1
6)d Aucun ouvrage ne se passe mieux de préface
qu’
un bon roman. Pourtant la réussite de Max Brod n’est pas seulement de
2
e de Garta, dont le lecteur ne tardera pas à voir
qu’
il figure la conscience exigeante, et comme le juge incorruptible et a
3
andir : Franz Kafka. De cet esprit incomparable —
qu’
on l’entende aux deux sens du terme —, un seul ouvrage a paru en franç
4
muler sa réaction, voilà sans doute l’explication
qu’
il faut donner à l’espèce de résistance que rencontre Kafka parmi nous
5
cation qu’il faut donner à l’espèce de résistance
que
rencontre Kafka parmi nous. Rien ne me paraît plus propre à la réduir
6
nous. Rien ne me paraît plus propre à la réduire
que
le détour auquel a recouru Max Brod ; la biographie romanesque, l’app
7
oche vivante de la personne même de Kafka dans ce
qu’
elle eut de quotidien et de très simplement communicable. Encore faut-
8
s simplement communicable. Encore faut-il montrer
que
ce détour n’est pas un artifice gratuit. Vieux Pragois lui aussi, Br
9
es œuvres, pour une très grande part inédites, et
que
Kafka lui-même, par l’excès d’un scrupule à la fois artistique et rel
10
ule à la fois artistique et religieux, souhaitait
que
l’on détruisît. Max Brod s’est expliqué sur ce point délicat dans une
11
jointe à l’édition posthume du Procès : je doute
que
les lecteurs de ce livre étonnant, le plus profond qu’on puisse imagi
12
es lecteurs de ce livre étonnant, le plus profond
qu’
on puisse imaginer, aient le courage de le lui reprocher. La piété mêm
13
ent le courage de le lui reprocher. La piété même
que
voue Max Brod à la mémoire de son ami le retint d’entreprendre au len
14
r de prolonger le merveilleux dialogue interrompu
que
l’auteur du Royaume enchanté attribue aujourd’hui l’inspiration de ce
15
ériences et préoccupations sociales, les lectures
qu’
il fait à son ami, la brève idylle de Weimar… tout cela compose une de
16
à Vienne en 1924. Il n’avait publié de son vivant
qu’
un petit nombre de récits. Mais on trouva dans ses papiers les manuscr
17
s : Le Procès, Le Château, et Amérique. Le regard
qu’
il y porte sur le monde est d’une précision proprement angoissante. Il
18
otre vie quotidienne, mais avec une minutie telle
qu’
on ne tarde pas à pressentir que la plupart de nos démarches sous-ente
19
une minutie telle qu’on ne tarde pas à pressentir
que
la plupart de nos démarches sous-entendent et masquent à peine une fo
20
une foncière absurdité. L’état d’extrême lucidité
que
suscite en nous cette vision ressemble à s’y méprendre à un cauchemar
21
plus sobre de notre humaine condition. On dirait
qu’
il incite ses héros à pratiquer contre la vie bourgeoise une espèce de
22
rs tâches banales et de leurs relations sociales,
qu’
ils en découvrent et en dénoncent l’impossibilité foncière. À serrer d
23
ns la vie de son héros, Kafka nous amène à penser
que
le détail de l’existence banale, et le sentiment d’étrangeté qui parf
24
s’expliquent de la manière la plus logique sitôt
qu’
on les rapporte à un fait initial mystérieux et d’apparence extravagan
25
les préoccupations sociales de « Garta », telles
que
nous les décrit Max Brod, aideront à deviner la nature assez rare du
26
de l’angoisse dérivent sans doute de Kierkegaard,
qu’
il fut l’un des premiers à découvrir au xxe siècle. D’autre part, sa
27
admiration pour Goethe. Rien n’est plus suggestif
que
cette rencontre en un seul homme de deux influences aussi contradicto
28
accepte ; mais dans cette mesure même, il se peut
qu’
il cesse d’être humain. Car l’homme n’a d’existence proprement humaine
29
n. Car l’homme n’a d’existence proprement humaine
que
lorsqu’il participe à la transformation du monde. Autrement, il est a
30
radation. Ceux qui ne croient pas à l’acte, c’est
qu’
ils ne connaissent plus aucun chemin. Comment marcher, s’il n’existe p
31
té. En vérité, toutes les démonstrations savantes
qu’
on nous a faites depuis un siècle pour nous prouver que l’acte est imp
32
nous a faites depuis un siècle pour nous prouver
que
l’acte est impossible et que le tout de l’homme est soumis au calcul,
33
le pour nous prouver que l’acte est impossible et
que
le tout de l’homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences
34
t le chemin Christ est la Vérité dans ce sens
qu’
être la vérité est la seule explication vraie de la vérité… Être la vé
35
ité ; et nul homme ne connaît davantage de vérité
qu’
il n’en incarne.3 Voici donc le mystère : s’il n’y a pas de chemin,
36
suis le chemin ». Mais un chemin n’est un chemin
que
si on y marche4. Sinon il n’est qu’un point de vue ; ou bien encore l
37
est un chemin que si on y marche4. Sinon il n’est
qu’
un point de vue ; ou bien encore le lieu d’un pur possible, et sur ces
38
croire au Paradoxe de l’incarnation, c’est croire
que
Dieu a revêtu la forme de ce monde, c’est croire donc que cette forme
39
a revêtu la forme de ce monde, c’est croire donc
que
cette forme peut être transformée. — à vrai dire, en vertu du paradox
40
u du paradoxe le plus fou. Nous ne pouvons agir «
qu’
en vertu de l’absurde » ; mais cela seul donne un sens à nos vies. Alo
41
lois qui nous disaient d’agir dans le même temps
qu’
elles nous privaient de tout pouvoir, s’évanouissent et meurent aux pa
42
et la norme de toutes les normes. Au premier pas
que
nous faisons dans notre nuit, voici que le chemin s’éclaire et que le
43
emier pas que nous faisons dans notre nuit, voici
que
le chemin s’éclaire et que les perspectives se dégagent. Et nous allo
44
dans notre nuit, voici que le chemin s’éclaire et
que
les perspectives se dégagent. Et nous allons connaître maintenant que
45
se dégagent. Et nous allons connaître maintenant
que
seul l’acte de foi est création, transformation, nouveauté pure dans
46
ternité qui vient à nous. 2. Il n’est d’action
que
prophétique Qu’est-ce que prophétiser sinon dire la Parole qui dét
47
nous. 2. Il n’est d’action que prophétique
Qu’
est-ce que prophétiser sinon dire la Parole qui détermine notre avenir
48
2. Il n’est d’action que prophétique Qu’est-ce
que
prophétiser sinon dire la Parole qui détermine notre avenir ? Mais la
49
étermine notre avenir ? Mais la Parole n’est dite
que
dans la foi, la foi n’existe que dans l’acte, et cet acte devient alo
50
arole n’est dite que dans la foi, la foi n’existe
que
dans l’acte, et cet acte devient alors notre chemin et notre loi. Ain
51
min et notre loi. Ainsi nous ne pouvons connaître
que
ce que nous prophétisons. Le chrétien marche dans la nuit en créant s
52
notre loi. Ainsi nous ne pouvons connaître que ce
que
nous prophétisons. Le chrétien marche dans la nuit en créant sa lumiè
53
lumière, chemin toujours imprévisible, certitude
que
devinent les pas, chemin qui se dérobe au doute et à l’orgueil, mais
54
hemin qui se dérobe au doute et à l’orgueil, mais
que
parfois la prophétie fait briller devant lui comme un éclair. « Sache
55
fait briller devant lui comme un éclair. « Sachez
qu’
à l’origine, — lit-on dans un dialogue de Kassner6 — toutes les créatu
56
, pareils aux prophètes. C’est de ce commencement
que
chaque chose tire sa force et son temps ; toute créature languit aprè
57
e qui prophétise ? Le chemin est imprévisible. Ce
que
nous connaissons, c’est pourtant son point de départ. Le chemin comme
58
tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ordre
qu’
il reçoit de Dieu, — n’importe où et n’importe qui, à n’importe quel o
59
chrétienne, — ose la mettre en pratique. L’action
que
tu introduiras ainsi dans la réalité portera la marque de l’absolu :
60
ans une sorte d’humour — dans l’aventure de celui
que
rien ne protège et la prudence de celui qui écoute, dans le tourment
61
emin, mais bien à l’inventer à chaque pas Tant
que
nous considérons le Christ avec des yeux de moralistes, comme une per
62
es, comme une personnalité morale de premier plan
qu’
il ne resterait plus qu’à imiter, l’acte demeure un pur possible, un m
63
té morale de premier plan qu’il ne resterait plus
qu’
à imiter, l’acte demeure un pur possible, un modèle d’acte, une abstra
64
acte, une abstraction, c’est-à-dire quelque chose
que
nous pouvons imaginer sans pour autant nous transformer, et c’est bie
65
quoi ? Parce que « le chemin » est invisible tant
qu’
on n’y est pas engagé. Parce que c’est un blasphème de l’homme pieux,
66
’est un blasphème de l’homme pieux, du moraliste,
que
de prétendre imiter le modèle que ses yeux voient et que sa chair per
67
, du moraliste, que de prétendre imiter le modèle
que
ses yeux voient et que sa chair perçoit (à la lecture des évangiles p
68
prétendre imiter le modèle que ses yeux voient et
que
sa chair perçoit (à la lecture des évangiles par exemple) au lieu d’é
69
rt de plaire, constamment exalté par la certitude
que
l’on est aimé maintenant, et même si l’effort échoue »8. Parce qu’il
70
le seul acte possible à l’homme. Et c’est l’acte
que
Dieu initie. 4. « Par rapport à l’absolu, il n’existe qu’un seul t
71
itie. 4. « Par rapport à l’absolu, il n’existe
qu’
un seul temps : le présent »9 Nous ne connaissons rien du Christ,
72
ec notre durée, et l’on n’en peut n’en dire sinon
qu’
il s’est produit, et qu’il peut se produire sans que rien y prépare. «
73
n’en peut n’en dire sinon qu’il s’est produit, et
qu’
il peut se produire sans que rien y prépare. « Car Dieu peut tout à to
74
iennent ; c’est pourquoi nous n’avons plus d’être
que
par la foi, « substance des choses espérées », et c’est pourquoi la P
75
», et c’est pourquoi la Parole, parmi nous, n’est
que
promesse et vigilante prophétie de l’invisible. De Séir, une voix cri
76
Séir, une voix crie au prophète11 : « Sentinelle,
que
dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? — La sentinel
77
« Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? Sentinelle,
que
dis-tu de la nuit ? — La sentinelle a répondu : Le matin vient, et la
78
ne perdit point Isaac ; c’est par la foi d’abord
qu’
il le reçut »14. 5. Le temps de l’acte est renaissance, initiation
79
ux moments réels d’une vie d’homme, s’il est vrai
que
Dieu Seul est réel, ce sont la naissance et la mort, parce qu’ils son
80
l’anarchie et sur la loi individuelle. C’est ici
qu’
on touche au mystère, sans lequel tout serait absurde : acte détruit l
81
ns le même instant et la mort et la vie des êtres
qu’
il promet à l’existence ; mais détruisant le temps, il le recrée et le
82
ion absolue, mais un acte de l’homme n’est jamais
qu’
une rédemption. Distinction de théologien, et qui veut prévenir l’orgu
83
doit agir, s’il veut juger de soi selon le succès
qu’
il remporte, n’arrivera jamais à rien entreprendre. Même si le succès
84
rien au héros ; car le héros n’a connu son succès
que
lorsque tout était fini ; et ce n’est point par le succès qu’il fut h
85
tout était fini ; et ce n’est point par le succès
qu’
il fut héros, mais par son entreprise »15. Le temps de l’acte vient s’
86
mort et de la vie a mis des marques victorieuses.
Qu’
est-ce que la personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vis
87
la vie a mis des marques victorieuses. Qu’est-ce
que
la personne ? C’est la vision et le visage du héros, sa vision contre
88
spoir Nous savons tous cela, comme nous savons
qu’
il faut mourir : sans y croire. À vrai dire, nous avons toutes les rai
89
ons toutes les raisons d’en douter, s’il est vrai
que
le doute est révolte, et qu’il faut pour se l’avouer la joie qui naît
90
outer, s’il est vrai que le doute est révolte, et
qu’
il faut pour se l’avouer la joie qui naît de l’acte de la foi. Lorsque
91
illusion du désespoir, qui consiste à s’imaginer
que
l’acte est puissance de l’homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Cel
92
e l’homme : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui
que
la foi vint saisir sait maintenant que l’acte est le contraire du dés
93
ser. Celui que la foi vint saisir sait maintenant
que
l’acte est le contraire du désespoir. Mais il le sait d’une tout autr
94
désespoir. Mais il le sait d’une tout autre façon
que
le désespéré ne l’imagine. Parce que le rapport du désespoir à l’acte
95
e et sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine
que
l’acte viendra comme un sursaut de joie, comme une révolte, comme une
96
e la preuve enfin de son moi, — mais il sait bien
qu’
il n’en a pas, ou que son moi est désespoir, c’est-à-dire qu’il n’y cr
97
son moi, — mais il sait bien qu’il n’en a pas, ou
que
son moi est désespoir, c’est-à-dire qu’il n’y croit pas et qu’il ne c
98
a pas, ou que son moi est désespoir, c’est-à-dire
qu’
il n’y croit pas et qu’il ne croit à aucun acte. Il vit dans le désir
99
st désespoir, c’est-à-dire qu’il n’y croit pas et
qu’
il ne croit à aucun acte. Il vit dans le désir et dans la nostalgie, e
100
itation, sensualité et envie… Ainsi l’acte absolu
qu’
il imagine serait sa mort, — et c’est pourquoi il n’y croit pas. Nul n
101
faudrait donc… la créer ? « L’homme ne peut faire
qu’
une seule chose en toute sobriété, c’est l’absolu »17. Entre le désesp
102
é et l’absolu, il y a tout ce romantisme qui veut
que
l’acte soit puissance et jouissance, il y a ce moi de désir qui veut
103
ce et jouissance, il y a ce moi de désir qui veut
que
l’acte — l’instant ! — soit durée… Mais l’absolu qui vient jucher nos
104
eçue d’ailleurs, une rupture de tout drame humain
que
nous pussions prévoir, désirer et décrire ; une rupture et une vision
105
a Parole de Dieu, — la prophétie dans l’immédiat.
Que
s’est-il donc passé ? Me voici seul sur le chemin ; mais je vois des
106
t menaçante. Nous ne voyons aucun visage ailleurs
que
dans l’acte d’aimer. 7. Toute vocation est sans précédent Car e
107
étie justement ! — et c’est de la seule prophétie
que
relèvent la réalité et le sérieux, le risque et la splendeur d’une vi
108
vie d’homme. L’homme se distingue du singe en ce
qu’
il prophétise, uniquement, et dès l’origine. C’est pourquoi l’homme a
109
st pourquoi l’homme a un visage et une vision, ce
que
n’ont pas les animaux ; c’est pourquoi l’homme est héroïque. Il faut
110
Kierkegaard a très peu parlé de vocation18. C’est
qu’
il parle sa vocation et ne s’en distingue jamais. Cependant il est hor
111
distingue jamais. Cependant il est hors de doute
qu’
il eut conscience de cet aspect particulier de son destin qui qualifie
112
alors que la foi véritable est celle du solitaire
que
plus rien ne soutient, hors la foi ? « Celui qui ne renonce pas à la
113
tu de l’absurde ». L’homme ne peut être déterminé
que
par son Dieu ou par « le monde », il faut choisir. Il faut être un ch
114
Il vit dans la forme du monde : et ce n’est point
qu’
elle soit pour lui réelle, elle est seulement la moins invraisemblable
115
tien qui marche dans la nouveauté ne prend mesure
que
de ce qu’il transforme. Sa connaissance est acte et vision prophétiqu
116
arche dans la nouveauté ne prend mesure que de ce
qu’
il transforme. Sa connaissance est acte et vision prophétique. La mesu
117
du temps de sa vie réside dans la seule vocation
qu’
il incarne. Sur le chemin qui commence à ses pas, il ne meurt jamais p
118
ne meurt jamais par surprise : et ce n’est point
qu’
il ait connu le jour et l’heure, mais il connaît l’instant, s’il vit d
119
voulu croire. Chez les hindous, elle n’est encore
qu’
une forme de l’agitation humaine. Pour le chrétien seul elle signifie
120
a pas de biographie. Rien ne serait plus ridicule
que
de tenter de faire la psychologie d’un prophète, ou bien alors elle s
121
pasteur de campagne, par exemple. C’est, dit-il,
que
sa consigne est de « tenir bon en souffrant ». Le presbytère de campa
122
lution commode, surtout en regard des souffrances
qu’
il sait trop bien que lui vaudront ses attaques contre l’Église établi
123
nt affligeant dans l’existence du bourgeois c’est
qu’
elle est entièrement déterminée jusqu’à la mort, mais que la mort surv
124
est entièrement déterminée jusqu’à la mort, mais
que
la mort survient comme une absurdité, la première dans l’histoire du
125
tout, dit Alice. Ils se disputent tous tellement
qu’
ils vous assourdissent. Ils ne suivent pas la règle du jeu et je ne sa
126
règle du jeu et je ne sais même pas s’ils savent
qu’
il y en a une. Alice au Pays des Merveilles On peut penser que notre
127
une. Alice au Pays des Merveilles On peut penser
que
notre langue est plus malade que n’était le latin à l’époque de la Re
128
On peut penser que notre langue est plus malade
que
n’était le latin à l’époque de la Renaissance24. Le latin de Bembo et
129
teur moyen trouve parfaitement normal de déclarer
que
« c’est du latin » pour ses oreilles, mais encore il existe autant de
130
es, mais encore il existe autant de ces latins-là
que
de chapelles littéraires, que d’écoles philosophiques, que de théorie
131
nt de ces latins-là que de chapelles littéraires,
que
d’écoles philosophiques, que de théories politiques. Ainsi les mots n
132
apelles littéraires, que d’écoles philosophiques,
que
de théories politiques. Ainsi les mots n’ont plus le même sens pour l
133
commun. La plupart des débats qui nous occupent,
qu’
il s’agisse de politique, de religion ou de littérature, nous offrent
134
r fantaisie, chacun croyant gagner à sa façon, et
que
les autres trichent ou font défaut. N’est-ce pas la partie de croquet
135
errain en hurlant au hasard son cri de guerre : «
Qu’
on lui coupe la tête ! » — Ainsi nos mots se déforment entre nos mains
136
condamnations d’autant plus excessives d’ailleurs
que
personne ne se soucie de les mettre à exécution25. « Vous n’avez pas
137
es instruments du jeu philosophique, ou politique
que
nous sommes en train de jouer, écrivains ou lecteurs, citoyens ou hom
138
se se faire l’accord. Or, sans parler des 29 sens
que
Littré donne, pour le seul mot : esprit, si j’interroge au hasard ceu
139
ntre les menaces dites matérialistes, je constate
qu’
on entend par ce mot tantôt l’intelligence, tantôt le Saint-Esprit, ta
140
ui auraient dû « s’entendre » et s’allier : c’est
que
pour l’un, esprit signifie évasion, spiritualisme et duperie bourgeoi
141
ne révolution. Mais là, aux neuf sens très précis
que
nous donne le dictionnaire, il nous faut ajouter une dizaine de sens
142
reusement chargés de passion et de préjugés, tels
que
patriotisme, nationalisme, impérialisme… ⁂ Tout concourt à créer et a
143
paraissaient leurs œuvres capitales. Et je doute
qu’
un Meyerson sont sérieusement compris et discuté par beaucoup plus de
144
compris et discuté par beaucoup plus de personnes
que
Descartes n’en convainquit de son vivant. Cependant les journaux du s
145
populaires à grand tirage, voilà tout un domaine
que
l’écrivain digne du nom ne contrôle pas, ne forme pas, n’atteint même
146
e pas, ne forme pas, n’atteint même pas. On a dit
que
cette « seconde zone culturelle » préparait peu à peu un public pour
147
ntre, on peut très nettement constater le déficit
que
représente pour la culture, la création de ces grandes zones d’échang
148
eurs appartements. Écrire dès lors n’est pour eux
que
tromper un besoin d’expression qui n’a plus de mission réelle. C’est
149
ment de l’unité sacrée. Ainsi toujours : pour peu
que
le sens des fins vienne à faiblir et que la mesure commune cesse d’êt
150
pour peu que le sens des fins vienne à faiblir et
que
la mesure commune cesse d’être effectivement perçue et observée, l’on
151
ue cesse d’exercer aucun contrôle sur son parler,
qu’
elle ne soumet plus à un but unanime. Si bien que les écrivains ne son
152
les écrivains ne sont plus compris du peuple, et
que
la langue vulgaire s’encombre d’équivoques, de confusions et de malen
153
ement la ruine de la communauté, par le seul fait
qu’
il ruine le langage. Cette absence d’un principe communautaire vivant
154
s. Ils échangent des paroles en plus grand nombre
que
jamais, et ne se disent rien qui compte. « Paroles vaines, serments f
155
a parole se détruit, quand elle n’est plus le don
qu’
un homme fait à un homme, et qui engage quelque chose de son être, c’e
156
une coutume ancestrale : dans les villes. Mais ce
que
l’homme ne fait pas pour l’homme, le diable le fait à sa place, et co
157
, le diable le fait à sa place, et contre l’homme
qu’
il séduit et qu’il trompe. Cette fin commune, cet idéal commun que nou
158
ait à sa place, et contre l’homme qu’il séduit et
qu’
il trompe. Cette fin commune, cet idéal commun que nous devions servir
159
qu’il trompe. Cette fin commune, cet idéal commun
que
nous devions servir ensemble dans la fraternité que crée l’œuvre unan
160
e nous devions servir ensemble dans la fraternité
que
crée l’œuvre unanime, nous les cherchions en vain, et sans le savoir,
161
erchions en vain, et sans le savoir, dans la cité
qu’
on nous a faite. C’est une faim, une soif, une nostalgie que tous nos
162
a faite. C’est une faim, une soif, une nostalgie
que
tous nos gestes, à notre insu, trahissent. Mais quelqu’un s’en est ap
163
trouve en effet le symbole agrandi d’un désespoir
qu’
il sent vivre dans tous les cœurs. L’homme d’aujourd’hui méprise les r
164
e d’aujourd’hui méprise les religions. Il sait ce
qu’
il faut penser des prêtres et des sorciers. On lui donnera donc autre
165
ordre politiques, tels sont les ersatz pitoyables
que
nous proposent l’Argent et l’État. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous
166
t. Gîovinezza ! Tod den Juden ! Nous ferons mieux
que
l’Amérique ! Achetez français ! Passez vos vacances à la mer ! C’est
167
is ! Passez vos vacances à la mer ! C’est avec ça
qu’
on fait les bons fascistes, les bons nazis, les vertueux komsomols, le
168
ence commune aux grandes masses européennes, quel
que
soit leur régime politique. Ainsi la mesure n’est plus cette loi qui
169
vivons à l’âge des mots d’ordre. L’on peut penser
que
c’est une espèce de progrès sur l’âge des clichés bourgeois. Mais si
170
. Mais si les mots d’ordre sont faux ? Si l’ordre
qu’
ils imposent est arbitraire, ou s’il ne mise que sur l’indignité humai
171
e qu’ils imposent est arbitraire, ou s’il ne mise
que
sur l’indignité humaine ? Et si la propagande et la publicité qui ont
172
communs spirituels et effectifs ne nous ordonnent
qu’
à des fins provisoires ou dégradantes : l’État totalitaire, et la rich
173
: l’État totalitaire, et la richesse matérielle ?
