1
Faire la propagande
de
la liberté, c’est sauver notre culture (décembre 1950-janvier 1951)a
2
la liberté, c’est sauver notre culture (décembre
1950-janvier
1951)a Nous sommes ici parce que nous savons tous que notre civili
3
c’est sauver notre culture (décembre 1950-janvier
1951
)a Nous sommes ici parce que nous savons tous que notre civilisatio
4
e salut reste encore possible, mais qu’il suppose
deux
conditions premières : la liberté et la paix. Si l’on nous demande qu
5
ui a pu rassembler des hommes aussi divers à tant
d’
égards que ceux que vous voyez sur cette tribune, je répondrai : Nous
6
té indivisibles, qu’elles sont la condition l’une
de
l’autre et pratiquement synonymes. J’espère bien que vous êtes de ceu
7
atiquement synonymes. J’espère bien que vous êtes
de
ceux qui se méfient des grands mots du genre de paix et de liberté et
8
s de ceux qui se méfient des grands mots du genre
de
paix et de liberté et qui demandent à voir ce qu’on met derrière ces
9
ui se méfient des grands mots du genre de paix et
de
liberté et qui demandent à voir ce qu’on met derrière ces syllabes pr
10
J’espère, parce que c’est précisément notre rôle
d’
intellectuels libres que de monter une garde vigilante et continue aut
11
précisément notre rôle d’intellectuels libres que
de
monter une garde vigilante et continue autour du sens humain, concret
12
ilante et continue autour du sens humain, concret
de
ces grands mots et d’entretenir une saine méfiance critique à l’égard
13
our du sens humain, concret de ces grands mots et
d’
entretenir une saine méfiance critique à l’égard de ceux qui en abusen
14
ui en abusent. Tel est peut-être le premier point
de
notre programme et j’y reviendrai. Mais j’entends dire partout avec d
15
se défendre, simplement, et chacun dans sa sphère
d’
action et d’intérêts. Nous, intellectuels, nous sommes prêts à prendre
16
simplement, et chacun dans sa sphère d’action et
d’
intérêts. Nous, intellectuels, nous sommes prêts à prendre notre part,
17
visés en premier lieu par la menace totalitaire,
d’
où qu’elle vienne. Nous savons que la phase actuelle de la lutte contr
18
qu’elle vienne. Nous savons que la phase actuelle
de
la lutte contre la tyrannie et pour la liberté est une phase idéologi
19
et avant nous ont lancé des appels pour la paix,
de
Stockholm, de Prague, de Varsovie tout récemment. C’est justement ce
20
ont lancé des appels pour la paix, de Stockholm,
de
Prague, de Varsovie tout récemment. C’est justement ce qui nous inqui
21
des appels pour la paix, de Stockholm, de Prague,
de
Varsovie tout récemment. C’est justement ce qui nous inquiète pour la
22
la souris et nous avons des raisons très précises
de
le penser. Nous publierons à ce sujet bientôt des textes que les gran
23
ntôt des textes que les grands chefs totalitaires
de
divers pays ont pris soin d’écrire eux-mêmes depuis longtemps et d’au
24
s chefs totalitaires de divers pays ont pris soin
d’
écrire eux-mêmes depuis longtemps et d’autres textes plus récents d’où
25
depuis longtemps et d’autres textes plus récents
d’
où il ressort, par exemple, que le but du Kominform, en lançant ses ap
26
en lançant ses appels à la paix n’est pas du tout
de
servir une paix durable, mais de donner un répit à l’armée russe pour
27
’est pas du tout de servir une paix durable, mais
de
donner un répit à l’armée russe pour renforcer ses armements. Vous po
28
on n’aura jamais vu des loups déclarer avec moins
de
pudeur leur amour passionné pour les brebis. La vérité, voyez-vous, c
29
érité, voyez-vous, c’est qu’on nous a volé ce mot
de
paix. On nous l’a kidnappé ; on l’a pris en otage ; on nous le présen
30
nant devant le front des troupes dans l’intention
de
nous désarmer. Si vous n’êtes pas dans le camp politique qui s’est em
31
ix », vous êtes, nous dit-on, pour la guerre. Des
millions
de naïfs dans nos pays, 14 millions en Europe, paraît-il, ont succomb
32
s êtes, nous dit-on, pour la guerre. Des millions
de
naïfs dans nos pays, 14 millions en Europe, paraît-il, ont succombé à
33
r la guerre. Des millions de naïfs dans nos pays,
14
millions en Europe, paraît-il, ont succombé à ce raisonnement d’une é
34
a guerre. Des millions de naïfs dans nos pays, 14
millions
en Europe, paraît-il, ont succombé à ce raisonnement d’une écrasante
35
Europe, paraît-il, ont succombé à ce raisonnement
d’
une écrasante simplicité dans le sophisme. Et puis, vous le savez tous
36
ix, c’est un mot. Il est très facile, à mon avis,
de
distinguer entre le mot paix et la réalité vivante qu’il devrait dési
37
n’est donc nullement défendue par les « Partisans
de
la Paix ». À nous donc, à nous tous, de reprendre la tâche, honnêteme
38
Partisans de la Paix ». À nous donc, à nous tous,
de
reprendre la tâche, honnêtement cette fois-ci, cartes sur table. L
39
cette fois-ci, cartes sur table. La propagande
de
la Liberté Quelles sont nos armes ? Je pense que leur nature doit
40
nature doit nous être indiquée par la nature même
de
la lutte en cours qui, pour l’instant, encore, dans nos pays démocrat
41
depuis un an, à ce que l’on a nommé une offensive
de
paix — d’un terme militaire bien caractéristique. Il s’agit de ce qu’
42
an, à ce que l’on a nommé une offensive de paix —
d’
un terme militaire bien caractéristique. Il s’agit de ce qu’on appelai
43
n terme militaire bien caractéristique. Il s’agit
de
ce qu’on appelait jadis — naguère — une préparation d’artillerie. Que
44
qu’on appelait jadis — naguère — une préparation
d’
artillerie. Quelle peut être notre riposte ? Je n’hésiterai pas à lui
45
i donner ce nom, bien que ce nom soit très mal vu
de
nos élites, peut-être même sans raison : c’est une mission de propaga
46
s, peut-être même sans raison : c’est une mission
de
propagande qui nous incombe au premier chef. Je désire m’expliquer su
47
mployer, les enrôler, pour ainsi dire, au service
de
la santé des hommes. Utilisons de cette manière la propagande pour va
48
ire, au service de la santé des hommes. Utilisons
de
cette manière la propagande pour vacciner contre elle les masses, qu’
49
lument artificiel. Notre but, en effet, n’est pas
d’
endormir ou d’hypnotiser les esprits mais au contraire, de réveiller l
50
iel. Notre but, en effet, n’est pas d’endormir ou
d’
hypnotiser les esprits mais au contraire, de réveiller les consciences
51
ir ou d’hypnotiser les esprits mais au contraire,
de
réveiller les consciences. Il n’est pas de répandre une mystique qui
52
raire, de réveiller les consciences. Il n’est pas
de
répandre une mystique qui promet la lune pour demain, mais de rappele
53
une mystique qui promet la lune pour demain, mais
de
rappeler les hommes aux réalités, à leurs responsabilités. Nous savon
54
ibertés démocratiques occidentales sont très loin
d’
être parfaites, mais si nous les perdons un jour, nous penserons dans
55
rendrons qu’il eût peut-être mieux valu s’occuper
de
ces problèmes pendant qu’on le pouvait, sauver au moins la possibilit
56
qu’on le pouvait, sauver au moins la possibilité
de
les vivre à notre manière. Pour notre part, nous agirons. Nous allons
57
ur nous, la défense de la paix suppose des moyens
de
liberté, elle suppose la libre discussion. Nous voulons des moyens co
58
que la liberté est à nos yeux la condition vitale
de
toute culture, de toute culture digne de ce nom. Pour nous intellectu
59
à nos yeux la condition vitale de toute culture,
de
toute culture digne de ce nom. Pour nous intellectuels, hommes de cul
60
n vitale de toute culture, de toute culture digne
de
ce nom. Pour nous intellectuels, hommes de culture, faire la propagan
61
digne de ce nom. Pour nous intellectuels, hommes
de
culture, faire la propagande de la liberté, c’est, en fin de compte e
62
llectuels, hommes de culture, faire la propagande
de
la liberté, c’est, en fin de compte et du même coup sauver notre cult
63
consacrer à d’autres activités dites distinguées
de
ce genre, je voudrais poser une simple question très précise et concr
64
ser une simple question très précise et concrète.
D’
où vient que l’Europe ait régné sur le monde, incontestablement depuis
65
ait régné sur le monde, incontestablement depuis
quatre
ou cinq siècles ? Quelles ont été les sources vives de cette puissanc
66
sur le monde, incontestablement depuis quatre ou
cinq
siècles ? Quelles ont été les sources vives de cette puissance parado
67
cinq siècles ? Quelles ont été les sources vives
de
cette puissance paradoxale ? La péninsule Europe ne représente, en ef
68
La péninsule Europe ne représente, en effet, que
5
% des terres du globe. Ni son étendue, ni le nombre de ses habitants,
69
des terres du globe. Ni son étendue, ni le nombre
de
ses habitants, ni ses richesses naturelles ne la destinaient fataleme
70
intervenus. En fait le rayonnement, la puissance
de
l’Europe ont résulté tout à la fois de ses conceptions religieuses et
71
puissance de l’Europe ont résulté tout à la fois
de
ses conceptions religieuses et morales, d’un pouvoir d’invention sans
72
a fois de ses conceptions religieuses et morales,
d’
un pouvoir d’invention sans égal et d’un système de lois garantissant
73
conceptions religieuses et morales, d’un pouvoir
d’
invention sans égal et d’un système de lois garantissant de mieux en m
74
et morales, d’un pouvoir d’invention sans égal et
d’
un système de lois garantissant de mieux en mieux les libertés de la p
75
’un pouvoir d’invention sans égal et d’un système
de
lois garantissant de mieux en mieux les libertés de la personne. C’es
76
on sans égal et d’un système de lois garantissant
de
mieux en mieux les libertés de la personne. C’est là qu’il faut cherc
77
lois garantissant de mieux en mieux les libertés
de
la personne. C’est là qu’il faut chercher les vrais secrets de notre
78
e. C’est là qu’il faut chercher les vrais secrets
de
notre puissance, même matérielle, dans le passé, et aujourd’hui les v
79
, dans le passé, et aujourd’hui les vrais secrets
de
notre survivance indépendante, donc de nos libertés les plus concrète
80
is secrets de notre survivance indépendante, donc
de
nos libertés les plus concrètes. Il s’en faut cependant, hélas ! de b
81
s plus concrètes. Il s’en faut cependant, hélas !
de
beaucoup, que la plupart de nos contemporains, même en Europe, prenne
82
ope, prennent au sérieux, pratiquement, ce secret
de
leur force. Ce qui est sérieux, croient-ils, ce sont les armements ou
83
e, que l’Assemblée européenne fût privée du droit
de
s’occuper des choses militaires et des choses économiques, s’écriait
84
des choses économiques, s’écriait avec une sorte
de
désespoir ironique, et très sûr de son effet : « Notre Assemblée, Mes
85
avec une sorte de désespoir ironique, et très sûr
de
son effet : « Notre Assemblée, Messieurs, se voit réduite à parler de
86
re Assemblée, Messieurs, se voit réduite à parler
de
questions culturelles. Cela me fait penser à de vieilles dames qui fo
87
r de questions culturelles. Cela me fait penser à
de
vieilles dames qui font du crochet pendant que les armées ennemies se
88
uve que notre culture n’est pas menacée seulement
de
l’extérieur. En effet, comparer la culture à de la broderie, accepter
89
t de l’extérieur. En effet, comparer la culture à
de
la broderie, accepter qu’il en soit ainsi, le laisser croire, c’est r
90
en soit ainsi, le laisser croire, c’est renoncer
d’
avance à nos meilleurs atouts dans la lutte historique où nous sommes
91
storique où nous sommes engagés qui est une lutte
d’
idées, de croyances, de conceptions du monde. Les totalitaires, eux, l
92
où nous sommes engagés qui est une lutte d’idées,
de
croyances, de conceptions du monde. Les totalitaires, eux, le savent
93
engagés qui est une lutte d’idées, de croyances,
de
conceptions du monde. Les totalitaires, eux, le savent très bien.
94
Staline rédige lui-même un long article en forme
d’
encyclique sur la science linguistique dans son empire ou lorsqu’il la
95
purement scientifique, déclare-t-il — avec l’aide
de
500 000 propagandistes entraînés, munis de films, d’expositions itiné
96
ement scientifique, déclare-t-il — avec l’aide de
500
000 propagandistes entraînés, munis de films, d’expositions itinérant
97
t scientifique, déclare-t-il — avec l’aide de 500
000
propagandistes entraînés, munis de films, d’expositions itinérantes e
98
l’aide de 500 000 propagandistes entraînés, munis
de
films, d’expositions itinérantes et de 20 millions de brochures, le t
99
500 000 propagandistes entraînés, munis de films,
d’
expositions itinérantes et de 20 millions de brochures, le tout largem
100
nés, munis de films, d’expositions itinérantes et
de
20 millions de brochures, le tout largement financé par les fonds du
101
, munis de films, d’expositions itinérantes et de
20
millions de brochures, le tout largement financé par les fonds du par
102
unis de films, d’expositions itinérantes et de 20
millions
de brochures, le tout largement financé par les fonds du parti, c’est
103
ilms, d’expositions itinérantes et de 20 millions
de
brochures, le tout largement financé par les fonds du parti, c’est-à-
104
ment financé par les fonds du parti, c’est-à-dire
de
l’État, lorsque Staline déclenche ses campagnes culturelles, soyez bi
105
ne joue pas aux vieilles dames, qu’il ne fait pas
de
la broderie, et que les armées qu’il met en marche sont plus redoutab
106
ins, elles veulent occuper le cœur et les esprits
de
ceux-là mêmes qui pourraient être appelés un jour à défendre l’Europe
107
Europe et qui ne le feront pas si le point de vue
de
l’adversaire les a, par avance, « occupés ». Ainsi donc, pratiquement
108
t — j’insiste sur le mot « pratiquement » — point
d’
Europe sans culture, point de culture sans libre discussion, point de
109
atiquement » — point d’Europe sans culture, point
de
culture sans libre discussion, point de liberté de critique et de rec
110
re, point de culture sans libre discussion, point
de
liberté de critique et de recherche sans droits civiques et politique
111
e culture sans libre discussion, point de liberté
de
critique et de recherche sans droits civiques et politiques et point
112
libre discussion, point de liberté de critique et
de
recherche sans droits civiques et politiques et point de paix digne d
113
erche sans droits civiques et politiques et point
de
paix digne de ce nom sans, à la base et avant tout, un esprit de libe
114
its civiques et politiques et point de paix digne
de
ce nom sans, à la base et avant tout, un esprit de liberté vigilant e
115
e ce nom sans, à la base et avant tout, un esprit
de
liberté vigilant et militant… La tâche est très vaste, c’est l’éviden
116
ceux qui se taisent et qui se découragent. À vous
de
les rejoindre. J’ajoute que, pour nous, intellectuels, le fait d’assu
117
. J’ajoute que, pour nous, intellectuels, le fait
d’
assumer publiquement notre part bien définie dans cette bataille commu
118
n définie dans cette bataille commune est un acte
de
propreté, un acte vital aussi pour notre pensée même ; car si nous re
119
ensée même ; car si nous reculions devant ce défi
de
l’histoire, que pourrions-nous encore penser écrire ou dire sans une
120
ire ou dire sans une honte intime, sans une sorte
de
mépris pour nous-mêmes ? 1. Ce texte est extrait du discours pron
121
e, sans une sorte de mépris pour nous-mêmes ?
1.
Ce texte est extrait du discours prononcé à Bruxelles, devant le comi
122
e comité international du Congrès pour la Liberté
de
la culture, par Denis de Rougemont, directeur du secrétariat internat
123
at international du Congrès. a. Rougemont Denis
de
, « Faire la propagande de la liberté, c’est sauver notre culture », L
124
s. a. Rougemont Denis de, « Faire la propagande
de
la liberté, c’est sauver notre culture », Les Amis de la liberté, Par
125
a liberté, c’est sauver notre culture », Les Amis
de
la liberté, Paris, décembre 1950–janvier 1951, p. 1-3.
126
ulture », Les Amis de la liberté, Paris, décembre
1950
–janvier 1951, p. 1-3.
127
Amis de la liberté, Paris, décembre 1950–janvier
1951,
p. 1-3.
128
C’est absolument impossible. Et je vais essayer
de
dire pourquoi. On peut tout fabriquer, ou presque, paraît-il. L’homme
129
de cette thèse absolue, j’invoquerai tout d’abord
deux
exemples connus qui feront mieux distinguer, par contraste, combien j
130
à notre enfance, — n’y touchons plus. Mais prenez
deux
Européens de nations différentes, si possible. Mariez leur fils avec
131
, — n’y touchons plus. Mais prenez deux Européens
de
nations différentes, si possible. Mariez leur fils avec la fille de d
132
ntes, si possible. Mariez leur fils avec la fille
de
deux autres Européens. Attendez une génération. Répétez le processus
133
s, si possible. Mariez leur fils avec la fille de
deux
autres Européens. Attendez une génération. Répétez le processus quatr
134
ns. Attendez une génération. Répétez le processus
quatre
ou cinq fois. Lorsque Schmidt, fils de Schmidt, sera baptisé Smith, c
135
ez une génération. Répétez le processus quatre ou
cinq
fois. Lorsque Schmidt, fils de Schmidt, sera baptisé Smith, changez s
136
cessus quatre ou cinq fois. Lorsque Schmidt, fils
de
Schmidt, sera baptisé Smith, changez son arbre généalogique. Déclarez
137
qu’il descend en droite ligne des émigrants venus
d’
Angleterre sur le fameux bateau nommé le Mayflower. Il semble bien que
138
bien que cette caravelle ait transporté plusieurs
centaines
de milliers d’émigrants : un Smith de plus ne la fera pas couler. App
139
ette caravelle ait transporté plusieurs centaines
de
milliers d’émigrants : un Smith de plus ne la fera pas couler. Appren
140
e caravelle ait transporté plusieurs centaines de
milliers
d’émigrants : un Smith de plus ne la fera pas couler. Apprenez mainte
141
le ait transporté plusieurs centaines de milliers
d’
émigrants : un Smith de plus ne la fera pas couler. Apprenez maintenan
142
renez maintenant au jeune homme la phrase célèbre
de
Lincoln sur le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple
143
nement du peuple par le peuple et pour le peuple,
deux
strophes du Star-Spangled Banner, le vocabulaire du base-ball et le p
144
z sur un rythme nègre, emballez (moralement) dans
de
la cellophane, et servez frais. Pour fabriquer un Soviétique, c’est p
145
c’est plus rapide. Prenez un Russe, passez-le au
MVD
— sorte de DDT moral nettoyant les idées subversives, et tirez le rid
146
rapide. Prenez un Russe, passez-le au MVD — sorte
de
DDT moral nettoyant les idées subversives, et tirez le rideau. Mais p
147
des Américains manqués. Les mélanges arbitraires
de
couleurs donnent du brun sale. Vous pouvez alors essayer des combinai
148
vez alors essayer des combinaisons plus savantes,
deux
par deux ou trois par trois. Vous pouvez mélanger, par exemple, de la
149
essayer des combinaisons plus savantes, deux par
deux
ou trois par trois. Vous pouvez mélanger, par exemple, de la culture
150
des combinaisons plus savantes, deux par deux ou
trois
par trois. Vous pouvez mélanger, par exemple, de la culture germaniqu
151
naisons plus savantes, deux par deux ou trois par
trois
. Vous pouvez mélanger, par exemple, de la culture germanique et des E
152
ois par trois. Vous pouvez mélanger, par exemple,
de
la culture germanique et des Espagnols, du socialisme plus ou moins m
153
up de combinaisons resteront stériles. Un mélange
de
catholiques et de juifs ne donnera pas des protestants ; pas plus qu’
154
resteront stériles. Un mélange de catholiques et
de
juifs ne donnera pas des protestants ; pas plus qu’un mélange de Marx
155
nera pas des protestants ; pas plus qu’un mélange
de
Marx et de Maurras ne donnera des libéraux ; ou qu’un mélange de Fran
156
s protestants ; pas plus qu’un mélange de Marx et
de
Maurras ne donnera des libéraux ; ou qu’un mélange de Français et d’A
157
aurras ne donnera des libéraux ; ou qu’un mélange
de
Français et d’Allemands, des Suisses. Je n’entrevois aucun espoir d’o
158
ra des libéraux ; ou qu’un mélange de Français et
d’
Allemands, des Suisses. Je n’entrevois aucun espoir d’obtenir par de t
159
lemands, des Suisses. Je n’entrevois aucun espoir
d’
obtenir par de tels procédés l’Européen synthétique ou moyen : nos ver
160
uisses. Je n’entrevois aucun espoir d’obtenir par
de
tels procédés l’Européen synthétique ou moyen : nos vertus, nos croya
161
e moyenne, si le sujet des Soviets est le produit
d’
un plan, l’Européen est par essence un être qui diffère et tient à dif
162
r essence un être qui diffère et tient à différer
de
son voisin et des modèles fournis. Il n’existe donc pas, il ne peut e
163
fournis. Il n’existe donc pas, il ne peut exister
d’
Européen moyen, résumant les vertus et les défauts contradictoires du
164
onégasques insouciants et des partisans motorisés
de
la paix concentrée. Il n’y a que des hommes habitués à différer les u
165
’est pourquoi faire un Européen, ce serait tenter
de
faire quelque chose qui ne ressemblerait plus à rien d’européen. Aprè
166
re quelque chose qui ne ressemblerait plus à rien
d’
européen. Après tout, pourquoi voudrait-on « fabriquer » des Européens
167
s ? C’est uniquement parce que l’on veut unir les
25
États souverains qui se divisent le continent. Mais nous venons de mo
168
nt. Mais nous venons de montrer qu’il serait vain
de
rêver cette union sous forme de mélange. Il nous faut faire l’Europe,
169
e. Pour la faire, il nous faut partir des quelque
300
millions d’hommes réels qui peuplent la partie libre du continent. Il
170
our la faire, il nous faut partir des quelque 300
millions
d’hommes réels qui peuplent la partie libre du continent. Il faut les
171
ire, il nous faut partir des quelque 300 millions
d’
hommes réels qui peuplent la partie libre du continent. Il faut les pr
172
t. Il faut les prendre comme ils sont, avec leurs
vingt
nations, leurs trois religions, leurs douze langues, leurs trente-six
173
e comme ils sont, avec leurs vingt nations, leurs
trois
religions, leurs douze langues, leurs trente-six partis et leurs inno
174
leurs vingt nations, leurs trois religions, leurs
douze
langues, leurs trente-six partis et leurs innombrables coutumes, tout
175
leurs trois religions, leurs douze langues, leurs
trente-six
partis et leurs innombrables coutumes, toutes supérieures à celles du
176
les coutumes, toutes supérieures à celles du pays
d’
à côté. Et puisqu’il faut baser l’union sur quelque chose qui soit com
177
le problème revient donc à faire comprendre à ces
300
millions d’hommes et de femmes, qu’ils ont tous en commun, précisémen
178
roblème revient donc à faire comprendre à ces 300
millions
d’hommes et de femmes, qu’ils ont tous en commun, précisément, leur v
179
evient donc à faire comprendre à ces 300 millions
d’
hommes et de femmes, qu’ils ont tous en commun, précisément, leur volo
180
à faire comprendre à ces 300 millions d’hommes et
de
femmes, qu’ils ont tous en commun, précisément, leur volonté de reste
181
ils ont tous en commun, précisément, leur volonté
de
rester chacun soi-même à sa façon. Voilà ce qui les distingue en bloc
182
es et des Américains, voilà le principe paradoxal
de
leur communauté profonde. Ce qu’il y a de plus humain chez tout homme
183
angoissante pour l’adolescent — qu’il est le seul
de
son espèce, qu’il est un cas absolument unique. Ce qu’il y a de plus
184
Ce qu’il y a de plus européen chez les habitants
de
notre cap, c’est l’idée qu’ils ont tous d’appartenir d’abord à une fa
185
itants de notre cap, c’est l’idée qu’ils ont tous
d’
appartenir d’abord à une famille, à une région, à une patrie, à une co
186
ils perdraient leurs libertés si on les empêchait
de
vivre à leur manière, qui n’est pas celle de leurs voisins. J’en vois
187
hait de vivre à leur manière, qui n’est pas celle
de
leurs voisins. J’en vois la preuve par neuf dans le reproche si coura
188
s celle de leurs voisins. J’en vois la preuve par
neuf
dans le reproche si courant qu’à tort ou à raison nous faisons à l’Am
189
ous d’autres régimes, où ce n’est pas la pression
de
la mode, mais celle de la police qui ramène « dans la ligne » !) Cert
190
ù ce n’est pas la pression de la mode, mais celle
de
la police qui ramène « dans la ligne » !) Certes, il y a d’autres lie
191
!) Certes, il y a d’autres liens entre les hommes
d’
Europe. Il y a leur héritage commun de civilisation, de valeurs spirit
192
les hommes d’Europe. Il y a leur héritage commun
de
civilisation, de valeurs spirituelles, de formes politiques, et même
193
ope. Il y a leur héritage commun de civilisation,
de
valeurs spirituelles, de formes politiques, et même de mœurs. Les con
194
commun de civilisation, de valeurs spirituelles,
de
formes politiques, et même de mœurs. Les conceptions de l’amour, de l
195
leurs spirituelles, de formes politiques, et même
de
mœurs. Les conceptions de l’amour, de la révolution, des libertés pub
196
mes politiques, et même de mœurs. Les conceptions
de
l’amour, de la révolution, des libertés publiques ou morales, pour ne
197
es, et même de mœurs. Les conceptions de l’amour,
de
la révolution, des libertés publiques ou morales, pour ne citer que c
198
ertés publiques ou morales, pour ne citer que ces
trois
grands exemples, sont à peu près les mêmes chez tous nos peuples. Ell
199
n de plus fort, pour nous unir, que cette passion
de
rester différents, indissolublement liée pour nous à la pratique des
200
dre : il nous faut combiner nos ressources. Faute
de
former à temps cette libre union, nous serons unifiés par la force, m
201
européenne consistera donc non point à fabriquer
de
l’Européen moyen, mais bien à réveiller en chacun de nous, tels que n
202
l’Européen moyen, mais bien à réveiller en chacun
de
nous, tels que nous sommes, la conscience de nos libertés ; puis à vo
203
acun de nous, tels que nous sommes, la conscience
de
nos libertés ; puis à vouloir le moyen de les sauver. L’éducation eur
204
science de nos libertés ; puis à vouloir le moyen
de
les sauver. L’éducation européenne devra montrer que nos libertés dép
205
devra montrer que nos libertés dépendent en fait
de
notre droit de différer, sans lequel il n’est point de dialogue créat
206
que nos libertés dépendent en fait de notre droit
de
différer, sans lequel il n’est point de dialogue créateur. Et que c’e
207
tre droit de différer, sans lequel il n’est point
de
dialogue créateur. Et que c’est cela qui fait la valeur de l’Europe.
208
ue créateur. Et que c’est cela qui fait la valeur
de
l’Europe. Et que c’est cela précisément qui est menacé. Et qu’il n’es
209
a précisément qui est menacé. Et qu’il n’est plus
d’
espoir que dans l’union, — celle qui veut surmonter nos divisions pour
210
pour sauver nos diversités. b. Rougemont Denis
de
, « Comment fabriquer un Européen ? », Notre Europe, Strasbourg, mars
211
r un Européen ? », Notre Europe, Strasbourg, mars
1951,
p. 41-44.
212
Défense
de
nos libertés (octobre 1951)c d Si l’on passe en revue tous les arg
213
Défense de nos libertés (octobre
1951
)c d Si l’on passe en revue tous les arguments avancés depuis des s
214
ce milieu du xxe siècle, c’est moins le problème
de
la liberté qui nous importe, que son drame. De l’issue de ce drame dé
215
me de la liberté qui nous importe, que son drame.
De
l’issue de ce drame dépendent nos vies. Car si nous vivons aujourd’hu
216
berté qui nous importe, que son drame. De l’issue
de
ce drame dépendent nos vies. Car si nous vivons aujourd’hui dans l’an
217
s. Car si nous vivons aujourd’hui dans l’angoisse
d’
une nouvelle guerre mondiale, c’est parce que le monde est divisé en d
218
mondiale, c’est parce que le monde est divisé en
deux
partis, qui ne se définissent clairement que par rapport à la liberté
219
inissent clairement que par rapport à la liberté.
D’
un côté, les peuples qui se disent libres et entendent le rester ; de
220
les qui se disent libres et entendent le rester ;
de
l’autre, ceux qui vivent en régime totalitaire, et qui n’ont pas nos
221
qu’ils jugent trompeuses. Tous les autres motifs
de
conflit que l’on pourrait énumérer sont discutables et peu clairs. Le
222
ivances, d’ailleurs également réparties entre les
deux
camps. Les conceptions de la justice sociale elle-même ne suffisent p
223
t réparties entre les deux camps. Les conceptions
de
la justice sociale elle-même ne suffisent pas pour distinguer netteme
224
er nettement les adversaires : il serait possible
de
discuter longtemps pour savoir de quel côté du rideau de fer il y a l
225
serait possible de discuter longtemps pour savoir
de
quel côté du rideau de fer il y a le plus de justice sociale, théoriq
226
uter longtemps pour savoir de quel côté du rideau
de
fer il y a le plus de justice sociale, théorique ou pratique, promise
227
voir de quel côté du rideau de fer il y a le plus
de
justice sociale, théorique ou pratique, promise ou réalisée. Par cont
228
ou réalisée. Par contre, ce qu’il est impossible
de
discuter, ce qui est évident aux yeux de tous, des deux côtés, c’est
229
iscuter, ce qui est évident aux yeux de tous, des
deux
côtés, c’est que nous voulons la liberté, et que les autres veulent l
230
concrètes que nous avons ? Si nous voulons gagner
d’
avance — avant une guerre, qui serait perdue par tous — cette lutte où
231
tte où nous sommes engagés, la première condition
de
succès, c’est de savoir ce que nous défendons. Quelles sont nos liber
232
s engagés, la première condition de succès, c’est
de
savoir ce que nous défendons. Quelles sont nos libertés ? Sont-elles
233
s questions. C’est là que gît la force principale
de
l’autre camp. Quand on nous dit : « Qu’avez-vous à opposer à l’idéolo
234
désespérément une réplique, ou que nous essayons
d’
improviser quelque « mystique » nouvelle, nous sommes déjà battus. Pou
235
alors à coup sûr, il faut que nous soyons en état
de
répondre instantanément, avec une conviction totale. Il faut que nous
236
dions ceci : « Nous n’avons pas besoin comme vous
d’
une mystique qui masque les faits, nous n’avons pas besoin d’une idéol
237
que qui masque les faits, nous n’avons pas besoin
d’
une idéologie, car nous avons nos libertés. Et ce n’est pas notre pass
238
u’il a conquises, et qui sont la réalité présente
de
nos vies, bien plus : qui sont le gage d’un avenir meilleur ! » Ce la
239
résente de nos vies, bien plus : qui sont le gage
d’
un avenir meilleur ! » Ce langage seul peut nous sauver. Encore faut-i
240
sauver. Encore faut-il que nous soyons en mesure
de
le tenir sans équivoque, et en pleine connaissance de cause. Le temps
241
absence par des slogans. Nous n’avons nul besoin
d’
une mystique « aussi puissante » ou « plus puissante » que les leurs.
242
avons plus que nous méritons. Je crois à la vertu
de
la prise de conscience : c’est d’une part le début de la guérison, qu
243
a prise de conscience : c’est d’une part le début
de
la guérison, quand le mal est d’ordre psychique ; c’est d’autre part
244
ne part le début de la guérison, quand le mal est
d’
ordre psychique ; c’est d’autre part une source de confiance en soi, q
245
d’ordre psychique ; c’est d’autre part une source
de
confiance en soi, quand les faits objectifs sont meilleurs que notre
246
pensait. Rendus conscients des forces véritables
de
l’Europe et de l’Occident, nous serons en mesure, aussitôt, de renver
247
s conscients des forces véritables de l’Europe et
de
l’Occident, nous serons en mesure, aussitôt, de renverser l’absurde s
248
t de l’Occident, nous serons en mesure, aussitôt,
de
renverser l’absurde situation volontairement créée par les mystiques
249
irement créée par les mystiques adverses. Au défi
de
la propagande, répondons tranquillement par les faits. Nous pouvons p
250
bertés. Nous pouvons aussi les sauver en décidant
de
les répandre. Si nous voyons les faits, et savons les faire voir, nou
251
s l’initiative. C’est l’autre camp qui sera forcé
de
se mettre sur la défensive, contre le rayonnement de nos vraies liber
252
se mettre sur la défensive, contre le rayonnement
de
nos vraies libertés. Or le meilleur moyen de les faire rayonner, c’es
253
ment de nos vraies libertés. Or le meilleur moyen
de
les faire rayonner, c’est de les faire passer du plan des faits à cel
254
Or le meilleur moyen de les faire rayonner, c’est
de
les faire passer du plan des faits à celui de nos consciences et de n
255
est de les faire passer du plan des faits à celui
de
nos consciences et de nos volontés ; c’est d’appeler toutes nos force
256
r du plan des faits à celui de nos consciences et
de
nos volontés ; c’est d’appeler toutes nos forces éparses à se fédérer
257
lui de nos consciences et de nos volontés ; c’est
d’
appeler toutes nos forces éparses à se fédérer solidement, non point à
258
es sont nos chances ? Je dirai qu’elles dépendent
de
chacun de nous, — beaucoup plus que d’un général américain. Chaque pe
259
s chances ? Je dirai qu’elles dépendent de chacun
de
nous, — beaucoup plus que d’un général américain. Chaque personne fai
260
dépendent de chacun de nous, — beaucoup plus que
d’
un général américain. Chaque personne fait obstacle à la fatalité. Lév
261
ittons la lutte. Léviathan, c’est la somme exacte
de
nos petites démissions personnelles. Et c’est pourquoi je conclurai,
262
us, par ce delenda Carthago que j’opposais il y a
quinze
ans à une autre « mystique millénaire », mais déjà morte : — Là où l’
263
ne sera jamais totalitaire. c. Rougemont Denis
de
, « Défense de nos libertés », Contacts littéraires et sociaux, Paris,
264
totalitaire. c. Rougemont Denis de, « Défense
de
nos libertés », Contacts littéraires et sociaux, Paris, octobre 1951,
265
, Contacts littéraires et sociaux, Paris, octobre
1951,
p. 1 et 6. d. Présenté par la note suivante : « Nous remercions le C
266
téraires et sociaux, Paris, octobre 1951, p. 1 et
6.
d. Présenté par la note suivante : « Nous remercions le Congrès pour
267
te : « Nous remercions le Congrès pour la liberté
de
la culture d’avoir bien voulu nous autoriser à reproduire un extrait
268
mercions le Congrès pour la liberté de la culture
d’
avoir bien voulu nous autoriser à reproduire un extrait de la brochure
269
bien voulu nous autoriser à reproduire un extrait
de
la brochure de Denis de Rougemont, Les Libertés que nous pouvons per
270
autoriser à reproduire un extrait de la brochure
de
Denis de Rougemont, Les Libertés que nous pouvons perdre , dont nous
271
Robert de Traz, l’Européen (
1952
)e Peu d’hommes ont vu plus juste, entre-deux-guerres. Peu d’écriva
272
Robert de Traz, l’Européen (1952)e Peu
d’
hommes ont vu plus juste, entre-deux-guerres. Peu d’écrivains ont si b
273
hommes ont vu plus juste, entre-deux-guerres. Peu
d’
écrivains ont si bien voyagé, et mieux dit ce qu’ils avaient vu. La pl
274
de leurs découvertes ; ils rapportaient des états
d’
âme ; mais lui, de ses Dépaysements f, nous rapportait l’Europe vivant
275
es ; ils rapportaient des états d’âme ; mais lui,
de
ses Dépaysements f, nous rapportait l’Europe vivante, interrogée sur
276
raliste : il la définissait comme « une puissance
d’
adhésion, qui tantôt s’identifie à son objet, et tantôt, rétablissant
277
variétés mêmes, qu’on nomme Europe. « Si le désir
de
comprendre ce qui se passe vous possède, comment n’irait-on pas, en é
278
les abstractions, questionner sur place l’Europe
d’
aujourd’hui, cette Europe révolutionnaire et nationaliste, violente, i
279
aliste, violente, ignorante, à moitié démolie, et
d’
où montent, comme les fumées d’un sol volcanique, la haine, la douleur
280
moitié démolie, et d’où montent, comme les fumées
d’
un sol volcanique, la haine, la douleur et l’espérance. Europe, vaste
281
ont l’essentiel est dans les âmes. » Ses tableaux
de
l’Allemagne, dès 1923, dessinent en creux ce qui sera le lit de l’hit
282
dans les âmes. » Ses tableaux de l’Allemagne, dès
1923,
dessinent en creux ce qui sera le lit de l’hitlérisme, un peu plus ta
283
, dès 1923, dessinent en creux ce qui sera le lit
de
l’hitlérisme, un peu plus tard : il a senti l’appel aux passions coll
284
’appel aux passions collectives, aux philosophies
de
combat, et qu’il ne fallait pas laisser ce peuple « dans les ténèbres
285
péenne ». Il a, l’un des premiers, ravivé l’idéal
de
cette communauté indispensable au monde, souligné sa nécessité, défin
286
ggéré sa structure fédérale. Dans tous ses livres
de
voyages, d’analyse morale ou d’histoire — mais nulle part mieux que d
287
ucture fédérale. Dans tous ses livres de voyages,
d’
analyse morale ou d’histoire — mais nulle part mieux que dans L’Esprit
288
s tous ses livres de voyages, d’analyse morale ou
d’
histoire — mais nulle part mieux que dans L’Esprit de Genève. Je viens
289
istoire — mais nulle part mieux que dans L’Esprit
de
Genève. Je viens de relire cet ouvrage, paru en 1929 : c’est un class
290
e Genève. Je viens de relire cet ouvrage, paru en
1929
: c’est un classique. Seuls quelques chapitres médians, qui décrivent
291
décrivent (et critiquent d’ailleurs) les méthodes
de
la SDN, peuvent nous paraître hors de saison, s’il est vrai que le sp
292
unies réduit à peu, sinon à rien, les espoirs que
de
Traz se faisait une vertu et même une raison d’entretenir, malgré tou
293
e de Traz se faisait une vertu et même une raison
d’
entretenir, malgré toutes ses méfiances et toute la précision d’un reg
294
malgré toutes ses méfiances et toute la précision
d’
un regard souvent railleur ou amusé. Mais l’ouverture et la longue con
295
plus justes, et peu de plus actuels dans la durée
de
nos problèmes fondamentaux. On y reviendra, comme on est revenu à L’E
296
x. On y reviendra, comme on est revenu à L’Esprit
de
conquête de Benjamin Constant, malgré le style parfois pompeux et app
297
endra, comme on est revenu à L’Esprit de conquête
de
Benjamin Constant, malgré le style parfois pompeux et apprêté de cet
298
stant, malgré le style parfois pompeux et apprêté
de
cet opuscule, quand de Traz reste vif, naturel et concis. C’est dans
299
parfois pompeux et apprêté de cet opuscule, quand
de
Traz reste vif, naturel et concis. C’est dans le fédéralisme qu’il vo
300
s. C’est dans le fédéralisme qu’il voit « la base
de
l’internationale moderne ». C’est de la nécessité, plutôt que d’une m
301
it « la base de l’internationale moderne ». C’est
de
la nécessité, plutôt que d’une mystique, qu’il attend « la refonte de
302
nale moderne ». C’est de la nécessité, plutôt que
d’
une mystique, qu’il attend « la refonte de l’Europe ». C’est par la ci
303
tôt que d’une mystique, qu’il attend « la refonte
de
l’Europe ». C’est par la civilisation « grecque et chrétienne — et Ro
304
rmes essentiels » que l’Europe est devenue patrie
de
la personne. Et c’est enfin en s’opposant non seulement « aux États-U
305
s’opposant non seulement « aux États-Unis, tentés
de
la soumettre » et à la Russie « dont le système politique comporte un
306
dans cet essai final, animé par un long mouvement
d’
éloquence lucide et sereine, qui ne porte encore mieux sur notre temps
307
porte encore mieux sur notre temps que sur celui
de
sa naissance — 1929, je le répète. « Petite Europe, toute seule dans
308
x sur notre temps que sur celui de sa naissance —
1929,
je le répète. « Petite Europe, toute seule dans un monde en tumulte,
309
lités intérieures sont archaïques » et qu’au-delà
de
ses frontières resserrées, des civilisations rajeunies vont se dresse
310
le pas nous mettre debout ? Avons-nous donc cessé
d’
être des mâles, qui formulent et dirigent, et, dans notre détresse com
311
me nègre n’ont-ils pas assez duré, avec leur goût
de
veulerie et de reniement ? » Et je crois entendre de Traz ajouter sur
312
ils pas assez duré, avec leur goût de veulerie et
de
reniement ? » Et je crois entendre de Traz ajouter sur un ton plus en
313
veulerie et de reniement ? » Et je crois entendre
de
Traz ajouter sur un ton plus encore convaincu qu’indigné : « Tout de
314
Héritiers magnifiquement privilégiés, les hommes
d’
Occident n’ont aucun motif de déserter leur propre cause. Qu’ils se ra
315
vilégiés, les hommes d’Occident n’ont aucun motif
de
déserter leur propre cause. Qu’ils se rapprochent donc pour mieux en
316
er. Qu’ils fassent, avec sang-froid, l’inventaire
de
leur patrimoine commun. La civilisation européenne est le produit d’u
317
commun. La civilisation européenne est le produit
d’
une collaboration séculaire et l’on ne saurait en supprimer l’apport d
318
éculaire et l’on ne saurait en supprimer l’apport
d’
aucun peuple sans la défigurer et l’affaiblir. Or notre génie d’invent
319
sans la défigurer et l’affaiblir. Or notre génie
d’
invention est intact. Nos méthodes critiques doivent à leurs principes
320
éthodes critiques doivent à leurs principes mêmes
de
pouvoir toujours s’adapter aux circonstances imprévues. Une égale pas
321
er aux circonstances imprévues. Une égale passion
de
l’effort nous anime encore, de l’effort qui conquiert, qui utilise, e
322
Une égale passion de l’effort nous anime encore,
de
l’effort qui conquiert, qui utilise, et surtout qui transfigure. Car
323
possibilité réside peut-être dans notre capacité
de
renouvellement. Je dirai mieux : notre capacité de résurrection. À fo
324
e renouvellement. Je dirai mieux : notre capacité
de
résurrection. À force d’imagination et de courage, nos rêves ne se pe
325
i mieux : notre capacité de résurrection. À force
d’
imagination et de courage, nos rêves ne se perdent pas dans une extase
326
apacité de résurrection. À force d’imagination et
de
courage, nos rêves ne se perdent pas dans une extase somnolente : ils
327
du libéralisme viril : « Est-ce rêver encore que
de
conseiller à l’Europe, pour se redresser, pour imposer silence à ses
328
edresser, pour imposer silence à ses détracteurs,
de
se reconnaître une mission nouvelle ? En affirmant son unité conquise
329
es dangers du dedans, elle aurait conclu un pacte
d’
alliance entre ses fils : ce pacte, elle le proposerait ensuite à l’un
330
tur, elle les désarmerait en harmonisant non plus
de
petits États que divisent quelques collines, mais des continents que
331
ne pas le dire ici ? Cette relecture avive en moi
d’
amers regrets. Je voudrais écrire à de Traz sur toutes ces choses, ce
332
vive en moi d’amers regrets. Je voudrais écrire à
de
Traz sur toutes ces choses, ce soir : il est trop tard. Il m’était en
333
dès mon adolescence, n’a pu me le faire concevoir
de
son vivant. Dans le recueil récemment publié de ses chroniques2, j’e
334
de son vivant. Dans le recueil récemment publié
de
ses chroniques2, j’en trouve quelques-unes sur l’Europe : sur nos con
335
ouve quelques-unes sur l’Europe : sur nos congrès
de
La Haye et de Bruxelles, sur l’idée de culture en Europe. Il suit le
336
unes sur l’Europe : sur nos congrès de La Haye et
de
Bruxelles, sur l’idée de culture en Europe. Il suit le Mouvement euro
337
os congrès de La Haye et de Bruxelles, sur l’idée
de
culture en Europe. Il suit le Mouvement européen de l’extérieur, d’un
338
culture en Europe. Il suit le Mouvement européen
de
l’extérieur, d’un œil amical et critique. Pourquoi ce précurseur n’a-
339
pe. Il suit le Mouvement européen de l’extérieur,
d’
un œil amical et critique. Pourquoi ce précurseur n’a-t-il pas joint l
340
la lucidité. « Est-ce rêver, se demandait-il, que
de
conseiller à l’Europe… de se reconnaître une mission ? » Non, ce n’ét
341
r, se demandait-il, que de conseiller à l’Europe…
de
se reconnaître une mission ? » Non, ce n’était pas rêver, il le savai
342
pas rêver, il le savait, mais ce n’est plus assez
de
conseiller. Ce convaincu n’était pas de l’espèce des militants d’une
343
lus assez de conseiller. Ce convaincu n’était pas
de
l’espèce des militants d’une politique. Ce moraliste voulait d’abord
344
e convaincu n’était pas de l’espèce des militants
d’
une politique. Ce moraliste voulait d’abord comprendre : pudeur ou foi
345
: pudeur ou foi dans la seule force du bon droit,
de
la clairvoyance alertée ? Sa vocation était tout attentive ; sa curio
346
s lentement dépasser les baladins et les bruyants
de
son époque, et son beau profil prend sa place parmi les effigies d’un
347
son beau profil prend sa place parmi les effigies
d’
une Europe renaissante. 2. Témoin, p. 119-129. e. Rougemont Denis
348
ce parmi les effigies d’une Europe renaissante.
2.
Témoin, p. 119-129. e. Rougemont Denis de, « Robert de Traz, l’Eur
349
e. 2. Témoin, p. 119-129. e. Rougemont Denis
de
, « Robert de Traz, l’Européen », Revue de Suisse, Genève, 1952, p. 3-
350
t Denis de, « Robert de Traz, l’Européen », Revue
de
Suisse, Genève, 1952, p. 3-5. f. Allusion au Dépaysement oriental de
351
t de Traz, l’Européen », Revue de Suisse, Genève,
1952,
p. 3-5. f. Allusion au Dépaysement oriental de Robert de Traz, paru
352
952, p. 3-5. f. Allusion au Dépaysement oriental
de
Robert de Traz, paru en 1926, et dont Rougemont a rendu compte dans l
353
u Dépaysement oriental de Robert de Traz, paru en
1926,
et dont Rougemont a rendu compte dans le Journal de Genève .
354
et dont Rougemont a rendu compte dans le Journal
de
Genève .
355
Prototype T.E.L. (janvier
1952
)g Entouré de soins extravagants, soumis à des épreuves exceptionne
356
Prototype T.E.L. (janvier 1952)g Entouré
de
soins extravagants, soumis à des épreuves exceptionnelles, étudié dan
357
es exceptionnelles, étudié dans le moindre détail
de
son comportement souvent imprévisible, le prototype peut se révéler i
358
ototype peut se révéler impropre à la fabrication
de
série : son intérêt n’en est pas amoindri. Car il fournit une connais
359
moindri. Car il fournit une connaissance nouvelle
de
certaines limites de vitesse, de résistance, ou de maniabilité. Que s
360
it une connaissance nouvelle de certaines limites
de
vitesse, de résistance, ou de maniabilité. Que se passe-t-il quand on
361
issance nouvelle de certaines limites de vitesse,
de
résistance, ou de maniabilité. Que se passe-t-il quand on les atteint
362
e certaines limites de vitesse, de résistance, ou
de
maniabilité. Que se passe-t-il quand on les atteint ? Jusqu’où peut-o
363
x construire des appareils utiles. Je me proposer
d’
envisager Lawrence comme prototype d’une race d’écrivains dont le sièc
364
me proposer d’envisager Lawrence comme prototype
d’
une race d’écrivains dont le siècle déjà nous donne plusieurs exemples
365
r d’envisager Lawrence comme prototype d’une race
d’
écrivains dont le siècle déjà nous donne plusieurs exemples, souvent m
366
re, et nous donne seul la possibilité et le désir
de
parler de lui. Bien d’autres ont vécu des aventures semblables, mais
367
s donne seul la possibilité et le désir de parler
de
lui. Bien d’autres ont vécu des aventures semblables, mais lui « sava
368
ain de faire, tandis que les autres travaillaient
d’
instinct3 ». Les Sept Piliers de la Sagesse, et toutes ses lettres, té
369
s que les autres travaillaient d’instinct3 ». Les
Sept
Piliers de la Sagesse, et toutes ses lettres, témoignent d’une volont
370
res travaillaient d’instinct3 ». Les Sept Piliers
de
la Sagesse, et toutes ses lettres, témoignent d’une volonté de consci
371
de la Sagesse, et toutes ses lettres, témoignent
d’
une volonté de conscience et d’expression qui justifie le point de dép
372
, et toutes ses lettres, témoignent d’une volonté
de
conscience et d’expression qui justifie le point de départ de cet ess
373
ettres, témoignent d’une volonté de conscience et
d’
expression qui justifie le point de départ de cet essai. Le héros-éc
374
conscience et d’expression qui justifie le point
de
départ de cet essai. Le héros-écrivain du xxe siècle Pour disti
375
e et d’expression qui justifie le point de départ
de
cet essai. Le héros-écrivain du xxe siècle Pour distinguer la s
376
Pour distinguer la singularité exemplaire du cas
de
Lawrence, ce n’est pas à la seule analyse de l’œuvre en soi qu’il fau
377
cas de Lawrence, ce n’est pas à la seule analyse
de
l’œuvre en soi qu’il faut recourir, mais d’abord il convient de cherc
378
soi qu’il faut recourir, mais d’abord il convient
de
chercher le rôle qu’a joué cette œuvre dans le conflit entre l’auteur
379
le nous paraît intégré naturellement à la société
de
son temps. L’écrivain du xviiie siècle ne l’est guère moins, bien qu
380
mette en question, ou raille agressivement, mais
de
l’intérieur où il est installé, les principes de l’ordre existant (Ro
381
de l’intérieur où il est installé, les principes
de
l’ordre existant (Rousseau, à peu près seul, s’en désolidarise). Aprè
382
zsche en sont les types — exilés dans la négation
d’
un ordre qui les cerne sans les incorporer, exilés dans le nihilisme,
383
isme, exilés dans la transcendance. Il n’y a plus
de
commune mesure entre celui qui pense et ceux qui agissent ; il n’y a
384
i pense et ceux qui agissent ; il n’y a donc plus
de
communauté réelle. Et c’est pourquoi le xxe siècle verra tant de nom
385
pourquoi le xxe siècle verra tant de nomades et
de
vrais émigrés. Les uns voyagent vers des climats et des coutumes où l
386
nté, soit du moins compensé par quelque sentiment
de
participation choisie (Rilke à travers l’Europe ; Gide en Afrique ; D
387
sie (Rilke à travers l’Europe ; Gide en Afrique ;
D.
H. Lawrence en Italie et chez les Indiens du Mexique ; Bernanos à Maj
388
ns américains). D’autres s’exilent dans un métier
d’
errants (Joseph Conrad, Claudel et Saint-John Perse). Et beaucoup se s
389
lés par le parti qui avait confisqué leur patrie (
de
Silone à Koestler, en passant par les Allemands, les Espagnols, les R
390
les Allemands, les Espagnols, les Russes et ceux
de
l’Est européen). Certains, enfin, parlent en quête d’une communauté à
391
’Est européen). Certains, enfin, parlent en quête
d’
une communauté à rejoindre où à recréer dans l’action, et là seulement
392
dans l’action à se réaliser, à mesurer le pouvoir
d’
un homme contre le monde et sur soi-même. Est-ce encore une compensati
393
ividualisme exaspéré, ou au contraire la décision
de
servir sans beaucoup d’illusions une cause dont la valeur importe moi
394
au contraire la décision de servir sans beaucoup
d’
illusions une cause dont la valeur importe moins que les épreuves qu’e
395
’elle impose. Nous voici tout près de Lawrence et
d’
une classe d’écrivains qui restera sans doute la plus typique de notre
396
Nous voici tout près de Lawrence et d’une classe
d’
écrivains qui restera sans doute la plus typique de notre siècle. Ils
397
’écrivains qui restera sans doute la plus typique
de
notre siècle. Ils sont héros par autre chose que par leur œuvre : pa
398
re son efficacité particulière. Car l’action sert
de
gage aux mots, et dans ce sens technique ces hommes sont engagés : il
399
technique ces hommes sont engagés : ils ont payé
de
leur personne le prix d’une signification. Que ces héros soient les n
400
t engagés : ils ont payé de leur personne le prix
d’
une signification. Que ces héros soient les nomades, on vient d’en voi
401
ation. Que ces héros soient les nomades, on vient
d’
en voir la raison générale. La plupart courent leur aventure hors de c
402
hors de chez eux, sourdement irrités qu’ils sont
de
se sentir étrangers dans leur peuple. S’expatrier devient une mise au
403
ent entre leurs exigences intimes et l’insipidité
de
la vie défaite de leur cité. (Quelques-uns ont trouvé dans l’armée, e
404
igences intimes et l’insipidité de la vie défaite
de
leur cité. (Quelques-uns ont trouvé dans l’armée, et surtout, dans l’
405
ns l’armée, et surtout, dans l’aviation, le moyen
de
s’expatrier sans passer les frontières de leur pays. L’aviateur est t
406
e moyen de s’expatrier sans passer les frontières
de
leur pays. L’aviateur est toujours en instance de départ, et par là,
407
de leur pays. L’aviateur est toujours en instance
de
départ, et par là, séparé de l’existence quotidienne : « Premier poin
408
toujours en instance de départ, et par là, séparé
de
l’existence quotidienne : « Premier point : nous ne sommes pas liés a
409
alistes en Angleterre. À vrai dire, c’est un goût
de
la lutte contre la vie, avec des camarades donnés par le hasard, qui
410
ui les jette dans des entreprises où la technique
de
la conquête (même pacifique) se confond avec celle du complot. On les
411
onfond avec celle du complot. On les voit engagés
de
préférence dans des conquêtes hasardeuses, que les gouvernements sout
412
ais des coups de feu, et qui demandent bien moins
de
conviction politique que d’audace ou de discipline, de goût du sacrif
413
demandent bien moins de conviction politique que
d’
audace ou de discipline, de goût du sacrifice ou de volonté de puissan
414
ien moins de conviction politique que d’audace ou
de
discipline, de goût du sacrifice ou de volonté de puissance. Les exem
415
nviction politique que d’audace ou de discipline,
de
goût du sacrifice ou de volonté de puissance. Les exemples précis de
416
’audace ou de discipline, de goût du sacrifice ou
de
volonté de puissance. Les exemples précis de Jünger, d’Edschmid, de K
417
de discipline, de goût du sacrifice ou de volonté
de
puissance. Les exemples précis de Jünger, d’Edschmid, de Koestler, de
418
e ou de volonté de puissance. Les exemples précis
de
Jünger, d’Edschmid, de Koestler, de Malraux, dans leur première pério
419
onté de puissance. Les exemples précis de Jünger,
d’
Edschmid, de Koestler, de Malraux, dans leur première période ; mieux
420
sance. Les exemples précis de Jünger, d’Edschmid,
de
Koestler, de Malraux, dans leur première période ; mieux encore, de T
421
emples précis de Jünger, d’Edschmid, de Koestler,
de
Malraux, dans leur première période ; mieux encore, de T. E. Lawrence
422
lraux, dans leur première période ; mieux encore,
de
T. E. Lawrence, de Saint-Exupéry, de Hillary ; et même de Salomon et
423
emière période ; mieux encore, de T. E. Lawrence,
de
Saint-Exupéry, de Hillary ; et même de Salomon et Hemingway, viennent
424
ieux encore, de T. E. Lawrence, de Saint-Exupéry,
de
Hillary ; et même de Salomon et Hemingway, viennent à l’appui de ces
425
Lawrence, de Saint-Exupéry, de Hillary ; et même
de
Salomon et Hemingway, viennent à l’appui de ces remarques générales e
426
leur morale ou littéraire, par l’importance aussi
de
leur rôle historique et la sincérité de leurs convictions, tous ces h
427
nce aussi de leur rôle historique et la sincérité
de
leurs convictions, tous ces hommes sont, ou furent, des individualist
428
nt, ou furent, des individualistes à la recherche
d’
une action commune, action conduite à l’étranger, et dont les fins der
429
ins que l’expérience elle-même, moins que le fait
de
servir en soi, ou d’éprouver les limites de l’homme. Ces anarchistes
430
elle-même, moins que le fait de servir en soi, ou
d’
éprouver les limites de l’homme. Ces anarchistes engagés se reconnaiss
431
fait de servir en soi, ou d’éprouver les limites
de
l’homme. Ces anarchistes engagés se reconnaissent à un signe certain
432
souvent à grand péril, il y a toujours une marge
de
conscience. Et dans cette marge naît leur œuvre écrite. Souvent l’hom
433
tte marge naît leur œuvre écrite. Souvent l’homme
d’
un seul livre, sous des titres divers, peu d’entre eux sont des écriva
434
entre eux sont des écrivains nés, au sens courant
de
l’expression, qui suppose non seulement le don mais une certaine faci
435
, où l’exactitude est vitale, soit qu’il s’agisse
d’
un ordre à rédiger ou d’une opération technique. Ces scrupules à plier
436
tale, soit qu’il s’agisse d’un ordre à rédiger ou
d’
une opération technique. Ces scrupules à plier le sens précis au rythm
437
hme ou au jeu des syllabes peuvent gâter l’allure
d’
un texte, ils n’en ont cure. Les meilleurs se rattrapent sur un plan p
438
meilleurs se rattrapent sur un plan plus profond
d’
efficacité du langage : certaines recettes pour manier les esprits, et
439
es esprits, et surtout pour leur imposer un angle
de
vision déterminé — c’est tout le secret du commandement — leur sont c
440
nctives. Ce n’est pas seulement à leur réputation
d’
aventuriers, de révolutionnaires ou d’aviateur qu’est dû le prestige p
441
st pas seulement à leur réputation d’aventuriers,
de
révolutionnaires ou d’aviateur qu’est dû le prestige particulier de l
442
réputation d’aventuriers, de révolutionnaires ou
d’
aviateur qu’est dû le prestige particulier de leurs écrits, mais tout
443
s ou d’aviateur qu’est dû le prestige particulier
de
leurs écrits, mais tout autant à l’efficacité d’une syntaxe qui sait
444
de leurs écrits, mais tout autant à l’efficacité
d’
une syntaxe qui sait comment « saisir » (expression favorite de Saint-
445
qui sait comment « saisir » (expression favorite
de
Saint-Exupéry). Soulignons que ces écrits ne sont nullement pour eux
446
écrits ne sont nullement pour eux les substituts
de
l’action terminée ou provisoirement suspendue, mais plutôt les effort
447
s pour lui trouver un sens, et justifier l’auteur
de
l’avoir entreprise. Témoignages cependant ambigus : autobiographiques
448
s livrent peu de confidences. Ils n’avouent guère
d’
autre ambition que celle d’un serviteur de la cause collective, et ne
449
s. Ils n’avouent guère d’autre ambition que celle
d’
un serviteur de la cause collective, et ne donnent de l’individu qu’un
450
t guère d’autre ambition que celle d’un serviteur
de
la cause collective, et ne donnent de l’individu qu’un portrait simpl
451
n serviteur de la cause collective, et ne donnent
de
l’individu qu’un portrait simplifié et dûment stylisé. Nés d’un besoi
452
u qu’un portrait simplifié et dûment stylisé. Nés
d’
un besoin de s’expliquer, ils restent obscurs sur un point décisif : c
453
rait simplifié et dûment stylisé. Nés d’un besoin
de
s’expliquer, ils restent obscurs sur un point décisif : celui des fin
454
intimes, et l’on s’aperçoit que le problème, loin
d’
y recevoir la réponse la plus attendue, n’y apparaît que plus fondamen
455
apparaît que plus fondamental : c’est pour tenter
de
le résoudre que l’homme écrit, et que parfois il retourne à l’action
456
ous laisse enfin n’est qu’une question, l’exemple
d’
une « passion » dont l’enjeu n’est pas clair. Et certes, les péripétie
457
’enjeu n’est pas clair. Et certes, les péripéties
d’
une telle passion peuvent bien suffire à l’intérêt de l’œuvre. Elles f
458
ne telle passion peuvent bien suffire à l’intérêt
de
l’œuvre. Elles font pâlir presque toutes nos fictions. Elles nous for
459
u’ici, enfin, un homme nous parle avec l’autorité
d’
une expérience virile poussée jusqu’aux extrêmes, dans la rigueur mora
460
chez ceux qui s’y exposent ? Névrose, ou volonté
de
sainteté « laïque » ? Par quels buts souverains les justifier ? Si l’
461
, nous demandons alors : qui va revêtir cet homme
d’
une vocation plus vraie que les causes qu’il a servies et qui se révèl
462
lent toujours, au bout du compte, décevantes ?
