1 1946, Articles divers (1946-1948). Théologie et littérature (1946)
1 sortis de l’enceinte ecclésiastique dès le déclin du Moyen Âge, mais il n’en est aucun dont l’esprit et l’histoire ne mani
2 omme on s’en convaincra par la lecture des écrits du jeune Marx sur la dialectique hégélienne. De nos jours, le vocabulair
3 s tend à remplacer l’appareil scolastique — c’est du moins ce que proclament les philosophes, avec une insistance parfois
4 saint Thomas sur Dante, de Calvin sur d’Aubigné, du jansénisme sur Pascal et Racine, de Swedenborg sur Balzac, de Newman
5 uvent une difficulté croissante à juger celles-ci du point de vue de leur foi : le vocabulaire de la piété et celui de la
6 ains-amateurs ou gens de goût. Sans rien préjuger du succès ou de l’influence possible d’une intervention de ce genre, ell
7 urs, dont la doctrine fut reprise par les auteurs du Tristan, d’où sont issus presque tous nos romans, étaient nourris de
8 es d’avant-garde, des déviations les plus connues du mysticisme, du gnosticisme, de l’arianisme et du libéralisme romantiq
9 e, des déviations les plus connues du mysticisme, du gnosticisme, de l’arianisme et du libéralisme romantique. Qui voudra
10 du mysticisme, du gnosticisme, de l’arianisme et du libéralisme romantique. Qui voudra et pourra l’expliquer aux disciple
11 gien. Lever les bras au ciel, ou pointer le doigt du moraliste, n’est pas faire acte de charité à l’égard des efforts de l
12 ts, va-t-on laisser certaine élite intellectuelle du siècle sans nul secours ? Va-t-on lui tourner le dos parce qu’elle es
13 s et « avancés », et ne tolère que le mauvais art du dernier siècle ? Au lecteur convaincu comme moi de la nécessité de ré
14 oésie des troubadours, née dans la seconde partie du xiie siècle, en plein conflit entre cathares et catholiques, féodaux
15 in conflit entre cathares et catholiques, féodaux du Nord et « démocrates » du Sud ; la poésie calviniste au xvie siècle 
16 et catholiques, féodaux du Nord et « démocrates » du Sud ; la poésie calviniste au xvie siècle ; le théâtre et le lyrisme
17 y, Coleridge, Lewis Carroll, et vingt autres noms du même ordre. Ce qui ne signifie rien, bien entendu, pour ou contre le
18 ette simplicité trop aisément atteinte aux dépens du mystère, et pour laquelle les protestants anglo-saxons montrent un go
19 el et agissant que celui qui fait l’objet déclaré du dit écrit. Parfois ces deux messages s’accordent et se renforcent ; l
20 , et l’un ruine l’autre secrètement dans l’esprit du lecteur. Ce qu’il importe de rappeler ici, c’est que toute œuvre litt
21 r), et qu’elle l’exprime par les mouvements mêmes du style, plus fidèlement et d’une manière plus contraignante que par so
22 issance : recueil de travaux publiés à l’occasion du soixantième anniversaire de Karl Barth, Neuchâtel, Delachaux et Niest
2 1946, Articles divers (1946-1948). Le supplice de Tantale (octobre 1946)
23 cher, retient le rocher. Étrange lieu que ce coin du Tartare, où la pesante logique de la matière est abolie pour peu que
24 ire, cette composition simplifiée comme un arcane du Tarot et non moins chargée de symboles : un corps, une eau, une branc
25 plaisirs qu’ils en tirent. Quant à la mise à mort du fils, offert ensuite aux dieux comme nourriture meilleure, il est sur
26 observer qu’elle invertit exactement le sacrifice du Fils de Dieu. Au lieu du Père livrant son Fils aux hommes pour qu’ils
27 exactement le sacrifice du Fils de Dieu. Au lieu du Père livrant son Fils aux hommes pour qu’ils le tuent, mais aussi pou
28 roit deviner qu’il n’est qu’une double réfraction du crime dans l’ordre humain. Parce qu’il a convoité la nourriture des d
29 urriture des dieux, Tantale se voit refuser celle du commun des hommes. Sa jalousie se réfléchit dans la frustration du dé
30 mes. Sa jalousie se réfléchit dans la frustration du désir. Et son défi au Ciel, ayant failli, s’inverse en menace suspend
31 n fait, que ses propres limites.) Dans l’histoire du supplice de Tantale, cet automatisme est si sûr qu’il autorise à des
32 ne change autour de lui. Considérons ici l’Homme du Désir, Tantale symboliquement réduit, dans la légende, à sa faim, à s
33 quelque chose : l’attente, l’espoir, la nostalgie du gain. Supposons un individu qui aurait désiré si longtemps que tout s
34 re-là mourrait nécessairement, et par définition, du don reçu. Ou encore : un être nouveau surgirait dans l’instant du don
35 encore : un être nouveau surgirait dans l’instant du don, pour le recevoir en son lieu. À la limite, et dans la logique d’
36 tique qui rêvait d’être empereur est mort le jour du couronnement. Tous nos succès, tous nos actes sans doute, sont ainsi
37 Klitte, qui est alsacien, jure que pour tout l’or du monde, une plaisanterie de ce genre ne le ferait pas pleurer. Sur quo
38 ens, la tête de beaucoup d’êtres, les souffrances du jeune Werther, un petit champ de bataille, lui-même enfin, en train d
39 n train de se tourmenter si pitoyablement à cause du testament, — et il s’en faut de bien peu qu’il ne pleure… Le conseill
40 une seule pensée d’amour pur et gratuit. L’auteur du nouveau Testament n’en demande pas davantage à l’homme pour le faire
41 offerts, déclenche irrésistiblement le mécanisme du supplice de Tantale, c’est-à-dire qu’elle s’annule de soi-même. Si un
