1
ues ont été propagés par le latin d’église. Et ce
n’
est point que tous ces arts classiques ne soient sortis de l’enceinte
2
e. Et ce n’est point que tous ces arts classiques
ne
soient sortis de l’enceinte ecclésiastique dès le déclin du Moyen Âge
3
cclésiastique dès le déclin du Moyen Âge, mais il
n’
en est aucun dont l’esprit et l’histoire ne manifestent à chaque insta
4
ais il n’en est aucun dont l’esprit et l’histoire
ne
manifestent à chaque instant l’influence de telles origines. Or le li
5
théologie, pour être moins généralement reconnu,
n’
en est pas moins étroit ni moins fécond à observer. 2. Depuis les tem
6
observer. 2. Depuis les temps où la philosophie
n’
était que la servante de la théologie, ses efforts d’émancipation les
7
n les plus violents, et même couronnés de succès,
n’
ont pu que confirmer une dépendance qui n’est certes plus de droit, ma
8
succès, n’ont pu que confirmer une dépendance qui
n’
est certes plus de droit, mais n’en demeure pas moins de fait et de na
9
e dépendance qui n’est certes plus de droit, mais
n’
en demeure pas moins de fait et de nature, autant que d’origine. Les g
10
polémique spécifiquement théologique. Le marxisme
ne
fait pas exception à cette règle, comme on s’en convaincra par la lec
11
Les rapports entre la théologie et la littérature
ne
sont pas aussi clairs, ni aussi facilement définissables et contrôlab
12
zac, de Newman sur Gerard Manley Hopkins. Mais il
ne
me paraît pas que le problème dans son ensemble ait été clairement po
13
’élite en général ? Il est clair que la théologie
n’
a pas besoin de la littérature et peut s’en désintéresser sans grand d
14
Église même. Car le clergé et l’élite des fidèles
ne
sauraient échapper à l’influence de leurs lectures, cependant qu’ils
15
odernes ont coutume « d’orner » leurs sermons. Ce
n’
est pas la littérature qui doit prêter secours à la Parole de Dieu, ma
16
eur époque, mais surtout comment ils pâtissent de
n’
avoir point connu l’existence de traditions soit orthodoxes soit hérét
17
s bras au ciel, ou pointer le doigt du moraliste,
n’
est pas faire acte de charité à l’égard des efforts de l’avant-garde,
18
que l’Église est bonne pour les petits bourgeois,
n’
a rien à dire aux esprits libres et « avancés », et ne tolère que le m
19
rien à dire aux esprits libres et « avancés », et
ne
tolère que le mauvais art du dernier siècle ? Au lecteur convaincu co
20
re à l’école de leurs complaisances, et par suite
ne
leur donnait rien. Exemple : Kierkegaard. Il ne fut pas un théologie
21
ne leur donnait rien. Exemple : Kierkegaard. Il
ne
fut pas un théologien au sens strict, mais toute son œuvre manifeste
22
ntrée décisive dans beaucoup de conversions, elle
n’
a pas eu pour effet (ou très rarement) l’adhésion des convertis à une
23
l’adhésion des convertis à une Église déterminée.
N’
est-ce point là le signe d’une incompatibilité inquiétante entre l’éli
24
ieux d’Église » ? 7. Une théologie orthodoxe (je
ne
dis pas sclérosée) favorise, soutient et nourrit des œuvres de style
25
rroll, et vingt autres noms du même ordre. Ce qui
ne
signifie rien, bien entendu, pour ou contre le ritualisme, mais indiq
26
public contre l’illusion courante qui consiste à
ne
prendre en considération comme auteurs « chrétiens » ou « religieux »
27
t traitent de sujets religieux. Ici encore, « ce
ne
sont pas ceux qui disent : Seigneur ! Seigneur !… mais ceux qui font
28
érieux. Faire la volonté de Dieu, en écrivant, ce
n’
est pas simplement parler de Dieu et de sa volonté, ni même en parler
29
ec aucune espèce de réalité spirituelle. L’auteur
ne
cesse de mentionner cette réalité, mais en fait il échoue à l’exprime
30
et le rocher qui surplombe sa tête va tomber mais
ne
tombe jamais. Pour l’observateur non prévenu, tout se passe comme si
31
, répond un châtiment dont on croit deviner qu’il
n’
est qu’une double réfraction du crime dans l’ordre humain. Parce qu’il
32
i, s’inverse en menace suspendue. Le monde païen
ne
conçoit pas de pardon par amour et de salut gratuit, et c’est pourquo
33
ce, ou d’un appel venu d’ailleurs. (Les « dieux »
n’
étant, en fait, que ses propres limites.) Dans l’histoire du supplice
34
rocher soutenu sur sa tête, l’onde et la branche
ne
s’écartant de lui qu’à l’instant où il veut les atteindre, et tout ce
35
l’instant où il veut les atteindre, et tout cela
ne
tient vraiment qu’à lui, qu’aux dispositions de son âme : c’est que c
36
aux dispositions de son âme : c’est que celles-ci
n’
ont pas changé depuis ses crimes. Nourrissant avec obstination les mêm
37
le rocher l’écrase. Mais c’est précisément ce qui
n’
arrive jamais, et ne peut arriver dans le Tartare. Tantale, ne croyant
38
Mais c’est précisément ce qui n’arrive jamais, et
ne
peut arriver dans le Tartare. Tantale, ne croyant pas à la résurrecti
39
ais, et ne peut arriver dans le Tartare. Tantale,
ne
croyant pas à la résurrection, ni au pardon, ni au salut que lui vaud
40
volte contre tout — sauf soi. C’est pourquoi rien
ne
change autour de lui. Considérons ici l’Homme du Désir, Tantale symb
41
ncore son désir, donc lui-même — à la proie qu’il
ne
posséderait qu’en acceptant d’être changé d’abord. Que lui servirait,
42
e est donc toujours un autre. Et celui qui désire
ne
gagnera jamais. C’est le sophisme de l’empereur : Napoléon n’est pas
43
amais. C’est le sophisme de l’empereur : Napoléon
n’
est pas un Bonaparte comblé, mais quelqu’un qui s’est substitué, sous
44
e de Tantale dans un monde où l’instant d’abandon
ne
signifie plus la mort mais la vie et l’héritage de la vie éternelle.
45
les larmes. Le marchand Neupeter se demande s’il
ne
s’agit que d’une mauvaise farce, indigne d’un homme de sens. Le fisca
46
tout l’or du monde, une plaisanterie de ce genre
ne
le ferait pas pleurer. Sur quoi l’inspecteur de police Harprecht lui
47
r que s’il parvient à pleurer à force de rire, ce
ne
sera qu’un vol pur et simple, mais l’Alsacien proteste que s’il rit,
48
» L’inspecteur ouvre de gros yeux fixes, où rien
ne
vient. Le jeune prédicateur Flachs, lui, serait tout disposé à se lam
49
du testament, — et il s’en faut de bien peu qu’il
ne
pleure… Le conseiller continue son discours… Soudain : « Je crois, tr
50
our pur et gratuit. L’auteur du nouveau Testament
n’
en demande pas davantage à l’homme pour le faire héritier de son royau
51
t pouvoir s’autoriser du mérite de ses œuvres, il
ne
pleurera pas : car la vision de la proie qui s’approche sera « bien t
52
du romancier français Georges Bernanos, tous deux
ne
s’étant pas trop égarés dans les mots en urne, ayant appelé un chat u
53
et pense que l’adversaire est méchant, puisqu’il
ne
pense pas comme lui. Des entretiens, tels qu’ils viennent d’avoir lie
54
dits. Personnellement, je regrette qu’aucun Russe
n’
ait répondu à notre invitation. Heureusement, nous avons eu Lukács, et
55
sez les démocraties d’être purement formelles, de
n’
être pas complètement réalisées ; vous prétendez, vous, Russie, être u
56
disez aux poètes de s’exprimer librement, et vous
n’
avez pas la liberté de la presse, et vous repoussez l’existentialisme
57
que celles de nous tous. Nous, nous acceptons de
n’
être pas complètement démocratisés ; vous, vous ne l’acceptez pas. À v
58
n’être pas complètement démocratisés ; vous, vous
ne
l’acceptez pas. À vous de faire le premier pas. Ouvrez vos frontières
59
Vous pouvez venir chez nous. Vous refusez ? Nous
ne
demandons qu’à comprendre. C’est à quoi, d’ailleurs, nous espérons pa
60
un homme de droite dans les partis de gauche. Je
ne
suis jamais pour ou contre un parti. Je suis contre le totalitarisme
61
le, qui est le fédéralisme. Un régime de tyrannie
n’
aboutit jamais à la liberté. On le voit, M. Denis de Rougemont nous pr
62
et d’une parfaite franchise de paroles. Sinon, ce
ne
serait plus l’esprit européen, où la France donne le ton, la France q
63
d’un peuple, mais d’un réel esprit européen. Nous
ne
sommes pas une nation, nous sommes une confédération, donc bien prépa
64
invite des conférenciers américains, dont la voix
ne
peut plus être séparée des dialogues européens. Il souhaite encore qu
65
sseur solitaire de Carson McCullers (1947)k Je
ne
connais dans tout New York qu’une seule vraie terrasse de café, celle
66
sans sa mère qui l’accompagnait ce jour-là, elle
ne
ferait pas deux pas toute seule dans la ville. Je la félicitai sur le
67
américaine et la française, c’est que la première
ne
professe pas du tout ce culte du roman américain qui caractérise la s
68
ion. Mais cette recherche obscurément spirituelle
ne
tend jamais vers la formule ou le système, comme elle ferait irrésist
69
er le lieu et la formule », disait Rimbaud.) Elle
ne
se décante pas, reste immergée dans le symbolisme ambigu des caractèr
70
sa première sonate : Cette chose que je veux, je
ne
sais pas quoi. Je pense qu’on est en droit de parler ici d’une « exp
71
i elle exprimait la pensée de Malraux, au lieu de
n’
être qu’un accord isolé de la partition. Chez les jeunes écrivains amé
72
éricains, chez Carson McCullers en tout cas, vous
ne
pourrez tirer des dialogues qu’une connaissance plus intime des héros
73
Amérique — qu’un article documenté du même auteur
ne
ferait sans doute que circonscrire et limiter. Notons aussi que la no
74
umentaire, ait eu tant de succès en Amérique ? Je
ne
vois pas de réponse satisfaisante à ma deuxième question : le fait es
75
is à Carson, avec la ruse d’un interviewer : — Il
n’
y a pas d’histoires d’amour, dans ce roman. Elle me regarde étonnée, p
76
Elle me regarde étonnée, presque indignée : — Il
n’
y a que cela ! Elle voulait dire l’amour des êtres, l’amour réel, et n
77
de à l’autre — de Neuchâtel à Berne par exemple —
ne
servent cependant qu’aux petits déplacements, qui sont des voyages co
78
les vrais, parce qu’entre le départ et l’arrivée
ne
s’établit jamais cette monotonie des heures de plaine et d’océan de n
79
e des heures de plaine et d’océan de nuit où rien
ne
bouge. Comme il n’y a pas de place en Suisse pour un véritable voyage
80
ine et d’océan de nuit où rien ne bouge. Comme il
n’
y a pas de place en Suisse pour un véritable voyage, on s’en tire en c
81
ures de musique russe indéfiniment répétées, pour
ne
garder que le meilleur, le plus actif et le plus déchirant, la ruptur
82
roisième, les gens chic parfois en seconde, et je
ne
savais rien des premières sinon qu’un morceau de dentelle ornait le h
83
arfaitement « en règle », il fallait simplement «
ne
pas faire attendre », en vertu de cette discipline spontanée, voire p
84
L’expérience de la vie new-yorkaise, où personne
ne
vous voit jamais, se propose par contraste une réponse. C’est qu’en S
85
ins, mais directs, trop sérieux et choqués par on
ne
sait quoi… ? Vous les soutenez d’abord avec curiosité, puis vous trou
86
nfini, en vertu de quelque inertie, et finalement
ne
se détournent qu’avec cet air exaspérant de celui qui renonce à compr
87
nne raison. Quand on possède la pax helvetica, on
ne
saurait se montrer trop vigilant, je veux dire trop méfiant et même i
88
ile, la direction de l’hôtel prie sa clientèle de
ne
pas donner à manger aux mouettes. C’était l’été des expériences de B
89
l’industrie. L’authentique usager de cette classe
n’
est pas curieux, comme les gens des troisièmes, des menus incidents du
90
it qu’il s’installe dans son bureau, et sa pensée
ne
vagabonde pas, reste enfermée dans sa serviette de cuir. Rien d’étonn
91
quilleurs, ces jeunes gens excités qui prétendent
ne
pas payer de supplément parce qu’il n’y avait plus de place dans les
92
prétendent ne pas payer de supplément parce qu’il
n’
y avait plus de place dans les troisièmes : ils ont l’air trop content
93
ent juste. Ces gens traversent le pays comme s’il
n’
existait pas, ils vont plus loin. Confirmation de la sentence ésotériq
94
onfirmation de la sentence ésotérique : l’œil qui
ne
voit pas n’est pas vu. Les passagers de première classe, en Suisse, j
95
de la sentence ésotérique : l’œil qui ne voit pas
n’
est pas vu. Les passagers de première classe, en Suisse, je les nomme
96
imperméables. Ils traversent et passent, et rien
ne
les touche. Ce sont aussi, et pour la même raison, des transparents.
