1
Reynold
et
l’avenir de la Suisse (1941)a Le grand service que nous aura rendu
2
t pessimiste. Les plus graves faiblesses, morales
et
matérielles, dans le domaine de la « défense spirituelle » comme dans
3
cité congénitale à prévoir le pire, à l’admettre,
et
à se préparer en conséquence. Nous n’avons pas encore su prendre le t
4
ère de la bourgeoisie, ère du « confort moderne »
et
de l’absence d’imagination réaliste, prolonge encore dans la vie de n
5
u pour être vrai », disait-il au siècle dernier ;
et
aujourd’hui : « Trop affreux pour être vrai. » Cette double méfiance,
6
e » par en haut comme par en bas, traduit un seul
et
même refus de voir le monde tel qu’il est : pécheur et racheté, conda
7
me refus de voir le monde tel qu’il est : pécheur
et
racheté, condamné et sauvé. Qui ne croit pas en Dieu ne saurait croir
8
onde tel qu’il est : pécheur et racheté, condamné
et
sauvé. Qui ne croit pas en Dieu ne saurait croire au diable. Qui ne c
9
pas au pardon ne saurait mesurer les profondeurs
et
les puissances du mal. Et c’est pourquoi les chrétiens seuls savent r
10
mesurer les profondeurs et les puissances du mal.
Et
c’est pourquoi les chrétiens seuls savent reconnaître les démons et d
11
les chrétiens seuls savent reconnaître les démons
et
déjouer à temps leurs calculs. Reynold a le courage d’envisager — de
12
acun commence par dire la vérité dans son patois,
et
celui de Reynold est « de droite ». Le mien passa souvent pour être d
13
chatouillent les politiciens ! Laissons tout cela
et
avançons ! La claire vision d’un but commun et d’un péril qui se dési
14
la et avançons ! La claire vision d’un but commun
et
d’un péril qui se désigne lui-même comme total (ou totalitaire) doit
15
esse, comme aujourd’hui, l’on voit ce qui compte,
et
c’est cela qui unit. Pour le reste, si sérieux soit-il, on en reparle
16
la Hollande. a. Rougemont Denis de, « Reynold
et
l’avenir de la Suisse », Hommage à Gonzague de Reynold, Fribourg, Lib
17
ut ! » Pour mieux courir, elle a jeté ses voiles,
et
sa pudeur est dévoilée, ô folle ! Mais lui les trouve et s’en revêt :
18
udeur est dévoilée, ô folle ! Mais lui les trouve
et
s’en revêt : voiles de nuit. Elle a passé tout près, ne l’a pas vu. C
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a pas vu. C’est pourtant le désir qui les presse,
et
l’amour appelant l’amour aux chambres vides, dans la sonorité glacial
20
des. Car sinon, tu m’entends, je suis le Prince !
Et
quelle est la femme égarée qui ne voudrait aimer le Prince de ces Lie
21
ient. La nuit pleuvait dans les futaies épaisses,
et
les herbes sauvages fouettaient les jambes nues. Au fond du parc, prè
22
l. L’homme choisit la plus terne, il était triste
et
présomptueux. À mesure qu’avec les années, il se persuadait que sa pi
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de ses vœux, la pierre se mit à luire davantage ;
et
davantage encore il l’aimait, plus il luttait contre la vie, plus il
24
car seul j’ai deviné le cher secret de son éclat.
Et
maintenant, ma pierre, luis de ton propre éclat ! Qu’une fois au moin
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ouleur — la pierre se mit à luire sous la cendre,
et
le grand feu flamba soudain toute la pièce. Il dit à sa pierre : — Ô
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je encore besoin du feu ? Je reprendrai ma pierre
et
me reposerai dans la fraîcheur de son éclat. Il la prit. Elle était b
27
ens de ta jeunesse. Il choisit la plus éclatante.
Et
vois : quand il était heureux, elle luisait d’une froide splendeur, e
28
ait heureux, elle luisait d’une froide splendeur,
et
quand il était triste, elle était consolante. Mais c’était l’autre qu
29
it alors entre ses mains, la pierre du vœu triste
et
présomptueux de sa jeunesse. Et il pleurait. Une troisième fois, il s
30
rre du vœu triste et présomptueux de sa jeunesse.
Et
il pleurait. Une troisième fois, il se leva pour aller au marché de l
31
ne te vendrai rien à crédit. Tu possèdes ta Vie,
et
tu possèdes aussi ton Bien. Veux-tu davantage ? Voici, l’une des deux
32
s sera ta pierre de Mort, si tu la choisis seule,
et
ne veux plus souffrir. III. Le coup de pistolet Évidemment, je
33
ez que c’est compliqué, ce bâtiment. Des couloirs
et
des escaliers partout, un labyrinthe. Je suivais les tapis rouges, et
34
tout, un labyrinthe. Je suivais les tapis rouges,
et
les lampes rouges, comme lorsqu’on choisit une couleur au jeu de cart
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que des feuilles de papier blanc sur les tables,
et
tout le monde lisait. Je dis : — Est-elle ici ? Quelqu’un l’a-t-il vu
36
ent d’un air vexé. Un valet s’approche rapidement
et
me dit à voix basse : — Puisque Monsieur est venu, et puisque Monsieu
37
e dit à voix basse : — Puisque Monsieur est venu,
et
puisque Monsieur demande si elle est ici, elle y est évidemment. Mais
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er sans bruit. Mais vous connaissez ces couloirs.
Et
je ne voulais pas être mis à la porte ! Naturellement, j’aurais dû po
39
û pousser la première porte venue, sans y penser,
et
je serais sorti comme j’étais entré. Mais le fait est que je pensais
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entré. Mais le fait est que je pensais à sortir,
et
par la bonne porte. Voilà la faute. L’inévitable se produisit au bout
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de quelques heures. J’étais épuisé, j’avais faim
et
soif, je ne rencontrais plus personne. Je suis un fumeur invétéré. Ma
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porte du bureau directorial. J’entre comme un fou
et
je crie : — Pourquoi ? Le directeur était assis face à la porte et me
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urquoi ? Le directeur était assis face à la porte
et
me regardait comme s’il n’avait rien entendu. Nous nous sommes dévisa
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lait que ce regard fuyait très loin dans ses yeux
et
me rejoignait par-derrière, je ne puis l’expliquer autrement. D’une c
45
’était mon propre, regard qui traversait ses yeux
et
revenait sur ma nuque. À l’instant où je l’ai compris, il a tiré. — E
46
sais combien de temps cela va durer. Elle délire
et
j’ai cette balle dans le cœur. Et voici que maintenant, je ne puis pl
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er. Elle délire et j’ai cette balle dans le cœur.
Et
voici que maintenant, je ne puis plus poser de questions. Car si vous
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ai dans le cœur, il est évident que je suis mort.
Et
si vous me dites que la balle n’est pas plus réelle que ce qui s’est
49
upprimez à la fois toutes les questions possibles
et
donc toute possibilité de réponse à quoi que ce soit. Laissez-moi don
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ce soit. Laissez-moi donc seul. C’est mon ordre.
Et
si vous ne me croyez pas, je vais tirer ! b. Rougemont Denis de,
51
il dit à un soldat : « Vous êtes 500 000 hommes,
et
vous tirez bien ; mais si nous vous attaquions avec un million d’homm
52
ici les faits : Avec une population de 4 millions
et
demi d’habitants, la Suisse a une armée de 600 000 hommes. Un habitan
53
0 millions d’hommes. Mais nulle part les coutumes
et
les institutions ne sont plus démocratiques qu’en Suisse, et nulle pa
54
itutions ne sont plus démocratiques qu’en Suisse,
et
nulle part l’armée n’est plus populaire et ne fait aussi partie de la
55
uisse, et nulle part l’armée n’est plus populaire
et
ne fait aussi partie de la vie nationale qu’en Suisse. Depuis que les
56
toyens libres, possédant chacun ses propres armes
et
portant fièrement son fusil, ses munitions et son équipement militair
57
mes et portant fièrement son fusil, ses munitions
et
son équipement militaire. C’est ainsi qu’on peut souvent voir un pays
58
paysan, assis sur le seuil de sa porte, polissant
et
graissant son fusil après le tir du dimanche, — spectacle que vous ne
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un symbole de leur liberté. Les libertés civiques
et
l’esprit militaire n’ont jamais été en contradiction. Depuis les temp
60
uisses étaient libres parce qu’ils étaient forts,
et
ils étaient forts parce qu’ils étaient libres. La possession par chaq
61
avaient le droit d’emporter chez eux leurs armes
et
leurs munitions ! En France, après l’Armistice, on offrit cent-mille
62
eul moyen d’assurer une mobilisation ultrarapide.
Et
c’est la défense la plus adéquate contre les parachutistes. Une coutu
63
C’est la clé de l’organisation de l’armée suisse
et
le secret de sa popularité… L’armée est un lien non seulement entre l
64
nt, on a le temps de reconnaître la valeur réelle
et
les faiblesses de son voisin, de se faire des amitiés. Une égalité co
65
oie les hommes à la vie civile, bronzés, endurcis
et
chargés d’expérience que la vie paisible des villes ou des villages n
66
sont un puissant tonique pour la jeunesse suisse
et
la durée relativement courte de l’entraînement permet à chaque recrue
67
ir, on voit des « cercles d’amis » pour officiers
et
sous-officiers. L’officier suisse est, dans la plupart des cas, un ci
68
ne guerre ne serait pas une guerre de « fronts »,
et
qu’une défense en profondeur devait être organisée, constituée par de
69
ée par des « nids » offrant une résistance locale
et
soigneusement équipés. C’est ainsi que les Suisses retournent à leur
70
n propre système de défense, selon sa topographie
et
ses ressources. Des petits corps d’armée surgissent en certains point
71
rtains points pour défendre les profondes vallées
et
pour barrer le paysage des gorges étroites. Si l’ennemi est trop puis
72
la structure politique du pays : autonomie locale
et
entraide. La moitié de l’armée est composée de divisions mobiles régu
73
obiles régulières. Le reste consiste en garnisons
et
en forts pour défendre les principaux passages des Alpes. Ce sont des
74
montagne, constituées par des spécialistes du ski
et
de l’alpinisme, et des brigades indépendantes pour défendre les front
75
es par des spécialistes du ski et de l’alpinisme,
et
des brigades indépendantes pour défendre les frontières. Ces troupes
76
ière alerte, les hommes endossent leurs uniformes
et
vont à leurs postes. Les machines et les canons anti-tanks sont prêts
77
rs uniformes et vont à leurs postes. Les machines
et
les canons anti-tanks sont prêts. Les magasins de munitions et de viv
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anti-tanks sont prêts. Les magasins de munitions
et
de vivres ont été cachés dans les rochers. En 1939, la disposition de
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ses jumelles, un champ, à 3000 pieds au-dessous,
et
parfois attraper le clair reflet d’une robe d’été et imaginer qu’il r
80
parfois attraper le clair reflet d’une robe d’été
et
imaginer qu’il reconnaissait ses enfants. De telles choses comptent d
81
res de l’Axe peuvent devenir les maîtres de l’air
et
désorganiser les communications ferroviaires. Mais l’armée suisse a é
82
. Mais l’armée suisse a été mobilisée depuis 1939
et
les distances sont si petites que les troupes peuvent être déplacées
83
, autant de bases de défense qu’il y a de défilés
et
de montagnes. Chaque village de la Suisse est devenu un fort, ses ent
84
u un fort, ses entrées fermées par des barricades
et
les maisons transformées en des forteresses en miniature. Vous ouvrez
85
iniature. Vous ouvrez la porte de quelque grenier
et
vous vous trouvez en face d’un canon anti-tank, protégé par un mur en
86
urrait seulement se faire en évitant les villages
et
en passant à travers les forêts ou les pâturages. Mais les routes son
87
les routes sont minées. Les fleuves, les vallées
et
les gorges sont protégés par des canons cachés dans les parois rocheu
88
isses de se défendre. Le contact entre les hommes
et
le sol, entre l’armée et le peuple, entre le présent et les tradition
89
contact entre les hommes et le sol, entre l’armée
et
le peuple, entre le présent et les traditions historiques, s’est vu r
90
sol, entre l’armée et le peuple, entre le présent
et
les traditions historiques, s’est vu raffermi par cette longue périod
91
rirent que ce serait un « morceau dur à avaler »,
et
parce qu’il était celui qui a, dans ses mains, le Gothard. Les 4/5e d
92
le Gothard. Les 4/5e du trafic entre l’Allemagne
et
l’Italie se font par le Gothard ou le Simplon. Ces tunnels sont puiss
93
descendants. Voilà pourquoi nous croyons en Dieu
et
non pas en un homme qui prétend être adoré comme un Dieu. c. Roug
94
eçon de l’armée suisse », Journal suisse d’Égypte
et
du Proche-Orient, Alexandrie, 4 mars 1942, p. 1.
95
e connaître, mais limiter sa part dans notre vie,
et
nul amour ne peut survivre à cette méfiance ou à cette avarice anxieu
96
lle avait sa statue dans le temple de la Volupté.
Et
certains pensent qu’elle est la même que la déesse Volupie. Promenons
97
issant le champ des facultés vers un objet unique
et
dans une seule pensée — l’identification, par la conquête chez l’un,
98
ter libre, mais il semble que l’âme s’extériorise
et
tombe sans fin dans le regard unique. Durant certaines secondes, elle
99
il est visible dans ce visage décomposé en ombres
et
lueurs lentement mouvantes, — un seul œil par où toute l’âme regarde
100
uvantes, — un seul œil par où toute l’âme regarde
et
supplie avec une impérieuse tendresse. De plus près encore, l’œil vie
101
êmes. Alors il lui saisit la tête entre ses bras,
et
la contemple. Et il la nomme dans sa pensée, comme s’il doutait… Adol
102
i saisit la tête entre ses bras, et la contemple.
Et
il la nomme dans sa pensée, comme s’il doutait… Adolescence ! Le cha
103
du présent. Or cette connaissance est interdite.
Et
c’est l’approche du viol de l’interdit qui impose aux amants leur sil
104
on a fait une brusque rumeur de vagues affrontées
et
hostiles. Maintenant, l’onde lisse et basse d’un temps nouveau nous e
105
affrontées et hostiles. Maintenant, l’onde lisse
et
basse d’un temps nouveau nous environne. Ceux qui n’aiment point la f
106
nos âmes ? Deux corps s’endorment dans leur paix,
et
l’être enfin comblé ne sait plus où se prendre. Il se ramène en soi,
107
ures d’avant l’aube, dans le dépaysement de l’âme
et
les métamorphoses indicibles. Lui s’éveille parfois tout à fait, et s
108
es indicibles. Lui s’éveille parfois tout à fait,
et
ses yeux dans le noir imaginent. Une étreinte qui s’égalerait à l’Inf
109
successives il s’élève à la jouissance imaginaire
et
désespérément consciente de l’Être. L’aube point. L’esprit se tourne
110
L’aube point. L’esprit se tourne vers les choses
et
les dénomme d’un regard. Un corps auprès du mien respire, mémoire pes
111
ne toucherons jamais qu’un impossible fascinant.
Et
nous vivrons dès lors dans le vertige de nous détruire au contact de
112
contact de cet infini, plus puissant que la joie
et
la douleur. Dans le vertige de revenir toucher cet absolu, sensible à
113
e : l’être que nous formons au sommet de l’amour,
et
qui meurt à l’instant où il naît. Tout notre platonisme échoue dans
114
, retirés en soi. Alors paraissent la conscience,
et
le sérieux, et la réalité des vies au jour. Nous sommes deux. Il n’y
115
i. Alors paraissent la conscience, et le sérieux,
et
la réalité des vies au jour. Nous sommes deux. Il n’y a que deux phi
116
Il n’y a que deux philosophies : celle du désir
et
celle de l’acte ; ou encore, il n’y a que deux doctrines : celle du s
117
e, il n’y a que deux doctrines : celle du silence
et
celle de la parole. La négation du désir amoureux par l’acte même qui
118
ieuse. Quittons ce temple où dorment deux idoles,
et
parlons le langage du Jour. d. Rougemont Denis de, « Angérone »,
119
ire (mars 1943)e (Nous le connaissions un peu,
et
pensions le connaître. La lecture de ses papiers posthumes nous le ré
120
e bien différent. Il fallait certes s’y attendre,
et
pourtant l’on demeure surpris. C’est que tout, dans ses livres, — sur
121
enir les plus curieux malentendus entre un auteur
et
ses lecteurs. Or il se peut que ce soit l’attitude de la plupart des
122
J’ai vécu pour la gloire — dit le prince André —
et
qu’est-ce que la gloire, si ce n’est aussi l’amour du prochain, le dé
123
i l’amour du prochain, le désir de lui être utile
et
de mériter ses louanges ? J’ai donc vécu pour les autres, et mon exis
124
er ses louanges ? J’ai donc vécu pour les autres,
et
mon existence est perdue, perdue sans retour ; depuis que je vis pour
125
tres, c’est le prochain, comme la princesse Marie
et
toi vous l’appelez, le prochain, cette grande source d’iniquité et de
126
elez, le prochain, cette grande source d’iniquité
et
de mal ! Le prochain, le sais-tu, ce sont les paysans de Kiew, que tu
127
êves de combler de bienfaits. (Tolstoï, La Guerre
et
la Paix.) Cette page m’avait séduit par sa mauvaise humeur. En la co
128
nt aimé son prochain, n’en n’a pas reçu de gloire
et
n’en demandait point. Aussi ne pense-t-elle pas qu’elle a « perdu sa
129
Liszt à la fin d’un concert triomphal, s’incline
et
prononce à mi-voix : « Je suis le serviteur du public, cela va sans d
130
sans dire. » C’est à cela qu’on donne la gloire.
Et
ceux qui ne la briguent point risquent fort de se rendre antipathique
131
. Or personne ne lit plus Les Martyrs ni Corinne,
et
tout le monde croit aimer La Chartreuse et Adolphe. Mais ce jugement
132
rinne, et tout le monde croit aimer La Chartreuse
et
Adolphe. Mais ce jugement sur le talent, changé du tout, n’entraîne p
133
ire est donc un mythe : j’entends que son pouvoir
et
sa grandeur ne dépendent d’aucune raison, et paraissent même n’en poi
134
voir et sa grandeur ne dépendent d’aucune raison,
et
paraissent même n’en point souffrir. Fama crescit eundo : minuit prae
135
je veux être aimé pour moi-même, tel que je suis
et
non point tel que me désire leur goût sentimental de « l’Art ». Mais
136
mental de « l’Art ». Mais comme tout se complique
et
se retourne ! Celui qui veut la gloire, est-ce qu’il manquerait d’org
137
erait d’orgueil ? Serait-il plus humble que moi ?
