1 1948, Articles divers (1948-1950). L’idée fédéraliste (1948)
1 L’idée fédéraliste ( 1948 )b On peut penser avec le philosophe Jaspers que l’Europe du xxe s
2 suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre, deux réserves préalables se présentent aussitôt à l’esprit. Il conviendrai
3 es d’histoire suisse, notre État fédéral avec ses cent ans d’existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudi
4 nérale, tout change. Nous voyons tout d’abord que cent ans, ce n’est qu’un septième de notre histoire nationale ; que celle-
5 les graines meurent, mais elles peuvent mourir de deux manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’humus,
6 en notre État fédéral, après un siècle et demi ou deux , disparaîtra tout comme une autre République sérénissime de Venise, n
7 elle a finalement pris forme et force de loi vers 1848  ; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis à la commente
8 inspiré l’action tout empirique de nos ancêtres. 1. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à toute idée d’hégém
9 à l’unification, caricature de l’union véritable. 2. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à tout esprit de sys
10 la fois de respecter et d’articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objecter
11 de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contras
12 ontières, et qui se recoupent et se recouvrent de cent manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un espri
13 de, « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse ( 1848-1948 ), Morat, Éditions patriotiques, 1948, p. 461-464.
14 suisse (1848-1948), Morat, Éditions patriotiques, 1948, p. 461-464.
2 1948, Articles divers (1948-1950). Essai sur l’avenir (1948)
15 Essai sur l’avenir ( 1948 )a 1. Parabole des fées Tout cela est très joli ! disait l
16 Essai sur l’avenir (1948)a 1. Parabole des fées Tout cela est très joli ! disait le Docteur,
17 guérit ! Elle invente des machines qui font déjà mille kilomètres à l’heure ! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre
18 aujourd’hui d’aller beaucoup plus vite qu’il y a cent ans. Voilà qui est sérieux, me dites-vous. Et voilà qui est utile au
19 chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’application des bons esprits. Voilà le sérieux nou
20 omme les fées, et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’u
21 ent la paix du cœur dans la souffrance, inventent mille tours sentimentaux insoupçonnés de notre barbarie, créent l’immobilit
22 ée. Nous vous laissons à vos enfantillages.1 2. Utopies et prévisions La faiblesse générale des utopies, c’est qu’
23 choix, c’est-à-dire prévoir à chaque pas au moins deux solutions possibles. Détourner constamment l’imagination de la ligne
24 ordre social acceptable, tantôt se disperse entre vingt sectes politiques contradictoires, tantôt se crispe en tyrannies, qui
25 s, mais assez naturelles, dont je ne donnerai que trois exemples : 1. la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de
26 urelles, dont je ne donnerai que trois exemples : 1. la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession
27 rois exemples : 1. la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. alle
28 épend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bien en soi. La vitesse accrue est à nos yeux
29 ialiste et mécaniste, quand la science est depuis trente ans énergétique et statistique… Cependant, l’on peut imaginer qu’une
30 pe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mo
31 ue de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.
32 tionnelles, superstitions et préjugés locaux. Ces deux passions produisent des guerres, à la faveur desquelles les possibili
33 tion d’un choix d’objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S’il est vrai que les civilisations se dévelop
34 réponse victorieuse suscite un nouveau challenge 3, quels développements devons-nous prévoir à partir du complexe de tens
35 par nos machines, c’est-à-dire par nos passions. Deux issues me paraissent dès lors imaginables. 1. Nous poursuivons notre
36 Deux issues me paraissent dès lors imaginables. 1. Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise de l’énergie atomiq
37 é nouvelle, mère d’une civilisation imprévisible. 2. Nous répondons au challenge des passions nationalistes et politiques
38 à titre de curiosité pour l’historien futur.) 4. Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité d’une réponse victorieuse, à
39 nesthésie spirituelle, ou l’aventure spirituelle. 1. L’anesthésie des masses ou insensibilisation à l’ennui, sera obtenue
40 trice d’une civilisation spirituelle et mondiale. 2. Si l’Humanité choisit au contraire l’aventure spirituelle, celle-ci s
41 s en débutant par le terme symbolique de Fées. 1. Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946.
42 empruntée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-S
43 tée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon
44 les annonçaient avec précision à la même époque. 3. Cf. Arnold Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis de, « Es
45 regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Callenbach, 1948, p. 401-407.
