1
L’idée fédéraliste (
1948
)b On peut penser avec le philosophe Jaspers que l’Europe du xxe s
2
, renonçant à leur souveraineté absolue au profit
d’
une constitution commune. Dans cette vue, la Suisse moderne serait une
3
ans cette vue, la Suisse moderne serait une sorte
de
« bon exemple à suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre, deux
4
suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre,
deux
réserves préalables se présentent aussitôt à l’esprit. Il conviendrai
5
tent aussitôt à l’esprit. Il conviendrait d’abord
de
préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui m
6
drait d’abord de préciser quels sont les éléments
de
notre expérience helvétique qui méritent d’être donnés en exemple ; p
7
ments de notre expérience helvétique qui méritent
d’
être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourr
8
ique qui méritent d’être donnés en exemple ; puis
de
chercher dans quelle mesure ils pourraient être utilisés ou reproduit
9
eproduits sur une plus vaste échelle. La question
de
nos dimensions dans l’espace et dans le temps apparaît capitale à cet
10
es d’histoire suisse, notre État fédéral avec ses
cent
ans d’existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudi
11
oire suisse, notre État fédéral avec ses cent ans
d’
existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudier les
12
nous autres Suisses. Mais si nous passons du plan
de
cette microhistoire à l’histoire générale, tout change. Nous voyons t
13
nérale, tout change. Nous voyons tout d’abord que
cent
ans, ce n’est qu’un septième de notre histoire nationale ; que celle-
14
out d’abord que cent ans, ce n’est qu’un septième
de
notre histoire nationale ; que celle-ci ne s’étend que sur le dernier
15
que celle-ci ne s’étend que sur le dernier tiers
de
l’ère chrétienne, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l
16
e, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers
de
l’histoire des civilisations, qui elles-mêmes ne couvrent que le dern
17
les-mêmes ne couvrent que le dernier cinquantième
de
la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il ré
18
nier cinquantième de la durée généralement admise
de
l’humanité sur la planète. D’où il résulte que notre expérience fédér
19
généralement admise de l’humanité sur la planète.
D’
où il résulte que notre expérience fédérale ne représente guère que la
20
lles s’évanouiront probablement, comme une goutte
de
vin dans la mer. Ensuite, ce rappel à nos dimensions très réduites da
21
ns jouer dans le monde. En effet, les proportions
de
notre expérience à l’histoire générale sont à peu près celles de la g
22
ence à l’histoire générale sont à peu près celles
de
la graine à l’arbre. Qu’est-ce qu’une graine ? C’est un objet hauteme
23
n aboutissement et un commencement. C’est le lieu
d’
un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent,
24
nt et un commencement. C’est le lieu d’un passage
de
la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent, mais elles p
25
es les graines meurent, mais elles peuvent mourir
de
deux manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’h
26
les graines meurent, mais elles peuvent mourir de
deux
manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’humus,
27
les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime
d’
humus, les autres donnent un nouvel arbre. Notre État fédéral mourra,
28
helle infiniment plus vaste ? Telle est la chance
de
la Suisse dans l’histoire, pour ce siècle ou pour ceux qui le suivron
29
ce siècle ou pour ceux qui le suivront. La chance
d’
une graine. Transposons maintenant ces symboles. Traduisons graine par
30
en notre État fédéral, après un siècle et demi ou
deux
, disparaîtra tout comme une autre République sérénissime de Venise, n
31
aîtra tout comme une autre République sérénissime
de
Venise, ne laissant qu’un souvenir ou un décor, parce qu’il aura gard
32
n cite l’exemple helvétique, à propos d’un projet
d’
États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate
33
ue, à propos d’un projet d’États-Unis d’Europe ou
de
gouvernement mondial, l’objection immédiate qui surgit sur les lèvres
34
l ne s’agit que des modalités typiquement suisses
de
la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’id
35
alités typiquement suisses de la mise en pratique
de
l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expér
36
ratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit
de
l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement pl
37
t s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience
de
laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses app
38
ce de laboratoire est nécessairement plus réduite
de
dimensions que ses applications, mais pourtant celles-ci n’existeraie
39
nt pas sans celle-là. Je ne parlerai donc ici que
de
notre idée fédéraliste en soi. Elle est très simple, comme toutes les
40
r en quelques mots, en une formule ; car elle est
d’
un type organique et non pas mécanique ou passionnel, en cela beaucoup
41
résistances, mais elle est au contraire le secret
d’
un équilibre constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de comp
42
constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit
de
composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après
43
nt entre des forces qu’il s’agit de composer, non
de
soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après l’autre. On ne sa
44
de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou
d’
écraser l’une après l’autre. On ne saurait trop insister sur le double
45
té, comme on voudra, qui est le battement du cœur
de
ce système. Car le fédéralisme ne consiste pas seulement dans l’union
46
Tous pour un ». Dans ce sens, il nous sera permis
de
dire que la politique fédéraliste n’est rien d’autre que la politique
47
s de dire que la politique fédéraliste n’est rien
d’
autre que la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot.
48
la politique tout court, au sens le plus légitime
de
ce mot. Elle est donc l’antithèse exacte des méthodes totalitaires, a
49
onsistent à écraser les diversités par incapacité
de
les composer en un tout organique et vivant. ⁂ C’est peut-être parce
50
s ou moins consciemment les principales décisions
de
notre vie politique pendant des siècles, et qu’elle a finalement pris
51
cles, et qu’elle a finalement pris forme et force
de
loi vers 1848 ; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis
52
elle a finalement pris forme et force de loi vers
1848
; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis à la commente
53
her à son sujet. Comme la vie même — étant la vie
de
notre praxis politique — elle allait sans dire, jusqu’ici. La nécessi
54
llait sans dire, jusqu’ici. La nécessité présente
de
l’affermir en face du défi que représente l’esprit totalitaire, et au
55
éfi que représente l’esprit totalitaire, et aussi
de
la propager, car la meilleure défense est dans l’attaque, nous invite
56
ui semblent avoir inspiré l’action tout empirique
de
nos ancêtres. 1. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à t
57
inspiré l’action tout empirique de nos ancêtres.
1.
Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à toute idée d’hégém
58
me ne peut naître que du renoncement à toute idée
d’
hégémonie éducatrice ou organisatrice exercée par l’une des nations co
59
légitime certains « grands » prendre l’initiative
d’
une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’
60
d’une fédération européenne ou mondiale. L’échec
de
Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe i
61
opéenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui
d’
Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’une manièr
62
Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives
d’
unifier l’Europe indiquent d’une manière négative cette même vérité si
63
ans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent
d’
une manière négative cette même vérité simple que notre réussite confi
64
e peuvent conduire qu’à l’unification, caricature
de
l’union véritable. 2. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncemen
65
à l’unification, caricature de l’union véritable.
2.
Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à tout esprit de sys
66
e ne peut naître que du renoncement à tout esprit
de
système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour
67
sprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme
d’
une nation vaut aussi pour celui d’une idéologie. On pourrait définir
68
l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour celui
d’
une idéologie. On pourrait définir l’attitude fédéraliste comme un ref
69
fédéraliste comme un refus constant et instinctif
de
recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et s
70
de recourir aux solutions systématiques, simples
de
lignes, claires et satisfaisantes pour la logique, mais par là même i
71
estructrices des diversités qui sont la condition
de
la vie organique. Fédérer, ce n’est pas mettre en ordre d’après un pl
72
re en ordre d’après un plan géométrique, à partir
d’
un centre ou d’un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes,
73
près un plan géométrique, à partir d’un centre ou
d’
un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes, selon leurs car
74
s caractères particuliers, qu’il s’agit à la fois
de
respecter et d’articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît p
75
ticuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et
d’
articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème d
76
la fois de respecter et d’articuler dans un tout.
3.
Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objecter
77
er dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas
de
problème des minorités. On objectera que le totalitarisme, lui aussi
78
qualités ne se traduit pas seulement dans le mode
d’
élection du Conseil des États, mais surtout, et d’une manière beaucoup
79
d’élection du Conseil des États, mais surtout, et
d’
une manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie pol
80
manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes
de
notre vie politique et culturelle, où l’on voit la Suisse romande ou
81
nne jouer un rôle sans proportion avec le chiffre
de
leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralism
82
proportion avec le chiffre de leurs habitants ou
de
leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour d
83
de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés.
4.
Enfin le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contras
84
arrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour
de
la complexité, par contraste avec le simplisme brutal qui caractérise
85
Burckhardt qualifiait dans une lettre prophétique
de
« terribles simplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’
86
mplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent
de
l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouve
87
l’extrême complication des institutions suisses,
de
l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, co
88
omplication des institutions suisses, de l’espèce
de
mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, féd
89
es institutions suisses, de l’espèce de mouvement
d’
horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, fédéraux, canton
90
, cantonaux, si diversement engrenés, il convient
de
leur montrer que cette complexité est la condition même de nos libert
91
ontrer que cette complexité est la condition même
de
nos libertés. C’est grâce à elle que nos fonctionnaires et nos législ
92
eurs sont constamment rappelés au concret, forcés
de
rester en contact avec les réalités humaines du pays. La Suisse est f
93
s réalités humaines du pays. La Suisse est formée
d’
une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, lingui
94
nes du pays. La Suisse est formée d’une multitude
de
groupes politiques, culturels, administratifs, linguistiques, religie
95
frontières, et qui se recoupent et se recouvrent
de
cent manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un
96
ontières, et qui se recoupent et se recouvrent de
cent
manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un espri
97
n ou totalitaire, brimeraient nécessairement l’un
de
ces groupes, tendraient à réduire leur variété, et mutileraient ainsi
98
eur variété, et mutileraient ainsi dans plusieurs
de
ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes,
99
ans plusieurs de ses dimensions, la personne même
de
ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur t
100
ux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile
de
décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plu
101
s, il est plus facile de décréter sur table rase,
de
simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la
102
créter sur table rase, de simplifier les réalités
d’
un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite
103
table rase, de simplifier les réalités d’un trait
de
plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalis
104
, de simplifier les réalités d’un trait de plume,
de
tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en é
105
trait de plume, de tirer des plans à la règle et
de
forcer ensuite leur réalisation en écrasant tout ce qui résiste, ou s
106
ut ce qui dépasse. Mais c’est la vitalité civique
d’
un peuple qu’on écrase ainsi. Une politique fédéraliste, telle qu’on v
107
u’on vient de la décrire, suppose infiniment plus
de
soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle
108
de la décrire, suppose infiniment plus de soins,
d’
ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne.
109
iniment plus de soins, d’ingéniosité technique et
de
compréhension du peuple qu’elle gouverne. C’est pourquoi je disais pl
110
pourquoi je vois en elle le seul avenir possible
de
l’Europe, et le don que nous pouvons lui faire en restant fidèles à n
111
stant fidèles à nous-mêmes. b. Rougemont Denis
de
, « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse (1848-1948), Morat, Édi
112
de, « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse (
1848-1948
), Morat, Éditions patriotiques, 1948, p. 461-464.
113
suisse (1848-1948), Morat, Éditions patriotiques,
1948,
p. 461-464.
114
Essai sur l’avenir (
1948
)a 1. Parabole des fées Tout cela est très joli ! disait l
115
Essai sur l’avenir (1948)a
1.
Parabole des fées Tout cela est très joli ! disait le Docteur,
116
, la seule méthode honnête, rigoureuse, éprouvée,
d’
analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et
117
thode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’analyse ou
de
construction. La seule utile, la seule qui réussisse et qui progresse
118
nous sommes libres, après Heisenberg et la Bombe,
de
penser n’importe quoi, et que cela changera tout. Pardon ! La science
119
uves que vos superstitions seraient bien en peine
de
réfuter ou d’égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font
120
uperstitions seraient bien en peine de réfuter ou
d’
égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font déjà mille ki
121
guérit ! Elle invente des machines qui font déjà
mille
kilomètres à l’heure ! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre
122
! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre
de
la bombe atomique, ses spéculations les plus « folles » ! Libre à vou
123
s spéculations les plus « folles » ! Libre à vous
de
prendre pour but l’évocation des fées du Moyen Âge : jamais une fée n
124
pas folle, c’est qu’elle nous permet aujourd’hui
d’
aller beaucoup plus vite qu’il y a cent ans. Voilà qui est sérieux, me
125
aujourd’hui d’aller beaucoup plus vite qu’il y a
cent
ans. Voilà qui est sérieux, me dites-vous. Et voilà qui est utile au
126
sant le contester autour de moi, je crois prudent
de
l’accepter. J’admets aussi que l’évocation des fées ne sert à rien et
127
ant que dans quelques lustres, les hommes cessent
de
trouver amusant d’aller plus vite, et donc commencent à se demander à
128
es lustres, les hommes cessent de trouver amusant
d’
aller plus vite, et donc commencent à se demander à quoi cela sert. Su
129
pposez que leur plaisir nouveau et principal soit
d’
évoquer quelque chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après deux
130
chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après
deux
ou trois siècles d’application des bons esprits. Voilà le sérieux nou
131
omme les fées, et qu’ils y arrivent après deux ou
trois
siècles d’application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’u
132
et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles
d’
application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’utilité urge
133
ent la paix du cœur dans la souffrance, inventent
mille
tours sentimentaux insoupçonnés de notre barbarie, créent l’immobilit
134
, inventent mille tours sentimentaux insoupçonnés
de
notre barbarie, créent l’immobilité dont le sous-produit nommé lenteu
135
r est vénéré par quelques sectes populaires, font
de
la mort une plaisanterie d’un goût sublime qui perd son sel à être ré
136
ctes populaires, font de la mort une plaisanterie
d’
un goût sublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’une seule
137
ublime qui perd son sel à être répétée, étouffent
d’
une seule pensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendr
138
ensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous
de
prendre pour but la construction d’un moteur atomique : jamais un mot
139
Libre à vous de prendre pour but la construction
d’
un moteur atomique : jamais un moteur atomique n’a évoqué la moindre f
140
ée. Nous vous laissons à vos enfantillages.1
2.
Utopies et prévisions La faiblesse générale des utopies, c’est qu’
141
s utopies, c’est qu’elles paraissent moins riches
d’
avenir que le présent. On peut même dire que l’Utopie se définit comme
142
e la plupart des utopistes, en effet, font preuve
de
moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des hi
143
art des utopistes, en effet, font preuve de moins
de
liberté dans leur imagination du futur que la plupart des historiens
144
bee, les utopies sont en réalité des « programmes
d’
action déguisés en descriptions sociologiques imaginaires », et l’acti
145
utre que l’arrêt artificiel, à un certain niveau,
d’
une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l
146
tain niveau, d’une société en décadence. On isole
de
cette société les éléments que l’on considère comme bons, et l’on en
147
l’abri des menaces vulgaires comme des créations
de
l’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité touj
148
’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés
de
la réalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire.
149
éalité toujours mouvante, — bref, hors du courant
de
l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’une manière moins s
150
f, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible
d’
imaginer l’avenir d’une manière moins statique par hypothèse ? Quelles
151
e l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir
d’
une manière moins statique par hypothèse ? Quelles seraient les condit
152
ons requises ? Il faudrait se garder tout d’abord
de
composer un tableau cohérent. Ménager à chaque pas la liberté du choi
153
choix, c’est-à-dire prévoir à chaque pas au moins
deux
solutions possibles. Détourner constamment l’imagination de la ligne
154
ns possibles. Détourner constamment l’imagination
de
la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les ob
155
. Détourner constamment l’imagination de la ligne
de
moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les obstacles qu’o
156
essent à gauche et à droite. (C’est le vrai moyen
de
la passionner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos effo
157
onner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue
de
nos efforts présents, les conduites qui pourront résulter du succès m
158
es conduites qui pourront résulter du succès même
de
ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’imaginer beaucoup de
159
de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent
d’
imaginer beaucoup de nos meneurs politiques : ils voient les condition
160
os meneurs politiques : ils voient les conditions
de
leur victoire, mais non ses suites.2) L’effort le plus soutenu, le mi
161
fourni jusqu’ici le monde occidental, c’est celui
de
dominer la nature par la science, dans l’espoir d’augmenter le confor
162
e dominer la nature par la science, dans l’espoir
d’
augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la d
163
spoir d’augmenter le confort matériel, la vitesse
de
nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysiqu
164
vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne
de
la vie. L’effort métaphysique et religieux s’est relâché à partir du
165
ordre social acceptable, tantôt se disperse entre
vingt
sectes politiques contradictoires, tantôt se crispe en tyrannies, qui
166
nies, qui sont des désordres fixés. Seul l’effort
de
la science (dont le sous-produit est l’industrie) enregistre un progr
167
surable, et semble se poursuivre avec des chances
de
succès toujours accrues. Il en résulte, dans les masses, certaines cr
168
s, mais assez naturelles, dont je ne donnerai que
trois
exemples : 1. la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de
169
urelles, dont je ne donnerai que trois exemples :
1.
la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession
170
rois exemples : 1. la science a toujours raison ;
2.
le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. alle
171
science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend
de
la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bi
172
rs raison ; 2. le bonheur dépend de la possession
de
certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bien en soi. La vi
173
épend de la possession de certains objets neufs ;
3.
aller plus vite est un bien en soi. La vitesse accrue est à nos yeux
174
c qu’elle est « vraie ». En retour, nous refusons
de
croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie o
175
croire ce que nous pensons que « l’état présent »
de
la science nie ou condamne, et nous accordons à cette science l’autor
176
ialiste et mécaniste, quand la science est depuis
trente
ans énergétique et statistique… Cependant, l’on peut imaginer qu’une
177
a science qu’elle vénère, ou du moins s’informera
de
ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’arrêt que semble ma
178
e ses dernières conclusions, à la faveur du temps
d’
arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Ca
179
du temps d’arrêt que semble marquer l’avant-garde
de
la physique mathématique. Car celle-ci semble avoir atteint, provisoi
180
me qu’elle l’a déjà percé, en ramenant un atome à
de
l’énergie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’immatériel,
181
gie, donc en réduisant la matière à quelque chose
d’
immatériel, pour parler un langage grossier. (Mais c’est celui, précis
182
elui, précisément, dans lequel la grande majorité
de
nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’i
183
ité de nos contemporains traduisent les résultats
de
la science d’hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les not
184
temporains traduisent les résultats de la science
d’
hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix
185
s tiennent pour la suprême autorité.) Les notions
de
choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau
186
prême autorité.) Les notions de choix arbitraire,
de
subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathé
187
es notions de choix arbitraire, de subjectivisme,
de
transcendance, sont de nouveau reçues par les mathématiciens et les b
188
e poussée à l’extrême ne peut nous rapprocher que
de
l’« à quoi bon ? », c’est-à-dire des questions métaphysiques que notr
189
ionaliste, indéfendable aux yeux de la science et
de
la raison, neutralise pratiquement la vitesse des transports. (Passer
190
e pratiquement la vitesse des transports. (Passer
d’
Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époq
191
asser d’Europe en Amérique ne prenait guère moins
de
temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol
192
pe en Amérique ne prenait guère moins de temps en
1946
qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mo
193
renait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque
de
Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches a
194
qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée
de
vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, a
195
ue de Christophe Colomb : une journée de vol plus
trois
mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.