42 e soi-même. Si un homme croit pouvoir s’autoriser du mérite de ses œuvres, il ne pleurera pas : car la vision de la proie
43 ropres désirs et à soi-même. (Et c’est le symbole du Baptême.) Telle est la ruse de l’Amour insondable. Admirons-en la pré
3 1946, Articles divers (1946-1948). Genève, rose des vents de l’esprit (19 décembre 1946)
44 le plus grand succès, comme celle, par ailleurs, du romancier français Georges Bernanos, tous deux ne s’étant pas trop ég
45 une solution. L’Européen veut prendre conscience du drame qui se joue en lui, qui se joue en chaque homme. Mais l’América
46 angers et vous êtes le peuple le plus militariste du monde. Si vous vous dites un pays démocratique, c’est simple mot. Vot
4 1947, Articles divers (1946-1948). Préface à Le Cœur est un chasseur solitaire de Carson McCullers (1947)
47 w York qu’une seule vraie terrasse de café, celle du Brevoort, au bas de la Cinquième Avenue. C’est là que Dos Passos situ
48 n écrivait, on composait, on sculptait, on jouait du piano dans toutes les chambres aux portes entrouvertes, et l’on se ré
49 l’autre bout de la table George Davis, rédacteur du Harper’s Bazaar, tenait son rôle de propriétaire. Benjamin Britten et
50 que. Un jour je la rencontre dans un train venant du Sud, en route pour une maison de vacances d’écrivains, tout au Nord,
51 st signalé comme le premier Américain blessé lors du débarquement en Normandie. Aujourd’hui elle est à Paris, inaugurant a
52 française, c’est que la première ne professe pas du tout ce culte du roman américain qui caractérise la seconde. Carson M
53 que la première ne professe pas du tout ce culte du roman américain qui caractérise la seconde. Carson McCullers par exem
54 octeur nègre (p. 307 et 308) sont ceux de Jake et du Dr Copeland, et leur maladresse pathétique éveille en moi des réactio
55 e des Noirs en Amérique — qu’un article documenté du même auteur ne ferait sans doute que circonscrire et limiter. Notons
56 mplement la description d’une petite ville pauvre du Sud ? Ou bien toutes ces choses à la fois ? Je me demandais aussi : c
5 1947, Articles divers (1946-1948). La lutte des classes (1947)
57 ’opère en un clin d’œil la silencieuse révolution du centre où se confondent les extrêmes les plus touchants du souvenir e
58 où se confondent les extrêmes les plus touchants du souvenir et de l’espoir, quand les portes du cœur, un instant, sont à
59 ants du souvenir et de l’espoir, quand les portes du cœur, un instant, sont à la fois ouvertes et fermées. Ainsi la Suisse
60 ? S’il me fallait décrire nos petits déplacements du point de vue de l’usager moyen, je dirais que je les trouve divisés e
61 ièges de velours rouge, pour quelque usage ignoré du commun. Presque toujours elles étaient vides. En troisième on retrouv
62 ut le monde connaissait, mais cela faisait partie du jeu. En bons élèves, les voyageurs préparaient leurs billets pour l’i
63 , au dernier jour — car les plus belles histoires du monde ont une fin — la faiblesse fatale de notre État : cette habitud
64 nent pour banal. Ils pensent mener la vie normale du genre humain, l’anarchie et la guerre étant des exceptions. Ainsi pen
65 étant des exceptions. Ainsi pensent les Français du climat tempéré dont ils jouissent à peu près seuls au monde, tandis q
66 en vedette, au lieu de nous rebattre les oreilles du train-train de nos corruptions. Donc les Suisses que je vois en IIIe
67 e imprévu, un air, un rien. L’indiscrétion sévère du regard suisse me surprend à chacun de mes retours. Comment décrire et
68 i pu lire l’été dernier, punaisé près de la porte du balcon dans une chambre d’hôtel des bords du lac Léman : Afin d’évit
69 orte du balcon dans une chambre d’hôtel des bords du lac Léman : Afin d’éviter tout bruit inutile, la direction de l’hôte
70 ces de Bikini. Dans les secondes règne la gravité du commerce et de l’industrie. L’authentique usager de cette classe n’es
71 omme les gens des troisièmes, des menus incidents du trajet. On sent bien qu’il a l’habitude. On dirait qu’il s’installe d
72 longs wagons bruns qui s’engouffraient au tunnel du Gothard : Amsterdam-Köln-Olten-Zagreb-Bucuresti. Voilà la Suisse en r
73 ess européens, petits trajets portés sur les axes du monde. Quel ennui, ces secondes entre les deux ! j. Rougemont Deni
6 1947, Articles divers (1946-1948). Les maladies de l’Europe (1947)
74 donc regarder notre Europe et j’éviterai de faire du sentiment puisque aussi bien tout se passe en public, puis j’essaiera
75 t les désordres matériels qui marquent le passage du Führer. La lutte contre les forces qu’il incarnait devant nous a réve
76 e, la rage nationaliste et policière, la négation du droit et des droits de la personne, une conception de l’homme réduit
77 tion de l’homme réduit au partisan, une technique du mensonge et de la délation, les élites asservies à la louange du chef
78 de la délation, les élites asservies à la louange du chef, la politisation totale de l’existence. Hitler battu, son corps
79 temps et dans des masses élargies par les effets du capitalisme et par l’esprit bourgeois que tous ces philosophes, cepen
80 ope, Die Christenheit oder Europa, selon le titre du fameux essai de Novalis. Les masses comme les élites échappent aux Ég
