1 1948, Articles divers (1948-1950). L’idée fédéraliste (1948)
1 , renonçant à leur souveraineté absolue au profit d’ une constitution commune. Dans cette vue, la Suisse moderne serait une
2 ans cette vue, la Suisse moderne serait une sorte de « bon exemple à suivre ». Même si l’on est disposé à l’admettre, deux
3 tent aussitôt à l’esprit. Il conviendrait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui m
4 drait d’abord de préciser quels sont les éléments de notre expérience helvétique qui méritent d’être donnés en exemple ; p
5 ments de notre expérience helvétique qui méritent d’ être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourr
6 ique qui méritent d’être donnés en exemple ; puis de chercher dans quelle mesure ils pourraient être utilisés ou reproduit
7 eproduits sur une plus vaste échelle. La question de nos dimensions dans l’espace et dans le temps apparaît capitale à cet
8 oire suisse, notre État fédéral avec ses cent ans d’ existence représente déjà une tradition ; nous pouvons en étudier les
9 nous autres Suisses. Mais si nous passons du plan de cette microhistoire à l’histoire générale, tout change. Nous voyons t
10 out d’abord que cent ans, ce n’est qu’un septième de notre histoire nationale ; que celle-ci ne s’étend que sur le dernier
11 que celle-ci ne s’étend que sur le dernier tiers de l’ère chrétienne, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l
12 e, laquelle n’est à son tour que le dernier tiers de l’histoire des civilisations, qui elles-mêmes ne couvrent que le dern
13 les-mêmes ne couvrent que le dernier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il ré
14 nier cinquantième de la durée généralement admise de l’humanité sur la planète. D’où il résulte que notre expérience fédér
15 généralement admise de l’humanité sur la planète. D’ où il résulte que notre expérience fédérale ne représente guère que la
16 lles s’évanouiront probablement, comme une goutte de vin dans la mer. Ensuite, ce rappel à nos dimensions très réduites da
17 ns jouer dans le monde. En effet, les proportions de notre expérience à l’histoire générale sont à peu près celles de la g
18 ence à l’histoire générale sont à peu près celles de la graine à l’arbre. Qu’est-ce qu’une graine ? C’est un objet hauteme
19 n aboutissement et un commencement. C’est le lieu d’ un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent,
20 nt et un commencement. C’est le lieu d’un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent, mais elles p
21 un commencement. C’est le lieu d’un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent, mais elles peuvent
22 cement. C’est le lieu d’un passage de la vie à la vie par la mort. Toutes les graines meurent, mais elles peuvent mourir de
23 es les graines meurent, mais elles peuvent mourir de deux manières : les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’h
24 les unes ne laissent qu’à peine leur poids minime d’ humus, les autres donnent un nouvel arbre. Notre État fédéral mourra,
25 helle infiniment plus vaste ? Telle est la chance de la Suisse dans l’histoire, pour ce siècle ou pour ceux qui le suivron
26 ce siècle ou pour ceux qui le suivront. La chance d’ une graine. Transposons maintenant ces symboles. Traduisons graine par
27 aîtra tout comme une autre République sérénissime de Venise, ne laissant qu’un souvenir ou un décor, parce qu’il aura gard
28 n cite l’exemple helvétique, à propos d’un projet d’ États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate
29 ue, à propos d’un projet d’États-Unis d’Europe ou de gouvernement mondial, l’objection immédiate qui surgit sur les lèvres
30 l ne s’agit que des modalités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’id
31 alités typiquement suisses de la mise en pratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expér
32 ratique de l’idée fédérale. On a tort s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement pl
33 t s’il s’agit de l’idée elle-même. Une expérience de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses app
34 ce de laboratoire est nécessairement plus réduite de dimensions que ses applications, mais pourtant celles-ci n’existeraie
35 nt pas sans celle-là. Je ne parlerai donc ici que de notre idée fédéraliste en soi. Elle est très simple, comme toutes les
36 r en quelques mots, en une formule ; car elle est d’ un type organique et non pas mécanique ou passionnel, en cela beaucoup
37 résistances, mais elle est au contraire le secret d’ un équilibre constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de comp
38 constamment mouvant entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après
39 nt entre des forces qu’il s’agit de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’écraser l’une après l’autre. On ne sa
40 de composer, non de soumettre l’une à l’autre, ou d’ écraser l’une après l’autre. On ne saurait trop insister sur le double
41 té, comme on voudra, qui est le battement du cœur de ce système. Car le fédéralisme ne consiste pas seulement dans l’union
42 Tous pour un ». Dans ce sens, il nous sera permis de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’autre que la politique
43 s de dire que la politique fédéraliste n’est rien d’ autre que la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot.
44 la politique tout court, au sens le plus légitime de ce mot. Elle est donc l’antithèse exacte des méthodes totalitaires, a
45 onsistent à écraser les diversités par incapacité de les composer en un tout organique et vivant. ⁂ C’est peut-être parce
46 s ou moins consciemment les principales décisions de notre vie politique pendant des siècles, et qu’elle a finalement pris
47 s consciemment les principales décisions de notre vie politique pendant des siècles, et qu’elle a finalement pris forme et
48 cles, et qu’elle a finalement pris forme et force de loi vers 1848 ; mais ce n’est guère qu’au xxe siècle qu’on s’est mis
49 commenter et à philosopher à son sujet. Comme la vie même — étant la vie de notre praxis politique — elle allait sans dire
50 osopher à son sujet. Comme la vie même — étant la vie de notre praxis politique — elle allait sans dire, jusqu’ici. La néce
51 her à son sujet. Comme la vie même — étant la vie de notre praxis politique — elle allait sans dire, jusqu’ici. La nécessi
52 llait sans dire, jusqu’ici. La nécessité présente de l’affermir en face du défi que représente l’esprit totalitaire, et au
53 éfi que représente l’esprit totalitaire, et aussi de la propager, car la meilleure défense est dans l’attaque, nous invite
54 ui semblent avoir inspiré l’action tout empirique de nos ancêtres. 1. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à t
55 me ne peut naître que du renoncement à toute idée d’ hégémonie éducatrice ou organisatrice exercée par l’une des nations co
56 légitime certains « grands » prendre l’initiative d’ une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’
57 d’une fédération européenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe i
58 opéenne ou mondiale. L’échec de Napoléon et celui d’ Hitler dans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’une manièr
59 Napoléon et celui d’Hitler dans leurs tentatives d’ unifier l’Europe indiquent d’une manière négative cette même vérité si
60 ans leurs tentatives d’unifier l’Europe indiquent d’ une manière négative cette même vérité simple que notre réussite confi
61 e peuvent conduire qu’à l’unification, caricature de l’union véritable. 2. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncemen
62 e ne peut naître que du renoncement à tout esprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour
63 sprit de système. Ce qui vaut pour l’impérialisme d’ une nation vaut aussi pour celui d’une idéologie. On pourrait définir
64 l’impérialisme d’une nation vaut aussi pour celui d’ une idéologie. On pourrait définir l’attitude fédéraliste comme un ref
65 fédéraliste comme un refus constant et instinctif de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et s
66 de recourir aux solutions systématiques, simples de lignes, claires et satisfaisantes pour la logique, mais par là même i
67 estructrices des diversités qui sont la condition de la vie organique. Fédérer, ce n’est pas mettre en ordre d’après un pl
68 trices des diversités qui sont la condition de la vie organique. Fédérer, ce n’est pas mettre en ordre d’après un plan géom
69 re en ordre d’après un plan géométrique, à partir d’ un centre ou d’un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes,
70 près un plan géométrique, à partir d’un centre ou d’ un axe, mais arranger ensemble des réalités concrètes, selon leurs car
71 s caractères particuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît p
72 ticuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter et d’ articuler dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème d
73 er dans un tout. 3. Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objectera que le totalitarisme, lui aussi
74 des qualités ne se traduit pas seulement dans le mode d’élection du Conseil des États, mais surtout, et d’une manière beauc
75 qualités ne se traduit pas seulement dans le mode d’ élection du Conseil des États, mais surtout, et d’une manière beaucoup
76 d’élection du Conseil des États, mais surtout, et d’ une manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie pol
77 manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie politique et culturelle, où l’on voit la Suisse romande ou
78 eaucoup plus efficace, dans les coutumes de notre vie politique et culturelle, où l’on voit la Suisse romande ou la Suisse
79 nne jouer un rôle sans proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralism
80 proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour d
81 arrés. 4. Enfin le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contraste avec le simplisme brutal qui caractérise
82 Burckhardt qualifiait dans une lettre prophétique de « terribles simplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’
83 mplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouve
84 l’extrême complication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, co
85 omplication des institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, féd
86 es institutions suisses, de l’espèce de mouvement d’ horlogerie fine que composent nos rouages, communaux, fédéraux, canton
87 , cantonaux, si diversement engrenés, il convient de leur montrer que cette complexité est la condition même de nos libert
88 ontrer que cette complexité est la condition même de nos libertés. C’est grâce à elle que nos fonctionnaires et nos législ
89 eurs sont constamment rappelés au concret, forcés de rester en contact avec les réalités humaines du pays. La Suisse est f
90 s réalités humaines du pays. La Suisse est formée d’ une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, lingui
91 nes du pays. La Suisse est formée d’une multitude de groupes politiques, culturels, administratifs, linguistiques, religie
92 frontières, et qui se recoupent et se recouvrent de cent manières différentes. Il est clair que des lois conçues dans un
93 n ou totalitaire, brimeraient nécessairement l’un de ces groupes, tendraient à réduire leur variété, et mutileraient ainsi
94 eur variété, et mutileraient ainsi dans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes,
95 ans plusieurs de ses dimensions, la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur t
96 ux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plu
97 s, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la
98 créter sur table rase, de simplifier les réalités d’ un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite
99 table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalis
100 , de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en é
101 trait de plume, de tirer des plans à la règle et de forcer ensuite leur réalisation en écrasant tout ce qui résiste, ou s
102 ut ce qui dépasse. Mais c’est la vitalité civique d’ un peuple qu’on écrase ainsi. Une politique fédéraliste, telle qu’on v
103 u’on vient de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle
104 de la décrire, suppose infiniment plus de soins, d’ ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne.
105 iniment plus de soins, d’ingéniosité technique et de compréhension du peuple qu’elle gouverne. C’est pourquoi je disais pl
106 pourquoi je vois en elle le seul avenir possible de l’Europe, et le don que nous pouvons lui faire en restant fidèles à n
107 stant fidèles à nous-mêmes. b. Rougemont Denis de , « L’idée fédéraliste », La Démocratie suisse (1848-1948), Morat, Édi
2 1948, Articles divers (1948-1950). Essai sur l’avenir (1948)
108 , la seule méthode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’ analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et
109 thode honnête, rigoureuse, éprouvée, d’analyse ou de construction. La seule utile, la seule qui réussisse et qui progresse
110 nous sommes libres, après Heisenberg et la Bombe, de penser n’importe quoi, et que cela changera tout. Pardon ! La science
111 uves que vos superstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font
112 uperstitions seraient bien en peine de réfuter ou d’ égaler. Elle guérit ! Elle invente des machines qui font déjà mille ki
113  ! Elle vérifie par des faits éclatants, du genre de la bombe atomique, ses spéculations les plus « folles » ! Libre à vou
114 s spéculations les plus « folles » ! Libre à vous de prendre pour but l’évocation des fées du Moyen Âge : jamais une fée n
115 pas folle, c’est qu’elle nous permet aujourd’hui d’ aller beaucoup plus vite qu’il y a cent ans. Voilà qui est sérieux, me
116 sant le contester autour de moi, je crois prudent de l’accepter. J’admets aussi que l’évocation des fées ne sert à rien et
117 ant que dans quelques lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’aller plus vite, et donc commencent à se demander à
118 es lustres, les hommes cessent de trouver amusant d’ aller plus vite, et donc commencent à se demander à quoi cela sert. Su
119 pposez que leur plaisir nouveau et principal soit d’ évoquer quelque chose comme les fées, et qu’ils y arrivent après deux
120 et qu’ils y arrivent après deux ou trois siècles d’ application des bons esprits. Voilà le sérieux nouveau, l’utilité urge
121 , inventent mille tours sentimentaux insoupçonnés de notre barbarie, créent l’immobilité dont le sous-produit nommé lenteu
122 r est vénéré par quelques sectes populaires, font de la mort une plaisanterie d’un goût sublime qui perd son sel à être ré
123 ctes populaires, font de la mort une plaisanterie d’ un goût sublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’une seule
124 ublime qui perd son sel à être répétée, étouffent d’ une seule pensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendr
125 ensée les explosions cosmiques, etc. Libre à vous de prendre pour but la construction d’un moteur atomique : jamais un mot
126 Libre à vous de prendre pour but la construction d’ un moteur atomique : jamais un moteur atomique n’a évoqué la moindre f
127 s utopies, c’est qu’elles paraissent moins riches d’ avenir que le présent. On peut même dire que l’Utopie se définit comme
128 e la plupart des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des hi
129 art des utopistes, en effet, font preuve de moins de liberté dans leur imagination du futur que la plupart des historiens
130 bee, les utopies sont en réalité des « programmes d’ action déguisés en descriptions sociologiques imaginaires », et l’acti
131 utre que l’arrêt artificiel, à un certain niveau, d’ une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l
132 tain niveau, d’une société en décadence. On isole de cette société les éléments que l’on considère comme bons, et l’on en
133 l’abri des menaces vulgaires comme des créations de l’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité touj
134 ’esprit, insensible aux défis toujours renouvelés de la réalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire.
