1
Max Brod,
Le
Royaume enchanté de l’amour (1936)d Aucun ouvrage ne se passe mieu
2
Max Brod, Le Royaume enchanté de
l’
amour (1936)d Aucun ouvrage ne se passe mieux de préface qu’un bon
3
passe mieux de préface qu’un bon roman. Pourtant
la
réussite de Max Brod n’est pas seulement de l’ordre romanesque : elle
4
nt la réussite de Max Brod n’est pas seulement de
l’
ordre romanesque : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour le so
5
e : elle est d’avoir mêlé à un beau drame d’amour
le
souvenir et davantage, la présence d’un être vrai, qui apporte à tout
6
à un beau drame d’amour le souvenir et davantage,
la
présence d’un être vrai, qui apporte à toute l’œuvre une émouvante pr
7
, la présence d’un être vrai, qui apporte à toute
l’
œuvre une émouvante précision. Le personnage de Garta, dont le lecteur
8
apporte à toute l’œuvre une émouvante précision.
Le
personnage de Garta, dont le lecteur ne tardera pas à voir qu’il figu
9
émouvante précision. Le personnage de Garta, dont
le
lecteur ne tardera pas à voir qu’il figure la conscience exigeante, e
10
ont le lecteur ne tardera pas à voir qu’il figure
la
conscience exigeante, et comme le juge incorruptible et amical du hér
11
ir qu’il figure la conscience exigeante, et comme
le
juge incorruptible et amical du héros et de son débat, ce personnage
12
: Franz Kafka. De cet esprit incomparable — qu’on
l’
entende aux deux sens du terme —, un seul ouvrage a paru en français22
13
ançais22. Ce serait assez pour donner une idée de
l’
ordre de grandeur spirituelle et de la singularité de l’œuvre entière.
14
une idée de l’ordre de grandeur spirituelle et de
la
singularité de l’œuvre entière. Mais bien peu en ont eu connaissance,
15
e de grandeur spirituelle et de la singularité de
l’
œuvre entière. Mais bien peu en ont eu connaissance, et moins encore s
16
réserve. Une sorte de stupéfaction respectueuse ;
le
mutisme de l’homme qui s’est senti touché dans une région de l’être d
17
orte de stupéfaction respectueuse ; le mutisme de
l’
homme qui s’est senti touché dans une région de l’être dont il ignorai
18
l’homme qui s’est senti touché dans une région de
l’
être dont il ignorait presque l’existence, et qui demande un peu de te
19
ans une région de l’être dont il ignorait presque
l’
existence, et qui demande un peu de temps pour formuler sa réaction, v
20
temps pour formuler sa réaction, voilà sans doute
l’
explication qu’il faut donner à l’espèce de résistance que rencontre K
21
oilà sans doute l’explication qu’il faut donner à
l’
espèce de résistance que rencontre Kafka parmi nous. Rien ne me paraît
22
Kafka parmi nous. Rien ne me paraît plus propre à
la
réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie roman
23
s. Rien ne me paraît plus propre à la réduire que
le
détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie romanesque, l’approc
24
réduire que le détour auquel a recouru Max Brod ;
la
biographie romanesque, l’approche vivante de la personne même de Kafk
25
el a recouru Max Brod ; la biographie romanesque,
l’
approche vivante de la personne même de Kafka dans ce qu’elle eut de q
26
; la biographie romanesque, l’approche vivante de
la
personne même de Kafka dans ce qu’elle eut de quotidien et de très si
27
ifice gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut
l’
ami le plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’est chargé de publi
28
gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Brod fut l’ami
le
plus intime de Franz Kafka. C’est lui qui s’est chargé de publier ses
29
grande part inédites, et que Kafka lui-même, par
l’
excès d’un scrupule à la fois artistique et religieux, souhaitait que
30
à la fois artistique et religieux, souhaitait que
l’
on détruisît. Max Brod s’est expliqué sur ce point délicat dans une no
31
liqué sur ce point délicat dans une note jointe à
l’
édition posthume du Procès : je doute que les lecteurs de ce livre éto
32
nte à l’édition posthume du Procès : je doute que
les
lecteurs de ce livre étonnant, le plus profond qu’on puisse imaginer,
33
: je doute que les lecteurs de ce livre étonnant,
le
plus profond qu’on puisse imaginer, aient le courage de le lui reproc
34
ant, le plus profond qu’on puisse imaginer, aient
le
courage de le lui reprocher. La piété même que voue Max Brod à la mém
35
rofond qu’on puisse imaginer, aient le courage de
le
lui reprocher. La piété même que voue Max Brod à la mémoire de son am
36
e imaginer, aient le courage de le lui reprocher.
La
piété même que voue Max Brod à la mémoire de son ami le retint d’entr
37
té même que voue Max Brod à la mémoire de son ami
le
retint d’entreprendre au lendemain de la mort de Kafka sa biographie
38
son ami le retint d’entreprendre au lendemain de
la
mort de Kafka sa biographie objective. Mais par une sorte de compensa
39
on tout inconsciente, c’est au désir de prolonger
le
merveilleux dialogue interrompu que l’auteur du Royaume enchanté attr
40
prolonger le merveilleux dialogue interrompu que
l’
auteur du Royaume enchanté attribue aujourd’hui l’inspiration de ce ro
41
l’auteur du Royaume enchanté attribue aujourd’hui
l’
inspiration de ce roman. Sachons-lui gré d’accorder par là même, à un
42
d’accorder par là même, à un public plus étendu,
l’
avance nécessaire, le gage tout humain dont certains lecteurs ont beso
43
me, à un public plus étendu, l’avance nécessaire,
le
gage tout humain dont certains lecteurs ont besoin, pour se risquer à
44
quer à découvrir un génie tellement « étranger »…
Le
récit de Max Brod est librement imaginé. Toutefois le personnage de G
45
écit de Max Brod est librement imaginé. Toutefois
le
personnage de Garta, ses propos, sa vision du monde, ses expériences
46
onde, ses expériences et préoccupations sociales,
les
lectures qu’il fait à son ami, la brève idylle de Weimar… tout cela c
47
ions sociales, les lectures qu’il fait à son ami,
la
brève idylle de Weimar… tout cela compose une description exacte de l
48
imar… tout cela compose une description exacte de
la
jeunesse de Kafka. Quelques faits et deux ou trois dates suffiront dé
49
aquit à Prague en 1883. Il passa dans cette ville
la
plus grande partie de sa vie. Docteur en droit, il travailla d’abord
50
les, puis d’une compagnie d’assurances ouvrières.
Le
travail manuel l’attirait ; il s’essaya dans un atelier de menuiserie
51
mpagnie d’assurances ouvrières. Le travail manuel
l’
attirait ; il s’essaya dans un atelier de menuiserie, puis dans une en
52
nombre de récits. Mais on trouva dans ses papiers
les
manuscrits presque complets de trois romans : Le Procès, Le Château,
53
les manuscrits presque complets de trois romans :
Le
Procès, Le Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde
54
its presque complets de trois romans : Le Procès,
Le
Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur le monde est d’une
55
rois romans : Le Procès, Le Château, et Amérique.
Le
regard qu’il y porte sur le monde est d’une précision proprement ango
56
Château, et Amérique. Le regard qu’il y porte sur
le
monde est d’une précision proprement angoissante. Il considère notre
57
ndent et masquent à peine une foncière absurdité.
L’
état d’extrême lucidité que suscite en nous cette vision ressemble à s
58
ar. Mais alors que tant de poètes s’efforçaient à
la
même époque de délirer méthodiquement, et de brouiller tous les plans
59
e de délirer méthodiquement, et de brouiller tous
les
plans du réel à seule fin de s’en évader — durant le temps de leur iv
60
plans du réel à seule fin de s’en évader — durant
le
temps de leur ivresse tout au moins — Kafka nous ramène sans cesse, a
61
sans cesse, avec une sorte d’humour inflexible, à
la
conscience la plus sobre de notre humaine condition. On dirait qu’il
62
ec une sorte d’humour inflexible, à la conscience
la
plus sobre de notre humaine condition. On dirait qu’il incite ses hér
63
dirait qu’il incite ses héros à pratiquer contre
la
vie bourgeoise une espèce de « grève perlée » : c’est à force de cons
64
orce de conscience, de naturel, d’exactitude dans
l’
exercice de leurs tâches banales et de leurs relations sociales, qu’il
65
ns sociales, qu’ils en découvrent et en dénoncent
l’
impossibilité foncière. À serrer de si près le réel, on le convainc ra
66
ent l’impossibilité foncière. À serrer de si près
le
réel, on le convainc rapidement de monstruosité et de scandale métaph
67
ibilité foncière. À serrer de si près le réel, on
le
convainc rapidement de monstruosité et de scandale métaphysique. Et d
68
Et dès lors tout devient étrangement signifiant,
le
fait divers s’agrandit peu à peu aux proportions d’une parabole de l’
69
andit peu à peu aux proportions d’une parabole de
l’
existence. Ou bien c’est le contraire : partant d’un fait inexplicable
70
ions d’une parabole de l’existence. Ou bien c’est
le
contraire : partant d’un fait inexplicable et monstrueux23 survenu da
71
un fait inexplicable et monstrueux23 survenu dans
la
vie de son héros, Kafka nous amène à penser que le détail de l’existe
72
a vie de son héros, Kafka nous amène à penser que
le
détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois
73
héros, Kafka nous amène à penser que le détail de
l’
existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois l’accompagne
74
à penser que le détail de l’existence banale, et
le
sentiment d’étrangeté qui parfois l’accompagne en sourdine s’explique
75
e banale, et le sentiment d’étrangeté qui parfois
l’
accompagne en sourdine s’expliquent de la manière la plus logique sitô
76
parfois l’accompagne en sourdine s’expliquent de
la
manière la plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial my
77
accompagne en sourdine s’expliquent de la manière
la
plus logique sitôt qu’on les rapporte à un fait initial mystérieux et
78
liquent de la manière la plus logique sitôt qu’on
les
rapporte à un fait initial mystérieux et d’apparence extravagante. De
79
rence extravagante. Derrière cette psychologie de
l’
angoisse quotidienne, l’on pressent chez Kafka des intentions morales,
80
ière cette psychologie de l’angoisse quotidienne,
l’
on pressent chez Kafka des intentions morales, une philosophie, et la
81
Kafka des intentions morales, une philosophie, et
la
recherche au moins d’une théologie. Tout cela, qui n’est pas exprimé
82
trahi par certaines bizarreries du récit, donne à
l’
œuvre une grandeur poétique, un pouvoir d’inquiéter presque morbide au
83
mais aussi, pour qui sait comprendre, salutaire…
Les
lectures favorites et les préoccupations sociales de « Garta », telle
84
comprendre, salutaire… Les lectures favorites et
les
préoccupations sociales de « Garta », telles que nous les décrit Max
85
ccupations sociales de « Garta », telles que nous
les
décrit Max Brod, aideront à deviner la nature assez rare du dessein s
86
que nous les décrit Max Brod, aideront à deviner
la
nature assez rare du dessein secret de Kafka. Sa passion de l’absolu
87
ez rare du dessein secret de Kafka. Sa passion de
l’
absolu moral et religieux, sa psychologie de l’angoisse dérivent sans
88
de l’absolu moral et religieux, sa psychologie de
l’
angoisse dérivent sans doute de Kierkegaard, qu’il fut l’un des premie
89
’utilité, d’éducation des forces spirituelles par
l’
activité pratique et sociale, volonté qui se manifeste tout au long de
90
este tout au long de son existence, et qui devait
l’
amener entre autres, à son projet de participation au jeune mouvement
91
sans doute assez pour faire entrevoir au lecteur
l’
arrière-plan et les prolongements de l’aventure du « vieux Pragois »,
92
pour faire entrevoir au lecteur l’arrière-plan et
les
prolongements de l’aventure du « vieux Pragois », héros non tout à fa
93
au lecteur l’arrière-plan et les prolongements de
l’
aventure du « vieux Pragois », héros non tout à fait imaginaire, lui a
94
ait imaginaire, lui aussi, du Royaume enchanté de
l’
amour. 22. Le Procès, roman traduit de l’allemand par A. Vialatte.
95
lui aussi, du Royaume enchanté de l’amour. 22.
Le
Procès, roman traduit de l’allemand par A. Vialatte. Deux autres réci
96
té de l’amour. 22. Le Procès, roman traduit de
l’
allemand par A. Vialatte. Deux autres récits de Kafka ont été publiés
97
. Deux autres récits de Kafka ont été publiés par
la
Nouvelle Revue française : La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par
98
t été publiés par la Nouvelle Revue française :
La
Métamorphose et Le Terrier. 23. Par exemple : la métamorphose subite
99
a Nouvelle Revue française : La Métamorphose et
Le
Terrier. 23. Par exemple : la métamorphose subite d’un jeune homme e
100
La Métamorphose et Le Terrier. 23. Par exemple :
la
métamorphose subite d’un jeune homme en une bête innommable et même i
101
une bête innommable et même indescriptible (dans
La
Métamorphose). Ou encore : l’inculpation inexplicable qui pèse sur le
102
ndescriptible (dans La Métamorphose). Ou encore :
l’
inculpation inexplicable qui pèse sur le héros du Procès. d. Rougemo
103
encore : l’inculpation inexplicable qui pèse sur
le
héros du Procès. d. Rougemont Denis de, Brod Max, « [Préface] Max B
104
ugemont Denis de, Brod Max, « [Préface] Max Brod,
Le
Royaume enchanté de l’amour », dans Le Royaume enchanté de l’amour,
105
Max, « [Préface] Max Brod, Le Royaume enchanté de
l’
amour », dans Le Royaume enchanté de l’amour, Paris, Édition « Je ser
106
Max Brod, Le Royaume enchanté de l’amour », dans
Le
Royaume enchanté de l’amour, Paris, Édition « Je sers », 1936, p. 9-1
107
chanté de l’amour », dans Le Royaume enchanté de
l’
amour, Paris, Édition « Je sers », 1936, p. 9-12.
108
Forme et transformation, ou
l’
acte selon Kierkegaard (janvier 1936)c « Toute mon activité d’auteu
109
Car on n’est pas chrétien, et même on ne peut pas
l’
être, mais il faut le devenir. Et le problème, alors, devient celui de
110
tien, et même on ne peut pas l’être, mais il faut
le
devenir. Et le problème, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire
111
n ne peut pas l’être, mais il faut le devenir. Et
le
problème, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire de la création
112
devenir. Et le problème, alors, devient celui de
l’
acte, c’est-à-dire de la création d’une possibilité nouvelle, sans pré
113
, alors, devient celui de l’acte, c’est-à-dire de
la
création d’une possibilité nouvelle, sans précédent. Y a-t-il des act
114
té nouvelle, sans précédent. Y a-t-il des actes ?
L’
homme d’aujourd’hui ne le croit pas. Il croit aux lois, et il se veut
115
nt. Y a-t-il des actes ? L’homme d’aujourd’hui ne
le
croit pas. Il croit aux lois, et il se veut déterminé. Or il l’est da
116
Il croit aux lois, et il se veut déterminé. Or il
l’
est dans la mesure exacte où il l’accepte ; mais dans cette mesure mêm
117
x lois, et il se veut déterminé. Or il l’est dans
la
mesure exacte où il l’accepte ; mais dans cette mesure même, il se pe
118
éterminé. Or il l’est dans la mesure exacte où il
l’
accepte ; mais dans cette mesure même, il se peut qu’il cesse d’être h
119
e même, il se peut qu’il cesse d’être humain. Car
l’
homme n’a d’existence proprement humaine que lorsqu’il participe à la
120
ence proprement humaine que lorsqu’il participe à
la
transformation du monde. Autrement, il est animal, et soumis à la for
121
n du monde. Autrement, il est animal, et soumis à
la
forme des choses, — à la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas
122
est animal, et soumis à la forme des choses, — à
la
commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à l’acte, c’est qu’ils n
123
la commune dégradation. Ceux qui ne croient pas à
l’
acte, c’est qu’ils ne connaissent plus aucun chemin. Comment marcher,
124
on appelle ainsi leur anxiété. En vérité, toutes
les
démonstrations savantes qu’on nous a faites depuis un siècle pour nou
125
s a faites depuis un siècle pour nous prouver que
l’
acte est impossible et que le tout de l’homme est soumis au calcul, to
126
our nous prouver que l’acte est impossible et que
le
tout de l’homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et
127
ouver que l’acte est impossible et que le tout de
l’
homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et des sociol
128
ciences et des sociologies établit à grands frais
l’
évidence du désespoir : l’homme moderne a perdu « le chemin ». Je sui
129
établit à grands frais l’évidence du désespoir :
l’
homme moderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et
130
évidence du désespoir : l’homme moderne a perdu «
le
chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1
131
: l’homme moderne a perdu « le chemin ». Je suis
le
chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le che
132
oderne a perdu « le chemin ». Je suis le chemin,
la
vérité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Chr
133
u « le chemin ». Je suis le chemin, la vérité et
la
vie, dit le Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vé
134
n ». Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit
le
Christ. 1. La vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce
135
chemin, la vérité et la vie, dit le Christ. 1.
La
vérité est le chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la
136
rité et la vie, dit le Christ. 1. La vérité est
le
chemin Christ est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la
137
rist. 1. La vérité est le chemin Christ est
la
Vérité dans ce sens qu’être la vérité est la seule explication vraie
138
min Christ est la Vérité dans ce sens qu’être
la
vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c
139
est la Vérité dans ce sens qu’être la vérité est
la
seule explication vraie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître
140
’être la vérité est la seule explication vraie de
la
vérité… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aur
141
est la seule explication vraie de la vérité… Être
la
vérité, c’est connaître la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu
142
aie de la vérité… Être la vérité, c’est connaître
la
vérité, et le Christ n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas
143
té… Être la vérité, c’est connaître la vérité, et
le
Christ n’aurait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été la vérité
144
tre la vérité, et le Christ n’aurait jamais connu
la
vérité s’il n’avait pas été la vérité ; et nul homme ne connaît davan
145
urait jamais connu la vérité s’il n’avait pas été
la
vérité ; et nul homme ne connaît davantage de vérité qu’il n’en incar
146
ntage de vérité qu’il n’en incarne.3 Voici donc
le
mystère : s’il n’y a pas de chemin, nous ne pouvons marcher, mais si
147
si nous ne marchons pas, il n’y a pas de chemin.
La
foi au Christ nous permet seule de franchir ce cercle enchanté où nou
148
de franchir ce cercle enchanté où nous maintient
l’
argument du démon — le serpent qui se mord la queue. La foi au Christ
149
enchanté où nous maintient l’argument du démon —
le
serpent qui se mord la queue. La foi au Christ est la condition néces
150
ient l’argument du démon — le serpent qui se mord
la
queue. La foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de
151
ument du démon — le serpent qui se mord la queue.
La
foi au Christ est la condition nécessaire et suffisante de tout acte
152
erpent qui se mord la queue. La foi au Christ est
la
condition nécessaire et suffisante de tout acte véritable, de toute m
153
marche, de toute création, de toute victoire sur
la
Nécessité. « Je suis le chemin ». Mais un chemin n’est un chemin que
154
on, de toute victoire sur la Nécessité. « Je suis
le
chemin ». Mais un chemin n’est un chemin que si on y marche4. Sinon i
155
inon il n’est qu’un point de vue ; ou bien encore
le
lieu d’un pur possible, et sur ces lieux règne le désespoir. Il nous
156
le lieu d’un pur possible, et sur ces lieux règne
le
désespoir. Il nous faut donc agir, si nous voulons la vérité, agir en
157
ésespoir. Il nous faut donc agir, si nous voulons
la
vérité, agir en vérité, c’est-à-dire agir dans le Christ. La possibil
158
la vérité, agir en vérité, c’est-à-dire agir dans
le
Christ. La possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y
159
agir en vérité, c’est-à-dire agir dans le Christ.
La
possibilité de l’acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc auc
160
est-à-dire agir dans le Christ. La possibilité de
l’
acte est identique à sa nécessité. Il n’y a donc aucun acte possible,
161
possible, aucun acte vrai et vivant en dehors de
la
foi au Christ. Mais croire au Christ, c’est croire au Paradoxe de l’i
162
ais croire au Christ, c’est croire au Paradoxe de
l’
incarnation, c’est croire que Dieu a revêtu la forme de ce monde, c’es
163
de l’incarnation, c’est croire que Dieu a revêtu
la
forme de ce monde, c’est croire donc que cette forme peut être transf
164
transformée. — à vrai dire, en vertu du paradoxe
le
plus fou. Nous ne pouvons agir « qu’en vertu de l’absurde » ; mais ce
165
e plus fou. Nous ne pouvons agir « qu’en vertu de
l’
absurde » ; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alors les règles,
166
; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alors
les
règles, les morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même
167
seul donne un sens à nos vies. Alors les règles,
les
morales et les lois qui nous disaient d’agir dans le même temps qu’el
168
sens à nos vies. Alors les règles, les morales et
les
lois qui nous disaient d’agir dans le même temps qu’elles nous privai
169
morales et les lois qui nous disaient d’agir dans
le
même temps qu’elles nous privaient de tout pouvoir, s’évanouissent et
170
, s’évanouissent et meurent aux pages des livres.
L’
action de l’homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les
171
sent et meurent aux pages des livres. L’action de
l’
homme devient aussi la vérité ; et la norme de toutes les normes. Au p
172
ges des livres. L’action de l’homme devient aussi
la
vérité ; et la norme de toutes les normes. Au premier pas que nous fa
173
L’action de l’homme devient aussi la vérité ; et
la
norme de toutes les normes. Au premier pas que nous faisons dans notr
174
e devient aussi la vérité ; et la norme de toutes
les
normes. Au premier pas que nous faisons dans notre nuit, voici que le
175
r pas que nous faisons dans notre nuit, voici que
le
chemin s’éclaire et que les perspectives se dégagent. Et nous allons
176
notre nuit, voici que le chemin s’éclaire et que
les
perspectives se dégagent. Et nous allons connaître maintenant que seu
177
ent. Et nous allons connaître maintenant que seul
l’
acte de foi est création, transformation, nouveauté pure dans le monde
178
est création, transformation, nouveauté pure dans
le
monde, vocation et personne éternelle, prophétie de l’éternité qui vi
179
nde, vocation et personne éternelle, prophétie de
l’
éternité qui vient à nous. 2. Il n’est d’action que prophétique
180
ophétique Qu’est-ce que prophétiser sinon dire
la
Parole qui détermine notre avenir ? Mais la Parole n’est dite que dan
181
dire la Parole qui détermine notre avenir ? Mais
la
Parole n’est dite que dans la foi, la foi n’existe que dans l’acte, e
182
notre avenir ? Mais la Parole n’est dite que dans
la
foi, la foi n’existe que dans l’acte, et cet acte devient alors notre
183
enir ? Mais la Parole n’est dite que dans la foi,
la
foi n’existe que dans l’acte, et cet acte devient alors notre chemin
184
st dite que dans la foi, la foi n’existe que dans
l’
acte, et cet acte devient alors notre chemin et notre loi. Ainsi nous
185
e pouvons connaître que ce que nous prophétisons.
Le
chrétien marche dans la nuit en créant sa lumière et son chemin5, lum
186
ce que nous prophétisons. Le chrétien marche dans
la
nuit en créant sa lumière et son chemin5, lumière qui n’est pas sa lu
187
min toujours imprévisible, certitude que devinent
les
pas, chemin qui se dérobe au doute et à l’orgueil, mais que parfois l
188
inent les pas, chemin qui se dérobe au doute et à
l’
orgueil, mais que parfois la prophétie fait briller devant lui comme u
189
dérobe au doute et à l’orgueil, mais que parfois
la
prophétie fait briller devant lui comme un éclair. « Sachez qu’à l’or
190
briller devant lui comme un éclair. « Sachez qu’à
l’
origine, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes les créatures,
191
e, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes
les
créatures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et
192
s un dialogue de Kassner6 — toutes les créatures,
le
Soleil, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres pa
193
ue de Kassner6 — toutes les créatures, le Soleil,
la
Terre, la Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et
194
ner6 — toutes les créatures, le Soleil, la Terre,
la
Lune, les plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisa
195
utes les créatures, le Soleil, la Terre, la Lune,
les
plantes, les animaux et les pierres parlaient et prophétisaient, pare
196
tures, le Soleil, la Terre, la Lune, les plantes,
les
animaux et les pierres parlaient et prophétisaient, pareils aux proph
197
l, la Terre, la Lune, les plantes, les animaux et
les
pierres parlaient et prophétisaient, pareils aux prophètes. C’est de
198
qui dans sa fin possède son commencement ». Mais
l’
homme déchu de son origine éternelle a perdu la vision de sa fin. Le v
199
is l’homme déchu de son origine éternelle a perdu
la
vision de sa fin. Le voici prisonnier des formes et des nombres, escl
200
on origine éternelle a perdu la vision de sa fin.
Le
voici prisonnier des formes et des nombres, esclave des lois d’un mon
201
un monde sur lequel il devrait régner. Seule peut
l’
en délivrer la Parole prophétique qui lui advient comme un appel dans
202
equel il devrait régner. Seule peut l’en délivrer
la
Parole prophétique qui lui advient comme un appel dans les ténèbres.
203
e prophétique qui lui advient comme un appel dans
les
ténèbres. Certains reçoivent l’ordre de parler, et c’est là leur acti
204
me un appel dans les ténèbres. Certains reçoivent
l’
ordre de parler, et c’est là leur action, leur prophétie et leur salut
205
tion, leur prophétie et leur salut. Cependant que
les
hommes les frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, d
206
prophétie et leur salut. Cependant que les hommes
les
frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la voca
207
salut. Cependant que les hommes les frappent sur
la
bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont la vocation prophétique
208
la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants, dont
la
vocation prophétique pareille à celle des hommes de Dieu qui se lèven
209
lle à celle des hommes de Dieu qui se lèvent sous
l’
Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui les conduira au marty
210
lèvent sous l’Ancienne Alliance, se confond avec
la
parole qui les conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, l
211
’Ancienne Alliance, se confond avec la parole qui
les
conduira au martyre. La Parole dite est leur chemin, leur vérité et l
212
nfond avec la parole qui les conduira au martyre.
La
Parole dite est leur chemin, leur vérité et leur vie dans ce monde ;
213
vérité et leur vie dans ce monde ; ils meurent de
l’
avoir dite, et n’ont pas d’autre tâche7. Le chemin est imprévisible ;
214
ent de l’avoir dite, et n’ont pas d’autre tâche7.
Le
chemin est imprévisible ; le nôtre, disons-nous, n’est pas celui de c
215
nous, n’est pas celui de ces prophètes. Cependant
la
question demeure : comment agir, et comment transformer, c’est-à-dire
216
comment transformer, c’est-à-dire comment obéir à
la
Parole qui prophétise ? Le chemin est imprévisible. Ce que nous conna
217
à-dire comment obéir à la Parole qui prophétise ?
Le
chemin est imprévisible. Ce que nous connaissons, c’est pourtant son
218
connaissons, c’est pourtant son point de départ.
Le
chemin commence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ordre q
219
mence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à
l’
ordre qu’il reçoit de Dieu, — n’importe où et n’importe qui, à n’impor
220
n’importe quelle règle d’action chrétienne, — ose
la
mettre en pratique. L’action que tu introduiras ainsi dans la réalité
221
d’action chrétienne, — ose la mettre en pratique.
L’
action que tu introduiras ainsi dans la réalité portera la marque de l
222
pratique. L’action que tu introduiras ainsi dans
la
réalité portera la marque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qu
223
que tu introduiras ainsi dans la réalité portera
la
marque de l’absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement
224
duiras ainsi dans la réalité portera la marque de
l’
absolu : c’est la marque de tout ce qui est véritablement chrétien (Jo
225
la réalité portera la marque de l’absolu : c’est
la
marque de tout ce qui est véritablement chrétien (Journal). Vends ton
226
ritablement chrétien (Journal). Vends ton bien et
le
donne aux pauvres, par exemple, ou si tu ne possèdes pas de bien, ces
227
si tu ne possèdes pas de bien, cesse d’en désirer
la
possession, et vis comme un chrétien : au jour le jour, sans assuranc
228
la possession, et vis comme un chrétien : au jour
le
jour, sans assurances et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans l
229
r le jour, sans assurances et sans préparation, à
la
grâce de Dieu, dans la confiance et l’inquiétude, — on pourrait dire,
230
ces et sans préparation, à la grâce de Dieu, dans
la
confiance et l’inquiétude, — on pourrait dire, dans une sorte d’humou
231
aration, à la grâce de Dieu, dans la confiance et
l’
inquiétude, — on pourrait dire, dans une sorte d’humour — dans l’avent
232
on pourrait dire, dans une sorte d’humour — dans
l’
aventure de celui que rien ne protège et la prudence de celui qui écou
233
— dans l’aventure de celui que rien ne protège et
la
prudence de celui qui écoute, dans le tourment et dans la joie d’une
234
protège et la prudence de celui qui écoute, dans
le
tourment et dans la joie d’une découverte quotidienne du chemin, — to
235
nce de celui qui écoute, dans le tourment et dans
la
joie d’une découverte quotidienne du chemin, — ton chemin, sur lequel
236
on chemin, sur lequel tu es seul, parce qu’il est
la
parole de ta vie, sa mesure et sa vocation, son risque à chaque insta
237
secret du risque. 3. Nous n’avons pas à suivre
le
chemin, mais bien à l’inventer à chaque pas Tant que nous considér
238
Nous n’avons pas à suivre le chemin, mais bien à
l’
inventer à chaque pas Tant que nous considérons le Christ avec des
239
nventer à chaque pas Tant que nous considérons
le
Christ avec des yeux de moralistes, comme une personnalité morale de
240
premier plan qu’il ne resterait plus qu’à imiter,
l’
acte demeure un pur possible, un modèle d’acte, une abstraction, c’est
241
sans pour autant nous transformer, et c’est bien
la
définition de « l’inactuel ». Se conformer à ce pieux idéal, non seul
242
ous transformer, et c’est bien la définition de «
l’
inactuel ». Se conformer à ce pieux idéal, non seulement ce n’est poin
243
oint agir, non seulement c’est limiter par avance
le
rôle de la foi, c’est-à-dire refuser la foi, mais c’est peut-être sim
244
non seulement c’est limiter par avance le rôle de
la
foi, c’est-à-dire refuser la foi, mais c’est peut-être simplement « s
245
ar avance le rôle de la foi, c’est-à-dire refuser
la
foi, mais c’est peut-être simplement « singer » un modèle flatteur et
246
flatteur et rassurant. Et pourquoi ? Parce que «
le
chemin » est invisible tant qu’on n’y est pas engagé. Parce que c’est
247
y est pas engagé. Parce que c’est un blasphème de
l’
homme pieux, du moraliste, que de prétendre imiter le modèle que ses y
248
omme pieux, du moraliste, que de prétendre imiter
le
modèle que ses yeux voient et que sa chair perçoit (à la lecture des
249
le que ses yeux voient et que sa chair perçoit (à
la
lecture des évangiles par exemple) au lieu d’écouter l’ordre, au lieu
250
ture des évangiles par exemple) au lieu d’écouter
l’
ordre, au lieu de croire et de faire un pas dans la nuit, sur ce « che
251
’ordre, au lieu de croire et de faire un pas dans
la
nuit, sur ce « chemin » qui est le Christ présent. Il y a abîmes entr
252
re un pas dans la nuit, sur ce « chemin » qui est
le
Christ présent. Il y a abîmes entre ces deux exigences : l’abîme entr
253
présent. Il y a abîmes entre ces deux exigences :
l’
abîme entre les mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation
254
a abîmes entre ces deux exigences : l’abîme entre
les
mérites humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte, l’a
255
exigences : l’abîme entre les mérites humains et
la
grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre la religion
256
: l’abîme entre les mérites humains et la grâce,
l’
abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi
257
re les mérites humains et la grâce, l’abîme entre
l’
imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le te
258
humains et la grâce, l’abîme entre l’imitation et
l’
acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instan
259
et la grâce, l’abîme entre l’imitation et l’acte,
l’
abîme entre la religion et la foi — entre le temps et l’instant créate
260
’abîme entre l’imitation et l’acte, l’abîme entre
la
religion et la foi — entre le temps et l’instant créateur —, entre la
261
imitation et l’acte, l’abîme entre la religion et
la
foi — entre le temps et l’instant créateur —, entre la forme et la tr
262
acte, l’abîme entre la religion et la foi — entre
le
temps et l’instant créateur —, entre la forme et la transformation. I
263
e entre la religion et la foi — entre le temps et
l’
instant créateur —, entre la forme et la transformation. Il ne faut pa
264
i — entre le temps et l’instant créateur —, entre
la
forme et la transformation. Il ne faut pas commencer par l’imitation,
265
temps et l’instant créateur —, entre la forme et
la
transformation. Il ne faut pas commencer par l’imitation, mais par la
266
t la transformation. Il ne faut pas commencer par
l’
imitation, mais par la grâce. L’imitation suivra comme un fruit de la
267
l ne faut pas commencer par l’imitation, mais par
la
grâce. L’imitation suivra comme un fruit de la reconnaissance… Tout c
268
pas commencer par l’imitation, mais par la grâce.
L’
imitation suivra comme un fruit de la reconnaissance… Tout commence pa
269
ar la grâce. L’imitation suivra comme un fruit de
la
reconnaissance… Tout commence par la joie d’être aimé — et ensuite vi
270
un fruit de la reconnaissance… Tout commence par
la
joie d’être aimé — et ensuite vient l’effort de plaire, constamment e
271
mmence par la joie d’être aimé — et ensuite vient
l’
effort de plaire, constamment exalté par la certitude que l’on est aim
272
vient l’effort de plaire, constamment exalté par
la
certitude que l’on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8
273
e plaire, constamment exalté par la certitude que
l’
on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8. Parce qu’il est
274
ertitude que l’on est aimé maintenant, et même si
l’
effort échoue »8. Parce qu’il est aimé maintenant, aller maintenant, p
275
qu’il est aimé maintenant, aller maintenant, par
la
foi, sur ce chemin qui commence à ses pas, — c’est là le destin du ch
276
sur ce chemin qui commence à ses pas, — c’est là
le
destin du chrétien, c’est son « impossible » destin, le seul acte pos
277
tin du chrétien, c’est son « impossible » destin,
le
seul acte possible à l’homme. Et c’est l’acte que Dieu initie. 4.
278
on « impossible » destin, le seul acte possible à
l’
homme. Et c’est l’acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’absolu
279
destin, le seul acte possible à l’homme. Et c’est
l’
acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à l’absolu, il n’existe qu’u
280
est l’acte que Dieu initie. 4. « Par rapport à
l’
absolu, il n’existe qu’un seul temps : le présent »9 Nous ne conna
281
apport à l’absolu, il n’existe qu’un seul temps :
le
présent »9 Nous ne connaissons rien du Christ, du « chemin », en
282
ssons rien du Christ, du « chemin », en dehors de
l’
acte de foi qui, supprimant toute distance historique, nous rend conte
283
nous rend contemporains de Son incarnation. Ainsi
l’
acte de foi détruit le temps où il a lieu mais comme la plénitude détr
284
s de Son incarnation. Ainsi l’acte de foi détruit
le
temps où il a lieu mais comme la plénitude détruit le relatif. Il est
285
e de foi détruit le temps où il a lieu mais comme
la
plénitude détruit le relatif. Il est ce contact impensable de l’étern
286
emps où il a lieu mais comme la plénitude détruit
le
relatif. Il est ce contact impensable de l’éternité avec notre durée,
287
truit le relatif. Il est ce contact impensable de
l’
éternité avec notre durée, et l’on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’e
288
act impensable de l’éternité avec notre durée, et
l’
on n’en peut n’en dire sinon qu’il s’est produit, et qu’il peut se pro
289
re. « Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là
la
santé de la foi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans la foi
290
eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de
la
foi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans la foi, il n’y aur
291
t là la santé de la foi »10. Si nous vivions dans
l’
obéissance et dans la foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais le Jo
292
oi »10. Si nous vivions dans l’obéissance et dans
la
foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais le Jour éternel de la prés
293
ans la foi, il n’y aurait ni passé ni futur, mais
le
Jour éternel de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le mon
294
aurait ni passé ni futur, mais le Jour éternel de
la
présence à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et l’unité du ge
295
de la présence à Dieu et à soi-même régnerait sur
le
monde et l’unité du genre humain. Si nous vivons dans l’obéissance et
296
ce à Dieu et à soi-même régnerait sur le monde et
l’
unité du genre humain. Si nous vivons dans l’obéissance et dans la foi
297
e et l’unité du genre humain. Si nous vivons dans
l’
obéissance et dans la foi, l’histoire s’arrêterait comme l’Aspiration
298
humain. Si nous vivons dans l’obéissance et dans
la
foi, l’histoire s’arrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par
299
Si nous vivons dans l’obéissance et dans la foi,
l’
histoire s’arrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par la beaut
300
nce et dans la foi, l’histoire s’arrêterait comme
l’
Aspiration d’un homme saisi par la beauté, et le temps immobile s’abîm
301
rrêterait comme l’Aspiration d’un homme saisi par
la
beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans l’amen éternel. Æternit
302
e l’Aspiration d’un homme saisi par la beauté, et
le
temps immobile s’abîmerait dans l’amen éternel. Æternitas non est tem
303
la beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans
l’
amen éternel. Æternitas non est temporis successio sine fine, sed nunc
304
est temporis successio sine fine, sed nunc stans.
L’
éternité a marché sur la terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais n
305
ine fine, sed nunc stans. L’éternité a marché sur
la
terre : ainsi le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’étern
306
c stans. L’éternité a marché sur la terre : ainsi
le
Christ est le chemin. Mais nous avons refusé l’éternel et nous lui pr
307
rnité a marché sur la terre : ainsi le Christ est
le
chemin. Mais nous avons refusé l’éternel et nous lui préférons nos vi
308
i le Christ est le chemin. Mais nous avons refusé
l’
éternel et nous lui préférons nos vies : c’est pourquoi nous vivons da
309
férons nos vies : c’est pourquoi nous vivons dans
l’
Histoire, et dans l’absence, ou dans la nostalgie des temps qui vienne
310
est pourquoi nous vivons dans l’Histoire, et dans
l’
absence, ou dans la nostalgie des temps qui viennent ; c’est pourquoi
311
ivons dans l’Histoire, et dans l’absence, ou dans
la
nostalgie des temps qui viennent ; c’est pourquoi nous n’avons plus d
312
; c’est pourquoi nous n’avons plus d’être que par
la
foi, « substance des choses espérées », et c’est pourquoi la Parole,
313
ubstance des choses espérées », et c’est pourquoi
la
Parole, parmi nous, n’est que promesse et vigilante prophétie de l’in
314
ous, n’est que promesse et vigilante prophétie de
l’
invisible. De Séir, une voix crie au prophète11 : « Sentinelle, que di
315
crie au prophète11 : « Sentinelle, que dis-tu de
la
nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu
316
que dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de
la
nuit ? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi !
317
e la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? —
La
sentinelle a répondu : Le matin vient, et la nuit aussi ! Si vous vou
318
e dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu :
Le
matin vient, et la nuit aussi ! Si vous voulez interroger, interrogez
319
? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et
la
nuit aussi ! Si vous voulez interroger, interrogez ; convertissez-vou
320
er, interrogez ; convertissez-vous et revenez ! »
La
forme du monde est durée, et c’est la forme du péché, du refus de l’i
321
revenez ! » La forme du monde est durée, et c’est
la
forme du péché, du refus de l’instant éternel12, — le temps, la succe
322
st durée, et c’est la forme du péché, du refus de
l’
instant éternel12, — le temps, la succession et le désir. C’est le ret
323
orme du péché, du refus de l’instant éternel12, —
le
temps, la succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le ret
324
ché, du refus de l’instant éternel12, — le temps,
la
succession et le désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Di
325
l’instant éternel12, — le temps, la succession et
le
désir. C’est le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le dout
326
l12, — le temps, la succession et le désir. C’est
le
retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpos
327
ps, la succession et le désir. C’est le retard de
l’
acte et le retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le sa
328
cession et le désir. C’est le retard de l’acte et
le
retrait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et le
329
le retard de l’acte et le retrait de Dieu, c’est
le
doute qui s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est la lâchet
330
ait de Dieu, c’est le doute qui s’interpose entre
le
savoir et le faire, et c’est la lâcheté de l’homme qui se repose sur
331
c’est le doute qui s’interpose entre le savoir et
le
faire, et c’est la lâcheté de l’homme qui se repose sur ses œuvres et
332
s’interpose entre le savoir et le faire, et c’est
la
lâcheté de l’homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son
333
tre le savoir et le faire, et c’est la lâcheté de
l’
homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec
334
té de l’homme qui se repose sur ses œuvres et qui
les
juge : son alliance avec le serpent. De quelles étranges et secrètes
335
ur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec
le
serpent. De quelles étranges et secrètes façons le temps est lié au p
336
e serpent. De quelles étranges et secrètes façons
le
temps est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de la
337
ges et secrètes façons le temps est lié au péché,
le
pécheur seul le sait, dans l’instant de la foi, où par grâce il peut
338
façons le temps est lié au péché, le pécheur seul
le
sait, dans l’instant de la foi, où par grâce il peut rompre ce lien.
339
s est lié au péché, le pécheur seul le sait, dans
l’
instant de la foi, où par grâce il peut rompre ce lien. « Si vous voul
340
péché, le pécheur seul le sait, dans l’instant de
la
foi, où par grâce il peut rompre ce lien. « Si vous voulez interroger
341
« Si vous voulez interroger, interrogez ! », mais
la
réponse est : « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte
342
, mais la réponse est : « Convertissez-vous ! » À
la
lumière jaillie de l’acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ;
343
: « Convertissez-vous ! » À la lumière jaillie de
l’
acte de la foi, le mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau
344
tissez-vous ! » À la lumière jaillie de l’acte de
la
foi, le mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau prend son
345
ous ! » À la lumière jaillie de l’acte de la foi,
le
mystère du temps se dévoile ; mais un temps nouveau prend son cours,
346
et sa mesure est plus mystérieuse encore. Voici :
le
pécheur pardonné vit dans le temps comme à contre-courant de sa durée
347
euse encore. Voici : le pécheur pardonné vit dans
le
temps comme à contre-courant de sa durée, vit d’acte en acte. Et son
348
rrait dire : sa patience. Car il se tient où Dieu
l’
a mis, et ce n’est plus une dérive. Il vit dans la forme du monde, mai
349
l’a mis, et ce n’est plus une dérive. Il vit dans
la
forme du monde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de la « vie
350
Il vit dans la forme du monde, mais il est ce qui
la
transforme. Vertige de la « vie chrétienne », cette histoire de Dieu
351
nde, mais il est ce qui la transforme. Vertige de
la
« vie chrétienne », cette histoire de Dieu dans le temps, cette histo
352
a « vie chrétienne », cette histoire de Dieu dans
le
temps, cette histoire de l’éternité ! « Il suffit d’un courage pureme
353
histoire de Dieu dans le temps, cette histoire de
l’
éternité ! « Il suffit d’un courage purement humain pour renoncer le t
354
suffit d’un courage purement humain pour renoncer
le
temps afin de gagner l’éternité : car je la gagne et ne puis plus de
355
ment humain pour renoncer le temps afin de gagner
l’
éternité : car je la gagne et ne puis plus de toute éternité la renonc
356
oncer le temps afin de gagner l’éternité : car je
la
gagne et ne puis plus de toute éternité la renoncer ; et c’est le par
357
car je la gagne et ne puis plus de toute éternité
la
renoncer ; et c’est le paradoxe ; mais il faut un courage paradoxal e
358
uis plus de toute éternité la renoncer ; et c’est
le
paradoxe ; mais il faut un courage paradoxal et humble pour embrasser
359
aut un courage paradoxal et humble pour embrasser
le
temps en vertu de l’absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Pa
360
xal et humble pour embrasser le temps en vertu de
l’
absurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par la foi Abraham ne p
361
vertu de l’absurde 13. Et ce courage est celui de
la
foi. Par la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’ab
362
bsurde 13. Et ce courage est celui de la foi. Par
la
foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord qu’il le
363
la foi Abraham ne perdit point Isaac ; c’est par
la
foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissa
364
rdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord qu’il
le
reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissance, initiation Le
365
’est par la foi d’abord qu’il le reçut »14. 5.
Le
temps de l’acte est renaissance, initiation Les deux moments réels
366
foi d’abord qu’il le reçut »14. 5. Le temps de
l’
acte est renaissance, initiation Les deux moments réels d’une vie d
367
Le temps de l’acte est renaissance, initiation
Les
deux moments réels d’une vie d’homme, s’il est vrai que Dieu Seul est
368
me, s’il est vrai que Dieu Seul est réel, ce sont
la
naissance et la mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la n
369
i que Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et
la
mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et la m
370
mort, parce qu’ils sont des actes de Dieu. Entre
la
naissance et la mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant
371
ils sont des actes de Dieu. Entre la naissance et
la
mort — ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de la durée : en
372
Entre la naissance et la mort — ou plutôt puisque
l’
acte est à contre-courant de la durée : entre la mort et la naissance
373
ou plutôt puisque l’acte est à contre-courant de
la
durée : entre la mort et la naissance — toute la réalité de l’homme e
374
e l’acte est à contre-courant de la durée : entre
la
mort et la naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte.
375
t à contre-courant de la durée : entre la mort et
la
naissance — toute la réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte
376
la durée : entre la mort et la naissance — toute
la
réalité de l’homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tensio
377
tre la mort et la naissance — toute la réalité de
l’
homme est dans son acte. Tout acte est Passage et tension, — passage d
378
e. Tout acte est Passage et tension, — passage de
la
mort à la vie, tension entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire
379
te est Passage et tension, — passage de la mort à
la
vie, tension entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire de la Paro
380
entre ce qui résiste et ce qui crée, victoire de
la
Parole sur la chair, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la
381
résiste et ce qui crée, victoire de la Parole sur
la
chair, autorité de la personne sur l’anarchie et sur la loi individue
382
, victoire de la Parole sur la chair, autorité de
la
personne sur l’anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici qu’on t
383
Parole sur la chair, autorité de la personne sur
l’
anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici qu’on touche au mystère
384
ir, autorité de la personne sur l’anarchie et sur
la
loi individuelle. C’est ici qu’on touche au mystère, sans lequel tout
385
e, sans lequel tout serait absurde : acte détruit
le
temps, puisqu’il est dans le même instant et la mort et la vie des êt
386
surde : acte détruit le temps, puisqu’il est dans
le
même instant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existenc
387
t le temps, puisqu’il est dans le même instant et
la
mort et la vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant
388
puisqu’il est dans le même instant et la mort et
la
vie des êtres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant le temps,
389
ant et la mort et la vie des êtres qu’il promet à
l’
existence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le rédime puisqu
390
tres qu’il promet à l’existence ; mais détruisant
le
temps, il le recrée et le rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un
391
omet à l’existence ; mais détruisant le temps, il
le
recrée et le rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en le
392
tence ; mais détruisant le temps, il le recrée et
le
rédime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en le liant au dest
393
ime puisqu’il lui rend une Mesure et un rythme en
le
liant au destin personnel. Ainsi l’acte absolu serait création absolu
394
un rythme en le liant au destin personnel. Ainsi
l’
acte absolu serait création absolue, mais un acte de l’homme n’est jam
395
e absolu serait création absolue, mais un acte de
l’
homme n’est jamais qu’une rédemption. Distinction de théologien, et qu
396
. Distinction de théologien, et qui veut prévenir
l’
orgueil. Mais la vision de celui qui agit n’est point un jugement des
397
théologien, et qui veut prévenir l’orgueil. Mais
la
vision de celui qui agit n’est point un jugement des résultats, — des
398
elle n’est pas davantage appréciation des causes.
L’
acte n’est jamais conséquence, il est toujours initiation. La vision d
399
t jamais conséquence, il est toujours initiation.
La
vision de celui qui agit est tout entière absorbée par l’instant, par
400
n de celui qui agit est tout entière absorbée par
l’
instant, par le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel.
401
agit est tout entière absorbée par l’instant, par
le
passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par le réel. « Celui qui doi
402
r le passage de ce qui meurt à ce qui nait, — par
le
réel. « Celui qui doit agir, s’il veut juger de soi selon le succès q
403
Celui qui doit agir, s’il veut juger de soi selon
le
succès qu’il remporte, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si
404
e, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si
le
succès pouvait réjouir le monde entier, il ne sert de rien au héros ;
405
n entreprendre. Même si le succès pouvait réjouir
le
monde entier, il ne sert de rien au héros ; car le héros n’a connu so
406
e monde entier, il ne sert de rien au héros ; car
le
héros n’a connu son succès que lorsque tout était fini ; et ce n’est
407
e lorsque tout était fini ; et ce n’est point par
le
succès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15. Le temps de l’ac
408
cès qu’il fut héros, mais par son entreprise »15.
Le
temps de l’acte vient s’inscrire sur les traits du visage héroïque. D
409
t héros, mais par son entreprise »15. Le temps de
l’
acte vient s’inscrire sur les traits du visage héroïque. Dans cette ch
410
rise »15. Le temps de l’acte vient s’inscrire sur
les
traits du visage héroïque. Dans cette chair qui doit vieillir, la ten
411
age héroïque. Dans cette chair qui doit vieillir,
la
tension de la mort et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’es
412
Dans cette chair qui doit vieillir, la tension de
la
mort et de la vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que la pe
413
ir qui doit vieillir, la tension de la mort et de
la
vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que la personne ? C’est
414
vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce que
la
personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vision contre so
415
s victorieuses. Qu’est-ce que la personne ? C’est
la
vision et le visage du héros, sa vision contre son visage, sa vision
416
s. Qu’est-ce que la personne ? C’est la vision et
le
visage du héros, sa vision contre son visage, sa vision qui crée son
417
contre son visage, sa vision qui crée son visage.
Le
visage appartient au temps, mais la vision à la parole dont elle proc
418
e son visage. Le visage appartient au temps, mais
la
vision à la parole dont elle procède, et si la face d’un homme est be
419
. Le visage appartient au temps, mais la vision à
la
parole dont elle procède, et si la face d’un homme est belle, c’est p
420
is la vision à la parole dont elle procède, et si
la
face d’un homme est belle, c’est parce qu’elle est un acte et un dest
421
qu’elle est un acte et un destin, une initiale de
l’
histoire, une effigie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de l’
422
estin, une initiale de l’histoire, une effigie de
la
Parole créatrice. 6. Le contraire de l’acte, c’est le désespoir
423
stoire, une effigie de la Parole créatrice. 6.
Le
contraire de l’acte, c’est le désespoir Nous savons tous cela, com
424
gie de la Parole créatrice. 6. Le contraire de
l’
acte, c’est le désespoir Nous savons tous cela, comme nous savons q
425
le créatrice. 6. Le contraire de l’acte, c’est
le
désespoir Nous savons tous cela, comme nous savons qu’il faut mour
426
r : sans y croire. À vrai dire, nous avons toutes
les
raisons d’en douter, s’il est vrai que le doute est révolte, et qu’il
427
toutes les raisons d’en douter, s’il est vrai que
le
doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de
428
i que le doute est révolte, et qu’il faut pour se
l’
avouer la joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écriv
429
doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer
la
joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son tr
430
t qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît de
l’
acte de la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de la Maladie m
431
ut pour se l’avouer la joie qui naît de l’acte de
la
foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de la Maladie mortelle 16
432
la foi. Lorsque Kierkegaard écrivit son traité de
la
Maladie mortelle 16, il venait justement de dépasser cette illusion d
433
usion du désespoir, qui consiste à s’imaginer que
l’
acte est puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui
434
consiste à s’imaginer que l’acte est puissance de
l’
homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que la foi vint saisir s
435
aginer que l’acte est puissance de l’homme : d’où
l’
impossibilité de l’oser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant
436
st puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de
l’
oser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le c
437
homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que
la
foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le contraire du désesp
438
Celui que la foi vint saisir sait maintenant que
l’
acte est le contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre f
439
la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est
le
contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que le
440
que l’acte est le contraire du désespoir. Mais il
le
sait d’une tout autre façon que le désespéré ne l’imagine. Parce que
441
spoir. Mais il le sait d’une tout autre façon que
le
désespéré ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’
442
e sait d’une tout autre façon que le désespéré ne
l’
imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte n’est pas seulemen
443
re façon que le désespéré ne l’imagine. Parce que
le
rapport du désespoir à l’acte n’est pas seulement renversement, mais
444
ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à
l’
acte n’est pas seulement renversement, mais création irréversible. Et
445
ment, mais création irréversible. Et cela tient à
la
nature de l’acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’abso
446
éation irréversible. Et cela tient à la nature de
l’
acte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de la Pers
447
cte, — mieux encore : à son origine. Cela tient à
l’
absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simpl
448
encore : à son origine. Cela tient à l’absolu de
la
Personne qui l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homm
449
origine. Cela tient à l’absolu de la Personne qui
l’
initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’homme dépourvu de fo
450
ela tient à l’absolu de la Personne qui l’initie.
Le
désespéré, le douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’homme
451
absolu de la Personne qui l’initie. Le désespéré,
le
douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’homme détendu, vagu
452
l’initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement
l’
homme dépourvu de foi, l’homme détendu, vague et fiévreux qui peuple n
453
e douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi,
l’
homme détendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités, l’homme sans vi
454
détendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités,
l’
homme sans visage et sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine que
455
sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine que
l’
acte viendra comme un sursaut de joie, comme une révolte, comme une af
456
une affirmation désespérée de son orgueil, comme
la
preuve enfin de son moi, — mais il sait bien qu’il n’en a pas, ou que
457
t pas et qu’il ne croit à aucun acte. Il vit dans
le
désir et dans la nostalgie, et son regard n’est pas une vision dans u
458
croit à aucun acte. Il vit dans le désir et dans
la
nostalgie, et son regard n’est pas une vision dans un visage, mais un
459
ans un visage, mais une manière de loucher vers «
les
autres », une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de la classe
460
re de loucher vers « les autres », une chaîne qui
le
lie à la coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait
461
cher vers « les autres », une chaîne qui le lie à
la
coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait-il faire
462
une chaîne qui le lie à la coutume du bourg ou de
la
classe. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est
463
Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car
l’
acte est décision, rupture, isolation, quand l’être même du désespéré
464
ar l’acte est décision, rupture, isolation, quand
l’
être même du désespéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à la
465
spéré consiste dans ses liens, dans sa croyance à
la
réalité des liens et de la masse, à la réalité des autres dans l’ense
466
ns, dans sa croyance à la réalité des liens et de
la
masse, à la réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pou
467
croyance à la réalité des liens et de la masse, à
la
réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pourrait-il fai
468
iens et de la masse, à la réalité des autres dans
l’
ensemble. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est
469
Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car
l’
acte est immédiat, création et initiation, c’est-à-dire sobriété pure,
470
t initiation, c’est-à-dire sobriété pure, — quand
l’
être même du désespéré est calcul, préméditation, sensualité et envie…
471
calcul, préméditation, sensualité et envie… Ainsi
l’
acte absolu qu’il imagine serait sa mort, — et c’est pourquoi il n’y c
472
c’est pourquoi il n’y croit pas. Nul n’échappe à
la
forme du monde. Mais la subir, c’est justement désespérer. Il faudrai
473
roit pas. Nul n’échappe à la forme du monde. Mais
la
subir, c’est justement désespérer. Il faudrait donc… la créer ? « L’h
474
ir, c’est justement désespérer. Il faudrait donc…
la
créer ? « L’homme ne peut faire qu’une seule chose en toute sobriété,
475
tement désespérer. Il faudrait donc… la créer ? «
L’
homme ne peut faire qu’une seule chose en toute sobriété, c’est l’abso
476
faire qu’une seule chose en toute sobriété, c’est
l’
absolu »17. Entre le désespéré et l’absolu, il y a tout ce romantisme
477
hose en toute sobriété, c’est l’absolu »17. Entre
le
désespéré et l’absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’acte
478
briété, c’est l’absolu »17. Entre le désespéré et
l’
absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que l’acte soit puissance e
479
l’absolu, il y a tout ce romantisme qui veut que
l’
acte soit puissance et jouissance, il y a ce moi de désir qui veut que
480
t jouissance, il y a ce moi de désir qui veut que
l’
acte — l’instant ! — soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos vi
481
nce, il y a ce moi de désir qui veut que l’acte —
l’
instant ! — soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos vies nous m
482
veut que l’acte — l’instant ! — soit durée… Mais
l’
absolu qui vient jucher nos vies nous meut parce qu’il est un ordre, u
483
, désirer et décrire ; une rupture et une vision.
La
présence de l’absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’ins
484
crire ; une rupture et une vision. La présence de
l’
absolu dans la sobriété parfaite et insensible de l’instant, c’est l’o
485
pture et une vision. La présence de l’absolu dans
la
sobriété parfaite et insensible de l’instant, c’est l’obéissance à la
486
absolu dans la sobriété parfaite et insensible de
l’
instant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l
487
briété parfaite et insensible de l’instant, c’est
l’
obéissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’
488
et insensible de l’instant, c’est l’obéissance à
la
Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat. Que s’est-il donc pas
489
nstant, c’est l’obéissance à la Parole de Dieu, —
la
prophétie dans l’immédiat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul su
490
éissance à la Parole de Dieu, — la prophétie dans
l’
immédiat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul sur le chemin ; mais
491
diat. Que s’est-il donc passé ? Me voici seul sur
le
chemin ; mais je vois des visages fraternels où s’agitait la foule co
492
mais je vois des visages fraternels où s’agitait
la
foule confuse et menaçante. Nous ne voyons aucun visage ailleurs que
493
te. Nous ne voyons aucun visage ailleurs que dans
l’
acte d’aimer. 7. Toute vocation est sans précédent Car elle est
494
Car elle est prophétie justement ! — et c’est de
la
seule prophétie que relèvent la réalité et le sérieux, le risque et l
495
t ! — et c’est de la seule prophétie que relèvent
la
réalité et le sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L
496
de la seule prophétie que relèvent la réalité et
le
sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’homme se dist
497
prophétie que relèvent la réalité et le sérieux,
le
risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’homme se distingue du sin
498
e relèvent la réalité et le sérieux, le risque et
la
splendeur d’une vie d’homme. L’homme se distingue du singe en ce qu’i
499
eux, le risque et la splendeur d’une vie d’homme.
L’
homme se distingue du singe en ce qu’il prophétise, uniquement, et dès
500
singe en ce qu’il prophétise, uniquement, et dès
l’
origine. C’est pourquoi l’homme a un visage et une vision, ce que n’on
501
ise, uniquement, et dès l’origine. C’est pourquoi
l’
homme a un visage et une vision, ce que n’ont pas les animaux ; c’est
502
homme a un visage et une vision, ce que n’ont pas
les
animaux ; c’est pourquoi l’homme est héroïque. Il faut noter ici un t
503
on, ce que n’ont pas les animaux ; c’est pourquoi
l’
homme est héroïque. Il faut noter ici un trait bien remarquable : Kier
504
articulier de son destin qui qualifie précisément
la
vocation : l’invraisemblable. Ses plus amers reproches au « christian
505
son destin qui qualifie précisément la vocation :
l’
invraisemblable. Ses plus amers reproches au « christianisme de la chr
506
e. Ses plus amers reproches au « christianisme de
la
chrétienté », à cette « inconcevable illusion des sens », ne s’adress
507
on des sens », ne s’adressent-ils pas justement à
la
« vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à la portée de « la
508
vraisemblance » doctrinale d’une religion mise à
la
portée de « la masse », alors que la foi véritable est celle du solit
509
» doctrinale d’une religion mise à la portée de «
la
masse », alors que la foi véritable est celle du solitaire que plus r
510
igion mise à la portée de « la masse », alors que
la
foi véritable est celle du solitaire que plus rien ne soutient, hors
511
elle du solitaire que plus rien ne soutient, hors
la
foi ? « Celui qui ne renonce pas à la vraisemblance n’entre jamais en
512
tient, hors la foi ? « Celui qui ne renonce pas à
la
vraisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu. L’audace religieu
513
aisemblance n’entre jamais en relation avec Dieu.
L’
audace religieuse, à plus forte raison l’audace chrétienne, est au-del
514
ec Dieu. L’audace religieuse, à plus forte raison
l’
audace chrétienne, est au-delà de toute vraisemblance, là où préciséme
515
au-delà de toute vraisemblance, là où précisément
l’
on renonce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, n
516
e vraisemblance, là où précisément l’on renonce à
la
vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas le suivr
517
ce à la vraisemblance »19. Parce qu’il faut créer
le
chemin, non pas le suivre ; parce que l’acte est initiateur ; parce q
518
ce »19. Parce qu’il faut créer le chemin, non pas
le
suivre ; parce que l’acte est initiateur ; parce que la dignité de l’
519
ut créer le chemin, non pas le suivre ; parce que
l’
acte est initiateur ; parce que la dignité de l’homme est de marcher d
520
vre ; parce que l’acte est initiateur ; parce que
la
dignité de l’homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser
521
e l’acte est initiateur ; parce que la dignité de
l’
homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de
522
rce que la dignité de l’homme est de marcher dans
l’
invisible et de prophétiser « en vertu de l’absurde ». L’homme ne peut
523
dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de
l’
absurde ». L’homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par « le
524
ible et de prophétiser « en vertu de l’absurde ».
L’
homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par « le monde », il
525
ne peut être déterminé que par son Dieu ou par «
le
monde », il faut choisir. Il faut être un chrétien ou un bourgeois. L
526
hoisir. Il faut être un chrétien ou un bourgeois.
Le
bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à l’acte et il meurt au
527
Le bourgeois est sans vocation, il ne croit pas à
l’
acte et il meurt au hasard, sans avoir rencontré personne ni soi-même2
528
oir rencontré personne ni soi-même20. Il vit dans
la
forme du monde : et ce n’est point qu’elle soit pour lui réelle, elle
529
qu’elle soit pour lui réelle, elle est seulement
la
moins invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans la nouveauté
530
elle est seulement la moins invraisemblable. Mais
le
chrétien qui marche dans la nouveauté ne prend mesure que de ce qu’il
531
invraisemblable. Mais le chrétien qui marche dans
la
nouveauté ne prend mesure que de ce qu’il transforme. Sa connaissance
532
. Sa connaissance est acte et vision prophétique.
La
mesure du temps de sa vie réside dans la seule vocation qu’il incarne
533
hétique. La mesure du temps de sa vie réside dans
la
seule vocation qu’il incarne. Sur le chemin qui commence à ses pas, i
534
réside dans la seule vocation qu’il incarne. Sur
le
chemin qui commence à ses pas, il ne meurt jamais par surprise : et c
535
par surprise : et ce n’est point qu’il ait connu
le
jour et l’heure, mais il connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cau
536
se : et ce n’est point qu’il ait connu le jour et
l’
heure, mais il connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cause de l’ins
537
’il ait connu le jour et l’heure, mais il connaît
l’
instant, s’il vit de Parole. À cause de l’instant éternel, « le héros
538
connaît l’instant, s’il vit de Parole. À cause de
l’
instant éternel, « le héros meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C
539
il vit de Parole. À cause de l’instant éternel, «
le
héros meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C’est le secret dernie
540
os meurt toujours avant qu’il ne meure »21. C’est
le
secret dernier de l’acte, et le sceau de l’amour chrétien. 3. App
541
nt qu’il ne meure »21. C’est le secret dernier de
l’
acte, et le sceau de l’amour chrétien. 3. Apprentissage du christi
542
meure »21. C’est le secret dernier de l’acte, et
le
sceau de l’amour chrétien. 3. Apprentissage du christianisme. 4.
543
C’est le secret dernier de l’acte, et le sceau de
l’
amour chrétien. 3. Apprentissage du christianisme. 4. Dans ce sen
544
Apprentissage du christianisme. 4. Dans ce sens,
la
catégorie récemment « découverte » par les psychologues de ce qui « s
545
e sens, la catégorie récemment « découverte » par
les
psychologues de ce qui « se fait se faisant » est une antilogie chrét
546
premier chef, et non pas hindoue, comme certains
l’
ont voulu croire. Chez les hindous, elle n’est encore qu’une forme de
547
hindoue, comme certains l’ont voulu croire. Chez
les
hindous, elle n’est encore qu’une forme de l’agitation humaine. Pour
548
ez les hindous, elle n’est encore qu’une forme de
l’
agitation humaine. Pour le chrétien seul elle signifie une transformat
549
encore qu’une forme de l’agitation humaine. Pour
le
chrétien seul elle signifie une transformation effective. Ou mieux en
550
e transformation effective. Ou mieux encore, pour
l’
hindou, cette catégorie suppose la primauté d’un Esprit sans contenu ;
551
ux encore, pour l’hindou, cette catégorie suppose
la
primauté d’un Esprit sans contenu ; pour le chrétien, la primauté d’u
552
ppose la primauté d’un Esprit sans contenu ; pour
le
chrétien, la primauté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à
553
auté d’un Esprit sans contenu ; pour le chrétien,
la
primauté d’une personne. 5. « Ta Parole est une lampe à mes pieds, u
554
sentier » 6. Die Chimäre, trad. française dans
les
Éléments de la grandeur humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et t
555
Die Chimäre, trad. française dans les Éléments de
la
grandeur humaine (NRF). 7. « Le prophète se lève et tombe avec sa mi
556
les Éléments de la grandeur humaine (NRF). 7. «
Le
prophète se lève et tombe avec sa mission » (Karl Barth). Il n’a pas
557
en ne serait plus ridicule que de tenter de faire
la
psychologie d’un prophète, ou bien alors elle se réduirait à la gramm
558
d’un prophète, ou bien alors elle se réduirait à
la
grammaire et à la syntaxe particulière de son message. 8. Journal.
559
bien alors elle se réduirait à la grammaire et à
la
syntaxe particulière de son message. 8. Journal. « L’imitation suiv
560
taxe particulière de son message. 8. Journal. «
L’
imitation suivra », en allemand, « Die Nachfolge wird nachfolgen ». 9
561
Isaïe 21, 11. 12. Lorsque Schopenhauer écrit : «
Le
temps n’a pas son origine dans les choses, mais dans le sujet connais
562
hauer écrit : « Le temps n’a pas son origine dans
les
choses, mais dans le sujet connaissant », nous retrouvons cette défin
563
ps n’a pas son origine dans les choses, mais dans
le
sujet connaissant », nous retrouvons cette définition du temps comme
564
trouvons cette définition du temps comme refus de
l’
instant et de l’obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est
565
éfinition du temps comme refus de l’instant et de
l’
obéissance immédiate à la Parole. La ressemblance est seulement formel
566
refus de l’instant et de l’obéissance immédiate à
la
Parole. La ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre
567
instant et de l’obéissance immédiate à la Parole.
La
ressemblance est seulement formelle. Le temps dont souffre Kierkegaar
568
a Parole. La ressemblance est seulement formelle.
Le
temps dont souffre Kierkegaard est engendré par la lâcheté du pécheur
569
e temps dont souffre Kierkegaard est engendré par
la
lâcheté du pécheur, tandis que le temps de Schopenhauer est « l’idéal
570
st engendré par la lâcheté du pécheur, tandis que
le
temps de Schopenhauer est « l’idéalité » du sujet connaissant, — une
571
écheur, tandis que le temps de Schopenhauer est «
l’
idéalité » du sujet connaissant, — une chimère spiritualiste, une nost
572
mère spiritualiste, une nostalgie. C’est pourquoi
le
temps de Kierkegaard peut connaître une rédemption par l’acte, quand
573
de Kierkegaard peut connaître une rédemption par
l’
acte, quand celui de Schopenhauer s’évanouit en pure absence. 13. K.
574
. K. entend : en vertu de ce paradoxe impensable,
l’
Incarnation historique de Dieu. Pas de réponse rationnelle au « Cur De
575
lme. 14. Crainte et tremblement. 15. Actes de
l’
amour. 16. Traduction française sous le titre de Traité du désespoir.
576
Actes de l’amour. 16. Traduction française sous
le
titre de Traité du désespoir. C’est une laïcisation ! Kierkegaard se
577
st une laïcisation ! Kierkegaard se rapportait de
la
façon la plus précise à Jean XI. 4. 17. Richtet selbst. 18. Ibid.
578
ïcisation ! Kierkegaard se rapportait de la façon
la
plus précise à Jean XI. 4. 17. Richtet selbst. 18. Ibid. 19. Tou
579
Richtet selbst. 18. Ibid. 19. Toutefois dans
le
Journal des années 1846 à 1848, on trouve de nombreuses notations de
580
ue sa consigne est de « tenir bon en souffrant ».
Le
presbytère de campagne serait une solution commode, surtout en regard
581
it trop bien que lui vaudront ses attaques contre
l’
Église établie. 20. Ce qui est particulièrement affligeant dans l’exi
582
20. Ce qui est particulièrement affligeant dans
l’
existence du bourgeois c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’
583
c’est qu’elle est entièrement déterminée jusqu’à
la
mort, mais que la mort survient comme une absurdité, la première dans
584
entièrement déterminée jusqu’à la mort, mais que
la
mort survient comme une absurdité, la première dans l’histoire du bou
585
rt survient comme une absurdité, la première dans
l’
histoire du bourgeois, mais décisive. À une enquête dont le sujet étai
586
e du bourgeois, mais décisive. À une enquête dont
le
sujet était : La rencontre la plus importante de votre vie ? M. Cléme
587
ais décisive. À une enquête dont le sujet était :
La
rencontre la plus importante de votre vie ? M. Clément Vautel qui per
588
À une enquête dont le sujet était : La rencontre
la
plus importante de votre vie ? M. Clément Vautel qui personnifie de n
589
? M. Clément Vautel qui personnifie de nos jours
le
Bourgeois, répondit avec une pertinence géniale : « Je n’ai jamais re
590
Rougemont Denis de, « Forme et transformation, ou
l’
acte selon Kierkegaard », Hermès, Bruxelles-Paris, janvier 1936, p. 83
591
ent qu’ils vous assourdissent. Ils ne suivent pas
la
règle du jeu et je ne sais même pas s’ils savent qu’il y en a une. Al
592
nser que notre langue est plus malade que n’était
le
latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet
593
tre langue est plus malade que n’était le latin à
l’
époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était enco
594
st plus malade que n’était le latin à l’époque de
la
Renaissance24. Le latin de Bembo et de Sadolet était encore une rhéto
595
n’était le latin à l’époque de la Renaissance24.
Le
latin de Bembo et de Sadolet était encore une rhétorique des lieux co
596
— mais forme encore et convention admise par tous
les
clercs européens. On ne saurait en dire autant du langage de nos bons
597
rivains. Car non seulement il est mal entendu par
la
grande masse des lecteurs ordinaires, disons des lecteurs de journaux
598
une foule de dialectes ésotériques. Non seulement
l’
écrivain moderne use d’une langue dont le lecteur moyen trouve parfait
599
eulement l’écrivain moderne use d’une langue dont
le
lecteur moyen trouve parfaitement normal de déclarer que « c’est du l
600
philosophiques, que de théories politiques. Ainsi
les
mots n’ont plus le même sens pour les intellectuels et pour la masse
601
de théories politiques. Ainsi les mots n’ont plus
le
même sens pour les intellectuels et pour la masse — cela s’est vu en
602
ques. Ainsi les mots n’ont plus le même sens pour
les
intellectuels et pour la masse — cela s’est vu en d’autres siècles. I
603
plus le même sens pour les intellectuels et pour
la
masse — cela s’est vu en d’autres siècles. Ils n’ont plus le même sen
604
cela s’est vu en d’autres siècles. Ils n’ont plus
le
même sens pour les divers partis intellectuels — c’est plus nouveau.
605
’autres siècles. Ils n’ont plus le même sens pour
les
divers partis intellectuels — c’est plus nouveau. Mais surtout, ils n
606
auquel on puisse se référer et qui fixe vraiment
l’
usage : un sens commun. La plupart des débats qui nous occupent, qu’il
607
ique, de religion ou de littérature, nous offrent
l’
image d’un jeu dont les différents partenaires changent la règle à leu
608
e littérature, nous offrent l’image d’un jeu dont
les
différents partenaires changent la règle à leur fantaisie, chacun cro
609
d’un jeu dont les différents partenaires changent
la
règle à leur fantaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que les
610
ntaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et que
les
autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas la partie de croquet dan
611
les autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas
la
partie de croquet dans Alice au pays des merveilles ? Les boules étai
612
ie de croquet dans Alice au pays des merveilles ?
Les
boules étaient des hérissons vivants, et les soldats s’arc-boutaient
613
es ? Les boules étaient des hérissons vivants, et
les
soldats s’arc-boutaient sur le sol pour former des arceaux vivants. Q
614
ssons vivants, et les soldats s’arc-boutaient sur
le
sol pour former des arceaux vivants. Quand Alice avait réussi à mettr
615
à mettre en boule son hérisson, et se préparait à
le
frapper avec la tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la re
616
e son hérisson, et se préparait à le frapper avec
la
tête du héron, celui-ci tordait son long cou et la regardait d’un air
617
a tête du héron, celui-ci tordait son long cou et
la
regardait d’un air d’ahurissement profond. Quand elle l’avait remis e
618
rdait d’un air d’ahurissement profond. Quand elle
l’
avait remis en position, c’était le hérisson qui se déroulait et coura
619
nd. Quand elle l’avait remis en position, c’était
le
hérisson qui se déroulait et courait dans la haie voisine. Si par has
620
tait le hérisson qui se déroulait et courait dans
la
haie voisine. Si par hasard la boule et le maillet restaient en place
621
it et courait dans la haie voisine. Si par hasard
la
boule et le maillet restaient en place, c’était alors l’arceau-soldat
622
t dans la haie voisine. Si par hasard la boule et
le
maillet restaient en place, c’était alors l’arceau-soldat qui se leva
623
e et le maillet restaient en place, c’était alors
l’
arceau-soldat qui se levait et s’en allait un peu plus loin. Tandis qu
624
evait et s’en allait un peu plus loin. Tandis que
la
Reine, au comble de la fureur, parcourait le terrain en hurlant au ha
625
peu plus loin. Tandis que la Reine, au comble de
la
fureur, parcourait le terrain en hurlant au hasard son cri de guerre
626
que la Reine, au comble de la fureur, parcourait
le
terrain en hurlant au hasard son cri de guerre : « Qu’on lui coupe la
627
t au hasard son cri de guerre : « Qu’on lui coupe
la
tête ! » — Ainsi nos mots se déforment entre nos mains, nos problèmes
628
forment au hasard, chacun joue sa partie comme il
le
peut, sans souci de la règle commune, et la terreur domine cette anar
629
un joue sa partie comme il le peut, sans souci de
la
règle commune, et la terreur domine cette anarchie, distribuant des c
630
me il le peut, sans souci de la règle commune, et
la
terreur domine cette anarchie, distribuant des condamnations d’autant
631
xcessives d’ailleurs que personne ne se soucie de
les
mettre à exécution25. « Vous n’avez pas idée, conclut Alice, combien
632
des choses vivantes. » ⁂ Prenons cinq mots parmi
les
plus fréquents dans le langage et les écrits de notre temps : esprit,
633
⁂ Prenons cinq mots parmi les plus fréquents dans
le
langage et les écrits de notre temps : esprit, révolution, liberté, o
634
mots parmi les plus fréquents dans le langage et
les
écrits de notre temps : esprit, révolution, liberté, ordre, patrie. V
635
esprit, révolution, liberté, ordre, patrie. Voilà
les
instruments du jeu philosophique, ou politique que nous sommes en tra
636
écrivains ou lecteurs, citoyens ou hommes d’État.
Les
uns tiennent le parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les
637
eurs, citoyens ou hommes d’État. Les uns tiennent
le
parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de
638
ns ou hommes d’État. Les uns tiennent le parti de
l’
esprit et les autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révoluti
639
d’État. Les uns tiennent le parti de l’esprit et
les
autres celui de l’ordre, les uns le parti de la révolution, les autre
640
nnent le parti de l’esprit et les autres celui de
l’
ordre, les uns le parti de la révolution, les autres celui de la patri
641
parti de l’esprit et les autres celui de l’ordre,
les
uns le parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns
642
l’esprit et les autres celui de l’ordre, les uns
le
parti de la révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudra
643
les autres celui de l’ordre, les uns le parti de
la
révolution, les autres celui de la patrie… Les uns voudraient la libe
644
ui de l’ordre, les uns le parti de la révolution,
les
autres celui de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre
645
ns le parti de la révolution, les autres celui de
la
patrie… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution
646
de la révolution, les autres celui de la patrie…
Les
uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’esprit
647
les autres celui de la patrie… Les uns voudraient
la
liberté dans l’ordre, ou la révolution par l’esprit, ou un esprit pat
648
de la patrie… Les uns voudraient la liberté dans
l’
ordre, ou la révolution par l’esprit, ou un esprit patriotique, ou une
649
e… Les uns voudraient la liberté dans l’ordre, ou
la
révolution par l’esprit, ou un esprit patriotique, ou une patrie spir
650
ent la liberté dans l’ordre, ou la révolution par
l’
esprit, ou un esprit patriotique, ou une patrie spirituelle… Tandis qu
651
patrie spirituelle… Tandis que d’autres opposent
l’
esprit à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de
652
rituelle… Tandis que d’autres opposent l’esprit à
la
révolution, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à
653
s que d’autres opposent l’esprit à la révolution,
l’
ordre à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la
654
tres opposent l’esprit à la révolution, l’ordre à
la
liberté, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de la révolutio
655
à la révolution, l’ordre à la liberté, ou encore
les
patries de l’ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinais
656
n, l’ordre à la liberté, ou encore les patries de
l’
ordre à la patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces per
657
à la liberté, ou encore les patries de l’ordre à
la
patrie de la révolution… Toutes ces combinaisons et ces permutations
658
, ou encore les patries de l’ordre à la patrie de
la
révolution… Toutes ces combinaisons et ces permutations seraient néan
659
raient néanmoins assez simples à débrouiller dans
la
pratique, et pourraient définir utilement le parti, si seulement chac
660
dans la pratique, et pourraient définir utilement
le
parti, si seulement chacun de ces mots avait le même sens pour tout l
661
t le parti, si seulement chacun de ces mots avait
le
même sens pour tout le monde. Ou, parmi plusieurs sens variés, un sen
662
t chacun de ces mots avait le même sens pour tout
le
monde. Ou, parmi plusieurs sens variés, un sens prépondérant sur lequ
663
, un sens prépondérant sur lequel puisse se faire
l’
accord. Or, sans parler des 29 sens que Littré donne, pour le seul mot
664
r, sans parler des 29 sens que Littré donne, pour
le
seul mot : esprit, si j’interroge au hasard ceux qui veulent défendre
665
j’interroge au hasard ceux qui veulent défendre «
l’
esprit » contre les menaces dites matérialistes, je constate qu’on ent
666
ard ceux qui veulent défendre « l’esprit » contre
les
menaces dites matérialistes, je constate qu’on entend par ce mot tant
667
istes, je constate qu’on entend par ce mot tantôt
l’
intelligence, tantôt le Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tan
668
n entend par ce mot tantôt l’intelligence, tantôt
le
Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tantôt les facultés créatr
669
ôt l’intelligence, tantôt le Saint-Esprit, tantôt
le
luxe des délicats, tantôt les facultés créatrices de l’homme, ou enco
670
Saint-Esprit, tantôt le luxe des délicats, tantôt
les
facultés créatrices de l’homme, ou encore une sagesse asiatique, ou u
671
e des délicats, tantôt les facultés créatrices de
l’
homme, ou encore une sagesse asiatique, ou une mentalité de classe ou
672
e, ou une mentalité de classe ou simplement toute
la
culture et ses produits. Une simple équivoque sémantique dresse parfo
673
bourgeoise ; pour l’autre, présence effective de
la
pensée et de la foi à nos misères, activité concrète et créatrice, et
674
ur l’autre, présence effective de la pensée et de
la
foi à nos misères, activité concrète et créatrice, et garantie contre
675
ctivité concrète et créatrice, et garantie contre
les
préjugés intéressés. « Voyez, gémit Alice, l’arceau sous lequel je do
676
re les préjugés intéressés. « Voyez, gémit Alice,
l’
arceau sous lequel je dois passer se promène à l’autre bout du jeu et
677
mène à l’autre bout du jeu et j’aurais dû croquer
le
hérisson de la Reine s’il ne s’était mis à courir juste au moment où
678
bout du jeu et j’aurais dû croquer le hérisson de
la
Reine s’il ne s’était mis à courir juste au moment où j’allais jouer.
