1
s et d’essayistes des plus jeunes générations, en
Europe
, en Angleterre et dans les deux Amériques. Notons que si cette influe
2
nternationales » placées sous l’égide de L’Esprit
européen
. On y a entendu des conférences et des discussions, des concerts, des
3
comme on dit. C’est comme cela qu’existe l’esprit
européen
: dans la libre discussion, nous confie Denis de Rougemont. La libert
4
ougemont. La liberté d’opposition est typiquement
européenne
. Même sans en tirer de conclusion, sans trouver une solution. L’Europ
5
tirer de conclusion, sans trouver une solution. L’
Européen
veut prendre conscience du drame qui se joue en lui, qui se joue en c
6
L’Américain, lui, c’est ce qui le distingue de l’
Européen
, court à la conclusion. Il veut une solution pratique, autant que pos
7
rès une conversation, de changer d’opinion. Pas l’
Européen
. L’Européen se retranche dans ses convictions et pense que l’adversai
8
ersation, de changer d’opinion. Pas l’Européen. L’
Européen
se retranche dans ses convictions et pense que l’adversaire est mécha
9
t, M. Denis de Rougemont nous prouve que l’esprit
européen
s’inspire d’une grande liberté et d’une parfaite franchise de paroles
10
ise de paroles. Sinon, ce ne serait plus l’esprit
européen
, où la France donne le ton, la France qui est un pays de dialogue, co
11
at, pas au nom d’un peuple, mais d’un réel esprit
européen
. Nous ne sommes pas une nation, nous sommes une confédération, donc b
12
t la voix ne peut plus être séparée des dialogues
européens
. Il souhaite encore que l’on organise à Genève un Café de Flore de l’
13
on organise à Genève un Café de Flore de l’Esprit
européen
, ou chacun se rencontrera librement, en dehors de toute officialité.
14
itions locales les plus touchantes et des express
européens
, petits trajets portés sur les axes du monde. Quel ennui, ces seconde
16
947)g On m’a prié de vous parler ce soir d’une
Europe
à laquelle je reviens après six ans d’absence, et certains événements
17
avez lu toute son histoire. Ainsi j’ai retrouvé l’
Europe
. Sur son visage et dans son expression certains traits accusés et ten
18
e et le plus naturel. Je vais donc regarder notre
Europe
et j’éviterai de faire du sentiment puisque aussi bien tout se passe
19
maintenant, qu’allons-nous faire ensemble ? » ⁂ L’
Europe
a mauvaise mine, il faut l’avouer. Avant même que l’on puisse détaill
20
c imposé son point de vue. Ainsi d’Hitler et de l’
Europe
démocratique. Ce ne sont pas seulement les ruines et les désordres ma
21
t devant nous a réveillé ces forces parmi nous. L’
Europe
a été façonnée par le judéo-christianisme, par la notion grecque d’in
22
de là, les progrès de la déchristianisation de l’
Europe
. Commencée parmi les élites, au xviiie siècle, avec l’attaque des ra
23
ion d’une chrétienté identifiable au concept de l’
Europe
, Die Christenheit oder Europa, selon le titre du fameux essai de Nova
24
ble au concept de l’Europe, Die Christenheit oder
Europa
, selon le titre du fameux essai de Novalis. Les masses comme les élit
25
veau conformisme. Dans telles grandes capitales d’
Europe
, on voit des écrivains et des savants donner des gages d’apparente lo
26
cès de fixation, se révèlent à l’observateur de l’
Europe
d’après-guerre. J’en mentionnerai quelques-uns rapidement. La Résista
27
ntionnerai quelques-uns rapidement. La Résistance
européenne
, admirable sursaut d’une liberté blessée qui se défendait, mais aussi
28
onalisme fait rage, cette maladie romantique de l’
Europe
. Lui seul, sous le couvert de je ne sais quels prétextes parés du nom
29
etites occupations les aliénés. Si l’on se bat en
Europe
demain, ce sera au nom de la démocratie contre le peuple, au nom du p