Et
l’orgueilleux que je suis, ne donne-t-il pas une preuve d’amour à son
138
mmunion ou d’une communauté, écarte aussi de soi,
et
l’on éprouve alors le besoin de se faire confirmer. Un homme en commu
139
are. Mais il chercherait l’excellence, à son rang
et
selon ses astres. Ainsi les héros et les rois sont les auteurs de leu
140
, à son rang et selon ses astres. Ainsi les héros
et
les rois sont les auteurs de leur éclat. Ils donnent et ne demandent
141
rois sont les auteurs de leur éclat. Ils donnent
et
ne demandent rien. Et ce qu’ils donnent fait toute la renommée du peu
142
de leur éclat. Ils donnent et ne demandent rien.
Et
ce qu’ils donnent fait toute la renommée du peuple. (Aujourd’hui c’es
143
exandre exemplaire, plus beau que tous, plus fort
et
plus heureux que tous, n’était pas séparé mais au sommet. Sa gloire é
144
e, mais exagérée, mobile, nerveuse, sentimentale.
Et
voici qui est plus grave : elle est ressentie comme flatteuse. C’est
145
té de son œuvre, que s’est constituée sa gloire.)
Et
cependant, je me suis surpris à désirer une gloire qui ne m’ennuierai
146
Un dieu n’a pas besoin d’adorateurs pour rayonner
et
se réjouir de son être. Oui, c’est bien là le privilège d’un dieu. Et
147
être. Oui, c’est bien là le privilège d’un dieu.
Et
la vraie gloire. Qu’est-ce que l’incognito ? Il y a là quelqu’un qui
148
vanité, ou bien ils croient que ce serait naïf ;
et
si l’on avoue son orgueil, ils croient que c’est par vanité. Je suis
149
« Je vous avertis que je vais mentir, pour telle
et
telle raison aisément vérifiable. » Ce serait instructif et amusant.
150
aison aisément vérifiable. » Ce serait instructif
et
amusant. Je veux ma gloire, et je ne l’avoue jamais, — je fais le mo
151
serait instructif et amusant. Je veux ma gloire,
et
je ne l’avoue jamais, — je fais le modeste — d’où vient cette pudeur
152
pas la gloire pour vous éblouir, vous que j’aime
et
qui me connaissez. Vous savez ce que je suis, et si vous appreniez un
153
et qui me connaissez. Vous savez ce que je suis,
et
si vous appreniez un jour que j’ai de la gloire, que sauriez-vous alo
154
tres ce que vous ne croyez point par vous-mêmes —
et
je ne veux pas l’erreur. Ou bien veux-je cette erreur-là ? Certes — m
155
prête, me fait venir les larmes aux yeux ? Gloire
et
lumière, gloire ou mystère, gloire et mort lumineuse, gloire et ce tr
156
ux ? Gloire et lumière, gloire ou mystère, gloire
et
mort lumineuse, gloire et ce triomphal accord clamé, ou cet instant p
157
oire ou mystère, gloire et mort lumineuse, gloire
et
ce triomphal accord clamé, ou cet instant plutôt qui est au seuil de
158
e sa résolution fondamentale — quel est ce seuil,
et
que nous ouvrent, sur quel ciel, les symphonies ? Je n’ose pas dire q
159
mon nom est : mensonge, que je voudrais la gloire
et
ne sais pas pourquoi ? Ou n’ose pas savoir pourquoi… Ce que je n’ose
160
rvir, parce que je sais que son nom est mensonge,
et
que c’est moi qui ne suis rien. Ainsi Dieu est mon adversaire. C’est
161
ersaire. C’est lui seul qui s’oppose à ma gloire,
et
qui me sauve malgré moi de mon triomphe. Il n’y a qu’un seul Dieu, ce
162
, je ne serai rien. Si Dieu me tue, il sera tout,
et
tout sera. Ainsi, ô Dieu, délivrez-moi de la gloire ! Mais cette priè
163
des choses qui allaient de soi dans notre Europe,
et
qui me sont révélées dans ce pays, parce que c’est leur contraire, ic
164
le souci qu’y montre Gide d’une écriture durable
et
d’une œuvre d’avenir. Il n’accepte de rompre avec une tradition que p
165
dure, en Amérique, mais d’abord pour qu’il frappe
et
qu’il agisse, au maximum, dans le plus court délai. Signe de santé d’
166
pe. Un art qui n’exclut pas une poésie très drue,
et
qui possède une rhétorique, un « art de persuader » étrangement effic
167
rature contemporaine de ce pays. Secrets de style
et
de composition. La rhétorique française veut qu’un discours, un essai
168
it. La rhétorique américaine écarte ces prudences
et
ces cérémonies. Elle considère comme un poids mort nos formules de pr
169
nts. C’est la Catch Phrase, la phrase-qui-attrape
et
qui vous jette de but en blanc dans l’humanité vive du sujet, saisi p
170
atière. Le style français triomphe dans la litote
et
le raccourci, le style américain dans l’effet de choc ou d’accumulati
171
e américaine à la « formule heureuse » condensant
et
généralisant des observations que l’on néglige de rapporter en détail
172
n écrit, mais plutôt : c’est effective, agissant.
Et
d’une idée l’on ne demandera pas seulement qu’elle soit juste, mais q
173
me aventureux de notre siècle. Entre la sensation
et
le sensationnel, elle fait preuve d’un incomparable pouvoir d’émotion
174
is rien. Mais je suis sûr que l’écrivain français
et
l’écrivain américain ont beaucoup à apprendre l’un de l’autre. Ils m’
175
m’apparaissent complémentaires comme la virilité
et
la féminité, la couleur et le dessin, la poussée vitale et la retenue
176
ires comme la virilité et la féminité, la couleur
et
le dessin, la poussée vitale et la retenue formelle. Et j’entrevois l
177
inité, la couleur et le dessin, la poussée vitale
et
la retenue formelle. Et j’entrevois les plus féconds échanges entre c
178
dessin, la poussée vitale et la retenue formelle.
Et
j’entrevois les plus féconds échanges entre ces deux principes de tou
179
que polarisent nos deux littératures : tradition
et
actualité, mise en ordre et mise en mouvement. De leur alliance naît
180
tératures : tradition et actualité, mise en ordre
et
mise en mouvement. De leur alliance naît la Liberté. f. Rougemont
181
à l’heure où on les perd. Souvenirs de Salzbourg
et
de Prague, Mozart et Rilke, et la Vienne de Schubert — à l’heure où s
182
perd. Souvenirs de Salzbourg et de Prague, Mozart
et
Rilke, et la Vienne de Schubert — à l’heure où sombrent des nations s
183
enirs de Salzbourg et de Prague, Mozart et Rilke,
et
la Vienne de Schubert — à l’heure où sombrent des nations sous l’unif
184
’orage, avant la nuit, dans une gloire déchirante
et
délicieuse comme les secondes voix de Schumann. Un mythe nouveau pren
185
t l’avant-guerre, les souvenirs de notre enfance.
Et
voici que ce Temps Perdu, tout d’un coup, est encore plus proche : c’
186
e était notre manière toute naturelle de respirer
et
de penser, d’aller et venir, et d’entretenir nos soucis, nos plaisirs
187
toute naturelle de respirer et de penser, d’aller
et
venir, et d’entretenir nos soucis, nos plaisirs personnels… Combien d
188
relle de respirer et de penser, d’aller et venir,
et
d’entretenir nos soucis, nos plaisirs personnels… Combien de temps en
189
ombien de semaines pourrons-nous goûter ce répit,
et
sentir que nous prolongeons une existence que nos fils appelleront do
190
ouvons que le monde a glissé dans une ère étrange
et
brutale, où ces formes de vie qui sont encore les nôtres ne peuvent p
191
us dresse à résister, il faudra changer le rythme
et
rectifier la tenue, bander tous les ressorts, mobiliser les cœurs… C’
192
le charme qu’elle fait régner. Des lois adroites
et
humaines ne suffiront jamais à l’assurer : il y faut ce climat sentim
193
de mettre en question l’usurpateur du Hradschin.
Et
dès lors qu’il l’a mis en question, et qu’il nous force au réalisme à
194
Hradschin. Et dès lors qu’il l’a mis en question,
et
qu’il nous force au réalisme à sa manière, le charme est détruit dans
195
s vies. Nous sommes pareils à celui qui s’éveille
et
goûte encore quelques instants les délices d’un rêve inachevé. Mais i
196
onté humaine plus inutile que jamais, dominatrice
et
bafouée. II. — Le dernier printemps de la paix En Suisse, 2 mai
197
l’espoir qu’au seuil des catastrophes générales.
Et
j’en connais qui ne parviennent à leur régime normal de vie (comme un
198
régime normal à tant à l’heure) que dans le drame
et
le bouleversement des habitudes où l’énergie s’enlise. Ce besoin d’êt
199
micile depuis le début de cette année. « Étranger
et
voyageur sur la terre », ainsi pensais-je d’autres fois, dans ces pér
200
t s’abattre une pluie d’orage sur la Concorde : «
Et
moi qui ai oublié mon masque à gaz ! C’était pourtant l’heure ! » 14
201
d’un soir pluvieux. Paris, souffrance des visages
et
des corps, exercice perpétuel de charité dans une atmosphère exténuan
202
plus extraordinaire du siècle ! Il est des êtres
et
des drames dont la vérité n’apparaît que dans cet environnement de lu
203
’existences étrangères. Paris propose une liberté
et
un danger, une révélation totale de l’humain dans tous ses risques ma
204
otale de l’humain dans tous ses risques matériels
et
spirituels, impossible ailleurs de nos jours, et peut-être à toute au
205
et spirituels, impossible ailleurs de nos jours,
et
peut-être à toute autre époque. Imaginer là-dessus un livre vrai, un
206
ivre vrai, un livre où tout serait avoué, horreur
et
charme, à travers la vision d’un saint qui vivrait sa vie consacrée d
207
Centre du monde ! Il s’en va, coudoyant la foule
et
traversant les lieux publics avec cette grande Question qu’il porte d
208
cette grande Question qu’il porte dans son être,
et
qui est aussi la grande réponse ; et les démons s’éveillent sur son p
209
ns son être, et qui est aussi la grande réponse ;
et
les démons s’éveillent sur son passage, il n’y a plus nulle part d’in
210
candale, l’Autre, l’Amour qui bouleverse le monde
et
fait surgir des quotidiennes apparences l’être touchant, bizarre ou
211
u travers de propos superficiellement passionnés…
Et
l’on cesserait aussi de redouter la guerre, parce qu’on la verrait da
212
à la frontière Écouté la radio : opéra de Mozart.
Et
dans une seule bouffée, toutes ces nuits de Vienne, élégantes passion
213
ons perdues encore, régions perdues dans le passé
et
territoires envahis. Le passé, le présent réduits se rétrécissent ver
214
aller, où rester, où demeurer quand tout s’en va,
et
que penser si je ne puis — rien dire ou faire qui s’accorde à ces tem
215
i vaste que la terre, se rétrécit de jour en jour
et
d’heure en heure, à chaque fois que j’allume cet œil vert — pays perd
216
où suis-je ? Déjà tout recommence, sans relâche,
et
cet acharnement des choses contre moi, voulant quoi, sans relâche ? v
217
pêcha les hommes de se rendre compte de l’ampleur
et
de la rapidité des bouleversements qu’ils vivaient. Aux mois de mai e
218
bouleversements qu’ils vivaient. Aux mois de mai
et
de juin 1940, on entendait répéter constamment : « Je viens d’écouter
219
as… V. — Lisbonne 10 septembre 1940 Blanche
et
bleue dans l’immense lumière de la liberté atlantique, avec tous ses
220
erté atlantique, avec tous ses drapeaux claquants
et
ses rues débouchant sur le ciel, la ville aux sept collines oublie la
221
nt de tomber sur la tête, qui se relève, se tâte,
et
ne sait pas encore où il a mal. Va-t-il vivre ? A-t-il rêvé ? Serait-
222
Serait-il déjà mort ? J’ai vu l’Espagne de cendre
et
d’esprit, incapable de retrouver son équilibre entre le démoniaque et
223
le de retrouver son équilibre entre le démoniaque
et
le surhumain. Et j’ai vu, aux frontières de la Suisse, l’invasion des
224
on équilibre entre le démoniaque et le surhumain.
Et
j’ai vu, aux frontières de la Suisse, l’invasion des herbes sauvages
225
s sauvages venant des terres abandonnées du Nord,
et
que nos paysans s’efforcent d’arrêter avant qu’elles n’étouffent leur
226
aniques dévastatrices du ve siècle de notre ère.
Et
je songe au bastion que mon pays élève autour du massif du Gothard, i
227
ays élève autour du massif du Gothard, invincible
et
désert, cœur mystérieux du continent, dernier symbole d’une liberté q
228
à peine d’un étage au-dessus des champs de roses
et
des blés, au bord du plateau de la Brie. Je montais vers Périgny par
229
caliers. Une seule rangée de maisons à traverser,
et
l’on parvient à la grand-rue : comme elle est vide ! Les toits d’ardo
230
patinées par les vents. Rares sont les boutiques,
et
même les cafés. Et s’il passe une auto, c’est une de ces voitures bra
231
nts. Rares sont les boutiques, et même les cafés.
Et
s’il passe une auto, c’est une de ces voitures branlantes qui semblen
232
monde la vie n’apparaît si discrète, si pacifique
et
séculaire. Ce pays-là n’est qu’amitié des tons et des lignes humaines
233
et séculaire. Ce pays-là n’est qu’amitié des tons
et
des lignes humaines, humilité sous la douceur du ciel, retrait des âm
234
à cet endroit, hésitant sur le chemin à prendre.
Et
soudain, je vis à mes pieds, tracé à la craie sur le sol, un grand ce
235
lage, silence des rues vides ouvertes sur le ciel
et
sur les blés. J’étais là fasciné comme par la découverte d’un secret
236
elui qui revient au pays après une longue absence
et
des déboires : il entre, ne trouve personne. Mais ses outils sont là,
237
usage du pays, l’intimité des choses de toujours.
Et
le moindre signe suffît. Je suis redescendu vers la vallée de l’Yerre
238
la vallée de l’Yerre, qui coule entre des saules
et
des peupliers blancs. Il faisait lourd et doux, le goudron de la rout
239
saules et des peupliers blancs. Il faisait lourd
et
doux, le goudron de la route sentait plus fort que les champs de rose
240
route sentait plus fort que les champs de roses,
et
des nuages noirs traînaient sur les vergers. J’ai su, plus tard, que
241
it si près là-bas. J’étais baigné. J’étais fondé.
Et
je marchais parmi les signes. Sédiments séculaires, socles de nos pat
242
s, mais qui renvoient l’écho familier de nos pas.
Et
ces rues qui tournaient doucement vers une place plantée d’arbres et
243
rnaient doucement vers une place plantée d’arbres
et
déserte, aux rendez-vous manqués où je me retrouvais… « Je t’aime. J’
244
. Le silence attendait, l’absence était profonde,
et
chaque être présent questionnait, répondait. La force était au secret
245
— il était vieux déjà du temps de notre enfance,
et
notre possession la plus tenace, il nous réduisait au silence. La for
246
s blessé, ta vie s’en va). La force était mémoire
et
allusion, elle était ce vieil arbre tenace. Elle était la douceur et
247
tait ce vieil arbre tenace. Elle était la douceur
et
la sagesse amère des adieux, ou la gaieté d’un mot dit en passant. El
248
, parce qu’elle a su garder en vie tant de passé,
et
garder tant de morts dans la présence, elle ne cessera pas d’engendre
249
vèle dans le malheur (février 1944)k Autrefois
et
naguère encore, avant l’occupation allemande, les étrangers qui n’ava
250
es lieux de plaisir de la capitale, connaissaient
et
jugeaient la France par ses vedettes. À leurs yeux, tout Français dev
251
uait aussitôt l’image d’une moustache à la Menjou
et
d’une boutonnière fleurie, d’un sourire charmeur à la Charles Boyer,
252
upé nous parlent du peuple de France ; les récits
et
les témoignages qui ont été publiés secrètement par les mouvements de
253
liés secrètement par les mouvements de résistance
et
qui parviennent sous nos yeux nous parlent du peuple de France ; et l
254
sous nos yeux nous parlent du peuple de France ;
et
les films composés à Hollywood ou à Londres sur l’organisation de la
255
onyme, le peuple unanime, le peuple sans vedettes
et
le voici enfin devenu la vraie vedette, malgré lui, de la France et d
256
devenu la vraie vedette, malgré lui, de la France
et
de sa résistance. J’ai vu à New York la plupart de ces films qui empr
257
lling, Croix de Lorraine, Assignment in Brittany,
et
je cite au hasard, il y en a tant. Je les ai vus avec des amis, tantô
258
vraisemblables, les traîtres trop conventionnels,
et
finalement l’inévitable raid de commandos sauvait tout le monde comme
259
l’œil : en critiquant, ils essuyaient une larme,
et
rien de plus français que cette pudeur. Quant aux Américains, ils exu
260
e que l’Europe mais constamment méconnue ou niée,
et
souvent par la faute des élites parisiennes : le peuple de France est
261
il est sérieux. Il n’est pas avant tout charmant
et
spirituel, bien-disant, bon vivant et léger. Il n’est tout cela qu’en
262
ut charmant et spirituel, bien-disant, bon vivant
et
léger. Il n’est tout cela qu’en second lieu, et comme par luxe. Dans
263
t et léger. Il n’est tout cela qu’en second lieu,
et
comme par luxe. Dans le fond et d’abord, il est sérieux, plus qu’aucu
264
u’en second lieu, et comme par luxe. Dans le fond
et
d’abord, il est sérieux, plus qu’aucun autre peuple dont j’aie vécu l
265
s pose, avec pudeur, préférant affecter la blague
et
le scepticisme plutôt que de paraître exagérer sa peine. Car il pense
266
me frappe le plus, dans les films que je citais,
et
dans les témoignages directs venus de France sur la lutte contre les
267
laient conquérir un pays de bavards, de coquettes
et
de politiciens véreux. Après quelques semaines en territoire conquis,
268
Allemand s’est senti dominé par une force étrange
et
qui l’intimidait : le regard sérieux de l’homme et de la femme du peu
269
t qui l’intimidait : le regard sérieux de l’homme
et
de la femme du peuple, ce jugement précis et humain, bien plus insupp
270
omme et de la femme du peuple, ce jugement précis
et
humain, bien plus insupportable que tous les cris de haines. Ils ne s
271
de la vraie France. Ils ont continué à le piller
et
à le fusiller avec une rage panique ; ils continuent, mais ils se sav
272
st pas exact que je les aime bien. Ils m’irritent
et
m’agacent. Mais je ne les oublie pas.7 L’auteur. La mémoire des off
273
ns vous n’êtes pas encore assez clair. L’auteur.