679
Mais là, aux neuf sens très précis que nous donne
le
dictionnaire, il nous faut ajouter une dizaine de sens parfois contra
680
izaine de sens parfois contradictoires, créés par
la
crise actuelle et très mal distingués les uns des autres par la plupa
681
réés par la crise actuelle et très mal distingués
les
uns des autres par la plupart de ceux qui les prononcent. Ainsi révol
682
ués les uns des autres par la plupart de ceux qui
les
prononcent. Ainsi révolution signifiera selon les cas : émeute, prise
683
les prononcent. Ainsi révolution signifiera selon
les
cas : émeute, prise de pouvoir légal, désordre et anarchie, établisse
684
de mesures économiques, transmutation de toutes
les
valeurs morales, etc. Et tous ces sens se chevauchent pour former dan
685
Et tous ces sens se chevauchent pour former dans
l’
esprit des polémistes les plus étranges surimpressions26. La liberté s
686
vauchent pour former dans l’esprit des polémistes
les
plus étranges surimpressions26. La liberté sera invoquée par la concu
687
es polémistes les plus étranges surimpressions26.
La
liberté sera invoquée par la concurrence et l’oppression capitalistes
688
es surimpressions26. La liberté sera invoquée par
la
concurrence et l’oppression capitalistes, par les intellectuels anarc
689
6. La liberté sera invoquée par la concurrence et
l’
oppression capitalistes, par les intellectuels anarchistes ou libéraux
690
la concurrence et l’oppression capitalistes, par
les
intellectuels anarchistes ou libéraux, par la presse d’opposition, pa
691
ar les intellectuels anarchistes ou libéraux, par
la
presse d’opposition, par Staline qui fait taire cette presse au nom d
692
par Staline qui fait taire cette presse au nom de
la
Révolution, par Hitler dénonçant le Diktat de Versailles, par l’Itali
693
sse au nom de la Révolution, par Hitler dénonçant
le
Diktat de Versailles, par l’Italie partant à la conquête de l’Éthiopi
694
par Hitler dénonçant le Diktat de Versailles, par
l’
Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt l
695
t le Diktat de Versailles, par l’Italie partant à
la
conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si abs
696
Versailles, par l’Italie partant à la conquête de
l’
Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, t
697
’Italie partant à la conquête de l’Éthiopie, etc.
L’
ordre sera tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictatur
698
conquête de l’Éthiopie, etc. L’ordre sera tantôt
le
statu quo, si absurde soit-il, tantôt la dictature brutale et arbitra
699
a tantôt le statu quo, si absurde soit-il, tantôt
la
dictature brutale et arbitraire, plus rarement la revendication d’un
700
la dictature brutale et arbitraire, plus rarement
la
revendication d’un équilibre vrai, d’une hiérarchie naturelle et féco
701
naturelle et féconde. Et quant au mot patrie, on
le
voit confondu, dans les discours et les articles de journaux, avec ét
702
Et quant au mot patrie, on le voit confondu, dans
les
discours et les articles de journaux, avec état, nation, mystique rac
703
patrie, on le voit confondu, dans les discours et
les
articles de journaux, avec état, nation, mystique raciale, peuple et
704
et coutumes, ou terre natale, clocher, etc. D’où
l’
embrouillamini de la politique et des partis, et la confusion meurtriè
705
re natale, clocher, etc. D’où l’embrouillamini de
la
politique et des partis, et la confusion meurtrière de termes dangere
706
’embrouillamini de la politique et des partis, et
la
confusion meurtrière de termes dangereusement chargés de passion et d
707
er et aggraver cette crise du sens des mots et de
la
sémantique vivante. D’une part la somme des échanges écrits ou verbau
708
des mots et de la sémantique vivante. D’une part
la
somme des échanges écrits ou verbaux a crû depuis la Renaissance dans
709
somme des échanges écrits ou verbaux a crû depuis
la
Renaissance dans des proportions formidables. D’autre part, le public
710
e dans des proportions formidables. D’autre part,
le
public capable de goûter une œuvre rigoureuse ou novatrice, et qui po
711
Péguy n’ont guère eu davantage de lecteurs durant
la
période de leur vie ou paraissaient leurs œuvres capitales. Et je dou
712
scartes n’en convainquit de son vivant. Cependant
les
journaux du soir à cinq-cent-mille exemplaires et la radio atteignent
713
journaux du soir à cinq-cent-mille exemplaires et
la
radio atteignent des millions d’auditeurs. Dans cette disproportion i
714
s. Dans cette disproportion impressionnante entre
l’
aire de la vraie culture créatrice et régulatrice et l’aire des sous-p
715
tte disproportion impressionnante entre l’aire de
la
vraie culture créatrice et régulatrice et l’aire des sous-produits st
716
e de la vraie culture créatrice et régulatrice et
l’
aire des sous-produits standardisés de la culture de consommation, on
717
trice et l’aire des sous-produits standardisés de
la
culture de consommation, on aperçoit la raison immédiate de la crise
718
rdisés de la culture de consommation, on aperçoit
la
raison immédiate de la crise actuelle du langage. La presse, la radio
719
consommation, on aperçoit la raison immédiate de
la
crise actuelle du langage. La presse, la radio, l’éloquence politique
720
raison immédiate de la crise actuelle du langage.
La
presse, la radio, l’éloquence politique et les ouvrages populaires à
721
diate de la crise actuelle du langage. La presse,
la
radio, l’éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirag
722
a crise actuelle du langage. La presse, la radio,
l’
éloquence politique et les ouvrages populaires à grand tirage, voilà t
723
ge. La presse, la radio, l’éloquence politique et
les
ouvrages populaires à grand tirage, voilà tout un domaine que l’écriv
724
ulaires à grand tirage, voilà tout un domaine que
l’
écrivain digne du nom ne contrôle pas, ne forme pas, n’atteint même pa
725
e culturelle » préparait peu à peu un public pour
les
auteurs du niveau supérieur. Cette accession démocratique des grandes
726
Cette accession démocratique des grandes masses à
la
vie de l’esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actuel d
727
ssion démocratique des grandes masses à la vie de
l’
esprit me paraît tout à fait improbable dans l’état actuel du régime.
728
ble dans l’état actuel du régime. Elle est à tout
le
moins vérifiable. Par contre, on peut très nettement constater le déf
729
ble. Par contre, on peut très nettement constater
le
déficit que représente pour la culture, la création de ces grandes zo
730
ettement constater le déficit que représente pour
la
culture, la création de ces grandes zones d’échanges incontrôlés. Ces
731
stater le déficit que représente pour la culture,
la
création de ces grandes zones d’échanges incontrôlés. Ces échanges en
732
ges en effet aboutissent rapidement à démonétiser
les
mots. Le vocabulaire des journaux est vague, impropre, sans saveur et
733
et aboutissent rapidement à démonétiser les mots.
Le
vocabulaire des journaux est vague, impropre, sans saveur et sans pou
734
faits, des choses, ou des idées. Il flatte ainsi
la
paresse de l’esprit, décourage le sens critique, décontenance les exp
735
oses, ou des idées. Il flatte ainsi la paresse de
l’
esprit, décourage le sens critique, décontenance les expressions les p
736
Il flatte ainsi la paresse de l’esprit, décourage
le
sens critique, décontenance les expressions les plus concrètes. Ainsi
737
’esprit, décourage le sens critique, décontenance
les
expressions les plus concrètes. Ainsi les mots perdent leur force et
738
ge le sens critique, décontenance les expressions
les
plus concrètes. Ainsi les mots perdent leur force et leur délicatesse
739
tenance les expressions les plus concrètes. Ainsi
les
mots perdent leur force et leur délicatesse d’appel. Et les bons écri
740
erdent leur force et leur délicatesse d’appel. Et
les
bons écrivains, qui n’ont pas d’autres armes, se voient privés de tou
741
istant. Et leurs conseils paraissent obscurs dans
la
mesure où ils se veulent scrupuleux. C’est pourquoi la plupart renonc
742
formel et précis, dont ils sont seuls à connaître
les
règles. (Encore ne sont-ils guère d’accord pour enregistrer les réuss
743
ncore ne sont-ils guère d’accord pour enregistrer
les
réussites ou les tricheries !) Leur style devient de plus en plus « e
744
guère d’accord pour enregistrer les réussites ou
les
tricheries !) Leur style devient de plus en plus « exquis » et par su
745
re une volonté d’action bientôt jugée vulgaire. ⁂
La
civilisation occidentale aurait-elle donc des fins dernières à quoi e
746
donc des fins dernières à quoi elle tend ? Quand
le
peuple d’Israël oublie sa vocation et se détourne de l’Éternel son Di
747
ple d’Israël oublie sa vocation et se détourne de
l’
Éternel son Dieu, il perd aussi le sens des noms et bientôt sa langue
748
se détourne de l’Éternel son Dieu, il perd aussi
le
sens des noms et bientôt sa langue délire : « Il prononce des paroles
749
des paroles vaines, des serments faux ! » s’écrie
le
prophète Osée. Quand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être les
750
serments faux ! » s’écrie le prophète Osée. Quand
les
clercs de la Cour de Rome cessent d’être les dociles instruments de l
751
! » s’écrie le prophète Osée. Quand les clercs de
la
Cour de Rome cessent d’être les dociles instruments de la vocation ca
752
uand les clercs de la Cour de Rome cessent d’être
les
dociles instruments de la vocation catholique, pour devenir de raffin
753
de Rome cessent d’être les dociles instruments de
la
vocation catholique, pour devenir de raffinés rhéteurs, ils perdent l
754
iment dans des langues nouvelles, au détriment de
l’
unité sacrée. Ainsi toujours : pour peu que le sens des fins vienne à
755
de l’unité sacrée. Ainsi toujours : pour peu que
le
sens des fins vienne à faiblir et que la mesure commune cesse d’être
756
peu que le sens des fins vienne à faiblir et que
la
mesure commune cesse d’être effectivement perçue et observée, l’on as
757
ne cesse d’être effectivement perçue et observée,
l’
on assiste à la même dégradation des instruments de la culture : — d’u
758
effectivement perçue et observée, l’on assiste à
la
même dégradation des instruments de la culture : — d’une part les écr
759
assiste à la même dégradation des instruments de
la
culture : — d’une part les écrivains se mettent à raffiner l’expressi
760
tion des instruments de la culture : — d’une part
les
écrivains se mettent à raffiner l’expression propre de chaque chose s
761
— d’une part les écrivains se mettent à raffiner
l’
expression propre de chaque chose séparée, au détriment de l’expressio
762
n propre de chaque chose séparée, au détriment de
l’
expression générale, d’autre part, la grande masse des usagers de la l
763
détriment de l’expression générale, d’autre part,
la
grande masse des usagers de la langue cesse d’exercer aucun contrôle
764
ale, d’autre part, la grande masse des usagers de
la
langue cesse d’exercer aucun contrôle sur son parler, qu’elle ne soum
765
elle ne soumet plus à un but unanime. Si bien que
les
écrivains ne sont plus compris du peuple, et que la langue vulgaire s
766
écrivains ne sont plus compris du peuple, et que
la
langue vulgaire s’encombre d’équivoques, de confusions et de malenten
767
confusions et de malentendus parfois tragiques :
l’
oubli des fins dernières entraîne nécessairement la ruine de la commun
768
’oubli des fins dernières entraîne nécessairement
la
ruine de la communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cet
769
ins dernières entraîne nécessairement la ruine de
la
communauté, par le seul fait qu’il ruine le langage. Cette absence d
770
îne nécessairement la ruine de la communauté, par
le
seul fait qu’il ruine le langage. Cette absence d’un principe commun
771
ne de la communauté, par le seul fait qu’il ruine
le
langage. Cette absence d’un principe communautaire vivant et puissan
772
unautaire vivant et puissant dans nos vies, c’est
le
drame de la civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous le
773
vant et puissant dans nos vies, c’est le drame de
la
civilisation, de la culture, de la cité modernes. Tous les hommes de
774
s nos vies, c’est le drame de la civilisation, de
la
culture, de la cité modernes. Tous les hommes de ce temps, s’ils ont
775
st le drame de la civilisation, de la culture, de
la
cité modernes. Tous les hommes de ce temps, s’ils ont quelque conscie
776
isation, de la culture, de la cité modernes. Tous
les
hommes de ce temps, s’ils ont quelque conscience, souffrent obscuréme
777
sont ensemble et ils sont seuls. Ils sont pressés
les
uns contre les autres et étrangers. Ils échangent des paroles en plus
778
t ils sont seuls. Ils sont pressés les uns contre
les
autres et étrangers. Ils échangent des paroles en plus grand nombre q
779
te. « Paroles vaines, serments faux ! » Or, quand
la
parole se détruit, quand elle n’est plus le don qu’un homme fait à un
780
quand la parole se détruit, quand elle n’est plus
le
don qu’un homme fait à un homme, et qui engage quelque chose de son ê
781
e, et qui engage quelque chose de son être, c’est
l’
amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est l’inquiétude des masses. El
782
’est l’amitié humaine qui se détruit. ⁂ Telle est
l’
inquiétude des masses. Elle n’est pas d’abord matérielle, elle est d’a
783
, elle est d’abord cette inquiétude du cœur et de
l’
esprit qui naît de la mort des amitiés. Plus angoissante encore, elle
784
tte inquiétude du cœur et de l’esprit qui naît de
la
mort des amitiés. Plus angoissante encore, elle règne innommée et pan
785
encore, elle règne innommée et panique partout où
l’
amitié humaine n’a jamais rien noué, rien engagé, rien sacrifié, là où
786
gé, rien sacrifié, là où elle n’a pas même laissé
les
traces d’une coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce que l’homm
787
laissé les traces d’une coutume ancestrale : dans
les
villes. Mais ce que l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fa
788
coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce que
l’
homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fait à sa place, et contr
789
les villes. Mais ce que l’homme ne fait pas pour
l’
homme, le diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et
790
es. Mais ce que l’homme ne fait pas pour l’homme,
le
diable le fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et qu’il tr
791
e que l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable
le
fait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et qu’il trompe. Cett
792
l’homme, le diable le fait à sa place, et contre
l’
homme qu’il séduit et qu’il trompe. Cette fin commune, cet idéal commu
793
déal commun que nous devions servir ensemble dans
la
fraternité que crée l’œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et
794
vions servir ensemble dans la fraternité que crée
l’
œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et sans le savoir, dans la
795
dans la fraternité que crée l’œuvre unanime, nous
les
cherchions en vain, et sans le savoir, dans la cité qu’on nous a fait
796
vre unanime, nous les cherchions en vain, et sans
le
savoir, dans la cité qu’on nous a faite. C’est une faim, une soif, un
797
s les cherchions en vain, et sans le savoir, dans
la
cité qu’on nous a faite. C’est une faim, une soif, une nostalgie que
798
Mais quelqu’un s’en est aperçu. Quelqu’un a formé
le
projet de tromper cette faim et cette soif. Au païen ignorant du vrai
799
im et cette soif. Au païen ignorant du vrai Dieu,
les
prêtres donnent des idoles faites à l’image des terreurs de l’homme.
800
rai Dieu, les prêtres donnent des idoles faites à
l’
image des terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images, le peuple
801
nnent des idoles faites à l’image des terreurs de
l’
homme. Dans le culte de ces images, le peuple croit trouver son unité,
802
es faites à l’image des terreurs de l’homme. Dans
le
culte de ces images, le peuple croit trouver son unité, et il y retro
803
terreurs de l’homme. Dans le culte de ces images,
le
peuple croit trouver son unité, et il y retrouve en effet le symbole
804
roit trouver son unité, et il y retrouve en effet
le
symbole agrandi d’un désespoir qu’il sent vivre dans tous les cœurs.
805
agrandi d’un désespoir qu’il sent vivre dans tous
les
cœurs. L’homme d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il
806
n désespoir qu’il sent vivre dans tous les cœurs.
L’
homme d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce qu’il faut pense
807
ans tous les cœurs. L’homme d’aujourd’hui méprise
les
religions. Il sait ce qu’il faut penser des prêtres et des sorciers.
808
t des sorciers. On lui donnera donc autre chose :
les
mêmes choses sous d’autres noms, des mystiques et des dictateurs. Les
809
s d’autres noms, des mystiques et des dictateurs.
Les
lieux communs sont morts et embaumés : déjà, on leur fait des musées.
810
publicitaires, mots d’ordre politiques, tels sont
les
ersatz pitoyables que nous proposent l’Argent et l’État. Gîovinezza !
811
els sont les ersatz pitoyables que nous proposent
l’
Argent et l’État. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que l
812
ersatz pitoyables que nous proposent l’Argent et
l’
État. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que l’Amérique !
813
îovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux que
l’
Amérique ! Achetez français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est ave
814
érique ! Achetez français ! Passez vos vacances à
la
mer ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis, le
815
vos vacances à la mer ! C’est avec ça qu’on fait
les
bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bo
816
er ! C’est avec ça qu’on fait les bons fascistes,
les
bons nazis, les vertueux komsomols, les petits bourgeois disciplinés.
817
ça qu’on fait les bons fascistes, les bons nazis,
les
vertueux komsomols, les petits bourgeois disciplinés. C’est ce confor
818
ascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols,
les
petits bourgeois disciplinés. C’est ce conformisme enthousiaste qui t
819
ennes, quel que soit leur régime politique. Ainsi
la
mesure n’est plus cette loi qui vit en l’homme réel et personnel, cet
820
. Ainsi la mesure n’est plus cette loi qui vit en
l’
homme réel et personnel, cette alliance du peuple avec sa vocation qui
821
e alliance du peuple avec sa vocation qui faisait
la
grandeur des cultures authentiques. Elle est devenue la loi inexorabl
822
ndeur des cultures authentiques. Elle est devenue
la
loi inexorable et mécanique qui plie l’individu à des calculs de mass
823
t devenue la loi inexorable et mécanique qui plie
l’
individu à des calculs de masses, à des disciplines extérieures, à des
824
ieures, à des ambitions inhumaines. Nous vivons à
l’
âge des mots d’ordre. L’on peut penser que c’est une espèce de progrès
825
inhumaines. Nous vivons à l’âge des mots d’ordre.
L’
on peut penser que c’est une espèce de progrès sur l’âge des clichés b
826
n peut penser que c’est une espèce de progrès sur
l’
âge des clichés bourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si l’o
827
progrès sur l’âge des clichés bourgeois. Mais si
les
mots d’ordre sont faux ? Si l’ordre qu’ils imposent est arbitraire, o
828
ourgeois. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si
l’
ordre qu’ils imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur l’indign
829
imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur
l’
indignité humaine ? Et si la propagande et la publicité qui ont pris l
830
s’il ne mise que sur l’indignité humaine ? Et si
la
propagande et la publicité qui ont pris la place des lieux communs sp
831
sur l’indignité humaine ? Et si la propagande et
la
publicité qui ont pris la place des lieux communs spirituels et effec
832
Et si la propagande et la publicité qui ont pris
la
place des lieux communs spirituels et effectifs ne nous ordonnent qu’
833
onnent qu’à des fins provisoires ou dégradantes :
l’
État totalitaire, et la richesse matérielle ? Que vaut alors cette com
834
ovisoires ou dégradantes : l’État totalitaire, et
la
richesse matérielle ? Que vaut alors cette communauté de réflexes et
835
nos défaites intimes, de nos dénis d’humanité, —
le
contraire absolu de la culture, si la culture est justement la part a
836
de nos dénis d’humanité, — le contraire absolu de
la
culture, si la culture est justement la part active que prend l’homme
837
humanité, — le contraire absolu de la culture, si
la
culture est justement la part active que prend l’homme à tout ce qui
838
absolu de la culture, si la culture est justement
la
part active que prend l’homme à tout ce qui est création dans la natu
839
la culture est justement la part active que prend
l’
homme à tout ce qui est création dans la nature, dans l’histoire, dans
840
que prend l’homme à tout ce qui est création dans
la
nature, dans l’histoire, dans la vie de l’esprit ? 24. Extrait d’u
841
e à tout ce qui est création dans la nature, dans
l’
histoire, dans la vie de l’esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitu
842
st création dans la nature, dans l’histoire, dans
la
vie de l’esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitulé Penser avec l
843
n dans la nature, dans l’histoire, dans la vie de
l’
esprit ? 24. Extrait d’un ouvrage intitulé Penser avec les mains ,
844
ec les mains , à paraître chez Albin Michel. 25.
Les
injures et les marques de mépris hautain dont se gratinent les poètes
845
à paraître chez Albin Michel. 25. Les injures et
les
marques de mépris hautain dont se gratinent les poètes, les essayiste
846
t les marques de mépris hautain dont se gratinent
les
poètes, les essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur s
847
s de mépris hautain dont se gratinent les poètes,
les
essayistes et les politiciens modernes, avec une fureur sans exemple
848
n dont se gratinent les poètes, les essayistes et
les
politiciens modernes, avec une fureur sans exemple dans l’histoire de
849
ciens modernes, avec une fureur sans exemple dans
l’
histoire de la culture, trahissent en somme l’impuissance pratique de
850
, avec une fureur sans exemple dans l’histoire de
la
culture, trahissent en somme l’impuissance pratique de notre langue.
851
ans l’histoire de la culture, trahissent en somme
l’
impuissance pratique de notre langue. Si les mots « portaient » réelle
852
somme l’impuissance pratique de notre langue. Si
les
mots « portaient » réellement, les écrivains seraient moins excités,
853
tre langue. Si les mots « portaient » réellement,
les
écrivains seraient moins excités, moins excessifs. La Terreur qui règ
854
crivains seraient moins excités, moins excessifs.
La
Terreur qui règne en permanence dans les revues d’avant-garde est le
855
xcessifs. La Terreur qui règne en permanence dans
les
revues d’avant-garde est le signe d’une rupture de contact, d’un impu
856
e en permanence dans les revues d’avant-garde est
le
signe d’une rupture de contact, d’un impuissant dépit, d’un profond p
857
d’un impuissant dépit, d’un profond pessimisme de
la
pensée qui désespère d’atteindre et de mouvoir effectivement les homm
858
désespère d’atteindre et de mouvoir effectivement
les
hommes. Cas de Nietzsche, des surréalistes, etc. Ce sont des êtres is
859
Contrairement à ce qui se passe normalement dans
les
cas d’homonymie ou de polysémie. Ainsi l’on ne risque pas de confondr
860
t dans les cas d’homonymie ou de polysémie. Ainsi
l’
on ne risque pas de confondre le vol à la tire et le vol plané dans la
861
polysémie. Ainsi l’on ne risque pas de confondre
le
vol à la tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis
862
e. Ainsi l’on ne risque pas de confondre le vol à
la
tire et le vol plané dans la conversation courante ; tandis que les d
863
on ne risque pas de confondre le vol à la tire et
le
vol plané dans la conversation courante ; tandis que les débats polit
864
e confondre le vol à la tire et le vol plané dans
la
conversation courante ; tandis que les débats politiques ou électorau
865
plané dans la conversation courante ; tandis que
les
débats politiques ou électoraux abondent en confusion de cette espèce
866
en confusion de cette espèce et s’en nourrissent.
L’
opération fameuse qui consiste à additionner les casseroles et les har
867
t. L’opération fameuse qui consiste à additionner
les
casseroles et les haricots est à la base de l’éloquence démagogique.
868
euse qui consiste à additionner les casseroles et
les
haricots est à la base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Den
869
additionner les casseroles et les haricots est à
la
base de l’éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Décadence
870
r les casseroles et les haricots est à la base de
l’
éloquence démagogique. e. Rougemont Denis de, « Décadence des lieux
871
Changer
la
vie ou changer l’homme ? (1937)u Variations du communisme Opp
872
Changer la vie ou changer
l’
homme ? (1937)u Variations du communisme Opposez les dogmes ch
873
(1937)u Variations du communisme Opposez
les
dogmes chrétiens aux axiomes de Marx et d’Engels, les communistes vou
874
dogmes chrétiens aux axiomes de Marx et d’Engels,
les
communistes vous répondront, non sans apparence d’à-propos, que l’opé
875
us répondront, non sans apparence d’à-propos, que
l’
opération les laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histoire
876
t, non sans apparence d’à-propos, que l’opération
les
laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histoire, non des vér
877
les laisse indifférents : ils sont sur le plan de
l’
histoire, non des vérités éternelles. Placez-vous donc sur ce plan his
878
ez en URSS par exemple. Constatez, comme beaucoup
l’
ont fait (qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que la dictatu
879
me beaucoup l’ont fait (qui sont sans aucun doute
les
plus honnêtes), que la dictature de Staline se rapproche des régimes
880
qui sont sans aucun doute les plus honnêtes), que
la
dictature de Staline se rapproche des régimes fascistes. Essayez d’en
881
des régimes fascistes. Essayez d’en conclure que
le
communisme c’est cela, s’il se confond, comme on nous l’affirmait, av
882
unisme c’est cela, s’il se confond, comme on nous
l’
affirmait, avec ses effets historiques. On vous répond que vous vous t
883
n’entendez rien au « devenir dialectique », dont
la
dictature actuelle n’est qu’un stade nécessaire mais provisoire. Vous
884
pprendrez qu’elle fut inventée par Hegel, qui eut
le
tort de la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur
885
u’elle fut inventée par Hegel, qui eut le tort de
la
fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : q
886
entée par Hegel, qui eut le tort de la fonder sur
l’
Esprit, ce qui était proprement la poser sur la tête : que le génie de
887
e la fonder sur l’Esprit, ce qui était proprement
la
poser sur la tête : que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en
888
ur l’Esprit, ce qui était proprement la poser sur
la
tête : que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant su
889
e qui était proprement la poser sur la tête : que
le
génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière é
890
ement la poser sur la tête : que le génie de Marx
l’
a remise sur ses pieds en la fondant sur la matière économique ; qu’ai
891
que le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en
la
fondant sur la matière économique ; qu’ainsi lestée, elle a pu se met
892
e Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur
la
matière économique ; qu’ainsi lestée, elle a pu se mettre en marche e
893
du réel ; que son but primitif était de détruire
l’
État au profit de l’homme concret, non sans avoir d’abord renforcé cet
894
ut primitif était de détruire l’État au profit de
l’
homme concret, non sans avoir d’abord renforcé cet État jusqu’à l’extr
895
non sans avoir d’abord renforcé cet État jusqu’à
l’
extrême qu’on nomme dictature ; et qu’enfin cette dictature disparaîtr
896
ure disparaîtra nécessairement, d’elle-même, avec
les
derniers opposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans le réel :
897
ec les derniers opposants. Vous pensiez être dans
l’
histoire, dans le réel : on vous invite maintenant à n’en pas croire v
898
pposants. Vous pensiez être dans l’histoire, dans
le
réel : on vous invite maintenant à n’en pas croire vos yeux, qui voie
899
ets, annonce une constitution qui renforce encore
l’
étatisme, et ne parle même plus de sa suppression future. Au contraire
900
arlent. On vous répond que c’est une nécessité de
la
tactique, dûment prévue d’ailleurs par les dialecticiens. Alors, peut
901
sité de la tactique, dûment prévue d’ailleurs par
les
dialecticiens. Alors, peut-être, vous commencez à entrevoir ce que si
902
oir ce que signifie : dialectique. C’est en fait,
l’
obéissance au parti, l’obéissance aveugle à Staline, dépositaire uniqu
903
ialectique. C’est en fait, l’obéissance au parti,
l’
obéissance aveugle à Staline, dépositaire unique de la doctrine. Quitt
904
éissance aveugle à Staline, dépositaire unique de
la
doctrine. Quitter le plan des vérités éternelles pour entrer dans le
905
aline, dépositaire unique de la doctrine. Quitter
le
plan des vérités éternelles pour entrer dans le plan de l’histoire, c
906
r le plan des vérités éternelles pour entrer dans
le
plan de l’histoire, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la
907
es vérités éternelles pour entrer dans le plan de
l’
histoire, cela signifiait donc, précisément, renoncer à la vérité, et
908
re, cela signifiait donc, précisément, renoncer à
la
vérité, et ne croire plus qu’à la tactique d’un dictateur, lequel cha
909
ent, renoncer à la vérité, et ne croire plus qu’à
la
tactique d’un dictateur, lequel changera la vérité tous les six mois.
910
qu’à la tactique d’un dictateur, lequel changera
la
vérité tous les six mois. Mais alors de quoi donc parle-t-on lorsqu’o
911
ue d’un dictateur, lequel changera la vérité tous
les
six mois. Mais alors de quoi donc parle-t-on lorsqu’on parle de commu
912
onc parle-t-on lorsqu’on parle de communisme ? Où
le
prendre ? En quoi peut résider l’identité d’une doctrine qui prétend
913
communisme ? Où le prendre ? En quoi peut résider
l’
identité d’une doctrine qui prétend justifier théoriquement, à quelque
914
er théoriquement, à quelques années d’intervalle,
la
démocratie des Soviets, puis la dictature de Staline ; le pacifisme à
915
ées d’intervalle, la démocratie des Soviets, puis
la
dictature de Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et l’impér
916
ratie des Soviets, puis la dictature de Staline ;
le
pacifisme à tout prix des débuts et l’impérialisme actuel (si mal dég
917
Staline ; le pacifisme à tout prix des débuts et
l’
impérialisme actuel (si mal déguisé par la IIIe Internationale) ; la l
918
buts et l’impérialisme actuel (si mal déguisé par
la
IIIe Internationale) ; la lutte contre l’État, et en même temps, le c
919
uel (si mal déguisé par la IIIe Internationale) ;
la
lutte contre l’État, et en même temps, le capitalisme d’État de Lénin
920
isé par la IIIe Internationale) ; la lutte contre
l’
État, et en même temps, le capitalisme d’État de Lénine ; l’expropriat
921
nale) ; la lutte contre l’État, et en même temps,
le
capitalisme d’État de Lénine ; l’expropriation des patrons en 1918, p
922
en même temps, le capitalisme d’État de Lénine ;
l’
expropriation des patrons en 1918, puis la restauration de la propriét
923
énine ; l’expropriation des patrons en 1918, puis
la
restauration de la propriété privée en 1933 ; la suppression de l’hér
924
tion des patrons en 1918, puis la restauration de
la
propriété privée en 1933 ; la suppression de l’héritage puis son réta
925
la restauration de la propriété privée en 1933 ;
la
suppression de l’héritage puis son rétablissement ; l’antimilitarisme
926
e la propriété privée en 1933 ; la suppression de
l’
héritage puis son rétablissement ; l’antimilitarisme et la création en
927
ppression de l’héritage puis son rétablissement ;
l’
antimilitarisme et la création enthousiaste d’une armée abondamment po
928
ge puis son rétablissement ; l’antimilitarisme et
la
création enthousiaste d’une armée abondamment pourvue de maréchaux ;
929
te d’une armée abondamment pourvue de maréchaux ;
l’
égalité sociale absolue puis la course aux salaires et aux grades ; la
930
vue de maréchaux ; l’égalité sociale absolue puis
la
course aux salaires et aux grades ; la ruine de la famille puis sa ré
931
solue puis la course aux salaires et aux grades ;
la
ruine de la famille puis sa réfection systématique ; la critique acer
932
a course aux salaires et aux grades ; la ruine de
la
famille puis sa réfection systématique ; la critique acerbe de la SDN
933
ne de la famille puis sa réfection systématique ;
la
critique acerbe de la SDN puis l’entrée dans cet organisme ? Tout cel
934
sa réfection systématique ; la critique acerbe de
la
SDN puis l’entrée dans cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je
935
systématique ; la critique acerbe de la SDN puis
l’
entrée dans cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je l’entends b
936
ns cet organisme ? Tout cela peut s’expliquer, je
l’
entends bien, par des nécessités pratiques et contingentes, et je n’ai
937
d’intellectuels défendre ces manœuvres au nom de
la
doctrine, et les justifier à tout coup (avec léger retard sur l’événe
938
défendre ces manœuvres au nom de la doctrine, et
les
justifier à tout coup (avec léger retard sur l’événement !) par des n
939
les justifier à tout coup (avec léger retard sur
l’
événement !) par des nécessités dites « dialectiques »… Les communiste
940
ent !) par des nécessités dites « dialectiques »…
Les
communistes sincères comprendront-ils que cette méthode figure aux ye
941
balance » (Pascal). Je m’en voudrais d’exploiter
l’
équivoque. Mais il fallait au moins rappeler son existence, sous peine
942
son existence, sous peine de tomber aussitôt dans
les
pièges grossiers qu’elle nous tend. (Pièges dans lesquels tombent les
943
qu’elle nous tend. (Pièges dans lesquels tombent
les
neuf dixièmes des adversaires du marxisme — et combien de marxistes e
944
tes eux-mêmes !) Si maintenant j’essaie de saisir
l’
identité foncière et la continuité de l’attitude communiste, au traver
945
ntenant j’essaie de saisir l’identité foncière et
la
continuité de l’attitude communiste, au travers des contradictions vi
946
de saisir l’identité foncière et la continuité de
l’
attitude communiste, au travers des contradictions violentes de ses té
947
en fin de compte, une grande volonté invariable :
la
volonté de changer le monde. Or une telle volonté ne saurait prendre
948
grande volonté invariable : la volonté de changer
le
monde. Or une telle volonté ne saurait prendre son élan que dans le s
949
elle volonté ne saurait prendre son élan que dans
le
sentiment insupportable d’un défaut inhérent au monde. Connaître qu’i
950
onc transformer toutes choses, tel est, je crois,
l’
acte initial mais aussi la passion constante du communiste conscient e
951
ses, tel est, je crois, l’acte initial mais aussi
la
passion constante du communiste conscient et conséquent. C’est ce mou
952
t profond qui légitime, à ses yeux tout au moins,
les
détours les plus tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’act
953
i légitime, à ses yeux tout au moins, les détours
les
plus tortueux, mettons les détours dialectiques, de l’action du parti
954
au moins, les détours les plus tortueux, mettons
les
détours dialectiques, de l’action du parti communiste41. La « cause »
955
us tortueux, mettons les détours dialectiques, de
l’
action du parti communiste41. La « cause » justifie les moyens… Mais a
956
dialectiques, de l’action du parti communiste41.
La
« cause » justifie les moyens… Mais alors, comment ne pas voir que ce
957
tion du parti communiste41. La « cause » justifie
les
moyens… Mais alors, comment ne pas voir que ce mouvement présente, da
958
ir que ce mouvement présente, dans sa forme, avec
le
mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre le péché) les plus fra
959
le mouvement du chrétien (qui est sa lutte contre
le
péché) les plus frappantes analogies ? Sur ce plan seul, il m’apparaî
960
nt du chrétien (qui est sa lutte contre le péché)
les
plus frappantes analogies ? Sur ce plan seul, il m’apparaît qu’une co
961
m’apparaît qu’une confrontation soit possible.
L’
homme d’abord, ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chr
962
nfrontation soit possible. L’homme d’abord, ou
le
monde d’abord ? Le marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que
963
ble. L’homme d’abord, ou le monde d’abord ?
Le
marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que l’homme n’existe pas
964
ou le monde d’abord ? Le marxiste, tout comme
le
chrétien, a reconnu que l’homme n’existe pas isolément, qu’il est un
965
e marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu que
l’
homme n’existe pas isolément, qu’il est un être « en relation », qu’il
966
», qu’il est lié à une société42. Mais encore, à
l’
instar du chrétien, le marxiste croit que la société présente n’a pas
967
e société42. Mais encore, à l’instar du chrétien,
le
marxiste croit que la société présente n’a pas le droit de déterminer
968
re, à l’instar du chrétien, le marxiste croit que
la
société présente n’a pas le droit de déterminer le tout de l’homme, e
969
le marxiste croit que la société présente n’a pas
le
droit de déterminer le tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle e
970
a société présente n’a pas le droit de déterminer
le
tout de l’homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-
971
résente n’a pas le droit de déterminer le tout de
l’
homme, et ne le peut pas. Car elle est divisée contre elle-même, et fa
972
le droit de déterminer le tout de l’homme, et ne
le
peut pas. Car elle est divisée contre elle-même, et fait de l’homme q
973
Car elle est divisée contre elle-même, et fait de
l’
homme qui s’abandonne à elle un être antinomique, « divisé », et comme
974
aliéné » de ce qu’il y a de plus humain en lui. À
la
découverte de « cette aliénation de soi », qui selon Marx serait le f
975
cette aliénation de soi », qui selon Marx serait
le
fait de toutes les sociétés passées, y compris le communisme primitif
976
de soi », qui selon Marx serait le fait de toutes
les
sociétés passées, y compris le communisme primitif, correspond formel
977
le fait de toutes les sociétés passées, y compris
le
communisme primitif, correspond formellement, dans le diagnostic chré
978
ommunisme primitif, correspond formellement, dans
le
diagnostic chrétien, la reconnaissance d’une corruption fondamentale,
979
espond formellement, dans le diagnostic chrétien,
la
reconnaissance d’une corruption fondamentale, qui est le péché origin
980
nnaissance d’une corruption fondamentale, qui est
le
péché originel. Il s’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que pour
981
, qui est le péché originel. Il s’ensuit que pour
le
marxiste, aussi bien que pour le chrétien, l’homme ne pourra trouver
982
’ensuit que pour le marxiste, aussi bien que pour
le
chrétien, l’homme ne pourra trouver sa plénitude et se « regagner tot
983
our le marxiste, aussi bien que pour le chrétien,
l’
homme ne pourra trouver sa plénitude et se « regagner totalement »43 q
984
sa plénitude et se « regagner totalement »43 qu’à
la
faveur d’une économie44 radicalement renouvelée. Une réaction semblab
985
emblable — toujours dans sa forme — dressera donc
le
chrétien et le marxiste contre toute espèce de statisme, contre toute
986
ours dans sa forme — dressera donc le chrétien et
le
marxiste contre toute espèce de statisme, contre toute spéculation id
987
ger quelque chose, — à lutter efficacement contre
le
mal universel. Cette volonté fondamentale de transformation, je la tr
988
Cette volonté fondamentale de transformation, je
la
trouve formulée et résumée, de part et d’autre, par deux propositions
989
ement claires qui, tout en affirmant avec vigueur
la
nécessité d’un « changement », et d’un changement pratique, concret,
990
, quant aux voies et moyens qu’elles préconisent.
La
2e thèse de Marx sur Feuerbach affirme : Les philosophes n’ont fait
991
ent. La 2e thèse de Marx sur Feuerbach affirme :
Les
philosophes n’ont fait jusqu’ici qu’interpréter diversement le monde
992
s n’ont fait jusqu’ici qu’interpréter diversement
le
monde ; or il s’agit maintenant de le transformer. Et l’apôtre Paul
993
diversement le monde ; or il s’agit maintenant de
le
transformer. Et l’apôtre Paul écrit dans sa Lettre aux Romains (12,
994
; or il s’agit maintenant de le transformer. Et
l’
apôtre Paul écrit dans sa Lettre aux Romains (12, 2) : Ne vous confor
995
s à ce siècle présent, mais soyez transformés par
le
renouvellement de votre sens, afin que vous discerniez quelle est la
996
e votre sens, afin que vous discerniez quelle est
la
volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans les deux
997
Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Dans
les
deux cas, il s’agit du même mot : transformer ; et il s’agit de trans
998
sformer ; et il s’agit de transformer en tant que
l’
on est proprement humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à l’Espr
999
n est proprement humain (c’est-à-dire en tant que
l’
on obéit à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution
1000
ent humain (c’est-à-dire en tant que l’on obéit à
l’
Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait la révolution, pour Marx).
1001
l’on obéit à l’Esprit, pour Paul, et en tant que
l’
on fait la révolution, pour Marx). Il s’agit donc d’action. Il s’agit
1002
t à l’Esprit, pour Paul, et en tant que l’on fait
la
révolution, pour Marx). Il s’agit donc d’action. Il s’agit d’attester
1003
l s’agit donc d’action. Il s’agit d’attester soit
la
foi, par une réalisation des volontés de Dieu, contrariant celles du
1004
tés de Dieu, contrariant celles du siècle, — soit
la
pensée, par une action45 qui ne peut être que révolutionnaire. Et cep
1005
ui ne peut être que révolutionnaire. Et cependant
l’
opposition de Marx et de l’apôtre éclate en ceci : que Paul veut trans
1006
ionnaire. Et cependant l’opposition de Marx et de
l’
apôtre éclate en ceci : que Paul veut transformer l’homme d’abord — et
1007
apôtre éclate en ceci : que Paul veut transformer
l’
homme d’abord — et le monde par lui — tandis que Marx veut transformer
1008
: que Paul veut transformer l’homme d’abord — et
le
monde par lui — tandis que Marx veut transformer le monde d’abord, —
1009
monde par lui — tandis que Marx veut transformer
le
monde d’abord, — et l’homme par lui. C’est sur le fait de cette oppos
1010
que Marx veut transformer le monde d’abord, — et
l’
homme par lui. C’est sur le fait de cette opposition centrale qu’il im
1011
le monde d’abord, — et l’homme par lui. C’est sur
le
fait de cette opposition centrale qu’il importe d’être bien au clair,
1012
n centrale qu’il importe d’être bien au clair, si
l’
on veut comprendre pourquoi la pratique et les fins du communisme cont
1013
e bien au clair, si l’on veut comprendre pourquoi
la
pratique et les fins du communisme contredisent radicalement la prati
1014
, si l’on veut comprendre pourquoi la pratique et
les
fins du communisme contredisent radicalement la pratique et les fins
1015
les fins du communisme contredisent radicalement
la
pratique et les fins du christianisme, dont elles dérivent d’ailleurs
1016
mmunisme contredisent radicalement la pratique et
les
fins du christianisme, dont elles dérivent d’ailleurs obscurément, ma
1017
nels, abandonnées aux seules lois du Temps. De
la
polémique antispiritualiste à la doctrine marxiste On ne répétera
1018
du Temps. De la polémique antispiritualiste à
la
doctrine marxiste On ne répétera jamais assez que la doctrine orig
1019
trine marxiste On ne répétera jamais assez que
la
doctrine originelle de Marx est avant tout la mise en forme d’une pol
1020
que la doctrine originelle de Marx est avant tout
la
mise en forme d’une polémique. Elle est, très consciemment, condition
1021
ue. Elle est, très consciemment, conditionnée par
la
situation de l’Europe occidentale vers le milieu du xixe siècle, et
1022
ès consciemment, conditionnée par la situation de
l’
Europe occidentale vers le milieu du xixe siècle, et par la volonté d
1023
née par la situation de l’Europe occidentale vers
le
milieu du xixe siècle, et par la volonté de la changer. En particuli
1024
ccidentale vers le milieu du xixe siècle, et par
la
volonté de la changer. En particulier, elle n’est « matérialiste », a
1025
s le milieu du xixe siècle, et par la volonté de
la
changer. En particulier, elle n’est « matérialiste », au sens vulgair
1026
’est « matérialiste », au sens vulgaire, que dans
la
mesure où la mentalité de l’époque peut être qualifiée — et se qualif
1027
aliste », au sens vulgaire, que dans la mesure où
la
mentalité de l’époque peut être qualifiée — et se qualifie elle-même
1028
s vulgaire, que dans la mesure où la mentalité de
l’
époque peut être qualifiée — et se qualifie elle-même — de spiritualis
1029
se qualifie elle-même — de spiritualiste, au sens
le
plus contestable du terme. Quelle était, du point de vue religieux, l
1030
u terme. Quelle était, du point de vue religieux,
la
situation qui se présentait à Marx ? C’était celle de la Restauration
1031
ation qui se présentait à Marx ? C’était celle de
la
Restauration. Professeurs et bourgeois libéraux, grands patrons du ca
1032
ant en Angleterre et en Allemagne, théologiens de
l’
école hégélienne, ou adversaires du christianisme, tous, dans un commu
1033
ssaient entendre, par leur attitude pratique, que
la
religion concerne « l’homme intérieur » et rien que lui. C’était une
1034
eur attitude pratique, que la religion concerne «
l’
homme intérieur » et rien que lui. C’était une « affaire privée » ; et
1035
ait une « affaire privée » ; et Marx n’a fait que
le
constater. Elle n’empêchait nullement de faire des affaires. Ni d’opp
1036
it nullement de faire des affaires. Ni d’opprimer
les
ouvriers. Ni d’appeler justice, au besoin, ce qui était utile aux maî
1037
stice, au besoin, ce qui était utile aux maîtres.
La
religion ne semblait plus gêner personne46. Elle sanctionnait et prot
1038
gêner personne46. Elle sanctionnait et protégeait
l’
ordre établi. Elle traduisait cet établissement même, et non plus ce q
1039
uisait cet établissement même, et non plus ce qui
l’
eût jugé. Marx ne perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à la
1040
l’eût jugé. Marx ne perd pas son temps à dénoncer
l’
erreur qui est à la base d’une pareille imposture : il la sait trop pr
1041
perd pas son temps à dénoncer l’erreur qui est à
la
base d’une pareille imposture : il la sait trop profondément enraciné
1042
r qui est à la base d’une pareille imposture : il
la
sait trop profondément enracinée dans l’homme pour être atteinte par
1043
ure : il la sait trop profondément enracinée dans
l’
homme pour être atteinte par une simple critique philosophique47. Or c
1044
losophique47. Or cette critique philosophique est
la
seule arme dont il disposerait sur le plan de l’« esprit », car il es
1045
la seule arme dont il disposerait sur le plan de
l’
« esprit », car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas l’« esprit
1046
», car il est incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas
l’
« esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme, que les spiritualistes aba
1047
ce n’est pas l’« esprit » qu’il veut sauver, mais
l’
homme, que les spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhu
1048
l’« esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme, que
les
spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhumain. Il lui f
1049
recourir à un autre ordre d’arguments : ceux que
l’
on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part la violence prolétarien
1050
l’on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part
la
violence prolétarienne, d’autre part la « science » infaillible des l
1051
’une part la violence prolétarienne, d’autre part
la
« science » infaillible des lois de l’évolution économique, qu’il for
1052
autre part la « science » infaillible des lois de
l’
évolution économique, qu’il formule. Je résume et je simplifie ce proc
1053
fie ce processus : ceux qui prétendent réformer «
l’
intérieur » se gardent bien de toucher à l’extérieur. Marx dira donc,
1054
rmer « l’intérieur » se gardent bien de toucher à
l’
extérieur. Marx dira donc, contre eux, qu’il faut d’abord transformer
1055
donc, contre eux, qu’il faut d’abord transformer
l’
extérieur — et le reste suivra nécessairement. Pour sauver le reste —
1056
, qu’il faut d’abord transformer l’extérieur — et
le
reste suivra nécessairement. Pour sauver le reste — disons : la cultu
1057
— et le reste suivra nécessairement. Pour sauver
le
reste — disons : la culture, l’esprit, et l’âme si l’on y tient — il
1058
a nécessairement. Pour sauver le reste — disons :
la
culture, l’esprit, et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par l
1059
ment. Pour sauver le reste — disons : la culture,
l’
esprit, et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’«
1060
uver le reste — disons : la culture, l’esprit, et
l’
âme si l’on y tient — il faut commencer par le nier. L’« esprit » du b
1061
este — disons : la culture, l’esprit, et l’âme si
l’
on y tient — il faut commencer par le nier. L’« esprit » du bourgeois
1062
et l’âme si l’on y tient — il faut commencer par
le
nier. L’« esprit » du bourgeois spiritualiste n’est qu’une caricature
1063
si l’on y tient — il faut commencer par le nier.
L’
« esprit » du bourgeois spiritualiste n’est qu’une caricature, mais se
1064
nt déjà tels qu’on ne peut plus songer à rétablir
la
vérité par des moyens purement spirituels. Au mensonge spiritualiste,
1065
t spirituels. Au mensonge spiritualiste, opposons
l’
argument frappant d’un matérialisme polémique : nous l’appellerons mat
1066
ument frappant d’un matérialisme polémique : nous
l’
appellerons matérialisme dialectique, pour indiquer qu’il n’est que pr
1067
instrumental, qu’il doit servir au bout du compte
la
vérité — laquelle contient aussi l’« esprit » — bref qu’il n’est en
1068
t du compte la vérité — laquelle contient aussi
l’
« esprit » — bref qu’il n’est en somme qu’une tactique. Faisons de néc
1069
ons de nécessité vertu. Proposons-nous de changer
les
choses et leurs rapports, de changer « le monde », c’est-à-dire les r
1070
hanger les choses et leurs rapports, de changer «
le
monde », c’est-à-dire les rapports économiques et sociaux. Et s’il no
1071
s rapports, de changer « le monde », c’est-à-dire
les
rapports économiques et sociaux. Et s’il nous reste encore du temps,
1072
s’il nous reste encore du temps, nous changerons
l’
homme. D’ailleurs, peut-être suffit-il de changer le cadre matériel po
1073
homme. D’ailleurs, peut-être suffit-il de changer
le
cadre matériel pour que le contenu se transforme ? N’a-t-on pas démon
1074
e suffit-il de changer le cadre matériel pour que
le
contenu se transforme ? N’a-t-on pas démontré déjà que la culture, pa
1075
nu se transforme ? N’a-t-on pas démontré déjà que
la
culture, par exemple, n’est qu’un « reflet » du processus économique
1076
e prend à son jeu polémique. Ce ne fut guère qu’à
la
fin de sa carrière que son ami Engels en découvrit le danger. « Marx
1077
in de sa carrière que son ami Engels en découvrit
le
danger. « Marx et moi — écrit-il en 1890 — nous sommes peut-être resp
1078
disciples ont insisté plus qu’il ne convenait sur
les
facteurs économiques. Nous étions forcés d’insister sur leur caractèr
1079
fondamental, par opposition à nos adversaires qui
le
niaient, et nous n’eûmes pas toujours le temps ni l’occasion de rendr
1080
ires qui le niaient, et nous n’eûmes pas toujours
le
temps ni l’occasion de rendre justice aux autres facteurs. » De la
1081
niaient, et nous n’eûmes pas toujours le temps ni
l’
occasion de rendre justice aux autres facteurs. » De la doctrine ma
1082
on de rendre justice aux autres facteurs. » De
la
doctrine marxiste à la tactique stalinienne En effet, de ce « mens
1083
x autres facteurs. » De la doctrine marxiste à
la
tactique stalinienne En effet, de ce « mensonge » opportuniste qu’
1084
n effet, de ce « mensonge » opportuniste qu’était
le
matérialisme polémique, promu par un glissement inévitable au rang de
1085
table au rang de doctrine du parti, devait sortir
la
« vérité » tactique du matérialisme vulgaire, celui que la presse bou
1086
té » tactique du matérialisme vulgaire, celui que
la
presse bourgeoise a si beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore qu’el
1087
beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore qu’elle
le
pratique elle-même sans vergogne, tout en le niant pour les besoins d
1088
elle le pratique elle-même sans vergogne, tout en
le
niant pour les besoins de sa cause. Ce matérialisme vulgaire, que Mar
1089
ue elle-même sans vergogne, tout en le niant pour
les
besoins de sa cause. Ce matérialisme vulgaire, que Marx avait tout d’
1090
u exactement symétrique de celui des idéalistes :
la
croyance que si l’on change l’ordre des choses, on change automatique
1091
ique de celui des idéalistes : la croyance que si
l’
on change l’ordre des choses, on change automatiquement la réalité hum
1092
i des idéalistes : la croyance que si l’on change
l’
ordre des choses, on change automatiquement la réalité humaine. Obligé
1093
nge l’ordre des choses, on change automatiquement
la
réalité humaine. Obligé par ses adversaires à proclamer la primauté d
1094
é humaine. Obligé par ses adversaires à proclamer
la
primauté du matériel, Marx ne se rendit pas compte qu’il allait décha
1095
rreur non moins grave que celle des défenseurs de
l’
esprit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous
1096
grave que celle des défenseurs de l’esprit pur :
l’
erreur qui porte l’homme à croire que la cause de tous ses malheurs es
1097
s défenseurs de l’esprit pur : l’erreur qui porte
l’
homme à croire que la cause de tous ses malheurs est dans les choses,
1098
rit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire que
la
cause de tous ses malheurs est dans les choses, et non dans lui. (Il
1099
croire que la cause de tous ses malheurs est dans
les
choses, et non dans lui. (Il n’en fut pas conscient, et pourtant il e
1100
nsable, nous reviendrons plus tard sur ce point.)
Le
peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas le
1101
viendrons plus tard sur ce point.) Le peuple — et
la
bourgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas le moine, et que
1102
Le peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète que
l’
habit ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur. Pr
1103
urgeoisie donc ! — répète que l’habit ne fait pas
le
moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit
1104
— répète que l’habit ne fait pas le moine, et que
l’
argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer qu
1105
ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas
le
bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer que l’habit fait le moi
1106
bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer que
l’
habit fait le moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui ex
1107
iquement, il croit dur comme fer que l’habit fait
le
moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15
1108
it dur comme fer que l’habit fait le moine et que
l’
argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15 volumes — dont
1109
er que l’habit fait le moine et que l’argent fait
le
bonheur. Marx vient lui expliquer en 15 volumes — dont on a fait des
1110
Marx vient lui démontrer que ceux qui prétendent
le
contraire, et qui prêchent que l’argent ne fait pas le bonheur, sont
1111
qui prétendent le contraire, et qui prêchent que
l’
argent ne fait pas le bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui on
1112
ntraire, et qui prêchent que l’argent ne fait pas
le
bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui ont l’argent et qui veu
1113
bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui ont
l’
argent et qui veulent le garder — justement parce qu’il fait leur bonh
1114
des exploiteurs, qui ont l’argent et qui veulent
le
garder — justement parce qu’il fait leur bonheur ! Alors, il n’y a pl
1115
ors, il n’y a plus qu’une seule voie : instituons
le
plan quinquennal, créons une industrie puissante, faisons mieux que l
1116
créons une industrie puissante, faisons mieux que
l’
Amérique, devenons encore plus riches, car l’argent distribué aux mass
1117
que l’Amérique, devenons encore plus riches, car
l’
argent distribué aux masses ne manque pas de créer du bonheur. Pour ré
1118
nheur. Pour réussir, il faut une discipline. Pour
la
maintenir, il faut un dictateur. Libre aux bourgeois, aux scrupuleux,
1119
e lui-même de s’indigner : il faut ce qu’il faut.
L’
étatisme dictatorial contredit la doctrine de Marx ? Qu’importe, puisq
1120
t ce qu’il faut. L’étatisme dictatorial contredit
la
doctrine de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est la richesse,
1121
ntredit la doctrine de Marx ? Qu’importe, puisque
le
but final est la richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce que vo
1122
ne de Marx ? Qu’importe, puisque le but final est
la
richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce que voulait Marx ? Résu
1123
que voulait Marx ? Résumons : Marx n’a pas voulu
le
matérialisme vulgaire. Mais les nécessités de la polémique d’une part
1124
Marx n’a pas voulu le matérialisme vulgaire. Mais
les
nécessités de la polémique d’une part, — et sa définition de l’homme
1125
le matérialisme vulgaire. Mais les nécessités de
la
polémique d’une part, — et sa définition de l’homme concret, purement
1126
de la polémique d’une part, — et sa définition de
l’
homme concret, purement social, d’autre part, l’ont amené à mettre l’a
1127
e l’homme concret, purement social, d’autre part,
l’
ont amené à mettre l’accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet
1128
rement social, d’autre part, l’ont amené à mettre
l’
accent sur les facteurs matérialistes. C’est cet accent que « les mass
1129
, d’autre part, l’ont amené à mettre l’accent sur
les
facteurs matérialistes. C’est cet accent que « les masses » ont senti
1130
es facteurs matérialistes. C’est cet accent que «
les
masses » ont senti, parce que tout les y prédisposait. Le résultat, c
1131
cent que « les masses » ont senti, parce que tout
les
y prédisposait. Le résultat, c’est l’URSS de Staline, régime dont je
1132
s » ont senti, parce que tout les y prédisposait.
Le
résultat, c’est l’URSS de Staline, régime dont je voudrais bien qu’on
1133
e que tout les y prédisposait. Le résultat, c’est
l’
URSS de Staline, régime dont je voudrais bien qu’on me démontre en quo
1134
ontre en quoi il diffère du fascisme, dans ce que
le
fascisme a de plus oppressif pour l’homme et pour sa liberté. L’at
1135
dans ce que le fascisme a de plus oppressif pour
l’
homme et pour sa liberté. L’attitude chrétienne devant le « monde »
1136
lus oppressif pour l’homme et pour sa liberté.
L’
attitude chrétienne devant le « monde » On parle avec raison de « d
1137
pour sa liberté. L’attitude chrétienne devant
le
« monde » On parle avec raison de « doctrine » marxiste, d’« idéol
1138
ire une confusion irrémédiable que de parler dans
le
même sens d’une « doctrine » du christianisme. Le chrétien, et surtou
1139
le même sens d’une « doctrine » du christianisme.
Le
chrétien, et surtout le protestant, répugne absolument à concevoir qu
1140
trine » du christianisme. Le chrétien, et surtout
le
protestant, répugne absolument à concevoir que les dogmes théologique
1141
le protestant, répugne absolument à concevoir que
les
dogmes théologiques puissent figurer la théorie d’une pratique49. Le
1142
voir que les dogmes théologiques puissent figurer
la
théorie d’une pratique49. Le christianisme n’est pas un programme ; n
1143
ues puissent figurer la théorie d’une pratique49.
Le
christianisme n’est pas un programme ; ni, comme le disent certains p
1144
christianisme n’est pas un programme ; ni, comme
le
disent certains primaires marxistes, une « idéologie » ; ni une tacti
1145
attitude totale. (Je dirais bien totalitaire, si
le
mot n’avait été pareillement perverti par les caricatures séculières
1146
, si le mot n’avait été pareillement perverti par
les
caricatures séculières de la révolution chrétienne.) La vie et la pen
1147
lement perverti par les caricatures séculières de
la
révolution chrétienne.) La vie et la pensée chrétiennes, en effet, se
1148
icatures séculières de la révolution chrétienne.)
La
vie et la pensée chrétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant
1149
éculières de la révolution chrétienne.) La vie et
la
pensée chrétiennes, en effet, se réfèrent à chaque instant à ce qui d
1150
, se réfèrent à chaque instant à ce qui détermine
le
tout de l’homme : son origine, sa fin, et sa mission présente. Le chr
1151
nt à chaque instant à ce qui détermine le tout de
l’
homme : son origine, sa fin, et sa mission présente. Le chrétien sait
1152
me : son origine, sa fin, et sa mission présente.
Le
chrétien sait qu’il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers le Roy
1153
n présente. Le chrétien sait qu’il vient de Dieu,
le
Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et q
1154
qu’il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers
le
Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et qu’il a pour mission actuelle
1155
, le Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu,
le
Réconciliateur ; et qu’il a pour mission actuelle d’obéir à une Parol
1156
tuelle d’obéir à une Parole qui est Jésus-Christ,
le
Médiateur. Mais cette Parole juge « le monde » qui l’a rejetée. Elle
1157
us-Christ, le Médiateur. Mais cette Parole juge «
le
monde » qui l’a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre les hommes qu
1158
édiateur. Mais cette Parole juge « le monde » qui
l’
a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre les hommes qui refusent tota
1159
» qui l’a rejetée. Elle ne sauve que ceux d’entre
les
hommes qui refusent totalement ce monde et s’attendent totalement au
1160
ume. Ce refus, cette attente active50 constituent
la
révolution la plus radicale qui soit, disons mieux : la seule radical
1161
cette attente active50 constituent la révolution
la
plus radicale qui soit, disons mieux : la seule radicale. Et toutes l
1162
olution la plus radicale qui soit, disons mieux :
la
seule radicale. Et toutes les autres, dans notre Occident troublé par
1163
soit, disons mieux : la seule radicale. Et toutes
les
autres, dans notre Occident troublé par un message qu’il méconnaît, n
1164
oublé par un message qu’il méconnaît, ne sont que
les
reflets énigmatiques de cet événement primordial — ses succédanés tem
1165
ordial — ses succédanés temporels, en dérive vers
le
néant. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transf
1166
… » Cela ne signifie pas, pour un chrétien, que «
le
monde » soit abandonné. Cela ne signifie pas qu’une fois opérée cette
1167
fois opérée cette transformation personnelle que
l’
on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à sub
1168
e cette transformation personnelle que l’on nomme
la
conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémis
1169
rmation personnelle que l’on nomme la conversion,
le
chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémissant les lois d
1170
n’ait plus qu’à attendre, et à subir en gémissant
les
lois d’un monde qu’il condamne ! Car alors, où serait son refus ? Et
1171
ormisme triomphant ? C’est bien là ce que pensent
les
marxistes, mais c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur l’ho
1172
c’est aussi où apparaît leur erreur initiale sur
l’
homme. Leur ignorance ou leur aveuglement quant au devoir, et au pouvo
1173
ur aveuglement quant au devoir, et au pouvoir, de
l’
homme transformé par la foi. L’homme nouveau, selon l’Évangile, est un
1174
devoir, et au pouvoir, de l’homme transformé par
la
foi. L’homme nouveau, selon l’Évangile, est un homme qui a changé de
1175
et au pouvoir, de l’homme transformé par la foi.
L’
homme nouveau, selon l’Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il
1176
mme transformé par la foi. L’homme nouveau, selon
l’
Évangile, est un homme qui a changé de sens. Il est orienté autrement,
1177
a changé de sens. Il est orienté autrement, comme
l’
indique le mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse,
1178
e sens. Il est orienté autrement, comme l’indique
le
mot conversion. Obéissant à la Parole que Dieu lui adresse, il reconn
1179
t, comme l’indique le mot conversion. Obéissant à
la
Parole que Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup l’origine et l
1180
e que Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup
l’
origine et le but de sa vie : il connaît dès lors son péché, tout ce q
1181
i adresse, il reconnaît du même coup l’origine et
le
but de sa vie : il connaît dès lors son péché, tout ce qui l’écartait
1182
vie : il connaît dès lors son péché, tout ce qui
l’
écartait de sa voie. Mais il se connaît du même coup responsable à l’e
1183
ie. Mais il se connaît du même coup responsable à
l’
endroit du monde. Car si le monde s’est livré à l’injustice et au déso
1184
ême coup responsable à l’endroit du monde. Car si
le
monde s’est livré à l’injustice et au désordre, c’est par la faute de
1185
l’endroit du monde. Car si le monde s’est livré à
l’
injustice et au désordre, c’est par la faute de l’homme, qui était son
1186
est livré à l’injustice et au désordre, c’est par
la
faute de l’homme, qui était son roi, et qui a trahi. Et tout péché in
1187
l’injustice et au désordre, c’est par la faute de
l’
homme, qui était son roi, et qui a trahi. Et tout péché individuel rép
1188
ute. Ainsi : conscience du péché, connaissance de
la
fin et de l’origine, obligation d’agir pour racheter le mal commis, s
1189
conscience du péché, connaissance de la fin et de
l’
origine, obligation d’agir pour racheter le mal commis, sont trois mom
1190
et de l’origine, obligation d’agir pour racheter
le
mal commis, sont trois moments indivisibles de la « transformation »
1191
le mal commis, sont trois moments indivisibles de
la
« transformation » dont parle Paul. L’un n’est pas concevable, sérieu
1192
utre. « Toute droite connaissance de Dieu naît de
l’
obéissance », écrit Calvin. Et que serait une obéissance qui ne se man
1193
rait une obéissance qui ne se manifesterait pas ?
La
transformation personnelle, au sens total de l’Évangile, ne peut donc
1194
? La transformation personnelle, au sens total de
l’
Évangile, ne peut donc se traduire, si elle s’est faite, que par une a
1195
st faite, que par une action du chrétien : contre
le
monde dans sa forme présente, et pour le monde restauré dans la Prome
1196
: contre le monde dans sa forme présente, et pour
le
monde restauré dans la Promesse. Il faut aller plus loin que cette af
1197
sa forme présente, et pour le monde restauré dans
la
Promesse. Il faut aller plus loin que cette affirmation tout évidente
1198
ue cette affirmation tout évidente. Non seulement
l’
homme converti devient transformateur du monde — ou sinon il n’est pas
1199
as converti — mais encore toute transformation de
la
forme actuelle des choses, qui ne serait pas l’effet d’une conversion
1200
e la forme actuelle des choses, qui ne serait pas
l’
effet d’une conversion des hommes, ne doit être aux yeux du chrétien,
1201
Voilà qui paraîtra plus scandaleux. Et cependant
l’
Évangile est formel : « Que servirait à un homme de gagner le monde, s
1202
est formel : « Que servirait à un homme de gagner
le
monde, s’il perdait son âme ? » Son âme, c’est-à-dire la conscience d
1203
e, s’il perdait son âme ? » Son âme, c’est-à-dire
la
conscience de son origine et de sa fin, du sens même de son action, d
1204
ns pas de vérités « purement théologiques » comme
le
dirait un incroyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit le chré
1205
s » comme le dirait un incroyant. Que servirait à
l’
homme, tel que le voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et mor
1206
it un incroyant. Que servirait à l’homme, tel que
le
voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à
1207
croyant. Que servirait à l’homme, tel que le voit
le
chrétien, de sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à la guer
1208
sauver sa vie matérielle et morale, d’échapper à
la
guerre, à la misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule
1209
e matérielle et morale, d’échapper à la guerre, à
la
misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose nécess
1210
et morale, d’échapper à la guerre, à la misère, à
l’
oppression, s’il ignore ou refuse « la seule chose nécessaire », le se
1211
a misère, à l’oppression, s’il ignore ou refuse «
la
seule chose nécessaire », le seul gage du salut total ? Alors, va-t-o
1212
l ignore ou refuse « la seule chose nécessaire »,
le
seul gage du salut total ? Alors, va-t-on, si l’on est converti, lais
1213
le seul gage du salut total ? Alors, va-t-on, si
l’
on est converti, laisser le monde aller son train, et les guerres se d
1214
l ? Alors, va-t-on, si l’on est converti, laisser
le
monde aller son train, et les guerres se déchaîner, et les chômeurs m
1215
st converti, laisser le monde aller son train, et
les
guerres se déchaîner, et les chômeurs mourir de faim ? Ce serait prou
1216
aller son train, et les guerres se déchaîner, et
les
chômeurs mourir de faim ? Ce serait prouver qu’on n’est pas converti.
1217
t pas converti. J’agirai donc, toutefois non pour
le
monde, et non pour sauver quelque bien, mais parce que je me sais res
1218
je ne puis supporter mon péché et ses effets dans
le
monde réel où vivent les hommes — où meurent les hommes. Reproches
1219
péché et ses effets dans le monde réel où vivent
les
hommes — où meurent les hommes. Reproches réciproques que s’adress
1220
s le monde réel où vivent les hommes — où meurent
les
hommes. Reproches réciproques que s’adressent les chrétiens et les
1221
hommes. Reproches réciproques que s’adressent
les
chrétiens et les marxistes Telle étant donc la conception chrétien
1222
ches réciproques que s’adressent les chrétiens et
les
marxistes Telle étant donc la conception chrétienne de l’homme, se
1223
es chrétiens et les marxistes Telle étant donc
la
conception chrétienne de l’homme, seul responsable du mal qui est dan
1224
s Telle étant donc la conception chrétienne de
l’
homme, seul responsable du mal qui est dans le monde, on comprendra qu
1225
de l’homme, seul responsable du mal qui est dans
le
monde, on comprendra que l’état d’esprit marxiste lui apparaisse néce
1226
e du mal qui est dans le monde, on comprendra que
l’
état d’esprit marxiste lui apparaisse nécessairement borné. Je me serv
1227
nécessairement borné. Je me servirai d’une image.
L’
enfant qui rate son coup, ou qui se heurte contre un meuble, se fâche
1228
u qui se heurte contre un meuble, se fâche contre
les
choses et les rend responsables. Il croit que c’est elles qu’il faut
1229
e contre un meuble, se fâche contre les choses et
les
rend responsables. Il croit que c’est elles qu’il faut changer. Il ba
1230
croit que c’est elles qu’il faut changer. Il bat
la
table, comme Xerxès faisait battre l’Hellespont. C’est ce préjugé inf
1231
ger. Il bat la table, comme Xerxès faisait battre
l’
Hellespont. C’est ce préjugé infantile que le marxisme devait consolid
1232
ttre l’Hellespont. C’est ce préjugé infantile que
le
marxisme devait consolider dans la conscience prolétarienne. Déviatio
1233
infantile que le marxisme devait consolider dans
la
conscience prolétarienne. Déviation grossière, dira-t-on ; mais pouva
1234
it-il pas dit qu’il fallait commencer par changer
l’
ordre matériel, l’ordre des choses, et que les hommes ensuite deviendr
1235
l fallait commencer par changer l’ordre matériel,
l’
ordre des choses, et que les hommes ensuite deviendraient plus habiles
1236
nger l’ordre matériel, l’ordre des choses, et que
les
hommes ensuite deviendraient plus habiles à s’entendre et à vivre heu
1237
biles à s’entendre et à vivre heureux ? « Changer
la
vie », criait l’enfant Rimbaud ! Et les intellectuels de gauche repre
1238
e et à vivre heureux ? « Changer la vie », criait
l’
enfant Rimbaud ! Et les intellectuels de gauche reprennent aujourd’hui
1239
« Changer la vie », criait l’enfant Rimbaud ! Et
les
intellectuels de gauche reprennent aujourd’hui cette devise, pour l’o
1240
gauche reprennent aujourd’hui cette devise, pour
l’
opposer au « spiritualisme » autant qu’à la routine et au cynisme des
1241
, pour l’opposer au « spiritualisme » autant qu’à
la
routine et au cynisme des conservateurs. Saint Paul n’a pas cette tra
1242
cette tragique naïveté. Il ne se fâche pas contre
l’
Empire romain, et ne désigne pas sa destruction comme premier objectif
1243
on comme premier objectif aux chrétiens. Pourtant
l’
Empire leur ôte toute liberté, et bientôt leur ôtera la vie ! Ne faut-
1244
ire leur ôte toute liberté, et bientôt leur ôtera
la
vie ! Ne faut-il pas « aller au plus pressé », sauver d’abord sa peau
1245
plus pressé », sauver d’abord sa peau, renverser
les
tyrans ? Ainsi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre
1246
ord sa peau, renverser les tyrans ? Ainsi parlent
le
bon sens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé la lutte sur c
1247
verser les tyrans ? Ainsi parlent le bon sens, et
le
marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’
1248
insi parlent le bon sens, et le marxisme. Mais si
l’
Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que l’on dit réaliste, à su
1249
ens, et le marxisme. Mais si l’Apôtre avait placé
la
lutte sur ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer que le « parti
1250
l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain que
l’
on dit réaliste, à supposer que le « parti chrétien » eût triomphé, ri
1251
ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer que
le
« parti chrétien » eût triomphé, rien ne l’eût empêché de subir le so
1252
r que le « parti chrétien » eût triomphé, rien ne
l’
eût empêché de subir le sort fatal des révoltes politiques : il eût re
1253
en » eût triomphé, rien ne l’eût empêché de subir
le
sort fatal des révoltes politiques : il eût revêtu les formes du pouv
1254
ort fatal des révoltes politiques : il eût revêtu
les
formes du pouvoir déposé51 et renvoyant à des temps plus paisibles l’
1255
déposé51 et renvoyant à des temps plus paisibles
l’
évangélisation — sa raison d’être — il se fût consacré aux tâches plus
1256
lus urgentes : donner du pain et des spectacles à
la
foule. Mais Paul était apôtre et non pas dictateur. C’est pourquoi so
1257
st encore prêché. Il annonçait aux hommes non pas
la
haine et le cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la
1258
êché. Il annonçait aux hommes non pas la haine et
le
cynisme — qui appartiennent à la forme du monde — mais la nouvelle, a
1259
pas la haine et le cynisme — qui appartiennent à
la
forme du monde — mais la nouvelle, absolument nouvelle, venant d’aill
1260
me — qui appartiennent à la forme du monde — mais
la
nouvelle, absolument nouvelle, venant d’ailleurs, d’au-delà de ce mon
1261
nne vivante et de son amour éternel. Il annonçait
l’
homme changé. Trop beau tout cela ! Trop beau pour être vrai, dit le m
1262
op beau tout cela ! Trop beau pour être vrai, dit
le
marxiste. (Chrétien, changé, je suis encore assez « vieil homme » pou
1263
changé, je suis encore assez « vieil homme » pour
le
comprendre.) Sur quoi repose cette transformation dont vous parlez ?
1264
e, et qu’elle m’ordonne d’ignorer. Je ne vois pas
les
effets d’une telle foi dans l’histoire de notre Occident52. Si je n’a
1265
r. Je ne vois pas les effets d’une telle foi dans
l’
histoire de notre Occident52. Si je n’ai pas votre foi, je ne les vois
1266
notre Occident52. Si je n’ai pas votre foi, je ne
les
vois pas. Je vois une Église établie, opprimant toutes les dissidence
1267
pas. Je vois une Église établie, opprimant toutes
les
dissidences, pactisant avec les puissants, soutenant partout les régi
1268
opprimant toutes les dissidences, pactisant avec
les
puissants, soutenant partout les régimes rétrogrades et prêchant la r
1269
, pactisant avec les puissants, soutenant partout
les
régimes rétrogrades et prêchant la résignation. C’est vraiment trop f
1270
enant partout les régimes rétrogrades et prêchant
la
résignation. C’est vraiment trop facile de se mettre en règle avec sa
1271
le avec sa mauvaise conscience, en prétextant que
l’
intérieur importe seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir l’h
1272
n prétextant que l’intérieur importe seul, et que
le
« pain de vie » suffit à nourrir l’homme ! Peut-être suffit-il à vous
1273
seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir
l’
homme ! Peut-être suffit-il à vous nourrir, personnellement, mais ce n
1274
sonnellement, mais ce n’est pas cela qui supprime
la
misère, qui empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut le dire
1275
’est pas cela qui supprime la misère, qui empêche
la
guerre, qui change le monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous c
1276
rime la misère, qui empêche la guerre, qui change
le
monde ! Il faut le dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproch
1277
empêche la guerre, qui change le monde ! Il faut
le
dire à notre honte, à nous chrétiens : ces reproches apparaissent jus
1278
hrétiens : ces reproches apparaissent justifiés à
la
grande masse des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi les «
1279
justifiés à la grande masse des travailleurs. Si
le
marxisme a provoqué parmi les « exploités » un tel soulèvement d’espé
1280
des travailleurs. Si le marxisme a provoqué parmi
les
« exploités » un tel soulèvement d’espérances, de telles vagues d’adh
1281
c’est qu’il s’est trouvé seul à protester contre
le
monde tel qu’il va. On dira : c’est d’abord qu’il a su rejeter sur l’
1282
a. On dira : c’est d’abord qu’il a su rejeter sur
l’
oppression capitaliste, trop réelle, tout le malheur inhérent à l’exis
1283
r sur l’oppression capitaliste, trop réelle, tout
le
malheur inhérent à l’existence, tout le malheur dont en vérité le péc
1284
italiste, trop réelle, tout le malheur inhérent à
l’
existence, tout le malheur dont en vérité le péché de chacun est respo
1285
lle, tout le malheur inhérent à l’existence, tout
le
malheur dont en vérité le péché de chacun est responsable. L’observat
1286
ent à l’existence, tout le malheur dont en vérité
le
péché de chacun est responsable. L’observation est juste ; elle est i
1287
ont en vérité le péché de chacun est responsable.
L’
observation est juste ; elle est insuffisante. Ce qui explique en dern
1288
insuffisante. Ce qui explique en dernier ressort
le
succès « religieux » du marxisme, c’est sa volonté proclamée, concrèt
1289
immédiate, de changer tout ; et non pas seulement
l’
« esprit » ou l’« intérieur ». Or si le marxisme a réussi cela, s’il a
1290
anger tout ; et non pas seulement l’« esprit » ou
l’
« intérieur ». Or si le marxisme a réussi cela, s’il a pu paraître cel
1291
seulement l’« esprit » ou l’« intérieur ». Or si
le
marxisme a réussi cela, s’il a pu paraître cela, c’est dans la mesure
1292
réussi cela, s’il a pu paraître cela, c’est dans
la
mesure où le christianisme, aux yeux des masses, n’a plus osé se mont
1293
s’il a pu paraître cela, c’est dans la mesure où
le
christianisme, aux yeux des masses, n’a plus osé se montrer chrétien.
1294
sses, n’a plus osé se montrer chrétien. C’est que
le
sel a perdu sa saveur, et son amertume salutaire. C’est que la seule
1295
u sa saveur, et son amertume salutaire. C’est que
la
seule espérance véritable et certaine n’a plus été prêchée au monde a
1296
attaque assez gênante et bouleversante. C’est que
l’
« esprit » qui devait être l’agent du changement total, perpétuel et s
1297
eversante. C’est que l’« esprit » qui devait être
l’
agent du changement total, perpétuel et seul réel, est devenu le gardi
1298
ngement total, perpétuel et seul réel, est devenu
le
gardien des conformismes, ou du moins n’a pas su, par excès de pruden
1299
s n’a pas su, par excès de prudence, empêcher que
les
foules le considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus respons
1300
u, par excès de prudence, empêcher que les foules
le
considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus responsables des
1301
empêcher que les foules le considèrent comme tel.