196
tophe Colomb : une journée de vol plus trois mois
de
démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.) La pas
197
tionnelles, superstitions et préjugés locaux. Ces
deux
passions produisent des guerres, à la faveur desquelles les possibili
198
faveur desquelles les possibilités destructrices
de
la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beauco
199
uctrices de la technique sont « mises à la portée
de
toutes les bourses », beaucoup plus généreusement que ne le sont les
200
possibilités constructrices pendant les périodes
de
paix. On peut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre
201
eut penser que l’unilatéralité, la spécialisation
de
notre effort scientifique, provoque ainsi les forces les mieux faites
202
ion prométhéenne. Une autre conséquence indirecte
de
l’effort scientifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la
203
ntifique doit être indiquée ici. La vulgarisation
de
la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait l
204
être indiquée ici. La vulgarisation de la notion
de
loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait la science du
205
psychologie, la sociologie, nous servent en fait
d’
alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’e
206
nous servent en fait d’alibis. Nous sommes tentés
de
justifier en leur nom des attitudes qu’en d’autres temps l’on eût app
207
qu’en d’autres temps l’on eût appelées faiblesse
de
caractère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en l
208
tère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons
de
perdre en liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre
209
n liberté ce que nous gagnons en confort (qui est
de
l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dan
210
e que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre
de
la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dans l’acte du
211
gurer qu’elle consiste à « avoir » la disposition
d’
un choix d’objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S
212
le consiste à « avoir » la disposition d’un choix
d’
objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S’il est vra
213
tion d’un choix d’objets toujours plus étendu…
3.
Surmonter la Guerre S’il est vrai que les civilisations se dévelop
214
réponse victorieuse suscite un nouveau challenge
3,
quels développements devons-nous prévoir à partir du complexe de tens
215
ppements devons-nous prévoir à partir du complexe
de
tensions que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature,
216
ons que l’on vient de caractériser ? Au challenge
de
la Nature, nous n’avons pas encore répondu par une victoire totale, i
217
ne victoire totale, il s’en faut, mais les moyens
de
cette victoire sont désormais entre nos mains. La principale résistan
218
par nos machines, c’est-à-dire par nos passions.
Deux
issues me paraissent dès lors imaginables. 1. Nous poursuivons notre
219
Deux issues me paraissent dès lors imaginables.
1.
Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise de l’énergie atomiq
220
Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise
de
l’énergie atomique) en laissant en friche le champ des passions (nati
221
me, politique partisane). Les passions s’emparent
de
la technique et provoquent la guerre atomique. Les destructions sont
222
estructions sont telles, et le choc psychologique
de
telle nature, que la civilisation occidentale se disloque en îlots pl
223
loque en îlots plus ou moins intacts dans une mer
de
ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les dern
224
u moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus
de
laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les derniers lieux communs mo
225
ux communs moraux se désintègrent. Il reste assez
d’
hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances tech
226
se désintègrent. Il reste assez d’hommes vivants,
de
livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour mainte
227
rent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres,
de
machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et
228
’hommes vivants, de livres, de machines-outils et
de
connaissances techniques pour maintenir ici et là des apparences de «
229
echniques pour maintenir ici et là des apparences
de
« vie normale », mais les liens profonds sont coupés. Plus rien ne va
230
rets, des policiers ou des fugitifs. Les sociétés
de
gangsters se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous o
231
se multiplient. Dans des communautés illuministes
de
tous ordres, on expérimente des morales nouvelles et des formes nouve
232
nte des morales nouvelles et des formes nouvelles
de
résistance contre l’État vainqueur et son empire, théoriquement unive
233
vainqueur et son empire, théoriquement universel.
De
ces communautés persécutées peut sortir une spiritualité nouvelle, mè
234
utées peut sortir une spiritualité nouvelle, mère
d’
une civilisation imprévisible. 2. Nous répondons au challenge des pass
235
é nouvelle, mère d’une civilisation imprévisible.
2.
Nous répondons au challenge des passions nationalistes et politiques
236
libres et presque instantanés sur toute l’étendue
de
la planète. Pour la première fois dans l’histoire du monde, il n’y a
237
u’une seule civilisation (l’occidentale, enrichie
d’
apports orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédé
238
orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine,
de
type fédéraliste ; et la question sociale, au lieu de s’exacerber ten
239
ales la guerre et la paix ; soit que le challenge
de
nos passions se révèle trop puissant et que notre civilisation y succ
240
y répondions victorieusement par l’établissement
d’
un gouvernement mondial, libérant l’effort scientifique. (Je note ce s
241
rt scientifique. (Je note ce sentiment, incapable
de
preuve, à titre de curiosité pour l’historien futur.) 4. Surmonter
242
à titre de curiosité pour l’historien futur.)
4.
Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité d’une réponse victorieuse, à
243
r.) 4. Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité
d’
une réponse victorieuse, à la dernière heure, quel serait le nouveau c
244
serait le nouveau challenge qui ne manquerait pas
de
confronter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre eff
245
ter l’humanité, et qui résulterait du succès même
de
notre effort le plus constant ? Ce serait à coup sûr l’Ennui. Ce sen
246
n la plus typique du xixe siècle. (Sans horaires
de
tous genres, on ne pourrait imaginer le fonctionnement des grandes us
247
ération vaste et dense.) « L’ennui naquit un jour
de
l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretien
248
our de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès
de
variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider s
249
. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient.
De
fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’en
250
qui l’entretient. De fait, il est bien difficile
de
décider si la monotonie crée plus d’ennui que la multiplicité des imp
251
en difficile de décider si la monotonie crée plus
d’
ennui que la multiplicité des impressions. L’Océan ou les chutes du Ni
252
Niagara ne m’ennuient pas, mais bien la traversée
d’
une grande ville inconnue. Ce qui provoque l’ennui, dans un cas comme
253
, dans un cas comme dans l’autre, c’est l’absence
de
rythmes vivants, ou leur rupture fréquente et arbitraire. En d’autres
254
traire. En d’autres termes, c’est la mécanisation
de
l’existence, ou encore : la répartition indifférente des efforts et d
255
oint choisi par quelque nécessité interne, en vue
d’
une création, d’une participation, d’une compréhension en profondeur.
256
quelque nécessité interne, en vue d’une création,
d’
une participation, d’une compréhension en profondeur. C’est donc un ac
257
erne, en vue d’une création, d’une participation,
d’
une compréhension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entr
258
ension en profondeur. C’est donc un accroissement
de
l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imagin
259
ssement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci
de
tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de mena
260
ci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît
de
l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans un
261
hallenge imaginable, qu’il naît de l’absence même
de
menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans une tempête, mais bi
262
, l’humanité ne pourra répondre que par une prise
de
position métaphysique. Elle pourra choisir l’anesthésie spirituelle,
263
nesthésie spirituelle, ou l’aventure spirituelle.
1.
L’anesthésie des masses ou insensibilisation à l’ennui, sera obtenue
264
lisation à l’ennui, sera obtenue par des méthodes
de
conditionnement social et physiologique, dont le principe général ser
265
l et physiologique, dont le principe général sera
d’
obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question mét
266
que, dont le principe général sera d’obnubiler et
de
refouler avec une extrême vigilance toute question métaphysique que l
267
oute question métaphysique que l’Ennui risquerait
de
mettre à nu. Dans ce cas, les spirituels-malgré-tout se verront persé
268
robablement nomade, qui pourra devenir la matrice
d’
une civilisation spirituelle et mondiale. 2. Si l’Humanité choisit au
269
trice d’une civilisation spirituelle et mondiale.
2.
Si l’Humanité choisit au contraire l’aventure spirituelle, celle-ci s
270
e par une élite en tous points comparable à celle
de
nos savants actuels, dotée des mêmes prestiges populaires, exerçant u
271
exerçant une autorité analogue sur l’orientation
de
la recherche organisée, et définissant de facto les nouveaux standard
272
e, et définissant de facto les nouveaux standards
d’
utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tour
273
sant de facto les nouveaux standards d’utilité et
de
valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la m
274
x standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort
de
cette élite, au lieu de se tourner vers la matière — désormais « dépa
275
» — se tournera vers la découverte et la maîtrise
de
réalités d’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jo
276
era vers la découverte et la maîtrise de réalités
d’
un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi p
277
’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées
de
nos jours, aussi peu imaginables pour nous que ne pouvait l’être pour
278
ants du xviiie siècle la destruction instantanée
d’
une ville par suite de la dissociation d’un invisible point de matière
279
tantanée d’une ville par suite de la dissociation
d’
un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, e
280
par suite de la dissociation d’un invisible point
de
matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, et sans nom dans notre
281
je désignais en débutant par le terme symbolique
de
Fées. 1. Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atom
282
s en débutant par le terme symbolique de Fées.
1.
Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946.
283
empruntée à mes Lettres sur la bombe atomique ,
1946.
2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-S
284
tée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946.
2.
Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon
285
la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi
de
théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contr
286
ires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contribué
d’
une manière décisive à donner forme à un avenir très différent de leur
287
écisive à donner forme à un avenir très différent
de
leurs prévisions. Saint-Simon a fourni les cadres du capitalisme indu
288
les annonçaient avec précision à la même époque.
3.
Cf. Arnold Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis de, « Es
289
Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis
de
, « Essai sur l’avenir », Pro regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Cal
290
regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Callenbach,
1948,
p. 401-407.
291
Pour sauver nos diversités (le sens
de
La Haye) (juin 1948)c La crise actuelle nous force à nous interrog
292
sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin
1948
)c La crise actuelle nous force à nous interroger sur la valeur mêm
293
e nous force à nous interroger sur la valeur même
de
l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’auton
294
r même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun
de
nous. Que signifie l’autonomie du continent, et que signifierait sa p
295
s qui pèsent sur nous mettent en cause une notion
de
l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis de
296
e une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal
de
liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’Europe. En les per
297
liberté, que symbolise depuis des siècles le nom
d’
Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce
298
om d’Europe. En les perdant, nous serions assurés
de
perdre du même coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la
299
coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens
de
la vie. Le monde entier en serait appauvri. C’est donc une notion de
300
entier en serait appauvri. C’est donc une notion
de
l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun
301
ait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et
de
la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun. C’est en ell
302
nité la plus profonde. Et c’est en la définissant
d’
une manière actuelle et concrète que nous poserons les bases de la féd
303
actuelle et concrète que nous poserons les bases
de
la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de
304
bases de la fédération, qui est notre seul espoir
de
la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que le
305
ui est notre seul espoir de la sauver. Primauté
de
la culture en Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nou
306
Europe S’il est vrai que les motifs immédiats
de
nous unir sont d’ordre économique et politique, il n’est pas moins ce
307
t vrai que les motifs immédiats de nous unir sont
d’
ordre économique et politique, il n’est pas moins certain que l’unité
308
politique, il n’est pas moins certain que l’unité
de
l’Europe est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géogra
309
e est essentiellement culturelle. Du point de vue
de
la géographie, l’Europe n’est qu’un cap de l’Asie. Du point de vue de
310
du monde, l’Europe reste aujourd’hui, même privée
de
sa puissance, le foyer d’une culture inégalée, plus intense, plus div
311
ujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer
d’
une culture inégalée, plus intense, plus diverse et créatrice qu’en to
312
lus diverse et créatrice qu’en toute autre région
de
la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plu
313
ion de la planète. Mais il faut rendre ici au mot
de
culture son sens le plus large et humain. La culture véritable n’est
314
e véritable n’est pas un ornement, un simple luxe
de
l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme
315
ement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble
de
spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît
316
mble de spécialités qui ne concernent pas l’homme
de
la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle il
317
concernent pas l’homme de la rue. La culture naît
d’
une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut
318
la rue. La culture naît d’une prise de conscience
de
la vie ; elle illustre, traduit et promeut une certaine conception de
319
ustre, traduit et promeut une certaine conception
de
l’existence ; elle l’éduque ; elle en donne le sens. Or il est bien t
320
e ; elle en donne le sens. Or il est bien typique
de
l’Europe, aujourd’hui, que la culture ainsi comprise y soit encore un
321
lleurs, elle est mise au service du développement
de
l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du
322
se au service du développement de l’industrie, ou
de
certaines visées politiques. Ce sont les chefs du parti au pouvoir, l
323
ont les chefs du parti au pouvoir, les dirigeants
de
l’économie qui lui dictent un programme précis, qui limitent ses acti
324
aire, c’est la culture qui exprime le sens humain
de
la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influen
325
qui exprime le sens humain de la vie politique et
de
l’économie ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les c
326
; c’est elle qui vise à les influencer, et permet
de
les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définit
327
fluencer, et permet de les critiquer. La primauté
de
la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et
328
uté de la culture appartient donc à la définition
de
l’Europe. Maintenir et promouvoir notre culture, cela signifie d’abor
329
Européens : élargir et approfondir la conception
de
l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moye
330
largir et approfondir la conception de l’homme et
de
sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins
331
nifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins
de
l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités
332
es moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer
de
rapporter sans cesse toutes les activités publiques et privées à une
333
privées à une notion toujours plus haute et large
de
l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le
334
notion toujours plus haute et large de l’homme et
de
sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vi
335
; aménager et transformer en conséquence le cadre
de
la vie et les institutions. La conception européenne de l’homme
336
et les institutions. La conception européenne
de
l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa l
337
e l’homme Élargir et approfondir la conception
de
l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une d
338
largir et approfondir la conception de l’homme et
de
sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique
339
e sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage
d’
une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie, mais au cont
340
été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique,
d’
une nation ou d’une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours,
341
l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou
d’
une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours, et ce sera, tant
342
, et ce sera, tant qu’il y aura l’Europe, l’effet
d’
un dialogue permanent, bien souvent dramatique, parfois tragique, entr
343
doctrines ou plusieurs confessions, une vingtaine
de
nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, il
344
ssions, une vingtaine de nations, et une infinité
d’
écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Eu
345
vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et
de
génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Europe et à mo
346
é à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne
de
l’homme. Cette idée n’est pas simple, mais toujours dialectique ; ell
347
le trouve son unité dans la diversité des couples
d’
éléments antagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous e
348
tagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun
de
nous et se renouvelle à chaque génération : antiquité et christianism
349
et protestantisme, attachements régionaux et sens
de
l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion
350
ens de l’universel, mémoire et invention, respect
de
la tradition et passion du progrès, science et sagesse, germanisme et
351
e… Dans cet équilibre tendu, et sans cesse menacé
de
rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risqu
352
tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit
de
l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme
353
se menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre
de
ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aven
354
’autre de ses éléments, réside le risque original
de
l’homme européen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous p
355
ropéen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun
de
nous participe plus ou moins consciemment réside le secret du dynamis
356
mment réside le secret du dynamisme occidental et
de
l’inquiétude créatrice qui pousse l’Européen à remettre en question,
357
ice qui pousse l’Européen à remettre en question,
de
siècle en siècle, ses rapports avec Dieu, avec le monde, avec l’État
358
naisons variées à l’infini qu’il lui est possible
d’
opérer entre les éléments contradictoires constituant son patrimoine,
359
patrimoine, réside la chance, pour tout Européen,
d’
individualiser de plus en plus ses jugements et son mode de vie. Et en
360
ns ce choix permanent, dans la conscience qu’il a
d’
en être responsable, l’Européen conçoit la liberté. Toute notre histo
361
istoire illustre ce débat, qui se livre en chacun
de
nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entr
362
n chacun de nous. Elle est l’histoire des risques
de
la liberté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrann
363
rté, progressant entre les écueils du désordre et
de
la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’indiv
364
écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma
de
ce progrès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits
365
grès est simple. Pour peu que l’individu, abusant
de
ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l
366
Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et
de
sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à ce
367
e sa liberté, devenue facile, cède à la tentation
de
l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste s
368
ile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle
de
l’impérialisme, une réaction collectiviste se déclenche, au nom de la
369
llectiviste se déclenche, au nom de la justice ou
de
l’ordre social. Elle donne naissance à des régimes unitaires (qu’on a
370
à se dresser avec une passion renouvelée le génie
de
la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenan
371
renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire
de
la liberté. Si nous cherchons maintenant dans quelle notion commune d
372
s cherchons maintenant dans quelle notion commune
de
l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’indiv
373
intenant dans quelle notion commune de l’homme et
de
sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et d
374
t de sa destinée se fonde cette critique alternée
de
l’individualisme et du collectivisme, renaissant à toutes les époques
375
qu’au xxe siècle, mais qui a toujours été l’axe
de
notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idé
376
été l’axe de notre histoire, la vision directrice
de
nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion
377
ion directrice de nos révolutions : c’est l’idéal
de
la personne humaine. Cette notion d’origine chrétienne, acceptée et r
378
’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion
d’
origine chrétienne, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de
379
e, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle
de
l’homme doublement responsable envers sa vocation et envers la cité ;
380
on pas seulement libre ou seulement engagé ; lieu
d’
une synthèse vivante, mais aussi d’un conflit entre des exigences égal
381
engagé ; lieu d’une synthèse vivante, mais aussi
d’
un conflit entre des exigences également valables mais pratiquement an
382
devient infidèle à lui-même et au génie créateur
de
l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes,
383
réateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation
de
supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa p
384
de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie
de
s’enfermer dans sa particularité (nation, parti ou idéologie), soit q
385
idéologie), soit qu’il prétende l’imposer à tous
d’
une manière uniforme, donc tyrannique. Diversité et division des na
386
et des idéologies Cette description succincte
de
l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-
387
succincte de l’homme européen nous met en mesure
de
clarifier maintenant quelques-uns des problèmes brûlants que nous pos
388
ntinent, a fait pendant des siècles l’originalité
de
l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusio
389
siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité
de
sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État,
390
ité de sa culture. Mais par suite de la collusion
de
la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réa
391
e. Mais par suite de la collusion de la nation et
de
l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réalités culturelle
392
iques et administratives, qui n’ont aucune raison
de
se recouvrir en fait, cette diversité naturelle est devenue division
393
uvrit nos échanges culturels. Elle laisse chacune
de
nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’as
394
els. Elle laisse chacune de nos patries incapable
de
sauvegarder son autonomie politique, ou d’assurer son existence écono
395
apable de sauvegarder son autonomie politique, ou
d’
assurer son existence économique. Cet individualisme national, qui ten
396
anger pour la vie réelle des nations. Dans l’état
de
faiblesse où il les met, il les livrera fatalement à l’unification fo
397
t à l’unification forcée, soit par l’intervention
d’
un empire du dehors, soit par l’usurpation d’un parti du dedans. C’est
398
tion d’un empire du dehors, soit par l’usurpation
d’
un parti du dedans. C’est pourquoi l’union fédérale est devenue la seu
399
es. Aussi indispensables que les nations à la vie
de
la culture et à la liberté, ces diversités à leur tour tendent à deve
400
ngereuse et utopique que ne serait l’impérialisme
d’
une seule nation. Il est bien clair que ni la droite, ni la gauche, ni
401
uche, ni le centre, aujourd’hui, ne sont capables
de
créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de
402
urd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun
de
ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par
403
cun de ces partis n’est donc capable, à lui seul,
de
sauver l’Europe, ni par suite son propre avenir. De même que les nati
404
son propre avenir. De même que les nations n’ont
de
chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique
405
e avenir. De même que les nations n’ont de chance
de
survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur s
406
ue si elles renoncent à temps au dogme tyrannique
de
leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre l
407
ue de leur souveraineté absolue, les partis n’ont
de
chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, ren
408
souveraineté absolue, les partis n’ont de chance
de
poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, renoncent à t
409
ubordonnent leur tactique à la stratégie générale
d’
une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour
410
eur tactique à la stratégie générale d’une action
de
salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour sauver nos d
411
de salut public européen. c. Rougemont Denis
de
, « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Par
412
t Denis de, « Pour sauver nos diversités (le sens
de
La Haye) », Fédération, Paris, juin 1948, p. 14-15.