30
ticisme lucide… ⁂ Il se peut que le portrait de l’
Europe
que je viens d’esquisser devant vous pèche par excès de pessimisme, e
31
gnore pas que l’autodénigrement, chez nous autres
Européens
, se confond trop souvent avec le sens critique. Je n’ignore pas que l
32
ugements subjectifs : c’est que la situation de l’
Europe
dans le monde s’est modifiée, qu’elle s’est même totalement renversée
33
s l’automne de 1939. Avant cette guerre, le nom d’
Europe
évoquait un foyer intense dont le rayonnement s’élargissait sur tous
34
t s’élargissait sur tous les autres continents. L’
Europe
nous semblait donc plus grande qu’elle n’était. D’où l’effet de choc
35
l’autre guerre, la phrase fameuse de Valéry sur l’
Europe
« petit cap de l’Asie ». Aujourd’hui l’Europe vue d’Amérique, et j’im
36
r l’Europe « petit cap de l’Asie ». Aujourd’hui l’
Europe
vue d’Amérique, et j’imagine aussi vue de Russie, paraît plus petite
37
efermée sur elle-même. Il y a plus. Nous voyons l’
Europe
comme vidée, au profit de ces deux empires, de certaines ambitions, d
38
s allusion tout à l’heure — semble avoir évacué l’
Europe
pour émigrer vers l’Amérique et la Russie. C’est une notion qui s’éti
39
ansion irrésistible, impérialiste ou généreuse, l’
Europe
a diffusé sur la planète, sans distinction, ses découvertes et ses ut
40
que, qui ont fait fortune en Amérique, venaient d’
Europe
; comme en venaient le matérialisme dialectique, la technique révolut
41
u’à la morale, autrefois religieuse. Tout vient d’
Europe
, tout cela fut nôtre à l’origine. Mais alors, comment et pourquoi ces
42
ne. Mais alors, comment et pourquoi ces créations
européennes
n’ont-elles pas connu en Europe leur plein succès ? Et comment et pou
43
es créations européennes n’ont-elles pas connu en
Europe
leur plein succès ? Et comment et pourquoi, hors d’Europe, ont-elles
44
eur plein succès ? Et comment et pourquoi, hors d’
Europe
, ont-elles subi cette croissance gigantesque ? Pourquoi n’ont-elles p
45
ni tout leur bien, ni tout leur mal ? C’est qu’en
Europe
, elles se trouvaient toujours en état de composition, tandis qu’aille
46
adictions, définit l’équilibre humain qu’on nomme
Europe
. Il conditionne aussi notre culture. Et nous allons voir qu’il tradui
47
uit, et parfois aussi qu’il trahit, la conception
européenne
de l’homme. Toute la question est de savoir si nous saurons maintenir
48
Ces chances paraissent très faibles en vérité. L’
Europe
a dominé le monde pendant des siècles par sa culture d’abord, dès le
49
’efficacité. Or, il s’en faut de beaucoup que les
Européens
soient unanimes à tenir activement le parti de cette Europe, de ses c
50
ent unanimes à tenir activement le parti de cette
Europe
, de ses complexités vitales, de sa culture. Une analyse sociologique
51
tenir vitalement aux conceptions et aux coutumes
européennes
, que deux classes par ailleurs tout opposées : les intellectuels non
52
osition. Telle est, en gros, notre situation. Une
Europe
démoralisée par sa victoire douteuse sur Hitler, rétrécie et coincée
53
itime de s’obstiner, de parler d’une défense de l’
Europe
, de nous cramponner à ses restes, et même d’appeler à son secours des
54
n vérité ? Cette même question, je sais plusieurs
Européens
qui se la posent en termes tout à fait urgents et familiers, quand il
55
s et familiers, quand ils se demandent si c’est l’
Europe
ou l’Amérique qu’il leur faut souhaiter pour leur enfant. Car nous pe
56
haiter pour leur enfant. Car nous pensons à notre
Europe
comme à un « Vaterland », pays des pères, mais l’Amérique, ou la Russ
57
je leurs espoirs à mes souvenirs ? En défendant l’
Europe
, il s’agit donc de savoir si nous défendons plus et mieux que de bell