Les
chrétiens sont bien plus responsables des succès de Marx auprès des f
1302
nsables des succès de Marx auprès des foules, que
le
marxisme n’est responsable du déclin des Églises dans le monde modern
1303
isme n’est responsable du déclin des Églises dans
le
monde moderne. C’est pourquoi les reproches du marxiste au chrétien s
1304
des Églises dans le monde moderne. C’est pourquoi
les
reproches du marxiste au chrétien sont humainement bien plus valables
1305
isciples (que ce soit en paroles ou en actes). Si
les
chrétiens gardaient une conscience plus fidèle, partant plus douloure
1306
e ce fait, je crois qu’ils éviteraient d’attaquer
le
marxisme dans les mêmes termes que la réaction. Mais ceci dit, et mai
1307
is qu’ils éviteraient d’attaquer le marxisme dans
les
mêmes termes que la réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste qu
1308
d’attaquer le marxisme dans les mêmes termes que
la
réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste qu’en doctrine, et ind
1309
doctrine, et indépendamment de toutes nos fautes,
l’
objection marxiste ne vaut rien, alors que l’objection chrétienne est
1310
tes, l’objection marxiste ne vaut rien, alors que
l’
objection chrétienne est imparable. Quand un marxiste me reproche de m
1311
angement tout spirituel, et qui n’affecte en rien
le
cours des choses, je suis fondé à lui répondre : « Ton reproche s’adr
1312
eté, à mon absence de foi, mais non pas du tout à
la
foi. Car la foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a pas
1313
bsence de foi, mais non pas du tout à la foi. Car
la
foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne l’a pas impunément,
1314
foi, dit Luther, est ‟une chose inquiète”, on ne
l’
a pas impunément, et si on l’a, cela se voit, des choses changent. Ce
1315
ose inquiète”, on ne l’a pas impunément, et si on
l’
a, cela se voit, des choses changent. Ce que tu me reproches, c’est, e
1316
e n’être pas assez chrétien ! Tu m’incites donc à
le
devenir davantage, quand tu croyais réfuter ma religion. Ton athéisme
1317
d’aventure, pour un dialecticien ! Si tu dis que
le
chrétien est celui qui ne fait rien, tu prouves simplement que tu ign
1318
: vous n’êtes pas assez marxistes ! Je dis : dès
le
départ, dès l’origine doctrinale, intrinsèquement, et dans la mesure
1319
pas assez marxistes ! Je dis : dès le départ, dès
l’
origine doctrinale, intrinsèquement, et dans la mesure exacte où l’on
1320
ès l’origine doctrinale, intrinsèquement, et dans
la
mesure exacte où l’on est un marxiste convaincu, non point dans la me
1321
ale, intrinsèquement, et dans la mesure exacte où
l’
on est un marxiste convaincu, non point dans la mesure où l’on trahit
1322
où l’on est un marxiste convaincu, non point dans
la
mesure où l’on trahit le marxisme, on fait une erreur fatale, irrévoc
1323
n marxiste convaincu, non point dans la mesure où
l’
on trahit le marxisme, on fait une erreur fatale, irrévocable, aujourd
1324
onvaincu, non point dans la mesure où l’on trahit
le
marxisme, on fait une erreur fatale, irrévocable, aujourd’hui manifes
1325
e, irrévocable, aujourd’hui manifeste. Erreur sur
l’
homme et sa mission cosmique. Erreur sur la personne — dans mon vocabu
1326
ur sur l’homme et sa mission cosmique. Erreur sur
la
personne — dans mon vocabulaire. Ma critique porte sur l’essentiel du
1327
nne — dans mon vocabulaire. Ma critique porte sur
l’
essentiel du marxisme, alors que la critique marxiste porte sur un chr
1328
ique porte sur l’essentiel du marxisme, alors que
la
critique marxiste porte sur un christianisme dénaturé. Et l’essentiel
1329
marxiste porte sur un christianisme dénaturé. Et
l’
essentiel du marxisme, je le répète, c’est sa volonté de changer le mo
1330
tianisme dénaturé. Et l’essentiel du marxisme, je
le
répète, c’est sa volonté de changer le monde, le monde d’abord, et no
1331
rxisme, je le répète, c’est sa volonté de changer
le
monde, le monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et le monde par
1332
le répète, c’est sa volonté de changer le monde,
le
monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et le monde par lui. Or un
1333
de changer le monde, le monde d’abord, et non pas
l’
homme d’abord, et le monde par lui. Or une telle volonté ne peut condu
1334
le monde d’abord, et non pas l’homme d’abord, et
le
monde par lui. Or une telle volonté ne peut conduire qu’à l’excès du
1335
r lui. Or une telle volonté ne peut conduire qu’à
l’
excès du matérialisme, non point par la malice de Staline, mais par l’
1336
duire qu’à l’excès du matérialisme, non point par
la
malice de Staline, mais par l’effet des conditions physiques et spiri
1337
sme, non point par la malice de Staline, mais par
l’
effet des conditions physiques et spirituelles de l’homme en ce qu’ell
1338
effet des conditions physiques et spirituelles de
l’
homme en ce qu’elles ont d’irréductibles à toute détermination sociale
1339
ermination sociale ou historique imaginable, dans
le
passé, le présent ou l’avenir53. Le problème des fins dernières :
1340
sociale ou historique imaginable, dans le passé,
le
présent ou l’avenir53. Le problème des fins dernières : Royaume de
1341
storique imaginable, dans le passé, le présent ou
l’
avenir53. Le problème des fins dernières : Royaume de Dieu ou parad
1342
able, dans le passé, le présent ou l’avenir53.
Le
problème des fins dernières : Royaume de Dieu ou paradis terrestre ?
1343
ivoque grossière dissipée en principe, au lieu de
la
véritable décision. Certains, frappés comme je le suis, par les resse
1344
la véritable décision. Certains, frappés comme je
le
suis, par les ressemblances formelles indiscutables que présentent la
1345
décision. Certains, frappés comme je le suis, par
les
ressemblances formelles indiscutables que présentent la volonté du vr
1346
semblances formelles indiscutables que présentent
la
volonté du vrai chrétien et celle du communiste militant, ont tenté l
1347
rétien et celle du communiste militant, ont tenté
la
synthèse pratique des deux croyances, qu’ils estimaient complémentair
1348
complémentaires. D’autres, plus nombreux qu’on ne
le
pense, souhaitent au moins et appellent cette synthèse, paraissant re
1349
malheur pour leur foi, ou pour son « succès », si
l’
on ne parvient pas à l’opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise
1350
ou pour son « succès », si l’on ne parvient pas à
l’
opérer. Dans la jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le probl
1351
uccès », si l’on ne parvient pas à l’opérer. Dans
la
jeunesse universitaire chinoise et japonaise, le problème se posait a
1352
la jeunesse universitaire chinoise et japonaise,
le
problème se posait avec urgence, aux environs de 1933, de réunir dans
1353
s de 1933, de réunir dans un même enthousiasme, «
les
deux Karl », c’est-à-dire Barth et Marx !54 C’est ici qu’une critique
1354
nt théologique se révèle seule capable de marquer
les
limites existant en fait, et les distinctions décisives. La pratique
1355
pable de marquer les limites existant en fait, et
les
distinctions décisives. La pratique du communisme n’est justiciable,
1356
existant en fait, et les distinctions décisives.
La
pratique du communisme n’est justiciable, en soi, que d’une critique
1357
nomique, historique, etc.55 Et je ne vois pas que
le
chrétien comme tel ait des lumières particulières sur ces sujets, qui
1358
oir technique. Mais ce qui tombe directement sous
le
coup de la seule critique théologique, ce sont les buts derniers du c
1359
ue. Mais ce qui tombe directement sous le coup de
la
seule critique théologique, ce sont les buts derniers du communisme e
1360
le coup de la seule critique théologique, ce sont
les
buts derniers du communisme et les postulats qu’il suppose. Qu’on me
1361
gique, ce sont les buts derniers du communisme et
les
postulats qu’il suppose. Qu’on me permette ici d’être un peu schémati
1362
schématique pour plus de clarté. Il me paraît que
l’
opposition finale entre la croyance marxiste et la foi personnelle du
1363
larté. Il me paraît que l’opposition finale entre
la
croyance marxiste et la foi personnelle du chrétien suffit à explique
1364
l’opposition finale entre la croyance marxiste et
la
foi personnelle du chrétien suffit à expliquer tout le reste. Le comm
1365
i personnelle du chrétien suffit à expliquer tout
le
reste. Le communisme prépare un paradis terrestre, le paradis tempore
1366
lle du chrétien suffit à expliquer tout le reste.
Le
communisme prépare un paradis terrestre, le paradis temporel de l’hom
1367
este. Le communisme prépare un paradis terrestre,
le
paradis temporel de l’homme ; le christianisme prépare un Royaume éte
1368
pare un paradis terrestre, le paradis temporel de
l’
homme ; le christianisme prépare un Royaume éternel, qui sera celui de
1369
radis terrestre, le paradis temporel de l’homme ;
le
christianisme prépare un Royaume éternel, qui sera celui de Dieu, non
1370
n Royaume éternel, qui sera celui de Dieu, non de
la
Terre. Tous deux sont eschatologiques, en ce sens qu’ils rapportent l
1371
lation, d’une longue passion temporelle. Et c’est
la
« foi », substance des choses espérées, qui permet seule de supporter
1372
es choses espérées, qui permet seule de supporter
les
maux que l’on endure au nom du but dernier. (Le chrétien chante sur s
1373
érées, qui permet seule de supporter les maux que
l’
on endure au nom du but dernier. (Le chrétien chante sur son bûcher, l
1374
les maux que l’on endure au nom du but dernier. (
Le
chrétien chante sur son bûcher, le komsomol accepte un salaire de fam
1375
but dernier. (Le chrétien chante sur son bûcher,
le
komsomol accepte un salaire de famine s’il faut cela pour sauver l’UR
1376
e un salaire de famine s’il faut cela pour sauver
l’
URSS.) Mais l’eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel,
1377
e famine s’il faut cela pour sauver l’URSS.) Mais
l’
eschaton chrétien est au-delà de ce temps, est éternel, et par là même
1378
immédiatement présent dans notre cœur56 alors que
l’
eschaton marxiste, temporel, s’enfuit dans un futur indéfini, — cent a
1379
e ans ? — et ne peut exister hic et nunc. Comment
l’
opposition radicale de ces deux fins, la temporelle et l’éternelle, va
1380
. Comment l’opposition radicale de ces deux fins,
la
temporelle et l’éternelle, va-t-elle maintenant se manifester dans no
1381
ition radicale de ces deux fins, la temporelle et
l’
éternelle, va-t-elle maintenant se manifester dans notre siècle ? Le p
1382
elle maintenant se manifester dans notre siècle ?
Le
phénomène de la « conversion » le fait bien voir. Un homme qui se con
1383
se manifester dans notre siècle ? Le phénomène de
la
« conversion » le fait bien voir. Un homme qui se convertit au christ
1384
notre siècle ? Le phénomène de la « conversion »
le
fait bien voir. Un homme qui se convertit au christianisme, c’est un
1385
tianisme, c’est un homme qui reçoit et qui saisit
la
Révélation en Personne. Et du coup le Royaume est au-dedans de lui. C
1386
qui saisit la Révélation en Personne. Et du coup
le
Royaume est au-dedans de lui. Cet homme n’est plus le maître de sa vi
1387
oyaume est au-dedans de lui. Cet homme n’est plus
le
maître de sa vie. Il est l’agent d’une vocation venue d’ailleurs, mai
1388
Cet homme n’est plus le maître de sa vie. Il est
l’
agent d’une vocation venue d’ailleurs, mais pour lui seul et ici-bas,
1389
s, et qui anime désormais ses gestes et sa pensée
la
plus intime. Dès maintenant sa personne est recréée. Dès maintenant,
1390
créée. Dès maintenant, elle entre en conflit avec
le
monde et ses formes mauvaises. Dès maintenant, elle porte témoignage
1391
faveur du fait accompli d’une révolution humaine.
Le
chrétien converti commence donc par la fin que visait l’espérance com
1392
n humaine. Le chrétien converti commence donc par
la
fin que visait l’espérance communiste. Il possède déjà l’essentiel, q
1393
tien converti commence donc par la fin que visait
l’
espérance communiste. Il possède déjà l’essentiel, que Marx voyait au
1394
ue visait l’espérance communiste. Il possède déjà
l’
essentiel, que Marx voyait au terme de l’histoire : la personne. Et al
1395
ède déjà l’essentiel, que Marx voyait au terme de
l’
histoire : la personne. Et alors, il attaque le monde ! Mais un homme
1396
sentiel, que Marx voyait au terme de l’histoire :
la
personne. Et alors, il attaque le monde ! Mais un homme qui se conver
1397
de l’histoire : la personne. Et alors, il attaque
le
monde ! Mais un homme qui se convertit au communisme ne se rattache p
1398
pas à une Présence actuelle. Il fait un pari dont
l’
objet n’est pas accessible aujourd’hui. Il mise son action immédiate s
1399
ion immédiate sur un fait qui n’est pas accompli,
l’
histoire n’ayant jamais connu de réalisation de communisme. Ainsi, des
1400
réalisation de communisme. Ainsi, des deux, c’est
le
marxiste qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réalist
1401
nisme. Ainsi, des deux, c’est le marxiste qui est
l’
utopiste ; et c’est le chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien :
1402
, c’est le marxiste qui est l’utopiste ; et c’est
le
chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable
1403
qui est l’utopiste ; et c’est le chrétien qui est
le
réaliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…) Le marxiste dit :
1404
e chrétien qui est le réaliste. (J’entends bien :
le
chrétien véritable…) Le marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi
1405
aliste. (J’entends bien : le chrétien véritable…)
Le
marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi dans l’invisible, mais s
1406
marxiste dit : « Je ne table pas sur une foi dans
l’
invisible, mais sur des faits concrets qu’il faut changer. Chaque réfo
1407
tion réalisée, me montre dès maintenant un peu de
la
réalité de mes espérances. » Mais l’espérance finale du communisme, c
1408
nt un peu de la réalité de mes espérances. » Mais
l’
espérance finale du communisme, c’est la libération de l’homme. Et moi
1409
s. » Mais l’espérance finale du communisme, c’est
la
libération de l’homme. Et moi je lui montre un homme libéré, tandis q
1410
ance finale du communisme, c’est la libération de
l’
homme. Et moi je lui montre un homme libéré, tandis qu’il ne peut me m
1411
autre différence, non moins radicale et urgente.
Le
chrétien converti a déjà l’essentiel : par là même, il se voit contra
1412
radicale et urgente. Le chrétien converti a déjà
l’
essentiel : par là même, il se voit contraint à chaque instant de tran
1413
sait qu’il est membre d’un corps qui porte toutes
les
marques du péché. Il est alors en face du monde, et au nom même de sa
1414
en face du monde, et au nom même de sa foi, dans
la
posture d’un révolutionnaire permanent. Non seulement il se voit cont
1415
en aide à son prochain, mais encore rien ne peut
le
satisfaire de ce qu’il obtient, par cet effort, s’il compare ce mieux
1416
it qu’il a reçu en Christ. Il possède en lui-même
la
mesure d’une perpétuelle transformation, nécessaire dans tous les dom
1417
perpétuelle transformation, nécessaire dans tous
les
domaines où son activité peut se développer57. Mais le marxiste, quel
1418
maines où son activité peut se développer57. Mais
le
marxiste, quelles que soient la souffrance et la colère qu’il éprouve
1419
évelopper57. Mais le marxiste, quelles que soient
la
souffrance et la colère qu’il éprouve devant les injustices présentes
1420
le marxiste, quelles que soient la souffrance et
la
colère qu’il éprouve devant les injustices présentes, du fait qu’il c
1421
t la souffrance et la colère qu’il éprouve devant
les
injustices présentes, du fait qu’il croit que l’intérêt de l’homme es
1422
les injustices présentes, du fait qu’il croit que
l’
intérêt de l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoi
1423
s présentes, du fait qu’il croit que l’intérêt de
l’
homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le conçoit, être socia
1424
que l’intérêt de l’homme est seul en jeu — et de
l’
homme tel qu’il le conçoit, être social — se verra fatalement neutrali
1425
l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il
le
conçoit, être social — se verra fatalement neutralisé dans son effort
1426
e verra fatalement neutralisé dans son effort par
les
gains peu à peu obtenus. Une balance s’établit entre les intérêts soc
1427
ns peu à peu obtenus. Une balance s’établit entre
les
intérêts sociaux présents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’
1428
s’établit entre les intérêts sociaux présents et
le
désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’à l’accomplissement final. Car c
1429
ents et le désir d’aller au-delà, d’aller jusqu’à
l’
accomplissement final. Car cet accomplissement, ou plénitude, n’est ja
1430
s qu’un futur théorique, — si passionnée que soit
l’
espérance du marxiste — et non pas une présence exigeante et totalemen
1431
nce exigeante et totalement animatrice. C’est ici
la
raison profonde des déviations dites « réformistes » ou « étatistes »
1432
iations dites « réformistes » ou « étatistes » de
la
révolution matérialiste. Pour qu’une telle pesanteur ne gagne pas san
1433
u’une telle pesanteur ne gagne pas sans cesse sur
les
élans révolutionnaires spasmodiques qui agitent l’humanité (comme en
1434
s élans révolutionnaires spasmodiques qui agitent
l’
humanité (comme en 1789 et en 1917), il faudrait que l’homme soit déli
1435
anité (comme en 1789 et en 1917), il faudrait que
l’
homme soit délivré de son péché, « changé », sorti du plan, précisémen
1436
péché, « changé », sorti du plan, précisément, où
le
marxisme le maintient. Moyens d’action du chrétien et du marxiste
1437
ngé », sorti du plan, précisément, où le marxisme
le
maintient. Moyens d’action du chrétien et du marxiste Préparer
1438
s d’action du chrétien et du marxiste Préparer
le
royaume de l’homme, ou témoigner par des actes visibles en faveur du
1439
chrétien et du marxiste Préparer le royaume de
l’
homme, ou témoigner par des actes visibles en faveur du retour d’un Ro
1440
tiquement une volonté de changer tout ce qui peut
l’
être ; mais aussi, cela suppose certains moyens d’action qui ne saurai
1441
se certains moyens d’action qui ne sauraient être
les
mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fi
1442
ens d’action qui ne sauraient être les mêmes dans
les
deux cas, si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos
1443
ne sauraient être les mêmes dans les deux cas, si
la
fin seule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de l’action du c
1444
mêmes dans les deux cas, si la fin seule justifie
les
moyens58. La fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royau
1445
deux cas, si la fin seule justifie les moyens58.
La
fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est le royaume de justice
1446
si la fin seule justifie les moyens58. La fin, ou
le
télos de l’action du chrétien, c’est le royaume de justice et d’amour
1447
ule justifie les moyens58. La fin, ou le télos de
l’
action du chrétien, c’est le royaume de justice et d’amour. Tout acte
1448
a fin, ou le télos de l’action du chrétien, c’est
le
royaume de justice et d’amour. Tout acte qui contredirait, dans le pr
1449
tice et d’amour. Tout acte qui contredirait, dans
le
présent, la loi d’amour et de justice, même s’il était commis au nom
1450
our. Tout acte qui contredirait, dans le présent,
la
loi d’amour et de justice, même s’il était commis au nom des intérêts
1451
ce, même s’il était commis au nom des intérêts de
l’
Église chrétienne, détruirait en fait cette Église en tant qu’elle vit
1452
es membres, et non pas dans un ciel abstrait. Car
le
gage de l’action chrétienne n’est pas futur, mais éternel et donc pré
1453
et non pas dans un ciel abstrait. Car le gage de
l’
action chrétienne n’est pas futur, mais éternel et donc présent. Si, p
1454
ur, mais éternel et donc présent. Si, pour sauver
le
futur de l’Église, je désobéis dans le présent, je perds tout du même
1455
rnel et donc présent. Si, pour sauver le futur de
l’
Église, je désobéis dans le présent, je perds tout du même coup, prése
1456
our sauver le futur de l’Église, je désobéis dans
le
présent, je perds tout du même coup, présent, futur, éternité. Je cru
1457
même coup, présent, futur, éternité. Je crucifie
le
Christ et je m’oppose à son retour. Il n’est donc pas d’« opportunism
1458
s d’« opportunisme » chrétien qui tienne, et tous
les
moyens du chrétien doivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est
1459
oivent être aussi purs que sa fin. Tout autre est
le
cas du marxiste. N’ayant pas derrière lui de modèle accompli, ni en l
1460
Présence souveraine, il se sent libre d’appliquer
les
moyens qu’il juge adéquats aux intérêts momentanés de son Parti et de
1461
ime son étatisme totalitaire en arguant que c’est
le
seul moyen d’accéder à un stade économique plus favorable au développ
1462
ien conséquents, et que leur indignation traduise
la
vraie volonté du marxisme, plutôt qu’un reste d’humanisme libéral. Le
1463
marxisme, plutôt qu’un reste d’humanisme libéral.
Le
fait est que la grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il
1464
qu’un reste d’humanisme libéral. Le fait est que
la
grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il résulte à l’évi
1465
é des communistes suit Staline. D’où il résulte à
l’
évidence que pour la grosse majorité des communistes, le mensonge, la
1466
it Staline. D’où il résulte à l’évidence que pour
la
grosse majorité des communistes, le mensonge, la haine, l’oppression,
1467
ence que pour la grosse majorité des communistes,
le
mensonge, la haine, l’oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raiso
1468
la grosse majorité des communistes, le mensonge,
la
haine, l’oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raison d’État », e
1469
majorité des communistes, le mensonge, la haine,
l’
oppression, l’hypocrisie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à
1470
communistes, le mensonge, la haine, l’oppression,
l’
hypocrisie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à la guerre s’il
1471
isie suprême nommée « raison d’État », et jusqu’à
la
guerre s’il le faut, sont des moyens parfaitement acceptables en tant
1472
mmée « raison d’État », et jusqu’à la guerre s’il
le
faut, sont des moyens parfaitement acceptables en tant qu’ils servent
1473
s parfaitement acceptables en tant qu’ils servent
le
progrès prolétarien, et préparent un avenir conforme à la doctrine59.
1474
ès prolétarien, et préparent un avenir conforme à
la
doctrine59. Que leur importe une « faute » personnelle et actuelle, p
1475
il n’y a pas de salut présent ni éternel, puisque
le
salut n’est pas pour eux de toute façon, mais pour les descendants de
1476
alut n’est pas pour eux de toute façon, mais pour
les
descendants de leurs descendants ? C’est ainsi qu’on a vu Zinoviev, p
1477
noviev, par « fidélité » au Parti, c’est-à-dire à
l’
avenir du Parti, proférer des aveux mensongers qu’il croyait tactiquem
1478
au parti communiste ou de militer en sa faveur :
l’
alternative où il se place est sans issue. Car ou bien il accepte les
1479
l se place est sans issue. Car ou bien il accepte
les
disciplines d’action que lui impose son parti, et qui comportent la h
1480
ction que lui impose son parti, et qui comportent
la
haine et le mensonge : mais alors pour sauver le monde, il perd sa ra
1481
i impose son parti, et qui comportent la haine et
le
mensonge : mais alors pour sauver le monde, il perd sa raison d’être
1482
la haine et le mensonge : mais alors pour sauver
le
monde, il perd sa raison d’être personnelle, et renie justement cette
1483
stement cette foi qu’il croyait mieux servir dans
le
communisme ; ou bien il tâche de n’agir qu’en chrétien ; mais alors i
1484
, un « trotzkyste » ou un « saboteur », et à tout
le
moins un militant suspect. Tout cela repose sur un fait unique, que n
1485
it unique, que nous pouvons formuler simplement :
la
fin dernière du chrétien est présente en chacun de ses actes, ou bien
1486
acun de ses actes, ou bien n’est pas ; tandis que
la
fin dernière du marxiste est un avenir absolument hétérogène aux acti
1487
aujourd’hui, dans un ordre non socialiste. Par où
l’
on voit qu’en dépit du langage, la transcendance de la foi chrétienne
1488
ialiste. Par où l’on voit qu’en dépit du langage,
la
transcendance de la foi chrétienne se manifeste ici et maintenant et
1489
voit qu’en dépit du langage, la transcendance de
la
foi chrétienne se manifeste ici et maintenant et engage le tout de l’
1490
rétienne se manifeste ici et maintenant et engage
le
tout de l’homme ; tandis que l’immanence de la croyance marxiste renv
1491
manifeste ici et maintenant et engage le tout de
l’
homme ; tandis que l’immanence de la croyance marxiste renvoie sans ce
1492
ntenant et engage le tout de l’homme ; tandis que
l’
immanence de la croyance marxiste renvoie sans cesse le fait humain to
1493
ge le tout de l’homme ; tandis que l’immanence de
la
croyance marxiste renvoie sans cesse le fait humain total dans un ave
1494
anence de la croyance marxiste renvoie sans cesse
le
fait humain total dans un avenir indéfini, et n’engage que certaines
1495
défini, et n’engage que certaines dispositions de
l’
être, celles-là précisément que l’avenir socialiste, la société sans c
1496
dispositions de l’être, celles-là précisément que
l’
avenir socialiste, la société sans classes, doit supprimer ! Le marxis
1497
e, celles-là précisément que l’avenir socialiste,
la
société sans classes, doit supprimer ! Le marxiste croit que le bien
1498
aliste, la société sans classes, doit supprimer !
Le
marxiste croit que le bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien
1499
s classes, doit supprimer ! Le marxiste croit que
le
bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien naît du parfait. D
1500
mer ! Le marxiste croit que le bien sort du mal ;
le
chrétien sait que le bien naît du parfait. D’une conséquence polit
1501
it que le bien sort du mal ; le chrétien sait que
le
bien naît du parfait. D’une conséquence politique de la foi Je
1502
aît du parfait. D’une conséquence politique de
la
foi Je m’adresserai maintenant aux chrétiens déclarés. J’en vois b
1503
ens déclarés. J’en vois beaucoup qui estiment que
la
transformation de l’homme importe seule, puisqu’elle est, en effet, l
1504
is beaucoup qui estiment que la transformation de
l’
homme importe seule, puisqu’elle est, en effet, l’essentiel, et le but
1505
l’homme importe seule, puisqu’elle est, en effet,
l’
essentiel, et le but de tout autre changement. J’en vois beaucoup qui
1506
seule, puisqu’elle est, en effet, l’essentiel, et
le
but de tout autre changement. J’en vois beaucoup qui jugent que l’act
1507
tre changement. J’en vois beaucoup qui jugent que
l’
action personnelle de charité et de sacrifice, pour le mieux-être du p
1508
tion personnelle de charité et de sacrifice, pour
le
mieux-être du prochain, suffit à compléter, si je puis dire, l’action
1509
du prochain, suffit à compléter, si je puis dire,
l’
action proprement religieuse. Et j’entends bien que les sacrifices qu’
1510
tion proprement religieuse. Et j’entends bien que
les
sacrifices qu’ils font ne sont pas seulement « spirituels », entraîne
1511
ntraînent des risques financiers, et même parfois
l’
abandon de tous biens et d’intérêts humains très chers. Mais je demand
1512
bres du Mouvement des Groupes, qui représentent à
l’
heure actuelle le christianisme le plus « activiste ». Pourquoi refuse
1513
des Groupes, qui représentent à l’heure actuelle
le
christianisme le plus « activiste ». Pourquoi refusent-ils de s’occup
1514
représentent à l’heure actuelle le christianisme
le
plus « activiste ». Pourquoi refusent-ils de s’occuper de politique ?
1515
oup de problèmes se poseront autrement… » Je veux
les
croire. Ils courent au plus pressé. Mais le marxiste aussi me tenait
1516
veux les croire. Ils courent au plus pressé. Mais
le
marxiste aussi me tenait ce raisonnement, pour justifier une action t
1517
t inverse. Je pense qu’il faut aller plus loin60.
La
déviation matérialiste du marxisme ne doit pas seulement nous inciter
1518
s : elle doit nous avertir de corriger sans trêve
la
déviation spiritualiste qui menace notre vie chrétienne, et qui est l
1519
liste qui menace notre vie chrétienne, et qui est
la
cause certaine des succès du marxisme. Tant que les chrétiens ne comp
1520
a cause certaine des succès du marxisme. Tant que
les
chrétiens ne comprendront pas que leur foi doit se manifester sur tou
1521
ront pas que leur foi doit se manifester sur tous
les
plans de l’activité humaine, y compris le plan politique, ils ne répo
1522
leur foi doit se manifester sur tous les plans de
l’
activité humaine, y compris le plan politique, ils ne répondront pas a
1523
r tous les plans de l’activité humaine, y compris
le
plan politique, ils ne répondront pas au défi du marxisme, qui s’en t
1524
tique chrétienne, déduite une fois pour toutes de
la
théologie. Mais je crois que le christianisme, aussitôt qu’il se mani
1525
is pour toutes de la théologie. Mais je crois que
le
christianisme, aussitôt qu’il se manifeste en vérité, entre en confli
1526
ructures politiques, et contribue, par son action
la
plus intime, à la création d’autres formes. Il importe de savoir lesq
1527
s, et contribue, par son action la plus intime, à
la
création d’autres formes. Il importe de savoir lesquelles, et de les
1528
es formes. Il importe de savoir lesquelles, et de
les
préparer consciemment. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes
1529
les préparer consciemment. Sinon nous laisserons
le
champ libre à toutes les entreprises désespérées qui passionnent les
1530
nt. Sinon nous laisserons le champ libre à toutes
les
entreprises désespérées qui passionnent les masses incroyantes. Il se
1531
outes les entreprises désespérées qui passionnent
les
masses incroyantes. Il se pose là, me semble-t-il, une question de so
1532
une question de solidarité, qui est une forme de
la
charité. Parfois aussi le devoir chrétien peut apparaître plus histor
1533
é, qui est une forme de la charité. Parfois aussi
le
devoir chrétien peut apparaître plus historiquement défini et localis
1534
monde sait, ou pressent au moins, ce que signifie
la
menace totalitaire, qu’elle soit fasciste ou soviétique : c’est la «
1535
aire, qu’elle soit fasciste ou soviétique : c’est
la
« mise au pas » de nos vies et de tous les aspects de nos vies, tant
1536
: c’est la « mise au pas » de nos vies et de tous
les
aspects de nos vies, tant spirituels que matériels, au service de l’É
1537
ies, tant spirituels que matériels, au service de
l’
État déifié. Cette situation n’est pas sans rappeler celle de l’Empire
1538
Cette situation n’est pas sans rappeler celle de
l’
Empire romain au premier âge du christianisme, telle que nous l’évoqui
1539
n au premier âge du christianisme, telle que nous
l’
évoquions plus haut. Toutefois, l’un des facteurs au moins s’est modif
1540
des facteurs au moins s’est modifié notablement :
les
chrétiens ne forment plus des groupuscules obscurs, ils ont constitué
1541
chrétiennes. Tout cela se trouve mis au défi par
l’
exigence totalitaire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne. L’É
1542
uve mis au défi par l’exigence totalitaire, comme
le
prouve le spectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore
1543
défi par l’exigence totalitaire, comme le prouve
le
spectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore, sinon dé
1544
ence totalitaire, comme le prouve le spectacle de
l’
Allemagne. L’État nouveau veut qu’on l’adore, sinon déjà dans des form
1545
ire, comme le prouve le spectacle de l’Allemagne.
L’
État nouveau veut qu’on l’adore, sinon déjà dans des formes religieuse
1546
ectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut qu’on
l’
adore, sinon déjà dans des formes religieuses, du moins dans des forme
1547
ents du Décalogue, et au devoir d’amour chrétien.
Le
conflit est inévitable. Suffira-t-il dès lors de se laisser persécute
1548
persécuter ? N’avons-nous rien à faire qu’à subir
le
martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de l’État une attitude d’objecteu
1549
à subir le martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de
l’
État une attitude d’objecteurs de conscience ? N’avons-nous rien que n
1550
sées sont pour une part, peut-être capitale, dans
le
malheur universel qui vient ? Or toute attente passive, si courageuse
1551
passive, si courageuse qu’elle soit, devient dans
le
cas présent une complicité. L’État totalitaire ne saurait s’instaurer
1552
soit, devient dans le cas présent une complicité.
L’
État totalitaire ne saurait s’instaurer contre l’opinion générale. Cel
1553
L’État totalitaire ne saurait s’instaurer contre
l’
opinion générale. Celle-ci se laisse séduire par les seuls constructeu
1554
’opinion générale. Celle-ci se laisse séduire par
les
seuls constructeurs. Mais alors, quel point de vue constructif le chr
1555
cteurs. Mais alors, quel point de vue constructif
le
chrétien peut-il soutenir, s’il ne veut pas rester l’objecteur que j’
1556
hrétien peut-il soutenir, s’il ne veut pas rester
l’
objecteur que j’ai dit ? Un protestant, et je précise : un calviniste,
1557
e, doit être ici en mesure de répondre. De toutes
les
églises chrétiennes, l’église calviniste est en effet la plus antitot
1558
e de répondre. De toutes les églises chrétiennes,
l’
église calviniste est en effet la plus antitotalitaire par essence. Je
1559
ses chrétiennes, l’église calviniste est en effet
la
plus antitotalitaire par essence. Je ne rappelle qu’en passant les dr
1560
litaire par essence. Je ne rappelle qu’en passant
les
dragonnades et les guerres de religion qui les précèdent : on sait as
1561
. Je ne rappelle qu’en passant les dragonnades et
les
guerres de religion qui les précèdent : on sait assez que ce fut la l
1562
nt les dragonnades et les guerres de religion qui
les
précèdent : on sait assez que ce fut la lutte d’une royauté déjà « to
1563
gion qui les précèdent : on sait assez que ce fut
la
lutte d’une royauté déjà « totalitaire » contre des groupes, loyalist
1564
abusif de déduire d’une situation déterminée par
la
persécution brutale, que les églises calvinistes défendaient alors, p
1565
uation déterminée par la persécution brutale, que
les
églises calvinistes défendaient alors, par principe, un régime fédéra
1566
François Ier, c’est-à-dire jusqu’à une époque où
la
passion totalitaire des gouvernants n’avait pas encore pu s’affirmer
1567
nants n’avait pas encore pu s’affirmer comme elle
le
fit sous Louis XIV, nous constatons que la première discipline que se
1568
statons que la première discipline que se donnent
les
églises calvinistes revêt une forme consciemment fédérative61. Or il
1569
’agit plus ici de contingences historiques. C’est
le
fond même de la doctrine calviniste qui s’exprime par cette structure
1570
e contingences historiques. C’est le fond même de
la
doctrine calviniste qui s’exprime par cette structure. L’importance a
1571
ine calviniste qui s’exprime par cette structure.
L’
importance attachée par Calvin à la notion de vocation personnelle suf
1572
tte structure. L’importance attachée par Calvin à
la
notion de vocation personnelle suffit à expliquer ce processus. À une
1573
nd nécessairement une organisation fédéraliste de
l’
Église, et même de l’État. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tou
1574
organisation fédéraliste de l’Église, et même de
l’
État. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tous les manuels, une so
1575
e, et même de l’État. Calvin n’a pas fondé, comme
le
répètent tous les manuels, une société théocratique, mais bien une so
1576
tat. Calvin n’a pas fondé, comme le répètent tous
les
manuels, une société théocratique, mais bien une société de type fédé
1577
is bien une société de type fédératif, respectant
les
diversités, voulues par Dieu, dans l’unité spirituelle. Et les suites
1578
respectant les diversités, voulues par Dieu, dans
l’
unité spirituelle. Et les suites de cette création sont encore visible
1579
s, voulues par Dieu, dans l’unité spirituelle. Et
les
suites de cette création sont encore visibles aujourd’hui : nulle par
1580
ion sont encore visibles aujourd’hui : nulle part
l’
esprit totalitaire n’a trouvé moins de complicité et plus de résistanc
1581
omplicité et plus de résistance déclarée que dans
les
pays calvinistes, où la notion de l’autonomie des groupes reste vivac
1582
stance déclarée que dans les pays calvinistes, où
la
notion de l’autonomie des groupes reste vivace (Angleterre, Écosse, S
1583
ée que dans les pays calvinistes, où la notion de
l’
autonomie des groupes reste vivace (Angleterre, Écosse, Suisse, Hollan
1584
leterre, Écosse, Suisse, Hollande). En Allemagne,
la
lutte des églises contre l’emprise morale de l’État fut menée, on le
1585
lande). En Allemagne, la lutte des églises contre
l’
emprise morale de l’État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est
1586
, la lutte des églises contre l’emprise morale de
l’
État fut menée, on le sait, par Karl Barth : c’est-à-dire par un calvi
1587
s contre l’emprise morale de l’État fut menée, on
le
sait, par Karl Barth : c’est-à-dire par un calviniste… Je ne voudrais
1588
par un calviniste… Je ne voudrais pas restreindre
la
portée de ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à l’esprit u
1589
voudrais pas restreindre la portée de ce fait en
l’
opposant, comme il serait facile, à l’esprit unitaire et impérial qui
1590
ce fait en l’opposant, comme il serait facile, à
l’
esprit unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome. Le grand souci
1591
facile, à l’esprit unitaire et impérial qui anime
l’
Église de Rome. Le grand souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner to
1592
unitaire et impérial qui anime l’Église de Rome.
Le
grand souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner toutes les églises,
1593
souci d’œcuménisme, que nous voyons gagner toutes
les
églises, est une promesse à laquelle nous devons croire de toute la f
1594
e promesse à laquelle nous devons croire de toute
la
force de notre foi. Aussi ne veux-je tirer de mon exemple qu’une conc
1595
diversité, toute autonomie spirituelle au sein de
la
communauté. Il y va de notre tout, personnel, mais aussi de la valeur
1596
. Il y va de notre tout, personnel, mais aussi de
la
valeur de la communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût
1597
notre tout, personnel, mais aussi de la valeur de
la
communauté pour tous les hommes qui la composent. Ne fût-ce que pour
1598
ais aussi de la valeur de la communauté pour tous
les
hommes qui la composent. Ne fût-ce que pour cette seule raison — et j
1599
valeur de la communauté pour tous les hommes qui
la
composent. Ne fût-ce que pour cette seule raison — et j’en ai mention
1600
n chrétien ne peut pas approuver, comme chrétien,
la
forme politique du communisme63. Il lui faut donc en préparer une aut
1601
autre, et prendre enfin parti, positivement, dans
l’
immense lutte qui va mettre aux prises l’étatisme totalitaire et le fé
1602
nt, dans l’immense lutte qui va mettre aux prises
l’
étatisme totalitaire et le fédéralisme libre. Responsabilité des ch
1603
ui va mettre aux prises l’étatisme totalitaire et
le
fédéralisme libre. Responsabilité des chrétiens vis-à-vis des marx
1604
s chrétiens vis-à-vis des marxistes On connaît
la
« croisade antimarxiste » qu’organise dans le monde entier la panique
1605
aît la « croisade antimarxiste » qu’organise dans
le
monde entier la panique des capitalismes. Cette croisade a pour vraie
1606
e antimarxiste » qu’organise dans le monde entier
la
panique des capitalismes. Cette croisade a pour vraie devise : divide
1607
: dividendes d’abord ! Mais elle entend utiliser
le
spirituel comme masque. Elle entraîne beaucoup de braves gens au serv
1608
e une valeur de pères de famille. C’est en vérité
la
croisade du matérialisme hypocrite contre le matérialisme généreux. C
1609
rité la croisade du matérialisme hypocrite contre
le
matérialisme généreux. C’est aussi la croisade des fascismes contre l
1610
rite contre le matérialisme généreux. C’est aussi
la
croisade des fascismes contre leur frère, le stalinisme : une guerre
1611
ussi la croisade des fascismes contre leur frère,
le
stalinisme : une guerre de religions qui ne sont pas les nôtres. Je p
1612
rends ici parti contre une telle entreprise, pour
les
mêmes raisons, mais aggravées, qui me faisaient prendre parti contre
1613
aggravées, qui me faisaient prendre parti contre
le
régime communiste. On nous donne à choisir entre deux sortes de matér
1614
à choisir entre deux sortes de matérialisme. Mais
le
communisme, au moins, voulait changer le monde… Contre les arguments
1615
me. Mais le communisme, au moins, voulait changer
le
monde… Contre les arguments démagogiques de nos croisés, je répète, a
1616
nisme, au moins, voulait changer le monde… Contre
les
arguments démagogiques de nos croisés, je répète, après Berdiaev, apr
1617
croisés, je répète, après Berdiaev, après Gide :
la
« vérité » du communisme résulte de la trahison du christianisme par
1618
rès Gide : la « vérité » du communisme résulte de
la
trahison du christianisme par la chrétienté. Toutes les aspirations v
1619
nisme résulte de la trahison du christianisme par
la
chrétienté. Toutes les aspirations valables et généreuses du marxisme
1620
ahison du christianisme par la chrétienté. Toutes
les
aspirations valables et généreuses du marxisme sont autant d’essais d
1621
s chrétiennes égarées, déformées, ou « mises sous
le
boisseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de l’aspiration tota
1622
arées, déformées, ou « mises sous le boisseau par
les
chrétiens ». Cela est vrai même de l’aspiration totalitaire, qui est
1623
isseau par les chrétiens ». Cela est vrai même de
l’
aspiration totalitaire, qui est monstrueuse dans ses formes actuelles,
1624
actuelles, mais qui traduit encore, obscurément,
l’
aspiration d’un Occident jadis chrétien, vers une économie sauvée : le
1625
cident jadis chrétien, vers une économie sauvée :
le
Royaume où Dieu est « tout en tous ». Si les églises chrétiennes ont
1626
vée : le Royaume où Dieu est « tout en tous ». Si
les
églises chrétiennes ont à souffrir demain par le fait d’un État tyran
1627
les églises chrétiennes ont à souffrir demain par
le
fait d’un État tyrannique, il faut qu’elles sachent qu’elles en sont
1628
elles sachent qu’elles en sont responsables, dans
la
mesure où elles cédèrent, jadis, aux tentations théocratiques ou sécu
1629
s, aux tentations théocratiques ou séculières. Si
la
culture et si nos libertés civiques sont brimées, par le fait d’une d
1630
ure et si nos libertés civiques sont brimées, par
le
fait d’une doctrine et d’un État « matérialistes », il faut savoir qu
1631
atérialistes », il faut savoir que nous en sommes
les
responsables, dans la mesure où nous cultivons un esprit détaché du r
1632
savoir que nous en sommes les responsables, dans
la
mesure où nous cultivons un esprit détaché du réel, une liberté abste
1633
l, une liberté abstentionniste et inféconde. Tout
le
mal vient de notre esprit. C’est à lui de faire pénitence, car c’étai
1634
primauté salutaire. Mais il faut aussi repartir.
La
tragédie de Marx et du marxisme, c’est de n’avoir pas su, ou pas pu o
1635
su, ou pas pu opposer au mensonge spiritualiste,
la
vérité du spirituel. Nous n’avons pas à nous dresser contre la « véri
1636
spirituel. Nous n’avons pas à nous dresser contre
la
« vérité » déviée de Marx, contre une vérité orpheline, coupée des li
1637
ne vérité orpheline, coupée des liens vivants qui
l’
attachaient en Dieu à ses fins et à ses origines. Mais nous devons pro
1638
ins et à ses origines. Mais nous devons proclamer
la
vérité parfaite dont nous avons, nous les premiers, dévié. « Malheur
1639
é. « Malheur à moi si je n’évangélise ! », disait
l’
Apôtre. Malheur à moi si je refuse de réaliser l’Évangile dans tous le
1640
l’Apôtre. Malheur à moi si je refuse de réaliser
l’
Évangile dans tous les domaines de la vie. La seule lutte efficace con
1641
moi si je refuse de réaliser l’Évangile dans tous
les
domaines de la vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c
1642
de réaliser l’Évangile dans tous les domaines de
la
vie. La seule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte q
1643
iser l’Évangile dans tous les domaines de la vie.
La
seule lutte efficace contre le matérialisme, c’est la lutte qu’il nou
1644
omaines de la vie. La seule lutte efficace contre
le
matérialisme, c’est la lutte qu’il nous faut mener contre la tentatio
1645
eule lutte efficace contre le matérialisme, c’est
la
lutte qu’il nous faut mener contre la tentation spiritualiste. 41.
1646
isme, c’est la lutte qu’il nous faut mener contre
la
tentation spiritualiste. 41. « Le communisme n’est pas pour nous u
1647
mener contre la tentation spiritualiste. 41. «
Le
communisme n’est pas pour nous un état qui doive être créé, un idéal…
1648
ive être créé, un idéal… Nous appelons communisme
le
mouvement effectif qui supprimera la réalité présente. Les conditions
1649
s communisme le mouvement effectif qui supprimera
la
réalité présente. Les conditions de ce mouvement sont données par cet
1650
ment effectif qui supprimera la réalité présente.
Les
conditions de ce mouvement sont données par cette situation » (Marx,
1651
tsche Ideologie). 42. « Nous sommes tous membres
les
uns des autres » (Rom., 12, 5). D’autre part, Marx n’a pas cessé de c
1652
5). D’autre part, Marx n’a pas cessé de critiquer
l’
« individu isolé et abstrait » (Thèses sur Feuerbach). 43. Marx, Crit
1653
» (Thèses sur Feuerbach). 43. Marx, Critique de
la
philosophie hégélienne du droit. 44. Au sens le plus large du terme,
1654
la philosophie hégélienne du droit. 44. Au sens
le
plus large du terme, qui peut désigner aussi bien la « société sans c
1655
plus large du terme, qui peut désigner aussi bien
la
« société sans classes » de Marx, que le « Royaume de Dieu » chrétien
1656
ssi bien la « société sans classes » de Marx, que
le
« Royaume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique, l’homme doit p
1657
que le « Royaume de Dieu » chrétien. 45. « Dans
la
pratique, l’homme doit prouver la vérité de sa pensée, c’est-à-dire s
1658
aume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique,
l’
homme doit prouver la vérité de sa pensée, c’est-à-dire sa réalité et
1659
en. 45. « Dans la pratique, l’homme doit prouver
la
vérité de sa pensée, c’est-à-dire sa réalité et sa puissance concrète
1660
alité et sa puissance concrète. Réalité ou non de
la
pensée humaine isolée du domaine pratique, c’est querelle de pure sco
1661
ue » (Marx, 2e thèse sur Feuerbach). De même pour
le
chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et
1662
e thèse sur Feuerbach). De même pour le chrétien,
la
foi sans les œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n
1663
Feuerbach). De même pour le chrétien, la foi sans
les
œuvres n’est pas la foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n’a jamais dit
1664
our le chrétien, la foi sans les œuvres n’est pas
la
foi (Jacq., 2, 26). Et Luther même n’a jamais dit autre chose, contra
1665
ations de polémistes ignorants, ou qui jouent sur
les
deux sens du mot œuvres (œuvres pies et action concrète). 46. Je par
1666
action concrète). 46. Je parle, bien entendu, de
la
religion telle que Marx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dan
1667
arle, bien entendu, de la religion telle que Marx
la
voyait, telle qu’elle lui apparaissait dans le corps social. Je n’oub
1668
rx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dans
le
corps social. Je n’oublie pas que la même époque a vu le grand réveil
1669
aissait dans le corps social. Je n’oublie pas que
la
même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la criti
1670
s social. Je n’oublie pas que la même époque a vu
le
grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la critique ne peut évidemme
1671
même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. «
L’
armée de la critique ne peut évidemment remplacer la critique des arme
1672
a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de
la
critique ne peut évidemment remplacer la critique des armes » (Marx,
1673
armée de la critique ne peut évidemment remplacer
la
critique des armes » (Marx, Critique de le philosophie hégélienne). I
1674
placer la critique des armes » (Marx, Critique de
le
philosophie hégélienne). Il faut en user, certes, mais elle ne suffit
1675
ne suffit pas. « Être radical consiste à attaquer
le
mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour l’homme même » (Id., i
1676
s. « Être radical consiste à attaquer le mal dans
la
racine. Mais la racine, c’est pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est
1677
l consiste à attaquer le mal dans la racine. Mais
la
racine, c’est pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire l’homme
1678
le mal dans la racine. Mais la racine, c’est pour
l’
homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire l’homme concret, produit socia
1679
st pour l’homme même » (Id., ibid.). C’est-à-dire
l’
homme concret, produit social selon Marx, et non pas créature spiritue
1680
irituelle et charnelle. 48. En particulier, dans
les
Thèses sur Feuerbach. On peut y lire une phrase qui prouve que Marx n
1681
prouve que Marx ne prétendait nullement négliger
les
facteurs humains personnels, sans quoi le matérialisme ne serait pas
1682
gliger les facteurs humains personnels, sans quoi
le
matérialisme ne serait pas « dialectique ». « La coïncidence de la mo
1683
le matérialisme ne serait pas « dialectique ». «
La
coïncidence de la modification des circonstances et de la modificatio
1684
e serait pas « dialectique ». « La coïncidence de
la
modification des circonstances et de la modification de l’activité hu
1685
idence de la modification des circonstances et de
la
modification de l’activité humaine, ou transformation personnelle, ne
1686
cation des circonstances et de la modification de
l’
activité humaine, ou transformation personnelle, ne peut être rationne
1687
e activité révolutionnaire. » Phrase importante à
l’
extrême ! Mais combien oubliée par le communiste moyen de nos jours !
1688
importante à l’extrême ! Mais combien oubliée par
le
communiste moyen de nos jours ! 49. Selon Karl Barth, par exemple, l
1689
e nos jours ! 49. Selon Karl Barth, par exemple,
la
dogmatique n’est qu’une question perpétuelle, une autocritique si l’o
1690
qu’une question perpétuelle, une autocritique si
l’
on veut, que l’Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de
1691
n perpétuelle, une autocritique si l’on veut, que
l’
Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de corriger sans
1692
our fonction de corriger sans cesse, de rectifier
le
message annoncé par la prédication et par les sacrements. C’est un ac
1693
r sans cesse, de rectifier le message annoncé par
la
prédication et par les sacrements. C’est un acte d’obéissance, et c’e
1694
fier le message annoncé par la prédication et par
les
sacrements. C’est un acte d’obéissance, et c’est aussi un acte d’humi
1695
inadéquate en soi, et ne peut être qu’un renvoi à
la
Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’est ains
1696
i à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ.
La
« doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique que l’Église prend de
1697
doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique que
l’
Église prend de son message sous le rapport de sa fidélité à son fonde
1698
n contenu et à son but. Elle ne présente rien que
l’
on puisse comparer, fût-ce le plus superficiellement, à un programme t
1699
ne présente rien que l’on puisse comparer, fût-ce
le
plus superficiellement, à un programme théorique qu’il s’agirait main
1700
qu’il s’agirait maintenant d’appliquer. En bref,
la
doctrine chrétienne, si l’on veut établir un parallèle — sans doute d
1701
d’appliquer. En bref, la doctrine chrétienne, si
l’
on veut établir un parallèle — sans doute dangereux — ce serait la Per
1702
r un parallèle — sans doute dangereux — ce serait
la
Personne vivante de Jésus-Christ, et non pas la théologie, simple aut
1703
t la Personne vivante de Jésus-Christ, et non pas
la
théologie, simple autocritique de l’Église et du message que l’on prê
1704
, et non pas la théologie, simple autocritique de
l’
Église et du message que l’on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre
1705
simple autocritique de l’Église et du message que
l’
on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre à… » veut dire ici : « tend
1706
ue de l’Église et du message que l’on prêche dans
l’
Église. 50. « S’attendre à… » veut dire ici : « tendre vers… » 51. M
1707
tin par des moyens légaux, il est vrai, mais avec
les
mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de l’histoire en ce sens
1708
es mêmes inconvénients. Certes il y a des lois de
l’
histoire en ce sens qu’on retrouve les mêmes mécanismes partout où l’e
1709
des lois de l’histoire en ce sens qu’on retrouve
les
mêmes mécanismes partout où l’esprit démissionne ! 52. « Je ne vois
1710
ns qu’on retrouve les mêmes mécanismes partout où
l’
esprit démissionne ! 52. « Je ne vois jamais le christianisme devenir
1711
ù l’esprit démissionne ! 52. « Je ne vois jamais
le
christianisme devenir révolutionnaire ! » S’exclamait naguère Jean Gu
1712
! » S’exclamait naguère Jean Guéhenno (Union pour
la
Vérité, 22 mars 1930). À quoi un socialiste allemand, le professeur H
1713
té, 22 mars 1930). À quoi un socialiste allemand,
le
professeur Hans Mühlestein, rétorquait : « Toutes les révolutions de
1714
professeur Hans Mühlestein, rétorquait : « Toutes
les
révolutions de l’histoire de l’Occident, sont sorties de la religion
1715
lestein, rétorquait : « Toutes les révolutions de
l’
histoire de l’Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute
1716
quait : « Toutes les révolutions de l’histoire de
l’
Occident, sont sorties de la religion chrétienne. Toute autre cause es
1717
ions de l’histoire de l’Occident, sont sorties de
la
religion chrétienne. Toute autre cause est secondaire. » Et Henri de
1718
’il n’y a pas de socialisme en Asie, cela tient à
l’
absence du christianisme. » Je note ici, à l’appui des dires de de Man
1719
nt à l’absence du christianisme. » Je note ici, à
l’
appui des dires de de Man, que le mouvement syndicaliste au Japon a ét
1720
» Je note ici, à l’appui des dires de de Man, que
le
mouvement syndicaliste au Japon a été fondé par un chrétien, Kagawa.
1721
ndé par un chrétien, Kagawa. 53. Je ne dis pas «
les
conditions physiques et spirituelles en ce qu’elles ont de permanent
1722
les en ce qu’elles ont de permanent », car alors,
le
marxiste me ferait observer que des facteurs très essentiels de l’êtr
1723
rait observer que des facteurs très essentiels de
l’
être même peuvent varier selon les milieux et la nature des institutio
1724
ès essentiels de l’être même peuvent varier selon
les
milieux et la nature des institutions. (Ainsi le besoin prétendu « pr
1725
e l’être même peuvent varier selon les milieux et
la
nature des institutions. (Ainsi le besoin prétendu « primordial » de
1726
les milieux et la nature des institutions. (Ainsi
le
besoin prétendu « primordial » de propriété, peut très bien être anéa
1727
» de propriété, peut très bien être anéanti chez
l’
homme par un régime communiste.) Que reste-t-il dans l’être humain d’a
1728
me par un régime communiste.) Que reste-t-il dans
l’
être humain d’absolument irréductible à toute transformation sociale ?
1729
ent irréductible à toute transformation sociale ?
La
mort physique et le péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créat
1730
oute transformation sociale ? La mort physique et
le
péché. Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de l’esprit. En
1731
iale ? La mort physique et le péché. Mais aussi :
la
qualité, la fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout l’essentie
1732
rt physique et le péché. Mais aussi : la qualité,
la
fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout l’essentiel ! — Je dis
1733
Mais aussi : la qualité, la fonction créatrice de
l’
esprit. En somme, tout l’essentiel ! — Je dis que toute doctrine qui n
1734
la fonction créatrice de l’esprit. En somme, tout
l’
essentiel ! — Je dis que toute doctrine qui ne tient pas compte d’une
1735
e de ces conditions conduit nécessairement soit à
l’
idéalisme, soit à son renversement matérialiste. Le stalinisme totalit
1736
’idéalisme, soit à son renversement matérialiste.
Le
stalinisme totalitaire résulte nécessairement d’une conception de l’h
1737
itaire résulte nécessairement d’une conception de
l’
homme purement social, qui néglige la fonction spirituelle (créatrice)
1738
onception de l’homme purement social, qui néglige
la
fonction spirituelle (créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu
1739
i néglige la fonction spirituelle (créatrice), et
la
pesanteur du péché. Tandis qu’à l’inverse, on ne saurait établir que
1740
créatrice), et la pesanteur du péché. Tandis qu’à
l’
inverse, on ne saurait établir que la sécularisation du christianisme
1741
Tandis qu’à l’inverse, on ne saurait établir que
la
sécularisation du christianisme résulte nécessairement de l’Évangile
1742
sation du christianisme résulte nécessairement de
l’
Évangile ! 54. Déclaration d’un étudiant chinois au congrès mondial d
1743
ation d’un étudiant chinois au congrès mondial de
la
Fédération des étudiants chrétiens. (Cf. Student World, automne 1933.
1744
(Cf. Student World, automne 1933.) 55. Telle que
l’
ont opérée par exemple un Werner Sombart, un de Man, et en France, le
1745
emple un Werner Sombart, un de Man, et en France,
le
groupe de l’Ordre nouveau. (Cf. en particulier la Révolution nécessai
1746
le groupe de l’Ordre nouveau. (Cf. en particulier
la
Révolution nécessaire, par Aron et Dandieu, et sa critique de la noti
1747
écessaire, par Aron et Dandieu, et sa critique de
la
notion d’échange chez Marx.) 56. « Les pharisiens lui ayant demandé
1748
ritique de la notion d’échange chez Marx.) 56. «
Les
pharisiens lui ayant demandé quand viendrait le Royaume de Dieu, Jésu
1749
Les pharisiens lui ayant demandé quand viendrait
le
Royaume de Dieu, Jésus leur répondit : Le Royaume de Dieu ne vient pa
1750
endrait le Royaume de Dieu, Jésus leur répondit :
Le
Royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards et l’on
1751
Royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper
les
regards et l’on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car v
1752
ne vient pas de manière à frapper les regards et
l’
on ne dira pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que le Ro
1753
: il est ici, ou bien : il est là ! Car voici que
le
Royaume de Dieu est au-dedans de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. Je p
1754
de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. Je parle ici,
l’
on m’entend bien, de ce que doit être un chrétien conséquent. Il est t
1755
s certaines activités, celles-là précisément dont
le
marxisme a dû faire sa spécialité, en vertu de notre carence : la pol
1756
faire sa spécialité, en vertu de notre carence :
la
politique, nos affaires, nos intérêts dits matériels, et ceux des aut
1757
matériels, et ceux des autres ! Exemple typique :
l’
auteur d’un des cantiques les plus pieux du recueil anglais, sir John
1758
s ! Exemple typique : l’auteur d’un des cantiques
les
plus pieux du recueil anglais, sir John Browning, est le même homme q
1759
pieux du recueil anglais, sir John Browning, est
le
même homme qui contraignit la Chine, sous la menace des canons, à s’o
1760
John Browning, est le même homme qui contraignit
la
Chine, sous la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’opium.
1761
est le même homme qui contraignit la Chine, sous
la
menace des canons, à s’ouvrir au commerce de l’opium. Un tel fait don
1762
s la menace des canons, à s’ouvrir au commerce de
l’
opium. Un tel fait donne raison en apparence à la critique marxiste. E
1763
l’opium. Un tel fait donne raison en apparence à
la
critique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à la
1764
itique marxiste. En vérité, il ne donne tort qu’à
l’
homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’e
1765
. En vérité, il ne donne tort qu’à l’homme, non à
la
foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression dans
1766
il ne donne tort qu’à l’homme, non à la foi dont
l’
homme refuse les ordres. 58. Je prends l’expression dans ce sens, qui
1767
rt qu’à l’homme, non à la foi dont l’homme refuse
les
ordres. 58. Je prends l’expression dans ce sens, qui n’est pas le se
1768
oi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends
l’
expression dans ce sens, qui n’est pas le sens jésuite courant : que l
1769
e prends l’expression dans ce sens, qui n’est pas
le
sens jésuite courant : que la fin seule doit indiquer les moyens just
1770
sens, qui n’est pas le sens jésuite courant : que
la
fin seule doit indiquer les moyens justes qui la préparent. Et non pa
1771
jésuite courant : que la fin seule doit indiquer
les
moyens justes qui la préparent. Et non pas justifier des moyens qui s
1772
la fin seule doit indiquer les moyens justes qui
la
préparent. Et non pas justifier des moyens qui seraient en soi contra
1773
ifier des moyens qui seraient en soi contraires à
la
justice, — ou à l’essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ic
1774
i seraient en soi contraires à la justice, — ou à
l’
essence de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie polé
1775
soi contraires à la justice, — ou à l’essence de
la
fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à l’imagerie polémique des bou
1776
ce de la fin souhaitée. 59. Je ne cède pas ici à
l’
imagerie polémique des bourgeois, aux yeux desquels tout bolcheviste e
1777
ls tout bolcheviste est un criminel en puissance.
Les
communistes représentent chez nous, en général, l’élite de leur class
1778
s communistes représentent chez nous, en général,
l’
élite de leur classe. Je ne les traite pas de menteurs, d’hypocrites,
1779
z nous, en général, l’élite de leur classe. Je ne
les
traite pas de menteurs, d’hypocrites, etc. Mais je dis qu’en tant qu’
1780
es, etc. Mais je dis qu’en tant qu’ils approuvent
la
politique de Staline et ses moyens, connus de tous, ils approuvent le
1781
ine et ses moyens, connus de tous, ils approuvent
le
mensonge (affaire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans la SDN), l’opp
1782
s, ils approuvent le mensonge (affaire Zinoviev),
l’
hypocrisie (entrée dans la SDN), l’oppression (déportation des paysans
1783
nge (affaire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans
la
SDN), l’oppression (déportation des paysans, des écrivains), la haine
1784
ire Zinoviev), l’hypocrisie (entrée dans la SDN),
l’
oppression (déportation des paysans, des écrivains), la haine de class
1785
ression (déportation des paysans, des écrivains),
la
haine de classe (prêchée par Marx) et la guerre (pour peu qu’elle soi
1786
ivains), la haine de classe (prêchée par Marx) et
la
guerre (pour peu qu’elle soit censée défendre l’URSS). 60. Je n’ente
1787
la guerre (pour peu qu’elle soit censée défendre
l’
URSS). 60. Je n’entends pas porter ici un jugement quelconque sur les
1788
entends pas porter ici un jugement quelconque sur
les
groupes dits d’Oxford. Je ne les cite qu’au seul titre d’exemple topi
1789
t quelconque sur les groupes dits d’Oxford. Je ne
les
cite qu’au seul titre d’exemple topique. 61. Le rédacteur de cette «
1790
les cite qu’au seul titre d’exemple topique. 61.
Le
rédacteur de cette « discipline » paraît avoir été le pasteur Antoine
1791
édacteur de cette « discipline » paraît avoir été
le
pasteur Antoine de Chandieu, mais l’intervention personnelle de Calvi
1792
ît avoir été le pasteur Antoine de Chandieu, mais
l’
intervention personnelle de Calvin dans l’élaboration du document ne f
1793
u, mais l’intervention personnelle de Calvin dans
l’
élaboration du document ne fait pas de doute. « C’est, dit F. de Schic
1794
on démocratique, fédérative et parlementaire. » À
la
base de tout, il y a l’église locale, ou paroisse. Ces églises se féd
1795
ive et parlementaire. » À la base de tout, il y a
l’
église locale, ou paroisse. Ces églises se fédèrent par région. L’inst
1796
ou paroisse. Ces églises se fédèrent par région.
L’
instance d’appel est « la cour suprême du synode national ». (John Vié
1797
se fédèrent par région. L’instance d’appel est «
la
cour suprême du synode national ». (John Viénot, Histoire de la Réfor
1798
e du synode national ». (John Viénot, Histoire de
la
Réforme française, I, p. 271.) 62. C’est-à-dire : fondée sur la noti
1799
çaise, I, p. 271.) 62. C’est-à-dire : fondée sur
la
notion de vocation. 63. L’URSS est le seul État totalement totalitai
1800
t-à-dire : fondée sur la notion de vocation. 63.
L’
URSS est le seul État totalement totalitaire, disait récemment Victor
1801
fondée sur la notion de vocation. 63. L’URSS est
le
seul État totalement totalitaire, disait récemment Victor Serge, écri
1802
on en Sibérie. u. Rougemont Denis de, « Changer
la
vie ou changer l’homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Pl
1803
Rougemont Denis de, « Changer la vie ou changer
l’
homme ? », Le Communisme et les chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-2
1804
enis de, « Changer la vie ou changer l’homme ? »,
Le
Communisme et les chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-233.
1805
r la vie ou changer l’homme ? », Le Communisme et
les
chrétiens, Paris, Plon, 1937, p. 203-233.
1806
ocation et destin d’Israël (1937)v Sens de «
l’
histoire » d’Israël Un prophète, a écrit Karl Barth, est un homme s
1807
s nul besoin d’en rien connaître pour reconnaître
la
portée de son message puisque c’est le message de Dieu. Jérémie n’eût
1808
econnaître la portée de son message puisque c’est
le
message de Dieu. Jérémie n’eût été qu’un berger bègue si l’Éternel n’
1809
de Dieu. Jérémie n’eût été qu’un berger bègue si
l’
Éternel n’avait parlé par lui. Voici qui est digne de remarque : le se
1810
parlé par lui. Voici qui est digne de remarque :
le
seul détail précis que rapporte la Bible à son sujet, c’est cette dif
1811
de remarque : le seul détail précis que rapporte
la
Bible à son sujet, c’est cette difficulté à s’exprimer. Non seulement
1812
r. Non seulement rien d’historiquement notable ne
le
prédestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, — les psychologues
1813
historiquement notable ne le prédestinait à jouer
le
rôle d’un grand prophète, — les psychologues s’y épuiseront — mais en
1814
édestinait à jouer le rôle d’un grand prophète, —
les
psychologues s’y épuiseront — mais encore il y avait cet obstacle, et
1815
cet obstacle, et celui-là précisément qui paraît
le
plus décisif, à vues humaines, s’agissant d’un homme appelé au minist
1816
nes, s’agissant d’un homme appelé au ministère de
la
Parole. Ce qui est vrai du prophète l’est aussi de son peuple, — peup
1817
nistère de la Parole. Ce qui est vrai du prophète
l’
est aussi de son peuple, — peuple entre tous prophétique. Ce qui est v
1818
peuple entre tous prophétique. Ce qui est vrai de
la
biographie d’un homme que l’Éternel choisit n’est pas moins vrai de l
1819
. Ce qui est vrai de la biographie d’un homme que
l’
Éternel choisit n’est pas moins vrai de l’histoire profane des Juifs,
1820
mme que l’Éternel choisit n’est pas moins vrai de
l’
histoire profane des Juifs, porteurs eux aussi d’une mission que rien
1821
ion que rien en eux ne semblait préparer. On peut
le
dire sans paradoxe : Israël n’eût pas eu d’histoire sans la promesse
1822
ns paradoxe : Israël n’eût pas eu d’histoire sans
la
promesse que Dieu fit à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » ave
1823
à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » avec
la
mission qu’elle incarne : « Préparer les voies du Seigneur », espérer
1824
be » avec la mission qu’elle incarne : « Préparer
les
voies du Seigneur », espérer et prêcher le Messie, attendre activemen
1825
parer les voies du Seigneur », espérer et prêcher
le
Messie, attendre activement l’invisible et plus que cela : le jamais
1826
espérer et prêcher le Messie, attendre activement
l’
invisible et plus que cela : le jamais vu, ce qu’aucun autre peuple au
1827
ttendre activement l’invisible et plus que cela :
le
jamais vu, ce qu’aucun autre peuple au monde n’a jamais pu seulement
1828
ne répond à nul besoin historiquement déterminé…
L’
histoire, au sens hégélien ou tainien, ou matérialiste-dialectique, se
1829
-dialectique, se donne pour tâche de reconstituer
l’
évolution immanente d’un peuple, telle qu’on peut vraisemblablement la
1830
e d’un peuple, telle qu’on peut vraisemblablement
la
styliser et la chiffrer, c’est-à-dire, telle qu’elle fut déterminée p
1831
telle qu’on peut vraisemblablement la styliser et
la
chiffrer, c’est-à-dire, telle qu’elle fut déterminée par des facteurs
1832
te. Que nous apprend une science de cet ordre sur
le
destin auquel étaient promises les infimes tribus nomades qui constit
1833
e cet ordre sur le destin auquel étaient promises
les
infimes tribus nomades qui constituaient, aux origines, la nation jui
1834
s tribus nomades qui constituaient, aux origines,
la
nation juive ? Une similitude facile nous permet de l’imaginer : l’hi
1835
tion juive ? Une similitude facile nous permet de
l’
imaginer : l’histoire n’a pas la plus petite raison de supposer que le
1836
Une similitude facile nous permet de l’imaginer :
l’
histoire n’a pas la plus petite raison de supposer que le peuple d’Isr
1837
le nous permet de l’imaginer : l’histoire n’a pas
la
plus petite raison de supposer que le peuple d’Israël, s’il n’avait p
1838
ire n’a pas la plus petite raison de supposer que
le
peuple d’Israël, s’il n’avait pas été « élu », eût évolué d’une autre
1839
d’hui, avec une persistance bien remarquable tous
les
traits caractéristiques de la coutume pastorale des temps d’Abraham.
1840
n remarquable tous les traits caractéristiques de
la
coutume pastorale des temps d’Abraham. Nous ne possédons pas un rense
1841
nt conservateur, qui a pesé jusqu’à nos jours sur
les
habitants du désert. Désignée entre mille, sans raison. Ou sans autre
1842
ance étonnante à construire et à conquérir… Ainsi
les
annales d’Israël sont celles d’une puissance imprévue et humainement
1843
que nous connaissons de leur « histoire » — mais
le
mot prend ici un sens nouveau — c’est la suite des gestes de Dieu don
1844
» — mais le mot prend ici un sens nouveau — c’est
la
suite des gestes de Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais
1845
a suite des gestes de Dieu dont ils ne furent que
les
instruments. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans
1846
Dieu dont ils ne furent que les instruments. Mais
les
instruments indociles ! Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce
1847
Ce qui est à eux, dans ces annales, c’est ce qui
les
rabat à leur destin, ce sont leurs révoltes constantes, leurs faux pa
1848
Et toute leur grandeur est à Dieu, c’est-à-dire à
la
vocation qui les arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre enve
1849
andeur est à Dieu, c’est-à-dire à la vocation qui
les
arrache, malgré eux, à ce destin de très piètre envergure. Foi et
1850
de très piètre envergure. Foi et idolâtrie
La
considération du conflit séculaire que décrit l’Ancien Testament nous
1851
La considération du conflit séculaire que décrit
l’
Ancien Testament nous ramène avec une insistance innombrable et vraime
1852
lle on ne peut rien comprendre de ce qui touche à
la
nation des Juifs. Destin nomade, vocation messianique. Destin visible
1853
ion invisible et triomphante : celle que prêchent
les
prophètes au peuple et qui seule l’élève, l’assemble et donne un sens
1854
que prêchent les prophètes au peuple et qui seule
l’
élève, l’assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errai
1855
ent les prophètes au peuple et qui seule l’élève,
l’
assemble et donne un sens à la vie de chacun. Ce peuple errait sans «
1856
qui seule l’élève, l’assemble et donne un sens à
la
vie de chacun. Ce peuple errait sans « fin » dans le désert, sans but
1857
vie de chacun. Ce peuple errait sans « fin » dans
le
désert, sans but jusqu’à ce que Dieu l’élise. Désormais sa voie est f
1858
in » dans le désert, sans but jusqu’à ce que Dieu
l’
élise. Désormais sa voie est fixée, mais ce n’est plus sa « propre » v
1859
voie. Il vient de Dieu, il va vers Dieu, et c’est
la
loi de Dieu qui l’y conduit. C’est pourquoi son télos (sa fin dernièr
1860
ieu, il va vers Dieu, et c’est la loi de Dieu qui
l’
y conduit. C’est pourquoi son télos (sa fin dernière), est transcendan
1861
n son essence, comme Dieu, et comme Dieu objet de
la
foi seule. De la foi, et non de la vue ! Catégories absolument nouvel
1862
mme Dieu, et comme Dieu objet de la foi seule. De
la
foi, et non de la vue ! Catégories absolument nouvelles, et qui jouer
1863
Dieu objet de la foi seule. De la foi, et non de
la
vue ! Catégories absolument nouvelles, et qui joueront un rôle déterm
1864
uvelles, et qui joueront un rôle déterminant dans
l’
éthique de l’Occident, même sous les noms paganisés d’idéalisme et de
1865
ui joueront un rôle déterminant dans l’éthique de
l’
Occident, même sous les noms paganisés d’idéalisme et de réalisme au s
1866
terminant dans l’éthique de l’Occident, même sous
les
noms paganisés d’idéalisme et de réalisme au sens courant. Mais le co
1867
d’idéalisme et de réalisme au sens courant. Mais
le
conflit de la foi et de la vue n’est en somme qu’un autre aspect du c
1868
t de réalisme au sens courant. Mais le conflit de
la
foi et de la vue n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de la v
1869
au sens courant. Mais le conflit de la foi et de
la
vue n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de la vocation et du
1870
e n’est en somme qu’un autre aspect du conflit de
la
vocation et du destin. Il fait comprendre l’esprit de révolte qui tou
1871
t de la vocation et du destin. Il fait comprendre
l’
esprit de révolte qui tourmenta sans fin les douze tribus. Car un but
1872
rendre l’esprit de révolte qui tourmenta sans fin
les
douze tribus. Car un but invisible aux mortels est une menace et une
1873
au moins autant qu’une promesse. Une menace pour
les
« intérêts immédiats » qui se voient par trop négligés au profit d’on
1874
Et une angoisse contre laquelle il est fatal que
l’
on cherche à se protéger par quelque chose de visible et de tangible.
1875
ar quelque chose de visible et de tangible. Ainsi
les
Hébreux se rebellent, ils fuient dans le culte des faux dieux, rassur
1876
. Ainsi les Hébreux se rebellent, ils fuient dans
le
culte des faux dieux, rassurants parce que « faits de main d’homme »…
1877
es reviennent pour railler durement ces idoles et
les
traîtres qui les adorent : Mon peuple consulte son bois Et c’est s
1878
r railler durement ces idoles et les traîtres qui
les
adorent : Mon peuple consulte son bois Et c’est son bâton qui lui
1879
n bois Et c’est son bâton qui lui parle ! Car
l’
esprit de prostitution égare Et ils se prostituent loin de leur Dieu
1880
ir, et qui pourtant fait toute sa grandeur, c’est
la
révolte du destin profane contre la vocation libératrice. Et de même
1881
andeur, c’est la révolte du destin profane contre
la
vocation libératrice. Et de même que cette révolte, et ce destin, et
1882
ce besoin de voir, sont symbolisés au concret par
les
statues des idoles étrangères — car c’est le voisin qu’on imite lorsq
1883
par les statues des idoles étrangères — car c’est
le
voisin qu’on imite lorsqu’on doute de sa vocation — de même cette voc
1884
doute de sa vocation — de même cette vocation et
la
foi qu’elle implique ont un symbole, unique et univoque : l’Arche de
1885
lle implique ont un symbole, unique et univoque :
l’
Arche de l’Alliance présente au sein du peuple, aussi nommée arche du
1886
e ont un symbole, unique et univoque : l’Arche de
l’
Alliance présente au sein du peuple, aussi nommée arche du témoignage,
1887
nommée arche du témoignage, parce qu’elle atteste
les
volontés de Dieu, les conditions de son alliance. La mesure Dan
1888
nage, parce qu’elle atteste les volontés de Dieu,
les
conditions de son alliance. La mesure Dans l’Arche sont les Tab
1889
ontés de Dieu, les conditions de son alliance.
La
mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mes
1890
conditions de son alliance. La mesure Dans
l’
Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’e
1891
e son alliance. La mesure Dans l’Arche sont
les
Tables de la Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui ra
1892
. La mesure Dans l’Arche sont les Tables de
la
Loi. La Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la f
1893
mesure Dans l’Arche sont les Tables de la Loi.
La
Loi est la « mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’or
1894
ans l’Arche sont les Tables de la Loi. La Loi est
la
« mesure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois l’origine et la
1895
sure » sacrée : c’est elle qui rappelle à la fois
l’
origine et la fin du peuple en tant qu’il est un « nouveau » peuple, é
1896
: c’est elle qui rappelle à la fois l’origine et
la
fin du peuple en tant qu’il est un « nouveau » peuple, élu par Dieu e
1897
aissé au hasard, tout est « mesuré » et jugé dans
la
perspective de la fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et
1898
out est « mesuré » et jugé dans la perspective de
la
fin assignée à toute la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi
1899
gé dans la perspective de la fin assignée à toute
la
nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’Alliance n
1900
erspective de la fin assignée à toute la nation :
l’
Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de l’Alliance nous apparaît
1901
la nation : l’Éternel Dieu et son service. Ainsi
l’
Arche de l’Alliance nous apparaît comme l’exemple à peu près idéal de
1902
: l’Éternel Dieu et son service. Ainsi l’Arche de
l’
Alliance nous apparaît comme l’exemple à peu près idéal de ce que l’on
1903
. Ainsi l’Arche de l’Alliance nous apparaît comme
l’
exemple à peu près idéal de ce que l’on peut nommer (d’un terme d’aill
1904
paraît comme l’exemple à peu près idéal de ce que
l’
on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à l’antiquité helléniqu
1905
’on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à
l’
antiquité hellénique) la mesure d’une civilisation, le canon d’une cul
1906
rme d’ailleurs emprunté à l’antiquité hellénique)
la
mesure d’une civilisation, le canon d’une culture et d’un ordre socia
1907
tiquité hellénique) la mesure d’une civilisation,
le
canon d’une culture et d’un ordre social, le principe initial et fina
1908
ion, le canon d’une culture et d’un ordre social,
le
principe initial et final régulateur et en même temps animateur de to
1909
l régulateur et en même temps animateur de toutes
les
œuvres d’une nation, tant matérielles que politiques et spirituelles6
1910
ant matérielles que politiques et spirituelles65.
