, à la hauteur du mythe, et de
la
Fable, plus profondément vrais que la vie. (Plus riches d’enseignemen
4881
ythe, et de la Fable, plus profondément vrais que
la
vie. (Plus riches d’enseignements concrets, et d’invites à la métamor
4882
s riches d’enseignements concrets, et d’invites à
la
métamorphose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est le paradoxe
4883
phose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est
le
paradoxe génial, l’audace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso
4884
rme ce qui nous défait, c’est le paradoxe génial,
l’
audace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso. Les amateurs d’abs
4885
dace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso.
Les
amateurs d’absurdités lyriques, j’en suis parfois, devraient se garde
4886
t à leur coutume qu’une « fantaisie gratuite » de
l’
art. Nul doute que l’art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleu
4887
ne « fantaisie gratuite » de l’art. Nul doute que
l’
art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleurs qu’il soit vraimen
4888
son image, il en diffère toutefois par ceci qu’il
l’
a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont la nouveauté reste en
4889
’a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont
la
nouveauté reste entière. Et j’y songe : ce Schlemihl éternel, ce symb
4890
ieues qui traverse encore notre vie, n’est-ce pas
l’
ombre de Chamisso ? Une ombre qui a perdu son homme, cette fois, mais
4891
te fois, mais non pas ses charmes profonds. C’est
le
siècle où je vis qui n’a plus d’ombre, et c’est pour lui que je garde
4892
s, il veut du vraisemblable ! Il est retombé dans
le
roman insignifiant. P.-S. Je n’ai pas voulu alourdir cette esquisse
4893
ut un appareil de références bibliographiques. On
les
trouve d’ailleurs réunies dans le Don Juan d’Otto Rank (Stock). Cet é
4894
graphiques. On les trouve d’ailleurs réunies dans
le
Don Juan d’Otto Rank (Stock). Cet érudit psychanalyste ne recense pas
4895
ne cinquantaine d’auteurs célèbres qui ont traité
le
mythe de l’ombre perdue dans leurs romans, pièces, ou contes fantasti
4896
ine d’auteurs célèbres qui ont traité le mythe de
l’
ombre perdue dans leurs romans, pièces, ou contes fantastiques. Notons
4897
français. Encore ceux-ci s’orientent plutôt vers
l’
aspect individuel du mythe de l’ombre, rejoignant le mythe voisin du d
4898
ntent plutôt vers l’aspect individuel du mythe de
l’
ombre, rejoignant le mythe voisin du double. (Maupassant par exemple).
4899
aspect individuel du mythe de l’ombre, rejoignant
le
mythe voisin du double. (Maupassant par exemple). Barrès, dans ses Ca
4900
par exemple). Barrès, dans ses Cahiers, recueille
la
lettre d’un descendant français de Chamisso, selon lequel l’idée de P
4901
’un descendant français de Chamisso, selon lequel
l’
idée de Peter Schlemihl aurait été donnée à son auteur par un de ses p
4902
un de ses parents, au cours d’un séjour à Paris.
L’
origine du conte célèbre serait donc bien française, et Barrès s’en ré
4903
t Barrès s’en réjouit. Il va jusqu’à soutenir que
l’
ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par Cha
4904
Il va jusqu’à soutenir que l’ombre perdue serait
le
symbole de la patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents r
4905
soutenir que l’ombre perdue serait le symbole de
la
patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents réunis par Rank
4906
ole de la patrie (française) perdue par Chamisso.
Les
documents réunis par Rank — et que j’ignorais d’ailleurs au moment où
4907
e nationaliste. Rank insiste longuement, comme je
l’
ai fait, sur l’antiquité nordique du mythe, auquel se rattachent de tr
4908
Rank insiste longuement, comme je l’ai fait, sur
l’
antiquité nordique du mythe, auquel se rattachent de très nombreuses c
4909
je convoite se fait opaque, par cela même que je
le
convoite… », A. Gide : Les Nouvelles Nourritures. 37. Freud : Trois
4910
e, par cela même que je le convoite… », A. Gide :
Les
Nouvelles Nourritures. 37. Freud : Trois essais sur la théorie de la
4911
velles Nourritures. 37. Freud : Trois essais sur
la
théorie de la sexualité. La définition du normal est donc ici : adapt
4912
ures. 37. Freud : Trois essais sur la théorie de
la
sexualité. La définition du normal est donc ici : adapté au milieu so
4913
ud : Trois essais sur la théorie de la sexualité.
La
définition du normal est donc ici : adapté au milieu social. Qui ne v
4914
ourrait tirer de cette « vérité d’expérience » si
l’
on voulait en faire une règle, comme nous en menacent les conformismes
4915
oulait en faire une règle, comme nous en menacent
les
conformismes totalitaires ? On ne peut accepter une « vérité » de ce
4916
er une « vérité » de ce genre qu’en insistant sur
le
contraire : l’anormal peut être créateur d’un nouveau type de rapport
4917
» de ce genre qu’en insistant sur le contraire :
l’
anormal peut être créateur d’un nouveau type de rapports sociaux, c’es
4918
c’est-à-dire d’une nouvelle normalité. 38. Dans
le
conte intitulé « l’Ombre », Andersen raconte comment un philosophe «
4919
nouvelle normalité. 38. Dans le conte intitulé «
l’
Ombre », Andersen raconte comment un philosophe « Venant des froides r
4920
ne femme qu’il perçoit de sa fenêtre. « Mais dans
les
climats chauds, les choses croissent très vite, et après qu’une semai
4921
it de sa fenêtre. « Mais dans les climats chauds,
les
choses croissent très vite, et après qu’une semaine eut passé, il vit
4922
commençait à croître lorsqu’il se promenait dans
le
soleil. » Ici donc, pas de fixation morbide, comme dans Schlemihl. Au
4923
xation morbide, comme dans Schlemihl. Aussi bien,
le
diable n’est-il pas dans l’affaire, cette fois-ci. 39. Selon Paracel
4924
chlemihl. Aussi bien, le diable n’est-il pas dans
l’
affaire, cette fois-ci. 39. Selon Paracelse toujours, l’élément sexue
4925
re, cette fois-ci. 39. Selon Paracelse toujours,
l’
élément sexuel se distingue de la Liquor vitae « comme l’écume d’une s
4926
acelse toujours, l’élément sexuel se distingue de
la
Liquor vitae « comme l’écume d’une soupe ». La créativité se purifie
4927
nt sexuel se distingue de la Liquor vitae « comme
l’
écume d’une soupe ». La créativité se purifie donc en le localisant. I
4928
de la Liquor vitae « comme l’écume d’une soupe ».
La
créativité se purifie donc en le localisant. Il paraît alors que le f
4929
e d’une soupe ». La créativité se purifie donc en
le
localisant. Il paraît alors que le freudisme ne s’occupe que de l’écu
4930
urifie donc en le localisant. Il paraît alors que
le
freudisme ne s’occupe que de l’écume d’une soupe ! (ou bien l’appelle
4931
paraît alors que le freudisme ne s’occupe que de
l’
écume d’une soupe ! (ou bien l’appelle-t-il libido ?). 40. Ces traits
4932
ne s’occupe que de l’écume d’une soupe ! (ou bien
l’
appelle-t-il libido ?). 40. Ces traits ne sauraient définir qu’un asp
4933
bien d’autres, et de tout contraire parfois : que
l’
on songe à Hegel, à Fichte, à Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Cha
4934
Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Chamisso et
le
Mythe de l’Ombre perdue », Les Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 19
4935
p. Rougemont Denis de, « Chamisso et le Mythe de
l’
Ombre perdue », Les Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 1937, p. 282‑2
4936
s de, « Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue »,
Les
Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 1937, p. 282‑291.
4937
novembre 1933 Mon domaine, c’est ce que j’ai sous
la
main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé d
4938
embre 1933 Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la
main
. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans l
4939
ne, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord
la
table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux trétea
4940
table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans
le
chai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ; j’ai dressé cela
4941
planches bien rabotées ; j’ai dressé cela devant
la
fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je l
4942
; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur
les
verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la c
4943
verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève
le
nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
4944
vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois
la
cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du p
4945
r de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
la
margelle du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à d
4946
du puits à gauche, où repose une vieille chatte,
le
chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager,
4947
une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de
la
cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bo
4948
lle chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour,
les
planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de ro
4949
er, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers.
L’
allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par d
4950
osent de tous côtés ce jardin de curé qui a juste
la
largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel la
4951
côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de
la
maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oi
4952
uste la largeur de la maison. On ne voit rien que
le
ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oiseaux, et parfois traversé par
4953
, et de petites dunes broussailleuses qui ferment
l’
horizon bas. Peu de terre et beaucoup de ciel, et partout cette humide
4954
met des ombres si légères, vertes et bleues, sur
les
murailles rosées. La maison compte deux chambres au rez-de-chaussée,
4955
ères, vertes et bleues, sur les murailles rosées.
La
maison compte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisin
4956
pte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de
la
cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un peti
4957
e, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À
l’
étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la
4958
de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où
l’
on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deu
4959
rvient par un petit escalier qui prend au fond de
la
cuisine, deux autres chambres assez vastes et presque vides, auxquell
4960
hambres assez vastes et presque vides, auxquelles
le
toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’aime. Des murs bla
4961
et gai, oui vraiment plus gai qu’ascétique. Dans
le
chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de lau
4962
i vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à
la
porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier. On di
4963
ne pénétrante odeur de laurier. On distingue dans
l’
ombre des amas de branchages, des outils et des treilles pour la pêche
4964
as de branchages, des outils et des treilles pour
la
pêche aux crevettes. Je me suis procuré un petit tonneau de vin blanc
4965
me suis procuré un petit tonneau de vin blanc de
l’
île. C’est un clairet assez acide, qui laisse peut-être un léger goût
4966
qui laisse peut-être un léger goût iodé, au moins
l’
on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablon
4967
re un léger goût iodé, au moins l’on est tenté de
l’
imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume
4968
oût iodé, au moins l’on est tenté de l’imaginer :
la
vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume avec du vare
4969
la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que
l’
on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux ri
4970
roît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume
avec
du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux rien dire enco
4971
n sol sablonneux que l’on fume avec du varech. De
l’
île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse to
4972
’on fume avec du varech. De l’île, du village, de
la
mer, je ne veux rien dire encore : je laisse tout cela se mêler à ma
4973
ore : je laisse tout cela se mêler à ma vie, dans
l’
heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour mes pensées, je le
4974
mêler à ma vie, dans l’heureux étourdissement de
la
lumière maritime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de p
4975
ment de la lumière maritime. Pour mes pensées, je
les
occupe en attendant à de petits exercices formels, sans nul rapport a
4976
t à de petits exercices formels, sans nul rapport
avec
ce beau vertige de liberté. Depuis six jours que nous sommes arrivés,
4977
six jours que nous sommes arrivés, je n’ai lu que
les
Règles de Descartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le temp
4978
scartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer
le
temps avant un rendez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts avec
4979
rendez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts
avec
les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la p
4980
ez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts avec
les
gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte
4981
novembre 1933 Premiers contacts avec les gens. —
Le
village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte, on enfile
4982
village se termine au bout de notre jardin. Passé
la
porte, on enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse
4983
enfile une petite rue toute blanche qui contourne
la
panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cet
4984
etite rue toute blanche qui contourne la panse de
l’
église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qu
4985
qui contourne la panse de l’église, et aboutit à
la
place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangl
4986
place, qui est un vaste rectangle de terre jaune,
les
habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme
4987
tangle de terre jaune, les habitants plantèrent à
la
Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, m
4988
habitants plantèrent à la Révolution un arbre de
la
Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux exemplaire dans
4989
dans sa symétrie architecturale. Il domine toutes
les
maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le
4990
e architecturale. Il domine toutes les maisons et
le
clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
4991
ocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais
le
dessiner dans le style rom antique, avec tous ses détails et toute so
4992
l au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
le
style rom antique, avec tous ses détails et toute son opulence, frisé
4993
e voudrais le dessiner dans le style rom antique,
avec
tous ses détails et toute son opulence, frisé comme une perruque du g
4994
e une perruque du grand siècle. De trois côtés de
la
place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, pei
4995
le. De trois côtés de la place généralement vide,
les
maisons s’alignent en ordre modeste, peintes en tons clairs et simple
4996
en tons clairs et simples, blanc, jaune ou vert.
