1 1948, Articles divers (1948-1950). L’idée fédéraliste (1948)
1 , renonçant à leur souveraineté absolue au profit d’ une constitution commune. Dans cette vue, la Suisse moderne serait une
2 ans cette vue, la Suisse moderne serait une sorte de « bon exemple à suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre, deux
3 tent aussitôt à l’esprit. Il conviendrait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui m
4 drait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui méritent d’être donnés en exemple ; p
5 ments de notre expérience helvétique qui méritent d’ être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourr
6 ique qui méritent d’être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourraient être utilisés ou reproduit
7 eproduits sur une plus vaste échelle. La question de nos dimensions dans l’espace et dans le temps apparaît capitale à cet
8 oire suisse, notre État fédéral avec ses cent ans d’ existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudier les
9 nous autres Suisses. Mais si nous passons du plan de cette microhistoire à l’histoire générale, tout change. Nous voyons t
10 out d’abord que cent ans, ce n’est qu’un septième de notre histoire nationale ; que celle-ci ne s’étend que sur le dernier
11 que celle-ci ne s’étend que sur le dernier tiers de l’ère chrétienne, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l
12 e, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l’histoire des civilisations, qui elles-mêmes ne couvrent que le dern
13 les-mêmes ne couvrent que le dernier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il ré
14 nier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il résulte que notre expérience fédér
15 généralement admise de l’humanité sur la planète. D’ où il résulte que notre expérience fédérale ne représente guère que la
16 lles s’évanouiront probablement, comme une goutte de vin dans la mer. Ensuite, ce rappel à nos dimensions très réduites da
17 ns jouer dans le monde. En effet, les proportions de notre expérience à l’histoire générale sont à peu près celles de la g
18 ence à l’histoire générale sont à peu près celles de la graine à l’arbre. Qu’est-ce qu’une graine ? C’est un objet hauteme
19 n aboutissement et un commencement. C’est le lieu d’ un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent,
20 nt et un commencement. C’est le lieu d’un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent, mais elles p
21 es les graines meurent, mais elles peuvent mourir de deux manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’h
22 les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’ humus, les autres donnent un nouvel arbre. Notre État fédéral mourra,
23 helle infiniment plus vaste ? Telle est la chance de la Suisse dans l’histoire, pour ce siècle ou pour ceux qui le suivron
24 ce siècle ou pour ceux qui le suivront. La chance d’ une graine. Transposons maintenant ces symboles. Traduisons graine par
25 aîtra tout comme une autre République sérénissime de Venise, ne laissant qu’un souvenir ou un décor, parce qu’il aura gard
26 n cite l’exemple helvétique, à propos d’un projet d’ États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate
27 ue, à propos d’un projet d’États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate qui surgit sur les lèvres
28 l ne s’agit que des modalités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’id
29 alités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expér
30 ratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement pl
31 t s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses app
32 ce de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses applications, mais pourtant celles-ci n’existeraie
33 nt pas sans celle-là. Je ne parlerai donc ici que de notre idée fédéraliste en soi. Elle est très simple, comme toutes les
34 r en quelques mots, en une formule ; car elle est d’ un type organique et non pas mécanique ou passionnel, en cela beaucoup
35 résistances, mais elle est au contraire le secret d’ un équilibre constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de comp
36 constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après
37 nt entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après l’autre. On ne sa
38 de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’ écraser l’une après l’autre. On ne saurait trop insister sur le double
39 té, comme on voudra, qui est le battement du cœur de ce système. Car le fédéralisme ne consiste pas seulement dans l’union
40 Tous pour un ». Dans ce sens, il nous sera permis de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’autre que la politique
41 s de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’ autre que la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot.
42 la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot. Elle est donc l’antithèse exacte des méthodes totalitaires, a
43 onsistent à écraser les diversités par incapacité de les composer en un tout organique et vivant. ⁂ C’est peut-être parce
44 s ou moins consciemment les principales décisions de notre vie politique pendant des siècles, et qu’elle a finalement pris
45 cles, et qu’elle a finalement pris forme et force de loi vers 1848 ; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis
46 her à son sujet. Comme la vie même — étant la vie de notre praxis politique — elle allait sans dire, jusqu’ici. La nécessi
47 llait sans dire, jusqu’ici. La nécessité présente de l’affermir en face du défi que représente l’esprit totalitaire, et au
48 éfi que représente l’esprit totalitaire, et aussi de la propager, car la meilleure défense est dans l’attaque, nous invite
49 ui semblent avoir inspiré l’action tout empirique de nos ancêtres. 1. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à t
50 me ne peut naître que du renoncement à toute idée d’ hégémonie éducatrice ou organisatrice exercée par l’une des nations co
51 légitime certains « grands » prendre l’initiative d’ une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’
52 d’une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe i
53 opéenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’ Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’une manièr
54 Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’ unifier l’Europe indiquent d’une manière négative cette même vérité si
55 ans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’ une manière négative cette même vérité simple que notre réussite confi
56 e peuvent conduire qu’à l’unification, caricature de l’union véritable. 2. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncemen
57 e ne peut naître que du renoncement à tout esprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour
58 sprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’ une nation vaut aussi pour celui d’une idéologie. On pourrait définir
59 l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour celui d’ une idéologie. On pourrait définir l’attitude fédéraliste comme un ref
60 fédéraliste comme un refus constant et instinctif de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et s
61 de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et satisfaisantes pour la logique, mais par là même i
62 estructrices des diversités qui sont la condition de la vie organique. Fédérer, ce n’est pas mettre en ordre d’après un pl
63 re en ordre d’après un plan géométrique, à partir d’ un centre ou d’un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes,
64 près un plan géométrique, à partir d’un centre ou d’ un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes, selon leurs car
65 s caractères particuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît p
66 ticuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’ articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème d
67 er dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objectera que le totalitarisme, lui aussi
68 qualités ne se traduit pas seulement dans le mode d’ élection du Conseil des États, mais surtout, et d’une manière beaucoup
69 d’élection du Conseil des États, mais surtout, et d’ une manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie pol
70 manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie politique et culturelle, où l’on voit la Suisse romande ou
71 nne jouer un rôle sans proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralism
72 proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour d
73 arrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contraste avec le simplisme brutal qui caractérise
74 Burckhardt qualifiait dans une lettre prophétique de « terribles simplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’
75 mplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouve
76 l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, co
77 omplication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, féd
78 es institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’ horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, fédéraux, canton
79 , cantonaux, si diversement engrenés, il convient de leur montrer que cette complexité est la condition même de nos libert
80 ontrer que cette complexité est la condition même de nos libertés. C’est grâce à elle que nos fonctionnaires et nos législ
81 eurs sont constamment rappelés au concret, forcés de rester en contact avec les réalités humaines du pays. La Suisse est f
82 s réalités humaines du pays. La Suisse est formée d’ une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, lingui
83 nes du pays. La Suisse est formée d’une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, linguistiques, religie
84 frontières, et qui se recoupent et se recouvrent de cent manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un
85 n ou totalitaire, brimeraient nécessairement l’un de ces groupes, tendraient à réduire leur variété, et mutileraient ainsi
86 eur variété, et mutileraient ainsi dans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes,
87 ans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur t
88 ux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plu
89 s, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la
90 créter sur table rase, de simplifier les réalités d’ un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite
91 table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalis
92 , de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en é
93 trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en écrasant tout ce qui résiste, ou s
94 ut ce qui dépasse. Mais c’est la vitalité civique d’ un peuple qu’on écrase ainsi. Une politique fédéraliste, telle qu’on v
95 u’on vient de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle
96 de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne.
97 iniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne. C’est pourquoi je disais pl
98 pourquoi je vois en elle le seul avenir possible de l’Europe, et le don que nous pouvons lui faire en restant fidèles à n
99 stant fidèles à nous-mêmes. b. Rougemont Denis de , « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse (1848-1948), Morat, Édi
2 1948, Articles divers (1948-1950). Essai sur l’avenir (1948)
100 , la seule méthode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’ analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et
101 thode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et qui progresse
102 nous sommes libres, après Heisenberg et la Bombe, de penser n’importe quoi, et que cela changera tout. Pardon ! La science
103 uves que vos superstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font
104 uperstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’ égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font déjà mille ki
105  ! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre de la bombe atomique, ses spéculations les plus « folles » ! Libre à vou
106 s spéculations les plus « folles » ! Libre à vous de prendre pour but l’évocation des fées du Moyen Âge : jamais une fée n
107 pas folle, c’est qu’elle nous permet aujourd’hui d’ aller beaucoup plus vite qu’il y a cent ans. Voilà qui est sérieux, me
108 sant le contester autour de moi, je crois prudent de l’accepter. J’admets aussi que l’évocation des fées ne sert à rien et
109 ant que dans quelques lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’aller plus vite, et donc commencent à se demander à
110 es lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’ aller plus vite, et donc commencent à se demander à quoi cela sert. Su
111 pposez que leur plaisir nouveau et principal soit d’ évoquer quelque chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après deux
112 et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’ application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’utilité urge
113 , inventent mille tours sentimentaux insoupçonnés de notre barbarie, créent l’immobilité dont le sous-produit nommé lenteu
114 r est vénéré par quelques sectes populaires, font de la mort une plaisanterie d’un goût sublime qui perd son sel à être ré
115 ctes populaires, font de la mort une plaisanterie d’ un goût sublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’une seule
116 ublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’ une seule pensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendr
117 ensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendre pour but la construction d’un moteur atomique : jamais un mot
118 Libre à vous de prendre pour but la construction d’ un moteur atomique : jamais un moteur atomique n’a évoqué la moindre f
119 s utopies, c’est qu’elles paraissent moins riches d’ avenir que le présent. On peut même dire que l’Utopie se définit comme
120 e la plupart des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des hi
121 art des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des historiens
122 bee, les utopies sont en réalité des « programmes d’ action déguisés en descriptions sociologiques imaginaires », et l’acti
123 utre que l’arrêt artificiel, à un certain niveau, d’ une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l
124 tain niveau, d’une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l’on considère comme bons, et l’on en
125 l’abri des menaces vulgaires comme des créations de l’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité touj
126 ’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire.