413
s (le sens de La Haye) », Fédération, Paris, juin
1948,
p. 14-15.
414
Pourquoi l’Europe ? (
25
décembre 1948)d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont e
415
Pourquoi l’Europe ? (25 décembre
1948
)d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’o
416
Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)d e
Deux
colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’observer, par
417
server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie
de
se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
418
rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour
de
la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
419
ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament
d’
une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
420
contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher
de
penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
421
une puissance, parce que l’Europe est divisée en
vingt
nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille qu’il faut, pour parl
422
er et se faire entendre, dans le monde dominé par
deux
grands empires. Et non seulement l’Europe n’est plus une puissance qu
423
cune des nations qui la composent se voit menacée
d’
annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
424
composent se voit menacée d’annexion politique ou
de
colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
425
tique ou de colonisation économique, par l’un des
deux
empires qui se disputent la terre. Voici le fait fondamental, et que
426
fondamental, et que personne ne peut nier : Aucun
de
nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
427
s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse
de
son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les probl
428
à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun
de
nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
429
omie moderne. Les conclusions que l’on doit tirer
de
ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
430
usions que l’on doit tirer de ce double fait sont
d’
une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
431
cité. Si les choses continuent comme elles vont :
1°
Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns a
432
tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays
de
l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
433
t annexés ou colonisés les uns après les autres ;
2°
La question allemande ne sera pas réglée, c’est-à-dire fournira un pr
434
rétexte permanent à la guerre entre USA et URSS ;
3°
Rien ne pourra s’opposer à cette guerre entre la Russie et l’Amérique
435
à-dire la Troisième puissance, qui serait capable
d’
exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
436
e puissance, qui serait capable d’exiger la paix,
de
l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
437
capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les
deux
autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même unie, serait encore trop
438
rait encore trop petite pour tenir en respect les
deux
Grands, je vous rappellerai un seul chiffre, qu’on a tendance à oubli
439
iffre, qu’on a tendance à oublier : La population
de
l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
440
de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau
de
fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
441
occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est
d’
environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
442
e, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
300
millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que l
443
onc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300
millions
, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie
444
de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire
deux
fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie et tous ses satelli
445
e la Russie et tous ses satellites réunis. Si ces
300
millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres
446
Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300
millions
d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu
447
t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions
d’
habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
448
qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent
de
porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
449
s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids
d’
un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
450
leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure
d’
agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
451
ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
de
faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
452
mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et
de
sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
453
monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens
d’
une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
454
s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent
d’
être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
455
arce que l’Europe est la réalité la plus complexe
de
la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
456
ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit
d’
en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique Cela « soulè
457
ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité
de
l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
458
? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets
d’
articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ic
459
économique ? Très bons sujets d’articles ou même
de
thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ici ! — mais nous nou
460
ntre les thèses — ici ! — mais nous nous occupons
de
la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
461
société des esprits. C’est aussi les personnages
de
Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
462
C’est aussi les personnages de Courteline et ceux
de
Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
463
onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux
de
Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
464
st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros
d’
aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
465
s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose
de
ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
466
l nous faut faire l’Europe. Mais quelle Europe !
Deux
douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues
467
re l’Europe. Mais quelle Europe ! Deux douzaines
de
nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
468
de nations avec leurs traditions, presque autant
de
langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
469
avec leurs traditions, presque autant de langues,
cinq
ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et j
470
rs traditions, presque autant de langues, cinq ou
six
grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et je ne sa
471
autant de langues, cinq ou six grandes cultures,
d’
innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
472
es morales contradictoires, et je ne sais combien
de
partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
473
ires, et je ne sais combien de partis politiques,
de
styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
474
ne sais combien de partis politiques, de styles,
d’
écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
475
ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et
d’
expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
476
onsiste dans les combinaisons et les permutations
d’
une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
477
mbinaisons et les permutations d’une longue série
d’
antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
478
lisme et universalisme, liberté et engagement, et
vingt
autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés e
479
t, et vingt autres tensions dans tous les ordres,
vingt
autres couples combinés et permutés, sans parler de leur ménages à tr
480
autres couples combinés et permutés, sans parler
de
leur ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les au
481
mbinés et permutés, sans parler de leur ménages à
trois
, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les autres, et nul d’entre
482
ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier
de
crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
483
. Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse
de
l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
484
son dynamisme incomparable, sont nés précisément
de
ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
485
comparable, sont nés précisément de ces tensions,
de
ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
486
és précisément de ces tensions, de ces dialogues,
de
cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
487
ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique.
De
là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
488
cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen,
de
siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
489
, avec le monde, avec la société, avec lui-même ;
de
là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
490
ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont
d’
autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
491
a violence, souvent aussi forcent à l’invention ;
de
là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
492
ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité
de
choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
493
ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et
de
se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
494
r et de se risquer, qui est la condition première
de
ce que l’Européen appelle sa liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
495
serait criminel, s’il n’était d’abord impossible,
de
faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
496
mpossible, de faire dépendre l’unité du continent
d’
une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
497
éalable mise au pas, intellectuelle ou politique,
d’
une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
498
cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe
d’
une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
499
mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux
de
convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
500
e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou
de
l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
501
ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer
d’
une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps, par
502
draient pour un temps, par la force, il resterait
dix
autres couples d’adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne
503
ps, par la force, il resterait dix autres couples
d’
adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
504
vienne enfin, en combinant tous les moyens connus
de
simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
505
fera l’Europe, puisque le problème est justement
de
la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolog
506
re sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut
d’
une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
507
plans, qui dit fédéralisme dit toujours à la fois
deux
choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais égale
508
t toujours à la fois deux choses, pense à la fois
deux
choses apparemment contraires mais également valables, et qu’il ne s’
509
s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas
de
subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
510
autre, mais au contraire de maintenir en tension,
de
composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
511
és locales et pouvoir central limité. Sur le plan
de
l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
512
les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse
de
contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
513
est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou
de
politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
514
isse de contrats privés ou de politique générale,
d’
économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
515
ts privés ou de politique générale, d’économie ou
d’
esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
516
mie ou d’esthétique, le problème restera toujours
d’
éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
517
ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte
de
la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
518
ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes
d’
États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec to
519
par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou
de
constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec tout le monde
520
ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté
de
l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
521
de même nous restons à l’écart, vous courez trop
de
dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ain
522
us restons à l’écart, vous courez trop de dangers
de
« mystifications » par les forces impérialistes… C’est ainsi qu’on pe
523
pose à votre admiration : Affirmer une vigilance
de
fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
524
édéraliste), ce n’est pas être absent, c’est être
deux
fois présent. Merci, messieurs, une fois nous suffirait. Mais soyons
525
suffirait. Mais soyons sérieux : quand il s’agit
de
voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
526
battons chaque jour contre elles), ces vigilants
de
fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
527
bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines
de
nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
528
t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle
d’
hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
529
rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend
de
nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
530
courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens,
de
prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
531
l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre
de
vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
532
péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend
de
nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
533
que le jour soit prochain où les voix concertées
de
l’Europe, proclament leur fédération, pourront se faire entendre au m
534
ntendre au monde entier comme la voix forte enfin
de
l’espérance. d. Rougemont Denis de, « Pourquoi l’Europe ? », Rasse
535
forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis
de
, « Pourquoi l’Europe ? », Rassemblement : bulletin intérieur hebdomad
536
: bulletin intérieur hebdomadaire du RPF, Paris,
25
décembre 1948, p. 1-2. e. Présenté par cette note : « Denis de Rouge
537
intérieur hebdomadaire du RPF, Paris, 25 décembre
1948,
p. 1-2. e. Présenté par cette note : « Denis de Rougemont, l’auteur
538
ette note : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse
de
tant d’essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récem
539
e : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant
d’
essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récemment des
540
nt de faire, en tant que membre du Comité central
de
l’Union européenne des fédéralistes, une conférence en Sorbonne. Les
541
à quel point les préoccupations et les positions
de
l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblemen
542
t les préoccupations et les positions de l’auteur
de
Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblement. »
543
La liberté religieuse à l’école (
2e
semestre 1949)h i La secte des adventistes du septième jour, se ré
544
La liberté religieuse à l’école (2e semestre
1949
)h i La secte des adventistes du septième jour, se référant au Déca
545
règlements scolaires sont stricts : toute absence
d’
un élève qui n’est pas justifiée par des raisons « réputées légitimes
546
réputées légitimes », telle que maladie, réunion
de
famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être pun
547
réunion de famille exceptionnelle, impossibilité
de
circuler, etc. doit être punie, surtout si elle se répète à intervall
548
lors subie par les parents ou responsables, et va
de
l’amende à la prison selon les cas et les pays. On imagine tous les c
549
s aussi sévères, pour peu qu’on veuille se servir
de
ceux-ci contre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossier
550
le se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens
d’
examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes
551
ontre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine
de
dossiers relatifs à des familles adventistes dans trois pays : la Bel
552
dossiers relatifs à des familles adventistes dans
trois
pays : la Belgique, la France et la Suisse. Dans quatre écoles belges
553
pays : la Belgique, la France et la Suisse. Dans
quatre
écoles belges (communale, moyenne, normale et un lycée) la preuve a é
554
ns plusieurs départements, après que les demandes
de
dispense ont été refusées « au nom de la loi », il est arrivé fréquem
555
loi », il est arrivé fréquemment que le directeur
d’
une école, ou l’inspecteur d’académie, consentissent finalement à inte
556
ent que le directeur d’une école, ou l’inspecteur
d’
académie, consentissent finalement à interpréter la loi, et à suspendr
557
n Algérie ou en Alsace, des amendes ou des peines
de
prison ont été infligées aux pères d’enfants absents plusieurs samedi
558
des peines de prison ont été infligées aux pères
d’
enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches a
559
ées aux pères d’enfants absents plusieurs samedis
de
suite. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignemen
560
res d’enfants absents plusieurs samedis de suite.
D’
innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des pré
561
te. D’innombrables démarches auprès des autorités
de
l’enseignement, des préfets et des ministres semblent avoir rencontré
562
quel que soit le désir, dont beaucoup témoignent,
d’
assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la
563
nt beaucoup témoignent, d’assurer l’exercice réel
de
la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’e
564
moignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté
de
conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolér
565
la liberté de conscience, il arrive que la lettre
d’
un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de préte
566
il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit
de
tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’i
567
e l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve
de
prétexte facile à l’esprit d’intolérance. En Suisse, la situation dif
568
il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit
d’
intolérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’un canton à l’
569
lérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup
d’
un canton à l’autre. C’est ainsi que l’État de Genève accorde le congé
570
eligieux, tandis que l’État de Vaud le refuse. Le
1er
avril 1948, Marcel D…, citoyen vaudois, s’est vu arrêté par les genda
571
tandis que l’État de Vaud le refuse. Le 1er avril
1948,
Marcel D…, citoyen vaudois, s’est vu arrêté par les gendarmes et inca
572
vu arrêté par les gendarmes et incarcéré pendant
trente
heures parce que sa fille manquait l’école le samedi matin, et qu’il
573
nquait l’école le samedi matin, et qu’il refusait
de
payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se re
574
medi matin, et qu’il refusait de payer une amende
de
2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d
575
i matin, et qu’il refusait de payer une amende de
2
francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d’u
576
ce : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable
d’
une faute, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettr
577
e, et ses convictions religieuses lui interdisent
de
l’admettre. À ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinqu
578
interdisent de l’admettre. À ce jour M. D… a subi
quatre
emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un
579
ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour
cinquante-sept
heures d’absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen berno
580
uatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures
d’
absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a acce
581
isonnements, pour cinquante-sept heures d’absence
de
sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de pay
582
autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté
de
payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence
583
ccepté de payer des amendes allant successivement
de
3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’
584
pté de payer des amendes allant successivement de
3
à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en
585
de payer des amendes allant successivement de 3 à
12
francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en a pa
586
llant successivement de 3 à 12 francs par absence
de
sa fillette à l’école communale, mais n’en a pas moins été condamné (
587
a pas moins été condamné (après « récidives ») à
trois
, puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envo
588
té condamné (après « récidives ») à trois, puis à
quatre
jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dan
589
après « récidives ») à trois, puis à quatre jours
de
prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dans un cant
590
loi paraît plus tolérante. L’instruction primaire
de
son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes compr
591
ction primaire de son enfant lui a coûté la somme
de
3000 francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une diza
592
on primaire de son enfant lui a coûté la somme de
3000
francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une dizaine d
593
sses, amendes comprises. Nous pourrions citer une
dizaine
d’autres situations, fort analogues. « Exceptions négligeables »
594
ous disent les gens pressés : qu’il ne s’agit que
de
cas fort rares, que les adventistes sont en très petit nombre, qu’ils
595
tistes sont en très petit nombre, qu’ils ont tort
de
s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la sema
596
e, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question
de
numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne m
597
r sur une question de numéros attribués aux jours
de
la semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’indignation, d
598
semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop
d’
indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millio
599
indignation, dans une époque où il s’agit d’abord
de
sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou a
600
ans une époque où il s’agit d’abord de sauver des
millions
d’innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. R
601
poque où il s’agit d’abord de sauver des millions
d’
innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Rema
602
e sauver des millions d’innocents jetés aux camps
de
concentration ou aux travaux forcés. Remarquons tout d’abord que le n
603
e que pour être quotidiennement perpétrée sur des
millions
, et il est curieux que les bonnes gens qui parleraient volontiers « d
604
que les bonnes gens qui parleraient volontiers «
d’
exceptions négligeables » dans le cas d’une secte brimée, ne voient pa
605
ontiers « d’exceptions négligeables » dans le cas
d’
une secte brimée, ne voient pas que cet argument devrait en bonne logi
606
, dont le nombre est infime. Ensuite, la question
de
savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au
607
n de savoir si les adventistes ont tort ou raison
de
préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davan
608
ison de préférer le samedi au dimanche comme jour
de
repos, ne doit pas davantage intervenir dans la considération des fai
609
qui nous occupent. Il s’agit ici du respect légal
de
toutes les convictions religieuses en tant que telles, et non point d
610
uses en tant que telles, et non point du jugement
de
vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions,
611
vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre
de
ces convictions, car si les deux points de vue n’étaient pas dissocié
612
r l’une ou l’autre de ces convictions, car si les
deux
points de vue n’étaient pas dissociés, l’on aboutirait fatalement à r
613
nutieusement ces libertés. Céder sur une question
de
principe, sous prétexte qu’elle n’intéresse qu’une minorité microscop
614
écise, suffirait à résoudre des conflits du genre
de
ceux que l’on vient de citer. Il serait, par exemple, extrêmement fac
615
citer. Il serait, par exemple, extrêmement facile
d’
introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une
616
facile d’introduire dans les règlements scolaires
de
toutes les démocraties une clause spéciale ajoutant à la liste des «
617
éciale ajoutant à la liste des « motifs légitimes
d’
absence aux cours » le fait d’appartenir à certaines religions, sectes
618
« motifs légitimes d’absence aux cours » le fait
d’
appartenir à certaines religions, sectes ou confessions. À cela j’imag
619
s ou confessions. À cela j’imagine qu’on opposera
deux
objections courantes : on dira qu’il est trop compliqué de prévoir to
620
ions courantes : on dira qu’il est trop compliqué
de
prévoir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des p
621
ir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux
de
créer des précédents dont mille sectes à l’avenir pourront être tenté
622
qu’il est dangereux de créer des précédents dont
mille
sectes à l’avenir pourront être tentées d’abuser. Le premier argument
623
ont mille sectes à l’avenir pourront être tentées
d’
abuser. Le premier argument n’est pas sérieux. Les lois pénales décriv
624
ux. Les lois pénales décrivent dans le détail des
centaines
de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscale
625
is pénales décrivent dans le détail des centaines
de
cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales,
626
il des centaines de cas bien plus rares que celui
de
nos adventistes. Les lois fiscales, les lois sur les loyers et les «
627
ns à distinguer, à nuancer, à préciser, à prévoir
d’
infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien
628
à prévoir d’infimes variations. Lorsqu’il s’agit
de
punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateu
629
’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou
de
faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateur ! S’il n’a
630
ur le législateur ! S’il n’apportait qu’une trace
de
ce génie méfiant dans la rédaction des décrets garantissant les droit
631
itutions, la Liberté et la Démocratie cesseraient
d’
être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on d
632
t la Démocratie cesseraient d’être raillées comme
de
belles abstractions. Quant à la crainte qu’on dit avoir, que des « pa
633
n’ouvrent la porte à l’anarchie, elle se nourrit
d’
une double confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’accorder des
634
uble confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas
d’
accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « libe
635
s d’accorder des droits spéciaux, mais simplement
de
concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties p
636
iaux, mais simplement de concrétiser la « liberté
de
conscience » que toutes nos démocraties proclament à l’envi. Et d’aut
637
roclament à l’envi. Et d’autre part, il n’y a pas
de
vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement
638
t, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas
de
ce genre se multiplient abusivement. Quand ils se révéleraient deux o
639
ultiplient abusivement. Quand ils se révéleraient
deux
ou trois fois plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ajout
640
nt abusivement. Quand ils se révéleraient deux ou
trois
fois plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ajouter quelqu
641
s plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que
d’
ajouter quelques clauses aux milliers d’autres, utiles ou non, qui s’a
642
as une affaire que d’ajouter quelques clauses aux
milliers
d’autres, utiles ou non, qui s’accumulent dans nos codes. Si l’anarch
643
ation simpliste et uniforme, elle aussi, implique
mille
désordres, puisqu’elle se traduit nécessairement par mille applicatio
644
ordres, puisqu’elle se traduit nécessairement par
mille
applications tyranniques — et que « la tyrannie est le souverain déso
645
montrent soudain les plus stricts dans leur refus
de
considérer les droits d’une petite confession qui ne menace personne.
