1 1938, Articles divers (1938-1940). Le seul espoir (juin 1938)
1 ial de la revue Esprit dont le retentissement a été grand). Enfin M. Motta lui-même l’a définie en quelques phrases lapid
2 ans le système des communications européennes. Il est probable que le Gothard ne jouera plus jamais le rôle unique et décis
3 lique de la mission confédérale se dégage et doit être dégagé avec une évidence, une force, une conviction profondément reno
4 nstitutions fondées sur elle. ⁂ La personne, ce n’ est pas l’individu enfermé dans ses droits égoïstes. Mais ce n’est pas no
5 ividu enfermé dans ses droits égoïstes. Mais ce n’ est pas non plus le « soldat politique » qui n’a plus en lui-même de prin
6 lus en lui-même de principe d’existence, et qui n’ est rien qu’un rouage de l’État. Enfin la personne n’est plus une simple
7 rien qu’un rouage de l’État. Enfin la personne n’ est plus une simple idée. C’est la réalité paradoxale et dynamique de l’h
8 mocraties méritent encore de porter ce nom, et ne sont pas de simples oligarchies de financiers et de démagogues. Tout ce qu
9 ies de financiers et de démagogues. Tout ce qui s’ est fait de réel et de valable en Occident fut l’œuvre de ces hommes doub
10 qui s’est fait de réel et de valable en Occident fut l’œuvre de ces hommes doublement responsables devant leur foi et deva
11 leurs prochains. Cette attitude « personnaliste » est la vraie tradition de l’Europe, la voie royale de sa culture, le foye
12 de sa culture, le foyer de son rayonnement. Ce n’ est pas, comme certains veulent le croire, un moyen terme entre anarchie
13 ouve que la devise antique de notre Confédération est précisément la devise du personnalisme véritable, l’affirmation indiv
14 n’a pas d’autre rôle ni d’autre vocation. Elle n’ est pas elle-même une nation, mais elle est davantage que cela : elle est
15 n. Elle n’est pas elle-même une nation, mais elle est davantage que cela : elle est le lieu et la formule du génie propre d
16 e nation, mais elle est davantage que cela : elle est le lieu et la formule du génie propre de l’Europe. Et voilà pourquoi
17 génie propre de l’Europe. Et voilà pourquoi nous sommes neutres. ⁂ En aucune heure de notre histoire, nous n’avons éprouvé un
18 reprendre pleine conscience de cette mission qui est notre raison d’être. À la période de déviation dans le sens individua
19 onscience de cette mission qui est notre raison d’ être . À la période de déviation dans le sens individualiste que représente
20 derniers siècles, succède depuis la guerre — qui fut une guerre des masses — une ère de déviation dans le sens collectivis
21 n. Elle tend à nier l’existence de tout ce qui ne serait pas une grande nation monolithique, fondée sur l’unité — toute théori
22 remier lieu sa garde neutre. L’esprit totalitaire est une puissante négation du seul principe qui tienne rassemblés nos can
23 e est une puissante négation du seul principe qui tienne rassemblés nos cantons, et de l’idéal commun qui nous a fédérés. Jama
24 il. Jamais la conscience impérieuse des raisons d’ être de la Suisse n’a été, comme elle l’est aujourd’hui, une condition vit
25 ce impérieuse des raisons d’être de la Suisse n’a été , comme elle l’est aujourd’hui, une condition vitale de notre existenc
26 raisons d’être de la Suisse n’a été, comme elle l’ est aujourd’hui, une condition vitale de notre existence même. ⁂ Je vois
27 vé trois au début de cet article, bien minimes il est vrai, mais assez nets et assez neufs. Il y en a d’autres, très typiqu
28 dhérents : on revient au fédéralisme tel que nous sommes chargés de le défendre, et qui s’oppose autant au particularisme étro
29 . Mais le plus gros effort s’esquisse à peine. Ce sera la tâche de la nouvelle génération que de le mener à chef dans le plu
30 générale. Notre force, à nous Suisses fédérés, n’ est pas dans le nationalisme ! Nous ne sommes pas une nation ; ni trois n
31 fédérés, n’est pas dans le nationalisme ! Nous ne sommes pas une nation ; ni trois nations ; ni même vingt-deux petites nation
32 ations ; ni même vingt-deux petites nations. Nous sommes une Confédération de communautés régionales. C’est dans la mesure où
33 r cela, et le devenir de mieux en mieux, que nous serons grands devant l’Europe, parce que nous serons l’avenir de l’Europe. S
34 ous serons grands devant l’Europe, parce que nous serons l’avenir de l’Europe. Si, pour faire face à la menace totalitaire, no
35 nt de devenir nous aussi une nation, notre compte sera vite réglé. Car : 1° nous perdrons notre raison d’être, et il n’est p
36 vite réglé. Car : 1° nous perdrons notre raison d’ être , et il n’est pas d’exemple dans l’Histoire qu’un État qui a perdu sa
37 r : 1° nous perdrons notre raison d’être, et il n’ est pas d’exemple dans l’Histoire qu’un État qui a perdu sa raison d’être
38 ans l’Histoire qu’un État qui a perdu sa raison d’ être y survive plus de quelques années. L’exemple de l’Autriche est éclata
39 plus de quelques années. L’exemple de l’Autriche est éclatant ; il l’est même trop pour que j’insiste… 2° nous ne pouvons
40 nées. L’exemple de l’Autriche est éclatant ; il l’ est même trop pour que j’insiste… 2° nous ne pouvons devenir qu’une des p
41 lle-même en trois races et trois langues, si ce n’ est quatre. Dès lors, quelle force opposerons-nous aux grandes nations qu
42 ous aux grandes nations qui nous entourent ? Nous serons dépecés en trois Anschluss. Ce n’est donc pas un « idéal fumeux » que
43 nt ? Nous serons dépecés en trois Anschluss. Ce n’ est donc pas un « idéal fumeux » que j’oppose à la tentation d’un nationa
44 de notre droit à l’existence. Notre seule force est dans notre idéal personnaliste, et donc fédéraliste. Notre seule forc
45 , et donc fédéraliste. Notre seule force sérieuse est d’ordre spirituel. Les « réalistes » qui voudraient le nier trahissen
46 espoir. La Suisse n’a pas de pires ennemis. Ce n’ est pas une armée motorisée qui nous sauvera de l’attaque de nos voisins,
2 1938, Articles divers (1938-1940). Souvenir d’Esztergom (juin 1938)
47 -uns de ses poèmes en traduction. Je savais qu’il était le chef de file du groupe le plus vivant des écrivains de Hongrie, — 
48 e et une race par ses poètes. La plaine hongroise était une grande liberté lumineuse ; tout m’accueillait, êtres et paysages,
49 ne grande liberté lumineuse ; tout m’accueillait, êtres et paysages, dans une vaste hospitalité qui était celle de l’été même
50 êtres et paysages, dans une vaste hospitalité qui était celle de l’été même dont Babits me faisait les honneurs… Qu’on me per
51 , dans une vaste hospitalité qui était celle de l’ été même dont Babits me faisait les honneurs… Qu’on me permette de recopi
52 es notes prises au retour de ce petit voyage ; il est resté merveilleusement vivant dans ma mémoire, et je ne puis plus sép
53 que m’évoque le nom de Michel Babits. ⁂ Esztergom est la plus vieille capitale de la Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. A
54 doivent vivre ceux qui « chantent ». L’après-midi est immense. Nous buvons des vins dorés et doux que nous verse Ilonka Bab
55 dorés et doux que nous verse Ilonka Babits (elle est poète aussi, et très belle). Nous inscrivons nos noms au charbon sur
56 fouille la plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est , je grimpe au cerisier sauvage, derrière la maison, un peintre tout e
57 les vignes, ah ! qu’il fait beau temps, l’horizon est aussi lointain qu’on l’imagine, tout a de belles couleurs, le poète s
58 t en lui-même, il y a une enfance dans l’air… ⁂ N’ est -ce pas cela, la vraie gloire d’un poète : que son souvenir se confond
3 1938, Articles divers (1938-1940). « Comment libérer l’État de la tyrannie de l’Argent ? » (10 juin 1938)
59 yrannie de l’Argent ? » (10 juin 1938)c d Nous sommes en train de passer du règne de la finance totalitaire (libéralisme) a
60 l’État ni l’argent, le problème que pose l’homme est celui-ci : remettre l’État et l’argent à leur place d’instruments tec
61 tal distribué par l’entremise des communes. Ainsi serait évitée la collusion des puissances financières avec le Parlement et l
62 et de cette erreur économique — entre autres — qu’ est la guerre totale, cancer de notre « paix ». Il n’y a de liberté possi
63 e désordre qu’on nomme l’ordre totalitaire. Telle est mon « utopie » : c’est la solution pratique proposée par l’Ordre nouv
64 te, qui mobilise le tout de l’homme, et qui seule est transformatrice. Mais ce n’est pas sur ces voies que vous m’interroge
65 omme, et qui seule est transformatrice. Mais ce n’ est pas sur ces voies que vous m’interrogez, je crois. c. Rougemont De
66 olitique au sens présent du terme. » e. Ce mot a été ajouté à la main dans l’exemplaire personnel de Rougemont.
4 1938, Articles divers (1938-1940). Le Relèvement de l’Allemagne (1918-1938) par Albert Rivaud (28 octobre 1938)
67 ivres sur la Russie soviétique ou stalinienne, il est temps que le public français commence à se renseigner sur la question
68 i survivra. La première partie de ce gros ouvrage est à mon sens la plus sérieuse et la plus riche d’enseignements. C’est u
69 Serbie, ici à la Tchécoslovaquie. Le dénouement a été différent, certes. En 1914, la guerre a éclaté et l’Allemagne, au ter
70 à rien, puisque vingt ans plus tard, l’Allemagne est plus forte que jamais, et atteint ses objectifs sans coup férir. Dans
71 a « description » qu’ils nous offrent. Certes, il est malaisé de se renseigner exactement sur le fonctionnement d’un régime
72 » depuis 1933. Dans quelles industries ? Et quels étaient les salaires de base ? Les polémiques au sujet des salaires russes no
73 on précise que le nombre des sociétés anonymes a été réduit de 9634 en 1932 à 7204 en 1936, et que le nombre des « petites
74 n 1936, et que le nombre des « petites sociétés » est tombé de 6632 à 3863. Comment interpréter ces chiffres ? L’auteur y v
75 Mais par ailleurs, il semble qu’au contraire, ce sont les trusts qui ont absorbé les petites sociétés. Méfions-nous d’un ce
76 es renseignements fournis sur l’économie paysanne sont plus précis, et paraissent autoriser mieux le terme de « socialisme a
77 de Mein Kampf reste flou : on ne sait trop ce qui est dit par Hitler et ce qui est du cru de l’auteur. Enfin, le chapitre s
78 ne sait trop ce qui est dit par Hitler et ce qui est du cru de l’auteur. Enfin, le chapitre sur les Églises et la religion
79 Enfin, le chapitre sur les Églises et la religion est superficiel et souvent inexact : défaut d’autant plus curieux que c’e
80 en France. Et l’on en vient à se demander si ce n’ est pas surtout le souci de faire la leçon aux Français « de gauche » qui
81 . Rivaud à étudier l’exemple allemand. Ce travers est particulièrement gênant dans le chapitre final sur la politique extér
82 si que la Conférence du désarmement, dont l’échec fut pourtant le prétexte principal à la restauration de la Reichswehr ! Q
5 1938, Articles divers (1938-1940). Réponse de Denis de Rougemont, lauréat du prix Rambert 1938 (novembre 1938)
83 Minuit praesentia famam, dit le latin. Mais il n’ est plus question de reculer. En publiant mon Journal , je suis entré da
84 uestion de reculer. En publiant mon Journal , je suis entré dans la voie des aveux. J’ai même confessé certaines de mes sup
85 nonce du prix Rambert. Depuis quelques mois, je m’ étais entièrement retiré dans l’élaboration d’un ouvrage intitulé L’Amour
86 nos vies, détient une signification secrète, qui est le combat du Jour et de la Nuit. J’espérais terminer mon livre aux al
87 ivre aux alentours du 21 juin, date du solstice d’ été , triomphe solaire sur les ténèbres, à cette heure où Brangaine du hau
88 ainsi mon travail, tout au moins par sa quantité, sera-t -il un peu moins indigne du grand honneur que vous lui faites… ⁂ L’un
89 as que mon souci tout helvétique de dire le vrai, fût -il désobligeant, m’amenait à reconnaître que ces relations ne sont pa
90 ant, m’amenait à reconnaître que ces relations ne sont pas bonnes, de nos jours. J’allais même jusqu’à dire, dans mon livre,
91 llais même jusqu’à dire, dans mon livre, qu’elles sont en état de crise aiguë. Il me semblait que les hommes de la cité actu
92 l à communier dans une même vérité vécue ; qu’ils sont souvent d’autant plus seuls qu’ils se voient contraints par le sort d
93 Il me semblait aussi que le langage des écrivains était devenu, ou était resté, le langage d’un très petit nombre, ou d’une c
94 ssi que le langage des écrivains était devenu, ou était resté, le langage d’un très petit nombre, ou d’une caste, alors que d
95 de lire des livres, sinon de les comprendre. D’où sont nés quantité de malentendus et d’illusions, largement exploités par l
96 les jeunes, mes cadets ou mes contemporains, vous êtes le vrai public d’un livre comme le Journal , celui qu’il cherche et
97 vouer que rien ne me préparait à l’espérer ? Vous êtes Vaudois, et pourtant vous couronnez un Neuchâtelois. Vous êtes zofing
98 et pourtant vous couronnez un Neuchâtelois. Vous êtes zofingiens, et vous couronnez un ancien bellettrien, — ce qui est enc
99 et vous couronnez un ancien bellettrien, — ce qui est encore plus digne de louange. Enfin, vous êtes des Suisses de Suisse,
100 qui est encore plus digne de louange. Enfin, vous êtes des Suisses de Suisse, et vous couronnez un Suisse de Paris, ein Pari
101 te calomnie, avec tout l’éclat désirable. Et ce n’ est pas le moindre titre que vous ayez à ma reconnaissance. Une vieille t
102 différences, — il se peut que ce service européen soit précisément dans la ligne d’une vocation d’écrivain suisse. Il faut d
103 e d’un de ses cantons ; des hommes qui, à force d’ être Vaudois avec génie, soient des valeurs européennes. Mais peut-être fa
104 es hommes qui, à force d’être Vaudois avec génie, soient des valeurs européennes. Mais peut-être faut-il ensuite, et à côté, d
105 la Suisse au regard de l’Europe ; des hommes qui soient des Suisses par cela même qu’ils essaient d’être des Européens. C’est
106 oient des Suisses par cela même qu’ils essaient d’ être des Européens. C’est dans cette tradition — celle d’un Constant — que
107 cette tradition — celle d’un Constant — que je me suis trouvé rangé, un peu par la force des choses, par atavisme autant que
108 choses, par atavisme autant que par goût. Mais je tiens à le souligner : je ne puis y espérer quelque succès qu’à la seule co
6 1938, Articles divers (1938-1940). Réponse à l’enquête « Littérature et christianisme » (20 novembre 1938)
109 t et pour un incroyant. Non pas que leurs données soient différentes. Mais elles n’ont pas le même sens. Je m’explique. Il n’y
110 ée de réussir une paire de souliers. Les souliers sont bons ou mauvais. Un roman, de même. Mais tout ce que fait un chrétien
111 c’est là toute la différence. Dira-t-on qu’elle n’ est guère visible ? En effet, elle ne l’est pas. Il n’y a de visible, dan
112 qu’elle n’est guère visible ? En effet, elle ne l’ est pas. Il n’y a de visible, dans un roman, que sa technique, son métier
113 ecteur, en fin de compte — et supposé que l’œuvre soit réussie du point de vue de l’art, donc transparente — c’est l’esprit
114 dans un esprit de service. Or tout service qui n’ est pas le service du Dieu vivant se trouve devenir une servitude. Un rom
115 L’unique préoccupation de l’artiste chrétien doit être de se maintenir en état de service pendant qu’il crée. Je suis d’acco
116 intenir en état de service pendant qu’il crée. Je suis d’accord avec Mauriac : le seul problème est de « purifier la source 
117 Je suis d’accord avec Mauriac : le seul problème est de « purifier la source ». Tout le reste est apologétique, c’est-à-di
118 lème est de « purifier la source ». Tout le reste est apologétique, c’est-à-dire mauvaise littérature. Aux yeux d’un croyan
119 mauvaise littérature. Aux yeux d’un croyant, il n’ est pas de comparaison possible entre la situation du romancier chrétien
120 l ne sert pas une cause visible, et son service n’ est pas mesurable à ses « résultats » (scandale ou conversions produites)
121 Lui plait. Mais je m’aperçois que ce point de vue est sans doute typiquement protestant (bien que valable pour un catholiqu
122 t-être, dans une certaine mesure, pourquoi « il n’ est pas question d’une littérature protestante ». En effet : le protestan
123 ère pas que son service en tant qu’artiste puisse être différent de son service en tant qu’homme chrétien, ou cordonnier, ou
124 » — dans tous les sens de ce terme — ne sauraient être pour lui que l’expression de sa foi au sein du monde réel. Elles ne v
125 lles-mêmes, hors de leur qualité technique. Elles sont un service ; elles ne sont pas au service d’une cause ou d’un parti,
126 alité technique. Elles sont un service ; elles ne sont pas au service d’une cause ou d’un parti, fût-il baptisé « chrétien »
127 ne sont pas au service d’une cause ou d’un parti, fût -il baptisé « chrétien ». (Je parle idéalement : nous avons nous aussi
128 « littérature protestante » d’édification.) Elles sont encore une action de grâce, comme le Magnificat de Bach. Pour précise
129 eux retable de Grünewald à Colmar : nos œuvres ne seront jamais que cette main qui désigne le Christ, au-dessus des déserts du
130 en chômage , et les autres écrits de Rougemont en sont parmi les plus importants témoignages. »
7 1939, Articles divers (1938-1940). Quel est le rôle de l’Université dans le pays ? (1939)
131 Quel est le rôle de l’Université dans le pays ? (1939)m … Quel est le rôle
132 de l’Université dans le pays ? (1939)m … Quel est le rôle de l’Université dans le pays ? Serait-ce de distribuer de l’i
133 … Quel est le rôle de l’Université dans le pays ? Serait -ce de distribuer de l’instruction, de vendre au poids des connaissanc
134 jamais cru, et aujourd’hui moins que jamais. Ce n’ est pas à l’Université que j’appris ce qu’il faut savoir pour vivre la vi
135 te de ne la point gagner, vous le savez bien : ce sont des trucs de métier, si j’ose dire, des trucs que l’on n’apprend qu’à
136 nce. Or l’Université ne saurait les donner. Et il serait bien sot, il serait même barbare de le lui reprocher un seul instant.
