1 1941, Articles divers (1941-1946). Reynold et l’avenir de la Suisse (1941)
1 à prévoir le pire, à l’admettre, et à se préparer en conséquence. Nous n’avons pas encore su prendre le tempo de ce xxe s
2 r et racheté, condamné et sauvé. Qui ne croit pas en Dieu ne saurait croire au diable. Qui ne croit pas au pardon ne saura
3 n’était autre que la mise au pas du pays, sa mise en marche vers le nihilisme — ou l’annexion. « Faire du socialisme, écri
4 oit bien suffire à fédérer nos vérités partielles en une force vivante. Allons-y viribus unitis ! Car cela est clair : ni
5 a qui unit. Pour le reste, si sérieux soit-il, on en reparlera plus tard. Faisons d’abord en sorte qu’il y ait un « plus t
6 d’abord en sorte qu’il y ait un « plus tard ». En campagne, le jour de la capitulation de la Hollande. a. Rougemont
2 1941, Articles divers (1941-1946). Trois paraboles (1er octobre 1941)
7 est dévoilée, ô folle ! Mais lui les trouve et s’ en revêt : voiles de nuit. Elle a passé tout près, ne l’a pas vu. C’est
8 opre éclat ! Qu’une fois au moins je te contemple en mon repos. Elle s’éteignit. Il la jeta dans le brasier cendreux. Pend
9 u de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’ en aller sans bruit. Mais vous connaissez ces couloirs. Et je ne voulais
3 1942, Articles divers (1941-1946). La leçon de l’armée suisse (4 mars 1942)
10 et les institutions ne sont plus démocratiques qu’ en Suisse, et nulle part l’armée n’est plus populaire et ne fait aussi p
11 re et ne fait aussi partie de la vie nationale qu’ en Suisse. Depuis que les communes suisses se libérèrent pour la premièr
12 s civiques et l’esprit militaire n’ont jamais été en contradiction. Depuis les temps les plus anciens, les Suisses étaient
13 mporter chez eux leurs armes et leurs munitions ! En France, après l’Armistice, on offrit cent-mille francs aux soldats, e
14 mistice, on offrit cent-mille francs aux soldats, en échange de leurs fusils, par crainte d’une révolution. Hitler fit dés
15 s villes ou des villages ne leur aurait pas donné en dix ans. Ces 3 mois sont un puissant tonique pour la jeunesse suisse
16 le de 200 hommes. Le Haut-Commandement de l’armée en Suisse a prévu dès 1930 déjà, que la prochaine guerre ne serait pas u
17 t pas une guerre de « fronts », et qu’une défense en profondeur devait être organisée, constituée par des « nids » offrant
18 s ressources. Des petits corps d’armée surgissent en certains points pour défendre les profondes vallées et pour barrer le
19 e divisions mobiles régulières. Le reste consiste en garnisons et en forts pour défendre les principaux passages des Alpes
20 les régulières. Le reste consiste en garnisons et en forts pour défendre les principaux passages des Alpes. Ce sont des br
21 ons et de vivres ont été cachés dans les rochers. En 1939, la disposition de ces troupes de couverture, qui précéda la mob
22 da la mobilisation générale de cinq jours, se fit en quelques heures, le long de toutes les frontières de la Suisse. Les g
23 L’un de ceux qui écrivit cet article fut mobilisé en 1939, à un poste-frontière du Jura. Il pouvait voir, à travers ses ju
24 oire derrière les lignes. Cela serait-il possible en Suisse ? Il y a autant de centres de résistance qu’il y a de cantons
25 es par des barricades et les maisons transformées en des forteresses en miniature. Vous ouvrez la porte de quelque grenier
26 es et les maisons transformées en des forteresses en miniature. Vous ouvrez la porte de quelque grenier et vous vous trouv
27 en face d’un canon anti-tank, protégé par un mur en ciment. Une poussée rapide de divisions motorisées pourrait seulement
28 divisions motorisées pourrait seulement se faire en évitant les villages et en passant à travers les forêts ou les pâtura
29 suisse, l’ennemi aurait à développer une attaque en règle. Il ne serait nullement question d’avancer rapidement comme dan
30 r rapidement comme dans les plaines de Flandre ou en Pologne. Les deux premières années de la victoire allemande ont renfo
31 ge à nos descendants. Voilà pourquoi nous croyons en Dieu et non pas en un homme qui prétend être adoré comme un Dieu.
32 s. Voilà pourquoi nous croyons en Dieu et non pas en un homme qui prétend être adoré comme un Dieu. c. Rougemont Denis
4 1943, Articles divers (1941-1946). Angérone (mars 1943)
33 ar l’abandon chez l’autre. Que cette hypnose soit en quelque mesure — celle de l’esprit — indépendante de l’instinct, c’es
34 finiment. Il n’aime que cela : regarder longtemps en silence, se perdre dans des yeux. (Certaines heures, soirs, aubes, pa
35 un seul œil est visible dans ce visage décomposé en ombres et lueurs lentement mouvantes, — un seul œil par où toute l’âm
36 ésir, sur la solitude égarée du couple, Éros pose en couronne un désespoir glacial : vous n’irez pas au-delà de votre unio
37 lus où se prendre. Il se ramène en soi, se divise en ses ombres. Ainsi passent les heures d’avant l’aube, dans le dépaysem
38 ne étreinte qui s’égalerait à l’Infini. Se fondre en un seul être, mais que cet être accède ensuite au commerce de ses sem
5 1943, Articles divers (1941-1946). La gloire (mars 1943)
39 Cette page m’avait séduit par sa mauvaise humeur. En la copiant, je n’y vois plus que sophismes. Non, la gloire, ce n’est
40 ncesse Marie, qui a vraiment aimé son prochain, n’ en n’a pas reçu de gloire et n’en demandait point. Aussi ne pense-t-elle
41 mé son prochain, n’en n’a pas reçu de gloire et n’ en demandait point. Aussi ne pense-t-elle pas qu’elle a « perdu sa vie »
42 de la gloire, mais non Stendhal. Madame de Staël en eut, mais non Constant (comme écrivain). Or personne ne lit plus Les
43 e dépendent d’aucune raison, et paraissent même n’ en point souffrir. Fama crescit eundo : minuit praesentia famam. Toute g
44 donne-t-il pas une preuve d’amour à son audience en exigeant d’elle plus de noblesse ? Dire : je néglige la gloire, c’est
45 la Renaissance. Glorieux est celui qui s’affirme en différant, bien plus qu’en excellant. C’est donc l’individu qui se di
46 st celui qui s’affirme en différant, bien plus qu’ en excellant. C’est donc l’individu qui se distingue, — n’importe où. (C
47 e alors le besoin de se faire confirmer. Un homme en communion active avec les hommes qui l’entourent ne songerait pas à r
48 s aussi le meilleur moyen de sauver son incognito en se donnant l’air, précisément, d’y renoncer ? Autre avantage de la gl
49 nfère le droit d’être banal. Tant pis si beaucoup en abusent… Hypothèse : l’expérience intime de la gloire précède toujou
50 tant assurément d’essayer de faire croire qu’on n’ en a point. Si l’on condamne sa propre vanité, le mieux pour s’en débarr
51 i l’on condamne sa propre vanité, le mieux pour s’ en débarrasser serait d’en parler ouvertement. Comme un menteur qui dira
52 e vanité, le mieux pour s’en débarrasser serait d’ en parler ouvertement. Comme un menteur qui dirait : « Je vous avertis q
6 1943, Articles divers (1941-1946). Rhétorique américaine (juin-juillet 1943)
53 avait le Journal d’André Gide. Chaque fois que j’ en relis quelques pages, je suis frappé par le souci qu’y montre Gide d’
54 l n’accepte de rompre avec une tradition que pour en fonder une nouvelle, qui se révélera sans doute conforme à la traditi
55 u temps. On n’écrit pas un livre pour qu’il dure, en Amérique, mais d’abord pour qu’il frappe et qu’il agisse, au maximum,
56 core André Gide. Dans ce sens élargi du mot, mais en retirant à l’épithète toute qualité dépréciative, on pourrait appeler
57 e, la phrase-qui-attrape et qui vous jette de but en blanc dans l’humanité vive du sujet, saisi par son côté sensationnel.