135 éalité toujours mouvante, — bref, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’une manière moins s
136 f, hors du courant de l’Histoire. Est-il possible d’ imaginer l’avenir d’une manière moins statique par hypothèse ? Quelles
137 e l’Histoire. Est-il possible d’imaginer l’avenir d’ une manière moins statique par hypothèse ? Quelles seraient les condit
138 ons requises ? Il faudrait se garder tout d’abord de composer un tableau cohérent. Ménager à chaque pas la liberté du choi
139 ns possibles. Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les ob
140 . Détourner constamment l’imagination de la ligne de moindre résistance à ses désirs, et la ramener sur les obstacles qu’o
141 essent à gauche et à droite. (C’est le vrai moyen de la passionner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos effo
142 onner.) Mimer enfin, par anticipation sur l’issue de nos efforts présents, les conduites qui pourront résulter du succès m
143 es conduites qui pourront résulter du succès même de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’imaginer beaucoup de
144 de ces efforts. (C’est ce qu’oublient ou refusent d’ imaginer beaucoup de nos meneurs politiques : ils voient les condition
145 os meneurs politiques : ils voient les conditions de leur victoire, mais non ses suites.2) L’effort le plus soutenu, le mi
146 fourni jusqu’ici le monde occidental, c’est celui de dominer la nature par la science, dans l’espoir d’augmenter le confor
147 e dominer la nature par la science, dans l’espoir d’ augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la d
148 spoir d’augmenter le confort matériel, la vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysiqu
149 vitesse de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie. L’effort métaphysique et religieux s’est relâché à partir du
150 se de nos déplacements, et la durée moyenne de la vie . L’effort métaphysique et religieux s’est relâché à partir du xviiie
151 nies, qui sont des désordres fixés. Seul l’effort de la science (dont le sous-produit est l’industrie) enregistre un progr
152 surable, et semble se poursuivre avec des chances de succès toujours accrues. Il en résulte, dans les masses, certaines cr
153 science a toujours raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bi
154 rs raison ; 2. le bonheur dépend de la possession de certains objets neufs ; 3. aller plus vite est un bien en soi. La vi
155 c qu’elle est « vraie ». En retour, nous refusons de croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie o
156 croire ce que nous pensons que « l’état présent » de la science nie ou condamne, et nous accordons à cette science l’autor
157 a science qu’elle vénère, ou du moins s’informera de ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’arrêt que semble ma
158 e ses dernières conclusions, à la faveur du temps d’ arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Ca
159 du temps d’arrêt que semble marquer l’avant-garde de la physique mathématique. Car celle-ci semble avoir atteint, provisoi
160 me qu’elle l’a déjà percé, en ramenant un atome à de l’énergie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’immatériel,
161 gie, donc en réduisant la matière à quelque chose d’ immatériel, pour parler un langage grossier. (Mais c’est celui, précis
162 elui, précisément, dans lequel la grande majorité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’i
163 ité de nos contemporains traduisent les résultats de la science d’hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les not
164 temporains traduisent les résultats de la science d’ hier, qu’ils tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix
165 s tiennent pour la suprême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau
166 prême autorité.) Les notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathé
167 es notions de choix arbitraire, de subjectivisme, de transcendance, sont de nouveau reçues par les mathématiciens et les b
168 e poussée à l’extrême ne peut nous rapprocher que de l’« à quoi bon ? », c’est-à-dire des questions métaphysiques que notr
169 ionaliste, indéfendable aux yeux de la science et de la raison, neutralise pratiquement la vitesse des transports. (Passer
170 e pratiquement la vitesse des transports. (Passer d’ Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époq
171 asser d’Europe en Amérique ne prenait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol
172 renait guère moins de temps en 1946 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches a
173 qu’à l’époque de Christophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, a
174 tophe Colomb : une journée de vol plus trois mois de démarches afin d’obtenir les visas, devises, affidavits, etc.) La pas
175 faveur desquelles les possibilités destructrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beauco
176 uctrices de la technique sont « mises à la portée de toutes les bourses », beaucoup plus généreusement que ne le sont les
177 possibilités constructrices pendant les périodes de paix. On peut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre
178 eut penser que l’unilatéralité, la spécialisation de notre effort scientifique, provoque ainsi les forces les mieux faites
179 ion prométhéenne. Une autre conséquence indirecte de l’effort scientifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la
180 ntifique doit être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait l
181 être indiquée ici. La vulgarisation de la notion de loi (au sens déterministe et mécaniste que lui donnait la science du
182 psychologie, la sociologie, nous servent en fait d’ alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’e
183 nous servent en fait d’alibis. Nous sommes tentés de justifier en leur nom des attitudes qu’en d’autres temps l’on eût app
184 qu’en d’autres temps l’on eût appelées faiblesse de caractère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en l
185 tère, défaitisme ou lâcheté. Ainsi nous acceptons de perdre en liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre
186 n liberté ce que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dan
187 e que nous gagnons en confort (qui est de l’ordre de la nécessité). Nous oublions que la liberté se réalise dans l’acte du
188 gurer qu’elle consiste à « avoir » la disposition d’ un choix d’objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S
189 le consiste à « avoir » la disposition d’un choix d’ objets toujours plus étendu… 3. Surmonter la Guerre S’il est vra
190 ppements devons-nous prévoir à partir du complexe de tensions que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature,
191 ons que l’on vient de caractériser ? Au challenge de la Nature, nous n’avons pas encore répondu par une victoire totale, i
192 ne victoire totale, il s’en faut, mais les moyens de cette victoire sont désormais entre nos mains. La principale résistan
193 Nous poursuivons notre effort technique (maîtrise de l’énergie atomique) en laissant en friche le champ des passions (nati
194 me, politique partisane). Les passions s’emparent de la technique et provoquent la guerre atomique. Les destructions sont
195 estructions sont telles, et le choc psychologique de telle nature, que la civilisation occidentale se disloque en îlots pl
196 loque en îlots plus ou moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les dern
197 u moins intacts dans une mer de ruines, au-dessus de laquelle se meut l’esprit du nihilisme. Les derniers lieux communs mo
198 ux communs moraux se désintègrent. Il reste assez d’ hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances tech
199 se désintègrent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour mainte
200 rent. Il reste assez d’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et
201 ’hommes vivants, de livres, de machines-outils et de connaissances techniques pour maintenir ici et là des apparences de «
202 echniques pour maintenir ici et là des apparences de « vie normale », mais les liens profonds sont coupés. Plus rien ne va
203 ques pour maintenir ici et là des apparences de «  vie normale », mais les liens profonds sont coupés. Plus rien ne va de so
204 rets, des policiers ou des fugitifs. Les sociétés de gangsters se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous o
205 se multiplient. Dans des communautés illuministes de tous ordres, on expérimente des morales nouvelles et des formes nouve
206 nte des morales nouvelles et des formes nouvelles de résistance contre l’État vainqueur et son empire, théoriquement unive
207 vainqueur et son empire, théoriquement universel. De ces communautés persécutées peut sortir une spiritualité nouvelle, mè
208 utées peut sortir une spiritualité nouvelle, mère d’ une civilisation imprévisible. 2. Nous répondons au challenge des pass
209 libres et presque instantanés sur toute l’étendue de la planète. Pour la première fois dans l’histoire du monde, il n’y a
210 u’une seule civilisation (l’occidentale, enrichie d’ apports orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédé
211 orientaux tardifs) ; une seule nation souveraine, de type fédéraliste ; et la question sociale, au lieu de s’exacerber ten
212 ales la guerre et la paix ; soit que le challenge de nos passions se révèle trop puissant et que notre civilisation y succ
213 y répondions victorieusement par l’établissement d’ un gouvernement mondial, libérant l’effort scientifique. (Je note ce s
214 rt scientifique. (Je note ce sentiment, incapable de preuve, à titre de curiosité pour l’historien futur.) 4. Surmonter
215 r.) 4. Surmonter l’Ennui Dans l’éventualité d’ une réponse victorieuse, à la dernière heure, quel serait le nouveau c
216 serait le nouveau challenge qui ne manquerait pas de confronter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre eff
217 ter l’humanité, et qui résulterait du succès même de notre effort le plus constant ? Ce serait à coup sûr l’Ennui. Ce sen
218 n la plus typique du xixe siècle. (Sans horaires de tous genres, on ne pourrait imaginer le fonctionnement des grandes us
219 ération vaste et dense.) « L’ennui naquit un jour de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretien
220 our de l’uniformité », dit-on. Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider s
221 . Mais c’est l’excès de variété qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’en
222 qui l’entretient. De fait, il est bien difficile de décider si la monotonie crée plus d’ennui que la multiplicité des imp
223 en difficile de décider si la monotonie crée plus d’ ennui que la multiplicité des impressions. L’Océan ou les chutes du Ni
224 Niagara ne m’ennuient pas, mais bien la traversée d’ une grande ville inconnue. Ce qui provoque l’ennui, dans un cas comme
225 , dans un cas comme dans l’autre, c’est l’absence de rythmes vivants, ou leur rupture fréquente et arbitraire. En d’autres
226 traire. En d’autres termes, c’est la mécanisation de l’existence, ou encore : la répartition indifférente des efforts et d
227 oint choisi par quelque nécessité interne, en vue d’ une création, d’une participation, d’une compréhension en profondeur.
228 quelque nécessité interne, en vue d’une création, d’ une participation, d’une compréhension en profondeur. C’est donc un ac
229 erne, en vue d’une création, d’une participation, d’ une compréhension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entr
230 ension en profondeur. C’est donc un accroissement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imagin
231 ssement de l’entropie. Or l’ennui diffère en ceci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de mena
232 ci de tout autre challenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans un
233 hallenge imaginable, qu’il naît de l’absence même de menaces définies. (On ne peut pas s’ennuyer dans une tempête, mais bi
234 , l’humanité ne pourra répondre que par une prise de position métaphysique. Elle pourra choisir l’anesthésie spirituelle,
235 lisation à l’ennui, sera obtenue par des méthodes de conditionnement social et physiologique, dont le principe général ser
236 l et physiologique, dont le principe général sera d’ obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question mét
237 que, dont le principe général sera d’obnubiler et de refouler avec une extrême vigilance toute question métaphysique que l
238 oute question métaphysique que l’Ennui risquerait de mettre à nu. Dans ce cas, les spirituels-malgré-tout se verront persé
239 robablement nomade, qui pourra devenir la matrice d’ une civilisation spirituelle et mondiale. 2. Si l’Humanité choisit au
240 e par une élite en tous points comparable à celle de nos savants actuels, dotée des mêmes prestiges populaires, exerçant u
241 exerçant une autorité analogue sur l’orientation de la recherche organisée, et définissant de facto les nouveaux standard
242 e, et définissant de facto les nouveaux standards d’ utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tour
243 sant de facto les nouveaux standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la m
244 x standards d’utilité et de valeur. Mais l’effort de cette élite, au lieu de se tourner vers la matière — désormais « dépa
245 » — se tournera vers la découverte et la maîtrise de réalités d’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jo
246 era vers la découverte et la maîtrise de réalités d’ un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi p
247 ’un autre ordre, totalement ignorées ou négligées de nos jours, aussi peu imaginables pour nous que ne pouvait l’être pour
248 ants du xviiie siècle la destruction instantanée d’ une ville par suite de la dissociation d’un invisible point de matière
249 tantanée d’une ville par suite de la dissociation d’ un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, e
250 par suite de la dissociation d’un invisible point de matière. Ce sont ces réalités indescriptibles, et sans nom dans notre
251 je désignais en débutant par le terme symbolique de Fées. 1. Cette page est empruntée à mes Lettres sur la bombe atom
252 la bombe atomique , 1946. 2. Ceci est vrai aussi de théoriciens révolutionnaires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contr
253 ires comme Saint-Simon et Marx, qui ont contribué d’ une manière décisive à donner forme à un avenir très différent de leur
254 écisive à donner forme à un avenir très différent de leurs prévisions. Saint-Simon a fourni les cadres du capitalisme indu
255 Toynbee, A Study of History. a. Rougemont Denis de , « Essai sur l’avenir », Pro regno pro sanctuario, Nijkerk, G. F. Cal
3 1948, Articles divers (1948-1950). Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)
256 Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) (juin 1948)c La crise actuelle nous force à nous interrog
257 e nous force à nous interroger sur la valeur même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’auton
258 r même de l’Europe, dans le monde, et pour chacun de nous. Que signifie l’autonomie du continent, et que signifierait sa p
259 s qui pèsent sur nous mettent en cause une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis de
260 e une notion de l’homme, un mode de vie, un idéal de liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’Europe. En les per
261 liberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’ Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce
262 om d’Europe. En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la
263 coup ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la vie. Le monde entier en serait appauvri. C’est donc une notion de
264 ce qui fait à nos yeux la valeur et le sens de la vie . Le monde entier en serait appauvri. C’est donc une notion de l’homme
265 entier en serait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun
266 ait appauvri. C’est donc une notion de l’homme et de la liberté qui est en définitive notre vrai bien commun. C’est en ell
267 nité la plus profonde. Et c’est en la définissant d’ une manière actuelle et concrète que nous poserons les bases de la féd
268 actuelle et concrète que nous poserons les bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de
269 bases de la fédération, qui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que le
270 ui est notre seul espoir de la sauver. Primauté de la culture en Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nou
271 Europe S’il est vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ordre économique et politique, il n’est pas moins ce
272 t vrai que les motifs immédiats de nous unir sont d’ ordre économique et politique, il n’est pas moins certain que l’unité
273 politique, il n’est pas moins certain que l’unité de l’Europe est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géogra
274 e est essentiellement culturelle. Du point de vue de la géographie, l’Europe n’est qu’un cap de l’Asie. Du point de vue de
275 du monde, l’Europe reste aujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’une culture inégalée, plus intense, plus div
276 ujourd’hui, même privée de sa puissance, le foyer d’ une culture inégalée, plus intense, plus diverse et créatrice qu’en to
277 lus diverse et créatrice qu’en toute autre région de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plu
278 ion de la planète. Mais il faut rendre ici au mot de culture son sens le plus large et humain. La culture véritable n’est
279 e véritable n’est pas un ornement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme
280 ement, un simple luxe de l’esprit, ou un ensemble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît
281 mble de spécialités qui ne concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle il
282 concernent pas l’homme de la rue. La culture naît d’ une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut
283 la rue. La culture naît d’une prise de conscience de la vie ; elle illustre, traduit et promeut une certaine conception de
284 . La culture naît d’une prise de conscience de la vie  ; elle illustre, traduit et promeut une certaine conception de l’exis
285 ustre, traduit et promeut une certaine conception de l’existence ; elle l’éduque ; elle en donne le sens. Or il est bien t
286 e ; elle en donne le sens. Or il est bien typique de l’Europe, aujourd’hui, que la culture ainsi comprise y soit encore un
287 lleurs, elle est mise au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du
288 se au service du développement de l’industrie, ou de certaines visées politiques. Ce sont les chefs du parti au pouvoir, l
289 ont les chefs du parti au pouvoir, les dirigeants de l’économie qui lui dictent un programme précis, qui limitent ses acti
290 aire, c’est la culture qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influen
291 c’est la culture qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influencer, et
292 qui exprime le sens humain de la vie politique et de l’économie ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les c
293 ; c’est elle qui vise à les influencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définit
294 fluencer, et permet de les critiquer. La primauté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et
295 uté de la culture appartient donc à la définition de l’Europe. Maintenir et promouvoir notre culture, cela signifie d’abor
296 Européens : élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moye
297 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté. Cela signifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins
298 nifie ensuite : harmoniser les moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités
299 es moyens et les fins de l’existence ; s’efforcer de rapporter sans cesse toutes les activités publiques et privées à une
300 privées à une notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le
301 notion toujours plus haute et large de l’homme et de sa liberté ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vi
302 ; aménager et transformer en conséquence le cadre de la vie et les institutions. La conception européenne de l’homme
303 ager et transformer en conséquence le cadre de la vie et les institutions. La conception européenne de l’homme Élargi
304 et les institutions. La conception européenne de l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa l
305 e l’homme Élargir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une d
306 largir et approfondir la conception de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique
307 e sa liberté n’a jamais été, en Europe, l’apanage d’ une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie, mais au cont
308 été, en Europe, l’apanage d’une doctrine unique, d’ une nation ou d’une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours,
309 l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou d’ une caste choisie, mais au contraire ce fut toujours, et ce sera, tant
310 , et ce sera, tant qu’il y aura l’Europe, l’effet d’ un dialogue permanent, bien souvent dramatique, parfois tragique, entr
311 doctrines ou plusieurs confessions, une vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, il
312 ssions, une vingtaine de nations, et une infinité d’ écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Eu
313 vingtaine de nations, et une infinité d’écoles et de génies individuels : tous, ils ont contribué à faire l’Europe et à mo
314 é à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée n’est pas simple, mais toujours dialectique ; ell
315 le trouve son unité dans la diversité des couples d’ éléments antagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous e
316 tagonistes dont le dialogue se perpétue en chacun de nous et se renouvelle à chaque génération : antiquité et christianism
317 et protestantisme, attachements régionaux et sens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion
318 ens de l’universel, mémoire et invention, respect de la tradition et passion du progrès, science et sagesse, germanisme et
319 e… Dans cet équilibre tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risqu
320 tendu, et sans cesse menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme
321 se menacé de rupture au profit de l’un ou l’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aven
322 ’autre de ses éléments, réside le risque original de l’homme européen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous p
323 ropéen, son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous participe plus ou moins consciemment réside le secret du dynamis
324 mment réside le secret du dynamisme occidental et de l’inquiétude créatrice qui pousse l’Européen à remettre en question,
325 ice qui pousse l’Européen à remettre en question, de siècle en siècle, ses rapports avec Dieu, avec le monde, avec l’État
326 naisons variées à l’infini qu’il lui est possible d’ opérer entre les éléments contradictoires constituant son patrimoine,
327 patrimoine, réside la chance, pour tout Européen, d’ individualiser de plus en plus ses jugements et son mode de vie. Et en
328 ns ce choix permanent, dans la conscience qu’il a d’ en être responsable, l’Européen conçoit la liberté. Toute notre histo
329 istoire illustre ce débat, qui se livre en chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entr
330 n chacun de nous. Elle est l’histoire des risques de la liberté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrann
331 rté, progressant entre les écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’indiv
332 écueils du désordre et de la tyrannie… Le schéma de ce progrès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits
333 grès est simple. Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l
334 Pour peu que l’individu, abusant de ses droits et de sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à ce
335 e sa liberté, devenue facile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste s
336 ile, cède à la tentation de l’anarchie ou à celle de l’impérialisme, une réaction collectiviste se déclenche, au nom de la
337 llectiviste se déclenche, au nom de la justice ou de l’ordre social. Elle donne naissance à des régimes unitaires (qu’on a
338 à se dresser avec une passion renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenan
339 renouvelée le génie de la diversité, c’est-à-dire de la liberté. Si nous cherchons maintenant dans quelle notion commune d
340 s cherchons maintenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’indiv
341 intenant dans quelle notion commune de l’homme et de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et d
342 t de sa destinée se fonde cette critique alternée de l’individualisme et du collectivisme, renaissant à toutes les époques
343 qu’au xxe siècle, mais qui a toujours été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idé
344 été l’axe de notre histoire, la vision directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion
345 ion directrice de nos révolutions : c’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’origine chrétienne, acceptée et r
346 ’est l’idéal de la personne humaine. Cette notion d’ origine chrétienne, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de
347 e, acceptée et reprise par l’humanisme, est celle de l’homme doublement responsable envers sa vocation et envers la cité ;
348 on pas seulement libre ou seulement engagé ; lieu d’ une synthèse vivante, mais aussi d’un conflit entre des exigences égal
349 engagé ; lieu d’une synthèse vivante, mais aussi d’ un conflit entre des exigences également valables mais pratiquement an
350 devient infidèle à lui-même et au génie créateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes,
351 réateur de l’Europe lorsqu’il cède à la tentation de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa p
352 de supprimer les antagonismes, soit qu’il essaie de s’enfermer dans sa particularité (nation, parti ou idéologie), soit q
353 idéologie), soit qu’il prétende l’imposer à tous d’ une manière uniforme, donc tyrannique. Diversité et division des na
354 et des idéologies Cette description succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-
355 succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-uns des problèmes brûlants que nous pos
356 ntinent, a fait pendant des siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusio
357 siècles l’originalité de l’Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État,
358 ité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réa
359 e. Mais par suite de la collusion de la nation et de l’État, fixant les mêmes frontières rigides à des réalités culturelle
360 iques et administratives, qui n’ont aucune raison de se recouvrir en fait, cette diversité naturelle est devenue division
361 uvrit nos échanges culturels. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’as
362 els. Elle laisse chacune de nos patries incapable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’assurer son existence écono
363 apable de sauvegarder son autonomie politique, ou d’ assurer son existence économique. Cet individualisme national, qui ten
364 cie, constitue aujourd’hui le pire danger pour la vie réelle des nations. Dans l’état de faiblesse où il les met, il les li
365 anger pour la vie réelle des nations. Dans l’état de faiblesse où il les met, il les livrera fatalement à l’unification fo
366 t à l’unification forcée, soit par l’intervention d’ un empire du dehors, soit par l’usurpation d’un parti du dedans. C’est
367 tion d’un empire du dehors, soit par l’usurpation d’ un parti du dedans. C’est pourquoi l’union fédérale est devenue la seu
368 logies. Aussi indispensables que les nations à la vie de la culture et à la liberté, ces diversités à leur tour tendent à d
369 es. Aussi indispensables que les nations à la vie de la culture et à la liberté, ces diversités à leur tour tendent à deve
370 ngereuse et utopique que ne serait l’impérialisme d’ une seule nation. Il est bien clair que ni la droite, ni la gauche, ni
371 uche, ni le centre, aujourd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de
372 urd’hui, ne sont capables de créer l’union. Aucun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par
373 cun de ces partis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’Europe, ni par suite son propre avenir. De même que les nati
374 son propre avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique
375 e avenir. De même que les nations n’ont de chance de survivre que si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur s
376 ue si elles renoncent à temps au dogme tyrannique de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre l
377 ue de leur souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, ren
378 souveraineté absolue, les partis n’ont de chance de poursuivre leur lutte que s’ils en limitent l’ambition, renoncent à t
379 ubordonnent leur tactique à la stratégie générale d’ une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour
380 eur tactique à la stratégie générale d’une action de salut public européen. c. Rougemont Denis de, « Pour sauver nos d
381 de salut public européen. c. Rougemont Denis de , « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Par
382 t Denis de, « Pour sauver nos diversités (le sens de La Haye) », Fédération, Paris, juin 1948, p. 14-15.