137 ne saurait les donner. Et il serait bien sot, il serait même barbare de le lui reprocher un seul instant. Nous attendons de l
138 ables, — ces stations au café de la Rotonde, ce n’ est pas le moment de les oublier ! — la vie nocturne de l’étudiant, des l
139 Je sais : toutes les générations ont cru qu’elles étaient la dernière à cultiver le romantisme. La nôtre se crut la première, p
140 isme. La nôtre se crut la première, parce qu’elle était horriblement surréaliste ! J’ignore si les volées qui ont suivi ont é
141 aliste ! J’ignore si les volées qui ont suivi ont été aussi folles que nous, et s’il serait décent de le souhaiter. Mais c’
142 ont suivi ont été aussi folles que nous, et s’il serait décent de le souhaiter. Mais c’est avec plus de tendresse que de remo
143 t des nuits que nous imaginions orgiaques, et qui étaient simplement lyriques. Durant des mois d’hiver, notre vie tournoyait da
144 tre. Dans cette ville dont les places et les rues sont si pareilles à des décors, la nuit, nous avions l’impression de circu
145 r sur une scène perpétuelle. Les bons bourgeois n’ étaient plus, à nos yeux, que des sortes de figurants, ignorant tout du sens
146 invisible à tout autre qu’à nous, et dont nous n’ étions même pas toujours sûrs qu’elle fût réelle — mais qu’importait ? Quelq
147 dont nous n’étions même pas toujours sûrs qu’elle fût réelle — mais qu’importait ? Quelques-uns, pourtant, s’y brûlèrent. E
148 histoire, et qui m’entraînerait assez loin. … Ne serait -ce pas notre rôle actuel, en Suisse, de maintenir cette tradition du
149 t aujourd’hui des chants… d’une autre espèce ? Ne serait -ce pas à nous de maintenir et d’illustrer aux yeux du monde moderne u
150 a jamais prospéré que dans les lieux où le loisir est cultivé, — et non pas méprisé ou condamné comme un péché envers l’Éta
151 l m’a semblé que cette petite morale du loisir ne serait pas déplacée ce soir, dans cette halte du souvenir et de l’amitié. Vr
152 ine paresse dans une occasion de ce genre ? Ce ne sera jamais, hélas, qu’une fois tous les cent ans ! m. Rougemont Denis
153 s les cent ans ! m. Rougemont Denis de, « Quel est le rôle de l’université dans le pays ? », Bulletin de l’Association d
8 1939, Articles divers (1938-1940). Le protestantisme créateur de personnes (1939)
154 quelque méfiance. Je souhaite que beaucoup aient tenu le petit raisonnement que voici : Pour les réformateurs, l’homme deva
155 en signifier cette contradiction affligeante ? Je serais heureux que la question vous ait paru curieuse, ou peut-être grave, o
156 t passer de notre théologie à notre histoire ? Qu’ est -ce que cette personnalité dont la valeur varie si curieusement entre
157 t une gloire peut-être intempestive ? Le problème est , je crois, d’autant plus actuel que les menaces qui pèsent aujourd’hu
158 ude, il s’agit de la combler en vérité. La menace est sérieuse, les événements de septembre et toute la suite l’ont fait vo
159 es. En Russie, en Allemagne, en Italie, l’attaque est déjà déclenchée. Elle nous atteint déjà par contrecoup, et il est sag
160 hée. Elle nous atteint déjà par contrecoup, et il est sage de s’attendre à bien pire. C’est donc le moment ou jamais de se
161 s moyens de défense. Et, par exemple, si beaucoup sont prêts à louer la Réforme d’être une école de personnalités, donc un r
162 mple, si beaucoup sont prêts à louer la Réforme d’ être une école de personnalités, donc un rempart contre la barbarie, c’est
163 rquoi, dans quel esprit surtout le protestantisme est effectivement cela. I Depuis une dizaine d’années, une discussio
164 s une dizaine d’années, une discussion générale s’ est instituée sur les notions de personne, d’individu et de personnalité.
165 nes protestants, beaucoup d’agnostiques aussi, se sont efforcés de démontrer l’importance concrète d’une définition de la pe
166 le mot d’ordre « Défense de la personne humaine » est devenu le slogan par excellence des hommes d’État démocratiques. Ce f
167 remontons aux origines, si nous cherchons comment sont apparues dans l’Histoire les notions d’individu et de personne, et le
168 ne certaine polémique réactionnaire, l’individu n’ est pas une invention du siècle des Lumières et de la Déclaration des dro
169 aturel, et s’isole. Le groupe primitif, la tribu, est lié par le lien du sang, des morts communs, et par celui de la terreu
170 l’intolérance radicale. (On ne discute pas ce qui est sacré.) De plus, elle est radicalement grégaire et xénophobe. Mais su
171 n ne discute pas ce qui est sacré.) De plus, elle est radicalement grégaire et xénophobe. Mais supposez maintenant qu’un de
172 istinct des peuplades indo-germaniques, les Grecs sont les premiers à se détacher, à prendre figure, donc à s’individualiser
173 les expulse : voilà les premiers individus. Ceci est important : à l’origine, individu est synonyme de criminel. Mais peu
174 vidus. Ceci est important : à l’origine, individu est synonyme de criminel. Mais peu à peu, ces individus se groupent pour
175 les à la cité au sens moderne. Alors que la tribu était liée par des liens d’origine — le sang, la famille — la cité est fond
176 s liens d’origine — le sang, la famille — la cité est fondée sur l’intérêt commun et les contrats. Alors que la morale de l
177 t. La définition la plus noble de l’individu nous est fournie à ce moment par Socrate, lorsqu’il nous dit : Connais-toi toi
178 misée ». Le vide social créé par l’individualisme est toujours un appel à l’État dictatorial. Et cet État aux cadres géomét
179 entre individualisme et dictature, l’opposition n’ est qu’apparente : en réalité, il y a de l’un à l’autre un lien de cause
180 ère dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plus l’appel est puissant. À bien des égards, l’étatisme ne f
181 au plein : plus le vide est absolu, plus l’appel est puissant. À bien des égards, l’étatisme ne fait qu’achever le process
182 ciale commencé par l’individualisme. L’individu s’ était abstrait du groupe naturel ; l’État liquide les groupes naturels subs
183 par sa fonction dans la cité. C’est celui-là qui sera nommé juridiquement la persona. Ce mot qui désignait à l’origine le m
184 que joue le citoyen. Dans l’Empire, tout homme n’ est pas une persona, il s’en faut. Les esclaves, par exemple, qui forment
185 , qui forment les deux tiers de la population, ne sont pas des personnes, puisqu’ils ne jouent pas de rôle dans les rouages
186 jouent pas de rôle dans les rouages de l’État. Il est important de rappeler ce sens romain du mot personne. Je le traduirai
187 rannie, successivement, ont fait faillite. Quelle sera la nouvelle société ? En ce point de l’évolution, dans cette angoisse
188 ssibilité de communauté, c’est celle qu’imagine l’ être spirituel. C’est l’espoir d’une société d’un type absolument nouveau,
189 ’une société d’un type absolument nouveau, qui ne soit pas fondée sur les contraintes du passé, ni sur des lois, mais sur l’
190 une et enthousiaste d’un au-delà libérateur. Ce n’ est plus le rêve du retour aux origines, c’est le rêve d’un avenir éterne
191 alisation historique de la première possibilité s’ est amorcée dès la fin de la République romaine, quand le César est deven
192 s la fin de la République romaine, quand le César est devenu un dieu. Et c’est l’échec de cette religion d’État, confondu a
193 nt une société absolument nouvelle : l’Église. Qu’ est -ce que l’Église primitive, du point de vue sociologique où je me plac
194 terme moderne : des cellules. Ces communautés ne sont pas fondées sur le passé ni sur des origines communes. « Il n’y a plu
195 des esclaves et des citoyens riches. Leur lien n’ est pas terrestre : il est dans l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre 
196 toyens riches. Leur lien n’est pas terrestre : il est dans l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre : il s’est assis au Cie
197 as terrestre : il est dans l’au-delà. Leur chef n’ est pas terrestre : il s’est assis au Ciel à la droite de Dieu. Leurs amb
198 s l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre : il s’ est assis au Ciel à la droite de Dieu. Leurs ambitions non plus ne sont p
199 à la droite de Dieu. Leurs ambitions non plus ne sont pas terrestres, car ce qu’elles attendent, c’est la fin des temps. Et
200 . Ainsi, spirituellement et socialement, l’Église est une communauté d’hommes qui sont à la fois libres et engagés. Libérés
201 alement, l’Église est une communauté d’hommes qui sont à la fois libres et engagés. Libérés par Celui qui les engage à son s
202 avons bien que leur libération et leur service ne sont nullement contradictoires, puisqu’ils traduisent deux aspects complém
203 d’une seule et même réalité : la conversion. Tel est l’homme neuf, créé par l’Église chrétienne. Ce n’est pas l’individu g
204 l’homme neuf, créé par l’Église chrétienne. Ce n’ est pas l’individu grec, puisqu’il se soucie davantage de servir que de s
205 davantage de servir que de se distinguer. Et ce n’ est pas non plus la persona du droit romain, puisque l’homme qui a une vo
206 christianisé. Car cet homme, lui aussi, se trouve être à la fois autonome et en relation. Ainsi le mot avec son sens nouveau
207 ns nouveau, et la réalité sociale de la personne, sont bel et bien des créations chrétiennes ou, pour mieux dire, des créati
208 ction entre ces deux vocables si courants, loin d’ être une querelle byzantine, ne traduit rien de moins, dans les débuts, qu
209 re l’homme naturel et l’homme chrétien. Ces bases étant posées, faisons dans nos pensées un petit saut de quelques siècles, p
210 s peu à peu l’héritage de l’Empire romain. Elle s’ est peu à peu substituée aux cadres sclérosés du vieux régime. La capital
211 lait le prévoir. En effet, la personne chrétienne était une sorte de paradoxe : elle unissait l’individu libre et la persona
212 ciété, et tend à s’imposer par la force, comme ce fut le cas dès le xiie siècle, on se retrouve dans une situation quelque
213 rèce individualiste. L’individu de la Renaissance est d’abord un révolté qui oppose ses besoins propres aux dogmes sacrés d
214 c’est-à-dire le libre examen de toutes choses. Il est assoiffé de gloire et de richesse, de sa propre gloire et de sa propr
215 se, de sa propre gloire et de sa propre richesse, fussent -elles acquises aux dépens de sa famille et de sa cité, aux dépens mêm
216 ême de la vie d’autrui. Un grand nombre de crimes furent commis dans l’Italie du xve siècle à seule fin de s’acquérir de la r
217 siciliens, fondateurs du capitalisme commercial, sont souvent cités comme les premiers types d’individus au sens moderne. N
218 e profanation que l’on opère. Du moins ces gestes sont -ils ressentis comme tels à cette époque. Or il est évident que cet in
219 nt-ils ressentis comme tels à cette époque. Or il est évident que cet individualisme est un retour du paganisme grec. Mais
220 époque. Or il est évident que cet individualisme est un retour du paganisme grec. Mais il est non moins évident qu’il repr
221 dualisme est un retour du paganisme grec. Mais il est non moins évident qu’il représente une réaction inévitable à la dévia
222 : je vais essayer de vous montrer ce que pourrait être et devrait être un personnalisme inspiré de la Réforme. Calvin ni Lut
223 r de vous montrer ce que pourrait être et devrait être un personnalisme inspiré de la Réforme. Calvin ni Luther n’ont parlé
224 dant toutes les réalités que désignent ces termes sont présentes, et sont en conflit à l’époque de la Réforme. Essayons de l
225 lités que désignent ces termes sont présentes, et sont en conflit à l’époque de la Réforme. Essayons de les dégager sommaire
226 ager sommairement. Le but unique des réformateurs était de restaurer la fidélité de l’Église à la Parole de Dieu. Jamais ils
227 ise à la Parole de Dieu. Jamais ils n’ont admis d’ être présentés comme des novateurs. « Nous nous sommes efforcés, écrit Cal
228 d’être présentés comme des novateurs. « Nous nous sommes efforcés, écrit Calvin, de ne pas mettre nos opinions personnelles à
229 mbarrer ces deux vices, toute la pureté de la foi serait confuse. » L’Église primitive était une communauté spirituelle de per
230 té de la foi serait confuse. » L’Église primitive était une communauté spirituelle de personnes, d’hommes nouveaux, à la fois
231 uant une multitude de communautés locales. Telles seront à nouveau les Églises réformées. Point de centralisation, point de ca
232 ans le plan de l’État. La personne chrétienne, ce sera le rôle que Dieu attribue à chaque homme. Notez bien que nous retrouv
233 son prochain. Ainsi la dignité de chaque individu est garantie non pas du seul fait qu’il existe physiquement, mais du fait
234 dès lors, cet homme n’a pas seulement le droit d’ être respecté par l’État, il a surtout le devoir d’agir, en tant qu’il est
235 tat, il a surtout le devoir d’agir, en tant qu’il est chargé d’une responsabilité unique dans la société, à sa juste place.
236 à sa juste place. Notons que si la personne doit être respectée par l’État, ce n’est pas en vertu d’un droit naturel à la d
237 la personne doit être respectée par l’État, ce n’ est pas en vertu d’un droit naturel à la désobéissance. Calvin précise qu
238 obéissance. Calvin précise que l’État, quel qu’il soit , doit être obéi par chacun. Mais il ajoute une restriction mémorable,
239 Calvin précise que l’État, quel qu’il soit, doit être obéi par chacun. Mais il ajoute une restriction mémorable, qui figure
240 et le peuple de telle manière que par cela je ne sois nullement empêché de rendre à Dieu le service que je lui dois par ma
241 e seul texte constitutionnel existant, qui puisse être qualifié de personnaliste, au sens précis où je l’entends. Diversité
242 n strictement ecclésiastique, c’est vrai. Mais il était inévitable et normal que ce type de relations influençât peu à peu to
243 elations politiques. Toute l’histoire de l’Europe serait à refaire à partir de cette constatation : que les formes et structur
244 tiques. Nous en verrons quelques exemples. Quelle fut donc la traduction politique de la doctrine calvinienne de l’Église e
245 on réfléchit aux deux questions suivantes : quels furent les régimes qui persécutèrent la Réforme ? Et quelle fut l’action his
246 régimes qui persécutèrent la Réforme ? Et quelle fut l’action historique des hommes d’État réformés ? Partout, et dès le d
247 s le début, l’obstacle principal à la Réforme, ce fut l’absolutisme, la passion unitaire et centralisatrice, tant chez les
248 ou moins inspiré du stathoudérat hollandais. Et n’ est -ce pas le huguenot Sully qui, le premier, sous Henry IV, conçut le « 
249 ndance fédéraliste protestante jusqu’à nos jours, est d’ordre proprement spirituel. C’est bien le même état d’esprit qui ex
250 quer. Et vous savez que les problèmes d’éducation furent dès le début le grand souci des réformés. Calvin fonde le Collège de
251 e sa vocation. C’est à cause de sa vocation qu’il est à la fois libre et engagé, autonome et pourtant responsable au sein d
252 initive, c’est de cela qu’il s’agit. L’histoire n’ est jamais qu’un tremplin pour mieux sauter en plein cœur de l’actuel. Co
253 orale personnaliste ? Calvin, vous le savez, ne s’ est jamais préoccupé de la forme des gouvernements. Il insiste à maintes
254 e fait que monarchies, oligarchies et républiques sont également voulues de Dieu et doivent être obéies comme telles. Une fo
255 bliques sont également voulues de Dieu et doivent être obéies comme telles. Une fois cependant il marque une préférence, mai
256 squ’il écrit : « Le meilleur état de gouvernement est celui-là où il y a une liberté bien tempérée et pour durer longuement
257 e donne raison au réformateur. Et je ne crois pas être infidèle à sa pensée en y ajoutant cette précision : ce n’est pas la
258 à sa pensée en y ajoutant cette précision : ce n’ est pas la forme d’un État qui compte, mais bien la condition qu’il ménag
259 s qui s’affrontent aujourd’hui. Le premier groupe est celui des nations qui respectent l’Église et la personne. Nous y trou
260 er entre ces trois États : d’abord parce que ce n’ est pas notre sujet, ensuite parce que ces différences, qui ne le voit, s
261 e. Ce qu’il nous importe de souligner ce soir, ce sont deux traits évidemment communs à ces régimes : leur opposition brutal
262 r opposition brutale au christianisme, dès qu’ils sont assez forts pour lever le masque, et leur mépris de la personne. Voic
263 stinction entre l’Église et l’État n’avait jamais été établie d’une manière satisfaisante. Le tsar par exemple, était à la