II
. T.E.L. et Saint-Exupéry « L’ambition est un motif méprisable ; l’
463
« L’ambition est un motif méprisable ; l’amour
de
la liberté une illusion ; le patriotisme, difficile quand ceux — comm
464
s Anglais ; quant à l’honneur, il est plus facile
de
mourir pour lui que d’en vivre ; mieux vaut mourir que de conduire le
465
onneur, il est plus facile de mourir pour lui que
d’
en vivre ; mieux vaut mourir que de conduire les autres, dans l’intrig
466
r pour lui que d’en vivre ; mieux vaut mourir que
de
conduire les autres, dans l’intrigue et la cruauté, vers la désillusi
467
t en ces termes que la plus sobre des biographies
de
Lawrence4 décrit l’état d’esprit du héros de 30 ans, à la fin de ses
468
hies de Lawrence4 décrit l’état d’esprit du héros
de
30 ans, à la fin de ses campagnes d’Arabie, avant le grand échec de s
469
s de Lawrence4 décrit l’état d’esprit du héros de
30
ans, à la fin de ses campagnes d’Arabie, avant le grand échec de ses
470
crit l’état d’esprit du héros de 30 ans, à la fin
de
ses campagnes d’Arabie, avant le grand échec de ses espoirs à la Conf
471
rit du héros de 30 ans, à la fin de ses campagnes
d’
Arabie, avant le grand échec de ses espoirs à la Conférence de Versail
472
n de ses campagnes d’Arabie, avant le grand échec
de
ses espoirs à la Conférence de Versailles. Mais comment ne pas penser
473
ant le grand échec de ses espoirs à la Conférence
de
Versailles. Mais comment ne pas penser à Saint-Exupéry ? Le parallèle
474
à Saint-Exupéry ? Le parallèle s’impose entre ces
deux
figures. Qu’elles aient été si différentes à tant d’égards, si contra
475
figures. Qu’elles aient été si différentes à tant
d’
égards, si contrastées dans leurs données individuelles, ne fait qu’ac
476
ées individuelles, ne fait qu’accentuer l’intérêt
d’
un rapprochement entre les deux personnes. Relevons d’abord les différ
477
’accentuer l’intérêt d’un rapprochement entre les
deux
personnes. Relevons d’abord les différences afin de mieux déterminer
478
s différences afin de mieux déterminer la formule
d’
homme qui, malgré tout ou presque tout, leur est commune. L’un Anglais
479
nglais et l’autre Français, et bien qu’ayant tous
deux
vécu leur aventure à l’étranger, parfaits représentants de leur natio
480
eur aventure à l’étranger, parfaits représentants
de
leur nation, dans ce qu’elle a justement de plus différent de l’autre
481
on, dans ce qu’elle a justement de plus différent
de
l’autre. L’un protestant et l’autre catholique, et bien que tous les
482
stant et l’autre catholique, et bien que tous les
deux
éloignés de leur foi, irrévocablement marqués par deux morales aussi
483
re catholique, et bien que tous les deux éloignés
de
leur foi, irrévocablement marqués par deux morales aussi extrêmes dan
484
éloignés de leur foi, irrévocablement marqués par
deux
morales aussi extrêmes dans leur domaine qu’hostiles entre elles : la
485
la femme est le repos du guerrier. L’un tourmenté
de
scrupules dans l’action et plein d’humour quand il parlait de son œuv
486
’un tourmenté de scrupules dans l’action et plein
d’
humour quand il parlait de son œuvre écrite, l’autre contant ses avent
487
dans l’action et plein d’humour quand il parlait
de
son œuvre écrite, l’autre contant ses aventures avec brio et insistan
488
ant pour lire à ses amis les versions successives
de
ses livres en train. L’un réservé jusqu’au silence total, l’autre tou
489
jusqu’au silence total, l’autre toujours en quête
d’
une audience amicale. L’un petit et durci, l’autre grand et sérieux. O
490
’autre grand et sérieux. On imagine difficilement
deux
hommes aux caractères mieux contrastés. Tout ce qui chez l’un et l’au
491
enant leur personne, j’entends ce qu’ils ont fait
de
ces données natives, et les tensions qu’ils ont instituées entre ce q
492
leur action, et leur drame. Une ultime structure
de
destinée semble gouverner ces deux vies. Leur vocation s’est marquée
493
ultime structure de destinée semble gouverner ces
deux
vies. Leur vocation s’est marquée dès l’enfance et affirmée pendant l
494
s l’enfance et affirmée pendant l’adolescence : à
20
ans les voilà partis, l’un pour des fouilles dans les pays arabes qu’
495
sion ; l’autre sur ces avions qu’il essayait déjà
de
manœuvrer en cachette à 16 ans. Les deux intellectuels qui resteront
496
ns qu’il essayait déjà de manœuvrer en cachette à
16
ans. Les deux intellectuels qui resteront toujours si furieux de l’av
497
ayait déjà de manœuvrer en cachette à 16 ans. Les
deux
intellectuels qui resteront toujours si furieux de l’avant-garde litt
498
x intellectuels qui resteront toujours si furieux
de
l’avant-garde littéraire, l’un tourné vers l’histoire et l’autre vers
499
’histoire et l’autre vers les sciences, mais tous
deux
inventeurs de machines, vont choisir des métiers où la technique s’al
500
utre vers les sciences, mais tous deux inventeurs
de
machines, vont choisir des métiers où la technique s’allie à l’art du
501
désert avec les mêmes Arabes. Soit qu’il s’agisse
de
négocier avec ceux-ci pour libérer un camarade pris en otage, ou de l
502
eux-ci pour libérer un camarade pris en otage, ou
de
les inciter à la révolte, dans les deux cas il faut parler leur langu
503
n otage, ou de les inciter à la révolte, dans les
deux
cas il faut parler leur langue, pénétrer leurs modes de penser, s’ass
504
il faut parler leur langue, pénétrer leurs modes
de
penser, s’assimiler les procédés subtils qui fondent le prestige de l
505
iler les procédés subtils qui fondent le prestige
de
leurs chefs. De ce commerce prolongé et de la coutume du désert, tous
506
s subtils qui fondent le prestige de leurs chefs.
De
ce commerce prolongé et de la coutume du désert, tous les deux garder
507
estige de leurs chefs. De ce commerce prolongé et
de
la coutume du désert, tous les deux garderont le secret d’influencer
508
rce prolongé et de la coutume du désert, tous les
deux
garderont le secret d’influencer et de manier les hommes par des moye
509
tume du désert, tous les deux garderont le secret
d’
influencer et de manier les hommes par des moyens qui ne sont pas ceux
510
tous les deux garderont le secret d’influencer et
de
manier les hommes par des moyens qui ne sont pas ceux du règlement, e
511
t qui ne doivent rien aux titres officiels : goût
de
l’autorité, non du pouvoir. (Lawrence, plus tard, se le reprochera, m
512
le reprochera, mais non Saint-Exupéry.) Tous les
deux
se moquent des grades, qu’on leur en donne ou non, et sont perpétuell
513
en donne ou non, et sont perpétuellement sur pied
de
fronde. Leur mépris orgueilleux pour les fonctions sans risques de ce
514
épris orgueilleux pour les fonctions sans risques
de
ceux dont ils reçoivent les ordres, donne la mesure de leur sens du s
515
ux dont ils reçoivent les ordres, donne la mesure
de
leur sens du service : ils se soumettent, non pas au fonctionnaire, m
516
ire, mais à la vertu mystérieuse qu’ils attendent
de
la règle, même injuste. Au reste, leurs plus grandes actions furent a
517
mpétences supérieures. Parfois cependant, cet art
de
persuader (qu’ils tiennent en partie des Arabes) leur vaut des appuis
518
, durement gagnés, et que souvent leurs camarades
d’
équipe sont restés les seuls à connaître. Ils se retournent vers le mo
519
rnent vers le monde des autres, et c’est le début
de
l’écœurement. Signe objectif d’une mésentente profonde : ils entrent
520
et c’est le début de l’écœurement. Signe objectif
d’
une mésentente profonde : ils entrent en conflit avec la politique des
521
profonds, et les mieux motivés, quant à la valeur
de
l’action par laquelle ils se sont illustrés. (Pour le courage physiqu
522
n’en parlent jamais qu’avec un scepticisme dénué
de
coquetterie.) Le seul désir bien déclaré est désormais de se retirer
523
tterie.) Le seul désir bien déclaré est désormais
de
se retirer dans une maison de campagne, avec le livre qu’ils portent
524
toujours le même, et qui doit être un commentaire
de
leur activité, visant à la sauver de l’anecdote historique pour en ex
525
commentaire de leur activité, visant à la sauver
de
l’anecdote historique pour en extraire une sagesse commune, et pour é
526
nument « durable » ou « intangible » à la mémoire
d’
un effort collectif. Ils n’écrivent pas plus facilement l’un que l’aut
527
e vantent parfois, mais plus souvent se plaignent
de
leur exigence excessive et de leurs ratures infinies. C’est qu’ils se
528
ouvent se plaignent de leur exigence excessive et
de
leurs ratures infinies. C’est qu’ils se refusent aux entraînements de
529
inies. C’est qu’ils se refusent aux entraînements
de
l’idéologie ou du lyrisme, s’appliquent aux descriptions exactes, et
530
mots éprouvés… C’est à ce stade que naissent Les
Sept
Piliers de la Sagesse et Terre des Hommes. L’aventure paraît consommé
531
s… C’est à ce stade que naissent Les Sept Piliers
de
la Sagesse et Terre des Hommes. L’aventure paraît consommée. Et cepen
532
e se noue à ce moment précis, devant la tentation
de
la « vie normale » d’un écrivain chargé des honneurs du héros. Au lie
533
précis, devant la tentation de la « vie normale »
d’
un écrivain chargé des honneurs du héros. Au lieu de se retirer dans u
534
ieu de se retirer dans une maison de campagne, ou
d’
accepter quelque fonction publique, ils reprennent subitement du servi
535
isons variables et même contradictoires. Dans les
deux
cas, et nonobstant les circonstances historiques différentes, il para
536
nces historiques différentes, il paraît difficile
de
distinguer leurs vrais motifs, parmi tant de prétextes qu’ils allègue
537
tant de prétextes qu’ils allèguent. S’agirait-il
d’
une fuite devant leur « personnage », ou d’une réelle passion de servi
538
ait-il d’une fuite devant leur « personnage », ou
d’
une réelle passion de servir ? Ou serait-ce simplement qu’ils n’ont pa
539
vant leur « personnage », ou d’une réelle passion
de
servir ? Ou serait-ce simplement qu’ils n’ont pas le choix, et que la
540
s parce que j’étais fauché ? », écrit Lawrence en
1923.
L’argent n’est ici qu’un symbole : il pouvait en gagner autrement.) I
541
es (ces « licornes » comme disait Lawrence), font
de
leur mieux pour les décourager ; mais eux s’obstinent, bien que plus
542
gnes précédentes, bien que hantés par leur besoin
d’
écrire, et bien qu’ils ne puissent ignorer qu’à des postes moins anony
543
nt plus difficiles à remplacer. Inextricable nœud
d’
orgueil et de masochisme, de loyauté modeste et de fierté blessée, de
544
ciles à remplacer. Inextricable nœud d’orgueil et
de
masochisme, de loyauté modeste et de fierté blessée, de grève perlée
545
er. Inextricable nœud d’orgueil et de masochisme,
de
loyauté modeste et de fierté blessée, de grève perlée contre la socié
546
d’orgueil et de masochisme, de loyauté modeste et
de
fierté blessée, de grève perlée contre la société et de soumission au
547
ochisme, de loyauté modeste et de fierté blessée,
de
grève perlée contre la société et de soumission aux règles de son jeu
548
rté blessée, de grève perlée contre la société et
de
soumission aux règles de son jeu, les mêmes énigmes d’ailleurs, sans
549
lée contre la société et de soumission aux règles
de
son jeu, les mêmes énigmes d’ailleurs, sans plus de solution, se trou
550
ns religieuses, et cette similitude ne manque pas
de
les frapper. Lawrence décrit son engagement dans l’armée de l’air com
551
pper. Lawrence décrit son engagement dans l’armée
de
l’air comme « le meilleur équivalent moderne de l’entrée au couvent a
552
e de l’air comme « le meilleur équivalent moderne
de
l’entrée au couvent au Moyen Âge ». Tous deux sont détachés de la foi
553
derne de l’entrée au couvent au Moyen Âge ». Tous
deux
sont détachés de la foi, et peut-être à la fin de la foi en eux-mêmes
554
u couvent au Moyen Âge ». Tous deux sont détachés
de
la foi, et peut-être à la fin de la foi en eux-mêmes ou dans le rôle
555
ux sont détachés de la foi, et peut-être à la fin
de
la foi en eux-mêmes ou dans le rôle qu’ils peuvent encore jouer parmi
556
es qui rendent le même son.) S’approche le moment
de
la retraite forcée, — fin de son engagement pour l’un, de la guerre p
557
S’approche le moment de la retraite forcée, — fin
de
son engagement pour l’un, de la guerre pour l’autre. Et survient l’ac
558
traite forcée, — fin de son engagement pour l’un,
de
la guerre pour l’autre. Et survient l’accident mortel. Ils sont tués
559
sont tués par la machine qui avait été la passion
de
leur vie. Mais leur légende prévaut contre le fait. Pendant longtemps
560
aut contre le fait. Pendant longtemps on refusera
de
les croire morts : ils sont revenus de tant d’autres dangers, et peut
561
n refusera de les croire morts : ils sont revenus
de
tant d’autres dangers, et peut-être n’ont-ils disparu que pour assume
562
es tâches, plus secrètes et plus importantes5.
III
. Un « message » de modestie J’essaierai maintenant de répondre à l
563
ètes et plus importantes5. III. Un « message »
de
modestie J’essaierai maintenant de répondre à la question dont ces
564
« message » de modestie J’essaierai maintenant
de
répondre à la question dont ces pages sont nées : « Que signifie pour
565
r nous Lawrence ? » Les dictateurs sont les héros
de
la masse, qui les produit dans sa panique devant une liberté sans con
566
t une liberté sans contenu. Il est des dictateurs
de
toutes sortes, il est vrai, mais la prostitution leur est commune : i
567
tionaliste. Je vois leur antithèse dans les héros
de
l’intégrité personnelle, dont Lawrence est le prototype. Le dictateur
568
nce est le prototype. Le dictateur n’est fort que
de
la faiblesse des autres, et sa grandeur est négative : il est le symb
569
us lui apportons pour faire nombre. Mais la force
d’
un Lawrence a sa source dans les seules exigences qu’il s’impose. Le d
570
aux publics. Lawrence n’a jamais rien demandé que
de
lui-même. Son pouvoir sur autrui lui fait horreur, il l’avoue à plusi
571
en garder longtemps le remords) si les nécessités
de
l’action l’y contraignent, comme ce fut le cas dans sa campagne d’Ara
572
ontraignent, comme ce fut le cas dans sa campagne
d’
Arabie ; et il ne peut se retenir de dénoncer dans cet usage, même lég
573
s sa campagne d’Arabie ; et il ne peut se retenir
de
dénoncer dans cet usage, même légal, un abus. Forcer autrui sera touj
574
mne ce viol, c’est qu’il se veut intègre, au prix
d’
un sacrifice dont il reste le maître. Son héroïsme le plus réel est là
575
dépens de son propre individu et pour l’éducation
de
sa personne. Il dépasse tous les autres dans ce sens. Et je ne lui vo
576
e tous les autres dans ce sens. Et je ne lui vois
d’
égal, dans l’exigence quant à soi-même, le mépris de la fraude, et le
577
égal, dans l’exigence quant à soi-même, le mépris
de
la fraude, et le scrupule fécond, que chez Kafka, — cet autre prototy
578
t autre prototype. Voici précisément ce qu’il eut
d’
exemplaire : il a soumis la condition de l’homme moderne aux épreuves
579
qu’il eut d’exemplaire : il a soumis la condition
de
l’homme moderne aux épreuves les plus dures dans divers ordres, faisa
580
es dans divers ordres, faisant lui-même les frais
de
l’expérience et se refusant à tous les faux-fuyants que nous offrent
581
Liberté, Violence, Angoisse, et le plus équivoque
de
tous : Révolution. On dirait qu’il a fait sur lui-même une étude de l
582
on. On dirait qu’il a fait sur lui-même une étude
de
la résistance du matériel et du moral humain dans l’état où se trouve
583
at où se trouve notre monde. Et voici le résultat
de
cette étude — la meilleure description que je puisse imaginer de la r
584
— la meilleure description que je puisse imaginer
de
la réalité moderne en tant que telle. Lawrence est dans un camp de la
585
erne en tant que telle. Lawrence est dans un camp
de
la RAF quand il écrit cette lettre à Lionel Curtis, le 30 mai 1923 :
586
F quand il écrit cette lettre à Lionel Curtis, le
30
mai 1923 : Et puis il y a l’absence de responsabilité : je n’ai à ré
587
il écrit cette lettre à Lionel Curtis, le 30 mai
1923
: Et puis il y a l’absence de responsabilité : je n’ai à répondre ic
588
urtis, le 30 mai 1923 : Et puis il y a l’absence
de
responsabilité : je n’ai à répondre ici que de la propreté de ma peau
589
ce de responsabilité : je n’ai à répondre ici que
de
la propreté de ma peau, de la propreté de mes habits, et d’une certai
590
ilité : je n’ai à répondre ici que de la propreté
de
ma peau, de la propreté de mes habits, et d’une certaine exactitude d
591
’ai à répondre ici que de la propreté de ma peau,
de
la propreté de mes habits, et d’une certaine exactitude dans les évol
592
ici que de la propreté de ma peau, de la propreté
de
mes habits, et d’une certaine exactitude dans les évolutions physique
593
reté de ma peau, de la propreté de mes habits, et
d’
une certaine exactitude dans les évolutions physiques à l’exercice. De
594
un seul choix : tout est prescrit — à l’exception
de
cette possibilité torturante de choisir de m’en aller d’ici, au momen
595
t — à l’exception de cette possibilité torturante
de
choisir de m’en aller d’ici, au moment où ma volonté de rester s’effo
596
eption de cette possibilité torturante de choisir
de
m’en aller d’ici, au moment où ma volonté de rester s’effondrera. À c
597
isir de m’en aller d’ici, au moment où ma volonté
de
rester s’effondrera. À cela près, ce serait le complet déterminisme —
598
etée (pas l’obéissance, car mon effort actuel est
de
trouver l’égalité dans la seule subordination. C’est l’exercice de l’
599
ité dans la seule subordination. C’est l’exercice
de
l’autorité qui m’écœure) ; l’action, je l’ai rejetée ; et la vie inte
600
e ; et la vie réceptive des sens ; et les assauts
d’
esprit. Autant d’échecs, et ma raison me dit qu’en conséquence l’obéis
601
eptive des sens ; et les assauts d’esprit. Autant
d’
échecs, et ma raison me dit qu’en conséquence l’obéissance, le non-sav
602
non-savoir échoueront aussi, puisque les racines
de
l’échec commun doivent être en moi, — et pourtant, en dépit de la rai
603
pourtant, en dépit de la raison, je m’y essaie.
Douze
ans plus tard, et très peu de temps avant sa mort, il tire de ses « e
604
tard, et très peu de temps avant sa mort, il tire
de
ses « essais » les conclusions suivantes : le Règlement du Proche-Ori
605
du Proche-Orient (qui fut en partie son œuvre en
1921
) pèse à ses yeux plus que ses campagnes, mais moins que son activité
606
ns que son activité dans la RAF « car la conquête
de
l’air me paraît être la seule tâche majeure de notre génération ; et
607
te de l’air me paraît être la seule tâche majeure
de
notre génération ; et je me suis convaincu que le progrès, aujourd’hu
608
jourd’hui, n’est pas le fait du génie isolé, mais
de
l’effort commun. Pour moi, c’est la multitude des rudes chauffeurs de
609
Pour moi, c’est la multitude des rudes chauffeurs
de
camion, couvrant chaque nuit toutes les routes de l’Angleterre, qui f
610
de camion, couvrant chaque nuit toutes les routes
de
l’Angleterre, qui fait notre âge mécanique. » Et ce sont aussi les si
611
nique. » Et ce sont aussi les simples mécaniciens
de
la RAF, non les grands as. « C’est pourquoi je suis resté dans le ran
612
ourquoi je suis resté dans le rang, et j’ai servi
de
mon mieux… » L’idée même de créer quelque chose « d’intangible », qui
613
e rang, et j’ai servi de mon mieux… » L’idée même
de
créer quelque chose « d’intangible », qui l’avait soutenu dans son ef
614
mon mieux… » L’idée même de créer quelque chose «
d’
intangible », qui l’avait soutenu dans son effort d’artiste alors qu’i
615
intangible », qui l’avait soutenu dans son effort
d’
artiste alors qu’il écrivait les Sept Piliers, il la renie ; car « tou
616
ans son effort d’artiste alors qu’il écrivait les
Sept
Piliers, il la renie ; car « toute création est tangible. Et ce que j
617
tangible. Et ce que j’essayais, je crois, c’était
de
poser une superstructure d’idées sur tout ce que je faisais. Eh bien,
618
is, je crois, c’était de poser une superstructure
d’
idées sur tout ce que je faisais. Eh bien, en cela, j’ai échoué. J’ai
619
. Eh bien, en cela, j’ai échoué. J’ai donc changé
de
direction… Je me suis engagé dans la RAF pour me mettre au service d’
620
suis engagé dans la RAF pour me mettre au service
d’
une entreprise mécanique, non pas comme un chef, mais comme un rouage
621
ense, c’est machine… Je laisse à d’autres le soin
de
dire si j’ai bien ou mal choisi : l’un des avantages d’être une pièce
622
e si j’ai bien ou mal choisi : l’un des avantages
d’
être une pièce de la machine, c’est qu’on y apprend qu’on n’a pas d’im
623
mal choisi : l’un des avantages d’être une pièce
de
la machine, c’est qu’on y apprend qu’on n’a pas d’importance ». De te
624
e la machine, c’est qu’on y apprend qu’on n’a pas
d’
importance ». De tels textes peuvent servir de repères pour ceux qui,
625
est qu’on y apprend qu’on n’a pas d’importance ».
De
tels textes peuvent servir de repères pour ceux qui, parmi nous, faut
626
pas d’importance ». De tels textes peuvent servir
de
repères pour ceux qui, parmi nous, faute d’un ordre acceptable, tente
627
ervir de repères pour ceux qui, parmi nous, faute
d’
un ordre acceptable, tentent de s’équilibrer dans le chaos. De repères
628
parmi nous, faute d’un ordre acceptable, tentent
de
s’équilibrer dans le chaos. De repères, simplement, non de philosophi
629
cceptable, tentent de s’équilibrer dans le chaos.
De
repères, simplement, non de philosophie. Car Lawrence, comme plusieur
630
librer dans le chaos. De repères, simplement, non
de
philosophie. Car Lawrence, comme plusieurs de sa race, ne se situe da
631
non de philosophie. Car Lawrence, comme plusieurs
de
sa race, ne se situe dans nos problèmes que d’une manière fragmentair
632
rs de sa race, ne se situe dans nos problèmes que
d’
une manière fragmentaire, en des occasions si concrètes que la techniq
633
casions si concrètes que la technique vécue, gage
de
son honnêteté, devient aussi son alibi. Du point de vue de nos débats
634
nnêteté, devient aussi son alibi. Du point de vue
de
nos débats politiques, pour se borner à un problème brûlant, qu’est-i
635
borner à un problème brûlant, qu’est-il possible
d’
inférer de son exemple ? Les citations que je viens de traduire semble
636
un problème brûlant, qu’est-il possible d’inférer
de
son exemple ? Les citations que je viens de traduire semblent indique
637
re semblent indiquer que Lawrence eût été capable
de
justifier, de la manière la plus tentante, le stalinisme et les mouve
638
diquer que Lawrence eût été capable de justifier,
de
la manière la plus tentante, le stalinisme et les mouvements totalita
639
il se fût battu contre eux. Faudra-t-il l’accuser
d’
inconséquence ? Le problème est un peu différent. Sans aucun doute, la
640
s aucun doute, la morale qu’il professe, au terme
de
son expérience de douze années dans l’aviation, est une morale collec
641
morale qu’il professe, au terme de son expérience
de
douze années dans l’aviation, est une morale collectiviste. (L’effort
642
ale qu’il professe, au terme de son expérience de
douze
années dans l’aviation, est une morale collectiviste. (L’effort commu
643
dans le complet déterminisme ; et jusqu’au culte
de
la machine !) Mais d’autre part, son aversion pour l’idéologie, son r
644
re part, son aversion pour l’idéologie, son refus
de
l’impérialisme sous toutes ses formes, surtout morales, l’écœurement
645
s, l’écœurement qu’il ressent devant la nécessité
d’
imposer son pouvoir et d’user d’autorité, tout l’opposait à la dictatu
646
sent devant la nécessité d’imposer son pouvoir et
d’
user d’autorité, tout l’opposait à la dictature et à la politique coll
647
vant la nécessité d’imposer son pouvoir et d’user
d’
autorité, tout l’opposait à la dictature et à la politique collectivis
648
r un tel homme ? Je le cite encore : « Les idéaux
d’
une politique sont de ces choses qui vous montent à la tête : leur tra
649
e cite encore : « Les idéaux d’une politique sont
de
ces choses qui vous montent à la tête : leur traduction en termes de
650
a structure sociale qui en résulte est un travail
de
second ordre. Je n’ai rien rencontré de plus honnête et dévoué que no
651
bien constitué comme le nôtre, peut se permettre
1
% de monistes ou de nihilistes. Voilà qui laisse assez de place pour
652
n constitué comme le nôtre, peut se permettre 1 %
de
monistes ou de nihilistes. Voilà qui laisse assez de place pour moi.
653
me le nôtre, peut se permettre 1 % de monistes ou
de
nihilistes. Voilà qui laisse assez de place pour moi. L’ennui avec le
654
monistes ou de nihilistes. Voilà qui laisse assez
de
place pour moi. L’ennui avec le communisme, c’est qu’il accepte trop
655
communisme, c’est qu’il accepte trop du mobilier
d’
aujourd’hui. Je hais les meubles. » Qu’on ne voie pas là une dérobade
656
s là une dérobade devant le grand choix politique
de
ce siècle : démocratie ou totalitarisme. Ces petites phrases d’un hum
657
démocratie ou totalitarisme. Ces petites phrases
d’
un humour cynique, bien que jetées dans une lettre hâtive, traduisent
658
nt une attitude mûrie. C’est la morale du Château
de
Kafka, la ligne de repli (devant les problèmes métaphysiques) d’un ho
659
ie. C’est la morale du Château de Kafka, la ligne
de
repli (devant les problèmes métaphysiques) d’un homme qui a raté ses
660
gne de repli (devant les problèmes métaphysiques)
d’
un homme qui a raté ses « sorties » et pour lequel il n’est plus d’aut
661
raté ses « sorties » et pour lequel il n’est plus
d’
autre solution que de s’assurer une petite place dans la cité, un rôle
662
et pour lequel il n’est plus d’autre solution que
de
s’assurer une petite place dans la cité, un rôle utile dans ce monde
663
ans ce monde qu’il juge assez absurde — par excès
de
conscience éthique — mais qu’il faut pourtant bien accepter, lorsqu’o
664
n grand courage, et surtout sans le moindre souci
d’
être un exemple ou d’enseigner : de là vient sa sincérité, à travers t
665
urtout sans le moindre souci d’être un exemple ou
d’
enseigner : de là vient sa sincérité, à travers tant de déguisements.
666
moindre souci d’être un exemple ou d’enseigner :
de
là vient sa sincérité, à travers tant de déguisements. On ne peut s’e
667
avers tant de déguisements. On ne peut s’empêcher
de
l’aimer. Mais il n’est pas question de le suivre. Le nihilisme, si «
668
s’empêcher de l’aimer. Mais il n’est pas question
de
le suivre. Le nihilisme, si « décent » soit-il, est une faible défens
669
it-il, est une faible défense contre les monstres
de
ce temps. Bien plus : objectivement, il en est le fourrier. Les fauss
670
le fourrier. Les fausses fois totalitaires n’ont
d’
ennemi sérieux que la foi. Pourtant, à ceux qui disent que Lawrence es
671
Lawrence est décevant parce qu’il n’a pas laissé
de
« message », je répondrai qu’il nous apprend au moins à n’en pas atte
672
cent la religion. Le plus honnête, s’il est privé
de
foi, s’avoue sans rien à révéler, mais par là même il décrit mieux l’
673
mais par là même il décrit mieux l’état véritable
de
l’homme. Rien ne tient, à l’épreuve, qui n’ait commencé là. 3. Le
674
ne tient, à l’épreuve, qui n’ait commencé là.
3.
Letters, p. 412. 4. T. E. Lawrence, par Charles Edmonde. 5. Chaq
675
, qui n’ait commencé là. 3. Letters, p. 412.
4.
T. E. Lawrence, par Charles Edmonde. 5. Chaque phrase et chaque nu
676
412. 4. T. E. Lawrence, par Charles Edmonde.
5.
Chaque phrase et chaque nuance de ce parallèle pourraient être appuyé
677
rles Edmonde. 5. Chaque phrase et chaque nuance
de
ce parallèle pourraient être appuyées par des documents précis et par
678
s fréquentes tirées des livres ou des lettres des
deux
hommes. J’ai dû me borner à les paraphraser, les lettres de Saint-Exu
679
J’ai dû me borner à les paraphraser, les lettres
de
Saint-Exupéry n’étant pas encore publiées. Quant à La Citadelle, on n
680
uivalent chez Lawrence. Et certes, rien n’empêche
d’
imaginer que ce dernier, s’il eût vécu tranquille dans son cottage, eû
681
osition lyrique et « littéraire » des expériences
de
l’homme d’action. Mais on sait que Churchill le destinait à des fonct
682
ique et « littéraire » des expériences de l’homme
d’
action. Mais on sait que Churchill le destinait à des fonctions milita
683
rtantes, que la guerre l’eût sans doute contraint
d’
accepter. Au total, Saint-Exupéry fut davantage un écrivain, Lawrence
684
péry fut davantage un écrivain, Lawrence un agent
de
l’Histoire. g. Rougemont Denis de, « Prototype T.E.L. », La Table
685
nce un agent de l’Histoire. g. Rougemont Denis
de
, « Prototype T.E.L. », La Table ronde, Paris, janvier 1952, p. 32-44.
686
rototype T.E.L. », La Table ronde, Paris, janvier
1952,
p. 32-44.
687
L’Heure
de
l’impatience (mars 1952)h Ce n’est pas un pamphlétaire irresponsab
688
L’Heure de l’impatience (mars
1952
)h Ce n’est pas un pamphlétaire irresponsable, c’est un homme polit
689
ccurrence, qui s’écriait naguère dans l’hémicycle
de
Strasbourg : « L’Europe vit, depuis des années, de la peur des Russes
690
e Strasbourg : « L’Europe vit, depuis des années,
de
la peur des Russes et de la charité des Américains ! » Traduisons, ma
691
vit, depuis des années, de la peur des Russes et
de
la charité des Américains ! » Traduisons, maintenant, ce cri d’alarme
692
des Américains ! » Traduisons, maintenant, ce cri
d’
alarme en chiffres dûment vérifiés. Cela donne, en millions d’habitant
693
larme en chiffres dûment vérifiés. Cela donne, en
millions
d’habitants : « 320 vivent depuis des années dans la peur de 210 et d
694
chiffres dûment vérifiés. Cela donne, en millions
d’
habitants : « 320 vivent depuis des années dans la peur de 210 et de l
695
vérifiés. Cela donne, en millions d’habitants : «
320
vivent depuis des années dans la peur de 210 et de la charité de 150.
696
nts : « 320 vivent depuis des années dans la peur
de
210 et de la charité de 150. » On souhaite qu’une telle constatation
697
: « 320 vivent depuis des années dans la peur de
210
et de la charité de 150. » On souhaite qu’une telle constatation appa
698
0 vivent depuis des années dans la peur de 210 et
de
la charité de 150. » On souhaite qu’une telle constatation apparaisse
699
s des années dans la peur de 210 et de la charité
de
150. » On souhaite qu’une telle constatation apparaisse plus choquant
700
es années dans la peur de 210 et de la charité de
150.
» On souhaite qu’une telle constatation apparaisse plus choquante enc
701
ent s’explique d’ailleurs par des raisons connues
de
chacun. Tout d’abord, les Européens refusent de se croire aussi nombr
702
s de chacun. Tout d’abord, les Européens refusent
de
se croire aussi nombreux qu’ils sont, parce qu’ils n’ont pas encore p
703
nt, parce qu’ils n’ont pas encore pris l’habitude
de
se sentir Européens. Au lieu d’un bloc à peu près aussi grand que les
704
Au lieu d’un bloc à peu près aussi grand que les
deux
autres additionnés, voici donc vingt petits pays, dont pas un seul n’
705
grand que les deux autres additionnés, voici donc
vingt
petits pays, dont pas un seul n’est à l’échelle du siècle. Il semble
706
le. Il semble évident que leur union renverserait
d’
un coup la situation. Tout les y pousse : la logique de l’Histoire com
707
coup la situation. Tout les y pousse : la logique
de
l’Histoire comme le calcul de leurs vrais intérêts, les nécessités de
708
pousse : la logique de l’Histoire comme le calcul
de
leurs vrais intérêts, les nécessités de leur défense comme celles de
709
le calcul de leurs vrais intérêts, les nécessités
de
leur défense comme celles de leur vie culturelle, le passé comme l’av
710
rêts, les nécessités de leur défense comme celles
de
leur vie culturelle, le passé comme l’avenir, la raison comme les rêv
711
les rêves. Qu’est-ce qui les retient ? Une sorte
de
myopie de la mémoire et du jugement. Ils tirent prétexte de leurs tra
712
. Qu’est-ce qui les retient ? Une sorte de myopie
de
la mémoire et du jugement. Ils tirent prétexte de leurs traditions, p
713
de la mémoire et du jugement. Ils tirent prétexte
de
leurs traditions, parlent d’ennemis héréditaires, mais ils oublient q
714
Ils tirent prétexte de leurs traditions, parlent
d’
ennemis héréditaires, mais ils oublient que leurs nationalismes ne rem
715
u’au siècle dernier, et qu’ils ont deux-mille ans
d’
usage commun d’un héritage que le reste de la Terre jalouse. Ils tiren
716
nier, et qu’ils ont deux-mille ans d’usage commun
d’
un héritage que le reste de la Terre jalouse. Ils tirent prétexte des
717
lle ans d’usage commun d’un héritage que le reste
de
la Terre jalouse. Ils tirent prétexte des intérêts à court terme de l
718
e. Ils tirent prétexte des intérêts à court terme
de
leurs États, mais ils oublient qu’ils forment un seul corps, et qu’il
719
nt qu’ils forment un seul corps, et qu’il est fou
d’
essayer de sauver un seul organe au détriment des autres. Le cœur ni l
720
forment un seul corps, et qu’il est fou d’essayer
de
sauver un seul organe au détriment des autres. Le cœur ni le poumon n
721
poumon ne vivraient isolés, et leur santé dépend
d’
une bonne circulation. Enfin, rien n’est plus clair au monde que la né
722
, rien n’est plus clair au monde que la nécessité
de
notre union, rien n’est moins contesté et cependant, comme il arrive
723
angoissante, durera jusqu’au réveil qu’il s’agit
de
provoquer. Europe, jadis, fut enlevée à l’Asie par une fougueuse divi
724
, fut enlevée à l’Asie par une fougueuse divinité
de
l’Occident : Jupiter changé en Taureau. On nous dit qu’Europe, aujour
725
nous dit qu’Europe, aujourd’hui, risque à nouveau
d’
être séduite, cette fois-ci par un Ours, ou par un Aigle. Craignons pl
726
u par un Aigle. Craignons plutôt le prudent idéal
de
certains députés de Strasbourg : l’enlèvement d’Europe par un escargo
727
gnons plutôt le prudent idéal de certains députés
de
Strasbourg : l’enlèvement d’Europe par un escargot ! La prudence a mo
728
de certains députés de Strasbourg : l’enlèvement
d’
Europe par un escargot ! La prudence a montré ce qu’elle savait faire.
729
venue de l’impatience créatrice. Je n’imagine pas
de
meilleur mot d’ordre pour une Campagne européenne de la jeunesse. h
730
meilleur mot d’ordre pour une Campagne européenne
de
la jeunesse. h. Rougemont Denis de, « L’heure de l’impatience », J
731
européenne de la jeunesse. h. Rougemont Denis
de
, « L’heure de l’impatience », Jeunesse d’Europe : bulletin d’informat
732
la jeunesse. h. Rougemont Denis de, « L’heure
de
l’impatience », Jeunesse d’Europe : bulletin d’information de la Camp
733
t Denis de, « L’heure de l’impatience », Jeunesse
d’
Europe : bulletin d’information de la Campagne européenne de la jeunes
734
e de l’impatience », Jeunesse d’Europe : bulletin
d’
information de la Campagne européenne de la jeunesse, Paris, mars 1952
735
nce », Jeunesse d’Europe : bulletin d’information
de
la Campagne européenne de la jeunesse, Paris, mars 1952, p. 1.
736
bulletin d’information de la Campagne européenne
de
la jeunesse, Paris, mars 1952, p. 1.
737
a Campagne européenne de la jeunesse, Paris, mars
1952,
p. 1.
738
Les foyers
de
culture et l’Europe (octobre 1952)i Je vais limiter mon exposé à u
739
Les foyers de culture et l’Europe (octobre
1952
)i Je vais limiter mon exposé à un seul thème, un thème-cathédrale
740
je vais développer rapidement pourrait s’exprimer
de
cette manière, sous sa forme la plus brutale : l’Europe égale les foy
741
forme la plus brutale : l’Europe égale les foyers
de
culture, ou : les foyers de culture sont l’Europe. Je précise tout de
742
rope égale les foyers de culture, ou : les foyers
de
culture sont l’Europe. Je précise tout de suite que je prends le term
743
récise tout de suite que je prends le terme foyer
de
culture au sens le plus général, le plus large ; je vous dirai aussi
744
e plus large ; je vous dirai aussi que les foyers
de
culture qui ont fait l’Europe jouaient, à d’autres époques, un rôle d
745
e jouaient, à d’autres époques, un rôle différent
de
celui qu’ils auraient maintenant. Je ne ferai pas de longues incursio
746
celui qu’ils auraient maintenant. Je ne ferai pas
de
longues incursions dans le passé, mais je rappellerai la leçon de l’h
747
sions dans le passé, mais je rappellerai la leçon
de
l’histoire ; avant le Moyen Âge, l’Europe s’est faite à partir des se
748
e, l’Europe s’est faite à partir des seuls foyers
de
culture existants : les couvents. Comment la culture devenait-elle vi
749
s les universités, formant les clercs, les hommes
de
culture, chargés d’élaborer les doctrines de l’Église, qui servaient
750
ormant les clercs, les hommes de culture, chargés
d’
élaborer les doctrines de l’Église, qui servaient de règles aux hommes
751
mmes de culture, chargés d’élaborer les doctrines
de
l’Église, qui servaient de règles aux hommes publics : princes, magis
752
élaborer les doctrines de l’Église, qui servaient
de
règles aux hommes publics : princes, magistrats, légistes. À un stade
753
s sermons entendus à l’Église, et tout un courant
de
connaissances orales, car les textes écrits n’avaient pas de circulat
754
ances orales, car les textes écrits n’avaient pas
de
circulation publique. On passait donc ainsi du foyer de culture à la
755
ulation publique. On passait donc ainsi du foyer
de
culture à la masse de la population par une série de maillons success
756
passait donc ainsi du foyer de culture à la masse
de
la population par une série de maillons successifs que je vous rappel
757
culture à la masse de la population par une série
de
maillons successifs que je vous rappelle : la méditation se formulant
758
issance populaire par transmission orale. L’unité
de
croyance fondamentale créait l’unité de culture entre toutes les clas
759
. L’unité de croyance fondamentale créait l’unité
de
culture entre toutes les classes de la population ; une commune mesur
760
réait l’unité de culture entre toutes les classes
de
la population ; une commune mesure existait entre les riches, les cle
761
st élaborée par des individus — plus rarement par
de
petites équipes de chercheurs ; puis coulée dans des moules uniformes
762
individus — plus rarement par de petites équipes
de
chercheurs ; puis coulée dans des moules uniformes : [par]j l’école,
763
elle est transmise à la masse et ces moyens mêmes
de
diffusion la rendent abstraite. Elle se heurte à des obstacles qui so
764
se heurte à des obstacles qui sont : la division
de
la population en classes sociales ne parlant pas le même langage, la
765
ge, la division en nations, qui existe depuis une
centaine
d’années, la division en langues, qui joue un rôle beaucoup plus vast
766
vision en nations, qui existe depuis une centaine
d’
années, la division en langues, qui joue un rôle beaucoup plus vaste q
767
uère aujourd’hui dans nos pays qu’une seule forme
de
culture commune à tout le monde, sans distinction de classes, de pays
768
culture commune à tout le monde, sans distinction
de
classes, de pays, de langues : la culture par l’image : cinéma, télév
769
une à tout le monde, sans distinction de classes,
de
pays, de langues : la culture par l’image : cinéma, télévision, « com
770
t le monde, sans distinction de classes, de pays,
de
langues : la culture par l’image : cinéma, télévision, « comics” illu
771
« comics” illustrés des journaux. C’est une forme
de
diffusion facile, qui ne connaît pas de frontières et ne nécessite au
772
une forme de diffusion facile, qui ne connaît pas
de
frontières et ne nécessite aucune traduction. Vous reconnaîtrez que c
773
mer l’homme et le jugement personnel. Le résultat
de
ces cloisons horizontales ou verticales par classes, nations et langu
774
ou verticales par classes, nations et langues est
de
faire perdre le bénéfice des moyens de diffusion de la culture et d’e
775
angues est de faire perdre le bénéfice des moyens
de
diffusion de la culture et d’empêcher son unité. Des conceptions diff
776
faire perdre le bénéfice des moyens de diffusion
de
la culture et d’empêcher son unité. Des conceptions différentes se fo
777
bénéfice des moyens de diffusion de la culture et
d’
empêcher son unité. Des conceptions différentes se forment ; le même t
778
ons différentes se forment ; le même terme change
de
sens en passant d’une classe sociale à l’autre. Finalement, la cultur
779
forment ; le même terme change de sens en passant
d’
une classe sociale à l’autre. Finalement, la culture humaniste, née co
780
culture humaniste, née comme une création commune
de
l’Europe, se fragmente en toutes sortes de petits morceaux. On ne peu
781
ommune de l’Europe, se fragmente en toutes sortes
de
petits morceaux. On ne peut plus dire : l’Europe, c’est une forme de
782
On ne peut plus dire : l’Europe, c’est une forme
de
culture, la substance de la culture est ignorée de la masse des popul
783
’Europe, c’est une forme de culture, la substance
de
la culture est ignorée de la masse des populations, comme l’est le se
784
e culture, la substance de la culture est ignorée
de
la masse des populations, comme l’est le sens de l’Europe. Pourtant,
785
de la masse des populations, comme l’est le sens
de
l’Europe. Pourtant, cette culture existe, elle se poursuit. Comment p
786
L’Europe-Culture ». Là, se pose le vrai problème
de
vos foyers de culture. Un foyer constitue le lieu de rencontre entre
787
ure ». Là, se pose le vrai problème de vos foyers
de
culture. Un foyer constitue le lieu de rencontre entre l’essence de l
788
vos foyers de culture. Un foyer constitue le lieu
de
rencontre entre l’essence de la culture et une situation locale bien
789
er constitue le lieu de rencontre entre l’essence
de
la culture et une situation locale bien définie, les problèmes d’urba
790
une situation locale bien définie, les problèmes
d’
urbanisme, d’éducation populaire, de questions sociales y sont évoqués
791
n locale bien définie, les problèmes d’urbanisme,
d’
éducation populaire, de questions sociales y sont évoqués par des homm
792
les problèmes d’urbanisme, d’éducation populaire,
de
questions sociales y sont évoqués par des hommes de classes différent
793
questions sociales y sont évoqués par des hommes
de
classes différentes et de niveaux intellectuels divers, mais réunis p
794
évoqués par des hommes de classes différentes et
de
niveaux intellectuels divers, mais réunis par des préoccupations comm
795
ons communes. Ainsi je vois l’activité des foyers
de
culture s’insérer dans ce grand phénomène historique, capable, vu à d
796
and phénomène historique, capable, vu à distance,
de
dominer tout le xxe siècle : la création de l’Europe unie, contre le
797
nce, de dominer tout le xxe siècle : la création
de
l’Europe unie, contre les dictatures et contre l’anarchie. L’homme eu
798
bord former des hommes. Tout le reste est affaire
d’
ingénieurs ou d’hommes politiques et ne nous intéresse pas ici. ⁂ Je v
799
hommes. Tout le reste est affaire d’ingénieurs ou
d’
hommes politiques et ne nous intéresse pas ici. ⁂ Je voudrais maintena
800
drais maintenant vous présenter un certain nombre
de
thèmes : 1° Il n’est pas possible que la culture puisse agir — c’est-
801
nant vous présenter un certain nombre de thèmes :
1°
Il n’est pas possible que la culture puisse agir — c’est-à-dire forme
802
asses sociales et les peuples. Née historiquement
de
ces échanges, fruits d’une grande circulation commune à toute l’Europ
803
uples. Née historiquement de ces échanges, fruits
d’
une grande circulation commune à toute l’Europe, elle est destinée, sa
804
le est destinée, sans eux, à mourir à bref délai.
2°
Il n’y a pas de culture vivante sans une incarnation, une implantatio
805
sans eux, à mourir à bref délai. 2° Il n’y a pas
de
culture vivante sans une incarnation, une implantation locale. Un foy
806
locale. Un foyer local ne peut être appelé foyer
de
culture que s’il réalise à la fois cette possibilité d’incarnation de
807
ture que s’il réalise à la fois cette possibilité
d’
incarnation de la culture et cette ouverture aux échanges universels.
808
réalise à la fois cette possibilité d’incarnation
de
la culture et cette ouverture aux échanges universels. Il n’y a pas d
809
e ouverture aux échanges universels. Il n’y a pas
d’
Europe vivante sans ces deux courants. Je reviens toujours à ces réali
810
niversels. Il n’y a pas d’Europe vivante sans ces
deux
courants. Je reviens toujours à ces réalités : pour faire l’Europe, i
811
: pour faire l’Europe, il faut que les foyers par
centaines
et par milliers, si possible, apportent leur coopération active. Eux,
812
rope, il faut que les foyers par centaines et par
milliers
, si possible, apportent leur coopération active. Eux, et eux seuls, p
813
euvent donner un contenu humain à la construction
de
l’idée européenne ; vie et chaleur lui viendront de la réalité quotid
814
chaleur lui viendront de la réalité quotidienne.
3°
Il ne faut pas que l’Europe se fabrique comme un immense trust super-
815
e aux masses, qui prépare pour l’avenir une sorte
d’
uniformité du cadre de la vie matérielle. Cela risque d’arriver avec l
816
are pour l’avenir une sorte d’uniformité du cadre
de
la vie matérielle. Cela risque d’arriver avec la Haute Autorité du ch
817
ormité du cadre de la vie matérielle. Cela risque
d’
arriver avec la Haute Autorité du charbon et de l’acier, très difficil
818
ue d’arriver avec la Haute Autorité du charbon et
de
l’acier, très difficile à comprendre. Contre cette uniformité, qui pe
819
rilisante, les foyers doivent défendre les droits
de
leurs diversités locales. J’insiste sur ce double mouvement, il faut
820
faut que les foyers collaborent à la constitution
de
l’Europe, mais aussi qu’ils défendent la diversité européenne contre
821
défendent la diversité européenne contre le germe
de
tyrannie que peut contenir l’aspiration à l’unité. C’est le paradoxe
822
ui défendent leurs particularités ; paradoxe même
de
la vie, lutte permanente entre deux dynamismes contraires également v
823
; paradoxe même de la vie, lutte permanente entre
deux
dynamismes contraires également valables, condition nécessaire à la c
824
valables, condition nécessaire à la construction
de
l’Europe. Nous devons être en garde constamment d’une part contre une
825
en garde constamment d’une part contre une espèce
de
mystique régionaliste, d’autre part contre une tentation d’internatio
826
e régionaliste, d’autre part contre une tentation
d’
internationalisme qui voudrait supprimer toutes diversités. Nous lutte
827
diversités. Nous lutterons contre ces déviations
de
l’esprit par une pratique de la circulation des idées et des personne
828
ontre ces déviations de l’esprit par une pratique
de
la circulation des idées et des personnes entre les communautés local
829
onnes entre les communautés locales et l’ensemble
de
l’Europe. Vous remarquerez que je saute à dessein le stade national,
830
une thèse sans fondement racontée dans les livres
d’
école depuis cent ans. Il n’existe pas de culture nationale, aucun his
831
fondement racontée dans les livres d’école depuis
cent
ans. Il n’existe pas de culture nationale, aucun historien sérieux ne
832
s livres d’école depuis cent ans. Il n’existe pas
de
culture nationale, aucun historien sérieux ne peut défendre cette idé
833
culture a toujours été internationale. Il s’agit
de
passer de l’ensemble européen aux implantations locales, et du foyer
834
toujours été internationale. Il s’agit de passer
de
l’ensemble européen aux implantations locales, et du foyer local dire
835
je proposerai que s’établisse un réseau européen
de
distribution de livres, de brochures, de revues, de journaux, de fil
836
ue s’établisse un réseau européen de distribution
de
livres, de brochures, de revues, de journaux, de films, et d’orateur
837
sse un réseau européen de distribution de livres,
de
brochures, de revues, de journaux, de films, et d’orateurs, réseau q
838
européen de distribution de livres, de brochures,
de
revues, de journaux, de films, et d’orateurs, réseau qui pourrait êt
839
distribution de livres, de brochures, de revues,
de
journaux, de films, et d’orateurs, réseau qui pourrait être constitu
840
de livres, de brochures, de revues, de journaux,
de
films, et d’orateurs, réseau qui pourrait être constitué, et constam
841
brochures, de revues, de journaux, de films, et
d’
orateurs, réseau qui pourrait être constitué, et constamment alimenté
842
imenté par cette Communauté européenne des foyers
de
culture, dont nous avons adopté le nom avant-hier. Je verrais les cho
843
s adopté le nom avant-hier. Je verrais les choses
de
cette façon ; chaque foyer, quelle que soit sa forme, sa structure, s
844
expressément par un vœu formulé si possible ici —
de
devenir un centre de diffusion locale de ce matériel européen, si vou
845
œu formulé si possible ici — de devenir un centre
de
diffusion locale de ce matériel européen, si vous permettez cette exp
846
le ici — de devenir un centre de diffusion locale
de
ce matériel européen, si vous permettez cette expression. Chaque foye
847
z cette expression. Chaque foyer serait une sorte
de
haut-parleur diffusant l’idée de l’Europe, et, en même temps, un cham
848
serait une sorte de haut-parleur diffusant l’idée
de
l’Europe, et, en même temps, un champ d’expérience pour des réalisati
849
t l’idée de l’Europe, et, en même temps, un champ
d’
expérience pour des réalisations concrètes. Pour être valables, celles
850
ncrètes. Pour être valables, celles-ci ont besoin
d’
être essayées dans le vif, passées au crible de la vie quotidienne, pu
851
in d’être essayées dans le vif, passées au crible
de
la vie quotidienne, puis modifiées dans leur pensée, si cela est néce
852
difiées dans leur pensée, si cela est nécessaire.
De
cette manière, l’idée européenne pourrait vraiment s’incarner. Pour p
853
r préciser encore, je voudrais que ce même réseau
de
distribution, de diffusion et de critique soit alimenté par le plus g
854
, je voudrais que ce même réseau de distribution,
de
diffusion et de critique soit alimenté par le plus grand nombre possi
855
e ce même réseau de distribution, de diffusion et
de
critique soit alimenté par le plus grand nombre possible d’organisati
856
e soit alimenté par le plus grand nombre possible
d’
organisations au niveau européen, comme le Conseil des communes d’Euro
857
au niveau européen, comme le Conseil des communes
d’
Europe, par exemple ; le Centre européen de la culture peut mettre à l
858
ropéen de la culture peut mettre à la disposition
de
cette Communauté européenne des foyers de culture tout d’abord ses pl
859
osition de cette Communauté européenne des foyers
de
culture tout d’abord ses plans de causeries — je crois qu’on vous les
860
enne des foyers de culture tout d’abord ses plans
de
causeries — je crois qu’on vous les a remis. J’explique en quoi ils c
861
emis. J’explique en quoi ils consistent : ce sont
de
petits plans de 5 ou 6 pages, englobant une vingtaine de sujets diffé
862
en quoi ils consistent : ce sont de petits plans
de
5 ou 6 pages, englobant une vingtaine de sujets différents concernant
863
quoi ils consistent : ce sont de petits plans de
5
ou 6 pages, englobant une vingtaine de sujets différents concernant l
864
ils consistent : ce sont de petits plans de 5 ou
6
pages, englobant une vingtaine de sujets différents concernant la vie
865
ts plans de 5 ou 6 pages, englobant une vingtaine
de
sujets différents concernant la vie européenne et contenant chacun un
866
ues rappels historiques permettant à une personne
de
faire, sans préparation, une causerie suffisamment documentée, d’une
867
réparation, une causerie suffisamment documentée,
d’
une heure ou d’une demi-heure. En collaboration avec la Campagne europ
868
causerie suffisamment documentée, d’une heure ou
d’
une demi-heure. En collaboration avec la Campagne européenne de la jeu
869
ure. En collaboration avec la Campagne européenne
de
la jeunesse, nous avons pu mettre en circulation 22 ou 23 de ces plan
870
la jeunesse, nous avons pu mettre en circulation
22
ou 23 de ces plans ; nous sommes prêts à en rédiger de nouveaux, corr
871
unesse, nous avons pu mettre en circulation 22 ou
23
de ces plans ; nous sommes prêts à en rédiger de nouveaux, correspond
872
sse, nous avons pu mettre en circulation 22 ou 23
de
ces plans ; nous sommes prêts à en rédiger de nouveaux, correspondant
873
23 de ces plans ; nous sommes prêts à en rédiger
de
nouveaux, correspondant aux désirs exprimés par vos foyers. Nous seri
874
xprimés par vos foyers. Nous serions très heureux
de
recevoir vos suggestions et de les étudier à Genève. Ensuite, nous po
875
rions très heureux de recevoir vos suggestions et
de
les étudier à Genève. Ensuite, nous pourrions mettre en circulation d
876
ve. Ensuite, nous pourrions mettre en circulation
d’
une manière périodique une sorte de fiche bibliographique comportant d
877
en circulation d’une manière périodique une sorte
de
fiche bibliographique comportant des listes d’ouvrages récemment paru
878
te de fiche bibliographique comportant des listes
d’
ouvrages récemment parus, avec les moyens de se les procurer gratuitem
879
istes d’ouvrages récemment parus, avec les moyens
de
se les procurer gratuitement si possible, ou à prix réduit. Nous vous
880
ssible, ou à prix réduit. Nous vous offrons aussi
de
faire circuler dans vos foyers des listes de conférenciers, choisis d
881
ussi de faire circuler dans vos foyers des listes
de
conférenciers, choisis dans tous les pays européens, avec le temps do
882
Ces conférenciers ne seraient pas des professeurs
d’
éloquence ni des hommes politiques, mais des écrivains, des explorateu
883
énieurs et, pourquoi pas, des sportifs. Au Centre
de
la culture, nous avons en préparation une Commission d’hygiène et de
884
culture, nous avons en préparation une Commission
d’
hygiène et de psychologie sportive. Quelques personnes compétentes — d
885
avons en préparation une Commission d’hygiène et
de
psychologie sportive. Quelques personnes compétentes — dont d’anciens
886
e sportive. Quelques personnes compétentes — dont
d’
anciens champions du monde — sont prêtes à faire le tour des foyers de
887
du monde — sont prêtes à faire le tour des foyers
de
culture, si on les y invite, pour parler de leurs expériences et lanc
888
oyers de culture, si on les y invite, pour parler
de
leurs expériences et lancer des groupes intéressés par ces questions
889
roupes intéressés par ces questions passionnantes
d’
hygiène et de psychologie sportives. Quatrième proposition : nous pour
890
ssés par ces questions passionnantes d’hygiène et
de
psychologie sportives. Quatrième proposition : nous pourrions faire c
891
urrions faire circuler parmi les foyers une sorte
de
lettre circulaire d’information sur l’état actuel de l’organisation e
892
r parmi les foyers une sorte de lettre circulaire
d’
information sur l’état actuel de l’organisation européenne, les positi
893
lettre circulaire d’information sur l’état actuel
de
l’organisation européenne, les positions à prendre sur différents suj
894
prendre sur différents sujets et les possibilités
d’
action à mener. Nous offrons d’établir des contacts entre la Communaut
895
t les possibilités d’action à mener. Nous offrons
d’
établir des contacts entre la Communauté européenne des foyers de cult
896
ontacts entre la Communauté européenne des foyers
de
culture et notre organisation, qui comprend des associations des guil
897
s du livre, des clubs européens, et des festivals
de
musique. Ceux-ci groupent, à l’heure actuelle, 15 des plus grands fes
898
de musique. Ceux-ci groupent, à l’heure actuelle,
15
des plus grands festivals de musique européenne. En nouant des liens
899
à l’heure actuelle, 15 des plus grands festivals
de
musique européenne. En nouant des liens avec eux, il serait possible
900
En nouant des liens avec eux, il serait possible
de
monter des représentations gratuites pour jeunes ou membres de nos fo
901
représentations gratuites pour jeunes ou membres
de
nos foyers. Je signale également notre Association des instituts d’ét
902
signale également notre Association des instituts
d’
études européennes, dont les résultats sont remarquables. Enfin, il y
903
ultats sont remarquables. Enfin, il y aurait lieu
d’
étudier, me semble-t-il, une sorte d’organisation de voyages et d’écha
904
aurait lieu d’étudier, me semble-t-il, une sorte
d’
organisation de voyages et d’échanges, comme celle établie par le Cent
905
étudier, me semble-t-il, une sorte d’organisation
de
voyages et d’échanges, comme celle établie par le Centre d’échanges i
906
mble-t-il, une sorte d’organisation de voyages et
d’
échanges, comme celle établie par le Centre d’échanges internationaux
907
et d’échanges, comme celle établie par le Centre
d’
échanges internationaux en France. Je vous signale que d’autres associ
908
s, demandant à entrer en relation avec les foyers
de
culture, celle par exemple du Chantier européen, qui établit des sent
909
européen, qui établit des sentiers allant du nord
de
l’Écosse au sud de l’Italie ; il serait intéressant de jalonner ces s
910
it des sentiers allant du nord de l’Écosse au sud
de
l’Italie ; il serait intéressant de jalonner ces sentiers de foyers o
911
Écosse au sud de l’Italie ; il serait intéressant
de
jalonner ces sentiers de foyers où les voyageurs pourraient s’arrêter
912
; il serait intéressant de jalonner ces sentiers
de
foyers où les voyageurs pourraient s’arrêter. Voici une belle idée de
913
ageurs pourraient s’arrêter. Voici une belle idée
de
circulation à travers l’Europe — et pas seulement pour les jeunes, ca
914
ards qui marchent —, avec comme relais les foyers
de
culture. Voici ce que le Centre européen de la culture se propose de
915
e que le Centre européen de la culture se propose
de
mettre à votre disposition. En retour, il voudrait bien que chacun de
916
sposition. En retour, il voudrait bien que chacun
de
vous prenne l’habitude de lui écrire pour suggérer des actions pratiq
917
oudrait bien que chacun de vous prenne l’habitude
de
lui écrire pour suggérer des actions pratiques ou formuler des critiq
918
rmuler des critiques fécondes. On risque toujours
de
tomber dans l’abstrait ; et nous avons besoin de votre opinion pour o
919
de tomber dans l’abstrait ; et nous avons besoin
de
votre opinion pour orienter notre action d’alimentation selon vos bes
920
esoin de votre opinion pour orienter notre action
d’
alimentation selon vos besoins. Le Centre européen de la culture voudr
921
n de la culture voudrait être la plaque tournante
de
vos foyers, leur forum. Un dernier mot : on a parlé tout à l’heure de
922
forum. Un dernier mot : on a parlé tout à l’heure
de
culture populaire. Je ne crois pas qu’il y ait une culture populaire,
923
tures nationales. Il y a la culture, qu’il s’agit
d’
implanter dans des sols différents avec des méthodes qui peuvent diffé
924
universitaires. C’est une grande tâche des foyers
de
contribuer à effacer cette distinction, à faire que le mot « Culture
925
aire que le mot « Culture » ne soit plus synonyme
d’
académisme, de propriété bourgeoise, de luxe intellectuel. Il faut qu’
926
t « Culture » ne soit plus synonyme d’académisme,
de
propriété bourgeoise, de luxe intellectuel. Il faut qu’ils coopèrent
927
s synonyme d’académisme, de propriété bourgeoise,
de
luxe intellectuel. Il faut qu’ils coopèrent dans un effort général po
928
ort général pour donner au mot culture un contenu
de
vitalité humaine, de création, d’ouverture vers l’avenir, de liberté.