58 nt des observations que l’on néglige de rapporter en détail. Au séminaire de Short Stories (histoires brèves, nouvelles) d
59 avenir dans le monde où nous allons entrer ? Je n’ en sais rien. Mais je suis sûr que l’écrivain français et l’écrivain amé
60 deux littératures : tradition et actualité, mise en ordre et mise en mouvement. De leur alliance naît la Liberté. f. R
61 s : tradition et actualité, mise en ordre et mise en mouvement. De leur alliance naît la Liberté. f. Rougemont Denis de
7 1943, Articles divers (1941-1946). Mémoire de l’Europe : Fragments d’un Journal des Mauvais Temps (septembre 1943)
62 ut un âge, un climat de musiques, soudain se fixe en nos mémoires, s’idéalise. Un « bon vieux temps » de plus, tout près d
63 siècle mécanique, accepter pour un temps sa loi, en préservant, s’il se peut, dans nos cœurs, ce droit d’aimer, cette bon
64 ouée. II. — Le dernier printemps de la paix En Suisse, 2 mai 1939 Combien oseraient avouer que cette menace leur ren
65 poir qu’au seuil des catastrophes générales. Et j’ en connais qui ne parviennent à leur régime normal de vie (comme un mote
66 apable est si profond, peut-être si normal, que j’ en viens à me demander si toutes nos crises ne seraient pas machinées pa
67 un silence de catacombes. Centre du monde ! Il s’ en va, coudoyant la foule et traversant les lieux publics avec cette gra
68 at. III. — Pendant la bataille des Flandres En Suisse, 24 mai 1940. Poste militaire à la frontière Écouté la radio :
69 nt, où aller, où rester, où demeurer quand tout s’ en va, et que penser si je ne puis — rien dire ou faire qui s’accorde à
70 que aussi vaste que la terre, se rétrécit de jour en jour et d’heure en heure, à chaque fois que j’allume cet œil vert — p
71 la terre, se rétrécit de jour en jour et d’heure en heure, à chaque fois que j’allume cet œil vert — pays perdus, souveni
72 e banale ? Ils deviendraient fous de révolte… Ils en ont, ils en ont sûrement quand ils s’endorment épuisés, sur un talus,
73 ls deviendraient fous de révolte… Ils en ont, ils en ont sûrement quand ils s’endorment épuisés, sur un talus, ou pire enc
74 rment épuisés, sur un talus, ou pire encore ! ils en ont au réveil, affreux bonheur d’une illusion rapide, où suis-je ? Dé
75  !… Vivant un cauchemar qui est vrai, nous allons en désordre au réveil. La mort, le désespoir en plein midi, — ou la reco
76 d’un jour à l’autre, mais on le regardait d’heure en heure, de trop près, on ne le voyait pas… V. — Lisbonne 10 sept
77 grâce ! VI. — Souvenir de la paix française En Amérique, novembre 1940 Périgny… C’était bien ce nom-là ? Un long vil
78 Périgny… C’était bien ce nom-là ? Un long village en bordure de la route. D’un côté, les maisons dominaient une vallée, de
79 le sol, un grand cercle entourant une inscription en lettres capitales bien arrondies : Martine Je suis Aux champs
80 t comme le sang, c’est que tu es blessé, ta vie s’ en va). La force était mémoire et allusion, elle était ce vieil arbre te
81 st la mémoire du monde, parce qu’elle a su garder en vie tant de passé, et garder tant de morts dans la présence, elle ne
8 1944, Articles divers (1941-1946). Un peuple se révèle dans le malheur (février 1944)
82 allemande, les étrangers qui n’avaient pas voyagé en France, ou ceux qui n’avaient vu que les lieux de plaisir de la capit
83 es sur l’organisation de la résistance à Paris ou en province, ne nous montrent encore que le peuple de France, pour la pr
84 ssignment in Brittany, et je cite au hasard, il y en a tant. Je les ai vus avec des amis, tantôt américains, tantôt frança
85 es. Mais je regardais mes amis du coin de l’œil : en critiquant, ils essuyaient une larme, et rien de plus français que ce
86 uant aux Américains, ils exultaient de confiance, en crescendo, jusqu’à la « Marseillaise » finale. On peut penser tout ce
87 e que l’on veut de ces films, du pire au bien ; j’ en retiens pour ma part qu’ils nous présentent enfin le petit peuple fra
88 re, le naturel de l’héroïsme populaire. Ce peuple en noir au regard vif s’est révélé face au danger. Il manquait d’armes,
89 et de politiciens véreux. Après quelques semaines en territoire conquis, l’Allemand s’est senti dominé par une force étran
9 1944, Articles divers (1941-1946). Ars prophetica, ou D’un langage qui ne veut pas être clair (hiver 1944)
90 point la dupe de vos phrases. Écrire, et surtout en français, ce n’est pas jouer du violon. Tout d’un coup vous le prenez
91 eux précédents dialogues. C. Du moins serez-vous en garde contre votre obscurité ? A. C’est justement ce parti pris de c
92 e point de vue. Il se peut que cette maladresse m’ en apprenne davantage qu’une feinte aimable. Au reste nous sommes entre
93 s qui n’ait été d’abord jaugé, chiffré, et défini en termes simples. À mon tour de me défier d’une convention aussi commod
94 a pas trompés une fois pour toutes, à l’origine, en décrétant — au nom de quoi, je vous en prie ? — la clarté et la simpl
95 l’origine, en décrétant — au nom de quoi, je vous en prie ? — la clarté et la simplicité d’un certain nombre de postulats
96 s qui résument leurs expériences, dira-t-on. Je n’ en crois rien. Ouvrez un ouvrage de science : vous y trouverez au terme
97 ent… La tricherie d’une déduction claire consiste en ce qu’elle prétend partir d’un nombre limité de faits acquis, quand l
98 de sa méthode : « Conduire par ordre mes pensées en commençant par les objets les plus simples et les plus aisés à connaî
99 e travaille sur des cartes postales. Elle dispose en bon ordre ses repères, et puis s’ébranle à reculons vers l’inconnu, l
100 prévention fâcheuse la croyance que ce but existe en tout état de cause. Pour moi, c’est presque le contraire. Voilà : — J
101 alyse. Vous ne donnerez pas la sensation du blanc en décrivant les sept couleurs. C’est pourquoi le langage de la vision o
102 nt j’essayais de vous faire pressentir la limite, en parlant d’un langage inexplicable et pourtant évident. C’est peut-êtr
103 ge parabolique… De là vient son obscurité. Parler en paraboles, c’est tenter d’exprimer un fait ou des idées, en tenant co
104 es, c’est tenter d’exprimer un fait ou des idées, en tenant compte du tout qui les englobe. Ou c’est encore se garder avec
105 solés de mesure. Il s’organise tout naturellement en discours, en phrases liées par voie de conséquence. Mais si je parle
106 re. Il s’organise tout naturellement en discours, en phrases liées par voie de conséquence. Mais si je parle en paraboles,
107 s liées par voie de conséquence. Mais si je parle en paraboles, je n’ai souci que d’une certaine orientation. C’est à part
108 un jour à une petite-fille pourquoi Jésus parlait en paraboles à ses disciples, sachant qu’ils ne comprendraient pas. Voic
109 fit : Jésus racontait des histoires pour qu’ils s’ en souviennent mieux plus tard. C’est comme les noix qui ont une coquill
110 question, voulez-vous ? Qui a le droit de parler en paraboles, et d’être obscur à la manière des prophètes ? A. Le droit
111 de parler seulement selon le droit et la décence, en toute clarté. Il arrive que certains furieux, je ne sais quels extati
112 sont décevantes et ses paraboles sans fruit, il n’ en est pas moins un prophète. Mais alors on le jugera selon sa fin. Vous
113  : la possession, la beauté, la puissance, — il n’ en faut pourtant pas davantage pour nous réduire au parler prophétique.