3 1948, Articles divers (1948-1950). Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)
46 sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948 )c La crise actuelle nous force à nous interroger sur la valeur mêm
47 s (le sens de La Haye) », Fédération, Paris, juin 1948, p. 14-15.
4 1948, Articles divers (1948-1950). Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)
48 Pourquoi l’Europe ? ( 25 décembre 1948)d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont e
49 Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948 )d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’o
50 Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’observer, par
51 une puissance, parce que l’Europe est divisée en vingt nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille qu’il faut, pour parl
52 er et se faire entendre, dans le monde dominé par deux grands empires. Et non seulement l’Europe n’est plus une puissance qu
53 tique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent la terre. Voici le fait fondamental, et que
54 cité. Si les choses continuent comme elles vont : Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns a
55 t annexés ou colonisés les uns après les autres ; La question allemande ne sera pas réglée, c’est-à-dire fournira un pr
56 rétexte permanent à la guerre entre USA et URSS ; Rien ne pourra s’opposer à cette guerre entre la Russie et l’Amérique
57 capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même unie, serait encore trop
58 rait encore trop petite pour tenir en respect les deux Grands, je vous rappellerai un seul chiffre, qu’on a tendance à oubli
59 e, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que l
60 onc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions , c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie
61 de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie et tous ses satelli
62 e la Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres
63 Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu
64 l nous faut faire l’Europe. Mais quelle Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues
65 avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et j
66 rs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et je ne sa
67 lisme et universalisme, liberté et engagement, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés e
68 t, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés et permutés, sans parler de leur ménages à tr
69 mbinés et permutés, sans parler de leur ménages à trois , et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les autres, et nul d’entre
70 draient pour un temps, par la force, il resterait dix autres couples d’adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne
71 plans, qui dit fédéralisme dit toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais égale
72 t toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais également valables, et qu’il ne s’
73 édéraliste), ce n’est pas être absent, c’est être deux fois présent. Merci, messieurs, une fois nous suffirait. Mais soyons
74  : bulletin intérieur hebdomadaire du RPF, Paris, 25 décembre 1948, p. 1-2. e. Présenté par cette note : « Denis de Rouge
75 intérieur hebdomadaire du RPF, Paris, 25 décembre 1948, p. 1-2. e. Présenté par cette note : « Denis de Rougemont, l’auteur
5 1949, Articles divers (1948-1950). La liberté religieuse à l’école (2e semestre 1949)
76 La liberté religieuse à l’école ( 2e semestre 1949)h i La secte des adventistes du septième jour, se ré
77 La liberté religieuse à l’école (2e semestre 1949 )h i La secte des adventistes du septième jour, se référant au Déca
78 dossiers relatifs à des familles adventistes dans trois pays : la Belgique, la France et la Suisse. Dans quatre écoles belges
79 pays : la Belgique, la France et la Suisse. Dans quatre écoles belges (communale, moyenne, normale et un lycée) la preuve a é
80 eligieux, tandis que l’État de Vaud le refuse. Le 1er avril 1948, Marcel D…, citoyen vaudois, s’est vu arrêté par les genda
81 tandis que l’État de Vaud le refuse. Le 1er avril 1948, Marcel D…, citoyen vaudois, s’est vu arrêté par les gendarmes et inca
82 vu arrêté par les gendarmes et incarcéré pendant trente heures parce que sa fille manquait l’école le samedi matin, et qu’il
83 i matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d’u
84 interdisent de l’admettre. À ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un
85 ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen berno
86 pté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en
87 de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en a pa
88 a pas moins été condamné (après « récidives ») à trois , puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envo
89 té condamné (après « récidives ») à trois, puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dan
90 on primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une dizaine d
91 sses, amendes comprises. Nous pourrions citer une dizaine d’autres situations, fort analogues. « Exceptions négligeables »
92 ans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. R
93 e que pour être quotidiennement perpétrée sur des millions , et il est curieux que les bonnes gens qui parleraient volontiers « d
94 r l’une ou l’autre de ces convictions, car si les deux points de vue n’étaient pas dissociés, l’on aboutirait fatalement à r
95 s ou confessions. À cela j’imagine qu’on opposera deux objections courantes : on dira qu’il est trop compliqué de prévoir to
96 qu’il est dangereux de créer des précédents dont mille sectes à l’avenir pourront être tentées d’abuser. Le premier argument
97 ux. Les lois pénales décrivent dans le détail des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscale
98 ultiplient abusivement. Quand ils se révéleraient deux ou trois fois plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ajout
99 nt abusivement. Quand ils se révéleraient deux ou trois fois plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ajouter quelqu
