1 1938, Articles divers (1938-1940). Le seul espoir (juin 1938)
1 tutions fondées sur elle. ⁂ La personne, ce n’est pas l’individu enfermé dans ses droits égoïstes. Mais ce n’est pas non pl
2 u enfermé dans ses droits égoïstes. Mais ce n’est pas non plus le « soldat politique » qui n’a plus en lui-même de principe
3 ties méritent encore de porter ce nom, et ne sont pas de simples oligarchies de financiers et de démagogues. Tout ce qui s’
4 sa culture, le foyer de son rayonnement. Ce n’est pas , comme certains veulent le croire, un moyen terme entre anarchie et t
5 la doctrine commune à tous les peuples, elle n’a pas d’autre rôle ni d’autre vocation. Elle n’est pas elle-même une nation
6 pas d’autre rôle ni d’autre vocation. Elle n’est pas elle-même une nation, mais elle est davantage que cela : elle est le
7 tend à nier l’existence de tout ce qui ne serait pas une grande nation monolithique, fondée sur l’unité — toute théorique
8 érale. Notre force, à nous Suisses fédérés, n’est pas dans le nationalisme ! Nous ne sommes pas une nation ; ni trois natio
9 , n’est pas dans le nationalisme ! Nous ne sommes pas une nation ; ni trois nations ; ni même vingt-deux petites nations. N
10 1° nous perdrons notre raison d’être, et il n’est pas d’exemple dans l’Histoire qu’un État qui a perdu sa raison d’être y s
11 serons dépecés en trois Anschluss. Ce n’est donc pas un « idéal fumeux » que j’oppose à la tentation d’un nationalisme hel
12 ent notre grandeur et notre espoir. La Suisse n’a pas de pires ennemis. Ce n’est pas une armée motorisée qui nous sauvera d
13 oir. La Suisse n’a pas de pires ennemis. Ce n’est pas une armée motorisée qui nous sauvera de l’attaque de nos voisins, mêm
2 1938, Articles divers (1938-1940). Souvenir d’Esztergom (juin 1938)
14 de la colline (pour que les vents ne l’emportent pas ), un beau nid de poète : car demeurer ici, c’est demeurer vraiment « 
15 n pleine nature », un peu au-dessus de la plaine, pas tout à fait dans le ciel, là où doivent vivre ceux qui « chantent ».
16 i-même, il y a une enfance dans l’air… ⁂ N’est-ce pas cela, la vraie gloire d’un poète : que son souvenir se confonde — ino
3 1938, Articles divers (1938-1940). « Comment libérer l’État de la tyrannie de l’Argent ? » (10 juin 1938)
17 e au premier chef, et vous savez que je n’entends pas le spirituel au sens évanescent des libéraux, mais bien comme une act
18 , et qui seule est transformatrice. Mais ce n’est pas sur ces voies que vous m’interrogez, je crois. c. Rougemont Denis
4 1938, Articles divers (1938-1940). Le Relèvement de l’Allemagne (1918-1938) par Albert Rivaud (28 octobre 1938)
19 conflit, n’a rien obtenu. En 1938, la guerre n’a pas éclaté, et l’Allemagne a tout obtenu. Les partisans de la résistance
20 auteurs de droite auxquels M. Rivaud ne se cache pas d’appartenir. Les renseignements fournis sur l’économie paysanne sont
21 , en politique et en économie. M. Rivaud ne cache pas l’admiration que lui inspirent les Allemands : c’est qu’il voit dans
22 rance. Et l’on en vient à se demander si ce n’est pas surtout le souci de faire la leçon aux Français « de gauche » qui a p
5 1938, Articles divers (1938-1940). Réponse de Denis de Rougemont, lauréat du prix Rambert 1938 (novembre 1938)
23 nçait portait la date fatidique du 21. Comment ne pas voir dans ces coïncidences un signal amical du destin ? Vous vous tro
24 s de l’auteur et de son public. Or vous n’ignorez pas que mon souci tout helvétique de dire le vrai, fût-il désobligeant, m
25 m’amenait à reconnaître que ces relations ne sont pas bonnes, de nos jours. J’allais même jusqu’à dire, dans mon livre, qu’
26 alomnie, avec tout l’éclat désirable. Et ce n’est pas le moindre titre que vous ayez à ma reconnaissance. Une vieille tradi
27 e humeur belliqueuse qui, Dieu merci, ne trouvait pas à s’exercer dans nos cantons paisibles. Pourquoi n’y aurait-il pas de
28 ans nos cantons paisibles. Pourquoi n’y aurait-il pas de nos jours, sous une forme plus pacifique1, des écrivains qui renou
6 1938, Articles divers (1938-1940). Réponse à l’enquête « Littérature et christianisme » (20 novembre 1938)
29 remment pour un croyant et pour un incroyant. Non pas que leurs données soient différentes. Mais elles n’ont pas le même se
30 eurs données soient différentes. Mais elles n’ont pas le même sens. Je m’explique. Il n’y a pas une manière chrétienne et u
31 s n’ont pas le même sens. Je m’explique. Il n’y a pas une manière chrétienne et une manière athée de réussir une paire de s
32 lle n’est guère visible ? En effet, elle ne l’est pas . Il n’y a de visible, dans un roman, que sa technique, son métier, sa
33 s un esprit de service. Or tout service qui n’est pas le service du Dieu vivant se trouve devenir une servitude. Un romanci
34 de pour l’artiste. Mais un romancier chrétien n’a pas à se préoccuper des résultats. Il ne saurait les prévoir, puisque c’e
35 aise littérature. Aux yeux d’un croyant, il n’est pas de comparaison possible entre la situation du romancier chrétien et c
36 ier communiste. Car le chrétien comme tel ne sert pas une cause visible, et son service n’est pas mesurable à ses « résulta
37 sert pas une cause visible, et son service n’est pas mesurable à ses « résultats » (scandale ou conversions produites). Le
38 re, dans une certaine mesure, pourquoi « il n’est pas question d’une littérature protestante ». En effet : le protestant ne
39 testante ». En effet : le protestant ne considère pas que son service en tant qu’artiste puisse être différent de son servi
40 technique. Elles sont un service ; elles ne sont pas au service d’une cause ou d’un parti, fût-il baptisé « chrétien ». (J
41 ndt, Du Bartas, Selma Lagerlöf, Ramuz) ne cherche pas à persuader le public de la beauté de sa religion, mais cherche à exp
7 1939, Articles divers (1938-1940). Quel est le rôle de l’Université dans le pays ? (1939)
42 is cru, et aujourd’hui moins que jamais. Ce n’est pas à l’Université que j’appris ce qu’il faut savoir pour vivre la vie di
43 s, — ces stations au café de la Rotonde, ce n’est pas le moment de les oublier ! — la vie nocturne de l’étudiant, des lectu
44 tout autre qu’à nous, et dont nous n’étions même pas toujours sûrs qu’elle fût réelle — mais qu’importait ? Quelques-uns,
45 t. Et voilà qui me donne à penser qu’il n’y avait pas en jeu, dans tout cela, rien qu’une innocente fantaisie. Il y avait p
46 et qui m’entraînerait assez loin. … Ne serait-ce pas notre rôle actuel, en Suisse, de maintenir cette tradition du romanti
47 hui des chants… d’une autre espèce ? Ne serait-ce pas à nous de maintenir et d’illustrer aux yeux du monde moderne une de c