646
stricts dans leur refus de considérer les droits
d’
une petite confession qui ne menace personne. On les honore d’avoir sa
647
confession qui ne menace personne. On les honore
d’
avoir sauvé d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoi
648
i ne menace personne. On les honore d’avoir sauvé
d’
une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au ra
649
d’une extinction probable la langue romanche, et
de
l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parl
650
la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang
de
langue nationale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’un cent
651
ionale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins
d’
un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils
652
u’elle ne soit parlée que par moins d’un centième
de
la population totale du pays. Comment ne verraient-ils pas qu’en assu
653
nt ne verraient-ils pas qu’en assurant les droits
d’
une minorité religieuse, ils confirmeraient les principes qui, depuis
654
ils confirmeraient les principes qui, depuis plus
d’
un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur p
655
s qui, depuis plus d’un siècle, sont la base même
de
leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’e
656
sont la base même de leur indépendance nationale,
de
leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des d
657
eur indépendance nationale, de leur prospérité et
de
leur paix ? L’exemple des adventistes, et des difficultés particulièr
658
tent leurs croyances, m’a paru propre à illustrer
d’
une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse
659
er d’une manière bien précise le problème général
de
la liberté religieuse à l’école. Parce qu’il n’est pas spectaculaire,
660
aru poser le plus clairement possible la question
de
principe du respect effectif des libertés théoriquement admises par l
661
, mais je sais que toute restriction à la liberté
d’
un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du
662
n à la liberté d’un seul groupe menace la liberté
de
tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne
663
tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune
de
nos religions, ne l’oublions jamais, est en quelque manière ou quelqu
664
ersécution qu’une autre endure. Est-il nécessaire
d’
ajouter qu’il en va de même pour nos droits politiques et civiques ? O
665
r la liberté, dans notre monde, qu’en s’efforçant
de
la sauver partout. h. Rougemont Denis de, « La liberté religieuse
666
çant de la sauver partout. h. Rougemont Denis
de
, « La liberté religieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris, 1
667
gieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris,
1949,
p. 11-14. i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas de petit
668
i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas
de
petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Au
669
ar la note suivante : « Il n’est pas de petite ou
de
grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Autoriser une r
670
t, en fait, refuser cette liberté qu’on se flatte
de
lui accorder. Denis de Rougemont l’expose fort bien dans les pages qu
671
’est pas inconditionnelle n’est qu’une caricature
de
la liberté. » j. « Confession » dans l’original. On a corrigé une er
672
Commencer par l’Europe (février
1949
)f Il paraît que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin d’att
673
l’Europe (février 1949)f Il paraît que l’idée
d’
un gouvernement mondial vient enfin d’atteindre Paris ; il était temps
674
que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin
d’
atteindre Paris ; il était temps ! C’est une idée qui était dans l’air
675
est une idée qui était dans l’air depuis au moins
trois
ans, mais elle y serait sans doute restée si quelques écrivains n’ava
676
mondiales. Qui dira plus ? Ici, nous avons l’air
de
dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. N
677
ir de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant
de
notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de na
678
de notre petite Europe. Nous allons faire figure
de
provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander :
679
urope. Nous allons faire figure de provinciaux ou
de
nationalistes attardés. Et l’on va nous demander : pourquoi l’Europe
680
rticulier : c’est qu’il faut lui montrer un point
d’
application. (Or, quand on veut engager un élan émotif dans la réalité
681
élan émotif dans la réalité, on a toujours l’air
de
freiner.) Nous ne sommes pas une autre école, nos buts finaux sont bi
682
renons au mot. Et nous vous proposons une méthode
de
travail, un mouvement qui est déjà au travail, et un objectif immédia
683
déjà au travail, et un objectif immédiat, qui est
de
commencer par l’Europe. Car nous pensons que le chemin vers la paix,
684
u ne passera pas du tout. J’ai peut-être le droit
de
parler ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a trois ans, je m
685
tre le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain
d’
Hiroshima, il y a trois ans, je me suis trouvé l’un des premiers à pro
686
er ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a
trois
ans, je me suis trouvé l’un des premiers à proclamer, en Amérique et
687
ouvernement mondial. Je n’ai pas un mot à retirer
de
ce que je publiais à l’époque. Je ne suis pas un instant revenu en ar
688
revenu en arrière. Je suis au contraire convaincu
d’
avoir fait un grand pas en avant en embrassant la cause européenne. Vo
689
quelles raisons, les plus simples du monde, mais
d’
une logique à laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me s
690
laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen
de
me soustraire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planèt
691
traire : Devant le nez des premiers enthousiastes
de
la Planète unie par les peuples unis — et j’en étais — un certain rid
692
peuples unis — et j’en étais — un certain rideau
de
fer est tombé, brutalement. Et la guerre froide a commencé. La situat
693
a situation s’est donc précisée, si je puis dire…
Deux
colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’observer, par
694
server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie
de
se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
695
rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour
de
la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
696
ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament
d’
une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
697
contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher
de
penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
698
s une puissance parce que l’Europe est divisée en
vingt
nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille qu’il faut pour parle
699
t se faire entendre, dans le monde dominé par les
deux
grands empires. Et non seulement l’Europe n’est plus une puissance qu
700
cune des nations qui la composent se voit menacée
d’
annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
701
composent se voit menacée d’annexion politique ou
de
colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
702
tique ou de colonisation économique, par l’un des
deux
empires qui se disputent la terre. Voici le fait fondamental, et que
703
fondamental, et que personne ne peut nier : aucun
de
nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
704
s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse
de
son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les prob
705
une défense sérieuse de son indépendance ; aucun
de
nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
706
ie moderne. ⁂ Les conclusions que l’on doit tirer
de
ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
707
usions que l’on doit tirer de ce double fait sont
d’
une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
708
cité. Si les choses continuent comme elles vont :
1°
Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns a
709
tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays
de
l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
710
t annexés ou colonisés les uns après les autres ;
2°
La question allemande ne sera pas réglée, c’est-à-dire fournira un pr
711
rétexte permanent à la guerre entre USA et URSS ;
3°
Rien ne pourra s’opposer à cette guerre entre la Russie et l’Amérique
712
ère sortirait vaincue. Tout cela est simple comme
2
et 2 font 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enf
713
ortirait vaincue. Tout cela est simple comme 2 et
2
font 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enfin la
714
t vaincue. Tout cela est simple comme 2 et 2 font
4
: tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enfin la derniè
715
4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien
d’
être enfin la dernière, parce qu’elle laissera peu de monde pour en fa
716
aussi tout cela nous conduit, avec la force même
de
l’évidence, vers une seule et unique solution. Si nous voulons sauver
717
et unique solution. Si nous voulons sauver chacun
de
nos pays, il nous faut unir ces pays. Si nous voulons sauver la paix,
718
-à-dire la troisième puissance qui serait capable
d’
exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
719
me puissance qui serait capable d’exiger la paix,
de
l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
720
capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les
deux
autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même unie, serait encore trop
721
rait encore trop petite pour tenir en respect les
deux
Grands, je rappellerai un seul chiffre, qu’on a tendance à oublier :
722
iffre, qu’on a tendance à oublier : La population
de
l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
723
de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau
de
fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
724
occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est
d’
environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
725
e, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
300
millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que l
726
onc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300
millions
, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie
727
de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire
deux
fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie et tous ses satelli
728
e la Russie et tous ses satellites réunis. Si ces
300
millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres
729
Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300
millions
d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu
730
t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions
d’
habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
731
qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent
de
porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
732
s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids
d’
un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
733
leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure
d’
agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
734
ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
de
faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
735
mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et
de
sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
736
monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens
d’
une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
737
s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent
d’
être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
738
arce que l’Europe est la réalité la plus complexe
de
la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
739
ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit
d’
en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique. Cela « soul
740
ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité
de
l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
741
? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets
d’
articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — m
742
économique ? Très bons sujets d’articles ou même
de
thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — mais nous nous occup
743
rien contre les thèses — mais nous nous occupons
de
la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
744
société des esprits. C’est aussi les personnages
de
Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
745
C’est aussi les personnages de Courteline et ceux
de
Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
746
onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux
de
Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
747
st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros
d’
aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
748
s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose
de
ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
749
ns viennent nous dire : tous ces gens, qu’ont-ils
de
commun entre eux ? Quelle unité voyez-vous dans tout cela ? Eh bien,
750
e : tous ces gens partagent le même sort, le sort
de
l’Europe, c’est-à-dire que si l’on ne fait rien, ils seront tous les
751
s gens ont en commun le dégoût et la peur immense
de
la guerre, et nous voulons pour eux et avec eux faire la paix. Voilà
752
aincre. ⁂ J’en reviens à la méthode et aux moyens
d’
action. Aux impatients qui rêvent d’unifier le genre humain dans les q
753
et aux moyens d’action. Aux impatients qui rêvent
d’
unifier le genre humain dans les quinze jours, le plus grand choc que
754
nts qui rêvent d’unifier le genre humain dans les
quinze
jours, le plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est de les fair
755
e plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est
de
les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore
756
c’est de les faire prendre une part active à l’un
de
ces congrès où s’élabore notre fédération européenne. Car c’est préci
757
parti au pouvoir et une opposition, un seul type
de
drug-store, et une morale moyenne, dont l’idée générale est justement
758
orale moyenne, dont l’idée générale est justement
d’
éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie,
759
ement d’éviter les conflits quotidiens et non pas
de
les affronter. En Russie, c’est encore plus simple : une seule tête,
760
le : une seule tête, un parti, une police, et pas
d’
opposition permise dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines d
761
sition permise dans aucun ordre. Mais en Europe !
Deux
douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues
762
dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines
de
nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
763
de nations avec leurs traditions, presque autant
de
langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
764
avec leurs traditions, presque autant de langues,
cinq
ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et j
765
rs traditions, presque autant de langues, cinq ou
six
grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et je ne sa
766
autant de langues, cinq ou six grandes cultures,
d’
innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
767
es morales contradictoires, et je ne sais combien
de
partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
768
ires, et je ne sais combien de partis politiques,
de
styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
769
ne sais combien de partis politiques, de styles,
d’
écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
770
ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et
d’
expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
771
onsiste dans les combinaisons et les permutations
d’
une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
772
mbinaisons et les permutations d’une longue série
d’
antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
773
lisme et universalisme, liberté et engagement, et
vingt
autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés e
774
t, et vingt autres tensions dans tous les ordres,
vingt
autres couples combinés et permutés, sans parler de leurs ménages à t
775
autres couples combinés et permutés, sans parler
de
leurs ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les a
776
binés et permutés, sans parler de leurs ménages à
trois
, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les autres, et nul d’entre
777
ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier
de
crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
778
. Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse
de
l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
779
son dynamisme incomparable, sont nés précisément
de
ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
780
comparable, sont nés précisément de ces tensions,
de
ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
781
és précisément de ces tensions, de ces dialogues,
de
cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
782
ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique.
De
là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
783
cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen,
de
siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
784
, avec le monde, avec la société, avec lui-même ;
de
là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
785
ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont
d’
autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
786
a violence, souvent aussi forcent à l’invention ;
de
là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
787
ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité
de
choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
788
ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et
de
se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
789
r et de se risquer, qui est la condition première
de
ce que l’Européen appelle la liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
790
serait criminel, s’il n’était d’abord impossible,
de
faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
791
mpossible, de faire dépendre l’unité du continent
d’
une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
792
éalable mise au pas, intellectuelle ou politique,
d’
une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
793
cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe
d’
une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
794
mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux
de
convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
795
e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou
de
l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
796
ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer
d’
une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps par l
797
ndraient pour un temps par la force, il resterait
dix
autres couples d’adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne
798
mps par la force, il resterait dix autres couples
d’
adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
799
vienne enfin, en combinant tous les moyens connus
de
simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
800
fera l’Europe, puisque le problème est justement
de
la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolo
801
e sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut
d’
une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
802
plans, qui dit fédéralisme dit toujours à la fois
deux
choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais égale
803
t toujours à la fois deux choses, pense à la fois
deux
choses apparemment contraires mais également valables, et qu’il ne s’
804
s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas
de
subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
805
autre, mais au contraire de maintenir en tension,
de
composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
806
és locales et pouvoir central limité. Sur le plan
de
l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
807
les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse
de
contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
808
est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou
de
politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
809
isse de contrats privés ou de politique générale,
d’
économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
810
ts privés ou de politique générale, d’économie ou
d’
esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
811
mie ou d’esthétique, le problème restera toujours
d’
éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
812
ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte
de
la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
813
ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes
d’
États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.
814
par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou
de
constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d
815
ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile
d’
insister : la méthode du fédéralisme est la seule qui soit adaptée à n
816
ropéennes. Faire du fédéralisme, c’est donc faire
de
l’Europe, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ I
817
rope, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases
de
la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assig
818
s de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions
de
combat que nous assigne une pareille attitude. Certes, nous voulons f
819
ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté
de
l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
820
s en préconisant le fédéralisme à tous les étages
de
la société, dans la commune et l’entreprise d’abord, puis à l’échelle
821
savons bien que nous heurtons certaines habitudes
de
pensée à la fois nationalistes et rationalistes, c’est-à-dire en un m
822
ure des obstacles qu’elle trouve posés en travers
de
sa route vers l’Europe fédérée et vers la paix — à la destruction du
823
et que Nietzsche appelait un jour « le plus froid
de
tous les monstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toute
824
nstres froids » — l’État-nation, cause et produit
de
toutes nos guerres. Sur ce point-là, nous serons à notre tour irréduc
825
e que nous voulons supprimer, c’est l’étatisation
de
la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par l
826
on de la nation elle-même ; c’est la confiscation
de
ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le
827
ation de ses forces vives par la machine imbécile
de
l’État, et c’est enfin le dogme et la pratique des souverainetés nati
828
nous demandons et préparons, comme premier point
de
tout notre programme, l’institution d’une Cour suprême européenne, c’
829
mier point de tout notre programme, l’institution
d’
une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’un pouvoir supérieur aux É
830
ution d’une Cour suprême européenne, c’est-à-dire
d’
un pouvoir supérieur aux États. Cette Cour suprême doit être la gardie
831
États. Cette Cour suprême doit être la gardienne
d’
une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en app
832
me doit être la gardienne d’une Charte des droits
de
la personne. Et à ce tribunal pourront en appeler, contre les pouvoir
833
t qui garantit les libertés européennes, le droit
d’
opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas
834
e droit d’opposition légale contre l’État. Parler
de
démocratie, si l’on n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler
835
n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler
de
dictature : voir les démocraties dites populaires. Les vues que j’ex
836
action qui se poursuit dans toute l’Europe depuis
deux
ans et qui est en train d’aboutir à certains résultats concrets. La C
837
à certains résultats concrets. La Conférence des
Cinq
va peut-être accepter notre plan de Parlement européen. Cette assembl
838
férence des Cinq va peut-être accepter notre plan
de
Parlement européen. Cette assemblée, que nous voulons élue à la fois
839
a fois par les parlements et par les forces vives
de
chaque pays, doit se réunir dans quelques mois. Elle aura pour missio
840
réunir dans quelques mois. Elle aura pour mission
de
proposer la création d’une Cour suprême et la Constitution fédérale d
841
s. Elle aura pour mission de proposer la création
d’
une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelqu
842
on d’une Cour suprême et la Constitution fédérale
de
l’Europe. C’est quelque chose, qui peut devenir beaucoup… Mais nous s
843
instant dévier vers on ne sait quelles alliances
d’
États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans tr
844
ne sait quelles alliances d’États souverains pris
de
panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait
845
alliances d’États souverains pris de panique, ou
d’
états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait quelles déclara
846
; vers on ne sait quelles déclarations sans rire
de
sécurité collective ; vers on ne sait quelle coalition sur le papier
847
le coalition sur le papier qui se donnerait l’air
de
provoquer l’un des deux grands, sans créer pour autant la force néces
848
pier qui se donnerait l’air de provoquer l’un des
deux
grands, sans créer pour autant la force nécessaire pour décourager l’
849
ger l’agression… C’est donc, pour nous, le moment
d’
être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active d
850
moment d’être forts dans les conseils européens —
de
rallier l’opinion active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d
851
active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et
d’
imprimer un grand élan à notre propagande populaire, ou pour mieux dir
852
e populaire, ou pour mieux dire : à l’information
de
la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui
853
’information de la masse. Car on aurait bien tort
de
croire que Vichinski peut, à lui seul, faire tout le travail et créer
854
bien ne plus entendre, pour l’avoir lue dans une
centaine
de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-c
855
plus entendre, pour l’avoir lue dans une centaine
de
comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci :
856
r l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus
de
nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons
857
une centaine de comptes rendus de nos réunions et
de
nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons que souhaiter bonn
858
eux pionniers du fédéralisme. » C’est une manière
de
dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts
859
dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons
de
loin vos efforts, et si vous gagnez par miracle, bien entendu, nous v
860
a ceux qui nous applaudissent, comme ces soldats
de
je ne sais quel pays, dans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sor
861
ans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sortir
de
la tranchée et s’élancer le premier à l’attaque, criaient bravo ! bra
862
de même nous restons à l’écart, vous courez trop
de
dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ain
863
us restons à l’écart, vous courez trop de dangers
de
‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ainsi qu’on po
864
cette phrase admirable : Affirmer une vigilance
de
fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
865
édéraliste), ce n’est pas être absent, c’est être
deux
fois présent. Merci, messieurs, une fois nous suffirait. Mais soyons
866
suffirait. Mais soyons sérieux ; quand il s’agit
de
voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
867
battons chaque jour contre elles), ces vigilants
de
fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
868
bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines
de
nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
869
t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle
d’
hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
870
us disent non sans raison : « Nous sommes saturés
de
discours ! Ce qu’il nous faut, ce sont des gestes ; sortez avec un ou
871
bien tort quand il cherchait un homme à la lueur
de
sa lanterne. Il eût mieux fait d’en devenir un lui-même. C’est le plu
872
omme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait
d’
en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’en trouver. Une bata
873
d’en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen
d’
en trouver. Une bataille est en train de se livrer pour l’Europe. Nous
874
ralisme court sa chance, et avec elle les chances
de
la paix. Si nous voulons la paix, nous devons vouloir ses moyens : l’
875
rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend
de
nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
876
courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens,
de
prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
877
l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre
de
vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
878
péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend
de
nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
879
que le jour soit prochain où les voix concertées
de
l’Europe, proclamant leur fédération, pourront se faire entendre au m
880
ntendre au monde entier comme la voix forte enfin
de
l’espérance. f. Rougemont Denis de, « Pour sauver la paix : commen
881
forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis
de
, « Pour sauver la paix : commencer par l’Europe », Fédération, Paris,
882
mencer par l’Europe », Fédération, Paris, février
1949,
p. 70-77.