929
er au mot culture un contenu de vitalité humaine,
de
création, d’ouverture vers l’avenir, de liberté. Hier, j’ai reçu une
930
ture un contenu de vitalité humaine, de création,
d’
ouverture vers l’avenir, de liberté. Hier, j’ai reçu une lettre parlan
931
humaine, de création, d’ouverture vers l’avenir,
de
liberté. Hier, j’ai reçu une lettre parlant des foyers où l’on disait
932
t que je vous la retransmettrai. Je ne veux faire
de
peine à personne, mais les maisons de culture sont là pour « bâtir l’
933
veux faire de peine à personne, mais les maisons
de
culture sont là pour « bâtir l’Europe », non pour organiser les tourn
934
bâtir l’Europe », non pour organiser les tournois
de
ping-pong. Elles sont là pour des activités récréatives, bien entendu
935
surtout pour des activités créatrices, créatrices
de
quoi ? d’hommes à la fois libres et responsables ! Je voudrais que vo
936
ur des activités créatrices, créatrices de quoi ?
d’
hommes à la fois libres et responsables ! Je voudrais que vous soyez t
937
ais que vous soyez très ambitieux pour vos foyers
de
culture, et très ambitieux sur ce terme de culture, car, à mon sens,
938
foyers de culture, et très ambitieux sur ce terme
de
culture, car, à mon sens, l’Europe de demain, l’Europe unie, vaudra e
939
ur ce terme de culture, car, à mon sens, l’Europe
de
demain, l’Europe unie, vaudra exactement ce que vaudront ces centaine
940
urope unie, vaudra exactement ce que vaudront ces
centaines
et ces milliers de Foyers de Culture dont vous représentez un grand n
941
a exactement ce que vaudront ces centaines et ces
milliers
de Foyers de Culture dont vous représentez un grand nombre. Je dirai,
942
ent ce que vaudront ces centaines et ces milliers
de
Foyers de Culture dont vous représentez un grand nombre. Je dirai, en
943
vaudront ces centaines et ces milliers de Foyers
de
Culture dont vous représentez un grand nombre. Je dirai, en terminant
944
urtout depuis que je vous ai vus approuver ce mot
de
Communauté. i. Rougemont Denis de, « Les foyers de culture et l’Eu
945
ouver ce mot de Communauté. i. Rougemont Denis
de
, « Les foyers de culture et l’Europe », Les Foyers de culture et l’Eu
946
ommunauté. i. Rougemont Denis de, « Les foyers
de
culture et l’Europe », Les Foyers de culture et l’Europe (Reims, octo
947
« Les foyers de culture et l’Europe », Les Foyers
de
culture et l’Europe (Reims, octobre 1952), Paris, Mouvement européen
948
Les Foyers de culture et l’Europe (Reims, octobre
1952
), Paris, Mouvement européen / Secrétariat international pour la jeune
949
éen / Secrétariat international pour la jeunesse,
1952,
p. 7-14. j. On a ici modifié le texte imprimé original, dont la synt
950
uisse et l’Europe : M. Denis de Rougemont réagit (
14
novembre 1952)k Sous ce titre de « La Suisse et l’Europe », notre
951
urope : M. Denis de Rougemont réagit (14 novembre
1952
)k Sous ce titre de « La Suisse et l’Europe », notre collaborateur
952
emont réagit (14 novembre 1952)k Sous ce titre
de
« La Suisse et l’Europe », notre collaborateur M. René-Henri Wüst a r
953
collaborateur M. René-Henri Wüst a relaté ici, le
1er
novembre, un entretien qu’il eut avec le professeur William Rappard.
954
rsonnelles qu’y exprimait l’éminent interlocuteur
de
notre confrère ont ouvert la porte à un vaste débat sur ce sujet de l
955
ont ouvert la porte à un vaste débat sur ce sujet
de
la constitution de l’Europe et de la position de notre pays à son éga
956
à un vaste débat sur ce sujet de la constitution
de
l’Europe et de la position de notre pays à son égard, et M. Denis de
957
at sur ce sujet de la constitution de l’Europe et
de
la position de notre pays à son égard, et M. Denis de Rougemont, dire
958
de la constitution de l’Europe et de la position
de
notre pays à son égard, et M. Denis de Rougemont, directeur du Centre
959
européen de la culture, se sentant en sa qualité
d’
« européaniste » visé par les déclarations du professeur Rappard, a ex
960
rations du professeur Rappard, a exprimé le désir
de
présenter son point de vue qui s’oppose totalement à celui du directe
961
vue qui s’oppose totalement à celui du directeur
de
l’Institut de hautes études internationales. Voici les propos que nou
962
ose totalement à celui du directeur de l’Institut
de
hautes études internationales. Voici les propos que nous avons recuei
963
ici les propos que nous avons recueillis au cours
d’
un entretien avec M. de Rougemont. Laissez-moi commencer par dire que
964
réconise, ce n’est certes pas une européanisation
de
la Suisse, mais bien au contraire une helvétisation de l’Europe, c’es
965
Suisse, mais bien au contraire une helvétisation
de
l’Europe, c’est-à-dire d’une Europe qui s’inspirerait de l’expérience
966
raire une helvétisation de l’Europe, c’est-à-dire
d’
une Europe qui s’inspirerait de l’expérience fédéraliste suisse. Or, c
967
rope, c’est-à-dire d’une Europe qui s’inspirerait
de
l’expérience fédéraliste suisse. Or, ce qu’a déclaré M. Rappard me to
968
ervi et voici qu’il paraît renier les conclusions
de
la plupart de ses ouvrages ; c’est pourquoi après cette interview, je
969
ès cette interview, je pense qu’il est nécessaire
de
montrer nettement le point de vue de ceux qui croient à l’Europe. Si
970
t nécessaire de montrer nettement le point de vue
de
ceux qui croient à l’Europe. Si vous le voulez bien, nous pourrions r
971
n, nous pourrions reprendre les principaux points
de
l’argumentation de M. Rappard, dans l’ordre où il les a énumérés lui-
972
eprendre les principaux points de l’argumentation
de
M. Rappard, dans l’ordre où il les a énumérés lui-même. « Je ne crois
973
lus acharnés ont reconnu qu’il n’était plus temps
de
s’interroger sur son opportunité, mais bien de traiter avec elle. La
974
ps de s’interroger sur son opportunité, mais bien
de
traiter avec elle. La petite Europe est faite depuis que le 13 septem
975
ec elle. La petite Europe est faite depuis que le
13
septembre la Haute Autorité du plan Schuman a été installée à Luxembo
976
mait le professeur Rappard, qui ajoutait : L’idée
d’
une fédération européenne est maintenant une idée américaine, qui aura
977
rouvé son expression dans le discours prononcé le
31
octobre 1949 par l’administrateur du plan Marshall. C’est peut-être u
978
xpression dans le discours prononcé le 31 octobre
1949
par l’administrateur du plan Marshall. C’est peut-être une idée améri
979
-Europe du comte Coudenhove-Kalergi, et le projet
de
Briand de 1923l. Et ce qui me surprend le plus chez M. Rappard, c’est
980
comte Coudenhove-Kalergi, et le projet de Briand
de
1923l. Et ce qui me surprend le plus chez M. Rappard, c’est qu’il sem
981
mte Coudenhove-Kalergi, et le projet de Briand de
1923l
. Et ce qui me surprend le plus chez M. Rappard, c’est qu’il semble av
982
’il présidait la commission économique du Congrès
de
l’Europe tenu à La Haye en 1948, préparé par la conférence de Montreu
983
onomique du Congrès de l’Europe tenu à La Haye en
1948,
préparé par la conférence de Montreux de 1947. Avant que l’administra
984
tenu à La Haye en 1948, préparé par la conférence
de
Montreux de 1947. Avant que l’administrateur du plan Marshall ait pro
985
ye en 1948, préparé par la conférence de Montreux
de
1947. Avant que l’administrateur du plan Marshall ait prononcé son di
986
en 1948, préparé par la conférence de Montreux de
1947.
Avant que l’administrateur du plan Marshall ait prononcé son discours
987
ait prononcé son discours, donc avant que l’idée
d’
une fédération européenne soit devenue américaine, M. Rappard avait en
988
ncore été un des délégués suisses à la conférence
de
Londres, en 1949. Ainsi donc, et sans remonter à Henri IV ou à Victor
989
s délégués suisses à la conférence de Londres, en
1949.
Ainsi donc, et sans remonter à Henri IV ou à Victor Hugo, on trouve s
990
Henri IV ou à Victor Hugo, on trouve suffisamment
d’
éléments, et dans l’activité même du directeur de l’Institut des haute
991
d’éléments, et dans l’activité même du directeur
de
l’Institut des hautes études, pour démontrer que l’idée de l’Europe n
992
itut des hautes études, pour démontrer que l’idée
de
l’Europe n’a pas attendu les Américains, pas plus que la mise en plac
993
ndu les Américains, pas plus que la mise en place
de
la Haute Autorité qui en est la première réalisation. Oui, mais… l
994
la première réalisation. Oui, mais… le rideau
de
fer ? Mais hélas ! il est de fait que le rideau de fer l’a séparée
995
, mais… le rideau de fer ? Mais hélas ! il est
de
fait que le rideau de fer l’a séparée en deux… N’allez pas plus loin,
996
er ? Mais hélas ! il est de fait que le rideau
de
fer l’a séparée en deux… N’allez pas plus loin, je connais l’antienne
997
l est de fait que le rideau de fer l’a séparée en
deux
… N’allez pas plus loin, je connais l’antienne ! Non, le rideau de fer
998
plus loin, je connais l’antienne ! Non, le rideau
de
fer ne nous a pas séparés en deux de la façon dont on voudrait nous l
999
! Non, le rideau de fer ne nous a pas séparés en
deux
de la façon dont on voudrait nous le faire croire. Premièrement, on p
1000
n, le rideau de fer ne nous a pas séparés en deux
de
la façon dont on voudrait nous le faire croire. Premièrement, on peut
1001
us êtes-vous demandé quelles sont les proportions
de
cette séparation ? De ce côté-ci du fameux rideau, nous sommes quelqu
1002
uelles sont les proportions de cette séparation ?
De
ce côté-ci du fameux rideau, nous sommes quelque 320 millions, tandis
1003
ce côté-ci du fameux rideau, nous sommes quelque
320
millions, tandis qu’il n’y en a pas quatre-vingt-dix-millions de l’au
1004
côté-ci du fameux rideau, nous sommes quelque 320
millions
, tandis qu’il n’y en a pas quatre-vingt-dix-millions de l’autre… Soit
1005
ndis qu’il n’y en a pas quatre-vingt-dix-millions
de
l’autre… Soit. Mais ces 320 millions avec lesquels vous voulez faire
1006
tre-vingt-dix-millions de l’autre… Soit. Mais ces
320
millions avec lesquels vous voulez faire l’Europe n’ont pas de tradit
1007
vingt-dix-millions de l’autre… Soit. Mais ces 320
millions
avec lesquels vous voulez faire l’Europe n’ont pas de traditions comm
1008
vec lesquels vous voulez faire l’Europe n’ont pas
de
traditions communes ou d’impérieuses raisons de s’unir, comme en avai
1009
aire l’Europe n’ont pas de traditions communes ou
d’
impérieuses raisons de s’unir, comme en avaient ceux qui ont fait la S
1010
s de traditions communes ou d’impérieuses raisons
de
s’unir, comme en avaient ceux qui ont fait la Suisse moderne. Ah ! ou
1011
ssait » protestants et catholiques sur les champs
de
bataille de Villmergen et du Sonderbund… À ce taux-là, la France et l
1012
estants et catholiques sur les champs de bataille
de
Villmergen et du Sonderbund… À ce taux-là, la France et l’Allemagne e
1013
ons-villes et les cantons-campagnes : qu’y a-t-il
de
commun entre Genève et Glaris ? Et ne parle-t-on pas du « miracle sui
1014
ue tout s’opposait, humainement, à la réalisation
de
cette confédération ? Alors, pourquoi pas l’Europe ? Les Européens n’
1015
emps de la prépondérance grecque, puis à l’Empire
de
Rome, on constate qu’elle avait déjà deux-mille ans d’existence quand
1016
me, on constate qu’elle avait déjà deux-mille ans
d’
existence quand les montagnards des trois pays firent alliance en 1291
1017
x-mille ans d’existence quand les montagnards des
trois
pays firent alliance en 1291. Non plus des projets… Oui, mais m
1018
les montagnards des trois pays firent alliance en
1291.
Non plus des projets… Oui, mais malgré cette antiquité, et pour
1019
cette Europe ne connaît même pas encore un début
de
véritable réalisation ». Mais c’est nier l’évidence même, et je le ré
1020
, depuis que la Haute Autorité a été installée le
13
septembre passé. Remarquez que M. Rappard juge naturel, souhaitable,
1021
naturel, souhaitable, heureux que nous discutions
de
projets tels que les plans Marshall, Schuman ou Pflimlin… Comment pou
1022
ou Pflimlin… Comment pouvez-vous parler du projet
de
plan Marshall puisque la réalisation de celui-ci est déjà achevée ? C
1023
du projet de plan Marshall puisque la réalisation
de
celui-ci est déjà achevée ? C’est du passé le plan Marshall ! Quant a
1024
euvent nous laisser indifférents, et ce sont ceux
de
notre économie, puisque, comme le note M. Rappard, notre commerce ext
1025
ote M. Rappard, notre commerce extérieur avec les
six
pays du plan Schuman ne représentait l’an dernier que le 40 % du volu
1026
plan Schuman ne représentait l’an dernier que le
40
% du volume de nos échanges. C’est donc, de la part de M. Rappard, ju
1027
e représentait l’an dernier que le 40 % du volume
de
nos échanges. C’est donc, de la part de M. Rappard, juger de la viabi
1028
nges. C’est donc, de la part de M. Rappard, juger
de
la viabilité de l’Europe d’après le volume des échanges de la Suisse
1029
, de la part de M. Rappard, juger de la viabilité
de
l’Europe d’après le volume des échanges de la Suisse ! Mais à notre p
1030
bilité de l’Europe d’après le volume des échanges
de
la Suisse ! Mais à notre point de vue, ce 40 % est-il vraiment si nég
1031
nges de la Suisse ! Mais à notre point de vue, ce
40
% est-il vraiment si négligeable ? Est-il proportionnellement inférie
1032
ue qui se partagent avec la Scandinavie, les pays
de
l’Est, la péninsule Ibérique, l’Amérique du Sud, l’Égypte et les pays
1033
rique du Sud, l’Égypte et les pays asiatiques, le
60
% restant de notre commerce extérieur ? Et je ne vois vraiment pas po
1034
l’Égypte et les pays asiatiques, le 60 % restant
de
notre commerce extérieur ? Et je ne vois vraiment pas pourquoi, si la
1035
solidifie toujours plus, la Suisse serait coupée
de
tout accès à la mer et réduite à l’état de province enclavée. Sur quo
1036
coupée de tout accès à la mer et réduite à l’état
de
province enclavée. Sur quoi, le professeur Rappard fonde-t-il cette d
1037
éclaration, je ne le comprends pas, et l’argument
de
cette finis Helvetiae me semble un rien démagogique. Non, rien ne ser
1038
ardons un contact actif au lieu de nous contenter
de
traiter de chimère ce plan qui est entré maintenant dans sa phase de
1039
ontact actif au lieu de nous contenter de traiter
de
chimère ce plan qui est entré maintenant dans sa phase de réalisation
1040
re ce plan qui est entré maintenant dans sa phase
de
réalisation. Mais ne croyez-vous pas, qu’isolés de la mer et de ceux
1041
e réalisation. Mais ne croyez-vous pas, qu’isolés
de
la mer et de ceux qui furent toujours à travers l’histoire nos grands
1042
. Mais ne croyez-vous pas, qu’isolés de la mer et
de
ceux qui furent toujours à travers l’histoire nos grands amis politiq
1043
re nos grands amis politiques, nous risquons fort
de
perdre notre autonomie extérieure ? Quels sont, à travers l’histoire,
1044
Quels sont, à travers l’histoire, nos grands amis
de
toujours ? L’Angleterre et les États-Unis ? Vraiment, voilà qui surpr
1045
e-Uni ait joué un grand rôle dans la constitution
de
la Suisse, ou que l’Amérique du Nord ait eu une grande influence sur
1046
du Nord ait eu une grande influence sur le cours
de
notre histoire. Et si cela était, et si comme le prétend M. Rappard l
1047
a était, et si comme le prétend M. Rappard l’idée
de
cette fédération européenne est une idée américaine, notre adhésion à
1048
ser sincèrement prétendre que nous serions isolés
d’
eux, même sur le plan économique ? Et sa comparaison d’un Sonderbund e
1049
, même sur le plan économique ? Et sa comparaison
d’
un Sonderbund européen me semble tout aussi erronée. Cette fédération
1050
ne fédération plus vaste que la Confédération des
huit
ou des treize cantons ne pouvait être opposée à celle des vingt-deux
1051
n plus vaste que la Confédération des huit ou des
treize
cantons ne pouvait être opposée à celle des vingt-deux cantons. Et
1052
reize cantons ne pouvait être opposée à celle des
vingt-deux
cantons. Et pourquoi pas l’Europe ? La France, l’Allemagne, l’I
1053
rope ? La France, l’Allemagne, l’Italie et les
trois
pays du Benelux trouvent assurément dans leur passé singulièrement pl
1054
nt assurément dans leur passé singulièrement plus
de
raisons de se redouter et de se méfier… que de s’aimer et de se fondr
1055
nt dans leur passé singulièrement plus de raisons
de
se redouter et de se méfier… que de s’aimer et de se fondre en une se
1056
singulièrement plus de raisons de se redouter et
de
se méfier… que de s’aimer et de se fondre en une seule patrie commune
1057
us de raisons de se redouter et de se méfier… que
de
s’aimer et de se fondre en une seule patrie commune, constate M. Rapp
1058
de se redouter et de se méfier… que de s’aimer et
de
se fondre en une seule patrie commune, constate M. Rappard. Eh ! oui.
1059
Un grand économiste anglais, Josiah Tucker, doyen
de
Gloucester, n’écrivait-il pas un an avant l’adoption par les États-Un
1060
-il pas un an avant l’adoption par les États-Unis
de
leur constitution fédérale que « L’idée que l’Amérique pourrait deven
1061
beaucoup plus illusoire que toutes les inventions
d’
un romancier. Les antipathies réciproques et les intérêts contradictoi
1062
c’est qu’ils ne pourront jamais trouver un centre
d’
union et un seul intérêt commun » ! Et dans un de ses ouvrages, M. Rap
1063
d’union et un seul intérêt commun » ! Et dans un
de
ses ouvrages, M. Rappard ne manque pas de relever, avec l’ironie qu’i
1064
dans un de ses ouvrages, M. Rappard ne manque pas
de
relever, avec l’ironie qu’il faut, quelques prédictions identiques de
1065
ronie qu’il faut, quelques prédictions identiques
de
Cherbuliez ou de Pyrame de Candolle… Renoncer à notre neutralité ?
1066
quelques prédictions identiques de Cherbuliez ou
de
Pyrame de Candolle… Renoncer à notre neutralité ? Reste le prob
1067
prédictions identiques de Cherbuliez ou de Pyrame
de
Candolle… Renoncer à notre neutralité ? Reste le problème de no
1068
enoncer à notre neutralité ? Reste le problème
de
notre neutralité dans une fédération européenne ? Reconnaissons qu’à
1069
éenne ? Reconnaissons qu’à suivre les suggestions
de
M. Rappard, elle courrait un grave danger. Ne dit-il pas en effet : «
1070
l pas en effet : « Au lieu d’isoler quelques pays
de
l’Europe continentale (face au péril bolchévique) de leurs alliés nat
1071
l’Europe continentale (face au péril bolchévique)
de
leurs alliés naturels d’outre-Manche et d’outre-mer, en cherchant à e
1072
ce au péril bolchévique) de leurs alliés naturels
d’
outre-Manche et d’outre-mer, en cherchant à en faire une seule et même
1073
vique) de leurs alliés naturels d’outre-Manche et
d’
outre-mer, en cherchant à en faire une seule et même patrie, ne vaudra
1074
aire une seule et même patrie, ne vaudrait-il pas
mille
fois mieux les unir tous dans une seule et même alliance ? » Alors qu
1075
lité. Or, la neutralité ne doit pas nous empêcher
de
collaborer ; mais pourquoi renoncerions-nous à cet avantage, et contr
1076
demande ? Encore une fois, non. Il ne s’agit pas
de
renoncer à cette neutralité, mais il ne faut pas non plus qu’elle nou
1077
mais il ne faut pas non plus qu’elle nous empêche
de
collaborer sur le plan européen. À nous de rechercher une adaptation.
1078
mpêche de collaborer sur le plan européen. À nous
de
rechercher une adaptation. Mais ce que je trouve le plus étonnant dan
1079
je trouve le plus étonnant dans ces déclarations
de
M. Rappard, c’est précisément que sa conclusion est en contradiction
1080
ec tout ce qui a précédé, puisqu’il ne craint pas
d’
inclure l’alliance militaire. Mais il a raison d’insister sur le fait
1081
d’inclure l’alliance militaire. Mais il a raison
d’
insister sur le fait que ces problèmes sont vitaux pour notre pays, et
1082
isse : nul mieux que lui ne sait que les intérêts
de
la Suisse ne peuvent être dissociés de ceux de l’Europe. Ainsi prend
1083
s intérêts de la Suisse ne peuvent être dissociés
de
ceux de l’Europe. Ainsi prend fin cet entretien dont nous avons essay
1084
ts de la Suisse ne peuvent être dissociés de ceux
de
l’Europe. Ainsi prend fin cet entretien dont nous avons essayé de ren
1085
si prend fin cet entretien dont nous avons essayé
de
rendre compte aussi fidèlement que possible. k. Rougemont Denis d
1086
i fidèlement que possible. k. Rougemont Denis
de
, « [Entretien] La Suisse et l’Europe : M. Denis de Rougemont réagit »
1087
. Denis de Rougemont réagit », La Suisse, Genève,
14
novembre 1952, p. 1-2. l. Une erreur s’est manifestement glissée ici
1088
ougemont réagit », La Suisse, Genève, 14 novembre
1952,
p. 1-2. l. Une erreur s’est manifestement glissée ici, le projet Bri
1089
s’est manifestement glissée ici, le projet Briand
d’
union européenne ayant été présenté à la SDN en 1929.
1090
d’union européenne ayant été présenté à la SDN en
1929.
1091
Grandeur
de
la Petite Europe (5 décembre 1952)m Je vais partout disant que l’E
1092
Grandeur de la Petite Europe (
5
décembre 1952)m Je vais partout disant que l’Europe est faite. On
1093
Grandeur de la Petite Europe (5 décembre
1952
)m Je vais partout disant que l’Europe est faite. On me demande : l
1094
n me demande : laquelle ? — Eh bien, l’Europe des
Six
, l’Europe de Luxembourg, la Haute Autorité, que certains nomment la S
1095
ciel : — Quoi ! me dit-on, mais l’Europe, cela va
de
Moscou à Gibraltar, et du Cap Nord aux Dardanelles ! De cette Europe,
1096
cou à Gibraltar, et du Cap Nord aux Dardanelles !
De
cette Europe, vous commencez par laisser une moitié derrière le ridea
1097
mmencez par laisser une moitié derrière le rideau
de
fer. De la moitié restante, le Conseil de l’Europe ne groupe encore q
1098
par laisser une moitié derrière le rideau de fer.
De
la moitié restante, le Conseil de l’Europe ne groupe encore que quinz
1099
ante, le Conseil de l’Europe ne groupe encore que
quinze
pays, sans le Portugal, sans l’Espagne, sans l’Autriche et sans la Su
1100
spagne, sans l’Autriche et sans la Suisse. Enfin,
de
cette « Europe-croupion », déjà privée de son Est, de son extrême-Oue
1101
Enfin, de cette « Europe-croupion », déjà privée
de
son Est, de son extrême-Ouest et de son Centre, vous trouvez le moyen
1102
ette « Europe-croupion », déjà privée de son Est,
de
son extrême-Ouest et de son Centre, vous trouvez le moyen d’exclure l
1103
, déjà privée de son Est, de son extrême-Ouest et
de
son Centre, vous trouvez le moyen d’exclure les Scandinaves, la Grand
1104
ême-Ouest et de son Centre, vous trouvez le moyen
d’
exclure les Scandinaves, la Grande-Bretagne, l’Irlande, la Grèce et la
1105
après toutes ces amputations, vous avez le front
de
dire que c’est l’Europe ? — Oui, j’ai cette conviction et je m’expliq
1106
vous faites une erreur en répétant que le rideau
de
fer coupe notre Europe par le milieu. Car vous avez à l’est du rideau
1107
e par le milieu. Car vous avez à l’est du rideau,
88
millions d’habitants, contre 332 millions à l’ouest. Ce n’est donc qu
1108
ar le milieu. Car vous avez à l’est du rideau, 88
millions
d’habitants, contre 332 millions à l’ouest. Ce n’est donc qu’un peu p
1109
ieu. Car vous avez à l’est du rideau, 88 millions
d’
habitants, contre 332 millions à l’ouest. Ce n’est donc qu’un peu plus
1110
l’est du rideau, 88 millions d’habitants, contre
332
millions à l’ouest. Ce n’est donc qu’un peu plus d’un cinquième des E
1111
st du rideau, 88 millions d’habitants, contre 332
millions
à l’ouest. Ce n’est donc qu’un peu plus d’un cinquième des Européens
1112
millions à l’ouest. Ce n’est donc qu’un peu plus
d’
un cinquième des Européens que nous perdons, provisoirement, du côté e
1113
provisoirement, du côté est. Et le meilleur moyen
de
les ramener parmi nous sera sans doute de créer un noyau dense et ric
1114
r moyen de les ramener parmi nous sera sans doute
de
créer un noyau dense et riche d’Europe unie, qui exercera sur eux une
1115
sera sans doute de créer un noyau dense et riche
d’
Europe unie, qui exercera sur eux une puissante attraction. Ensuite, a
1116
ttraction. Ensuite, avez-vous bien compté que les
six
pays de la Haute Autorité font tous ensemble un peu plus de 155 milli
1117
. Ensuite, avez-vous bien compté que les six pays
de
la Haute Autorité font tous ensemble un peu plus de 155 millions d’ha
1118
la Haute Autorité font tous ensemble un peu plus
de
155 millions d’habitants ? Si vous appelez ce groupe la « Petite Euro
1119
Haute Autorité font tous ensemble un peu plus de
155
millions d’habitants ? Si vous appelez ce groupe la « Petite Europe »
1120
te Autorité font tous ensemble un peu plus de 155
millions
d’habitants ? Si vous appelez ce groupe la « Petite Europe », disait
1121
té font tous ensemble un peu plus de 155 millions
d’
habitants ? Si vous appelez ce groupe la « Petite Europe », disait l’a
1122
i des petits États-Unis qui ont tout juste autant
d’
habitants, ou de la petite URSS qui n’en a que 30 millions de plus. V
1123
ts-Unis qui ont tout juste autant d’habitants, ou
de
la petite URSS qui n’en a que 30 millions de plus. Vous me répondrez
1124
d’habitants, ou de la petite URSS qui n’en a que
30
millions de plus. Vous me répondrez que le nombre d’habitants ne fai
1125
habitants, ou de la petite URSS qui n’en a que 30
millions
de plus. Vous me répondrez que le nombre d’habitants ne fait pas tou
1126
illions de plus. Vous me répondrez que le nombre
d’
habitants ne fait pas tout. Et, en effet, Paul Valéry faisait remarque
1127
ait remarquer que si l’on mettait dans un plateau
de
la balance l’Empire des Indes, dans l’autre le Royaume-Uni, le platea
1128
yaume-Uni, le plateau chargé du plus petit nombre
d’
habitants pencherait. Il faut donc tenir compte des richesses naturell
1129
aut donc tenir compte des richesses naturelles et
de
la production matérielle. Or, on peut vérifier facilement que pour la
1130
ier facilement que pour la production du charbon,
de
l’acier et de l’électricité, l’Europe des Six est la deuxième puissan
1131
que pour la production du charbon, de l’acier et
de
l’électricité, l’Europe des Six est la deuxième puissance du monde :
1132
bon, de l’acier et de l’électricité, l’Europe des
Six
est la deuxième puissance du monde : elle vient tout de suite après l
1133
e après les USA, bien avant l’URSS même augmentée
de
ses satellites. Allons plus loin. Les chiffres et les statistiques n’
1134
t les statistiques n’épuisent pas la réalité. Les
six
pays que groupe la Haute Autorité forment une unité de civilisation e
1135
ys que groupe la Haute Autorité forment une unité
de
civilisation et culture inégalée dans le monde moderne. Ils ont fait
1136
des siècles et grâce à leurs échanges continuels
d’
idées de procédés, de maîtres et de disciples, presque tout ce qui com
1137
cles et grâce à leurs échanges continuels d’idées
de
procédés, de maîtres et de disciples, presque tout ce qui compte dans
1138
à leurs échanges continuels d’idées de procédés,
de
maîtres et de disciples, presque tout ce qui compte dans la peinture,
1139
ges continuels d’idées de procédés, de maîtres et
de
disciples, presque tout ce qui compte dans la peinture, dans la musiq
1140
Et les plus grandes philosophies. Le rayonnement
de
leurs écoles d’art et de pensée s’étend sur la planète entière. « Pet
1141
ndes philosophies. Le rayonnement de leurs écoles
d’
art et de pensée s’étend sur la planète entière. « Petite Europe ? » L
1142
osophies. Le rayonnement de leurs écoles d’art et
de
pensée s’étend sur la planète entière. « Petite Europe ? » La Sibérie
1143
se, n’aient rien ajouté à ces gloires, ni que les
Six
aient décidé de vivre désormais dans un vase clos. La « Petite Europe
1144
ajouté à ces gloires, ni que les Six aient décidé
de
vivre désormais dans un vase clos. La « Petite Europe » a cherché son
1145
malgré l’hostilité, la méfiance ou l’indifférence
de
ses voisins et frères en civilisation. Ceux-ci seraient donc bien mal
1146
être assez grande pour leur laisser tout le temps
de
réfléchir et de recalculer leurs intérêts. Quant à ceux qui s’en vont
1147
e pour leur laisser tout le temps de réfléchir et
de
recalculer leurs intérêts. Quant à ceux qui s’en vont répétant qu’un
1148
ation plus étendue, ils ont contre eux les leçons
de
l’Histoire entière et tous les exemples vécus par trois-mille-cinq-ce
1149
les exemples vécus par trois-mille-cinq-cents ans
de
civilisation occidentale, États-Unis inclus. J’y reviendrai. m. Ro
1150
nis inclus. J’y reviendrai. m. Rougemont Denis
de
, « Grandeur de la Petite Europe », La IVe République des Pyrénées, Pa
1151
reviendrai. m. Rougemont Denis de, « Grandeur
de
la Petite Europe », La IVe République des Pyrénées, Pau, 5 décembre 1
1152
te Europe », La IVe République des Pyrénées, Pau,
5
décembre 1952, p. 1-2.
1153
, La IVe République des Pyrénées, Pau, 5 décembre
1952,
p. 1-2.
1154
Préface à Photo + scène (
1953
)n o Le Centre européen de la culture n’avait pas attendu le succès
1155
orté l’an dernier par l’Exposition internationale
de
photographies de scène, pour lui accorder dès le départ son patronage
1156
par l’Exposition internationale de photographies
de
scène, pour lui accorder dès le départ son patronage et son appui pra
1157
i pratique. Il salue cette année l’épanouissement
de
cette initiative. Si la musique reste une création spécifique de l’Eu
1158
tive. Si la musique reste une création spécifique
de
l’Europe, le théâtre est un langage mondial, mais qui exprime mieux q
1159
qui exprime mieux que tout autre le rythme intime
d’
une civilisation. Le décor a pris en Europe, depuis la Renaissance ita
1160
Enfin, l’art photographique dérive non seulement
de
nos techniques mais de cinq siècles de peinture occidentale. Une expo
1161
hique dérive non seulement de nos techniques mais
de
cinq siècles de peinture occidentale. Une exposition de photos de scè
1162
ue dérive non seulement de nos techniques mais de
cinq
siècles de peinture occidentale. Une exposition de photos de scène ac
1163
seulement de nos techniques mais de cinq siècles
de
peinture occidentale. Une exposition de photos de scène accomplissant
1164
q siècles de peinture occidentale. Une exposition
de
photos de scène accomplissant le pèlerinage de nos festivals de musiq
1165
de peinture occidentale. Une exposition de photos
de
scène accomplissant le pèlerinage de nos festivals de musique offre d
1166
on de photos de scène accomplissant le pèlerinage
de
nos festivals de musique offre donc un instantané saisissant de l’éta
1167
cène accomplissant le pèlerinage de nos festivals
de
musique offre donc un instantané saisissant de l’état présent des art
1168
ls de musique offre donc un instantané saisissant
de
l’état présent des arts en Occident. Une dizaine de pays prennent par
1169
ssant de l’état présent des arts en Occident. Une
dizaine
de pays prennent part à ce concours. Belle occasion pour les auteurs
1170
l’état présent des arts en Occident. Une dizaine
de
pays prennent part à ce concours. Belle occasion pour les auteurs et
1171
tteurs en scène, les photographes et les peintres
de
méditer non seulement sur leur métier propre, mais sur les surprises
1172
laboration. Belle occasion aussi, pour le public,
de
prendre conscience de ce fait que l’art n’est pas le produit d’une na
1173
sion aussi, pour le public, de prendre conscience
de
ce fait que l’art n’est pas le produit d’une nation mais de toute une
1174
science de ce fait que l’art n’est pas le produit
d’
une nation mais de toute une culture, — ici l’européenne. Quelques gra
1175
que l’art n’est pas le produit d’une nation mais
de
toute une culture, — ici l’européenne. Quelques grands thèmes ou arch
1176
l’Hamlet du Piccolo Teatro ; comparez-le à celui
de
John Gielgud ; voyez le Don Juan de Munich, comparez-le à celui d’Aix
1177
voyez le Don Juan de Munich, comparez-le à celui
d’
Aix, comme on peut comparer dans nos musées l’évolution d’un grand suj
1178
omme on peut comparer dans nos musées l’évolution
d’
un grand sujet au cours des âges, de l’Italie aux Pays-Bas, puis à la
1179
s l’évolution d’un grand sujet au cours des âges,
de
l’Italie aux Pays-Bas, puis à la France, puis à l’Allemagne — et vous
1180
puis à l’Allemagne — et vous verrez l’unité vraie
de
notre Europe : celle qui se réalise dans la diversité des langages, d
1181
er, pour les nouveaux départs que le monde attend
de
nous. n. Rougemont Denis de, « [Préface] Photo + scène », Photo +
1182
ue le monde attend de nous. n. Rougemont Denis
de
, « [Préface] Photo + scène », Photo + scène : deuxième exposition in
1183
hoto + scène : deuxième exposition internationale
de
photographie de théâtre, Illertissen, Sittler & Federmann, 1953,
1184
euxième exposition internationale de photographie
de
théâtre, Illertissen, Sittler & Federmann, 1953, p. 1-3. o. Non
1185
de théâtre, Illertissen, Sittler & Federmann,
1953,
p. 1-3. o. Non paginé, avec des traductions italienne, allemande, an
1186
Rudolf Kassner (
1953
)p Ces premiers textes de Kassner, lus en français dans une précieu
1187
Rudolf Kassner (1953)p Ces premiers textes
de
Kassner, lus en français dans une précieuse et simple traduction (de
1188
français dans une précieuse et simple traduction (
de
Jean Paulhan et Bernard Groethuysen, mais non signée)6, lorsque j’ess
1189
n Paulhan et Bernard Groethuysen, mais non signée)
6,
lorsque j’essaie de me remémorer l’espèce de choc que j’en reçus, à 2
1190
Groethuysen, mais non signée)6, lorsque j’essaie
de
me remémorer l’espèce de choc que j’en reçus, à 25 ans, un seul mot m
1191
gnée)6, lorsque j’essaie de me remémorer l’espèce
de
choc que j’en reçus, à 25 ans, un seul mot me vient à l’esprit : auto
1192
e me remémorer l’espèce de choc que j’en reçus, à
25
ans, un seul mot me vient à l’esprit : autorité. Avant d’avoir compri
1193
un seul mot me vient à l’esprit : autorité. Avant
d’
avoir compris ce qui était dit, j’avais reconnu la grandeur d’un ton,
1194
ris ce qui était dit, j’avais reconnu la grandeur
d’
un ton, d’un style, d’une impatience rigoureuse. Une manière « d’occup
1195
était dit, j’avais reconnu la grandeur d’un ton,
d’
un style, d’une impatience rigoureuse. Une manière « d’occuper la scèn
1196
j’avais reconnu la grandeur d’un ton, d’un style,
d’
une impatience rigoureuse. Une manière « d’occuper la scène » en trois
1197
style, d’une impatience rigoureuse. Une manière «
d’
occuper la scène » en trois répliques, d’imposer une allure à la fois
1198
rigoureuse. Une manière « d’occuper la scène » en
trois
répliques, d’imposer une allure à la fois calme et circonspecte, n’ad
1199
anière « d’occuper la scène » en trois répliques,
d’
imposer une allure à la fois calme et circonspecte, n’admettant que de
1200
dmettant que des gestes précis et maîtrisés, puis
de
la briser soudain par une cascade d’ellipses saisissantes qui laissai
1201
trisés, puis de la briser soudain par une cascade
d’
ellipses saisissantes qui laissaient le lecteur pantois, comme l’antiq
1202
: devine, ou je te dévore ! Une constante énergie
de
l’énoncé. Et une grande force d’exclusion. Seuls les mondains, pensai
1203
onstante énergie de l’énoncé. Et une grande force
d’
exclusion. Seuls les mondains, pensais-je, savent encore exclure avec
1204
ntolérance instantanée à l’égard du doute faible,
de
l’adjectif incertain, et en général des complaisances « artistes » ou
1205
réflexion passionnément originale. Et je tentais
de
décrire — dans le premier article, je crois bien, publié en France su
1206
, publié en France sur Kassner — « l’acuité lente
de
la réflexion, l’alliage précieux de hauteur, de rigueur et de pitié h
1207
’acuité lente de la réflexion, l’alliage précieux
de
hauteur, de rigueur et de pitié humaine, la retenue presque solennell
1208
e de la réflexion, l’alliage précieux de hauteur,
de
rigueur et de pitié humaine, la retenue presque solennelle mais qui s
1209
ion, l’alliage précieux de hauteur, de rigueur et
de
pitié humaine, la retenue presque solennelle mais qui sans cesse frôl
1210
mposaient au sens magique du mot, les « charmes »
de
cette prose et son autorité. Telle fut ma première impression. Vingt
1211
t son autorité. Telle fut ma première impression.
Vingt
ans plus tard, je la vois confirmée par un commerce rarement interrom
1212
re dont la difficulté, précisément, n’a pas cessé
de
me séduire et inciter. Je suppose qu’il est devenu banal de déplorer
1213
ire et inciter. Je suppose qu’il est devenu banal
de
déplorer l’obscurité des essais et dialogues de Kassner. Elle est pou
1214
l de déplorer l’obscurité des essais et dialogues
de
Kassner. Elle est pourtant la garantie de leur pouvoir, et ne saurait
1215
alogues de Kassner. Elle est pourtant la garantie
de
leur pouvoir, et ne saurait traduire, à mon avis, qu’une intention pr
1216
tention profondément délibérée. Car il s’agit ici
d’
une maïeutique, s’exerçant sur les mythes de l’âme. Je parlais tout à
1217
t ici d’une maïeutique, s’exerçant sur les mythes
de
l’âme. Je parlais tout à l’heure d’ellipses « saisissantes », et c’ét
1218
ur les mythes de l’âme. Je parlais tout à l’heure
d’
ellipses « saisissantes », et c’était au sens littéral, non pathétique
1219
s », et c’était au sens littéral, non pathétique,
de
l’adjectif. L’ellipse de pensée n’est nullement, chez Kassner, un pro
1220
ittéral, non pathétique, de l’adjectif. L’ellipse
de
pensée n’est nullement, chez Kassner, un procédé de rhétorique, une m
1221
pensée n’est nullement, chez Kassner, un procédé
de
rhétorique, une manière de sauter les évidences ou platitudes intermé
1222
ez Kassner, un procédé de rhétorique, une manière
de
sauter les évidences ou platitudes intermédiaires. Elle est un acte d
1223
es ou platitudes intermédiaires. Elle est un acte
de
vision. Nous montrant d’un seul coup, sans transition, plusieurs obje
1224
tume sépare, non seulement elle oblige à les voir
d’
un œil neuf, mais encore elle excite à découvrir l’angle particulier s
1225
re, non seulement elle oblige à les voir d’un œil
neuf
, mais encore elle excite à découvrir l’angle particulier sous lequel
1226
ir, proches ou confondues, son auteur. (Cet angle
de
vision étant son vrai « message ».) Elle propose donc à l’imagination
1227
qu’imposent aux néophytes les moines bouddhistes
de
la secte du zen. Le thème profond, omniprésent, de l’œuvre, c’est le
1228
e la secte du zen. Le thème profond, omniprésent,
de
l’œuvre, c’est le problème du Dieu-homme, d’où naît celui de la perso
1229
ent, de l’œuvre, c’est le problème du Dieu-homme,
d’
où naît celui de la personne, générateur de l’Occident. Problème ambig
1230
c’est le problème du Dieu-homme, d’où naît celui
de
la personne, générateur de l’Occident. Problème ambigu s’il en fût, e
1231
homme, d’où naît celui de la personne, générateur
de
l’Occident. Problème ambigu s’il en fût, et qui échappe par définitio
1232
on à la pensée systématique et discursive : point
de
réponse rationnelle au « cur deus homo » de saint Anselme. Kassner gr
1233
point de réponse rationnelle au « cur deus homo »
de
saint Anselme. Kassner gravite autour de ce mystère, l’approche par l
1234
ite autour de ce mystère, l’approche par le moyen
de
paraboles, de questions, de comparaisons. De quels autres moyens disp
1235
ce mystère, l’approche par le moyen de paraboles,
de
questions, de comparaisons. De quels autres moyens disposons-nous, qu
1236
approche par le moyen de paraboles, de questions,
de
comparaisons. De quels autres moyens disposons-nous, qui soient ordon
1237
oyen de paraboles, de questions, de comparaisons.
De
quels autres moyens disposons-nous, qui soient ordonnés à cette fin ?
1238
qui soient ordonnés à cette fin ? Ce sont moyens
de
poésie, c’est-à-dire d’âme. « La faculté principale de l’âme est de c
1239
ette fin ? Ce sont moyens de poésie, c’est-à-dire
d’
âme. « La faculté principale de l’âme est de comparer » remarque Monte
1240
ésie, c’est-à-dire d’âme. « La faculté principale
de
l’âme est de comparer » remarque Montesquieu, et il ajoute : « Ce qui
1241
-dire d’âme. « La faculté principale de l’âme est
de
comparer » remarque Montesquieu, et il ajoute : « Ce qui fait ordinai
1242
ombre d’autres, et qu’on nous fait découvrir tout
d’
un coup ce que nous ne pouvions espérer qu’après une grande lecture. »
1243
nt, tour à tour, à l’expression la plus virulente
de
sa vérité, et chacun nous convainc si bien que la conclusion ne saura
1244
moderne, ou les grandes intuitions tautologiques
de
l’Inde : par leurs images plutôt que leurs concepts ; sans conclusion
1245
ue leurs concepts ; sans conclusion. Mais l’angle
de
vision s’est imposé. Et l’imagination, irrésistiblement, s’oriente ve
1246
, s’oriente vers le mystère crucial. S’agirait-il
d’
une théologie ? Certainement non. Kassner veut voir. D’une gnose alors
1247
théologie ? Certainement non. Kassner veut voir.
D’
une gnose alors ? On pourrait le penser. Mais ceux qui se font de la p
1248
rs ? On pourrait le penser. Mais ceux qui se font
de
la poésie une idée finalement plus favorable au « Livre de Job » et a
1249
sie une idée finalement plus favorable au « Livre
de
Job » et aux proverbes zen qu’à Lamartine ou même à Rilke, reconnaîtr
1250
reconnaîtront dans les dialogues et les paraboles
de
Kassner son irréfutable présence. 6. Les Éléments de la grandeur h
1251
paraboles de Kassner son irréfutable présence.
6.
Les Éléments de la grandeur humaine, Paris, Gallimard, 1931, Collect
1252
sner son irréfutable présence. 6. Les Éléments
de
la grandeur humaine, Paris, Gallimard, 1931, Collection blanche, 222
1253
léments de la grandeur humaine, Paris, Gallimard,
1931,
Collection blanche, 222 Seiten, enthält u. a. die zuerst in der von P
1254
aine, Paris, Gallimard, 1931, Collection blanche,
222
Seiten, enthält u. a. die zuerst in der von P. Valéry, Valery Larbaud
1255
schienenen Werke Rudolf Kassners : « Des éléments
de
la grandeur humaine », « La chimère », « Le lépreux », « Le Christ et
1256
vidu et l’homme collectif ». p. Rougemont Denis
de
, « Rudolf Kassner », Rudolf Kassner zum achtzigsten Geburtstag, Zuric
1257
r zum achtzigsten Geburtstag, Zurich, E. Rentsch,
1953,
p. 80-82.
1258
atomique ou la fin dans le commencement (janvier
1953
)q r Les fins d’une civilisation ne sont pas visibles à son terme,
1259
ans le commencement (janvier 1953)q r Les fins
d’
une civilisation ne sont pas visibles à son terme, et rien ne se passe
1260
on meurt, c’est justement qu’elle a perdu le sens
de
ses fins ou qu’elle renonce à les saisir. De même, les origines d’une
1261
’elle renonce à les saisir. De même, les origines
d’
une civilisation ne doivent pas être recherchées dans son passé le plu
1262
lles ne sont saisissables que dans la dialectique
de
ses succès et de ses échecs, c’est-à-dire dans les moments mêmes où s
1263
issables que dans la dialectique de ses succès et
de
ses échecs, c’est-à-dire dans les moments mêmes où ses fins deviennen
1264
sans oublier que l’inverse est aussi vrai. Ainsi
de
l’Europe, qui est une culture, foyer de toute la civilisation occiden
1265
ai. Ainsi de l’Europe, qui est une culture, foyer
de
toute la civilisation occidentale : ni dans le temps ni dans l’espace
1266
, car au contraire de ce que l’on pourrait croire
de
la plupart des civilisations antiques, asiatiques, précolombiennes ou
1267
asiatiques, précolombiennes ou africaines, celle
de
l’Europe ne saurait être interprétée ni définie par un ensemble de me
1268
urait être interprétée ni définie par un ensemble
de
mesures sacrées, encore moins par quelque système rendant compte de s
1269
, encore moins par quelque système rendant compte
de
son unité. Si l’on veut établir son passeport pour l’Histoire, les do
1270
atéralement antagonistes. L’Europe est le produit
de
ces antagonismes, convergeant au carrefour hasardeux d’une Histoire n
1271
antagonismes, convergeant au carrefour hasardeux
d’
une Histoire née comme telle de trois mots du Credo : « sous Ponce Pil
1272
arrefour hasardeux d’une Histoire née comme telle
de
trois mots du Credo : « sous Ponce Pilate ». Les Pères ne savaient pa
1273
efour hasardeux d’une Histoire née comme telle de
trois
mots du Credo : « sous Ponce Pilate ». Les Pères ne savaient pas que
1274
Pilate ». Les Pères ne savaient pas que le dogme
de
l’incarnation — c’est-à-dire du vrai Dieu et vrai homme à la fois — f
1275
oute la logique antinomique, dont l’un des points
d’
éclatement naturel (ou diabolique) serait un jour Hiroshima ; ni que l
1276
lique) serait un jour Hiroshima ; ni que le dogme
de
la Trinité — trois fonctions personnelles en un seul Créateur — fonda
1277
jour Hiroshima ; ni que le dogme de la Trinité —
trois
fonctions personnelles en un seul Créateur — fondait ou refondait la
1278
ns juridiques, éthiques et sociales qui découlent
de
l’idée de personne à la fois libre et responsable, distincte et relié
1279
ues, éthiques et sociales qui découlent de l’idée
de
personne à la fois libre et responsable, distincte et reliée, unique
1280
versait tout) se trouva définir, aux grands jours
de
Nicée, le type de réalité que des siècles d’Europe entreprendraient d
1281
rouva définir, aux grands jours de Nicée, le type
de
réalité que des siècles d’Europe entreprendraient de « vérifier » ou
1282
ours de Nicée, le type de réalité que des siècles
d’
Europe entreprendraient de « vérifier » ou de reconnaître, même quand
1283
réalité que des siècles d’Europe entreprendraient
de
« vérifier » ou de reconnaître, même quand ils essaieraient de l’élim
1284
cles d’Europe entreprendraient de « vérifier » ou
de
reconnaître, même quand ils essaieraient de l’éliminer. Tant il est v
1285
» ou de reconnaître, même quand ils essaieraient
de
l’éliminer. Tant il est vrai que les polémiques sur le principe de co
1286
nt il est vrai que les polémiques sur le principe
de
contradiction et le tiers exclus sans lesquelles les recherches nuclé
1287
otype ou, pour mieux dire : la décisive épiphanie
de
leur archétype. La réalité se définit, pour une civilisation donnée,
1288
finit, pour une civilisation donnée, par le champ
de
recherches qu’instituent certaines options fondamentales : pour l’Ori
1289
oir la nature agonique, et non point rationnelle,
de
la recherche, de la création ou de la connaissance dite scientifique.
1290
nique, et non point rationnelle, de la recherche,
de
la création ou de la connaissance dite scientifique. La complicité fo
1291
t rationnelle, de la recherche, de la création ou
de
la connaissance dite scientifique. La complicité fondamentale du suje
1292
entifique. La complicité fondamentale du sujet et
de
l’anti-sujet affrontés, et leur interaction antinomique, nous apparai
1293
omique, nous apparaissent dans le détail très fin
de
toutes nos sciences, de la logique mathématique à la médecine et de l
1294
t dans le détail très fin de toutes nos sciences,
de
la logique mathématique à la médecine et de la physique à la psycholo
1295
nces, de la logique mathématique à la médecine et
de
la physique à la psychologie. Rien n’existe, au sens fort, en dehors
1296
lutte, dont le réel figure la résultante. Au-delà
de
tout idéalisme ou réalisme, de tout spiritualisme ou matérialisme, le
1297
ésultante. Au-delà de tout idéalisme ou réalisme,
de
tout spiritualisme ou matérialisme, le réel vivant — faut-il dire le
1298
insi comme la frontière (au sens Far West du mot)
de
deux systèmes énergétiques qui sont comme l’ombre l’une de l’autre et
1299
i comme la frontière (au sens Far West du mot) de
deux
systèmes énergétiques qui sont comme l’ombre l’une de l’autre et dont
1300
ystèmes énergétiques qui sont comme l’ombre l’une
de
l’autre et dont l’affrontement ou l’étreinte crée le jour et la nuit
1301
e et le néant, l’actuel et le virtuel. Là-dessus,
trois
observations : 1) La nature dialectique du réel vivant, intuitivement
1302
el et le virtuel. Là-dessus, trois observations :
1
) La nature dialectique du réel vivant, intuitivement perçue par les a
1303
les aventuriers des arts, explique l’incertitude
de
leur vocabulaire. Adonnés à la même recherche, ils nous parlent tantô
1304
nnés à la même recherche, ils nous parlent tantôt
de
musique concrète ou de peinture abstraite, et les deux adjectifs sont
1305
e, ils nous parlent tantôt de musique concrète ou
de
peinture abstraite, et les deux adjectifs sont évidemment faux : on p
1306
musique concrète ou de peinture abstraite, et les
deux
adjectifs sont évidemment faux : on pourrait aussi bien — ou aussi ma
1307
nt tantôt qu’ils découvrent ou qu’ils inventent ;
deux
descriptions apparemment contradictoires et notoirement insuffisante
1308
ment contradictoires et notoirement insuffisantes
d’
un acte de l’esprit qui est pourtant bien le même, mais qu’il nous res
1309
adictoires et notoirement insuffisantes d’un acte
de
l’esprit qui est pourtant bien le même, mais qu’il nous reste à défin
1310
me, mais qu’il nous reste à définir. (Concevoir a
deux
sens aussi, mais en un mot.) 2) L’éclatement d’une bombe H vérifie ce
1311
r. (Concevoir a deux sens aussi, mais en un mot.)
2
) L’éclatement d’une bombe H vérifie cette harmonie préétablie, ou ce
1312
deux sens aussi, mais en un mot.) 2) L’éclatement
d’
une bombe H vérifie cette harmonie préétablie, ou ce mariage de notre
1313
vérifie cette harmonie préétablie, ou ce mariage
de
notre esprit et du cosmos pour le meilleur et pour le pire sans quoi
1314
cience ne serait possible. Cette même possibilité
de
réciprocité créatrice ou conformatrice se trouve justifier, par aille
1315
ice se trouve justifier, par ailleurs, l’ambition
d’
une peinture dite abstraite, ambition qui n’est point ou ne doit pas ê
1316
mbition qui n’est point ou ne doit pas être celle
de
coïncider, soit avec des structures préformées de notre esprit, soit
1317
de coïncider, soit avec des structures préformées
de
notre esprit, soit avec quelque loi formatrice du cosmos, mais d’illu
1318
soit avec quelque loi formatrice du cosmos, mais
d’
illustrer l’instant de leur amour. C’est celui de leur haine chez beau
1319
formatrice du cosmos, mais d’illustrer l’instant
de
leur amour. C’est celui de leur haine chez beaucoup de mauvais peintr
1320
d’illustrer l’instant de leur amour. C’est celui
de
leur haine chez beaucoup de mauvais peintres : on parle alors de dési
1321
hez beaucoup de mauvais peintres : on parle alors
de
désintégration — mais tout ce vocabulaire est à reprendre. 3) L’Occid
1322
ation — mais tout ce vocabulaire est à reprendre.