4 1948, Articles divers (1948-1950). Pourquoi l’Europe ? (25 décembre 1948)
383 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
384 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
385 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
386 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
387 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
388 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
389 fondamental, et que personne ne peut nier : Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
390 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les probl
391 à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
392 omie moderne. Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
393 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
394 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
395 à-dire la Troisième puissance, qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
396 e puissance, qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
397 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
398 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
399 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
400 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
401 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
402 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
403 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
404 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
405 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
406 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
407 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
408 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
409 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique Cela « soulè
410 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
411 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ic
412 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses, et je ne dirai rien contre les thèses — ici ! — mais nous nou
413 ntre les thèses — ici ! — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
414 s nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pascal et Goethe, c’est Dante et Shakespe
415 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
416 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
417 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
418 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
419 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
420 re l’Europe. Mais quelle Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
421 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
422 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
423 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
424 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
425 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
426 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
427 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
428 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
429 autres couples combinés et permutés, sans parler de leur ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les au
430 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
431 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
432 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
433 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
434 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
435 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
436 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
437 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
438 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
439 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
440 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
441 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
442 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle sa liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
443 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
444 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
445 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
446 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
447 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
448 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
449 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps, par
450 ps, par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
451 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
452 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolog
453 re sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
454 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
455 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
456 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
457 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
458 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
459 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
460 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
461 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
462 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
463 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec to
464 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. Certes, nous voulons faire l’Europe avec tout le monde
465 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
466 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ain
467 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de « mystifications » par les forces impérialistes… C’est ainsi qu’on pe
468 pose à votre admiration : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
469 suffirait. Mais soyons sérieux : quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
470 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
471 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
472 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
473 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
474 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
475 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
476 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
477 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclament leur fédération, pourront se faire entendre au m
478 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de, « Pourquoi l’Europe ? », Rasse
479 forte enfin de l’espérance. d. Rougemont Denis de , « Pourquoi l’Europe ? », Rassemblement : bulletin intérieur hebdomad
480 ette note : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récem
481 e : « Denis de Rougemont, l’auteur suisse de tant d’ essais réputés outre-Atlantique comme en France, et tout récemment des
482 nt de faire, en tant que membre du Comité central de l’Union européenne des fédéralistes, une conférence en Sorbonne. Les
483 à quel point les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblemen
484 t les préoccupations et les positions de l’auteur de Penser avec les mains rejoignent celles du Rassemblement. »
5 1949, Articles divers (1948-1950). La liberté religieuse à l’école (2e semestre 1949)
485 règlements scolaires sont stricts : toute absence d’ un élève qui n’est pas justifiée par des raisons « réputées légitimes 
486  réputées légitimes », telle que maladie, réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être pun
487 réunion de famille exceptionnelle, impossibilité de circuler, etc. doit être punie, surtout si elle se répète à intervall
488 lors subie par les parents ou responsables, et va de l’amende à la prison selon les cas et les pays. On imagine tous les c
489 s aussi sévères, pour peu qu’on veuille se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossier
490 le se servir de ceux-ci contre celle-là. Je viens d’ examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes
491 ontre celle-là. Je viens d’examiner une vingtaine de dossiers relatifs à des familles adventistes dans trois pays : la Bel
492 ns plusieurs départements, après que les demandes de dispense ont été refusées « au nom de la loi », il est arrivé fréquem
493 loi », il est arrivé fréquemment que le directeur d’ une école, ou l’inspecteur d’académie, consentissent finalement à inte
494 ent que le directeur d’une école, ou l’inspecteur d’ académie, consentissent finalement à interpréter la loi, et à suspendr
495 n Algérie ou en Alsace, des amendes ou des peines de prison ont été infligées aux pères d’enfants absents plusieurs samedi
496 des peines de prison ont été infligées aux pères d’ enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches a
497 ées aux pères d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignemen
498 res d’enfants absents plusieurs samedis de suite. D’ innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des pré
499 te. D’innombrables démarches auprès des autorités de l’enseignement, des préfets et des ministres semblent avoir rencontré
500 quel que soit le désir, dont beaucoup témoignent, d’ assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la
501 nt beaucoup témoignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’e
502 moignent, d’assurer l’exercice réel de la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolér
503 la liberté de conscience, il arrive que la lettre d’ un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de préte
504 il arrive que la lettre d’un décret tue l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’i
505 e l’esprit de tolérance là où il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’intolérance. En Suisse, la situation dif
506 il existe, ou serve de prétexte facile à l’esprit d’ intolérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’un canton à l’
507 lérance. En Suisse, la situation diffère beaucoup d’ un canton à l’autre. C’est ainsi que l’État de Genève accorde le congé
508 nquait l’école le samedi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se re
509 medi matin, et qu’il refusait de payer une amende de 2 francs par absence : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d
510 ce : c’eût été à ses yeux se reconnaître coupable d’ une faute, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettr
511 e, et ses convictions religieuses lui interdisent de l’admettre. À ce jour M. D… a subi quatre emprisonnements, pour cinqu
512 uatre emprisonnements, pour cinquante-sept heures d’ absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a acce
513 isonnements, pour cinquante-sept heures d’absence de sa fille. Un autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de pay
514 autre père, Albert B…, citoyen bernois, a accepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence
515 ccepté de payer des amendes allant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’
516 llant successivement de 3 à 12 francs par absence de sa fillette à l’école communale, mais n’en a pas moins été condamné (
517 après « récidives ») à trois, puis à quatre jours de prison. Renonçant alors à la lutte, il a envoyé sa fille dans un cant
518 loi paraît plus tolérante. L’instruction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes compr
519 ction primaire de son enfant lui a coûté la somme de 3000 francs suisses, amendes comprises. Nous pourrions citer une diza
520 ous disent les gens pressés : qu’il ne s’agit que de cas fort rares, que les adventistes sont en très petit nombre, qu’ils
521 tistes sont en très petit nombre, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la sema
522 e, qu’ils ont tort de s’obstiner sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne m
523 r sur une question de numéros attribués aux jours de la semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’indignation, d
524 semaine, et qu’enfin tout cela ne mérite pas trop d’ indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millio
525 indignation, dans une époque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou a
526 poque où il s’agit d’abord de sauver des millions d’ innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Rema
527 e sauver des millions d’innocents jetés aux camps de concentration ou aux travaux forcés. Remarquons tout d’abord que le n
528 que les bonnes gens qui parleraient volontiers «  d’ exceptions négligeables » dans le cas d’une secte brimée, ne voient pa
529 ontiers « d’exceptions négligeables » dans le cas d’ une secte brimée, ne voient pas que cet argument devrait en bonne logi
530 , dont le nombre est infime. Ensuite, la question de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au
531 n de savoir si les adventistes ont tort ou raison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davan
532 ison de préférer le samedi au dimanche comme jour de repos, ne doit pas davantage intervenir dans la considération des fai
533 qui nous occupent. Il s’agit ici du respect légal de toutes les convictions religieuses en tant que telles, et non point d
534 uses en tant que telles, et non point du jugement de vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions,
535 vérité que l’on peut porter sur l’une ou l’autre de ces convictions, car si les deux points de vue n’étaient pas dissocié
536 nutieusement ces libertés. Céder sur une question de principe, sous prétexte qu’elle n’intéresse qu’une minorité microscop
537 écise, suffirait à résoudre des conflits du genre de ceux que l’on vient de citer. Il serait, par exemple, extrêmement fac
538 citer. Il serait, par exemple, extrêmement facile d’ introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une
539 facile d’introduire dans les règlements scolaires de toutes les démocraties une clause spéciale ajoutant à la liste des « 
540 éciale ajoutant à la liste des « motifs légitimes d’ absence aux cours » le fait d’appartenir à certaines religions, sectes
541 « motifs légitimes d’absence aux cours » le fait d’ appartenir à certaines religions, sectes ou confessions. À cela j’imag
542 ions courantes : on dira qu’il est trop compliqué de prévoir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des p
543 ir tous les cas possibles, ou qu’il est dangereux de créer des précédents dont mille sectes à l’avenir pourront être tenté
544 ont mille sectes à l’avenir pourront être tentées d’ abuser. Le premier argument n’est pas sérieux. Les lois pénales décriv
545 is pénales décrivent dans le détail des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales,
546 il des centaines de cas bien plus rares que celui de nos adventistes. Les lois fiscales, les lois sur les loyers et les « 
547 ns à distinguer, à nuancer, à préciser, à prévoir d’ infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien
548 à prévoir d’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateu
549 ’infimes variations. Lorsqu’il s’agit de punir ou de faire payer, rien n’est trop compliqué pour le législateur ! S’il n’a
550 ur le législateur ! S’il n’apportait qu’une trace de ce génie méfiant dans la rédaction des décrets garantissant les droit
551 itutions, la Liberté et la Démocratie cesseraient d’ être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on d
552 t la Démocratie cesseraient d’être raillées comme de belles abstractions. Quant à la crainte qu’on dit avoir, que des « pa
553 n’ouvrent la porte à l’anarchie, elle se nourrit d’ une double confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’accorder des
554 uble confusionj car, d’une part, il ne s’agit pas d’ accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « libe
555 s d’accorder des droits spéciaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties p
556 iaux, mais simplement de concrétiser la « liberté de conscience » que toutes nos démocraties proclament à l’envi. Et d’aut
557 roclament à l’envi. Et d’autre part, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement
558 t, il n’y a pas de vraisemblance à ce que des cas de ce genre se multiplient abusivement. Quand ils se révéleraient deux o
559 s plus nombreux, ce ne serait pas une affaire que d’ ajouter quelques clauses aux milliers d’autres, utiles ou non, qui s’a
560 montrent soudain les plus stricts dans leur refus de considérer les droits d’une petite confession qui ne menace personne.
561 stricts dans leur refus de considérer les droits d’ une petite confession qui ne menace personne. On les honore d’avoir sa
562 confession qui ne menace personne. On les honore d’ avoir sauvé d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoi
563 i ne menace personne. On les honore d’avoir sauvé d’ une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au ra
564 d’une extinction probable la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parl
565 la langue romanche, et de l’avoir élevée au rang de langue nationale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’un cent
566 ionale, bien qu’elle ne soit parlée que par moins d’ un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils
567 u’elle ne soit parlée que par moins d’un centième de la population totale du pays. Comment ne verraient-ils pas qu’en assu
568 nt ne verraient-ils pas qu’en assurant les droits d’ une minorité religieuse, ils confirmeraient les principes qui, depuis
569 ils confirmeraient les principes qui, depuis plus d’ un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur p
570 s qui, depuis plus d’un siècle, sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’e
571 sont la base même de leur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des d
572 eur indépendance nationale, de leur prospérité et de leur paix ? L’exemple des adventistes, et des difficultés particulièr
573 tent leurs croyances, m’a paru propre à illustrer d’ une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse
574 er d’une manière bien précise le problème général de la liberté religieuse à l’école. Parce qu’il n’est pas spectaculaire,
575 aru poser le plus clairement possible la question de principe du respect effectif des libertés théoriquement admises par l
576 , mais je sais que toute restriction à la liberté d’ un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du
577 n à la liberté d’un seul groupe menace la liberté de tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne
578 tous les autres — et donc aussi du mien. Chacune de nos religions, ne l’oublions jamais, est en quelque manière ou quelqu
579 ersécution qu’une autre endure. Est-il nécessaire d’ ajouter qu’il en va de même pour nos droits politiques et civiques ? O
580 r la liberté, dans notre monde, qu’en s’efforçant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de, « La liberté religieuse
581 çant de la sauver partout. h. Rougemont Denis de , « La liberté religieuse à l’école », Conscience et Liberté, Paris, 1
582 i. Présenté par la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Au
583 ar la note suivante : « Il n’est pas de petite ou de grande liberté. Il n’y a que la liberté “tout court”. Autoriser une r
584 t, en fait, refuser cette liberté qu’on se flatte de lui accorder. Denis de Rougemont l’expose fort bien dans les pages qu
585 ’est pas inconditionnelle n’est qu’une caricature de la liberté. » j. « Confession » dans l’original. On a corrigé une er
6 1949, Articles divers (1948-1950). Commencer par l’Europe (février 1949)
586 l’Europe (février 1949)f Il paraît que l’idée d’ un gouvernement mondial vient enfin d’atteindre Paris ; il était temps
587 que l’idée d’un gouvernement mondial vient enfin d’ atteindre Paris ; il était temps ! C’est une idée qui était dans l’air
588 mondiales. Qui dira plus ? Ici, nous avons l’air de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. N
589 ir de dire moins, beaucoup moins, en vous parlant de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de na
590 de notre petite Europe. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander :
591 urope. Nous allons faire figure de provinciaux ou de nationalistes attardés. Et l’on va nous demander : pourquoi l’Europe 
592 rticulier : c’est qu’il faut lui montrer un point d’ application. (Or, quand on veut engager un élan émotif dans la réalité
593 élan émotif dans la réalité, on a toujours l’air de freiner.) Nous ne sommes pas une autre école, nos buts finaux sont bi
594 renons au mot. Et nous vous proposons une méthode de travail, un mouvement qui est déjà au travail, et un objectif immédia
595 déjà au travail, et un objectif immédiat, qui est de commencer par l’Europe. Car nous pensons que le chemin vers la paix,
596 u ne passera pas du tout. J’ai peut-être le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’Hiroshima, il y a trois ans, je m
597 tre le droit de parler ainsi, puisqu’au lendemain d’ Hiroshima, il y a trois ans, je me suis trouvé l’un des premiers à pro
598 ouvernement mondial. Je n’ai pas un mot à retirer de ce que je publiais à l’époque. Je ne suis pas un instant revenu en ar
599 revenu en arrière. Je suis au contraire convaincu d’ avoir fait un grand pas en avant en embrassant la cause européenne. Vo
600 quelles raisons, les plus simples du monde, mais d’ une logique à laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me s
601 laquelle, pour ma part, je n’imagine aucun moyen de me soustraire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planèt
602 traire : Devant le nez des premiers enthousiastes de la Planète unie par les peuples unis — et j’en étais — un certain rid
603 peuples unis — et j’en étais — un certain rideau de fer est tombé, brutalement. Et la guerre froide a commencé. La situat
604 server, par-dessus nos têtes… Ils n’ont pas envie de se battre, affirment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de l
605 rment-ils. Ils proclament au contraire leur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’une voix de plus en plus bour
606 ur amour de la paix. Seulement, ils le proclament d’ une voix de plus en plus bourrue, de plus en plus contenue et glaciale
607 contenue et glaciale. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que s’ils continuent à se déclarer la paix sur ce ton-là, cela
608 cune des nations qui la composent se voit menacée d’ annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux em
609 composent se voit menacée d’annexion politique ou de colonisation économique, par l’un des deux empires qui se disputent l
610 fondamental, et que personne ne peut nier : aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
611 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les prob
612 une défense sérieuse de son indépendance ; aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
613 ie moderne. ⁂ Les conclusions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’une tragique simplicité. Si les choses continue
614 usions que l’on doit tirer de ce double fait sont d’ une tragique simplicité. Si les choses continuent comme elles vont : 1
615 tinuent comme elles vont : 1° Les différents pays de l’Europe seront annexés ou colonisés les uns après les autres ; 2° La
616 4 : tout cela va vers une guerre qui risque bien d’ être enfin la dernière, parce qu’elle laissera peu de monde pour en fa
617 aussi tout cela nous conduit, avec la force même de l’évidence, vers une seule et unique solution. Si nous voulons sauver
618 et unique solution. Si nous voulons sauver chacun de nos pays, il nous faut unir ces pays. Si nous voulons sauver la paix,
619 -à-dire la troisième puissance qui serait capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit
620 me puissance qui serait capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Et si l’on me dit que l’Europe, même
621 iffre, qu’on a tendance à oublier : La population de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ
622 de l’Europe occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Am
623 occidentale, donc à l’ouest du rideau de fer, est d’ environ 300 millions, c’est-à-dire deux fois plus que l’Amérique, et a
624 t tous ses satellites réunis. Si ces 300 millions d’ habitants faisaient bloc, soit qu’ils se déclarent neutres, soit qu’il
625 qu’ils se déclarent neutres, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir,
626 s, soit qu’ils menacent de porter tout leur poids d’ un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agre
627 leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’ agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. I
628 ds d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste
629 mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix du monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’
630 monde. Il reste à trouver la méthode, les moyens d’ une action immédiate. Ici, les choses cessent d’être simples, parce qu
631 s d’une action immédiate. Ici, les choses cessent d’ être simples, parce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la
632 arce que l’Europe est la réalité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’en faire une unité qui puisse peser sur l
633 ité la plus complexe de la terre, et qu’il s’agit d’ en faire une unité qui puisse peser sur le plan politique. Cela « soul
634 ultés. On nous dit : qu’est-ce que c’est, l’unité de l’Europe ? Est-ce que c’est culturel ? ou politique ? ou économique ?