883
L’Europe ou le cap du destin (
1949
)g Toutes les grandeurs européennes viennent de l’esprit, et non pa
884
eurs européennes viennent de l’esprit, et non pas
de
la nature ni du nombre. Comment expliquer autrement que ce cap déchiq
885
Comment expliquer autrement que ce cap déchiqueté
de
l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa popu
886
iquer autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie —
4
% de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ai
887
r autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 %
de
la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu
888
de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins
d’
un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant p
889
4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième
de
sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant par ses armes
890
es pouvoirs sur les choses et la vie ? Les causes
de
cette puissance, naguère mondiale, du « petit cap », furent très dive
891
urope a dominé par ses techniques, par sa science
de
la mise en valeur d’un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a
892
s techniques, par sa science de la mise en valeur
d’
un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a dominé par la violenc
893
aussi, et par la mise en esclavage ou en servage
de
centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a d
894
ssi, et par la mise en esclavage ou en servage de
centaines
de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’un
895
r la mise en esclavage ou en servage de centaines
de
millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une m
896
a mise en esclavage ou en servage de centaines de
millions
d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière be
897
esclavage ou en servage de centaines de millions
d’
habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beauc
898
u en servage de centaines de millions d’habitants
de
la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beaucoup plus sub
899
abitants de la planète. Finalement, elle a dominé
d’
une manière beaucoup plus subtile, et peut-être plus effective, en imp
900
n imposant à tous les continents un certain angle
de
vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme,
901
à tous les continents un certain angle de vision
de
la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dé
902
ertain angle de vision de la destinée, une notion
de
l’homme issue du christianisme, et dont dérivent les grands concepts
903
ristianisme, et dont dérivent les grands concepts
de
liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité
904
t dont dérivent les grands concepts de liberté et
de
justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, conc
905
ent les grands concepts de liberté et de justice,
de
dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se
906
nds concepts de liberté et de justice, de dignité
de
la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament,
907
berté et de justice, de dignité de la personne et
de
responsabilité sociale, concepts dont se réclament, au xxe siècle, l
908
tiens, les Américains comme les Russes, les chefs
de
l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de te
909
comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux
de
la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science p
910
de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse
de
philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctr
911
eux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou
de
technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou
912
e. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique,
de
science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés d
913
e philosophie ou de technique, de science pure ou
d’
industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le
914
ou de technique, de science pure ou d’industrie,
de
doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier
915
e pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou
de
procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marqu
916
industrie, de doctrines politiques ou de procédés
de
construction, le monde entier porte aujourd’hui les marques — ou les
917
es marques — ou les blessures — du génie créateur
de
l’Europe. Et certes, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes d
918
s, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes
de
sa puissance ; on les retourne sans scrupules contre elle. Mais elle
919
rupules contre elle. Mais elle reste le palladium
d’
une civilisation que tous rêvent d’imiter. Dire que l’Europe est mena
920
e le palladium d’une civilisation que tous rêvent
d’
imiter. Dire que l’Europe est menacée — et l’on sait à quel point la
921
se — c’est donc dire que le cœur et la conscience
d’
une culture désormais universelle sont menacés. Pour le bien comme pou
922
Pour le bien comme pour le mal, ce qui est sorti
de
l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres contine
923
ur le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti
de
l’esprit. Or, il se trouve que d’autres continents nous ont ravi les
924
res continents nous ont ravi les moyens matériels
de
la puissance, et nous en ont en quelque sorte purifiés. Ils nous ont
925
us ont condamnés à ne représenter que l’essentiel
d’
une civilisation : son génie, ses mesures, sa culture. Défendre l’Euro
926
riel, ni la puissance militaire, ni la suprématie
de
la race blanche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’État,
927
nche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion
d’
État, ni le nationalisme, car l’Amérique ou la Russie s’en chargent. E
928
a Russie s’en chargent. Et s’il ne s’agissait que
de
cela, nous pourrions aussi bien nous laisser coloniser par les Yankee
929
iniens. Ils ont appris à se servir mieux que nous
de
ces armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. S
930
armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées
de
nos mains. Si les Européens, dans leur majorité, refusent à la fois d
931
Européens, dans leur majorité, refusent à la fois
de
se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sen
932
refusent à la fois de se laisser américaniser et
de
se laisser staliniser, c’est qu’ils sentent bien que dans le meilleur
933
sentent bien que dans le meilleur cas, en retour
de
certains avantages matériels, ils perdraient ce qui fait le sens même
934
atériels, ils perdraient ce qui fait le sens même
de
leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aîn
935
s même de leur vie. Ils céderaient contre un plat
de
lentilles leur droit d’aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diab
936
céderaient contre un plat de lentilles leur droit
d’
aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diable. Et le monde entier e
937
Cette Europe, pratiquement réduite à l’essentiel
de
son génie, à ce qu’il a de plus défendable, comment allons-nous la dé
938
ouanes, et créer des pouvoirs européens, capables
de
traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
939
pouvoirs européens, capables de traiter sur pied
d’
égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
940
traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs
de
l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
941
pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et
de
l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul
942
ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien
d’
autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de préveni
943
eut assurer l’indépendance européenne, seul moyen
de
prévenir la guerre. Tels sont les buts concrets que se sont assignés
944
eurs du Mouvement européen. Nous verrons, au mois
d’
août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’o
945
Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’août
de
cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
946
u mois d’août de cette année, le premier résultat
de
leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, une Assemblée parl
947
tenues par un élan profond, par un espoir nouveau
de
tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce
948
r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan
de
l’opinion et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande artif
949
au contraire une véritable éducation du sentiment
de
notre communauté. Ce sentiment existe, nous venons de le voir ; c’est
950
iment existe, nous venons de le voir ; c’est lui,
d’
instinct, qui nous fait repousser les tentations russe et américaine.
951
ns russe et américaine. Mais il s’agit maintenant
de
l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre consc
952
ricaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer,
de
lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissan
953
aintenant de l’informer, de lui donner des moyens
d’
expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche don
954
’informer, de lui donner des moyens d’expression,
de
le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche dont le congrès d
955
t et agissant. Telle est la tâche dont le congrès
de
La Haye, il y a un an, proclamait la nécessité. La section culturelle
956
européen de la culture, prévu par les résolutions
de
La Haye, un modeste Bureau d’études. Il a son siège à Genève, où il t
957
par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau
d’
études. Il a son siège à Genève, où il travaille depuis le mois de fév
958
on siège à Genève, où il travaille depuis le mois
de
février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) D
959
Genève, où il travaille depuis le mois de février
de
cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) Documentatio
960
de février de cette année. Son programme tient en
trois
rubriques : a) Documentation sur tous les efforts entrepris dans les
961
r tous les efforts entrepris dans les divers pays
d’
Europe en faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres
962
pays d’Europe en faveur de l’union des peuples et
d’
une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existe
963
faveur de l’union des peuples et d’une éducation
de
« cadres européens ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’i
964
s et d’une éducation de « cadres européens ». Des
dizaines
d’instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première t
965
e éducation de « cadres européens ». Des dizaines
d’
instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première tâch
966
gnorent mutuellement. La première tâche sera donc
de
dresser un inventaire des forces spirituelles, intellectuelles et art
967
nt. b) Coordination des activités « culturelles »
de
tous ordres, qui se placent sur un plan européen. Deux exemples entre
968
tous ordres, qui se placent sur un plan européen.
Deux
exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser
969
placent sur un plan européen. Deux exemples entre
vingt
: le Bureau d’études de Genève vient d’organiser une rencontre entre
970
n européen. Deux exemples entre vingt : le Bureau
d’
études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsable
971
n. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études
de
Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsables d’une d
972
entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient
d’
organiser une rencontre entre les responsables d’une dizaine d’institu
973
d’organiser une rencontre entre les responsables
d’
une dizaine d’instituts visant à la formation d’une jeune élite europé
974
aniser une rencontre entre les responsables d’une
dizaine
d’instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et i
975
ne rencontre entre les responsables d’une dizaine
d’
instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et il r
976
s d’une dizaine d’instituts visant à la formation
d’
une jeune élite européenne ; et il rassemble une équipe d’historiens,
977
une élite européenne ; et il rassemble une équipe
d’
historiens, en vue de la révision des manuels scolaires, qui furent de
978
révision des manuels scolaires, qui furent depuis
cent
ans la source même des pires aberrations nationalistes. c) Étude et f
979
listes. c) Étude et formulation des grands thèmes
de
la propagande générale du Mouvement européen. Ici, nos intellectuels
980
ci, nos intellectuels ont une occasion magnifique
de
« s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un m
981
sion magnifique de « s’engager » sans rien trahir
de
leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun es
982
sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre
d’
un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au me
983
ir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement
de
militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’h
984
adre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit
de
parti ne contraint au mensonge ou à l’hypocrisie en service commandé,
985
vice commandé, ils vont pouvoir prendre leur part
d’
action, assumer conjointement les décisions politiques, juridiques ou
986
pour être exécutées demain par un pouvoir fédéral
de
l’Europe. En outre, le Bureau d’études met au point le programme d’un
987
pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau
d’
études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui d
988
tre, le Bureau d’études met au point le programme
d’
une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne
989
études met au point le programme d’une conférence
de
la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne. Des rapports na
990
es rapports nationaux, préparés par les « Groupes
d’
étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la
991
pes d’étude culturels », en formation dans chacun
de
nos pays, fourniront la base des travaux. Et l’on doit espérer que de
992
ont la base des travaux. Et l’on doit espérer que
de
l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les
993
s travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble
de
ces rapports documentés, inventoriant les forces et les faiblesses de
994
mentés, inventoriant les forces et les faiblesses
de
nos cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : l
995
blesses de nos cultures nationales, se dégageront
deux
séries de conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’éta
996
os cultures nationales, se dégageront deux séries
de
conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de divis
997
: les unes portant sur ce qui existe dans l’état
de
division dont nous souffrons, les autres sur ce qui peut naître dans
998
ur ce qui peut naître dans une Europe débarrassée
de
ses frontières étatiques, enfin « rendue dans toute son étendue à la
999
et des biens ». ( Message aux Européens , congrès
de
La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. I
1000
La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite
de
douze cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut ê
1001
Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de
douze
cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut être as
1002
nion ne sera jamais réelle sans le concours actif
de
chacune d’elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accep
1003
a jamais réelle sans le concours actif de chacune
d’
elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accepter nos div
1004
les. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que
d’
accepter nos divisions présentes, nous voulons concerter nos vocations
1005
ocations pour la défense et pour l’épanouissement
d’
un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient per
1006
ense et pour l’épanouissement d’un certain nombre
de
valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient perdues. Mais l’Europe
1007
perdue sans elles. Telle est l’interaction vitale
de
l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fé
1008
es. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et
de
la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fédéraliste, qui
1009
urent avec l’esprit fédéraliste, qui est le génie
de
l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de, « L’Europe ou le
1010
l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis
de
, « L’Europe ou le cap du destin », Cahiers du Monde nouveau, Paris, j
1011
», Cahiers du Monde nouveau, Paris, juin–juillet
1949,
p. 47-50.
1012
« Le promoteur
de
l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)k Depuis
1013
moteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (
1er
juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de
1014
émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet
1949
)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le
1015
t… » (1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois
de
février 1949, M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaq
1016
uillet 1949)k Depuis la fin du mois de février
1949,
M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaque semaine au
1017
semaine au micro du « dialogue » qu’est l’Europe.
De
lundi en lundi, nous suivons ses chroniques au cours desquelles il no
1018
s chroniques au cours desquelles il nous démontre
de
manière éclatante qu’une ère nouvelle s’ouvre au Vieux Continent. Mon
1019
faut-il fédérer l’Europe ? Parce qu’il n’y a pas
d’
autre moyen imaginable d’empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays
1020
? Parce qu’il n’y a pas d’autre moyen imaginable
d’
empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays, c’est, en effet, créer
1021
c’est, en effet, créer la seule puissance capable
d’
exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Eur
1022
réer la seule puissance capable d’exiger la paix,
de
l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte
1023
capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les
deux
autres. Imaginez cette Europe grande ouverte où les nations ne dispar
1024
à ne faire la guerre à personne, mais à défendre
d’
un seul cœur son indépendance reconquise. Paix, liberté, prospérité, t
1025
berté, prospérité, tels ont été les grands motifs
de
toutes les confédérations qui ont vu le jour au cours des siècles, et
1026
t vous savez comment la Suisse a su atteindre ces
trois
buts, en se fédérant, il y a cent ans. À l’instant même où nous venon
1027
atteindre ces trois buts, en se fédérant, il y a
cent
ans. À l’instant même où nous venons vous surprendre dans cette annex
1028
e main à un ouvrage sur la Suisse qui fera partie
d’
une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de dif
1029
ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’une série
de
16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays
1030
rage sur la Suisse qui fera partie d’une série de
16
volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays. J
1031
6 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera
de
différents pays. Je prépare également une conférence culturelle europ
1032
tout mon temps. En effet, je dirige ici le bureau
d’
études pour un Centre européen de la culture. Pouvez-vous, très succin
1033
ure. Pouvez-vous, très succinctement, nous parler
de
la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute i
1034
us, très succinctement, nous parler de la mission
de
ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute indépendance de
1035
ernementaux, cet organisme a pour tâche immédiate
d’
étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment d
1036
cet organisme a pour tâche immédiate d’étudier et
de
proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité eur
1037
ser toute mesure propre à promouvoir le sentiment
de
l’unité européenne ; d’agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le
1038
à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ;
d’
agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le film et la radio, par v
1039
opinion, la presse, le film et la radio, par voie
d’
informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour cré
1040
, le film et la radio, par voie d’informations et
de
recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des u
1041
o, par voie d’informations et de recommandations,
de
coordonner les efforts pour créer une union des universités et des me
1042
s et des membres des corps enseignants ; et enfin
d’
exercer un contrôle vigilant pour restaurer le propre usage des mots-c
1043
ible. De plus, le Centre européen offrira un lieu
de
rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, af
1044
n lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs
de
la culture occidentale, afin qu’ils puissent examiner ensemble les gr
1045
semble les grandes questions qui affectent la vie
de
l’Europe, et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion publi
1046
ppels à l’opinion publique. k. Rougemont Denis
de
, « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio,
1047
ublique. k. Rougemont Denis de, « Le promoteur
de
l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet
1048
Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne,
1
juillet 1949, p. 950.
1049
Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet
1949,
p. 950.
1050
européen de la culture aura son siège en Suisse (
7
juillet 1949)l L’Europe dominait le monde entier, lorsque éclata l
1051
de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet
1949
)l L’Europe dominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1
1052
ominait le monde entier, lorsque éclata la guerre
de
1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de se
1053
nait le monde entier, lorsque éclata la guerre de
1939.
Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouv
1054
que éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus
de
la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’i
1055
ement, plus de la moitié du genre humain relevait
de
ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates o
1056
levait de ses gouvernements, le reste s’inspirait
de
ses doctrines démocrates ou marxistes, chrétiennes ou humanistes. Ell
1057
s lois, et tous les peuples subissaient l’attrait
de
ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette p
1058
peuples subissaient l’attrait de ses techniques,
de
ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette puissance inouïe, sa
1059
physiquement elle ne figure qu’un cap déchiqueté
de
l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa gra
1060
nt elle ne figure qu’un cap déchiqueté de l’Asie,
quatre
pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de
1061
igure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour
cent
de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa cultur
1062
qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent
de
la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture,
1063
ueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie
de
la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture, qui pour le bien
1064
es marques — ou les blessures — du génie créateur
de
l’Europe. En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de m
1065
les blessures — du génie créateur de l’Europe. En
cinq
ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Elle est rus
1066
nq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé
de
mains. Elle est russe et américaine. Elle se retourne contre nous. L’
1067
échue n’est plus qu’un petit continent, divisé en
vingt-quatre
nations, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation
1068
t-quatre nations, à demi ruiné, et menacé par les
deux
Grands de colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la
1069
ions, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands
de
colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, e
1070
et menacé par les deux Grands de colonisation ou
d’
annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite
1071
onisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse
de
la planète, elle en est réduite à lutter pour assurer sa survivance é
1072
douanes, et créer des pouvoirs européens capables
de
traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
1073
s pouvoirs européens capables de traiter sur pied
d’
égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
1074
traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs
de
l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
1075
pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et
de
l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui
1076
ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien
d’
autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui est à son tour le
1077
ance européenne, qui est à son tour le seul moyen
de
prévenir une guerre livrée à nos dépens. Tels sont les buts concrets
1078
teurs du Mouvement européen. Nous verrons au mois
d’
août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ou
1079
u Mouvement européen. Nous verrons au mois d’août
de
cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
1080
au mois d’août de cette année le premier résultat
de
leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, le Parlement consu
1081
uvrira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif
de
treize nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques
1082
ira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif de
treize
nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques, polit
1083
tenues par un élan profond, par un espoir nouveau
de
tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce
1084
r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan
de
l’opinion, et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande arti
1085
au contraire une véritable éducation du sentiment
de
notre communauté. Ce sentiment existe, il n’est pas une chose vague.
1086
t pas une chose vague. C’est lui qui nous empêche
de
dire aux Russes : « Finissons-en, venez nous mettre au pas, et suppri
1087
ne à Varsovie. » C’est lui aussi qui nous empêche
de
dire à nos amis américains : « Mais entrez donc, apportez-nous les se
1088
s : « Mais entrez donc, apportez-nous les secrets
de
votre bonheur, nous vendrons notre droit d’aînesse contre vos belles
1089
crets de votre bonheur, nous vendrons notre droit
d’
aînesse contre vos belles autos et vos dollars. » Si nous refusons, c’
1090
efusons, c’est que nous avons encore le sentiment
d’
une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la
1091
que nous avons encore le sentiment d’une qualité
de
vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être
1092
s avons encore le sentiment d’une qualité de vie,
de
liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Eur
1093
le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et
de
conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il f
1094
rté et de conscience, qui est justement la raison
d’
être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des m
1095
de conscience, qui est justement la raison d’être
de
l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d
1096
faut informer ce sentiment, lui donner des moyens
d’
expression, le rendre enfin conscient et agissant. Telle est la tâche
1097
e dans quelques mois, et que prépare notre Bureau
d’
études. Installé à Genève depuis trois mois. Je ne m’étendrai pas sur
1098
e notre Bureau d’études. Installé à Genève depuis
trois
mois. Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques de son travail
1099
. Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques
de
son travail (documentation européenne ; coordination des efforts entr
1100
tous nos pays, et qui souvent s’ignorent ; action
de
propagande par la presse, la radio, les revues, auprès des élites com
1101
près des élites comme du grand public ; formation
d’
équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement défi
1102
lites comme du grand public ; formation d’équipes
de
travail internationales, etc.). Je voudrais simplement définir l’espr
1103
e et le guide. Il ne s’agit nullement, pour nous,
de
mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les pr
1104
ur nous, de mettre la culture en statistiques, ou
de
traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la jus
1105
u de traiter théoriquement les problèmes éternels
de
la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une par
1106
éoriquement les problèmes éternels de la liberté,
de
la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une part offrir aux fo
1107
voulons d’une part offrir aux forces culturelles
de
toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du
1108
ulturelles de toute l’Europe les moyens pratiques
de
« s’engager » dans l’œuvre du mouvement fédéraliste ; d’autre part, f
1109
déraliste ; d’autre part, faire valoir les droits
de
l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. F
1110
d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit
de
la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sort
1111
s de l’esprit de la culture, dans la construction
de
l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à
1112
t de la culture, dans la construction de l’Europe
de
demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à s’unir, afin
1113
suite une Europe fédérée vienne en aide à chacune
de
nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culture
1114
e de nos cultures : telle sera la double ambition
de
la Conférence culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’oct
1115
culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois
d’
octobre, sous les auspices du Mouvement européen. Le fait que la Suiss
1116
e comme siège du Centre européen de la culture et
de
la Conférence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considéra
1117
érence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni
de
considérations touristiques. Notre neutralité traditionnelle, reconnu
1118
suisse : notre pays dépend, plus qu’aucun autre,
de
l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc p
1119
plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et
de
ses destinées. Comment pourra-t-il donc participer aux efforts pour s
1120
s pour sauver l’Europe ? La réponse ne peut faire
de
doute. Tant à Berne qu’au comité du Mouvement européen, on a reconnu
1121
rien notre neutralité, jouer le rôle qu’on attend
de
nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, su
1122
rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective
de
la fédération. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une m
1123
n. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là
d’
une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se
1124
nse pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une manière
de
nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se réalisent les
1125
continent se dessine et prend corps, la nécessité
de
lui donner une âme passe au premier plan. Et c’est bien cela, c’est b
1126
péen de la culture. Les plus anciennes traditions
de
la Suisse la désignent comme siège d’une telle institution. Gardiens
1127
traditions de la Suisse la désignent comme siège
d’
une telle institution. Gardiens des cols pour le Saint-Empire au xiiie
1128
-Empire au xiiie siècle ; gardiens du Vatican et
de
la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créati
1129
rdiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis
de
la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international
1130
de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et
de
vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’u
1131
la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de
vingt
autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’une exp
1132
is de la Croix-Rouge et de vingt autres créations
de
l’esprit international ; gardiens enfin d’une expérience fédéraliste
1133
ations de l’esprit international ; gardiens enfin
d’
une expérience fédéraliste qui peut servir d’exemple au continent, les
1134
nfin d’une expérience fédéraliste qui peut servir
d’
exemple au continent, les Suisses seront fidèles à leur vraie vocation
1135
n accueillant, soutenant et animant le foyer même
d’
une action historique, dont on a pu dire que le but était « l’Europe h
1136
it « l’Europe helvétisée ». l. Rougemont Denis
de
, « Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse », Curie
1137
e aura son siège en Suisse », Curieux, Neuchâtel,
7
juillet 1949, p. 6.