264 d’une manière satisfaisante. Le tsar par exemple, était à la fois chef de l’État et chef de l’Église : c’est ce qu’on nomme l
265 ropapisme. D’autre part, ses décisions politiques étaient fortement influencées par le clergé : c’est ce qu’on nomme la théocra
266 La coupure entre le spirituel et le temporel n’y était pas faite au bon endroit, ou mal faite, ou pas faite du tout. Il en r
267 oup plus rigoureusement, car la religion dont ils étaient les chefs était une religion de guerre, possédant toute la virulence
268 ement, car la religion dont ils étaient les chefs était une religion de guerre, possédant toute la virulence des corps chimiq
269 e part, l’instauration de ces régimes tyranniques fut largement facilitée, et même appelée, par l’absence dans tous ces pay
270 ’il nomme « l’absence des meilleurs », ne saurait être que l’absolutisme. Or, si nous nous rappelons que le calvinisme a tou
271 e fait suivant qui, à ma connaissance, n’a jamais été signalé : c’est qu’il existe une forme de fascisme correspondant à la
272 catholiques, alors qu’il n’en existe point qui se soit développé en pays « calvinistes » ou simplement influencés par des él
273 que le calvinisme ne puisse dévier lui aussi, et soit sans défauts. Mais cela signifie que ses défauts et déviations n’entr
274 t totalitaire. Mais lorsque le calvinisme cesse d’ être une foi vivante, il laisse derrière lui une empreinte tout à fait dif
275 rtains qui se demandent encore, par exemple, s’il est de gauche ou de droite, alors qu’il est du diable, et que c’est en ch
276 ple, s’il est de gauche ou de droite, alors qu’il est du diable, et que c’est en chrétiens que nous avons maintenant à nous
277 enant à nous défendre, dans cette guerre qui nous est déclarée. Or le meilleur, le seul moyen de se défendre — surtout quan
278 condition pour éviter chez nous, pendant qu’il en est temps, des déviations qui feraient le jeu de l’ennemi. Connaître la d
279 ierai de tirer des conclusions pratiques. Quelle est la condition faite à l’Église dans les pays totalitaires ? Cette prem
280 s les pays totalitaires ? Cette première question est capitale. Car la politique d’un régime est toujours étroitement dépen
281 estion est capitale. Car la politique d’un régime est toujours étroitement dépendante de l’attitude qu’il prend vis-à-vis d
282 Église et du fait religieux en général. Un régime est totalitaire lorsqu’il prétend centraliser radicalement tous les pouvo
283 se. Et d’autant plus que la religion qu’il adopte est , comme dans le cas des fascismes et du communisme, une religion de l’
284 ace, la tradition, les morts. Voilà pourquoi elle est intolérante au suprême degré, et plus qu’intolérante : on ne peut mêm
285 rigines, on ne pourra jamais y entrer — si l’on n’ est pas de sang aryen, par exemple — car cette religion n’admet pas que «
286 te religion n’admet pas que « les choses vieilles sont passées » selon la parole de l’Apôtre. Elle n’admet pas la conversion
287 is-tu ? qu’espères-tu ? mais elle demande : quels sont tes morts ? Religion du sang, religion de la terre et des morts, reli
288 u monde, d’une défense spirituelle du pays. Et je suis le premier à l’approuver. Mais lorsque l’on fonde cette défense spiri
289 d’une Suisse chrétienne quand beaucoup de Suisses sont incroyants, cela mène tout simplement, dans la pratique, à l’utilisat
290 sme. Si le mot d’ordre « Suisse chrétienne » doit être lancé, ce ne peut être que par l’Église seule, et non par un parti, e
291 « Suisse chrétienne » doit être lancé, ce ne peut être que par l’Église seule, et non par un parti, et non par l’État fédéra
292 par l’État fédéral. Une « Suisse chrétienne », ce serait une Suisse dont les citoyens seraient chrétiens. En attendant, sachon
293 étienne », ce serait une Suisse dont les citoyens seraient chrétiens. En attendant, sachons maintenir, et étendons plus que jama
294 déralisme, seule doctrine politique existante qui soit radicalement contraire à la doctrine totalitaire. Le fédéralisme, ce
295 e à la doctrine totalitaire. Le fédéralisme, ce n’ est pas seulement un pour tous — qui serait une devise fasciste — ce n’es
296 alisme, ce n’est pas seulement un pour tous — qui serait une devise fasciste — ce n’est pas seulement tous pour un — qui serai
297 pour tous — qui serait une devise fasciste — ce n’ est pas seulement tous pour un — qui serait individualiste —, c’est l’équ
298 ciste — ce n’est pas seulement tous pour un — qui serait individualiste —, c’est l’équilibre vivant des deux termes. Ceux qui
299 lidaire. Ceci nous amène au second point : quelle est la condition faite à la personne dans les pays totalitaires ? C’est t
300 utre pôle : celui de l’engagement social. L’homme étant totalement engagé, corps et esprit, dans les rouages de l’État, et ce
301 ai : caporalisation. La personne ainsi comprise n’ est plus rien qu’une persona au sens romain, un rôle, un masque, une fonc
302 ent humaines. À force de louer la Réforme d’avoir été , comme on dit, « une pépinière d’individualités et de caractères bien
303 nous courons le risque d’oublier que la Réforme n’ est pas faite pour l’homme d’abord. À force de louer ses effets humains,
304 ause divine. N’oublions pas que la personnalité n’ est bien souvent que le résidu, l’empreinte d’une personne sur un individ
305 ne croit plus à sa vocation, et qui a simplement été formé par une éducation et une ambiance protestante. Il y a trop de c
306 sorte de nationalisme huguenot, de ces hommes qui sont simplement « sortis » du protestantisme… Certes, nous pouvons nous ré
307 ouir que la foi réformée, même quand elle cesse d’ être vivante, laisse en se retirant beaucoup de personnalités. Cela consti
308 aut alors rappeler que la personnalité, si grande soit -elle, devant Dieu c’est zéro. Et si l’on se borne au social, il faut
309 uis, une personnalité en soi, sans vocation, ce n’ est rien de plus, après tout, qu’un individu aux caractères accusés. Ains
310 t c’est pourquoi l’on a pu dire que le calvinisme était à l’origine du capitalisme moderne, avec sa concurrence sans frein, p
311 ques, mais ce qu’il ne peut ni ne veut former, ce sont justement des personnes, des vocations irréductibles aux ambitions sp
312 ions spirituelles de l’État. Ces personnes-là, ce sont ses véritables adversaires, les seuls sérieux, et il le sait ! Si Nie
313 , les seuls sérieux, et il le sait ! Si Niemöller est dans un camp de concentration, prisonnier personnel du Führer, ce n’e
314 ncentration, prisonnier personnel du Führer, ce n’ est point parce qu’on lui reproche son énergie ou ses talents, ses traits
315 sonnalité, car bien d’autres en ont autant qui ne sont pas pour cela en prison. Ce qu’on lui reproche, ce que l’on ne peut p
316 rsonne, c’est-à-dire sa vocation particulière qui est de prêcher l’Évangile. — Vous voyez que le Führer sait parfaitement o
317 e bénéfice exclusif d’une telle clairvoyance. Il est temps de tirer, en deux mots, la conclusion de cette série de mises a
318 Réforme, et spécialement sa tendance calviniste, est appelée à figurer, dans notre siècle, le type même de la sûre doctrin
319 . Un véritable protestant, les faits le prouvent, sera toujours l’adversaire le plus efficace de l’esprit totalitaire. Déjà,
320 ar une espèce de croisade intérieure. Le chrétien est celui qui n’a pas d’autre ennemi à craindre que l’ennemi qu’il porte
321 ui-même. Car un ennemi visible et extérieur, ce n’ est jamais que l’incarnation d’une possibilité secrète, d’une tentation q
9 1939, Articles divers (1938-1940). Le théâtre communautaire en Suisse (1939)
322 âtre communautaire en Suisse (1939)y La Suisse est sans doute le pays où l’on joue le plus de théâtre. Serait-ce que le
323 ns doute le pays où l’on joue le plus de théâtre. Serait -ce que le paysage lui-même invite au jeu, avec ses décors partout sus
324 s de rochers, grandiose toile de fond des Alpes ? Serait -ce plutôt que le sérieux de nos mœurs, notre fameuse méfiance du déco
325 qui trouverait sur la scène son lieu privilégié ? Serait -ce enfin dans le fédéralisme qu’il faudrait rechercher l’origine de c
326 satisfait au premier chef ? Je ne sais ; et m’en tiendrai donc au seul problème du théâtre actuel. Nous voyons naître l’ère des
327 re d’une arène destinée à 400 000 spectateurs. Il est clair que de telles proportions anéantissent matériellement toute pos
328 es seuls protagonistes visibles, sur cette scène, seront les masses et leurs insignes. Le théâtre individualiste analysait les
329 r, nous n’avons pas de grandes villes, et nous ne sommes pas une grande nation. La seule voie qui nous reste ouverte est celle
330 ande nation. La seule voie qui nous reste ouverte est celle d’un théâtre de groupes — non d’individus, ni de masses — corre
331 lieu, à tenir compte des conditions de fait qui m’ étaient imposées par l’occasion de la représentation — il s’agissait de l’Exp
332 voici, quelque peu schématisée, la solution où je suis parvenu. Parmi les forces individuelles les plus marquantes de notre
333 é visiteur de l’Exposition. Or, si ce solitaire a été grand, c’est parce qu’un jour il a tout sacrifié au salut de la commu
334 rappelle notre devise confédérale : un seul peut être utile à tous. La traduction spectaculaire de cette donnée propose un
335 d’une scène de 30 mètres de largeur, qui ne peut être occupée que par une foule, mais en même temps, l’action doit graviter
336 ou deux personnages dominants, les autres rôles n’ étant qu’épisodiques. (C’est la solution eschylienne du problème tout à fai
337 r, il se trouve, par chance, que l’élément choral est de beaucoup le plus facile à recruter en Suisse, et particulièrement
338 é médian, de concert avec le chœur d’enfants : ce seront les Suisses et les enfants de Nicolas. Enfin un petit chœur caché der
339 ésente par ailleurs un gros défaut technique : il est très difficile de marier un bon texte à des éléments spectaculaires t
340 trop vastes, qui accaparent toute l’attention. Je suis donc parti du texte lui-même, du mouvement intérieur du dialogue, pou
341 ses répercussions dans la communauté. Le dialogue est simplifié à l’extrême de manière à pouvoir supporter l’amplification
342 n par les haut-parleurs. Et la musique intervient soit pour souligner le sentiment qui se dégage d’un dialogue, soit pour cr
343 uligner le sentiment qui se dégage d’un dialogue, soit pour créer une atmosphère qui appelle l’action du héros. Elle n’est p
344 atmosphère qui appelle l’action du héros. Elle n’ est plus décorative, mais proprement dramatique. Je ne saurais trop me fé
345 l de préparation et de répétition de ce spectacle est d’ailleurs venu justifier le calcul que je viens d’esquisser. Cinq-ce
346 même à l’intérieur du canton ! Certes, la guerre étant intervenue, tout s’est trouvé suspendu à la veille des représentation
347 nton ! Certes, la guerre étant intervenue, tout s’ est trouvé suspendu à la veille des représentations de Zurich. Il est don
348 ndu à la veille des représentations de Zurich. Il est donc encore impossible d’estimer la valeur intrinsèque de ce drame. M
349 ort : nulle part, ailleurs qu’en Suisse, il n’eût été possible d’imaginer et de réaliser un spectacle de cette envergure, e
350 de cette envergure, et de le rendre populaire. Ce sont les conditions proprement suisses, et plus précisément fédéralistes,
351 autaire qu’il m’a paru intéressant d’énumérer. Je suis persuadé que sa formule est celle de l’avenir de notre scène. y. R
352 ssant d’énumérer. Je suis persuadé que sa formule est celle de l’avenir de notre scène. y. Rougemont Denis de, « Le théâ
10 1939, Articles divers (1938-1940). Un quart d’heure avec M. Denis de Rougemont : Hitler, grand-prêtre de l’Allemagne (11 janvier 1939)
353 gne hitlérienne. Il y a pourtant deux ans qu’il a été écrit. Son auteur, M. Denis de Rougemont, me dit pourquoi il a attend
354 935-1936. Que valaient ces impressions ? Quand je suis revenu, je n’étais pas sûr qu’elles n’eussent pas décrit des aspects
355 ient ces impressions ? Quand je suis revenu, je n’ étais pas sûr qu’elles n’eussent pas décrit des aspects passagers du régime
356 tre livre met en évidence : que le fait hitlérien est un fait religieux. Oui. Cela a été déjà beaucoup dit. N’importe. Il n
357 fait hitlérien est un fait religieux. Oui. Cela a été déjà beaucoup dit. N’importe. Il ne faut pas craindre de le répéter,
358 , eux, ont compris que le socialisme économique n’ est que la moitié d’une doctrine : l’État ne sera maître de l’argent que
359 ue n’est que la moitié d’une doctrine : l’État ne sera maître de l’argent que s’il est maître des esprits. Un État totalitai
360 rine : l’État ne sera maître de l’argent que s’il est maître des esprits. Un État totalitaire ne peut pas être totalitaire
361 ître des esprits. Un État totalitaire ne peut pas être totalitaire à moitié. Il lui faut la fameuse confiance, et une confia
362 vérité sur l’âme de l’Allemagne hitlérienne vous est -elle apparue dès que vous êtes arrivé en Allemagne ? Je crois l’avoir
363 ne hitlérienne vous est-elle apparue dès que vous êtes arrivé en Allemagne ? Je crois l’avoir discernée peu à peu, mais asse
364 peu à peu, mais assez vite. Cependant, elle ne s’ est imposée à moi que le jour où j’ai assisté à un discours du Führer, en
365 résence de 40 000 personnes. Mais, ce jour-là, ce fut pour moi foudroyant. Je me souviens qu’avant de me rendre à cette réu
366 ’un : « Vous y croyez, vous, à l’âme collective ? Est -ce que ce n’est pas une formule grandiloquente pour désigner l’absenc
367 royez, vous, à l’âme collective ? Est-ce que ce n’ est pas une formule grandiloquente pour désigner l’absence d’âme personne
368 écouter le Führer, nous en reparlerons ensuite ». Est -ce donc une révélation que de voir Hitler ? Ce qui est une révélation
369 e donc une révélation que de voir Hitler ? Ce qui est une révélation, ce qui, du moins, en a été une pour moi, c’est de voi
370 Ce qui est une révélation, ce qui, du moins, en a été une pour moi, c’est de voir quels liens unissent Hitler à une foule à
371 Essayez de vous représenter une salle immense qui est soudain plongée dans la pénombre, tandis qu’un coup de projecteur fai
372 commence. Et cela dure plusieurs minutes, ce qui est très long, jusqu’à ce que commence le chant du Horst Wessel Lied, com
373 Une seule chaîne de SS le séparait de la foule. J’ étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireur l’eût descendu t
374 descendu très facilement. Mais ce bon tireur ne s’ est jamais trouvé dans cent occasions analogues. Voilà le principal de ce
375 Hitler. Vous pouvez réfléchir là-dessus. Quelles sont vos propres réflexions ? C’est qu’on ne tire pas sur un homme qui n’e
376 ions ? C’est qu’on ne tire pas sur un homme qui n’ est rien et qui est tout. On ne tire pas sur un petit-bourgeois qui est l
377 on ne tire pas sur un homme qui n’est rien et qui est tout. On ne tire pas sur un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 mil
378 t tout. On ne tire pas sur un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 millions d’hommes. On tire sur un tyran, ou sur un roi,
379 n, ou sur un roi, mais les fondateurs de religion sont réservés à d’autres catastrophes. J’achève votre raisonnement : puisq
380 pas d’attentats contre Hitler, c’est qu’Hitler n’ est ni un tyran ni un roi, mais un fondateur de religion. Cependant, tout
381 ’économie, jouent leur rôle aussi. Évidemment, il sera toujours possible d’expliquer l’avènement, puis la montée d’Hitler, p
382 es, etc. Mais tout cela retrace le comment cela s’ est fait. Il reste à trouver le pourquoi. Là-dessus, les réponses varient
383 essus, les réponses varient, mais chacune d’elles est toujours la même. Les marxistes vont répétant : « défense du capital 
384 s démocrates disent : « tyrannie ». Or, tout cela est démenti par les faits. Ce n’est pas pour défendre le capitalisme que
385  ». Or, tout cela est démenti par les faits. Ce n’ est pas pour défendre le capitalisme que les mineurs de la Sarre ont voté
386 re ont voté leur rattachement au IIIe Reich. Ce n’ est pas en parlant d’hystérie qu’on peut comprendre le phénomène fondamen
387 e communauté autour d’un sentiment sacré. Et ce n’ est pas la soif d’une tyrannie, au sens politique et légal, qui a jeté l’
388 u’exerce une religion naissante, si basse qu’elle soit , sur les masses décomposées par des siècles d’individualisme. J’ai re
389 ce que je viens de vous exposer brièvement. Elle est d’un jeune national-socialiste, qui m’explique d’abord que le régime
390 e, qui m’explique d’abord que le régime hitlérien est né de la pauvreté et du malheur de son pays — ce qui est très juste.
