1 (janvier 1957)a b Ce qui s’oppose coopère, et de ce qui diverge procède la plus belle harmonie. Héraclite Reconnaît

2 raclite Reconnaître nos différences Parlant de l’Absolu, que certains appellent Dieu, d’autres le Soi, ou le Total,

3 « aucune différence », il n’y aurait pas non plus d’ antinomie foncière entre la foi chrétienne de l’Occident et la pensée

4 plus d’antinomie foncière entre la foi chrétienne de l’Occident et la pensée religieuse de l’Asie1. Sur d’autres plans, po

5 chrétienne de l’Occident et la pensée religieuse de l’Asie1. Sur d’autres plans, pourtant, les différences éclatent. Ce s

6 nces éclatent. Ce serait faire tort à l’homme que de nier leurs liens avec certaines options fondamentales qu’il a prises

7 a prises au plan religieux. Au nom même du désir d’ union de l’humanité qui anime de part et d’autre les meilleurs esprits

8 s au plan religieux. Au nom même du désir d’union de l’humanité qui anime de part et d’autre les meilleurs esprits, il me

9 nom même du désir d’union de l’humanité qui anime de part et d’autre les meilleurs esprits, il me paraît vital d’admettre

10 désir d’union de l’humanité qui anime de part et d’ autre les meilleurs esprits, il me paraît vital d’admettre en toute fr

11 d’autre les meilleurs esprits, il me paraît vital d’ admettre en toute franchise l’existence historique et spirituelle de d

12 e franchise l’existence historique et spirituelle de deux expériences différentes, de deux voies longtemps divergentes, de

13 e et spirituelle de deux expériences différentes, de deux voies longtemps divergentes, de deux types d’aventure humaine qu

14 différentes, de deux voies longtemps divergentes, de deux types d’aventure humaine que l’on peut désigner par les termes s

15 e deux voies longtemps divergentes, de deux types d’ aventure humaine que l’on peut désigner par les termes symboliques, pl

16 r les termes symboliques, plus que géographiques, d’ Orient et d’Occident. Contraster les contenus de ces termes sera l’obj

17 symboliques, plus que géographiques, d’Orient et d’ Occident. Contraster les contenus de ces termes sera l’objet des essai

18 , d’Orient et d’Occident. Contraster les contenus de ces termes sera l’objet des essais de mise au point qui suivent. Cert

19 es contenus de ces termes sera l’objet des essais de mise au point qui suivent. Certains penseront qu’il est dangereux de

20 i suivent. Certains penseront qu’il est dangereux de souligner ce qui nous distingue, au lieu de mettre en valeur ce qui n

21 aleur ce qui nous est commun ; qu’on risque ainsi de nourrir les préjugés, et de forcer, par esprit de symétrie, des antit

22  ; qu’on risque ainsi de nourrir les préjugés, et de forcer, par esprit de symétrie, des antithèses qu’une sagesse supérie

23 de nourrir les préjugés, et de forcer, par esprit de symétrie, des antithèses qu’une sagesse supérieure saurait conduire à

24 prits ne sera jamais acquise au prix du sacrifice de nos diversités vivantes ; elle suppose bien plutôt la connaissance de

25 e suppose bien plutôt la connaissance des raisons d’ être de ces diversités. Vouloir les ignorer par gain de paix, les pass

26 se bien plutôt la connaissance des raisons d’être de ces diversités. Vouloir les ignorer par gain de paix, les passer sous

27 e de ces diversités. Vouloir les ignorer par gain de paix, les passer sous silence ou les minimiser, ce serait perdre d’av

28 r sous silence ou les minimiser, ce serait perdre d’ avance les deux vertus majeures qui dénotent une union véritable : à s

29 esse supérieure et vraiment unitive ne naîtra pas d’ aspirations mal informées, ni du refus de bien voir l’état présent des

30 îtra pas d’aspirations mal informées, ni du refus de bien voir l’état présent des choses, encore moins du recours à quelqu

31 nuit des temps, et noyant les problèmes concrets de notre siècle dans une condamnation globale de l’Occident2. « La nuit,

32 ets de notre siècle dans une condamnation globale de l’Occident2. « La nuit, tous les chats sont gris », dit le proverbe.

33 ts sont gris », dit le proverbe. Mauvaise formule d’ union, qui ne peut survivre à l’aube ! Si l’Orient et l’Occident doive

34 doivent un jour converger au lieu de s’ignorer ou de se combattre, ils le devront bien moins à un « retour aux sources » q

35 et toujours plus lucide vers les buts respectifs de leur double aventure. Mieux compris, mieux réalisés, ces buts se révé

36 , ces buts se révéleront un jour complémentaires, d’ une façon qui nous demeure encore indescriptible, mais dont le pressen

37 essentiment nous accompagne. Réalités externes de l’opposition Admettons l’hypothèse d’une origine commune, et d’une

38 externes de l’opposition Admettons l’hypothèse d’ une origine commune, et d’une famille d’idiomes indo-européens dont le

39 Admettons l’hypothèse d’une origine commune, et d’ une famille d’idiomes indo-européens dont le sanscrit serait le plus a

40 hypothèse d’une origine commune, et d’une famille d’ idiomes indo-européens dont le sanscrit serait le plus ancien témoigna

41 tons que le régime des castes, imposé aux peuples de l’Inde par les conquérants aryens, ait son origine en Europe, où Plat

42 s efforts des réformateurs religieux, du Bouddha, de l’islam, mais non pas des Anglais… À l’Ouest, en revanche, l’ascensio

43 des Anglais… À l’Ouest, en revanche, l’ascension de l’Europe se confond avec les succès de la lutte permanente contre les

44 ’ascension de l’Europe se confond avec les succès de la lutte permanente contre les castes. La démocratie hellénique, l’ex

45 les castes. La démocratie hellénique, l’expansion de la morale chrétienne, la Renaissance et la Révolution française marqu

46 ce et la Révolution française marquent les étapes de cette dissolution du système social tripartite hérité de l’ancêtre ar

47 e dissolution du système social tripartite hérité de l’ancêtre aryen. Sur l’arrière-fond commun, les différences s’accusen

48 n, les différences s’accusent. Elles ne cesseront de s’affirmer dans l’ensemble de notre histoire, nonobstant la longue pa

49 Elles ne cesseront de s’affirmer dans l’ensemble de notre histoire, nonobstant la longue parenthèse du Moyen Âge. À bien

50 e Moyen Âge a représenté la période « orientale » de l’Occident. Le symbolisme y dominait dans tous les ordres ; les trois

51 s traditions multipliées primaient sur tout essai d’ innovation ou de variation individuelles ; l’au-delà était tenu pour p

52 tipliées primaient sur tout essai d’innovation ou de variation individuelles ; l’au-delà était tenu pour plus réel que l’i

53 nt il convenait par suite de s’évader, plutôt que d’ essayer de l’aménager selon les désirs d’un corps vil et d’une raison

54 enait par suite de s’évader, plutôt que d’essayer de l’aménager selon les désirs d’un corps vil et d’une raison mal éclair

55 utôt que d’essayer de l’aménager selon les désirs d’ un corps vil et d’une raison mal éclairée ; partout, le collectif-sacr

56 de l’aménager selon les désirs d’un corps vil et d’ une raison mal éclairée ; partout, le collectif-sacral refoulait le ra

57  », la tendance individualiste ne pouvait trouver d’ exutoire que dans l’aventure mystique. Le véritable individu, au Moyen

58 à-dire le saint homme qui se « détache » du clan, de la coutume, de la magie, du dogme même, devenant hétérodoxe moins par

59 homme qui se « détache » du clan, de la coutume, de la magie, du dogme même, devenant hétérodoxe moins par la négation de

60 e même, devenant hétérodoxe moins par la négation de l’orthodoxie qu’il croit encore servir, que par son dépassement réali

61 son dépassement réalisé. Mais l’Orient n’a pas eu de Renaissance. La durée même de son Moyen Âge, confronté tout vivant av

62 l’Orient n’a pas eu de Renaissance. La durée même de son Moyen Âge, confronté tout vivant avec notre âge technique, trahit

63 fin du nôtre. À partir de la Renaissance, l’angle de divergence s’agrandit rapidement, pour atteindre à peu près 180° aux

64 dement, pour atteindre à peu près 180° aux débuts de notre siècle technique. Alors, la réalité de l’opposition à peu près

65 buts de notre siècle technique. Alors, la réalité de l’opposition à peu près diamétrale des deux mondes s’atteste aux yeux

66 -Unis dont le passé vivant ne remonte pas au-delà d’ une post-Renaissance importée. En Inde, on ne voit partout que pèlerin

67 que pèlerinages, sanctuaires, lieux et quartiers de ville sacrés ; arbres, fleuves, animaux sacrés ; hommes et femmes en

68 selle. En Europe, dans un paysage où les clochers d’ églises dominent encore généralement la silhouette des villages et des

69 s pèlerinages ou lieux sacrés, quelques centaines de vieux châteaux (symboles de l’âme pour la mystique) témoignent d’un s

70 s, quelques centaines de vieux châteaux (symboles de l’âme pour la mystique) témoignent d’un sacré dont l’âge fait le prix

71 x (symboles de l’âme pour la mystique) témoignent d’ un sacré dont l’âge fait le prix, mais que l’on isole de la vie, et qu

72 acré dont l’âge fait le prix, mais que l’on isole de la vie, et que cernent impatiemment les grands faubourgs industriels

73 nt les grands faubourgs industriels et les décors de la technique. En Amérique : pas un seul lieu sacré en dehors des égli

74 rs des églises en faux gothique luxueux, dominées de très haut par les gratte-ciel ; pas un seul pèlerinage et pas un vrai

75 rai château. Plaines et villes immenses, dénudées de mystère, nettoyées de toute trace de religion primitive et de vénérat

76 t villes immenses, dénudées de mystère, nettoyées de toute trace de religion primitive et de vénération pour les choses, l

77 es, dénudées de mystère, nettoyées de toute trace de religion primitive et de vénération pour les choses, les plantes, les

78 nettoyées de toute trace de religion primitive et de vénération pour les choses, les plantes, les animaux ou le surnaturel

79 rtagé par toutes les classes. L’Occidental retour d’ Orient s’écrie : « Je n’ai vu que des foules, pas une personne ! » Et

80 qu’il n’y voit qu’agitation désordonnée, absence de sens et d’harmonie, et pas un seul vrai spirituel… Réalités intern

81 voit qu’agitation désordonnée, absence de sens et d’ harmonie, et pas un seul vrai spirituel… Réalités internes de l’opp

82 pas un seul vrai spirituel… Réalités internes de l’opposition a) Symbolisme de l’Orient et de l’Occident 5. — L’Ori

83 éalités internes de l’opposition a) Symbolisme de l’Orient et de l’Occident 5. — L’Orient et l’Occident ne sont donc pa

84 s de l’opposition a) Symbolisme de l’Orient et de l’Occident 5. — L’Orient et l’Occident ne sont donc pas seulement des

85 l doute, mais ils sont beaucoup plus : deux voies de l’homme, deux directions maîtresses de sa Quête inlassable du Réel. P

86 deux voies de l’homme, deux directions maîtresses de sa Quête inlassable du Réel. Pour passer du sens géographique et hist

87 l. Pour passer du sens géographique et historique de nos deux termes à leur sens symbolique et spirituel, recourons aux ré

88 isionnaires que deux grands philosophes religieux de l’Iran et de l’Arabie, Avicenne et Sohrawardi, nous ont laissés sur c

89 ue deux grands philosophes religieux de l’Iran et de l’Arabie, Avicenne et Sohrawardi, nous ont laissés sur ce sujet fonda

90 ont laissés sur ce sujet fondamental6. Le récit d’ Avicenne est une initiation à l’Orient, monde des Formes de lumière, c

91 e est une initiation à l’Orient, monde des Formes de lumière, contrastant avec l’Occident du monde terrestre et l’Extrême-

92 réside l’univers angélique ; à gauche, l’Occident de la Matière et du soleil couchant, au bord le plus lointain duquel s’é

93 ux qui le cultivent viennent d’ailleurs… » (Thème de l’Exil.) Et ce climat est un lieu de dévastation, un désert de sel, r

94 rs… » (Thème de l’Exil.) Et ce climat est un lieu de dévastation, un désert de sel, rempli de troubles, de guerres, de dis

95 t ce climat est un lieu de dévastation, un désert de sel, rempli de troubles, de guerres, de disputes, de tumultes : « joi

96 un lieu de dévastation, un désert de sel, rempli de troubles, de guerres, de disputes, de tumultes : « joie et beauté n’y

97 évastation, un désert de sel, rempli de troubles, de guerres, de disputes, de tumultes : « joie et beauté n’y sont qu’un e

98 un désert de sel, rempli de troubles, de guerres, de disputes, de tumultes : « joie et beauté n’y sont qu’un emprunt procu

99 sel, rempli de troubles, de guerres, de disputes, de tumultes : « joie et beauté n’y sont qu’un emprunt procuré d’un lieu

100 : « joie et beauté n’y sont qu’un emprunt procuré d’ un lieu lointain ». Entre l’Orient et l’Occident (c’est-à-dire au lieu

101 et l’Occident (c’est-à-dire au lieu de rencontre de la matière et de la forme) est une circonscription intermédiaire : « 

102 ’est-à-dire au lieu de rencontre de la matière et de la forme) est une circonscription intermédiaire : « C’est celle que l

103 est celle que l’on connaît le mieux… » (Il s’agit de notre vie terrestre.) Dans son Récit de l’exil occidental de l’âme, S

104 Il s’agit de notre vie terrestre.) Dans son Récit de l’exil occidental de l’âme, Sohrawardi décrit le pèlerinage de l’âme,

105 e terrestre.) Dans son Récit de l’exil occidental de l’âme, Sohrawardi décrit le pèlerinage de l’âme, son « exil » dans le

106 idental de l’âme, Sohrawardi décrit le pèlerinage de l’âme, son « exil » dans les liens de la matière et du corps qui la r

107 pèlerinage de l’âme, son « exil » dans les liens de la matière et du corps qui la retiennent captive dans leurs noires fo

108 eurs noires forteresses, son départ vers l’Orient de l’illumination, de l’origine et de la délivrance. Et l’on retrouve ic

109 sses, son départ vers l’Orient de l’illumination, de l’origine et de la délivrance. Et l’on retrouve ici les mêmes signifi

110 vers l’Orient de l’illumination, de l’origine et de la délivrance. Et l’on retrouve ici les mêmes significations symboliq

111 retrouve ici les mêmes significations symboliques de l’Orient et de l’Occident que dans le récit d’Avicenne, auquel l’aute

112 s mêmes significations symboliques de l’Orient et de l’Occident que dans le récit d’Avicenne, auquel l’auteur rattache d’a

113 es de l’Orient et de l’Occident que dans le récit d’ Avicenne, auquel l’auteur rattache d’ailleurs son conte, qui est une v

114 on conte, qui est une vision7. Tentons maintenant de dresser une liste des caractères symboliques que ces deux auteurs att

115 à nos jours, tous les esprits occidentaux nourris de la pensée mystique du Proche-Orient8 ont accolés à nos deux termes. N

116 eux termes. Nous aurons le tableau suivant, formé de quatorze antithèses : Orient : l’aurore, le matin, le haut, la droit

117 droite, l’extrême raffinement, la lumière, l’Ange de la Révélation, le but dernier, l’âme, l’initiation, la sagesse, la ré

118 gauche, l’épaisseur opaque, la pénombre, le démon de l’utilitarisme et de la puissance aveugle, l’oubli des buts de l’âme,

119 paque, la pénombre, le démon de l’utilitarisme et de la puissance aveugle, l’oubli des buts de l’âme, le corps et la matiè

120 isme et de la puissance aveugle, l’oubli des buts de l’âme, le corps et la matière, l’activité désordonnée, la passion, la

121 e par les liens matériels et passionnels, le lieu d’ exil. Cette unanimité dans l’interprétation, uniquement favorable à l’

122 ’interprétation, uniquement favorable à l’Orient, de nos deux termes symboliques ne peut manquer d’impressionner. On ne sa

123 t, de nos deux termes symboliques ne peut manquer d’ impressionner. On ne saurait la réduire à rien d’accidentel, de physiq

124 d’impressionner. On ne saurait la réduire à rien d’ accidentel, de physique ou d’anecdotique. Car si le soleil se lève à l

125 er. On ne saurait la réduire à rien d’accidentel, de physique ou d’anecdotique. Car si le soleil se lève à l’Orient pour l

126 it la réduire à rien d’accidentel, de physique ou d’ anecdotique. Car si le soleil se lève à l’Orient pour les Grecs, il en

127 et ceux-ci ne figurent pas pour autant l’Occident de la Chine ou de la Malaisie, ni le Japon l’Occident de l’Amérique ! El

128 igurent pas pour autant l’Occident de la Chine ou de la Malaisie, ni le Japon l’Occident de l’Amérique ! Elle révèle donc

129 cident de l’Amérique ! Elle révèle donc une forme de l’âme, une pente de l’âme, voire une « orientation » de la psyché occ

130  ! Elle révèle donc une forme de l’âme, une pente de l’âme, voire une « orientation » de la psyché occidentale. Mais, du p

131 me, une pente de l’âme, voire une « orientation » de la psyché occidentale. Mais, du prestige de cet Orient qui n’est pas

132 ion » de la psyché occidentale. Mais, du prestige de cet Orient qui n’est pas celui de l’atlas, l’Orient réel, qui va de l

133 is, du prestige de cet Orient qui n’est pas celui de l’atlas, l’Orient réel, qui va de la Perse au Japon bénéficie très la

134 n’est pas celui de l’atlas, l’Orient réel, qui va de la Perse au Japon bénéficie très largement dans nos esprits. Nous ver

135 ement dans nos esprits. Nous verrons par la suite de ce livre comment l’Occident historique, relevant un défi qui semblait

136 crasant et qu’il se portait à lui-même, acceptant de « s’enfoncer dans la matière », acceptant les passions et les corps à

137 ues pour l’âme et l’esprit, en a tiré le principe d’ une possible grandeur et d’une vérité difficile, qui est l’enjeu de so

138 en a tiré le principe d’une possible grandeur et d’ une vérité difficile, qui est l’enjeu de son aventure. b) Incarnation

139 andeur et d’une vérité difficile, qui est l’enjeu de son aventure. b) Incarnation et Excarnation. — Si nous passons au pla

140 écues, métaphysiques et religieuses, l’opposition de l’Orient et de l’Occident revêt une valeur différente, encore que par

141 iques et religieuses, l’opposition de l’Orient et de l’Occident revêt une valeur différente, encore que par sa forme elle

142 lle semble correspondre au tableau que l’on vient d’ établir. Un voyageur allemand9 demandait à un yogi : « N’avez-vous pas

143 un yogi : « N’avez-vous pas tenté, en Inde aussi, de calculer la quadrature du cercle ? » Le yogi répondit : « Nous cherch

144 te ainsi ce bref dialogue : « Dans ces deux voies de réalisations de soi, l’une allant du cercle au carré, et l’autre inve

145 dialogue : « Dans ces deux voies de réalisations de soi, l’une allant du cercle au carré, et l’autre inversement, s’expri

146 missions différentes, toutes les deux légitimes, de l’Ouest et de l’Est… (car) : le carré — ou mieux, le cube — est parto

147 érentes, toutes les deux légitimes, de l’Ouest et de l’Est… (car) : le carré — ou mieux, le cube — est partout le symbole

148 arré — ou mieux, le cube — est partout le symbole de la matière, et le cercle — ou la sphère — celui de l’esprit. En sorte

149 e la matière, et le cercle — ou la sphère — celui de l’esprit. En sorte que la quadrature du cercle est la transformation

150 que la quadrature du cercle est la transformation de l’esprit en matière, ou encore la matérialisation de l’esprit. Tandis

151 l’esprit en matière, ou encore la matérialisation de l’esprit. Tandis que le passage du carré au cercle figure le retour d

152 ue le passage du carré au cercle figure le retour de la matière à l’esprit. La première opération signifie en termes humai

153 aspects variés. Christ et le Bouddha. — Le Fils de Dieu, incréé, transcendant, entre dans l’immanence et dans l’Histoire

154 et dans l’Histoire, se fait corps matériel, chair d’ enfant pauvre, assume les pires souffrances et finalement en meurt, af

155 ler aux hommes dans leur langage, dans les termes de leur existence, et de les sauver là où ils sont, par la seule foi dan

156 ur langage, dans les termes de leur existence, et de les sauver là où ils sont, par la seule foi dans l’action du pardon,

157 s sont, par la seule foi dans l’action du pardon, de l’amour et de la grâce de Dieu. Le fils d’un roi de ce monde quitte s

158 seule foi dans l’action du pardon, de l’amour et de la grâce de Dieu. Le fils d’un roi de ce monde quitte son palais prin

159 ans l’action du pardon, de l’amour et de la grâce de Dieu. Le fils d’un roi de ce monde quitte son palais princier pour al

160 ardon, de l’amour et de la grâce de Dieu. Le fils d’ un roi de ce monde quitte son palais princier pour aller dans la solit

161 l’amour et de la grâce de Dieu. Le fils d’un roi de ce monde quitte son palais princier pour aller dans la solitude la pl

162 s dénuée, et là découvre que la voie du salut est de refuser le monde, le corps et la souffrance, pour s’élever vers le Ri

163 es ; car il s’agit en réalité dans le premier cas d’ une descente créatrice de Dieu dans l’homme ; dans le second, d’un ess

164 lité dans le premier cas d’une descente créatrice de Dieu dans l’homme ; dans le second, d’un essai de montée de l’homme v

165 créatrice de Dieu dans l’homme ; dans le second, d’ un essai de montée de l’homme vers ce qui nie la créature. Foi et Con

166 de Dieu dans l’homme ; dans le second, d’un essai de montée de l’homme vers ce qui nie la créature. Foi et Connaissance.