58
mêler à la vision de leur avenir la vision d’une
Europe
réduite à l’état de musée plus ou moins bien tenu, ou au contraire la
59
moins bien tenu, ou au contraire la vision d’une
Europe
qui aurait cédé aux tentations d’un bonheur étranger à son génie, une
60
tentations d’un bonheur étranger à son génie, une
Europe
américanisée — ce serait par goût — soviétisée — ce serait par contra
61
nisée. Un musée ou une colonie… autant dire : une
Europe
absente… Imaginons le monde heureux, prospère, et puissamment organis
62
mot, vague et poignant : c’est le mot « âme ». L’
Europe
absente, démissionnaire, colonisée, c’est un certain sens de la vie,
63
t donc pas au nom de je ne sais quel nationalisme
européen
qu’il nous faut défendre l’Europe, mais au seul nom de l’humanité la
64
nationalisme européen qu’il nous faut défendre l’
Europe
, mais au seul nom de l’humanité la plus consciente et la plus créatri
65
t l’autre jour, ici même, l’existence d’un esprit
européen
, et c’était un appel, nous l’avions tous compris. C’est un point de v
66
l’on observe. Mais si maintenant nous regardons l’
Europe
dans le monde, ce changement de point de vue va nous faire voir une t
67
s solide réalité spirituelle. S’il est vrai que l’
Europe
, jusqu’à ce siècle, ne s’est guère sentie et conçue comme un tout, co
68
de l’homme. Esquissons cette comparaison entre l’
Europe
et les nouveaux empires qui se désignent typiquement par des lettres
69
ine de la religion, de la culture et de la morale
européennes
, il y a l’idée de la contradiction, du déchirement fécond, du conflit
70
histoire, et sans drame. Il s’ensuit que le héros
européen
sera l’homme qui atteint, dramatiquement, le plus haut point de consc
71
aisons de vivre, même mortelles. Voilà pourquoi l’
Européen
typique sera tantôt un révolutionnaire ou un apôtre, un amant passion
72
mal sont liés, inextricablement et vitalement. L’
Européen
connaît donc la valeur essentielle des antagonismes, de l’opposition
73
ière un peu trop schématique et abstraite entre l’
Européen
, d’une part, l’Américain et le Soviétique, de l’autre, je n’ai pas à
74
arge vérité ; que telle est bien la vocation de l’
Europe
, et que l’Europe existe au plus haut point comme entité spirituelle,
75
telle est bien la vocation de l’Europe, et que l’
Europe
existe au plus haut point comme entité spirituelle, dans les diversit
76
otre rencontre. Ainsi donc, la confrontation de l’
Europe
et de ces deux filles parfois ingrates du plus grand Occident nous su
77
t nous suggère une formule de l’homme typiquement
européen
: c’est l’homme de la contradiction, l’homme dialectique par excellen
78
i est pour un seul. Crucifié, dis-je, car l’homme
européen
en tant que tel n’accepte pas d’être réduit à l’un ou à l’autre de ce
79
de ces tensions, l’effort principal de l’esprit.
Européenne
sera donc, typiquement, la volonté de rapporter à l’homme, de mesurer
80
riserait trop facilement d’une certaine tradition
européenne
, non la meilleure. Je préfère emprunter, pour un moment, à nos voisin
81
ntenir et pour illustrer les valeurs propres de l’
Europe
. Ce sera peut-être un bon moyen de les définir dans l’actuel. Sauver
82
bon moyen de les définir dans l’actuel. Sauver l’
Europe
— c’est simple à dire vraiment — sauver l’Europe, c’est pratiquement,
83
’Europe — c’est simple à dire vraiment — sauver l’
Europe
, c’est pratiquement, et aujourd’hui, empêcher à tout prix la guerre.
84
aire les faire d’une manière non sanglante, car l’
Europe
ne peut pas s’offrir des destructions supplémentaires.) Et je sais tr
85
vient de voir qu’elle est la condition de l’homme
européen
, la source vive de sa grandeur et de sa spiritualité. Voilà le drame.
