1 1948, Articles divers (1948-1950). L’idée fédéraliste (1948)
1 On peut penser avec le philosophe Jaspers que l’ Europe du xxe siècle n’a plus le choix « qu’entre la balkanisation et l’hel
2 , renonçant à leur souveraineté absolue au profit d’ une constitution commune. Dans cette vue, la Suisse moderne serait une
3 ans cette vue, la Suisse moderne serait une sorte de « bon exemple à suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre, deux
4 tent aussitôt à l’esprit. Il conviendrait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui m
5 drait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui méritent d’être donnés en exemple ; p
6 ments de notre expérience helvétique qui méritent d’ être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourr
7 ique qui méritent d’être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourraient être utilisés ou reproduit
8 eproduits sur une plus vaste échelle. La question de nos dimensions dans l’espace et dans le temps apparaît capitale à cet
9 oire suisse, notre État fédéral avec ses cent ans d’ existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudier les
10 nous autres Suisses. Mais si nous passons du plan de cette microhistoire à l’histoire générale, tout change. Nous voyons t
11 out d’abord que cent ans, ce n’est qu’un septième de notre histoire nationale ; que celle-ci ne s’étend que sur le dernier
12 que celle-ci ne s’étend que sur le dernier tiers de l’ère chrétienne, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l
13 e, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l’histoire des civilisations, qui elles-mêmes ne couvrent que le dern
14 les-mêmes ne couvrent que le dernier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il ré
15 nier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il résulte que notre expérience fédér
16 généralement admise de l’humanité sur la planète. D’ où il résulte que notre expérience fédérale ne représente guère que la
17 lles s’évanouiront probablement, comme une goutte de vin dans la mer. Ensuite, ce rappel à nos dimensions très réduites da
18 ns jouer dans le monde. En effet, les proportions de notre expérience à l’histoire générale sont à peu près celles de la g
19 ence à l’histoire générale sont à peu près celles de la graine à l’arbre. Qu’est-ce qu’une graine ? C’est un objet hauteme
20 n aboutissement et un commencement. C’est le lieu d’ un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent,
21 nt et un commencement. C’est le lieu d’un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent, mais elles p
22 es les graines meurent, mais elles peuvent mourir de deux manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’h
23 les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’ humus, les autres donnent un nouvel arbre. Notre État fédéral mourra,
24 helle infiniment plus vaste ? Telle est la chance de la Suisse dans l’histoire, pour ce siècle ou pour ceux qui le suivron
25 ce siècle ou pour ceux qui le suivront. La chance d’ une graine. Transposons maintenant ces symboles. Traduisons graine par
26 aîtra tout comme une autre République sérénissime de Venise, ne laissant qu’un souvenir ou un décor, parce qu’il aura gard
27 n cite l’exemple helvétique, à propos d’un projet d’ États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate
28 ue, à propos d’un projet d’États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate qui surgit sur les lèvres
29 l ne s’agit que des modalités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’id
30 alités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expér
31 ratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement pl
32 t s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses app
33 ce de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses applications, mais pourtant celles-ci n’existeraie
34 nt pas sans celle-là. Je ne parlerai donc ici que de notre idée fédéraliste en soi. Elle est très simple, comme toutes les
35 r en quelques mots, en une formule ; car elle est d’ un type organique et non pas mécanique ou passionnel, en cela beaucoup
36 résistances, mais elle est au contraire le secret d’ un équilibre constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de comp
37 constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après
38 nt entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après l’autre. On ne sa
39 de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’ écraser l’une après l’autre. On ne saurait trop insister sur le double
40 té, comme on voudra, qui est le battement du cœur de ce système. Car le fédéralisme ne consiste pas seulement dans l’union
41 Tous pour un ». Dans ce sens, il nous sera permis de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’autre que la politique
42 s de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’ autre que la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot.
43 la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot. Elle est donc l’antithèse exacte des méthodes totalitaires, a
44 onsistent à écraser les diversités par incapacité de les composer en un tout organique et vivant. ⁂ C’est peut-être parce
45 s ou moins consciemment les principales décisions de notre vie politique pendant des siècles, et qu’elle a finalement pris
46 cles, et qu’elle a finalement pris forme et force de loi vers 1848 ; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis
47 her à son sujet. Comme la vie même — étant la vie de notre praxis politique — elle allait sans dire, jusqu’ici. La nécessi
48 llait sans dire, jusqu’ici. La nécessité présente de l’affermir en face du défi que représente l’esprit totalitaire, et au
49 éfi que représente l’esprit totalitaire, et aussi de la propager, car la meilleure défense est dans l’attaque, nous invite
50 ui semblent avoir inspiré l’action tout empirique de nos ancêtres. 1. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à t
51 me ne peut naître que du renoncement à toute idée d’ hégémonie éducatrice ou organisatrice exercée par l’une des nations co
52 légitime certains « grands » prendre l’initiative d’ une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’
53 « grands » prendre l’initiative d’une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentati
54 d’une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe i
55 opéenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’ Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’une manièr
56 Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’ unifier l’Europe indiquent d’une manière négative cette même vérité si
57 celui d’Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’ Europe indiquent d’une manière négative cette même vérité simple que notre r
58 ans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’ une manière négative cette même vérité simple que notre réussite confi
59 e peuvent conduire qu’à l’unification, caricature de l’union véritable. 2. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncemen
60 e ne peut naître que du renoncement à tout esprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour
61 sprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’ une nation vaut aussi pour celui d’une idéologie. On pourrait définir
62 l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour celui d’ une idéologie. On pourrait définir l’attitude fédéraliste comme un ref
63 fédéraliste comme un refus constant et instinctif de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et s
64 de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et satisfaisantes pour la logique, mais par là même i
65 estructrices des diversités qui sont la condition de la vie organique. Fédérer, ce n’est pas mettre en ordre d’après un pl
66 re en ordre d’après un plan géométrique, à partir d’ un centre ou d’un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes,
67 près un plan géométrique, à partir d’un centre ou d’ un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes, selon leurs car
68 s caractères particuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît p
69 ticuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’ articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème d
70 er dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objectera que le totalitarisme, lui aussi
71 qualités ne se traduit pas seulement dans le mode d’ élection du Conseil des États, mais surtout, et d’une manière beaucoup
72 d’élection du Conseil des États, mais surtout, et d’ une manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie pol
73 manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie politique et culturelle, où l’on voit la Suisse romande ou
74 nne jouer un rôle sans proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralism
75 proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour d
76 arrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contraste avec le simplisme brutal qui caractérise
77 Burckhardt qualifiait dans une lettre prophétique de « terribles simplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’
78 mplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouve
79 l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, co
80 omplication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, féd
81 es institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’ horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, fédéraux, canton
82 , cantonaux, si diversement engrenés, il convient de leur montrer que cette complexité est la condition même de nos libert
83 ontrer que cette complexité est la condition même de nos libertés. C’est grâce à elle que nos fonctionnaires et nos législ
84 eurs sont constamment rappelés au concret, forcés de rester en contact avec les réalités humaines du pays. La Suisse est f
85 s réalités humaines du pays. La Suisse est formée d’ une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, lingui
86 nes du pays. La Suisse est formée d’une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, linguistiques, religie
87 frontières, et qui se recoupent et se recouvrent de cent manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un
88 n ou totalitaire, brimeraient nécessairement l’un de ces groupes, tendraient à réduire leur variété, et mutileraient ainsi
89 eur variété, et mutileraient ainsi dans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes,
90 ans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur t
91 ux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plu
92 s, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la
93 créter sur table rase, de simplifier les réalités d’ un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite
94 table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalis
95 , de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en é
96 trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en écrasant tout ce qui résiste, ou s
97 ut ce qui dépasse. Mais c’est la vitalité civique d’ un peuple qu’on écrase ainsi. Une politique fédéraliste, telle qu’on v
98 u’on vient de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle
99 de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne.
100 iniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne. C’est pourquoi je disais pl
101 pourquoi je vois en elle le seul avenir possible de l’Europe, et le don que nous pouvons lui faire en restant fidèles à n
102 quoi je vois en elle le seul avenir possible de l’ Europe , et le don que nous pouvons lui faire en restant fidèles à nous-mêmes
103 stant fidèles à nous-mêmes. b. Rougemont Denis de , « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse (1848-1948), Morat, Édi
2 1948, Articles divers (1948-1950). Essai sur l’avenir (1948)
104 , la seule méthode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’ analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et
105 thode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et qui progresse
106 nous sommes libres, après Heisenberg et la Bombe, de penser n’importe quoi, et que cela changera tout. Pardon ! La science
107 uves que vos superstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font
108 uperstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’ égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font déjà mille ki
109  ! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre de la bombe atomique, ses spéculations les plus « folles » ! Libre à vou
110 s spéculations les plus « folles » ! Libre à vous de prendre pour but l’évocation des fées du Moyen Âge : jamais une fée n
111 pas folle, c’est qu’elle nous permet aujourd’hui d’ aller beaucoup plus vite qu’il y a cent ans. Voilà qui est sérieux, me
112 sant le contester autour de moi, je crois prudent de l’accepter. J’admets aussi que l’évocation des fées ne sert à rien et
113 ant que dans quelques lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’aller plus vite, et donc commencent à se demander à
114 es lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’ aller plus vite, et donc commencent à se demander à quoi cela sert. Su
115 pposez que leur plaisir nouveau et principal soit d’ évoquer quelque chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après deux
116 et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’ application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’utilité urge
117 , inventent mille tours sentimentaux insoupçonnés de notre barbarie, créent l’immobilité dont le sous-produit nommé lenteu
118 r est vénéré par quelques sectes populaires, font de la mort une plaisanterie d’un goût sublime qui perd son sel à être ré
119 ctes populaires, font de la mort une plaisanterie d’ un goût sublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’une seule
120 ublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’ une seule pensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendr
121 ensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendre pour but la construction d’un moteur atomique : jamais un mot
122 Libre à vous de prendre pour but la construction d’ un moteur atomique : jamais un moteur atomique n’a évoqué la moindre f
123 s utopies, c’est qu’elles paraissent moins riches d’ avenir que le présent. On peut même dire que l’Utopie se définit comme
124 e la plupart des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des hi
125 art des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des historiens
126 bee, les utopies sont en réalité des « programmes d’ action déguisés en descriptions sociologiques imaginaires », et l’acti
127 utre que l’arrêt artificiel, à un certain niveau, d’ une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l
128 tain niveau, d’une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l’on considère comme bons, et l’on en
129 l’abri des menaces vulgaires comme des créations de l’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité touj
130 ’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire.
131 éalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’une manière moins s
132 f, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’ imaginer l’avenir d’une manière moins statique par hypothèse ? Quelles
133 e l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’ une manière moins statique par hypothèse ? Quelles seraient les condit
134 ons requises ? Il faudrait se garder tout d’abord de composer un tableau cohérent. Ménager à chaque pas la liberté du choi
135 ns possibles. Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les ob
136 . Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les obstacles qu’o
137 essent à gauche et à droite. (C’est le vrai moyen de la passionner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos effo
138 onner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos efforts présents, les conduites qui pourront résulter du succès m
139 es conduites qui pourront résulter du succès même de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’imaginer beaucoup de
140 de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’ imaginer beaucoup de nos meneurs politiques : ils voient les condition
141 os meneurs politiques : ils voient les conditions de leur victoire, mais non ses suites.2) L’effort le plus soutenu, le mi
142 fourni jusqu’ici le monde occidental, c’est celui de dominer la nature par la science, dans l’espoir d’augmenter le confor
143 e dominer la nature par la science, dans l’espoir d’ augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la d
144 spoir d’augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysiqu
145 vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysique et religieux s’est relâché à partir du
146 nies, qui sont des désordres fixés. Seul l’effort de la science (dont le sous-produit est l’industrie) enregistre un progr
147 surable, et semble se poursuivre avec des chances de succès toujours accrues. Il en résulte, dans les masses, certaines cr
148 science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bi
149 rs raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bien en soi. La vi
150 c qu’elle est « vraie ». En retour, nous refusons de croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie o
151 croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie ou condamne, et nous accordons à cette science l’autor
152 a science qu’elle vénère, ou du moins s’informera de ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’arrêt que semble ma
153 e ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’ arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Ca
154 du temps d’arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Car celle-ci semble avoir atteint, provisoi
155 me qu’elle l’a déjà percé, en ramenant un atome à de l’énergie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’immatériel,
156 gie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’ immatériel, pour parler un langage grossier. (Mais c’est celui, précis
157 elui, précisément, dans lequel la grande majorité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’i
158 ité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les not
159 temporains traduisent les résultats de la science d’ hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix
160 s tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau
161 prême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathé
162 es notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathématiciens et les b
163 e poussée à l’extrême ne peut nous rapprocher que de l’« à quoi bon ? », c’est-à-dire des questions métaphysiques que notr
164 ionaliste, indéfendable aux yeux de la science et de la raison, neutralise pratiquement la vitesse des transports. (Passer
165 e pratiquement la vitesse des transports. (Passer d’ Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époq
166 pratiquement la vitesse des transports. (Passer d’ Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de
167 asser d’Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol
168 renait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches a
169 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, a
170 tophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.) La pas
171 faveur desquelles les possibilités destructrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beauco
172 uctrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beaucoup plus généreusement que ne le sont les
173 possibilités constructrices pendant les périodes de paix. On peut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre
174 eut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre effort scientifique, provoque ainsi les forces les mieux faites
175 ion prométhéenne. Une autre conséquence indirecte de l’effort scientifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la
176 ntifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait l
177 être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait la science du
178 psychologie, la sociologie, nous servent en fait d’ alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’e
179 nous servent en fait d’alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’en d’autres temps l’on eût app
180 qu’en d’autres temps l’on eût appelées faiblesse de caractère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en l
181 tère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre
182 n liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dan
183 e que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dans l’acte du
184 gurer qu’elle consiste à « avoir » la disposition d’ un choix d’objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S
185 le consiste à « avoir » la disposition d’un choix d’ objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S’il est vra
186 ppements devons-nous prévoir à partir du complexe de tensions que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature,
187 ons que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature, nous n’avons pas encore répondu par une victoire totale, i
188 ne victoire totale, il s’en faut, mais les moyens de cette victoire sont désormais entre nos mains. La principale résistan
189 Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise de l’énergie atomique) en laissant en friche le champ des passions (nati
190 me, politique partisane). Les passions s’emparent de la technique et provoquent la guerre atomique. Les destructions sont
191 estructions sont telles, et le choc psychologique de telle nature, que la civilisation occidentale se disloque en îlots pl
192 loque en îlots plus ou moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les dern
193 u moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les derniers lieux communs mo
194 ux communs moraux se désintègrent. Il reste assez d’ hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances tech
195 se désintègrent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour mainte
196 rent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et
197 ’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et là des apparences de «
198 echniques pour maintenir ici et là des apparences de « vie normale », mais les liens profonds sont coupés. Plus rien ne va
199 rets, des policiers ou des fugitifs. Les sociétés de gangsters se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous o
200 se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous ordres, on expérimente des morales nouvelles et des formes nouve
201 nte des morales nouvelles et des formes nouvelles de résistance contre l’État vainqueur et son empire, théoriquement unive
202 vainqueur et son empire, théoriquement universel. De ces communautés persécutées peut sortir une spiritualité nouvelle, mè
203 utées peut sortir une spiritualité nouvelle, mère d’ une civilisation imprévisible. 2. Nous répondons au challenge des pass
204 libres et presque instantanés sur toute l’étendue de la planète. Pour la première fois dans l’histoire du monde, il n’y a
205 u’une seule civilisation (l’occidentale, enrichie d’ apports orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédé
206 orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédéraliste ; et la question sociale, au lieu de s’exacerber ten
207 ales la guerre et la paix ; soit que le challenge de nos passions se révèle trop puissant et que notre civilisation y succ
208 y répondions victorieusement par l’établissement d’ un gouvernement mondial, libérant l’effort scientifique. (Je note ce s
209 rt scientifique. (Je note ce sentiment, incapable de preuve, à titre de curiosité pour l’historien futur.) 4. Surmonter
210 r.) 4. Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité d’ une réponse victorieuse, à la dernière heure, quel serait le nouveau c
211 serait le nouveau challenge qui ne manquerait pas de confronter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre eff
212 ter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre effort le plus constant ? Ce serait à coup sûr l’Ennui. Ce sen
213 n la plus typique du xixe siècle. (Sans horaires de tous genres, on ne pourrait imaginer le fonctionnement des grandes us
214 ération vaste et dense.) « L’ennui naquit un jour de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretien
215 our de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider s
216 . Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’en
217 qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’ennui que la multiplicité des imp
218 en difficile de décider si la monotonie crée plus d’ ennui que la multiplicité des impressions. L’Océan ou les chutes du Ni
219 Niagara ne m’ennuient pas, mais bien la traversée d’ une grande ville inconnue. Ce qui provoque l’ennui, dans un cas comme
220 , dans un cas comme dans l’autre, c’est l’absence de rythmes vivants, ou leur rupture fréquente et arbitraire. En d’autres
221 traire. En d’autres termes, c’est la mécanisation de l’existence, ou encore : la répartition indifférente des efforts et d
222 oint choisi par quelque nécessité interne, en vue d’ une création, d’une participation, d’une compréhension en profondeur.