48 dans les lieux où le loisir est cultivé, — et non pas méprisé ou condamné comme un péché envers l’État. Il m’a semblé que c
49 emblé que cette petite morale du loisir ne serait pas déplacée ce soir, dans cette halte du souvenir et de l’amitié. Vraime
8 1939, Articles divers (1938-1940). Le protestantisme créateur de personnes (1939)
50 ion ! Cette interrogation pressante, il ne s’agit pas de lui offrir n’importe quelle réponse flatteuse ou approximative. Et
51 araître byzantines au grand public. Il n’en reste pas moins que le mot d’ordre « Défense de la personne humaine » est deven
52 ut éviter les pires malentendus. Je ne reprendrai pas ici les distinctions théoriques que l’on a proposées entre individu,
53 ertaine polémique réactionnaire, l’individu n’est pas une invention du siècle des Lumières et de la Déclaration des droits
54 distinctif l’intolérance radicale. (On ne discute pas ce qui est sacré.) De plus, elle est radicalement grégaire et xénopho
55 ns-le, avec l’intelligence et la raison, ne tarde pas à affaiblir les liens sociaux. Il s’oriente vers l’anarchie. À ce mom
56 ose plus à son action d’unification, de « mise au pas  ». C’est avec la poussière des individus que l’État fera son ciment.
57 ids de son appareil dévorateur. Et cela ne manque pas de se produire lorsque la majorité des citoyens se trouve réduite à l
58 joue le citoyen. Dans l’Empire, tout homme n’est pas une persona, il s’en faut. Les esclaves, par exemple, qui forment les
59 forment les deux tiers de la population, ne sont pas des personnes, puisqu’ils ne jouent pas de rôle dans les rouages de l
60 , ne sont pas des personnes, puisqu’ils ne jouent pas de rôle dans les rouages de l’État. Il est important de rappeler ce s
61 société d’un type absolument nouveau, qui ne soit pas fondée sur les contraintes du passé, ni sur des lois, mais sur l’atte
62 le possibilité d’une communauté progressive n’eût pas suffi à éveiller la volonté de la réaliser et de la faire sortir de l
63 e moderne : des cellules. Ces communautés ne sont pas fondées sur le passé ni sur des origines communes. « Il n’y a plus ni
64 esclaves et des citoyens riches. Leur lien n’est pas terrestre : il est dans l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre : il
65 errestre : il est dans l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre : il s’est assis au Ciel à la droite de Dieu. Leurs ambitio
66 droite de Dieu. Leurs ambitions non plus ne sont pas terrestres, car ce qu’elles attendent, c’est la fin des temps. Et cep
67 omme neuf, créé par l’Église chrétienne. Ce n’est pas l’individu grec, puisqu’il se soucie davantage de servir que de se di
68 ntage de servir que de se distinguer. Et ce n’est pas non plus la persona du droit romain, puisque l’homme qui a une vocati
69 en ce sens qu’une révolte de l’individu ne tarde pas à se manifester. Cette révolte, c’est la Renaissance. Elle apparaît d
70 e du sujet. Qu’on m’entende bien : je ne prétends pas annexer ici la Réforme à la cause personnaliste. Bien au contraire :
71 ther n’ont parlé de la personne en soi. Ils n’ont pas fait une théorie personnaliste, ils ne paraissent même pas avoir entr
72 une théorie personnaliste, ils ne paraissent même pas avoir entrevu la possibilité ou l’intérêt d’un tel problème. Mais ils
73 l’intérêt d’un tel problème. Mais ils ne parlent pas non plus de l’individu ou de la collectivité, et cependant toutes les
74 « Nous nous sommes efforcés, écrit Calvin, de ne pas mettre nos opinions personnelles à la place de l’exposition simple et
75 Strasbourg et Genève. Le problème ne se pose même pas . Les Églises locales s’organiseront en fédérations, délégueront des d
76 gueront des députés à des synodes, et il n’y aura pas de pape pour unifier temporellement toutes ces cellules vivantes, aut
77 si la dignité de chaque individu est garantie non pas du seul fait qu’il existe physiquement, mais du fait qu’il peut incar
78 particulière de Dieu. Et dès lors, cet homme n’a pas seulement le droit d’être respecté par l’État, il a surtout le devoir
79 personne doit être respectée par l’État, ce n’est pas en vertu d’un droit naturel à la désobéissance. Calvin précise que l’
80 glise et des vocations personnelles ? Je n’hésite pas à le dire : c’est le fédéralisme. Cette thèse pourra paraître un peu
81 ouis le Grand », c’est-à-dire la France « mise au pas  » par l’homme qui dit : « l’État, c’est moi », la France synchronisée
82 s inspiré du stathoudérat hollandais. Et n’est-ce pas le huguenot Sully qui, le premier, sous Henry IV, conçut le « Grand D
83 la vie privée. L’un entraîne l’autre, l’un ne va pas sans l’autre. Nous pouvons le vérifier d’une autre manière encore. Qu
84 raine donne raison au réformateur. Et je ne crois pas être infidèle à sa pensée en y ajoutant cette précision : ce n’est pa
85 a pensée en y ajoutant cette précision : ce n’est pas la forme d’un État qui compte, mais bien la condition qu’il ménage à
86 ntre ces trois États : d’abord parce que ce n’est pas notre sujet, ensuite parce que ces différences, qui ne le voit, s’att
87 upure entre le spirituel et le temporel n’y était pas faite au bon endroit, ou mal faite, ou pas faite du tout. Il en résul
88 était pas faite au bon endroit, ou mal faite, ou pas faite du tout. Il en résultait, dans le peuple, le sentiment que l’Ét
89 grand écrivain espagnol Ortega y Gasset n’hésite pas à comparer sous ce rapport l’Espagne et la Russie. « Fort différentes
90 ce sous la Troisième République. Cela ne signifie pas , bien entendu, que le calvinisme ne puisse dévier lui aussi, et soit
91 gnifie que ses défauts et déviations n’entraînent pas cette conséquence-là. Lorsque la religion orthodoxe grecque, par exem
92 ile des deux doctrines. Je dis bien utile, et non pas simplement intéressante. Je ne fais pas ici, vous le sentez bien, une
93 e, et non pas simplement intéressante. Je ne fais pas ici, vous le sentez bien, une description désintéressée et académique
94 don à espérer : la communauté spirituelle ne peut pas en appeler à une instance supérieure à l’État, puisque c’est lui qui
95 e degré, et plus qu’intolérante : on ne peut même pas s’y convertir ! Si l’on n’a pas les mêmes origines, on ne pourra jama
96 : on ne peut même pas s’y convertir ! Si l’on n’a pas les mêmes origines, on ne pourra jamais y entrer — si l’on n’est pas
97 nes, on ne pourra jamais y entrer — si l’on n’est pas de sang aryen, par exemple — car cette religion n’admet pas que « les
98 g aryen, par exemple — car cette religion n’admet pas que « les choses vieilles sont passées » selon la parole de l’Apôtre.