635 ? ou politique ? ou économique ? Très bons sujets d’ articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — m
636 économique ? Très bons sujets d’articles ou même de thèses — et je ne dirai rien contre les thèses — mais nous nous occup
637 rien contre les thèses — mais nous nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pasca
638 s nous occupons de la paix. On nous répète sur le mode solennel que l’Europe c’est Pascal et Goethe, c’est Dante et Shakespe
639 société des esprits. C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces p
640 C’est aussi les personnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la p
641 onnages de Courteline et ceux de Bourget, et ceux de Kafka, et c’est aussi ces paysans ahuris par la politique qui vient d
642 st aussi tous ceux qui n’ont jamais été les héros d’ aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans
643 s d’aucun roman, et qui ne savent pas grand-chose de ce qui se passe dans le monde, ceux qui croient — et j’en connais bea
644 ns viennent nous dire : tous ces gens, qu’ont-ils de commun entre eux ? Quelle unité voyez-vous dans tout cela ? Eh bien,
645 e : tous ces gens partagent le même sort, le sort de l’Europe, c’est-à-dire que si l’on ne fait rien, ils seront tous les
646 s gens ont en commun le dégoût et la peur immense de la guerre, et nous voulons pour eux et avec eux faire la paix. Voilà
647 aincre. ⁂ J’en reviens à la méthode et aux moyens d’ action. Aux impatients qui rêvent d’unifier le genre humain dans les q
648 et aux moyens d’action. Aux impatients qui rêvent d’ unifier le genre humain dans les quinze jours, le plus grand choc que
649 e plus grand choc que l’on puisse réserver, c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore
650 c’est de les faire prendre une part active à l’un de ces congrès où s’élabore notre fédération européenne. Car c’est préci
651 parti au pouvoir et une opposition, un seul type de drug-store, et une morale moyenne, dont l’idée générale est justement
652 orale moyenne, dont l’idée générale est justement d’ éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie,
653 ement d’éviter les conflits quotidiens et non pas de les affronter. En Russie, c’est encore plus simple : une seule tête,
654 le : une seule tête, un parti, une police, et pas d’ opposition permise dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines d
655 dans aucun ordre. Mais en Europe ! Deux douzaines de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six
656 de nations avec leurs traditions, presque autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’innombrables morales contrad
657 autant de langues, cinq ou six grandes cultures, d’ innombrables morales contradictoires, et je ne sais combien de partis
658 es morales contradictoires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’exp
659 ires, et je ne sais combien de partis politiques, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques m
660 ne sais combien de partis politiques, de styles, d’ écoles qui s’anathématisent, et d’expériences économiques moins ration
661 ues, de styles, d’écoles qui s’anathématisent, et d’ expériences économiques moins rationnelles que polémiques. Et cela n’e
662 onsiste dans les combinaisons et les permutations d’ une longue série d’antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et d
663 mbinaisons et les permutations d’une longue série d’ antagonismes essentiels : Nord et Midi, gauche et droite, insulaires e
664 autres couples combinés et permutés, sans parler de leurs ménages à trois, et nul d’entre eux ne saurait vivre sans les a
665 ntre eux ne peut prétendre à dominer. Quel panier de crabes ! disent les Américains. Mais ils ne doivent pas oublier que l
666 . Mais ils ne doivent pas oublier que la richesse de l’Europe comme ses misères, et sa grandeur comme ses bassesses, et au
667 son dynamisme incomparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cet
668 comparable, sont nés précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude cré
669 és précisément de ces tensions, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse
670 ns, de ces dialogues, de cette infinie polémique. De là cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siè
671 cette inquiétude créatrice qui pousse l’Européen, de siècle en siècle, à remettre en question ses rapports avec Dieu, avec
672 , avec le monde, avec la société, avec lui-même ; de là tant de dilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’autre
673 ilemmes accentués à plaisir, et qui souvent n’ont d’ autre issue que la violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de
674 a violence, souvent aussi forcent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la co
675 ent à l’invention ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’E
676 ion ; de là enfin cette possibilité de choisir et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appell
677 r et de se risquer, qui est la condition première de ce que l’Européen appelle la liberté. Voilà pourquoi il serait crimin
678 serait criminel, s’il n’était d’abord impossible, de faire dépendre l’unité du continent d’une préalable mise au pas, inte
679 mpossible, de faire dépendre l’unité du continent d’ une préalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’une unificat
680 éalable mise au pas, intellectuelle ou politique, d’ une unification des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’une idéol
681 cation des mœurs et des doctrines, ou du triomphe d’ une idéologie. C’est d’abord impossible, et chacun peut le voir : ni l
682 mple, n’ont aujourd’hui le moindre espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Q
683 e espoir sérieux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour
684 ux de convaincre leur adversaire ou de l’éliminer d’ une manière décisive. Quand elles y parviendraient pour un temps par l
685 mps par la force, il resterait dix autres couples d’ adversaires à pacifier. À supposer qu’on y parvienne enfin, en combina
686 vienne enfin, en combinant tous les moyens connus de simplification du genre humain, du penthotal au plutonium en passant
687 fera l’Europe, puisque le problème est justement de la faire sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’une idéolo
688 e sans commencer par la dénaturer. Mais à défaut d’ une idéologie, il existe une méthode politique, qui nous paraît prédes
689 s mais également valables, et qu’il ne s’agit pas de subordonner l’une à l’autre, mais au contraire de maintenir en tensio
690 autre, mais au contraire de maintenir en tension, de composer en vivant équilibre. Ainsi sur le plan politique : autonomie
691 és locales et pouvoir central limité. Sur le plan de l’économie : secteur libre et secteur dirigé, ou encore : risque et a
692 les plans, la formule est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique,
693 est la même. Qu’il s’agisse de contrats privés ou de politique générale, d’économie ou d’esthétique, le problème restera t
694 isse de contrats privés ou de politique générale, d’ économie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la f
695 ts privés ou de politique générale, d’économie ou d’ esthétique, le problème restera toujours d’éviter à la fois l’isolatio
696 mie ou d’esthétique, le problème restera toujours d’ éviter à la fois l’isolation stérile et l’uniformité contrainte, l’ana
697 ans la diversité, c’est-à-dire l’antithèse exacte de la formule totalitaire, qui est la réduction forcée à l’uniforme. Tel
698 ent trahie par la plupart des bâtisseurs modernes d’ États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.
699 par la plupart des bâtisseurs modernes d’États ou de constitutions. (On ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d
700 ne peut guère excepter que les Suisses.) Inutile d’ insister : la méthode du fédéralisme est la seule qui soit adaptée à n
701 ropéennes. Faire du fédéralisme, c’est donc faire de l’Europe, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ I
702 rope, c’est-à-dire, pratiquement, faire les bases de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assig
703 s de la paix. ⁂ Il reste à préciser les positions de combat que nous assigne une pareille attitude. Certes, nous voulons f
704 ptent, avec toutes les nations qui ont la liberté de l’accepter, avec toutes les religions ou les irréligions, et avec tou
705 s en préconisant le fédéralisme à tous les étages de la société, dans la commune et l’entreprise d’abord, puis à l’échelle
706 savons bien que nous heurtons certaines habitudes de pensée à la fois nationalistes et rationalistes, c’est-à-dire en un m
707 ure des obstacles qu’elle trouve posés en travers de sa route vers l’Europe fédérée et vers la paix — à la destruction du
708 et que Nietzsche appelait un jour « le plus froid de tous les monstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toute
709 nstres froids » — l’État-nation, cause et produit de toutes nos guerres. Sur ce point-là, nous serons à notre tour irréduc
710 e que nous voulons supprimer, c’est l’étatisation de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par l
711 on de la nation elle-même ; c’est la confiscation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le
712 ation de ses forces vives par la machine imbécile de l’État, et c’est enfin le dogme et la pratique des souverainetés nati
713 nous demandons et préparons, comme premier point de tout notre programme, l’institution d’une Cour suprême européenne, c’
714 mier point de tout notre programme, l’institution d’ une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’un pouvoir supérieur aux É
715 ution d’une Cour suprême européenne, c’est-à-dire d’ un pouvoir supérieur aux États. Cette Cour suprême doit être la gardie
716 États. Cette Cour suprême doit être la gardienne d’ une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en app
717 me doit être la gardienne d’une Charte des droits de la personne. Et à ce tribunal pourront en appeler, contre les pouvoir
718 t qui garantit les libertés européennes, le droit d’ opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas
719 e droit d’opposition légale contre l’État. Parler de démocratie, si l’on n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler
720 n’a pas ce droit, c’est bavarder, ou c’est parler de dictature : voir les démocraties dites populaires. Les vues que j’ex
721 férence des Cinq va peut-être accepter notre plan de Parlement européen. Cette assemblée, que nous voulons élue à la fois
722 a fois par les parlements et par les forces vives de chaque pays, doit se réunir dans quelques mois. Elle aura pour missio
723 réunir dans quelques mois. Elle aura pour mission de proposer la création d’une Cour suprême et la Constitution fédérale d
724 s. Elle aura pour mission de proposer la création d’ une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelqu
725 on d’une Cour suprême et la Constitution fédérale de l’Europe. C’est quelque chose, qui peut devenir beaucoup… Mais nous s
726 instant dévier vers on ne sait quelles alliances d’ États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans tr
727 ne sait quelles alliances d’États souverains pris de panique, ou d’états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait
728 alliances d’États souverains pris de panique, ou d’ états-majors d’ailleurs sans troupes ; vers on ne sait quelles déclara
729  ; vers on ne sait quelles déclarations sans rire de sécurité collective ; vers on ne sait quelle coalition sur le papier
730 le coalition sur le papier qui se donnerait l’air de provoquer l’un des deux grands, sans créer pour autant la force néces
731 ger l’agression… C’est donc, pour nous, le moment d’ être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active d
732 moment d’être forts dans les conseils européens — de rallier l’opinion active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d
733 active derrière nos avant-gardes fédéralistes, et d’ imprimer un grand élan à notre propagande populaire, ou pour mieux dir
734 e populaire, ou pour mieux dire : à l’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui
735 ’information de la masse. Car on aurait bien tort de croire que Vichinski peut, à lui seul, faire tout le travail et créer
736 plus entendre, pour l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci :
737 r l’avoir lue dans une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons
738 une centaine de comptes rendus de nos réunions et de nos congrès, et c’est celle-ci : « Nous ne pouvons que souhaiter bonn
739 eux pionniers du fédéralisme. » C’est une manière de dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts
740 dire : « Allez-y, faites-vous tuer, nous suivrons de loin vos efforts, et si vous gagnez par miracle, bien entendu, nous v
741 a ceux qui nous applaudissent, comme ces soldats de je ne sais quel pays, dans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sor
742 ans l’autre guerre, qui, voyant l’officier sortir de la tranchée et s’élancer le premier à l’attaque, criaient bravo ! bra
743 de même nous restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ain
744 us restons à l’écart, vous courez trop de dangers de ‟mystifications” par les forces impérialistes… » C’est ainsi qu’on po
745 cette phrase admirable : Affirmer une vigilance de fer (à l’égard du mouvement fédéraliste), ce n’est pas être absent, c
746 suffirait. Mais soyons sérieux ; quand il s’agit de voter dans nos congrès contre les « mystifications » qu’ils dénoncent
747 battons chaque jour contre elles), ces vigilants de fer ne sont pas là. Quand la bataille devient sérieuse, ils ne sont p
748 bsents. Il y a ceux qui nous reprochent certaines de nos alliances tactiques. Ils veulent bien faire l’Europe, ils veulent
749 t la leçon du jour. C’est qu’ils ont oublié celle d’ hier. Ils oublient que Staline lui-même s’est allié à Churchill pour b
750 us disent non sans raison : « Nous sommes saturés de discours ! Ce qu’il nous faut, ce sont des gestes ; sortez avec un ou
751 bien tort quand il cherchait un homme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’en devenir un lui-même. C’est le plu
752 omme à la lueur de sa lanterne. Il eût mieux fait d’ en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’en trouver. Une bata
753 d’en devenir un lui-même. C’est le plus sûr moyen d’ en trouver. Une bataille est en train de se livrer pour l’Europe. Nous
754 ralisme court sa chance, et avec elle les chances de la paix. Si nous voulons la paix, nous devons vouloir ses moyens : l’
755 rd’hui qu’il faut en courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous q
756 courir l’aventure. Il dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit proc
757 l dépend de nous, Européens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix conc
758 péens, de prendre la guerre de vitesse. Il dépend de nous que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, pr
759 que le jour soit prochain où les voix concertées de l’Europe, proclamant leur fédération, pourront se faire entendre au m
760 ntendre au monde entier comme la voix forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de, « Pour sauver la paix : commen
761 forte enfin de l’espérance. f. Rougemont Denis de , « Pour sauver la paix : commencer par l’Europe », Fédération, Paris,
7 1949, Articles divers (1948-1950). L’Europe ou le cap du destin (1949)
762 eurs européennes viennent de l’esprit, et non pas de la nature ni du nombre. Comment expliquer autrement que ce cap déchiq
763 Comment expliquer autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa popu
764 r autrement que ce cap déchiqueté de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu
765 de l’Asie — 4 % de la superficie du globe, moins d’ un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant p
766 4 % de la superficie du globe, moins d’un sixième de sa population — ait pu régner sur toute la terre, tant par ses armes
767 l qu’exerçaient ses pouvoirs sur les choses et la vie  ? Les causes de cette puissance, naguère mondiale, du « petit cap »,
768 es pouvoirs sur les choses et la vie ? Les causes de cette puissance, naguère mondiale, du « petit cap », furent très dive
769 urope a dominé par ses techniques, par sa science de la mise en valeur d’un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a
770 s techniques, par sa science de la mise en valeur d’ un sol fertile sous un climat bénin. Mais elle a dominé par la violenc
771 aussi, et par la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a d
772 r la mise en esclavage ou en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une m
773 esclavage ou en servage de centaines de millions d’ habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beauc
774 u en servage de centaines de millions d’habitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’une manière beaucoup plus sub
775 abitants de la planète. Finalement, elle a dominé d’ une manière beaucoup plus subtile, et peut-être plus effective, en imp
776 n imposant à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme,
777 à tous les continents un certain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dé
778 ertain angle de vision de la destinée, une notion de l’homme issue du christianisme, et dont dérivent les grands concepts
779 ristianisme, et dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité
780 t dont dérivent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, conc
781 ent les grands concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se
782 nds concepts de liberté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament,
783 berté et de justice, de dignité de la personne et de responsabilité sociale, concepts dont se réclament, au xxe siècle, l
784 tiens, les Américains comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de te
785 comme les Russes, les chefs de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science p
786 de l’Inde comme ceux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctr
787 eux de la Chine. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou
788 e. Qu’il s’agisse de philosophie ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés d
789 e philosophie ou de technique, de science pure ou d’ industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le
790 ou de technique, de science pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier
791 e pure ou d’industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marqu
792 industrie, de doctrines politiques ou de procédés de construction, le monde entier porte aujourd’hui les marques — ou les
793 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. Et certes, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes d
794 s, l’Europe a follement exporté les secrets mêmes de sa puissance ; on les retourne sans scrupules contre elle. Mais elle
795 rupules contre elle. Mais elle reste le palladium d’ une civilisation que tous rêvent d’imiter. Dire que l’Europe est mena
796 e le palladium d’une civilisation que tous rêvent d’ imiter. Dire que l’Europe est menacée — et l’on sait à quel point la
797 se — c’est donc dire que le cœur et la conscience d’ une culture désormais universelle sont menacés. Pour le bien comme pou
798 Pour le bien comme pour le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres contine
799 ur le mal, ce qui est sorti de l’Europe est sorti de l’esprit. Or, il se trouve que d’autres continents nous ont ravi les
800 res continents nous ont ravi les moyens matériels de la puissance, et nous en ont en quelque sorte purifiés. Ils nous ont
801 us ont condamnés à ne représenter que l’essentiel d’ une civilisation : son génie, ses mesures, sa culture. Défendre l’Euro
802 riel, ni la puissance militaire, ni la suprématie de la race blanche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’État,
803 nche, ni l’ordre social à tout prix, ni la notion d’ État, ni le nationalisme, car l’Amérique ou la Russie s’en chargent. E
804 a Russie s’en chargent. Et s’il ne s’agissait que de cela, nous pourrions aussi bien nous laisser coloniser par les Yankee
805 iniens. Ils ont appris à se servir mieux que nous de ces armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. S
806 armes inventées par nous, et qu’ils ont arrachées de nos mains. Si les Européens, dans leur majorité, refusent à la fois d
807 Européens, dans leur majorité, refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sen
808 refusent à la fois de se laisser américaniser et de se laisser staliniser, c’est qu’ils sentent bien que dans le meilleur
809 sentent bien que dans le meilleur cas, en retour de certains avantages matériels, ils perdraient ce qui fait le sens même
810 atériels, ils perdraient ce qui fait le sens même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aîn
811 , ils perdraient ce qui fait le sens même de leur vie . Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aînesse. Ils
812 s même de leur vie. Ils céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diab
813 céderaient contre un plat de lentilles leur droit d’ aînesse. Ils signeraient un pacte avec le diable. Et le monde entier e
814 Cette Europe, pratiquement réduite à l’essentiel de son génie, à ce qu’il a de plus défendable, comment allons-nous la dé
815 ouanes, et créer des pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
816 pouvoirs européens, capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
817 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
818 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul
819 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de préveni
820 eut assurer l’indépendance européenne, seul moyen de prévenir la guerre. Tels sont les buts concrets que se sont assignés
821 eurs du Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’ août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’o
822 Mouvement européen. Nous verrons, au mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
823 u mois d’août de cette année, le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, une Assemblée parl
824 nt européen promeut, resteront sans force et sans vie , si elles ne sont pas soutenues par un élan profond, par un espoir no
825 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce
826 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande artif
827 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, nous venons de le voir ; c’est
828 iment existe, nous venons de le voir ; c’est lui, d’ instinct, qui nous fait repousser les tentations russe et américaine.