3
) L’Occident ne saurait se désintégrer, comme beaucoup le redoutent ou
1323
appelé. Mais il est en train de franchir le seuil
d’
une connaissance nouvelle. La découverte (ou l’invention ?) de l’antim
1324
ssance nouvelle. La découverte (ou l’invention ?)
de
l’antimatière pourrait marquer symboliquement ce seuil. Rien de plus
1325
s congénial au mouvement dialectique, au complexe
de
tensions où naquit l’Occident, tout avide de systèmes qui ne l’apaise
1326
lexe de tensions où naquit l’Occident, tout avide
de
systèmes qui ne l’apaiseront jamais, qui le consument et dont il vit.
1327
e consument et dont il vit. q. Rougemont Denis
de
, « Des conciles à la bombe atomique ou la fin dans le commencement »,
1328
ncement », The Alliance Review, Alliance, janvier
1953,
p. 1. r. Le texte français est publié avec une traduction anglaise e
1329
signifié la fin des religions et des magies, nées
de
la peur, qu’il a permis le développement de la science, recherche imp
1330
nées de la peur, qu’il a permis le développement
de
la science, recherche impitoyable de la vérité. Au moment où la physi
1331
éveloppement de la science, recherche impitoyable
de
la vérité. Au moment où la physique actuelle retire à la matière ses
1332
uelle retire à la matière ses qualités classiques
de
vraie matière pour lui accorder les attributs que les matérialistes p
1333
tributs que les matérialistes pensaient être ceux
de
l’esprit, Denis de Rougemont nous rappelle, fort opportunément, que l
1334
Suisse, Europe et neutralité (
6
mars 1953)s La thèse que je voudrais défendre devant vous tient en
1335
Suisse, Europe et neutralité (6 mars
1953
)s La thèse que je voudrais défendre devant vous tient en deux phra
1336
èse que je voudrais défendre devant vous tient en
deux
phrases : 1. Une discussion sur l’abandon volontaire de notre neutral
1337
rais défendre devant vous tient en deux phrases :
1.
Une discussion sur l’abandon volontaire de notre neutralité serait au
1338
ases : 1. Une discussion sur l’abandon volontaire
de
notre neutralité serait aujourd’hui sans objet, et nous devons donc l
1339
rd’hui sans objet, et nous devons donc l’éviter ;
2.
La neutralité ne doit pas servir de prétexte à la Suisse pour refuser
1340
nc l’éviter ; 2. La neutralité ne doit pas servir
de
prétexte à la Suisse pour refuser de collaborer à l’union européenne.
1341
t pas servir de prétexte à la Suisse pour refuser
de
collaborer à l’union européenne. I En effet, pour que la Suisse
1342
our refuser de collaborer à l’union européenne.
I
En effet, pour que la Suisse en vienne à décider qu’elle abandonne
1343
re contre la Suisse, — soit une autorité fédérale
de
l’Europe à laquelle nous puissions adhérer. L’une ou l’autre de ces c
1344
laquelle nous puissions adhérer. L’une ou l’autre
de
ces conditions étant donnée entraînerait automatiquement l’abandon de
1345
ant donnée entraînerait automatiquement l’abandon
de
notre neutralité, sans qu’il y ait lieu dans discuter dans le premier
1346
s le second cas, comme une conséquence accessoire
de
notre entrée dans un corps politique plus large, entrée qui aurait ét
1347
s large, entrée qui aurait été le véritable objet
de
la discussion avant le vote populaire. Mais ni l’une ni l’autre de ce
1348
avant le vote populaire. Mais ni l’une ni l’autre
de
ces conditions n’est présente. Si nous voulions aujourd’hui renoncer
1349
ets pratiques ? Dans l’état présent des choses et
de
l’opinion publique, chez nous et dans les pays voisins, un tel geste
1350
voisins, un tel geste paraîtrait à la fois dénué
de
sagesse et d’efficacité. Il resterait gratuit, au pire sens de ce ter
1351
el geste paraîtrait à la fois dénué de sagesse et
d’
efficacité. Il resterait gratuit, au pire sens de ce terme. On ne voit
1352
d’efficacité. Il resterait gratuit, au pire sens
de
ce terme. On ne voit donc pas d’objet concret à une discussion, aujou
1353
it, au pire sens de ce terme. On ne voit donc pas
d’
objet concret à une discussion, aujourd’hui, sur l’abandon de notre ne
1354
cret à une discussion, aujourd’hui, sur l’abandon
de
notre neutralité. Dans ces conditions, comment se fait-il que la ques
1355
es conditions, comment se fait-il que la question
de
la neutralité soit sans cesse reposée depuis le fin de la guerre, et
1356
neutralité soit sans cesse reposée depuis le fin
de
la guerre, et menace de devenir un sujet de discorde entre les Conféd
1357
sse reposée depuis le fin de la guerre, et menace
de
devenir un sujet de discorde entre les Confédérés ? Cela tient à deux
1358
e fin de la guerre, et menace de devenir un sujet
de
discorde entre les Confédérés ? Cela tient à deux causes bien précise
1359
t de discorde entre les Confédérés ? Cela tient à
deux
causes bien précises, extérieures à la Suisse, qui sont l’impérialism
1360
ont l’impérialisme bolchévique et la construction
de
l’Europe, et à une troisième cause, intérieure celle-là, qui est la m
1361
et ses ennemis. À cela, je répondrai que le choix
de
notre peuple est fait. Le parti stalinien ne peut réunir chez nous qu
1362
. Le parti stalinien ne peut réunir chez nous que
2,5
% des voix électorales. Le Conseil fédéral a pris des mesures de défe
1363
lectorales. Le Conseil fédéral a pris des mesures
de
défense contre les staliniens (exclusions de fonctionnaires, actions
1364
ures de défense contre les staliniens (exclusions
de
fonctionnaires, actions légales, etc.). Si nous disions que nous rest
1365
ers à ne pas nous croire. En fait, ils ne cessent
de
répéter que la Suisse a cessé d’être neutre : si nous décidions offic
1366
, ils ne cessent de répéter que la Suisse a cessé
d’
être neutre : si nous décidions officiellement d’abandonner notre neut
1367
d’être neutre : si nous décidions officiellement
d’
abandonner notre neutralité, rien ne serait donc changé à cet égard. N
1368
é, rien ne serait donc changé à cet égard. Nombre
de
pays qui ne sont pas neutres ont fait beaucoup moins que nous pour lu
1369
est ainsi, nous dira-t-on, pourquoi refusez-vous
de
participer à la défense commune de l’Europe ? La réponse est qu’en fa
1370
i refusez-vous de participer à la défense commune
de
l’Europe ? La réponse est qu’en fait, nous sommes presque les seuls à
1371
tinent, et que nous lui consacrons une proportion
de
notre budget national beaucoup plus forte que tous les autres pays. I
1372
pays. Ici encore, on ne voit pas ce que l’abandon
de
notre neutralité pourrait changer à la situation. Tout ceci revient-i
1373
on. Tout ceci revient-il à dire que la neutralité
de
la Suisse ne pose aucune question réelle ? Certes non. Notre neutrali
1374
Certes non. Notre neutralité est devenue un objet
de
discussions par la seule faute de ceux qui s’en réclament à tout prop
1375
ent à tout propos et hors de propos, pour refuser
de
faire face à la situation concrète de l’Europe et de la Suisse en Eur
1376
our refuser de faire face à la situation concrète
de
l’Europe et de la Suisse en Europe. Je précise : ce ne sont pas les p
1377
faire face à la situation concrète de l’Europe et
de
la Suisse en Europe. Je précise : ce ne sont pas les partisans de la
1378
Europe. Je précise : ce ne sont pas les partisans
de
la fédération européenne, les Schuman, les Spaak, les de Gasperi, les
1379
édération européenne, les Schuman, les Spaak, les
de
Gasperi, les Adenauer, qui nous ont jamais sommés de renoncer à la ne
1380
Gasperi, les Adenauer, qui nous ont jamais sommés
de
renoncer à la neutralité, mais ce sont les partisans de la neutralité
1381
oncer à la neutralité, mais ce sont les partisans
de
la neutralité-tabou qui nous somment, nous fédéralistes, de renoncer
1382
ralité-tabou qui nous somment, nous fédéralistes,
de
renoncer à toute idée de construction européenne. Ce n’est pas nous q
1383
ment, nous fédéralistes, de renoncer à toute idée
de
construction européenne. Ce n’est pas nous qui opposons fédération de
1384
péenne. Ce n’est pas nous qui opposons fédération
de
l’Europe et neutralité suisse, c’est eux. Et dès lors la neutralité d
1385
problème épineux. J’aborde ici la seconde partie
de
ma thèse. II En tant que professionnel de l’idée européenne, j’
1386
x. J’aborde ici la seconde partie de ma thèse.
II
En tant que professionnel de l’idée européenne, j’ai pu mesurer qu
1387
e de ma thèse. II En tant que professionnel
de
l’idée européenne, j’ai pu mesurer quotidiennement, depuis 5 ans, les
1388
ropéenne, j’ai pu mesurer quotidiennement, depuis
5
ans, les résistances têtues que l’on oppose, en Suisse, à notre actio
1389
culture, à Genève, s’est vu refuser toute espèce
de
subvention (en argent ou en facilités habituelles données aux institu
1390
es données aux institutions internationales) pour
deux
raisons : la première, c’est que le Centre est au service de l’idée e
1391
: la première, c’est que le Centre est au service
de
l’idée européenne ; la seconde, c’est que son directeur a parlé de l’
1392
nne ; la seconde, c’est que son directeur a parlé
de
l’Europe dans son discours du 1er août 1952 à Genève (sans même prono
1393
irecteur a parlé de l’Europe dans son discours du
1er
août 1952 à Genève (sans même prononcer le mot de neutralité). Il n’e
1394
a parlé de l’Europe dans son discours du 1er août
1952
à Genève (sans même prononcer le mot de neutralité). Il n’en a pas fa
1395
er août 1952 à Genève (sans même prononcer le mot
de
neutralité). Il n’en a pas fallu davantage pour que le Conseil fédéra
1396
tage pour que le Conseil fédéral, puis le Conseil
d’
État de Genève, aient froidement refusé, l’un après l’autre, d’aider l
1397
ève, aient froidement refusé, l’un après l’autre,
d’
aider le Centre en aucune manière. Les prétextes allégués sont vagues,
1398
sincérité pose des problèmes. Les vraies raisons
de
ces deux refus, je le sais, sont d’un ordre psychologique bien plus e
1399
ité pose des problèmes. Les vraies raisons de ces
deux
refus, je le sais, sont d’un ordre psychologique bien plus encore que
1400
raies raisons de ces deux refus, je le sais, sont
d’
un ordre psychologique bien plus encore que politique : toute personne
1401
: toute personne physique ou morale qui s’occupe
de
l’Europe, en Suisse, se voit automatiquement « mise à l’index ». L’ar
1402
utomatiquement « mise à l’index ». L’arrière-plan
de
cette étrange mentalité, c’est la croyance en la neutralité-tabou. On
1403
éclairé restent sans prises sur l’épaisse inertie
de
pareils préjugés. J’ai cité cet exemple précis pour définir une situa
1404
er ? Je vous propose, pour aujourd’hui, une série
de
dix arguments, qui peuvent fournir les thèmes d’une campagne efficace
1405
? Je vous propose, pour aujourd’hui, une série de
dix
arguments, qui peuvent fournir les thèmes d’une campagne efficace :
1406
de dix arguments, qui peuvent fournir les thèmes
d’
une campagne efficace : Les fédéralistes ne demandent pas l’abandon
1407
e : Les fédéralistes ne demandent pas l’abandon
de
la neutralité, mesure qui serait actuellement sans effet. Ils laissen
1408
sans effet. Ils laissent aux communistes le soin
de
verser des larmes de crocodile sur cet abandon prétendu. Ils estiment
1409
sent aux communistes le soin de verser des larmes
de
crocodile sur cet abandon prétendu. Ils estiment que la neutralité re
1410
a Suisse un atout, qu’elle ne doit pas jouer sans
d’
impérieuses raisons. Les fédéralistes rappellent que la Suisse est si
1411
la Suisse est située, géographiquement, au centre
de
l’Europe ; qu’elle a pris naissance un peu après le milieu de l’histo
1412
; qu’elle a pris naissance un peu après le milieu
de
l’histoire de l’Europe ; que son sort dépend donc à tous égards du so
1413
is naissance un peu après le milieu de l’histoire
de
l’Europe ; que son sort dépend donc à tous égards du sort de l’Europe
1414
; que son sort dépend donc à tous égards du sort
de
l’Europe. (Même si M. Rappard démontre que ses échanges ne sont que d
1415
M. Rappard démontre que ses échanges ne sont que
de
40 % avec les six pays du plan Schuman, nous ne sommes pas prêts à ju
1416
Rappard démontre que ses échanges ne sont que de
40
% avec les six pays du plan Schuman, nous ne sommes pas prêts à juger
1417
tre que ses échanges ne sont que de 40 % avec les
six
pays du plan Schuman, nous ne sommes pas prêts à juger négligeable ce
1418
sommes pas prêts à juger négligeable ce client n°
1
!) Les fédéralistes font remarquer que les grands industriels suisses
1419
grands industriels suisses qui souriaient, il y a
2
ans, quand on leur parlait du plan Schuman, s’inquiètent de le voir r
1420
and on leur parlait du plan Schuman, s’inquiètent
de
le voir réalisé sans eux. Cette bonne leçon de choses doit porter. Le
1421
nt de le voir réalisé sans eux. Cette bonne leçon
de
choses doit porter. Les fédéralistes constatent que rien ne s’oppose
1422
constatent que rien ne s’oppose dans notre statut
de
neutres à des conversations avec la Haute-Autorité de Luxembourg, con
1423
pas attendu les Américains pour proclamer depuis
1933
la nécessité d’une Europe unie. Ils sont seuls à entretenir en Suisse
1424
méricains pour proclamer depuis 1933 la nécessité
d’
une Europe unie. Ils sont seuls à entretenir en Suisse des contacts ét
1425
s qui ont obtenu la création du noyau fédéral des
six
pays du pool charbon-acier. Concernant la défense de l’Europe, les fé
1426
l’Europe, les fédéralistes rappellent l’existence
de
15 divisions suisses (la moitié de ce que demandait Eisenhower pour t
1427
urope, les fédéralistes rappellent l’existence de
15
divisions suisses (la moitié de ce que demandait Eisenhower pour tout
1428
nt l’existence de 15 divisions suisses (la moitié
de
ce que demandait Eisenhower pour toute l’Europe) et la nécessité tech
1429
et la nécessité technique, pour tout état-major,
de
se concerter avec les voisins. Les fédéralistes suisses estiment que
1430
e notre constitution fédérale peut et doit servir
de
modèle pour une Europe fédérée, dans le respect des diversités nation
1431
construction, et que la vraie question n’est pas
d’
européaniser la Suisse, mais plutôt d’helvétiser l’Europe. Les fédéral
1432
n n’est pas d’européaniser la Suisse, mais plutôt
d’
helvétiser l’Europe. Les fédéralistes sont convaincus que notre neutra
1433
Europe sera fédérée : à ce moment seulement, mais
de
toute évidence, la neutralité suisse perdra toute raison d’être. Les
1434
vidence, la neutralité suisse perdra toute raison
d’
être. Les fédéralistes européens de Suisse entendent rester les porteu
1435
a toute raison d’être. Les fédéralistes européens
de
Suisse entendent rester les porteurs, parmi leurs compatriotes, de ce
1436
nt rester les porteurs, parmi leurs compatriotes,
de
cette vérité fondamentale, mais qu’une opinion somnolente et des magi
1437
es magistrats aux vues courtes s’efforcent encore
de
ne pas regarder en face : la Suisse ne sera pas sauvée si l’Europe es
1438
demain, faute de s’unir. s. Rougemont Denis
de
, « Suisse, Europe et neutralité », L’Essor, Genève, 6 mars 1953, p. 4
1439
Suisse, Europe et neutralité », L’Essor, Genève,
6
mars 1953, p. 4-5.
1440
, Europe et neutralité », L’Essor, Genève, 6 mars
1953,
p. 4-5.
1441
Unité et diversité
de
l’Europe (juin 1953)t Beaucoup pensent aujourd’hui que l’Europe es
1442
Unité et diversité de l’Europe (juin
1953
)t Beaucoup pensent aujourd’hui que l’Europe est trop diverse pour
1443
uelle au Moyen Âge et elle avait atteint au début
de
ce siècle une espèce d’unité matérielle : le voyageur pouvait la trav
1444
le avait atteint au début de ce siècle une espèce
d’
unité matérielle : le voyageur pouvait la traverser de Madrid à Berlin
1445
ité matérielle : le voyageur pouvait la traverser
de
Madrid à Berlin ou d’Athènes à Stockholm sans souci de « devises » ni
1446
yageur pouvait la traverser de Madrid à Berlin ou
d’
Athènes à Stockholm sans souci de « devises » ni de passeport : la car
1447
drid à Berlin ou d’Athènes à Stockholm sans souci
de
« devises » ni de passeport : la carte de visite suffisait. Mais aujo
1448
’Athènes à Stockholm sans souci de « devises » ni
de
passeport : la carte de visite suffisait. Mais aujourd’hui ! Barrière
1449
s souci de « devises » ni de passeport : la carte
de
visite suffisait. Mais aujourd’hui ! Barrières douanières, quotas, vi
1450
rselle, nationalismes exacerbés par les souvenirs
de
deux guerres : où trouver dans tout cela un dénominateur commun, et q
1451
lle, nationalismes exacerbés par les souvenirs de
deux
guerres : où trouver dans tout cela un dénominateur commun, et que ve
1452
un dénominateur commun, et que venez-vous parler
d’
union, quand l’unité foncière a disparu ? Il serait fou, et il est imp
1453
e a disparu ? Il serait fou, et il est impossible
de
fondre nos diversités de langues, de religions, de nationalités, de p
1454
ou, et il est impossible de fondre nos diversités
de
langues, de religions, de nationalités, de partis politiques et d’int
1455
t impossible de fondre nos diversités de langues,
de
religions, de nationalités, de partis politiques et d’intérêts, dans
1456
e fondre nos diversités de langues, de religions,
de
nationalités, de partis politiques et d’intérêts, dans une espèce d’e
1457
rsités de langues, de religions, de nationalités,
de
partis politiques et d’intérêts, dans une espèce d’espéranto totalita
1458
ligions, de nationalités, de partis politiques et
d’
intérêts, dans une espèce d’espéranto totalitaire… Cette vision pessim
1459
partis politiques et d’intérêts, dans une espèce
d’
espéranto totalitaire… Cette vision pessimiste de notre sort repose su
1460
d’espéranto totalitaire… Cette vision pessimiste
de
notre sort repose sur deux graves confusions. En effet, l’absence act
1461
Cette vision pessimiste de notre sort repose sur
deux
graves confusions. En effet, l’absence actuelle d’union ne signifie p
1462
x graves confusions. En effet, l’absence actuelle
d’
union ne signifie pas que l’unité millénaire de l’Europe n’existe plus
1463
le d’union ne signifie pas que l’unité millénaire
de
l’Europe n’existe plus. Ensuite, il faudrait distinguer entre nos div
1464
duit nos vraies richesses, et la meilleure raison
de
nous fédérer, c’est que seule l’union fédérale peut les sauver et les
1465
es sauver et les garantir dans notre siècle. Mais
d’
où proviennent ces confusions courantes ? Ce qui fausse notre optique
1466
enu plus tard l’esprit nationaliste, pour aboutir
de
nos jours à l’esprit totalitaire, nous a fait croire que l’unité et l
1467
t sacrées ; et qu’en conséquence l’union fédérale
de
nos pays, sauvegardant leurs diversités, était une rêverie condamnabl
1468
diversités, était une rêverie condamnable doublée
d’
une erreur de logique. Il est aisé de répondre à ces sophismes par un
1469
tait une rêverie condamnable doublée d’une erreur
de
logique. Il est aisé de répondre à ces sophismes par un exemple bien
1470
able doublée d’une erreur de logique. Il est aisé
de
répondre à ces sophismes par un exemple bien connu, et par un rappel
1471
ique ou non, la Suisse existe, réfutation vivante
de
toutes les théories nationalo-totalitaires. Et l’histoire nous enseig
1472
pendant un siècle et demi sur les deux-mille ans
de
notre ère. Le phénomène de la nation fermée, imposant la limite d’une
1473
sur les deux-mille ans de notre ère. Le phénomène
de
la nation fermée, imposant la limite d’une langue à des réalités tout
1474
phénomène de la nation fermée, imposant la limite
d’
une langue à des réalités toutes différentes, comme l’économie, les éc
1475
la géographie, se réduit à une tranche très mince
de
l’immense aventure humaine. Ce manque d’épaisseur historique du natio
1476
ès mince de l’immense aventure humaine. Ce manque
d’
épaisseur historique du nationalisme suffirait à nous rendre méfiants,
1477
uffirait à nous rendre méfiants, lorsqu’il s’agit
de
porter un jugement sur l’avenir, comme dans le cas de l’union de l’Eu
1478
orter un jugement sur l’avenir, comme dans le cas
de
l’union de l’Europe. Mais il y a plus. Il est parfaitement clair que
1479
gement sur l’avenir, comme dans le cas de l’union
de
l’Europe. Mais il y a plus. Il est parfaitement clair que la nation,
1480
on, au sens dix-neuviémiste du mot, est une forme
d’
association périmée à bien des égards. Il n’est pas une nation de l’Eu
1481
érimée à bien des égards. Il n’est pas une nation
de
l’Europe d’aujourd’hui qui puisse se dire indépendante, soit pour sa
1482
n des égards. Il n’est pas une nation de l’Europe
d’
aujourd’hui qui puisse se dire indépendante, soit pour sa production,
1483
te, soit pour sa production, soit du point de vue
de
sa défense. Qu’en est-il du point de vue de la culture, qui fut l’élé
1484
e vue de sa défense. Qu’en est-il du point de vue
de
la culture, qui fut l’élément décisif pour la formation de nos nation
1485
ture, qui fut l’élément décisif pour la formation
de
nos nations ? Les faits historiques les mieux établis et les plus fac
1486
s et les plus faciles à vérifier dénoncent le peu
d’
importance réelle de nos différences nationales. Pour peu que l’on com
1487
s à vérifier dénoncent le peu d’importance réelle
de
nos différences nationales. Pour peu que l’on compare l’ensemble des
1488
es. Pour peu que l’on compare l’ensemble des pays
de
l’Europe à d’autres continents, comme l’Asie, l’Afrique ou l’URSS, le
1489
communs à tous nos peuples apparaissent aussitôt
mille
fois plus importants que nos différenciations récentes. Nous voyons t
1490
, avec toutes ses subdivisions qui portent un air
de
famille. (Les textes des liturgies de communion romaine, anglicane, l
1491
tent un air de famille. (Les textes des liturgies
de
communion romaine, anglicane, luthérienne et même calviniste ont tous
1492
et l’autre cas, le langage est le même, il dérive
de
la théologie, fût-ce à travers Hegel et Marx. De Kierkegaard à Heideg
1493
de la théologie, fût-ce à travers Hegel et Marx.
De
Kierkegaard à Heidegger, puis Sartre, les mêmes concepts, proprement
1494
es concepts, proprement impensables hors du champ
de
l’influence chrétienne, se groupent, s’opposent et se regroupent. Nos
1495
groupent, s’opposent et se regroupent. Nos formes
d’
expression sont identiques, qu’il s’agisse du sonnet, dans toutes les
1496
qu’il s’agisse du sonnet, dans toutes les langues
d’
Europe, du roman (dérivé de Tristan), du tableau de chevalet ou de l’o
1497
ans toutes les langues d’Europe, du roman (dérivé
de
Tristan), du tableau de chevalet ou de l’opéra, du concerto, de la sy
1498
’Europe, du roman (dérivé de Tristan), du tableau
de
chevalet ou de l’opéra, du concerto, de la symphonie ou de la façade
1499
an (dérivé de Tristan), du tableau de chevalet ou
de
l’opéra, du concerto, de la symphonie ou de la façade d’un palais. No
1500
u tableau de chevalet ou de l’opéra, du concerto,
de
la symphonie ou de la façade d’un palais. Nos modèles d’organisation
1501
et ou de l’opéra, du concerto, de la symphonie ou
de
la façade d’un palais. Nos modèles d’organisation de la vie sociale o
1502
éra, du concerto, de la symphonie ou de la façade
d’
un palais. Nos modèles d’organisation de la vie sociale ou politique d
1503
ymphonie ou de la façade d’un palais. Nos modèles
d’
organisation de la vie sociale ou politique dérivent tous de Rome et d
1504
la façade d’un palais. Nos modèles d’organisation
de
la vie sociale ou politique dérivent tous de Rome et de l’Église : au
1505
tion de la vie sociale ou politique dérivent tous
de
Rome et de l’Église : au commencement furent la paroisse et la commun
1506
vie sociale ou politique dérivent tous de Rome et
de
l’Église : au commencement furent la paroisse et la commune, totaleme
1507
t la paroisse et la commune, totalement inconnues
de
l’Orient ; les synodes et le sénat, d’où viennent nos parlements. Rie
1508
inconnues de l’Orient ; les synodes et le sénat,
d’
où viennent nos parlements. Rien ne se ressemble plus que nos folklore
1509
s, prétendus « nationaux » par la science démodée
de
Herder et des romantiques mais dont la science actuelle tire au contr
1510
illeurs arguments pour démontrer l’unité foncière
de
nos peuples. Ni la musique ni la peinture, créations typiques de l’Eu
1511
Ni la musique ni la peinture, créations typiques
de
l’Europe, n’ont jamais été nationales : elles furent des œuvres colle
1512
es : elles furent des œuvres collectives, passant
de
foyers en écoles, du sud au nord, à l’ouest puis à l’est, au cours de
1513
ontières. Et enfin, et surtout, ce que nous avons
de
commun, c’est une certaine passion de différer, une certaine manière
1514
nous avons de commun, c’est une certaine passion
de
différer, une certaine manière de dire « moi », et de nous distinguer
1515
ertaine passion de différer, une certaine manière
de
dire « moi », et de nous distinguer ainsi de la tribu ou du corps mag
1516
ifférer, une certaine manière de dire « moi », et
de
nous distinguer ainsi de la tribu ou du corps magique collectif. Déco
1517
ière de dire « moi », et de nous distinguer ainsi
de
la tribu ou du corps magique collectif. Découverte par la Grèce avec
1518
r l’Église romaine et la Réforme avec leur notion
de
la personne, cette manière de se croire et de se sentir unique, carac
1519
me avec leur notion de la personne, cette manière
de
se croire et de se sentir unique, caractérise l’homo europæus, quelle
1520
ion de la personne, cette manière de se croire et
de
se sentir unique, caractérise l’homo europæus, quelle que soit d’aill
1521
oit d’ailleurs sa naissance, et le rend différent
de
l’Hindou qui est d’une caste, de l’Africain qui est d’une tribu, non
1522
issance, et le rend différent de l’Hindou qui est
d’
une caste, de l’Africain qui est d’une tribu, non moins que du Soviéti
1523
e rend différent de l’Hindou qui est d’une caste,
de
l’Africain qui est d’une tribu, non moins que du Soviétique condition
1524
Hindou qui est d’une caste, de l’Africain qui est
d’
une tribu, non moins que du Soviétique conditionné par les décrets du
1525
moi dans le Tout. Le Soviétique n’a plus le droit
de
dire « je » que lorsqu’il s’avoue criminel. L’Européen seul a placé l
1526
el. L’Européen seul a placé la personne au-dessus
de
la collectivité. Comparées à la communauté fondamentale et millénaire
1527
parées à la communauté fondamentale et millénaire
de
nos structures de pensées, de nos formes d’expression et de nos types
1528
auté fondamentale et millénaire de nos structures
de
pensées, de nos formes d’expression et de nos types d’organisation so
1529
ntale et millénaire de nos structures de pensées,
de
nos formes d’expression et de nos types d’organisation sociale et pol
1530
naire de nos structures de pensées, de nos formes
d’
expression et de nos types d’organisation sociale et politique, nos di
1531
uctures de pensées, de nos formes d’expression et
de
nos types d’organisation sociale et politique, nos divisions présente
1532
nsées, de nos formes d’expression et de nos types
d’
organisation sociale et politique, nos divisions présentes perdent leu
1533
s redeviennent alors un trait fondamental du mode
de
vivre européen : chez nous seulement elles ont été admises (« Il y a
1534
belles créations. Certes, l’école par ses manuels
d’
histoire, le journal par son exploitation des préjugés reçus de l’écol
1535
e journal par son exploitation des préjugés reçus
de
l’école, certaine littérature aussi pour laquelle tout ce qui est nat
1536
la réalité, cela ne signifie pas qu’il ait cessé
de
nuire. Les écrivains — poètes et philosophes — qui ont tant fait pour
1537
er au début du xixe siècle, pourraient beaucoup,
de
nos jours, pour nous en délivrer. Entre l’agoraphobie du nationalisme
1538
y a place pour un réalisme. t. Rougemont Denis
de
, « Unité et diversité de l’Europe », Pax Romana, Paris, juin 1953, p.
1539
e. t. Rougemont Denis de, « Unité et diversité
de
l’Europe », Pax Romana, Paris, juin 1953, p. 1.
1540
diversité de l’Europe », Pax Romana, Paris, juin
1953,
p. 1.
1541
Pourquoi je suis Européen (
20
juin 1953)v w Je voudrais vous demander quelles ont été les raison
1542
Pourquoi je suis Européen (20 juin
1953
)v w Je voudrais vous demander quelles ont été les raisons toutes p
1543
été les raisons toutes personnelles qui ont fait
de
vous un partisan de l’Europe unie ? Je suis né à Neuchâtel, c’est-à-d
1544
tes personnelles qui ont fait de vous un partisan
de
l’Europe unie ? Je suis né à Neuchâtel, c’est-à-dire dans le canton q
1545
le dernier à se rallier à la fédération suisse en
1848.
Jusqu’à cette date, Neuchâtel était une principauté dont le souverain
1546
i-chemin entre France et Allemagne, avec beaucoup
d’
ancêtres français et quelques allemands. Quand je me suis mis à voyage
1547
t, je ne me suis jamais senti étranger dans aucun
de
nos pays. Tel est, si vous le voulez, l’aspect « cosmopolite » de mon
1548
est, si vous le voulez, l’aspect « cosmopolite »
de
mon européanisme : il m’est instinctif, comme d’ailleurs beaucoup de
1549
comme d’ailleurs beaucoup de Suisses. Dès la fin
de
mes études, j’ai longuement habité Paris et la France, et c’est penda
1550
art de mes livres, tous centrés sur la définition
d’
une doctrine personnaliste dont la traduction politique est, à mes yeu
1551
des groupes personnalistes dont elles étaient les
deux
foyers. C’était aussi le moment où Kierkegaard commençait à être conn
1552
ençait à être connu en France, et j’avais coutume
de
l’opposer à Hegel, préférant, en philosophie comme en politique, la t
1553
nsion et le drame au système et à la synthèse. En
1938,
j’ai publié mon Journal d’Allemagne , à la fin duquel je dénonçais H
1554
à la synthèse. En 1938, j’ai publié mon Journal
d’
Allemagne , à la fin duquel je dénonçais Hitler comme antieuropéen par
1555
publié un ouvrage intitulé Mission ou démission
de
la Suisse , dans lequel j’exposais plus nettement qu’auparavant la li
1556
ison nécessaire entre la conception personnaliste
de
l’homme, la doctrine, ou pour mieux dire, l’attitude fédéraliste, et
1557
eux dire, l’attitude fédéraliste, et la nécessité
d’
une union européenne. C’est donc bien en tant que fédéraliste que je r
1558
en chemise brune ». Étant lecteur à l’Université
de
Francfort de 1935 à 1936, j’avais eu l’insolence de professer un cour
1559
rune ». Étant lecteur à l’Université de Francfort
de
1935 à 1936, j’avais eu l’insolence de professer un cours sur le para
1560
e ». Étant lecteur à l’Université de Francfort de
1935
à 1936, j’avais eu l’insolence de professer un cours sur le paralléli
1561
ant lecteur à l’Université de Francfort de 1935 à
1936,
j’avais eu l’insolence de professer un cours sur le parallélisme entr
1562
Francfort de 1935 à 1936, j’avais eu l’insolence
de
professer un cours sur le parallélisme entre les doctrines jacobines
1563
Du jacobinisme est sorti Napoléon et des guerres
de
Napoléon le nationalisme de tout un siècle. Napoléon voulait faire l’
1564
poléon et des guerres de Napoléon le nationalisme
de
tout un siècle. Napoléon voulait faire l’Europe, oui, mais comme Hitl
1565
et nécessairement totalitaire est le pire ennemi
de
l’Europe fédérée, dont la richesse et la créativité naissent de la di
1566
dérée, dont la richesse et la créativité naissent
de
la diversité. Mais si l’on insiste trop sur nos diversités, que devie
1567
ut-on la fonder ? Précisément, dans notre passion
de
différer les uns des autres : c’est ce que nous avons tous en commun.
1568
en ce moment un livre qui sera intitulé : Le Sens
de
nos vies x, et dans lequel j’esquisse une histoire de l’homme europée
1569
os vies x, et dans lequel j’esquisse une histoire
de
l’homme européen, ou plutôt de sa manière de dire « je » ou « moi ».
1570
uisse une histoire de l’homme européen, ou plutôt
de
sa manière de dire « je » ou « moi ». C’est là une notion essentielle
1571
oire de l’homme européen, ou plutôt de sa manière
de
dire « je » ou « moi ». C’est là une notion essentiellement européenn
1572
ntiellement européenne, et que nous avons eu tort
de
tenir pour universelle. L’Asiatique n’a jamais eu la notion de l’indi
1573
universelle. L’Asiatique n’a jamais eu la notion
de
l’individuel, les Russes font tout ce qu’ils peuvent pour l’interdire
1574
e à se déprimer en Amérique. Elle reste la source
de
nos grandeurs comme de nos faiblesses : notre risque créateur. Mais q
1575
ique. Elle reste la source de nos grandeurs comme
de
nos faiblesses : notre risque créateur. Mais quand je parle d’individ
1576
sses : notre risque créateur. Mais quand je parle
d’
individu, il faut s’entendre. Le véritable Européen, c’est l’individu
1577
e, bien autre chose que l’entrée dans un parti !)
D’
où notre critique de l’individualisme irresponsable qui, depuis le xvi
1578
que l’entrée dans un parti !) D’où notre critique
de
l’individualisme irresponsable qui, depuis le xviiie siècle, a prépa
1579
nisme lui a ajouté la vocation. L’individu chargé
d’
une vocation qui, à la fois, le distingue de la tribu et le relie à so
1580
hargé d’une vocation qui, à la fois, le distingue
de
la tribu et le relie à son prochain, voilà la personne. On l’a dit :
1581
ne il y a des prochains… Mais nous nous éloignons
de
notre sujet… Tout ce que je viens de vous dire résume la phase doctri
1582
je viens de vous dire résume la phase doctrinale
de
mon européanisme. Repartons de 1940. À la fin de cette année-là, j’ai
1583
a phase doctrinale de mon européanisme. Repartons
de
1940. À la fin de cette année-là, j’ai été envoyé aux États-Unis pour
1584
hase doctrinale de mon européanisme. Repartons de
1940.
À la fin de cette année-là, j’ai été envoyé aux États-Unis pour une s
1585
de mon européanisme. Repartons de 1940. À la fin
de
cette année-là, j’ai été envoyé aux États-Unis pour une série de conf
1586
là, j’ai été envoyé aux États-Unis pour une série
de
conférences. De là, j’ai été en Argentine et, à mon retour à New York
1587
oyé aux États-Unis pour une série de conférences.
De
là, j’ai été en Argentine et, à mon retour à New York, en novembre 19
1588
rgentine et, à mon retour à New York, en novembre
1941,
les États-Unis sont entrés en guerre : plus moyen de revenir en Suiss
1589
les États-Unis sont entrés en guerre : plus moyen
de
revenir en Suisse. À New York, j’ai fait une nouvelle découverte de l
1590
se. À New York, j’ai fait une nouvelle découverte
de
l’Europe. Aux yeux des Américains il n’y a pas des Français, des Suis
1591
is pas, alors, qu’Hitler s’était emparé du slogan
de
la « Nouvelle Europe »… À mon premier retour, en 1946, je fus invité
1592
la « Nouvelle Europe »… À mon premier retour, en
1946,
je fus invité à parler sur « l’Esprit européen » aux Rencontres inter
1593
’Esprit européen » aux Rencontres internationales
de
Genève… En juillet 1947, rentrant d’un nouveau séjour à New York, je
1594
Rencontres internationales de Genève… En juillet
1947,
rentrant d’un nouveau séjour à New York, je reçus la visite de Raymon
1595
ernationales de Genève… En juillet 1947, rentrant
d’
un nouveau séjour à New York, je reçus la visite de Raymond Silva, que
1596
’un nouveau séjour à New York, je reçus la visite
de
Raymond Silva, que je ne connaissais pas, et qui, sans préambule, me
1597
nnaissais pas, et qui, sans préambule, me demanda
d’
ouvrir par un discours le premier congrès fédéraliste qui allait se te
1598
situation politique que je n’avais pu suivre que
de
très loin, il me dit : « Vous n’avez qu’à reprendre vos textes de 193
1599
me dit : « Vous n’avez qu’à reprendre vos textes
de
1939 et 1940 : c’est exactement ce que notre congrès attend. » Ainsi
1600
dit : « Vous n’avez qu’à reprendre vos textes de
1939
et 1940 : c’est exactement ce que notre congrès attend. » Ainsi fut f
1601
Vous n’avez qu’à reprendre vos textes de 1939 et
1940
: c’est exactement ce que notre congrès attend. » Ainsi fut fait. Mon
1602
part par le nazisme, d’autre part par mes années
d’
Amérique. Quelles sont à votre avis les maladies infantiles de la cons
1603
Quelles sont à votre avis les maladies infantiles
de
la construction européenne ? Il y a d’abord la maladie que j’appeller
1604
Je pense non seulement à l’instabilité politique
de
la France, mais aussi aux difficultés qu’elle éprouve à liquider le p
1605
’elle éprouve à liquider le passé récent, la peur
de
l’Allemagne. La France, qui a été à l’avant-garde de la construction
1606
l’Allemagne. La France, qui a été à l’avant-garde
de
la construction européenne, en constitue aujourd’hui le point faible.
1607
is la faiblesse présente et les forces virtuelles
de
l’Europe. Nehru, énumérant les puissances qui comptent dans notre mon
1608
lle a infecté les autres continents. C’est à nous
de
trouver le contrepoison de ce nationalisme. Mais d’autre part il y a
1609
ntinents. C’est à nous de trouver le contrepoison
de
ce nationalisme. Mais d’autre part il y a nos forces réelles, dont il
1610
ndre conscience. Vous savez que c’est à ce réveil
de
la conscience européenne que sont consacrés tous les efforts du Centr
1611
turellement. Je suis aussi pour la fédération des
Six
. Il est conforme à la doctrine et surtout à la pratique fédéraliste d
1612
la doctrine et surtout à la pratique fédéraliste
de
commencer par des petites réalisations, par quelques-uns, ceux qui ve
1613
ferme et solide. Et ce sera aussi l’aboutissement
de
ce que j’ai appelé la mission de la Suisse. Je vais vous citer deux a
1614
l’aboutissement de ce que j’ai appelé la mission
de
la Suisse. Je vais vous citer deux alexandrins qui résument parfaitem
1615
ppelé la mission de la Suisse. Je vais vous citer
deux
alexandrins qui résument parfaitement notre isolationnisme un peu mes
1616
otre isolationnisme un peu mesquin et la grandeur
de
l’idée fédéraliste que nous avons réalisée en petit, et presque sans
1617
istoire aura le dernier mot. Saviez-vous que ces
deux
vers sont de Victor Hugo ? v. Rougemont Denis de, « [Entretien] Po
1618
dernier mot. Saviez-vous que ces deux vers sont
de
Victor Hugo ? v. Rougemont Denis de, « [Entretien] Pourquoi je sui
1619
vers sont de Victor Hugo ? v. Rougemont Denis
de
, « [Entretien] Pourquoi je suis Européen », Jeune Europe, Paris, 20 j
1620
Pourquoi je suis Européen », Jeune Europe, Paris,
20
juin 1953, p. 7-8. w. Propos recueillis par Charles Maignial, précéd
1621
je suis Européen », Jeune Europe, Paris, 20 juin
1953,
p. 7-8. w. Propos recueillis par Charles Maignial, précédés de la no
1622
Propos recueillis par Charles Maignial, précédés
de
la note suivante : « Nous ne présenterons pas à nos lecteurs cet écri
1623
urs cet écrivain pénétrant devenu ardent militant
de
l’Europe qu’est Denis de Rougemont. Le directeur du Centre européen d
1624
eur du Centre européen de la culture s’est soumis
de
fort bonne grâce à cet examen de conscience européenne que nous somme
1625
ure s’est soumis de fort bonne grâce à cet examen
de
conscience européenne que nous sommes heureux de publier dans notre j
1626
de conscience européenne que nous sommes heureux
de
publier dans notre journal. » x. Aucun livre de Rougemont n’a été pu
1627
mais un essai paru dans la revue Preuves en juin
1952.
L’Aventure occidentale de l’homme , et Lettre ouverte aux Européens
1628
vue Preuves en juin 1952. L’Aventure occidentale
de
l’homme , et Lettre ouverte aux Européens approfondiront cette ques
1629
fausse nouvelle : « Dieu est mort » (juin-juillet
1953
)u Le thème de la mort de Dieu a constitué depuis la fin de la guer
1630
Dieu est mort » (juin-juillet 1953)u Le thème
de
la mort de Dieu a constitué depuis la fin de la guerre la hantise d’u
1631
ort » (juin-juillet 1953)u Le thème de la mort
de
Dieu a constitué depuis la fin de la guerre la hantise d’une partie a
1632
hème de la mort de Dieu a constitué depuis la fin
de
la guerre la hantise d’une partie assez importante de la littérature
1633
a constitué depuis la fin de la guerre la hantise
d’
une partie assez importante de la littérature contemporaine. Repris de
1634
a guerre la hantise d’une partie assez importante
de
la littérature contemporaine. Repris de Nietzsche vers 1944 par des é
1635
mportante de la littérature contemporaine. Repris
de
Nietzsche vers 1944 par des écrivains que les circonstances rendaient
1636
ttérature contemporaine. Repris de Nietzsche vers
1944
par des écrivains que les circonstances rendaient influents, il est q
1637
t répété par leurs disciples et cité comme allant
de
soi par ceux qui vivent de l’écho. Les bien-pensants s’indignent, com
1638
s et cité comme allant de soi par ceux qui vivent
de
l’écho. Les bien-pensants s’indignent, comme si l’on avait proféré un
1639
’indignent, comme si l’on avait proféré un propos
d’
une extrême gravité : attitude incompréhensible de la part des chrétie
1640
s chrétiens, qui devraient savoir que l’existence
de
Dieu n’est pas affectée par une polémique locale dans le temps et dan
1641
ailleurs divisé, des agnostiques. Déjà l’on parle
de
mystiques sans Dieu, des saints sans Dieu. Malraux se demande si la m
1642
s saints sans Dieu. Malraux se demande si la mort
de
Dieu n’entraîne pas celle de l’homme, — pensée difficile à comprendre
1643
e demande si la mort de Dieu n’entraîne pas celle
de
l’homme, — pensée difficile à comprendre. De jeunes romanciers s’auto
1644
elle de l’homme, — pensée difficile à comprendre.
De
jeunes romanciers s’autorisent de la « mort de Dieu » pour s’abandonn
1645
e à comprendre. De jeunes romanciers s’autorisent
de
la « mort de Dieu » pour s’abandonner au plaisir masochiste de décrir
1646
e. De jeunes romanciers s’autorisent de la « mort
de
Dieu » pour s’abandonner au plaisir masochiste de décrire un monde «
1647
de Dieu » pour s’abandonner au plaisir masochiste
de
décrire un monde « absurde », etc. Cependant, je ne vois pas que ce t
1648
té vraiment discuté, jusqu’ici. Du défi désespéré
de
Nietzsche, de l’affirmation méthodique de Sartre, on a (plutôt vaguem
1649
scuté, jusqu’ici. Du défi désespéré de Nietzsche,
de
l’affirmation méthodique de Sartre, on a (plutôt vaguement) supputé l
1650
sespéré de Nietzsche, de l’affirmation méthodique
de
Sartre, on a (plutôt vaguement) supputé les effets sur la psychologie
1651
est mort, ce qu’ils entendent exactement par là ?
De
quel Dieu s’agit-il, en somme ? De celui qu’ils imaginent ou de celui
1652
ement par là ? De quel Dieu s’agit-il, en somme ?
De
celui qu’ils imaginent ou de celui que beaucoup prient ? D’une carica
1653
’agit-il, en somme ? De celui qu’ils imaginent ou
de
celui que beaucoup prient ? D’une caricature commode ou de la premièr
1654
u’ils imaginent ou de celui que beaucoup prient ?
D’
une caricature commode ou de la première Personne de la Trinité ? Du D
1655
que beaucoup prient ? D’une caricature commode ou
de
la première Personne de la Trinité ? Du Dieu des philosophes ou du Di
1656
une caricature commode ou de la première Personne
de
la Trinité ? Du Dieu des philosophes ou du Dieu des Prophètes ? D’une
1657
u Dieu des philosophes ou du Dieu des Prophètes ?
D’
une attitude psychologique ou d’une réalité ontologique ? Ou seulement
1658
u des Prophètes ? D’une attitude psychologique ou
d’
une réalité ontologique ? Ou seulement du mot de passe d’un nouveau co
1659
u d’une réalité ontologique ? Ou seulement du mot
de
passe d’un nouveau conformisme ? Exiger sur tout cela un peu d’honnêt
1660
éalité ontologique ? Ou seulement du mot de passe
d’
un nouveau conformisme ? Exiger sur tout cela un peu d’honnête clarté,
1661
nouveau conformisme ? Exiger sur tout cela un peu
d’
honnête clarté, ce serait le moyen de faire entrevoir quelques difficu
1662
cela un peu d’honnête clarté, ce serait le moyen
de
faire entrevoir quelques difficultés inextricables, où cette affirmat
1663
ù cette affirmation jette non seulement la pensée
de
ses auteurs récents, mais toute la pensée du type occidental. Gardons
1664
toute la pensée du type occidental. Gardons-nous
d’
admettre — ce serait leur faire injure — qu’ils aient voulu dire simpl
1665
u romantisme ou même aux platitudes rationalistes
de
l’athéisme occidental, qu’ils ont largement reniés. Ils insistent, au
1666
ent, au contraire, par ce tour dramatique au goût
de
l’immédiate après-guerre, sur la nouveauté du message, et sur son obj
1667
ndent annoncer une nouvelle, la mauvaise nouvelle
de
la mort récente de Dieu, c’est-à-dire un anti-évangile (evangelos : l
1668
nouvelle, la mauvaise nouvelle de la mort récente
de
Dieu, c’est-à-dire un anti-évangile (evangelos : la bonne nouvelle).
1669
: la bonne nouvelle). Nous voici donc contraints
d’
examiner premièrement les sources et, secondement, la crédibilité de l
1670
ement les sources et, secondement, la crédibilité
de
l’information. Je ne discuterai pas l’inventeur de la phrase : Nietzs
1671
e l’information. Je ne discuterai pas l’inventeur
de
la phrase : Nietzsche est un cas suffisamment connu7. Et, d’ailleurs,
1672
essage en écrivant un jour ceci : « La réfutation
de
Dieu : ce n’est que le Dieu moral qui est réfuté. » (Œuvres posthumes
1673
futé. » (Œuvres posthumes.) Tout autre est le cas
de
l’auteur contemporain auquel l’ignorance générale fait remonter la ru
1674
ur dont je parle, J.-P. Sartre. L’argument majeur
de
ce philosophe ne porte pas, bien entendu, sur l’essence de Dieu et du
1675
losophe ne porte pas, bien entendu, sur l’essence
de
Dieu et du diable, mais sur leur existence qui, selon lui, diminuerai
1676
ui, diminuerait ou supprimerait la responsabilité
de
l’homme. Si telle est bien sa position, l’on en déduit nécessairement
1677
puisqu’en son nom l’on peut trancher une question
d’
existence réelle. Il ne faut pas que Dieu et le diable existent, car a
1678
t le diable existent, car alors la responsabilité
de
l’homme en pâtirait. Nous sommes donc en présence d’une morale fanati
1679
en présence d’une morale fanatique, c’est-à-dire
d’
une morale prête à nier telle ou telle réalité8, pour peu que celle-ci
1680
fortement la responsabilité — cependant réelle —
de
l’homme. Il suffit pour que Sartre décrète que Dieu n’existe pas, et
1681
Dieu n’existe pas, et bien plus, qu’il est mort.
D’
où peut lui venir cette passion de la responsabilité ? D’une volonté d
1682
qu’il est mort. D’où peut lui venir cette passion
de
la responsabilité ? D’une volonté d’affirmer l’homme et ses pouvoirs,
1683
ut lui venir cette passion de la responsabilité ?
D’
une volonté d’affirmer l’homme et ses pouvoirs, répondrait-il. Et c’es
1684
ette passion de la responsabilité ? D’une volonté
d’
affirmer l’homme et ses pouvoirs, répondrait-il. Et c’est d’une manièr
1685
l’homme et ses pouvoirs, répondrait-il. Et c’est
d’
une manière analogue que Malraux et Jaspers interprètent ici le cri de
1686
ue que Malraux et Jaspers interprètent ici le cri
de
Nietzsche : comme une proclamation de l’avènement de l’homme. Ceci co
1687
ici le cri de Nietzsche : comme une proclamation
de
l’avènement de l’homme. Ceci couvre une étrange équivoque. En effet,
1688
Nietzsche : comme une proclamation de l’avènement
de
l’homme. Ceci couvre une étrange équivoque. En effet, Sartre ne prend
1689
t « responsable » au sens authentique et littéral
de
« capable de répondre » (de ses actes et pensées devant Dieu ou devan
1690
le » au sens authentique et littéral de « capable
de
répondre » (de ses actes et pensées devant Dieu ou devant autrui), ma
1691
thentique et littéral de « capable de répondre » (
de
ses actes et pensées devant Dieu ou devant autrui), mais au sens de «
1692
nsées devant Dieu ou devant autrui), mais au sens
de
« capable de décider » (de ce qu’on est et sera) ; non pas au sens ch
1693
Dieu ou devant autrui), mais au sens de « capable
de
décider » (de ce qu’on est et sera) ; non pas au sens chargé de missi
1694
autrui), mais au sens de « capable de décider » (
de
ce qu’on est et sera) ; non pas au sens chargé de mission, mais à cel
1695
de ce qu’on est et sera) ; non pas au sens chargé
de
mission, mais à celui d’aventurier qui assume ses risques et périls e
1696
; non pas au sens chargé de mission, mais à celui
d’
aventurier qui assume ses risques et périls et qui les choisit souvera
1697
qui les choisit souverainement ; non pas au sens
de
créature, mais bien à celui de démiurge ; non pas au sens d’un homme,
1698
; non pas au sens de créature, mais bien à celui
de
démiurge ; non pas au sens d’un homme, mais bien d’un dieu. Ce dernie
1699
, mais bien à celui de démiurge ; non pas au sens
d’
un homme, mais bien d’un dieu. Ce dernier trait est capital. On sent q
1700
démiurge ; non pas au sens d’un homme, mais bien
d’
un dieu. Ce dernier trait est capital. On sent qu’il trahit un refus d
1701
trait est capital. On sent qu’il trahit un refus
de
la réalité donnée, la sienne d’abord (« Je vais me faire à mon idée »
1702
Je vais me faire à mon idée ») et par suite celle
d’
autrui (« L’enfer, c’est les autres »). Il n’en marque pas moins la li
1703
les autres »). Il n’en marque pas moins la limite
de
l’arrogance intellectuelle, le terme délirant d’un individualisme de
1704
de l’arrogance intellectuelle, le terme délirant
d’
un individualisme de surcompensation, qui ne pourra plus que se nier l
1705
llectuelle, le terme délirant d’un individualisme
de
surcompensation, qui ne pourra plus que se nier lui-même s’il veut re
1706
t rejoindre la morale. Il se niera donc au profit
de
quelque dictature collectiviste, car là seulement il croira retrouver
1707
p du communisme, où naguère encore on le traitait
de
rat visqueux, ou d’une manière plus précise, d’individualiste petit-b
1708
naguère encore on le traitait de rat visqueux, ou
d’
une manière plus précise, d’individualiste petit-bourgeois. Ce rapide
1709
t de rat visqueux, ou d’une manière plus précise,
d’
individualiste petit-bourgeois. Ce rapide examen des sources nous ramè
1710
apide examen des sources nous ramène à des prises
de
position peu compliquées. Sartre annonçant que Dieu est mort nous dit
1711
r l’homme. Il n’en résulte pas que Dieu ait cessé
d’
exister, d’aider l’homme ou de le juger. Et dans le fait, numériquemen
1712
Il n’en résulte pas que Dieu ait cessé d’exister,
d’
aider l’homme ou de le juger. Et dans le fait, numériquement, il n’y a
1713
que Dieu ait cessé d’exister, d’aider l’homme ou
de
le juger. Et dans le fait, numériquement, il n’y a jamais eu dans l’H
1714
uement, il n’y a jamais eu dans l’Histoire autant
d’
hommes qu’aujourd’hui pour affirmer qu’ils croient leur Dieu vivant. (
1715
u vivant. (Cf. les statistiques du christianisme,
de
l’islam et de bien des religions que nous nommons païennes.) Voyons m
1716
les statistiques du christianisme, de l’islam et
de
bien des religions que nous nommons païennes.) Voyons maintenant la c
1717
mmons païennes.) Voyons maintenant la crédibilité
de
la nouvelle. (Il est clair qu’elle ne peut être estimée sur le fait q
1718
e fait qu’une majorité la récuse.) ⁂ Hors du plan
de
la polémique, soit nietzschéenne, soit anticléricale, littéralement e
1719
évélation du Dieu vivant par l’Évangile, que dire
de
la révélation inverse que nous apportent ces deux hommes ? Nous somme
1720
e de la révélation inverse que nous apportent ces
deux
hommes ? Nous sommes en pleine absurdité. La crédibilité de la nouvel
1721
? Nous sommes en pleine absurdité. La crédibilité
de
la nouvelle est nulle. ⁂ Reste le fait que le Dieu du christianisme,
1722
fait que le Dieu du christianisme, du judaïsme et
de
l’islam, le Dieu qui s’intéresse à chaque homme (et même à chaque pas
1723
au dit l’Évangile), et cela dans le détail intime
de
sa vie, le Dieu que tant de milliards d’humains souffrants ou méditan
1724
s le détail intime de sa vie, le Dieu que tant de
milliards
d’humains souffrants ou méditants, génies ou pauvres types essayant d
1725
l intime de sa vie, le Dieu que tant de milliards
d’
humains souffrants ou méditants, génies ou pauvres types essayant de s
1726
ts ou méditants, génies ou pauvres types essayant
de
s’en tirer, ont prié et prient encore pour qu’il les assiste individu
1727
et absurde que toutes les absurdités que je viens
d’
énumérer. À vrai dire, ce n’est pas surprenant. C’est même aisément ex
1728
gination aujourd’hui courante du cosmos. Question
d’
échelle. Cette vermine fugitive que représente l’homme sur la terre, a
1729
gitive que représente l’homme sur la terre, atome
d’
un système solaire, atome lui-même d’une galaxie, atome à son tour de
1730
terre, atome d’un système solaire, atome lui-même
d’
une galaxie, atome à son tour de l’espace-temps d’un univers à l’expan
1731
e, atome lui-même d’une galaxie, atome à son tour
de
l’espace-temps d’un univers à l’expansion indéfinie… Et compter les c
1732
d’une galaxie, atome à son tour de l’espace-temps
d’
un univers à l’expansion indéfinie… Et compter les cheveux de sa tête
1733
s à l’expansion indéfinie… Et compter les cheveux
de
sa tête ! Mais à l’inverse, le Dieu personnel redevient non seulement
1734
non seulement croyable mais indiscutable au sens
de
chaque vie, dès que le regard se tourne vers l’homme, vers un homme b
1735
, et le voit de plus en plus près, dans le secret
de
son cœur, dans le noyau de son esprit. « Dieu sensible au cœur », dis
1736
s près, dans le secret de son cœur, dans le noyau
de
son esprit. « Dieu sensible au cœur », disait Pascal. Et de même, l’é
1737
ne peut être décelée et étudiée que dans le noyau
de
l’atome, dans ce cœur du réel physique. Si nos savants s’étaient born
1738
es villes, la mer, le ciel, des autos, des livres
d’
économie politique ou le sort des masses, l’énergie nucléaire non seul
1739
ût demeurée inimaginable. De même, il est absurde
de
« chercher Dieu dans la nature » ou dans l’Histoire, ou encore dans n
1740
sensible qu’au cœur, c’est-à-dire au plus intime
d’
une personne bien réelle et distincte. Il est donc normal que le Dieu
1741
r lieu que dans l’intime, comme la transformation
de
l’énergie que dans l’infime, et comme l’amour nulle part ailleurs que
1742
e l’amour nulle part ailleurs que dans un cœur.
7.
Voir le bref et admirable ouvrage de Karl Jaspers : Nietzsche et le c
1743
s un cœur. 7. Voir le bref et admirable ouvrage
de
Karl Jaspers : Nietzsche et le christianisme. 8. Car Dieu, même si q
1744
de Karl Jaspers : Nietzsche et le christianisme.
8.
Car Dieu, même si quelqu’un croit qu’il n’est pas, reste en tout cas
1745
majorité des hommes vivants. u. Rougemont Denis
de
, « Une fausse nouvelle : “Dieu est mort” », Liberté de l’esprit, Pari
1746
Une fausse nouvelle : “Dieu est mort” », Liberté
de
l’esprit, Paris, juin–juillet 1953, p. 141-142.
1747
mort” », Liberté de l’esprit, Paris, juin–juillet
1953,
p. 141-142.
