1 1948, Articles divers (1948-1950). L’idée fédéraliste (1948)
1 L’idée fédéraliste ( 1948 )b On peut penser avec le philosophe Jaspers que l’Europe du xxe s
2 , renonçant à leur souveraineté absolue au profit d’ une constitution commune. Dans cette vue, la Suisse moderne serait une
3 ans cette vue, la Suisse moderne serait une sorte de « bon exemple à suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre, deux
4 suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre, deux réserves préalables se présentent aussitôt à l’esprit. Il conviendrai
5 tent aussitôt à l’esprit. Il conviendrait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui m
6 drait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui méritent d’être donnés en exemple ; p
7 ments de notre expérience helvétique qui méritent d’ être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourr
8 ique qui méritent d’être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourraient être utilisés ou reproduit
9 eproduits sur une plus vaste échelle. La question de nos dimensions dans l’espace et dans le temps apparaît capitale à cet
10 es d’histoire suisse, notre État fédéral avec ses cent ans d’existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudi
11 oire suisse, notre État fédéral avec ses cent ans d’ existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudier les
12 nous autres Suisses. Mais si nous passons du plan de cette microhistoire à l’histoire générale, tout change. Nous voyons t
13 nérale, tout change. Nous voyons tout d’abord que cent ans, ce n’est qu’un septième de notre histoire nationale ; que celle-
14 out d’abord que cent ans, ce n’est qu’un septième de notre histoire nationale ; que celle-ci ne s’étend que sur le dernier
15 que celle-ci ne s’étend que sur le dernier tiers de l’ère chrétienne, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l
16 e, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l’histoire des civilisations, qui elles-mêmes ne couvrent que le dern
17 les-mêmes ne couvrent que le dernier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il ré
18 nier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il résulte que notre expérience fédér
19 généralement admise de l’humanité sur la planète. D’ où il résulte que notre expérience fédérale ne représente guère que la
20 lles s’évanouiront probablement, comme une goutte de vin dans la mer. Ensuite, ce rappel à nos dimensions très réduites da
21 ns jouer dans le monde. En effet, les proportions de notre expérience à l’histoire générale sont à peu près celles de la g
22 ence à l’histoire générale sont à peu près celles de la graine à l’arbre. Qu’est-ce qu’une graine ? C’est un objet hauteme
23 n aboutissement et un commencement. C’est le lieu d’ un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent,
24 nt et un commencement. C’est le lieu d’un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent, mais elles p
25 es les graines meurent, mais elles peuvent mourir de deux manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’h
26 les graines meurent, mais elles peuvent mourir de deux manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’humus,
27 les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’ humus, les autres donnent un nouvel arbre. Notre État fédéral mourra,
28 helle infiniment plus vaste ? Telle est la chance de la Suisse dans l’histoire, pour ce siècle ou pour ceux qui le suivron
29 ce siècle ou pour ceux qui le suivront. La chance d’ une graine. Transposons maintenant ces symboles. Traduisons graine par
30 en notre État fédéral, après un siècle et demi ou deux , disparaîtra tout comme une autre République sérénissime de Venise, n
31 aîtra tout comme une autre République sérénissime de Venise, ne laissant qu’un souvenir ou un décor, parce qu’il aura gard
32 n cite l’exemple helvétique, à propos d’un projet d’ États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate
33 ue, à propos d’un projet d’États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate qui surgit sur les lèvres
34 l ne s’agit que des modalités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’id
35 alités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expér
36 ratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement pl
37 t s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses app
38 ce de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses applications, mais pourtant celles-ci n’existeraie
39 nt pas sans celle-là. Je ne parlerai donc ici que de notre idée fédéraliste en soi. Elle est très simple, comme toutes les
40 r en quelques mots, en une formule ; car elle est d’ un type organique et non pas mécanique ou passionnel, en cela beaucoup
41 résistances, mais elle est au contraire le secret d’ un équilibre constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de comp
42 constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après
43 nt entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après l’autre. On ne sa
44 de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’ écraser l’une après l’autre. On ne saurait trop insister sur le double
45 té, comme on voudra, qui est le battement du cœur de ce système. Car le fédéralisme ne consiste pas seulement dans l’union
46 Tous pour un ». Dans ce sens, il nous sera permis de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’autre que la politique
47 s de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’ autre que la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot.
48 la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot. Elle est donc l’antithèse exacte des méthodes totalitaires, a
49 onsistent à écraser les diversités par incapacité de les composer en un tout organique et vivant. ⁂ C’est peut-être parce
50 s ou moins consciemment les principales décisions de notre vie politique pendant des siècles, et qu’elle a finalement pris
51 cles, et qu’elle a finalement pris forme et force de loi vers 1848 ; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis
52 elle a finalement pris forme et force de loi vers 1848  ; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis à la commente
53 her à son sujet. Comme la vie même — étant la vie de notre praxis politique — elle allait sans dire, jusqu’ici. La nécessi
54 llait sans dire, jusqu’ici. La nécessité présente de l’affermir en face du défi que représente l’esprit totalitaire, et au
55 éfi que représente l’esprit totalitaire, et aussi de la propager, car la meilleure défense est dans l’attaque, nous invite
56 ui semblent avoir inspiré l’action tout empirique de nos ancêtres. 1. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à t
57 inspiré l’action tout empirique de nos ancêtres. 1. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à toute idée d’hégém
58 me ne peut naître que du renoncement à toute idée d’ hégémonie éducatrice ou organisatrice exercée par l’une des nations co
59 légitime certains « grands » prendre l’initiative d’ une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’
60 d’une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe i
61 opéenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’ Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’une manièr
62 Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’ unifier l’Europe indiquent d’une manière négative cette même vérité si
63 ans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’ une manière négative cette même vérité simple que notre réussite confi
64 e peuvent conduire qu’à l’unification, caricature de l’union véritable. 2. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncemen
65 à l’unification, caricature de l’union véritable. 2. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à tout esprit de sys
66 e ne peut naître que du renoncement à tout esprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour
67 sprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’ une nation vaut aussi pour celui d’une idéologie. On pourrait définir
68 l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour celui d’ une idéologie. On pourrait définir l’attitude fédéraliste comme un ref
69 fédéraliste comme un refus constant et instinctif de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et s
70 de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et satisfaisantes pour la logique, mais par là même i
71 estructrices des diversités qui sont la condition de la vie organique. Fédérer, ce n’est pas mettre en ordre d’après un pl
72 re en ordre d’après un plan géométrique, à partir d’ un centre ou d’un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes,
73 près un plan géométrique, à partir d’un centre ou d’ un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes, selon leurs car
74 s caractères particuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît p
75 ticuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’ articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème d
76 la fois de respecter et d’articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objecter
77 er dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objectera que le totalitarisme, lui aussi
78 qualités ne se traduit pas seulement dans le mode d’ élection du Conseil des États, mais surtout, et d’une manière beaucoup
79 d’élection du Conseil des États, mais surtout, et d’ une manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie pol
80 manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie politique et culturelle, où l’on voit la Suisse romande ou
81 nne jouer un rôle sans proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralism
82 proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour d
83 de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contras
84 arrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contraste avec le simplisme brutal qui caractérise
85 Burckhardt qualifiait dans une lettre prophétique de « terribles simplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’
86 mplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouve
87 l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, co
88 omplication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, féd
89 es institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’ horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, fédéraux, canton
90 , cantonaux, si diversement engrenés, il convient de leur montrer que cette complexité est la condition même de nos libert
91 ontrer que cette complexité est la condition même de nos libertés. C’est grâce à elle que nos fonctionnaires et nos législ
92 eurs sont constamment rappelés au concret, forcés de rester en contact avec les réalités humaines du pays. La Suisse est f
93 s réalités humaines du pays. La Suisse est formée d’ une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, lingui
94 nes du pays. La Suisse est formée d’une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, linguistiques, religie
95 frontières, et qui se recoupent et se recouvrent de cent manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un
96 ontières, et qui se recoupent et se recouvrent de cent manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un espri
97 n ou totalitaire, brimeraient nécessairement l’un de ces groupes, tendraient à réduire leur variété, et mutileraient ainsi
98 eur variété, et mutileraient ainsi dans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes,
99 ans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur t
100 ux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plu
101 s, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la
102 créter sur table rase, de simplifier les réalités d’ un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite
103 table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalis
104 , de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en é
105 trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en écrasant tout ce qui résiste, ou s
106 ut ce qui dépasse. Mais c’est la vitalité civique d’ un peuple qu’on écrase ainsi. Une politique fédéraliste, telle qu’on v
107 u’on vient de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle
108 de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne.
109 iniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne. C’est pourquoi je disais pl
110 pourquoi je vois en elle le seul avenir possible de l’Europe, et le don que nous pouvons lui faire en restant fidèles à n
111 stant fidèles à nous-mêmes. b. Rougemont Denis de , « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse (1848-1948), Morat, Édi
112 de, « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse ( 1848-1948 ), Morat, Éditions patriotiques, 1948, p. 461-464.
113 suisse (1848-1948), Morat, Éditions patriotiques, 1948, p. 461-464.
2 1948, Articles divers (1948-1950). Essai sur l’avenir (1948)
114 Essai sur l’avenir ( 1948 )a 1. Parabole des fées Tout cela est très joli ! disait l
115 Essai sur l’avenir (1948)a 1. Parabole des fées Tout cela est très joli ! disait le Docteur,
116 , la seule méthode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’ analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et
117 thode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et qui progresse
118 nous sommes libres, après Heisenberg et la Bombe, de penser n’importe quoi, et que cela changera tout. Pardon ! La science
119 uves que vos superstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font
120 uperstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’ égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font déjà mille ki
121 guérit ! Elle invente des machines qui font déjà mille kilomètres à l’heure ! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre
122  ! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre de la bombe atomique, ses spéculations les plus « folles » ! Libre à vou
123 s spéculations les plus « folles » ! Libre à vous de prendre pour but l’évocation des fées du Moyen Âge : jamais une fée n
124 pas folle, c’est qu’elle nous permet aujourd’hui d’ aller beaucoup plus vite qu’il y a cent ans. Voilà qui est sérieux, me
125 aujourd’hui d’aller beaucoup plus vite qu’il y a cent ans. Voilà qui est sérieux, me dites-vous. Et voilà qui est utile au
126 sant le contester autour de moi, je crois prudent de l’accepter. J’admets aussi que l’évocation des fées ne sert à rien et
127 ant que dans quelques lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’aller plus vite, et donc commencent à se demander à
128 es lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’ aller plus vite, et donc commencent à se demander à quoi cela sert. Su
129 pposez que leur plaisir nouveau et principal soit d’ évoquer quelque chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après deux
130 chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’application des bons esprits. Voilà le sérieux nou
131 omme les fées, et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’u
132 et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’ application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’utilité urge
133 ent la paix du cœur dans la souffrance, inventent mille tours sentimentaux insoupçonnés de notre barbarie, créent l’immobilit
134 , inventent mille tours sentimentaux insoupçonnés de notre barbarie, créent l’immobilité dont le sous-produit nommé lenteu
135 r est vénéré par quelques sectes populaires, font de la mort une plaisanterie d’un goût sublime qui perd son sel à être ré
136 ctes populaires, font de la mort une plaisanterie d’ un goût sublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’une seule
137 ublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’ une seule pensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendr
138 ensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendre pour but la construction d’un moteur atomique : jamais un mot
139 Libre à vous de prendre pour but la construction d’ un moteur atomique : jamais un moteur atomique n’a évoqué la moindre f
140 ée. Nous vous laissons à vos enfantillages.1 2. Utopies et prévisions La faiblesse générale des utopies, c’est qu’
141 s utopies, c’est qu’elles paraissent moins riches d’ avenir que le présent. On peut même dire que l’Utopie se définit comme
142 e la plupart des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des hi
143 art des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des historiens
144 bee, les utopies sont en réalité des « programmes d’ action déguisés en descriptions sociologiques imaginaires », et l’acti
145 utre que l’arrêt artificiel, à un certain niveau, d’ une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l
146 tain niveau, d’une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l’on considère comme bons, et l’on en
147 l’abri des menaces vulgaires comme des créations de l’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité touj
148 ’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire.
149 éalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’une manière moins s
150 f, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’ imaginer l’avenir d’une manière moins statique par hypothèse ? Quelles
151 e l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’ une manière moins statique par hypothèse ? Quelles seraient les condit
152 ons requises ? Il faudrait se garder tout d’abord de composer un tableau cohérent. Ménager à chaque pas la liberté du choi
153 choix, c’est-à-dire prévoir à chaque pas au moins deux solutions possibles. Détourner constamment l’imagination de la ligne
154 ns possibles. Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les ob
155 . Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les obstacles qu’o
156 essent à gauche et à droite. (C’est le vrai moyen de la passionner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos effo
157 onner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos efforts présents, les conduites qui pourront résulter du succès m
158 es conduites qui pourront résulter du succès même de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’imaginer beaucoup de
159 de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’ imaginer beaucoup de nos meneurs politiques : ils voient les condition
160 os meneurs politiques : ils voient les conditions de leur victoire, mais non ses suites.2) L’effort le plus soutenu, le mi
161 fourni jusqu’ici le monde occidental, c’est celui de dominer la nature par la science, dans l’espoir d’augmenter le confor
162 e dominer la nature par la science, dans l’espoir d’ augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la d
163 spoir d’augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysiqu
164 vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysique et religieux s’est relâché à partir du
165 ordre social acceptable, tantôt se disperse entre vingt sectes politiques contradictoires, tantôt se crispe en tyrannies, qui
166 nies, qui sont des désordres fixés. Seul l’effort de la science (dont le sous-produit est l’industrie) enregistre un progr
167 surable, et semble se poursuivre avec des chances de succès toujours accrues. Il en résulte, dans les masses, certaines cr
168 s, mais assez naturelles, dont je ne donnerai que trois exemples : 1. la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de
169 urelles, dont je ne donnerai que trois exemples : 1. la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession
170 rois exemples : 1. la science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. alle
171 science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bi
172 rs raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bien en soi. La vi
173 épend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bien en soi. La vitesse accrue est à nos yeux
174 c qu’elle est « vraie ». En retour, nous refusons de croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie o
175 croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie ou condamne, et nous accordons à cette science l’autor
176 ialiste et mécaniste, quand la science est depuis trente ans énergétique et statistique… Cependant, l’on peut imaginer qu’une
177 a science qu’elle vénère, ou du moins s’informera de ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’arrêt que semble ma
178 e ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’ arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Ca
179 du temps d’arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Car celle-ci semble avoir atteint, provisoi
180 me qu’elle l’a déjà percé, en ramenant un atome à de l’énergie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’immatériel,
181 gie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’ immatériel, pour parler un langage grossier. (Mais c’est celui, précis
182 elui, précisément, dans lequel la grande majorité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’i
183 ité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les not
184 temporains traduisent les résultats de la science d’ hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix
185 s tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau
186 prême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathé
187 es notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathématiciens et les b
188 e poussée à l’extrême ne peut nous rapprocher que de l’« à quoi bon ? », c’est-à-dire des questions métaphysiques que notr
189 ionaliste, indéfendable aux yeux de la science et de la raison, neutralise pratiquement la vitesse des transports. (Passer
190 e pratiquement la vitesse des transports. (Passer d’ Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époq
191 asser d’Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol
192 pe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mo
193 renait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches a
194 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, a
195 ue de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.