127 éalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’une manière moins s
128 f, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’ imaginer l’avenir d’une manière moins statique par hypothèse ? Quelles
129 e l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’ une manière moins statique par hypothèse ? Quelles seraient les condit
130 ons requises ? Il faudrait se garder tout d’abord de composer un tableau cohérent. Ménager à chaque pas la liberté du choi
131 ns possibles. Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les ob
132 . Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les obstacles qu’o
133 essent à gauche et à droite. (C’est le vrai moyen de la passionner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos effo
134 onner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos efforts présents, les conduites qui pourront résulter du succès m
135 es conduites qui pourront résulter du succès même de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’imaginer beaucoup de
136 de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’ imaginer beaucoup de nos meneurs politiques : ils voient les condition
137 os meneurs politiques : ils voient les conditions de leur victoire, mais non ses suites.2) L’effort le plus soutenu, le mi
138 fourni jusqu’ici le monde occidental, c’est celui de dominer la nature par la science, dans l’espoir d’augmenter le confor
139 e dominer la nature par la science, dans l’espoir d’ augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la d
140 spoir d’augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysiqu
141 vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysique et religieux s’est relâché à partir du
142 nies, qui sont des désordres fixés. Seul l’effort de la science (dont le sous-produit est l’industrie) enregistre un progr
143 surable, et semble se poursuivre avec des chances de succès toujours accrues. Il en résulte, dans les masses, certaines cr
144 science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bi
145 rs raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bien en soi. La vi
146 c qu’elle est « vraie ». En retour, nous refusons de croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie o
147 croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie ou condamne, et nous accordons à cette science l’autor
148 a science qu’elle vénère, ou du moins s’informera de ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’arrêt que semble ma
149 e ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’ arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Ca
150 du temps d’arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Car celle-ci semble avoir atteint, provisoi
151 me qu’elle l’a déjà percé, en ramenant un atome à de l’énergie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’immatériel,
152 gie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’ immatériel, pour parler un langage grossier. (Mais c’est celui, précis
153 elui, précisément, dans lequel la grande majorité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’i
154 ité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les not
155 temporains traduisent les résultats de la science d’ hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix
156 s tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau
157 prême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathé
158 es notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathématiciens et les b
159 e poussée à l’extrême ne peut nous rapprocher que de l’« à quoi bon ? », c’est-à-dire des questions métaphysiques que notr
160 ionaliste, indéfendable aux yeux de la science et de la raison, neutralise pratiquement la vitesse des transports. (Passer
161 e pratiquement la vitesse des transports. (Passer d’ Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époq
162 asser d’Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol
163 renait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches a
164 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, a
165 tophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.) La pas
166 faveur desquelles les possibilités destructrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beauco
167 uctrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beaucoup plus généreusement que ne le sont les
168 possibilités constructrices pendant les périodes de paix. On peut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre
169 eut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre effort scientifique, provoque ainsi les forces les mieux faites
170 ion prométhéenne. Une autre conséquence indirecte de l’effort scientifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la
171 ntifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait l
172 être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait la science du
173 psychologie, la sociologie, nous servent en fait d’ alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’e
174 nous servent en fait d’alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’en d’autres temps l’on eût app
175 qu’en d’autres temps l’on eût appelées faiblesse de caractère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en l
176 tère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre
177 n liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dan
178 e que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dans l’acte du
179 gurer qu’elle consiste à « avoir » la disposition d’ un choix d’objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S
180 le consiste à « avoir » la disposition d’un choix d’ objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S’il est vra
181 ppements devons-nous prévoir à partir du complexe de tensions que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature,
182 ons que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature, nous n’avons pas encore répondu par une victoire totale, i
183 ne victoire totale, il s’en faut, mais les moyens de cette victoire sont désormais entre nos mains. La principale résistan
184 Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise de l’énergie atomique) en laissant en friche le champ des passions (nati
185 me, politique partisane). Les passions s’emparent de la technique et provoquent la guerre atomique. Les destructions sont
186 estructions sont telles, et le choc psychologique de telle nature, que la civilisation occidentale se disloque en îlots pl
187 loque en îlots plus ou moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les dern
188 u moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les derniers lieux communs mo
189 ux communs moraux se désintègrent. Il reste assez d’ hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances tech
190 se désintègrent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour mainte
191 rent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et
192 ’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et là des apparences de «
193 echniques pour maintenir ici et là des apparences de « vie normale », mais les liens profonds sont coupés. Plus rien ne va
194 rets, des policiers ou des fugitifs. Les sociétés de gangsters se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous o
195 se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous ordres, on expérimente des morales nouvelles et des formes nouve
196 nte des morales nouvelles et des formes nouvelles de résistance contre l’État vainqueur et son empire, théoriquement unive
197 vainqueur et son empire, théoriquement universel. De ces communautés persécutées peut sortir une spiritualité nouvelle, mè
198 utées peut sortir une spiritualité nouvelle, mère d’ une civilisation imprévisible. 2. Nous répondons au challenge des pass
199 libres et presque instantanés sur toute l’étendue de la planète. Pour la première fois dans l’histoire du monde, il n’y a
200 u’une seule civilisation (l’occidentale, enrichie d’ apports orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédé
201 orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédéraliste ; et la question sociale, au lieu de s’exacerber ten
202 ales la guerre et la paix ; soit que le challenge de nos passions se révèle trop puissant et que notre civilisation y succ
203 y répondions victorieusement par l’établissement d’ un gouvernement mondial, libérant l’effort scientifique. (Je note ce s
204 rt scientifique. (Je note ce sentiment, incapable de preuve, à titre de curiosité pour l’historien futur.) 4. Surmonter
205 r.) 4. Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité d’ une réponse victorieuse, à la dernière heure, quel serait le nouveau c
206 serait le nouveau challenge qui ne manquerait pas de confronter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre eff
207 ter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre effort le plus constant ? Ce serait à coup sûr l’Ennui. Ce sen
208 n la plus typique du xixe siècle. (Sans horaires de tous genres, on ne pourrait imaginer le fonctionnement des grandes us
209 ération vaste et dense.) « L’ennui naquit un jour de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretien
210 our de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider s
211 . Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’en
212 qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’ennui que la multiplicité des imp
213 en difficile de décider si la monotonie crée plus d’ ennui que la multiplicité des impressions. L’Océan ou les chutes du Ni
214 Niagara ne m’ennuient pas, mais bien la traversée d’ une grande ville inconnue. Ce qui provoque l’ennui, dans un cas comme
215 , dans un cas comme dans l’autre, c’est l’absence de rythmes vivants, ou leur rupture fréquente et arbitraire. En d’autres
216 traire. En d’autres termes, c’est la mécanisation de l’existence, ou encore : la répartition indifférente des efforts et d
217 oint choisi par quelque nécessité interne, en vue d’ une création, d’une participation, d’une compréhension en profondeur.
218 quelque nécessité interne, en vue d’une création, d’ une participation, d’une compréhension en profondeur. C’est donc un ac
219 erne, en vue d’une création, d’une participation, d’ une compréhension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entr
220 ension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imagin
221 ssement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de mena
222 ci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans un
223 hallenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans une tempête, mais bi
224 , l’humanité ne pourra répondre que par une prise de position métaphysique. Elle pourra choisir l’anesthésie spirituelle,
225 lisation à l’ennui, sera obtenue par des méthodes de conditionnement social et physiologique, dont le principe général ser
226 l et physiologique, dont le principe général sera d’ obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question mét
227 que, dont le principe général sera d’obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question métaphysique que l
228 oute question métaphysique que l’Ennui risquerait de mettre à nu. Dans ce cas, les spirituels-malgré-tout se verront persé
229 robablement nomade, qui pourra devenir la matrice d’ une civilisation spirituelle et mondiale. 2. Si l’Humanité choisit au
230 e par une élite en tous points comparable à celle de nos savants actuels, dotée des mêmes prestiges populaires, exerçant u
231 exerçant une autorité analogue sur l’orientation de la recherche organisée, et définissant de facto les nouveaux standard
232 e, et définissant de facto les nouveaux standards d’ utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tour
233 sant de facto les nouveaux standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la m
234 x standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la matière — désormais « dépa
235 » — se tournera vers la découverte et la maîtrise de réalités d’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jo
236 era vers la découverte et la maîtrise de réalités d’ un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi p
237 ’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi peu imaginables pour nous que ne pouvait l’être pour
238 ants du xviiie siècle la destruction instantanée d’ une ville par suite de la dissociation d’un invisible point de matière
239 tantanée d’une ville par suite de la dissociation d’ un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, e
240 par suite de la dissociation d’un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, et sans nom dans notre
241 je désignais en débutant par le terme symbolique de Fées. 1. Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atom
242 la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contr
243 ires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contribué d’ une manière décisive à donner forme à un avenir très différent de leur
244 écisive à donner forme à un avenir très différent de leurs prévisions. Saint-Simon a fourni les cadres du capitalisme indu
245 Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis de , « Essai sur l’avenir », Pro regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Cal
3 1948, Articles divers (1948-1950). Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)
246 Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)c La crise actuelle nous force à nous interrog
247 e nous force à nous interroger sur la valeur même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’auton
248 r même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’autonomie du continent, et que signifierait sa p
249 s qui pèsent sur nous mettent en cause une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis de
250 e une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’Europe. En les per
251 liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’ Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce
252 om d’Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la
253 coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la vie. Le monde entier en serait appauvri. C’est donc une notion de
254 entier en serait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun
255 ait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun. C’est en ell
256 nité la plus profonde. Et c’est en la définissant d’ une manière actuelle et concrète que nous poserons les bases de la féd
257 actuelle et concrète que nous poserons les bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de
258 bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que le
259 ui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nou
260 Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ordre économique et politique, il n’est pas moins ce
261 t vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ ordre économique et politique, il n’est pas moins certain que l’unité
262 politique, il n’est pas moins certain que l’unité de l’Europe est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géogra
263 e est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géographie, l’Europe n’est qu’un cap de l’Asie. Du point de vue de
264 du monde, l’Europe reste aujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’une culture inégalée, plus intense, plus div
265 ujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’ une culture inégalée, plus intense, plus diverse et créatrice qu’en to
266 lus diverse et créatrice qu’en toute autre région de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plu
267 ion de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plus large et humain. La culture véritable n’est
268 e véritable n’est pas un ornement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme
269 ement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît
270 mble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle il
271 concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’ une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut
272 la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut une certaine conception de
273 ustre, traduit et promeut une certaine conception de l’existence ; elle l’éduque ; elle en donne le sens. Or il est bien t
274 e ; elle en donne le sens. Or il est bien typique de l’Europe, aujourd’hui, que la culture ainsi comprise y soit encore un
275 lleurs, elle est mise au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du
276 se au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du parti au pouvoir, l
277 ont les chefs du parti au pouvoir, les dirigeants de l’économie qui lui dictent un programme précis, qui limitent ses acti
278 aire, c’est la culture qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influen
279 qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les c
280 ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définit
281 fluencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et
282 uté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et promouvoir notre culture, cela signifie d’abor
283 Européens : élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moye
284 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins
285 nifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités
286 es moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités publiques et privées à une
287 privées à une notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le
288 notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vi
289 ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vie et les institutions. La conception européenne de l’homme
290 et les institutions. La conception européenne de l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa l
291 e l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une d
292 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique
293 e sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’ une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie, mais au cont
294 été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique, d’ une nation ou d’une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours,
295 l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou d’ une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours, et ce sera, tant
296 , et ce sera, tant qu’il y aura l’Europe, l’effet d’ un dialogue permanent, bien souvent dramatique, parfois tragique, entr
297 doctrines ou plusieurs confessions, une vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, il
298 ssions, une vingtaine de nations, et une infinité d’ écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Eu
299 vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Europe et à mo
300 é à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée n’est pas simple, mais toujours dialectique ; ell
301 le trouve son unité dans la diversité des couples d’ éléments antagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous e
302 tagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous et se renouvelle à chaque génération : antiquité et christianism
303 et protestantisme, attachements régionaux et sens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion
304 ens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion du progrès, science et sagesse, germanisme et
305 e… Dans cet équilibre tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risqu
306 tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme
307 se menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aven
308 ’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous p
309 ropéen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous participe plus ou moins consciemment réside le secret du dynamis
310 mment réside le secret du dynamisme occidental et de l’inquiétude créatrice qui pousse l’Européen à remettre en question,
311 ice qui pousse l’Européen à remettre en question, de siècle en siècle, ses rapports avec Dieu, avec le monde, avec l’État
312 naisons variées à l’infini qu’il lui est possible d’ opérer entre les éléments contradictoires constituant son patrimoine,
313 patrimoine, réside la chance, pour tout Européen, d’ individualiser de plus en plus ses jugements et son mode de vie. Et en
314 ns ce choix permanent, dans la conscience qu’il a d’ en être responsable, l’Européen conçoit la liberté. Toute notre histo
315 istoire illustre ce débat, qui se livre en chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entr
316 n chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrann
317 rté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’indiv
318 écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits
319 grès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l
320 Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à ce
321 e sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste s
322 ile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste se déclenche, au nom de la
323 llectiviste se déclenche, au nom de la justice ou de l’ordre social. Elle donne naissance à des régimes unitaires (qu’on a
324 à se dresser avec une passion renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenan
325 renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenant dans quelle notion commune d
326 s cherchons maintenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’indiv
327 intenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et d
328 t de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et du collectivisme, renaissant à toutes les époques
329 qu’au xxe siècle, mais qui a toujours été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idé
330 été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion
331 ion directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’origine chrétienne, acceptée et r
332 ’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’ origine chrétienne, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de
333 e, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de l’homme doublement responsable envers sa vocation et envers la cité ;
334 on pas seulement libre ou seulement engagé ; lieu d’ une synthèse vivante, mais aussi d’un conflit entre des exigences égal
335 engagé ; lieu d’une synthèse vivante, mais aussi d’ un conflit entre des exigences également valables mais pratiquement an
336 devient infidèle à lui-même et au génie créateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes,
337 réateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa p
338 de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa particularité (nation, parti ou idéologie), soit q
339 idéologie), soit qu’il prétende l’imposer à tous d’ une manière uniforme, donc tyrannique. Diversité et division des na
340 et des idéologies Cette description succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-
341 succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-uns des problèmes brûlants que nous pos
342 ntinent, a fait pendant des siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusio
343 siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État,
344 ité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réa
345 e. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réalités culturelle
346 iques et administratives, qui n’ont aucune raison de se recouvrir en fait, cette diversité naturelle est devenue division
347 uvrit nos échanges culturels. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’as
348 els. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’assurer son existence écono
349 apable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’ assurer son existence économique. Cet individualisme national, qui ten
350 anger pour la vie réelle des nations. Dans l’état de faiblesse où il les met, il les livrera fatalement à l’unification fo
351 t à l’unification forcée, soit par l’intervention d’ un empire du dehors, soit par l’usurpation d’un parti du dedans. C’est
352 tion d’un empire du dehors, soit par l’usurpation d’ un parti du dedans. C’est pourquoi l’union fédérale est devenue la seu
353 es. Aussi indispensables que les nations à la vie de la culture et à la liberté, ces diversités à leur tour tendent à deve
354 ngereuse et utopique que ne serait l’impérialisme d’ une seule nation. Il est bien clair que ni la droite, ni la gauche, ni
355 uche, ni le centre, aujourd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de
356 urd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par
357 cun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par suite son propre avenir. De même que les nati
358 son propre avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique
359 e avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur s
360 ue si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre l
361 ue de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, ren
362 souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, renoncent à t
363 ubordonnent leur tactique à la stratégie générale d’ une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour
364 eur tactique à la stratégie générale d’une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour sauver nos d
365 de salut public européen. c. Rougemont Denis de , « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Par
366 t Denis de, « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Paris, juin 1948, p. 14-15.