223 quelque nécessité interne, en vue d’une création, d’ une participation, d’une compréhension en profondeur. C’est donc un ac
224 erne, en vue d’une création, d’une participation, d’ une compréhension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entr
225 ension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imagin
226 ssement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de mena
227 ci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans un
228 hallenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans une tempête, mais bi
229 , l’humanité ne pourra répondre que par une prise de position métaphysique. Elle pourra choisir l’anesthésie spirituelle,
230 lisation à l’ennui, sera obtenue par des méthodes de conditionnement social et physiologique, dont le principe général ser
231 l et physiologique, dont le principe général sera d’ obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question mét
232 que, dont le principe général sera d’obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question métaphysique que l
233 oute question métaphysique que l’Ennui risquerait de mettre à nu. Dans ce cas, les spirituels-malgré-tout se verront persé
234 robablement nomade, qui pourra devenir la matrice d’ une civilisation spirituelle et mondiale. 2. Si l’Humanité choisit au
235 e par une élite en tous points comparable à celle de nos savants actuels, dotée des mêmes prestiges populaires, exerçant u
236 exerçant une autorité analogue sur l’orientation de la recherche organisée, et définissant de facto les nouveaux standard
237 e, et définissant de facto les nouveaux standards d’ utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tour
238 sant de facto les nouveaux standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la m
239 x standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la matière — désormais « dépa
240 » — se tournera vers la découverte et la maîtrise de réalités d’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jo
241 era vers la découverte et la maîtrise de réalités d’ un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi p
242 ’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi peu imaginables pour nous que ne pouvait l’être pour
243 ants du xviiie siècle la destruction instantanée d’ une ville par suite de la dissociation d’un invisible point de matière
244 tantanée d’une ville par suite de la dissociation d’ un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, e
245 par suite de la dissociation d’un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, et sans nom dans notre
246 je désignais en débutant par le terme symbolique de Fées. 1. Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atom
247 la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contr
248 ires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contribué d’ une manière décisive à donner forme à un avenir très différent de leur
249 écisive à donner forme à un avenir très différent de leurs prévisions. Saint-Simon a fourni les cadres du capitalisme indu
250 Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis de , « Essai sur l’avenir », Pro regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Cal
3 1948, Articles divers (1948-1950). Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)
251 Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)c La crise actuelle nous force à nous interrog
252 e nous force à nous interroger sur la valeur même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’auton
253 s force à nous interroger sur la valeur même de l’ Europe , dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’autonomie du c
254 r même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’autonomie du continent, et que signifierait sa p
255 s qui pèsent sur nous mettent en cause une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis de
256 e une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’Europe. En les per
257 liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’ Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce
258 iberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’ Europe . En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce qui f
259 om d’Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la
260 coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la vie. Le monde entier en serait appauvri. C’est donc une notion de
261 entier en serait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun
262 ait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun. C’est en ell
263 nité la plus profonde. Et c’est en la définissant d’ une manière actuelle et concrète que nous poserons les bases de la féd
264 actuelle et concrète que nous poserons les bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de
265 bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que le
266 ui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nou
267 espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ordre é
268 Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ordre économique et politique, il n’est pas moins ce
269 t vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ ordre économique et politique, il n’est pas moins certain que l’unité
270 politique, il n’est pas moins certain que l’unité de l’Europe est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géogra
271 ique, il n’est pas moins certain que l’unité de l’ Europe est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géographie, l’E
272 e est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géographie, l’Europe n’est qu’un cap de l’Asie. Du point de vue de
273 t culturelle. Du point de vue de la géographie, l’ Europe n’est qu’un cap de l’Asie. Du point de vue des hommes qui l’habitent,
274 qui l’habitent, et des autres peuples du monde, l’ Europe reste aujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’une cultur
275 du monde, l’Europe reste aujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’une culture inégalée, plus intense, plus div
276 ujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’ une culture inégalée, plus intense, plus diverse et créatrice qu’en to
277 lus diverse et créatrice qu’en toute autre région de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plu
278 ion de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plus large et humain. La culture véritable n’est
279 e véritable n’est pas un ornement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme
280 ement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît
281 mble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle il
282 concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’ une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut
283 la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut une certaine conception de
284 ustre, traduit et promeut une certaine conception de l’existence ; elle l’éduque ; elle en donne le sens. Or il est bien t
285 e ; elle en donne le sens. Or il est bien typique de l’Europe, aujourd’hui, que la culture ainsi comprise y soit encore un
286 lle en donne le sens. Or il est bien typique de l’ Europe , aujourd’hui, que la culture ainsi comprise y soit encore un but, et
287 lleurs, elle est mise au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du
288 se au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du parti au pouvoir, l
289 ont les chefs du parti au pouvoir, les dirigeants de l’économie qui lui dictent un programme précis, qui limitent ses acti
290 et qui prescrivent son rôle subordonné. Pour nous Européens , tout au contraire, c’est la culture qui exprime le sens humain de la
291 aire, c’est la culture qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influen
292 qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les c
293 ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définit
294 fluencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et
295 uté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et promouvoir notre culture, cela signifie d’abor
296 e la culture appartient donc à la définition de l’ Europe . Maintenir et promouvoir notre culture, cela signifie d’abord, pour n
297 r notre culture, cela signifie d’abord, pour nous Européens  : élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. C
298 Européens : élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moye
299 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins
300 nifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités
301 es moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités publiques et privées à une
302 privées à une notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le
303 notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vi
304 ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vie et les institutions. La conception européenne de l’homme
305 e de la vie et les institutions. La conception européenne de l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de s
306 et les institutions. La conception européenne de l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa l
307 e l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une d
308 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique
309 on de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe , l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie
310 e sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’ une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie, mais au cont
311 été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique, d’ une nation ou d’une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours,
312 l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou d’ une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours, et ce sera, tant
313 ce fut toujours, et ce sera, tant qu’il y aura l’ Europe , l’effet d’un dialogue permanent, bien souvent dramatique, parfois tr
314 , et ce sera, tant qu’il y aura l’Europe, l’effet d’ un dialogue permanent, bien souvent dramatique, parfois tragique, entr
315 doctrines ou plusieurs confessions, une vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, il
316 ssions, une vingtaine de nations, et une infinité d’ écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Eu
317 vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Europe et à mo
318 s individuels : tous, ils ont contribué à faire l’ Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée n’est pas simpl
319 nt contribué à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée n’est pas simple, mais toujours dialectique ;
320 é à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée n’est pas simple, mais toujours dialectique ; ell
321 le trouve son unité dans la diversité des couples d’ éléments antagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous e
322 tagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous et se renouvelle à chaque génération : antiquité et christianism
323 et protestantisme, attachements régionaux et sens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion
324 ens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion du progrès, science et sagesse, germanisme et
325 e… Dans cet équilibre tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risqu
326 tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme
327 se menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aven
328 ’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous p
329 es éléments, réside le risque original de l’homme européen , son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous participe plus ou
330 ropéen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous participe plus ou moins consciemment réside le secret du dynamis
331 mment réside le secret du dynamisme occidental et de l’inquiétude créatrice qui pousse l’Européen à remettre en question,
332 idental et de l’inquiétude créatrice qui pousse l’ Européen à remettre en question, de siècle en siècle, ses rapports avec Dieu,
333 ice qui pousse l’Européen à remettre en question, de siècle en siècle, ses rapports avec Dieu, avec le monde, avec l’État
334 naisons variées à l’infini qu’il lui est possible d’ opérer entre les éléments contradictoires constituant son patrimoine,
335 tuant son patrimoine, réside la chance, pour tout Européen , d’individualiser de plus en plus ses jugements et son mode de vie. E
336 patrimoine, réside la chance, pour tout Européen, d’ individualiser de plus en plus ses jugements et son mode de vie. Et en
337 ns ce choix permanent, dans la conscience qu’il a d’ en être responsable, l’Européen conçoit la liberté. Toute notre histo
338 ns la conscience qu’il a d’en être responsable, l’ Européen conçoit la liberté. Toute notre histoire illustre ce débat, qui se l
339 istoire illustre ce débat, qui se livre en chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entr
340 n chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrann
341 rté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’indiv
342 écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits
343 grès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l
344 Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à ce
345 e sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste s
346 ile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste se déclenche, au nom de la
347 llectiviste se déclenche, au nom de la justice ou de l’ordre social. Elle donne naissance à des régimes unitaires (qu’on a
348 à se dresser avec une passion renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenan
349 renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenant dans quelle notion commune d
350 s cherchons maintenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’indiv
351 intenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et d
352 t de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et du collectivisme, renaissant à toutes les époques
353 qu’au xxe siècle, mais qui a toujours été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idé
354 été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion
355 ion directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’origine chrétienne, acceptée et r
356 ’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’ origine chrétienne, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de
357 e, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de l’homme doublement responsable envers sa vocation et envers la cité ;
358 on pas seulement libre ou seulement engagé ; lieu d’ une synthèse vivante, mais aussi d’un conflit entre des exigences égal
359 engagé ; lieu d’une synthèse vivante, mais aussi d’ un conflit entre des exigences également valables mais pratiquement an
360 devient infidèle à lui-même et au génie créateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes,
361 ent infidèle à lui-même et au génie créateur de l’ Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes, soit qu’
362 réateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa p
363 de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa particularité (nation, parti ou idéologie), soit q
364 idéologie), soit qu’il prétende l’imposer à tous d’ une manière uniforme, donc tyrannique. Diversité et division des na
365 et des idéologies Cette description succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-
366 ologies Cette description succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-uns des problèmes
367 succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-uns des problèmes brûlants que nous pos
368 ntinent, a fait pendant des siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusio
369 nt, a fait pendant des siècles l’originalité de l’ Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la n
370 siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État,
371 ité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réa
372 e. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réalités culturelle
373 iques et administratives, qui n’ont aucune raison de se recouvrir en fait, cette diversité naturelle est devenue division
374 uvrit nos échanges culturels. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’as
375 els. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’assurer son existence écono
376 apable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’ assurer son existence économique. Cet individualisme national, qui ten
377 anger pour la vie réelle des nations. Dans l’état de faiblesse où il les met, il les livrera fatalement à l’unification fo
378 t à l’unification forcée, soit par l’intervention d’ un empire du dehors, soit par l’usurpation d’un parti du dedans. C’est
379 tion d’un empire du dehors, soit par l’usurpation d’ un parti du dedans. C’est pourquoi l’union fédérale est devenue la seu
380 es. Aussi indispensables que les nations à la vie de la culture et à la liberté, ces diversités à leur tour tendent à deve
381 Tandis que les frontières étatiques cloisonnent l’ Europe verticalement, les idéologies et les partis la cloisonnent horizontal
382 ngereuse et utopique que ne serait l’impérialisme d’ une seule nation. Il est bien clair que ni la droite, ni la gauche, ni
383 uche, ni le centre, aujourd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de
384 urd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par
385 cun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par suite son propre avenir. De même que les nati
386 artis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’ Europe , ni par suite son propre avenir. De même que les nations n’ont de cha
387 son propre avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique
388 e avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur s
389 ue si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre l
390 ue de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, ren
391 souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, renoncent à t
392 ubordonnent leur tactique à la stratégie générale d’ une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour
393 eur tactique à la stratégie générale d’une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour sauver nos d
394 a stratégie générale d’une action de salut public européen . c. Rougemont Denis de, « Pour sauver nos diversités (le sens de
395 de salut public européen. c. Rougemont Denis de , « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Par
396 t Denis de, « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Paris, juin 1948, p. 14-15.
4 1948, Articles divers (1948-1950). Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)
397 Pourquoi l’ Europe  ? (25 décembre 1948)d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels,
398 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
399 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
400 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
401 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
402 er au compromis, c’est-à-dire à la Paix — c’est l’ Europe . Mais l’Europe n’est plus une puissance, parce que l’Europe est divis
403 , c’est-à-dire à la Paix — c’est l’Europe. Mais l’ Europe n’est plus une puissance, parce que l’Europe est divisée en vingt nat
404 is l’Europe n’est plus une puissance, parce que l’ Europe est divisée en vingt nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille
405 ominé par deux grands empires. Et non seulement l’ Europe n’est plus une puissance qui pourrait exiger la paix, mais chacune de
406 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
407 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
408 fondamental, et que personne ne peut nier : Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
409 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les probl
410 à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
411 omie moderne. Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
412 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
413 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
414 nt comme elles vont : 1° Les différents pays de l’ Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La question
415 lutôt faire la paix, il nous faut d’abord faire l’ Europe , c’est-à-dire la Troisième puissance, qui serait capable d’exiger la
416 à-dire la Troisième puissance, qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
417 e puissance, qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
418 ter pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’ Europe , même unie, serait encore trop petite pour tenir en respect les deux
419 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
420 , qu’on a tendance à oublier : La population de l’ Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 milli
421 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
422 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
423 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
424 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
425 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
426 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
427 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
428 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
429 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
430 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
431 i, les choses cessent d’être simples, parce que l’ Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en fai
432 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
433 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique Cela « soulè
434 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
435 . On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’ Europe  ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ? Très bon
436 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ic
437 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ici ! — mais nous nou
438 ntre les thèses — ici ! — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
439 a paix. On nous répète sur le mode solennel que l’ Europe c’est Pascal et Goethe, c’est Dante et Shakespeare, c’est Paul Valéry
440 c’est Paul Valéry, etc. Bien sûr ; mais hélas ! l’ Europe réelle, ce n’est pas seulement une société des esprits. C’est aussi l
441 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
442 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
443 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
444 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
445 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
446 x tous, même malgré eux — qu’il nous faut faire l’ Europe . Mais quelle Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs tradition
447 ux — qu’il nous faut faire l’Europe. Mais quelle Europe  ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de
448 re l’Europe. Mais quelle Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
449 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
450 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
451 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
452 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
453 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
454 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
455 les que polémiques. Et cela n’est rien encore : l’ Europe consiste dans les combinaisons et les permutations d’une longue série
456 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
457 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
458 autres couples combinés et permutés, sans parler de leur ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les au
459 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
460 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
461 s ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’ Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au total so
462 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
463 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
464 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
465 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
466 ue. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’ Européen , de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu,
467 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
468 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
469 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
470 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
471 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
472 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
473 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle sa liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
474 isquer, qui est la condition première de ce que l’ Européen appelle sa liberté. Voilà pourquoi il serait criminel, s’il n’était d
475 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
476 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
477 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
478 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
479 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
480 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
481 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps, par
482 ps, par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
483 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
484 passant par le NKVD, le résultat ne serait plus l’ Europe , mais très exactement ce « petit cap de l’Asie » à quoi se réduit l’E
485 ent ce « petit cap de l’Asie » à quoi se réduit l’ Europe sans son génie. Ce n’est donc pas une idéologie qui fera l’Europe, pu
486 génie. Ce n’est donc pas une idéologie qui fera l’ Europe , puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la
487 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolog
488 re sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
489 qui nous paraît prédestinée à surmonter la crise européenne  : c’est la méthode fédéraliste. Fédérer, en effet, ce n’est pas unifi
490 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
491 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
492 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
493 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
494 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
495 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
496 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
497 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
498 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
499 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec to
500 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec tout le monde
501 ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’ Europe avec tout le monde, c’est-à-dire avec tous les partis qui l’acceptent
502 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
503 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ain
504 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ainsi qu’on pe
505 pose à votre admiration : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
506 suffirait. Mais soyons sérieux : quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
507 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
508 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
509 nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’ Europe , ils veulent bien faire la paix, mais à une condition : c’est que M.