1748
Ce petit cap de l’Asie (
1er
juin 1954)y J’entends dire tous les jours à Genève : « Nous sommes
1749
Ce petit cap de l’Asie (1er juin
1954
)y J’entends dire tous les jours à Genève : « Nous sommes occupés p
1750
lles villas qu’« occupent » les Asiatiques. C’est
de
l’attention mondiale qu’ils se sont emparés, et du jeu politique, et
1751
e qu’ils se sont emparés, et du jeu politique, et
de
l’initiative, et du calendrier de nos propres décisions, nous détourn
1752
u politique, et de l’initiative, et du calendrier
de
nos propres décisions, nous détournant ainsi du vrai problème, des vr
1753
nsi du vrai problème, des vrais périls urgents et
de
leur solution pour le salut de l’Occident. Même si la conférence de B
1754
périls urgents et de leur solution pour le salut
de
l’Occident. Même si la conférence de Berlin avait unifié l’Allemagne
1755
our le salut de l’Occident. Même si la conférence
de
Berlin avait unifié l’Allemagne et libéré l’Autriche, ces décisions n
1756
èsent sur l’ensemble du continent, les impératifs
de
son économie, et cette grande nostalgie de l’homme occidental, beauco
1757
ratifs de son économie, et cette grande nostalgie
de
l’homme occidental, beaucoup plus que la paix, qui demande un sens à
1758
ion à son espoir… Et cependant, si les rencontres
de
Berlin se sont soldées par un échec sur tous les points de l’ordre du
1759
se sont soldées par un échec sur tous les points
de
l’ordre du jour, elles n’en ont pas moins apporté un élément de pitto
1760
jour, elles n’en ont pas moins apporté un élément
de
pittoresque au débat sur l’union de l’Europe : M. Molotov, qui voit g
1761
té un élément de pittoresque au débat sur l’union
de
l’Europe : M. Molotov, qui voit grand, jugeant mesquine l’Europe des
1762
ov, qui voit grand, jugeant mesquine l’Europe des
Six
, a promis une Europe des Trente-Deux. (J’avoue que le compte n’est pa
1763
esquine l’Europe des Six, a promis une Europe des
Trente-Deux
. (J’avoue que le compte n’est pas facile à établir. Mais la Russie es
1764
ands cris la disproportion des forces au sein des
Six
, entre la France et l’Allemagne de l’Ouest c’est-à-dire entre 43 et 4
1765
ance et l’Allemagne de l’Ouest c’est-à-dire entre
43
et 48 millions d’habitants, seront sans doute rassurés à l’idée d’un
1766
t l’Allemagne de l’Ouest c’est-à-dire entre 43 et
48
millions d’habitants, seront sans doute rassurés à l’idée d’un bloc r
1767
’Allemagne de l’Ouest c’est-à-dire entre 43 et 48
millions
d’habitants, seront sans doute rassurés à l’idée d’un bloc russe de 2
1768
e de l’Ouest c’est-à-dire entre 43 et 48 millions
d’
habitants, seront sans doute rassurés à l’idée d’un bloc russe de 200
1769
d’habitants, seront sans doute rassurés à l’idée
d’
un bloc russe de 200 millions établissant d’un seul coup la balance. L
1770
ront sans doute rassurés à l’idée d’un bloc russe
de
200 millions établissant d’un seul coup la balance. Les États-Unis dé
1771
t sans doute rassurés à l’idée d’un bloc russe de
200
millions établissant d’un seul coup la balance. Les États-Unis déséqu
1772
ns doute rassurés à l’idée d’un bloc russe de 200
millions
établissant d’un seul coup la balance. Les États-Unis déséquilibraien
1773
déséquilibraient l’Alliance atlantique. La masse
de
l’URSS équilibrerait alors l’Alliance eurasiatique, cela saute aux ye
1774
géographique et matérialiste du monde, Retenons,
de
ces divagations, un fait curieux : l’idée européenne a fait de tel pr
1775
tions, un fait curieux : l’idée européenne a fait
de
tel progrès que M. Molotov ne peut plus la combattre sans feindre de
1776
M. Molotov ne peut plus la combattre sans feindre
de
l’accepter d’abord. Quitte à tenter de l’écraser par une surenchère i
1777
ns feindre de l’accepter d’abord. Quitte à tenter
de
l’écraser par une surenchère insensée. Et surtout soulignons d’autant
1778
ar une surenchère insensée. Et surtout soulignons
d’
autant plus fortement que la presse a manqué de le faire qu’à la confé
1779
ns d’autant plus fortement que la presse a manqué
de
le faire qu’à la conférence de Berlin l’idée d’Europe unie a constitu
1780
la presse a manqué de le faire qu’à la conférence
de
Berlin l’idée d’Europe unie a constitué le plus sérieux atout des peu
1781
é de le faire qu’à la conférence de Berlin l’idée
d’
Europe unie a constitué le plus sérieux atout des peuples libres dans
1782
onfrontation avec Moscou. Non point que le projet
de
CED et le projet de fédération qui est sa vraie base aient jamais été
1783
scou. Non point que le projet de CED et le projet
de
fédération qui est sa vraie base aient jamais été considéré comme mon
1784
aie base aient jamais été considéré comme monnaie
d’
échange éventuelle — MM. Bidault et Eden l’ont précisé — mais ce sont
1785
sont ces projets qui ont mis l’Occident en mesure
de
discuter sur un fondement solide : nous avions quelque chose à défend
1786
pas seulement le statu quo, mais l’avenir commun
de
nos peuples. La « conférence asiatique » s’ouvre à Genève à l’heure c
1787
l’heure choisie par l’Est. Du côté russe, l’idée
de
manœuvre est claire : fixer la France d’abord, puis la Grande-Bretagn
1788
s États-Unis, sur l’imbroglio des guerres locales
d’
Extrême-Orient, afin de nous détourner du problème préalable qui reste
1789
e nous détourner du problème préalable qui reste,
de
toute évidence, l’union de l’Europe, condition de sa force (notre opi
1790
e préalable qui reste, de toute évidence, l’union
de
l’Europe, condition de sa force (notre opinion l’oublie. Molotov, non
1791
de toute évidence, l’union de l’Europe, condition
de
sa force (notre opinion l’oublie. Molotov, non). Longtemps, toute l’
1792
ttention du monde va se concentrer sur le théâtre
d’
une bataille où l’Occident désormais joue perdant. Le monde entier ver
1793
s défaites militaires, et l’insolence des envoyés
de
l’Asie rouge distribuant à nos hommes d’État des camouflets très peu
1794
rrir la CED, seule capable — à tort ou à raison —
d’
inspirer quelque crainte à la Russie. Dans son premier discours à Genè
1795
ous menace à bout portant : il a déjà conquis nos
six
nations de l’Est, et quatre nations en Asie. Il baptise « paix » cett
1796
bout portant : il a déjà conquis nos six nations
de
l’Est, et quatre nations en Asie. Il baptise « paix » cette conquête
1797
: il a déjà conquis nos six nations de l’Est, et
quatre
nations en Asie. Il baptise « paix » cette conquête par la force et «
1798
rce et « provocation belliciste » toute tentative
de
résistance à son emprise. Annexer l’Indochine à l’empire communiste s
1799
l’Indochine à l’empire communiste serait un moyen
de
rétablir la « paix » dans le Sud-Est de l’Asie, puisque celle-ci sera
1800
un moyen de rétablir la « paix » dans le Sud-Est
de
l’Asie, puisque celle-ci serait ouverte à l’expansion russe et chinoi
1801
itive entre la France et l’Allemagne par le moyen
de
leur fédération, ce serait agir en « bellicistes », puisque ce serait
1802
’Europe aux armées rouges. Sous la double poussée
de
la révolte asiatique et du colonialisme soviétique, une Europe persis
1803
croissantes ; par suite, l’invasion irrésistible
de
la propagande totalitaire, et démission finale entre les mains d’une
1804
totalitaire, et démission finale entre les mains
d’
une petit groupe d’« apaiseurs », formule Bénès : on sait la suite. Se
1805
mission finale entre les mains d’une petit groupe
d’
« apaiseurs », formule Bénès : on sait la suite. Seule riposte possibl
1806
le riposte possible : l’union européenne, capable
d’
opposer aux Russes une puissance qui les tienne en respect. Et tout le
1807
nce qui les tienne en respect. Et tout le Sud-Est
de
l’Asie devrait comprendre que son élan irrépressible vers l’indépenda
1808
arrêté par l’Europe, mais peut bien être détourné
de
ses fins par la Russie. Ils voient encore notre colonialisme. Ne saur
1809
a pas unie en temps utile si les efforts présents
de
fédération des Six échouent. (Début modeste, si l’on veut, mais seul
1810
s utile si les efforts présents de fédération des
Six
échouent. (Début modeste, si l’on veut, mais seul concret.) Ces effor
1811
Communauté politique et son élargissement rapide
de
toute l’Europe. L’enchaînement de ces faits laisse peu de jeu à l’ima
1812
issement rapide de toute l’Europe. L’enchaînement
de
ces faits laisse peu de jeu à l’imagination et aux surprises. Une rem
1813
sée : Si la CED était votée demain, la conférence
de
Genève se terminerait dans les huit jours, ayant perdu son intérêt st
1814
, la conférence de Genève se terminerait dans les
huit
jours, ayant perdu son intérêt stratégique pour M. Molotov. C’est da
1815
ective — qui déclasse brutalement les discussions
de
« préalables » » et de garanties à obtenir sur le papier contre une A
1816
rutalement les discussions de « préalables » » et
de
garanties à obtenir sur le papier contre une Allemagne d’après-demain
1817
ties à obtenir sur le papier contre une Allemagne
d’
après-demain — que l’Histoire va juger le vote français sur le projet
1818
’Histoire va juger le vote français sur le projet
de
CED. Le sort de l’Europe dans le monde dépend d’une poignée de député
1819
er le vote français sur le projet de CED. Le sort
de
l’Europe dans le monde dépend d’une poignée de députés dont on ne sau
1820
de CED. Le sort de l’Europe dans le monde dépend
d’
une poignée de députés dont on ne saura jamais les noms : ceux qui se
1821
rt de l’Europe dans le monde dépend d’une poignée
de
députés dont on ne saura jamais les noms : ceux qui se décideront à l
1822
et Hannibal ante portas qu’on voudrait leur crier
de
Genève ? y. Rougemont Denis de, « Ce petit cap de l’Asie », Jeune
1823
rait leur crier de Genève ? y. Rougemont Denis
de
, « Ce petit cap de l’Asie », Jeune Europe, Paris, 1 juin 1954, p. 1 e
1824
« Ce petit cap de l’Asie », Jeune Europe, Paris,
1
juin 1954, p. 1 et 8.
1825
etit cap de l’Asie », Jeune Europe, Paris, 1 juin
1954,
p. 1 et 8.
1826
Asie », Jeune Europe, Paris, 1 juin 1954, p. 1 et
8.
1827
La CED, ses mythes et sa réalité (
12
août 1954)z La Communauté européenne de défense n’est pour le mome
1828
La CED, ses mythes et sa réalité (12 août
1954
)z La Communauté européenne de défense n’est pour le moment qu’un t
1829
pour le moment qu’un traité, ou mieux, un projet
de
traité, dont tout le monde parle depuis deux ans, sur lequel tous les
1830
projet de traité, dont tout le monde parle depuis
deux
ans, sur lequel tous les députés et journalistes européens ont pris p
1831
ens ont pris position en public ou dans le secret
de
leur cœur, mais que presque personne n’a lu ! On me confiait récemmen
1832
! On me confiait récemment, à Paris, le résultat
de
sondages discrets opérés à la Chambre française : il semble qu’un peu
1833
la Chambre française : il semble qu’un peu moins
d’
un député sur dix ait pris la peine de lire ce texte de 96 pages, plus
1834
çaise : il semble qu’un peu moins d’un député sur
dix
ait pris la peine de lire ce texte de 96 pages, plus aride mais bien
1835
n peu moins d’un député sur dix ait pris la peine
de
lire ce texte de 96 pages, plus aride mais bien moins compliqué qu’un
1836
député sur dix ait pris la peine de lire ce texte
de
96 pages, plus aride mais bien moins compliqué qu’un roman policier o
1837
uté sur dix ait pris la peine de lire ce texte de
96
pages, plus aride mais bien moins compliqué qu’un roman policier ordi
1838
rouve que le sort du traité, et par suite le sort
de
l’Europe, dépend en fait des députés français, appelés par M. Mendès
1839
endès France à le ratifier — ou non — vers la fin
de
ce mois. C’est dire que le lecteur moyen a bien le droit de demander
1840
. C’est dire que le lecteur moyen a bien le droit
de
demander à son tour, sans rougir de son ignorance : après tout, de qu
1841
bien le droit de demander à son tour, sans rougir
de
son ignorance : après tout, de quoi s’agit-il ? Je vais tenter de lui
1842
tour, sans rougir de son ignorance : après tout,
de
quoi s’agit-il ? Je vais tenter de lui répondre objectivement, sans c
1843
: après tout, de quoi s’agit-il ? Je vais tenter
de
lui répondre objectivement, sans cacher pour autant mes préférences.
1844
s cacher pour autant mes préférences. Naissance
de
l’idée Quelle était la situation lorsque le traité fut rédigé, au
1845
situation lorsque le traité fut rédigé, au début
de
1952 ? En présence de l’URSS, disposant de plus de 200 divisions, l’E
1846
tuation lorsque le traité fut rédigé, au début de
1952
? En présence de l’URSS, disposant de plus de 200 divisions, l’Europe
1847
e 1952 ? En présence de l’URSS, disposant de plus
de
200 divisions, l’Europe était pratiquement désarmée, à l’exception de
1848
952 ? En présence de l’URSS, disposant de plus de
200
divisions, l’Europe était pratiquement désarmée, à l’exception de la
1849
Europe était pratiquement désarmée, à l’exception
de
la Suisse et de la Suède. Or, ces deux pays étaient neutres. C’est di
1850
tiquement désarmée, à l’exception de la Suisse et
de
la Suède. Or, ces deux pays étaient neutres. C’est dire que l’Europe
1851
l’exception de la Suisse et de la Suède. Or, ces
deux
pays étaient neutres. C’est dire que l’Europe dépendait, pour sa défe
1852
e l’Europe dépendait, pour sa défense éventuelle,
de
quelques divisions américaines occupant leur secteur en Allemagne. Dé
1853
Américains trouvaient lourde et coûteuse la tâche
de
protéger l’Europe. Ils souhaitaient que nous les aidions à nous aider
1854
menacés, n’auraient-ils pas le droit et le devoir
de
reconstituer une armée ? — Les Hollandais, les Belges, et surtout les
1855
a se comprend. Une Wehrmacht autonome, renaissant
de
ses cendres, leur paraissait plus menaçante que rassurante. Son nom s
1856
çante que rassurante. Son nom seul leur rappelait
de
durs souvenirs. Elle pouvait aussi bien les attaquer que les protéger
1857
t défendre sérieusement l’Europe sans le concours
d’
un de ses plus grands pays, et de celui qui se trouvait en première li
1858
endre sérieusement l’Europe sans le concours d’un
de
ses plus grands pays, et de celui qui se trouvait en première ligne ?
1859
sans le concours d’un de ses plus grands pays, et
de
celui qui se trouvait en première ligne ? C’est pour tenter de résoud
1860
se trouvait en première ligne ? C’est pour tenter
de
résoudre ce dilemme que fut conçue la CED. — Contre l’opinion (à l’ép
1861
urope — et enfin pour hâter l’indispensable union
de
nos pays, la France imagina le plan d’une « communauté de défense »,
1862
able union de nos pays, la France imagina le plan
d’
une « communauté de défense », c’est-à-dire d’une armée européenne, re
1863
ays, la France imagina le plan d’une « communauté
de
défense », c’est-à-dire d’une armée européenne, remplaçant les armées
1864
lan d’une « communauté de défense », c’est-à-dire
d’
une armée européenne, remplaçant les armées nationales. Après des mois
1865
remplaçant les armées nationales. Après des mois
de
discussions d’experts, un projet de traité fut signé le 27 mai 1952 p
1866
armées nationales. Après des mois de discussions
d’
experts, un projet de traité fut signé le 27 mai 1952 par les ministre
1867
près des mois de discussions d’experts, un projet
de
traité fut signé le 27 mai 1952 par les ministres des Affaires étrang
1868
sions d’experts, un projet de traité fut signé le
27
mai 1952 par les ministres des Affaires étrangères des six pays déjà
1869
’experts, un projet de traité fut signé le 27 mai
1952
par les ministres des Affaires étrangères des six pays déjà liés par
1870
952 par les ministres des Affaires étrangères des
six
pays déjà liés par la Communauté du charbon et de l’acier, plus connu
1871
ix pays déjà liés par la Communauté du charbon et
de
l’acier, plus connue sous le nom de plan Schuman. C’est ce traité qu’
1872
du charbon et de l’acier, plus connue sous le nom
de
plan Schuman. C’est ce traité qu’ont déjà ratifié la Hollande et le L
1873
ai très court. Son choix sera donc décisif. Après
deux
ans de débats passionnés, ne serait-il pas grand temps de voir d’un p
1874
ourt. Son choix sera donc décisif. Après deux ans
de
débats passionnés, ne serait-il pas grand temps de voir d’un peu plus
1875
e débats passionnés, ne serait-il pas grand temps
de
voir d’un peu plus près de quoi l’on parle ? Quel est donc le contenu
1876
passionnés, ne serait-il pas grand temps de voir
d’
un peu plus près de quoi l’on parle ? Quel est donc le contenu du proj
1877
Divisions nationales, armées européennes Les
132
articles du traité prévoient des institutions communes, des forces ar
1878
ient aussi qu’aucun État membre ne recrutera plus
de
forces armées nationales pour son propre compte, en dehors de celles
1879
ette mise en commun des ressources militaires des
six
pays ? S’agit-il de mélanger les soldats allemands et français dans d
1880
es ressources militaires des six pays ? S’agit-il
de
mélanger les soldats allemands et français dans des compagnies comman
1881
ais lu le traité. En vérité, il s’agit simplement
d’
un plan de mise sur pied de contingents nationaux, commandés par leurs
1882
traité. En vérité, il s’agit simplement d’un plan
de
mise sur pied de contingents nationaux, commandés par leurs propres o
1883
, il s’agit simplement d’un plan de mise sur pied
de
contingents nationaux, commandés par leurs propres officiers jusqu’à
1884
s strictement nationales seront groupées en corps
d’
armée et placées à la disposition d’un état-major général, qui, lui, s
1885
pées en corps d’armée et placées à la disposition
d’
un état-major général, qui, lui, sera européen par sa composition et s
1886
demain, que se passera-t-il donc, pratiquement ?
Trois
choses, dont la première seulement sera visible et sensible au grand
1887
ible et sensible au grand public. Les troupes des
six
pays porteront le même uniforme. (Mais n’est-ce pas déjà le cas, à qu
1888
à le cas, à quelques détails près ?) Les généraux
de
corps d’armée et d’armée pourront être choisis dans n’importe lequel
1889
à quelques détails près ?) Les généraux de corps
d’
armée et d’armée pourront être choisis dans n’importe lequel des pays
1890
détails près ?) Les généraux de corps d’armée et
d’
armée pourront être choisis dans n’importe lequel des pays membres. (C
1891
mbres. (C’est ce qui s’est passé déjà pendant les
deux
dernières guerres.) Enfin, les méthodes d’instruction et la productio
1892
les deux dernières guerres.) Enfin, les méthodes
d’
instruction et la production des armements seront standardisées. (D’où
1893
a production des armements seront standardisées. (
D’
où un considérable allègement des budgets militaires, et une efficacit
1894
hnique accrue.) Il s’agit donc, en fin de compte,
de
l’organisation dès le temps de paix d’un commandement suprême europée
1895
en fin de compte, de l’organisation dès le temps
de
paix d’un commandement suprême européen. — Mais quel sera le pouvoir
1896
de compte, de l’organisation dès le temps de paix
d’
un commandement suprême européen. — Mais quel sera le pouvoir disposan
1897
e européen. — Mais quel sera le pouvoir disposant
de
cette armée ? Le traité prévoit un Conseil des ministres nationaux (r
1898
ministres nationaux (représentant le point de vue
de
chacun des six États considérés comme égaux), un Commissariat de 9 me
1899
onaux (représentant le point de vue de chacun des
six
États considérés comme égaux), un Commissariat de 9 membres, sorte de
1900
ix États considérés comme égaux), un Commissariat
de
9 membres, sorte de ministère européen de la Défense ; une Cour de ju
1901
États considérés comme égaux), un Commissariat de
9
membres, sorte de ministère européen de la Défense ; une Cour de just
1902
comme égaux), un Commissariat de 9 membres, sorte
de
ministère européen de la Défense ; une Cour de justice et une Assembl
1903
ssariat de 9 membres, sorte de ministère européen
de
la Défense ; une Cour de justice et une Assemblée parlementaire, qui
1904
te de ministère européen de la Défense ; une Cour
de
justice et une Assemblée parlementaire, qui existent déjà : ce seraie
1905
le contrôle national et le contrôle démocratique
de
l’Armée commune. La procédure prévue pour la mobilisation et l’entrée
1906
n et l’entrée en campagne est telle (majorité des
deux
tiers ou unanimité des États, selon les cas) que l’on ne saurait imag
1907
tats, selon les cas) que l’on ne saurait imaginer
d’
autre emploi de l’armée qu’en cas d’agression qualifiée contre un ou p
1908
cas) que l’on ne saurait imaginer d’autre emploi
de
l’armée qu’en cas d’agression qualifiée contre un ou plusieurs des Ét
1909
rait imaginer d’autre emploi de l’armée qu’en cas
d’
agression qualifiée contre un ou plusieurs des États membres. Par sa s
1910
français vont-ils être commandés en allemand par
d’
anciens feldweibel hitlériens ? » Ce serait en effet scandaleux pour l
1911
ndaleux pour le sentiment national des résistants
de
la dernière guerre. Mais c’est absolument exclu par les dispositions
1912
ntégration n’étant prévue qu’à l’échelon du corps
d’
armée — nous venons de le voir. — « Mais si la France n’a pas le droit
1913
e le voir. — « Mais si la France n’a pas le droit
d’
entretenir sa propre armée, comment défendra-t-elle ses colonies ? » p
1914
ant. Or, le cas est dûment prévu par les articles
10
et suivants, autorisant un État membre à détacher de son contingent l
1915
et suivants, autorisant un État membre à détacher
de
son contingent les forces nécessaires à la défense de ses territoires
1916
édé polémique des plus courants consiste à parler
de
la CED comme d’un « traité de réarmement de l’Allemagne ». Cette conf
1917
s plus courants consiste à parler de la CED comme
d’
un « traité de réarmement de l’Allemagne ». Cette confusion égare beau
1918
s consiste à parler de la CED comme d’un « traité
de
réarmement de l’Allemagne ». Cette confusion égare beaucoup de lecteu
1919
arler de la CED comme d’un « traité de réarmement
de
l’Allemagne ». Cette confusion égare beaucoup de lecteurs, et tend à
1920
ecteurs, et tend à leur faire croire le contraire
de
ce qui est. Nous avons vu que le premier souci des auteurs français d
1921
ouci des auteurs français du traité fut justement
d’
éliminer toute renaissance possible d’une Wehrmacht autonome. C’est au
1922
t justement d’éliminer toute renaissance possible
d’
une Wehrmacht autonome. C’est au contraire si l’on refuse la CED que c
1923
rôle possible. J’entends et lis aussi des phrases
de
ce genre : « Ce traité désastreux va supprimer d’un trait de plume no
1924
de ce genre : « Ce traité désastreux va supprimer
d’
un trait de plume notre glorieuse armée française, en même temps qu’il
1925
: « Ce traité désastreux va supprimer d’un trait
de
plume notre glorieuse armée française, en même temps qu’il réarmera l
1926
té. Si vraiment ce traité signifie la disparition
de
l’armée française, il empêche pour les mêmes raisons la réapparition
1927
il empêche pour les mêmes raisons la réapparition
d’
une armée allemande. C’est en vertu d’une erreur semblable que d’excel
1928
emande. C’est en vertu d’une erreur semblable que
d’
excellents patriotes redoutent « la perte de la souveraineté française
1929
e que d’excellents patriotes redoutent « la perte
de
la souveraineté française et la restitution de ses droits égaux à l’A
1930
te de la souveraineté française et la restitution
de
ses droits égaux à l’Allemagne ». En fait, le traité ne rend à l’Alle
1931
neté toute théorique que pour mieux lui permettre
de
la sacrifier aussitôt sur l’autel commun — au même titre que les cinq
1932
ssitôt sur l’autel commun — au même titre que les
cinq
autres pays. Enfin, certains soutiennent que le traité « impose à l’E
1933
si l’Europe ne se donne pas elle-même les moyens
d’
assurer sa défense, c’est-à-dire si elle refuse la CED, alors et dans
1934
able. Qui est pour ? qui est contre ? Après
deux
ans de discussions et à la veille des décisions finales, la répartiti
1935
Qui est pour ? qui est contre ? Après deux ans
de
discussions et à la veille des décisions finales, la répartition des
1936
, la répartition des adversaires et des partisans
de
la CED apparaît facile à décrire. On peut même la prévoir selon l’âge
1937
s du communisme, du nationalisme traditionnel, et
de
certains intérêts privés, calculant à court terme. Les communistes ve
1938
autre part, les personnes âgées qui vivent encore
de
souvenirs glorieux, et de rancunes qui parfois le sont moins, entreti
1939
âgées qui vivent encore de souvenirs glorieux, et
de
rancunes qui parfois le sont moins, entretiennent l’illusion touchant
1940
tant que moi ! En faveur de la CED, nous trouvons
d’
une manière générale ceux qui ont compris qu’ils vivent au xxe siècle
1941
compris qu’ils vivent au xxe siècle, que le rêve
d’
une souveraineté nationale sans limites n’est plus qu’un rêve, que l’E
1942
réelle, pour ne rien dire des révoltes montantes
de
l’Asie, de l’Afrique, du Proche-Orient… En faveur de la CED, je vois
1943
ur ne rien dire des révoltes montantes de l’Asie,
de
l’Afrique, du Proche-Orient… En faveur de la CED, je vois l’Histoire,
1944
is l’Histoire, le réalisme, la raison, la volonté
de
sauver nos libertés, et la jeunesse. Certes, on peut se demander s’il
1945
’elle est, si prudente et respectueuse des droits
de
chacun des États membres, suffira pour notre défense. Je me pose moi-
1946
s je vois un pays réaliste qui, lui, ne doute pas
de
l’efficacité de la CED : c’est la Russie, dont tout l’effort diplomat
1947
s réaliste qui, lui, ne doute pas de l’efficacité
de
la CED : c’est la Russie, dont tout l’effort diplomatique, depuis deu
1948
a Russie, dont tout l’effort diplomatique, depuis
deux
ans, ne vise qu’à retarder la décision française. Et même en admettan
1949
surestime la CED, comment ne pas voir qu’au-delà
de
sa valeur militaire — dont chacun souhaite qu’elle n’ait jamais à fai
1950
ouvre toutes grandes les perspectives prochaines
d’
une Europe fédérée, gage de paix pour le monde et de prospérité pour t
1951
erspectives prochaines d’une Europe fédérée, gage
de
paix pour le monde et de prospérité pour tout un continent — dont la
1952
une Europe fédérée, gage de paix pour le monde et
de
prospérité pour tout un continent — dont la Suisse est le cœur. z.
1953
ont la Suisse est le cœur. z. Rougemont Denis
de
, « La CED, ses mythes et sa réalité », L’Illustré, Lausanne, 12 août
1954
ses mythes et sa réalité », L’Illustré, Lausanne,
12
août 1954, p. 19.
1955
es et sa réalité », L’Illustré, Lausanne, 12 août
1954,
p. 19.
1956
Fédéralisme et nationalisme (septembre-octobre
1954
)aa Parler fédéralisme sur un plan théorique serait contraire à l’a
1957
u nom desquels on le juge néfaste, et les maximes
de
l’action qui permettra de le surmonter. I. Naissance et proliférati
1958
néfaste, et les maximes de l’action qui permettra
de
le surmonter. I. Naissance et prolifération du nationalisme Goet
1959
imes de l’action qui permettra de le surmonter.
I
. Naissance et prolifération du nationalisme Goethe, assistant à la
1960
u nationalisme Goethe, assistant à la bataille
de
Valmy, s’écriait : « De ce lieu, de ce jour, on datera l’ère nouvelle
1961
, assistant à la bataille de Valmy, s’écriait : «
De
ce lieu, de ce jour, on datera l’ère nouvelle ». C’est en effet au cr
1962
à la bataille de Valmy, s’écriait : « De ce lieu,
de
ce jour, on datera l’ère nouvelle ». C’est en effet au cri de « Vive
1963
on datera l’ère nouvelle ». C’est en effet au cri
de
« Vive la Nation », clamé sur tout le front des troupes, que les Fran
1964
comme une invocation à un dieu nouveau, une sorte
de
« Gott mit uns ! » aussitôt exaucé, puisque par ce seul cri la batail
1965
, c’est donc un idéal, une idéologie, le principe
d’
une nouvelle communauté non de naissance mais d’avenir et de volonté.
1966
ologie, le principe d’une nouvelle communauté non
de
naissance mais d’avenir et de volonté. Toutefois, cette idéologie n’e
1967
e d’une nouvelle communauté non de naissance mais
d’
avenir et de volonté. Toutefois, cette idéologie n’est pas le fait du
1968
elle communauté non de naissance mais d’avenir et
de
volonté. Toutefois, cette idéologie n’est pas le fait du peuple tout
1969
gie n’est pas le fait du peuple tout entier, mais
d’
un parti ; et ce parti agit par le moyen de l’État. À l’intérieur du p
1970
, mais d’un parti ; et ce parti agit par le moyen
de
l’État. À l’intérieur du pays, la première tâche de l’État sera d’écr
1971
l’État. À l’intérieur du pays, la première tâche
de
l’État sera d’écraser les opposants, car la nation est religion et le
1972
térieur du pays, la première tâche de l’État sera
d’
écraser les opposants, car la nation est religion et les religions ne
1973
ne transigent pas. L’État se voit donc contraint
de
renforcer la police, de centraliser tous les éléments du pouvoir, et
1974
at se voit donc contraint de renforcer la police,
de
centraliser tous les éléments du pouvoir, et de transformer la justic
1975
, de centraliser tous les éléments du pouvoir, et
de
transformer la justice en instrument de l’idéologie, le tout au nom d
1976
uvoir, et de transformer la justice en instrument
de
l’idéologie, le tout au nom de la nation. Il confond dans une même ré
1977
viendrait mon juge ! pense l’État idéologique, né
d’
une révolution sanglante, et qui se sait illégitime dans sa prétention
1978
moitié du peuple. Mais si, à l’intérieur, l’idée
de
nation devient entre les mains de l’État un instrument d’oppression e
1979
térieur, l’idée de nation devient entre les mains
de
l’État un instrument d’oppression et de guerre civile larvée, à l’ext
1980
n devient entre les mains de l’État un instrument
d’
oppression et de guerre civile larvée, à l’extérieur elle va devenir u
1981
les mains de l’État un instrument d’oppression et
de
guerre civile larvée, à l’extérieur elle va devenir un instrument de
1982
rvée, à l’extérieur elle va devenir un instrument
de
guerre déclarée. Pourquoi la nation doit-elle faire la guerre ? Tout
1983
me le dira Hegel. Ensuite, parce que la collusion
de
l’État centralisé et de la nation missionnaire produit comme résultan
1984
e, parce que la collusion de l’État centralisé et
de
la nation missionnaire produit comme résultante fatale l’impérialisme
1985
e : et voici la France napoléonienne. L’idéologie
de
la nation est par essence conquérante : elle veut apporter la Liberté
1986
les, par la force au besoin. De plus, à la faveur
de
ces guerres que l’État présente toujours comme une « défense de nos f
1987
par l’État : nous assistons à la première en date
de
toutes les « nationalisations », celle des patriotismes locaux ! Noto
1988
ée, justifie toujours le sacrifice « temporaire »
de
certaines libertés. Or il n’est presque aucune de ces mesures d’urgen
1989
de certaines libertés. Or il n’est presque aucune
de
ces mesures d’urgence, prises par l’État, qu’on ait vue rapportée une
1990
bertés. Or il n’est presque aucune de ces mesures
d’
urgence, prises par l’État, qu’on ait vue rapportée une fois la paix r
1991
tée une fois la paix revenue. Ainsi, le mécanisme
de
l’État-nation non seulement conduit à la guerre, mais trouve en elle
1992
en elle les conditions du renforcement continuel
de
son pouvoir. Mais voici que la guerre nationale menée par les soldats
1993
e nationale menée par les soldats « libérateurs »
de
la Révolution et de l’Empire, loin de faire triompher dans toute l’Eu
1994
r les soldats « libérateurs » de la Révolution et
de
l’Empire, loin de faire triompher dans toute l’Europe l’idéologie uni
1995
e constituer. Hegel est la contrepartie réflexive
de
Napoléon. Hegel, conformément à l’esprit de Valmy, se représente la n
1996
exive de Napoléon. Hegel, conformément à l’esprit
de
Valmy, se représente la nation comme une croisade pour l’idée. « Ce n
1997
e. « Ce ne sont pas les déterminations naturelles
de
la nation qui lui donnent son caractère, mais c’est son esprit nation
1998
ure.) Cet esprit national est « un dans la marche
de
l’Histoire ». Il se fait par sa propre activité, s’épanouit, atteint
1999
domine le peuple qui incarne le plus haut concept
de
l’Esprit. » Voici donc les peuples élevés à la dignité d’intentions p
2000
rit. » Voici donc les peuples élevés à la dignité
d’
intentions particulières de l’esprit mondial, mais en même temps, les
2001
es élevés à la dignité d’intentions particulières
de
l’esprit mondial, mais en même temps, les voici privés sous peine de
2002
voici privés sous peine de « nullité politique »
de
la permission de vivre en paix, de « végéter », précise Hegel, dans l
2003
s peine de « nullité politique » de la permission
de
vivre en paix, de « végéter », précise Hegel, dans le bonheur et sans
2004
té politique » de la permission de vivre en paix,
de
« végéter », précise Hegel, dans le bonheur et sans histoire. Nous as
2005
ans histoire. Nous assistons au transfert décisif
de
l’idée de vocation, passant des personnes aux nations. ⁂ Mais cet Éta
2006
re. Nous assistons au transfert décisif de l’idée
de
vocation, passant des personnes aux nations. ⁂ Mais cet État-nation,
2007
ux nations. ⁂ Mais cet État-nation, une fois doué
de
toute la personnalité dont il tend à priver les hommes réels, comment
2008
-il se comporter dans le monde ? L’idéal primitif
de
la nation, confisqué par l’État français, lui-même confisqué par un C
2009
é et récemment conquis —, a conduit à des guerres
d’
agression. Celles-ci ont fait surgir d’autres nationalismes, qui vont
2010
lismes, qui vont revendiquer à leur tour le droit
de
dominer l’époque, après s’être arrogé (au nom de la liberté) le droit
2011
rès s’être arrogé (au nom de la liberté) le droit
de
régner absolument sur leurs sujets. À cette fin, chacun prétendra qu’
2012
un prétendra qu’il incarne « le plus haut concept
de
l’esprit ». Pour la Prusse, l’idée de l’État définie par Hegel et Fic
2013
aut concept de l’esprit ». Pour la Prusse, l’idée
de
l’État définie par Hegel et Fichte. Pour l’Angleterre, la maîtrise de
2014
uie, l’Irlande et Israël se livrer au jeu pénible
de
restaurer artificiellement leur « langue nationale », parfaitement ou
2015
puis longtemps, afin de mieux prouver leur raison
d’
être. Nationalisme de reflet, d’imitation, parfois plus proche du vrai
2016
de mieux prouver leur raison d’être. Nationalisme
de
reflet, d’imitation, parfois plus proche du vrai patriotisme, mais to
2017
ouver leur raison d’être. Nationalisme de reflet,
d’
imitation, parfois plus proche du vrai patriotisme, mais tout aussi ja
2018
même hargneux que celui des grands voisins. Aucun
de
ces « concepts de l’esprit » ne parvenant à s’imposer, aucune nation
2019
celui des grands voisins. Aucun de ces « concepts
de
l’esprit » ne parvenant à s’imposer, aucune nation ne dominera longte
2020
u’au jour où seront proclamés certains « concepts
de
l’esprit » plus redoutables : encore la « race des maîtres », le « He
2021
vement parlant. À partir de Napoléon, les nations
de
l’Europe vont se conduire comme des « individus » sans foi ni loi, au
2022
foi ni loi, au détriment de la grande communauté
de
civilisation qu’était l’Europe. Chacune se dira « souveraine », à l’i
2023
e », à l’imitation des rois absolus qui n’avaient
de
comptes à rendre qu’à Dieu seul — mais il n’y a plus de Dieu au-dessu
2024
ptes à rendre qu’à Dieu seul — mais il n’y a plus
de
Dieu au-dessus des nations. Le droit divin se traduit donc par le dro
2025
ions. Le droit divin se traduit donc par le droit
de
l’État le plus fort. Celui-ci ne connaît plus d’autres obligations qu
2026
passés avec ses concurrents, alliances ou traités
de
commerce révoqués dès qu’ils ne payent plus. C’est ainsi qu’une demi-
2027
ne payent plus. C’est ainsi qu’une demi-douzaine
d’
« États-gangsters », follement susceptibles, dépourvus de tout scrupul
2028
ts-gangsters », follement susceptibles, dépourvus
de
tout scrupule communautaire, main dans la poche, prêts à tirer, vont
2029
, main dans la poche, prêts à tirer, vont essayer
de
faire la loi en Europe. On parlera beaucoup de « concert des nations
2030
n parlera beaucoup de « concert des nations », et
de
« droit international », mais il est clair que ces États-nations-Indi
2031
t limitant leur « absolue souveraineté ». Pendant
cent
ans, l’Europe qui se croit rationnelle vivra sur cette absurdité fond
2032
nnelle vivra sur cette absurdité fondamentale. En
1914,
elle en mourra. Mais comment cette absurdité a-t-elle pu triompher pe
2033
on enseignement, en devenant elle-même une source
de
« sacré ». L’Aigle, les Trois Couleurs et le Petit Chapeau jouent au
2034
t elle-même une source de « sacré ». L’Aigle, les
Trois
Couleurs et le Petit Chapeau jouent au début le rôle du labarum, du c
2035
ouent au début le rôle du labarum, du crucifix et
de
la mitre. Les cérémonies viendront plus tard, avec les monuments aux
2036
l’instruction publique obligatoire se chargeront
d’
en rédiger les hymnes et le catéchisme. Cette religion nationale, que
2037
era même pas le christianisme, elle se contentera
de
l’annexer dans les occasions décisives. Lorsqu’un Maurice Barrès célè
2038
rsqu’un Maurice Barrès célèbre l’union « sacrée »
de
la nation dans laquelle catholiques, protestants et agnostiques « oub
2039
ne proteste contre cette subordination méprisante
de
sa foi à l’esprit national. On n’y voit qu’une manière de parler… Et
2040
i à l’esprit national. On n’y voit qu’une manière
de
parler… Et cependant cet esprit national est un dieu bien réel, et qu
2041
roit vraiment, puisqu’il peut exiger le sacrifice
de
la vie même du citoyen. Mais que nous offre-t-il en échange de nos vi
2042
e du citoyen. Mais que nous offre-t-il en échange
de
nos vies ? Une certaine communion vague et puissante, qui permet à l’
2043
union vague et puissante, qui permet à l’individu
de
dépasser son horizon restreint, de s’affranchir de ses soucis privés
2044
t à l’individu de dépasser son horizon restreint,
de
s’affranchir de ses soucis privés (en temps de guerre) et de se senti
2045
e dépasser son horizon restreint, de s’affranchir
de
ses soucis privés (en temps de guerre) et de se sentir comme transpor
2046
t, de s’affranchir de ses soucis privés (en temps
de
guerre) et de se sentir comme transporté dans une espèce de transcend
2047
chir de ses soucis privés (en temps de guerre) et
de
se sentir comme transporté dans une espèce de transcendance. À vrai d
2048
et de se sentir comme transporté dans une espèce
de
transcendance. À vrai dire, il s’agit encore d’un égoïsme, mais telle
2049
e de transcendance. À vrai dire, il s’agit encore
d’
un égoïsme, mais tellement élargi qu’il en devient vertu. On l’enseign
2050
vertu. On l’enseigne dans les écoles sous le nom
de
« patriotisme ». Il est admis que tout orgueil, toute vanité, et jusq
2051
icites et honorables, dès qu’on les met au compte
de
la nation où l’on a pris la peine de naître. Ce que nul n’oserait dir
2052
et au compte de la nation où l’on a pris la peine
de
naître. Ce que nul n’oserait dire de son moi, il a le devoir sacré de
2053
ris la peine de naître. Ce que nul n’oserait dire
de
son moi, il a le devoir sacré de le dire de son nous. Pourtant, cette
2054
l n’oserait dire de son moi, il a le devoir sacré
de
le dire de son nous. Pourtant, cette religion nationale demeure bien
2055
dire de son moi, il a le devoir sacré de le dire
de
son nous. Pourtant, cette religion nationale demeure bien incapable d
2056
, cette religion nationale demeure bien incapable
d’
animer l’existence tout entière de l’homme. « L’orgueil national est l
2057
bien incapable d’animer l’existence tout entière
de
l’homme. « L’orgueil national est loin de la vie quotidienne » remarq
2058
ne donne, infiniment plus, à l’absurde. Principe
de
haine, plus que d’amour, la nation revendique des absolus dont il est
2059
nt plus, à l’absurde. Principe de haine, plus que
d’
amour, la nation revendique des absolus dont il est manifeste qu’elle
2060
ement indigne et matériellement incapable : celui
de
la souveraineté sans limites, par exemple, qui est un des attributs d
2061
ns limites, par exemple, qui est un des attributs
de
Dieu ; ou celui de l’éternité, au mépris de toute vraisemblance. « La
2062
mple, qui est un des attributs de Dieu ; ou celui
de
l’éternité, au mépris de toute vraisemblance. « La France éternelle »
2063
ibuts de Dieu ; ou celui de l’éternité, au mépris
de
toute vraisemblance. « La France éternelle », « l’Allemagne immortell
2064
ortelle » sont des expressions courantes en temps
de
guerre. Cette rhétorique émeut des millions d’hommes, qui en oublient
2065
es en temps de guerre. Cette rhétorique émeut des
millions
d’hommes, qui en oublient du même coup leurs rudiments d’Histoire. Ce
2066
ps de guerre. Cette rhétorique émeut des millions
d’
hommes, qui en oublient du même coup leurs rudiments d’Histoire. Ces c
2067
mes, qui en oublient du même coup leurs rudiments
d’
Histoire. Ces contradictions essentielles — entre la souveraineté abso
2068
ienne, entre la nation et la paix — ont éclaté en
1914.
Et l’Europe depuis lors se trouve devant ce choix, dont nous devons l
2069
une et diverse, et cela suppose briser le carcan
de
l’État-nation, recréer des pouvoirs locaux, dévaloriser les frontière
2070
assumant au mépris des personnes ses prétentions
d’
Église sans Dieu, et réclamant non seulement la mort en masse mais la
2071
t non seulement la mort en masse mais la totalité
de
la vie des hommes. Voilà le grand dilemme de notre temps. II. Crit
2072
lité de la vie des hommes. Voilà le grand dilemme
de
notre temps. II. Critique fédéraliste du nationalisme Appliquon
2073
hommes. Voilà le grand dilemme de notre temps.
II
. Critique fédéraliste du nationalisme Appliquons maintenant notre
2074
t au moins dans nos réflexes acquis sur les bancs
de
l’école primaire. ⁂ La souveraineté nationale, tout d’abord. On a rem
2075
nfondaient sincèrement et réellement les concepts
de
patrie réelle, de nation et de souveraineté. M. Herriot, par exemple,
2076
ment et réellement les concepts de patrie réelle,
de
nation et de souveraineté. M. Herriot, par exemple, s’écria solennell
2077
ement les concepts de patrie réelle, de nation et
de
souveraineté. M. Herriot, par exemple, s’écria solennellement que la
2078
s’écria solennellement que la CED était « la fin
de
la France », parce que la CED prétendait limiter la souveraineté de l
2079
rce que la CED prétendait limiter la souveraineté
de
l’État dans le domaine militaire. À ses yeux donc, une France non abs
2080
eraine n’était plus la France. La seule évocation
d’
une atteinte possible à la souveraineté absolue lui paraissait suffisa
2081
rès laïque M. Herriot est en réalité un fanatique
de
la religion de la nation. S’il n’était pas aveuglé par la superstitio
2082
erriot est en réalité un fanatique de la religion
de
la nation. S’il n’était pas aveuglé par la superstition jacobine, il
2083
bsolue n’est qu’un mythe, inventé par les prêtres
de
la nation dans le dessein d’asservir les esprits à l’État. La souvera
2084
enté par les prêtres de la nation dans le dessein
d’
asservir les esprits à l’État. La souveraineté absolue n’existe pas, e
2085
i la souveraineté comme « la faculté pour un État
d’
agir à sa guise, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, dans les limites
2086
ine ». Or il n’est pas un seul État européen qui,
de
nos jours, ait conservé la faculté d’agir à sa guise à l’extérieur. I
2087
ropéen qui, de nos jours, ait conservé la faculté
d’
agir à sa guise à l’extérieur. Il n’en est pas un seul qui soit capabl
2088
térieur. Il n’en est pas un seul qui soit capable
de
déclarer la guerre ou de conclure la paix comme il l’entend, d’assure
2089
un seul qui soit capable de déclarer la guerre ou
de
conclure la paix comme il l’entend, d’assurer seul sa prospérité, de
2090
guerre ou de conclure la paix comme il l’entend,
d’
assurer seul sa prospérité, de se défendre seul pendant plus de quelqu
2091
comme il l’entend, d’assurer seul sa prospérité,
de
se défendre seul pendant plus de quelques heures contre une attaque d
2092
l sa prospérité, de se défendre seul pendant plus
de
quelques heures contre une attaque des Russes ou des Américains, bref
2093
re une attaque des Russes ou des Américains, bref
de
vivre en vase clos ou de jouer au pirate. Ces limites décisives à la
2094
ou des Américains, bref de vivre en vase clos ou
de
jouer au pirate. Ces limites décisives à la souveraineté ne sont poin
2095
eté nationale, vis-à-vis de l’extérieur, n’a plus
d’
autre existence que celle d’une illusion pseudo-religieuse et obsessiv
2096
l’extérieur, n’a plus d’autre existence que celle
d’
une illusion pseudo-religieuse et obsessive. Où la voit-on à l’œuvre ?
2097
mais seulement dans les discours des adversaires
de
la CED ou de toute autre forme d’organisation de l’Europe. Non pas co
2098
nt dans les discours des adversaires de la CED ou
de
toute autre forme d’organisation de l’Europe. Non pas comme une réali
2099
des adversaires de la CED ou de toute autre forme
d’
organisation de l’Europe. Non pas comme une réalité, mais bien comme u
2100
de la CED ou de toute autre forme d’organisation
de
l’Europe. Non pas comme une réalité, mais bien comme un prétexte à re
2101
réceptacle où se recueillent pêle-mêle nostalgies
de
gloires passées, orgueils déçus, rancunes et préjugés hérités d’une H
2102
ées, orgueils déçus, rancunes et préjugés hérités
d’
une Histoire faussée par l’école, agressivité frustrée, et surtout ang
2103
’école, agressivité frustrée, et surtout angoisse
de
perdre son identité. Elle a donc pris les caractères cliniques d’un c
2104
entité. Elle a donc pris les caractères cliniques
d’
un complexe. D’où la difficulté, pour ceux qui en sont victimes, de s’
2105
donc pris les caractères cliniques d’un complexe.
D’
où la difficulté, pour ceux qui en sont victimes, de s’adapter aux réa
2106
où la difficulté, pour ceux qui en sont victimes,
de
s’adapter aux réalités changeantes du siècle, et même de les apercevo
2107
apter aux réalités changeantes du siècle, et même
de
les apercevoir. D’où la prise qu’ils offrent aux manœuvres les plus g
2108
changeantes du siècle, et même de les apercevoir.
D’
où la prise qu’ils offrent aux manœuvres les plus grossières du commun
2109
r affectivité inquiète comme Iago sur la jalousie
d’
Othello. D’où enfin, l’extrême confusion et les éclats de passion saug
2110
té inquiète comme Iago sur la jalousie d’Othello.
D’
où enfin, l’extrême confusion et les éclats de passion saugrenus qui c
2111
lo. D’où enfin, l’extrême confusion et les éclats
de
passion saugrenus qui caractérisent les polémiques sur la souverainet
2112
a souveraineté nationale absolue, qu’une attitude
de
scepticisme intégral, tempérée par un souci de clinicien : le nationa
2113
de de scepticisme intégral, tempérée par un souci
de
clinicien : le nationaliste, en effet, n’est pas simplement un homme
2114
on erreur. C’est bien plutôt un homme qui souffre
de
la crainte morbide de perdre une puissance magique qui n’existe pas !
2115
plutôt un homme qui souffre de la crainte morbide
de
perdre une puissance magique qui n’existe pas ! Il s’agit beaucoup mo
2116
gique qui n’existe pas ! Il s’agit beaucoup moins
de
le réfuter que d’éviter d’exciter sa névrose. Nous reviendrons sur le
2117
pas ! Il s’agit beaucoup moins de le réfuter que
d’
éviter d’exciter sa névrose. Nous reviendrons sur les conséquences à t
2118
s’agit beaucoup moins de le réfuter que d’éviter
d’
exciter sa névrose. Nous reviendrons sur les conséquences à tirer de c
2119
se. Nous reviendrons sur les conséquences à tirer
de
ce diagnostic. ⁂ Un autre élément du nationalisme profondément induré
2120
isme profondément induré dans les esprits, depuis
quatre
ou cinq générations, par les soins de l’instruction publique, c’est l
2121
ndément induré dans les esprits, depuis quatre ou
cinq
générations, par les soins de l’instruction publique, c’est la confus
2122
depuis quatre ou cinq générations, par les soins
de
l’instruction publique, c’est la confusion établie entre « Patrie »,
2123
La Patrie, pour le fédéraliste, est une réalité
d’
instinct et de sentiment, un fait de naissance, comme le mot l’indique
2124
our le fédéraliste, est une réalité d’instinct et
de
sentiment, un fait de naissance, comme le mot l’indique, une implanta
2125
t une réalité d’instinct et de sentiment, un fait
de
naissance, comme le mot l’indique, une implantation géophysique, loca
2126
contraire, est une réalité idéale ou idéologique.
D’
où la différence foncière que voici : on peut annexer des peuples à un
2127
ent influencée et jamais déterminée par la nature
de
la patrie concrète, encore moins par ses limites naturelles. Il suffi
2128
ncore moins par ses limites naturelles. Il suffit
de
constater que la forme de l’État est à peu près la même de nos jours
2129
s naturelles. Il suffit de constater que la forme
de
l’État est à peu près la même de nos jours dans les patries et les na
2130
ter que la forme de l’État est à peu près la même
de
nos jours dans les patries et les nations les plus diverses. D’autre
2131
État n’entretient avec la nation que les rapports
d’
usurpation et de confiscation que j’indiquais plus haut. Quant à la La
2132
t avec la nation que les rapports d’usurpation et
de
confiscation que j’indiquais plus haut. Quant à la Langue, elle ne co
2133
accablantes n’empêchent pas le nationaliste moyen
de
revendiquer l’annexion à son État, au nom de son propre sentiment pat
2134
État, au nom de son propre sentiment patriotique,
de
peuples qui ont l’honneur de parler sa langue, quand celle-ci se trou
2135
ntiment patriotique, de peuples qui ont l’honneur
de
parler sa langue, quand celle-ci se trouve être celle d’une majorité
2136
er sa langue, quand celle-ci se trouve être celle
d’
une majorité dans les frontières actuelles de l’État en question. La c
2137
elle d’une majorité dans les frontières actuelles
de
l’État en question. La confusion Patrie-État-nation-Langue, résultat
2138
La confusion Patrie-État-nation-Langue, résultat
d’
une ignorance crasse, sévit dans plusieurs chapitres des traités de Ve
2139
rasse, sévit dans plusieurs chapitres des traités
de
Versailles, Trianon et Saint-Germain, pour ne citer que ceux-là. Elle
2140
int-Germain, pour ne citer que ceux-là. Elle sert
de
prétexte au premier nigaud venu pour mettre en doute la possibilité d
2141
r nigaud venu pour mettre en doute la possibilité
d’
une Europe unie. Dissocier ce conglomérat monstrueux, réfuter cette co
2142
confusion séculaire, la ridiculiser et l’extirper
de
l’enseignement, voilà qui me paraît l’une des toutes premières tâches
2143
urde. Non content de prétendre forcer dans le lit
de
Procuste des mêmes frontières administratives, patries locales, natio
2144
venu français ou allemand selon qu’il se trouvait
d’
un côté ou de l’autre de la frontière linguistique, idéalement prolong
2145
ou allemand selon qu’il se trouvait d’un côté ou
de
l’autre de la frontière linguistique, idéalement prolongée dans le so
2146
d selon qu’il se trouvait d’un côté ou de l’autre
de
la frontière linguistique, idéalement prolongée dans le sous-sol muet
2147
st qu’une transposition particulièrement insensée
de
la volonté d’isolement à la fois anxieux et agressif que représente l
2148
sposition particulièrement insensée de la volonté
d’
isolement à la fois anxieux et agressif que représente l’État-nation.
2149
bien-être des hommes soit sacrifié à la puissance
de
l’État, et leurs libertés concrètes à sa liberté abstraite, qu’il nom
2150
humaine, puisqu’en fait on lui sacrifie la santé
d’
un pays et son niveau de vie, la liberté économique et la justice elle
2151
la souveraineté absolue, elle ne représente rien
d’
autre qu’une tendance psychologique morbide, un prétexte à refuser tou
2152
bide, un prétexte à refuser toute mesure réaliste
de
coopération et à autoriser les tricheries les plus effrontées dans le
2153
ris pour la religion, l’a remplacé par le concept
de
« culture nationale ». On prétend que les idées ne connaissent pas de
2154
le ». On prétend que les idées ne connaissent pas
de
frontières, mais l’instruction publique a changé cela. (Et l’Universi
2155
es encyclopédies et les revues parlent couramment
de
« science française », de « science allemande », etc. (variétés que l
2156
vues parlent couramment de « science française »,
de
« science allemande », etc. (variétés que les Soviets englobent d’ail
2157
iets englobent d’ailleurs sous le titre diffamant
de
« science bourgeoise »). Sous Hitler, on parlait également de mathéma
2158
bourgeoise »). Sous Hitler, on parlait également
de
mathématiques allemandes, et sous Staline, d’une biologie marxiste. C
2159
ent de mathématiques allemandes, et sous Staline,
d’
une biologie marxiste. Ces excès doivent nous rendre attentifs à l’usa
2160
une plus grande rigueur ? La volonté fondamentale
de
l’État-nation : imposer les mêmes frontières au patriotisme, à l’admi
2161
nationalisme. Et ceci nous permet, par contraste,
de
décrire l’attitude fédéraliste comme un simple retour au respect des
2162
des réalités, comme une référence au bon sens.
III
. Deux modes de penser Il y a dans notre Europe du xxe siècle, deu
2163
éalités, comme une référence au bon sens. III.