196 tophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.) La pas
197 tionnelles, superstitions et préjugés locaux. Ces deux passions produisent des guerres, à la faveur desquelles les possibili
198 faveur desquelles les possibilités destructrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beauco
199 uctrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beaucoup plus généreusement que ne le sont les
200 possibilités constructrices pendant les périodes de paix. On peut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre
201 eut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre effort scientifique, provoque ainsi les forces les mieux faites
202 ion prométhéenne. Une autre conséquence indirecte de l’effort scientifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la
203 ntifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait l
204 être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait la science du
205 psychologie, la sociologie, nous servent en fait d’ alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’e
206 nous servent en fait d’alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’en d’autres temps l’on eût app
207 qu’en d’autres temps l’on eût appelées faiblesse de caractère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en l
208 tère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre
209 n liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dan
210 e que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dans l’acte du
211 gurer qu’elle consiste à « avoir » la disposition d’ un choix d’objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S
212 le consiste à « avoir » la disposition d’un choix d’ objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S’il est vra
213 tion d’un choix d’objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S’il est vrai que les civilisations se dévelop
214 réponse victorieuse suscite un nouveau challenge 3, quels développements devons-nous prévoir à partir du complexe de tens
215 ppements devons-nous prévoir à partir du complexe de tensions que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature,
216 ons que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature, nous n’avons pas encore répondu par une victoire totale, i
217 ne victoire totale, il s’en faut, mais les moyens de cette victoire sont désormais entre nos mains. La principale résistan
218 par nos machines, c’est-à-dire par nos passions. Deux issues me paraissent dès lors imaginables. 1. Nous poursuivons notre
219 Deux issues me paraissent dès lors imaginables. 1. Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise de l’énergie atomiq
220 Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise de l’énergie atomique) en laissant en friche le champ des passions (nati
221 me, politique partisane). Les passions s’emparent de la technique et provoquent la guerre atomique. Les destructions sont
222 estructions sont telles, et le choc psychologique de telle nature, que la civilisation occidentale se disloque en îlots pl
223 loque en îlots plus ou moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les dern
224 u moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les derniers lieux communs mo
225 ux communs moraux se désintègrent. Il reste assez d’ hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances tech
226 se désintègrent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour mainte
227 rent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et
228 ’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et là des apparences de «
229 echniques pour maintenir ici et là des apparences de « vie normale », mais les liens profonds sont coupés. Plus rien ne va
230 rets, des policiers ou des fugitifs. Les sociétés de gangsters se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous o
231 se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous ordres, on expérimente des morales nouvelles et des formes nouve
232 nte des morales nouvelles et des formes nouvelles de résistance contre l’État vainqueur et son empire, théoriquement unive
233 vainqueur et son empire, théoriquement universel. De ces communautés persécutées peut sortir une spiritualité nouvelle, mè
234 utées peut sortir une spiritualité nouvelle, mère d’ une civilisation imprévisible. 2. Nous répondons au challenge des pass
235 é nouvelle, mère d’une civilisation imprévisible. 2. Nous répondons au challenge des passions nationalistes et politiques
236 libres et presque instantanés sur toute l’étendue de la planète. Pour la première fois dans l’histoire du monde, il n’y a
237 u’une seule civilisation (l’occidentale, enrichie d’ apports orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédé
238 orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédéraliste ; et la question sociale, au lieu de s’exacerber ten
239 ales la guerre et la paix ; soit que le challenge de nos passions se révèle trop puissant et que notre civilisation y succ
240 y répondions victorieusement par l’établissement d’ un gouvernement mondial, libérant l’effort scientifique. (Je note ce s
241 rt scientifique. (Je note ce sentiment, incapable de preuve, à titre de curiosité pour l’historien futur.) 4. Surmonter
242 à titre de curiosité pour l’historien futur.) 4. Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité d’une réponse victorieuse, à
243 r.) 4. Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité d’ une réponse victorieuse, à la dernière heure, quel serait le nouveau c
244 serait le nouveau challenge qui ne manquerait pas de confronter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre eff
245 ter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre effort le plus constant ? Ce serait à coup sûr l’Ennui. Ce sen
246 n la plus typique du xixe siècle. (Sans horaires de tous genres, on ne pourrait imaginer le fonctionnement des grandes us
247 ération vaste et dense.) « L’ennui naquit un jour de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretien
248 our de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider s
249 . Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’en
250 qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’ennui que la multiplicité des imp
251 en difficile de décider si la monotonie crée plus d’ ennui que la multiplicité des impressions. L’Océan ou les chutes du Ni
252 Niagara ne m’ennuient pas, mais bien la traversée d’ une grande ville inconnue. Ce qui provoque l’ennui, dans un cas comme
253 , dans un cas comme dans l’autre, c’est l’absence de rythmes vivants, ou leur rupture fréquente et arbitraire. En d’autres
254 traire. En d’autres termes, c’est la mécanisation de l’existence, ou encore : la répartition indifférente des efforts et d
255 oint choisi par quelque nécessité interne, en vue d’ une création, d’une participation, d’une compréhension en profondeur.
256 quelque nécessité interne, en vue d’une création, d’ une participation, d’une compréhension en profondeur. C’est donc un ac
257 erne, en vue d’une création, d’une participation, d’ une compréhension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entr
258 ension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imagin
259 ssement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de mena
260 ci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans un
261 hallenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans une tempête, mais bi
262 , l’humanité ne pourra répondre que par une prise de position métaphysique. Elle pourra choisir l’anesthésie spirituelle,
263 nesthésie spirituelle, ou l’aventure spirituelle. 1. L’anesthésie des masses ou insensibilisation à l’ennui, sera obtenue
264 lisation à l’ennui, sera obtenue par des méthodes de conditionnement social et physiologique, dont le principe général ser
265 l et physiologique, dont le principe général sera d’ obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question mét
266 que, dont le principe général sera d’obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question métaphysique que l
267 oute question métaphysique que l’Ennui risquerait de mettre à nu. Dans ce cas, les spirituels-malgré-tout se verront persé
268 robablement nomade, qui pourra devenir la matrice d’ une civilisation spirituelle et mondiale. 2. Si l’Humanité choisit au
269 trice d’une civilisation spirituelle et mondiale. 2. Si l’Humanité choisit au contraire l’aventure spirituelle, celle-ci s
270 e par une élite en tous points comparable à celle de nos savants actuels, dotée des mêmes prestiges populaires, exerçant u
271 exerçant une autorité analogue sur l’orientation de la recherche organisée, et définissant de facto les nouveaux standard
272 e, et définissant de facto les nouveaux standards d’ utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tour
273 sant de facto les nouveaux standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la m
274 x standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la matière — désormais « dépa
275 » — se tournera vers la découverte et la maîtrise de réalités d’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jo
276 era vers la découverte et la maîtrise de réalités d’ un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi p
277 ’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi peu imaginables pour nous que ne pouvait l’être pour
278 ants du xviiie siècle la destruction instantanée d’ une ville par suite de la dissociation d’un invisible point de matière
279 tantanée d’une ville par suite de la dissociation d’ un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, e
280 par suite de la dissociation d’un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, et sans nom dans notre
281 je désignais en débutant par le terme symbolique de Fées. 1. Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atom
282 s en débutant par le terme symbolique de Fées. 1. Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946.
283 empruntée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-S
284 tée à mes Lettres sur la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon
285 la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contr
286 ires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contribué d’ une manière décisive à donner forme à un avenir très différent de leur
287 écisive à donner forme à un avenir très différent de leurs prévisions. Saint-Simon a fourni les cadres du capitalisme indu
288 les annonçaient avec précision à la même époque. 3. Cf. Arnold Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis de, « Es
289 Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis de , « Essai sur l’avenir », Pro regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Cal
290 regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Callenbach, 1948, p. 401-407.
3 1948, Articles divers (1948-1950). Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)
291 Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)c La crise actuelle nous force à nous interrog
292 sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948 )c La crise actuelle nous force à nous interroger sur la valeur mêm
293 e nous force à nous interroger sur la valeur même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’auton
294 r même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’autonomie du continent, et que signifierait sa p
295 s qui pèsent sur nous mettent en cause une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis de
296 e une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’Europe. En les per
297 liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’ Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce
298 om d’Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la
299 coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la vie. Le monde entier en serait appauvri. C’est donc une notion de
300 entier en serait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun
301 ait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun. C’est en ell
302 nité la plus profonde. Et c’est en la définissant d’ une manière actuelle et concrète que nous poserons les bases de la féd
303 actuelle et concrète que nous poserons les bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de
304 bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que le
305 ui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nou
306 Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ordre économique et politique, il n’est pas moins ce
307 t vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ ordre économique et politique, il n’est pas moins certain que l’unité
308 politique, il n’est pas moins certain que l’unité de l’Europe est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géogra
309 e est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géographie, l’Europe n’est qu’un cap de l’Asie. Du point de vue de
310 du monde, l’Europe reste aujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’une culture inégalée, plus intense, plus div
311 ujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’ une culture inégalée, plus intense, plus diverse et créatrice qu’en to
312 lus diverse et créatrice qu’en toute autre région de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plu
313 ion de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plus large et humain. La culture véritable n’est
314 e véritable n’est pas un ornement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme
315 ement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît
316 mble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle il
317 concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’ une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut
318 la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut une certaine conception de
319 ustre, traduit et promeut une certaine conception de l’existence ; elle l’éduque ; elle en donne le sens. Or il est bien t
320 e ; elle en donne le sens. Or il est bien typique de l’Europe, aujourd’hui, que la culture ainsi comprise y soit encore un
321 lleurs, elle est mise au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du
322 se au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du parti au pouvoir, l
323 ont les chefs du parti au pouvoir, les dirigeants de l’économie qui lui dictent un programme précis, qui limitent ses acti
324 aire, c’est la culture qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influen
325 qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les c
326 ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définit
327 fluencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et
328 uté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et promouvoir notre culture, cela signifie d’abor
329 Européens : élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moye
330 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins
331 nifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités
332 es moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités publiques et privées à une
333 privées à une notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le
334 notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vi
335 ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vie et les institutions. La conception européenne de l’homme
336 et les institutions. La conception européenne de l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa l
337 e l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une d
338 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique
339 e sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’ une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie, mais au cont
340 été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique, d’ une nation ou d’une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours,
341 l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou d’ une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours, et ce sera, tant
342 , et ce sera, tant qu’il y aura l’Europe, l’effet d’ un dialogue permanent, bien souvent dramatique, parfois tragique, entr
343 doctrines ou plusieurs confessions, une vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, il
344 ssions, une vingtaine de nations, et une infinité d’ écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Eu
345 vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Europe et à mo
346 é à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée n’est pas simple, mais toujours dialectique ; ell
347 le trouve son unité dans la diversité des couples d’ éléments antagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous e
348 tagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous et se renouvelle à chaque génération : antiquité et christianism
349 et protestantisme, attachements régionaux et sens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion
350 ens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion du progrès, science et sagesse, germanisme et
351 e… Dans cet équilibre tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risqu
352 tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme
353 se menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aven
354 ’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous p
355 ropéen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous participe plus ou moins consciemment réside le secret du dynamis
356 mment réside le secret du dynamisme occidental et de l’inquiétude créatrice qui pousse l’Européen à remettre en question,
357 ice qui pousse l’Européen à remettre en question, de siècle en siècle, ses rapports avec Dieu, avec le monde, avec l’État
358 naisons variées à l’infini qu’il lui est possible d’ opérer entre les éléments contradictoires constituant son patrimoine,
359 patrimoine, réside la chance, pour tout Européen, d’ individualiser de plus en plus ses jugements et son mode de vie. Et en
360 ns ce choix permanent, dans la conscience qu’il a d’ en être responsable, l’Européen conçoit la liberté. Toute notre histo
361 istoire illustre ce débat, qui se livre en chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entr
362 n chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrann
363 rté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’indiv
364 écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits
365 grès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l
366 Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à ce
367 e sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste s
368 ile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste se déclenche, au nom de la
369 llectiviste se déclenche, au nom de la justice ou de l’ordre social. Elle donne naissance à des régimes unitaires (qu’on a
370 à se dresser avec une passion renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenan
371 renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenant dans quelle notion commune d
372 s cherchons maintenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’indiv
373 intenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et d
374 t de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et du collectivisme, renaissant à toutes les époques
375 qu’au xxe siècle, mais qui a toujours été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idé
376 été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion
377 ion directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’origine chrétienne, acceptée et r
378 ’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’ origine chrétienne, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de
379 e, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de l’homme doublement responsable envers sa vocation et envers la cité ;
380 on pas seulement libre ou seulement engagé ; lieu d’ une synthèse vivante, mais aussi d’un conflit entre des exigences égal
381 engagé ; lieu d’une synthèse vivante, mais aussi d’ un conflit entre des exigences également valables mais pratiquement an
382 devient infidèle à lui-même et au génie créateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes,
383 réateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa p
384 de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa particularité (nation, parti ou idéologie), soit q
385 idéologie), soit qu’il prétende l’imposer à tous d’ une manière uniforme, donc tyrannique. Diversité et division des na
386 et des idéologies Cette description succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-
387 succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-uns des problèmes brûlants que nous pos
388 ntinent, a fait pendant des siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusio
389 siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État,
390 ité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réa
391 e. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réalités culturelle
392 iques et administratives, qui n’ont aucune raison de se recouvrir en fait, cette diversité naturelle est devenue division
393 uvrit nos échanges culturels. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’as
394 els. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’assurer son existence écono
395 apable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’ assurer son existence économique. Cet individualisme national, qui ten
396 anger pour la vie réelle des nations. Dans l’état de faiblesse où il les met, il les livrera fatalement à l’unification fo
397 t à l’unification forcée, soit par l’intervention d’ un empire du dehors, soit par l’usurpation d’un parti du dedans. C’est
398 tion d’un empire du dehors, soit par l’usurpation d’ un parti du dedans. C’est pourquoi l’union fédérale est devenue la seu
399 es. Aussi indispensables que les nations à la vie de la culture et à la liberté, ces diversités à leur tour tendent à deve
400 ngereuse et utopique que ne serait l’impérialisme d’ une seule nation. Il est bien clair que ni la droite, ni la gauche, ni
401 uche, ni le centre, aujourd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de
402 urd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par
403 cun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par suite son propre avenir. De même que les nati
404 son propre avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique
405 e avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur s
406 ue si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre l
407 ue de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, ren
408 souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, renoncent à t
409 ubordonnent leur tactique à la stratégie générale d’ une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour
410 eur tactique à la stratégie générale d’une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour sauver nos d
411 de salut public européen. c. Rougemont Denis de , « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Par
412 t Denis de, « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Paris, juin 1948, p. 14-15.
