1 1938, Articles divers (1938-1940). Le seul espoir (juin 1938)
1 force de sa vocation unique, mais cependant relié à la communauté par l’exercice de cette vocation. L’homme libre et reli
2 our les nations, gardienne de la doctrine commune à tous les peuples, elle n’a pas d’autre rôle ni d’autre vocation. Elle
3 nce de cette mission qui est notre raison d’être. À la période de déviation dans le sens individualiste que représentent
4 our notre État que l’anarchie ancienne. Elle tend à nier notre mission. Elle tend à nier l’existence de tout ce qui ne se
5 cienne. Elle tend à nier notre mission. Elle tend à nier l’existence de tout ce qui ne serait pas une grande nation monol
6 e la force militaire. Par là même, elle s’attaque à la tradition créatrice de l’Occident, — et elle menace en premier lie
7 ude de nos syndicats, qui tendent de plus en plus à développer la conscience démocratique au sens suisse de leurs adhéren
8 t qui s’oppose autant au particularisme étroit qu’ à cette forme antisuisse de centralisation qui s’appelle le nationalism
9 a tâche de la nouvelle génération que de le mener à chef dans le plus court délai. Car il y va de l’existence même de not
10 s ici qu’indiquer la ligne générale. Notre force, à nous Suisses fédérés, n’est pas dans le nationalisme ! Nous ne sommes
11 serons l’avenir de l’Europe. Si, pour faire face à la menace totalitaire, nous essayons plus ou moins sérieusement de de
12 e n’est donc pas un « idéal fumeux » que j’oppose à la tentation d’un nationalisme helvétique. Je lui oppose la condition
13 e. Je lui oppose la condition même de notre droit à l’existence. Notre seule force est dans notre idéal personnaliste, e
14 x yeux des peuples d’Occident. Notre seul espoir, à nous Suisses, c’est de rester et de devenir de mieux en mieux le seul
2 1938, Articles divers (1938-1940). Souvenir d’Esztergom (juin 1938)
15 culture. Des amis me proposèrent de l’aller voir à Esztergom, où il passe les étés. J’eus ce bonheur de découvrir une te
16 les vagues se perdent dans une poussière violacée à l’horizon — chez les Tchèques déjà. Nous allons aux bains, car c’est
17 ure ruisselante, il nous sourit, dans l’eau jusqu’ à mi-corps, mythologique. Nous sortons ensemble de la petite ville aux
18 nature », un peu au-dessus de la plaine, pas tout à fait dans le ciel, là où doivent vivre ceux qui « chantent ». L’après
19 chot prend des photos, Gyergyai fouille la plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est, je grimpe au cerisier sauvage, der
3 1938, Articles divers (1938-1940). « Comment libérer l’État de la tyrannie de l’Argent ? » (10 juin 1938)
20 ’homme est celui-ci : remettre l’État et l’argent à leur place d’instruments techniques. Schéma : un État souverain dans
21 reprises qui échappent par leurs dimensions mêmes à la souveraineté communale, telles que chemins de fer, postes, statist
22 conduit au désordre flagrant des démocraties, et à cette fixation brutale du même désordre qu’on nomme l’ordre totalitai
23 sens présent du terme. » e. Ce mot a été ajouté à la main dans l’exemplaire personnel de Rougemont.
4 1938, Articles divers (1938-1940). Le Relèvement de l’Allemagne (1918-1938) par Albert Rivaud (28 octobre 1938)
24 nne, il est temps que le public français commence à se renseigner sur la question hitlérienne, autrement brûlante et immé
25 oir situé le développement du national-socialisme à l’intérieur du développement pangermaniste, qui a précédé Hitler, qui
26 rvivra. La première partie de ce gros ouvrage est à mon sens la plus sérieuse et la plus riche d’enseignements. C’est un
27 té vraiment bouleversante. Nous venons d’assister à la répétition du coup de juillet 1914. Mêmes manœuvres simultanées de
28 êmes tentatives pour « localiser le conflit », là à la Serbie, ici à la Tchécoslovaquie. Le dénouement a été différent, c
29 our « localiser le conflit », là à la Serbie, ici à la Tchécoslovaquie. Le dénouement a été différent, certes. En 1914, l
30 gne a tout obtenu. Les partisans de la résistance à tout prix en déduiront que l’on a eu tort d’aller à Munich. Mais on p
31 tout prix en déduiront que l’on a eu tort d’aller à Munich. Mais on peut leur faire observer que la guerre de 1914 n’a se
32 server que la guerre de 1914 n’a servi exactement à rien, puisque vingt ans plus tard, l’Allemagne est plus forte que jam
33 e et financier. Nous aurions beaucoup de réserves à formuler sur le détail de ces chapitres et sur l’intention qui présid
34 l de ces chapitres et sur l’intention qui préside à la « description » qu’ils nous offrent. Certes, il est malaisé de se
35 es sociétés anonymes a été réduit de 9634 en 1932 à 7204 en 1936, et que le nombre des « petites sociétés » est tombé de
36 nombre des « petites sociétés » est tombé de 6632 à 3863. Comment interpréter ces chiffres ? L’auteur y voit la preuve « 
37 il parle des doctrines nazies, on doit reprocher à M. Rivaud de mêler trop souvent ses commentaires à l’exposé objectif
38 M. Rivaud de mêler trop souvent ses commentaires à l’exposé objectif des thèses hitlériennes. Son résumé de Mein Kampf r
39 te de ce qui se passe en France. Et l’on en vient à se demander si ce n’est pas surtout le souci de faire la leçon aux Fr
40 aux Français « de gauche » qui a poussé M. Rivaud à étudier l’exemple allemand. Ce travers est particulièrement gênant da
41 araît extrait des seules chroniques de M. Bailby. À tel point qu’on omet d’y faire figurer le retrait de l’Allemagne de l
42 , dont l’échec fut pourtant le prétexte principal à la restauration de la Reichswehr ! Que ces critiques n’empêchent pers
43 Elles n’ont pour but que de faciliter une lecture à tant d’égards urgente et révélatrice. f. Rougemont Denis de, « [Co
5 1938, Articles divers (1938-1940). Réponse de Denis de Rougemont, lauréat du prix Rambert 1938 (novembre 1938)
44 certaines de mes superstitions. Il ne me reste qu’ à persévérer, et c’est ce que je vais faire en vous contant les circons
45 olstice d’été, triomphe solaire sur les ténèbres, à cette heure où Brangaine du haut de la tour jette le cri des « aubes 
46 rd, les deux dernières places libres. Or voici qu’ à l’heure même où je terminais mon livre, vous décidiez de me donner vo
47 e de dire le vrai, fût-il désobligeant, m’amenait à reconnaître que ces relations ne sont pas bonnes, de nos jours. J’all
48 ont pas bonnes, de nos jours. J’allais même jusqu’ à dire, dans mon livre, qu’elles sont en état de crise aiguë. Il me sem
49 ue les hommes de la cité actuelle ont bien du mal à communier dans une même vérité vécue ; qu’ils sont souvent d’autant p
50 es en apparences. Tout mon effort se portait donc à distinguer, et dans la mesure de mes moyens et dans mon champ, à diss
51 t dans la mesure de mes moyens et dans mon champ, à dissiper ces malentendus et leurs causes. Le reste de votre jury m’in
52 leurs causes. Le reste de votre jury m’inciterait à croire que j’y ai partiellement réussi : car enfin, vous les jeunes,
53 le ! Dois-je vous avouer que rien ne me préparait à l’espérer ? Vous êtes Vaudois, et pourtant vous couronnez un Neuchâte
54 e. Et ce n’est pas le moindre titre que vous ayez à ma reconnaissance. Une vieille tradition helvétique voulait que les e
55 meur belliqueuse qui, Dieu merci, ne trouvait pas à s’exercer dans nos cantons paisibles. Pourquoi n’y aurait-il pas de n
56 aît de plus en plus comme le symbole d’une Europe à venir, fédérant ses précieuses différences, — il se peut que ce servi
57 ité vivante d’un de ses cantons ; des hommes qui, à force d’être Vaudois avec génie, soient des valeurs européennes. Mais
58 s européennes. Mais peut-être faut-il ensuite, et à côté, des hommes qui essaient de représenter l’idée de la Suisse au r
59 , par atavisme autant que par goût. Mais je tiens à le souligner : je ne puis y espérer quelque succès qu’à la seule cond
60 ouligner : je ne puis y espérer quelque succès qu’ à la seule condition de garder avec la Suisse réelle les liens les plus
61 plus étroits. Que votre générosité ait contribué à resserrer ces liens, en me procurant une soirée comme celle-ci, c’est
6 1938, Articles divers (1938-1940). Réponse à l’enquête « Littérature et christianisme » (20 novembre 1938)
62 Réponse à l’enquête « Littérature et christianisme » (20 novembre 1938)j k
63 e. Mais tout ce que fait un chrétien, il le dédie à la gloire de Dieu, et c’est là toute la différence. Dira-t-on qu’elle
64 our l’artiste. Mais un romancier chrétien n’a pas à se préoccuper des résultats. Il ne saurait les prévoir, puisque c’est
65 cause visible, et son service n’est pas mesurable à ses « résultats » (scandale ou conversions produites). Le chrétien se
66 Du Bartas, Selma Lagerlöf, Ramuz) ne cherche pas à persuader le public de la beauté de sa religion, mais cherche à expri
67 public de la beauté de sa religion, mais cherche à exprimer l’humain dans sa réalité totale, telle que la foi seule la r
68 r au Jean-Baptiste du fameux retable de Grünewald à Colmar : nos œuvres ne seront jamais que cette main qui désigne le Ch
7 1939, Articles divers (1938-1940). Quel est le rôle de l’Université dans le pays ? (1939)
69 ru, et aujourd’hui moins que jamais. Ce n’est pas à l’Université que j’appris ce qu’il faut savoir pour vivre la vie dite
70 r, si j’ose dire, des trucs que l’on n’apprend qu’ à l’expérience. Or l’Université ne saurait les donner. Et il serait bie
71 de l’Université tout autre chose. Je puis le dire à sa louange : ce que j’ai reçu d’elle, de plus précieux, c’est ce qu’e
72 cturne de l’étudiant, des lectures qui ne servent à rien, des promenades qui ne mènent à rien, sinon à voir et à sentir c
73 i ne servent à rien, des promenades qui ne mènent à rien, sinon à voir et à sentir comme jamais plus nous ne le ferons pl
74 promenades qui ne mènent à rien, sinon à voir et à sentir comme jamais plus nous ne le ferons plus tard, la couleur de n
75 générations ont cru qu’elles étaient la dernière à cultiver le romantisme. La nôtre se crut la première, parce qu’elle é
76 lle dont les places et les rues sont si pareilles à des décors, la nuit, nous avions l’impression de circuler sur une scè
77 e perpétuelle. Les bons bourgeois n’étaient plus, à nos yeux, que des sortes de figurants, ignorant tout du sens réel de
78 oues. Nous dansions autour d’une flamme invisible à tout autre qu’à nous, et dont nous n’étions même pas toujours sûrs qu
79 ons autour d’une flamme invisible à tout autre qu’ à nous, et dont nous n’étions même pas toujours sûrs qu’elle fût réelle
80 s, pourtant, s’y brûlèrent. Et voilà qui me donne à penser qu’il n’y avait pas en jeu, dans tout cela, rien qu’une innoce
81 des chants… d’une autre espèce ? Ne serait-ce pas à nous de maintenir et d’illustrer aux yeux du monde moderne une de ces
82 et de l’amitié. Vraiment, quel danger y aurait-il à faire l’éloge d’une certaine paresse dans une occasion de ce genre ?