Deux
modes de penser Il y a dans notre Europe du xxe siècle, deux type
2164
mme une référence au bon sens. III. Deux modes
de
penser Il y a dans notre Europe du xxe siècle, deux types d’espri
2165
enser Il y a dans notre Europe du xxe siècle,
deux
types d’esprit et de sensibilité politique : les nationalistes (dont
2166
y a dans notre Europe du xxe siècle, deux types
d’
esprit et de sensibilité politique : les nationalistes (dont les plus
2167
tre Europe du xxe siècle, deux types d’esprit et
de
sensibilité politique : les nationalistes (dont les plus conséquents
2168
on peut rapporter sans conteste à l’un ou l’autre
de
ces types d’esprit, dans le passé récent de l’Occident ? Le nationali
2169
rter sans conteste à l’un ou l’autre de ces types
d’
esprit, dans le passé récent de l’Occident ? Le nationalisme a représe
2170
autre de ces types d’esprit, dans le passé récent
de
l’Occident ? Le nationalisme a représenté au xixe siècle le seul pri
2171
sme a représenté au xixe siècle le seul principe
de
communion civique qui ait survécu au raz-de-marée rationaliste et jac
2172
ionaliste et jacobin ; et aussi l’agent principal
de
l’expansion européenne. Ce sont en effet les États-nations, et non pa
2173
Européens, le nationalisme développait les germes
de
notre décadence. D’une part, chez les peuples lointains qu’il venait
2174
es peuples lointains qu’il venait de coloniser et
d’
humilier, il suscitait un esprit de révolte et d’« indépendance nation
2175
e coloniser et d’humilier, il suscitait un esprit
de
révolte et d’« indépendance nationale » qui allait se dresser contre
2176
d’humilier, il suscitait un esprit de révolte et
d’
« indépendance nationale » qui allait se dresser contre lui au nom de
2177
e de plus en plus totalitaire. Si l’Europe, entre
1914
et 1954, a connu la décadence rapide, la chute de potentiel, le recul
2178
s en plus totalitaire. Si l’Europe, entre 1914 et
1954,
a connu la décadence rapide, la chute de potentiel, le recul mondial
2179
14 et 1954, a connu la décadence rapide, la chute
de
potentiel, le recul mondial que l’on sait, elle le doit, à un double
2180
au-dedans. En revanche, le fédéralisme a produit
deux
témoignages exemplaires de sa vitalité : les USA et la Suisse. Ces de
2181
édéralisme a produit deux témoignages exemplaires
de
sa vitalité : les USA et la Suisse. Ces deux pays ont été à la fois l
2182
laires de sa vitalité : les USA et la Suisse. Ces
deux
pays ont été à la fois les plus prospères et les plus pacifiques de l
2183
la fois les plus prospères et les plus pacifiques
de
l’ère moderne : ils n’ont provoqué aucune guerre. Toutes les dernière
2184
ique du xxe siècle, et avec les intérêts majeurs
de
l’Europe, tant spirituels que matériels. En s’opposant à l’ouverture
2185
ériels. En s’opposant à l’ouverture indispensable
d’
un grand marché continental, il entretient dans les pays protectionnis
2186
leur nature, ou par leur portée, ou par leur coût
de
production, ou enfin par les échanges que ces techniques multiplient
2187
’égoïsme politique mal compris opposent à l’union
de
l’Europe ; il est devenu au surplus une forme de pensée réactionnaire
2188
de l’Europe ; il est devenu au surplus une forme
de
pensée réactionnaire, un système de références démodé et rétrograde,
2189
lus une forme de pensée réactionnaire, un système
de
références démodé et rétrograde, et cela un siècle et demi seulement
2190
vec l’évolution technique et les nouvelles formes
de
la pensée scientifique. La pensée fédéraliste, en effet, se représent
2191
nte la société européenne comme une constellation
de
foyers créateurs, non comme un puzzle formé de pièces rigides et défi
2192
on de foyers créateurs, non comme un puzzle formé
de
pièces rigides et définies d’abord par leur contour. Elle conçoit les
2193
rapports humains et politiques comme un complexe
de
tensions normales entre des pôles opposés mais valables, non comme la
2194
opposés mais valables, non comme la juxtaposition
de
monades ou d’autarcies qui ne cessent de s’ignorer que pour s’entrech
2195
alables, non comme la juxtaposition de monades ou
d’
autarcies qui ne cessent de s’ignorer que pour s’entrechoquer brutalem
2196
position de monades ou d’autarcies qui ne cessent
de
s’ignorer que pour s’entrechoquer brutalement. Nos coutumes et nos st
2197
le polémique ne lui apparaissent pas comme autant
de
contradictions insupportables, qu’il faut tenter de réduire à l’unifo
2198
contradictions insupportables, qu’il faut tenter
de
réduire à l’uniformité si l’on ne peut les isoler par des cloisons ét
2199
oler par des cloisons étanches, mais comme autant
de
valeurs « complémentaires », dont le dialogue fait la richesse de l’O
2200
plémentaires », dont le dialogue fait la richesse
de
l’Occident. Or nous voyons que la science actuelle pense également pa
2201
ue la science actuelle pense également par champs
de
forces en interaction, non par entités statiques, et qu’elle a substi
2202
tés statiques, et qu’elle a substitué au principe
de
non-contradiction qui bloquait le progrès des sciences physiques, le
2203
it le progrès des sciences physiques, le principe
de
complémentarité. Qu’il s’agisse de la théorie des jeux appliquée par
2204
s, le principe de complémentarité. Qu’il s’agisse
de
la théorie des jeux appliquée par von Neumann à la politique et à l’é
2205
ar von Neumann à la politique et à l’économie, ou
de
l’organisation technique des entreprises, la science actuelle dépasse
2206
à rechercher le meilleur équilibre « en tension »
de
deux groupes différents, sauvegardant de la sorte à la fois leur indi
2207
echercher le meilleur équilibre « en tension » de
deux
groupes différents, sauvegardant de la sorte à la fois leur individua
2208
ension » de deux groupes différents, sauvegardant
de
la sorte à la fois leur individualité et leur relation créatrice. Il
2209
et leur relation créatrice. Il serait bien utile
de
prolonger ce parallèle dans le domaine de la biologie et de la psycho
2210
n utile de prolonger ce parallèle dans le domaine
de
la biologie et de la psychologie : je le suggère à des esprits plus c
2211
er ce parallèle dans le domaine de la biologie et
de
la psychologie : je le suggère à des esprits plus compétents. J’enten
2212
science moderne a conçue ; et il suppose un monde
de
relations libres et décentralisées qui est précisément celui que la t
2213
ans le droit fil des traditions les plus fécondes
de
l’Occident. On sait que l’Orient et l’Occident s’opposent comme le mo
2214
est aussi le principe vivant du fédéralisme. Être
d’
une patrie locale en tant qu’on y est né, mais d’une religion universe
2215
d’une patrie locale en tant qu’on y est né, mais
d’
une religion universelle en tant qu’on y croit ; se rattacher par la l
2216
; pouvoir au surplus s’affilier à une telle école
de
pensée, d’art ou de doctrine politique, proche ou lointaine dans le t
2217
u surplus s’affilier à une telle école de pensée,
d’
art ou de doctrine politique, proche ou lointaine dans le temps ou l’e
2218
s’affilier à une telle école de pensée, d’art ou
de
doctrine politique, proche ou lointaine dans le temps ou l’espace, se
2219
qu’une dispersion qui l’angoisse et où il craint
de
perdre son identité. Le fédéraliste au contraire y voit une possibili
2220
e fédéraliste au contraire y voit une possibilité
d’
enrichissement de la personne. (J’ai souvent défini la liberté comme l
2221
contraire y voit une possibilité d’enrichissement
de
la personne. (J’ai souvent défini la liberté comme le droit d’apparte
2222
e. (J’ai souvent défini la liberté comme le droit
d’
appartenir à plusieurs clubs !) Ce pluralisme redouté par le nationali
2223
alitaire, est le secret des pouvoirs créateurs et
de
la santé mentale de l’Occident. Enfin, je rappellerai que le fédérali
2224
ret des pouvoirs créateurs et de la santé mentale
de
l’Occident. Enfin, je rappellerai que le fédéralisme est dans la lign
2225
rappellerai que le fédéralisme est dans la ligne
de
la pensée chrétienne, alors que le nationalisme est foncièrement païe
2226
ment païen, idolâtre et antichrétien. L’idée même
de
nation est étrangère au dogme et à la foi chrétienne. Le Christ est m
2227
che une organisation personnaliste et fédéraliste
de
la société et de la communauté des peuples. Là encore, la cause est j
2228
ion personnaliste et fédéraliste de la société et
de
la communauté des peuples. Là encore, la cause est jugée. L’Histoire,
2229
ent sans appel le mythe nationaliste, destructeur
de
l’Europe et de sa paix. IV. Stratégie et tactique du fédéralisme
2230
le mythe nationaliste, destructeur de l’Europe et
de
sa paix. IV. Stratégie et tactique du fédéralisme Et cependant,
2231
aliste, destructeur de l’Europe et de sa paix.
IV
. Stratégie et tactique du fédéralisme Et cependant, il nous faut b
2232
tionalistes ont sur nous les avantages du nombre,
d’
une routine centenaire (qu’ils prennent à tort pour la tradition), du
2233
cocardier, encore si puissant sur les foules, et
de
l’appui d’intérêts privés décidés à payer ce qu’il faut. Mais nous av
2234
encore si puissant sur les foules, et de l’appui
d’
intérêts privés décidés à payer ce qu’il faut. Mais nous avons sur eux
2235
aut. Mais nous avons sur eux l’avantage important
de
défendre une cause qu’ils n’osent pas attaquer : celle de l’union eur
2236
dre une cause qu’ils n’osent pas attaquer : celle
de
l’union européenne. Il est clair que tous les obstacles à cette union
2237
férents prétextes, mais ils lui rendent l’hommage
d’
une adhésion de principe. M. Herriot est l’un de ces hommages que le n
2238
es, mais ils lui rendent l’hommage d’une adhésion
de
principe. M. Herriot est l’un de ces hommages que le nationalisme ren
2239
e d’une adhésion de principe. M. Herriot est l’un
de
ces hommages que le nationalisme rend à l’Europe unie. Et M. Molotov
2240
lisme, c’est-à-dire en tenant compte à chaque pas
de
cette double nécessité : instituer une union réelle, sauvegarder nos
2241
is si l’on opprime ses diversités, l’Europe cesse
d’
être elle-même. Ces deux exigences, bien moins contradictoires que « c
2242
diversités, l’Europe cesse d’être elle-même. Ces
deux
exigences, bien moins contradictoires que « complémentaires », comman
2243
Europe, et que les nationalistes ne cesseront pas
de
sitôt d’opposer leurs « solutions de rechange » à notre volonté const
2244
t que les nationalistes ne cesseront pas de sitôt
d’
opposer leurs « solutions de rechange » à notre volonté constructive.
2245
esseront pas de sitôt d’opposer leurs « solutions
de
rechange » à notre volonté constructive. Quelles seront les maximes d
2246
volonté constructive. Quelles seront les maximes
de
notre lutte, dans cette situation de fait ? ⁂ J’envisagerai trois exe
2247
les maximes de notre lutte, dans cette situation
de
fait ? ⁂ J’envisagerai trois exemples typiques, l’un concernant la po
2248
e, dans cette situation de fait ? ⁂ J’envisagerai
trois
exemples typiques, l’un concernant la politique, le second l’économie
2249
e, le second l’économie, le troisième la culture.
1°
— Il y a d’abord la fameuse querelle de la souveraineté nationale. Fa
2250
culture. 1° — Il y a d’abord la fameuse querelle
de
la souveraineté nationale. Faut-il la sacrifier ? Suffit-il de la lim
2251
ineté nationale. Faut-il la sacrifier ? Suffit-il
de
la limiter ? Ou bien peut-on la conserver tout en faisant l’Europe ?
2252
comme M. Herriot, nous disent qu’ils veulent bien
d’
une Europe unie, à condition qu’elle respecte les souverainetés nation
2253
elle conduit à refuser toute proposition concrète
d’
union — on vient de le voir par le rejet de la CED. Ceci dit, les fédé
2254
ncrète d’union — on vient de le voir par le rejet
de
la CED. Ceci dit, les fédéralistes doivent-ils engager la bataille su
2255
stes doivent-ils engager la bataille sur le thème
de
« l’abandon des souverainetés » ? Je ne le crois pas, pour deux raiso
2256
on des souverainetés » ? Je ne le crois pas, pour
deux
raisons. La première, c’est que la souveraineté nationale est encore
2257
e un mythe puissamment agissant sur les primaires
de
la presse, des parlements, et de tous les degrés de l’enseignement. D
2258
ur les primaires de la presse, des parlements, et
de
tous les degrés de l’enseignement. Dès qu’on y touche, on provoque un
2259
la presse, des parlements, et de tous les degrés
de
l’enseignement. Dès qu’on y touche, on provoque une opposition passio
2260
emme : souveraineté ou fédération. Et sur la base
d’
une expérience historique probante, je leur propose une solution prati
2261
s réussies, on peut citer la Suisse sans soulever
d’
objections. Chacun sait que son régime politique est l’un des plus sta
2262
e fédéraliste parvint à se faire accepter par les
22
cantons qui étaient encore, au début de 1848, des États parfaitement
2263
r par les 22 cantons qui étaient encore, au début
de
1848, des États parfaitement souverains. Tout le monde admettait, à c
2264
ar les 22 cantons qui étaient encore, au début de
1848,
des États parfaitement souverains. Tout le monde admettait, à ce mome
2265
ns étouffaient l’économie. Mais toute proposition
de
pacte fédéral plus étroit se heurtait au veto des cantons, jaloux de
2266
us étroit se heurtait au veto des cantons, jaloux
de
leur souveraineté sacrée. La solution qui s’imposa finalement, au len
2267
La solution qui s’imposa finalement, au lendemain
de
la guerre civile dite du Sonderbund (1847), fut la suivante : loin d’
2268
lendemain de la guerre civile dite du Sonderbund (
1847
), fut la suivante : loin d’exiger des cantons une renonciation à leur
2269
dite du Sonderbund (1847), fut la suivante : loin
d’
exiger des cantons une renonciation à leur souveraineté, la Constituti
2270
ation à leur souveraineté, la Constitution suisse
de
1848 garantit expressément cette souveraineté, en même temps qu’elle
2271
on à leur souveraineté, la Constitution suisse de
1848
garantit expressément cette souveraineté, en même temps qu’elle en dé
2272
les textes : Article premier. — Les peuples des
vingt-deux
cantons souverains de la Suisse, unis par la présente alliance… forme
2273
. — Les peuples des vingt-deux cantons souverains
de
la Suisse, unis par la présente alliance… forment dans leur ensemble
2274
s leur ensemble la Confédération suisse. Article
3.
— Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas
2275
ne sont pas délégués au pouvoir fédéral. Article
5.
— La Confédération garantit aux cantons leur territoire, la souverain
2276
ouveraineté dans les limites fixées par l’article
3,
leurs constitutions, la liberté et les droits du peuple… (etc.) Rati
2277
e depuis cent-six ans. On peut les qualifier soit
d’
habile compromis, soit d’échappatoire, selon qu’on a le tempérament pr
2278
peut les qualifier soit d’habile compromis, soit
d’
échappatoire, selon qu’on a le tempérament pragmatique ou doctrinaire.
2279
ue ou doctrinaire. Un fait demeure : il n’est pas
de
constitution plus fédéraliste que celle de la Suisse, et pourtant ell
2280
st pas de constitution plus fédéraliste que celle
de
la Suisse, et pourtant elle garantit la souveraineté de ses membres !
2281
Suisse, et pourtant elle garantit la souveraineté
de
ses membres ! Souveraineté plus ou moins fictive, direz-vous ? Raison
2282
iveau de la fédération. Tout cela me paraît plein
d’
enseignements pour l’Europe d’aujourd’hui. Tout cela nous indique une
2283
ela me paraît plein d’enseignements pour l’Europe
d’
aujourd’hui. Tout cela nous indique une voie : nous devons désormais c
2284
sur la mise en discussion et sur la ratification
d’
une Constitution fédérale de l’Europe, afin que l’Europe recouvre, ent
2285
t sur la ratification d’une Constitution fédérale
de
l’Europe, afin que l’Europe recouvre, entre les grands empires, une s
2286
les grands empires, une souveraineté qui échappe
de
toute manière à ses nations. Nous savons bien comment vont réagir le
2287
dissimuler derrière ce petit préfixe leur qualité
d’
adversaires réels de l’union. Mais là encore, je demande que les fédér
2288
ce petit préfixe leur qualité d’adversaires réels
de
l’union. Mais là encore, je demande que les fédéralistes refusent de
2289
encore, je demande que les fédéralistes refusent
de
se battre pour des mots trompeurs. C’est le contenu et la visée fédér
2290
des nationalismes intégraux, — je serai content.
2°
— Dans le domaine économique, également, cherchons la réalité derrièr
2291
ce faux dilemme, pour la même raison qu’il refuse
de
choisir entre les autonomies régionales absolues et l’unification for
2292
me est une manière souple et sans cesse réajustée
de
distinguer entre ce qui doit être mis en commun pour mieux fonctionne
2293
nes la part des automatismes nécessaires et celle
de
l’invention libre, la part des fonctions étatiques collectivisées et
2294
risques personnels. Les nationalistes, incapables
de
nier la nécessité d’une coopération continentale, ne proposent que de
2295
es nationalistes, incapables de nier la nécessité
d’
une coopération continentale, ne proposent que des marchandages entre
2296
services fédéraux organisant toutes les activités
de
production, d’investissement et de transport qui, par nature, déborde
2297
ux organisant toutes les activités de production,
d’
investissement et de transport qui, par nature, débordent la capacité
2298
les activités de production, d’investissement et
de
transport qui, par nature, débordent la capacité d’un seul pays ; et
2299
transport qui, par nature, débordent la capacité
d’
un seul pays ; et nous demandons la libération correspondante ou compl
2300
ou complémentaire des entreprises dont l’optimum
de
production reste local ou régional. Ici, comme sur le plan des struct
2301
puis ici qu’indiquer sommairement cette direction
de
recherches économiques. Mais je tenais à marquer son articulation sol
2302
ions fédéralistes et personnalistes d’autre part.
3°
— Deux mots enfin sur le problème de la culture. Il est une phrase qu
2303
fédéralistes et personnalistes d’autre part. 3° —
Deux
mots enfin sur le problème de la culture. Il est une phrase que je re
2304
’autre part. 3° — Deux mots enfin sur le problème
de
la culture. Il est une phrase que je retrouve dans tous les plans et
2305
t même par Strasbourg : il s’agit, nous dit-on, «
d’
organiser des échanges culturels entre nations ». Une sensibilité fédé
2306
cidentale n’a jamais coïncidé avec les frontières
de
nos États actuels, pour l’excellente raison qu’elle existait bien ava
2307
n qu’elle existait bien avant eux. Elle a précédé
de
mille à deux-mille ans la tentative de morceler notre héritage commun
2308
u’elle existait bien avant eux. Elle a précédé de
mille
à deux-mille ans la tentative de morceler notre héritage commun en «
2309
a précédé de mille à deux-mille ans la tentative
de
morceler notre héritage commun en « cultures nationales », tentative
2310
leurs avortée, qui n’a guère qu’un siècle et demi
d’
âge en France, moins d’un demi-siècle en Norvège, quelques dizaines d’
2311
guère qu’un siècle et demi d’âge en France, moins
d’
un demi-siècle en Norvège, quelques dizaines d’années en Turquie et en
2312
ance, moins d’un demi-siècle en Norvège, quelques
dizaines
d’années en Turquie et en Irlande. Jamais la culture en Europe ne s’e
2313
ns d’un demi-siècle en Norvège, quelques dizaines
d’
années en Turquie et en Irlande. Jamais la culture en Europe ne s’est
2314
éveloppée par des échanges contrôlés et officiels
de
nation à nation. Elle est née dans des foyers locaux qui ne correspon
2315
ns des foyers locaux qui ne correspondent à aucun
de
nos États-nations — la Lombardie, l’Ombrie, les Flandres, la Rhénanie
2316
is, Bâle ou Oxford. Elle s’est propagée librement
de
l’un à l’autre de ces foyers. Et grâce à cette interaction perpétuell
2317
tes ses formes nous sont communes, qu’il s’agisse
de
la symphonie ou du concerto, du roman ou du sonnet, de l’équation ou
2318
symphonie ou du concerto, du roman ou du sonnet,
de
l’équation ou de la théorie des groupes, de la fresque ou du tableau
2319
concerto, du roman ou du sonnet, de l’équation ou
de
la théorie des groupes, de la fresque ou du tableau de chevalet, du v
2320
nnet, de l’équation ou de la théorie des groupes,
de
la fresque ou du tableau de chevalet, du vocabulaire ou des catégorie
2321
théorie des groupes, de la fresque ou du tableau
de
chevalet, du vocabulaire ou des catégories philosophiques, et en géné
2322
e ou des catégories philosophiques, et en général
de
toutes les théories et procédés scientifiques. À quoi servirait, dès
2323
océdés scientifiques. À quoi servirait, dès lors,
de
« multiplier les échanges culturels » comme on dit, entre la Suède et
2324
peuples à se mieux connaître » par le truchement
d’
œuvres d’art nées sur leur territoire actuel. Les artistes les plus ty
2325
territoire actuel. Les artistes les plus typiques
de
l’esprit national d’un peuple sont en général les plus mauvais. Ce n’
2326
s artistes les plus typiques de l’esprit national
d’
un peuple sont en général les plus mauvais. Ce n’est pas Mallarmé, ni
2327
comme telle. Et les peuples ont bien moins besoin
de
se connaître personnellement que d’être enfin débarrassés de l’enseig
2328
moins besoin de se connaître personnellement que
d’
être enfin débarrassés de l’enseignement nationaliste, qui leur inculq
2329
ître personnellement que d’être enfin débarrassés
de
l’enseignement nationaliste, qui leur inculque dès l’enfance la méfia
2330
ur inculque dès l’enfance la méfiance et la haine
de
leurs voisins. Il résulte de ces brèves remarques que préconiser comm
2331
méfiance et la haine de leurs voisins. Il résulte
de
ces brèves remarques que préconiser comme on fait des échanges cultur
2332
e préconiser comme on fait des échanges culturels
de
nation à nation, c’est essayer de consolider les mythes nationalistes
2333
anges culturels de nation à nation, c’est essayer
de
consolider les mythes nationalistes, c’est reconnaître aux États le d
2334
tionalistes, c’est reconnaître aux États le droit
d’
élever ou d’abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des id
2335
c’est reconnaître aux États le droit d’élever ou
d’
abaisser des obstacles arbitraires à la circulation des idées et des œ
2336
ulturels. La culture est par essence un phénomène
d’
échanges libres ; elle meurt d’être enfermée dans des cadres administr
2337
sence un phénomène d’échanges libres ; elle meurt
d’
être enfermée dans des cadres administratifs ou nationaux ; et ce n’es
2338
n’est pas une libération surveillée des échanges
de
prison à prison que nous devons exiger mais l’élargissement immédiat
2339
u — j’entends : la suppression totale des mesures
de
discrimination nationales et des barrières douanières imposées à la v
2340
barrières douanières imposées à la vie culturelle
de
l’Europe et à ses produits. Les États — et demain le Pouvoir fédéral
2341
n le Pouvoir fédéral européen — n’ont qu’un moyen
d’
aider la culture : c’est d’offrir à ceux qui la créent et la transmett
2342
en — n’ont qu’un moyen d’aider la culture : c’est
d’
offrir à ceux qui la créent et la transmettent les moyens de vivre déc
2343
ceux qui la créent et la transmettent les moyens
de
vivre décemment. Et quant à ceux qui feignent de redouter que la supp
2344
de vivre décemment. Et quant à ceux qui feignent
de
redouter que la suppression des frontières « culturelles » entraîne u
2345
ières « culturelles » entraîne un affreux mélange
de
nos vertus et caractères nationaux, nous leur dirons : qu’est-ce que
2346
est-ce que votre « génie national » s’il a besoin
d’
être entouré par des douaniers pour ne pas se perdre ? Conclusions
2347
clusions J’ai tenté par ces quelques exemples,
de
montrer comment l’analyse fédéraliste, en même temps qu’elle rend com
2348
emps qu’elle rend compte des causes nationalistes
de
la décadence de l’Europe, dégage les principes d’une méthode et les m
2349
d compte des causes nationalistes de la décadence
de
l’Europe, dégage les principes d’une méthode et les maximes d’une act
2350
de la décadence de l’Europe, dégage les principes
d’
une méthode et les maximes d’une action seules susceptibles de conduir
2351
dégage les principes d’une méthode et les maximes
d’
une action seules susceptibles de conduire à une union vivante de nos
2352
e et les maximes d’une action seules susceptibles
de
conduire à une union vivante de nos peuples. Dans chaque cas, mes con
2353
ules susceptibles de conduire à une union vivante
de
nos peuples. Dans chaque cas, mes conclusions ont été pareilles : ell
2354
seul objectif décisif : la Constitution fédérale
de
l’Europe. La méthode proposée par les Anglais et baptisée « fonctionn
2355
iste. Mais elle a conduit à l’échec. Elle a servi
de
prétexte à trop de marchandages entre les vraies forces d’union et le
2356
onduit à l’échec. Elle a servi de prétexte à trop
de
marchandages entre les vraies forces d’union et les répugnances natio
2357
te à trop de marchandages entre les vraies forces
d’
union et les répugnances nationalistes, plus ou moins avouées comme te
2358
lisme le plus franc qui a triomphé, lors du refus
de
la CED. Nous voyons donc qu’il n’est pas plus facile de faire l’Europ
2359
CED. Nous voyons donc qu’il n’est pas plus facile
de
faire l’Europe par pièces et morceaux, que de la faire dans un seul é
2360
ile de faire l’Europe par pièces et morceaux, que
de
la faire dans un seul élan. Tourner un à un les obstacles multipliés
2361
les saboteurs sournois, n’est pas plus facile que
d’
attaquer de front, franchement, une fois pour toutes, ce qui inspire t
2362
rs sournois, n’est pas plus facile que d’attaquer
de
front, franchement, une fois pour toutes, ce qui inspire toutes les r
2363
: l’esprit nationaliste. aa. Rougemont Denis
de
, « Fédéralisme et nationalisme », Fédération, Paris, septembre–octobr
2364
ionalisme », Fédération, Paris, septembre–octobre
1954,
p. 1-16.
2365
Une présence (
1955
)ab Depuis le début de l’ère des dictatures, nombre d’intellectuels
2366
Une présence (1955)ab Depuis le début
de
l’ère des dictatures, nombre d’intellectuels occidentaux et asiatique
2367
Depuis le début de l’ère des dictatures, nombre
d’
intellectuels occidentaux et asiatiques nous répètent qu’il est imposs
2368
et asiatiques nous répètent qu’il est impossible
de
résister au fanatisme politique sans devenir soi-même fanatique, de l
2369
atisme politique sans devenir soi-même fanatique,
de
lutter contre le fascisme sans adopter la ligne communiste, ou de lut
2370
le fascisme sans adopter la ligne communiste, ou
de
lutter contre le stalinisme sans adopter les procédés fascistes. Le r
2371
rand que par crainte de le courir ils choisissent
de
ne point résister du tout, et de s’inscrire par exemple aux « partisa
2372
ils choisissent de ne point résister du tout, et
de
s’inscrire par exemple aux « partisans de la paix », qui sont ceux d’
2373
out, et de s’inscrire par exemple aux « partisans
de
la paix », qui sont ceux d’une armée et de sa politique. L’action du
2374
emple aux « partisans de la paix », qui sont ceux
d’
une armée et de sa politique. L’action du Congrès pour la liberté de l
2375
tisans de la paix », qui sont ceux d’une armée et
de
sa politique. L’action du Congrès pour la liberté de la culture, depu
2376
sa politique. L’action du Congrès pour la liberté
de
la culture, depuis cinq ans, a démontré la possibilité de lutter libr
2377
du Congrès pour la liberté de la culture, depuis
cinq
ans, a démontré la possibilité de lutter librement contre la tyrannie
2378
lture, depuis cinq ans, a démontré la possibilité
de
lutter librement contre la tyrannie, et de surmonter le défaitisme an
2379
bilité de lutter librement contre la tyrannie, et
de
surmonter le défaitisme anxieux d’une intelligentsia trop facilement
2380
a tyrannie, et de surmonter le défaitisme anxieux
d’
une intelligentsia trop facilement dupée par les prétextes humanitaire
2381
p facilement dupée par les prétextes humanitaires
de
la Terreur. Nous n’avons pas opposé à la propagande des Bons Tyrans j
2382
acrifice « temporaire » mais concret des libertés
de
la personne et des impératifs de la justice. Mais nous avons créé un
2383
ret des libertés de la personne et des impératifs
de
la justice. Mais nous avons créé un point de ralliement pour des espr
2384
tifs de la justice. Mais nous avons créé un point
de
ralliement pour des esprits venus d’horizons différents, et visant de
2385
réé un point de ralliement pour des esprits venus
d’
horizons différents, et visant des buts très divers. Quoi de commun, p
2386
différents, et visant des buts très divers. Quoi
de
commun, pourrait-on demander, entre nos présidents d’honneur ? Entre
2387
ommun, pourrait-on demander, entre nos présidents
d’
honneur ? Entre Maritain et Russell, entre Niebuhr et Madariaga, entre
2388
ebuhr et Madariaga, entre Jaspers et Croce ? Rien
de
facile à définir, sans doute. Pas un slogan. Mais ce fait et ce mode
2389
ans doute. Pas un slogan. Mais ce fait et ce mode
d’
expérience — comme l’eût dit John Dewey, leur grand aîné — qu’est l’ex
2390
grand aîné — qu’est l’exercice vivant et militant
de
la liberté de l’esprit, dans l’actualité de notre temps. Quels furent
2391
u’est l’exercice vivant et militant de la liberté
de
l’esprit, dans l’actualité de notre temps. Quels furent les actes du
2392
itant de la liberté de l’esprit, dans l’actualité
de
notre temps. Quels furent les actes du Congrès pendant cinq ans ? On
2393
temps. Quels furent les actes du Congrès pendant
cinq
ans ? On rappelle plus loin nos conférences de savants, d’écrivains,
2394
cinq ans ? On rappelle plus loin nos conférences
de
savants, d’écrivains, de musiciens, d’économistes et de philosophes,
2395
On rappelle plus loin nos conférences de savants,
d’
écrivains, de musiciens, d’économistes et de philosophes, nos revues e
2396
lus loin nos conférences de savants, d’écrivains,
de
musiciens, d’économistes et de philosophes, nos revues et publication
2397
onférences de savants, d’écrivains, de musiciens,
d’
économistes et de philosophes, nos revues et publications, nos spectac
2398
ants, d’écrivains, de musiciens, d’économistes et
de
philosophes, nos revues et publications, nos spectacles et nos débats
2399
spectacles et nos débats, et les grandes réunions
de
Berlin, de Bruxelles, de Bombay, de Paris, de Hambourg, de Rangoon et
2400
et nos débats, et les grandes réunions de Berlin,
de
Bruxelles, de Bombay, de Paris, de Hambourg, de Rangoon et de Milan.
2401
et les grandes réunions de Berlin, de Bruxelles,
de
Bombay, de Paris, de Hambourg, de Rangoon et de Milan. Je voudrais si
2402
ndes réunions de Berlin, de Bruxelles, de Bombay,
de
Paris, de Hambourg, de Rangoon et de Milan. Je voudrais simplement me
2403
ons de Berlin, de Bruxelles, de Bombay, de Paris,
de
Hambourg, de Rangoon et de Milan. Je voudrais simplement mettre en re
2404
, de Bruxelles, de Bombay, de Paris, de Hambourg,
de
Rangoon et de Milan. Je voudrais simplement mettre en relief un fait
2405
, de Bombay, de Paris, de Hambourg, de Rangoon et
de
Milan. Je voudrais simplement mettre en relief un fait : celui de not
2406
drais simplement mettre en relief un fait : celui
de
notre Rassemblement. Peut-être a-t-il contribué plus qu’on ne le croi
2407
bué plus qu’on ne le croit à changer l’atmosphère
de
l’après-guerre mondiale. La mode était aux démissions de l’esprit dev
2408
rès-guerre mondiale. La mode était aux démissions
de
l’esprit devant l’autel d’une Histoire déifiée. Les hommes libres se
2409
e était aux démissions de l’esprit devant l’autel
d’
une Histoire déifiée. Les hommes libres se sentaient seuls. Ils ont tr
2410
ns renoncer à sa vocation. Ce n’est pas un ersatz
d’
église, ce n’est pas un parti jaloux, ce n’est pas un bastion de défen
2411
’est pas un parti jaloux, ce n’est pas un bastion
de
défense. C’est plutôt un réseau d’amitiés agissantes de Paris à Tokyo
2412
pas un bastion de défense. C’est plutôt un réseau
d’
amitiés agissantes de Paris à Tokyo, de New York à Bombay, de Berlin-O
2413
ense. C’est plutôt un réseau d’amitiés agissantes
de
Paris à Tokyo, de New York à Bombay, de Berlin-Ouest à Santiago et Me
2414
un réseau d’amitiés agissantes de Paris à Tokyo,
de
New York à Bombay, de Berlin-Ouest à Santiago et Mexico. C’est une vo
2415
gissantes de Paris à Tokyo, de New York à Bombay,
de
Berlin-Ouest à Santiago et Mexico. C’est une volonté de justice qui s
2416
lin-Ouest à Santiago et Mexico. C’est une volonté
de
justice qui se moque des opportunismes et c’est une action permanente
2417
, le Congrès va mener plus que jamais l’offensive
de
la liberté, sa vraie lutte pour une paix vivante. ab. Rougemont De
2418
tte pour une paix vivante. ab. Rougemont Denis
de
, « Une présence », Cinq ans de présence (juin 1950-septembre 1955). L
2419
nte. ab. Rougemont Denis de, « Une présence »,
Cinq
ans de présence (juin 1950-septembre 1955). Le Congrès pour la libert
2420
. Rougemont Denis de, « Une présence », Cinq ans
de
présence (juin 1950-septembre 1955). Le Congrès pour la liberté de la
2421
de, « Une présence », Cinq ans de présence (juin
1950-septembre
1955). Le Congrès pour la liberté de la culture, Paris, 1955, p. 5-6.
2422
ence », Cinq ans de présence (juin 1950-septembre
1955
). Le Congrès pour la liberté de la culture, Paris, 1955, p. 5-6.
2423
1950-septembre 1955). Le Congrès pour la liberté
de
la culture, Paris, 1955, p. 5-6.
2424
Le Congrès pour la liberté de la culture, Paris,
1955,
p. 5-6.
2425
Reynold et l’Europe (
1955
)ac Il y a quinze ans j’osais louer Reynold de n’avoir pas craint d
2426
Reynold et l’Europe (1955)ac Il y a
quinze
ans j’osais louer Reynold de n’avoir pas craint de porter un jugement
2427
955)ac Il y a quinze ans j’osais louer Reynold
de
n’avoir pas craint de porter un jugement pessimiste sur l’avenir immé
2428
e ans j’osais louer Reynold de n’avoir pas craint
de
porter un jugement pessimiste sur l’avenir immédiat de la Suisse, sau
2429
rter un jugement pessimiste sur l’avenir immédiat
de
la Suisse, sauvant ainsi chez nous le sens du pire, la conscience d’u
2430
nt ainsi chez nous le sens du pire, la conscience
d’
une menace totale à laquelle, pour faire face, il fallait d’abord croi
2431
, c’est pour une part minime mais qui est la part
de
l’homme, parce que Reynold a eu raison et parce qu’il a su se faire e
2432
ire entendre. Cités et pays suisses et Conscience
de
la Suisse — l’avertissement venant après l’illustration —, ces deux l
2433
’avertissement venant après l’illustration —, ces
deux
livres ont porté, et je suis de ceux qui tiennent pour capital leur r
2434
stration —, ces deux livres ont porté, et je suis
de
ceux qui tiennent pour capital leur rôle dans la défense de ce pays,
2435
us qui tiennent un peuple ensemble. Dans la liste
de
ses ouvrages, je trouve un tournant symbolique, vers 1940 précisément
2436
ouvrages, je trouve un tournant symbolique, vers
1940
précisément : succédant à Grandeur de la Suisse, voici Qu’est-ce que
2437
que, vers 1940 précisément : succédant à Grandeur
de
la Suisse, voici Qu’est-ce que l’Europe ? et l’annonce d’un grand œuv
2438
isse, voici Qu’est-ce que l’Europe ? et l’annonce
d’
un grand œuvre consacré à la formation du plus vaste ensemble historiq
2439
istorique dans lequel se situe la Suisse. Le sens
de
la grandeur et le sens de l’Europe : voilà qui nous éloigne de la Sui
2440
itue la Suisse. Le sens de la grandeur et le sens
de
l’Europe : voilà qui nous éloigne de la Suisse des manuels, et de la
2441
r et le sens de l’Europe : voilà qui nous éloigne
de
la Suisse des manuels, et de la Suisse « concrète » (comme on dit bie
2442
ilà qui nous éloigne de la Suisse des manuels, et
de
la Suisse « concrète » (comme on dit bien à tort), celle qui ne prend
2443
fois spirituelles et historiques, qui sont celles
de
l’Europe entière ? Cités et pays suisses nous disait qui nous sommes,
2444
uisses nous disait qui nous sommes, et Conscience
de
la Suisse, où nous en sommes. Formation de l’Europe montre d’où nous
2445
cience de la Suisse, où nous en sommes. Formation
de
l’Europe montre d’où nous venons. Ces repères définissent un axe. Cet
2446
, où nous en sommes. Formation de l’Europe montre
d’
où nous venons. Ces repères définissent un axe. Cet axe part de l’Euro
2447
ons. Ces repères définissent un axe. Cet axe part
de
l’Europe des Romains et des Francs, traverse notre histoire et pointe
2448
t pointe vers un avenir qui ne peut être distinct
de
celui d’une Europe soit fédérée par la libre invention, soit unifiée
2449
vers un avenir qui ne peut être distinct de celui
d’
une Europe soit fédérée par la libre invention, soit unifiée par une f
2450
euple européen qui ait autant besoin que le nôtre
d’
exercer ce que Reynold appelle « l’imagination historique ». On sait q
2451
gés déguisés en vertus — bon sens pratique, tabou
de
la neutralité — tendent à stériliser chez nous cette faculté. Mais to
2452
ette faculté. Mais toutes nos réalités se moquent
de
ces excuses : il n’est que de regarder la carte. Tout nous rattache d
2453
réalités se moquent de ces excuses : il n’est que
de
regarder la carte. Tout nous rattache dans le passé, comme pour l’ave
2454
vie ne serait pas concevable. Prendre conscience
de
l’être suisse, au-delà des apparences souvent médiocres, c’est prendr
2455
ences souvent médiocres, c’est prendre conscience
de
l’Europe. Car l’Europe est faite dans l’ensemble des mêmes éléments q
2456
fondeurs du passé, dans cet inconscient collectif
d’
où remontent les rêves qui nous guident, par les deux utopies directri
2457
’où remontent les rêves qui nous guident, par les
deux
utopies directrices du Saint-Empire et de l’esprit des communes. Tout
2458
r les deux utopies directrices du Saint-Empire et
de
l’esprit des communes. Toutefois ces éléments, séparés en Europe, voi
2459
leur conciliation vivante nous définit. Principe
d’
autorité, principe d’association, « à la rencontre l’un de l’autre, ve
2460
vante nous définit. Principe d’autorité, principe
d’
association, « à la rencontre l’un de l’autre, vers la synthèse de l’u
2461
té, principe d’association, « à la rencontre l’un
de
l’autre, vers la synthèse de l’un et du multiple » : ces formules que
2462
à la rencontre l’un de l’autre, vers la synthèse
de
l’un et du multiple » : ces formules que Reynold a tirées de l’étude
2463
du multiple » : ces formules que Reynold a tirées
de
l’étude d’une Europe romano-germanique, n’est-il pas frappant de cons
2464
» : ces formules que Reynold a tirées de l’étude
d’
une Europe romano-germanique, n’est-il pas frappant de constater qu’el
2465
e Europe romano-germanique, n’est-il pas frappant
de
constater qu’elles résument l’expérience fédérale et fédéraliste de l
2466
les résument l’expérience fédérale et fédéraliste
de
la Suisse ? De l’Europe à la Suisse, de la Suisse à l’Europe, ces mou
2467
expérience fédérale et fédéraliste de la Suisse ?
De
l’Europe à la Suisse, de la Suisse à l’Europe, ces mouvements de syst
2468
déraliste de la Suisse ? De l’Europe à la Suisse,
de
la Suisse à l’Europe, ces mouvements de systole et de diastole animen
2469
a Suisse, de la Suisse à l’Europe, ces mouvements
de
systole et de diastole animent l’œuvre entière de Reynold et lui donn
2470
a Suisse à l’Europe, ces mouvements de systole et
de
diastole animent l’œuvre entière de Reynold et lui donnent sa valeur
2471
de systole et de diastole animent l’œuvre entière
de
Reynold et lui donnent sa valeur exemplaire : je n’en connais pas de
2472
de plus fécondes à méditer par les constructeurs
de
l’Europe. ac. Rougemont Denis de, « Reynold et l’Europe », Gonzagu
2473
constructeurs de l’Europe. ac. Rougemont Denis
de
, « Reynold et l’Europe », Gonzague de Reynold et son œuvre, Fribourg,
2474
et son œuvre, Fribourg, Éditions universitaires,
1955,
p. 313-314.
2475
Rien n’est perdu, tout reste à faire (janvier
1955
)ad Deux événements politiques ont absorbé l’attention des Européen
2476
est perdu, tout reste à faire (janvier 1955)ad
Deux
événements politiques ont absorbé l’attention des Européens et des mi
2477
bsorbé l’attention des Européens et des militants
de
l’Europe unie depuis l’été dernier : l’abandon du projet de CED et le
2478
e unie depuis l’été dernier : l’abandon du projet
de
CED et les accords de Londres. Londres a réalisé dans l’euphorie ce q
2479
rnier : l’abandon du projet de CED et les accords
de
Londres. Londres a réalisé dans l’euphorie ce que la CED était accusé
2480
ans l’euphorie ce que la CED était accusée à tort
de
préparer ; ce quelle avait pour objet principal de prévenir ; ce qui
2481
e préparer ; ce quelle avait pour objet principal
de
prévenir ; ce qui enfin devenait fatal dès l’instant qu’on la rejetai
2482
jeter ce qu’elle seule pouvait empêcher. Le moyen
de
décrire plus simplement ce vertige de contradictions ? Il y faudrait
2483
r. Le moyen de décrire plus simplement ce vertige
de
contradictions ? Il y faudrait une parabole. En voici une. Il y avait
2484
leur proposa un vaccin. Ayant remarqué que le nom
de
ce vaccin évoquait le nom de la maladie, comme il arrive en général,
2485
remarqué que le nom de ce vaccin évoquait le nom
de
la maladie, comme il arrive en général, ils votèrent contre le remède
2486
soulagés. Laissant aux historiens futurs le soin
de
tirer les conclusions de ce pataquès exemplaire, nous nous bornons ic
2487
istoriens futurs le soin de tirer les conclusions
de
ce pataquès exemplaire, nous nous bornons ici à relever deux faits :
2488
aquès exemplaire, nous nous bornons ici à relever
deux
faits : — Le rejet de la CED ne met pas fin à la construction europée
2489
ous bornons ici à relever deux faits : — Le rejet
de
la CED ne met pas fin à la construction européenne, comme on l’a répé
2490
bien à tort : il montre simplement qu’une partie
d’
un parlement (devenue majorité grâce à l’appui des communistes) n’a pa
2491
tes) n’a pas encore senti la nécessité historique
de
cette construction — nécessité qui demeure intacte après leur vote. —
2492
te. — En revanche, il est douteux que les accords
de
Londres représentent « un premier pas vers l’intégration européenne »
2493
s de plus que l’éducation européenne des peuples,
de
leurs cadres et de leurs élites, reste à faire. Les partisans de l’Eu
2494
cation européenne des peuples, de leurs cadres et
de
leurs élites, reste à faire. Les partisans de l’Europe unie ont péché
2495
et de leurs élites, reste à faire. Les partisans
de
l’Europe unie ont péché depuis quelques années — et non seulement dan
2496
quelques années — et non seulement dans l’affaire
de
la CED — par complaisance à une double illusion : ils ont cru que le
2497
ondeur, lent par nature, représenterait une perte
de
temps ; et ils ont cru que la propagande pour l’idée européenne était
2498
t faite. Examinons les réalités que cachaient ces
deux
illusions. I. — À un moment ou à un autre, nous avons tous été tentés
2499
ns les réalités que cachaient ces deux illusions.
I
. — À un moment ou à un autre, nous avons tous été tentés de penser qu
2500
moment ou à un autre, nous avons tous été tentés
de
penser qu’on ne pouvait réussir l’union que par une série de mesures
2501
u’on ne pouvait réussir l’union que par une série
de
mesures « concrètes », telles que l’OECE, la CECA, la CED, qu’on espé
2502
utionnaire qu’eût représenté l’exigence immédiate
d’
une fédération politique. C’était pratiquement se rallier à la méthode
2503
à petit l’oiseau fait son nid9, méthode qui évite
d’
agiter « inutilement » les esprits et les passions, et qui préfère l’a
2504
préfère l’action diplomatique ou les combinaisons
de
coulisses parlementaires. Cette méthode a réussi (OECE, CECA) jusqu’a
2505
ssi (OECE, CECA) jusqu’au jour où les adversaires
de
l’union ont déclenché leur propagande massive. Eux n’ont pas hésité u
2506
: elle consistait à croire qu’il est plus facile
de
faire l’Europe par pièces et morceaux que de la faire dans un seul él
2507
cile de faire l’Europe par pièces et morceaux que
de
la faire dans un seul élan fédérateur : qu’il est plus facile de tour
2508
s un seul élan fédérateur : qu’il est plus facile
de
tourner les obstacles que de les attaquer là où ils sont : dans les r
2509
u’il est plus facile de tourner les obstacles que
de
les attaquer là où ils sont : dans les routines de l’esprit nationali
2510
e les attaquer là où ils sont : dans les routines
de
l’esprit nationaliste, autant et plus que dans les intérêts particuli
2511
agne éducative en profondeur, que l’on a négligée
de
mener — ou que l’on n’a pas sérieusement soutenue. II. — Les mouvemen
2512
ener — ou que l’on n’a pas sérieusement soutenue.
II
. — Les mouvements de militants européens ont été surpris par l’échec
2513
a pas sérieusement soutenue. II. — Les mouvements
de
militants européens ont été surpris par l’échec de la CED. En effet,
2514
e militants européens ont été surpris par l’échec
de
la CED. En effet, cet échec a résulté du fait qu’on laissait le publi
2515
du fait qu’on laissait le public dans l’ignorance
de
la vraie situation européenne, des vrais buts du traité, du traité lu
2516
u traité, du traité lui-même, et des conséquences
de
son rejet. Or, les militants européens croyaient avoir expliqué tout
2517
’explique. Une enquête menée par le CEC10 au mois
de
septembre a donné les résultats suivants : le nombre des brochures, t
2518
: le nombre des brochures, tracts, petits livres
de
propagande ou d’information européenne publiés depuis 1947 dans les s
2519
brochures, tracts, petits livres de propagande ou
d’
information européenne publiés depuis 1947 dans les seize pays du CE e
2520
agande ou d’information européenne publiés depuis
1947
dans les seize pays du CE et en Suisse, s’élève à quatre-cent-quatre-
2521
formation européenne publiés depuis 1947 dans les
seize
pays du CE et en Suisse, s’élève à quatre-cent-quatre-vingt-onze. Leu
2522
ingt-onze. Leur tirage total a légèrement dépassé
trois
millions d’exemplaires. Cela paraît considérable quand on est assis d
2523
nze. Leur tirage total a légèrement dépassé trois
millions
d’exemplaires. Cela paraît considérable quand on est assis dans le bu
2524
tirage total a légèrement dépassé trois millions
d’
exemplaires. Cela paraît considérable quand on est assis dans le burea
2525
dérable quand on est assis dans le bureau central
d’
un mouvement, devant près de cinq-cents brochures de titres différents
2526
un mouvement, devant près de cinq-cents brochures
de
titres différents. En fait, cela représente en moyenne quatre-cents e
2527
la représente en moyenne quatre-cents exemplaires
de
chaque brochure distribuée dans chaque pays. Une goutte d’eau dans la
2528
brochure distribuée dans chaque pays. Une goutte
d’
eau dans la mer. Comment s’étonner après cela de l’ignorance presque t
2529
e d’eau dans la mer. Comment s’étonner après cela
de
l’ignorance presque totale où sont restés nos peuples et leurs élites
2530
e, depuis un siècle, et notamment par les manuels
d’
histoire : l’anti-Europe a joué là-dessus. De notre côté, tout reste à
2531
uels d’histoire : l’anti-Europe a joué là-dessus.
De
notre côté, tout reste à faire, ou presque. Une révolution est l’abou
2532
e, ou presque. Une révolution est l’aboutissement
d’
une série d’actions d’abord morales, intellectuelles et spirituelles,
2533
e. Une révolution est l’aboutissement d’une série
d’
actions d’abord morales, intellectuelles et spirituelles, puis économi
2534
par nature restent invisibles à l’œil des agences
de
presse, mais sans lesquelles rien ne se ferait. L’Europe unie est une
2535
stades préparatoires des révolutions réussies.
9.
Proverbe qui repose sur l’ignorance des mœurs des oiseaux : ceux-ci c
2536
leur nid en un jour, toutes affaires cessantes.
10.
« Centre européen de la culture », dont le siège est à Genève. L’arti
2537
culture », dont le siège est à Genève. L’article
de
M. Denis de Rougemont est extrait du ">n° 6 du bulletin de ce Cent
2538
e de M. Denis de Rougemont est extrait du ">n°
6
du bulletin de ce Centre (122, rue de Lausanne). ad. Rougemont Deni
2539
de Rougemont est extrait du ">n° 6 du bulletin
de
ce Centre (122, rue de Lausanne). ad. Rougemont Denis de, « Rien n’
2540
st extrait du ">n° 6 du bulletin de ce Centre (
122,
rue de Lausanne). ad. Rougemont Denis de, « Rien n’est perdu, tout
2541
tre (122, rue de Lausanne). ad. Rougemont Denis
de
, « Rien n’est perdu, tout reste à faire », France Europe, Paris, janv
2542
ut reste à faire », France Europe, Paris, janvier
1955,
p. 5.
2543
nse à l’enquête « Pour une bibliothèque idéale » (
1956
)ae af S’il s’agissait de nommer les cent grands livres de l’humani
2544
liothèque idéale » (1956)ae af S’il s’agissait
de
nommer les cent grands livres de l’humanité (ceux que l’on prend pour
2545
le » (1956)ae af S’il s’agissait de nommer les
cent
grands livres de l’humanité (ceux que l’on prend pour base des études
2546
S’il s’agissait de nommer les cent grands livres
de
l’humanité (ceux que l’on prend pour base des études dans certaines u
2547
e me bornerais aux écrits religieux, ou créateurs
de
communautés, ou scientifiques, tels que la Bible, le Coran, les Vedas
2548
acer sur le même plan que nos œuvres critiques ou
d’
imagination. Et d’autre part, où tracer la limite entre le sacré et la
2549
ntre le sacré et la culture ? Je n’ai tenu compte
d’
écrits de ces trois ordres que dans la mesure où ils ont fixé la rhéto
2550
acré et la culture ? Je n’ai tenu compte d’écrits
de
ces trois ordres que dans la mesure où ils ont fixé la rhétorique de
2551
la culture ? Je n’ai tenu compte d’écrits de ces
trois
ordres que dans la mesure où ils ont fixé la rhétorique de l’une de n
2552
que dans la mesure où ils ont fixé la rhétorique
de
l’une de nos langues nationales. (Il faudrait ajouter les traductions
2553
la mesure où ils ont fixé la rhétorique de l’une
de
nos langues nationales. (Il faudrait ajouter les traductions de la Bi
2554
nationales. (Il faudrait ajouter les traductions
de
la Bible en Angleterre et en Allemagne.) Pour les autres, je propose
2555
par un chiffre romain derrière les titres marqués
d’
une croix : I. — Livres ayant formé nos cultures et notre conscience
2556
romain derrière les titres marqués d’une croix :
I
. — Livres ayant formé nos cultures et notre conscience collective. II
2557
ormé nos cultures et notre conscience collective.
II
. — Livres ayant contribué à notre éducation occidentale, depuis cent
2558
t contribué à notre éducation occidentale, depuis
cent
ans. III. — Livres qui excitent aujourd’hui ma pensée. l. — Livres
2559
é à notre éducation occidentale, depuis cent ans.
III
. — Livres qui excitent aujourd’hui ma pensée. l. — Livres ayant for
2560
mé nos cultures et notre conscience collective
1.
Homère : L’Odyssée. 2. Eschyle : Théâtre. 3. Platon : Dialogues. 4. P
2561
e conscience collective 1. Homère : L’Odyssée.
2.
Eschyle : Théâtre. 3. Platon : Dialogues. 4. Plotin : Ennéades. 5. Ci
2562
e 1. Homère : L’Odyssée. 2. Eschyle : Théâtre.
3.
Platon : Dialogues. 4. Plotin : Ennéades. 5. Cicéron : Traités moraux
2563
sée. 2. Eschyle : Théâtre. 3. Platon : Dialogues.
4.
Plotin : Ennéades. 5. Cicéron : Traités moraux et philosophiques (hél
2564
tre. 3. Platon : Dialogues. 4. Plotin : Ennéades.
5.
Cicéron : Traités moraux et philosophiques (hélas !). 6. Saint August
2565
ron : Traités moraux et philosophiques (hélas !).
6.
Saint Augustin : Les Confessions. 7. Saint Thomas d’Aquin : Somme thé
2566
s (hélas !). 6. Saint Augustin : Les Confessions.
7.
Saint Thomas d’Aquin : Somme théologique. 8. Béroul : Tristan. 9. Chr
2567
ons. 7. Saint Thomas d’Aquin : Somme théologique.
8.
Béroul : Tristan. 9. Chrétien de Troyes : Le Chevalier au lion. 10. R
2568
d’Aquin : Somme théologique. 8. Béroul : Tristan.
9.
Chrétien de Troyes : Le Chevalier au lion. 10. Rabelais : Pantagruel.
2569
an. 9. Chrétien de Troyes : Le Chevalier au lion.
10.
Rabelais : Pantagruel. 11. — Gargantua. 12. Calvin : Institution de l
2570
Le Chevalier au lion. 10. Rabelais : Pantagruel.
11.
— Gargantua. 12. Calvin : Institution de la religion chrétienne. 13.
2571
lion. 10. Rabelais : Pantagruel. 11. — Gargantua.
12.
Calvin : Institution de la religion chrétienne. 13. Montaigne : Essai
2572
agruel. 11. — Gargantua. 12. Calvin : Institution
de
la religion chrétienne. 13. Montaigne : Essais. 14. Descartes : Disco
2573
. Calvin : Institution de la religion chrétienne.
13.
Montaigne : Essais. 14. Descartes : Discours de la méthode. 15. Pasca
2574
e la religion chrétienne. 13. Montaigne : Essais.
14.
Descartes : Discours de la méthode. 15. Pascal : Pensées. 16. Charles
2575
13. Montaigne : Essais. 14. Descartes : Discours
de
la méthode. 15. Pascal : Pensées. 16. Charles Perrault : Contes. 17.
2576
: Essais. 14. Descartes : Discours de la méthode.
15.
Pascal : Pensées. 16. Charles Perrault : Contes. 17. Montesquieu : L’
2577
s : Discours de la méthode. 15. Pascal : Pensées.
16.
Charles Perrault : Contes. 17. Montesquieu : L’Esprit des lois. 18. J
2578
Pascal : Pensées. 16. Charles Perrault : Contes.
17.
Montesquieu : L’Esprit des lois. 18. J.-J. Rousseau : Les Confessions
2579
lt : Contes. 17. Montesquieu : L’Esprit des lois.
18.
J.-J. Rousseau : Les Confessions. 19. Proudhon : Du Principe fédérali
2580
t des lois. 18. J.-J. Rousseau : Les Confessions.
19.
Proudhon : Du Principe fédéraliste. 20. Balzac : La Comédie humaine.
2581
fessions. 19. Proudhon : Du Principe fédéraliste.
20.
Balzac : La Comédie humaine. 21. Bacon : Essais. 22. Shakespeare : T
2582
ipe fédéraliste. 20. Balzac : La Comédie humaine.
21.
Bacon : Essais. 22. Shakespeare : Théâtre. 23. Swift : Les Voyages d
2583
Balzac : La Comédie humaine. 21. Bacon : Essais.
22.
Shakespeare : Théâtre. 23. Swift : Les Voyages de Gulliver. 24. De Fo
2584
. 21. Bacon : Essais. 22. Shakespeare : Théâtre.
23.
Swift : Les Voyages de Gulliver. 24. De Foe : Robinson Crusoé. 25. Le
2585
2. Shakespeare : Théâtre. 23. Swift : Les Voyages
de
Gulliver. 24. De Foe : Robinson Crusoé. 25. Lewis Carroll : Alice au
2586
e : Théâtre. 23. Swift : Les Voyages de Gulliver.
24.
De Foe : Robinson Crusoé. 25. Lewis Carroll : Alice au pays des merve
2587
Théâtre. 23. Swift : Les Voyages de Gulliver. 24.
De
Foe : Robinson Crusoé. 25. Lewis Carroll : Alice au pays des merveill
2588
oyages de Gulliver. 24. De Foe : Robinson Crusoé.
25.
Lewis Carroll : Alice au pays des merveilles. 26. — À travers le miro
2589
25. Lewis Carroll : Alice au pays des merveilles.
26.
— À travers le miroir. 27. William James : L’Expérience religieuse. 2
2590
u pays des merveilles. 26. — À travers le miroir.
27.
William James : L’Expérience religieuse. 28. Maître Eckhart : Sermons
2591
oir. 27. William James : L’Expérience religieuse.
28.
Maître Eckhart : Sermons. 29. Luther : De Servo arbitrio. 30. Goethe
2592
érience religieuse. 28. Maître Eckhart : Sermons.
29.
Luther : De Servo arbitrio. 30. Goethe : Faust. 31. Hegel : Philosoph
2593
ieuse. 28. Maître Eckhart : Sermons. 29. Luther :
De
Servo arbitrio. 30. Goethe : Faust. 31. Hegel : Philosophie de l’espr
2594
ckhart : Sermons. 29. Luther : De Servo arbitrio.
30.
Goethe : Faust. 31. Hegel : Philosophie de l’esprit. 32. Freud : La S
2595
. Luther : De Servo arbitrio. 30. Goethe : Faust.
31.
Hegel : Philosophie de l’esprit. 32. Freud : La Science des rêves. 33
2596
trio. 30. Goethe : Faust. 31. Hegel : Philosophie
de
l’esprit. 32. Freud : La Science des rêves. 33. Saint Jean de la Croi
2597
the : Faust. 31. Hegel : Philosophie de l’esprit.
32.
Freud : La Science des rêves. 33. Saint Jean de la Croix : La Nuit ob
2598
ie de l’esprit. 32. Freud : La Science des rêves.
33.
Saint Jean de la Croix : La Nuit obscure de l’âme. 34. Cervantès : Do
2599
ves. 33. Saint Jean de la Croix : La Nuit obscure
de
l’âme. 34. Cervantès : Don Quichotte. 35. Dante : La Divine Comédie.
2600
aint Jean de la Croix : La Nuit obscure de l’âme.
34.
Cervantès : Don Quichotte. 35. Dante : La Divine Comédie. 36. Raimbau
2601
obscure de l’âme. 34. Cervantès : Don Quichotte.
35.
Dante : La Divine Comédie. 36. Raimbaut d’Orange : Œuvres poétiques.
2602
s : Don Quichotte. 35. Dante : La Divine Comédie.
36.
Raimbaut d’Orange : Œuvres poétiques. 37. Al-Hallaj : Divan. II. —
2603
omédie. 36. Raimbaut d’Orange : Œuvres poétiques.
37.
Al-Hallaj : Divan. II. — Livres ayant contribué à notre éducation
2604
nge : Œuvres poétiques. 37. Al-Hallaj : Divan.
II
. — Livres ayant contribué à notre éducation occidentale depuis cent a
2605
nt contribué à notre éducation occidentale depuis
cent
ans 38. Tibulle : Élégies. 39. Dante : De la Langue vulgaire. 40.
2606
à notre éducation occidentale depuis cent ans
38.
Tibulle : Élégies. 39. Dante : De la Langue vulgaire. 40. Spinoza : É
2607
dentale depuis cent ans 38. Tibulle : Élégies.
39.
Dante : De la Langue vulgaire. 40. Spinoza : Éthique. 41. Agrippa d’A
2608
is cent ans 38. Tibulle : Élégies. 39. Dante :
De
la Langue vulgaire. 40. Spinoza : Éthique. 41. Agrippa d’Aubigné : Le
2609
lle : Élégies. 39. Dante : De la Langue vulgaire.
40.
Spinoza : Éthique. 41. Agrippa d’Aubigné : Les Tragiques. 42. Cardina
2610
e : De la Langue vulgaire. 40. Spinoza : Éthique.
41.
Agrippa d’Aubigné : Les Tragiques. 42. Cardinal de Retz : Mémoires. 4
2611
: Éthique. 41. Agrippa d’Aubigné : Les Tragiques.
42.
Cardinal de Retz : Mémoires. 43. Prince de Ligne : Écrits. 44. Casano
2612
: Les Tragiques. 42. Cardinal de Retz : Mémoires.
43.
Prince de Ligne : Écrits. 44. Casanova : Mémoires. 45. Chateaubriand:
2613
de Retz : Mémoires. 43. Prince de Ligne : Écrits.
44.
Casanova : Mémoires. 45. Chateaubriand: Mémoires d’outre-tombe. 46. V
2614
rince de Ligne : Écrits. 44. Casanova : Mémoires.
45.
Chateaubriand: Mémoires d’outre-tombe. 46. Victor Hugo : Choses vues.
2615
Casanova : Mémoires. 45. Chateaubriand: Mémoires
d’
outre-tombe. 46. Victor Hugo : Choses vues. 47. Stendhal : La Chartreu
2616
oires. 45. Chateaubriand: Mémoires d’outre-tombe.
46.
Victor Hugo : Choses vues. 47. Stendhal : La Chartreuse de Parme. 48.
2617
res d’outre-tombe. 46. Victor Hugo : Choses vues.
47.
Stendhal : La Chartreuse de Parme. 48. Charles Baudelaire : Les Fleur
2618
Hugo : Choses vues. 47. Stendhal : La Chartreuse
de
Parme. 48. Charles Baudelaire : Les Fleurs du mal. 49. Stéphane Mall
2619
oses vues. 47. Stendhal : La Chartreuse de Parme.
48.
Charles Baudelaire : Les Fleurs du mal. 49. Stéphane Mallarmé : Poés
2620
rme. 48. Charles Baudelaire : Les Fleurs du mal.
49.