413 s (le sens de La Haye) », Fédération, Paris, juin 1948, p. 14-15.
4 1948, Articles divers (1948-1950). Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)
414 Pourquoi l’Europe ? ( 25 décembre 1948)d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont e
415 Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948 )d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’o
416 Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)d e Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’observer, par
417 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
418 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
419 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
420 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
421 une puissance, parce que l’Europe est divisée en vingt nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille qu’il faut, pour parl
422 er et se faire entendre, dans le monde dominé par deux grands empires. Et non seulement l’Europe n’est plus une puissance qu
423 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
424 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
425 tique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent la terre. Voici le fait fondamental, et que
426 fondamental, et que personne ne peut nier : Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
427 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les probl
428 à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
429 omie moderne. Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
430 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
431 cité. Si les choses continuent comme elles vont : Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns a
432 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
433 t annexés ou colonisés les uns après les autres ; La question allemande ne sera pas réglée, c’est-à-dire fournira un pr
434 rétexte permanent à la guerre entre USA et URSS ; Rien ne pourra s’opposer à cette guerre entre la Russie et l’Amérique
435 à-dire la Troisième puissance, qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
436 e puissance, qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
437 capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même unie, serait encore trop
438 rait encore trop petite pour tenir en respect les deux Grands, je vous rappellerai un seul chiffre, qu’on a tendance à oubli
439 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
440 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
441 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
442 e, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que l
443 onc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions , c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie
444 de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie et tous ses satelli
445 e la Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres
446 Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu
447 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
448 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
449 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
450 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
451 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
452 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
453 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
454 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
455 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
456 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique Cela « soulè
457 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
458 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ic
459 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ici ! — mais nous nou
460 ntre les thèses — ici ! — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
461 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
462 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
463 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
464 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
465 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
466 l nous faut faire l’Europe. Mais quelle Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues
467 re l’Europe. Mais quelle Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
468 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
469 avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et j
470 rs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et je ne sa
471 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
472 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
473 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
474 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
475 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
476 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
477 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
478 lisme et universalisme, liberté et engagement, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés e
479 t, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés et permutés, sans parler de leur ménages à tr
480 autres couples combinés et permutés, sans parler de leur ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les au
481 mbinés et permutés, sans parler de leur ménages à trois , et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les autres, et nul d’entre
482 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
483 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
484 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
485 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
486 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
487 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
488 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
489 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
490 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
491 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
492 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
493 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
494 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle sa liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
495 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
496 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
497 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
498 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
499 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
500 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
501 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps, par
502 draient pour un temps, par la force, il resterait dix autres couples d’adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne
503 ps, par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
504 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
505 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolog
506 re sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
507 plans, qui dit fédéralisme dit toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais égale
508 t toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais également valables, et qu’il ne s’
509 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
510 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
511 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
512 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
513 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
514 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
515 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
516 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
517 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
518 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec to
519 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec tout le monde
520 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
521 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ain
522 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ainsi qu’on pe
523 pose à votre admiration : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
524 édéraliste), ce n’est pas être absent, c’est être deux fois présent. Merci, messieurs, une fois nous suffirait. Mais soyons
525 suffirait. Mais soyons sérieux : quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
526 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
527 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
528 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
529 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
530 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
531 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
532 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
533 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclament leur fédération, pourront se faire entendre au m
534 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de, « Pourquoi l’Europe ? », Rasse
535 forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de , « Pourquoi l’Europe ? », Rassemblement : bulletin intérieur hebdomad
536  : bulletin intérieur hebdomadaire du RPF, Paris, 25 décembre 1948, p. 1-2. e. Présenté par cette note : « Denis de Rouge
537 intérieur hebdomadaire du RPF, Paris, 25 décembre 1948, p. 1-2. e. Présenté par cette note : « Denis de Rougemont, l’auteur
538 ette note : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récem
539 e : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’ essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récemment des
540 nt de faire, en tant que membre du Comité central de l’Union européenne des fédéralistes, une conférence en Sorbonne. Les
541 à quel point les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblemen
542 t les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblement. »
5 1949, Articles divers (1948-1950). La liberté religieuse à l’école (2e semestre 1949)
543 La liberté religieuse à l’école ( 2e semestre 1949)h i La secte des adventistes du septième jour, se ré
544 La liberté religieuse à l’école (2e semestre 1949 )h i La secte des adventistes du septième jour, se référant au Déca
545 règlements scolaires sont stricts : toute absence d’ un élève qui n’est pas justifiée par des raisons « réputées légitimes 
546  réputées légitimes », telle que maladie, réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être pun
547 réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être punie, surtout si elle se répète à intervall
548 lors subie par les parents ou responsables, et va de l’amende à la prison selon les cas et les pays. On imagine tous les c
549 s aussi sévères, pour peu qu’on veuille se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossier
550 le se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’ examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes
551 ontre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes dans trois pays : la Bel
552 dossiers relatifs à des familles adventistes dans trois pays : la Belgique, la France et la Suisse. Dans quatre écoles belges
553 pays : la Belgique, la France et la Suisse. Dans quatre écoles belges (communale, moyenne, normale et un lycée) la preuve a é
554 ns plusieurs départements, après que les demandes de dispense ont été refusées « au nom de la loi », il est arrivé fréquem
555 loi », il est arrivé fréquemment que le directeur d’ une école, ou l’inspecteur d’académie, consentissent finalement à inte
556 ent que le directeur d’une école, ou l’inspecteur d’ académie, consentissent finalement à interpréter la loi, et à suspendr
557 n Algérie ou en Alsace, des amendes ou des peines de prison ont été infligées aux pères d’enfants absents plusieurs samedi
558 des peines de prison ont été infligées aux pères d’ enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches a
559 ées aux pères d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignemen
560 res d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’ innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des pré
561 te. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des préfets et des ministres semblent avoir rencontré
562 quel que soit le désir, dont beaucoup témoignent, d’ assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la
563 nt beaucoup témoignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’e
564 moignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolér
565 la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’ un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de préte
566 il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’i
567 e l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’intolérance. En Suisse, la situation dif
568 il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’ intolérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’un canton à l’
569 lérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’ un canton à l’autre. C’est ainsi que l’État de Genève accorde le congé
570 eligieux, tandis que l’État de Vaud le refuse. Le 1er avril 1948, Marcel D…, citoyen vaudois, s’est vu arrêté par les genda
571 tandis que l’État de Vaud le refuse. Le 1er avril 1948, Marcel D…, citoyen vaudois, s’est vu arrêté par les gendarmes et inca
572 vu arrêté par les gendarmes et incarcéré pendant trente heures parce que sa fille manquait l’école le samedi matin, et qu’il
573 nquait l’école le samedi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se re
574 medi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d
575 i matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d’u
576 ce : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d’ une faute, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettr
577 e, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettre. À ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinqu
578 interdisent de l’admettre. À ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un
579 ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen berno
580 uatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’ absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a acce
581 isonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de pay
582 autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence
583 ccepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’
584 pté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en
585 de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en a pa
586 llant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en a pas moins été condamné (
587 a pas moins été condamné (après « récidives ») à trois , puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envo
588 té condamné (après « récidives ») à trois, puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dan
589 après « récidives ») à trois, puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dans un cant
590 loi paraît plus tolérante. L’instruction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes compr
591 ction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une diza
592 on primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une dizaine d
593 sses, amendes comprises. Nous pourrions citer une dizaine d’autres situations, fort analogues. « Exceptions négligeables »
594 ous disent les gens pressés : qu’il ne s’agit que de cas fort rares, que les adventistes sont en très petit nombre, qu’ils
595 tistes sont en très petit nombre, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la sema
596 e, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne m
597 r sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’indignation, d
598 semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’ indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millio
599 indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou a
600 ans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. R
601 poque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’ innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Rema
602 e sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Remarquons tout d’abord que le n
603 e que pour être quotidiennement perpétrée sur des millions , et il est curieux que les bonnes gens qui parleraient volontiers « d
604 que les bonnes gens qui parleraient volontiers «  d’ exceptions négligeables » dans le cas d’une secte brimée, ne voient pa
605 ontiers « d’exceptions négligeables » dans le cas d’ une secte brimée, ne voient pas que cet argument devrait en bonne logi
606 , dont le nombre est infime. Ensuite, la question de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au
607 n de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davan
608 ison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davantage intervenir dans la considération des fai
609 qui nous occupent. Il s’agit ici du respect légal de toutes les convictions religieuses en tant que telles, et non point d
610 uses en tant que telles, et non point du jugement de vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions,
611 vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions, car si les deux points de vue n’étaient pas dissocié
612 r l’une ou l’autre de ces convictions, car si les deux points de vue n’étaient pas dissociés, l’on aboutirait fatalement à r
613 nutieusement ces libertés. Céder sur une question de principe, sous prétexte qu’elle n’intéresse qu’une minorité microscop
614 écise, suffirait à résoudre des conflits du genre de ceux que l’on vient de citer. Il serait, par exemple, extrêmement fac
615 citer. Il serait, par exemple, extrêmement facile d’ introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une
616 facile d’introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une clause spéciale ajoutant à la liste des « 
617 éciale ajoutant à la liste des « motifs légitimes d’ absence aux cours » le fait d’appartenir à certaines religions, sectes
618 « motifs légitimes d’absence aux cours » le fait d’ appartenir à certaines religions, sectes ou confessions. À cela j’imag
619 s ou confessions. À cela j’imagine qu’on opposera deux objections courantes : on dira qu’il est trop compliqué de prévoir to
620 ions courantes : on dira qu’il est trop compliqué de prévoir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des p
621 ir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des précédents dont mille sectes à l’avenir pourront être tenté
622 qu’il est dangereux de créer des précédents dont mille sectes à l’avenir pourront être tentées d’abuser. Le premier argument
623 ont mille sectes à l’avenir pourront être tentées d’ abuser. Le premier argument n’est pas sérieux. Les lois pénales décriv
624 ux. Les lois pénales décrivent dans le détail des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscale
625 is pénales décrivent dans le détail des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales,
626 il des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales, les lois sur les loyers et les « 
627 ns à distinguer, à nuancer, à préciser, à prévoir d’ infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien
628 à prévoir d’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateu
629 ’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateur ! S’il n’a
630 ur le législateur ! S’il n’apportait qu’une trace de ce génie méfiant dans la rédaction des décrets garantissant les droit
631 itutions, la Liberté et la Démocratie cesseraient d’ être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on d
632 t la Démocratie cesseraient d’être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on dit avoir, que des « pa
633 n’ouvrent la porte à l’anarchie, elle se nourrit d’ une double confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’accorder des
634 uble confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’ accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « libe
635 s d’accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties p
636 iaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties proclament à l’envi. Et d’aut
637 roclament à l’envi. Et d’autre part, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement
638 t, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement. Quand ils se révéleraient deux o
639 ultiplient abusivement. Quand ils se révéleraient deux ou trois fois plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ajout
640 nt abusivement. Quand ils se révéleraient deux ou trois fois plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ajouter quelqu
641 s plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ ajouter quelques clauses aux milliers d’autres, utiles ou non, qui s’a
642 as une affaire que d’ajouter quelques clauses aux milliers d’autres, utiles ou non, qui s’accumulent dans nos codes. Si l’anarch
643 ation simpliste et uniforme, elle aussi, implique mille désordres, puisqu’elle se traduit nécessairement par mille applicatio
644 ordres, puisqu’elle se traduit nécessairement par mille applications tyranniques — et que « la tyrannie est le souverain déso
645 montrent soudain les plus stricts dans leur refus de considérer les droits d’une petite confession qui ne menace personne.