100 as une affaire que d’ajouter quelques clauses aux milliers d’autres, utiles ou non, qui s’accumulent dans nos codes. Si l’anarch
101 ation simpliste et uniforme, elle aussi, implique mille désordres, puisqu’elle se traduit nécessairement par mille applicatio
102 ordres, puisqu’elle se traduit nécessairement par mille applications tyranniques — et que « la tyrannie est le souverain déso
103 gieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris, 1949, p. 11-14. i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas de petit
6 1949, Articles divers (1948-1950). Commencer par l’Europe (février 1949)
104 Commencer par l’Europe (février 1949 )f Il paraît que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin d’att
105 est une idée qui était dans l’air depuis au moins trois ans, mais elle y serait sans doute restée si quelques écrivains n’ava
106 er ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a trois ans, je me suis trouvé l’un des premiers à proclamer, en Amérique et
107 a situation s’est donc précisée, si je puis dire… Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’observer, par
108 s une puissance parce que l’Europe est divisée en vingt nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille qu’il faut pour parle
109 t se faire entendre, dans le monde dominé par les deux grands empires. Et non seulement l’Europe n’est plus une puissance qu
110 tique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent la terre. Voici le fait fondamental, et que
111 cité. Si les choses continuent comme elles vont : Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns a
112 t annexés ou colonisés les uns après les autres ; La question allemande ne sera pas réglée, c’est-à-dire fournira un pr
113 rétexte permanent à la guerre entre USA et URSS ; Rien ne pourra s’opposer à cette guerre entre la Russie et l’Amérique
114 ère sortirait vaincue. Tout cela est simple comme 2 et 2 font 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enf
115 ortirait vaincue. Tout cela est simple comme 2 et 2 font 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enfin la
116 t vaincue. Tout cela est simple comme 2 et 2 font 4  : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enfin la derniè
117 capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même unie, serait encore trop
118 rait encore trop petite pour tenir en respect les deux Grands, je rappellerai un seul chiffre, qu’on a tendance à oublier :
119 e, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que l
120 onc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions , c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie
121 de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie et tous ses satelli
122 e la Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres
123 Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu
124 nts qui rêvent d’unifier le genre humain dans les quinze jours, le plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est de les fair
125 sition permise dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues
126 avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et j
127 rs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et je ne sa
128 lisme et universalisme, liberté et engagement, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés e
129 t, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés et permutés, sans parler de leurs ménages à t
130 binés et permutés, sans parler de leurs ménages à trois , et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les autres, et nul d’entre
131 ndraient pour un temps par la force, il resterait dix autres couples d’adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne
132 plans, qui dit fédéralisme dit toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais égale
133 t toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais également valables, et qu’il ne s’
134 action qui se poursuit dans toute l’Europe depuis deux ans et qui est en train d’aboutir à certains résultats concrets. La C
135 à certains résultats concrets. La Conférence des Cinq va peut-être accepter notre plan de Parlement européen. Cette assembl
136 pier qui se donnerait l’air de provoquer l’un des deux grands, sans créer pour autant la force nécessaire pour décourager l’
137 bien ne plus entendre, pour l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-c
138 édéraliste), ce n’est pas être absent, c’est être deux fois présent. Merci, messieurs, une fois nous suffirait. Mais soyons
139 mencer par l’Europe », Fédération, Paris, février 1949, p. 70-77.
7 1949, Articles divers (1948-1950). L’Europe ou le cap du destin (1949)
140 L’Europe ou le cap du destin ( 1949 )g Toutes les grandeurs européennes viennent de l’esprit, et non pa
141 iquer autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4  % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ai
142 ssi, et par la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’un
143 a mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière be
144 de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) Documentation sur tous les efforts entrepris dans les
145 s et d’une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première t
146 tous ordres, qui se placent sur un plan européen. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser
147 placent sur un plan européen. Deux exemples entre vingt  : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser une rencontre entre
148 aniser une rencontre entre les responsables d’une dizaine d’instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et i
149 révision des manuels scolaires, qui furent depuis cent ans la source même des pires aberrations nationalistes. c) Étude et f
150 blesses de nos cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’éta
151 Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut être as
152  », Cahiers du Monde nouveau, Paris, juin–juillet 1949, p. 47-50.