Stéphane Mallarmé : Poésies. 50. Arthur Rimbaud : Une saison en enfer
2621
Fleurs du mal. 49. Stéphane Mallarmé : Poésies.
50.
Arthur Rimbaud : Une saison en enfer. 51. Charles Péguy : L’Argent. 5
2622
oésies. 50. Arthur Rimbaud : Une saison en enfer.
51.
Charles Péguy : L’Argent. 52. G. Apollinaire : Alcools. 53. Marcel Pr
2623
ne saison en enfer. 51. Charles Péguy : L’Argent.
52.
G. Apollinaire : Alcools. 53. Marcel Proust : À la recherche du temps
2624
s Péguy : L’Argent. 52. G. Apollinaire : Alcools.
53.
Marcel Proust : À la recherche du temps perdu. 54. John Donne : Sermo
2625
3. Marcel Proust : À la recherche du temps perdu.
54.
John Donne : Sermons. 55. James Joyce : Ulysse. 56. T. E. Lawrence: C
2626
cherche du temps perdu. 54. John Donne : Sermons.
55.
James Joyce : Ulysse. 56. T. E. Lawrence: Correspondance. 57. Edgar P
2627
. John Donne : Sermons. 55. James Joyce : Ulysse.
56.
T. E. Lawrence: Correspondance. 57. Edgar Poe : Contes. 58. T. S. Eli
2628
yce : Ulysse. 56. T. E. Lawrence: Correspondance.
57.
Edgar Poe : Contes. 58. T. S. Eliot : Poèmes. 59. Thomas Hardy : Jude
2629
Lawrence: Correspondance. 57. Edgar Poe : Contes.
58.
T. S. Eliot : Poèmes. 59. Thomas Hardy : Jude l’obscur. 60. Hemingway
2630
57. Edgar Poe : Contes. 58. T. S. Eliot : Poèmes.
59.
Thomas Hardy : Jude l’obscur. 60. Hemingway : Pour qui sonne le glas.
2631
Eliot : Poèmes. 59. Thomas Hardy : Jude l’obscur.
60.
Hemingway : Pour qui sonne le glas. 61. D. H. Lawrence : L’Amant de l
2632
l’obscur. 60. Hemingway : Pour qui sonne le glas.
61.
D. H. Lawrence : L’Amant de lady Chatterley. 62. Paracelse : Liber pa
2633
scur. 60. Hemingway : Pour qui sonne le glas. 61.
D.
H. Lawrence : L’Amant de lady Chatterley. 62. Paracelse : Liber param
2634
r qui sonne le glas. 61. D. H. Lawrence : L’Amant
de
lady Chatterley. 62. Paracelse : Liber paramirum. 63. — Prognosticati
2635
61. D. H. Lawrence : L’Amant de lady Chatterley.
62.
Paracelse : Liber paramirum. 63. — Prognostication. 64. Novalis : Poé
2636
lady Chatterley. 62. Paracelse : Liber paramirum.
63.
— Prognostication. 64. Novalis : Poésies et fragments philosophiques.
2637
racelse : Liber paramirum. 63. — Prognostication.
64.
Novalis : Poésies et fragments philosophiques. 65. Hölderlin : Poèmes
2638
4. Novalis : Poésies et fragments philosophiques.
65.
Hölderlin : Poèmes. 66. Chamisso : L’Histoire merveilleuse de Peter S
2639
fragments philosophiques. 65. Hölderlin : Poèmes.
66.
Chamisso : L’Histoire merveilleuse de Peter Schlemihl. 67. Gottfried
2640
: Poèmes. 66. Chamisso : L’Histoire merveilleuse
de
Peter Schlemihl. 67. Gottfried Keller : Henri le vert. 68. Nietzsche
2641
sso : L’Histoire merveilleuse de Peter Schlemihl.
67.
Gottfried Keller : Henri le vert. 68. Nietzsche : Aurore. 69. Rainer
2642
Schlemihl. 67. Gottfried Keller : Henri le vert.
68.
Nietzsche : Aurore. 69. Rainer Maria Rilke : Élégies de Duino. 70. R.
2643
d Keller : Henri le vert. 68. Nietzsche : Aurore.
69.
Rainer Maria Rilke : Élégies de Duino. 70. R. Kassner : Toute son œuv
2644
tzsche : Aurore. 69. Rainer Maria Rilke : Élégies
de
Duino. 70. R. Kassner : Toute son œuvre ou, en tout cas Les Éléments
2645
urore. 69. Rainer Maria Rilke : Élégies de Duino.
70.
R. Kassner : Toute son œuvre ou, en tout cas Les Éléments de la grand
2646
er : Toute son œuvre ou, en tout cas Les Éléments
de
la grandeur humaine. 71. M. de Unamuno : Le Sentiment tragique de la
2647
en tout cas Les Éléments de la grandeur humaine.
71.
M. de Unamuno : Le Sentiment tragique de la vie. 72. Silone : Le Pain
2648
umaine. 71. M. de Unamuno : Le Sentiment tragique
de
la vie. 72. Silone : Le Pain et le vin. 73. Dostoïevski : L’Idiot. 74
2649
M. de Unamuno : Le Sentiment tragique de la vie.
72.
Silone : Le Pain et le vin. 73. Dostoïevski : L’Idiot. 74. — Les Frèr
2650
agique de la vie. 72. Silone : Le Pain et le vin.
73.
Dostoïevski : L’Idiot. 74. — Les Frères Karamazov. 75. Kierkegaard :
2651
e : Le Pain et le vin. 73. Dostoïevski : L’Idiot.
74.
— Les Frères Karamazov. 75. Kierkegaard : Post-scriptum aux riens phi
2652
ostoïevski : L’Idiot. 74. — Les Frères Karamazov.
75.
Kierkegaard : Post-scriptum aux riens philosophiques. 76. Andersen :
2653
kegaard : Post-scriptum aux riens philosophiques.
76.
Andersen : Contes. 77. G. Bernanos : Journal d’un curé de campagne.
2654
aux riens philosophiques. 76. Andersen : Contes.
77.
G. Bernanos : Journal d’un curé de campagne. 78. Valery Larbaud : Ama
2655
76. Andersen : Contes. 77. G. Bernanos : Journal
d’
un curé de campagne. 78. Valery Larbaud : Amants, heureux Amants. 79.
2656
en : Contes. 77. G. Bernanos : Journal d’un curé
de
campagne. 78. Valery Larbaud : Amants, heureux Amants. 79. Ramuz : Ad
2657
77. G. Bernanos : Journal d’un curé de campagne.
78.
Valery Larbaud : Amants, heureux Amants. 79. Ramuz : Adam et Ève (ou
2658
gne. 78. Valery Larbaud : Amants, heureux Amants.
79.
Ramuz : Adam et Ève (ou Derborence). 80. Saint-John Perse : Anabase.
2659
Amants. 79. Ramuz : Adam et Ève (ou Derborence).
80.
Saint-John Perse : Anabase. 81. D. de Rougemont : L’Amour et l’Occid
2660
(ou Derborence). 80. Saint-John Perse : Anabase.
81.
D. de Rougemont : L’Amour et l’Occident . 82. Paul Valéry : Variété.
2661
Derborence). 80. Saint-John Perse : Anabase. 81.
D.
de Rougemont : L’Amour et l’Occident . 82. Paul Valéry : Variété. 83
2662
e. 81. D. de Rougemont : L’Amour et l’Occident .
82.
Paul Valéry : Variété. 83. Gide : Journal. 84. Burckhardt : Considéra
2663
’Amour et l’Occident . 82. Paul Valéry : Variété.
83.
Gide : Journal. 84. Burckhardt : Considérations sur l’histoire du mon
2664
. 82. Paul Valéry : Variété. 83. Gide : Journal.
84.
Burckhardt : Considérations sur l’histoire du monde. 85. Kafka : Le P
2665
ckhardt : Considérations sur l’histoire du monde.
85.
Kafka : Le Procès. 86. Webster : Le Démon blanc. 87. Huizinga : La Fi
2666
s sur l’histoire du monde. 85. Kafka : Le Procès.
86.
Webster : Le Démon blanc. 87. Huizinga : La Fin du Moyen Âge. Déjà
2667
Kafka : Le Procès. 86. Webster : Le Démon blanc.
87.
Huizinga : La Fin du Moyen Âge. Déjà cités (I) Lewis Carroll :
2668
87. Huizinga : La Fin du Moyen Âge. Déjà cités (
I
) Lewis Carroll : Alice au pays des merveilles. — À travers le mir
2669
u pays des merveilles. — À travers le miroir.
III
. — Livres qui excitent aujourd’hui ma pensée 88. Benjamin Constant
2670
I. — Livres qui excitent aujourd’hui ma pensée
88.
Benjamin Constant : Journal intime. 89. De Tocqueville : La Démocrati
2671
pensée 88. Benjamin Constant : Journal intime.
89.
De Tocqueville : La Démocratie en Amérique. 90. Toynbee : A Study of
2672
ée 88. Benjamin Constant : Journal intime. 89.
De
Tocqueville : La Démocratie en Amérique. 90. Toynbee : A Study of His
2673
. 89. De Tocqueville : La Démocratie en Amérique.
90.
Toynbee : A Study of History. 91. W. A. Auden : Collected Poems. 92.
2674
ie en Amérique. 90. Toynbee : A Study of History.
91.
W. A. Auden : Collected Poems. 92. Bitzius (Jérémie Gotthelf) : L’Ara
2675
dy of History. 91. W. A. Auden : Collected Poems.
92.
Bitzius (Jérémie Gotthelf) : L’Araignée noire. 93. Garcia Lorca : Thé
2676
2. Bitzius (Jérémie Gotthelf) : L’Araignée noire.
93.
Garcia Lorca : Théâtre. 94. J. L. Borgès : Œuvre. 95. Machiavel : Dis
2677
) : L’Araignée noire. 93. Garcia Lorca : Théâtre.
94.
J. L. Borgès : Œuvre. 95. Machiavel : Discours sur la première décade
2678
Garcia Lorca : Théâtre. 94. J. L. Borgès : Œuvre.
95.
Machiavel : Discours sur la première décade de Tite Live. 96. André
2679
. 95. Machiavel : Discours sur la première décade
de
Tite Live. 96. André Breton : L’Amour fou. 97. Malraux : Psychologie
2680
: Discours sur la première décade de Tite Live.
96.
André Breton : L’Amour fou. 97. Malraux : Psychologie de l’art. 98.
2681
de de Tite Live. 96. André Breton : L’Amour fou.
97.
Malraux : Psychologie de l’art. 98. Jean Paulhan : Les Fleurs de Ta
2682
é Breton : L’Amour fou. 97. Malraux : Psychologie
de
l’art. 98. Jean Paulhan : Les Fleurs de Tarbes. 99. Graham Greene :
2683
L’Amour fou. 97. Malraux : Psychologie de l’art.
98.
Jean Paulhan : Les Fleurs de Tarbes. 99. Graham Greene : La Puissan
2684
hologie de l’art. 98. Jean Paulhan : Les Fleurs
de
Tarbes. 99. Graham Greene : La Puissance et la gloire. Déjà cités (
2685
l’art. 98. Jean Paulhan : Les Fleurs de Tarbes.
99.
Graham Greene : La Puissance et la gloire. Déjà cités (I et II)
2686
Greene : La Puissance et la gloire. Déjà cités (
I
et II) Cardinal de Retz : Mémoires. Pascal : Pensées. Swift : L
2687
e : La Puissance et la gloire. Déjà cités (I et
II
) Cardinal de Retz : Mémoires. Pascal : Pensées. Swift : Les Voy
2688
Mémoires. Pascal : Pensées. Swift : Les Voyages
de
Gulliver. Lewis Carroll : Alice au pays des merveilles. — À travers
2689
ux riens philosophiques. ae. Rougemont Denis
de
, « [Réponse à une enquête] Pour une bibliothèque idéale », Pour une b
2690
, Pour une bibliothèque idéale, Paris, Gallimard,
1956,
p. 279‑284. af. Introduit par cette notice : « Né en 1906. Brillant
2691
bliothèque idéale, Paris, Gallimard, 1956, p. 279‑
284.
af. Introduit par cette notice : « Né en 1906. Brillant essayiste, i
2692
79‑284. af. Introduit par cette notice : « Né en
1906.
Brillant essayiste, il s’est fait l’ardent défenseur du mouvement féd
2693
du mouvement fédéraliste : Le Paysan du Danube (
1932
), Politique de la personne (1934), Penser avec les mains (1936),
2694
aliste : Le Paysan du Danube (1932), Politique
de
la personne (1934), Penser avec les mains (1936), Journal d’un in
2695
an du Danube (1932), Politique de la personne (
1934
), Penser avec les mains (1936), Journal d’un intellectuel en chôma
2696
de la personne (1934), Penser avec les mains (
1936
), Journal d’un intellectuel en chômage (1937), L’Amour et l’Occide
2697
(1934), Penser avec les mains (1936), Journal
d’
un intellectuel en chômage (1937), L’Amour et l’Occident (1939), et
2698
(1936), Journal d’un intellectuel en chômage (
1937
), L’Amour et l’Occident (1939), etc. »
2699
tuel en chômage (1937), L’Amour et l’Occident (
1939
), etc. »
2700
L’Association européenne des festivals
de
musique a cinq ans (1956)ap À la fin de 1951, répondant à une invi
2701
Association européenne des festivals de musique a
cinq
ans (1956)ap À la fin de 1951, répondant à une invitation lancée p
2702
n européenne des festivals de musique a cinq ans (
1956
)ap À la fin de 1951, répondant à une invitation lancée par le Cent
2703
tivals de musique a cinq ans (1956)ap À la fin
de
1951, répondant à une invitation lancée par le Centre européen de la
2704
als de musique a cinq ans (1956)ap À la fin de
1951,
répondant à une invitation lancée par le Centre européen de la cultur
2705
entre européen de la culture, sur une proposition
de
son conseiller musical, Igor Markevitch, les directeurs de quinze gra
2706
nseiller musical, Igor Markevitch, les directeurs
de
quinze grands festivals se réunissaient à Genève. Jamais encore, une
2707
iller musical, Igor Markevitch, les directeurs de
quinze
grands festivals se réunissaient à Genève. Jamais encore, une telle r
2708
telle rencontre n’avait eu lieu dans les annales
de
l’Europe. Une seule journée de délibérations suffit à dégager un acco
2709
u dans les annales de l’Europe. Une seule journée
de
délibérations suffit à dégager un accord unanime. Les quinze directeu
2710
bérations suffit à dégager un accord unanime. Les
quinze
directeurs décidèrent avec enthousiasme de créer une organisation com
2711
es quinze directeurs décidèrent avec enthousiasme
de
créer une organisation commune. Un secrétariat fut établi à Genève, a
2712
paraissait une brochure contenant les programmes
de
tous les festivals-membres pour la saison suivante. Premier témoignag
2713
r la saison suivante. Premier témoignage tangible
d’
un esprit de collaboration se substituant à l’esprit de rivalité, et d
2714
suivante. Premier témoignage tangible d’un esprit
de
collaboration se substituant à l’esprit de rivalité, et d’une vision
2715
esprit de collaboration se substituant à l’esprit
de
rivalité, et d’une vision européenne dépassant les intérêts locaux to
2716
oration se substituant à l’esprit de rivalité, et
d’
une vision européenne dépassant les intérêts locaux tout en les servan
2717
En effet, la multiplication rapide des festivals
de
musique dans tous nos pays et presque dans toutes nos villes, posait
2718
posait des problèmes tout nouveaux. Plus on joue
de
musique, et mieux cela vaut, dira-t-on. Oui, mais cela peut aussi cré
2719
ines confusions des valeurs. Le public, sollicité
de
tous côtés, ne sait plus où aller et voudrait qu’on l’oriente. Les ar
2720
l’oriente. Les artistes, orchestres et les chefs
de
qualité ne suffisent plus à la demande. Les programmes tendent à deve
2721
ge des meilleurs. ⁂ Qu’est-ce qu’un bon festival
de
musique ? Telle est la première question que s’est posée notre associ
2722
festival est d’abord une fête, donc quelque chose
d’
exceptionnel, qui sort de la routine des programmes de l’hiver et qui
2723
fête, donc quelque chose d’exceptionnel, qui sort
de
la routine des programmes de l’hiver et qui doit créer une atmosphère
2724
ceptionnel, qui sort de la routine des programmes
de
l’hiver et qui doit créer une atmosphère spéciale, à laquelle contrib
2725
ontribuent non seulement la qualité des œuvres et
de
leur exécution, mais le paysage, l’ambiance d’une cité, et la traditi
2726
et de leur exécution, mais le paysage, l’ambiance
d’
une cité, et la tradition musicale d’une région. Voilà pourquoi l’ass
2727
, l’ambiance d’une cité, et la tradition musicale
d’
une région. Voilà pourquoi l’association n’admet comme membres que ce
2728
n établi. Pour un festival européen, faire partie
de
l’association devient ainsi une garantie de qualité et d’authenticité
2729
artie de l’association devient ainsi une garantie
de
qualité et d’authenticité. ⁂ Une idée simple a présidé à la formation
2730
ociation devient ainsi une garantie de qualité et
d’
authenticité. ⁂ Une idée simple a présidé à la formation de notre asso
2731
icité. ⁂ Une idée simple a présidé à la formation
de
notre association : il s’agissait de présenter l’ensemble des meilleu
2732
la formation de notre association : il s’agissait
de
présenter l’ensemble des meilleurs festivals comme une seule et grand
2733
tivals comme une seule et grandiose manifestation
de
la musique européenne, dans son unité fondamentale et dans la richess
2734
, dans son unité fondamentale et dans la richesse
de
ses diversités nationales et régionales. Notre but est donc à la fois
2735
nales et régionales. Notre but est donc à la fois
d’
harmoniser les efforts dans un esprit de collaboration européenne, tou
2736
à la fois d’harmoniser les efforts dans un esprit
de
collaboration européenne, tout en développant toujours plus le caract
2737
éveloppant toujours plus le caractère particulier
de
chaque festival. Pratiquement, l’association s’efforce d’atteindre ce
2738
e festival. Pratiquement, l’association s’efforce
d’
atteindre ce but par les moyens suivants : La publication annuelle de
2739
par les moyens suivants : La publication annuelle
de
la brochure Saison, donnant les programmes des festivals membres plus
2740
membres plusieurs mois avant que la première note
d’
un concert d’ouverture retentisse en Allemagne, en France ou en Italie
2741
eurs mois avant que la première note d’un concert
d’
ouverture retentisse en Allemagne, en France ou en Italie, offre au pu
2742
ique en son genre, parce qu’il permet à l’amateur
de
s’orienter vers la qualité, de se composer selon ses goûts un itinéra
2743
permet à l’amateur de s’orienter vers la qualité,
de
se composer selon ses goûts un itinéraire des hauts lieux de la musiq
2744
ser selon ses goûts un itinéraire des hauts lieux
de
la musique européenne, et d’être assuré qu’il ne sera pas déçu, et qu
2745
aire des hauts lieux de la musique européenne, et
d’
être assuré qu’il ne sera pas déçu, et qu’il ira vraiment d’une fête à
2746
uré qu’il ne sera pas déçu, et qu’il ira vraiment
d’
une fête à l’autre. L’échange de « créations », de spectacles nouveaux
2747
u’il ira vraiment d’une fête à l’autre. L’échange
de
« créations », de spectacles nouveaux montés par tel ou tel festival,
2748
d’une fête à l’autre. L’échange de « créations »,
de
spectacles nouveaux montés par tel ou tel festival, et dont d’autres
2749
t ainsi bénéficier, diminue les risques matériels
d’
une création, favorise le renouvellement des programmes et doit stimul
2750
créateur des artistes contemporains. La création
d’
archives musicales — uniques en Europe — permet à tous les festivals m
2751
s en Europe — permet à tous les festivals membres
de
savoir ce qui a été fait par d’autres et dans quelles conditions, que
2752
chefs on pourra faire appel, etc. Enfin, l’étude
d’
entreprises communes, telles qu’une revue musicale européenne ou certa
2753
uropéenne ou certaines manifestations artistiques
de
grande envergure conduit l’association à resserrer toujours plus les
2754
us les frontières et les rivalités nationales. En
cinq
ans, l’association a fait ses preuves. Sa brochure Saison, tirée en t
2755
a fait ses preuves. Sa brochure Saison, tirée en
trois
langues à 160 000 exemplaires, et distribuée dans toute l’Europe et e
2756
ves. Sa brochure Saison, tirée en trois langues à
160
000 exemplaires, et distribuée dans toute l’Europe et en Amérique, do
2757
Sa brochure Saison, tirée en trois langues à 160
000
exemplaires, et distribuée dans toute l’Europe et en Amérique, donne
2758
ns toute l’Europe et en Amérique, donne la preuve
d’
une coopération étroite entre dix-sept des meilleurs festivals de huit
2759
, donne la preuve d’une coopération étroite entre
dix-sept
des meilleurs festivals de huit pays. Elle fournit ainsi un exemple,
2760
on étroite entre dix-sept des meilleurs festivals
de
huit pays. Elle fournit ainsi un exemple, encore modeste, mais convai
2761
étroite entre dix-sept des meilleurs festivals de
huit
pays. Elle fournit ainsi un exemple, encore modeste, mais convaincant
2762
nsi un exemple, encore modeste, mais convaincant,
de
cette union européenne qui doit s’opérer dans les cœurs avant de pouv
2763
our la paix. La musique, création la plus typique
de
l’Europe, n’était-elle pas faite pour manifester la première cette co
2764
première cette communauté profonde des réactions
de
la sensibilité et de l’esprit qui définit une civilisation ? ap. R
2765
nauté profonde des réactions de la sensibilité et
de
l’esprit qui définit une civilisation ? ap. Rougemont Denis de, «
2766
définit une civilisation ? ap. Rougemont Denis
de
, « L’Association des festivals de musique a cinq ans », Saison, AEFM,
2767
Rougemont Denis de, « L’Association des festivals
de
musique a cinq ans », Saison, AEFM, 1956, p. 12-13.
2768
is de, « L’Association des festivals de musique a
cinq
ans », Saison, AEFM, 1956, p. 12-13.
2769
festivals de musique a cinq ans », Saison, AEFM,
1956,
p. 12-13.
2770
« Je vivais en ce temps-là… » (janvier
1956
)ag Je vivais en ce temps-là, terminant mes études, dans la petite
2771
ps-là, terminant mes études, dans la petite ville
de
Neuchâtel, et nous étions passionnément surréalistes, comme nos aînés
2772
nnément surréalistes, comme nos aînés avaient été
d’
Action française, ou encore anarcho-gidiens, avec un sérieux redoutabl
2773
able, — pensant au fond tout autre chose que ceux
de
Paris, et nous donnant le ridicule de vouloir vivre ces doctrines. In
2774
se que ceux de Paris, et nous donnant le ridicule
de
vouloir vivre ces doctrines. Inquiétude et ferveur étaient les mots d
2775
doctrines. Inquiétude et ferveur étaient les mots
de
l’époque. Âge d’or de la Littérature, qui triomphait dans le temps mê
2776
tude et ferveur étaient les mots de l’époque. Âge
d’
or de la Littérature, qui triomphait dans le temps même que nous pensi
2777
et ferveur étaient les mots de l’époque. Âge d’or
de
la Littérature, qui triomphait dans le temps même que nous pensions l
2778
ions la renier comme telle, au nom de l’Aventure,
de
la Révolution, ou de quelque règle de vie, mais subversive bien enten
2779
telle, au nom de l’Aventure, de la Révolution, ou
de
quelque règle de vie, mais subversive bien entendu. L’un des deux tem
2780
l’Aventure, de la Révolution, ou de quelque règle
de
vie, mais subversive bien entendu. L’un des deux temples de ce culte
2781
le de vie, mais subversive bien entendu. L’un des
deux
temples de ce culte (l’autre étant comme on pense la NRF ) se cachai
2782
is subversive bien entendu. L’un des deux temples
de
ce culte (l’autre étant comme on pense la NRF ) se cachait derrière
2783
hait derrière une vitrine très savamment discrète
de
la rue de l’Odéon. Il n’était pas lieu de Paris que j’avais l’impress
2784
iscrète de la rue de l’Odéon. Il n’était pas lieu
de
Paris que j’avais l’impression de mieux connaître, sans y être jamais
2785
’était pas lieu de Paris que j’avais l’impression
de
mieux connaître, sans y être jamais entré. Boutique de gloire où fréq
2786
eux connaître, sans y être jamais entré. Boutique
de
gloire où fréquentaient nos Dieux ! Nous en connaissions la légende.
2787
là, devant le jeune André Breton immobile et muet
d’
admiration, comme transfixé. Valéry venait y bavarder avec Fargue et L
2788
l’improbable nom venait de s’inscrire au fronton
d’
un considérable poème. (Nous en avions appris par cœur de longs fragme
2789
nsidérable poème. (Nous en avions appris par cœur
de
longs fragments, faute de pouvoir acheter l’édition rare.) Bon pour c
2790
n rare.) Bon pour ceux qui n’y « croyaient » pas,
d’
entrer là sans façon ni vergogne pour acheter banalement un livre : al
2791
ter banalement un livre : alors que l’on risquait
de
se trouver tout d’un coup devant Gide, Claudel, ou James Joyce conver
2792
ivre : alors que l’on risquait de se trouver tout
d’
un coup devant Gide, Claudel, ou James Joyce conversant comme de simpl
2793
nt Gide, Claudel, ou James Joyce conversant comme
de
simples humains avec la desservante du sanctuaire, en robe de bure no
2794
umains avec la desservante du sanctuaire, en robe
de
bure nouée d’une cordelette. Tels étaient à nos yeux les prestiges de
2795
desservante du sanctuaire, en robe de bure nouée
d’
une cordelette. Tels étaient à nos yeux les prestiges de l’enseigne «
2796
cordelette. Tels étaient à nos yeux les prestiges
de
l’enseigne « à jamais littéraire » de la Maison des amis des livres.
2797
s prestiges de l’enseigne « à jamais littéraire »
de
la Maison des amis des livres. (Commerce en éloignait toute idée comm
2798
encore dans sa petite cuisine, en train de peler
de
fines patates pour un dîner improvisé. Je rentrais d’Amérique, je vou
2799
ines patates pour un dîner improvisé. Je rentrais
d’
Amérique, je voulais tout savoir sur nos amis, leurs œuvres et leurs v
2800
fraîche et la plus sûre… Qu’est devenue la série
de
photos en couleur qui furent prises à la veille de la guerre dans l’a
2801
e photos en couleur qui furent prises à la veille
de
la guerre dans l’appartement d’Adrienne ? De l’ancêtre Claudel aux je
2802
rises à la veille de la guerre dans l’appartement
d’
Adrienne ? De l’ancêtre Claudel aux jeunes d’alors, tous ceux qu’elle
2803
ille de la guerre dans l’appartement d’Adrienne ?
De
l’ancêtre Claudel aux jeunes d’alors, tous ceux qu’elle estimait défi
2804
ment d’Adrienne ? De l’ancêtre Claudel aux jeunes
d’
alors, tous ceux qu’elle estimait défilèrent un à un devant l’objectif
2805
filèrent un à un devant l’objectif — bien nommé —
de
Gisèle Freund. Ce choix des élus d’Adrienne, qu’on pourrait publier e
2806
bien nommé — de Gisèle Freund. Ce choix des élus
d’
Adrienne, qu’on pourrait publier en album, ne ferait-il pas un bel hom
2807
ces, incisives et toujours amicales qu’elle donna
de
plusieurs des modèles dans son Navire d’argent et sa Gazette des amis
2808
le donna de plusieurs des modèles dans son Navire
d’
argent et sa Gazette des amis des livres : autant de petits chefs-d’œu
2809
argent et sa Gazette des amis des livres : autant
de
petits chefs-d’œuvre d’intelligence du cœur. Quel art ferme et subtil
2810
amis des livres : autant de petits chefs-d’œuvre
d’
intelligence du cœur. Quel art ferme et subtil, quel familier respect
2811
me et subtil, quel familier respect du langage et
de
ses artisans, et quel savoureux naturel ! Aurions-nous perdu avec ell
2812
acieusement que personne ? ag. Rougemont Denis
de
, « ‟Je vivais en ce temps-là…” », Mercure de France, Paris, janvier 1
2813
e temps-là…” », Mercure de France, Paris, janvier
1956,
p. 50-51.
2814
Tableau du phénomène courtois (janvier
1956
)ah Revenant après de longues années sur les problèmes soulevés par
2815
omène courtois (janvier 1956)ah Revenant après
de
longues années sur les problèmes soulevés par L’Amour et l’Occident
2816
es problèmes soulevés par L’Amour et l’Occident
11,
j’éprouve le besoin de rassembler ici tout un faisceau d’observations
2817
r L’Amour et l’Occident 11, j’éprouve le besoin
de
rassembler ici tout un faisceau d’observations nouvelles. Le lecteur
2818
ouve le besoin de rassembler ici tout un faisceau
d’
observations nouvelles. Le lecteur va juger si elles infirment ou si a
2819
conception religieuse, ou simplement une théorie
de
l’homme — et une forme lyrique déterminée. (Rapports entre le soufism
2820
sme et la poésie courtoise des Arabes ; influence
de
Freud sur l’école surréaliste.) Les polémiques parfois fort vives pro
2821
en comprise12, les découvertes multipliées depuis
quinze
ans par des spécialistes, de l’amour courtois, du catharisme et du ma
2822
ltipliées depuis quinze ans par des spécialistes,
de
l’amour courtois, du catharisme et du manichéisme, et peut-être l’exp
2823
éisme, et peut-être l’expérience vécue autant que
de
nouvelles recherches personnelles, tout cela m’amène aujourd’hui à un
2824
s, tout cela m’amène aujourd’hui à une conception
de
la cortezia à peine moins « historique » que celle que j’esquissais a
2825
oute plus psychologique. Je rappelais la relation
de
fait (lieux et dates remarquablement identiques) entre cathares et tr
2826
is à dire : il y a là quelque chose, et l’absence
de
rapports entre ces gens me paraîtrait plus étonnante encore que n’imp
2827
lle hypothèse, « sérieuse » ou non, sur la nature
de
ces rapports. Mais je me gardais de démontrer le détail précis des in
2828
sur la nature de ces rapports. Mais je me gardais
de
démontrer le détail précis des influences à la manière de beaucoup d’
2829
il précis des influences à la manière de beaucoup
d’
historiens pour qui le réel n’est défini que par des documents écrits.
2830
le leur. Je ne prétends pas fonder sur pièces une
de
ces solutions textuelles et « scientifiques » après quoi, comme le di
2831
isant autant qu’il est possible, la problématique
de
l’amour courtois — parce que je la crois vitale pour l’Occident moder
2832
lques faits, comme un piège. J’éviterai à la fois
d’
indiquer des relations de cause à effet, et de formuler expressément d
2833
ge. J’éviterai à la fois d’indiquer des relations
de
cause à effet, et de formuler expressément des conclusions que l’on p
2834
ois d’indiquer des relations de cause à effet, et
de
formuler expressément des conclusions que l’on pourrait citer hors du
2835
: « Des preuves ! » ou « Comme c’est vrai ! » ⁂
1.
La révolution psychique du xiie siècle Une hérésie néo-manichéenn
2836
condamnant le mariage, mais fondant une « Église
d’
Amour », opposée à l’Église de Rome13, envahit rapidement la France, d
2837
ondant une « Église d’Amour », opposée à l’Église
de
Rome13, envahit rapidement la France, de Reims à Toulouse et de l’Ita
2838
l’Église de Rome13, envahit rapidement la France,
de
Reims à Toulouse et de l’Italie jusqu’à l’Espagne, pour rayonner de l
2839
ahit rapidement la France, de Reims à Toulouse et
de
l’Italie jusqu’à l’Espagne, pour rayonner de là sur toute l’Europe. D
2840
e et de l’Italie jusqu’à l’Espagne, pour rayonner
de
là sur toute l’Europe. Dans le même temps, d’autres mouvements hétéro
2841
sant aux prélats ambitieux et aux pompes sacrales
de
l’Église un spiritualisme épuré, ils aboutissent parfois, plus ou moi
2842
nt Bernard de Clairvaux et Abélard sont les pôles
de
ce drame dans l’Église, et au niveau de la spéculation. Mais hors de
2843
incompréhensibles, les oscillations s’amplifient.
D’
Henri de Lausanne et Pierre de Bruys jusqu’à un Amaury de Bène et aux
2844
squ’à un Amaury de Bène et aux frères ortliebiens
de
Strasbourg, tous condamnent le mariage, — que par ailleurs, le pape-m
2845
ue par ailleurs, le pape-moine Grégoire VII vient
d’
interdire aux prêtres. En revanche, beaucoup professent que l’homme ét
2846
beaucoup professent que l’homme étant divin, rien
de
ce qu’il fait avec son corps — cette part du diable — ne saurait enga
2847
ette part du diable — ne saurait engager le salut
de
son âme : « Point de péché au-dessous du nombril ! » précise un évêqu
2848
ne saurait engager le salut de son âme : « Point
de
péché au-dessous du nombril ! » précise un évêque dualiste, excusant
2849
ée par plusieurs sectes. Une forme toute nouvelle
de
poésie naît dans le Midi de la France, patrie cathare : elle célèbre
2850
’idée platonicienne du principe féminin, le culte
de
l’Amour contre le mariage, en même temps que la chasteté. Saint Bern
2851
u Parfaits, puis oppose à la cortezia la mystique
de
l’Amour divin. De nombreux commentaires du Cantique des Cantiques son
2852
ppose à la cortezia la mystique de l’Amour divin.
De
nombreux commentaires du Cantique des Cantiques sont écrits pour les
2853
sont écrits pour les nonnes des premiers couvents
de
femmes, de l’abbaye de Fontevrault si proche du premier troubadour —
2854
pour les nonnes des premiers couvents de femmes,
de
l’abbaye de Fontevrault si proche du premier troubadour — c’est le co
2855
nnes des premiers couvents de femmes, de l’abbaye
de
Fontevrault si proche du premier troubadour — c’est le comte Guillaum
2856
e comte Guillaume de Poitiers — jusqu’au Paraclet
d’
Héloïse. Cette mystique épithalamique se retrouve à la fois chez Berna
2857
es courtois et en lettres, le premier grand roman
d’
amour-passion de notre histoire. Jaufré Rudel va mourir dans les bras
2858
n lettres, le premier grand roman d’amour-passion
de
notre histoire. Jaufré Rudel va mourir dans les bras de la comtesse d
2859
re histoire. Jaufré Rudel va mourir dans les bras
de
la comtesse de Tripoli, « princesse lointaine » qu’il aime sans l’avo
2860
x et au temps où se nouent la légende et le mythe
de
la passion mortelle : Tristan. À cette montée puissante et comme uni
2861
n. À cette montée puissante et comme universelle
de
l’Amour et du culte de la Femme idéalisée, l’Église et le clergé ne p
2862
sante et comme universelle de l’Amour et du culte
de
la Femme idéalisée, l’Église et le clergé ne pouvaient manquer d’oppo
2863
lisée, l’Église et le clergé ne pouvaient manquer
d’
opposer une croyance et un culte qui répondissent au même désir profon
2864
lte qui répondissent au même désir profond, surgi
de
l’âme collective. Il fallait « convertir » ce désir, tout en se laiss
2865
mme pour mieux le capter dans le courant puissant
de
l’orthodoxie14. De là les tentatives multipliées, dès le début du xii
2866
apter dans le courant puissant de l’orthodoxie14.
De
là les tentatives multipliées, dès le début du xiie siècle, pour ins
2867
le début du xiie siècle, pour instituer un culte
de
la Vierge. Marie reçoit généralement, dès cette époque, le titre de r
2868
e reçoit généralement, dès cette époque, le titre
de
regina coeli, et c’est en Reine désormais que l’art va la représenter
2869
’art va la représenter. À la « Dame des Pensées »
de
la cortezia, on substituera « Notre Dame ». Et les ordres monastiques
2870
ordres chevaleresques : le moine est « chevalier
de
Marie ». En 1140, à Lyon, les chanoines établissent une fête de l’Imm
2871
resques : le moine est « chevalier de Marie ». En
1140,
à Lyon, les chanoines établissent une fête de l’Immaculée Conception
2872
1140, à Lyon, les chanoines établissent une fête
de
l’Immaculée Conception de Notre-Dame. Saint Bernard de Clairvaux eut
2873
es établissent une fête de l’Immaculée Conception
de
Notre-Dame. Saint Bernard de Clairvaux eut beau protester dans une le
2874
fameuse contre « cette fête nouvelle que l’usage
de
l’Église ignore, que la raison n’approuve pas, que la tradition n’aut
2875
torise point… et qui introduit la nouveauté, sœur
de
la superstition, fille de l’inconstance ». Et saint Thomas, au siècle
2876
duit la nouveauté, sœur de la superstition, fille
de
l’inconstance ». Et saint Thomas, au siècle suivant, eut beau écrire
2877
saint Thomas, au siècle suivant, eut beau écrire
de
la manière la plus précise : « Si Marie eût été conçue sans péché, el
2878
té conçue sans péché, elle n’aurait pas eu besoin
d’
être rachetée par Jésus-Christ. » Le culte de la Vierge répondait à un
2879
soin d’être rachetée par Jésus-Christ. » Le culte
de
la Vierge répondait à une nécessité d’ordre vital pour l’Église menac
2880
» Le culte de la Vierge répondait à une nécessité
d’
ordre vital pour l’Église menacée et entraînée… La papauté, plusieurs
2881
ier trait dont on verra qu’il est tout impossible
de
le rattacher latéralement aux précédents. C’est au xiie siècle que s
2882
tteste en Europe une modification radicale du jeu
d’
échecs, originaire de l’Inde. Au lieu des quatre rois qui dominaient l
2883
modification radicale du jeu d’échecs, originaire
de
l’Inde. Au lieu des quatre rois qui dominaient le jeu primitif, on vo
2884
u jeu d’échecs, originaire de l’Inde. Au lieu des
quatre
rois qui dominaient le jeu primitif, on voit la Dame (ou Reine) prend
2885
trouvant d’ailleurs réduit à sa moindre puissance
d’
action réelle, tout en demeurant l’enjeu final et le personnage sacré.
2886
emeurant l’enjeu final et le personnage sacré.
2.
Œdipe et les dieux Freud désigne du nom d’Œdipe le complexe compos
2887
2. Œdipe et les dieux Freud désigne du nom
d’
Œdipe le complexe composé dans l’inconscient par l’agressivité du fils
2888
tacle à l’amour pour la mère) et par le sentiment
de
culpabilité qui en résulte. Le poids de l’autorité patriarcale réduit
2889
sentiment de culpabilité qui en résulte. Le poids
de
l’autorité patriarcale réduit le fils au conformisme social et moral
2890
le fils au conformisme social et moral ; le poids
de
l’interdit lié à la mère (donc au principe féminin) inhibe l’amour :
2891
ui touche à la femme reste « impur ». Ce complexe
de
sentiments œdipiens est d’autant plus contraignant que la structure s
2892
« impur ». Ce complexe de sentiments œdipiens est
d’
autant plus contraignant que la structure sociale est plus solide, la
2893
ouvoirs plus révéré. Imaginons maintenant un état
de
la société où le principe de cohésion se relâche ; où la puissance éc
2894
s maintenant un état de la société où le principe
de
cohésion se relâche ; où la puissance économique détenue par le père
2895
divine se divise elle-même, soit en une pluralité
de
dieux, comme en Grèce, soit en un couple dieu-déesse, comme en Égypte
2896
compulsion qui créait le complexe œdipien faiblit
d’
autant. La haine pour le père se concentre sur le démiurge et sur son
2897
sexualité procréatrice, — tandis qu’un sentiment
d’
adoration purifiée peut se porter sur le Dieu-Esprit. En même temps, l
2898
iellement libéré : il peut s’avouer sous la forme
d’
un culte rendu à l’archétype divin de la femme, à condition que cette
2899
ous la forme d’un culte rendu à l’archétype divin
de
la femme, à condition que cette Déesse-Mère ne cesse pas d’être virgi
2900
e, à condition que cette Déesse-Mère ne cesse pas
d’
être virginale, qu’elle échappe donc à l’interdit maintenu sur la femm
2901
e échappe donc à l’interdit maintenu sur la femme
de
chair. L’union mystique avec cette divinité féminine devient alors un
2902
iasme libérateur unifiant l’être, le « consolant »
15.
3. Une illustration Au xiie siècle, l’on assiste dans le Midi
2903
ibérateur unifiant l’être, le « consolant »15.
3.
Une illustration Au xiie siècle, l’on assiste dans le Midi de la
2904
des domaines entre tous les fils, ou « pariage »,
d’
où perte d’autorité du suzerain) ; à une sorte de pré-Renaissance indi
2905
s entre tous les fils, ou « pariage », d’où perte
d’
autorité du suzerain) ; à une sorte de pré-Renaissance individualiste
2906
d’où perte d’autorité du suzerain) ; à une sorte
de
pré-Renaissance individualiste ; à l’invasion d’une religion dualiste
2907
de pré-Renaissance individualiste ; à l’invasion
d’
une religion dualiste ; enfin, à cette montée puissante du culte de l’
2908
aliste ; enfin, à cette montée puissante du culte
de
l’Amour, dont je viens de rappeler les manifestations. Nous voici don
2909
nie dans l’Histoire) du phénomène que nous venons
d’
imaginer au paragraphe précédent. Si nous cherchons à nous représente
2910
ous représenter la situation psychique et éthique
de
l’homme en ce temps-là, nous constatons d’abord qu’il se trouve impli
2911
és dans le cas des simples croyants, c’est-à-dire
de
l’immense majorité des hérétiques. Du côté catholique, le mariage est
2912
ent, cependant qu’il repose en fait sur des bases
d’
intérêt matériel et social, et se voit imposé aux époux sans qu’il soi
2913
voit imposé aux époux sans qu’il soit tenu compte
de
leurs sentiments. En même temps, le relâchement de l’autorité et des
2914
e leurs sentiments. En même temps, le relâchement
de
l’autorité et des pouvoirs ménage, comme nous l’avons vu, une possibi
2915
, comme nous l’avons vu, une possibilité nouvelle
d’
admettre la femme, mais sous le couvert d’une idéalisation, voire d’un
2916
ouvelle d’admettre la femme, mais sous le couvert
d’
une idéalisation, voire d’une divinisation du principe féminin. Ce qui
2917
e, mais sous le couvert d’une idéalisation, voire
d’
une divinisation du principe féminin. Ce qui ne peut qu’aviver la cont
2918
ies dans leur fascinante nouveauté… C’est au cœur
de
cette situation inextricable, c’est comme une résultante de tant de c
2919
ituation inextricable, c’est comme une résultante
de
tant de confusions qui devaient s’y nouer, qu’apparaît la cortezia, «
2920
qu’apparaît la cortezia, « religion » littéraire
de
l’Amour chaste, de la femme idéalisée, avec sa « pitié » particulière
2921
tezia, « religion » littéraire de l’Amour chaste,
de
la femme idéalisée, avec sa « pitié » particulière, la joy d’amors, s
2922
idéalisée, avec sa « pitié » particulière, la joy
d’
amors, ses « rites » précis, la rhétorique des troubadours, sa morale
2923
précis, la rhétorique des troubadours, sa morale
de
l’hommage et du service, sa « théologie » et ses disputes théologique
2924
ans toute l’Europe. Or nous voyons cette religion
de
l’amour ennoblissant célébrée par les mêmes hommes qui persistent à t
2925
vent dans le même poète un adorateur enthousiaste
de
la Dame, qu’il exalte, et un contempteur de la femme, qu’il rabaisse
2926
iaste de la Dame, qu’il exalte, et un contempteur
de
la femme, qu’il rabaisse : qu’on se rappelle seulement les vers d’un
2927
l rabaisse : qu’on se rappelle seulement les vers
d’
un Marcabru ou d’un Rambaut d’Orange. Chose curieuse, les troubadours
2928
n se rappelle seulement les vers d’un Marcabru ou
d’
un Rambaut d’Orange. Chose curieuse, les troubadours chez lesquels nou
2929
gnent pas ! On dirait qu’ils ont trouvé le secret
d’
une conciliation vivante des inconciliables. Ils semblent refléter, ma
2930
a division des consciences (elle-même productrice
de
mauvaise conscience) dans la grande masse d’une société partagée non
2931
rice de mauvaise conscience) dans la grande masse
d’
une société partagée non seulement entre la chair et l’esprit, mais en
2932
entre l’hérésie et l’orthodoxie, et au sein même
de
l’hérésie, entre l’exigence des Parfaits et la vie réelle des Croyant
2933
ssus l’un des plus sensibles interprètes modernes
de
la cortezia, René Nelli : Presque toutes les dames du Carcassès, du
2934
s les dames du Carcassès, du Toulousain, du Foix,
de
l’Albigeois étaient « croyantes » et savaient — bien qu’elles fussent
2935
et qui leur demandaient non pas tant une illusion
d’
amour sincère qu’un antipode spirituel au mariage où elles avaient été
2936
eur ajoute qu’à son avis, « il n’est pas question
de
voir dans la chasteté, ainsi feinte, une habitude réelle ni un reflet
2937
morale des Parfaits. Mais enfin, dit le sceptique
d’
aujourd’hui, que peut bien signifier au concret cette « chasteté » prô
2938
gleurs ? Et comment expliquer le succès si rapide
d’
une prétendue morale à ce point ambiguë, dans un Languedoc, une Italie
2939
logie n’occupaient tout de même pas le plus clair
de
la vie, et n’avaient tout de même pas supprimé toute espèce d’impulsi
2940
n’avaient tout de même pas supprimé toute espèce
d’
impulsions naturelles ? Les modernes, en effet, depuis Rousseau, croie
2941
, depuis Rousseau, croient qu’il existe une sorte
de
nature normale, à laquelle la culture et la religion seraient venues
2942
que nous sommes, sans le savoir, menons nos vies
de
civilisés dans une confusion proprement insensée de religions jamais
2943
civilisés dans une confusion proprement insensée
de
religions jamais tout à fait mortes, et rarement tout à fait comprise
2944
et rarement tout à fait comprises et pratiquées ;
de
morales jadis exclusives, mais qui se superposent ou se combinent à l
2945
i se superposent ou se combinent à l’arrière-plan
de
nos conduites élémentaires ; de complexes ignorés, mais d’autant plus
2946
à l’arrière-plan de nos conduites élémentaires ;
de
complexes ignorés, mais d’autant plus actifs ; et d’instincts hérités
2947
nduites élémentaires ; de complexes ignorés, mais
d’
autant plus actifs ; et d’instincts hérités bien moins de quelque natu
2948
complexes ignorés, mais d’autant plus actifs ; et
d’
instincts hérités bien moins de quelque nature animale que de coutumes
2949
t plus actifs ; et d’instincts hérités bien moins
de
quelque nature animale que de coutumes totalement oubliées, devenues
2950
hérités bien moins de quelque nature animale que
de
coutumes totalement oubliées, devenues traces ou cicatrices mentales
2951
ces ou cicatrices mentales tout inconscientes et,
de
ce fait, aisément confondues avec l’instinct. Elles furent tantôt des
2952
ines à la fois dans le temps et dans l’espace.
4.
Une technique de la « chasteté » À partir du vie siècle se répand
2953
ns le temps et dans l’espace. 4. Une technique
de
la « chasteté » À partir du vie siècle se répand rapidement dans
2954
ipe cosmique féminin ; la méditation tient compte
de
ses « pouvoirs », la délivrance devient possible par la Çatki… Dans c
2955
vient elle-même une chose sacrée, une incarnation
de
la mère. L’apothéose religieuse de la femme est commune d’ailleurs à
2956
ne incarnation de la mère. L’apothéose religieuse
de
la femme est commune d’ailleurs à tous les courants mystiques du Moye
2957
Il s’agit, par le cérémonial du yoga tantrique,
de
transcender la condition humaine. Le tantrisme bouddhique trouve des
2958
ha yoga hindou, technique du contrôle du corps et
de
l’énergie vitale. C’est ainsi que certaines postures (mudras) décrite
2959
mudras) décrites par le hatha yoga ont pour but «
d’
utiliser comme moyen de divinisation et ensuite d’intégration, d’unifi
2960
hatha yoga ont pour but « d’utiliser comme moyen
de
divinisation et ensuite d’intégration, d’unification finale, la fonct
2961
d’utiliser comme moyen de divinisation et ensuite
d’
intégration, d’unification finale, la fonction par excellence humaine,
2962
e moyen de divinisation et ensuite d’intégration,
d’
unification finale, la fonction par excellence humaine, celle-là même
2963
es naissances et des morts, la fonction sexuelle »
17.
Ainsi parle Shiva18 : « Pour mes dévots, je vais décrire le geste de
2964
a18 : « Pour mes dévots, je vais décrire le geste
de
l’Éclair (vajroli mudra) qui détruit la Ténèbre du monde et doit être
2965
onnées par le texte font allusion à une technique
de
l’acte sexuel sans consommation, car « celui qui garde (ou reprend) s
2966
a semence dans son corps, qu’aurait-il à craindre
de
la mort ? » comme le dit un upanishad. Dans le tantrisme, la maithuna
2967
ecret, obscur, à double sens, dans lequel un état
de
conscience est exprimé par un terme érotique »19 — ou l’inverse aussi
2968
de conscience est exprimé par un terme érotique »
19
— ou l’inverse aussi bien. À tel point « qu’on ne peut jamais précise
2969
a est un acte réel ou simplement une allégorie ».
De
toute manière, le but est le « suprême grand bonheur… la joie de l’an
2970
e, le but est le « suprême grand bonheur… la joie
de
l’anéantissement du moi ». Et cette « béatitude érotique », obtenue p
2971
ique », obtenue par l’arrêt, non du plaisir, mais
de
son effet physique, est utilisée comme expérience immédiate pour obte
2972
rappellent les textes, le dévot devient la proie
de
la triste loi karmique, comme n’importe quel débauché. » Mais la femm
2973
Mais la femme, dans tout cela ? Elle reste objet
d’
un culte. Considérée comme « source unique de joie et de repos, l’aman
2974
bjet d’un culte. Considérée comme « source unique
de
joie et de repos, l’amante synthétise toute la nature féminine, elle
2975
ulte. Considérée comme « source unique de joie et
de
repos, l’amante synthétise toute la nature féminine, elle est mère, s
2976
sœur, épouse, fille… elle est le chemin du salut »
20.
Ainsi le tantrisme apporte cette nouveauté qui consiste à « expérimen
2977
isme, symbolise l’état par excellence du péché et
de
la mort : l’acte sexuel »21. Mais l’acte est toujours décrit comme ét
2978
xcellence du péché et de la mort : l’acte sexuel »
21.
Mais l’acte est toujours décrit comme étant celui de l’homme. La femm
2979
Mais l’acte est toujours décrit comme étant celui
de
l’homme. La femme reste passive, impersonnelle, pur principe, sans vi
2980
On y accorde une grande importance à toute sorte
d’
« amour » et le rituel de maithuna apparaît comme le couronnement d’un
2981
importance à toute sorte d’« amour » et le rituel
de
maithuna apparaît comme le couronnement d’un lent et difficile appren
2982
rituel de maithuna apparaît comme le couronnement
d’
un lent et difficile apprentissage ascétique… Le néophyte doit servir
2983
phyte doit servir la « femme dévote » pendant les
quatre
premiers mois, comme un domestique, dormir dans la même chambre qu’el
2984
me chambre qu’elle, puis à ses pieds. Pendant les
quatre
mois suivants et tout en continuant à la servir comme avant, il dort
2985
dans le même lit, du côté gauche. Pendant encore
quatre
mois, il dormira du côté droit, après ils dormiront enlacés, etc. Tou
2986
s préliminaires ont pour but « l’autonomisation »
de
la volupté — considérée comme l’unique expérience humaine qui peut ré
2987
vie en économisant le principe vital, plutôt que
de
conquérir la liberté spirituelle par la déification du corps. La « ch
2988
e et la béatitude à travers une Elle qu’il s’agit
de
« servir » en posture humiliée, mais en gardant cette maîtrise de soi
2989
posture humiliée, mais en gardant cette maîtrise
de
soi dont la perte pourrait se traduire par un acte de procréation, le
2990
oi dont la perte pourrait se traduire par un acte
de
procréation, lequel ferait retomber le chevalier servant dans la réal
2991
alier servant dans la réalité fatale du Karma.
5.
La joie d’amour En contraste indéniable avec ces textes mystiques
2992
nt dans la réalité fatale du Karma. 5. La joie
d’
amour En contraste indéniable avec ces textes mystiques et cette ab
2993
hysiologique, citons maintenant quelques chansons
de
« légers troubadours méridionaux », grands seigneurs amateurs ou jong
2994
que les romanistes unanimes nous décrivent comme
de
purs « rhétoriqueurs23 ». D’Amour, je sais qu’il donne aisément gran
2995
ous décrivent comme de purs « rhétoriqueurs23 ».
D’
Amour, je sais qu’il donne aisément grande joie à celui qui observe se
2996
itiers et neuvième duc d’Aquitaine, qui mourut en
1127.
Dès le début du xiie siècle, ces « lois d’Amour » sont donc déjà fix
2997
en 1127. Dès le début du xiie siècle, ces « lois
d’
Amour » sont donc déjà fixées, comme un rituel. Ce sont Mesure, Servic
2998
s conduisent à la Joie, qui est signe et garantie
de
Vray Amor. Voici Mesure et Patience : De courtoisie peut se vanter c
2999
arantie de Vray Amor. Voici Mesure et Patience :
De
courtoisie peut se vanter celui qui sait garder Mesure… Le bien-être
3000
me fasse longtemps attendre et que je n’aie point
d’
elle ce qu’elle m’a promis. (Marcabru.) Voici le Service de la Dame :
3001
qu’elle m’a promis. (Marcabru.) Voici le Service
de
la Dame : Prenez ma vie en hommage, belle de dure merci, pourvu que
3002
ice de la Dame : Prenez ma vie en hommage, belle
de
dure merci, pourvu que vous m’accordiez que par vous au ciel je tende
3003
« La soumission à l’aimée est la marque naturelle
d’
un homme courtois. ») Voici la Chasteté : Celui qui se dispose à aime
3004
Voici la Chasteté : Celui qui se dispose à aimer
d’
amour sensuel se met en guerre avec lui-même, car le sot après avoir v
3005
riste contenance ! (Marcabru.) Écoutez ! Sa voix (
d’
Amour) paraîtra douce comme le chant de la lyre, si seulement vous lui
3006
! Sa voix (d’Amour) paraîtra douce comme le chant
de
la lyre, si seulement vous lui coupez la queue !24 (Marcabru.) Chast
3007
coupez la queue !24 (Marcabru.) Chasteté délivre
de
la tyrannie du désir en portant le Désir (courtois) à l’extrême : Pa
3008
tant le Désir (courtois) à l’extrême : Par excès
de
désir, je crois que je me l’enlèverai, si l’on peut rien perdre à for
3009
Ibn Dawoud louait la chasteté pour son pouvoir «
d’
éterniser le désir ».) C’est au comble de l’amour (vrai) et de sa « jo
3010
ouvoir « d’éterniser le désir ».) C’est au comble
de
l’amour (vrai) et de sa « joie » que Jaufré Rudel se sent le plus élo
3011
le désir ».) C’est au comble de l’amour (vrai) et
de
sa « joie » que Jaufré Rudel se sent le plus éloigné de l’amour coupa
3012
« joie » que Jaufré Rudel se sent le plus éloigné
de
l’amour coupable et de son « angoisse ». Il va plus loin dans la libé
3013
el se sent le plus éloigné de l’amour coupable et
de
son « angoisse ». Il va plus loin dans la libération : la présence ph
3014
us loin dans la libération : la présence physique
de
l’objet aimé lui deviendra bientôt indifférente : J’ai une amie, mai
3015
… Nulle joie ne me plaît autant que la possession
de
cet amour lointain. La « joie d’Amour » n’est pas seulement libératr
3016
e la possession de cet amour lointain. La « joie
d’
Amour » n’est pas seulement libératrice du désir dominé par Mesure et
3017
é par Mesure et Prouesse, elle est aussi fontaine
de
Jouvence : Je veux garder (ma dame) pour me rafraîchir le cœur et re
3018
si bien que je ne puisse vieillir… Celui-là vivra
cent
ans qui réussira à posséder la joie de son amour. (Guillaume de Poiti
3019
là vivra cent ans qui réussira à posséder la joie
de
son amour. (Guillaume de Poitiers.) Je n’ai cité que des poètes de l
3020
llaume de Poitiers.) Je n’ai cité que des poètes
de
la première et de la seconde génération des troubadours (1120 à 1180
3021
.) Je n’ai cité que des poètes de la première et
de
la seconde génération des troubadours (1120 à 1180 environ). Au xiiie
3022
ière et de la seconde génération des troubadours (
1120
à 1180 environ). Au xiiie siècle, ceux de la dernière génération exp
3023
de la seconde génération des troubadours (1120 à
1180
environ). Au xiiie siècle, ceux de la dernière génération expliciter
3024
urs (1120 à 1180 environ). Au xiiie siècle, ceux
de
la dernière génération expliciteront ce que leurs modèles avaient cha
3025
que leurs modèles avaient chanté. « Ce n’est plus
de
l’amour courtois, si on le matérialise ou si la Dame se rend comme ré
3026
crit Daude de Prades, qui cependant ne craint pas
de
donner des précisions sur les gestes érotiques que l’on peut se perme
3027
on : Dans le palais où elle siège (la Dame) sont
cinq
portes : celui qui peut ouvrir les deux premières passe aisément les
3028
ame) sont cinq portes : celui qui peut ouvrir les
deux
premières passe aisément les trois autres, mais il lui est difficile
3029
peut ouvrir les deux premières passe aisément les
trois
autres, mais il lui est difficile d’en sortir. Il vit dans la joie, c
3030
ément les trois autres, mais il lui est difficile
d’
en sortir. Il vit dans la joie, celui qui peut y rester. On y accède p
3031
la joie, celui qui peut y rester. On y accède par
quatre
degrés très doux, mais là n’entrent ni vilains ni malotrus, ces gens-
3032
à sont logés dans le faubourg, lequel occupe plus
de
la moitié du monde. Celui que l’on nomme parfois le dernier troubad
3033
s le dernier troubadour, Guiraut Riquier, donnera
de
ces vers le commentaire suivant : Les cinq portes sont Désir, Prière
3034
donnera de ces vers le commentaire suivant : Les
cinq
portes sont Désir, Prière, Servir, Baiser, et Faire, par où Amour pér
3035
rvir, Baiser, et Faire, par où Amour périt. » Les
quatre
degrés sont « honorer, dissimuler, bien servir, patiemment attendre.2
3036
qui peuvent éclairer indirectement sur la nature
de
l’amour vrai ou du moins sur certains de ses aspects. Et tout d’abord
3037
a nature de l’amour vrai ou du moins sur certains
de
ses aspects. Et tout d’abord, dit Marcabru, « Il lie partie avec le d
3038
r ». (Et en effet, le diable n’est-il pas le père
de
la création matérielle… et de la procréation, selon le catharisme ?)