646 stricts dans leur refus de considérer les droits d’ une petite confession qui ne menace personne. On les honore d’avoir sa
647 confession qui ne menace personne. On les honore d’ avoir sauvé d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoi
648 i ne menace personne. On les honore d’avoir sauvé d’ une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au ra
649 d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parl
650 la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’un cent
651 ionale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’ un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils
652 u’elle ne soit parlée que par moins d’un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils pas qu’en assu
653 nt ne verraient-ils pas qu’en assurant les droits d’ une minorité religieuse, ils confirmeraient les principes qui, depuis
654 ils confirmeraient les principes qui, depuis plus d’ un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur p
655 s qui, depuis plus d’un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’e
656 sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des d
657 eur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des difficultés particulièr
658 tent leurs croyances, m’a paru propre à illustrer d’ une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse
659 er d’une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse à l’école. Parce qu’il n’est pas spectaculaire,
660 aru poser le plus clairement possible la question de principe du respect effectif des libertés théoriquement admises par l
661 , mais je sais que toute restriction à la liberté d’ un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du
662 n à la liberté d’un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne
663 tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne l’oublions jamais, est en quelque manière ou quelqu
664 ersécution qu’une autre endure. Est-il nécessaire d’ ajouter qu’il en va de même pour nos droits politiques et civiques ? O
665 r la liberté, dans notre monde, qu’en s’efforçant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de, « La liberté religieuse
666 çant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de , « La liberté religieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris, 1
667 gieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris, 1949, p. 11-14. i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas de petit
668 i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Au
669 ar la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Autoriser une r
670 t, en fait, refuser cette liberté qu’on se flatte de lui accorder. Denis de Rougemont l’expose fort bien dans les pages qu
671 ’est pas inconditionnelle n’est qu’une caricature de la liberté. » j. « Confession » dans l’original. On a corrigé une er
6 1949, Articles divers (1948-1950). Commencer par l’Europe (février 1949)
672 Commencer par l’Europe (février 1949 )f Il paraît que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin d’att
673 l’Europe (février 1949)f Il paraît que l’idée d’ un gouvernement mondial vient enfin d’atteindre Paris ; il était temps
674 que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin d’ atteindre Paris ; il était temps ! C’est une idée qui était dans l’air
675 est une idée qui était dans l’air depuis au moins trois ans, mais elle y serait sans doute restée si quelques écrivains n’ava
676 mondiales. Qui dira plus ? Ici, nous avons l’air de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. N
677 ir de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de na
678 de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander :
679 urope. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander : pourquoi l’Europe 
680 rticulier : c’est qu’il faut lui montrer un point d’ application. (Or, quand on veut engager un élan émotif dans la réalité
681 élan émotif dans la réalité, on a toujours l’air de freiner.) Nous ne sommes pas une autre école, nos buts finaux sont bi
682 renons au mot. Et nous vous proposons une méthode de travail, un mouvement qui est déjà au travail, et un objectif immédia
683 déjà au travail, et un objectif immédiat, qui est de commencer par l’Europe. Car nous pensons que le chemin vers la paix,
684 u ne passera pas du tout. J’ai peut-être le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a trois ans, je m
685 tre le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’ Hiroshima, il y a trois ans, je me suis trouvé l’un des premiers à pro
686 er ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a trois ans, je me suis trouvé l’un des premiers à proclamer, en Amérique et
687 ouvernement mondial. Je n’ai pas un mot à retirer de ce que je publiais à l’époque. Je ne suis pas un instant revenu en ar
688 revenu en arrière. Je suis au contraire convaincu d’ avoir fait un grand pas en avant en embrassant la cause européenne. Vo
689 quelles raisons, les plus simples du monde, mais d’ une logique à laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me s
690 laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me soustraire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planèt
691 traire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planète unie par les peuples unis — et j’en étais — un certain rid
692 peuples unis — et j’en étais — un certain rideau de fer est tombé, brutalement. Et la guerre froide a commencé. La situat
693 a situation s’est donc précisée, si je puis dire… Deux colosses, ou qui nous semblent tels, sont en train de s’observer, par
694 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
695 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
696 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
697 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
698 s une puissance parce que l’Europe est divisée en vingt nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille qu’il faut pour parle
699 t se faire entendre, dans le monde dominé par les deux grands empires. Et non seulement l’Europe n’est plus une puissance qu
700 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
701 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
702 tique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent la terre. Voici le fait fondamental, et que
703 fondamental, et que personne ne peut nier : aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
704 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les prob
705 une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
706 ie moderne. ⁂ Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
707 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
708 cité. Si les choses continuent comme elles vont : Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns a
709 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
710 t annexés ou colonisés les uns après les autres ; La question allemande ne sera pas réglée, c’est-à-dire fournira un pr
711 rétexte permanent à la guerre entre USA et URSS ; Rien ne pourra s’opposer à cette guerre entre la Russie et l’Amérique
712 ère sortirait vaincue. Tout cela est simple comme 2 et 2 font 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enf
713 ortirait vaincue. Tout cela est simple comme 2 et 2 font 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enfin la
714 t vaincue. Tout cela est simple comme 2 et 2 font 4  : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’être enfin la derniè
715 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’ être enfin la dernière, parce qu’elle laissera peu de monde pour en fa
716 aussi tout cela nous conduit, avec la force même de l’évidence, vers une seule et unique solution. Si nous voulons sauver
717 et unique solution. Si nous voulons sauver chacun de nos pays, il nous faut unir ces pays. Si nous voulons sauver la paix,
718 -à-dire la troisième puissance qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
719 me puissance qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
720 capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même unie, serait encore trop
721 rait encore trop petite pour tenir en respect les deux Grands, je rappellerai un seul chiffre, qu’on a tendance à oublier :
722 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
723 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
724 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
725 e, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que l
726 onc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions , c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie
727 de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et autant que la Russie et tous ses satelli
728 e la Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres
729 Russie et tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu
730 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
731 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
732 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
733 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
734 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
735 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
736 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
737 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
738 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
739 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique. Cela « soul
740 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
741 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — m
742 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — mais nous nous occup
743 rien contre les thèses — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
744 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
745 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
746 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
747 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
748 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
749 ns viennent nous dire : tous ces gens, qu’ont-ils de commun entre eux ? Quelle unité voyez-vous dans tout cela ? Eh bien,
750 e : tous ces gens partagent le même sort, le sort de l’Europe, c’est-à-dire que si l’on ne fait rien, ils seront tous les
751 s gens ont en commun le dégoût et la peur immense de la guerre, et nous voulons pour eux et avec eux faire la paix. Voilà
752 aincre. ⁂ J’en reviens à la méthode et aux moyens d’ action. Aux impatients qui rêvent d’unifier le genre humain dans les q
753 et aux moyens d’action. Aux impatients qui rêvent d’ unifier le genre humain dans les quinze jours, le plus grand choc que
754 nts qui rêvent d’unifier le genre humain dans les quinze jours, le plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est de les fair
755 e plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore
756 c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore notre fédération européenne. Car c’est préci
757 parti au pouvoir et une opposition, un seul type de drug-store, et une morale moyenne, dont l’idée générale est justement
758 orale moyenne, dont l’idée générale est justement d’ éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie,
759 ement d’éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie, c’est encore plus simple : une seule tête,
760 le : une seule tête, un parti, une police, et pas d’ opposition permise dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines d
761 sition permise dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues
762 dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
763 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
764 avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et j
765 rs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contradictoires, et je ne sa
766 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
767 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
768 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
769 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
770 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
771 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
772 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
773 lisme et universalisme, liberté et engagement, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés e
774 t, et vingt autres tensions dans tous les ordres, vingt autres couples combinés et permutés, sans parler de leurs ménages à t
775 autres couples combinés et permutés, sans parler de leurs ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les a
776 binés et permutés, sans parler de leurs ménages à trois , et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les autres, et nul d’entre
777 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
778 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
779 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
780 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
781 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
782 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
783 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
784 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
785 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
786 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
787 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
788 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
789 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle la liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
790 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
791 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
792 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
793 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
794 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
795 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
796 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps par l
797 ndraient pour un temps par la force, il resterait dix autres couples d’adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne
798 mps par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
799 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
800 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolo
801 e sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
802 plans, qui dit fédéralisme dit toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais égale
803 t toujours à la fois deux choses, pense à la fois deux choses apparemment contraires mais également valables, et qu’il ne s’
804 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
805 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
806 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
807 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
808 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
809 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
810 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
811 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
812 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
813 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.
814 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d
815 ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d’ insister : la méthode du fédéralisme est la seule qui soit adaptée à n
816 ropéennes. Faire du fédéralisme, c’est donc faire de l’Europe, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ I
817 rope, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assig
818 s de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assigne une pareille attitude. Certes, nous voulons f
819 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
820 s en préconisant le fédéralisme à tous les étages de la société, dans la commune et l’entreprise d’abord, puis à l’échelle
821 savons bien que nous heurtons certaines habitudes de pensée à la fois nationalistes et rationalistes, c’est-à-dire en un m
822 ure des obstacles qu’elle trouve posés en travers de sa route vers l’Europe fédérée et vers la paix — à la destruction du
823 et que Nietzsche appelait un jour « le plus froid de tous les monstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toute
824 nstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toutes nos guerres. Sur ce point-là, nous serons à notre tour irréduc
825 e que nous voulons supprimer, c’est l’étatisation de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par l
826 on de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le
827 ation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le dogme et la pratique des souverainetés nati
828 nous demandons et préparons, comme premier point de tout notre programme, l’institution d’une Cour suprême européenne, c’
829 mier point de tout notre programme, l’institution d’ une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’un pouvoir supérieur aux É
830 ution d’une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’ un pouvoir supérieur aux États. Cette Cour suprême doit être la gardie
831 États. Cette Cour suprême doit être la gardienne d’ une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en app
832 me doit être la gardienne d’une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en appeler, contre les pouvoir
833 t qui garantit les libertés européennes, le droit d’ opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas
834 e droit d’opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler
835 n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler de dictature : voir les démocraties dites populaires. Les vues que j’ex
836 action qui se poursuit dans toute l’Europe depuis deux ans et qui est en train d’aboutir à certains résultats concrets. La C
837 à certains résultats concrets. La Conférence des Cinq va peut-être accepter notre plan de Parlement européen. Cette assembl
838 férence des Cinq va peut-être accepter notre plan de Parlement européen. Cette assemblée, que nous voulons élue à la fois
839 a fois par les parlements et par les forces vives de chaque pays, doit se réunir dans quelques mois. Elle aura pour missio
840 réunir dans quelques mois. Elle aura pour mission de proposer la création d’une Cour suprême et la Constitution fédérale d
841 s. Elle aura pour mission de proposer la création d’ une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelqu
842 on d’une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelque chose, qui peut devenir beaucoup… Mais nous s
843 instant dévier vers on ne sait quelles alliances d’ États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans tr
844 ne sait quelles alliances d’États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait
845 alliances d’États souverains pris de panique, ou d’ états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait quelles déclara
846  ; vers on ne sait quelles déclarations sans rire de sécurité collective ; vers on ne sait quelle coalition sur le papier
847 le coalition sur le papier qui se donnerait l’air de provoquer l’un des deux grands, sans créer pour autant la force néces
848 pier qui se donnerait l’air de provoquer l’un des deux grands, sans créer pour autant la force nécessaire pour décourager l’
849 ger l’agression… C’est donc, pour nous, le moment d’ être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active d
850 moment d’être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d
851 active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d’ imprimer un grand élan à notre propagande populaire, ou pour mieux dir
852 e populaire, ou pour mieux dire : à l’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui
853 ’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui seul, faire tout le travail et créer
854 bien ne plus entendre, pour l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-c
855 plus entendre, pour l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci :
856 r l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons
857 une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons que souhaiter bonn
858 eux pionniers du fédéralisme. » C’est une manière de dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts
859 dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts, et si vous gagnez par miracle, bien entendu, nous v
860 a ceux qui nous applaudissent, comme ces soldats de je ne sais quel pays, dans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sor
861 ans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sortir de la tranchée et s’élancer le premier à l’attaque, criaient bravo ! bra
862 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ain
863 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ainsi qu’on po
864 cette phrase admirable : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
865 édéraliste), ce n’est pas être absent, c’est être deux fois présent. Merci, messieurs, une fois nous suffirait. Mais soyons
866 suffirait. Mais soyons sérieux ; quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
867 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
868 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
869 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
870 us disent non sans raison : « Nous sommes saturés de discours ! Ce qu’il nous faut, ce sont des gestes ; sortez avec un ou
871 bien tort quand il cherchait un homme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’en devenir un lui-même. C’est le plu
872 omme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’ en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’en trouver. Une bata
873 d’en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’ en trouver. Une bataille est en train de se livrer pour l’Europe. Nous
874 ralisme court sa chance, et avec elle les chances de la paix. Si nous voulons la paix, nous devons vouloir ses moyens : l’
875 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
876 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
877 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
878 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
879 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclamant leur fédération, pourront se faire entendre au m
880 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de, « Pour sauver la paix : commen
881 forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de , « Pour sauver la paix : commencer par l’Europe », Fédération, Paris,
882 mencer par l’Europe », Fédération, Paris, février 1949, p. 70-77.
7 1949, Articles divers (1948-1950). L’Europe ou le cap du destin (1949)
883 L’Europe ou le cap du destin ( 1949 )g Toutes les grandeurs européennes viennent de l’esprit, et non pa
884 eurs européennes viennent de l’esprit, et non pas de la nature ni du nombre. Comment expliquer autrement que ce cap déchiq
885 Comment expliquer autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa popu
886 iquer autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4  % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ai
887 r autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu
888 de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’ un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant p
889 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant par ses armes
890 es pouvoirs sur les choses et la vie ? Les causes de cette puissance, naguère mondiale, du « petit cap », furent très dive
891 urope a dominé par ses techniques, par sa science de la mise en valeur d’un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a
892 s techniques, par sa science de la mise en valeur d’ un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a dominé par la violenc
893 aussi, et par la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a d
894 ssi, et par la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’un
895 r la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une m
896 a mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière be
897 esclavage ou en servage de centaines de millions d’ habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beauc
898 u en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beaucoup plus sub
899 abitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’ une manière beaucoup plus subtile, et peut-être plus effective, en imp
900 n imposant à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme,
901 à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dé
902 ertain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dérivent les grands concepts
903 ristianisme, et dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité
904 t dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, conc
905 ent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se
906 nds concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament,
907 berté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament, au xxe siècle, l
908 tiens, les Américains comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de te
909 comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science p
910 de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctr
911 eux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou
912 e. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés d
913 e philosophie ou de technique, de science pure ou d’ industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le
914 ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier
915 e pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marqu
916 industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marques — ou les
917 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. Et certes, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes d
918 s, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes de sa puissance ; on les retourne sans scrupules contre elle. Mais elle
919 rupules contre elle. Mais elle reste le palladium d’ une civilisation que tous rêvent d’imiter. Dire que l’Europe est mena
920 e le palladium d’une civilisation que tous rêvent d’ imiter. Dire que l’Europe est menacée — et l’on sait à quel point la
921 se — c’est donc dire que le cœur et la conscience d’ une culture désormais universelle sont menacés. Pour le bien comme pou
922 Pour le bien comme pour le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres contine
923 ur le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres continents nous ont ravi les
924 res continents nous ont ravi les moyens matériels de la puissance, et nous en ont en quelque sorte purifiés. Ils nous ont
925 us ont condamnés à ne représenter que l’essentiel d’ une civilisation : son génie, ses mesures, sa culture. Défendre l’Euro
926 riel, ni la puissance militaire, ni la suprématie de la race blanche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’État,
927 nche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’ État, ni le nationalisme, car l’Amérique ou la Russie s’en chargent. E
928 a Russie s’en chargent. Et s’il ne s’agissait que de cela, nous pourrions aussi bien nous laisser coloniser par les Yankee
929 iniens. Ils ont appris à se servir mieux que nous de ces armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. S
930 armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. Si les Européens, dans leur majorité, refusent à la fois d
931 Européens, dans leur majorité, refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sen
932 refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sentent bien que dans le meilleur
933 sentent bien que dans le meilleur cas, en retour de certains avantages matériels, ils perdraient ce qui fait le sens même
934 atériels, ils perdraient ce qui fait le sens même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aîn
935 s même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diab
936 céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’ aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diable. Et le monde entier e
937 Cette Europe, pratiquement réduite à l’essentiel de son génie, à ce qu’il a de plus défendable, comment allons-nous la dé
938 ouanes, et créer des pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
939 pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
940 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
941 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul
942 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de préveni
943 eut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de prévenir la guerre. Tels sont les buts concrets que se sont assignés
944 eurs du Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’ août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’o
945 Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
946 u mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, une Assemblée parl
947 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce
948 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande artif
949 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, nous venons de le voir ; c’est
950 iment existe, nous venons de le voir ; c’est lui, d’ instinct, qui nous fait repousser les tentations russe et américaine.