Et
pourquoi je vous prie, être clair ? Vous n’allez pas me dire que c’es
274
pour n’être point la dupe de vos phrases. Écrire,
et
surtout en français, ce n’est pas jouer du violon. Tout d’un coup vou
275
on. Tout d’un coup vous le prenez à double corde,
et
l’on distingue mal les passages, vous changez de ton et l’on voudrait
276
n distingue mal les passages, vous changez de ton
et
l’on voudrait savoir que vous le savez… Il me semble que vous manquez
277
ceté pour vos idées. Elles vous séduisent de loin
et
quand vous nous les présentez, elles ont déjà votre complicité, je ne
278
us persuader que vos goûts sont bien des raisons,
et
que ces raisons sont les nôtres. Ou bien vous faites de la poésie, et
279
ont les nôtres. Ou bien vous faites de la poésie,
et
alors vous jouez sur des surprises, ou bien vous nous parlez d’idées,
280
des surprises, ou bien vous nous parlez d’idées,
et
dans ce cas, il faut que nous pensions à chaque instant : « j’allais
281
e feinte aimable. Au reste nous sommes entre nous
et
vous n’abuserez pas de mes aveux… D’autant qu’ils seront probablement
282
nel ! A. Notre langage courant sans aucun doute.
Et
plus rigoureusement encore notre langage intellectuel et scientifique
283
rigoureusement encore notre langage intellectuel
et
scientifique, qui se distingue du langage courant par le souci de con
284
oir choisir entre un langage franchement poétique
et
ce langage clair et distinct qui convient au débat des idées. A. … q
285
langage franchement poétique et ce langage clair
et
distinct qui convient au débat des idées. A. … qui convient au débat
286
du langage. N’est-ce pas la cohérence des raisons
et
à la fois l’exact ajustement de ces raisons à la réalité, qui constit
287
transcendante. Il part de ce qu’il suppose clair
et
facile, et sa marche est une déduction. La convention d’un tel langag
288
nte. Il part de ce qu’il suppose clair et facile,
et
sa marche est une déduction. La convention d’un tel langage, est que
289
un tel langage, est que tout est donné au départ,
et
qu’il s’agit de ne rien introduire dans la chaîne des arguments qui n
290
s arguments qui n’ait été d’abord jaugé, chiffré,
et
défini en termes simples. À mon tour de me défier d’une convention au
291
puleuse, mais c’est qu’il a le goût de se tromper
et
de tromper. A. Pour moi, je crains une duperie moins naïve dans la m
292
nd-on dans le monde rien qui soit « clair, simple
et
facile » en soi ? Le monde dans lequel nous vivons et parlons n’est-i
293
acile » en soi ? Le monde dans lequel nous vivons
et
parlons n’est-il pas, comme l’a dit un Russe « le monde de l’imprécis
294
, comme l’a dit un Russe « le monde de l’imprécis
et
du non résolu » ? Ou comme l’écrit Descartes lui-même, le monde des c
295
pas pour effet immédiat de multiplier le mystère
et
les absurdités logiques ? Voyez Kafka… Je me demande alors si le cart
296
t — au nom de quoi, je vous en prie ? — la clarté
et
la simplicité d’un certain nombre de postulats abstraits. Ma méfiance
297
. C’est elle dont usent nos physiciens, chimistes
et
mathématiciens, pour formuler ce qu’ils appellent des lois. Bien. Mai
298
dire — à la formule mathématique ; d’autre part,
et
voilà qui est remarquable, il est sous-entendu qu’elles correspondent
299
scours cohérent sur des propriétés de la matière.
Et
ce discours n’est qu’un certain système d’images. S’il se distingue d
300
c’est entendu, qu’une manière de parler du réel,
et
sans cesse corrigée par les faits. Mais où je crie à la tricherie, c’
301
la fin nous échappent ! Comme s’il était licite,
et
même possible, de partir de certains éléments et de les déclarer conn
302
et même possible, de partir de certains éléments
et
de les déclarer connus, quand on ignore méthodiquement l’ensemble don
303
nore méthodiquement l’ensemble dont ils dépendent
et
qui est leur seule mesure. C. J’avoue que je vous suivrais mieux si
304
ées en commençant par les objets les plus simples
et
les plus aisés à connaître. » Voilà qui paraît clair, j’entends confo
305
oser que le plus simple est aussi le plus proche,
et
qu’il faut commencer par là. C’est sans doute le plus mauvais tour qu
306
On ne peut connaître les parties que par le tout,
et
non l’inverse. C. J’observe une fois de plus avec curiosité le gliss
307
iques. Souffrez alors que je m’avoue incompétent,
et
que j’assiste sans vous interrompre davantage aux développements d’un
308
postales. Elle dispose en bon ordre ses repères,
et
puis s’ébranle à reculons vers l’inconnu, les yeux toujours fixés sur
309
le chemin parcouru : elle ignore tout de son but
et
tiendrait même pour une prévention fâcheuse la croyance que ce but ex
310
lée. Voilà le sens, l’orientation de ma démarche,
et
c’est pourquoi je vous disais qu’on ne peut la comprendre qu’à partir
311
’imagine ? A. Il vaut mieux dire indescriptible,
et
cela tient à sa vérité même, je veux dire à sa plénitude instantanée
312
, s’il était pur, serait absolument inexplicable,
et
évident. Il n’y aurait plus qu’à méditer sans fin cette forme signifi
313
diter sans fin cette forme significative du tout,
et
de chaque partie dans le tout. Bien entendu, je ne puis avancer aucun
314
er à deux modes d’expression également rigoureuse
et
pourtant exclusifs l’un de l’autre. Le premier serait la loi scientif
315
loi scientifique. Ses conventions sont la clarté
et
l’absence de contradiction. La seconde forme d’expression, ce serait
316
r la limite, en parlant d’un langage inexplicable
et
pourtant évident. C’est peut-être le verbe impliquer qui distinguera
317
tion va nous aider : impliquer le réel comme tel,
et
non pas expliquer certaines manières de le réduire aux exigences d’un
318
core une fois, que les contradictions s’éclairent
et
se résolvent, et non pas à partir d’éléments que j’aurais distingués
319
e les contradictions s’éclairent et se résolvent,
et
non pas à partir d’éléments que j’aurais distingués dès le départ. Un
320
partant pour reconnaître une Amérique de vision.
Et
cette fin, ce terme, ce télos, tous les hiatus, toutes les obscurités
321
re. On peut les emporter sans qu’elles se gâtent,
et
quand on a faim, on les ouvre. C. Encore une petite question, voulez
322
lez-vous ? Qui a le droit de parler en paraboles,
et
d’être obscur à la manière des prophètes ? A. Le droit ? Personne, b
323
arrive assez souvent que l’on oublie les grandes
et
graves raisons qu’il y a de se taire, ou de parler seulement selon le
324
e se taire, ou de parler seulement selon le droit
et
la décence, en toute clarté. Il arrive que certains furieux, je ne sa
325
toutefois imaginer une autre attitude de l’être,
et
qui soit telle que la question du droit ne se pose plus. C’est l’atti
326
a vu quelque chose, ou simplement qui a cru voir,
et
qui voudrait retrouver sa vision et la faire pressentir à d’autres ho
327
i a cru voir, et qui voudrait retrouver sa vision
et
la faire pressentir à d’autres hommes. Une vision ne se transmet pas,
328
it dans une certaine orientation au moyen de mots
et
de phrases qui puissent, comme par une ironie, être compris en soi et
329
issent, comme par une ironie, être compris en soi
et
dans leur lettre, mais dont le sens dernier ne puisse être aperçu sou
330
quelque chose doit parler la langue des prophètes
et
composer des paraboles. Si ses prophéties sont décevantes et ses para
331
des paraboles. Si ses prophéties sont décevantes
et
ses paraboles sans fruit, il n’en est pas moins un prophète. Mais alo
332
e le Petit Monde au Grand Monde, — signes du Tout
et
de la Fin, mais signes seulement, résumés, prises partielles et signi
333
mais signes seulement, résumés, prises partielles
et
significatives… Certes celui qui pourrait les fixer retrouverait tout
334
uire au parler prophétique. C’est le même risque,
et
ce n’est pas la même grandeur… Les « sentinelles de Juda », les grand
335
in devenues favorables pour une action plus large
et
constructive. Les événements eux-mêmes se sont chargés de faire la cr
336
nde à reconstruire, les grandes questions peuvent
et
doivent être reposées. Allons-nous rebâtir sur les valeurs d’une phil
337
sophie de l’Objet (qui était celle du capitalisme
et
des divers « planisme »), ou bien allons-nous faire une société où le
338
bjets soient remis au service de l’homme qui crée
et
qui se veut responsable ? Si nous choisissons la seconde voie, la doc
339
conscience de leur responsabilité intellectuelle
et
civique vers 1930, en France, se trouvaient confrontés avec les dilem
340
gat de réflexes conditionnés par l’État, le Parti
et
les statisticiens. Sur le plan philosophique, la situation n’était pa
341
lait se fonder la démocratie d’un siècle dernier,
et
le soldat politique sur lequel a voulu se fonder le totalitarisme de
342
institutions doivent être au service de l’homme,
et
non l’inverse : — la liberté ne cesse d’être un mot creux que dans un
343
alisme, fédéralisme. Ils définissent une attitude
et
une action. Certes, beaucoup de philosophes s’étaient intitulés « per
344
s un William Stern, un Keyserling, un C. G. Jung,
et
l’école californienne de The Personalist. Mais la caractéristique du
345
on politique, d’une économie, d’un régime social,
et
même d’une esthétique. C’est pourquoi je ne saurais mieux décrire la
346
rvice civil industriel Les premiers manifestes
et
volumes publiés par le mouvement n’apportaient pas les blue-prints d’
347
roite ou de gauche édifiaient des plans abstraits
et
se bornaient pratiquement à revendiquer des réformes isolées ou matér
348
ire ne serait plus le seul mobile du travailleur,
et
la masse de main-d’œuvre créée par le service civil serait mise par l
349
e. Les politiciens déclarèrent le projet utopique
et
d’ailleurs néfaste : il risquait de résoudre un conflit que leur tact
350
ion de l’atelier. Il était éditeur de son métier,
et
si peu adroit de ses mains qu’il assurait être le seul officier de ré
351
vil supposait une refonte générale de l’économie,
et
notamment une discrimination très précise entre le travail quantitati
352
entre le travail quantitatif (ou « parcellaire »)
et
le travail qualitatif ou créateur. Le premier devait être entièrement
353
ur. Le premier devait être entièrement socialisé,
et
régi par l’État, qui assurerait d’autre part la distribution d’un min
354
gratuit pour tous. Le second devait rester libre,
et
d’autant plus qu’il recevrait l’aide gratuite du service civil. L’Éta
355
État lui-même se trouverait réduit au rôle précis
et
limité d’agence de statistique et de répartition de la main-d’œuvre e
356
au rôle précis et limité d’agence de statistique
et
de répartition de la main-d’œuvre et du bonus social, au profit des e
357
statistique et de répartition de la main-d’œuvre
et
du bonus social, au profit des entreprises libres et des groupes coop
358
du bonus social, au profit des entreprises libres
et
des groupes coopératifs. La notion de groupe L’un des traits ma
359
insistance sur la nécessité des groupes autonomes
et
organiques. Elle coïncide avec la découverte la plus importante de no
360
cle de la physique quantique. La paresse d’esprit
et
l’inertie ont laissé se constituer au xxe siècle des cadres démesuré
361
s cadres démesurés, simplifiés jusqu’à la démence
et
rigides comme elle, qui pèsent lourdement sur nos activités. L’État c
362
t lourdement sur nos activités. L’État centralisé
et
sa bureaucratie abstraite tendent à détruire les groupes organiques,
363
unique, étendant sur l’économie, la vie politique
et
les coutumes d’un pays le carcan géométrique de ses décrets, le perso
364
foyers rayonnants de création locale : entreprise
et
commune à la base, librement fédérées par bassins naturels, par-dessu
365
la nation. La France avait des frontières rigides
et
un centre unique, Paris. Entre les deux, le vide, l’espace abstrait.
366
sistance élevés dans toute la profondeur du pays,
et
une mobilisation fortement décentralisée. C’était en somme le système
367
ant un régime fédéraliste. Les événements de 1940
et
toute l’évolution ultérieure de la guerre ont amplement confirmé ces
368
r les secrets de la vénalité des grands journaux,
et
recueillir une documentation locale précise et humaine. Un bulletin d
369
x, et recueillir une documentation locale précise
et
humaine. Un bulletin de liaison alimentait les clubs. Tout était prép
370
ations fameuses de l’Underground. État présent
et
avenir du mouvement À la veille de la guerre, le personnalisme ava
371
revues, un hebdomadaire, des bulletins, brochures
et
tracts, répandaient ses idées. Les nazis avaient délégué leur représe
372
route. Ils souffraient tout d’abord d’une qualité
et
d’un défaut bien typiquement français : le sérieux et l’excès d’idées
373
’un défaut bien typiquement français : le sérieux
et
l’excès d’idées neuves. Hors d’eux-mêmes s’opposaient à leur action :
374
d’un désastre prévisible, les préjugés de droite
et
de gauche, le manque d’argent et de moyens de pression collectifs. Il
375
éjugés de droite et de gauche, le manque d’argent
et
de moyens de pression collectifs. Il valait mieux attendre encore un
376
er des hommes, un à un, non des masses. La guerre
et
l’invasion obligèrent le mouvement à « disparaître ». Dans l’interval
377
Dans l’intervalle entre l’armistice de juin 1940
et
la suppression de toute expression libre par Vichy, la revue Esprit
378
a suite d’un article contre Pétain, son directeur
et
plusieurs de ses rédacteurs emprisonnés. Nul autre mouvement ne me pa
379
manque de foi. 8. Exemple : le bassin houiller
et
ferrugineux de la Sarre coupé en deux par une frontière correspondant
380
ême. L’un n’est guère bon, mais l’autre est pire,
et
j’ai choisi sans hésiter jamais. On peut appeler le premier démocrate
381
iter jamais. On peut appeler le premier démocrate
et
le second totalitaire. On peut aussi les nommer Pierre et Paul, ou mo
382
cond totalitaire. On peut aussi les nommer Pierre
et
Paul, ou moi et l’autre, ou nous et l’ennemi : car « la seule chose q
383
. On peut aussi les nommer Pierre et Paul, ou moi
et
l’autre, ou nous et l’ennemi : car « la seule chose qui importe est d
384
nommer Pierre et Paul, ou moi et l’autre, ou nous
et
l’ennemi : car « la seule chose qui importe est de gagner la guerre »
385
our de moi. Si j’essayais de m’entendre d’abord ?
Et
de comprendre, s’il se peut, la question que cette guerre pose et ne
386
, s’il se peut, la question que cette guerre pose
et
ne peut résoudre. ⁂ Par dépit, par fatigue, ou par esprit de polémiqu
387
ités économiques étaient plus fortes que l’esprit
et
que ses choix. Or ces réalités ne faisaient que traduire en quantités
388
tre attitude spirituelle. Elles étaient résultats
et
non pas causes. Car il n’y a pas d’abord la loi de l’offre et de la d
389
auses. Car il n’y a pas d’abord la loi de l’offre
et
de la demande, il y a d’abord nos offres et nos demandes, selon nos r
390
offre et de la demande, il y a d’abord nos offres
et
nos demandes, selon nos rêves et nos passions. Il n’y a pas d’abord l
391
abord nos offres et nos demandes, selon nos rêves
et
nos passions. Il n’y a pas d’abord les machines puis une société qui
392
symbole ancestral. Il n’y a pas d’abord les faits
et
puis l’humanité qu’ils guident ou blessent, mais il y a d’abord l’hum
393
is il y a d’abord l’humanité créatrice ou malade,
et
puis des faits qui expriment avec un peu de retard ce génie ou cette
394
voir qu’elle se passe d’abord en chacun de nous,
et
qu’elle figure dans son ensemble la crise d’un conflit psychologique
395
imaginative, affective, sexuelle, intuitive, etc.
et
se réduit théoriquement à la raison commune, il arrive que les facult
396
exilées dans son inconscient se révoltent soudain
et
l’attaquent en force, par une espèce d’éruption volcanique nommée név
397
rs envahissent sa vie quotidienne, le persécutent
et
lui rendent l’existence impossible. Il se persuade que des forces abs
398
e d’un autre. Un médecin qu’il jugera très brutal
et
hostile lui suggère alors que cet « autre » n’est en fait qu’une part
399
fait qu’une part de lui-même. S’il comprend cela
et
s’il le croit, le malade guérira peut-être. Sinon, il faudra l’enferm
400
yen Âge, on disait qu’un tel homme était possédé,
et
on l’exorcisait par des cérémonies souvent efficaces. Au xixe siècle
401
aces. Au xixe siècle, on disait qu’il était fou,
et
l’on essayait d’abord de le raisonner, puis de le réduire à la raison
402
inculte9. On a tenté de raisonner cet inconscient
et
de le forcer à se tenir tranquille. Privé de moyens de s’exprimer à s
403
la planète. L’humanité comme aliénée se flagella
et
se meurtrit : elle fait la guerre. Exactement, elle se la fait. Elle
404
se la fait. Elle ne tardera pas à tomber épuisée
et
à se passer la camisole de force d’un régime d’ordre pour incurables
405
mènent à une proposition que je voudrais défendre
et
illustrer dans une série d’écrits à venir : il est temps que la pensé
406
guerre nous plaît. Toutes ses victimes le nient,
et
presque tous ceux qu’elle fait vivre. Je dis que la guerre nous plaît
407
elle serait impossible. Tous, nous sommes contre,
et
nous la faisons tous : expliquez cela. — « Ce sont les autres. » Mais
408
avez pas pensé. Nous avons « fait notre devoir »
et
pas de question. Je dis que la guerre nous plaît. Elle arrange bien d
409
’état d’exception proclamé dans la nation entière
et
dans tous les domaines. Ainsi la guerre devient pour nous l’équivalen
410
éguisement de rigueur, le sacrifice humain légal,
et
les valeurs morales changent de signe : tu tueras, tu voleras, tu dir
411
ion comme on dirait état de siège, état de grâce.
Et
les trois ne sont point sans rapports. Comme la fête chez les primiti
412
e nous attire. Pourtant viendra la paix, bientôt.
Et
ce sera peut-être pour des siècles. (Il y aura trop d’avions du même
413
qu’on n’allume plus de bûchers pour les chrétiens
et
qu’ils tolèrent les hérétiques), c’est la mort sous les balles pour l
414
ue l’esprit seul sait pousser jusqu’au paroxysme.
Et
comment vivre, s’il n’y a plus de paroxysmes ? La guerre nous plaît.
415
ysmes ? La guerre nous plaît. Nous le nions tous,
et
c’est normal. Mais je propose un test précis. Pourquoi tant de rétice
416
éticences à décider le désarmement général, total
et
définitif de tous les peuples, appuyé par une interdiction absolue de
417
r une interdiction absolue de fabriquer des armes
et
d’enseigner à s’en servir ? Je ne sais pas mieux que la plupart ce qu
418
ui tremblent avant même que la bouche ne s’ouvre.