8 1939, Articles divers (1938-1940). Le protestantisme créateur de personnes (1939)
83 ave, ou en tout cas digne de réflexion, car c’est à elle précisément que je me propose de répondre ici. Comment passer du
84 ci. Comment passer du zéro de l’homme devant Dieu à la valeur infinie de la personnalité ? Comment passer de notre théolo
85 personnalité ? Comment passer de notre théologie à notre histoire ? Qu’est-ce que cette personnalité dont la valeur vari
86 te chrétienne, incitent beaucoup de contemporains à se tourner vers le passé pour y trouver le réconfort d’anciennes vict
87 sées par les Pères de l’Église, des Apôtres jusqu’ à Luther. Devant le danger, ils serrent les rangs. Ils se mettent à com
88 le danger, ils serrent les rangs. Ils se mettent à compter leurs forces, à recenser tous leurs appuis. Et c’est sans dou
89 les rangs. Ils se mettent à compter leurs forces, à recenser tous leurs appuis. Et c’est sans doute à ce désir de certitu
90 à recenser tous leurs appuis. Et c’est sans doute à ce désir de certitude renouvelée, à ce désir de retrouver confiance e
91 st sans doute à ce désir de certitude renouvelée, à ce désir de retrouver confiance en soi, que je devrais répondre en ex
92 déjà par contrecoup, et il est sage de s’attendre à bien pire. C’est donc le moment ou jamais de se montrer très rigoureu
93 défense. Et, par exemple, si beaucoup sont prêts à louer la Réforme d’être une école de personnalités, donc un rempart c
94 git dans cette discussion. Nous y avons notre mot à dire, peut-être même avant quiconque, si l’on veut éviter les pires m
95 est l’homme de la tribu qui tout d’un coup se met à réfléchir pour son compte, et qui, de ce fait même, se distingue du g
96 maintenant qu’un des membres de la tribu se mette à raisonner à part soi. Raisonner, c’est d’abord douter, et c’est bient
97 . L’homme qui raisonne, c’est l’homme qui cherche à échapper à la terreur originelle, aux liens sacrés du groupe, et par
98 ui raisonne, c’est l’homme qui cherche à échapper à la terreur originelle, aux liens sacrés du groupe, et par là même à s
99 nelle, aux liens sacrés du groupe, et par là même à son principe de tyrannie. Ce mouvement d’arrachement au sacré sombre,
100 nnie. Ce mouvement d’arrachement au sacré sombre, à l’empire des morts, ce mouvement de dissolution de la communauté prim
101 des indo-germaniques, les Grecs sont les premiers à se détacher, à prendre figure, donc à s’individualiser. Dans la tribu
102 iques, les Grecs sont les premiers à se détacher, à prendre figure, donc à s’individualiser. Dans la tribu primitive, cer
103 es premiers à se détacher, à prendre figure, donc à s’individualiser. Dans la tribu primitive, certains hommes se singula
104 oilà les premiers individus. Ceci est important : à l’origine, individu est synonyme de criminel. Mais peu à peu, ces ind
105 e nouvelles communautés (les thiases) comparables à la cité au sens moderne. Alors que la tribu était liée par des liens
106 . Dans la cité, bien au contraire, chacun cherche à se distinguer. On met son point d’honneur à faire mieux que le voisin
107 erche à se distinguer. On met son point d’honneur à faire mieux que le voisin, ou tout au moins à faire autrement que lui
108 eur à faire mieux que le voisin, ou tout au moins à faire autrement que lui. On se veut autonome et conscient. La définit
109 tion la plus noble de l’individu nous est fournie à ce moment par Socrate, lorsqu’il nous dit : Connais-toi toi-même, c’e
110 le de celle qui poussa les physiciens de la Grèce à créer la notion d’atome, les philosophes à formuler le principe d’ind
111 Grèce à créer la notion d’atome, les philosophes à formuler le principe d’individuation, les législateurs et les artiste
112 d’individuation, les législateurs et les artistes à concentrer leur attention sur l’homme et son destin particulier. D’où
113 e, avec l’intelligence et la raison, ne tarde pas à affaiblir les liens sociaux. Il s’oriente vers l’anarchie. À ce momen
114 les liens sociaux. Il s’oriente vers l’anarchie. À ce moment, se produit fatalement ce que j’appellerais un sentiment de
115 st une sorte d’angoisse diffuse d’où naît l’appel à une communauté nouvelle et plus solide, où l’individu isolé retrouve
116 l créé par l’individualisme est toujours un appel à l’État dictatorial. Et cet État aux cadres géométriques, avec son arm
117 tant plus facilement qu’il n’aura plus affaire qu’ à une poussière d’individus déracinés, n’offrant plus de résistance app
118 n n’est qu’apparente : en réalité, il y a de l’un à l’autre un lien de cause à effet ou plus exactement, de succession fa
119 éalité, il y a de l’un à l’autre un lien de cause à effet ou plus exactement, de succession fatale. L’individu ne s’oppos
120 ent, de succession fatale. L’individu ne s’oppose à l’État qu’à la manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide
121 ession fatale. L’individu ne s’oppose à l’État qu’ à la manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est absolu,
122 us le vide est absolu, plus l’appel est puissant. À bien des égards, l’étatisme ne fait qu’achever le processus de dissol
123 in qu’aucune structure organique ne s’oppose plus à son action d’unification, de « mise au pas ». C’est avec la poussière
124 orsque la majorité des citoyens se trouve réduite à l’état de fonctionnaires ou de soldats. C’est l’histoire de la décade
125 mé juridiquement la persona. Ce mot qui désignait à l’origine le masque de l’acteur, signifiera bientôt le « rôle » que j
126 Mais plus tard elle a sombré dans l’anarchie. Et à son tour, la Rome étatique s’écroule sous son propre poids. De nouvea
127 se reforme un vide social, une angoisse, un appel à une communauté. L’anarchie et la tyrannie, successivement, ont fait f
128 utions paraissent possibles. Ou bien l’on cherche à recréer la communauté primitive, à base de sang et de liens sacrés :
129 sions, et satisfait le rêve nostalgique du retour à la nature, d’une fraternité plus charnelle, d’une communion avec la m
130 lité d’une communauté progressive n’eût pas suffi à éveiller la volonté de la réaliser et de la faire sortir de l’utopie.
131 chef n’est pas terrestre : il s’est assis au Ciel à la droite de Dieu. Leurs ambitions non plus ne sont pas terrestres, c
132 bres et engagés. Libérés par Celui qui les engage à son service, et engagés au service du prochain dans la mesure précisé
133 r ? Il faut un mot nouveau. Ou plutôt non : c’est à un mot déjà connu que l’on aura recours, mais on va lui donner un nou
134 qui va servir aux premiers philosophes chrétiens à désigner la réalité de l’homme dans un monde christianisé. Car cet ho
135 posé original dominé par la foi. Si la foi venait à disparaître ou à s’altérer, la communauté fondée sur la personne cour
136 iné par la foi. Si la foi venait à disparaître ou à s’altérer, la communauté fondée sur la personne courait le danger d’u
137 alisme, d’autre part vers le collectivisme. C’est à cette seconde déviation que succomba la société au Moyen Âge. « L’hom
138 usion de l’Église et du pouvoir politique tendait à opprimer la liberté de la personne, en absorbant celle-ci de plus en
139 ’élément sacré reparaît dans une société, et tend à s’imposer par la force, comme ce fut le cas dès le xiie siècle, on s
140 retrouve dans une situation quelque peu analogue à celle des débuts de la Grèce, en ce sens qu’une révolte de l’individu
141 ce sens qu’une révolte de l’individu ne tarde pas à se manifester. Cette révolte, c’est la Renaissance. Elle apparaît d’a
142 crimes furent commis dans l’Italie du xve siècle à seule fin de s’acquérir de la renommée. Et les pirates siciliens, fon
143 cial. Enfin l’individu de la Renaissance se livre à une activité toute nouvelle : l’expérimentation scientifique libre. T
144 Du moins ces gestes sont-ils ressentis comme tels à cette époque. Or il est évident que cet individualisme est un retour
145 évident qu’il représente une réaction inévitable à la déviation romaine de la communauté catholique. Entre ces deux dévi
146 bien : je ne prétends pas annexer ici la Réforme à la cause personnaliste. Bien au contraire : je vais essayer de vous m
147 ent ces termes sont présentes, et sont en conflit à l’époque de la Réforme. Essayons de les dégager sommairement. Le but
148 ateurs était de restaurer la fidélité de l’Église à la Parole de Dieu. Jamais ils n’ont admis d’être présentés comme des
149 que l’œuvre de Calvin a consisté essentiellement à restaurer la doctrine de l’Église, de même qu’elle a consisté acciden
150 consisté accidentellement, sur le plan politique, à combattre sur deux fronts : d’une part contre l’absolutisme du pouvoi
151 aniseront en fédérations, délégueront des députés à des synodes, et il n’y aura pas de pape pour unifier temporellement t
152 . Avec ce terme de vocation, Calvin n’ajoute rien à la réalité de l’homme chrétien, du membre de l’Église, mais il apport
153 l’Église, mais il apporte une précision capitale à la définition de la personne. À tel point que je dirais volontiers qu
154 récision capitale à la définition de la personne. À tel point que je dirais volontiers que la définition protestante de l
155 nne chrétienne, ce sera le rôle que Dieu attribue à chaque homme. Notez bien que nous retrouvons ici le paradoxe essentie
156 t reliée à nouveau. Car le rôle que Dieu attribue à un homme distingue cet homme, l’isole, mais en même temps le remet en
157 argé d’une responsabilité unique dans la société, à sa juste place. Notons que si la personne doit être respectée par l’É
158 l’État, ce n’est pas en vertu d’un droit naturel à la désobéissance. Calvin précise que l’État, quel qu’il soit, doit êt
159 e par cela je ne sois nullement empêché de rendre à Dieu le service que je lui dois par ma vocation. » C’est à ma connais
160 service que je lui dois par ma vocation. » C’est à ma connaissance le seul texte constitutionnel existant, qui puisse êt
161 s politiques. Toute l’histoire de l’Europe serait à refaire à partir de cette constatation : que les formes et structures
162 e et des vocations personnelles ? Je n’hésite pas à le dire : c’est le fédéralisme. Cette thèse pourra paraître un peu fo
163 alisme. Cette thèse pourra paraître un peu forcée à certains historiens méticuleux. Mais elle devient presque évidente dè
164  ? Partout, et dès le début, l’obstacle principal à la Réforme, ce fut l’absolutisme, la passion unitaire et centralisatr
165 rente. Il ne tombe jamais dans le piège d’opposer à l’absolutisme romain un absolutisme réformé. Au contraire. Qu’il s’ag
166 rance, vers la fin du xvie siècle, préconisèrent à plusieurs reprises des projets d’organisation fédérative du Royaume,
167 ive du Royaume, avec large autonomie des communes à la base, et au sommet, contrôle du pouvoir royal par un organe plus o
168 on européenne ? Certes, les historiens attribuent à ces faits des causes politiques précises. Ils disent que la Réforme a
169 onde de la tendance fédéraliste protestante jusqu’ à nos jours, est d’ordre proprement spirituel. C’est bien le même état
170 trine réformée prédispose les peuples protestants à comprendre et à soutenir les régimes fédéralistes. L’homme ne vaut ri
171 rédispose les peuples protestants à comprendre et à soutenir les régimes fédéralistes. L’homme ne vaut rien par lui-même,
172 éoccupé de la forme des gouvernements. Il insiste à maintes reprises sur le fait que monarchies, oligarchies et républiqu
173 au réformateur. Et je ne crois pas être infidèle à sa pensée en y ajoutant cette précision : ce n’est pas la forme d’un
174 t qui compte, mais bien la condition qu’il ménage à l’Église, et l’idée de l’homme qu’il suppose. C’est en nous plaçant à
175 e de l’homme qu’il suppose. C’est en nous plaçant à ce double point de vue : condition de l’Église et condition de l’homm
176 (On ose à peine parler des Tchèques, déjà plus qu’ à moitié colonisés.) En face de ce groupement hétérogène quant à la for