391 de la pauvreté et du malheur de son pays — ce qui est très juste. Mais il ajoute : « La pauvreté et le malheur ne peuvent e
392 La raison profonde d’un mouvement comme le nôtre est irrationnelle. Nous voulions croire à quelque chose, nous voulions vi
393 ous voulions vivre pour quelque chose. Nous avons été reconnaissants à celui qui nous apportait cette possibilité de croire
394 ussirons-nous à y croire. » Voilà qui dit bien où est la force de l’Allemagne nouvelle. Quelle force croyez-vous donc qu’on
395 poser à cette force-là ? Rien d’efficace, si ce n’ est pas une force spirituelle. Rien de pratique, si ce n’est un grand eff
396 une force spirituelle. Rien de pratique, si ce n’ est un grand effort moral. Quand j’ai envoyé à des amis de France le réci
397 tites assemblées, vos chants traînants, tout cela sera balayé. Il ne vous restera que la foi. Mais la vraie lutte commence l
398 mmence là. » Et je crois toujours que le problème est là : c’est celui d’une renaissance spirituelle qui ne peut se faire s
11 1939, Articles divers (1938-1940). Qui est Hitler ? (24 février 1939)
399 Qui est Hitler ? (24 février 1939)p La grande majorité des Français pensen
400 rande majorité des Français pensent que le Führer est un végétarien belliqueux qui ressemble à Charlie Chaplin et qui est d
401 belliqueux qui ressemble à Charlie Chaplin et qui est doué d’une voix de stentor fanatique, particulièrement désagréable au
402 des Allemands pensent au contraire que le Führer est un homme simple et bon, quoique énergique, sorti du peuple, assoiffé
403 le chaîne de miliciens le séparait de la foule. J’ étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireur l’eût descendu t
404 descendu très facilement. Mais ce bon tireur ne s’ est jamais trouvé, dans cent occasions analogues. Voilà le principal de c
405 uvez réfléchir là-dessus… On demande souvent s’il est intelligent. Il me semble que cela n’a pas grande importance, que cel
406 areil cas. Tout au plus pourrait-on dire que s’il était très intelligent, il n’aurait sans doute pas réussi à fanatiser tout
407 n peuple. Une certaine forme de bêtise convaincue est seule capable de s’imposer à de grandes masses rassemblées par des pa
408 a pas toujours besoin d’intelligence. Or, on doit tenir le Führer pour un génie, dans un certain sens, bien précis : c’est un
409 un portefeuille dans le gouvernement. (Son rôle y est d’inspiration, d’arbitrage entre les factions, et de prestige.) Il ne
410 e entre les factions, et de prestige.) Il ne veut être appelé ni dictateur, ni maréchal, ni roi, ni président, et il insiste
411 ivil allemand lorsqu’on lui offrit le pouvoir. Qu’ est -il donc ? Selon l’un des théoriciens du iiie Reich, il est « celui q
412 c ? Selon l’un des théoriciens du iiie Reich, il est « celui qu’on ne peut pas définir ». Celui, comme je le disais, qui n
413 t pas définir ». Celui, comme je le disais, qui n’ est rien et qui est tout. Un lieu de passage des forces de l’Histoire, le
414 Celui, comme je le disais, qui n’est rien et qui est tout. Un lieu de passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de c
415 s de l’Histoire, le catalyseur de ces forces, qui sont là dressées devant vous, suscitées et coalisées par sa parole brutale
416 rriez le supprimer sans rien détruire de ce qui s’ est fait par lui. Le seul trait qui me frappe encore en lui, si je le reg
417 utant que l’individu ne compte plus, comme tel, n’ est que le support ou le médium d’une puissance qui échappe à nos psychol
418 unich, en tête-à-tête avec cet homme-symbole ! Il est clair que le phénomène Hitler est d’ordre religieux, non politique d’
419 me-symbole ! Il est clair que le phénomène Hitler est d’ordre religieux, non politique d’abord. Si ce petit individu sans q
420 sons de se dévouer corps et âme à un absolu. Il s’ est donné pour l’Absolu, la Providence, le Destin des Allemands. Il a fai
421 des miracles et dit des prophéties — et elles se sont réalisées — non pas au nom du Christ, mais au nom des idoles, au nom
422 apparence), que les prophètes de Jéhovah. Hitler est à mes yeux le type du faux prophète, celui qui annonce aux hommes le
423 t pourquoi notre vraie défense contre lui ne peut être que notre foi. La contre-épreuve de ce jugement, je la vois dans deux
424 use qu’ait rencontrée l’hitlérisme en Allemagne n’ est autre que la résistance des Églises chrétiennes. Le second, c’est que
425 vinistes allemands), le pasteur Martin Niemöller, est actuellement « prisonnier personnel » du Führer pour dix ans. Cas uni
426 histoire confuse. p. Rougemont Denis de, « Qui est Hitler ? », L’Hebdomadaire du temps présent, Paris, 24 février 1939,
12 1939, Articles divers (1938-1940). Il y a toujours des directeurs de conscience en Occident (juin 1939)
427 es. D’accord avec votre jugement global, je ne le suis guère avec votre description. La direction de conscience est affaire
428 vec votre description. La direction de conscience est affaire de contacts personnels, non d’influence collective. J’écarte
429 ux lettres de lecteurs : un Gide, un Claudel… Ils sont rares. Restent les médecins de famille : ce n’est pas nouveau. Et les
430 ont rares. Restent les médecins de famille : ce n’ est pas nouveau. Et les psychanalystes : c’est pratiquement limité au trè
431 ment limité au très petit nombre de personnes qui sont en mesure de les payer. Seules les directrices de magazines féminins
432 consultations personnelles. Quant aux meneurs, ce sont évidemment des directeurs d’inconscience collective. Leur méthode con
433 à supprimer brutalement les données du problème, est d’ailleurs la conséquence nécessaire de notre anarchie morale. Et cet
434 t avant tout se préoccuper de le prendre là où il est , et commencer là. Voilà le secret de tout secours… Pour aider réellem
435 ersiste cependant à faire valoir ma science, ce n’ est plus alors que par vanité ou par orgueil, de sorte qu’au fond, au lie
436 che à me faire admirer de lui ». (Kierkegaard) Qu’ est -ce en effet que diriger ? C’est donner un sens. Or tout sens est défi
437 que diriger ? C’est donner un sens. Or tout sens est défini par deux points : le point de départ et le point d’arrivée. Ou
438 prochain, doit d’abord « prendre l’homme là où il est  », et ensuite, il doit « en savoir davantage que lui », c’est-à-dire
439 qu’il doit connaître un but de vie meilleur. S’il est vrai que d’abord, il s’agit de partir de l’homme réel (ce que ne peuv
440 que ne peuvent faire les meneurs de masses), il n’ est pas moins vrai qu’en fin de compte, l’activité de directeur de consci
441 es conduire vers leur plénitude. Un universalisme est donc souhaitable. Et tout le monde est d’accord pour le souhaiter. Ma
442 versalisme est donc souhaitable. Et tout le monde est d’accord pour le souhaiter. Mais qui peut « inventer » une orthodoxie
443 faut, tout universalisme imaginé par nos cerveaux sera frappé du même vice que les orthodoxies que vous condamnez : parti qu
444 qui veut se faire aussi grand que le tout. Que ce soit le parti de la Raison, ou de la Liberté, ou de l’Humanité, etc. Aussi
445 its en se tirant par les cheveux, aussi vrai nous est -il impossible de nous hausser jusqu’à l’universel avec l’aide de nos
446 iversel avec l’aide de nos idéaux : car eux aussi sont dans le puits. Je ne connais pas de doctrine universelle, d’universal
447 e plan terrestre, dans l’homme. Seul un point qui serait au-delà de notre monde pourrait devenir le point de convergence de to
448 qu’à celles de nos sens. Ainsi la foi chrétienne est universaliste dans son élan et dans son espérance au-delà des diversi
449 diversités confessionnelles et dogmatiques3. Elle est réellement totalitaire, parce qu’elle attend dans la prière et l’obéi
450 et encore moins d’un retour au christianisme. Ce serait émettre un non-sens. La foi est toujours en avant, elle s’élance vers
451 istianisme. Ce serait émettre un non-sens. La foi est toujours en avant, elle s’élance vers les « choses espérées ». Elle n
452 fait de la pluralité des orthodoxies chrétiennes est un scandale, mais un scandale dont seuls les chrétiens confessants pe
13 1939, Articles divers (1938-1940). Nicolas de Flue vu par Denis de Rougemont (8 juillet 1939)
453 te. Deux immenses pianos, encombrés de manuscrits tiennent conseil au centre de la pièce. Des livres envahissent des placards. U
454 musique sur un texte de Denis de Rougemont. Elle sera représentée à l’Exposition de Zurich et offerte au public suisse par
455 gemont à une de mes questions. Et ces différences sont  ? Il a fallu se plier aux conditions données par la scène, ce qui res
456 ation oblige à creuser en profondeur. Tout ce qui est inutile devient ennuyeux et lourd, car il ne faut pas songer au talen
457 talent des acteurs pour sauver un texte si besoin est … Et pourquoi donc ? La scène de Zurich est immense et se trouve dans
458 besoin est… Et pourquoi donc ? La scène de Zurich est immense et se trouve dans une salle ouverte. En outre, la scène compr
459 Immédiatement on sent que les effets à obtenir ne seront pas le résultat d’une action individualiste, mais collective. Et comm
460 entraîne avec lui un des composants du spectacle, soit la foule, soit le chœur. Il est l’axe autour duquel tourne cette lége
461 ui un des composants du spectacle, soit la foule, soit le chœur. Il est l’axe autour duquel tourne cette légende dramatique.
462 ts du spectacle, soit la foule, soit le chœur. Il est l’axe autour duquel tourne cette légende dramatique. Outre ces dispos
463 le en slogans, si on peut dire ainsi. Ses paroles sont très concentrées et expriment une vérité massive qui doit frapper le
464 dans la pénombre… Je précise encore que la salle est ouverte, et que la légende sera plus collective qu’individuelle. Main
465 ncore que la salle est ouverte, et que la légende sera plus collective qu’individuelle. Maintenant, je me tourne du côté d’A
466 que les cuivres. Si je comprends bien, les chœurs seront l’acteur numéro 1 du spectacle. Exactement. Et j’ai composé ma musiqu
467 rfois une phrase, émergera de la masse sonore. Ce sera comme un cri répété plusieurs fois. Et la conversation continue longu
14 1939, Articles divers (1938-1940). Du mythe de Tristan et Iseut à l’hitlérisme (14 juillet 1939)
468 t Iseut à l’hitlérisme (14 juillet 1939)u v Il était juste que Denis de Rougemont, cet homme sans domicile, ou plutôt aux
469 , à ce qu’il me semble. Entre deux averses de cet été inclément, nous pouvons profiter du petit jardin de la NRF. C’est un
470 ssi sincères que peu répandues, ce jeune écrivain est en passe de se faire dans la littérature une place bien à lui et qui
471 dans la littérature une place bien à lui et qui n’ est pas des moindres. Ce fils de la libre Suisse, qui a hérité de la cons
472 ne des ailes à la plus austère exégèse. Peut-être est -ce parce qu’il sait « penser avec ses mains ». ⁂ Mais revenons au jar
473 ins ». ⁂ Mais revenons au jardin de la NRF, où je suis venue lui parler de l’amour, ou plutôt de L’Amour et l’Occident, son
474 en chômage, et surtout au Journal d’Allemagne qui fut accueilli avec une telle faveur par tous ceux qui pensent librement.
475 ceux qui pensent librement. Toutes les questions sont indiscrètes, répond Denis de Rougemont avec ce demi-sourire en coin q
476 actuel que beaucoup d’autres. La crise du mariage est un des problèmes les plus brûlants de la société d’aujourd’hui, et c’
477 cadence de la conception du mariage. Les idées me sont venues en travaillant. Les livres que j’ai lus m’ont mis sur la piste
478 dans la littérature, à l’amour et la guerre, ont été trouvés en cours de route. Mais les hypothèses historiques que j’y dé
479 s les hypothèses historiques que j’y développe ne sont pas indispensables à l’essence du livre qui pourrait se concevoir en
480 on plus des relations économiques, mais de ce qui est sacré dans la sociologie, que j’en suis arrivé à envisager les problè
481 de ce qui est sacré dans la sociologie, que j’en suis arrivé à envisager les problèmes collectifs. Tristan symbolise la man
482 t le xiie siècle considérait l’amour. Le mythe n’ est pas un sujet individuel inventé par un romancier. C’est une légende r
483 ’est un problème sur lequel les érudits eux-mêmes sont en désaccord, au point de renoncer à toute explication. Mais vous ave
484 e. Par ailleurs, on sait que certains troubadours étaient cathares, des travaux tout à fait récents, publiés en même temps que
485 issaient les mêmes germes, seulement la passion y était considérée comme une maladie ou folie. À partir du xiie siècle, sous
486 ue-t-il. Il n’aime pas Iseut de charité, dans son être véritable. À la différence d’Agapè, l’amour chrétien de la personne,
487 hrétien de la personne, Éros, le désir sans fin n’ est que la projection de l’idéal de l’amant sur un autre être. On ne peut
488 la projection de l’idéal de l’amant sur un autre être . On ne peut pas épouser une femme comme Iseut, parce qu’alors on verr
489 on verrait la femme réelle. Iseut épousée cesse d’ être Iseut pour devenir madame Tristan, ce qu’on ne saurait imaginer. Pour
490 it imaginer. Pour conserver leurs illusions, deux êtres ne peuvent s’aimer que dans l’atmosphère où ils se sont rencontrés. N
491 e peuvent s’aimer que dans l’atmosphère où ils se sont rencontrés. N’est-ce pas d’ailleurs le thème constant de tous les rom
492 ue dans l’atmosphère où ils se sont rencontrés. N’ est -ce pas d’ailleurs le thème constant de tous les romanciers ? Ainsi, s
493 de tous les romanciers ? Ainsi, selon vous, il n’ est pas de synthèse possible entre Éros et Agapè ? J’ai tenté une esquiss
494 avez réhabilité les problèmes de la passion qui n’ étaient pas jusqu’à présent objet de littérature sérieuse. Il est rare, en ef
495 jusqu’à présent objet de littérature sérieuse. Il est rare, en effet, qu’on en ait parlé en France comme de problèmes série
496 miner impartialement « son » problème. Comment en êtes -vous venu à envisager le parallélisme entre la guerre et l’amour ? Je
497 ec des règles, un commencement et une fin, ce qui est la définition même du jeu. Certes, on ne peut pas passer directement
498 à l’appui de cette thèse. Les peuples connus pour être des peuples guerriers sont aussi les peuples qui aiment l’amour. Les
499 es peuples connus pour être des peuples guerriers sont aussi les peuples qui aiment l’amour. Les peuples les plus guerriers
500 ui aiment l’amour. Les peuples les plus guerriers sont l’Espagne et la France ; l’Allemagne ne vient que loin derrière, — l’
501 emand. Quand les formes se disloquent, le mythe n’ est plus un mythe, mais une réaction antisociale ; l’anarchie des mœurs a
502 ent à une mise au pas faute de laquelle toute vie serait impossible. C’est ce qui se produit en Allemagne ou en Russie. C’est
503 agne ou en Russie. C’est en ce sens que mon livre est actuel. Je n’ai pas choisi ce qu’on appelle communément un sujet d’ac
504 estions qui se posent au niveau le plus profond a été négligée aussi bien par le marxisme que par l’économie bourgeoise. Et
505 rt sur un point particulier, précise-t-il, cela m’ est indifférent. Les faits que je rapporte servent davantage à illustrer
506 loge présentement dans un clair studio qui lui a été prêté par un de ses confrères en matière de « journal ». La NRF conti
15 1939, Articles divers (1938-1940). Comment j’ai écrit Nicolas de Flue (3 novembre 1939)
507  Alléluia ! » parce qu’un homme a osé, quand tout était perdu, croire encore au miracle et l’accomplir ! Le message de l’ermi
508 pe d’aujourd’hui. Il n’y avait plus à hésiter. Je tenais enfin le grand sujet. La pièce fut écrite, le musicien trouvé — Honeg
509 hésiter. Je tenais enfin le grand sujet. La pièce fut écrite, le musicien trouvé — Honegger, le puissant auteur du Roi Davi
510 temps. Elle vit encore au cœur des Suisses. Elle est encore le grand symbole de notre Confédération et de sa mission en Eu
511 6 novembre, quelques scènes typiques de la pièce seront exécutées à votre intention par les acteurs, choristes et musiciens q
512 ion par les acteurs, choristes et musiciens qui s’ étaient préparés pour Zurich. (Compagnie de la Saint-Grégoire, Chorales du Lo
513 on, régie de M. Jean Kiehl.) Beaucoup d’entre eux sont comme moi, mobilisés. Remercions l’armée de leur avoir accordé les co
16 1939, Articles divers (1938-1940). Pourquoi nous sommes là (décembre 1939)
514 Pourquoi nous sommes là (décembre 1939)x Il neige de gros flocons humides sur un vallon
515 demande encore, devant ce papier blanc : pourquoi sommes -nous là, — quelque part, — loin de tout ce qui faisait notre vie ? Il
516 vie ? Il faudrait essayer de répondre. L’homme n’ est pas né pour faire n’importe quoi, sans rien comprendre. À quelques ki
517 au pas militaire, de son arrogance étatique. Nous sommes ici à patauger parce que les peuples autour de nous font la guerre, e
518 s, la plus belle promesse ! Maintenant, la preuve est faite, attestée par le sang, que la solution suisse et fédérale est s
519 e par le sang, que la solution suisse et fédérale est seule capable de fonder la paix, puisque l’autre aboutit à la guerre.
520 a paix, puisque l’autre aboutit à la guerre. Ce n’ est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent
521 rre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le reconnaître avec une tragique éviden
522 possible de l’Europe. Le seul lieu où cet avenir soit , d’ores et déjà, un présent. Il ne s’agit pas de grands mots, de lyri
523 ’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fait, si nous sommes là, ce n’est pas pour défendre des fromages, des conseils d’administr
524 ’agit de voir qu’en fait, si nous sommes là, ce n’ est pas pour défendre des fromages, des conseils d’administration, notre
525 cela aussi bien que nous — peut-être mieux ! Ce n’ est pas non plus pour protéger nos « lacs d’azur » et nos « glaciers subl
526 olontiers de ce travail de Heimatschutz.) Si nous sommes là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsables, dep
527 mmes là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsables, depuis des siècles, devant l’Europe. D’autres se sont c
528 depuis des siècles, devant l’Europe. D’autres se sont chargés d’arrêter les brigands qui voulaient profiter de sa faiblesse
529 ands qui voulaient profiter de sa faiblesse. Nous sommes chargés de la défendre contre elle-même, de garder son trésor, d’affi
530 III/20. x. Rougemont Denis de, « Pourquoi nous sommes là », La DAC, Berne, décembre 1939, p. 1.
17 1939, Articles divers (1938-1940). Nicolas de Flue : naissance d’un drame (Noël 1939)
531 re de l’an dernier, au milieu de l’après-midi, je fus appelé au téléphone par un ami. Était-ce la guerre qu’on attendait d’
532 près-midi, je fus appelé au téléphone par un ami. Était -ce la guerre qu’on attendait d’une heure à l’autre ? C’était Munich,
533 n’arrangeait pas mes affaires. Car voici ce qui m’ était arrivé. Deux semaines auparavant, à Venise, j’écoutais Honegger dirig
534 défiais quiconque d’en trouver un, en Suisse, qui fût de taille à occuper l’énorme scène dont j’avais vu les plans. On insi
535 ois jours « pour réfléchir », et n’en fis rien. J’ étais certain qu’avant le terme, la catastrophe réglerait tout. Sur quoi, l
536 de Nicolas sauve la paix à la onzième heure, ce n’ est plus un souvenir de manuel, c’est le Munich des Suisses, c’est l’éter
537 de la paix, toujours immérité… Au matin, la pièce était faite. Non pas écrite, bien entendu, mais tout entière organisée et d
538 organisée et déployée dans mon esprit. Elle ne s’ est guère modifiée depuis lors. Dès les premiers instants, le paradoxe te
539 ers instants, le paradoxe technique de ce drame m’ était clairement apparu : il s’agissait de peupler une scène immense autour
540 on, je m’adressai à Honegger. En trois mois, tout fut terminé. Mois heureux, où le temps s’écoulait au rythme même de l’œuv
541 re en marche. L’accord du musicien et de l’auteur était si parfaitement préétabli que je ne fus pas étonné de retrouver, dans
542 ’auteur était si parfaitement préétabli que je ne fus pas étonné de retrouver, dans la partition d’Honegger, certains trait
543 osant mes chœurs et mes récitatifs, — et que je m’ étais bien gardé de lui chanter ! On sait la suite : tout était prêt, quand
544 en gardé de lui chanter ! On sait la suite : tout était prêt, quand septembre 1939 vint détruire ce qu’avait engendré Munich.
545 ent de deux séries de faits sans aucun lien… Quel sera le destin de ce drame ? Celui de la paix, je le répète. Joignons alor
546 laus, par Mlle de Segesser, avec l’espoir qu’elle soit bientôt traduite. C’est un excellent travail d’histoire revécue. z.