167 ns l’homme ; dans le second, d’un essai de montée de l’homme vers ce qui nie la créature. Foi et Connaissance. L’Oriental

168 . L’Oriental, tournant le dos au « monde » décide d’ atteindre le salut par tout son moi, mais par son moi seul, détaché, p

169 oi seul, détaché, progressivement illuminé : voie de la connaissance directe de l’Esprit. L’Occidental, tournant le dos au

170 vement illuminé : voie de la connaissance directe de l’Esprit. L’Occidental, tournant le dos au soleil, en lequel il croit

171 u soleil, en lequel il croit sans le voir, décide d’ imiter Dieu le Créateur en œuvrant dans Sa création : voie de l’obéiss

172 eu le Créateur en œuvrant dans Sa création : voie de l’obéissance active dans l’ombre de la foi. Le danger que court l’Ori

173 éation : voie de l’obéissance active dans l’ombre de la foi. Le danger que court l’Oriental, c’est l’ex-carnation trop fac

174 cile. (On perd en chemin le monde créé, sa raison d’ être, la connaissance et la maîtrise de ses structures.) Le danger, po

175 sa raison d’être, la connaissance et la maîtrise de ses structures.) Le danger, pour l’Occidental, c’est l’incarnation tr

176 i-même dans la matière et ses structures, on perd de vue les exigences et la maîtrise des réalités spirituelles.) Vérifie

177 és spirituelles.) Vérifier la Voie : deux formes d’ expérience. Pour l’Hindou, il s’agit d’arriver à la connaissance du di

178 eux formes d’expérience. Pour l’Hindou, il s’agit d’ arriver à la connaissance du divin non par le « saut de la foi », qui

179 iver à la connaissance du divin non par le « saut de la foi », qui ne procure pas une connaissance suffisante, n’ouvre pas

180 on puisse librement parcourir ; mais par le moyen d’ une ascèse soumettant le corps et le mental à l’âme, donc délivrant ce

181 mental à l’âme, donc délivrant celle-ci des liens de Prakriti (le monde manifesté, qui est illusion) afin qu’elle aille ve

182 hant ce qu’elle fait. « Ô bien-aimé ! si imprégné de la Connaissance, si détaché, si versé dans la Loi, et si maître de lu

183 e, si détaché, si versé dans la Loi, et si maître de lui qu’il soit, un dieu lui-même ne peut sans le yoga atteindre la li

184 -anka.) Pour l’Occidental au contraire, il s’agit de connaître Dieu non pas en écartant le monde manifesté, ou bien en se

185 e manifesté, ou bien en se contentant à son sujet d’ intuitions directes et vagues (sur la nature de l’atome, par exemple)

186 et d’intuitions directes et vagues (sur la nature de l’atome, par exemple) qui ne permettent pas de refaire le chemin à vo

187 re de l’atome, par exemple) qui ne permettent pas de refaire le chemin à volonté par l’intellect et par l’action physique,

188 n efficace, afin de mieux pénétrer la Création et d’ en maîtriser le principe. « D’autant plus nous connaissons les choses

189 trer la Création et d’en maîtriser le principe. «  D’ autant plus nous connaissons les choses particulières, d’autant plus n

190 t plus nous connaissons les choses particulières, d’ autant plus nous connaissons Dieu. » (Spinoza) Ainsi se croisent les d

191 outes, et parfois les méfiances. Car chacun pense de l’autre : est-ce qu’il dit vrai ? trouve-t-il vraiment l’objet de sa

192 -ce qu’il dit vrai ? trouve-t-il vraiment l’objet de sa recherche ? et cet objet lui-même, est-il vraiment réel ? S’identi

193 triser les secrets du cosmos, et peut-être demain de la vie, pense l’Oriental, n’est-ce pas régner sur la Maya ? Et chacun

194 -ce pas régner sur la Maya ? Et chacun sera tenté de tenir pour illusoires les « preuves » dont l’autre se prévaut, puisqu

195 ar l’autre ne sont en vérité que des implications de son option fondamentale. Tautologies que tout cela ! c) Individu et T

196 et l’Orient traditionaliste, il paraît difficile de le mettre en doute10 : tous les auteurs qui traitent de mon sujet s’a

197 mettre en doute10 : tous les auteurs qui traitent de mon sujet s’accordent au moins sur ce point, malgré les divergences d

198 ent au moins sur ce point, malgré les divergences de leur vocabulaire, de leur angle de vision ou de leur jugement de vale

199 oint, malgré les divergences de leur vocabulaire, de leur angle de vision ou de leur jugement de valeur. Pourtant la chose

200 es divergences de leur vocabulaire, de leur angle de vision ou de leur jugement de valeur. Pourtant la chose ne me paraît

201 s de leur vocabulaire, de leur angle de vision ou de leur jugement de valeur. Pourtant la chose ne me paraît pas si simple

202 aire, de leur angle de vision ou de leur jugement de valeur. Pourtant la chose ne me paraît pas si simple, et j’y sens une

203 y sens une complexité dont j’essaierai maintenant d’ indiquer la nature en rapportant l’observation suivante, faite en Inde

204 ant l’observation suivante, faite en Inde. « Trop de monde partout ! Trois domestiques pour ma simple chambre d’hôtel. Sep

205 artout ! Trois domestiques pour ma simple chambre d’ hôtel. Sept ou huit hommes, dont un travaille, dans des boutiques minu

206 e le passage des voitures. Les trottoirs couverts de dormeurs pendant la nuit. Et j’ai vu cinq personnes sur une seule bic

207 tiers anciens : celui qui entoure la grande pièce d’ eau sacrée, rectangulaire. Petites rues sinueuses, bordées de maisons

208 e, rectangulaire. Petites rues sinueuses, bordées de maisons étroites, cages d’oiseaux mal superposées. Regards luisants d

209 ues sinueuses, bordées de maisons étroites, cages d’ oiseaux mal superposées. Regards luisants dans la pénombre. Corps tass

210 s recoins. Silence et dignité profonde. Un groupe d’ hommes attentifs dans une cour écoute le lecteur de poèmes : il s’agit

211 ’hommes attentifs dans une cour écoute le lecteur de poèmes : il s’agit de légendes sacrées. Jamais la vie ne m’a paru plu

212 une cour écoute le lecteur de poèmes : il s’agit de légendes sacrées. Jamais la vie ne m’a paru plus solennelle ni plus s

213 olennelle ni plus simplement adorable. Tintements de cloches, irréguliers, seuls bruits. Mais ces petits garages, aux port

214 petits garages, aux portes grillagées, surmontés de clochetons baroques ? Ce sont des temples, dit mon guide. Devant l’id

215 des temples, dit mon guide. Devant l’idole vêtue de soie précieuse et de colliers de verroterie, une femme seule, un homm

216 guide. Devant l’idole vêtue de soie précieuse et de colliers de verroterie, une femme seule, un homme seul, immobile et d

217 nt l’idole vêtue de soie précieuse et de colliers de verroterie, une femme seule, un homme seul, immobile et debout. Dans

218 prêtre renouvelle les cierges noirs devant le jet d’ eau grêle. Je pense aux holy men, errant dans les campagnes, ou longue

219 uement assis en tailleur dans leurs niches… Point de culte public en Inde, de liturgie, d’église organisée. L’Hindou gréga

220 dans leurs niches… Point de culte public en Inde, de liturgie, d’église organisée. L’Hindou grégaire n’est seul que devant

221 ches… Point de culte public en Inde, de liturgie, d’ église organisée. L’Hindou grégaire n’est seul que devant le divin. L’

222 st seul que devant le divin. L’Occidental, jaloux de sa vie privée, s’assemble dans l’église où l’on chante des chœurs. Me

223 e dans l’église où l’on chante des chœurs. Messes de Mozart, Passions de Bach : je ne sais rien de plus européen, ni de pl

224 ’on chante des chœurs. Messes de Mozart, Passions de Bach : je ne sais rien de plus européen, ni de plus véritablement com

225 e dois citer Rudolf Kassner, essayiste autrichien de génie. Personne n’a mieux traduit l’impression qui submerge l’Europée

226 ’Inde, immergé dans la foule indienne. J’ai parlé de l’Hindou « grégaire » ; terme inexact s’il fait penser à « collectif 

227 il fait penser à « collectif », à je ne sais quoi d’ organisé ou d’encadré. Je cherchais à dire autre chose. Kassner m’offr

228 à « collectif », à je ne sais quoi d’organisé ou d’ encadré. Je cherchais à dire autre chose. Kassner m’offre ce mot : le

229 centre. L’homme magique, le corps magique n’a pas d’ ironie ni de paradoxe, parce qu’il n’a ni contraire ni contradiction. 

230 mme magique, le corps magique n’a pas d’ironie ni de paradoxe, parce qu’il n’a ni contraire ni contradiction. » Dépourvu d

231 ’il n’a ni contraire ni contradiction. » Dépourvu de sensibilité au sens du xviiie siècle, de souci moralisateur ou d’esp

232 épourvu de sensibilité au sens du xviiie siècle, de souci moralisateur ou d’esprit révolutionnaire, ignorant la curiosité

233 sens du xviiie siècle, de souci moralisateur ou d’ esprit révolutionnaire, ignorant la curiosité, il ne peut avoir cure n

234 , ignorant la curiosité, il ne peut avoir cure ni de ses droits distincts, ni de sa chance, ni d’un miroir, donc ni d’une

235 ne peut avoir cure ni de ses droits distincts, ni de sa chance, ni d’un miroir, donc ni d’une personnalité ni d’un visage.

236 e ni de ses droits distincts, ni de sa chance, ni d’ un miroir, donc ni d’une personnalité ni d’un visage. « On peut aller

237 stincts, ni de sa chance, ni d’un miroir, donc ni d’ une personnalité ni d’un visage. « On peut aller jusqu’à prétendre cec

238 ce, ni d’un miroir, donc ni d’une personnalité ni d’ un visage. « On peut aller jusqu’à prétendre ceci : les contradictions

239 rues et des places, l’homme des supercheries, est de son appartenance : il forme le bord, la lisière du monde du saint, co

240 inexprimable, au sein de laquelle nos conceptions de liberté, action, de personne et d’histoire n’ont plus de pointe ni de

241 n de laquelle nos conceptions de liberté, action, de personne et d’histoire n’ont plus de pointe ni de but. Le monde magiq

242 os conceptions de liberté, action, de personne et d’ histoire n’ont plus de pointe ni de but. Le monde magique est en forme

243 rté, action, de personne et d’histoire n’ont plus de pointe ni de but. Le monde magique est en forme de Boule, infinie et

244 de personne et d’histoire n’ont plus de pointe ni de but. Le monde magique est en forme de Boule, infinie et tout-engloban

245 ntradiction, tension ou dissension, et ne cessent de refaire le signe de la Croix. Je disais que la voie de l’individu en

246 ou dissension, et ne cessent de refaire le signe de la Croix. Je disais que la voie de l’individu en Inde, comme celle du

247 faire le signe de la Croix. Je disais que la voie de l’individu en Inde, comme celle du mystique médiéval, ne peut être qu

248 a voie consiste à libérer progressivement une âme de l’illusion d’être distincte. Tout se ramène enfin à cette opposition 

249 e à libérer progressivement une âme de l’illusion d’ être distincte. Tout se ramène enfin à cette opposition : panthéisme o

250  : panthéisme ou Dieu personnel. Car il n’est pas de personne sans un Dieu qui interpelle. Et l’Orient ne connaît rien de

251 Dieu qui interpelle. Et l’Orient ne connaît rien de tel. Soit qu’on pense qu’il n’y a pas de Dieu — selon le système Sank

252 aît rien de tel. Soit qu’on pense qu’il n’y a pas de Dieu — selon le système Sankya et le bouddhisme — soit qu’on pense, s

253 et accompli (That Thwam Asi) — il n’y a pas plus de personne dans la gnose hindouiste que de moi distinct dans le bouddhi

254 pas plus de personne dans la gnose hindouiste que de moi distinct dans le bouddhisme. Qu’il n’y ait point de Dieu, ou que

255 distinct dans le bouddhisme. Qu’il n’y ait point de Dieu, ou que Je sois le Tout, dans les deux cas l’Autre s’évanouit ;

256 ns les deux cas l’Autre s’évanouit ; il n’est pas de dialogue possible, ni d’appel, ni donc de vocation, ni par suite de p

257 ’évanouit ; il n’est pas de dialogue possible, ni d’ appel, ni donc de vocation, ni par suite de personne. De là découle un

258 est pas de dialogue possible, ni d’appel, ni donc de vocation, ni par suite de personne. De là découle un monde de conséqu

259 l, ni donc de vocation, ni par suite de personne. De là découle un monde de conséquences précises, — un monde, littéraleme

260 ni par suite de personne. De là découle un monde de conséquences précises, — un monde, littéralement, comme j’espère le m

261 me j’espère le montrer. Revenons à la déclaration de Ramakrishna que je citais en tête de ce chapitre : « Il n’y a aucune

262 déclaration de Ramakrishna que je citais en tête de ce chapitre : « Il n’y a aucune différence, que vous l’appeliez Toi o

263 i. » Nous y lisons maintenant la vraie définition de l’attitude religieuse orientale. Car il est bien certain que l’identi

264 vacue l’existence personnelle, et que la négation de la personne postule la suppression de la différence entre le Toi divi

265 la négation de la personne postule la suppression de la différence entre le Toi divin et le moi de l’homme. En revanche, l

266 ion de la différence entre le Toi divin et le moi de l’homme. En revanche, l’Occident s’atteste et s’actualise là où la di

267 magique. Yin yang Dans le symbole central de la pensée chinoise (le cercle divisé par un grand S qui représente la

268 si montré que l’élément masculin n’est pas absent de la région du yin tandis que l’élément féminin reste présent dans la r

269 yang. Vérifiée par les sexologues, cette relation d’ inter-présence des opposés n’est pas moins évidente dans les zones res

270 est pas moins évidente dans les zones respectives de l’Orient et de l’Occident. Qui voudrait nier, par exemple, qu’il y ai

271 vidente dans les zones respectives de l’Orient et de l’Occident. Qui voudrait nier, par exemple, qu’il y ait en Occident d

272 udrait nier, par exemple, qu’il y ait en Occident de grands spirituels, ou de grands physiciens en Orient ? Mais personne

273 qu’il y ait en Occident de grands spirituels, ou de grands physiciens en Orient ? Mais personne n’a l’idée de parler de l

274 s physiciens en Orient ? Mais personne n’a l’idée de parler de l’Orient scientifique, ou de l’Occident mystique. Un Sankar

275 ns en Orient ? Mais personne n’a l’idée de parler de l’Orient scientifique, ou de l’Occident mystique. Un Sankara parfois

276 n’a l’idée de parler de l’Orient scientifique, ou de l’Occident mystique. Un Sankara parfois préfigure le thomisme, et il

277 figure le thomisme, et il arrive à Maître Eckhart de s’exprimer comme un bouddhiste. La Bhagavad-Gita fait l’éloge de l’ac

278 omme un bouddhiste. La Bhagavad-Gita fait l’éloge de l’action, le quiétisme celui de la passivité. Les plus grands mystiqu

279 Gita fait l’éloge de l’action, le quiétisme celui de la passivité. Les plus grands mystiques de l’Europe ont pu se voir ac

280 celui de la passivité. Les plus grands mystiques de l’Europe ont pu se voir accuser d’athéisme sur la foi de leurs ultime

281 ands mystiques de l’Europe ont pu se voir accuser d’ athéisme sur la foi de leurs ultimes conclusions (condamnées et souven

282 rope ont pu se voir accuser d’athéisme sur la foi de leurs ultimes conclusions (condamnées et souvent détruites), tandis q

283 et souvent détruites), tandis qu’il ne manque pas d’ écoles hindoues pour affirmer la réalité du Moi, l’action de la Grâce,

284 indoues pour affirmer la réalité du Moi, l’action de la Grâce, voire un Dieu personnel. L’idée de la « voie » ou « loi ind

285 tion de la Grâce, voire un Dieu personnel. L’idée de la « voie » ou « loi individuelle » (Svadharma) semble rappeler l’idé

286 individuelle » (Svadharma) semble rappeler l’idée de vocation personnelle, tandis que nous inventons le collectivisme… Et

287 inventons le collectivisme… Et l’on aura beau jeu de m’opposer des textes apparemment ruineux pour ma thèse des deux Voies

288 ma thèse des deux Voies. À quelle école mystique de l’hindouisme appartient l’auteur de cette phrase : « Écarte les chose

289 cole mystique de l’hindouisme appartient l’auteur de cette phrase : « Écarte les choses, ô Amant, ta voie est fuite » ? De

290 Écarte les choses, ô Amant, ta voie est fuite » ? De quelle yâna bouddhique relève celui qui a dit : « Il faut que tu aime

291 sonne, non-Image, … un Un pur et absolu, dépourvu de toute dualité, dans lequel nous devons nous enfoncer éternellement d’

292 ns lequel nous devons nous enfoncer éternellement d’ un néant à un néant » ? Et à l’inverse, quel est le mystique chrétien

293 é tout attachement » et s’être engagé sur la voie de la connaissance divine, « il faut demeurer dans l’action, gardant un

294 t pourtant il serait faux, plus encore que banal, de répéter ici « tout est dans tout ». La partie blanche contient un cer

295 aut un homme ? Et finalement, ce qu’il importe de voir, ce sont les résultantes majeures des complexes doctrinaux dont

296 œurs, en Occident. Ils se fondent sur la négation de nos croyances communes, et de nos institutions. Ils représentent le p

297 ent sur la négation de nos croyances communes, et de nos institutions. Ils représentent le point d’Orient dans notre sphèr

298 et de nos institutions. Ils représentent le point d’ Orient dans notre sphère. En revanche, l’Orient ne connaît pas d’Églis

299 otre sphère. En revanche, l’Orient ne connaît pas d’ Églises. La Bible et les Vedas n’ont vraiment rien de commun, et l’usa

300 glises. La Bible et les Vedas n’ont vraiment rien de commun, et l’usage qu’on en fait n’est pas du tout le même. La foule

301 qu’on en fait n’est pas du tout le même. La foule de Bénarès n’est pas la foule de Lourdes, même si l’on pense que Dieu re

302 t le même. La foule de Bénarès n’est pas la foule de Lourdes, même si l’on pense que Dieu reconnaîtra les siens, qu’ils se

303 nse à l’esprit des Occidentaux, mais elle n’a pas d’ effet dans leur vie religieuse, moins encore dans leur vie sociale. M

304 qu’on obtient les réponses les plus révélatrices de l’Orient et de l’Occident, et rien n’illustre mieux la divergence rée

305 les réponses les plus révélatrices de l’Orient et de l’Occident, et rien n’illustre mieux la divergence réelle des résulta

306 tre où il décrit le corps magique : Une histoire d’ Hérodote traite d’un grand du royaume qui, en échange de tout ce qu’il

307 e corps magique : Une histoire d’Hérodote traite d’ un grand du royaume qui, en échange de tout ce qu’il avait fait pour X

308 dote traite d’un grand du royaume qui, en échange de tout ce qu’il avait fait pour Xerxès et son armée, pour l’équipement

309 fait pour Xerxès et son armée, pour l’équipement de la campagne contre les Grecs, demande au roi cette faveur : exempter

310 les Grecs, demande au roi cette faveur : exempter de la guerre un de ses cinq fils. Sur quoi Xerxès, irrité, fait mettre à

311 de au roi cette faveur : exempter de la guerre un de ses cinq fils. Sur quoi Xerxès, irrité, fait mettre à mort ce seul fi

312 s et couper le corps en deux moitiés dans le sens de la longueur. Et entre ces deux moitiés sectionnées depuis la tête jus

313 nées depuis la tête jusqu’au sexe, comme le corps d’ un bœuf ou d’un mouton à l’étal d’un boucher, au beau milieu défileron

314 a tête jusqu’au sexe, comme le corps d’un bœuf ou d’ un mouton à l’étal d’un boucher, au beau milieu défileront les armées

315 comme le corps d’un bœuf ou d’un mouton à l’étal d’ un boucher, au beau milieu défileront les armées qui marchent contre l

316 en deux. Ce qui manque ici, c’est l’idée grecque de mesure et, en liaison avec elle, l’idée de liberté. Seule l’idée de l

317 recque de mesure et, en liaison avec elle, l’idée de liberté. Seule l’idée de la mesure de l’homme renferme l’idée de son

318 iaison avec elle, l’idée de liberté. Seule l’idée de la mesure de l’homme renferme l’idée de son individualité. Mon secon

319 lle, l’idée de liberté. Seule l’idée de la mesure de l’homme renferme l’idée de son individualité. Mon second exemple, es

320 le l’idée de la mesure de l’homme renferme l’idée de son individualité. Mon second exemple, est emprunté à un essai de Er

321 ité. Mon second exemple, est emprunté à un essai de Ernst Jünger12 : La relation que soutient l’homme avec le libre arbi

322 er dans ses actes et ses opinions. Ce qu’il pense de la personne, du destin, ce qu’il proclame moral ou immoral, son attit

323 ts et gestes. Ceci vaut surtout du cas qu’il fait de la vie même. Lorsqu’en 1194, le comte de Champagne, dans son voyage d

324 u’en 1194, le comte de Champagne, dans son voyage d’ Arménie, toucha le territoire des Assassins, leur grand-maître lui fit

325 x. Ils arrivèrent devant une place forte flanquée de très hautes tours : deux guetteurs vêtus de blanc étaient en faction

326 nquée de très hautes tours : deux guetteurs vêtus de blanc étaient en faction sur chacune d’elles. Le grand maître voulut

327 urs vêtus de blanc étaient en faction sur chacune d’ elles. Le grand maître voulut faire voir au comte que les siens lui ob

328 sol rocheux. Puis il demanda au comte s’il devait d’ un second signe livrer à la mort toute la garde des créneaux ; l’autre

329 ort toute la garde des créneaux ; l’autre le pria de n’en rien faire, tout en confessant qu’il ne saurait attendre de ses

330 ire, tout en confessant qu’il ne saurait attendre de ses vassaux une telle docilité […]. Et chaque Européen éprouvera ici