510 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
511 voulez la paix, vous devez vouloir ses moyens : l’ Europe unie est le plus sûr ; si vous voulez l’Europe, vous devez vouloir le
512 l’Europe unie est le plus sûr ; si vous voulez l’ Europe , vous devez vouloir le fédéralisme, si vous voulez demeurer libres, e
513 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
514 ’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens , de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit
515 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
516 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
517 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
518 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclament leur fédération, pourront se faire entendre au m
519 le jour soit prochain où les voix concertées de l’ Europe , proclament leur fédération, pourront se faire entendre au monde enti
520 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de, « Pourquoi l’Europe ? », Rasse
521 forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de , « Pourquoi l’Europe ? », Rassemblement : bulletin intérieur hebdomad
522 espérance. d. Rougemont Denis de, « Pourquoi l’ Europe  ? », Rassemblement : bulletin intérieur hebdomadaire du RPF, Paris, 2
523 ette note : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récem
524 e : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’ essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récemment des
525 nt de faire, en tant que membre du Comité central de l’Union européenne des fédéralistes, une conférence en Sorbonne. Les
526 , en tant que membre du Comité central de l’Union européenne des fédéralistes, une conférence en Sorbonne. Les extraits que l’on v
527 à quel point les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblemen
528 t les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblement. »
5 1949, Articles divers (1948-1950). La liberté religieuse à l’école (2e semestre 1949)
529 règlements scolaires sont stricts : toute absence d’ un élève qui n’est pas justifiée par des raisons « réputées légitimes 
530  réputées légitimes », telle que maladie, réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être pun
531 réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être punie, surtout si elle se répète à intervall
532 lors subie par les parents ou responsables, et va de l’amende à la prison selon les cas et les pays. On imagine tous les c
533 s aussi sévères, pour peu qu’on veuille se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossier
534 le se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’ examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes
535 ontre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes dans trois pays : la Bel
536 ns plusieurs départements, après que les demandes de dispense ont été refusées « au nom de la loi », il est arrivé fréquem
537 loi », il est arrivé fréquemment que le directeur d’ une école, ou l’inspecteur d’académie, consentissent finalement à inte
538 ent que le directeur d’une école, ou l’inspecteur d’ académie, consentissent finalement à interpréter la loi, et à suspendr
539 n Algérie ou en Alsace, des amendes ou des peines de prison ont été infligées aux pères d’enfants absents plusieurs samedi
540 des peines de prison ont été infligées aux pères d’ enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches a
541 ées aux pères d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignemen
542 res d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’ innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des pré
543 te. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des préfets et des ministres semblent avoir rencontré
544 quel que soit le désir, dont beaucoup témoignent, d’ assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la
545 nt beaucoup témoignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’e
546 moignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolér
547 la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’ un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de préte
548 il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’i
549 e l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’intolérance. En Suisse, la situation dif
550 il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’ intolérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’un canton à l’
551 lérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’ un canton à l’autre. C’est ainsi que l’État de Genève accorde le congé
552 nquait l’école le samedi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se re
553 medi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d
554 ce : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d’ une faute, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettr
555 e, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettre. À ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinqu
556 uatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’ absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a acce
557 isonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de pay
558 autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence
559 ccepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’
560 llant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en a pas moins été condamné (
561 après « récidives ») à trois, puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dans un cant
562 loi paraît plus tolérante. L’instruction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes compr
563 ction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une diza
564 ous disent les gens pressés : qu’il ne s’agit que de cas fort rares, que les adventistes sont en très petit nombre, qu’ils
565 tistes sont en très petit nombre, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la sema
566 e, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne m
567 r sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’indignation, d
568 semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’ indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millio
569 indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou a
570 poque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’ innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Rema
571 e sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Remarquons tout d’abord que le n
572 que les bonnes gens qui parleraient volontiers «  d’ exceptions négligeables » dans le cas d’une secte brimée, ne voient pa
573 ontiers « d’exceptions négligeables » dans le cas d’ une secte brimée, ne voient pas que cet argument devrait en bonne logi
574 , dont le nombre est infime. Ensuite, la question de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au
575 n de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davan
576 ison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davantage intervenir dans la considération des fai
577 qui nous occupent. Il s’agit ici du respect légal de toutes les convictions religieuses en tant que telles, et non point d
578 uses en tant que telles, et non point du jugement de vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions,
579 vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions, car si les deux points de vue n’étaient pas dissocié
580 nutieusement ces libertés. Céder sur une question de principe, sous prétexte qu’elle n’intéresse qu’une minorité microscop
581 écise, suffirait à résoudre des conflits du genre de ceux que l’on vient de citer. Il serait, par exemple, extrêmement fac
582 citer. Il serait, par exemple, extrêmement facile d’ introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une
583 facile d’introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une clause spéciale ajoutant à la liste des « 
584 éciale ajoutant à la liste des « motifs légitimes d’ absence aux cours » le fait d’appartenir à certaines religions, sectes
585 « motifs légitimes d’absence aux cours » le fait d’ appartenir à certaines religions, sectes ou confessions. À cela j’imag
586 ions courantes : on dira qu’il est trop compliqué de prévoir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des p
587 ir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des précédents dont mille sectes à l’avenir pourront être tenté
588 ont mille sectes à l’avenir pourront être tentées d’ abuser. Le premier argument n’est pas sérieux. Les lois pénales décriv
589 is pénales décrivent dans le détail des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales,
590 il des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales, les lois sur les loyers et les « 
591 ns à distinguer, à nuancer, à préciser, à prévoir d’ infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien
592 à prévoir d’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateu
593 ’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateur ! S’il n’a
594 ur le législateur ! S’il n’apportait qu’une trace de ce génie méfiant dans la rédaction des décrets garantissant les droit
595 itutions, la Liberté et la Démocratie cesseraient d’ être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on d
596 t la Démocratie cesseraient d’être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on dit avoir, que des « pa
597 n’ouvrent la porte à l’anarchie, elle se nourrit d’ une double confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’accorder des
598 uble confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’ accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « libe
599 s d’accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties p
600 iaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties proclament à l’envi. Et d’aut
601 roclament à l’envi. Et d’autre part, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement
602 t, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement. Quand ils se révéleraient deux o
603 s plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ ajouter quelques clauses aux milliers d’autres, utiles ou non, qui s’a
604 montrent soudain les plus stricts dans leur refus de considérer les droits d’une petite confession qui ne menace personne.
605 stricts dans leur refus de considérer les droits d’ une petite confession qui ne menace personne. On les honore d’avoir sa
606 confession qui ne menace personne. On les honore d’ avoir sauvé d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoi
607 i ne menace personne. On les honore d’avoir sauvé d’ une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au ra
608 d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parl
609 la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’un cent
610 ionale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’ un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils
611 u’elle ne soit parlée que par moins d’un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils pas qu’en assu
612 nt ne verraient-ils pas qu’en assurant les droits d’ une minorité religieuse, ils confirmeraient les principes qui, depuis
613 ils confirmeraient les principes qui, depuis plus d’ un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur p
614 s qui, depuis plus d’un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’e
615 sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des d
616 eur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des difficultés particulièr
617 tent leurs croyances, m’a paru propre à illustrer d’ une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse
618 er d’une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse à l’école. Parce qu’il n’est pas spectaculaire,
619 aru poser le plus clairement possible la question de principe du respect effectif des libertés théoriquement admises par l
620 , mais je sais que toute restriction à la liberté d’ un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du
621 n à la liberté d’un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne
622 tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne l’oublions jamais, est en quelque manière ou quelqu
623 ersécution qu’une autre endure. Est-il nécessaire d’ ajouter qu’il en va de même pour nos droits politiques et civiques ? O
624 r la liberté, dans notre monde, qu’en s’efforçant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de, « La liberté religieuse
625 çant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de , « La liberté religieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris, 1
626 i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Au
627 ar la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Autoriser une r
628 t, en fait, refuser cette liberté qu’on se flatte de lui accorder. Denis de Rougemont l’expose fort bien dans les pages qu
629 ’est pas inconditionnelle n’est qu’une caricature de la liberté. » j. « Confession » dans l’original. On a corrigé une er
6 1949, Articles divers (1948-1950). Commencer par l’Europe (février 1949)
630 Commencer par l’ Europe (février 1949)f Il paraît que l’idée d’un gouvernement mondial vie
631 l’Europe (février 1949)f Il paraît que l’idée d’ un gouvernement mondial vient enfin d’atteindre Paris ; il était temps
632 que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin d’ atteindre Paris ; il était temps ! C’est une idée qui était dans l’air
633 passent en France et c’est très bien : c’est très européen … La voici donc en pleine actualité. Tout le monde se déclare pour le
634 mondiales. Qui dira plus ? Ici, nous avons l’air de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. N
635 ir de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de na
636 , beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe . Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés
637 de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander :
638 urope. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander : pourquoi l’Europe 
639 s attardés. Et l’on va nous demander : pourquoi l’ Europe  ? Tant qu’à faire, pourquoi pas le monde entier ? Pourquoi nous arrêt
640 rticulier : c’est qu’il faut lui montrer un point d’ application. (Or, quand on veut engager un élan émotif dans la réalité
641 élan émotif dans la réalité, on a toujours l’air de freiner.) Nous ne sommes pas une autre école, nos buts finaux sont bi
642 renons au mot. Et nous vous proposons une méthode de travail, un mouvement qui est déjà au travail, et un objectif immédia
643 déjà au travail, et un objectif immédiat, qui est de commencer par l’Europe. Car nous pensons que le chemin vers la paix,
644 un objectif immédiat, qui est de commencer par l’ Europe . Car nous pensons que le chemin vers la paix, vers le gouvernement mo
645 a paix, vers le gouvernement mondial, passe par l’ Europe — ou ne passera pas du tout. J’ai peut-être le droit de parler ainsi,
646 u ne passera pas du tout. J’ai peut-être le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a trois ans, je m
647 tre le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’ Hiroshima, il y a trois ans, je me suis trouvé l’un des premiers à pro
648 l’un des premiers à proclamer, en Amérique et en Europe , qu’il n’y avait qu’une parade à la bombe, c’était le gouvernement mo
649 ouvernement mondial. Je n’ai pas un mot à retirer de ce que je publiais à l’époque. Je ne suis pas un instant revenu en ar
650 revenu en arrière. Je suis au contraire convaincu d’ avoir fait un grand pas en avant en embrassant la cause européenne. Vo
651 fait un grand pas en avant en embrassant la cause européenne . Voici pour quelles raisons, les plus simples du monde, mais d’une lo
652 quelles raisons, les plus simples du monde, mais d’ une logique à laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me s
653 laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me soustraire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planèt
654 traire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planète unie par les peuples unis — et j’en étais — un certain rid
655 peuples unis — et j’en étais — un certain rideau de fer est tombé, brutalement. Et la guerre froide a commencé. La situat
656 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
657 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
658 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
659 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
660 er au compromis, c’est-à-dire à la paix — c’est l’ Europe . Mais l’Europe n’est plus une puissance parce que l’Europe est divisé
661 , c’est-à-dire à la paix — c’est l’Europe. Mais l’ Europe n’est plus une puissance parce que l’Europe est divisée en vingt nati
662 ais l’Europe n’est plus une puissance parce que l’ Europe est divisée en vingt nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille
663 é par les deux grands empires. Et non seulement l’ Europe n’est plus une puissance qui pourrait exiger la paix, mais chacune de
664 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
665 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
666 fondamental, et que personne ne peut nier : aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
667 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les prob
668 une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
669 ie moderne. ⁂ Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
670 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
671 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
672 nt comme elles vont : 1° Les différents pays de l’ Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La question
673 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’ être enfin la dernière, parce qu’elle laissera peu de monde pour en fa
674 aussi tout cela nous conduit, avec la force même de l’évidence, vers une seule et unique solution. Si nous voulons sauver
675 et unique solution. Si nous voulons sauver chacun de nos pays, il nous faut unir ces pays. Si nous voulons sauver la paix,
676 lutôt faire la paix, il nous faut d’abord faire l’ Europe , c’est-à-dire la troisième puissance qui serait capable d’exiger la p
677 -à-dire la troisième puissance qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
678 me puissance qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
679 ter pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’ Europe , même unie, serait encore trop petite pour tenir en respect les deux
680 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
681 , qu’on a tendance à oublier : La population de l’ Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 milli
682 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
683 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
684 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
685 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
686 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
687 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
688 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
689 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
690 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
691 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
692 i, les choses cessent d’être simples, parce que l’ Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en fai
693 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
694 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique. Cela « soul
695 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
696 . On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’ Europe  ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ? Très bon
697 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — m
698 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — mais nous nous occup
699 rien contre les thèses — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
700 a paix. On nous répète sur le mode solennel que l’ Europe c’est Pascal et Goethe, c’est Dante et Shakespeare, c’est Paul Valéry
701 c’est Paul Valéry, etc. Bien sûr ; mais hélas, l’ Europe réelle, ce n’est pas seulement une société des esprits. C’est aussi l
702 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
703 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
704 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
705 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
706 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
707 ur eux tous, même malgré eux — qu’il nous faire l’ Europe . Mais alors des malins viennent nous dire : tous ces gens, qu’ont-ils
708 ns viennent nous dire : tous ces gens, qu’ont-ils de commun entre eux ? Quelle unité voyez-vous dans tout cela ? Eh bien,
709 e : tous ces gens partagent le même sort, le sort de l’Europe, c’est-à-dire que si l’on ne fait rien, ils seront tous les
710 ous ces gens partagent le même sort, le sort de l’ Europe , c’est-à-dire que si l’on ne fait rien, ils seront tous les uns après
711 s gens ont en commun le dégoût et la peur immense de la guerre, et nous voulons pour eux et avec eux faire la paix. Voilà
712 aincre. ⁂ J’en reviens à la méthode et aux moyens d’ action. Aux impatients qui rêvent d’unifier le genre humain dans les q
713 et aux moyens d’action. Aux impatients qui rêvent d’ unifier le genre humain dans les quinze jours, le plus grand choc que
714 e plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore
715 c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore notre fédération européenne. Car c’est préci
716 l’un de ces congrès où s’élabore notre fédération européenne . Car c’est précisément quand on veut les unir, qu’on découvre à quel
717 ut les unir, qu’on découvre à quel point tous les Européens résistent dans leurs différences, et peut-être consistent dans leurs
718 parti au pouvoir et une opposition, un seul type de drug-store, et une morale moyenne, dont l’idée générale est justement
719 orale moyenne, dont l’idée générale est justement d’ éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie,
720 ement d’éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie, c’est encore plus simple : une seule tête,
721 le : une seule tête, un parti, une police, et pas d’ opposition permise dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines d
722 as d’opposition permise dans aucun ordre. Mais en Europe  ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de
723 dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
724 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
725 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
726 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
727 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
728 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
729 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
730 les que polémiques. Et cela n’est rien encore ; l’ Europe consiste dans les combinaisons et les permutations d’une longue série
731 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
732 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
733 autres couples combinés et permutés, sans parler de leurs ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les a
734 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
735 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
736 s ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’ Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au total so
737 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
738 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
739 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
740 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
741 ue. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’ Européen , de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu,
742 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
743 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
744 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
745 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
746 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
747 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
748 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle la liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
749 isquer, qui est la condition première de ce que l’ Européen appelle la liberté. Voilà pourquoi il serait criminel, s’il n’était d
750 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
751 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
752 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
753 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
754 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
755 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
756 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps par l
757 mps par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
758 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
759 passant par le NKVD, le résultat ne serait plus l’ Europe , mais très exactement, ce « petit cap de l’Asie » à quoi se réduit l’
760 nt, ce « petit cap de l’Asie » à quoi se réduit l’ Europe sans son génie. Ce n’est donc pas une idéologie qui fera l’Europe, pu
761 génie. Ce n’est donc pas une idéologie qui fera l’ Europe , puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la
762 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolo
763 e sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
764 qui nous paraît prédestinée à surmonter la crise européenne  : c’est la méthode fédéraliste. Fédérer, en effet, ce n’est pas unifi
765 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
766 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
767 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
768 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
769 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
770 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
771 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
772 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
773 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
774 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.