La
couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’une manière subti
4997
jaune ou vert. La couleur des volets s’harmonise
avec
chaque façade d’une manière subtile et précise qui en dit long sur l’
4998
ne manière subtile et précise qui en dit long sur
l’
âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour
4999
en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est
l’
impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle cor
5000
cret. C’est l’impression que je veux retenir pour
le
moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée
5001
tenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige
la
mauvaise humeur que m’a donnée notre épicière. Car il faut bien, héla
5002
épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par
l’
épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est én
5003
hélas, commencer par l’épicière, quand on aborde
le
village où l’on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a de
5004
cer par l’épicière, quand on aborde le village où
l’
on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dan
5005
est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dans
les
jambes, et m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens b
5006
bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer
le
prix du chou-fleur, des enveloppes jaunes, du peloton de ficelle et d
5007
lo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne
la
renseignent pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manif
5008
s râpés, ne la renseignent pas clairement. Et que
penser
d’un « Parisien » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’hive
5009
nt. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste
l’
intention de rester ici tout l’hiver ? — C’est plutôt en été qu’on vie
5010
en » qui manifeste l’intention de rester ici tout
l’
hiver ? — C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prud
5011
chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je
le
sais bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’
5012
m’en demander davantage. Et moi, je recule devant
l’
entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’e
5013
i, je recule devant l’entreprise de lui expliquer
la
nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écri
5014
rire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour
les
journaux, sans doute, mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pay
5015
s il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays… Je
l’
ai laissée en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les c
5016
en plein mystère. Elle a dû en parler longuement
avec
les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que
5017
lein mystère. Elle a dû en parler longuement avec
les
clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je s
5018
ment avec les clients qui attendaient en silence,
le
nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujo
5019
ence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti.
La
mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiver elle fait pe
5020
le fait peu de réserves de produits alimentaires,
les
habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainag
5021
les habitants n’achetant guère autre chose que de
la
mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’autre
5022
es épices. Alors il faut aller de l’autre côté de
la
place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’être vu par l’une,
5023
, entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me
l’
a dit. Car elles ne baisseront pas leurs prix pour garder un client, e
5024
eront pas leurs prix pour garder un client, elles
les
augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans comp
5025
n client, elles les augmenteront bien plutôt pour
le
punir d’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueil
5026
Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par
la
réprobation sournoise d’une épicière. 21 novembre 1933 Le bureau de p
5027
bation sournoise d’une épicière. 21 novembre 1933
Le
bureau de poste. — Trois mètres sur trois, et grille épaisse au milie
5028
sur trois, et grille épaisse au milieu. Derrière
la
grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
5029
et grille épaisse au milieu. Derrière la grille,
le
long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Tr
5030
rière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai
l’
impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il
5031
ge de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
la
vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande
5032
i l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois
la
semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenan
5033
Trois fois la semaine au moins, il me voit venir
avec
une grande enveloppe contenant un manuscrit. Est-ce une lettre ? — No
5034
— Non. — Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à
la
machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a d
5035
à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à
la
main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit
5036
a machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la
main
? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit pour
5037
la main ? — Si, il y a des corrections écrites à
la
main. Pédenaud relit pour la nième fois son tarif, fait son calcul su
5038
main ? — Si, il y a des corrections écrites à la
main
. Pédenaud relit pour la nième fois son tarif, fait son calcul sur un
5039
orrections écrites à la main. Pédenaud relit pour
la
nième fois son tarif, fait son calcul sur un bout de papier, et concl
5040
llets. Il en paraît lui-même consterné. J’affirme
avec
vivacité que ça ne peut pas aller. Il faut tout recommencer. Finaleme
5041
t pas aller. Il faut tout recommencer. Finalement
l’
on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port :
5042
out recommencer. Finalement l’on décide d’envoyer
le
manuscrit comme échantillon sans valeur. Port : quatre francs soixant
5043
aleur. Port : quatre francs soixante-quinze. Dans
l’
après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte
5044
tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer
la
porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’
5045
able, j’entends grincer la porte du jardin. C’est
la
femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une
5046
tification officielle d’avoir à verser sans délai
la
somme de Fr. 67.25 restant due sur l’envoi de ce matin. En effet, Péd
5047
sans délai la somme de Fr. 67.25 restant due sur
l’
envoi de ce matin. En effet, Pédenaud, qui a voulu en avoir le cœur ne
5048
e matin. En effet, Pédenaud, qui a voulu en avoir
le
cœur net, a pris des instructions par téléphone au chef-lieu. Son sup
5049
rcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à
l’
autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut t
5050
oche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter
le
courrier. L’autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu,
5051
ilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier.
L’
autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu, faire rouvri
5052
téléphoner au chef-lieu, faire rouvrir au passage
le
sac postal, discuter passionnément, trouver une formule d’apaisement
5053
rouver une formule d’apaisement qui ménage toutes
les
susceptibilités, et finalement ne rien payer de plus. Je note ceci pa
5054
ne assez typique du malentendu qui apparaît entre
les
gens d’ici et moi dès qu’il s’agit de mon travail et de ses condition
5055
nuis sans gravité, bien sûr. Mais quel drame dans
la
vie d’un buraliste de recette auxiliaire ! Depuis lors, il rougit et
5056
des lessives. En été ils pêchent des palourdes et
les
vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien
5057
agère, même pour un riche. Je me sens rejeté dans
la
catégorie bourgeoise. Ma bonne conscience de pauvre n’aura pas duré b
5058
as duré bien longtemps. 16 décembre 1933 Derrière
la
même pile d’assiettes où je crois avoir déjà dit que j’avais trouvé d
5059
e, j’ai déniché ce matin une édition populaire de
La
Naissance du jour, de Colette. Je n’avais pas encore lu ce livre. Il
5060
vais pas encore lu ce livre. Il est exactement de
l’
espèce que j’aime, et l’un des plus charmants dans cette espèce, mais
5061
ur une raison très précise et qui n’a rien à voir
avec
la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les y
5062
e raison très précise et qui n’a rien à voir avec
la
critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux
5063
ui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À
la
page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils dé
5064
voir avec la critique littéraire. À la page 43 de
l’
édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comm
5065
ttéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous
les
yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces d’un hérisson
5066
les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme
les
puces d’un hérisson mort. » Cette phrase a fait dans mon esprit ce qu
5067
mon compte, j’en ai pris sept sur mon pyjama dans
l’
espace de deux minutes, ce qui doit constituer une sorte de record. D’
5068
ituer une sorte de record. D’autres sautaient sur
le
couvre-pied. D’autres sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comm
5069
autres sautaient sur le couvre-pied. D’autres sur
le
plancher. Je n’en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue
5070
sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comme
la
mère Renaud était venue nous voir la veille, nous ne cherchâmes pas p
5071
large. Comme la mère Renaud était venue nous voir
la
veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il es
5072
voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin
la
cause du phénomène. Il est vrai qu’on a beau porter un nombre excessi
5073
petit hérisson était venu se mettre en boule dans
la
plate-bande qui borde la maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très v
5074
se mettre en boule dans la plate-bande qui borde
la
maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très vite, il avait l’air malad
5075
e. Il soufflait très vite, il avait l’air malade.
Le
lendemain nous le trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépul
5076
ès vite, il avait l’air malade. Le lendemain nous
le
trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépulture, caché sous d
5077
alade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je
l’
avais oublié là, sans sépulture, caché sous des feuillages brunis. Si
5078
caché sous des feuillages brunis. Si j’ajoute que
la
porte d’entrée joint mal le seuil, tout s’explique sans peine désorma
5079
unis. Si j’ajoute que la porte d’entrée joint mal
le
seuil, tout s’explique sans peine désormais, grâce à la phrase de Col
5080
il, tout s’explique sans peine désormais, grâce à
la
phrase de Colette. Je rapporte cette anecdote parce qu’elle comporte
5081
necdote parce qu’elle comporte une conclusion qui
la
dépasse d’ailleurs notablement et qui me paraît assez frappante. Voic
5082
s, je viens de trouver dans un ouvrage littéraire
la
solution d’une question précise. Grâce à Colette, je sais maintenant
5083
l’air de rien, mais je vois là comme un symbole.
Les
livres devraient être utiles. 23 décembre 1933 J’écris ceci sur une t
5084
933 J’écris ceci sur une table de café. À travers
la
vitrine, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche
5085
une table de café. À travers la vitrine, je vois
le
vieux port de cette vieille ville, la plus proche de notre île, et où
5086
ne, je vois le vieux port de cette vieille ville,
la
plus proche de notre île, et où nous devons encore passer deux heures
5087
ous devons encore passer deux heures en attendant
le
départ de l’autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis u
5088
core passer deux heures en attendant le départ de
l’
autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis un bon moment
5089
epuis un bon moment déjà, tout contents de revoir
le
va-et-vient d’un lieu public, de lire les journaux de Paris et de fum
5090
e revoir le va-et-vient d’un lieu public, de lire
les
journaux de Paris et de fumer des cigarettes américaines au goût de m
5091
es américaines au goût de miel, introuvables dans
l’
île. Pendant que ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer le fi
5092
e ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer
le
fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de notre pr
5093
fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater
l’
échec de notre première tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à
5094
z vite ce qu’il nous fallait pour subsister après
l’
épuisement de notre réserve. J’ai travaillé beaucoup, mais je ne serai
5095
uand on n’a plus rien. Pour celui qui vit au jour
le
jour, il s’agit essentiellement d’éviter les lacunes de cette sorte.
5096
jour le jour, il s’agit essentiellement d’éviter
les
lacunes de cette sorte. (Ce que l’on nomme « difficultés de trésoreri
5097
ment d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que
l’
on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient ici,
5098
que l’on nomme « difficultés de trésorerie » dans
les
affaires, devient ici, évidemment, un obstacle absolu.) Assuré au moi
5099
au moins de quelque argent à venir, j’ai accepté
l’
invitation d’un ami qui nous offre de passer trois semaines chez lui.
5100
bite à une petite journée de voyage de notre île.