4 1948, Articles divers (1948-1950). Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)
367 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
368 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
369 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
370 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
371 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
372 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
373 fondamental, et que personne ne peut nier : Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
374 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les probl
375 à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
376 omie moderne. Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
377 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
378 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
379 à-dire la Troisième puissance, qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
380 e puissance, qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
381 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
382 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
383 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
384 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
385 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
386 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
387 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
388 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
389 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
390 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
391 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
392 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
393 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique Cela « soulè
394 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
395 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ic
396 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ici ! — mais nous nou
397 ntre les thèses — ici ! — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
398 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
399 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
400 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
401 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
402 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
403 re l’Europe. Mais quelle Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
404 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
405 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
406 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
407 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
408 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
409 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
410 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
411 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
412 autres couples combinés et permutés, sans parler de leur ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les au
413 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
414 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
415 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
416 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
417 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
418 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
419 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
420 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
421 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
422 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
423 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
424 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
425 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle sa liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
426 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
427 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
428 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
429 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
430 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
431 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
432 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps, par
433 ps, par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
434 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
435 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolog
436 re sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
437 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
438 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
439 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
440 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
441 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
442 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
443 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
444 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
445 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
446 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec to
447 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec tout le monde
448 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
449 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ain
450 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ainsi qu’on pe
451 pose à votre admiration : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
452 suffirait. Mais soyons sérieux : quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
453 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
454 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
455 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
456 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
457 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
458 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
459 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
460 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclament leur fédération, pourront se faire entendre au m
461 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de, « Pourquoi l’Europe ? », Rasse
462 forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de , « Pourquoi l’Europe ? », Rassemblement : bulletin intérieur hebdomad
463 ette note : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récem
464 e : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’ essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récemment des
465 nt de faire, en tant que membre du Comité central de l’Union européenne des fédéralistes, une conférence en Sorbonne. Les
466 à quel point les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblemen
467 t les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblement. »
5 1949, Articles divers (1948-1950). La liberté religieuse à l’école (2e semestre 1949)
468 règlements scolaires sont stricts : toute absence d’ un élève qui n’est pas justifiée par des raisons « réputées légitimes 
469  réputées légitimes », telle que maladie, réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être pun
470 réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être punie, surtout si elle se répète à intervall
471 lors subie par les parents ou responsables, et va de l’amende à la prison selon les cas et les pays. On imagine tous les c
472 s aussi sévères, pour peu qu’on veuille se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossier
473 le se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’ examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes
474 ontre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes dans trois pays : la Bel
475 ns plusieurs départements, après que les demandes de dispense ont été refusées « au nom de la loi », il est arrivé fréquem
476 loi », il est arrivé fréquemment que le directeur d’ une école, ou l’inspecteur d’académie, consentissent finalement à inte
477 ent que le directeur d’une école, ou l’inspecteur d’ académie, consentissent finalement à interpréter la loi, et à suspendr
478 n Algérie ou en Alsace, des amendes ou des peines de prison ont été infligées aux pères d’enfants absents plusieurs samedi
479 des peines de prison ont été infligées aux pères d’ enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches a
480 ées aux pères d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignemen
481 res d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’ innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des pré
482 te. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des préfets et des ministres semblent avoir rencontré
483 quel que soit le désir, dont beaucoup témoignent, d’ assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la
484 nt beaucoup témoignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’e
485 moignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolér
486 la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’ un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de préte
487 il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’i
488 e l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’intolérance. En Suisse, la situation dif
489 il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’ intolérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’un canton à l’
490 lérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’ un canton à l’autre. C’est ainsi que l’État de Genève accorde le congé
491 nquait l’école le samedi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se re
492 medi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d
493 ce : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d’ une faute, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettr
494 e, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettre. À ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinqu
495 uatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’ absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a acce
496 isonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de pay
497 autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence
498 ccepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’
499 llant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en a pas moins été condamné (
500 après « récidives ») à trois, puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dans un cant
501 loi paraît plus tolérante. L’instruction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes compr
502 ction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une diza
503 ous disent les gens pressés : qu’il ne s’agit que de cas fort rares, que les adventistes sont en très petit nombre, qu’ils
504 tistes sont en très petit nombre, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la sema
505 e, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne m
506 r sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’indignation, d
507 semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’ indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millio
508 indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou a
509 poque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’ innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Rema
510 e sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Remarquons tout d’abord que le n
511 que les bonnes gens qui parleraient volontiers «  d’ exceptions négligeables » dans le cas d’une secte brimée, ne voient pa
512 ontiers « d’exceptions négligeables » dans le cas d’ une secte brimée, ne voient pas que cet argument devrait en bonne logi
513 , dont le nombre est infime. Ensuite, la question de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au
514 n de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davan
515 ison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davantage intervenir dans la considération des fai
516 qui nous occupent. Il s’agit ici du respect légal de toutes les convictions religieuses en tant que telles, et non point d
517 uses en tant que telles, et non point du jugement de vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions,
518 vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions, car si les deux points de vue n’étaient pas dissocié
519 nutieusement ces libertés. Céder sur une question de principe, sous prétexte qu’elle n’intéresse qu’une minorité microscop
520 écise, suffirait à résoudre des conflits du genre de ceux que l’on vient de citer. Il serait, par exemple, extrêmement fac
521 citer. Il serait, par exemple, extrêmement facile d’ introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une
522 facile d’introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une clause spéciale ajoutant à la liste des « 
523 éciale ajoutant à la liste des « motifs légitimes d’ absence aux cours » le fait d’appartenir à certaines religions, sectes
524 « motifs légitimes d’absence aux cours » le fait d’ appartenir à certaines religions, sectes ou confessions. À cela j’imag
525 ions courantes : on dira qu’il est trop compliqué de prévoir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des p
526 ir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des précédents dont mille sectes à l’avenir pourront être tenté
527 ont mille sectes à l’avenir pourront être tentées d’ abuser. Le premier argument n’est pas sérieux. Les lois pénales décriv
528 is pénales décrivent dans le détail des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales,
529 il des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales, les lois sur les loyers et les « 
530 ns à distinguer, à nuancer, à préciser, à prévoir d’ infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien
531 à prévoir d’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateu
532 ’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateur ! S’il n’a
533 ur le législateur ! S’il n’apportait qu’une trace de ce génie méfiant dans la rédaction des décrets garantissant les droit
534 itutions, la Liberté et la Démocratie cesseraient d’ être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on d
535 t la Démocratie cesseraient d’être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on dit avoir, que des « pa
536 n’ouvrent la porte à l’anarchie, elle se nourrit d’ une double confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’accorder des
537 uble confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’ accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « libe
538 s d’accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties p
539 iaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties proclament à l’envi. Et d’aut
540 roclament à l’envi. Et d’autre part, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement
541 t, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement. Quand ils se révéleraient deux o
542 s plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ ajouter quelques clauses aux milliers d’autres, utiles ou non, qui s’a
543 montrent soudain les plus stricts dans leur refus de considérer les droits d’une petite confession qui ne menace personne.