L’
histoire des civilisations nous offre certes d’autres exemples assez g
1911
en et aztèque, Chine des grandes dynasties.) Mais
la
mesure des tribus hébraïques se distingue de toutes les autres en ce
1912
sure des tribus hébraïques se distingue de toutes
les
autres en ce qu’elle est une vocation adressée par un Dieu personnel,
1913
el, unique, éternel, transcendant. Elle n’est pas
le
produit normal d’une évolution historique fécondée et cristallisée pa
1914
évolution historique fécondée et cristallisée par
l’
intervention d’un grand chef. Elle est donc plus « totalitaire » que t
1915
retrait ou de dépassement. Aucun refuge « loin de
la
face de l’Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu
1916
de dépassement. Aucun refuge « loin de la face de
l’
Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éter
1917
loin de la face de l’Éternel ». Parce qu’elle est
la
loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience f
1918
ce qu’elle est la loi de Dieu, et que ce Dieu est
l’
Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu
1919
est la loi de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel,
la
Loi est la conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est l
1920
de Dieu, et que ce Dieu est l’Éternel, la Loi est
la
conscience finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est la loi de Di
1921
nce finale du peuple hébreu. Et parce qu’elle est
la
loi de Dieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle la règle pe
1922
Et parce qu’elle est la loi de Dieu — qui définit
la
vérité —, elle porte en elle la règle permanente de toute action et d
1923
ieu — qui définit la vérité —, elle porte en elle
la
règle permanente de toute action et de toute pensée. Vraie mesure don
1924
ie mesure donc, et parfaitement commune. On porte
l’
Arche au-devant des armées, dans la guerre, comme le symbole de l’unit
1925
mune. On porte l’Arche au-devant des armées, dans
la
guerre, comme le symbole de l’unité du peuple, mais son usage est int
1926
Arche au-devant des armées, dans la guerre, comme
le
symbole de l’unité du peuple, mais son usage est interdit pendant les
1927
t des armées, dans la guerre, comme le symbole de
l’
unité du peuple, mais son usage est interdit pendant les guerres civil
1928
té du peuple, mais son usage est interdit pendant
les
guerres civiles : c’est que la mesure est indivisible. Dieu est au ci
1929
interdit pendant les guerres civiles : c’est que
la
mesure est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et
1930
est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur
la
terre, et les prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et si ces
1931
le. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre, et
les
prêtres sont là pour veiller sur l’Alliance. Et si ces « clercs » vie
1932
la terre, et les prêtres sont là pour veiller sur
l’
Alliance. Et si ces « clercs » viennent à trahir, cédant à leur pencha
1933
hant immémorial et bien connu, s’ils oublient que
le
Dieu qu’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux », les Prophète
1934
’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux »,
les
Prophètes se lèvent contre eux et dénoncent leur idolâtrie66. Remarqu
1935
eux et dénoncent leur idolâtrie66. Remarquons que
la
notion d’idolâtrie déborde ici singulièrement le culte des images d’o
1936
la notion d’idolâtrie déborde ici singulièrement
le
culte des images d’où elle tire son nom. Elle embrasse tout ce qui n’
1937
on d’un autre bien. Idole tout ce qui détourne de
la
seule vocation. Idole toute action ou pensée, si belle ou si féconde
1938
euple élu. Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à
la
fin que les prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolât
1939
Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à la fin que
les
prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolâtries, c’est
1940
in que les prophètes annoncent sans relâche. Mais
la
pire des idolâtries, c’est celle qui prend pour objet de son culte la
1941
es, c’est celle qui prend pour objet de son culte
la
mesure même, la Loi en soi, abstraite des fins pour lesquelles elle e
1942
qui prend pour objet de son culte la mesure même,
la
Loi en soi, abstraite des fins pour lesquelles elle existe. C’est l’i
1943
raite des fins pour lesquelles elle existe. C’est
l’
idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à la « lettre » d’une légis
1944
xiste. C’est l’idolâtrie qui consiste à soumettre
l’
homme à la « lettre » d’une législation divine, mais dont l’homme s’es
1945
st l’idolâtrie qui consiste à soumettre l’homme à
la
« lettre » d’une législation divine, mais dont l’homme s’est emparé,
1946
la « lettre » d’une législation divine, mais dont
l’
homme s’est emparé, et dont il fait sa chose, oubliant son Auteur. C’e
1947
it sa chose, oubliant son Auteur. C’est alors que
la
lettre tue l’homme, au lieu de le secourir en incarnant l’esprit. Et
1948
ubliant son Auteur. C’est alors que la lettre tue
l’
homme, au lieu de le secourir en incarnant l’esprit. Et c’est à cette
1949
C’est alors que la lettre tue l’homme, au lieu de
le
secourir en incarnant l’esprit. Et c’est à cette ultime tentation que
1950
tue l’homme, au lieu de le secourir en incarnant
l’
esprit. Et c’est à cette ultime tentation que devaient succomber les p
1951
t à cette ultime tentation que devaient succomber
les
plus grands rigoristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que le p
1952
ue devaient succomber les plus grands rigoristes,
les
savants docteurs de la Loi, ceux que le peuple honorait à peu près co
1953
s plus grands rigoristes, les savants docteurs de
la
Loi, ceux que le peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard
1954
oristes, les savants docteurs de la Loi, ceux que
le
peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard des Pères de l’É
1955
, ceux que le peuple honorait à peu près comme on
le
fit plus tard des Pères de l’Église, des évêques et des cardinaux : l
1956
Pères de l’Église, des évêques et des cardinaux :
les
pharisiens. Condamnant au nom de la Loi celui-là même qui l’avait don
1957
cardinaux : les pharisiens. Condamnant au nom de
la
Loi celui-là même qui l’avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de
1958
ns. Condamnant au nom de la Loi celui-là même qui
l’
avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de la lettre, celui dont ce
1959
i l’avait donnée, tuant en Jésus-Christ au nom de
la
lettre, celui dont cette lettre préparait la venue, et qui seul lui d
1960
m de la lettre, celui dont cette lettre préparait
la
venue, et qui seul lui donnait son sens… ⁂ Rien ne me paraît plus pro
1961
t plus propre à confirmer cette interprétation de
la
Loi, comme mesure du peuple hébreu, qu’un texte que je trouve dans le
1962
du peuple hébreu, qu’un texte que je trouve dans
le
plus grand des historiens profanes des Juifs : Josèphe. « Notre légis
1963
ïse), écrit-il dans sa Réponse à Appion 67, a été
le
seul dont les actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a
1964
l dans sa Réponse à Appion 67, a été le seul dont
les
actions et les paroles ont été conformes. » Car il n’a pas seulement
1965
se à Appion 67, a été le seul dont les actions et
les
paroles ont été conformes. » Car il n’a pas seulement formulé des loi
1966
le conformité, parce que rien n’est si capable de
la
faire naître et de l’entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de
1967
ue rien n’est si capable de la faire naître et de
l’
entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, e
1968
e la faire naître et de l’entretenir, que d’avoir
les
mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, et d’être élevés dans une mê
1969
l’entretenir, que d’avoir les mêmes sentiments de
la
grandeur de Dieu, et d’être élevés dans une même manière de vivre, et
1970
re élevés dans une même manière de vivre, et dans
les
mêmes coutumes ; car on n’entend point parmi nous parler diversement
1971
parler diversement de Dieu, comme il arrive parmi
les
autres peuples, non seulement entre les personnes du commun qui disen
1972
ive parmi les autres peuples, non seulement entre
les
personnes du commun qui disent chacun au hasard ce qui leur vient dan
1973
ui disent chacun au hasard ce qui leur vient dans
l’
esprit ; mais entre les philosophes… Nous croyons que Dieu voit tout c
1974
sard ce qui leur vient dans l’esprit ; mais entre
les
philosophes… Nous croyons que Dieu voit tout ce qui se passe dans le
1975
s croyons que Dieu voit tout ce qui se passe dans
le
monde. Nos femmes et nos serviteurs en sont persuadés comme nous : on
1976
dés comme nous : on peut apprendre de leur bouche
les
règles de la conduite de notre vie, et que toutes nos actions doivent
1977
: on peut apprendre de leur bouche les règles de
la
conduite de notre vie, et que toutes nos actions doivent avoir pour o
1978
t matériel, aussi fanatiquement lié et suspendu à
l’
invisible. Le moderne en ressent comme une offense à cette liberté cré
1979
ussi fanatiquement lié et suspendu à l’invisible.
Le
moderne en ressent comme une offense à cette liberté créatrice dans l
1980
d’inventions négligées, méprisées ! Nous adorons
la
Vie et le Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure n
1981
ons négligées, méprisées ! Nous adorons la Vie et
le
Progrès, le foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à
1982
s, méprisées ! Nous adorons la Vie et le Progrès,
le
foisonnement et la diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu
1983
adorons la Vie et le Progrès, le foisonnement et
la
diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux qu’une occasion de dé
1984
t à nos yeux qu’une occasion de dépassement… Oui,
la
Richesse est notre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de l’ex
1985
chesse est notre dernier dieu, et c’est peut-être
le
secret de l’expansion, mais aussi de l’anarchie finale de notre cultu
1986
tre dernier dieu, et c’est peut-être le secret de
l’
expansion, mais aussi de l’anarchie finale de notre culture moderne. C
1987
peut-être le secret de l’expansion, mais aussi de
l’
anarchie finale de notre culture moderne. Culture dont les éléments pr
1988
hie finale de notre culture moderne. Culture dont
les
éléments progressivement désunis, puis coupés de toute base commune,
1989
t à ne plus même pouvoir communiquer, ni s’animer
les
uns les autres, chacun se refermant sur sa spécialité, se forgeant un
1990
lus même pouvoir communiquer, ni s’animer les uns
les
autres, chacun se refermant sur sa spécialité, se forgeant une langue
1991
et convoquant enfin, à grands frais d’inventions,
la
vieille malédiction de la tour de Babel, qui est la dispersion du gen
1992
nds frais d’inventions, la vieille malédiction de
la
tour de Babel, qui est la dispersion du genre humain. Le dilemme qui
1993
vieille malédiction de la tour de Babel, qui est
la
dispersion du genre humain. Le dilemme qui se trouve posé à toute civ
1994
de Babel, qui est la dispersion du genre humain.
Le
dilemme qui se trouve posé à toute civilisation, et d’une manière trè
1995
ute civilisation, et d’une manière très urgente à
la
nôtre, est assez clairement défini par la comparaison que l’on peut f
1996
gente à la nôtre, est assez clairement défini par
la
comparaison que l’on peut faire de notre richesse anarchique, et rend
1997
st assez clairement défini par la comparaison que
l’
on peut faire de notre richesse anarchique, et rendue presque vaine pa
1998
ique, et rendue presque vaine par ses excès, avec
la
pauvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. C
1999
auvreté pleine de sens et de grandeur qu’imposait
la
Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une
2000
t de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. Ce que
l’
on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce do
2001
osait la Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce que
l’
on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont l’exemple juif no
2002
gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont
l’
exemple juif nous permettra mieux que tout autre de juger. Que devient
2003
eux que tout autre de juger. Que devient en effet
la
culture, dans un monde où n’est tolérée que « la seule chose nécessai
2004
la culture, dans un monde où n’est tolérée que «
la
seule chose nécessaire ? » L’homme qui a une vocation n’est pas bon
2005
’est tolérée que « la seule chose nécessaire ? »
L’
homme qui a une vocation n’est pas bon à autre chose. Israël portait d
2006
s bon à autre chose. Israël portait dans son sein
l’
avenir religieux du monde. Dès qu’il était tenté de s’oublier dans les
2007
du monde. Dès qu’il était tenté de s’oublier dans
les
voies vulgaires des autres peuples, une sorte de génie sombre lui mon
2008
s peuples, une sorte de génie sombre lui montrait
l’
envers de toute chose, et avec des accents d’amère ironie, proclamait
2009
t avec des accents d’amère ironie, proclamait que
la
justice à l’ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ain
2010
cents d’amère ironie, proclamait que la justice à
l’
ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68 Ainsi toute tent
2011
it assimilée à une révolte d’orgueil contre Dieu.
La
culture d’Israël sera pauvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté
2012
uvre à raison même de sa pureté. Sa pauvreté sera
la
condition de sa grandeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui comble l
2013
andeur. Car ce qui est grand, c’est ce qui comble
la
mesure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais
2014
c’est ce qui comble la mesure, et non pas ce qui
la
dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas l
2015
esure, et non pas ce qui la dépasse. Ce n’est pas
la
richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes ma
2016
ce qui la dépasse. Ce n’est pas la richesse, mais
la
fidélité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais les moyens mesu
2017
pas la richesse, mais la fidélité. Ce ne sont pas
les
moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par la fin. C’est pourquo
2018
lité. Ce ne sont pas les moyens en eux-mêmes mais
les
moyens mesurés par la fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit l
2019
s moyens en eux-mêmes mais les moyens mesurés par
la
fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit la fidélité de la cultu
2020
la fin. C’est pourquoi sa pauvreté même garantit
la
fidélité de la culture du peuple hébreu. C’est une ascèse : il s’agit
2021
pourquoi sa pauvreté même garantit la fidélité de
la
culture du peuple hébreu. C’est une ascèse : il s’agit de détruire en
2022
ce qui comblerait trop tôt, ou trop humainement,
la
grande attente messianique. Point d’abstractions : c’est que le culte
2023
nte messianique. Point d’abstractions : c’est que
le
culte qu’il faut rendre au Dieu vivant est une obéissance directe « e
2024
ité ». Or abstraire, c’est d’abord s’abstraire de
l’
immédiat. Et c’est aussi, dans une certaine mesure, douter… Ainsi donc
2025
ans une certaine mesure, douter… Ainsi donc, pour
l’
Hébreu, se borner au concret, c’est rester fidèle à la Loi. D’ailleurs
2026
breu, se borner au concret, c’est rester fidèle à
la
Loi. D’ailleurs son langage même s’ordonne dès l’origine à cette voca
2027
la Loi. D’ailleurs son langage même s’ordonne dès
l’
origine à cette vocation supérieure ; dénué de termes abstraits, impro
2028
its, impropre à toute métaphysique69 il contraint
les
auteurs sacrés à l’invention de métaphores qui enrobent les notions l
2029
métaphysique69 il contraint les auteurs sacrés à
l’
invention de métaphores qui enrobent les notions les plus hautes dans
2030
s sacrés à l’invention de métaphores qui enrobent
les
notions les plus hautes dans un vêtement quotidien ; on dirait : un v
2031
’invention de métaphores qui enrobent les notions
les
plus hautes dans un vêtement quotidien ; on dirait : un vêtement de t
2032
hètes, a-t-il besoin de philosophes ? — est ainsi
l’
aspect négatif d’une splendeur poétique inégalée. (La poésie de l’Occi
2033
spect négatif d’une splendeur poétique inégalée. (
La
poésie de l’Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera
2034
d’une splendeur poétique inégalée. (La poésie de
l’
Occident chrétien sera grande dans la mesure où elle sera biblique ou
2035
La poésie de l’Occident chrétien sera grande dans
la
mesure où elle sera biblique ou grecque, sublime dans la mesure où la
2036
re où elle sera biblique ou grecque, sublime dans
la
mesure où la synthèse des deux traditions sera dominée par l’élément
2037
ra biblique ou grecque, sublime dans la mesure où
la
synthèse des deux traditions sera dominée par l’élément biblique.) Se
2038
la synthèse des deux traditions sera dominée par
l’
élément biblique.) Seuls les grands discours prophétiques, parmi tous
2039
tions sera dominée par l’élément biblique.) Seuls
les
grands discours prophétiques, parmi tous les chants de la terre, ont
2040
euls les grands discours prophétiques, parmi tous
les
chants de la terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié l’étymo
2041
s discours prophétiques, parmi tous les chants de
la
terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié l’étymologie grecque
2042
ous les chants de la terre, ont réellement rythmé
l’
action et vérifié l’étymologie grecque de poésie, qui est agir. Point
2043
terre, ont réellement rythmé l’action et vérifié
l’
étymologie grecque de poésie, qui est agir. Point d’arts figuratifs ou
2044
est agir. Point d’arts figuratifs ou imaginatifs.
La
loi les interdit par le deuxième et le troisième commandement. « Tu n
2045
r. Point d’arts figuratifs ou imaginatifs. La loi
les
interdit par le deuxième et le troisième commandement. « Tu ne te fer
2046
e représentation des choses qui sont en haut dans
les
cieux, en bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que la terre. »
2047
hoses qui sont en haut dans les cieux, en bas sur
la
terre, et dans les eaux plus bas que la terre. » Cela condamne toute
2048
haut dans les cieux, en bas sur la terre, et dans
les
eaux plus bas que la terre. » Cela condamne toute espèce d’art plasti
2049
n bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que
la
terre. » Cela condamne toute espèce d’art plastique. « Tu n’auras pas
2050
s d’autres dieux devant ma face » — cela condamne
la
mythologie et la fabulation, où les Aryens puisent leur art de trompe
2051
devant ma face » — cela condamne la mythologie et
la
fabulation, où les Aryens puisent leur art de tromper et de se satisf
2052
cela condamne la mythologie et la fabulation, où
les
Aryens puisent leur art de tromper et de se satisfaire d’illusions. P
2053
’illusions. Point de science purement technique :
la
sagesse de Salomon n’est pas une connaissance des « causes » mais bie
2054
ignatures » naturelles. Elle ne veut pas utiliser
les
choses, mais distinguer en elles les intentions divines, pour les off
2055
pas utiliser les choses, mais distinguer en elles
les
intentions divines, pour les offrir en holocauste spirituel au Créate
2056
distinguer en elles les intentions divines, pour
les
offrir en holocauste spirituel au Créateur70. Enfin, remarque encore
2057
l au Créateur70. Enfin, remarque encore Renan : «
L’
esprit prophétique, et les institutions qui en naissent, au moins virt
2058
emarque encore Renan : « L’esprit prophétique, et
les
institutions qui en naissent, au moins virtuellement, interdisaient l
2059
n naissent, au moins virtuellement, interdisaient
le
développement commercial71 et industriel. » Que reste-t-il de ce que
2060
tes, science, industrie, tout cela est sacrifié à
la
seule chose nécessaire : l’accomplissement d’une vocation spirituelle
2061
t cela est sacrifié à la seule chose nécessaire :
l’
accomplissement d’une vocation spirituelle. Et les moyens de cet accom
2062
l’accomplissement d’une vocation spirituelle. Et
les
moyens de cet accomplissement sont les moyens les plus élémentaires q
2063
tuelle. Et les moyens de cet accomplissement sont
les
moyens les plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’écri
2064
les moyens de cet accomplissement sont les moyens
les
plus élémentaires que les hommes ont de commercer : l’écriture, la pa
2065
ssement sont les moyens les plus élémentaires que
les
hommes ont de commercer : l’écriture, la parole et l’action, — la tra
2066
us élémentaires que les hommes ont de commercer :
l’
écriture, la parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guer
2067
res que les hommes ont de commercer : l’écriture,
la
parole et l’action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet
2068
ommes ont de commercer : l’écriture, la parole et
l’
action, — la tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénu
2069
commercer : l’écriture, la parole et l’action, —
la
tradition, la prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénuement, ce ré
2070
’écriture, la parole et l’action, — la tradition,
la
prophétie, la guerre… Mais cet extrême dénuement, ce résidu d’exclusi
2071
parole et l’action, — la tradition, la prophétie,
la
guerre… Mais cet extrême dénuement, ce résidu d’exclusions fanatiques
2072
clusions fanatiques, se trouve sauver et garantir
la
possession de ce que notre Occident lui-même a défini comme le bien s
2073
de ce que notre Occident lui-même a défini comme
le
bien souverain : l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la
2074
ident lui-même a défini comme le bien souverain :
l’
harmonie dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet q
2075
défini comme le bien souverain : l’harmonie dans
le
dynamisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que la destinatio
2076
le bien souverain : l’harmonie dans le dynamisme,
le
Sens général de la vie. Si l’on admet que la destination de toute cul
2077
l’harmonie dans le dynamisme, le Sens général de
la
vie. Si l’on admet que la destination de toute culture, c’est de conc
2078
dans le dynamisme, le Sens général de la vie. Si
l’
on admet que la destination de toute culture, c’est de concentrer les
2079
sme, le Sens général de la vie. Si l’on admet que
la
destination de toute culture, c’est de concentrer les puissances de l
2080
destination de toute culture, c’est de concentrer
les
puissances de la nature et de la société dans les, mains de l’homme r
2081
te culture, c’est de concentrer les puissances de
la
nature et de la société dans les, mains de l’homme responsable, et do
2082
t de concentrer les puissances de la nature et de
la
société dans les, mains de l’homme responsable, et dont l’esprit conn
2083
les puissances de la nature et de la société dans
les
, mains de l’homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel
2084
de la nature et de la société dans les, mains de
l’
homme responsable, et dont l’esprit connaît un but auquel il dédie tou
2085
é dans les, mains de l’homme responsable, et dont
l’
esprit connaît un but auquel il dédie toutes ses œuvres, l’on voit que
2086
connaît un but auquel il dédie toutes ses œuvres,
l’
on voit que la culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu,
2087
auquel il dédie toutes ses œuvres, l’on voit que
la
culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la
2088
dédie toutes ses œuvres, l’on voit que la culture
la
plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi la plus conven
2089
pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi
la
plus convenable aux fins suprêmes de l’esprit. Toutefois, non tant à
2090
fut aussi la plus convenable aux fins suprêmes de
l’
esprit. Toutefois, non tant à cause de sa pauvreté même, qu’à cause de
2091
n tant à cause de sa pauvreté même, qu’à cause de
l’
absolu de sa mesure, et de la promesse qu’elle portait. ⁂ Revenons enc
2092
même, qu’à cause de l’absolu de sa mesure, et de
la
promesse qu’elle portait. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce q
2093
it. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce que
l’
on nous reproche comme un grand défaut, de ne nous point étudier à inv
2094
tudier à inventer des choses nouvelles, soit dans
les
arts, ou dans le langage, au lieu que les autres peuples méritent bea
2095
des choses nouvelles, soit dans les arts, ou dans
le
langage, au lieu que les autres peuples méritent beaucoup de louange
2096
it dans les arts, ou dans le langage, au lieu que
les
autres peuples méritent beaucoup de louange d’y apporter de continuel
2097
à vertu et prudence, de demeurer constamment dans
l’
observation des lois et des coutumes de nos ancêtres, parce que c’est
2098
l n’y a que celles qui n’ont pas cet avantage que
l’
on soit obligé de changer, lorsque l’expérience fait connaître le beso
2099
avantage que l’on soit obligé de changer, lorsque
l’
expérience fait connaître le besoin d’en corriger les défauts. Ainsi,
2100
é de changer, lorsque l’expérience fait connaître
le
besoin d’en corriger les défauts. Ainsi, comme nous ne doutons point
2101
expérience fait connaître le besoin d’en corriger
les
défauts. Ainsi, comme nous ne doutons point que ce ne soit Dieu qui n
2102
que ce ne soit Dieu qui nous a donné ces lois par
l’
entremise de Moïse, pourrions-nous, sans impiété, ne nous pas efforcer
2103
rions-nous, sans impiété, ne nous pas efforcer de
les
observer très religieusement ? Et quelle conduite peut être plus just
2104
s sainte, que celle dont ce souverain Monarque de
l’
univers est l’auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus
2105
celle dont ce souverain Monarque de l’univers est
l’
auteur… Quelle forme de gouvernement peut donc être plus parfaite que
2106
de gouvernement peut donc être plus parfaite que
la
nôtre, et quels plus grands honneurs peut-on rendre à Dieu, puisque n
2107
e, et que toutes choses ne sont pas mieux réglées
le
jour d’une fête solennelle, qu’elles le sont toujours parmi nous ?
2108
x réglées le jour d’une fête solennelle, qu’elles
le
sont toujours parmi nous ? Chute d’Israël Tout était suspendu
2109
ous ? Chute d’Israël Tout était suspendu à
la
Loi, qui était elle-même suspendue à la promesse messianique donnée p
2110
uspendu à la Loi, qui était elle-même suspendue à
la
promesse messianique donnée par Dieu dès les temps primitifs72. Mais
2111
due à la promesse messianique donnée par Dieu dès
les
temps primitifs72. Mais cette promesse, enfin, s’est incarnée. Et les
2112
2. Mais cette promesse, enfin, s’est incarnée. Et
les
juifs l’ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cette « ombre des bi
2113
tte promesse, enfin, s’est incarnée. Et les juifs
l’
ont méconnue prenant prétexte de la Loi, cette « ombre des biens à ven
2114
. Et les juifs l’ont méconnue prenant prétexte de
la
Loi, cette « ombre des biens à venir. » (Héb. 10, 1), pour repousser
2115
des biens à venir. » (Héb. 10, 1), pour repousser
le
Christ, qui était « l’esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lo
2116
éb. 10, 1), pour repousser le Christ, qui était «
l’
esprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomp
2117
ur repousser le Christ, qui était « l’esprit » et
la
réalité finale de la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le
2118
t, qui était « l’esprit » et la réalité finale de
la
Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui
2119
sprit » et la réalité finale de la Loi. Dès lors,
la
Loi est « accomplie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’e
2120
la Loi. Dès lors, la Loi est « accomplie » comme
le
dit Jésus-Christ lui-même, et elle l’est d’une double manière : parce
2121
lie » comme le dit Jésus-Christ lui-même, et elle
l’
est d’une double manière : parce qu’elle a abouti — le Messie est venu
2122
t d’une double manière : parce qu’elle a abouti —
le
Messie est venu — et parce qu’elle a perdu son sens en condamnant cel
2123
ette Alliance, et ce sont ceux qui adorent encore
l’
ancienne Loi, « déclarée vieillie », qui sont maintenant les idolâtres
2124
e Loi, « déclarée vieillie », qui sont maintenant
les
idolâtres. Voilà pourquoi le peuple juif, qui n’a pas cru à sa victoi
2125
qui sont maintenant les idolâtres. Voilà pourquoi
le
peuple juif, qui n’a pas cru à sa victoire, et qui repousse la nouvel
2126
f, qui n’a pas cru à sa victoire, et qui repousse
la
nouvelle mesure, c’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui l
2127
et qui repousse la nouvelle mesure, c’est-à-dire
la
Nouvelle Alliance, est aujourd’hui le peuple sans mesure, sans limite
2128
’est-à-dire la Nouvelle Alliance, est aujourd’hui
le
peuple sans mesure, sans limites et sans foyer. Sans espérance, il cr
2129
es qui ne viendront pas… Héritage d’Israël
Le
christianisme par sa nature même, brisait avec le nationalisme exclus
2130
Le christianisme par sa nature même, brisait avec
le
nationalisme exclusif du judaïsme et assumait une mission de portée u
2131
verselle. Il revendiquait toutefois en même temps
l’
héritage d’Israël, et l’attraction qu’il exerçait venait non des princ
2132
t toutefois en même temps l’héritage d’Israël, et
l’
attraction qu’il exerçait venait non des principes généraux de la pens
2133
’il exerçait venait non des principes généraux de
la
pensée hellénistique, mais de la pure tradition hébraïque, représenté
2134
ipes généraux de la pensée hellénistique, mais de
la
pure tradition hébraïque, représentée par la Loi et les Prophètes. L’
2135
s de la pure tradition hébraïque, représentée par
la
Loi et les Prophètes. L’Église primitive se regardait comme le second
2136
re tradition hébraïque, représentée par la Loi et
les
Prophètes. L’Église primitive se regardait comme le second Israël, l’
2137
braïque, représentée par la Loi et les Prophètes.
L’
Église primitive se regardait comme le second Israël, l’héritière du R
2138
se primitive se regardait comme le second Israël,
l’
héritière du Royaume promis au Peuple de Dieu. Aussi conserva-t-elle à
2139
conciliable opposition dont s’était nourrie toute
la
tradition judaïque. C’est précisément ce sens de la continuité histor
2140
tradition judaïque. C’est précisément ce sens de
la
continuité historique et de la solidarité sociale qui distingua l’égl
2141
isément ce sens de la continuité historique et de
la
solidarité sociale qui distingua l’église chrétienne des religions à
2142
torique et de la solidarité sociale qui distingua
l’
église chrétienne des religions à mystères et des autres cultes orient
2143
ette époque, et qui fit d’elle dès son apparition
la
seule rivale véritable et la seule remplaçante possible de la religio
2144
e dès son apparition la seule rivale véritable et
la
seule remplaçante possible de la religion officielle de l’Empire73.
2145
ale véritable et la seule remplaçante possible de
la
religion officielle de l’Empire73. Ces quelques lignes de Dawson me
2146
remplaçante possible de la religion officielle de
l’
Empire73. Ces quelques lignes de Dawson me paraissent définir en racc
2147
gnes de Dawson me paraissent définir en raccourci
le
double héritage que l’Église et l’Europe ont repris des mains d’Israë
2148
ssent définir en raccourci le double héritage que
l’
Église et l’Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l
2149
r en raccourci le double héritage que l’Église et
l’
Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin de l’« élection
2150
ont repris des mains d’Israël : héritage divin de
l’
« élection collective », d’une part, — car la postérité d’Abraham, apr
2151
n de l’« élection collective », d’une part, — car
la
postérité d’Abraham, après le Christ, c’est l’ensemble de tous les cr
2152
, d’une part, — car la postérité d’Abraham, après
le
Christ, c’est l’ensemble de tous les croyants, gentils ou Juifs conve
2153
ar la postérité d’Abraham, après le Christ, c’est
l’
ensemble de tous les croyants, gentils ou Juifs convertis, donc l’Égli
2154
braham, après le Christ, c’est l’ensemble de tous
les
croyants, gentils ou Juifs convertis, donc l’Église — héritage humain
2155
us les croyants, gentils ou Juifs convertis, donc
l’
Église — héritage humain, d’autre part, de cette notion de la mesure «
2156
héritage humain, d’autre part, de cette notion de
la
mesure « totalitaire » qui devait assurer la grandeur de l’Église — m
2157
n de la mesure « totalitaire » qui devait assurer
la
grandeur de l’Église — mais dont les déviations et perversions ravage
2158
« totalitaire » qui devait assurer la grandeur de
l’
Église — mais dont les déviations et perversions ravagent l’Europe dep
2159
evait assurer la grandeur de l’Église — mais dont
les
déviations et perversions ravagent l’Europe depuis le xviie siècle,
2160
mais dont les déviations et perversions ravagent
l’
Europe depuis le xviie siècle, et menacent aujourd’hui de la détruire
2161
éviations et perversions ravagent l’Europe depuis
le
xviie siècle, et menacent aujourd’hui de la détruire74. Il ne saurai
2162
puis le xviie siècle, et menacent aujourd’hui de
la
détruire74. Il ne saurait être question de retracer ici dans son ense
2163
t être question de retracer ici dans son ensemble
l’
évolution des éléments culturels et civilisateurs qui survécurent à la
2164
ents culturels et civilisateurs qui survécurent à
la
chute d’Israël, au moins aussi fondamentaux pour l’Occident que la ra
2165
chute d’Israël, au moins aussi fondamentaux pour
l’
Occident que la raison des Grecs et l’ordre des Romains. Il m’appartie
2166
, au moins aussi fondamentaux pour l’Occident que
la
raison des Grecs et l’ordre des Romains. Il m’appartient seulement de
2167
entaux pour l’Occident que la raison des Grecs et
l’
ordre des Romains. Il m’appartient seulement de préciser en quelques t
2168
partient seulement de préciser en quelques traits
le
sens que prend l’héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante
2169
de préciser en quelques traits le sens que prend
l’
héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante. On sait le rôle
2170
traits le sens que prend l’héritage d’Israël pour
la
foi chrétienne protestante. On sait le rôle joué dans la Réforme par
2171
sraël pour la foi chrétienne protestante. On sait
le
rôle joué dans la Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux t
2172
chrétienne protestante. On sait le rôle joué dans
la
Réforme par le retour à l’Ancien Testament et aux traditions prophéti
2173
estante. On sait le rôle joué dans la Réforme par
le
retour à l’Ancien Testament et aux traditions prophétiques. Mais sait
2174
sait le rôle joué dans la Réforme par le retour à
l’
Ancien Testament et aux traditions prophétiques. Mais sait-on à quel p
2175
is sait-on à quel point tout cela vit encore dans
les
églises évangéliques de nos jours ? Dès les bancs de « l’école du dim
2176
dans les églises évangéliques de nos jours ? Dès
les
bancs de « l’école du dimanche », tout jeune protestant est nourri au
2177
es évangéliques de nos jours ? Dès les bancs de «
l’
école du dimanche », tout jeune protestant est nourri aux sources même
2178
seph vendu par ses frères, Jonas dans sa baleine,
l’
ânesse de Balaam, David et Jonathan, Absalon pris par les cheveux, le
2179
se de Balaam, David et Jonathan, Absalon pris par
les
cheveux, le jeune Samuel appelé trois fois par Jéhovah, — que ce soit
2180
David et Jonathan, Absalon pris par les cheveux,
le
jeune Samuel appelé trois fois par Jéhovah, — que ce soit histoire ou
2181
ages lui sont incomparablement plus familiers que
les
métamorphoses des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75 que l’Ancie
2182
s des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75 que
l’
Ancien Testament était la vraie Antiquité des peuples de l’Europe prot
2183
en qu’on a pu dire75 que l’Ancien Testament était
la
vraie Antiquité des peuples de l’Europe protestante. Mais il y a bien
2184
Testament était la vraie Antiquité des peuples de
l’
Europe protestante. Mais il y a bien davantage que cet arrière-plan po
2185
e morale parfois scandaleusement antibourgeoise !
Le
thème de la vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuv
2186
fois scandaleusement antibourgeoise ! Le thème de
la
vocation et le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus
2187
ement antibourgeoise ! Le thème de la vocation et
le
thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément la
2188
le thème du peuple élu sont de ceux qui émeuvent
le
plus profondément la « sensibilité spirituelle » d’un réformé. Le
2189
lu sont de ceux qui émeuvent le plus profondément
la
« sensibilité spirituelle » d’un réformé. Le « peuple élu » Le
2190
t la « sensibilité spirituelle » d’un réformé.
Le
« peuple élu » Le simple fait que le calvinisme ait été dès le déb
2191
irituelle » d’un réformé. Le « peuple élu »
Le
simple fait que le calvinisme ait été dès le début une église minorit
2192
formé. Le « peuple élu » Le simple fait que
le
calvinisme ait été dès le début une église minoritaire, en butte à la
2193
» Le simple fait que le calvinisme ait été dès
le
début une église minoritaire, en butte à la persécution, ne suffit pa
2194
é dès le début une église minoritaire, en butte à
la
persécution, ne suffit pas à expliquer les ressemblances si souvent s
2195
butte à la persécution, ne suffit pas à expliquer
les
ressemblances si souvent signalées entre le sort des tribus dispersée
2196
quer les ressemblances si souvent signalées entre
le
sort des tribus dispersées et celui du « petit troupeau » longtemps c
2197
etit troupeau » longtemps chassé de son pays ; ni
les
ressemblances entre les formes d’activité et d’attitude sociale adopt
2198
s chassé de son pays ; ni les ressemblances entre
les
formes d’activité et d’attitude sociale adoptées par les deux « natio
2199
mes d’activité et d’attitude sociale adoptées par
les
deux « nations »76. Ce qui est déterminant pour cette analogie, ce qu
2200
gie, ce qui lui donne son seul sens acceptable et
la
situe dans son ordre réel, c’est que, dans les deux cas, la persécuti
2201
et la situe dans son ordre réel, c’est que, dans
les
deux cas, la persécution et l’isolement minoritaire sont considérés c
2202
ans son ordre réel, c’est que, dans les deux cas,
la
persécution et l’isolement minoritaire sont considérés comme « normau
2203
, c’est que, dans les deux cas, la persécution et
l’
isolement minoritaire sont considérés comme « normaux » : ils exprimen
2204
sont considérés comme « normaux » : ils expriment
le
destin spirituel, dans un monde incrédule et rebelle, de ceux que Die
2205
lise. En vertu de cette « élection » dont ils ont
l’
assurance d’être l’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, le
2206
ette « élection » dont ils ont l’assurance d’être
l’
objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès
2207
d’être l’objet, par une grâce périlleuse, et dans
la
foi, les calvinistes, dès la fin du xvie siècle, se considèrent comm
2208
’objet, par une grâce périlleuse, et dans la foi,
les
calvinistes, dès la fin du xvie siècle, se considèrent comme chargés
2209
périlleuse, et dans la foi, les calvinistes, dès
la
fin du xvie siècle, se considèrent comme chargés d’une mission au se
2210
nde pécheur que Dieu n’abandonne pas. De même que
la
loi de Moïse maintenait le peuple juif, malgré le péché, dans une éco
2211
donne pas. De même que la loi de Moïse maintenait
le
peuple juif, malgré le péché, dans une économie provisoirement vivabl
2212
la loi de Moïse maintenait le peuple juif, malgré
le
péché, dans une économie provisoirement vivable et propre à entreteni
2213
mie provisoirement vivable et propre à entretenir
l’
attente active du Messie, de même l’éthique charismatique77 des calvin
2214
à entretenir l’attente active du Messie, de même
l’
éthique charismatique77 des calvinistes les amène à la conception d’un
2215
de même l’éthique charismatique77 des calvinistes
les
amène à la conception d’une intendance des biens terrestres, dont ils
2216
hique charismatique77 des calvinistes les amène à
la
conception d’une intendance des biens terrestres, dont ils auraient à
2217
des biens terrestres, dont ils auraient à assumer
l’
office : usant de ces richesses « comme n’en usant pas », au nom et pa
2218
richesses « comme n’en usant pas », au nom et par
la
charge du Seigneur qui est venu, et qui doit revenir. Telle est sans
2219
t venu, et qui doit revenir. Telle est sans doute
la
racine authentique du puritanisme qui apparaît dans le courant du xvi
2220
cine authentique du puritanisme qui apparaît dans
le
courant du xviie siècle. Max Weber, dans une thèse célèbre, a souten
2221
dans une thèse célèbre, a soutenu que c’était là
l’
origine du capitalisme moderne et de ses principales valeurs éthiques.
2222
les valeurs éthiques. Mais Sombart lui répond que
le
capitalisme est plus ancien, et qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’
2223
qu’il est d’origine judaïque78. Ce n’est pas ici
le
lieu de prendre parti entre ces deux explications d’un phénomène écon
2224
e retiens que l’une et l’autre hypothèse rattache
le
capitalisme à des attitudes religieuses, d’où serait partie l’impulsi
2225
e à des attitudes religieuses, d’où serait partie
l’
impulsion, attitudes analogues en ceci tout au moins qu’elles mettent
2226
analogues en ceci tout au moins qu’elles mettent
l’
accent sur le fait de l’élection. Il est curieux de noter que le paral
2227
ceci tout au moins qu’elles mettent l’accent sur
le
fait de l’élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se po
2228
au moins qu’elles mettent l’accent sur le fait de
l’
élection. Il est curieux de noter que le parallélisme se poursuit même
2229
e fait de l’élection. Il est curieux de noter que
le
parallélisme se poursuit même, — et peut-être surtout — dans les dévi
2230
e se poursuit même, — et peut-être surtout — dans
les
déviations qualifiées que subirent l’éthique juive et l’éthique purit
2231
out — dans les déviations qualifiées que subirent
l’
éthique juive et l’éthique puritaine, à mesure qu’elles « réussissaien
2232
ations qualifiées que subirent l’éthique juive et
l’
éthique puritaine, à mesure qu’elles « réussissaient ». Le spiritualis
2233
e puritaine, à mesure qu’elles « réussissaient ».
Le
spiritualisme transcendant des Juifs d’Orient au contact des coutumes
2234
, se mue peu à peu en son contraire exact : c’est
le
matérialisme jouisseur et cynique que les nazis reprochent aux Juifs
2235
: c’est le matérialisme jouisseur et cynique que
les
nazis reprochent aux Juifs allemands capitalistes, avec d’autant plus
2236
que cette attitude provocante fut souvent prise à
l’
étranger pour un trait de caractère germanique. Mais c’est aussi l’int
2237
n trait de caractère germanique. Mais c’est aussi
l’
intellectualisme stérilisant, l’esprit d’abstraction inhumaine et chim
2238
Mais c’est aussi l’intellectualisme stérilisant,
l’
esprit d’abstraction inhumaine et chimérique, au surplus troublé de se
2239
rique, au surplus troublé de sentimentalisme, que
l’
on dénonce à droite chez les auteurs d’origine juive, mais qui ont ces
2240
e sentimentalisme, que l’on dénonce à droite chez
les
auteurs d’origine juive, mais qui ont cessé de croire à la mission de
2241
s d’origine juive, mais qui ont cessé de croire à
la
mission de leur peuple, et qui exercent désormais à vide les facultés
2242
de leur peuple, et qui exercent désormais à vide
les
facultés psychologiques fortement développées dans leur race par des
2243
ppées dans leur race par des siècles d’attente de
l’
invisible. De même, l’ascétisme vigoureux, le pessimisme actif des pur
2244
ar des siècles d’attente de l’invisible. De même,
l’
ascétisme vigoureux, le pessimisme actif des puritains anglais, cédant
2245
e de l’invisible. De même, l’ascétisme vigoureux,
le
pessimisme actif des puritains anglais, cédant aux tentations du succ
2246
ès immédiat et contrôlable, s’est transformé dans
le
Nouveau Monde d’une part en volonté de puissance abstraite (les fonda
2247
nde d’une part en volonté de puissance abstraite (
les
fondateurs des trusts au siècle dernier), d’autre part en utilitarism
2248
otale perte de conscience des fins religieuses de
l’
éthique puritaine, et transformant en tyrannie absurde ce qui était à
2249
t transformant en tyrannie absurde ce qui était à
l’
origine une attitude d’obéissance à la foi, et de renoncement à soi-mê
2250
qui était à l’origine une attitude d’obéissance à
la
foi, et de renoncement à soi-même. Corruptio optimi pessima… La vo
2251
oncement à soi-même. Corruptio optimi pessima…
La
vocation collective Ces quelques indications, qui appelleraient d’
2252
indications, qui appelleraient d’ailleurs toutes
les
nuances qu’on imagine, nous amènent au problème central que pose à la
2253
gine, nous amènent au problème central que pose à
la
pensée d’un protestant, et particulièrement d’un calviniste, l’exempl
2254
protestant, et particulièrement d’un calviniste,
l’
exemple d’Israël et de sa chute. Toute la théologie éthique de Calvin
2255
viniste, l’exemple d’Israël et de sa chute. Toute
la
théologie éthique de Calvin est centrée sur la vocation : vocation du
2256
te la théologie éthique de Calvin est centrée sur
la
vocation : vocation du « petit troupeau » ou de l’Église ; vocation p
2257
a vocation : vocation du « petit troupeau » ou de
l’
Église ; vocation personnelle de chaque membre de l’Église. Or, Israël
2258
Église ; vocation personnelle de chaque membre de
l’
Église. Or, Israël qui était le peuple élu, a trahi sa mission et s’es
2259
e chaque membre de l’Église. Or, Israël qui était
le
peuple élu, a trahi sa mission et s’est livré à son destin. Sa disper
2260
et s’est livré à son destin. Sa dispersion en est
le
châtiment. Serait-il donc possible de perdre sa vocation ? Et que dev
2261
de perdre sa vocation ? Et que devient celui qui
la
trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il la prenne pour idol
2262
trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’il
la
prenne pour idole, refusant d’en reconnaître la vraie fin lorsqu’elle
2263
l la prenne pour idole, refusant d’en reconnaître
la
vraie fin lorsqu’elle lui apparaît incarnée ? Est-il rejeté à tout ja
2264
mais ? Une vocation est-elle donc « amissible » ?
Le
refus de l’homme serait-il donc capable de modifier un arrêt éternel,
2265
ocation est-elle donc « amissible » ? Le refus de
l’
homme serait-il donc capable de modifier un arrêt éternel, alors que D
2266
problème n’est pas gratuit : il touche au cœur de
la
foi réformée. Or c’est lui justement que traite saint Paul au chapitr
2267
justement que traite saint Paul au chapitre XI de
l’
Épître aux Romains. Et sans doute ce texte illumine aussi profondément
2268
te illumine aussi profondément qu’il est possible
le
mystère dernier d’Israël. « Je demande maintenant : Dieu a-t-il rejet
2269
? Non certes, car je suis moi-même israélite, de
la
postérité d’Abraham, de la tribu de Benjamin. Dieu n’a point rejeté s
2270
moi-même israélite, de la postérité d’Abraham, de
la
tribu de Benjamin. Dieu n’a point rejeté son peuple qu’il a connu d’a
2271
« Israël n’a point obtenu ce qu’il cherche : mais
les
élus l’ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c
2272
n’a point obtenu ce qu’il cherche : mais les élus
l’
ont obtenu et les autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par
2273
ce qu’il cherche : mais les élus l’ont obtenu et
les
autres ont été endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par suite de la faut
2274
té endurcis » (v. 7). Ainsi, « c’est par suite de
la
faute des enfants d’Israël que le salut est parvenu aux païens, afin
2275
st par suite de la faute des enfants d’Israël que
le
salut est parvenu aux païens, afin d’exciter leur propre émulation »
2276
propre émulation » (v. 11). En tuant leur Messie,
les
Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont
2277
v. 11). En tuant leur Messie, les Juifs ont forcé
les
Apôtres à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice n
2278
Messie, les Juifs ont forcé les Apôtres à prêcher
le
message aux gentils, ils ont perdu le bénéfice national, comme exclus
2279
s à prêcher le message aux gentils, ils ont perdu
le
bénéfice national, comme exclusif, de la Révélation. Mais c’est ici q
2280
nt perdu le bénéfice national, comme exclusif, de
la
Révélation. Mais c’est ici que saint Paul indique le mystérieux renve
2281
Révélation. Mais c’est ici que saint Paul indique
le
mystérieux renversement des rôles au dernier jour : « Or, si leur fau
2282
ôles au dernier jour : « Or, si leur faute a fait
la
richesse du monde, et leur amoindrissement la richesse des païens, qu
2283
ait la richesse du monde, et leur amoindrissement
la
richesse des païens, que ne fera pas leur complet relèvement ! » (v.
2284
se : c’est qu’une partie d’Israël est tombée dans
l’
endurcissement jusqu’à ce que la totalité des païens soit entrée (dans
2285
l est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce que
la
totalité des païens soit entrée (dans l’Église) ; et ainsi tout Israë
2286
à ce que la totalité des païens soit entrée (dans
l’
Église) ; et ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les don
2287
ainsi tout Israël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car
les
dons et l’appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum
2288
sraël sera sauvé » (v. 25-26) … « Car les dons et
l’
appel de Dieu sont irrévocables » (v. 29). Hoc est verbum praeclarum
2289
os de ce dernier verset, dans son Commentaire sur
l’
Épître aux Romains. Et Calvin dit du même verset que c’est « une fort
2290
rset que c’est « une fort belle sentence ». Ainsi
la
vocation, du moins cette vocation79 — est réellement inamissible, c’e
2291
ire ne peut être perdue, même si celui qui en est
l’
objet s’y oppose de toutes ses forces ! Car sa révolte même se trouve
2292
ses forces ! Car sa révolte même se trouve servir
les
desseins éternels de Dieu. Elle étend à l’humanité entière le bénéfic
2293
ervir les desseins éternels de Dieu. Elle étend à
l’
humanité entière le bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependant q
2294
éternels de Dieu. Elle étend à l’humanité entière
le
bénéfice de la Promesse qu’il a reçue, cependant que son destin final
2295
u. Elle étend à l’humanité entière le bénéfice de
la
Promesse qu’il a reçue, cependant que son destin final demeure entre
2296
çue, cependant que son destin final demeure entre
les
mains du plus secret conseil de Dieu. « Quant à moi, écrit Calvin, j’
2297
oi, écrit Calvin, j’étends ce nom d’Israël à tout
le
peuple de Dieu, en ce sens, après que les gentils seront entrés dedan
2298
l à tout le peuple de Dieu, en ce sens, après que
les
gentils seront entrés dedans (l’Église), lors les Juifs aussi se reti
2299
sens, après que les gentils seront entrés dedans (
l’
Église), lors les Juifs aussi se retirant de leur révoltement, se rang
2300
les gentils seront entrés dedans (l’Église), lors
les
Juifs aussi se retirant de leur révoltement, se rangeront à l’obéissa
2301
i se retirant de leur révoltement, se rangeront à
l’
obéissance de la foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier lie
2302
leur révoltement, se rangeront à l’obéissance de
la
foi… toutefois que les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant l
2303
rangeront à l’obéissance de la foi… toutefois que
les
Juifs tiendront le premier lieu, comme étant les enfants aînés en la
2304
les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant
les
enfants aînés en la maison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.
2305
le premier lieu, comme étant les enfants aînés en
la
maison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.) Le sort du monde,
2306
aison de Dieu. » (Commentaires, sur Rom. II, 26.)
Le
sort du monde, et l’on pourrait même dire : la date de son salut fina
2307
mentaires, sur Rom. II, 26.) Le sort du monde, et
l’
on pourrait même dire : la date de son salut final, dépend ainsi de la
2308
.) Le sort du monde, et l’on pourrait même dire :
la
date de son salut final, dépend ainsi de la conversion des Juifs. Et
2309
ire : la date de son salut final, dépend ainsi de
la
conversion des Juifs. Et ceci nous révèle la plus profonde raison des
2310
i de la conversion des Juifs. Et ceci nous révèle
la
plus profonde raison des sentiments « ambivalents », comme dirait Fre
2311
s », comme dirait Freud, qu’ont eus de tout temps
les
chrétiens à l’égard du peuple d’Israël. Tout dépend de lui, et il ref
2312
d’Israël. Tout dépend de lui, et il refuse ! D’où
la
haine sourde, et en même temps le respect religieux qu’on lui porte.
2313
l refuse ! D’où la haine sourde, et en même temps
le
respect religieux qu’on lui porte. Peut-être n’est-il pas excessif de
2314
xcessif de voir dans cette passion contradictoire
le
secret des soudaines explosions de rancune qui apparurent périodiquem
2315
ne sais si cette explication vaudrait encore pour
l’
antisémitisme des hitlériens, qui n’en serait en tout cas que le plus
2316
e des hitlériens, qui n’en serait en tout cas que
le
plus impur exemple. Il reste que la chrétienté non seulement ne pourr
2317
tout cas que le plus impur exemple. Il reste que
la
chrétienté non seulement ne pourra jamais se désintéresser du sort de
2318
e se doit de juger Israël autrement que ne fait «
le
monde ». Ce n’est pas au nom d’intérêts passagers que nous avons à pr
2319
à prendre position, mais au nom des promesses de
la
foi, et dans une perspective missionnaire qui réduit à leurs justes p
2320
issionnaire qui réduit à leurs justes proportions
les
thèses des politiques nationalistes. Le drame est bien plus vaste que
2321
portions les thèses des politiques nationalistes.
Le
drame est bien plus vaste que ne peuvent le concevoir nos polémiques.
2322
stes. Le drame est bien plus vaste que ne peuvent
le
concevoir nos polémiques. Et son issue ne dépend ni de nous seuls, ni
2323
dépend ni de nous seuls, ni d’eux seuls. On dit :
les
Juifs sont ceci, les Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos rich
2324
ls, ni d’eux seuls. On dit : les Juifs sont ceci,
les
Juifs sont cela, ils se sont emparés de nos richesses, etc. Mais de q
2325
richesses, etc. Mais de quels biens se préoccupe
le
croyant ? Leur faute a fait la richesse du monde. Et cette richesse s
2326
biens se préoccupe le croyant ? Leur faute a fait
la
richesse du monde. Et cette richesse s’appelle le salut. 64. Il fa
2327
la richesse du monde. Et cette richesse s’appelle
le
salut. 64. Il faut bien voir que le « racisme » juif n’est justifi
2328
s’appelle le salut. 64. Il faut bien voir que
le
« racisme » juif n’est justifié à l’origine que par la vocation spiri
2329
ien voir que le « racisme » juif n’est justifié à
l’
origine que par la vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas du
2330
racisme » juif n’est justifié à l’origine que par
la
vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas du tout biologique. I
2331
ce peuple. Il n’est pas du tout biologique. Il ne
le
devient qu’accessoirement, à mesure que l’on prend les « signes » de
2332
Il ne le devient qu’accessoirement, à mesure que
l’
on prend les « signes » de la vocation pour des réalités valables en e
2333
evient qu’accessoirement, à mesure que l’on prend
les
« signes » de la vocation pour des réalités valables en elles-mêmes.
2334
rement, à mesure que l’on prend les « signes » de
la
vocation pour des réalités valables en elles-mêmes. Mais sans doute c
2335
ns doute ce glissement fatal s’est-il dessiné dès
le
début, à mesure que l’on codifiait les relations des « élus » et des
2336
fatal s’est-il dessiné dès le début, à mesure que
l’
on codifiait les relations des « élus » et des « gentils ». On sait à
2337
dessiné dès le début, à mesure que l’on codifiait
les
relations des « élus » et des « gentils ». On sait à quel point cette
2338
sait à quel point cette codification fut poussée.
L’
historien juif Josèphe écrit dans sa Réponse à Appion (I, 2) qu’un reg
2339
artenant aux familles des prêtres) était tenu par
les
sacrificateurs. « Et ils n’en épousaient point qui aient été captives
2340
Que si quelqu’un manque d’observer cet ordre, on
le
sépare de l’autel, sans qu’il lui soit plus permis de faire aucune de
2341
u’un manque d’observer cet ordre, on le sépare de
l’
autel, sans qu’il lui soit plus permis de faire aucune des fonctions s
2342
ons sacerdotales. » — Il est curieux de noter que
les
lois racistes hitlériennes privent de tous droits civiques les person
2343
stes hitlériennes privent de tous droits civiques
les
personnes qui ne peuvent prouver par les registres la pureté de leurs
2344
civiques les personnes qui ne peuvent prouver par
les
registres la pureté de leurs origines : c’est que l’exercice des droi
2345
ersonnes qui ne peuvent prouver par les registres
la
pureté de leurs origines : c’est que l’exercice des droits civiques e
2346
registres la pureté de leurs origines : c’est que
l’
exercice des droits civiques est bien une sorte de « sacerdoce » natio
2347
orte de « sacerdoce » national. On voit ainsi que
l’
eugénisme n’est pas le seul motif de la législation raciste. 65. Sur
2348
national. On voit ainsi que l’eugénisme n’est pas
le
seul motif de la législation raciste. 65. Sur l’importance capitale
2349
ainsi que l’eugénisme n’est pas le seul motif de
la
législation raciste. 65. Sur l’importance capitale de cette notion d
2350
le seul motif de la législation raciste. 65. Sur
l’
importance capitale de cette notion de commune mesure pour toute cultu
2351
ns un volume intitulé Penser avec les mains , où
l’
on trouvera un raccourci de la présente étude. Du point de vue de l’hi
2352
avec les mains , où l’on trouvera un raccourci de
la
présente étude. Du point de vue de l’histoire du peuple juif, ce racc
2353
accourci de la présente étude. Du point de vue de
l’
histoire du peuple juif, ce raccourci souffre, entre autres, d’une trè
2354
très grave lacune en ce qu’il paraît conclure sur
l’
abandon final d’Israël à son destin, après la mort de Jésus-Christ. Je
2355
sur l’abandon final d’Israël à son destin, après
la
mort de Jésus-Christ. Je suis heureux de pouvoir donner ci-après un d
2356
ent qui n’avait pas sa place dans mon livre. 66.
La
rédaction des livres mosaïques est attribuée par Wellhausen et son éc
2357
es disciples des grands prophètes. Ce serait donc
le
prophétisme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de la religion
2358
ètes. Ce serait donc le prophétisme, c’est-à-dire
l’
élément le plus finaliste de la religion d’Israël qui aurait donné au
2359
erait donc le prophétisme, c’est-à-dire l’élément
le
plus finaliste de la religion d’Israël qui aurait donné au peuple l’e
2360
isme, c’est-à-dire l’élément le plus finaliste de
la
religion d’Israël qui aurait donné au peuple l’expression légale de s
2361
e la religion d’Israël qui aurait donné au peuple
l’
expression légale de sa commune mesure : le Décalogue. Ainsi la fin cr
2362
peuple l’expression légale de sa commune mesure :
le
Décalogue. Ainsi la fin crée ses moyens. Cette hypothèse est aujourd’
2363
légale de sa commune mesure : le Décalogue. Ainsi
la
fin crée ses moyens. Cette hypothèse est aujourd’hui démodée. On revi
2364
e hypothèse est aujourd’hui démodée. On revient à
la
conception ancienne : un chef hébreu — celui que la Bible appelle Moï
2365
conception ancienne : un chef hébreu — celui que
la
Bible appelle Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de la Lo
2366
la Bible appelle Moïse — aurait bel et bien donné
les
rudiments de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophè
2367
Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de
la
Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alo
2368
donné les rudiments de la Loi au peuple juif dès
la
sortie d’Égypte. Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent le
2369
de la Loi au peuple juif dès la sortie d’Égypte.
Les
prophètes seraient alors ceux qui rappellent le peuple au culte du vr
2370
Les prophètes seraient alors ceux qui rappellent
le
peuple au culte du vrai Dieu — contre les prêtres des dieux étrangers
2371
ppellent le peuple au culte du vrai Dieu — contre
les
prêtres des dieux étrangers — mais aussi ceux qui dénoncent les excès
2372
s dieux étrangers — mais aussi ceux qui dénoncent
les
excès du légalisme. 67. Livre II, chap. VI, trad. d’Arnaud d’Andilly
2373
istoire du peuple d’Israël, t. II, p. 265. 69. «
L’
embarras de l’hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plu
2374
ple d’Israël, t. II, p. 265. 69. « L’embarras de
l’
hébreu pour expliquer les notions philosophiques les plus simples, dan
2375
265. 69. « L’embarras de l’hébreu pour expliquer
les
notions philosophiques les plus simples, dans le Livre de Job, dans l
2376
’hébreu pour expliquer les notions philosophiques
les
plus simples, dans le Livre de Job, dans l’Ecclésiaste, est quelque c
2377
les notions philosophiques les plus simples, dans
le
Livre de Job, dans l’Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’
2378
ques les plus simples, dans le Livre de Job, dans
l’
Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant. L’image physique qui, da
2379
s l’Ecclésiaste, est quelque chose de surprenant.
L’
image physique qui, dans les langues sémitiques, est encore à fleur de
2380
e chose de surprenant. L’image physique qui, dans
les
langues sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit la déduction
2381
sémitiques, est encore à fleur de sol, obscurcit
la
déduction abstraite… » (Renan, op. cit., I, p. 49). Où Renan voit un
2382
p. 49). Où Renan voit un obscurcissement, je vois
le
gage d’une vive actualité, ou efficacité, du langage des clercs, iden
2383
oque avec Salomon, par Albert-Marie Schmidt, dans
la
revue Hic et Nunc , n° 9-10. 71. Des études plus récentes semblent
2384
ier jugement de Renan. Mais il reste valable pour
la
période primitive. 72. Abraham déjà, et les prophètes, ont vu « le j
2385
pour la période primitive. 72. Abraham déjà, et
les
prophètes, ont vu « le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de
2386
ve. 72. Abraham déjà, et les prophètes, ont vu «
le
jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de l’Épître aux Hébreux (c
2387
es, ont vu « le jour du Seigneur ». Saint Paul et
l’
auteur de l’Épître aux Hébreux (chap. II) insistent fortement sur cett
2388
le jour du Seigneur ». Saint Paul et l’auteur de
l’
Épître aux Hébreux (chap. II) insistent fortement sur cette unicité de
2389
hap. II) insistent fortement sur cette unicité de
la
Révélation. C’est un grand lieu commun de la théologie réformée que d
2390
é de la Révélation. C’est un grand lieu commun de
la
théologie réformée que de voir dans l’Ancien Testament l’histoire du
2391
commun de la théologie réformée que de voir dans
l’
Ancien Testament l’histoire du Christ avant qu’il vienne, dans les Pro
2392
ogie réformée que de voir dans l’Ancien Testament
l’
histoire du Christ avant qu’il vienne, dans les Prophètes, des Apôtres
2393
ent l’histoire du Christ avant qu’il vienne, dans
les
Prophètes, des Apôtres avant le Christ, dans les Apôtres, des Prophèt
2394
’il vienne, dans les Prophètes, des Apôtres avant
le
Christ, dans les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bib
2395
les Prophètes, des Apôtres avant le Christ, dans
les
Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autr
2396
le Christ, dans les Apôtres, des Prophètes après
le
Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autre sens que de désigner l’Incarna
2397
les Apôtres, des Prophètes après le Christ. Ainsi
la
Bible n’a pas d’autre sens que de désigner l’Incarnation qui est son
2398
nsi la Bible n’a pas d’autre sens que de désigner
l’
Incarnation qui est son centre, au-delà d’elle-même. Tolle Christum e
2399
er : De servo arbitrio.) 73. Christopher Dawson,
Les
Origines de l’Europe et de la civilisation européenne, trad. français
2400
bitrio.) 73. Christopher Dawson, Les Origines de
l’
Europe et de la civilisation européenne, trad. française, chez Rieder,
2401
hristopher Dawson, Les Origines de l’Europe et de
la
civilisation européenne, trad. française, chez Rieder, 1934, p. 43.
2402
ançaise, chez Rieder, 1934, p. 43. 74. Sitôt que
la
mesure cesse d’être transcendante, devient humaine, contingente et pa
2403
ant plus totale, se veut encore totalitaire, on a
l’
État-nation-Police de type fasciste ou stalinien. Bien entendu, il ser
2404
sponsable de ce qui n’est que « profanations » de
la
notion de mesure totalitaire. 75. Cf. Ramuz. 76. Par exemple : cohé
2405
’autres auteurs, tels que Labriola, font remonter
le
phénomène capitaliste à l’« accumulation » de richesses des couvents
2406
abriola, font remonter le phénomène capitaliste à
l’
« accumulation » de richesses des couvents anglais au Moyen Âge, et au
2407
couvents anglais au Moyen Âge, et aux banques de
l’
Italie du Nord. Les responsabilités se partageraient donc équitablemen
2408
au Moyen Âge, et aux banques de l’Italie du Nord.
Les
responsabilités se partageraient donc équitablement entre les trois r
2409
bilités se partageraient donc équitablement entre
les
trois religions ! 79. Calvin, toujours soucieux de ne pas spéculer a
2410
rs soucieux de ne pas spéculer arbitrairement sur
les
textes, note en effet cette restriction : « Et aussi ne faut-il pas e
2411
celle par laquelle Dieu a adopté en son alliance
la
postérité d’Abraham : vu que le propos était nommément et spécialemen
2412
é en son alliance la postérité d’Abraham : vu que
le
propos était nommément et spécialement d’icelle vocation. » (Commenta
2413
gemont Denis de, « Vocation et destin d’Israël »,
Les
Juifs, Paris, Plon, 1937, p. 143-165.
2414
gnore Luther en France serait exagérer, mais dans
le
sens contraire de celui qu’on imagine. Car on fait pis que de l’ignor
2415
re de celui qu’on imagine. Car on fait pis que de
l’
ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamai
2416
. Car on fait pis que de l’ignorer et même que de
le
méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut,
2417
et même que de le méconnaître : on prétend, sans
l’
avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
2418
oir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
les
Propos de table, présentés au public français comme un ouvrage capita
2419
contradictions. Est-ce avec cela que s’est faite
la
Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à soutenir que Lu
2420
nir que Luther fut un démagogue, un exploiteur de
l’
éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romai
2421
gogue, un exploiteur de l’éternel ressentiment de
la
race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffon
2422
’éternel ressentiment de la race allemande contre
la
civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès g
2423
mande contre la civilisation romaine. On a poussé
la
bouffonnerie jusqu’à cet excès grandiose d’assimiler Luther et M. Hit
2424
iose d’assimiler Luther et M. Hitler, par goût de
la
rime sans doute. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que la p
2425
t M. Hitler, par goût de la rime sans doute. Pour
l’
opinion moyenne sur Luther, je crois que la phrase suivante en donne u
2426
. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que
la
phrase suivante en donne une juste idée : « En somme, qu’est-ce que L
2427
ion du livre d’un critique littéraire connu, dont
les
revues n’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure e
2428
’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer
la
mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste
2429
as lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et
la
sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste d’insister s
2430
héologique… Ceci dit, il est juste d’insister sur
la
grande valeur des travaux de quelques spécialistes français qui, au n
2431
quelques spécialistes français qui, au niveau de
la
haute culture, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je pense a
2432
u niveau de la haute culture, ont largement sauvé
l’
honneur de leur pays. Je pense aux ouvrages publiés par MM. Henri Stro
2433
son, pour ne rien dire — mais cela va de soi — de
l’
activité des professeurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de l’
2434
sseurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de
l’
Église dans les trois facultés françaises de théologie protestante. Il
2435
atique luthérienne ou d’histoire de l’Église dans
les
trois facultés françaises de théologie protestante. Il n’en reste pas
2436
héologie protestante. Il n’en reste pas moins que
l’
ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes
2437
tante. Il n’en reste pas moins que l’ignorance ou
la
méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes aux diverses ca
2438
ies recueillies par des biographes amateurs, et à
l’
action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
2439
ies par des biographes amateurs, et à l’action de
la
polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent le public f
2440
e catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
le
public français en état d’infériorité assez grave, ne fût-ce que sur
2441
riorité assez grave, ne fût-ce que sur le plan de
la
culture générale. Car ignorer ou méconnaître Luther, c’est ignorer ou
2442
onnaître un des deux ou trois moments décisifs de
la
tradition fondamentale de l’Occident, c’est s’interdire de rien compr
2443
moments décisifs de la tradition fondamentale de
l’
Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion
2444
’Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à
la
grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans la
2445
n comprendre à la grande discussion millénaire, à
la
grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son dynamis
2446
re, à la grande tension spirituelle dans laquelle
l’
Europe a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre
2447
rope a puisé son dynamisme créateur. Tension dont
le
débat du libre arbitre, opposant Érasme à Luther, permet de définir s
2448
Érasme à Luther, permet de définir symboliquement
les
pôles : pensée « pure » et pensée « engagée », ou encore attitude du
2449
ion qui, sur le plan théologique, ou mieux : dans
la
totalité de l’être, revient à celle d’un christianisme qui se met au
2450
plan théologique, ou mieux : dans la totalité de
l’
être, revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’hu
2451
celle d’un christianisme qui se met au service de
l’
humain (j’entends bien de l’humain purifié, « divinisé » par les effor
2452
se met au service de l’humain (j’entends bien de
l’
humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant
2453
ntends bien de l’humain purifié, « divinisé » par
les
efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un chris
2454
l’humain purifié, « divinisé » par les efforts de
la
religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absol
2455
r les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de
la
raison), et d’un christianisme absolu, qu’on déclare volontiers « inh
2456
o C’est sans doute dans cette perspective que
le
lecteur, peu familiarisé avec la pensée luthérienne, parviendra le pl
2457
perspective que le lecteur, peu familiarisé avec
la
pensée luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir l’importance
2458
amiliarisé avec la pensée luthérienne, parviendra
le
plus aisément à saisir l’importance centrale du traité que nous publi
2459
luthérienne, parviendra le plus aisément à saisir
l’
importance centrale du traité que nous publions : je le vois au centre
2460
ortance centrale du traité que nous publions : je
le
vois au centre du débat occidental par excellence, mais au centre, au
2461
idental par excellence, mais au centre, aussi, de
la
Réforme, et de l’effort dogmatique de Luther30. On croit d’abord à un
2462
ence, mais au centre, aussi, de la Réforme, et de
l’
effort dogmatique de Luther30. On croit d’abord à un pamphlet, encore
2463
e que son volume matériel soit bien écrasant pour
le
genre. Mais on s’aperçoit sans tarder que la discussion avec Érasme e
2464
pour le genre. Mais on s’aperçoit sans tarder que
la
discussion avec Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée), n’est e
2465
iatribe (souvent personnifiée), n’est en fait que
le
support apparent d’une réflexion de plus vaste envergure, d’un témoig
2466
lle, excité (bien plutôt que « désarmé » comme il
le
dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du scepti
2467
ésarmé » comme il le dit aux premières pages) par
les
procédés de l’humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme,
2468
l le dit aux premières pages) par les procédés de
l’
humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme, Luther en vien
2469
che, à ressaisir et reposer avec puissance toutes
les
affirmations fondamentales de la Réforme : justification par la foi,
2470
uissance toutes les affirmations fondamentales de
la
Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de D
2471
s fondamentales de la Réforme : justification par
la
foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul ; opposition de cette
2472
Dieu seul ; opposition de cette justice de Dieu à
la
justice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la n
2473
ice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de
la
grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Pa
2474
mes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à
la
nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivant
2475
uvres ; opposition de la grâce à la nature, selon
les
termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition c
2476
tion de la grâce à la nature, selon les termes de
l’
Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sen
2477
ure, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de
la
Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale e
2478
s de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à
la
tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un no
2479
Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de
la
décision totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout moye
2480
erme ou médiation plus ou moins rationnelle entre
les
règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ;
2481
lle entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de
la
foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage, et du témoign
2482
témoignage, et du témoignage fidèle, certifié par
l’
Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme
2483
et du témoignage fidèle, certifié par l’Esprit et
la
Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme entre les ma
2484
certifié par l’Esprit et la Bible, et constituant
la
véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont le
2485
Bible, et constituant la véritable « action » de
l’
homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ou
2486
stituant la véritable « action » de l’homme entre
les
mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’
2487
n » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont
les
thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en forme,
2488
du mot, mais qu’ils s’impliquent très étroitement
les
uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et
2489
mais qu’ils s’impliquent très étroitement les uns
les
autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et perpétue
2490
autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans
l’
unique et perpétuelle question que nous posent toutes les pages de la
2491
ue et perpétuelle question que nous posent toutes
les
pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont
2492
elle question que nous posent toutes les pages de
la
Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les refl
2493
renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que
les
reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la
2494
ment réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à
la
question du Christ : « … et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si t
2495
« … et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si tu
le
crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
2496
crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu
la
foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luthe
2497
la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
les
assertions de Luther, ni dans sa négation joyeuse du libre arbitre. S
2498
arbitre. Ses coups violents n’ébranlent plus que
le
« vieil homme », celui qu’il nous faut dépouiller. Folie pour les
2499
, celui qu’il nous faut dépouiller. Folie pour
les
sages Mais il s’en faut de presque tout que les grandes thèses pau
2500
es sages Mais il s’en faut de presque tout que
les
grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simple
2501
esque tout que les grandes thèses pauliniennes de
la
Réforme soient acceptées (ou simplement connues !) par nos contempora
2502
s. Il s’en faut de beaucoup, de presque tout, que
les
arguments d’un Érasme nous apparaissent comme autant de sophismes. No
2503
ent comme autant de sophismes. Non seulement tous
les
humanistes — des marxistes aux vieux libéraux — y applaudissent ouver
2504
pplaudissent ouvertement, mais encore jusque chez
les
chrétiens, ces arguments se voient réinventés, admis, parfois même pr
2505
e voient réinventés, admis, parfois même prêchés.
Le
laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique s
2506
prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout
le
monopole : tout catholique se doit, en bonne logique, de les faire si
2507
e : tout catholique se doit, en bonne logique, de
les
faire siens, puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous les prote
2508
s, puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous
les
protestants qui jugent encore que Calvin et Luther ont fait leur temp
2509
e Paul, bien plus ancien — tous ceux qui tiennent
la
prédestination pour un dogme immoral ou périmé ; ceux qui traduisent
2510
mmoral ou périmé ; ceux qui traduisent « Paix sur
la
terre aux hommes que Dieu agrée » par « Paix aux hommes de bonne volo
2511
ec Érasme et son armée de grands docteurs de tous
les
siècles, pour soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le po
2512
rands docteurs de tous les siècles, pour soutenir
le
libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de
2513
soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire
le
pouvoir qu’aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts e
2514
itre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait
l’
homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres morales.
2515
Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous
le
goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitu
2516
qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ;
l’
élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « gr
2517
r en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial,
la
violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « grave », d’une di
2518
i va droit au point décisif, envisage honnêtement
les
objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans iro
2519
sif, envisage honnêtement les objections, donne à
la
thèse adverse toutes ses chances, non sans ironie toutefois, et sait
2520
nie toutefois, et sait enfin conférer à son choix
la
force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue
2521
s, et sait enfin conférer à son choix la force et
la
simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue purement es
2522
r assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui refuse
l’
essentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le to
2523
ssentiel soit tout de même attiré et subjugué par
le
style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous m
2524
tout de même attiré et subjugué par le style, par
le
ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, sépar
2525
me attiré et subjugué par le style, par le ton de
l’
ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, séparer le fond
2526
s ne savons que trop bien, nous modernes, séparer
le
fond de la forme, admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vic
2527
que trop bien, nous modernes, séparer le fond de
la
forme, admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vice versa.) M
2528
lleurs du chef d’un grand mouvement (comme dirait
le
jargon d’aujourd’hui), tout est fait, dans notre Traité, pour heurter
2529
st fait, dans notre Traité, pour heurter de front
le
lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des
2530
le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas
la
foi de Paul et des Apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’es
2531
rtage pas la foi de Paul et des Apôtres. D’abord,
le
langage scolastique, qui n’est pas proprement luthérien, mais que Lut
2532
t obligé d’utiliser pour débrouiller et supprimer
les
faux problèmes où la Diatribe voulait l’embarrasser31. Ensuite, ce re
2533
ur débrouiller et supprimer les faux problèmes où
la
Diatribe voulait l’embarrasser31. Ensuite, ce refus total, ou mieux,
2534
pprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait
l’
embarrasser31. Ensuite, ce refus total, ou mieux, cette négligence tra
2535
(Un tel homme est bien trop vivant pour faire de
la
psychologie ; trop engagé dans le réel pour prendre au sérieux ses re
2536
t pour faire de la psychologie ; trop engagé dans
le
réel pour prendre au sérieux ses reflets dans la conscience du specta
2537
le réel pour prendre au sérieux ses reflets dans
la
conscience du spectateur.) Ce qui ne manquera pas de faire crier au d
2538
faire crier au dogmatisme. Tout se passe ici « à
l’
intérieur » du christianisme, de l’Église. L’humanisme laïque, autonom
2539
passe ici « à l’intérieur » du christianisme, de
l’
Église. L’humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une ab
2540
« à l’intérieur » du christianisme, de l’Église.
L’
humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une absurdité, u
2541
nié, comme une absurdité, une contradiction dans
les
termes. C’est à Érasme, en tant que théologien, que Luther s’applique
2542
que Luther s’applique à répondre ; et c’est même
la
plus dure ironie — quoique involontaire, je le suppose — dont il pouv
2543
me la plus dure ironie — quoique involontaire, je
le
suppose — dont il pouvait en l’occurrence, l’accabler. On ne saurait
2544
involontaire, je le suppose — dont il pouvait en
l’
occurrence, l’accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trai
2545
je le suppose — dont il pouvait en l’occurrence,
l’
accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trait : c’est enco
2546
en philosophe ou en métaphysicien, que Luther nie
le
libre arbitre. Ceci pourrait suffire et doit suffire en droit, à réfu
2547
rrait suffire et doit suffire en droit, à réfuter
l’
objection d’un moderne, l’objection parfaitement anachronique, mais qu
2548
ire en droit, à réfuter l’objection d’un moderne,
l’
objection parfaitement anachronique, mais que je sais inévitable, et q
2549
à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais
le
sérieux théologique est chose trop rare, et pour beaucoup trop diffic
2550
e écarter cette objection par un simple rappel de
l’
ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, t
2551
ction par un simple rappel de l’ordre dans lequel
le
Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dia
2552
nsé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins,
le
dialogue d’une « conscience moderne », douée d’exigence spirituelle,
2553
’un tel dialogue se déroule même à l’intérieur de
la
pensée d’un homme qui veut croire…) Dialogue Car Dieu peut tout
2554
ue Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là
la
santé de la foi. Kierkegaard Une conscience moderne. — Selon Luthe
2555
eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de
la
foi. Kierkegaard Une conscience moderne. — Selon Luther, nous n’av
2556
selon sa prévision. Luther ne pose pas seulement
l’
omnipotence, mais l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qu
2557
Luther ne pose pas seulement l’omnipotence, mais
l’
omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir à
2558
as seulement l’omnipotence, mais l’omniscience et
la
prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir à sa promesse, et a
2559
erons plus ! Nous refusons de jouer si, d’avance,
le
vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos
2560
oits ! Un luthérien. — Mais connais-tu seulement
les
vraies règles du jeu ? Qui t’a fait croire que ta vie était une parti
2561
que ta vie était une partie à jouer entre toi et
le
monde, par exemple ; ou encore entre l’individu et le Sort, cette ido
2562
re toi et le monde, par exemple ; ou encore entre
l’
individu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le
2563
onde, par exemple ; ou encore entre l’individu et
le
Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le croire pour ag
2564
rt, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de
le
croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi
2565
e ta science ne s’occupe-t-elle pas, justement, à
les
découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dign
2566
le pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à
les
inventer ? C. M. — Certes, mais ma dignité consiste à lutter contre
2567
à lutter contre de telles forces, une fois que je
les
ai reconnues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée m
2568
qui crée ma liberté, par un acte de révolte, s’il
le
faut ! L. — Tu crois donc détenir un tel pouvoir ? C. M. — Il me su
2569
un tel pouvoir ? C. M. — Il me suffit de vouloir
l’
affirmer. L. — Soit, c’est une hypothèse de travail… Pour moi, je cro
2570
e de travail… Pour moi, je crois que Dieu connaît
la
fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, f
2571
vail… Pour moi, je crois que Dieu connaît la fin,
la
somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures ;
2572
moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme,
la
valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures ; car elles
2573
passées, présentes, futures ; car elles sont dans
le
temps, Dieu dans l’éternité qui est avant le temps, qui est en lui, e
2574
futures ; car elles sont dans le temps, Dieu dans
l’
éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore apr
2575
dans le temps, Dieu dans l’éternité qui est avant
le
temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu
2576
gard de Dieu, donc, « tout est accompli », depuis
la
mort du Christ sur la croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C.
2577
tout est accompli », depuis la mort du Christ sur
la
croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C. M. — Si c’était vrai,
2578
core nier ce Dieu, qui prétend voir plus loin que
le
terme de mes actions, ce qui, avouons-le, les ridiculise complètement
2579
loin que le terme de mes actions, ce qui, avouons-
le
, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : ca
2580
que le terme de mes actions, ce qui, avouons-le,
les
ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : car je
2581
e qui, avouons-le, les ridiculise complètement et
les
rend vaines en fin de compte : car je sens, malgré tout, que je les f
2582
fin de compte : car je sens, malgré tout, que je
les
fais librement, et tu viens me dire qu’elles sont prévues ! Et prévue
2583
tzsche a proclamé qu’il avait fait. L. — Comment
le
temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ?
2584
’il avait fait. L. — Comment le temps tuerait-il
l’
Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer q
2585
— Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment
la
chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’
2586
rait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle
l’
Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’elle s’en formait… Mai
2587
air tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que
l’
idée fausse qu’elle s’en formait… Mais tu affirmes que si Dieu prévoit
2588
tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’est plus
la
peine de faire aucun effort. C’est peut-être mal raisonner. Si ton ef
2589
ton effort aussi était prévu ? Pourrais-tu ne pas
le
fournir ? Et si tu décidais : « je suis, donc Dieu n’est pas ! »32 qu
2590
ui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à
l’
éternelle prévision ? Qui t’assurerait qu’en prononçant ces mots, tu n
2591
ant ces mots, tu ne prononcerais pas sur toi-même
l’
arrêt éternel de Dieu te rejetant vers le néant, en sorte que Dieu, vr
2592
toi-même l’arrêt éternel de Dieu te rejetant vers
le
néant, en sorte que Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer l
2593
e Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer
les
yeux sur une réalité, ce n’est pas la supprimer en fait. Mais c’est p
2594
i ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’est pas
la
supprimer en fait. Mais c’est peut-être se priver de son secours, ou
2595
est peut-être se priver de son secours, ou encore
la
transformer en une menace obscure… Il y a une double prédestination :
2596
double prédestination : l’une au salut, l’autre à
la
damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au temps
2597
justement être rivé au temps sans fin, et refuser
l’
éternité qui vient nous délivrer du temps ? C. M. — Mais mon temps es
2598
eauté, de création ! Ton éternité immobile, c’est
l’
image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philo
2599
on ! Ton éternité immobile, c’est l’image même de
la
mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la rai
2600
l’image même de la mort. L. — Que savons-nous de
l’
éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que mort
2601
de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ?
Les
philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bib
2602
ue savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et
la
raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’ell
2603
ternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent
l’
imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que
2604
t la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais
la
Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort
2605
ner que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est
la
Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve q
2606
n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que
l’
éternité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’e
2607
que ? Qui nous dit qu’elle n’est pas au contraire
la
source de tout acte et de toute création, une invention totale et per
2608
totale et perpétuelle, une actualité permanente,
la
seule chose qui change quelque chose au déroulement calculable du tem
2609
se au déroulement calculable du temps, quand elle
le
touche dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul
2610
nt calculable du temps, quand elle le touche dans
l’
instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul) ?33 Qui t’ass
2611
dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme
l’
écrit Paul) ?33 Qui t’assure que notre raison tout attachée à notre ch
2612
? C’est un mystère plus profond que notre vie, et
la
raison n’est qu’un faible élément de notre vie. C’est un mystère que
2613
faible élément de notre vie. C’est un mystère que
le
croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’
2614
que le croyant pressent et vit au seul moment de
la
prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous
2615
et vit au seul moment de la prière. « Demandez et
l’
on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le cro
2616
la prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit
le
même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a
2617
a », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand
le
croyant, qui sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu
2618
t-il pas ce paradoxe et ce mystère : croire que «
l’
Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu — peut
2619
peut aussi tout changer en un instant aux yeux de
l’
homme, sans que rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il d
2620
de ce qu’il décide ou de ce qu’il décidera ? Car
l’
Éternel ne connaît pas de « temps », il n’est pas lié comme nous à une
2621
ire, nos divers temps et successions procèdent de
l’
Éternel et lui sont liés : nous venons de lui, nous retournons à lui,
2622
ui, nous retournons à lui, il est en nous lorsque
l’
Esprit dit : la Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous f
2623
nons à lui, il est en nous lorsque l’Esprit dit :
la
Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous ferait croire qu
2624
ge illusion nous ferait croire qu’une décision de
l’
Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui dé
2625
u’une décision de l’Éternel est une décision dans
le
passé ! Quand c’est elle seule qui définit notre présent ! Est-ce que
2626
t notre crainte du « fatalisme » ne reposent pas,
le
plus souvent, sur cette erreur des plus grossières ?… C. M. — On peu
2627
es plus grossières ?… C. M. — On peut aussi nier
l’
éternité, et affirmer que seul existe notre temps. Dans ce cas, tu n’a
2628
— On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on
l’
accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peu
2629
rien de ce qui est essentiel ; on l’accepte ou on
le
refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peut nous conduire
2630
ns pas dialogué en vain, si nous avons pu dégager
l’
alternative du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans les termes ex
2631
tive du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans
les
termes extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’Éternel qui
2632
s extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est
l’
Éternel qui commande — ou c’est moi. Il n’y a pas là de difficultés in
2633
s là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que
la
résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours trè
2634
que la résistance acharnée du « vieil homme », et
les
prétextes toujours très moraux, et même très pieux, qu’invoque notre
2635
révolte… Réalité radicale du problème Dans
l’
Église, une fois acceptés le Credo et son fondement, qui est la Parole
2636
e du problème Dans l’Église, une fois acceptés
le
Credo et son fondement, qui est la Parole dite en nous par l’Esprit e
2637
fois acceptés le Credo et son fondement, qui est
la
Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’Écriture, — or, ce
2638
son fondement, qui est la Parole dite en nous par
l’
Esprit et attestée par l’Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-m
2639
Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par
l’
Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l
2640
te Parole est Christ lui-même, — il me paraît que
l’
opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la d
2641
r n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et
la
démonstration purement biblique qu’on en trouvera dans ce traité, mal
2642
s exégétiques discutables, suffit à établir, pour
le
chrétien, la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qu
2643
discutables, suffit à établir, pour le chrétien,
la
vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur
2644
her n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de
l’
Évangile. L’apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiast
2645
inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile.