La
leçon pratique de cette première expérience de deux mois, c’est que l
5101
cette première expérience de deux mois, c’est que
la
liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode, et
5102
est que la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut
la
conquérir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’attaque, pr
5103
berté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir
avec
méthode, et organiser à l’avance un plan d’attaque, prévoyant à un jo
5104
il faut la conquérir avec méthode, et organiser à
l’
avance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée d
5105
vance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près
la
date d’arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier de ma retraite
5106
s de, « Journal d’un intellectuel en chômage »,
La
Revue du dimanche, supplément hebdomadaire de la Revue de Lausanne ,
5107
La Revue du dimanche, supplément hebdomadaire de
la
Revue de Lausanne , Lausanne, 25 juillet 1937, p. 1. r. Précédé de l
5108
, Lausanne, 25 juillet 1937, p. 1. r. Précédé de
la
note suivante : « Par les soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, pa
5109
37, p. 1. r. Précédé de la note suivante : « Par
les
soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, paraîtra très prochainement
5110
Précédé de la note suivante : « Par les soins de
la
Guilde du Livre, à Lausanne, paraîtra très prochainement un ouvrage d
5111
ès prochainement un ouvrage de notre compatriote,
l’
excellent écrivain neuchâtelois Denis de Rougement : Journal d’un int
5112
: Journal d’un intellectuel en chômage . Grâce à
la
complaisance du directeur de la Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes en
5113
chômage . Grâce à la complaisance du directeur de
la
Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs
5114
ud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs
la
primeur de quelques pages de ce livre. Dans ces pages, l’auteur peint
5115
ur de quelques pages de ce livre. Dans ces pages,
l’
auteur peint notamment le milieu où il s’est retiré, une petite île ve
5116
e livre. Dans ces pages, l’auteur peint notamment
le
milieu où il s’est retiré, une petite île vendéenne. »
5117
Il faut parler des « autocars ». Je ne sais si
l’
on se doute à Paris de l’importance des autocars et des transformation
5118
utocars ». Je ne sais si l’on se doute à Paris de
l’
importance des autocars et des transformations qu’ils sont en train de
5119
ansformations qu’ils sont en train de causer dans
la
vie provinciale. Je n’ai pas compté le nombre de lignes actuellement
5120
auser dans la vie provinciale. Je n’ai pas compté
le
nombre de lignes actuellement exploitées. Mais j’ai pu constater dans
5121
j’ai pu constater dans plusieurs départements de
l’
Ouest qu’il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une
5122
t modifier plus rapidement et plus profondément «
la
coutume » de la France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire :
5123
rapidement et plus profondément « la coutume » de
la
France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’autocar modifi
5124
nce rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire :
l’
autocar modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et l
5125
ncore assez dire : l’autocar modifie complètement
le
mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, qua
5126
car modifie complètement le mode de contact entre
le
voyageur et la province. Naguère encore, quand on n’avait que les che
5127
plètement le mode de contact entre le voyageur et
la
province. Naguère encore, quand on n’avait que les chemins de fer, to
5128
la province. Naguère encore, quand on n’avait que
les
chemins de fer, tout convergeait vers Paris, non seulement du fait d’
5129
viaire centralisée, mais encore sentimentalement.
Le
confort relatif des grandes lignes indiquait qu’on allait à Paris ou
5130
ait qu’on allait à Paris ou qu’on en venait. Tout
le
reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’on se
5131
reste n’était que tortillards cahotants, jamais à
l’
heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulatio
5132
t que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où
l’
on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on n
5133
s, jamais à l’heure, où l’on se sentait relégué à
l’
écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gar
5134
l’heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de
la
« vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gares, ce qu’i
5135
relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et
l’
on ne voyait guère que des gares, ce qu’il y a de plus attristant dans
5136
plus attristant dans chaque village. Aujourd’hui,
les
stations d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on p
5137
ge. Aujourd’hui, les stations d’autocars sont sur
la
place principale. C’est de là qu’on part au milieu d’une grande afflu
5138
rrive à grands sons de trompe, c’est enfin ce que
l’
on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insu
5139
ands sons de trompe, c’est enfin ce que l’on voit
le
mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la v
5140
t enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays.
La
voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle la trave
5141
pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à
la
vie locale ; elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans ten
5142
était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle
la
traversait abstraitement, sans la voir, sans tenir compte de ses circ
5143
e locale ; elle la traversait abstraitement, sans
la
voir, sans tenir compte de ses circonstances. Sur ses bords ne vivait
5144
s ne vivait qu’une population nomade, qui portait
l’
uniforme de l’État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois
5145
’une population nomade, qui portait l’uniforme de
l’
État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de
5146
nomade, qui portait l’uniforme de l’État, partout
la
même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de part en part san
5147
artout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois
la
France de part en part sans remarquer que les gens qui l’habitent ne
5148
fois la France de part en part sans remarquer que
les
gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une p
5149
e de part en part sans remarquer que les gens qui
l’
habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à un
5150
r que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de
la
même sorte, et que d’une province à une autre, ce n’est pas seulement
5151
’une province à une autre, ce n’est pas seulement
le
paysage qui change. N’était-ce pas là l’une des raisons qui faisait,
5152
l’une des raisons qui faisait, si facilement nier
la
subsistance des « petites patries » dans la nation abstraitement unif
5153
nier la subsistance des « petites patries » dans
la
nation abstraitement unifiée ? La ligne d’autocar fait partie du pays
5154
patries » dans la nation abstraitement unifiée ?
La
ligne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie phy
5155
gne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse
la
géographie physique mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos la
5156
que mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos
la
route nationale pour des chemins secondaires ou des ruelles à peine p
5157
econdaires ou des ruelles à peine plus larges que
la
voiture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale, d
5158
ture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de
la
vie locale, du calendrier des marées, de l’heure matinale des foires,
5159
es de la vie locale, du calendrier des marées, de
l’
heure matinale des foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l
5160
des marées, de l’heure matinale des foires, dans
les
districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines
5161
foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de
l’
entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d
5162
s districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de
la
sortie des usines ou des écoles. La simple intention d’utiliser ce mo
5163
’entrée et de la sortie des usines ou des écoles.
La
simple intention d’utiliser ce moyen de transport vous met en contact
5164
tiliser ce moyen de transport vous met en contact
avec
toutes sortes d’habitudes locales. D’abord il faut aller dans deux ou
5165
pour obtenir un minimum de précisions concernant
l’
heure du prochain départ et la destination des diverses voitures qui s
5166
écisions concernant l’heure du prochain départ et
la
destination des diverses voitures qui stationnent, sur la place… Et q
5167
nation des diverses voitures qui stationnent, sur
la
place… Et que dire maintenant du voyage lui-même ? C’est une résurrec
5168
C’est une résurrection de ce que Vigny pleurait,
la
poésie des diligences, mais aérée. C’est fait d’une foule d’incidents
5169
de conversations absurdes et rapidement intimes,
avec
ce personnage enfoui à côté de vous dans un luxueux fauteuil de cuir
5170
vif, et qui change de tête plusieurs fois pendant
le
trajet, de coups de main aux voyageurs chargés de paquets ou d’un jeu
5171
et admiré, d’arrêts et de détours imprévus — car
les
chauffeurs acceptent volontiers toutes sortes de petites commissions
5172
ons que de vieilles dames leur confient au départ
avec
force recommandations ; et ils sont rares, ceux qui n’ont pas deux mo
5173
nt rares, ceux qui n’ont pas deux mots à dire par
la
portière entr’ouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui
5174
à dire par la portière entr’ouverte un instant à
la
fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux
5175
la portière entr’ouverte un instant à la fille de
l’
auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent, sur
5176
nstant à la fille de l’auberge écartée qui attend
le
passage du car, les cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’
5177
e l’auberge écartée qui attend le passage du car,
les
cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique
5178
ttend le passage du car, les cheveux au vent, sur
le
bord de la route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car
5179
ssage du car, les cheveux au vent, sur le bord de
la
route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car. Cela tien
5180
unes gaillards solides et gais, et qui ont toutes
les
raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est
5181
es et gais, et qui ont toutes les raisons d’aimer
le
travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous
5182
i ont toutes les raisons d’aimer le travail et de
le
faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans l’espr
5183
c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans
l’
esprit des populations, on se sent maître à bord de sa puissante machi
5184
se sent maître à bord de sa puissante machine, et
l’
on bénéficie de ces petites faveurs que les femmes ont toujours accord
5185
ine, et l’on bénéficie de ces petites faveurs que
les
femmes ont toujours accordées à ceux qui commandent et disposent, ne
5186
que pour une heure, de leur vie. Oui, voilà bien
les
hommes avec lesquels je rêverais d’entreprendre une belle révolution,
5187
ne heure, de leur vie. Oui, voilà bien les hommes
avec
lesquels je rêverais d’entreprendre une belle révolution, qui rajeuni
5188
entreprendre une belle révolution, qui rajeunisse
la
France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et l
5189
le révolution, qui rajeunisse la France : ils ont
la
bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit
5190
i rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur,
le
dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois
5191
a France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme,
le
sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont
5192
a bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et
la
rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuen
5193
sme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que
les
bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au « peuple »
5194
par erreur au « peuple » en général. Sans compter
les
moyens techniques dont ils disposent et qui seraient décisifs lors d’
5195
rapide. Mais loin de moi ces ambitions : ceux qui
les
ont n’en parlent pas, dit-on. Et je ne suis qu’un écrivain. Ceci me r
5196
t de conversation que j’aurais dû noter plus tôt.
Le
monsieur rencontré dans l’autocar de Taillefer voulait savoir quel ét
5197
ais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans
l’
autocar de Taillefer voulait savoir quel était mon métier. Et quand j’
5198
je n’étais qu’un écrivain, et chômeur par-dessus
le
marché, il s’écria : « Ah ! cher monsieur, je vous envie ! Vous avez
5199
envie ! Vous avez un rôle magnifique à jouer dans
la
société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos
5200
ôle magnifique à jouer dans la société. Vous avez
le
temps de réfléchir et de nous faire part de vos lumières, et sans vou
5201
normal, mettons qu’un fonctionnaire c’était pour
le
flatter, et cela tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans le
5202
latter, et cela tient aux circonstances mêmes qui
l’
ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne pe
5203
tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans
le
cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, e
5204
s qui l’ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien
l’
on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faibless
5205
ns le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que
l’
on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faiblesse ou d’une ambitio
5206
’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est
l’
aveu d’une faiblesse ou d’une ambition excessive, deux choses qui comp
5207
ition excessive, deux choses qui compliquent fort
la
vie, je crois ; ou bien l’on écrit des choses intelligentes, et c’est
5208
s qui compliquent fort la vie, je crois ; ou bien
l’
on écrit des choses intelligentes, et c’est encore l’aveu d’une inadap
5209
n écrit des choses intelligentes, et c’est encore
l’
aveu d’une inadaptation cruelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; on
5210
uelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; on bien
l’
on écrit simplement pour gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moy
5211
implement pour gagner sa chienne de vie, et c’est
le
bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imagine
5212
chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner
la
misère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédac
5213
e vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère
la
plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédactionnels.
5214
ère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans
les
antres rédactionnels. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain
5215
e imaginer, dans les antres rédactionnels. Je dis
les
antres. De toute façon, un écrivain est par nature un empêtré. Et voi
5216
, un écrivain est par nature un empêtré. Et voilà
le
paradoxe et l’injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces
5217
st par nature un empêtré. Et voilà le paradoxe et
l’
injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces gens-là des ve
5218
me de ces gens-là des vertus au-dessus du commun,
la
révélation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indig
5219
ation de secrets qui suffiraient à rendre heureux
les
plus indignes, et ingénieux les plus balourds, enfin je ne sais quell
5220
à rendre heureux les plus indignes, et ingénieux
les
plus balourds, enfin je ne sais quelle supériorité humaine, quel luxe
5221
ne, quel luxe d’énergie ou d’invention qui, s’ils
les
possédaient vraiment, feraient de leurs détenteurs non point des écri
5222
quand vous aurez compris cela, vous cesserez, je
le
crains, d’envier ma condition… s. Rougemont Denis de, « Extraits d
5223
aits de… Journal d’un intellectuel en chômage »,
Le
Journal, 15 août 1937, p. 2. t. Précédé de la notice suivante : « Br
5224
», Le Journal, 15 août 1937, p. 2. t. Précédé de
la
notice suivante : « Brillant essayiste dans deux ouvrages déjà remarq
5225
], M. Denis de Rougemont vient d’illustrer ce que
l’
on peut appeler sa « doctrine », en nous donnant, sous le titre de Jou
5226
ut appeler sa « doctrine », en nous donnant, sous
le
titre de Journal d’un intellectuel en chômage, un recueil de réflexio
5227
ale — qui s’impose aux nouvelles générations. Par
les
menues expériences d’une vie diminuée et matériellement difficile, M.