18 1940, Articles divers (1938-1940). L’homme au poignard enguirlandé (1940)
547 njures : « Tu mens plus largement que ta gueule n’ est fendue !… Tu t’es creusé un trou en terre comme un cochon dans son fu
548 plus largement que ta gueule n’est fendue !… Tu t’ es creusé un trou en terre comme un cochon dans son fumier !… Ô toi mon
549 t à quitter la guerre il n’y faut plus songer, ce serait quitter du même pas la planète… ⁂ Un vers du temps — d’un peu plus ta
550 ans toute son œuvre, au cœur de son lyrisme, elle tient le lieu de la passion d’amour, et c’est elle qu’il invite à la danse
551 nt d’autres, connus ou anonymes, dira-t-on que ce fut leur romantisme ? Mais non, le romantisme est littéraire, et ces homm
552 ce fut leur romantisme ? Mais non, le romantisme est littéraire, et ces hommes ont le regard net, accoutumé à taxer le rée
553 une dure exactitude : face au danger. Leur Suisse est au sommet de son élan vers la conquête et la richesse ; au comble de
554 e de sa gloire, et de son risque. Elle n’a jamais été moins neutre, moins confinée dans ses moyennes, ni moins en garde con
555 garde contre les tentations de la grandeur. Elle est sérieuse parce qu’elle est menacée et menaçante ; parce qu’elle est t
556 s de la grandeur. Elle est sérieuse parce qu’elle est menacée et menaçante ; parce qu’elle est tout le contraire d’un pays
557 qu’elle est menacée et menaçante ; parce qu’elle est tout le contraire d’un pays d’« assurés ». Sérieuse et impétueuse, co
558 et impétueuse, comme ceux qui savent que la vie n’ est pas le but de la vie, qu’elle ne mérite pas de majuscule, et qu’elle
559 e, qu’elle ne mérite pas de majuscule, et qu’elle est quelque chose qui doit brûler, flamber, et non pas rapporter du trois
560 ent et disent à leur manière que de demain rien n’ est certain. Mais ce qu’ils sentent menacé, ce n’est point la jeunesse et
561 ’est certain. Mais ce qu’ils sentent menacé, ce n’ est point la jeunesse et l’amour, je ne sais quel printemps platonicien,
562 ver sur la terre. » Le secret de la vie généreuse est la conscience de sa brève vanité. Dix-huit siècles de chrétienté ont
563 e à l’énergie dans la libre invention lyrique, ce sont là des secrets spirituels dont la plupart des artistes modernes parai
564 tes modernes paraissent ignorer même l’existence, soit qu’ils rêvassent dans la couleur ou cernent brutalement des figures s
565 nent brutalement des figures sans mystère. Manuel est un nerveux, mais de ferme écriture : un imaginatif, mais sans excitat
566 n ; un homme qui prend les choses telles qu’elles sont , ni vulgaires ni belles en soi, mais les compose avec une liberté pui
567 n réalisme ne fait pas d’histoires, parce qu’il n’ est pas une polémique mais une acceptation des choses, à toutes fins util
568 ues de l’usage, et dominée par quelques Alpes qui sont des vagues à peine figées dans leur élan. Une Suisse réelle, et non p
569 . ⁂ Mais je m’attarde à ces tableaux, et Manuel n’ est pas un « artiste » au sens moderne et bien suspect du terme. Un beau
570 forme. Il écrira d’abord des jeux de carnaval qui sont en vérité bien plus que des satires « contre le pape et sa séquelle »
571 ismes illustrés, tout comme sa Danse des morts en était un. Le premier jeu se termine sur ce vers : Amen. Scellé avec le poi
572 ogramme, enguirlandé au coin de ses tableaux ; ce sera l’arme réelle du guerrier suisse, signe des vieilles libertés ; et ma
573 un « qu’il a fait un peu tous les métiers », ce n’ est pas un éloge, il s’en faut, c’est plutôt une manière de lui refuser c
574 andeur d’un Manuel, et de plusieurs à son époque, est d’avoir su conduire leur vie vers un but qui transcende toutes nos ac
575 n sens. Si l’art n’y suffit pas, c’est que le mal est profond : d’où la nécessité d’agir sur la cité. Si la cité n’a plus d
576 la Renaissance ». Rappelons alors que ce guerrier fut bon époux, et bon père de six enfants ; que cet artiste, l’un des plu
577 ue cet artiste, l’un des plus grands de son pays, fut aussi le plus raisonnable parmi les chefs de la Réformation. L’année
578 e jour aux séances du Conseil de Berne. Le 16, il est signalé comme absent. Le 18 on le confirme dans sa charge de banneret
579 rme dans sa charge de banneret. Le 20 avril, il n’ est plus. « Pareil au cierge qui se consume d’autant plus vite qu’il a mi
580 d. À la bataille de la Bicoque, les lansquenets s’ étaient dissimulés dans des tranchées, pendant que leur artillerie décimait l
19 1940, Articles divers (1938-1940). Mission spéciale (1940)
581 ale : un pour tous, mais aussi tous pour un. Nous sommes ici, mobilisés, parce que les peuples autour de nous se font la guerr
582 progressivement. La guerre actuelle, quels qu’en soient les fauteurs, se trouve être dans son principe la guerre la plus anti
583 uelle, quels qu’en soient les fauteurs, se trouve être dans son principe la guerre la plus antisuisse de l’histoire. C’est d
584 mps la plus belle promesse ! Maintenant la preuve est faite, attestée par le sang, que la solution suisse et fédérale est s
585 e par le sang, que la solution suisse et fédérale est seule capable de fonder la paix, puisque les autres aboutissent à la
586 puisque les autres aboutissent à la guerre. Ce n’ est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent
587 rre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le reconnaître avec une tragique éviden
588 possible de l’Europe. Le seul lieu où cet avenir soit , d’ores et déjà, un présent. Il ne s’agit pas de grands mots, de lyri
589 ’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fait, si nous sommes là, ce n’est pas pour défendre d’abord notre fameux confort moderne.
590 ’agit de voir qu’en fait, si nous sommes là, ce n’ est pas pour défendre d’abord notre fameux confort moderne. Ce n’est pas
591 fendre d’abord notre fameux confort moderne. Ce n’ est pas seulement pour protéger nos « lacs d’azur » et nos « glaciers sub
592 cs d’azur » et nos « glaciers sublimes ». Si nous sommes là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsables depu
593 mmes là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsables depuis des siècles, depuis les temps du Saint-Empire : n
594 mpire : notre mission vis-à-vis de l’Europe. Nous sommes chargés de la défendre contre elle-même, de garder son trésor, d’affi
595 d’affirmer sa santé, et de sauver son avenir. Tel est le sens de notre indépendance, et telle est la mission spéciale qui j
596 . Tel est le sens de notre indépendance, et telle est la mission spéciale qui justifie notre neutralité. av. Rougemont D
20 1940, Articles divers (1938-1940). D’un certain cafard helvétique (janvier 1940)
597 ractions. Les hommes qui se battent, par exemple, sont moralement en meilleure forme que ceux qui, à l’arrière, essaient de
598 nais rien de plus démoralisant que le sentiment d’ être entravé dans son action. C’est bien pire qu’une totale et irrémédiabl
599 ut pas courir pour attraper un train, parce qu’on est empêtré dans ses draps. Or c’est à cette sorte-là de démoralisation e
600 se, qui voudraient travailler pour leur pays, qui sont pleins de projets et d’espoirs, qui ont cru en septembre 1939 que not
601 précédent, — et qui, après trois ou quatre mois, sont en train comme on dit de se dégonfler. Pourquoi ? Parce que nous somm
602 on dit de se dégonfler. Pourquoi ? Parce que nous sommes un petit pays qui se méfie des grandes entreprises, ou simplement des
603 cette mission, et surtout de la réaliser. La DAC est un de ces moyens ; bien modeste, mais il faut commencer. Et j’en prof
604 ous ceux qui veulent faire quelque chose — et ils sont plus nombreux que jamais — ; ne vous laissez pas engluer par les scep
605 ons agir et réagir. Quand le premier enthousiasme est tombé, l’heure est venue d’une reprise en main, d’un regroupement pou
606 Quand le premier enthousiasme est tombé, l’heure est venue d’une reprise en main, d’un regroupement pour un nouveau départ
21 1940, Articles divers (1938-1940). Les Suisses sont-ils « à la hauteur » de la Suisse ? (20 janvier 1940)
607 Les Suisses sont -ils « à la hauteur » de la Suisse ? (20 janvier 1940)ab La Suisse
608 » de la Suisse ? (20 janvier 1940)ab La Suisse est neutre. La Suisse est belle. On a fait avec cela beaucoup de littérat
609 anvier 1940)ab La Suisse est neutre. La Suisse est belle. On a fait avec cela beaucoup de littérature de manuels, — et e
610 s préserver. Neutralité et beautés naturelles ont été trop longtemps considérées soit d’un point de vue purement sentimenta
611 tés naturelles ont été trop longtemps considérées soit d’un point de vue purement sentimental — comme privilèges de droit di
612 omme privilèges de droit divin du peuple suisse — soit d’un point de vue purement utilitaire ou touristique. C’est-à-dire tr
613 uristique. C’est-à-dire trop haut et trop bas. Il est grand temps d’abandonner cette attitude que beaucoup d’étrangers, hél
614 comme chacun sait… Qu’on y prenne garde : si nous sommes neutres, si nos Alpes sont belles et nos glaciers « sublimes », il n’
615 enne garde : si nous sommes neutres, si nos Alpes sont belles et nos glaciers « sublimes », il n’y a pas là de quoi nous van
616 l n’y a pas là de quoi nous vanter. D’abord, ce n’ est pas notre faute. Car vraiment, nous ne sommes pour rien, nous autres
617 , ce n’est pas notre faute. Car vraiment, nous ne sommes pour rien, nous autres Suisses du xxe siècle, dans notre histoire et
618 est de le mériter. Et de prouver en fait que l’on est seul à pouvoir l’exercer dignement. Or, nous chantons nos lacs d’azur
619 écisément peut tenter certains de nos voisins… Ne seraient -ils pas aussi capables que nous de chanter et de gagner de l’argent,
620 nous de chanter et de gagner de l’argent, si nous étions contraints de leur céder la place ? Sommes-nous vraiment plus dignes
621 i nous étions contraints de leur céder la place ? Sommes -nous vraiment plus dignes et plus conscients que d’autres des « charg
622 agnifiques, pleines de la grandeur de Dieu. Je me suis retourné, me demandant à quel être supérieur et choisi la nature serv
623 de Dieu. Je me suis retourné, me demandant à quel être supérieur et choisi la nature servait ce merveilleux festin de montag
624 moin, en effet, un seul, car du reste l’esplanade était sauvage, abrupte et déserte. Je n’oublierai cela de ma vie. Dans une
625 gardait au hasard devant lui. Ô abîme ! les Alpes étaient le spectacle, le spectateur était un crétin. Je me suis perdu dans ce
626 e ! les Alpes étaient le spectacle, le spectateur était un crétin. Je me suis perdu dans cette effrayante antithèse : l’homme
627 e spectacle, le spectateur était un crétin. Je me suis perdu dans cette effrayante antithèse : l’homme opposé à la nature ;
628  la posture la plus misérable de l’homme ». Et je suis loin de penser que nous sommes des crétins ! Je dis seulement qu’en f
629 de l’homme ». Et je suis loin de penser que nous sommes des crétins ! Je dis seulement qu’en face de cette nature dans son at
630 tte nature dans son attitude superbe, il s’agit d’ être moralement « à la hauteur ». Non, ce n’est pas si facile que cela d’h
631 git d’être moralement « à la hauteur ». Non, ce n’ est pas si facile que cela d’habiter et de posséder un pays dont l’altièr
632 ire, et qui oublie qu’on peut aussi l’y comparer. Être Suisse, ce n’est pas un « filon ». C’est plutôt une « mission spécial
633 qu’on peut aussi l’y comparer. Être Suisse, ce n’ est pas un « filon ». C’est plutôt une « mission spéciale ». Il y faut au
634 En avant donc, pour mériter cette Suisse qui nous fut donnée ! ab. Rougemont Denis de, « Les Suisses sont-ils “à la haut
635 donnée ! ab. Rougemont Denis de, « Les Suisses sont -ils “à la hauteur” de la Suisse ? », La Coopération, Bâle, 20 janvier
22 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. I : Les voix que rien n’arrête (24 février 1940)
636 que rien n’arrête (24 février 1940)ac ad Nous sommes là, nous sommes prêts. Nous avons élevé autour de ce pays une barrièr
637 te (24 février 1940)ac ad Nous sommes là, nous sommes prêts. Nous avons élevé autour de ce pays une barrière. Nous avons cr
638 los, reclus dans ses sécurités. Et rien ne passe. Sommes -nous bien sûrs que réellement plus rien ne passe ? Certes, toutes ces
639 patriotiques et officiels ? Figurez-vous que vous êtes , en cet instant, devant un poste de radio, et que j’arrête tout exprè
640 ent depuis 1933, la face de l’Europe a changé. Il est temps de nous en rendre compte. Autrefois, et naguère encore, il suff
641 ation. Or voici que depuis quelques années, ce ne sont plus les armées qui conquièrent un pays. Mais c’est d’abord la propag
642 t un pays. Mais c’est d’abord la propagande. Ce n’ est plus le territoire qu’on cherche à envahir, mais c’est en premier lie
643 ne vient qu’en dernier lieu, quand le principal a été fait par les agents secrets et les propagandistes. Et que disent ces
644 utrefois, l’on croyait volontiers que chaque État était voulu de Dieu, et qu’il jouissait par conséquent d’une légitimité ind
645  : elle dit que certains États modernes n’ont pas été créés par Dieu, mais par le traité de Versailles. Et c’est bien vrai.
646 es États, et en particulier les petits États, ont été créés, eux aussi, par d’autres traités plus anciens, qui se trouvent
647 lobe, comme par hasard, tous les pays voisins qui sont trop petits pour se défendre seuls. Au nom de ce concept d’espace vit
648 clare donc que ces États n’ont plus de « raison d’ être historique ». Pour peu qu’elle arrive à le faire croire, soit aux mas
649 que ». Pour peu qu’elle arrive à le faire croire, soit aux masses, soit plutôt à certains dirigeants, la victoire lui est ac
650 u’elle arrive à le faire croire, soit aux masses, soit plutôt à certains dirigeants, la victoire lui est acquise d’avance. E
651 oit plutôt à certains dirigeants, la victoire lui est acquise d’avance. Et les ceintures de fortifications les mieux conçue
652 parce que des centres vitaux du pays, les ordres seront déjà donnés dans la langue de l’envahisseur. Voici alors ce que nous
653 us les Suisses, si nous avons encore une raison d’ être , si nous osons encore le proclamer, et si nous en gardons une conscie
654 euls, à nous Suisses. Elles nous demandent quelle est la Suisse que nous sommes décidés à défendre. Voilà le défi que nous
655 lles nous demandent quelle est la Suisse que nous sommes décidés à défendre. Voilà le défi que nous adresse l’Europe moderne.
656 ous contenter de déclarer que notre Confédération fut « autrefois » voulue par Dieu, il nous faut nous demander, maintenant
657 e défendre la Suisse jusqu’à la mort. Eh bien, il serait fou de mourir pour une Suisse dont nous ne serions pas sûrs qu’elle a
658 serait fou de mourir pour une Suisse dont nous ne serions pas sûrs qu’elle a le droit et le devoir d’exister, devant Dieu. On n
659 ur ne pas dire au dégonflage de ces clichés. Ce n’ est pas pour le stérile plaisir de démolir. Bien au contraire ! Mon entre
660 ir de démolir. Bien au contraire ! Mon entreprise serait inutile, si nous ne cherchions pas ensemble, et surtout si nous ne tr
661 certaines réalités solides qui valent la peine d’ être affirmées sans rhétorique. Je vous ai parlé déjà de notre « nature »5
662 « libertés », puis de notre « neutralité ». Et ce sera pour découvrir le sens positif de ces termes, pour les sauver de la b
23 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. II : Sommes-nous libres ? (2 mars 1940)
663 La Suisse que nous devons défendre. II : Sommes -nous libres ? (2 mars 1940)ae « Nous défendrons nos libertés, répé
664 rix de leur héroïsme civique et militaire, et qui sont un modèle pour l’Europe. » Oui, certes. Mais, en fait, que sont deven
665 pour l’Europe. » Oui, certes. Mais, en fait, que sont devenues ces libertés illustres et antiques, ces privilèges démocrati
666 en vanter pour qu’elles subsistent ? La liberté n’ est pas seulement un privilège que l’on « hérite ». C’est une conquête pe
667 « hérite ». C’est une conquête perpétuelle. Elle est sans doute un héritage « politique ». Mais rien ne se déprécie plus r
668 jouit ne sait pas les mériter par ses manières d’ être et de penser. Un jour, écrit Goethe, les Suisses se délivrèrent d’un
669 e. On les entend dire, jusqu’à satiété, qu’ils se sont affranchis un jour et qu’ils sont demeurés libres. En vérité, derrièr
670 iété, qu’ils se sont affranchis un jour et qu’ils sont demeurés libres. En vérité, derrière leurs murailles, ils ne sont plu
671 bres. En vérité, derrière leurs murailles, ils ne sont plus esclaves que de leurs lois et de leurs coutumes, de leurs commér
672 u xviiie siècle. Les petits tyrans dont il parle étaient peut-être alors les petites oligarchies que la Révolution devait renv
673 évolution devait renverser un peu plus tard. Mais sommes -nous bien certains que pour autant le jugement de Goethe n’est plus d
674 certains que pour autant le jugement de Goethe n’ est plus du tout valable de nos jours ? Sommes-nous bien certains que la
675 Goethe n’est plus du tout valable de nos jours ? Sommes -nous bien certains que la tyrannie de l’opinion publique vaut mieux q
676 publique vaut mieux que celle des aristocrates ? Sommes -nous bien certains que les Suisses sont, plus que d’autres, libérés d
677 rates ? Sommes-nous bien certains que les Suisses sont , plus que d’autres, libérés des préjugés bourgeois ? Sommes-nous bien
678 us que d’autres, libérés des préjugés bourgeois ? Sommes -nous bien certains, enfin, qu’il a suffi à nos pères de s’affranchir
679 us ayons le droit de répéter à tout jamais : nous sommes libres ! Ayons le courage de le reconnaître en toute franchise : la S
680 connaître en toute franchise : la Suisse actuelle est un pays où l’on a peu de « véritable » liberté d’esprit. C’est un pay
681 t que l’autre, celui qui pense différemment, doit être un type dangereux ou très méchant. Ceci pour le plan des idées. Sur l
682 lérant. Qu’il me suffise de remarquer que si nous étions plus chrétiens, nous serions beaucoup plus tolérants dans ce domaine,
683 remarquer que si nous étions plus chrétiens, nous serions beaucoup plus tolérants dans ce domaine, nous aurions beaucoup plus d
684 u’il s’agit de défendre, en ce mois de mars 1940, sont avant tout nos libertés poli­tiques. Je répondrai que nos libertés po
685 e en témoigne. « Une politique de liberté ne peut être faite que par des esprits libres. » Les deux libertés, l’extérieure e
686 ertés, l’extérieure et l’intérieure, ont toujours été liées dans notre histoire. C’est parce que les premiers Suisses avaie
687 lus d’une véritable liberté intérieure qu’ils ont été une proie facile pour l’étranger, pour les armées de la Révolution fr
688 es ne pourront subsister longtemps, et alors c’en sera fait de noire liberté vis-à-vis de l’étranger, c’est-à-dire de notre
689 armée défende quelque chose de valable. Or, quels sont les ennemis intérieurs de notre liberté ? Je n’en désignerai ici que
690 ui vous paraîtront peut-être assez inattendus. Ce sont la paresse d’esprit et l’égalitarisme. Voici ce que j’entends par la
691 urquoi ? Parce qu’on se contentait de dire : elle est pour l’ordre, les bolchévistes sont pour le désordre. Sans se demande
692 de dire : elle est pour l’ordre, les bolchévistes sont pour le désordre. Sans se demander un seul instant de quelle espèce d
693 éritable liberté d’esprit. Notre « égalitarisme » est , lui aussi, une forme de paresse d’esprit, bien plus encore qu’une fo
694 ourd’hui, l’égalitarisme hérité du xixe siècle n’ est plus qu’une dégénérescence de cet instinct démocratique. Il veut tout
695 ans la politique. Un mot encore, pendant que j’en suis à ronchonner. (La prochaine fois, nous parlerons d’une manière « posi
696 quelque chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’ est pas comme jadis la superstition… c’est la préoccupation, la passion d
697 u bien-être matériel. Sa pente, n’en doutons pas, est du côté de la tyrannie. » C’est Vinet qui parlait ainsi, il y a longt
698 nis de, « La Suisse que nous devons défendre II : Sommes -nous libres ? », La Coopération, Bâle, 2 mars 1940, p. 2.