Et
cependant, ils ne sont guère capables de me donner sur-le-champ, avec
419
fus. C’est un refus instinctif, comme ils disent.
Et
c’est tout ce que je voulais leur faire dire. (Il leur reste à me tra
420
sable pour gagner la guerre. Point de vue stérile
et
désastreux dès qu’il s’agit de la paix. Hitler n’est pas en dehors de
421
n nous-mêmes d’abord qu’il se dresse contre nous.
Et
quand nous l’aurons tué, il nous occupera sans coup férir si nous n’a
422
aventure prendra fin dans la catastrophe prévue.
Et
devant le cadavre gisant de l’homme qui fit trembler tout l’univers,
423
nous n’avions sans doute jamais eu l’expérience.
Et
pourtant c’est une part de nous-mêmes qui machine cette brusque épouv
424
eligion en général, comme phénomène humain, cause
et
produit de toute communauté vivante. Je parle d’un instinct aussi fon
425
vivante. Je parle d’un instinct aussi fondamental
et
naturel que la sexualité. Il est incontestable que le rationalisme12
426
eux des Occidentaux. Car non content de combattre
et
d’évacuer les coutumes religieuses périmées (c’était son droit et son
427
coutumes religieuses périmées (c’était son droit
et
son devoir), il s’est méthodiquement refusé à laisser naître des cout
428
rouvé l’homme pour capter ses puissances obscures
et
les ordonner à des fins tantôt pratiques, tantôt transcendantales. Ca
429
rent la circulation entre l’inconscient collectif
et
l’activité quotidienne. Condamnez-les et vous créerez une sécheresse
430
ollectif et l’activité quotidienne. Condamnez-les
et
vous créerez une sécheresse générale, nécessairement suivie d’une rup
431
le, nécessairement suivie d’une rupture de digues
et
de l’interruption catastrophique des forces sombres de la cité. La ra
432
étruit tous les moyens connus de les apprivoiser,
et
prohibe la recherche hasardeuse de moyens nouveaux, elle fait lever d
433
nalisme régnant peut produire des avions en masse
et
par ce moyen-là venir à bout d’Hitler ; mais il ne pourra prévenir la
434
l’Accroissement des Monstres. Les pires sottises
et
les thaumaturgies les plus grossières sont destinées à susciter dans
435
l’après-guerre l’enthousiasme éperdu des foules.
Et
les calculs politiques les plus sains des réalistes et des experts se
436
s calculs politiques les plus sains des réalistes
et
des experts seront vidés d’un coup par ces lames de fond. Certains in
437
alors l’instinct religieux, cette « survivance ».
Et
nous lirons encore des jérémiades sur le déclin de l’esprit et l’aban
438
s encore des jérémiades sur le déclin de l’esprit
et
l’abandon des grands principes. « C’est inconcevable ! » opineront-il
439
de l’équilibre des grandes puissances nationales
et
des trusts : elle ne peut plus saisir les éléments de notre conflit.
440
ologiques, dans les masses, à l’échelle du globe.
Et
s’il faut des experts autour du tapis vert, qu’on appelle des psychia
441
imparfaits qu’ils soient, sont un moindre mal. »
Et
certes, en politique, il s’agira toujours, au mieux, de moindres maux
442
ionaliste ont été patents dans la morale sexuelle
et
la conception du mariage au siècle dernier ; ou lorsqu’il s’agissait
443
ion artistique, l’importance relative de l’argent
et
du travail, les dogmes chrétiens, etc., etc. m. Rougemont Denis de,
444
Jacquemin Gringonneur, peintre français, dessina
et
enlumina des cartes pour Charles VI, le roi fou, liant ainsi le tarot
445
d’argent, ne portent ni inscriptions ni nombres,
et
s’inspirent de modèles vénitiens. Dix-sept d’entre elles sont conserv
446
. D’un autre jeu, faussement attribué à Mantegna,
et
daté de 1400, subsistent aujourd’hui quatre exemplaires de 50 cartes
447
té un jeu de tarot pour enseigner l’arithmétique.
Et
Gargantua jouait au « Tarau » selon Rabelais. Au xve siècle, l’inven
448
, le tarot n’est guère connu que chez les princes
et
chez les gipsys, tout en haut de l’échelle sociale et tout en bas, pa
449
hez les gipsys, tout en haut de l’échelle sociale
et
tout en bas, passe-temps noble et magique ou rituel de science maudit
450
échelle sociale et tout en bas, passe-temps noble
et
magique ou rituel de science maudite, et prêtant aux abus les plus pu
451
ps noble et magique ou rituel de science maudite,
et
prêtant aux abus les plus puérils ou les plus démoniaques, bien enten
452
ts dans une inscription chinoise, datant de 1120,
et
dans les tablettes hindoues représentant les avatars de Vishnu. L’ori
453
llons parler, par d’Odoucet son premier disciple,
et
par Éliphas Levi. Elle a été contestée par W. A. Chatto, anglais, en
454
été contestée par W. A. Chatto, anglais, en 1848,
et
par Boiteau, français, en 1854. Ce dernier attribue au tarot une orig
455
e dernier attribue au tarot une origine hindoue ;
et
ce sont les gipsys, selon lui (et d’ailleurs aussi selon Lévi) qui l’
456
igine hindoue ; et ce sont les gipsys, selon lui (
et
d’ailleurs aussi selon Lévi) qui l’auraient transmis à l’Europe. Mais
457
qu’en 1417 sous la conduite du « Duc d’Égypte » ;
et
qu’on lui suppose une ascendance hindoue. Or nous possédons des carte
458
1922) : Cet auteur, en rendant justice au génie
et
à la science de Court de Gébelin, terrassa ce que ce grave antiquaire
459
, que d’après sa cuisinière. Il était perruquier
et
se nommait de son vrai nom, Alliette. Il redécouvrit le tarot pendant
460
à cause de leur propension à ramener tout à tout,
et
réciproquement. En voici un exemple : Etteilla a placé le Fou à la f
461
e Fou à la fin du jeu, c’est-à-dire au nombre 78,
et
a mis au nombre 21 la figure qu’il nomme le Despote africain, qui n’e
462
e Fou sous le nombre 78 qui est enfin notre zéro,
et
voici son intéressante analyse de ce nombre. (Elie Alta, Le Tarot égy
463
é, Vichy, 1922.) On peut juger d’après ce texte (
et
son contexte) que selon Etteilla et son disciple Elie Alta, l’un corr
464
rès ce texte (et son contexte) que selon Etteilla
et
son disciple Elie Alta, l’un corrigeant l’autre. 0 = 78 = (77) = 21 =
465
tude du tarot. 3. Variations Selon les pays
et
les temps : quant au dessin des cartes, et quant à leur interprétatio
466
s pays et les temps : quant au dessin des cartes,
et
quant à leur interprétation, les variations paraissent avoir été auss
467
lacés par les Carreaux ; les Épées par les Piques
et
les Deniers par les Trèfles. En France nous trouvons difficilement le
468
modèles plus anciens, restitués par l’érudition.
Et
depuis Court de Gébelin, la décadence s’est accentuée. On trouve même
469
artes de tarot à figures redoublées (tête en haut
et
tête en bas) à l’instar du jeu de cartes moderne. C’est un abus inqua
470
’arcane 17, petit exemple, ou les lettres T-A-R-O
et
J-H-V-H dans l’arcane 10, c’est-à-dire simplement le sens de la lame
471
re simplement le sens de la lame — Taro ou Rota —
et
le nom de Dieu — Jahvé). On voudrait conseiller au lecteur de détruir
472
d’interprétations fort diverses : il serait aisé (
et
désirable) de les multiplier à propos de ces mêmes cartes. Peut-être
473
une lettre de l’alphabet hébreu (sens exotérique
et
sens ésotérique) 4. un nombre (interprété par la Cabbale) 5. un éléme
474
é 12. un génie 13. un verset des psaumes de David
et
les psychanalystes modernes : 14. une des quatre facultés (pensée, in
475
cations sont organisées en structures ou rythmes,
et
non pas simplement juxtaposées. Prenons l’exemple des lettres. D’aprè
476
Prenons l’exemple des lettres. D’après Elie Alta (
et
donc Etteilla), « les Égyptiens ont attaché à chaque carte des 22 ato
477
cartes majeures : l’Homme (Le Bateleur), le Fou,
et
la Mort. » 4. Correspondances avec les cartes modernes Les inte
478
me à établir entre les quatre couleurs des tarots
et
les quatre couleurs du jeu de cartes moderne. Bornons-nous à livrer à
479
résentent, grosso modo, les autorités religieuses
et
sociales au Moyen Âge, et quelques-unes des situations élémentaires d
480
s autorités religieuses et sociales au Moyen Âge,
et
quelques-unes des situations élémentaires de l’existence, signifiées
481
jusqu’au moindre détail, si le dessin est exact.
Et
ces symboles, à l’examen d’une attention qui consent à se laisser doc
482
s majeurs est une apparition, un grand rêve fixé,
et
peut être analysé à ce titre. Les figures de la papesse, de l’empereu
483
de l’inconscient, dans leur immobilité insondable
et
infiniment allusive. Cependant que la Roue de Fortune, le, Jugement d
484
ur décapitée sont de grands événements psychiques
et
cosmiques, tantôt clichés dans leur moment d’extrême tension, tantôt
485
ure. Les arcanes sont issus de la nuit des Mères,
et
de l’Underground éternel. Peut-être même faudrait-il voir dans les la
486
is n’auraient pas cessé de répandre leur croyance
et
leur sagesse par l’entremise des tireurs de cartes. Cette hypothèse a
487
en particulier du professeur Tassin, de Columbia,
et
de Paul Foster Case, le tarot aurait été, originellement, une méthode
488
ngées — la cure ou yoga durait plusieurs années —
et
marqueraient les étapes d’une « voie hermétique » aboutissant à la ré
489
r, à travers ce yoga, de l’illusion à la réalité,
et
des choses telles qu’elles nous apparaissent aux choses telles qu’ell
490
e qui part dans la vie comme un Fol (arcane zéro)
et
aboutit à la connaissance de soi et du Monde (arcane 21) en passant p
491
(arcane zéro) et aboutit à la connaissance de soi
et
du Monde (arcane 21) en passant par tous les stades du développement
492
étudiant en occultisme comme sujet de méditations
et
de contemplation, au cours d’exercices poursuivis aux fins d’arriver
493
, à la visualisation, à l’exactitude, à l’analyse
et
à la synthèse, à l’évaluation des couleurs et des formes, et surtout
494
yse et à la synthèse, à l’évaluation des couleurs
et
des formes, et surtout il entraînait cette faculté maîtresse qui étab
495
thèse, à l’évaluation des couleurs et des formes,
et
surtout il entraînait cette faculté maîtresse qui établit des corréla
496
nt des usages pittoresques, secondaires, dérivés,
et
le plus souvent charlatanesques, dont les modernes ont cru pouvoir se
497
tre Emlen Etting, attaché aux forces américaines,
et
son ami André Lhote, furent les premiers à pénétrer dans le Palais du
498
ers, épées : des cœurs, des cloches, des feuilles
et
des glands. Le Fou, arcane 0 a) Interprétation d’Elie Alta d’
499
me richement habillé, portant une rose à la main,
et
qui s’arrête au bord d’un précipice pour contempler l’espace au-desso
500
’un précipice pour contempler l’espace au-dessous
et
au-dessus de lui. L’abîme ne lui inspire pas de terreur. Son visage e
501
eur. Son visage est plein d’intelligence, de rêve
et
d’attente. C’est un prince de l’autre monde en voyage ici-bas. Sous c
502
la conscience individuelle libérée de l’illusion,
et
poursuivant sa route sans craindre les dangers que court l’homme coll
503
grand que le grand, tenu pour néant par la raison
et
le monde, symbolisé par le cercle, il est l’expression de la volonté
504
oint de vue de l’égo, cette quête n’est que folie
et
non-sens. c) Interprétation moderne de B. McM. Hazard (résumé)
505
rimer un état de préparation, avant la conscience
et
l’individuation. Les symboles de la carte le confirment : le grand so
506
ion terrestre. Il porte les deux symboles féminin
et
masculin : ses cheveux clairs dénotent la conscience (par opposition
507
—, ornée de trèfles verts — la nature créatrice —
et
de disques jaunes sur lesquels sont brodées des roues rouges à 8 rayo
508
annonçant l’accomplissement futur, l’intégration
et
la conscience individuelle. Les arcanes majeurs qui suivent montrent
509
u à mesure qu’il traversera les collines, vallées
et
montagnes indiquées dans le fond de cette carte, jusqu’à ce qu’il rev
510
abond errant sans but, avec la démarche d’un fou…
et
un regard qui perce toutes choses sans s’arrêter à aucune. (Le Fou) e
511
nce terrestre (les épées) ; des sacrements, rites
et
prêtres des religions établies (les coupes) ; des biens qu’on peut ac
512
blies (les coupes) ; des biens qu’on peut acheter
et
vendre (les deniers) ; du sol et du foyer (les bâtons). Il n’a plus d
513
’on peut acheter et vendre (les deniers) ; du sol
et
du foyer (les bâtons). Il n’a plus d’attaches, ni de nom. Il est la c
514
ssus des rois, des reines, des as, des chevaliers
et
des valets, au-dessus des 21 symboles qui décrivent la hiérarchie des
515
symboles qui décrivent la hiérarchie des essences
et
des sphères surhumaines ? En passant à travers eux tous, mais sans êt
516
nivers ambiant perd son poids. Sa réalité visible
et
tangible continue d’exister, mais elle a perdu son pouvoir magique. V
517
dont il s’est débarrassé depuis longtemps. L’une
et
l’autre sont les illusions qui s’interposent entre l’homme et son ess
518
ont les illusions qui s’interposent entre l’homme
et
son essence divine innée… Le fol errant n’a ni famille, ni possession
519
tamment son essence dans les aspects de l’univers
et
de ses créatures, et cependant restant le « Dieu caché », deus abscon
520
ans les aspects de l’univers et de ses créatures,
et
cependant restant le « Dieu caché », deus absconditus, éternellement…
521
manifestation de Dieu, c’est-à-dire de lui-même,
et
en même temps il voit à travers toutes les choses : elles ne sont que
522
assées… Il est le mendiant qui possède l’univers,
et
toutes ses richesses, qui ne sont rien d’autre que le déploiement de
523
u’il paraît. Si quelque étranger aux habits sales
et
déchirés, au regard bizarre, entrait chez vous et vous tapait gentime
524
et déchirés, au regard bizarre, entrait chez vous
et
vous tapait gentiment sur l’épaule en murmurant à votre oreille : « J
525
en murmurant à votre oreille : « Je suis le Père,
et
le Fils, et le Saint-Esprit ! » — la plupart d’entre vous, sans plus
526
à votre oreille : « Je suis le Père, et le Fils,
et
le Saint-Esprit ! » — la plupart d’entre vous, sans plus d’enquête, l
527
t initié ne condescend pas à desserrer ses lèvres
et
à révéler le scandaleux secret de sa perfection. Dans la sagesse du S
528
carné, il passe, étranger, silencieux. Étant tout
et
toutes choses, il ne lui reste plus qu’à feindre de n’être rien. Et d
529
il ne lui reste plus qu’à feindre de n’être rien.