86
re la liberté et l’engagement, dont s’honorent en
Europe
les pays dominés par l’influence protestante. Si nous nous demandons,
87
ous demandons, en effet, quels sont les pays de l’
Europe
qui « marchent le mieux », nous constatons que ce sont sans contredit
88
nation unie, puis entre les nations diverses et l’
Europe
; puis entre l’Europe et le monde. À tous les degrés, nous retrouvons
89
e les nations diverses et l’Europe ; puis entre l’
Europe
et le monde. À tous les degrés, nous retrouvons les mêmes tentations
90
ant. La volonté qui possède Bonaparte d’unifier l’
Europe
au mépris des diversités nationales provoquera, sous Napoléon, la nai
91
, qu’il faut voir dans le nationalisme la maladie
européenne
, l’anti-Europe par excellence. Je compare le nationalisme à une espèc
92
de la sorte, qui se conduit alors vis-à-vis de l’
Europe
comme un groupe absolutisé, comme un vulgaire individu dont la préten
93
vertu de l’exemple vécu. Telle est la santé de l’
Europe
, et telles sont ses deux maladies, contradictoires en apparence, mais
94
re de l’homme. Et c’est pourquoi la vocation de l’
Europe
et des élites qui portent la conscience de cette Europe, m’apparaît,
95
et des élites qui portent la conscience de cette
Europe
, m’apparaît, dans un double office de vigilance et d’invention. Le tr
96
ffice de vigilance et d’invention. Le trésor de l’
Europe
, c’est son idée de l’homme. Mais c’est un trésor explosif, d’où la né
97
rder la liberté dans l’ordre. Après tout, c’est l’
Europe
qui a sécrété ce contagieux nationalisme, c’est à elle d’inventer son
98
t Messieurs, si les descriptions pessimistes de l’
Europe
auxquelles je me suis livré en débutant sont exactes, il peut paraîtr
99
étrange de parler après cela d’une vocation de l’
Europe
. Pour exercer une vocation, il faut d’abord être vivant, il faut surv
100
faut d’abord être vivant, il faut survivre. Or l’
Europe
démoralisée, coincée entre deux grands empires, minée par son propre
101
ses vertus bien plus encore que par ses vices, l’
Europe
a-t-elle des chances de vivre encore assez pour qu’il ne soit pas uto
102
tôt lorsqu’elle est accomplie. Or, notre vocation
européenne
me paraît encore loin d’être accomplie… Mais cette raison irrationnel
103
e raison toute physique, géographique d’abord : l’
Europe
, cette Grèce agrandie, est un continent cloisonné, et par nature dive
104
, qui affecte une certaine part de nos esprits, l’
Europe
garde encore l’apanage du scepticisme et de l’esprit critique. Les Ég
105
l’humaniser, et par là même de la rapprocher de l’
Europe
. Je pense surtout à l’avenir de l’URSS. Que l’on soit sympathique ou
106
res, l’homme en soi — l’éternel résistant ! Or, l’
Europe
, et c’est là sa grandeur, a justement vécu de toutes ces choses gênan
107
eux du moins leurs enfants. Un dernier trait : l’
Europe
, surtout si on la compare aux deux empires séparés d’elle, et que je
108
que je nomme les deux empires sans précédent — l’
Europe
est la patrie de la mémoire. Elle est même, pratiquement, la mémoire
109
intimité des relations humaines. Voilà pourquoi l’
Europe
a toutes les chances de rester la patrie de l’invention — alors que l
110
e qui nous permet donc d’aller plus loin. Ainsi l’
Europe
construit des églises modernes, en verre et en ciment armé, tandis qu
111
r des églises en gothique neuf. C’est parce que l’
Europe
est la mémoire du monde qu’elle ne cessera pas d’inventer. Elle reste
112
ir… oui, s’il est un avenir, non seulement pour l’
Europe
, mais pour le monde. Dans une certaine mesure, qui est celle du réali
113
e atomique éclate, il n’y a plus de problème de l’
Europe
, et d’une façon plus générale, il n’y a peut-être plus de problème de
114
ussi, l’avenir du monde dépend de l’attitude de l’
Europe
, et de son pouvoir d’invention. Ici, point de malentendu ! Ne demando
115
Ne demandons pas l’instauration d’une fédération
européenne
pour que se crée un troisième bloc, un bloc-tampon, ou un bloc opposé
116
der, et obtenir, nous tous, c’est que les nations
européennes
s’ouvrent d’abord les unes aux autres, suppriment sur tous les plans
117
une attitude nouvelle, une confiance — ouvrant l’
Europe
au monde, du même coup. Ce qu’il nous faut demander et obtenir — obte
118
nous-mêmes tout d’abord — c’est que le génie de l’
Europe
découvre, et qu’il propage, les antitoxines des virus dont il a infes
119
a infesté le monde entier. Il n’y a de fédération
européenne
imaginable qu’en vue d’une fédération mondiale. Il n’y a de paix et d
120
ondial. Et le monde, pour ce faire, a besoin de l’
Europe
, j’entends de son esprit critique autant que de son sens inventif. La
121
de son sens inventif. La pensée du monde, c’est l’
Europe
. Et s’il s’agit vraiment de penser, que penser d’autre pour la paix,
122
ui doit ici nous inspirer, je dirai, songeant à l’
Europe
et à sa vocation mondiale, et je vous invite à le dire avec moi : Je
123
s ! g. Rougemont Denis de, « Les maladies de l’
Europe
», L’Esprit européen, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1947, p.