177 r ce soir, ce sont deux traits évidemment communs à ces régimes : leur opposition brutale au christianisme, dès qu’ils so
178 le masque, et leur mépris de la personne. Voici, à mon avis, les causes de ces deux phénomènes. En Russie, en Allemagne,
179 de ces deux phénomènes. En Russie, en Allemagne, à Rome et en Espagne, la distinction entre l’Église et l’État n’avait j
180 ys que je viens de nommer souffraient, eux aussi, à des degrés divers, et pour mille raisons très complexes, de l’un ou l
181 at et l’Église formaient un tout et constituaient à eux deux le Pouvoir. Renverser l’un, c’était donc fatalement s’attaqu
182 enverser l’un, c’était donc fatalement s’attaquer à l’autre. Et le chef de la révolution triomphante dans chacun de ces p
183 e contraint par le sentiment général de reprendre à son compte à la fois l’autorité d’un chef d’Église et le pouvoir d’un
184 possédant toute la virulence des corps chimiques à l’état naissant. D’autre part, l’instauration de ces régimes tyranniq
185 nd écrivain espagnol Ortega y Gasset n’hésite pas à comparer sous ce rapport l’Espagne et la Russie. « Fort différentes s
186 es, on comprendra sans peine le fait suivant qui, à ma connaissance, n’a jamais été signalé : c’est qu’il existe une form
187 qu’il existe une forme de fascisme correspondant à la Russie orthodoxe, une autre correspondant à l’Allemagne luthérienn
188 nt à la Russie orthodoxe, une autre correspondant à l’Allemagne luthérienne, et deux autres correspondant à l’Italie et à
189 lemagne luthérienne, et deux autres correspondant à l’Italie et à l’Espagne catholiques, alors qu’il n’en existe point qu
190 ienne, et deux autres correspondant à l’Italie et à l’Espagne catholiques, alors qu’il n’en existe point qui se soit déve
191 ivante, il laisse derrière lui une empreinte tout à fait différente : une espèce d’individualisme. Nous aurons l’occasion
192 dualisme. Nous aurons l’occasion d’y revenir tout à l’heure. Car en effet, une opposition aussi radicale et aussi exacte
193 que c’est en chrétiens que nous avons maintenant à nous défendre, dans cette guerre qui nous est déclarée. Or le meilleu
194 lusions pratiques. Quelle est la condition faite à l’Église dans les pays totalitaires ? Cette première question est cap
195 x. Alors il n’y a plus de recours, plus de pardon à espérer : la communauté spirituelle ne peut pas en appeler à une inst
196 la communauté spirituelle ne peut pas en appeler à une instance supérieure à l’État, puisque c’est lui qui l’a créée pou
197 ne peut pas en appeler à une instance supérieure à l’État, puisque c’est lui qui l’a créée pour ses seules fins, et qu’i
198 le futur éternel, le rachat du péché d’origine ? À nous maintenant de rester vigilants, exigeants et vigilants, même et
199 éfense spirituelle du pays. Et je suis le premier à l’approuver. Mais lorsque l’on fonde cette défense spirituelle sur la
200 d’un certain enthousiasme qui nous ferait tomber à pieds joints dans la fatale confusion du temporel et du spirituel. Pa
201 nts, cela mène tout simplement, dans la pratique, à l’utilisation de l’Église pour des fins politiques, c’est-à-dire au c
202 litique existante qui soit radicalement contraire à la doctrine totalitaire. Le fédéralisme, ce n’est pas seulement un po
203 e au second point : quelle est la condition faite à la personne dans les pays totalitaires ? C’est très simple. On a détr
204 liberté ou de l’autonomie, et l’on a tout réduit à l’autre pôle : celui de l’engagement social. L’homme étant totalement
205 ouvoir, il n’y a plus aucun recours de l’individu à l’absolu divin, donc il n’y a plus aucune liberté. Tous les abus de p
206 durcis, de ces jeunes soldats politiques dressés à l’héroïsme en masse, à l’héroïsme collectif — le plus facile ! —, mai
207 soldats politiques dressés à l’héroïsme en masse, à l’héroïsme collectif — le plus facile ! —, mais qui n’ont plus d’héro
208 ne véritable civilisation. Qu’allons-nous opposer à cela ? Tout simplement, la force préventive, inattaquable tant qu’ell
209 e de la terre et des morts, pour peu qu’il vienne à s’accentuer, risque de nous conduire un jour par une voie directe au
210 d’une personne sur un individu qui ne croit plus à sa vocation, et qui a simplement été formé par une éducation et une a
211 ractères accusés. Ainsi l’on glisse du calvinisme à l’individualisme, dès que l’on perd la foi de la Réforme pour ne gard
212 t pourquoi l’on a pu dire que le calvinisme était à l’origine du capitalisme moderne, avec sa concurrence sans frein, phé
213 spécialement sa tendance calviniste, est appelée à figurer, dans notre siècle, le type même de la sûre doctrine de résis
214 s au sérieux la théologie réformée. Il nous reste à prendre au sérieux la doctrine réformée de l’homme et de l’État. Ceci
215 de l’État. Ceci ne signifie pas que l’Église ait à proposer un programme comme tant d’autres, mais bien qu’elle doit mar
216 es, et, d’autre part, qu’elle ne doit pas hésiter à appuyer certaines revendications conformes au Décalogue. Tout cela do
217 ici et maintenant, notre situation ressemble fort à celle qu’eut à résoudre la Réforme. Calvin combattait sur deux fronts
218 nt, notre situation ressemble fort à celle qu’eut à résoudre la Réforme. Calvin combattait sur deux fronts, au nom d’une
219 Le chrétien est celui qui n’a pas d’autre ennemi à craindre que l’ennemi qu’il porte en lui-même. Car un ennemi visible
220 la fière devise des vieux huguenots : « Tant plus à me frapper l’on s’amuse, tant plus de marteaux l’on y use. » 2. Te
221 ’une conférence prononcée au mois de janvier 1939 à Bâle, Neuchâtel, Lausanne et Genève. l. Rougemont Denis de, « Le pr
9 1939, Articles divers (1938-1940). Le théâtre communautaire en Suisse (1939)
222 font place aux mythes collectivistes, et la pièce à trois personnages au jeu sacral et militaire. Tout récemment, le chef
223 ns posait la première pierre d’une arène destinée à 400 000 spectateurs. Il est clair que de telles proportions anéantiss
224 s — non d’individus, ni de masses — correspondant à la structure communautaire de notre Confédération et de chacun de nos
225 communauté réelle. J’ai cherché, en second lieu, à tenir compte des conditions de fait qui m’étaient imposées par l’occa
226 otre devise confédérale : un seul peut être utile à tous. La traduction spectaculaire de cette donnée propose un nouveau
227 un héros solitaire. D’où la nécessité de recourir à des chœurs, qui peuplent et animent de grands espaces, tout en concen
228 . (C’est la solution eschylienne du problème tout à fait analogue qui se posait lors des Jeux olympiques.) Or, il se trou
229 e l’élément choral est de beaucoup le plus facile à recruter en Suisse, et particulièrement dans le canton de Neuchâtel,
230 ffet chez nous des chœurs mixtes de premier ordre à La Chaux-de-Fonds et au Locle ; un chœur d’enfants dans la région de
231 musique plus savante : le chœur « Sine Nomine », à Neuchâtel même. J’utiliserai donc, pour mon drame, une masse chorale
232 , et qui agira sur le degré inférieur de la scène à trois plans dont j’ai vu le projet. Une masse plus réduite agira sur
233 lan 2 au plan 3. Au deuxième acte, le monde vient à lui : les chœurs gravissent et redescendent les escaliers qui conduis
234 ue : il est très difficile de marier un bon texte à des éléments spectaculaires trop lents et trop vastes, qui accaparent
235 intérieur du dialogue, pour aboutir organiquement à l’intervention de la musique ou du cortège, dans les moments où l’int
236 de la foule, c’est-à-dire du drame de la personne à ses répercussions dans la communauté. Le dialogue est simplifié à l’e
237 ons dans la communauté. Le dialogue est simplifié à l’extrême de manière à pouvoir supporter l’amplification par les haut
238 régions de notre canton, se mirent de grand cœur à la tâche : acteurs amateurs recrutés dans toutes les classes, du pêch
239 le fédéralisme ne perdit jamais ses droits, même à l’intérieur du canton ! Certes, la guerre étant intervenue, tout s’es
240 erre étant intervenue, tout s’est trouvé suspendu à la veille des représentations de Zurich. Il est donc encore impossibl
10 1939, Articles divers (1938-1940). Un quart d’heure avec M. Denis de Rougemont : Hitler, grand-prêtre de l’Allemagne (11 janvier 1939)
241 Un État totalitaire ne peut pas être totalitaire à moitié. Il lui faut la fameuse confiance, et une confiance discipliné
242 fameuse confiance, et une confiance disciplinée, à toute épreuve. Seule, la mystique nationaliste peut la lui donner. Ce
243 mais assez vite. Cependant, elle ne s’est imposée à moi que le jour où j’ai assisté à un discours du Führer, en présence
244 e s’est imposée à moi que le jour où j’ai assisté à un discours du Führer, en présence de 40 000 personnes. Mais, ce jour
245 foudroyant. Je me souviens qu’avant de me rendre à cette réunion, j’avais dit à quelqu’un : « Vous y croyez, vous, à l’â
246 u’avant de me rendre à cette réunion, j’avais dit à quelqu’un : « Vous y croyez, vous, à l’âme collective ? Est-ce que ce
247 j’avais dit à quelqu’un : « Vous y croyez, vous, à l’âme collective ? Est-ce que ce n’est pas une formule grandiloquente
248 ur moi, c’est de voir quels liens unissent Hitler à une foule à laquelle il parle. Essayez de vous représenter une salle
249 t de voir quels liens unissent Hitler à une foule à laquelle il parle. Essayez de vous représenter une salle immense qui
250 re plusieurs minutes, ce qui est très long, jusqu’ à ce que commence le chant du Horst Wessel Lied, comme un cantique. C’e
251 ique. C’est alors que j’ai compris. Je me croyais à un meeting de masses, à quelque manifestation politique. Mais c’est l
252 ai compris. Je me croyais à un meeting de masses, à quelque manifestation politique. Mais c’est leur culte que ces Allema
253 le séparait de la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireur l’eût descendu très facilement. Mai
254 oi, mais les fondateurs de religion sont réservés à d’autres catastrophes. J’achève votre raisonnement : puisqu’il n’y a
255 cela retrace le comment cela s’est fait. Il reste à trouver le pourquoi. Là-dessus, les réponses varient, mais chacune d’
256 le nôtre est irrationnelle. Nous voulions croire à quelque chose, nous voulions vivre pour quelque chose. Nous avons été
257 pour quelque chose. Nous avons été reconnaissants à celui qui nous apportait cette possibilité de croire. Le christianism
258 re de la majorité du peuple. Nous voulions croire à la mission du peuple allemand. Nous voulions croire à l’immortalité d
259 mission du peuple allemand. Nous voulions croire à l’immortalité du peuple et peut-être réussirons-nous à y croire. » Vo
260 mmortalité du peuple et peut-être réussirons-nous à y croire. » Voilà qui dit bien où est la force de l’Allemagne nouvell
261 uelle force croyez-vous donc qu’on puisse opposer à cette force-là ? Rien d’efficace, si ce n’est pas une force spirituel
262 ce n’est un grand effort moral. Quand j’ai envoyé à des amis de France le récit de la journée où j’ai vu Hitler en commun
11 1939, Articles divers (1938-1940). Qui est Hitler ? (24 février 1939)
263 Führer est un végétarien belliqueux qui ressemble à Charlie Chaplin et qui est doué d’une voix de stentor fanatique, part
264 oi avant la révolution de 1789. Au panégyrique et à la caricature, j’opposerai ici un témoignage limité, mais authentique
265 . J’ai entendu Hitler pendant une heure et demie, à peu de distance de sa tribune, et je l’ai vu à la sortie de cette « m
266 le séparait de la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireur l’eût descendu très facilement. Mai
267 ès intelligent, il n’aurait sans doute pas réussi à fanatiser tout un peuple. Une certaine forme de bêtise convaincue est
268 bêtise convaincue est seule capable de s’imposer à de grandes masses rassemblées par des passions élémentaires. Mais ce
269 ’inconsciente angoisse de son peuple, et incarner à ses yeux un symbole d’espérance, de vengeance et de force collective.