97
isent sont transparents s’ils vont très vite ? On
ne
cesse de voir le paysage au travers.) Ils appartiennent au vaste mond
98
cours. Vous prenez cette amie dans vos bras, vous
ne
trouvez à dire que des phrases banales : « Viens ici qu’on se voie un
99
: « Viens ici qu’on se voie un peu. Eh bien ! tu
n’
as pas trop changé ! » Mais d’un coup d’œil, vous avez lu toute son hi
100
: « Et maintenant, quels sont tes projets ? » Je
ne
saurais échapper ce soir à l’emprise de ce rituel des retours et de l
101
sur lui, dans le corps à corps qui s’ensuit, vous
ne
distinguez plus deux points de vue, mais seulement deux lutteurs étre
102
e. Ainsi d’Hitler et de l’Europe démocratique. Ce
ne
sont pas seulement les ruines et les désordres matériels qui marquent
103
ère moins avouée, non moins dangereuse. La guerre
n’
a pas arrêté, loin de là, les progrès de la déchristianisation de l’Eu
104
ses comme les élites échappent aux Églises. Elles
ne
croient plus qu’en l’ici-bas, qu’en cette vie-ci, qu’en un bonheur ci
105
es des dogmes religieux, ces masses et ces élites
n’
ont rien de plus pressé que de s’asservir aux dogmes d’un parti. Tout
106
rtement sur ce trait : le fanatisme d’aujourd’hui
n’
est plus religieux, mais politique. L’idée que « la fin justifie les m
107
itique. L’idée que « la fin justifie les moyens »
n’
est plus jésuite, mais léniniste, mais fasciste. L’hypocrisie aussi a
108
te. L’hypocrisie aussi a changé de camp. Tartuffe
n’
est plus dévot comme jadis, il n’est plus même de droite comme hier, i
109
e camp. Tartuffe n’est plus dévot comme jadis, il
n’
est plus même de droite comme hier, il est de gauche, ou « dans la lig
110
onseil de prudence. Certes, le conformisme en soi
n’
est pas nouveau, même chez les intellectuels. Ce qui est nouveau, c’es
111
est un nouveau succès de l’esprit totalitaire qui
n’
a eu qu’à changer d’étiquette pour occuper, sans coup férir, d’importa
112
rain d’avorter sous nos yeux, et pas un résistant
ne
me contredira. Des habitudes prises dans la lutte clandestine, ce son
113
si l’écrasement du foyer même de ce mal infernal
n’
avait eu pour effet que d’en faire rejaillir de tous côtés les étincel
114
ique de l’Europe. Lui seul, sous le couvert de je
ne
sais quels prétextes parés du nom de tradition, en réalité villageois
115
ruineux budgets de défense nationale. Un pays qui
ne
peut pas vêtir ses déportés trouve encore le moyen de faire des unifo
116
causes, et d’en inventer les remèdes ? Leur voix
ne
porte guère, tant qu’elle n’emprunte pas les haut-parleurs contrôlés
117
remèdes ? Leur voix ne porte guère, tant qu’elle
n’
emprunte pas les haut-parleurs contrôlés par l’État ou par le parti au
118
Mais se faire écouter par ces moyens, c’est aussi
n’
être plus entendu, car il s’agit de s’adapter, de se « mettre au pas »
119
« mettre au pas » spontanément, au point que rien
ne
passe plus de ce qu’on avait à dire. Devant cette impuissance pratiqu
120
soit efficace et douée d’une vertu agissante, il
ne
suffit pas que le penseur s’achète une étiquette ou un insigne. Et ce
121
privés de guides spirituels, les jeunes gens qui
ne
se contentent pas de cultiver le sens de l’absurde cherchent des chef
122
es chefs qui leur commandent d’agir et de réussir
n’
importe quoi. Le « Führerprinzip » n’est pas mort avec celui qui lui d
123
t de réussir n’importe quoi. Le « Führerprinzip »
n’
est pas mort avec celui qui lui donna son nom. Il se cherche, il se tr
124
ts. Tous ces maux et tant d’impuissance à y parer
n’
ont pas manqué de provoquer dans les élites demeurées libérales une cr
125
tinguer sur le visage spirituel du continent — je
ne
dis rien de son visage physique — ne trahissent qu’une fatigue tempor
126
ntinent — je ne dis rien de son visage physique —
ne
trahissent qu’une fatigue temporaire. Je n’ignore pas que l’autodénig
127
que — ne trahissent qu’une fatigue temporaire. Je
n’
ignore pas que l’autodénigrement, chez nous autres Européens, se confo
128
se confond trop souvent avec le sens critique. Je
n’
ignore pas que l’indignation morale est un genre littéraire, dont la r
129
ces exagérations. Il reste cependant un fait qui
ne
dépend à aucun degré de nos estimations ou jugements subjectifs : c’e
130
. L’Europe nous semblait donc plus grande qu’elle
n’
était. D’où l’effet de choc que produisit dans nos esprits, au lendema
131
rs, comment et pourquoi ces créations européennes
n’
ont-elles pas connu en Europe leur plein succès ? Et comment et pourqu
132
lles subi cette croissance gigantesque ? Pourquoi
n’
ont-elles produit chez nous ni tout leur bien, ni tout leur mal ? C’es
133
frein ni contrepoids. Le capitalisme, chez nous,
n’
a jamais pu donner son plein, parce qu’il était sans cesse bridé et co
134
barrages de douanes ou de coutumes que l’Amérique
ne
connaît pas. Et de même le progrès social s’est vu bridé et contrarié
135
Mais en même temps, le capitalisme et l’étatisme
n’
ont pas atteint chez nous leurs pires excès, parce qu’ils se trouvaien
136
egardent vers l’Amérique. À tort ou à raison — je
n’
en juge pas ici —, ils s’imaginent que ces pays réalisent mieux que le
137
e qu’ils attendent eux-mêmes de la vie. Ainsi, ce
ne
sont pas seulement les idéaux de progrès collectiviste ou de progrès
138
écadence, ou la déplore mais sans faire mieux. Je
ne
vois plus, pour tenir vitalement aux conceptions et aux coutumes euro
139
les valables et sont-elles justifiables ? Ou bien
ne
sont-elles rien de mieux que les sentiments égoïstes d’un vieux propr
140
», pays des pères, mais l’Amérique, ou la Russie,
ne
serait-ce pas ce « Kinderland » qu’appelait Nietzsche de ses vœux ? C
141
nderland » qu’appelait Nietzsche de ses vœux ? Ce
n’
est pas assez de donner des ancêtres à ses enfants ; ils ont besoin d’
142
perdue pour tous et non seulement pour nous ! Ce
n’
est donc pas au nom de je ne sais quel nationalisme européen qu’il nou
143
lement pour nous ! Ce n’est donc pas au nom de je
ne
sais quel nationalisme européen qu’il nous faut défendre l’Europe, ma
144
e. S’il est vrai que l’Europe, jusqu’à ce siècle,
ne
s’est guère sentie et conçue comme un tout, comme un corps organisé,
145
me un corps organisé, c’est surtout parce qu’elle
n’
avait pas l’occasion de se comparer, de s’opposer et de se définir ; e
146
standard du bonheur, celui qui réussit, celui qui
ne
souffre plus parce qu’il s’est parfaitement adapté. L’homme exemplair
147
la vie résulte d’un conflit permanent, et son but
n’
est pas le bonheur, mais la conscience plus aiguë, la découverte d’un
148
’inconscience heureuse, et nous à la conscience à
n’
importe quel prix. Ils veulent la vie, nous des raisons de vivre, même
149
art, l’Américain et le Soviétique, de l’autre, je
n’
ai pas à chercher bien loin. Je prendrai simplement l’exemple de l’ent
150
oints de vue inquiéterait l’auditeur plus qu’elle
ne
l’intéresserait. L’Américain moyen demande une solution qu’il puisse
151
approfondissement de la conscience. En Russie, je
ne
crois pas être injuste en affirmant que ces rencontres seraient simpl
152
nitiateurs sur le banc des aveux spontanés. Et je
ne
dis pas que l’Américain et le Russe n’aient quelques bonnes raisons d
153
nés. Et je ne dis pas que l’Américain et le Russe
n’
aient quelques bonnes raisons de se comporter ainsi, je dis seulement
154
mporter ainsi, je dis seulement que leurs raisons
ne
sont pas celles de la culture ; que la culture suppose la libre discu
155
fié, dis-je, car l’homme européen en tant que tel
n’
accepte pas d’être réduit à l’un ou à l’autre de ces termes. Mais il e
156
de la révolution et les fusillades massives. (Je
ne
dis pas — notez-le bien — empêcher les révolutions que l’on constate
157
s faire d’une manière non sanglante, car l’Europe
ne
peut pas s’offrir des destructions supplémentaires.) Et je sais trop
158
gent de l’exercer. Les guerres ni les révolutions
ne
sont jamais initiées ni déclenchées par les masses, car les masses co
159
chées par les masses, car les masses comme telles
n’
ont cerveau ni main, ni, par suite, faculté de décision. C’est donc su
160
il crée dans la cité une anarchie. Cette anarchie
ne
tarde pas à provoquer une réaction collectiviste. À l’excès de libert
161
ns la cage du parti ou de l’État. À vrai dire, il
ne
l’a pas volé. Le bon moyen d’éviter ces excès d’engagement dans le Pa
162
gement dans le Parti, d’oppression par l’État, ce
n’
est pas du tout de prêcher ce qu’on appelle un « individualisme impéni
163
l, libre, efficace et constamment critique. Et je
ne
dis pas cela dans l’abstrait ; j’ai en vue des exemples précis. Appel
164
ation collectiviste. Ce que je lui oppose ici, ce
n’
est nullement l’excès inverse de l’anarchie et du capitalisme libéral,
165
quel que soit le vainqueur, aux dictatures. Or il
n’
en va pas autrement sur le plan de la communauté et de la politique de
166
ifférence essentielle. Cet impérialisme intérieur
ne
manque jamais de s’exalter à son tour en impérialisme tout court. Un
167
se de presque toutes nos guerres. J’ai dit, et je
ne