829 ns russe et américaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre consc
830 ricaine. Mais il s’agit maintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissan
831 aintenant de l’informer, de lui donner des moyens d’ expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche don
832 ’informer, de lui donner des moyens d’expression, de le rendre conscient et agissant. Telle est la tâche dont le congrès d
833 t et agissant. Telle est la tâche dont le congrès de La Haye, il y a un an, proclamait la nécessité. La section culturelle
834 européen de la culture, prévu par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’études. Il a son siège à Genève, où il t
835 par les résolutions de La Haye, un modeste Bureau d’ études. Il a son siège à Genève, où il travaille depuis le mois de fév
836 on siège à Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) D
837 Genève, où il travaille depuis le mois de février de cette année. Son programme tient en trois rubriques : a) Documentatio
838 r tous les efforts entrepris dans les divers pays d’ Europe en faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres
839 pays d’Europe en faveur de l’union des peuples et d’ une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existe
840 faveur de l’union des peuples et d’une éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’instituts existent, mais ils s’i
841 e éducation de « cadres européens ». Des dizaines d’ instituts existent, mais ils s’ignorent mutuellement. La première tâch
842 gnorent mutuellement. La première tâche sera donc de dresser un inventaire des forces spirituelles, intellectuelles et art
843 nt. b) Coordination des activités « culturelles » de tous ordres, qui se placent sur un plan européen. Deux exemples entre
844 n européen. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’ études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsable
845 n. Deux exemples entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’organiser une rencontre entre les responsables d’une d
846 entre vingt : le Bureau d’études de Genève vient d’ organiser une rencontre entre les responsables d’une dizaine d’institu
847 d’organiser une rencontre entre les responsables d’ une dizaine d’instituts visant à la formation d’une jeune élite europé
848 ne rencontre entre les responsables d’une dizaine d’ instituts visant à la formation d’une jeune élite européenne ; et il r
849 s d’une dizaine d’instituts visant à la formation d’ une jeune élite européenne ; et il rassemble une équipe d’historiens,
850 une élite européenne ; et il rassemble une équipe d’ historiens, en vue de la révision des manuels scolaires, qui furent de
851 listes. c) Étude et formulation des grands thèmes de la propagande générale du Mouvement européen. Ici, nos intellectuels
852 ci, nos intellectuels ont une occasion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un m
853 sion magnifique de « s’engager » sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun es
854 sans rien trahir de leur fonction. Dans le cadre d’ un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au me
855 ir de leur fonction. Dans le cadre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’h
856 adre d’un mouvement de militants, qu’aucun esprit de parti ne contraint au mensonge ou à l’hypocrisie en service commandé,
857 vice commandé, ils vont pouvoir prendre leur part d’ action, assumer conjointement les décisions politiques, juridiques ou
858 pour être exécutées demain par un pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’études met au point le programme d’un
859 pouvoir fédéral de l’Europe. En outre, le Bureau d’ études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui d
860 tre, le Bureau d’études met au point le programme d’ une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne
861 études met au point le programme d’une conférence de la culture, qui doit se tenir fin octobre à Lausanne. Des rapports na
862 es rapports nationaux, préparés par les « Groupes d’ étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la
863 pes d’étude culturels », en formation dans chacun de nos pays, fourniront la base des travaux. Et l’on doit espérer que de
864 ont la base des travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les
865 s travaux. Et l’on doit espérer que de l’ensemble de ces rapports documentés, inventoriant les forces et les faiblesses de
866 mentés, inventoriant les forces et les faiblesses de nos cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : l
867 os cultures nationales, se dégageront deux séries de conclusions : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de divis
868  : les unes portant sur ce qui existe dans l’état de division dont nous souffrons, les autres sur ce qui peut naître dans
869 ur ce qui peut naître dans une Europe débarrassée de ses frontières étatiques, enfin « rendue dans toute son étendue à la
870 et des biens ». ( Message aux Européens , congrès de La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. I
871 La Haye.) L’Europe est une culture qui est faite de douze cultures. Il faut que chacune comprenne que son salut ne peut ê
872 nion ne sera jamais réelle sans le concours actif de chacune d’elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accep
873 a jamais réelle sans le concours actif de chacune d’ elles. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’accepter nos div
874 les. Aussi loin de souhaiter l’uniformisation que d’ accepter nos divisions présentes, nous voulons concerter nos vocations
875 ocations pour la défense et pour l’épanouissement d’ un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient per
876 ense et pour l’épanouissement d’un certain nombre de valeurs humaines qui, sans l’Europe, seraient perdues. Mais l’Europe
877 perdue sans elles. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fé
878 es. Telle est l’interaction vitale de l’Europe et de la culture. Elles naissent et meurent avec l’esprit fédéraliste, qui
879 urent avec l’esprit fédéraliste, qui est le génie de l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de, « L’Europe ou le
880 l’union dans la diversité. g. Rougemont Denis de , « L’Europe ou le cap du destin », Cahiers du Monde nouveau, Paris, j
8 1949, Articles divers (1948-1950). « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)
881 « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… » (1er juillet 1949)k Depuis
882 t… » (1er juillet 1949)k Depuis la fin du mois de février 1949, M. Denis de Rougemont, le grand fédéraliste, parle chaq
883 semaine au micro du « dialogue » qu’est l’Europe. De lundi en lundi, nous suivons ses chroniques au cours desquelles il no
884 s chroniques au cours desquelles il nous démontre de manière éclatante qu’une ère nouvelle s’ouvre au Vieux Continent. Mon
885 faut-il fédérer l’Europe ? Parce qu’il n’y a pas d’ autre moyen imaginable d’empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays
886  ? Parce qu’il n’y a pas d’autre moyen imaginable d’ empêcher la guerre atomique. Fédérer nos pays, c’est, en effet, créer
887 c’est, en effet, créer la seule puissance capable d’ exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Eur
888 réer la seule puissance capable d’exiger la paix, de l’inventer pour les deux autres. Imaginez cette Europe grande ouverte
889 à ne faire la guerre à personne, mais à défendre d’ un seul cœur son indépendance reconquise. Paix, liberté, prospérité, t
890 berté, prospérité, tels ont été les grands motifs de toutes les confédérations qui ont vu le jour au cours des siècles, et
891 e main à un ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’ une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de dif
892 ouvrage sur la Suisse qui fera partie d’une série de 16 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays
893 6 volumes édités par l’Unesco, série qui traitera de différents pays. Je prépare également une conférence culturelle europ
894 tout mon temps. En effet, je dirige ici le bureau d’ études pour un Centre européen de la culture. Pouvez-vous, très succin
895 ure. Pouvez-vous, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute i
896 us, très succinctement, nous parler de la mission de ce Centre européen de la culture ? Constitué en toute indépendance de
897 ernementaux, cet organisme a pour tâche immédiate d’ étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment d
898 cet organisme a pour tâche immédiate d’étudier et de proposer toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité eur
899 ser toute mesure propre à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le
900 à promouvoir le sentiment de l’unité européenne ; d’ agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le film et la radio, par v
901 opinion, la presse, le film et la radio, par voie d’ informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour cré
902 , le film et la radio, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des u
903 o, par voie d’informations et de recommandations, de coordonner les efforts pour créer une union des universités et des me
904 s et des membres des corps enseignants ; et enfin d’ exercer un contrôle vigilant pour restaurer le propre usage des mots-c
905 ible. De plus, le Centre européen offrira un lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, af
906 n lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la culture occidentale, afin qu’ils puissent examiner ensemble les gr
907 r ensemble les grandes questions qui affectent la vie de l’Europe, et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion pu
908 semble les grandes questions qui affectent la vie de l’Europe, et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion publi
909 ppels à l’opinion publique. k. Rougemont Denis de , « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio,
910 ublique. k. Rougemont Denis de, « Le promoteur de l’émission Demain l’Europe nous dit… », Le Radio, Lausanne, 1 juillet
9 1949, Articles divers (1948-1950). Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse (7 juillet 1949)
911 ominait le monde entier, lorsque éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de se
912 que éclata la guerre de 1939. Politiquement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’i
913 ement, plus de la moitié du genre humain relevait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates o
914 levait de ses gouvernements, le reste s’inspirait de ses doctrines démocrates ou marxistes, chrétiennes ou humanistes. Ell
915 s lois, et tous les peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette p
916 peuples subissaient l’attrait de ses techniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie. Cette puissance inouïe, sa
917 hniques, de ses pouvoirs sur la matière et sur la vie . Cette puissance inouïe, sans précédent, l’Europe la devait à l’espri
918 physiquement elle ne figure qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa gra
919 qu’un cap déchiqueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture,
920 ueté de l’Asie, quatre pour cent de la superficie de la planète. Toute sa grandeur venait de sa culture, qui pour le bien
921 es marques — ou les blessures — du génie créateur de l’Europe. En cinq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de m
922 nq ans, tout s’est écroulé. La puissance a changé de mains. Elle est russe et américaine. Elle se retourne contre nous. L’
923 ions, à demi ruiné, et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, e
924 et menacé par les deux Grands de colonisation ou d’ annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite
925 onisation ou d’annexion. Naguère encore maîtresse de la planète, elle en est réduite à lutter pour assurer sa survivance é
926 douanes, et créer des pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ou
927 s pouvoirs européens capables de traiter sur pied d’ égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne
928 traiter sur pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance euro
929 pied d’égalité avec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui
930 ec les empires neufs de l’Est et de l’Ouest. Rien d’ autre ne peut assurer l’indépendance européenne, qui est à son tour le
931 ance européenne, qui est à son tour le seul moyen de prévenir une guerre livrée à nos dépens. Tels sont les buts concrets
932 teurs du Mouvement européen. Nous verrons au mois d’ août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ou
933 u Mouvement européen. Nous verrons au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira,
934 au mois d’août de cette année le premier résultat de leurs efforts, lorsque s’ouvrira, dans Strasbourg, le Parlement consu
935 uvrira, dans Strasbourg, le Parlement consultatif de treize nations. Mais toutes les constructions économiques, juridiques
936 nt européen promeut, resteront sans force et sans vie si elles ne sont pas soutenues par un élan profond, par un espoir nou
937 tenues par un élan profond, par un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce
938 r un espoir nouveau de tous nos peuples. Cet élan de l’opinion, et cet espoir des masses, ce n’est pas une propagande arti
939 au contraire une véritable éducation du sentiment de notre communauté. Ce sentiment existe, il n’est pas une chose vague.