Que
vaut alors cette communauté de réflexes et d’obsession ? N’est-elle p
174
lture, si la culture est justement la part active
que
prend l’homme à tout ce qui est création dans la nature, dans l’histo
175
ès fort parce qu’ils se sentent très loin de ceux
qu’
ils interpellent, et qu’ils traitent comme des sourds. 26. Contrairem
176
sentent très loin de ceux qu’ils interpellent, et
qu’
ils traitent comme des sourds. 26. Contrairement à ce qui se passe no
177
s vous répondront, non sans apparence d’à-propos,
que
l’opération les laisse indifférents : ils sont sur le plan de l’histo
178
it (qui sont sans aucun doute les plus honnêtes),
que
la dictature de Staline se rapproche des régimes fascistes. Essayez d
179
oche des régimes fascistes. Essayez d’en conclure
que
le communisme c’est cela, s’il se confond, comme on nous l’affirmait,
180
mait, avec ses effets historiques. On vous répond
que
vous vous trompez du tout au tout ; que vous n’entendez rien au « dev
181
us répond que vous vous trompez du tout au tout ;
que
vous n’entendez rien au « devenir dialectique », dont la dictature ac
182
r dialectique », dont la dictature actuelle n’est
qu’
un stade nécessaire mais provisoire. Vous voilà rejeté sur le plan doc
183
rs de cette fameuse dialectique : vous apprendrez
qu’
elle fut inventée par Hegel, qui eut le tort de la fonder sur l’Esprit
184
t, ce qui était proprement la poser sur la tête :
que
le génie de Marx l’a remise sur ses pieds en la fondant sur la matièr
185
s pieds en la fondant sur la matière économique ;
qu’
ainsi lestée, elle a pu se mettre en marche et agir au niveau du réel
186
u se mettre en marche et agir au niveau du réel ;
que
son but primitif était de détruire l’État au profit de l’homme concre
187
avoir d’abord renforcé cet État jusqu’à l’extrême
qu’
on nomme dictature ; et qu’enfin cette dictature disparaîtra nécessair
188
État jusqu’à l’extrême qu’on nomme dictature ; et
qu’
enfin cette dictature disparaîtra nécessairement, d’elle-même, avec le
189
fait fusiller ceux qui en parlent. On vous répond
que
c’est une nécessité de la tactique, dûment prévue d’ailleurs par les
190
. Alors, peut-être, vous commencez à entrevoir ce
que
signifie : dialectique. C’est en fait, l’obéissance au parti, l’obéis
191
cisément, renoncer à la vérité, et ne croire plus
qu’
à la tactique d’un dictateur, lequel changera la vérité tous les six m
192
ques »… Les communistes sincères comprendront-ils
que
cette méthode figure aux yeux de qui n’a pas leur « foi », nécessaire
193
« foi », nécessairement, un simple opportunisme ?
Que
sert alors de discuter, de confronter ? « Rien ne sera juste à cette
194
eine de tomber aussitôt dans les pièges grossiers
qu’
elle nous tend. (Pièges dans lesquels tombent les neuf dixièmes des ad
195
Or une telle volonté ne saurait prendre son élan
que
dans le sentiment insupportable d’un défaut inhérent au monde. Connaî
196
portable d’un défaut inhérent au monde. Connaître
qu’
il existe un mal universel, et qu’il faut donc transformer toutes chos
197
onde. Connaître qu’il existe un mal universel, et
qu’
il faut donc transformer toutes choses, tel est, je crois, l’acte init
198
tifie les moyens… Mais alors, comment ne pas voir
que
ce mouvement présente, dans sa forme, avec le mouvement du chrétien (
199
antes analogies ? Sur ce plan seul, il m’apparaît
qu’
une confrontation soit possible. L’homme d’abord, ou le monde d’abo
200
Le marxiste, tout comme le chrétien, a reconnu
que
l’homme n’existe pas isolément, qu’il est un être « en relation », qu
201
en, a reconnu que l’homme n’existe pas isolément,
qu’
il est un être « en relation », qu’il est lié à une société42. Mais en
202
pas isolément, qu’il est un être « en relation »,
qu’
il est lié à une société42. Mais encore, à l’instar du chrétien, le ma
203
encore, à l’instar du chrétien, le marxiste croit
que
la société présente n’a pas le droit de déterminer le tout de l’homme
204
ntinomique, « divisé », et comme « aliéné » de ce
qu’
il y a de plus humain en lui. À la découverte de « cette aliénation de
205
damentale, qui est le péché originel. Il s’ensuit
que
pour le marxiste, aussi bien que pour le chrétien, l’homme ne pourra
206
uver sa plénitude et se « regagner totalement »43
qu’
à la faveur d’une économie44 radicalement renouvelée. Une réaction sem
207
manière significative, quant aux voies et moyens
qu’
elles préconisent. La 2e thèse de Marx sur Feuerbach affirme : Les ph
208
h affirme : Les philosophes n’ont fait jusqu’ici
qu’
interpréter diversement le monde ; or il s’agit maintenant de le trans
209
soit la pensée, par une action45 qui ne peut être
que
révolutionnaire. Et cependant l’opposition de Marx et de l’apôtre écl
210
pposition de Marx et de l’apôtre éclate en ceci :
que
Paul veut transformer l’homme d’abord — et le monde par lui — tandis
211
i. C’est sur le fait de cette opposition centrale
qu’
il importe d’être bien au clair, si l’on veut comprendre pourquoi la p
212
doctrine marxiste On ne répétera jamais assez
que
la doctrine originelle de Marx est avant tout la mise en forme d’une
213
r, elle n’est « matérialiste », au sens vulgaire,
que
dans la mesure où la mentalité de l’époque peut être qualifiée — et s
214
laissaient entendre, par leur attitude pratique,
que
la religion concerne « l’homme intérieur » et rien que lui. C’était u
215
a religion concerne « l’homme intérieur » et rien
que
lui. C’était une « affaire privée » ; et Marx n’a fait que le constat
216
C’était une « affaire privée » ; et Marx n’a fait
que
le constater. Elle n’empêchait nullement de faire des affaires. Ni d’
217
incroyant. D’ailleurs, ce n’est pas l’« esprit »
qu’
il veut sauver, mais l’homme, que les spiritualistes abandonnent à un
218
pas l’« esprit » qu’il veut sauver, mais l’homme,
que
les spiritualistes abandonnent à un sort toujours plus inhumain. Il l
219
donc recourir à un autre ordre d’arguments : ceux
que
l’on dit « matérialistes ». Ce seront d’une part la violence prolétar
220
» infaillible des lois de l’évolution économique,
qu’
il formule. Je résume et je simplifie ce processus : ceux qui prétende
221
oucher à l’extérieur. Marx dira donc, contre eux,
qu’
il faut d’abord transformer l’extérieur — et le reste suivra nécessair
222
er. L’« esprit » du bourgeois spiritualiste n’est
qu’
une caricature, mais ses ravages sont déjà tels qu’on ne peut plus son
223
u’une caricature, mais ses ravages sont déjà tels
qu’
on ne peut plus songer à rétablir la vérité par des moyens purement sp
224
pellerons matérialisme dialectique, pour indiquer
qu’
il n’est que provisoire, instrumental, qu’il doit servir au bout du co
225
térialisme dialectique, pour indiquer qu’il n’est
que
provisoire, instrumental, qu’il doit servir au bout du compte la véri
226
ndiquer qu’il n’est que provisoire, instrumental,
qu’
il doit servir au bout du compte la vérité — laquelle contient aussi
227
é — laquelle contient aussi l’« esprit » — bref
qu’
il n’est en somme qu’une tactique. Faisons de nécessité vertu. Proposo
228
nt aussi l’« esprit » — bref qu’il n’est en somme
qu’
une tactique. Faisons de nécessité vertu. Proposons-nous de changer le
229
ontenu se transforme ? N’a-t-on pas démontré déjà
que
la culture, par exemple, n’est qu’un « reflet » du processus économiq
230
démontré déjà que la culture, par exemple, n’est
qu’
un « reflet » du processus économique ? On voit ainsi comment Marx lui
231
ême se prend à son jeu polémique. Ce ne fut guère
qu’
à la fin de sa carrière que son ami Engels en découvrit le danger. « M
232
mique. Ce ne fut guère qu’à la fin de sa carrière
que
son ami Engels en découvrit le danger. « Marx et moi — écrit-il en 18
233
n 1890 — nous sommes peut-être responsables de ce
que
parfois nos disciples ont insisté plus qu’il ne convenait sur les fac
234
de ce que parfois nos disciples ont insisté plus
qu’
il ne convenait sur les facteurs économiques. Nous étions forcés d’ins
235
enne En effet, de ce « mensonge » opportuniste
qu’
était le matérialisme polémique, promu par un glissement inévitable au
236
vérité » tactique du matérialisme vulgaire, celui
que
la presse bourgeoise a si beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore qu
237
ise a si beau jeu d’attaquer aujourd’hui — encore
qu’
elle le pratique elle-même sans vergogne, tout en le niant pour les be
238
es besoins de sa cause. Ce matérialisme vulgaire,
que
Marx avait tout d’abord combattu48, est devenu, après lui, un mensong
239
symétrique de celui des idéalistes : la croyance
que
si l’on change l’ordre des choses, on change automatiquement la réali
240
rimauté du matériel, Marx ne se rendit pas compte
qu’
il allait déchaîner un préjugé absurde, une erreur non moins grave que
241
er un préjugé absurde, une erreur non moins grave
que
celle des défenseurs de l’esprit pur : l’erreur qui porte l’homme à c
242
’esprit pur : l’erreur qui porte l’homme à croire
que
la cause de tous ses malheurs est dans les choses, et non dans lui. (
243
t.) Le peuple — et la bourgeoisie donc ! — répète
que
l’habit ne fait pas le moine, et que l’argent ne fait pas le bonheur.
244
c ! — répète que l’habit ne fait pas le moine, et
que
l’argent ne fait pas le bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer
245
le bonheur. Pratiquement, il croit dur comme fer
que
l’habit fait le moine et que l’argent fait le bonheur. Marx vient lui
246
croit dur comme fer que l’habit fait le moine et
que
l’argent fait le bonheur. Marx vient lui expliquer en 15 volumes — do
247
quer en 15 volumes — dont on a fait des résumés —
qu’
il a raison de croire cela. Bien plus, Marx vient lui démontrer que ce
248
croire cela. Bien plus, Marx vient lui démontrer
que
ceux qui prétendent le contraire, et qui prêchent que l’argent ne fai
249
ceux qui prétendent le contraire, et qui prêchent
que
l’argent ne fait pas le bonheur, sont simplement des exploiteurs, qui
250
ce qu’il fait leur bonheur ! Alors, il n’y a plus
qu’
une seule voie : instituons le plan quinquennal, créons une industrie
251
al, créons une industrie puissante, faisons mieux
que
l’Amérique, devenons encore plus riches, car l’argent distribué aux m
252
camarade Gide lui-même de s’indigner : il faut ce
qu’
il faut. L’étatisme dictatorial contredit la doctrine de Marx ? Qu’imp
253
tisme dictatorial contredit la doctrine de Marx ?
Qu’
importe, puisque le but final est la richesse, mère du bonheur. N’est-
254
la richesse, mère du bonheur. N’est-ce pas là ce
que
voulait Marx ? Résumons : Marx n’a pas voulu le matérialisme vulgaire
255
sur les facteurs matérialistes. C’est cet accent
que
« les masses » ont senti, parce que tout les y prédisposait. Le résul
256
démontre en quoi il diffère du fascisme, dans ce
que
le fascisme a de plus oppressif pour l’homme et pour sa liberté. L
257
s ce serait introduire une confusion irrémédiable
que
de parler dans le même sens d’une « doctrine » du christianisme. Le c
258
out le protestant, répugne absolument à concevoir
que
les dogmes théologiques puissent figurer la théorie d’une pratique49.
259
sa fin, et sa mission présente. Le chrétien sait
qu’
il vient de Dieu, le Créateur ; qu’il va vers le Royaume de Dieu, le R
260
chrétien sait qu’il vient de Dieu, le Créateur ;
qu’
il va vers le Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et qu’il a pour mis
261
a vers le Royaume de Dieu, le Réconciliateur ; et
qu’
il a pour mission actuelle d’obéir à une Parole qui est Jésus-Christ,
262
juge « le monde » qui l’a rejetée. Elle ne sauve
que
ceux d’entre les hommes qui refusent totalement ce monde et s’attende
263
utres, dans notre Occident troublé par un message
qu’
il méconnaît, ne sont que les reflets énigmatiques de cet événement pr
264
t troublé par un message qu’il méconnaît, ne sont
que
les reflets énigmatiques de cet événement primordial — ses succédanés
265
formés… » Cela ne signifie pas, pour un chrétien,
que
« le monde » soit abandonné. Cela ne signifie pas qu’une fois opérée
266
« le monde » soit abandonné. Cela ne signifie pas
qu’
une fois opérée cette transformation personnelle que l’on nomme la con
267
’une fois opérée cette transformation personnelle
que
l’on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus qu’à attendre, et à
268
l’on nomme la conversion, le chrétien n’ait plus
qu’
à attendre, et à subir en gémissant les lois d’un monde qu’il condamne
269
ndre, et à subir en gémissant les lois d’un monde
qu’
il condamne ! Car alors, où serait son refus ? Et quelle preuve aurion
270
sein du conformisme triomphant ? C’est bien là ce
que
pensent les marxistes, mais c’est aussi où apparaît leur erreur initi
271
’indique le mot conversion. Obéissant à la Parole
que
Dieu lui adresse, il reconnaît du même coup l’origine et le but de sa
272
de Dieu naît de l’obéissance », écrit Calvin. Et
que
serait une obéissance qui ne se manifesterait pas ? La transformation
273
e, ne peut donc se traduire, si elle s’est faite,
que
par une action du chrétien : contre le monde dans sa forme présente,
274
estauré dans la Promesse. Il faut aller plus loin
que
cette affirmation tout évidente. Non seulement l’homme converti devie
275
on des hommes, ne doit être aux yeux du chrétien,
qu’
une réforme sans grande portée. Voilà qui paraîtra plus scandaleux. Et
276
candaleux. Et cependant l’Évangile est formel : «
Que
servirait à un homme de gagner le monde, s’il perdait son âme ? » Son
277
ment théologiques » comme le dirait un incroyant.
Que
servirait à l’homme, tel que le voit le chrétien, de sauver sa vie ma
278
dirait un incroyant. Que servirait à l’homme, tel
que
le voit le chrétien, de sauver sa vie matérielle et morale, d’échappe
279
t les chômeurs mourir de faim ? Ce serait prouver
qu’
on n’est pas converti. J’agirai donc, toutefois non pour le monde, et
280
Si je n’avais pas cette reconnaissance, ce serait
que
j’ignore mon salut. Mais si je connais mon salut, je ne puis supporte
281
— où meurent les hommes. Reproches réciproques
que
s’adressent les chrétiens et les marxistes Telle étant donc la con
282
sable du mal qui est dans le monde, on comprendra
que
l’état d’esprit marxiste lui apparaisse nécessairement borné. Je me s
283
tre les choses et les rend responsables. Il croit
que
c’est elles qu’il faut changer. Il bat la table, comme Xerxès faisait
284
t les rend responsables. Il croit que c’est elles
qu’
il faut changer. Il bat la table, comme Xerxès faisait battre l’Helles
285
t battre l’Hellespont. C’est ce préjugé infantile
que
le marxisme devait consolider dans la conscience prolétarienne. Dévia
286
ouvait-elle être évitée ? Marx n’avait-il pas dit
qu’
il fallait commencer par changer l’ordre matériel, l’ordre des choses,
287
changer l’ordre matériel, l’ordre des choses, et
que
les hommes ensuite deviendraient plus habiles à s’entendre et à vivre
288
evise, pour l’opposer au « spiritualisme » autant
qu’
à la routine et au cynisme des conservateurs. Saint Paul n’a pas cette
289
s si l’Apôtre avait placé la lutte sur ce terrain
que
l’on dit réaliste, à supposer que le « parti chrétien » eût triomphé,
290
sur ce terrain que l’on dit réaliste, à supposer
que
le « parti chrétien » eût triomphé, rien ne l’eût empêché de subir le
291
tte transformation dont vous parlez ? Sur une foi
que
ma raison refuse, et qu’elle m’ordonne d’ignorer. Je ne vois pas les
292
ous parlez ? Sur une foi que ma raison refuse, et
qu’
elle m’ordonne d’ignorer. Je ne vois pas les effets d’une telle foi da
293
règle avec sa mauvaise conscience, en prétextant
que
l’intérieur importe seul, et que le « pain de vie » suffit à nourrir
294
e, en prétextant que l’intérieur importe seul, et
que
le « pain de vie » suffit à nourrir l’homme ! Peut-être suffit-il à v
295
nthousiastes, si aveuglement enthousiastes, c’est
qu’
il s’est trouvé seul à protester contre le monde tel qu’il va. On dira
296
s’est trouvé seul à protester contre le monde tel
qu’
il va. On dira : c’est d’abord qu’il a su rejeter sur l’oppression cap
297
re le monde tel qu’il va. On dira : c’est d’abord
qu’
il a su rejeter sur l’oppression capitaliste, trop réelle, tout le mal
298
s masses, n’a plus osé se montrer chrétien. C’est
que
le sel a perdu sa saveur, et son amertume salutaire. C’est que la seu
299
perdu sa saveur, et son amertume salutaire. C’est
que
la seule espérance véritable et certaine n’a plus été prêchée au mond
300
e d’attaque assez gênante et bouleversante. C’est
que
l’« esprit » qui devait être l’agent du changement total, perpétuel e
301
moins n’a pas su, par excès de prudence, empêcher
que
les foules le considèrent comme tel. Les chrétiens sont bien plus res
302
esponsables des succès de Marx auprès des foules,
que
le marxisme n’est responsable du déclin des Églises dans le monde mod
303
e au chrétien sont humainement bien plus valables
que
ceux du chrétien au marxiste. En gros : si Marx se trompe et réussit,
304
arce que Christ est mal prêché par ses disciples (
que
ce soit en paroles ou en actes). Si les chrétiens gardaient une consc
305
le, partant plus douloureuse de ce fait, je crois
qu’
ils éviteraient d’attaquer le marxisme dans les mêmes termes que la ré
306
ient d’attaquer le marxisme dans les mêmes termes
que
la réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste qu’en doctrine, et
307
la réaction. Mais ceci dit, et maintenu, il reste
qu’
en doctrine, et indépendamment de toutes nos fautes, l’objection marxi
308
si on l’a, cela se voit, des choses changent. Ce
que
tu me reproches, c’est, en fait, de n’être pas assez chrétien ! Tu m’
309
rôle d’aventure, pour un dialecticien ! Si tu dis
que
le chrétien est celui qui ne fait rien, tu prouves simplement que tu
310
est celui qui ne fait rien, tu prouves simplement
que
tu ignores tout du christianisme. » (Je répète que ce n’est pas sa fa
311
ue tu ignores tout du christianisme. » (Je répète
que
ce n’est pas sa faute, à ce marxiste, mais notre faute, et tout d’abo
312
de par lui. Or une telle volonté ne peut conduire
qu’
à l’excès du matérialisme, non point par la malice de Staline, mais pa
313
itions physiques et spirituelles de l’homme en ce
qu’
elles ont d’irréductibles à toute détermination sociale ou historique
314
is, par les ressemblances formelles indiscutables
que
présentent la volonté du vrai chrétien et celle du communiste militan
315
nt tenté la synthèse pratique des deux croyances,
qu’
ils estimaient complémentaires. D’autres, plus nombreux qu’on ne le pe
316
timaient complémentaires. D’autres, plus nombreux
qu’
on ne le pense, souhaitent au moins et appellent cette synthèse, parai
317
Karl », c’est-à-dire Barth et Marx !54 C’est ici
qu’
une critique proprement théologique se révèle seule capable de marquer
318
pratique du communisme n’est justiciable, en soi,
que
d’une critique politique, économique, historique, etc.55 Et je ne voi
319
économique, historique, etc.55 Et je ne vois pas
que
le chrétien comme tel ait des lumières particulières sur ces sujets,
320
les buts derniers du communisme et les postulats
qu’
il suppose. Qu’on me permette ici d’être un peu schématique pour plus
321
ers du communisme et les postulats qu’il suppose.
Qu’
on me permette ici d’être un peu schématique pour plus de clarté. Il m
322
peu schématique pour plus de clarté. Il me paraît
que
l’opposition finale entre la croyance marxiste et la foi personnelle
323
Terre. Tous deux sont eschatologiques, en ce sens
qu’
ils rapportent leur accomplissement à un état dernier et invariable, à
324
espérées, qui permet seule de supporter les maux
que
l’on endure au nom du but dernier. (Le chrétien chante sur son bûcher
325
ne. Le chrétien converti commence donc par la fin
que
visait l’espérance communiste. Il possède déjà l’essentiel, que Marx
326
spérance communiste. Il possède déjà l’essentiel,
que
Marx voyait au terme de l’histoire : la personne. Et alors, il attaqu
327
foi dans l’invisible, mais sur des faits concrets
qu’
il faut changer. Chaque réforme obtenue, chaque revendication réalisée
328
un homme libéré, tandis qu’il ne peut me montrer
que
quelques conditions préliminaires d’une libération toujours future. J
329
à son bien souverain. S’il est chrétien, il sait
qu’
il est membre d’un corps qui porte toutes les marques du péché. Il est
330
ain, mais encore rien ne peut le satisfaire de ce
qu’
il obtient, par cet effort, s’il compare ce mieux-être relatif au don
331
s’il compare ce mieux-être relatif au don parfait
qu’
il a reçu en Christ. Il possède en lui-même la mesure d’une perpétuell
332
é peut se développer57. Mais le marxiste, quelles
que
soient la souffrance et la colère qu’il éprouve devant les injustices
333
te, quelles que soient la souffrance et la colère
qu’
il éprouve devant les injustices présentes, du fait qu’il croit que l’
334
éprouve devant les injustices présentes, du fait
qu’
il croit que l’intérêt de l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel
335
ant les injustices présentes, du fait qu’il croit
que
l’intérêt de l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel qu’il le con
336
êt de l’homme est seul en jeu — et de l’homme tel
qu’
il le conçoit, être social — se verra fatalement neutralisé dans son e
337
r cet accomplissement, ou plénitude, n’est jamais
qu’
un futur théorique, — si passionnée que soit l’espérance du marxiste —
338
est jamais qu’un futur théorique, — si passionnée
que
soit l’espérance du marxiste — et non pas une présence exigeante et t
339
’humanité (comme en 1789 et en 1917), il faudrait
que
l’homme soit délivré de son péché, « changé », sorti du plan, précisé
340
us les moyens du chrétien doivent être aussi purs
que
sa fin. Tout autre est le cas du marxiste. N’ayant pas derrière lui d
341
uveraine, il se sent libre d’appliquer les moyens
qu’
il juge adéquats aux intérêts momentanés de son Parti et de sa classe.
342
. Il légitime son étatisme totalitaire en arguant
que
c’est le seul moyen d’accéder à un stade économique plus favorable au
343
beaucoup de marxistes s’en indigner mais je doute
qu’
ils soient bien conséquents, et que leur indignation traduise la vraie
344
mais je doute qu’ils soient bien conséquents, et
que
leur indignation traduise la vraie volonté du marxisme, plutôt qu’un
345
ion traduise la vraie volonté du marxisme, plutôt
qu’
un reste d’humanisme libéral. Le fait est que la grosse majorité des c
346
utôt qu’un reste d’humanisme libéral. Le fait est
que
la grosse majorité des communistes suit Staline. D’où il résulte à l’
347
nistes suit Staline. D’où il résulte à l’évidence
que
pour la grosse majorité des communistes, le mensonge, la haine, l’opp
348
et préparent un avenir conforme à la doctrine59.