99 ssées » selon la parole de l’Apôtre. Elle n’admet pas la conversion spirituelle, à partir de laquelle il n’y a plus ni Juif
100 il n’y a plus ni Juifs ni Grecs. Elle ne demande pas  : que crois-tu ? qu’espères-tu ? mais elle demande : quels sont tes m
101 premières racines de quelque chose qu’il ne faut pas laisser grandir. On nous parle, avec les meilleures intentions du mon
102 la doctrine totalitaire. Le fédéralisme, ce n’est pas seulement un pour tous — qui serait une devise fasciste — ce n’est pa
103 tous — qui serait une devise fasciste — ce n’est pas seulement tous pour un — qui serait individualiste —, c’est l’équilib
104 rouvent ainsi les uns et les autres, qu’ils n’ont pas encore bien compris le paradoxe vivant que représente, en chacun de n
105 ieure, c’est-à-dire un individu embrigadé, et non pas une vocation. Milliers de masques durs, volontairement durcis, de ces
106 courons le risque d’oublier que la Réforme n’est pas faite pour l’homme d’abord. À force de louer ses effets humains, nous
107 us risquons de trahir sa cause divine. N’oublions pas que la personnalité n’est bien souvent que le résidu, l’empreinte d’u
108 lité, car bien d’autres en ont autant qui ne sont pas pour cela en prison. Ce qu’on lui reproche, ce que l’on ne peut pas t
109 rison. Ce qu’on lui reproche, ce que l’on ne peut pas tolérer, c’est précisément sa personne, c’est-à-dire sa vocation part
110 éformée de l’homme et de l’État. Ceci ne signifie pas que l’Église ait à proposer un programme comme tant d’autres, mais bi
111 taines limites, et, d’autre part, qu’elle ne doit pas hésiter à appuyer certaines revendications conformes au Décalogue. To
112 roisade intérieure. Le chrétien est celui qui n’a pas d’autre ennemi à craindre que l’ennemi qu’il porte en lui-même. Car u
9 1939, Articles divers (1938-1940). Le théâtre communautaire en Suisse (1939)
113 des foules des grandes nations. Or, nous n’avons pas de grandes villes, et nous ne sommes pas une grande nation. La seule
114 n’avons pas de grandes villes, et nous ne sommes pas une grande nation. La seule voie qui nous reste ouverte est celle d’u
10 1939, Articles divers (1938-1940). Un quart d’heure avec M. Denis de Rougemont : Hitler, grand-prêtre de l’Allemagne (11 janvier 1939)
115 es impressions ? Quand je suis revenu, je n’étais pas sûr qu’elles n’eussent pas décrit des aspects passagers du régime. Le
116 uis revenu, je n’étais pas sûr qu’elles n’eussent pas décrit des aspects passagers du régime. Les choses vont peut-être cha
117 la a été déjà beaucoup dit. N’importe. Il ne faut pas craindre de le répéter, et surtout de le faire bien comprendre. Les n
118 t maître des esprits. Un État totalitaire ne peut pas être totalitaire à moitié. Il lui faut la fameuse confiance, et une c
119 z, vous, à l’âme collective ? Est-ce que ce n’est pas une formule grandiloquente pour désigner l’absence d’âme personnelle
120 sont vos propres réflexions ? C’est qu’on ne tire pas sur un homme qui n’est rien et qui est tout. On ne tire pas sur un pe
121 homme qui n’est rien et qui est tout. On ne tire pas sur un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 millions d’hommes. On ti
122 es. J’achève votre raisonnement : puisqu’il n’y a pas d’attentats contre Hitler, c’est qu’Hitler n’est ni un tyran ni un ro
123 dateur de religion. Cependant, tout ne s’explique pas par le sentiment religieux dans l’hitlérisme. La politique, l’économi
124 Or, tout cela est démenti par les faits. Ce n’est pas pour défendre le capitalisme que les mineurs de la Sarre ont voté leu
125 nt voté leur rattachement au IIIe Reich. Ce n’est pas en parlant d’hystérie qu’on peut comprendre le phénomène fondamental
126 mmunauté autour d’un sentiment sacré. Et ce n’est pas la soif d’une tyrannie, au sens politique et légal, qui a jeté l’Autr
127 r à cette force-là ? Rien d’efficace, si ce n’est pas une force spirituelle. Rien de pratique, si ce n’est un grand effort
11 1939, Articles divers (1938-1940). Qui est Hitler ? (24 février 1939)
128 t s’il est intelligent. Il me semble que cela n’a pas grande importance, que cela ne compte guère en pareil cas. Tout au pl
129 il était très intelligent, il n’aurait sans doute pas réussi à fanatiser tout un peuple. Une certaine forme de bêtise conva
130 e qu’il faut souligner, c’est qu’un « génie » n’a pas toujours besoin d’intelligence. Or, on doit tenir le Führer pour un g
131 dent, et il insiste sur ce point. Il n’avait même pas d’état civil allemand lorsqu’on lui offrit le pouvoir. Qu’est-il donc
132 iens du iiie Reich, il est « celui qu’on ne peut pas définir ». Celui, comme je le disais, qui n’est rien et qui est tout.