270 ature, on sent très bien qu’elle n’appartient pas à l’individu, et même qu’elle ne saurait se manifester qu’autant que l’
271 support ou le médium d’une puissance qui échappe à nos psychologies. Voilà de quoi déconcerter nos hommes d’État démocra
272 ’État démocratiques lorsqu’ils se trouvent, comme à Munich, en tête-à-tête avec cet homme-symbole ! Il est clair que le p
273 asses, c’est uniquement parce qu’il a su répondre à l’attente angoissée de ces masses, de leur âme humiliée, misérable et
274 d’espérer, des raisons de se dévouer corps et âme à un absolu. Il s’est donné pour l’Absolu, la Providence, le Destin des
275 arence), que les prophètes de Jéhovah. Hitler est à mes yeux le type du faux prophète, celui qui annonce aux hommes le rè
276 r personnel » du Führer pour dix ans. Cas unique, à ma connaissance, et qui revêt une signification extraordinaire dans s
12 1939, Articles divers (1938-1940). Il y a toujours des directeurs de conscience en Occident (juin 1939)
277 d’inconscience collective. Leur méthode consiste à anesthésier les consciences, faute de pouvoir les saisir dans leur ré
278 voir les saisir dans leur réalité singulière, une à une. Cette solution, qui consiste à supprimer brutalement les données
279 ngulière, une à une. Cette solution, qui consiste à supprimer brutalement les données du problème, est d’ailleurs la cons
280 ait : « Si l’on veut réellement conduire un homme à un but défini, il faut avant tout se préoccuper de le prendre là où i
281 ne lui servira de rien. Si je persiste cependant à faire valoir ma science, ce n’est plus alors que par vanité ou par or
282 e qu’au fond, au lieu d’aider l’homme, je cherche à me faire admirer de lui ». (Kierkegaard) Qu’est-ce en effet que dirig
283 de directeur de conscience se trouve subordonnée à la connaissance d’un but auquel il faut conduire cet homme réel. La d
284 les fins qu’elle doit servir. Tout se ramène donc à cette question : pour quelles fins vivons-nous ? Car cela seul peut d
285 vivons-nous ? Car cela seul peut définir la voie à suivre, l’orthodoxie. Point de direction de conscience sans orthodoxi
286 nt de direction de conscience sans orthodoxie. Et à l’inverse ; dès qu’une orthodoxie se remet à sévir, la fonction de di
287 . Et à l’inverse ; dès qu’une orthodoxie se remet à sévir, la fonction de directeur de conscience reparaît automatiquemen
288 nscience reparaît automatiquement ; elle consiste à relier l’homme réel, dans telle ou telle situation complexe où il se
289 e où il se trouve, au but final et simple assigné à sa vie. Or nous voyons au xxe siècle plusieurs « orthodoxies » se co
290 s « orthodoxies » se constituer, toutes destinées à surmonter l’anarchie individualiste. Elles se fondent sur une doctrin
291 ément subordonner toutes les activités de l’homme à ces fins-là. Mais comme il s’agit de fins partielles, n’embrassant qu
292 sser et dominer » ces pseudo-solutions partielles à prétentions totalitaires. Et en effet, une doctrine réellement univer
293 les consciences, mais au contraire contribuerait à les susciter, à les former, à les conduire vers leur plénitude. Un un
294 , mais au contraire contribuerait à les susciter, à les former, à les conduire vers leur plénitude. Un universalisme est
295 raire contribuerait à les susciter, à les former, à les conduire vers leur plénitude. Un universalisme est donc souhaitab
296 fins dernières, d’où nous venons, où nous allons… À son défaut, tout universalisme imaginé par nos cerveaux sera frappé d
297 vrai nous est-il impossible de nous hausser jusqu’ à l’universel avec l’aide de nos idéaux : car eux aussi sont dans le pu
298 rselle, d’universalisme concevable, descriptible, à notre portée et à notre disposition, c’est-à-dire ayant son fondement
299 lisme concevable, descriptible, à notre portée et à notre disposition, c’est-à-dire ayant son fondement dans le plan terr
300 l échappe aux prises de notre esprit non moins qu’ à celles de nos sens. Ainsi la foi chrétienne est universaliste dans so
301 hommes. Mais je n’entends pas parler d’un retour à une église, et encore moins d’un retour au christianisme. Ce serait é
302 père et qu’elle prie, et vers lequel elle s’ouvre à l’infini. « Et l’Esprit et l’Épouse disent : Viens ! Et que celui qui
303 le surmonter. q. Rougemont Denis de, « [Réponse à une enquête] Il y a toujours des directeurs de conscience en Occident
304 Volontés, Paris, juin 1939, p. 49-52. r. Réponse à une enquête.
13 1939, Articles divers (1938-1940). Nicolas de Flue vu par Denis de Rougemont (8 juillet 1939)
305 le sourire généreux, voici Honegger, le musicien. À ses côtés, plus réticent, plus replié sur lui-même, le regard intelli
306 — en disent long sur la méditation qui a conduit à maturité des chefs-d’œuvre comme : Les Cris du Monde, David, Pacific
307 exte de Denis de Rougemont. Elle sera représentée à l’Exposition de Zurich et offerte au public suisse par le canton de N
308 ofondément émouvant dans ce don : un canton offre à son pays une œuvre suisse, faite par un des musiciens les plus célèbr
309 Nicolas de Flue comprend trois parties, j’hésite à dire trois actes tant notre travail diffère du genre purement théâtra
310 enre purement théâtral, répond Denis de Rougemont à une de mes questions. Et ces différences sont ? Il a fallu se plier a
311 n auteur. Mais par contre cette limitation oblige à creuser en profondeur. Tout ce qui est inutile devient ennuyeux et lo
312 se clarifie. Immédiatement on sent que les effets à obtenir ne seront pas le résultat d’une action individualiste, mais c
313 ent pris pour faire du texte une suite s’adaptant à l’action ? Certainement, quand Nicolas de Flue parle, il parle en slo
314 ne du côté d’Arthur Honegger qui a suivi, la pipe à la bouche, notre conversation. Et la musique ? D’abord, je vous dirai
315 chœurs avanceront, monteront au premier « étage » à moins qu’ils ne descendent du ciel vers la terre, car nous avons appe
316 ’Honegger n’avouent, c’est la joie qu’ils ont eue à créer une œuvre saine et forte. C’est aussi l’inquiétude d’en connaît
14 1939, Articles divers (1938-1940). Du mythe de Tristan et Iseut à l’hitlérisme (14 juillet 1939)
317 Du mythe de Tristan et Iseut à l’hitlérisme (14 juillet 1939)u v Il était juste que Denis de Roug
318 e, ou plutôt aux innombrables domiciles, me reçut à la NRF. Pourrait-on s’imaginer, en effet, l’ex-« intellectuel en chôm
319 ômage », qui traîna ses méditations et sa machine à écrire de la Vendée en Languedoc, et de la province à Paris, installé
320 rire de la Vendée en Languedoc, et de la province à Paris, installé dans ses meubles, avec une suspension et des draperie
321 eries qui lui appartinssent en propre ?… Le voici à Paris pour ma chance et fort Parisien, à ce qu’il me semble. Entre de
322 Le voici à Paris pour ma chance et fort Parisien, à ce qu’il me semble. Entre deux averses de cet été inclément, nous pou
323 nné et aménagé avec goût comme tout ce qui touche à la maison de la rue Sébastien-Bottin. Une tonnelle verte invite aux c
324 èbe impure. Une bordure de géraniums rouges offre à l’œil un opportun et gracieux point d’appui. Tout invite à un entreti
325 n opportun et gracieux point d’appui. Tout invite à un entretien parfait. Tout, jusqu’au Journal d’André Gide, un fort vo
326 de la Pléiade et qui, posé sur la table, imprime à notre rencontre la note de la maison. ⁂ Que dire de Denis de Rougemon
327 se de se faire dans la littérature une place bien à lui et qui n’est pas des moindres. Ce fils de la libre Suisse, qui a
328 problèmes avec conviction, pour ne les lâcher qu’ à la fin du sillon, possède en même temps une ironie affectueuse et amu
329 me les plus arides méditations et donne des ailes à la plus austère exégèse. Peut-être est-ce parce qu’il sait « penser a
330 discrète, je voudrais savoir ce qui vous a poussé à écrire ce livre, si différent par son caractère intemporel de vos der
331 tère intemporel de vos derniers livres, tous liés à l’actualité. Je songe au Journal d’un intellectuel en chômage, et sur
332 nts de la société d’aujourd’hui, et c’est surtout à cet aspect de la question que j’ai songé en me mettant à l’œuvre. J’a
333 spect de la question que j’ai songé en me mettant à l’œuvre. J’ai voulu d’abord faire un livre court traitant du mythe de
334 s et le catharisme. C’est ainsi que les livres II à V de L’Amour et l’Occident , consacrés aux origines religieuses du m
335 nt , consacrés aux origines religieuses du mythe, à passion et mysticisme, au mythe dans la littérature, à l’amour et la
336 sion et mysticisme, au mythe dans la littérature, à l’amour et la guerre, ont été trouvés en cours de route. Mais les hyp
337 ques que j’y développe ne sont pas indispensables à l’essence du livre qui pourrait se concevoir en dehors d’elles. Denis
338 st sacré dans la sociologie, que j’en suis arrivé à envisager les problèmes collectifs. Tristan symbolise la manière dont
339 ouvé que c’était la poésie des troubadours. Quant à savoir d’où vient cette dernière, c’est un problème sur lequel les ér
340 eux-mêmes sont en désaccord, au point de renoncer à toute explication. Mais vous avez sans doute une hypothèse personnell
341 sans doute une hypothèse personnelle ? La voici. À la même époque que les troubadours, fleurissait dans le Languedoc, en
342 ue nous en savons, il comportait des notions tout à fait comparables à celles des troubadours : refus de la consommation
343 il comportait des notions tout à fait comparables à celles des troubadours : refus de la consommation de l’amour, exaltat
344 ns troubadours étaient cathares, des travaux tout à fait récents, publiés en même temps que mon livre, l’ont établi avec
345 on y était considérée comme une maladie ou folie. À partir du xiie siècle, sous l’influence de la mystique cathare et de
346 ut, couple de parfaits amants, ne s’aimèrent pas. À la manière dont Denis de Rougemont répond : « C’est exact, en effet »
347 me pas Iseut de charité, dans son être véritable. À la différence d’Agapè, l’amour chrétien de la personne, Éros, le dési
348 os et Agapè ? J’ai tenté une esquisse de synthèse à la fin de mon livre, en partant des mystiques. Je traiterai ce problè
349 s de l’amour, afin d’y voir clair avant de passer à la synthèse. En écrivant L’Amour et l’Occident, vous avez réhabilité
350 de mon livre montrent que l’étranger s’intéresse à une étude où l’on parle de l’amour sans ironie comme sans sentimental
351 ement « son » problème. Comment en êtes-vous venu à envisager le parallélisme entre la guerre et l’amour ? Je ne peux me
352 nd de plus en plus figure de conversation amicale à bâtons rompus, tant je me sens de plain-pied avec cet auteur si peu i
353 rre moderne telle qu’on la fait depuis 1915. Mais à l’époque de l’amour courtois il n’existait pas de distinction entre l
354 tlérisme ? Il y a certainement une source commune à Hitler et aux romantiques allemands ; il y a certainement une analogi
355 e ; l’anarchie des mœurs aboutit alors fatalement à une mise au pas faute de laquelle toute vie serait impossible. C’est
356 rent. Les faits que je rapporte servent davantage à illustrer ma thèse qu’à la prouver. ⁂ Mais sans doute cette précautio
357 apporte servent davantage à illustrer ma thèse qu’ à la prouver. ⁂ Mais sans doute cette précaution lui paraît-elle insuff
358 is de, « [Entretien] Du mythe de Tristan et Iseut à l’hitlérisme », Tribune de France. Hebdomadaire de la reconstruction
15 1939, Articles divers (1938-1940). Comment j’ai écrit Nicolas de Flue (3 novembre 1939)
359 digne des vastes dimensions de la Halle des Fêtes à Zurich. C’était en septembre 1938. L’Europe entière allait mobiliser.