81 chetés intellectuelles se parent des noms d’amour du peuple, de discipline révolutionnaire, d’antifascisme, en sorte qu’à
82 n sacrée. Autant de succès remportés par l’esprit du vaincu sur celui des vainqueurs. L’antisémitisme fait rage jusque dan
83 roblème juif. Tout se passe comme si l’écrasement du foyer même de ce mal infernal n’avait eu pour effet que d’en faire re
84 us le couvert de je ne sais quels prétextes parés du nom de tradition, en réalité villageois et naïvement machiavéliques,
85 c cette minutie sourde et aveugle aux indications du réel qu’apportent à leurs petites occupations les aliénés. Si l’on se
86 re les libertés, j’entends au nom de la dictature du prolétariat contre la liberté du capital, c’est-à-dire au nom d’une c
87 de la dictature du prolétariat contre la liberté du capital, c’est-à-dire au nom d’une confusion contre une autre confusi
88 s que j’ai cru distinguer sur le visage spirituel du continent — je ne dis rien de son visage physique — ne trahissent qu’
89 semblaient parfois définir son génie. Notre rêve du progrès par exemple — j’y faisais allusion tout à l’heure — semble av
90 nique : celui de la culture au sens le plus large du terme, c’est-à-dire : une mesure de l’homme, un principe de critique
91 en tirer un bien meilleur parti, pour l’avantage du plus grand nombre ? Que valent nos craintes ? Qu’avons-nous peur de p
92 éfinit comme une position polémique à l’intérieur du champ que l’on observe. Mais si maintenant nous regardons l’Europe da
93 s en 1946, elle se voit affrontée à deux empires. Du même coup elle ressent son unité et la définit par contraste comme ce
94 e européennes, il y a l’idée de la contradiction, du déchirement fécond, du conflit créateur. Il y a ce signe de contradic
95 ’idée de la contradiction, du déchirement fécond, du conflit créateur. Il y a ce signe de contradiction par excellence qui
96 mme lui-même, de l’élimination des antithèses, et du triomphe de l’organisation bien huilée, sans histoire, et sans drame.
97 u russe sera l’homme le plus conforme au standard du bonheur, celui qui réussit, celui qui ne souffre plus parce qu’il s’e
98 r eux, c’est l’exemplaire de série. Ces deux sens du mot « exemplaire » nous livrent le secret de l’opposition que je voud
99 e l’Europe et de ces deux filles parfois ingrates du plus grand Occident nous suggère une formule de l’homme typiquement e
100 endance, le collectif et l’individuel, le service du groupe et l’anarchie libératrice, la sécurité et le risque, les règle
101 libératrice, la sécurité et le risque, les règles du jeu qui sont pour tous et la vocation qui est pour un seul. Crucifié,
102 viduels, comme le firent les requins capitalistes du dernier siècle, il crée dans la cité une anarchie. Cette anarchie ne
103 et voici qu’on l’enferme aujourd’hui dans la cage du parti ou de l’État. À vrai dire, il ne l’a pas volé. Le bon moyen d’é
104 s le Parti, d’oppression par l’État, ce n’est pas du tout de prêcher ce qu’on appelle un « individualisme impénitent ». C’
105 n’est nullement l’excès inverse de l’anarchie et du capitalisme libéral, mais bien cette morale civique, cet équilibre, s
106 sse, et les royaumes démocratiques et socialistes du Nord, Scandinavie, Hollande et Grande-Bretagne. Parce qu’ils ont su d
107 visme autoritaire. Sur le plan de la personne, et du civisme donc, la déviation vers l’anarchie d’une part, la déviation v
108 d office est l’invention de structures politiques du type fédéraliste, seules créatrices de paix et seules capables de sau
109 lement pour son salut, mais pour celui de la paix du monde entier. ⁂ Mesdames et Messieurs, si les descriptions pessimiste
110 t de nos esprits, l’Europe garde encore l’apanage du scepticisme et de l’esprit critique. Les Églises, autrefois, les redo
111 cepticisme, s’applique aux mystiques de l’État et du Parti divinisé, aux idéaux purement profanes et séculiers que nous pr
112 dépasse l’homme et son bonheur, c’est notre sens du transcendant, précisément, c’est notre foi, qui doit faire de nous de
113 s crises qu’il faut prévoir dans les deux empires du succès. Leurs plans, en effet, sont fondés sur une méconnaissance vou
114 ts de notre désordre et de nos ordres — sinon eux du moins leurs enfants. Un dernier trait : l’Europe, surtout si on la co
115 mémoire. Elle est même, pratiquement, la mémoire du monde, le lieu du monde où l’on conserve et reproduit les plus vieux
116 même, pratiquement, la mémoire du monde, le lieu du monde où l’on conserve et reproduit les plus vieux documents des race
117 s mœurs et les coutumes aussi, dans les habitudes du langage et dans l’intimité des relations humaines. Voilà pourquoi l’E
118 que neuf. C’est parce que l’Europe est la mémoire du monde qu’elle ne cessera pas d’inventer. Elle restera le point de vir
119 lence extrême de la création spirituelle, ce coin du monde où l’homme a su tirer de lui-même les utopies les plus transfor
120 le monde. Dans une certaine mesure, qui est celle du réalisme politique, et il fallait tout de même que ce fût dit ici, la
121 même que ce fût dit ici, la question de l’avenir du monde se résume dans ce simple dilemme : la Planète unie ou la Bombe.