Et
de même, il convient que la séquence des arcanes, grâce aux symboles
530
raphiques desquels nous sont dévolus l’initiation
et
l’accomplissement, apparaisse simplement comme une série de cartes à
531
comme une série de cartes à jouer plutôt bizarres
et
démodées… Le Parfait sous l’aspect d’un fol errant, a dépassé la poss
532
s particulières exprimées par les quatre couleurs
et
les arcanes. C’est pourquoi, prenons garde, s’il nous advient jamais
533
rné, le Christ errant de nouveau parmi les hommes
Et
de plus, s’il y condescendait, il pourrait bien être capable de nous
534
traîne d’un côté un singe, un lapin ou un diable,
et
de l’autre côté un homme. Elle nous indique simplement le mouvement d
535
lles ou physiques… Celui qui s’élève sera abaissé
et
celui qui s’abaisse sera élevé. Synonymes. Droite : Fortune, bonheur
536
ésumé) : La clef 10 termine le cycle collectif
et
inaugure le cycle individuel. Aux 4 coins de la carte, les figures sy
537
les 4 lettres I H V H brodées sur la robe du Fou,
et
représentent les 4 signes fixes du zodiaque. L’Ange (Aquarius) est l’
538
s chérubiniques dans Ézéchiel, les 4 évangélistes
et
leurs emblèmes, les 4 rivières du Paradis, et le Tétragramme. Ces 4 s
539
tes et leurs emblèmes, les 4 rivières du Paradis,
et
le Tétragramme. Ces 4 symboles cosmiques sont entourés de nuages de t
540
de l’autre : équilibre entre les aspects positifs
et
négatifs des 4 instruments (bâtons, épées, coupes, deniers), c’est-à-
541
coupes, deniers), c’est-à-dire entre l’évolution
et
l’involution. L’une des roues porte les signes alchimiques du Mercure
542
ure (Intellect) ; Sel (Corps) ; Soufre (Esprit) ;
et
Dissolution (Émotions). L’autre roue ne porte pas de signes, mais il
543
plus bas niveau de la conscience, encore solaire
et
collective (symboles abstraits). Autour de la roue, trois symboles co
544
) dirigé vers le bas (involution dans la matière)
et
ondulant (action vibratoire de l’intellect créateur). L’Anubis, ou He
545
e, coloré en rouge (désir), s’élève de la matière
et
évolue vers le Père : c’est l’homme qui s’éveille des profondeurs, et
546
re : c’est l’homme qui s’éveille des profondeurs,
et
qui commence à monter vers l’appel du Sphinx, symbole de l’homme parf
547
u Sphinx, symbole de l’homme parfait ou conscient
et
individualisé. Le Sphinx est bleu (spiritualisé, re-né) et porte sur
548
dualisé. Le Sphinx est bleu (spiritualisé, re-né)
et
porte sur la tête des ornements noirs et blancs : équilibre des contr
549
, re-né) et porte sur la tête des ornements noirs
et
blancs : équilibre des contradictions. Il tient l’épée de la discrimi
550
Playing Cards, London, 1848. Éliphas Lévi : Dogme
et
rituel de la haute magie, 1860 — Clefs majeures et clavicules de Salo
551
t rituel de la haute magie, 1860 — Clefs majeures
et
clavicules de Salomon, 1895. — Le Grand Arcane, 1898. — Transcendenta
552
hétorique est devenue synonyme d’éloquence creuse
et
de clichés. J’en parlerai dans un tout autre sens. Je voudrais désign
553
divers que les lois de composition d’un tableau,
et
sa limitation par le cadre ; les lois de l’harmonie et du contrepoint
554
limitation par le cadre ; les lois de l’harmonie
et
du contrepoint ; les genres musicaux et littéraires ; les conventions
555
’harmonie et du contrepoint ; les genres musicaux
et
littéraires ; les conventions de l’opéra et de la danse ; les personn
556
icaux et littéraires ; les conventions de l’opéra
et
de la danse ; les personnages constants du théâtre ; les ouvertures,
557
s, levers de rideau, préfaces, finales, épilogues
et
points d’orgue ; la règle des trois unités ; les transitions, récitat
558
s ; les transitions, récitatifs, coups de théâtre
et
contrastes ménagés ; le nombre fixe des syllabes dans un vers et des
559
énagés ; le nombre fixe des syllabes dans un vers
et
des vers dans un sonnet ; les rimes et les césures, — bref, toutes le
560
ns un vers et des vers dans un sonnet ; les rimes
et
les césures, — bref, toutes les conventions acceptées en commun par l
561
conventions acceptées en commun par les artistes
et
leur public. Tout cela faisait l’Art, aux grandes époques. Artiste ét
562
sa liberté. L’inspiration passait par ces canaux
et
se communiquait par eux. Les règles étant connues, amateurs et critiq
563
quait par eux. Les règles étant connues, amateurs
et
critiques disposaient d’une mesure commune avec le créateur. Ils pouv
564
Ils pouvaient estimer la bienfacture d’une œuvre,
et
faire la part de l’invention par déduction de la coutume. Presque tou
565
plus juger d’une œuvre. Elle tient la rhétorique
et
ses figures pour arbitraires, artificielles, non contraignantes. (Et
566
arbitraires, artificielles, non contraignantes. (
Et
sans doute, le sont-elles devenues.) Mais dès l’instant où les règles
567
vous avez inventé quelque chose. Ôtez les règles,
et
ce même déplacement devient le type du geste indifférent. Dans le pri
568
t le type du geste indifférent. Dans le principe,
et
dans les hautes époques, la rhétorique au sens large, et ses règles,
569
les hautes époques, la rhétorique au sens large,
et
ses règles, sont strictement non arbitraires. Elles traduisent des re
570
ations constitutives de notre corps, de la psyché
et
du Cosmos. La régularité et l’alternance de la respiration, des nuits
571
e corps, de la psyché et du Cosmos. La régularité
et
l’alternance de la respiration, des nuits et des saisons, sont nécess
572
rité et l’alternance de la respiration, des nuits
et
des saisons, sont nécessaires à notre vie, comme les cadences et les
573
sont nécessaires à notre vie, comme les cadences
et
les contrastes composés sont vitaux pour nos œuvres d’art. Au surplus
574
put les retrouver dans les symboles des religions
et
des magies, spontanément réapparus au cours des âges et sur les point
575
magies, spontanément réapparus au cours des âges
et
sur les points les plus divers de la planète. Les romantiques alleman
576
cependant que le journalisme fait son apparition,
et
que la réalité quotidienne s’introduit dans les romans. Conjonction l
577
, balayant les symboles sacrés, les rites sociaux
et
les cérémonies dont l’élite a perdu le sens, pour instaurer le culte
578
s convenues, rimes, unités, précautions oratoires
et
procédés de composition. Mais elle alla plus loin. Elle déclara que l
579
ique en tant que telle était mauvaise, insincère,
et
contraire à l’inspiration libre. Dans ses recettes magiques et artifi
580
à l’inspiration libre. Dans ses recettes magiques
et
artifices profonds, elle ne vit que recettes et artifices, et command
581
s et artifices profonds, elle ne vit que recettes
et
artifices, et commanda de les éliminer. De ses fleurs, elle fit des c
582
profonds, elle ne vit que recettes et artifices,
et
commanda de les éliminer. De ses fleurs, elle fit des clichés1. Aband
583
in… Il tomba dans « la réalité », coupa ses ailes
et
se fit romancier ou paysagiste d’après nature. Le sociologue et le ph
584
ncier ou paysagiste d’après nature. Le sociologue
et
le photographe l’observaient d’un œil ironique. La naissance, le tri
585
ent d’un œil ironique. La naissance, le triomphe
et
le déclin du roman comme genre littéraire, illustrent à merveille ces
586
brèves indications sur l’office de la rhétorique
et
le danger de l’écarter à la légère. L’origine du roman est dans le co
587
de l’âme ou du Cosmos dans un jeu de personnages
et
d’aventures très simples. Le mythe se développe en légende, et la lég
588
s très simples. Le mythe se développe en légende,
et
la légende sacrée convoie un enseignement religieux. L’épopée perpétu
589
l’homme devient de plus en plus son propre centre
et
son sujet d’étonnement favori, le mythe se rapproche de l’histoire. I
590
l’« étude » du réel, quand le conte, la légende,
et
même l’épopée, étaient créations pures de l’imagination. Et l’on ne s
591
épopée, étaient créations pures de l’imagination.
Et
l’on ne sait plus si le roman est une pseudo-science ou un faux art.
592
non pas des moyens d’expression. Mieux on l’imite
et
plus on s’écarte de l’art. Avec une incroyable étourderie, certains d
593
ersonne ne pourrait jouer2. Le jeu ne sera vivant
et
passionnant qu’à la mesure de la fixité même de ses règles indiscutée
594
e naturante, au lieu de copier la nature naturée.
Et
la psyché réinventait un réel significatif. Comment rejoindrait-on le
595
Comment rejoindrait-on le sens profond des choses
et
des événements de la vie, en décalquant le désordre varié des objets
596
ans le moindre étonnement par la critique moderne
et
par le grand public. Elle rend compte de l’insignifiance, au sens lit
597
u’au sublime, proposaient des types de vie haute,
et
réveillaient des forces endormies. Le conte était le libre déploiemen
598
décrivait en personnages selon certains procédés
et
figures surgis des profondeurs de l’être, identiques à ceux du rêve,
599
profondeurs de l’être, identiques à ceux du rêve,
et
crus comme tels avec reconnaissance, au double sens de l’expression.
600
ait savoir qu’il a mis dans son livre ce qui est,
et
non plus ce qu’il a inventé ? L’abandon de la rhétorique entraîne deu
601
’auditeur un état très particulier de réceptivité
et
de créance. On savait qu’un jeu commençait, amusant ou profond, et si
602
savait qu’un jeu commençait, amusant ou profond,
et
significatif. On croyait tout : c’était le jeu. Le jeu ne tolère pas
603
des mots rituels pour suspendre le sens critique,
et
voici le plaisir extrême : Peau d’âne va lui être conté. Mais si vous
604
futiles. Au siècle passé, les conteurs populaires
et
certains des meilleurs écrivains avaient encore coutume de débuter pa
605
dans l’atmosphère du récit. (Le début de Le Rouge
et
le Noir.) Ces procédés d’avertissement retenaient encore une règle él
606
liste ambitionne d’imiter la vie, qui ne commence
et
ne finit jamais. Force lui est donc d’entrer comme par hasard, au mil
607
atmosphère, ou même d’une phrase, « N’importe où
et
n’importe comment » — c’est à quoi vise son effort. « Gontran sortit
608
son briquet de nacre, alluma une cigarette blonde
et
consulta l’indicateur. » Il s’agit de me faire croire que c’est vrai.
609
e c’est vrai. Il faut donc me fournir des preuves
et
des observations exactes. Mais à la première preuve, je commence à do
610
je la connais autant que cet auteur. Je me méfie,
et
bientôt discute. Et plus l’auteur paraît désireux de me convaincre —
611
que cet auteur. Je me méfie, et bientôt discute.
Et
plus l’auteur paraît désireux de me convaincre — au lieu de s’abandon
612
’est pas deux expériences humaines superposables.
Et
je ne renoncerais à la mienne pour faire crédit à celle de l’écrivain
613
rivain que si, d’abord, il renonçait à démontrer,
et
m’entraînait par d’autres charmes… Du conteur pur, je n’exigeais qu’u
614
Du conteur pur, je n’exigeais qu’un sens, valable
et
vérifiable en soi. 2°) — Par la suppression des cérémonies d’introduc
615
Par la suppression des cérémonies d’introduction
et
de sortie3, le romancier moderne veut créer l’illusion du réel quotid
616
it à faire du roman quelque chose d’interminable,
et
quelque chose de méthodiquement insignifiant. Quelque chose qui n’en
617
eproduire en multipliant les observations exactes
et
les personnages quelconques. Et c’est au nom de cette fidélité à la v
618
ervations exactes et les personnages quelconques.
Et
c’est au nom de cette fidélité à la vie que M. Jules Romains va s’int
619
terdire, dit-il — « les enchaînements arbitraires
et
le picaresque », les rencontres qu’on ne voit pas dans la réalité, br
620
’absence de conventions sera tenue pour avantage,
et
compensera, aux yeux de ses contemporains, l’absence de mérite esthét
621
ls sont, au nom des vieilles règles, de commencer
et
de finir le jeu avec les mêmes cartes », échouent à exprimer ce désor
622
uoi les romans devraient-ils exprimer tout cela ?
Et
d’ailleurs, comment le pourraient-ils ? Si longs qu’ils soient, ils s
623
la vie », c’est doublement tricher : avec la vie,
et
surtout avec l’art. Cette tricherie généralisée doit amener, nécessai
624
tôt frustes mais fixes, du découpage, du montage,
et
de la présentation dramatisée. Ces conditions, dans une vue commercia
625
sement maintenues par les « producers », éditeurs
et
directeurs de magazines à grand tirage. Le genre proprement romanesq
626
’éteindra dans le même temps que l’ère bourgeoise
et
pour avoir commis la même erreur : qui était de croire les convention
627
aux lois d’une rhétorique précise. C’est un jeu,
et
un jeu serré, qui ne tolère aucune faiblesse, aucune tricherie. Ses l
628
aiblesse, aucune tricherie. Ses lois sont connues
et
communes : dès Conan Doyle, elles ont pris force contraignante. Ses p
629
ceux de la Commedia dell’arte, ou ceux des cartes
et
des échecs : le détective élégant, volontiers philosophe, l’agent de
630
tesse de palaces ; le valet de chambre silencieux
et
astucieux, etc. La situation, donnée d’entrée de jeu, se résout compl
631
de jeu, se résout complètement à la fin du livre,
et
ne comporte qu’un nombre fini d’éléments. Le lieu de l’action est cir
632
mble que personne n’ait pu y entrer ni en sortir,
et
qui contient le problème sous forme de cadavre. Parfois, ce n’est qu’
633
posée par J. Huizinga5 : une action dont le début
et
la fin sont nettement marqués, qui a lieu dans un espace nettement dé
634
ués, qui a lieu dans un espace nettement délimité
et
qui obéit, entre ces limites spatiales et temporelles, à des règles i
635
élimité et qui obéit, entre ces limites spatiales
et
temporelles, à des règles indiscutées. Le roman policier passionne da
636
s permet de mesurer l’invention de chaque auteur,
et
les progrès du genre. Une grande partie de l’intérêt que l’amateur ap
637
mans policiers devient très vite un spécialiste.)
Et
cette rhétorique ne manquera pas d’exercer son pouvoir créateur de co
638
ée, elle aussi, bien que l’exemple soit moins pur
et
moins frappant. Le roman historique garde le bénéfice du cadre : son
639
rra donc, comme sont mortes la tragédie classique
et
les chroniques en vers. Il mourra pour avoir épuisé ses possibilités
640
rra pour avoir épuisé ses possibilités formelles,
et
pour avoir poursuivi la chimère d’une liberté sans condition. Quelque
641
qu’enfin il se fît un prestige de les contredire
et
miner. Tout cela ne durera plus que le temps de liquider un héritage
642
quider un héritage saccagé par la guerre actuelle
et
par l’avènement des masses. La révolution que nous vivons déclassera
643
e lire des fables ne s’éteindra pas pour si peu ;
et
moins encore, le besoin d’en conter. L’imaginaire, délivré du souci d
644
fabuleux », le pouvoir créateur des formes fixes
et
la dialectique des symboles. Le conteur, renonçant à imiter la vie, l
645
conteur, renonçant à imiter la vie, la récréera ;
et
renonçant à prouver qu’il dit vrai, aussitôt se verra restituer les p
646
on. Notre monde retentit d’événements incroyables
et
pourtant mortellement réels. Les faits les plus flagrants du siècle d
647
tre du fou rire populaire avec l’instinct sadique
et
le goût des orgies de destruction que devait traduire, quelques année
648
fût-ce que pour rester au niveau de nos épreuves
et
de nos désastres réels, l’art de demain va revenir au jeu des amplifi
649
va revenir au jeu des amplifications, raccourcis
et
miracles qui constituaient la rhétorique des contes. Il ne rejoindra
650
’en se livrant à la logique profonde des symboles
et
des mythes de l’âme. Tout porte à tenir pour probable que les grandes
651
s convaincante. 1. La dialectique de la Terreur
et
de la Rhétorique forme le sujet du grand livre de Jean Paulhan, publi
652
’Alice in Wonderland où les arceaux, les maillets
et
les boules sont vivants et ne cessent de se déplacer. 3. Coup de sif
653
arceaux, les maillets et les boules sont vivants
et
ne cessent de se déplacer. 3. Coup de sifflet donné par l’arbitre, a
654
e dans la vie sérieuse. Idem : les rites d’entrée
et
de sortie relatifs à un espace ou à un temps sacré. 4. Voir Roger Ca
655
oup de foudre (1946)o Un regard dans un regard
et
les voilà fixés, cloués sur place, comme le coq est cloué sur la lign
656
n’y pas croire. C’est un fait, nous l’avons subi,
et
nous avons tous dit : je n’y puis rien. Avec autant de sincérité, nou
657
royant décrivant sa conversion en termes de grâce
et
de prédestination. Mais s’il est vain de nier le fait, il ne l’est po
658
des yeux — ils se détournent aussitôt que frappés
et
c’est toujours : « Ô toi que j’eusse aimée ! » Mais non, si c’était v
659
r impressionner ses victimes. Il en a tant parlé,
et
vous autres après lui, que toutes les femmes qui vont le rencontrer y
660
roman. Oui, l’idée seule a fait tous ces ravages,
et
non pas quelque dieu, ni le Destin. Il n’y aurait jamais de coup de f
661
rlande est reçu par la fille du roi selon l’usage
et
l’étiquette. Siegfried et Brunehilde qui s’avancent l’un vers l’autre
662
le du roi selon l’usage et l’étiquette. Siegfried
et
Brunehilde qui s’avancent l’un vers l’autre, dans la scène du hanap,
663
é, sous l’égide des plus intangibles hiérarchies.
Et
Don Juan triche, une fois de plus, quand il feint que cela se produis
664
erlocuteur d’une manière un peu trop personnelle,
et
comment dire ? — qu’il savait mieux que moi cette histoire que je lui
665
ettres. Il vint m’attendre au débarqué de l’avion
et
me conduisit à sa demeure. C’était l’heure du déjeuner. Nous causions
666
Mon hôte bientôt s’inquiète : « — Vous êtes pâle
et
vous ne mangez rien ! Vous sentiriez-vous indisposé ? » Je balbutie n
667
c vivacité comment il a organisé mes conférences,
et
quel public j’aurai, et quelles personnes me prient de leur réserver
668
organisé mes conférences, et quel public j’aurai,
et
quelles personnes me prient de leur réserver un dîner : bref, vous vo
669
on ? J’allais m’en persuader quand je m’aperçois,
et
cette fois-ci non sans terreur, que la femme du banquier, elle aussi,
670
que : d’ailleurs sa femme me promènera dans Buda,
et
me fera visiter le Musée, — à ce soir ! Il s’en va, très satisfait de
671
— à ce soir ! Il s’en va, très satisfait de lui,
et
de moi aussi, je crois. Nous voici seuls. Silence. Silence encore dan
672
eige bien gelée où ses pas, lentement s’enfoncent
et
se marquent. Je la rejoins. Alors d’un geste elle désigne la ville à
673
a rien d’autre à dire. Nous remontons en voiture
et
descendons vers la ville. Soudain, je me suis décidé et j’articule :
674
cendons vers la ville. Soudain, je me suis décidé
et
j’articule : « — Vous n’avez rien mangé au déjeuner, madame. — Vous n
675
i attablés devant des sandwiches au caviar rouge.
Et
le tour recommence. Même jeu qu’au déjeuner. Ni l’un ni l’autre ne po
676
ela — je me suis retenu de lui toucher l’épaule —
et
je m’entends prononcer : — Puisqu’il faut que cela soit, eh bien… que
677
cela soit, eh bien… que cela soit ! Elle se lève
et
me suit. Nous allons chez elle. Un vertige, un sombre délire, et sans
678
s allons chez elle. Un vertige, un sombre délire,
et
sans qu’un mot de plus ait été prononcé… Et ce fut ainsi, durant tout
679
lire, et sans qu’un mot de plus ait été prononcé…
Et
ce fut ainsi, durant tout mon séjour à Budapest. L’après-midi, je vou
680
is. Le soir, j’avais mes conférences ou un dîner.
Et
je passais le reste de la nuit dans un bar, en compagnie d’un peintre
681
de politique, des perspectives du nouveau régime,
et
pas du tout de mes après-midi. Bien entendu. La veille de mon départ,
682
de mon départ, comme nous sortions du bar, Maria
et
moi, une édition du matin nous apprend l’incendie du Reichstag. Je dé
683
stag. Je décide de rentrer le jour même à Berlin,
et
prends congé de mon ami qui se montrait fort inquiet de mon sort. Il
684
tre villa de Zehlendorf, ma femme m’attend, grave
et
presque sévère. Moi, je ne pensais qu’à la situation politique. Nous
685
ntime. J’ai tout avoué sans me chercher d’excuse.
Et
comme elle se taisait encore, je lui ai demandé comment elle avait su
686
lettre par avion, arrivée pour moi le matin même
et
qu’elle avait ouverte par crainte d’un malheur. Quelques lignes sur u
687
e feuille portant l’en-tête d’un bar de Budapest,
et
disant à peu près : « Donne-moi vite de tes nouvelles, je suis inquie
688
e la femme du banquier était lectrice de romans —
et
sans doute de vos propres romans ?… Et ce coup de foudre, n’est-il pa
689
e romans — et sans doute de vos propres romans ?…
Et
ce coup de foudre, n’est-il pas tombé d’un ciel qu’il convient de nom
690
ontribution à l’étude du coup de foudre », Formes
et
Couleurs, Lausanne, 1946, p. 1-4.
691
r vaine toute œuvre qui laisse son auteur intact,
et
son lecteur à son confort. Vaine et mauvaise toute œuvre qui ne te sa
692
uteur intact, et son lecteur à son confort. Vaine
et
mauvaise toute œuvre qui ne te saisit pas comme avec une main, qui ne
693
ue chose qu’il ne peut plus fuir attaque l’auteur
et
tout ce qu’il reflète d’une ambiance domestiquée. Il est grand temps
694
elle est en réalité : dangereuse pour le penseur,
et
transformatrice du réel. « Là où je crée, là je suis vrai », écrivait
695
Là où je crée, là je suis vrai », écrivait Rilke.