544 stricts dans leur refus de considérer les droits d’ une petite confession qui ne menace personne. On les honore d’avoir sa
545 confession qui ne menace personne. On les honore d’ avoir sauvé d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoi
546 i ne menace personne. On les honore d’avoir sauvé d’ une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au ra
547 d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parl
548 la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’un cent
549 ionale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’ un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils
550 u’elle ne soit parlée que par moins d’un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils pas qu’en assu
551 nt ne verraient-ils pas qu’en assurant les droits d’ une minorité religieuse, ils confirmeraient les principes qui, depuis
552 ils confirmeraient les principes qui, depuis plus d’ un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur p
553 s qui, depuis plus d’un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’e
554 sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des d
555 eur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des difficultés particulièr
556 tent leurs croyances, m’a paru propre à illustrer d’ une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse
557 er d’une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse à l’école. Parce qu’il n’est pas spectaculaire,
558 aru poser le plus clairement possible la question de principe du respect effectif des libertés théoriquement admises par l
559 , mais je sais que toute restriction à la liberté d’ un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du
560 n à la liberté d’un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne
561 tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne l’oublions jamais, est en quelque manière ou quelqu
562 ersécution qu’une autre endure. Est-il nécessaire d’ ajouter qu’il en va de même pour nos droits politiques et civiques ? O
563 r la liberté, dans notre monde, qu’en s’efforçant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de, « La liberté religieuse
564 çant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de , « La liberté religieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris, 1
565 i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Au
566 ar la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Autoriser une r
567 t, en fait, refuser cette liberté qu’on se flatte de lui accorder. Denis de Rougemont l’expose fort bien dans les pages qu
568 ’est pas inconditionnelle n’est qu’une caricature de la liberté. » j. « Confession » dans l’original. On a corrigé une er
6 1949, Articles divers (1948-1950). Commencer par l’Europe (février 1949)
569 l’Europe (février 1949)f Il paraît que l’idée d’ un gouvernement mondial vient enfin d’atteindre Paris ; il était temps
570 que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin d’ atteindre Paris ; il était temps ! C’est une idée qui était dans l’air
571 mondiales. Qui dira plus ? Ici, nous avons l’air de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. N
572 ir de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de na
573 de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander :
574 urope. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander : pourquoi l’Europe 
575 rticulier : c’est qu’il faut lui montrer un point d’ application. (Or, quand on veut engager un élan émotif dans la réalité
576 élan émotif dans la réalité, on a toujours l’air de freiner.) Nous ne sommes pas une autre école, nos buts finaux sont bi
577 renons au mot. Et nous vous proposons une méthode de travail, un mouvement qui est déjà au travail, et un objectif immédia
578 déjà au travail, et un objectif immédiat, qui est de commencer par l’Europe. Car nous pensons que le chemin vers la paix,
579 u ne passera pas du tout. J’ai peut-être le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a trois ans, je m
580 tre le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’ Hiroshima, il y a trois ans, je me suis trouvé l’un des premiers à pro
581 ouvernement mondial. Je n’ai pas un mot à retirer de ce que je publiais à l’époque. Je ne suis pas un instant revenu en ar
582 revenu en arrière. Je suis au contraire convaincu d’ avoir fait un grand pas en avant en embrassant la cause européenne. Vo
583 quelles raisons, les plus simples du monde, mais d’ une logique à laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me s
584 laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me soustraire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planèt
585 traire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planète unie par les peuples unis — et j’en étais — un certain rid
586 peuples unis — et j’en étais — un certain rideau de fer est tombé, brutalement. Et la guerre froide a commencé. La situat
587 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
588 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
589 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
590 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
591 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
592 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
593 fondamental, et que personne ne peut nier : aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
594 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les prob
595 une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
596 ie moderne. ⁂ Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
597 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
598 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
599 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’ être enfin la dernière, parce qu’elle laissera peu de monde pour en fa
600 aussi tout cela nous conduit, avec la force même de l’évidence, vers une seule et unique solution. Si nous voulons sauver
601 et unique solution. Si nous voulons sauver chacun de nos pays, il nous faut unir ces pays. Si nous voulons sauver la paix,
602 -à-dire la troisième puissance qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
603 me puissance qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
604 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
605 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
606 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
607 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
608 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
609 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
610 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
611 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
612 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
613 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
614 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
615 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
616 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique. Cela « soul
617 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
618 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — m
619 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — mais nous nous occup
620 rien contre les thèses — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
621 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
622 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
623 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
624 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
625 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
626 ns viennent nous dire : tous ces gens, qu’ont-ils de commun entre eux ? Quelle unité voyez-vous dans tout cela ? Eh bien,
627 e : tous ces gens partagent le même sort, le sort de l’Europe, c’est-à-dire que si l’on ne fait rien, ils seront tous les
628 s gens ont en commun le dégoût et la peur immense de la guerre, et nous voulons pour eux et avec eux faire la paix. Voilà
629 aincre. ⁂ J’en reviens à la méthode et aux moyens d’ action. Aux impatients qui rêvent d’unifier le genre humain dans les q
630 et aux moyens d’action. Aux impatients qui rêvent d’ unifier le genre humain dans les quinze jours, le plus grand choc que
631 e plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore
632 c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore notre fédération européenne. Car c’est préci
633 parti au pouvoir et une opposition, un seul type de drug-store, et une morale moyenne, dont l’idée générale est justement
634 orale moyenne, dont l’idée générale est justement d’ éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie,
635 ement d’éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie, c’est encore plus simple : une seule tête,
636 le : une seule tête, un parti, une police, et pas d’ opposition permise dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines d
637 dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
638 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
639 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
640 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
641 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
642 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
643 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
644 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
645 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
646 autres couples combinés et permutés, sans parler de leurs ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les a
647 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
648 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
649 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
650 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
651 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
652 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
653 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
654 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
655 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
656 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
657 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
658 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
659 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle la liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
660 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
661 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
662 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
663 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
664 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
665 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
666 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps par l
667 mps par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
668 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
669 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolo
670 e sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
671 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
672 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
673 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
674 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
675 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
676 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
677 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
678 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
679 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
680 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.
681 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d
682 ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d’ insister : la méthode du fédéralisme est la seule qui soit adaptée à n
683 ropéennes. Faire du fédéralisme, c’est donc faire de l’Europe, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ I
684 rope, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assig
685 s de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assigne une pareille attitude. Certes, nous voulons f
686 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
687 s en préconisant le fédéralisme à tous les étages de la société, dans la commune et l’entreprise d’abord, puis à l’échelle
688 savons bien que nous heurtons certaines habitudes de pensée à la fois nationalistes et rationalistes, c’est-à-dire en un m
689 ure des obstacles qu’elle trouve posés en travers de sa route vers l’Europe fédérée et vers la paix — à la destruction du
690 et que Nietzsche appelait un jour « le plus froid de tous les monstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toute
691 nstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toutes nos guerres. Sur ce point-là, nous serons à notre tour irréduc
692 e que nous voulons supprimer, c’est l’étatisation de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par l
693 on de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le
694 ation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le dogme et la pratique des souverainetés nati
695 nous demandons et préparons, comme premier point de tout notre programme, l’institution d’une Cour suprême européenne, c’
696 mier point de tout notre programme, l’institution d’ une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’un pouvoir supérieur aux É
697 ution d’une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’ un pouvoir supérieur aux États. Cette Cour suprême doit être la gardie
698 États. Cette Cour suprême doit être la gardienne d’ une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en app
699 me doit être la gardienne d’une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en appeler, contre les pouvoir
700 t qui garantit les libertés européennes, le droit d’ opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas
701 e droit d’opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler
702 n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler de dictature : voir les démocraties dites populaires. Les vues que j’ex
703 férence des Cinq va peut-être accepter notre plan de Parlement européen. Cette assemblée, que nous voulons élue à la fois
704 a fois par les parlements et par les forces vives de chaque pays, doit se réunir dans quelques mois. Elle aura pour missio
705 réunir dans quelques mois. Elle aura pour mission de proposer la création d’une Cour suprême et la Constitution fédérale d
706 s. Elle aura pour mission de proposer la création d’ une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelqu
707 on d’une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelque chose, qui peut devenir beaucoup… Mais nous s
708 instant dévier vers on ne sait quelles alliances d’ États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans tr
709 ne sait quelles alliances d’États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait
710 alliances d’États souverains pris de panique, ou d’ états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait quelles déclara
711  ; vers on ne sait quelles déclarations sans rire de sécurité collective ; vers on ne sait quelle coalition sur le papier
712 le coalition sur le papier qui se donnerait l’air de provoquer l’un des deux grands, sans créer pour autant la force néces
713 ger l’agression… C’est donc, pour nous, le moment d’ être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active d
714 moment d’être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d
715 active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d’ imprimer un grand élan à notre propagande populaire, ou pour mieux dir
716 e populaire, ou pour mieux dire : à l’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui
717 ’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui seul, faire tout le travail et créer
718 plus entendre, pour l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci :
719 r l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons
720 une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons que souhaiter bonn
721 eux pionniers du fédéralisme. » C’est une manière de dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts
722 dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts, et si vous gagnez par miracle, bien entendu, nous v
723 a ceux qui nous applaudissent, comme ces soldats de je ne sais quel pays, dans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sor
724 ans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sortir de la tranchée et s’élancer le premier à l’attaque, criaient bravo ! bra
725 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ain
726 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ainsi qu’on po
727 cette phrase admirable : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
728 suffirait. Mais soyons sérieux ; quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
729 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
730 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
731 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
732 us disent non sans raison : « Nous sommes saturés de discours ! Ce qu’il nous faut, ce sont des gestes ; sortez avec un ou
733 bien tort quand il cherchait un homme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’en devenir un lui-même. C’est le plu
734 omme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’ en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’en trouver. Une bata
735 d’en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’ en trouver. Une bataille est en train de se livrer pour l’Europe. Nous
736 ralisme court sa chance, et avec elle les chances de la paix. Si nous voulons la paix, nous devons vouloir ses moyens : l’
737 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
738 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
739 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
740 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
741 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclamant leur fédération, pourront se faire entendre au m
742 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de, « Pour sauver la paix : commen
743 forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de , « Pour sauver la paix : commencer par l’Europe », Fédération, Paris,
7 1949, Articles divers (1948-1950). L’Europe ou le cap du destin (1949)
744 eurs européennes viennent de l’esprit, et non pas de la nature ni du nombre. Comment expliquer autrement que ce cap déchiq
745 Comment expliquer autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa popu
746 r autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu
747 de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’ un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant p
748 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant par ses armes
749 es pouvoirs sur les choses et la vie ? Les causes de cette puissance, naguère mondiale, du « petit cap », furent très dive
750 urope a dominé par ses techniques, par sa science de la mise en valeur d’un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a
751 s techniques, par sa science de la mise en valeur d’ un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a dominé par la violenc
752 aussi, et par la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a d
753 r la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une m
754 esclavage ou en servage de centaines de millions d’ habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beauc
755 u en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beaucoup plus sub
756 abitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’ une manière beaucoup plus subtile, et peut-être plus effective, en imp
757 n imposant à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme,
758 à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dé
759 ertain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dérivent les grands concepts
760 ristianisme, et dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité
761 t dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, conc
762 ent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se
763 nds concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament,
764 berté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament, au xxe siècle, l
765 tiens, les Américains comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de te
766 comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science p
767 de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctr
768 eux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou
769 e. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés d
770 e philosophie ou de technique, de science pure ou d’ industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le
771 ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier
772 e pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marqu
773 industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marques — ou les
774 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. Et certes, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes d
775 s, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes de sa puissance ; on les retourne sans scrupules contre elle. Mais elle
776 rupules contre elle. Mais elle reste le palladium d’ une civilisation que tous rêvent d’imiter. Dire que l’Europe est mena
777 e le palladium d’une civilisation que tous rêvent d’ imiter. Dire que l’Europe est menacée — et l’on sait à quel point la
778 se — c’est donc dire que le cœur et la conscience d’ une culture désormais universelle sont menacés. Pour le bien comme pou
779 Pour le bien comme pour le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres contine
780 ur le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres continents nous ont ravi les
781 res continents nous ont ravi les moyens matériels de la puissance, et nous en ont en quelque sorte purifiés. Ils nous ont
782 us ont condamnés à ne représenter que l’essentiel d’ une civilisation : son génie, ses mesures, sa culture. Défendre l’Euro
783 riel, ni la puissance militaire, ni la suprématie de la race blanche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’État,
784 nche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’ État, ni le nationalisme, car l’Amérique ou la Russie s’en chargent. E
785 a Russie s’en chargent. Et s’il ne s’agissait que de cela, nous pourrions aussi bien nous laisser coloniser par les Yankee
786 iniens. Ils ont appris à se servir mieux que nous de ces armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. S
787 armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. Si les Européens, dans leur majorité, refusent à la fois d
788 Européens, dans leur majorité, refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sen
789 refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sentent bien que dans le meilleur
790 sentent bien que dans le meilleur cas, en retour de certains avantages matériels, ils perdraient ce qui fait le sens même
791 atériels, ils perdraient ce qui fait le sens même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aîn
792 s même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diab
793 céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’ aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diable. Et le monde entier e
794 Cette Europe, pratiquement réduite à l’essentiel de son génie, à ce qu’il a de plus défendable, comment allons-nous la dé
795 ouanes, et créer des pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
796 pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
797 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
798 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul
799 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de préveni
800 eut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de prévenir la guerre. Tels sont les buts concrets que se sont assignés
801 eurs du Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’ août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’o
802 Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
803 u mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, une Assemblée parl
804 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce
805 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande artif
806 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, nous venons de le voir ; c’est
807 iment existe, nous venons de le voir ; c’est lui, d’ instinct, qui nous fait repousser les tentations russe et américaine.