5228
t tracer un tableau très vivant et très nuancé de
la
province française, ainsi qu’en témoigne cet extrait. »
5229
x Pourquoi voulez-vous — ou veulent-ils — que
la
philosophie se purifie de théologie ? La théologie vaut bien la scien
5230
ls — que la philosophie se purifie de théologie ?
La
théologie vaut bien la science. C’est même une science bien moins var
5231
se purifie de théologie ? La théologie vaut bien
la
science. C’est même une science bien moins variable que les sciences
5232
e. C’est même une science bien moins variable que
les
sciences dites exactes, dont les fondements sont renversés tous les v
5233
ins variable que les sciences dites exactes, dont
les
fondements sont renversés tous les vingt ans de fond en comble. Je ne
5234
exactes, dont les fondements sont renversés tous
les
vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que la transcendance pui
5235
ersés tous les vingt ans de fond en comble. Je ne
pense
pas que la transcendance puisse jamais être « simplement la nature ».
5236
vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que
la
transcendance puisse jamais être « simplement la nature ». Voyez chez
5237
la transcendance puisse jamais être « simplement
la
nature ». Voyez chez Goethe, chez Tolstoï, chez Nietzsche : dans la m
5238
chez Goethe, chez Tolstoï, chez Nietzsche : dans
la
mesure où elle est un élément de transcendance, la nature devient div
5239
a mesure où elle est un élément de transcendance,
la
nature devient divinité (et ne peut pas ne pas le devenir). Pour ma p
5240
la nature devient divinité (et ne peut pas ne pas
le
devenir). Pour ma part, je ne conçois pas de relation concrète à la t
5241
ma part, je ne conçois pas de relation concrète à
la
transcendance où manquerait le sentiment du divin, du sacré. Mais vot
5242
elation concrète à la transcendance où manquerait
le
sentiment du divin, du sacré. Mais votre communication nous oriente u
5243
us oriente utilement vers une nouvelle analyse de
la
transcendance dans son rapport aux puissances de l’imagination et non
5244
transcendance dans son rapport aux puissances de
l’
imagination et non seulement dans son rapport à l’éthique. w. Rouge
5245
l’imagination et non seulement dans son rapport à
l’
éthique. w. Rougemont Denis de, « Lettre de M. Denis de Rougemont »
5246
« Lettre de M. Denis de Rougemont », Bulletin de
la
Société française de philosophie, Paris, décembre 1937, p. 204. x. L
5247
, décembre 1937, p. 204. x. Lettre publiée parmi
les
réactions à la conférence de Jean Wahl, « Subjectivité et transcendan
5248
p. 204. x. Lettre publiée parmi les réactions à
la
conférence de Jean Wahl, « Subjectivité et transcendance ».
5249
oint perdre leur temps et leurs forces à discuter
avec
leurs adversaires ». Il leur demande ensuite de prendre le pouvoir. M
5250
adversaires ». Il leur demande ensuite de prendre
le
pouvoir. Mais avant de prendre le pouvoir, il faut convaincre, sinon
5251
uite de prendre le pouvoir. Mais avant de prendre
le
pouvoir, il faut convaincre, sinon l’on se verra contraint d’exercer
5252
de prendre le pouvoir, il faut convaincre, sinon
l’
on se verra contraint d’exercer cette dictature que l’on se proposait
5253
se verra contraint d’exercer cette dictature que
l’
on se proposait justement de combattre, et qui est celle de l’État tot
5254
osait justement de combattre, et qui est celle de
l’
État totalitaire. Or, pour convaincre, il faut entre autres dissiper l
5255
r, pour convaincre, il faut entre autres dissiper
les
malentendus, désarmer autant que possible les adversaires, donc discu
5256
per les malentendus, désarmer autant que possible
les
adversaires, donc discuter. Au surplus, je ne sais pas si le terme d’
5257
res, donc discuter. Au surplus, je ne sais pas si
le
terme d’adversaire convient à M. Pierre Beausire. Il approuve notre r
5258
te en parlant de leurs auteurs : « On ne peut que
les
suivre et les approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour
5259
de leurs auteurs : « On ne peut que les suivre et
les
approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour l’essentiel d
5260
ver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour
l’
essentiel de ce que nous avons dit dans notre numéro spécial81. S’il n
5261
C’est au nom du personnalisme. Mais qu’est-ce que
le
personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de l’humanité. » Erreur tota
5262
me. Mais qu’est-ce que le personnalisme ? « C’est
l’
amour abstrait de l’humanité. » Erreur totale et malentendu maximum. S
5263
ue le personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de
l’
humanité. » Erreur totale et malentendu maximum. S’il fallait à tout p
5264
tendu maximum. S’il fallait à tout prix reprendre
les
termes choisis par M. Beausire lui-même pour définir notre attitude,
5265
lui-même pour définir notre attitude, je dirais :
Le
personnalisme, c’est l’amour concret des hommes réels. Ce n’est pas «
5266
tre attitude, je dirais : Le personnalisme, c’est
l’
amour concret des hommes réels. Ce n’est pas « la bonté, la charité (v
5267
l’amour concret des hommes réels. Ce n’est pas «
la
bonté, la charité (vertus toutes passives et féminines) » (au sentime
5268
oncret des hommes réels. Ce n’est pas « la bonté,
la
charité (vertus toutes passives et féminines) » (au sentiment de l’au
5269
toutes passives et féminines) » (au sentiment de
l’
auteur), mais c’est, au contraire, la volonté d’agir dans le sens de c
5270
sentiment de l’auteur), mais c’est, au contraire,
la
volonté d’agir dans le sens de ce qui libère en l’homme les forces de
5271
mais c’est, au contraire, la volonté d’agir dans
le
sens de ce qui libère en l’homme les forces de résistance et de créat
5272
a volonté d’agir dans le sens de ce qui libère en
l’
homme les forces de résistance et de création, systématiquement déprim
5273
é d’agir dans le sens de ce qui libère en l’homme
les
forces de résistance et de création, systématiquement déprimées par l
5274
ce et de création, systématiquement déprimées par
les
tyrannies que l’on sait. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dan
5275
systématiquement déprimées par les tyrannies que
l’
on sait. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dans le seul plan «
5276
it. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dans
le
seul plan « moral » où M. Beausire nous situe, par un réflexe bien ro
5277
r un réflexe bien romand ; (qu’il me pardonne !).
Le
personnalisme est bien plus qu’une morale, s’il en suppose une. Il es
5278
morale, s’il en suppose une. Il est, à mon sens,
la
tradition centrale de l’Occident, l’élément civilisateur de notre civ
5279
une. Il est, à mon sens, la tradition centrale de
l’
Occident, l’élément civilisateur de notre civilisation, le caractère s
5280
à mon sens, la tradition centrale de l’Occident,
l’
élément civilisateur de notre civilisation, le caractère spécifique de
5281
nt, l’élément civilisateur de notre civilisation,
le
caractère spécifique de la pensée et de la vie des hommes qui ont fai
5282
de notre civilisation, le caractère spécifique de
la
pensée et de la vie des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent l
5283
ation, le caractère spécifique de la pensée et de
la
vie des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent la maintenir. Et
5284
de la pensée et de la vie des hommes qui ont fait
l’
Europe et qui veulent la maintenir. Et l’individualisme et les collect
5285
e des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent
la
maintenir. Et l’individualisme et les collectivismes ne sont que les
5286
ont fait l’Europe et qui veulent la maintenir. Et
l’
individualisme et les collectivismes ne sont que les déviations complé
5287
qui veulent la maintenir. Et l’individualisme et
les
collectivismes ne sont que les déviations complémentaires et périodiq
5288
’individualisme et les collectivismes ne sont que
les
déviations complémentaires et périodiques de cette ligne de plus gran
5289
odiques de cette ligne de plus grande efficacité.
Le
mouvement personnaliste ne s’est constitué comme tel, et n’a pris ce
5290
comme tel, et n’a pris ce nom, que parce que dans
l’
Europe actuelle se déchaînent des puissances de mort, spirituelles et
5291
matérielles, radicalement contraires au génie de
l’
Occident. Ces puissances nous ont obligés, par leurs menaces instantes
5292
ctive de ce qui, depuis nos origines, n’était que
le
sous-entendu de tous nos efforts créateurs. Cette prise de conscience
5293
nscience active s’est effectuée diversement selon
les
milieux et les groupes. En France, elle s’est traduite surtout en ter
5294
s’est effectuée diversement selon les milieux et
les
groupes. En France, elle s’est traduite surtout en termes catholiques
5295
en termes surtout protestants ; en Espagne, avant
l’
invasion des idéologies totalitaires, en termes proches de l’anarchism
5296
des idéologies totalitaires, en termes proches de
l’
anarchisme, etc. Comme l’Europe, le personnalisme est essentiellement
5297
es, en termes proches de l’anarchisme, etc. Comme
l’
Europe, le personnalisme est essentiellement pluraliste, c’est-à-dire
5298
mes proches de l’anarchisme, etc. Comme l’Europe,
le
personnalisme est essentiellement pluraliste, c’est-à-dire : fédérali
5299
pluraliste, c’est-à-dire : fédéraliste. Il exalte
les
différences en ce qu’elles ont de créateur. Il veut une organisation
5300
lles ont de créateur. Il veut une organisation de
la
cité qui leur permette de s’exprimer. Telle est la forme que revêt «
5301
a cité qui leur permette de s’exprimer. Telle est
la
forme que revêt « la charité personnaliste », pour reprendre une form
5302
tte de s’exprimer. Telle est la forme que revêt «
la
charité personnaliste », pour reprendre une formule d’Arnaud Dandieu
5303
d Dandieu (qui d’ailleurs était nietzschéen). Que
le
christianisme vrai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à le
5304
ai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à
le
nier. En tant que protestant personnaliste, je tiens que seule la foi
5305
que protestant personnaliste, je tiens que seule
la
foi réelle — celle qui agit, et non celle qui endort — donne à notre
5306
tude son sens dernier. Beaucoup de mes camarades,
la
majorité même, ne partagent pas cette certitude. Ils en ont d’autres,
5307
n ont d’autres, que je crois insuffisantes, et je
le
leur dis en toute franchise. Du moins ne tiennent-ils pas le christia
5308
en toute franchise. Du moins ne tiennent-ils pas
le
christianisme dont je parle pour une niaiserie sentimentale. À défaut
5309
arle pour une niaiserie sentimentale. À défaut de
la
foi, ils connaissent l’Histoire, et savent de quoi l’Europe s’est fai
5310
sentimentale. À défaut de la foi, ils connaissent
l’
Histoire, et savent de quoi l’Europe s’est faite. Pierre Beausire ne c
5311
oi, ils connaissent l’Histoire, et savent de quoi
l’
Europe s’est faite. Pierre Beausire ne craint pas de proclamer que « s
5312
erre Beausire ne craint pas de proclamer que « si
l’
on veut parler à des hommes, et non à des enfants, il faut renoncer à
5313
et non à des enfants, il faut renoncer à invoquer
le
Christ ». Je ne craindrai pas de lui répondre que ce n’est pas là par
5314
ment du pouvoir dans cet État, et, en manifestant
la
noblesse de leur caractère, nous délivrent du triste spectacle que no
5315
délivrent du triste spectacle que nous avons sous
les
yeux. » Car la noblesse qu’il nous suppose, purement « morale », sent
5316
ste spectacle que nous avons sous les yeux. » Car
la
noblesse qu’il nous suppose, purement « morale », sentimentale, idéal
5317
», sentimentale, idéaliste, ne saurait suffire à
la
tâche. « Le peuple a besoin — nous dit l’auteur — de chefs d’une souv
5318
tale, idéaliste, ne saurait suffire à la tâche. «
Le
peuple a besoin — nous dit l’auteur — de chefs d’une souveraine digni
5319
ffire à la tâche. « Le peuple a besoin — nous dit
l’
auteur — de chefs d’une souveraine dignité, d’une intelligence froide
5320
d’un jugement droit. » Où trouve-t-on cela ? Dans
les
livres de Nietzsche. Mais non pas encore dans l’Histoire ? Si ce n’es
5321
les livres de Nietzsche. Mais non pas encore dans
l’
Histoire ? Si ce n’est pas une utopie de plus, un refuge pour les faib
5322
i ce n’est pas une utopie de plus, un refuge pour
les
faibles et les sceptiques, pour ceux qui craignent de se perdre en s’
5323
une utopie de plus, un refuge pour les faibles et
les
sceptiques, pour ceux qui craignent de se perdre en s’engageant, et p
5324
aignent de se perdre en s’engageant, et préfèrent
la
littérature ; si ce n’est pas une manière de « grève perlée » que de
5325
une manière de « grève perlée » que de n’accepter
la
lutte que dans ces termes ; si cet idéal est possible, si Beausire co
5326
un, qu’il nous amène ce précieux renfort, et nous
le
saluerons d’un vivat ! Nous saurons très bien nous entendre avec tous
5327
d’un vivat ! Nous saurons très bien nous entendre
avec
tous ceux qui veulent sauver non point nos âmes — c’est l’affaire de
5328
eux qui veulent sauver non point nos âmes — c’est
l’
affaire de Dieu seul — mais bien la possibilité de vivre et de créer s
5329
s âmes — c’est l’affaire de Dieu seul — mais bien
la
possibilité de vivre et de créer sa vérité — bonne ou mauvaise — cont
5330
t de créer sa vérité — bonne ou mauvaise — contre
les
fous totalitaires de droite ou de gauche, leurs guerres et leurs cult
5331
d’État. 80. Voir numéro du 1er décembre 1937 :
Le
Personnalisme en Suisse. 81. La réserve indiquée sur « le Suisse »,
5332
décembre 1937 : Le Personnalisme en Suisse. 81.