124
Denis de, « Les maladies de l’Europe », L’Esprit
européen
, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1947, p. 143-163.
125
ns oser se l’avouer, les chrétiens devenaient, en
Europe
comme ailleurs, une minorité doucement persécutée. Cette persécution
126
de six ans en Amérique. Les mœurs sexuelles de l’
Europe
peuvent être définies comme un jeu très complexe opposant un ensemble
127
llywood, en dépit de toutes les censures ? Car en
Europe
, le vice et la vertu restent fort étroitement liés, l’un vivant de l’
128
peu plus). On ne saurait dire d’elle, comme de l’
Européenne
, par, métaphore idéaliste, qu’elle règne au sein de son foyer ; car e
129
issant à l’extrême, dont la majorité des femmes d’
Europe
souffrent encore, pour la plus grande satisfaction des hommes. L’Amér
130
sais quoi de repoussant (et pas seulement pour un
Européen
, je m’en assure) dans un rassemblement de femmes d’âge moyen, non dép
131
en ordre de deux vies individuelles. C’est qu’en
Europe
, l’on se préoccupe avant tout du passé, d’un capital de souvenirs et
132
ifs allégués, il y a comme partout l’adultère. En
Europe
, où l’on croit au mariage-sacrement, à la continuité de la famille, à
133
grande licence des mœurs chez les jeunes gens, l’
Européen
s’étonne de ne point trouver trace de ce qu’il nommait libertinage. L
134
Disons, pour fixer les idées, que les deux romans
européens
les moins pensables en Amérique seraient sans doute Adolphe et les Li
135
ion n’existe que chez lesdits critiques. Certains
Européens
penseraient plutôt de la même jeunesse qu’elle manque de vraie sensua
136
Russie soviétique et d’une partie de la jeunesse
européenne
. Essayons de le définir en quelques traits. Perte du sens tragique de
137
aissent encore moins intégrés que leurs confrères
européens
à la vie de leur propre nation. Cela tient sans doute à mille raisons
138
e américaine, disciples réticents de nos écoles d’
Europe
, cherchant une méthode de pensée plutôt que des fondements spirituels
139
. Une jeune romancière me disait : « Vous autres,
Européens
, vous écrivez comme si vous étiez déjà morts. Oh ! ce n’est pas un re
140
les plus heureux du monde. ⁂ Cambridge retient l’
Européen
, parce qu’à la différence des autres bourgs de ce pays, l’on y trouve
141
La guerre va mal, il faut le dire, et persuader l’
Europe
qu’elle ira bien demain. La campagne sous-marine bat son plein, Tobro
142
gnifie pratiquement un peu plus de bateaux vers l’
Europe
. Leur dire que la production de guerre américaine peut leur sembler u
143
ler, de me retrouver, pour rentrer tout entier en
Europe
après ces deux années de violente dérive. … mais sachez-le : Nous n’
144
r en France, — dans quelle France, et dans quelle
Europe
? Nous étions soumis à l’érosion de l’exil, moins brutale, certes, ma
145
échéance, sur le sort de chacune de nos nations d’
Europe
et sur nos vies individuelles. Il n’est pas un de ces faits qu’on pui
146
réliminaire de la lutte pour l’autonomie. Voici l’
Europe
enfin, cette Europe qui naguère était le plus orgueilleux des contine
147
tte pour l’autonomie. Voici l’Europe enfin, cette
Europe
qui naguère était le plus orgueilleux des continents, et qui fait une
148
ité et les plaisirs plus lucides de l’angoisse. L’
Europe
patrie de l’invention, du « système D » et de la réplique rapide, don
149
oblige à rationner le charbon et l’électricité. L’
Europe
qui, à peine délivrée des tyrans et des dictatures, cesse de croire à
150
es dictatures, cesse de croire à la démocratie. L’
Europe
qui se donne pour battue, quand à elle seule elle totalise plus d’hab
151
e politique en Asie, manque de foi et d’espoir en
Europe
. Je dis bien que notre paix repose sur ces manques, qu’elle y trouve
152
tentée d’abuser de ses avantages actuels. Et si l’
Europe
était moins abîmée, qui sait quelle arrogance elle ne retrouverait pa
153
étanches de leur autarcie politique ; parce que l’
Europe