940 t pas une chose vague. C’est lui qui nous empêche de dire aux Russes : « Finissons-en, venez nous mettre au pas, et suppri
941 ne à Varsovie. » C’est lui aussi qui nous empêche de dire à nos amis américains : « Mais entrez donc, apportez-nous les se
942 s : « Mais entrez donc, apportez-nous les secrets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’aînesse contre vos belles
943 crets de votre bonheur, nous vendrons notre droit d’ aînesse contre vos belles autos et vos dollars. » Si nous refusons, c’
944 efusons, c’est que nous avons encore le sentiment d’ une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la
945 que nous avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être
946 e nous avons encore le sentiment d’une qualité de vie , de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l
947 s avons encore le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Eur
948 le sentiment d’une qualité de vie, de liberté et de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il f
949 rté et de conscience, qui est justement la raison d’ être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des m
950 de conscience, qui est justement la raison d’être de l’Europe. Mais il faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d
951 faut informer ce sentiment, lui donner des moyens d’ expression, le rendre enfin conscient et agissant. Telle est la tâche
952 e dans quelques mois, et que prépare notre Bureau d’ études. Installé à Genève depuis trois mois. Je ne m’étendrai pas sur
953 . Je ne m’étendrai pas sur les aspects techniques de son travail (documentation européenne ; coordination des efforts entr
954 tous nos pays, et qui souvent s’ignorent ; action de propagande par la presse, la radio, les revues, auprès des élites com
955 près des élites comme du grand public ; formation d’ équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement défi
956 lites comme du grand public ; formation d’équipes de travail internationales, etc.). Je voudrais simplement définir l’espr
957 e et le guide. Il ne s’agit nullement, pour nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les pr
958 ur nous, de mettre la culture en statistiques, ou de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la jus
959 u de traiter théoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une par
960 éoriquement les problèmes éternels de la liberté, de la justice, ou du progrès. Mais nous voulons d’une part offrir aux fo
961 voulons d’une part offrir aux forces culturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du
962 ulturelles de toute l’Europe les moyens pratiques de « s’engager » dans l’œuvre du mouvement fédéraliste ; d’autre part, f
963 déraliste ; d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. F
964 d’autre part, faire valoir les droits de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sort
965 s de l’esprit de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à
966 t de la culture, dans la construction de l’Europe de demain. Faire en sorte que la culture aide nos peuples à s’unir, afin
967 suite une Europe fédérée vienne en aide à chacune de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culture
968 e de nos cultures : telle sera la double ambition de la Conférence culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’oct
969 culturelle, qui doit se réunir à Lausanne au mois d’ octobre, sous les auspices du Mouvement européen. Le fait que la Suiss
970 e comme siège du Centre européen de la culture et de la Conférence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considéra
971 érence culturelle, cela ne relève ni du hasard ni de considérations touristiques. Notre neutralité traditionnelle, reconnu
972 suisse : notre pays dépend, plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc p
973 plus qu’aucun autre, de l’Europe tout entière et de ses destinées. Comment pourra-t-il donc participer aux efforts pour s
974 s pour sauver l’Europe ? La réponse ne peut faire de doute. Tant à Berne qu’au comité du Mouvement européen, on a reconnu
975 rien notre neutralité, jouer le rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, su
976 rôle qu’on attend de nous dans l’œuvre collective de la fédération. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une m
977 n. Qu’on ne pense pas, surtout, qu’il s’agisse là d’ une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se
978 nse pas, surtout, qu’il s’agisse là d’une manière de nous faufiler par la petite porte ! Car à mesure que se réalisent les
979 continent se dessine et prend corps, la nécessité de lui donner une âme passe au premier plan. Et c’est bien cela, c’est b
980 péen de la culture. Les plus anciennes traditions de la Suisse la désignent comme siège d’une telle institution. Gardiens
981 traditions de la Suisse la désignent comme siège d’ une telle institution. Gardiens des cols pour le Saint-Empire au xiiie
982 -Empire au xiiie siècle ; gardiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créati
983 rdiens du Vatican et de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international
984 de la Genève de Calvin, puis de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’u
985 is de la Croix-Rouge et de vingt autres créations de l’esprit international ; gardiens enfin d’une expérience fédéraliste
986 ations de l’esprit international ; gardiens enfin d’ une expérience fédéraliste qui peut servir d’exemple au continent, les
987 nfin d’une expérience fédéraliste qui peut servir d’ exemple au continent, les Suisses seront fidèles à leur vraie vocation
988 n accueillant, soutenant et animant le foyer même d’ une action historique, dont on a pu dire que le but était « l’Europe h
989 it « l’Europe helvétisée ». l. Rougemont Denis de , « Le Centre européen de la culture aura son siège en Suisse », Curie
10 1950, Articles divers (1948-1950). Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)
990 Préface à Le Problème de l’union européenne d’Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrang
991 Préface à Le Problème de l’union européenne d’ Olivier Philip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « fai
992 ip (1950)u Il peut sembler étrange qu’on parle de « faire l’Europe », quand elle existe depuis tant de siècles. Mais l’
993 rmation que vient de subir la puissance apparente de nos pays dans le jeu des forces mondiales : l’Europe paraît avoir été
994 ubitement élevés à l’Est et à l’Ouest, elle prend d’ elle-même une conscience toute nouvelle, et malheureuse. « L’Europe es
995 s divisions », déclarait le Manifeste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bie
996 ste du congrès de La Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situat
997 Haye, trois ans après la fin de la guerre. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’une situation pré-fédérale, po
998 re. Prise de conscience bien typique, on le voit, d’ une situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’union se déclare
999 e situation pré-fédérale, pour peu qu’une volonté d’ union se déclare, au sein de la crise assumée. Ces circonstances donne
1000 se assumée. Ces circonstances donnent à l’ouvrage de M. Olivier Philip une importance particulière : non pas seulement cel
1001 importance particulière : non pas seulement celle d’ une première vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europ
1002 re vue générale des efforts déployés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’une contribution à cette prise de consc
1003 loyés pour l’union de l’Europe, mais encore celle d’ une contribution à cette prise de conscience active de notre sort, san
1004 e contribution à cette prise de conscience active de notre sort, sans laquelle les traités resteront du papier. Je voudrai
1005 emarques, entre toutes celles que ne manquera pas de suggérer cette enquête efficace par sa lucidité. La première touche à
1006 à l’économie, la seconde à la doctrine formatrice de l’union. Les analyses économiques tiennent une place importante dans
1007 que. Voilà, me semble-t-il, une manière implicite d’ affirmer que l’Économie obéit beaucoup moins aux « lois » fatales admi
1008 elle-même déterminée par une certaine orientation de nos énergies dont j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de q
1009 nt j’ai toujours pensé qu’elle relève, au départ, de quelque choix métaphysique. La thèse soutenue par notre auteur impliq
1010 ue par notre auteur implique une décision inverse de celle dont les suites nécessaires nous ont conduits aux impasses prés
1011 tif des Experts. Je vois bien que ce règne est né d’ une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par er
1012 e règne est né d’une réaction contre la politique de l’éloquence (qu’on appelle, par erreur, doctrinaire). Mais il tend, s
1013 d garde, à évacuer la politique, au sens légitime de ce terme. Il tend à substituer, en fait, les Pouvoirs à l’Autorité. L
1014 à l’Autorité. Le plan Schuman, parce qu’il est né d’ une décision proprement politique, pourra marquer, s’il aboutit, le po
1015 politique, pourra marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second
1016 a marquer, s’il aboutit, le point de renversement d’ une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note q
1017 de renversement d’une attitude contraire au génie de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’un historique adroite
1018 de l’Europe. En second lieu, je note qu’au cours d’ un historique adroitement condensé, l’auteur souligne, à plusieurs rep
1019 plusieurs reprises, l’influence « déterminante » de l’aile fédéraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la créa
1020 déraliste du Mouvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’une véritable Autorité européenne. On pourra discuter p
1021 uvement européen, dès qu’il s’agit de la création d’ une véritable Autorité européenne. On pourra discuter plus tard sur la
1022 pourra discuter plus tard sur la paternité réelle de maints projets revendiqués par les fédéralistes, tels que la Cour eur
1023 enne des droits de l’homme, le pool du charbon et de l’acier, la transformation du Comité des ministres en Sénat. Mais il
1024 ’ils sont parfois considérés comme des empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justeme
1025 es empêcheurs de danser en rond, je me permettrai de répondre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en r
1026 ndre en leur nom que, justement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends
1027 tement, le but n’est pas de tourner en rond, mais d’ avancer. Qu’on m’entende bien : je ne défends pas ici (ce n’est pas le
1028 tu en général, ou même contre l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent
1029 l’union des peuples de l’Europe. Nous sommes tous de bonne volonté… Mais certains souhaitent l’union, bien sûr, et comment
1030 , je les appelle fédéralistes. Il n’est pas juste de les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme
1031 les considérer comme extrémistes, car il est faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’union mais refusent sa co
1032 faux de considérer comme modérés ceux qui parlent d’ union mais refusent sa condition. Nous avons d’autres noms pour ces de
1033 n’est pas la seule. L’Europe est née, elle a vécu d’ antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y p
1034 st née, elle a vécu d’antagonismes. Elle mourrait de leur suppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créati
1035 ppression artificielle. Elle y perdrait le secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’o
1036 secret de sa créativité, qui est aussi le secret de sa puissance. Pas plus qu’on ne peut rêver l’Europe toute libérale ou
1037 corporatiste ou parlementaire… Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des t
1038 Et dans plusieurs de ces domaines, il serait vain de chercher un compromis : chacune des tendances opposées exige d’aller
1039 compromis : chacune des tendances opposées exige d’ aller au bout de sa vocation, car elle perdrait sa qualité constitutiv
1040 elle perdrait sa qualité constitutive, sa raison d’ être, en y renonçant. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d
1041 t. Quelle est la solution ? J’avoue n’en pas voir d’ autre que dans le régime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages
1042 gime fédéraliste. Lui seul conserve les avantages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L
1043 ntages de la féconde diversité en y ajoutant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer qu
1044 outant ceux de l’union. Vue théorique ? L’exemple de la Suisse suffit à démontrer que cette solution n’est pas seulement p
1045 le en principe, mais pratique. On ne manquera pas de m’objecter que les Suisses sont les premiers à se montrer prudents, q
1046 s premiers à se montrer prudents, quand il s’agit de « faire l’Europe ». C’est qu’ils sont déjà fédérés. Aux unionistes, j
1047 que l’on sache. Quand vous y serez, il sera temps de voir si la prudence, ou au contraire un peu de hâte, conviennent à no
1048 nviennent à nos calamités. u. Rougemont Denis de , Philip Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union e
1049 Olivier, « [Préface] Olivier Philip, Le Problème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâ
1050 oblème de l’union européenne  », dans Le Problème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-
1051 oblème de l’union européenne, Neuchâtel, Éditions de la Baconnière, 1950, p. 9-11.
11 1950, Articles divers (1948-1950). Raisons et buts d’une conférence (janvier 1950)
1052 Raisons et buts d’ une conférence (janvier 1950)n o La condition profondément contradi
1053 e désespérée. Elle est aussi plus près que jamais de se résoudre en une synthèse. Il est vrai que l’Europe est en train de
1054 t, — l’Europe est en train de se faire ! Aux yeux d’ un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dan
1055 yeux d’un esprit objectif, toutes les conditions de la ruine sont réunies dans notre ciel et dans nos données immédiates 
1056 t les mêmes conditions qui pourraient être celles d’ une renaissance. Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s
1057 Nos divisions absurdes, par exemple, n’ont cessé de s’aggraver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absu
1058 ver depuis dix ans — mais nous prenons conscience de leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires ext
1059 leur absurdité. L’avènement brusque et stupéfiant de deux empires extraeuropéens décourage des millions d’entre nous, mais
1060 d’entre nous, mais il réveille aussi le sentiment d’ un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’aban
1061 il réveille aussi le sentiment d’un destin commun de nos peuples. Enfin, l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités d
1062 , l’indifférence écœurée, l’abandon aux fatalités de l’histoire, se voient combattus par l’élan vers l’union, vers la fédé
1063 sses, l’Assemblée de Strasbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’un espoir tremblant. Le sentiment le plus répa
1064 asbourg, cette conférence de la culture. Je parle d’ un espoir tremblant. Le sentiment le plus répandu, j’allais dire le pl
1065 y a aujourd’hui une manière proprement européenne d’ avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres vi
1066 ui une manière proprement européenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’une guerre que d’autres viendraient fai
1067 éenne d’avoir peur de l’avenir : et c’est la peur d’ une guerre que d’autres viendraient faire sur notre sol, et sur le cor
1068 viendraient faire sur notre sol, et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des
1069 et sur le corps de nos enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’une guerre des autres, qui serait perdue par nou
1070 enfants ; c’est l’angoisse de devenir les objets d’ une guerre des autres, qui serait perdue par nous, quelle que soit son
1071 ais il y a, en même temps, une manière européenne d’ espérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre f
1072 pérer, un espoir proprement européen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance c
1073 péen, c’est celui de réussir notre fédération, et de retrouver par là même une puissance capable d’imposer la paix. Telle
1074 et de retrouver par là même une puissance capable d’ imposer la paix. Telle est la situation contradictoire dans laquelle n
1075 re dans laquelle nous sommes engagés. À son point de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait r
1076 int de crise, où nous sommes, il dépend en partie de nous que l’espoir ait raison du désespoir. Mais il faut aller vite, e
1077 s’esquissent, à Strasbourg, les cadres politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée huma
1078 s politiques de l’Europe unie, il est grand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de l
1079 rand temps de définir la visée, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but
1080 e, la portée humaine de cette action, la vocation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’o
1081 ation de la communauté européenne. Tel est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une répo
1082 l est le but de cette Conférence. Ce qu’on attend de nous ici, c’est d’abord une réponse à la question dangereuse que pose
1083 elles propres à garantir et développer l’exercice de la pensée libre, sans laquelle l’Europe n’est plus rien. On pourrait
1084 rien. On pourrait discuter sans fin sur le titre de cette Conférence. Les mots européen, culture, prêtent à des controver
1085 à des controverses trop faciles. Dès qu’on parle d’ Europe, d’unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’
1086 troverses trop faciles. Dès qu’on parle d’Europe, d’ unir l’Europe, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’Europe ! »
1087 urope, chacun commence par dire : « Il n’y a plus d’ Europe ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Eur
1088 rope ! » et finit par offrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à
1089 ffrir une belle définition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialog
1090 ition de ce qu’est l’Europe, de ce qu’elle a été, de ce qu’elle devrait être à son sens. Et ce dialogue à plusieurs voix r
1091 s voix reste, à tout prendre, la vraie définition de l’Europe, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, cha
1092 rope, une et diverse. De même, dès que l’on parle de culture, chacun donne à ce mot des réalités hétéroclites : inventions
1093 ues et beaux-arts, hygiène, éducation, et procédé de construction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; con
1094 truction ; littérature, philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité hu
1095 philosophie, et doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique 
1096 doctrines de l’État ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la v
1097 tat ; conceptions de la liberté, de la justice et de la dignité humaine ; esprit critique ; et toute la vie des religions.
1098 a dignité humaine ; esprit critique ; et toute la vie des religions. Culture peut signifier aussi prise de conscience de la
1099 Culture peut signifier aussi prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’ex
1100 re peut signifier aussi prise de conscience de la vie , besoin perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’existence
1101 i prise de conscience de la vie, besoin perpétuel d’ approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouv
1102 ence de la vie, besoin perpétuel d’approfondir et d’ illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, t
1103 in perpétuel d’approfondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que
1104 pprofondir et d’illustrer le sens de l’existence, d’ augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses.
1105 er le sens de l’existence, d’augmenter le pouvoir de l’homme, tant sur lui-même que sur les choses. Culture peut signifier
1106 re peut signifier, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre
1107 er, enfin, l’ensemble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’i
1108 emble des procédés de création et de transmission de leurs principes. Je souhaite que notre Conférence s’interdise les déb
1109 s définitions. À toutes fins utiles, elle partira de l’idée que la culture, ce sont les réalités intellectuelles et spirit
1110 ités intellectuelles et spirituelles qui ont fait de l’Europe autre chose et beaucoup plus que ce qu’elle est dans sa réal
1111 jours par la rendre folle, il se contente parfois de l’endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’occupations acc
1112 endormir. Je veux dire qu’il surcharge ses élites d’ occupations accablantes et flatteuses, qui ne leur laissent plus une s
1113 tastrophes. On demande à certains « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils
1114 « grands noms » de venir participer au sauvetage de l’Europe. Ils nous répondent qu’ils ont un rhume, qu’ils ont promis u
1115 ne conférence. D’autres invoquent un besoin subit de se retirer pour méditer. Regrettons-le, pour eux surtout. S’ils sont
1116 és, ce qu’à Dieu ne plaise, dans certains « camps de rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les r
1117 rééducation sociale », ils auront enfin le temps de méditer sur les raisons urgentes qui motivaient un rassemblement comm
1118 ôtre. Ils comprendront qu’il est certains moments de l’histoire où l’on ne peut renverser les destins qu’en y allant tous
1119 Pour être juste, il faut reconnaître que beaucoup d’ intellectuels redoutent non sans raison l’atmosphère des congrès, inco
1120 tmosphère des congrès, inconsidérément multipliés de nos jours. Je les comprends, et je comprends surtout ceux d’entre eux
1121 rent — (ou c’est un mauvais écrivain) — au destin de la communauté dont il écrit la langue, où sa voix porte, qui peut le
1122 éral, établi pour l’information des délégués, n’a d’ autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont
1123 nformation des délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au
1124 délégués, n’a d’autre ambition que de signaler et de classer les problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’une enq
1125 s problèmes qui se sont révélés urgents, au terme d’ une enquête dans nos divers pays. Chacun des groupes nationaux du Mouv
1126 n questionnaire sur l’état des problèmes concrets de la culture dans son pays. Dix-sept groupes ont donné des réponses dét
1127 û l’improviser avec des groupes en pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y
1128 n pleine période de formation. Elle nous a permis de mieux voir l’intérêt capital qu’il y aurait à dresser systématiquemen
1129 aire aussi des lacunes, des obstacles, permettant de délimiter des zones critiques où concentrer l’effort. Puis, des étude
1130 concrets, nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’ études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’
1131 , nous ont été remises. Enfin, le Bureau d’études de Genève a fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’une quinz
1132 fourni plusieurs notes et documents. Sur la base d’ une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéci
1133 s notes et documents. Sur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des docu
1134 ur la base d’une quinzaine de rapports nationaux, d’ une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapp
1135 quinzaine de rapports nationaux, d’une trentaine de rapports spéciaux, et des documents précités, le rapport général a te
1136 es documents précités, le rapport général a tenté d’ opérer une synthèse provisoire, en guise d’introduction aux travaux de
1137 e provisoire, en guise d’introduction aux travaux de la conférence. Précisons bien que ce rapport n’est pas un instant des
1138 n instant destiné à faire l’objet des discussions de la conférence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’exposé de
1139 rence. Il en introduit les sujets. Il veut servir d’ exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront propo
1140 ts. Il veut servir d’exposé des motifs à la série de résolutions pratiques qui seront proposées et mises au point par les
1141 niques restant, bien entendu, réservés aux débuts de l’ensemble du congrès, siégeant en commission générale. Il nous appar
1142 mission générale. Il nous apparaît qu’il y a lieu de prévoir une nouvelle commission, consacrée à l’éducation et à l’ensei
1143 à nous égarer. On parle beaucoup, par exemple, «  d’ organiser les échanges culturels ». Observons tout d’abord qu’il n’en
1144 frontières étaient ouvertes, et l’union fédérale de l’Europe réalisée. Nos cultures, prisonnières des cadres nationaux, n
1145 res nationaux, ne doivent pas chercher des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent
1146 des moyens de correspondre un peu plus facilement de prison à prison. Elles doivent au contraire exiger leur « élargisseme
1147 ement » immédiat, sans condition. Le terme même «  d’ échanges culturels », avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force
1148 , avouons-le, est devenu bien déplaisant, à force d’ avoir servi d’échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien mal
1149 est devenu bien déplaisant, à force d’avoir servi d’ échappatoire facile aux fonctionnaires chargés (bien malgré eux, souve
1150 x, souvent) des problèmes réputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce p
1151 éputés « secondaires » de la culture. Ils tentent de s’en tirer en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’échanges
1152 r en consentant à la culture ce petit va-et-vient d’ échanges surveillés que leurs douaniers et leurs agents fiscaux sauron
1153 ux quelques petits décrets concernant les voyages de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bon
1154 es de quelques professeurs bien vus des pouvoirs, de quelques boursiers bons élèves ; et quelques phrases bien plates sur
1155 hrases bien plates sur l’indispensable solidarité de nos nations. Une hypocrisie ennuyeuse. Prétendre « organiser les écha
1156 droits que l’État s’est arrogés, et qu’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’abaisser des obstacl
1157 u’il s’agit de lui dénier radicalement — le droit d’ élever ou d’abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des id
1158 de lui dénier radicalement — le droit d’élever ou d’ abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des idées, des per
1159 nent ce qu’ils ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, d
1160 ls ont toujours été dans les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits o
1161 les périodes de vitalité de la culture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités a
1162 ture — échanges de découvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques
1163 uvertes à l’état naissant, de produits originaux, de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de p
1164 ant, de produits originaux, de curiosités avides, d’ expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non
1165 de curiosités avides, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements
1166 es, d’expressions authentiques de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème
1167 de la sensibilité, de passions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner,
1168 assions mêmes, et non pas de simples déplacements de forts en thème — nous devons : 1° abandonner, et au besoin dénoncer l
1169 : 1° abandonner, et au besoin dénoncer la méthode de « l’organisation des échanges », 2° exiger la suppression pure et sim
1170 ion des personnes, des œuvres, et des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits
1171 des instruments de travail, dans toute l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bé
1172 l’étendue de l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, do
1173 l’Europe. Supprimer tous ces droits de douane ou de visas, dont le bénéfice est dérisoire pour les États, dont la charge
1174 re. Et surtout ne proposons pas, dans ce domaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’esprit qui entraîne tant de
1175 omaine, de nouveaux organismes ! C’est la paresse d’ esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines b
1176 d’esprit qui entraîne tant de Comités à proposer de nouvelles machines bureaucratiques. Restaurer la culture, c’est aussi
1177 poids mort des organisations ! Qu’on n’essaie pas d’ organiser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’une respirat
1178 organisations ! Qu’on n’essaie pas d’organiser la vie , qu’on la laisse libre ! La seule idée d’une respiration organisée, n
1179 ser la vie, qu’on la laisse libre ! La seule idée d’ une respiration organisée, n’est-il pas vrai, vous coupe le souffle. Q
1180 s vrai, vous coupe le souffle. Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était
1181 . Qu’on n’essaie pas de créer par décrets l’unité de notre culture : elle existe, elle était aux origines, elle n’a cessé
1182 e, elle était aux origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse lib
1183 origines, elle n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifeste
1184 n’a cessé depuis de se reformer et de s’enrichir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe o
1185 richir de mille diversités. Qu’on la laisse libre de se manifester ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins
1186 er ! L’Europe ouverte, et rien de plus, mais rien de moins, voilà la solution, voilà le remède pratique à presque tous les
1187 un effort positif. Il serait insuffisant et vain de vouloir revenir simplement à la condition libérale qui était celle de
1188 implement à la condition libérale qui était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je
1189 était celle de l’esprit en Europe avant la guerre de 1914. C’était le beau temps, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’An
1190 s, je le sais. L’on pouvait lire, dans l’Annuaire de la Compagnie européenne des wagons-lits, au chapitre sur les passepor
1191 Pour l’entrée dans tous les autres pays, la carte de visite suffit » ! Mais cette liberté des échanges n’a pas suffi à réd
1192 titutions qui garantissent et manifestent l’unité de nos cultures dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’instr
1193 dans leur diversité. Il faut doter l’Europe unie d’ instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut au
1194 ersité. Il faut doter l’Europe unie d’instruments de travail qui soient à l’échelle continentale. Il faut aussi former les
1195 er les jeunes hommes qui deviendront les porteurs de l’idée fédérale, sans laquelle nos réformes techniques et matérielles
1196 » que le xxe siècle a vu naître, il est frappant de constater qu’il n’en existe pas un seul qui ait pour objet l’Europe c
1197 s pays forment un ensemble, un complexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-
1198 omplexe organique de culture, facile à distinguer de ses voisins, et qu’en tout cas, ceux-ci distinguent souvent mieux que
1199 mble n’ait pas encore été étudié en tant que tel, d’ une manière systématique ; et qu’il n’existe aucune institution capabl
1200 ue ; et qu’il n’existe aucune institution capable de renseigner sur l’Europe en général, sur sa situation présente, sur l’
1201 en général, sur sa situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes.