1138
siège en Suisse », Curieux, Neuchâtel, 7 juillet
1949,
p. 6.
1139
Préface à Le Problème
de
l’union européenne d’Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrang
1140
Préface à Le Problème de l’union européenne
d’
Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « fai
1141
Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (
1950
)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’Europe », quand
1142
ip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle
de
« faire l’Europe », quand elle existe depuis tant de siècles. Mais l’
1143
rmation que vient de subir la puissance apparente
de
nos pays dans le jeu des forces mondiales : l’Europe paraît avoir été
1144
es, elle constate qu’elle est détrônée. Entre les
deux
empires vainqueurs, subitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle pren
1145
ubitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle prend
d’
elle-même une conscience toute nouvelle, et malheureuse. « L’Europe es
1146
s divisions », déclarait le Manifeste du congrès
de
La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bie
1147
», déclarait le Manifeste du congrès de La Haye,
trois
ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on l
1148
ste du congrès de La Haye, trois ans après la fin
de
la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situat
1149
Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise
de
conscience bien typique, on le voit, d’une situation pré-fédérale, po
1150
re. Prise de conscience bien typique, on le voit,
d’
une situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’union se déclare
1151
e situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté
d’
union se déclare, au sein de la crise assumée. Ces circonstances donne
1152
se assumée. Ces circonstances donnent à l’ouvrage
de
M. Olivier Philip une importance particulière : non pas seulement cel
1153
importance particulière : non pas seulement celle
d’
une première vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europ
1154
re vue générale des efforts déployés pour l’union
de
l’Europe, mais encore celle d’une contribution à cette prise de consc
1155
loyés pour l’union de l’Europe, mais encore celle
d’
une contribution à cette prise de conscience active de notre sort, san
1156
e contribution à cette prise de conscience active
de
notre sort, sans laquelle les traités resteront du papier. Je voudrai
1157
tés resteront du papier. Je voudrais formuler ici
deux
remarques, entre toutes celles que ne manquera pas de suggérer cette
1158
emarques, entre toutes celles que ne manquera pas
de
suggérer cette enquête efficace par sa lucidité. La première touche à
1159
à l’économie, la seconde à la doctrine formatrice
de
l’union. Les analyses économiques tiennent une place importante dans
1160
que. Voilà, me semble-t-il, une manière implicite
d’
affirmer que l’Économie obéit beaucoup moins aux « lois » fatales admi
1161
elle-même déterminée par une certaine orientation
de
nos énergies dont j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de q
1162
nt j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ,
de
quelque choix métaphysique. La thèse soutenue par notre auteur impliq
1163
ue par notre auteur implique une décision inverse
de
celle dont les suites nécessaires nous ont conduits aux impasses prés
1164
duits aux impasses présentes. Nous vivons, depuis
1920,
sous le règne effectif des Experts. Je vois bien que ce règne est né
1165
tif des Experts. Je vois bien que ce règne est né
d’
une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par er
1166
e règne est né d’une réaction contre la politique
de
l’éloquence (qu’on appelle, par erreur, doctrinaire). Mais il tend, s
1167
d garde, à évacuer la politique, au sens légitime
de
ce terme. Il tend à substituer, en fait, les Pouvoirs à l’Autorité. L
1168
à l’Autorité. Le plan Schuman, parce qu’il est né
d’
une décision proprement politique, pourra marquer, s’il aboutit, le po
1169
politique, pourra marquer, s’il aboutit, le point
de
renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second
1170
a marquer, s’il aboutit, le point de renversement
d’
une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note q
1171
de renversement d’une attitude contraire au génie
de
l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’un historique adroite
1172
de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours
d’
un historique adroitement condensé, l’auteur souligne, à plusieurs rep
1173
plusieurs reprises, l’influence « déterminante »
de
l’aile fédéraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la créa
1174
déraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit
de
la création d’une véritable Autorité européenne. On pourra discuter p
1175
uvement européen, dès qu’il s’agit de la création
d’
une véritable Autorité européenne. On pourra discuter plus tard sur la
1176
pourra discuter plus tard sur la paternité réelle
de
maints projets revendiqués par les fédéralistes, tels que la Cour eur
1177
enne des droits de l’homme, le pool du charbon et
de
l’acier, la transformation du Comité des ministres en Sénat. Mais il
1178
’ils sont parfois considérés comme des empêcheurs
de
danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justeme
1179
es empêcheurs de danser en rond, je me permettrai
de
répondre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en r
1180
ndre en leur nom que, justement, le but n’est pas
de
tourner en rond, mais d’avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends
1181
tement, le but n’est pas de tourner en rond, mais
d’
avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends pas ici (ce n’est pas le
1182
tu en général, ou même contre l’union des peuples
de
l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent
1183
l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous
de
bonne volonté… Mais certains souhaitent l’union, bien sûr, et comment
1184
, je les appelle fédéralistes. Il n’est pas juste
de
les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme
1185
les considérer comme extrémistes, car il est faux
de
considérer comme modérés ceux qui parlent d’union mais refusent sa co
1186
faux de considérer comme modérés ceux qui parlent
d’
union mais refusent sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces de
1187
t sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces
deux
attitudes. M. Philip a des pages excellentes sur le « compromis » néc
1188
n’est pas la seule. L’Europe est née, elle a vécu
d’
antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y p
1189
st née, elle a vécu d’antagonismes. Elle mourrait
de
leur suppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créati
1190
ppression artificielle. Elle y perdrait le secret
de
sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’o
1191
secret de sa créativité, qui est aussi le secret
de
sa puissance. Pas plus qu’on ne peut rêver l’Europe toute libérale ou
1192
corporatiste ou parlementaire… Et dans plusieurs
de
ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des t
1193
Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain
de
chercher un compromis : chacune des tendances opposées exige d’aller
1194
compromis : chacune des tendances opposées exige
d’
aller au bout de sa vocation, car elle perdrait sa qualité constitutiv
1195
elle perdrait sa qualité constitutive, sa raison
d’
être, en y renonçant. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d
1196
t. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir
d’
autre que dans le régime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages
1197
gime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages
de
la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L
1198
ntages de la féconde diversité en y ajoutant ceux
de
l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer qu
1199
outant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple
de
la Suisse suffit à démontrer que cette solution n’est pas seulement p
1200
le en principe, mais pratique. On ne manquera pas
de
m’objecter que les Suisses sont les premiers à se montrer prudents, q
1201
s premiers à se montrer prudents, quand il s’agit
de
« faire l’Europe ». C’est qu’ils sont déjà fédérés. Aux unionistes, j
1202
que l’on sache. Quand vous y serez, il sera temps
de
voir si la prudence, ou au contraire un peu de hâte, conviennent à no
1203
nviennent à nos calamités. u. Rougemont Denis
de
, Philip Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union e
1204
Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème
de
l’union européenne », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâ
1205
oblème de l’union européenne », dans Le Problème
de
l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-
1206
oblème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions
de
la Baconnière, 1950, p. 9-11.
1207
européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière,
1950,
p. 9-11.
1208
Raisons et buts
d’
une conférence (janvier 1950)n o La condition profondément contradi
1209
Raisons et buts d’une conférence (janvier
1950
)n o La condition profondément contradictoire dans laquelle vit l’E
1210
contradictoire dans laquelle vit l’Europe, depuis
dix
ans, est entrée dans la phase critique. Elle est presque désespérée.
1211
e désespérée. Elle est aussi plus près que jamais
de
se résoudre en une synthèse. Il est vrai que l’Europe est en train de
1212
t, — l’Europe est en train de se faire ! Aux yeux
d’
un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dan
1213
yeux d’un esprit objectif, toutes les conditions
de
la ruine sont réunies dans notre ciel et dans nos données immédiates
1214
t les mêmes conditions qui pourraient être celles
d’
une renaissance. Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s
1215
Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé
de
s’aggraver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absu
1216
es, par exemple, n’ont cessé de s’aggraver depuis
dix
ans — mais nous prenons conscience de leur absurdité. L’avènement bru
1217
ver depuis dix ans — mais nous prenons conscience
de
leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires ext
1218
leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant
de
deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais
1219
r absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de
deux
empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais il r
1220
iant de deux empires extraeuropéens décourage des
millions
d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment d’un destin commun
1221
d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment
d’
un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’aban
1222
il réveille aussi le sentiment d’un destin commun
de
nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités d
1223
, l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités
de
l’histoire, se voient combattus par l’élan vers l’union, vers la fédé
1224
sses, l’Assemblée de Strasbourg, cette conférence
de
la culture. Je parle d’un espoir tremblant. Le sentiment le plus répa
1225
asbourg, cette conférence de la culture. Je parle
d’
un espoir tremblant. Le sentiment le plus répandu, j’allais dire le pl
1226
y a aujourd’hui une manière proprement européenne
d’
avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres vi
1227
ui une manière proprement européenne d’avoir peur
de
l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres viendraient fai
1228
éenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur
d’
une guerre que d’autres viendraient faire sur notre sol, et sur le cor
1229
viendraient faire sur notre sol, et sur le corps
de
nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des
1230
et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse
de
devenir les objets d’une guerre des autres, qui serait perdue par nou
1231
enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets
d’
une guerre des autres, qui serait perdue par nous, quelle que soit son
1232
ais il y a, en même temps, une manière européenne
d’
espérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre f
1233
pérer, un espoir proprement européen, c’est celui
de
réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance c
1234
péen, c’est celui de réussir notre fédération, et
de
retrouver par là même une puissance capable d’imposer la paix. Telle
1235
et de retrouver par là même une puissance capable
d’
imposer la paix. Telle est la situation contradictoire dans laquelle n
1236
re dans laquelle nous sommes engagés. À son point
de
crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait r
1237
int de crise, où nous sommes, il dépend en partie
de
nous que l’espoir ait raison du désespoir. Mais il faut aller vite, e
1238
s’esquissent, à Strasbourg, les cadres politiques
de
l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée huma
1239
s politiques de l’Europe unie, il est grand temps
de
définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de l
1240
rand temps de définir la visée, la portée humaine
de
cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but
1241
e, la portée humaine de cette action, la vocation
de
la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’o
1242
ation de la communauté européenne. Tel est le but
de
cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une répo
1243
l est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend
de
nous ici, c’est d’abord une réponse à la question dangereuse que pose
1244
elles propres à garantir et développer l’exercice
de
la pensée libre, sans laquelle l’Europe n’est plus rien. On pourrait
1245
rien. On pourrait discuter sans fin sur le titre
de
cette Conférence. Les mots européen, culture, prêtent à des controver
1246
à des controverses trop faciles. Dès qu’on parle
d’
Europe, d’unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’
1247
troverses trop faciles. Dès qu’on parle d’Europe,
d’
unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’Europe ! »
1248
urope, chacun commence par dire : « Il n’y a plus
d’
Europe ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Eur
1249
rope ! » et finit par offrir une belle définition
de
ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à
1250
ffrir une belle définition de ce qu’est l’Europe,
de
ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialog
1251
ition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été,
de
ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialogue à plusieurs voix r
1252
s voix reste, à tout prendre, la vraie définition
de
l’Europe, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, cha
1253
rope, une et diverse. De même, dès que l’on parle
de
culture, chacun donne à ce mot des réalités hétéroclites : inventions
1254
ues et beaux-arts, hygiène, éducation, et procédé
de
construction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; con
1255
truction ; littérature, philosophie, et doctrines
de
l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité hu
1256
philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions
de
la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique
1257
doctrines de l’État ; conceptions de la liberté,
de
la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la v
1258
tat ; conceptions de la liberté, de la justice et
de
la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la vie des religions.
1259
Culture peut signifier aussi prise de conscience
de
la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’ex
1260
i prise de conscience de la vie, besoin perpétuel
d’
approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouv
1261
ence de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et
d’
illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, t
1262
in perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens
de
l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que
1263
pprofondir et d’illustrer le sens de l’existence,
d’
augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses.
1264
er le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir
de
l’homme, tant sur lui-même que sur les choses. Culture peut signifier
1265
re peut signifier, enfin, l’ensemble des procédés
de
création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre
1266
er, enfin, l’ensemble des procédés de création et
de
transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’i
1267
emble des procédés de création et de transmission
de
leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’interdise les déb
1268
s définitions. À toutes fins utiles, elle partira
de
l’idée que la culture, ce sont les réalités intellectuelles et spirit
1269
ités intellectuelles et spirituelles qui ont fait
de
l’Europe autre chose et beaucoup plus que ce qu’elle est dans sa réal
1270
ses fruits, on jugera la culture sur sa récolte.
Deux
mots sur ceux qui ne sont pas venus ici. Quand Dieu veut perdre une s
1271
jours par la rendre folle, il se contente parfois
de
l’endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’occupations acc
1272
endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites
d’
occupations accablantes et flatteuses, qui ne leur laissent plus une s
1273
tastrophes. On demande à certains « grands noms »
de
venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils
1274
« grands noms » de venir participer au sauvetage
de
l’Europe. Ils nous répondent qu’ils ont un rhume, qu’ils ont promis u
1275
ne conférence. D’autres invoquent un besoin subit
de
se retirer pour méditer. Regrettons-le, pour eux surtout. S’ils sont
1276
és, ce qu’à Dieu ne plaise, dans certains « camps
de
rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les r
1277
rééducation sociale », ils auront enfin le temps
de
méditer sur les raisons urgentes qui motivaient un rassemblement comm
1278
ôtre. Ils comprendront qu’il est certains moments
de
l’histoire où l’on ne peut renverser les destins qu’en y allant tous
1279
Pour être juste, il faut reconnaître que beaucoup
d’
intellectuels redoutent non sans raison l’atmosphère des congrès, inco
1280
tmosphère des congrès, inconsidérément multipliés
de
nos jours. Je les comprends, et je comprends surtout ceux d’entre eux
1281
rent — (ou c’est un mauvais écrivain) — au destin
de
la communauté dont il écrit la langue, où sa voix porte, qui peut le
1282
éral, établi pour l’information des délégués, n’a
d’
autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont
1283
nformation des délégués, n’a d’autre ambition que
de
signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au
1284
délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et
de
classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’une enq
1285
s problèmes qui se sont révélés urgents, au terme
d’
une enquête dans nos divers pays. Chacun des groupes nationaux du Mouv
1286
n questionnaire sur l’état des problèmes concrets
de
la culture dans son pays. Dix-sept groupes ont donné des réponses dét
1287
s problèmes concrets de la culture dans son pays.
Dix-sept
groupes ont donné des réponses détaillées. Je tiens à souligner qu’un
1288
û l’improviser avec des groupes en pleine période
de
formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y
1289
n pleine période de formation. Elle nous a permis
de
mieux voir l’intérêt capital qu’il y aurait à dresser systématiquemen
1290
aire aussi des lacunes, des obstacles, permettant
de
délimiter des zones critiques où concentrer l’effort. Puis, des étude
1291
concrets, nous ont été remises. Enfin, le Bureau
d’
études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’
1292
, nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’études
de
Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’une quinz
1293
fourni plusieurs notes et documents. Sur la base
d’
une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéci
1294
s notes et documents. Sur la base d’une quinzaine
de
rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des docu
1295
ur la base d’une quinzaine de rapports nationaux,
d’
une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapp
1296
quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine
de
rapports spéciaux, et des documents précités, le rapport général a te
1297
es documents précités, le rapport général a tenté
d’
opérer une synthèse provisoire, en guise d’introduction aux travaux de
1298
e provisoire, en guise d’introduction aux travaux
de
la conférence. Précisons bien que ce rapport n’est pas un instant des
1299
n instant destiné à faire l’objet des discussions
de
la conférence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’exposé de
1300
rence. Il en introduit les sujets. Il veut servir
d’
exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront propo
1301
ts. Il veut servir d’exposé des motifs à la série
de
résolutions pratiques qui seront proposées et mises au point par les
1302
Mouvement européen6 avait estimé tout d’abord que
deux
commissions suffiraient : l’une consacrée au problème des échanges, l
1303
niques restant, bien entendu, réservés aux débuts
de
l’ensemble du congrès, siégeant en commission générale. Il nous appar
1304
mission générale. Il nous apparaît qu’il y a lieu
de
prévoir une nouvelle commission, consacrée à l’éducation et à l’ensei
1305
n, consacrée à l’éducation et à l’enseignement.
I
. Les échangesq La question des échanges. — La situation présente
1306
à nous égarer. On parle beaucoup, par exemple, «
d’
organiser les échanges culturels ». Observons tout d’abord qu’il n’en
1307
frontières étaient ouvertes, et l’union fédérale
de
l’Europe réalisée. Nos cultures, prisonnières des cadres nationaux, n
1308
res nationaux, ne doivent pas chercher des moyens
de
correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent
1309
des moyens de correspondre un peu plus facilement
de
prison à prison. Elles doivent au contraire exiger leur « élargisseme
1310
ement » immédiat, sans condition. Le terme même «
d’
échanges culturels », avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force
1311
, avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force
d’
avoir servi d’échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien mal
1312
est devenu bien déplaisant, à force d’avoir servi
d’
échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien malgré eux, souve
1313
x, souvent) des problèmes réputés « secondaires »
de
la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce p
1314
éputés « secondaires » de la culture. Ils tentent
de
s’en tirer en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’échanges
1315
r en consentant à la culture ce petit va-et-vient
d’
échanges surveillés que leurs douaniers et leurs agents fiscaux sauron
1316
ux quelques petits décrets concernant les voyages
de
quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bon
1317
es de quelques professeurs bien vus des pouvoirs,
de
quelques boursiers bons élèves ; et quelques phrases bien plates sur
1318
hrases bien plates sur l’indispensable solidarité
de
nos nations. Une hypocrisie ennuyeuse. Prétendre « organiser les écha
1319
droits que l’État s’est arrogés, et qu’il s’agit
de
lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’abaisser des obstacl
1320
u’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit
d’
élever ou d’abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des id
1321
de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou
d’
abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des idées, des per
1322
nent ce qu’ils ont toujours été dans les périodes
de
vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, d
1323
ls ont toujours été dans les périodes de vitalité
de
la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits o
1324
les périodes de vitalité de la culture — échanges
de
découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités a
1325
ture — échanges de découvertes à l’état naissant,
de
produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques
1326
uvertes à l’état naissant, de produits originaux,
de
curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de p
1327
ant, de produits originaux, de curiosités avides,
d’
expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non
1328
de curiosités avides, d’expressions authentiques
de
la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements
1329
es, d’expressions authentiques de la sensibilité,
de
passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème
1330
de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas
de
simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner,
1331
assions mêmes, et non pas de simples déplacements
de
forts en thème — nous devons : 1° abandonner, et au besoin dénoncer l
1332
es déplacements de forts en thème — nous devons :
1°
abandonner, et au besoin dénoncer la méthode de « l’organisation des
1333
: 1° abandonner, et au besoin dénoncer la méthode
de
« l’organisation des échanges », 2° exiger la suppression pure et sim
1334
er la méthode de « l’organisation des échanges »,
2°
exiger la suppression pure et simple, immédiate, des obstacles à la l
1335
ion des personnes, des œuvres, et des instruments
de
travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits
1336
des instruments de travail, dans toute l’étendue
de
l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bé
1337
l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits
de
douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, do
1338
l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou
de
visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, dont la charge
1339
re. Et surtout ne proposons pas, dans ce domaine,
de
nouveaux organismes ! C’est la paresse d’esprit qui entraîne tant de
1340
omaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse
d’
esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines b
1341
d’esprit qui entraîne tant de Comités à proposer
de
nouvelles machines bureaucratiques. Restaurer la culture, c’est aussi
1342
poids mort des organisations ! Qu’on n’essaie pas
d’
organiser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’une respirat
1343
ser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée
d’
une respiration organisée, n’est-il pas vrai, vous coupe le souffle. Q
1344
s vrai, vous coupe le souffle. Qu’on n’essaie pas
de
créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était
1345
. Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité
de
notre culture : elle existe, elle était aux origines, elle n’a cessé
1346
e, elle était aux origines, elle n’a cessé depuis
de
se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse lib
1347
origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et
de
s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifeste
1348
n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir
de
mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe o
1349
a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de
mille
diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe ouverte
1350
richir de mille diversités. Qu’on la laisse libre
de
se manifester ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins
1351
er ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien
de
moins, voilà la solution, voilà le remède pratique à presque tous les
1352
presque tous les maux que vous allez recenser.