Et
c’est pourquoi nous prendrons au sérieux cette distinction : il y a d
696
des hommes qui sont l’orgueil de notre esprit, —
et
d’autres qui s’enorgueillissent de notre esprit. Il y a des hommes qu
697
: il ne faudra plus les confondre. Il y a Pascal
et
Goethe, Dostoïevski et Kierkegaard, — il y a aussi les fins lettrés,
698
s confondre. Il y a Pascal et Goethe, Dostoïevski
et
Kierkegaard, — il y a aussi les fins lettrés, les bons esprits, les p
699
, ou un capital bien placé. Cerveaux sans mains !
et
qui jugent de haut, mais de loin, et toujours après coup, la multitud
700
sans mains ! et qui jugent de haut, mais de loin,
et
toujours après coup, la multitude des mains sans cerveau qui travaill
701
Or, ces gens forment l’opinion, sans aucun doute,
et
ils le savent. Toute l’opinion du monde en est à peu près là, que la
702
créateurs ont pensé, au prix de leur vie souvent,
et
toujours par un acte initiateur et révolutionnaire. Les uns pensent,
703
r vie souvent, et toujours par un acte initiateur
et
révolutionnaire. Les uns pensent, dit-on, les autres agissent ! Mais
704
laisément dans notre langue par liberté de parole
et
de religion, libération de la misère et de la crainte. Donc les Natio
705
de parole et de religion, libération de la misère
et
de la crainte. Donc les Nations unies ayant gagné la guerre, il est t
706
écemment libérés, de même qu’en Russie soviétique
et
au Japon. On brûle encore, à l’occasion, quelques églises protestante
707
u commerciales, la misère règne, la police règne,
et
les vainqueurs eux-mêmes vivent dans la peur les uns des autres. Quan
708
s ne paraissent comporter que des réponses amères
et
humiliantes, si l’on reste au niveau des faits, des dures nécessités,
709
comparaison qu’il nous oblige à faire de l’idéal
et
du présent. Je propose donc que nous changions ce qui peut être imméd
710
donnée. Elle exige d’être affirmée sur le champ,
et
coûte que coûte, quels que soient les obstacles. Il y aura toujours d
711
e, elles peuvent être conquises. Nous l’affirmons
et
nous le démontrons par notre lutte contre toutes les « nécessités » q
712
les « nécessités » qui s’y opposent sans relâche.
Et
cette lutte est toujours possible. Cette Résistance ne fait que comme
713
xercice de notre liberté sont fatals, nécessaires
et
surhumains, aussitôt nous les rendrons tels, aussitôt nous cesserons
714
rons tels, aussitôt nous cesserons d’être libres.
Et
l’État aura tous les droits, puisque nous lui laisserons tous les dev
715
. Ce qu’il nous faut pour être libres, uniquement
et
tout simplement, c’est du courage. Car nous sommes libres, si nous so
716
Révolution, ni des Soviets, ni de la Démocratie,
et
surtout pas de leurs experts. Il la tient de sa vision seule et de so
717
de leurs experts. Il la tient de sa vision seule
et
de son courage de lutter pour la joindre. Lénine, sous le tsarisme, é
718
tait plus libre qu’un fonctionnaire sous Staline.
Et
George Washington était plus libre qu’un citoyen américain qui tourne
719
es provinces ; le canon à la guerre des nations ;
et
l’avion à la guerre des continents. Voici la Bombe, à quoi servira-t-
720
’est-à-dire : à une guerre qui nous atteint tous,
et
que nous ne faisons donc qu’à nous-mêmes. Les dimensions de la commun
721
la Terre, le Globe, la Boule, la Tête, la Bombe,
et
l’Unité considérée partout et de tout temps comme objet rond, pomme,
722
la Tête, la Bombe, et l’Unité considérée partout
et
de tout temps comme objet rond, pomme, sphère ou sceptre d’or, que ce
723
d au macrocosme. Si notre siècle arrive à digérer
et
intégrer cette pensée-là, il aura fait une révolution bien plus grand
724
te des habitants des Amériques Nord, Centre, Sud,
et
de l’Asie, c’est-à-dire la moitié du genre humain. L’autre moitié en
725
ables : les Français eussent mieux mangé, en 1944
et
1945, si les cargos alliés n’avaient été trop occupés dans le Pacifiq
726
u Romains, avec nos clans, nos écoles, nos partis
et
nos disputes centenaires ou quinquennales, avec nos allusions perfide
727
lusions perfides ou flatteuses qui perdent pointe
et
sens si l’on se déplace un peu, disons à quelques heures d’avion. Ce
728
tent intraduisibles pour qui ne peut y aller voir
et
sentir. Et notre époque n’est pas celle des voyages, mais seulement c
729
uisibles pour qui ne peut y aller voir et sentir.
Et
notre époque n’est pas celle des voyages, mais seulement celle des «
730
rien. Cependant qu’un beau jour le paysan normand
et
le boutiquier de Lyon ne pourront plus boucler leurs comptes parce qu
731
seront révoltés en Caroline du Sud ou à Harlem ;
et
les mineurs du pays de Galles n’auront plus de viande pendant des moi
732
e ne peut pas tout savoir, encore moins tout voir
et
tout comprendre. Les problèmes les plus angoissants de nos compagnons
733
ns de planète restent pour nous terres inconnues,
et
psychologiquement inexplorées. Hic sunt leones inscrivaient les géogr
734
s les grandes marges de leurs cartes de l’Europe.
Et
pourtant nous sommes destinés à découvrir un jour que ces lions sont
735
re. C’est sa nécessité qu’il faut d’abord sentir.
Et
qu’aussitôt la presse et la radio, le cinéma surtout l’éveillent et l
736
’il faut d’abord sentir. Et qu’aussitôt la presse
et
la radio, le cinéma surtout l’éveillent et la propagent, sous de larg
737
presse et la radio, le cinéma surtout l’éveillent
et
la propagent, sous de larges rubriques créant un appel d’air. Ce n’es
738
ue je vois manifester le sentiment le plus direct
et
le plus contagieux de la planète sont précisément deux poètes : le Sa
739
nt deux poètes : le Saint-John Perse de l’Anabase
et
de l’Exil, et Paul Claudel, notre grand écrivain « global » ? Dans le
740
: le Saint-John Perse de l’Anabase et de l’Exil,
et
Paul Claudel, notre grand écrivain « global » ? Dans leur prose et da
741
notre grand écrivain « global » ? Dans leur prose
et
dans leurs longs versets, quel qu’en soit le sujet allégué, nous avon
742
ère fois senti, sous le drapé d’un français riche
et
pur, battre le pouls mesuré de l’Asie, le cœur violent des Amériques.
743
e premier me parla de la Planète comme d’un amour
et
d’une souffrance intime !… r. Rougemont Denis de, « Dialogues sur
744
raient compterait les ministères suivants : Bombe
et
Répression des États, Échange des matières premières, Sens général de
745
ppliquant.) Mais il n’y a que les idées pratiques
et
raisonnables que l’on traite de folies, à l’âge où l’on prépare dans
746
monde entier, à la demande générale, la prochaine
et
irrévocablement dernière guerre civile du genre humain. Que va-t-il s
747
sse diffuse ne soit sensible dans les populations
et
chez beaucoup de bons esprits, mais une paralysie sans précédent s’es
748
éricain de la sensation, du biggest in the world.
Et
de vrai, c’est dans ce pays que la première Bombe vient d’être constr
749
ombe vient d’être construite. Exagérée sans doute
et
dépassant la mesure de ce que l’on connaissait avant le 6 août, elle
750
août, elle est là, parce que l’homme l’a mise là.
Et
votre sens de la mesure peut se rebeller comme l’esprit devant la mor
751
nne partie de leur utilité au service des nations
et
de leur vertu d’ordre. Admettons qu’elles arrivent encore à se battre
752
Admettons que notre globe dure longtemps encore,
et
que la guerre militaire y prospère d’autant mieux qu’elle sera dotée
753
omphe des « éléments d’ordre » aussi énigmatique,
et
sans témoins. Je reconnais volontiers que ce processus peut se poursu
754
se passeront peut-être pas de la manière soudaine
et
dramatique qu’un certain goût de l’antithèse m’incline parfois à souh
755
pures, parce que nos choix ne sont pas si francs,
et
que nos chefs savent à peine ce qu’ils jouent. Une espèce d’organisat
756
ue les peuples se révolteront contre cette nation
et
son régime, tôt ou tard. Il est évident que si l’on continue à penser
757
aujourd’hui, cela finira dans l’explosion totale.
Et
il est évident que la grande majorité des hommes se refuse à ces évid
758
la mort ? L’humanité, ce sont des gens comme vous
et
moi. Quand vous me dites qu’elle n’est pas prête pour la paix, cela v
759
isir la paix, vous votez tacitement pour la mort,
et
vous en rendez responsable. Tout tient à chacun de nous. Et nous en s
760
rendez responsable. Tout tient à chacun de nous.
Et
nous en sommes au point où il devient difficile de le cacher. Nos ali
761
iques, j’ai posé le principe du pessimisme actif.
Et
comment ne m’y tiendrais-je pas, quand je sais que l’enjeu n’est poin
762
it ? » La sentinelle a répondu : « Le matin vient
et
la nuit aussi. » Je n’ai pas fini d’aimer ce cri. Les citations de la
763
ce cri. Les citations de la Bible vous irritent.
Et
vous me direz : que fait Dieu dans tout cela ? Dangereuse question :
764
t que nous fassions sauter la Terre, elle sautera
et
ce sera très bien. Au-delà de ce « clin d’œil », il nous attend. s.
765
t-scriptum (27 avril 1946)t — Un dernier mot. (
Et
dire que j’allais l’oublier !) La Bombe n’est pas dangereuse du tout.
766
elques généraux. Je parlais de la fin du monde… —
Et
maintenant vous nous dites : aucun danger ! C’est là sans doute votre
767
t d’esprit d’Apocalypse. Mais dix mois ont passé,
et
rien ne se passe. Dieu soit loué, nous avons repris nos sens. Certain
768
parce que tout le monde en avait une peur bleue,
et
que personne, même pas Hitler, n’a eu le courage de commencer. À plus
769
a fait son calcul. Les Alliés pouvaient riposter,
et
la valeur militaire de cette arme était loin de compenser, même à ses
770
nt, c’est l’homme. C’est lui qui a fait la Bombe,
et
c’est lui seul qui se prépare à l’employer. Quand je vois qu’on nomme
771
eut plus l’éviter depuis que la Bombe nous menace
et
nous tente à la fois. Et voilà bien le progrès le plus sensationnel d
772
que la Bombe nous menace et nous tente à la fois.
Et
voilà bien le progrès le plus sensationnel du siècle. — Un progrès ?
773
tout ce qui nous rapproche des vraies questions,
et
nous oblige à y faire face. t. Rougemont Denis de, « Dialogues sur
774
communiste, que sais-je. On m’écrit cela de Paris
et
l’on ajoute que je ferais bien de rentrer, sous peine de ne pas compr
775
pas comprendre la réalité européenne en général,
et
française en particulier. Je pourrais me contenter de répondre : c’es
776
à m’en tirer par une réplique, même de bon sens,
et
j’ai quelques raisons de prendre la France plus au sérieux, plus au t
777
ux de partir. Je vois les avantages de l’Amérique
et
ses défauts, mieux qu’ils ne sont en mesure de les imaginer. Cela se
778
. Il n’est qu’une solution, qui est d’aller voir,
et
d’« essayer » le pays comme un nouveau costume. Et je me dis que le p
779
t d’« essayer » le pays comme un nouveau costume.
Et
je me dis que le problème est mal posé. Il ne s’agit ni de partir ni
780
ns hésiter : il ne s’agit ni de choisir une terre
et
ses morts contre le Globe et ses vivants ; ni de choisir le nomadisme
781
de choisir une terre et ses morts contre le Globe
et
ses vivants ; ni de choisir le nomadisme permanent et l’exil par prin
782
es vivants ; ni de choisir le nomadisme permanent
et
l’exil par principe ou dégoût. Il s’agit simplement de vivre au xxe
783
ien peu d’hommes d’aujourd’hui vivent leur temps,
et
se trouvent pratiquement en mesure de le vivre ! Combien encore sont-
784
ien encore sont-ils du Moyen Âge, ou du bourgeois
et
lent xixe siècle ! Serait-ce manque d’imagination ? Certes, il en fa
785
vite que Jules Verne n’a pu le rêver. C’est cela,
et
c’est aussi le cauchemar des visas. Si cette folie furieuse et inutil
786
i le cauchemar des visas. Si cette folie furieuse
et
inutile ne régnait pas sur le monde d’après-guerre, le problème parti
787
stion de couper les ponts, de brûler les pénates,
et
autres rites attestant devant les mânes des ancêtres un choix farouch
788
rrévocable. Se déplacer devient un geste naturel,
et
partir peut très bien signifier revenir après quelque temps, comme on
789
s quelque temps, comme on prend un billet d’aller
et
retour. La poésie des voyages a vécu, la tragédie des départs a vécu.
790
exclusive de la curiosité, un accueil plus ferme
et
plus souple de la diversité des êtres et des coutumes. Aimez votre te
791
us ferme et plus souple de la diversité des êtres
et
des coutumes. Aimez votre terre et quittez-la. Quittez-la trois fois
792
sité des êtres et des coutumes. Aimez votre terre
et
quittez-la. Quittez-la trois fois et revenez-y trois et quatre fois,
793
votre terre et quittez-la. Quittez-la trois fois
et
revenez-y trois et quatre fois, selon l’arithmétique du cœur. Le noma
794
ttez-la. Quittez-la trois fois et revenez-y trois
et
quatre fois, selon l’arithmétique du cœur. Le nomade n’aime pas sa te
795
la meilleure manière, s’il refuse tout le reste,
et
la comparaison. Il faut s’ouvrir. Il faut aimer. Il faut cesser de tr
796
aut aimer. Il faut cesser de trouver cela nigaud,
et
de faire le coq de village tout hérissé, griffu, inefficace. Circulez
797
é, griffu, inefficace. Circulez donc, allez voir,
et
aimez. Puis choisissez. Revenez si le cœur vous en dit. Mais je sais
798
us empêchent de rejoindre le siècle, de l’habiter
et
d’user de ses dons. Forçons les gouvernants à nous répondre : à quoi
799
en parle simplement, avec ce sens de l’équilibre
et
de la mesure dont ses ouvrages portent l’empreinte. Le prochain aussi
800
connaissance, ils vous appellent par votre prénom
et
vous invitent pour le prochain week-end. Aux États-Unis, l’étranger e
801
sons, si elles sont plus rares, sont plus solides
et
profondes. Outre-Atlantique, on est très camarade ; tout cela glisse,
802
très camarade ; tout cela glisse, change, glisse…
Et
l’inverse ? Quels sont, chez l’Américain, les sentiments éveillés par
803
classes d’Américains. Ceux qui ont connu l’Europe
et
qui y ont vécu, se distinguent par une sorte de snobisme européen, su
804
norité qui affectionne particulièrement la France
et
la Suisse. L’Américain moyen, qui connaît notre continent par les jou
805
u comme nous voyions les Balkans avant la guerre.
Et
puis, ils ont un peu peur de nous ; ils craignent que nous ne soyons
806
nous ne soyons une source permanente de désordres
et
de troubles. Tous les nationalismes européens les effraient. De même
807
te chez les Américains au point de vue du civisme
et
de la politique. Ils ont le sentiment d’être decent. Leur opinion est
808
ces termes : « Être decent, c’est tenir sa parole
et
se tenir propre soi-même »… Quant à la masse du centre du pays, elle
809
ts y viennent de partout, de toutes les Amériques
et
de tous les continents. New York résume un peu les États-Unis… Mais u
810
ce de glacis ou s’affrontent le monde anglo-saxon
et
le monde russe. On a fortement l’impression de l’existence de deux pô
811
existence de deux pôles d’attraction : l’Amérique
et
la Russie. Cette impression est une réalité. Quant à notre continent,
812
nce ; il a cédé le pas au problème Amérique-URSS.
Et
que pensent les Américains des Russes ? L’opinion est extrêmement mél
813
le de la comprendre de l’autre côté de l’Océan. ⁂
Et
l’Amérique intellectuelle ? La vie scientifique est très remarquable
814
rts en n’importe quoi. Au point de vue littéraire
et
philosophique, je ne vois rien de très neuf qui se soit développé pen
815
développé pendant la guerre ou après. Entre 1918
et
1939, l’Amérique a connu une grande période littéraire. Je ne disting
816
t intellectuels, qui font un lyrisme très violent
et
très coloré… Quant à l’Amérique sociale… Socialement parlant, l’ouvri
817
fait la grève pour des raisons purement pratiques
et
non au nom du marxisme… En conclusion, une « cure d’Amérique » est pr
818
outre-Atlantique pour y vivre une ou deux années
et
inversement. Je ne vois pas d’hostilité possible entre les deux conti
819
ue, nous pouvons apporter beaucoup de raffinement
et
un sens des valeurs spirituelles. Les Américains nous apportent la fr
820
ent la franchise dans la vie, la liberté d’allure
et
beaucoup de gentillesse. Telle est la « leçon d’Amérique » que nous a
821
ait trouvé aux États-Unis « trente-deux religions
et
un seul plat », il n’avait tort qu’a cinquante pour cent… w. Rouge
822
érique », L’Illustré, Lausanne, 16 mai 1946, p. 5
et
23. x. Propos recueillis par Georges Gygax et introduits par la note
823
5 et 23. x. Propos recueillis par Georges Gygax
et
introduits par la note suivante : « Un écrivain nous est revenu. Il n
824
us est revenu. Il nous est revenu de la lointaine
et
si proche Amérique, emportant avec lui, pour nous le communiquer avec
825
ournal d’un intellectuel en chômage , de L’Amour
et
l’Occident , de tant d’autres œuvres auxquelles sa personnalité a imp
826
a personnalité a imprimé son sceau de vie, de foi
et
de vérité, doit être classé à l’opposé absolu de tout ce qui porte en
827
e qui porte en soi le germe de la superficialité.