331 acrifice, ordre et discipline, sont ici arrachées de leur place ; l’horreur d’un monde étranger lui monte au cœur. Cette h

332 ine, sont ici arrachées de leur place ; l’horreur d’ un monde étranger lui monte au cœur. Cette horreur saisira toujours ce

333 a toujours celui qui respecte en l’homme un noyau de liberté auquel il n’est pas permis de porter atteinte. Ce qui s’y pas

334 me un noyau de liberté auquel il n’est pas permis de porter atteinte. Ce qui s’y passe, et ce qui en provient, ne peut naî

335 trainte. Quand ce noyau est lésé, des tourbillons de néant s’en dégagent. La réaction de nos deux auteurs occidentaux n’e

336 tourbillons de néant s’en dégagent. La réaction de nos deux auteurs occidentaux n’est pas moins significative, pour notr

337 blissent la même liaison entre le peu de cas fait de la vie humaine, et la négation de la personne, ou simplement de l’ind

338 peu de cas fait de la vie humaine, et la négation de la personne, ou simplement de l’individualité. Pour tous les deux, la

339 ine, et la négation de la personne, ou simplement de l’individualité. Pour tous les deux, la liberté de l’homme a pour con

340 e l’individualité. Pour tous les deux, la liberté de l’homme a pour condition la personne. On dira que l’Occident a fait l

341 es à gaz, tandis que l’Orient professe un respect de la Vie qui va jusqu’au refus de détruire la vermine13. Pourtant, l’ad

342 ofesse un respect de la Vie qui va jusqu’au refus de détruire la vermine13. Pourtant, l’adoration de la vie en général n’e

343 s de détruire la vermine13. Pourtant, l’adoration de la vie en général n’entraîne pas le respect de la vie humaine. La Bha

344 on de la vie en général n’entraîne pas le respect de la vie humaine. La Bhagavad-Gita, qui n’a rien de bouddhique, enseign

345 de la vie humaine. La Bhagavad-Gita, qui n’a rien de bouddhique, enseigne que la mort étant le sort commun, tuer n’est vra

346 nches ou qu’on l’épargne, elle ne sera pas sauvée de la nécessité de renaître un millier ou cent-milliers de fois. La méte

347 ’épargne, elle ne sera pas sauvée de la nécessité de renaître un millier ou cent-milliers de fois. La métempsycose évacue

348 nécessité de renaître un millier ou cent-milliers de fois. La métempsycose évacue les sanctions redoutées de la résurrecti

349 s. La métempsycose évacue les sanctions redoutées de la résurrection : le martyr qui revient, portant sa tête sous le bras

350 ient, portant sa tête sous le bras ! Qu’en est-il de notre Occident ? Certes, l’Europe qui croit à l’absolue valeur de la

351 t ? Certes, l’Europe qui croit à l’absolue valeur de la personne dans chaque individu, n’en a pas moins connu les tortures

352 eligieux). Elle a même inventé la guerre totale ! D’ où provient alors cette « horreur » et ce « plus violent des refus » q

353 au contraire, notre foi nous condamne. La cruauté de l’Oriental est fatidique, et par suite sans mesure, sans péché, sans

354 . Il y a des différences. Et mon propos n’est pas de les mettre en relief pour inciter le lecteur à des comparaisons tourn

355 lecteur à des comparaisons tournant à l’avantage de l’un ou de l’autre « camp » : car il n’y a pas de camps, ni de lutte

356 des comparaisons tournant à l’avantage de l’un ou de l’autre « camp » : car il n’y a pas de camps, ni de lutte engagée, ce

357 de l’un ou de l’autre « camp » : car il n’y a pas de camps, ni de lutte engagée, ceci soit dit ici une fois pour toutes. I

358 l’autre « camp » : car il n’y a pas de camps, ni de lutte engagée, ceci soit dit ici une fois pour toutes. Il y a seuleme

359 seulement deux expériences globales qu’il importe de déchiffrer. Mais l’infinie complexité de leurs données nous oblige à

360 importe de déchiffrer. Mais l’infinie complexité de leurs données nous oblige à n’examiner que des prises partielles et t

361 ai choisi mes exemples dans le domaine religieux, de préférence. N’est-ce pas là que l’irritante question de la « supérior

362 férence. N’est-ce pas là que l’irritante question de la « supériorité » de ceci sur cela offre le moins de sens, et de fai

363 là que l’irritante question de la « supériorité » de ceci sur cela offre le moins de sens, et de fait perd sa pointe, puis

364 a « supériorité » de ceci sur cela offre le moins de sens, et de fait perd sa pointe, puisqu’on n’y dispose pas d’éléments

365 ité » de ceci sur cela offre le moins de sens, et de fait perd sa pointe, puisqu’on n’y dispose pas d’éléments mesurables,

366 de fait perd sa pointe, puisqu’on n’y dispose pas d’ éléments mesurables, comme ce serait le cas au plan de l’économie ou d

367 éments mesurables, comme ce serait le cas au plan de l’économie ou de l’état social par exemple ? Je cherchais à cerner le

368 , comme ce serait le cas au plan de l’économie ou de l’état social par exemple ? Je cherchais à cerner les options primord

369 premières ou effets ; qu’elles résument une série de facteurs antécédents, ou qu’au contraire elles initient l’histoire, t

370 nitient l’histoire, tout cela m’importe moins que de les avoir bien vues, et de suivre à partir d’un contraste assez simpl

371 la m’importe moins que de les avoir bien vues, et de suivre à partir d’un contraste assez simple entre deux conceptions de

372 que de les avoir bien vues, et de suivre à partir d’ un contraste assez simple entre deux conceptions de l’homme et de ses

373 ’un contraste assez simple entre deux conceptions de l’homme et de ses fins, celle dont les conséquences ont formé l’Occid

374 assez simple entre deux conceptions de l’homme et de ses fins, celle dont les conséquences ont formé l’Occident. 1. L’O

375 testants européens, qui conçoit Dieu comme le Toi de l’homme ; et l’Asie par ceux des systèmes philosophiques et religieux

376 par ceux des systèmes philosophiques et religieux de l’Inde qui conçoivent que le Tout n’est autre que le Je pleinement ré

377 des auteurs modernes qui se réclament en Occident de la « pensée traditionnelle ». Ces utopistes à rebours projettent dans

378 s projettent dans un passé qui souffre tout, sauf d’ être vérifié, un négatif du présent qu’ils refusent. 3. Celle des Sud

379 hors-castes étant les « résistants » au processus d’ intégration sociale. 4. Il y a peut-être en Inde autant d’idoles que

380 tion sociale. 4. Il y a peut-être en Inde autant d’ idoles que d’habitants, si l’on songe que le nombre des dieux connus d

381 4. Il y a peut-être en Inde autant d’idoles que d’ habitants, si l’on songe que le nombre des dieux connus du panthéon hi

382 chapitre, sauf exception, je demanderai à l’Inde de représenter l’Orient, l’Europe chrétienne figurant l’Occident. Il y a

383 ’Europe chrétienne figurant l’Occident. Il y a là de l’arbitraire, mais comment y échapper sans brouiller le dessin de cet

384 mais comment y échapper sans brouiller le dessin de cet ouvrage ? Voici maintenant quelques raisons qui justifient le pro

385 de a joué en Asie un rôle très comparable à celui de l’Europe en Occident. C’est de l’hindouisme qu’est issu le bouddhisme

386 comparable à celui de l’Europe en Occident. C’est de l’hindouisme qu’est issu le bouddhisme, pour recouvrir ensuite le Tib

387 r ensuite en Amérique du Nord. À la confrontation de l’Europe et de l’Inde qui garde une signification centrale, pourrait

388 érique du Nord. À la confrontation de l’Europe et de l’Inde qui garde une signification centrale, pourrait répondre la con

389 tion centrale, pourrait répondre la confrontation de l’Extrême-Occident et de l’Extrême-Orient, représentés par deux forme

390 épondre la confrontation de l’Extrême-Occident et de l’Extrême-Orient, représentés par deux formes « hérétiques » de la re

391 rient, représentés par deux formes « hérétiques » de la religion initiale : le moralisme américain et le bouddhisme zen, t

392 est vue retardée pendant longtemps par le barrage de l’islam, et n’a pu s’esquisser qu’à partir du xixe siècle ; la secon

393 onde s’opère sous nos yeux, provoquée par le choc de la guerre entre le Japon et les États-Unis. 6. Cf. Henry Corbin, Avi

394 même auteur : Œuvres philosophiques et mystiques de Sohrawardi, tome 1, Téhéran, 1952. On y trouvera le texte des deux ré

395 le texte des deux récits que je mentionne. Celui d’ Avicenne s’intitule : Récit d’Havy ibn Yaqzân. Celui de Sohrawardi : R

396 je mentionne. Celui d’Avicenne s’intitule : Récit d’ Havy ibn Yaqzân. Celui de Sohrawardi : Récit de l’exil occidental de l

397 cenne s’intitule : Récit d’Havy ibn Yaqzân. Celui de Sohrawardi : Récit de l’exil occidental de l’âme. Le premier date du

398 it d’Havy ibn Yaqzân. Celui de Sohrawardi : Récit de l’exil occidental de l’âme. Le premier date du xe siècle, le second

399 Celui de Sohrawardi : Récit de l’exil occidental de l’âme. Le premier date du xe siècle, le second du xiie siècle. 7.

400 r Orient n’est pas l’Inde ou la Chine, mais celui de la mystique « illuminée » de certaines traditions coraniques. 8. Je

401 la Chine, mais celui de la mystique « illuminée » de certaines traditions coraniques. 8. Je pense à Parménide et à Platon

402 intains disciples cathares et « courtois », à Pic de la Mirandole, à Jacob Boehme, aux romantiques allemands philosophes,

403 n avenue l’innovation individuelle, et que le but de la recherche humaine ne peut pas être le progrès ou l’invention, mais

404 du chercheur avec un Objet que l’on situe au-delà de tout changement possible. 11. Rudolf Kassner : Buch der Erinnerung.

405 a rendre inoffensive en la gorgeant du sang impur d’ un domestique hors-caste, qui se couche le premier dans le lit, se fai

406 abondamment piquer par poux et puces, dispensant de la sorte son maître d’avoir à tuer ces insectes. (Anecdote citée par

407 poux et puces, dispensant de la sorte son maître d’ avoir à tuer ces insectes. (Anecdote citée par R. Kassner, op. cit.)

408 ée par R. Kassner, op. cit.) a. Rougemont Denis de , « La voie et l’aventure », La Table ronde, Paris, janvier 1957, p. 9

409 anvier 1957, p. 9-22. b. Il s’agit du chapitre I de L’Aventure occidentale de l’homme , qui sera publié chez Albin Miche

410 l s’agit du chapitre I de L’Aventure occidentale de l’homme , qui sera publié chez Albin Michel en février 1957.

411 De l’unité de culture à l’union politique (mai 1957)c 1. Il suffit de

412 De l’unité de culture à l’union politique (mai 1957)c 1. Il suffit de s’éloigner

413 e à l’union politique (mai 1957)c 1. Il suffit de s’éloigner de l’Europe dans n’importe quelle direction pour sentir la

414 litique (mai 1957)c 1. Il suffit de s’éloigner de l’Europe dans n’importe quelle direction pour sentir la réalité de no

415 n’importe quelle direction pour sentir la réalité de notre unité de culture. Aux USA déjà, en URSS sans hésiter, en Asie a

416 e direction pour sentir la réalité de notre unité de culture. Aux USA déjà, en URSS sans hésiter, en Asie au-delà de tous

417 x USA déjà, en URSS sans hésiter, en Asie au-delà de tous les doutes possibles, les Français et les Grecs, les Anglais et

418 e raison. Tout bien considéré, je n’en trouve pas de meilleure que cette fameuse communauté de culture qui échappe si faci

419 uve pas de meilleure que cette fameuse communauté de culture qui échappe si facilement à nos définitions, mais si difficil

420 , mais si difficilement au regard des Autres. Vue de dehors, l’Europe est évidente. L’histoire que nous vivons la définit

421 sion qui ne pardonne pas : celle du ressentiment, de l’envie, voire de la haine, plus souvent je le crains, que celle de l

422 ne pas : celle du ressentiment, de l’envie, voire de la haine, plus souvent je le crains, que celle de l’amour. Les Afro-A

423 de la haine, plus souvent je le crains, que celle de l’amour. Les Afro-Asiatiques et les Arabes savent trop bien ce qu’ell

424 commune. On me dira qu’il est bien « dangereux » d’ écrire cela. Je réponds qu’il est plus dangereux de vouloir ignorer Ba

425 ’écrire cela. Je réponds qu’il est plus dangereux de vouloir ignorer Bandung. 2. J’ai cru remarquer que ceux des Européens

426 que ceux des Européens qui insistent avec le plus d’ emphase sur la nature universelle de nos problèmes, et partant de là,

427 avec le plus d’emphase sur la nature universelle de nos problèmes, et partant de là, dénient toute personnalité économiqu

428 a nature universelle de nos problèmes, et partant de là, dénient toute personnalité économique, sociale ou scientifique à

429 siècles. Il n’y aurait donc, à les en croire, pas de différences bien notables (dans le domaine de leur spécialité) entre

430 pas de différences bien notables (dans le domaine de leur spécialité) entre l’Europe et le Congo ou le Cachemire, tandis q

431 e Congo ou le Cachemire, tandis qu’il y en aurait d’ insurmontables entre les Britanniques et les Français, entre ceux-ci e

432 ceux-ci et les Allemands, etc. Un même mouvement de ces esprits les porte à effacer les différences continentales, mais à

433 trice dans l’histoire, qui est l’union nécessaire de l’Europe. (Je ne parle pas ici de politique, mais seulement de formes

434 nion nécessaire de l’Europe. (Je ne parle pas ici de politique, mais seulement de formes d’esprit et de mécanismes d’évasi

435 (Je ne parle pas ici de politique, mais seulement de formes d’esprit et de mécanismes d’évasion intellectuelle.) 3. L’arg

436 le pas ici de politique, mais seulement de formes d’ esprit et de mécanismes d’évasion intellectuelle.) 3. L’argument des

437 e politique, mais seulement de formes d’esprit et de mécanismes d’évasion intellectuelle.) 3. L’argument des contrastes s

438 ais seulement de formes d’esprit et de mécanismes d’ évasion intellectuelle.) 3. L’argument des contrastes séculaires, inv

439 s séculaires, invoqué sans fatigue contre l’union de l’Europe, n’est qu’une étourderie aux yeux de l’historien et de l’obs

440 ’est qu’une étourderie aux yeux de l’historien et de l’observateur des cultures, mais c’est un dernier refuge pour les nat

441 gument, précisément, n’est pas soutenable au plan de la nation. Comment le serait-il donc au plan de l’Europe entière ? On

442 n de la nation. Comment le serait-il donc au plan de l’Europe entière ? On nous dit que les contrastes entre Allemands et

443 ontinentaux, Suédois et Grecs (pour ne parler que de géographie, d’histoire récente et de modes de vie, mais il y a les re

444 édois et Grecs (pour ne parler que de géographie, d’ histoire récente et de modes de vie, mais il y a les religions, l’écon

445 e parler que de géographie, d’histoire récente et de modes de vie, mais il y a les religions, l’économie, les formes polit

446 ent toute union politique, et font douter d’abord de l’unité de culture qui donnerait une assise à cette union. Mais : 1°

447 nion politique, et font douter d’abord de l’unité de culture qui donnerait une assise à cette union. Mais : 1° les différe

448 e assise à cette union. Mais : 1° les différences de langue, de religion, de « race », de coutumes et de niveau de vie ent

449 cette union. Mais : 1° les différences de langue, de religion, de « race », de coutumes et de niveau de vie entre Bretons

450 Mais : 1° les différences de langue, de religion, de « race », de coutumes et de niveau de vie entre Bretons et Languedoci

451 différences de langue, de religion, de « race », de coutumes et de niveau de vie entre Bretons et Languedociens, Frisons

452 langue, de religion, de « race », de coutumes et de niveau de vie entre Bretons et Languedociens, Frisons et Bavarois, Pi

453 rois, Piémontais et Siciliens, pâtres catholiques de l’Appenzell et banquiers protestants de Genève, n’ont pas empêché l’u

454 tholiques de l’Appenzell et banquiers protestants de Genève, n’ont pas empêché l’unification nationale de la France, de l’

455 Genève, n’ont pas empêché l’unification nationale de la France, de l’Allemagne, de l’Italie et des cantons suisses — pas p

456 pas empêché l’unification nationale de la France, de l’Allemagne, de l’Italie et des cantons suisses — pas plus que cette

457 ification nationale de la France, de l’Allemagne, de l’Italie et des cantons suisses — pas plus que cette unification, d’a

458 supprimé ces différences. (Encore que les écoles d’ État s’y soient efforcées depuis un siècle : or personne n’a jamais at

459 s un siècle : or personne n’a jamais attendu rien de pareil d’un État fédéral européen.) Ainsi l’obstacle qu’on pose à l’u

460 e : or personne n’a jamais attendu rien de pareil d’ un État fédéral européen.) Ainsi l’obstacle qu’on pose à l’union de l’

461 européen.) Ainsi l’obstacle qu’on pose à l’union de l’Europe, et les dangers qu’on redoute de cette union sont également

462 l’union de l’Europe, et les dangers qu’on redoute de cette union sont également imaginaires, comme le prouve l’expérience

463 alement imaginaires, comme le prouve l’expérience de la nation elle-même, au nom de laquelle on refuse l’union. 2° Si pitt

464 , et malgré tout ce qu’il serait tellement facile de dire, la même foi dominant l’arrière-plan millénaire sur lequel se dé

465 -plan millénaire sur lequel se détache la dignité de l’homme. 4. Quantité de publicistes découvrent — et cela dure depuis

466 uel se détache la dignité de l’homme. 4. Quantité de publicistes découvrent — et cela dure depuis des années — que l’Europ

467 et historique, car ses frontières n’ont pas cessé de se déplacer au cours des temps. Elle ne serait donc définissable que

468 re, qui ne l’est guère. Conclusion : il n’y a pas d’ Europe, et si l’on en veut une, il faudra l’inventer. Ce qui ne facili

469 udra l’inventer. Ce qui ne facilite guère l’œuvre d’ union… Ainsi jouent les sophistes, et le lecteur s’inquiète : il sent

470 t avec le drame qui vient. Au vrai, tout cela n’a de sens que pour les professeurs. Ceux-ci doivent circonscrire exactemen

471 . Ceux-ci doivent circonscrire exactement l’objet d’ un éventuel enseignement ; s’ils n’arrivent pas à le définir, ils le r

472 ues devient chez les écrivains libres une méthode d’ obstruction, consciente ou non. Le « préalable » d’une définition hist

473 ’obstruction, consciente ou non. Le « préalable » d’ une définition historique et géographique, occasion de discours permet

474 e définition historique et géographique, occasion de discours permettant de surseoir au débat sur l’avenir immédiat de l’E

475 et géographique, occasion de discours permettant de surseoir au débat sur l’avenir immédiat de l’Europe, fournit à nos in

476 ettant de surseoir au débat sur l’avenir immédiat de l’Europe, fournit à nos intellectuels l’équivalent du procédé parleme

477 valent du procédé parlementaire connu sous le nom de filibuster. Je n’en citerai qu’un exemple qui me tombe sous les yeux

478 us les yeux pendant que j’écris14. Bien qu’auteur d’ une Histoire de l’Europe, M. Berl estime aujourd’hui que l’Europe n’es

479 dant que j’écris14. Bien qu’auteur d’une Histoire de l’Europe, M. Berl estime aujourd’hui que l’Europe n’est pas une entit

480 oulu que l’Empire romain fût une première ébauche de l’Europe. Mais il excluait Francfort, Copenhague, Amsterdam. Spengler

481 es Balkans, toute l’Europe de l’Est. La naissance de l’Europe ne nous est pas mieux connue que ses limites. L’Europe ne s

482 du tout, parce qu’on ne s’accorde pas sur sa date de naissance ? Mais le même raisonnement conduirait à douter de l’existe

483 e ? Mais le même raisonnement conduirait à douter de l’existence de la Suisse, par exemple. Les historiens font remonter s

484 e raisonnement conduirait à douter de l’existence de la Suisse, par exemple. Les historiens font remonter sa naissance au

485 te alliance excluait à peu près les neuf dixièmes de la Suisse actuelle. Tout comme la France d’avant Philippe Auguste exc

486 ièmes de la Suisse actuelle. Tout comme la France d’ avant Philippe Auguste excluait la Bretagne, l’Alsace, le Languedoc, l

487 re correspondre au réel, car il s’agit maintenant de sauver ce réel, et non pas d’ergoter sur sa définition. En privant le

488 l s’agit maintenant de sauver ce réel, et non pas d’ ergoter sur sa définition. En privant le concept Europe de son passé,

489 r sur sa définition. En privant le concept Europe de son passé, on ne tend à rien de moins qu’à miner son avenir, et l’on

490 le concept Europe de son passé, on ne tend à rien de moins qu’à miner son avenir, et l’on déprime l’élan vers l’union néce

491 ontrer ses fondements légitimes dans l’ancienneté de sa conscience commune. 5. Au sujet de la naissance de l’Europe, vingt

492 a conscience commune. 5. Au sujet de la naissance de l’Europe, vingt théories s’affrontent inutilement je le crains, car i

493 affrontent inutilement je le crains, car il en va d’ une civilisation, d’une culture et même d’une nation, à peu près comme

494 nt je le crains, car il en va d’une civilisation, d’ une culture et même d’une nation, à peu près comme d’une œuvre d’art :

495 l en va d’une civilisation, d’une culture et même d’ une nation, à peu près comme d’une œuvre d’art : est-elle née de ce jo

496 ne culture et même d’une nation, à peu près comme d’ une œuvre d’art : est-elle née de ce jour où l’on a fait son plan, ou

497 à peu près comme d’une œuvre d’art : est-elle née de ce jour où l’on a fait son plan, ou reçu sa commande, ou senti son cl

498 an, ou reçu sa commande, ou senti son climat ? Ou de cette heure où fut écrite sa première page, posée sa première touche,

499 mière touche, noté son premier accord ? Ou plutôt de l’instant d’une intuition précise, plusieurs années auparavant ? Ou n

500 noté son premier accord ? Ou plutôt de l’instant d’ une intuition précise, plusieurs années auparavant ? Ou n’aurait-elle

501 chemin du travail entrepris, qui a soudain changé de sens et trouvé son vrai sens ? Il importe assez peu, l’œuvre est là.