II
. Les institutions À la suppression des obstacles matériels et léga
1353
un effort positif. Il serait insuffisant et vain
de
vouloir revenir simplement à la condition libérale qui était celle de
1354
implement à la condition libérale qui était celle
de
l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je
1355
était celle de l’esprit en Europe avant la guerre
de
1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’An
1356
it celle de l’esprit en Europe avant la guerre de
1914.
C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire
1357
s, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire
de
la Compagnie européenne des wagons-lits, au chapitre sur les passepor
1358
Pour l’entrée dans tous les autres pays, la carte
de
visite suffit » ! Mais cette liberté des échanges n’a pas suffi à réd
1359
titutions qui garantissent et manifestent l’unité
de
nos cultures dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’instr
1360
dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie
d’
instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut au
1361
ersité. Il faut doter l’Europe unie d’instruments
de
travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut aussi former les
1362
er les jeunes hommes qui deviendront les porteurs
de
l’idée fédérale, sans laquelle nos réformes techniques et matérielles
1363
» que le xxe siècle a vu naître, il est frappant
de
constater qu’il n’en existe pas un seul qui ait pour objet l’Europe c
1364
s pays forment un ensemble, un complexe organique
de
culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-
1365
omplexe organique de culture, facile à distinguer
de
ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-ci distinguent souvent mieux que
1366
mble n’ait pas encore été étudié en tant que tel,
d’
une manière systématique ; et qu’il n’existe aucune institution capabl
1367
ue ; et qu’il n’existe aucune institution capable
de
renseigner sur l’Europe en général, sur sa situation présente, sur l’
1368
en général, sur sa situation présente, sur l’état
de
ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes.
1369
a situation présente, sur l’état de ses forces et
de
ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’
1370
ur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin
d’
une telle institution soit urgent, rien ne saurait mieux le faire sent
1371
difficultés qu’a rencontrées la préparation même
de
cette conférence, et que ses insuffisances inévitables dans l’état ac
1372
s choses. Je tiens à rappeler que, dès le congrès
de
La Haye, avait été demandée la création d’un Centre européen de la cu
1373
ongrès de La Haye, avait été demandée la création
d’
un Centre européen de la culture, dont les attributions furent esquiss
1374
par la résolution culturelle du congrès. Au mois
de
février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’étud
1375
olution culturelle du congrès. Au mois de février
1949,
le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de
1376
le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau
d’
études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septe
1377
ment européen ouvrait à Genève un Bureau d’études
7
chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de
1378
péen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé
de
préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même an
1379
rgé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois
de
septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg vo
1380
er l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre
de
la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unan
1381
tembre de la même année, l’Assemblée consultative
de
Strasbourg votait à l’unanimité une recommandation favorable à la cré
1382
nimité une recommandation favorable à la création
d’
un Centre européen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Ge
1383
tre européen de la culture. Le travail du Bureau
d’
études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus prè
1384
éen de la culture. Le travail du Bureau d’études
de
Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la ques
1385
’études de Genève, depuis quelques mois, a permis
de
serrer de plus près la question. Il a conduit aux conclusions pratiqu
1386
t leur réserver. Il en va de même pour le Collège
d’
Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commi
1387
llège d’Europe, à Bruges, collège qui permettrait
de
former les « grands commis européens », dont les futures institutions
1388
commis européens », dont les futures institutions
de
l’Europe unie auront évidemment besoin. Enfin, je mentionnerai un pro
1389
idemment besoin. Enfin, je mentionnerai un projet
d’
Institut européen des sciences politiques et sociales ; et ce projet s
1390
ces politiques et sociales ; et ce projet surtout
d’
un Fonds européen pour les recherches scientifiques, dont l’importance
1391
M. Dautry a magistralement exposé les motifs.
III
. L’enseignement Quant à la commission proposée tout à l’heure, qui
1392
mission proposée tout à l’heure, qui s’occuperait
de
l’enseignement européen, deux mots seulement, mais importants. La pré
1393
ure, qui s’occuperait de l’enseignement européen,
deux
mots seulement, mais importants. La préparation de cette Conférence,
1394
x mots seulement, mais importants. La préparation
de
cette Conférence, l’abondance et la qualité des rapports reçus sur le
1395
t la qualité des rapports reçus sur les questions
d’
éducation, ont montré à quel point ce souci est général dans nos pays.
1396
le monde se rend parfaitement compte que l’avenir
de
l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite
1397
enir de l’union européenne dépend en premier lieu
de
la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un es
1398
européenne dépend en premier lieu de la création
d’
une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranatio
1399
emier lieu de la création d’une élite responsable
de
jeunes gens, formés dans un esprit supranational. Cette tâche, comme
1400
’écrit M. Jean Bayet8, « exigera la bonne volonté
de
plusieurs générations, [mais] réclame aussi un départ extrêmement vif
1401
aussi un départ extrêmement vif et net ». L’effet
de
choc que produira sur l’opinion publique l’institution rapide d’un en
1402
duira sur l’opinion publique l’institution rapide
d’
un enseignement européen constituera la meilleure propagande pour notr
1403
ent être créés par le blocage, au titre européen,
d’
une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernem
1404
cage, au titre européen, d’une fraction du budget
de
l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernements et l’économie privée
1405
és. Nous invoquerons le fait que, si le sentiment
d’
un destin spirituel commun, et l’énergie créatrice des Européens ne so
1406
ettre nos gouvernements devant un choix. Un ordre
de
priorité doit être d’urgence établi. Il est probable que le prix de r
1407
s devant un choix. Un ordre de priorité doit être
d’
urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bom
1408
tre d’urgence établi. Il est probable que le prix
de
revient d’une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel
1409
ce établi. Il est probable que le prix de revient
d’
une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel des instit
1410
institutions que nous venons de proposer. Le prix
d’
une seule bombe atomique couvrirait donc le budget global d’une renais
1411
e bombe atomique couvrirait donc le budget global
d’
une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mor
1412
ouvrirait donc le budget global d’une renaissance
de
la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des
1413
e de la culture européenne. Construire des engins
de
mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millio
1414
ne. Construire des engins de mort qui coûtent des
milliards
, quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de dévelop
1415
e mort qui coûtent des milliards, quand on refuse
de
trouver les millions qui permettraient de développer la recherche sci
1416
ent des milliards, quand on refuse de trouver les
millions
qui permettraient de développer la recherche scientifique pour la pai
1417
refuse de trouver les millions qui permettraient
de
développer la recherche scientifique pour la paix et la vie, c’est la
1418
ientifique pour la paix et la vie, c’est la folie
de
l’Occident moderne. À tel point qu’on se demande parfois s’il ne vaud
1419
l ne vaudrait pas mieux être restés barbares, que
de
nous être aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture
1420
tre aussi mal civilisés. La Conférence européenne
de
la culture faillirait à sa vraie mission, si elle n’élevait pas, cont
1421
pour quelles fins réelles voulons-nous ces moyens
de
culture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La
1422
ns-nous ces moyens de culture, et cette éducation
d’
une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle
1423
ture, et cette éducation d’une conscience commune
de
l’Europe ? La question doit être posée. Elle est d’ailleurs spécifiqu
1424
pas substituer aux nationalismes locaux une sorte
de
nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au mond
1425
e sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est,
de
tout temps, ouverte au monde entier. Elle a toujours conçu sa civilis
1426
toujours conçu sa civilisation comme un ensemble
de
valeurs universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’opposer une
1427
s universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous,
d’
opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Oue
1428
opposer une nation européenne aux grandes nations
de
l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthé
1429
nation européenne aux grandes nations de l’Est et
de
l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valab
1430
e aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni
de
vouloir une « culture européenne » synthétique, valable pour nous seu
1431
fermée sur elle-même : ce serait trahir le génie
de
l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre
1432
e serait trahir le génie de l’Europe, nous couper
de
ses sources chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contr
1433
chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est
de
contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le mo
1434
es. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union
de
nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de
1435
nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen
d’
une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est l
1436
a leur seul salut, par le moyen d’une renaissance
de
leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. E
1437
d’une renaissance de leur culture dans la liberté
de
l’esprit, qui est leur vraie force. Et notre objet ne sera pas non pl
1438
vraie force. Et notre objet ne sera pas non plus
de
dénoncer ce qui se pratique ailleurs, car nous ne pouvons réformer qu
1439
acceptons pas la scission que symbolise le rideau
de
fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occid
1440
de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen
de
ramener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’i
1441
amener vers l’Occident les peuples séparés, c’est
de
leur offrir l’image d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté,
1442
les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image
d’
une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’une Europe qui prend
1443
d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté,
d’
une Europe qui prend au sérieux sa vocation particulière dans le monde
1444
ns le monde. Une Europe affaiblie, et divisée par
vingt
nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être
1445
lie, et divisée par vingt nationalismes et autant
de
barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une
1446
ée par vingt nationalismes et autant de barrières
de
douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une Europe procla
1447
arrières de douanes, ne saurait plus être un pôle
d’
attraction. Une Europe proclamant des principes sans les appliquer fer
1448
pliquer fermement, n’aurait bientôt plus le droit
de
parler. Prendre au sérieux la vocation européenne, c’est une mission
1449
sérieux la vocation européenne, c’est une mission
de
vigilance dont les intellectuels des pays libres doivent se sentir pl
1450
tir plus que jamais responsables. Il leur incombe
de
rappeler sans relâche aux gouvernants, comme aux législateurs sociaux
1451
eurs sociaux et aux experts, qu’un certain nombre
de
principes moraux ne sauraient être négligés dans la pratique sans que
1452
nomie. Si nous exerçons, à Lausanne, cette action
de
vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’el
1453
on de vigilance publique, on pourra dire vraiment
de
notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne.
1454
aiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès
de
la conscience européenne. Une conscience malheureuse, il est vrai, to
1455
conscience, en dernière analyse. C’est notre lot
d’
Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la co
1456
lot d’Européens, et c’est notre mission profonde,
de
préférer toujours la conscience au bonheur. Vocation tragique et féco
1457
nt depuis que se dressent à l’Est comme à l’Ouest
deux
civilisations plus jeunes, filles de la nôtre, dont l’une, qui nous e
1458
à l’Ouest deux civilisations plus jeunes, filles
de
la nôtre, dont l’une, qui nous est chère, cultive un idéal eudémoniqu
1459
est chère, cultive un idéal eudémonique, l’idéal
d’
un bonheur assuré. Il est frappant que le bonheur, en Europe, n’ait tr
1460
mes, quelques prières. C’est par la musique seule
de
Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous
1461
es prières. C’est par la musique seule de Bach ou
de
Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous en respiro
1462
, nous ne sommes pas réunis pour tracer des plans
d’
innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de tr
1463
s pas réunis pour tracer des plans d’innocence et
de
prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyen
1464
prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement,
de
trouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations
1465
ouver les moyens qui permettent le libre exercice
de
nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notr
1466
xercice de nos vocations tourmentées ; des moyens
de
vivre, oui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. S
1467
ui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons
de
vivre. Sauvons l’Europe tragique, pour que nos descendants puissent e
1468
t, par la grâce des chefs-d’œuvre futurs, au ciel
de
la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador
1469
ciel de la musique — dans une Europe heureuse.
6.
Présidée par M. Salvador de Madariaga, qui était d’ailleurs président
1470
ador de Madariaga, qui était d’ailleurs président
de
la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemon
1471
, qui était d’ailleurs président de la conférence
de
Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collab
1472
s président de la conférence de Lausanne (NDLR).
7.
Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration de M. Raymond
1473
par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration
de
M. Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR). 8. Dans son remarq
1474
. Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR).
8.
Dans son remarquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Co
1475
LR). 8. Dans son remarquable rapport qui a servi
de
base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation
1476
marquable rapport qui a servi de base aux travaux
de
la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougem
1477
qui a servi de base aux travaux de la Commission
de
l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « R
1478
aux travaux de la Commission de l’enseignement et
de
l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’une
1479
nt et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis
de
, « Raisons et buts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier 195
1480
NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts
d’
une conférence », Fédération, Paris, janvier 1950, p. 19-25. o. Il s’
1481
ts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier
1950,
p. 19-25. o. Il s’agit du discours prononcé par Denis de Rougemont l
1482
nis de Rougemont lors de la Conférence européenne
de
la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avons
1483
e la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre
1949.
p. Nous avons rajouté le participe passé « été », oublié par erreur
1484
Les sous-titres ont été rajoutés pour les besoins
de
cette édition numérique.
1485
Un gage à Jean Paulhan ! (avril
1950
)r Cher ami, Ce n’est pas sans surprise que j’apprends, à vous lire
1486
surprise que j’apprends, à vous lire dans Liberté
de
l’Esprit, que les fédéralistes ont exclu la Russie de l’Europe ; que
1487
que la Grèce n’en fait pas partie, mais bien « et
de
toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires
1488
de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un
de
nos « doctrinaires » ; que j’ai « annoncé la fin du désespoir » ; que
1489
lisme est contre les patries (mais qu’il juge bon
de
le « cacher ») ; et qu’enfin les fédéralistes « n’ont jamais été amou
1490
pe, et pour les fédéralistes, il n’y a pas un mot
de
vrai dans tout cela. Vous jugez notre projet « imbécile ». Celui que
1491
que vous critiquez est tel sans aucun doute. Mais
d’
où sort-il ? Je ne connais pas un seul fédéraliste qui puisse y reconn
1492
rvations dans l’ordre où je viens de les relever.
1°
« La Russie, qu’est-ce que vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit po
1493
vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit possible
de
l’exclure sans lui faire violence ? » Mais quand l’avons-nous exclue
1494
montrez, au paragraphe suivant, qu’il serait vain
d’
espérer l’inclure. Que diable voulez-vous donc que nous en fassions ?
1495
en fassions ? (On m’assure que cela dépend aussi
de
Staline.) 2° « Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils son
1496
? (On m’assure que cela dépend aussi de Staline.)
2°
« Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils sont là !… » Je
1497
éuni à Strasbourg… et qu’il a déjà son statut (en
quarante-deux
articles) ». Montrez-nous donc un seul de ces articles qui dise, ou l
1498
rante-deux articles) ». Montrez-nous donc un seul
de
ces articles qui dise, ou laisse entendre, que le Conseil de l’Europe
1499
ait cela que nous voulions : je vous en montrerai
trente
qui disent le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre de cet org
1500
t le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre
de
cet organisme est qu’il serve provisoirement, à sa place, et malgré s
1501
ute qu’on ne compte à Strasbourg qu’une trentaine
de
fédéralistes sur cent-un députés.) 3° La Grèce fait partie du Conseil
1502
e trentaine de fédéralistes sur cent-un députés.)
3°
La Grèce fait partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août 1949,
1503
èce fait partie du Conseil de l’Europe, depuis le
11
août 1949, mais les États-Unis n’y ont été nommés jusqu’ici que par L
1504
partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août
1949,
mais les États-Unis n’y ont été nommés jusqu’ici que par L’Humanité.
1505
nt été nommés jusqu’ici que par L’Humanité. Drôle
d’
évidence. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.) 4° M. Spaak est
1506
nce. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.)
4°
M. Spaak est un homme d’État qui agit plus que tout autre en faveur d
1507
e voudrais bien qu’il se déclare « fédéraliste »…
5°
Ai-je vraiment, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et de l’iso
1508
ent, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et
de
l’isolement, la mort des ressentiments nationaux » ? Hélas ! Diagnost
1509
us par exemple), ce n’est pas « annoncer » la fin
de
la maladie, ni promettre « des joies et des fêtes ». Nous demandons s
1510
s fêtes ». Nous demandons surtout des sacrifices.
6°
Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou d’imbécile » dans le projet
1511
des sacrifices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a «
de
faux ou d’imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de
1512
ices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou
d’
imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interr
1513
e » dans le projet des fédéralistes, vous décidez
de
les interroger. Que ne le faites-vous ? Mais non, par une erreur vrai
1514
« fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil
de
neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tenda
1515
fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil de
neuf
conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances
1516
ecueil de neuf conférences prononcées à Genève en
1949,
par des hommes de tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl J
1517
ences prononcées à Genève en 1949, par des hommes
de
tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces
1518
osées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces
neuf
, un seul fédéraliste déclaré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à
1519
, un seul fédéraliste déclaré. Voyez donc la page
60
: « Je reproche à Benda de confondre union et unification, de vouloir
1520
ré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à Benda
de
confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités san
1521
proche à Benda de confondre union et unification,
de
vouloir effacer les diversités sans lesquelles aucune fédération n’es
1522
fédération n’est possible. » C’est la seule page
de
ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la do
1523
ule page de ce gros livre où vous aviez la chance
de
tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous ci
1524
re où vous aviez la chance de tomber sur un point
de
la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous citée, au lieu de m’attri
1525
vous citée, au lieu de m’attribuer des sottises ?
7°
Notre doctrine (qui veut l’union dans la diversité, formule suisse) é
1526
ersité, formule suisse) étant à l’opposé de celle
de
Benda (qui veut l’unification, formule jacobine) vous déclarez que la
1527
vous déclarez que la seconde n’est que « l’aveu »
de
ce que la première dissimule. Après quoi, bien sûr, plus rien ne saur
1528
mais. Au contraire, vous rejoignez ici une partie
de
leurs positions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi c
1529
leurs positions, et votre belle colère se trompe
d’
adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison atta
1530
tions, et votre belle colère se trompe d’adresse.