951 ns russe et américaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre consc
952 ricaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissan
953 aintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’ expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche don
954 ’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche dont le congrès d
955 t et agissant. Telle est la tâche dont le congrès de La Haye, il y a un an, proclamait la nécessité. La section culturelle
956 européen de la culture, prévu par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’études. Il a son siège à Genève, où il t
957 par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’ études. Il a son siège à Genève, où il travaille depuis le mois de fév
958 on siège à Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) D
959 Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) Documentatio
960 de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) Documentation sur tous les efforts entrepris dans les
961 r tous les efforts entrepris dans les divers pays d’ Europe en faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres
962 pays d’Europe en faveur de l’union des peuples et d’ une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existe
963 faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’i
964 s et d’une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première t
965 e éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’ instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première tâch
966 gnorent mutuellement. La première tâche sera donc de dresser un inventaire des forces spirituelles, intellectuelles et art
967 nt. b) Coordination des activités « culturelles » de tous ordres, qui se placent sur un plan européen. Deux exemples entre
968 tous ordres, qui se placent sur un plan européen. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser
969 placent sur un plan européen. Deux exemples entre vingt  : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser une rencontre entre
970 n européen. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’ études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsable
971 n. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsables d’une d
972 entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’ organiser une rencontre entre les responsables d’une dizaine d’institu
973 d’organiser une rencontre entre les responsables d’ une dizaine d’instituts visant à la formation d’une jeune élite europé
974 aniser une rencontre entre les responsables d’une dizaine d’instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et i
975 ne rencontre entre les responsables d’une dizaine d’ instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et il r
976 s d’une dizaine d’instituts visant à la formation d’ une jeune élite européenne ; et il rassemble une équipe d’historiens,
977 une élite européenne ; et il rassemble une équipe d’ historiens, en vue de la révision des manuels scolaires, qui furent de
978 révision des manuels scolaires, qui furent depuis cent ans la source même des pires aberrations nationalistes. c) Étude et f
979 listes. c) Étude et formulation des grands thèmes de la propagande générale du Mouvement européen. Ici, nos intellectuels
980 ci, nos intellectuels ont une occasion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un m
981 sion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun es
982 sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’ un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au me
983 ir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’h
984 adre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’hypocrisie en service commandé,
985 vice commandé, ils vont pouvoir prendre leur part d’ action, assumer conjointement les décisions politiques, juridiques ou
986 pour être exécutées demain par un pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’études met au point le programme d’un
987 pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’ études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui d
988 tre, le Bureau d’études met au point le programme d’ une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne
989 études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne. Des rapports na
990 es rapports nationaux, préparés par les « Groupes d’ étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la
991 pes d’étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la base des travaux. Et l’on doit espérer que de
992 ont la base des travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les
993 s travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les faiblesses de
994 mentés, inventoriant les forces et les faiblesses de nos cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : l
995 blesses de nos cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’éta
996 os cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de divis
997  : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de division dont nous souffrons, les autres sur ce qui peut naître dans
998 ur ce qui peut naître dans une Europe débarrassée de ses frontières étatiques, enfin « rendue dans toute son étendue à la
999 et des biens ». ( Message aux Européens , congrès de La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. I
1000 La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut ê
1001 Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut être as
1002 nion ne sera jamais réelle sans le concours actif de chacune d’elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accep
1003 a jamais réelle sans le concours actif de chacune d’ elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accepter nos div
1004 les. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’ accepter nos divisions présentes, nous voulons concerter nos vocations
1005 ocations pour la défense et pour l’épanouissement d’ un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient per
1006 ense et pour l’épanouissement d’un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient perdues. Mais l’Europe
1007 perdue sans elles. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fé
1008 es. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fédéraliste, qui
1009 urent avec l’esprit fédéraliste, qui est le génie de l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de, « L’Europe ou le
1010 l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de , « L’Europe ou le cap du destin », Cahiers du Monde nouveau, Paris, j
1011  », Cahiers du Monde nouveau, Paris, juin–juillet 1949, p. 47-50.
8 1949, Articles divers (1948-1950). « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)
1012 « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)k Depuis
1013 moteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » ( 1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de
1014 émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949 )k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le
1015 t… » (1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaq
1016 uillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaque semaine au
1017 semaine au micro du « dialogue » qu’est l’Europe. De lundi en lundi, nous suivons ses chroniques au cours desquelles il no
1018 s chroniques au cours desquelles il nous démontre de manière éclatante qu’une ère nouvelle s’ouvre au Vieux Continent. Mon
1019 faut-il fédérer l’Europe ? Parce qu’il n’y a pas d’ autre moyen imaginable d’empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays
1020  ? Parce qu’il n’y a pas d’autre moyen imaginable d’ empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays, c’est, en effet, créer
1021 c’est, en effet, créer la seule puissance capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Eur
1022 réer la seule puissance capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte
1023 capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte où les nations ne dispar
1024 à ne faire la guerre à personne, mais à défendre d’ un seul cœur son indépendance reconquise. Paix, liberté, prospérité, t
1025 berté, prospérité, tels ont été les grands motifs de toutes les confédérations qui ont vu le jour au cours des siècles, et
1026 t vous savez comment la Suisse a su atteindre ces trois buts, en se fédérant, il y a cent ans. À l’instant même où nous venon
1027 atteindre ces trois buts, en se fédérant, il y a cent ans. À l’instant même où nous venons vous surprendre dans cette annex
1028 e main à un ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’ une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de dif
1029 ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays
1030 rage sur la Suisse qui fera partie d’une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays. J
1031 6 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays. Je prépare également une conférence culturelle europ
1032 tout mon temps. En effet, je dirige ici le bureau d’ études pour un Centre européen de la culture. Pouvez-vous, très succin
1033 ure. Pouvez-vous, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute i
1034 us, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute indépendance de
1035 ernementaux, cet organisme a pour tâche immédiate d’ étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment d
1036 cet organisme a pour tâche immédiate d’étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité eur
1037 ser toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le
1038 à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’ agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le film et la radio, par v
1039 opinion, la presse, le film et la radio, par voie d’ informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour cré
1040 , le film et la radio, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des u
1041 o, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des universités et des me
1042 s et des membres des corps enseignants ; et enfin d’ exercer un contrôle vigilant pour restaurer le propre usage des mots-c
1043 ible. De plus, le Centre européen offrira un lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, af
1044 n lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, afin qu’ils puissent examiner ensemble les gr
1045 semble les grandes questions qui affectent la vie de l’Europe, et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion publi
1046 ppels à l’opinion publique. k. Rougemont Denis de , « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio,
1047 ublique. k. Rougemont Denis de, « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet
1048 Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet 1949, p. 950.
1049 Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet 1949, p. 950.
9 1949, Articles divers (1948-1950). Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet 1949)
1050 européen de la culture aura son siège en Suisse ( 7 juillet 1949)l L’Europe dominait le monde entier, lorsque éclata l
1051 de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet 1949 )l L’Europe dominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1
1052 ominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de se
1053 nait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouv
1054 que éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’i
1055 ement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates o
1056 levait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates ou marxistes, chrétiennes ou humanistes. Ell
1057 s lois, et tous les peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette p
1058 peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette puissance inouïe, sa
1059 physiquement elle ne figure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa gra
1060 nt elle ne figure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de
1061 igure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa cultur
1062 qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture,
1063 ueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture, qui pour le bien
1064 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de m
1065 les blessures — du génie créateur de l’Europe. En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Elle est rus
1066 nq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Elle est russe et américaine. Elle se retourne contre nous. L’
1067 échue n’est plus qu’un petit continent, divisé en vingt-quatre nations, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation
1068 t-quatre nations, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la
1069 ions, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, e
1070 et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’ annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite
1071 onisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite à lutter pour assurer sa survivance é
1072 douanes, et créer des pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
1073 s pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
1074 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
1075 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui
1076 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui est à son tour le
1077 ance européenne, qui est à son tour le seul moyen de prévenir une guerre livrée à nos dépens. Tels sont les buts concrets
1078 teurs du Mouvement européen. Nous verrons au mois d’ août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ou
1079 u Mouvement européen. Nous verrons au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
1080 au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, le Parlement consu
1081 uvrira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif de treize nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques
1082 ira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif de treize nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques, polit
1083 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce
1084 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande arti
1085 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, il n’est pas une chose vague.
1086 t pas une chose vague. C’est lui qui nous empêche de dire aux Russes : « Finissons-en, venez nous mettre au pas, et suppri
1087 ne à Varsovie. » C’est lui aussi qui nous empêche de dire à nos amis américains : « Mais entrez donc, apportez-nous les se
1088 s : « Mais entrez donc, apportez-nous les secrets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’aînesse contre vos belles
1089 crets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’ aînesse contre vos belles autos et vos dollars. » Si nous refusons, c’
1090 efusons, c’est que nous avons encore le sentiment d’ une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la
1091 que nous avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être
1092 s avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Eur
1093 le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il f
1094 rté et de conscience, qui est justement la raison d’ être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des m
1095 de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d
1096 faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d’ expression, le rendre enfin conscient et agissant. Telle est la tâche
1097 e dans quelques mois, et que prépare notre Bureau d’ études. Installé à Genève depuis trois mois. Je ne m’étendrai pas sur
1098 e notre Bureau d’études. Installé à Genève depuis trois mois. Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques de son travail
1099 . Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques de son travail (documentation européenne ; coordination des efforts entr
1100 tous nos pays, et qui souvent s’ignorent ; action de propagande par la presse, la radio, les revues, auprès des élites com
1101 près des élites comme du grand public ; formation d’ équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement défi
1102 lites comme du grand public ; formation d’équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement définir l’espr
1103 e et le guide. Il ne s’agit nullement, pour nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les pr
1104 ur nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la jus
1105 u de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une par
1106 éoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une part offrir aux fo
1107 voulons d’une part offrir aux forces culturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du
1108 ulturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du mouvement fédéraliste ; d’autre part, f
1109 déraliste ; d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. F
1110 d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sort
1111 s de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à
1112 t de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à s’unir, afin
1113 suite une Europe fédérée vienne en aide à chacune de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culture
1114 e de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’oct
1115 culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’ octobre, sous les auspices du Mouvement européen. Le fait que la Suiss
1116 e comme siège du Centre européen de la culture et de la Conférence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considéra
1117 érence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considérations touristiques. Notre neutralité traditionnelle, reconnu
1118 suisse : notre pays dépend, plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc p
1119 plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc participer aux efforts pour s
1120 s pour sauver l’Europe ? La réponse ne peut faire de doute. Tant à Berne qu’au comité du Mouvement européen, on a reconnu
1121 rien notre neutralité, jouer le rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, su
1122 rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une m
1123 n. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’ une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se
1124 nse pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se réalisent les
1125 continent se dessine et prend corps, la nécessité de lui donner une âme passe au premier plan. Et c’est bien cela, c’est b
1126 péen de la culture. Les plus anciennes traditions de la Suisse la désignent comme siège d’une telle institution. Gardiens
1127 traditions de la Suisse la désignent comme siège d’ une telle institution. Gardiens des cols pour le Saint-Empire au xiiie
1128 -Empire au xiiie siècle ; gardiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créati
1129 rdiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international
1130 de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’u
1131 la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’une exp
1132 is de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’une expérience fédéraliste
1133 ations de l’esprit international ; gardiens enfin d’ une expérience fédéraliste qui peut servir d’exemple au continent, les
1134 nfin d’une expérience fédéraliste qui peut servir d’ exemple au continent, les Suisses seront fidèles à leur vraie vocation
1135 n accueillant, soutenant et animant le foyer même d’ une action historique, dont on a pu dire que le but était « l’Europe h
1136 it « l’Europe helvétisée ». l. Rougemont Denis de , « Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse », Curie
1137 e aura son siège en Suisse », Curieux, Neuchâtel, 7 juillet 1949, p. 6.
1138 siège en Suisse », Curieux, Neuchâtel, 7 juillet 1949, p. 6.