502 ssez peu, l’œuvre est là. Depuis quand parle-t-on de l’Europe ? S’agirait-il d’une invention de Victor Hugo, voire des féd

503 epuis quand parle-t-on de l’Europe ? S’agirait-il d’ une invention de Victor Hugo, voire des fédéralistes de notre temps, c

504 e-t-on de l’Europe ? S’agirait-il d’une invention de Victor Hugo, voire des fédéralistes de notre temps, comme certains l’

505 invention de Victor Hugo, voire des fédéralistes de notre temps, comme certains l’ont finement supposé ? Une cantate peu

506 s l’ont finement supposé ? Une cantate peu connue de Beethoven, composée pour le congrès de Vienne, s’intitulait pourtant

507 peu connue de Beethoven, composée pour le congrès de Vienne, s’intitulait pourtant L’Europe est née ! Montesquieu, et Leib

508 et Leibniz avant lui, mettent l’Europe au-dessus de leur « nation ». Mais l’adjectif européen est d’un usage bien plus an

509 de leur « nation ». Mais l’adjectif européen est d’ un usage bien plus ancien : il paraît déjà au lendemain de la bataille

510 ge bien plus ancien : il paraît déjà au lendemain de la bataille de Poitiers (732) dans l’œuvre d’un clerc espagnol contin

511 cien : il paraît déjà au lendemain de la bataille de Poitiers (732) dans l’œuvre d’un clerc espagnol continuant la chroniq

512 ain de la bataille de Poitiers (732) dans l’œuvre d’ un clerc espagnol continuant la chronique d’Isidore de Beja. L’auteur

513 œuvre d’un clerc espagnol continuant la chronique d’ Isidore de Beja. L’auteur y qualifie d’Europenses les vainqueurs de ce

514 chronique d’Isidore de Beja. L’auteur y qualifie d’ Europenses les vainqueurs de ces grandes journées, et « répète avec co

515 . L’auteur y qualifie d’Europenses les vainqueurs de ces grandes journées, et « répète avec complaisance ce nom qui indiqu

516 pète avec complaisance ce nom qui indique l’éveil d’ un sentiment nouveau15 ». Cependant, la prise de conscience d’une enti

517 nt nouveau15 ». Cependant, la prise de conscience d’ une entité européenne ne peut être attestée à l’aide de documents qu’à

518 s, écrit M. Denys Hay, « constituaient des cartes de l’Europe en tant que telle, et (ce qui est encore plus important) ils

519 encore plus important) ils étaient le témoignage de l’intérêt porté au caractère culturel et politique des terres dont il

520 anistes commencent à distinguer les deux concepts de christianitas et d’Europa. C’est enfin dans les œuvres d’un homme qui

521 distinguer les deux concepts de christianitas et d’ Europa. C’est enfin dans les œuvres d’un homme qui fut d’abord grand h

522 tianitas et d’Europa. C’est enfin dans les œuvres d’ un homme qui fut d’abord grand humaniste sous le nom d’Æneas Silvius P

523 homme qui fut d’abord grand humaniste sous le nom d’ Æneas Silvius Piccolomini, puis grand pape sous le nom de Pie II, que

524 Silvius Piccolomini, puis grand pape sous le nom de Pie II, que l’Europe se voit définie, face à l’islam de Mahomet II, c

525 II, que l’Europe se voit définie, face à l’islam de Mahomet II, comme l’héritière chrétienne de Rome et de la Grèce. Chac

526 islam de Mahomet II, comme l’héritière chrétienne de Rome et de la Grèce. Chacun sait la fortune que devait connaître cett

527 homet II, comme l’héritière chrétienne de Rome et de la Grèce. Chacun sait la fortune que devait connaître cette définitio

528 la fortune que devait connaître cette définition de l’Europe par ses trois sources principales, reprise naguère avec écla

529 poétique des banquets et des éditoriaux du temps de guerre. Passons sur ces excès, voyons la thèse elle-même, et le jugem

530 ’elle implique sur la réalité. On a souvent tenté de nier l’existence d’une vraie culture européenne, en arguant non seule

531 a réalité. On a souvent tenté de nier l’existence d’ une vraie culture européenne, en arguant non seulement de ce qu’une pa

532 raie culture européenne, en arguant non seulement de ce qu’une pareille culture est difficile à définir, mais de la comple

533 ne pareille culture est difficile à définir, mais de la complexité de ses origines et de l’importance des influences extra

534 re est difficile à définir, mais de la complexité de ses origines et de l’importance des influences extracontinentales qu’

535 définir, mais de la complexité de ses origines et de l’importance des influences extracontinentales qu’elle a subies. Ces

536 ments prennent toute leur force contre le concept de cultures nationales, apparu au xixe siècle. Qu’as-tu que tu n’aies r

537 ’Europe aux nations. Elles seraient bien en peine de répondre. Spécifiquement européenne ou non, la culture des Européens

538 encore qu’ils définissent la soi-disant autonomie de leur culture. En vérité, sur ce plan-là, nulle réalité créatrice ne s

539 es limites accidentelles et souvent fort récentes d’ un de nos États. Mais sur les autres plans, qui ne voit du premier cou

540 mites accidentelles et souvent fort récentes d’un de nos États. Mais sur les autres plans, qui ne voit du premier coup que

541 premier coup que les réalités décisives ont cessé d’ être nationales au xxe siècle ? Notre économie, nos techniques, se dé

542 en dépit des nations, qui ont au plus le pouvoir de les freiner en paralysant les échanges. Quant au plan politique on a

543 s que nos ci-devant grandes puissances refusaient de sacrifier sur l’autel de l’Europe. Que l’idée nationale soit forte en

544 es puissances refusaient de sacrifier sur l’autel de l’Europe. Que l’idée nationale soit forte encore, il serait absurde d

545 ée nationale soit forte encore, il serait absurde de le contester : elle ne peut rien sauver, mais elle pourrait tout perd

546 ver, mais elle pourrait tout perdre. Gardons-nous de la sous-estimer ! Mais gardons-nous aussi de confondre plus longtemps

547 nous de la sous-estimer ! Mais gardons-nous aussi de confondre plus longtemps ce mélange de lyrisme et d’émouvants souveni

548 nous aussi de confondre plus longtemps ce mélange de lyrisme et d’émouvants souvenirs, d’orgueil injustifié et de vrai pat

549 confondre plus longtemps ce mélange de lyrisme et d’ émouvants souvenirs, d’orgueil injustifié et de vrai patriotisme, avec

550 s ce mélange de lyrisme et d’émouvants souvenirs, d’ orgueil injustifié et de vrai patriotisme, avec le réalisme politique.

551 et d’émouvants souvenirs, d’orgueil injustifié et de vrai patriotisme, avec le réalisme politique. La patrie n’est pas la

552 pirituel, culturel et politique, dans les limites d’ un même cordon douanier et du pouvoir d’une même police, on obtient fi

553 s limites d’un même cordon douanier et du pouvoir d’ une même police, on obtient finalement ce qu’on mérite, j’entends l’Ét

554 itaire. Il reste, hélas ! qu’aux yeux de beaucoup d’ intellectuels, la nation cache l’Europe comme l’arbre la forêt. Je dir

555 ai plus : l’Européen demeuré nationaliste au fond de son cœur, me paraît comparable à un arbre qui s’obstinerait à mettre

556 s’obstinerait à mettre en doute l’existence même de la forêt. (Sait-on bien où elle s’arrête ? Sait-on quand elle est née

557 ’arrête ? Sait-on quand elle est née ? Et combien d’ arbres il faut pour former une forêt ? J’ai mes racines, voilà qui est

558 st vrai, le reste est mythe…) N’est-il pas temps de faire voir à ces nationalistes qu’une Europe fédérée serait seule en

559 stes qu’une Europe fédérée serait seule en mesure de sauver le concret de nos vies nationales, et n’en sacrifierait que l’

560 dérée serait seule en mesure de sauver le concret de nos vies nationales, et n’en sacrifierait que l’illusoire, j’entends

561 que l’illusoire, j’entends ce qui est déjà perdu de toute façon et qui ne pourrait être récupéré — pour autant que ce soi

562 : la souveraineté peut-être (si elle est le droit d’ un groupe à faire ou à ne pas faire la guerre quand il l’entend) ; la

563 vivre, et non pas simplement le résultat matériel d’ un effort humainement abrutissant) ; l’indépendance assurément (si ell

564 l’indépendance assurément (si elle est le pouvoir de ne pas subir la loi d’une puissance étrangère)… Tout cela suppose le

565 nt (si elle est le pouvoir de ne pas subir la loi d’ une puissance étrangère)… Tout cela suppose le développement ou le rév

566 … Tout cela suppose le développement ou le réveil d’ un sentiment trop faible encore dans tous nos peuples : celui d’appart

567 trop faible encore dans tous nos peuples : celui d’ appartenir à un ensemble humain plus vaste, plus ancien, et plus fort

568 ncien, et plus fort désormais que ne l’est aucune de nos nations. Or cet ensemble humain n’est encore, aujourd’hui, qu’un

569 mble humain n’est encore, aujourd’hui, qu’un fait de culture au sens large. Prendre conscience de notre appartenance à cet

570 fait de culture au sens large. Prendre conscience de notre appartenance à cette communauté de culture, c’est la condition

571 nscience de notre appartenance à cette communauté de culture, c’est la condition nécessaire de l’union supranationale, et

572 munauté de culture, c’est la condition nécessaire de l’union supranationale, et de l’allégeance qu’elle requiert. Mais la

573 ondition nécessaire de l’union supranationale, et de l’allégeance qu’elle requiert. Mais la condition suffisante sera donn

574 qui n’est autre, à mon sens, que celui des moyens d’ ordonner l’existence d’un groupe humain. Or un tel groupe ne saurait ê

575 sens, que celui des moyens d’ordonner l’existence d’ un groupe humain. Or un tel groupe ne saurait être défini par son cadr

576 i par son cadre institutionnel, mais par un style de vie, un système de valeurs, un certain sens donné au fait de vivre, à

577 titutionnel, mais par un style de vie, un système de valeurs, un certain sens donné au fait de vivre, à l’amour, à la mort

578 système de valeurs, un certain sens donné au fait de vivre, à l’amour, à la mort, aux relations entre humains, à la matièr

579 au rapport entre forme et contenu. Une politique d’ union ne devient possible que s’il y a tout d’abord communauté de cult

580 ent possible que s’il y a tout d’abord communauté de culture entre les hommes qu’elle envisage d’unir. Cette politique, en

581 auté de culture entre les hommes qu’elle envisage d’ unir. Cette politique, ensuite, ne sera valable que si elle exprime, t

582 exprime, traduit et tend à préserver ce qu’il y a de créateur dans cette communauté. J’en conclus que la forme politique q

583 , nos diversités constituent le ressort principal de notre créativité, dans la mesure toutefois où elles ne s’isolent pas

584 que, toujours risqué, cet art empirique et subtil de louvoyer entre le Charybde du particularisme étroit et le Scylla du c

585 e Scylla du centralisme niveleur, c’est le secret de la santé européenne. Ici, culture et politique se joignent dans la se

586 itique se joignent dans la seule et même exigence d’ une union fédérale de nos peuples. 14. Emmanuel Berl, « Hors du réel

587 ns la seule et même exigence d’une union fédérale de nos peuples. 14. Emmanuel Berl, « Hors du réel », La Table ronde, j

588 ors du réel », La Table ronde, janvier 1957. 15. D’ une lettre que m’écrit à ce sujet le comte Jean de Pange. La référence

589 enys Hay, dans Diogène, n° 17, 1957 (article tiré d’ une communication au 10e Congrès international des sciences historique

590 ques, Rome, septembre 1955). c. Rougemont Denis de , « De l’unité de culture à l’union politique », La Table ronde, Paris

591 Rome, septembre 1955). c. Rougemont Denis de, «  De l’unité de culture à l’union politique », La Table ronde, Paris, mai

592 mbre 1955). c. Rougemont Denis de, « De l’unité de culture à l’union politique », La Table ronde, Paris, mai 1957, p. 10

593 , le Droit, et Romain Rolland, que pour triompher d’ un épouvantail auquel il accroche mon nom. Je n’attaquais rien de ce q

594 l auquel il accroche mon nom. Je n’attaquais rien de ce qu’il défend avec tant de passion et de juste colère. Je suis très

595 s rien de ce qu’il défend avec tant de passion et de juste colère. Je suis très loin de mépriser l’Histoire ; je dis seule

596 acte où M. Berl lui-même peut écrire une Histoire de l’Europe. Je suis très loin de qualifier de sophistes ceux qui pensen

597 toire de l’Europe. Je suis très loin de qualifier de sophistes ceux qui pensent néanmoins que l’Europe reste à « faire » ;

598 x — si d’abord on nie qu’elle existe comme entité de culture et Aventure unique. Je ne pense pas avoir recommandé l’impost

599 s affamés » ? Je demandais simplement qu’on cesse de mettre en doute l’existence même de cette Europe qu’il faut sauver.

600 t qu’on cesse de mettre en doute l’existence même de cette Europe qu’il faut sauver. d. Rougemont Denis de, « [Lettre e

601 e Europe qu’il faut sauver. d. Rougemont Denis de , « [Lettre en réponse à Emmanuel Berl] », La Table ronde, Paris, mai

602 ris, mai 1957. e. Introduit par la note suivante de l’éditeur : « En réponse au post-scriptum d’Emmanuel Berl, que nous l

603 ante de l’éditeur : « En réponse au post-scriptum d’ Emmanuel Berl, que nous lui avons fait parvenir avant publication, Den

604 me numéro où paraissait l’article de Rougemont, «  De l’unité de culture à l’union politique », Emmanuel Berl, pris à part

605 ù paraissait l’article de Rougemont, « De l’unité de culture à l’union politique », Emmanuel Berl, pris à part dans le tex

606 r » par ce post-scriptum : « Je sentais l’urgence de rappeler que l’Europe ne peut et ne doit pas être regardée comme une

607 une Suisse, quoiqu’on puisse disputer sur la date de sa naissance. En effet. Mais on a généralement su où était, ce que fa

608 e. Mais l’Europe ? était-elle pendant la bataille de Stalingrad avec Staline ou avec Hitler ? Et, auparavant, avec ceux qu

609 g, avec Napoléon ou contre lui ? Il ne suffit pas d’ ignorer quand une personne est née pour avoir la certitude qu’elle vit

610 er, et même sans accepter une Europe qui naîtrait de l’imposture et vivrait de la tyrannie. Je crierai : vive l’Europe ! s

611 une Europe qui naîtrait de l’imposture et vivrait de la tyrannie. Je crierai : vive l’Europe ! si elle rétablit la concord

612 avait une Europe de Romain Rolland. Il y en a une de Pierre Dominique, qui espère en elle pour répondre du tac au tac à Kh

613 ires européennes qu’ils oublient les motifs mêmes de leur engagement. Tels les philanthropes de Octave Mirbeau qui, pour d

614 mêmes de leur engagement. Tels les philanthropes de Octave Mirbeau qui, pour défendre leur “œuvre” accablaient et exploit

615 stice, ni contre la paix. Libre à M. de Rougemont de hausser les épaules et de répondre : “Tout cela n’a de sens que pour

616 Libre à M. de Rougemont de hausser les épaules et de répondre : “Tout cela n’a de sens que pour les professeurs.” Le menso

617 usser les épaules et de répondre : “Tout cela n’a de sens que pour les professeurs.” Le mensonge n’est pas mon fort, fût-c

618 fin du pessimisme (juin 1957)f Le fameux sens de l’histoire, argument numéro 1 de la séduction progressiste, paraissai

619 Le fameux sens de l’histoire, argument numéro 1 de la séduction progressiste, paraissait avoir mis une fois pour toutes

620 ilière ; voilà qu’il se détourne horrifié et vire de bord, aux accents de la Marseillaise, en direction de 1848. (André F

621 se détourne horrifié et vire de bord, aux accents de la Marseillaise, en direction de 1848. (André Fontaine, Le Monde, au

622 ord, aux accents de la Marseillaise, en direction de 1848. (André Fontaine, Le Monde, au lendemain de la révolution hongr

623 de 1848. (André Fontaine, Le Monde, au lendemain de la révolution hongroise.) Cinquante ans d’analyses pessimistes de not

624 demain de la révolution hongroise.) Cinquante ans d’ analyses pessimistes de notre société et de son destin ont culminé dan

625 hongroise.) Cinquante ans d’analyses pessimistes de notre société et de son destin ont culminé dans l’utopie de George Or

626 te ans d’analyses pessimistes de notre société et de son destin ont culminé dans l’utopie de George Orwell 1984. Il y eut

627 ociété et de son destin ont culminé dans l’utopie de George Orwell 1984. Il y eut d’abord ce titre subversif à l’aube du s

628 if à l’aube du siècle : Les Illusions du progrès, de Georges Sorel. Puis on se mit à citer Bergson, réclamant un supplémen

629 n se mit à citer Bergson, réclamant un supplément d’ âme pour ce corps subitement agrandi, le monde technique. Deux guerres

630 ique. Deux guerres mondiales, ruinant le prestige de l’Europe et sa puissance, trois révolutions portant au pouvoir des ty

631 e ce fut assez pour justifier le scepticisme amer de nos élites à l’égard de l’idée de progrès. Croire « encore » au progr

632 cepticisme amer de nos élites à l’égard de l’idée de progrès. Croire « encore » au progrès disqualifiait son homme, et l’i

633 rès disqualifiait son homme, et l’idée s’empressa d’ émigrer aux États-Unis et en URSS. Les penseurs de l’Europe, à peu prè

634 d’émigrer aux États-Unis et en URSS. Les penseurs de l’Europe, à peu près unanimes, entrèrent en dissidence et se mirent à

635 tivement ou cyniquement, au nom de la réaction ou de la révolution, ils ne nous parlaient plus que d’une Crise de l’Esprit

636 de la révolution, ils ne nous parlaient plus que d’ une Crise de l’Esprit, d’une Décadence de l’Occident, d’une Trahison d

637 ution, ils ne nous parlaient plus que d’une Crise de l’Esprit, d’une Décadence de l’Occident, d’une Trahison des Clercs, d

638 nous parlaient plus que d’une Crise de l’Esprit, d’ une Décadence de l’Occident, d’une Trahison des Clercs, d’un Monde san

639 plus que d’une Crise de l’Esprit, d’une Décadence de l’Occident, d’une Trahison des Clercs, d’un Monde sans âme, de la Fra

640 Crise de l’Esprit, d’une Décadence de l’Occident, d’ une Trahison des Clercs, d’un Monde sans âme, de la France contre les

641 cadence de l’Occident, d’une Trahison des Clercs, d’ un Monde sans âme, de la France contre les robots, de la machine contr

642 , d’une Trahison des Clercs, d’un Monde sans âme, de la France contre les robots, de la machine contre l’homme, de l’homme

643 n Monde sans âme, de la France contre les robots, de la machine contre l’homme, de l’homme contre l’humain, de la fin des

644 contre les robots, de la machine contre l’homme, de l’homme contre l’humain, de la fin des illusions, de la fin de tout.