114 u début de l’ouvrage Doctrine fabuleuse , publié en 1947. j. Rougemont Denis de, «  Ars prophetica, ou D’un langage qui
10 1944, Articles divers (1941-1946). L’attitude personnaliste (octobre 1944)
115 44)l La lecture des journaux clandestins parus en France montre que les idées personnalistes avaient fait leur chemin d
116 voir vivre impunément, jusqu’à ce que Hitler vînt en prendre avantage. Devant un monde à reconstruire, les grandes questio
117 sponsabilité intellectuelle et civique vers 1930, en France, se trouvaient confrontés avec les dilemmes suivants : droite
118 en apparence les plus opposées se trouvaient agir en fait dans le même sens : elles tendaient toutes à dépersonnaliser l’h
119 sponsabilité. La psychologie freudienne ne voyait en elle qu’un îlot précaire perdu dans l’océan de l’inconscient. D’autre
120 ais mieux décrire la doctrine du personnalisme qu’ en indiquant certaines des tentatives d’action les plus typiques qu’elle
121 ivil pourrait du jour au lendemain se transformer en bon manœuvre. Les politiciens déclarèrent le projet utopique et d’ail
122 moment où cette institution n’existait pas encore en France. L’expérience, dans l’ensemble, réussit brillamment. Je me sui
123 domaine de la physique ou celui de la sociologie, en mathématiques, en politique, en économie, les meilleurs esprits de ce
124 ique ou celui de la sociologie, en mathématiques, en politique, en économie, les meilleurs esprits de ce temps sont parven
125 de la sociologie, en mathématiques, en politique, en économie, les meilleurs esprits de ce temps sont parvenus à des concl
126 age d’un univers composé de groupements autonomes en perpétuelle interaction n’a pas encore été traduite dans nos institut
127 tion des corps simples par Mendeleïev, quand nous en sommes au siècle de la physique quantique. La paresse d’esprit et l’i
128 rmé ces vues. L’Underground, dans plusieurs pays, en a glorieusement confirmé l’efficacité. Les groupes personnalistes cri
129 s personnalistes critiquaient également la presse en France. Vénale, pauvre en informations, ou mensongère, elle ne reflét
130 ent également la presse en France. Vénale, pauvre en informations, ou mensongère, elle ne reflétait plus que l’anarchie ca
131 es clubs. Tout était préparé pour sa transmission en cas de crise révolutionnaire ou d’invasion, Les Clubs de presse perso
132 lus divers. Il était prêt à déclencher une action en profondeur d’abord, puis publique. Une trentaine de volumes, deux rev
133 dées. Les nazis avaient délégué leur représentant en France, Abetz, au soin d’observer de très près ce développement inqui
134 ichy, la revue Esprit vit son tirage quintupler en quelques mois. Puis elle fut interdite, à la suite d’un article contr
135 bassin houiller et ferrugineux de la Sarre coupé en deux par une frontière correspondant aux langues. l. Rougemont Deni
11 1944, Articles divers (1941-1946). Quelle guerre cruelle (octobre-novembre 1944)
136 (octobre-novembre 1944)m Je trouve deux hommes en moi. Ils mènent cette guerre en moi-même. L’un n’est guère bon, mais
137 rouve deux hommes en moi. Ils mènent cette guerre en moi-même. L’un n’est guère bon, mais l’autre est pire, et j’ai choisi
138 choix. Or ces réalités ne faisaient que traduire en quantités physiquement mesurables notre attitude spirituelle. Elles é
139 lle : il importe de voir qu’elle se passe d’abord en chacun de nous, et qu’elle figure dans son ensemble la crise d’un con
140 n inconscient se révoltent soudain et l’attaquent en force, par une espèce d’éruption volcanique nommée névrose. Alors l’h
141 hostile lui suggère alors que cet « autre » n’est en fait qu’une part de lui-même. S’il comprend cela et s’il le croit, le
142 uire à la raison, par des procédés contraignants. En cas d’échec, on le mettait derrière des barreaux. La guerre actuelle
143 rendre, il nous faudrait un diagnostic. Tentons d’ en indiquer les premiers éléments. Si cette génération n’a pas le courag
144 uer plus profondément qu’aucune autre, il ne faut en attendre rien de bon, ni rien de grand, ni rien de vrai. Essayons une
145 s-nous fait enquête avant de partir ? Sommes-nous en possession des pièces du procès ? Quand cela serait, ce ne serait pas
146 rais conflits. Elle tire de nous ce que la paix n’ en tirait plus. Elle offre l’avantage incomparable de sanctionner notre
147 elle a perdu ces attraits. Tout le monde la fait, en salopette, en kaki, ou en tablier. Dans la plupart des cas, loin de l
148 es attraits. Tout le monde la fait, en salopette, en kaki, ou en tablier. Dans la plupart des cas, loin de le combler, ell
149 Tout le monde la fait, en salopette, en kaki, ou en tablier. Dans la plupart des cas, loin de le combler, elle déçoit l’i
150 ’humanité — presque totalement mobilisée — combat en fait sur les champs de bataille. Seule une fraction de cette fraction
151 ivalent de la fête chez les peuples anciens, elle en possède les attributs les plus aisément reconnaissables : les lois so
152 absolue de fabriquer des armes et d’enseigner à s’ en servir ? Je ne sais pas mieux que la plupart ce qui résulterait d’une
153 x. Hitler n’est pas en dehors de l’humanité, mais en elle. Bien plus, il n’est pas seulement devant nous, mais en nous. Il
154 en plus, il n’est pas seulement devant nous, mais en nous. Il était en nous avons d’être contre nous. C’est en nous-mêmes
155 pas seulement devant nous, mais en nous. Il était en nous avons d’être contre nous. C’est en nous-mêmes d’abord qu’il se d
156 Il était en nous avons d’être contre nous. C’est en nous-mêmes d’abord qu’il se dresse contre nous. Et quand nous l’auron
157 errifie n’est pas toujours l’aspect du personnage en scène, qui peut être emprunté à la réalité la plus banale, mais c’est
158 atmosphère, tout ce que nous refusions d’admettre en nous. Le cauchemar nous apprend qu’il ne suffit pas de refuser un ins
159 les supprimer. Il s’agit de les utiliser, ou de s’ en guérir ; sinon soyons certains qu’ils vont revenir en force, sous un
160 uérir ; sinon soyons certains qu’ils vont revenir en force, sous un déguisement séduisant, ou sous la forme d’un monstre a
161 a petite moustache est l’un de ces monstres. Nous en verrons bien d’autres, si nous nous contentons de lutter contre les s
162 ntre les signes extérieurs du mal, sans essayer d’ en modifier les causes dans nous-mêmes11. Mais ceci pose un problème nou
163 t refusé à laisser naître des coutumes nouvelles ( en ceci protestant, mais sans la foi). Or les coutumes religieuses quell
164 Le rationalisme régnant peut produire des avions en masse et par ce moyen-là venir à bout d’Hitler ; mais il ne pourra pr
165 fut responsable des méfaits de l’alcool frelaté, en Amérique. ⁂ Je ne demande pas que des sorciers ni même des prêtres di