De
quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison attaquez-vous d
1531
ez-vous des gens que vous n’avez pas pris le soin
d’
identifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près
1532
tifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même,
de
l’à-peu-près journalistique. Pour en finir, je vous envoie ma petite
1533
’Attitude fédéraliste . Vous y trouverez beaucoup
d’
attaques contre le nationalisme, contre l’État-nation, contre sa préte
1534
riotisme et les patries. Or j’ai quelques raisons
de
penser que ce texte exprime le « projet des fédéralistes » plus fidèl
1535
quoi, cette lettre est inutile, si l’on a décidé
d’
appeler « fédéralistes » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé
1536
s » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé
de
l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a de
1537
l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien
de
s’unir. Il y a des gens qui appellent surréaliste tout écrit qu’ils e
1538
uand vous aurez renoncé à le confondre avec celui
de
Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce
1539
oncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui
de
Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce que vous proposez.
1540
proposez. Car je ne vais pas vous faire l’injure
de
croire que vous trouvez que tout va très bien ainsi, ou que vous pens
1541
ant toutes petites et mignonnes. Elles ont besoin
de
vous aussi, non point pour les louer contre nous, mais pour les défen
1542
« Europe vole » ? Un gage. r. Rougemont Denis
de
, « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950
1543
t Denis de, « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté
de
l’esprit, Paris, avril 1950, p. 33-34.
1544
an Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril
1950,
p. 33-34.
1545
Il est impossible
de
sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)s t Il est imp
1546
ssible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (
5
août 1950)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauv
1547
de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août
1950
)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en m
1548
sa culture (5 août 1950)s t Il est impossible
de
sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de
1549
i l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou
de
sauver la culture occidentale si l’on ne sauve pas en même temps sa p
1550
e sauve pas en même temps sa patrie. Rien ne sert
de
faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les
1551
ême temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer,
de
conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa re
1552
a créature — l’Europe — si l’on tarit les sources
de
sa recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’entretenir le d
1553
recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus
d’
entretenir le désir créateur, si on le prive des possibilités de s’acc
1554
e désir créateur, si on le prive des possibilités
de
s’accomplir dans une libre communauté. Si l’Europe est réduite à l’im
1555
mondiales, personne ne pourra remplacer cette âme
d’
une civilisation qui avait su remplacer toutes les autres. Le secret d
1556
i avait su remplacer toutes les autres. Le secret
de
ses mesures vivantes sera perdu. ⁂ Mais en retour, sans une culture a
1557
unie, c’est même plus que probable, par les soins
d’
experts étrangers, ou d’une police qui a fait ses preuves ailleurs déj
1558
e probable, par les soins d’experts étrangers, ou
d’
une police qui a fait ses preuves ailleurs déjà. Mais elle aura perdu
1559
es ailleurs déjà. Mais elle aura perdu le ressort
de
son pouvoir transformateur du monde, ce pouvoir qui avait fait sa gra
1560
e, ce pouvoir qui avait fait sa grandeur à partir
d’
un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si
1561
ir d’un médiocre destin. Que servirait à l’Europe
de
recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cett
1562
pe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle
de
son choix ? et si cette unité signifiait sa défaite, non point sa con
1563
l’Asie — et l’Asie n’a jamais passé pour la terre
de
la liberté. Ces deux réalités : l’Europe, la culture, naissent et meu
1564
n’a jamais passé pour la terre de la liberté. Ces
deux
réalités : l’Europe, la culture, naissent et meurent du même mouvemen
1565
et meurent du même mouvement. ⁂ Qu’en est-il donc
de
ce mouvement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les deux colosse
1566
ement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les
deux
colosses russe et américain, l’Européen qui vient de perdre la guerre
1567
it actuellement ce qu’on peut appeler une névrose
d’
infériorité. Pourtant, les faits ne justifient pas le désespoir, mais
1568
ifient pas le désespoir, mais seulement un effort
de
redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américai
1569
, mais seulement un effort de redressement. Entre
200
millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’
1570
is seulement un effort de redressement. Entre 200
millions
de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du
1571
ent un effort de redressement. Entre 200 millions
de
Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rid
1572
de redressement. Entre 200 millions de Russes et
150
millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, pr
1573
redressement. Entre 200 millions de Russes et 150
millions
d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300
1574
ent. Entre 200 millions de Russes et 150 millions
d’
Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 mi
1575
d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau
de
fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un qu
1576
us sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de
300
millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, e
1577
ommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300
millions
d’Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’
1578
à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions
d’
Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’un
1579
300 millions d’Européens. Nous disposons de plus
d’
un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit a
1580
disposons de plus d’un quart du charbon, et près
d’
un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous dis
1581
de plus d’un quart du charbon, et près d’un tiers
de
l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous disposons surt
1582
it aujourd’hui la planète. Nous disposons surtout
de
ressources humaines qui n’ont pas leurs égales ailleurs : une main-d’
1583
ont les traditions ne s’imitent pas, une capacité
d’
invention que le monde entier peut nous envier. ⁂ Qu’avons-nous invent
1584
Qu’avons-nous inventé, nous les Européens, depuis
cent
ans ? Je répondrai : que n’avons-nous pas inventé ? Je cite pêle-mêle
1585
re : presque tous leurs grands noms sont des noms
de
l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier
1586
ès rares qui n’en sont pas ont appris leur métier
de
nos maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou pa
1587
maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés
de
Paris, ou par nos livres. ⁂ Je dirai plus. Le monde moderne tout enti
1588
e à la fois nos mœurs et nos objets, nos procédés
d’
art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie e
1589
is nos mœurs et nos objets, nos procédés d’art et
de
construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de méde
1590
os objets, nos procédés d’art et de construction,
de
transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos arme
1591
rocédés d’art et de construction, de transport et
de
gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous,
1592
de construction, de transport et de gouvernement,
d’
industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les
1593
, de transport et de gouvernement, d’industrie et
de
médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les Noirs, copient
1594
ous, nous copions tout au plus quelques citations
de
leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de
1595
elques citations de leurs sages, quelques statues
de
leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que s
1596
lques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes
de
leurs danses. ⁂ Finalement, que sont les empires qui prétendent parta
1597
du Nord et la Russie de Staline sont des produits
de
notre culture, l’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de
1598
’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a
de
moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’un côté, plus les grat
1599
a de moderne justement. Calvin et le puritanisme,
d’
un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les
1600
isme, d’un côté, plus les gratte-ciel, le système
de
Taylor-Bedault à tous les degrés, la cellophane et la fermeture-éclai
1601
e-éclair qui sont des inventions européennes ; et
de
l’autre côté, Marx et notre industrie plus l’instruction publique et
1602
nstruction publique et l’athéisme, l’hypertrophie
de
l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pè
1603
ypertrophie de l’appareil étatique, et des copies
de
l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce
1604
ppareil étatique, et des copies de l’art officiel
de
nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce n’est point par ha
1605
idemment ; mais ce n’est point par hasard que ces
deux
grands pays semblent appeler ce procédé de description : leurs traits
1606
ces deux grands pays semblent appeler ce procédé
de
description : leurs traits les plus frappants et qu’ils croient spéci
1607
en que l’Amérique et la Russie moderne, dans plus
d’
un sens, sont en réalité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas
1608
ité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas
de
malentendu ! Ne nous laissons jamais aller à placer sur le même plan
1609
placer sur le même plan l’Amérique et la Russie.
Deux
constatations très simples me suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu
1610
suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu’y a-t-il
de
commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation
1611
e commun ? Il y a tous les principes fondamentaux
de
notre civilisation ; il y a l’exercice des mêmes libertés ; il y a de
1612
mêmes libertés ; il y a devant nous le même idéal
de
liberté humaine. Tandis qu’entre les Russes et nous, il n’y a en comm
1613
our nous liberté politique. s. Rougemont Denis
de
, « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », Fra
1614
ue. s. Rougemont Denis de, « Il est impossible
de
sauver l’Europe sans sauver sa culture », France indépendante, Paris,
1615
sauver sa culture », France indépendante, Paris,
5
août 1950, p. 1-2. t. Présenté par la note suivante : « France Indép
1616
sa culture », France indépendante, Paris, 5 août
1950,
p. 1-2. t. Présenté par la note suivante : « France Indépendante pré
1617
présente cette semaine à ses lecteurs, un extrait
de
l’importante conférence prononcée par Denis de Rougemont au congrès d
1618
rence prononcée par Denis de Rougemont au congrès
de
La Fédération à Beaune. Nous tenons à remercier M. de Rougemont pour
1619
à remercier M. de Rougemont pour son autorisation
de
publier ces lignes qui suscitèrent, nous en sommes certains, chez nos
1620
Saint-John Perse et l’Amérique (
1950
)m La grandeur de cette poésie fait reculer le commentaire : elle e
1621
t-John Perse et l’Amérique (1950)m La grandeur
de
cette poésie fait reculer le commentaire : elle est un acte, elle se
1622
à, posant elle-même ses mesures. La première page
d’
Anabase lorsqu’elle parut, constitua pour nous le fait du prince, tout
1623
rer dans la durée, — ce dont plusieurs doutaient,
de
ma génération. (D’où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un
1624
— ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. (
D’
où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un jeune amour veut so
1625
t, on l’imagine, en Amérique. Au long des avenues
de
Manhattan, il marchait lentement, régulièrement, comme ceux qui vont
1626
, comme ceux qui vont très loin, ou qui pensent à
de
grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’empressement. Ou da
1627
e grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas
d’
empressement. Ou dans cette chambre d’angle, dont il parle dans Neiges
1628
i n’ont pas d’empressement. Ou dans cette chambre
d’
angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme
1629
angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire
de
l’instant, homme sans preuve ni témoin », il nous donnait un haut exe
1630
n », il nous donnait un haut exemple du bon usage
de
l’exil : sans plainte, au cœur du grand litige ; aussi actif dans la
1631
avait su rester sensible dans l’action ; soucieux
de
voir, non d’être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des de
1632
er sensible dans l’action ; soucieux de voir, non
d’
être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des destins molesté
1633
re, enfin, dans son retrait, des destins molestés
de
la France, que tant de « partisans extravagants » qui tenaient bruyam
1634
extravagants » qui tenaient bruyamment le devant
de
la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je
1635
uyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas
de
l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarqu
1636
ène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps
de
parler. Je voudrais proposer trois remarques sur les relations qui se
1637
e qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer
trois
remarques sur les relations qui se sont révélées entre le poète et l’
1638
atique. J’y verrais même la meilleure description
de
l’essor des États-Unis dans l’espace et le temps à la fois, si le suj
1639
ture et l’invention du Nouveau Monde ont illustré
d’
accidents séculaires. Tout se passe à la fois dans l’Histoire et dans
1640
oire et dans l’homme, « dans un très haut tumulte
de
terres en marche vers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. D
1641
ers l’ouest », contre le vent qui souffle en est.
De
l’Atlantique au Pacifique, des Pères pèlerins aux savants atomistes,
1642
r nylon, les grands rapides « avec leur provision
de
glace pour cinq jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « c
1643
rands rapides « avec leur provision de glace pour
cinq
jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « civilisation du m
1644
maïs noir — non violet », enfin « les siffloteurs
de
blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’h
1645
les siffloteurs de blues dans les usines secrètes
de
guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme
1646
s usines secrètes de guerre », au « pire scandale
de
l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence
1647
au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est
de
l’homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’un agrandisseme
1648
homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et
d’
un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poèm
1649
dans sa présence humaine ; et d’un agrandissement
de
l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poème ainsi prend sa sou
1650
, peuvent être vues comme une seule et même geste
de
l’âme. (Je dis l’âme, et non pas l’esprit, ni l’intellect et ni le cœ
1651
’esprit, ni l’intellect et ni le cœur.) Et c’est
d’
un même mouvement à tout ce mouvement lié, que mon poème encore dans l
1652
mouvement lié, que mon poème encore dans le vent,
de
ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de
1653
mon poème encore dans le vent, de ville en ville,
de
fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénia
1654
de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles
de
la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les
1655
tes houles de la terre… Congénialité du poème et
de
cette Amérique ourdie par les grands vents : le mouvement, la violenc
1656
vision globale du « monde entier des choses ». ⁂
I
. Le mouvement crée l’énergie, le rayonnement et les trains d’ondes, —
1657
ment crée l’énergie, le rayonnement et les trains
d’
ondes, — et d’autre part, dans le poème, il crée littéralement le sens
1658
s le poème, il crée littéralement le sens. (Point
de
départ d’une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa for
1659
, il crée littéralement le sens. (Point de départ
d’
une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa formule dynam
1660
nous filaient entre les doigts — grands virements
de
comptes et glissements sur l’aile. L’apposition me semble offrir ici
1661
osition me semble offrir ici l’équivalent en mots
d’
un accord en musique : co-vibration des sens au lieu de celle des sons
1662
où l’on étudiera, plus tard, les rôles conjugués
de
l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale,
1663
plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et
de
l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale, entre ses « origine
1664
le, entre ses « origines » et son délire global…)
II
. Anabase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques de ce siècle :
1665
ase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques
de
ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nour
1666
i les rares œuvres toniques de ce siècle : chants
de
violence heureuse, refus du désespoir (qui nourrit la plupart des poè
1667
respire à longs traits la maîtrise, et le bonheur
de
la victoire. Les mots faveur et favorable, éloges, délice et délectab
1668
autres les expressions du délaissement, du dégoût
de
vivre ou des chagrins intimes. Qu’ils n’aillent dire : tristesse… s’
1669
nostalgie deviennent ici conquête, pressentiment
de
l’acte, distraction vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de
1670
ion vers l’avenir et naissance du chant. Un chant
de
force pour les hommes… Choses vivantes, ô choses — excellentes ! Rien
1671
poésie des « blues » fait illusion : temps faible
d’
un grand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Co
1672
rand rythme souple, dont il devrait être interdit
de
l’isoler.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil int
1673
er.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin
de
l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’au
1674
témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle
de
hauteur, d’exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s
1675
’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur,
d’
exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au
1676
ope. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre
d’
humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au monde entier des chose
1677
ce propos une hypothèse critique, qui permettrait
de
situer les grands poèmes du siècle. Si l’élément sentimental domine c
1678
uel, c’est dans l’élément animique que les poèmes
de
Saint-John Perse trouvent leurs lois et leurs cadences : Et c’est pa
1679
à l’image des grandes crues, Qu’il prend conseil
de
ces menées nouvelles au lit du vent. Et c’est conseil encore de fo
1680
velles au lit du vent. Et c’est conseil encore
de
force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents
1681
t du vent. Et c’est conseil encore de force et
de
violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents du Nouveau M
1682
e comme les vents du Nouveau Monde, comme un rêve
de
pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les ri
1683
n rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est
de
l’avoir domptée par les rigueurs voluptueuses du plus pur langage fra
1684
urs voluptueuses du plus pur langage français, et
de
cette « rhétorique profonde » dont parlait un jour Baudelaire. III. L
1685
rique profonde » dont parlait un jour Baudelaire.
III
. L’Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est visio
1686
it un jour Baudelaire. III. L’Europe étant vision
de
l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fu
1687
n de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision
de
l’espace. L’Europe fut universaliste, et le redeviendra peut-être, ma
1688
rocédés, chez Saint-John Perse, ouvrent les voies
d’
un grand lyrisme américain. Ils sont classiques. Les continents, les p
1689
yriques, et l’édification sur table rase des lois
d’
une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en c
1690
tion sur table rase des lois d’une cité émergeant
de
son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes
1691
lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient
de
très grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et q
1692
ès grandes forces en croissance sur toutes pistes
de
ce monde, et qui prenaient source plus haute qu’en nos chants, en lie
1693
aient source plus haute qu’en nos chants, en lieu
d’
insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô mond
1694
plus haute qu’en nos chants, en lieu d’insulte et
de
discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô monde entier des
1695
e mot « monde » à chaque page : il ne s’agit plus
d’
états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée
1696
monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’états
d’
âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de va
1697
à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’âme,
de
sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes es
1698
us d’états d’âme, de sentiments individuels, mais
de
« la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute rac
1699
nts individuels, mais de « la terre distribuée en
de
vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pa
1700
rre distribuée en de vastes espaces », des hommes
de
toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de
1701
de vastes espaces », des hommes de toute race et
de
toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par
1702
es », des hommes de toute race et de toute façon,
de
« pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’u
1703
hommes de toute race et de toute façon, de « pans
de
siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme san
1704
toute façon, de « pans de siècles en voyage » et
de
peuples lus « par nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’un
1705
s en voyage » et de peuples lus « par nations » ;
d’
une âme sans nom — l’inconscient d’une époque — dont le poète déchiffr
1706
ar nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient
d’
une époque — dont le poète déchiffre les messages. Itinéraires et inve
1707
s messages. Itinéraires et inventaires, sommation
de
nos « voies et façons » et « chants d’un peuple, le plus ivre », — il
1708
sommation de nos « voies et façons » et « chants
d’
un peuple, le plus ivre », — il semblera surprenant qu’un Français ait
1709
ançais ait ouvert aux Américains les perspectives
de
l’épopée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans
1710
pée globale que l’histoire désormais leur assigne
de
vivre. Dans un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafay
1711
un autre ordre, cependant, il y eut le précédent
de
Lafayette. ⁂ Mais Vents n’est pas seulement le poème du lyrisme, le c
1712
s seulement le poème du lyrisme, le chant profond
de
l’Amérique. C’est aussi, dans sa dernière partie, le poème du retour
1713
l’Europe, à la France. Nous reviendrons, un soir
d’
Automne, sur les derniers roulements d’orage… Demain, ce continent lar
1714
s, un soir d’Automne, sur les derniers roulements
d’
orage… Demain, ce continent largué… S’ensuit une description charmant
1715
S’ensuit une description charmante et déchirante
d’
une France désuète et qui naguère encore périssait « par excès de sage
1716
suète et qui naguère encore périssait « par excès
de
sagesse », d’une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent
1717
aguère encore périssait « par excès de sagesse »,
d’
une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent des Amériques
1718
ur avec le vent des Amériques. Au plus haut point
de
ce très haut poème, Saint-John Perse a rejoint notre vœu. Nous l’atte
1719
se a rejoint notre vœu. Nous l’attendrons un soir
d’
automne, avec le souffle du grand vent, sur la route et la terre des h
1720
la terre des hommes, prêts à rendre nos comptes «
d’
hommes nouveaux, — d’hommes entendus dans la gestion humaine, non dans
1721
prêts à rendre nos comptes « d’hommes nouveaux, —
d’
hommes entendus dans la gestion humaine, non dans la précession des éq
1722
es équinoxes », et qu’il nous aide ! par le chant
d’
une Europe future. Car, ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plu
1723
, ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plus
de
qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’auteur qui donne à l’âm
1724
us de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas
d’
auteur qui donne à l’âme de plus grands mouvements… qui nous remplisse
1725
e plus grands mouvements… qui nous remplisse plus
de
la vapeur du dieu qui l’agite. » 4. « Avertissement du Dieu ! Avers
1726
plisse plus de la vapeur du dieu qui l’agite. »
4.
« Avertissement du Dieu ! Aversion du Dieu ! » ou « … avec la bête ha
1727
la bête haut cabrée — une âme plus scabreuse ! » (
Deux
exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capa
1728
e âme plus scabreuse ! » (Deux exemples au hasard
de
ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de
1729
use ! » (Deux exemples au hasard de ma mémoire.)
5.
Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le
1730
mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables
de
bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureu
1731
Où sont les grands poètes capables de bonheur, et
de
grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureux sont les plus
1732
Arabes et Chinois peut-être… m. Rougemont Denis
de
, « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris
1733
, « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers
de
la Pléiade, Paris, septembre 1950, p. 136-139.
1734
ue », Les Cahiers de la Pléiade, Paris, septembre
1950,
p. 136-139.