645 chine contre l’homme, de l’homme contre l’humain, de la fin des illusions, de la fin de tout. L’Anti-moderne de Maritain e

646 l’homme contre l’humain, de la fin des illusions, de la fin de tout. L’Anti-moderne de Maritain et Les Temps modernes de C

647 ntre l’humain, de la fin des illusions, de la fin de tout. L’Anti-moderne de Maritain et Les Temps modernes de Chaplin, la

648 L’Anti-moderne de Maritain et Les Temps modernes de Chaplin, la métaphysique pure et les clichés primaires, les dénonciat

649 ne sans précédent, un asservissement sans recours de l’homme aux puissances anonymes, la machine, la police et l’État. Orw

650 dre à l’Europe de l’Ouest, à supprimer le facteur de résistance humaine, à désespérer d’une manière exemplaire — convainqu

651 er le facteur de résistance humaine, à désespérer d’ une manière exemplaire — convainquant les lecteurs qu’il voulait révol

652 prême. Et Kafka n’était plus que le Jean-Baptiste d’ une sorte d’Évangile à rebours, « mauvaise nouvelle » d’une démission

653 fka n’était plus que le Jean-Baptiste d’une sorte d’ Évangile à rebours, « mauvaise nouvelle » d’une démission fatale. Les

654 sorte d’Évangile à rebours, « mauvaise nouvelle » d’ une démission fatale. Les émeutes de Poznań, la résistance de Varsovie

655 se nouvelle » d’une démission fatale. Les émeutes de Poznań, la résistance de Varsovie et la révolution de Budapest ont re

656 sion fatale. Les émeutes de Poznań, la résistance de Varsovie et la révolution de Budapest ont renversé le cours de cette

657 oznań, la résistance de Varsovie et la révolution de Budapest ont renversé le cours de cette immense dérive et restauré d’

658 t la révolution de Budapest ont renversé le cours de cette immense dérive et restauré d’un coup l’espoir. La nature humain

659 ersé le cours de cette immense dérive et restauré d’ un coup l’espoir. La nature humaine, niée par Sartre, triomphait dans

660 qui n’avait appris que le mensonge. Ses pouvoirs de résistance à Big Brother, niés par Orwell, ont éclaté dans les rues d

661 rother, niés par Orwell, ont éclaté dans les rues de Budapest. Sa faculté de revendiquer et d’imposer un sens positif à la

662 ont éclaté dans les rues de Budapest. Sa faculté de revendiquer et d’imposer un sens positif à la vie, niée par Kafka, s’

663 es rues de Budapest. Sa faculté de revendiquer et d’ imposer un sens positif à la vie, niée par Kafka, s’est attestée dans

664 des ouvriers unis aux étudiants. L’intelligentsia de l’Ouest voyait venir Quatre-vingt-quatre. Et soudain, celle de l’Est

665 yait venir Quatre-vingt-quatre. Et soudain, celle de l’Est lui répond Quarante-huit. C’est quatre-vingt-quatre inversé. Ja

666 e inversé. Jamais chiffres ne furent plus chargés de symboles. Essayons de les interpréter. Tout ce qui compte en Europe,

667 fres ne furent plus chargés de symboles. Essayons de les interpréter. Tout ce qui compte en Europe, depuis un demi-siècle

668 à la fois, sous peine de ne plus compter. Inutile de citer des noms : ce seraient ceux, justement, que tout le monde conna

669 s. On pourrait m’objecter Valéry, hédoniste épris de la règle et persuadé de la valeur des conventions ; mais n’est-ce pas

670 r Valéry, hédoniste épris de la règle et persuadé de la valeur des conventions ; mais n’est-ce pas lui qui ouvrit, en 1919

671 ère » ? On pourrait m’objecter Claudel, optimiste de style baroque et fonctionnaire du premier rang ; mais sa phrase est p

672 pour tel dans les cafés, et sa foi prend l’allure d’ un défi. On pourrait m’objecter Saint-John Perse, mais justement il a

673 il en soi. Tous les autres sont contre le siècle, d’ une manière encore plus évidente, soit qu’ils attaquent avec acharneme

674 e aussi, fût-ce par son seul échec, la dissidence de la pensée dans le monde moderne. À partir de 1919, les influences dom

675 dominantes sur nos élites créatrices sont celles de Nietzsche, de Rimbaud, de Kierkegaard et de Dostoïevski. Il est remar

676 r nos élites créatrices sont celles de Nietzsche, de Rimbaud, de Kierkegaard et de Dostoïevski. Il est remarquable que ce

677 créatrices sont celles de Nietzsche, de Rimbaud, de Kierkegaard et de Dostoïevski. Il est remarquable que ce siècle n’ait

678 elles de Nietzsche, de Rimbaud, de Kierkegaard et de Dostoïevski. Il est remarquable que ce siècle n’ait retenu du précéde

679 onc antibourgeois, j’entends bien dans le domaine de l’éthique et de l’esprit. Mais rien ne compte en fait que par la bour

680 s, j’entends bien dans le domaine de l’éthique et de l’esprit. Mais rien ne compte en fait que par la bourgeoisie. C’est e

681 ancêtres. Et c’est elle aujourd’hui qui est prise d’ angoisse devant ce qu’ils dénonçaient en vain. C’est elle qui croit au

682 le progrès. C’est elle enfin qui cède au vertige de l’histoire, s’imagine que son heure est passée, que le Prolétariat do

683 vrai malgré lui. Curieux pouvoir des pessimistes de l’autre siècle sur les héritiers de leurs ennemis ! La bourgeoisie du

684 s pessimistes de l’autre siècle sur les héritiers de leurs ennemis ! La bourgeoisie du xixe fut optimiste en dépit des so

685 le travail l’enrichissait. Aujourd’hui, l’ouvrier d’ usine bénéficie des soins jaloux de l’État. Encore un peu, et la techn

686 hui, l’ouvrier d’usine bénéficie des soins jaloux de l’État. Encore un peu, et la technique elle-même l’aura délivré de la

687 un peu, et la technique elle-même l’aura délivré de la chaîne. Mais c’est le bourgeois qui en vient alors à craindre le r

688 rable des machines, et qui conçoit, avec cent ans de retard, un pessimisme fataliste et résigné. Dans ce décalage séculair

689 laire entre la conscience et le réel, naît l’idée d’ une pensée impuissante, d’une réalité terrifiante et d’un sens fatal d

690 et le réel, naît l’idée d’une pensée impuissante, d’ une réalité terrifiante et d’un sens fatal de l’Histoire, dont Big Bro

691 pensée impuissante, d’une réalité terrifiante et d’ un sens fatal de l’Histoire, dont Big Brother sera l’aboutissement. J

692 nte, d’une réalité terrifiante et d’un sens fatal de l’Histoire, dont Big Brother sera l’aboutissement. J’ai tu jusqu’ici

693 ms, qui dominent pourtant ce tableau. L’influence de Marx et de Freud sur les classes dirigeantes de l’Occident dépasse de

694 inent pourtant ce tableau. L’influence de Marx et de Freud sur les classes dirigeantes de l’Occident dépasse de loin la co

695 e de Marx et de Freud sur les classes dirigeantes de l’Occident dépasse de loin la conscience qu’elles en ont, la connaiss

696 sur les classes dirigeantes de l’Occident dépasse de loin la conscience qu’elles en ont, la connaissance qu’elles ont pu p

697 onnaissance qu’elles ont pu prendre du Capital ou de la Science des rêves, et les jugements qu’elles avoueraient à leur su

698 peu sadique. Ce succès n’est pas dû à la lecture de leurs œuvres ardues et complexes, mais à l’intention polémique qui di

699 dirigea leur entreprise, et qui imposa leur angle de vision même à ceux qui refusaient leurs thèses ou contestaient leurs

700 s arguments. Il s’agit, au plein sens des termes, d’ un succès de scandale, d’un choc profanateur, d’un renversement des ta

701 Il s’agit, au plein sens des termes, d’un succès de scandale, d’un choc profanateur, d’un renversement des tabous. La bou

702 u plein sens des termes, d’un succès de scandale, d’ un choc profanateur, d’un renversement des tabous. La bourgeoisie du x

703 , d’un succès de scandale, d’un choc profanateur, d’ un renversement des tabous. La bourgeoisie du xixe frappait d’interdi

704 ment des tabous. La bourgeoisie du xixe frappait d’ interdit deux sujets dans les conversations de la table de famille ou

705 ait d’interdit deux sujets dans les conversations de la table de famille ou des salons, et c’étaient le Sexe et l’Argent.

706 it deux sujets dans les conversations de la table de famille ou des salons, et c’étaient le Sexe et l’Argent. Tout devait

707 ient le Sexe et l’Argent. Tout devait avoir l’air de se passer dans le monde comme si ces choses n’existaient pas. Les gra

708 enfants naissaient dans les choux, et le langage d’ un homme tel que Victor Hugo (sauf dans ses petits carnets intimes) re

709 s intimes) restait prude. Subitement Marx attaque de sa voix grasseyante : parlons d’argent, c’est le secret du drame soci

710 ent Marx attaque de sa voix grasseyante : parlons d’ argent, c’est le secret du drame social. Mais Freud un peu plus tard :

711 t le secret du drame individuel. Et voilà le choc de la reconnaissance, l’illumination fulgurante, l’illusion que le facte

712 es. Appliquer l’analyse marxiste au milieu social de Freud, la psychanalyse au cas individuel de Marx, les critères freudi

713 ocial de Freud, la psychanalyse au cas individuel de Marx, les critères freudiens et marxistes à la Bourgeoisie même et au

714 Bourgeoisie même et au Prolétariat (cette figure de terreur longtemps refoulée dans l’inconscient de la Société) — tout c

715 de terreur longtemps refoulée dans l’inconscient de la Société) — tout cela met en lumière l’intention polémique qui anim

716 mes, sans doute, méritèrent à ce point qu’on dise d’ eux qu’ils ont « fait leur temps », au double sens de l’expression. Qu

717 ux qu’ils ont « fait leur temps », au double sens de l’expression. Que Freud soit dépassé dans son propre domaine, et surt

718 omaine, et surtout débordé par le retour en force de réalités religieuses qu’il tenait pour autant d’illusions ; que Marx

719 de réalités religieuses qu’il tenait pour autant d’ illusions ; que Marx se soit trompé dans toutes ses prévisions (sauf d

720 , se voient aujourd’hui démentis. L’élargissement de la conscience humaine aux dimensions de la planète fait apparaître la

721 gissement de la conscience humaine aux dimensions de la planète fait apparaître la psyché du monde bourgeois (seule étudié

722 s l’espace et le temps. D’autre part, l’ascension d’ un Staline, son long règne et sa chute posthume, les grandes explosion

723 plosions libertaires du « Printemps » polonais et de l’Octobre hongrois, enfin l’essor libérateur de la technique dans les

724 t de l’Octobre hongrois, enfin l’essor libérateur de la technique dans les régimes capitalistes avancés, tout échappe à la

725 capitalistes avancés, tout échappe à la prévision de la fameuse dialectique marxiste. Toujours prônée par ses disciples co

726 ts, en est réduite à restaurer des dogmes à coups de mensonges. Si les ouvriers de Czepel ne sont pas des « fascistes impo

727 des dogmes à coups de mensonges. Si les ouvriers de Czepel ne sont pas des « fascistes importés », la dialectique n’est p

728  » comme eût dit Marx lui-même, et le « mouvement de l’histoire » un mauvais alibi pour nos démissions personnelles. Le dr

729 alibi pour nos démissions personnelles. Le droit d’ opposition redevient créateur. Et la question n’est plus de supputer l

730 ion redevient créateur. Et la question n’est plus de supputer le « sens inévitable » de l’Histoire, mais de la faire. L’u

731 ion n’est plus de supputer le « sens inévitable » de l’Histoire, mais de la faire. L’utopie masochiste d’Orwell prolongea

732 pputer le « sens inévitable » de l’Histoire, mais de la faire. L’utopie masochiste d’Orwell prolongeait le cauchemar stal

733 ’Histoire, mais de la faire. L’utopie masochiste d’ Orwell prolongeait le cauchemar stalinien, l’épurait, si j’ose dire, l

734 Tout portait l’intelligentsia à confondre ce rêve d’ angoisse avec notre avenir historique, à tenir cette logique démente p

735 que, à tenir cette logique démente pour l’annonce d’ une fatalité. A-t-il vraiment suffi d’un « dégel » temporaire, d’une r

736 r l’annonce d’une fatalité. A-t-il vraiment suffi d’ un « dégel » temporaire, d’une révolution écrasée, d’une révolte larvé

737 A-t-il vraiment suffi d’un « dégel » temporaire, d’ une révolution écrasée, d’une révolte larvée de la jeunesse russe elle

738 n « dégel » temporaire, d’une révolution écrasée, d’ une révolte larvée de la jeunesse russe elle-même, pour briser le cour

739 e, d’une révolution écrasée, d’une révolte larvée de la jeunesse russe elle-même, pour briser le cours de cette fatalité e

740 la jeunesse russe elle-même, pour briser le cours de cette fatalité et pour renverser nos destins ? Le traumatisme provoqu

741 URSS, n’aurait-il pas créé l’illusion romantique d’ un renouveau de la liberté, d’un faux réveil rêvé pendant un long cauc

742 -il pas créé l’illusion romantique d’un renouveau de la liberté, d’un faux réveil rêvé pendant un long cauchemar qui serai

743 illusion romantique d’un renouveau de la liberté, d’ un faux réveil rêvé pendant un long cauchemar qui serait, en fin de co

744 lité ? On pourrait s’inquiéter si d’autres séries de faits, indépendants d’ailleurs des récents événements de l’Est, ne ve

745 s, indépendants d’ailleurs des récents événements de l’Est, ne venaient corroborer un optimisme neuf. Budapest a gagné sa

746 ettons que cela n’est pas tout. Mais qu’en est-il de l’Occident ? Trois représentations vagues mais obsédantes assombriss

747 du plan total, ordonnant toute la vie au service de l’État. Un certain déterminisme historique faisait prévoir la « décad

748 minisme historique faisait prévoir la « décadence de l’Occident » et considérait comme fatal l’écrasement de l’Europe entr

749 ccident » et considérait comme fatal l’écrasement de l’Europe entre les blocs. Un certain déterminisme technologique, enfi

750 évèle une tendance générale au réveil des valeurs de liberté. Première illusion fataliste : « L’URSS est l’avenir… » — L’

751  L’URSS est l’avenir… » — L’URSS était le paradis de la classe ouvrière, les USA le dernier bastion du capitalisme exploit

752 les USA se voyaient condamnés par le « mouvement de l’histoire ». Telle était la religion des « progressistes ». Voyons l

753 s marxistes mais les jette dans des crises aiguës de dialectique. Ils le jugent grossièrement matérialiste, et au surplus

754 jugent grossièrement matérialiste, et au surplus de mauvaise foi. Plus finement, Bertrand de Jouvenel, comparant les écon

755 uvenel, comparant les économies des États-Unis et de l’URSS, a montré que l’entreprise communiste n’apporte rien qui la di

756 e n’apporte rien qui la distingue essentiellement de l’entreprise capitaliste dans son développement historique, mais qu’a

757 e définie par la remise au travailleur des fruits de son travail, serait l’œuvre du communisme. Or l’examen des chiffres e

758 l’URSS est l’avenir ! », répéteront nos maniaques de l’Histoire. Drôle d’avenir, qui s’essouffle à rejoindre un « passé »

759  », répéteront nos maniaques de l’Histoire. Drôle d’ avenir, qui s’essouffle à rejoindre un « passé » rituellement dénoncé

760 es prospectus publicitaires vantant les bienfaits de la cure, on se contente d’en vérifier les résultats, on voit que le p

761 vantant les bienfaits de la cure, on se contente d’ en vérifier les résultats, on voit que le progrès est à l’Ouest, le se

762 ue le progrès est à l’Ouest, le servage et la loi d’ airain à l’Est, et qu’une classe ouvrière mieux informée qu’endoctriné

763 ieux informée qu’endoctrinée, si elle a à choisir d’ émigrer, choisirait en masse l’Amérique. Comme l’ont fait la plupart d

764 ouvriers hongrois réfugiés en Autriche et libres de parler. Il n’en reste pas moins frappant de constater que l’avenir, a

765 ibres de parler. Il n’en reste pas moins frappant de constater que l’avenir, aux yeux de ces Hongrois, s’il n’est pas l’UR

766 cinq États « souverains » — incapables d’ailleurs de prouver qu’ils le sont — se voyait promise par l’Histoire à des parta

767 ent vers l’union fédérale, déclenché au lendemain de la guerre par les congrès de Montreux et de La Haye, a produit le Con

768 clenché au lendemain de la guerre par les congrès de Montreux et de La Haye, a produit le Conseil de l’Europe, CECA, le Ma

769 emain de la guerre par les congrès de Montreux et de La Haye, a produit le Conseil de l’Europe, CECA, le Marché commun et

770 e dans l’esprit des nationalistes attardés. Aucun de nos États ne peut se défendre seul. Aucun ne peut faire la guerre san

771 mble, et ils commencent à le savoir. 330 millions d’ habitants à l’ouest du rideau de fer, plus 100 millions récupérés à l’

772 oir. 330 millions d’habitants à l’ouest du rideau de fer, plus 100 millions récupérés à l’Est, feraient un ensemble supéri

773 ns additionnés. Je ne parle que des chiffres, non de la qualité. Alors les prophéties lugubres d’un Spengler, ou les spécu

774 non de la qualité. Alors les prophéties lugubres d’ un Spengler, ou les spéculations fascinantes d’un Toynbee, inspirées p

775 es d’un Spengler, ou les spéculations fascinantes d’ un Toynbee, inspirées par l’idée mythique d’Évolution, — on monte, on

776 antes d’un Toynbee, inspirées par l’idée mythique d’ Évolution, — on monte, on culmine, on chancelle, on décline, et l’on m

777 lement — se verront démenties par le nouvel essor d’ une Europe reprenant la tête du progrès. Et c’est une autre prophétie,

778 t une autre prophétie, qui deviendra vraie, celle de Proudhon, qui fut quarante-huitard : « Le xxe siècle ouvrira l’ère d

779 rations, ou l’humanité recommencera un purgatoire de mille ans. » Au fait, nous en sommes là, ce n’est plus une hypothèse.

780 plus une hypothèse. L’Histoire dépend de nouveau de ce que nous en ferons, et non plus d’une courbe mythique, d’une Évolu

781 de nouveau de ce que nous en ferons, et non plus d’ une courbe mythique, d’une Évolution bien tracée, ou d’un processus di

782 ous en ferons, et non plus d’une courbe mythique, d’ une Évolution bien tracée, ou d’un processus dialectique, dont un Part

783 courbe mythique, d’une Évolution bien tracée, ou d’ un processus dialectique, dont un Parti qu’on connaît trop tire les fi

784 rti qu’on connaît trop tire les ficelles. Cessons de chercher le sens de l’Histoire, alibi du refus de notre vocation ; ap

785 op tire les ficelles. Cessons de chercher le sens de l’Histoire, alibi du refus de notre vocation ; apprenons à le décider

786 de chercher le sens de l’Histoire, alibi du refus de notre vocation ; apprenons à le décider. Troisième illusion fatalist

787 t déjà nos corps, dictent nos gestes et le rythme de nos journées. Encore un peu, et les cerveaux électroniques dicteront

788 miner nos existences disciplinées. C’en sera fait de la liberté, et du droit d’hésiter, d’errer… Les savants, apprentis so

789 linées. C’en sera fait de la liberté, et du droit d’ hésiter, d’errer… Les savants, apprentis sorciers, ont déchaîné dans l

790 n sera fait de la liberté, et du droit d’hésiter, d’ errer… Les savants, apprentis sorciers, ont déchaîné dans le monde des

791 est faux dans ce langage ; tout n’est que manière de parler abusivement prise à la lettre, et donc fautive. Les machines e

792 trée dans ma cour, spontanément, dans l’intention de m’envahir. Et pas même une machine à laver. Que de mal, au contraire,

793 e m’envahir. Et pas même une machine à laver. Que de mal, au contraire, dans ma campagne, pour obtenir le téléphone ! Vous

794 pagne, pour obtenir le téléphone ! Vous me parlez de l’esclavage du téléphone ? Mais a-t-on jamais vu qu’un appareil, pren

795 Vous n’êtes donc pas l’esclave du téléphone, mais de votre seule curiosité. Le règne des machines, à vous entendre, nous i

796 gne des machines, à vous entendre, nous isolerait de la Nature ? Mais je vois au contraire que l’express et l’avion, le sc

797 a Nature, et non l’homme, qui aurait ici le droit de se plaindre. Vous citez l’apprenti sorcier. Et qui ne l’a pas cité, q

798 la Bombe n’a jamais rien fait sans l’ordre exprès d’ un président, d’un général. Ce n’est pas elle qui est dangereuse, c’es

799 ais rien fait sans l’ordre exprès d’un président, d’ un général. Ce n’est pas elle qui est dangereuse, c’est l’homme. Et le

800 que vous l’aurez bien mérité. L’Apprenti sorcier de la légende déchaînait une force inconnue. Mais nos savants font tout

801 ls humains que je connaisse qui aient eu le droit de maudire la technique, ce ne sont pas les bourgeois de ce siècle, ni l

802 audire la technique, ce ne sont pas les bourgeois de ce siècle, ni leurs penseurs, mais bien les ouvriers du xixe et les

803 se sont vus transformés en « compléments vivants d’ un mécanisme mort », selon l’expression terrible et juste de Marx. Or

804 isme mort », selon l’expression terrible et juste de Marx. Or il se trouve précisément que les robots viennent les délivre

805 précisément que les robots viennent les délivrer de la chaîne. Éloquemment entretenu par Bernanos, un malentendu sans par

806 ’est pas un homme automatique, comme des millions de personnes le croient encore sur la foi de quelques films et de la sci

807 illions de personnes le croient encore sur la foi de quelques films et de la science-fiction. C’est encore moins un homme

808 le croient encore sur la foi de quelques films et de la science-fiction. C’est encore moins un homme esclave de la machine

809 ence-fiction. C’est encore moins un homme esclave de la machine. C’est une machine, ni plus ni moins, c’est un outil, que

810 t si rarement dénoncée, a provoqué la destruction de plusieurs millions de vies humaines. C’est ici qu’il convient de rapp

811 , a provoqué la destruction de plusieurs millions de vies humaines. C’est ici qu’il convient de rappeler le décalage de la

812 llions de vies humaines. C’est ici qu’il convient de rappeler le décalage de la conscience dont j’ai parlé. Le mal dénoncé

813 C’est ici qu’il convient de rappeler le décalage de la conscience dont j’ai parlé. Le mal dénoncé en son temps par Karl M

814 n n’écoutait pas, tenait à la semi-automatisation de la production industrielle. Tout retour en arrière étant exclu, le re

815 tomatisme total, libérant l’ouvrier non seulement de ses efforts sur la matière trop lourde ou dangereuse à manier, mais a

816 re trop lourde ou dangereuse à manier, mais aussi de la monotonie et du rythme inhumain de travail qu’imposaient la machin

817 mais aussi de la monotonie et du rythme inhumain de travail qu’imposaient la machine et la chaîne. Le remède était donc l

818 pplication générale prit récemment le nom anglais d’ automation. Il est curieux que la pensée occidentale, découvrant le pé

819 ée occidentale, découvrant le péril avec cent ans de retard, ait porté sa colère contre le remède… L’automatisation complè

820 olère contre le remède… L’automatisation complète de l’usine, loin d’augmenter le mal si longuement déploré par ceux qui n

821 emède… L’automatisation complète de l’usine, loin d’ augmenter le mal si longuement déploré par ceux qui ne le subissaient

822 roduisant jour et nuit sous la seule surveillance d’ un groupe d’opérateurs, signifie simplement, partout où elle fonctionn

823 ur et nuit sous la seule surveillance d’un groupe d’ opérateurs, signifie simplement, partout où elle fonctionne, la suppre

824 ement, partout où elle fonctionne, la suppression de la condition prolétarienne. Généralisée dans l’avenir, elle rendra su

825 ndra superflu et sans objet le moment dialectique de la révolution donnant le pouvoir aux ouvriers d’usine. C’est ainsi le

826 de la révolution donnant le pouvoir aux ouvriers d’ usine. C’est ainsi le développement plus poussé de la technique, non l

827 d’usine. C’est ainsi le développement plus poussé de la technique, non l’action du parti communiste, ni même de la classe

828 hnique, non l’action du parti communiste, ni même de la classe ouvrière, qui sera l’agent du dépassement concret des confl

829 et des techniciens. C’est le problème des moyens de culture, qui seront mis à contribution, sur une échelle brusquement a

830 s, tous alertés, au-delà des problèmes classiques de plein-emploi et de temps de travail, le problème de l’emploi du temps

831 -delà des problèmes classiques de plein-emploi et de temps de travail, le problème de l’emploi du temps, qui se pose à l’h

832 problèmes classiques de plein-emploi et de temps de travail, le problème de l’emploi du temps, qui se pose à l’homme. Le

833 plein-emploi et de temps de travail, le problème de l’emploi du temps, qui se pose à l’homme. Le problème de la liberté.