166 qu’ils soient, sont un moindre mal. » Et certes, en politique, il s’agira toujours, au mieux, de moindres maux. Mais la q
167 te serait-elle un moindre mal que la fracture qui en résulte ? La maladie mortelle, un moindre mal que la mort qui la term
12 1945, Articles divers (1941-1946). Présentation du tarot (printemps 1945)
168 l’invention de l’imprimerie multiplia les cartes en circulation, mais jusqu’au xviiie siècle, le tarot n’est guère connu
169 Toth, livre sacré de l’Égypte. Mais il crut aussi en retrouver les équivalents dans une inscription chinoise, datant de 11
170 . Elle a été contestée par W. A. Chatto, anglais, en 1848, et par Boiteau, français, en 1854. Ce dernier attribue au tarot
171 atto, anglais, en 1848, et par Boiteau, français, en 1854. Ce dernier attribue au tarot une origine hindoue ; et ce sont l
172 urope. Mais on sait que le peuple tzigane ne vint en Europe qu’en 1417 sous la conduite du « Duc d’Égypte » ; et qu’on lui
173 n sait que le peuple tzigane ne vint en Europe qu’ en 1417 sous la conduite du « Duc d’Égypte » ; et qu’on lui suppose une
174 lé Le Nouvel Etteilla (Paris 1922) : Cet auteur, en rendant justice au génie et à la science de Court de Gébelin, terrass
175 rétations sont hasardeuses, mais il a le mérite d’ en avoir proposées. Ses disciples, dont le plus grand fut Éliphas Lévi (
176 pension à ramener tout à tout, et réciproquement. En voici un exemple : Etteilla a placé le Fou à la fin du jeu, c’est-à-
177 qui n’est autre que l’arcane 7, 1e Chariot… Mais en fait cette lame n’a pas de nombre autre que le zéro. Ce nombre 21 app
178 . Il est préférable d’employer les suivants, mais en numérotant les arcanes mineurs : 1. Le tarot de Marseille où les arca
179 ièrement défiguré, mais qui peut également servir en tenant compte que les Bâtons sont remplacés par les Carreaux ; les Ép
180 es par les Piques et les Deniers par les Trèfles. En France nous trouvons difficilement le tarot de Marseille. La Maison G
181 ot italien ; celui de Schaffhouse ne se trouve qu’ en Suisse, de même celui de Francfort en Allemagne ; ils n’ont pas droit
182 e trouve qu’en Suisse, de même celui de Francfort en Allemagne ; ils n’ont pas droit d’entrée en France. Quant à celui d’E
183 cfort en Allemagne ; ils n’ont pas droit d’entrée en France. Quant à celui d’Etteilla, on le trouve partout. (E. Alta, op.
184 sin. La plupart des jeux qu’on trouve aujourd’hui en circulation (si l’on peut dire, car leur vente est interdite dans de
185 arte apparaît dans le jeu droite ou renversée. Il en résulte aussi que le manque de place, dans le cas d’une figure doublé
186 tés monstrueuses. C) Significations. Nous donnons en regard des lames reproduites ci-après quelques exemples d’interprétat
187 es modifications kaléidoscopiques. Celles-ci sont en nombre infini, ainsi qu’on en pourra juger par l’examen du tableau su
188 ues. Celles-ci sont en nombre infini, ainsi qu’on en pourra juger par l’examen du tableau suivant. En effet, chacune des l
189 ctif. De plus, ces significations sont organisées en structures ou rythmes, et non pas simplement juxtaposées. Prenons l’e
190 elon R. M. de Marinis (dans un ouvrage à paraître en 1945) : Bâtons = Trèfle = Sexualité = Sensation = Terre Coupes = Cœur
191 s de l’existence, signifiées par allégories. Il n’ en est rien. Tout est symbole dans le Tarot, jusqu’au moindre détail, si
192 ition. (La croisade contre les albigeois commença en 1209.) Les troubadours cathares, initiateurs de toute la poésie occid
193 comme un moyen de divination de l’avenir. Si l’on en croit les plus récents travaux, ceux en particulier du professeur Tas
194 Chacune des cartes était utilisée par l’étudiant en occultisme comme sujet de méditations et de contemplation, au cours d
195 court trajet dont nous pouvons adoucir les peines en nous comportant d’après les plus saines aspirations du rayon divin qu
196 ve et d’attente. C’est un prince de l’autre monde en voyage ici-bas. Sous cet aspect, il est la conscience individuelle li
197 l ne se sent frustré de rien de tout cela. Il est en union avec l’Univers, sa vraie maison. L’univers participe à sa natur
198 us absconditus, éternellement… Le fol errant voit en toutes choses la manifestation de Dieu, c’est-à-dire de lui-même, et
199 t chez vous et vous tapait gentiment sur l’épaule en murmurant à votre oreille : « Je suis le Père, et le Fils, et le Sain
200 tant du mouvement de 2 roues de 4 rayons tournant en sens inverse l’une de l’autre : équilibre entre les aspects positifs
201 e ne porte pas de signes, mais il se peut qu’elle en ait porté autrefois. À l’extrémité de chacun des rayons de la premièr
202 lettres Yod, Heh, Vav, Heh, qui doivent être lues en sens inverse des aiguilles d’une montre, étant hébraïques. La divisio
203 L’Anubis, ou Hermanubis, mi-loup mi-homme, coloré en rouge (désir), s’élève de la matière et évolue vers le Père : c’est l
13 1945, Articles divers (1941-1946). Les règles du jeu dans l’art romanesque (1944-1945)
204 que est l’art de persuader. L’ignorance ou l’abus en ont fait aujourd’hui l’art de parler pour ne rien dire. Rhétorique es
205 enue synonyme d’éloquence creuse et de clichés. J’ en parlerai dans un tout autre sens. Je voudrais désigner par rhétorique
206 césures, — bref, toutes les conventions acceptées en commun par les artistes et leur public. Tout cela faisait l’Art, aux
207 attention : l’enseignement de la rhétorique entre en décadence, cependant que le journalisme fait son apparition, et que l
208 t d’aventures très simples. Le mythe se développe en légende, et la légende sacrée convoie un enseignement religieux. L’ép
209 ri, le mythe se rapproche de l’histoire. Il gagne en intérêt tout ce qu’il perd en magie. Naît alors le récit en prose, il
210 ’histoire. Il gagne en intérêt tout ce qu’il perd en magie. Naît alors le récit en prose, illustration de vérités morales
211 tout ce qu’il perd en magie. Naît alors le récit en prose, illustration de vérités morales communes à l’élite d’une socié
212 à l’élite d’une société donnée. Nous avons fait, en quelques lignes, tout le chemin qui sépare les premiers chapitres de
213 s profond des choses et des événements de la vie, en décalquant le désordre varié des objets ou des sentiments ? Par l’ext
214 – par rapport à la vie réelle – tenait l’auditeur en haleine ; son rythme était autorité. Les événements extraordinaires q
215 ment des réalités mêmes de l’âme, qu’il décrivait en personnages selon certains procédés et figures surgis des profondeurs
216 méthodiquement insignifiant. Quelque chose qui n’ en finit plus, car la vie ne met jamais de point final. Il y a jeu quand
217 resque rien. Or, c’est elle qu’on veut reproduire en multipliant les observations exactes et les personnages quelconques.