Que
leur importe une « faute » personnelle et actuelle, puisqu’il n’y a p
349
es descendants de leurs descendants ? C’est ainsi
qu’
on a vu Zinoviev, par « fidélité » au Parti, c’est-à-dire à l’avenir d
350
l’avenir du Parti, proférer des aveux mensongers
qu’
il croyait tactiquement utiles. Imaginez maintenant qu’un vrai chrétie
351
croyait tactiquement utiles. Imaginez maintenant
qu’
un vrai chrétien juge bon de s’inscrire au parti communiste ou de mili
352
. Car ou bien il accepte les disciplines d’action
que
lui impose son parti, et qui comportent la haine et le mensonge : mai
353
d’être personnelle, et renie justement cette foi
qu’
il croyait mieux servir dans le communisme ; ou bien il tâche de n’agi
354
r dans le communisme ; ou bien il tâche de n’agir
qu’
en chrétien ; mais alors il devient un opposant, un « trotzkyste » ou
355
ant suspect. Tout cela repose sur un fait unique,
que
nous pouvons formuler simplement : la fin dernière du chrétien est pr
356
e est un avenir absolument hétérogène aux actions
qu’
il peut faire aujourd’hui, dans un ordre non socialiste. Par où l’on v
357
i, dans un ordre non socialiste. Par où l’on voit
qu’
en dépit du langage, la transcendance de la foi chrétienne se manifest
358
humain total dans un avenir indéfini, et n’engage
que
certaines dispositions de l’être, celles-là précisément que l’avenir
359
nes dispositions de l’être, celles-là précisément
que
l’avenir socialiste, la société sans classes, doit supprimer ! Le mar
360
sans classes, doit supprimer ! Le marxiste croit
que
le bien sort du mal ; le chrétien sait que le bien naît du parfait.
361
croit que le bien sort du mal ; le chrétien sait
que
le bien naît du parfait. D’une conséquence politique de la foi
362
rétiens déclarés. J’en vois beaucoup qui estiment
que
la transformation de l’homme importe seule, puisqu’elle est, en effet
363
t autre changement. J’en vois beaucoup qui jugent
que
l’action personnelle de charité et de sacrifice, pour le mieux-être d
364
religieuse. Et j’entends bien que les sacrifices
qu’
ils font ne sont pas seulement « spirituels », entraînent des risques
365
souci suffisant des suites sociales et politiques
qu’
implique en fait leur attitude ? Et je pense en particulier aux membre
366
ls de s’occuper de politique ? Comment se fait-il
qu’
un grand nombre d’entre eux s’en désintéressent pratiquement ? Ils me
367
pour justifier une action tout inverse. Je pense
qu’
il faut aller plus loin60. La déviation matérialiste du marxisme ne do
368
st la cause certaine des succès du marxisme. Tant
que
les chrétiens ne comprendront pas que leur foi doit se manifester sur
369
xisme. Tant que les chrétiens ne comprendront pas
que
leur foi doit se manifester sur tous les plans de l’activité humaine,
370
e fois pour toutes de la théologie. Mais je crois
que
le christianisme, aussitôt qu’il se manifeste en vérité, entre en con
371
gie. Mais je crois que le christianisme, aussitôt
qu’
il se manifeste en vérité, entre en conflit avec certaines structures
372
toriquement défini et localisé : je n’en donnerai
qu’
un seul exemple, que je crois actuel entre tous. Tout le monde sait, o
373
t localisé : je n’en donnerai qu’un seul exemple,
que
je crois actuel entre tous. Tout le monde sait, ou pressent au moins,
374
ous. Tout le monde sait, ou pressent au moins, ce
que
signifie la menace totalitaire, qu’elle soit fasciste ou soviétique :
375
au moins, ce que signifie la menace totalitaire,
qu’
elle soit fasciste ou soviétique : c’est la « mise au pas » de nos vie
376
de tous les aspects de nos vies, tant spirituels
que
matériels, au service de l’État déifié. Cette situation n’est pas san
377
ire romain au premier âge du christianisme, telle
que
nous l’évoquions plus haut. Toutefois, l’un des facteurs au moins s’e
378
le spectacle de l’Allemagne. L’État nouveau veut
qu’
on l’adore, sinon déjà dans des formes religieuses, du moins dans des
379
se laisser persécuter ? N’avons-nous rien à faire
qu’
à subir le martyre ? Ou qu’à revêtir vis-à-vis de l’État une attitude
380
vons-nous rien à faire qu’à subir le martyre ? Ou
qu’
à revêtir vis-à-vis de l’État une attitude d’objecteurs de conscience
381
de d’objecteurs de conscience ? N’avons-nous rien
que
nous-mêmes à sauver, alors que nos erreurs passées sont pour une part
382
i vient ? Or toute attente passive, si courageuse
qu’
elle soit, devient dans le cas présent une complicité. L’État totalita
383
-il soutenir, s’il ne veut pas rester l’objecteur
que
j’ai dit ? Un protestant, et je précise : un calviniste, doit être ic
384
plus antitotalitaire par essence. Je ne rappelle
qu’
en passant les dragonnades et les guerres de religion qui les précèden
385
res de religion qui les précèdent : on sait assez
que
ce fut la lutte d’une royauté déjà « totalitaire » contre des groupes
386
situation déterminée par la persécution brutale,
que
les églises calvinistes défendaient alors, par principe, un régime fé
387
comme elle le fit sous Louis XIV, nous constatons
que
la première discipline que se donnent les églises calvinistes revêt u
388
s XIV, nous constatons que la première discipline
que
se donnent les églises calvinistes revêt une forme consciemment fédér
389
oins de complicité et plus de résistance déclarée
que
dans les pays calvinistes, où la notion de l’autonomie des groupes re
390
me l’Église de Rome. Le grand souci d’œcuménisme,
que
nous voyons gagner toutes les églises, est une promesse à laquelle no
391
notre foi. Aussi ne veux-je tirer de mon exemple
qu’
une conclusion que je crois valable pour tout chrétien, à quelque égli
392
ne veux-je tirer de mon exemple qu’une conclusion
que
je crois valable pour tout chrétien, à quelque église qu’il appartien
393
rois valable pour tout chrétien, à quelque église
qu’
il appartienne. Nous avons tous reçu de Dieu un appel strictement pers
394
pour tous les hommes qui la composent. Ne fût-ce
que
pour cette seule raison — et j’en ai mentionné plusieurs autres —, un
395
xistes On connaît la « croisade antimarxiste »
qu’
organise dans le monde entier la panique des capitalismes. Cette crois
396
demain par le fait d’un État tyrannique, il faut
qu’
elles sachent qu’elles en sont responsables, dans la mesure où elles c
397
it d’un État tyrannique, il faut qu’elles sachent
qu’
elles en sont responsables, dans la mesure où elles cédèrent, jadis, a
398
ne et d’un État « matérialistes », il faut savoir
que
nous en sommes les responsables, dans la mesure où nous cultivons un
399
e efficace contre le matérialisme, c’est la lutte
qu’
il nous faut mener contre la tentation spiritualiste. 41. « Le comm
400
r aussi bien la « société sans classes » de Marx,
que
le « Royaume de Dieu » chrétien. 45. « Dans la pratique, l’homme doi
401
46. Je parle, bien entendu, de la religion telle
que
Marx la voyait, telle qu’elle lui apparaissait dans le corps social.
402
u, de la religion telle que Marx la voyait, telle
qu’
elle lui apparaissait dans le corps social. Je n’oublie pas que la mêm
403
pparaissait dans le corps social. Je n’oublie pas
que
la même époque a vu le grand réveil piétiste. 47. « L’armée de la cr
404
r Feuerbach. On peut y lire une phrase qui prouve
que
Marx ne prétendait nullement négliger les facteurs humains personnels
405
ersonnelle, ne peut être rationnellement comprise
que
comme une activité révolutionnaire. » Phrase importante à l’extrême !
406
elon Karl Barth, par exemple, la dogmatique n’est
qu’
une question perpétuelle, une autocritique si l’on veut, que l’Église
407
stion perpétuelle, une autocritique si l’on veut,
que
l’Église s’adresse à elle-même, et qui a pour fonction de corriger sa
408
nécessairement inadéquate en soi, et ne peut être
qu’
un renvoi à la Révélation seule parfaite, à Jésus-Christ. La « doctrin
409
aite, à Jésus-Christ. La « doctrine » n’est ainsi
qu’
une mesure critique que l’Église prend de son message sous le rapport
410
a « doctrine » n’est ainsi qu’une mesure critique
que
l’Église prend de son message sous le rapport de sa fidélité à son fo
411
à son contenu et à son but. Elle ne présente rien
que
l’on puisse comparer, fût-ce le plus superficiellement, à un programm
412
plus superficiellement, à un programme théorique
qu’
il s’agirait maintenant d’appliquer. En bref, la doctrine chrétienne,
413
ie, simple autocritique de l’Église et du message
que
l’on prêche dans l’Église. 50. « S’attendre à… » veut dire ici : « t
414
. Certes il y a des lois de l’histoire en ce sens
qu’
on retrouve les mêmes mécanismes partout où l’esprit démissionne ! 52
415
se est secondaire. » Et Henri de Man : « Je crois
qu’
il n’y a jamais eu de tentative révolutionnaire qui n’ait été d’origin
416
me. » Je note ici, à l’appui des dires de de Man,
que
le mouvement syndicaliste au Japon a été fondé par un chrétien, Kagaw
417
« les conditions physiques et spirituelles en ce
qu’
elles ont de permanent », car alors, le marxiste me ferait observer qu
418
nent », car alors, le marxiste me ferait observer
que
des facteurs très essentiels de l’être même peuvent varier selon les
419
e anéanti chez l’homme par un régime communiste.)
Que
reste-t-il dans l’être humain d’absolument irréductible à toute trans
420
e l’esprit. En somme, tout l’essentiel ! — Je dis
que
toute doctrine qui ne tient pas compte d’une de ces conditions condui
421
ché. Tandis qu’à l’inverse, on ne saurait établir
que
la sécularisation du christianisme résulte nécessairement de l’Évangi
422
ns. (Cf. Student World, automne 1933.) 55. Telle
que
l’ont opérée par exemple un Werner Sombart, un de Man, et en France,
423
pas : il est ici, ou bien : il est là ! Car voici
que
le Royaume de Dieu est au-dedans de vous ! » (Luc, 17, 20-25.) 57. J
424
25.) 57. Je parle ici, l’on m’entend bien, de ce
que
doit être un chrétien conséquent. Il est trop clair que nous restons,
425
it être un chrétien conséquent. Il est trop clair
que
nous restons, tous tant que nous sommes, bien en arrière de notre voc
426
nt. Il est trop clair que nous restons, tous tant
que
nous sommes, bien en arrière de notre vocation. La plupart de nos tra
427
n. La plupart de nos trahisons viennent de ceci :
que
nous n’acceptons pas de tout soumettre aux volontés de Dieu. Nous rés
428
la critique marxiste. En vérité, il ne donne tort
qu’
à l’homme, non à la foi dont l’homme refuse les ordres. 58. Je prends
429
ce sens, qui n’est pas le sens jésuite courant :
que
la fin seule doit indiquer les moyens justes qui la préparent. Et non
430
e pas de menteurs, d’hypocrites, etc. Mais je dis
qu’
en tant qu’ils approuvent la politique de Staline et ses moyens, connu
431
classe (prêchée par Marx) et la guerre (pour peu
qu’
elle soit censée défendre l’URSS). 60. Je n’entends pas porter ici un
432
que sur les groupes dits d’Oxford. Je ne les cite
qu’
au seul titre d’exemple topique. 61. Le rédacteur de cette « discipli
433
teht und fallt mit seiner Mission », c’est-à-dire
qu’
il consiste uniquement dans sa mission ; ou, si nous traduisons littér
434
isque c’est le message de Dieu. Jérémie n’eût été
qu’
un berger bègue si l’Éternel n’avait parlé par lui. Voici qui est dign
435
qui est digne de remarque : le seul détail précis
que
rapporte la Bible à son sujet, c’est cette difficulté à s’exprimer. N
436
ique. Ce qui est vrai de la biographie d’un homme
que
l’Éternel choisit n’est pas moins vrai de l’histoire profane des Juif
437
ofane des Juifs, porteurs eux aussi d’une mission
que
rien en eux ne semblait préparer. On peut le dire sans paradoxe : Isr
438
: Israël n’eût pas eu d’histoire sans la promesse
que
Dieu fit à Abraham. Cette tribu « se lève et tombe » avec la mission
439
Cette tribu « se lève et tombe » avec la mission
qu’
elle incarne : « Préparer les voies du Seigneur », espérer et prêcher
440
e Messie, attendre activement l’invisible et plus
que
cela : le jamais vu, ce qu’aucun autre peuple au monde n’a jamais pu
441
t l’invisible et plus que cela : le jamais vu, ce
qu’
aucun autre peuple au monde n’a jamais pu seulement imaginer, ce qui n
442
nstituer l’évolution immanente d’un peuple, telle
qu’
on peut vraisemblablement la styliser et la chiffrer, c’est-à-dire, te
443
t la styliser et la chiffrer, c’est-à-dire, telle
qu’
elle fut déterminée par des facteurs en partie mesurables (géographiqu
444
otre langage plus ou moins naïvement positiviste.
Que
nous apprend une science de cet ordre sur le destin auquel étaient pr
445
istoire n’a pas la plus petite raison de supposer
que
le peuple d’Israël, s’il n’avait pas été « élu », eût évolué d’une au
446
ait pas été « élu », eût évolué d’une autre sorte
que
tant de tribus d’Arabie qui nous offrent encore aujourd’hui, avec une
447
le, sans raison. Ou sans autre raison, peut-être,
que
cette impuissance étonnante à construire et à conquérir… Ainsi les an
448
mmanente aux conditions médiocres des Hébreux. Ce
que
nous connaissons de leur « histoire » — mais le mot prend ici un sens
449
st la suite des gestes de Dieu dont ils ne furent
que
les instruments. Mais les instruments indociles ! Ce qui est à eux, d
450
dolâtrie La considération du conflit séculaire
que
décrit l’Ancien Testament nous ramène avec une insistance innombrable
451
fiant ; vocation invisible et triomphante : celle
que
prêchent les prophètes au peuple et qui seule l’élève, l’assemble et
452
sans « fin » dans le désert, sans but jusqu’à ce
que
Dieu l’élise. Désormais sa voie est fixée, mais ce n’est plus sa « pr
453
le conflit de la foi et de la vue n’est en somme
qu’
un autre aspect du conflit de la vocation et du destin. Il fait compre
454
s est une menace et une angoisse, au moins autant
qu’
une promesse. Une menace pour les « intérêts immédiats » qui se voient
455
tur. Et une angoisse contre laquelle il est fatal
que
l’on cherche à se protéger par quelque chose de visible et de tangibl
456
rie qui renaît dès qu’Israël cesse de croire à ce
que
ses yeux ne peuvent voir, et qui pourtant fait toute sa grandeur, c’e
457
atues des idoles étrangères — car c’est le voisin
qu’
on imite lorsqu’on doute de sa vocation — de même cette vocation et la
458
de sa vocation — de même cette vocation et la foi
qu’
elle implique ont un symbole, unique et univoque : l’Arche de l’Allian
459
e, élu par Dieu et « mis à part »64. C’est à elle
que
tout acte se réfère, et non seulement tout geste, mais toute pensée.
460
s apparaît comme l’exemple à peu près idéal de ce
que
l’on peut nommer (d’un terme d’ailleurs emprunté à l’antiquité hellén
461
toutes les œuvres d’une nation, tant matérielles
que
politiques et spirituelles65. L’histoire des civilisations nous offre
462
ébraïques se distingue de toutes les autres en ce
qu’
elle est une vocation adressée par un Dieu personnel, unique, éternel,
463
un grand chef. Elle est donc plus « totalitaire »
que
toute mesure humainement concevable, puisqu’elle ne tire pas son orig
464
l’Éternel ». Parce qu’elle est la loi de Dieu, et
que
ce Dieu est l’Éternel, la Loi est la conscience finale du peuple hébr
465
est interdit pendant les guerres civiles : c’est
que
la mesure est indivisible. Dieu est au ciel, sa loi est sur la terre,
466
penchant immémorial et bien connu, s’ils oublient
que
le Dieu qu’ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux », les Proph
467
émorial et bien connu, s’ils oublient que le Dieu
qu’
ils servent est un Dieu qui se nomme « jaloux », les Prophètes se lève
468
tre eux et dénoncent leur idolâtrie66. Remarquons
que
la notion d’idolâtrie déborde ici singulièrement le culte des images
469
le toute action ou pensée, si belle ou si féconde
qu’
elle soit, qui ne puisse être consacrée au ministère sacerdotal du peu
470
lu. Idole, tout ce qui n’est pas ordonné à la fin
que
les prophètes annoncent sans relâche. Mais la pire des idolâtries, c’
471
rnant l’esprit. Et c’est à cette ultime tentation
que
devaient succomber les plus grands rigoristes, les savants docteurs d
472
rigoristes, les savants docteurs de la Loi, ceux
que
le peuple honorait à peu près comme on le fit plus tard des Pères de
473
étation de la Loi, comme mesure du peuple hébreu,
qu’
un texte que je trouve dans le plus grand des historiens profanes des
474
a Loi, comme mesure du peuple hébreu, qu’un texte
que
je trouve dans le plus grand des historiens profanes des Juifs : Josè
475
mplètes et très détaillées, mais il a veillé à ce
qu’
elles fussent connues de tous. Cette connaissance produit parmi nous
476
si capable de la faire naître et de l’entretenir,
que
d’avoir les mêmes sentiments de la grandeur de Dieu, et d’être élevés
477
esprit ; mais entre les philosophes… Nous croyons
que
Dieu voit tout ce qui se passe dans le monde. Nos femmes et nos servi
478
bouche les règles de la conduite de notre vie, et
que
toutes nos actions doivent avoir pour objet de plaire à Dieu. Une
479
Un homme du xxe siècle ne peut, me semble-t-il,
qu’
éprouver une sorte d’effroi au spectacle d’un ordre social, spirituel
480
berté créatrice dans laquelle il met son orgueil.
Que
de richesses perdues, songe-t-il, que d’inventions négligées, méprisé
481
on orgueil. Que de richesses perdues, songe-t-il,
que
d’inventions négligées, méprisées ! Nous adorons la Vie et le Progrès
482
a diversité, et toute mesure ne serait à nos yeux
qu’
une occasion de dépassement… Oui, la Richesse est notre dernier dieu,
483
e, est assez clairement défini par la comparaison
que
l’on peut faire de notre richesse anarchique, et rendue presque vaine
484
s, avec la pauvreté pleine de sens et de grandeur
qu’
imposait la Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce que l’on gagne à sacr
485
ns et de grandeur qu’imposait la Loi d’Israël. Ce
que
l’on perd et ce que l’on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce
486
’imposait la Loi d’Israël. Ce que l’on perd et ce
que
l’on gagne à sacrifier à une « mesure », voilà ce dont l’exemple juif
487
voilà ce dont l’exemple juif nous permettra mieux
que
tout autre de juger. Que devient en effet la culture, dans un monde o
488
uif nous permettra mieux que tout autre de juger.