sans elle s’enfoncerait encore plus dans sa névrose de scepticisme et
154
raliste qu’a entendue le congrès des fédéralistes
européens
de la bouche de M. Denis de Rougemont a eu un retentissement considér
155
un ouvrage sur la Suisse, intitulé Le Cœur de l’
Europe
et dont il n’existe qu’une édition anglaise. Ce qu’on sait moins che
156
gument principal le cas de notre propre armée. En
Europe
même, les écrits de M. de Rougemont, ont marqué de leur influence une
157
uisse, malgré son petit cadre, est valable pour l’
Europe
. Voyez-vous, on ne se rend pas compte, en Suisse, qu’il existe en nou
158
, qu’il existe en nous, aujourd’hui, un sentiment
européen
, ce qui n’empêche pas, il est vrai, bon nombre d’entre nous de douter
159
e nous de douter de la naissance d’une fédération
européenne
. Mais ce qui me paraît important et encourageant tout à la fois, c’es
160
alut de notre fédéralisme ne peut venir que d’une
Europe
fédérée. o. Rougemont Denis de, « [Entretien] Conversation à bâton
161
philosophe allemand Karl Jaspers déclarait que l’
Europe
n’a plus de choix qu’entre la balkanisation et l’helvétisation. Je su
162
ntendait par balkanisation la désintégration de l’
Europe
en nationalismes rivaux, et par helvétisation au contraire, l’intégra
163
édéraliste ne projette pas devant elle une utopie
européenne
qu’il s’agirait simplement de rejoindre, ou des plans statiques qu’il
164
sonne. Il est infiniment probable que sur le plan
européen
, nous allons voir se dessiner deux tendances toutes semblables à cell
165
: ou se nier, ou triompher, mais sur le plan de l’
Europe
entière. Le grand danger de l’heure présente, pour la Suisse, je le v
166
nscience de ses fins. De même pour le fédéralisme
européen
. Un instinct commun se formait peu à peu, depuis la guerre de 1914-19
167
er. Brusquement, la question se pose de fédérer l’
Europe
dès la paix rétablie. Mais parce qu’elle se pose brusquement, cette q
168
licables, immédiatement, dans l’état présent de l’
Europe
. Premier principe. — La fédération ne peut naître que du renoncement
169
er, dans leurs tentatives pour faire l’unité de l’
Europe
, sont des avertissements utiles, ils nous confirment dans l’idée qu’o
170
éfendues et maintenues. De même, la richesse de l’
Europe
et l’essence même de sa culture seraient perdues si l’on tentait d’un
171
e tout mélanger, et d’obtenir une sorte de nation
européenne
, où Latins et Germains, Slaves et Anglo-Saxons, Scandinaves et Grecs,
172
n de ces groupes, et qui les brimerait tous. Si l’
Europe
doit se fédérer, c’est pour que chacun de ses membres bénéficie de l’
173
le menacent. Chacune des nations qui composent l’
Europe
y représente une fonction propre, irremplaçable, comme celle d’un org
174
armonie avec tous les autres. Si les nations de l’
Europe
arrivaient à se concevoir dans ce rôle d’organes divers d’un même cor
175
le moyen des gouvernements. Je vois la fédération
européenne
se composer lentement, un peu partout, et de toutes sortes de manière
176
ui créent peu à peu des réseaux variés d’échanges
européens
. Rien de tout cela n’est inutile. Et tout cela, qui paraît si dispers
177
ope. Au-dessous et au-dessus des gouvernements, l’
Europe
est beaucoup plus près de s’organiser qu’il ne le semble. Elle est dé
178
u l’ONU, que cela empêche de vivre. La fédération
européenne
ne sera pas l’œuvre des gouvernants chargés de défendre les intérêts
179
ces personnes qui formeront le gouvernement de l’
Europe
. Il n’y a pas d’autre voie possible et praticable. Les USA ne sont pa
180
latif issus des peuples. Le jour où les peuples d’
Europe
auront compris qu’ils sont en réalité beaucoup plus solidaires et plu
181
dans nos efforts et nos débats pour promouvoir l’
Europe
unie, si nous ne restons pas en garde vigilante contre les réflexes t
182
artie sera déjà plus qu’à moitié gagnée. Car si l’
Europe
doit durer, c’est aux fédéralistes qu’elle le devra, et à eux seuls.