Et
Dieu seul est capable de dessiner les contours de ce mot « superficie
828
tional-socialisme, « phénomène à la fois mythique
et
mystique ». N’est-ce pas lui qui a lancé cette fulgurante vérité aux
829
joyeusement à la chute dans l’abîme : « Personne
et
pensée ne sont point séparables, et toutes deux ne sont possibles que
830
: « Personne et pensée ne sont point séparables,
et
toutes deux ne sont possibles que dans cet acte unique d’obéissance q
831
eune Amérique, vieille Europe. Patrie de l’avenir
et
patrie de la mémoire. Dynamisme allégé du poids des traditions et que
832
mémoire. Dynamisme allégé du poids des traditions
et
querelles ancestrales qui tournent en rond. C’est la rumeur du xxe s
833
nous frapper d’une sorte de mélancolie sceptique
et
de nous tenter d’abandon aux prétendues fatalités de l’Histoire. Mais
834
pour l’homme qui ne recule pas devant sa liberté,
et
qui accepte les risques de son choix. Laissons l’Histoire telle qu’on
835
e telle qu’on la simplifie en courbes ascendantes
et
descendantes. Tout peut encore se renverser, et plus d’une fois, dans
836
s et descendantes. Tout peut encore se renverser,
et
plus d’une fois, dans les destins de collectivités aussi complexes qu
837
rtaines valeurs que l’Europe a promues patiemment
et
qu’elle illustre encore aux yeux du monde. Je veux parler de la « mém
838
x yeux du monde. Je veux parler de la « mémoire »
et
de l’« expérience historique », qui est celle des épreuves et des éch
839
périence historique », qui est celle des épreuves
et
des échecs. L’étude des singes et de leur attristante psychologie nou
840
le des épreuves et des échecs. L’étude des singes
et
de leur attristante psychologie nous révèle que ces faux ancêtres ne
841
reconstruire leur monde, de l’apprendre à nouveau
et
de réinventer les gestes élémentaires. Ce travail de Sisyphe les épui
842
es élémentaires. Ce travail de Sisyphe les épuise
et
les condamne à rester singes. Il les réduit à imiter, là où nous somm
843
nuit, faute de repères, faute d’un passé vivant,
et
faute de traditions instrumentales. Il s’imagine qu’il invente sans c
844
nouvelles toutes chaudes, à la dernière tactique,
et
ne fait que singer d’antiques découvertes. À propos de ces mêmes créa
845
s découvrent bientôt les tiroirs, ils les ouvrent
et
dévorent les bananes. On répète le manège un grand nombre de fois, po
846
es singes se précipitent, arrachent les tiroirs —
et
les trouvent vides. La plupart de ces animaux montrent alors les sign
847
ressent que le sort, la science, le monde moderne
et
sa prospérité ne sont pas les garants infaillibles d’un bonheur qui l
848
ptimisme automatique conditionné par la publicité
et
les sirènes du progrès. Et c’est pourquoi il tiendra le coup. v. R
849
ionné par la publicité et les sirènes du progrès.
Et
c’est pourquoi il tiendra le coup. v. Rougemont Denis de, « Histoi
850
es provinces ; le canon à la guerre des nations ;
et
l’avion à la guerre des continents. Voici la Bombe. À quoi servira-t-
851
c’est-à-dire à une guerre qui nous atteint tous,
et
que nous ne faisons donc qu’à nous-mêmes. Les dimensions de la commun
852
la Terre, le Globe, la Boule, la Tête, la Bombe,
et
l’Unité considérée partout et de tout temps comme objet rond, pomme,
853
la Tête, la Bombe, et l’Unité considérée partout
et
de tout temps comme objet rond, pomme, sphère ou sceptre d’or, que ce
854
d au macrocosme. Si notre siècle arrive à digérer
et
intégrer cette pensée-là, il aura fait une révolution bien plus grand
855
te des habitants des Amériques Nord, Centre, Sud,
et
de l’Asie, c’est-à-dire la moitié du genre humain. L’autre moitié en
856
ables : les Français eussent mieux mangé, en 1944
et
1945, si les cargos alliés n’avaient pas été trop occupés dans le Pac
857
u Romains, avec nos clans, nos écoles, nos partis
et
nos disputes centenaires ou quinquennales, avec nos allusions perfide
858
lusions perfides ou flatteuses qui perdent pointe
et
sens si l’on se déplace un peu, disons à quelques heures d’avion. Ce
859
tent intraduisibles pour qui ne peut y aller voir
et
sentir. Et notre époque n’est pas celle des voyages, mais seulement c
860
uisibles pour qui ne peut y aller voir et sentir.
Et
notre époque n’est pas celle des voyages, mais seulement celle des «
861
rien. Cependant qu’un beau jour le paysan normand
et
le boutiquier de Lyon ne pourront plus boucler leurs comptes parce qu
862
seront révoltés en Caroline du Sud ou à Harlem ;
et
les mineurs du pays de Galles n’auront plus de viande pendant des moi
863
e ne peut pas tout savoir, encore moins tout voir
et
comprendre. Les problèmes les plus angoissants de nos compagnons de p
864
ns de planète restent pour nous terres inconnues,
et
psychologiquement inexplorées. « Hic sunt leones » inscrivaient les g
865
urs cartes de l’Europe, « ici vivent les lions ».
Et
pourtant nous sommes destinés à découvrir un jour que ces lions sont
866
re. C’est sa nécessité qu’il faut d’abord sentir.
Et
qu’aussitôt la presse, et la radio, le cinéma surtout l’éveillent et
867
il faut d’abord sentir. Et qu’aussitôt la presse,
et
la radio, le cinéma surtout l’éveillent et la propagent, sous de larg
868
resse, et la radio, le cinéma surtout l’éveillent
et
la propagent, sous de larges rubriques créant un appel d’air. Ce n’es
869
ue je vois manifester le sentiment le plus direct
et
le plus contagieux de la planète sont précisément deux poètes : le Sa
870
nt deux poètes : le Saint-John Perse de l’Anabase
et
de l’Exil, et Paul Claudel, notre grand écrivain « global » ? Dans le
871
: le Saint-John Perse de l’Anabase et de l’Exil,
et
Paul Claudel, notre grand écrivain « global » ? Dans leur prose et da
872
notre grand écrivain « global » ? Dans leur prose
et
dans leurs longs versets, quel qu’en soit le sujet allégué, nous avon
873
ère fois senti, sous le drapé d’un français riche
et
pur, battre le pouls mesuré de l’Asie, le cœur violent des Amériques.
874
mesuré de l’Asie, le cœur violent des Amériques.
Et
que dire de ce grand joueur de Boule que fut « Saint-Ex »13, le premi
875
emier qui me parla de la Planète comme d’un amour
et
d’une souffrance intime ? Sinon qu’il fut lui aussi un poète, en pros
876
me ? Sinon qu’il fut lui aussi un poète, en prose
et
en action, en vision créatrice. 13. Saint-Exupéry, l’auteur de Vol
877
ice. 13. Saint-Exupéry, l’auteur de Vol de Nuit
et
de Terre des Hommes. y. Rougemont Denis de, « La pensée planétaire
878
qui pense cette idée, détruit ; l’idée que vous,
et
qui pensez, un jour ne serez plus, un jour serez un mort. Si « macabr
879
ucun cas se dire de sa propre mort, de la mienne.
Et
non plus, à mon sens, de la méditation que je poursuis entre ces phra
880
ues instants, s’arrêter, accélère ma respiration.
Et
cela ne signifie point que nous n’ayons jamais pensé à notre mort ave
881
le seul critère d’une perfection intellectuelle,
et
l’on conçoit que son application ne puisse être ni rapportée ni répét
882
e puisse être ni rapportée ni répétée. Perfection
et
Mort en ceci se confondent, qu’elles sont absolument tragiques, c’est
883
une instance mystérieuse aimante notre méditation
et
qu’elle la fixe sur cela que le naturel se refuse à prendre au sérieu
884
doit normalement être aperçu comme négligeable ;
et
s’y attarder serait le fait d’une sophistique assez gratuite. Ma natu
885
applique à la disqualifier, à la rendre abstraite
et
lointaine, à la chasser à tout jamais dans un futur indéfini. Ainsi d
886
omme savait un jour ce qu’il en est de son destin
et
de sa liberté, s’il voyait à l’œil nu, leur sens dernier et l’enjeu v
887
iberté, s’il voyait à l’œil nu, leur sens dernier
et
l’enjeu véritable de ses choix, à qui reviendrait l’empire de ce mond
888
Vivre est impur, qu’on sache ou non où va la vie,
et
c’est pourquoi les bonnes raisons n’expliquent pas notre réalité, mai
889
n de la Réalité qui m’a pressé d’écrire ces pages
et
qui pourrait suspendre ici ma phrase, me jetant dans mon jugement ? S
890
Crise déjà qui affleure, nous avertit de la Fin,
et
l’atteste. La crise Le Bas-Empire ne fut « bas », en son temps,
891
le illuminait. Sans la vie, que dire de la mort ?
Et
sans la Fin, que dire de la durée ? Mais tout se mêle encore confusém
892
yeux bien dessillés. C’est assez pour l’angoisse
et
trop peu pour agir. Ainsi le grand décret de crise qui sévit au cœur
893
oche, — ce crépuscule qui est peut-être une aube,
et
la frange de cet éclat qui doit consumer toute chair. Dans cette lueu
894
un jour d’apparaître la face réelle de la Terre.
Et
déjà, par intermittence, certains, ont entrevu et tenté de juger les
895
Et déjà, par intermittence, certains, ont entrevu
et
tenté de juger les buts réels de notre marche séculaire. Que savons-n
896
? La grandeur ? Nous avons détruit toute mesure,
et
plus rien n’est grand ni petit, mais toute chose sans répit nous prov
897
i le temps, désormais, travaillait contre nous ?)
Et
le monde entier s’organise à ce niveau de vie moyenne qui paraît offr
898
surances s’étend sur toutes nos activités : plans
et
pactes, statistiques de l’imprévu, eugénisme et longévité, clercs au
899
s et pactes, statistiques de l’imprévu, eugénisme
et
longévité, clercs au pas ou stérilisés, guerre hors la loi, sécurité
900
la loi, sécurité d’abord. Nous apprenons à vivre,
et
non plus à mourir : cet effort est contre nature. Il naît au déclin d
901
t est contre nature. Il naît au déclin de la vie,
et
fatalement se retourne contre elle. Nous voulons échapper au temps, à
902
n saisisse les commandes pour accomplir le Temps…
Et
nous serons pris au dépourvu, comme nulle autre génération. Car, tand
903
Avertissement Votre refuge est dans la masse
et
son Histoire. Vous vous dites en secret qu’elle ne peut pas mourir, e
904
vous dites en secret qu’elle ne peut pas mourir,
et
il est vrai qu’elle ne possède pas de vie réelle, et ne peut donc pen
905
il est vrai qu’elle ne possède pas de vie réelle,
et
ne peut donc penser sa fin, ni rien. Elle ne peut être en soi pensée,
906
sa fin, ni rien. Elle ne peut être en soi pensée,
et
l’homme en elle reste à peu près dénué de réalité, jusqu’au jour où l
907
nué de réalité, jusqu’au jour où la Fin le pense.
Et
c’est là son tragique et l’humour de la Fin. Tout ce qui est réel, to
908
jour où la Fin le pense. Et c’est là son tragique
et
l’humour de la Fin. Tout ce qui est réel, tout ce qui manifeste la pr
909
quel que soit le désir que vous avez qu’il dure,
et
la persuasion où vous vous entretenez qu’il durera toujours autant qu
910
totalement démesurée ? Qui périrait dans la honte
et
la rage ? Ceux qui croient encore aux mesures et cherchent leur appui
911
et la rage ? Ceux qui croient encore aux mesures
et
cherchent leur appui dans l’illusion tomberont en grand nombre dans l
912
and nombre dans le vide. Mais ceux qui auront vu,
et
qui auront cru leurs yeux, retrouveront dans la tempête la coutume de
913
e où le diable sévit, se réfugie sur les hauteurs
et
découvre que Dieu y est plus dangereux encore, d’une autre sorte, ful
914
une vaste conversation de la mort, sur les places
et
dans les grands cafés, aux lieux de populace et de parole rapide. Peu
915
s et dans les grands cafés, aux lieux de populace
et
de parole rapide. Peut-être le soleil éteint se promène-t-il depuis q
916
ut si facilement glisser, tout se trouver changé,
et
les hommes poursuivre leur discours, pénétrant dans l’horreur sans mé
917
epuis bientôt mille ans, l’An Mil était passé — «
et
toutes ses prières perdues ! » — mais ils savaient que rien ne peut f
918
s ils savaient que rien ne peut finir tout à fait
et
à jamais qu’au prix de cela justement qu’il n’était point permis d’im
919
sont apprises souffre mal qu’on y passe outre, —
et
très peu d’entre eux possédaient la pleine assurance de l’être. L’Ins
920
nstinct de mort. On proposait une cure des masses
et
la nationalisation des écoles de psychanalyse. Un théologien répondit
921
’est la mort. Saint Paul l’a vu bien avant Freud,
et
mieux. Il entendait par « chair » le tout de l’homme, intelligence et
922
it par « chair » le tout de l’homme, intelligence
et
belle âme comprises. Et ce n’est point que nous aimions la mort comme
923
de l’homme, intelligence et belle âme comprises.
Et
ce n’est point que nous aimions la mort comme telle. Bien au contrair
924
telle que vous la cultivez, qui conduit à la mort
et
la mérite. Nous sommes tout simplement au jour du Jugement. Il sera p
925
oui pour la première fois à l’instant qui le juge
et
l’accomplit, — notre temps, qui n’était pour nous qu’un refus de l’in
926
était pour nous qu’un refus de l’instant éternel.
Et
l’Histoire tout entière dans l’acte de ce oui, se manifeste au Jour d
927
Comme il parlait encore, une lueur d’aube apparut
et
grandit autour d’eux. Toutes choses replongées dans la stupeur origin
928
ant où les hommes s’aperçoivent que leurs efforts
et
leurs soucis se tournaient vers ce qui n’est rien, vers une Absence d
929
a seule Présence qui est terrible en sa splendeur
et
difficile à supporter, le seul Amour apparaissant qui menace d’être i
930
té de ce monde mal fait… Parut un soleil nouveau.
Et
ceux qui le voyaient prenaient un visage neuf, leurs yeux devenaient
931
aient un visage neuf, leurs yeux devenaient forts
et
s’attendaient à l’éclat d’une lueur encore plus vive. Par degré le Gr
932
degré le Grand Jour éclatait, toujours plus vaste
et
blanc dans l’univers entier. Ils se sont tout d’abord sentis gênés, b
933
ourds, ne sachant trop quelle contenance prendre.
Et
la lumière ne cesse de grandir. Ils tombent déjà par rangs entiers, a
934
dir. Ils tombent déjà par rangs entiers, aveuglés
et
cloués sur place par l’évidence de l’amour éclatant. Quelques-uns cep
935
la Cour. Bien peu soutinrent les derniers soleils
et
l’agrandissement de la lumière jusqu’aux limites de sa perfection, où
936
haque homme poussé à la limite de son expression,
et
chaque homme forcé à l’extrémité de son choix, cria le « terme » de s
937
ternelle sommation, somme absolue de ses journées
et
de ses nuits, de ses pensées et de ses gestes, de son savoir, de ses
938
e de ses journées et de ses nuits, de ses pensées
et
de ses gestes, de son savoir, de ses refus, de ses aveuglements, de s
939
fut déclarée l’incomparable qualité de son péché
et
mesuré le degré d’être de son être tel qu’il l’avait librement fait e
940
it en le vivant. L’examen des raisons de survivre
et
leur introduction au titre de l’éternité occupèrent moins de temps qu
941
er. Demandez-moi plutôt pour quoi je veux mourir.
Et
c’était bien ce qu’on faisait. Ainsi tous connurent la mort, mais les
942
e de la banalité soudain flagrante de leurs vœux,
et
, finalement, murmuraient d’une voix faible : — Vous savez sans doute
943
empruntant la forme des joies qu’il rencontrait ;
et
son désir ainsi fut exaucé. Un autre voulait vivre abondamment au sei
944
u sein d’une perpétuelle pauvreté. Devint soleil.
Et
quel est celui qui s’approche avec son parapluie mal fermé sous le br
945
proche avec son parapluie mal fermé sous le bras,
et
des lunettes bourrues au-dessus du sourire de la plus fervente ironie
946
eut alors comme un silence qui s’imposa sur nous
et
jusqu’assez haut dans les cieux, en sorte que plus haut, régnant seul
947
s les cieux, en sorte que plus haut, régnant seul
et
purifié, l’on put entendre le choral d’une angélique hilarité. Et nou
948
put entendre le choral d’une angélique hilarité.
Et
nous sûmes que cet homme était très grand.) Troisième jugement, ou
949
, toute chair a son temps, tout esprit son essor.
Et
chacun de nous accède au destin qu’il s’est fait, à la parfaite posse
950
son être, au faîte inconcevable du désir comblé,
et
comblé pour l’éternité. « Mais l’Esprit et l’Épouse disent : Viens. E
951
omblé, et comblé pour l’éternité. « Mais l’Esprit
et
l’Épouse disent : Viens. Et que celui qui entend dise : Viens ! à cel
952
nité. « Mais l’Esprit et l’Épouse disent : Viens.
Et
que celui qui entend dise : Viens ! à celui qui porte avec soi la rét
953
n dans nos œuvres. Commence l’œuvre du Pardon. «
Et
que celui qui a soif vienne, que celui qui veut prenne de l’eau de la
954
.................................................
Et
c’est alors que toutes les voix des justes confondues clameront l’har
955
s justes confondues clameront l’harmonie violente
et
bienheureuse du mot sacrement de toute la création, son terme monumen
956
Tout-Puissant, — l’Amen du Temps qui s’agenouille
et
s’abîme éternellement. 14. Søren Kierkegaard, d’après une caricatu
957
représenter « pratiquement » un Pouvoir Mondial,
et
à vous en former une image convaincante. Voici comment j’explique, po
958
re des Affaires étrangères nous paraît comme puni
et
humilié ; et sans ministère de la Guerre, il nous paraît dépourvu de
959
es étrangères nous paraît comme puni et humilié ;
et
sans ministère de la Guerre, il nous paraît dépourvu de sérieux. Or,
960
erre ? À quoi cela ressemblerait-il ? Les nations
et
leurs gouvernements ne se posent qu’en s’opposant. C’est la menace ex
961
nte leur unité », qui « galvanise leur énergie »,
et
qui provoque ces magnifiques mouvements « d’union sacrée » où chacun
962
parie que vous venez de penser à la planète Mars,
et
à une guerre possible contre les Martiens ? Ne me dites pas non : vot
963
votre première idée a été de supposer une guerre.