10 1950, Articles divers (1948-1950). Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)
1139 Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrang
1140 Préface à Le Problème de l’union européenne d’ Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « fai
1141 Problème de l’union européenne d’Olivier Philip ( 1950 )u Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’Europe », quand
1142 ip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’Europe », quand elle existe depuis tant de siècles. Mais l’
1143 rmation que vient de subir la puissance apparente de nos pays dans le jeu des forces mondiales : l’Europe paraît avoir été
1144 es, elle constate qu’elle est détrônée. Entre les deux empires vainqueurs, subitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle pren
1145 ubitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle prend d’ elle-même une conscience toute nouvelle, et malheureuse. « L’Europe es
1146 s divisions », déclarait le Manifeste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bie
1147 », déclarait le Manifeste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on l
1148 ste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situat
1149 Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situation pré-fédérale, po
1150 re. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’ une situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’union se déclare
1151 e situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’ union se déclare, au sein de la crise assumée. Ces circonstances donne
1152 se assumée. Ces circonstances donnent à l’ouvrage de M. Olivier Philip une importance particulière : non pas seulement cel
1153 importance particulière : non pas seulement celle d’ une première vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europ
1154 re vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’une contribution à cette prise de consc
1155 loyés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’ une contribution à cette prise de conscience active de notre sort, san
1156 e contribution à cette prise de conscience active de notre sort, sans laquelle les traités resteront du papier. Je voudrai
1157 tés resteront du papier. Je voudrais formuler ici deux remarques, entre toutes celles que ne manquera pas de suggérer cette
1158 emarques, entre toutes celles que ne manquera pas de suggérer cette enquête efficace par sa lucidité. La première touche à
1159 à l’économie, la seconde à la doctrine formatrice de l’union. Les analyses économiques tiennent une place importante dans
1160 que. Voilà, me semble-t-il, une manière implicite d’ affirmer que l’Économie obéit beaucoup moins aux « lois » fatales admi
1161 elle-même déterminée par une certaine orientation de nos énergies dont j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de q
1162 nt j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de quelque choix métaphysique. La thèse soutenue par notre auteur impliq
1163 ue par notre auteur implique une décision inverse de celle dont les suites nécessaires nous ont conduits aux impasses prés
1164 duits aux impasses présentes. Nous vivons, depuis 1920, sous le règne effectif des Experts. Je vois bien que ce règne est né
1165 tif des Experts. Je vois bien que ce règne est né d’ une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par er
1166 e règne est né d’une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par erreur, doctrinaire). Mais il tend, s
1167 d garde, à évacuer la politique, au sens légitime de ce terme. Il tend à substituer, en fait, les Pouvoirs à l’Autorité. L
1168 à l’Autorité. Le plan Schuman, parce qu’il est né d’ une décision proprement politique, pourra marquer, s’il aboutit, le po
1169 politique, pourra marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second
1170 a marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’ une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note q
1171 de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’un historique adroite
1172 de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’ un historique adroitement condensé, l’auteur souligne, à plusieurs rep
1173 plusieurs reprises, l’influence « déterminante » de l’aile fédéraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la créa
1174 déraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’une véritable Autorité européenne. On pourra discuter p
1175 uvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’ une véritable Autorité européenne. On pourra discuter plus tard sur la
1176 pourra discuter plus tard sur la paternité réelle de maints projets revendiqués par les fédéralistes, tels que la Cour eur
1177 enne des droits de l’homme, le pool du charbon et de l’acier, la transformation du Comité des ministres en Sénat. Mais il
1178 ’ils sont parfois considérés comme des empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justeme
1179 es empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en r
1180 ndre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends
1181 tement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’ avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends pas ici (ce n’est pas le
1182 tu en général, ou même contre l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent
1183 l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent l’union, bien sûr, et comment
1184 , je les appelle fédéralistes. Il n’est pas juste de les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme
1185 les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’union mais refusent sa co
1186 faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’ union mais refusent sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces de
1187 t sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces deux attitudes. M. Philip a des pages excellentes sur le « compromis » néc
1188 n’est pas la seule. L’Europe est née, elle a vécu d’ antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y p
1189 st née, elle a vécu d’antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créati
1190 ppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’o
1191 secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’on ne peut rêver l’Europe toute libérale ou
1192 corporatiste ou parlementaire… Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des t
1193 Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des tendances opposées exige d’aller
1194 compromis : chacune des tendances opposées exige d’ aller au bout de sa vocation, car elle perdrait sa qualité constitutiv
1195 elle perdrait sa qualité constitutive, sa raison d’ être, en y renonçant. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d
1196 t. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d’ autre que dans le régime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages
1197 gime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L
1198 ntages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer qu
1199 outant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer que cette solution n’est pas seulement p
1200 le en principe, mais pratique. On ne manquera pas de m’objecter que les Suisses sont les premiers à se montrer prudents, q
1201 s premiers à se montrer prudents, quand il s’agit de « faire l’Europe ». C’est qu’ils sont déjà fédérés. Aux unionistes, j
1202 que l’on sache. Quand vous y serez, il sera temps de voir si la prudence, ou au contraire un peu de hâte, conviennent à no
1203 nviennent à nos calamités. u. Rougemont Denis de , Philip Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union e
1204 Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâ
1205 oblème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-
1206 oblème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-11.
1207 européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-11.
11 1950, Articles divers (1948-1950). Raisons et buts d’une conférence (janvier 1950)
1208 Raisons et buts d’ une conférence (janvier 1950)n o La condition profondément contradi
1209 Raisons et buts d’une conférence (janvier 1950 )n o La condition profondément contradictoire dans laquelle vit l’E
1210 contradictoire dans laquelle vit l’Europe, depuis dix ans, est entrée dans la phase critique. Elle est presque désespérée.
1211 e désespérée. Elle est aussi plus près que jamais de se résoudre en une synthèse. Il est vrai que l’Europe est en train de
1212 t, — l’Europe est en train de se faire ! Aux yeux d’ un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dan
1213 yeux d’un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dans notre ciel et dans nos données immédiates 
1214 t les mêmes conditions qui pourraient être celles d’ une renaissance. Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s
1215 Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s’aggraver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absu
1216 es, par exemple, n’ont cessé de s’aggraver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absurdité. L’avènement bru
1217 ver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires ext
1218 leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais
1219 r absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais il r
1220 iant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment d’un destin commun
1221 d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment d’ un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’aban
1222 il réveille aussi le sentiment d’un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités d
1223 , l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités de l’histoire, se voient combattus par l’élan vers l’union, vers la fédé
1224 sses, l’Assemblée de Strasbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’un espoir tremblant. Le sentiment le plus répa
1225 asbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’ un espoir tremblant. Le sentiment le plus répandu, j’allais dire le pl
1226 y a aujourd’hui une manière proprement européenne d’ avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres vi
1227 ui une manière proprement européenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres viendraient fai
1228 éenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’ une guerre que d’autres viendraient faire sur notre sol, et sur le cor
1229 viendraient faire sur notre sol, et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des
1230 et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des autres, qui serait perdue par nou
1231 enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’ une guerre des autres, qui serait perdue par nous, quelle que soit son
1232 ais il y a, en même temps, une manière européenne d’ espérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre f
1233 pérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance c
1234 péen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance capable d’imposer la paix. Telle
1235 et de retrouver par là même une puissance capable d’ imposer la paix. Telle est la situation contradictoire dans laquelle n
1236 re dans laquelle nous sommes engagés. À son point de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait r
1237 int de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait raison du désespoir. Mais il faut aller vite, e
1238 s’esquissent, à Strasbourg, les cadres politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée huma
1239 s politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de l
1240 rand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but
1241 e, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’o
1242 ation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une répo
1243 l est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une réponse à la question dangereuse que pose
1244 elles propres à garantir et développer l’exercice de la pensée libre, sans laquelle l’Europe n’est plus rien. On pourrait
1245 rien. On pourrait discuter sans fin sur le titre de cette Conférence. Les mots européen, culture, prêtent à des controver
1246 à des controverses trop faciles. Dès qu’on parle d’ Europe, d’unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’
1247 troverses trop faciles. Dès qu’on parle d’Europe, d’ unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’Europe ! »
1248 urope, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’ Europe ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Eur
1249 rope ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à
1250 ffrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialog
1251 ition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialogue à plusieurs voix r
1252 s voix reste, à tout prendre, la vraie définition de l’Europe, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, cha
1253 rope, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, chacun donne à ce mot des réalités hétéroclites : inventions
1254 ues et beaux-arts, hygiène, éducation, et procédé de construction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; con
1255 truction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité hu
1256 philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique 
1257 doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la v
1258 tat ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la vie des religions.
1259 Culture peut signifier aussi prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’ex
1260 i prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’ approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouv
1261 ence de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’ illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, t
1262 in perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que
1263 pprofondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’ augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses.
1264 er le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses. Culture peut signifier
1265 re peut signifier, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre
1266 er, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’i
1267 emble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’interdise les déb
1268 s définitions. À toutes fins utiles, elle partira de l’idée que la culture, ce sont les réalités intellectuelles et spirit
1269 ités intellectuelles et spirituelles qui ont fait de l’Europe autre chose et beaucoup plus que ce qu’elle est dans sa réal
1270 ses fruits, on jugera la culture sur sa récolte. Deux mots sur ceux qui ne sont pas venus ici. Quand Dieu veut perdre une s
1271 jours par la rendre folle, il se contente parfois de l’endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’occupations acc
1272 endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’ occupations accablantes et flatteuses, qui ne leur laissent plus une s
1273 tastrophes. On demande à certains « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils
1274 « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils ont un rhume, qu’ils ont promis u
1275 ne conférence. D’autres invoquent un besoin subit de se retirer pour méditer. Regrettons-le, pour eux surtout. S’ils sont
1276 és, ce qu’à Dieu ne plaise, dans certains « camps de rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les r
1277 rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les raisons urgentes qui motivaient un rassemblement comm
1278 ôtre. Ils comprendront qu’il est certains moments de l’histoire où l’on ne peut renverser les destins qu’en y allant tous
1279 Pour être juste, il faut reconnaître que beaucoup d’ intellectuels redoutent non sans raison l’atmosphère des congrès, inco
1280 tmosphère des congrès, inconsidérément multipliés de nos jours. Je les comprends, et je comprends surtout ceux d’entre eux
1281 rent — (ou c’est un mauvais écrivain) — au destin de la communauté dont il écrit la langue, où sa voix porte, qui peut le
1282 éral, établi pour l’information des délégués, n’a d’ autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont
1283 nformation des délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au
1284 délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’une enq
1285 s problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’ une enquête dans nos divers pays. Chacun des groupes nationaux du Mouv
1286 n questionnaire sur l’état des problèmes concrets de la culture dans son pays. Dix-sept groupes ont donné des réponses dét
1287 s problèmes concrets de la culture dans son pays. Dix-sept groupes ont donné des réponses détaillées. Je tiens à souligner qu’un
1288 û l’improviser avec des groupes en pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y
1289 n pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y aurait à dresser systématiquemen
1290 aire aussi des lacunes, des obstacles, permettant de délimiter des zones critiques où concentrer l’effort. Puis, des étude
1291 concrets, nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’ études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’
1292 , nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’une quinz
1293 fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’ une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéci
1294 s notes et documents. Sur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des docu
1295 ur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’ une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapp
1296 quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapport général a te
1297 es documents précités, le rapport général a tenté d’ opérer une synthèse provisoire, en guise d’introduction aux travaux de
1298 e provisoire, en guise d’introduction aux travaux de la conférence. Précisons bien que ce rapport n’est pas un instant des
1299 n instant destiné à faire l’objet des discussions de la conférence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’exposé de
1300 rence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’ exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront propo
1301 ts. Il veut servir d’exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront proposées et mises au point par les
1302 Mouvement européen6 avait estimé tout d’abord que deux commissions suffiraient : l’une consacrée au problème des échanges, l
1303 niques restant, bien entendu, réservés aux débuts de l’ensemble du congrès, siégeant en commission générale. Il nous appar
1304 mission générale. Il nous apparaît qu’il y a lieu de prévoir une nouvelle commission, consacrée à l’éducation et à l’ensei
1305 n, consacrée à l’éducation et à l’enseignement. I . Les échangesq La question des échanges. — La situation présente
1306 à nous égarer. On parle beaucoup, par exemple, «  d’ organiser les échanges culturels ». Observons tout d’abord qu’il n’en
1307 frontières étaient ouvertes, et l’union fédérale de l’Europe réalisée. Nos cultures, prisonnières des cadres nationaux, n
1308 res nationaux, ne doivent pas chercher des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent
1309 des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent au contraire exiger leur « élargisseme
1310 ement » immédiat, sans condition. Le terme même «  d’ échanges culturels », avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force
1311 , avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force d’ avoir servi d’échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien mal
1312 est devenu bien déplaisant, à force d’avoir servi d’ échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien malgré eux, souve
1313 x, souvent) des problèmes réputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce p
1314 éputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’échanges
1315 r en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’ échanges surveillés que leurs douaniers et leurs agents fiscaux sauron
1316 ux quelques petits décrets concernant les voyages de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bon
1317 es de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bons élèves ; et quelques phrases bien plates sur
1318 hrases bien plates sur l’indispensable solidarité de nos nations. Une hypocrisie ennuyeuse. Prétendre « organiser les écha
1319 droits que l’État s’est arrogés, et qu’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’abaisser des obstacl
1320 u’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’ élever ou d’abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des id
1321 de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’ abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des idées, des per
1322 nent ce qu’ils ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, d
1323 ls ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits o
1324 les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités a
1325 ture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques
1326 uvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de p
1327 ant, de produits originaux, de curiosités avides, d’ expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non
1328 de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements
1329 es, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème
1330 de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner,
1331 assions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner, et au besoin dénoncer l
1332 es déplacements de forts en thème — nous devons : abandonner, et au besoin dénoncer la méthode de « l’organisation des
1333 : 1° abandonner, et au besoin dénoncer la méthode de « l’organisation des échanges », 2° exiger la suppression pure et sim
1334 er la méthode de « l’organisation des échanges », exiger la suppression pure et simple, immédiate, des obstacles à la l
1335 ion des personnes, des œuvres, et des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits
1336 des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bé
1337 l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, do
1338 l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, dont la charge
1339 re. Et surtout ne proposons pas, dans ce domaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’esprit qui entraîne tant de
1340 omaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’ esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines b
1341 d’esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines bureaucratiques. Restaurer la culture, c’est aussi
1342 poids mort des organisations ! Qu’on n’essaie pas d’ organiser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’une respirat
1343 ser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’ une respiration organisée, n’est-il pas vrai, vous coupe le souffle. Q
1344 s vrai, vous coupe le souffle. Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était
1345 . Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était aux origines, elle n’a cessé
1346 e, elle était aux origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse lib
1347 origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifeste
1348 n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe o
1349 a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe ouverte
1350 richir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins
1351 er ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins, voilà la solution, voilà le remède pratique à presque tous les
1352 presque tous les maux que vous allez recenser. II . Les institutions À la suppression des obstacles matériels et léga
1353 un effort positif. Il serait insuffisant et vain de vouloir revenir simplement à la condition libérale qui était celle de
1354 implement à la condition libérale qui était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je
1355 était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’An
1356 it celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire
1357 s, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire de la Compagnie européenne des wagons-lits, au chapitre sur les passepor
1358 Pour l’entrée dans tous les autres pays, la carte de visite suffit » ! Mais cette liberté des échanges n’a pas suffi à réd
1359 titutions qui garantissent et manifestent l’unité de nos cultures dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’instr
1360 dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’ instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut au
1361 ersité. Il faut doter l’Europe unie d’instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut aussi former les
1362 er les jeunes hommes qui deviendront les porteurs de l’idée fédérale, sans laquelle nos réformes techniques et matérielles
1363 » que le xxe siècle a vu naître, il est frappant de constater qu’il n’en existe pas un seul qui ait pour objet l’Europe c
1364 s pays forment un ensemble, un complexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-
1365 omplexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-ci distinguent souvent mieux que
1366 mble n’ait pas encore été étudié en tant que tel, d’ une manière systématique ; et qu’il n’existe aucune institution capabl
1367 ue ; et qu’il n’existe aucune institution capable de renseigner sur l’Europe en général, sur sa situation présente, sur l’
1368 en général, sur sa situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes.