le répéterai jamais assez, qu’il faut voir dans le nationalisme la ma
168
ivantes, sous prétexte d’unification, et alors on
ne
saurait plus parler d’union, puisqu’il n’y a plus rien à unir. D’autr
169
lors on ne saurait plus parler d’union, puisqu’il
n’
y a plus rien à unir. D’autre part, il déclare souveraine la nation un
170
me un vulgaire individu dont la prétendue liberté
ne
connaît plus aucun scrupule. De même, on vit Hitler, on voit Staline,
171
elle des chances de vivre encore assez pour qu’il
ne
soit pas utopique d’envisager sa fonction dans le monde, son avenir e
172
irrationnelle, de croire à nos chances de durée,
ne
peut ni ne doit vous suffire. J’en indiquerai rapidement quelques aut
173
lle, de croire à nos chances de durée, ne peut ni
ne
doit vous suffire. J’en indiquerai rapidement quelques autres, et ce
174
meilleur. Et que l’on peut impunément multiplier
n’
importe quoi par 10 ou 100. Vous oubliez la mesure de l’homme. Si, par
175
z par 10 toutes les dimensions d’une maison, vous
ne
pourrez plus gravir les escaliers ni vous asseoir dans les fauteuils…
176
tématique, de la complexité de l’homme total. Ils
ne
sont que des expériences, et le propre d’une expérience est de rater
177
point qu’on se demande si ce qui les gêne le plus
n’
est pas simplement l’homme, dans son humanité rebelle aux chiffres, l’
178
t cela va compter — à la longue. Un beau jour, il
n’
est pas impossible, il est même probable, et c’est là mon espoir, que
179
arce que l’Europe est la mémoire du monde qu’elle
ne
cessera pas d’inventer. Elle restera le point de virulence extrême de
180
Et je veux dire : Si les États-Unis et la Russie
ne
s’entendent pas, si la guerre atomique éclate, il n’y a plus de probl
181
s’entendent pas, si la guerre atomique éclate, il
n’
y a plus de problème de l’Europe, et d’une façon plus générale, il n’y
182
ème de l’Europe, et d’une façon plus générale, il
n’
y a peut-être plus de problème de l’ici-bas, mais seulement du jugemen
183
i-bas, mais seulement du jugement dernier — et je
n’
en dirai rien, n’y pouvant rien. Mais dans une large mesure aussi, l’a
184
ment du jugement dernier — et je n’en dirai rien,
n’
y pouvant rien. Mais dans une large mesure aussi, l’avenir du monde dé
185
n pouvoir d’invention. Ici, point de malentendu !
Ne
demandons pas l’instauration d’une fédération européenne pour que se
186
loc-tampon, ou un bloc opposé aux deux autres. Ce
ne
serait rien résoudre, et au contraire, ce serait exalter le nationali
187
s des virus dont il a infesté le monde entier. Il
n’
y a de fédération européenne imaginable qu’en vue d’une fédération mon
188
maginable qu’en vue d’une fédération mondiale. Il
n’
y a de paix et donc d’avenir imaginable que dans l’effort pour instaur
189
positions trop menacées par le scepticisme. Pour
ne
donner que deux exemples : on vit le mouvement mystique s’éteindre au
190
aux Églises chrétiennes un dilemme très net : il
ne
leur reste plus qu’à s’endormir, ou bien à passer à l’attaque. ⁂ Ce l
191
ttaque. ⁂ Ce lendemain d’une guerre de Trente Ans
ne
ressemble guère à une victoire, il faut bien le dire. Les nations qui
192
rre ont tout perdu ; mais celles qui l’ont gagnée
n’
ont rien gagné : elles ont seulement repoussé une menace, au prix de s
193
ssairement lésée. En d’autres termes, les Églises
ne
trouvent plus dans le monde des doctrines hostiles, mais un vide doct
194
t à ses réglementations, souvent utiles, mais qui
ne
sont jamais règles de vie. Je voudrais une sociologie chrétienne pour
195
les Américains, s’instaure sur notre planète, ce
ne
sera qu’au nom de ce qui transcende nos attachements nationaux, polit
196
le doit, et de toute urgence ! S’il y échoue, je
ne
vois aucune raison d’attendre autre chose, pour le monde, que des tyr
197
ur le réaliser. Les Églises comme corps organisés
ne
peuvent que soutenir et encadrer l’action chrétienne. Celle-ci se fer
198
u réunis dans une chambre ; par des mystiques qui
n’
auront l’air de rien ; par des hommes dont on dira qu’ils exagèrent, q
199
t on dira qu’ils exagèrent, qu’ils rêvent, qu’ils
n’
ont pas le sens commun, qu’ils voient trop grand… Peut-être même par d
200
isant, il est non moins généralement admis que ce
n’
est pas un sport public et diurne. Cette petite nouvelle, parue dans
201
pe de civilisation, j’imagine que vos conclusions
ne
seront point trop différentes de celles que je voudrais dégager d’un
202
s les détruire. Les mœurs sexuelles de l’Amérique
ne
sont point si faciles à définir. Comment expliquer le contraste entre
203
liés, l’un vivant de l’autre, pour ainsi dire, et
n’
existant que par la négation de l’autre, si bien que le contraste entr
204
uelles à la fois délicates et profondes, mais qui
n’
ont pas trouvé leur véritable objet ; un pouvoir exceptionnel de conce
205
s biens terrestres et du bonheur… L’amour-passion
ne
peut exister que dans une civilisation marquée par la croyance en la
206
t convaincu que le bonheur est le but de la vie :
n’
est-ce point écrit dans sa Constitution ? Son attitude vis-à-vis de la
207
st peut-être plus saine que la nôtre. En bref, il
n’
aime point souffrir, et tient pour perversion ce goût de la torture ex
208
quelque drame se noue dans sa vie, malgré lui, il
n’
a de cesse qu’il n’en sorte au plus vite, par une dépêche d’adieu, un
209
ue dans sa vie, malgré lui, il n’a de cesse qu’il
n’
en sorte au plus vite, par une dépêche d’adieu, un voyage, un divorce.
210
adieu, un voyage, un divorce. Never get involved,
ne
vous laissez jamais prendre au piège d’une intrigue complexe et qui m
211
e l’être ou des circonstances qui les causent. Il
n’
a pas le goût de la durée intense. C’est tout de suite ou jamais. C’es
212
se. C’est tout de suite ou jamais. C’est OK ou ce
n’
est rien. Si ce n’est pas vous ce soir, c’était donc une erreur. Ils n
213
suite ou jamais. C’est OK ou ce n’est rien. Si ce
n’
est pas vous ce soir, c’était donc une erreur. Ils ne croient guère à
214
st pas vous ce soir, c’était donc une erreur. Ils
ne
croient guère à la valeur unique d’un être, — et il est vrai qu’il fa
215
t de folies pour composer une telle croyance. Nul
n’
est irremplaçable dans un monde aussi vaste, et où les déplacements so
216
cements sont si faciles. Au vrai, l’amour-passion
ne
saurait exister dans une civilisation qui n’accorde à l’échec nulle d
217
sion ne saurait exister dans une civilisation qui
n’
accorde à l’échec nulle dignité spirituelle, et qui ne tient pour vrai
218
corde à l’échec nulle dignité spirituelle, et qui
ne
tient pour vrai que ce qui réussit. Or, l’échec n’est pour eux qu’une
219
e tient pour vrai que ce qui réussit. Or, l’échec
n’
est pour eux qu’une perte sèche, et non la condition d’un approfondiss
220
ture ou d’une trahison, c’est simplement que nous
n’
aimons pas à rester seuls. Du matriarcat, du mariage et des « moms
221
mariage et des « moms » Dans un tel monde, il
ne
subsiste que deux solutions praticables : le mariage, ou l’affair d’u
222
urse, en l’occurrence, le carnet de chèques. Elle
ne
se borne pas à choisir les rideaux, mais la maison, et même l’auto. J
223
ui tombe à portée de sa main (et un peu plus). On
ne
saurait dire d’elle, comme de l’Européenne, par, métaphore idéaliste,
224
, tout simplement, dans toute la vie, et le foyer
n’
est qu’une partie de ses domaines. Il s’agit de l’aménager pour qu’il
225
tal : comme si la « poésie des travaux ménagers »
ne
correspondait pas, en fait, au labeur harcelant, physiquement déforma
226
mécontente pour quelque raison mystérieuse, elle
ne
fera pas de scène criarde, mais affichera un silence offensé qui sign
227
pour éviter le pire. Cette domination de la femme
ne
s’observe pas seulement dans la vie quotidienne d’un ménage ou d’une
228
que le suzerain jadis accordait au vassal. Et ce
n’
est point qu’elle soit moins capable qu’une autre d’amour, de tendress
229
eu de contacts entre mari et femme, et sans doute
n’
en souffrent-ils guère. Lui déjeune avec ses collègues en vingt minute
230
s femmes s’approchent volontiers), mais il y a je
ne
sais quoi de repoussant (et pas seulement pour un Européen, je m’en a
231
lcools. Tout se passe comme si l’homme d’Amérique
n’
avait qu’un goût modéré pour la femme, dont il ne serait que la conquê
232
n’avait qu’un goût modéré pour la femme, dont il
ne
serait que la conquête plus ou moins résignée ou satisfaite. Certains
233
te. Aux yeux des intéressés, le divorce américain
ne
saurait être, comme chez nous, la douloureuse rupture d’une longue in
234
uloureuse rupture d’une longue intimité, celle-ci
n’
existant pas, en règle générale. Aux yeux de la morale courante, il ap
235
de se remarier. Il arrive que le nouveau mariage
ne
soit séparé du divorce que par le temps de changer de salle, et c’est
236
ctes. Telle est du moins la coutume de Reno. Reno
n’
est pas une légende pittoresque, mais une nécessité pratique créée par
237
x minutes, quitte les lieux l’instant d’après. Il
n’
y reviendra jamais, bien entendu, sauf s’il divorce une seconde fois.