133 te nature, on sent très bien qu’elle n’appartient pas à l’individu, et même qu’elle ne saurait se manifester qu’autant que
134 des prophéties — et elles se sont réalisées — non pas au nom du Christ, mais au nom des idoles, au nom de la race aryenne,
12 1939, Articles divers (1938-1940). Il y a toujours des directeurs de conscience en Occident (juin 1939)
135 rares. Restent les médecins de famille : ce n’est pas nouveau. Et les psychanalystes : c’est pratiquement limité au très pe
136 ne peuvent faire les meneurs de masses), il n’est pas moins vrai qu’en fin de compte, l’activité de directeur de conscience
137 , etc. Aussi vrai que le baron de Crac ne pouvait pas sortir du puits en se tirant par les cheveux, aussi vrai nous est-il
138 : car eux aussi sont dans le puits. Je ne connais pas de doctrine universelle, d’universalisme concevable, descriptible, à
13 1939, Articles divers (1938-1940). Nicolas de Flue vu par Denis de Rougemont (8 juillet 1939)
139 lus célèbres de son temps — suisse, ne l’oublions pas — et par un des écrivains les plus intelligents de sa génération. Neu
140 inutile devient ennuyeux et lourd, car il ne faut pas songer au talent des acteurs pour sauver un texte si besoin est… Et p
141 tement on sent que les effets à obtenir ne seront pas le résultat d’une action individualiste, mais collective. Et comment
142 e qui parle, car de la place du public on ne voit pas très bien qui a la parole ? C’est fort simple, un seul parle souvent,
14 1939, Articles divers (1938-1940). Du mythe de Tristan et Iseut à l’hitlérisme (14 juillet 1939)
143 la littérature une place bien à lui et qui n’est pas des moindres. Ce fils de la libre Suisse, qui a hérité de la conscien
144 son dernier livre. Si ma question ne vous paraît pas trop indiscrète, je voudrais savoir ce qui vous a poussé à écrire ce
145 hypothèses historiques que j’y développe ne sont pas indispensables à l’essence du livre qui pourrait se concevoir en deho
146 xiie siècle considérait l’amour. Le mythe n’est pas un sujet individuel inventé par un romancier. C’est une légende repri
147 sser penser qu’avant le xiie siècle on ne savait pas ce que c’était que la passion, ne puis-je m’empêcher de compléter. Je
148 e puis-je m’empêcher de compléter. Je ne le crois pas , réplique Denis de Rougemont. La passion a des racines naturelles. L’
149 t Iseut, couple de parfaits amants, ne s’aimèrent pas . À la manière dont Denis de Rougemont répond : « C’est exact, en effe
150 t exact, en effet », on sent qu’il ne lui déplait pas de se faire le champion d’un paradoxe. Tristan aime sa passion, expli
151 Tristan aime sa passion, explique-t-il. Il n’aime pas Iseut de charité, dans son être véritable. À la différence d’Agapè, l
152 l’idéal de l’amant sur un autre être. On ne peut pas épouser une femme comme Iseut, parce qu’alors on verrait la femme rée
153 l’atmosphère où ils se sont rencontrés. N’est-ce pas d’ailleurs le thème constant de tous les romanciers ? Ainsi, selon vo
154 tous les romanciers ? Ainsi, selon vous, il n’est pas de synthèse possible entre Éros et Agapè ? J’ai tenté une esquisse de
155 abilité les problèmes de la passion qui n’étaient pas jusqu’à présent objet de littérature sérieuse. Il est rare, en effet,
156 Mais à l’époque de l’amour courtois il n’existait pas de distinction entre l’amour et la guerre. Le lansquenet de l’ancien
157 est la définition même du jeu. Certes, on ne peut pas passer directement des relations individuelles des amants au fait col
158 , bien qu’ayant vécu un drame personnel, n’en ont pas moins exercé sur la nation entière une influence qui se fait sentir a
159 des mœurs aboutit alors fatalement à une mise au pas faute de laquelle toute vie serait impossible. C’est ce qui se produi
160 ’est en ce sens que mon livre est actuel. Je n’ai pas choisi ce qu’on appelle communément un sujet d’actualité, parce que j
161 de pour terminer d’insister sur le fait qu’il n’a pas voulu faire œuvre d’historien. Même si les historiens trouvent que j’
15 1939, Articles divers (1938-1940). Comment j’ai écrit Nicolas de Flue (3 novembre 1939)
162 ame allait nous redire. Et cependant nous n’avons pas perdu courage. La foi de Nicolas domine les temps. Elle vit encore au
16 1939, Articles divers (1938-1940). Pourquoi nous sommes là (décembre 1939)
163 ue. Les hommes me regardent, et ils ne rient même pas . L’un d’eux entre ses dents : « On se demande ce qu’on fout par-là… »
164  ? Il faudrait essayer de répondre. L’homme n’est pas né pour faire n’importe quoi, sans rien comprendre. À quelques kilomè
165 s ? Parce que les gouvernements de l’Europe n’ont pas su résoudre autrement le problème des minorités, allemandes, tchèques
166 ovaques ou ukrainiennes. Et pourquoi ne l’ont-ils pas su ? Parce que tous ils s’imaginaient — ou croyaient devoir s’imagine
167 dépendent de sa grandeur physique, de sa mise au pas militaire, de son arrogance étatique. Nous sommes ici à patauger parc
168 uerre, et s’ils la font, c’est parce qu’ils n’ont pas su, comme nous les Suisses, se fédérer progressivement au lieu de s’u
169 u de s’unifier brutalement. Oui, cette guerre n’a pas d’autre sens : elle marque la faillite retentissante des systèmes cen
170 ix, puisque l’autre aboutit à la guerre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le
171 ir soit, d’ores et déjà, un présent. Il ne s’agit pas de grands mots, de lyrisme ou d’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fa
172 t de voir qu’en fait, si nous sommes là, ce n’est pas pour défendre des fromages, des conseils d’administration, notre conf
173 aussi bien que nous — peut-être mieux ! Ce n’est pas non plus pour protéger nos « lacs d’azur » et nos « glaciers sublimes