Que
devient en effet la culture, dans un monde où n’est tolérée que « la
489
effet la culture, dans un monde où n’est tolérée
que
« la seule chose nécessaire ? » L’homme qui a une vocation n’est pas
490
e, et avec des accents d’amère ironie, proclamait
que
la justice à l’ancienne manière ne devait jamais être sacrifiée.68
491
attente messianique. Point d’abstractions : c’est
que
le culte qu’il faut rendre au Dieu vivant est une obéissance directe
492
anique. Point d’abstractions : c’est que le culte
qu’
il faut rendre au Dieu vivant est une obéissance directe « en esprit e
493
x, en bas sur la terre, et dans les eaux plus bas
que
la terre. » Cela condamne toute espèce d’art plastique. « Tu n’auras
494
nt le développement commercial71 et industriel. »
Que
reste-t-il de ce que nous nommons culture ? Philosophie, beaux-arts,
495
ommercial71 et industriel. » Que reste-t-il de ce
que
nous nommons culture ? Philosophie, beaux-arts, fictions écrites, sci
496
mplissement sont les moyens les plus élémentaires
que
les hommes ont de commercer : l’écriture, la parole et l’action, — la
497
se trouve sauver et garantir la possession de ce
que
notre Occident lui-même a défini comme le bien souverain : l’harmonie
498
namisme, le Sens général de la vie. Si l’on admet
que
la destination de toute culture, c’est de concentrer les puissances d
499
but auquel il dédie toutes ses œuvres, l’on voit
que
la culture la plus pauvre, qui fut celle du peuple hébreu, fut aussi
500
Toutefois, non tant à cause de sa pauvreté même,
qu’
à cause de l’absolu de sa mesure, et de la promesse qu’elle portait. ⁂
501
cause de l’absolu de sa mesure, et de la promesse
qu’
elle portait. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce que l’on nous
502
ortait. ⁂ Revenons encore à Josèphe : Quant à ce
que
l’on nous reproche comme un grand défaut, de ne nous point étudier à
503
, soit dans les arts, ou dans le langage, au lieu
que
les autres peuples méritent beaucoup de louange d’y apporter de conti
504
tumes de nos ancêtres, parce que c’est une preuve
qu’
elles ont été parfaitement bien établies, puisqu’il n’y a que celles q
505
t été parfaitement bien établies, puisqu’il n’y a
que
celles qui n’ont pas cet avantage que l’on soit obligé de changer, lo
506
qu’il n’y a que celles qui n’ont pas cet avantage
que
l’on soit obligé de changer, lorsque l’expérience fait connaître le b
507
r les défauts. Ainsi, comme nous ne doutons point
que
ce ne soit Dieu qui nous a donné ces lois par l’entremise de Moïse, p
508
être plus juste, plus excellente et plus sainte,
que
celle dont ce souverain Monarque de l’univers est l’auteur… Quelle fo
509
orme de gouvernement peut donc être plus parfaite
que
la nôtre, et quels plus grands honneurs peut-on rendre à Dieu, puisqu
510
ommes toujours préparés à nous acquitter du culte
que
nous lui devons ; que nos Sacrificateurs sont établis pour veiller sa
511
s à nous acquitter du culte que nous lui devons ;
que
nos Sacrificateurs sont établis pour veiller sans cesse à ce qu’il ne
512
cateurs sont établis pour veiller sans cesse à ce
qu’
il ne se fasse rien qui y soit contraire, et que toutes choses ne sont
513
e qu’il ne se fasse rien qui y soit contraire, et
que
toutes choses ne sont pas mieux réglées le jour d’une fête solennelle
514
pas mieux réglées le jour d’une fête solennelle,
qu’
elles le sont toujours parmi nous ? Chute d’Israël Tout était s
515
arce qu’elle a perdu son sens en condamnant celui
qu’
elle annonçait. Christ apporte une nouvelle mesure, fondant ainsi un n
516
n même temps l’héritage d’Israël, et l’attraction
qu’
il exerçait venait non des principes généraux de la pensée hellénistiq
517
araissent définir en raccourci le double héritage
que
l’Église et l’Europe ont repris des mains d’Israël : héritage divin d
518
raël, au moins aussi fondamentaux pour l’Occident
que
la raison des Grecs et l’ordre des Romains. Il m’appartient seulement
519
seulement de préciser en quelques traits le sens
que
prend l’héritage d’Israël pour la foi chrétienne protestante. On sait
520
le jeune Samuel appelé trois fois par Jéhovah, —
que
ce soit histoire ou légende, ces personnages lui sont incomparablemen
521
sonnages lui sont incomparablement plus familiers
que
les métamorphoses des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75 que l’A
522
hoses des dieux païens. Si bien qu’on a pu dire75
que
l’Ancien Testament était la vraie Antiquité des peuples de l’Europe p
523
l’Europe protestante. Mais il y a bien davantage
que
cet arrière-plan poétique, et ces exemples d’une morale parfois scand
524
n réformé. Le « peuple élu » Le simple fait
que
le calvinisme ait été dès le début une église minoritaire, en butte à
525
acceptable et la situe dans son ordre réel, c’est
que
, dans les deux cas, la persécution et l’isolement minoritaire sont co
526
tuel, dans un monde incrédule et rebelle, de ceux
que
Dieu s’est « choisis » pour témoins, en tant que collectivité, peuple
527
chargés d’une mission au sein d’un monde pécheur
que
Dieu n’abandonne pas. De même que la loi de Moïse maintenait le peupl
528
cle. Max Weber, dans une thèse célèbre, a soutenu
que
c’était là l’origine du capitalisme moderne et de ses principales val
529
cipales valeurs éthiques. Mais Sombart lui répond
que
le capitalisme est plus ancien, et qu’il est d’origine judaïque78. Ce
530
lui répond que le capitalisme est plus ancien, et
qu’
il est d’origine judaïque78. Ce n’est pas ici le lieu de prendre parti
531
e ces deux explications d’un phénomène économique
que
par ailleurs personne — non pas même Marx, quoi qu’on en pense souven
532
vent — n’a su définir clairement. Mais je retiens
que
l’une et l’autre hypothèse rattache le capitalisme à des attitudes re
533
ulsion, attitudes analogues en ceci tout au moins
qu’
elles mettent l’accent sur le fait de l’élection. Il est curieux de no
534
ur le fait de l’élection. Il est curieux de noter
que
le parallélisme se poursuit même, — et peut-être surtout — dans les d
535
eut-être surtout — dans les déviations qualifiées
que
subirent l’éthique juive et l’éthique puritaine, à mesure qu’elles «
536
l’éthique juive et l’éthique puritaine, à mesure
qu’
elles « réussissaient ». Le spiritualisme transcendant des Juifs d’Ori
537
xact : c’est le matérialisme jouisseur et cynique
que
les nazis reprochent aux Juifs allemands capitalistes, avec d’autant
538
mands capitalistes, avec d’autant plus d’amertume
que
cette attitude provocante fut souvent prise à l’étranger pour un trai
539
himérique, au surplus troublé de sentimentalisme,
que
l’on dénonce à droite chez les auteurs d’origine juive, mais qui ont
540
, qui appelleraient d’ailleurs toutes les nuances
qu’
on imagine, nous amènent au problème central que pose à la pensée d’un
541
s qu’on imagine, nous amènent au problème central
que
pose à la pensée d’un protestant, et particulièrement d’un calviniste
542
erait-il donc possible de perdre sa vocation ? Et
que
devient celui qui la trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit qu’i
543
cation ? Et que devient celui qui la trahit, soit
qu’
il rejette ses ordres, soit qu’il la prenne pour idole, refusant d’en
544
ui la trahit, soit qu’il rejette ses ordres, soit
qu’
il la prenne pour idole, refusant d’en reconnaître la vraie fin lorsqu
545
u cœur de la foi réformée. Or c’est lui justement
que
traite saint Paul au chapitre XI de l’Épître aux Romains. Et sans dou
546
t sans doute ce texte illumine aussi profondément
qu’
il est possible le mystère dernier d’Israël. « Je demande maintenant :
547
ibu de Benjamin. Dieu n’a point rejeté son peuple
qu’
il a connu d’avance » (c’est-à-dire prédestiné) (Rom., II, 1-2). Cepen
548
II, 1-2). Cependant, « Israël n’a point obtenu ce
qu’
il cherche : mais les élus l’ont obtenu et les autres ont été endurcis
549
c’est par suite de la faute des enfants d’Israël
que
le salut est parvenu aux païens, afin d’exciter leur propre émulation
550
comme exclusif, de la Révélation. Mais c’est ici
que
saint Paul indique le mystérieux renversement des rôles au dernier jo
551
, et leur amoindrissement la richesse des païens,
que
ne fera pas leur complet relèvement ! » (v. 12). « En effet, je ne ve
552
! » (v. 12). « En effet, je ne veux pas, frères,
que
vous ignoriez ce mystère, de peur que vous ne présumiez trop de votre
553
as, frères, que vous ignoriez ce mystère, de peur
que
vous ne présumiez trop de votre sagesse : c’est qu’une partie d’Israë
554
e vous ne présumiez trop de votre sagesse : c’est
qu’
une partie d’Israël est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce que la
555
sraël est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce
que
la totalité des païens soit entrée (dans l’Église) ; et ainsi tout Is
556
’Épître aux Romains. Et Calvin dit du même verset
que
c’est « une fort belle sentence ». Ainsi la vocation, du moins cette
557
d à l’humanité entière le bénéfice de la Promesse
qu’
il a reçue, cependant que son destin final demeure entre les mains du
558
se rangeront à l’obéissance de la foi… toutefois
que
les Juifs tiendront le premier lieu, comme étant les enfants aînés en
559
s sentiments « ambivalents », comme dirait Freud,
qu’
ont eus de tout temps les chrétiens à l’égard du peuple d’Israël. Tout
560
ine sourde, et en même temps le respect religieux
qu’
on lui porte. Peut-être n’est-il pas excessif de voir dans cette passi
561
tisme des hitlériens, qui n’en serait en tout cas
que
le plus impur exemple. Il reste que la chrétienté non seulement ne po
562
t en tout cas que le plus impur exemple. Il reste
que
la chrétienté non seulement ne pourra jamais se désintéresser du sort
563
au sien en vertu d’un décret de Dieu, mais encore
qu’
elle se doit de juger Israël autrement que ne fait « le monde ». Ce n’
564
encore qu’elle se doit de juger Israël autrement
que
ne fait « le monde ». Ce n’est pas au nom d’intérêts passagers que no
565
monde ». Ce n’est pas au nom d’intérêts passagers
que
nous avons à prendre position, mais au nom des promesses de la foi, e
566
iques nationalistes. Le drame est bien plus vaste
que
ne peuvent le concevoir nos polémiques. Et son issue ne dépend ni de
567
esse s’appelle le salut. 64. Il faut bien voir
que
le « racisme » juif n’est justifié à l’origine que par la vocation sp
568
ue le « racisme » juif n’est justifié à l’origine
que
par la vocation spirituelle de ce peuple. Il n’est pas du tout biolog
569
Il n’est pas du tout biologique. Il ne le devient
qu’
accessoirement, à mesure que l’on prend les « signes » de la vocation
570
que. Il ne le devient qu’accessoirement, à mesure
que
l’on prend les « signes » de la vocation pour des réalités valables e
571
ent fatal s’est-il dessiné dès le début, à mesure
que
l’on codifiait les relations des « élus » et des « gentils ». On sait
572
uif Josèphe écrit dans sa Réponse à Appion (I, 2)
qu’
un registre des « femmes sacerdotales » (c’est-à-dire appartenant aux
573
épousaient point qui aient été captives, de peur
qu’
elles n’aient eu quelque commerce avec des étrangers. Peut-il y avoir
574
descente de père en fils depuis deux-mille ans ?
Que
si quelqu’un manque d’observer cet ordre, on le sépare de l’autel, sa
575
nctions sacerdotales. » — Il est curieux de noter
que
les lois racistes hitlériennes privent de tous droits civiques les pe
576
les registres la pureté de leurs origines : c’est
que
l’exercice des droits civiques est bien une sorte de « sacerdoce » na
577
ne sorte de « sacerdoce » national. On voit ainsi
que
l’eugénisme n’est pas le seul motif de la législation raciste. 65. S
578
ffre, entre autres, d’une très grave lacune en ce
qu’
il paraît conclure sur l’abandon final d’Israël à son destin, après la
579
à la conception ancienne : un chef hébreu — celui
que
la Bible appelle Moïse — aurait bel et bien donné les rudiments de la
580
est un grand lieu commun de la théologie réformée
que
de voir dans l’Ancien Testament l’histoire du Christ avant qu’il vien
581
ès le Christ. Ainsi la Bible n’a pas d’autre sens
que
de désigner l’Incarnation qui est son centre, au-delà d’elle-même. To
582
. française, chez Rieder, 1934, p. 43. 74. Sitôt
que
la mesure cesse d’être transcendante, devient humaine, contingente et
583
urde de rendre Israël responsable de ce qui n’est
que
« profanations » de la notion de mesure totalitaire. 75. Cf. Ramuz.
584
vocation personnelle. 78. D’autres auteurs, tels
que
Labriola, font remonter le phénomène capitaliste à l’« accumulation »
585
dopté en son alliance la postérité d’Abraham : vu
que
le propos était nommément et spécialement d’icelle vocation. » (Comme
586
serf arbitre (1937)o Luther inconnu Dire
qu’
on ignore Luther en France serait exagérer, mais dans le sens contrair
587
it exagérer, mais dans le sens contraire de celui
qu’
on imagine. Car on fait pis que de l’ignorer et même que de le méconna
588
contraire de celui qu’on imagine. Car on fait pis
que
de l’ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir
589
imagine. Car on fait pis que de l’ignorer et même
que
de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il
590
e platitudes, de contradictions. Est-ce avec cela
que
s’est faite la Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à
591
utres, moins exigeants, n’hésitent pas à soutenir
que
Luther fut un démagogue, un exploiteur de l’éternel ressentiment de l
592
oute. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois
que
la phrase suivante en donne une juste idée : « En somme, qu’est-ce qu
593
se suivante en donne une juste idée : « En somme,
qu’
est-ce que Luther ? Un moine qui a voulu se marier. » J’extrais cette
594
e en donne une juste idée : « En somme, qu’est-ce
que
Luther ? Un moine qui a voulu se marier. » J’extrais cette déclaratio
595
Strohl, J. Vignaud et Lucien Febvre et aux cours,
qu’
ont professés MM. Jean Baruzi et E. Gilson, pour ne rien dire — mais c
596
de théologie protestante. Il n’en reste pas moins
que
l’ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, joint
597
çais en état d’infériorité assez grave, ne fût-ce
que
sur le plan de la culture générale. Car ignorer ou méconnaître Luther
598
ceux de la raison), et d’un christianisme absolu,
qu’
on déclare volontiers « inhumain » parce qu’il attribue tout à Dieu.
599
itrio C’est sans doute dans cette perspective
que
le lecteur, peu familiarisé avec la pensée luthérienne, parviendra le
600
aisément à saisir l’importance centrale du traité
que
nous publions : je le vois au centre du débat occidental par excellen
601
Luther30. On croit d’abord à un pamphlet, encore
que
son volume matériel soit bien écrasant pour le genre. Mais on s’aperç
602
ant pour le genre. Mais on s’aperçoit sans tarder
que
la discussion avec Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée), n’es
603
sa Diatribe (souvent personnifiée), n’est en fait
que
le support apparent d’une réflexion de plus vaste envergure, d’un tém
604
îné par sa fougue habituelle, excité (bien plutôt
que
« désarmé » comme il le dit aux premières pages) par les procédés de
605
) par les procédés de l’humaniste et du sceptique
que
se vantait d’être Érasme, Luther en vient, de proche en proche, à res
606
mme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes
qu’
illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en forme, c’est qu’il
607
vrage. S’ils n’y sont pas traités en forme, c’est
qu’
ils ne constituent pas un système, au sens philosophique du mot, mais
608
as un système, au sens philosophique du mot, mais
qu’
ils s’impliquent très étroitement les uns les autres, et ne peuvent êt
609
s uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis
que
dans l’unique et perpétuelle question que nous posent toutes les page
610
saisis que dans l’unique et perpétuelle question
que
nous posent toutes les pages de la Bible. Ils renvoient tous à une ré
611
Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont
que
les reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à
612
ibre arbitre. Ses coups violents n’ébranlent plus
que
le « vieil homme », celui qu’il nous faut dépouiller. Folie pour l
613
ts n’ébranlent plus que le « vieil homme », celui
qu’
il nous faut dépouiller. Folie pour les sages Mais il s’en faut
614
ur les sages Mais il s’en faut de presque tout
que
les grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou si
615
tiens. Il s’en faut de beaucoup, de presque tout,
que
les arguments d’un Érasme nous apparaissent comme autant de sophismes
616
uvres ; et tous les protestants qui jugent encore
que
Calvin et Luther ont fait leur temps — que dire de Paul, bien plus an
617
encore que Calvin et Luther ont fait leur temps —
que
dire de Paul, bien plus ancien — tous ceux qui tiennent la prédestina
618
eux qui traduisent « Paix sur la terre aux hommes
que
Dieu agrée » par « Paix aux hommes de bonne volonté », tous ceux-là s
619
libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir
qu’
aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres
620
son salut par ses efforts et ses œuvres morales.
Que
trouveront-ils, dès lors, dans ce Traité ? Une verdeur de polémique q
621
e style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons
que
trop bien, nous modernes, séparer le fond de la forme, admirer l’une
622
ce versa.) Mais une fois reconnue cette maîtrise,
qu’
on attendait d’ailleurs du chef d’un grand mouvement (comme dirait le
623
astique, qui n’est pas proprement luthérien, mais
que
Luther est obligé d’utiliser pour débrouiller et supprimer les faux p
624
s termes. C’est à Érasme, en tant que théologien,
que
Luther s’applique à répondre ; et c’est même la plus dure ironie — qu
625
sable, non pas en philosophe ou en métaphysicien,
que
Luther nie le libre arbitre. Ceci pourrait suffire et doit suffire en
626
erne, l’objection parfaitement anachronique, mais
que
je sais inévitable, et qui consiste à affirmer que Luther est « déter
627
ue je sais inévitable, et qui consiste à affirmer
que
Luther est « déterministe ». Mais le sérieux théologique est chose tr
628
du « serf arbitre » luthérien. (On peut admettre
qu’
un tel dialogue se déroule même à l’intérieur de la pensée d’un homme
629
r en réalité, Dieu a tout prévu, et rien n’arrive
que
selon sa prévision. Luther ne pose pas seulement l’omnipotence, mais
630
sa promesse, et auquel nul obstacle ne s’oppose.
Que
devient alors notre effort ? Il ne sert plus de rien. Nous n’en feron
631
nt les vraies règles du jeu ? Qui t’a fait croire
que
ta vie était une partie à jouer entre toi et le monde, par exemple ;
632
— J’ai besoin de le croire pour agir. L. — Mais
qu’
est-ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi qui agis ? Ou n’es-tu pas toi-mêm
633
soin de le croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce
qu’
agir ? Est-ce vraiment toi qui agis ? Ou n’es-tu pas toi-même agi par
634
’est une hypothèse de travail… Pour moi, je crois
que
Dieu connaît la fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passé
635
s encore nier ce Dieu, qui prétend voir plus loin
que
le terme de mes actions, ce qui, avouons-le, les ridiculise complètem
636
ines en fin de compte : car je sens, malgré tout,
que
je les fais librement, et tu viens me dire qu’elles sont prévues ! Et
637
t, que je les fais librement, et tu viens me dire
qu’
elles sont prévues ! Et prévues par un Dieu éternel, qui alors se joue
638
i. Dussè-je tuer Dieu, comme Nietzsche a proclamé
qu’
il avait fait. L. — Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment l
639
a chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer
que
l’idée fausse qu’elle s’en formait… Mais tu affirmes que si Dieu prév
640
le l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse
qu’
elle s’en formait… Mais tu affirmes que si Dieu prévoit tout, tu es al
641
dée fausse qu’elle s’en formait… Mais tu affirmes
que
si Dieu prévoit tout, tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’est pl
642
ieu prévoit tout, tu es alors dispensé d’agir, et
que
ce n’est plus la peine de faire aucun effort. C’est peut-être mal rai
643
suis, donc Dieu n’est pas ! »32 qui t’assurerait
que
cet acte de révolte échappe à l’éternelle prévision ? Qui t’assurerai
644
chappe à l’éternelle prévision ? Qui t’assurerait
qu’
en prononçant ces mots, tu ne prononcerais pas sur toi-même l’arrêt ét
645
té immobile, c’est l’image même de la mort. L. —
Que
savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l
646
es philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer
que
morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’
647
vent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit
qu’
elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui no
648
te. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et
que
notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’éternit
649
us dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est
qu’
une mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’éternité est quelque chose
650
vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve
que
l’éternité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit q
651
lque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit
qu’
elle n’est pas au contraire la source de tout acte et de toute créatio
652
» de temps, comme l’écrit Paul) ?33 Qui t’assure
que
notre raison tout attachée à notre chair, à notre temps où elle s’est
653
té seule actuelle ? C’est un mystère plus profond
que
notre vie, et la raison n’est qu’un faible élément de notre vie. C’es
654
re plus profond que notre vie, et la raison n’est
qu’
un faible élément de notre vie. C’est un mystère que le croyant presse
655
’un faible élément de notre vie. C’est un mystère
que
le croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et
656
qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait
que
Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu, au nom de sa promess
657
ne vit-il pas ce paradoxe et ce mystère : croire
que
« l’Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu —
658
ère : croire que « l’Éternel est vivant », croire
que
sa volonté — qui a tout prévu — peut aussi tout changer en un instant
659
yeux de l’homme, sans que rien soit changé de ce
qu’
a décidé Dieu, de ce qu’il décide ou de ce qu’il décidera ? Car l’Éter
660
ue rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce
qu’
il décide ou de ce qu’il décidera ? Car l’Éternel ne connaît pas de «
661
ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il décide ou de ce
qu’
il décidera ? Car l’Éternel ne connaît pas de « temps », il n’est pas
662
cœur. Quelle étrange illusion nous ferait croire
qu’
une décision de l’Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est
663
est elle seule qui définit notre présent ! Est-ce
que
nos objections « philosophiques » et notre crainte du « fatalisme » n
664
. M. — On peut aussi nier l’éternité, et affirmer
que
seul existe notre temps. Dans ce cas, tu n’as rien prouvé. L. — On n
665
une décision pure. Discuter ne peut nous conduire
qu’
au seuil de cette décision. Et nous n’aurons pas dialogué en vain, si
666
pu dégager l’alternative du libre arbitre, telle
qu’
elle se pose dans les termes extrêmes où elle revêt sa vraie réalité :
667
a pas là de difficultés intellectuelles. Il n’y a
que
la résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours
668
étextes toujours très moraux, et même très pieux,
qu’
invoque notre révolte… Réalité radicale du problème Dans l’Églis
669
cette Parole est Christ lui-même, — il me paraît
que
l’opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et l
670
objections. Et la démonstration purement biblique
qu’
on en trouvera dans ce traité, malgré quelques détails exégétiques dis
671
tablir, pour le chrétien, la vérité d’un paradoxe
que
Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile. L’ap
672
(Phil. 2, 12-13). C’est parce que Dieu fait tout
que
nous devons agir, selon qu’il nous l’a commandé. C’est parce que Dieu
673
ce que Dieu fait tout que nous devons agir, selon
qu’
il nous l’a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons
674
s l’a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu
que
nous avons en lui, et en lui seul, la liberté. Mais cela n’apparaît q
675
et en lui seul, la liberté. Mais cela n’apparaît
qu’
à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de la connaissance de soi-mêm
676
uther insiste sur cet « extrémisme » évangélique,
que
les sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser »
677
émisme » évangélique, que les sophistes n’étaient
que
trop portés à corriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer la C
678
maniser », au risque d’« évacuer la Croix ». Tant
qu’
on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jusque dans son série
679
jusque dans son sérieux dernier, on peut soutenir
que
l’homme possède au moins « un faible libre arbitre »34 dans les chose
680
libre arbitre »34 dans les choses du salut. Mais
que
le Christ ait dû mourir — cet acte extrême — pour nous sauver, fait v
681
— cet acte extrême — pour nous sauver, fait voir
que
nous n’avons aucune liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et à l
682
squ’au fond de la connaissance du péché pour voir
qu’
il n’y a de liberté possible que dans la grâce que Dieu nous fait. Tou
683
u péché pour voir qu’il n’y a de liberté possible
que
dans la grâce que Dieu nous fait. Toute l’argumentation de Luther vis
684
qu’il n’y a de liberté possible que dans la grâce
que
Dieu nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le moment de la
685
ologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris
que
Luther ne nie pas du tout notre faculté de vouloir, mais nie seulemen
686
tout notre faculté de vouloir, mais nie seulement
qu’
elle puisse suffire à nous obtenir le salut, étant elle-même soumise a
687
ttérature et scolastique. Il n’en reste pas moins
qu’
aux yeux de la raison — cette folle, comme le répète Luther — ce que n
688
raison — cette folle, comme le répète Luther — ce
que
nous nommons ici un paradoxe demeure une pure et simple absurdité. Ma
689
ui me paraît correspondre, terme à terme, à celui
que
Luther et Paul — et l’Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a po
690
Paul — et l’Évangile — posent à notre foi. C’est
qu’
il a poussé comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de l’homme, jusqu
691
limites de l’homme, jusqu’aux questions dernières
que
peut envisager notre pensée. Pour échapper au nihilisme qui l’étreint
692
qui l’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou
qu’
il l’a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour étern
693
nté de reconnaître notre totale irresponsabilité,
qu’
il croit trouver et regagner la dignité suprême de l’homme sans Dieu.
694
ïncidence. En vérité, c’est bien du même problème
qu’
il s’agit. Le seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale
695
opre existence35. Mais la difficulté fondamentale
que
posent les rapports de notre volonté et de l’éternité souveraine, dem
696
souveraine, demeure entière. La différence, c’est
que
Nietzsche nous propose d’adorer un Destin muet, tandis que nous adoro
697
el ! » — Dieu avec nous ! 30. À la proposition
qu’
on lui faisait, en 1587, d’éditer ses œuvres complètes, le réformateur
698
rt (1936-1937)a b Nous partons de l’impression
qu’
il existe, entre certains systèmes qu’on a coutume d’opposer très nett
699
’impression qu’il existe, entre certains systèmes
qu’
on a coutume d’opposer très nettement les uns aux autres, un commun dé
700
uns aux autres, un commun dénominateur d’erreur,
que
nous ne pourrions définir qu’en sortant du plan sur lequel ils voulai
701
ominateur d’erreur, que nous ne pourrions définir
qu’
en sortant du plan sur lequel ils voulaient nous faire prendre parti.
702
s voulaient nous faire prendre parti. C’est ainsi
qu’
on peut distinguer, dans l’idéalisme et dans le réalisme, ou dans le r
703
Les quelques pages qui suivent n’ont d’autre but
que
d’en indiquer le principe de permanente actualité. C’est précisément
704
’est précisément ce sentiment de bonne conscience
que
nous ne pouvons plus éprouver en présence de la plupart des philosoph
705
philosophies de naguère et d’aujourd’hui, telles
qu’
elles se présentent à nous. Avant même d’en pénétrer le détail et d’en
706
r ce mouvement de refus global. Mais nous sentons
qu’
elles entraînent en nous un état de division intérieure. Elles opèrent
707
nomie parfaite qui nous semble absurde. Il semble
que
l’esprit ait proclamé, lui aussi, son autarchie, et qu’il puisse se d
708
esprit ait proclamé, lui aussi, son autarchie, et
qu’
il puisse se donner des lois qui ne tiennent plus compte de la crise d
709
’est dégagé des coordonnées du moment, c’est dire
que
son exercice n’engage plus à rien, concrètement. D’où ce sentiment, q
710
es dépens. On peut continuer la métaphore et dire
que
la pensée dont nous souffrons est une pensée débrayée. Un moteur débr
711
ne pensée débrayée. Un moteur débrayé n’en ronfle
que
mieux, d’ailleurs, et fait plus de bruit qu’en « prise ». Il arrive m
712
nfle que mieux, d’ailleurs, et fait plus de bruit
qu’
en « prise ». Il arrive même qu’il tourne si vite que toute tentative
713
ait plus de bruit qu’en « prise ». Il arrive même
qu’
il tourne si vite que toute tentative d’embrayage serait immédiatement
714
en « prise ». Il arrive même qu’il tourne si vite
que
toute tentative d’embrayage serait immédiatement fatale à la machine,
715
e part, le sentiment de division et de diminution
qu’
elle favorise en nous : ce mot serait celui d’inactualité, entendu, no
716
s au sens de rupture entre la pensée et l’acte. ⁂
Que
la pensée moderne repose sur un postulat d’inactualité, il suffit, po
717
traire. Si notre monde tient encore debout, c’est
que
les philosophies qui le partagent restent gratuites, relativistes et
718
plus effroyable anarchie matérielle. On nous dira
que
, cependant, si le désordre du monde est réel, il se peut qu’il provie
719
ant, si le désordre du monde est réel, il se peut
qu’
il provienne, précisément, d’actualisations partielles des philosophie
720
ent, d’actualisations partielles des philosophies
que
nous repoussons ? Nous serions mal venus à le nier. Si le monde dure,
721
le monde dure, c’est-à-dire se renouvelle, c’est
qu’
il y a dans le monde plus d’actualité que nos philosophies n’en peuven
722
e, c’est qu’il y a dans le monde plus d’actualité
que
nos philosophies n’en peuvent concevoir. Et s’il y a du désordre, c’e
723
peuvent concevoir. Et s’il y a du désordre, c’est
que
ces philosophies sont tout de même moins inopérantes que souvent elle
724
philosophies sont tout de même moins inopérantes
que
souvent elles ne voudraient l’être. Mais, chose étrange, la raison po
725
ibre entre le microbe et la maladie ne peut mener
qu’
à une consomption lente, ou à des accidents violents, catastrophiques.