238
es noms des conjoints suivis de cette mention qui
n’
étonne plus : « lui pour la troisième fois, elle pour la quatrième. »
239
»). Mais on en trouvera d’autres, plus précis. Il
n’
aimait que la cuisine du Nord, elle lui servait des ratatouilles à la
240
it tout parce qu’elle amuse. Vous penserez que ce
n’
est pas sérieux, et peut-être aurez-vous raison. Si grave que soit un
241
e ses mariages manquent de sens et de sérieux. Il
n’
y entre pas pour toute la vie, mais pour un bail de « trois-six-neuf »
242
ur et des avocats. L’hygiène morale de l’Amérique
ne
tolère pas dans un foyer les miasmes d’une situation irrégulière, et
243
foyer les miasmes d’une situation irrégulière, et
ne
laisse pas le temps de les résorber. C’est une passion de la propreté
244
tés. L’élément puritain ou d’ascendance puritaine
ne
représente plus en Amérique qu’une infime minorité. Boston, leur anci
245
ritanisme sexuel. On a rejeté tous ses tabous. On
ne
pense plus que la « chair » soit le Mal, ni ses désirs des signes de
246
ntisme, craignant par-dessus tout que les enfants
n’
aillent se former des complexes… Et pourtant, dans cette liberté, qui
247
œurs chez les jeunes gens, l’Européen s’étonne de
ne
point trouver trace de ce qu’il nommait libertinage. L’Américain, me
248
nommait libertinage. L’Américain, me semble-t-il,
n’
est pas vicieux. Il est moral ou sans morale, mais bien rarement immor
249
t égard plus qu’à tout autre. Il convient donc de
n’
indiquer qu’à la volée quelques remarques dont on reconnaît qu’elles s
250
lle soit tout simplement sexy, et que l’obsession
n’
existe que chez lesdits critiques. Certains Européens penseraient plut
251
e, viendraient à l’appui de cette thèse ; mais il
ne
faut pas oublier l’influence beaucoup plus directe et contrôlable du
252
ales ; l’échange sexuel, par consentement commun,
n’
engage à rien, ni à l’amour ni au mariage ; affirmation du droit au bo
253
une « révolte des instincts », ou d’y dénoncer je
ne
sais quelle « vague de barbarie nouvelle ». Le danger n’est sans dout
254
quelle « vague de barbarie nouvelle ». Le danger
n’
est sans doute pas là. Car il est très possible qu’au contraire de ce
255
est bien ce qu’il pense être, étant Américain. Je
ne
l’observe pas sans inquiétude ; non plus sans beaucoup d’amitié. 4
256
vert un « milieu littéraire » dans ce pays. Et ce
n’
était pas une terrasse de café, ni l’antichambre d’une maison d’éditio
257
maison d’édition, ni un salon — rien de tout cela
n’
existe en Amérique — mais une party. Et cette party n’était pas animée
258
iste en Amérique — mais une party. Et cette party
n’
était pas animée par la vivacité des discussions, la coquetterie des f
259
vache ») leur défaut de responsabilité. Tout cela
ne
les empêche pas, bien au contraire, de rechercher surtout la « vie »
260
s écrivez comme si vous étiez déjà morts. Oh ! ce
n’
est pas un reproche aussi violent qu’il vous paraît. Je veux dire que
261
e, instinctive, et parfois émue de la « vie »… On
ne
sait trop. Le savent-ils eux-mêmes ? L’exigence que nous gardons enco
262
pliste, il attend des jugements entiers. Quitte à
ne
pas savoir ce qu’il juge, ni pourquoi… Quitte à rivaliser d’intoléran
263
olérance brutale avec ceux qu’il croit condamner…
N’
est-ce pas cela, le vrai danger totalitaire, dans un pays où l’opinion
264
ionnistes dans leur grande majorité. La situation
ne
m’apparaît pas simple. Si les Églises s’opposent à l’intervention, c’
265
risque d’instaurer. Mais c’est aussi parce qu’on
ne
croit plus au mal, en Amérique. « C’est trop affreux pour être vrai »
266
ranco et de leurs régimes « d’avenir »… Celui qui
ne
veut pas croire au diable travaille fatalement pour lui. Cambridge (M
267
rd, au milieu de la petite ville de Cambridge qui
n’
est plus qu’un faubourg de Boston. Le premier soir en arrivant dans ce
268
son Waste Land… Un grand cimetière le domine, je
n’
en ai jamais vu de plus serein. Point de barrières ni d’allées. De sim
269
r le gazon, irrégulièrement espacées. Ce pays qui
n’
aime pas la mort comme les Germains, et n’en fait point de cérémonies
270
ays qui n’aime pas la mort comme les Germains, et
n’
en fait point de cérémonies grandiloquentes comme les Latins, a les ci
271
’est une catégorie précise d’étudiants. « Génie »
n’
est pas un éloge excité, dans leur bouche : cela se mesure et cela se
272
à 135. Le génie, s’il est physicien par exemple,
n’
en sera pas moins un spécialiste de Kierkegaard ou de Kafka, à l’analy
273
héories de la logistique de Vienne, à moins qu’il
ne
préfère les aborder en sociologue postmarxiste ou en freudien hétérod
274
t cela pouvait suffire en France. Ici, la recette
ne
vaut rien. Le minimum requis est impérieux et difficile à obtenir par
275
e à obtenir parce que le dollar est très cher. On
ne
peut pas « se débrouiller » avec moins qu’il ne faut. Et je touche ic
276
n ne peut pas « se débrouiller » avec moins qu’il
ne
faut. Et je touche ici la limite des fameuses libertés américaines, n
277
ils atteignent presque tous ici, quand les Russes
ne
font qu’en parler. Mais les intellectuels ? Ils n’ont de choix qu’ent
278
e font qu’en parler. Mais les intellectuels ? Ils
n’
ont de choix qu’entre le journalisme et le professorat. Or je répugne
279
vont et viennent sur ce toit en lisant. Comme il
n’
y a ni mur, ni barrière, il faut craindre à chaque fois qu’elles fasse
280
suis le prisonnier de mon livre et ferais bien de
ne
plus m’en échapper. Je devais aller chez des amis après le dîner. J’e
281
rtier. Je suis monté sans dîner chez mes amis. Je
n’
en ai pas de plus charmants dans toute la ville, et je les ai vus pres
282
e chaque jour le mois dernier. Mais ce soir-là je
n’
avais rien à dire, et me demandais non sans angoisse ce que l’on peut
283
uve à six ou huit dans un salon. Rentré tôt, mais
n’
ai rien fait qui vaille de toute la nuit. Voilà qui est clair : ou écr
284
luie torrentielle et fonte des neiges. Les nonnes
ne
sortent plus, ou sont peut-être tombées dans la cour. Des gouttes cha
285
molir mon étage. Je louais cet atelier au mois et
n’
ai donc plus qu’à déguerpir sans insister. 16 avril 1942, 11 West, 52
286
a tranquillement vidé mon compte en banque, et je
ne
suis pas plus avancé qu’au temps de mon île atlantique. 21 avril 1942
287
a de l’argent dans sa poche ou non ! D’abord, on
ne
regarde pas les mêmes. Ou dans la même, on ne voit pas les mêmes obje
288
on ne regarde pas les mêmes. Ou dans la même, on
ne
voit pas les mêmes objets. Et comme le monde est une vitrine, en bonn
289
er dans une atmosphère orageuse ! Mais l’Amérique
n’
est pas son fort. Il y tient le succès à distance, laissant à Salvador
290
il voudrait bien savoir un peu ce qui se passe… «
N’
êtes-vous pas l’auteur du Secret ? Souffrez que j’en sois la victime.
291
i, peut-être, il serait temps d’aller à ce dîner,
n’
était-ce pas pour huit heures ? Quitte à revenir terminer dans la nuit
292
ohn Perse. — Lorsqu’il est arrivé en Amérique, il
n’
a paru de lui qu’une seule photo, encore était-elle prise de dos. (Mai
293
l parle de Briand qu’il a servi longtemps, et qui
n’
a jamais su qu’il y avait Saint-John Perse ; d’Hitler dont il a regard
294
aisse, sur la plage. 18 août 1942 Peut-être qu’il
n’
est pas de bonheur plus conscient que celui de l’enfance retrouvée dan
295
er au progrès collectif », mais la fin du progrès
ne
peut être qu’une plage, un loisir sur la plage, et nous l’avons ici.
296
st absolue. Washington part de l’idée juste qu’il
n’
est pas de mensonge, si pieux mensonge soit-il, qui ne serve Hitler en
297
t pas de mensonge, si pieux mensonge soit-il, qui
ne
serve Hitler en fin de compte. J’écris vingt à trente pages par jour
298
rant le premier soir dans le hall. Maintenant, on
ne
saurait plus le faire sortir de Bevin House. Il s’est remis à écrire
299
de petits pinceaux puérils et tire la langue pour
ne
pas « dépasser ». Je pose pour le Petit Prince couché sur le ventre e
300
exible. Il me donne l’impression d’un cerveau qui
ne
peut plus s’arrêter de penser… Fin octobre 1942 Propagande et style.