808 ns russe et américaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre consc
809 ricaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissan
810 aintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’ expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche don
811 ’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche dont le congrès d
812 t et agissant. Telle est la tâche dont le congrès de La Haye, il y a un an, proclamait la nécessité. La section culturelle
813 européen de la culture, prévu par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’études. Il a son siège à Genève, où il t
814 par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’ études. Il a son siège à Genève, où il travaille depuis le mois de fév
815 on siège à Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) D
816 Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) Documentatio
817 r tous les efforts entrepris dans les divers pays d’ Europe en faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres
818 pays d’Europe en faveur de l’union des peuples et d’ une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existe
819 faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’i
820 e éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’ instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première tâch
821 gnorent mutuellement. La première tâche sera donc de dresser un inventaire des forces spirituelles, intellectuelles et art
822 nt. b) Coordination des activités « culturelles » de tous ordres, qui se placent sur un plan européen. Deux exemples entre
823 n européen. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’ études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsable
824 n. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsables d’une d
825 entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’ organiser une rencontre entre les responsables d’une dizaine d’institu
826 d’organiser une rencontre entre les responsables d’ une dizaine d’instituts visant à la formation d’une jeune élite europé
827 ne rencontre entre les responsables d’une dizaine d’ instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et il r
828 s d’une dizaine d’instituts visant à la formation d’ une jeune élite européenne ; et il rassemble une équipe d’historiens,
829 une élite européenne ; et il rassemble une équipe d’ historiens, en vue de la révision des manuels scolaires, qui furent de
830 listes. c) Étude et formulation des grands thèmes de la propagande générale du Mouvement européen. Ici, nos intellectuels
831 ci, nos intellectuels ont une occasion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un m
832 sion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun es
833 sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’ un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au me
834 ir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’h
835 adre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’hypocrisie en service commandé,
836 vice commandé, ils vont pouvoir prendre leur part d’ action, assumer conjointement les décisions politiques, juridiques ou
837 pour être exécutées demain par un pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’études met au point le programme d’un
838 pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’ études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui d
839 tre, le Bureau d’études met au point le programme d’ une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne
840 études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne. Des rapports na
841 es rapports nationaux, préparés par les « Groupes d’ étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la
842 pes d’étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la base des travaux. Et l’on doit espérer que de
843 ont la base des travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les
844 s travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les faiblesses de
845 mentés, inventoriant les forces et les faiblesses de nos cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : l
846 os cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de divis
847  : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de division dont nous souffrons, les autres sur ce qui peut naître dans
848 ur ce qui peut naître dans une Europe débarrassée de ses frontières étatiques, enfin « rendue dans toute son étendue à la
849 et des biens ». ( Message aux Européens , congrès de La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. I
850 La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut ê
851 nion ne sera jamais réelle sans le concours actif de chacune d’elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accep
852 a jamais réelle sans le concours actif de chacune d’ elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accepter nos div
853 les. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’ accepter nos divisions présentes, nous voulons concerter nos vocations
854 ocations pour la défense et pour l’épanouissement d’ un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient per
855 ense et pour l’épanouissement d’un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient perdues. Mais l’Europe
856 perdue sans elles. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fé
857 es. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fédéraliste, qui
858 urent avec l’esprit fédéraliste, qui est le génie de l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de, « L’Europe ou le
859 l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de , « L’Europe ou le cap du destin », Cahiers du Monde nouveau, Paris, j
8 1949, Articles divers (1948-1950). « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)
860 « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)k Depuis
861 t… » (1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaq
862 semaine au micro du « dialogue » qu’est l’Europe. De lundi en lundi, nous suivons ses chroniques au cours desquelles il no
863 s chroniques au cours desquelles il nous démontre de manière éclatante qu’une ère nouvelle s’ouvre au Vieux Continent. Mon
864 faut-il fédérer l’Europe ? Parce qu’il n’y a pas d’ autre moyen imaginable d’empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays
865  ? Parce qu’il n’y a pas d’autre moyen imaginable d’ empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays, c’est, en effet, créer
866 c’est, en effet, créer la seule puissance capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Eur
867 réer la seule puissance capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte
868 à ne faire la guerre à personne, mais à défendre d’ un seul cœur son indépendance reconquise. Paix, liberté, prospérité, t
869 berté, prospérité, tels ont été les grands motifs de toutes les confédérations qui ont vu le jour au cours des siècles, et
870 e main à un ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’ une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de dif
871 ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays
872 6 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays. Je prépare également une conférence culturelle europ
873 tout mon temps. En effet, je dirige ici le bureau d’ études pour un Centre européen de la culture. Pouvez-vous, très succin
874 ure. Pouvez-vous, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute i
875 us, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute indépendance de
876 ernementaux, cet organisme a pour tâche immédiate d’ étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment d
877 cet organisme a pour tâche immédiate d’étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité eur
878 ser toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le
879 à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’ agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le film et la radio, par v
880 opinion, la presse, le film et la radio, par voie d’ informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour cré
881 , le film et la radio, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des u
882 o, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des universités et des me
883 s et des membres des corps enseignants ; et enfin d’ exercer un contrôle vigilant pour restaurer le propre usage des mots-c
884 ible. De plus, le Centre européen offrira un lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, af
885 n lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, afin qu’ils puissent examiner ensemble les gr
886 semble les grandes questions qui affectent la vie de l’Europe, et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion publi
887 ppels à l’opinion publique. k. Rougemont Denis de , « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio,
888 ublique. k. Rougemont Denis de, « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet
9 1949, Articles divers (1948-1950). Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet 1949)
889 ominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de se
890 que éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’i
891 ement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates o
892 levait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates ou marxistes, chrétiennes ou humanistes. Ell
893 s lois, et tous les peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette p
894 peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette puissance inouïe, sa
895 physiquement elle ne figure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa gra
896 qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture,
897 ueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture, qui pour le bien
898 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de m
899 nq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Elle est russe et américaine. Elle se retourne contre nous. L’
900 ions, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, e
901 et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’ annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite
902 onisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite à lutter pour assurer sa survivance é
903 douanes, et créer des pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
904 s pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
905 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
906 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui
907 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui est à son tour le
908 ance européenne, qui est à son tour le seul moyen de prévenir une guerre livrée à nos dépens. Tels sont les buts concrets
909 teurs du Mouvement européen. Nous verrons au mois d’ août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ou
910 u Mouvement européen. Nous verrons au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
911 au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, le Parlement consu
912 uvrira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif de treize nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques
913 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce
914 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande arti
915 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, il n’est pas une chose vague.
916 t pas une chose vague. C’est lui qui nous empêche de dire aux Russes : « Finissons-en, venez nous mettre au pas, et suppri
917 ne à Varsovie. » C’est lui aussi qui nous empêche de dire à nos amis américains : « Mais entrez donc, apportez-nous les se
918 s : « Mais entrez donc, apportez-nous les secrets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’aînesse contre vos belles
919 crets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’ aînesse contre vos belles autos et vos dollars. » Si nous refusons, c’
920 efusons, c’est que nous avons encore le sentiment d’ une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la
921 que nous avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être
922 s avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Eur
923 le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il f
924 rté et de conscience, qui est justement la raison d’ être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des m
925 de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d
926 faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d’ expression, le rendre enfin conscient et agissant. Telle est la tâche
927 e dans quelques mois, et que prépare notre Bureau d’ études. Installé à Genève depuis trois mois. Je ne m’étendrai pas sur
928 . Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques de son travail (documentation européenne ; coordination des efforts entr
929 tous nos pays, et qui souvent s’ignorent ; action de propagande par la presse, la radio, les revues, auprès des élites com
930 près des élites comme du grand public ; formation d’ équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement défi
931 lites comme du grand public ; formation d’équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement définir l’espr
932 e et le guide. Il ne s’agit nullement, pour nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les pr
933 ur nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la jus
934 u de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une par
935 éoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une part offrir aux fo
936 voulons d’une part offrir aux forces culturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du
937 ulturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du mouvement fédéraliste ; d’autre part, f
938 déraliste ; d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. F
939 d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sort
940 s de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à
941 t de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à s’unir, afin
942 suite une Europe fédérée vienne en aide à chacune de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culture
943 e de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’oct
944 culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’ octobre, sous les auspices du Mouvement européen. Le fait que la Suiss
945 e comme siège du Centre européen de la culture et de la Conférence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considéra
946 érence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considérations touristiques. Notre neutralité traditionnelle, reconnu
947 suisse : notre pays dépend, plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc p
948 plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc participer aux efforts pour s
949 s pour sauver l’Europe ? La réponse ne peut faire de doute. Tant à Berne qu’au comité du Mouvement européen, on a reconnu
950 rien notre neutralité, jouer le rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, su
951 rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une m
952 n. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’ une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se
953 nse pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se réalisent les
954 continent se dessine et prend corps, la nécessité de lui donner une âme passe au premier plan. Et c’est bien cela, c’est b
955 péen de la culture. Les plus anciennes traditions de la Suisse la désignent comme siège d’une telle institution. Gardiens
956 traditions de la Suisse la désignent comme siège d’ une telle institution. Gardiens des cols pour le Saint-Empire au xiiie
957 -Empire au xiiie siècle ; gardiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créati
958 rdiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international
959 de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’u
960 is de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’une expérience fédéraliste
961 ations de l’esprit international ; gardiens enfin d’ une expérience fédéraliste qui peut servir d’exemple au continent, les
962 nfin d’une expérience fédéraliste qui peut servir d’ exemple au continent, les Suisses seront fidèles à leur vraie vocation
963 n accueillant, soutenant et animant le foyer même d’ une action historique, dont on a pu dire que le but était « l’Europe h
964 it « l’Europe helvétisée ». l. Rougemont Denis de , « Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse », Curie
10 1950, Articles divers (1948-1950). Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)
965 Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrang
966 Préface à Le Problème de l’union européenne d’ Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « fai
967 ip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’Europe », quand elle existe depuis tant de siècles. Mais l’
968 rmation que vient de subir la puissance apparente de nos pays dans le jeu des forces mondiales : l’Europe paraît avoir été
969 ubitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle prend d’ elle-même une conscience toute nouvelle, et malheureuse. « L’Europe es
970 s divisions », déclarait le Manifeste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bie
971 ste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situat
972 Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situation pré-fédérale, po
973 re. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’ une situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’union se déclare
974 e situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’ union se déclare, au sein de la crise assumée. Ces circonstances donne
975 se assumée. Ces circonstances donnent à l’ouvrage de M. Olivier Philip une importance particulière : non pas seulement cel
976 importance particulière : non pas seulement celle d’ une première vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europ
977 re vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’une contribution à cette prise de consc
978 loyés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’ une contribution à cette prise de conscience active de notre sort, san
979 e contribution à cette prise de conscience active de notre sort, sans laquelle les traités resteront du papier. Je voudrai
980 emarques, entre toutes celles que ne manquera pas de suggérer cette enquête efficace par sa lucidité. La première touche à
981 à l’économie, la seconde à la doctrine formatrice de l’union. Les analyses économiques tiennent une place importante dans
982 que. Voilà, me semble-t-il, une manière implicite d’ affirmer que l’Économie obéit beaucoup moins aux « lois » fatales admi
983 elle-même déterminée par une certaine orientation de nos énergies dont j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de q
984 nt j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de quelque choix métaphysique. La thèse soutenue par notre auteur impliq
985 ue par notre auteur implique une décision inverse de celle dont les suites nécessaires nous ont conduits aux impasses prés
986 tif des Experts. Je vois bien que ce règne est né d’ une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par er
987 e règne est né d’une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par erreur, doctrinaire). Mais il tend, s
988 d garde, à évacuer la politique, au sens légitime de ce terme. Il tend à substituer, en fait, les Pouvoirs à l’Autorité. L
989 à l’Autorité. Le plan Schuman, parce qu’il est né d’ une décision proprement politique, pourra marquer, s’il aboutit, le po
990 politique, pourra marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second
991 a marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’ une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note q
992 de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’un historique adroite
993 de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’ un historique adroitement condensé, l’auteur souligne, à plusieurs rep
994 plusieurs reprises, l’influence « déterminante » de l’aile fédéraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la créa
995 déraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’une véritable Autorité européenne. On pourra discuter p
996 uvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’ une véritable Autorité européenne. On pourra discuter plus tard sur la
997 pourra discuter plus tard sur la paternité réelle de maints projets revendiqués par les fédéralistes, tels que la Cour eur
998 enne des droits de l’homme, le pool du charbon et de l’acier, la transformation du Comité des ministres en Sénat. Mais il
999 ’ils sont parfois considérés comme des empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justeme
1000 es empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en r
1001 ndre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends
1002 tement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’ avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends pas ici (ce n’est pas le
1003 tu en général, ou même contre l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent
1004 l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent l’union, bien sûr, et comment
1005 , je les appelle fédéralistes. Il n’est pas juste de les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme
1006 les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’union mais refusent sa co
1007 faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’ union mais refusent sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces de
1008 n’est pas la seule. L’Europe est née, elle a vécu d’ antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y p
1009 st née, elle a vécu d’antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créati
1010 ppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’o
1011 secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’on ne peut rêver l’Europe toute libérale ou
1012 corporatiste ou parlementaire… Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des t
1013 Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des tendances opposées exige d’aller
1014 compromis : chacune des tendances opposées exige d’ aller au bout de sa vocation, car elle perdrait sa qualité constitutiv
1015 elle perdrait sa qualité constitutive, sa raison d’ être, en y renonçant. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d
1016 t. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d’ autre que dans le régime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages
1017 gime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L
1018 ntages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer qu
1019 outant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer que cette solution n’est pas seulement p
1020 le en principe, mais pratique. On ne manquera pas de m’objecter que les Suisses sont les premiers à se montrer prudents, q
1021 s premiers à se montrer prudents, quand il s’agit de « faire l’Europe ». C’est qu’ils sont déjà fédérés. Aux unionistes, j
1022 que l’on sache. Quand vous y serez, il sera temps de voir si la prudence, ou au contraire un peu de hâte, conviennent à no
1023 nviennent à nos calamités. u. Rougemont Denis de , Philip Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union e
1024 Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâ
1025 oblème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-
1026 oblème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-11.