122 tre plus de problème de l’ici-bas, mais seulement du jugement dernier — et je n’en dirai rien, n’y pouvant rien. Mais dans
123 rien. Mais dans une large mesure aussi, l’avenir du monde dépend de l’attitude de l’Europe, et de son pouvoir d’invention
124 velle, une confiance — ouvrant l’Europe au monde, du même coup. Ce qu’il nous faut demander et obtenir — obtenir de nous-m
125 itique autant que de son sens inventif. La pensée du monde, c’est l’Europe. Et s’il s’agit vraiment de penser, que penser
7 1947, Articles divers (1946-1948). L’opportunité chrétienne (1947)
126 se se défendaient contre les attaques successives du scepticisme né de la science cartésienne, de l’historisme, de la phil
127 ons romaines aux premiers temps leur avaient fait du bien. Partout, l’on vit au cours du xviiie et surtout du xixe siècl
128 avaient fait du bien. Partout, l’on vit au cours du xviiie et surtout du xixe siècle, s’exténuer les formes extrêmes, h
129 Partout, l’on vit au cours du xviiie et surtout du xixe siècle, s’exténuer les formes extrêmes, hardies et créatrices d
130 s la pression de l’incroyance, on frisait la part du feu, on cédait les positions trop menacées par le scepticisme. Pour n
131 s, les Églises renonçaient sinon à leur âme même, du moins à cette véhémence flambante qui fut toujours signe et symbole d
132 ues modernes répondaient dans l’ensemble : « Avec du sucre ! ». Remarque hélas valable pour bien d’autres Églises, et qui
133 s « scientifiques » contre la Genèse, la Création du monde par Dieu, sa Fin, l’existence de l’esprit, etc., paraît close p
134 s-à-vis des critiques de l’extérieur. Renaissance du thomisme et des études mystiques chez les catholiques ; restauration
135 pel à l’attaque, à l’offensive, à l’initiative, à du plein. Ou encore : les Églises et leurs prédicateurs ont moins que j
136 yant au-dehors ses chances d’action, et la misère du temps qui appelle, j’attends ceci : 1° Que l’Église offre un type de
137 le le fit aux siècles sombres, avant la floraison du Moyen Âge, qui fut son œuvre. Il s’agit de restaurer le sens de la co
138 sume à mes yeux les plus grandes chances d’action du christianisme au xxe siècle, resterait une pure utopie si les chréti
8 1947, Articles divers (1946-1948). La guerre des sexes en Amérique (janvier 1947)
139 roissant étalage en public de marques d’affection du genre communément appelé necking 4. S’il est vrai que tout le monde s
140 ’humour l’attitude de la jeune Amérique vis-à-vis du problème des sexes. Si vous tenez entre vos mains ce texte, comme un
141 eux relève en fin de compte d’une même estimation du rôle et de l’importance de la sexualité. Tandis qu’en Amérique nous t
142 idélité ; enfin le mépris des biens terrestres et du bonheur… L’amour-passion ne peut exister que dans une civilisation ma
143 hissent une critique inconsciente de l’atmosphère du Nouveau Monde : elles en peignent le négatif. L’Américain me paraît p
144 mplement que nous n’aimons pas à rester seuls. Du matriarcat, du mariage et des « moms » Dans un tel monde, il ne su
145 us n’aimons pas à rester seuls. Du matriarcat, du mariage et des « moms » Dans un tel monde, il ne subsiste que deux
146 ctionne au service de tout le reste : la carrière du mari et la sienne propre, l’hygiène des enfants, les relations social
147 tion familière pour Maman, que soupire le GI loin du foyer, dans ces trois lettres fatidiques qui sont le secret de millio
148 seul osé dénoncer le « momisme » comme la Gorgone du matriarcat américain. MOM est partout, elle est tout et dans tous, e
149 tremblent les députés, les pasteurs, les magnats du cinéma. Ce « tonitruant troisième sexe » dérobe aux jeunes femmes — s
150 le même auteur — « cette part de la personnalité du fils qui devait devenir l’amour d’une femme de son âge ». Mom le tran
151 tiviste que sa belle-mère. Quant à l’homme, cause du mal et victime peu consciente, il se réfugie dans son club ou parmi l
152 il se réfugie dans son club ou parmi les copains du bar voisin. La journée d’un couple bourgeois, dans une grande ville a
153 ce lieu réservé, le spectacle le plus inquiétant du Nouveau Monde : car nous sommes habitués à voir des hommes en masses,
154 plus de garanties contre le divorce américain. Du divorce Les statistiques établissent qu’aux États-Unis l’on divorc
155 s l’on divorce davantage que dans tout autre pays du monde, Suisse comprise. Mais ce que les statistiques oublient de note
156 C’est qu’en Europe, l’on se préoccupe avant tout du passé, d’un capital de souvenirs et d’habitudes communes, dont la rup
157 ouvenirs et d’habitudes communes, dont la rupture du couple entraînera la perte. En Amérique, tout cela pèse bien peu au r
158 . Il arrive que le nouveau mariage ne soit séparé du divorce que par le temps de changer de salle, et c’est le même juge —
159 porte — qui légalisera les deux actes. Telle est du moins la coutume de Reno. Reno n’est pas une légende pittoresque, mai
160 d’autres, plus précis. Il n’aimait que la cuisine du Nord, elle lui servait des ratatouilles à la mode de la Louisiane : d
161 ar un conjoint coûte à l’autre 1000 dollars, prix du voyage de Reno, du séjour et des avocats. L’hygiène morale de l’Améri
162 e à l’autre 1000 dollars, prix du voyage de Reno, du séjour et des avocats. L’hygiène morale de l’Amérique ne tolère pas d
163 xplique peut-être, en fin de compte, le phénomène du divorce américain. De la sexualité Je mets en fait que le purit