301
gré mal gré mes vingt-cinq pages quotidiennes, je
n’
ai pu guère écrire que ces notes de journal, et deux essais pour des r
302
duisibles, au sens le plus large du terme. Car il
ne
s’agit pas seulement, pour moi, d’écrire en vue d’une traduction amér
303
ans la moindre bavure savante pour l’élégance. On
ne
savait plus juger du « bien écrire » sinon par référence à des modèle
304
ue tous nos bons auteurs français contemporains :
n’
importe qui dira qu’ils « écrivent bien », parce que leurs élégances r
305
devenue le droit d’énoncer des banalités mais qui
ne
passent plus pour telles, et qui portent. Savoir ne point se limiter
306
passent plus pour telles, et qui portent. Savoir
ne
point se limiter constamment à la qualité. Car cela irait à préférer
307
ont accepter l’original, qui fit scandale ou même
ne
fut pas remarqué. (Balzac « journaliste », Beethoven « cacophoniste »
308
nées de violente dérive. … mais sachez-le : Nous
n’
étions pas absents de vous plus que de nous-mêmes. Vous étiez « occupé
309
s intime que celle de l’occupation. Un conquérant
n’
occupe jamais que l’extérieur, mais l’étranger s’infiltre au cœur de l
310
voit que vous restez là, il change un peu : vous
n’
êtes plus l’invité mais un client, et qui devrait s’arranger pour paye
311
qui devrait s’arranger pour payer. Et quand vous
n’
avez plus d’argent, c’est tout d’un coup le monsieur qui ne tient pas
312
us d’argent, c’est tout d’un coup le monsieur qui
ne
tient pas à ce que vous causiez des ennuis. Débrouillez-vous. Et puis
313
uillez-vous. Et puis, vous êtes trop nombreux, on
ne
peut pas s’occuper de chacun de vous. Et c’est bien vrai. Nous étions
314
is devant le roman américain (7 juin 1947)m Je
ne
connais dans tout New York qu’une seule vraie terrasse de café, celle
315
sans sa mère qui l’accompagnait ce jour-là, elle
ne
ferait pas deux pas toute seule dans la ville. Je la félicitai sur le
316
américaine et la française, c’est que la première
ne
professe pas du tout ce culte du roman américain qui caractérise la s
317
ion. Mais cette recherche obscurément spirituelle
ne
tend jamais vers la formule ou le système, comme elle ferait irrésist
318
er le lieu et la formule », disait Rimbaud.) Elle
ne
se décante pas, reste immergée dans le symbolisme ambigu des caractèr
319
», mais elle augmente aussi l’incertitude. Or ce
n’
est pas l’angoisse, comme on le répète complaisamment, ce n’est pas mê
320
l’angoisse, comme on le répète complaisamment, ce
n’
est pas même l’anxiété, c’est simplement l’incertitude qui domine l’ét
321
x Indes les musulmans, les hindous et les princes
ne
s’accordent que sur un point, qui est de refuser les plans de retrait
322
i entre le Kouomintang et l’armée communiste, qui
n’
est même pas soutenue par Moscou. Quelle est la stratégie yankee à l’é
323
nis un divorce pour trois mariages. Cela non plus
ne
restera pas sans conséquences, mais lesquelles ? Il n’est pas un de c
324
stera pas sans conséquences, mais lesquelles ? Il
n’
est pas un de ces faits, grands ou petits, moral, économique, culturel
325
tits, moral, économique, culturel, religieux, qui
ne
modifie les conditions du jeu mondial et ne soit destiné à réagir, à
326
, qui ne modifie les conditions du jeu mondial et
ne
soit destiné à réagir, à plus ou moins longue échéance, sur le sort d
327
ations d’Europe et sur nos vies individuelles. Il
n’
est pas un de ces faits qu’on puisse analyser à l’aide de nos catégori
328
sser vers l’insanité ou révéler son ignorance. Il
n’
est pas un de ces faits, par conséquent, dont tiennent compte nos déba
329
e coqs avec le problème de la bombe. Et tout cela
n’
est que trop naturel. Il est parfaitement naturel que nous aimions par
330
vue, et s’il fallait d’abord savoir les faits il
n’
y aurait plus moyen de causer. La bêtise triomphante Cependant n
331
er serait s’occuper vraiment de politique. Car il
n’
y a plus à proprement parler de politique pratique, sérieuse et effica
332
t de profondes contradictions internes. Leur lien
n’
est pas facile à distinguer. Essayons tout d’abord de les décrire. Vo
333
and il s’agit de la vie de millions de ses sujets
n’
avait trahi tant d’insécurité dans ses réactions extérieures, tant de
334
tait moins abîmée, qui sait quelle arrogance elle
ne
retrouverait pas. J’imagine que les hommes d’État se préoccupent esse
335
eine réalité. Jamais les peuples ou les individus
ne
se sont unis à cause des richesses qu’ils avaient, tout au contraire.
336
topie agissante. L’Organisation des Nations unies
ne
s’est formée que pour répondre à l’appel de nos anxiétés et de nos ma
337
’État qui se trouvent chargés d’administrer l’ONU
ne
le comprennent pas il faut prévoir que cet appel créera demain d’autr
338
Il y a quelques mois, une de mes voisines, que je
ne
connais pas, envoie sa petite fille sonner à ma porte. La petite fill
339
banquets, j’ai entendu beaucoup de speechs. Vous
ne
pouvez imaginer à quel point ce pays a changé depuis lors. Le niveau
340
onne de la manière dont ils réagissent, ou plutôt
ne
réagissent pas à la menace atomique. Ils semblent n’avoir qu’une idée
341
réagissent pas à la menace atomique. Ils semblent
n’
avoir qu’une idée en tête : leur sécurité personnelle, leur prospérité
342
e russe Et je pense à part moi : nous y voici.
N’
ai-je pas entendu répéter ces derniers temps qu’Einstein serait « très
343
on qu’on réserve d’ailleurs aux personnes dont on
ne
peut affirmer qu’elles sont communistes, simplement. N’a-t-il pas pro
344
t affirmer qu’elles sont communistes, simplement.
N’
a-t-il pas proposé, en 1945, de livrer le secret de la bombe aux quatr
345
lus nette de ce qu’il nomme l’hystérie antirusse,
n’
est autre que l’attitude des Russes sur le plan international. Einstei
346
ance systématique des Soviets. Or je crains qu’il
n’
y ait rien à faire pour la surmonter. Car la cause n’en est que trop c
347
ait rien à faire pour la surmonter. Car la cause
n’
en est que trop claire. La Russie sait que, dans le jeu actuel, elle e
348
ilitaires proprement dits ? — Oui… et au sujet de
n’
importe quoi qui se passe aujourd’hui dans leurs frontières. Je vous l
349
forcés de tout refuser. — Alors que faire ? — Je
ne
vois qu’une solution possible. C’est que tous les autres pays forment
350
les résistances ou le sabotage soviétique, qu’on
n’
aura plus besoin d’y garder des secrets. Les Russes pourront bien entr
351
r plaira, officiels ou non. Et à la fin — car ils
ne
sont pas fous comme les nazis —, ils verront bien que leur avantage e
352
y a d’ennuyeux avec vous, Albert, c’est que vous
ne
savez pas compter ! » Je pense à l’Institut qu’Einstein a fondé avec
353
n air malicieux et bonhomme : « La bombe, dit-il,
n’
a pas changé les conditions de la guerre beaucoup plus que ne l’avaien
354
ngé les conditions de la guerre beaucoup plus que
ne
l’avaient déjà fait les raids massifs d’avions. Mais la bombe a du mo
355
évelopper : « Vous voyez, riposta le maréchal, il
n’
y a pas une seconde à perdre ! » n. Rougemont Denis de, « Einstein
356
Suisse, intitulé Le Cœur de l’Europe et dont il
n’
existe qu’une édition anglaise. Ce qu’on sait moins chez nous, c’est l
357
’autant plus utile pour nous que notre neutralité
n’
a pas toujours été bien comprise et que la presse n’a pas toujours été
358
a pas toujours été bien comprise et que la presse
n’
a pas toujours été très tendre à notre égard. De cette influence, nous
359
ès tendre à notre égard. De cette influence, nous
ne
donnerons qu’un exemple, mais qui illustre bien ce que nous venons de
360
cadre, est valable pour l’Europe. Voyez-vous, on
ne
se rend pas compte, en Suisse, qu’il existe en nous, aujourd’hui, un
361
nous, aujourd’hui, un sentiment européen, ce qui
n’
empêche pas, il est vrai, bon nombre d’entre nous de douter de la nais
362
onscience de ce sentiment suisse. Aujourd’hui, il
ne
faut pas se leurrer, il y a une crise du fédéralisme suisse. Et cette
363
is-je convaincu que le salut de notre fédéralisme
ne
peut venir que d’une Europe fédérée. o. Rougemont Denis de, « [Ent
364
aîner à des généralisations théoriques ; or, rien
n’
est plus contraire à l’essence même du fédéralisme que l’esprit théori
365
lle de la Confédération helvétique. Toutefois, je
ne
puis éviter de poser au départ quelques définitions. Il est vain de p
366
vain de parler des problèmes politiques, si l’on
ne
s’est pas entendu d’abord sur une certaine idée de l’homme. Car toute
367
, si nous souhaitons un régime fédéraliste ? Nous
n’
en parlerions pas si nous pensions que le type d’homme le plus souhait
368
ns ce cas, notre jardin nous suffirait. Mais nous
n’
en parlerions pas non plus si nous pensions avec Hitler que l’homme n’
369
non plus si nous pensions avec Hitler que l’homme
n’
est qu’un soldat politique totalement absorbé par le service de la com
370
x individualistes nous rappelons donc que l’homme
ne
peut se réaliser intégralement sans se trouver engagé du même coup da
371
vistes, nous rappelons que les conquêtes sociales
ne
sont rien, si elles n’aboutissent pas à rendre chaque individu plus l
372
que les conquêtes sociales ne sont rien, si elles
n’
aboutissent pas à rendre chaque individu plus libre dans l’exercice de
373
trop rapide mais qui me paraît indispensable. Il
ne
faut pas penser que la personne soit un moyen terme ou un juste milie
374
personne, c’est l’homme réel, et les deux autres
ne
sont que des déviations morbides, des démissions de l’humanité complè
375
es démissions de l’humanité complète. La personne
n’
est pas à mi-chemin entre la peste et le choléra, mais elle représente
376
ivique. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave
n’
est pas à mi-chemin entre celui qui meurt de soif et celui qui se noie
377
et celui qui se noie. Et de même, le fédéralisme
ne
naîtra jamais d’un habile dosage d’anarchie et de dictature, de parti
378
ophe allemand Karl Jaspers déclarait que l’Europe
n’
a plus de choix qu’entre la balkanisation et l’helvétisation. Je suppo
379
n gouvernement mondial. Rien de plus banal, si ce
n’
est les objections qui surgissent aussitôt : « Tout cela, dit-on, est
380
, dit-on, est bel et bon pour un petit pays, mais
n’
est pas applicable aux grands. De plus, il a fallu des siècles aux Sui
381
e objection, je répondrai que les cantons suisses
n’
ont adopté une constitution commune qu’en 1848, au terme d’une crise d
382
je répondrai que l’objection est valable si l’on
ne
s’attache qu’aux détails de la mise en pratique du fédéralisme en Sui
383
ons que ses applications, mais pourtant celles-ci
n’
existeraient pas sans celle-là. C’est pourquoi, dans notre tentative d
384
ir l’idée fédéraliste en soi, nous ferons bien de
ne
pas perdre de vue cette expérience-témoin, concrète, typique, et part
385
ens, le mouvement intime de la pensée fédéraliste
ne
saurait être mieux comparé qu’à un rythme, à une respiration, à l’alt
386
diastole et de la systole. La pensée fédéraliste
ne
projette pas devant elle une utopie européenne qu’il s’agirait simple
387
s aux autres, ou d’écraser l’un après l’autre. On
ne
saurait trop insister sur ce double mouvement qui caractérise la pens
388
. Or les uns et les autres ont tort, parce qu’ils
n’
ont qu’à moitié raison. Le véritable fédéralisme ne consiste ni dans l
389
’ont qu’à moitié raison. Le véritable fédéralisme
ne
consiste ni dans la seule union des cantons, ni dans leur seule auton
390
naler en Suisse. Nous aurons des fédéralistes qui
ne
penseront qu’à faire l’union et à la renforcer, et nous aurons des fé
391
eler aux deux partis que le fédéralisme véritable
n’
est ni dans l’une ni dans l’autre de ces tendances, mais bien dans leu
392
x d’avant 1848, on est frappé de constater qu’ils
n’
emploient jamais le terme de fédéralisme, qu’ils l’ignorent, et qu’ils
393
erme de fédéralisme, qu’ils l’ignorent, et qu’ils
ne
touchent que très rarement, et très vaguement, à l’idée fédéraliste e
394
t incontestable, en effet, que l’idée fédéraliste
n’
a pas cessé d’inspirer et de guider les démarches des meilleurs hommes
395
ait forcée à prendre forme et force de loi. Et ce
n’
est guère qu’au xxe siècle que les penseurs et sociologues se sont mi
396
atre langues, de vingt-deux républiques, et de je
ne
sais combien de « races » en un État qui les respecte, cette union pr
397
le doit dire ce qui allait sans dire et qui alors
n’
en allait que mieux. Elle s’expose à son risque maximum : celui de déc
398
de politiques d’hégémonie. Toutefois ce sentiment
ne
cessait pas de croître et de se renforcer dans la plupart des peuples
399
que d’être mal posée. J’entends qu’elle risque de
ne
susciter que des plans rationnels et des systèmes. C’est pour éviter
400
t de l’Europe. Premier principe. — La fédération
ne
peut naître que du renoncement à toute idée d’hégémonie organisatrice
401
posant catholiques et protestants, les vainqueurs
n’
ont eu rien de plus pressé que de rendre aux vaincus leur pleine égali
402
’État fédératif moderne. C’est pourquoi la Suisse
ne
verra jamais sans une certaine méfiance certains « grands » s’arroger
403
nts utiles, ils nous confirment dans l’idée qu’on
ne
peut pas atteindre la fin, qui est l’union, par des moyens impérialis
404
st l’union, par des moyens impérialistes. Ceux-ci
ne
peuvent conduire qu’à l’unification forcée, caricature de l’union vér
405
n véritable. Deuxième principe. — Le fédéralisme
ne
peut naître que du renoncement à tout esprit de système. Ce que je vi
406
rganique. Rappelons-nous toujours que fédérer, ce
n’
est pas mettre en ordre d’après un plan géométrique à partir d’un cent
407
ns un tout. Troisième principe. — Le fédéralisme
ne
connaît pas de problème des minorités. On objectera que le totalitar
408
qu’une majorité. C’est qu’à ses yeux la minorité
ne
représente qu’un chiffre, et le plus petit. Pour le fédéraliste, il v
409
une fonction.) En Suisse, ce respect des qualités
ne
se traduit pas seulement dans le mode d’élection du Conseil des États
410
tres carrés. Quatrième principe. — La fédération
n’
a pas pour but d’effacer les diversités et de fondre toutes les nation
411
verraient soumis aux mêmes lois et coutumes, qui
ne
pourrait satisfaire aucun de ces groupes, et qui les brimerait tous.