218 uérir un mérite esthétique supérieur… mais ce qui en tout cas lui interdit de cultiver les conventions. » Ceci corrigerait
219 , répond notre auteur, comme pour se justifier, n’ en va-t-il pas de même dans la vie ? Les romans traditionnels « préoccup
220 a vie réelle. Avouer l’ambition d’écrire un livre en se conformant aux « lois de la vie », c’est doublement tricher : avec
221 dont il semble que personne n’ait pu y entrer ni en sortir, et qui contient le problème sous forme de cadavre. Parfois, c
222 nt mortes la tragédie classique et les chroniques en vers. Il mourra pour avoir épuisé ses possibilités formelles, et pour
223 ra pas pour si peu ; et moins encore, le besoin d’ en conter. L’imaginaire, délivré du souci d’une vraisemblance insignifia
224 ntes. Il ne rejoindra le sens vrai de nos vies qu’ en se livrant à la logique profonde des symboles et des mythes de l’âme.
225 types de libre création, des paraboles que furent en d’autres temps Gargantua, Don Quichotte, Robinson Crusoe, ou Gulliver
226 e le sujet du grand livre de Jean Paulhan, publié en France sous l’occupation : Les Fleurs de Tarbes. 2. Ce cauchemar est
14 1946, Articles divers (1941-1946). Contribution à l’étude du coup de foudre (1946)
227 tait vrai, j’aurais su t’arrêter. Le monde entier en eût été changé à l’instant même, sans que nul ne s’en doute. ⁂ J’étai
228 ût été changé à l’instant même, sans que nul ne s’ en doute. ⁂ J’étais sceptique, en ce temps-là. Je disais à ce romancier
229 sans que nul ne s’en doute. ⁂ J’étais sceptique, en ce temps-là. Je disais à ce romancier (l’un des meilleurs de l’Allema
230 n de Don Juan pour impressionner ses victimes. Il en a tant parlé, et vous autres après lui, que toutes les femmes qui von
231 égers mouvements que cette apparition fait naître en elles. Très facile que de les persuader, une fois si bien intéressées
232 e confession. Je ne sais d’ailleurs ce qu’on peut en conclure pour ou contre vos théories. ⁂ Au début de 1933, au moment o
233 avais remarqué mes livres, lorsque sa femme entra en nous saluant d’une mélodieuse formule hongroise. La présentation fait
234 pêche dont on vide trois verres d’un seul trait, en se regardant dans les yeux. Je me sentis pâlir violemment. Nous passo
235  » Je balbutie n’importe quoi sur cette traversée en avion… Le banquier comprend très bien cela. Il parle beaucoup pour me
236 . Est-ce vraiment l’effet de l’avion ? J’allais m’ en persuader quand je m’aperçois, et cette fois-ci non sans terreur, que
237 que mon malaise est contagieux. Il bavarde encore en prenant le café, puis s’excuse d’avoir à regagner sa banque : d’aille
238 , et me fera visiter le Musée, — à ce soir ! Il s’ en va, très satisfait de lui, et de moi aussi, je crois. Nous voici seul
239 e, que domine la statue de saint Geller, les bras en croix. Elle arrête la voiture près d’une barrière de parc public, des
240 t. » Il n’y a rien d’autre à dire. Nous remontons en voiture et descendons vers la ville. Soudain, je me suis décidé et j’
241 r. Et je passais le reste de la nuit dans un bar, en compagnie d’un peintre réfugié, nommé Maria. Je l’avais connu quelque
15 1946, Articles divers (1941-1946). Penser avec les mains (janvier 1946)
242 vaillent sans fin par le monde, peinant peut-être en pure perte, si ce n’est pour notre perte à tous. Or, ces gens forment
243 doute, et ils le savent. Toute l’opinion du monde en est à peu près là, que la pensée ne peut venir qu’à la remorque d’évé
16 1946, Articles divers (1941-1946). Les quatre libertés (30 mars 1946)
244 ablir dans les pays récemment libérés, de même qu’ en Russie soviétique et au Japon. On brûle encore, à l’occasion, quelque
245 bleau : la liberté de parole se voit partout mise en échec par des censures officielles ou commerciales, la misère règne,
246 ’esclavage d’État par nécessité matérielle ? On m’ en voudra de ces questions, parce qu’elles ne paraissent comporter que d
247 qui peut être immédiatement changé : notre idéal, en attendant le reste. Je propose que nous remplacions la revendication
248 arabole. Je connais certains hommes qui jouissent en fait des quatre libertés susdites. « Une » : Ils peuvent dire tout ce
249 La liberté ne peut pas être détaillée ni débitée en tranches : elle est vivante. Elle ne peut pas non plus être donnée. E
250 rs des obstacles. Ceux qui ont peur d’être libres en feront leurs prétextes comme l’ont fait les Allemands sous l’hitléris
17 1946, Articles divers (1941-1946). Dialogues sur la bombe atomique : La pensée planétaire (30 mars 1946)
251 -à-dire la moitié du genre humain. L’autre moitié en subit les effets moins directs, mais pourtant notables : les Français
252 tant notables : les Français eussent mieux mangé, en 1944 et 1945, si les cargos alliés n’avaient été trop occupés dans le
253 rs comptes parce que les Noirs se seront révoltés en Caroline du Sud ou à Harlem ; et les mineurs du pays de Galles n’auro
254 s leur prose et dans leurs longs versets, quel qu’ en soit le sujet allégué, nous avons pour la première fois senti, sous l
18 1946, Articles divers (1941-1946). Dialogues sur la bombe atomique : La paix ou la bombe (20 avril 1946)
255 e la Bombe que l’on a suggérés depuis six mois, j’ en retiens deux : 1. Donner la Bombe aux petits pays pour qu’ils soient
256 nnable, comme vous le voyez. On trouverait mieux, en s’appliquant.) Mais il n’y a que les idées pratiques et raisonnables
257 ue va-t-il se passer ? Ces projets échoueront. On en rira. On n’en rira même pas : on les négligera simplement. On passera
258 passer ? Ces projets échoueront. On en rira. On n’ en rira même pas : on les négligera simplement. On passera aux affaires
259 res. Il est évident que les nations souveraines s’ en moqueront. Il est évident que l’une d’entre elles, Bombe en main, ess
260 nt. Il est évident que l’une d’entre elles, Bombe en main, essaiera d’imposer sa paix à toutes les autres. (Inutile même d
261 paix, parce que ses moyens vous déplaisent. Mais en refusant de choisir la paix, vous votez tacitement pour la mort, et v
262 paix, vous votez tacitement pour la mort, et vous en rendez responsable. Tout tient à chacun de nous. Et nous en sommes au
263 responsable. Tout tient à chacun de nous. Et nous en sommes au point où il devient difficile de le cacher. Nos alibis ne t
19 1946, Articles divers (1941-1946). Dialogues sur la bombe atomique : Post-scriptum (27 avril 1946)
264 exemple. Mais cela ne serait rien encore, quoi qu’ en pensent quelques généraux. Je parlais de la fin du monde… — Et mainte
265 s ? Dans toutes les capitales d’Europe, on voyait en 1939 les civils se promener avec leur boîte à masque en bandoulière.