726
diagnostic indique par lui-même la thérapeutique
que
nous voudrions proposer, et qui serait un traitement préventif par l’
727
présents, avant toute analyse, dans le sentiment
que
nous disions tout à l’heure éprouver en face d’une conception puremen
728
On pourrait dire tout au plus (métaphoriquement)
que
l’acte révélé par le cliché, c’est l’éclair de magnésium dont la phot
729
a scène représentée par la photo, elle n’est plus
qu’
un objectif, inactuel en soi, et problématique. Qu’on nous permette de
730
u’un objectif, inactuel en soi, et problématique.
Qu’
on nous permette de reprendre ici une distinction importante introduit
731
même objectives, et celles sur lesquelles il faut
que
l’esprit s’appuie pour poser un problème quelconque ». L’acte, tel qu
732
pour poser un problème quelconque ». L’acte, tel
que
nous l’entendons, est évidemment une donnée de ce deuxième type, la d
733
me. La réflexion sur l’acte ne pouvant intervenir
qu’
a posteriori, elle n’est, en réalité, qu’une réflexion sur les effets
734
tervenir qu’a posteriori, elle n’est, en réalité,
qu’
une réflexion sur les effets de l’acte. Si, au moment de sauter, l’ath
735
ne reste alors qu’à se consoler par la certitude
que
l’analyse philosophique est avec celui qui ne peut pas sauter. Et c’e
736
t pas sauter. Et c’est peut-être cela précisément
que
la sagesse vulgaire appelle « prendre les choses avec philosophie »…
737
s avec philosophie »… Ceci nous amène à constater
que
: 1° Si on ne part pas de l’acte, on ne part pas du tout. 2° Si on n
738
ur l’acte contiendra nécessairement des mots tels
que
« départ », « partir » et « tout de suite ». Tout discours sur l’acte
739
la réalité créante. Force nous est de reconnaître
qu’
un tel discours, dans l’état de notre philosophie, paraîtra peu philos
740
phie, paraîtra peu philosophique. Personne, mieux
que
Kierkegaard, n’a su montrer cette complicité essentielle, et d’appare
741
: « L’éthique ne commence pas dans une ignorance
qu’
il faudrait muer en savoir, mais dans un savoir qui exige sa réalisati
742
anscendant à sa création. Il est créateur en ceci
qu’
il introduit dans les choses un rapport nouveau instituant une situati
743
ns ce rapport nouveau on ne trouvera rien d’autre
que
la matière d’une problématique nouvelle, un donné, ou plutôt un « aba
744
bouleversant d’un nouvel acte. Il n’y a eu d’acte
que
dans le présent, dans l’instant créateur, dans ce contact entre l’éte
745
mps, qui est le mystère même. Cela n’entraîne pas
qu’
on ne puisse rien dire des réactions psychologiques à l’acte « as it’s
746
e vouloir et le pouvoir. On pourrait presque dire
que
c’est la sensation de l’unité, ou, plus exactement, de son accompliss
747
maintenant le reproche d’inactualité essentielle
que
nous adressions dès le début à certains systèmes par ailleurs fort di
748
gique, à l’éliminer ou à la disqualifier. À moins
qu’
il n’en parte, comme de la réalité centrale, impensable et qui permet
749
e la véritable valeur d’une philosophie de l’acte
qu’
en montrant comment ses caractères principaux, tels que nous venons de
750
montrant comment ses caractères principaux, tels
que
nous venons de les indiquer, se retrouvent — comme reflétés — dans se
751
croyons en avoir assez dit pour pouvoir affirmer
qu’
il n’y a pas de transition entre l’acte et ses effets. C’est l’acte lu
752
ait dire, paradoxalement : il n’y a de transition
que
par l’acte, mais l’acte est le contraire d’une transition. Avant de p
753
te, impliquées d’ailleurs dans ce qui précède, et
que
nous allons utiliser. La première, c’est la violence de l’acte. Quand
754
mais aussi une nouvelle mise en ordre. C’est ici
que
nous retrouvons, sous un aspect dynamique, la distinction esprit-mati
755
n aspect dynamique, la distinction esprit-matière
que
nous avions écartée tout d’abord. L’acte créateur sépare la lumière d
756
lé de son caractère agonique. Ce n’est pas à dire
que
la lumière et les ténèbres soient données avant l’acte, car sinon il
757
car sinon il ne serait pas créateur, c’est-à-dire
qu’
il ne serait pas acte. L’acte n’a qu’un point d’application, le chaos,
758
c’est-à-dire qu’il ne serait pas acte. L’acte n’a
qu’
un point d’application, le chaos, la discorde, le non-être, ou ce qui
759
ordre. L’acte est si étroitement lié à ses effets
qu’
on ne saurait humainement le séparer du premier d’entre eux, qui est l
760
tension. Le nouvel état du conflit est plus aigu
que
l’ancien. Au fur et à mesure qu’elle se libère, la personnalité se ri
761
it est plus aigu que l’ancien. Au fur et à mesure
qu’
elle se libère, la personnalité se risque de plus en plus. C’est pourq
762
au prestige du positivisme et du néo-pragmatisme
qu’
à celui du moulin à prières. Il est plus difficile de maintenir sur le
763
difficile de maintenir sur le qui-vive un empire
qu’
une cité étroite. En effet, à l’intérieur même de l’empire, s’établit
764
l’intérieur même de l’empire, s’établit un danger
qu’
ignorent les pays de marche. Le sentiment de la sécurité, de l’ennui,
765
échissement. La tentation de l’acte gratuit n’est
qu’
une forme moderne de la tentation de l’inerte. C’est un vertige de la
766
on seulement la pensée est acte, mais elle est ce
qu’
il y a de plus actuel ·dans l’acte. Ce qui a pu tromper sur ce point,
767
qui a pu tromper sur ce point, c’est précisément
que
, la pensée étant la plus immédiate des mises en ordre, la raison est
768
est tentée de confondre cet ordre même, qui n’est
qu’
un effet, avec le dynamisme qui en est cause. Ce dynamisme propre de l
769
namisme propre de la pensée créatrice, c’est cela
que
nous appelons sa faculté dichotomique. La science nous en donnera un
770
r Meyerson). Il n’y a de paradoxe épistémologique
que
pour qui refuse d’aborder le problème de la connaissance à partir de
771
me monument ou système de règles, ne saurait être
qu’
un aspect provisoirement favorable du chaos. La vérité scientifique es
772
ence-faite rejoint le donné. Mais cela n’est vrai
que
pour le savant seulement au moment où il crée ; pour les autres homme
773
es termes, la machine sépare le travail qualifié,
qu’
elle repousse vers l’activité spirituelle, du travail non qualifié, où
774
du travail non qualifié, où l’homme ne joue plus
qu’
un rôle d’exécuteur. Remarquons que la machine n’est que le prolongeme
775
e ne joue plus qu’un rôle d’exécuteur. Remarquons
que
la machine n’est que le prolongement d’un schéma mathématique, et qu’
776
rôle d’exécuteur. Remarquons que la machine n’est
que
le prolongement d’un schéma mathématique, et qu’elle est elle-même pr
777
que le prolongement d’un schéma mathématique, et
qu’
elle est elle-même prolongée par la rationalisation. Nous avons là un
778
as y renoncer sans briser son ressort. Remarquons
que
cet attachement est la marque de l’humanité. Mais, d’autre part, l’ho
779
s, d’autre part, l’homme n’existe personnellement
qu’
autant qu’il s’affirme en acte. Quand on parle de solidarité humaine,
780
part, l’homme n’existe personnellement qu’autant
qu’
il s’affirme en acte. Quand on parle de solidarité humaine, de valeur
781
valeur humaine, c’est à une société de personnes
que
l’on pense. L’homme n’atteint l’universel qu’à travers le personnel.
782
nes que l’on pense. L’homme n’atteint l’universel
qu’
à travers le personnel. Originalité éclatante, inoubliable, paradoxale
783
yeux ce qui n’est pas immédiat à l’acte ? Est-ce
que
nous n’allons pas être amenés à nier la réalité de toute médiation ?
784
éalité des résistances à cette activité. Ce n’est
que
dans certains domaines très étroits de la pensée que ces résistances
785
dans certains domaines très étroits de la pensée
que
ces résistances sont assez nettement brisées pour conférer à la créat
786
’activité. La médiation ne se manifeste pour nous
que
sous forme de résistance. Il y a assurément des résistances plus ou m
787
x au personnalisme social, mais ce ne sont jamais
que
des résistances. Entre les deux pôles de la tension, il n’y a ni iden
788
umaine ne saurait donc considérer toute médiation
que
comme une résistance à son effort immédiat, ou, pour reprendre l’expr
789
métaphysique contre l’éthique ». Il faut, certes,
que
l’homme trouve des points d’appui et garde une participation avec ce
790
sonnel. Mais cette nécessité ne reprend sa valeur
que
dans la tension active dirigée tout entière vers l’affirmation du per
791
ine, l’acte instantané ne fera briller son éclair
que
bien rarement. Les conflits contre le temps, contre l’espace, contre
792
ort une sorte de réalité indépendante, ne donnent
que
rarement l’occasion d’une victoire évidente ; mais dans tous les doma
793
té de l’acte. 1. Ce qui ne signifie pas du tout
que
la pensée doive être soumise à l’action — bien au contraire ! — mais
794
e soumise à l’action — bien au contraire ! — mais
que
le risque de penser est actuel (D. R.). 2. Je retrouve dans les pap
795
ssable. En effet, de tous les seuils irrationnels
que
l’homme puisse passer, c’est sans doute le seul qui ne lui coûte pas
796
ement M. Lévy-Bruhl, notamment dans la conférence
qu’
il a faite à Oxford, le 19 mai 1931, il le passe chaque fois qu’il pen
797
1931, il le passe chaque fois qu’il pense, encore
que
peut-être l’acte de penser, au sens plein et cartésien du mot, soit i
798
mot, soit infiniment plus difficile et plus rare
qu’
on ne se figure communément. Avant de chercher à répondre à cette ques
799
dispensable de marquer très fortement l’influence
qu’
exerce ce seuil sur toute la vie humaine et, probablement, sur la vie
800
vie en général. Cela est d’autant plus nécessaire
que
de même que la science a longtemps refusé de faire entrer dans ses co
801
dans ses constructions le principe de Carnot, et
qu’
elle n’a accepté l’irréversibilité qu’il recèle, que pour en tourner l
802
Carnot, et qu’elle n’a accepté l’irréversibilité
qu’
il recèle, que pour en tourner l’irrationalité foncière à l’aide d’une
803
’elle n’a accepté l’irréversibilité qu’il recèle,
que
pour en tourner l’irrationalité foncière à l’aide d’une loi statistiq
804
tion intellectuelle. Notre science n’est à l’aise
que
dans le continu et elle fait surgir le discontinu qu’elle multiplie p
805
dans le continu et elle fait surgir le discontinu
qu’
elle multiplie par son progrès même. Elle ne connaît que du probable e
806
e multiplie par son progrès même. Elle ne connaît
que
du probable et, en tant qu’acte, elle est l’improbabilité essentielle
807
e, elle est l’improbabilité essentielle. Paradoxe
que
M. Meyerson a décrit sous le nom de paradoxe épistémologique. » (Arna
808
es raisons Chacun sait et éprouve chaque jour,
que
l’état des dépendances financières ou des partisanneries politiques q
809
nformation d’État : Tass ou DNB sont aussi graves
que
celles d’un monopole privé) qu’il est à craindre qu’elle ne puisse s’
810
sont aussi graves que celles d’un monopole privé)
qu’
il est à craindre qu’elle ne puisse s’accomplir isolément. Seul le red
811
celles d’un monopole privé) qu’il est à craindre
qu’
elle ne puisse s’accomplir isolément. Seul le redressement radical et
812
rd’hui l’argent, libérera l’information. Ce n’est
qu’
en attaquant l’ensemble des trusts qu’on atteindra celui des journaux.
813
n. Ce n’est qu’en attaquant l’ensemble des trusts
qu’
on atteindra celui des journaux. Le but L’objet des « Clubs de p
814
lic, synonyme de mensonge. Il s’agit en attendant
que
la question puisse être attaquée et résolue de front — de tourner la
815
r une matière définitive. Il convient de préciser
que
le bulletin n’est pas distribué. Il est adressé personnellement et co
816
ils acceptent les statuts. Il faut encore ajouter
que
le « Comité central d’informations » qui rédige le bulletin, n’a pas
817
pas seulement à sa disposition les renseignements
que
lui fournissent les clubs de base. Composé lui-même de journalistes,
818
ns de comprendre et de redresser la documentation
que
continuera à leur fournir la presse. Elle pourrait être une sorte d’é
819
hors de son domaine, les « Clubs » n’oublient pas
que
la réforme organique de la presse est le but final. Dans cette partie
820
roblèmes financiers, professionnels, législatifs,
que
pose la réforme de la presse. Dès à présent, de tels documents facili
821
une presse truquée. L’esprit Il est évident
que
la portée d’une telle entreprise dépend de la valeur professionnelle
822
partiennent, dans une entreprise qui ne veut être
qu’
une œuvre stricte d’information, à l’exclusivité de tout commentaire e
823
limité, celui de l’information, nous avons pensé
que
nous devions collaborer avec des camarades venant d’autres organisati
824
l’occasion d’un échange de vues qui ne peut être
que
fructueux pour tous. Nous faisons un appel pressant auprès de tous no
825
s, pour qu’ils comprennent l’intérêt exceptionnel
que
présente la formation des clubs, pour qu’ils y collaborent activement
826
la culture et de la défense de la culture. C’est
qu’
on ne sait plus ce que signifie culture. C’est que la culture est en p
827
éfense de la culture. C’est qu’on ne sait plus ce
que
signifie culture. C’est que la culture est en pleine crise, et que ce
828
qu’on ne sait plus ce que signifie culture. C’est
que
la culture est en pleine crise, et que cette crise ne sévit plus seul
829
ure. C’est que la culture est en pleine crise, et
que
cette crise ne sévit plus seulement dans les élites, mais se manifest
830
t dans les couches profondes de la nation. Je dis
que
la crise de la culture est dans la rue. Je dis que la culture fait le
831
ue la crise de la culture est dans la rue. Je dis
que
la culture fait le trottoir. Et que c’est la politique qui s’est char
832
a rue. Je dis que la culture fait le trottoir. Et
que
c’est la politique qui s’est chargée de réglementer à sa manière la p
833
s’édifiait la culture. M. de la Rocque défend ce
qu’
il appelle « la primauté de l’esprit ». Il fait placarder des affiches
834
de la politique, on peut être à peu près certain
que
ces deux messieurs défendent en réalité le contraire de l’esprit et d
835
traire de l’esprit et de la liberté, c’est-à-dire
qu’
ils défendent l’un et l’autre un régime d’étatisme oppressif et de dic
836
aine, vous passerez bientôt pour fasciste. On dit
que
les mots n’ont plus de sens. Ce serait trop beau, ce serait trop faci
837
gues. En réalité, les mots prennent tous les sens
qu’
on veut dans la bouche des politiciens. Ils prennent de préférence un
838
olini fait la conquête de l’Éthiopie au nom de ce
qu’
il appelle sa liberté, etc.) Mais ils prennent aussi toutes sortes de
839
politique actuelle s’occupe bien moins des faits
que
des mystiques dont on se sert pour masquer, à gauche et à droite, une
840
a surenchère politicienne en est venue à ce point
que
, par une double démagogie, on dit aujourd’hui liberté et autorité à d
841
pour interdire cette prostitution. Il en résulte
que
la culture qui joue tant sur le sens des mots et sur leur acception c
842
on commune, se trouve ruinée par la politique. Et
que
la politique, qui a tourné en mystique, parle pour ne rien dire ou po
843
parle pour ne rien dire ou pour dire autre chose
que
ce qu’elle dit. On se demande pourquoi, dans de telles conditions, l’
844
pour ne rien dire ou pour dire autre chose que ce
qu’
elle dit. On se demande pourquoi, dans de telles conditions, l’on s’ob
845
r ce problème tout d’abord. Écrivons pour montrer
qu’
il n’est pas de problème politique plus urgent que celui des mots ; et
846
qu’il n’est pas de problème politique plus urgent
que
celui des mots ; et qu’il n’est pas de problème culturel qui ne dépen
847
ème politique plus urgent que celui des mots ; et
qu’
il n’est pas de problème culturel qui ne dépende de la politique. Cela
848
i Je n’apprendrai rien à personne en affirmant
que
le roman est le plus « contagieux » de nos genres littéraires, j’ente
849
eur « Temps perdu » ; enfin, à tous les adultères
que
le roman à trois personnages, genre français par excellence, a provoq
850
es lecteurs assez ardents pour le subir autrement
qu’
en imagination. Et rien n’est plus légitime, voire désirable, que cett
851
on. Et rien n’est plus légitime, voire désirable,
que
cette contagion pratique de l’art, tant qu’il s’agit véritablement d’
852
able, que cette contagion pratique de l’art, tant
qu’
il s’agit véritablement d’art, tant qu’il s’agit, pour un auteur, d’in
853
’art, tant qu’il s’agit véritablement d’art, tant
qu’
il s’agit, pour un auteur, d’influencer le public par des moyens chois
854
du monde plus profonde, plus riche et plus vraie,
que
la vision banale de la vie quotidienne. Il est très bon que le romanc
855
ion banale de la vie quotidienne. Il est très bon
que
le romancier et ses romans agissent, de cette manière intime et soute
856
ent, de cette manière intime et souterraine, tant
qu’
ils ont quelque chose à dire. Mais nos romanciers d’après-guerre, qu’o
857
chose à dire. Mais nos romanciers d’après-guerre,
qu’
ont-ils à dire ? Dans quel sens entendent-ils agir sur les mœurs de le
858
Vie (avec majuscule). Ils ne redoutent rien tant
que
l’œuvre à thèse. Ils se défendent de toutes leurs forces d’avoir une
859
, par crainte de s’imposer ou par ignorance de ce
qu’
il faudrait imposer, se contentent d’un opportunisme à la petite semai
860
a petite semaine, et ménagent les opinions plutôt
que
les intérêts de leurs électeurs. Cet opportunisme à courte vue caract
861
t de la conscience bourgeoise moyenne. Il ne fait
que
traduire les humeurs, les goûts, les craintes et les vapeurs du bourg
862
u nom d’un idéal révolutionnaire cohérent. Il n’a
qu’
une crainte : celle de passer pour autre chose qu’un « pur artiste »,
863
qu’une crainte : celle de passer pour autre chose
qu’
un « pur artiste », celle de passer pour un auteur à thèse, pour un pr
864
lasse. Rien n’est plus dangereusement tendancieux
qu’
un écrivain qui n’ose pas affirmer sa tendance. La contagion du roman
865
lasses possédantes et de leurs coutumes. Il n’est
que
de voir l’importance démesurée que nos romanciers attachent à la desc
866
umes. Il n’est que de voir l’importance démesurée
que
nos romanciers attachent à la description des vêtements, des ameublem
867
is qui s’imaginait, naïvement et confortablement,
qu’
on peut écrire n’importe quoi, sans ce que cela porte à conséquences,
868
lement, qu’on peut écrire n’importe quoi, sans ce
que
cela porte à conséquences, ce romancier s’est condamné lui-même, en f
869
s’est condamné lui-même, en fait, à ne plus être
que
l’agent de publicité — plus ou moins bénévole — des fournisseurs d’un
870
’une certaine classe. Ce romancier, et la culture
qu’
il représente, on comprend que la jeunesse actuelle ne marche plus pou
871
cier, et la culture qu’il représente, on comprend
que
la jeunesse actuelle ne marche plus pour les défendre. La crise du li
872
ui qui est consacré à l’après-guerre. II est vrai
que
beaucoup de noms y sont omis, que beaucoup de nos gloires y sont trai
873
re. II est vrai que beaucoup de noms y sont omis,
que
beaucoup de nos gloires y sont traitées cavalièrement (Maurois-Mauria
874
mais on ne l’avait vu et constaté aussi nettement
qu’
à la lecture de ce bilan désinvolte. Au lendemain de la guerre, la pro
875
iait cette génération : elle ignorait apparemment
que
la liberté est une conquête, et non pas une facilité. Tout concourait
876
de gloires rapides et sans ampleur, des « noms »
qu’
un seul livre imposa, et l’on acceptait les suivants parce que c’était
877
s de la crise qui les suit, on ne retiendra guère
que
les bizarreries les plus aiguës : Cocteau, Max Jacob, les premiers su
878
ante. Quant au roman contemporain, il est curieux
que
Thibaudet, son premier historien, ne tente d’en sauver que les plus g
879
udet, son premier historien, ne tente d’en sauver
que
les plus gros morceaux — au poids — les « romans-cycles ». Le roman-c
880
. Le roman-cycle, c’est, semble-t-il, la solution
qu’
adoptent naturellement les écrivains lassés de l’improvisation et du b
881
et vagabondent à travers les générations. Notons
qu’
ils s’attardent presque tous aux générations d’avant-guerre : le temps
882
fficultés, conclut-il, on ne saurait guère douter
que
le super-cycle de ces sept romans-cycles (Martin du Gard, Duhamel, Fr
883
u paysage, du roman, pour cette tranche de siècle
que
meublera la génération de 1914. Il est caractéristique que le livre
884
ra la génération de 1914. Il est caractéristique
que
le livre de Thibaudet se termine sur une note pessimiste, et sur l’ex
885
cette dégradation littéraire, après tout, ne fait
que
traduire celle de la société. Tous ces romans-cycles sont, en effet,
886
sque tout est brouillé, lorsque tout est permis ?