412
mprendraient aussi que dans une fédération, elles
n’
auraient pas à se mélanger, mais au contraire à fonctionner de concert
413
tionner de concert, chacune selon sa vocation. Ce
ne
serait pas même une question de tolérance, vertu purement négative et
414
manière et selon son génie. Après tout, le poumon
n’
a pas à « tolérer » le cœur. Tout ce qu’on lui demande, c’est d’être u
415
tratifs, culturels, linguistiques, religieux, qui
n’
ont pas les mêmes frontières, et qui se recoupent de cent manières dif
416
échit, on s’aperçoit que la politique fédéraliste
n’
est rien d’autre que la politique tout court, la politique par excelle
417
ux variés d’échanges européens. Rien de tout cela
n’
est inutile. Et tout cela, qui paraît si dispersé, si peu efficace sou
418
urope est beaucoup plus près de s’organiser qu’il
ne
le semble. Elle est déjà beaucoup plus unie, en réalité, qu’elle ne l
419
est déjà beaucoup plus unie, en réalité, qu’elle
ne
le croit. C’est sur le plan de l’action gouvernementale que les oppos
420
nt, et là seulement, elles sont irréductibles. Je
ne
pense pas que les gouvernements puissent jamais réaliser une union vi
421
amais réaliser une union viable. Leurs dirigeants
ne
sont pas qualifiés pour arbitrer le jeu des nations. Chacun sait qu’i
422
e cela empêche de vivre. La fédération européenne
ne
sera pas l’œuvre des gouvernants chargés de défendre les intérêts de
423
nes qui formeront le gouvernement de l’Europe. Il
n’
y a pas d’autre voie possible et praticable. Les USA ne sont pas dirig
424
pas d’autre voie possible et praticable. Les USA
ne
sont pas dirigés par une assemblée des gouverneurs des 48 États, ni l
425
s solidaires et plus unis que leurs gouvernements
ne
pourront jamais l’être, ils s’apercevront que la fédération est non s
426
ancée, les structures en sont déjà esquissées. Il
n’
y manque plus qu’une charte fédérale, des organes représentatifs, et u
427
eure. C’est dire qu’il nous faut aller vite. ⁂ Il
n’
y a, dans le monde du xxe siècle, que deux camps, deux politiques, de
428
politiques, deux attitudes humaines possibles. Ce
ne
sont pas la gauche et la droite, devenues presque indiscernables dans
429
sque indiscernables dans leurs manifestations. Ce
ne
sont pas le socialisme et le capitalisme, l’un tendant à se faire nat
430
ndant à se faire national et l’autre étatique. Ce
ne
sont pas la Tradition et le Progrès, qui prétendent également défendr
431
i prétendent également défendre la liberté. Et ce
ne
sont pas non plus la Justice et la Liberté, qu’il est aussi impossibl
432
es de démission spirituelle. L’esprit totalitaire
n’
est pas dangereux seulement parce qu’il triomphe aujourd’hui dans une
433
de notre courage, du sens de notre vocation. Nous
n’
arriverons à rien de bon, dans nos efforts et nos débats pour promouvo
434
nos débats pour promouvoir l’Europe unie, si nous
ne
restons pas en garde vigilante contre les réflexes totalitaires qui p
435
x seuls. Sur qui d’autre peut-elle compter ? Elle
ne
doit pas compter sur les gens au pouvoir. J’en connais peu qui aient
436
nchant irrésistible à devenir totalitaires. Et ce
n’
est point que leurs hommes d’État soient particulièrement bêtes ou méc
437
on, la paix, que la plupart d’entre eux désirent,
ne
peuvent pas être leur affaire, pour des raisons absurdes mais techniq
438
conviction sobre et ferme que, cette fois-ci, on
ne
nous laisserait plus le temps de rater. p. Rougemont Denis de, « L
439
udrait au moins distinguer amour et sexualité. Il
n’
est pas exact de dire, par exemple, que « l’homme primitif et l’homme
440
thique… » Car ce que les primitifs réglementaient
n’
était jamais l’amour au sens où nous l’entendons et qu’ils ignoraient
441
« depuis toujours ». Je crains bien que tout cela
ne
repose sur la confusion des termes amour et sexualité. En fait, je ne
442
fusion des termes amour et sexualité. En fait, je
ne
connais pas une seule loi, dans un seul pays ou un seul temps, qui ai
443
sans doute que la police crée l’ordre, quand elle
n’
en est que le déchet.) Les seuls obstacles réels à l’amour sont en nou
444
la Liberté dans l’Amour et par l’Amour. Cet idéal
n’
est pas seulement « souhaitable » comme le suggère modestement votre q
445
la lourde réalité du problème que vous posez. Je
ne
me sens pas capable de le résoudre en quelques lignes, et je ne vois
446
capable de le résoudre en quelques lignes, et je
ne
vois pas très bien, je l’avoue, quel sens aurait ici une « prise de p
447
admettaient comme naturelle l’homosexualité, cela
n’
augmenterait pas notablement le nombre des homosexuels. Ils ont en fai
448
des personnages sacrés, et d’une manière générale
ne
toléraient aucune fantaisie individuelle dans ce domaine. C’est préci
449
éthique de l’amour » (entendons de la sexualité)
n’
est pas nécessaire ; car en fait nous n’en avons plus, ou juste assez
450
exualité) n’est pas nécessaire ; car en fait nous
n’
en avons plus, ou juste assez pour que le piquant d’une tricherie que
451
La balance
n’
est pas égale entre les États-Unis et l’URSS (8 novembre 1947)q L’a
452
dmirer. « Très beau, dit notre Américain, mais je
ne
vois pas de trains circuler ? » — « En effet, réplique le guide, ils
453
circuler ? » — « En effet, réplique le guide, ils
ne
circulent pas encore, mais vous, qu’est-ce que vous dites de la quest
454
oirs aux États-Unis, hein ? » Ce dialogue de fous
n’
est pas celui des peuples, mais de certains journalistes qui parlent e
455
pour servir « l’expansionnisme » du dollar. Qu’on
ne
rie pas : il s’agit de « dialectique ». Et qu’on ne hausse pas les ép
456
rie pas : il s’agit de « dialectique ». Et qu’on
ne
hausse pas les épaules : il s’agit d’un retour en force de l’hitléro-
457
otalitaire que ce qu’on publie dans un pays donné
ne
peut et ne doit servir que le parti au pouvoir. Ainsi, Faulkner, Hemi
458
que ce qu’on publie dans un pays donné ne peut et
ne
doit servir que le parti au pouvoir. Ainsi, Faulkner, Hemingway et Mi
459
nique de ce reproche : 1° Les éditeurs américains
ne
sont pas aux ordres de Truman, comme ceux de l’URSS sont aux ordres d
460
tout en publiant parfois une œuvre de qualité qui
ne
rapporte rien ; 3° Or les livres qui font de l’argent aux US sont les
461
; 4° Les droits de traduction d’un de ces romans
ne
représentent au mieux qu’une fraction négligeable des bénéfices sur l
462
d, et d’une trentaine de romanciers dont l’Europe
ne
connaît même pas les noms, tirent à 800 000 avant la mise en vente, p
463
es personnelles que je pourrais verser au dossier
n’
ajouteraient rien que l’on ne sache. Comme dans tous les pays où l’ent
464
is verser au dossier n’ajouteraient rien que l’on
ne
sache. Comme dans tous les pays où l’entreprise est libre, mais plus
465
e, mais plus que chez nous, parce que l’Américain
n’
est pas hypocrite dans ce domaine, les éditeurs de livres et de revues
466
du mot esprit dans ce contexte. Mais la question
n’
est pas si simple. Car après tout, c’est le goût du public qui fait le
467
ons la balance égale… ⁂ Eh bien ! non, la balance
n’
est pas égale ! L’Amérique est tout de même un pays où les dégradation
468
ertinence, une cruauté qu’aucun critique européen
n’
égale. De Mencken à Philip Wylic, de Thorsten Veblen à Reinhold Niehbu
469
ylic, de Thorsten Veblen à Reinhold Niehbur, pour
ne
rien dire des romanciers, il n’est pas une des tares américaines qui
470
old Niehbur, pour ne rien dire des romanciers, il
n’
est pas une des tares américaines qui n’ait été décrite, avouée, analy
471
ciers, il n’est pas une des tares américaines qui
n’
ait été décrite, avouée, analysée par les Américains eux-mêmes, avec u
472
eux-mêmes, avec une liberté d’esprit que l’Europe
ne
peut qu’envier, et qui épouvanterait les staliniens. La balance n’est
473
, et qui épouvanterait les staliniens. La balance
n’
est pas égale. Car ce qui dégrade l’esprit, ce sont bien moins les ten
474
commandé par l’État. Ce qui dégrade l’esprit, ce
n’
est pas le fait que les mauvais romans encombrent l’étalage, mais qu’o