834 ploi du temps, qui se pose à l’homme. Le problème de la liberté. Le problème du sens de nos vies… Je propose à nos philos

835 e. Le problème de la liberté. Le problème du sens de nos vies… Je propose à nos philosophes du déclin de la bourgeoisie,

836 nos vies… Je propose à nos philosophes du déclin de la bourgeoisie, du déclin de l’Occident, du déclin de la culture, et

837 hilosophes du déclin de la bourgeoisie, du déclin de l’Occident, du déclin de la culture, et de la fatalité des tyrannies

838 a bourgeoisie, du déclin de l’Occident, du déclin de la culture, et de la fatalité des tyrannies prochaines, de laisser po

839 déclin de l’Occident, du déclin de la culture, et de la fatalité des tyrannies prochaines, de laisser pour un temps ces su

840 ture, et de la fatalité des tyrannies prochaines, de laisser pour un temps ces sujets affligeants, leur ayant accordé asse

841 ces sujets affligeants, leur ayant accordé assez de complaisance, et de considérer la nouveauté de l’époque : bel exercic

842 nts, leur ayant accordé assez de complaisance, et de considérer la nouveauté de l’époque : bel exercice pour une pensée ré

843 ez de complaisance, et de considérer la nouveauté de l’époque : bel exercice pour une pensée régulatrice, que d’en maîtris

844 e : bel exercice pour une pensée régulatrice, que d’ en maîtriser les vertiges ! Je propose la clôture d’un demi-siècle de

845 en maîtriser les vertiges ! Je propose la clôture d’ un demi-siècle de rumination pessimiste, longtemps justifiée, nous le

846 vertiges ! Je propose la clôture d’un demi-siècle de rumination pessimiste, longtemps justifiée, nous le savons, mais qui

847 ous le savons, mais qui court désormais le danger de survivre aux dangers prévus. Je propose à l’intelligence un rôle nouv

848 propose à l’intelligence un rôle nouveau : celui de créer la liberté en la cherchant, en acceptant d’envisager ses risque

849 de créer la liberté en la cherchant, en acceptant d’ envisager ses risques et de les courir d’abord en imagination. Je prop

850 herchant, en acceptant d’envisager ses risques et de les courir d’abord en imagination. Je propose une idée renouvelée du

851 e propose une idée renouvelée du Progrès, au-delà de nos illusions mais aussi de nos scepticismes. Ce n’est pas l’accroiss

852 e du Progrès, au-delà de nos illusions mais aussi de nos scepticismes. Ce n’est pas l’accroissement de nos biens, ni la so

853 de nos scepticismes. Ce n’est pas l’accroissement de nos biens, ni la solution de nos maux, car toute solution concevable

854 pas l’accroissement de nos biens, ni la solution de nos maux, car toute solution concevable serait la fin de notre libert

855 maux, car toute solution concevable serait la fin de notre liberté. J’imagine au contraire le progrès véritable dans l’acc

856 ais pour ouvrir des portes. f. Rougemont Denis de , « La fin du pessimisme », Réalités, Paris, juin 1957, p. 27-29.

857 xième fois par un jury étrange, composé à la fois de fonctionnaires français des Arts et Lettres (anciens ministres des Be

858 ciens ministres des Beaux-Arts directeurs, etc.), de militaires (le maréchal Juin), d’écrivains (Maurice Genevoix, Marcel

859 ecteurs, etc.), de militaires (le maréchal Juin), d’ écrivains (Maurice Genevoix, Marcel Brion, Paul Vialar), de critiques

860 ns (Maurice Genevoix, Marcel Brion, Paul Vialar), de critiques (Robert Kemp) et d’une directrice de théâtre (Mary Morgan).

861 rion, Paul Vialar), de critiques (Robert Kemp) et d’ une directrice de théâtre (Mary Morgan). Tout ce monde s’est entendu p

862 ), de critiques (Robert Kemp) et d’une directrice de théâtre (Mary Morgan). Tout ce monde s’est entendu pour trouver dans

863 ce monde s’est entendu pour trouver dans l’œuvre de Denis de Rougemont un livre qui « exalte le plus clairement les quali

864 oral au lecteur ». C’est donc sa récente Aventure de l’homme occidental (Albin Michel, éd.) qui est aujourd’hui orné de ce

865 ntal (Albin Michel, éd.) qui est aujourd’hui orné de ce laurier. Des prix ? me dit Denis de Rougemont, j’en ai manqué beau

866 emont, j’en ai manqué beaucoup avant-guerre. Plus d’ un jury pensait à me donner une palme. Et il y avait toujours, au dern

867 a revanche. Aux photographes qui me mitraillaient de flashes quand je me trouvais aux côtés du maréchal Juin, j’ai pu dire

868 ue lieutenant dans l’armée suisse ? » L’Aventure de l’homme occidental qui paraît simultanément à New York, Londres et P

869 de Rougemont, à répandre un peu plus les raisons de croire à l’Europe. On sait que cet historien, ce philosophe s’est, de

870 t, depuis dix ans, consacré à militer pour l’idée de faire l’Europe comme a été faite l’Amérique. Il suffit, dit-il, de se

871 comme a été faite l’Amérique. Il suffit, dit-il, de se trouver en Amérique, pour savoir que l’Europe existe, ne serait-ce

872 finit l’Europe, j’assure que, plutôt que discuter de frontières mouvantes, il vaut mieux se préoccuper de définir la civil

873 frontières mouvantes, il vaut mieux se préoccuper de définir la civilisation européenne à travers son histoire et d’en mes

874 civilisation européenne à travers son histoire et d’ en mesurer les effets. C’est ce que j’ai tenté dans mon livre et ma co

875 ion est tout à fait optimiste : on parle en effet de décadence de l’Europe. Mais où voit-on cette décadence ? La planète e

876 à fait optimiste : on parle en effet de décadence de l’Europe. Mais où voit-on cette décadence ? La planète entière est en

877 ntaliser. Personne ne se convertit au mode de vie de l’islam, mais voyez la Chine, voyez l’Inde : ne se mettent-elles pas

878 ropéenne ? L’Europe dévore les nuits et les jours de Denis de Rougemont. Il ne peut écrire de livres qu’entre onze heures

879 es jours de Denis de Rougemont. Il ne peut écrire de livres qu’entre onze heures du soir et quatre heures du matin, mais c

880 importants ouvrages : l’un qui établira une sorte de morale de la vocation, c’est-à-dire prouvera que la fin justifie les

881 ouvrages : l’un qui établira une sorte de morale de la vocation, c’est-à-dire prouvera que la fin justifie les moyens. À

882 est pas une fin juste. Le second ouvrage essaiera de situer cette morale de la vocation dans la vie sociale. C’est, dit Ro

883 Le second ouvrage essaiera de situer cette morale de la vocation dans la vie sociale. C’est, dit Rougemont, une question d

884 a vie sociale. C’est, dit Rougemont, une question de feux rouges et de feux verts, de contrat pour la commodité générale.

885 st, dit Rougemont, une question de feux rouges et de feux verts, de contrat pour la commodité générale. Une morale personn

886 nt, une question de feux rouges et de feux verts, de contrat pour la commodité générale. Une morale personnaliste en quelq

887 nuel Mounier pour fonder une nouvelle philosophie de la personne humaine. Je m’attendais à trouver en Denis de Rougemont u

888 Je m’attendais à trouver en Denis de Rougemont un de ces théoriciens et philosophes qui sourient avec une pointe de condes

889 ciens et philosophes qui sourient avec une pointe de condescendance devant les ouvrages de fiction, devant la création rom

890 une pointe de condescendance devant les ouvrages de fiction, devant la création romanesque. C’était sans songer à l’auteu

891 éation romanesque. C’était sans songer à l’auteur de ce Nicolas de Flue dont nous n’avons pas encore eu la représentatio

892 eu la représentation scénique, nous satisfaisant de la version en oratorio qui a été tirée de cet opéra où Rougemont sut

893 faisant de la version en oratorio qui a été tirée de cet opéra où Rougemont sut se montrer poète et où Honegger trouva une

894 nt sut se montrer poète et où Honegger trouva une de ses plus grandes réussites. Je songe toujours au roman, me confia Den

895 Rougemont. J’en ai jadis écrit un que j’ai retiré de justesse des mains de l’éditeur avant qu’il ne soit livré à l’imprime

896 is écrit un que j’ai retiré de justesse des mains de l’éditeur avant qu’il ne soit livré à l’imprimeur. Mais je n’ai pas r

897 édige comme un poème un livre tel que L’Aventure de l’homme occidental . Le style me paraît aussi important que les idées

898 idées qu’on veut défendre. g. Rougemont Denis de , « La fin justifie les moyens », Tribune de Lausanne, Lausanne, 9 jui

899 Denis de, « La fin justifie les moyens », Tribune de Lausanne, Lausanne, 9 juin 1957, p. 7.

900 lus hautes valeurs européennes tient dans l’œuvre de Bach et dans celle de Mozart. La Messe en ut mineur réduit à peu de c

901 opéennes tient dans l’œuvre de Bach et dans celle de Mozart. La Messe en ut mineur réduit à peu de chose toute tentative v

902 plus haut, peut-être ; mais qui serait en mesure d’ exiger davantage ou de proposer mieux dans le monde d’aujourd’hui ? Ce

903 ; mais qui serait en mesure d’exiger davantage ou de proposer mieux dans le monde d’aujourd’hui ? Certes, l’Europe réelle

904 iger davantage ou de proposer mieux dans le monde d’ aujourd’hui ? Certes, l’Europe réelle est loin de tels sommets, mais c

905 de même ses sommets. Elle n’est pas souvent digne de ces œuvres, mais c’est elle qui les a créées. Nous l’oublions souvent

906 pas nos grandeurs, car la musique est le sublime de l’Occident, mais pour l’oreille d’un Oriental, c’est un bruit vague,

907 est le sublime de l’Occident, mais pour l’oreille d’ un Oriental, c’est un bruit vague, une espèce de rumeur insensée… Il f

908 e d’un Oriental, c’est un bruit vague, une espèce de rumeur insensée… Il fallait bien rappeler ici qu’une réflexion sur no

909 uation dominée par le malentendu et toute chargée de tragédies latentes. En voici la formule la plus simple, je crois : la

910 a formule la plus simple, je crois : la diffusion de nos valeurs n’est pas co-extensive avec celle de nos produits et n’en

911 de nos valeurs n’est pas co-extensive avec celle de nos produits et n’en est pas non plus contemporaine ; elle reste loin

912 le temps. Tel est le drame. Il intéresse l’avenir de tous les peuples de la Terre. Si l’on cherche à se figurer l’aire de

913 drame. Il intéresse l’avenir de tous les peuples de la Terre. Si l’on cherche à se figurer l’aire de diffusion de la civi

914 de la Terre. Si l’on cherche à se figurer l’aire de diffusion de la civilisation occidentale, on s’aperçoit qu’elle n’est

915 Si l’on cherche à se figurer l’aire de diffusion de la civilisation occidentale, on s’aperçoit qu’elle n’est pas loin de

916 ensemble des terres habitées, mais que la densité d’ occidentalisation varie d’une manière considérable selon les pays, et

917 es, mais que la densité d’occidentalisation varie d’ une manière considérable selon les pays, et à l’intérieur même de pres

918 onsidérable selon les pays, et à l’intérieur même de presque tous les pays. L’Europe latine, anglo-saxonne et germano-scan

919 germano-scandinave, conservatoire et laboratoire de toute l’histoire, de toutes les valeurs et de tous les produits d’ord

920 conservatoire et laboratoire de toute l’histoire, de toutes les valeurs et de tous les produits d’ordres divers qui ont ca

921 ire de toute l’histoire, de toutes les valeurs et de tous les produits d’ordres divers qui ont caractérisé notre civilisat

922 re, de toutes les valeurs et de tous les produits d’ ordres divers qui ont caractérisé notre civilisation, des origines jus

923 et certains pays du Commonwealth forment une zone de diffusion occidentale parfois plus homogène, mais un peu moins dense,

924 des valeurs et des tensions. Le Sud-Est européen, de la Puszta hongroise à l’Asie Mineure turque, en passant par les Balka

925 i furent éliminées avec les anciennes classes, et de valeurs autochtones et populaires systématiquement refoulées. Reporté

926 efoulées. Reportées sur un planisphère, ces zones de diffusion pourraient être représentées par une petite tache d’un roug

927 pourraient être représentées par une petite tache d’ un rouge sombre sur l’Europe médiane tandis que les Amériques et l’Aus

928 tralie seraient en rouge vif, les franges sud-est de l’Europe en rose, et l’URSS en quadrillé rouge et blanc. Quant à l’As

929 Hong Kong17 et des décors industriels aux confins de la jungle ou en plein désert. Enfin la Chine vient d’adopter coup sur

930 a jungle ou en plein désert. Enfin la Chine vient d’ adopter coup sur coup une doctrine d’État venue d’Europe : le marxisme

931 Chine vient d’adopter coup sur coup une doctrine d’ État venue d’Europe : le marxisme ; la technique et les armes de l’Occ

932 d’adopter coup sur coup une doctrine d’État venue d’ Europe : le marxisme ; la technique et les armes de l’Occident ; l’alp

933 ’Europe : le marxisme ; la technique et les armes de l’Occident ; l’alphabet substitué aux idéogrammes ; et le contrôle de

934 ammes ; et le contrôle des naissances. Ce tableau de la diffusion de notre civilisation résume tant d’aspects variés, d’ir

935 ntrôle des naissances. Ce tableau de la diffusion de notre civilisation résume tant d’aspects variés, d’irrégularités de t

936 de la diffusion de notre civilisation résume tant d’ aspects variés, d’irrégularités de transmission, d’influences tantôt v

937 notre civilisation résume tant d’aspects variés, d’ irrégularités de transmission, d’influences tantôt vagues et générales

938 ion résume tant d’aspects variés, d’irrégularités de transmission, d’influences tantôt vagues et générales et tantôt sélec

939 ’aspects variés, d’irrégularités de transmission, d’ influences tantôt vagues et générales et tantôt sélectives à l’excès,

940 signifier, en fin de compte, l’occidentalisation d’ un peuple, d’un État ou d’un individu. Ici, l’on se contente d’importe

941 n fin de compte, l’occidentalisation d’un peuple, d’ un État ou d’un individu. Ici, l’on se contente d’importer nos machine

942 te, l’occidentalisation d’un peuple, d’un État ou d’ un individu. Ici, l’on se contente d’importer nos machines et nos arme

943 d’un État ou d’un individu. Ici, l’on se contente d’ importer nos machines et nos armements, là nos formes politiques, part

944 . Plus tard, telle nation neuve ou telle fraction de son intelligentsia décide d’adopter nos conceptions sécularistes de l

945 ve ou telle fraction de son intelligentsia décide d’ adopter nos conceptions sécularistes de l’existence, désacralisée, rat

946 sia décide d’adopter nos conceptions sécularistes de l’existence, désacralisée, rationalisée, scientiste et démocratique.

947 es et intellectuelles qui explique seul la genèse de ces « produits », qui définit ou qui limite leur mode d’emploi et don

948 « produits », qui définit ou qui limite leur mode d’ emploi et donne un sens à l’aventure occidentale, ce système de valeur

949 onne un sens à l’aventure occidentale, ce système de valeurs reste ignoré, refusé d’instinct par les masses ou expressémen

950 ntale, ce système de valeurs reste ignoré, refusé d’ instinct par les masses ou expressément combattu par leurs guides spir

951 Le décalage sans cesse croissant entre le rythme d’ expansion de nos produits et celui de nos valeurs régulatrices est en

952 sans cesse croissant entre le rythme d’expansion de nos produits et celui de nos valeurs régulatrices est en train de fom

953 re le rythme d’expansion de nos produits et celui de nos valeurs régulatrices est en train de fomenter dans le monde entie

954 iétantes, des malentendus pathétiques, une menace de chaos sans précédent. Un intellectuel indonésien me dit un jour : « V

955 oi n’y joignez-vous pas un petit livre expliquant d’ où viennent ces objets, pourquoi vous avez eu l’idée de les construire

956 viennent ces objets, pourquoi vous avez eu l’idée de les construire et comment ils expriment et transportent, en fait, tou

957 expriment et transportent, en fait, tout un monde de valeurs complètement étranger à nos croyances traditionnelles ? » Une

958 emme, qui est une Hollandaise, donnait des leçons de solfège aux enfants d’une école de Djakarta ; et quand ils eurent app

959 ndaise, donnait des leçons de solfège aux enfants d’ une école de Djakarta ; et quand ils eurent appris les notes de notre

960 ait des leçons de solfège aux enfants d’une école de Djakarta ; et quand ils eurent appris les notes de notre gamme, elle

961 e Djakarta ; et quand ils eurent appris les notes de notre gamme, elle leur dit : composez maintenant une chanson dans le

962 it : composez maintenant une chanson dans le goût de ce pays ; mais ils ne purent écrire que de petites mélodies qui ne ra

963 e goût de ce pays ; mais ils ne purent écrire que de petites mélodies qui ne rappelaient rien de leur musique indonésienne

964 e que de petites mélodies qui ne rappelaient rien de leur musique indonésienne et ne faisaient que réinventer les lieux co

965 et ne faisaient que réinventer les lieux communs de chansons européennes qu’ils ne connaissaient pas. Ainsi chaque machin

966 i chaque machine exportée est, en fait, un cheval de Troie. Nous avons évacué nos guerriers et retiré nos fonctionnaires,

967 ils commandent, aux sentiments, aux sources mêmes de l’invention et de la compréhension de la vie. Nos machines et nos rai

968 x sentiments, aux sources mêmes de l’invention et de la compréhension de la vie. Nos machines et nos raisonnements, nos fo

969 urces mêmes de l’invention et de la compréhension de la vie. Nos machines et nos raisonnements, nos formes d’art et de gou

970 ie. Nos machines et nos raisonnements, nos formes d’ art et de gouvernement transportent au loin des champs de force qui vo

971 achines et nos raisonnements, nos formes d’art et de gouvernement transportent au loin des champs de force qui vont agir a

972 t de gouvernement transportent au loin des champs de force qui vont agir anarchiquement, détruisant les bases mêmes d’équi

973 t agir anarchiquement, détruisant les bases mêmes d’ équilibres anciens, appelant d’autres ensembles de valeurs, mais ne po

974 d’équilibres anciens, appelant d’autres ensembles de valeurs, mais ne pouvant les communiquer, les expliquer et les faire

975 expliquer et les faire vivre. Les trois aspects de notre message Que répondre à ces Orientaux, et bientôt à ces Afric

976 cains, qui nous demandent avec anxiété, non point de les laisser comme ils sont, dans leur « sagesse » intacte et leur fam

977 ans leur « sagesse » intacte et leur famine, mais de déclarer nos valeurs ? Ils nous obligent à nous interroger sur ce qui

978 s interroger sur ce qui va de soi dans nos façons de penser et nos conduites habituées ; à prendre conscience, devant eux,

979 tes habituées ; à prendre conscience, devant eux, de ce que nous croyons et voulons ; à réviser sous leur regard méfiant l

980 à réviser sous leur regard méfiant les illusions de notre « universalisme » ou à découvrir ses vraies bases. Classons d’a

981 s. Classons d’abord les éléments caractéristiques de la civilisation occidentale en trois ordres : produits, principes de

982 occidentale en trois ordres : produits, principes de vie publique et valeurs. Produits : les machines, la technique, l’in

983 e, l’industrie, le confort matériel, les procédés de construction et d’alimentation, l’hygiène ; les sociétés, les capitau

984 confort matériel, les procédés de construction et d’ alimentation, l’hygiène ; les sociétés, les capitaux et leur mode d’em

985 hygiène ; les sociétés, les capitaux et leur mode d’ emploi ; la commune et les syndicats ; le suffrage universel, les parl

986 l’instruction publique et la presse ; les œuvres d’ art. Principes de vie publique : la séparation du temporel et du spir

987 lique et la presse ; les œuvres d’art. Principes de vie publique : la séparation du temporel et du spirituel ; la séparat

988 ; la séparation des pouvoirs et la réglementation de leurs rapports ; l’égalité devant la loi, la liberté de l’individu ou

989 rs rapports ; l’égalité devant la loi, la liberté de l’individu ou du groupe garantie par la justice (habeas corpus et dro

990 e garantie par la justice (habeas corpus et droit d’ association) ; le droit à l’opposition (majorité possible de demain),

991 ion) ; le droit à l’opposition (majorité possible de demain), le droit de libre expression, le droit au travail et à la sé

992 pposition (majorité possible de demain), le droit de libre expression, le droit au travail et à la sécurité sociale ou pri

993 aites, etc.), la souveraineté nationale et l’idée d’ une loi internationale… Valeurs : la personne humaine considérée comm

994 humaine considérée comme inviolable ; le respect de la vérité objective, condition du progrès de la recherche autant que

995 pect de la vérité objective, condition du progrès de la recherche autant que de la liberté, l’interdépendance étroite de l

996 , condition du progrès de la recherche autant que de la liberté, l’interdépendance étroite de la liberté et de la justice,

997 tant que de la liberté, l’interdépendance étroite de la liberté et de la justice, le but de la justice étant de protéger l

998 berté, l’interdépendance étroite de la liberté et de la justice, le but de la justice étant de protéger les libertés et la

999 ce étroite de la liberté et de la justice, le but de la justice étant de protéger les libertés et la garantie interne des