164 détermine de nos jours encore les mœurs sexuelles du Nouveau Monde. J’ajouterai qu’elle les détermine principalement par l
165 e, à l’école, dans la presse, au cinéma, au cours du soir pour étrangers récemment naturalisés. On leur inculque à tous qu
166 l’influence beaucoup plus directe et contrôlable du cinéma et des comics. À mon avis, l’aspect le plus intéressant de l’é
167 Essayons de le définir en quelques traits. Perte du sens tragique de l’amour ; réalisme scientifique et quelque peu pédan
168 que et quelque peu pédant, substitué aux préjugés du moralisme, mais aussi du libertinage ; fuite générale devant l’intens
169 , substitué aux préjugés du moralisme, mais aussi du libertinage ; fuite générale devant l’intensité et les complexités se
170 à rien, ni à l’amour ni au mariage ; affirmation du droit au bonheur comme seule règle ; et peut-être, du fait de l’égali
171 roit au bonheur comme seule règle ; et peut-être, du fait de l’égalité complète, désaffection mutuelle des deux sexes. (Vo
172 t frustes pariades ?) Tout cela, au stade présent du moins, trop volontaire et rationnel pour que l’on soit en droit d’y v
173 s disciplines praticables, sera vraiment le génie du siècle et l’objet d’une grâce spéciale. Or c’est bien ce qu’il pense
9 1947, Articles divers (1946-1948). Journal d’un intellectuel en exil (mars 1947)
174 vrai drame, c’est de s’être affranchis des tabous du puritanisme au prix d’une frustration de l’âme, d’un refus ricaneur d
175 x d’une frustration de l’âme, d’un refus ricaneur du spirituel. Le mot de transcendance les rend malades, leur paraît méch
176 t paru dans une revue de New York, Upton Sinclair du fond de la Californie alerte à leur sujet deux éditeurs. Sur leur dem
177 chez Reinhold Niebuhr, l’une des meilleures têtes du pays. Professeur de théologie, socialiste militant, polémiste sérieux
178 e conscience, pacifisme, antimilitarisme, crainte du régime tyrannique que toute guerre risque d’instaurer. Mais c’est aus
179 mme les Latins, a les cimetières les plus heureux du monde. ⁂ Cambridge retient l’Européen, parce qu’à la différence des a
180 ur de trois rues, et des cafés où vers six heures du soir se groupent autour d’un verre et d’un problème les écrivains, le
181 émoire, l’érudition, le sens logique, la rapidité du raisonnement, etc.) doit donner un chiffre total supérieur à 135. Le
182 r, entre mon fauteuil et ma table — les deux bras du fauteuil touchant le bord de la table — devant un bloc de papier blan
183 reux, je cours dîner pour 50 cents à la cafétéria du coin. 2 mars 1942 Ou écrire, ou sortir. — Après trois jours et nuits
184 t et jour. Fin mars 1942 Écrit finis à six heures du matin. Église Saint-Marc à l’aube froide, quelques bonnes femmes et u
185 ne crypte de pierre nue. Exorciser en moi la part du diable, celle qu’il a sans doute prise à mon ouvrage. Idée bizarre :
186 le prendre de vitesse. 1er avril 1942 Une lettre du propriétaire m’apprend qu’on va démolir mon étage. Je louais cet atel
187 d’infortune d’un auteur d’après ses descriptions du monde. 10 mai 1942 Un job. — J’étais allé voir mes enfants à Long Is
188 le Revue française et l’ancien rédacteur en chef du Matin lui fournissent de la copie. Les anciens directeurs de La Révol
189 ciens collaborateurs des Nouvelles littéraires , du Collège de sociologie, d’ Esprit , du Figaro , etc. Telles sont les
190 ttéraires , du Collège de sociologie, d’ Esprit , du Figaro , etc. Telles sont les petites surprises de l’exil. Fin juin
191 u’on lui donne une église à régir, et le beau nom du sacerdoce à restaurer dans une atmosphère orageuse ! Mais l’Amérique
192 orce de discrétion, en revêtant l’uniforme simple du GI. Ces messieurs les speakers, qui sont André Breton, le peintre Amé
193 t le front maculé d’encre à copier. Il me cherche du regard par-dessus ses lunettes. Il tient une liasse de documents, les
194 n peu ce qui se passe… « N’êtes-vous pas l’auteur du Secret ? Souffrez que j’en sois la victime. » Sur quoi, peut-être, il
195 te à revenir terminer dans la nuit. À deux heures du matin, si tout a bien marché, je monterai chez « Saint-Ex » faire une
196 mier raid anglais de mille avions, et la promesse du général Marshall : « Nous débarquerons en France. » Juillet 1942 Sai
197 aux ; de Reynaud qui l’a renvoyé sous la pression du parti de l’armistice… Et je doute si personne aujourd’hui parle un fr
198 ruse et des métiers de plus d’une race… « Chemins du monde, l’un vous suit. » Chemins d’exil. Wesport (Connecticut), 15 ao
199 ur la galerie, après le bain, à toutes les heures du jour et de la nuit. Profité de ce bref loisir pour reprendre mon diab
200 « Contribuer au progrès collectif », mais la fin du progrès ne peut être qu’une plage, un loisir sur la plage, et nous l’
201 je pressens intraduisibles, au sens le plus large du terme. Car il ne s’agit pas seulement, pour moi, d’écrire en vue d’un
202 savante pour l’élégance. On ne savait plus juger du « bien écrire » sinon par référence à des modèles anciens. (Que de pa
203 e domaine public, dans la banalité au sens propre du terme (ce qui est à tous, comme on le dit d’un cœur, d’un taureau ou
204 soi monstrueuse, qu’il s’agisse de l’automobile, du sourire de la Joconde, ou des Variations Goldberg. Les copies seules
205 à juste titre. Les pires tourments de l’esprit et du cœur ont toujours paru préférables à la torture physique, ou même à s
206 à défendre par nous, dans l’exil… 6. Quartier du bas de la ville où habitent beaucoup d’écrivains et surtout de peintr