1369 a situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’
1370 ur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’ une telle institution soit urgent, rien ne saurait mieux le faire sent
1371 difficultés qu’a rencontrées la préparation même de cette conférence, et que ses insuffisances inévitables dans l’état ac
1372 s choses. Je tiens à rappeler que, dès le congrès de La Haye, avait été demandée la création d’un Centre européen de la cu
1373 ongrès de La Haye, avait été demandée la création d’ un Centre européen de la culture, dont les attributions furent esquiss
1374 par la résolution culturelle du congrès. Au mois de février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’étud
1375 olution culturelle du congrès. Au mois de février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de
1376 le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’ études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septe
1377 ment européen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de
1378 péen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même an
1379 rgé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg vo
1380 er l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unan
1381 tembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unanimité une recommandation favorable à la cré
1382 nimité une recommandation favorable à la création d’ un Centre européen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Ge
1383 tre européen de la culture. Le travail du Bureau d’ études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus prè
1384 éen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la ques
1385 ’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la question. Il a conduit aux conclusions pratiqu
1386 t leur réserver. Il en va de même pour le Collège d’ Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commi
1387 llège d’Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commis européens », dont les futures institutions
1388 commis européens », dont les futures institutions de l’Europe unie auront évidemment besoin. Enfin, je mentionnerai un pro
1389 idemment besoin. Enfin, je mentionnerai un projet d’ Institut européen des sciences politiques et sociales ; et ce projet s
1390 ces politiques et sociales ; et ce projet surtout d’ un Fonds européen pour les recherches scientifiques, dont l’importance
1391 M. Dautry a magistralement exposé les motifs. III . L’enseignement Quant à la commission proposée tout à l’heure, qui
1392 mission proposée tout à l’heure, qui s’occuperait de l’enseignement européen, deux mots seulement, mais importants. La pré
1393 ure, qui s’occuperait de l’enseignement européen, deux mots seulement, mais importants. La préparation de cette Conférence,
1394 x mots seulement, mais importants. La préparation de cette Conférence, l’abondance et la qualité des rapports reçus sur le
1395 t la qualité des rapports reçus sur les questions d’ éducation, ont montré à quel point ce souci est général dans nos pays.
1396 le monde se rend parfaitement compte que l’avenir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite
1397 enir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un es
1398 européenne dépend en premier lieu de la création d’ une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranatio
1399 emier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranational. Cette tâche, comme
1400 ’écrit M. Jean Bayet8, « exigera la bonne volonté de plusieurs générations, [mais] réclame aussi un départ extrêmement vif
1401 aussi un départ extrêmement vif et net ». L’effet de choc que produira sur l’opinion publique l’institution rapide d’un en
1402 duira sur l’opinion publique l’institution rapide d’ un enseignement européen constituera la meilleure propagande pour notr
1403 ent être créés par le blocage, au titre européen, d’ une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernem
1404 cage, au titre européen, d’une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernements et l’économie privée
1405 és. Nous invoquerons le fait que, si le sentiment d’ un destin spirituel commun, et l’énergie créatrice des Européens ne so
1406 ettre nos gouvernements devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’urgence établi. Il est probable que le prix de r
1407 s devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’ urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bom
1408 tre d’urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel
1409 ce établi. Il est probable que le prix de revient d’ une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel des instit
1410 institutions que nous venons de proposer. Le prix d’ une seule bombe atomique couvrirait donc le budget global d’une renais
1411 e bombe atomique couvrirait donc le budget global d’ une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mor
1412 ouvrirait donc le budget global d’une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des
1413 e de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millio
1414 ne. Construire des engins de mort qui coûtent des milliards , quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de dévelop
1415 e mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche sci
1416 ent des milliards, quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche scientifique pour la pai
1417 refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche scientifique pour la paix et la vie, c’est la
1418 ientifique pour la paix et la vie, c’est la folie de l’Occident moderne. À tel point qu’on se demande parfois s’il ne vaud
1419 l ne vaudrait pas mieux être restés barbares, que de nous être aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture
1420 tre aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture faillirait à sa vraie mission, si elle n’élevait pas, cont
1421 pour quelles fins réelles voulons-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La
1422 ns-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’ une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle
1423 ture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle est d’ailleurs spécifiqu
1424 pas substituer aux nationalismes locaux une sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au mond
1425 e sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au monde entier. Elle a toujours conçu sa civilis
1426 toujours conçu sa civilisation comme un ensemble de valeurs universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’opposer une
1427 s universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’ opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Oue
1428 opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthé
1429 nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valab
1430 e aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valable pour nous seu
1431 fermée sur elle-même : ce serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre
1432 e serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contr
1433 chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le mo
1434 es. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de
1435 nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’ une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est l
1436 a leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. E
1437 d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. Et notre objet ne sera pas non pl
1438 vraie force. Et notre objet ne sera pas non plus de dénoncer ce qui se pratique ailleurs, car nous ne pouvons réformer qu
1439 acceptons pas la scission que symbolise le rideau de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occid
1440 de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’i
1441 amener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté,
1442 les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’ une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’une Europe qui prend
1443 d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’ une Europe qui prend au sérieux sa vocation particulière dans le monde
1444 ns le monde. Une Europe affaiblie, et divisée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être
1445 lie, et divisée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une
1446 ée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une Europe procla
1447 arrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’ attraction. Une Europe proclamant des principes sans les appliquer fer
1448 pliquer fermement, n’aurait bientôt plus le droit de parler. Prendre au sérieux la vocation européenne, c’est une mission
1449 sérieux la vocation européenne, c’est une mission de vigilance dont les intellectuels des pays libres doivent se sentir pl
1450 tir plus que jamais responsables. Il leur incombe de rappeler sans relâche aux gouvernants, comme aux législateurs sociaux
1451 eurs sociaux et aux experts, qu’un certain nombre de principes moraux ne sauraient être négligés dans la pratique sans que
1452 nomie. Si nous exerçons, à Lausanne, cette action de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’el
1453 on de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne.
1454 aiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne. Une conscience malheureuse, il est vrai, to
1455 conscience, en dernière analyse. C’est notre lot d’ Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la co
1456 lot d’Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la conscience au bonheur. Vocation tragique et féco
1457 nt depuis que se dressent à l’Est comme à l’Ouest deux civilisations plus jeunes, filles de la nôtre, dont l’une, qui nous e
1458 à l’Ouest deux civilisations plus jeunes, filles de la nôtre, dont l’une, qui nous est chère, cultive un idéal eudémoniqu
1459 est chère, cultive un idéal eudémonique, l’idéal d’ un bonheur assuré. Il est frappant que le bonheur, en Europe, n’ait tr
1460 mes, quelques prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous
1461 es prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous en respiro
1462 , nous ne sommes pas réunis pour tracer des plans d’ innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de tr
1463 s pas réunis pour tracer des plans d’innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyen
1464 prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations
1465 ouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notr
1466 xercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. S
1467 ui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. Sauvons l’Europe tragique, pour que nos descendants puissent e
1468 t, par la grâce des chefs-d’œuvre futurs, au ciel de la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador
1469 ciel de la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador de Madariaga, qui était d’ailleurs président
1470 ador de Madariaga, qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemon
1471 , qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collab
1472 s président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration de M. Raymond
1473 par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration de M. Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR). 8. Dans son remarq
1474 . Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR). 8. Dans son remarquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Co
1475 LR). 8. Dans son remarquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation
1476 marquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougem
1477 qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « R
1478 aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’une
1479 nt et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de , « Raisons et buts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier 195
1480 NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’ une conférence », Fédération, Paris, janvier 1950, p. 19-25. o. Il s’
1481 ts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier 1950, p. 19-25. o. Il s’agit du discours prononcé par Denis de Rougemont l
1482 nis de Rougemont lors de la Conférence européenne de la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avons
1483 e la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avons rajouté le participe passé « été », oublié par erreur
1484 Les sous-titres ont été rajoutés pour les besoins de cette édition numérique.
12 1950, Articles divers (1948-1950). Un gage à Jean Paulhan ! (avril 1950)
1485 Un gage à Jean Paulhan ! (avril 1950 )r Cher ami, Ce n’est pas sans surprise que j’apprends, à vous lire
1486 surprise que j’apprends, à vous lire dans Liberté de l’Esprit, que les fédéralistes ont exclu la Russie de l’Europe ; que
1487 que la Grèce n’en fait pas partie, mais bien « et de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires 
1488 de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires » ; que j’ai « annoncé la fin du désespoir » ; que
1489 lisme est contre les patries (mais qu’il juge bon de le « cacher ») ; et qu’enfin les fédéralistes « n’ont jamais été amou
1490 pe, et pour les fédéralistes, il n’y a pas un mot de vrai dans tout cela. Vous jugez notre projet « imbécile ». Celui que
1491 que vous critiquez est tel sans aucun doute. Mais d’ où sort-il ? Je ne connais pas un seul fédéraliste qui puisse y reconn
1492 rvations dans l’ordre où je viens de les relever. « La Russie, qu’est-ce que vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit po
1493 vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit possible de l’exclure sans lui faire violence ? » Mais quand l’avons-nous exclue 
1494 montrez, au paragraphe suivant, qu’il serait vain d’ espérer l’inclure. Que diable voulez-vous donc que nous en fassions ?
1495 en fassions ? (On m’assure que cela dépend aussi de Staline.) 2° « Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils son
1496 ? (On m’assure que cela dépend aussi de Staline.) « Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils sont là !… » Je
1497 éuni à Strasbourg… et qu’il a déjà son statut (en quarante-deux articles) ». Montrez-nous donc un seul de ces articles qui dise, ou l
1498 rante-deux articles) ». Montrez-nous donc un seul de ces articles qui dise, ou laisse entendre, que le Conseil de l’Europe
1499 ait cela que nous voulions : je vous en montrerai trente qui disent le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre de cet org
1500 t le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre de cet organisme est qu’il serve provisoirement, à sa place, et malgré s
1501 ute qu’on ne compte à Strasbourg qu’une trentaine de fédéralistes sur cent-un députés.) 3° La Grèce fait partie du Conseil
1502 e trentaine de fédéralistes sur cent-un députés.) La Grèce fait partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août 1949,
1503 èce fait partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août 1949, mais les États-Unis n’y ont été nommés jusqu’ici que par L
1504 partie du Conseil de l’Europe, depuis le 11 août 1949, mais les États-Unis n’y ont été nommés jusqu’ici que par L’Humanité.
1505 nt été nommés jusqu’ici que par L’Humanité. Drôle d’ évidence. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.) 4° M. Spaak est
1506 nce. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.) M. Spaak est un homme d’État qui agit plus que tout autre en faveur d
1507 e voudrais bien qu’il se déclare « fédéraliste »… Ai-je vraiment, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et de l’iso
1508 ent, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et de l’isolement, la mort des ressentiments nationaux » ? Hélas ! Diagnost
1509 us par exemple), ce n’est pas « annoncer » la fin de la maladie, ni promettre « des joies et des fêtes ». Nous demandons s
1510 s fêtes ». Nous demandons surtout des sacrifices. Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou d’imbécile » dans le projet
1511 des sacrifices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a «  de faux ou d’imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de
1512 ices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou d’ imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interr
1513 e » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interroger. Que ne le faites-vous ? Mais non, par une erreur vrai
1514 « fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tenda
1515 fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances
1516 ecueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl J
1517 ences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces
1518 osées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces neuf , un seul fédéraliste déclaré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à
1519 , un seul fédéraliste déclaré. Voyez donc la page 60  : « Je reproche à Benda de confondre union et unification, de vouloir
1520 ré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités san
1521 proche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités sans lesquelles aucune fédération n’es
1522 fédération n’est possible. » C’est la seule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la do
1523 ule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous ci
1524 re où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous citée, au lieu de m’attri
1525 vous citée, au lieu de m’attribuer des sottises ? Notre doctrine (qui veut l’union dans la diversité, formule suisse) é
1526 ersité, formule suisse) étant à l’opposé de celle de Benda (qui veut l’unification, formule jacobine) vous déclarez que la
1527 vous déclarez que la seconde n’est que « l’aveu » de ce que la première dissimule. Après quoi, bien sûr, plus rien ne saur
1528 mais. Au contraire, vous rejoignez ici une partie de leurs positions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi c
1529 leurs positions, et votre belle colère se trompe d’ adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison atta
1530 tions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison attaquez-vous d
1531 ez-vous des gens que vous n’avez pas pris le soin d’ identifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près
1532 tifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près journalistique. Pour en finir, je vous envoie ma petite
1533 ’Attitude fédéraliste . Vous y trouverez beaucoup d’ attaques contre le nationalisme, contre l’État-nation, contre sa préte
1534 riotisme et les patries. Or j’ai quelques raisons de penser que ce texte exprime le « projet des fédéralistes » plus fidèl
1535 quoi, cette lettre est inutile, si l’on a décidé d’ appeler « fédéralistes » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé
1536 s » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé de l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a de
1537 l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a des gens qui appellent surréaliste tout écrit qu’ils e
1538 uand vous aurez renoncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce
1539 oncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce que vous proposez.
1540 proposez. Car je ne vais pas vous faire l’injure de croire que vous trouvez que tout va très bien ainsi, ou que vous pens
1541 ant toutes petites et mignonnes. Elles ont besoin de vous aussi, non point pour les louer contre nous, mais pour les défen
1542  « Europe vole » ? Un gage. r. Rougemont Denis de , « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950
1543 t Denis de, « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950, p. 33-34.
1544 an Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950, p. 33-34.