1202 a situation présente, sur l’état de ses forces et de ses faiblesses, sur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’
1203 ur ses possibilités et ses lacunes. Que le besoin d’ une telle institution soit urgent, rien ne saurait mieux le faire sent
1204 difficultés qu’a rencontrées la préparation même de cette conférence, et que ses insuffisances inévitables dans l’état ac
1205 s choses. Je tiens à rappeler que, dès le congrès de La Haye, avait été demandée la création d’un Centre européen de la cu
1206 ongrès de La Haye, avait été demandée la création d’ un Centre européen de la culture, dont les attributions furent esquiss
1207 par la résolution culturelle du congrès. Au mois de février 1949, le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’étud
1208 le Mouvement européen ouvrait à Genève un Bureau d’ études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septe
1209 péen ouvrait à Genève un Bureau d’études 7 chargé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même an
1210 rgé de préparer l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg vo
1211 er l’œuvre du Centre. Enfin, au mois de septembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unan
1212 tembre de la même année, l’Assemblée consultative de Strasbourg votait à l’unanimité une recommandation favorable à la cré
1213 nimité une recommandation favorable à la création d’ un Centre européen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Ge
1214 tre européen de la culture. Le travail du Bureau d’ études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus prè
1215 éen de la culture. Le travail du Bureau d’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la ques
1216 ’études de Genève, depuis quelques mois, a permis de serrer de plus près la question. Il a conduit aux conclusions pratiqu
1217 t leur réserver. Il en va de même pour le Collège d’ Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commi
1218 llège d’Europe, à Bruges, collège qui permettrait de former les « grands commis européens », dont les futures institutions
1219 commis européens », dont les futures institutions de l’Europe unie auront évidemment besoin. Enfin, je mentionnerai un pro
1220 idemment besoin. Enfin, je mentionnerai un projet d’ Institut européen des sciences politiques et sociales ; et ce projet s
1221 ces politiques et sociales ; et ce projet surtout d’ un Fonds européen pour les recherches scientifiques, dont l’importance
1222 mission proposée tout à l’heure, qui s’occuperait de l’enseignement européen, deux mots seulement, mais importants. La pré
1223 x mots seulement, mais importants. La préparation de cette Conférence, l’abondance et la qualité des rapports reçus sur le
1224 t la qualité des rapports reçus sur les questions d’ éducation, ont montré à quel point ce souci est général dans nos pays.
1225 le monde se rend parfaitement compte que l’avenir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite
1226 enir de l’union européenne dépend en premier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un es
1227 européenne dépend en premier lieu de la création d’ une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranatio
1228 emier lieu de la création d’une élite responsable de jeunes gens, formés dans un esprit supranational. Cette tâche, comme
1229 ’écrit M. Jean Bayet8, « exigera la bonne volonté de plusieurs générations, [mais] réclame aussi un départ extrêmement vif
1230 aussi un départ extrêmement vif et net ». L’effet de choc que produira sur l’opinion publique l’institution rapide d’un en
1231 duira sur l’opinion publique l’institution rapide d’ un enseignement européen constituera la meilleure propagande pour notr
1232 ent être créés par le blocage, au titre européen, d’ une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernem
1233 cage, au titre européen, d’une fraction du budget de l’Éducation, dans chaque pays. Les gouvernements et l’économie privée
1234 és. Nous invoquerons le fait que, si le sentiment d’ un destin spirituel commun, et l’énergie créatrice des Européens ne so
1235 ettre nos gouvernements devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’urgence établi. Il est probable que le prix de r
1236 s devant un choix. Un ordre de priorité doit être d’ urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bom
1237 tre d’urgence établi. Il est probable que le prix de revient d’une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel
1238 ce établi. Il est probable que le prix de revient d’ une seule bombe atomique dépasse largement le budget annuel des instit
1239 institutions que nous venons de proposer. Le prix d’ une seule bombe atomique couvrirait donc le budget global d’une renais
1240 e bombe atomique couvrirait donc le budget global d’ une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mor
1241 ouvrirait donc le budget global d’une renaissance de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des
1242 e de la culture européenne. Construire des engins de mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millio
1243 e mort qui coûtent des milliards, quand on refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche sci
1244 refuse de trouver les millions qui permettraient de développer la recherche scientifique pour la paix et la vie, c’est la
1245 pper la recherche scientifique pour la paix et la vie , c’est la folie de l’Occident moderne. À tel point qu’on se demande p
1246 ientifique pour la paix et la vie, c’est la folie de l’Occident moderne. À tel point qu’on se demande parfois s’il ne vaud
1247 l ne vaudrait pas mieux être restés barbares, que de nous être aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture
1248 tre aussi mal civilisés. La Conférence européenne de la culture faillirait à sa vraie mission, si elle n’élevait pas, cont
1249 pour quelles fins réelles voulons-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La
1250 ns-nous ces moyens de culture, et cette éducation d’ une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle
1251 ture, et cette éducation d’une conscience commune de l’Europe ? La question doit être posée. Elle est d’ailleurs spécifiqu
1252 pas substituer aux nationalismes locaux une sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au mond
1253 e sorte de nationalisme européen. L’Europe s’est, de tout temps, ouverte au monde entier. Elle a toujours conçu sa civilis
1254 toujours conçu sa civilisation comme un ensemble de valeurs universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’opposer une
1255 s universelles. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’ opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Oue
1256 opposer une nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthé
1257 nation européenne aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valab
1258 e aux grandes nations de l’Est et de l’Ouest ; ni de vouloir une « culture européenne » synthétique, valable pour nous seu
1259 fermée sur elle-même : ce serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre
1260 e serait trahir le génie de l’Europe, nous couper de ses sources chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contr
1261 chrétiennes et humanistes. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le mo
1262 es. Notre ambition, c’est de contribuer à l’union de nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de
1263 nos pays, qui sera leur seul salut, par le moyen d’ une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est l
1264 a leur seul salut, par le moyen d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. E
1265 d’une renaissance de leur culture dans la liberté de l’esprit, qui est leur vraie force. Et notre objet ne sera pas non pl
1266 vraie force. Et notre objet ne sera pas non plus de dénoncer ce qui se pratique ailleurs, car nous ne pouvons réformer qu
1267 acceptons pas la scission que symbolise le rideau de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occid
1268 de fer ; mais nous pensons que le meilleur moyen de ramener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’i
1269 amener vers l’Occident les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté,
1270 les peuples séparés, c’est de leur offrir l’image d’ une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’une Europe qui prend
1271 d’une Europe rénovée par l’union dans la liberté, d’ une Europe qui prend au sérieux sa vocation particulière dans le monde
1272 lie, et divisée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une
1273 ée par vingt nationalismes et autant de barrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’attraction. Une Europe procla
1274 arrières de douanes, ne saurait plus être un pôle d’ attraction. Une Europe proclamant des principes sans les appliquer fer
1275 pliquer fermement, n’aurait bientôt plus le droit de parler. Prendre au sérieux la vocation européenne, c’est une mission
1276 sérieux la vocation européenne, c’est une mission de vigilance dont les intellectuels des pays libres doivent se sentir pl
1277 tir plus que jamais responsables. Il leur incombe de rappeler sans relâche aux gouvernants, comme aux législateurs sociaux
1278 eurs sociaux et aux experts, qu’un certain nombre de principes moraux ne sauraient être négligés dans la pratique sans que
1279 nomie. Si nous exerçons, à Lausanne, cette action de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’el
1280 on de vigilance publique, on pourra dire vraiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne.
1281 aiment de notre Conférence qu’elle fut le congrès de la conscience européenne. Une conscience malheureuse, il est vrai, to
1282 conscience, en dernière analyse. C’est notre lot d’ Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la co
1283 lot d’Européens, et c’est notre mission profonde, de préférer toujours la conscience au bonheur. Vocation tragique et féco
1284 à l’Ouest deux civilisations plus jeunes, filles de la nôtre, dont l’une, qui nous est chère, cultive un idéal eudémoniqu
1285 est chère, cultive un idéal eudémonique, l’idéal d’ un bonheur assuré. Il est frappant que le bonheur, en Europe, n’ait tr
1286 mes, quelques prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous
1287 es prières. C’est par la musique seule de Bach ou de Mozart que nous en possédons la substance idéale, que nous en respiro
1288 , nous ne sommes pas réunis pour tracer des plans d’ innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de tr
1289 s pas réunis pour tracer des plans d’innocence et de prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyen
1290 prospérité organisée. Nous tenterons, sobrement, de trouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations
1291 ouver les moyens qui permettent le libre exercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notr
1292 xercice de nos vocations tourmentées ; des moyens de vivre, oui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. S
1293 ui, mais selon notre foi, sans renier nos raisons de vivre. Sauvons l’Europe tragique, pour que nos descendants puissent e
1294 t, par la grâce des chefs-d’œuvre futurs, au ciel de la musique — dans une Europe heureuse. 6. Présidée par M. Salvador
1295 ador de Madariaga, qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemon
1296 , qui était d’ailleurs président de la conférence de Lausanne (NDLR). 7. Dirigé par M. Denis de Rougemont, avec la collab
1297 par M. Denis de Rougemont, avec la collaboration de M. Raymond Silva comme secrétaire général (NDLR). 8. Dans son remarq
1298 LR). 8. Dans son remarquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation
1299 marquable rapport qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougem
1300 qui a servi de base aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « R
1301 aux travaux de la Commission de l’enseignement et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’une
1302 nt et de l’éducation (NDLR). n. Rougemont Denis de , « Raisons et buts d’une conférence », Fédération, Paris, janvier 195
1303 NDLR). n. Rougemont Denis de, « Raisons et buts d’ une conférence », Fédération, Paris, janvier 1950, p. 19-25. o. Il s’
1304 nis de Rougemont lors de la Conférence européenne de la culture qui a eu lieu à Lausanne en décembre 1949. p. Nous avons
1305 Les sous-titres ont été rajoutés pour les besoins de cette édition numérique.
12 1950, Articles divers (1948-1950). Un gage à Jean Paulhan ! (avril 1950)
1306 surprise que j’apprends, à vous lire dans Liberté de l’Esprit, que les fédéralistes ont exclu la Russie de l’Europe ; que
1307 que la Grèce n’en fait pas partie, mais bien « et de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires 
1308 de toute évidence » les USA ; que M. Spaak est un de nos « doctrinaires » ; que j’ai « annoncé la fin du désespoir » ; que
1309 lisme est contre les patries (mais qu’il juge bon de le « cacher ») ; et qu’enfin les fédéralistes « n’ont jamais été amou
1310 pe, et pour les fédéralistes, il n’y a pas un mot de vrai dans tout cela. Vous jugez notre projet « imbécile ». Celui que
1311 que vous critiquez est tel sans aucun doute. Mais d’ où sort-il ? Je ne connais pas un seul fédéraliste qui puisse y reconn
1312 vous en faites ? Croyez-vous qu’il soit possible de l’exclure sans lui faire violence ? » Mais quand l’avons-nous exclue 
1313 montrez, au paragraphe suivant, qu’il serait vain d’ espérer l’inclure. Que diable voulez-vous donc que nous en fassions ?
1314 en fassions ? (On m’assure que cela dépend aussi de Staline.) 2° « Les États-Unis d’Europe… Eh bien, il paraît qu’ils son
1315 rante-deux articles) ». Montrez-nous donc un seul de ces articles qui dise, ou laisse entendre, que le Conseil de l’Europe
1316 t le contraire. Le mieux que l’on puisse attendre de cet organisme est qu’il serve provisoirement, à sa place, et malgré s
1317 ute qu’on ne compte à Strasbourg qu’une trentaine de fédéralistes sur cent-un députés.) 3° La Grèce fait partie du Conseil
1318 nt été nommés jusqu’ici que par L’Humanité. Drôle d’ évidence. (C’est l’OECE qui est née du plan Marshall.) 4° M. Spaak est
1319 ent, à mon insu, « annoncé la fin du désespoir et de l’isolement, la mort des ressentiments nationaux » ? Hélas ! Diagnost
1320 us par exemple), ce n’est pas « annoncer » la fin de la maladie, ni promettre « des joies et des fêtes ». Nous demandons s
1321 des sacrifices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a «  de faux ou d’imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de
1322 ices. 6° Pour découvrir ce qu’il y a « de faux ou d’ imbécile » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interr
1323 e » dans le projet des fédéralistes, vous décidez de les interroger. Que ne le faites-vous ? Mais non, par une erreur vrai
1324 « fédéralistes » dans L’Esprit européen, recueil de neuf conférences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tenda
1325 ences prononcées à Genève en 1949, par des hommes de tendances aussi opposées que Georg Lukács et Karl Jaspers. Parmi ces
1326 ré. Voyez donc la page 60 : « Je reproche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités san
1327 proche à Benda de confondre union et unification, de vouloir effacer les diversités sans lesquelles aucune fédération n’es
1328 fédération n’est possible. » C’est la seule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la do
1329 ule page de ce gros livre où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous ci
1330 re où vous aviez la chance de tomber sur un point de la doctrine fédéraliste. Que ne l’avez-vous citée, au lieu de m’attri
1331 ersité, formule suisse) étant à l’opposé de celle de Benda (qui veut l’unification, formule jacobine) vous déclarez que la
1332 vous déclarez que la seconde n’est que « l’aveu » de ce que la première dissimule. Après quoi, bien sûr, plus rien ne saur
1333 mais. Au contraire, vous rejoignez ici une partie de leurs positions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi c
1334 leurs positions, et votre belle colère se trompe d’ adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison atta
1335 tions, et votre belle colère se trompe d’adresse. De quoi ce lapsus est-il révélateur ? Pour quelle raison attaquez-vous d
1336 ez-vous des gens que vous n’avez pas pris le soin d’ identifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près
1337 tifier ? Vous n’êtes pas coutumier, tout de même, de l’à-peu-près journalistique. Pour en finir, je vous envoie ma petite
1338 ’Attitude fédéraliste . Vous y trouverez beaucoup d’ attaques contre le nationalisme, contre l’État-nation, contre sa préte
1339 riotisme et les patries. Or j’ai quelques raisons de penser que ce texte exprime le « projet des fédéralistes » plus fidèl
1340 quoi, cette lettre est inutile, si l’on a décidé d’ appeler « fédéralistes » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé
1341 s » tous ceux, qui, un jour ou l’autre, ont parlé de l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a de
1342 l’Europe avec une vague idée qu’elle ferait bien de s’unir. Il y a des gens qui appellent surréaliste tout écrit qu’ils e
1343 uand vous aurez renoncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce
1344 oncé à le confondre avec celui de Benda, ou celui de Churchill pendant qu’on y est, dites-nous donc ce que vous proposez.