266 9 les civils se promener avec leur boîte à masque en bandoulière. Eh bien, la guerre des gaz n’a pas eu lieu, parce que to
267 des gaz n’a pas eu lieu, parce que tout le monde en avait une peur bleue, et que personne, même pas Hitler, n’a eu le cou
20 1946, Articles divers (1941-1946). Faut-il rentrer ? (4 mai 1946)
268 accablés de problèmes. Mais je ne cherche pas à m’ en tirer par une réplique, même de bon sens, et j’ai quelques raisons de
269 e l’Amérique et ses défauts, mieux qu’ils ne sont en mesure de les imaginer. Cela se discuterait à l’infini. Il n’est qu’u
270 ût. Il s’agit simplement de vivre au xxe siècle, en tenant compte des réalités que nous avons créées ou laissé s’imposer 
271 ui vivent leur temps, et se trouvent pratiquement en mesure de le vivre ! Combien encore sont-ils du Moyen Âge, ou du bour
272 cle ! Serait-ce manque d’imagination ? Certes, il en faut une dose non ordinaire pour se rendre contemporain d’un monde qu
273 uerre, le problème partir ou rester se résoudrait en termes simples : on verrait vite que c’est un faux dilemme. Le fait e
274 est un faux dilemme. Le fait est là : nous allons en dix heures de Lisbonne à New York, de New York au Pacifique. Un très
275 lanète. Nous changeons de continent comme on part en week-end. Le mot partir a donc changé de sens. Il a perdu son aura dr
276 t aimez. Puis choisissez. Revenez si le cœur vous en dit. Mais je sais bien qu’il y a les visas. N’acceptons pas que cet a
277 ifier ? Ils n’ont pas arrêté un seul espion, tout en causant la perte des milliers d’innocents. Ils rendent vains les prog
21 1946, Articles divers (1941-1946). « Selon Denis de Rougemont, le centre de gravité du monde s’est déplacé d’Europe en Amérique » (16 mai 1946)
278 centre de gravité du monde s’est déplacé d’Europe en Amérique » (16 mai 1946)w x M. de Rougemont est rentré d’Amérique.
279 M. de Rougemont est rentré d’Amérique. Il nous en parle simplement, avec ce sens de l’équilibre et de la mesure dont se
280 portent l’empreinte. Le prochain aussi, ce Vivre en Amérique que Stock publiera cet automne. Nous questionnons : Dites-n
281 ivilisation américaine éveille chez un Européen ? En arrivant là-bas, on a l’impression très nette de pénétrer dans une au
282 ession beaucoup plus forte que celle qu’éveillent en nous les livres ou même le cinéma. Un sentiment qui dure : pour moi,
283 nt de soi ; chez nous, elles paraissent bizarres. En France, par exemple, il était bien vu de tricher avec le fisc ; on s’
284 , il était bien vu de tricher avec le fisc ; on s’ en vantait. En Amérique, la chose est mal vue. Les gens trichent peut-êt
285 ien vu de tricher avec le fisc ; on s’en vantait. En Amérique, la chose est mal vue. Les gens trichent peut-être, mais je
286 t mal vue. Les gens trichent peut-être, mais je n’ en suis pas persuadé. L’Américain s’achète une bonne conscience en payan
287 rsuadé. L’Américain s’achète une bonne conscience en payant son dû à l’État. J’admire beaucoup son sens civique. Quand le
288 il n’a pas pour autant l’amour du règlement comme en Suisse… J’ai aussi été sensible à une sorte de loufoquerie de la vie
289 p de gentillesse. Les Américains lui font crédit. En Europe, par contre, les liaisons, si elles sont plus rares, sont plus
290 es, qui sont toujours sur leurs ergots ; des gens en qui l’on ne peut pas avoir une grande confiance… Ils voient l’Europe
291 lismes européens les effraient. De même qu’il y a en Europe un grand sentiment de supériorité à cause de notre culture, l’
292 qualité qu’un jeune citoyen de là-bas expliquait en ces termes : « Être decent, c’est tenir sa parole et se tenir propre
293 Si de New York vous passez dans le Middlewest, ou en Californie, ou à La Nouvelle-Orléans, vous ne manquez pas d’observer
294 r que le centre de gravité du monde s’est déplacé en Amérique ? Très nettement. Vue de New York, l’Europe constitue une es
295 t considéré comme une espèce de champ de bataille en puissance. Cela change toutes les perspectives. Le problème France-Al
296 ent de la Chambre de commerce américaine est allé en Russie tenir des discours capitalistes… D’autres gens voudraient fair
297 t faire la guerre à la Russie sans plus attendre, en se servant de la bombe atomique, etc. Moscou, qui a toujours eu cette
298 tifique est très remarquable ; l’énergie atomique en est la preuve. La civilisation américaine devient de plus en plus une
299 a, là-bas, le plus grand respect pour les experts en n’importe quoi. Au point de vue littéraire et philosophique, je ne vo
300 ons purement pratiques et non au nom du marxisme… En conclusion, une « cure d’Amérique » est profitable à l’Européen ? Abs
301 érique » que nous a donnée M. Denis de Rougemont. En conclusion, disons que lorsque Talleyrand affirmait qu’il avait trouv
302 centre de gravité du monde s’est déplacé d’Europe en Amérique », L’Illustré, Lausanne, 16 mai 1946, p. 5 et 23. x. Propos
303 une voile au vent), du Journal d’un intellectuel en chômage , de L’Amour et l’Occident , de tant d’autres œuvres auxquel
22 1946, Articles divers (1941-1946). Histoire de singes ou deux secrets de l’Europe (16 mai 1946)
304 traditions et querelles ancestrales qui tournent en rond. C’est la rumeur du xxe siècle. Elle a cours en Europe au moins
305 ond. C’est la rumeur du xxe siècle. Elle a cours en Europe au moins autant qu’ailleurs. Elle risquerait parfois de nous f
306 oix. Laissons l’Histoire telle qu’on la simplifie en courbes ascendantes et descendantes. Tout peut encore se renverser, e
307 it à imiter, là où nous sommes capables d’innover en tirant les leçons d’expériences de la veille. Singe est celui qui doi
308 tout béant sur l’absurde, car une obscure sagesse en lui s’y attendait ; elle le tenait prêt à subir en souplesse les méco
309 n lui s’y attendait ; elle le tenait prêt à subir en souplesse les mécomptes, à vrai dire normaux, de l’optimisme automati
23 1946, Articles divers (1941-1946). La pensée planétaire (30 mai 1946)
310 -à-dire la moitié du genre humain. L’autre moitié en subit les effets moins directs, mais pourtant notables : les Français
311 tant notables : les Français eussent mieux mangé, en 1944 et 1945, si les cargos alliés n’avaient pas été trop occupés dan
312 rs comptes parce que les Noirs se seront révoltés en Caroline du Sud ou à Harlem ; et les mineurs du pays de Galles n’auro
313 s leur prose et dans leurs longs versets, quel qu’ en soit le sujet allégué, nous avons pour la première fois senti, sous l
314 ance intime ? Sinon qu’il fut lui aussi un poète, en prose et en action, en vision créatrice. 13. Saint-Exupéry, l’auteu
315 ? Sinon qu’il fut lui aussi un poète, en prose et en action, en vision créatrice. 13. Saint-Exupéry, l’auteur de Vol de