13 1950, Articles divers (1948-1950). Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)
1545 Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)s t Il est imp
1546 ssible de sauver l’Europe sans sauver sa culture ( 5 août 1950)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauv
1547 de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950 )s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en m
1548 sa culture (5 août 1950)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de
1549 i l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de sauver la culture occidentale si l’on ne sauve pas en même temps sa p
1550 e sauve pas en même temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les
1551 ême temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa re
1552 a créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’entretenir le d
1553 recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’ entretenir le désir créateur, si on le prive des possibilités de s’acc
1554 e désir créateur, si on le prive des possibilités de s’accomplir dans une libre communauté. Si l’Europe est réduite à l’im
1555 mondiales, personne ne pourra remplacer cette âme d’ une civilisation qui avait su remplacer toutes les autres. Le secret d
1556 i avait su remplacer toutes les autres. Le secret de ses mesures vivantes sera perdu. ⁂ Mais en retour, sans une culture a
1557 unie, c’est même plus que probable, par les soins d’ experts étrangers, ou d’une police qui a fait ses preuves ailleurs déj
1558 e probable, par les soins d’experts étrangers, ou d’ une police qui a fait ses preuves ailleurs déjà. Mais elle aura perdu
1559 es ailleurs déjà. Mais elle aura perdu le ressort de son pouvoir transformateur du monde, ce pouvoir qui avait fait sa gra
1560 e, ce pouvoir qui avait fait sa grandeur à partir d’ un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si
1561 ir d’un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cett
1562 pe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cette unité signifiait sa défaite, non point sa con
1563 l’Asie — et l’Asie n’a jamais passé pour la terre de la liberté. Ces deux réalités : l’Europe, la culture, naissent et meu
1564 n’a jamais passé pour la terre de la liberté. Ces deux réalités : l’Europe, la culture, naissent et meurent du même mouvemen
1565 et meurent du même mouvement. ⁂ Qu’en est-il donc de ce mouvement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les deux colosse
1566 ement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les deux colosses russe et américain, l’Européen qui vient de perdre la guerre
1567 it actuellement ce qu’on peut appeler une névrose d’ infériorité. Pourtant, les faits ne justifient pas le désespoir, mais
1568 ifient pas le désespoir, mais seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américai
1569 , mais seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’
1570 is seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du
1571 ent un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rid
1572 de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, pr
1573 redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300
1574 ent. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’ Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 mi
1575 d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un qu
1576 us sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, e
1577 ommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’
1578 à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’ Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’un
1579 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’ un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit a
1580 disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’ un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous dis
1581 de plus d’un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous disposons surt
1582 it aujourd’hui la planète. Nous disposons surtout de ressources humaines qui n’ont pas leurs égales ailleurs : une main-d’
1583 ont les traditions ne s’imitent pas, une capacité d’ invention que le monde entier peut nous envier. ⁂ Qu’avons-nous invent
1584 Qu’avons-nous inventé, nous les Européens, depuis cent ans ? Je répondrai : que n’avons-nous pas inventé ? Je cite pêle-mêle
1585 re : presque tous leurs grands noms sont des noms de l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier
1586 ès rares qui n’en sont pas ont appris leur métier de nos maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou pa
1587 maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou par nos livres. ⁂ Je dirai plus. Le monde moderne tout enti
1588 e à la fois nos mœurs et nos objets, nos procédés d’ art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie e
1589 is nos mœurs et nos objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de méde
1590 os objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos arme
1591 rocédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous,
1592 de construction, de transport et de gouvernement, d’ industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les
1593 , de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les Noirs, copient
1594 ous, nous copions tout au plus quelques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de
1595 elques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que s
1596 lques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que sont les empires qui prétendent parta
1597 du Nord et la Russie de Staline sont des produits de notre culture, l’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de
1598 ’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’un côté, plus les grat
1599 a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’ un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les
1600 isme, d’un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les degrés, la cellophane et la fermeture-éclai
1601 e-éclair qui sont des inventions européennes ; et de l’autre côté, Marx et notre industrie plus l’instruction publique et
1602 nstruction publique et l’athéisme, l’hypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pè
1603 ypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce
1604 ppareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce n’est point par ha
1605 idemment ; mais ce n’est point par hasard que ces deux grands pays semblent appeler ce procédé de description : leurs traits
1606 ces deux grands pays semblent appeler ce procédé de description : leurs traits les plus frappants et qu’ils croient spéci
1607 en que l’Amérique et la Russie moderne, dans plus d’ un sens, sont en réalité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas
1608 ité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas de malentendu ! Ne nous laissons jamais aller à placer sur le même plan
1609 placer sur le même plan l’Amérique et la Russie. Deux constatations très simples me suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu
1610 suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu’y a-t-il de commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation
1611 e commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation ; il y a l’exercice des mêmes libertés ; il y a de
1612 mêmes libertés ; il y a devant nous le même idéal de liberté humaine. Tandis qu’entre les Russes et nous, il n’y a en comm
1613 our nous liberté politique. s. Rougemont Denis de , « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », Fra
1614 ue. s. Rougemont Denis de, « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », France indépendante, Paris,
1615 sauver sa culture », France indépendante, Paris, 5 août 1950, p. 1-2. t. Présenté par la note suivante : « France Indép
1616 sa culture », France indépendante, Paris, 5 août 1950, p. 1-2. t. Présenté par la note suivante : « France Indépendante pré
1617 présente cette semaine à ses lecteurs, un extrait de l’importante conférence prononcée par Denis de Rougemont au congrès d
1618 rence prononcée par Denis de Rougemont au congrès de La Fédération à Beaune. Nous tenons à remercier M. de Rougemont pour
1619 à remercier M. de Rougemont pour son autorisation de publier ces lignes qui suscitèrent, nous en sommes certains, chez nos
14 1950, Articles divers (1948-1950). Saint-John Perse et l’Amérique (1950)
1620 Saint-John Perse et l’Amérique ( 1950 )m La grandeur de cette poésie fait reculer le commentaire : elle e
1621 t-John Perse et l’Amérique (1950)m La grandeur de cette poésie fait reculer le commentaire : elle est un acte, elle se
1622 à, posant elle-même ses mesures. La première page d’ Anabase lorsqu’elle parut, constitua pour nous le fait du prince, tout
1623 rer dans la durée, — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. (D’où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un
1624 — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. ( D’ où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un jeune amour veut so
1625 t, on l’imagine, en Amérique. Au long des avenues de Manhattan, il marchait lentement, régulièrement, comme ceux qui vont
1626 , comme ceux qui vont très loin, ou qui pensent à de grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’empressement. Ou da
1627 e grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’ empressement. Ou dans cette chambre d’angle, dont il parle dans Neiges
1628 i n’ont pas d’empressement. Ou dans cette chambre d’ angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme
1629 angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme sans preuve ni témoin », il nous donnait un haut exe
1630 n », il nous donnait un haut exemple du bon usage de l’exil : sans plainte, au cœur du grand litige ; aussi actif dans la
1631 avait su rester sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des de
1632 er sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’ être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des destins molesté
1633 re, enfin, dans son retrait, des destins molestés de la France, que tant de « partisans extravagants » qui tenaient bruyam
1634 extravagants » qui tenaient bruyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je
1635 uyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarqu
1636 ène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarques sur les relations qui se
1637 e qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarques sur les relations qui se sont révélées entre le poète et l’
1638 atique. J’y verrais même la meilleure description de l’essor des États-Unis dans l’espace et le temps à la fois, si le suj
1639 ture et l’invention du Nouveau Monde ont illustré d’ accidents séculaires. Tout se passe à la fois dans l’Histoire et dans
1640 oire et dans l’homme, « dans un très haut tumulte de terres en marche vers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. D
1641 ers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. De l’Atlantique au Pacifique, des Pères pèlerins aux savants atomistes,
1642 r nylon, les grands rapides « avec leur provision de glace pour cinq jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « c
1643 rands rapides « avec leur provision de glace pour cinq jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « civilisation du m
1644 maïs noir — non violet », enfin « les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’h
1645 les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme
1646 s usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence
1647 au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’un agrandisseme
1648 homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’ un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poèm
1649 dans sa présence humaine ; et d’un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poème ainsi prend sa sou
1650 , peuvent être vues comme une seule et même geste de l’âme. (Je dis l’âme, et non pas l’esprit, ni l’intellect et ni le cœ
1651 ’esprit, ni l’intellect et ni le cœur.) Et c’est d’ un même mouvement à tout ce mouvement lié, que mon poème encore dans l
1652 mouvement lié, que mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de
1653 mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénia
1654 de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les
1655 tes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les grands vents : le mouvement, la violenc
1656 vision globale du « monde entier des choses ». ⁂ I . Le mouvement crée l’énergie, le rayonnement et les trains d’ondes, —
1657 ment crée l’énergie, le rayonnement et les trains d’ ondes, — et d’autre part, dans le poème, il crée littéralement le sens
1658 s le poème, il crée littéralement le sens. (Point de départ d’une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa for
1659 , il crée littéralement le sens. (Point de départ d’ une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa formule dynam
1660 nous filaient entre les doigts — grands virements de comptes et glissements sur l’aile. L’apposition me semble offrir ici
1661 osition me semble offrir ici l’équivalent en mots d’ un accord en musique : co-vibration des sens au lieu de celle des sons
1662 où l’on étudiera, plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale,
1663 plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale, entre ses « origine
1664 le, entre ses « origines » et son délire global…) II . Anabase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques de ce siècle :
1665 ase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nour
1666 i les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nourrit la plupart des poè
1667 respire à longs traits la maîtrise, et le bonheur de la victoire. Les mots faveur et favorable, éloges, délice et délectab
1668 autres les expressions du délaissement, du dégoût de vivre ou des chagrins intimes. Qu’ils n’aillent dire : tristesse… s’
1669 nostalgie deviennent ici conquête, pressentiment de l’acte, distraction vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de
1670 ion vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de force pour les hommes… Choses vivantes, ô choses — excellentes ! Rien
1671 poésie des « blues » fait illusion : temps faible d’ un grand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Co
1672 rand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil int
1673 er.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’au
1674 témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s
1675 ’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’ exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au
1676 ope. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’ humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au monde entier des chose
1677 ce propos une hypothèse critique, qui permettrait de situer les grands poèmes du siècle. Si l’élément sentimental domine c
1678 uel, c’est dans l’élément animique que les poèmes de Saint-John Perse trouvent leurs lois et leurs cadences : Et c’est pa
1679 à l’image des grandes crues, Qu’il prend conseil de ces menées nouvelles au lit du vent. Et c’est conseil encore de fo
1680 velles au lit du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents
1681 t du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents du Nouveau M
1682 e comme les vents du Nouveau Monde, comme un rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les ri
1683 n rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les rigueurs voluptueuses du plus pur langage fra
1684 urs voluptueuses du plus pur langage français, et de cette « rhétorique profonde » dont parlait un jour Baudelaire. III. L
1685 rique profonde » dont parlait un jour Baudelaire. III . L’Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est visio
1686 it un jour Baudelaire. III. L’Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fu
1687 n de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fut universaliste, et le redeviendra peut-être, ma
1688 rocédés, chez Saint-John Perse, ouvrent les voies d’ un grand lyrisme américain. Ils sont classiques. Les continents, les p
1689 yriques, et l’édification sur table rase des lois d’ une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en c
1690 tion sur table rase des lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes
1691 lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et q
1692 ès grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et qui prenaient source plus haute qu’en nos chants, en lie
1693 aient source plus haute qu’en nos chants, en lieu d’ insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô mond
1694 plus haute qu’en nos chants, en lieu d’insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô monde entier des
1695 e mot « monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’ états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée
1696 monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’ âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de va
1697 à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes es
1698 us d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute rac
1699 nts individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pa
1700 rre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de
1701 de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par
1702 es », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’u
1703 hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme san
1704 toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’un
1705 s en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’ une âme sans nom — l’inconscient d’une époque — dont le poète déchiffr
1706 ar nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’ une époque — dont le poète déchiffre les messages. Itinéraires et inve
1707 s messages. Itinéraires et inventaires, sommation de nos « voies et façons » et « chants d’un peuple, le plus ivre », — il
1708 sommation de nos « voies et façons » et « chants d’ un peuple, le plus ivre », — il semblera surprenant qu’un Français ait
1709 ançais ait ouvert aux Américains les perspectives de l’épopée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans
1710 pée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafay
1711 un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafayette. ⁂ Mais Vents n’est pas seulement le poème du lyrisme, le c
1712 s seulement le poème du lyrisme, le chant profond de l’Amérique. C’est aussi, dans sa dernière partie, le poème du retour
1713 l’Europe, à la France. Nous reviendrons, un soir d’ Automne, sur les derniers roulements d’orage… Demain, ce continent lar
1714 s, un soir d’Automne, sur les derniers roulements d’ orage… Demain, ce continent largué… S’ensuit une description charmant
1715 S’ensuit une description charmante et déchirante d’ une France désuète et qui naguère encore périssait « par excès de sage
1716 suète et qui naguère encore périssait « par excès de sagesse », d’une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent
1717 aguère encore périssait « par excès de sagesse », d’ une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent des Amériques
1718 ur avec le vent des Amériques. Au plus haut point de ce très haut poème, Saint-John Perse a rejoint notre vœu. Nous l’atte
1719 se a rejoint notre vœu. Nous l’attendrons un soir d’ automne, avec le souffle du grand vent, sur la route et la terre des h
1720 la terre des hommes, prêts à rendre nos comptes «  d’ hommes nouveaux, — d’hommes entendus dans la gestion humaine, non dans
1721 prêts à rendre nos comptes « d’hommes nouveaux, —  d’ hommes entendus dans la gestion humaine, non dans la précession des éq
1722 es équinoxes », et qu’il nous aide ! par le chant d’ une Europe future. Car, ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plu
1723 , ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plus de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’auteur qui donne à l’âm
1724 us de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’ auteur qui donne à l’âme de plus grands mouvements… qui nous remplisse
1725 e plus grands mouvements… qui nous remplisse plus de la vapeur du dieu qui l’agite. » 4. « Avertissement du Dieu ! Avers
1726 plisse plus de la vapeur du dieu qui l’agite. » 4. « Avertissement du Dieu ! Aversion du Dieu ! » ou « … avec la bête ha
1727 la bête haut cabrée — une âme plus scabreuse ! » ( Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capa
1728 e âme plus scabreuse ! » (Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de
1729 use ! » (Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le
1730 mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureu
1731 Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureux sont les plus
1732 Arabes et Chinois peut-être… m. Rougemont Denis de , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris
1733 , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris, septembre 1950, p. 136-139.
1734 ue », Les Cahiers de la Pléiade, Paris, septembre 1950, p. 136-139.