24 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. III : Pourquoi nous devons rester neutres (9 mars 1940)
699 s, sans commencement ni fin imaginables, qui nous serait due sans discussion et même sans contrepartie, et qui représenterait,
700 ège de droit divin. Nous savons que la neutralité est une conception menacée ; qu’elle est en quelque sorte contre nature,
701 a neutralité est une conception menacée ; qu’elle est en quelque sorte contre nature, car l’instinct normal de tout homme l
702 uleversements historiques dont la guerre actuelle est le signe ? Pour certains, qui se disent réalistes, si nous sommes neu
703 ? Pour certains, qui se disent réalistes, si nous sommes neutres, c’est uniquement en vertu de nécessités toutes matérielles :
704 de nécessités toutes matérielles : parce que nous sommes un trop petit pays, parce que notre situation géographique centrale n
705 parti. Notons que cet argument de la nécessité n’ est guère valable que pour nous, Suisses. Nos voisins n’ont aucune raison
706 d’en tenir compte, bien au contraire. Dire : nous sommes neutres uniquement parce que nous sommes trop faibles pour faire la g
707 e : nous sommes neutres uniquement parce que nous sommes trop faibles pour faire la guerre, c’est induire nos voisins dans la
708 yeux d’un chrétien et d’un Suisse, les traités ne seront jamais de simples chiffons de papier ! La Confédération reste fondée
709 e justification militaire à notre neutralité : il serait de l’intérêt des puissances belligérantes de ne point utiliser le pas
710 t Welches et Suisses allemands. Aujourd’hui, nous sommes unanimes… Que reste-t-il donc à répondre à ceux qui nous demanderaien
711 e convaincante pour nos voisins, et par suite, ne sont plus pour nous cette garantie morale dont nous avons un besoin réelle
712 sse a le devoir de rester neutre, ce ne peut donc être qu’au nom d’une réalité qui ne sera ni matérielle ni légale, mais spi
713 ne peut donc être qu’au nom d’une réalité qui ne sera ni matérielle ni légale, mais spirituelle au premier chef ; au nom de
714 éenne. Non, la neutralité de la Suisse ne saurait être un privilège, c’est une charge ! Et ce serait bien mal la défendre qu
715 urait être un privilège, c’est une charge ! Et ce serait bien mal la défendre que de la défendre au nom de nos seuls intérêts,
716 isants. Notre position géographique, par exemple, est un péril certain si l’on ne s’attache qu’à l’aspect matériel des chos
717 De même, la garantie légale de notre neutralité n’ est qu’un chiffon de papier, si l’on veut y voir simplement une garantie
718 un traité signé à Vienne il y a plus de cent ans, soit  ! Mais il ne faudrait pas retenir de ce traité uniquement ce qui nous
719 et son indépendance de toute influence étrangère, sont dans les vrais intérêts de la politique de l’Europe entière. » Et j’e
720 onsidérer dorénavant comme des charges, dont nous sommes responsables vis-à-vis de la communauté européenne. Je voudrais marqu
721 arge autant qu’un privilège, et même le privilège était subordonné à la charge ; il n’avait d’autre but que d’en faciliter l’
722 naturels, n’ont d’autre sens et d’autre raison d’ être que de nous permettre d’accomplir notre mission spéciale de Suisses.
25 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. IV : Notre « mission spéciale » (16 mars 1940)
723 Notre « mission spéciale » (16 mars 1940)ag Il est temps que je définisse ce que j’appelle la mission de la Suisse, ou m
724 nous espérons. C’est très facile à dire, et ce n’ est pas très neuf, en apparence. Mais dès qu’on veut prendre au sérieux c
725 sérieux cette vocation, l’on s’aperçoit que ce n’ est pas si simple. Que signifient ces mots : défendre et illustrer le pri
726 rt on ne saurait attaquer avec succès que si l’on est sûr de ses armes, et solidement appuyé par l’arrière. Quand on parle
727 tion de la Suisse vis-à-vis de l’Europe, nombreux sont ceux qui crient à l’utopie. Beaucoup de gens s’imaginent que les peti
728 ucoup de gens s’imaginent que les petites raisons sont plus réalistes que les grandes. Beaucoup de gens s’imaginent que les
729 aginent que les réalités matérielles et pratiques sont plus sérieuses que les réalités spirituelles, qu’ils traitent volonti
730 aujourd’hui plus qu’à toute autre époque. Car il est clair que la guerre actuelle est une guerre de doctrines et même de r
731 e époque. Car il est clair que la guerre actuelle est une guerre de doctrines et même de religions. Des raisons spirituelle
732 e. Épargnés jusqu’ici par les bombardements, nous sommes engagés comme les autres dans le conflit spirituel. Chose étrange, su
733 s l’avons constaté, à propos de la neutralité, ce sont les faits eux-mêmes qui nous invitent à prendre une attitude active v
734 dre une attitude active vis-à-vis de l’Europe. Ce sont les faits qui rendent insuffisantes nos justifications par l’intérêt.
735 r l’intérêt. De par notre situation de fait, nous sommes , si je puis dire, pratiquement condamnés à l’idéalisme. Mais beaucoup
736 Ils prétendent tenir compte uniquement de ce qui est inscrit dans nos nécessités, dans notre situation géographique et mat
737 affirment que dans toutes ces choses qui peuvent être vues et touchées, nos Alpes, la petitesse de notre territoire, et nos
738 certain sens, ils n’ont pas tort. Une vocation n’ est jamais inscrite en clair dans les faits matériels. Il faut savoir l’y
739 ement, aller au-delà, et dans un sens qui ne peut être révélé que par sa foi. Maintenant donc, il s’agit pour nous tous de r
740 la vocation suisse, d’en revêtir la charge, d’en être les porteurs. Travaillons tout d’abord à la défendre, c’est-à-dire à
741 se trouveraient mieux placés dans ce combat, et d’ être prêt à leur porter main-forte cas échéant. Car tout revient, dans ce
742 ic favorable à des entreprises éventuelles, qu’il serait imprudent de préciser trop vite, mais qui naîtront sans aucun doute,
743 ous les croirons justes et nécessaires. Peut-être est -il encore trop tôt pour mobiliser l’opinion en faveur d’une action de
744 e la Suisse auprès de ses voisins en guerre. Ce n’ est pas encore une mobilisation spirituelle que je réclame, c’est plutôt
745 que je réclame, c’est plutôt une mise de piquet. Soyons prêts à répondre à tout appel, même balbutiant, qui se ferait entendr
746 nous aurons à dire à nos voisins, forts que nous sommes d’une expérience fédéraliste de six siècles. Et surtout, ne dénigrons
747 en sorte que cette réduction d’Europe fédérée qu’ est la Suisse soit au moins de l’ouvrage bien fait, digne d’être exposé e
748 cette réduction d’Europe fédérée qu’est la Suisse soit au moins de l’ouvrage bien fait, digne d’être exposé et en bonne plac
749 sse soit au moins de l’ouvrage bien fait, digne d’ être exposé et en bonne place, comme un modèle valable pour l’Europe de de
750 proche pour s’y mettre. Notre vocation intérieure est pour le moment plus précise que notre vocation européenne : mais je l
751 étroit — du problème. J’estime que le fédéralisme est tout d’abord une réalité morale, et même spirituelle. Et c’est sur ce
752 qui savent souvent tellement mieux que nous ce qu’ est la Suisse. Il nous reste surtout à développer en profondeur ce que j’
753 te l’éthique fédéraliste. Faut-il me résumer ? Ce sera vite fait. Je n’ai développé dans mes articles qu’une seule idée : c’
754  : c’est que la Suisse que nous devons défendre n’ est pas la Suisse des manuels, des cartes postales et des discours, n’est
755 s manuels, des cartes postales et des discours, n’ est pas la Suisse qui se vante de ses beautés, de ses libertés et de sa n
756 ces privilèges les signes d’une mission dont elle est responsable. Une seule idée… Mais si nous l’acceptons, je suis certai
757 ble. Une seule idée… Mais si nous l’acceptons, je suis certain que la plupart des critiques auxquelles j’ai dû me livrer en
758 itimité. Si nous refusons de considérer le fait d’ être Suisses comme une espèce de filon, si nous le considérons tout au con
759 us librement, avec plus de générosité. Alors nous serons en état de mesurer la vraie grandeur des événements actuels, la vraie
760 rôle qui peut nous y attendre. Et parce que nous serons plus conscients de ce que nous avons à donner, nous serons mieux armé
761 us conscients de ce que nous avons à donner, nous serons mieux armés pour défendre la Suisse où Dieu nous veut à son service.
26 1940, Articles divers (1938-1940). Le petit nuage (avril 1940)
762 at contre les chrétiens, quand tout espoir humain était perdu, tout horizon bouché, Athanase prononça ces mots : nubicula est
763 zon bouché, Athanase prononça ces mots : nubicula est , transibit, c’est un petit nuage, il passera. » La semaine passée, je
764 ats-Unis. La première me dit : « Le petit nuage n’ est pas passé. Il passera, et nous serons encore une fois assis au café d
765 petit nuage n’est pas passé. Il passera, et nous serons encore une fois assis au café des Deux Magots. La vie reprendra. Cela
766 l’autre de ces lettres6. Pas d’importance. Ce qui est important, c’est la certitude « qu’il passera ». Que sont nos petits
767 ortant, c’est la certitude « qu’il passera ». Que sont nos petits accès de découragement, ces brumes qu’un léger vent d’avan
768 -printemps suffit à dissiper en cinq minutes ? Qu’ est -ce que cela au regard de la menace énorme qui domine l’Europe d’aujou
769 hui ? Eh bien, cette menace énorme, à son tour, n’ est qu’un tout petit nuage, au regard du Règlement des comptes universels
770 au regard du Règlement des comptes universels que sera notre jugement au dernier jour de tous les temps. Karl Barth nous le
771 petits personnages, ce combat, si « total » qu’il soit , ne saurait figurer pour nous qu’un exercice, une première escarmouch
772 les que le chrétien se doit d’envisager. Elles ne sont pas démesurées. Elles doivent au contraire nous donner la vraie mesur
773 . « C’est un petit nuage, il passera. » Ce mot me fut comme parole d’Évangile quand je le lus l’année dernière. Et je ne me
774 ns un livre interdit (mais je ne pense pas que ce soit à cause de ce passage). L’auteur est l’un des chefs d’un parti que l’
775 pas que ce soit à cause de ce passage). L’auteur est l’un des chefs d’un parti que l’on devine ; écœuré, il vient de démis
776 nner (la scène se passe en 1935) et il s’attend à être abattu par l’un de ces anciens amis. Réfugié dans un hôtel chrétien,
777 s. » Plt D. de Rougemont 6. Bien entendu, si je suis vivant après cette guerre, j’espère que j’aurai mieux à faire qu’à me
27 1940, Articles divers (1938-1940). D’un journal d’attente (pages démodées) (avril 1940)
778 tente (pages démodées) (avril 1940)ai Ceux qui tiennent un journal intime sont d’ordinaire des êtres qui se cherchent, ou qui
779 il 1940)ai Ceux qui tiennent un journal intime sont d’ordinaire des êtres qui se cherchent, ou qui, pour mieux se posséde
780 i tiennent un journal intime sont d’ordinaire des êtres qui se cherchent, ou qui, pour mieux se posséder, fixent d’eux-mêmes
781 rcher, à me vérifier curieusement. Mon vrai désir serait de me donner, à peu près dans le sens où l’on dirait : quoi que je so
782 eu près dans le sens où l’on dirait : quoi que je sois , l’on verra bien ce que cela peut « donner » à l’usage. C’est faute d
783 fication, ou plutôt ne signifiant rien qui puisse être aussitôt mis en œuvre… C’est qu’aucune œuvre n’est plus concevable qu
784 re aussitôt mis en œuvre… C’est qu’aucune œuvre n’ est plus concevable quand l’avenir immédiat ne l’est plus. Toute création
785 ’est plus concevable quand l’avenir immédiat ne l’ est plus. Toute création demande une vacance, un espace qui ne soit mesur
786 te création demande une vacance, un espace qui ne soit mesuré et un temps qui ne soit rythmé que par les lois intimes du suj
787 , un espace qui ne soit mesuré et un temps qui ne soit rythmé que par les lois intimes du sujet fascinant. Chaque œuvre veut
788 à n’écrire que des fragments. Le « journaliste » est l’homme sans lendemain. 5 avril 1939 Ce chef d’État offre, dit-on, d’
789 d’État offre, dit-on, d’évacuer une île dont il s’ est emparé, à condition qu’on lui donne en échange quelque autre territoi
790 contre récompense ». 8 avril 1939 Monsieur Turc a été marin, puis contrebandier, puis douanier. Il cultive aujourd’hui un m
791 ie. — Voyez-vous, me dit-il, pour nous autres, qu’ est -ce que cela fait, ceux qui gouvernent ? Ça peut bien être des Alleman
792 que cela fait, ceux qui gouvernent ? Ça peut bien être des Allemands, ou des Anglais, ou tout ce que vous voudrez, pourvu qu
793 voudrez, pourvu qu’on nous laisse travailler. Qu’ est -ce que cela change ? J’ai semé et taillé comme chaque année. Ils n’on
794 par exemple : j’accusais la culture moderne de s’ être « distinguée » abusivement du peuple, d’avoir ainsi perdu sa sève act
795 ’au contraire, la vraie conscience de la vie ne s’ est maintenue que chez les écrivains savants qui, à force d’ascèse intell
796 oser) ont déchu au-dessous du niveau où la pensée est encore agissante. S’il y a divorce entre culture et masses, ce serait
797 nte. S’il y a divorce entre culture et masses, ce serait moins la faute de la culture que celle des hasards anonymes qui organ
798 perd ses prises et son efficace. En vérité, ce ne sont pas les clercs qui ont trahi, mais plutôt les chrétiens indignes de l
799 s (état de siège proclamé par toute l’Europe), je suis tenté de prendre le contre-pied de mon Journal d’un intellectuel en
800 position que sur celles de communauté. Car s’il n’ est de communion vraie que dans la Vérité elle-même, cette Vérité devient
801 es masses. Déjà, dans la moitié de l’Europe, elle est des Catacombes, et non pas du Forum. On m’a loué de « penser près de
802 oué de « penser près de la vie ». Hélas ! je n’en suis que trop près, — et surtout de la vie des autres ! On voudrait parfoi
803 urtout de la vie des autres ! On voudrait parfois être riche, à seule fin de maintenir certaines distances, — celles-là même
804 e sort de la démocratie dépend de la solution qui sera donnée en fait à ce problème, au cours des mois ou des années qui vie
805 spose dans mon esprit en problèmes de langage. Il est sans cesse question d’achat et de vente, et je remarque que l’acheteu
806 ente, et je remarque que l’acheteur et le vendeur sont nécessairement deux personnes différentes, mais non pas l’acheté et l
807 té et le vendu. L’homme qui agit (achète ou vend) est défini par son action, revêt un rôle, devient une persona ; tandis qu
808 ona ; tandis que l’homme qui subit un acte (qu’il soit acheté ou vendu) se voit assimilé par le langage lui-même à un objet
809 réalistes, selon l’urgence des événements. — « Je suis en pleine cure morale, me dit-il, après quatre ans de fièvre. Mais je
810 vie politique ou intellectuelle, plus personne n’ est vraiment d’aplomb. Nervosité, hystérie, fatigue excessive, ambitions
811 s délirantes, et le tréponème, et j’en passe… Qui est fou, qui ne l’est pas ? » Il me dit hésiter souvent sur ce point, — e
812 e tréponème, et j’en passe… Qui est fou, qui ne l’ est pas ? » Il me dit hésiter souvent sur ce point, — et me donne un écla
813 t : — « Pourquoi vous inquiéter ? Quand la guerre sera là, il sera temps d’y penser. » C’est qu’il ne croit pas à la guerre.
814 quoi vous inquiéter ? Quand la guerre sera là, il sera temps d’y penser. » C’est qu’il ne croit pas à la guerre. Un second :
815 ’écarte pas, bien au contraire. Le premier devoir est de ne point se laisser surprendre. » C’est qu’il ne croit plus à la p
816 paix. Tous les deux ont de bonnes raisons. Car il est vrai que la guerre n’est pas fatale ; vrai tout autant qu’elle est pr
817 e bonnes raisons. Car il est vrai que la guerre n’ est pas fatale ; vrai tout autant qu’elle est probable. Suis-je aux prise
818 uerre n’est pas fatale ; vrai tout autant qu’elle est probable. Suis-je aux prises avec deux tempéraments irréductibles ? O
819 s fatale ; vrai tout autant qu’elle est probable. Suis -je aux prises avec deux tempéraments irréductibles ? Ou bien suffirai
820 le second celle du matin ? 29 avril 1939 Comme il est des stratèges de Café du Commerce — généraux qui n’ont rien à command
821 merce — généraux qui n’ont rien à commander —, il est des « résistants » qui n’ont rien à sauver, et qui ne s’en montrent q
822 chèque.) Historien futur ! — s’il en reste — tels étaient les propos amers qui se tenaient dans le Paris du printemps 1939. M’a
823 l en reste — tels étaient les propos amers qui se tenaient dans le Paris du printemps 1939. M’absoudras-tu de n’avoir su prendre
824 des habitudes où l’énergie s’enlise. Ce besoin d’ être provoqué pour montrer de quoi l’on est capable est si profond, peut-ê
825 besoin d’être provoqué pour montrer de quoi l’on est capable est si profond, peut-être si normal, que j’en viens à me dema
826 re provoqué pour montrer de quoi l’on est capable est si profond, peut-être si normal, que j’en viens à me demander si tout
827 j’en viens à me demander si toutes nos crises ne seraient pas machinées par nous-mêmes, dans notre inconscient collectif. Je pu
828 onscient collectif. Je puis l’avouer parce que je suis un écrivain. Il est admis que ces gens-là ont le droit de dire — pour
829 e puis l’avouer parce que je suis un écrivain. Il est admis que ces gens-là ont le droit de dire — pour le soulagement géné
830 e de cynisme ou de lâcheté. Faut-il penser qu’ils sont plus courageux ? Mais non. Ils sont tout seuls devant leur papier bla
831 penser qu’ils sont plus courageux ? Mais non. Ils sont tout seuls devant leur papier blanc. Les réactions à leur parole sero
832 nt leur papier blanc. Les réactions à leur parole seront lointaines, ou même ils ne les connaîtront jamais… 6 mai 1939 Ce ne s
833 e ils ne les connaîtront jamais… 6 mai 1939 Ce ne sont pas ceux qui la feront qui peuvent avoir peur de la guerre. Car avoir
834 ntrevoir, imaginer ses conséquences, et la guerre est la suppression de toute espèce de conséquences, la privation, d’ores
835 spirituelle la plus extraordinaire du siècle ! Il est des êtres et des drames dont la vérité n’apparaît que dans cet enviro
836 lle la plus extraordinaire du siècle ! Il est des êtres et des drames dont la vérité n’apparaît que dans cet environnement de
837 maginer là-dessus un livre vrai, un livre où tout serait avoué, horreur et charme, à travers la vision d’un saint qui vivrait
838 n de ce temple, un samedi soir, où la Sainte-Cène est partagée dans un silence de catacombes. Centre du monde ! Il s’en va,
839 , avec cette grande Question qu’il porte dans son être , et qui est aussi la grande Réponse ; et les démons s’éveillent sur s
840 grande Question qu’il porte dans son être, et qui est aussi la grande Réponse ; et les démons s’éveillent sur son passage,
841 onde et fait surgir des quotidiennes apparences l’ être touchant, bizarre et pitoyable que chacun de nous dissimule. Alors on
842 verrait le réel, alors on cesserait de haïr, ou d’ être déçu par l’amour, ou de s’inquiéter des rumeurs qui glissent au trave
843 21 mai 1939 Promenade au Bois avec V. O. que j’ai été prendre chez Adrienne Monnier — où elle s’était fait montrer les fame
844 ’ai été prendre chez Adrienne Monnier — où elle s’ était fait montrer les fameuses photos en couleur d’écrivains français et é
845 José Ortega y Gasset. Il y a trois semaines, nous étions ensemble à Orléans, pour la représentation de la Jeanne d’Arc de Clau
846 ’Arc de Claudel et Honegger. Entre-temps, V. O. a tenu le rôle du récitant dans la Perséphone de Stravinsky, à Florence. Ort
847 ’il existe encore ailleurs, précisément, qu’il ne soit pas perdu pour tous, c’est ce qui rend sa perte insupportable à qui c
848 , de tel régime qui nous menace depuis des mois ? Serait -ce à cause de la menace ? Je ne le crois pas. S’il n’y avait pas un b
849 auté qu’ils disent avoir réinventée, dont nous ne sommes pas, et dont nous sentons bien qu’ils nous excluent dans l’intention
850 t haï les sans-culottes avec passion, quand ils n’ étaient encore qu’une troupe désordonnée, incapable — du moins le croyait-on
851 estaurant où j’achève de déjeuner — rive droite — est le type même du restaurant « moderne » conçu par le délire matérialis
852 le délire matérialiste de l’après-guerre. Tout y est laid, désaccordé, géométrique, douloureux pour la vue et pour l’ouïe,
853 et trop éclairé par ce néon rouge ou bleuâtre qui sera , n’en doutons pas, l’éclairage de l’enfer… Les clients : demi-luxe et
854 ntôt de toutes choses, oui, seules les apparences étaient vulgaires ! Au-dessus d’elles, à l’intérieur aussi, se fait entendre
855 ousiasme, déchirant les voiles, du salut qui nous est promis ! 9 juin 1939 « Notre Führer fait une politique d’artiste ! »,
856 -Prés, le printemps parisien, ce soir, tourne à l’ été . La lumière mûrit là-haut, sur le clocher roman de cette église mysté
857 , malgré la ville environnante, à la campagne… Je suis seul et je pense à un bonheur promis, ce revoir qui est pour demain.