316 il fut lui aussi un poète, en prose et en action, en vision créatrice. 13. Saint-Exupéry, l’auteur de Vol de Nuit et de
24 1946, Articles divers (1941-1946). La fin du monde (juin 1946)
317 ’étrangeté de la mort des autres, cela ne saurait en aucun cas se dire de sa propre mort, de la mienne. Et non plus, à mon
318 l’idée soit tragique : elle m’appartient, je puis en disposer, feindre assez facilement d’en rire. Elle n’est pas plus for
319 , je puis en disposer, feindre assez facilement d’ en rire. Elle n’est pas plus forte que moi. Peut-être même n’est-elle qu
320 être ni rapportée ni répétée. Perfection et Mort en ceci se confondent, qu’elles sont absolument tragiques, c’est-à-dire
321 it de son but. Si l’homme savait un jour ce qu’il en est de son destin et de sa liberté, s’il voyait à l’œil nu, leur sens
322 ient à l’idée de penser notre mort, c’est la Mort en nous qui se pense, c’est la Crise déjà qui affleure, nous avertit de
323 ste. La crise Le Bas-Empire ne fut « bas », en son temps, qu’aux yeux de ceux qu’une réalité nouvelle illuminait. Sa
324 se mêle encore confusément. Nous sommes là comme en rêve, empêtrés, dans le sentiment d’une urgence que nous ne parvenons
325 e règne sur nous, depuis peu. Nous essayons, mais en phrases banales de moralistes tardivement ressaisis, d’évaluer les co
326 st dans la masse et son Histoire. Vous vous dites en secret qu’elle ne peut pas mourir, et il est vrai qu’elle ne possède
327 rien. Elle ne peut être en soi pensée, et l’homme en elle reste à peu près dénué de réalité, jusqu’au jour où la Fin le pe
328 et cherchent leur appui dans l’illusion tomberont en grand nombre dans le vide. Mais ceux qui auront vu, et qui auront cru
329 La fin du monde, irréfutable, s’arrêtait un peu en avant, les regardait sans indulgence, puis se remettait à marcher, co
330 pas croire à sa mort proche, — cet air petit. On en reviendrait bien, de cette fin du monde ! Car sinon tout apparaissait
331 ’élan mortel. Car il ne vient pas de nous, mais d’ En Face. Ici le futur nous attend, ce futur qui n’était pour nous qu’un
332 lors que c’est la seule Présence qui est terrible en sa splendeur et difficile à supporter, le seul Amour apparaissant qui
333 l rend ce qu’il reçoit, où le grand jour est tout en tous. Ce premier Jugement fut la Salutation. Second jugement ou so
334 être de son être tel qu’il l’avait librement fait en le vivant. L’examen des raisons de survivre et leur introduction au t
335 me vint, comme viennent les somnambules, le corps en paix, mais le visage affreusement nu. Il désirait un palais vide à la
336 vec soi la rétribution de nos œuvres » — elle est en Lui, non dans nos œuvres. Commence l’œuvre du Pardon. « Et que celui
25 1946, Articles divers (1941-1946). Deux lettres sur le gouvernement mondial (4 juin 1946)
337 er « pratiquement » un Pouvoir Mondial, et à vous en former une image convaincante. Voici comment j’explique, pour ma part
338 Personne à qui répondre que l’honneur du pays est en jeu, qu’on ne cédera plus d’une ligne, etc. ? Pour tout dire, pas de
339 es nations et leurs gouvernements ne se posent qu’ en s’opposant. C’est la menace extérieure qui « cimente leur unité », qu
340 tions. Je perdrais mon temps et le vôtre à fonder en logique, et, dans l’Histoire, cette relation que le premier venu peut
341 -même que vous ne voyez pas. Je dis vous, et je m’ en excuse. Vous représentez ici l’humanité. Notre condition malheureuse
342 e, ils représentent les « éléments d’ordre », à n’ en pas douter. Il suffit de voir l’état présent de l’Europe. ⁂ J’ai cru
343 ent de désordre ». Ce colonel m’a donné une idée. En reposant sa lettre je me suis écrié : « Vivement la Bombe ! Suprême é
344 Bombe peut nous délivrer de deux manières : soit en faisant sauter le tout, soit en nous forçant d’ici peu à fédérer les
345 x manières : soit en faisant sauter le tout, soit en nous forçant d’ici peu à fédérer les hommes au-delà des nations. Vous
346 us êtes servie. II. L’État-nation Non, je n’ en veux pas un instant à votre ami le colonel. Dites-lui que je respecte
347 aos. Je cherche un moyen de l’éviter, ou plutôt d’ en sortir un peu, car nous y sommes déjà bien engagés. Ce sont les guerr
348 ts-nations ainsi formés, de se rendre autarciques en vue d’une guerre possible, soit qu’ils redoutent ou souhaitent cette
349 d’horribles confusions d’idées, qui se terminent en carnages périodiques. Autre exemple. Pourquoi n’est-il question que d
350 que de se mettre hors d’état de faire la guerre, en se liant à des économies voisines. Mais remarquez l’hypocrisie du ter
351 rti du prestige qui s’attache à l’idée de nation… En fait, on étatise la nation. Que penser de ces États-nations, de plus
352 t de protections à la frontière, comme autrefois, en attendant que la Bombe vienne volatiliser leurs centres vifs en une s
353 ue la Bombe vienne volatiliser leurs centres vifs en une seconde, négligeant les armées purement décoratives ? Vous me dir
354 isation, je note seulement qu’on prend parti sans en savoir plus que moi, et à cause de trois syllabes. Et que l’on confon
355 quer le fait qu’il s’agit d’une étatisation. Je n’ en ai qu’au cadre national. Introduisez dans cette broyeuse automatique
356 à l’autre bout, vous obtiendrez du totalitarisme en bâtons et une grêle de coups. Je suis sérieux. Le socialisme, non pas
357 es sociaux. On ne sortira de ce cercle vicieux qu’ en supprimant ce qui permet la guerre, ou la provoque, c’est-à-dire en d
358 ui permet la guerre, ou la provoque, c’est-à-dire en désintégrant le carcan des États-nations. Par quel moyen ? En remetta
359 ant le carcan des États-nations. Par quel moyen ? En remettant le soin de diriger les affaires internationales à des homme
26 1946, Articles divers (1941-1946). L’Américain croit à la vie, le Français aux raisons de vivre (19 juillet 1946)
360 Pendant que vous avez encore quelques Américains en France, et que l’Amérique encore me tient par tout ce que je viens d’
361 ncore me tient par tout ce que je viens d’y vivre en six années, livrons-nous au petit jeu de société mondiale qu’est la c
362 général, et ne vous rencontrera qu’au café. Mais en France des amitiés se nouent — terme intraduisible en anglais — des a
363 rance des amitiés se nouent — terme intraduisible en anglais — des amitiés exigeantes et suivies, attentives et agissantes
364 s français, de Montaigne à Paul Valéry. Tandis qu’ en Amérique, il vous arrive souvent de vous sentir seul au monde en conn
365 vous arrive souvent de vous sentir seul au monde en connaissant tout le monde. La rançon d’une intimité trop rapide et su