1345 proposez. Car je ne vais pas vous faire l’injure de croire que vous trouvez que tout va très bien ainsi, ou que vous pens
1346 ant toutes petites et mignonnes. Elles ont besoin de vous aussi, non point pour les louer contre nous, mais pour les défen
1347  « Europe vole » ? Un gage. r. Rougemont Denis de , « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950
1348 t Denis de, « Un gage à Jean Paulhan ! », Liberté de l’esprit, Paris, avril 1950, p. 33-34.
13 1950, Articles divers (1948-1950). Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)
1349 Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture (5 août 1950)s t Il est imp
1350 sa culture (5 août 1950)s t Il est impossible de sauver l’Europe si l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de
1351 i l’on ne sauve pas en même temps sa culture ; ou de sauver la culture occidentale si l’on ne sauve pas en même temps sa p
1352 e sauve pas en même temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les
1353 ême temps sa patrie. Rien ne sert de faire durer, de conserver la créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa re
1354 a créature — l’Europe — si l’on tarit les sources de sa recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’entretenir le d
1355 recréation perpétuelle. Et rien ne sert non plus d’ entretenir le désir créateur, si on le prive des possibilités de s’acc
1356 e désir créateur, si on le prive des possibilités de s’accomplir dans une libre communauté. Si l’Europe est réduite à l’im
1357 mondiales, personne ne pourra remplacer cette âme d’ une civilisation qui avait su remplacer toutes les autres. Le secret d
1358 i avait su remplacer toutes les autres. Le secret de ses mesures vivantes sera perdu. ⁂ Mais en retour, sans une culture a
1359 unie, c’est même plus que probable, par les soins d’ experts étrangers, ou d’une police qui a fait ses preuves ailleurs déj
1360 e probable, par les soins d’experts étrangers, ou d’ une police qui a fait ses preuves ailleurs déjà. Mais elle aura perdu
1361 es ailleurs déjà. Mais elle aura perdu le ressort de son pouvoir transformateur du monde, ce pouvoir qui avait fait sa gra
1362 e, ce pouvoir qui avait fait sa grandeur à partir d’ un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si
1363 ir d’un médiocre destin. Que servirait à l’Europe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cett
1364 pe de recevoir une unité, si ce n’était pas celle de son choix ? et si cette unité signifiait sa défaite, non point sa con
1365 l’Asie — et l’Asie n’a jamais passé pour la terre de la liberté. Ces deux réalités : l’Europe, la culture, naissent et meu
1366 et meurent du même mouvement. ⁂ Qu’en est-il donc de ce mouvement, au milieu de notre xxe siècle ? Entre les deux colosse
1367 it actuellement ce qu’on peut appeler une névrose d’ infériorité. Pourtant, les faits ne justifient pas le désespoir, mais
1368 ifient pas le désespoir, mais seulement un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américai
1369 ent un effort de redressement. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rid
1370 ent. Entre 200 millions de Russes et 150 millions d’ Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 mi
1371 d’Américains, nous sommes ici à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’un qu
1372 à l’ouest du rideau de fer, près de 300 millions d’ Européens. Nous disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’un
1373 300 millions d’Européens. Nous disposons de plus d’ un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit a
1374 disposons de plus d’un quart du charbon, et près d’ un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous dis
1375 de plus d’un quart du charbon, et près d’un tiers de l’électricité que produit aujourd’hui la planète. Nous disposons surt
1376 it aujourd’hui la planète. Nous disposons surtout de ressources humaines qui n’ont pas leurs égales ailleurs : une main-d’
1377 ont les traditions ne s’imitent pas, une capacité d’ invention que le monde entier peut nous envier. ⁂ Qu’avons-nous invent
1378 re : presque tous leurs grands noms sont des noms de l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier
1379 ès rares qui n’en sont pas ont appris leur métier de nos maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou pa
1380 maîtres, dans nos écoles, aux terrasses des cafés de Paris, ou par nos livres. ⁂ Je dirai plus. Le monde moderne tout enti
1381 e à la fois nos mœurs et nos objets, nos procédés d’ art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie e
1382 is nos mœurs et nos objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de méde
1383 os objets, nos procédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos arme
1384 rocédés d’art et de construction, de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous,
1385 de construction, de transport et de gouvernement, d’ industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les
1386 , de transport et de gouvernement, d’industrie et de médecine, et nos armes. Les Hindous, les Chinois, les Noirs, copient
1387 ous, nous copions tout au plus quelques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de
1388 elques citations de leurs sages, quelques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que s
1389 lques statues de leurs dieux, ou quelques rythmes de leurs danses. ⁂ Finalement, que sont les empires qui prétendent parta
1390 du Nord et la Russie de Staline sont des produits de notre culture, l’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de
1391 ’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’un côté, plus les grat
1392 a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’ un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les
1393 isme, d’un côté, plus les gratte-ciel, le système de Taylor-Bedault à tous les degrés, la cellophane et la fermeture-éclai
1394 e-éclair qui sont des inventions européennes ; et de l’autre côté, Marx et notre industrie plus l’instruction publique et
1395 nstruction publique et l’athéisme, l’hypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pè
1396 ypertrophie de l’appareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce
1397 ppareil étatique, et des copies de l’art officiel de nos grands-pères. Caricatures évidemment ; mais ce n’est point par ha
1398 ces deux grands pays semblent appeler ce procédé de description : leurs traits les plus frappants et qu’ils croient spéci
1399 en que l’Amérique et la Russie moderne, dans plus d’ un sens, sont en réalité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas
1400 ité notre caricature. ⁂ Mais ici, attention ! pas de malentendu ! Ne nous laissons jamais aller à placer sur le même plan
1401 suffiront. Entre l’Amérique et nous, qu’y a-t-il de commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation
1402 e commun ? Il y a tous les principes fondamentaux de notre civilisation ; il y a l’exercice des mêmes libertés ; il y a de
1403 mêmes libertés ; il y a devant nous le même idéal de liberté humaine. Tandis qu’entre les Russes et nous, il n’y a en comm
1404 our nous liberté politique. s. Rougemont Denis de , « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », Fra
1405 ue. s. Rougemont Denis de, « Il est impossible de sauver l’Europe sans sauver sa culture », France indépendante, Paris,
1406 présente cette semaine à ses lecteurs, un extrait de l’importante conférence prononcée par Denis de Rougemont au congrès d
1407 rence prononcée par Denis de Rougemont au congrès de La Fédération à Beaune. Nous tenons à remercier M. de Rougemont pour
1408 à remercier M. de Rougemont pour son autorisation de publier ces lignes qui suscitèrent, nous en sommes certains, chez nos
14 1950, Articles divers (1948-1950). Saint-John Perse et l’Amérique (1950)
1409 t-John Perse et l’Amérique (1950)m La grandeur de cette poésie fait reculer le commentaire : elle est un acte, elle se
1410 à, posant elle-même ses mesures. La première page d’ Anabase lorsqu’elle parut, constitua pour nous le fait du prince, tout
1411 rer dans la durée, — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. (D’où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un
1412 — ce dont plusieurs doutaient, de ma génération. ( D’ où quelque résistance aux poèmes qui suivirent. Un jeune amour veut so
1413 t, on l’imagine, en Amérique. Au long des avenues de Manhattan, il marchait lentement, régulièrement, comme ceux qui vont
1414 , comme ceux qui vont très loin, ou qui pensent à de grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’empressement. Ou da
1415 e grands objets. Ce sont des hommes qui n’ont pas d’ empressement. Ou dans cette chambre d’angle, dont il parle dans Neiges
1416 i n’ont pas d’empressement. Ou dans cette chambre d’ angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme
1417 angle, dont il parle dans Neiges, « hôte précaire de l’instant, homme sans preuve ni témoin », il nous donnait un haut exe
1418 n », il nous donnait un haut exemple du bon usage de l’exil : sans plainte, au cœur du grand litige ; aussi actif dans la
1419 avait su rester sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des de
1420 er sensible dans l’action ; soucieux de voir, non d’ être vu ; plus solidaire, enfin, dans son retrait, des destins molesté
1421 re, enfin, dans son retrait, des destins molestés de la France, que tant de « partisans extravagants » qui tenaient bruyam
1422 extravagants » qui tenaient bruyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je
1423 uyamment le devant de la scène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarqu
1424 ène… Mais ce n’est pas de l’homme qu’il est temps de parler. Je voudrais proposer trois remarques sur les relations qui se
1425 atique. J’y verrais même la meilleure description de l’essor des États-Unis dans l’espace et le temps à la fois, si le suj
1426 ture et l’invention du Nouveau Monde ont illustré d’ accidents séculaires. Tout se passe à la fois dans l’Histoire et dans
1427 oire et dans l’homme, « dans un très haut tumulte de terres en marche vers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. D
1428 ers l’ouest », contre le vent qui souffle en est. De l’Atlantique au Pacifique, des Pères pèlerins aux savants atomistes,
1429 r nylon, les grands rapides « avec leur provision de glace pour cinq jours », la « mouette mauve du Mormon », ou cette « c
1430 maïs noir — non violet », enfin « les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’h
1431 les siffloteurs de blues dans les usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme
1432 s usines secrètes de guerre », au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence
1433 au « pire scandale de l’histoire »… Mais « c’est de l’homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’un agrandisseme
1434 homme qu’il s’agit, dans sa présence humaine ; et d’ un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poèm
1435 dans sa présence humaine ; et d’un agrandissement de l’œil aux plus hautes mers intérieures ». Le poème ainsi prend sa sou
1436 , peuvent être vues comme une seule et même geste de l’âme. (Je dis l’âme, et non pas l’esprit, ni l’intellect et ni le cœ
1437 ’esprit, ni l’intellect et ni le cœur.) Et c’est d’ un même mouvement à tout ce mouvement lié, que mon poème encore dans l
1438 mouvement lié, que mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de
1439 mon poème encore dans le vent, de ville en ville, de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénia
1440 de fleuve en fleuve, court aux plus vastes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les
1441 tes houles de la terre… Congénialité du poème et de cette Amérique ourdie par les grands vents : le mouvement, la violenc
1442 ment crée l’énergie, le rayonnement et les trains d’ ondes, — et d’autre part, dans le poème, il crée littéralement le sens
1443 s le poème, il crée littéralement le sens. (Point de départ d’une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa for
1444 , il crée littéralement le sens. (Point de départ d’ une rhétorique.) Un continent nous est ici donné dans sa formule dynam
1445 nous filaient entre les doigts — grands virements de comptes et glissements sur l’aile. L’apposition me semble offrir ici
1446 osition me semble offrir ici l’équivalent en mots d’ un accord en musique : co-vibration des sens au lieu de celle des sons
1447 où l’on étudiera, plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale,
1448 plus tard, les rôles conjugués de l’étymologie et de l’emportement lyrique4. (Ainsi l’Amérique idéale, entre ses « origine
1449 ase et Vents sont parmi les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nour
1450 i les rares œuvres toniques de ce siècle : chants de violence heureuse, refus du désespoir (qui nourrit la plupart des poè
1451 respire à longs traits la maîtrise, et le bonheur de la victoire. Les mots faveur et favorable, éloges, délice et délectab
1452 autres les expressions du délaissement, du dégoût de vivre ou des chagrins intimes. Qu’ils n’aillent dire : tristesse… s’
1453 nostalgie deviennent ici conquête, pressentiment de l’acte, distraction vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de
1454 ion vers l’avenir et naissance du chant. Un chant de force pour les hommes… Choses vivantes, ô choses — excellentes ! Rien
1455 poésie des « blues » fait illusion : temps faible d’ un grand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Co
1456 rand rythme souple, dont il devrait être interdit de l’isoler.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil int
1457 er.) Comparez avec Rilke, notre plus grand témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’au
1458 témoin de l’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s
1459 ’exil intérieur en Europe. L’un parle de hauteur, d’ exultation, l’autre d’humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au
1460 ope. L’un parle de hauteur, d’exultation, l’autre d’ humilité dans la souffrance ; l’un s’ouvre « au monde entier des chose
1461 ce propos une hypothèse critique, qui permettrait de situer les grands poèmes du siècle. Si l’élément sentimental domine c
1462 uel, c’est dans l’élément animique que les poèmes de Saint-John Perse trouvent leurs lois et leurs cadences : Et c’est pa
1463 à l’image des grandes crues, Qu’il prend conseil de ces menées nouvelles au lit du vent. Et c’est conseil encore de fo
1464 velles au lit du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents
1465 t du vent. Et c’est conseil encore de force et de violence. « Anima » violente et sauvage comme les vents du Nouveau M
1466 e comme les vents du Nouveau Monde, comme un rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les ri
1467 n rêve de pionniers en Ouest. Mais le miracle est de l’avoir domptée par les rigueurs voluptueuses du plus pur langage fra
1468 urs voluptueuses du plus pur langage français, et de cette « rhétorique profonde » dont parlait un jour Baudelaire. III. L
1469 it un jour Baudelaire. III. L’Europe étant vision de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fu
1470 n de l’homme dans le temps, l’Amérique est vision de l’espace. L’Europe fut universaliste, et le redeviendra peut-être, ma
1471 rocédés, chez Saint-John Perse, ouvrent les voies d’ un grand lyrisme américain. Ils sont classiques. Les continents, les p
1472 yriques, et l’édification sur table rase des lois d’ une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en c
1473 tion sur table rase des lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes
1474 lois d’une cité émergeant de son rêve. C’étaient de très grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et q
1475 ès grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde, et qui prenaient source plus haute qu’en nos chants, en lie
1476 aient source plus haute qu’en nos chants, en lieu d’ insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô mond
1477 plus haute qu’en nos chants, en lieu d’insulte et de discorde Qui se donnaient licence par le monde — ô monde entier des
1478 e mot « monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’ états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée
1479 monde » à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’ âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de va
1480 à chaque page : il ne s’agit plus d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes es
1481 us d’états d’âme, de sentiments individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute rac
1482 nts individuels, mais de « la terre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pa
1483 rre distribuée en de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de
1484 de vastes espaces », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par
1485 es », des hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’u
1486 hommes de toute race et de toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme san
1487 toute façon, de « pans de siècles en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’un
1488 s en voyage » et de peuples lus « par nations » ; d’ une âme sans nom — l’inconscient d’une époque — dont le poète déchiffr
1489 ar nations » ; d’une âme sans nom — l’inconscient d’ une époque — dont le poète déchiffre les messages. Itinéraires et inve
1490 s messages. Itinéraires et inventaires, sommation de nos « voies et façons » et « chants d’un peuple, le plus ivre », — il
1491 sommation de nos « voies et façons » et « chants d’ un peuple, le plus ivre », — il semblera surprenant qu’un Français ait
1492 ançais ait ouvert aux Américains les perspectives de l’épopée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans
1493 pée globale que l’histoire désormais leur assigne de vivre. Dans un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafay
1494 un autre ordre, cependant, il y eut le précédent de Lafayette. ⁂ Mais Vents n’est pas seulement le poème du lyrisme, le c
1495 s seulement le poème du lyrisme, le chant profond de l’Amérique. C’est aussi, dans sa dernière partie, le poème du retour
1496 l’Europe, à la France. Nous reviendrons, un soir d’ Automne, sur les derniers roulements d’orage… Demain, ce continent lar
1497 s, un soir d’Automne, sur les derniers roulements d’ orage… Demain, ce continent largué… S’ensuit une description charmant
1498 S’ensuit une description charmante et déchirante d’ une France désuète et qui naguère encore périssait « par excès de sage
1499 suète et qui naguère encore périssait « par excès de sagesse », d’une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent
1500 aguère encore périssait « par excès de sagesse », d’ une France vers laquelle il rêve son retour avec le vent des Amériques
1501 ur avec le vent des Amériques. Au plus haut point de ce très haut poème, Saint-John Perse a rejoint notre vœu. Nous l’atte
1502 se a rejoint notre vœu. Nous l’attendrons un soir d’ automne, avec le souffle du grand vent, sur la route et la terre des h
1503 la terre des hommes, prêts à rendre nos comptes «  d’ hommes nouveaux, — d’hommes entendus dans la gestion humaine, non dans
1504 prêts à rendre nos comptes « d’hommes nouveaux, —  d’ hommes entendus dans la gestion humaine, non dans la précession des éq
1505 es équinoxes », et qu’il nous aide ! par le chant d’ une Europe future. Car, ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plu
1506 , ainsi que l’écrit Montesquieu — je ne sais plus de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’auteur qui donne à l’âm
1507 us de qui, mais il n’importe : « Nous n’avons pas d’ auteur qui donne à l’âme de plus grands mouvements… qui nous remplisse
1508 e plus grands mouvements… qui nous remplisse plus de la vapeur du dieu qui l’agite. » 4. « Avertissement du Dieu ! Avers
1509 e âme plus scabreuse ! » (Deux exemples au hasard de ma mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de
1510 mémoire.) 5. Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureu
1511 Où sont les grands poètes capables de bonheur, et de grandir dans le bonheur, — ceux dont les chants heureux sont les plus
1512 Arabes et Chinois peut-être… m. Rougemont Denis de , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris
1513 , « Saint-John Perse et l’Amérique », Les Cahiers de la Pléiade, Paris, septembre 1950, p. 136-139.