858 ul et je pense à un bonheur promis, ce revoir qui est pour demain. Et voici que soudain, un « à venir » m’est rendu, un ryt
859 ur demain. Et voici que soudain, un « à venir » m’ est rendu, un rythme heureux du temps, pour vingt-quatre heures, une plén
860 sir qui vient. Et les ennuis, et l’ennui même, ne seront plus que les petits retards où s’alimente le désir. Les délais de ce
861 s’alimente le désir. Les délais de ce genre nous sont -ils mesurés par la qualité de notre espoir ? Mais quel espoir, alors,
862 ardente ? Si j’y croyais vraiment, sans cesse, je serais heureux sans cesse et en tout lieu ! Si tout dépendait d’un avenir as
863 assez glorieux pour disqualifier nos soucis, tout serait à chaque instant libre et allègre, ouvert sur la seule grande Attente
864 ente… À l’œuvre donc, advienne que pourra ! Que l’ été nous apporte — c’est probable — un nouveau serpent de mer des dictate
865 du temps retrouvé, dans l’instant d’un espoir qui fut pour moi la parabole salutaire ! Substance présente des choses espéré
866 ire ! Substance présente des choses espérées ! Qu’ est -ce que la guerre, et qu’est-ce que cette crise, quand le seul terme r
867 choses espérées ! Qu’est-ce que la guerre, et qu’ est -ce que cette crise, quand le seul terme redoutable est le Jugement qu
868 e que cette crise, quand le seul terme redoutable est le Jugement qui nous délivrera ? Eh quoi ! suffisait-il d’y penser ?
869 d’y penser ? Non, mais il suffira d’y croire. Il est dit : si tu crois, tu vivras. ai. Rougemont Denis de, « D’un journ
28 1940, Articles divers (1938-1940). L’heure sévère (juin 1940)
870 L’heure sévère (juin 1940)aj Il est des pessimistes par tempérament. Leurs propos ne renseignent pas sur
871 Ce qu’il nous faut à l’heure que nous vivons, ce sont des pessimistes réfléchis maîtres d’eux-mêmes, et objectifs. Je dirai
872 objectifs. Je dirai plus : ce qu’il nous faut, ce sont des pessimistes actifs. Des hommes qui pensent et qui agissent confor
873 t conformément à la maxime du Taciturne : « Pas n’ est besoin d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. »
874 ni de réussir pour persévérer. » Or cette espèce est rare en Suisse, comme dans tous les petits pays où l’ère bourgeoise,
875 voici piteusement indignés. Pourtant le précipice était prévu. Mais encore fallait-il y croire. Or le matérialisme modéré dan
876 roire. Or le matérialisme modéré dans lequel nous étions installés nous mettait hors d’état d’imaginer à la fois le sublime et
877 à la fois le sublime et le pire. « Trop beau pour être vrai », c’était un de nos proverbes. Et lorsqu’on nous avertissait de
878 péen, nous répondions : « C’est trop affreux pour être vrai. » À certain document que je ne puis nommer, d’une atterrante pr
879 gandes. Nous nous prétendions « réalistes ». Nous étions simplement incapables d’imaginer quelque chose d’excessif par rapport
880 croire au diable, et ne sait pas le reconnaître, fût -il aussi mal déguisé qu’un grenadier tombé du ciel en parachute pour
881 sévère. Ouvrons les yeux et apprenons ce qu’il en est de notre châtiment. ⁂ L’Europe est en train de payer le prix d’un siè
882 ns ce qu’il en est de notre châtiment. ⁂ L’Europe est en train de payer le prix d’un siècle d’abandon à l’optimisme du Prog
883 ogrès matériel ? Question stupide et irritante, n’ est -ce pas, aux yeux de qui refuse d’envisager la vie comme une totalité
884 éché. Il sait que les inventions humaines peuvent être employées contre l’homme ; que l’aviation n’a nullement transformé le
885 ains. J’écris ceci pendant la bataille de France. Est -il trop tard pour répéter ces vérités élémentaires, que le sérieux de
886 ourtant, les plus grands hommes du dernier siècle furent unanimes à prévoir le destin qui maintenant nous surprend. Nous avons
887 nous ont manqué. Le dossier de ces avertissements est écrasant pour la conscience européenne : vous y trouverez les plus gr
888 trouverez les plus grands noms de la pensée, qui furent aussi les plus cyniquement méconnus. Vous y trouverez les témoignages
889 ectivistes. Nietzsche ricane que le monde moderne est en train d’adopter « une morale de commerçants », et qu’il sera vainc
890 d’adopter « une morale de commerçants », et qu’il sera vaincu par des ascètes féroces. Vinet prévoit que les libertés social
891 quelque chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’ est pas comme jadis la superstition, c’est la préoccupation, la passion d
892 u bien-être matériel. Sa pente, n’en doutons pas, est du côté de la tyrannie. » Et qu’il suffise enfin d’une allusion aux p
893 lleurs irréductiblement divers, je répète qu’elle est écrasante. Elle supprime nos dernières excuses. Nous avons été averti
894 . Elle supprime nos dernières excuses. Nous avons été avertis. Nous avons refusé d’écouter. Et maintenant il faut payer. No
895 mais au contraire parce que Dieu existe, et qu’il est juste dans son châtiment. Il faut payer. Nous adorions l’idole de la
896 fusé obstinément tout ce qui lésait si peu que ce soit notre confort, notre profit, nos égoïsmes de nations, nous voici cont
897 s pires, inévitables et stériles. Le plus étrange est que ces sacrifices se révèlent parfaitement « possibles ». Dès qu’il
898 ersives » certaines réformes sociales qui eussent été dix fois ou vingt fois moins coûteuses que celles qu’entraîne la guer
899 ou du mieux tuer. Eh bien si la peur et la guerre sont seules capables d’obtenir de nous un dépassement de nos égoïsmes que
900 la guerre. Nous avons ce que nous méritons. Nous sommes payés et nous payons selon notre justice à nous. C’est aujourd’hui qu
901 qu’on en mesure l’aune. Ces vérités élémentaires sont dures. Elles ne sont pas originales. Elles sont même grossières, et g
902 ne. Ces vérités élémentaires sont dures. Elles ne sont pas originales. Elles sont même grossières, et gênantes. Certains dir
903 s sont dures. Elles ne sont pas originales. Elles sont même grossières, et gênantes. Certains diront encore qu’elles sont in
904 res, et gênantes. Certains diront encore qu’elles sont inopportunes, à l’heure où nous cherchons des raisons d’espérer. Mais
905 herchons des raisons d’espérer. Mais nul espoir n’ est plus possible, sachons-le, si nous refusons maintenant encore d’envis
906 alut, le seul et le dernier possible — quelle que soit l’issue de la guerre — dépend de notre capacité d’accepter des vérité
907 ité d’accepter des vérités dures. Car tout le mal est venu de les avoir refusées, avant qu’elles montrent leurs effets aux
908 gauche, dont le programme de bonheur obligatoire était le même — avec moins de franchise — que celui de l’ennemi fasciste co
909 dénoncèrent le mal dans leurs écrits, mais qui se tinrent apparemment pour satisfaits de leur succès de librairie : mea culpa.
910 Nous n’avons plus qu’un seul espoir — quelle que soit l’issue de la guerre : obtenir pour l’Europe un statut sursitaire, un
911 ue chose de précis, que je veux dire à temps. Ils sont encore à l’écart de la guerre, et peut-être y resteront-ils. Ils ont
912 s bombardements, quand on ne sait même plus qui a été tué. Un peuple en guerre sauve son moral en se dopant, en forçant l’i
913 ple neutre, en avouant le réel. Avouer ses fautes est une libération dont l’homme sort toujours retrempé. Avouer les fautes
914 le nous donnera la force de préparer l’avenir. Il est dur de reconnaître ces fautes, parce que nous en sommes les complices
915 dur de reconnaître ces fautes, parce que nous en sommes les complices, et que nous aimons les fautifs. Il est dur de les avou
916 les complices, et que nous aimons les fautifs. Il est dur de les avouer, parce que les fautes contraires des autres, en fac
917 omphent tout de même, ou à cause de cela même. Il est dur de reconnaître que ce châtiment, qui nous atteint aussi, est méri
918 nnaître que ce châtiment, qui nous atteint aussi, est mérité ; et qu’il était logique, inévitable, et qu’il n’y a plus qu’à
919 nt, qui nous atteint aussi, est mérité ; et qu’il était logique, inévitable, et qu’il n’y a plus qu’à en tirer les conclusion
920 plus qu’à en tirer les conclusions9. Mais nous ne sommes pas neutres pour rien, pour le confort. Nous ne sommes pas neutres co
921 s pas neutres pour rien, pour le confort. Nous ne sommes pas neutres comme on est rentier. Nous sommes neutres en vue de l’ave
922 r le confort. Nous ne sommes pas neutres comme on est rentier. Nous sommes neutres en vue de l’avenir. C’est là notre missi
923 ne sommes pas neutres comme on est rentier. Nous sommes neutres en vue de l’avenir. C’est là notre mission spéciale, notre re
924 dra, mais je sais que s’il vaut quelque chose, ce sera grâce à l’action personnelle des hommes qui auront su répudier les il
925 . Car ceux-là seuls sauront alors ce qui mérite d’ être sauvé ou recréé. Non pas le droit et la justice dont se réclamaient n
926 goïsmes et celui des gouvernements : tout cela ne sera que ruines et détritus à déblayer, même si les grandes démocraties on
927 tout le reste, ciel et terre, idéaux et réalités, est pulvérisé par les bombes. Au plus fort de la persécution entreprise p
928 perdu, Athanase prononça cette parole : Nubicula est , transibit — c’est un petit nuage, il passera. Ce n’était pas là de l
929 ransibit — c’est un petit nuage, il passera. Ce n’ était pas là de l’optimisme. Athanase prévoyait qu’avec le « petit nuage »
930 . À quoi se raccrocher, que faire encore ? Quelle était l’assurance d’éternité qui permettait à Athanase de dire : c’est un p
931 oses, par la brutalité démesurée des choses, nous sommes réduits à ne plus espérer qu’au nom de l’unique nécessaire : « L’amou
29 1940, Articles divers (1938-1940). Au peuple suisse ! (22 juillet 1940)
932 Au cœur de la révolution européenne, la Suisse est réduite à elle-même. Elle n’a pas d’autre garantie humaine que son ar
933 d’autre espoir que son travail. Cette situation n’ est pas nouvelle dans notre histoire. Elle fut celle de nos grandes victo
934 tion n’est pas nouvelle dans notre histoire. Elle fut celle de nos grandes victoires et de nos grands renouvellements. Nous
935 ncore se croyaient adversaires, découvrent qu’ils sont prêts à travailler ensemble, pour défendre la Suisse et pour la rénov
936 mmes qui prouvent, par leur seule réunion, qu’ils sont assez indépendants pour mériter une confiance nouvelle. Il est temps
937 épendants pour mériter une confiance nouvelle. Il est temps que ces aspirations se réalisent et s’organisent. Il est temps
938 ces aspirations se réalisent et s’organisent. Il est temps que les bonnes volontés deviennent une volonté commune. Nous no
939 olontés deviennent une volonté commune. Nous nous sommes donc groupés pour travailler. Venus de tous les points de l’horizon p
940 cœur de l’Europe et limite des races, le Gothard est le grand symbole autour duquel tous les Confédérés peuvent s’unir dan
941 t s’unir dans leurs diversités. Que tous ceux qui sont las des querelles partisanes, que tous ceux qui viennent d’être démob
942 uerelles partisanes, que tous ceux qui viennent d’ être démobilisés et qui sont prêts à faire du neuf, que tous les aînés qui
943 tous ceux qui viennent d’être démobilisés et qui sont prêts à faire du neuf, que tous les aînés qui voient clair, que tous
944 qui voient clair, que tous les jeunes qui veulent être guidés viennent avec nous pour travailler. Nous n’avons qu’un seul bu
945 grand effort commun. Mais il nous rendra fiers d’ être hommes, et d’être Suisses.   Ligue du Gothard Schauplatzgasse 23, B
946 un. Mais il nous rendra fiers d’être hommes, et d’ être Suisses.   Ligue du Gothard Schauplatzgasse 23, Berne.   Dans quelq
30 1940, Articles divers (1938-1940). Autocritique de la Suisse (août 1940)
947 ût 1940)am an Nul pays, à ma connaissance, n’a été plus souvent expliqué à lui-même et au monde que la Suisse. C’est qu’
948 t qu’il en a besoin plus que nul autre. Sa devise est un paradoxe qu’il n’a pas toujours bien compris. Elle exclut en princ
949 arifions notre langage ! — Puisque le fédéralisme est une forme politique qui suppose l’équilibre vivant entre les droits d
950 haque région et ses devoirs envers l’ensemble, il est absurde de nommer « fédéraliste » un parti qui n’a d’autre programme
951 ux qui se disent, chez nous, « fédéralistes », ne sont souvent, je le crains, que des nationalistes cantonaux. Ceux qui insi
952 eur fédéralisme se résume à combattre tout ce qui est dit fédéral. Comprenne qui pourra ! Cette confusion verbale, symboliq
953 e confusion verbale, symbolique de tant d’autres, est à la base de la plupart de nos conflits politiques, économiques, parl
954 on. Ils se font un programme de ce qui ne saurait être que la maladie individualiste ou la maladie collectiviste de notre Ét
955 À quand le parti de la santé fédéraliste ? Il ne sera ni de gauche ni de droite. Car sous l’opposition, indéfendable en thé
956 on gauche-droite. Les radicaux centralisateurs ne sont que des socialistes qui s’ignorent ; ceux-ci à leur tour ne sont que
957 cialistes qui s’ignorent ; ceux-ci à leur tour ne sont que des totalitaires timorés, c’est-à-dire quelque chose d’absolument
958 béraux » et les conservateurs « fédéralistes » ne sont que des réactionnaires inconséquents : tant que je ne les aurai pas v
959 érieux leurs convictions « fédéralistes » (ce mot étant pris dans leur sens). (Et ce ne sont pas seulement les particuliers,
960 s » (ce mot étant pris dans leur sens). (Et ce ne sont pas seulement les particuliers, propriétaires ou industriels, qui men
961 cations ; mais les cantons les plus conservateurs sont souvent ceux qui, me dit-on, se gênent le moins…10) Or l’opposition g
962 gênent le moins…10) Or l’opposition gauche-droite est étrangère au génie de la Suisse. Son origine parlementaire le prouve 
963 ues françaises. L’idée même de parti, d’ailleurs, est antisuisse, dans ce sens qu’elle est antifédéraliste. Tout parti poli
964 d’ailleurs, est antisuisse, dans ce sens qu’elle est antifédéraliste. Tout parti politique est en puissance un petit État
965 qu’elle est antifédéraliste. Tout parti politique est en puissance un petit État totalitaire et unifié, qui voudrait bien t
966 Les seuls partis qu’une fédération puisse tolérer sont les partis à programme restreint, représentant une région, ou un grou
967 t tout assimiler, tout juger et tout absorber. Il serait temps de se remettre à la Diète ! 3. Suite du précédent. — Comment pe
968 agne et du Pacte germano-russe ? Les Espagnols se sont entretués pendant trois ans, en toute sincérité et en tout héroïsme,
969 er les antihitlériens, qui se trouvent d’ailleurs être les mêmes. (« Réactionnaires et capitalistes internationaux ».) Nos d
970  ».) Nos descendants diront de notre siècle qu’il fut celui des gogos enragés. 4. Paresse d’esprit. — Je parle ici par expé
971 dapter, distinguer, assouplir, traduire : ce ne n’ est pas beaucoup plus difficile ; c’est beaucoup plus intéressant ; et c’
972 plupart des bureaux font tout le contraire, cela tient à la paresse d’esprit des messieurs qui en occupent les fauteuils. Le
973 nfort et la prudence. Ne dites donc plus : « Nous sommes opposés par principe à tout ce qui vient de Berne — sauf les crédits.
974 ez, la révolution nationale dont certains parlent sera faite. Mais autrement, elle ne servira de rien. 5. Notre matérialisme
975 helle des valeurs. Le cadre matériel de notre vie est parfait, mais il n’encadrera bientôt plus aucune vie digne de ce nom.