8 1949, Articles divers (1948-1950). « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)
153 moteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » ( 1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de
154 émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949 )k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le
155 uillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaque semaine au
156 capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte où les nations ne dispar
157 t vous savez comment la Suisse a su atteindre ces trois buts, en se fédérant, il y a cent ans. À l’instant même où nous venon
158 atteindre ces trois buts, en se fédérant, il y a cent ans. À l’instant même où nous venons vous surprendre dans cette annex
159 rage sur la Suisse qui fera partie d’une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays. J
160 Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet 1949, p. 950.
161 Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet 1949, p. 950.
9 1949, Articles divers (1948-1950). Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet 1949)
162 européen de la culture aura son siège en Suisse ( 7 juillet 1949)l L’Europe dominait le monde entier, lorsque éclata l
163 de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet 1949 )l L’Europe dominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1
164 nait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouv
165 nt elle ne figure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de
166 igure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa cultur
167 les blessures — du génie créateur de l’Europe. En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Elle est rus
168 échue n’est plus qu’un petit continent, divisé en vingt-quatre nations, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation
169 t-quatre nations, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la
170 ira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif de treize nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques, polit
171 e notre Bureau d’études. Installé à Genève depuis trois mois. Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques de son travail
172 la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’une exp
173 e aura son siège en Suisse », Curieux, Neuchâtel, 7 juillet 1949, p. 6.
174 siège en Suisse », Curieux, Neuchâtel, 7 juillet 1949, p. 6.
10 1950, Articles divers (1948-1950). Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)
175 Problème de l’union européenne d’Olivier Philip ( 1950 )u Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’Europe », quand
176 es, elle constate qu’elle est détrônée. Entre les deux empires vainqueurs, subitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle pren
177 », déclarait le Manifeste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on l
178 tés resteront du papier. Je voudrais formuler ici deux remarques, entre toutes celles que ne manquera pas de suggérer cette
179 duits aux impasses présentes. Nous vivons, depuis 1920, sous le règne effectif des Experts. Je vois bien que ce règne est né
180 t sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces deux attitudes. M. Philip a des pages excellentes sur le « compromis » néc
181 européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-11.
11 1950, Articles divers (1948-1950). Raisons et buts d’une conférence (janvier 1950)
182 Raisons et buts d’une conférence (janvier 1950 )n o La condition profondément contradictoire dans laquelle vit l’E
183 contradictoire dans laquelle vit l’Europe, depuis dix ans, est entrée dans la phase critique. Elle est presque désespérée.
184 es, par exemple, n’ont cessé de s’aggraver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absurdité. L’avènement bru
185 r absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais il r
186 iant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment d’un destin commun
187 ses fruits, on jugera la culture sur sa récolte. Deux mots sur ceux qui ne sont pas venus ici. Quand Dieu veut perdre une s
188 s problèmes concrets de la culture dans son pays. Dix-sept groupes ont donné des réponses détaillées. Je tiens à souligner qu’un
189 Mouvement européen6 avait estimé tout d’abord que deux commissions suffiraient : l’une consacrée au problème des échanges, l
190 n, consacrée à l’éducation et à l’enseignement. I . Les échangesq La question des échanges. — La situation présente
191 es déplacements de forts en thème — nous devons : abandonner, et au besoin dénoncer la méthode de « l’organisation des
192 er la méthode de « l’organisation des échanges », exiger la suppression pure et simple, immédiate, des obstacles à la l
193 a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe ouverte
194 presque tous les maux que vous allez recenser. II . Les institutions À la suppression des obstacles matériels et léga
195 it celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire
196 olution culturelle du congrès. Au mois de février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de
197 ment européen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de
198 M. Dautry a magistralement exposé les motifs. III . L’enseignement Quant à la commission proposée tout à l’heure, qui
199 ure, qui s’occuperait de l’enseignement européen, deux mots seulement, mais importants. La préparation de cette Conférence,
200 ne. Construire des engins de mort qui coûtent des milliards , quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de dévelop
201 ent des milliards, quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche scientifique pour la pai
202 ns le monde. Une Europe affaiblie, et divisée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être