360 ions de l’Europe d’aujourd’hui. Il n’y avait plus à hésiter. Je tenais enfin le grand sujet. La pièce fut écrite, le musi
361 urs, choristes et figurants se mirent joyeusement à l’ouvrage pour réaliser le spectacle. Ce magnifique effort d’art et d
362 ques scènes typiques de la pièce seront exécutées à votre intention par les acteurs, choristes et musiciens qui s’étaient
16 1939, Articles divers (1938-1940). Pourquoi nous sommes là (décembre 1939)
363 n feu de branches mortes, mornes et ronchonneurs, à la lisière d’un bois. J’essaie de les réconforter. Silence, réprobati
364 pour faire n’importe quoi, sans rien comprendre. À quelques kilomètres d’ici commencent les tranchées de la guerre, et d
365 taire, de son arrogance étatique. Nous sommes ici à patauger parce que les peuples autour de nous font la guerre, et s’il
366 apable de fonder la paix, puisque l’autre aboutit à la guerre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les fait
367 ui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le reconnaître avec une tragique évidence. Et c’est cela que nous avo
368 e tragique évidence. Et c’est cela que nous avons à défendre : le seul avenir possible de l’Europe. Le seul lieu où cet a
17 1939, Articles divers (1938-1940). Nicolas de Flue : naissance d’un drame (Noël 1939)
369 i. Était-ce la guerre qu’on attendait d’une heure à l’autre ? C’était Munich, c’était la paix, cela n’arrangeait pas mes
370 ce qui m’était arrivé. Deux semaines auparavant, à Venise, j’écoutais Honegger dirigeant son Nocturne dans le théâtre go
371 he assourdissante fascina tout entendement. C’est à ce moment que l’on m’offrit d’écrire une pièce pour l’Exposition de Z
372 que d’en trouver un, en Suisse, qui fût de taille à occuper l’énorme scène dont j’avais vu les plans. On insista, je dema
373 hone que j’ai dit, et toute la vie qui se reprend à vivre, les délais à courir, le sujet à me fuir… Le soir même, rentran
374 t toute la vie qui se reprend à vivre, les délais à courir, le sujet à me fuir… Le soir même, rentrant de voyage, ma femm
375 se reprend à vivre, les délais à courir, le sujet à me fuir… Le soir même, rentrant de voyage, ma femme m’apporte un livr
376 et ces deux files de pèlerins, l’une qui descend à droite, l’autre qui vient de la gauche, — il faudrait une scène à éta
377 e qui vient de la gauche, — il faudrait une scène à étages… C’est justement celle de Zurich ! Nuit blanche. Trois actes s
378 e de Stans où le message de Nicolas sauve la paix à la onzième heure, ce n’est plus un souvenir de manuel, c’est le Munic
379 théâtre grec, avec son chœur mobile prenant part à l’action. C’était évidemment la solution formelle. Encore fallait-il
380 la solution formelle. Encore fallait-il l’adapter à l’esprit chrétien du sujet. Un catholique eût sans doute recouru à l’
381 en du sujet. Un catholique eût sans doute recouru à l’inspiration liturgique. Protestant, je songeai tout de suite au sty
382 violente simplicité qui peut s’accorder à la fois à la déclamation d’un chœur en marche et au dialogue, forcément sans nu
383 cien… Sans un instant d’hésitation, je m’adressai à Honegger. En trois mois, tout fut terminé. Mois heureux, où le temps
384 isponibles en pays neuchâtelois). On devine aussi à quelles nécessités intimes répondait cet appel du dehors. Mais le mys
385 a paix, je le répète. Joignons alors notre prière à celle du peuple suisse, invoquant du fond des vallées l’intervention
386 nds ! clémente et pacificatrice — ô voix pareille à la rosée ! — Viens te poser sur le cœur de violence — apaise-nous, co
387 z des mains, peuple, pour Nicolas, Unissez-vous à l’éclat des fanfares Vous tous, au loin, et quiconque entendra :
18 1940, Articles divers (1938-1940). L’homme au poignard enguirlandé (1940)
388 40)au Oui, je veux opposer la Suisse de Manuel à l’Helvétie des manuels ! Et qu’importe le calembour, s’il fait hésite
389 laisse, après Novare, par-dessus les Alpes, jusqu’ à Berne. Quant à quitter la guerre il n’y faut plus songer, ce serait q
390 ovare, par-dessus les Alpes, jusqu’à Berne. Quant à quitter la guerre il n’y faut plus songer, ce serait quitter du même
391 le même rythme de vie — vient mêler sa guirlande à mes images, comme la devise du tableau, tandis que je songe à la vie
392 , comme la devise du tableau, tandis que je songe à la vie de Nicolas Manuel Deutsch. C’est un autre guerrier qui parle e
393 de la passion d’amour, et c’est elle qu’il invite à la danse avec une fougue adolescente, une peur naïve, un courage chré
394 e et mort de carnaval, vierge, paysanne, ou fille à lansquenets, c’est toujours elle qui le rejoint ou qu’il poursuit ; d
395 de cette époque où la vie s’exaspère ont-ils fait à la mort, dans leurs rêves, la part que nous fîmes à l’amour ? Urs Gra
396 la mort, dans leurs rêves, la part que nous fîmes à l’amour ? Urs Graf, Holbein, Hans Kluber, Grünewald, et tant d’autres
397 raire, et ces hommes ont le regard net, accoutumé à taxer le réel avec une dure exactitude : face au danger. Leur Suisse
398 que. Manuel et ses contemporains savent et disent à leur manière que de demain rien n’est certain. Mais ce qu’ils sentent
399 cien, c’est la vie savoureuse et forte qui figure à leurs yeux le train normal de l’homme. Leur œuvre illustre la vision
400 c le temps tu le retrouveras ; donnes-en une part à sept et même à huit, car tu ne sais pas quel malheur peut arriver sur
401 e retrouveras ; donnes-en une part à sept et même à huit, car tu ne sais pas quel malheur peut arriver sur la terre. » Le
402 élégance dans le style énergique, ou au contraire à l’énergie dans la libre invention lyrique, ce sont là des secrets spi
403 as une polémique mais une acceptation des choses, à toutes fins utiles ou spirituelles, à la volée d’une imagination qui
404 des choses, à toutes fins utiles ou spirituelles, à la volée d’une imagination qui se soucie d’abord de composer. Entre u
405 , des laboureurs et des bateaux, toute une nature à la mesure de l’homme, portant les marques de l’usage, et dominée par
406 vivant n’a jamais rien perçu. ⁂ Mais je m’attarde à ces tableaux, et Manuel n’est pas un « artiste » au sens moderne et b
407 aux guerriers du chevalier de Stein, va combattre à Novare et pille la cité, assiste à la défaite de la Bicoque, crie son
408 , va combattre à Novare et pille la cité, assiste à la défaite de la Bicoque, crie son indignation dans un furieux poème,
409 ndignation dans un furieux poème, et s’en revient à Berne pour y faire la Réforme. Il écrira d’abord des jeux de carnaval
410 ar ce poignard, c’était déjà celui qu’il joignait à son monogramme, enguirlandé au coin de ses tableaux ; ce sera l’arme
411 aintenant c’est le sceau des poèmes qu’il dédie «  à la gloire de Dieu ». ⁂ Quand on dit chez nous de quelqu’un « qu’il a
412 es. Mais la grandeur d’un Manuel, et de plusieurs à son époque, est d’avoir su conduire leur vie vers un but qui transcen
413 dans sa peinture, Manuel n’hésite pas un instant à planter là pinceaux et chevalet lorsqu’ayant dominé son art, il entre
414 satirique ou guerrier, architecte ou négociateur, à quelle passion maîtresse ordonna-t-il sa vie ? Peut-être à la recréat
415 passion maîtresse ordonna-t-il sa vie ? Peut-être à la recréation d’une unité de rythme et de vision au sein d’un monde q
416 manuscrit d’une satire contre la messe, on vante à Berne la modération de ses discours lors des débats de religion. Ce d
417 avide d’une unité de sens spirituel, inaccessible à tout « savoir », aussi vaste qu’on l’imagine. ⁂ Le 21 mars 1530, Manu
418 21 mars 1530, Manuel parut pour la dernière fois à la Diète de Baden. Du 1er au 12 avril, il assiste chaque jour aux séa
419 eul autoportrait qui subsiste de lui nous montre, à la fin de sa vie, un regard doux et perspicace, un visage aigu de mal
420 e d’homme devant Dieu. 15. Vers du Biccocalied. À la bataille de la Bicoque, les lansquenets s’étaient dissimulés dans
421 Suisses à bout portant. Le poème de Manuel répond à une chanson glorifiant la victoire des Allemands. 16. Amen. Versigl
19 1940, Articles divers (1938-1940). Mission spéciale (1940)
422 Mission spéciale (1940)av À quelques kilomètres d’ici commencent les tranchées de la guerre, et d
423 de fonder la paix, puisque les autres aboutissent à la guerre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les fait
424 ui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le reconnaître avec une tragique évidence. Et c’est cela que nous avo
425 e tragique évidence. Et c’est cela que nous avons à défendre en défendant notre patrie : le seul avenir possible de l’Eur
20 1940, Articles divers (1938-1940). D’un certain cafard helvétique (janvier 1940)
426 sont moralement en meilleure forme que ceux qui, à l’arrière, essaient de s’amuser. Par contre, je ne connais rien de pl
427 parce qu’on est empêtré dans ses draps. Or c’est à cette sorte-là de démoralisation et de cafard que se trouvent exposés
428 ées. Chose curieuse, c’est dans le civil, plus qu’ à l’armée, que se manifeste cette tendance à tout faire « rentrer dans
429 lus qu’à l’armée, que se manifeste cette tendance à tout faire « rentrer dans le rang ». Essayez de lancer un projet et d
430 eux ou d’excité. Certain sentiment suisse répugne à tout ce qui lui paraît vouloir se distinguer, dans n’importe quel ord
431 méfions en vertu d’un instinct démocratique tout à fait sain à l’origine, je le répète. Mais quand cet instinct dégénère
432 vertu d’un instinct démocratique tout à fait sain à l’origine, je le répète. Mais quand cet instinct dégénère en mauvaise
433 l faut commencer. Et j’en profite pour dire, ici, à tous ceux qui veulent faire quelque chose — et ils sont plus nombreux
21 1940, Articles divers (1938-1940). Les Suisses sont-ils « à la hauteur » de la Suisse ? (20 janvier 1940)
434 Les Suisses sont-ils «  à la hauteur » de la Suisse ? (20 janvier 1940)ab La Suisse est neut
435 pour l’argent. Mais il y a sans doute autre chose à tirer de nos « privilèges », si nous voulons les préserver. Neutralit
436 mériter. Et de prouver en fait que l’on est seul à pouvoir l’exercer dignement. Or, nous chantons nos lacs d’azur, nous
437 s m’empêcher de songer, avec une horrible malice, à certain passage de Hugo contemplant du haut du Pilate le panorama de
438 andeur de Dieu. Je me suis retourné, me demandant à quel être supérieur et choisi la nature servait ce merveilleux festin
439 ages et de soleil, et cherchant un témoin sublime à ce sublime paysage. Il y avait un témoin, en effet, un seul, car du r
440 tes sur une grosse pierre, un idiot, un goitreux, à corps grêle et à face énorme, riait d’un air stupide, le visage en pl
441 e pierre, un idiot, un goitreux, à corps grêle et à face énorme, riait d’un air stupide, le visage en plein soleil, et re
442 dans cette effrayante antithèse : l’homme opposé à la nature ; la nature dans son attitude la plus superbe, l’homme dans
443 n attitude superbe, il s’agit d’être moralement «  à la hauteur ». Non, ce n’est pas si facile que cela d’habiter et de po
444 ctateur, touriste ou hôtelier, qui suit d’en bas, à la lunette, la caravane en plein effort sur les glaciers. En avant do
445 ab. Rougemont Denis de, « Les Suisses sont-ils “ à la hauteur” de la Suisse ? », La Coopération, Bâle, 20 janvier 1940,
22 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. I : Les voix que rien n’arrête (24 février 1940)
446 , voix insinuantes, tentatrices, voix comparables à ces sifflements pleins de mystère qui circulent au-dessus de l’Europe
447 ope et que, parfois, quand vous cherchez un poste à la radio, vous captez sans le vouloir, en passant. Que signifient ces
448 ompte. Autrefois, et naguère encore, il suffisait à une nation de déclarer son sol sacré, pour avoir le droit de le défen
449 l sacré, pour avoir le droit de le défendre jusqu’ à la dernière goutte du sang des citoyens. Assurer les armes à la main
450 re goutte du sang des citoyens. Assurer les armes à la main l’intégrité du sol de la patrie, voilà qui ne faisait pas de
451 pas de question. Il n’y avait pas d’autre raison à chercher et à proclamer que cette raison tout instinctive. À cette ép
452 on. Il n’y avait pas d’autre raison à chercher et à proclamer que cette raison tout instinctive. À cette époque, on ne po
453 et à proclamer que cette raison tout instinctive. À cette époque, on ne pouvait en effet conquérir un pays qu’au moyen d’
454 e du terrain. C’était donc le terrain qu’on avait à défendre, le territoire, symbole unique, symbole « sacré » de la nati
455 agande. Ce n’est plus le territoire qu’on cherche à envahir, mais c’est en premier lieu la conscience nationale. Souvenez
456 stes ? Ils proclament une doctrine politique tout à fait nouvelle en Europe. Ils prétendent que les nations « n’ont pas t
457 e les nations « n’ont pas toutes les mêmes droits à l’existence ». Autrefois, l’on croyait volontiers que chaque État éta
458 es nations « jeunes » et « dynamiques » ont droit à un espace vital, lequel espace englobe, comme par hasard, tous les pa
459 ison d’être historique ». Pour peu qu’elle arrive à le faire croire, soit aux masses, soit plutôt à certains dirigeants,
460 e à le faire croire, soit aux masses, soit plutôt à certains dirigeants, la victoire lui est acquise d’avance. Et les cei
461 opéennes que rien n’arrête : elles nous demandent à nous les Suisses, si nous avons encore une raison d’être, si nous oso
462 utonomie. Elles nous forcent, non sans brutalité, à « dire » enfin ce qui naguère allait sans dire, à dire pourquoi nous
463 à « dire » enfin ce qui naguère allait sans dire, à dire pourquoi nous voulons que notre sol n’appartienne qu’à nous seul
464 rquoi nous voulons que notre sol n’appartienne qu’ à nous seuls, à nous Suisses. Elles nous demandent quelle est la Suisse
465 lons que notre sol n’appartienne qu’à nous seuls, à nous Suisses. Elles nous demandent quelle est la Suisse que nous somm
466 dent quelle est la Suisse que nous sommes décidés à défendre. Voilà le défi que nous adresse l’Europe moderne. Il s’agit
467 ment, le 2 septembre, de défendre la Suisse jusqu’ à la mort. Eh bien, il serait fou de mourir pour une Suisse dont nous n
468 ns de vivre. Notre serment nous engage donc aussi à prendre une conscience sérieuse des raisons de vivre de la Suisse, et
469 onc pas trop si je consacre mes premiers articles à la « critique », pour ne pas dire au dégonflage de ces clichés. Ce n’
470 mpliquait une suite, une partie “positive”. C’est à cette demande que veut bien répondre notre collaborateur. »
23 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. II : Sommes-nous libres ? (2 mars 1940)
471 ssaim de petits tyrans. À présent, ils continuent à répéter le vieux conte. On les entend dire, jusqu’à satiété, qu’ils s
472 répéter le vieux conte. On les entend dire, jusqu’ à satiété, qu’ils se sont affranchis un jour et qu’ils sont demeurés li
473 ? Sommes-nous bien certains, enfin, qu’il a suffi à nos pères de s’affranchir un jour pour que nous ayons le droit de rép
474 r un jour pour que nous ayons le droit de répéter à tout jamais : nous sommes libres ! Ayons le courage de le reconnaître
475 é ». Ils jugent suspect tout ce qui ne rentre pas à première vue dans des catégories moyennes et bien connues, telles que
476 passion maladive pour les choses « simples » tend à supprimer pratiquement toute possibilité de jugement libre, toute vér
477 eut tout faire rentrer dans le rang. Il persécute à petits coups d’épingles tout ce qui « paraît » vouloir se distinguer.