L’
apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiastique » ; et
2646
qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul
l’
a formulé avant toute « tradition ecclésiastique » ; et tous les Pères
2647
vant toute « tradition ecclésiastique » ; et tous
les
Pères et tous les siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien
2648
tion ecclésiastique » ; et tous les Pères et tous
les
siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien : « Travaillez à v
2649
emblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous
le
vouloir et le faire » (Phil. 2, 12-13). C’est parce que Dieu fait tou
2650
sque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et
le
faire » (Phil. 2, 12-13). C’est parce que Dieu fait tout que nous dev
2651
fait tout que nous devons agir, selon qu’il nous
l’
a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, e
2652
tout prévu que nous avons en lui, et en lui seul,
la
liberté. Mais cela n’apparaît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extr
2653
ît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de
la
connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insi
2654
aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de
la
connaissance de la foi. Luther insiste sur cet « extrémisme » évangél
2655
connaissance de soi-même et de la connaissance de
la
foi. Luther insiste sur cet « extrémisme » évangélique, que les sophi
2656
r insiste sur cet « extrémisme » évangélique, que
les
sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au
2657
orriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer
la
Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jus
2658
« évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé
la
doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut so
2659
oix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de
la
pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ho
2660
ue dans son sérieux dernier, on peut soutenir que
l’
homme possède au moins « un faible libre arbitre »34 dans les choses d
2661
ssède au moins « un faible libre arbitre »34 dans
les
choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême
2662
re arbitre »34 dans les choses du salut. Mais que
le
Christ ait dû mourir — cet acte extrême — pour nous sauver, fait voir
2663
e liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et à
l’
inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du pé
2664
’inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de
la
connaissance du péché pour voir qu’il n’y a de liberté possible que d
2665
our voir qu’il n’y a de liberté possible que dans
la
grâce que Dieu nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le mom
2666
sible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute
l’
argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les
2667
u nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise
le
moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se com
2668
Toute l’argumentation de Luther vise le moment de
la
décision, et néglige les moyens termes où voulait se complaire Érasme
2669
Luther vise le moment de la décision, et néglige
les
moyens termes où voulait se complaire Érasme. Le problème du salut es
2670
les moyens termes où voulait se complaire Érasme.
Le
problème du salut est un problème de vie ou de mort. Or il est seul e
2671
e de vie ou de mort. Or il est seul en cause pour
le
théologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris que Luther ne ni
2672
use pour le théologien. Et tout est clair lorsque
l’
on a compris que Luther ne nie pas du tout notre faculté de vouloir, m
2673
e seulement qu’elle puisse suffire à nous obtenir
le
salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie,
2674
ir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout
le
reste est psychologie, littérature et scolastique. Il n’en reste pas
2675
olastique. Il n’en reste pas moins qu’aux yeux de
la
raison — cette folle, comme le répète Luther — ce que nous nommons ic
2676
ins qu’aux yeux de la raison — cette folle, comme
le
répète Luther — ce que nous nommons ici un paradoxe demeure une pure
2677
s alors, on peut se demander si ceux qui refusent
le
christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contrair
2678
ui refusent le christianisme échappent vraiment à
la
difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais dans
2679
ent à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne
la
retrouvent pas, mais dans un plan où elle reste insoluble. Érasme éta
2680
me était encore catholique ; son humanisme mesuré
l’
empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adve
2681
tholique ; son humanisme mesuré l’empêche de voir
le
vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adversaires du christi
2682
l’empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais
le
plus grand des adversaires du christianisme dans les temps modernes,
2683
plus grand des adversaires du christianisme dans
les
temps modernes, Nietzsche, aboutit à un dilemme qui me paraît corresp
2684
e, terme à terme, à celui que Luther et Paul — et
l’
Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a poussé comme Luther, jusq
2685
oussé comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de
l’
homme, jusqu’aux questions dernières que peut envisager notre pensée.
2686
ager notre pensée. Pour échapper au nihilisme qui
l’
étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagi
2687
’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il
l’
a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel pa
2688
Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagine
le
Retour éternel. Et comme ce Retour éternel paraît exclure toute liber
2689
xclure toute liberté humaine, il se met à prêcher
l’
amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable.
2690
liberté humaine, il se met à prêcher l’amor fati,
l’
adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans c
2691
r l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à
la
fatalité inéluctable. C’est dans cette volonté de reconnaître notre t
2692
irresponsabilité, qu’il croit trouver et regagner
la
dignité suprême de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éte
2693
l croit trouver et regagner la dignité suprême de
l’
homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éternité de son destin. (
2694
e de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir
l’
éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’est accepter en acte l’ét
2695
re, c’est vouloir l’éternité de son destin. (Pour
le
chrétien, c’est accepter en acte l’éternelle prévision du Dieu qui sa
2696
destin. (Pour le chrétien, c’est accepter en acte
l’
éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du par
2697
en acte l’éternelle prévision du Dieu qui sauve.)
La
similitude étonnante du paradoxe luthérien et du paradoxe nietzschéen
2698
vérité, c’est bien du même problème qu’il s’agit.
Le
seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. A
2699
ème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de
la
vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsc
2700
iens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsche oppose
le
« je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppo
2701
oncé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de
l’
homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppose sa propre exist
2702
ppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à
l’
existence de Dieu, il oppose sa propre existence35. Mais la difficulté
2703
ce de Dieu, il oppose sa propre existence35. Mais
la
difficulté fondamentale que posent les rapports de notre volonté et d
2704
nce35. Mais la difficulté fondamentale que posent
les
rapports de notre volonté et de l’éternité souveraine, demeure entièr
2705
le que posent les rapports de notre volonté et de
l’
éternité souveraine, demeure entière. La différence, c’est que Nietzsc
2706
nté et de l’éternité souveraine, demeure entière.
La
différence, c’est que Nietzsche nous propose d’adorer un Destin muet,
2707
muet, tandis que nous adorons une Providence dont
la
Parole vivante s’est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous !
2708
rnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 30. À
la
proposition qu’on lui faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complètes
2709
faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complètes,
le
réformateur répondit : « Je ne reconnais aucun de mes livres pour adé
2710
de mes livres pour adéquat, si ce n’est peut-être
le
de servo arbitrio et le Catéchisme. » 31. Luther avertit à chaque fo
2711
at, si ce n’est peut-être le de servo arbitrio et
le
Catéchisme. » 31. Luther avertit à chaque fois : « nécessité conditi
2712
absolue, comme ils disent », et ce ils désigne «
les
sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 32. Comme l’anarchiste B
2713
et ce ils désigne « les sophistes », c’est-à-dire
les
scolastiques. 32. Comme l’anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52.
2714
stes », c’est-à-dire les scolastiques. 32. Comme
l’
anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52. Les traductions françaises
2715
omme l’anarchiste Bakounine. 33. I Cor. 15, 52.
Les
traductions françaises donnent en général : « Nous serons transformés
2716
L’
Acte comme point de départ (1936-1937)a b Nous partons de l’impress
2717
point de départ (1936-1937)a b Nous partons de
l’
impression qu’il existe, entre certains systèmes qu’on a coutume d’opp
2718
systèmes qu’on a coutume d’opposer très nettement
les
uns aux autres, un commun dénominateur d’erreur, que nous ne pourrion
2719
re parti. C’est ainsi qu’on peut distinguer, dans
l’
idéalisme et dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans le prag
2720
i qu’on peut distinguer, dans l’idéalisme et dans
le
réalisme, ou dans le rationalisme et dans le pragmatisme, etc., un en
2721
er, dans l’idéalisme et dans le réalisme, ou dans
le
rationalisme et dans le pragmatisme, etc., un ensemble de supposition
2722
dans le réalisme, ou dans le rationalisme et dans
le
pragmatisme, etc., un ensemble de suppositions communes qui nous para
2723
ppositions communes qui nous paraissent renfermer
la
véritable raison de rejeter l’un et l’autre système, sans plus nous a
2724
tacher à combattre leurs erreurs respectives dans
le
plan sur lequel ils s’opposent. Cette impossibilité de prendre parti
2725
« changement de plan »), qui seule nous restitue
l’
unité de vision, la plénitude de volonté et en quelque sorte la bonne
2726
an »), qui seule nous restitue l’unité de vision,
la
plénitude de volonté et en quelque sorte la bonne conscience nécessai
2727
sion, la plénitude de volonté et en quelque sorte
la
bonne conscience nécessaire à toute œuvre constructive. Les quelques
2728
conscience nécessaire à toute œuvre constructive.
Les
quelques pages qui suivent n’ont d’autre but que d’en indiquer le pri
2729
s qui suivent n’ont d’autre but que d’en indiquer
le
principe de permanente actualité. C’est précisément ce sentiment de b
2730
es se présentent à nous. Avant même d’en pénétrer
le
détail et d’en critiquer la structure propre, nous nous sentons repou
2731
nt même d’en pénétrer le détail et d’en critiquer
la
structure propre, nous nous sentons repoussés par quelque chose qui n
2732
e parfaite qui nous semble absurde. Il semble que
l’
esprit ait proclamé, lui aussi, son autarchie, et qu’il puisse se donn
2733
se donner des lois qui ne tiennent plus compte de
la
crise du monde, et de celle de l’esprit dans ce monde. L’esprit s’est
2734
plus compte de la crise du monde, et de celle de
l’
esprit dans ce monde. L’esprit s’est dégagé des coordonnées du moment,
2735
du monde, et de celle de l’esprit dans ce monde.
L’
esprit s’est dégagé des coordonnées du moment, c’est dire que son exer
2736
nous trouver diminués dans notre énergie totale.
La
pensée n’est plus le moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à
2737
s dans notre énergie totale. La pensée n’est plus
le
moteur de l’action ; au contraire, elle tourne à ses dépens. On peut
2738
énergie totale. La pensée n’est plus le moteur de
l’
action ; au contraire, elle tourne à ses dépens. On peut continuer la
2739
aire, elle tourne à ses dépens. On peut continuer
la
métaphore et dire que la pensée dont nous souffrons est une pensée dé
2740
épens. On peut continuer la métaphore et dire que
la
pensée dont nous souffrons est une pensée débrayée. Un moteur débrayé
2741
ntative d’embrayage serait immédiatement fatale à
la
machine, et ferait voler en éclats les engrenages. La merveilleuse su
2742
nt fatale à la machine, et ferait voler en éclats
les
engrenages. La merveilleuse subtilité d’une certaine pensée critique,
2743
achine, et ferait voler en éclats les engrenages.
La
merveilleuse subtilité d’une certaine pensée critique, aujourd’hui, n
2744
s exactement cette impression ? Ne pourrions-nous
la
caractériser maintenant par un seul mot, qui exprime à la fois son ma
2745
que de coordonnées, d’une part, et, d’autre part,
le
sentiment de division et de diminution qu’elle favorise en nous : ce
2746
s au sens temporel, mais au sens de rupture entre
la
pensée et l’acte. ⁂ Que la pensée moderne repose sur un postulat d’in
2747
porel, mais au sens de rupture entre la pensée et
l’
acte. ⁂ Que la pensée moderne repose sur un postulat d’inactualité, il
2748
sens de rupture entre la pensée et l’acte. ⁂ Que
la
pensée moderne repose sur un postulat d’inactualité, il suffit, pour
2749
de se demander un instant ce qui arriverait dans
le
cas contraire. Si notre monde tient encore debout, c’est que les phil
2750
re. Si notre monde tient encore debout, c’est que
les
philosophies qui le partagent restent gratuites, relativistes et inac
2751
ent encore debout, c’est que les philosophies qui
le
partagent restent gratuites, relativistes et inactuelles dans leur en
2752
, relativistes et inactuelles dans leur ensemble.
Le
« libéralisme » idéaliste, ce « laisser passer, laisser faire », supp
2753
te, ce « laisser passer, laisser faire », suppose
le
débrayage de la pensée, sinon nous vivrions dans la plus effroyable a
2754
passer, laisser faire », suppose le débrayage de
la
pensée, sinon nous vivrions dans la plus effroyable anarchie matériel
2755
débrayage de la pensée, sinon nous vivrions dans
la
plus effroyable anarchie matérielle. On nous dira que, cependant, si
2756
rchie matérielle. On nous dira que, cependant, si
le
désordre du monde est réel, il se peut qu’il provienne, précisément,
2757
es que nous repoussons ? Nous serions mal venus à
le
nier. Si le monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a d
2758
repoussons ? Nous serions mal venus à le nier. Si
le
monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a dans le monde
2759
c’est-à-dire se renouvelle, c’est qu’il y a dans
le
monde plus d’actualité que nos philosophies n’en peuvent concevoir. E
2760
moins inopérantes que souvent elles ne voudraient
l’
être. Mais, chose étrange, la raison pour laquelle le désordre n’est p
2761
elles ne voudraient l’être. Mais, chose étrange,
la
raison pour laquelle le désordre n’est pas total, c’est la raison mêm
2762
tre. Mais, chose étrange, la raison pour laquelle
le
désordre n’est pas total, c’est la raison même de ce désordre : c’est
2763
pour laquelle le désordre n’est pas total, c’est
la
raison même de ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et l’ac
2764
otal, c’est la raison même de ce désordre : c’est
la
rupture entre la pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce l’
2765
ison même de ce désordre : c’est la rupture entre
la
pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre
2766
ce désordre : c’est la rupture entre la pensée et
l’
acte, rupture qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre part, la fre
2767
pensée et l’acte, rupture qui, d’une part, amorce
l’
anarchie, d’autre part, la freine et la prive pour le moment de virule
2768
qui, d’une part, amorce l’anarchie, d’autre part,
la
freine et la prive pour le moment de virulence. Cet état d’équilibre
2769
rt, amorce l’anarchie, d’autre part, la freine et
la
prive pour le moment de virulence. Cet état d’équilibre entre le micr
2770
narchie, d’autre part, la freine et la prive pour
le
moment de virulence. Cet état d’équilibre entre le microbe et la mala
2771
e moment de virulence. Cet état d’équilibre entre
le
microbe et la maladie ne peut mener qu’à une consomption lente, ou à
2772
rulence. Cet état d’équilibre entre le microbe et
la
maladie ne peut mener qu’à une consomption lente, ou à des accidents
2773
rophiques. Un tel diagnostic indique par lui-même
la
thérapeutique que nous voudrions proposer, et qui serait un traitemen
2774
oposer, et qui serait un traitement préventif par
l’
actualisation, c’est-à-dire par l’effort et la volonté de confondre l’
2775
t préventif par l’actualisation, c’est-à-dire par
l’
effort et la volonté de confondre l’opération propre de la pensée avec
2776
par l’actualisation, c’est-à-dire par l’effort et
la
volonté de confondre l’opération propre de la pensée avec l’acte qui
2777
st-à-dire par l’effort et la volonté de confondre
l’
opération propre de la pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dir
2778
et la volonté de confondre l’opération propre de
la
pensée avec l’acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette
2779
de confondre l’opération propre de la pensée avec
l’
acte qui la certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté sont d
2780
e l’opération propre de la pensée avec l’acte qui
la
certifie1. À vrai dire, cet effort et cette volonté sont déjà présent
2781
nté sont déjà présents, avant toute analyse, dans
le
sentiment que nous disions tout à l’heure éprouver en face d’une conc
2782
nalyse, dans le sentiment que nous disions tout à
l’
heure éprouver en face d’une conception purement critique, ou idéalist
2783
rement critique, ou idéaliste, ou relativiste, de
l’
activité du philosophe. ⁂ Mais cette réalité salutaire, cet acte, comm
2784
pte ? Nous ne disons pas : comment pourrions-nous
le
définir, nous disons seulement — et littéralement — comment pourrions
2785
en vérité, il n’y a pas pour nous de problème de
l’
acte mais il y a problème de ce qui s’oppose à l’acte. (En d’autres te
2786
l’acte mais il y a problème de ce qui s’oppose à
l’
acte. (En d’autres termes, il n’y a pas de problème de la personne, ma
2787
(En d’autres termes, il n’y a pas de problème de
la
personne, mais bien des « choses », de l’impersonnel.) L’acte, étant
2788
lème de la personne, mais bien des « choses », de
l’
impersonnel.) L’acte, étant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesse
2789
nne, mais bien des « choses », de l’impersonnel.)
L’
acte, étant immédiat au sujet, ne peut pas, sans cesser d’être acte, ê
2790
as, sans cesser d’être acte, être posé en face de
l’
acteur. On ne peut pas photographier un acte, et donner ensuite la des
2791
peut pas photographier un acte, et donner ensuite
la
description de la photo comme la description d’un acte. On pourrait d
2792
hier un acte, et donner ensuite la description de
la
photo comme la description d’un acte. On pourrait dire tout au plus (
2793
t donner ensuite la description de la photo comme
la
description d’un acte. On pourrait dire tout au plus (métaphoriquemen
2794
pourrait dire tout au plus (métaphoriquement) que
l’
acte révélé par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la photo c
2795
au plus (métaphoriquement) que l’acte révélé par
le
cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la photo constitue l’un des
2796
riquement) que l’acte révélé par le cliché, c’est
l’
éclair de magnésium dont la photo constitue l’un des effets. Quant à l
2797
é par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont
la
photo constitue l’un des effets. Quant à la scène représentée par la
2798
dont la photo constitue l’un des effets. Quant à
la
scène représentée par la photo, elle n’est plus qu’un objectif, inact
2799
l’un des effets. Quant à la scène représentée par
la
photo, elle n’est plus qu’un objectif, inactuel en soi, et problémati
2800
ion importante introduite par M. Gabriel Marcel à
la
fin de son article intitulé : Existence et objectivité. M. Marcel dis
2801
tence et objectivité. M. Marcel distingue « entre
les
données susceptibles de fournir la matière d’un problème, données qui
2802
ingue « entre les données susceptibles de fournir
la
matière d’un problème, données qui sont par là même objectives, et ce
2803
objectives, et celles sur lesquelles il faut que
l’
esprit s’appuie pour poser un problème quelconque ». L’acte, tel que n
2804
rit s’appuie pour poser un problème quelconque ».
L’
acte, tel que nous l’entendons, est évidemment une donnée de ce deuxiè
2805
er un problème quelconque ». L’acte, tel que nous
l’
entendons, est évidemment une donnée de ce deuxième type, la donnée pa
2806
s, est évidemment une donnée de ce deuxième type,
la
donnée par excellence. En réalité, toute définition s’appuie sur une
2807
irait Heidegger. Toute tentative de définition de
l’
acte lui-même supposerait un arrêt, un retour sur l’acte, c’est-à-dire
2808
acte lui-même supposerait un arrêt, un retour sur
l’
acte, c’est-à-dire un retour contre l’acte, qui en neutraliserait auss
2809
retour sur l’acte, c’est-à-dire un retour contre
l’
acte, qui en neutraliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur l’
2810
our contre l’acte, qui en neutraliserait aussitôt
le
dynamisme. La réflexion sur l’acte ne pouvant intervenir qu’a posteri
2811
cte, qui en neutraliserait aussitôt le dynamisme.
La
réflexion sur l’acte ne pouvant intervenir qu’a posteriori, elle n’es
2812
aliserait aussitôt le dynamisme. La réflexion sur
l’
acte ne pouvant intervenir qu’a posteriori, elle n’est, en réalité, qu
2813
ori, elle n’est, en réalité, qu’une réflexion sur
les
effets de l’acte. Si, au moment de sauter, l’athlète essaie de défini
2814
t, en réalité, qu’une réflexion sur les effets de
l’
acte. Si, au moment de sauter, l’athlète essaie de définir le saut, il
2815
ur les effets de l’acte. Si, au moment de sauter,
l’
athlète essaie de définir le saut, il ne sautera pas. Tous ceux qui on
2816
au moment de sauter, l’athlète essaie de définir
le
saut, il ne sautera pas. Tous ceux qui ont pratiqué un minimum de cul
2817
ture physique connaissent ce genre d’échec. C’est
la
conscience défaillante qui refuse l’obstacle. Il ne reste alors qu’à
2818
échec. C’est la conscience défaillante qui refuse
l’
obstacle. Il ne reste alors qu’à se consoler par la certitude que l’an
2819
’obstacle. Il ne reste alors qu’à se consoler par
la
certitude que l’analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas
2820
reste alors qu’à se consoler par la certitude que
l’
analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas sauter. Et c’est
2821
s sauter. Et c’est peut-être cela précisément que
la
sagesse vulgaire appelle « prendre les choses avec philosophie »… Cec
2822
isément que la sagesse vulgaire appelle « prendre
les
choses avec philosophie »… Ceci nous amène à constater que : 1° Si on
2823
s amène à constater que : 1° Si on ne part pas de
l’
acte, on ne part pas du tout. 2° Si on ne part pas tout de suite, on
2824
ne part pas tout de suite, on ne partira jamais.
Le
jeu des mots traduit ici le jeu des faits. Impossible de parler de l’
2825
on ne partira jamais. Le jeu des mots traduit ici
le
jeu des faits. Impossible de parler de l’acte dans un langage arrêté
2826
uit ici le jeu des faits. Impossible de parler de
l’
acte dans un langage arrêté ou détendu. Tout discours sur l’acte conti
2827
s un langage arrêté ou détendu. Tout discours sur
l’
acte contiendra nécessairement des mots tels que « départ », « partir
2828
partir » et « tout de suite ». Tout discours sur
l’
acte manifestera ce trouble, cette vibration, cette « nouveauté » déco
2829
ion, cette « nouveauté » déconcertante qui révèle
la
proximité de la réalité créante. Force nous est de reconnaître qu’un
2830
veauté » déconcertante qui révèle la proximité de
la
réalité créante. Force nous est de reconnaître qu’un tel discours, da
2831
nous est de reconnaître qu’un tel discours, dans
l’
état de notre philosophie, paraîtra peu philosophique. Personne, mieux
2832
té essentielle, et d’apparence scandaleuse, entre
l’
expression et l’existence. Bornons-nous à citer de lui une phrase bien
2833
et d’apparence scandaleuse, entre l’expression et
l’
existence. Bornons-nous à citer de lui une phrase bien typique par sa
2834
qui, par ailleurs, peut éclairer notre débat : «
L’
éthique ne commence pas dans une ignorance qu’il faudrait muer en savo
2835
réalisation. » Nous dirions en d’autres termes :
l’
acte n’est pas un problème, mais une donnée initiale, le seul donné qu
2836
n’est pas un problème, mais une donnée initiale,
le
seul donné qui se donne à soi-même. Or, cette donnée, d’une part, n’e
2837
donnée, d’une part, n’est pas réductible à ce qui
la
précède, d’autre part, n’est pas épuisée par l’analyse de ses effets.
2838
i la précède, d’autre part, n’est pas épuisée par
l’
analyse de ses effets. L’acte est à la fois créateur, et transcendant
2839
t, n’est pas épuisée par l’analyse de ses effets.
L’
acte est à la fois créateur, et transcendant à sa création. Il est cré
2840
ion. Il est créateur en ceci qu’il introduit dans
les
choses un rapport nouveau instituant une situation irréversible ; et
2841
e rapport nouveau on ne trouvera rien d’autre que
la
matière d’une problématique nouvelle, un donné, ou plutôt un « abando
2842
erminations objectives, et s’offrant à son tour à
l’
éclair bouleversant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte que dans le p
2843
ant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte que dans
le
présent, dans l’instant créateur, dans ce contact entre l’éternité et
2844
cte. Il n’y a eu d’acte que dans le présent, dans
l’
instant créateur, dans ce contact entre l’éternité et le temps, qui es
2845
t, dans l’instant créateur, dans ce contact entre
l’
éternité et le temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’
2846
ant créateur, dans ce contact entre l’éternité et
le
temps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas qu’on ne puisse r
2847
ce contact entre l’éternité et le temps, qui est
le
mystère même. Cela n’entraîne pas qu’on ne puisse rien dire des réact
2848
e puisse rien dire des réactions psychologiques à
l’
acte « as it’s known as », réactions qui, elles, se manifestent dans u
2849
manifestent dans une certaine durée de vibration.
Le
sentiment qui accompagne l’acte, c’est le sentiment d’indivision inté
2850
e durée de vibration. Le sentiment qui accompagne
l’
acte, c’est le sentiment d’indivision intérieure, d’indivision entre l
2851
ration. Le sentiment qui accompagne l’acte, c’est
le
sentiment d’indivision intérieure, d’indivision entre le vouloir et l
2852
iment d’indivision intérieure, d’indivision entre
le
vouloir et le pouvoir. On pourrait presque dire que c’est la sensatio
2853
sion intérieure, d’indivision entre le vouloir et
le
pouvoir. On pourrait presque dire que c’est la sensation de l’unité,
2854
et le pouvoir. On pourrait presque dire que c’est
la
sensation de l’unité, ou, plus exactement, de son accomplissement. C’
2855
n pourrait presque dire que c’est la sensation de
l’
unité, ou, plus exactement, de son accomplissement. C’est l’euphorie d
2856
u, plus exactement, de son accomplissement. C’est
l’
euphorie de celui qui éprouve simultanément la résistance d’un objet e
2857
est l’euphorie de celui qui éprouve simultanément
la
résistance d’un objet et la victoire sur cette résistance. Moment mys
2858
éprouve simultanément la résistance d’un objet et
la
victoire sur cette résistance. Moment mystérieux entre tous, où le ma
2859
ette résistance. Moment mystérieux entre tous, où
le
maximum de risque s’identifie au maximum de sécurité, dans la conscie
2860
e risque s’identifie au maximum de sécurité, dans
la
conscience de celui qui agit. Nous appellerions volontiers cet instan
2861
ui agit. Nous appellerions volontiers cet instant
le
saint des saints de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si la «
2862
ons volontiers cet instant le saint des saints de
la
réalité humaine, le lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comm
2863
nstant le saint des saints de la réalité humaine,
le
lieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaar
2864
aint des saints de la réalité humaine, le lieu de
la
pureté, si la « pureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le
2865
s de la réalité humaine, le lieu de la pureté, si
la
« pureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est le vouloir uniqu
2866
ieu de la pureté, si la « pureté du cœur », comme
le
veut Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant l’être vivant et
2867
ureté du cœur », comme le veut Kierkegaard, c’est
le
vouloir unique, unifiant l’être vivant et le confondant un instant av
2868
ut Kierkegaard, c’est le vouloir unique, unifiant
l’
être vivant et le confondant un instant avec l’objet de son désir. On
2869
’est le vouloir unique, unifiant l’être vivant et
le
confondant un instant avec l’objet de son désir. On comprendra peut-ê
2870
nt l’être vivant et le confondant un instant avec
l’
objet de son désir. On comprendra peut-être mieux maintenant le reproc
2871
n désir. On comprendra peut-être mieux maintenant
le
reproche d’inactualité essentielle que nous adressions dès le début à
2872
d’inactualité essentielle que nous adressions dès
le
début à certains systèmes par ailleurs fort divers, mais dont l’exerc
2873
ains systèmes par ailleurs fort divers, mais dont
l’
exercice se trouve être lié à une division préalable de notre être, pa
2874
devenir historique, ou encore à une autonomie de
la
raison critique. Division qui a pour effet, généralement, de volatili
2875
on qui a pour effet, généralement, de volatiliser
les
points d’application de notre volonté, de relativiser tout effort cré
2876
r tout effort créateur, enfin de « dés-orienter »
l’
activité spécifique de la pensée. L’acte, étant essentiellement l’affi
2877
nfin de « dés-orienter » l’activité spécifique de
la
pensée. L’acte, étant essentiellement l’affirmation simultanée de l’u
2878
és-orienter » l’activité spécifique de la pensée.
L’
acte, étant essentiellement l’affirmation simultanée de l’un et du div
2879
fique de la pensée. L’acte, étant essentiellement
l’
affirmation simultanée de l’un et du divers, affirmation absurde en la
2880
philosophique sera amené, par son jeu logique, à
l’
éliminer ou à la disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la r
2881
era amené, par son jeu logique, à l’éliminer ou à
la
disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de la réalité centrale,
2882
disqualifier. À moins qu’il n’en parte, comme de
la
réalité centrale, impensable et qui permet de penser. Nous voudrions
2883
otre position. ⁂ Nous ne pouvons faire comprendre
la
véritable valeur d’une philosophie de l’acte qu’en montrant comment s
2884
mprendre la véritable valeur d’une philosophie de
l’
acte qu’en montrant comment ses caractères principaux, tels que nous v
2885
es caractères principaux, tels que nous venons de
les
indiquer, se retrouvent — comme reflétés — dans ses effets immédiats.
2886
voir affirmer qu’il n’y a pas de transition entre
l’
acte et ses effets. C’est l’acte lui-même qui se trouve être transitif
2887
s de transition entre l’acte et ses effets. C’est
l’
acte lui-même qui se trouve être transitif et novateur, sans qu’il y a
2888
, paradoxalement : il n’y a de transition que par
l’
acte, mais l’acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à
2889
ent : il n’y a de transition que par l’acte, mais
l’
acte est le contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de
2890
y a de transition que par l’acte, mais l’acte est
le
contraire d’une transition. Avant de passer à l’examen de ses effets,
2891
le contraire d’une transition. Avant de passer à
l’
examen de ses effets, rappelons encore deux caractéristiques de l’acte
2892
effets, rappelons encore deux caractéristiques de
l’
acte, impliquées d’ailleurs dans ce qui précède, et que nous allons ut
2893
, et que nous allons utiliser. La première, c’est
la
violence de l’acte. Quand on descend au fond de la notion de force, o
2894
llons utiliser. La première, c’est la violence de
l’
acte. Quand on descend au fond de la notion de force, on est obligé de
2895
a violence de l’acte. Quand on descend au fond de
la
notion de force, on est obligé de faire appel à l’idée de choc, de ru
2896
a notion de force, on est obligé de faire appel à
l’
idée de choc, de rupture, en un mot de violence (voir à cet égard Sore
2897
n’y a pas d’évolution créatrice sans révolution.
L’
acte sera donc agonique. D’autre part, l’acte implique un élan vers, p
2898
olution. L’acte sera donc agonique. D’autre part,
l’
acte implique un élan vers, pour reprendre l’expression du Dr Minkowsk
2899
art, l’acte implique un élan vers, pour reprendre
l’
expression du Dr Minkowski. L’acte est l’éclatement d’une tension orie
2900
ers, pour reprendre l’expression du Dr Minkowski.
L’
acte est l’éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi inten
2901
eprendre l’expression du Dr Minkowski. L’acte est
l’
éclatement d’une tension orientée ; il est donc aussi intention. Il n’
2902
ci que nous retrouvons, sous un aspect dynamique,
la
distinction esprit-matière que nous avions écartée tout d’abord. L’ac
2903
rit-matière que nous avions écartée tout d’abord.
L’
acte créateur sépare la lumière des ténèbres. Son caractère dichotomiq
2904
ions écartée tout d’abord. L’acte créateur sépare
la
lumière des ténèbres. Son caractère dichotomique n’est pas isolé de s
2905
e son caractère agonique. Ce n’est pas à dire que
la
lumière et les ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il ne
2906
e agonique. Ce n’est pas à dire que la lumière et
les
ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il ne serait pas créa
2907
e la lumière et les ténèbres soient données avant
l’
acte, car sinon il ne serait pas créateur, c’est-à-dire qu’il ne serai
2908
créateur, c’est-à-dire qu’il ne serait pas acte.
L’
acte n’a qu’un point d’application, le chaos, la discorde, le non-être
2909
t pas acte. L’acte n’a qu’un point d’application,
le
chaos, la discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui e
2910
. L’acte n’a qu’un point d’application, le chaos,
la
discorde, le non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau
2911
qu’un point d’application, le chaos, la discorde,
le
non-être, ou ce qui tend à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pa
2912
end à y revenir. Ce qui est nouveau, ce n’est pas
le
désordre, c’est l’ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets q
2913
qui est nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est
l’
ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait hum
2914
nouveau, ce n’est pas le désordre, c’est l’ordre.
L’
acte est si étroitement lié à ses effets qu’on ne saurait humainement
2915
ent lié à ses effets qu’on ne saurait humainement
le
séparer du premier d’entre eux, qui est l’affirmation de la personnal
2916
nement le séparer du premier d’entre eux, qui est
l’
affirmation de la personnalité. Nous définissons la personne comme l’i
2917
du premier d’entre eux, qui est l’affirmation de
la
personnalité. Nous définissons la personne comme l’individu qui se sa
2918
’affirmation de la personnalité. Nous définissons
la
personne comme l’individu qui se sait et se veut engagé dans le confl
2919
personnalité. Nous définissons la personne comme
l’
individu qui se sait et se veut engagé dans le conflit créateur. Mais
2920
mme l’individu qui se sait et se veut engagé dans
le
conflit créateur. Mais en s’affirmant, c’est-à-dire en changeant de p
2921
, c’est-à-dire en changeant de plan, en allant de
l’
angoisse à la création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la
2922
e en changeant de plan, en allant de l’angoisse à
la
création, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité
2923
e plan, en allant de l’angoisse à la création, de
l’
impasse du désordre à l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore
2924
tion, de l’impasse du désordre à l’ordre nouveau,
la
personnalité accentue encore la tension. Le nouvel état du conflit es
2925
l’ordre nouveau, la personnalité accentue encore
la
tension. Le nouvel état du conflit est plus aigu que l’ancien. Au fur
2926
veau, la personnalité accentue encore la tension.
Le
nouvel état du conflit est plus aigu que l’ancien. Au fur et à mesure
2927
sion. Le nouvel état du conflit est plus aigu que
l’
ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère, la personnalité se risqu
2928
e l’ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère,
la
personnalité se risque de plus en plus. C’est pourquoi les époques de
2929
nnalité se risque de plus en plus. C’est pourquoi
les
époques de conciliation sont des époques de décadence. Le salut n’est
2930
es de conciliation sont des époques de décadence.
Le
salut n’est jamais dans le repli, dans le refus du conflit concret. L
2931
époques de décadence. Le salut n’est jamais dans
le
repli, dans le refus du conflit concret. L’invention de l’homme « int
2932
adence. Le salut n’est jamais dans le repli, dans
le
refus du conflit concret. L’invention de l’homme « intérieur » suppos
2933
dans le repli, dans le refus du conflit concret.
L’
invention de l’homme « intérieur » suppose et permet celle du « robot
2934
dans le refus du conflit concret. L’invention de
l’
homme « intérieur » suppose et permet celle du « robot » d’affaires. L
2935
suppose et permet celle du « robot » d’affaires.
L’
autisme est un fléchissement de la personnalité. D’une manière général
2936
t » d’affaires. L’autisme est un fléchissement de
la
personnalité. D’une manière générale, l’acte personnel revêtira donc
2937
ement de la personnalité. D’une manière générale,
l’
acte personnel revêtira donc deux aspects, symbolisant les pôles de ce
2938
personnel revêtira donc deux aspects, symbolisant
les
pôles de cette tension qui constitue le ressort de l’activité elle-mê
2939
bolisant les pôles de cette tension qui constitue
le
ressort de l’activité elle-même. D’un côté, il y aura une joie créatr
2940
ôles de cette tension qui constitue le ressort de
l’
activité elle-même. D’un côté, il y aura une joie créatrice, une consc
2941
e créatrice, une conscience de libération qui est
la
jouissance spécifiquement humaine. De l’autre côté, on trouvera une é
2942
aits. D’un côté, un champ plus libre conquis pour
l’
esprit, de l’autre une pression accrue sur l’inerte. Risque par conséq
2943
pour l’esprit, de l’autre une pression accrue sur
l’
inerte. Risque par conséquent accru aussi, puisque la tentation de l’i
2944
nerte. Risque par conséquent accru aussi, puisque
la
tentation de l’inertie augmentera en raison même de la plus grande do
2945
r conséquent accru aussi, puisque la tentation de
l’
inertie augmentera en raison même de la plus grande docilité de l’iner
2946
ntation de l’inertie augmentera en raison même de
la
plus grande docilité de l’inerte. Il est plus difficile d’échapper au
2947
tera en raison même de la plus grande docilité de
l’
inerte. Il est plus difficile d’échapper au prestige du positivisme et
2948
à prières. Il est plus difficile de maintenir sur
le
qui-vive un empire qu’une cité étroite. En effet, à l’intérieur même
2949
i-vive un empire qu’une cité étroite. En effet, à
l’
intérieur même de l’empire, s’établit un danger qu’ignorent les pays d
2950
une cité étroite. En effet, à l’intérieur même de
l’
empire, s’établit un danger qu’ignorent les pays de marche. Le sentime
2951
même de l’empire, s’établit un danger qu’ignorent
les
pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de l’ennui, du vide, tra
2952
établit un danger qu’ignorent les pays de marche.
Le
sentiment de la sécurité, de l’ennui, du vide, traduit un fléchisseme
2953
r qu’ignorent les pays de marche. Le sentiment de
la
sécurité, de l’ennui, du vide, traduit un fléchissement de la tension
2954
s pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de
l’
ennui, du vide, traduit un fléchissement de la tension. L’adoration de
2955
de l’ennui, du vide, traduit un fléchissement de
la
tension. L’adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’inv
2956
du vide, traduit un fléchissement de la tension.
L’
adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’
2957
it un fléchissement de la tension. L’adoration de
l’
abstrait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de l’acte gratuit, c
2958
nsion. L’adoration de l’abstrait, c’est-à-dire de
la
formule, l’invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans p
2959
ration de l’abstrait, c’est-à-dire de la formule,
l’
invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans point d’appui
2960
trait, c’est-à-dire de la formule, l’invention de
l’
acte gratuit, c’est-à-dire de l’acte sans point d’appui et sans orient
2961
e, l’invention de l’acte gratuit, c’est-à-dire de
l’
acte sans point d’appui et sans orientation, autrement dit de l’acte i
2962
int d’appui et sans orientation, autrement dit de
l’
acte impossible, sont des exemples de ce fléchissement. La tentation d
2963
mpossible, sont des exemples de ce fléchissement.
La
tentation de l’acte gratuit n’est qu’une forme moderne de la tentatio
2964
des exemples de ce fléchissement. La tentation de
l’
acte gratuit n’est qu’une forme moderne de la tentation de l’inerte. C
2965
n de l’acte gratuit n’est qu’une forme moderne de
la
tentation de l’inerte. C’est un vertige de la personnalité consécutif
2966
uit n’est qu’une forme moderne de la tentation de
l’
inerte. C’est un vertige de la personnalité consécutif au relâchement
2967
de la tentation de l’inerte. C’est un vertige de
la
personnalité consécutif au relâchement de la tension et à la perte du
2968
e de la personnalité consécutif au relâchement de
la
tension et à la perte du sentiment du risque véritable. À côté de la
2969
lité consécutif au relâchement de la tension et à
la
perte du sentiment du risque véritable. À côté de la réalité de la pe
2970
perte du sentiment du risque véritable. À côté de
la
réalité de la personne, une autre réalité immédiate à l’acte, c’est é
2971
ment du risque véritable. À côté de la réalité de
la
personne, une autre réalité immédiate à l’acte, c’est évidemment la c
2972
ité de la personne, une autre réalité immédiate à
l’
acte, c’est évidemment la connaissance. Non seulement la pensée est ac
2973
utre réalité immédiate à l’acte, c’est évidemment
la
connaissance. Non seulement la pensée est acte, mais elle est ce qu’i
2974
, c’est évidemment la connaissance. Non seulement
la
pensée est acte, mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans l’ac
2975
, mais elle est ce qu’il y a de plus actuel ·dans
l’
acte. Ce qui a pu tromper sur ce point, c’est précisément que, la pens
2976
a pu tromper sur ce point, c’est précisément que,
la
pensée étant la plus immédiate des mises en ordre, la raison est tent
2977
ce point, c’est précisément que, la pensée étant
la
plus immédiate des mises en ordre, la raison est tentée de confondre
2978
ensée étant la plus immédiate des mises en ordre,
la
raison est tentée de confondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet,
2979
ondre cet ordre même, qui n’est qu’un effet, avec
le
dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de la pensée créatric
2980
ynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de
la
pensée créatrice, c’est cela que nous appelons sa faculté dichotomiqu
2981
t cela que nous appelons sa faculté dichotomique.
La
science nous en donnera un bon exemple. En tant qu’activité, elle peu
2982
le. En tant qu’activité, elle peut se définir par
l’
invention de l’abstrait, c’est-à-dire de l’homogénéité mathématique. E
2983
activité, elle peut se définir par l’invention de
l’
abstrait, c’est-à-dire de l’homogénéité mathématique. Elle apparaît ai
2984
ir par l’invention de l’abstrait, c’est-à-dire de
l’
homogénéité mathématique. Elle apparaît ainsi comme un va-et-vient du
2985
pparaît ainsi comme un va-et-vient du « donné » à
l’
abstrait. (Conflit de l’identité et de la réalité, voir Meyerson). Il
2986
a-et-vient du « donné » à l’abstrait. (Conflit de
l’
identité et de la réalité, voir Meyerson). Il n’y a de paradoxe épisté
2987
onné » à l’abstrait. (Conflit de l’identité et de
la
réalité, voir Meyerson). Il n’y a de paradoxe épistémologique que pou
2988
oxe épistémologique que pour qui refuse d’aborder
le
problème de la connaissance à partir de l’acte. Mais, au contraire, l
2989
ique que pour qui refuse d’aborder le problème de
la
connaissance à partir de l’acte. Mais, au contraire, la science, cons
2990
border le problème de la connaissance à partir de
l’
acte. Mais, au contraire, la science, considérée maintenant comme monu
2991
naissance à partir de l’acte. Mais, au contraire,
la
science, considérée maintenant comme monument ou système de règles, n
2992
e qu’un aspect provisoirement favorable du chaos.
La
vérité scientifique est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint le
2993
vorable du chaos. La vérité scientifique est dans
l’
abstrait ; la science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que
2994
aos. La vérité scientifique est dans l’abstrait ;
la
science-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que pour le sava
2995
ue est dans l’abstrait ; la science-faite rejoint
le
donné. Mais cela n’est vrai que pour le savant seulement au moment où
2996
e rejoint le donné. Mais cela n’est vrai que pour
le
savant seulement au moment où il crée ; pour les autres hommes, la sc
2997
r le savant seulement au moment où il crée ; pour
les
autres hommes, la science se traduit par une économie d’énergie et de
2998
nt au moment où il crée ; pour les autres hommes,
la
science se traduit par une économie d’énergie et de pensée, d’où cett
2999
onomie d’énergie et de pensée, d’où cette zone où
l’
homme marche sur de l’art humain en toute sécurité et en plein automat
3000
pensée, d’où cette zone où l’homme marche sur de
l’
art humain en toute sécurité et en plein automatisme (exemple : les gr
3001
toute sécurité et en plein automatisme (exemple :
les
grandes villes). Le progrès scientifique accroît sans cesse ce risque
3002
plein automatisme (exemple : les grandes villes).
Le
progrès scientifique accroît sans cesse ce risque d’automatisme, ranç
3003
oît sans cesse ce risque d’automatisme, rançon de
la
conquête2. À tous les étages et dans tous les domaines de l’effort de
3004
que d’automatisme, rançon de la conquête2. À tous
les
étages et dans tous les domaines de l’effort de pensée nous retrouvon
3005
n de la conquête2. À tous les étages et dans tous
les
domaines de l’effort de pensée nous retrouvons ce risque, né du carac
3006
2. À tous les étages et dans tous les domaines de
l’
effort de pensée nous retrouvons ce risque, né du caractère ordonnateu
3007
rouvons ce risque, né du caractère ordonnateur de
l’
activité humaine. Ainsi dans l’organisation du travail. La machine ten
3008
ère ordonnateur de l’activité humaine. Ainsi dans
l’
organisation du travail. La machine tend à détruire l’artisanat, c’est
3009
té humaine. Ainsi dans l’organisation du travail.
La
machine tend à détruire l’artisanat, c’est-à-dire la zone du travail
3010
ganisation du travail. La machine tend à détruire
l’
artisanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où l’œuvre garde un
3011
machine tend à détruire l’artisanat, c’est-à-dire
la
zone du travail manuel où l’œuvre garde un caractère plus ou moins ne
3012
isanat, c’est-à-dire la zone du travail manuel où
l’
œuvre garde un caractère plus ou moins net de totalité. En d’autres te
3013
lus ou moins net de totalité. En d’autres termes,
la
machine sépare le travail qualifié, qu’elle repousse vers l’activité
3014
e totalité. En d’autres termes, la machine sépare
le
travail qualifié, qu’elle repousse vers l’activité spirituelle, du tr
3015
sépare le travail qualifié, qu’elle repousse vers
l’
activité spirituelle, du travail non qualifié, où l’homme ne joue plus
3016
activité spirituelle, du travail non qualifié, où
l’
homme ne joue plus qu’un rôle d’exécuteur. Remarquons que la machine n
3017
joue plus qu’un rôle d’exécuteur. Remarquons que
la
machine n’est que le prolongement d’un schéma mathématique, et qu’ell
3018
d’exécuteur. Remarquons que la machine n’est que
le
prolongement d’un schéma mathématique, et qu’elle est elle-même prolo
3019
hématique, et qu’elle est elle-même prolongée par
la
rationalisation. Nous avons là un exemple saisissant de la progressio
3020
alisation. Nous avons là un exemple saisissant de
la
progression par dichotomie. Progression réelle, créant un double risq
3021
le, créant un double risque non moins réel, ou si
l’
on veut, une double tentation. Car, d’une part, renoncer à la machine
3022
une double tentation. Car, d’une part, renoncer à
la
machine ce serait en quelque sorte renoncer au sens même de l’activit
3023
serait en quelque sorte renoncer au sens même de
l’
activité humaine ; mais, d’autre part, la domination de la machine ser
3024
même de l’activité humaine ; mais, d’autre part,
la
domination de la machine serait le résultat fatal du renoncement à la
3025
té humaine ; mais, d’autre part, la domination de
la
machine serait le résultat fatal du renoncement à la valeur éthique d
3026
d’autre part, la domination de la machine serait
le
résultat fatal du renoncement à la valeur éthique de la science en ta
3027
machine serait le résultat fatal du renoncement à
la
valeur éthique de la science en tant qu’acte (tentation à laquelle no
3028
ultat fatal du renoncement à la valeur éthique de
la
science en tant qu’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder l
3029
’acte (tentation à laquelle nous condamne à céder
l’
expérimentalisme positiviste). Un troisième exemple de tension et d’ac
3030
exemple de tension et d’acte nous est fourni par
l’
homme considéré du point de vue social. D’un côté, nous trouvons l’att
3031
du point de vue social. D’un côté, nous trouvons
l’
attachement de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambian
3032
social. D’un côté, nous trouvons l’attachement de
l’
homme à la terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’hom
3033
un côté, nous trouvons l’attachement de l’homme à
la
terre, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut
3034
s trouvons l’attachement de l’homme à la terre, à
la
famille, à la race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renon
3035
ttachement de l’homme à la terre, à la famille, à
la
race, à l’ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans brise
3036
de l’homme à la terre, à la famille, à la race, à
l’
ambiance sociale. L’homme ne peut pas y renoncer sans briser son resso
3037
e, à la famille, à la race, à l’ambiance sociale.
L’
homme ne peut pas y renoncer sans briser son ressort. Remarquons que c
3038
r son ressort. Remarquons que cet attachement est
la
marque de l’humanité. Mais, d’autre part, l’homme n’existe personnell
3039
. Remarquons que cet attachement est la marque de
l’
humanité. Mais, d’autre part, l’homme n’existe personnellement qu’auta
3040
est la marque de l’humanité. Mais, d’autre part,
l’
homme n’existe personnellement qu’autant qu’il s’affirme en acte. Quan
3041
eur humaine, c’est à une société de personnes que
l’
on pense. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Ori
3042
c’est à une société de personnes que l’on pense.
L’
homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel. Originalité écl
3043
té de personnes que l’on pense. L’homme n’atteint
l’
universel qu’à travers le personnel. Originalité éclatante, inoubliabl
3044
pense. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers
le
personnel. Originalité éclatante, inoubliable, paradoxale, de la soci
3045
riginalité éclatante, inoubliable, paradoxale, de
la
société humaine, qui lui permet de se dépasser elle-même. L’homme con
3046
humaine, qui lui permet de se dépasser elle-même.
L’
homme concret, l’homme vivant, l’homme en acte est l’affirmation d’une
3047
permet de se dépasser elle-même. L’homme concret,
l’
homme vivant, l’homme en acte est l’affirmation d’une tension permanen
3048
asser elle-même. L’homme concret, l’homme vivant,
l’
homme en acte est l’affirmation d’une tension permanente entre ces deu
3049
omme concret, l’homme vivant, l’homme en acte est
l’
affirmation d’une tension permanente entre ces deux pôles de l’amour :
3050
d’une tension permanente entre ces deux pôles de
l’
amour : l’attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l
3051
sion permanente entre ces deux pôles de l’amour :
l’
attachement à la diversité concrète, et l’actualisation de l’universel
3052
entre ces deux pôles de l’amour : l’attachement à
la
diversité concrète, et l’actualisation de l’universel par la charité
3053
amour : l’attachement à la diversité concrète, et
l’
actualisation de l’universel par la charité personnaliste. ⁂ Pour évit
3054
nt à la diversité concrète, et l’actualisation de
l’
universel par la charité personnaliste. ⁂ Pour éviter un malentendu es
3055
é concrète, et l’actualisation de l’universel par
la
charité personnaliste. ⁂ Pour éviter un malentendu essentiel, nous te
3056
tiel, nous tenons à souligner encore en terminant
le
caractère d’instantanéité de l’acte créateur. Nous affirmons ainsi ce
3057
core en terminant le caractère d’instantanéité de
l’
acte créateur. Nous affirmons ainsi ce qui nous paraît spécifique de l
3058
affirmons ainsi ce qui nous paraît spécifique de
l’
effort et de la pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le
3059
i ce qui nous paraît spécifique de l’effort et de
la
pensée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le
3060
t spécifique de l’effort et de la pensée humaine.
La
pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et le plus humain. Mais
3061
e la pensée humaine. La pensée créatrice est donc
l’
acte le plus pur et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos
3062
nsée humaine. La pensée créatrice est donc l’acte
le
plus pur et le plus humain. Mais comment va se présenter à nos yeux c
3063
a pensée créatrice est donc l’acte le plus pur et
le
plus humain. Mais comment va se présenter à nos yeux ce qui n’est pas
3064
présenter à nos yeux ce qui n’est pas immédiat à
l’
acte ? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de t
3065
? Est-ce que nous n’allons pas être amenés à nier
la
réalité de toute médiation ? Assurément l’évidence de l’acte, non seu
3066
à nier la réalité de toute médiation ? Assurément
l’
évidence de l’acte, non seulement prime tout pour nous, mais constitue
3067
ité de toute médiation ? Assurément l’évidence de
l’
acte, non seulement prime tout pour nous, mais constitue, comme nous l
3068
prime tout pour nous, mais constitue, comme nous
l’
avons dit, le point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus
3069
our nous, mais constitue, comme nous l’avons dit,
le
point de départ nécessaire, la supra-rationalité la plus favorable à
3070
nous l’avons dit, le point de départ nécessaire,
la
supra-rationalité la plus favorable à l’édification de toute construc
3071
point de départ nécessaire, la supra-rationalité
la
plus favorable à l’édification de toute construction humaine, même et
3072
essaire, la supra-rationalité la plus favorable à
l’
édification de toute construction humaine, même et surtout rationnelle
3073
elle. Mais si nous rejetons toute médiation entre
l’
acte et ses manifestations humaines, nous ne saurions écarter la réali
3074
manifestations humaines, nous ne saurions écarter
la
réalité des résistances à cette activité. Ce n’est que dans certains
3075
n’est que dans certains domaines très étroits de
la
pensée que ces résistances sont assez nettement brisées pour conférer
3076
nces sont assez nettement brisées pour conférer à
la
création issue de l’acte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs
3077
ment brisées pour conférer à la création issue de
l’
acte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs, les résistances son
3078
cte comme une forme d’éternité. Partout ailleurs,
les
résistances sont étroitement mêlées à toutes les manifestations d’act
3079
les résistances sont étroitement mêlées à toutes
les
manifestations d’activité. La médiation ne se manifeste pour nous que
3080
nt mêlées à toutes les manifestations d’activité.
La
médiation ne se manifeste pour nous que sous forme de résistance. Il
3081
ésistances plus ou moins favorables au ressort de
l’
activité, comme certains climats ou certains pays se prêtent mieux au
3082
mais ce ne sont jamais que des résistances. Entre
les
deux pôles de la tension, il n’y a ni identité, ni égalité, justement
3083
mais que des résistances. Entre les deux pôles de
la
tension, il n’y a ni identité, ni égalité, justement parce que l’un d
3084
ité, justement parce que l’un d’entre eux attache
l’
homme aux autres formes de la vie, tandis que le second affirme la tra
3085
d’entre eux attache l’homme aux autres formes de
la
vie, tandis que le second affirme la transcendance de l’acte. Étant o
3086
es formes de la vie, tandis que le second affirme
la
transcendance de l’acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humai
3087
tandis que le second affirme la transcendance de
l’
acte. Étant orientée vers l’acte, la tension humaine ne saurait donc c
3088
e la transcendance de l’acte. Étant orientée vers
l’
acte, la tension humaine ne saurait donc considérer toute médiation qu
3089
nscendance de l’acte. Étant orientée vers l’acte,
la
tension humaine ne saurait donc considérer toute médiation que comme
3090
istance à son effort immédiat, ou, pour reprendre
l’
expression vigoureuse de Kierkegaard, comme « un attentat métaphysique
3091
rkegaard, comme « un attentat métaphysique contre
l’
éthique ». Il faut, certes, que l’homme trouve des points d’appui et g
3092
physique contre l’éthique ». Il faut, certes, que
l’
homme trouve des points d’appui et garde une participation avec ce qui
3093
ais cette nécessité ne reprend sa valeur que dans
la
tension active dirigée tout entière vers l’affirmation du personnalis
3094
dans la tension active dirigée tout entière vers
l’
affirmation du personnalisme. Dans les divers ordres de l’activité hum
3095
entière vers l’affirmation du personnalisme. Dans
les
divers ordres de l’activité humaine, l’acte instantané ne fera brille
3096
ation du personnalisme. Dans les divers ordres de
l’
activité humaine, l’acte instantané ne fera briller son éclair que bie
3097
me. Dans les divers ordres de l’activité humaine,
l’
acte instantané ne fera briller son éclair que bien rarement. Les conf
3098
ané ne fera briller son éclair que bien rarement.
Les
conflits contre le temps, contre l’espace, contre la matière, qui rep
3099
son éclair que bien rarement. Les conflits contre
le
temps, contre l’espace, contre la matière, qui reprennent ici en tant
3100
en rarement. Les conflits contre le temps, contre
l’
espace, contre la matière, qui reprennent ici en tant que résistance à
3101
conflits contre le temps, contre l’espace, contre
la
matière, qui reprennent ici en tant que résistance à l’effort une sor
3102
ière, qui reprennent ici en tant que résistance à
l’
effort une sorte de réalité indépendante, ne donnent que rarement l’oc
3103
de réalité indépendante, ne donnent que rarement
l’
occasion d’une victoire évidente ; mais dans tous les domaines de l’ac
3104
occasion d’une victoire évidente ; mais dans tous
les
domaines de l’activité humaine la pensée dichotomique maintiendra cet
3105
ictoire évidente ; mais dans tous les domaines de
l’
activité humaine la pensée dichotomique maintiendra cette volonté : li
3106
mais dans tous les domaines de l’activité humaine
la
pensée dichotomique maintiendra cette volonté : libérer la personnali
3107
dichotomique maintiendra cette volonté : libérer
la
personnalité, dégager l’instantanéité de l’acte. 1. Ce qui ne signi
3108
cette volonté : libérer la personnalité, dégager
l’
instantanéité de l’acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que la pe
3109
bérer la personnalité, dégager l’instantanéité de
l’
acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que la pensée doive être sou
3110
e l’acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout que
la
pensée doive être soumise à l’action — bien au contraire ! — mais que
3111
ie pas du tout que la pensée doive être soumise à
l’
action — bien au contraire ! — mais que le risque de penser est actuel
3112
umise à l’action — bien au contraire ! — mais que
le
risque de penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les papier
3113
penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans
les
papiers posthumes d’Arnaud Dandieu quelques lignes qui me paraissent
3114
opres à éclairer ce dernier paragraphe (D. R.). «
Le
seuil qui sépare le prélogique du logique, où est-il donc ? Le point
3115
dernier paragraphe (D. R.). « Le seuil qui sépare
le
prélogique du logique, où est-il donc ? Le point est d’importance car
3116
sépare le prélogique du logique, où est-il donc ?
Le
point est d’importance car il nous éclairera un peu sur la nature int
3117
est d’importance car il nous éclairera un peu sur
la
nature intime de l’acte créateur, dans la mesure où elle est saisissa
3118
il nous éclairera un peu sur la nature intime de
l’
acte créateur, dans la mesure où elle est saisissable. En effet, de to
3119
peu sur la nature intime de l’acte créateur, dans
la
mesure où elle est saisissable. En effet, de tous les seuils irration
3120
mesure où elle est saisissable. En effet, de tous
les
seuils irrationnels que l’homme puisse passer, c’est sans doute le se
3121
le. En effet, de tous les seuils irrationnels que
l’
homme puisse passer, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas la
3122
nnels que l’homme puisse passer, c’est sans doute
le
seul qui ne lui coûte pas la vie. Or, ce seuil, comme le montre clair
3123
er, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas
la
vie. Or, ce seuil, comme le montre clairement M. Lévy-Bruhl, notammen
3124
qui ne lui coûte pas la vie. Or, ce seuil, comme
le
montre clairement M. Lévy-Bruhl, notamment dans la conférence qu’il a
3125
e montre clairement M. Lévy-Bruhl, notamment dans
la
conférence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il le passe chaque
3126
amment dans la conférence qu’il a faite à Oxford,
le
19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il pense, encore que peut-êtr
3127
érence qu’il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il
le
passe chaque fois qu’il pense, encore que peut-être l’acte de penser,
3128
sse chaque fois qu’il pense, encore que peut-être
l’
acte de penser, au sens plein et cartésien du mot, soit infiniment plu
3129
n, il est indispensable de marquer très fortement
l’
influence qu’exerce ce seuil sur toute la vie humaine et, probablement
3130
ortement l’influence qu’exerce ce seuil sur toute
la
vie humaine et, probablement, sur la vie en général. Cela est d’autan
3131
il sur toute la vie humaine et, probablement, sur
la
vie en général. Cela est d’autant plus nécessaire que de même que la
3132
Cela est d’autant plus nécessaire que de même que
la
science a longtemps refusé de faire entrer dans ses constructions le
3133
mps refusé de faire entrer dans ses constructions
le
principe de Carnot, et qu’elle n’a accepté l’irréversibilité qu’il re
3134
ons le principe de Carnot, et qu’elle n’a accepté
l’
irréversibilité qu’il recèle, que pour en tourner l’irrationalité fonc
3135
irréversibilité qu’il recèle, que pour en tourner
l’
irrationalité foncière à l’aide d’une loi statistique, de même la méth
3136
e, que pour en tourner l’irrationalité foncière à
l’
aide d’une loi statistique, de même la méthode sociologique qui a cond
3137
foncière à l’aide d’une loi statistique, de même
la
méthode sociologique qui a conduit à la découverte de la véritable na
3138
, de même la méthode sociologique qui a conduit à
la
découverte de la véritable nature de la mentalité prélogique, hésite
3139
ode sociologique qui a conduit à la découverte de
la
véritable nature de la mentalité prélogique, hésite à faire la part d
3140
conduit à la découverte de la véritable nature de
la
mentalité prélogique, hésite à faire la part de l’orientation humaine
3141
nature de la mentalité prélogique, hésite à faire
la
part de l’orientation humaine qui s’exprime par une affirmation crois
3142
a mentalité prélogique, hésite à faire la part de
l’
orientation humaine qui s’exprime par une affirmation croissante de la
3143
e qui s’exprime par une affirmation croissante de
la
discontinuité explosive sous forme d’individualisation ou de création
3144
de création intellectuelle. Notre science n’est à
l’
aise que dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle mul
3145
llectuelle. Notre science n’est à l’aise que dans
le
continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle multiplie par son p
3146
à l’aise que dans le continu et elle fait surgir
le
discontinu qu’elle multiplie par son progrès même. Elle ne connaît qu
3147
aît que du probable et, en tant qu’acte, elle est
l’
improbabilité essentielle. Paradoxe que M. Meyerson a décrit sous le n
3148
sentielle. Paradoxe que M. Meyerson a décrit sous
le
nom de paradoxe épistémologique. » (Arnaud Dandieu). a. Rougemont
3149
. » (Arnaud Dandieu). a. Rougemont Denis de, «
L’
Acte comme point de départ », Recherches philosophiques, Paris, 1936–1
3150
ons des Clubs de presse (30 janvier 1937)f g
Les
raisons Chacun sait et éprouve chaque jour, que l’état des dépenda
3151
aisons Chacun sait et éprouve chaque jour, que
l’
état des dépendances financières ou des partisanneries politiques qui
3152
ou des partisanneries politiques qui est celui de
la
presse française, rend à peu près impossibles une documentation objec
3153
cumentation objective et une information sincère.
Le
procès de la presse n’est plus à faire. Sa réforme pose tant de probl
3154
bjective et une information sincère. Le procès de
la
presse n’est plus à faire. Sa réforme pose tant de problèmes et entra
3155
nt de problèmes et entraîne de telles incidences (
les
dangers d’une information d’État : Tass ou DNB sont aussi graves que
3156
dre qu’elle ne puisse s’accomplir isolément. Seul
le
redressement radical et général d’un régime économique où règne aujou
3157
néral d’un régime économique où règne aujourd’hui
l’
argent, libérera l’information. Ce n’est qu’en attaquant l’ensemble de
3158
conomique où règne aujourd’hui l’argent, libérera
l’
information. Ce n’est qu’en attaquant l’ensemble des trusts qu’on atte
3159
libérera l’information. Ce n’est qu’en attaquant
l’
ensemble des trusts qu’on atteindra celui des journaux. Le but L
3160
des trusts qu’on atteindra celui des journaux.
Le
but L’objet des « Clubs de presse », en même temps que de préparer
3161
qu’on atteindra celui des journaux. Le but
L’
objet des « Clubs de presse », en même temps que de préparer et d’accé
3162
ournir dès à présent à tous ceux qui en éprouvent
le
pressant besoin, les premiers éléments d’une information honnête, et
3163
onditions et aux méthodes aujourd’hui faussées de
la
grande presse imprimée. Le principe Ce sont les mêmes procédés
3164
urd’hui faussées de la grande presse imprimée.
Le
principe Ce sont les mêmes procédés techniques (imprimerie, grand
3165
grande presse imprimée. Le principe Ce sont
les
mêmes procédés techniques (imprimerie, grand tirage, publicité, centr
3166
ge, publicité, centralisation, etc.) qui ont fait
le
succès de la presse moderne, qui font aujourd’hui son servage. « L’im
3167
, centralisation, etc.) qui ont fait le succès de
la
presse moderne, qui font aujourd’hui son servage. « L’imprimé » qui é
3168
esse moderne, qui font aujourd’hui son servage. «
L’
imprimé » qui était, il y a trente ans, synonyme dans l’opinion popula
3169
imé » qui était, il y a trente ans, synonyme dans
l’
opinion populaire, de vérité, est devenu pour le public, synonyme de m
3170
s l’opinion populaire, de vérité, est devenu pour
le
public, synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant que la question
3171
synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant que
la
question puisse être attaquée et résolue de front — de tourner la dif
3172
se être attaquée et résolue de front — de tourner
la
difficulté en remontant à la source, en renouvelant le mode primitif
3173
e front — de tourner la difficulté en remontant à
la
source, en renouvelant le mode primitif de l’information, l’informati
3174
fficulté en remontant à la source, en renouvelant
le
mode primitif de l’information, l’information directe, personnelle et
3175
t à la source, en renouvelant le mode primitif de
l’
information, l’information directe, personnelle et orale. Déjà aujourd
3176
en renouvelant le mode primitif de l’information,
l’
information directe, personnelle et orale. Déjà aujourd’hui, devant la
3177
e, personnelle et orale. Déjà aujourd’hui, devant
la
carence ou la subversion de l’information officielle, chercher à obte
3178
et orale. Déjà aujourd’hui, devant la carence ou
la
subversion de l’information officielle, chercher à obtenir, par des c
3179
ujourd’hui, devant la carence ou la subversion de
l’
information officielle, chercher à obtenir, par des contacts personnel
3180
ée qui se crée spontanément, d’établir dans toute
la
France, un vaste réseau entre les hommes de bonne volonté. Les org
3181
ablir dans toute la France, un vaste réseau entre
les
hommes de bonne volonté. Les organismes On constitue, dans le p
3182
aste réseau entre les hommes de bonne volonté.
Les
organismes On constitue, dans le plus grand nombre possible de loc
3183
volonté. Les organismes On constitue, dans
le
plus grand nombre possible de localités un « Club de presse ». Les ad
3184
mbre possible de localités un « Club de presse ».
Les
adhérents se réunissent une fois par semaine, pour recevoir et apport
3185
t une fois par semaine, pour recevoir et apporter
les
éléments de cette nouvelle forme d’informations. Le travail est centr
3186
éléments de cette nouvelle forme d’informations.
Le
travail est centralisé par un « Comité central des informations », si
3187
que semaine un bulletin dactylographié condensant
les
résultats acquis. Il s’établit ainsi, en quelque sorte, un double cou
3188
ainsi, en quelque sorte, un double courant entre
la
base et le sommet, qui, après recoupements et vérifications, permet d
3189
quelque sorte, un double courant entre la base et
le
sommet, qui, après recoupements et vérifications, permet d’élaborer u
3190
e matière définitive. Il convient de préciser que
le
bulletin n’est pas distribué. Il est adressé personnellement et confi
3191
ement au président responsable de chaque club qui
le
communique à ses adhérents. Ceux-ci ne sont pas de simples lecteurs p
3192
actifs, qui participent à une œuvre commune, dans
le
cadre du Club privé dont ils acceptent les statuts. Il faut encore aj
3193
e, dans le cadre du Club privé dont ils acceptent
les
statuts. Il faut encore ajouter que le « Comité central d’information
3194
acceptent les statuts. Il faut encore ajouter que
le
« Comité central d’informations » qui rédige le bulletin, n’a pas seu
3195
e le « Comité central d’informations » qui rédige
le
bulletin, n’a pas seulement à sa disposition les renseignements que l
3196
e le bulletin, n’a pas seulement à sa disposition
les
renseignements que lui fournissent les clubs de base. Composé lui-mêm
3197
isposition les renseignements que lui fournissent
les
clubs de base. Composé lui-même de journalistes, d’économistes, de fi
3198
s, de financiers, de militants, il utilise toutes
les
Informations directes dans les agences, les rédactions, le parlement,
3199
il utilise toutes les Informations directes dans
les
agences, les rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux fin
3200
outes les Informations directes dans les agences,
les
rédactions, le parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par
3201
ations directes dans les agences, les rédactions,
le
parlement, les syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de
3202
s dans les agences, les rédactions, le parlement,
les
syndicats, les milieux financiers… Par la diversité de sa composition
3203
ces, les rédactions, le parlement, les syndicats,
les
milieux financiers… Par la diversité de sa composition professionnell
3204
ement, les syndicats, les milieux financiers… Par
la
diversité de sa composition professionnelle, par l’étendue de ses ram
3205
diversité de sa composition professionnelle, par
l’
étendue de ses ramifications, il vise à ne délaisser aucune source, à
3206
e délaisser aucune source, à tenir compte de tous
les
points de vue. Le programme Le bulletin se divise en trois part
3207
rce, à tenir compte de tous les points de vue.
Le
programme Le bulletin se divise en trois parties 1° une partie pol
3208
pte de tous les points de vue. Le programme
Le
bulletin se divise en trois parties 1° une partie politique positive
3209
appréciations, sur chacun des faits importants de
la
semaine. Cette première partie doit donner aux membres des clubs, une
3210
sorte de revue de presse commentée. On y relèvera
les
contradictions et les déformations de la grande presse ou de la press
3211
se commentée. On y relèvera les contradictions et
les
déformations de la grande presse ou de la presse d’opinion, en donnan
3212
elèvera les contradictions et les déformations de
la
grande presse ou de la presse d’opinion, en donnant chaque fois les r
3213
ons et les déformations de la grande presse ou de
la
presse d’opinion, en donnant chaque fois les raisons politiques ou fi
3214
ou de la presse d’opinion, en donnant chaque fois
les
raisons politiques ou financières de telle campagne et aussi de tel s
3215
hérents, des moyens de comprendre et de redresser
la
documentation que continuera à leur fournir la presse. Elle pourrait
3216
er la documentation que continuera à leur fournir
la
presse. Elle pourrait être une sorte d’école permanente des lecteurs
3217
eurs de journaux ; 3° une partie documentaire sur
la
presse. Tout en cherchant à remédier à l’action néfaste de la presse
3218
ire sur la presse. Tout en cherchant à remédier à
l’
action néfaste de la presse imprimée en se plaçant hors de son domaine
3219
out en cherchant à remédier à l’action néfaste de
la
presse imprimée en se plaçant hors de son domaine, les « Clubs » n’ou
3220
resse imprimée en se plaçant hors de son domaine,
les
« Clubs » n’oublient pas que la réforme organique de la presse est le
3221
de son domaine, les « Clubs » n’oublient pas que
la
réforme organique de la presse est le but final. Dans cette partie, o
3222
lubs » n’oublient pas que la réforme organique de
la
presse est le but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit,
3223
ent pas que la réforme organique de la presse est
le
but final. Dans cette partie, on réunira petit à petit, une documenta
3224
nira petit à petit, une documentation précise sur
la
structure et le mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les
3225
it, une documentation précise sur la structure et
le
mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes les modifications da
3226
ation précise sur la structure et le mécanisme de
la
presse. Soit en signalant toutes les modifications dans la commandite
3227
mécanisme de la presse. Soit en signalant toutes
les
modifications dans la commandite, la direction, la tendance, etc. des
3228
. Soit en signalant toutes les modifications dans
la
commandite, la direction, la tendance, etc. des journaux existants ;
3229
lant toutes les modifications dans la commandite,
la
direction, la tendance, etc. des journaux existants ; soit par des ét
3230
s modifications dans la commandite, la direction,
la
tendance, etc. des journaux existants ; soit par des études plus géné
3231
xistants ; soit par des études plus générales sur
les
problèmes financiers, professionnels, législatifs, que pose la réform
3232
financiers, professionnels, législatifs, que pose
la
réforme de la presse. Dès à présent, de tels documents facilitent aux
3233
ofessionnels, législatifs, que pose la réforme de
la
presse. Dès à présent, de tels documents facilitent aux adhérents l’o
3234
ésent, de tels documents facilitent aux adhérents
l’
objet de la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum
3235
els documents facilitent aux adhérents l’objet de
la
partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec le minimum de duperie,
3236
la partie numéro 2 du bulletin : savoir lire avec
le
minimum de duperie, une presse truquée. L’esprit Il est évident
3237
vec le minimum de duperie, une presse truquée.
L’
esprit Il est évident que la portée d’une telle entreprise dépend d
3238
presse truquée. L’esprit Il est évident que
la
portée d’une telle entreprise dépend de la valeur professionnelle et
3239
nt que la portée d’une telle entreprise dépend de
la
valeur professionnelle et morale et de l’honnêteté intellectuelle de
3240
pend de la valeur professionnelle et morale et de
l’
honnêteté intellectuelle de ses réalisateurs. Le côté confidentiel et
3241
e l’honnêteté intellectuelle de ses réalisateurs.
Le
côté confidentiel et privé de la méthode rend la question particulièr
3242
es réalisateurs. Le côté confidentiel et privé de
la
méthode rend la question particulièrement importante. L’expérience se
3243
Le côté confidentiel et privé de la méthode rend
la
question particulièrement importante. L’expérience seule permettra au
3244
ode rend la question particulièrement importante.
L’
expérience seule permettra aux adhérents des clubs de vérifier le séri
3245
ule permettra aux adhérents des clubs de vérifier
le
sérieux et l’indépendance du bulletin. Toutefois les adhérents trouve
3246
aux adhérents des clubs de vérifier le sérieux et
l’
indépendance du bulletin. Toutefois les adhérents trouveront au départ
3247
sérieux et l’indépendance du bulletin. Toutefois
les
adhérents trouveront au départ une première garantie dans les groupem
3248
s trouveront au départ une première garantie dans
les
groupements qui ont pris l’initiative de la création et du fonctionne
3249
emière garantie dans les groupements qui ont pris
l’
initiative de la création et du fonctionnement des clubs de presse. Le
3250
dans les groupements qui ont pris l’initiative de
la
création et du fonctionnement des clubs de presse. Les « Clubs de pre
3251
réation et du fonctionnement des clubs de presse.
Les
« Clubs de presse » sont fondés et dirigés par Denis de Rougemont et
3252
Esprit . Ceux-ci n’entendent nullement impliquer
la
ligne politique propre des mouvements auxquels ils appartiennent, dan
3253
e veut être qu’une œuvre stricte d’information, à
l’
exclusivité de tout commentaire et de tout jugement. Mais ils s’engage
3254
re et de tout jugement. Mais ils s’engagent, dans
les
« clubs de presse », à défendre les principes qui leur sont communs :
3255
ngagent, dans les « clubs de presse », à défendre
les
principes qui leur sont communs : primauté de la personne humaine, re
3256
les principes qui leur sont communs : primauté de
la
personne humaine, respect de la vérité et lutte contre la tyrannie de
3257
uns : primauté de la personne humaine, respect de
la
vérité et lutte contre la tyrannie de l’argent. Louis E. Galey, Jacqu
3258
nne humaine, respect de la vérité et lutte contre
la
tyrannie de l’argent. Louis E. Galey, Jacques Madaule, Jean Maze, R.-
3259
spect de la vérité et lutte contre la tyrannie de
l’
argent. Louis E. Galey, Jacques Madaule, Jean Maze, R.-Philippe Millet
3260
gemont Denis de, « Formons des clubs de presse »,
La
Flèche, Paris, 30 janvier 1937, p. 2. g. Précédé de la notice suivan
3261
che, Paris, 30 janvier 1937, p. 2. g. Précédé de
la
notice suivante : « Nous présentons ci-dessous à tous nos camarades e
3262
ns ci-dessous à tous nos camarades et lecteurs de
La
Flèche le manifeste des clubs de presse en formation. À l’heure où la
3263
ous à tous nos camarades et lecteurs de La Flèche
le
manifeste des clubs de presse en formation. À l’heure où la grande pr
3264
le manifeste des clubs de presse en formation. À
l’
heure où la grande presse française se constitue chaque jour davantage
3265
te des clubs de presse en formation. À l’heure où
la
grande presse française se constitue chaque jour davantage en trusts,
3266
ses mensonges et ses trahisons. Il faut passer à
l’
action. Sur un terrain parfaitement précis et limité, celui de l’infor
3267
n terrain parfaitement précis et limité, celui de
l’
information, nous avons pensé que nous devions collaborer avec des cam
3268
organisations. Ce sera certainement par ailleurs
l’
occasion d’un échange de vues qui ne peut être que fructueux pour tous
3269
tistes ou non frontistes, pour qu’ils comprennent
l’
intérêt exceptionnel que présente la formation des clubs, pour qu’ils
3270
s comprennent l’intérêt exceptionnel que présente
la
formation des clubs, pour qu’ils y collaborent activement, pour que d
3271
calité, si éloignée, si peu importante soit-elle,
le
club de presse dont ils seront les instigateurs devienne rapidement u
3272
ante soit-elle, le club de presse dont ils seront
les
instigateurs devienne rapidement un organisme craint et respecté. À l
3273
nne rapidement un organisme craint et respecté. À
l’
heure où l’Argent-roi investit complètement la presse française, à l’h
3274
ent un organisme craint et respecté. À l’heure où
l’
Argent-roi investit complètement la presse française, à l’heure où Hav
3275
. À l’heure où l’Argent-roi investit complètement
la
presse française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion
3276
-roi investit complètement la presse française, à
l’
heure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par le pa
3277
la presse française, à l’heure où Havas règne, à
l’
heure où la diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio
3278
française, à l’heure où Havas règne, à l’heure où
la
diffusion de la pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais
3279
eure où Havas règne, à l’heure où la diffusion de
la
pensée par le papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, n
3280
règne, à l’heure où la diffusion de la pensée par
le
papier, le film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obl
3281
heure où la diffusion de la pensée par le papier,
le
film et la radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de rev
3282
diffusion de la pensée par le papier, le film et
la
radio n’a jamais été si grande, nous sommes obligés de revenir à une
3283
de revenir à une forme antique de transmission :
l’
information orale. C’est la seule possible aujourd’hui. Camarades, si
3284
ique de transmission : l’information orale. C’est
la
seule possible aujourd’hui. Camarades, si vous voulez savoir, aidez-n
3285
Pour tous renseignements, adressez provisoirement
les
lettres à La Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin
3286
eignements, adressez provisoirement les lettres à
La
Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin la mention :
3287
Flèche, 7, rue de la Michodière, en mettant dans
le
coin la mention : clubs de presse.) »
3288
7, rue de la Michodière, en mettant dans le coin
la
mention : clubs de presse.) »
3289
À qui
la
liberté ? (5 mars 1937)h Tout le monde parle de la culture et de l
3290
iberté ? (5 mars 1937)h Tout le monde parle de
la
culture et de la défense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce q
3291
1937)h Tout le monde parle de la culture et de
la
défense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce que signifie cultu
3292
le monde parle de la culture et de la défense de
la
culture. C’est qu’on ne sait plus ce que signifie culture. C’est que
3293
n ne sait plus ce que signifie culture. C’est que
la
culture est en pleine crise, et que cette crise ne sévit plus seuleme
3294
, et que cette crise ne sévit plus seulement dans
les
élites, mais se manifeste dans la vie publique, et dans les couches p
3295
seulement dans les élites, mais se manifeste dans
la
vie publique, et dans les couches profondes de la nation. Je dis que
3296
, mais se manifeste dans la vie publique, et dans
les
couches profondes de la nation. Je dis que la crise de la culture est
3297
la vie publique, et dans les couches profondes de
la
nation. Je dis que la crise de la culture est dans la rue. Je dis que
3298
ns les couches profondes de la nation. Je dis que
la
crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le tr
3299
es profondes de la nation. Je dis que la crise de
la
culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et q
3300
ation. Je dis que la crise de la culture est dans
la
rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est la politiqu
3301
a crise de la culture est dans la rue. Je dis que
la
culture fait le trottoir. Et que c’est la politique qui s’est chargée
3302
lture est dans la rue. Je dis que la culture fait
le
trottoir. Et que c’est la politique qui s’est chargée de réglementer
3303
dis que la culture fait le trottoir. Et que c’est
la
politique qui s’est chargée de réglementer à sa manière la prostituti
3304
que qui s’est chargée de réglementer à sa manière
la
prostitution des mots-clés, des lieux communs fondamentaux sur lesque
3305
ux communs fondamentaux sur lesquelles s’édifiait
la
culture. M. de la Rocque défend ce qu’il appelle « la primauté de l’e
3306
ulture. M. de la Rocque défend ce qu’il appelle «
la
primauté de l’esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour la défe
3307
a Rocque défend ce qu’il appelle « la primauté de
l’
esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour la défense de la liber
3308
l’esprit ». Il fait placarder des affiches « Pour
la
défense de la liberté ». M. Vaillant-Couturier publie un manifeste in
3309
fait placarder des affiches « Pour la défense de
la
liberté ». M. Vaillant-Couturier publie un manifeste intitulé Au serv
3310
turier publie un manifeste intitulé Au service de
l’
esprit, où il est question à chaque page de défendre la liberté. Dans
3311
rit, où il est question à chaque page de défendre
la
liberté. Dans l’état présent du langage, de la culture, et de la poli
3312
estion à chaque page de défendre la liberté. Dans
l’
état présent du langage, de la culture, et de la politique, on peut êt
3313
re la liberté. Dans l’état présent du langage, de
la
culture, et de la politique, on peut être à peu près certain que ces
3314
s l’état présent du langage, de la culture, et de
la
politique, on peut être à peu près certain que ces deux messieurs déf
3315
rtain que ces deux messieurs défendent en réalité
le
contraire de l’esprit et de la liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent
3316
ux messieurs défendent en réalité le contraire de
l’
esprit et de la liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent l’un et l’autre
3317
fendent en réalité le contraire de l’esprit et de
la
liberté, c’est-à-dire qu’ils défendent l’un et l’autre un régime d’ét
3318
un régime d’étatisme oppressif et de dictature de
l’
économique. Le résultat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et l
3319
atisme oppressif et de dictature de l’économique.