183
gitation de l’opinion et des peuples dans toute l’
Europe
qui les poussera. De cette agitation, que je voudrais baptiser la Nou
184
, que je voudrais baptiser la Nouvelle Résistance
européenne
, nous nous sommes déclarés responsables au récent congrès de Montreux
185
uisée dans son pays » ; 2° Truman veut asservir l’
Europe
au dollar ; 3° Donc Truman impose à l’Europe la lecture de Henry Mill
186
ir l’Europe au dollar ; 3° Donc Truman impose à l’
Europe
la lecture de Henry Miller, et ce dernier qui est « le plus rusé de t
187
is alors, et pour les mêmes raisons, le succès en
Europe
occidentale de Tolstoï et Dostoïevsky devrait être mis au crédit des
188
McDonald, et d’une trentaine de romanciers dont l’
Europe
ne connaît même pas les noms, tirent à 800 000 avant la mise en vente
189
r parler comme les communistes. Les intellectuels
européens
qui ont connu de près la vie américaine ont coutume d’insister sur de
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traîne une quantité d’emprisonnements. Mais nous,
Européens
, quels efforts faisons-nous pour qu’une masse élargie assimile les id
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ce, une pertinence, une cruauté qu’aucun critique
européen
n’égale. De Mencken à Philip Wylic, de Thorsten Veblen à Reinhold Nie
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icains eux-mêmes, avec une liberté d’esprit que l’
Europe
ne peut qu’envier, et qui épouvanterait les staliniens. La balance n’
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américains, est celui de notre public. Mais sur l’
Europe
, en général, l’influence américaine s’est exercée en deux occasions p
195
ntreux9 : « Vous y croyez à cette fédération de l’
Europe
? » Je réponds qu’il s’agit plutôt de la vouloir. « Mais pourquoi, me
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ouloir ? » Je réponds qu’il n’y a qu’à regarder l’
Europe
, qu’à faire son bilan de misères, qu’à voir la place qu’elle tient en
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en dégage. Quelques faits La fédération de l’
Europe
est inscrite dans les faits les plus neufs de ce siècle, les uns tech
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min de l’Amérique à la Russie ne passe plus par l’
Europe
, mais par le pôle. La radio, l’aviation, l’économie redistribuent nos
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n même temps qu’elles les rendent plus étroits. L’
Europe
est plus petite que nous ne pensions, le monde plus grand. Nos descen
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en que Valéry ait pu nous étonner en notant que l’
Europe
n’est qu’un cap de l’Asie. À ces faits matériels vient s’ajouter le g
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et les démocraties : tout se passait entre nous,
Européens
, nous sentions donc surtout nos divisions. Aujourd’hui les deux Grand
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de la culture elle y perdrait autant que nous. L’
Europe
a dépassé le stade de l’individualisme économique. Son rôle est d’inv
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mœurs, l’idée de l’homme commune aux peuples de l’
Europe
: ni l’individu sans devoirs ni le soldat politique sans droits, mais
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r tous et le tous pour un. Voilà la vocation de l’
Europe
. Or il est clair qu’aucune de nos nations n’est en mesure de la réali
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sition foncière. Qui oserait dire : « Je veux une
Europe
désunie ! Je veux que nos rivalités se perpétuent ! Je veux que nos p
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qu’ils y ajoutent un troisième refus, celui de l’
Europe
, jusqu’à ce qu’ils soient dûment colonisés ! » Personne n’ose dire ce
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férente : « Vous y croyez à cette fédération de l’
Europe
?… » Derrière ce scepticisme en quête d’un sourire complice ou gêné (
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! Enfin le stalinisme a décrété que l’union de l’
Europe
est antirusse, ce qui est la manière stalinienne de dire que la Russi
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ne de dire que la Russie ne veut pas la paix de l’
Europe
. Invités aux congrès fédéralistes, les communistes répondent en tiran
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bloc contre eux… Il n’y a donc plus qu’à faire l’
Europe
sans eux. Les sceptiques rejoindront un jour, les défaitistes auront
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de doubles négations et de demi-mesures — c’est l’
Europe
fédérée devant les deux empires. C’est l’Europe rejoignant le xixe s
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l’Europe fédérée devant les deux empires. C’est l’
Europe
rejoignant le xixe siècle, pour en prendre la tête et inventer l’ave
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à libérer de ses cloisons, à reconquérir : notre
Europe
. 9. Le congrès de l’Union européenne des fédéralistes, qui s’est t
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uérir : notre Europe. 9. Le congrès de l’Union
européenne
des fédéralistes, qui s’est tenu à Montreux à la fin du mois d’août.