174 si nous n’en prenons pas conscience, je ne donne pas lourd de notre indépendance. Lt D. de Rougemont III/20. x. Rougemo
17 1939, Articles divers (1938-1940). Nicolas de Flue : naissance d’un drame (Noël 1939)
175 ’était Munich, c’était la paix, cela n’arrangeait pas mes affaires. Car voici ce qui m’était arrivé. Deux semaines auparava
176 hose pour cet homme-là. Sur quoi la guerre fit un pas lourd dans notre Europe, et cette approche assourdissante fascina tou
177 te, j’allais mettre mon casque ; enfin je n’avais pas de sujet, et je défiais quiconque d’en trouver un, en Suisse, qui fût
178 urs immérité… Au matin, la pièce était faite. Non pas écrite, bien entendu, mais tout entière organisée et déployée dans mo
179 eur était si parfaitement préétabli que je ne fus pas étonné de retrouver, dans la partition d’Honegger, certains traits mé
18 1940, Articles divers (1938-1940). L’homme au poignard enguirlandé (1940)
180 té. Ah ! Nicolas Manuel Deutsch, on ne s’embêtait pas de ton temps ! On allait faire la guerre en Italie pour le plaisir d’
181 l n’y faut plus songer, ce serait quitter du même pas la planète… ⁂ Un vers du temps — d’un peu plus tard, sans doute, mais
182 mpétueuse, comme ceux qui savent que la vie n’est pas le but de la vie, qu’elle ne mérite pas de majuscule, et qu’elle est
183 vie n’est pas le but de la vie, qu’elle ne mérite pas de majuscule, et qu’elle est quelque chose qui doit brûler, flamber,
184 st quelque chose qui doit brûler, flamber, et non pas rapporter du trois pour cent. Sérieuse comme ce qui compte avec la mo
185 en une part à sept et même à huit, car tu ne sais pas quel malheur peut arriver sur la terre. » Le secret de la vie généreu
186 scutable envie de peindre… ⁂ Son réalisme ne fait pas d’histoires, parce qu’il n’est pas une polémique mais une acceptation
187 alisme ne fait pas d’histoires, parce qu’il n’est pas une polémique mais une acceptation des choses, à toutes fins utiles o
188 figées dans leur élan. Une Suisse réelle, et non pas un décor ; non pas un état d’âme vaporeux, comme les idylles du xviii
189 lan. Une Suisse réelle, et non pas un décor ; non pas un état d’âme vaporeux, comme les idylles du xviiie , non pas l’opéra
190 d’âme vaporeux, comme les idylles du xviiie , non pas l’opéra romantique, bien moins encore ces planches de minéralogie que
191 Mais je m’attarde à ces tableaux, et Manuel n’est pas un « artiste » au sens moderne et bien suspect du terme. Un beau jour
192  qu’il a fait un peu tous les métiers », ce n’est pas un éloge, il s’en faut, c’est plutôt une manière de lui refuser cette
193 eux et appliqué dans sa peinture, Manuel n’hésite pas un instant à planter là pinceaux et chevalet lorsqu’ayant dominé son
194 che d’une forme et d’un sens. Si l’art n’y suffit pas , c’est que le mal est profond : d’où la nécessité d’agir sur la cité.
19 1940, Articles divers (1938-1940). Mission spéciale (1940)
195 ces morts ? Parce que les États de l’Europe n’ont pas pu résoudre autrement le problème des minorités. Or ce problème n’exi
196 erre ; et s’ils la font, c’est parce qu’ils n’ont pas su se fédérer progressivement. La guerre actuelle, quels qu’en soient
197 sque les autres aboutissent à la guerre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le
198 ir soit, d’ores et déjà, un présent. Il ne s’agit pas de grands mots, de lyrisme ou d’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fa
199 t de voir qu’en fait, si nous sommes là, ce n’est pas pour défendre d’abord notre fameux confort moderne. Ce n’est pas seul
200 re d’abord notre fameux confort moderne. Ce n’est pas seulement pour protéger nos « lacs d’azur » et nos « glaciers sublime
20 1940, Articles divers (1938-1940). D’un certain cafard helvétique (janvier 1940)
201 oyen de soutenir le moral, c’est l’action. Et non pas les distractions. Les hommes qui se battent, par exemple, sont morale
202 Cela ressemble aux cauchemars ; quand on ne peut pas courir pour attraper un train, parce qu’on est empêtré dans ses draps
203 sont plus nombreux que jamais — ; ne vous laissez pas engluer par les sceptiques et les faux réalistes, par tous ceux qui n
21 1940, Articles divers (1938-1940). Les Suisses sont-ils « à la hauteur » de la Suisse ? (20 janvier 1940)
204 ont belles et nos glaciers « sublimes », il n’y a pas là de quoi nous vanter. D’abord, ce n’est pas notre faute. Car vraime
205 y a pas là de quoi nous vanter. D’abord, ce n’est pas notre faute. Car vraiment, nous ne sommes pour rien, nous autres Suis
206 t tenter certains de nos voisins… Ne seraient-ils pas aussi capables que nous de chanter et de gagner de l’argent, si nous
207 sa posture la plus misérable… Eh bien, je ne dis pas que le peuple suisse représente dans son ensemble « la posture la plu
208 d’être moralement « à la hauteur ». Non, ce n’est pas si facile que cela d’habiter et de posséder un pays dont l’altière be
209 on peut aussi l’y comparer. Être Suisse, ce n’est pas un « filon ». C’est plutôt une « mission spéciale ». Il y faut aujour
210 trise de soi de l’« alpiniste » justement, et non pas seulement la sympathie distante du spectateur, touriste ou hôtelier,
22 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. I : Les voix que rien n’arrête (24 février 1940)
211 s parasites gênants ? Pourquoi ne tenterions-nous pas , une fois pour toutes, de déchiffrer ces messages secrets que rien ne
212 tégrité du sol de la patrie, voilà qui ne faisait pas de question. Il n’y avait pas d’autre raison à chercher et à proclame
213 oilà qui ne faisait pas de question. Il n’y avait pas d’autre raison à chercher et à proclamer que cette raison tout instin
214 en Europe. Ils prétendent que les nations « n’ont pas toutes les mêmes droits à l’existence ». Autrefois, l’on croyait volo