11 1950, Articles divers (1948-1950). Raisons et buts d’une conférence (janvier 1950)
1027 Raisons et buts d’ une conférence (janvier 1950)n o La condition profondément contradi
1028 e désespérée. Elle est aussi plus près que jamais de se résoudre en une synthèse. Il est vrai que l’Europe est en train de
1029 t, — l’Europe est en train de se faire ! Aux yeux d’ un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dan
1030 yeux d’un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dans notre ciel et dans nos données immédiates 
1031 t les mêmes conditions qui pourraient être celles d’ une renaissance. Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s
1032 Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s’aggraver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absu
1033 ver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires ext
1034 leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais
1035 d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment d’ un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’aban
1036 il réveille aussi le sentiment d’un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités d
1037 , l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités de l’histoire, se voient combattus par l’élan vers l’union, vers la fédé
1038 sses, l’Assemblée de Strasbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’un espoir tremblant. Le sentiment le plus répa
1039 asbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’ un espoir tremblant. Le sentiment le plus répandu, j’allais dire le pl
1040 y a aujourd’hui une manière proprement européenne d’ avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres vi
1041 ui une manière proprement européenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres viendraient fai
1042 éenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’ une guerre que d’autres viendraient faire sur notre sol, et sur le cor
1043 viendraient faire sur notre sol, et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des
1044 et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des autres, qui serait perdue par nou
1045 enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’ une guerre des autres, qui serait perdue par nous, quelle que soit son
1046 ais il y a, en même temps, une manière européenne d’ espérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre f
1047 pérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance c
1048 péen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance capable d’imposer la paix. Telle
1049 et de retrouver par là même une puissance capable d’ imposer la paix. Telle est la situation contradictoire dans laquelle n
1050 re dans laquelle nous sommes engagés. À son point de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait r
1051 int de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait raison du désespoir. Mais il faut aller vite, e
1052 s’esquissent, à Strasbourg, les cadres politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée huma
1053 s politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de l
1054 rand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but
1055 e, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’o
1056 ation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une répo
1057 l est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une réponse à la question dangereuse que pose
1058 elles propres à garantir et développer l’exercice de la pensée libre, sans laquelle l’Europe n’est plus rien. On pourrait
1059 rien. On pourrait discuter sans fin sur le titre de cette Conférence. Les mots européen, culture, prêtent à des controver
1060 à des controverses trop faciles. Dès qu’on parle d’ Europe, d’unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’
1061 troverses trop faciles. Dès qu’on parle d’Europe, d’ unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’Europe ! »
1062 urope, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’ Europe ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Eur
1063 rope ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à
1064 ffrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialog
1065 ition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialogue à plusieurs voix r
1066 s voix reste, à tout prendre, la vraie définition de l’Europe, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, cha
1067 rope, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, chacun donne à ce mot des réalités hétéroclites : inventions
1068 ues et beaux-arts, hygiène, éducation, et procédé de construction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; con
1069 truction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité hu
1070 philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique 
1071 doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la v
1072 tat ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la vie des religions.
1073 Culture peut signifier aussi prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’ex
1074 i prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’ approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouv
1075 ence de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’ illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, t
1076 in perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que
1077 pprofondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’ augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses.
1078 er le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses. Culture peut signifier
1079 re peut signifier, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre
1080 er, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’i
1081 emble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’interdise les déb
1082 s définitions. À toutes fins utiles, elle partira de l’idée que la culture, ce sont les réalités intellectuelles et spirit
1083 ités intellectuelles et spirituelles qui ont fait de l’Europe autre chose et beaucoup plus que ce qu’elle est dans sa réal
1084 jours par la rendre folle, il se contente parfois de l’endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’occupations acc
1085 endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’ occupations accablantes et flatteuses, qui ne leur laissent plus une s
1086 tastrophes. On demande à certains « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils
1087 « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils ont un rhume, qu’ils ont promis u
1088 ne conférence. D’autres invoquent un besoin subit de se retirer pour méditer. Regrettons-le, pour eux surtout. S’ils sont
1089 és, ce qu’à Dieu ne plaise, dans certains « camps de rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les r
1090 rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les raisons urgentes qui motivaient un rassemblement comm
1091 ôtre. Ils comprendront qu’il est certains moments de l’histoire où l’on ne peut renverser les destins qu’en y allant tous
1092 Pour être juste, il faut reconnaître que beaucoup d’ intellectuels redoutent non sans raison l’atmosphère des congrès, inco
1093 tmosphère des congrès, inconsidérément multipliés de nos jours. Je les comprends, et je comprends surtout ceux d’entre eux
1094 rent — (ou c’est un mauvais écrivain) — au destin de la communauté dont il écrit la langue, où sa voix porte, qui peut le
1095 éral, établi pour l’information des délégués, n’a d’ autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont
1096 nformation des délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au
1097 délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’une enq
1098 s problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’ une enquête dans nos divers pays. Chacun des groupes nationaux du Mouv
1099 n questionnaire sur l’état des problèmes concrets de la culture dans son pays. Dix-sept groupes ont donné des réponses dét
1100 û l’improviser avec des groupes en pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y
1101 n pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y aurait à dresser systématiquemen
1102 aire aussi des lacunes, des obstacles, permettant de délimiter des zones critiques où concentrer l’effort. Puis, des étude
1103 concrets, nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’ études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’
1104 , nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’une quinz
1105 fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’ une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéci
1106 s notes et documents. Sur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des docu
1107 ur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’ une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapp
1108 quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapport général a te
1109 es documents précités, le rapport général a tenté d’ opérer une synthèse provisoire, en guise d’introduction aux travaux de
1110 e provisoire, en guise d’introduction aux travaux de la conférence. Précisons bien que ce rapport n’est pas un instant des
1111 n instant destiné à faire l’objet des discussions de la conférence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’exposé de
1112 rence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’ exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront propo
1113 ts. Il veut servir d’exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront proposées et mises au point par les
1114 niques restant, bien entendu, réservés aux débuts de l’ensemble du congrès, siégeant en commission générale. Il nous appar
1115 mission générale. Il nous apparaît qu’il y a lieu de prévoir une nouvelle commission, consacrée à l’éducation et à l’ensei
1116 à nous égarer. On parle beaucoup, par exemple, «  d’ organiser les échanges culturels ». Observons tout d’abord qu’il n’en
1117 frontières étaient ouvertes, et l’union fédérale de l’Europe réalisée. Nos cultures, prisonnières des cadres nationaux, n
1118 res nationaux, ne doivent pas chercher des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent
1119 des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent au contraire exiger leur « élargisseme
1120 ement » immédiat, sans condition. Le terme même «  d’ échanges culturels », avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force
1121 , avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force d’ avoir servi d’échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien mal
1122 est devenu bien déplaisant, à force d’avoir servi d’ échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien malgré eux, souve
1123 x, souvent) des problèmes réputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce p
1124 éputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’échanges
1125 r en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’ échanges surveillés que leurs douaniers et leurs agents fiscaux sauron
1126 ux quelques petits décrets concernant les voyages de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bon
1127 es de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bons élèves ; et quelques phrases bien plates sur
1128 hrases bien plates sur l’indispensable solidarité de nos nations. Une hypocrisie ennuyeuse. Prétendre « organiser les écha
1129 droits que l’État s’est arrogés, et qu’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’abaisser des obstacl
1130 u’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’ élever ou d’abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des id
1131 de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’ abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des idées, des per
1132 nent ce qu’ils ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, d
1133 ls ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits o
1134 les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités a
1135 ture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques
1136 uvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de p
1137 ant, de produits originaux, de curiosités avides, d’ expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non
1138 de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements
1139 es, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème
1140 de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner,
1141 assions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner, et au besoin dénoncer l
1142 : 1° abandonner, et au besoin dénoncer la méthode de « l’organisation des échanges », 2° exiger la suppression pure et sim
1143 ion des personnes, des œuvres, et des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits
1144 des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bé
1145 l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, do
1146 l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, dont la charge
1147 re. Et surtout ne proposons pas, dans ce domaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’esprit qui entraîne tant de
1148 omaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’ esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines b
1149 d’esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines bureaucratiques. Restaurer la culture, c’est aussi
1150 poids mort des organisations ! Qu’on n’essaie pas d’ organiser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’une respirat
1151 ser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’ une respiration organisée, n’est-il pas vrai, vous coupe le souffle. Q
1152 s vrai, vous coupe le souffle. Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était
1153 . Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était aux origines, elle n’a cessé
1154 e, elle était aux origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse lib
1155 origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifeste
1156 n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe o
1157 richir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins
1158 er ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins, voilà la solution, voilà le remède pratique à presque tous les
1159 un effort positif. Il serait insuffisant et vain de vouloir revenir simplement à la condition libérale qui était celle de
1160 implement à la condition libérale qui était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je
1161 était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’An
1162 s, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire de la Compagnie européenne des wagons-lits, au chapitre sur les passepor
1163 Pour l’entrée dans tous les autres pays, la carte de visite suffit » ! Mais cette liberté des échanges n’a pas suffi à réd
1164 titutions qui garantissent et manifestent l’unité de nos cultures dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’instr
1165 dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’ instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut au
1166 ersité. Il faut doter l’Europe unie d’instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut aussi former les
1167 er les jeunes hommes qui deviendront les porteurs de l’idée fédérale, sans laquelle nos réformes techniques et matérielles
1168 » que le xxe siècle a vu naître, il est frappant de constater qu’il n’en existe pas un seul qui ait pour objet l’Europe c
1169 s pays forment un ensemble, un complexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-
1170 omplexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-ci distinguent souvent mieux que
1171 mble n’ait pas encore été étudié en tant que tel, d’ une manière systématique ; et qu’il n’existe aucune institution capabl
1172 ue ; et qu’il n’existe aucune institution capable de renseigner sur l’Europe en général, sur sa situation présente, sur l’
1173 en général, sur sa situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes.