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in du mois d’août. r. Rougemont Denis de, « Une
Europe
fédérée », Une Semaine dans le monde, Paris, 20 décembre 1947, p. 1-2
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auvoir s’entretiennent fiévreusement du sort de l’
Europe
. L’auteur de La Part du diable m’en parlera lui aussi, tout à l’heure
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e hier la prohibition. Voilà qui allait de soi en
Europe
aussi, avant le xixe siècle. Que faisaient Dante, Cervantès, Swift,
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t leur œuvre. Enfin, nous en venons à parler de l’
Europe
. Je suis profondément européen, me déclare Denis de Rougemont. Mais j
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venons à parler de l’Europe. Je suis profondément
européen
, me déclare Denis de Rougemont. Mais je pense que notre continent ne
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ne. Au mois d’août dernier, au congrès de l’Union
européenne
des fédéralistes, qui se tenait à Montreux, j’ai prononcé une confére
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naître. Il faut provoquer les états généraux de l’
Europe
. C’est le seul moyen d’échapper au totalitarisme de plus en plus mena
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faits. Pourquoi n’en serait-il pas de même pour l’
Europe
? Mais, encore une fois, il convient de se hâter, car je vois venir l
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s hommes prendraient part aux états généraux de l’
Europe
dont il vient de me parler. Il faut, me répond-il, que toutes les pro
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spirations pourront s’exprimer que le fédéralisme
européen
pourra s’imposer. Mais sa réalisation ne vous semble-t-elle pas chimé
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rait fatalement à la guerre. Pour les premiers, l’
Europe
n’est plus rien par elle-même et devrait s’attacher au plus vite soit
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. Autrement dit, l’URSS est présente dans toute l’
Europe
aux élections et dans les parlements, elle a ses troupes disciplinées
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est nullement une arme de combat. Par rapport à l’
Europe
, les intentions des deux empires ne sont pas davantage comparables. O
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’oppose à toute tentative d’unir les nations de l’
Europe
: c’est qu’elle veut diviser pour régner. Les États-Unis, au contrair
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s-Unis, au contraire, poussent à la collaboration
européenne
, et surtout sur le plan économique. Ils nous veulent forts, donc auto
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commune mesure entre le danger soviétique pour l’
Europe
et le prétendu danger yankee. La Russie, qui vise à l’autarcie totali
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quer ce fait brutal : la Russie ne veut pas d’une
Europe
forte, c’est-à-dire d’une Europe unie et autonome ; elle ne veut qu’u
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e veut pas d’une Europe forte, c’est-à-dire d’une
Europe
unie et autonome ; elle ne veut qu’une Europe livrée à sa merci par l
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une Europe unie et autonome ; elle ne veut qu’une
Europe
livrée à sa merci par les rivalités nationalistes et la misère. À ce
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hoix qui nous reste ouvert, c’est donc celui de l’
Europe
elle-même. La seule manière possible de défendre l’Europe, c’est de l
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lle-même. La seule manière possible de défendre l’
Europe
, c’est de la faire, donc de nous fédérer. Malgré les Russes et avec l
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e invention américaine, mais une ancienne coutume
européenne
, et plus spécifiquement française. Insistons un peu sur le fait, avan