215 hose : elle dit que certains États modernes n’ont pas été créés par Dieu, mais par le traité de Versailles. Et c’est bien v
216 ou de mourir pour une Suisse dont nous ne serions pas sûrs qu’elle a le droit et le devoir d’exister, devant Dieu. On n’a p
217 droit et le devoir d’exister, devant Dieu. On n’a pas le droit de mourir pour quelque chose qui ne fournit pas des raisons
218 droit de mourir pour quelque chose qui ne fournit pas des raisons de vivre. Notre serment nous engage donc aussi à prendre
219 patriotiques. Que mes lecteurs ne s’étonnent donc pas trop si je consacre mes premiers articles à la « critique », pour ne
220 mes premiers articles à la « critique », pour ne pas dire au dégonflage de ces clichés. Ce n’est pas pour le stérile plais
221 e pas dire au dégonflage de ces clichés. Ce n’est pas pour le stérile plaisir de démolir. Bien au contraire ! Mon entrepris
222 entreprise serait inutile, si nous ne cherchions pas ensemble, et surtout si nous ne trouvions pas, par-dessous les grande
223 ons pas ensemble, et surtout si nous ne trouvions pas , par-dessous les grandes phrases habituelles, certaines réalités soli
23 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. II : Sommes-nous libres ? (2 mars 1940)
224 anter pour qu’elles subsistent ? La liberté n’est pas seulement un privilège que l’on « hérite ». C’est une conquête perpét
225 ges politiques, si le peuple qui en jouit ne sait pas les mériter par ses manières d’être et de penser. Un jour, écrit Goe
226 ages et de leurs préjugés bourgeois. Je n’oublie pas que Goethe écrivait cela au xviiie siècle. Les petits tyrans dont il
227 tiques ou religieux, chez nous, ne se fréquentent pas , ne se parlent pas, et souvent ne se saluent plus ! On dirait presque
228 , chez nous, ne se fréquentent pas, ne se parlent pas , et souvent ne se saluent plus ! On dirait presque qu’ils croient que
229 plan de la morale, c’est pire encore. Je ne vais pas refaire ici, après tant d’autres, le procès de notre moralisme intolé
230 On me dira peut-être que ces considérations n’ont pas grande importance, actuellement, et que les libertés qu’il s’agit de
231 té morale et intellectuelle. Car les unes ne vont pas sans les autres, et toute notre histoire en témoigne. « Une politique
232 e notre indépendance nationale. Il ne suffit donc pas de protéger notre indépendance par des fortifications. C’est l’intéri
233 liqué ». Ils jugent suspect tout ce qui ne rentre pas à première vue dans des catégories moyennes et bien connues, telles q
234 que chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’est pas comme jadis la superstition… c’est la préoccupation, la passion du bi
235 ion du bien-être matériel. Sa pente, n’en doutons pas , est du côté de la tyrannie. » C’est Vinet qui parlait ainsi, il y a
24 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. III : Pourquoi nous devons rester neutres (9 mars 1940)
236 que nous restons mobilisés. Je ne discuterai même pas ici l’argument de l’impartialité morale, qui put jouer un rôle en 191
237 er notre refus de « payer notre part ». Je ne dis pas que ces arguments ne valent plus rien. Je dis seulement qu’ils ne rep
238 y a plus de cent ans, soit ! Mais il ne faudrait pas retenir de ce traité uniquement ce qui nous semblerait y garantir not
25 1940, Articles divers (1938-1940). La Suisse que nous devons défendre. IV : Notre « mission spéciale » (16 mars 1940)
239 s espérons. C’est très facile à dire, et ce n’est pas très neuf, en apparence. Mais dès qu’on veut prendre au sérieux cette
240 ieux cette vocation, l’on s’aperçoit que ce n’est pas si simple. Que signifient ces mots : défendre et illustrer le princip
241 lisme. Mais beaucoup de bons Suisses ne le voient pas de leurs yeux, et par suite, ne veulent pas y croire. Ils prétendent
242 oient pas de leurs yeux, et par suite, ne veulent pas y croire. Ils prétendent tenir compte uniquement de ce qui est inscri
243 nne de la Suisse. Dans un certain sens, ils n’ont pas tort. Une vocation n’est jamais inscrite en clair dans les faits maté
244 eux de l’esprit. Tenir compte des faits ne suffit pas  : il faut savoir leur donner un sens, leur ajouter un sens par un act
245 Si quelqu’un me dit que pour sa part, il ne voit pas par quels moyens il pourrait y contribuer, je lui demanderai d’aider
246 Suisse auprès de ses voisins en guerre. Ce n’est pas encore une mobilisation spirituelle que je réclame, c’est plutôt une
247 éraliste de six siècles. Et surtout, ne dénigrons pas les tentatives qui se feraient jour dans ce sens, comme nous avons tr
248 ’est que la Suisse que nous devons défendre n’est pas la Suisse des manuels, des cartes postales et des discours, n’est pas
249 nuels, des cartes postales et des discours, n’est pas la Suisse qui se vante de ses beautés, de ses libertés et de sa neutr
26 1940, Articles divers (1938-1940). Le petit nuage (avril 1940)
250 Unis. La première me dit : « Le petit nuage n’est pas passé. Il passera, et nous serons encore une fois assis au café des D
251 onne raison à l’une ou à l’autre de ces lettres6. Pas d’importance. Ce qui est important, c’est la certitude « qu’il passer
252 redouter que le Prince de tous les démons, et non pas tel ou tel démon qu’il nous délègue de temps à autre. Le combat que n
253 ue le chrétien se doit d’envisager. Elles ne sont pas démesurées. Elles doivent au contraire nous donner la vraie mesure de
254 trouver dans un livre interdit (mais je ne pense pas que ce soit à cause de ce passage). L’auteur est l’un des chefs d’un
255 sur cette parole consolante : Ils ne continueront pas toujours, car leur folie devient évidente aux yeux de tous. » Plt D.