1174 a situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’
1175 ur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’ une telle institution soit urgent, rien ne saurait mieux le faire sent
1176 difficultés qu’a rencontrées la préparation même de cette conférence, et que ses insuffisances inévitables dans l’état ac
1177 s choses. Je tiens à rappeler que, dès le congrès de La Haye, avait été demandée la création d’un Centre européen de la cu
1178 ongrès de La Haye, avait été demandée la création d’ un Centre européen de la culture, dont les attributions furent esquiss
1179 par la résolution culturelle du congrès. Au mois de février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’étud
1180 le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’ études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septe
1181 péen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même an
1182 rgé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg vo
1183 er l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unan
1184 tembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unanimité une recommandation favorable à la cré
1185 nimité une recommandation favorable à la création d’ un Centre européen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Ge
1186 tre européen de la culture. Le travail du Bureau d’ études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus prè
1187 éen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la ques
1188 ’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la question. Il a conduit aux conclusions pratiqu
1189 t leur réserver. Il en va de même pour le Collège d’ Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commi
1190 llège d’Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commis européens », dont les futures institutions
1191 commis européens », dont les futures institutions de l’Europe unie auront évidemment besoin. Enfin, je mentionnerai un pro
1192 idemment besoin. Enfin, je mentionnerai un projet d’ Institut européen des sciences politiques et sociales ; et ce projet s
1193 ces politiques et sociales ; et ce projet surtout d’ un Fonds européen pour les recherches scientifiques, dont l’importance
1194 mission proposée tout à l’heure, qui s’occuperait de l’enseignement européen, deux mots seulement, mais importants. La pré
1195 x mots seulement, mais importants. La préparation de cette Conférence, l’abondance et la qualité des rapports reçus sur le
1196 t la qualité des rapports reçus sur les questions d’ éducation, ont montré à quel point ce souci est général dans nos pays.
1197 le monde se rend parfaitement compte que l’avenir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite
1198 enir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un es
1199 européenne dépend en premier lieu de la création d’ une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranatio
1200 emier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranational. Cette tâche, comme
1201 ’écrit M. Jean Bayet8, « exigera la bonne volonté de plusieurs générations, [mais] réclame aussi un départ extrêmement vif
1202 aussi un départ extrêmement vif et net ». L’effet de choc que produira sur l’opinion publique l’institution rapide d’un en
1203 duira sur l’opinion publique l’institution rapide d’ un enseignement européen constituera la meilleure propagande pour notr
1204 ent être créés par le blocage, au titre européen, d’ une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernem
1205 cage, au titre européen, d’une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernements et l’économie privée
1206 és. Nous invoquerons le fait que, si le sentiment d’ un destin spirituel commun, et l’énergie créatrice des Européens ne so
1207 ettre nos gouvernements devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’urgence établi. Il est probable que le prix de r
1208 s devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’ urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bom
1209 tre d’urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel
1210 ce établi. Il est probable que le prix de revient d’ une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel des instit
1211 institutions que nous venons de proposer. Le prix d’ une seule bombe atomique couvrirait donc le budget global d’une renais
1212 e bombe atomique couvrirait donc le budget global d’ une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mor
1213 ouvrirait donc le budget global d’une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des
1214 e de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millio
1215 e mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche sci
1216 refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche scientifique pour la paix et la vie, c’est la
1217 ientifique pour la paix et la vie, c’est la folie de l’Occident moderne. À tel point qu’on se demande parfois s’il ne vaud
1218 l ne vaudrait pas mieux être restés barbares, que de nous être aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture
1219 tre aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture faillirait à sa vraie mission, si elle n’élevait pas, cont
1220 pour quelles fins réelles voulons-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La
1221 ns-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’ une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle
1222 ture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle est d’ailleurs spécifiqu
1223 pas substituer aux nationalismes locaux une sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au mond
1224 e sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au monde entier. Elle a toujours conçu sa civilis
1225 toujours conçu sa civilisation comme un ensemble de valeurs universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’opposer une
1226 s universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’ opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Oue
1227 opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthé
1228 nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valab
1229 e aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valable pour nous seu
1230 fermée sur elle-même : ce serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre
1231 e serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contr
1232 chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le mo
1233 es. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de
1234 nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’ une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est l
1235 a leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. E
1236 d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. Et notre objet ne sera pas non pl
1237 vraie force. Et notre objet ne sera pas non plus de dénoncer ce qui se pratique ailleurs, car nous ne pouvons réformer qu
1238 acceptons pas la scission que symbolise le rideau de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occid
1239 de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’i
1240 amener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté,
1241 les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’ une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’une Europe qui prend
1242 d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’ une Europe qui prend au sérieux sa vocation particulière dans le monde
1243 lie, et divisée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une
1244 ée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une Europe procla
1245 arrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’ attraction. Une Europe proclamant des principes sans les appliquer fer
1246 pliquer fermement, n’aurait bientôt plus le droit de parler. Prendre au sérieux la vocation européenne, c’est une mission
1247 sérieux la vocation européenne, c’est une mission de vigilance dont les intellectuels des pays libres doivent se sentir pl
1248 tir plus que jamais responsables. Il leur incombe de rappeler sans relâche aux gouvernants, comme aux législateurs sociaux
1249 eurs sociaux et aux experts, qu’un certain nombre de principes moraux ne sauraient être négligés dans la pratique sans que
1250 nomie. Si nous exerçons, à Lausanne, cette action de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’el
1251 on de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne.
1252 aiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne. Une conscience malheureuse, il est vrai, to
1253 conscience, en dernière analyse. C’est notre lot d’ Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la co
1254 lot d’Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la conscience au bonheur. Vocation tragique et féco
1255 à l’Ouest deux civilisations plus jeunes, filles de la nôtre, dont l’une, qui nous est chère, cultive un idéal eudémoniqu
1256 est chère, cultive un idéal eudémonique, l’idéal d’ un bonheur assuré. Il est frappant que le bonheur, en Europe, n’ait tr
1257 mes, quelques prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous
1258 es prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous en respiro
1259 , nous ne sommes pas réunis pour tracer des plans d’ innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de tr
1260 s pas réunis pour tracer des plans d’innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyen
1261 prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations
1262 ouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notr
1263 xercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. S
1264 ui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. Sauvons l’Europe tragique, pour que nos descendants puissent e
1265 t, par la grâce des chefs-d’œuvre futurs, au ciel de la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador
1266 ador de Madariaga, qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemon
1267 , qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collab
1268 par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration de M. Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR). 8. Dans son remarq
1269 LR). 8. Dans son remarquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation
1270 marquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougem
1271 qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « R
1272 aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’une
1273 nt et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de , « Raisons et buts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier 195
1274 NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’ une conférence », Fédération, Paris, janvier 1950, p. 19-25. o. Il s’
1275 nis de Rougemont lors de la Conférence européenne de la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avons
1276 Les sous-titres ont été rajoutés pour les besoins de cette édition numérique.
12 1950, Articles divers (1948-1950). Un gage à Jean Paulhan ! (avril 1950)
1277 surprise que j’apprends, à vous lire dans Liberté de l’Esprit, que les fédéralistes ont exclu la Russie de l’Europe ; que
1278 que la Grèce n’en fait pas partie, mais bien « et de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires 
1279 de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires » ; que j’ai « annoncé la fin du désespoir » ; que
1280 lisme est contre les patries (mais qu’il juge bon de le « cacher ») ; et qu’enfin les fédéralistes « n’ont jamais été amou
1281 pe, et pour les fédéralistes, il n’y a pas un mot de vrai dans tout cela. Vous jugez notre projet « imbécile ». Celui que
1282 que vous critiquez est tel sans aucun doute. Mais d’ où sort-il ? Je ne connais pas un seul fédéraliste qui puisse y reconn
1283 vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit possible de l’exclure sans lui faire violence ? » Mais quand l’avons-nous exclue 
1284 montrez, au paragraphe suivant, qu’il serait vain d’ espérer l’inclure. Que diable voulez-vous donc que nous en fassions ?
1285 en fassions ? (On m’assure que cela dépend aussi de Staline.) 2° « Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils son
1286 rante-deux articles) ». Montrez-nous donc un seul de ces articles qui dise, ou laisse entendre, que le Conseil de l’Europe
1287 t le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre de cet organisme est qu’il serve provisoirement, à sa place, et malgré s
1288 ute qu’on ne compte à Strasbourg qu’une trentaine de fédéralistes sur cent-un députés.) 3° La Grèce fait partie du Conseil
1289 nt été nommés jusqu’ici que par L’Humanité. Drôle d’ évidence. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.) 4° M. Spaak est
1290 ent, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et de l’isolement, la mort des ressentiments nationaux » ? Hélas ! Diagnost
1291 us par exemple), ce n’est pas « annoncer » la fin de la maladie, ni promettre « des joies et des fêtes ». Nous demandons s
1292 des sacrifices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a «  de faux ou d’imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de
1293 ices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou d’ imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interr
1294 e » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interroger. Que ne le faites-vous ? Mais non, par une erreur vrai
1295 « fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tenda
1296 ences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces
1297 ré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités san
1298 proche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités sans lesquelles aucune fédération n’es
1299 fédération n’est possible. » C’est la seule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la do
1300 ule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous ci
1301 re où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous citée, au lieu de m’attri
1302 ersité, formule suisse) étant à l’opposé de celle de Benda (qui veut l’unification, formule jacobine) vous déclarez que la
1303 vous déclarez que la seconde n’est que « l’aveu » de ce que la première dissimule. Après quoi, bien sûr, plus rien ne saur
1304 mais. Au contraire, vous rejoignez ici une partie de leurs positions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi c
1305 leurs positions, et votre belle colère se trompe d’ adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison atta
1306 tions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison attaquez-vous d
1307 ez-vous des gens que vous n’avez pas pris le soin d’ identifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près
1308 tifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près journalistique. Pour en finir, je vous envoie ma petite
1309 ’Attitude fédéraliste . Vous y trouverez beaucoup d’ attaques contre le nationalisme, contre l’État-nation, contre sa préte
1310 riotisme et les patries. Or j’ai quelques raisons de penser que ce texte exprime le « projet des fédéralistes » plus fidèl
1311 quoi, cette lettre est inutile, si l’on a décidé d’ appeler « fédéralistes » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé
1312 s » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé de l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a de
1313 l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a des gens qui appellent surréaliste tout écrit qu’ils e
1314 uand vous aurez renoncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce
1315 oncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce que vous proposez.
1316 proposez. Car je ne vais pas vous faire l’injure de croire que vous trouvez que tout va très bien ainsi, ou que vous pens
1317 ant toutes petites et mignonnes. Elles ont besoin de vous aussi, non point pour les louer contre nous, mais pour les défen
1318  « Europe vole » ? Un gage. r. Rougemont Denis de , « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950
1319 t Denis de, « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950, p. 33-34.