207 d’écrivains et surtout de peintres. 7. Il s’agit du livre intitulé La Part du diable , qui devait paraître à New York à
208 eintres. 7. Il s’agit du livre intitulé La Part du diable , qui devait paraître à New York à la fin de 1942, dans une pr
10 1947, Articles divers (1946-1948). La jeune littérature des États-Unis devant le roman américain (7 juin 1947)
209 w York qu’une seule vraie terrasse de café, celle du Brevoort, au bas de la Cinquième Avenue. C’est là que Dos Passos situ
210 n écrivait, on composait, on sculptait, on jouait du piano dans toutes les chambres aux portes entrouvertes, et l’on se ré
211 l’autre bout de la table George Davis, rédacteur du Harper’s Bazaar, tenait son rôle de propriétaire. Benjamin Britten et
212 que. Un jour je la rencontre dans un train venant du Sud, en route pour une maison de vacances d’écrivains, tout au Nord,
213 st signalé comme le premier Américain blessé lors du débarquement en Normandie. Aujourd’hui elle est à Paris, inaugurant a
214 française, c’est que la première ne professe pas du tout ce culte du roman américain qui caractérise la seconde. Carson M
215 que la première ne professe pas du tout ce culte du roman américain qui caractérise la seconde. Carson McCullers par exem
11 1947, Articles divers (1946-1948). Drôle de paix (7 juin 1947)
216 Drôle de paix (7 juin 1947)l Nouvelles du monde chaque matin dans l’excitante confusion d’un grand journal amér
217 époque, depuis que Hitler a disparu. Notre vision du monde, naguère limitée aux dimensions de la nation, mais désormais so
218 ulturel, religieux, qui ne modifie les conditions du jeu mondial et ne soit destiné à réagir, à plus ou moins longue échéa
219 nos partis il y a la vie sérieuse, la vie réelle du monde, d’immenses transformations continentales qui demain disposeron
220 de la démocratie, c’est-à-dire de l’éducation et du civisme, découvre que ce sont précisément quelques-unes de ses bases
221 Nord se voit chargée de la conduite des affaires du monde et se dispose à exporter les principes de son way of life, qui
222 se confondent dans son esprit avec la santé même du genre humain, le bon sens et la démocratie… Voici l’Asie, les Indes e
223 es de l’angoisse. L’Europe patrie de l’invention, du « système D » et de la réplique rapide, dont les ministres annoncent
224 s anarchique elle dominerait un jour par la force du nombre. Si l’Amérique sentait son idéal mieux assuré dans ses propres
225 t essentiellement de la répartition des richesses du monde, au bénéfice de leur nation, bien entendu. Si c’est le cas, ces
12 1947, Articles divers (1946-1948). Einstein, patriarche de l’âge atomique, m’a dit : « C’est pour dissimuler sa pauvreté et sa faiblesse que l’URSS méfiante, s’entoure de secret… » (9 août 1947)
226 es de bains : c’est l’une des grandes universités du continent. Depuis deux ans que j’y vis, je vois passer chaque jour so
227 sser chaque jour sous mes fenêtres, à onze heures du matin, quelque temps qu’il fasse, le patriarche du nouvel âge, Albert
228 u matin, quelque temps qu’il fasse, le patriarche du nouvel âge, Albert Einstein. Je suis allé lui rendre visite dans une
229 tudiants. Il m’apporte un fauteuil de jardin près du sien. Et nous parlons de l’Amérique, dont Einstein est devenu citoyen
230 ux atomiques ? — J’ai une explication plus simple du « rideau de fer ». Les Russes sont très pauvres. C’est pour cela qu’i
231 rangers. Et non sans raison. Car, au cours actuel du dollar, il serait vraiment trop facile d’acheter des espions en Russi
232 Beethoven, accompagne parfois Einstein, qui joue du violon. Je me rappelle l’anecdote qui circule ici. Schnabel s’interro
233 fait les raids massifs d’avions. Mais la bombe a du moins l’avantage de rendre les masses plus conscientes du danger de l
234 l’avantage de rendre les masses plus conscientes du danger de la guerre moderne. » Je lui demande s’il approuve le plan B
13 1947, Articles divers (1946-1948). Conversation à bâtons rompus avec M. Denis de Rougemont (30-31 août 1947)
235 i écrit Vivre en Amérique , j’ai publié La Part du diable et m’en vais sortir très prochainement Journal des deux mond
236 inement Journal des deux mondes , dont la Guilde du Livre a déjà donné une édition. À l’intention du public américain, j’
237 du Livre a déjà donné une édition. À l’intention du public américain, j’ai fait, enfin, un ouvrage sur la Suisse, intitul
238 répandues. En écoutant parler mardi soir l’auteur du Journal d’un intellectuel en chômage, nous nous étions demandé à la s
239 les il avait été amené à formuler une philosophie du fédéralisme aussi profonde et aussi originale. Nous avons posé la que
240 a campagne de la Société helvétique et les écrits du doyen Bridel pour que l’opinion publique prît enfin conscience de ce
241 ’hui, il ne faut pas se leurrer, il y a une crise du fédéralisme suisse. Et cette crise vient de ce que nous sommes entour
14 1947, Articles divers (1946-1948). L’attitude fédéraliste (octobre 1947)
242  ; or, rien n’est plus contraire à l’essence même du fédéralisme que l’esprit théorique et les généralisations. D’autre pa
243 ommunauté. Car alors, nous irions de l’autre côté du rideau de fer, en esprit tout au moins. Si nous en parlons, si nous l
244 se réaliser intégralement sans se trouver engagé du même coup dans le complexe social. Et aux collectivistes, nous rappel
245 hacun sait que l’individualisme outré fait le lit du collectivisme : ces deux extrêmes, eux, sont dans le même plan, se co