366 e. Comment ils s’unissent et se divisentac En France, il y a les catholiques et les laïques, c’est simple ; mais il
367 et sous-partis, tendances et nuances politiques. En Amérique, il y a les républicains et les démocrates, c’est simple ; m
368 tous les avions de série étaient déjà faits ; il en est fatigué d’avance, et passe à l’invention suivante. Vue d’Amérique
369 ls, parce qu’il les utilise vraiment, parce qu’il en vit, et qu’il ne spécule pas à leur sujet. Comment ils prennent la
370 s confessionnelles. L’Américain lui, passe encore en Europe pour un Anglo-Saxon puritain du type dynamique, alors qu’il es
371 raît fort peu romantique. On compare les salaires en toute simplicité, on divorce pour des questions de cuisine, on se con
372 passe d’un continent à l’autre. Un seul exemple : en Europe, la longue durée d’une liaison l’officialise presque ; en Amér
373 ongue durée d’une liaison l’officialise presque ; en Amérique, c’est elle qui fait scandale. Se quitter bons amis après [i
374 ui est immoral…ad Comment ils construisent En Europe, terre des cathédrales, on demande à Le Corbusier de bâtir des
375 s, on demande à Le Corbusier de bâtir des églises en verre et en ciment : je me souviens du temple protestant de Drancy, e
376 e à Le Corbusier de bâtir des églises en verre et en ciment : je me souviens du temple protestant de Drancy, et de vingt é
377 temple protestant de Drancy, et de vingt églises en style aérodynamique construites par les Allemands avant Hitler, ou pa
378 r, ou par les Suisses ou par les Hollandais. Mais en Amérique, on copie le gothique, tant pour les églises que pour les un
379 pousse le raffinement jusqu’à construire le chœur en style roman, et la nef en style ogival ; jusqu’à reproduire les tours
380 u’à construire le chœur en style roman, et la nef en style ogival ; jusqu’à reproduire les tours non terminées des cathédr
381 ersité et d’élégance, que les maisons bourgeoises en France. Quant aux gratte-ciel, l’ère en est bien passée. Sauf à New Y
382 urgeoises en France. Quant aux gratte-ciel, l’ère en est bien passée. Sauf à New York, ils ne sont pas rentables. Comme
383 j’entends vis-à-vis de l’État. Quand vous entrez en Amérique, on vous demande de remplir des questionnaires comportant de
384 urent d’abord — quitte à payer le prix qu’il faut en matériel — que les batteries d’en face ont été écrasées. Cette folie
385 té par nous sur la base du texte paru dans Vivre en Amérique (chapitre 4), livre édité un an plus tard chez Stock. ad.
27 1946, Articles divers (1941-1946). Réponse à l’enquête « Les travaux des écrivains » (24 août 1946)
386 absence de six ans. D’abord, chez Stock : Vivre en Amérique . C’est un recueil de tous mes articles sur les États-Unis,
387 , qui paraissent simultanément dans huit pays et en sept langues différentes. La Part du diable , dont deux versions di
388 ont deux versions différentes parurent à New York en 1940 af et en 1944. Il s’agit, bien entendu, de la version définitive
389 ons différentes parurent à New York en 1940 af et en 1944. Il s’agit, bien entendu, de la version définitive. Les Person
390 avec les mains et le Journal d’un intellectuel en chômage . Aux Éditions « Je sers » : Politique de la personne , qui,
391 ui, publié il y a douze ans, obtint un vif succès en Hollande, où il joua un certain rôle dans la naissance du parti trava
392 e préfère ne point vous parler des traductions. J’ en ai environ dix-huit ! ae. Rougemont Denis de, « [Réponse à une enq
393 af. La première version de cet ouvrage est parue en 1942, et non en 1940.
394 version de cet ouvrage est parue en 1942, et non en 1940.
28 1946, Articles divers (1941-1946). Mémoire de l’Europe (écrit en Amérique, en 1943) (août-septembre 1946)
395 Mémoire de l’Europe (écrit en Amérique, en 1943) (août-septembre 1946)ah Je ne savais pas que to
396 Mémoire de l’Europe (écrit en Amérique, en 1943) (août-septembre 1946)ah Je ne savais pas que tout était si p
397 t comme le sang, c’est que tu es blessé, ta vie s’ en va !) La force était mémoire et allusion. Elle était ce vieil arbre t
398 st la mémoire du monde, parce qu’elle a su garder en vie tant de passé, et garder tant de morts dans la présence, elle ne
399 Rougemont Denis de, « Mémoire de l’Europe (écrit en Amérique, en 1943) », Suisse contemporaine, Lausanne, août–septembre
400 nis de, « Mémoire de l’Europe (écrit en Amérique, en 1943) », Suisse contemporaine, Lausanne, août–septembre 1946, p. 824.
29 1946, Articles divers (1941-1946). En 1940, j’ai vu chanceler une civilisation : ce que l’on entendait sur le paquebot entre Lisbonne et New York (21 septembre 1946)
401 En 1940, j’ai vu chanceler une civilisation : ce que l’on entendait sur
402 ai vu qu’elle peut mourir. Durant cette traversée en autocar de Genève aux Pyrénées, pendant deux jours, j’ai vu la France
403 l est le sadisme policier. Nous venons de passer, en quatre jours de voyage, sept contrôles différents de douane et de pol
404 à chaque pas de prouver son identité. Or plus il en proteste et moins il s’en assure. Plus il la chiffre et moins il la r
405 on identité. Or plus il en proteste et moins il s’ en assure. Plus il la chiffre et moins il la ressent. Et plus il la démo
406 econnaît dans le portrait simplifié que la police en compose à toutes fins menaçantes. Songeons aussi que ces procédés s’a
407 ciemment, qu’il était bien réel et bien lui-même… En mer, nuit du 12 au 13 septembre 1940 Les derniers bateaux de la derni
408 e reliant l’Europe à l’Amérique ont tous des noms en « Ex » : Exeter, Excalibur, Excambion. Et ils ne transportent, en eff
409 re côté on savait tout cela, et qu’au surplus, on en faisait autant, avec des armes fournies par certains ministères. Si j
410 des armes fournies par certains ministères. Si j’ en crois ces deux ex-adversaires, leurs astucieux préparatifs de guerre
411 x, mais nous le regardions de trop près : d’heure en heure, nous n’avons rien vu. C’est après coup, en nous retournant, qu
412 en heure, nous n’avons rien vu. C’est après coup, en nous retournant, que nous avons entrevu l’ampleur et la rapidité des
413 times. Et les Anglais, même battus, se comportent en propriétaires de droit divin de la victoire en général. La seule solu
414 s, s’appuie au bastingage, près de moi, et me dit en crachant dans l’eau entre chaque phrase : « Il y a des gens, des Pari
415 il vous donne quelquefois cinq sous pour rentrer en métro… Il est correct, isn’t he ? » À mon tour, j’ai craché dans l’ea
416 pour marquer mon approbation. 20 septembre 1940, en rade de New York Je me suis éveillé dans ma cabine moite avec le sent
417 e à l’instant même ! ag. Rougemont Denis de, «  En 1940, j’ai vu chanceler une civilisation », Le Figaro littéraire, Par