27 1940, Articles divers (1938-1940). D’un journal d’attente (pages démodées) (avril 1940)
256 issons ensemble quelques choux-fleurs — « N’allez pas couper les petites feuilles ! Il faut les cuire avec, c’est succulent
257 s, si c’est eux qui gouvernent ? — Ils ne peuvent pas m’empêcher de travailler ! J’ai tout semé comme les autres années… Mo
258 Monsieur Turc a semé, mais moi, je n’arrive même pas à défricher le champ d’un gros ouvrage projeté. Toute œuvre humaine,
259 nts et moins d’amours profondes. La guerre ne tue pas seulement pendant qu’elle sévit, et après ; mais aussi avant. 15 avri
260 ses prises et son efficace. En vérité, ce ne sont pas les clercs qui ont trahi, mais plutôt les chrétiens indignes de leur
261 itié de l’Europe, elle est des Catacombes, et non pas du Forum. On m’a loué de « penser près de la vie ». Hélas ! je n’en s
262 cessairement deux personnes différentes, mais non pas l’acheté et le vendu. L’homme qui agit (achète ou vend) est défini pa
263 éponème, et j’en passe… Qui est fou, qui ne l’est pas  ? » Il me dit hésiter souvent sur ce point, — et me donne un éclair d
264 il sera temps d’y penser. » C’est qu’il ne croit pas à la guerre. Un second : « Comment penser à autre chose qu’à cette me
265 qu’à cette menace ? Faire l’autruche ne l’écarte pas , bien au contraire. Le premier devoir est de ne point se laisser surp
266 nnes raisons. Car il est vrai que la guerre n’est pas fatale ; vrai tout autant qu’elle est probable. Suis-je aux prises av
267 ées ? — Je pense bien, me dit-on. Il n’hésiterait pas à faire tuer pour elles ses meilleurs amis. (On entend : les Français
268 it-il : — La France aime tant la Paix qu’elle n’a pas hésité à sacrifier sur son autel un peuple ami. (Il entendait : son p
269 ns à me demander si toutes nos crises ne seraient pas machinées par nous-mêmes, dans notre inconscient collectif. Je puis l
270 ne les connaîtront jamais… 6 mai 1939 Ce ne sont pas ceux qui la feront qui peuvent avoir peur de la guerre. Car avoir peu
271 xiste encore ailleurs, précisément, qu’il ne soit pas perdu pour tous, c’est ce qui rend sa perte insupportable à qui croya
272 ? Serait-ce à cause de la menace ? Je ne le crois pas . S’il n’y avait pas un bien, dans ce régime, un bien que nous avons p
273 de la menace ? Je ne le crois pas. S’il n’y avait pas un bien, dans ce régime, un bien que nous avons perdu, et qu’il séque
274 s’il n’y avait que du mal en lui, nous n’aurions pas de haine ni d’amertume : on ne hait pas les catastrophes, les incendi
275 n’aurions pas de haine ni d’amertume : on ne hait pas les catastrophes, les incendies et les tremblements de terre. Notre a
276 ’ils disent avoir réinventée, dont nous ne sommes pas , et dont nous sentons bien qu’ils nous excluent dans l’intention d’en
277 ce néon rouge ou bleuâtre qui sera, n’en doutons pas , l’éclairage de l’enfer… Les clients : demi-luxe et demi-monde. Des f
28 1940, Articles divers (1938-1940). L’heure sévère (juin 1940)
278 stes par tempérament. Leurs propos ne renseignent pas sur l’état des faits dans le monde, mais seulement sur l’état de leur
279 gissent conformément à la maxime du Taciturne : «  Pas n’est besoin d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévér
280 us opposions le scepticisme de qui ne s’en laisse pas conter, et connaît toutes les ruses de toutes les propagandes. Nous n
281 science, j’en dirai la cause : celui qui ne croit pas en Dieu ne sait pas non plus croire au diable, et ne sait pas le reco
282 la cause : celui qui ne croit pas en Dieu ne sait pas non plus croire au diable, et ne sait pas le reconnaître, fût-il auss
283 ne sait pas non plus croire au diable, et ne sait pas le reconnaître, fût-il aussi mal déguisé qu’un grenadier tombé du cie
284 i Dieu existait, pleurons-nous, il ne permettrait pas cela ! Nous oublions que « cela », c’est nous aussi, et que Dieu malg
285 atériel ? Question stupide et irritante, n’est-ce pas , aux yeux de qui refuse d’envisager la vie comme une totalité orienté
286 uel. À la première de ces questions, il n’oserait pas répondre en toute franchise ; et à la seconde, il pressent bien qu’on
287 us avons eu bien assez de prophètes. Nous n’avons pas le droit de gémir que les avertissements nous ont manqué. Le dossier
288 que chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’est pas comme jadis la superstition, c’est la préoccupation, la passion du bi
289 ion du bien-être matériel. Sa pente, n’en doutons pas , est du côté de la tyrannie. » Et qu’il suffise enfin d’une allusion
290 stice triomphe, non point parce que Dieu n’existe pas , mais au contraire parce que Dieu existe, et qu’il est juste dans son
291 primer toutes les questions sociales. Et cela non pas seulement en Suisse, mais dans tous les pays de l’Europe ; non seulem
292 es vérités élémentaires sont dures. Elles ne sont pas originales. Elles sont même grossières, et gênantes. Certains diront
293 eux de tous. Mea culpa des pacifistes, qui n’ont pas su imaginer le mal parce qu’ils croyaient au bien fait de main d’homm
294 in d’homme. Mea culpa des militaristes, qui n’ont pas su imaginer un autre bien que la défense toute matérielle d’un ordre
295 ’à en tirer les conclusions9. Mais nous ne sommes pas neutres pour rien, pour le confort. Nous ne sommes pas neutres comme
296 eutres pour rien, pour le confort. Nous ne sommes pas neutres comme on est rentier. Nous sommes neutres en vue de l’avenir.
297 goûts, nos sympathies et nos passions. Je ne sais pas ce que l’avenir vaudra, mais je sais que s’il vaut quelque chose, ce
298 t alors ce qui mérite d’être sauvé ou recréé. Non pas le droit et la justice dont se réclamaient nos égoïsmes et celui des
299 e si les grandes démocraties ont la victoire. Non pas le bonheur fait de laisser-aller et d’insouciance du prochain, car no
300 it — c’est un petit nuage, il passera. Ce n’était pas là de l’optimisme. Athanase prévoyait qu’avec le « petit nuage » pass
29 1940, Articles divers (1938-1940). Au peuple suisse ! (22 juillet 1940)
301 enne, la Suisse est réduite à elle-même. Elle n’a pas d’autre garantie humaine que son armée, pas d’autre allié que son ter
302 e n’a pas d’autre garantie humaine que son armée, pas d’autre allié que son terrain, pas d’autre espoir que son travail. Ce
303 que son armée, pas d’autre allié que son terrain, pas d’autre espoir que son travail. Cette situation n’est pas nouvelle da
304 tre espoir que son travail. Cette situation n’est pas nouvelle dans notre histoire. Elle fut celle de nos grandes victoires
305 attendent des hommes nouveaux. Des hommes et non pas des programmes. Car les événements marchent vite. Des hommes auxquels
30 1940, Articles divers (1938-1940). Autocritique de la Suisse (août 1940)
306 ue nul autre. Sa devise est un paradoxe qu’il n’a pas toujours bien compris. Elle exclut en principe toute doctrine unitair