775 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d
776 ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d’ insister : la méthode du fédéralisme est la seule qui soit adaptée à n
777 isme est la seule qui soit adaptée à nos réalités européennes . Faire du fédéralisme, c’est donc faire de l’Europe, c’est-à-dire, pr
778 ropéennes. Faire du fédéralisme, c’est donc faire de l’Europe, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ I
779 nnes. Faire du fédéralisme, c’est donc faire de l’ Europe , c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ Il reste à
780 rope, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assig
781 s de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assigne une pareille attitude. Certes, nous voulons f
782 e pareille attitude. Certes, nous voulons faire l’ Europe avec tout le monde, c’est-à-dire avec tous les partis qui l’acceptent
783 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
784 s en préconisant le fédéralisme à tous les étages de la société, dans la commune et l’entreprise d’abord, puis à l’échelle
785 d’abord, puis à l’échelle nationale, puis au plan européen , et finalement au plan mondial nous savons bien que nous heurtons cer
786 savons bien que nous heurtons certaines habitudes de pensée à la fois nationalistes et rationalistes, c’est-à-dire en un m
787 ure des obstacles qu’elle trouve posés en travers de sa route vers l’Europe fédérée et vers la paix — à la destruction du
788 u’elle trouve posés en travers de sa route vers l’ Europe fédérée et vers la paix — à la destruction du Léviathan moderne décri
789 et que Nietzsche appelait un jour « le plus froid de tous les monstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toute
790 nstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toutes nos guerres. Sur ce point-là, nous serons à notre tour irréduc
791 e que nous voulons supprimer, c’est l’étatisation de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par l
792 on de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le
793 ation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le dogme et la pratique des souverainetés nati
794 nous demandons et préparons, comme premier point de tout notre programme, l’institution d’une Cour suprême européenne, c’
795 mier point de tout notre programme, l’institution d’ une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’un pouvoir supérieur aux É
796 notre programme, l’institution d’une Cour suprême européenne , c’est-à-dire d’un pouvoir supérieur aux États. Cette Cour suprême do
797 ution d’une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’ un pouvoir supérieur aux États. Cette Cour suprême doit être la gardie
798 États. Cette Cour suprême doit être la gardienne d’ une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en app
799 me doit être la gardienne d’une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en appeler, contre les pouvoir
800 era sauvegardé le droit qui garantit les libertés européennes , le droit d’opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si
801 t qui garantit les libertés européennes, le droit d’ opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas
802 e droit d’opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler
803 n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler de dictature : voir les démocraties dites populaires. Les vues que j’ex
804 nties par une action qui se poursuit dans toute l’ Europe depuis deux ans et qui est en train d’aboutir à certains résultats co
805 férence des Cinq va peut-être accepter notre plan de Parlement européen. Cette assemblée, que nous voulons élue à la fois
806 inq va peut-être accepter notre plan de Parlement européen . Cette assemblée, que nous voulons élue à la fois par les parlements
807 a fois par les parlements et par les forces vives de chaque pays, doit se réunir dans quelques mois. Elle aura pour missio
808 réunir dans quelques mois. Elle aura pour mission de proposer la création d’une Cour suprême et la Constitution fédérale d
809 s. Elle aura pour mission de proposer la création d’ une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelqu
810 on d’une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelque chose, qui peut devenir beaucoup… Mais nous s
811 une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’ Europe . C’est quelque chose, qui peut devenir beaucoup… Mais nous sommes loi
812 instant dévier vers on ne sait quelles alliances d’ États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans tr
813 ne sait quelles alliances d’États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait
814 alliances d’États souverains pris de panique, ou d’ états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait quelles déclara
815  ; vers on ne sait quelles déclarations sans rire de sécurité collective ; vers on ne sait quelle coalition sur le papier
816 le coalition sur le papier qui se donnerait l’air de provoquer l’un des deux grands, sans créer pour autant la force néces
817 ger l’agression… C’est donc, pour nous, le moment d’ être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active d
818 ur nous, le moment d’être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active derrière nos avant-gardes fédéralistes,
819 moment d’être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d
820 active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d’ imprimer un grand élan à notre propagande populaire, ou pour mieux dir
821 e populaire, ou pour mieux dire : à l’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui
822 ’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui seul, faire tout le travail et créer
823 ui seul, faire tout le travail et créer l’opinion européenne . ⁂ Il est une phrase que je voudrais bien ne plus entendre, pour l’av
824 plus entendre, pour l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci :
825 r l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons
826 une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons que souhaiter bonn
827 eux pionniers du fédéralisme. » C’est une manière de dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts
828 dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts, et si vous gagnez par miracle, bien entendu, nous v
829 a ceux qui nous applaudissent, comme ces soldats de je ne sais quel pays, dans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sor
830 ans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sortir de la tranchée et s’élancer le premier à l’attaque, criaient bravo ! bra
831 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ain
832 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ainsi qu’on po
833 cette phrase admirable : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
834 suffirait. Mais soyons sérieux ; quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
835 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
836 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
837 nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’ Europe , ils veulent bien faire la paix, mais à une condition : c’est que M.
838 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
839 us disent non sans raison : « Nous sommes saturés de discours ! Ce qu’il nous faut, ce sont des gestes ; sortez avec un ou
840 bien tort quand il cherchait un homme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’en devenir un lui-même. C’est le plu
841 omme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’ en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’en trouver. Une bata
842 d’en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’ en trouver. Une bataille est en train de se livrer pour l’Europe. Nous
843 er. Une bataille est en train de se livrer pour l’ Europe . Nous l’avons provoquée, nous les fédéralistes, en invitant gouvernem
844 parlements à convoquer cette année une Assemblée européenne . C’est maintenant — ou peut-être jamais — que le fédéralisme court sa
845 ralisme court sa chance, et avec elle les chances de la paix. Si nous voulons la paix, nous devons vouloir ses moyens : l’
846 ulons la paix, nous devons vouloir ses moyens : l’ Europe unie est le plus sûr ; si nous voulons l’Europe, nous devons vouloir
847 l’Europe unie est le plus sûr ; si nous voulons l’ Europe , nous devons vouloir le fédéralisme ; si nous voulons demeurer libres
848 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
849 ’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens , de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit
850 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
851 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
852 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
853 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclamant leur fédération, pourront se faire entendre au m
854 le jour soit prochain où les voix concertées de l’ Europe , proclamant leur fédération, pourront se faire entendre au monde enti
855 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de, « Pour sauver la paix : commen
856 forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de , « Pour sauver la paix : commencer par l’Europe », Fédération, Paris,
857 Denis de, « Pour sauver la paix : commencer par l’ Europe  », Fédération, Paris, février 1949, p. 70-77.
7 1949, Articles divers (1948-1950). L’Europe ou le cap du destin (1949)
858 L’ Europe ou le cap du destin (1949)g Toutes les grandeurs européennes vienn
859 le cap du destin (1949)g Toutes les grandeurs européennes viennent de l’esprit, et non pas de la nature ni du nombre. Comment e
860 eurs européennes viennent de l’esprit, et non pas de la nature ni du nombre. Comment expliquer autrement que ce cap déchiq
861 Comment expliquer autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa popu
862 r autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu
863 de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’ un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant p
864 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant par ses armes
865 es pouvoirs sur les choses et la vie ? Les causes de cette puissance, naguère mondiale, du « petit cap », furent très dive
866 , furent très diverses et même contradictoires. L’ Europe a dominé par ses techniques, par sa science de la mise en valeur d’un
867 urope a dominé par ses techniques, par sa science de la mise en valeur d’un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a
868 s techniques, par sa science de la mise en valeur d’ un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a dominé par la violenc
869 aussi, et par la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a d
870 r la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une m
871 esclavage ou en servage de centaines de millions d’ habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beauc
872 u en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beaucoup plus sub
873 abitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’ une manière beaucoup plus subtile, et peut-être plus effective, en imp
874 n imposant à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme,
875 à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dé
876 ertain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dérivent les grands concepts
877 ristianisme, et dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité
878 t dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, conc
879 ent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se
880 nds concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament,
881 berté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament, au xxe siècle, l
882 tiens, les Américains comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de te
883 comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science p
884 de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctr
885 eux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou
886 e. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés d
887 e philosophie ou de technique, de science pure ou d’ industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le
888 ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier
889 e pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marqu
890 industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marques — ou les
891 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. Et certes, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes d
892 rques — ou les blessures — du génie créateur de l’ Europe . Et certes, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes de sa puis
893 res — du génie créateur de l’Europe. Et certes, l’ Europe a follement exporté les secrets mêmes de sa puissance ; on les retour
894 s, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes de sa puissance ; on les retourne sans scrupules contre elle. Mais elle
895 rupules contre elle. Mais elle reste le palladium d’ une civilisation que tous rêvent d’imiter. Dire que l’Europe est mena
896 e le palladium d’une civilisation que tous rêvent d’ imiter. Dire que l’Europe est menacée — et l’on sait à quel point la
897 ivilisation que tous rêvent d’imiter. Dire que l’ Europe est menacée — et l’on sait à quel point la menace est sérieuse — c’es
898 se — c’est donc dire que le cœur et la conscience d’ une culture désormais universelle sont menacés. Pour le bien comme pou
899 Pour le bien comme pour le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres contine
900 le bien comme pour le mal, ce qui est sorti de l’ Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres continents nous
901 ur le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres continents nous ont ravi les
902 res continents nous ont ravi les moyens matériels de la puissance, et nous en ont en quelque sorte purifiés. Ils nous ont
903 us ont condamnés à ne représenter que l’essentiel d’ une civilisation : son génie, ses mesures, sa culture. Défendre l’Euro
904  : son génie, ses mesures, sa culture. Défendre l’ Europe , aujourd’hui, ce n’est donc plus défendre le capitalisme industriel,
905 riel, ni la puissance militaire, ni la suprématie de la race blanche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’État,
906 nche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’ État, ni le nationalisme, car l’Amérique ou la Russie s’en chargent. E
907 a Russie s’en chargent. Et s’il ne s’agissait que de cela, nous pourrions aussi bien nous laisser coloniser par les Yankee
908 iniens. Ils ont appris à se servir mieux que nous de ces armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. S
909 armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. Si les Européens, dans leur majorité, refusent à la fois d
910 ous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. Si les Européens , dans leur majorité, refusent à la fois de se laisser américaniser et
911 Européens, dans leur majorité, refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sen
912 refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sentent bien que dans le meilleur
913 sentent bien que dans le meilleur cas, en retour de certains avantages matériels, ils perdraient ce qui fait le sens même
914 atériels, ils perdraient ce qui fait le sens même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aîn
915 s même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diab
916 céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’ aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diable. Et le monde entier e
917 en pâtirait, Russes et Américains compris. Cette Europe , pratiquement réduite à l’essentiel de son génie, à ce qu’il a de plu
918 Cette Europe, pratiquement réduite à l’essentiel de son génie, à ce qu’il a de plus défendable, comment allons-nous la dé
919 en supprimant les douanes, et créer des pouvoirs européens , capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’E
920 ouanes, et créer des pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
921 pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
922 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
923 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul
924 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de préveni
925 uest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne , seul moyen de prévenir la guerre. Tels sont les buts concrets que se
926 eut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de prévenir la guerre. Tels sont les buts concrets que se sont assignés
927 que se sont assignés les promoteurs du Mouvement européen . Nous verrons, au mois d’août de cette année, le premier résultat de
928 eurs du Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’ août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’o
929 Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
930 u mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, une Assemblée parl
931 t chacun reconnaît l’urgence, et que le Mouvement européen promeut, resteront sans force et sans vie, si elles ne sont pas soute
932 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce
933 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande artif
934 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, nous venons de le voir ; c’est
935 iment existe, nous venons de le voir ; c’est lui, d’ instinct, qui nous fait repousser les tentations russe et américaine.