475
s mauvais romans encombrent l’étalage, mais qu’on
n’
ait plus le droit de les juger mauvais si le Parti les déclare orthodo
476
is si le Parti les déclare orthodoxes. La balance
n’
est pas égale. Car d’un côté l’on se moque encore de la bêtise, de l’a
477
eurs producers de Broadway me dit en riant : « Il
n’
y a qu’une réponse possible. Je vais faire jouer cette pièce ici, ce s
478
ses chefs. q. Rougemont Denis de, « La balance
n’
est pas égale entre les États-Unis et l’URSS », Le Figaro littéraire,
479
t-on, faudrait-il la vouloir ? » Je réponds qu’il
n’
y a qu’à regarder l’Europe, qu’à faire son bilan de misères, qu’à voir
480
sères, qu’à voir la place qu’elle tient encore ou
ne
tient déjà plus dans le monde actuel… Mais puisqu’on m’invite aujourd
481
chniques, les autres politiques. Si tout le monde
ne
le voit pas d’un coup d’œil, c’est que « l’homme moderne est démodé »
482
a carte des frontières, dont les réseaux de l’air
ne
tiennent pas compte. S’il posait son atlas pour faire tourner un glob
483
ue le plus court chemin de l’Amérique à la Russie
ne
passe plus par l’Europe, mais par le pôle. La radio, l’aviation, l’éc
484
t plus étroits. L’Europe est plus petite que nous
ne
pensions, le monde plus grand. Nos descendants s’étonneront bien que
485
Valéry ait pu nous étonner en notant que l’Europe
n’
est qu’un cap de l’Asie. À ces faits matériels vient s’ajouter le gran
486
la table ? Deux mondes sont en présence, que nous
n’
approuvons pas, pour des raisons d’ailleurs très inégales. L’un est co
487
ous nous méfions du second. Notre idée de l’homme
n’
est pas celle du Kremlin ni celle du businessman américain. Nous ne vo
488
u Kremlin ni celle du businessman américain. Nous
ne
voulons pas d’un régime de terreur, de parole asservie, d’épuration à
489
e marteau (c’est le nom choisi par Molotov). Nous
ne
voulons pas de la dictature d’un seul parti ; qui ne représente qu’un
490
voulons pas de la dictature d’un seul parti ; qui
ne
représente qu’un quart du corps électoral dans les pays où il est le
491
oral dans les pays où il est le plus fort, et qui
ne
peut faire notre unité que sur nos ruines, par l’occupation russe, et
492
que notre refus, pour être beaucoup moins brutal,
n’
est pas moins franc. Nous avons besoin d’elle matériellement, elle a b
493
’Europe. Or il est clair qu’aucune de nos nations
n’
est en mesure de la réaliser pour son seul compte et sans échanges. Au
494
ser pour son seul compte et sans échanges. Aucune
n’
est assez riche et assez forte pour réussir sans ses voisins, ou pour
495
gime social, et qui inspire partout sa recherche,
ne
saurait s’arrêter aux frontières d’un pays. Voilà donc le fédéralisme
496
iècle et si lisible aux meilleures volontés qu’il
ne
puisse provoquer d’opposition foncière. Qui oserait dire : « Je veux
497
’à ce qu’ils soient dûment colonisés ! » Personne
n’
ose dire cela, ou comme cela. Mais certains le pensent et finissent pa
498
alisme, défaitisme et stalinisme. Le nationalisme
n’
est en fait qu’une crispation de névrose féodale, un complexe de repli
499
est la manière stalinienne de dire que la Russie
ne
veut pas la paix de l’Europe. Invités aux congrès fédéralistes, les c
500
’on les exclut, qu’on fait un bloc contre eux… Il
n’
y a donc plus qu’à faire l’Europe sans eux. Les sceptiques rejoindront
501
out régime démocratique. Le refus sur deux fronts
n’
est pas une politique. Quand il est autre chose que l’effet naturel d’
502
fet naturel d’une grande affirmation centrale, il
n’
est même pas un vrai refus : il ne peut mener qu’à accepter par force
503
on centrale, il n’est même pas un vrai refus : il
ne
peut mener qu’à accepter par force ce qu’on a combattu dans la faible
504
acrer ce besoin d’engagement que les totalitaires
ne
demandent qu’à tromper ? Ils donnent des mitraillettes à ceux qui veu
505
aurer le sens communautaire. En dehors d’eux rien
n’
a paru depuis la guerre qu’ils avaient eux-mêmes déclenchée. Et nous s
506
llants, regardant à droite et à gauche comme s’il
n’
y avait rien devant nous. Quand le monde attend de nous l’invention pa
507
n carcan. Ce qui est la politique par excellence,
n’
en déplaise aux sectaires de tous bords. La véritable troisième force,
508
s de tous bords. La véritable troisième force, ce
n’
est pas je ne sais quel groupement de doubles négations et de demi-mes
509
ds. La véritable troisième force, ce n’est pas je
ne
sais quel groupement de doubles négations et de demi-mesures — c’est
510
est le fédéralisme, qui veut que la Terre promise
ne
soit pour nous ni l’Amérique ni la Russie, mais cette vieille terre à
511
a. Ensuite on verra mieux ce qui va plus loin. Ce
n’
est pas une erreur qui doit ouvrir la voie. Mais essayons de ramener l
512
passé. Car si je suis unique, il est une voie qui
n’
est tracée que pour moi seul, et que seul je pourrai deviner comme on
513
cohue, le superstitieux simplement sera celui qui
ne
désespère pas de trouver quelque sens acceptable sous l’uniforme absu
514
n moment, et commence à longer la rue. Son allure
ne
saurait tromper. C’est la puissante circonspection de celui qui s’eng
515
ans le jeu. Dans un état signifiant et rythmé. Il
ne
voit plus l’échelle ni le chat noir à gauche, les chevaux blancs ni l
516
auche, les chevaux blancs ni les curés barbus. Il
n’
attend rien qui ressemble aux dictons de l’occulte, attendant cela seu
517
ictons de l’occulte, attendant cela seulement qui
ne
ressemble à rien mais qu’il reconnaîtra du premier coup : un repère à
518
t dans l’harmonie de son destin. Cherchant ce qui
ne
vibre qu’à lui-même et révèle un accord instant, il marche au son, co
519
tre les profondeurs et la surface manifeste. ⁂ Je
ne
parlais que des Grands Rêves et des vrais jeux. Bien entendu, pour l’
520
comme pour le tout-venant du rêve qui le reflète,
n’
importe quel objet pourra servir ; vieux clou tordu, statuette à quatr
521
hasard. Mais nous touchons ici au fétichisme, qui
n’
est qu’une obsession morbide du sens des signes. ⁂ Quand tout se ferme
522
es. ⁂ Quand tout se ferme devant moi, et que rien
ne
m’indique plus comment agir et comment sortir de l’impasse, je tire l
523
son destin. Survient alors celui qui dit : « Vous
ne
retenez que les coïncidences, prémonitions et prédictions heureuses,
524
vos expériences de laboratoire. Et comme vous, je
ne
retiens que le dixième, qui donne un sens. Mais les neuf autres n’ont
525
dixième, qui donne un sens. Mais les neuf autres
n’
ont pas été vaines, ni muettes. Car elles m’ont dit : tu n’es pas toi,
526
été vaines, ni muettes. Car elles m’ont dit : tu
n’
es pas toi, ou pas ici, tu n’y es plus ou pas encore. Elles m’ont rame
527
elles m’ont dit : tu n’es pas toi, ou pas ici, tu
n’
y es plus ou pas encore. Elles m’ont ramené… » Le superstitieux va loi
528
usqu’au bout de lui-même. ⁂ Erreur commune : s’il
n’
y a pas de hasard, tout serait donc déterminé ? Nous n’aurions plus qu
529
pas de hasard, tout serait donc déterminé ? Nous
n’
aurions plus qu’à suivre une voie rigide, fixée de toute nécessité par
530
estin ? Erreur commune et dont il faut rougir. Il
n’
y a pas de hasard, mais pourtant nous sommes libres. Je ne sais qui di
531
s de hasard, mais pourtant nous sommes libres. Je
ne
sais qui dispose de moi, mais la contrainte, si c’en est une, certain
532
mais la contrainte, si c’en est une, certainement
n’
est pas mécanique. La voix insiste ou bien n’insiste plus ; elle parle
533
ment n’est pas mécanique. La voix insiste ou bien
n’
insiste plus ; elle parle plus ou moins clairement ; des portes se fer
534
oriente… C’est une immense affaire d’amour ! Nous
ne
sommes pas aimantés comme des grains de limaille, nous sommes aimés p
535
, me tient probablement plus que jamais encore je
ne
me l’étais avoué : celle du changement instantané de tout, en sorte q
536
u changement instantané de tout, en sorte que nul
ne
s’en doute. Ne serait-ce pas sur cette croyance que reposent les vœux
537
stantané de tout, en sorte que nul ne s’en doute.