Que
décrire, sinon ce qui s’écroule — et cela ne peut pas donner les élém
887
rmes. Les gros romans sociaux de huit-cents pages
que
nous assènent les Céline, Aragon ou Plisnier sont bien plus des pamph
888
, Aragon ou Plisnier sont bien plus des pamphlets
que
des romans, des essais illustrés d’exemples : du coup, ils retrouvent
889
ls retrouvent un public. Il semble, d’autre part,
que
les documentaires entremêlés de réflexions et de jugements personnels
890
s la meilleure des prudences. C’est la conclusion
que
je tire d’un article de M. Vandérem (dans Candide) où la critique des
891
ans Candide) où la critique des critiques actuels
que
j’avais esquissée, ici même, se trouve citée et commentée, et sans do
892
petto… Mais M. Vandérem est réaliste : il trouve
que
j’en prends à mon aise et que je néglige un peu cavalièrement les con
893
éaliste : il trouve que j’en prends à mon aise et
que
je néglige un peu cavalièrement les contingences. Si j’étais plus av
894
rit-il —, je me rendrais compte de tous les aléas
que
représenteraient pour la critique un chambardement de ce genre. Ce se
895
ète demandant des mois. On ne saurait mieux dire
que
le mal est aussi grave que je l’indiquais. Et si l’on en doutait enco
896
ne saurait mieux dire que le mal est aussi grave
que
je l’indiquais. Et si l’on en doutait encore, c’est M. Fernandez qui
897
e force au public ». Car, précisait-il, « on sait
que
la force, en ces matières, cela veut dire surtout la chance et la tac
898
re surtout la chance et la tactique, il me semble
que
le talent de M. Amoux est supérieur à sa tactique ». Faut-il être jeu
899
« constatation » de cet ordre ! Comprenez-vous ce
qu’
elle suppose, ce qu’elle avoue sereinement, ce qu’elle déclare avec ta
900
cet ordre ! Comprenez-vous ce qu’elle suppose, ce
qu’
elle avoue sereinement, ce qu’elle déclare avec tant de naturel ? Sent
901
qu’elle suppose, ce qu’elle avoue sereinement, ce
qu’
elle déclare avec tant de naturel ? Sentez-vous, à la lire, quelque ch
902
oût ? Partagez-vous ma naïveté ? Et M. Fernandez,
qu’
en pensait-il, écrivant cela ? Dans quelle illusion ai-je vécu ? Ce n’
903
’est rien d’écrire, de faire une œuvre, de croire
qu’
on a quelque chose à dire ; le but de l’écrivain, c’est de s’imposer a
904
de la tactique ! Je le vois bien. Je supplie donc
qu’
on m’explique la tactique. En quoi cela peut-il consister ? Aucune idé
905
stère de « la vie… ». Profitant de mon innocence,
que
j’espère d’ailleurs provisoire, — je vieillirai — je voudrais dire ce
906
que chose de beaucoup plus dangereux et difficile
que
l’avancement dans la vie : quelque chose que nous autres appelons, da
907
cile que l’avancement dans la vie : quelque chose
que
nous autres appelons, dans ce journal, une révolution. Quand les cler
908
: mes dernières années de Paris m’avaient appris
que
cette ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des
909
s milliers de maisons vides. Dites autour de vous
que
vous en cherchez une, et vous en trouverez pour rien, ou pas grand-ch
910
eut « vivre » ? C’est à cette question judicieuse
que
j’ai voulu répondre. Peut-être mon récit n’a-t-il pas d’autre but que
911
dre. Peut-être mon récit n’a-t-il pas d’autre but
que
de décrire un précédent, d’affirmer que cela peut se faire, que cela
912
autre but que de décrire un précédent, d’affirmer
que
cela peut se faire, que cela s’est fait, qu’il y a là un bonheur… 22
913
un précédent, d’affirmer que cela peut se faire,
que
cela s’est fait, qu’il y a là un bonheur… 22 septembre 1934. À… (Gard
914
rmer que cela peut se faire, que cela s’est fait,
qu’
il y a là un bonheur… 22 septembre 1934. À… (Gard) Arrivés hier matin,
915
és hier matin, par Nîmes. Déjà je ne sais plus ce
que
j’attendais, ni ce que j’ai pu rêver de ce pays. Il est très pauvre,
916
s. Déjà je ne sais plus ce que j’attendais, ni ce
que
j’ai pu rêver de ce pays. Il est très pauvre, sec et lumineux. Toutes
917
« Décrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons
que
le jardinier s’appelle Simard, sa femme Marguerite, son chien basset
918
sa femme Marguerite, son chien basset Pernod. Et
qu’
il va falloir modifier cette maison pleine de guéridons et d’aquarelle
919
eine de guéridons et d’aquarelles, de telle sorte
qu’
on puisse y travailler. Nous faisons l’inventaire minutieux et le plan
920
’ai dressé ma table sur des tréteaux. Il ne reste
qu’
un grand canapé de velours ponceau et des chaises de paille trouvées d
921
peine de quoi se nourrir. Et j’entrevois déjà ce
qu’
ils appellent ici se nourrir : nos voisins n’ont sur leur table, quand
922
’ont sur leur table, quand on va les voir à midi,
que
des châtaignes, des olives, des radis et quelques légumes de leurs cu
923
des radis et quelques légumes de leurs cultures,
qu’
ils n’ont pas pu vendre au marché. Cependant, ils se considèrent comme
924
ité, dont la femme fait des journées. Considérant
que
richesse oblige — car je gagne à peu près 1.000 francs par mois — nou
925
d’un couvent désaffecté, mais je n’y vois jamais
que
des vieillards en pantoufles. Devant le parc, un mail couvert d’une é
926
s aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi
qu’
ils s’arrangent pour vivre plus mal que la population des faubourgs de
927
erve aussi qu’ils s’arrangent pour vivre plus mal
que
la population des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie s
928
vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez
que
dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé d’URSS, et ré
929
’ailleurs importé d’URSS, et récemment. On me dit
qu’
ici trois maisons seulement, sur 200, ont l’eau courante. Les femmes v
930
is d’autre part, en parcourant la feuille locale,
qu’
il naît encore pas mal d’enfants dans ces foyers que tout menace. Fais
931
’il naît encore pas mal d’enfants dans ces foyers
que
tout menace. Faisons la part des « accidents », des « imprudences ».
932
Pourtant c’est bien ici le peuple « raisonnable »
qu’
on donne en exemple aux barbares de l’Europe centrale. Le peuple qui s
933
tre à quelque espoir vague et profond. Or tout ce
que
l’État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, r
934
ge pratique de la raison ? Simplement je constate
qu’
en fait, et dans ce pays tel qu’il est, la morale rationnelle et les m
935
ement je constate qu’en fait, et dans ce pays tel
qu’
il est, la morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est
936
l qu’il est, la morale rationnelle et les mesures
qu’
elle propose, ce n’est guère que le rêve des vieux célibataires assez
937
le et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère
que
le rêve des vieux célibataires assez fortunés, ou ascètes. Ceux qui n
938
ont un peu de peine avec les ouvriers. Il paraît
qu’
on en trouve de moins en moins. — « Mais, lui dis-je, et les chômeurs
939
« Mais, lui dis-je, et les chômeurs ? On m’a dit
qu’
il y en a 400 à A ? » La mère, vivement : « Jamais je n’ai engagé de c
940
urs, Monsieur, c’est un principe. Nous ne voulons
que
des ouvriers honnêtes. Pensez donc, deux femmes seules ! — C’est que
941
nnêtes. Pensez donc, deux femmes seules ! — C’est
que
je suis chômeur moi-même, Madame… » Elle sourit à son tour, de l’air
942
r, sans indiscrétion ? » Je dis mon nom. — Est-ce
que
vous écrivez des articles ? J’en ai lu signés de ce nom-là. Et elle m
943
ertes, et pourtant elles en sont encore à estimer
que
chômeur est synonyme de vagabond dangereux. Elles font partie des « t
944
oisie des villes et le prolétariat ? L’opposition
que
veulent voir les marxistes entre bourgeois, ou maîtres, et prolétaire
945
mi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé
qu’
on le lui dise. Il s’estime fort au-dessus d’un mineur retraité, par e
946
out autre espèce, on dirait même d’une autre race
que
les métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le
947
race que les métayers catholiques de la montagne
qu’
on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’une supériorit
948
r le marché. Et très conscients d’une supériorité
qu’
ils ne peuvent attribuer au rang social ni au salaire, c’est évident,
949
des différences et des affinités, au moins autant
que
les conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale
950
s’estime donc scientifique. Il ne part pas de ce
que
les hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de le
951
hommes veulent être, ni de la conscience globale
qu’
ils ont de leur état (et c’est pourtant le principal, pratiquement et
952
usions, voire de « mystification ». Il part de ce
que
les hommes sont malgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de l
953
humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle
qu’
elle est vécue et voulue par les hommes réels et concrets, ou bien sur
954
s réels et concrets, ou bien sur la réalité telle
qu’
elle est chiffrable, inévitable, impersonnelle ? 2 novembre 1934 Minui
955
s ; de ces veillées fiévreuses, assiégées. Est-ce
que
je les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n
956
s, assiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-ce
que
l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des
957
heure suspendue, il vaut mieux cesser de penser.
Que
penserais-je, ici, d’humain, d’actif ? Ici où je suis sans prochain,
958
e ou mes frères (?) les hommes sont plus éloignés
que
jamais ? « La nuit est faite pour dormir », me disait un gardien de l
959
s gens. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit
que
la mère a la grippe. Je trouve à la cuisine la fille et une voisine.
960
je crois bien sa blouse noire aussi. Elle me dit
qu’
elle a été assez mal. On devait lui retirer son linge toutes les deux
961
ucher à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire
que
la viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du po
962
i a fait de l’avantage. Voyez ! Ce n’est pas vrai
que
la viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir fair
963
és quand on va les récolter. « Voyez-vous ! c’est
qu’
il a fait un vent cette nuit ! » 11 novembre 1934 D’une manière généra
964
ns la bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort
que
les gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouil
965
eux assiettes. La mère Calixte, qui casse tout ce
que
l’on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je
966
yais la tenir cette assiette ! » De telle manière
qu’
on entend bien que c’est ainsi de tout, et qu’on aurait grand tort de
967
ère qu’on entend bien que c’est ainsi de tout, et
qu’
on aurait grand tort de croire que rien au monde dépend de nous. Ceci
968
nsi de tout, et qu’on aurait grand tort de croire
que
rien au monde dépend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la
969
ée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce
qu’
il faut, elles qui travaillent, elles qui décident, elles qui lisent,
970
Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question :
Que
reste-t-il pour entreprendre ici une révolution constructive ? 21 nov
971
la filature : « Je vous dis, c’est miraculeux ce
qu’
on leur donne ! Sept francs par jour ! » (Il voulait dire : scandaleux
972
ans l’autocar, une femme dont j’ai cru comprendre
qu’
elle tient un petit hôtel à Saint-Jean-du-Gard, expliquait à sa voisin
973
ialiste, rappelle-toi ! Si tu oublies, tu n’auras
qu’
à te rappeler épicerie. » Épicerie pour spécialiste, vous n’auriez jam
974
Et c’est encore une fois le drame de la culture.
Qu’
on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de ce fait, à vrai dire minu
975
e fois le drame de la culture. Qu’on ne croie pas
que
j’exagère. Je ne tire de ce fait, à vrai dire minuscule, qu’une évide
976
re. Je ne tire de ce fait, à vrai dire minuscule,
qu’
une évidence. Les mots que nous disons ou que nous écrivons, nous autr
977
à vrai dire minuscule, qu’une évidence. Les mots
que
nous disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels, éveillen
978
ule, qu’une évidence. Les mots que nous disons ou
que
nous écrivons, nous autres intellectuels, éveillent dans l’esprit pop
979
éveillent dans l’esprit populaire des harmoniques
que
nous ne savons plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus le mê
980
ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple
que
je viens de citer, c’est une espèce de calembour qui ne joue que sur
981
citer, c’est une espèce de calembour qui ne joue
que
sur des sons. Mais il est clair que le sens des termes dont nous uson
982
r qui ne joue que sur des sons. Mais il est clair
que
le sens des termes dont nous usons doit subir des métamorphoses non m
983
et pauvreté, tous ces vocables dont nous pensions
qu’
ils exprimaient les lieux communs sur quoi repose, tacitement, la vie
984
e du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts,
que
chez nous. Leur résonance sentimentale est différente, et c’est pourq
985
pourquoi leur sens est différent, en dépit de ce
que
l’on pourrait déduire, dans le fait, d’une discussion raisonnable, c’
986
dire truquée, avec tel ou tel ouvrier. On pensera
que
de tout temps la traduction du langage surveillé des écrivains dans l
987
ce au langage, est un des droits imprescriptibles
que
se trouve avoir décrété la Convention. Bref, il n’est plus de mesure
988
pour ne pas dire dans le vide (il vaudrait mieux
que
ce soit le vide, dans bien des cas), quels que soient nos efforts ver
989
ux que ce soit le vide, dans bien des cas), quels
que
soient nos efforts vers la rigueur et vers l’adaptation de notre styl
990
le à notre action. On serait même tenté d’estimer
que
la plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité, et l’inverse.
991
oindre efficacité, et l’inverse. Par où l’on voit
que
le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vi
992
ic nous posent des exigences dont il faut admirer
qu’
elles soient aussi exactement contradictoires. Or, de ces deux antagon
993
nistes, c’est l’esprit qui sera vaincu. Non point
qu’
il s’avilisse partout ni qu’il se laisse toujours persuader par la ten
994
era vaincu. Non point qu’il s’avilisse partout ni
qu’
il se laisse toujours persuader par la tentation du succès. Mais simpl
995
implement on ne l’entend plus, il n’agit plus. Ce
qu’
on « entend », c’est l’absence de l’esprit, c’est l’appel aux instinct
996
embre 1934 Le pasteur m’a convoqué aux entretiens
qu’
il organise le samedi soir, dans une salle attenante au temple, pour l
997
it-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n’en vient
qu’
une dizaine au culte. C’est trop compromettant. Mais pour une causerie
998
t parler de tout… J’irai d’autant plus volontiers
que
, devant parler moi-même, dans quelques jours, au cercle d’hommes de S
999
département ». La discussion n’a vraiment démarré
que
lorsqu’on s’est mis à parler d’autre chose que du sujet, c’est-à-dire
1000
ré que lorsqu’on s’est mis à parler d’autre chose
que
du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de l’enseignement, des journau
1001
is de gros rires. L’homme du peuple — et je pense
qu’
il en va de même du bourgeois peu cultivé, et sans doute de tout ce qu
1002
ette lenteur et ces répétitions n’ont d’autre but
que
de laisser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’e
1003
est seulement de la langue des écrivains français
qu’
il est exact de dire, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de
1004
s qu’il est exact de dire, avec tous les manuels,
qu’
elle est une langue de discussion, parce que toujours elle vise à la f
1005
ve, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose
qu’
une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire28. Or
1006
ù ils veulent être de bons écrivains français.) —
Que
de bonne volonté chez les hommes de ce Cercle ! comme ils s’appliquen
1007
des choses, amicalement ; de partager avec eux ce
que
l’on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus,
1008
à leurs timidités et aux distances télescopiques
que
tout cela met entre celui qui parle et son public ! (Le « conférencie
1009
ussi des communistes, de temps à autre. Il paraît
que
ça chauffe certains soirs. Mais le pasteur préside et on le respecte
1010
abitants qui ne le sont pas ne savent pas trop ce
qu’
ils sont, à part les châtelains. Ils votent radical ou socialiste, et
1011
couture, régulièrement. Mais faut-il donc penser
que
les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le
1012
il en est bien ainsi, me dis-je, on peut redouter
que
ces hommes ne sachent pas faire la distinction entre le marxisme et l
1013
vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis
que
sa vie consiste à connaître ces choses, il faut prendre le mot dans l
1014
n qui est responsable de connaître ces gens mieux
qu’
ils ne se connaissent eux-mêmes, quelqu’un qui a pour mission de leur
1015
a donc des communistes. Je demande au pasteur ce
que
c’est que ces communistes. — Voilà. Que vous dire de gens que je conn
1016
s communistes. Je demande au pasteur ce que c’est
que
ces communistes. — Voilà. Que vous dire de gens que je connais si bie
1017
asteur ce que c’est que ces communistes. — Voilà.
Que
vous dire de gens que je connais si bien ? C’est difficile de les cla
1018
e ces communistes. — Voilà. Que vous dire de gens
que
je connais si bien ? C’est difficile de les classer et je n’aime pas
1019
sûr, et plus on les voit de près… — Je comprends
qu’
il soit difficile de parler en général de ses paroissiens. Mais s’ils
1020
de la place à traverser. — ??? — Oui, vous savez
que
nos temples du Midi sont construits en général sur la place du villag
1021
? — Guère. Là encore, ce sont surtout les femmes
qu’
on voit. Eux sont au travail, ou au café. — Pourquoi n’iriez-vous pas
1022
yez-vous ? — Surtout à l’occasion des conférences
que
j’organise. Vous avez déjà parlé dans des cercles d’hommes. Vous voye
1023
discussion sur l’incroyance. L’orateur avait dit
que
la différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est que pas
1024
e entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est
que
pas les chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est qu’i
1025
e n’est que pas les chrétiens se conduisent mieux
que
les autres, mais c’est qu’ils se confient en Dieu, et qu’ils attenden
1026
ns se conduisent mieux que les autres, mais c’est
qu’
ils se confient en Dieu, et qu’ils attendent tous les ordres de lui. À
1027
autres, mais c’est qu’ils se confient en Dieu, et
qu’
ils attendent tous les ordres de lui. À la fin, un des communistes se
1028
us ne croyons pas en Dieu, nous autres, ce serait
que
nous sommes trop orgueilleux ? » En général, on peut dire que les com
1029
mes trop orgueilleux ? » En général, on peut dire
que
les communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux, e
1030
i proposent des réformes pratiques, qui demandent
qu’
on installe l’eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’élém
1031
treprenant de la population. — Mais savent-ils ce
que
c’est, le marxisme ? — Ils essaient ; peut-être plus qu’on ne croirai
1032
st, le marxisme ? — Ils essaient ; peut-être plus
qu’
on ne croirait. J’en connais plusieurs qui lisent des brochures de vul
1033
s des questions. Mais ce n’est pas par la lecture
qu’
ils viennent au parti. L’affaire, pour eux, c’est d’abord de se groupe
1034
, vous vous entendez bien avec eux ? — Ils savent
que
je suis de leur côté, en gros, dans les questions locales où il faut
1035
joue pratiquement aucun rôle dans leur action, et
qu’
elle n’a rien changé à leur croyance ou plutôt à leur incroyance. Tout
1036
leur incroyance. Tout de même, on se dit souvent
que
ces hommes mériteraient mieux que ce qu’on leur donne, en fait de doc
1037
se dit souvent que ces hommes mériteraient mieux
que
ce qu’on leur donne, en fait de doctrine. En réalité, ils ne sont pas
1038
souvent que ces hommes mériteraient mieux que ce
qu’
on leur donne, en fait de doctrine. En réalité, ils ne sont pas plus m
1039
trine. En réalité, ils ne sont pas plus marxistes
que
moi. Ils veulent avant tout vivre et travailler raisonnablement. Mais
1040
décembre 1934 Le grand tort des chrétiens, c’est
qu’
ils prennent au sérieux l’incroyance de leurs contemporains. Au fond,
1041
d, ils en ont peur. Or ils devraient n’avoir peur
que
de Dieu, et des vocations bouleversantes qu’il arrive que Dieu nous a
1042
peur que de Dieu, et des vocations bouleversantes
qu’
il arrive que Dieu nous adresse. C’est un comique profond, lugubre et
1043
ieu, et des vocations bouleversantes qu’il arrive
que
Dieu nous adresse. C’est un comique profond, lugubre et déprimant que
1044
e. C’est un comique profond, lugubre et déprimant
que
celui du chrétien honteux, honteux d’une foi qu’il n’a pas ! Car s’il
1045
que celui du chrétien honteux, honteux d’une foi
qu’
il n’a pas ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à la confesse
1046
fesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est
qu’
il ne craint pas Dieu, mais qu’il croit au jugement des incroyants, to
1047
’il a honte, c’est qu’il ne craint pas Dieu, mais
qu’
il croit au jugement des incroyants, tout en s’imaginant qu’il n’est p
1048
t au jugement des incroyants, tout en s’imaginant
qu’
il n’est pas un des leurs… Je voudrais définir le croyant véritable :
1049
ais définir le croyant véritable : celui qui sait
qu’
il ne croit pas aux dieux du monde, et qui le prouve. Comment le prouv
1050
Méridionaux qui ne connaît pas de meilleur remède
que
la parlotte. Tout de suite, c’est la question des assurances qu’il ab
1051
. Tout de suite, c’est la question des assurances
qu’
il aborde avec autorité, tout en tenant son doigt blessé droit en l’ai
1052
si je l’en crois, n’a guère vendu depuis un mois
que
pour 50 francs de légumes. Or la vente des produits de son jardin est
1053
ernier examen médical, ces cochons-là ont déclaré
que
tout allait bien, c’est-à-dire qu’ils « l’ont diminuée à 17 sous par
1054
là ont déclaré que tout allait bien, c’est-à-dire
qu’
ils « l’ont diminuée à 17 sous par jour ». Pour se venger, il leur a r
1055
été voir « une personne encore plus compétente »
que
lui Simard, et cette personne lui a conseillé d’écrire une nouvelle l
1056
mmandée « à la charge du destinataire ». Eh bien,
qu’
est-ce que vous croyez ? Réponse dans les quatre jours ! ah, ils sont
1057
à la charge du destinataire ». Eh bien, qu’est-ce
que
vous croyez ? Réponse dans les quatre jours ! ah, ils sont comme ça !
1058
quatre jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà
que
la personne compétente lui dit : « Ce cochon-là t’a refait de 299 fra
1059
chons-là vous diminuent. Simard m’explique encore
que
les gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme part
1060
« On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire
que
c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont pas l’instruction comme nous
1061
ges de l’ignorance » plus sentimentaux d’ailleurs
que
machiavéliques. Je sais que l’ignorance — oui, au sens de l’école pri
1062
ntimentaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais
que
l’ignorance — oui, au sens de l’école primaire — est un mal qu’il fau
1063
e — oui, au sens de l’école primaire — est un mal
qu’
il faudrait guérir. Mais je ne puis m’empêcher de penser que ces « ill
1064
rait guérir. Mais je ne puis m’empêcher de penser
que
ces « illettrés » sont peut-être moins bas que ces « assurés ». Ce pe
1065
er que ces « illettrés » sont peut-être moins bas
que
ces « assurés ». Ce peuple à la retraite qui meurt en rouspétant cont
1066
tant contre les bureaucrates ne sait plus bien ce
qu’
il craint davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qu
1067
0 janvier 1935 Superstition. — C’est de Casanova
que
Ligne écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est le moins croyab
1068
se du peuple français : il n’échappe aux jésuites
que
pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscul
1069
Déclassé. — L’intellectuel l’est toujours. C’est
qu’
il est d’une classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont ch
1070
les gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment
qu’
à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette
1071
ris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est
qu’
il m’a fallu m’éloigner de cette ambiance bourgeoise où l’on a convenu
1072
l’on a convenu de cacher cela — de cacher ce fait
que
l’intellectuel en tant que tel est un hors-classe, un être à part, au
1073
ndai la parole pour expliquer, le plus simplement
que
je pus, que le problème fasciste est un problème avant tout national
1074
le pour expliquer, le plus simplement que je pus,
que
le problème fasciste est un problème avant tout national ; qu’il s’es
1075
me fasciste est un problème avant tout national ;
qu’
il s’est posé en Italie dans des termes particuliers à ce pays, et qu’
1076
Italie dans des termes particuliers à ce pays, et
qu’
en tout cas il ne peut pas se poser de la même façon en France. Je con
1077
s se poser de la même façon en France. Je conclus
que
la seule manière de prévenir utilement un fascisme, ce n’était pas de
1078
« à la française » le problème de l’autorité, tel
que
le posent cinquante années de démocratie parlementaire, et toute une
1079
end ou ne prend point parti. Mais l’électeur veut
qu’
on soit pour ou contre, et il se méfie par principe de celui qui disti
1080
e à mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu
que
l’article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma
1081
que l’article expose le pour et le contre, quelle
que
soit d’ailleurs ma conclusion, on me classera fasciste ou communiste.