1000 erté et de la justice, le but de la justice étant de protéger les libertés et la garantie interne des libertés consistant

1001 ntie interne des libertés consistant dans le sens de la responsabilité de chacun envers tous, ou solidarité ; l’unité, non

1002 rtés consistant dans le sens de la responsabilité de chacun envers tous, ou solidarité ; l’unité, non exclusive de la dive

1003 vers tous, ou solidarité ; l’unité, non exclusive de la diversité (ainsi les voix distinctes s’accordent dans nos chœurs) 

1004 s’accordent dans nos chœurs) ; la reconnaissance de la réalité de la matière et du corps ; la croyance à la raison et à l

1005 ans nos chœurs) ; la reconnaissance de la réalité de la matière et du corps ; la croyance à la raison et à la rationalité

1006 alité du cosmos ; la foi au transcendant, l’amour de Dieu et du prochain. On voit sans peine que nos produits sont les plu

1007 s à exporter et les plus rapidement acceptés hors d’ Europe ; que nos principes de vie publique sont officiellement invoqué

1008 dement acceptés hors d’Europe ; que nos principes de vie publique sont officiellement invoqués, mais principalement contre

1009 vent totalement ignorées. Mais ce qu’il m’importe de montrer, c’est comment ces produits et ces principes procèdent en réa

1010 es produits et ces principes procèdent en réalité de nos valeurs, et ne trouvent que par elles, dans le champ magnétique q

1011 asse généralement pour le produit le plus typique de l’Occident. D’où provient-elle ? De la technique évidemment. Mais com

1012 nt pour le produit le plus typique de l’Occident. D’ où provient-elle ? De la technique évidemment. Mais comment expliquer

1013 plus typique de l’Occident. D’où provient-elle ? De la technique évidemment. Mais comment expliquer que l’Europe ait seul

1014 en Europe, une conjonction sans précédent : celle de la science, s’établissant enfin sur les bases autonomes du calcul et

1015 issant enfin sur les bases autonomes du calcul et de l’expérimentation ; de la philanthropie illuministe, héritière des rê

1016 ses autonomes du calcul et de l’expérimentation ; de la philanthropie illuministe, héritière des rêves alchimiques ; et de

1017 illuministe, héritière des rêves alchimiques ; et de la raison profane, égalitaire, balayant les coutumes sacrées et les e

1018 outumes sacrées et les entraves ancestrales. Mais d’ où venaient cette science et cette raison hardie rénovant les institut

1019 nt les institutions, et cette ambition singulière de transformer le monde matériel ? Si l’on remonte à leurs origines, on

1020 rèce et le christianisme, c’est-à-dire le respect de la vérité objective, la dialectique et la libre critique d’une part,

1021 ritique d’une part, et d’autre part la conviction de la réalité de la matière, objet futur des sciences physiques (réalité

1022 part, et d’autre part la conviction de la réalité de la matière, objet futur des sciences physiques (réalité niée par la p

1023 siques (réalité niée par la plupart des religions de l’Orient mais affirmée par le dogme de l’Incarnation) et la croyance

1024 religions de l’Orient mais affirmée par le dogme de l’Incarnation) et la croyance profonde que le cosmos, créé par Dieu,

1025 ces des divinités monstrueuses ; il vaut la peine d’ en scruter les lois et il attend de l’homme d’être compris, révélé, vo

1026 vaut la peine d’en scruter les lois et il attend de l’homme d’être compris, révélé, voire sauvé, selon saint Paul. Quant

1027 ine d’en scruter les lois et il attend de l’homme d’ être compris, révélé, voire sauvé, selon saint Paul. Quant à nos princ

1028 re sauvé, selon saint Paul. Quant à nos principes de vie publique, ils s’inspirèrent tous, d’une manière plus ou moins dir

1029 rincipes de vie publique, ils s’inspirèrent tous, d’ une manière plus ou moins directe ou correcte, de deux valeurs fondame

1030 d’une manière plus ou moins directe ou correcte, de deux valeurs fondamentales élaborées aux origines mêmes de l’Europe ;

1031 aleurs fondamentales élaborées aux origines mêmes de l’Europe ; la notion grecque d’individu et la notion chrétienne de pe

1032 ux origines mêmes de l’Europe ; la notion grecque d’ individu et la notion chrétienne de personne. La première remonte aux

1033 notion grecque d’individu et la notion chrétienne de personne. La première remonte aux philosophes présocratiques, mais c’

1034 se lia par la suite indissolublement à la notion de vocation personnelle. C’est de la conjonction séculaire de ces valeur

1035 lement à la notion de vocation personnelle. C’est de la conjonction séculaire de ces valeurs grecques et chrétiennes que p

1036 on personnelle. C’est de la conjonction séculaire de ces valeurs grecques et chrétiennes que procède l’idée de liberté dan

1037 aleurs grecques et chrétiennes que procède l’idée de liberté dans ses différentes acceptions, ces dernières permettant de

1038 différentes acceptions, ces dernières permettant de rendre compte des tendances plus ou moins égalitaires ou aristocratiq

1039 ues, plus ou moins anarchisantes ou socialisantes de nos institutions. Tels étant les liens innombrables qui unissent les

1040 mbrables qui unissent les attitudes fondamentales de la psyché européenne et les principes ou les produits qui manifestent

1041 son activité, il apparaît clairement que l’usage de ces produits et le recours à ces principes ne peuvent aller sans impl

1042 ncipes ne peuvent aller sans impliquer le système de valeurs dont ils procèdent. User des uns ou invoquer les autres hors

1043 ou invoquer les autres hors du contexte spirituel de l’Occident, entraîne des conséquences incalculables et généralement c

1044 alculables et généralement chaotiques. Le contact de la civilisation occidentale et des coutumes arabes en Algérie nous en

1045 e un exemple tragique. Il ne s’agit nullement ici de politique, et ce n’est qu’en vertu d’un accident de l’histoire que la

1046 politique, et ce n’est qu’en vertu d’un accident de l’histoire que la France paraît seule en cause dans cette affaire, ca

1047 s. On voit que l’alternative est utopique, chacun de ses termes l’étant. Il nous reste à trouver des formules d’équilibre

1048 mes l’étant. Il nous reste à trouver des formules d’ équilibre ou de compromis tolérables entre ces extrêmes idéaux. C’est

1049 nous reste à trouver des formules d’équilibre ou de compromis tolérables entre ces extrêmes idéaux. C’est la tâche la plu

1050 xtrêmes idéaux. C’est la tâche la plus importante de la seconde moitié du xxe siècle. Et c’est sans doute la première foi

1051 Naples est la seule ville orientale qui n’ait pas de quartier européen ». h. Rougemont Denis de, « Le rôle mondial des v

1052 pas de quartier européen ». h. Rougemont Denis de , « Le rôle mondial des valeurs occidentales », Occident, Bruxelles, o

1053 âce à ses voyages et à ses travaux, les problèmes de base qui se posent à l’Occident. Son dernier livre, L’Aventure occid

1054 ident. Son dernier livre, L’Aventure occidentale de l’homme , a été analysé dans notre n° 3. M. de Rougemont dirige le Ce

1055 ontières ?[préface] (1958)j L’homme ne vit pas de pain seulement, mais ne vit pas longtemps sans pain. Ainsi de l’Europ

1056 ement, mais ne vit pas longtemps sans pain. Ainsi de l’Europe. Pour unir les 332 millions d’habitants qu’elle compte à l’o

1057 in. Ainsi de l’Europe. Pour unir les 332 millions d’ habitants qu’elle compte à l’ouest du rideau de fer — en attendant les

1058 ns d’habitants qu’elle compte à l’ouest du rideau de fer — en attendant les 98 millions retenus à l’est dans l’orbite russ

1059 l’orbite russe — la seule réussite dans douze ans d’ institutions économiques ne peut évidemment suffire ; mais leur échec

1060 ntôt mortel. Or le Marché commun des Six, la zone de libre-échange des Dix-Sept, et leur future intégration dans le cadre

1061 ix-Sept, et leur future intégration dans le cadre d’ une Grande Europe associée aux nations africaines ne supposent pas seu

1062 ntellectuelle, par quoi j’entends un vaste effort de libre réflexion et d’imagination de la part des économistes, et une p

1063 i j’entends un vaste effort de libre réflexion et d’ imagination de la part des économistes, et une prise de conscience éco

1064 omique dans le grand public. L’étude des réalités de base et des problèmes présents de l’économie, incroyablement négligée

1065 de des réalités de base et des problèmes présents de l’économie, incroyablement négligée par l’École, doit devenir partie

1066 ligée par l’École, doit devenir partie intégrante de la culture d’un honnête homme au xxe siècle, si l’on veut que la dém

1067 ole, doit devenir partie intégrante de la culture d’ un honnête homme au xxe siècle, si l’on veut que la démocratie foncti

1068 nnête homme vote, et sa voix détermine l’économie de son pays, que ce soit d’une manière directe comme en Suisse, ou plus

1069 oix détermine l’économie de son pays, que ce soit d’ une manière directe comme en Suisse, ou plus souvent par députés inter

1070 édités en librairie ; leurs auteurs ne prévoient d’ être lus que par leurs étudiants et leurs collègues. Entre un public i

1071 erts liés par leur mission, et des savants privés d’ une large audience, peu ou point d’échanges efficaces. Il faudrait réf

1072 savants privés d’une large audience, peu ou point d’ échanges efficaces. Il faudrait réfléchir librement sur les problèmes

1073 uoi le Centre européen de la culture a jugé utile de réunir en séminaire une vingtaine d’économistes, à la fois réputés et

1074 a jugé utile de réunir en séminaire une vingtaine d’ économistes, à la fois réputés et indépendants, pour leur poser une qu

1075 ndants, pour leur poser une question populaire et d’ une simplicité presque choquante, une question qu’il jugeait présente

1076 vraisemblance. Que la répugnance professionnelle de nos séminaristes à « jouer » ainsi — répugnance sensible dans celles

1077 e du sérieux avec lequel ils ont essayé néanmoins de répondre à notre question. Nous nous étions efforcés de les persuader

1078 ondre à notre question. Nous nous étions efforcés de les persuader dès l’abord qu’il importait de réduire certaines object

1079 rcés de les persuader dès l’abord qu’il importait de réduire certaines objections de principe, ou mieux certaines craintes

1080 d qu’il importait de réduire certaines objections de principe, ou mieux certaines craintes vagues mais courantes. Car le g

1081 antes. Car le grand public — précédé par beaucoup d’ intellectuels et suivi par beaucoup de députés — n’hésite pas, lui, à

1082 up de députés — n’hésite pas, lui, à jouer le jeu de « ce qui se passerait si… » Seulement, il a tendance à jouer perdant,

1083 lement, il a tendance à jouer perdant, à préjuger de catastrophes dont rien ne prouve qu’elles se produiraient. Il ne croi

1084 xperts croient aux chiffres, et que les militants de l’Europe fédérée croient aux bienfaits automatiques de l’union, sans

1085 Europe fédérée croient aux bienfaits automatiques de l’union, sans avoir toujours calculé son prix. Nos économistes se son

1086 économistes se sont réunis deux fois, à six mois de distance, et leurs débats ont été chauds. Tout parti pris de militant

1087 , et leurs débats ont été chauds. Tout parti pris de militant leur eût paru indigne d’une attitude proprement scientifique

1088 Tout parti pris de militant leur eût paru indigne d’ une attitude proprement scientifique. Pourtant, un optimisme européen

1089 ant, un optimisme européen bien tempéré se dégage de leurs études, dont le plan fut arrêté en commun, la rédaction stricte

1090 se au point réciproque. Que pouvons-nous attendre de ces études ? Nous nous sommes refusés à leur donner après coup le tou

1091 t de leur véritable utilité. Elles ont déjà servi de base à plusieurs brochures de large diffusion18, à des articles et à

1092 lles ont déjà servi de base à plusieurs brochures de large diffusion18, à des articles et à des émissions de radio. Mais c

1093 ge diffusion18, à des articles et à des émissions de radio. Mais c’est leur publication en recueil qui leur donnera leur v

1094 cueil qui leur donnera leur vraie valeur, chacune d’ elles appuyant, nuançant ou parfois corrigeant les autres. Aux économi

1095 ls et commerçants, elles apporteront des analyses d’ une rare objectivité. Que se passerait-il si… ? — Rien ou presque rien

1096 Que se passerait-il si… ? — Rien ou presque rien de ce que vous redoutiez, mais beaucoup de bonnes choses qu’il vous rest

1097 qu’il vous reste à vouloir — avec au moins autant de lucidité que les totalitaires en apportent à vouloir un monde inhumai

1098 and public, ces études donneront une idée précise de la complexité des problèmes qui se posent, mais aussi des espoirs aut

1099 tant de peine à s’accepter, à saisir ses chances de grandeur, à guérir de son pessimisme et de ses crampes nationalistes…

1100 epter, à saisir ses chances de grandeur, à guérir de son pessimisme et de ses crampes nationalistes… Puisse cet ouvrage co

1101 hances de grandeur, à guérir de son pessimisme et de ses crampes nationalistes… Puisse cet ouvrage contribuer à ranimer un

1102 même qui suffirait sans doute à la rendre capable d’ exercer à nouveau sa vocation mondiale. 18. Voir en particulier : P

1103 faits , publications du CEC. j. Rougemont Denis de , « [Préface] Demain l’Europe sans frontières  », Demain l’Europe sans

1104 . C’est même elle, et elle seule, qui nous permet de parler de l’Europe comme d’une unité existante, sur laquelle il devie

1105 me elle, et elle seule, qui nous permet de parler de l’Europe comme d’une unité existante, sur laquelle il devient possibl

1106 eule, qui nous permet de parler de l’Europe comme d’ une unité existante, sur laquelle il devient possible de construire no

1107 unité existante, sur laquelle il devient possible de construire notre union nécessaire. Ceux qui disent redouter on ne sai

1108 culturelle » comme conséquence lugubre et fatale de l’union politique, sont parfois en réalité des adversaires politiques

1109 ont parfois en réalité des adversaires politiques de cette union et le sort de la culture leur importe très peu ; mais ils

1110 adversaires politiques de cette union et le sort de la culture leur importe très peu ; mais ils sont plus souvent les inn

1111 ais ils sont plus souvent les innocentes victimes d’ une illusion scolaire : ils ont retenu de leurs manuels que l’Europe s

1112 victimes d’une illusion scolaire : ils ont retenu de leurs manuels que l’Europe se divise en autant de cultures qu’elle a

1113 de leurs manuels que l’Europe se divise en autant de cultures qu’elle a de nations, celles-ci correspondant d’ailleurs aux

1114 ’Europe se divise en autant de cultures qu’elle a de nations, celles-ci correspondant d’ailleurs aux langues, aux coutumes

1115 lkloriques, et aux frontières naturelles (chaînes de montagnes ou rivières). On ne perdra pas son temps à expliquer que to

1116 oute institution culturelle soucieuse des destins de l’Europe. D’une part, une telle institution devra montrer que l’Europ

1117 st d’abord une culture, qu’elle doit à sa culture d’ avoir dominé le monde, qui retourne aujourd’hui contre elle les armes

1118 que cette culture est commune à tous les peuples de l’Europe, puisque leurs nations mêmes en sont nées, non l’inverse. D

1119 D’autre part, cette institution devra s’efforcer de réduire les résistances invétérées à notre union, les « blocs psychol

1120 éducation scolaire depuis un siècle, ou résultant de maladies chroniques de notre culture millénaire. On ne fera pas l’Eu

1121 is un siècle, ou résultant de maladies chroniques de notre culture millénaire. On ne fera pas l’Europe sans sa culture, c

1122 fonde et manifeste l’unité qui est la vraie base de notre union ; mais d’autre part, elle seule peut expliquer les divisi

1123 pas l’Europe en répétant qu’il est indispensable de s’unir : tout le monde le sait ; ni en ratifiant des traités : person

1124 iant des traités : personne n’y croit. (On attend de voir…) Et certes il fallait dire : unissons-nous ! Certes, il fallait

1125 s actions précises : 1° Réduire les préjugés, nés d’ une mauvaise éducation qui accrédite l’illusion générale de l’existenc

1126 vaise éducation qui accrédite l’illusion générale de l’existence première de « cultures nationales » et de « l’éternité »

1127 édite l’illusion générale de l’existence première de « cultures nationales » et de « l’éternité » de nos États-nations (fo

1128 ’existence première de « cultures nationales » et de « l’éternité » de nos États-nations (formés pour la plupart depuis mo

1129 e de « cultures nationales » et de « l’éternité » de nos États-nations (formés pour la plupart depuis moins de cent ans…)

1130 tats-nations (formés pour la plupart depuis moins de cent ans…) 2° Informer les élites et les masses, leur montrer le dram

1131 r les élites et les masses, leur montrer le drame de l’Europe, mais aussi le rôle décisif de cette Europe dans les transfo

1132 le drame de l’Europe, mais aussi le rôle décisif de cette Europe dans les transformations du monde au xxe siècle, sa voc

1133 n avenir si elle s’unit. 3° Créer des instruments de coopération pour les différentes branches de la culture, sans tenir c

1134 ents de coopération pour les différentes branches de la culture, sans tenir compte des frontières nationales quand les pro

1135 n fait dans ce sens depuis que la grande question de l’union européenne s’est trouvée posée, au lendemain de la dernière g

1136 nion européenne s’est trouvée posée, au lendemain de la dernière guerre ? Parallèlement aux mouvements fédéralistes, une s

1137 allèlement aux mouvements fédéralistes, une série d’ instituts d’études européennes se créent dès 194620. Ils nouent des li

1138 ux mouvements fédéralistes, une série d’instituts d’ études européennes se créent dès 194620. Ils nouent des liens entre eu

1139 entre eux dès 1950. On en compte aujourd’hui plus d’ une vingtaine, pour la plupart liés à des universités, ou de rang univ

1140 taine, pour la plupart liés à des universités, ou de rang universitaire. En 1948, le Congrès de l’Europe, à La Haye, décid

1141 és, ou de rang universitaire. En 1948, le Congrès de l’Europe, à La Haye, décide la création d’un Centre européen de la cu

1142 ongrès de l’Europe, à La Haye, décide la création d’ un Centre européen de la culture. Celui-ci se fonde à Genève en l950.

1143 Nous y reviendrons. En 1949, un Congrès européen de la culture se réunit à Lausanne, et définit les tâches du Centre euro

1144 ches du Centre européen de la culture, du Collège d’ Europe (Bruges), d’une association des universitaires, et d’un Laborat

1145 péen de la culture, du Collège d’Europe (Bruges), d’ une association des universitaires, et d’un Laboratoire européen de re

1146 Bruges), d’une association des universitaires, et d’ un Laboratoire européen de recherches nucléaires (fondé en 1953 sous l

1147 des universitaires, et d’un Laboratoire européen de recherches nucléaires (fondé en 1953 sous le nom de CERN, à Genève.)