478 bien plus simple, et plus facile de tout ramener à des mesures médiocres et uniformes. C’est bien plus simple et plus fa
479 a politique. Un mot encore, pendant que j’en suis à ronchonner. (La prochaine fois, nous parlerons d’une manière « positi
24 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. III : Pourquoi nous devons rester neutres (9 mars 1940)
480 us, dans cette guerre-ci, aux yeux de l’Europe et à nos propres yeux, notre situation privilégiée de neutres ? Il semble
481 ues années, nous avons renoncé, et c’est heureux, à regarder notre neutralité comme une chose qui irait de soi, qui aurai
482 ’instinct normal de tout homme le pousse toujours à prendre parti ; et qu’enfin nous devons la justifier, sous peine de p
483 e situation géographique centrale nous exposerait à de trop grands dangers en cas de guerre, enfin, parce que notre diver
484 dislocation de notre fédération, si nous venions à prendre parti. Notons que cet argument de la nécessité n’est guère va
485 r ! La Confédération reste fondée sur la fidélité à la parole jurée, le nom l’indique, et surtout en allemand : Eid-Genos
486 n, l’on donne parfois une justification militaire à notre neutralité : il serait de l’intérêt des puissances belligérante
487 ite d’équilibre stratégique peut tomber d’un jour à l’autre. Et la preuve que nous ne la prenons pas au sérieux, c’est qu
488 rd’hui, nous sommes unanimes… Que reste-t-il donc à répondre à ceux qui nous demanderaient d’entrer en guerre ? Ni l’argu
489 s sommes unanimes… Que reste-t-il donc à répondre à ceux qui nous demanderaient d’entrer en guerre ? Ni l’argument des ré
490 juristes, ni celui des stratèges, ne suffiraient à justifier notre refus de « payer notre part ». Je ne dis pas que ces
491 s et un poids aux arguments que nous jugions tout à l’heure insuffisants. Notre position géographique, par exemple, est u
492 ple, est un péril certain si l’on ne s’attache qu’ à l’aspect matériel des choses. Mais elle devient un avantage dès qu’on
493 n Europe. Rester neutres au nom d’un traité signé à Vienne il y a plus de cent ans, soit ! Mais il ne faudrait pas reteni
494 privilège, et même le privilège était subordonné à la charge ; il n’avait d’autre but que d’en faciliter l’exercice. C’e
495 u sol oblige, liberté oblige, neutralité oblige ! À quoi ? C’est ce que je préciserai dans un dernier article, sur la voc
25 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. IV : Notre « mission spéciale » (16 mars 1940)
496 , ou mieux encore, sa vocation. C’est très facile à dire en quelques mots. La vocation actuelle et historique de la Suiss
497 e de la paix que nous espérons. C’est très facile à dire, et ce n’est pas très neuf, en apparence. Mais dès qu’on veut pr
498 isse ait vraiment le droit de s’offrir en exemple à l’Europe, sur le plan du fédéralisme. Ces deux aspects de notre vocat
499 -à-vis de l’Europe, nombreux sont ceux qui crient à l’utopie. Beaucoup de gens s’imaginent que les petites raisons sont p
500 là se trompent lourdement, et aujourd’hui plus qu’ à toute autre époque. Car il est clair que la guerre actuelle est une g
501 té, ce sont les faits eux-mêmes qui nous invitent à prendre une attitude active vis-à-vis de l’Europe. Ce sont les faits
502 s sommes, si je puis dire, pratiquement condamnés à l’idéalisme. Mais beaucoup de bons Suisses ne le voient pas de leurs
503 d’en être les porteurs. Travaillons tout d’abord à la défendre, c’est-à-dire à la faire connaître autour de nous et en d
504 vaillons tout d’abord à la défendre, c’est-à-dire à la faire connaître autour de nous et en dehors de nos frontières. Si
505 e cas échéant. Car tout revient, dans ce domaine, à une question d’état d’esprit et de préparation morale. Ce qu’il s’agi
506 est une disposition du sentiment public favorable à des entreprises éventuelles, qu’il serait imprudent de préciser trop
507 me, c’est plutôt une mise de piquet. Soyons prêts à répondre à tout appel, même balbutiant, qui se ferait entendre. Prépa
508 lutôt une mise de piquet. Soyons prêts à répondre à tout appel, même balbutiant, qui se ferait entendre. Préparons-nous à
509 albutiant, qui se ferait entendre. Préparons-nous à dire très haut, dès que l’occasion s’en montrera, ce que nous aurons
510 que l’occasion s’en montrera, ce que nous aurons à dire à nos voisins, forts que nous sommes d’une expérience fédéralist
511 occasion s’en montrera, ce que nous aurons à dire à nos voisins, forts que nous sommes d’une expérience fédéraliste de si
512 ites. Travaillons aussi, c’est le deuxième point, à illustrer notre fédéralisme, c’est-à-dire à le mieux réaliser, d’une
513 oint, à illustrer notre fédéralisme, c’est-à-dire à le mieux réaliser, d’une manière qui le rende exemplaire, au sens lit
514 ’est sur ce plan décisif qu’il nous reste le plus à faire. Il nous reste, par exemple, à découvrir toute notre histoire,
515 este le plus à faire. Il nous reste, par exemple, à découvrir toute notre histoire, ou nos histoires diverses, si curieus
516 gurées et affadies par les manuels. Il nous reste à connaître beaucoup mieux nos confédérés suisses allemands, qui savent
517 e nous ce qu’est la Suisse. Il nous reste surtout à développer en profondeur ce que j’appellerai le sens fédéraliste inti
518 e droit de différer de nous ; le comprendre jusqu’ à la limite du possible comme il se comprend lui-même ; ne point recher
519 nous apprendrons à voir plus grand, et par suite à penser plus librement, avec plus de générosité. Alors nous serons en
520 nous serons plus conscients de ce que nous avons à donner, nous serons mieux armés pour défendre la Suisse où Dieu nous
521 x armés pour défendre la Suisse où Dieu nous veut à son service. ag. Rougemont Denis de, « La Suisse que nous devons d
26 1940, Articles divers (1938-1940). Le petit nuage (avril 1940)
522 es uniformes pour les aérer. Secundo, j’ai envoyé à un certain nombre de mes amis la phrase suivante : « Au plus fort de
523 avec ! » Selon l’humeur du jour, je donne raison à l’une ou à l’autre de ces lettres6. Pas d’importance. Ce qui est impo
524 elon l’humeur du jour, je donne raison à l’une ou à l’autre de ces lettres6. Pas d’importance. Ce qui est important, c’es
525 brumes qu’un léger vent d’avant-printemps suffit à dissiper en cinq minutes ? Qu’est-ce que cela au regard de la menace
526 ope d’aujourd’hui ? Eh bien, cette menace énorme, à son tour, n’est qu’un tout petit nuage, au regard du Règlement des co
527 les temps. Karl Barth nous le disait l’autre jour à Tavannes : comme chrétiens, nous n’avons à redouter que le Prince de
528 e jour à Tavannes : comme chrétiens, nous n’avons à redouter que le Prince de tous les démons, et non pas tel ou tel démo
529 pas tel ou tel démon qu’il nous délègue de temps à autre. Le combat que nous devrons peut-être engager militairement con
530 ionner (la scène se passe en 1935) et il s’attend à être abattu par l’un de ces anciens amis. Réfugié dans un hôtel chrét
531 de son pays. « Dans mon désespoir, j’eus recours à l’Évangile qu’on trouve sur toutes les tables de nuit de ces hospices
532 nt après cette guerre, j’espère que j’aurai mieux à faire qu’à me rasseoir à la terrasse des Deux Magots. ah. Rougemont
533 tte guerre, j’espère que j’aurai mieux à faire qu’ à me rasseoir à la terrasse des Deux Magots. ah. Rougemont Denis de,
534 espère que j’aurai mieux à faire qu’à me rasseoir à la terrasse des Deux Magots. ah. Rougemont Denis de, « Le petit nua
27 1940, Articles divers (1938-1940). D’un journal d’attente (pages démodées) (avril 1940)
535 s instantanés révélateurs. Pour moi, j’ai renoncé à me chercher, à me vérifier curieusement. Mon vrai désir serait de me
536 évélateurs. Pour moi, j’ai renoncé à me chercher, à me vérifier curieusement. Mon vrai désir serait de me donner, à peu p
537 sois, l’on verra bien ce que cela peut « donner » à l’usage. C’est faute d’usage et d’occasion, faute d’une action vraime
538 et fascinant. Chaque œuvre veut et crée son temps à soi, dans la vie de l’auteur qu’elle choisit. Mais aujourd’hui, je ne
539 . Désorganisent la méditation. Et me contraignent à n’écrire que des fragments. Le « journaliste » est l’homme sans lende
540 , dit-on, d’évacuer une île dont il s’est emparé, à condition qu’on lui donne en échange quelque autre territoire ou colo
541 n merveilleux jardin, dans un vallon bien abrité, à la terre ocrée, sous les pins. Pendant que nous choisissons ensemble
542 i semé et taillé comme chaque année. Ils n’ont qu’ à faire la guerre pour leurs histoires ! Moi je sais ce que c’est, je l
543 sieur Turc a semé, mais moi, je n’arrive même pas à défricher le champ d’un gros ouvrage projeté. Toute œuvre humaine, to
544 est maintenue que chez les écrivains savants qui, à force d’ascèse intellectuelle et de raffinements affectifs, ont su ca
545 vie des autres ! On voudrait parfois être riche, à seule fin de maintenir certaines distances, — celles-là mêmes que, da
546 tie dépend de la solution qui sera donnée en fait à ce problème, au cours des mois ou des années qui viennent. Paris, 21
547 anche dans un train bondé. Une journée de reprise à Paris. Et ce soir, me voici [venu] assister à un débat, dans un cercl
548 ise à Paris. Et ce soir, me voici [venu] assister à un débat, dans un cercle privé, sur la politique commerciale de la Fr
549 u vendu) se voit assimilé par le langage lui-même à un objet matériel indifférencié. À peine ai-je noté ceci, qu’un des e
550 À peine ai-je noté ceci, qu’un des experts se met à parler de la « personnalité » d’un produit commercial et de son « pre
551 et de son « prestige ». Curieuse dramatisation ! À mesure que les hommes perdent leur personnalité, c’est la matière qui
552 e. Découragé, désabusé, mais en même temps décidé à « reconsidérer » le monde sous des aspects plus réalistes, selon l’ur
553 sera temps d’y penser. » C’est qu’il ne croit pas à la guerre. Un second : « Comment penser à autre chose qu’à cette mena
554 oit pas à la guerre. Un second : « Comment penser à autre chose qu’à cette menace ? Faire l’autruche ne l’écarte pas, bie
555 re. Un second : « Comment penser à autre chose qu’ à cette menace ? Faire l’autruche ne l’écarte pas, bien au contraire. L
556 e laisser surprendre. » C’est qu’il ne croit plus à la paix. Tous les deux ont de bonnes raisons. Car il est vrai que la
557 t — et même s’échangent — que le premier se mette à lire la presse du soir, et le second celle du matin ? 29 avril 1939 C
558 ges de Café du Commerce — généraux qui n’ont rien à commander —, il est des « résistants » qui n’ont rien à sauver, et qu
559 ander —, il est des « résistants » qui n’ont rien à sauver, et qui ne s’en montrent que plus « durs ». Cet excité croit-i
560 t que plus « durs ». Cet excité croit-il vraiment à ses idées ? — Je pense bien, me dit-on. Il n’hésiterait pas à faire t
561 ? — Je pense bien, me dit-on. Il n’hésiterait pas à faire tuer pour elles ses meilleurs amis. (On entend : les Français q
562 a France aime tant la Paix qu’elle n’a pas hésité à sacrifier sur son autel un peuple ami. (Il entendait : son peuple tch