246 e s’attache qu’aux détails de la mise en pratique du fédéralisme en Suisse, mais non pas si l’on cherche à dégager de cett
247 logique. Elle échappe aux catégories géométriques du rationalisme vulgaire, mais correspond assez bien aux formes de pensé
248 arité, comme on voudra, qui est le battement même du cœur de tout régime fédéraliste. L’oublier serait se condamner à reto
249 s droits de chaque nation contre les empiètements du pouvoir central. Et nous devrons constamment rappeler aux deux partis
250 sans dire, comme la vie même ; elle était la vie du civisme et de la pratique politique des Suisses. C’est le défi que re
251 mier principe. — La fédération ne peut naître que du renoncement à toute idée d’hégémonie organisatrice, exercée par l’une
252 ème principe. — Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à tout esprit de système. Ce que je viens de dire au suje
253 se traduit pas seulement dans le mode d’élection du Conseil des États, mais surtout, et d’une manière beaucoup plus effic
254 elle d’un organe dans un corps. Or la vie normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses organes, de même que la
255 rtu purement négative et qui naît le plus souvent du scepticisme. Chaque nation serait mise au défi de donner le meilleur
256 logiques, et même économiques, telle est la santé du régime fédéraliste. Et ses pires ennemis sont ceux dont le grand Jako
257 attentif avec les réalités humaines et naturelles du pays. La Suisse est formée d’une multitude de groupes et d’organismes
258 endre les intérêts de leur nation contre le reste du monde. La fédération sera l’œuvre de groupes et de personnes qui pren
259 l nous faut aller vite. ⁂ Il n’y a, dans le monde du xxe siècle, que deux camps, deux politiques, deux attitudes humaines
260 leur des cas lui sont subordonnées. Les principes du fédéralisme, tels que je viens de les rappeler, s’opposent diamétrale
261 léchissement de notre vitalité, de notre courage, du sens de notre vocation. Nous n’arriverons à rien de bon, dans nos eff
15 1947, Articles divers (1946-1948). La liberté dans l’amour [Réponse à une enquête] (novembre 1947)
262 modernes, et l’accusent de « saper les fondements du mariage et de la famille ». Mais il est hasardeux de parler de la « c
263 remment inévitable3, que réside la lourde réalité du problème que vous posez. Je ne me sens pas capable de le résoudre en
264 prise de position ». (Avec toutes les imprudences du monde, il m’a fallu 350 pages serrées pour en esquisser une, partiell
16 1947, Articles divers (1946-1948). La balance n’est pas égale entre les États-Unis et l’URSS (8 novembre 1947)
265 ain vient de visiter les stations flambant neuves du métro de Moscou, et son guide soviétique l’invite à admirer. « Très b
266 est le suivant : 1° « Henry Miller propage l’idée du monde la plus désespérée qu’un Américain ait encore puisée dans son p
267 it ce qu’il faut pour servir « l’expansionnisme » du dollar. Qu’on ne rie pas : il s’agit de « dialectique ». Et qu’on ne
268 y devrait être mis au crédit des sombres desseins du tsarisme ? Et, de même, l’insuccès notoire de la littérature soviétiq
269 ccuser les éditeurs américains de « tirer parti » du pessimisme d’un Miller ou d’un Faulkner, pour faire de leurs livres d
270 déplaisants : la dictature de l’argent, et celle du grand public, c’est-à-dire du simplisme qu’on baptise opinion moyenne
271 l’argent, et celle du grand public, c’est-à-dire du simplisme qu’on baptise opinion moyenne. Sur la dictature de l’argent
272 monde l’admettra, sans chicaner sur le sens exact du mot esprit dans ce contexte. Mais la question n’est pas si simple. Ca
273 ’est pas si simple. Car après tout, c’est le goût du public qui fait le succès financier d’un roman, bien plus que la pass
274 ès financier d’un roman, bien plus que la passion du gain chez l’éditeur. En d’autres termes, si Ambre est un triomphe mon
275 ant ceux de Miller à Paris, c’est que la majorité du grand public est imbécile. Il faut donc l’éduquer, concluent les mora
276 ce sont bien moins les tentations de l’argent et du succès vulgaire que les habitudes de mensonge en service commandé par
277 942, et alors elle fut bien le fait de la volonté du peuple américain et de la politique de ses chefs. q. Rougemont Den
17 1947, Articles divers (1946-1948). Une Europe fédérée (20 décembre 1947)
278 orité nous refusons le premier, nous nous méfions du second. Notre idée de l’homme n’est pas celle du Kremlin ni celle du
279 du second. Notre idée de l’homme n’est pas celle du Kremlin ni celle du businessman américain. Nous ne voulons pas d’un r
280 ée de l’homme n’est pas celle du Kremlin ni celle du businessman américain. Nous ne voulons pas d’un régime de terreur, de
281 e d’un seul parti ; qui ne représente qu’un quart du corps électoral dans les pays où il est le plus fort, et qui ne peut
282 ramme soit si clairement inscrit dans les données du siècle et si lisible aux meilleures volontés qu’il ne puisse provoque
283 Ils donnent des mitraillettes à ceux qui veulent du pain, une discipline aveugle à ceux qui cherchent un ordre, et le cam
284 fédéralistes, qui s’est tenu à Montreux à la fin du mois d’août. r. Rougemont Denis de, « Une Europe fédérée », Une Sem
18 1948, Articles divers (1946-1948). Notes sur la voie clandestine (hiver 1948)
285 nt qui ne ressemble à rien mais qu’il reconnaîtra du premier coup : un repère à la craie sur le seuil de sa vie, une note
286 es messages émis par quelque au-delà (ou en deçà) du moi qui veille. Canaux, écluses, ou signaux éprouvés, jalonnant la vo