1082
Journal d’un intellectuel en chômage , ces pages
que
je suis en train de rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur
1083
le résultat de cette entreprise. Pour des raisons
que
je devine plus sentimentales que les arguments qu’il m’oppose… — Tout
1084
Pour des raisons que je devine plus sentimentales
que
les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est
1085
ue je devine plus sentimentales que les arguments
qu’
il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est qu’on lui raconte
1086
tales que les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce
que
le lecteur demande, c’est qu’on lui raconte une histoire, me dit R. —
1087
m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est
qu’
on lui raconte une histoire, me dit R. — Mais si je raconte mon histoi
1088
eut des histoires inventées. — Mais si je lui dis
que
j’invente mon histoire ? — Il ne vous croira pas, vous ne savez pas m
1089
rité sur une situation matérielle. Il est entendu
qu’
on ne doit pas parler de « questions matérielles » dans une société di
1090
lles » dans une société distinguée. Vous me direz
qu’
on ne parle guère que de cela. Oui, mais d’une façon générale, non pas
1091
té distinguée. Vous me direz qu’on ne parle guère
que
de cela. Oui, mais d’une façon générale, non pas personnelle. Seuleme
1092
ale, non pas personnelle. Seulement, il se trouve
que
mon propos, précisément, est de montrer, entre autres, la décadence d
1093
s moralement — moins indiscret de parler d’argent
que
de parler, comme tant d’autres, de mes amours, en donnant toutes les
1094
, de mes amours, en donnant toutes les précisions
qu’
un collégien puisse désirer.) R. me disait aussi : En somme, vous n’êt
1095
suis fait moi-même cette objection. Il est clair
qu’
un intellectuel aura toujours la possibilité de travailler, pour autan
1096
t plus de quoi sera fait le lendemain. — Admettez
que
cela ne vous empêche pas de vivre assez bien, à votre idée. Vous avez
1097
ur », je vous l’assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit
que
cela me serait pratiquement impossible, sauf gâtisme précoce. Ce n’es
1098
en que sans ressources. Mais d’autre part, est-ce
que
le fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous
1099
ressources. Mais d’autre part, est-ce que le fait
que
je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à
1100
x suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez
qu’
à regarder la frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pour
1101
r la frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça
que
je pourrais faire une carrière dans le monde, à supposer que l’envie
1102
rais faire une carrière dans le monde, à supposer
que
l’envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire dans mon journal, c’e
1103
onde, à supposer que l’envie m’en prenne. Tout ce
que
je compte dire dans mon journal, c’est qu’on peut être très content d
1104
out ce que je compte dire dans mon journal, c’est
qu’
on peut être très content d’un sort matériel très médiocre. Ce n’est p
1105
Ce n’est pas nouveau. Et il faut bien reconnaître
que
ce n’est pas aussi romantique et excitant que mon titre pourrait le f
1106
tre que ce n’est pas aussi romantique et excitant
que
mon titre pourrait le faire croire. L’intéressant à mon point de vue,
1107
eoisie ont accouché d’un des plus beaux complexes
que
le diable ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns co
1108
rrables sujets de méditation, le petit communiqué
que
voici : Bouillargues. — Les « exclus » vieux travailleurs. Demain
1109
its de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour
que
la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je l
1110
nté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais
que
dis-je le jour ! C’est l’heure même qui va sonner : demain dimanche,
1111
eurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde
que
nos militants héroïques n’ont pas perdu leur peine depuis 89 ! Oui, d
1112
t à cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est
que
l’état social est à peu près paradisiaque. » J’ajouterais peut-être c
1113
ation qui dévoue tous ses enthousiasmes aux soins
que
réclame la vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journa
1114
ce pas beau, rassurant, émouvant, dans une Europe
que
l’on croyait en proie aux brutales jeunesses bottées ? » 25 avril 193
1115
des fois on vous en demande de trop, vous n’avez
qu’
à donner la mienne, vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de
1116
rête sur le seuil. « Et alors, mon bon, c’est toi
qu’
on va mettre à la mairie ? » L’homme au visage maigre fait un geste ré
1117
un air malin). — On sait bien, dit le communiste,
que
vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les petits ! — Les g
1118
ous pressez toute notre argent, depuis quatre ans
que
vous l’avez, le pouvoir ! » L’autre se dégage et s’en va, un peu tris
1119
rs et de langage pareils. S’ils s’opposent, c’est
que
l’un est avare et légèrement maboul, l’autre énergique et assez sensé
1120
il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant
qu’
il le voudrait. Mais ce n’est pas sûr. Je sais bien une douzaine de se
1121
les mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser
que
les partis expriment tout simplement des attitudes morales différente
1122
le sont si peu ! — et si possible, plus médiocre
que
celle des grands journaux d’information. On leur impose une mystique
1123
ujiks… Quel est l’homme sain qui oserait affirmer
que
ce quotidien lamentable, hérissé de clichés hargneux, travaille pour
1124
x disciplines staliniennes en haine d’une société
qu’
ils sont les seuls à croire encore « chrétienne » — il faut bien dire
1125
croire encore « chrétienne » — il faut bien dire
que
le parti communiste est une sinistre trahison des pauvres hommes. Bea
1126
n, mais cela prouve simplement, une fois de plus,
que
l’homme du peuple ne comprend pas profondément ce qu’on lui donne à l
1127
l’homme du peuple ne comprend pas profondément ce
qu’
on lui donne à lire ou à entendre. Il comprend sa situation, et ne voi
1128
ntendre. Il comprend sa situation, et ne voit pas
que
son journal est sans rapport réel avec cette situation. Mais les inte
1129
e, et surtout vaine, ils en viennent à s’imaginer
qu’
ils défendent eux aussi les « petits » en défendant ces exploiteurs de
1130
Réflexion de « personnaliste ». — Le peuple tel
qu’
on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritables. Mais c’est
1131
t ignorant de ses intérêts véritables. Mais c’est
qu’
il ne peut pas les exprimer très aisément. Question de langage. Revene
1132
uestion de langage. Revenez voir ces mêmes hommes
que
j’ai dit, revenez deux fois, vingt fois, prenez-les sur le fait au dé
1133
eux encore, parlez-leur de leur travail, de celui
qu’
ils sont en train de faire tandis que vous causez, vous arriverez à le
1134
artisans de la dictature. Ils vous diront d’abord
que
le fond de leur vie, c’est l’ennui. Ils expliqueront presque toujours
1135
vre » un effort bien localisé, de s’attacher à ce
qu’
on fait ; nécessité où l’on se trouve de bâcler son ouvrage, pour gagn
1136
le de changer de condition. Ils vous diront aussi
qu’
ils n’ont plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résult
1137
ont plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent
que
les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’i
1138
soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront
que
le mal vient de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les loi
1139
dans les épiceries du pays, lesquelles ne vendent
que
des succédanés fabriqués dans des « caves centrales » avec des vins d
1140
c des vins d’Afrique et des produits chimiques («
que
vous avez la gorge brûlante après un verre »). Enfin ils se plaindron
1141
après un verre »). Enfin ils se plaindront de ce
que
, dans leur pays, il n’y a plus de vie, d’initiative, de vrai plaisir.
1142
lées, ce n’est pas lui. Écoutons les observations
que
formulent des individus pris à part, dans leur vie concrète. Je const
1143
pris à part, dans leur vie concrète. Je constate
qu’
elles vont toutes dans le sens de ce que proposent les personnalistes
1144
constate qu’elles vont toutes dans le sens de ce
que
proposent les personnalistes : autonomie de la région naturelle, comm
1145
st, ou feint d’en être ; c’est bien moins concret
qu’
il ne semble.) Conclusion : il appartient à des équipes d’hommes nouve
1146
es et sortis de toutes les classes, d’exprimer ce
que
taisent les journaux, les orateurs et les affiches — et qui est la vo
1147
e siècle. La dictature est très facile. Elle n’a
qu’
un argument très puissant contre nous : sur qui et sur quoi tablez-vou
1148
— La maison de Simard recèle un effrayant secret
qu’
on m’avait laissé ignorer : une belle-mère. Nous apprenons son existen
1149
ns l’esprit du lecteur philosophe. Déjà huit mois
que
nous sommes ici, et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la
1150
ous, tout leur logis — nous avions cru comprendre
que
les autres pièces étaient vides ou ne servaient que de débarras —, et
1151
e les autres pièces étaient vides ou ne servaient
que
de débarras —, et rien ne pouvait nous faire soupçonner cette présenc
1152
ie-t-elle. C’est Madame Bastide, la belle-mère. —
Qu’
a-t-elle ? — Oh, elle m’a bien reconnue, mais elle va passer cette nui
1153
uront plus à languir bien longtemps. On peut dire
que
la chose est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’e
1154
La nuit, par un dernier respect pour la moribonde
qu’
ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans la remise qu
1155
ingué », disait la convocation. 28. La stratégie
qu’
inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonapa
1156
on, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme
que
l’application du style français à la chose militaire. 29. Ils ont do
1157
ascisme, les communistes paraissent avoir compris
qu’
il faut défendre la culture. Le malheur est qu’ils n’envisagent pour c
1158
is qu’il faut défendre la culture. Le malheur est
qu’
ils n’envisagent pour cette défense que des moyens fascistes. « Toute
1159
alheur est qu’ils n’envisagent pour cette défense
que
des moyens fascistes. « Toute la littérature sociale-démocrate — écri
1160
Sur la littérature et l’art. Disons tout de suite
que
le Père des peuples n’a fourni pour sa part qu’une dizaine de pages (
1161
e que le Père des peuples n’a fourni pour sa part
qu’
une dizaine de pages (sur 150) relatives surtout au développement d’un
1162
réunions et se moque des communistes qui ne font
que
siéger et siéger encore. Je ne sais ce qu’il faut penser de la poésie
1163
e font que siéger et siéger encore. Je ne sais ce
qu’
il faut penser de la poésie, mais pour ce qui est de la politique, je
1164
le ton des « dirigeants » a bien changé. Voici ce
qu’
écrit, à cette date, le Père des peuples, sur le même Maïakovski : Il
1165
ses œuvres est un crime. » Heureusement pour lui
que
Lénine est déjà mort et momifié ! Je ne sais quelle était l’intention
1166
mmunistes de ce choix. Il en ressort à l’évidence
que
les « idées » de Lénine sur la littérature étaient en général saines,
1167
nt en général saines, banales, un peu courtes, et
que
Staline s’est chargé d’en extraire ce qu’elles avaient de réactionnai
1168
tes, et que Staline s’est chargé d’en extraire ce
qu’
elles avaient de réactionnaire et d’attardé, ou de brutalement primair
1169
onc avouer un terrible secret ! Il arrive souvent
qu’
un étranger s’initiant aux croyances d’un peuple soit le premier saisi
1170
soit le premier saisi par ce frisson d’absurdité
que
l’on baptise inspiration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’é
1171
r de s’en délivrer en l’exprimant. Et c’est ainsi
que
Chamisso introduisit dans la conscience moderne le mythe de l’homme q
1172
ur un sujet qui défie l’expérience, l’on s’étonne
qu’
aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier. L’on s’étonne qu’aucun n
1173
tre eux n’ait songé à se justifier. L’on s’étonne
qu’
aucun non plus n’ait essayé de formuler le symbole enfermé dans le myt
1174
’artistes ? Pudeur tout court ? Ou faut-il croire
qu’
ils ont écrit leurs contes sans jamais se poser de questions sur le se
1175
Plus tard je lus le livre qui me parut splendide…
Qu’
est-ce qu’une ombre ? me demandais-je. Quelque chose d’assez méprisabl
1176
je lus le livre qui me parut splendide… Qu’est-ce
qu’
une ombre ? me demandais-je. Quelque chose d’assez méprisable. Les Lat
1177
C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus
que
l’ombre de lui-même ! ») Mais je vois bien qu’ils exagèrent : si nous
1178
tous une, et s’entendent à tirer parti du plaisir
que
dispense un corps. Ils prisent fort la « transparence », mais tolèren
1179
en cette chair, — oui, même ceux-là qui déplorent
qu’
elle se fasse, aux regards de la convoitise, « opaque »36. Que pouvais
1180
asse, aux regards de la convoitise, « opaque »36.
Que
pouvais-je tirer de tout cela ? Rien qu’une évidence assez pauvre : l
1181
que »36. Que pouvais-je tirer de tout cela ? Rien
qu’
une évidence assez pauvre : l’ombre est le fait, en nous, de notre cha
1182
était même si vivant, et sa présence si gênante,
que
je tentai de le contraindre, quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux. I
1183
, en m’appliquant à écarter les conseils de pitié
que
me dictait mon cœur. Signalement de Peter Schlemihl Peter est u
1184
un naïf : il croit à la fortune. Il croit surtout
qu’
elle seule assure à l’homme une dignité. C’est un bourgeois de la plus
1185
vie les bourgeois riches. D’où vient le sentiment
qu’
il a d’être inférieur. Le diable sait cela : c’est par là qu’il le tie
1186
tre inférieur. Le diable sait cela : c’est par là
qu’
il le tient. Peter lui donne son ombre contre une bourse magique, d’où
1187
tout : on se moque de lui. Comblé, le voici plus
qu’
avant inadmissible. Le complexe d’infériorité à peine défait par la fo
1188
ans la rue, les valets qui le servent, les femmes
qu’
il rencontre, surtout la lumière du jour, et même la clarté de la lune
1189
pour eux, comme toutes les choses trop naturelles
que
l’on possède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (N
1190
naît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne connaît-on
que
ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que l’on connaît, comme Adam e
1191
aît-on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce
que
l’on connaît, comme Adam et Ève l’innocence ?) Schlemihl est donc le
1192
hit cette fêlure : on aime Schlemihl pour tout ce
qu’
il a, qui n’est pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui le devi
1193
el est le rapport social le plus réel ? Admettons
que
ce soit le mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes les ruses de
1194
nt devant cet obstacle dernier. Il a beau n’aller
que
de nuit aux rendez-vous avec Mina. Le jour venu de signer le contrat,
1195
e savais depuis longtemps, il n’a pas d’ombre ! »
Que
reste-t-il à un tel homme ? Le suicide ? Rien n’est plus loin de sa p
1196
ence réelle se confond avec tous les vagabondages
qu’
il imagine. Il peut même retrouver une espèce d’activité, purement des
1197
e de toutes les plantes de la terre. C’est à cela
qu’
il s’occupe en Thébaïde, quand nous perdons sa trace. Résumons : compl
1198
ussi probable. Et quand rien ne dépend à coup sûr
que
du tout ? Ceci dit, la psychanalyse peut nous donner des descriptions
1199
mal dans sa vie sexuelle »37. Nous venons de voir
que
Schlemihl est le type même de l’inadapté, — celui qui ne peut « trouv
1200
i ne subsiste dans la compagnie de ses semblables
que
par un subterfuge toujours menacé. D’une incompatibilité sociale auss
1201
cette aberration, il conviendrait de rappeler ici
que
Peter parvient à la cacher à tous sauf aux deux femmes qu’il voudrait
1202
parvient à la cacher à tous sauf aux deux femmes
qu’
il voudrait épouser. Mais n’allons pas conclure trop vite. Les états d
1203
cela peut être comme une première influence de ce
qu’
on nommera chez un malade, folie de la persécution). Il arrive aussi q
1204
malade, folie de la persécution). Il arrive aussi
que
cet homme se sente trop lucide, perçant toutes choses à jour, et lui-
1205
tes choses à jour, et lui-même, d’où l’impression
qu’
il a d’être mal défendu contre les regards qu’il rencontre, transparen
1206
ion qu’il a d’être mal défendu contre les regards
qu’
il rencontre, transparent dirait-on, — sans ombre ! Voilà, peut-être,
1207
raîtra sans doute plus probante à des adolescents
qu’
à des adultes, à des mélancoliques qu’à des sanguins, et même à des No
1208
adolescents qu’à des adultes, à des mélancoliques
qu’
à des sanguins, et même à des Nordiques qu’à des Méridionaux, pourrion
1209
liques qu’à des sanguins, et même à des Nordiques
qu’
à des Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toutes les réserves qu’
1210
, pourrions-nous ajouter avec toutes les réserves
qu’
on voudra, mais en nous souvenant de la question que nous posait l’ori
1211
’on voudra, mais en nous souvenant de la question
que
nous posait l’origine germanique du mythe38. Dès le début, j’avais pr
1212
nique du mythe38. Dès le début, j’avais pressenti
qu’
une fable à ce point célèbre dans un peuple ne pouvait exprimer qu’un
1213
point célèbre dans un peuple ne pouvait exprimer
qu’
un fait humain élémentaire. J’étais déçu de le voir se réduire à quelq
1214
oir se réduire à quelque chose d’aussi précis, et
que
mille préjugés, français surtout, concourent à ridiculiser. Un fragme
1215
mparer la Liquor vitae dans l’homme à autre chose
qu’
à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de l’homme et se form
1216
avec bien d’autres choses curieuses et profondes,
que
la portée de ce passage était en vérité beaucoup plus vaste que tout
1217
de ce passage était en vérité beaucoup plus vaste
que
tout ce que permettait d’imaginer l’obtus physiologisme de ce siècle.
1218
e était en vérité beaucoup plus vaste que tout ce
que
permettait d’imaginer l’obtus physiologisme de ce siècle. La « Liquor
1219
otre créativité dans tous les ordres. Elle est ce
qu’
il y a de plus noble dans le corps tout entier et dans l’homme. » Je l
1220
stion sexuelle » ne tire son importance démesurée
que
du seul fait qu’elle est une image physique du pouvoir créateur spiri
1221
ne tire son importance démesurée que du seul fait
qu’
elle est une image physique du pouvoir créateur spirituel. Comme on pe
1222
n de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison
qu’
en beaucoup d’êtres la créativité paraît avoir son siège dans le seul
1223
ativité paraît avoir son siège dans le seul sexe,
que
la pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour cette raison q
1224
calisée là ? Ne serait-ce point pour cette raison
que
l’homme cherche à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et que
1225
à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et
que
les deux fils de Noé couvrirent la nudité de leur père ivre en marcha
1226
es remarques n’expliquent pas encore l’essentiel.
Que
l’on cache son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouv
1227
nd, le plus sacré, qui est le pouvoir de création
que
l’on possède, c’est naturel ; mais non du tout qu’on en ait honte, se
1228
ue l’on possède, c’est naturel ; mais non du tout
qu’
on en ait honte, semble-t-il. En vérité, la mauvaise pudeur provient d
1229
-il. En vérité, la mauvaise pudeur provient de ce
que
le corps et l’âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être r
1230
ise description de l’individu romantique, dans ce
qu’
il a de démissionnaire, d’impuissant à saisir le monde pour le former
1231
n Peter tous les traits physiques et moraux de ce
que
l’on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le va
1232
e. Et le poème ensuite — plus beau et plus vivant
que
l’individu qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrai
1233
e… ⁂ C’est une des gloires du romantisme allemand
que
d’avoir su élever les faiblesses de l’homme, et quelques-unes de ses
1234
du mythe, et de la Fable, plus profondément vrais
que
la vie. (Plus riches d’enseignements concrets, et d’invites à la méta
1235
adir une telle œuvre, n’y admirant à leur coutume
qu’
une « fantaisie gratuite » de l’art. Nul doute que l’art de Chamisso n
1236
qu’une « fantaisie gratuite » de l’art. Nul doute
que
l’art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleurs qu’il soit vrai
1237
t de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleurs
qu’
il soit vraiment un art — tout effort digne de ce nom établit d’abord
1238
e, une mise en ordre, un sens donné… C’est par là
que
Chamisso s’est sauvé de lui-même : s’il a fait Schlemihl comme on sai
1239
tie à son image, il en diffère toutefois par ceci
qu’
il l’a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont la nouveauté res
1240
où je vis qui n’a plus d’ombre, et c’est pour lui
que
je garde ma pitié. Il ne sait même plus écrire sa Fable, il n’en veut
1241
rs romans, pièces, ou contes fantastiques. Notons
qu’
en dehors du domaine germanique et anglais, il ne relève que deux ou t
1242
rs du domaine germanique et anglais, il ne relève
que
deux ou trois auteurs français. Encore ceux-ci s’orientent plutôt ver
1243
e, et Barrès s’en réjouit. Il va jusqu’à soutenir
que
l’ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par
1244
par Chamisso. Les documents réunis par Rank — et
que
j’ignorais d’ailleurs au moment où j’écrivis cette étude — réduisent
1245
deux millénaires, à Chamisso. 36. « J’éprouve
que
chaque objet de cette terre que je convoite se fait opaque, par cela
1246
36. « J’éprouve que chaque objet de cette terre
que
je convoite se fait opaque, par cela même que je le convoite… », A. G
1247
rre que je convoite se fait opaque, par cela même
que
je le convoite… », A. Gide : Les Nouvelles Nourritures. 37. Freud :
1248
onc ici : adapté au milieu social. Qui ne voit ce
qu’
on pourrait tirer de cette « vérité d’expérience » si l’on voulait en
1249
? On ne peut accepter une « vérité » de ce genre
qu’
en insistant sur le contraire : l’anormal peut être créateur d’un nouv
1250
perd son ombre à force de rêver d’une jeune femme
qu’
il perçoit de sa fenêtre. « Mais dans les climats chauds, les choses c
1251
qu’une semaine eut passé, il vit à sa grande joie
qu’
une nouvelle ombre partant de ses pieds commençait à croître lorsqu’il
1252
ant. Il paraît alors que le freudisme ne s’occupe
que
de l’écume d’une soupe ! (ou bien l’appelle-t-il libido ?). 40. Ces
1253
l libido ?). 40. Ces traits ne sauraient définir
qu’
un aspect, à vrai dire fréquent, du romantisme allemand qui en a montr
1254
tré bien d’autres, et de tout contraire parfois :
que
l’on songe à Hegel, à Fichte, à Schlegel. p. Rougemont Denis de, «
1255
r Début de novembre 1933 Mon domaine, c’est ce
que
j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée :
1256
ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table
que
je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux
1257
a juste la largeur de la maison. On ne voit rien
que
le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oiseaux, et parfois traversé p
1258
udes. Décor candide et gai, oui vraiment plus gai
qu’
ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénét
1259
r : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux
que
l’on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux
1260
avec ce beau vertige de liberté. Depuis six jours
que
nous sommes arrivés, je n’ai lu que les Règles de Descartes, comme on
1261
uis six jours que nous sommes arrivés, je n’ai lu
que
les Règles de Descartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le
1262
ur l’âme de ce peuple discret. C’est l’impression
que
je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvai
1263
t des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur
que
m’a donnée notre épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par l’é
1264
mais râpés, ne la renseignent pas clairement. Et
que
penser d’un « Parisien » qui manifeste l’intention de rester ici tout
1265
e rester ici tout l’hiver ? — C’est plutôt en été
qu’
on vient chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais bie
1266
i expliquer la nature de mon travail. « Écrire »,
qu’
est-ce que cela signifie ? Écrire pour les journaux, sans doute, mais
1267
r la nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce
que
cela signifie ? Écrire pour les journaux, sans doute, mais il n’y en
1268
attendaient en silence, le nez sur leurs sabots,
que
je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En
1269
je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujours ce
qu’
on voudrait. En hiver elle fait peu de réserves de produits alimentair
1270
aires, les habitants n’achetant guère autre chose
que
de la mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’
1271
t pour le punir d’avoir été en face. Sans compter
qu’
on n’aime pas être accueilli par la réprobation sournoise d’une épiciè
1272
le, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression
que
je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir
1273
mprimé ? — Non. C’est tapé à la machine. — Est-ce
qu’
il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a des corrections écrites
1274
fait son calcul sur un bout de papier, et conclut
que
j’ai à payer 72 francs, pour un envoi, ce jour-là, d’une centaine de
1275
araît lui-même consterné. J’affirme avec vivacité
que
ça ne peut pas aller. Il faut tout recommencer. Finalement l’on décid
1276
éphone au chef-lieu. Son supérieur lui a confirmé
qu’
un manuscrit s’affranchit comme une lettre. Il faut donc que je m’exéc
1277
scrit s’affranchit comme une lettre. Il faut donc
que
je m’exécute, sinon c’est lui qui sera forcé « d’y aller de sa poche
1278
liaire ! Depuis lors, il rougit et transpire rien
qu’
à me voir entrer. Je cause un peu, pour me faire pardonner. Pédenaud e
1279
serais-je tant à son guichet ?), mais s’il savait
que
j’ai dépensé près de 600 francs depuis trois semaines, il estimerait
1280
e 600 francs depuis trois semaines, il estimerait
que
j’exagère, même pour un riche. Je me sens rejeté dans la catégorie bo
1281
même pile d’assiettes où je crois avoir déjà dit
que
j’avais trouvé deux ouvrages traitant de mon île, j’ai déniché ce mat
1282
encore lu ce livre. Il est exactement de l’espèce
que
j’aime, et l’un des plus charmants dans cette espèce, mais ce n’est p
1283
dans cette espèce, mais ce n’est point pour cela
que
j’en parle ici. C’est pour une raison très précise et qui n’a rien à
1284
la critique littéraire. À la page 43 de l’édition
que
j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces
1285
on mort. » Cette phrase a fait dans mon esprit ce
qu’
on appelle un trait de lumière. Lundi dernier, au petit matin, nous no
1286
pas plus loin la cause du phénomène. Il est vrai
qu’
on a beau porter un nombre excessif de jupons, cela ne devrait pas suf
1287
re, caché sous des feuillages brunis. Si j’ajoute
que
la porte d’entrée joint mal le seuil, tout s’explique sans peine déso
1288
mie. Je ne suis pas arrivé à gagner assez vite ce
qu’
il nous fallait pour subsister après l’épuisement de notre réserve. J’
1289
ellement d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce
que
l’on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient i
1290
de cette première expérience de deux mois, c’est
que
la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode,
1291
ux mois, c’est que la liberté ne s’improvise pas.