563 rendre parti entre ces deux ardeurs montées jusqu’ à la haine ? En Suisse, 2 mai 1939 Combien oseraient avouer que cette m
564 giés qui n’éprouvent de désir pour leurs biens qu’ à la veille de les perdre. Déshérités aussi, qui ne retrouvent l’espoir
565 hes générales. Et j’en connais qui ne parviennent à leur régime normal de vie (comme un moteur prend son régime à tant à
566 e normal de vie (comme un moteur prend son régime à tant à l’heure) que dans le drame et le bouleversement des habitudes
567 l de vie (comme un moteur prend son régime à tant à l’heure) que dans le drame et le bouleversement des habitudes où l’én
568 t si profond, peut-être si normal, que j’en viens à me demander si toutes nos crises ne seraient pas machinées par nous-m
569 out seuls devant leur papier blanc. Les réactions à leur parole seront lointaines, ou même ils ne les connaîtront jamais…
570 ie de l’individu, qui se voit concrètement réduit à sa juste et minime importance. Paris, 12 mai 1939 Quatrième changemen
571 adisme involontaire. Aujourd’hui, je songe plutôt à quelque état de mobilisation permanente, préventive… Militarisation d
572 r la Concorde : « Et moi qui ai oublié mon masque à gaz ! C’était pourtant l’heure H ! » 14 mai 1939 La grande ville trav
573 impossibles ailleurs de nos jours, et, peut-être, à toute autre époque. Imaginer là-dessus un livre vrai, un livre où tou
574 sset. Il y a trois semaines, nous étions ensemble à Orléans, pour la représentation de la Jeanne d’Arc de Claudel et Hone
575 ôle du récitant dans la Perséphone de Stravinsky, à Florence. Ortega spirituel et sérieux, parlant sur le même ton du gra
576 , d’Autriche, de Roumanie : la plupart vont venir à Paris ou s’y trouvent déjà. Impression soudaine, émouvante, d’une soc
577 digieuse gerbe de roses rouges que V. O. envoyait à ma femme. Plantée au milieu du studio, dans un gros pot de grès, elle
578 ur tous, c’est ce qui rend sa perte insupportable à qui croyait le posséder. Nos haines… Pourquoi la haine, par exemple,
579 lles disposent sur la banquette de velours grenat à côté du représentant calamistré d’une marque d’auto. Et ces rires, ce
580 cette beauté sensible au-dessus de toutes choses, à l’intérieur bientôt de toutes choses, oui, seules les apparences étai
581 apparences étaient vulgaires ! Au-dessus d’elles, à l’intérieur aussi, se fait entendre maintenant le chant profond et co
582 té par ses victimes, les philistins. 10 juin 1939 À Saint-Germain-des-Prés, le printemps parisien, ce soir, tourne à l’ét
583 -des-Prés, le printemps parisien, ce soir, tourne à l’été. La lumière mûrit là-haut, sur le clocher roman de cette église
584 ieusement demeurée, malgré la ville environnante, à la campagne… Je suis seul et je pense à un bonheur promis, ce revoir
585 ronnante, à la campagne… Je suis seul et je pense à un bonheur promis, ce revoir qui est pour demain. Et voici que soudai
586 r qui est pour demain. Et voici que soudain, un «  à venir » m’est rendu, un rythme heureux du temps, pour vingt-quatre he
587 urrait rythmer toute la durée de notre vie, jusqu’ à la mort, — sinon l’espoir d’un rendez-vous au-delà du monde, et l’ent
588 lorieux pour disqualifier nos soucis, tout serait à chaque instant libre et allègre, ouvert sur la seule grande Attente…
589 e et allègre, ouvert sur la seule grande Attente… À l’œuvre donc, advienne que pourra ! Que l’été nous apporte — c’est pr
590 de mer des dictateurs, je mets ici un point final à ce journal de petite attente. Il faut juger notre vie par sa Fin, pou
28 1940, Articles divers (1938-1940). L’heure sévère (juin 1940)
591 de leurs nerfs. Sans intérêt. Ce qu’il nous faut à l’heure que nous vivons, ce sont des pessimistes réfléchis maîtres d’
592 pondions : « C’est trop affreux pour être vrai. » À certain document que je ne puis nommer, d’une atterrante précision, n
593 u ciel en parachute pour jouer l’ange protecteur. À l’origine de notre aveuglement, il y a notre incrédulité. Si Dieu exi
594 t en train de payer le prix d’un siècle d’abandon à l’optimisme du Progrès. Pendant un siècle, elle fit la sourde oreille
595 ndu, quand certains lui posaient cette question : à quoi tend le progrès matériel ? Question stupide et irritante, n’est-
596 augmentation du confort. Il refuse de se demander à quoi servira cet argent ou si le confort matériel favorise un bien sp
597 i le confort matériel favorise un bien spirituel. À la première de ces questions, il n’oserait pas répondre en toute fran
598 il n’oserait pas répondre en toute franchise ; et à la seconde, il pressent bien qu’on ne pourrait que répondre non. D’où
599 s grands hommes du dernier siècle furent unanimes à prévoir le destin qui maintenant nous surprend. Nous avons eu bien as
600 e » de leur temps, et dans la prédiction des maux à venir — ceux qui fondent sur nous aujourd’hui. Quoi de commun entre u
601 cessairement sur l’Occident, si celui-ci persiste à ne prendre au sérieux que les valeurs de bourse et la « prosperity ».
602 erribles simplificateurs », qui viendront imposer à l’Europe d’impitoyables dictatures militaires au nom de la liberté et
603 à condamnés, de la manière la plus tragi-comique, à sacrifier notre prospérité, notre confort et nos progrès aux nécessit
604 mes de nations, nous voici contraints brutalement à des sacrifices mille fois pires, inévitables et stériles. Le plus étr
605 fraction minime aurait suffi, en d’autres temps, à supprimer toutes les questions sociales. Et cela non pas seulement en
606 social, mais sur le plan des relations de peuple à peuple. Tout ce que nous jugions impossible quand il s’agissait du mi
607 un dépassement de nos égoïsmes que nous refusions à l’amour, pourquoi donc voulez-vous que nous ayons l’amour, et la paix
608 s sommes payés et nous payons selon notre justice à nous. C’est aujourd’hui qu’on en mesure l’aune. Ces vérités élémentai
609 ertains diront encore qu’elles sont inopportunes, à l’heure où nous cherchons des raisons d’espérer. Mais nul espoir n’es
610 ité de rebâtir. Mais on n’accorde un concordat qu’ à celui qui se déclare en faillite. L’aveu suppose un sens des valeurs
611 des chiffres, des quantités et des vitesses. Avis à la génération sportive, aux réalistes qui l’engendrèrent, aux libérau
612 . Avis aux Suisses. Les Suisses ont quelque chose à faire, quelque chose de précis, que je veux dire à temps. Ils sont en
613 faire, quelque chose de précis, que je veux dire à temps. Ils sont encore à l’écart de la guerre, et peut-être y restero
614 précis, que je veux dire à temps. Ils sont encore à l’écart de la guerre, et peut-être y resteront-ils. Ils ont encore ce
615 était logique, inévitable, et qu’il n’y a plus qu’ à en tirer les conclusions9. Mais nous ne sommes pas neutres pour rien,
616 ements : tout cela ne sera que ruines et détritus à déblayer, même si les grandes démocraties ont la victoire. Non pas le
617 éternel, y a l’amour et l’espérance de l’éternel. À quoi se raccrocher, que faire encore ? Quelle était l’assurance d’éte
618 uelle était l’assurance d’éternité qui permettait à Athanase de dire : c’est un petit nuage, il passera ? La grandeur de
619 utalité démesurée des choses, nous sommes réduits à ne plus espérer qu’au nom de l’unique nécessaire : « L’amour parfait
29 1940, Articles divers (1938-1940). Au peuple suisse ! (22 juillet 1940)
620 e la révolution européenne, la Suisse est réduite à elle-même. Elle n’a pas d’autre garantie humaine que son armée, pas d
621 res et de nos grands renouvellements. Nous savons à quelles conditions nos ancêtres ont pu surmonter les crises qui menaç
622 rant capables de créer, eux aussi, un ordre neuf, à leur manière et selon leur foi chrétienne. Aujourd’hui, comme aux heu
623 oyaient adversaires, découvrent qu’ils sont prêts à travailler ensemble, pour défendre la Suisse et pour la rénover. Ils
624 e tous les points de l’horizon politique, fidèles à nos amitiés, mais décidés à faire converger nos efforts, nous fondons
625 on politique, fidèles à nos amitiés, mais décidés à faire converger nos efforts, nous fondons la   Ligue du Gothard   B
626 qui viennent d’être démobilisés et qui sont prêts à faire du neuf, que tous les aînés qui voient clair, que tous les jeun
30 1940, Articles divers (1938-1940). Autocritique de la Suisse (août 1940)
627 itique de la Suisse (août 1940)am an Nul pays, à ma connaissance, n’a été plus souvent expliqué à lui-même et au monde
628 à ma connaissance, n’a été plus souvent expliqué à lui-même et au monde que la Suisse. C’est qu’il en a besoin plus que
629 ès vivante d’une autre espèce d’union, sans cesse à recréer. Or l’inertie des masses et l’à peu près intellectuel s’oppos
630 t l’à peu près intellectuel s’opposent sans cesse à cette reprise de conscience. D’où la nécessité d’une vigilante autocr
631 ’union centrale auraient peut-être plus de droits à revendiquer le nom de fédéralistes, dans son sens étymologique. (fœdu
632 rne. Il en résulte que leur fédéralisme se résume à combattre tout ce qui est dit fédéral. Comprenne qui pourra ! Cette c
633 nfusion verbale, symbolique de tant d’autres, est à la base de la plupart de nos conflits politiques, économiques, parlem
634 aliste ou la maladie collectiviste de notre État. À quand le parti de la santé fédéraliste ? Il ne sera ni de gauche ni d
635 sont que des socialistes qui s’ignorent ; ceux-ci à leur tour ne sont que des totalitaires timorés, c’est-à-dire quelque
636 ns suisse que notre Parlement, importé d’Amérique à une époque récente, et plus ou moins contaminé par les mœurs politiqu
637 alitaire et unifié, qui voudrait bien tout régler à sa guise, et qui se condamne, ridiculement, à avoir des idées sur tou
638 ler à sa guise, et qui se condamne, ridiculement, à avoir des idées sur tout. Les seuls partis qu’une fédération puisse t
639 qu’une fédération puisse tolérer sont les partis à programme restreint, représentant une région, ou un groupe d’activité
640 et tout absorber. Il serait temps de se remettre à la Diète ! 3. Suite du précédent. — Comment peut-on se dire encore « 
641 pas d’un demi-ton, nos philofascistes continuent à reprocher à nos socialistes un étatisme qui, en réalité, fait partie
642 mi-ton, nos philofascistes continuent à reprocher à nos socialistes un étatisme qui, en réalité, fait partie de tout prog
643 out programme fasciste ; nos marxistes continuent à se croire libertaires, etc. Seuls nos staliniens ont cessé de dénonce
644 par expérience : rien n’oblige un bureau de Berne à faire du centralisme à coups de décrets rigides ; rien ne l’empêche d
645 ’oblige un bureau de Berne à faire du centralisme à coups de décrets rigides ; rien ne l’empêche de respecter nos précieu
646 pecter nos précieuses diversités, et de se mettre à leur service, comme il se doit. Prévoir des exceptions, tenir compte
647 rt des bureaux font tout le contraire, cela tient à la paresse d’esprit des messieurs qui en occupent les fauteuils. Les
648 es donc plus : « Nous sommes opposés par principe à tout ce qui vient de Berne — sauf les crédits. » Mais dites : « Nous