936 ns russe et américaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre consc
937 ricaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissan
938 aintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’ expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche don
939 ’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche dont le congrès d
940 t et agissant. Telle est la tâche dont le congrès de La Haye, il y a un an, proclamait la nécessité. La section culturelle
941 la nécessité. La section culturelle du Mouvement européen s’est constituée pour y collaborer. Elle a commencé par fonder, avan
942 européen de la culture, prévu par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’études. Il a son siège à Genève, où il t
943 par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’ études. Il a son siège à Genève, où il travaille depuis le mois de fév
944 on siège à Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) D
945 Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) Documentatio
946 r tous les efforts entrepris dans les divers pays d’ Europe en faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres
947 tous les efforts entrepris dans les divers pays d’ Europe en faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres europ
948 pays d’Europe en faveur de l’union des peuples et d’ une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existe
949 faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’i
950 ’union des peuples et d’une éducation de « cadres européens  ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellemen
951 e éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’ instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première tâch
952 gnorent mutuellement. La première tâche sera donc de dresser un inventaire des forces spirituelles, intellectuelles et art
953 nt. b) Coordination des activités « culturelles » de tous ordres, qui se placent sur un plan européen. Deux exemples entre
954 lles » de tous ordres, qui se placent sur un plan européen . Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’org
955 n européen. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’ études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsable
956 n. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsables d’une d
957 entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’ organiser une rencontre entre les responsables d’une dizaine d’institu
958 d’organiser une rencontre entre les responsables d’ une dizaine d’instituts visant à la formation d’une jeune élite europé
959 ne rencontre entre les responsables d’une dizaine d’ instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et il r
960 s d’une dizaine d’instituts visant à la formation d’ une jeune élite européenne ; et il rassemble une équipe d’historiens,
961 instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne  ; et il rassemble une équipe d’historiens, en vue de la révision des
962 une élite européenne ; et il rassemble une équipe d’ historiens, en vue de la révision des manuels scolaires, qui furent de
963 listes. c) Étude et formulation des grands thèmes de la propagande générale du Mouvement européen. Ici, nos intellectuels
964 nds thèmes de la propagande générale du Mouvement européen . Ici, nos intellectuels ont une occasion magnifique de « s’engager »
965 ci, nos intellectuels ont une occasion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un m
966 sion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun es
967 sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’ un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au me
968 ir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’h
969 adre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’hypocrisie en service commandé,
970 vice commandé, ils vont pouvoir prendre leur part d’ action, assumer conjointement les décisions politiques, juridiques ou
971 pour être exécutées demain par un pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’études met au point le programme d’un
972 être exécutées demain par un pouvoir fédéral de l’ Europe . En outre, le Bureau d’études met au point le programme d’une confére
973 pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’ études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui d
974 tre, le Bureau d’études met au point le programme d’ une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne
975 études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne. Des rapports na
976 es rapports nationaux, préparés par les « Groupes d’ étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la
977 pes d’étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la base des travaux. Et l’on doit espérer que de
978 ont la base des travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les
979 s travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les faiblesses de
980 mentés, inventoriant les forces et les faiblesses de nos cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : l
981 os cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de divis
982  : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de division dont nous souffrons, les autres sur ce qui peut naître dans
983 frons, les autres sur ce qui peut naître dans une Europe débarrassée de ses frontières étatiques, enfin « rendue dans toute so
984 ur ce qui peut naître dans une Europe débarrassée de ses frontières étatiques, enfin « rendue dans toute son étendue à la
985 s hommes, des idées et des biens ». ( Message aux Européens , congrès de La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douz
986 et des biens ». ( Message aux Européens , congrès de La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. I
987 ( Message aux Européens , congrès de La Haye.) L’ Europe est une culture qui est faite de douze cultures. Il faut que chacune
988 La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut ê
989 nion ne sera jamais réelle sans le concours actif de chacune d’elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accep
990 a jamais réelle sans le concours actif de chacune d’ elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accepter nos div
991 les. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’ accepter nos divisions présentes, nous voulons concerter nos vocations
992 ocations pour la défense et pour l’épanouissement d’ un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient per
993 ense et pour l’épanouissement d’un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient perdues. Mais l’Europe
994 un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’ Europe , seraient perdues. Mais l’Europe à son tour serait perdue sans elles.
995 ines qui, sans l’Europe, seraient perdues. Mais l’ Europe à son tour serait perdue sans elles. Telle est l’interaction vitale d
996 perdue sans elles. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fé
997 e sans elles. Telle est l’interaction vitale de l’ Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fédéraliste
998 es. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fédéraliste, qui
999 urent avec l’esprit fédéraliste, qui est le génie de l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de, « L’Europe ou le
1000 l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de , « L’Europe ou le cap du destin », Cahiers du Monde nouveau, Paris, j
1001 dans la diversité. g. Rougemont Denis de, « L’ Europe ou le cap du destin », Cahiers du Monde nouveau, Paris, juin–juillet
8 1949, Articles divers (1948-1950). « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)
1002 « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)k Depuis
1003 « Le promoteur de l’émission Demain l’ Europe nous dit… » (1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1
1004 t… » (1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaq
1005 chaque semaine au micro du « dialogue » qu’est l’ Europe . De lundi en lundi, nous suivons ses chroniques au cours desquelles i
1006 semaine au micro du « dialogue » qu’est l’Europe. De lundi en lundi, nous suivons ses chroniques au cours desquelles il no
1007 s chroniques au cours desquelles il nous démontre de manière éclatante qu’une ère nouvelle s’ouvre au Vieux Continent. Mon
1008 Monsieur de Rougemont, pourquoi faut-il fédérer l’ Europe  ? Parce qu’il n’y a pas d’autre moyen imaginable d’empêcher la guerre
1009 faut-il fédérer l’Europe ? Parce qu’il n’y a pas d’ autre moyen imaginable d’empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays
1010  ? Parce qu’il n’y a pas d’autre moyen imaginable d’ empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays, c’est, en effet, créer
1011 c’est, en effet, créer la seule puissance capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Eur
1012 réer la seule puissance capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte
1013 e l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte où les nations ne disparaîtraient pas davantage que no
1014 entre nos cantons. Imaginez ensuite cette grande Europe aussi décidée que la Suisse à ne faire la guerre à personne, mais à d
1015 à ne faire la guerre à personne, mais à défendre d’ un seul cœur son indépendance reconquise. Paix, liberté, prospérité, t
1016 berté, prospérité, tels ont été les grands motifs de toutes les confédérations qui ont vu le jour au cours des siècles, et
1017 e main à un ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’ une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de dif
1018 ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays
1019 6 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays. Je prépare également une conférence culturelle europ
1020 s. Je prépare également une conférence culturelle européenne qui aura lieu, en octobre, à Lausanne. Ce qui me préoccupe sans relâc
1021 che c’est une œuvre très importante qui a nom : l’ Europe dont les problèmes culturels, en particulier, accaparent tout mon tem
1022 tout mon temps. En effet, je dirige ici le bureau d’ études pour un Centre européen de la culture. Pouvez-vous, très succin
1023 ure. Pouvez-vous, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute i
1024 us, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute indépendance de
1025 ernementaux, cet organisme a pour tâche immédiate d’ étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment d
1026 cet organisme a pour tâche immédiate d’étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité eur
1027 ser toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le
1028 esure propre à promouvoir le sentiment de l’unité européenne  ; d’agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le film et la radio,
1029 à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’ agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le film et la radio, par v
1030 opinion, la presse, le film et la radio, par voie d’ informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour cré
1031 , le film et la radio, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des u
1032 o, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des universités et des me
1033 s et des membres des corps enseignants ; et enfin d’ exercer un contrôle vigilant pour restaurer le propre usage des mots-c
1034 ls aucun pacte n’est possible. De plus, le Centre européen offrira un lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la cult
1035 ible. De plus, le Centre européen offrira un lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, af
1036 n lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, afin qu’ils puissent examiner ensemble les gr
1037 semble les grandes questions qui affectent la vie de l’Europe, et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion publi
1038 e les grandes questions qui affectent la vie de l’ Europe , et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion publique. k.
1039 ppels à l’opinion publique. k. Rougemont Denis de , « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio,
1040 ublique. k. Rougemont Denis de, « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet
1041 t Denis de, « Le promoteur de l’émission Demain l’ Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet 1949, p. 950.
9 1949, Articles divers (1948-1950). Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet 1949)
1042 e aura son siège en Suisse (7 juillet 1949)l L’ Europe dominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1939. Politique
1043 ominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de se
1044 que éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’i
1045 ement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates o
1046 levait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates ou marxistes, chrétiennes ou humanistes. Ell
1047 s lois, et tous les peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette p
1048 peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette puissance inouïe, sa
1049 la vie. Cette puissance inouïe, sans précédent, l’ Europe la devait à l’esprit, car physiquement elle ne figure qu’un cap déchi
1050 physiquement elle ne figure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa gra
1051 qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture,
1052 ueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture, qui pour le bien
1053 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de m
1054 rques — ou les blessures — du génie créateur de l’ Europe . En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Ell
1055 nq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Elle est russe et américaine. Elle se retourne contre nous. L’
1056 se et américaine. Elle se retourne contre nous. L’ Europe déchue n’est plus qu’un petit continent, divisé en vingt-quatre natio
1057 ions, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, e
1058 et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’ annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite
1059 onisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite à lutter pour assurer sa survivance é
1060 ique et civique, déjà fortement compromise. Cette Europe sur la défensive, comment allons-nous la sauver ? Là-dessus, tous les
1061 en supprimant les douanes, et créer des pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Es
1062 douanes, et créer des pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
1063 s pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
1064 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
1065 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui
1066 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui est à son tour le
1067 uest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne , qui est à son tour le seul moyen de prévenir une guerre livrée à nos
1068 ance européenne, qui est à son tour le seul moyen de prévenir une guerre livrée à nos dépens. Tels sont les buts concrets
1069 que se sont assignés les promoteurs du Mouvement européen . Nous verrons au mois d’août de cette année le premier résultat de le
1070 teurs du Mouvement européen. Nous verrons au mois d’ août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ou
1071 u Mouvement européen. Nous verrons au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
1072 au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, le Parlement consu
1073 uvrira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif de treize nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques
1074 nt chacun reconnaît l’urgence et que le Mouvement européen promeut, resteront sans force et sans vie si elles ne sont pas souten
1075 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce
1076 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande arti
1077 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, il n’est pas une chose vague.
1078 t pas une chose vague. C’est lui qui nous empêche de dire aux Russes : « Finissons-en, venez nous mettre au pas, et suppri
1079 ne à Varsovie. » C’est lui aussi qui nous empêche de dire à nos amis américains : « Mais entrez donc, apportez-nous les se
1080 s : « Mais entrez donc, apportez-nous les secrets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’aînesse contre vos belles
1081 crets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’ aînesse contre vos belles autos et vos dollars. » Si nous refusons, c’
1082 efusons, c’est que nous avons encore le sentiment d’ une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la
1083 que nous avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être
1084 s avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Eur
1085 le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il f
1086 rté et de conscience, qui est justement la raison d’ être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des m
1087 de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d
1088 nscience, qui est justement la raison d’être de l’ Europe . Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d’expressi
1089 faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d’ expression, le rendre enfin conscient et agissant. Telle est la tâche
1090 e dans quelques mois, et que prépare notre Bureau d’ études. Installé à Genève depuis trois mois. Je ne m’étendrai pas sur
1091 . Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques de son travail (documentation européenne ; coordination des efforts entr
1092 aspects techniques de son travail (documentation européenne  ; coordination des efforts entrepris dans tous nos pays, et qui souve
1093 tous nos pays, et qui souvent s’ignorent ; action de propagande par la presse, la radio, les revues, auprès des élites com
1094 près des élites comme du grand public ; formation d’ équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement défi
1095 lites comme du grand public ; formation d’équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement définir l’espr
1096 e et le guide. Il ne s’agit nullement, pour nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les pr
1097 ur nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la jus
1098 u de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une par
1099 éoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une part offrir aux fo
1100 voulons d’une part offrir aux forces culturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du
1101 une part offrir aux forces culturelles de toute l’ Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du mouvement fédér
1102 ulturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du mouvement fédéraliste ; d’autre part, f
1103 déraliste ; d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. F
1104 d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sort
1105 s de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à
1106 l’esprit de la culture, dans la construction de l’ Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à s’unir, a
1107 t de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à s’unir, afin
1108 re aide nos peuples à s’unir, afin qu’ensuite une Europe fédérée vienne en aide à chacune de nos cultures : telle sera la doub
1109 suite une Europe fédérée vienne en aide à chacune de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culture
1110 e de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’oct
1111 culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’ octobre, sous les auspices du Mouvement européen. Le fait que la Suiss
1112 au mois d’octobre, sous les auspices du Mouvement européen . Le fait que la Suisse soit prévue comme siège du Centre européen de
1113 e comme siège du Centre européen de la culture et de la Conférence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considéra
1114 érence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considérations touristiques. Notre neutralité traditionnelle, reconnu
1115 outes les puissances comme étant « nécessaire à l’ Europe  », rend difficile, pour le moment, notre pleine participation aux con
1116 suisse : notre pays dépend, plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc p
1117 se : notre pays dépend, plus qu’aucun autre, de l’ Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc participer
1118 plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc participer aux efforts pour s
1119 ra-t-il donc participer aux efforts pour sauver l’ Europe  ? La réponse ne peut faire de doute. Tant à Berne qu’au comité du Mou
1120 s pour sauver l’Europe ? La réponse ne peut faire de doute. Tant à Berne qu’au comité du Mouvement européen, on a reconnu
1121 de doute. Tant à Berne qu’au comité du Mouvement européen , on a reconnu que le domaine culturel était celui où nous pouvions, s
1122 rien notre neutralité, jouer le rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, su
1123 rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une m
1124 n. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’ une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se
1125 nse pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se réalisent les
1126 continent se dessine et prend corps, la nécessité de lui donner une âme passe au premier plan. Et c’est bien cela, c’est b
1127 péen de la culture. Les plus anciennes traditions de la Suisse la désignent comme siège d’une telle institution. Gardiens
1128 traditions de la Suisse la désignent comme siège d’ une telle institution. Gardiens des cols pour le Saint-Empire au xiiie
1129 -Empire au xiiie siècle ; gardiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créati
1130 rdiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international
1131 de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’u
1132 is de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’une expérience fédéraliste
1133 ations de l’esprit international ; gardiens enfin d’ une expérience fédéraliste qui peut servir d’exemple au continent, les
1134 nfin d’une expérience fédéraliste qui peut servir d’ exemple au continent, les Suisses seront fidèles à leur vraie vocation
1135 n accueillant, soutenant et animant le foyer même d’ une action historique, dont on a pu dire que le but était « l’Europe h
1136 istorique, dont on a pu dire que le but était « l’ Europe helvétisée ». l. Rougemont Denis de, « Le Centre européen de la cu
1137 it « l’Europe helvétisée ». l. Rougemont Denis de , « Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse », Curie
10 1950, Articles divers (1948-1950). Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)
1138 Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrang
1139 Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « 
1140 Préface à Le Problème de l’union européenne d’ Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « fai
1141 ip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’Europe », quand elle existe depuis tant de siècles. Mais l’
1142 Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’ Europe  », quand elle existe depuis tant de siècles. Mais l’expression se jus
1143 rmation que vient de subir la puissance apparente de nos pays dans le jeu des forces mondiales : l’Europe paraît avoir été
1144 de nos pays dans le jeu des forces mondiales : l’ Europe paraît avoir été défaite, et sa défection à l’Histoire devient une po
1145 ubitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle prend d’ elle-même une conscience toute nouvelle, et malheureuse. « L’Europe es
1146 ne conscience toute nouvelle, et malheureuse. « L’ Europe est menacée, l’Europe est divisée, et la plus grave menace vient de s
1147 uvelle, et malheureuse. « L’Europe est menacée, l’ Europe est divisée, et la plus grave menace vient de ses divisions », déclar
1148 s divisions », déclarait le Manifeste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bie
1149 ste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situat
1150 Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situation pré-fédérale, po
1151 re. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’ une situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’union se déclare
1152 e situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’ union se déclare, au sein de la crise assumée. Ces circonstances donne
1153 se assumée. Ces circonstances donnent à l’ouvrage de M. Olivier Philip une importance particulière : non pas seulement cel
1154 importance particulière : non pas seulement celle d’ une première vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europ
1155 re vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’une contribution à cette prise de consc
1156 e générale des efforts déployés pour l’union de l’ Europe , mais encore celle d’une contribution à cette prise de conscience act
1157 loyés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’ une contribution à cette prise de conscience active de notre sort, san
1158 e contribution à cette prise de conscience active de notre sort, sans laquelle les traités resteront du papier. Je voudrai
1159 emarques, entre toutes celles que ne manquera pas de suggérer cette enquête efficace par sa lucidité. La première touche à
1160 à l’économie, la seconde à la doctrine formatrice de l’union. Les analyses économiques tiennent une place importante dans
1161 que. Voilà, me semble-t-il, une manière implicite d’ affirmer que l’Économie obéit beaucoup moins aux « lois » fatales admi
1162 elle-même déterminée par une certaine orientation de nos énergies dont j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de q
1163 nt j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de quelque choix métaphysique. La thèse soutenue par notre auteur impliq
1164 ue par notre auteur implique une décision inverse de celle dont les suites nécessaires nous ont conduits aux impasses prés
1165 tif des Experts. Je vois bien que ce règne est né d’ une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par er
1166 e règne est né d’une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par erreur, doctrinaire). Mais il tend, s
1167 d garde, à évacuer la politique, au sens légitime de ce terme. Il tend à substituer, en fait, les Pouvoirs à l’Autorité. L
1168 à l’Autorité. Le plan Schuman, parce qu’il est né d’ une décision proprement politique, pourra marquer, s’il aboutit, le po
1169 politique, pourra marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second
1170 a marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’ une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note q
1171 de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’un historique adroite
1172 nversement d’une attitude contraire au génie de l’ Europe . En second lieu, je note qu’au cours d’un historique adroitement cond
1173 de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’ un historique adroitement condensé, l’auteur souligne, à plusieurs rep
1174 plusieurs reprises, l’influence « déterminante » de l’aile fédéraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la créa
1175 déterminante » de l’aile fédéraliste du Mouvement européen , dès qu’il s’agit de la création d’une véritable Autorité européenne.