Ne
serait-ce pas sur cette croyance que reposent les vœux, incantations,
538
ls suivent leur voie ou s’ils l’inventent ? S’ils
ne
l’inventent qu’en la suivant telle qu’elle était, ou ne la suivent qu
539
nventent qu’en la suivant telle qu’elle était, ou
ne
la suivent qu’en l’inventant telle qu’elle devient ? Créer ou rejoin
540
n poème, un destin, un amour, une vocation ? « Je
n’
ai jamais su, dit le poète, si j’inventais un vers ou si je le retrouv
541
de « mystique ». Demandez-lui ce qu’il fait : Je
n’
ai d’autre spécialité, vous répondra-t-il, que de réfléchir aux conséq
542
tent. C’est un intellectuel. Un intellectuel qui
n’
a pas mauvaise conscience de sa vocation, qui ne s’en cache pas. Il in
543
i n’a pas mauvaise conscience de sa vocation, qui
ne
s’en cache pas. Il intitula même un de ses livres les plus remarquabl
544
es préoccupations, se tient la personne humaine ;
ne
voulut-il pas instaurer une Politique de la personne ? Et, pour mie
545
ne ? Et, pour mieux préciser encore sa position,
ne
nous invita-t-il pas, reprenant le précepte du vieil Anaxagore, à pen
546
voyé en Amérique pour y faire des conférences. Il
n’
en revint qu’au mois de juillet dernier. Il vécut à New York, à Prince
547
une voix qui me dit : « Allô ! Ici Einstein ». Je
n’
en croyais pas mes oreilles ; c’est un peu comme si j’avais entendu :
548
’effrayent, c’est certain. Mais sa responsabilité
ne
se sent pas engagée. Sans doute, pense-t-il que, même sans lui, le se
549
et que par conséquent… « La bombe, m’a-t-il dit,
n’
a pas changé les conditions de la guerre beaucoup plus que ne l’avaien
550
ngé les conditions de la guerre beaucoup plus que
ne
l’avaient déjà fait les raids massifs d’avions. Mais la bombe a du mo
551
re un rideau de fer, c’est pour que leur pauvreté
ne
soit pas découverte. Einstein souhaite que tous les autres pays forme
552
RSS finisse par se rendre compte que son avantage
n’
est pas de s’y opposer perpétuellement et en vain, mais d’y entrer. Je
553
r perpétuellement et en vain, mais d’y entrer. Je
n’
interrogerai pas Denis de Rougemont sur les États-Unis. Il leur a cons
554
Les disputes autour de l’engagement de l’écrivain
n’
existent pas là-bas. Écrire, aux États-Unis, c’est entretenir les lect
555
evait. Et c’est cela qui me semble essentiel. Ils
n’
étaient pas des inadaptés comme, au contraire, le furent les hommes de
556
ez Baudelaire, et Kierkegaard, dont toute l’œuvre
n’
est qu’immense effort pour atteindre les gens et qui est mort — oui, l
557
rent toujours en marge de la société, parce qu’il
n’
y avait plus de communauté réelle entre l’écrivain d’une part, la bour
558
se rencontrer naguère, mais où, maintenant, « on
ne
peut plus mettre les pieds ». « Pensez, dit Sartre, la voix pleine d’
559
ntemporains, c’est Camus et Simone de Beauvoir. »
N’
était-ce pas là façon de se désigner soi-même… par personne interposée
560
artre, Bataille, Breton… Après l’autre guerre, ce
n’
avait pas été ainsi. C’est, me semble-t-il, dis-je à mon tour, que le
561
erre-ci. Pour les jeunes hommes d’aujourd’hui, il
ne
s’agit pas seulement de relever des ruines, mais de découvrir un mond
562
ouveau et de l’organiser. Tout est à recréer. Ils
n’
ont encore rien à dire, ou ce qu’ils voudraient exprimer est encore im
563
voix, les hommes de 40 ans comme vous les nommez,
ne
font que poursuivre les discours commencés avant 1939. À cette époque
564
défaite, l’exil ont pu les dérouter ; leurs idées
n’
en ont pas été transformées pour autant. Voilà pourquoi ce sont eux et
565
u’on entend, ou du moins qu’on écoute. Les autres
n’
en sont encore qu’aux balbutiements. La musique s’est tue. Les tables
566
crépusculaire. Nul mouvement, nul bruit de la rue
n’
est perceptible ici. L’on dirait qu’on est en marge du temps. Cela don
567
faut dépasser leurs frontières. Bien souvent, ce
n’
est pas dans leur pays d’origine qu’ils rencontrent le plus large accu
568
à moi, que cette transformation de leur existence
ne
peut pas être sans influence profonde sur leurs pensées et leur œuvre
569
s de Rougemont. Mais je pense que notre continent
ne
peut être sauvé que par une organisation fédérative. Le modèle en est
570
ù je développais les principes du fédéralisme. Il
ne
peut naître, disais-je, que d’un renoncement à toute idée d’hégémonie
571
omplexe et souple comme la paix, comme la vie. Il
ne
faut pas avoir peur de ces complexités, de ces complications. Elles s
572
r, la Suisse en reconnaît les bienfaits. Pourquoi
n’
en serait-il pas de même pour l’Europe ? Mais, encore une fois, il con
573
me européen pourra s’imposer. Mais sa réalisation
ne
vous semble-t-elle pas chimérique ? Nullement. Si nous parvenons à dé
574
: La Règle du jeu. Espérons que la bombe atomique
n’
interrompra pas vos travaux… La bombe n’est pas dangereuse du tout, me
575
atomique n’interrompra pas vos travaux… La bombe
n’
est pas dangereuse du tout, me répond-il. C’est un objet. Les objets n
576
du tout, me répond-il. C’est un objet. Les objets
ne
m’ont jamais fait peur, non plus que les machines. Ce qui est dangere
577
Les deux blocs ? Il
n’
en existe qu’un (9 janvier 1948)u Les uns nous disent que le choix
578
talement à la guerre. Pour les premiers, l’Europe
n’
est plus rien par elle-même et devrait s’attacher au plus vite soit au
579
lar américain. Mais les seconds proclament qu’ils
ne
choisiront pas entre la peste et le choléra et qu’ils tiennent la bal
580
que jusque dans nos communes : tandis que les USA
n’
ont que des sympathies, point de propagande organisée, aucun moyen de
581
e scientifique : le marxisme ; tandis que les USA
n’
ont pas de doctrine, et n’ont rien d’autre à proposer qu’un genre de v
582
me ; tandis que les USA n’ont pas de doctrine, et
n’
ont rien d’autre à proposer qu’un genre de vie, leur way of life qui n
583
proposer qu’un genre de vie, leur way of life qui
n’
est nullement une arme de combat. Par rapport à l’Europe, les intentio
584
pport à l’Europe, les intentions des deux empires
ne
sont pas davantage comparables. On l’a bien vu lors de la Conférence
585
t-il donc chercher l’impérialisme ? Avouons qu’il
n’
est pas le même des deux côtés. Un contraste frappant Et si l’on
586
russes. Il faut vraiment se boucher les yeux pour
ne
pas voir de quel côté les promesses faites aux masses sont tenues aux
587
nt pour la réduire, et cela au nom d’un idéal qui
ne
change pas tous les six mois, car il est la morale commune, et non pa
588
ssances nous conduisent à la même conclusion : il
n’
y a pas de commune mesure entre le danger soviétique pour l’Europe et
589
bloc dans tous les sens du terme. Mais l’Amérique
n’
en est pas un, elle qui vise aux libres échanges, tolère les pires ind
590
que est une démocratie, et une démocratie vivante
n’
est pas un bloc. Un seul remède : nous fédérer Que devient alors
591
autres déclarent noblement décliner ? En fait, il
n’
y a plus de choix possible. Car la Russie, en refusant de collaborer,
592
isément, a choisi pour nous, malgré nous. Si nous
n’
acceptons pas d’être ses satellites, elle nous déclare et nous croit s
593
communistes contre un prétendu « bloc américain »
n’
a d’autre but que de masquer ce fait brutal : la Russie ne veut pas d’
594
tre but que de masquer ce fait brutal : la Russie
ne
veut pas d’une Europe forte, c’est-à-dire d’une Europe unie et autono
595
c’est-à-dire d’une Europe unie et autonome ; elle
ne
veut qu’une Europe livrée à sa merci par les rivalités nationalistes
596
lités nationalistes et la misère. À ce défi, nous
ne
pouvons pas répondre en nous jetant simplement dans les bras de l’Amé
597
t dans les bras de l’Amérique. Non seulement nous
ne
le devons pas, mais c’est pratiquement impossible. Car l’Amérique n’a
598
ais c’est pratiquement impossible. Car l’Amérique
n’
a nullement l’intention de nous entretenir à grands frais comme des ma
599
eptibles. Elle cherche à nous aider pour que nous
ne
tombions pas dans le piège grossier que nous tendent les Russes : c’e
600
de vue stratégique autant que culturel. Mais elle
ne
pourra nous aider que si nous existons d’abord. Le seul choix qui nou
601
u. Rougemont Denis de, « Les deux blocs ? Il
n’
en existe qu’un », L’Intransigeant, Paris, 9 janvier 1948, p. 4.
602
ce qui tombe », écrit Lanson, « c’est tout ce qui
n’
est pas la notation sèche du fait », c’est la poésie, c’est le style d
603
ute notre enfance. Il est vrai qu’en tout cela je
n’
ai cité que des traductions, et que ni Goethe, ni Swift, ni Cervantès
604
uctions, et que ni Goethe, ni Swift, ni Cervantès
n’
ont jamais reçu le prix Goncourt, ce qui doit apaiser bien des scrupul
605
amb, des comédies et tragédies de Shakespeare. Je
ne
saurais leur comparer chez nous, sous le double rapport du succès et
606
oul (4485 vers). Vous trouverez sans peine, dans
n’
importe quelle histoire de la littérature française, de quoi tripler l
607
u supposé du public d’une époque et d’un pays, ce
n’
est pas une invention américaine, mais une ancienne coutume européenne
608
e du procédé. Il est probable que le « condensé »
n’
aurait pas provoqué pareille indignation chez les critiques, ni rencon
609
encontré pareil succès dans le grand public, s’il
n’
eût pas été présenté comme américain d’origine. (Américain signifiant
610
auvrissent, défigurent, saccagent leur modèle, et
ne
peuvent qu’en écarter le lecteur. Vogüé résume, croit condenser, mais
611
’on va du pire à l’excellent. Le procédé lui-même
n’
est pas en cause, mais bien le talent de celui qui l’applique, et peut
612
les ouvrages d’une honnête moyenne. Les critiques
n’
ont pas protesté tant qu’on nous a servi Shakespeare et Goethe, Cervan
613
Trois remarques encore sur ce vaste sujet que je
ne
puis traiter ici qu’en « condensé ». L’on admet sans mauvaise humeur
614
ais le fameux grand public, si cher aux éditeurs,
n’
est-il pas un enfant devant la vraie culture ? N’a-t-il pas droit aux
615
n’est-il pas un enfant devant la vraie culture ?
N’
a-t-il pas droit aux mêmes égards que la jeunesse de la part de ceux q
616
e la jeunesse de la part de ceux qui l’éduquent ?
Ne
faut-il pas lui ménager avec prudence un accès progressif aux chefs-d
617
an non terminé, et que l’auteur voulait détruire,
ne
court-il pas les mêmes dangers que s’il était « condensé » en cinquan
618
teindre enfin la vaste audience que nos critiques
n’
avaient pas su lui procurer ? Pour ma part, je salue de mes vœux toute
619
s vain de s’indigner des « condensés » tant qu’on
n’
aura rien fait pour la culture des masses ; car nous sommes en démocra
620
spote qu’il s’agit avant tout d’éclairer. Mais il
n’
est pas vain d’exiger que les fabricants de condensés se donnent des r
621
’ils avertissent bien clairement le lecteur qu’on
ne
lui vend qu’un résumé, et qu’ils rappellent les dimensions de l’origi
622
rer chez le libraire. Tous les critiques français
ne
devraient-ils pas se liguer pour qu’un code de ce genre soit adopté ?