3039
’est-il pas le père de la création matérielle… et
de
la procréation, selon le catharisme ?) Les adversaires du vrai Amour
3040
res, faux abbés, fausses recluses et faux reclus »
26.
Ils seront détruits « soumis à toute ruine », et tourmentés en enfer.
3041
entation des désespérés. Ah ! noble Amour, source
de
bonté, par qui le monde entier est illuminé, je te crie merci. Contre
3042
ci. Contre ces clameurs gémissantes, défends-moi,
de
peur que je ne sois retenu là-bas (en enfer) ; en tous lieux je me ti
3043
ouvent des ambiguïtés ménagées par le « service »
d’
amour courtois, Cercamon n’hésite pas à écrire en mettant les points s
3044
femmes et les époux. Ils vous disent qu’Amour va
de
travers, et c’est pourquoi les maris deviennent jaloux et les dames s
3045
u’un grand nombre abandonnent Mérite et éloignent
d’
eux Jeunesse. Quelles que soient les réalités ou l’absence de réalité
3046
se. Quelles que soient les réalités ou l’absence
de
réalités « matérielles » qui aient pu correspondre, en ces temps, à d
3047
lles » qui aient pu correspondre, en ces temps, à
de
telles précisions de langage, la rhétorique courtoise et son système
3048
orrespondre, en ces temps, à de telles précisions
de
langage, la rhétorique courtoise et son système de vertus, de péchés,
3049
e langage, la rhétorique courtoise et son système
de
vertus, de péchés, de louanges et d’interdits, demeure un fait patent
3050
la rhétorique courtoise et son système de vertus,
de
péchés, de louanges et d’interdits, demeure un fait patent : il suffi
3051
ue courtoise et son système de vertus, de péchés,
de
louanges et d’interdits, demeure un fait patent : il suffit de lire.
3052
son système de vertus, de péchés, de louanges et
d’
interdits, demeure un fait patent : il suffit de lire. Elle va servir
3053
t d’interdits, demeure un fait patent : il suffit
de
lire. Elle va servir aux romanciers du Nord, ceux du cycle d’Arthur,
3054
e va servir aux romanciers du Nord, ceux du cycle
d’
Arthur, du Graal, et de Tristan, pour décrire des actions et des drame
3055
ers du Nord, ceux du cycle d’Arthur, du Graal, et
de
Tristan, pour décrire des actions et des drames, et non plus seulemen
3056
idi, pour une pure fantasmagorie sentimentale.
6.
Excuse aux historiens Je ne crois guère à l’histoire « scientifiqu
3057
téressent dans cet ouvrage. Je lui laisse le soin
d’
affirmer que telle « filiation » reste indémontrable « dans l’état act
3058
iation » reste indémontrable « dans l’état actuel
de
nos connaissances », reste donc incroyable jusqu’à nouvel avis. Je ch
3059
ujourd’hui pour établis. Simplement, je les crois
de
nature à nourrir l’imagination. Voici deux de ces faits sur quoi l’on
3060
es crois de nature à nourrir l’imagination. Voici
deux
de ces faits sur quoi l’on peut rêver. La Pantcha Tantra, recueil de
3061
ois de nature à nourrir l’imagination. Voici deux
de
ces faits sur quoi l’on peut rêver. La Pantcha Tantra, recueil de con
3062
quoi l’on peut rêver. La Pantcha Tantra, recueil
de
contes bouddhistes, fut traduit au vie siècle du sanscrit en pehlevi
3063
ie siècle du sanscrit en pehlevi, par un médecin
de
Chosroès Ier, roi de Perse. De là, on peut suivre son progrès rapide
3064
vi, par un médecin de Chosroès Ier, roi de Perse.
De
là, on peut suivre son progrès rapide vers l’Europe à travers une sér
3065
progrès rapide vers l’Europe à travers une série
de
traductions en syriaque, en arabe, en latin, en espagnol, etc. Au xvi
3066
r une ancienne version arabe. Le périple du Roman
de
Barlaam et Josaphat est encore plus surprenant. Sous sa forme connue
3067
est encore plus surprenant. Sous sa forme connue
de
nos jours, c’est l’histoire romancée de l’évolution spirituelle qui c
3068
me connue de nos jours, c’est l’histoire romancée
de
l’évolution spirituelle qui conduit Josaphat, prince indien, à découv
3069
es grandes lignes, porte des traces indiscutables
de
manichéisme. Selon l’école néo-cathare française, les hérétiques du x
3070
nichéenne du Roman est attestée par les fragments
de
son texte original (en langage ouïgour du viiie siècle) retrouvés da
3071
» (var. Yudhâsaf). Innombrables sont les exemples
de
relations entre l’Orient et l’Occident médiéval. J’ai choisi ces deux
3072
l’Orient et l’Occident médiéval. J’ai choisi ces
deux
cas, solidement attestés, parce qu’ils réfutent le préjugé moderne en
3073
aître « hautement fantaisiste et improbable ».
7.
En lieu et place de conclusions définitives L’amour courtois resse
3074
r courtois ressemble à l’amour encore chaste — et
d’
autant plus brûlant — de la première adolescence. Il ressemble aussi à
3075
’amour encore chaste — et d’autant plus brûlant —
de
la première adolescence. Il ressemble aussi à l’amour chanté par les
3076
ront repris par presque tous les grands mystiques
de
l’Occident. Il nous semble parfois se réduire à des fadaises sophisti
3077
i les réalités précises, mais non moins ambiguës,
d’
une certaine discipline érotico-mystique dont l’Inde, la Chine et le P
3078
ai » aux divers sens du mot, et simultanément, et
de
plusieurs manières. Tout cela nous aide à mieux comprendre — si rien
3079
it à l’« expliquer » — l’amour courtois. Au terme
de
l’espèce de contre-enquête à laquelle je viens de me livrer, et compt
3080
liquer » — l’amour courtois. Au terme de l’espèce
de
contre-enquête à laquelle je viens de me livrer, et compte tenu des o
3081
ensées que firent à ma thèse minima les partisans
d’
écoles au moins diverses, me voici ramené par une sorte de spirale au-
3082
au moins diverses, me voici ramené par une sorte
de
spirale au-dessus de mes premières constatations : l’amour courtois e
3083
e voici ramené par une sorte de spirale au-dessus
de
mes premières constatations : l’amour courtois est né au xiie siècle
3084
tois est né au xiie siècle, en pleine révolution
de
la psyché occidentale. Il a surgi du même mouvement qui fit remonter
3085
i du même mouvement qui fit remonter au demi-jour
de
la conscience et de l’expression lyrique de l’âme, le Principe Fémini
3086
qui fit remonter au demi-jour de la conscience et
de
l’expression lyrique de l’âme, le Principe Féminin de la çatki, le cu
3087
-jour de la conscience et de l’expression lyrique
de
l’âme, le Principe Féminin de la çatki, le culte de la Femme, de la M
3088
’expression lyrique de l’âme, le Principe Féminin
de
la çatki, le culte de la Femme, de la Mère, de la Vierge. Il particip
3089
l’âme, le Principe Féminin de la çatki, le culte
de
la Femme, de la Mère, de la Vierge. Il participe de cette épiphanie d
3090
incipe Féminin de la çatki, le culte de la Femme,
de
la Mère, de la Vierge. Il participe de cette épiphanie de l’Anima, qu
3091
in de la çatki, le culte de la Femme, de la Mère,
de
la Vierge. Il participe de cette épiphanie de l’Anima, qui figure à m
3092
la Femme, de la Mère, de la Vierge. Il participe
de
cette épiphanie de l’Anima, qui figure à mes yeux, dans l’homme occid
3093
re, de la Vierge. Il participe de cette épiphanie
de
l’Anima, qui figure à mes yeux, dans l’homme occidental, le retour d’
3094
re à mes yeux, dans l’homme occidental, le retour
d’
un Orient symbolique. Il nous devient intelligible par certaines de se
3095
lique. Il nous devient intelligible par certaines
de
ses marques historiques : sa relation littéralement congénitale avec
3096
ne virulence intime, perpétuellement nouvelle.
11.
Le présent texte constitue le chapitre X du Livre II de la version re
3097
le. 11. Le présent texte constitue le chapitre
X
du Livre II de la version remaniée de L’Amour et l’Occident . (Nouv.
3098
Le présent texte constitue le chapitre X du Livre
II
de la version remaniée de L’Amour et l’Occident . (Nouv. édit. Plon.
3099
présent texte constitue le chapitre X du Livre II
de
la version remaniée de L’Amour et l’Occident . (Nouv. édit. Plon. 195
3100
le chapitre X du Livre II de la version remaniée
de
L’Amour et l’Occident . (Nouv. édit. Plon. 1956). 12. Il faut avouer
3101
iée de L’Amour et l’Occident . (Nouv. édit. Plon.
1956
). 12. Il faut avouer que les réfutations les plus virulentes qui aie
3102
’Amour et l’Occident . (Nouv. édit. Plon. 1956).
12.
Il faut avouer que les réfutations les plus virulentes qui aient été
3103
eule hypothèse que j’avais mentionnée au chapitre
VII
de ce livre, à savoir que les poèmes des troubadours pouvaient être —
3104
hypothèse que j’avais mentionnée au chapitre VII
de
ce livre, à savoir que les poèmes des troubadours pouvaient être — se
3105
t être — selon Rahn, Aroux et Péladan — une sorte
de
langage secret du catharisme — une relecture des chapitres VIII et IX
3106
ecret du catharisme — une relecture des chapitres
VIII
et IX suffit à « réduire » à son tour cette simplification tout à fai
3107
catharisme — une relecture des chapitres VIII et
IX
suffit à « réduire » à son tour cette simplification tout à fait abus
3108
ables que moi — en dépit de certaines imprudences
d’
expression. (Ce sont elles, par malheur, qui ont le plus fait pour ass
3109
heur, qui ont le plus fait pour assurer le succès
de
l’ouvrage dans un large public pressé, comme il arrive.) 13. Comme A
3110
e dans un large public pressé, comme il arrive.)
13.
Comme Amor s’oppose à Roma. Les hérétiques reprochaient à l’Église ca
3111
Les hérétiques reprochaient à l’Église catholique
d’
avoir inverti le nom même du Dieu qui est Amour. 14. Ce qui n’empêche
3112
avoir inverti le nom même du Dieu qui est Amour.
14.
Ce qui n’empêchera pas l’Église de Rome, en la personne du pape Innoc
3113
i est Amour. 14. Ce qui n’empêchera pas l’Église
de
Rome, en la personne du pape Innocent III qui rêvait de « l’empire du
3114
l’Église de Rome, en la personne du pape Innocent
III
qui rêvait de « l’empire du monde » et ne pouvait tolérer la défectio
3115
e, en la personne du pape Innocent III qui rêvait
de
« l’empire du monde » et ne pouvait tolérer la défection de l’Italie
3116
ire du monde » et ne pouvait tolérer la défection
de
l’Italie du Nord et du Languedoc, de déclencher en 1209 la croisade c
3117
la défection de l’Italie du Nord et du Languedoc,
de
déclencher en 1209 la croisade contre les cathares : le premier génoc
3118
’Italie du Nord et du Languedoc, de déclencher en
1209
la croisade contre les cathares : le premier génocide ou massacre sys
3119
es : le premier génocide ou massacre systématique
d’
un peuple, enregistré par notre histoire « chrétienne » de l’Occident.
3120
ple, enregistré par notre histoire « chrétienne »
de
l’Occident. 15. Consoler vient de consolari, formée de cum et de so
3121
par notre histoire « chrétienne » de l’Occident.
15.
Consoler vient de consolari, formée de cum et de solus (qui veut dir
3122
cident. 15. Consoler vient de consolari, formée
de
cum et de solus (qui veut dire proprement : entier). Consoler signifi
3123
5. Consoler vient de consolari, formée de cum et
de
solus (qui veut dire proprement : entier). Consoler signifie donc éty
3124
signifie donc étymologiquement : rendre entier.
16.
Voir Mircea Eliade, Technique du yoga, p. 176 à 191. 17. Id., ibid.
3125
. Voir Mircea Eliade, Technique du yoga, p. 176 à
191.
17. Id., ibid., p. 199. 18. Civa Samhitâ, 4, 78 à 102. Cf. Alain
3126
Mircea Eliade, Technique du yoga, p. 176 à 191.
17.
Id., ibid., p. 199. 18. Civa Samhitâ, 4, 78 à 102. Cf. Alain Danié
3127
du yoga, p. 176 à 191. 17. Id., ibid., p. 199.
18.
Civa Samhitâ, 4, 78 à 102. Cf. Alain Daniélou, Yoga, the Method of R
3128
91. 17. Id., ibid., p. 199. 18. Civa Samhitâ,
4,
78 à 102. Cf. Alain Daniélou, Yoga, the Method of Reintegration, 1949
3129
17. Id., ibid., p. 199. 18. Civa Samhitâ, 4,
78
à 102. Cf. Alain Daniélou, Yoga, the Method of Reintegration, 1949, p
3130
Id., ibid., p. 199. 18. Civa Samhitâ, 4, 78 à
102.
Cf. Alain Daniélou, Yoga, the Method of Reintegration, 1949, p. 45 et
3131
lain Daniélou, Yoga, the Method of Reintegration,
1949,
p. 45 et suiv. 19. Mircea Eliade, op. cit., p. 205 et suiv. On trou
3132
he Method of Reintegration, 1949, p. 45 et suiv.
19.
Mircea Eliade, op. cit., p. 205 et suiv. On trouve parfois « jusqu’à
3133
it., p. 205 et suiv. On trouve parfois « jusqu’à
cinq
sens équivalents pour un seul terme ». 20. L. De La Vallée-Poussin,
3134
qu’à cinq sens équivalents pour un seul terme ».
20.
L. De La Vallée-Poussin, Bouddhisme, Études et matériaux, 1898. 21.
3135
cinq sens équivalents pour un seul terme ». 20.
L.
De La Vallée-Poussin, Bouddhisme, Études et matériaux, 1898. 21. El
3136
q sens équivalents pour un seul terme ». 20. L.
De
La Vallée-Poussin, Bouddhisme, Études et matériaux, 1898. 21. Eliad
3137
Vallée-Poussin, Bouddhisme, Études et matériaux,
1898.
21. Eliade, op. cit., p. 210 et 212. 22. Id., ibid. 23. Je m’ex
3138
-Poussin, Bouddhisme, Études et matériaux, 1898.
21.
Eliade, op. cit., p. 210 et 212. 22. Id., ibid. 23. Je m’excuse
3139
atériaux, 1898. 21. Eliade, op. cit., p. 210 et
212.
22. Id., ibid. 23. Je m’excuse de ne pouvoir citer ici que des fr
3140
ux, 1898. 21. Eliade, op. cit., p. 210 et 212.
22.
Id., ibid. 23. Je m’excuse de ne pouvoir citer ici que des fragmen
3141
iade, op. cit., p. 210 et 212. 22. Id., ibid.
23.
Je m’excuse de ne pouvoir citer ici que des fragments de chansons — d
3142
p. 210 et 212. 22. Id., ibid. 23. Je m’excuse
de
ne pouvoir citer ici que des fragments de chansons — de paroles de ch
3143
’excuse de ne pouvoir citer ici que des fragments
de
chansons — de paroles de chansons ! — souvent très pauvrement traduit
3144
pouvoir citer ici que des fragments de chansons —
de
paroles de chansons ! — souvent très pauvrement traduites, et privés
3145
er ici que des fragments de chansons — de paroles
de
chansons ! — souvent très pauvrement traduites, et privés de toute be
3146
! — souvent très pauvrement traduites, et privés
de
toute beauté proprement poétique et rythmique par cette double trahis
3147
n entendu que je n’épingle ici que des dépouilles
de
sens… 24. Note du professeur Jeanroy : « C’est-à-dire, si vous parve
3148
que je n’épingle ici que des dépouilles de sens…
24.
Note du professeur Jeanroy : « C’est-à-dire, si vous parvenez à suppr
3149
si vous parvenez à supprimer ses conséquences. »
25.
Cf. plus haut (p. 22) la description du « service » selon l’école Sah
3150
ce » selon l’école Sahajiya. Cette interprétation
de
Guiraut Riquier est exacte. On peut s’en assurer en lisant cette phra
3151
acte. On peut s’en assurer en lisant cette phrase
d’
Ælius Donatus (commentaire sur Térence, ive siècle) : Quinque lineoe
3152
qui enflamme – et servir à tactus.) Le thème des
Cinq
lignes d’amour peut être suivi à travers toute la poésie latine du Mo
3153
e – et servir à tactus.) Le thème des Cinq lignes
d’
amour peut être suivi à travers toute la poésie latine du Moyen Âge, j
3154
onsard. Les variations sont très légères. Mais en
1510,
Jean Lemaire de Belges écrit dans son Illustrations de Gaule : « Les
3155
an Lemaire de Belges écrit dans son Illustrations
de
Gaule : « Les nobles poètes disent que cinq lignes y a en amours, … l
3156
rations de Gaule : « Les nobles poètes disent que
cinq
lignes y a en amours, … le regard, le parler, l’attouchement, le bais
3157
ion, c’est celui qu’on nomme par honnêteté le don
de
mercy. » Le contraste avec l’amour courtois est clair. Et non moins l
3158
pour leur part à la Grâce, chez les troubadours…
26.
Les cathares condamnaient la guerre et toute forme d’homicide, légal
3159
es cathares condamnaient la guerre et toute forme
d’
homicide, légal ou non. Et en place de faux juges, faux prêtres, faux
3160
toute forme d’homicide, légal ou non. Et en place
de
faux juges, faux prêtres, faux reclus, et de maris trompeurs, les Inq
3161
lace de faux juges, faux prêtres, faux reclus, et
de
maris trompeurs, les Inquisiteurs du siècle suivant n’eussent pas man
3162
quisiteurs du siècle suivant n’eussent pas manqué
de
lire simplement : juges, prêtres, reclus, et maris ! ah. Rougemont
3163
prêtres, reclus, et maris ! ah. Rougemont Denis
de
, « Tableau du phénomène courtois », La Table ronde, Paris, janvier 19
3164
nomène courtois », La Table ronde, Paris, janvier
1956,
p. 16-27.
3165
ugemont et l’amour-passion, phénomène historique (
4
février 1956)ai aj Pourquoi aviez-vous écrit ce livre ? L’amour de
3166
l’amour-passion, phénomène historique (4 février
1956
)ai aj Pourquoi aviez-vous écrit ce livre ? L’amour des découvertes
3167
mort avec l’amour pour la vie. Je voulais donner
150
pages ; j’en fis 400. En cours de route, en effet, je me mis à recher
3168
ur la vie. Je voulais donner 150 pages ; j’en fis
400.
En cours de route, en effet, je me mis à rechercher l’origine de l’am
3169
voulais donner 150 pages ; j’en fis 400. En cours
de
route, en effet, je me mis à rechercher l’origine de l’amour-passion
3170
route, en effet, je me mis à rechercher l’origine
de
l’amour-passion et je m’aperçus qu’il apparaissait pour la première f
3171
it pour la première fois clairement dans le mythe
de
Tristan. Dès lors je dépassais largement mon sujet : il ne s’agissait
3172
ssais largement mon sujet : il ne s’agissait plus
d’
exposer ce que j’appelle la crise contemporaine du mariage mais d’alle
3173
j’appelle la crise contemporaine du mariage mais
d’
aller véritablement à l’essentiel : étudier l’amour-passion à travers
3174
autres aussi, jusqu’à la dégradation qu’il subit
de
nos jours. J’ai tenté de le décrire comme un phénomène historique, d’
3175
dégradation qu’il subit de nos jours. J’ai tenté
de
le décrire comme un phénomène historique, d’origine proprement religi
3176
enté de le décrire comme un phénomène historique,
d’
origine proprement religieuse. Voulez-vous dire que l’amour-passion n’
3177
ur-passion n’est pas un des caractères permanents
de
la nature humaine ? Exactement. L’amour-passion est un sentiment hist
3178
ntion aux textes. Vous verrez qu’il ne s’agit que
d’
amour charnel. Aucun texte de l’antiquité ne nous présente l’amour com
3179
qu’il ne s’agit que d’amour charnel. Aucun texte
de
l’antiquité ne nous présente l’amour comme lié à la mort, avec ce goû
3180
résente l’amour comme lié à la mort, avec ce goût
de
cendres tel que l’Occident a pris l’habitude de le considérer ou de l
3181
t de cendres tel que l’Occident a pris l’habitude
de
le considérer ou de l’éprouver. En Orient et dans la Grèce contempora
3182
l’Occident a pris l’habitude de le considérer ou
de
l’éprouver. En Orient et dans la Grèce contemporaine de Platon, l’amo
3183
prouver. En Orient et dans la Grèce contemporaine
de
Platon, l’amour humain est très généralement conçu comme un plaisir,
3184
où elle exerce ses ravages aux dépens du monde et
de
soi. Pourquoi cette révolution ? Pourquoi l’amour de l’amour et l’amo
3185
soi. Pourquoi cette révolution ? Pourquoi l’amour
de
l’amour et l’amour de la mort sont-ils apparus à ce moment-là ? Il fa
3186
volution ? Pourquoi l’amour de l’amour et l’amour
de
la mort sont-ils apparus à ce moment-là ? Il faut relier l’amour cour
3187
s condamnaient le mariage. On vous avait reproché
d’
avoir fait trop d’hypothèses sur la doctrine de cette hérésie. En effe
3188
mariage. On vous avait reproché d’avoir fait trop
d’
hypothèses sur la doctrine de cette hérésie. En effet. Quand parut mon
3189
hé d’avoir fait trop d’hypothèses sur la doctrine
de
cette hérésie. En effet. Quand parut mon livre, on ignorait encore be
3190
parut mon livre, on ignorait encore beaucoup trop
de
choses sur cette doctrine. J’avoue que j’en avais été réduit à un gra
3191
avoue que j’en avais été réduit à un grand nombre
d’
hypothèses. Mais, en 1940, le Père Dondaine retrouva dans une biblioth
3192
é réduit à un grand nombre d’hypothèses. Mais, en
1940,
le Père Dondaine retrouva dans une bibliothèque de Florence le Livre
3193
, le Père Dondaine retrouva dans une bibliothèque
de
Florence le Livre des deux principes, premier texte cathare en notre
3194
va dans une bibliothèque de Florence le Livre des
deux
principes, premier texte cathare en notre possession. J’eus le bonheu
3195
xte cathare en notre possession. J’eus le bonheur
de
voir qu’il confirmait ce que j’avais avancé. C’est pourquoi je propos
3196
artie historique. Mais votre propos demeure celui
d’
un moraliste. J’en conviens. Mon livre est celui d’un moraliste dans l
3197
’un moraliste. J’en conviens. Mon livre est celui
d’
un moraliste dans la mesure où il cherche à faire prendre conscience a
3198
he à faire prendre conscience aux gens des motifs
de
leurs actes. Nous en revenons à mon but initial : dénoncer la crise d
3199
initial : dénoncer la crise du mariage. Le mythe
de
Tristan, dégradé, édulcoré, à l’état inconscient habite toujours les
3200
s les esprits. Il n’est pas une femme qui ne rêve
de
connaître le grand amour, la passion unique, totale, mortelle. L’adul
3201
presque devenu une vertu. Le cinéma fournit assez
de
preuves à ce que j’avance. Fonder le mariage sur l’amour-passion est
3202
ne pas s’aimer : un philtre, la beauté diabolique
de
l’un ou simplement la fatalité les contraint à s’aimer. Mais alors, s
3203
t rien. Pauvres cathares ! ai. Rougemont Denis
de
, « [Entretien] L’amour-passion, phénomène historique », L’Information
3204
ation financière, économique et politique, Paris,
4
février 1956, p. 6. aj. Propos recueillis par Guy Bechtel et introdu
3205
ncière, économique et politique, Paris, 4 février
1956,
p. 6. aj. Propos recueillis par Guy Bechtel et introduits par la not
3206
et augmentée, aggravée dit M. de Rougemont qui a
de
l’esprit, vient de paraître chez Plon. La première édition, née en 19
3207
e paraître chez Plon. La première édition, née en
1939,
avait provoqué une série de polémiques qui attestait l’importance de
3208
re édition, née en 1939, avait provoqué une série
de
polémiques qui attestait l’importance de l’ouvrage : on s’accorde à l
3209
ne série de polémiques qui attestait l’importance
de
l’ouvrage : on s’accorde à le tenir pour un des livres les plus impor
3210
à le tenir pour un des livres les plus importants
de
notre époque. M. de Rougemont vit peu en France. Après avoir passé se
3211
ntenant fixé à Genève et s’occupe essentiellement
d’
économie politique. La semaine dernière, il a toutefois retrouvé Paris
3212
ir. Nous avons pu l’isoler quelques minutes entre
deux
émissions de radio et l’interroger pour les lecteurs de L’Information
3213
pu l’isoler quelques minutes entre deux émissions
de
radio et l’interroger pour les lecteurs de L’Information. »
3214
ssions de radio et l’interroger pour les lecteurs
de
L’Information. »
3215
Petits trajets sur les axes du monde (août
1956
)ak al Cette beauté bien drue d’énergie pure et neuve, aux matins l
3216
monde (août 1956)ak al Cette beauté bien drue
d’
énergie pure et neuve, aux matins luisants de rosée, quand le pays ent
3217
drue d’énergie pure et neuve, aux matins luisants
de
rosée, quand le pays entier émerge de la brume, repeint durant la nui
3218
ns luisants de rosée, quand le pays entier émerge
de
la brume, repeint durant la nuit comme un banc vert auprès du lac pré
3219
à peine moins translucides que le ciel, ce temps
de
création du monde juste avant l’homme, c’est ma Suisse telle que je l
3220
nt l’homme, c’est ma Suisse telle que je la vois,
de
très loin, dans mon souvenir. J’y reviens. Les gros plans tout d’un c
3221
ns mon souvenir. J’y reviens. Les gros plans tout
d’
un coup anéantissent l’exaltant panorama. Les maisons sages, un peu sc
3222
le compartiment. Compartiments, c’est le mot-clé
de
la Suisse. Douze paysages ou décors types juxtaposés, et l’on va de l
3223
nt. Compartiments, c’est le mot-clé de la Suisse.
Douze
paysages ou décors types juxtaposés, et l’on va de l’un à l’autre en
3224
e paysages ou décors types juxtaposés, et l’on va
de
l’un à l’autre en une demi-heure, parfois en deux minutes comme il ar
3225
a de l’un à l’autre en une demi-heure, parfois en
deux
minutes comme il arrive quand on traverse le tunnel de Chexbres : il
3226
nutes comme il arrive quand on traverse le tunnel
de
Chexbres : il se ferme sur un paysage de plateaux nordiques et rhénan
3227
e tunnel de Chexbres : il se ferme sur un paysage
de
plateaux nordiques et rhénans — collines où montent les sapins en bat
3228
le — et s’ouvre à l’autre bout dans l’espace doré
d’
un ciel méridional que double un lac immense. Vingt-cinq États distinc
3229
é d’un ciel méridional que double un lac immense.
Vingt-cinq
États distincts sans nulle frontière visible, deux confessions majeur
3230
inq États distincts sans nulle frontière visible,
deux
confessions majeures et trente-six sectes qui se côtoient partout mai
3231
e frontière visible, deux confessions majeures et
trente-six
sectes qui se côtoient partout mais qui s’ignorent, je ne sais combie
3232
t partout mais qui s’ignorent, je ne sais combien
de
races, de classes et de dialectes jalousement préservés, séparés, san
3233
mais qui s’ignorent, je ne sais combien de races,
de
classes et de dialectes jalousement préservés, séparés, sans mélange.
3234
orent, je ne sais combien de races, de classes et
de
dialectes jalousement préservés, séparés, sans mélange. Si bien que l
3235
ervés, séparés, sans mélange. Si bien que l’homme
de
poids y sera surtout local. Il sera le grand homme d’une vallée, d’un
3236
oids y sera surtout local. Il sera le grand homme
d’
une vallée, d’une cité, plus rarement celui d’un canton, presque jamai
3237
rtout local. Il sera le grand homme d’une vallée,
d’
une cité, plus rarement celui d’un canton, presque jamais celui de la
3238
mme d’une vallée, d’une cité, plus rarement celui
d’
un canton, presque jamais celui de la nation entière. Tandis que le gr
3239
rarement celui d’un canton, presque jamais celui
de
la nation entière. Tandis que le grand esprit, solidement raciné dans
3240
rtiment natal, cherchera dans les jeux survolants
de
la synthèse les grandes dimensions qui lui manquent. Paracelse était
3241
s qui lui manquent. Paracelse était suisse, comme
C.
G. Jung, et Rousseau comme Jacob Burckhart, et Madame de Staël comme
3242
ckhart, et Madame de Staël comme personne. « Pays
de
gens moyens, oui, disait Lucien Febvre, mais quand ils réussissent à
3243
n Febvre, mais quand ils réussissent à se dégager
de
leur canton — alors, pas de milieu, ils atteignent à l’universel. Au
3244
ssissent à se dégager de leur canton — alors, pas
de
milieu, ils atteignent à l’universel. Au fond de son trou, l’homme de
3245
de milieu, ils atteignent à l’universel. Au fond
de
son trou, l’homme de Disentis, de Goeschenen, de Viège — entre les ha
3246
gnent à l’universel. Au fond de son trou, l’homme
de
Disentis, de Goeschenen, de Viège — entre les hautes parois de sa pri
3247
versel. Au fond de son trou, l’homme de Disentis,
de
Goeschenen, de Viège — entre les hautes parois de sa prison. Mais s’i
3248
de son trou, l’homme de Disentis, de Goeschenen,
de
Viège — entre les hautes parois de sa prison. Mais s’il monte sur la
3249
de Goeschenen, de Viège — entre les hautes parois
de
sa prison. Mais s’il monte sur la montagne… Alors, cette ivresse des
3250
ne… Alors, cette ivresse des sommets. L’intuition
de
la grandeur. Et plus d’obstacles devant la pensée… »am Compartiments
3251
des sommets. L’intuition de la grandeur. Et plus
d’
obstacles devant la pensée… »am Compartiments, esprit de groupe et so
3252
cles devant la pensée… »am Compartiments, esprit
de
groupe et sociétés. Mais petits groupes de gens qui ne se connaissent
3253
esprit de groupe et sociétés. Mais petits groupes
de
gens qui ne se connaissent que trop, et sociétés solides si leur but
3254
p, et sociétés solides si leur but est restreint.
D’
où l’extrême importance accordée à la vie, à la santé de l’individu, à
3255
’extrême importance accordée à la vie, à la santé
de
l’individu, à son confort : médecine, hygiène, vêtement, technique mi
3256
ents. Et découvrons la Suisse réelle dans l’usage
de
ses trains locaux. Les trains suisses, bien qu’ils vous conduisent e
3257
ins suisses, bien qu’ils vous conduisent en moins
d’
une heure d’un monde à l’autre, ne servent cependant qu’aux petits dép
3258
bien qu’ils vous conduisent en moins d’une heure
d’
un monde à l’autre, ne servent cependant qu’aux petits déplacements, q
3259
ée ne s’établit jamais cette monotonie des heures
de
plaine et d’océan de nuit où rien ne bouge. Comme il n’y a pas de pla
3260
it jamais cette monotonie des heures de plaine et
d’
océan de nuit où rien ne bouge. Comme il n’y a pas de place en Suisse
3261
s cette monotonie des heures de plaine et d’océan
de
nuit où rien ne bouge. Comme il n’y a pas de place en Suisse pour un
3262
céan de nuit où rien ne bouge. Comme il n’y a pas
de
place en Suisse pour un véritable voyage, on s’en tire en coupant le
3263
on s’en tire en coupant le milieu, ce remplissage
de
kilomètres, ces deux mesures de musique russe indéfiniment répétées,
3264
pant le milieu, ce remplissage de kilomètres, ces
deux
mesures de musique russe indéfiniment répétées, pour ne garder que le
3265
u, ce remplissage de kilomètres, ces deux mesures
de
musique russe indéfiniment répétées, pour ne garder que le meilleur,
3266
usion qui en ouvre une autre, tandis qu’entre les
deux
s’opère en un clin d’œil la silencieuse révolution du centre où se co
3267
nt les extrêmes les plus touchants du souvenir et
de
l’espoir, quand les portes du cœur, un instant, sont à la fois ouvert
3268
s romantiques contraints par les dimensions mêmes
de
leur État au classicisme véritable, celui qui exprime le tout en disa
3269
prime le tout en disant le moins, et qui témoigne
de
l’inspiration par le signal d’un raccourci métaphorique. J’idéalise,
3270
s, et qui témoigne de l’inspiration par le signal
d’
un raccourci métaphorique. J’idéalise, mais pourquoi pas ? S’il me fal
3271
t décrire nos petits déplacements du point de vue
de
l’usager moyen, je dirais que je les trouve divisés en trois classes,
3272
ger moyen, je dirais que je les trouve divisés en
trois
classes, pour la commodité de l’exposé. De mon temps, les gens bien v
3273
rouve divisés en trois classes, pour la commodité
de
l’exposé. De mon temps, les gens bien voyageaient en troisième, les g
3274
en trois classes, pour la commodité de l’exposé.
De
mon temps, les gens bien voyageaient en troisième, les gens chics par
3275
ne savais rien des premières sinon qu’un morceau
de
dentelle ornait le haut de leurs sièges de velours rouge, pour quelqu
3276
es sinon qu’un morceau de dentelle ornait le haut
de
leurs sièges de velours rouge, pour quelque usage ignoré du commun. P
3277
orceau de dentelle ornait le haut de leurs sièges
de
velours rouge, pour quelque usage ignoré du commun. Presque toujours
3278
ens bien, gracieusement mêlés au peuple souverain
de
la région, dans cette égalité scolaire que créent en Suisse les bancs
3279
e égalité scolaire que créent en Suisse les bancs
de
bois peints en faux bois jaune clair. On s’attendait à être interrogé
3280
clair. On s’attendait à être interrogé, dans les
trois
langues nationales. À mi-chemin entre l’instituteur et le gendarme, u
3281
l’instituteur et le gendarme, un personnage vêtu
d’
un sévère uniforme au col bordé de perles blanches mordant sur l’encol
3282
personnage vêtu d’un sévère uniforme au col bordé
de
perles blanches mordant sur l’encolure bien rasée entrait, claquait l
3283
t annonçait avec une emphatique autorité des noms
de
villages que tout le monde connaissait, mais cela faisait partie du j
3284
se passait d’ailleurs sans angoisse. On était sûr
de
son affaire, on était parfaitement « en règle », il fallait simplemen
3285
e, voire prévenante, qui fait la force principale
de
notre régime fédéral. Revenant en Suisse après la longue absence de m
3286
déral. Revenant en Suisse après la longue absence
de
mes années américaines et plus que jamais frappé par ce trait nationa
3287
toires du monde ont une fin — la fatale faiblesse
de
notre État : cette habitude de nous sentir “en règle”, et donc de nou
3288
a fatale faiblesse de notre État : cette habitude
de
nous sentir “en règle”, et donc de nous croire protégés par toutes le
3289
cette habitude de nous sentir “en règle”, et donc
de
nous croire protégés par toutes les lois divines et humaines, comme s
3290
manité où nous plongeons se conformait aux règles
de
la bonne conduite. » L’aspect d’un wagon suisse de troisième classe,
3291
rmait aux règles de la bonne conduite. » L’aspect
d’
un wagon suisse de troisième classe, tant il respire naturellement l’h
3292
e la bonne conduite. » L’aspect d’un wagon suisse
de
troisième classe, tant il respire naturellement l’honnêteté, tendrait
3293
tion, la décence et la sécurité des citoyens sont
de
purs et simples miracles ; que le monde est une jungle atomique, l’hu
3294
rresponsable et affamée ; et notre âme un cloaque
de
crimes potentiels, comme l’ont dit Freud, Shakespeare et les Pères de
3295
dit Freud, Shakespeare et les Pères de l’Église…
Dix
années ont passé, et plus que jamais, s’il faut que j’en croie mes ye
3296
xtravagantes menacent quotidiennement, depuis des
millénaires
, l’existence même de la plupart des autres hommes. En dépit du langag
3297
nnement, depuis des millénaires, l’existence même
de
la plupart des autres hommes. En dépit du langage courant, c’est le n
3298
t le normal qui est exceptionnel. Ce sont les cas
d’
ordre, de paix et de raison qui doivent nous étonner lorsqu’ils parais
3299
al qui est exceptionnel. Ce sont les cas d’ordre,
de
paix et de raison qui doivent nous étonner lorsqu’ils paraissent, phé
3300
exceptionnel. Ce sont les cas d’ordre, de paix et
de
raison qui doivent nous étonner lorsqu’ils paraissent, phénomènes hau
3301
lieu de nous rebattre les oreilles du train-train
de
nos corruptions. Donc les Suisses que je vois en troisième classe off
3302
s que je vois en troisième classe offrent l’image
de
l’homme sûr de son monde. D’où vient alors cette espèce de malaise qu
3303
n troisième classe offrent l’image de l’homme sûr
de
son monde. D’où vient alors cette espèce de malaise qu’éprouvent les
3304
asse offrent l’image de l’homme sûr de son monde.
D’
où vient alors cette espèce de malaise qu’éprouvent les étrangers sens
3305
e sûr de son monde. D’où vient alors cette espèce
de
malaise qu’éprouvent les étrangers sensibles lorsqu’ils prennent plac
3306
nnent place dans nos trains locaux ? L’expérience
de
la vie new-yorkaise, où personne ne vous voit jamais, me propose par
3307
en somme, inconsciemment, comme si notre système
de
sécurité devait être à chaque instant vérifié, mis au point, méticule
3308
méticuleusement nettoyé des moindres suggestions
de
bizarrerie ou de virtuelle indiscipline que peuvent représenter une c
3309
nettoyé des moindres suggestions de bizarrerie ou
de
virtuelle indiscipline que peuvent représenter une cravate insolente,
3310
ndiscrétion du regard suisse me surprend à chacun
de
mes retours. Comment décrire et comment justifier l’espèce particuliè
3311
écrire et comment justifier l’espèce particulière
d’
irritation que provoquent ces regards apparemment timides, mais direct
3312
ement ne se détournent qu’avec cet air exaspérant
de
celui qui renonce à comprendre… Ah ! mais il faut y être pour sentir
3313
naisé près de la porte du balcon dans une chambre
d’
hôtel des bords du lac Léman : Afin d’éviter tout bruit inutile, la d
3314
: Afin d’éviter tout bruit inutile, la direction
de
l’hôtel prie sa clientèle de ne pas donner à manger aux mouettes. C’
3315
nutile, la direction de l’hôtel prie sa clientèle
de
ne pas donner à manger aux mouettes. C’était l’été des expériences d
3316
nger aux mouettes. C’était l’été des expériences
de
Bikini. Dans les secondes règne la gravité du commerce et de l’indus
3317
Dans les secondes règne la gravité du commerce et
de
l’industrie. L’authentique usager de cette classe n’est pas curieux,
3318
commerce et de l’industrie. L’authentique usager
de
cette classe n’est pas curieux, comme les gens de troisième, des menu
3319
de cette classe n’est pas curieux, comme les gens
de
troisième, des menus incidents du trajet. On sent bien qu’il a l’habi
3320
e vagabonde pas, reste enfermée dans sa serviette
de
cuir. Rien d’étonnant si le contrôleur distingue à première vue les r
3321
s, reste enfermée dans sa serviette de cuir. Rien
d’
étonnant si le contrôleur distingue à première vue les resquilleurs, c
3322
s jeunes gens excités qui prétendent ne pas payer
de
supplément parce qu’il n’y avait plus de place dans les troisièmes :
3323
as payer de supplément parce qu’il n’y avait plus
de
place dans les troisièmes : ils ont l’air trop contents d’être là, on
3324
dans les troisièmes : ils ont l’air trop contents
d’
être là, on les refoule. J’ai cru remarquer à ce propos que le peuple
3325
s aux moues insolentes, vêtues comme des réclames
de
magazines, discutent avec un accent révoltant le prix de leurs nylons
3326
zines, discutent avec un accent révoltant le prix
de
leurs nylons ou de cette « Cadillac » promise, affirment-elles, par l
3327
ec un accent révoltant le prix de leurs nylons ou
de
cette « Cadillac » promise, affirment-elles, par le jeune mâle placid
3328
les troisièmes. Mais il faut traverser un couloir
de
premières. Et je m’arrête, fasciné. Un vieux monsieur en noir, au col
3329
n’existait pas, ils vont plus loin. Confirmation
de
la sentence ésotérique : l’œil qui ne voit pas n’est pas vu. Les pass
3330
l’œil qui ne voit pas n’est pas vu. Les passagers
de
première classe, en Suisse, je les nomme les imperméables. Ils traver
3331
t transparents s’ils vont très vite ? On ne cesse
de
voir le paysage au travers.) Ils appartiennent au vaste monde dont je
3332
nent au vaste monde dont je rêvais avec fièvre, à
12
ans, quand je lisais sur les longs wagons bruns qui s’engouffraient a
3333
axes du monde. Quel ennui, ces Secondes entre les
deux
! ak. Rougemont Denis de, « Petits trajets sur les axes du monde »
3334
Secondes entre les deux ! ak. Rougemont Denis
de
, « Petits trajets sur les axes du monde », Médecine de France, Paris,
3335
Petits trajets sur les axes du monde », Médecine
de
France, Paris, août 1956, p. 33-35. al. Ce texte est une nouvelle ve
3336
axes du monde », Médecine de France, Paris, août
1956,
p. 33-35. al. Ce texte est une nouvelle version, remaniée, de « La l
3337
al. Ce texte est une nouvelle version, remaniée,
de
« La lutte des classes ». am. Il s’agit d’un extrait de la préface à
3338
niée, de « La lutte des classes ». am. Il s’agit
d’
un extrait de la préface à la Confédération helvétique , que Rougemont
3339
lutte des classes ». am. Il s’agit d’un extrait
de
la préface à la Confédération helvétique , que Rougemont publie en 19
3340
onfédération helvétique , que Rougemont publie en
1953.
3341
Un exemple pour l’Europe (octobre
1956
)an Parmi les fédérations réussies, l’on peut citer la Suisse sans
3342
réussies, l’on peut citer la Suisse sans soulever
d’
objections. Tout le monde sait que son régime politique est l’un des p
3343
e est l’un des plus stables au monde, depuis plus
d’
un siècle. Les partisans de l’Europe unie ne manquent pas de le citer
3344
au monde, depuis plus d’un siècle. Les partisans
de
l’Europe unie ne manquent pas de le citer en exemple. Mais combien sa
3345
e. Les partisans de l’Europe unie ne manquent pas
de
le citer en exemple. Mais combien savent comment ce modèle d’un systè
3346
en exemple. Mais combien savent comment ce modèle
d’
un système politique fédéral a pris naissance en 1848 ? Une fédérati
3347
’un système politique fédéral a pris naissance en
1848
? Une fédération qui garantit leur souveraineté aux fédérés Jusq
3348
u’à cette date, la Suisse n’était qu’une alliance
d’
États souverains. Pendant des siècles, leur lien légal avait consisté
3349
sisté dans une Diète, laquelle n’avait guère plus
de
pouvoir que l’Assemblée consultative de Strasbourg. Composée d’ambass
3350
uère plus de pouvoir que l’Assemblée consultative
de
Strasbourg. Composée d’ambassadeurs des cantons souverains, pourvus d
3351
l’Assemblée consultative de Strasbourg. Composée
d’
ambassadeurs des cantons souverains, pourvus du droit de veto, cette D
3352
ssadeurs des cantons souverains, pourvus du droit
de
veto, cette Diète « n’avait en fait d’emprise sur les cantons que dan
3353
s du droit de veto, cette Diète « n’avait en fait
d’
emprise sur les cantons que dans la mesure où elle se conformait à leu
3354
la mesure où elle se conformait à leurs volontés »
27.
La division des petits États, leur impuissance à adopter en temps uti
3355
ne politique commune expliquent la chute soudaine
de
l’ancienne Confédération devant les armées de la Révolution française
3356
ine de l’ancienne Confédération devant les armées
de
la Révolution française, en 1798. L’essai d’unification jacobine entr
3357
devant les armées de la Révolution française, en
1798.
L’essai d’unification jacobine entrepris à ce moment-là sous le nom d
3358
mées de la Révolution française, en 1798. L’essai
d’
unification jacobine entrepris à ce moment-là sous le nom de « Républi
3359
ion jacobine entrepris à ce moment-là sous le nom
de
« République helvétique une et indivisible » échoua rapidement, et Na
3360
issant l’erreur commise, déclarait aux Suisses en
1802
: « La Nature a fait votre État fédératif. Vouloir la vaincre ne peut
3361
at fédératif. Vouloir la vaincre ne peut pas être
d’
un homme sage. » Entre les deux extrêmes de l’alliance d’États souvera
3362
cre ne peut pas être d’un homme sage. » Entre les
deux
extrêmes de l’alliance d’États souverains sans pouvoir central et de
3363
s être d’un homme sage. » Entre les deux extrêmes
de
l’alliance d’États souverains sans pouvoir central et de la totale un
3364
mme sage. » Entre les deux extrêmes de l’alliance
d’
États souverains sans pouvoir central et de la totale unification, la
3365
liance d’États souverains sans pouvoir central et
de
la totale unification, la Suisse chercha pendant près d’un demi-siècl
3366
otale unification, la Suisse chercha pendant près
d’
un demi-siècle un équilibre malaisé. Toute tentative de révision du «
3367
demi-siècle un équilibre malaisé. Toute tentative
de
révision du « Pacte fédéral », comme celle de 1832, se voyait repouss
3368
ive de révision du « Pacte fédéral », comme celle
de
1832, se voyait repoussée à la fois par la gauche, qui lui reprochait
3369
de révision du « Pacte fédéral », comme celle de
1832,
se voyait repoussée à la fois par la gauche, qui lui reprochait son r
3370
La solution qui s’imposa finalement au lendemain
de
la guerre civile dite du Sonderbund (1847) peut être qualifiée soit d
3371
lendemain de la guerre civile dite du Sonderbund (
1847
) peut être qualifiée soit d’habile compris soit d’échappatoire, selon
3372
ite du Sonderbund (1847) peut être qualifiée soit
d’
habile compris soit d’échappatoire, selon qu’on a le tempérament pragm
3373
7) peut être qualifiée soit d’habile compris soit
d’
échappatoire, selon qu’on a le tempérament pragmatique ou doctrinaire.
3374
fait, elle a tranquillement supprimé le problème
de
la souveraineté cantonale (ou nationale), et cela d’une manière qui m
3375
la souveraineté cantonale (ou nationale), et cela
d’
une manière qui me paraît pleine d’enseignements pour l’Europe d’aujou
3376
nale), et cela d’une manière qui me paraît pleine
d’
enseignements pour l’Europe d’aujourd’hui. Loin d’exiger des cantons u
3377
ui me paraît pleine d’enseignements pour l’Europe
d’
aujourd’hui. Loin d’exiger des cantons une renonciation à leur souvera
3378
d’enseignements pour l’Europe d’aujourd’hui. Loin
d’
exiger des cantons une renonciation à leur souveraineté, la Constituti
3379
ation à leur souveraineté, la Constitution suisse
de
1848 garantit expressément cette souveraineté, en même temps qu’elle
3380
on à leur souveraineté, la Constitution suisse de
1848
garantit expressément cette souveraineté, en même temps qu’elle la li
3381
au pouvoir fédéral. Voici les textes : Article
1.
— Les peuples des vingt-deux cantons souverains de la Suisse, unis pa
3382
Voici les textes : Article 1. — Les peuples des
vingt-deux
cantons souverains de la Suisse, unis par la présente alliance… forme
3383
. — Les peuples des vingt-deux cantons souverains
de
la Suisse, unis par la présente alliance… forment dans leur ensemble
3384
s leur ensemble la Confédération suisse. Article
3.
— Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas
3385
ne sont pas délégués au pouvoir fédéral. Article
5.
— La Confédération garantit aux cantons leur territoire, la souverain
3386
ouveraineté dans les limites fixées par l’article
3,
leurs constitutions, la liberté et les droits du peuple, etc. Per
3387
ffens l’a définie comme « la faculté pour un État
d’
agir à sa guise, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, dans les limites
3388
s aucun État européen qui ait conservé la faculté
d’
agir à sa guise à l’extérieur, c’est-à-dire qui soit capable de déclar
3389
uise à l’extérieur, c’est-à-dire qui soit capable
de
déclarer la guerre ou de conclure la paix comme il l’entend, d’assure
3390
-à-dire qui soit capable de déclarer la guerre ou
de
conclure la paix comme il l’entend, d’assurer sa prospérité sans plus
3391
guerre ou de conclure la paix comme il l’entend,
d’
assurer sa prospérité sans plus dépendre de l’étranger, de se défendre
3392
ntend, d’assurer sa prospérité sans plus dépendre
de
l’étranger, de se défendre plus de quelques heures contre les Russes
3393
r sa prospérité sans plus dépendre de l’étranger,
de
se défendre plus de quelques heures contre les Russes ou les Américai
3394
plus dépendre de l’étranger, de se défendre plus
de
quelques heures contre les Russes ou les Américains : donc de se cond
3395
heures contre les Russes ou les Américains : donc
de
se conduire en pirate ou de vivre en vase clos. Ces limites décisives
3396
les Américains : donc de se conduire en pirate ou
de
vivre en vase clos. Ces limites décisives à la souveraineté ne sont p
3397
aineté ne sont plus posées par le droit, mais par
d’
implacables circonstances techniques, économiques et politiques. Il en
3398
ulte que la souveraineté nationale n’a plus guère
d’
autre existence que psychologique. Refoulée du domaine des forces réel
3399
ogique. Refoulée du domaine des forces réelles et
de
pouvoirs concrets elle est devenue le réceptacle où se recueillent pê
3400
réceptacle où se recueillent pêle-mêle nostalgies
de
gloires passées, orgueils déçus, rancunes et préjugés hérités d’une H
3401
ées, orgueils déçus, rancunes et préjugés hérités
d’
une Histoire faussée par l’école, agressivité frustrée, et surtout ang
3402
’école, agressivité frustrée, et surtout angoisse
de
perdre son identité. Elle a donc pris les caractères cliniques d’un c
3403
entité. Elle a donc pris les caractères cliniques
d’
un complexe. D’où la difficulté, pour ceux qui en sont victimes, de s’
3404
donc pris les caractères cliniques d’un complexe.
D’
où la difficulté, pour ceux qui en sont victimes, de s’adapter aux réa
3405
où la difficulté, pour ceux qui en sont victimes,
de
s’adapter aux réalités changeantes du siècle, et même de les apercevo
3406
apter aux réalités changeantes du siècle, et même
de
les apercevoir. D’où la prise qu’ils offrent aux manœuvres les plus g
3407
changeantes du siècle, et même de les apercevoir.
D’
où la prise qu’ils offrent aux manœuvres les plus grossières du commun
3408
r affectivité inquiète comme Iago sur la jalousie
d’
Othello. D’où enfin l’extrême confusion et les éclats de passion saugr
3409
té inquiète comme Iago sur la jalousie d’Othello.
D’
où enfin l’extrême confusion et les éclats de passion saugrenus qui ca
3410
llo. D’où enfin l’extrême confusion et les éclats
de
passion saugrenus qui caractérisent les polémiques sur la souverainet
3411
es sur la souveraineté nationale. Lors des débats
de
la table ronde de l’Europe tenue à Rome en 1953, deux arguments m’ont
3412
neté nationale. Lors des débats de la table ronde
de
l’Europe tenue à Rome en 1953, deux arguments m’ont frappé comme étan
3413
ats de la table ronde de l’Europe tenue à Rome en
1953,
deux arguments m’ont frappé comme étant propres à éduquer le sens eur
3414
la table ronde de l’Europe tenue à Rome en 1953,
deux
arguments m’ont frappé comme étant propres à éduquer le sens européen
3415
pé comme étant propres à éduquer le sens européen
de
notre opinion publique. Le premier fut apporté par M. Ernst Friedlaen
3416
’on doit rassurer ceux qui tremblent, disent-ils,
de
voir leur patrie « se perdre dans la masse informe d’une Europe unie
3417
oir leur patrie « se perdre dans la masse informe
d’
une Europe unie ». Le second argument est dû à M. Cotsaridas, publicis
3418
le peuple sera associé à leur gestion. Il importe
d’
expliquer cela aux masses, car ainsi sera dissipée la crainte que susc
3419
nsi sera dissipée la crainte que suscite la perte
de
la souveraineté nationale. » Il n’est donc pas exact que nos nations,
3420
vue de s’unir, doivent sacrifier ce qui subsiste
de
leur souveraineté nominale. Quant à l’essentiel de cette souveraineté
3421
e leur souveraineté nominale. Quant à l’essentiel
de
cette souveraineté, elles l’ont perdu, et sans retour. À la question
3422
s, une souveraineté qui échappe à ses nations.
27.
William Rappard, La Constitution fédérale de la Suisse, p. 20. 28.
3423
27. William Rappard, La Constitution fédérale
de
la Suisse, p. 20. 28. Ibid., p. 83. an. Rougemont Denis de, « Un
3424
d, La Constitution fédérale de la Suisse, p. 20.
28.
Ibid., p. 83. an. Rougemont Denis de, « Un exemple pour l’Europe »
3425
p. 20. 28. Ibid., p. 83. an. Rougemont Denis
de
, « Un exemple pour l’Europe », Fédération, Paris, octobre 1956, p. 59
3426
emple pour l’Europe », Fédération, Paris, octobre
1956,
p. 596-598.
3427
Serrer la main
d’
un communiste, désormais… (10 novembre 1956)ao Le dimanche 4 novemb
3428
Serrer la main d’un communiste, désormais… (
10
novembre 1956)ao Le dimanche 4 novembre, à 7 h 57, Radio-Kossuth d
3429
la main d’un communiste, désormais… (10 novembre
1956
)ao Le dimanche 4 novembre, à 7 h 57, Radio-Kossuth diffuse le text
3430
e, désormais… (10 novembre 1956)ao Le dimanche
4
novembre, à 7 h 57, Radio-Kossuth diffuse le texte que voici : Atten
3431
(10 novembre 1956)ao Le dimanche 4 novembre, à
7
h 57, Radio-Kossuth diffuse le texte que voici : Attention ! attenti
3432
novembre 1956)ao Le dimanche 4 novembre, à 7 h
57,
Radio-Kossuth diffuse le texte que voici : Attention ! attention ! c
3433
chers auditeurs, vous allez entendre le manifeste
de
la Fédération des écrivains hongrois. Ici la Fédération des écrivains
3434
de, à tous les savants, à toutes les associations
d’
écrivains et académies, à l’élite intellectuelle du monde entier, nous
3435
peu de temps. Vous connaissez les faits. Inutile
de
rappeler ce qui se passe. Aidez la Hongrie. Aidez le peuple hongrois.
3436
u secours ! au secours ! Le manifeste est répété
trois
fois en anglais, en allemand et en russe. Puis quelques minutes de mu
3437
s, en allemand et en russe. Puis quelques minutes
de
musique. À 8 h 7, Radio-Kossuth se tait. QUI RÉPONDRA ? À ces dernièr
3438
et en russe. Puis quelques minutes de musique. À
8
h 7, Radio-Kossuth se tait. QUI RÉPONDRA ? À ces dernières paroles de
3439
en russe. Puis quelques minutes de musique. À 8 h
7,
Radio-Kossuth se tait. QUI RÉPONDRA ? À ces dernières paroles de la r
3440
h se tait. QUI RÉPONDRA ? À ces dernières paroles
de
la révolution déclenchée par les étudiants et par les écrivains du ce
3441
u, cet appel propagé dans le monde entier. Chacun
de
nous doit maintenant y répondre. Chacun de nous peut faire quelque ch
3442
Chacun de nous doit maintenant y répondre. Chacun
de
nous peut faire quelque chose. Le monstrueux forfait de Budapest a mi
3443
s peut faire quelque chose. Le monstrueux forfait
de
Budapest a mis le communisme au ban de l’humanité. Il fallait tout d’
3444
ux forfait de Budapest a mis le communisme au ban
de
l’humanité. Il fallait tout d’abord le déclarer. Mais il faut en tire
3445
e part, nous pensons ce qui suit : Serrer la main
d’
un communiste occidental, qui approuve « librement » son parti, c’est
3446
nt » son parti, c’est saluer un complice du crime
de
Budapest. Publier ses écrits, c’est contribuer au genre de propagande
3447
st. Publier ses écrits, c’est contribuer au genre
de
propagande intellectuelle qui mène au crime de Budapest. Discuter ses
3448
re de propagande intellectuelle qui mène au crime
de
Budapest. Discuter ses raisons, c’est oublier qu’elles « justifient »
3449
elles « justifient » nécessairement les massacres
de
Budapest. Continuer les dialogues Europe-URSS, engagés sous le signe
3450
ogues Europe-URSS, engagés sous le signe trompeur
d’
une « détente » qui vient de montrer sa vraie nature à Budapest, c’est
3451
uet-apens. Accueillir et fêter les jolies troupes
d’
artistes, les intellectuels asservis que nous envoie le régime de Mosc
3452
intellectuels asservis que nous envoie le régime
de
Moscou, c’est oublier la voix des écrivains martyrs qui nous appelaie
3453
la voix des écrivains martyrs qui nous appelaient
de
Budapest, et c’est trahir leur testament. Que chacun s’interroge et d
3454
ament. Que chacun s’interroge et décide librement
de
l’action qu’il entend mener, dans sa sphère d’influence personnelle o
3455
nt de l’action qu’il entend mener, dans sa sphère
d’
influence personnelle ou civique, contre ceux qui applaudissent au cri
3456
re ceux qui applaudissent au crime, qui tenteront
de
le faire oublier, ou de lui chercher des excuses. Que tous les esprit
3457
t au crime, qui tenteront de le faire oublier, ou
de
lui chercher des excuses. Que tous les esprits libres qui voudraient
3458
’action internationale du Congrès pour la liberté
de
la culture sachent qu’ils trouveront ici des hommes qui n’oublient pa
3459
s hommes qui n’oublient pas l’appel des écrivains
de
Budapest, qui ne le laisseront pas oublier, et dont tout le programme
3460
oublier, et dont tout le programme est maintenant
d’
y répondre. Au nom du Congrès pour la liberté de la culture, Le présid
3461
t d’y répondre. Au nom du Congrès pour la liberté
de
la culture, Le président du comité exécutif, Denis de Rougemont ao.
3462
écutif, Denis de Rougemont ao. Rougemont Denis
de
, « Serrer la main d’un communiste, désormais… », Le Figaro littéraire
3463
emont ao. Rougemont Denis de, « Serrer la main
d’
un communiste, désormais… », Le Figaro littéraire, Paris, 10 novembre
3464
niste, désormais… », Le Figaro littéraire, Paris,
10
novembre 1956.
3465
mais… », Le Figaro littéraire, Paris, 10 novembre
1956.