287 la voie clandestine, fleurs de cette « rhétorique du rêve » que Jean-Paul a nommée le premier, ils règlent la circulation
288 pour l’usage quotidien, comme pour le tout-venant du rêve qui le reflète, n’importe quel objet pourra servir ; vieux clou
289 au fétichisme, qui n’est qu’une obsession morbide du sens des signes. ⁂ Quand tout se ferme devant moi, et que rien ne m’i
290 signes baignent dans une réalité profonde, celle du mythe, à quoi s’ordonnent les hasards apparents, et des structures de
291 prédictions heureuses, une sur dix, comme la loi du hasard nous autoriserait à l’attendre. Vous négligez tous les cas où
292 que jamais encore je ne me l’étais avoué : celle du changement instantané de tout, en sorte que nul ne s’en doute. Ne ser
293 n rêve qui sombrait et que je ramène sur la berge du réveil par une touffe de cheveux, par la main… Il se débat, et pour u
294 syllabes, exactement… Le superstitieux, que le 21 du mois, à 7 heures… Un beau soir le beau vers accourt sur douze pieds,
19 1948, Articles divers (1946-1948). Rencontre avec Denis de Rougemont (janvier 1948)
295 es interlocuteurs penchés sur les bonnes feuilles du Cheval de Troie, et m’entraîne dans un bar voisin. Musique en sourdin
296 Simone de Beauvoir s’entretiennent fiévreusement du sort de l’Europe. L’auteur de La Part du diable m’en parlera lui auss
297 eusement du sort de l’Europe. L’auteur de La Part du diable m’en parlera lui aussi, tout à l’heure. Mais, d’abord, il faut
298 n, ne nous invita-t-il pas, reprenant le précepte du vieil Anaxagore, à penser avec les mains ? Je suis né à Neuchâtel, me
299 Denis de Rougemont. Chaque jour, vers onze heures du matin, ce patriarche du nouvel âge, ce Moïse de la terre atomique pas
300 ue jour, vers onze heures du matin, ce patriarche du nouvel âge, ce Moïse de la terre atomique passait sous mes fenêtres.
301 fait les raids massifs d’avions. Mais la bombe a du moins l’avantage de rendre les masses plus conscientes du danger de l
302 l’avantage de rendre les masses plus conscientes du danger de la guerre moderne. C’est la question même de la guerre qui
303 me, au contraire, le furent les hommes de lettres du xixe siècle, par exemple. Voyez Nietzsche, voyez Baudelaire, et Kier
304 . Eh bien ! non. Ceux qui se tiennent à la pointe du combat se nomment Sartre, Bataille, Breton… Après l’autre guerre, ce
305 ette époque, ils portaient déjà en eux une vision du monde, un message auxquels ils sont demeurés fidèles. La guerre, la d
306 ourquoi ce sont eux et eux seuls qu’on entend, ou du moins qu’on écoute. Les autres n’en sont encore qu’aux balbutiements.
307 cé une conférence où je développais les principes du fédéralisme. Il ne peut naître, disais-je, que d’un renoncement à tou
308 rochain livre qu’il doit publier : Les Personnes du drame . J’y traite de Goethe, de Kafka, de Kierkegaard, de Luther, de
309 e composer une morale qu’il intitulera : La Règle du jeu. Espérons que la bombe atomique n’interrompra pas vos travaux… La
310 ra pas vos travaux… La bombe n’est pas dangereuse du tout, me répond-il. C’est un objet. Les objets ne m’ont jamais fait p
20 1948, Articles divers (1946-1948). Les deux blocs ? Il n’en existe qu’un (9 janvier 1948)
311 t qu’ils tiennent la balance égale entre le refus du stalinisme et le refus de l’américanisme. Tel est le dialogue qui se
312 de fer, la Russie est un bloc dans tous les sens du terme. Mais l’Amérique n’en est pas un, elle qui vise aux libres écha
313 enfin plus qu’aucun pays à toutes les influences du monde, et sait très bien que sa propre santé dépend de celle des autr
21 1948, Articles divers (1946-1948). Ce sont les Français qui ont commencé (La querelle des « condensés… ») (14 février 1948)
314 soudaine diffusion provient d’une clause secrète du plan Marshall. Preuve de plus des sombres desseins que nourrissent le
315 harnés à nous asservir tout en feignant de donner du lait en poudre aux enfants. Il faut avouer que le nom même de « conde
316 , « c’est tout ce qui n’est pas la notation sèche du fait », c’est la poésie, c’est le style d’Homère. Lesage condense (ou
317 nding, à la manière de Hollywood, déjà.) Au début du dix-neuvième siècle, Gérard de Nerval condense les deux Faust de Goet
318 s deux Faust de Goethe, et Goethe se déclare ravi du résultat, préfère se relire en français. Vers la fin du siècle, le vi
319 ultat, préfère se relire en français. Vers la fin du siècle, le vicomte de Vogüé et d’autres condensent le roman russe, l’
320 ançais, et le réduisent aux dimensions civilisées du volume à trois francs cinquante broché en jaune. Et j’allais oublier
321 Une Nuits de Galland, qui sont pourtant le record du genre, comme on peut le vérifier d’un coup d’œil, si on les place sur
322 s leur comparer chez nous, sous le double rapport du succès et de la valeur littéraire intrinsèque, que le Roman de Trista
323 sions originales de la légende, et en particulier du poème de Thomas (3144 vers) et de celui de Béroul (4485 vers). Vous
324 l’adaptation d’une œuvre au goût réel ou supposé du public d’une époque et d’un pays, ce n’est pas une invention américai
325 oposer quelques remarques touchant la valeur même du procédé. Il est probable que le « condensé » n’aurait pas provoqué pa
326 ait. Ainsi, selon l’auteur et sa méthode, l’on va du pire à l’excellent. Le procédé lui-même n’est pas en cause, mais bien
327 le style de Goethe m’importe davantage que celui du dernier prix Tartempion. J’avouerai même, pendant que j’y suis, que c