La
réserve indiquée sur « le Suisse », auquel Beausire croit que je croi
5333
nalisme en Suisse. 81. La réserve indiquée sur «
le
Suisse », auquel Beausire croit que je crois, résulte d’un malentendu
5334
e je crois, résulte d’un malentendu. Je crois à «
l’
idée suisse » telle que l’exprime Liehburg. Idée qui exclut l’existenc
5335
alentendu. Je crois à « l’idée suisse » telle que
l’
exprime Liehburg. Idée qui exclut l’existence d’un type suisse racial,
5336
e » telle que l’exprime Liehburg. Idée qui exclut
l’
existence d’un type suisse racial, ou « national » au sens unitaire. J
5337
tional » au sens unitaire. Je ne crois même pas à
l’
homo alpinus, création polémique de Ramuz. y. Rougemont Denis de, «
5338
n 1813. Son père avait passé son enfance à garder
les
moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il
5339
avait passé son enfance à garder les moutons dans
la
plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur
5340
s dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par
la
misère, il était monté sur un tertre et il avait maudit le Dieu Tout-
5341
, il était monté sur un tertre et il avait maudit
le
Dieu Tout-Puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assom
5342
rtre et il avait maudit le Dieu Tout-Puissant qui
le
laissait mourir de faim. Ce blasphème assombrit sa vie, et la révélat
5343
mourir de faim. Ce blasphème assombrit sa vie, et
la
révélation qu’en eut plus tard Søren fut décisive pour son développem
5344
t décisive pour son développement religieux. Mais
le
défi jeté à Dieu sembla porter bonheur au père de Kierkegaard. Il dev
5345
e sa fortune, il ne voulut tirer nul intérêt : il
la
confia à l’un de ses frères, pour éviter d’avoir affaire aux banques,
5346
d’avoir affaire aux banques, et lorsqu’il mourut,
l’
on s’aperçut qu’il n’en restait que 200 francs. Cette fortune provenai
5347
rancs. Cette fortune provenait d’une malédiction,
pensait
-il. Il l’avait donc dilapidée sans compter, mais surtout en dons géné
5348
rtune provenait d’une malédiction, pensait-il. Il
l’
avait donc dilapidée sans compter, mais surtout en dons généreux. À 27
5349
terminait ses études de théologie, et se fiançait
avec
une jeune fille de 18 ans, Régine Olsen. Tout le monde connaît le dra
5350
le de 18 ans, Régine Olsen. Tout le monde connaît
le
drame de ces fiançailles douloureusement rompues au bout d’un an. L’i
5351
nçailles douloureusement rompues au bout d’un an.
L’
idée que Kierkegaard s’était formée du mariage était trop absolue pour
5352
absolue pour comporter une réalisation pratique.
Le
« tout ou rien » qui est sa devise devait fatalement le conduire au r
5353
out ou rien » qui est sa devise devait fatalement
le
conduire au refus d’une perspective de bonheur dans laquelle il ne po
5354
ctive de bonheur dans laquelle il ne pouvait voir
le
vrai tout de son existence singulière. (Que d’autres y cherchent des
5355
ture, il partit pour Berlin où il désirait suivre
les
cours de Schelling. Il y demeura quelques mois, puis il revint à Cope
5356
ort, en 1835. Il travaillait une grande partie de
la
nuit. Georg Brandes raconte qu’on pouvait le voir, de la rue, arpente
5357
e de la nuit. Georg Brandes raconte qu’on pouvait
le
voir, de la rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vas
5358
. Georg Brandes raconte qu’on pouvait le voir, de
la
rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vastes appartem
5359
n pouvait le voir, de la rue, arpenter longuement
les
pièces illuminées de ses vastes appartements. Dans chaque chambre il
5360
ir noter, au cours de son interminable promenade,
les
phrases qu’il venait de composer tout en marchant. À l’aube, il s’acc
5361
ases qu’il venait de composer tout en marchant. À
l’
aube, il s’accordait quelque répit, errait sur les quais déserts du po
5362
l’aube, il s’accordait quelque répit, errait sur
les
quais déserts du port, ou gagnait les forêts qui avoisinent la capita
5363
errait sur les quais déserts du port, ou gagnait
les
forêts qui avoisinent la capitale. Puis il se remettait à écrire. Ver
5364
rts du port, ou gagnait les forêts qui avoisinent
la
capitale. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parc
5365
ale. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on
le
voyait parcourir les rues les plus animées de la ville, parlant, rian
5366
ttait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir
les
rues les plus animées de la ville, parlant, riant et discutant avec l
5367
crire. Vers midi, on le voyait parcourir les rues
les
plus animées de la ville, parlant, riant et discutant avec les bourge
5368
le voyait parcourir les rues les plus animées de
la
ville, parlant, riant et discutant avec les bourgeois, avec des jeune
5369
animées de la ville, parlant, riant et discutant
avec
les bourgeois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le pe
5370
ées de la ville, parlant, riant et discutant avec
les
bourgeois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit
5371
, parlant, riant et discutant avec les bourgeois,
avec
des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit peuple qu’il aim
5372
utant avec les bourgeois, avec des jeunes filles,
avec
des balayeurs, avec le petit peuple qu’il aimait par-dessus tout. Tou
5373
eois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs,
avec
le petit peuple qu’il aimait par-dessus tout. Tout le monde, à Copenh
5374
avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec
le
petit peuple qu’il aimait par-dessus tout. Tout le monde, à Copenhagu
5375
ongs. Mais on savait aussi que cet original était
le
plus grand écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un immense suc
5376
Sa première œuvre eut un immense succès : c’était
l’
Alternative, qu’il publia en 1843. La même année parurent deux autres
5377
ès : c’était l’Alternative, qu’il publia en 1843.
La
même année parurent deux autres ouvrages, signés de pseudonymes (La R
5378
rent deux autres ouvrages, signés de pseudonymes (
La
Répétition, Crainte et Tremblement) et deux recueils de Discours édif
5379
e son nom. Mais à mesure qu’il faisait mieux voir
le
fond chrétien de sa pensée, le public s’écarta, effrayé. Et lorsqu’en
5380
faisait mieux voir le fond chrétien de sa pensée,
le
public s’écarta, effrayé. Et lorsqu’en 1831, il se mit à attaquer ave
5381
effrayé. Et lorsqu’en 1831, il se mit à attaquer
avec
une extrême violence, le christianisme officiel et ses évêques, il se
5382
, il se mit à attaquer avec une extrême violence,
le
christianisme officiel et ses évêques, il se vit abandonné dans la pl
5383
officiel et ses évêques, il se vit abandonné dans
la
plus complète solitude qu’ait sans doute jamais connue un grand espri
5384
nue un grand esprit. Un an plus tard, accablé par
la
lutte qu’il menait seul contre tous, il tombait d’épuisement au cours
5385
’épuisement au cours d’une promenade en ville. On
le
transporta à l’hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul
5386
ours d’une promenade en ville. On le transporta à
l’
hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul ami, le pasteur
5387
il mourut paisiblement en disant à son seul ami,
le
pasteur Boesen : « Salue tous les hommes de tua part, je les aimais b
5388
à son seul ami, le pasteur Boesen : « Salue tous
les
hommes de tua part, je les aimais bien, tous… » Le seul événement ext
5389
Boesen : « Salue tous les hommes de tua part, je
les
aimais bien, tous… » Le seul événement extérieur de sa vie avait été
5390
s hommes de tua part, je les aimais bien, tous… »
Le
seul événement extérieur de sa vie avait été la rupture de ses fiança
5391
» Le seul événement extérieur de sa vie avait été
la
rupture de ses fiançailles. Mais l’acte qui résume toute son œuvre, c
5392
vie avait été la rupture de ses fiançailles. Mais
l’
acte qui résume toute son œuvre, cet acte après lequel, semblable au p
5393
ourir certain d’avoir accompli sa mission, ce fut
l’
attaque qu’il mena contre l’Église établie et contre dix-huit siècles
5394
li sa mission, ce fut l’attaque qu’il mena contre
l’
Église établie et contre dix-huit siècles de chrétienté officielle — a
5395
siècles de chrétienté officielle — attaque contre
le
« monde chrétien » au nom du Christ des évangiles. ⁂ Toute mon activi
5396
r on ne naît pas chrétien, et même on ne peut pas
l’
être, il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de l
5397
et même on ne peut pas l’être, il faut sans cesse
le
devenir, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de
5398
eut pas l’être, il faut sans cesse le devenir, et
le
devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéis
5399
il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans
l’
instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéissance. Cessons d
5400
cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de
la
foi, qui est l’instant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le
5401
, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est
l’
instant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme «
5402
ir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de
l’
acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme « à bon marché
5403
nstant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre
le
christianisme « à bon marché », comme les évêques. Pensée centrale de
5404
prendre le christianisme « à bon marché », comme
les
évêques. Pensée centrale de l’œuvre énorme de Kierkegaard (40 volumes
5405
n marché », comme les évêques. Pensée centrale de
l’
œuvre énorme de Kierkegaard (40 volumes en douze années). Pensée qu’il
5406
. Pensée qu’il défendit et qu’il servit de toutes
les
forces de son génie universel de poète, de philosophe, d’ironiste et
5407
confort moral, témoignage, discours académiques.