Le
résultat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et l’on en voit dé
3320
ltat de ces pratiques ne se fera pas attendre, et
l’
on en voit déjà les premiers signes : parlez de la liberté, posez-vous
3321
l’on en voit déjà les premiers signes : parlez de
la
liberté, posez-vous en défenseur de cet idéal permanent de la Révolut
3322
posez-vous en défenseur de cet idéal permanent de
la
Révolution humaine, vous passerez bientôt pour fasciste. On dit que l
3323
, vous passerez bientôt pour fasciste. On dit que
les
mots n’ont plus de sens. Ce serait trop beau, ce serait trop facile,
3324
trop beau, ce serait trop facile, ce serait enfin
la
trêve des démagogues. En réalité, les mots prennent tous les sens qu’
3325
serait enfin la trêve des démagogues. En réalité,
les
mots prennent tous les sens qu’on veut dans la bouche des politiciens
3326
es démagogues. En réalité, les mots prennent tous
les
sens qu’on veut dans la bouche des politiciens. Ils prennent de préfé
3327
, les mots prennent tous les sens qu’on veut dans
la
bouche des politiciens. Ils prennent de préférence un sens contraire
3328
ennent de préférence un sens contraire à celui de
l’
usage courant. (Staline dit : « Je ne suis pas un dictateur » ; Mussol
3329
« Je ne suis pas un dictateur » ; Mussolini fait
la
conquête de l’Éthiopie au nom de ce qu’il appelle sa liberté, etc.) M
3330
as un dictateur » ; Mussolini fait la conquête de
l’
Éthiopie au nom de ce qu’il appelle sa liberté, etc.) Mais ils prennen
3331
t aussi toutes sortes de sens intermédiaires dans
la
bouche de nos députés et journalistes, qui flétrissent (à droite) ou
3332
i flétrissent (à droite) ou approuvent (à gauche)
les
lois sociales parce qu’ils les qualifient de socialistes, et qui appr
3333
rouvent (à gauche) les lois sociales parce qu’ils
les
qualifient de socialistes, et qui approuveraient (à droite), ou flétr
3334
ouveraient (à droite), ou flétriraient (à gauche)
les
mêmes lois si on les qualifiait de fascistes. Alors qu’elles sont, en
3335
, ou flétriraient (à gauche) les mêmes lois si on
les
qualifiait de fascistes. Alors qu’elles sont, en fait, l’un et l’autr
3336
s. Alors qu’elles sont, en fait, l’un et l’autre.
La
politique actuelle s’occupe bien moins des faits que des mystiques do
3337
s mots. Ces mots suffirent longtemps à départager
les
opinions réelles : on disait liberté à gauche, patrie et autorité à d
3338
berté à gauche, patrie et autorité à droite. Mais
la
surenchère politicienne en est venue à ce point que, par une double d
3339
à droite ; patrie, autorité et liberté à gauche.
La
politique a prostitué le langage. La culture n’a pas été assez forte
3340
ité et liberté à gauche. La politique a prostitué
le
langage. La culture n’a pas été assez forte pour interdire cette pros
3341
té à gauche. La politique a prostitué le langage.
La
culture n’a pas été assez forte pour interdire cette prostitution. Il
3342
r interdire cette prostitution. Il en résulte que
la
culture qui joue tant sur le sens des mots et sur leur acception comm
3343
n. Il en résulte que la culture qui joue tant sur
le
sens des mots et sur leur acception commune, se trouve ruinée par la
3344
sur leur acception commune, se trouve ruinée par
la
politique. Et que la politique, qui a tourné en mystique, parle pour
3345
ommune, se trouve ruinée par la politique. Et que
la
politique, qui a tourné en mystique, parle pour ne rien dire ou pour
3346
n se demande pourquoi, dans de telles conditions,
l’
on s’obstinerait encore à écrire, à parler, si par hasard on est de bo
3347
n’est pas de problème culturel qui ne dépende de
la
politique. Cela revient à écrire, si l’on me comprend, pour éduquer l
3348
épende de la politique. Cela revient à écrire, si
l’
on me comprend, pour éduquer la méfiance du lecteur. h. Rougemont D
3349
vient à écrire, si l’on me comprend, pour éduquer
la
méfiance du lecteur. h. Rougemont Denis de, « À qui la liberté ? »
3350
nce du lecteur. h. Rougemont Denis de, « À qui
la
liberté ? », À nous la liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
3351
ougemont Denis de, « À qui la liberté ? », À nous
la
liberté, Paris, 5 mars 1937, p. 10.
3352
Romanciers publicitaires ou
la
contagion romanesque (13 mars 1937)i Je n’apprendrai rien à person
3353
Je n’apprendrai rien à personne en affirmant que
le
roman est le plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’entends
3354
rai rien à personne en affirmant que le roman est
le
plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’entends celui qui ex
3355
os genres littéraires, j’entends celui qui exerce
l’
influence la plus directe et la plus intime sur nos mœurs, sur notre v
3356
ttéraires, j’entends celui qui exerce l’influence
la
plus directe et la plus intime sur nos mœurs, sur notre vie privée. S
3357
s celui qui exerce l’influence la plus directe et
la
plus intime sur nos mœurs, sur notre vie privée. Songez aux plus gran
3358
x plus avilies, à ces jeunes gens qui choisissent
le
néant et la folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suici
3359
es, à ces jeunes gens qui choisissent le néant et
la
folie avec Ivan Karamazov, comme d’autres s’étaient suicidés après We
3360
de Balzac ; aux boursiers dont Stendhal enfièvre
l’
ambition ; aux jeunes bourgeois qui se défont à rechercher leur « Temp
3361
à rechercher leur « Temps perdu » ; enfin, à tous
les
adultères que le roman à trois personnages, genre français par excell
3362
« Temps perdu » ; enfin, à tous les adultères que
le
roman à trois personnages, genre français par excellence, a provoqués
3363
excellence, a provoqués et justifiés dans toutes
les
sous-préfectures. Ce pouvoir contagieux est, bien sûr, tout à l’honne
3364
ures. Ce pouvoir contagieux est, bien sûr, tout à
l’
honneur des écrivains qui savent le communiquer à leur œuvre, et des l
3365
en sûr, tout à l’honneur des écrivains qui savent
le
communiquer à leur œuvre, et des lecteurs assez ardents pour le subir
3366
à leur œuvre, et des lecteurs assez ardents pour
le
subir autrement qu’en imagination. Et rien n’est plus légitime, voire
3367
voire désirable, que cette contagion pratique de
l’
art, tant qu’il s’agit véritablement d’art, tant qu’il s’agit, pour un
3368
, tant qu’il s’agit, pour un auteur, d’influencer
le
public par des moyens choisis, et de lui transmettre une certaine vis
3369
onde plus profonde, plus riche et plus vraie, que
la
vision banale de la vie quotidienne. Il est très bon que le romancier
3370
plus riche et plus vraie, que la vision banale de
la
vie quotidienne. Il est très bon que le romancier et ses romans agiss
3371
banale de la vie quotidienne. Il est très bon que
le
romancier et ses romans agissent, de cette manière intime et souterra
3372
ls à dire ? Dans quel sens entendent-ils agir sur
les
mœurs de leurs contemporains ? Ils prétendent faire de pures et simpl
3373
tendent faire de pures et simples descriptions de
la
Vie (avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant que l’œuvre à thèse.
3374
(avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant que
l’
œuvre à thèse. Ils se défendent de toutes leurs forces d’avoir une mét
3375
ndant, leur influence n’est pas moins grande, sur
la
vie privée du lecteur. Ils ne veulent rien dire, mais, pourtant, ils
3376
udrait imposer, se contentent d’un opportunisme à
la
petite semaine, et ménagent les opinions plutôt que les intérêts de l
3377
’un opportunisme à la petite semaine, et ménagent
les
opinions plutôt que les intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme
3378
tite semaine, et ménagent les opinions plutôt que
les
intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme à courte vue caractéris
3379
t opportunisme à courte vue caractérise très bien
le
romancier bourgeois. Refuser toute espèce de thèse, cela signifie sim
3380
hèse, cela signifie simplement ménager et flatter
le
lecteur, la conscience bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de
3381
ignifie simplement ménager et flatter le lecteur,
la
conscience bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de la lectrice,
3382
nce bourgeoise du lecteur, ou plus précisément de
la
lectrice, car en France, paraît-il, ce sont les femmes qui lisent et
3383
de la lectrice, car en France, paraît-il, ce sont
les
femmes qui lisent et qui se passionnent pour les romans. Ainsi, à for
3384
les femmes qui lisent et qui se passionnent pour
les
romans. Ainsi, à force de ménager les préjugés moraux et immoraux, à
3385
onnent pour les romans. Ainsi, à force de ménager
les
préjugés moraux et immoraux, à force de flatter les instincts les plu
3386
s préjugés moraux et immoraux, à force de flatter
les
instincts les plus faciles à flatter, à force de ne vouloir rien affi
3387
aux et immoraux, à force de flatter les instincts
les
plus faciles à flatter, à force de ne vouloir rien affirmer de trop v
3388
e trop réellement révolutionnaire et constructif,
le
« romancier à succès », de nos jours, est devenu un simple reflet de
3389
s », de nos jours, est devenu un simple reflet de
la
conscience bourgeoise moyenne. Il ne fait que traduire les humeurs, l
3390
ience bourgeoise moyenne. Il ne fait que traduire
les
humeurs, les goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible
3391
ise moyenne. Il ne fait que traduire les humeurs,
les
goûts, les craintes et les vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherc
3392
. Il ne fait que traduire les humeurs, les goûts,
les
craintes et les vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à le
3393
traduire les humeurs, les goûts, les craintes et
les
vapeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à les combattre, à l
3394
apeurs du bourgeois sensible, il ne cherche pas à
les
combattre, à les transformer, à les dissiper au nom d’un idéal person
3395
is sensible, il ne cherche pas à les combattre, à
les
transformer, à les dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins enc
3396
cherche pas à les combattre, à les transformer, à
les
dissiper au nom d’un idéal personnel, et moins encore au nom d’un idé
3397
istes — fait de notre romancier, tout simplement,
le
propagandiste des goûts de sa classe. Rien n’est plus dangereusement
3398
u’un écrivain qui n’ose pas affirmer sa tendance.
La
contagion du roman réaliste ou psychologique actuel s’exerce uniqueme
3399
dantes et de leurs coutumes. Il n’est que de voir
l’
importance démesurée que nos romanciers attachent à la description des
3400
portance démesurée que nos romanciers attachent à
la
description des vêtements, des ameublements, des marques d’autos, et
3401
e cigarettes (Paul Reboux) de leurs personnages !
Le
romancier bourgeois qui s’imaginait, naïvement et confortablement, qu
3402
st condamné lui-même, en fait, à ne plus être que
l’
agent de publicité — plus ou moins bénévole — des fournisseurs d’une c
3403
rnisseurs d’une certaine classe. Ce romancier, et
la
culture qu’il représente, on comprend que la jeunesse actuelle ne mar
3404
, et la culture qu’il représente, on comprend que
la
jeunesse actuelle ne marche plus pour les défendre. La crise du livre
3405
rend que la jeunesse actuelle ne marche plus pour
les
défendre. La crise du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord
3406
unesse actuelle ne marche plus pour les défendre.
La
crise du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord la crise du r
3407
du livre, dont tout le monde parle, c’est d’abord
la
crise du roman, et du roman fait à l’usage des bourgeois, de leurs lo
3408
est d’abord la crise du roman, et du roman fait à
l’
usage des bourgeois, de leurs loisirs improductifs. Une telle crise ne
3409
des lois plus ou moins astucieuses. C’est toutes
les
bases de la culture actuelle qui sont en crise. Faites-nous des œuvre
3410
s ou moins astucieuses. C’est toutes les bases de
la
culture actuelle qui sont en crise. Faites-nous des œuvres qui affirm
3411
Rougemont Denis de, « Romanciers publicitaires ou
la
contagion romanesque », À nous la liberté, Paris, 13 mars 1937, p. 10
3412
ublicitaires ou la contagion romanesque », À nous
la
liberté, Paris, 13 mars 1937, p. 10.
3413
n a très vivement critiqué le dernier chapitre de
l’
Histoire de la littérature française de Thibaudetk : celui qui est con
3414
ent critiqué le dernier chapitre de l’Histoire de
la
littérature française de Thibaudetk : celui qui est consacré à l’aprè
3415
rançaise de Thibaudetk : celui qui est consacré à
l’
après-guerre. II est vrai que beaucoup de noms y sont omis, que beauco
3416
petites histoires de leur milieu… »). On a dit :
le
chapitre est bâclé. Je me demande si l’époque méritait mieux. Époque
3417
n a dit : le chapitre est bâclé. Je me demande si
l’
époque méritait mieux. Époque bâclée, elle aussi, littérature bâclée,
3418
e bâclée, elle aussi, littérature bâclée, surtout
la
romanesque. Jamais on ne l’avait vu et constaté aussi nettement qu’à
3419
ature bâclée, surtout la romanesque. Jamais on ne
l’
avait vu et constaté aussi nettement qu’à la lecture de ce bilan désin
3420
on ne l’avait vu et constaté aussi nettement qu’à
la
lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre, la product
3421
a lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de
la
guerre, la production écrite des hommes qui revenaient du front — 20
3422
e ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre,
la
production écrite des hommes qui revenaient du front — 20 à 35 ans —
3423
s — connut un véritable boom commercial. « À nous
la
liberté ! » s’écriait cette génération : elle ignorait apparemment qu
3424
cette génération : elle ignorait apparemment que
la
liberté est une conquête, et non pas une facilité. Tout concourait d’
3425
toute une génération tuée à remplacer. Il y avait
l’
inflation, et la prospérité des nouveaux riches, une avidité de sensat
3426
tion tuée à remplacer. Il y avait l’inflation, et
la
prospérité des nouveaux riches, une avidité de sensations, une libéra
3427
bération érotique, des mécènes américains… Ce fut
la
grande Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de 19
3428
mécènes américains… Ce fut la grande Permission,
la
Permission perpétuelle — jusqu’à la crise de 1930. Il nous en reste u
3429
e Permission, la Permission perpétuelle — jusqu’à
la
crise de 1930. Il nous en reste une génération de gloires rapides et
3430
ampleur, des « noms » qu’un seul livre imposa, et
l’
on acceptait les suivants parce que c’était commode, et parce que les
3431
noms » qu’un seul livre imposa, et l’on acceptait
les
suivants parce que c’était commode, et parce que les critiques sont a
3432
suivants parce que c’était commode, et parce que
les
critiques sont admirablement disciplinés. (D’ailleurs, tous se connai
3433
: auteurs, critiques et éditeurs ; pratiquement,
la
franchise n’est pas possible.) De ces années, et de celles de la cris
3434
est pas possible.) De ces années, et de celles de
la
crise qui les suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plu
3435
ble.) De ces années, et de celles de la crise qui
les
suit, on ne retiendra guère que les bizarreries les plus aiguës : Coc
3436
la crise qui les suit, on ne retiendra guère que
les
bizarreries les plus aiguës : Cocteau, Max Jacob, les premiers surréa
3437
s suit, on ne retiendra guère que les bizarreries
les
plus aiguës : Cocteau, Max Jacob, les premiers surréalistes composero
3438
blement une anthologie de « mineurs » qui prendra
le
charme d’un style, et très vite, une patine rassurante. Quant au roma
3439
, son premier historien, ne tente d’en sauver que
les
plus gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ». Le roman-cycle
3440
en sauver que les plus gros morceaux — au poids —
les
« romans-cycles ». Le roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution qu
3441
gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ».
Le
roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution qu’adoptent naturellemen
3442
ans-cycles ». Le roman-cycle, c’est, semble-t-il,
la
solution qu’adoptent naturellement les écrivains lassés de l’improvis
3443
emble-t-il, la solution qu’adoptent naturellement
les
écrivains lassés de l’improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher
3444
qu’adoptent naturellement les écrivains lassés de
l’
improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher la densité, en profonde
3445
l’improvisation et du bâclé. Au lieu de chercher
la
densité, en profondeur, ils trouvent plus commode de donner en surfac
3446
ndir un personnage jusqu’au type, ils multiplient
les
personnages. Au lieu de marquer d’une empreinte durable un moment don
3447
arquer d’une empreinte durable un moment donné de
l’
histoire sociale, ils s’étalent dans la durée et vagabondent à travers
3448
t donné de l’histoire sociale, ils s’étalent dans
la
durée et vagabondent à travers les générations. Notons qu’ils s’attar
3449
s’étalent dans la durée et vagabondent à travers
les
générations. Notons qu’ils s’attardent presque tous aux générations d
3450
ent presque tous aux générations d’avant-guerre :
le
temps de leur jeunesse, remarque Thibaudet. Et il attribue ce phénomè
3451
. Et il attribue ce phénomène de « refoulement de
la
durée vers l’amont » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à
3452
ue ce phénomène de « refoulement de la durée vers
l’
amont » à l’incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité c
3453
ène de « refoulement de la durée vers l’amont » à
l’
incertitude du lendemain (et du présent), à la nécessité croissante de
3454
» à l’incertitude du lendemain (et du présent), à
la
nécessité croissante de vivre sur ses réserves, enfin à une crise et
3455
s réserves, enfin à une crise et à une carence de
la
création. Malgré ces difficultés, conclut-il, on ne saurait guère do
3456
ultés, conclut-il, on ne saurait guère douter que
le
super-cycle de ces sept romans-cycles (Martin du Gard, Duhamel, Franc
3457
rancis, Lacretelle, Chardonne, Romains, Béhaine),
le
Tour de France des romanciers cyclistes, ne reste un trait capital de
3458
omanciers cyclistes, ne reste un trait capital de
l’
histoire du roman, du paysage, du roman, pour cette tranche de siècle
3459
roman, pour cette tranche de siècle que meublera
la
génération de 1914. Il est caractéristique que le livre de Thibaudet
3460
a génération de 1914. Il est caractéristique que
le
livre de Thibaudet se termine sur une note pessimiste, et sur l’expre
3461
baudet se termine sur une note pessimiste, et sur
l’
expression de « dégradation de la littérature, au sens où les physicie
3462
ssimiste, et sur l’expression de « dégradation de
la
littérature, au sens où les physiciens s’intéressent à la dégradation
3463
on de « dégradation de la littérature, au sens où
les
physiciens s’intéressent à la dégradation de l’énergie ». Mais cette
3464
rature, au sens où les physiciens s’intéressent à
la
dégradation de l’énergie ». Mais cette dégradation littéraire, après
3465
les physiciens s’intéressent à la dégradation de
l’
énergie ». Mais cette dégradation littéraire, après tout, ne fait que
3466
éraire, après tout, ne fait que traduire celle de
la
société. Tous ces romans-cycles sont, en effet, des procès-verbaux de
3467
tion du monde bourgeois : de Proust à Lacretelle,
les
salons se défont, les classes se mêlent, les propriétés sont vendues
3468
s : de Proust à Lacretelle, les salons se défont,
les
classes se mêlent, les propriétés sont vendues aux enchères ou rachet
3469
lle, les salons se défont, les classes se mêlent,
les
propriétés sont vendues aux enchères ou rachetées par une coucherie,
3470
dues aux enchères ou rachetées par une coucherie,
les
fils renient leurs pères, les hommes leur sexe, les personnes leur id
3471
par une coucherie, les fils renient leurs pères,
les
hommes leur sexe, les personnes leur identité. Comment imaginer la na
3472
s fils renient leurs pères, les hommes leur sexe,
les
personnes leur identité. Comment imaginer la naissance, d’une grande
3473
xe, les personnes leur identité. Comment imaginer
la
naissance, d’une grande œuvre romanesque dans un pareil état social ?
3474
uvre romanesque dans un pareil état social ? Tous
les
chefs-d’œuvre du genre, au xixe siècle, étaient issus d’une société
3475
taient issus d’une société solidement établie, où
les
types étaient fixes et stables, et les relations codifiées, tyranniqu
3476
tablie, où les types étaient fixes et stables, et
les
relations codifiées, tyranniques : il y avait encore intérêt à passer
3477
non ce qui s’écroule — et cela ne peut pas donner
les
éléments d’un art, si l’art est une construction. Il semble bien que
3478
cela ne peut pas donner les éléments d’un art, si
l’
art est une construction. Il semble bien que la littérature la plus ré
3479
si l’art est une construction. Il semble bien que
la
littérature la plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes. Les
3480
e construction. Il semble bien que la littérature
la
plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes. Les gros romans soc
3481
plus récente s’oriente déjà vers d’autres formes.
Les
gros romans sociaux de huit-cents pages que nous assènent les Céline,
3482
ans sociaux de huit-cents pages que nous assènent
les
Céline, Aragon ou Plisnier sont bien plus des pamphlets que des roman
3483
etrouvent un public. Il semble, d’autre part, que
les
documentaires entremêlés de réflexions et de jugements personnels, co
3484
ons et de jugements personnels, comme par exemple
les
derniers livres d’Henri Petit et de Marius Richard soient promis à de
3485
s profonds. Nous avons à refaire un inventaire de
l’
homme, préparation modeste et nécessaire à une littérature vraiment pe
3486
e, « Vers une littérature personnaliste », À nous
la
liberté, Paris, 20 mars 1937, p. 10. k. Rougemont a rendu compte de
3487
C’est jeune (10 avril 1937)l
L’
ironie est parfois la meilleure des prudences. C’est la conclusion que
3488
st jeune (10 avril 1937)l L’ironie est parfois
la
meilleure des prudences. C’est la conclusion que je tire d’un article
3489
nie est parfois la meilleure des prudences. C’est
la
conclusion que je tire d’un article de M. Vandérem (dans Candide) où
3490
ire d’un article de M. Vandérem (dans Candide) où
la
critique des critiques actuels que j’avais esquissée, ici même, se tr
3491
à mon aise et que je néglige un peu cavalièrement
les
contingences. Si j’étais plus avancé dans la vie — écrit-il —, je me
3492
nt les contingences. Si j’étais plus avancé dans
la
vie — écrit-il —, je me rendrais compte de tous les aléas que représe
3493
a vie — écrit-il —, je me rendrais compte de tous
les
aléas que représenteraient pour la critique un chambardement de ce ge
3494
ompte de tous les aléas que représenteraient pour
la
critique un chambardement de ce genre. Ce serait toute une série de n
3495
demandant des mois. On ne saurait mieux dire que
le
mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si l’on en doutait encore,
3496
rait mieux dire que le mal est aussi grave que je
l’
indiquais. Et si l’on en doutait encore, c’est M. Fernandez qui me fou
3497
le mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si
l’
on en doutait encore, c’est M. Fernandez qui me fournirait le plus sav
3498
tait encore, c’est M. Fernandez qui me fournirait
le
plus savoureux argument. Dans sa chronique littéraire de Marianne, il
3499
rce au public ». Car, précisait-il, « on sait que
la
force, en ces matières, cela veut dire surtout la chance et la tactiq
3500
la force, en ces matières, cela veut dire surtout
la
chance et la tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est sup
3501
ces matières, cela veut dire surtout la chance et
la
tactique, il me semble que le talent de M. Amoux est supérieur à sa t
3502
urtout la chance et la tactique, il me semble que
le
talent de M. Amoux est supérieur à sa tactique ». Faut-il être jeune,
3503
t-il être jeune, tout de même, et peu avancé dans
la
vie, pour s’ébahir, comme je le fais, d’une… « constatation » de cet
3504
t peu avancé dans la vie, pour s’ébahir, comme je
le
fais, d’une… « constatation » de cet ordre ! Comprenez-vous ce qu’ell
3505
lle déclare avec tant de naturel ? Sentez-vous, à
la
lire, quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétude,
3506
la lire, quelque chose qui s’agite en vous, entre
le
rire, l’inquiétude, et le dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. F
3507
quelque chose qui s’agite en vous, entre le rire,
l’
inquiétude, et le dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez,
3508
s’agite en vous, entre le rire, l’inquiétude, et
le
dégoût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez, qu’en pensait-il
3509
e œuvre, de croire qu’on a quelque chose à dire ;
le
but de l’écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public. Et cela d
3510
e croire qu’on a quelque chose à dire ; le but de
l’
écrivain, c’est de s’imposer avec force au Public. Et cela demande de
3511
’imposer avec force au Public. Et cela demande de
la
tactique ! Je le vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique la tacti
3512
ce au Public. Et cela demande de la tactique ! Je
le
vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique la tactique. En quoi cela
3513
Je le vois bien. Je supplie donc qu’on m’explique
la
tactique. En quoi cela peut-il consister ? Aucune idée. L’angoisse m’
3514
ue. En quoi cela peut-il consister ? Aucune idée.
L’
angoisse m’étreint. Je suis comme un enfant devant le mystère de « la
3515
ngoisse m’étreint. Je suis comme un enfant devant
le
mystère de « la vie… ». Profitant de mon innocence, que j’espère d’ai
3516
t. Je suis comme un enfant devant le mystère de «
la
vie… ». Profitant de mon innocence, que j’espère d’ailleurs provisoir
3517
ieillirai — je voudrais dire ceci à M. Vandérem :
la
« réinstallation complète » dont nous parlions ne demandera pas seule
3518
chose de beaucoup plus dangereux et difficile que
l’
avancement dans la vie : quelque chose que nous autres appelons, dans
3519
plus dangereux et difficile que l’avancement dans
la
vie : quelque chose que nous autres appelons, dans ce journal, une ré
3520
appelons, dans ce journal, une révolution. Quand
les
clercs en sont arrivés — et l’élite — à subordonner leur mission à la
3521
révolution. Quand les clercs en sont arrivés — et
l’
élite — à subordonner leur mission à la « tactique » du succès commerc
3522
rivés — et l’élite — à subordonner leur mission à
la
« tactique » du succès commercial, c’est le moment de fourrer les pie
3523
ion à la « tactique » du succès commercial, c’est
le
moment de fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser les convive
3524
du succès commercial, c’est le moment de fourrer
les
pieds dans le plat et d’éclabousser les convives. Nous ferons notre p
3525
ercial, c’est le moment de fourrer les pieds dans
le
plat et d’éclabousser les convives. Nous ferons notre pain nous-mêmes
3526
e fourrer les pieds dans le plat et d’éclabousser
les
convives. Nous ferons notre pain nous-mêmes. l. Rougemont Denis de
3527
l. Rougemont Denis de, « C’est jeune », À nous
la
liberté, Paris, 10 avril 1937, p. 10.
3528
ecret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pas
l’
air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris q
3529
s m’avaient appris que cette ville, au moins pour
la
jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concie
3530
ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est
la
ville des gérants ignobles et des concierges, des lieux-sombres-et-po
3531
des lieux-sombres-et-populeux où il faut pénétrer
l’
âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « A
3532
es-et-populeux où il faut pénétrer l’âme basse et
la
petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en »
3533
aut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à
la
main. Tant d’autres disent : « Allons-nous-en », et restent faute d’i
3534
. Et pourtant il suffit de bien peu pour partir :
la
France a des milliers de maisons vides. Dites autour de vous que vous
3535
pays. Il est très pauvre, sec et lumineux. Toutes
les
nuances du gris, herbes, pierres, oliviers, et quelques touches de ve
3536
les premières pentes des Cévennes, où commencent
les
châtaigneraies. Au sud, on voit un coin de plaine entre des collines
3537
vettes étagées, quelques cyprès en silhouette sur
les
crêtes, et des toits de ce rose émouvant des tuiles romaines sous un
3538
ciel doux. Au nord, derrière notre maison, c’est
le
rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très
3539
Au nord, derrière notre maison, c’est le rocher,
la
montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux
3540
otre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée.
La
maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux murs de gros moello
3541
revêtus. Il y a trois pièces au premier étage, où
l’
on entre de plain-pied par-derrière. Au-dessous, c’est une grande remi
3542
grande remise. Au second quatre petites chambres.
Le
tout encombré de fauteuils, de chaises de velours, tables rondes et o
3543
uge. La plupart des fenêtres donnent au midi dans
le
branchage bleu d’un tilleul. Au bord de la terrasse, une fontaine abo
3544
i dans le branchage bleu d’un tilleul. Au bord de
la
terrasse, une fontaine abondante coule dans un fort grand bassin rect
3545
fort grand bassin rectangulaire aux eaux sombres.
La
maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmier
3546
re aux eaux sombres. La maison du jardinier ferme
la
cour sur la droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute
3547
sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur
la
droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute aussi, blan
3548
anchie, presque sans fenêtres. Un voile vert clôt
la
porte d’entrée, où l’on accède par quelques marches et un balcon de p
3549
enêtres. Un voile vert clôt la porte d’entrée, où
l’
on accède par quelques marches et un balcon de pierre. L’on descend pa
3550
cède par quelques marches et un balcon de pierre.
L’
on descend par d’étroits escaliers aux quatre autres terrasses du jard
3551
ux quatre autres terrasses du jardin, étagées sur
le
versant nord d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droi
3552
d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur
la
droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques touffues d’oli
3553
mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que
le
versant sud, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’horizon
3554
d, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme
l’
horizon immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la
3555
immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur
la
fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invi
3556
Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de
la
vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, mas
3557
nous avons une échappée sur la fin de la vallée,
la
rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied
3558
e échappée sur la fin de la vallée, la rivière et
la
plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied des rochers,
3559
sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine.
La
petite ville reste invisible, massée au pied des rochers, en retrait
3560
gare, un coup de trompe d’auto, des cris de coq.
L’
odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous
3561
des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de
la
cour, et remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les laurier
3562
deur du raisin foulé monte de la cour, et remplit
l’
ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jau
3563
é monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous
le
tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jaune brille au bord d
3564
remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et
les
lauriers. Un grand vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de
3565
rs. Un grand vase jaune brille au bord du bassin.
Le
reflet de l’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la ch
3566
vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de
l’
eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’éc
3567
sin. Le reflet de l’eau tremble au plafond et sur
les
murs verdâtres de la chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice
3568
u tremble au plafond et sur les murs verdâtres de
la
chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice de rentrée terminé :
3569
on petit exercice de rentrée terminé : « Décrivez
la
maison de vos vacances… » Ajoutons que le jardinier s’appelle Simard,
3570
écrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons que
le
jardinier s’appelle Simard, sa femme Marguerite, son chien basset Per
3571
lle sorte qu’on puisse y travailler. Nous faisons
l’
inventaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de chacune des pi
3572
ravailler. Nous faisons l’inventaire minutieux et
le
plan d’arrangement actuel de chacune des pièces du premier, avant de
3573
actuel de chacune des pièces du premier, avant de
les
vider et de transporter leur contenu à l’étage supérieur. 23 septembr
3574
ant de les vider et de transporter leur contenu à
l’
étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d’un
3575
à l’étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant
les
murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a ét
3576
s murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair.
Le
carreau rouge a été débarrassé du tapis. J’ai dressé ma table sur des
3577
et des chaises de paille trouvées dans un coin de
la
remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminé
3578
de paille trouvées dans un coin de la remise, où
les
chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux
3579
ans un coin de la remise, où les chaises brodées,
les
guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensé
3580
remise, où les chaises brodées, les guéridons et
le
dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensées — ont été les
3581
ée — vingt-deux pièces dûment recensées — ont été
les
remplacer. Seul vestige des splendeurs bourgeoises de ce salon : un l
3582
e. Mais on va pouvoir respirer. 25 septembre 1934
La
traduction d’un considérable ouvrage allemand nous permettra de passe
3583
ois mois ou quatre sans trop de soucis matériels.
La
vie paraît assez peu chère. Mais bien trop chère encore pour les gens
3584
assez peu chère. Mais bien trop chère encore pour
les
gens du pays. Les petites entreprises qui leur donnaient du travail f
3585
ais bien trop chère encore pour les gens du pays.
Les
petites entreprises qui leur donnaient du travail font faillite l’une
3586
r : nos voisins n’ont sur leur table, quand on va
les
voir à midi, que des châtaignes, des olives, des radis et quelques lé
3587
considèrent comme des privilégiés, cela se sent à
la
manière dont ils nous parlent de quelques familles des environs qui n
3588
t de quelques familles des environs qui n’ont pas
la
ressource d’un jardin, ou qui ne « savent pas y faire ». (Légère nuan
3589
iale chez Simard). Nos hôtes nous avaient signalé
la
famille d’un mineur retraité, dont la femme fait des journées. Consid
3590
ent signalé la famille d’un mineur retraité, dont
la
femme fait des journées. Considérant que richesse oblige — car je gag
3591
eu près 1.000 francs par mois — nous avons engagé
la
mère Calixte pour donner un coup de main le matin et faire les lessiv
3592
ngagé la mère Calixte pour donner un coup de main
le
matin et faire les lessives. C’est une toute petite vieille noueuse,
3593
xte pour donner un coup de main le matin et faire
les
lessives. C’est une toute petite vieille noueuse, à la sagesse senten
3594
ssives. C’est une toute petite vieille noueuse, à
la
sagesse sentencieuse et imagée. Étonnamment active. Bonne protestante
3595
nnamment active. Bonne protestante et qui tient à
le
dire. Sa cordialité demeure digne, trait notable à partir des Cévenne
3596
ou de force, c’est certain, nous saurons tout sur
les
gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une p
3597
c’est certain, nous saurons tout sur les gens de
la
ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi de roc
3598
de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à
la
base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouc
3599
te cité tassée à la base d’une paroi de rocher et
le
long d’une rivière rapide qui débouche d’une gorge étroite, cité coul
3600
paraît en ruine, prouve sa vie par ses odeurs et
la
saleté de ses ruelles. Un ruisseau coule au milieu du pavé, charriant
3601
arriant des ordures, des papiers, du sang près de
la
boucherie, du lait verdi. C’est à peine si l’on peut marcher à pied s
3602
de la boucherie, du lait verdi. C’est à peine si
l’
on peut marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils,
3603
’est à peine si l’on peut marcher à pied sec dans
les
passages étroits. Sur les seuils, des groupes de femmes en noir jacas
3604
marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur
les
seuils, des groupes de femmes en noir jacassent pendant des heures. D
3605
enfants en sarraus noirs jouent au football dans
le
ruisseau avec un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits
3606
it beau et fin mais incroyablement crasseux. Vers
la
gare, il y a bien un parc municipal, le jardin d’un couvent désaffect
3607
eux. Vers la gare, il y a bien un parc municipal,
le
jardin d’un couvent désaffecté, mais je n’y vois jamais que des vieil
3608
s jamais que des vieillards en pantoufles. Devant
le
parc, un mail couvert d’une épaisse couche de poussière : là, de nouv
3609
upçon qui m’est venu en maintes autres régions de
la
France : les provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssen
3610
est venu en maintes autres régions de la France :
les
provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssent la couleur
3611
aux ignorent obstinément, peut-être même haïssent
la
couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir.
3612
nément, peut-être même haïssent la couleur verte,
le
soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J
3613
t-être même haïssent la couleur verte, le soleil,
la
nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe au
3614
haïssent la couleur verte, le soleil, la nature,
la
propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils
3615
te, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment
le
noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils s’arrangent pour vivre p
3616
aussi qu’ils s’arrangent pour vivre plus mal que
la
population des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie sain
3617
e la population des faubourgs des grandes villes.
Le
goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que da
3618
on des faubourgs des grandes villes. Le goût de «
la
vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banli
3619
goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne
le
trouverez que dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé
3620
» et du grand air, vous ne le trouverez que dans
la
« banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé d’URSS, et récemment.
3621
dit qu’ici trois maisons seulement, sur 200, ont
l’
eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule
3622
s maisons seulement, sur 200, ont l’eau courante.
Les
femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la
3623
’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à
la
fontaine qui coule son filet sur la grande place, juste à côté de la
3624
des cruches à la fontaine qui coule son filet sur
la
grande place, juste à côté de la pissotière et de l’arrêt des autocar
3625
le son filet sur la grande place, juste à côté de
la
pissotière et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire…
3626
grande place, juste à côté de la pissotière et de
l’
arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire… 8 octobre 1934 Du r
3627
et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut
le
dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de la raison. Je vois la misèr
3628
peut le dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de
la
raison. Je vois la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les
3629
obre 1934 Du rôle pratique de la raison. Je vois
la
misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les détruit. Je vois ce
3630
la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui
les
détruit. Je vois ces enfants sales abandonnés par leurs parents aux h
3631
sales abandonnés par leurs parents aux hasards de
la
rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’
3632
ts aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de
la
famille, mais aussi aux hasards de l’éducation primaire, bienfaisante
3633
ien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de
l’
éducation primaire, bienfaisante en principe il est vrai, mais tristem
3634
te, étroite, appauvrissante en fait. Je vois tous
les
espoirs et toutes les « assurances » de cette population balayée péri
3635
sante en fait. Je vois tous les espoirs et toutes
les
« assurances » de cette population balayée périodiquement par la fail
3636
» de cette population balayée périodiquement par
la
faillite des entreprises où elle travaille, ou par quelque décret d’É
3637
travaille, ou par quelque décret d’État. Je vois
le
chômage s’étendre et s’installer, comme se sont installés dans ces vi
3638
stallés dans ces villages malsains et mal soignés
la
tuberculose, l’alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’au
3639
villages malsains et mal soignés la tuberculose,
l’
alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en par
3640
ns et mal soignés la tuberculose, l’alcoolisme et
la
misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant la feuil
3641
ditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant
la
feuille locale, qu’il naît encore pas mal d’enfants dans ces foyers q
3642
’enfants dans ces foyers que tout menace. Faisons
la
part des « accidents », des « imprudences ». Il reste encore une marg
3643
des risques, de confiance obscurément accordée à
l’
instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malg
3644
onfiance obscurément accordée à l’instinct ou à «
la
Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant
3645
ément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à
la
solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici
3646
l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de
l’
espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « raiso
3647
èce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici
le
peuple « raisonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’Europ
3648
sonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de
l’
Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bourre
3649
nne en exemple aux barbares de l’Europe centrale.
Le
peuple qui sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine e
3650
uple qui sait calculer, faire son budget, bourrer
le
bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chos
3651
re son budget, bourrer le bas de laine et nourrir
la
bouteille aux pièces de dix sous. Une chose est claire : faire des en
3652
s. Une chose est claire : faire des enfants, dans
les
conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique.
3653
ants, dans les conditions actuelles, c’est défier
le
bon sens et la raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir
3654
conditions actuelles, c’est défier le bon sens et
la
raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir vague et profon
3655
à quelque espoir vague et profond. Or tout ce que
l’
État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridi
3656
profond. Or tout ce que l’État nous apprend, par
le
moyen de l’école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre
3657
tout ce que l’État nous apprend, par le moyen de
l’
école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre d’espoirs. Q
3658
ruine ce genre d’espoirs. Qui voudrait condamner
l’
usage pratique de la raison ? Simplement je constate qu’en fait, et da
3659
poirs. Qui voudrait condamner l’usage pratique de
la
raison ? Simplement je constate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il
3660
nstate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il est,
la
morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que
3661
s ce pays tel qu’il est, la morale rationnelle et
les
mesures qu’elle propose, ce n’est guère que le rêve des vieux célibat
3662
t les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que
le
rêve des vieux célibataires assez fortunés, ou ascètes. Ceux qui n’on
3663
nt plus besoin de calculer, ceux-là calculent. Et
les
autres acceptent leurs risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malg
3664
risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malgré
l’
État laïque qui leur conseille plutôt l’épargne. 15 octobre 1934 On a
3665
e, malgré l’État laïque qui leur conseille plutôt
l’
épargne. 15 octobre 1934 On a terminé les vendanges, et la récolte des
3666
le plutôt l’épargne. 15 octobre 1934 On a terminé
les
vendanges, et la récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver appara
3667
e. 15 octobre 1934 On a terminé les vendanges, et
la
récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus
3668
é les vendanges, et la récolte des figues d’été. (
Les
figues d’hiver apparaissent déjà, plus petites et toujours vertes ; o
3669
ent déjà, plus petites et toujours vertes ; on ne
les
mange pas). Simard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la co
3670
mard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de
la
colline du sud, où nous pourrons acheter une provision d’« œillades »
3671
ommes allés hier au soir. Des hauteurs, on voyait
la
plaine rose et violacée entre des monticules pointus tout frisés d’ol
3672
sés d’oliviers, un paysage de primitifs italiens.
Le
mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nou
3673
paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de
la
colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis
3674
taliens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans
l’
ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur la terrasse, au p
3675
re, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur
la
terrasse, au pied d’un grand micocoulier. Bientôt un chien furieux su
3676
d micocoulier. Bientôt un chien furieux surgit de
la
maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est la propriétaire, Mada
3677
a maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est
la
propriétaire, Madame Turc. Elle nous fait entrer. Pour la vente du ra
3678
iétaire, Madame Turc. Elle nous fait entrer. Pour
la
vente du raisin, il faut attendre sa fille qui va rentrer des champs,
3679
va rentrer des champs, où elle travaille jusqu’à
la
nuit tombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais la fermière n
3680
ombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme mais
la
fermière nous reçoit comme une « dame », ou plutôt un peu mieux, avec
3681
de réserve et d’attentions. On parle du domaine.
Les
deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont u
3682
’attentions. On parle du domaine. Les deux femmes
le
dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine
3683
omaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis
la
mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il para
3684
a mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec
les
ouvriers. Il paraît qu’on en trouve de moins en moins. — « Mais, lui
3685
rouve de moins en moins. — « Mais, lui dis-je, et
les
chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a 400 à A ? » La mère, vivement : «
3686
es chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a 400 à A ? »
La
mère, vivement : « Jamais je n’ai engagé de chômeurs, Monsieur, c’est
3687
ur moi-même, Madame… » Elle sourit à son tour, de
l’
air de dire : Oh, vous, ce n’est pas la même chose. Elle a sans doute
3688
n tour, de l’air de dire : Oh, vous, ce n’est pas
la
même chose. Elle a sans doute entendu parler de nous. Rien à faire :
3689
de nous. Rien à faire : je suis un « monsieur ».
La
fille rentre : une forte femme, environ 35 ans, un peu masculine. Ell
3690
ron 35 ans, un peu masculine. Elle nous conduit à
la
chambre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : « C’
3691
bre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait
la
pesée : « C’est pour qui, Monsieur, sans indiscrétion ? » Je dis mon
3692
re auxquelles je collabore, en effet. — Vous avez
le
temps de lire beaucoup ? — Oh, on le prend. Comme nous ne voyons jama
3693
— Vous avez le temps de lire beaucoup ? — Oh, on
le
prend. Comme nous ne voyons jamais personne… (En France, cela étonne.
3694
ations. Leur niveau de culture, fort au-dessus de
la
moyenne, ne m’étonne guère, s’agissant de protestantes. Ce ne sont pa
3695
al d’exception. Combien y a-t-il de classes entre
la
bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’opposition que veulent v
3696
-il de classes entre la bourgeoisie des villes et
le
prolétariat ? L’opposition que veulent voir les marxistes entre bourg
3697
tre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ?
L’
opposition que veulent voir les marxistes entre bourgeois, ou maîtres,
3698
et le prolétariat ? L’opposition que veulent voir
les
marxistes entre bourgeois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs,
3699
ois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs, je
la
trouve fausse dans tous les cas concrets, dès que je sors des très gr
3700
ires ou serviteurs, je la trouve fausse dans tous
les
cas concrets, dès que je sors des très grandes villes et de leur cari
3701
illes et de leur caricature de société. — Simard,
le
jardinier, est à demi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé
3702
ayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on
le
lui dise. Il s’estime fort au-dessus d’un mineur retraité, par exempl
3703
fort au-dessus d’un mineur retraité, par exemple.
Les
instituteurs d’A… ? Ils sont du peuple. Oui, mais bourgeois par leur
3704
uple. Oui, mais bourgeois par leur profession. Et
les
Calixte ? Prolétaires sans doute, mais d’une tout autre espèce, on di
3705
autre espèce, on dirait même d’une autre race que
les
métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le mar
3706
d’une autre race que les métayers catholiques de
la
montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’u
3707
oliques de la montagne qu’on voit venir à A… pour
le
marché. Et très conscients d’une supériorité qu’ils ne peuvent attrib
3708
ion. En vérité, ce qui compte dans ce pays, c’est
la
religion — celle des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et le mé
3709
religion — celle des ancêtres, tout au moins ! —
l’
éducation et le métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches,
3710
le des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et
le
métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches, des différences
3711
différences et des affinités, au moins autant que
les
conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de c
3712
les conditions économiques. On ne comprend rien à
la
réalité sociale de ce canton si l’on fait abstraction de tout cela do
3713
omprend rien à la réalité sociale de ce canton si
l’
on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, justement, se doit
3714
canton si l’on fait abstraction de tout cela dont
le
marxisme, justement, se doit de ne pas tenir compte. Un communiste tr
3715
it de ne pas tenir compte. Un communiste traitera
les
dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de stati
3716
a les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit.
Le
marxisme part de statistiques et de relations numériques (salaires, p
3717
stime donc scientifique. Il ne part pas de ce que
les
hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur é
3718
part pas de ce que les hommes veulent être, ni de
la
conscience globale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le prin
3719
lobale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant
le
principal, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle le jeu des
3720
l, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle
le
jeu des relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme t
3721
est ce qui règle le jeu des relations humaines et
les
opinions politiques). Le marxisme traite tout cela de nuances vaines,
3722
s relations humaines et les opinions politiques).
Le
marxisme traite tout cela de nuances vaines, d’illusions, voire de «
3723
ns, voire de « mystification ». Il part de ce que
les
hommes sont malgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la St
3724
lgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de
la
Statistique. Et il prétend fonder là-dessus non seulement des mesures
3725
morale, un art et une métaphysique ! Problème de
la
politique actuelle : sera-t-elle l’affaire du meilleur statisticien,
3726
! Problème de la politique actuelle : sera-t-elle
l’
affaire du meilleur statisticien, ou au contraire de l’homme le plus h
3727
aire du meilleur statisticien, ou au contraire de
l’
homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle
3728
meilleur statisticien, ou au contraire de l’homme
le
plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle est véc
3729
e l’homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur
la
réalité telle qu’elle est vécue et voulue par les hommes réels et con
3730
la réalité telle qu’elle est vécue et voulue par
les
hommes réels et concrets, ou bien sur la réalité telle qu’elle est ch
3731
lue par les hommes réels et concrets, ou bien sur
la
réalité telle qu’elle est chiffrable, inévitable, impersonnelle ? 2 n
3732
ersonnelle ? 2 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé
la
tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la p
3733
2 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche de
la
journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâ
3734
rminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans
la
chambre dont je vois la porte entrebâillée. Une dernière bûche fume,
3735
rnée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois
la
porte entrebâillée. Une dernière bûche fume, il fait presque froid. D
3736
e, il fait presque froid. Dans ce silence vide de
la
nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts
3737
a nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé,
les
yeux bien ouverts, l’esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veil
3738
voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts,
l’
esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veillée trop lucide peut-ê
3739
solitaire, veillée trop lucide peut-être, puisque
le
monde n’y porte plus d’ombres. Je me souviens de ces nuits de Paris,
3740
ces veillées fiévreuses, assiégées. Est-ce que je
les
regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pa
3741
ssiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-ce que
l’
heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des ma
3742
st-ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de
la
nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nos
3743
e les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où
l’
on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nostalgies. ?
3744
de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours
l’
heure des mauvaises nostalgies. ? Qui pourrait nous écrire une histoir
3745
urrait nous écrire une histoire des inventions de
l’
insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissance
3746
de l’insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement
l’
histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questi
3747
? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de
la
naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates
3748
lement l’histoire de la naissance de nos démons ?
La
nuit ne pose pas de questions immédiates. C’est pourquoi, dans cette
3749
is sans prochain, à cette heure ou mes frères (?)
les
hommes sont plus éloignés que jamais ? « La nuit est faite pour dormi
3750
(?) les hommes sont plus éloignés que jamais ? «
La
nuit est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ordre qui m’a
3751
est faite pour dormir », me disait un gardien de
l’
ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d
3752
ait un gardien de l’ordre qui m’avait surpris sur
les
quais de la Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux noctu
3753
n de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de
la
Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux nocturnes. Ma pol
3754
e opposerais-je, quelle arrière-pensée rode ici ?
La
mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères préc
3755
? La mauvaise habitude de penser « librement » ?
Le
goût des chimères précises ? 10 novembre 1934 Observations nouvelles
3756
ses ? 10 novembre 1934 Observations nouvelles sur
les
gens. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a la grip
3757
servations nouvelles sur les gens. — Je vais chez
les
Calixte. On nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisin
3758
ns. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que
la
mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Ell
3759
ais chez les Calixte. On nous a dit que la mère a
la
grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine. Elles se plai
3760
n nous a dit que la mère a la grippe. Je trouve à
la
cuisine la fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le four
3761
t que la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine
la
fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le fourneau est ro
3762
ille et une voisine. Elles se plaignent du froid.
Le
fourneau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le
3763
e plaignent du froid. Le fourneau est rouge, mais
la
porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis
3764
ge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient
le
vent le plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longt
3765
la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent
le
plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longtemps ava
3766
es siècles, et en tout cas depuis longtemps avant
la
construction de cette maison… On n’y avait pas pensé ? Je passe au fo
3767
ambre obscure mais qui me paraît propre et sobre.
La
mère Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les p
3768
e Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur
le
ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je
3769
st au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre,
les
pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je crois bien s
3770
ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur
les
épaules, et je crois bien sa blouse noire aussi. Elle me dit qu’elle
3771
assez mal. On devait lui retirer son linge toutes
les
deux heures. Quand elle sortait sa main du lit, cela fumait. « Vous a
3772
it sa main du lit, cela fumait. « Vous avez eu de
la
fièvre ! » Elle ne sait pas. Elle ne veut pas de médecin. Sa fille di
3773
fille dit : « Elle ne voulait même plus toucher à
la
viande, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon r
3774
r à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire que
la
viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du poule
3775
oire que la viande soit un si bon remède comme on
le
dit. Je lui ai fait du poulet, elle n’y avait pas goût. Alors j’ai pe
3776
lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de
l’
avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour le
3777
fait de l’avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai que
la
viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire u
3778
Ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour
les
malades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour r
3779
ades. » Elle accepte de venir faire une lessive à
la
maison pour remplacer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre le
3780
acer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre
le
linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce.
3781
de corde pour étendre le linge ; elle imagine de
le
mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont pl
3782
e mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous
les
mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les récolter. « Voy
3783
mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va
les
récolter. « Voyez-vous ! c’est qu’il a fait un vent cette nuit ! » 11
3784
re générale, ils ne sont pas conscients de porter
la
responsabilité des accidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans
3785
ccidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans
le
détail. C’est assez sage dans l’ensemble. Ils seraient moins pauvres,
3786
peut agacer dans le détail. C’est assez sage dans
l’
ensemble. Ils seraient moins pauvres, moins malades, etc., s’ils étaie
3787
’ils étaient plus « pratiques » comme on dit dans
la
bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple so
3788
pratiques » comme on dit dans la bourgeoisie — où
l’
on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adro
3789
a bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que
les
gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouillard
3790
des états parce qu’ils ont cassé deux assiettes.
La
mère Calixte, qui casse tout ce que l’on veut, a coutume de dire en c
3791
assiettes. La mère Calixte, qui casse tout ce que
l’
on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je cr
3792
ce que l’on veut, a coutume de dire en constatant
le
mal : « Voyez-vous ! je croyais la tenir cette assiette ! » De telle
3793
en constatant le mal : « Voyez-vous ! je croyais
la
tenir cette assiette ! » De telle manière qu’on entend bien que c’est
3794
que rien au monde dépend de nous. Ceci vaut pour
les
femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont
3795
pend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont
la
part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce
3796
nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part
la
plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il f
3797
les femmes, qui sont la part la plus civilisée de
la
population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il faut, elles qui travai
3798
qui décident, elles qui lisent, elles qui vont à
l’
église ou au temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour les homme
3799
u temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour
les
hommes, c’est tout autre chose. Ils sont éloquents et naïfs, revendic
3800
icaces. La plupart ne font rien, ou « travaillent
le
mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — la derniè
3801
, ou « travaillent le mazet », ce qui n’est rien.
Les
femmes vont à la filature — la dernière qui marche encore — et gagnen
3802
le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à
la
filature — la dernière qui marche encore — et gagnent leurs 7 francs
3803
gagnent leurs 7 francs par jour. Pendant ce temps
les
hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce son
3804
cs par jour. Pendant ce temps les hommes sont sur
la
place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et l
3805
les hommes sont sur la place et protestent contre
le
gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçant
3806
ace et protestent contre le gouvernement. Ce sont
les
radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnai
3807
t contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et
les
socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent
3808
rnement. Ce sont les radicaux et les socialistes.
Les
commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la
3809
souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de
la
place. Enfin ceux qui sont occupés par l’imprimerie du journal local,
3810
ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par
l’
imprimerie du journal local, par les garages ou à la Mairie, sont comm
3811
nt occupés par l’imprimerie du journal local, par
les
garages ou à la Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pa
3812
imprimerie du journal local, par les garages ou à
la
Mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à t
3813
arages ou à la Mairie, sont communistes et mènent
les
affaires du pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la paro
3814
et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes
les
conférences, prennent la parole au Cercle d’hommes, citent des livres
3815
pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent
la
parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur la politique. 12 nov
3816
parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur
la
politique. 12 novembre 1934 J’ai relevé quelques chiffres dans un ouv
3817
vé quelques chiffres dans un ouvrage sur A…, dû à
la
plume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570, le mûrier, importé
3818
rage sur A…, dû à la plume d’un de ses pasteurs à
la
retraite. En 1570, le mûrier, importé de Chine, fait son apparition d
3819
lume d’un de ses pasteurs à la retraite. En 1570,
le
mûrier, importé de Chine, fait son apparition dans le Midi. État du p
3820
ûrier, importé de Chine, fait son apparition dans
le
Midi. État du pays en 1820 : douze filatures, deux fabriques de chape
3821
mportant de produits soyeux manufacturés. Lors de
la
dédicace du nouveau temple, en 1822, quinze mille protestants accoure
3822
1822, quinze mille protestants accourent de toute
la
contrée pour suivre des cérémonies dont leurs descendants parlent enc
3823
temple chaque dimanche. Je complète : vers 1900,
la
soie artificielle fait son apparition dans la vallée du Rhône. Fondat
3824
00, la soie artificielle fait son apparition dans
la
vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de la région lyonnaise.
3825
vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de
la
région lyonnaise. Apparition du grand capital. État du pays en 1935 :
3826
ours par semaine à une centaine d’ouvrières, dont
le
salaire moyen est de 7 francs par jour. Faillite de la dernière bonne
3827
e de la dernière bonnetterie, ces derniers jours.
Le
tiers des maisons est en ruines, — tout le centre. On croirait une vi
3828
jours. Le tiers des maisons est en ruines, — tout
le
centre. On croirait une ville bombardée, 2300 habitants. Cent personn
3829
ée, 2300 habitants. Cent personnes au culte. Dans
la
campagne environnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934, la soie
3830
vironnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934,
la
soie japonaise a fait son apparition sur le marché lyonnais. Faillite
3831
1934, la soie japonaise a fait son apparition sur
le
marché lyonnais. Faillite de plusieurs des grosses entreprises de soi
3832
urs des grosses entreprises de soie artificielle.
Le
cycle normal du progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute la
3833
progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute
la
richesse indigène de ce département. Et cette richesse à son tour va
3834
tement. Et cette richesse à son tour va reprendre
le
chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : Que res
3835
tte richesse à son tour va reprendre le chemin de
l’
Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : Que reste-t-il pour
3836
rendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois
le
mûrier. Question : Que reste-t-il pour entreprendre ici une révolutio
3837
on constructive ? 21 novembre 1934 Leur langage.
La
mère Calixte devait faire notre lessive la semaine prochaine. Elle vi
3838
ngage. La mère Calixte devait faire notre lessive
la
semaine prochaine. Elle vient s’excuser : « Qui sait, Madame, j’aimer
3839
jour ça vous préférerait ? » (En prononçant tous
les
e muets). Simart, à propos de la récente baisse des salaires à la fil
3840
prononçant tous les e muets). Simart, à propos de
la
récente baisse des salaires à la filature : « Je vous dis, c’est mira
3841
art, à propos de la récente baisse des salaires à
la
filature : « Je vous dis, c’est miraculeux ce qu’on leur donne ! Sept
3842
après tout. Tradition laïque.) L’autre jour, dans
l’
autocar, une femme dont j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit hôt
3843
jamais fait ce rapprochement ? Ce petit fait, si
l’
on y réfléchit, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans no
3844
notre société présente. Et c’est encore une fois
le
drame de la culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de
3845
té présente. Et c’est encore une fois le drame de
la
culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de ce fait, à v
3846
ce fait, à vrai dire minuscule, qu’une évidence.
Les
mots que nous disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels,
3847
rivons, nous autres intellectuels, éveillent dans
l’
esprit populaire des harmoniques que nous ne savons plus prévoir. Litt
3848
s que nous ne savons plus prévoir. Littéralement,
les
mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraie
3849
plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus
le
même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le p
3850
téralement, les mots n’ont plus le même sens pour
le
peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple que j
3851
le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler.
Le
petit exemple que je viens de citer, c’est une espèce de calembour qu
3852
i ne joue que sur des sons. Mais il est clair que
le
sens des termes dont nous usons doit subir des métamorphoses non moin
3853
es vocables dont nous pensions qu’ils exprimaient
les
lieux communs sur quoi repose, tacitement, la vie sociale, sont aujou
3854
nt les lieux communs sur quoi repose, tacitement,
la
vie sociale, sont aujourd’hui vidés de leur signification à la fois s
3855
symbolique et précise. Ils n’éveillent plus chez
l’
homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts, que chez nous. L
3856
cise. Ils n’éveillent plus chez l’homme du peuple
les
mêmes espoirs, les mêmes dégoûts, que chez nous. Leur résonance senti
3857
nt plus chez l’homme du peuple les mêmes espoirs,
les
mêmes dégoûts, que chez nous. Leur résonance sentimentale est différe
3858
rquoi leur sens est différent, en dépit de ce que
l’
on pourrait déduire, dans le fait, d’une discussion raisonnable, c’est
3859
t, en dépit de ce que l’on pourrait déduire, dans
le
fait, d’une discussion raisonnable, c’est-à-dire truquée, avec tel ou
3860
tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps
la
traduction du langage surveillé des écrivains dans le langage parlé d
3861
raduction du langage surveillé des écrivains dans
le
langage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voir
3862
e fut affectée de malentendus de ce genre. Voire.
Le
peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était
3863
e ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant
l’
école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois
3864
Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot.
Le
« public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse
3865
, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était
la
noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les co
3866
de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et
les
bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la
3867
», c’était la noblesse, et les bourgeois imitant
la
noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’uti
3868
a noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse.
Le
vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église
3869
les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple
les
comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait
3870
t la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans
la
seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église
3871
rai peuple les comprenait dans la seule mesure de
l’
utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens c
3872
e les comprenait dans la seule mesure de l’utile.
L’
Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens concret de
3873
dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait
le
trait d’union, l’Église gardienne du sens concret des lieux communs.
3874
re de l’utile. L’Église faisait le trait d’union,
l’
Église gardienne du sens concret des lieux communs. Aujourd’hui ces do
3875
mmuns. Aujourd’hui ces données sont bouleversées.
L’
instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la
3876
nées sont bouleversées. L’instruction publique et
la
Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de l
3877
instruction publique et la Presse répandent sinon
le
goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’éte
3878
ue et la Presse répandent sinon le goût, du moins
la
pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il n
3879
inon le goût, du moins la pratique quotidienne de
la
lecture. Le public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps l
3880
, du moins la pratique quotidienne de la lecture.
Le
public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps limité, éduqu
3881
. Un chacun peut en être, et juger comme il veut.
Le
droit de se tromper, et de tromper grâce au langage, est un des droit
3882
oits imprescriptibles que se trouve avoir décrété
la
Convention. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni l
3883
ntion. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni
l’
Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plu
3884
il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni
la
Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité
3885
e mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni
l’
École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de
3886
i l’Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend
les
remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bie
3887
prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur
l’
esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas di
3888
remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de
la
lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans le v
3889
ien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans
le
vide (il vaudrait mieux que ce soit le vide, dans bien des cas), quel
3890
dire dans le vide (il vaudrait mieux que ce soit
le
vide, dans bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rigueu
3891
bien des cas), quels que soient nos efforts vers
la
rigueur et vers l’adaptation de notre style à notre action. On serait
3892
ls que soient nos efforts vers la rigueur et vers
l’
adaptation de notre style à notre action. On serait même tenté d’estim
3893
notre action. On serait même tenté d’estimer que
la
plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et l’inverse. Par
3894
nté d’estimer que la plus grande rigueur entraîne
la
moindre efficacité, et l’inverse. Par où l’on voit que le contraire d
3895
grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et
l’
inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle »,
3896
raîne la moindre efficacité, et l’inverse. Par où
l’
on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public
3897
re efficacité, et l’inverse. Par où l’on voit que
le
contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie s
3898
t l’inverse. Par où l’on voit que le contraire de
la
« vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie spirituelle et ce
3899
e le contraire de la « vie spirituelle », c’est «
le
public ». Cette vie spirituelle et ce public nous posent des exigence
3900
tradictoires. Or, de ces deux antagonistes, c’est
l’
esprit qui sera vaincu. Non point qu’il s’avilisse partout ni qu’il se
3901
partout ni qu’il se laisse toujours persuader par
la
tentation du succès. Mais simplement on ne l’entend plus, il n’agit p
3902
par la tentation du succès. Mais simplement on ne
l’
entend plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de l
3903
plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est
l’
absence de l’esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents
3904
git plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de
l’
esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque tou
3905
on « entend », c’est l’absence de l’esprit, c’est
l’
appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque toujours contraires
3906
de compte, aux intérêts réels… 1er décembre 1934
Le
pasteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise le samedi soir, da
3907
asteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise
le
samedi soir, dans une salle attenante au temple, pour les hommes de s
3908
di soir, dans une salle attenante au temple, pour
les
hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il.
3909
u temple, pour les hommes de sa paroisse. « C’est
le
seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n
3910
s hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de
les
avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n’en vient qu’une d
3911
le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous
l’
aurez remarqué, il n’en vient qu’une dizaine au culte. C’est trop comp
3912
sur un sujet neutre, nous en avons toujours dans
les
40 à 50. Et une fois qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d
3913
achevaient de boire leur tasse de café au fond de
la
salle, dans un coin arrangé en cabinet de lecture. Journaux et illust
3914
cture. Journaux et illustrés, quelques livres sur
la
table. Puis on s’est assis sur des chaises alignées, pour entendre le
3915
est assis sur des chaises alignées, pour entendre
le
« conférencier »27. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quinc
3916
e « conférencier »27. J’ai reconnu deux facteurs,
le
libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraité
3917
ier »27. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire,
le
quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraités qui « trava
3918
eurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de
la
mairie, quelques retraités qui « travaillent le mazet » dans nos para
3919
e la mairie, quelques retraités qui « travaillent
le
mazet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs, les trois institut
3920
azet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs,
les
trois instituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’Écriture.
3921
un ou deux cultivateurs, les trois instituteurs.
Le
pasteur a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a é
3922
nstituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de
l’
Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des instituteur
3923
a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi
le
sujet a été introduit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de « l
3924
uit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de «
l’
histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démarré qu
3925
’agissait de « l’histoire de notre département ».
La
discussion n’a vraiment démarré que lorsqu’on s’est mis à parler d’au
3926
ose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de
l’
enseignement, des journaux, des traditions et anecdotes locales. Discu
3927
necdotes locales. Discussion n’est d’ailleurs pas
le
mot : c’étaient surtout des questions, des affirmations de partis pri
3928
és locales, provoquant chaque fois de gros rires.
L’
homme du peuple — et je pense qu’il en va de même du bourgeois peu cul
3929
es répétitions n’ont d’autre but que de laisser à
l’
esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de
3930
tions n’ont d’autre but que de laisser à l’esprit
le
temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue
3931
e « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de
la
langue des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous les
3932
vains français qu’il est exact de dire, avec tous
les
manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que toujours ell
3933
gue de discussion, parce que toujours elle vise à
la
formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu’un
3934
elle vise à la formule décisive, et ne s’accorde
le
droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus éco
3935
droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de
la
façon la plus économique et la plus claire28. Or, cette langue d’écha
3936
dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon
la
plus économique et la plus claire28. Or, cette langue d’échanges dial
3937
une seule fois, de la façon la plus économique et
la
plus claire28. Or, cette langue d’échanges dialectiques rapides se tr
3938
ques rapides se trouve par là même inefficace sur
le
« peuple ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprise
3939
». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement
les
reprises, les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflex
3940
e de durée. Évitant méticuleusement les reprises,
les
retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflexion spontanée,
3941
les retours, elle s’accorde très mal au rythme de
la
réflexion spontanée, qui est « péguyste » et non « classique ». Écriv
3942
t non « classique ». Écrivains inutilisables dans
la
mesure où ils veulent être de bons écrivains français.) — Que de bonn
3943
écrivains français.) — Que de bonne volonté chez
les
hommes de ce Cercle ! comme ils s’appliquent à comprendre, comme ils
3944
choses, amicalement ; de partager avec eux ce que
l’
on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à
3945
t cela met entre celui qui parle et son public ! (
Le
« conférencier » en tournée se présente comme un séducteur, c’est la
3946
en tournée se présente comme un séducteur, c’est
la
loi du genre, et cela rend les échanges bien pauvres…) Quand nous nou
3947
un séducteur, c’est la loi du genre, et cela rend
les
échanges bien pauvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir, le
3948
uvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir,
le
facteur ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé,
3949
us sommes levés pour sortir, le facteur ronflait,
le
front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeu
3950
dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté
les
yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé avec plusieurs jeunes
3951
ns politiques, dans ce cercle ? — Il y a de tout.
Le
quincaillier est royaliste, un des instituteurs est objecteur de cons
3952
re. Il paraît que ça chauffe certains soirs. Mais
le
pasteur préside et on le respecte : 40 ans ; genre ancien combattant
3953
ffe certains soirs. Mais le pasteur préside et on
le
respecte : 40 ans ; genre ancien combattant ; « très large », dit-on.
3954
t-on. Et « il cause bien ». 16 décembre 1934 À N…
la
mairie est tout entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont
3955
out entière communiste. Ceux des habitants qui ne
le
sont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part les châtelains. Il
3956
ont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part
les
châtelains. Ils votent radical ou socialiste, et se font battre à pla
3957
ture, régulièrement. Mais faut-il donc penser que
les
communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marx
3958
ser que les communistes, eux, savent pourquoi ils
le
sont, et connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela
3959
eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent
le
marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela du tout, vous verrez. Ê
3960
ans ce pays, c’est tout simplement être à gauche,
le
plus à gauche possible. S’il en est bien ainsi, me dis-je, on peut re
3961
peut redouter que ces hommes ne sachent pas faire
la
distinction entre le marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-il
3962
hommes ne sachent pas faire la distinction entre
le
marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictat
3963
ent pas faire la distinction entre le marxisme et
l’
anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictateur qui se prés
3964
oser au dictateur qui se présentera un jour comme
l’
homme de gauche à poigne ? J’ai questionné à ce sujet quelqu’un qui co
3965
à ce sujet quelqu’un qui connaît bien son monde.
La
vie même de cet homme consiste en effet à connaître intimement le plu
3966
et homme consiste en effet à connaître intimement
le
plus grand nombre de familles de N., leurs circonstances matérielles,
3967
eurs traditions et leurs rancunes — c’est souvent
la
même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et
3968
s — c’est souvent la même chose — leurs idées sur
la
vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste
3969
uvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur
la
mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître
3970
chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur
le
mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître ces choses,
3971
consiste à connaître ces choses, il faut prendre
le
mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas
3972
connaître ces choses, il faut prendre le mot dans
le
sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur
3973
e ces choses, il faut prendre le mot dans le sens
le
plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple
3974
t prendre le mot dans le sens le plus actif : car
l’
homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple curieux ou spectate
3975
s, quelqu’un qui a pour mission de leur enseigner
le
sens dernier des circonstances de leur vie. C’est le pasteur. Sa paro
3976
sens dernier des circonstances de leur vie. C’est
le
pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habit
3977
leur vie. C’est le pasteur. Sa paroisse comprend
les
villages de N. et de V. où il habite. V., c’est un vieux nid d’aigle,
3978
, une pierraille couronnant des hauteurs ventées.
Les
rues sont étroites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que le vent
3979
roites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que
le
vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur un
3980
teuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de
les
balayer. Nous sommes installés au presbytère sur une galerie d’où l’o
3981
mmes installés au presbytère sur une galerie d’où
l’
on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des
3982
rie d’où l’on domine un ample paysage horizontal.
La
plaine est à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’horizon
3983
à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à
l’
horizon des collines vers Uzès, où quelques ruines de castels et quelq
3984
e castels et quelques cheminées d’usines grattent
le
bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parm
3985
e bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine
le
village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeu
3986
aune. On distingue à peine le village de N. parmi
les
rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route noire pour dé
3987
es rangées de peupliers : il faut suivre des yeux
la
route noire pour découvrir enfin l’amas brunâtre des maisons au-desso
3988
ivre des yeux la route noire pour découvrir enfin
l’
amas brunâtre des maisons au-dessous d’une tache blanche dans un pré,
3989
-dessous d’une tache blanche dans un pré, qui est
le
château. Joie de voir un pays dans son ensemble, dans son unité natur
3990
et ancienne. Une même patine de crépuscule réunit
les
champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des co
3991
Une même patine de crépuscule réunit les champs,
les
arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. J
3992
tine de crépuscule réunit les champs, les arbres,
les
maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. Je demande au
3993
gens que je connais si bien ? C’est difficile de
les
classer et je n’aime pas beaucoup ça… Il y en a de toutes sortes, bie
3994
Il y en a de toutes sortes, bien sûr, et plus on
les
voit de près… — Je comprends qu’il soit difficile de parler en généra
3995
dire, oui et non. — Enfin, viennent-ils au temple
le
dimanche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas, les hommes d’ici
3996
anche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas,
les
hommes d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas l’envie qui man
3997
es d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas
l’
envie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours la question de la
3998
vie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours
la
question de la place à traverser. — ??? — Oui, vous savez que nos tem
3999
mais ils ont peur. C’est toujours la question de
la
place à traverser. — ??? — Oui, vous savez que nos temples du Midi so
4000
os temples du Midi sont construits en général sur
la
place du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses
4001
ur la place du village. En face ou à côté, il y a
les
cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hom
4002
du village. En face ou à côté, il y a les cafés,
les
terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont
4003
e ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous
les
platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis.
4004
a les cafés, les terrasses sous les platanes, et
le
dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au cu
4005
errasses sous les platanes, et le dimanche matin,
les
hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au culte, il faut défiler
4006
he matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si
l’
on va au culte, il faut défiler devant les terrasses, c’est gênant. Un
4007
stis. Si l’on va au culte, il faut défiler devant
les
terrasses, c’est gênant. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsie
4008
t. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsieur
le
pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacris
4009
e pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par
la
porte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et
4010
i on pouvait entrer par-derrière, par la porte de
la
sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux, le
4011
ndrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux,
les
voyez-vous ? Pouvez-vous discuter avec eux ? — Guère. Là encore, ce s
4012
er avec eux ? — Guère. Là encore, ce sont surtout
les
femmes qu’on voit. Eux sont au travail, ou au café. — Pourquoi n’irie
4013
fficile ! Moi, ça ne me gênerait pas. Mais eux on
les
étonnerait, et surtout ils y sont entre eux. Je n’ai aucune envie d’a
4014
ont entre eux. Je n’ai aucune envie d’aller faire
l’
intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne
4015
x. Je n’ai aucune envie d’aller faire l’intrus ou
le
bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne dis pas. Ma
4016
atiquement, je vous assure, c’est difficile. — Et
les
salutistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On les connaît… — A
4017
utistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On
les
connaît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des c
4018
rme. C’est classé. On les connaît… — Alors, quand
les
voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des conférences que j’organise. V
4019
naît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à
l’
occasion des conférences que j’organise. Vous avez déjà parlé dans des
4020
déjà parlé dans des cercles d’hommes. Vous voyez
le
genre. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête
4021
s des cercles d’hommes. Vous voyez le genre. — Et
les
communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête. Et ils discute
4022
re. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr,
le
maire en tête. Et ils discutent, et même très bien. Je me rappelle pa
4023
en. Je me rappelle par exemple une discussion sur
l’
incroyance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens
4024
elle par exemple une discussion sur l’incroyance.
L’
orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroya
4025
cussion sur l’incroyance. L’orateur avait dit que
la
différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas le
4026
ance. L’orateur avait dit que la différence entre
les
chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas les chrétiens se condui
4027
vait dit que la différence entre les chrétiens et
les
incroyants, ce n’est que pas les chrétiens se conduisent mieux que le
4028
les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas
les
chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est qu’ils se co
4029
est que pas les chrétiens se conduisent mieux que
les
autres, mais c’est qu’ils se confient en Dieu, et qu’ils attendent to
4030
ils se confient en Dieu, et qu’ils attendent tous
les
ordres de lui. À la fin, un des communistes se lève et résume le déba
4031
eu, et qu’ils attendent tous les ordres de lui. À
la
fin, un des communistes se lève et résume le débat : « En somme, dit-
4032
i. À la fin, un des communistes se lève et résume
le
débat : « En somme, dit-il, si nous ne croyons pas en Dieu, nous autr
4033
trop orgueilleux ? » En général, on peut dire que
les
communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux, et eu
4034
En général, on peut dire que les communistes sont
les
plus intelligents du village. Ce sont eux, et eux seuls, qui proposen
4035
réformes pratiques, qui demandent qu’on installe
l’
eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé e
4036
pratiques, qui demandent qu’on installe l’eau et
l’
électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entrepr
4037
andent qu’on installe l’eau et l’électricité dans
les
maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de la populati
4038
eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est
l’
élément réveillé et entreprenant de la population. — Mais savent-ils c
4039
etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de
la
population. — Mais savent-ils ce que c’est, le marxisme ? — Ils essai
4040
de la population. — Mais savent-ils ce que c’est,
le
marxisme ? — Ils essaient ; peut-être plus qu’on ne croirait. J’en co
4041
eurs qui lisent des brochures de vulgarisation de
la
doctrine. Ils me posent quelquefois des questions. Mais ce n’est pas
4042
quelquefois des questions. Mais ce n’est pas par
la
lecture qu’ils viennent au parti. L’affaire, pour eux, c’est d’abord
4043
’est pas par la lecture qu’ils viennent au parti.
L’
affaire, pour eux, c’est d’abord de se grouper afin d’entreprendre que
4044
, de résister aux gros propriétaires qui tiennent
la
région, et de leur imposer des mesures de progrès, de bon sens… — Au
4045
ses, d’où viennent-ils ? — Pour la plupart — tous
les
chefs en tous cas —, ce sont de petits propriétaires ou des ouvriers
4046
ls savent que je suis de leur côté, en gros, dans
les
questions locales où il faut prendre position. Quant à la doctrine, c
4047
ions locales où il faut prendre position. Quant à
la
doctrine, c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils la connais
4048
c’est difficile à discuter, d’abord parce qu’ils
la
connaissent mal, ensuite et surtout parce qu’elle ne joue pratiquemen
4049
er raisonnablement. Mais rien ne se présente pour
les
soutenir. Ils vont au parti communiste parce qu’il n’y a rien d’autre
4050
d’autre et personne d’autre… Ce seraient souvent
les
meilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises tê
4051
aient souvent les meilleures têtes du pays, et on
les
laisse devenir les « mauvaises têtes ». 17 décembre 1934 Le grand tor
4052
eilleures têtes du pays, et on les laisse devenir
les
« mauvaises têtes ». 17 décembre 1934 Le grand tort des chrétiens, c’
4053
devenir les « mauvaises têtes ». 17 décembre 1934
Le
grand tort des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux l’incroyan
4054
t des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux
l’
incroyance de leurs contemporains. Au fond, ils en ont peur. Or ils de
4055
nteux, honteux d’une foi qu’il n’a pas ! Car s’il
l’
avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et
4056
s ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à
la
confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint
4057
, il n’aurait plus de honte à la confesser devant
les
hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint pas Dieu, mais qu’il
4058
qu’il n’est pas un des leurs… Je voudrais définir
le
croyant véritable : celui qui sait qu’il ne croit pas aux dieux du mo
4059
ait qu’il ne croit pas aux dieux du monde, et qui
le
prouve. Comment le prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en an
4060
pas aux dieux du monde, et qui le prouve. Comment
le
prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en annonçant aux hommes
4061
simplement en témoignant, en annonçant aux hommes
la
vérité et le chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, su
4062
témoignant, en annonçant aux hommes la vérité et
le
chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, surhumaines : s
4063
mieux. 12 janvier 1935 Ces cochons-là ! — Simard
le
jardinier s’est fait une forte entaille au doigt en travaillant. Ce g
4064
é d’ordinaire, en est tout pâle. Je vais discuter
le
coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne c
4065
tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour
le
ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas de meilleur
4066
dionaux qui ne connaît pas de meilleur remède que
la
parlotte. Tout de suite, c’est la question des assurances qu’il abord
4067
leur remède que la parlotte. Tout de suite, c’est
la
question des assurances qu’il aborde avec autorité, tout en tenant so
4068
utorité, tout en tenant son doigt blessé droit en
l’
air, dans une attitude doctorale. La question des assurances est une q
4069
essé droit en l’air, dans une attitude doctorale.