Et
cela pour essayer de vous mieux représenter ce qu’un pouvoir planétai
964
rres avec d’autres nations. Je perdrais mon temps
et
le vôtre à fonder en logique, et, dans l’Histoire, cette relation que
965
rdrais mon temps et le vôtre à fonder en logique,
et
, dans l’Histoire, cette relation que le premier venu peut détecter da
966
le premier venu peut détecter dans sa conscience,
et
sans autre instrument qu’un peu de sincérité. Les nations produisent
967
les guerres, les guerres produisent les nations,
et
les unes sans les autres ne seraient pas imaginables. Si vous me dite
968
aix elle-même que vous ne voyez pas. Je dis vous,
et
je m’en excuse. Vous représentez ici l’humanité. Notre condition malh
969
d’une moralité douteuse. Quant aux lance-flammes
et
aux bombardiers lourds, et quant à ceux qui donneront le signal de le
970
uant aux lance-flammes et aux bombardiers lourds,
et
quant à ceux qui donneront le signal de les utiliser au service des n
971
au service des nations, gouvernants tout d’abord
et
généraux ensuite, ils représentent les « éléments d’ordre », à n’en p
972
tait le pire désordre imaginable à notre époque ;
et
que ceux qui la tenaient encore pour une nécessité, voire pour une ve
973
tu, étaient les véritables éléments de désordre ;
et
que l’utopie la plus dangereuse était la théorie de la souveraineté s
974
attre », ce qui est bien la preuve que j’ai tort,
et
d’ailleurs de n’importe quoi. Il ajoute que ma lettre, dans sa forme,
975
« Vivement la Bombe ! Suprême élément d’ordre ! »
Et
ne croyez pas que je plaisantais. Car la Bombe seule peut nous débarr
976
rrasser des armées, des souverainetés nationales,
et
de l’anarchie qu’elles entretiennent sur la planète. Je dis que la Bo
977
que les nations puissent perdre leur souveraineté
et
leurs armées, vous attriste visiblement. Vous avez l’impression que l
978
ement. Vous avez l’impression que la civilisation
et
la culture y perdraient quelque chose de précieux. Nous serions tous
979
magma informe de races, de langues, de religions
et
de coutumes, et toutes les différences qui font le goût de la vie s’é
980
e races, de langues, de religions et de coutumes,
et
toutes les différences qui font le goût de la vie s’évanouiraient sou
981
n engagés. Ce sont les guerres qui le produisent.
Et
ce sont les nations qui produisent les guerres… Mais je vois que ce m
982
té absolue, n’est pas limité par leurs frontières
et
ne saurait être défendu par leurs armées. En effet, supprimez ces tro
983
éléments qui composent l’idée moderne de nation,
et
les nations réelles subsisteront intactes, comme membres du corps de
984
corps de l’humanité, comme foyers de rayonnement,
et
comme communauté de gens apparentés, soit par leurs traditions, soit
985
seront de parler français, de créer leur culture,
et
d’habiter paisiblement leur terre, si la France renonce un beau jour,
986
les autres nations, à son armée, à ses douaniers
et
à son ministère des Affaires étrangères ? Et ne pensez-vous pas que s
987
iers et à son ministère des Affaires étrangères ?
Et
ne pensez-vous pas que si le gouvernement français n’a plus rien d’au
988
uit aujourd’hui les nations, dans le sens valable
et
fécond de ce mot, c’est qu’elles tendent à se confondre avec l’État,
989
’est qu’elles tendent à se confondre avec l’État,
et
c’est la volonté qu’ont les États-nations ainsi formés, de se rendre
990
anence. Ainsi l’ennemi des nations c’est l’État ;
et
leur sauvegarde serait le gouvernement mondial. Ceux qui pensent que
991
er les échanges internationaux, comme le bon sens
et
l’économie l’indiqueraient ? C’est parce que certains pays ont préfér
992
en plus nombreux, qui se referment sur eux-mêmes
et
sur leur budget militaire, qui se bardent de protections à la frontiè
993
l’étatisme parce qu’elle veut la justice sociale,
et
que cela n’a rien à voir avec la préparation à la guerre. Sans doute,
994
arce qu’elle contient ces trois syllabes sacrées,
et
l’on traite de fasciste celui qui demande à voir. (La prochaine fois
995
nt qu’on prend parti sans en savoir plus que moi,
et
à cause de trois syllabes. Et que l’on confond socialisation et natio
996
avoir plus que moi, et à cause de trois syllabes.
Et
que l’on confond socialisation et nationalisation pour masquer le fai
997
trois syllabes. Et que l’on confond socialisation
et
nationalisation pour masquer le fait qu’il s’agit d’une étatisation.
998
bout, vous obtiendrez du totalitarisme en bâtons
et
une grêle de coups. Je suis sérieux. Le socialisme, non pas en soi, m
999
arbitrer. Autrement ce n’est qu’un jeu de force,
et
le premier qui tire aura gagné, quel que soit le mordant de l’infante
1000
ement mondial », Mondes, Paris, 4 juin 1946, p. 1
et
3.
1001
e vous avez encore quelques Américains en France,
et
que l’Amérique encore me tient par tout ce que je viens d’y vivre en
1002
illent un étranger Le grand bourgeois de Paris
et
ses fils, lorsqu’ils rencontrent une tête nouvelle, ne sourient guère
1003
traire, comme sa bouche sur des dents éclatantes,
et
comme s’il n’avait attendu que votre arrivée, justement, pour donner
1004
cours à ses puissances instinctives de cordialité
et
d’hospitalité. Comment ils deviennent amis À la deuxième rencon
1005
it votre prénom, vous raconte sa vie sentimentale
et
l’état de ses affaires, enfin vous invite pour un week-end. Pendant v
1006
uvreté s’il est pauvre, sa vie privée en général,
et
ne vous rencontrera qu’au café. Mais en France des amitiés se nouent
1007
intraduisible en anglais — des amitiés exigeantes
et
suivies, attentives et agissantes. Personne n’a plus, et mieux écrit
1008
s — des amitiés exigeantes et suivies, attentives
et
agissantes. Personne n’a plus, et mieux écrit sur l’amitié que les mo
1009
ies, attentives et agissantes. Personne n’a plus,
et
mieux écrit sur l’amitié que les moralistes français, de Montaigne à
1010
ut le monde. La rançon d’une intimité trop rapide
et
superficielle, c’est la facilité avec laquelle cette intimité s’évapo
1011
elques semaines, puis plus du tout pendant un an.
Et
quand on se rencontre par hasard, on ne se demande pas ce qu’on est d
1012
rit, on boit, on ne s’étonne de rien, tout glisse
et
passe, il y a tant d’êtres sur la terre, tant de hasards, tant de man
1013
de hasards, tant de manières de vivre, de bonnes
et
de mauvaises fortunes, par chance… Le sourire large des Américains di
1014
tragédie : la solitude. Comment ils s’unissent
et
se divisentac En France, il y a les catholiques et les laïques, c
1015
divisentac En France, il y a les catholiques
et
les laïques, c’est simple ; mais il y a d’autre part trente-six parti
1016
mple ; mais il y a d’autre part trente-six partis
et
sous-partis, tendances et nuances politiques. En Amérique, il y a les
1017
part trente-six partis et sous-partis, tendances
et
nuances politiques. En Amérique, il y a les républicains et les démoc
1018
politiques. En Amérique, il y a les républicains
et
les démocrates, c’est simple ; mais il y a d’autre part trente-six «
1019
d’autre part trente-six « stocks » d’immigrants,
et
trente-six églises différentes, sous-églises, sectes et sous-sectes,
1020
nte-six églises différentes, sous-églises, sectes
et
sous-sectes, transportées jadis ou naguère par des réfugiés religieux
1021
rapide du monde n’existe qu’à un seul exemplaire.
Et
pendant qu’on le construisait, l’Amérique a produit quelques milliers
1022
produit quelques milliers d’appareils plus lourds
et
plus lents, qui n’ont d’autre avantage que de fonctionner sur toutes
1023
ence du génie français : il invente sans relâche,
et
cent fois plus que le génie américain ; mais aussitôt il généralise s
1024
son prototype ; c’est à ses yeux un stade atteint
et
dépassé, c’est comme si tous les avions de série étaient déjà faits ;
1025
étaient déjà faits ; il en est fatigué d’avance,
et
passe à l’invention suivante. Vue d’Amérique, l’Europe apparaît comme
1026
dardisée. C’est que l’Européen s’ennuie plus vite
et
supporte moins de s’ennuyer. Tandis que l’Américain se contente plus
1027
e qu’il les utilise vraiment, parce qu’il en vit,
et
qu’il ne spécule pas à leur sujet. Comment ils prennent la vie
1028
, son théâtre d’avant-guerre, ses romans à succès
et
ses produits d’exportation, humains ou commerciaux, le font passer po
1029
léger que l’air. Il a fallu le général de Gaulle
et
les récits de la Résistance pour que certains Américains pressentent
1030
in du type dynamique, alors qu’il est en réalité,
et
neuf fois sur dix, bien plus près du Méridional par son goût de l’exa
1031
rin serait bien épaté — son humeur communicative,
et
son insouciance lyrique. Ses chansons déchirantes de sentimentalisme
1032
style emprunté aux nègres. Mais sa vie amoureuse
et
sexuelle me paraît fort peu romantique. On compare les salaires en to
1033
ande à Le Corbusier de bâtir des églises en verre
et
en ciment : je me souviens du temple protestant de Drancy, et de ving
1034
: je me souviens du temple protestant de Drancy,
et
de vingt églises en style aérodynamique construites par les Allemands
1035
ement jusqu’à construire le chœur en style roman,
et
la nef en style ogival ; jusqu’à reproduire les tours non terminées d
1036
tours non terminées des cathédrales européennes.
Et
les résidences luxueuses de la campagne ou de la ville sont régulière
1037
s ont infiniment plus d’originalité, de diversité
et
d’élégance, que les maisons bourgeoises en France. Quant aux gratte-c
1038
livre. Ce qu’il ne tolère pas, c’est le mensonge,
et
là précisément où le Français le considère comme allant de soi, j’ent
1039
? » Vous pouvez répondre que vous êtes alcoolique
et
anarchiste, on vous laissera entrer. Mais si vous dites sous la foi d
1040
s sous la foi du serment, que vous ne l’êtes pas,
et
que votre vie plus tard prouve que vous l’êtes, l’amende ou la peine
1041
Voici le contraste le plus profond entre l’Ancien
et
le Nouveau Monde : leur manière de réagir à la souffrance. Prenons l’
1042
guerre. Le Français, élevé dans l’idée que dulce
et
decorum est pro patria mori, accepte de se faire tuer non point par f
1043
sans opinion.) Il pense qu’il faut ce qu’il faut,
et
qu’il faut cela, et que c’est ainsi depuis des siècles, et qu’on ne p
1044
nse qu’il faut ce qu’il faut, et qu’il faut cela,
et
que c’est ainsi depuis des siècles, et qu’on ne peut pas y échapper.
1045
faut cela, et que c’est ainsi depuis des siècles,
et
qu’on ne peut pas y échapper. L’Américain, bien au contraire, considè
1046
icain, bien au contraire, considère la souffrance
et
la mort comme des accidents insensés, que rien au monde ne peut rendr
1047
uns préfèrent les raisons de vivre à la vie même,
et
pour les autres, c’est l’inverse. Je compare et vous laisse juger. Ce
1048
, et pour les autres, c’est l’inverse. Je compare
et
vous laisse juger. Ce n’est pas simple. Et cela va peut-être choquer
1049
ompare et vous laisse juger. Ce n’est pas simple.
Et
cela va peut-être choquer ? Que voulez-vous, j’ai deux amours. Or l’a
1050
Sous-titre manifestement oublié par la rédaction,
et
rajouté par nous sur la base du texte paru dans Vivre en Amérique (
1051
arus dans Carrefour , Le Figaro , Le Littéraire
et
le Journal de Genève . Chez Gallimard : mes Lettres sur la bombe at
1052
que , qui paraissent simultanément dans huit pays
et
en sept langues différentes. La Part du diable , dont deux versions
1053
rsions différentes parurent à New York en 1940 af
et
en 1944. Il s’agit, bien entendu, de la version définitive. Les Per
1054
Kierkegaard, Kafka, Luther, Gide, Ramuz, Claudel
et
les romantiques allemands. Enfin, Doctrine fabuleuse . J’y travaille
1055
ctrine fabuleuse . J’y travaille depuis vingt ans
et
voudrais la voir sortir pour mon quarantième anniversaire. D’autre pa
1056
ons d’ouvrages qui, à cause de leur faible tirage
et
des circonstances où ils parurent, sont restés pratiquement ignorés.
1057
norés. Chez Albin Michel, Penser avec les mains
et
le Journal d’un intellectuel en chômage . Aux Éditions « Je sers » :
1058
remière version de cet ouvrage est parue en 1942,
et
non en 1940.
1059
t si près, là-bas. J’étais baigné. J’étais fondé.
Et
je marchais parmi les signes. Sédiments séculaires, socles de nos pat
1060
s, mais qui renvoient l’écho familier de nos pas.
Et
ces rues qui tournaient doucement vers une place plantée d’arbres et
1061
rnaient doucement vers une place plantée d’arbres
et
déserte, aux rendez-vous manqués où je me retrouvais… « Je t’aime. J’
1062
. Le silence attendait, l’absence était profonde,
et
chaque être présent questionnait, répondait. La force était au secret
1063
— il était vieux déjà du temps de notre enfance,
et
notre possession la plus tenace, il nous réduisait au silence. La for
1064
blessé, ta vie s’en va !) La force était mémoire
et
allusion. Elle était ce vieil arbre tenace. Elle était la douceur et
1065
tait ce vieil arbre tenace. Elle était la douceur
et
la sagesse amère des adieux, ou la gaieté d’un mot dit en passant. El
1066
, parce qu’elle a su garder en vie tant de passé,
et
garder tant de morts dans la présence, elle ne cessera pas d’engendre
1067
que l’on entendait sur le paquebot entre Lisbonne
et
New York (21 septembre 1946)ag Lisbonne, 8 septembre 1940 Blanche
1068
bre 1946)ag Lisbonne, 8 septembre 1940 Blanche
et
bleue dans l’immense lumière de la liberté atlantique, avec tous ses
1069
berté atlantique, avec tous ses drapeaux claquant
et
ses rues débouchant sur le ciel, la ville aux sent collines renie la
1070
nt de tomber sur la tête : il se relève, se tâte,
et
ne sait pas encore où il a mal. Va-t-il vivre ? A-t-il rêvé ? Serait-
1071
Serait-il déjà mort ? J’ai vu l’Espagne de cendre
et
d’esprit, incapable de retrouver son équilibre entre le démoniaque et
1072
le de retrouver son équilibre entre le démoniaque
et
le surhumain. Et j’ai vu, aux frontières de la Suisse, l’invasion des
1073
on équilibre entre le démoniaque et le surhumain.
Et
j’ai vu, aux frontières de la Suisse, l’invasion des herbes sauvages
1074
es sauvages venant des terres abandonnées du Nord
et
que nos paysans s’efforcent d’arrêter avant qu’elles n’étouffent leur
1075
aniques dévastatrices du ve siècle de notre ère.
Et
je songe au bastion que mon pays élève, nuit et jour, autour du massi
1076
. Et je songe au bastion que mon pays élève, nuit
et
jour, autour du massif du Gothard, cœur mystérieux du continent, dern
1077
rniers barrages traversés, la passerelle relevée,
et
nos papiers enfin déposés chez le purser, nous n’avons plus devant no
1078
la frontière — à deux-cents mètres — du Portugal
et
de la liberté. Car tel est le sadisme policier. Nous venons de passer
1079
rs de voyage, sept contrôles différents de douane
et
de police. Secondés par la chance, nous n’y avons passé, si je compte
1080
e total normal est d’au moins 30, m’affirme-t-on,
et
les « accidents » sont fréquents. Paradoxe du siècle où tout est fait
1081
s de prouver son identité. Or plus il en proteste
et
moins il s’en assure. Plus il la chiffre et moins il la ressent. Et p
1082
teste et moins il s’en assure. Plus il la chiffre
et
moins il la ressent. Et plus il la démontre à coups de documents, moi
1083
ssure. Plus il la chiffre et moins il la ressent.
Et
plus il la démontre à coups de documents, moins il se reconnaît dans
1084
ilieu, de tout ce qui allait de soi autour de lui
et
l’assurait quotidiennement, inconsciemment, qu’il était bien réel et
1085
diennement, inconsciemment, qu’il était bien réel
et
bien lui-même… En mer, nuit du 12 au 13 septembre 1940 Les derniers b
1086
es noms en « Ex » : Exeter, Excalibur, Excambion.
Et
ils ne transportent, en effet, que des ex-quelque chose, ex-ministres
1087
l’ex ? Ni fugitif, ni juif, ni riche, ni détrôné,
et
ne pouvant me réclamer que d’une « mission de conférences » (prétexte
1088
pont cette nuit même. L’heure était fort tardive
et
propice aux aveux. V., ex-cagoulard, ayant raconté, non sans verve co
1089
ant raconté, non sans verve comment ses camarades
et
lui-même, avant la guerre, organisaient des dépôts de mitraillettes d
1090
t de la gauche, lui répondit avec un demi-sourire
et
sans retirer son mégot, que de l’autre côté on savait tout cela, et q
1091
n mégot, que de l’autre côté on savait tout cela,
et
qu’au surplus, on en faisait autant, avec des armes fournies par cert
1092
ufiler, R. s’extrait du groupe, me cède sa place,
et
je l’entends dire à sa femme qui attendait un peu en arrière : « Rien
1093
nous retournant, que nous avons entrevu l’ampleur
et
la rapidité des événements. Il a dit : « Rien de nouveau, rien d’impo
1094
5 avions allemands ont été abattus sur Londres. »
Et
c’est peut-être la nouvelle la plus importante de la guerre. Car tout
1095
ortante de la guerre. Car tout tient aux Anglais,
et
si ce bulletin dit vrai, les Anglais tiennent. L’autre jour à Lisbonn
1096
: l’une qui ne sait pas vaincre, mais qui gagne,
et
l’autre qui ne sait pas être vaincue, mais qui perd ? Les Allemands,
1097
ctorieux, se plaignent encore comme des victimes.
Et
les Anglais, même battus, se comportent en propriétaires de droit div
1098
nt de Paris, s’appuie au bastingage, près de moi,
et
me dit en crachant dans l’eau entre chaque phrase : « Il y a des gens
1099
pas à la nature américaine, à la voir la première
et
de si près, avant les gratte-ciel, la statue… Je n’ai jamais eu la se
1100
t accueillant. Tous ces arbres si riches, touffus
et
un peu fous ! Et ces maisons coloniales espacées, si intimes semble-t
1101
us ces arbres si riches, touffus et un peu fous !
Et
ces maisons coloniales espacées, si intimes semble-t-il derrière leur
1102
imes semble-t-il derrière leurs grands portiques.
Et
comme on aime une terre qui s’approche, avec l’immense sécurité du co
1103
mbre de luxueuse tapisserie… La rivière s’élargit
et
se peuple de mâts. Au sommet d’une falaise qui fuit obliquement éclat
1104
fuit obliquement éclate une longue façade claire
et
neuve : la première rue américaine ! Nous approchons. Tournant la têt
1105
Figaro littéraire, Paris, 21 septembre 1946, p. 1
et
4.