L’
évêque Nynster venait de mourir, comblé d’honneurs et de gloire mondai
5408
t de gloire mondaine. Sur sa tombe son successeur
le
qualifia, selon l’usage, de « grand témoin de la vérité ». Kierkegaar
5409
e. Sur sa tombe son successeur le qualifia, selon
l’
usage, de « grand témoin de la vérité ». Kierkegaard écrivit alors un
5410
le qualifia, selon l’usage, de « grand témoin de
la
vérité ». Kierkegaard écrivit alors un article indigné, qui provoqua
5411
né, qui provoqua un énorme scandale. Il décrivait
la
vie de Nynster. Était-ce celle d’un témoin de la vérité ? Non, s’écri
5412
la vie de Nynster. Était-ce celle d’un témoin de
la
vérité ? Non, s’écriait Kierkegaard : Un témoin de la vérité, c’est
5413
rité ? Non, s’écriait Kierkegaard : Un témoin de
la
vérité, c’est un homme dont la vie est familière avec toute espèce de
5414
rd : Un témoin de la vérité, c’est un homme dont
la
vie est familière avec toute espèce de souffrance, … un homme qui tém
5415
vérité, c’est un homme dont la vie est familière
avec
toute espèce de souffrance, … un homme qui témoigne dans le dénuement
5416
spèce de souffrance, … un homme qui témoigne dans
le
dénuement, la misère et l’humiliation, méconnu, déteste, insulté, baf
5417
rance, … un homme qui témoigne dans le dénuement,
la
misère et l’humiliation, méconnu, déteste, insulté, bafoué — un homme
5418
omme qui témoigne dans le dénuement, la misère et
l’
humiliation, méconnu, déteste, insulté, bafoué — un homme qui est flag
5419
s enfin — car c’est bien d’un véritable témoin de
la
vérité qu’on nous parle — et puis enfin crucifié, décapité, brûlé ou
5420
ié, décapité, brûlé ou rôti sur un gril, jeté par
le
bourreau dans un endroit écarté, sans être enterré. Voilà un témoin d
5421
oit écarté, sans être enterré. Voilà un témoin de
la
vérité, sa vie et son existence, sa mort et son enterrement, et l’évê
5422
et son existence, sa mort et son enterrement, et
l’
évêque Nynster, nous dit-on, fut un des vrais témoins de la vérité ! E
5423
Nynster, nous dit-on, fut un des vrais témoins de
la
vérité ! En vérité, il y a quelque chose de plus contraire au christi
5424
et c’est de jouer au christianisme, d’en écarter
les
dangers, et de jouer ensuite au jeu que l’évêque Nynster était un tém
5425
arter les dangers, et de jouer ensuite au jeu que
l’
évêque Nynster était un témoin de la vérité. Cas symbolique aux yeux
5426
te au jeu que l’évêque Nynster était un témoin de
la
vérité. Cas symbolique aux yeux de Kierkegaard. Il fallait un rappel
5427
e aux yeux de Kierkegaard. Il fallait un rappel à
l’
ordre. Il le devint lui-même, de tout son être. Et il savait ce que ce
5428
e Kierkegaard. Il fallait un rappel à l’ordre. Il
le
devint lui-même, de tout son être. Et il savait ce que cela devait lu
5429
. Et il savait ce que cela devait lui coûter. Car
le
monde ne tolère jamais la passion spirituelle qui se déclare dans sa
5430
devait lui coûter. Car le monde ne tolère jamais
la
passion spirituelle qui se déclare dans sa pureté. La plupart des gen
5431
oivent pas de malaise. D’autres, qui s’essaient à
penser
en fin de semaine, comme on fait un peu d’ordre dans l’appartement, r
5432
fin de semaine, comme on fait un peu d’ordre dans
l’
appartement, reculent bientôt devant l’énormité — l’absence de normes
5433
ordre dans l’appartement, reculent bientôt devant
l’
énormité — l’absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent.
5434
appartement, reculent bientôt devant l’énormité —
l’
absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent. Ils se rendo
5435
ntôt devant l’énormité — l’absence de normes — de
la
vie telle qu’ils la découvrent. Ils se rendorment, ou bien édifient d
5436
té — l’absence de normes — de la vie telle qu’ils
la
découvrent. Ils se rendorment, ou bien édifient des systèmes (qu’ils
5437
Ceux qui persistent cependant, s’aperçoivent que
l’
entreprise pourrait être mortellement compromettante. Aussi l’histoire
5438
pourrait être mortellement compromettante. Aussi
l’
histoire de la pensée n’est-elle peut-être que la chronique de ses ret
5439
mortellement compromettante. Aussi l’histoire de
la
pensée n’est-elle peut-être que la chronique de ses retraites éloquen
5440
l’histoire de la pensée n’est-elle peut-être que
la
chronique de ses retraites éloquentes. Très peu vont jusqu’au bout de
5441
nt jusqu’au bout de leur emportement. L’un, c’est
la
mort accidentelle, l’autre, la folie qui l’abat. Un seul, je crois, p
5442
ement. L’un, c’est la mort accidentelle, l’autre,
la
folie qui l’abat. Un seul, je crois, parvint dans l’intégrité de sa f
5443
c’est la mort accidentelle, l’autre, la folie qui
l’
abat. Un seul, je crois, parvint dans l’intégrité de sa force à une mo
5444
folie qui l’abat. Un seul, je crois, parvint dans
l’
intégrité de sa force à une mort que toute son œuvre provoquait et qui
5445
ui vaincue par une telle victime, lui révéla dans
les
derniers instants le vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui
5446
le victime, lui révéla dans les derniers instants
le
vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui aboutissait là. Conte
5447
i révéla dans les derniers instants le vrai sens,
la
valeur de destin de la pensée qui aboutissait là. Contempler dans sa
5448
ers instants le vrai sens, la valeur de destin de
la
pensée qui aboutissait là. Contempler dans sa mort la « fin » de sa p
5449
ensée qui aboutissait là. Contempler dans sa mort
la
« fin » de sa passion et l’accomplissement de sa foi, tel fut le sort
5450
ntempler dans sa mort la « fin » de sa passion et
l’
accomplissement de sa foi, tel fut le sort de Kierkegaard, son incomme
5451
a passion et l’accomplissement de sa foi, tel fut
le
sort de Kierkegaard, son incommensurable grandeur. Un acharnement san
5452
ble grandeur. Un acharnement sans pareil à forcer
l’
esprit sur l’obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’existence ;
5453
Un acharnement sans pareil à forcer l’esprit sur
l’
obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’existence ; toute une vie
5454
forcer l’esprit sur l’obstacle du désespoir et de
l’
absurdité de l’existence ; toute une vie tendue vers l’impossible, tou
5455
sur l’obstacle du désespoir et de l’absurdité de
l’
existence ; toute une vie tendue vers l’impossible, toute une œuvre de
5456
urdité de l’existence ; toute une vie tendue vers
l’
impossible, toute une œuvre de sarcasmes précis contre les innombrable
5457
sible, toute une œuvre de sarcasmes précis contre
les
innombrables tentations d’une religion qui n’est pas Dieu ; et soudai
5458
udain, sur son lit de mort, cette phrase : Je ne
pense
pas que ce soit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pou
5459
que ce soit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne
l’
ai dit que pour l’écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! All
5460
is, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pour
l’
écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! Alléluia !82 Deux d
5461
lléluia ! Alléluia !82 Deux documents éclairent
le
mystère de ce triomphe, le sens dernier de cette vie et de cette mort
5462
ux documents éclairent le mystère de ce triomphe,
le
sens dernier de cette vie et de cette mort. Le premier est de Kierkeg
5463
tte mort. Le premier est de Kierkegaard : Forcer
les
hommes à être attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemi
5464
re attentifs et à juger, c’est exactement prendre
le
chemin du vrai martyre. Un vrai martyr n’a jamais eu recours à la vio
5465
i martyre. Un vrai martyr n’a jamais eu recours à
la
violence, il combat à l’aide de son impuissance. Il force les hommes
5466
, il combat à l’aide de son impuissance. Il force
les
hommes à être attentifs. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, i
5467
s. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, ils
le
tuent. Mais c’est là ce qu’il voulait. Il n’a jamais cru que sa mort
5468
oui, que cette action ne commencerait vraiment qu’
avec
sa mort !83 On trouve le second document dans le journal de l’hôpit
5469
c sa mort !83 On trouve le second document dans
le
journal de l’hôpital où vint mourir Kierkegaard (c’est un interne qui
5470
On trouve le second document dans le journal de
l’
hôpital où vint mourir Kierkegaard (c’est un interne qui transcrit les
5471
ourir Kierkegaard (c’est un interne qui transcrit
les
déclarations du malade) : Il tient sa maladie pour mortelle. Sa mort
5472
aladie pour mortelle. Sa mort serait nécessaire à
l’
action à laquelle il a consacré toutes ses forces spirituelles et tout
5473
alors affaiblie. Au contraire sa mort donnera de
la
force à son attaque, et lui assurera, pense-t-il, la victoire.84 ⁂
5474
nnera de la force à son attaque, et lui assurera,
pense-t
-il, la victoire.84 ⁂ De cette œuvre considérable, il ne saurait êtr
5475
force à son attaque, et lui assurera, pense-t-il,
la
victoire.84 ⁂ De cette œuvre considérable, il ne saurait être quest
5476
rait être question, ici, de résumer ne fût-ce que
les
thèmes directeurs. Il faut y aller voir dans ses livres traduits, et
5477
ut y aller voir dans ses livres traduits, et dans
l’
étude monumentale que Jean Wahl publie ces jours-ci. Mais il sera peut
5478
nt manquer de frapper, de retenir ou de repousser
le
lecteur non prévenu : la « difficulté » de Kierkegaard et sa dialecti
5479
retenir ou de repousser le lecteur non prévenu :
la
« difficulté » de Kierkegaard et sa dialectique du sérieux et de l’ir
5480
de Kierkegaard et sa dialectique du sérieux et de
l’
ironie. Kierkegaard est difficile parce qu’il est simple. « La pureté
5481
erkegaard est difficile parce qu’il est simple. «
La
pureté du cœur, c’est de vouloir une seule chose », écrit-il. Mais ce
5482
s désirs. Il est désespéré, mais c’est à cause de
la
foi. Et s’il espère, c’est « en vertu de l’absurde », c’est-à-dire de
5483
se de la foi. Et s’il espère, c’est « en vertu de
l’
absurde », c’est-à-dire de l’incarnation de Dieu en Christ. On ne peut
5484
c’est « en vertu de l’absurde », c’est-à-dire de
l’
incarnation de Dieu en Christ. On ne peut pas le comprendre : on le so
5485
e l’incarnation de Dieu en Christ. On ne peut pas
le
comprendre : on le souffre. On l’aime, on l’injurie, on se débat sous
5486
Dieu en Christ. On ne peut pas le comprendre : on
le
souffre. On l’aime, on l’injurie, on se débat sous son regard, on arg
5487
On ne peut pas le comprendre : on le souffre. On
l’
aime, on l’injurie, on se débat sous son regard, on argumente contre s
5488
pas le comprendre : on le souffre. On l’aime, on
l’
injurie, on se débat sous son regard, on argumente contre sa souffranc
5489
tte capitulation. On n’étudie pas Kierkegaard, on
l’
attrape comme une maladie. Cet homme sécrète un poison salutaire, dont
5490
sécrète un poison salutaire, dont nul ne trouvera
l’
antidote : qu’il en soit mort, atteste ce fait capital que la pensée h
5491
: qu’il en soit mort, atteste ce fait capital que
la
pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous les autres, sauf Empéd
5492
la pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous
les
autres, sauf Empédocle et Nietzsche, ont refusé de signer de leur san
5493
e et Nietzsche, ont refusé de signer de leur sang
le
pacte qui lie le penseur à Méphisto : expérimentateurs qui se ménagen
5494
nt refusé de signer de leur sang le pacte qui lie
le
penseur à Méphisto : expérimentateurs qui se ménagent un dernier reto
5495
énagent un dernier retour, guerriers qui déposent
les
armes avant la décision mortelle. Concession, la raison de Pascal, et
5496
er retour, guerriers qui déposent les armes avant
la
décision mortelle. Concession, la raison de Pascal, et lors même qu’i
5497
les armes avant la décision mortelle. Concession,
la
raison de Pascal, et lors même qu’il y renonce : concession, la pitié
5498
ascal, et lors même qu’il y renonce : concession,
la
pitié parfois presque sadique de Dostoievsky. Oui, même ceux-là ! Mêm
5499
là ! Même ces deux-là qui sont allés si loin dans
la
passion de l’absolu chrétien, mais seul Kierkegaard en est mort. Une
5500
deux-là qui sont allés si loin dans la passion de
l’
absolu chrétien, mais seul Kierkegaard en est mort. Une pureté presque
5501
icité conquise aux dépens de tout ce qui soutient
l’
homme contre Dieu. Et cependant, dans le pire désespoir, jamais de déf
5502
soutient l’homme contre Dieu. Et cependant, dans
le
pire désespoir, jamais de défi, ni d’« hybris ». Pureté du chrétien,
5503
ieux » de Kierkegaard, il est de nature à tromper
le
lecteur mille manières. On peut se laisser prendre à la fantaisie bar
5504
teur mille manières. On peut se laisser prendre à
la
fantaisie baroque de certaines paraboles, de certaines ironies polémi
5505
’aperçoit qu’elles nous jettent en plein drame de
l’
existence. Kierkegaard déconsidère le sérieux « humain », par l’ironie
5506
ein drame de l’existence. Kierkegaard déconsidère
le
sérieux « humain », par l’ironie de l’éternité. L’éternité, pour lui,
5507
ierkegaard déconsidère le sérieux « humain », par
l’
ironie de l’éternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temp
5508
éconsidère le sérieux « humain », par l’ironie de
l’
éternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquell
5509
e sérieux « humain », par l’ironie de l’éternité.