203 nt depuis que se dressent à l’Est comme à l’Ouest deux civilisations plus jeunes, filles de la nôtre, dont l’une, qui nous e
204 ciel de la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador de Madariaga, qui était d’ailleurs président
205 s président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration de M. Raymond
206 . Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR). 8. Dans son remarquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Co
207 ts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier 1950, p. 19-25. o. Il s’agit du discours prononcé par Denis de Rougemont l
208 e la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avons rajouté le participe passé « été », oublié par erreur
12 1950, Articles divers (1948-1950). Un gage à Jean Paulhan ! (avril 1950)
209 Un gage à Jean Paulhan ! (avril 1950 )r Cher ami, Ce n’est pas sans surprise que j’apprends, à vous lire
210 rvations dans l’ordre où je viens de les relever. « La Russie, qu’est-ce que vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit po
211 ? (On m’assure que cela dépend aussi de Staline.) « Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils sont là !… » Je
212 éuni à Strasbourg… et qu’il a déjà son statut (en quarante-deux articles) ». Montrez-nous donc un seul de ces articles qui dise, ou l
213 ait cela que nous voulions : je vous en montrerai trente qui disent le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre de cet org
214 e trentaine de fédéralistes sur cent-un députés.) La Grèce fait partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août 1949,
215 èce fait partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août 1949, mais les États-Unis n’y ont été nommés jusqu’ici que par L
216 partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août 1949, mais les États-Unis n’y ont été nommés jusqu’ici que par L’Humanité.
217 nce. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.) M. Spaak est un homme d’État qui agit plus que tout autre en faveur d
218 e voudrais bien qu’il se déclare « fédéraliste »… Ai-je vraiment, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et de l’iso
219 s fêtes ». Nous demandons surtout des sacrifices. Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou d’imbécile » dans le projet
220 fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances
221 ecueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl J
222 osées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces neuf , un seul fédéraliste déclaré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à
223 , un seul fédéraliste déclaré. Voyez donc la page 60  : « Je reproche à Benda de confondre union et unification, de vouloir
224 vous citée, au lieu de m’attribuer des sottises ? Notre doctrine (qui veut l’union dans la diversité, formule suisse) é
225 an Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950, p. 33-34.
13 1950, Articles divers (1948-1950). Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)
226 ssible de sauver l’Europe sans sauver sa culture ( 5 août 1950)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauv
227 de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950 )s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en m
228 n’a jamais passé pour la terre de la liberté. Ces deux réalités : l’Europe, la culture, naissent et meurent du même mouvemen
229 ement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les deux colosses russe et américain, l’Européen qui vient de perdre la guerre
230 , mais seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’
231 is seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du
232 de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, pr
233 redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300
234 us sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, e
235 ommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’
236 Qu’avons-nous inventé, nous les Européens, depuis cent ans ? Je répondrai : que n’avons-nous pas inventé ? Je cite pêle-mêle
237 idemment ; mais ce n’est point par hasard que ces deux grands pays semblent appeler ce procédé de description : leurs traits
238 placer sur le même plan l’Amérique et la Russie. Deux constatations très simples me suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu
239 sauver sa culture », France indépendante, Paris, 5 août 1950, p. 1-2. t. Présenté par la note suivante : « France Indép
240 sa culture », France indépendante, Paris, 5 août 1950, p. 1-2. t. Présenté par la note suivante : « France Indépendante pré
14 1950, Articles divers (1948-1950). Saint-John Perse et l’Amérique (1950)
241 Saint-John Perse et l’Amérique ( 1950 )m La grandeur de cette poésie fait reculer le commentaire : elle e
242 e qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarques sur les relations qui se sont révélées entre le poète et l’
243 rands rapides « avec leur provision de glace pour cinq jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « civilisation du m
244 vision globale du « monde entier des choses ». ⁂ I . Le mouvement crée l’énergie, le rayonnement et les trains d’ondes, —
245 le, entre ses « origines » et son délire global…) II . Anabase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques de ce siècle :
246 rique profonde » dont parlait un jour Baudelaire. III . L’Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est visio
247 plisse plus de la vapeur du dieu qui l’agite. » 4. « Avertissement du Dieu ! Aversion du Dieu ! » ou « … avec la bête ha
248 la bête haut cabrée — une âme plus scabreuse ! » ( Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capa
249 use ! » (Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le
250 ue », Les Cahiers de la Pléiade, Paris, septembre 1950, p. 136-139.