La
question des assurances est une question complexe, comme toutes les q
4070
ssurances est une question complexe, comme toutes
les
questions capitales. Les gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, pa
4071
n complexe, comme toutes les questions capitales.
Les
gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je l’en cro
4072
ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je
l’
en crois, n’a guère vendu depuis un mois que pour 50 francs de légumes
4073
depuis un mois que pour 50 francs de légumes. Or
la
vente des produits de son jardin est son seul moyen de gagner). Carré
4074
en de gagner). Carré sur son tabouret de cuisine,
le
doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et an
4075
). Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en
l’
air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et analogues — av
4076
de cuisine, le doigt en l’air, il passe en revue
les
compagnies d’assurances — et analogues — avec lesquelles il est en co
4077
compte. Je dis compagnies d’assurances, mais lui
les
nomme plus couramment « ces cochons-là ». Ces cochons-là sont donc au
4078
en totalise sept pour son compte, et sa dame fait
le
petit appoint. Elle s’est « coupé » la jambe, cela fait bien cinq ans
4079
dame fait le petit appoint. Elle s’est « coupé »
la
jambe, cela fait bien cinq ans déjà, et « touche » pour cette jambe c
4080
claré que tout allait bien, c’est-à-dire qu’ils «
l’
ont diminuée à 17 sous par jour ». Pour se venger, il leur a retiré so
4081
venger, il leur a retiré son assurance à lui, et
l’
a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances sociales, v
4082
et l’a passée à d’autres. Il reste par bonheur :
les
assurances sociales, vie, décès, « avec doublage », vieillesse, accid
4083
re très compliquée de capitalisation-loterie, qui
l’
excite particulièrement. Tout cela rend plus ou moins. Dans certains c
4084
re. « Ce cochon-là » n’a pas répondu, et pourtant
la
lettre était recommandée. Alors il a été voir « une personne encore p
4085
illé d’écrire une nouvelle lettre recommandée « à
la
charge du destinataire ». Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Répons
4086
Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Réponse dans
les
quatre jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que la personne com
4087
re jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que
la
personne compétente lui dit : « Ce cochon-là t’a refait de 299 francs
4088
cochon-là t’a refait de 299 francs, consulte voir
le
barème ! » Il a fallu récrire deux fois pour obtenir gain de cause. E
4089
50 francs. Autrement, vous savez ce qui se passe,
les
employés là-bas, au ministère, ils mettent l’argent dans leur poche.
4090
e, les employés là-bas, au ministère, ils mettent
l’
argent dans leur poche. — Tous les mas et mazets des environs sont hab
4091
ère, ils mettent l’argent dans leur poche. — Tous
les
mas et mazets des environs sont habités par des retraités, des pensio
4092
ités, des pensionnés, des assurés qui vivent dans
la
rouspétance contre ces « cochons-là » et dans la crainte de la vieill
4093
e contre ces « cochons-là » et dans la crainte de
la
vieillesse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de la mévente c
4094
sse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de
la
mévente croissante, on vit sur le dos de l’État, on suit des enterrem
4095
ner, à cause de la mévente croissante, on vit sur
le
dos de l’État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfa
4096
se de la mévente croissante, on vit sur le dos de
l’
État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfants pour d
4097
ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à
la
politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages,
4098
ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique,
l’
hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages, et ces cochons
4099
t à peine à la politique, l’hiver est « pourri »,
la
« pulmonie » fait des ravages, et ces cochons-là vous diminuent. Sima
4100
s-là vous diminuent. Simard m’explique encore que
les
gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme partout.
4101
re que les gens s’en vont d’ici pour travailler à
la
ville. C’est comme partout. Bon. Alors les catholiques descendent de
4102
iller à la ville. C’est comme partout. Bon. Alors
les
catholiques descendent de la montagne et viennent prendre la place. «
4103
partout. Bon. Alors les catholiques descendent de
la
montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illet
4104
ues descendent de la montagne et viennent prendre
la
place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des
4105
de la montagne et viennent prendre la place. « On
les
appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés,
4106
t viennent prendre la place. « On les appelle ici
les
illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont
4107
que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont pas
l’
instruction comme nous autres. » Arriérés, illettrés. Je n’en suis plu
4108
lus au temps où j’approuvais certains « Éloges de
l’
ignorance » plus sentimentaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais q
4109
entaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais que
l’
ignorance — oui, au sens de l’école primaire — est un mal qu’il faudra
4110
liques. Je sais que l’ignorance — oui, au sens de
l’
école primaire — est un mal qu’il faudrait guérir. Mais je ne puis m’e
4111
t-être moins bas que ces « assurés ». Ce peuple à
la
retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait plus
4112
uple à la retraite qui meurt en rouspétant contre
les
bureaucrates ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de la vie
4113
ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de
la
vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage »…
4114
davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de
la
mort qui rapporte « en doublage »… 20 janvier 1935 Superstition. — C
4115
e écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est
le
moins croyable, étant superstitieux sur tout plein d’objets. » Malcha
4116
: il n’échappe aux jésuites que pour tomber dans
le
fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois,
4117
aux jésuites que pour tomber dans le fétichisme :
le
franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de
4118
pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré,
les
idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée
4119
c sacré, les idées à majuscules, toucher du bois,
la
bouteille de champagne brisée contre la coque des bateaux neufs, etc.
4120
du bois, la bouteille de champagne brisée contre
la
coque des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute la situation : c’
4121
que des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute
la
situation : c’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de la Lot
4122
’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de
la
Loterie nationale, s’inclinant sur la tombe du Soldat inconnu. Juste
4123
gagnant de la Loterie nationale, s’inclinant sur
la
tombe du Soldat inconnu. Juste hommage au collègue, au gagnant d’une
4124
collègue, au gagnant d’une autre loterie ! Toute
la
grande presse en a parlé. Personne ne rit. Léon Bloy rugit dans sa to
4125
rugit dans sa tombe. 3 février 1935 Déclassé. —
L’
intellectuel l’est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière
4126
tombe. 3 février 1935 Déclassé. — L’intellectuel
l’
est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière, dispersée com
4127
il est d’une classe particulière, dispersée comme
les
Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment
4128
ne classe particulière, dispersée comme les Juifs
le
sont chez les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la f
4129
ticulière, dispersée comme les Juifs le sont chez
les
gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce ch
4130
e les Juifs le sont chez les gentils. Pourquoi ne
l’
ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a
4131
entils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à
la
faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette ambi
4132
fallu m’éloigner de cette ambiance bourgeoise où
l’
on a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que l’intellectuel en
4133
a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que
l’
intellectuel en tant que tel est un hors-classe, un être à part, auque
4134
à part, auquel on ne croit pas. (D’où sans doute
l’
angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à
4135
’angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de
l’
argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : pour
4136
tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à
l’
Académie, voire à jouer un rôle politique : pour faire figure, pour ac
4137
re, pour acquérir une situation bien définie dans
le
corps social). Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes int
4138
dans le corps social). Nous sommes méprisés dans
la
mesure où nous sommes intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans
4139
s intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans
la
mesure où nous réussissons à nous faire passer pour des bourgeois ou
4140
at. 17 février 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir
le
sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion d
4141
er 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir le sujet de
l’
entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt
4142
hommes. — Hier soir le sujet de l’entretien était
le
problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme.
4143
soir le sujet de l’entretien était le problème de
l’
autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos
4144
t de l’entretien était le problème de l’autorité.
La
discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos de partis pr
4145
e de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers
le
fascisme. Un beau chaos de partis pris, d’erreurs de faits et de form
4146
de faits et de formules électorales ! Je demandai
la
parole pour expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème
4147
ectorales ! Je demandai la parole pour expliquer,
le
plus simplement que je pus, que le problème fasciste est un problème
4148
our expliquer, le plus simplement que je pus, que
le
problème fasciste est un problème avant tout national ; qu’il s’est p
4149
ays, et qu’en tout cas il ne peut pas se poser de
la
même façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir uti
4150
poser de la même façon en France. Je conclus que
la
seule manière de prévenir utilement un fascisme, ce n’était pas de co
4151
tilement un fascisme, ce n’était pas de condamner
les
Italiens et leurs admirateurs français, position négative, paresseuse
4152
e, et donc faible, mais d’essayer de résoudre « à
la
française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante an
4153
le, mais d’essayer de résoudre « à la française »
le
problème de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocra
4154
yer de résoudre « à la française » le problème de
l’
autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlementai
4155
la française » le problème de l’autorité, tel que
le
posent cinquante années de démocratie parlementaire, et toute une tra
4156
e libertés. Bref, un petit sermon élémentaire sur
le
thème « liberté oblige ». Au sortir de la réunion, je surprends cette
4157
ire sur le thème « liberté oblige ». Au sortir de
la
réunion, je surprends cette phrase d’un homme, dans la cour, tandis q
4158
union, je surprends cette phrase d’un homme, dans
la
cour, tandis qu’il donne du feu à son copain : Pour moi, c’est un fas
4159
es raisons il prend ou ne prend point parti. Mais
l’
électeur veut qu’on soit pour ou contre, et il se méfie par principe d
4160
osition fondamentale. Peut-être ferais-je bien, à
l’
avenir, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, d
4161
je bien, à l’avenir, si j’écris quelque chose sur
le
fascisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : J
4162
, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur
les
soviets, de mettre en épigraphe à mon article : Je suis contre. Sinon
4163
mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu que
l’
article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma con
4164
suis contre. Sinon, pour peu que l’article expose
le
pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me cl
4165
. Sinon, pour peu que l’article expose le pour et
le
contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me classera fasc
4166
me classera fasciste ou communiste. Et pourtant,
la
mission de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur,
4167
asciste ou communiste. Et pourtant, la mission de
l’
écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l
4168
de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer
le
lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses par
4169
pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de
l’
amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? Mars 1935 (à M
4170
le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur
les
raisons de ses partis pris ? Mars 1935 (à Marseille) J’ai parlé à R.
4171
le) J’ai parlé à R. de mon projet de publier sous
le
titre de Journal d’un intellectuel en chômage , ces pages que je sui
4172
rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur
le
résultat de cette entreprise. Pour des raisons que je devine plus sen
4173
des raisons que je devine plus sentimentales que
les
arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est qu’
4174
s que les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que
le
lecteur demande, c’est qu’on lui raconte une histoire, me dit R. — Ma
4175
, me dit R. — Mais si je raconte mon histoire ? —
Le
lecteur veut des histoires inventées. — Mais si je lui dis que j’inve
4176
vous met en question, cela vous invite à comparer
les
situations… À cause de la solidarité humaine, probablement. — (Voilà
4177
vous invite à comparer les situations… À cause de
la
solidarité humaine, probablement. — (Voilà pourquoi l’on trouvera san
4178
lidarité humaine, probablement. — (Voilà pourquoi
l’
on trouvera sans doute, indiscret, de ma part, ce journal. Un tel juge
4179
el jugement ne serait pas très franc, d’ailleurs.
L’
indiscrétion, en soi, ne gêne pas beaucoup de gens, au contraire. Ce q
4180
de gens, au contraire. Ce qui gêne, c’est plutôt
la
vérité telle quelle, surtout la vérité sur une situation matérielle.
4181
êne, c’est plutôt la vérité telle quelle, surtout
la
vérité sur une situation matérielle. Il est entendu qu’on ne doit pas
4182
ropos, précisément, est de montrer, entre autres,
la
décadence de ce tabou. Je trouve moins indiscret de parler en public
4183
e tant d’autres, de mes amours, en donnant toutes
les
précisions qu’un collégien puisse désirer.) R. me disait aussi : En s
4184
ous n’êtes pas un vrai chômeur, puisque vous avez
la
possibilité de travailler. — Je me suis fait moi-même cette objection
4185
on. Il est clair qu’un intellectuel aura toujours
la
possibilité de travailler, pour autant que son vrai travail est de pe
4186
utant que son vrai travail est de penser. Mais je
l’
appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la possibilité de
4187
pelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus
la
possibilité de s’assurer un gagne-pain régulier par son travail, s’il
4188
plus d’emploi, et ne sait plus de quoi sera fait
le
lendemain. — Admettez que cela ne vous empêche pas de vivre assez bie
4189
atisfait de votre situation. Ce n’est fichtre pas
le
cas des vrais chômeurs ! — Ah, c’est vrai, je suis bien content, malg
4190
s pas du tout à être un « vrai chômeur », je vous
l’
assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit que cela me serait pratiquement impo
4191
ue sans ressources. Mais d’autre part, est-ce que
le
fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’a
4192
nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder
la
frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pourrais faire un
4193
s avec ça que je pourrais faire une carrière dans
le
monde, à supposer que l’envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire
4194
faire une carrière dans le monde, à supposer que
l’
envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire dans mon journal, c’est
4195
ssi romantique et excitant que mon titre pourrait
le
faire croire. L’intéressant à mon point de vue, c’est de montrer une
4196
excitant que mon titre pourrait le faire croire.
L’
intéressant à mon point de vue, c’est de montrer une fois que c’est vr
4197
’est vrai, et de montrer comment c’est vrai, dans
le
détail… ⁂ Cette conversation avec R. m’a rendu attentif à un fait qui
4198
n fait qui m’apparaît soudain fondamental ; c’est
l’
affectivité quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à l’argent,
4199
é quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à
l’
argent, et qui se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la ri
4200
se mêle en particulier à tout échange d’idées sur
la
richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irrit
4201
rticulier à tout échange d’idées sur la richesse,
la
pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauva
4202
t échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou
le
chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauvaise conscience,
4203
’imbroglio passionnel plus idéalement favorable à
l’
apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur e
4204
ent favorable à l’apparition de délires subits de
la
pensée ou des sentiments. Aigreur et nervosité qui révèlent surtout u
4205
estions. Plusieurs générations de bourgeoisie, et
la
crise de cette bourgeoisie ont accouché d’un des plus beaux complexes
4206
ie ont accouché d’un des plus beaux complexes que
le
diable ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contr
4207
ue le diable ait jamais pu concevoir pour dresser
les
humains les uns contre les autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en
4208
ait jamais pu concevoir pour dresser les humains
les
uns contre les autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en guérir ? — C
4209
concevoir pour dresser les humains les uns contre
les
autres. Et qui, ou quoi, pourrait nous en guérir ? — Commençons par n
4210
uer, passons outre à nos vieilles pudeurs : c’est
le
début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés e
4211
outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de
la
cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés en fonction d
4212
aire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à
l’
argent son rôle mineur de moyen, d’impur et simple moyen… 31 mars 1935
4213
— Je lis dans un journal socialiste du Midi, sous
la
rubrique « La vie régionale », qui chaque jour m’apporte d’inénarrabl
4214
un journal socialiste du Midi, sous la rubrique «
La
vie régionale », qui chaque jour m’apporte d’inénarrables sujets de m
4215
ur m’apporte d’inénarrables sujets de méditation,
le
petit communiqué que voici : Bouillargues. — Les « exclus » vieux tr
4216
le petit communiqué que voici : Bouillargues. —
Les
« exclus » vieux travailleurs. Demain dimanche, à 10 heures, sera d
4217
let 1930 29 . Tous ceux qui ne bénéficient pas de
la
loi des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L
4218
des assurances sociales ont intérêt à assister à
la
conférence. L’organisation lutte afin de faire accorder une retraite
4219
sociales ont intérêt à assister à la conférence.
L’
organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
4220
der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez
la
propagande afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendicat
4221
donnée aux légitimes revendications des vieux ! «
L’
organisation lutte… Unissez-vous ! Activez la propagande ! » Ô merveil
4222
! « L’organisation lutte… Unissez-vous ! Activez
la
propagande ! » Ô merveille du pathos révolutionnaire ! ô gloire de la
4223
merveille du pathos révolutionnaire ! ô gloire de
la
phraséologie marxiste ! Ô triomphe des mots d’ordre sur l’inertie des
4224
ologie marxiste ! Ô triomphe des mots d’ordre sur
l’
inertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme cl
4225
iomphe des mots d’ordre sur l’inertie des masses,
l’
égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical — la conférence
4226
ertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois,
l’
obscurantisme clérical — la conférence est à 10 heures, dimanche matin
4227
des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical —
la
conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réac
4228
conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et
les
oligarchies réactionnaires ! Ô liberté, égalité, fraternité, Déclarat
4229
des droits de l’homme ! Il est venu, il est venu
le
jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que
4230
de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que
la
Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je le j
4231
re appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je
le
jour ! C’est l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le cou
4232
ous ses espoirs ! Mais que dis-je le jour ! C’est
l’
heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le coup de dix heures,
4233
l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur
le
coup de dix heures, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de
4234
ner : demain dimanche, sur le coup de dix heures,
le
grand mot qui résume cent années d’efforts, de luttes, de sacrifices
4235
ce grand mot sera prononcé, proclamé, acclamé par
les
travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos mil
4236
par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à
la
face du monde que nos militants héroïques n’ont pas perdu leur peine
4237
olique mot d’ordre sera donné comme un soufflet à
la
Réaction insolente : « Place aux Vieux ! » — On se demande s’il est a
4238
se demande s’il est au monde un seul pays, hormis
la
France, où cette phrase soit possible. Où les partis qui se disent «
4239
rmis la France, où cette phrase soit possible. Où
les
partis qui se disent « avancés » osent le proposer comme objectif de
4240
le. Où les partis qui se disent « avancés » osent
le
proposer comme objectif de « lutte ». Où la publication d’un communiq
4241
osent le proposer comme objectif de « lutte ». Où
la
publication d’un communiqué de ce genre ne soit pas accueillie par un
4242
une traînée de rigolade irrépressible dans toutes
les
couches de la population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la p
4243
rigolade irrépressible dans toutes les couches de
la
population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine enquê
4244
opulation, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À
la
prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets de
4245
ou « réactionnaire ». À la prochaine enquête sur
l’
état politique de la France, je me promets de répondre par cette simpl
4246
». À la prochaine enquête sur l’état politique de
la
France, je me promets de répondre par cette simple déclaration : « La
4247
mets de répondre par cette simple déclaration : «
La
France est un pays comblé qui a résolu tous les problèmes économiques
4248
« La France est un pays comblé qui a résolu tous
les
problèmes économiques urgents. La preuve en est fournie par ces phras
4249
a résolu tous les problèmes économiques urgents.
La
preuve en est fournie par ces phrases cueillies dans un journal révol
4250
ases cueillies dans un journal révolutionnaire : ‟
L’
organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
4251
der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez
la
propagande, afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendica
4252
cations des vieux !” Quand on en est à cela, dans
les
partis d’extrême gauche, c’est que l’état social est à peu près parad
4253
cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que
l’
état social est à peu près paradisiaque. » J’ajouterais peut-être ceci
4254
voue tous ses enthousiasmes aux soins que réclame
la
vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journaux, est act
4255
a vieillesse. Notre opinion publique, à en croire
les
journaux, est actuellement dominée par le souci des élections académi
4256
croire les journaux, est actuellement dominée par
le
souci des élections académiques et des retraites aux sexagénaires. N’
4257
as beau, rassurant, émouvant, dans une Europe que
l’
on croyait en proie aux brutales jeunesses bottées ? » 25 avril 1935
4258
ses bottées ? » 25 avril 1935 Communisme. — Dans
la
petite librairie grande ouverte sur la rue principale, je parcours, c
4259
me. — Dans la petite librairie grande ouverte sur
la
rue principale, je parcours, comme chaque jour, la plupart des journa
4260
bonhomme au nez violacé traîne ses pantoufles par
la
boutique et grogne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement la p
4261
gne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement
la
patronne qui ne répond pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il fau
4262
d pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il faut
le
laisser frapper le sol de sa canne et redresser sa casquette pour pon
4263
itué, il est comme ça. Il faut le laisser frapper
le
sol de sa canne et redresser sa casquette pour ponctuer ses raisonnem
4264
ntelligent. — Vous avez mon Huma ? — Bou die ! je
les
ai toutes vendues, Monsieur Dumas ! (C’est jour de foire). — Allons,
4265
(C’est jour de foire). — Allons, tant mieux, fait
l’
homme. Et si des fois on vous en demande de trop, vous n’avez qu’à don
4266
n’avez qu’à donner la mienne, vous savez. Plus on
la
lit… Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteu
4267
vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de
la
cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. « Et
4268
Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque
le
vieux gâteux l’arrête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu
4269
re de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux
l’
arrête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à
4270
e va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur
le
seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? »
4271
« Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à
la
mairie ? » L’homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux
4272
on bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? »
L’
homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par l
4273
L’homme au visage maigre fait un geste réticent.
Le
vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des s
4274
au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux
le
tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers :
4275
gre fait un geste réticent. Le vieux le tient par
la
manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers : « Tu m’enten
4276
le tient par la manche et lui martèle de sa canne
le
bout des souliers : « Tu m’entends ? Nous ôtres, nous allons vous pas
4277
s ôtres, nous allons vous passer à tabaque, toute
la
bande ! — Oh ! dit l’homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit
4278
ous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit
l’
homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit ! — Notre droit ? Peu
4279
(Il glousse d’un air malin). — On sait bien, dit
le
communiste, que vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les
4280
dit le communiste, que vous avez toujours soutenu
les
gros qui pressent les petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc
4281
vous avez toujours soutenu les gros qui pressent
les
petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez
4282
ours soutenu les gros qui pressent les petits ! —
Les
gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez toute notre ar
4283
ez toute notre argent, depuis quatre ans que vous
l’
avez, le pouvoir ! » L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou p
4284
notre argent, depuis quatre ans que vous l’avez,
le
pouvoir ! » L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou peut-être
4285
e ces deux hommes, je n’hésite pas : je vote pour
le
communiste. C’est un Méridional du type sérieux, un de ces hommes qui
4286
de ces hommes qui pourraient sauver sa région de
la
totale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de
4287
ient sauver sa région de la totale décrépitude où
l’
ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcool
4288
région de la totale décrépitude où l’ont laissée
les
radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait parti
4289
tale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et
les
créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà l’aspec
4290
Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà
l’
aspect local et personnel de la question, sur le plan des prochaines é
4291
fait partie. Voilà l’aspect local et personnel de
la
question, sur le plan des prochaines élections municipales. Mais il y
4292
. Simple question de tempérament. Peut-être aussi
le
communiste n’est-il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant qu
4293
encore parvenu à « mettre de côté » autant qu’il
le
voudrait. Mais ce n’est pas sûr. Je sais bien une douzaine de ses cam
4294
une douzaine de ses camarades qui comptent parmi
les
mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment
4295
mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que
les
partis expriment tout simplement des attitudes morales différentes ?
4296
i avais acheté, innocemment, le dernier numéro de
l’
Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers,
4297
eté, innocemment, le dernier numéro de l’Huma. De
la
haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquag
4298
ernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de
la
haine, quelques mensonges grossiers, le truquage habituel des titres,
4299
encore de la haine, quelques mensonges grossiers,
le
truquage habituel des titres, une sauce aigre où nagent de grandes vé
4300
ujours bonnes à dire, mais mal dites. J’accepte à
la
rigueur cette division du monde en gros et en petits, si c’est le seu
4301
division du monde en gros et en petits, si c’est
le
seul moyen pratique de faire valoir les droits élémentaires d’une par
4302
, si c’est le seul moyen pratique de faire valoir
les
droits élémentaires d’une partie de la population. Mais quelle trahis
4303
re valoir les droits élémentaires d’une partie de
la
population. Mais quelle trahison des « petits » représente alors ce j
4304
ésente alors ce journal ! Leur seule force contre
les
capitalistes et surtout contre leurs suppôts, ces retraités radicaux
4305
traités radicaux ou socialistes, ce serait d’être
le
parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hom
4306
caux ou socialistes, ce serait d’être le parti de
la
vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bourge
4307
vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous
les
hommes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la politique et l
4308
mmes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent
la
politique et la combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit les
4309
ou intellectuels — qui détestent la politique et
la
combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit les révoltes les mie
4310
combine électorale. Au lieu de quoi on pervertit
les
révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les a
4311
torale. Au lieu de quoi on pervertit les révoltes
les
mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une
4312
n pervertit les révoltes les mieux justifiées, on
les
étourdit de mensonges, on les abreuve d’une prose abstraite, brutale
4313
ieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on
les
abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — e
4314
abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui
le
sont si peu ! — et si possible, plus médiocre que celle des grands jo
4315
tion. On leur impose une mystique confectionnée à
l’
usage des moujiks… Quel est l’homme sain qui oserait affirmer que ce q
4316
que confectionnée à l’usage des moujiks… Quel est
l’
homme sain qui oserait affirmer que ce quotidien lamentable, hérissé d
4317
able, hérissé de clichés hargneux, travaille pour
le
bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait
4318
neux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si
l’
on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas l
4319
e bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux
le
sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas le cas des intellectuel
4320
le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas
le
cas des intellectuels qui « adhèrent » aux disciplines staliniennes e
4321
s staliniennes en haine d’une société qu’ils sont
les
seuls à croire encore « chrétienne » — il faut bien dire que le parti
4322
ire encore « chrétienne » — il faut bien dire que
le
parti communiste est une sinistre trahison des pauvres hommes. Beauco
4323
inistre trahison des pauvres hommes. Beaucoup, je
le
sais, résistent à l’intoxication, mais cela prouve simplement, une fo
4324
pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résistent à
l’
intoxication, mais cela prouve simplement, une fois de plus, que l’hom
4325
ais cela prouve simplement, une fois de plus, que
l’
homme du peuple ne comprend pas profondément ce qu’on lui donne à lire
4326
est sans rapport réel avec cette situation. Mais
les
intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est d
4327
vec cette situation. Mais les intellectuels, dont
le
métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, do
4328
llectuels, dont le métier est de comprendre, dont
le
métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir fo
4329
est de comprendre, dont le métier est de vouloir
la
vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une p
4330
re, dont le métier est de vouloir la vérité, dont
la
seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, —
4331
érité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans
le
pouvoir d’une pensée droite, — on se demande par quelle rancune vague
4332
viennent à s’imaginer qu’ils défendent eux aussi
les
« petits » en défendant ces exploiteurs de la bassesse et du mensonge
4333
si les « petits » en défendant ces exploiteurs de
la
bassesse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bleue
4334
e la bassesse et du mensonge en service commandé.
L’
homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort m
4335
sse et du mensonge en service commandé. L’homme à
la
veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort maladroit e
4336
en service commandé. L’homme à la veste bleue, je
le
comprends et je l’aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans l
4337
. L’homme à la veste bleue, je le comprends et je
l’
aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’ai
4338
aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans
la
mesure où je l’aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Réflexion de «
4339
fort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je
l’
aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Réflexion de « personnaliste ».
4340
28 avril 1935 Réflexion de « personnaliste ». —
Le
peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritab
4341
exion de « personnaliste ». — Le peuple tel qu’on
le
voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritables. Mais c’est qu’i
4342
intérêts véritables. Mais c’est qu’il ne peut pas
les
exprimer très aisément. Question de langage. Revenez voir ces mêmes h
4343
e j’ai dit, revenez deux fois, vingt fois, prenez-
les
sur le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs a
4344
it, revenez deux fois, vingt fois, prenez-les sur
le
fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs au sens
4345
le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-
les
attentifs au sens de leurs clichés. Mieux encore, parlez-leur de leur
4346
e de sensé, de vécu, de réel, — et qui renversera
les
conclusions cyniques des partisans de la dictature. Ils vous diront d
4347
versera les conclusions cyniques des partisans de
la
dictature. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’e
4348
sans de la dictature. Ils vous diront d’abord que
le
fond de leur vie, c’est l’ennui. Ils expliqueront presque toujours ce
4349
ous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est
l’
ennui. Ils expliqueront presque toujours cet ennui par les conditions
4350
. Ils expliqueront presque toujours cet ennui par
les
conditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : no
4351
ennui par les conditions du travail créées depuis
la
guerre dans les campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impos
4352
onditions du travail créées depuis la guerre dans
les
campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impossibilité de « su
4353
isé, de s’attacher à ce qu’on fait ; nécessité où
l’
on se trouve de bâcler son ouvrage, pour gagner de quoi vivre, tentati
4354
ondition. Ils vous diront aussi qu’ils n’ont plus
le
cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la mer
4355
plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que
les
résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incap
4356
uvrage, quand ils savent que les résultats sont à
la
merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diro
4357
t d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront que
le
mal vient de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois s
4358
d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de
l’
État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois sans rien savoir
4359
de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font
les
lois sans rien savoir des situations locales. Parfois ils proposeront
4360
s proposeront quelque réforme pratique : faire de
la
place aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer
4361
tique : faire de la place aux jeunes en abaissant
la
limite d’âge dans les chemins de fer et l’administration ; faire des
4362
lace aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans
les
chemins de fer et l’administration ; faire des lois régionales pour l
4363
issant la limite d’âge dans les chemins de fer et
l’
administration ; faire des lois régionales pour la viticulture ; mettr
4364
l’administration ; faire des lois régionales pour
la
viticulture ; mettre en commun les terres d’un petit village ; vendre
4365
régionales pour la viticulture ; mettre en commun
les
terres d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries
4366
en commun les terres d’un petit village ; vendre
le
vin du pays dans les épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des
4367
s d’un petit village ; vendre le vin du pays dans
les
épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des succédanés fabriqués
4368
frique et des produits chimiques (« que vous avez
la
gorge brûlante après un verre »). Enfin ils se plaindront de ce que,
4369
laisir. On n’est plus fier d’en être, on approuve
la
jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! »
4370
r d’en être, on approuve la jeunesse qui délaisse
la
terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! » — phrase entendue un peu
4371
n approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour
la
ville. (« C’est mort, ici ! » — phrase entendue un peu partout dans l
4372
rt, ici ! » — phrase entendue un peu partout dans
la
province). Et puis « leur » politique, parlez-moi de « leurs combines
4373
’en tiendra aux clichés du journal. On n’aura pas
le
temps ni le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder d
4374
aux clichés du journal. On n’aura pas le temps ni
le
courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités.
4375
al. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même
l’
idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités. Donc, par amour du
4376
s plus ses assemblées, ce n’est pas lui. Écoutons
les
observations que formulent des individus pris à part, dans leur vie c
4377
e concrète. Je constate qu’elles vont toutes dans
le
sens de ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région
4378
lles vont toutes dans le sens de ce que proposent
les
personnalistes : autonomie de la région naturelle, communalisme, synd
4379
e que proposent les personnalistes : autonomie de
la
région naturelle, communalisme, syndicats locaux, rajeunissement des
4380
oyens de circuler et de s’instruire, résistance à
l’
état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le mo
4381
ruire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant à
la
lutte contre le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être
4382
e à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre
le
capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être ; c’est bien mo
4383
pes d’hommes nouveaux, jeunes et sortis de toutes
les
classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les
4384
de toutes les classes, d’exprimer ce que taisent
les
journaux, les orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle
4385
classes, d’exprimer ce que taisent les journaux,
les
orateurs et les affiches — et qui est la volonté réelle des travaille
4386
imer ce que taisent les journaux, les orateurs et
les
affiches — et qui est la volonté réelle des travailleurs, trahis par
4387
urnaux, les orateurs et les affiches — et qui est
la
volonté réelle des travailleurs, trahis par le langage politicien. La
4388
st la volonté réelle des travailleurs, trahis par
le
langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui re
4389
s travailleurs, trahis par le langage politicien.
La
dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peu
4390
rahis par le langage politicien. La dictature est
la
seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature ou
4391
la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer
le
peuple. Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La d
4392
’éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà
le
dilemme du xxe siècle. La dictature est très facile. Elle n’a qu’un
4393
re ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle.
La
dictature est très facile. Elle n’a qu’un argument très puissant cont
4394
classe, sur quels intérêts ? — Nous comptons sur
l’
effort des hommes les plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d
4395
ntérêts ? — Nous comptons sur l’effort des hommes
les
plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d’autre n’est vrai… 6
4396
s-vous. Mais rien d’autre n’est vrai… 6 mai 1935
La
mort et les cérémonies dans le Gard. — La maison de Simard recèle un
4397
s rien d’autre n’est vrai… 6 mai 1935 La mort et
les
cérémonies dans le Gard. — La maison de Simard recèle un effrayant se
4398
vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans
le
Gard. — La maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait
4399
i 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. —
La
maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait laissé igno
4400
e. Nous apprenons son existence en même temps que
l’
imminence de sa mort — et voici qui éveillera peut-être des réflexions
4401
éveillera peut-être des réflexions fécondes dans
l’
esprit du lecteur philosophe. Déjà huit mois que nous sommes ici, et c
4402
et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans
la
grande cuisine qui était, pensions-nous, tout leur logis — nous avion
4403
tout leur logis — nous avions cru comprendre que
les
autres pièces étaient vides ou ne servaient que de débarras —, et rie
4404
ire soupçonner cette présence à côté. Hier matin,
la
mère Calixte arrive tout agitée : « Madame se meurt ! s’écrie-t-elle.
4405
se meurt ! s’écrie-t-elle. C’est Madame Bastide,
la
belle-mère. — Qu’a-t-elle ? — Oh, elle m’a bien reconnue, mais elle v
4406
uit, vous savez, elle est toute chargée, bou die,
l’
estomac et tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle !
4407
toute chargée, bou die, l’estomac et tout. — Mais
les
Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissai
4408
parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissaient de
l’
emballer, la vieille ! » Ils n’auront plus à languir bien longtemps. O
4409
e ! — Peuchère ! ils languissaient de l’emballer,
la
vieille ! » Ils n’auront plus à languir bien longtemps. On peut dire
4410
t plus à languir bien longtemps. On peut dire que
la
chose est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effr
4411
gtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on
l’
entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables discussions nous
4412
e est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour,
le
bruit d’effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simar
4413
bruit d’effroyables discussions nous parvient de
la
cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé, et on partage. C’est to
4414
é, et on partage. C’est toujours assez compliqué.
La
nuit, par un dernier respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour
4415
z compliqué. La nuit, par un dernier respect pour
la
moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dan
4416
lent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans
la
remise qui est au-dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix n
4417
ence : sans auto, sans argent, sans amis proches,
la
solitude devient un isolement. Il y a « les gens », bien sûr. C’est i
4418
oches, la solitude devient un isolement. Il y a «
les
gens », bien sûr. C’est instructif. Mais le désir de s’instruire a de
4419
a « les gens », bien sûr. C’est instructif. Mais
le
désir de s’instruire a des limites. Déjà les relations se stabilisent
4420
Mais le désir de s’instruire a des limites. Déjà
les
relations se stabilisent, les « courtes habitudes » épuisent leur ver
4421
a des limites. Déjà les relations se stabilisent,
les
« courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est le moment de lever s
4422
« courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est
le
moment de lever son camp. Plus tard, peut-être, quand toutes ces mais
4423
de se plaindre des villes, où ils s’incrustent —
la
province deviendra vivable. La révolution sera faite. Nous reviendron
4424
ils s’incrustent — la province deviendra vivable.
La
révolution sera faite. Nous reviendrons… — Demain, il faut remettre e
4425
reviendrons… — Demain, il faut remettre en place
les
aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, no
4426
Demain, il faut remettre en place les aquarelles,
les
guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous
4427
emettre en place les aquarelles, les guéridons et
les
dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous fuyons. 27. Mo
4428
. 27. Monsieur X… « orateur distingué », disait
la
convocation. 28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Rév
4429
orateur distingué », disait la convocation. 28.
La
stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut c
4430
la convocation. 28. La stratégie qu’inaugurèrent
les
généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en so
4431
28. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de
la
Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’appli
4432
et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que
l’
application du style français à la chose militaire. 29. Ils ont donc
4433
st en somme que l’application du style français à
la
chose militaire. 29. Ils ont donc au moins 66 ans aujourd’hui, où l’
4434
29. Ils ont donc au moins 66 ans aujourd’hui, où
l’
article paraît. m. Rougemont Denis de, « Journal d’un intellectuel
4435
Lénine, Staline et
la
littérature (17 avril 1937)n Pour lutter contre le fascisme, les c
4436
ittérature (17 avril 1937)n Pour lutter contre
le
fascisme, les communistes paraissent avoir compris qu’il faut défendr
4437
7 avril 1937)n Pour lutter contre le fascisme,
les
communistes paraissent avoir compris qu’il faut défendre la culture.
4438
stes paraissent avoir compris qu’il faut défendre
la
culture. Le malheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense que de
4439
ent avoir compris qu’il faut défendre la culture.
Le
malheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense que des moyens fas
4440
r cette défense que des moyens fascistes. « Toute
la
littérature sociale-démocrate — écrit Lénine en 1905 déjà ! — doit de
4441
tion totalitaire ; dans un discours aux cadets de
l’
Académie de l’Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans les circonst
4442
re ; dans un discours aux cadets de l’Académie de
l’
Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans les circonstances actuelle
4443
de l’Armée rouge, il s’écrie : « Chez nous, dans
les
circonstances actuelles, les cadres décident de tout ! » Compris ? Ce
4444
: « Chez nous, dans les circonstances actuelles,
les
cadres décident de tout ! » Compris ? Ces deux phrases sont tirées d’
4445
d’un choix de propos de Lénine et de Staline Sur
la
littérature et l’art. Disons tout de suite que le Père des peuples n’
4446
pos de Lénine et de Staline Sur la littérature et
l’
art. Disons tout de suite que le Père des peuples n’a fourni pour sa p
4447
la littérature et l’art. Disons tout de suite que
le
Père des peuples n’a fourni pour sa part qu’une dizaine de pages (sur
4448
e par sa veuve : « En Russie, Ilitch ne goûta pas
l’
art nouveau, qui lui demeurait étranger. » Il préférait de beaucoup à
4449
étranger. » Il préférait de beaucoup à Maïakovski
le
« Salut au 17e » : Salut, salut à vous, braves soldats du 17e… ou e
4450
, salut à vous, braves soldats du 17e… ou encore
la
chanson patriotarde sur l’Alsace-Lorraine : Vous avez pu germaniser
4451
ats du 17e… ou encore la chanson patriotarde sur
l’
Alsace-Lorraine : Vous avez pu germaniser nos plaines Mais notre cœ
4452
ermaniser nos plaines Mais notre cœur — vous ne
l’
aurez jamais ! Dans un article de 1922, il loue cependant un poème de
4453
, il loue cependant un poème de Maïakovski contre
les
bureaucrates. Je n’appartiens pas, dit-il, aux admirateurs de son ta
4454
tratif. Dans son poème, il raille impitoyablement
les
réunions et se moque des communistes qui ne font que siéger et siéger
4455
siéger encore. Je ne sais ce qu’il faut penser de
la
poésie, mais pour ce qui est de la politique, je m’en porte garant, c
4456
faut penser de la poésie, mais pour ce qui est de
la
politique, je m’en porte garant, c’est parfaitement vrai. Voilà qui
4457
, c’est parfaitement vrai. Voilà qui donne toute
la
mesure (la dernière phrase surtout) de Lénine « fondateur de la nouve
4458
dernière phrase surtout) de Lénine « fondateur de
la
nouvelle culture ». Au moins, c’est franc, sans prétention, et cela r
4459
moins, c’est franc, sans prétention, et cela rend
l’
homme plutôt sympathique. Mais, en 1935, le ton des « dirigeants » a b
4460
a rend l’homme plutôt sympathique. Mais, en 1935,
le
ton des « dirigeants » a bien changé. Voici ce qu’écrit, à cette date
4461
» a bien changé. Voici ce qu’écrit, à cette date,
le
Père des peuples, sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure le
4462
qu’écrit, à cette date, le Père des peuples, sur
le
même Maïakovski : Il a été et il demeure le poète le meilleur, le pl
4463
sur le même Maïakovski : Il a été et il demeure
le
poète le meilleur, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’i
4464
ême Maïakovski : Il a été et il demeure le poète
le
meilleur, le plus talentueux de notre époque soviétique. L’indifféren
4465
i : Il a été et il demeure le poète le meilleur,
le
plus talentueux de notre époque soviétique. L’indifférence à sa mémoi
4466
r, le plus talentueux de notre époque soviétique.
L’
indifférence à sa mémoire et à ses œuvres est un crime. Vous reconnai
4467
et à ses œuvres est un crime. Vous reconnaissez
le
ton du policier, et du fonctionnaire arrivé. « L’indifférence à ses œ
4468
le ton du policier, et du fonctionnaire arrivé. «
L’
indifférence à ses œuvres est un crime. » Heureusement pour lui que Lé
4469
st déjà mort et momifié ! Je ne sais quelle était
l’
intention des éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à l’évid
4470
éditeurs communistes de ce choix. Il en ressort à
l’
évidence que les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en gén
4471
istes de ce choix. Il en ressort à l’évidence que
les
« idées » de Lénine sur la littérature étaient en général saines, ban
4472
sort à l’évidence que les « idées » de Lénine sur
la
littérature étaient en général saines, banales, un peu courtes, et qu
4473
re et d’attardé, ou de brutalement primaire, pour
le
planifier à l’échelle de son empire national-socialiste. À nous de re
4474
, ou de brutalement primaire, pour le planifier à
l’
échelle de son empire national-socialiste. À nous de relever la vraie
4475
son empire national-socialiste. À nous de relever
la
vraie défense de la culture, et d’une culture créatrice, novatrice, c
4476
socialiste. À nous de relever la vraie défense de
la
culture, et d’une culture créatrice, novatrice, contre ses fossoyeurs
4477
totalitaires, et contre ce distributeur de prix à
l’
Académie de l’Armée rouge, l’homme des « cadres qui décident de tout »
4478
et contre ce distributeur de prix à l’Académie de
l’
Armée rouge, l’homme des « cadres qui décident de tout ». n. Rougem
4479
stributeur de prix à l’Académie de l’Armée rouge,
l’
homme des « cadres qui décident de tout ». n. Rougemont Denis de, «
4480
». n. Rougemont Denis de, « Lénine, Staline et
la
littérature », À nous la liberté, Paris, 17 avril 1937, p. 10.
4481
de, « Lénine, Staline et la littérature », À nous
la
liberté, Paris, 17 avril 1937, p. 10.
4482
Chamisso et
le
Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)p L’énigme Vers 1813,
4483
Chamisso et le Mythe de
l’
Ombre perdue (mai-juin 1937)p L’énigme Vers 1813, un personnag
4484
le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)p
L’
énigme Vers 1813, un personnage assez hagard aborde l’imagination d
4485
e Vers 1813, un personnage assez hagard aborde
l’
imagination de Chamisso ; il déclare avoir perdu son ombre. Le second
4486
feste une anxiété plus sérieusement troublante. «
L’
homme sans ombre » rôdait depuis longtemps dans les régions obscures d
4487
L’homme sans ombre » rôdait depuis longtemps dans
les
régions obscures de la légende populaire. S’il se risque à paraître d
4488
ait depuis longtemps dans les régions obscures de
la
légende populaire. S’il se risque à paraître devant Chamisso, c’est p
4489
aître devant Chamisso, c’est peut-être poussé par
l’
envie d’être enfin deviné, expliqué. Chamisso est français de naissanc
4490
ntricité du sort a fait de lui un poète allemand.
Les
autres ont toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans le savoir
4491
toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans
le
savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de l’homme sa
4492
le savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est
le
calcul de l’homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer au
4493
hamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de
l’
homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer au soleil : c’e
4494
t le premier saisi par ce frisson d’absurdité que
l’
on baptise inspiration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’épro
4495
piration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui
l’
éprouve, le désir de s’en délivrer en l’exprimant. Et c’est ainsi que
4496
rsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’éprouve,
le
désir de s’en délivrer en l’exprimant. Et c’est ainsi que Chamisso in
4497
celui qui l’éprouve, le désir de s’en délivrer en
l’
exprimant. Et c’est ainsi que Chamisso introduisit dans la conscience
4498
ant. Et c’est ainsi que Chamisso introduisit dans
la
conscience moderne le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous le
4499
e Chamisso introduisit dans la conscience moderne
le
mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques e
4500
ntroduisit dans la conscience moderne le mythe de
l’
homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques et naïfs du c
4501
e le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous
les
traits pathétiques et naïfs du célèbre Peter Schlemihl. De Chamisso à
4502
êle une assez opaque science, sans détriment pour
le
mystère, qui reste entier. Cependant, à voir tant d’auteurs s’exercer
4503
ntier. Cependant, à voir tant d’auteurs s’exercer
l’
imagination sur un sujet qui défie l’expérience, l’on s’étonne qu’aucu
4504
rs s’exercer l’imagination sur un sujet qui défie
l’
expérience, l’on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justif
4505
’imagination sur un sujet qui défie l’expérience,
l’
on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier. L’on s’ét
4506
qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier.
L’
on s’étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formuler le symbole enfe
4507
étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formuler
le
symbole enfermé dans le mythe. Serait-ce pudeur d’artistes ? Pudeur t
4508
n’ait essayé de formuler le symbole enfermé dans
le
mythe. Serait-ce pudeur d’artistes ? Pudeur tout court ? Ou faut-il c
4509
eurs contes sans jamais se poser de questions sur
le
sens d’un tel accident — dont à vrai dire les suites sont assez pitto
4510
sur le sens d’un tel accident — dont à vrai dire
les
suites sont assez pittoresques pour qu’un « poète » — au sens banal d
4511
e » — au sens banal du terme — préfère en ignorer
la
cause ? L’on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et
4512
ns banal du terme — préfère en ignorer la cause ?
L’
on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et l’expressi
4513
r la cause ? L’on s’étonne enfin de ce lien entre
le
domaine germanique et l’expression littéraire du mythe : Chamisso, An
4514
e enfin de ce lien entre le domaine germanique et
l’
expression littéraire du mythe : Chamisso, Andersen, Hofmannsthal, et
4515
, Hofmannsthal, et bien d’autres imitateurs, dont
le
moindre n’est pas Hoffmann… ⁂ L’énigme commença de m’inquiéter lors d
4516
imitateurs, dont le moindre n’est pas Hoffmann… ⁂
L’
énigme commença de m’inquiéter lors d’un séjour allemand au cours duqu
4517
emand au cours duquel je pus observer mainte fois
l’
extraordinaire popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à l’Opér
4518
popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à
l’
Opéra. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas le livret d’Hofm
4519
a. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas
le
livret d’Hofmannsthal, et compris mal l’intrigue de la Femme sans omb
4520
sais pas le livret d’Hofmannsthal, et compris mal
l’
intrigue de la Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la sc
4521
vret d’Hofmannsthal, et compris mal l’intrigue de
la
Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la scène en hurlant
4522
Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir
la
scène en hurlant : elle tirait après soi un grand morceau d’étoffe qu
4523
grand morceau d’étoffe qui figurait son ombre et
l’
embarrassait fort. Aux entractes, on parlait de Freud. La musique m’en
4524
rassait fort. Aux entractes, on parlait de Freud.
La
musique m’ennuyait, indéfinie. Plus tard je lus le livre qui me parut
4525
a musique m’ennuyait, indéfinie. Plus tard je lus
le
livre qui me parut splendide… Qu’est-ce qu’une ombre ? me demandais-j
4526
e demandais-je. Quelque chose d’assez méprisable.
Les
Latins la ridiculisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est
4527
-je. Quelque chose d’assez méprisable. Les Latins
la
ridiculisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus que l
4528
sable. Les Latins la ridiculisent. C’est pour eux
l’
irréalité même. (« Il n’est plus que l’ombre de lui-même ! ») Mais je
4529
t pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus que
l’
ombre de lui-même ! ») Mais je vois bien qu’ils exagèrent : si nous ét
4530
purs esprits, nous ne projetterions pas d’ombre.
L’
ombre est la preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du
4531
s, nous ne projetterions pas d’ombre. L’ombre est
la
preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du moins qui, p
4532
pas d’ombre. L’ombre est la preuve humiliante de
la
chair — humiliante pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans le
4533
air — humiliante pour ceux, du moins qui, plaçant
la
Raison dans le monde des dieux, voudraient bien être pris pour des ge
4534
e pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans
le
monde des dieux, voudraient bien être pris pour des gens raisonnables
4535
nables. Voilà pourquoi, pensais-je, ils méprisent
l’
ombre, et la mésestiment gravement. Mais encore ? Ils en ont tous une,
4536
à pourquoi, pensais-je, ils méprisent l’ombre, et
la
mésestiment gravement. Mais encore ? Ils en ont tous une, et s’entend
4537
u plaisir que dispense un corps. Ils prisent fort
la
« transparence », mais tolèrent très bien cette chair, — oui, même ce
4538
là qui déplorent qu’elle se fasse, aux regards de
la
convoitise, « opaque »36. Que pouvais-je tirer de tout cela ? Rien qu
4539
e tout cela ? Rien qu’une évidence assez pauvre :
l’
ombre est le fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’es
4540
? Rien qu’une évidence assez pauvre : l’ombre est
le
fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’est mourir, et
4541
vant, et sa présence si gênante, que je tentai de
le
contraindre, quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux. Il y avait la psy
4542
quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux. Il y avait
la
psychanalyse. Mais avant d’en venir à cette extrémité, on pouvait ess
4543
ssayer d’un pédantisme moins barbare. Je rédigeai
la
note qui suit, en m’appliquant à écarter les conseils de pitié que me
4544
igeai la note qui suit, en m’appliquant à écarter
les
conseils de pitié que me dictait mon cœur. Signalement de Peter Sc
4545
Peter Schlemihl Peter est un naïf : il croit à
la
fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à l’homme une dignité.
4546
fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à
l’
homme une dignité. C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce, le
4547
sure à l’homme une dignité. C’est un bourgeois de
la
plus dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie les bourgeois r
4548
C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce,
le
bourgeois pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient le sentim
4549
dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie
les
bourgeois riches. D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur. L
4550
pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient
le
sentiment qu’il a d’être inférieur. Le diable sait cela : c’est par l
4551
D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur.
Le
diable sait cela : c’est par là qu’il le tient. Peter lui donne son o
4552
férieur. Le diable sait cela : c’est par là qu’il
le
tient. Peter lui donne son ombre contre une bourse magique, d’où il p
4553
Désormais riche, mais privé d’ombre, il se croit
le
maître du monde. Point du tout : on se moque de lui. Comblé, le voici
4554
onde. Point du tout : on se moque de lui. Comblé,
le
voici plus qu’avant inadmissible. Le complexe d’infériorité à peine d
4555
lui. Comblé, le voici plus qu’avant inadmissible.
Le
complexe d’infériorité à peine défait par la fortune subite, se renou
4556
ble. Le complexe d’infériorité à peine défait par
la
fortune subite, se renoue, cette fois-ci sans remède. Il ne tarde pas
4557
au délire de persécution. Tout effraye Peter, et
le
moleste en mille manières. Les jeux des enfants dans la rue, les vale
4558
t effraye Peter, et le moleste en mille manières.
Les
jeux des enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes q
4559
este en mille manières. Les jeux des enfants dans
la
rue, les valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout l
4560
mille manières. Les jeux des enfants dans la rue,
les
valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière
4561
Les jeux des enfants dans la rue, les valets qui
le
servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et m
4562
s enfants dans la rue, les valets qui le servent,
les
femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et même la clarté
4563
i le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout
la
lumière du jour, et même la clarté de la lune. Il recherche la solitu
4564
il rencontre, surtout la lumière du jour, et même
la
clarté de la lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexio
4565
surtout la lumière du jour, et même la clarté de
la
lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexions désespérée
4566
jour, et même la clarté de la lune. Il recherche
la
solitude pour y mener des réflexions désespérées. Souvent il éclate e
4567
ions désespérées. Souvent il éclate en sanglots à
l’
idée du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous les autres semb
4568
du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous
les
autres semblent détenir le secret, jalousement, méchamment, contre lu
4569
ce bonheur dont tous les autres semblent détenir
le
secret, jalousement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce l’est bie
4570
lousement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce
l’
est bien pour eux, comme toutes les choses trop naturelles que l’on po
4571
! Un secret, ce l’est bien pour eux, comme toutes
les
choses trop naturelles que l’on possède. Peter, lui, le connaît, mais
4572
eux, comme toutes les choses trop naturelles que
l’
on possède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne c
4573
ses trop naturelles que l’on possède. Peter, lui,
le
connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient
4574
ossède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il
l’
a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que
4575
on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que
l’
on connaît, comme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc le typ
4576
Et perd-on ce que l’on connaît, comme Adam et Ève
l’
innocence ?) Schlemihl est donc le type classique de l’homme qui perd
4577
mme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc
le
type classique de l’homme qui perd le contact social. L’or même ne su
4578
ocence ?) Schlemihl est donc le type classique de
l’
homme qui perd le contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir t
4579
hl est donc le type classique de l’homme qui perd
le
contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts.
4580
classique de l’homme qui perd le contact social.
L’
or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il les é
4581
t social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous
les
contacts. Ou plutôt il les établit en apparences, mais dirait-on, san
4582
it pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il
les
établit en apparences, mais dirait-on, sans réciprocité. La moindre é
4583
en apparences, mais dirait-on, sans réciprocité.
La
moindre épreuve trahit cette fêlure : on aime Schlemihl pour tout ce
4584
pour tout ce qu’il a, qui n’est pas lui. Ce sont
les
femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social le
4585
st pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui
le
devinent. Quel est le rapport social le plus réel ? Admettons que ce
4586
s femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est
le
rapport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtou
4587
endu, qui le devinent. Quel est le rapport social
le
plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtout pour ce philisti
4588
pport social le plus réel ? Admettons que ce soit
le
mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes les ruses de Peter échou
4589
t le mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes
les
ruses de Peter échouent devant cet obstacle dernier. Il a beau n’alle
4590
au n’aller que de nuit aux rendez-vous avec Mina.
Le
jour venu de signer le contrat, devant témoins, lorsque son imposture
4591
aux rendez-vous avec Mina. Le jour venu de signer
le
contrat, devant témoins, lorsque son imposture éclate au grand soleil
4592
Mina s’écrie : « Oh ! mon pressentiment ! Oui, je
le
savais depuis longtemps, il n’a pas d’ombre ! » Que reste-t-il à un t
4593
a pas d’ombre ! » Que reste-t-il à un tel homme ?
Le
suicide ? Rien n’est plus loin de sa pensée. Sa vision du monde serai
4594
un philistin sans exigences, et qui veut croire à
la
vertu, — s’il n’y avait, au centre de lui-même, cette absence. En tou
4595
f en ce je ne sais quoi qui n’est rien et devient
l’
essentiel, notre philistin méconnu se voit chassé de la communauté des
4596
entiel, notre philistin méconnu se voit chassé de
la
communauté des siens. Et par sa faute ! c’est là son amertume. Ici in
4597
sa faute ! c’est là son amertume. Ici intervient
l’
évasion. Il achète — par économie — une paire de bottes usagées. Mais
4598
ottes usagées. Mais voilà bien sa chance, ce sont
les
bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à la vie, au voisinage e
4599
es bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à
la
vie, au voisinage et au dialogue. Son existence réelle se confond ave
4600
alogue. Son existence réelle se confond avec tous
les
vagabondages qu’il imagine. Il peut même retrouver une espèce d’activ
4601
écanique : il dresse un vaste catalogue de toutes
les
plantes de la terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand n
4602
resse un vaste catalogue de toutes les plantes de
la
terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand nous perdons sa
4603
ve d’interprétation Je reproche pour ma part à
la
psychanalyse de flatter notre propension à localiser les symboles. Ca
4604
chanalyse de flatter notre propension à localiser
les
symboles. Car, pour la vie spirituelle, il n’est pas de lieux séparés
4605
re propension à localiser les symboles. Car, pour
la
vie spirituelle, il n’est pas de lieux séparés, on peut toujours pass
4606
ours passer de l’un à l’autre par quelque ruse de
la
métamorphose, qui est la vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lor
4607
utre par quelque ruse de la métamorphose, qui est
la
vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cel
4608
e ruse de la métamorphose, qui est la vie même de
la
vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand l’inv
4609
oi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand
l’
inverse est au moins aussi probable. Et quand rien ne dépend à coup sû
4610
rien ne dépend à coup sûr que du tout ? Ceci dit,
la
psychanalyse peut nous donner des descriptions utiles, et quelques «
4611
xuelle »37. Nous venons de voir que Schlemihl est
le
type même de l’inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au so
4612
venons de voir que Schlemihl est le type même de
l’
inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au soleil », et qui n
4613
ver sa place au soleil », et qui ne subsiste dans
la
compagnie de ses semblables que par un subterfuge toujours menacé. D’
4614
rration maximum. Pour confirmer notre soupçon sur
la
nature de cette aberration, il conviendrait de rappeler ici que Peter
4615
conviendrait de rappeler ici que Peter parvient à
la
cacher à tous sauf aux deux femmes qu’il voudrait épouser. Mais n’all
4616
it épouser. Mais n’allons pas conclure trop vite.
Les
états d’âme d’un malade ou d’un fou diffèrent-ils essentiellement des
4617
s à se muer en leur contraire ? Plus précisément,
l’
état de Peter Schlemihl n’est-il pas comparable à celui d’un esprit et
4618
e à celui d’un esprit et d’un corps sains après «
l’
amour » ? Durant quelques moments, l’homme éprouve une sensation de vi
4619
ains après « l’amour » ? Durant quelques moments,
l’
homme éprouve une sensation de vide, de légèreté et en même temps de l
4620
tait un peu en arrière des choses, lent à démêler
le
monde où il revient, et qui l’accable de présences bizarres, ou douce
4621
es, lent à démêler le monde où il revient, et qui
l’
accable de présences bizarres, ou douces, mais aussi quelques fois, ho
4622
ence de ce qu’on nommera chez un malade, folie de
la
persécution). Il arrive aussi que cet homme se sente trop lucide, per
4623
, perçant toutes choses à jour, et lui-même, d’où
l’
impression qu’il a d’être mal défendu contre les regards qu’il rencont
4624
où l’impression qu’il a d’être mal défendu contre
les
regards qu’il rencontre, transparent dirait-on, — sans ombre ! Voilà,
4625
s Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toutes
les
réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de la question que nous
4626
réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de
la
question que nous posait l’origine germanique du mythe38. Dès le débu
4627
en nous souvenant de la question que nous posait
l’
origine germanique du mythe38. Dès le début, j’avais pressenti qu’une
4628
nous posait l’origine germanique du mythe38. Dès
le
début, j’avais pressenti qu’une fable à ce point célèbre dans un peup
4629
er qu’un fait humain élémentaire. J’étais déçu de
le
voir se réduire à quelque chose d’aussi précis, et que mille préjugés
4630
asard à cette époque, vint heureusement me donner
la
clé d’une interprétation autrement riche et inquiétante. Je traduis c
4631
ce fragment littéralement : « On ne peut comparer
la
Liquor vitae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi,
4632
ment : « On ne peut comparer la Liquor vitae dans
l’
homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vien
4633
tae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur
la
paroi, laquelle (ombre) vient de l’homme et se forme d’après lui : te
4634
une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de
l’
homme et se forme d’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est « l
4635
l’homme et se forme d’après lui : telle est aussi
la
Liquor, qui est « l’ombre intérieure. » Une lecture plus poussée de P
4636
’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est «
l’
ombre intérieure. » Une lecture plus poussée de Paracelse devait bient
4637
bien d’autres choses curieuses et profondes, que
la
portée de ce passage était en vérité beaucoup plus vaste que tout ce
4638
plus vaste que tout ce que permettait d’imaginer
l’
obtus physiologisme de ce siècle. La « Liquor vitae », selon Paracelse
4639
it d’imaginer l’obtus physiologisme de ce siècle.
La
« Liquor vitae », selon Paracelse, c’est en effet le principe d’activ
4640
« Liquor vitae », selon Paracelse, c’est en effet
le
principe d’activité vitale répandu dans tous nos organes. Elle figure
4641
vitale répandu dans tous nos organes. Elle figure
le
« miroir auquel la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agen
4642
tous nos organes. Elle figure le « miroir auquel
la
nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique, la
4643
el la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi
l’
agent microcosmique, la puissance même de notre créativité dans tous l
4644
en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique,
la
puissance même de notre créativité dans tous les ordres. Elle est ce
4645
, la puissance même de notre créativité dans tous
les
ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans le corps tout entier
4646
ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans
le
corps tout entier et dans l’homme. » Je la rapproche alors de ce Selb
4647
a de plus noble dans le corps tout entier et dans
l’
homme. » Je la rapproche alors de ce Selbst (ou soi-même) dont parle C
4648
e dans le corps tout entier et dans l’homme. » Je
la
rapproche alors de ce Selbst (ou soi-même) dont parle Chamisso vers l
4649
ce Selbst (ou soi-même) dont parle Chamisso vers
la
fin de son conte. Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39. La
4650
la fin de son conte. Voilà qui peut situer enfin
le
vrai problème39. La créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui e
4651
. Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39.
La
créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui est vraiment grave da
4652
out ce qui est vraiment grave dans notre vie ; et
la
fameuse « question sexuelle » ne tire son importance démesurée que du
4653
ique du pouvoir créateur spirituel. Comme on peut
le
voir par l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’
4654
oir créateur spirituel. Comme on peut le voir par
l’
examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup
4655
spirituel. Comme on peut le voir par l’examen de
la
pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres la c
4656
ar l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour
la
raison qu’en beaucoup d’êtres la créativité paraît avoir son siège da
4657
it-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres
la
créativité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que la pudeur s’
4658
d’êtres la créativité paraît avoir son siège dans
le
seul sexe, que la pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour
4659
ité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que
la
pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que
4660
sée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que
l’
homme cherche à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les
4661
-ce point pour cette raison que l’homme cherche à
le
dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les deux fils de Noé
4662
e dissimuler comme quelque chose de sacré, et que
les
deux fils de Noé couvrirent la nudité de leur père ivre en marchant v
4663
de sacré, et que les deux fils de Noé couvrirent
la
nudité de leur père ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez
4664
ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez
l’
homme qui parvient à la conscience de sa mission spirituelle, le centr
4665
lui à reculons ? Mais chez l’homme qui parvient à
la
conscience de sa mission spirituelle, le centre de la créativité para
4666
rvient à la conscience de sa mission spirituelle,
le
centre de la créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le
4667
onscience de sa mission spirituelle, le centre de
la
créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur. La pud
4668
e centre de la créativité paraît se déplacer dans
le
cerveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les se
4669
tivité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans
le
cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle
4670
raît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur.
La
pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle « d’étala
4671
rveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte
la
pensée, les sentiments. On parle « d’étalage impudique » lorsqu’un au
4672
ns le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée,
les
sentiments. On parle « d’étalage impudique » lorsqu’un auteur exhibe
4673
(Il peut être d’ailleurs, au sens courant du mot,
le
plus « pudibond » des bourgeois : un Amiel). Cependant ces remarques
4674
. Cependant ces remarques n’expliquent pas encore
l’
essentiel. Que l’on cache son secret le plus profond, le plus sacré, q
4675
emarques n’expliquent pas encore l’essentiel. Que
l’
on cache son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir
4676
pas encore l’essentiel. Que l’on cache son secret
le
plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on
4677
ntiel. Que l’on cache son secret le plus profond,
le
plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on possède, c’est na
4678
on secret le plus profond, le plus sacré, qui est
le
pouvoir de création que l’on possède, c’est naturel ; mais non du tou
4679
le plus sacré, qui est le pouvoir de création que
l’
on possède, c’est naturel ; mais non du tout qu’on en ait honte, sembl
4680
tout qu’on en ait honte, semble-t-il. En vérité,
la
mauvaise pudeur provient de ce que le corps et l’âme se distinguent d
4681
En vérité, la mauvaise pudeur provient de ce que
le
corps et l’âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être refl
4682
la mauvaise pudeur provient de ce que le corps et
l’
âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être reflets l’un de
4683
et cessent d’être reflets l’un de l’autre. Alors
le
corps a honte de sa pensée, et celle-ci des désirs de son corps — com
4684
ssement sans amour, ou d’un amour qui se refuse à
l’
étreinte. Et pourquoi la pudeur cesse-t-elle d’exister — normalement —
4685
’un amour qui se refuse à l’étreinte. Et pourquoi
la
pudeur cesse-t-elle d’exister — normalement — quand deux êtres s’aime
4686
rmalement — quand deux êtres s’aiment ? Parce que
le
sexe reprend alors sa « propriété » symbolique. (Ce qui est douteux,
4687
, m’est étranger). Revenons alors à notre mythe :
la
transparence, c’est l’absence d’ombre, donc de secret. Or le secret «
4688
nons alors à notre mythe : la transparence, c’est
l’
absence d’ombre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant le lieu
4689
ence, c’est l’absence d’ombre, donc de secret. Or
le
secret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, cel
4690
bre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant
le
lieu de la créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre,
4691
e secret. Or le secret « sacré » étant le lieu de
la
créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre, se promène
4692
ret « sacré » étant le lieu de la créativité dans
la
personne, celui qui a perdu son ombre, se promène parmi les hommes av
4693
ne, celui qui a perdu son ombre, se promène parmi
les
hommes avec l’angoisse de voir révélée au grand jour non son secret,
4694
perdu son ombre, se promène parmi les hommes avec
l’
angoisse de voir révélée au grand jour non son secret, mais justement
4695
élée au grand jour non son secret, mais justement
l’
absence en lui de son secret, sa transparence : spirituellement, ou de
4696
e autre sorte, il n’est plus un homme créateur. À
l’
inverse, la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme son
4697
te, il n’est plus un homme créateur. À l’inverse,
la
chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme son élan vers
4698
la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en
l’
homme son élan vers le monde. Elle le porte au-devant de tout, comme u
4699
le ou corporelle) rénove en l’homme son élan vers
le
monde. Elle le porte au-devant de tout, comme un peu en avant de lui-
4700
e) rénove en l’homme son élan vers le monde. Elle
le
porte au-devant de tout, comme un peu en avant de lui-même, là où il
4701
vant de lui-même, là où il peut dominer sa vie et
la
construire avec tout son instinct à l’image d’une vision de l’esprit.
4702
sa vie et la construire avec tout son instinct à
l’
image d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme
4703
avec tout son instinct à l’image d’une vision de
l’
esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’u
4704
son instinct à l’image d’une vision de l’esprit. (
L’
esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de l
4705
ge d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit)
Le
corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit
4706
ion de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et
l’
âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit offensif et
4707
seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans
l’
unisson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se s
4708
e corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de
la
chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein d
4709
âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté.
L’
esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein dans sa peau »
4710
sson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux,
le
corps qui se sent « plein dans sa peau », partagent les richesses du
4711
rps qui se sent « plein dans sa peau », partagent
les
richesses du désir. Et l’homme a retrouvé son ombre. Suite et fin
4712
s sa peau », partagent les richesses du désir. Et
l’
homme a retrouvé son ombre. Suite et fin de la fable Peter Schle
4713
l’homme a retrouvé son ombre. Suite et fin de
la
fable Peter Schlemihl nous apparaît maintenant une émouvante et tr
4714
nant une émouvante et très précise description de
l’
individu romantique, dans ce qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à
4715
qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à saisir
le
monde pour le former à son image40, et d’évasif devant sa vocation :
4716
missionnaire, d’impuissant à saisir le monde pour
le
former à son image40, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de
4717
r à son image40, et d’évasif devant sa vocation :
le
mystère de l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les trait
4718
0, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de
l’
incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les traits physiques et
4719
l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous
les
traits physiques et moraux de ce que l’on appellera plus tard le vagu
4720
ter tous les traits physiques et moraux de ce que
l’
on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague
4721
ques et moraux de ce que l’on appellera plus tard
le
vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hof
4722
aux de ce que l’on appellera plus tard le vague à
l’
âme, — qui est aussi bien le vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal
4723
plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien
le
vague au corps… Le roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le
4724
à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps…
Le
roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le tourment d’une fem
4725
e roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit
le
tourment d’une femme stérile, l’impératrice qui a perdu son ombre et
4726
épreuve — décrit le tourment d’une femme stérile,
l’
impératrice qui a perdu son ombre et qui emprunte celle d’une fille du
4727
rsen, comme on pouvait s’y attendre, fait dominer
l’
aspect « spirituel » du mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole
4728
ner l’aspect « spirituel » du mythe. Son conte de
l’
Ombre, c’est le symbole de la puissance de création qui vient à se dét
4729
spirituel » du mythe. Son conte de l’Ombre, c’est
le
symbole de la puissance de création qui vient à se détacher de l’aute
4730
mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole de
la
puissance de création qui vient à se détacher de l’auteur pour prendr
4731
puissance de création qui vient à se détacher de
l’
auteur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et le poème ensuite —
4732
à se détacher de l’auteur pour prendre corps dans
l’
œuvre poétique. Et le poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’i
4733
teur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et
le
poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’individu qui l’a conçu
4734
t le poème ensuite — plus beau et plus vivant que
l’
individu qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrait p
4735
ite — plus beau et plus vivant que l’individu qui
l’
a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrait puissant d’un dé
4736
qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par
l’
attrait puissant d’un désir — reviendra s’asservir le poète… ⁂ C’est u
4737
ttrait puissant d’un désir — reviendra s’asservir
le
poète… ⁂ C’est une des gloires du romantisme allemand que d’avoir su
4738
ires du romantisme allemand que d’avoir su élever
les
faiblesses de l’homme, et quelques-unes de ses plus folles illusions,
4739
allemand que d’avoir su élever les faiblesses de
l’
homme, et quelques-unes de ses plus folles illusions, à la hauteur du
4740
et quelques-unes de ses plus folles illusions, à
la
hauteur du mythe, et de la Fable, plus profondément vrais que la vie.
4741
us folles illusions, à la hauteur du mythe, et de
la
Fable, plus profondément vrais que la vie. (Plus riches d’enseignemen
4742
ythe, et de la Fable, plus profondément vrais que
la
vie. (Plus riches d’enseignements concrets, et d’invites à la métamor
4743
s riches d’enseignements concrets, et d’invites à
la
métamorphose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est le paradoxe
4744
phose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est
le
paradoxe génial, l’audace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso
4745
rme ce qui nous défait, c’est le paradoxe génial,
l’
audace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso. Les amateurs d’abs
4746
dace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso.
Les
amateurs d’absurdités lyriques, j’en suis parfois, devraient se garde
4747
t à leur coutume qu’une « fantaisie gratuite » de
l’
art. Nul doute que l’art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleu
4748
ne « fantaisie gratuite » de l’art. Nul doute que
l’
art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleurs qu’il soit vraimen
4749
son image, il en diffère toutefois par ceci qu’il
l’
a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont la nouveauté reste en
4750
’a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont
la
nouveauté reste entière. Et j’y songe : ce Schlemihl éternel, ce symb
4751
ieues qui traverse encore notre vie, n’est-ce pas
l’
ombre de Chamisso ? Une ombre qui a perdu son homme, cette fois, mais
4752
te fois, mais non pas ses charmes profonds. C’est
le
siècle où je vis qui n’a plus d’ombre, et c’est pour lui que je garde
4753
s, il veut du vraisemblable ! Il est retombé dans
le
roman insignifiant. P.-S. Je n’ai pas voulu alourdir cette esquisse
4754
ut un appareil de références bibliographiques. On
les
trouve d’ailleurs réunies dans le Don Juan d’Otto Rank (Stock). Cet é
4755
graphiques. On les trouve d’ailleurs réunies dans
le
Don Juan d’Otto Rank (Stock). Cet érudit psychanalyste ne recense pas
4756
ne cinquantaine d’auteurs célèbres qui ont traité
le
mythe de l’ombre perdue dans leurs romans, pièces, ou contes fantasti
4757
ine d’auteurs célèbres qui ont traité le mythe de
l’
ombre perdue dans leurs romans, pièces, ou contes fantastiques. Notons
4758
français. Encore ceux-ci s’orientent plutôt vers
l’
aspect individuel du mythe de l’ombre, rejoignant le mythe voisin du d
4759
ntent plutôt vers l’aspect individuel du mythe de
l’
ombre, rejoignant le mythe voisin du double. (Maupassant par exemple).
4760
aspect individuel du mythe de l’ombre, rejoignant
le
mythe voisin du double. (Maupassant par exemple). Barrès, dans ses Ca
4761
par exemple). Barrès, dans ses Cahiers, recueille
la
lettre d’un descendant français de Chamisso, selon lequel l’idée de P
4762
’un descendant français de Chamisso, selon lequel
l’
idée de Peter Schlemihl aurait été donnée à son auteur par un de ses p
4763
un de ses parents, au cours d’un séjour à Paris.
L’
origine du conte célèbre serait donc bien française, et Barrès s’en ré
4764
t Barrès s’en réjouit. Il va jusqu’à soutenir que
l’
ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par Cha
4765
Il va jusqu’à soutenir que l’ombre perdue serait
le
symbole de la patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents r
4766
soutenir que l’ombre perdue serait le symbole de
la
patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents réunis par Rank
4767
ole de la patrie (française) perdue par Chamisso.
Les
documents réunis par Rank — et que j’ignorais d’ailleurs au moment où
4768
e nationaliste. Rank insiste longuement, comme je
l’
ai fait, sur l’antiquité nordique du mythe, auquel se rattachent de tr
4769
Rank insiste longuement, comme je l’ai fait, sur
l’
antiquité nordique du mythe, auquel se rattachent de très nombreuses c
4770
je convoite se fait opaque, par cela même que je
le
convoite… », A. Gide : Les Nouvelles Nourritures. 37. Freud : Trois
4771
e, par cela même que je le convoite… », A. Gide :
Les
Nouvelles Nourritures. 37. Freud : Trois essais sur la théorie de la
4772
velles Nourritures. 37. Freud : Trois essais sur
la
théorie de la sexualité. La définition du normal est donc ici : adapt
4773
ures. 37. Freud : Trois essais sur la théorie de
la
sexualité. La définition du normal est donc ici : adapté au milieu so
4774
ud : Trois essais sur la théorie de la sexualité.
La
définition du normal est donc ici : adapté au milieu social. Qui ne v
4775
ourrait tirer de cette « vérité d’expérience » si
l’
on voulait en faire une règle, comme nous en menacent les conformismes
4776
oulait en faire une règle, comme nous en menacent
les
conformismes totalitaires ? On ne peut accepter une « vérité » de ce
4777
er une « vérité » de ce genre qu’en insistant sur
le
contraire : l’anormal peut être créateur d’un nouveau type de rapport
4778
» de ce genre qu’en insistant sur le contraire :
l’
anormal peut être créateur d’un nouveau type de rapports sociaux, c’es
4779
c’est-à-dire d’une nouvelle normalité. 38. Dans
le
conte intitulé « l’Ombre », Andersen raconte comment un philosophe «
4780
nouvelle normalité. 38. Dans le conte intitulé «
l’
Ombre », Andersen raconte comment un philosophe « Venant des froides r
4781
ne femme qu’il perçoit de sa fenêtre. « Mais dans
les
climats chauds, les choses croissent très vite, et après qu’une semai
4782
it de sa fenêtre. « Mais dans les climats chauds,
les
choses croissent très vite, et après qu’une semaine eut passé, il vit
4783
commençait à croître lorsqu’il se promenait dans
le
soleil. » Ici donc, pas de fixation morbide, comme dans Schlemihl. Au
4784
xation morbide, comme dans Schlemihl. Aussi bien,
le
diable n’est-il pas dans l’affaire, cette fois-ci. 39. Selon Paracel
4785
chlemihl. Aussi bien, le diable n’est-il pas dans
l’
affaire, cette fois-ci. 39. Selon Paracelse toujours, l’élément sexue
4786
re, cette fois-ci. 39. Selon Paracelse toujours,
l’
élément sexuel se distingue de la Liquor vitae « comme l’écume d’une s
4787
acelse toujours, l’élément sexuel se distingue de
la
Liquor vitae « comme l’écume d’une soupe ». La créativité se purifie
4788
nt sexuel se distingue de la Liquor vitae « comme
l’
écume d’une soupe ». La créativité se purifie donc en le localisant. I
4789
de la Liquor vitae « comme l’écume d’une soupe ».
La
créativité se purifie donc en le localisant. Il paraît alors que le f
4790
e d’une soupe ». La créativité se purifie donc en
le
localisant. Il paraît alors que le freudisme ne s’occupe que de l’écu
4791
urifie donc en le localisant. Il paraît alors que
le
freudisme ne s’occupe que de l’écume d’une soupe ! (ou bien l’appelle
4792
paraît alors que le freudisme ne s’occupe que de
l’
écume d’une soupe ! (ou bien l’appelle-t-il libido ?). 40. Ces traits
4793
ne s’occupe que de l’écume d’une soupe ! (ou bien
l’
appelle-t-il libido ?). 40. Ces traits ne sauraient définir qu’un asp
4794
bien d’autres, et de tout contraire parfois : que
l’
on songe à Hegel, à Fichte, à Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Cha
4795
Schlegel. p. Rougemont Denis de, « Chamisso et
le
Mythe de l’Ombre perdue », Les Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 19
4796
p. Rougemont Denis de, « Chamisso et le Mythe de
l’
Ombre perdue », Les Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 1937, p. 282‑2
4797
s de, « Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue »,
Les
Cahiers du Sud, Marseille, mai–juin 1937, p. 282‑291.
4798
novembre 1933 Mon domaine, c’est ce que j’ai sous
la
main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé d
4799
ne, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord
la
table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux trétea
4800
table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans
le
chai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ; j’ai dressé cela
4801
planches bien rabotées ; j’ai dressé cela devant
la
fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je l
4802
; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur
les
verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la c
4803
verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève
le
nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
4804
vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois
la
cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du p
4805
r de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
la
margelle du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à d
4806
du puits à gauche, où repose une vieille chatte,
le
chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager,
4807
une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de
la
cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bo
4808
lle chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour,
les
planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de ro
4809
er, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers.
L’
allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par d
4810
osent de tous côtés ce jardin de curé qui a juste
la
largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel la
4811
côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de
la
maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oi
4812
uste la largeur de la maison. On ne voit rien que
le
ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oiseaux, et parfois traversé par
4813
, et de petites dunes broussailleuses qui ferment
l’
horizon bas. Peu de terre et beaucoup de ciel, et partout cette humide
4814
met des ombres si légères, vertes et bleues, sur
les
murailles rosées. La maison compte deux chambres au rez-de-chaussée,
4815
ères, vertes et bleues, sur les murailles rosées.