976 t aux salaires fixes, tandis que moins d’un tiers est consacré au but de l’œuvre. Je vois une revue d’art et de littérature
977 d’entre eux s’étonne, on lui répond que les temps sont difficiles. Je vois que dans le budget moyen d’un ouvrier suisse, le
978 . par an. Je vois enfin que toute notre politique est alourdie et comme paralysée par des soucis budgétaires de cet ordre,
979 quelque chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’ est pas comme jadis la superstition… c’est la préoccupation, la passion d
980 u bien-être matériel. Sa pente, n’en doutons pas, est du côté de la tyrannie. » C’est Vinet qui parlait ainsi, il y a longt
981 ds qui se rétractent au seul mot de germanisme ne sont pas ceux qui sauront illustrer la Suisse romande, donc la défendre. R
982 eur du germanisme, l’ont étudié et l’ont aimé. Ce sont nos meilleurs écrivains. 7. Tolérance. — Le fédéralisme véritable sup
983 énager non seulement la chèvre et le chou, ce qui est humain, mais encore l’agneau… et le loup, ce qui est moins impartial
984 humain, mais encore l’agneau… et le loup, ce qui est moins impartial qu’il ne semble. Ne commettons plus l’imprudence capi
985 uis plusieurs années. De ce point de vue, nous ne sommes plus neutres en fait, nous sommes en guerre parce que victimes d’une
986 de vue, nous ne sommes plus neutres en fait, nous sommes en guerre parce que victimes d’une agression systématique et quotidie
987 tifier nos frontières ? L’intégrité du territoire serait -elle plus importante de nos jours que l’intégrité de la conscience na
988 Celle-là conserve-t-elle son sens quand celle-ci est déjà compromise ? 10. Poésie et prose. — Revenons à la géographie ! d
989 lligérants qui viennent nous dire : « Ceux qui ne sont ni froids ni bouillants seront vomis. » Qu’est-ce que cela signifie,
990 dire : « Ceux qui ne sont ni froids ni bouillants seront vomis. » Qu’est-ce que cela signifie, pratiquement ? Que ceux qui son
991 e sont ni froids ni bouillants seront vomis. » Qu’ est -ce que cela signifie, pratiquement ? Que ceux qui sont froids ou boui
992 ce que cela signifie, pratiquement ? Que ceux qui sont froids ou bouillants seront mangés. Je demande à voir ce qui vaut le
993 iquement ? Que ceux qui sont froids ou bouillants seront mangés. Je demande à voir ce qui vaut le mieux. Il ne faut pas parler
994 ut dépend de ceci : vis-à-vis de quoi, ou de qui, est -on tiède, est-on neutre ? Si c’est vis-à-vis du Christ, la parole éva
995 eci : vis-à-vis de quoi, ou de qui, est-on tiède, est -on neutre ? Si c’est vis-à-vis du Christ, la parole évangélique nous
996 ole évangélique nous apprend que cette neutralité est suprêmement désavantageuse : elle entraîne notre expulsion violente h
997 utres que l’on reste tiède, cette neutralité peut être avantageuse dans certains cas, dans la mesure où elle nous exclut, pr
998 ons mauvais. (Reste à savoir si le conflit actuel est « mauvais ». Puis, si notre tiédeur suffira pour que le monstre de la
999 e le monstre de la guerre nous vomisse… Mais ceci est une autre histoire.) On ferait bien de ne pas utiliser comme des prov
1000 n Royaume, à son Éternité. Répéter que les tièdes seront vomis, en détournant ce verset de son sens spirituel, c’est toujours
1001 même jusqu’à nous affirmer que cette « éternité » est la base officielle de notre politique. Dans ce cas, notre politique r
1002 itique reposerait sur une faute de français, j’en suis fâché. Ce n’est pas éternelle qu’il convient de dire, mais perpétuell
1003 sur une faute de français, j’en suis fâché. Ce n’ est pas éternelle qu’il convient de dire, mais perpétuelle. Se figure-t-o
1004 prenons donc à qui de droit que nul État humain n’ est éternel ; que la Suisse est un État humain ; et que par conséquent l’
1005 que nul État humain n’est éternel ; que la Suisse est un État humain ; et que par conséquent l’épithète « éternelle » ne sa
1006 par la Suisse en politique. De plus, la Suisse n’ est devenue neutre qu’à partir d’un certain moment de son histoire. Or ce
1007 ir d’un certain moment de son histoire. Or ce qui est éternel ne commence pas à un certain moment, en 1648 ou en 1815 par e
1008 ar exemple : tant que notre mission européenne ne sera pas accomplie. (L’Empire fédératif ?) Mais toute politique digne de c
1009 Toujours à gauche, mais pas plus loin. » Pourquoi est -ce comique ? Parce que l’histoire et la politique ne cessent pas de m
1010 as de modifier ces positions toutes relatives que sont la gauche et la droite. Affirmer dans l’absolu une position relative,
1011 absolu une position relative, si légitime qu’elle soit , c’est se condamner à être sans cesse dépassé et ridiculisé par les f
1012 e, si légitime qu’elle soit, c’est se condamner à être sans cesse dépassé et ridiculisé par les faits. 14. Neutralité « mora
1013 opinion. Renoncer au droit de nous exprimer, ce n’ est donc pas nous conformer aux exigences de la neutralité. Ce peut être,
1014 conformer aux exigences de la neutralité. Ce peut être , dans certains cas, une mesure opportune ; mais passé certaine limite
1015 un point décisif pour notre indépendance future, étant donnée la nature des guerres modernes, qui sont d’abord des guerres m
1016 étant donnée la nature des guerres modernes, qui sont d’abord des guerres morales, des guerres de propagande. Quand une tro
1017 ales, des guerres de propagande. Quand une troupe est réduite à l’impuissance par l’adversaire, on ne dit pas qu’elle est n
1018 puissance par l’adversaire, on ne dit pas qu’elle est neutre, on dit qu’elle est neutralisée. Taire nos opinions, aujourd’h
1019 on ne dit pas qu’elle est neutre, on dit qu’elle est neutralisée. Taire nos opinions, aujourd’hui, ce n’est pas rester neu
1020 eutralisée. Taire nos opinions, aujourd’hui, ce n’ est pas rester neutres, c’est accepter d’être neutralisés moralement. Le
1021 ui, ce n’est pas rester neutres, c’est accepter d’ être neutralisés moralement. Le Conseil fédéral a repoussé officiellement
1022 lle l’affirme au contraire ! Le devoir de l’armée est de garantir par la force l’intégrité de notre indépendance, et non pa
1023 édiocrité des vues politiques. Les petits pays ne sont pas dispensés d’imaginer et de voir grand. Bien au contraire : ils so
1024 maginer et de voir grand. Bien au contraire : ils sont contraints de compenser leur petitesse physique par leur prestige mor
1025 récemment découvert qu’un diplomate moderne doit être un expert commercial. Conception bien typique du siècle dernier, où,
1026 e du siècle dernier, où, en effet, la politique n’ était plus guère qu’une annexe des affaires. Rien de plus dangereusement ut
1027 ique que le réalisme d’avant-hier. Notre époque n’ est plus celle du grand commerce ; ni même de la grande industrie (réalis
1028 grande industrie (réalisme d’hier). Notre époque est celle des religions politiques, sociales, nationales. Le commerce, l’
1029 l, ont cessé d’imposer leurs « lois fatales ». Ce sont les chefs qui dictent les prix, les cours des changes, la consommatio
1030 ce — et en particulier à dominer les masses13. Il est temps que la Suisse comprenne que le souci de son économie ne saurait
1031 reste, le fonctionnement technique de la machine, étant l’affaire des fonctionnaires — leur nom l’indique — et des conseiller
1032 e notre gouvernement comprenne ceci : La prudence est le vice des timides et la vertu des audacieux. 10. Peut-être me cro
1033 r pleinement cette déclaration de Spitteler : « N’ est -ce pas un spectacle grotesque que celui d’une feuille de chou qui, sû
1034 olique devenu national-socialiste. 14. « Nous ne sommes pas gouvernés, nous sommes seulement administrés », répète avec raiso
1035 aliste. 14. « Nous ne sommes pas gouvernés, nous sommes seulement administrés », répète avec raison G. de Reynold. am. Roug
1036 on avertissement, le propos, en ces termes : “Ils sont tous nés d’un même souci de la personne et de son rôle dans la commun
1037 nd avant tout à nous faire rentrer en nous-mêmes, est une œuvre forte, un appel viril à la réflexion, un avertissement grav
1038 ement grave et clairvoyant quant à l’avenir. Nous sommes donc particulièrement heureux d’en présenter à nos lecteurs, à titre
31 1940, Articles divers (1938-1940). Henri le Vert ou l’âme alémanique (1940)
1039 es manœuvres dans la campagne bernoise. C’était l’ été , nous traversions des vergers, des jardins et des fermes, dans la gra
1040 dans une nature moins douce, mais plus drue. Je m’ étais bien promis d’y retourner, et c’est encore la mobilisation qui m’y ra
1041 confie que mes premiers loisirs de militaire ont été consacrés à la lecture du grand roman de Gottfried Keller intitulé He
1042 bre ma seconde découverte de l’âme alémanique. Il est à peine croyable que ce roman soit si peu lu chez nous, si mal connu,
1043 alémanique. Il est à peine croyable que ce roman soit si peu lu chez nous, si mal connu, et qu’il n’en existe à cette heure
1044 te heure qu’une seule et unique édition. Car ce n’ est pas seulement l’un des chefs-d’œuvre de la littérature universelle, l
1045 nne action patriotique. Car le patriotisme suisse est d’abord une question d’amitié, et l’amitié suppose une connaissance m
1046 peu plus d’énergie et moins d’esprit critique. Ce sont ces nuances-là qui donnent le ton de la bonne chanson suisse allemand
1047 n modèle du Suisse allemand… Oh, bien sûr, ils ne sont pas tous des Gottfried Keller ou des Henri le Vert. Tous les Français
1048 des Henri le Vert. Tous les Français non plus ne sont pas des Pascal, tous les Allemands ne sont pas des Goethe — loin de l
1049 lus ne sont pas des Pascal, tous les Allemands ne sont pas des Goethe — loin de là… Et cependant, celui qui a compris Pascal
1050 it le meilleur fonds du Suisse allemand dès qu’il est délivré de son sérieux massif. Et alors, dans mon enthousiasme, j’évo
1051 ses maisons aux puissantes assises, ses ours qui furent conquis sur le duc de Milan et ramenés par-dessus les Alpes, — j’évoq
1052 des régionalistes romands qu’un Suisse allemand n’ est pas nécessairement un centraliste ou un Monsieur de Berne ! C’est un
1053 ux de toute espèce, mâles et femelles, ne saurait être plus content que ces hommes avec leur chère petite patrie et les mill
1054 s, par leurs costumes et leurs accents !… Et tout est bon et beau et cher au cœur, — car c’est la patrie. Qu’il est donc ré
1055 eau et cher au cœur, — car c’est la patrie. Qu’il est donc réjouissant que tous les Suisses ne soient pas sortis du même mo
1056 u’il est donc réjouissant que tous les Suisses ne soient pas sortis du même moule, qu’il y ait des Zurichois et des Bernois, d
32 1940, Articles divers (1938-1940). L’heure de la Suisse (1er août 1940)
1057 entre les grands États qui entouraient la Suisse fut notre garantie d’indépendance. Cet équilibre vient d’être rompu. La S
1058 re garantie d’indépendance. Cet équilibre vient d’ être rompu. La Suisse est réduite à elle-même. Quels que soient les sentim
1059 ance. Cet équilibre vient d’être rompu. La Suisse est réduite à elle-même. Quels que soient les sentiments que nourrissent
1060 mpu. La Suisse est réduite à elle-même. Quels que soient les sentiments que nourrissent à son égard ses voisins, elle se voit
1061 es idéologies nouvelles. Nous courons le risque d’ être absorbés économiquement, divisés racialement, manœuvrés moralement pa
1062 trangères. Jamais notre existence indépendante ne fut plus gravement mise en question. Jamais donc, il ne fut plus urgent d
1063 us gravement mise en question. Jamais donc, il ne fut plus urgent de proclamer nos raisons d’être, notre mission confédéral
1064 il ne fut plus urgent de proclamer nos raisons d’ être , notre mission confédérale, et notre volonté de nous en rendre dignes
1065 age du 1er août de cette année : le péril où nous sommes peut devenir notre chance. Il nous sort de nous-mêmes et de nos préju
1066 l’héritage que Dieu nous a confié. Nos raisons d’ être tiennent dans ses deux mots : liberté, solidarité. Deux mots qui fure
1067 ritage que Dieu nous a confié. Nos raisons d’être tiennent dans ses deux mots : liberté, solidarité. Deux mots qui furent pour n
1068 es deux mots : liberté, solidarité. Deux mots qui furent pour nos ancêtres autre chose que des mots flatteurs : des raisons de
1069 des raisons de vivre et de mourir. Notre histoire est celle de la liberté, certes, mais de la liberté menacée, conquise au
1070 a succombé : en 1798. Les causes de cette défaite sont bien connues, elles nous avertissent clairement : discorde politique,
1071 eur reconnut que les habitants du Nidwald avaient été les seuls de toute l’Europe à l’impressionner par leur résistance ; e
1072 a fait votre État fédératif. Vouloir la vaincre n’ est pas d’un homme sage. » (Napoléon, en 1802.) L’idée suisse renaissait,
1073 nt. Il nous montre que de tout temps, la Suisse a été menacée par des puissances dix fois supérieures, et qu’elle ne s’est
1074 puissances dix fois supérieures, et qu’elle ne s’ est maintenue qu’en acceptant la lutte même sans espoir. Un siècle de séc
1075 liser que ceux qui ont oublié comment la Suisse s’ est faite, et à quel prix elle s’est toujours maintenue. Mais on ne se dé
1076 ment la Suisse s’est faite, et à quel prix elle s’ est toujours maintenue. Mais on ne se défend bien qu’en attaquant. On ne
1077 nte des grandes démocraties « ploutocratiques » — est à certains égards une survivance, au milieu de l’Europe totalitaire.
1078 els notre situation rend un pouvoir. Notre force est dans notre union. Or, pour s’unir, il faut d’abord un but commun. Il
1079 gés, et son confort. C’est tout. Le but commun ne fut jamais plus clair. C’est le maintien et la rénovation de la Suisse :
1080 ices matériels ne suffisent pas. Comprenons qu’il est des sacrifices intellectuels non moins indispensables. Quand il y va
1081 -nous, allons chez le voisin et disons-lui : vous étiez de gauche, et moi de droite, mais aujourd’hui nous sommes de Suisse,
1082 e gauche, et moi de droite, mais aujourd’hui nous sommes de Suisse, l’un comme l’autre. Les sacrifices de cette nature sont pe
1083 ’un comme l’autre. Les sacrifices de cette nature sont peut-être plus durs, pour beaucoup, que les restrictions matérielles,
1084 au contraire à notre perte à tous. Ces remarques sont simples et utilisables. Elles ne sont pas originales. Il me suffit qu
1085 s remarques sont simples et utilisables. Elles ne sont pas originales. Il me suffit qu’elles soient chrétiennes. Si mes lect
1086 les ne sont pas originales. Il me suffit qu’elles soient chrétiennes. Si mes lecteurs les approuvent et les mettent en pratiqu
33 1940, Articles divers (1938-1940). Un fondateur de la Ligue du Gothard part pour quatre mois aux États-Unis : M. Denis de Rougemont nous dit… (23 août 1940)
1087 e loin l’évolution de la « Ligue du Gothard » qui est mon idée et celle de mon ami Spoerri, de Zurich, et à laquelle je tie
1088 e de mon ami Spoerri, de Zurich, et à laquelle je tiens . Elle suit d’ailleurs son chemin malgré les torrents d’injures dont e
1089 chemin malgré les torrents d’injures dont elle a été abreuvée et vous pouvez être assuré qu’elle n’a enregistré jusqu’à ce
1090 d’injures dont elle a été abreuvée et vous pouvez être assuré qu’elle n’a enregistré jusqu’à ce jour aucune défection, en dé
1091 ns un parti, car nous nous défendons de vouloir l’ être jamais — ce qui doit logiquement représenter la Suisse d’aujourd’hui.
1092 ien de la Suisse. Le comité directeur de la Ligue est formé de dix hommes dont le plus jeune a 26 ans et le plus âgé 44. C’
1093 te de sénat composé de personnes d’expérience qui seront là pour nous conseiller. Aujourd’hui, la « Ligue du Gothard » est ent
1094 conseiller. Aujourd’hui, la « Ligue du Gothard » est entrée dans une phase active : nous sommes en pleine organisation des
1095 Gothard » est entrée dans une phase active : nous sommes en pleine organisation des équipes cantonales formées de représentant
1096 s de représentants de tous les groupements qui ne sont pas des partis. Nous attachons, vous le voyez, une très grande import
1097 ’avoir la jeunesse avec nous. C’est que nous nous sommes rendu compte que les hommes de 35 ans et moins ne sont pas dans les p
1098 rendu compte que les hommes de 35 ans et moins ne sont pas dans les partis, parce que la politique leur a paru jusqu’à prése
1099 suivante : « M. Denis de Rougemont s’en va. Telle est la nouvelle dont on parlait sous le couvert depuis quelques jours et
1100 s le couvert depuis quelques jours et qui vient d’ être rendue officielle. N’y voyons pas, comme certains se hâteront de le f
1101 Rougemont s’en va en Amérique parce qu’il vient d’ être chargé par la fondation “Pro Helvetia” d’une série de conférences des
1102 de l’Exposition nationale de Zurich et qui ne put être représentée, la guerre ayant éclaté quelques jours avant la première.
1103 emière. Cette légende dramatique, dont la musique est d’Arthur Honegger, sera jouée en oratorio, c’est-à-dire dans sa parti
1104 ramatique, dont la musique est d’Arthur Honegger, sera jouée en oratorio, c’est-à-dire dans sa partition réduite pour un réc
1105 l’Exposition de New York. Ce voyage, on le voit, est sérieusement motivé et ne signifie nullement que M. de Rougemont fuit
34 1940, Articles divers (1938-1940). La Ligue du Gothard : raisons d’espérer (13 septembre 1940)
1106 ui forment une équipe. Passons sur le passé. Nous sommes anticapitalistes et antimarxistes, ni de gauche ni de droite, alliés
1107 r par canton une organisation professionnelle qui est la première mesure à prendre, si l’on veut sauver le pays. Oui, certe
1108 uver le pays. Oui, certes, plusieurs d’entre nous sont « marqués », mais qui ne l’est pas, s’il a fait quelque chose ? Comme
1109 eurs d’entre nous sont « marqués », mais qui ne l’ est pas, s’il a fait quelque chose ? Comme le dit la Lutte syndicale dans
1110 r numéro, il ne faut pas agir comme si personne n’ était capable d’entendre raison et de modifier ses positions. Duttweiler ne
1111 ni aucune organisation. Le peu que nous avons, ce sont des dons personnels. Et nous cherchons, sûrs de trouver dans la mesur
1112 cherchons, sûrs de trouver dans la mesure où nous sommes sûrs de la nécessité de notre Ligue… Les partis ne veulent rien enten
1113 dit son sentiment sur la ligue du Gothard dont il est un membre de la première heure. »