1176 déraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’une véritable Autorité européenne. On pourra discuter p
1177 uvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’ une véritable Autorité européenne. On pourra discuter plus tard sur la
1178 il s’agit de la création d’une véritable Autorité européenne . On pourra discuter plus tard sur la paternité réelle de maints proje
1179 pourra discuter plus tard sur la paternité réelle de maints projets revendiqués par les fédéralistes, tels que la Cour eur
1180 evendiqués par les fédéralistes, tels que la Cour européenne des droits de l’homme, le pool du charbon et de l’acier, la transform
1181 enne des droits de l’homme, le pool du charbon et de l’acier, la transformation du Comité des ministres en Sénat. Mais il
1182 ’ils sont parfois considérés comme des empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justeme
1183 es empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en r
1184 ndre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends
1185 tement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’ avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends pas ici (ce n’est pas le
1186 tu en général, ou même contre l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent
1187 général, ou même contre l’union des peuples de l’ Europe . Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent l’union,
1188 l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent l’union, bien sûr, et comment
1189 , je les appelle fédéralistes. Il n’est pas juste de les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme
1190 les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’union mais refusent sa co
1191 faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’ union mais refusent sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces de
1192 raux. Mais cette opposition n’est pas la seule. L’ Europe est née, elle a vécu d’antagonismes. Elle mourrait de leur suppressio
1193 n’est pas la seule. L’Europe est née, elle a vécu d’ antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y p
1194 st née, elle a vécu d’antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créati
1195 ppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’o
1196 secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’on ne peut rêver l’Europe toute libérale ou
1197 t de sa puissance. Pas plus qu’on ne peut rêver l’ Europe toute libérale ou toute socialiste, on ne peut l’imaginer toute catho
1198 corporatiste ou parlementaire… Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des t
1199 Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des tendances opposées exige d’aller
1200 compromis : chacune des tendances opposées exige d’ aller au bout de sa vocation, car elle perdrait sa qualité constitutiv
1201 elle perdrait sa qualité constitutive, sa raison d’ être, en y renonçant. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d
1202 t. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d’ autre que dans le régime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages
1203 gime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L
1204 ntages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer qu
1205 outant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer que cette solution n’est pas seulement p
1206 le en principe, mais pratique. On ne manquera pas de m’objecter que les Suisses sont les premiers à se montrer prudents, q
1207 s premiers à se montrer prudents, quand il s’agit de « faire l’Europe ». C’est qu’ils sont déjà fédérés. Aux unionistes, j
1208 se montrer prudents, quand il s’agit de « faire l’ Europe  ». C’est qu’ils sont déjà fédérés. Aux unionistes, je tiendrai ce lan
1209 que l’on sache. Quand vous y serez, il sera temps de voir si la prudence, ou au contraire un peu de hâte, conviennent à no
1210 nviennent à nos calamités. u. Rougemont Denis de , Philip Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union e
1211 Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâ
1212  [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la
1213 oblème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-
1214 ’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne , Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-11.
1215 oblème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-11.
11 1950, Articles divers (1948-1950). Raisons et buts d’une conférence (janvier 1950)
1216 Raisons et buts d’ une conférence (janvier 1950)n o La condition profondément contradi
1217 n profondément contradictoire dans laquelle vit l’ Europe , depuis dix ans, est entrée dans la phase critique. Elle est presque
1218 e désespérée. Elle est aussi plus près que jamais de se résoudre en une synthèse. Il est vrai que l’Europe est en train de
1219 de se résoudre en une synthèse. Il est vrai que l’ Europe est en train de se défaire. Elle n’a jamais étép plus menacée, plus d
1220 ans toute sa longue histoire, — consciemment, — l’ Europe est en train de se faire ! Aux yeux d’un esprit objectif, toutes les
1221 t, — l’Europe est en train de se faire ! Aux yeux d’ un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dan
1222 yeux d’un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dans notre ciel et dans nos données immédiates 
1223 t les mêmes conditions qui pourraient être celles d’ une renaissance. Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s
1224 Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s’aggraver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absu
1225 ver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires ext
1226 leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais
1227 d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment d’ un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’aban
1228 il réveille aussi le sentiment d’un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités d
1229 , l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités de l’histoire, se voient combattus par l’élan vers l’union, vers la fédé
1230 sses, l’Assemblée de Strasbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’un espoir tremblant. Le sentiment le plus répa
1231 asbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’ un espoir tremblant. Le sentiment le plus répandu, j’allais dire le pl
1232 ndre. » Il y a aujourd’hui une manière proprement européenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres
1233 y a aujourd’hui une manière proprement européenne d’ avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres vi
1234 ui une manière proprement européenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres viendraient fai
1235 éenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’ une guerre que d’autres viendraient faire sur notre sol, et sur le cor
1236 viendraient faire sur notre sol, et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des
1237 et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des autres, qui serait perdue par nou
1238 enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’ une guerre des autres, qui serait perdue par nous, quelle que soit son
1239 on issue. Mais il y a, en même temps, une manière européenne d’espérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notr
1240 ais il y a, en même temps, une manière européenne d’ espérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre f
1241 anière européenne d’espérer, un espoir proprement européen , c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même
1242 pérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance c
1243 péen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance capable d’imposer la paix. Telle
1244 et de retrouver par là même une puissance capable d’ imposer la paix. Telle est la situation contradictoire dans laquelle n
1245 re dans laquelle nous sommes engagés. À son point de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait r
1246 int de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait raison du désespoir. Mais il faut aller vite, e
1247 s’esquissent, à Strasbourg, les cadres politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée huma
1248 uissent, à Strasbourg, les cadres politiques de l’ Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée humaine de ce
1249 s politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de l
1250 rand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but
1251 e, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’o
1252 ine de cette action, la vocation de la communauté européenne . Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’e
1253 ation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une répo
1254 l est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une réponse à la question dangereuse que pose
1255 posent nos circonstances historiques : pourquoi l’ Europe  ? qu’a-t-elle à dire aux hommes ? quels sont ses droits humains et sp
1256 elles propres à garantir et développer l’exercice de la pensée libre, sans laquelle l’Europe n’est plus rien. On pourrait
1257 er l’exercice de la pensée libre, sans laquelle l’ Europe n’est plus rien. On pourrait discuter sans fin sur le titre de cette
1258 rien. On pourrait discuter sans fin sur le titre de cette Conférence. Les mots européen, culture, prêtent à des controver
1259 ns fin sur le titre de cette Conférence. Les mots européen , culture, prêtent à des controverses trop faciles. Dès qu’on parle d’
1260 à des controverses trop faciles. Dès qu’on parle d’ Europe, d’unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’
1261 des controverses trop faciles. Dès qu’on parle d’ Europe , d’unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’Europe
1262 troverses trop faciles. Dès qu’on parle d’Europe, d’ unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’Europe ! »
1263 trop faciles. Dès qu’on parle d’Europe, d’unir l’ Europe , chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’Europe ! » et finit par
1264 urope, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’ Europe ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Eur
1265 ope, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’ Europe  ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, d
1266 rope ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à
1267 it par offrir une belle définition de ce qu’est l’ Europe , de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce di
1268 ffrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialog
1269 ition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialogue à plusieurs voix r
1270 s voix reste, à tout prendre, la vraie définition de l’Europe, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, cha
1271 x reste, à tout prendre, la vraie définition de l’ Europe , une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, chacun donne
1272 rope, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, chacun donne à ce mot des réalités hétéroclites : inventions
1273 ues et beaux-arts, hygiène, éducation, et procédé de construction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; con
1274 truction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité hu
1275 philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique 
1276 doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la v
1277 tat ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la vie des religions.
1278 Culture peut signifier aussi prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’ex
1279 i prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’ approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouv
1280 ence de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’ illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, t
1281 in perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que
1282 pprofondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’ augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses.
1283 er le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses. Culture peut signifier
1284 re peut signifier, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre
1285 er, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’i
1286 emble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’interdise les déb
1287 s définitions. À toutes fins utiles, elle partira de l’idée que la culture, ce sont les réalités intellectuelles et spirit
1288 ités intellectuelles et spirituelles qui ont fait de l’Europe autre chose et beaucoup plus que ce qu’elle est dans sa réal
1289 intellectuelles et spirituelles qui ont fait de l’ Europe autre chose et beaucoup plus que ce qu’elle est dans sa réalité physi
1290 jours par la rendre folle, il se contente parfois de l’endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’occupations acc
1291 endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’ occupations accablantes et flatteuses, qui ne leur laissent plus une s
1292 tastrophes. On demande à certains « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils
1293 « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils ont un rhume, qu’ils ont promis u
1294 ands noms » de venir participer au sauvetage de l’ Europe . Ils nous répondent qu’ils ont un rhume, qu’ils ont promis une confér
1295 ne conférence. D’autres invoquent un besoin subit de se retirer pour méditer. Regrettons-le, pour eux surtout. S’ils sont
1296 és, ce qu’à Dieu ne plaise, dans certains « camps de rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les r
1297 rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les raisons urgentes qui motivaient un rassemblement comm
1298 ôtre. Ils comprendront qu’il est certains moments de l’histoire où l’on ne peut renverser les destins qu’en y allant tous
1299 Pour être juste, il faut reconnaître que beaucoup d’ intellectuels redoutent non sans raison l’atmosphère des congrès, inco
1300 tmosphère des congrès, inconsidérément multipliés de nos jours. Je les comprends, et je comprends surtout ceux d’entre eux
1301 rent — (ou c’est un mauvais écrivain) — au destin de la communauté dont il écrit la langue, où sa voix porte, qui peut le
1302 éral, établi pour l’information des délégués, n’a d’ autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont
1303 nformation des délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au
1304 délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’une enq
1305 s problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’ une enquête dans nos divers pays. Chacun des groupes nationaux du Mouv
1306 s pays. Chacun des groupes nationaux du Mouvement européen a reçu d’abord un questionnaire sur l’état des problèmes concrets de
1307 n questionnaire sur l’état des problèmes concrets de la culture dans son pays. Dix-sept groupes ont donné des réponses dét
1308 û l’improviser avec des groupes en pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y
1309 n pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y aurait à dresser systématiquemen
1310 aire aussi des lacunes, des obstacles, permettant de délimiter des zones critiques où concentrer l’effort. Puis, des étude
1311 concrets, nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’ études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’
1312 , nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’une quinz
1313 fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’ une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéci
1314 s notes et documents. Sur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des docu
1315 ur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’ une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapp
1316 quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapport général a te
1317 es documents précités, le rapport général a tenté d’ opérer une synthèse provisoire, en guise d’introduction aux travaux de
1318 e provisoire, en guise d’introduction aux travaux de la conférence. Précisons bien que ce rapport n’est pas un instant des
1319 n instant destiné à faire l’objet des discussions de la conférence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’exposé de
1320 rence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’ exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront propo
1321 ts. Il veut servir d’exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront proposées et mises au point par les
1322 niques restant, bien entendu, réservés aux débuts de l’ensemble du congrès, siégeant en commission générale. Il nous appar
1323 mission générale. Il nous apparaît qu’il y a lieu de prévoir une nouvelle commission, consacrée à l’éducation et à l’ensei
1324 à nous égarer. On parle beaucoup, par exemple, «  d’ organiser les échanges culturels ». Observons tout d’abord qu’il n’en
1325 frontières étaient ouvertes, et l’union fédérale de l’Europe réalisée. Nos cultures, prisonnières des cadres nationaux, n
1326 tières étaient ouvertes, et l’union fédérale de l’ Europe réalisée. Nos cultures, prisonnières des cadres nationaux, ne doivent
1327 res nationaux, ne doivent pas chercher des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent
1328 des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent au contraire exiger leur « élargisseme
1329 ement » immédiat, sans condition. Le terme même «  d’ échanges culturels », avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force
1330 , avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force d’ avoir servi d’échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien mal
1331 est devenu bien déplaisant, à force d’avoir servi d’ échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien malgré eux, souve
1332 x, souvent) des problèmes réputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce p
1333 éputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’échanges
1334 r en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’ échanges surveillés que leurs douaniers et leurs agents fiscaux sauron
1335 ux quelques petits décrets concernant les voyages de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bon
1336 es de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bons élèves ; et quelques phrases bien plates sur
1337 hrases bien plates sur l’indispensable solidarité de nos nations. Une hypocrisie ennuyeuse. Prétendre « organiser les écha
1338 droits que l’État s’est arrogés, et qu’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’abaisser des obstacl
1339 u’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’ élever ou d’abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des id
1340 de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’ abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des idées, des per
1341 nent ce qu’ils ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, d
1342 ls ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits o
1343 les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités a
1344 ture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques
1345 uvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de p
1346 ant, de produits originaux, de curiosités avides, d’ expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non
1347 de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements
1348 es, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème
1349 de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner,
1350 assions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner, et au besoin dénoncer l
1351 : 1° abandonner, et au besoin dénoncer la méthode de « l’organisation des échanges », 2° exiger la suppression pure et sim
1352 ion des personnes, des œuvres, et des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits
1353 des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bé
1354 instruments de travail, dans toute l’étendue de l’ Europe . Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice es
1355 l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, do
1356 l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, dont la charge
1357 re. Et surtout ne proposons pas, dans ce domaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’esprit qui entraîne tant de
1358 omaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’ esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines b
1359 d’esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines bureaucratiques. Restaurer la culture, c’est aussi
1360 poids mort des organisations ! Qu’on n’essaie pas d’ organiser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’une respirat
1361 ser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’ une respiration organisée, n’est-il pas vrai, vous coupe le souffle. Q
1362 s vrai, vous coupe le souffle. Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était
1363 . Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était aux origines, elle n’a cessé
1364 e, elle était aux origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse lib
1365 origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifeste
1366 n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe o
1367 richir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins
1368 sités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’ Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins, voilà la solution, voil
1369 er ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins, voilà la solution, voilà le remède pratique à presque tous les
1370 un effort positif. Il serait insuffisant et vain de vouloir revenir simplement à la condition libérale qui était celle de
1371 implement à la condition libérale qui était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je
1372 condition libérale qui était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouv
1373 était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’An
1374 s, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire de la Compagnie européenne des wagons-lits, au chapitre sur les passepor
1375 ’on pouvait lire, dans l’Annuaire de la Compagnie européenne des wagons-lits, au chapitre sur les passeports : « Le passeport n’es
1376 Pour l’entrée dans tous les autres pays, la carte de visite suffit » ! Mais cette liberté des échanges n’a pas suffi à réd
1377 titutions qui garantissent et manifestent l’unité de nos cultures dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’instr
1378 nos cultures dans leur diversité. Il faut doter l’ Europe unie d’instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il
1379 dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’ instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut au
1380 ersité. Il faut doter l’Europe unie d’instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut aussi former les
1381 er les jeunes hommes qui deviendront les porteurs de l’idée fédérale, sans laquelle nos réformes techniques et matérielles
1382 » que le xxe siècle a vu naître, il est frappant de constater qu’il n’en existe pas un seul qui ait pour objet l’Europe c
1383 u’il n’en existe pas un seul qui ait pour objet l’ Europe comme unité. Les uns veulent embrasser le monde entier, tandis que le
1384 s pays forment un ensemble, un complexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-
1385 omplexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-ci distinguent souvent mieux que
1386 mble n’ait pas encore été étudié en tant que tel, d’ une manière systématique ; et qu’il n’existe aucune institution capabl
1387 ue ; et qu’il n’existe aucune institution capable de renseigner sur l’Europe en général, sur sa situation présente, sur l’
1388 te aucune institution capable de renseigner sur l’ Europe en général, sur sa situation présente, sur l’état de ses forces et de
1389 en général, sur sa situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes.