La
maison compte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisin
4816
pte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de
la
cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un peti
4817
e, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À
l’
étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la
4818
de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où
l’
on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deu
4819
rvient par un petit escalier qui prend au fond de
la
cuisine, deux autres chambres assez vastes et presque vides, auxquell
4820
hambres assez vastes et presque vides, auxquelles
le
toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’aime. Des murs bla
4821
et gai, oui vraiment plus gai qu’ascétique. Dans
le
chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de lau
4822
i vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à
la
porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier. On di
4823
ne pénétrante odeur de laurier. On distingue dans
l’
ombre des amas de branchages, des outils et des treilles pour la pêche
4824
as de branchages, des outils et des treilles pour
la
pêche aux crevettes. Je me suis procuré un petit tonneau de vin blanc
4825
me suis procuré un petit tonneau de vin blanc de
l’
île. C’est un clairet assez acide, qui laisse peut-être un léger goût
4826
qui laisse peut-être un léger goût iodé, au moins
l’
on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablon
4827
re un léger goût iodé, au moins l’on est tenté de
l’
imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume
4828
oût iodé, au moins l’on est tenté de l’imaginer :
la
vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume avec du vare
4829
la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que
l’
on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux ri
4830
n sol sablonneux que l’on fume avec du varech. De
l’
île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse to
4831
’on fume avec du varech. De l’île, du village, de
la
mer, je ne veux rien dire encore : je laisse tout cela se mêler à ma
4832
ore : je laisse tout cela se mêler à ma vie, dans
l’
heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour mes pensées, je le
4833
mêler à ma vie, dans l’heureux étourdissement de
la
lumière maritime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de p
4834
ment de la lumière maritime. Pour mes pensées, je
les
occupe en attendant à de petits exercices formels, sans nul rapport a
4835
six jours que nous sommes arrivés, je n’ai lu que
les
Règles de Descartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le temp
4836
scartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer
le
temps avant un rendez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts avec
4837
ez-vous. 19 novembre 1933 Premiers contacts avec
les
gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte
4838
novembre 1933 Premiers contacts avec les gens. —
Le
village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte, on enfile
4839
village se termine au bout de notre jardin. Passé
la
porte, on enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse
4840
enfile une petite rue toute blanche qui contourne
la
panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cet
4841
etite rue toute blanche qui contourne la panse de
l’
église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qu
4842
qui contourne la panse de l’église, et aboutit à
la
place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangl
4843
place, qui est un vaste rectangle de terre jaune,
les
habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme
4844
tangle de terre jaune, les habitants plantèrent à
la
Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, m
4845
habitants plantèrent à la Révolution un arbre de
la
Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux exemplaire dans
4846
dans sa symétrie architecturale. Il domine toutes
les
maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le
4847
e architecturale. Il domine toutes les maisons et
le
clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
4848
ocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais
le
dessiner dans le style rom antique, avec tous ses détails et toute so
4849
l au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
le
style rom antique, avec tous ses détails et toute son opulence, frisé
4850
e une perruque du grand siècle. De trois côtés de
la
place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, pei
4851
le. De trois côtés de la place généralement vide,
les
maisons s’alignent en ordre modeste, peintes en tons clairs et simple
4852
en tons clairs et simples, blanc, jaune ou vert.
La
couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’une manière subti
4853
ne manière subtile et précise qui en dit long sur
l’
âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour
4854
en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est
l’
impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle cor
4855
cret. C’est l’impression que je veux retenir pour
le
moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée
4856
tenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige
la
mauvaise humeur que m’a donnée notre épicière. Car il faut bien, héla
4857
épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par
l’
épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est én
4858
hélas, commencer par l’épicière, quand on aborde
le
village où l’on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a de
4859
cer par l’épicière, quand on aborde le village où
l’
on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dan
4860
est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dans
les
jambes, et m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens b
4861
bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer
le
prix du chou-fleur, des enveloppes jaunes, du peloton de ficelle et d
4862
lo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne
la
renseignent pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manif
4863
nt. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste
l’
intention de rester ici tout l’hiver ? — C’est plutôt en été qu’on vie
4864
en » qui manifeste l’intention de rester ici tout
l’
hiver ? — C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prud
4865
chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je
le
sais bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’
4866
m’en demander davantage. Et moi, je recule devant
l’
entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’e
4867
i, je recule devant l’entreprise de lui expliquer
la
nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écri
4868
rire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour
les
journaux, sans doute, mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pay
4869
s il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays… Je
l’
ai laissée en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les c
4870
lein mystère. Elle a dû en parler longuement avec
les
clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je s
4871
ment avec les clients qui attendaient en silence,
le
nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujo
4872
ence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti.
La
mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiver elle fait pe
4873
le fait peu de réserves de produits alimentaires,
les
habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainag
4874
les habitants n’achetant guère autre chose que de
la
mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’autre
4875
es épices. Alors il faut aller de l’autre côté de
la
place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’être vu par l’une,
4876
, entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me
l’
a dit. Car elles ne baisseront pas leurs prix pour garder un client, e
4877
eront pas leurs prix pour garder un client, elles
les
augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans comp
4878
n client, elles les augmenteront bien plutôt pour
le
punir d’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueil
4879
Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par
la
réprobation sournoise d’une épicière. 21 novembre 1933 Le bureau de p
4880
bation sournoise d’une épicière. 21 novembre 1933
Le
bureau de poste. — Trois mètres sur trois, et grille épaisse au milie
4881
sur trois, et grille épaisse au milieu. Derrière
la
grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
4882
et grille épaisse au milieu. Derrière la grille,
le
long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Tr
4883
rière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai
l’
impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il
4884
ge de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
la
vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande
4885
i l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois
la
semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenan
4886
— Non. — Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à
la
machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a d
4887
à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à
la
main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit
4888
la main ? — Si, il y a des corrections écrites à
la
main. Pédenaud relit pour la nième fois son tarif, fait son calcul su
4889
orrections écrites à la main. Pédenaud relit pour
la
nième fois son tarif, fait son calcul sur un bout de papier, et concl
4890
t pas aller. Il faut tout recommencer. Finalement
l’
on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port :
4891
out recommencer. Finalement l’on décide d’envoyer
le
manuscrit comme échantillon sans valeur. Port : quatre francs soixant
4892
aleur. Port : quatre francs soixante-quinze. Dans
l’
après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte
4893
tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer
la
porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’
4894
able, j’entends grincer la porte du jardin. C’est
la
femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une
4895
tification officielle d’avoir à verser sans délai
la
somme de Fr. 67.25 restant due sur l’envoi de ce matin. En effet, Péd
4896
sans délai la somme de Fr. 67.25 restant due sur
l’
envoi de ce matin. En effet, Pédenaud, qui a voulu en avoir le cœur ne
4897
e matin. En effet, Pédenaud, qui a voulu en avoir
le
cœur net, a pris des instructions par téléphone au chef-lieu. Son sup
4898
rcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à
l’
autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut t
4899
oche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter
le
courrier. L’autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu,
4900
ilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier.
L’
autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu, faire rouvri
4901
téléphoner au chef-lieu, faire rouvrir au passage
le
sac postal, discuter passionnément, trouver une formule d’apaisement
4902
rouver une formule d’apaisement qui ménage toutes
les
susceptibilités, et finalement ne rien payer de plus. Je note ceci pa
4903
ne assez typique du malentendu qui apparaît entre
les
gens d’ici et moi dès qu’il s’agit de mon travail et de ses condition
4904
nuis sans gravité, bien sûr. Mais quel drame dans
la
vie d’un buraliste de recette auxiliaire ! Depuis lors, il rougit et
4905
des lessives. En été ils pêchent des palourdes et
les
vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien
4906
agère, même pour un riche. Je me sens rejeté dans
la
catégorie bourgeoise. Ma bonne conscience de pauvre n’aura pas duré b
4907
as duré bien longtemps. 16 décembre 1933 Derrière
la
même pile d’assiettes où je crois avoir déjà dit que j’avais trouvé d
4908
e, j’ai déniché ce matin une édition populaire de
La
Naissance du jour, de Colette. Je n’avais pas encore lu ce livre. Il
4909
vais pas encore lu ce livre. Il est exactement de
l’
espèce que j’aime, et l’un des plus charmants dans cette espèce, mais
4910
e raison très précise et qui n’a rien à voir avec
la
critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux
4911
ui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À
la
page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils dé
4912
voir avec la critique littéraire. À la page 43 de
l’
édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comm
4913
ttéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous
les
yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces d’un hérisson
4914
les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme
les
puces d’un hérisson mort. » Cette phrase a fait dans mon esprit ce qu
4915
mon compte, j’en ai pris sept sur mon pyjama dans
l’
espace de deux minutes, ce qui doit constituer une sorte de record. D’
4916
ituer une sorte de record. D’autres sautaient sur
le
couvre-pied. D’autres sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comm
4917
autres sautaient sur le couvre-pied. D’autres sur
le
plancher. Je n’en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue
4918
sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comme
la
mère Renaud était venue nous voir la veille, nous ne cherchâmes pas p
4919
large. Comme la mère Renaud était venue nous voir
la
veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il es
4920
voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin
la
cause du phénomène. Il est vrai qu’on a beau porter un nombre excessi
4921
petit hérisson était venu se mettre en boule dans
la
plate-bande qui borde la maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très v
4922
se mettre en boule dans la plate-bande qui borde
la
maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très vite, il avait l’air malad
4923
e. Il soufflait très vite, il avait l’air malade.
Le
lendemain nous le trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépul
4924
ès vite, il avait l’air malade. Le lendemain nous
le
trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépulture, caché sous d
4925
alade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je
l’
avais oublié là, sans sépulture, caché sous des feuillages brunis. Si
4926
caché sous des feuillages brunis. Si j’ajoute que
la
porte d’entrée joint mal le seuil, tout s’explique sans peine désorma
4927
unis. Si j’ajoute que la porte d’entrée joint mal
le
seuil, tout s’explique sans peine désormais, grâce à la phrase de Col
4928
il, tout s’explique sans peine désormais, grâce à
la
phrase de Colette. Je rapporte cette anecdote parce qu’elle comporte
4929
necdote parce qu’elle comporte une conclusion qui
la
dépasse d’ailleurs notablement et qui me paraît assez frappante. Voic
4930
s, je viens de trouver dans un ouvrage littéraire
la
solution d’une question précise. Grâce à Colette, je sais maintenant
4931
l’air de rien, mais je vois là comme un symbole.
Les
livres devraient être utiles. 23 décembre 1933 J’écris ceci sur une t
4932
933 J’écris ceci sur une table de café. À travers
la
vitrine, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche
4933
une table de café. À travers la vitrine, je vois
le
vieux port de cette vieille ville, la plus proche de notre île, et où
4934
ne, je vois le vieux port de cette vieille ville,
la
plus proche de notre île, et où nous devons encore passer deux heures
4935
ous devons encore passer deux heures en attendant
le
départ de l’autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis u
4936
core passer deux heures en attendant le départ de
l’
autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis un bon moment
4937
epuis un bon moment déjà, tout contents de revoir
le
va-et-vient d’un lieu public, de lire les journaux de Paris et de fum
4938
e revoir le va-et-vient d’un lieu public, de lire
les
journaux de Paris et de fumer des cigarettes américaines au goût de m
4939
es américaines au goût de miel, introuvables dans
l’
île. Pendant que ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer le fi
4940
e ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer
le
fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de notre pr
4941
fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater
l’
échec de notre première tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à
4942
z vite ce qu’il nous fallait pour subsister après
l’
épuisement de notre réserve. J’ai travaillé beaucoup, mais je ne serai
4943
uand on n’a plus rien. Pour celui qui vit au jour
le
jour, il s’agit essentiellement d’éviter les lacunes de cette sorte.
4944
jour le jour, il s’agit essentiellement d’éviter
les
lacunes de cette sorte. (Ce que l’on nomme « difficultés de trésoreri
4945
ment d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que
l’
on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient ici,
4946
que l’on nomme « difficultés de trésorerie » dans
les
affaires, devient ici, évidemment, un obstacle absolu.) Assuré au moi
4947
au moins de quelque argent à venir, j’ai accepté
l’
invitation d’un ami qui nous offre de passer trois semaines chez lui.
4948
bite à une petite journée de voyage de notre île.
La
leçon pratique de cette première expérience de deux mois, c’est que l
4949
cette première expérience de deux mois, c’est que
la
liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode, et
4950
est que la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut
la
conquérir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’attaque, pr
4951
il faut la conquérir avec méthode, et organiser à
l’
avance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée d
4952
vance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près
la
date d’arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier de ma retraite
4953
s de, « Journal d’un intellectuel en chômage »,
La
Revue du dimanche, supplément hebdomadaire de la Revue de Lausanne ,
4954
La Revue du dimanche, supplément hebdomadaire de
la
Revue de Lausanne , Lausanne, 25 juillet 1937, p. 1. r. Précédé de l
4955
, Lausanne, 25 juillet 1937, p. 1. r. Précédé de
la
note suivante : « Par les soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, pa
4956
37, p. 1. r. Précédé de la note suivante : « Par
les
soins de la Guilde du Livre, à Lausanne, paraîtra très prochainement
4957
Précédé de la note suivante : « Par les soins de
la
Guilde du Livre, à Lausanne, paraîtra très prochainement un ouvrage d
4958
ès prochainement un ouvrage de notre compatriote,
l’
excellent écrivain neuchâtelois Denis de Rougement : Journal d’un int
4959
: Journal d’un intellectuel en chômage . Grâce à
la
complaisance du directeur de la Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes en
4960
chômage . Grâce à la complaisance du directeur de
la
Guilde, M. A. Mermoud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs
4961
ud, nous sommes en mesure d’offrir à nos lecteurs
la
primeur de quelques pages de ce livre. Dans ces pages, l’auteur peint
4962
ur de quelques pages de ce livre. Dans ces pages,
l’
auteur peint notamment le milieu où il s’est retiré, une petite île ve
4963
e livre. Dans ces pages, l’auteur peint notamment
le
milieu où il s’est retiré, une petite île vendéenne. »
4964
Il faut parler des « autocars ». Je ne sais si
l’
on se doute à Paris de l’importance des autocars et des transformation
4965
utocars ». Je ne sais si l’on se doute à Paris de
l’
importance des autocars et des transformations qu’ils sont en train de
4966
ansformations qu’ils sont en train de causer dans
la
vie provinciale. Je n’ai pas compté le nombre de lignes actuellement
4967
auser dans la vie provinciale. Je n’ai pas compté
le
nombre de lignes actuellement exploitées. Mais j’ai pu constater dans
4968
j’ai pu constater dans plusieurs départements de
l’
Ouest qu’il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une
4969
t modifier plus rapidement et plus profondément «
la
coutume » de la France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire :
4970
rapidement et plus profondément « la coutume » de
la
France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’autocar modifi
4971
nce rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire :
l’
autocar modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et l
4972
ncore assez dire : l’autocar modifie complètement
le
mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, qua
4973
car modifie complètement le mode de contact entre
le
voyageur et la province. Naguère encore, quand on n’avait que les che
4974
plètement le mode de contact entre le voyageur et
la
province. Naguère encore, quand on n’avait que les chemins de fer, to
4975
la province. Naguère encore, quand on n’avait que
les
chemins de fer, tout convergeait vers Paris, non seulement du fait d’
4976
viaire centralisée, mais encore sentimentalement.
Le
confort relatif des grandes lignes indiquait qu’on allait à Paris ou
4977
ait qu’on allait à Paris ou qu’on en venait. Tout
le
reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’on se
4978
reste n’était que tortillards cahotants, jamais à
l’
heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulatio
4979
t que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où
l’
on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on n
4980
s, jamais à l’heure, où l’on se sentait relégué à
l’
écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gar
4981
l’heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de
la
« vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gares, ce qu’i
4982
relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et
l’
on ne voyait guère que des gares, ce qu’il y a de plus attristant dans
4983
plus attristant dans chaque village. Aujourd’hui,
les
stations d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on p
4984
ge. Aujourd’hui, les stations d’autocars sont sur
la
place principale. C’est de là qu’on part au milieu d’une grande afflu
4985
rrive à grands sons de trompe, c’est enfin ce que
l’
on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insu
4986
ands sons de trompe, c’est enfin ce que l’on voit
le
mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la v
4987
t enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays.
La
voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle la trave
4988
pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à
la
vie locale ; elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans ten
4989
était une sorte d’insulte à la vie locale ; elle
la
traversait abstraitement, sans la voir, sans tenir compte de ses circ
4990
e locale ; elle la traversait abstraitement, sans
la
voir, sans tenir compte de ses circonstances. Sur ses bords ne vivait
4991
s ne vivait qu’une population nomade, qui portait
l’
uniforme de l’État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois
4992
’une population nomade, qui portait l’uniforme de
l’
État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de
4993
nomade, qui portait l’uniforme de l’État, partout
la
même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de part en part san
4994
artout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois
la
France de part en part sans remarquer que les gens qui l’habitent ne
4995
fois la France de part en part sans remarquer que
les
gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une p
4996
e de part en part sans remarquer que les gens qui
l’
habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à un
4997
r que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de
la
même sorte, et que d’une province à une autre, ce n’est pas seulement
4998
’une province à une autre, ce n’est pas seulement
le
paysage qui change. N’était-ce pas là l’une des raisons qui faisait,
4999
l’une des raisons qui faisait, si facilement nier
la
subsistance des « petites patries » dans la nation abstraitement unif
5000
nier la subsistance des « petites patries » dans
la
nation abstraitement unifiée ? La ligne d’autocar fait partie du pays
5001
patries » dans la nation abstraitement unifiée ?
La
ligne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie phy
5002
gne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse
la
géographie physique mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos la
5003
que mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos
la
route nationale pour des chemins secondaires ou des ruelles à peine p
5004
econdaires ou des ruelles à peine plus larges que
la
voiture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale, d
5005
ture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de
la
vie locale, du calendrier des marées, de l’heure matinale des foires,
5006
es de la vie locale, du calendrier des marées, de
l’
heure matinale des foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l
5007
des marées, de l’heure matinale des foires, dans
les
districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines
5008
foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de
l’
entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d
5009
s districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de
la
sortie des usines ou des écoles. La simple intention d’utiliser ce mo
5010
’entrée et de la sortie des usines ou des écoles.
La
simple intention d’utiliser ce moyen de transport vous met en contact
5011
pour obtenir un minimum de précisions concernant
l’
heure du prochain départ et la destination des diverses voitures qui s
5012
écisions concernant l’heure du prochain départ et
la
destination des diverses voitures qui stationnent, sur la place… Et q
5013
nation des diverses voitures qui stationnent, sur
la
place… Et que dire maintenant du voyage lui-même ? C’est une résurrec
5014
C’est une résurrection de ce que Vigny pleurait,
la
poésie des diligences, mais aérée. C’est fait d’une foule d’incidents
5015
vif, et qui change de tête plusieurs fois pendant
le
trajet, de coups de main aux voyageurs chargés de paquets ou d’un jeu
5016
et admiré, d’arrêts et de détours imprévus — car
les
chauffeurs acceptent volontiers toutes sortes de petites commissions
5017
nt rares, ceux qui n’ont pas deux mots à dire par
la
portière entr’ouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui
5018
à dire par la portière entr’ouverte un instant à
la
fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux
5019
la portière entr’ouverte un instant à la fille de
l’
auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent, sur
5020
nstant à la fille de l’auberge écartée qui attend
le
passage du car, les cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’
5021
e l’auberge écartée qui attend le passage du car,
les
cheveux au vent, sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique
5022
ttend le passage du car, les cheveux au vent, sur
le
bord de la route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car
5023
ssage du car, les cheveux au vent, sur le bord de
la
route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car. Cela tien
5024
unes gaillards solides et gais, et qui ont toutes
les
raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est
5025
es et gais, et qui ont toutes les raisons d’aimer
le
travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous
5026
i ont toutes les raisons d’aimer le travail et de
le
faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans l’espr
5027
c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans
l’
esprit des populations, on se sent maître à bord de sa puissante machi
5028
se sent maître à bord de sa puissante machine, et
l’
on bénéficie de ces petites faveurs que les femmes ont toujours accord
5029
ine, et l’on bénéficie de ces petites faveurs que
les
femmes ont toujours accordées à ceux qui commandent et disposent, ne
5030
que pour une heure, de leur vie. Oui, voilà bien
les
hommes avec lesquels je rêverais d’entreprendre une belle révolution,
5031
entreprendre une belle révolution, qui rajeunisse
la
France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et l
5032
le révolution, qui rajeunisse la France : ils ont
la
bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit
5033
i rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur,
le
dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois
5034
a France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme,
le
sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont
5035
a bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et
la
rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuen
5036
sme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que
les
bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au « peuple »
5037
par erreur au « peuple » en général. Sans compter
les
moyens techniques dont ils disposent et qui seraient décisifs lors d’
5038
rapide. Mais loin de moi ces ambitions : ceux qui
les
ont n’en parlent pas, dit-on. Et je ne suis qu’un écrivain. Ceci me r
5039
t de conversation que j’aurais dû noter plus tôt.
Le
monsieur rencontré dans l’autocar de Taillefer voulait savoir quel ét
5040
ais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans
l’
autocar de Taillefer voulait savoir quel était mon métier. Et quand j’
5041
je n’étais qu’un écrivain, et chômeur par-dessus
le
marché, il s’écria : « Ah ! cher monsieur, je vous envie ! Vous avez
5042
envie ! Vous avez un rôle magnifique à jouer dans
la
société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos
5043
ôle magnifique à jouer dans la société. Vous avez
le
temps de réfléchir et de nous faire part de vos lumières, et sans vou
5044
normal, mettons qu’un fonctionnaire c’était pour
le
flatter, et cela tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans le
5045
latter, et cela tient aux circonstances mêmes qui
l’
ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne pe
5046
tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans
le
cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, e
5047
s qui l’ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien
l’
on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faibless
5048
ns le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que
l’
on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faiblesse ou d’une ambitio
5049
’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est
l’
aveu d’une faiblesse ou d’une ambition excessive, deux choses qui comp
5050
ition excessive, deux choses qui compliquent fort
la
vie, je crois ; ou bien l’on écrit des choses intelligentes, et c’est
5051
s qui compliquent fort la vie, je crois ; ou bien
l’
on écrit des choses intelligentes, et c’est encore l’aveu d’une inadap
5052
n écrit des choses intelligentes, et c’est encore
l’
aveu d’une inadaptation cruelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; on
5053
uelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; on bien
l’
on écrit simplement pour gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moy
5054
implement pour gagner sa chienne de vie, et c’est
le
bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imagine
5055
chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner
la
misère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédac
5056
e vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère
la
plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédactionnels.
5057
ère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans
les
antres rédactionnels. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain
5058
e imaginer, dans les antres rédactionnels. Je dis
les
antres. De toute façon, un écrivain est par nature un empêtré. Et voi
5059
, un écrivain est par nature un empêtré. Et voilà
le
paradoxe et l’injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces
5060
st par nature un empêtré. Et voilà le paradoxe et
l’
injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces gens-là des ve
5061
me de ces gens-là des vertus au-dessus du commun,
la
révélation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indig
5062
ation de secrets qui suffiraient à rendre heureux
les
plus indignes, et ingénieux les plus balourds, enfin je ne sais quell
5063
à rendre heureux les plus indignes, et ingénieux
les
plus balourds, enfin je ne sais quelle supériorité humaine, quel luxe
5064
ne, quel luxe d’énergie ou d’invention qui, s’ils
les
possédaient vraiment, feraient de leurs détenteurs non point des écri
5065
quand vous aurez compris cela, vous cesserez, je
le
crains, d’envier ma condition… s. Rougemont Denis de, « Extraits d
5066
aits de… Journal d’un intellectuel en chômage »,
Le
Journal, 15 août 1937, p. 2. t. Précédé de la notice suivante : « Br
5067
», Le Journal, 15 août 1937, p. 2. t. Précédé de
la
notice suivante : « Brillant essayiste dans deux ouvrages déjà remarq
5068
], M. Denis de Rougemont vient d’illustrer ce que
l’
on peut appeler sa « doctrine », en nous donnant, sous le titre de Jou
5069
ut appeler sa « doctrine », en nous donnant, sous
le
titre de Journal d’un intellectuel en chômage, un recueil de réflexio
5070
ale — qui s’impose aux nouvelles générations. Par
les
menues expériences d’une vie diminuée et matériellement difficile, M.
5071
t tracer un tableau très vivant et très nuancé de
la
province française, ainsi qu’en témoigne cet extrait. »
5072
x Pourquoi voulez-vous — ou veulent-ils — que
la
philosophie se purifie de théologie ? La théologie vaut bien la scien
5073
ls — que la philosophie se purifie de théologie ?
La
théologie vaut bien la science. C’est même une science bien moins var
5074
se purifie de théologie ? La théologie vaut bien
la
science. C’est même une science bien moins variable que les sciences
5075
e. C’est même une science bien moins variable que
les
sciences dites exactes, dont les fondements sont renversés tous les v
5076
ins variable que les sciences dites exactes, dont
les
fondements sont renversés tous les vingt ans de fond en comble. Je ne
5077
exactes, dont les fondements sont renversés tous
les
vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que la transcendance pui
5078
vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas que
la
transcendance puisse jamais être « simplement la nature ». Voyez chez
5079
la transcendance puisse jamais être « simplement
la
nature ». Voyez chez Goethe, chez Tolstoï, chez Nietzsche : dans la m
5080
chez Goethe, chez Tolstoï, chez Nietzsche : dans
la
mesure où elle est un élément de transcendance, la nature devient div
5081
a mesure où elle est un élément de transcendance,
la
nature devient divinité (et ne peut pas ne pas le devenir). Pour ma p
5082
la nature devient divinité (et ne peut pas ne pas
le
devenir). Pour ma part, je ne conçois pas de relation concrète à la t
5083
ma part, je ne conçois pas de relation concrète à
la
transcendance où manquerait le sentiment du divin, du sacré. Mais vot
5084
elation concrète à la transcendance où manquerait
le
sentiment du divin, du sacré. Mais votre communication nous oriente u
5085
us oriente utilement vers une nouvelle analyse de
la
transcendance dans son rapport aux puissances de l’imagination et non
5086
transcendance dans son rapport aux puissances de
l’
imagination et non seulement dans son rapport à l’éthique. w. Rouge
5087
l’imagination et non seulement dans son rapport à
l’
éthique. w. Rougemont Denis de, « Lettre de M. Denis de Rougemont »
5088
« Lettre de M. Denis de Rougemont », Bulletin de
la
Société française de philosophie, Paris, décembre 1937, p. 204. x. L
5089
, décembre 1937, p. 204. x. Lettre publiée parmi
les
réactions à la conférence de Jean Wahl, « Subjectivité et transcendan
5090
p. 204. x. Lettre publiée parmi les réactions à
la
conférence de Jean Wahl, « Subjectivité et transcendance ».
5091
adversaires ». Il leur demande ensuite de prendre
le
pouvoir. Mais avant de prendre le pouvoir, il faut convaincre, sinon
5092
uite de prendre le pouvoir. Mais avant de prendre
le
pouvoir, il faut convaincre, sinon l’on se verra contraint d’exercer
5093
de prendre le pouvoir, il faut convaincre, sinon
l’
on se verra contraint d’exercer cette dictature que l’on se proposait
5094
se verra contraint d’exercer cette dictature que
l’
on se proposait justement de combattre, et qui est celle de l’État tot
5095
osait justement de combattre, et qui est celle de
l’
État totalitaire. Or, pour convaincre, il faut entre autres dissiper l
5096
r, pour convaincre, il faut entre autres dissiper
les
malentendus, désarmer autant que possible les adversaires, donc discu
5097
per les malentendus, désarmer autant que possible
les
adversaires, donc discuter. Au surplus, je ne sais pas si le terme d’
5098
res, donc discuter. Au surplus, je ne sais pas si
le
terme d’adversaire convient à M. Pierre Beausire. Il approuve notre r
5099
te en parlant de leurs auteurs : « On ne peut que
les
suivre et les approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour
5100
de leurs auteurs : « On ne peut que les suivre et
les
approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour l’essentiel d
5101
ver. » En somme, il se rangerait à nos côtés pour
l’
essentiel de ce que nous avons dit dans notre numéro spécial81. S’il n
5102
C’est au nom du personnalisme. Mais qu’est-ce que
le
personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de l’humanité. » Erreur tota
5103
me. Mais qu’est-ce que le personnalisme ? « C’est
l’
amour abstrait de l’humanité. » Erreur totale et malentendu maximum. S
5104
ue le personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de
l’
humanité. » Erreur totale et malentendu maximum. S’il fallait à tout p
5105
tendu maximum. S’il fallait à tout prix reprendre
les
termes choisis par M. Beausire lui-même pour définir notre attitude,
5106
lui-même pour définir notre attitude, je dirais :
Le
personnalisme, c’est l’amour concret des hommes réels. Ce n’est pas «
5107
tre attitude, je dirais : Le personnalisme, c’est
l’
amour concret des hommes réels. Ce n’est pas « la bonté, la charité (v
5108
l’amour concret des hommes réels. Ce n’est pas «
la
bonté, la charité (vertus toutes passives et féminines) » (au sentime
5109
oncret des hommes réels. Ce n’est pas « la bonté,
la
charité (vertus toutes passives et féminines) » (au sentiment de l’au
5110
toutes passives et féminines) » (au sentiment de
l’
auteur), mais c’est, au contraire, la volonté d’agir dans le sens de c
5111
sentiment de l’auteur), mais c’est, au contraire,
la
volonté d’agir dans le sens de ce qui libère en l’homme les forces de
5112
mais c’est, au contraire, la volonté d’agir dans
le
sens de ce qui libère en l’homme les forces de résistance et de créat
5113
a volonté d’agir dans le sens de ce qui libère en
l’
homme les forces de résistance et de création, systématiquement déprim
5114
é d’agir dans le sens de ce qui libère en l’homme
les
forces de résistance et de création, systématiquement déprimées par l
5115
ce et de création, systématiquement déprimées par
les
tyrannies que l’on sait. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dan
5116
systématiquement déprimées par les tyrannies que
l’
on sait. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dans le seul plan «
5117
it. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dans
le
seul plan « moral » où M. Beausire nous situe, par un réflexe bien ro
5118
r un réflexe bien romand ; (qu’il me pardonne !).
Le
personnalisme est bien plus qu’une morale, s’il en suppose une. Il es
5119
morale, s’il en suppose une. Il est, à mon sens,
la
tradition centrale de l’Occident, l’élément civilisateur de notre civ
5120
une. Il est, à mon sens, la tradition centrale de
l’
Occident, l’élément civilisateur de notre civilisation, le caractère s
5121
à mon sens, la tradition centrale de l’Occident,
l’
élément civilisateur de notre civilisation, le caractère spécifique de
5122
nt, l’élément civilisateur de notre civilisation,
le
caractère spécifique de la pensée et de la vie des hommes qui ont fai
5123
de notre civilisation, le caractère spécifique de
la
pensée et de la vie des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent l
5124
ation, le caractère spécifique de la pensée et de
la
vie des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent la maintenir. Et
5125
de la pensée et de la vie des hommes qui ont fait
l’
Europe et qui veulent la maintenir. Et l’individualisme et les collect
5126
e des hommes qui ont fait l’Europe et qui veulent
la
maintenir. Et l’individualisme et les collectivismes ne sont que les
5127
ont fait l’Europe et qui veulent la maintenir. Et
l’
individualisme et les collectivismes ne sont que les déviations complé
5128
qui veulent la maintenir. Et l’individualisme et
les
collectivismes ne sont que les déviations complémentaires et périodiq
5129
’individualisme et les collectivismes ne sont que
les
déviations complémentaires et périodiques de cette ligne de plus gran
5130
odiques de cette ligne de plus grande efficacité.
Le
mouvement personnaliste ne s’est constitué comme tel, et n’a pris ce
5131
comme tel, et n’a pris ce nom, que parce que dans
l’
Europe actuelle se déchaînent des puissances de mort, spirituelles et
5132
matérielles, radicalement contraires au génie de
l’
Occident. Ces puissances nous ont obligés, par leurs menaces instantes
5133
ctive de ce qui, depuis nos origines, n’était que
le
sous-entendu de tous nos efforts créateurs. Cette prise de conscience
5134
nscience active s’est effectuée diversement selon
les
milieux et les groupes. En France, elle s’est traduite surtout en ter
5135
s’est effectuée diversement selon les milieux et
les
groupes. En France, elle s’est traduite surtout en termes catholiques
5136
en termes surtout protestants ; en Espagne, avant
l’
invasion des idéologies totalitaires, en termes proches de l’anarchism
5137
des idéologies totalitaires, en termes proches de
l’
anarchisme, etc. Comme l’Europe, le personnalisme est essentiellement
5138
es, en termes proches de l’anarchisme, etc. Comme
l’
Europe, le personnalisme est essentiellement pluraliste, c’est-à-dire
5139
mes proches de l’anarchisme, etc. Comme l’Europe,
le
personnalisme est essentiellement pluraliste, c’est-à-dire : fédérali
5140
pluraliste, c’est-à-dire : fédéraliste. Il exalte
les
différences en ce qu’elles ont de créateur. Il veut une organisation
5141
lles ont de créateur. Il veut une organisation de
la
cité qui leur permette de s’exprimer. Telle est la forme que revêt «
5142
a cité qui leur permette de s’exprimer. Telle est
la
forme que revêt « la charité personnaliste », pour reprendre une form
5143
tte de s’exprimer. Telle est la forme que revêt «
la
charité personnaliste », pour reprendre une formule d’Arnaud Dandieu
5144
d Dandieu (qui d’ailleurs était nietzschéen). Que
le
christianisme vrai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à le
5145
ai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à
le
nier. En tant que protestant personnaliste, je tiens que seule la foi
5146
que protestant personnaliste, je tiens que seule
la
foi réelle — celle qui agit, et non celle qui endort — donne à notre
5147
tude son sens dernier. Beaucoup de mes camarades,
la
majorité même, ne partagent pas cette certitude. Ils en ont d’autres,
5148
n ont d’autres, que je crois insuffisantes, et je
le
leur dis en toute franchise. Du moins ne tiennent-ils pas le christia
5149
en toute franchise. Du moins ne tiennent-ils pas
le
christianisme dont je parle pour une niaiserie sentimentale. À défaut
5150
arle pour une niaiserie sentimentale. À défaut de
la
foi, ils connaissent l’Histoire, et savent de quoi l’Europe s’est fai
5151
sentimentale. À défaut de la foi, ils connaissent
l’
Histoire, et savent de quoi l’Europe s’est faite. Pierre Beausire ne c
5152
oi, ils connaissent l’Histoire, et savent de quoi
l’
Europe s’est faite. Pierre Beausire ne craint pas de proclamer que « s
5153
erre Beausire ne craint pas de proclamer que « si
l’
on veut parler à des hommes, et non à des enfants, il faut renoncer à
5154
et non à des enfants, il faut renoncer à invoquer
le
Christ ». Je ne craindrai pas de lui répondre que ce n’est pas là par
5155
ment du pouvoir dans cet État, et, en manifestant
la
noblesse de leur caractère, nous délivrent du triste spectacle que no
5156
délivrent du triste spectacle que nous avons sous
les
yeux. » Car la noblesse qu’il nous suppose, purement « morale », sent
5157
ste spectacle que nous avons sous les yeux. » Car
la
noblesse qu’il nous suppose, purement « morale », sentimentale, idéal
5158
», sentimentale, idéaliste, ne saurait suffire à
la
tâche. « Le peuple a besoin — nous dit l’auteur — de chefs d’une souv
5159
tale, idéaliste, ne saurait suffire à la tâche. «
Le
peuple a besoin — nous dit l’auteur — de chefs d’une souveraine digni
5160
ffire à la tâche. « Le peuple a besoin — nous dit
l’
auteur — de chefs d’une souveraine dignité, d’une intelligence froide
5161
d’un jugement droit. » Où trouve-t-on cela ? Dans
les
livres de Nietzsche. Mais non pas encore dans l’Histoire ? Si ce n’es
5162
les livres de Nietzsche. Mais non pas encore dans
l’
Histoire ? Si ce n’est pas une utopie de plus, un refuge pour les faib
5163
i ce n’est pas une utopie de plus, un refuge pour
les
faibles et les sceptiques, pour ceux qui craignent de se perdre en s’
5164
une utopie de plus, un refuge pour les faibles et
les
sceptiques, pour ceux qui craignent de se perdre en s’engageant, et p
5165
aignent de se perdre en s’engageant, et préfèrent
la
littérature ; si ce n’est pas une manière de « grève perlée » que de
5166
une manière de « grève perlée » que de n’accepter
la
lutte que dans ces termes ; si cet idéal est possible, si Beausire co
5167
un, qu’il nous amène ce précieux renfort, et nous
le
saluerons d’un vivat ! Nous saurons très bien nous entendre avec tous
5168
eux qui veulent sauver non point nos âmes — c’est
l’
affaire de Dieu seul — mais bien la possibilité de vivre et de créer s
5169
s âmes — c’est l’affaire de Dieu seul — mais bien
la
possibilité de vivre et de créer sa vérité — bonne ou mauvaise — cont
5170
t de créer sa vérité — bonne ou mauvaise — contre
les
fous totalitaires de droite ou de gauche, leurs guerres et leurs cult
5171
d’État. 80. Voir numéro du 1er décembre 1937 :
Le
Personnalisme en Suisse. 81. La réserve indiquée sur « le Suisse »,
5172
décembre 1937 : Le Personnalisme en Suisse. 81.
La
réserve indiquée sur « le Suisse », auquel Beausire croit que je croi
5173
nalisme en Suisse. 81. La réserve indiquée sur «
le
Suisse », auquel Beausire croit que je crois, résulte d’un malentendu
5174
e je crois, résulte d’un malentendu. Je crois à «
l’
idée suisse » telle que l’exprime Liehburg. Idée qui exclut l’existenc
5175
alentendu. Je crois à « l’idée suisse » telle que
l’
exprime Liehburg. Idée qui exclut l’existence d’un type suisse racial,
5176
e » telle que l’exprime Liehburg. Idée qui exclut
l’
existence d’un type suisse racial, ou « national » au sens unitaire. J
5177
tional » au sens unitaire. Je ne crois même pas à
l’
homo alpinus, création polémique de Ramuz. y. Rougemont Denis de, «
5178
n 1813. Son père avait passé son enfance à garder
les
moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il
5179
avait passé son enfance à garder les moutons dans
la
plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur
5180
s dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par
la
misère, il était monté sur un tertre et il avait maudit le Dieu Tout-
5181
, il était monté sur un tertre et il avait maudit
le
Dieu Tout-Puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assom
5182
rtre et il avait maudit le Dieu Tout-Puissant qui
le
laissait mourir de faim. Ce blasphème assombrit sa vie, et la révélat
5183
mourir de faim. Ce blasphème assombrit sa vie, et
la
révélation qu’en eut plus tard Søren fut décisive pour son développem
5184
t décisive pour son développement religieux. Mais
le
défi jeté à Dieu sembla porter bonheur au père de Kierkegaard. Il dev
5185
e sa fortune, il ne voulut tirer nul intérêt : il
la
confia à l’un de ses frères, pour éviter d’avoir affaire aux banques,
5186
d’avoir affaire aux banques, et lorsqu’il mourut,
l’
on s’aperçut qu’il n’en restait que 200 francs. Cette fortune provenai
5187
rtune provenait d’une malédiction, pensait-il. Il
l’
avait donc dilapidée sans compter, mais surtout en dons généreux. À 27
5188
le de 18 ans, Régine Olsen. Tout le monde connaît
le
drame de ces fiançailles douloureusement rompues au bout d’un an. L’i
5189
nçailles douloureusement rompues au bout d’un an.
L’
idée que Kierkegaard s’était formée du mariage était trop absolue pour
5190
absolue pour comporter une réalisation pratique.
Le
« tout ou rien » qui est sa devise devait fatalement le conduire au r
5191
out ou rien » qui est sa devise devait fatalement
le
conduire au refus d’une perspective de bonheur dans laquelle il ne po
5192
ctive de bonheur dans laquelle il ne pouvait voir
le
vrai tout de son existence singulière. (Que d’autres y cherchent des
5193
ture, il partit pour Berlin où il désirait suivre
les
cours de Schelling. Il y demeura quelques mois, puis il revint à Cope
5194
ort, en 1835. Il travaillait une grande partie de
la
nuit. Georg Brandes raconte qu’on pouvait le voir, de la rue, arpente
5195
e de la nuit. Georg Brandes raconte qu’on pouvait
le
voir, de la rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vas
5196
. Georg Brandes raconte qu’on pouvait le voir, de
la
rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vastes appartem
5197
n pouvait le voir, de la rue, arpenter longuement
les
pièces illuminées de ses vastes appartements. Dans chaque chambre il
5198
ir noter, au cours de son interminable promenade,
les
phrases qu’il venait de composer tout en marchant. À l’aube, il s’acc
5199
ases qu’il venait de composer tout en marchant. À
l’
aube, il s’accordait quelque répit, errait sur les quais déserts du po
5200
l’aube, il s’accordait quelque répit, errait sur
les
quais déserts du port, ou gagnait les forêts qui avoisinent la capita
5201
errait sur les quais déserts du port, ou gagnait
les
forêts qui avoisinent la capitale. Puis il se remettait à écrire. Ver
5202
rts du port, ou gagnait les forêts qui avoisinent
la
capitale. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parc
5203
ale. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on
le
voyait parcourir les rues les plus animées de la ville, parlant, rian
5204
ttait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir
les
rues les plus animées de la ville, parlant, riant et discutant avec l
5205
crire. Vers midi, on le voyait parcourir les rues
les
plus animées de la ville, parlant, riant et discutant avec les bourge
5206
le voyait parcourir les rues les plus animées de
la
ville, parlant, riant et discutant avec les bourgeois, avec des jeune
5207
ées de la ville, parlant, riant et discutant avec
les
bourgeois, avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec le petit
5208
avec des jeunes filles, avec des balayeurs, avec
le
petit peuple qu’il aimait par-dessus tout. Tout le monde, à Copenhagu
5209
ongs. Mais on savait aussi que cet original était
le
plus grand écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un immense suc
5210
Sa première œuvre eut un immense succès : c’était
l’
Alternative, qu’il publia en 1843. La même année parurent deux autres
5211
ès : c’était l’Alternative, qu’il publia en 1843.
La
même année parurent deux autres ouvrages, signés de pseudonymes (La R
5212
rent deux autres ouvrages, signés de pseudonymes (
La
Répétition, Crainte et Tremblement) et deux recueils de Discours édif
5213
e son nom. Mais à mesure qu’il faisait mieux voir
le
fond chrétien de sa pensée, le public s’écarta, effrayé. Et lorsqu’en
5214
faisait mieux voir le fond chrétien de sa pensée,
le
public s’écarta, effrayé. Et lorsqu’en 1831, il se mit à attaquer ave
5215
, il se mit à attaquer avec une extrême violence,
le
christianisme officiel et ses évêques, il se vit abandonné dans la pl
5216
officiel et ses évêques, il se vit abandonné dans
la
plus complète solitude qu’ait sans doute jamais connue un grand espri
5217
nue un grand esprit. Un an plus tard, accablé par
la
lutte qu’il menait seul contre tous, il tombait d’épuisement au cours
5218
’épuisement au cours d’une promenade en ville. On
le
transporta à l’hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul
5219
ours d’une promenade en ville. On le transporta à
l’
hôpital où il mourut paisiblement en disant à son seul ami, le pasteur
5220
il mourut paisiblement en disant à son seul ami,
le
pasteur Boesen : « Salue tous les hommes de tua part, je les aimais b
5221
à son seul ami, le pasteur Boesen : « Salue tous
les
hommes de tua part, je les aimais bien, tous… » Le seul événement ext
5222
Boesen : « Salue tous les hommes de tua part, je
les
aimais bien, tous… » Le seul événement extérieur de sa vie avait été
5223
s hommes de tua part, je les aimais bien, tous… »
Le
seul événement extérieur de sa vie avait été la rupture de ses fiança
5224
» Le seul événement extérieur de sa vie avait été
la
rupture de ses fiançailles. Mais l’acte qui résume toute son œuvre, c
5225
vie avait été la rupture de ses fiançailles. Mais
l’
acte qui résume toute son œuvre, cet acte après lequel, semblable au p
5226
ourir certain d’avoir accompli sa mission, ce fut
l’
attaque qu’il mena contre l’Église établie et contre dix-huit siècles
5227
li sa mission, ce fut l’attaque qu’il mena contre
l’
Église établie et contre dix-huit siècles de chrétienté officielle — a
5228
siècles de chrétienté officielle — attaque contre
le
« monde chrétien » au nom du Christ des évangiles. ⁂ Toute mon activi
5229
r on ne naît pas chrétien, et même on ne peut pas
l’
être, il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de l
5230
et même on ne peut pas l’être, il faut sans cesse
le
devenir, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de
5231
eut pas l’être, il faut sans cesse le devenir, et
le
devenir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéis
5232
il faut sans cesse le devenir, et le devenir dans
l’
instant de la foi, qui est l’instant de l’acte d’obéissance. Cessons d
5233
cesse le devenir, et le devenir dans l’instant de
la
foi, qui est l’instant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le
5234
, et le devenir dans l’instant de la foi, qui est
l’
instant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme «
5235
ir dans l’instant de la foi, qui est l’instant de
l’
acte d’obéissance. Cessons de prendre le christianisme « à bon marché
5236
nstant de l’acte d’obéissance. Cessons de prendre
le
christianisme « à bon marché », comme les évêques. Pensée centrale de
5237
prendre le christianisme « à bon marché », comme
les
évêques. Pensée centrale de l’œuvre énorme de Kierkegaard (40 volumes
5238
n marché », comme les évêques. Pensée centrale de
l’
œuvre énorme de Kierkegaard (40 volumes en douze années). Pensée qu’il
5239
. Pensée qu’il défendit et qu’il servit de toutes
les
forces de son génie universel de poète, de philosophe, d’ironiste et
5240
confort moral, témoignage, discours académiques.
L’
évêque Nynster venait de mourir, comblé d’honneurs et de gloire mondai
5241
t de gloire mondaine. Sur sa tombe son successeur
le
qualifia, selon l’usage, de « grand témoin de la vérité ». Kierkegaar
5242
e. Sur sa tombe son successeur le qualifia, selon
l’
usage, de « grand témoin de la vérité ». Kierkegaard écrivit alors un
5243
le qualifia, selon l’usage, de « grand témoin de
la
vérité ». Kierkegaard écrivit alors un article indigné, qui provoqua
5244
né, qui provoqua un énorme scandale. Il décrivait
la
vie de Nynster. Était-ce celle d’un témoin de la vérité ? Non, s’écri
5245
la vie de Nynster. Était-ce celle d’un témoin de
la
vérité ? Non, s’écriait Kierkegaard : Un témoin de la vérité, c’est
5246
rité ? Non, s’écriait Kierkegaard : Un témoin de
la
vérité, c’est un homme dont la vie est familière avec toute espèce de
5247
rd : Un témoin de la vérité, c’est un homme dont
la
vie est familière avec toute espèce de souffrance, … un homme qui tém
5248
spèce de souffrance, … un homme qui témoigne dans
le
dénuement, la misère et l’humiliation, méconnu, déteste, insulté, baf
5249
rance, … un homme qui témoigne dans le dénuement,
la
misère et l’humiliation, méconnu, déteste, insulté, bafoué — un homme
5250
omme qui témoigne dans le dénuement, la misère et
l’
humiliation, méconnu, déteste, insulté, bafoué — un homme qui est flag
5251
s enfin — car c’est bien d’un véritable témoin de
la
vérité qu’on nous parle — et puis enfin crucifié, décapité, brûlé ou
5252
ié, décapité, brûlé ou rôti sur un gril, jeté par
le
bourreau dans un endroit écarté, sans être enterré. Voilà un témoin d
5253
oit écarté, sans être enterré. Voilà un témoin de
la
vérité, sa vie et son existence, sa mort et son enterrement, et l’évê
5254
et son existence, sa mort et son enterrement, et
l’
évêque Nynster, nous dit-on, fut un des vrais témoins de la vérité ! E
5255
Nynster, nous dit-on, fut un des vrais témoins de
la
vérité ! En vérité, il y a quelque chose de plus contraire au christi
5256
et c’est de jouer au christianisme, d’en écarter
les
dangers, et de jouer ensuite au jeu que l’évêque Nynster était un tém
5257
arter les dangers, et de jouer ensuite au jeu que
l’
évêque Nynster était un témoin de la vérité. Cas symbolique aux yeux
5258
te au jeu que l’évêque Nynster était un témoin de
la
vérité. Cas symbolique aux yeux de Kierkegaard. Il fallait un rappel
5259
e aux yeux de Kierkegaard. Il fallait un rappel à
l’
ordre. Il le devint lui-même, de tout son être. Et il savait ce que ce
5260
e Kierkegaard. Il fallait un rappel à l’ordre. Il
le
devint lui-même, de tout son être. Et il savait ce que cela devait lu
5261
. Et il savait ce que cela devait lui coûter. Car
le
monde ne tolère jamais la passion spirituelle qui se déclare dans sa
5262
devait lui coûter. Car le monde ne tolère jamais
la
passion spirituelle qui se déclare dans sa pureté. La plupart des gen
5263
fin de semaine, comme on fait un peu d’ordre dans
l’
appartement, reculent bientôt devant l’énormité — l’absence de normes
5264
ordre dans l’appartement, reculent bientôt devant
l’
énormité — l’absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent.
5265
appartement, reculent bientôt devant l’énormité —
l’
absence de normes — de la vie telle qu’ils la découvrent. Ils se rendo
5266
ntôt devant l’énormité — l’absence de normes — de
la
vie telle qu’ils la découvrent. Ils se rendorment, ou bien édifient d
5267
té — l’absence de normes — de la vie telle qu’ils
la
découvrent. Ils se rendorment, ou bien édifient des systèmes (qu’ils
5268
Ceux qui persistent cependant, s’aperçoivent que
l’
entreprise pourrait être mortellement compromettante. Aussi l’histoire
5269
pourrait être mortellement compromettante. Aussi
l’
histoire de la pensée n’est-elle peut-être que la chronique de ses ret
5270
mortellement compromettante. Aussi l’histoire de
la
pensée n’est-elle peut-être que la chronique de ses retraites éloquen
5271
l’histoire de la pensée n’est-elle peut-être que
la
chronique de ses retraites éloquentes. Très peu vont jusqu’au bout de
5272
nt jusqu’au bout de leur emportement. L’un, c’est
la
mort accidentelle, l’autre, la folie qui l’abat. Un seul, je crois, p
5273
ement. L’un, c’est la mort accidentelle, l’autre,
la
folie qui l’abat. Un seul, je crois, parvint dans l’intégrité de sa f
5274
c’est la mort accidentelle, l’autre, la folie qui
l’
abat. Un seul, je crois, parvint dans l’intégrité de sa force à une mo
5275
folie qui l’abat. Un seul, je crois, parvint dans
l’
intégrité de sa force à une mort que toute son œuvre provoquait et qui
5276
ui vaincue par une telle victime, lui révéla dans
les
derniers instants le vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui
5277
le victime, lui révéla dans les derniers instants
le
vrai sens, la valeur de destin de la pensée qui aboutissait là. Conte
5278
i révéla dans les derniers instants le vrai sens,
la
valeur de destin de la pensée qui aboutissait là. Contempler dans sa
5279
ers instants le vrai sens, la valeur de destin de
la
pensée qui aboutissait là. Contempler dans sa mort la « fin » de sa p
5280
ensée qui aboutissait là. Contempler dans sa mort
la
« fin » de sa passion et l’accomplissement de sa foi, tel fut le sort
5281
ntempler dans sa mort la « fin » de sa passion et
l’
accomplissement de sa foi, tel fut le sort de Kierkegaard, son incomme
5282
a passion et l’accomplissement de sa foi, tel fut
le
sort de Kierkegaard, son incommensurable grandeur. Un acharnement san
5283
ble grandeur. Un acharnement sans pareil à forcer
l’
esprit sur l’obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’existence ;
5284
Un acharnement sans pareil à forcer l’esprit sur
l’
obstacle du désespoir et de l’absurdité de l’existence ; toute une vie
5285
forcer l’esprit sur l’obstacle du désespoir et de
l’
absurdité de l’existence ; toute une vie tendue vers l’impossible, tou
5286
sur l’obstacle du désespoir et de l’absurdité de
l’
existence ; toute une vie tendue vers l’impossible, toute une œuvre de
5287
urdité de l’existence ; toute une vie tendue vers
l’
impossible, toute une œuvre de sarcasmes précis contre les innombrable
5288
sible, toute une œuvre de sarcasmes précis contre
les
innombrables tentations d’une religion qui n’est pas Dieu ; et soudai
5289
que ce soit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne
l’
ai dit que pour l’écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! All
5290
is, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pour
l’
écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! Alléluia !82 Deux d
5291
lléluia ! Alléluia !82 Deux documents éclairent
le
mystère de ce triomphe, le sens dernier de cette vie et de cette mort
5292
ux documents éclairent le mystère de ce triomphe,
le
sens dernier de cette vie et de cette mort. Le premier est de Kierkeg
5293
tte mort. Le premier est de Kierkegaard : Forcer
les
hommes à être attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemi
5294
re attentifs et à juger, c’est exactement prendre
le
chemin du vrai martyre. Un vrai martyr n’a jamais eu recours à la vio
5295
i martyre. Un vrai martyr n’a jamais eu recours à
la
violence, il combat à l’aide de son impuissance. Il force les hommes
5296
, il combat à l’aide de son impuissance. Il force
les
hommes à être attentifs. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, i
5297
s. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs, ils
le
tuent. Mais c’est là ce qu’il voulait. Il n’a jamais cru que sa mort
5298
c sa mort !83 On trouve le second document dans
le
journal de l’hôpital où vint mourir Kierkegaard (c’est un interne qui
5299
On trouve le second document dans le journal de
l’
hôpital où vint mourir Kierkegaard (c’est un interne qui transcrit les
5300
ourir Kierkegaard (c’est un interne qui transcrit
les
déclarations du malade) : Il tient sa maladie pour mortelle. Sa mort
5301
aladie pour mortelle. Sa mort serait nécessaire à
l’
action à laquelle il a consacré toutes ses forces spirituelles et tout
5302
alors affaiblie. Au contraire sa mort donnera de
la
force à son attaque, et lui assurera, pense-t-il, la victoire.84 ⁂
5303
force à son attaque, et lui assurera, pense-t-il,
la
victoire.84 ⁂ De cette œuvre considérable, il ne saurait être quest
5304
rait être question, ici, de résumer ne fût-ce que
les
thèmes directeurs. Il faut y aller voir dans ses livres traduits, et
5305
ut y aller voir dans ses livres traduits, et dans
l’
étude monumentale que Jean Wahl publie ces jours-ci. Mais il sera peut
5306
nt manquer de frapper, de retenir ou de repousser
le
lecteur non prévenu : la « difficulté » de Kierkegaard et sa dialecti
5307
retenir ou de repousser le lecteur non prévenu :
la
« difficulté » de Kierkegaard et sa dialectique du sérieux et de l’ir
5308
de Kierkegaard et sa dialectique du sérieux et de
l’
ironie. Kierkegaard est difficile parce qu’il est simple. « La pureté
5309
erkegaard est difficile parce qu’il est simple. «
La
pureté du cœur, c’est de vouloir une seule chose », écrit-il. Mais ce
5310
s désirs. Il est désespéré, mais c’est à cause de
la
foi. Et s’il espère, c’est « en vertu de l’absurde », c’est-à-dire de
5311
se de la foi. Et s’il espère, c’est « en vertu de
l’
absurde », c’est-à-dire de l’incarnation de Dieu en Christ. On ne peut
5312
c’est « en vertu de l’absurde », c’est-à-dire de
l’
incarnation de Dieu en Christ. On ne peut pas le comprendre : on le so
5313
e l’incarnation de Dieu en Christ. On ne peut pas
le
comprendre : on le souffre. On l’aime, on l’injurie, on se débat sous
5314
Dieu en Christ. On ne peut pas le comprendre : on
le
souffre. On l’aime, on l’injurie, on se débat sous son regard, on arg
5315
On ne peut pas le comprendre : on le souffre. On
l’
aime, on l’injurie, on se débat sous son regard, on argumente contre s
5316
pas le comprendre : on le souffre. On l’aime, on
l’
injurie, on se débat sous son regard, on argumente contre sa souffranc
5317
tte capitulation. On n’étudie pas Kierkegaard, on
l’
attrape comme une maladie. Cet homme sécrète un poison salutaire, dont
5318
sécrète un poison salutaire, dont nul ne trouvera
l’
antidote : qu’il en soit mort, atteste ce fait capital que la pensée h
5319
: qu’il en soit mort, atteste ce fait capital que
la
pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous les autres, sauf Empéd
5320
la pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous
les
autres, sauf Empédocle et Nietzsche, ont refusé de signer de leur san
5321
e et Nietzsche, ont refusé de signer de leur sang
le
pacte qui lie le penseur à Méphisto : expérimentateurs qui se ménagen
5322
nt refusé de signer de leur sang le pacte qui lie
le
penseur à Méphisto : expérimentateurs qui se ménagent un dernier reto
5323
énagent un dernier retour, guerriers qui déposent
les
armes avant la décision mortelle. Concession, la raison de Pascal, et
5324
er retour, guerriers qui déposent les armes avant
la
décision mortelle. Concession, la raison de Pascal, et lors même qu’i
5325
les armes avant la décision mortelle. Concession,
la
raison de Pascal, et lors même qu’il y renonce : concession, la pitié
5326
ascal, et lors même qu’il y renonce : concession,
la
pitié parfois presque sadique de Dostoievsky. Oui, même ceux-là ! Mêm
5327
là ! Même ces deux-là qui sont allés si loin dans
la
passion de l’absolu chrétien, mais seul Kierkegaard en est mort. Une
5328
deux-là qui sont allés si loin dans la passion de
l’
absolu chrétien, mais seul Kierkegaard en est mort. Une pureté presque
5329
icité conquise aux dépens de tout ce qui soutient
l’
homme contre Dieu. Et cependant, dans le pire désespoir, jamais de déf
5330
soutient l’homme contre Dieu. Et cependant, dans
le
pire désespoir, jamais de défi, ni d’« hybris ». Pureté du chrétien,
5331
ieux » de Kierkegaard, il est de nature à tromper
le
lecteur mille manières. On peut se laisser prendre à la fantaisie bar
5332
teur mille manières. On peut se laisser prendre à
la
fantaisie baroque de certaines paraboles, de certaines ironies polémi
5333
’aperçoit qu’elles nous jettent en plein drame de
l’
existence. Kierkegaard déconsidère le sérieux « humain », par l’ironie
5334
ein drame de l’existence. Kierkegaard déconsidère
le
sérieux « humain », par l’ironie de l’éternité. L’éternité, pour lui,
5335
ierkegaard déconsidère le sérieux « humain », par
l’
ironie de l’éternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temp
5336
éconsidère le sérieux « humain », par l’ironie de
l’
éternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquell
5337
e sérieux « humain », par l’ironie de l’éternité.
L’
éternité, pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle le temps f
5338
ternité. L’éternité, pour lui, est une ironie sur
le
temps, à laquelle le temps finira bien par succomber. Mais, ayant tué
5339
pour lui, est une ironie sur le temps, à laquelle
le
temps finira bien par succomber. Mais, ayant tué en lui toute autre v
5340
t tué en lui toute autre vanité que celle de haïr
le
temps — c’est là son dépit amoureux — Kierkegaard peut enfin parler a
5341
ard peut enfin parler avec un sérieux total, dont
l’
écrivain d’aujourd’hui n’a même plus l’idée. Un de nos meilleurs auteu
5342
otal, dont l’écrivain d’aujourd’hui n’a même plus
l’
idée. Un de nos meilleurs auteurs déclarait récemment que le palais de
5343
de nos meilleurs auteurs déclarait récemment que
le
palais de Versailles manque de sérieux. C’était bien vu. Mais notre a
5344
eux, est seul important, mais tant de gens « font
les
importants ». Où est la différence ? C’est que le sérieux vrai est en
5345
mais tant de gens « font les importants ». Où est
la
différence ? C’est que le sérieux vrai est en définitive dans le seul
5346
es importants ». Où est la différence ? C’est que
le
sérieux vrai est en définitive dans le seul acte de foi, qui jette su
5347
C’est que le sérieux vrai est en définitive dans
le
seul acte de foi, qui jette sur nos sérieux, poses et amusettes (ou «
5348
infiniment pire qu’une ironie. Car peut-être que
l’
acte de foi n’existe pas, n’est qu’une figure de rhétorique pieuse, un
5349
ique pieuse, une illusion, un mythe, un saut dans
le
vide, etc. Et alors il n’y a plus nulle part de « vrai » sérieux. Mai
5350
ieux dans ma vie tant que je n’ai pas trouvé dans
la
foi, ou mieux : tant que la foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé
5351
n’ai pas trouvé dans la foi, ou mieux : tant que
la
foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé. Kierkegaard a eu trois des
5352
pirituelles. La première est littéraire : ce sont
les
dramaturges et les poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen.
5353
mière est littéraire : ce sont les dramaturges et
les
poètes du Nord, dont le plus grand nom est Ibsen. La seconde philosop
5354
sont les dramaturges et les poètes du Nord, dont
le
plus grand nom est Ibsen. La seconde philosophique : l’école « existe
5355
s grand nom est Ibsen. La seconde philosophique :
l’
école « existentielle » d’Allemagne, avec Martin Heidegger et Karl Jas
5356
egger et Karl Jaspers. La troisième théologique :
l’
école dialectique, qui sous l’impulsion de Karl Barth est en train de
5357
sième théologique : l’école dialectique, qui sous
l’
impulsion de Karl Barth est en train de sauver l’honneur et l’existenc
5358
l’impulsion de Karl Barth est en train de sauver
l’
honneur et l’existence même des églises allemandes. Nul ne peut mesure
5359
de Karl Barth est en train de sauver l’honneur et
l’
existence même des églises allemandes. Nul ne peut mesurer aujourd’hui
5360
lises allemandes. Nul ne peut mesurer aujourd’hui
le
développement promis à l’influence de Kierkegaard sur notre temps : o
5361
eut mesurer aujourd’hui le développement promis à
l’
influence de Kierkegaard sur notre temps : on le redécouvre après cent
5362
à l’influence de Kierkegaard sur notre temps : on
le
redécouvre après cent ans, on le traduit partout, on publie sur son œ
5363
notre temps : on le redécouvre après cent ans, on
le
traduit partout, on publie sur son œuvre des centaines d’ouvrages et
5364
ges et d’articles. Ce qui est certain, c’est qu’à
la
différence de Nietzsche, personne ne parviendra jamais à « utiliser »
5365
itiques et temporelles. Il se dresse, au seuil de
l’
époque comme la plus formidable accusation vivante contre nos lâchetés
5366
orelles. Il se dresse, au seuil de l’époque comme
la
plus formidable accusation vivante contre nos lâchetés collectivistes
5367
re danois, on peut lire cette inscription nue : «
Le
Solitaire ». Le rire et la passion sévère, le ricanement puissant et
5368
ut lire cette inscription nue : « Le Solitaire ».
Le
rire et la passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amo
5369
te inscription nue : « Le Solitaire ». Le rire et
la
passion sévère, le ricanement puissant et le message d’amour de Kierk
5370
: « Le Solitaire ». Le rire et la passion sévère,
le
ricanement puissant et le message d’amour de Kierkegaard traversent n
5371
e et la passion sévère, le ricanement puissant et
le
message d’amour de Kierkegaard traversent notre âge comme cette pierr
5372
ur silence d’éternité. 82. « Alléluia » : Louez
l’
Éternel. Kierkegaard avait aussi noté, peu de jours auparavant : « Il
5373
sme, une seule tâche comparable à la mienne. Dans
la
‟chrétienté”, elle apparaît pour la première fois. Je le sais, je sai
5374
étienté”, elle apparaît pour la première fois. Je
le
sais, je sais aussi ce qu’il m’en a coûté, ce que j’ai souffert, je p
5375
qu’il m’en a coûté, ce que j’ai souffert, je puis
l’
exprimer par cette seule phrase : ‟Je ne fus pas comme les autres” ».
5376
mer par cette seule phrase : ‟Je ne fus pas comme
les
autres” ». 83. Point de vue explicatif sur mon activité d’auteur (1
5377
sont peu de chose », s’écrie Bossuet (Sermon sur
la
mort, 22 mars 1662). Que dirions-nous alors du sort fait à celui qui
5378
er aux hommes tel qu’il est ? S’entendre dire que
l’
homme en général est peu de chose, n’est pas trop humiliant pour qui s
5379
ur qui se flatte d’une image de soi composée dans
la
solitude : tant qu’on ne s’est pas avoué devant les autres, on peut t
5380
a solitude : tant qu’on ne s’est pas avoué devant
les
autres, on peut toujours s’estimer singulier, c’est-à-dire supérieur
5381
urs s’estimer singulier, c’est-à-dire supérieur à
la
masse. Et ce n’est pas encore franchement s’avouer que de se comparer
5382
s’avouer que de se comparer aux seuls humains que
le
métier ou notre rang social nous met en mesure d’approcher. L’épreuve
5383
notre rang social nous met en mesure d’approcher.
L’
épreuve décisive est celle que l’on subit au contact de voisins que ri
5384
ure d’approcher. L’épreuve décisive est celle que
l’
on subit au contact de voisins que rien en nous, que rien dans notre v
5385
Ce n’est qu’au prix d’un désordre social — selon
les
préjugés du régime établi — que ces rencontres deviennent possibles,
5386
t à la fois se reconnaître en vérité et rejoindre
l’
humanité. Chômage. — On dit souvent qu’il faut à l’homme un minimum
5387
umanité. Chômage. — On dit souvent qu’il faut à
l’
homme un minimum de confort ou d’aisance matérielle pour pouvoir réflé
5388
intellectuel » au chômage absolu, c’est-à-dire à
l’
arrêt de la pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel es
5389
el » au chômage absolu, c’est-à-dire à l’arrêt de
la
pensée, tout au moins de la pensée créatrice. Mais quel est ce certai
5390
t-à-dire à l’arrêt de la pensée, tout au moins de
la
pensée créatrice. Mais quel est ce certain degré ? À quel niveau plac
5391
? À quel niveau placer cette limite inférieure ?
La
question paraît insoluble dès qu’on la pose dans le concret d’une vie
5392
férieure ? La question paraît insoluble dès qu’on
la
pose dans le concret d’une vie connue. Prenons deux hommes qui furent
5393
question paraît insoluble dès qu’on la pose dans
le
concret d’une vie connue. Prenons deux hommes qui furent tous deux de
5394
mes qui ont écrit chacun une vingtaine de volumes
l’
espace de dix ans : Kierkegaard et Nietzsche. Le premier était riche e
5395
il ne lui restait plus même une chemise entière :
les
morceaux du bras avant servi à rapiécer les épaules et le plastron. L
5396
ère : les morceaux du bras avant servi à rapiécer
les
épaules et le plastron. Le peu d’argent de sa retraite de professeur
5397
aux du bras avant servi à rapiécer les épaules et
le
plastron. Le peu d’argent de sa retraite de professeur servait à paye
5398
vant servi à rapiécer les épaules et le plastron.
Le
peu d’argent de sa retraite de professeur servait à payer ses logeuse
5399
seur servait à payer ses logeuses successives, et
les
remèdes contre ses effroyables maux de tête. De plus, il était à demi
5400
sent concevoir d’autres buts à leur existence que
la
recherche d’un gain précaire. Mais à ceux qui ont quelque chose, il f
5401
ceux qui ont quelque chose, il faut rappeler que
la
recherche du confort est ce qui s’oppose le plus radicalement à toute
5402
r que la recherche du confort est ce qui s’oppose
le
plus radicalement à toute culture véritable. Île de R. — La nuit !
5403
calement à toute culture véritable. Île de R. —
La
nuit ! Je l’avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette
5404
ute culture véritable. Île de R. — La nuit ! Je
l’
avais oubliée à Paris. La nuit des villes n’est pas cette mort opaque
5405
Île de R. — La nuit ! Je l’avais oubliée à Paris.
La
nuit des villes n’est pas cette mort opaque dont il faut redouter je
5406
ge et circulante, pleine de rumeurs, comparable à
la
fièvre. Plus lucide souvent que les jours. Ici, tout repose complètem
5407
, comparable à la fièvre. Plus lucide souvent que
les
jours. Ici, tout repose complètement. Un silence implacable et mat en
5408
omplètement. Un silence implacable et mat enserre
l’
homme qui chemine sur la route incertaine, au milieu des menaces origi
5409
implacable et mat enserre l’homme qui chemine sur
la
route incertaine, au milieu des menaces originelles. Par temps clair,
5410
milieu des menaces originelles. Par temps clair,
les
étoiles sont très grosses et molles au-dessus du jardin. Mais il arri
5411
et molles au-dessus du jardin. Mais il arrive que
le
noir soit compact. Je me dirige à peu près le long de l’allée unique,
5412
soit compact. Je me dirige à peu près le long de
l’
allée unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la
5413
irige à peu près le long de l’allée unique, entre
les
rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans l’o
5414
e unique, entre les rosiers. Je trouve, à tâtons,
le
verrou de la porte du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici le
5415
re les rosiers. Je trouve, à tâtons, le verrou de
la
porte du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici les rues du vil
5416
ve, à tâtons, le verrou de la porte du fond, dans
l’
odeur des lauriers épais. Voici les rues du village, illuminées comme
5417
e du fond, dans l’odeur des lauriers épais. Voici
les
rues du village, illuminées comme un décor blanc et vert. Des chiens
5418
soudain en gémissant. J’ai des lettres à porter à
l’
autobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et l’écho
5419
utobus. Il faut s’éloigner du village. De nouveau
le
noir, et l’écho de mes pas contre les murs des maisons mortes. Je me
5420
aut s’éloigner du village. De nouveau le noir, et
l’
écho de mes pas contre les murs des maisons mortes. Je me glisse dans
5421
. De nouveau le noir, et l’écho de mes pas contre
les
murs des maisons mortes. Je me glisse dans le hangar de la grosse voi
5422
re les murs des maisons mortes. Je me glisse dans
le
hangar de la grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’à ce que je renc
5423
es maisons mortes. Je me glisse dans le hangar de
la
grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’à ce que je rencontre l’ouver
5424
re et tâte ses flancs jusqu’à ce que je rencontre
l’
ouverture de la boîte aux lettres. De loin, le village apparaît fantas
5425
flancs jusqu’à ce que je rencontre l’ouverture de
la
boîte aux lettres. De loin, le village apparaît fantastique : les bec
5426
tre l’ouverture de la boîte aux lettres. De loin,
le
village apparaît fantastique : les becs de gaz, très bas, éclairent q
5427
ttres. De loin, le village apparaît fantastique :
les
becs de gaz, très bas, éclairent quelques façades blanches, carrés et
5428
arrés et rectangles détachés violemment au bas de
l’
énorme nuit. On ne voit que ces figures géométriques, dominées par le
5429
e voit que ces figures géométriques, dominées par
le
clocher à toit plat, et des fragments de silhouettes d’arbres devant
5430
, et des fragments de silhouettes d’arbres devant
les
maisons. La rumeur de la mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouve
5431
ments de silhouettes d’arbres devant les maisons.
La
rumeur de la mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouveau cet étran
5432
ouettes d’arbres devant les maisons. La rumeur de
la
mer arrive par bouffées. Puis c’est de nouveau cet étrange écho des p
5433
nouveau cet étrange écho des pas, si proche dans
les
rues vides, et les mêmes chiens qui reviennent, et pas une âme. « Val
5434
e écho des pas, si proche dans les rues vides, et
les
mêmes chiens qui reviennent, et pas une âme. « Vallée de l’ombre de l
5435
hiens qui reviennent, et pas une âme. « Vallée de
l’
ombre de la mort… étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus que
5436
eviennent, et pas une âme. « Vallée de l’ombre de
la
mort… étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus que dans cette
5437
e de l’ombre de la mort… étranger et voyageur sur
la
terre… » Jamais plus que dans cette nuit. Fin de séjour à A… (Gard)
5438
Gard). — Tout est en place. Je garderai toutefois
le
plan d’aménagement et de décoration des trois chambres du premier éta
5439
ois chambres du premier étage, on ne sait jamais…
Les
vingt-deux pièces du dessus de cheminée ont été replacées au millimèt
5440
llimètre, dans une symétrie impeccable. Mais tout
l’
effet de notre labeur risque d’être détruit par une odieuse malice du
5441
deuxième un lourd sommier pour en faire un divan.
L’
escalier est étroit. La descente s’était opérée sans trop de mal lors
5442
er pour en faire un divan. L’escalier est étroit.
La
descente s’était opérée sans trop de mal lors de notre arrivée. Mais
5443
rs de notre arrivée. Mais nous n’avions pas prévu
la
remontée ! Épuisés par une demi-heure d’efforts haletants, qui n’ont
5444
’efforts haletants, qui n’ont abouti qu’à coincer
le
sommier au tournant, entre la balustrade et les parois de la cage d’e
5445
abouti qu’à coincer le sommier au tournant, entre
la
balustrade et les parois de la cage d’escalier — au surplus fortement
5446
er le sommier au tournant, entre la balustrade et
les
parois de la cage d’escalier — au surplus fortement rayées — nous avo
5447
au tournant, entre la balustrade et les parois de
la
cage d’escalier — au surplus fortement rayées — nous avons couru impl
5448
plus fortement rayées — nous avons couru implorer
l’
aide de Simard. « Ce cochon-là » refuse, prétextant une hernie ; sa fe
5449
sa jambe « coupée ». (Bonne occasion pourtant de
la
décrocher un peu pour toucher davantage à l’assurance !) Il a bien fa
5450
t de la décrocher un peu pour toucher davantage à
l’
assurance !) Il a bien fallu se rendre à l’évidence : ce sommier impla
5451
tage à l’assurance !) Il a bien fallu se rendre à
l’
évidence : ce sommier implacable restera dans l’escalier comme témoin
5452
à l’évidence : ce sommier implacable restera dans
l’
escalier comme témoin des bouleversements que nous avons infligés à la
5453
oin des bouleversements que nous avons infligés à
la
maison. Pas question d’aller quérir du renfort à A. Il faut encore bo
5454
ler quérir du renfort à A. Il faut encore boucler
les
valises, descendre mes caisses de livres à la gare, etc., et le train
5455
er les valises, descendre mes caisses de livres à
la
gare, etc., et le train part dans une heure. Quand la propriétaire re
5456
scendre mes caisses de livres à la gare, etc., et
le
train part dans une heure. Quand la propriétaire reviendra pour l’été
5457
are, etc., et le train part dans une heure. Quand
la
propriétaire reviendra pour l’été, elle se heurtera à ce sommier monu
5458
s une heure. Quand la propriétaire reviendra pour
l’
été, elle se heurtera à ce sommier monumental dans sa pose scandale et
5459
te des « gens » en général — quand je ne fais que
les
jauger d’un regard — et sympathie violente, « élan vers », dès que mo
5460
n visage, au corps et aux vêtements, aux mains, à
l’
attitude distraite et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends le
5461
e et vraie d’un être isolé près de moi. Je prends
le
métro, malgré l’odeur de buanderie et ce relent de fauves de certains
5462
tre isolé près de moi. Je prends le métro, malgré
l’
odeur de buanderie et ce relent de fauves de certains parfums de femme
5463
garder des êtres et vivre un moment auprès d’eux,
le
temps de trois stations, le temps d’imaginer une rencontre, un échang
5464
moment auprès d’eux, le temps de trois stations,
le
temps d’imaginer une rencontre, un échange spontané, une de ces décou
5465
lescent — et sûrement ce serait bien autre chose…
La
femme descend sans se retourner ; l’homme déplie un journal que je n’
5466
autre chose… La femme descend sans se retourner ;
l’
homme déplie un journal que je n’aime pas, qu’il a peut-être acheté to
5467
plus pourquoi j’ai eu ce fort désir soudain, dans
le
métro, de tutoyer mes compagnons de route. Était-ce envie de donner o
5468
le maintenant que j’écris, que c’est profondément
le
même mouvement, l’amour. La même déception de l’amour, parce rien ne
5469
’écris, que c’est profondément le même mouvement,
l’
amour. La même déception de l’amour, parce rien ne s’est produit, rien
5470
ue c’est profondément le même mouvement, l’amour.
La
même déception de l’amour, parce rien ne s’est produit, rien ne peut
5471
le même mouvement, l’amour. La même déception de
l’
amour, parce rien ne s’est produit, rien ne peut se produire, pour tan
5472
es que nous tous. — Et alors, dira-t-on : « Faire
la
révolution ! » — Ce substitut, ce renvoi aux calendes de la Grande Co
5473
ion ! » — Ce substitut, ce renvoi aux calendes de
la
Grande Communication… Montparnasse. — Stupidité triste, parfois ins
5474
, « bagnoles », « Paris-Soir », « on se défend… »
La
grosse petite bonne qui tire sa robe à fleurs sur le quai désert du m
5475
grosse petite bonne qui tire sa robe à fleurs sur
le
quai désert du métro, enfin un être vrai. Conclusion. — S’occuper d
5476
uper des « petits-faits-vrais » vaut mieux que de
les
ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force
5477
faits-vrais » vaut mieux que de les ignorer. Mais
l’
excellent, c’est de parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on
5478
es ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à
les
ignorer avec force, une fois qu’on les a bien connus, dans leur réali
5479
parvenir à les ignorer avec force, une fois qu’on
les
a bien connus, dans leur réalité sordide. Un petit fait vrai vaut plu
5480
embrassée avec force au mépris de soi-même et de
l’
utilité. Car elle peut devenir le fait dominateur. En vérité, il n’y a
5481
e soi-même et de l’utilité. Car elle peut devenir
le
fait dominateur. En vérité, il n’y a pas de faits grands ou petits en
5482
u près digne de ce nom, un fait qui commande tous
les
autres et qui est la mesure de tout. Quand tu l’auras connu et accept
5483
, un fait qui commande tous les autres et qui est
la
mesure de tout. Quand tu l’auras connu et accepté — tu es seul à pouv
5484
les autres et qui est la mesure de tout. Quand tu
l’
auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir le connaître — lève-toi
5485
u l’auras connu et accepté — tu es seul à pouvoir
le
connaître — lève-toi et regarde les choses, les gestes incongrus et m
5486
seul à pouvoir le connaître — lève-toi et regarde
les
choses, les gestes incongrus et mécaniques des autres : écoute bien c
5487
ir le connaître — lève-toi et regarde les choses,
les
gestes incongrus et mécaniques des autres : écoute bien ce qu’ils dis
5488
s autres : écoute bien ce qu’ils disent à travers
les
paroles qu’ils croient dire : essaie de les comprendre quand ils se p
5489
avers les paroles qu’ils croient dire : essaie de
les
comprendre quand ils se plaignent ou quand ils rient : tu ne verras,
5490
qui est plus fort que toi. Car il est tout ce que
le
monde attend, attend de toute éternité pour aujourd’hui et de toi seu
5491
hez son beau-frère. Il était adversaire du prêt à
l’
intérêt, condamné par l’église primitive. Il donnait à qui voulait. Ap
5492
tait adversaire du prêt à l’intérêt, condamné par
l’
église primitive. Il donnait à qui voulait. Après sa mort, on s’aperçu
5493
on s’aperçut qu’il ne restait que 250 francs dans
le
coffre. aa. Rougemont Denis de, « Nouvelles pages du Journal d’un i