13 1950, Articles divers (1948-1950). Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)
1320 Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)s t Il est imp
1321 sa culture (5 août 1950)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de
1322 i l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de sauver la culture occidentale si l’on ne sauve pas en même temps sa p
1323 e sauve pas en même temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les
1324 ême temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa re
1325 a créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’entretenir le d
1326 recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’ entretenir le désir créateur, si on le prive des possibilités de s’acc
1327 e désir créateur, si on le prive des possibilités de s’accomplir dans une libre communauté. Si l’Europe est réduite à l’im
1328 mondiales, personne ne pourra remplacer cette âme d’ une civilisation qui avait su remplacer toutes les autres. Le secret d
1329 i avait su remplacer toutes les autres. Le secret de ses mesures vivantes sera perdu. ⁂ Mais en retour, sans une culture a
1330 unie, c’est même plus que probable, par les soins d’ experts étrangers, ou d’une police qui a fait ses preuves ailleurs déj
1331 e probable, par les soins d’experts étrangers, ou d’ une police qui a fait ses preuves ailleurs déjà. Mais elle aura perdu
1332 es ailleurs déjà. Mais elle aura perdu le ressort de son pouvoir transformateur du monde, ce pouvoir qui avait fait sa gra
1333 e, ce pouvoir qui avait fait sa grandeur à partir d’ un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si
1334 ir d’un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cett
1335 pe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cette unité signifiait sa défaite, non point sa con
1336 l’Asie — et l’Asie n’a jamais passé pour la terre de la liberté. Ces deux réalités : l’Europe, la culture, naissent et meu
1337 et meurent du même mouvement. ⁂ Qu’en est-il donc de ce mouvement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les deux colosse
1338 it actuellement ce qu’on peut appeler une névrose d’ infériorité. Pourtant, les faits ne justifient pas le désespoir, mais
1339 ifient pas le désespoir, mais seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américai
1340 ent un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rid
1341 ent. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’ Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 mi
1342 d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un qu
1343 à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’ Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’un
1344 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’ un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit a
1345 disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’ un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous dis
1346 de plus d’un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous disposons surt
1347 it aujourd’hui la planète. Nous disposons surtout de ressources humaines qui n’ont pas leurs égales ailleurs : une main-d’
1348 ont les traditions ne s’imitent pas, une capacité d’ invention que le monde entier peut nous envier. ⁂ Qu’avons-nous invent
1349 re : presque tous leurs grands noms sont des noms de l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier
1350 ès rares qui n’en sont pas ont appris leur métier de nos maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou pa
1351 maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou par nos livres. ⁂ Je dirai plus. Le monde moderne tout enti
1352 e à la fois nos mœurs et nos objets, nos procédés d’ art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie e
1353 is nos mœurs et nos objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de méde
1354 os objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos arme
1355 rocédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous,
1356 de construction, de transport et de gouvernement, d’ industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les
1357 , de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les Noirs, copient
1358 ous, nous copions tout au plus quelques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de
1359 elques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que s
1360 lques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que sont les empires qui prétendent parta
1361 du Nord et la Russie de Staline sont des produits de notre culture, l’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de
1362 ’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’un côté, plus les grat
1363 a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’ un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les
1364 isme, d’un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les degrés, la cellophane et la fermeture-éclai
1365 e-éclair qui sont des inventions européennes ; et de l’autre côté, Marx et notre industrie plus l’instruction publique et
1366 nstruction publique et l’athéisme, l’hypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pè
1367 ypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce
1368 ppareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce n’est point par ha
1369 ces deux grands pays semblent appeler ce procédé de description : leurs traits les plus frappants et qu’ils croient spéci
1370 en que l’Amérique et la Russie moderne, dans plus d’ un sens, sont en réalité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas
1371 ité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas de malentendu ! Ne nous laissons jamais aller à placer sur le même plan
1372 suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu’y a-t-il de commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation
1373 e commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation ; il y a l’exercice des mêmes libertés ; il y a de
1374 mêmes libertés ; il y a devant nous le même idéal de liberté humaine. Tandis qu’entre les Russes et nous, il n’y a en comm
1375 our nous liberté politique. s. Rougemont Denis de , « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », Fra
1376 ue. s. Rougemont Denis de, « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », France indépendante, Paris,
1377 présente cette semaine à ses lecteurs, un extrait de l’importante conférence prononcée par Denis de Rougemont au congrès d
1378 rence prononcée par Denis de Rougemont au congrès de La Fédération à Beaune. Nous tenons à remercier M. de Rougemont pour
1379 à remercier M. de Rougemont pour son autorisation de publier ces lignes qui suscitèrent, nous en sommes certains, chez nos
14 1950, Articles divers (1948-1950). Saint-John Perse et l’Amérique (1950)
1380 t-John Perse et l’Amérique (1950)m La grandeur de cette poésie fait reculer le commentaire : elle est un acte, elle se
1381 à, posant elle-même ses mesures. La première page d’ Anabase lorsqu’elle parut, constitua pour nous le fait du prince, tout
1382 rer dans la durée, — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. (D’où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un
1383 — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. ( D’ où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un jeune amour veut so
1384 t, on l’imagine, en Amérique. Au long des avenues de Manhattan, il marchait lentement, régulièrement, comme ceux qui vont
1385 , comme ceux qui vont très loin, ou qui pensent à de grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’empressement. Ou da
1386 e grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’ empressement. Ou dans cette chambre d’angle, dont il parle dans Neiges
1387 i n’ont pas d’empressement. Ou dans cette chambre d’ angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme
1388 angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme sans preuve ni témoin », il nous donnait un haut exe
1389 n », il nous donnait un haut exemple du bon usage de l’exil : sans plainte, au cœur du grand litige ; aussi actif dans la
1390 avait su rester sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des de
1391 er sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’ être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des destins molesté
1392 re, enfin, dans son retrait, des destins molestés de la France, que tant de « partisans extravagants » qui tenaient bruyam
1393 extravagants » qui tenaient bruyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je
1394 uyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarqu
1395 ène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarques sur les relations qui se
1396 atique. J’y verrais même la meilleure description de l’essor des États-Unis dans l’espace et le temps à la fois, si le suj
1397 ture et l’invention du Nouveau Monde ont illustré d’ accidents séculaires. Tout se passe à la fois dans l’Histoire et dans
1398 oire et dans l’homme, « dans un très haut tumulte de terres en marche vers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. D
1399 ers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. De l’Atlantique au Pacifique, des Pères pèlerins aux savants atomistes,
1400 r nylon, les grands rapides « avec leur provision de glace pour cinq jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « c
1401 maïs noir — non violet », enfin « les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’h
1402 les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme
1403 s usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence
1404 au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’un agrandisseme
1405 homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’ un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poèm
1406 dans sa présence humaine ; et d’un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poème ainsi prend sa sou
1407 , peuvent être vues comme une seule et même geste de l’âme. (Je dis l’âme, et non pas l’esprit, ni l’intellect et ni le cœ
1408 ’esprit, ni l’intellect et ni le cœur.) Et c’est d’ un même mouvement à tout ce mouvement lié, que mon poème encore dans l
1409 mouvement lié, que mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de
1410 mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénia
1411 de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les
1412 tes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les grands vents : le mouvement, la violenc
1413 ment crée l’énergie, le rayonnement et les trains d’ ondes, — et d’autre part, dans le poème, il crée littéralement le sens
1414 s le poème, il crée littéralement le sens. (Point de départ d’une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa for
1415 , il crée littéralement le sens. (Point de départ d’ une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa formule dynam
1416 nous filaient entre les doigts — grands virements de comptes et glissements sur l’aile. L’apposition me semble offrir ici
1417 osition me semble offrir ici l’équivalent en mots d’ un accord en musique : co-vibration des sens au lieu de celle des sons
1418 où l’on étudiera, plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale,
1419 plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale, entre ses « origine
1420 ase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nour
1421 i les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nourrit la plupart des poè
1422 respire à longs traits la maîtrise, et le bonheur de la victoire. Les mots faveur et favorable, éloges, délice et délectab
1423 autres les expressions du délaissement, du dégoût de vivre ou des chagrins intimes. Qu’ils n’aillent dire : tristesse… s’
1424 nostalgie deviennent ici conquête, pressentiment de l’acte, distraction vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de
1425 ion vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de force pour les hommes… Choses vivantes, ô choses — excellentes ! Rien
1426 poésie des « blues » fait illusion : temps faible d’ un grand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Co
1427 rand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil int
1428 er.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’au
1429 témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s
1430 ’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’ exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au
1431 ope. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’ humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au monde entier des chose
1432 ce propos une hypothèse critique, qui permettrait de situer les grands poèmes du siècle. Si l’élément sentimental domine c
1433 uel, c’est dans l’élément animique que les poèmes de Saint-John Perse trouvent leurs lois et leurs cadences : Et c’est pa
1434 à l’image des grandes crues, Qu’il prend conseil de ces menées nouvelles au lit du vent. Et c’est conseil encore de fo
1435 velles au lit du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents
1436 t du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents du Nouveau M
1437 e comme les vents du Nouveau Monde, comme un rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les ri
1438 n rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les rigueurs voluptueuses du plus pur langage fra
1439 urs voluptueuses du plus pur langage français, et de cette « rhétorique profonde » dont parlait un jour Baudelaire. III. L
1440 it un jour Baudelaire. III. L’Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fu
1441 n de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fut universaliste, et le redeviendra peut-être, ma
1442 rocédés, chez Saint-John Perse, ouvrent les voies d’ un grand lyrisme américain. Ils sont classiques. Les continents, les p
1443 yriques, et l’édification sur table rase des lois d’ une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en c
1444 tion sur table rase des lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes
1445 lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et q
1446 ès grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et qui prenaient source plus haute qu’en nos chants, en lie
1447 aient source plus haute qu’en nos chants, en lieu d’ insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô mond
1448 plus haute qu’en nos chants, en lieu d’insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô monde entier des
1449 e mot « monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’ états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée
1450 monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’ âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de va
1451 à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes es
1452 us d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute rac
1453 nts individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pa
1454 rre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de
1455 de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par
1456 es », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’u
1457 hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme san
1458 toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’un
1459 s en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’ une âme sans nom — l’inconscient d’une époque — dont le poète déchiffr
1460 ar nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’ une époque — dont le poète déchiffre les messages. Itinéraires et inve
1461 s messages. Itinéraires et inventaires, sommation de nos « voies et façons » et « chants d’un peuple, le plus ivre », — il
1462 sommation de nos « voies et façons » et « chants d’ un peuple, le plus ivre », — il semblera surprenant qu’un Français ait
1463 ançais ait ouvert aux Américains les perspectives de l’épopée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans
1464 pée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafay
1465 un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafayette. ⁂ Mais Vents n’est pas seulement le poème du lyrisme, le c
1466 s seulement le poème du lyrisme, le chant profond de l’Amérique. C’est aussi, dans sa dernière partie, le poème du retour
1467 l’Europe, à la France. Nous reviendrons, un soir d’ Automne, sur les derniers roulements d’orage… Demain, ce continent lar
1468 s, un soir d’Automne, sur les derniers roulements d’ orage… Demain, ce continent largué… S’ensuit une description charmant
1469 S’ensuit une description charmante et déchirante d’ une France désuète et qui naguère encore périssait « par excès de sage
1470 suète et qui naguère encore périssait « par excès de sagesse », d’une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent
1471 aguère encore périssait « par excès de sagesse », d’ une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent des Amériques
1472 ur avec le vent des Amériques. Au plus haut point de ce très haut poème, Saint-John Perse a rejoint notre vœu. Nous l’atte
1473 se a rejoint notre vœu. Nous l’attendrons un soir d’ automne, avec le souffle du grand vent, sur la route et la terre des h
1474 la terre des hommes, prêts à rendre nos comptes «  d’ hommes nouveaux, — d’hommes entendus dans la gestion humaine, non dans
1475 prêts à rendre nos comptes « d’hommes nouveaux, —  d’ hommes entendus dans la gestion humaine, non dans la précession des éq
1476 es équinoxes », et qu’il nous aide ! par le chant d’ une Europe future. Car, ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plu
1477 , ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plus de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’auteur qui donne à l’âm
1478 us de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’ auteur qui donne à l’âme de plus grands mouvements… qui nous remplisse
1479 e plus grands mouvements… qui nous remplisse plus de la vapeur du dieu qui l’agite. » 4. « Avertissement du Dieu ! Avers
1480 e âme plus scabreuse ! » (Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de
1481 mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureu
1482 Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureux sont les plus
1483 Arabes et Chinois peut-être… m. Rougemont Denis de , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris
1484 , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris, septembre 1950, p. 136-139.