307 ité d’une vigilante autocritique, si l’on ne veut pas déchoir ou se laisser dissoudre, si l’on veut durer et surtout, si l’
308 onnaires inconséquents : tant que je ne les aurai pas vu refuser l’argent de l’État, je ne pourrai pas prendre au sérieux l
309 pas vu refuser l’argent de l’État, je ne pourrai pas prendre au sérieux leurs convictions « fédéralistes » (ce mot étant p
310 ce mot étant pris dans leur sens). (Et ce ne sont pas seulement les particuliers, propriétaires ou industriels, qui mendien
311 nos partis continuent, nos arguments ne changent pas d’un demi-ton, nos philofascistes continuent à reprocher à nos social
312 er, distinguer, assouplir, traduire : ce ne n’est pas beaucoup plus difficile ; c’est beaucoup plus intéressant ; et c’est
313 que chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’est pas comme jadis la superstition… c’est la préoccupation, la passion du bi
314 ion du bien-être matériel. Sa pente, n’en doutons pas , est du côté de la tyrannie. » C’est Vinet qui parlait ainsi, il y a
315 i se rétractent au seul mot de germanisme ne sont pas ceux qui sauront illustrer la Suisse romande, donc la défendre. Rouss
316 Rousseau, Constant, Madame de Staël, Vinet n’ont pas eu peur du germanisme, l’ont étudié et l’ont aimé. Ce sont nos meille
317 ouviennent, et que nos conformistes ne l’oublient pas  ! 8. Intolérance. — À mon avis, un fédéralisme sain doit se montrer r
318 plus souvent, d’ailleurs, ils se contentent de ne pas remarquer la ressemblance entre ce qu’ils détestent en Suisse et ce q
319 e demande à voir ce qui vaut le mieux. Il ne faut pas parler de neutralité en général, dans l’absolu et dans l’abstrait. Ca
320 eci est une autre histoire.) On ferait bien de ne pas utiliser comme des proverbes généraux certaines paroles du Christ qui
321 une faute de français, j’en suis fâché. Ce n’est pas éternelle qu’il convient de dire, mais perpétuelle. Se figure-t-on qu
322 e son histoire. Or ce qui est éternel ne commence pas à un certain moment, en 1648 ou en 1815 par exemple. Tout ce qui comm
323 parfois dans un élan de passion. Mais on ne peut pas le nier par un décret. 13. Neutralité perpétuelle. — Certes, les prem
324 emple : tant que notre mission européenne ne sera pas accomplie. (L’Empire fédératif ?) Mais toute politique digne de ce no
325 istique du Méridional : « Toujours à gauche, mais pas plus loin. » Pourquoi est-ce comique ? Parce que l’histoire et la pol
326 ? Parce que l’histoire et la politique ne cessent pas de modifier ces positions toutes relatives que sont la gauche et la d
327 Renoncer au droit de nous exprimer, ce n’est donc pas nous conformer aux exigences de la neutralité. Ce peut être, dans cer
328 duite à l’impuissance par l’adversaire, on ne dit pas qu’elle est neutre, on dit qu’elle est neutralisée. Taire nos opinion
329 alisée. Taire nos opinions, aujourd’hui, ce n’est pas rester neutres, c’est accepter d’être neutralisés moralement. Le Cons
330 ttaquent ouvertement le nôtre. Et qu’on ne vienne pas me dire qu’une pareille attitude peut compromettre notre indépendance
331 a force l’intégrité de notre indépendance, et non pas seulement sa matérialité (le territoire). Le vrai patriote suisse ne
332 é (le territoire). Le vrai patriote suisse ne dit pas  : « Plutôt renoncer à ma liberté d’opinion que de risquer des ennuis
333 que l’esclavage. »12 15. Diplomatie. — Ne cédons pas à la tentation des basses époques : confondre le réalisme avec la méd
334 rité des vues politiques. Les petits pays ne sont pas dispensés d’imaginer et de voir grand. Bien au contraire : ils sont c
335 e, après la page qu’on vient de lire, que je n’ai pas d’ambitions politiques ! 11. Intéressante précision du langage ! Un
336 ement cette déclaration de Spitteler : « N’est-ce pas un spectacle grotesque que celui d’une feuille de chou qui, sûre de s
337 devenu national-socialiste. 14. « Nous ne sommes pas gouvernés, nous sommes seulement administrés », répète avec raison G.
31 1940, Articles divers (1938-1940). Henri le Vert ou l’âme alémanique (1940)
338 eure qu’une seule et unique édition. Car ce n’est pas seulement l’un des chefs-d’œuvre de la littérature universelle, l’un
339 mands. Et quand je parle de lyrisme, je n’entends pas ce sentimentalisme vague et un peu lourd qui met tant de points d’org
340 èle du Suisse allemand… Oh, bien sûr, ils ne sont pas tous des Gottfried Keller ou des Henri le Vert. Tous les Français non
341 Henri le Vert. Tous les Français non plus ne sont pas des Pascal, tous les Allemands ne sont pas des Goethe — loin de là… E
342 e sont pas des Pascal, tous les Allemands ne sont pas des Goethe — loin de là… Et cependant, celui qui a compris Pascal, ou
343 régionalistes romands qu’un Suisse allemand n’est pas nécessairement un centraliste ou un Monsieur de Berne ! C’est un frag
344 t donc réjouissant que tous les Suisses ne soient pas sortis du même moule, qu’il y ait des Zurichois et des Bernois, des g
32 1940, Articles divers (1938-1940). L’heure de la Suisse (1er août 1940)
345 it votre État fédératif. Vouloir la vaincre n’est pas d’un homme sage. » (Napoléon, en 1802.) L’idée suisse renaissait, con
346 intien et la rénovation de la Suisse : l’un ne va pas sans l’autre, l’une rend l’autre possible. Les sacrifices, nous devon
347 leurs. Mais les sacrifices matériels ne suffisent pas . Comprenons qu’il est des sacrifices intellectuels non moins indispen
348 lus que ceux de l’autre bord fassent les premiers pas et disent le premier mea culpa. Commençons une bonne fois, risquons-n
349 ayer des impôts quadruplés. Ils n’en représentent pas moins la condition première de toute rénovation pratique. Ceux qui l’
350 arques sont simples et utilisables. Elles ne sont pas originales. Il me suffit qu’elles soient chrétiennes. Si mes lecteurs
33 1940, Articles divers (1938-1940). Un fondateur de la Ligue du Gothard part pour quatre mois aux États-Unis : M. Denis de Rougemont nous dit… (23 août 1940)
351 représentants de tous les groupements qui ne sont pas des partis. Nous attachons, vous le voyez, une très grande importance
352 compte que les hommes de 35 ans et moins ne sont pas dans les partis, parce que la politique leur a paru jusqu’à présent u
353 la moitié des citoyens suisses ne s’intéressaient pas aux affaires du pays. Il fallait se hâter de les grouper, sinon l’idé
354 et qui vient d’être rendue officielle. N’y voyons pas , comme certains se hâteront de le faire, un rapport quelconque avec l
34 1940, Articles divers (1938-1940). La Ligue du Gothard : raisons d’espérer (13 septembre 1940)
355 d’entre nous sont « marqués », mais qui ne l’est pas , s’il a fait quelque chose ? Comme le dit la Lutte syndicale dans son
356 tte syndicale dans son dernier numéro, il ne faut pas agir comme si personne n’était capable d’entendre raison et de modifi
357 t de modifier ses positions. Duttweiler ne nous a pas donné un sou, quoi qu’en dise une certaine presse qui ne se défend pl