L’
éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle le temps f
5510
ternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur
le
temps, à laquelle le temps finira bien par succomber. Mais, ayant tué
5511
pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle
le
temps finira bien par succomber. Mais, ayant tué en lui toute autre v
5512
t tué en lui toute autre vanité que celle de haïr
le
temps — c’est là son dépit amoureux — Kierkegaard peut enfin parler a
5513
on dépit amoureux — Kierkegaard peut enfin parler
avec
un sérieux total, dont l’écrivain d’aujourd’hui n’a même plus l’idée.
5514
ard peut enfin parler avec un sérieux total, dont
l’
écrivain d’aujourd’hui n’a même plus l’idée. Un de nos meilleurs auteu
5515
otal, dont l’écrivain d’aujourd’hui n’a même plus
l’
idée. Un de nos meilleurs auteurs déclarait récemment que le palais de
5516
de nos meilleurs auteurs déclarait récemment que
le
palais de Versailles manque de sérieux. C’était bien vu. Mais notre a
5517
eux, est seul important, mais tant de gens « font
les
importants ». Où est la différence ? C’est que le sérieux vrai est en
5518
mais tant de gens « font les importants ». Où est
la
différence ? C’est que le sérieux vrai est en définitive dans le seul
5519
es importants ». Où est la différence ? C’est que
le
sérieux vrai est en définitive dans le seul acte de foi, qui jette su
5520
C’est que le sérieux vrai est en définitive dans
le
seul acte de foi, qui jette sur nos sérieux, poses et amusettes (ou «
5521
infiniment pire qu’une ironie. Car peut-être que
l’
acte de foi n’existe pas, n’est qu’une figure de rhétorique pieuse, un
5522
ique pieuse, une illusion, un mythe, un saut dans
le
vide, etc. Et alors il n’y a plus nulle part de « vrai » sérieux. Mai
5523
ieux dans ma vie tant que je n’ai pas trouvé dans
la
foi, ou mieux : tant que la foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé
5524
n’ai pas trouvé dans la foi, ou mieux : tant que
la
foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé. Kierkegaard a eu trois des
5525
pirituelles. La première est littéraire : ce sont
les
dramaturges et les poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen.
5526
mière est littéraire : ce sont les dramaturges et
les
poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen. La seconde philosop
5527
sont les dramaturges et les poètes du Nord, dont
le
plus grand nom est Ibsen. La seconde philosophique : l’école « existe
5528
s grand nom est Ibsen. La seconde philosophique :
l’
école « existentielle » d’Allemagne, avec Martin Heidegger et Karl Jas
5529
sophique : l’école « existentielle » d’Allemagne,
avec
Martin Heidegger et Karl Jaspers. La troisième théologique : l’école
5530
egger et Karl Jaspers. La troisième théologique :
l’
école dialectique, qui sous l’impulsion de Karl Barth est en train de
5531
sième théologique : l’école dialectique, qui sous
l’
impulsion de Karl Barth est en train de sauver l’honneur et l’existenc
5532
l’impulsion de Karl Barth est en train de sauver
l’
honneur et l’existence même des églises allemandes. Nul ne peut mesure
5533
de Karl Barth est en train de sauver l’honneur et
l’
existence même des églises allemandes. Nul ne peut mesurer aujourd’hui
5534
lises allemandes. Nul ne peut mesurer aujourd’hui
le
développement promis à l’influence de Kierkegaard sur notre temps : o
5535
eut mesurer aujourd’hui le développement promis à
l’
influence de Kierkegaard sur notre temps : on le redécouvre après cent
5536
à l’influence de Kierkegaard sur notre temps : on
le
redécouvre après cent ans, on le traduit partout, on publie sur son œ
5537
notre temps : on le redécouvre après cent ans, on
le
traduit partout, on publie sur son œuvre des centaines d’ouvrages et
5538
ges et d’articles. Ce qui est certain, c’est qu’à
la
différence de Nietzsche, personne ne parviendra jamais à « utiliser »
5539
itiques et temporelles. Il se dresse, au seuil de
l’
époque comme la plus formidable accusation vivante contre nos lâchetés
5540
orelles. Il se dresse, au seuil de l’époque comme
la
plus formidable accusation vivante contre nos lâchetés collectivistes
5541
re danois, on peut lire cette inscription nue : «
Le
Solitaire ». Le rire et la passion sévère, le ricanement puissant et
5542
ut lire cette inscription nue : « Le Solitaire ».
Le
rire et la passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amo
5543
te inscription nue : « Le Solitaire ». Le rire et
la
passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amour de Kierk
5544
: « Le Solitaire ». Le rire et la passion sévère,
le
ricanement puissant et le message d’amour de Kierkegaard traversent n
5545
e et la passion sévère, le ricanement puissant et
le
message d’amour de Kierkegaard traversent notre âge comme cette pierr
5546
ur silence d’éternité. 82. « Alléluia » : Louez
l’
Éternel. Kierkegaard avait aussi noté, peu de jours auparavant : « Il
5547
sme, une seule tâche comparable à la mienne. Dans
la
‟chrétienté”, elle apparaît pour la première fois. Je le sais, je sai
5548
étienté”, elle apparaît pour la première fois. Je
le
sais, je sais aussi ce qu’il m’en a coûté, ce que j’ai souffert, je p
5549
qu’il m’en a coûté, ce que j’ai souffert, je puis
l’
exprimer par cette seule phrase : ‟Je ne fus pas comme les autres” ».
5550
mer par cette seule phrase : ‟Je ne fus pas comme
les
autres” ». 83. Point de vue explicatif sur mon activité d’auteur (1
5551
sont peu de chose », s’écrie Bossuet (Sermon sur
la
mort, 22 mars 1662). Que dirions-nous alors du sort fait à celui qui
5552
er aux hommes tel qu’il est ? S’entendre dire que
l’
homme en général est peu de chose, n’est pas trop humiliant pour qui s
5553
ur qui se flatte d’une image de soi composée dans
la
solitude : tant qu’on ne s’est pas avoué devant les autres, on peut t
5554
a solitude : tant qu’on ne s’est pas avoué devant
les
autres, on peut toujours s’estimer singulier, c’est-à-dire supérieur
5555
urs s’estimer singulier, c’est-à-dire supérieur à
la
masse. Et ce n’est pas encore franchement s’avouer que de se comparer
5556
s’avouer que de se comparer aux seuls humains que
le
métier ou notre rang social nous met en mesure d’approcher. L’épreuve
5557
notre rang social nous met en mesure d’approcher.
L’
épreuve décisive est celle que l’on subit au contact de voisins que ri
5558
ure d’approcher. L’épreuve décisive est celle que
l’
on subit au contact de voisins que rien en nous, que rien dans notre v
5559
Ce n’est qu’au prix d’un désordre social — selon
les
préjugés du régime établi — que ces rencontres deviennent possibles,
5560
t à la fois se reconnaître en vérité et rejoindre
l’
humanité. Chômage. — On dit souvent qu’il faut à l’homme un minimum
5561
umanité. Chômage. — On dit souvent qu’il faut à
l’
homme un minimum de confort ou d’aisance matérielle pour pouvoir réflé
5562
intellectuel » au chômage absolu, c’est-à-dire à
l’
arrêt de la pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel es
5563
el » au chômage absolu, c’est-à-dire à l’arrêt de
la
pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel est ce certai
5564
t-à-dire à l’arrêt de la pensée, tout au moins de
la
pensée créatrice. Mais quel est ce certain degré ? À quel niveau plac
5565
? À quel niveau placer cette limite inférieure ?
La
question paraît insoluble dès qu’on la pose dans le concret d’une vie
5566
férieure ? La question paraît insoluble dès qu’on
la
pose dans le concret d’une vie connue. Prenons deux hommes qui furent
5567
question paraît insoluble dès qu’on la pose dans
le
concret d’une vie connue. Prenons deux hommes qui furent tous deux de
5568
mes qui ont écrit chacun une vingtaine de volumes
l’
espace de dix ans : Kierkegaard et Nietzsche. Le premier était riche e
5569
il ne lui restait plus même une chemise entière :
les
morceaux du bras avant servi à rapiécer les épaules et le plastron. L
5570
ère : les morceaux du bras avant servi à rapiécer
les
épaules et le plastron. Le peu d’argent de sa retraite de professeur
5571
aux du bras avant servi à rapiécer les épaules et
le
plastron. Le peu d’argent de sa retraite de professeur servait à paye
5572
vant servi à rapiécer les épaules et le plastron.
Le
peu d’argent de sa retraite de professeur servait à payer ses logeuse
5573
seur servait à payer ses logeuses successives, et
les
remèdes contre ses effroyables maux de tête. De plus, il était à demi
5574
sent concevoir d’autres buts à leur existence que
la
recherche d’un gain précaire. Mais à ceux qui ont quelque chose, il f
5575
ceux qui ont quelque chose, il faut rappeler que
la
recherche du confort est ce qui s’oppose le plus radicalement à toute
5576
r que la recherche du confort est ce qui s’oppose
le
plus radicalement à toute culture véritable. Île de R. — La nuit !
5577
calement à toute culture véritable. Île de R. —
La
nuit ! Je l’avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette
5578
ute culture véritable. Île de R. — La nuit ! Je
l’
avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette mort opaque
5579
Île de R. — La nuit ! Je l’avais oubliée à Paris.