1390 a situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’
1391 ur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’ une telle institution soit urgent, rien ne saurait mieux le faire sent
1392 difficultés qu’a rencontrées la préparation même de cette conférence, et que ses insuffisances inévitables dans l’état ac
1393 s choses. Je tiens à rappeler que, dès le congrès de La Haye, avait été demandée la création d’un Centre européen de la cu
1394 ongrès de La Haye, avait été demandée la création d’ un Centre européen de la culture, dont les attributions furent esquiss
1395 par la résolution culturelle du congrès. Au mois de février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’étud
1396 du congrès. Au mois de février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de préparer l’œuvre du C
1397 le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’ études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septe
1398 péen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même an
1399 rgé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg vo
1400 er l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unan
1401 tembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unanimité une recommandation favorable à la cré
1402 nimité une recommandation favorable à la création d’ un Centre européen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Ge
1403 tre européen de la culture. Le travail du Bureau d’ études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus prè
1404 éen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la ques
1405 ’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la question. Il a conduit aux conclusions pratiqu
1406 t leur réserver. Il en va de même pour le Collège d’ Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commi
1407 leur réserver. Il en va de même pour le Collège d’ Europe , à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commis euro
1408 llège d’Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commis européens », dont les futures institutions
1409 ège qui permettrait de former les « grands commis européens  », dont les futures institutions de l’Europe unie auront évidemment b
1410 commis européens », dont les futures institutions de l’Europe unie auront évidemment besoin. Enfin, je mentionnerai un pro
1411 s européens », dont les futures institutions de l’ Europe unie auront évidemment besoin. Enfin, je mentionnerai un projet d’Ins
1412 idemment besoin. Enfin, je mentionnerai un projet d’ Institut européen des sciences politiques et sociales ; et ce projet s
1413 soin. Enfin, je mentionnerai un projet d’Institut européen des sciences politiques et sociales ; et ce projet surtout d’un Fonds
1414 ces politiques et sociales ; et ce projet surtout d’ un Fonds européen pour les recherches scientifiques, dont l’importance
1415 ues et sociales ; et ce projet surtout d’un Fonds européen pour les recherches scientifiques, dont l’importance capitale ne saur
1416 mission proposée tout à l’heure, qui s’occuperait de l’enseignement européen, deux mots seulement, mais importants. La pré
1417 out à l’heure, qui s’occuperait de l’enseignement européen , deux mots seulement, mais importants. La préparation de cette Confér
1418 x mots seulement, mais importants. La préparation de cette Conférence, l’abondance et la qualité des rapports reçus sur le
1419 t la qualité des rapports reçus sur les questions d’ éducation, ont montré à quel point ce souci est général dans nos pays.
1420 le monde se rend parfaitement compte que l’avenir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite
1421 rend parfaitement compte que l’avenir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite responsable de jeun
1422 enir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un es
1423 européenne dépend en premier lieu de la création d’ une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranatio
1424 emier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranational. Cette tâche, comme
1425 ’écrit M. Jean Bayet8, « exigera la bonne volonté de plusieurs générations, [mais] réclame aussi un départ extrêmement vif
1426 aussi un départ extrêmement vif et net ». L’effet de choc que produira sur l’opinion publique l’institution rapide d’un en
1427 duira sur l’opinion publique l’institution rapide d’ un enseignement européen constituera la meilleure propagande pour notr
1428 n publique l’institution rapide d’un enseignement européen constituera la meilleure propagande pour notre union, et peut-être la
1429 nt facilement être créés par le blocage, au titre européen , d’une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouve
1430 ent être créés par le blocage, au titre européen, d’ une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernem
1431 cage, au titre européen, d’une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernements et l’économie privée
1432 és. Nous invoquerons le fait que, si le sentiment d’ un destin spirituel commun, et l’énergie créatrice des Européens ne so
1433 stin spirituel commun, et l’énergie créatrice des Européens ne sont pas réveillés, les États et l’économie privée courent à leur
1434 ettre nos gouvernements devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’urgence établi. Il est probable que le prix de r
1435 s devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’ urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bom
1436 tre d’urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel
1437 ce établi. Il est probable que le prix de revient d’ une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel des instit
1438 institutions que nous venons de proposer. Le prix d’ une seule bombe atomique couvrirait donc le budget global d’une renais
1439 e bombe atomique couvrirait donc le budget global d’ une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mor
1440 ouvrirait donc le budget global d’une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des
1441 le budget global d’une renaissance de la culture européenne . Construire des engins de mort qui coûtent des milliards, quand on re
1442 e de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millio
1443 e mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche sci
1444 refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche scientifique pour la paix et la vie, c’est la
1445 ientifique pour la paix et la vie, c’est la folie de l’Occident moderne. À tel point qu’on se demande parfois s’il ne vaud
1446 l ne vaudrait pas mieux être restés barbares, que de nous être aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture
1447 e de nous être aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture faillirait à sa vraie mission, si elle n’élevait pas, c
1448 tre aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture faillirait à sa vraie mission, si elle n’élevait pas, cont
1449 pour quelles fins réelles voulons-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La
1450 ns-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’ une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle
1451 ture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle est d’ailleurs spécifiqu
1452 et cette éducation d’une conscience commune de l’ Europe  ? La question doit être posée. Elle est d’ailleurs spécifiquement « e
1453 être posée. Elle est d’ailleurs spécifiquement «  européenne  ». Qu’il soit bien clair que nous n’entendons pas substituer aux nati
1454 pas substituer aux nationalismes locaux une sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au mond
1455 ux nationalismes locaux une sorte de nationalisme européen . L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au monde entier. Elle a toujo
1456 smes locaux une sorte de nationalisme européen. L’ Europe s’est, de tout temps, ouverte au monde entier. Elle a toujours conçu
1457 e sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au monde entier. Elle a toujours conçu sa civilis
1458 toujours conçu sa civilisation comme un ensemble de valeurs universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’opposer une
1459 s universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’ opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Oue
1460 s’agit donc pas, pour nous, d’opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « cult
1461 opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthé
1462 nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valab
1463 e aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valable pour nous seu
1464 l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne  » synthétique, valable pour nous seuls et fermée sur elle-même : ce s
1465 fermée sur elle-même : ce serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre
1466 ée sur elle-même : ce serait trahir le génie de l’ Europe , nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre ambition
1467 e serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contr
1468 chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le mo
1469 es. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de
1470 nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’ une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est l
1471 a leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. E
1472 d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. Et notre objet ne sera pas non pl
1473 vraie force. Et notre objet ne sera pas non plus de dénoncer ce qui se pratique ailleurs, car nous ne pouvons réformer qu
1474 acceptons pas la scission que symbolise le rideau de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occid
1475 de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’i
1476 amener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté,
1477 les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’ une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’une Europe qui prend
1478 uples séparés, c’est de leur offrir l’image d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’une Europe qui prend au sérieu
1479 d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’ une Europe qui prend au sérieux sa vocation particulière dans le monde
1480 Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’une Europe qui prend au sérieux sa vocation particulière dans le monde. Une Euro
1481 rieux sa vocation particulière dans le monde. Une Europe affaiblie, et divisée par vingt nationalismes et autant de barrières
1482 lie, et divisée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une
1483 ée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une Europe procla
1484 arrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’ attraction. Une Europe proclamant des principes sans les appliquer fer
1485 s, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une Europe proclamant des principes sans les appliquer fermement, n’aurait bient
1486 pliquer fermement, n’aurait bientôt plus le droit de parler. Prendre au sérieux la vocation européenne, c’est une mission
1487 e droit de parler. Prendre au sérieux la vocation européenne , c’est une mission de vigilance dont les intellectuels des pays libre
1488 sérieux la vocation européenne, c’est une mission de vigilance dont les intellectuels des pays libres doivent se sentir pl
1489 tir plus que jamais responsables. Il leur incombe de rappeler sans relâche aux gouvernants, comme aux législateurs sociaux
1490 eurs sociaux et aux experts, qu’un certain nombre de principes moraux ne sauraient être négligés dans la pratique sans que
1491 uraient être négligés dans la pratique sans que l’ Europe perde ses droits à l’existence et à l’autonomie. Si nous exerçons, à
1492 nomie. Si nous exerçons, à Lausanne, cette action de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’el
1493 on de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne.
1494 aiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne. Une conscience malheureuse, il est vrai, to
1495 onférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne . Une conscience malheureuse, il est vrai, tourmentée, coupable, — com
1496 conscience, en dernière analyse. C’est notre lot d’ Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la co
1497 onscience, en dernière analyse. C’est notre lot d’ Européens , et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la conscience
1498 lot d’Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la conscience au bonheur. Vocation tragique et féco
1499 à l’Ouest deux civilisations plus jeunes, filles de la nôtre, dont l’une, qui nous est chère, cultive un idéal eudémoniqu
1500 est chère, cultive un idéal eudémonique, l’idéal d’ un bonheur assuré. Il est frappant que le bonheur, en Europe, n’ait tr
1501 onheur assuré. Il est frappant que le bonheur, en Europe , n’ait trouvé ses plus hautes expressions que dans quelques tableaux
1502 mes, quelques prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous
1503 es prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous en respiro
1504 , nous ne sommes pas réunis pour tracer des plans d’ innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de tr
1505 s pas réunis pour tracer des plans d’innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyen
1506 prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations
1507 ouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notr
1508 xercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. S
1509 ui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. Sauvons l’Europe tragique, pour que nos descendants puissent e
1510 foi, sans renier nos raisons de vivre. Sauvons l’ Europe tragique, pour que nos descendants puissent encore habiter en esprit,
1511 t, par la grâce des chefs-d’œuvre futurs, au ciel de la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador
1512 -d’œuvre futurs, au ciel de la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador de Madariaga, qui était d’ai
1513 ador de Madariaga, qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemon
1514 , qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collab
1515 par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration de M. Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR). 8. Dans son remarq
1516 LR). 8. Dans son remarquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation
1517 marquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougem
1518 qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « R
1519 aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’une
1520 nt et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de , « Raisons et buts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier 195
1521 NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’ une conférence », Fédération, Paris, janvier 1950, p. 19-25. o. Il s’
1522 oncé par Denis de Rougemont lors de la Conférence européenne de la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avo
1523 nis de Rougemont lors de la Conférence européenne de la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avons
1524 Les sous-titres ont été rajoutés pour les besoins de cette édition numérique.
12 1950, Articles divers (1948-1950). Un gage à Jean Paulhan ! (avril 1950)
1525 surprise que j’apprends, à vous lire dans Liberté de l’Esprit, que les fédéralistes ont exclu la Russie de l’Europe ; que
1526 que la Grèce n’en fait pas partie, mais bien « et de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires 
1527 de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires » ; que j’ai « annoncé la fin du désespoir » ; que
1528 lisme est contre les patries (mais qu’il juge bon de le « cacher ») ; et qu’enfin les fédéralistes « n’ont jamais été amou
1529  n’ont jamais été amoureux ». Heureusement pour l’ Europe , et pour les fédéralistes, il n’y a pas un mot de vrai dans tout cela
1530 pe, et pour les fédéralistes, il n’y a pas un mot de vrai dans tout cela. Vous jugez notre projet « imbécile ». Celui que
1531 que vous critiquez est tel sans aucun doute. Mais d’ où sort-il ? Je ne connais pas un seul fédéraliste qui puisse y reconn
1532 vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit possible de l’exclure sans lui faire violence ? » Mais quand l’avons-nous exclue 
1533 montrez, au paragraphe suivant, qu’il serait vain d’ espérer l’inclure. Que diable voulez-vous donc que nous en fassions ?
1534 en fassions ? (On m’assure que cela dépend aussi de Staline.) 2° « Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils son
1535 rante-deux articles) ». Montrez-nous donc un seul de ces articles qui dise, ou laisse entendre, que le Conseil de l’Europe
1536 t le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre de cet organisme est qu’il serve provisoirement, à sa place, et malgré s
1537 rès graves imperfections, au progrès vers l’union européenne , laquelle reste à faire, comme chacun sait. (J’ajoute qu’on ne compte
1538 ute qu’on ne compte à Strasbourg qu’une trentaine de fédéralistes sur cent-un députés.) 3° La Grèce fait partie du Conseil
1539 nt été nommés jusqu’ici que par L’Humanité. Drôle d’ évidence. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.) 4° M. Spaak est
1540 qui agit plus que tout autre en faveur de l’union européenne , mais je ne sache pas qu’il ait jamais passé pour un « doctrinaire »,
1541 ent, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et de l’isolement, la mort des ressentiments nationaux » ? Hélas ! Diagnost
1542 conseiller certains remèdes in extremis (que les Européens n’aiment pas du tout, vous par exemple), ce n’est pas « annoncer » la
1543 us par exemple), ce n’est pas « annoncer » la fin de la maladie, ni promettre « des joies et des fêtes ». Nous demandons s
1544 des sacrifices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a «  de faux ou d’imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de
1545 ices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou d’ imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interr
1546 e » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interroger. Que ne le faites-vous ? Mais non, par une erreur vrai
1547 e. Vous prenez vos « fédéralistes » dans L’Esprit européen , recueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hom
1548 « fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tenda
1549 ences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces
1550 ré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités san
1551 proche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités sans lesquelles aucune fédération n’es
1552 fédération n’est possible. » C’est la seule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la do
1553 ule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous ci
1554 re où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous citée, au lieu de m’attri
1555 ersité, formule suisse) étant à l’opposé de celle de Benda (qui veut l’unification, formule jacobine) vous déclarez que la
1556 vous déclarez que la seconde n’est que « l’aveu » de ce que la première dissimule. Après quoi, bien sûr, plus rien ne saur
1557 mais. Au contraire, vous rejoignez ici une partie de leurs positions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi c
1558 leurs positions, et votre belle colère se trompe d’ adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison atta
1559 tions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison attaquez-vous d
1560 ez-vous des gens que vous n’avez pas pris le soin d’ identifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près
1561 tifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près journalistique. Pour en finir, je vous envoie ma petite
1562 ’Attitude fédéraliste . Vous y trouverez beaucoup d’ attaques contre le nationalisme, contre l’État-nation, contre sa préte
1563 riotisme et les patries. Or j’ai quelques raisons de penser que ce texte exprime le « projet des fédéralistes » plus fidèl
1564 quoi, cette lettre est inutile, si l’on a décidé d’ appeler « fédéralistes » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé
1565 s » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé de l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a de
1566 ous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé de l’ Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a des gens qu
1567 l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a des gens qui appellent surréaliste tout écrit qu’ils e
1568 uand vous aurez renoncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce
1569 oncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce que vous proposez.