649 les : Je vois dans le budget d’une œuvre destinée à soutenir telle branche de l’activité intellectuelle que les deux tier
650 ctuelle que les deux tiers des ressources passent à l’administration et aux salaires fixes, tandis que moins d’un tiers e
651 t de littérature consacrer des milliers de francs à sa « présentation » matérielle, et zéro franc à payer ses collaborate
652 s à sa « présentation » matérielle, et zéro franc à payer ses collaborateurs. Si l’un d’entre eux s’étonne, on lui répond
653 norité dans une vie fédérale saine : elle a droit à de plus grands égards, relativement, que la majorité. C’est ainsi que
654 onformistes ne l’oublient pas ! 8. Intolérance. — À mon avis, un fédéralisme sain doit se montrer radicalement intolérant
655 la presse — par qui de droit — et qui consistent à ménager non seulement la chèvre et le chou, ce qui est humain, mais e
656 déjà compromise ? 10. Poésie et prose. — Revenons à la géographie ! dit ce poète. Et de nous décrire une Suisse héroïque
657 °. » Il s’agissait sans doute d’inciter le public à des économies de charbon. On nous recommandait la tiédeur… Mais voici
658 nt, d’un conflit que nous jugeons mauvais. (Reste à savoir si le conflit actuel est « mauvais ». Puis, si notre tiédeur s
659 qui n’ont de sens que par rapport à sa Personne, à son Royaume, à son Éternité. Répéter que les tièdes seront vomis, en
660 ens que par rapport à sa Personne, à son Royaume, à son Éternité. Répéter que les tièdes seront vomis, en détournant ce v
661 e « neutralité éternelle », et l’on va même jusqu’ à nous affirmer que cette « éternité » est la base officielle de notre
662 ternité » d’une décision humaine ? Apprenons donc à qui de droit que nul État humain n’est éternel ; que la Suisse est un
663 tique. De plus, la Suisse n’est devenue neutre qu’ à partir d’un certain moment de son histoire. Or ce qui est éternel ne
664 n histoire. Or ce qui est éternel ne commence pas à un certain moment, en 1648 ou en 1815 par exemple. Tout ce qui commen
665 1648 ou en 1815 par exemple. Tout ce qui commence à un certain moment, dans l’histoire, cessera aussi nécessairement à un
666 nt, dans l’histoire, cessera aussi nécessairement à un autre moment. On peut le nier parfois dans un élan de passion. Mai
667 clarèrent que leur alliance devait, s’il plaisait à Dieu, durer « éternellement ». C’était une manière d’affirmer qu’ils
668 paix « pour vingt-cinq ans » que faisait naguère à ses voisins un homme dont Anastasie m’a fait oublier le nom.) De même
669  ?) Mais toute politique digne de ce nom consiste à prévoir même le pire, et même la réalisation prochaine de nos plus lo
670 la devise humoristique du Méridional : « Toujours à gauche, mais pas plus loin. » Pourquoi est-ce comique ? Parce que l’h
671 ive, si légitime qu’elle soit, c’est se condamner à être sans cesse dépassé et ridiculisé par les faits. 14. Neutralité «
672 é politique et militaire. Ils nous obligent aussi à la défendre intégralement. Mais ils ne nous imposent nullement une ne
673 é certaine limite, c’est tout simplement renoncer à une belle part de notre indépendance. C’est renoncer à nous défendre
674 belle part de notre indépendance. C’est renoncer à nous défendre intégralement. Et c’est enfin céder sur un point décisi
675 erres de propagande. Quand une troupe est réduite à l’impuissance par l’adversaire, on ne dit pas qu’elle est neutre, on
676 ai patriote suisse ne dit pas : « Plutôt renoncer à ma liberté d’opinion que de risquer des ennuis avec une légation. » I
677 l’esclavage. »12 15. Diplomatie. — Ne cédons pas à la tentation des basses époques : confondre le réalisme avec la médio
678 politique, mais qu’elle peut au contraire servir à tout lorsqu’on l’y force — et en particulier à dominer les masses13.
679 ir à tout lorsqu’on l’y force — et en particulier à dominer les masses13. Il est temps que la Suisse comprenne que le sou
680 i de son économie ne saurait plus servir d’excuse à l’absence de vues politiques. On demande à un gouvernement de « gouve
681 excuse à l’absence de vues politiques. On demande à un gouvernement de « gouverner14 », de piloter l’État et d’orienter s
682 de la chose européenne, qui nous représenteraient à l’étranger — officiellement ou non — avec combien plus d’efficacité q
683 listes formés par les bureaux de Berne, et rompus à toutes les prudences « fédérales ». Sur le plan diplomatique européen
684 ne veut pas dire que nous devons préférer la mort à l’interdiction de proclamer des sottises. Je m’excuse de tant de lour
685 re, elle accomplit un acte de décence. » 13. Cf. à ce sujet les vues très exactes du grand théoricien de l’État totalita
686 rôle dans la communauté ; et tous ils s’adressent à des Suisses. Par une série de cercles concentriques, ils s’efforcent
687 ope d’aujourd’hui.” Ce livre, qui tend avant tout à nous faire rentrer en nous-mêmes, est une œuvre forte, un appel viril
688 n nous-mêmes, est une œuvre forte, un appel viril à la réflexion, un avertissement grave et clairvoyant quant à l’avenir.
689 mmes donc particulièrement heureux d’en présenter à nos lecteurs, à titre de spécimen, le dernier chapitre : “Autocritiqu
690 ntifs (car nous nous sentons pressés de le faire) à la valeur capitale de cet ouvrage, qui a paru aux Éditions de la Baco
31 1940, Articles divers (1938-1940). Henri le Vert ou l’âme alémanique (1940)
691 mière découverte de l’atmosphère suisse allemande à un cours de répétition. Nous faisions des manœuvres dans la campagne
692 confort moderne et le confort paysan se mariaient à l’ombre des installant pour quelques heures le confort moderne et le
693 s premiers loisirs de militaire ont été consacrés à la lecture du grand roman de Gottfried Keller intitulé Henri le Vert,
694 Keller intitulé Henri le Vert, c’est que je dois à cette œuvre célèbre ma seconde découverte de l’âme alémanique. Il est
695 lu chez nous, si mal connu, et qu’il n’en existe à cette heure qu’une seule et unique édition. Car ce n’est pas seulemen
696 allemand. Courez demain matin chez un libraire ou à la bibliothèque la plus proche, et demandez la traduction de ce gros
697 dis que la Providence nous veut vraiment du bien, à nous les Suisses, puisqu’elle nous a permis de réunir des qualités et
698 e d’un peu précautionneux ou de timide, se trouve à merveille compensé par la confiance plus naïve en la vie que manifest
699  ! Et quand une même appartenance politique vient à s’épanouir dans l’amitié commune, alors un peuple atteint ce qu’il y
32 1940, Articles divers (1938-1940). L’heure de la Suisse (1er août 1940)
700 uilibre vient d’être rompu. La Suisse est réduite à elle-même. Quels que soient les sentiments que nourrissent à son égar
701 . Quels que soient les sentiments que nourrissent à son égard ses voisins, elle se voit menacée dans son autonomie par la
702 de nous-mêmes et de nos préjugés, il nous oblige à mesurer nos forces vraies, il nous permet de nous unir mieux que jama
703 un sens communautaire qui doit rester en exemple à l’Europe. C’est l’esprit de liberté des communes du Gothard (nous dir
704 e de quelques-uns pour tous qui a sauvé la Suisse à Saint-Jacques sur la Birse, malgré l’anéantissement total de nos trou
705 u Nidwald avaient été les seuls de toute l’Europe à l’impressionner par leur résistance ; et après une tentative manquée
706 nce ; et après une tentative manquée pour imposer à la Suisse un statut contraire à ses traditions, il déclara : « La nat
707 quée pour imposer à la Suisse un statut contraire à ses traditions, il déclara : « La nature a fait votre État fédératif.
708 naces actuelles nous réveillent, et nous ramènent à notre loi normale ; la loi du risque et de l’effort tenace. Ces menac
709 qui ont oublié comment la Suisse s’est faite, et à quel prix elle s’est toujours maintenue. Mais on ne se défend bien qu
710 nt. On ne maintient un héritage qu’en travaillant à l’enrichir. Ainsi la Suisse ne survivra aux révolutions actuelles que
711 vivra aux révolutions actuelles que si elle croit à son avenir, à sa mission — qui seule la rend indispensable aux autres
712 lutions actuelles que si elle croit à son avenir, à sa mission — qui seule la rend indispensable aux autres peuples de l’
713 des grandes démocraties « ploutocratiques » — est à certains égards une survivance, au milieu de l’Europe totalitaire. No
714 avec elle-même et tolérante ! Sachons nous élever à la hauteur de l’idéal forgé par notre histoire. Rendons la Suisse dig
715 d’abord un but commun. Il faut ensuite sacrifier à ce but ses intérêts particuliers, ses préjugés, et son confort. C’est
716 u contraire en prenant les devants pour le forcer à se décider. Donnons au monde un grand exemple de solidarité pratique 
717 ximum. Prenons un cas concret : Si nous parvenons à supprimer le chômage dans le cadre des entreprises existantes, ou par
718 nce, une proie facile pour certaines propagandes. À l’inverse, chaque occasion de travail créée comblera une lacune dans
719 ire, si cela peut permettre de donner de l’emploi à beaucoup de leurs camarades : il y va de la liberté future des travai
720 t au salut du pays. Mais ceux qui s’obstineraient à accuser « les autres » de tout le mal qui se fait dans le monde, trav
721 fait dans le monde, travailleraient au contraire à notre perte à tous. Ces remarques sont simples et utilisables. Elles
722 monde, travailleraient au contraire à notre perte à tous. Ces remarques sont simples et utilisables. Elles ne sont pas or
33 1940, Articles divers (1938-1940). Un fondateur de la Ligue du Gothard part pour quatre mois aux États-Unis : M. Denis de Rougemont nous dit… (23 août 1940)
723 n idée et celle de mon ami Spoerri, de Zurich, et à laquelle je tiens. Elle suit d’ailleurs son chemin malgré les torrent
724 s pouvez être assuré qu’elle n’a enregistré jusqu’ à ce jour aucune défection, en dépit de ce qu’on a dit. D’ailleurs, je
725 usqu’à présent un jeu déplaisant… ; cela équivaut à dire que la moitié des citoyens suisses ne s’intéressaient pas aux af
726 -dire dans sa partition réduite pour un récitant, à l’Exposition de New York. Ce voyage, on le voit, est sérieusement mot
727 nombreuses lettres de citoyens qui s’intéressent à elles et à ses desseins. Nous le croyons volontiers et l’attendons à
728 lettres de citoyens qui s’intéressent à elles et à ses desseins. Nous le croyons volontiers et l’attendons à l’œuvre tou
729 sseins. Nous le croyons volontiers et l’attendons à l’œuvre tout d’abord sur le terrain cantonal, en bonne fédéraliste qu
34 1940, Articles divers (1938-1940). La Ligue du Gothard : raisons d’espérer (13 septembre 1940)
730 va paraître sur la Ligue. Il faut faire confiance à des hommes jeunes et qui forment une équipe. Passons sur le passé. No
731 rs éléments les plus vivants, et nous travaillons à la réconciliation des syndicats et des corporations, pour préparer pa
732 sation professionnelle qui est la première mesure à prendre, si l’on veut sauver le pays. Oui, certes, plusieurs d’entre
733 i tout d’abord l’opinion de M. Denis de Rougemont à qui nous avions exprimé notre étonnement. Par une brève lettre datée