La
nuit des villes n’est pas cette mort opaque dont il faut redouter je
5580
ge et circulante, pleine de rumeurs, comparable à
la
fièvre. Plus lucide souvent que les jours. Ici, tout repose complètem
5581
, comparable à la fièvre. Plus lucide souvent que
les
jours. Ici, tout repose complètement. Un silence implacable et mat en
5582
omplètement. Un silence implacable et mat enserre
l’
homme qui chemine sur la route incertaine, au milieu des menaces origi
5583
implacable et mat enserre l’homme qui chemine sur
la
route incertaine, au milieu des menaces originelles. Par temps clair,
5584
milieu des menaces originelles. Par temps clair,
les
étoiles sont très grosses et molles au-dessus du jardin. Mais il arri
5585
et molles au-dessus du jardin. Mais il arrive que
le
noir soit compact. Je me dirige à peu près le long de l’allée unique,
5586
soit compact. Je me dirige à peu près le long de
l’
allée unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la
5587
irige à peu près le long de l’allée unique, entre
les
rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans l’o
5588
e unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons,
le
verrou de la porte du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici le
5589
re les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de
la
porte du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici les rues du vil
5590
ve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans
l’
odeur des lauriers épais. Voici les rues du village, illuminées comme
5591
e du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici
les
rues du village, illuminées comme un décor blanc et vert. Des chiens
5592
horriblement, tournent autour de moi, me flairent
avec
angoisse, et fuient soudain en gémissant. J’ai des lettres à porter à
5593
soudain en gémissant. J’ai des lettres à porter à
l’
autobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et l’écho
5594
utobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau
le
noir, et l’écho de mes pas contre les murs des maisons mortes. Je me
5595
aut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et
l’
écho de mes pas contre les murs des maisons mortes. Je me glisse dans
5596
. De nouveau le noir, et l’écho de mes pas contre
les
murs des maisons mortes. Je me glisse dans le hangar de la grosse voi
5597
re les murs des maisons mortes. Je me glisse dans
le
hangar de la grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’à ce que je renc
5598
es maisons mortes. Je me glisse dans le hangar de
la
grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’à ce que je rencontre l’ouver
5599
re et tâte ses flancs jusqu’à ce que je rencontre
l’
ouverture de la boîte aux lettres. De loin, le village apparaît fantas
5600
flancs jusqu’à ce que je rencontre l’ouverture de
la
boîte aux lettres. De loin, le village apparaît fantastique : les bec
5601
tre l’ouverture de la boîte aux lettres. De loin,
le
village apparaît fantastique : les becs de gaz, très bas, éclairent q
5602
ttres. De loin, le village apparaît fantastique :
les
becs de gaz, très bas, éclairent quelques façades blanches, carrés et
5603
arrés et rectangles détachés violemment au bas de
l’
énorme nuit. On ne voit que ces figures géométriques, dominées par le
5604
e voit que ces figures géométriques, dominées par
le
clocher à toit plat, et des fragments de silhouettes d’arbres devant
5605
, et des fragments de silhouettes d’arbres devant
les
maisons. La rumeur de la mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouve
5606
ments de silhouettes d’arbres devant les maisons.
La
rumeur de la mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouveau cet étran
5607
ouettes d’arbres devant les maisons. La rumeur de
la
mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouveau cet étrange écho des p
5608
nouveau cet étrange écho des pas, si proche dans
les
rues vides, et les mêmes chiens qui reviennent, et pas une âme. « Val
5609
e écho des pas, si proche dans les rues vides, et
les
mêmes chiens qui reviennent, et pas une âme. « Vallée de l’ombre de l
5610
hiens qui reviennent, et pas une âme. « Vallée de
l’
ombre de la mort… étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus que
5611
eviennent, et pas une âme. « Vallée de l’ombre de
la
mort… étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus que dans cette
5612
e de l’ombre de la mort… étranger et voyageur sur
la
terre… » Jamais plus que dans cette nuit. Fin de séjour à A… (Gard)
5613
Gard). — Tout est en place. Je garderai toutefois
le
plan d’aménagement et de décoration des trois chambres du premier éta
5614
ois chambres du premier étage, on ne sait jamais…
Les
vingt-deux pièces du dessus de cheminée ont été replacées au millimèt
5615
llimètre, dans une symétrie impeccable. Mais tout
l’
effet de notre labeur risque d’être détruit par une odieuse malice du
5616
deuxième un lourd sommier pour en faire un divan.
L’
escalier est étroit. La descente s’était opérée sans trop de mal lors
5617
er pour en faire un divan. L’escalier est étroit.
La
descente s’était opérée sans trop de mal lors de notre arrivée. Mais
5618
rs de notre arrivée. Mais nous n’avions pas prévu
la
remontée ! Épuisés par une demi-heure d’efforts haletants, qui n’ont
5619
’efforts haletants, qui n’ont abouti qu’à coincer
le
sommier au tournant, entre la balustrade et les parois de la cage d’e
5620
abouti qu’à coincer le sommier au tournant, entre
la
balustrade et les parois de la cage d’escalier — au surplus fortement
5621
er le sommier au tournant, entre la balustrade et
les
parois de la cage d’escalier — au surplus fortement rayées — nous avo
5622
au tournant, entre la balustrade et les parois de
la
cage d’escalier — au surplus fortement rayées — nous avons couru impl
5623
plus fortement rayées — nous avons couru implorer
l’
aide de Simard. « Ce cochon-là » refuse, prétextant une hernie ; sa fe
5624
sa jambe « coupée ». (Bonne occasion pourtant de
la
décrocher un peu pour toucher davantage à l’assurance !) Il a bien fa
5625
t de la décrocher un peu pour toucher davantage à
l’
assurance !) Il a bien fallu se rendre à l’évidence : ce sommier impla
5626
tage à l’assurance !) Il a bien fallu se rendre à
l’
évidence : ce sommier implacable restera dans l’escalier comme témoin
5627
à l’évidence : ce sommier implacable restera dans
l’
escalier comme témoin des bouleversements que nous avons infligés à la
5628
oin des bouleversements que nous avons infligés à
la
maison. Pas question d’aller quérir du renfort à A. Il faut encore bo
5629
ler quérir du renfort à A. Il faut encore boucler
les
valises, descendre mes caisses de livres à la gare, etc., et le train
5630
er les valises, descendre mes caisses de livres à
la
gare, etc., et le train part dans une heure. Quand la propriétaire re
5631
scendre mes caisses de livres à la gare, etc., et
le
train part dans une heure. Quand la propriétaire reviendra pour l’été
5632
are, etc., et le train part dans une heure. Quand
la
propriétaire reviendra pour l’été, elle se heurtera à ce sommier monu
5633
s une heure. Quand la propriétaire reviendra pour
l’
été, elle se heurtera à ce sommier monumental dans sa pose scandale et
5634
te des « gens » en général — quand je ne fais que
les
jauger d’un regard — et sympathie violente, « élan vers », dès que mo
5635
ement à un visage, au corps et aux vêtements, aux
mains
, à l’attitude distraite et vraie d’un être isolé près de moi. Je pren
5636
n visage, au corps et aux vêtements, aux mains, à
l’
attitude distraite et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends le
5637
e et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends
le
métro, malgré l’odeur de buanderie et ce relent de fauves de certains
5638
tre isolé près de moi. Je prends le métro, malgré
l’
odeur de buanderie et ce relent de fauves de certains parfums de femme
5639
garder des êtres et vivre un moment auprès d’eux,
le
temps de trois stations, le temps d’imaginer une rencontre, un échang
5640
moment auprès d’eux, le temps de trois stations,
le
temps d’imaginer une rencontre, un échange spontané, une de ces décou
5641
lescent — et sûrement ce serait bien autre chose…
La
femme descend sans se retourner ; l’homme déplie un journal que je n’
5642
autre chose… La femme descend sans se retourner ;
l’
homme déplie un journal que je n’aime pas, qu’il a peut-être acheté to
5643
is on se juge tout de même là-dessus… Je sors, je
pense
à autre chose, à quelque chose qui n’est pas d’ici. Et déjà je ne com
5644
plus pourquoi j’ai eu ce fort désir soudain, dans
le
métro, de tutoyer mes compagnons de route. Était-ce envie de donner o
5645
le maintenant que j’écris, que c’est profondément
le
même mouvement, l’amour. La même déception de l’amour, parce rien ne
5646
’écris, que c’est profondément le même mouvement,
l’
amour. La même déception de l’amour, parce rien ne s’est produit, rien
5647
ue c’est profondément le même mouvement, l’amour.
La
même déception de l’amour, parce rien ne s’est produit, rien ne peut
5648
le même mouvement, l’amour. La même déception de
l’
amour, parce rien ne s’est produit, rien ne peut se produire, pour tan
5649
es que nous tous. — Et alors, dira-t-on : « Faire
la
révolution ! » — Ce substitut, ce renvoi aux calendes de la Grande Co
5650
ion ! » — Ce substitut, ce renvoi aux calendes de
la
Grande Communication… Montparnasse. — Stupidité triste, parfois ins
5651
, « bagnoles », « Paris-Soir », « on se défend… »
La
grosse petite bonne qui tire sa robe à fleurs sur le quai désert du m
5652
grosse petite bonne qui tire sa robe à fleurs sur
le
quai désert du métro, enfin un être vrai. Conclusion. — S’occuper d
5653
uper des « petits-faits-vrais » vaut mieux que de
les
ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force
5654
faits-vrais » vaut mieux que de les ignorer. Mais
l’
excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on
5655
es ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à
les
ignorer avec force, une fois qu’on les a bien connus, dans leur réali
5656
Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer
avec
force, une fois qu’on les a bien connus, dans leur réalité sordide. U
5657
parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on
les
a bien connus, dans leur réalité sordide. Un petit fait vrai vaut plu
5658
me serait, par exemple, une grande idée embrassée
avec
force au mépris de soi-même et de l’utilité. Car elle peut devenir le
5659
embrassée avec force au mépris de soi-même et de
l’
utilité. Car elle peut devenir le fait dominateur. En vérité, il n’y a
5660
e soi-même et de l’utilité. Car elle peut devenir
le
fait dominateur. En vérité, il n’y a pas de faits grands ou petits en
5661
u près digne de ce nom, un fait qui commande tous
les
autres et qui est la mesure de tout. Quand tu l’auras connu et accept
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, un fait qui commande tous les autres et qui est
la
mesure de tout. Quand tu l’auras connu et accepté — tu es seul à pouv
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les autres et qui est la mesure de tout. Quand tu
l’
auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir le connaître — lève-toi
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u l’auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir
le
connaître — lève-toi et regarde les choses, les gestes incongrus et m
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seul à pouvoir le connaître — lève-toi et regarde
les
choses, les gestes incongrus et mécaniques des autres : écoute bien c
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ir le connaître — lève-toi et regarde les choses,
les
gestes incongrus et mécaniques des autres : écoute bien ce qu’ils dis
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s autres : écoute bien ce qu’ils disent à travers
les
paroles qu’ils croient dire : essaie de les comprendre quand ils se p
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avers les paroles qu’ils croient dire : essaie de
les
comprendre quand ils se plaignent ou quand ils rient : tu ne verras,
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qui est plus fort que toi. Car il est tout ce que
le
monde attend, attend de toute éternité pour aujourd’hui et de toi seu
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hez son beau-frère. Il était adversaire du prêt à
l’
intérêt, condamné par l’église primitive. Il donnait à qui voulait. Ap
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tait adversaire du prêt à l’intérêt, condamné par
l’
église primitive. Il donnait à qui voulait. Après sa mort, on s’aperçu
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on s’aperçut qu’il ne restait que 250 francs dans
le
coffre. aa. Rougemont Denis de, « Nouvelles pages du Journal d’un i