1570 proposez. Car je ne vais pas vous faire l’injure de croire que vous trouvez que tout va très bien ainsi, ou que vous pens
1571 ant toutes petites et mignonnes. Elles ont besoin de vous aussi, non point pour les louer contre nous, mais pour les défen
1572 nous, mais pour les défendre avec nous. P.-S. — «  Europe vole » ? Un gage. r. Rougemont Denis de, « Un gage à Jean Paulhan 
1573  « Europe vole » ? Un gage. r. Rougemont Denis de , « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950
1574 t Denis de, « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950, p. 33-34.
13 1950, Articles divers (1948-1950). Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)
1575 Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)s t Il est imp
1576 Il est impossible de sauver l’ Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)s t Il est impossible de sauve
1577 sa culture (5 août 1950)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de
1578 (5 août 1950)s t Il est impossible de sauver l’ Europe si l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de sauver la cultu
1579 i l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de sauver la culture occidentale si l’on ne sauve pas en même temps sa p
1580 e sauve pas en même temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les
1581 ême temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa re
1582 sert de faire durer, de conserver la créature — l’ Europe — si l’on tarit les sources de sa recréation perpétuelle. Et rien ne
1583 a créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’entretenir le d
1584 recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’ entretenir le désir créateur, si on le prive des possibilités de s’acc
1585 e désir créateur, si on le prive des possibilités de s’accomplir dans une libre communauté. Si l’Europe est réduite à l’im
1586 és de s’accomplir dans une libre communauté. Si l’ Europe est réduite à l’impuissance politique, si elle est colonisée par l’Am
1587 le désire parfois, ou envahie par la Russie, si l’ Europe disparaît du jeu des forces mondiales, personne ne pourra remplacer c
1588 mondiales, personne ne pourra remplacer cette âme d’ une civilisation qui avait su remplacer toutes les autres. Le secret d
1589 i avait su remplacer toutes les autres. Le secret de ses mesures vivantes sera perdu. ⁂ Mais en retour, sans une culture a
1590 sans une culture active rendue à l’efficacité, l’ Europe ne peut recouvrer la puissance. Elle sera peut-être unie, c’est même
1591 unie, c’est même plus que probable, par les soins d’ experts étrangers, ou d’une police qui a fait ses preuves ailleurs déj
1592 e probable, par les soins d’experts étrangers, ou d’ une police qui a fait ses preuves ailleurs déjà. Mais elle aura perdu
1593 es ailleurs déjà. Mais elle aura perdu le ressort de son pouvoir transformateur du monde, ce pouvoir qui avait fait sa gra
1594 e, ce pouvoir qui avait fait sa grandeur à partir d’ un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si
1595 à partir d’un médiocre destin. Que servirait à l’ Europe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si c
1596 ir d’un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cett
1597 pe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cette unité signifiait sa défaite, non point sa con
1598 elle-même ? son destin et non plus sa liberté ? L’ Europe sans sa culture, réduite à ce qu’elle est, ne serait plus qu’un cap d
1599 l’Asie — et l’Asie n’a jamais passé pour la terre de la liberté. Ces deux réalités : l’Europe, la culture, naissent et meu
1600 our la terre de la liberté. Ces deux réalités : l’ Europe , la culture, naissent et meurent du même mouvement. ⁂ Qu’en est-il do
1601 et meurent du même mouvement. ⁂ Qu’en est-il donc de ce mouvement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les deux colosse
1602 e ? Entre les deux colosses russe et américain, l’ Européen qui vient de perdre la guerre, fait actuellement ce qu’on peut appele
1603 it actuellement ce qu’on peut appeler une névrose d’ infériorité. Pourtant, les faits ne justifient pas le désespoir, mais
1604 ifient pas le désespoir, mais seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américai
1605 ent un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rid
1606 ent. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’ Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 mi
1607 d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un qu
1608 à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’ Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’un
1609 l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’ Européens . Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’un tiers de
1610 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’ un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit a
1611 disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’ un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous dis
1612 de plus d’un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous disposons surt
1613 it aujourd’hui la planète. Nous disposons surtout de ressources humaines qui n’ont pas leurs égales ailleurs : une main-d’
1614 ont les traditions ne s’imitent pas, une capacité d’ invention que le monde entier peut nous envier. ⁂ Qu’avons-nous invent
1615 ut nous envier. ⁂ Qu’avons-nous inventé, nous les Européens , depuis cent ans ? Je répondrai : que n’avons-nous pas inventé ? Je c
1616 re : presque tous leurs grands noms sont des noms de l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier
1617 presque tous leurs grands noms sont des noms de l’ Europe , et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier de nos ma
1618 ès rares qui n’en sont pas ont appris leur métier de nos maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou pa
1619 maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou par nos livres. ⁂ Je dirai plus. Le monde moderne tout enti
1620 moderne tout entier peut être appelé une création européenne . Pour le bien comme pour le mal, il imite à la fois nos mœurs et nos
1621 e à la fois nos mœurs et nos objets, nos procédés d’ art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie e
1622 is nos mœurs et nos objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de méde
1623 os objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos arme
1624 rocédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous,
1625 de construction, de transport et de gouvernement, d’ industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les
1626 , de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les Noirs, copient
1627 s. Les Hindous, les Chinois, les Noirs, copient l’ Europe pour toutes ces choses, mais nous, nous copions tout au plus quelques
1628 ous, nous copions tout au plus quelques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de
1629 elques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que s
1630 lques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que sont les empires qui prétendent parta
1631 du Nord et la Russie de Staline sont des produits de notre culture, l’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de
1632 ’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’un côté, plus les grat
1633 a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’ un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les
1634 isme, d’un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les degrés, la cellophane et la fermeture-éclai
1635 ne et la fermeture-éclair qui sont des inventions européennes  ; et de l’autre côté, Marx et notre industrie plus l’instruction publ
1636 e-éclair qui sont des inventions européennes ; et de l’autre côté, Marx et notre industrie plus l’instruction publique et
1637 nstruction publique et l’athéisme, l’hypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pè
1638 ypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce
1639 ppareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce n’est point par ha
1640 ces deux grands pays semblent appeler ce procédé de description : leurs traits les plus frappants et qu’ils croient spéci
1641 en que l’Amérique et la Russie moderne, dans plus d’ un sens, sont en réalité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas
1642 ité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas de malentendu ! Ne nous laissons jamais aller à placer sur le même plan
1643 suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu’y a-t-il de commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation
1644 e commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation ; il y a l’exercice des mêmes libertés ; il y a de
1645 mêmes libertés ; il y a devant nous le même idéal de liberté humaine. Tandis qu’entre les Russes et nous, il n’y a en comm
1646 our nous liberté politique. s. Rougemont Denis de , « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », Fra
1647 ue. s. Rougemont Denis de, « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », France indépendante, Paris,
1648 ugemont Denis de, « Il est impossible de sauver l’ Europe sans sauver sa culture », France indépendante, Paris, 5 août 1950, p.
1649 présente cette semaine à ses lecteurs, un extrait de l’importante conférence prononcée par Denis de Rougemont au congrès d
1650 rence prononcée par Denis de Rougemont au congrès de La Fédération à Beaune. Nous tenons à remercier M. de Rougemont pour
1651 à remercier M. de Rougemont pour son autorisation de publier ces lignes qui suscitèrent, nous en sommes certains, chez nos
14 1950, Articles divers (1948-1950). Saint-John Perse et l’Amérique (1950)
1652 t-John Perse et l’Amérique (1950)m La grandeur de cette poésie fait reculer le commentaire : elle est un acte, elle se
1653 à, posant elle-même ses mesures. La première page d’ Anabase lorsqu’elle parut, constitua pour nous le fait du prince, tout
1654 rer dans la durée, — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. (D’où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un
1655 — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. ( D’ où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un jeune amour veut so
1656 t, on l’imagine, en Amérique. Au long des avenues de Manhattan, il marchait lentement, régulièrement, comme ceux qui vont
1657 , comme ceux qui vont très loin, ou qui pensent à de grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’empressement. Ou da
1658 e grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’ empressement. Ou dans cette chambre d’angle, dont il parle dans Neiges
1659 i n’ont pas d’empressement. Ou dans cette chambre d’ angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme
1660 angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme sans preuve ni témoin », il nous donnait un haut exe
1661 n », il nous donnait un haut exemple du bon usage de l’exil : sans plainte, au cœur du grand litige ; aussi actif dans la
1662 avait su rester sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des de
1663 er sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’ être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des destins molesté
1664 re, enfin, dans son retrait, des destins molestés de la France, que tant de « partisans extravagants » qui tenaient bruyam
1665 extravagants » qui tenaient bruyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je
1666 uyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarqu
1667 ène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarques sur les relations qui se
1668 atique. J’y verrais même la meilleure description de l’essor des États-Unis dans l’espace et le temps à la fois, si le suj
1669 ture et l’invention du Nouveau Monde ont illustré d’ accidents séculaires. Tout se passe à la fois dans l’Histoire et dans
1670 oire et dans l’homme, « dans un très haut tumulte de terres en marche vers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. D
1671 ers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. De l’Atlantique au Pacifique, des Pères pèlerins aux savants atomistes,
1672 r nylon, les grands rapides « avec leur provision de glace pour cinq jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « c
1673 maïs noir — non violet », enfin « les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’h
1674 les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme
1675 s usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence
1676 au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’un agrandisseme
1677 homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’ un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poèm
1678 dans sa présence humaine ; et d’un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poème ainsi prend sa sou
1679 , peuvent être vues comme une seule et même geste de l’âme. (Je dis l’âme, et non pas l’esprit, ni l’intellect et ni le cœ
1680 ’esprit, ni l’intellect et ni le cœur.) Et c’est d’ un même mouvement à tout ce mouvement lié, que mon poème encore dans l
1681 mouvement lié, que mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de
1682 mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénia
1683 de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les
1684 tes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les grands vents : le mouvement, la violenc
1685 ment crée l’énergie, le rayonnement et les trains d’ ondes, — et d’autre part, dans le poème, il crée littéralement le sens
1686 s le poème, il crée littéralement le sens. (Point de départ d’une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa for
1687 , il crée littéralement le sens. (Point de départ d’ une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa formule dynam
1688 nous filaient entre les doigts — grands virements de comptes et glissements sur l’aile. L’apposition me semble offrir ici
1689 osition me semble offrir ici l’équivalent en mots d’ un accord en musique : co-vibration des sens au lieu de celle des sons
1690 où l’on étudiera, plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale,
1691 plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale, entre ses « origine
1692 ase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nour
1693 i les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nourrit la plupart des poè
1694 respire à longs traits la maîtrise, et le bonheur de la victoire. Les mots faveur et favorable, éloges, délice et délectab
1695 autres les expressions du délaissement, du dégoût de vivre ou des chagrins intimes. Qu’ils n’aillent dire : tristesse… s’
1696 nostalgie deviennent ici conquête, pressentiment de l’acte, distraction vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de
1697 ion vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de force pour les hommes… Choses vivantes, ô choses — excellentes ! Rien
1698 poésie des « blues » fait illusion : temps faible d’ un grand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Co
1699 rand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil int
1700 er.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’au
1701 e, notre plus grand témoin de l’exil intérieur en Europe . L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’humilité dans la souf
1702 témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s
1703 ’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’ exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au
1704 ope. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’ humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au monde entier des chose
1705 ce propos une hypothèse critique, qui permettrait de situer les grands poèmes du siècle. Si l’élément sentimental domine c
1706 uel, c’est dans l’élément animique que les poèmes de Saint-John Perse trouvent leurs lois et leurs cadences : Et c’est pa
1707 à l’image des grandes crues, Qu’il prend conseil de ces menées nouvelles au lit du vent. Et c’est conseil encore de fo
1708 velles au lit du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents
1709 t du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents du Nouveau M
1710 e comme les vents du Nouveau Monde, comme un rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les ri
1711 n rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les rigueurs voluptueuses du plus pur langage fra
1712 urs voluptueuses du plus pur langage français, et de cette « rhétorique profonde » dont parlait un jour Baudelaire. III. L
1713 rofonde » dont parlait un jour Baudelaire. III. L’ Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’esp
1714 it un jour Baudelaire. III. L’Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fu
1715 n de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fut universaliste, et le redeviendra peut-être, ma
1716 ns le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’ Europe fut universaliste, et le redeviendra peut-être, mais l’Amérique est p
1717 rocédés, chez Saint-John Perse, ouvrent les voies d’ un grand lyrisme américain. Ils sont classiques. Les continents, les p
1718 yriques, et l’édification sur table rase des lois d’ une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en c
1719 tion sur table rase des lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes
1720 lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et q
1721 ès grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et qui prenaient source plus haute qu’en nos chants, en lie
1722 aient source plus haute qu’en nos chants, en lieu d’ insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô mond
1723 plus haute qu’en nos chants, en lieu d’insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô monde entier des
1724 e mot « monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’ états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée
1725 monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’ âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de va
1726 à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes es
1727 us d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute rac
1728 nts individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pa
1729 rre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de
1730 de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par
1731 es », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’u
1732 hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme san
1733 toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’un
1734 s en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’ une âme sans nom — l’inconscient d’une époque — dont le poète déchiffr
1735 ar nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’ une époque — dont le poète déchiffre les messages. Itinéraires et inve
1736 s messages. Itinéraires et inventaires, sommation de nos « voies et façons » et « chants d’un peuple, le plus ivre », — il
1737 sommation de nos « voies et façons » et « chants d’ un peuple, le plus ivre », — il semblera surprenant qu’un Français ait
1738 ançais ait ouvert aux Américains les perspectives de l’épopée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans
1739 pée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafay
1740 un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafayette. ⁂ Mais Vents n’est pas seulement le poème du lyrisme, le c
1741 s seulement le poème du lyrisme, le chant profond de l’Amérique. C’est aussi, dans sa dernière partie, le poème du retour
1742 , dans sa dernière partie, le poème du retour à l’ Europe , à la France. Nous reviendrons, un soir d’Automne, sur les derniers
1743 l’Europe, à la France. Nous reviendrons, un soir d’ Automne, sur les derniers roulements d’orage… Demain, ce continent lar
1744 s, un soir d’Automne, sur les derniers roulements d’ orage… Demain, ce continent largué… S’ensuit une description charmant
1745 S’ensuit une description charmante et déchirante d’ une France désuète et qui naguère encore périssait « par excès de sage
1746 suète et qui naguère encore périssait « par excès de sagesse », d’une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent
1747 aguère encore périssait « par excès de sagesse », d’ une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent des Amériques
1748 ur avec le vent des Amériques. Au plus haut point de ce très haut poème, Saint-John Perse a rejoint notre vœu. Nous l’atte
1749 se a rejoint notre vœu. Nous l’attendrons un soir d’ automne, avec le souffle du grand vent, sur la route et la terre des h
1750 la terre des hommes, prêts à rendre nos comptes «  d’ hommes nouveaux, — d’hommes entendus dans la gestion humaine, non dans
1751 prêts à rendre nos comptes « d’hommes nouveaux, —  d’ hommes entendus dans la gestion humaine, non dans la précession des éq
1752 es équinoxes », et qu’il nous aide ! par le chant d’ une Europe future. Car, ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plu
1753 inoxes », et qu’il nous aide ! par le chant d’une Europe future. Car, ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plus de qui,
1754 , ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plus de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’auteur qui donne à l’âm
1755 us de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’ auteur qui donne à l’âme de plus grands mouvements… qui nous remplisse
1756 e plus grands mouvements… qui nous remplisse plus de la vapeur du dieu qui l’agite. » 4. « Avertissement du Dieu ! Avers
1757 e âme plus scabreuse ! » (Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de
1758 mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureu
1759 Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureux sont les plus
1760 Arabes et Chinois peut-être… m. Rougemont Denis de , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris
1761 , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris, septembre 1950, p. 136-139.