Qu’
il faut la conquérir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’a
1292
l’importance des autocars et des transformations
qu’
ils sont en train de causer dans la vie provinciale. Je n’ai pas compt
1293
constater dans plusieurs départements de l’Ouest
qu’
il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une ou deux o
1294
ême trois compagnies de transports locaux. Depuis
que
j’ai quitté Paris, j’ai bien utilisé une vingtaine de ces lignes. Je
1295
et la province. Naguère encore, quand on n’avait
que
les chemins de fer, tout convergeait vers Paris, non seulement du fai
1296
. Le confort relatif des grandes lignes indiquait
qu’
on allait à Paris ou qu’on en venait. Tout le reste n’était que tortil
1297
grandes lignes indiquait qu’on allait à Paris ou
qu’
on en venait. Tout le reste n’était que tortillards cahotants, jamais
1298
à Paris ou qu’on en venait. Tout le reste n’était
que
tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’on se sentait relégué à
1299
la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère
que
des gares, ce qu’il y a de plus attristant dans chaque village. Aujou
1300
lation. Et l’on ne voyait guère que des gares, ce
qu’
il y a de plus attristant dans chaque village. Aujourd’hui, les statio
1301
utocars sont sur la place principale. C’est de là
qu’
on part au milieu d’une grande affluence de badauds, c’est là qu’on ar
1302
ilieu d’une grande affluence de badauds, c’est là
qu’
on arrive à grands sons de trompe, c’est enfin ce que l’on voit le mie
1303
on arrive à grands sons de trompe, c’est enfin ce
que
l’on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’i
1304
pte de ses circonstances. Sur ses bords ne vivait
qu’
une population nomade, qui portait l’uniforme de l’État, partout la mê
1305
ngt fois la France de part en part sans remarquer
que
les gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’u
1306
l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et
que
d’une province à une autre, ce n’est pas seulement le paysage qui cha
1307
ns secondaires ou des ruelles à peine plus larges
que
la voiture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale
1308
verses voitures qui stationnent, sur la place… Et
que
dire maintenant du voyage lui-même ? C’est une résurrection de ce que
1309
du voyage lui-même ? C’est une résurrection de ce
que
Vigny pleurait, la poésie des diligences, mais aérée. C’est fait d’un
1310
rée. C’est fait d’une foule d’incidents entrevus,
que
tout dispose à romancer ; de conversations absurdes et rapidement int
1311
t volontiers toutes sortes de petites commissions
que
de vieilles dames leur confient au départ avec force recommandations
1312
le bord de la route. Rien n’est plus sympathique
qu’
un conducteur de car. Cela tient évidemment à leur métier. Ce sont en
1313
machine, et l’on bénéficie de ces petites faveurs
que
les femmes ont toujours accordées à ceux qui commandent et disposent,
1314
ées à ceux qui commandent et disposent, ne fût-ce
que
pour une heure, de leur vie. Oui, voilà bien les hommes avec lesquels
1315
namisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit
que
les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au « peup
1316
i les ont n’en parlent pas, dit-on. Et je ne suis
qu’
un écrivain. Ceci me rappelle un bout de conversation que j’aurais dû
1317
crivain. Ceci me rappelle un bout de conversation
que
j’aurais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans l’autocar de T
1318
savoir quel était mon métier. Et quand j’eus dit
que
je n’en avais aucun, et que je n’étais qu’un écrivain, et chômeur par
1319
r. Et quand j’eus dit que je n’en avais aucun, et
que
je n’étais qu’un écrivain, et chômeur par-dessus le marché, il s’écri
1320
us dit que je n’en avais aucun, et que je n’étais
qu’
un écrivain, et chômeur par-dessus le marché, il s’écria : « Ah ! cher
1321
us aux curés ? » — Comptez, monsieur, lui dis-je,
qu’
un écrivain a bien deux fois plus de peine à vivre qu’un homme normal,
1322
n écrivain a bien deux fois plus de peine à vivre
qu’
un homme normal, mettons qu’un fonctionnaire c’était pour le flatter,
1323
plus de peine à vivre qu’un homme normal, mettons
qu’
un fonctionnaire c’était pour le flatter, et cela tient aux circonstan
1324
s dans le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce
que
l’on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faiblesse ou d’une ambi
1325
êtré. Et voilà le paradoxe et l’injustice : c’est
qu’
on attend, qu’on exige même de ces gens-là des vertus au-dessus du com
1326
le paradoxe et l’injustice : c’est qu’on attend,
qu’
on exige même de ces gens-là des vertus au-dessus du commun, la révéla
1327
, des milliardaires ou des saints. Croyez-moi, ce
que
nous vous donnons, c’est justement ce qui nous manque, et quand vous
1328
[sic], M. Denis de Rougemont vient d’illustrer ce
que
l’on peut appeler sa « doctrine », en nous donnant, sous le titre de
1329
s, d’observations et de jugements. Il y montre ce
que
peut avoir de quotidien cet effort de restauration morale — et social
1330
nt et très nuancé de la province française, ainsi
qu’
en témoigne cet extrait. »
1331
37)w x Pourquoi voulez-vous — ou veulent-ils —
que
la philosophie se purifie de théologie ? La théologie vaut bien la sc
1332
ience. C’est même une science bien moins variable
que
les sciences dites exactes, dont les fondements sont renversés tous l
1333
les vingt ans de fond en comble. Je ne pense pas
que
la transcendance puisse jamais être « simplement la nature ». Voyez c
1334
l’on se verra contraint d’exercer cette dictature
que
l’on se proposait justement de combattre, et qui est celle de l’État
1335
autres dissiper les malentendus, désarmer autant
que
possible les adversaires, donc discuter. Au surplus, je ne sais pas s
1336
à M. Pierre Beausire. Il approuve notre réaction (
qu’
il dit « parfaitement justifiée ») ; et quand il énumère nos réclamati
1337
ajoute en parlant de leurs auteurs : « On ne peut
que
les suivre et les approuver. » En somme, il se rangerait à nos côtés
1338
l se rangerait à nos côtés pour l’essentiel de ce
que
nous avons dit dans notre numéro spécial81. S’il nous attaque, c’est
1339
pécial81. S’il nous attaque, c’est sur des points
que
nous n’avons pas abordés, et sur des thèses que je souhaite qu’aucun
1340
s que nous n’avons pas abordés, et sur des thèses
que
je souhaite qu’aucun de nous ne soutienne jamais. Précisons. ⁂ « Au n
1341
ns pas abordés, et sur des thèses que je souhaite
qu’
aucun de nous ne soutienne jamais. Précisons. ⁂ « Au nom de quel princ
1342
M. Beausire. C’est au nom du personnalisme. Mais
qu’
est-ce que le personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de l’humanité.
1343
re. C’est au nom du personnalisme. Mais qu’est-ce
que
le personnalisme ? « C’est l’amour abstrait de l’humanité. » Erreur t
1344
ion, systématiquement déprimées par les tyrannies
que
l’on sait. Mais tout ceci nous maintiendrait encore dans le seul plan
1345
eausire nous situe, par un réflexe bien romand ; (
qu’
il me pardonne !). Le personnalisme est bien plus qu’une morale, s’il
1346
il me pardonne !). Le personnalisme est bien plus
qu’
une morale, s’il en suppose une. Il est, à mon sens, la tradition cent
1347
Et l’individualisme et les collectivismes ne sont
que
les déviations complémentaires et périodiques de cette ligne de plus
1348
ne s’est constitué comme tel, et n’a pris ce nom,
que
parce que dans l’Europe actuelle se déchaînent des puissances de mort
1349
ce active de ce qui, depuis nos origines, n’était
que
le sous-entendu de tous nos efforts créateurs. Cette prise de conscie
1350
re : fédéraliste. Il exalte les différences en ce
qu’
elles ont de créateur. Il veut une organisation de la cité qui leur pe
1351
i leur permette de s’exprimer. Telle est la forme
que
revêt « la charité personnaliste », pour reprendre une formule d’Arna
1352
rnaud Dandieu (qui d’ailleurs était nietzschéen).
Que
le christianisme vrai revive dans ce mouvement, je serais mal venu à
1353
r. En tant que protestant personnaliste, je tiens
que
seule la foi réelle — celle qui agit, et non celle qui endort — donne
1354
rtagent pas cette certitude. Ils en ont d’autres,
que
je crois insuffisantes, et je le leur dis en toute franchise. Du moin
1355
faite. Pierre Beausire ne craint pas de proclamer
que
« si l’on veut parler à des hommes, et non à des enfants, il faut ren
1356
le Christ ». Je ne craindrai pas de lui répondre
que
ce n’est pas là parler en homme, ni en enfant, mais en adolescent imp
1357
se d’ironie M. Beausire joint à son vœu final : «
Qu’
ils s’emparent hardiment du pouvoir dans cet État, et, en manifestant
1358
eur caractère, nous délivrent du triste spectacle
que
nous avons sous les yeux. » Car la noblesse qu’il nous suppose, purem
1359
e que nous avons sous les yeux. » Car la noblesse
qu’
il nous suppose, purement « morale », sentimentale, idéaliste, ne saur
1360
; si ce n’est pas une manière de « grève perlée »
que
de n’accepter la lutte que dans ces termes ; si cet idéal est possibl
1361
re de « grève perlée » que de n’accepter la lutte
que
dans ces termes ; si cet idéal est possible, si Beausire connaît de t
1362
e connaît de tels chefs, ou désire en devenir un,
qu’
il nous amène ce précieux renfort, et nous le saluerons d’un vivat ! N
1363
indiquée sur « le Suisse », auquel Beausire croit
que
je crois, résulte d’un malentendu. Je crois à « l’idée suisse » telle
1364
un malentendu. Je crois à « l’idée suisse » telle
que
l’exprime Liehburg. Idée qui exclut l’existence d’un type suisse raci
1365
. Ce blasphème assombrit sa vie, et la révélation
qu’
en eut plus tard Søren fut décisive pour son développement religieux.
1366
nt commerçant, amassa une fortune, et c’est ainsi
que
Kierkegaard reçut en héritage, après une sévère éducation piétiste, u
1367
e, après une sévère éducation piétiste, un secret
qu’
il qualifiera de terrifiant, et une belle aisance matérielle. Du secre
1368
aux banques, et lorsqu’il mourut, l’on s’aperçut
qu’
il n’en restait que 200 francs. Cette fortune provenait d’une malédict
1369
rsqu’il mourut, l’on s’aperçut qu’il n’en restait
que
200 francs. Cette fortune provenait d’une malédiction, pensait-il. Il
1370
s douloureusement rompues au bout d’un an. L’idée
que
Kierkegaard s’était formée du mariage était trop absolue pour comport
1371
t voir le vrai tout de son existence singulière. (
Que
d’autres y cherchent des raisons physiologiques ; c’est probable, et
1372
e grande partie de la nuit. Georg Brandes raconte
qu’
on pouvait le voir, de la rue, arpenter longuement les pièces illuminé
1373
cours de son interminable promenade, les phrases
qu’
il venait de composer tout en marchant. À l’aube, il s’accordait quelq
1374
filles, avec des balayeurs, avec le petit peuple
qu’
il aimait par-dessus tout. Tout le monde, à Copenhague, connaissait sa
1375
u, ses pantalons trop longs. Mais on savait aussi
que
cet original était le plus grand écrivain de son pays. Sa première œu
1376
re eut un immense succès : c’était l’Alternative,
qu’
il publia en 1843. La même année parurent deux autres ouvrages, signés
1377
cours édifiants, signés de son nom. Mais à mesure
qu’
il faisait mieux voir le fond chrétien de sa pensée, le public s’écart
1378
l se vit abandonné dans la plus complète solitude
qu’
ait sans doute jamais connue un grand esprit. Un an plus tard, accablé
1379
and esprit. Un an plus tard, accablé par la lutte
qu’
il menait seul contre tous, il tombait d’épuisement au cours d’une pro
1380
ain d’avoir accompli sa mission, ce fut l’attaque
qu’
il mena contre l’Église établie et contre dix-huit siècles de chrétien
1381
Kierkegaard (40 volumes en douze années). Pensée
qu’
il défendit et qu’il servit de toutes les forces de son génie universe
1382
olumes en douze années). Pensée qu’il défendit et
qu’
il servit de toutes les forces de son génie universel de poète, de phi
1383
car c’est bien d’un véritable témoin de la vérité
qu’
on nous parle — et puis enfin crucifié, décapité, brûlé ou rôti sur un
1384
quelque chose de plus contraire au christianisme
que
n’importe quelle hérésie, et c’est de jouer au christianisme, d’en éc
1385
n écarter les dangers, et de jouer ensuite au jeu
que
l’évêque Nynster était un témoin de la vérité. Cas symbolique aux ye
1386
evint lui-même, de tout son être. Et il savait ce
que
cela devait lui coûter. Car le monde ne tolère jamais la passion spir
1387
’énormité — l’absence de normes — de la vie telle
qu’
ils la découvrent. Ils se rendorment, ou bien édifient des systèmes (q
1388
Ils se rendorment, ou bien édifient des systèmes (
qu’
ils se garderont d’habiter). Ceux qui persistent cependant, s’aperçoiv
1389
er). Ceux qui persistent cependant, s’aperçoivent
que
l’entreprise pourrait être mortellement compromettante. Aussi l’histo
1390
ussi l’histoire de la pensée n’est-elle peut-être
que
la chronique de ses retraites éloquentes. Très peu vont jusqu’au bout
1391
, parvint dans l’intégrité de sa force à une mort
que
toute son œuvre provoquait et qui vaincue par une telle victime, lui
1392
son lit de mort, cette phrase : Je ne pense pas
que
ce soit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pour l’écar
1393
phrase : Je ne pense pas que ce soit mauvais, ce
que
j’ai dit, mais je ne l’ai dit que pour l’écarter, et pour arriver à A
1394
oit mauvais, ce que j’ai dit, mais je ne l’ai dit
que
pour l’écarter, et pour arriver à Alléluia ! Alléluia ! Alléluia !82
1395
iennent attentifs, ils le tuent. Mais c’est là ce
qu’
il voulait. Il n’a jamais cru que sa mort pourrait entraver son action
1396
Mais c’est là ce qu’il voulait. Il n’a jamais cru
que
sa mort pourrait entraver son action, il a compris qu’elle faisait pa
1397
a mort pourrait entraver son action, il a compris
qu’
elle faisait partie de son action, oui, que cette action ne commencera
1398
ompris qu’elle faisait partie de son action, oui,
que
cette action ne commencerait vraiment qu’avec sa mort !83 On trouve
1399
n, oui, que cette action ne commencerait vraiment
qu’
avec sa mort !83 On trouve le second document dans le journal de l’h
1400
il poursuivra sa lutte religieuse, mais il craint
qu’
elle ne soit alors affaiblie. Au contraire sa mort donnera de la force
1401
saurait être question, ici, de résumer ne fût-ce
que
les thèmes directeurs. Il faut y aller voir dans ses livres traduits,
1402
ses livres traduits, et dans l’étude monumentale
que
Jean Wahl publie ces jours-ci. Mais il sera peut-être utile d’insiste
1403
ison salutaire, dont nul ne trouvera l’antidote :
qu’
il en soit mort, atteste ce fait capital que la pensée humaine ne peut
1404
ote : qu’il en soit mort, atteste ce fait capital
que
la pensée humaine ne peut être irrémédiable. Tous les autres, sauf Em
1405
le. Concession, la raison de Pascal, et lors même
qu’
il y renonce : concession, la pitié parfois presque sadique de Dostoie
1406
onies polémiques. Et tout d’un coup on s’aperçoit
qu’
elles nous jettent en plein drame de l’existence. Kierkegaard déconsid
1407
comber. Mais, ayant tué en lui toute autre vanité
que
celle de haïr le temps — c’est là son dépit amoureux — Kierkegaard pe
1408
. Un de nos meilleurs auteurs déclarait récemment
que
le palais de Versailles manque de sérieux. C’était bien vu. Mais notr
1409
nt les importants ». Où est la différence ? C’est
que
le sérieux vrai est en définitive dans le seul acte de foi, qui jette
1410
, un « soupçon » d’ironie qui est infiniment pire
qu’
une ironie. Car peut-être que l’acte de foi n’existe pas, n’est qu’une
1411
est infiniment pire qu’une ironie. Car peut-être
que
l’acte de foi n’existe pas, n’est qu’une figure de rhétorique pieuse,
1412
r peut-être que l’acte de foi n’existe pas, n’est
qu’
une figure de rhétorique pieuse, une illusion, un mythe, un saut dans
1413
ors il n’y a pas de vrai sérieux dans ma vie tant
que
je n’ai pas trouvé dans la foi, ou mieux : tant que la foi — qui est
1414
e je n’ai pas trouvé dans la foi, ou mieux : tant
que
la foi — qui est don de Dieu — ne m’a trouvé. Kierkegaard a eu trois
1415
ouvrages et d’articles. Ce qui est certain, c’est
qu’
à la différence de Nietzsche, personne ne parviendra jamais à « utilis
1416
ur la première fois. Je le sais, je sais aussi ce
qu’
il m’en a coûté, ce que j’ai souffert, je puis l’exprimer par cette se
1417
le sais, je sais aussi ce qu’il m’en a coûté, ce
que
j’ai souffert, je puis l’exprimer par cette seule phrase : ‟Je ne fus
1418
pour une préface. — « C’est une entreprise hardie
que
d’aller dire aux hommes qu’ils sont peu de chose », s’écrie Bossuet (
1419
une entreprise hardie que d’aller dire aux hommes
qu’
ils sont peu de chose », s’écrie Bossuet (Sermon sur la mort, 22 mars
1420
écrie Bossuet (Sermon sur la mort, 22 mars 1662).
Que
dirions-nous alors du sort fait à celui qui doit se montrer aux homme
1421
t fait à celui qui doit se montrer aux hommes tel
qu’
il est ? S’entendre dire que l’homme en général est peu de chose, n’es
1422
ontrer aux hommes tel qu’il est ? S’entendre dire
que
l’homme en général est peu de chose, n’est pas trop humiliant pour qu
1423
une image de soi composée dans la solitude : tant
qu’
on ne s’est pas avoué devant les autres, on peut toujours s’estimer si
1424
asse. Et ce n’est pas encore franchement s’avouer
que
de se comparer aux seuls humains que le métier ou notre rang social n
1425
ent s’avouer que de se comparer aux seuls humains
que
le métier ou notre rang social nous met en mesure d’approcher. L’épre
1426
mesure d’approcher. L’épreuve décisive est celle
que
l’on subit au contact de voisins que rien en nous, que rien dans notr
1427
ve est celle que l’on subit au contact de voisins
que
rien en nous, que rien dans notre vie n’attendait et ne prévoyait. Ce
1428
’on subit au contact de voisins que rien en nous,
que
rien dans notre vie n’attendait et ne prévoyait. Ce n’est qu’au prix
1429
s notre vie n’attendait et ne prévoyait. Ce n’est
qu’
au prix d’un désordre social — selon les préjugés du régime établi — q
1430
re social — selon les préjugés du régime établi —
que
ces rencontres deviennent possibles, se multiplient : se « déclasser
1431
rejoindre l’humanité. Chômage. — On dit souvent
qu’
il faut à l’homme un minimum de confort ou d’aisance matérielle pour p
1432
r des problèmes nouveaux, créer… D’où résulterait
qu’
un certain degré de pauvreté ou de misère physique condamnerait même u
1433
, au moment où il écrivit ses plus grandes œuvres
qu’
il ne lui restait plus même une chemise entière : les morceaux du bras
1434
puissent concevoir d’autres buts à leur existence
que
la recherche d’un gain précaire. Mais à ceux qui ont quelque chose, i
1435
is à ceux qui ont quelque chose, il faut rappeler
que
la recherche du confort est ce qui s’oppose le plus radicalement à to
1436
eurs, comparable à la fièvre. Plus lucide souvent
que
les jours. Ici, tout repose complètement. Un silence implacable et ma
1437
ses et molles au-dessus du jardin. Mais il arrive
que
le noir soit compact. Je me dirige à peu près le long de l’allée uniq
1438
e la grosse voiture et tâte ses flancs jusqu’à ce
que
je rencontre l’ouverture de la boîte aux lettres. De loin, le village
1439
és violemment au bas de l’énorme nuit. On ne voit
que
ces figures géométriques, dominées par le clocher à toit plat, et des
1440
étranger et voyageur sur la terre… » Jamais plus
que
dans cette nuit. Fin de séjour à A… (Gard). — Tout est en place. Je
1441
demi-heure d’efforts haletants, qui n’ont abouti
qu’
à coincer le sommier au tournant, entre la balustrade et les parois de
1442
dans l’escalier comme témoin des bouleversements
que
nous avons infligés à la maison. Pas question d’aller quérir du renfo
1443
evante des « gens » en général — quand je ne fais
que
les jauger d’un regard — et sympathie violente, « élan vers », dès qu
1444
ent de fauves de certains parfums de femmes, rien
que
pour regarder des êtres et vivre un moment auprès d’eux, le temps de
1445
ntané, une de ces découvertes frémissantes telles
que
j’en ai sans doute vécues, adolescent — et sûrement ce serait bien au
1446
end sans se retourner ; l’homme déplie un journal
que
je n’aime pas, qu’il a peut-être acheté tout par hasard, comme il m’a
1447
er ; l’homme déplie un journal que je n’aime pas,
qu’
il a peut-être acheté tout par hasard, comme il m’arrive à moi aussi,
1448
e donner ou de recevoir ? Il me semble maintenant
que
j’écris, que c’est profondément le même mouvement, l’amour. La même d
1449
e recevoir ? Il me semble maintenant que j’écris,
que
c’est profondément le même mouvement, l’amour. La même déception de l
1450
ur tant de mauvaises raisons qui sont plus fortes
que
nous tous. — Et alors, dira-t-on : « Faire la révolution ! » — Ce sub
1451
— S’occuper des « petits-faits-vrais » vaut mieux
que
de les ignorer. Mais l’excellent, c’est de parvenir à les ignorer ave
1452
eur réalité sordide. Un petit fait vrai vaut plus
que
dix grandes idées discutables. Mais n’oublions pas qu’il vaut moins q
1453
ix grandes idées discutables. Mais n’oublions pas
qu’
il vaut moins qu’un grand fait vrai, comme serait, par exemple, une gr
1454
discutables. Mais n’oublions pas qu’il vaut moins
qu’
un grand fait vrai, comme serait, par exemple, une grande idée embrass
1455
congrus et mécaniques des autres : écoute bien ce
qu’
ils disent à travers les paroles qu’ils croient dire : essaie de les c
1456
coute bien ce qu’ils disent à travers les paroles
qu’
ils croient dire : essaie de les comprendre quand ils se plaignent ou
1457
erras, tu n’entendras et tu ne comprendras jamais
qu’
un appel à devenir toi-même ce fait qui est plus fort que toi. Car il
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ppel à devenir toi-même ce fait qui est plus fort
que
toi. Car il est tout ce que le monde attend, attend de toute éternité
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ait qui est plus fort que toi. Car il est tout ce
que
le monde attend, attend de toute éternité pour aujourd’hui et de toi
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onnait à qui voulait. Après sa mort, on s’aperçut
qu’
il ne restait que 250 francs dans le coffre. aa. Rougemont Denis de,
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ait. Après sa mort, on s’aperçut qu’il ne restait
que
250 francs dans le coffre. aa. Rougemont Denis de, « Nouvelles page