1148 recherches nucléaires (fondé en 1953 sous le nom de CERN, à Genève.) Le Conseil de l’Europe, issu d’une résolution du con

1149 de CERN, à Genève.) Le Conseil de l’Europe, issu d’ une résolution du congrès de La Haye, est constitué neuf mois plus tar

1150 eil de l’Europe, issu d’une résolution du congrès de La Haye, est constitué neuf mois plus tard, et comporte dès le début

1151 te dès le début une direction culturelle, coiffée d’ un Comité d’experts des 16 gouvernements membres. Il élabore et fait r

1152 but une direction culturelle, coiffée d’un Comité d’ experts des 16 gouvernements membres. Il élabore et fait ratifier une

1153 péens, crée des bourses, organise des expositions de peinture, patronne la révision des manuels d’histoire, et prépare une

1154 ons de peinture, patronne la révision des manuels d’ histoire, et prépare une série de publications scientifiques. Une Asso

1155 sion des manuels d’histoire, et prépare une série de publications scientifiques. Une Association des universitaires d’Euro

1156 scientifiques. Une Association des universitaires d’ Europe et une Association européenne des enseignants se fondent en 195

1157 péenne des écoles propose chaque année des sujets de rédaction sur l’Europe aux élèves des écoles de 7 pays, et donne des

1158 s de rédaction sur l’Europe aux élèves des écoles de 7 pays, et donne des prix à 80 d’entre eux, sur plus de 300 000 parti

1159 ays, et donne des prix à 80 d’entre eux, sur plus de 300 000 participants. Une Fondation européenne de la culture a été cr

1160 de 300 000 participants. Une Fondation européenne de la culture a été créée à Genève en 1954, et opère depuis cette année

1161 des volumes, thèses, mémoires et numéros spéciaux de revues sur l’Europe et ses problèmes compte déjà, depuis dix ans, plu

1162 compte déjà, depuis dix ans, plusieurs centaines de titres, parus dans toutes nos langues, sans parler de milliers de bro

1163 itres, parus dans toutes nos langues, sans parler de milliers de brochures. Cet effort est immense. Est-il trop dispersé p

1164 dans toutes nos langues, sans parler de milliers de brochures. Cet effort est immense. Est-il trop dispersé pour porter p

1165 ens ? Hélas ! la somme totale des budgets annuels de toutes les organisations que je viens de citer (à l’exception du CERN

1166 nstruction) équivaudrait à peine aux possibilités d’ une des « petites » fondations qui existent par milliers en Amérique d

1167 Il serait temps que nos États prennent conscience de ces deux vérités primordiales, à savoir : 1° que l’Europe n’a dû sa p

1168 puissance qu’aux inventions, procédés et systèmes de tous ordres directement issus de sa culture et que, par suite, sans l

1169 édés et systèmes de tous ordres directement issus de sa culture et que, par suite, sans la vitalité de cette culture, elle

1170 de sa culture et que, par suite, sans la vitalité de cette culture, elle se réduirait vite à ce qu’elle est sur la carte :

1171 tinent s’obstinent à lui refuser même le centième de l’aide que lui accordent chez eux les empires ascendants et réalistes

1172 ux les empires ascendants et réalistes des USA et de l’URSS21. ⁂ Le Centre européen de la culture Sans attendre que

1173 ndre que ce problème ait reçu la moindre promesse d’ un début de solution raisonnable, le Centre européen de la culture a d

1174 problème ait reçu la moindre promesse d’un début de solution raisonnable, le Centre européen de la culture a décidé dès 1

1175 e Centre européen de la culture a décidé dès 1950 de tenter l’aventure d’exister. Il existe depuis sept ans. Son exemple p

1176 la culture a décidé dès 1950 de tenter l’aventure d’ exister. Il existe depuis sept ans. Son exemple peut éclairer. J’essai

1177 ans. Son exemple peut éclairer. J’essaierai donc de le décrire, très brièvement, pour illustrer les considérations, un pe

1178 es, qui précèdent. La mission générale du CEC est de contribuer à l’union de l’Europe en ralliant les forces vives de la c

1179 ssion générale du CEC est de contribuer à l’union de l’Europe en ralliant les forces vives de la culture dans tous nos peu

1180 l’union de l’Europe en ralliant les forces vives de la culture dans tous nos peuples, et en leur offrant : un lieu de ren

1181 ns tous nos peuples, et en leur offrant : un lieu de rencontre, des instruments de coordination, un foyer d’études et d’in

1182 r offrant : un lieu de rencontre, des instruments de coordination, un foyer d’études et d’initiatives. Fondé sous les ausp

1183 contre, des instruments de coordination, un foyer d’ études et d’initiatives. Fondé sous les auspices du Mouvement européen

1184 instruments de coordination, un foyer d’études et d’ initiatives. Fondé sous les auspices du Mouvement européen, le CEC est

1185 éen, le CEC est issu des délibérations du congrès de La Haye (mai 1948). Dès février 1949, un Bureau d’études s’ouvrait à

1186 e La Haye (mai 1948). Dès février 1949, un Bureau d’ études s’ouvrait à Genève, chargé d’élaborer le travail de l’instituti

1187 49, un Bureau d’études s’ouvrait à Genève, chargé d’ élaborer le travail de l’institution projetée, et d’organiser une « Co

1188 s’ouvrait à Genève, chargé d’élaborer le travail de l’institution projetée, et d’organiser une « Conférence européenne de

1189 élaborer le travail de l’institution projetée, et d’ organiser une « Conférence européenne de la culture ». Celle-ci se réu

1190 jetée, et d’organiser une « Conférence européenne de la culture ». Celle-ci se réunit à Lausanne en décembre 1949, et form

1191 n association régie par la loi suisse, elle jouit de la personnalité juridique. Ses ressources sont assurées par des dons

1192 nt assurées par des dons et subventions provenant de sources privées ou officielles, par les cotisations de ses membres et

1193 urces privées ou officielles, par les cotisations de ses membres et par la vente de ses publications. Le choix des objecti

1194 ar les cotisations de ses membres et par la vente de ses publications. Le choix des objectifs du CEC est déterminé par deu

1195 u CEC est déterminé par deux critères : l’urgence d’ un problème culturel qui se pose à l’échelle européenne, et ses possib

1196 pose à l’échelle européenne, et ses possibilités de solution pratiques. Un budget réduit au strict minimum opératif, un p

1197 s qui distinguent cet organisme privé et européen de la plupart des organisations gouvernementales et internationales exis

1198 nt leur autonomie, tout en agissant dans le cadre d’ un programme commun. Quelles sont donc les grandes lignes de ce progra

1199 amme commun. Quelles sont donc les grandes lignes de ce programme ? Laissant de côté des réalisations passées, qui furent

1200 onc les grandes lignes de ce programme ? Laissant de côté des réalisations passées, qui furent entre autres le Congrès de

1201 tions passées, qui furent entre autres le Congrès de compositeurs et critiques musicaux à Rome, en 1953, le Prix européen

1202 tiques musicaux à Rome, en 1953, le Prix européen de littérature, et l’initiative de la création du CERN, bornons-nous à d

1203 le Prix européen de littérature, et l’initiative de la création du CERN, bornons-nous à décrire les trois principaux cham

1204 ornons-nous à décrire les trois principaux champs d’ activité entre lesquels se répartissent les secrétariats du CEC : éduc

1205 quer dans les nouvelles générations la conscience d’ une commune appartenance aux formes de pensée et de vie qui définissen

1206 conscience d’une commune appartenance aux formes de pensée et de vie qui définissent notre culture et notre civilisation,

1207 ’une commune appartenance aux formes de pensée et de vie qui définissent notre culture et notre civilisation, au-delà des

1208 actuelles ; d’autre part, exposer l’état présent de l’Europe, son drame mais aussi ses possibilités d’avenir au plan mond

1209 e l’Europe, son drame mais aussi ses possibilités d’ avenir au plan mondial, si elle unit ses forces pendant qu’il en est t

1210 st temps. Le Centre a donc suscité dans plusieurs de nos pays des expériences-pilotes d’éducation européenne prenant app

1211 ns plusieurs de nos pays des expériences-pilotes d’ éducation européenne prenant appui soit sur le corps enseignant d’une

1212 éenne prenant appui soit sur le corps enseignant d’ une région donnée, soit sur des foyers de culture populaire en milieu

1213 seignant d’une région donnée, soit sur des foyers de culture populaire en milieu rural ou urbain. Il leur fournit des moye

1214 u urbain. Il leur fournit des moyens audiovisuels d’ enseignement, des publications spéciales, des experts ou moniteurs, et

1215 t des subventions, réparties selon les directives d’ un Comité d’éducateurs où se trouvent représentés la plupart de nos pa

1216 tions, réparties selon les directives d’un Comité d’ éducateurs où se trouvent représentés la plupart de nos pays (y compri

1217 États scandinaves). Enfin, il les fait bénéficier de ses moyens d’information européenne. Ceux-ci consistent en publicatio

1218 ves). Enfin, il les fait bénéficier de ses moyens d’ information européenne. Ceux-ci consistent en publications, films et c

1219 ix à huit numéros spéciaux consacrés à des sujets d’ intérêt européen, et largement diffusés en plusieurs langues. Des pla

1220 rgement diffusés en plusieurs langues. Des plans de causerie , établis en tenant compte des milieux populaires ou des gro

1221 es militants auxquels ils s’adressent, permettent de multiplier les exposés documentés donnés dans de petits groupes de tr

1222 de multiplier les exposés documentés donnés dans de petits groupes de travail. Un Service de conférenciers fournit des

1223 exposés documentés donnés dans de petits groupes de travail. Un Service de conférenciers fournit des orateurs aux organ

1224 és dans de petits groupes de travail. Un Service de conférenciers fournit des orateurs aux organisations intéressées par

1225 téressées par les problèmes européens. Une série, de films documentaires sur l’Europe est en cours de réalisation. Enfin

1226 e films documentaires sur l’Europe est en cours de réalisation. Enfin, l’information de la presse est assurée par les A

1227 est en cours de réalisation. Enfin, l’information de la presse est assurée par les Actualités européennes , fascicule men

1228 portants Séminaires, l’un sur l’avenir économique d’ une Europe sans frontières intérieures l’autre sur les conséquences po

1229 ences pour la culture, l’éducation et les loisirs de la nouvelle révolution technique que symbolise le terme d’automation.

1230 velle révolution technique que symbolise le terme d’ automation. En outre, le CEC élabore actuellement trois plans nouveaux

1231 bore actuellement trois plans nouveaux : création d’ un Institut technologique de formation européenne, pour les ingénieur

1232 nouveaux : création d’un Institut technologique de formation européenne, pour les ingénieurs ; convocation d’une Confére

1233 ion européenne, pour les ingénieurs ; convocation d’ une Conférence « Afrique du Nord-Europe » ; organisation d’un Dialogue

1234 férence « Afrique du Nord-Europe » ; organisation d’ un Dialogue Asie-Europe. Parallèlement l’Association des instituts d’

1235 urope. Parallèlement l’Association des instituts d’ études européennes , qui groupe 19 instituts de niveau universitaire,

1236 ts d’études européennes , qui groupe 19 instituts de niveau universitaire, et l’Association européenne des festivals de m

1237 taire, et l’Association européenne des festivals de musique , qui groupe 21 grands festivals, poursuivent la coordination

1238 21 grands festivals, poursuivent la coordination de leurs programmes et de leurs publications, grâce à leurs secrétariats

1239 oursuivent la coordination de leurs programmes et de leurs publications, grâce à leurs secrétariats assurés par le CEC. Ce

1240 éenne des enseignants et celle des universitaires d’ Europe proposent au CEC une forme « fédéraliste » d’affiliation, sauve

1241 Europe proposent au CEC une forme « fédéraliste » d’ affiliation, sauvegardant l’autonomie des trois institutions tout en a

1242 réelles et organiques qui sont l’une des sources de la vitalité et des tensions fécondes de notre culture. Il ne s’agit n

1243 s sources de la vitalité et des tensions fécondes de notre culture. Il ne s’agit nullement de les uniformiser. Cependant,

1244 fécondes de notre culture. Il ne s’agit nullement de les uniformiser. Cependant, il est urgent de leur offrir les moyens p

1245 ment de les uniformiser. Cependant, il est urgent de leur offrir les moyens pratiques d’échanger leurs expériences, de gro

1246 il est urgent de leur offrir les moyens pratiques d’ échanger leurs expériences, de grouper leurs forces en vue de certaine

1247 es moyens pratiques d’échanger leurs expériences, de grouper leurs forces en vue de certaines actions communes, et de mett

1248 s forces en vue de certaines actions communes, et de mettre en pool celles de leurs activités ou de leurs ressources — mai

1249 nes actions communes, et de mettre en pool celles de leurs activités ou de leurs ressources — mais celles-là seules ! — qu

1250 et de mettre en pool celles de leurs activités ou de leurs ressources — mais celles-là seules ! — qui semblent bien devoir

1251 là seules ! — qui semblent bien devoir bénéficier d’ une intégration plus poussée. À l’heure où les institutions économique

1252 ure où les institutions économiques et politiques de l’Europe naissante proclament leur volonté de concentrer autant que p

1253 ues de l’Europe naissante proclament leur volonté de concentrer autant que possible leurs services et leurs assemblées, un

1254 ort parallèle doit être entrepris dans le domaine de la culture. Coordonner les autonomies, telle doit être à mes yeux la

1255 à mes yeux la devise, spécifiquement fédéraliste, de cet effort. Un autre parallèle s’impose, entre la situation politique

1256 la situation politique et la situation culturelle de l’Europe. Minorisée aux Nations unies, menacée dans ses positions mon

1257 s mondiales par des empires qui l’accusent encore de colonialisme, mais la maintiennent en fait sous la pression constante

1258 a maintiennent en fait sous la pression constante de leur expansion économique ou idéologique, l’Europe reste sans voix po

1259 ntredisent souvent et ne convergent jamais, faute d’ une institution unique et compétente. L’Europe a donc besoin d’un mini

1260 tion unique et compétente. L’Europe a donc besoin d’ un ministère des Affaires étrangères européennes. Mais de même, dans l

1261 chnique d’une part, et les civilisations diverses de l’Asie, de l’Afrique et du Moyen-Orient d’autre part, appellent des s

1262 ne part, et les civilisations diverses de l’Asie, de l’Afrique et du Moyen-Orient d’autre part, appellent des solutions qu

1263 nt d’autre part, appellent des solutions qu’aucun de nos États-nations ne peut élaborer, et moins encore faire accepter à

1264 re accepter à lui tout seul. Ces difficultés sont d’ ordre culturel (spirituel et sociologique à la fois) bien avant d’être

1265 (spirituel et sociologique à la fois) bien avant d’ être politiques. Là encore, l’Europe mise au défi en tant qu’ensemble

1266 culturel, reste sans voix. C’est ici la nécessité de relations culturelles européennes qui se fait jour. Le besoin d’une c

1267 lturelles européennes qui se fait jour. Le besoin d’ une coordination entre nos forces culturelles, et le besoin de représe

1268 nation entre nos forces culturelles, et le besoin de représentation commune de ces forces vis-à-vis du reste du monde nous

1269 lturelles, et le besoin de représentation commune de ces forces vis-à-vis du reste du monde nous appellent et nous poussen

1270 fficace pour unir nos élites que la confrontation de leurs diversités avec d’autres cultures ou civilisations : vue de l’e

1271 tés avec d’autres cultures ou civilisations : vue de l’extérieur, l’Europe forme un tout évident. En retour, nos différent

1272 le dialogue nécessaire avec les autres traditions de culture, que si elles se présentent au nom de l’Europe entière, sûre

1273 es se présentent au nom de l’Europe entière, sûre de sa vocation, donc ouverte à l’avenir. 19. On parle 6 langues en Fr

1274 etc. Le folklore révèle précisément la communauté de traditions de tous nos peuples. Le Rhin serait une frontière naturell

1275 re révèle précisément la communauté de traditions de tous nos peuples. Le Rhin serait une frontière naturelle, mais le Dan

1276 iens naturels ?…, etc. 20. Voir l’ Annuaire 1957 de l’Association des instituts d’études européennes (AIEE) publié en nov

1277 r l’ Annuaire 1957 de l’Association des instituts d’ études européennes (AIEE) publié en novembre 1957 par le Centre europé

1278 A : 10 % du revenu national. k. Rougemont Denis de , « Europe et culture », Quelle Europe ?, Paris, Fayard, 1958, p. 69-7

1279 Pourquoi la guerre ? Un échange de lettres prophétique entre Einstein et Freud (avril 1958)l Cela se

1280 l 1958)l Cela se passait en 1932, sur le seuil de ce quart de siècle qui allait voir l’ascension d’Hitler, puis sa ruin

1281 Cela se passait en 1932, sur le seuil de ce quart de siècle qui allait voir l’ascension d’Hitler, puis sa ruine entraînant

1282 de ce quart de siècle qui allait voir l’ascension d’ Hitler, puis sa ruine entraînant celle de l’Europe entière, la renaiss

1283 scension d’Hitler, puis sa ruine entraînant celle de l’Europe entière, la renaissance de l’idée d’union, et l’arme absolue

1284 raînant celle de l’Europe entière, la renaissance de l’idée d’union, et l’arme absolue dans les mains de deux empires pres

1285 lle de l’Europe entière, la renaissance de l’idée d’ union, et l’arme absolue dans les mains de deux empires presque immobi

1286 l’idée d’union, et l’arme absolue dans les mains de deux empires presque immobilisés par la terreur d’y recourir… Que pen

1287 e deux empires presque immobilisés par la terreur d’ y recourir… Que pensaient et pressentaient ces deux génies de premier

1288 r… Que pensaient et pressentaient ces deux génies de premier ordre, à la veille même du déchaînement dont ils avaient choi

1289 ille même du déchaînement dont ils avaient choisi d’ examiner les causes, afin de proposer les moyens de le prévenir ? On l

1290 ’examiner les causes, afin de proposer les moyens de le prévenir ? On les relit avec une sorte d’avidité et d’anxiété rétr

1291 yens de le prévenir ? On les relit avec une sorte d’ avidité et d’anxiété rétrospective. L’un se borne à poser des question

1292 évenir ? On les relit avec une sorte d’avidité et d’ anxiété rétrospective. L’un se borne à poser des questions, dans un do

1293 sonnable et moyen. L’autre répond dans la rigueur de sa pensée : il est chez lui. Que dit Einstein ? Il dit que, la guerre

1294 ison. Mais pourquoi la raison n’a-t-elle pas plus de force ? Pourquoi les masses suivent-elles leur « classe régnante » ?

1295 les instincts ? Et comment supprimer « le besoin de haine » dégénérant en « psychose collective » ? C’est écrit de Potsda

1296 générant en « psychose collective » ? C’est écrit de Potsdam et sous l’œil des barbares. Freud répond de sa Vienne natale

1297 Potsdam et sous l’œil des barbares. Freud répond de sa Vienne natale en sursis — elle n’en aura plus pour longtemps — et

1298 e n’en aura plus pour longtemps — et le pacifisme d’ Einstein se voit soumis à l’examen analytique d’un praticien courtois,

1299 e d’Einstein se voit soumis à l’examen analytique d’ un praticien courtois, mais dénué d’illusions. Non, la force, dit-il,

1300 en analytique d’un praticien courtois, mais dénué d’ illusions. Non, la force, dit-il, n’est pas le contraire du droit. Car

1301 t. Car le droit n’est en somme qu’une autre forme de la violence inévitable. C’est la violence née de « l’union de plusieu

1302 de la violence inévitable. C’est la violence née de « l’union de plusieurs faibles ». La violence d’un seul ne peut être

1303 ce inévitable. C’est la violence née de « l’union de plusieurs faibles ». La violence d’un seul ne peut être brisée que pa

1304 de « l’union de plusieurs faibles ». La violence d’ un seul ne peut être brisée que par l’union de ses victimes, fondant s

1305 nce d’un seul ne peut être brisée que par l’union de ses victimes, fondant sur l’intérêt et sur le sentiment les lois de l

1306 ondant sur l’intérêt et sur le sentiment les lois de leur communauté. Il s’agit donc de transférer le pouvoir à quelque « 

1307 iment les lois de leur communauté. Il s’agit donc de transférer le pouvoir à quelque « plus vaste unité ». Mais la Société

1308 ité ». Mais la Société des Nations ne dispose pas d’ une force à son échelle et ne provoque pas l’« identification » créatr

1309 et ne provoque pas l’« identification » créatrice de communauté. Passant aux grandes questions naïves anxieusement posées

1310 maîtrise en invoquant l’Éros vital et l’instinct de mort, également essentiels à l’homme. « On ferait œuvre inutile à pré

1311 » Mais peut-on les canaliser vers d’autres formes d’ expression que la guerre ? Ici, Freud va nous étonner. D’une part, il

1312 es ; d’autre part, à l’autorité : ce serait celle d’ une élite véritable de chefs, défenseurs supérieurs qui dirigeraient l

1313 ’autorité : ce serait celle d’une élite véritable de chefs, défenseurs supérieurs qui dirigeraient les masses. Mesures à t

1314 ns aucun doute. Mais on ne peut prendre son parti de la guerre, pourtant « biologiquement fondée ». Car l’évolution cultur

1315 ment fondée ». Car l’évolution culturelle, à tant d’ égards contre nature, fait que certains hommes d’aujourd’hui éprouvent

1316 d’égards contre nature, fait que certains hommes d’ aujourd’hui éprouvent en présence de la guerre bien autre chose qu’une

1317 ain ? Freud confie son espoir lointain à l’action de ces deux éléments : le développement de la culture, et la crainte des

1318 l’action de ces deux éléments : le développement de la culture, et la crainte des effets d’une guerre totale. Einstein p

1319 loppement de la culture, et la crainte des effets d’ une guerre totale. Einstein propose une seule idée, d’une irréfutable

1320 guerre totale. Einstein propose une seule idée, d’ une irréfutable logique : celle d’un gouvernement mondial. J’y reviend

1321 une seule idée, d’une irréfutable logique : celle d’ un gouvernement mondial. J’y reviendrai. Pour le reste, son diagnostic

1322 Pour le reste, son diagnostic joue sur des images d’ Épinal. La « classe régnante » et les marchands de canons tiendraient

1323 d’Épinal. La « classe régnante » et les marchands de canons tiendraient la presse, l’école et les « organisations religieu

1324 raient ainsi les masses, les poussant à la haine, d’ où sortirait la guerre… Mais ce qui « règne » en Occident, il y a beau

1325 n publique qui les prépare, résultent aujourd’hui de l’État, des Partis, des Affaires, et parfois des Églises — et non pas

1326 des Affaires, et parfois des Églises — et non pas de leur complicité, mais plutôt de leurs dissensions. Quand bien même ce

1327 ises — et non pas de leur complicité, mais plutôt de leurs dissensions. Quand bien même ces puissances pousseraient toutes

1328 usseraient toutes dans le même sens à l’intérieur d’ une même nation, la résultante de leur action serait modifiée ou, dans

1329 ns à l’intérieur d’une même nation, la résultante de leur action serait modifiée ou, dans certains cas, annulée par la pre

1330 ar la pression contraire d’autres empires. L’idée d’ une classe régnante fauteuse de guerre est d’un autre âge, quoique pop

1331 es empires. L’idée d’une classe régnante fauteuse de guerre est d’un autre âge, quoique populaire. Et l’on peut s’étonner

1332 idée d’une classe régnante fauteuse de guerre est d’ un autre âge, quoique populaire. Et l’on peut s’étonner qu’Einstein l’

1333 gence critique, lui qui voyait pourtant et vivait de si près la montée d’Hitler au pouvoir, malgré l’opposition des partis

1334 ui voyait pourtant et vivait de si près la montée d’ Hitler au pouvoir, malgré l’opposition des partis, des nantis, des Égl

1335 des partis, des nantis, des Églises et des cadres de l’État, pour une fois tous hostiles à la guerre. Ce grand homme, plei

1336 tous hostiles à la guerre. Ce grand homme, plein de bon sens dans sa conversation, cédait facilement aux clichés quand il

1337 hés quand il s’exprimait en public. Dans son rôle de critique des clichés « pacifistes » Freud, au contraire, paraît plus

1338 l que jamais. En réduisant l’opposition classique de la Force et du Droit à celle de deux violences, il définit les condit

1339 osition classique de la Force et du Droit à celle de deux violences, il définit les conditions de toute politique réaliste

1340 elle de deux violences, il définit les conditions de toute politique réaliste. Quatre ans après l’échange de lettres qu’on

1341 te politique réaliste. Quatre ans après l’échange de lettres qu’on va lire, Hitler réoccupait la Rhénanie. À Paris, le pré

1342 e, la force du Droit ! » Traduite dans les termes de Freud, cette déclaration signifiait qu’à la violence d’un seul s’oppo

1343 ud, cette déclaration signifiait qu’à la violence d’ un seul s’opposerait la violence née de l’union de ses victimes. Mais,

1344 a violence d’un seul s’opposerait la violence née de l’union de ses victimes. Mais, comme en fait il n’y avait pas d’union

1345 d’un seul s’opposerait la violence née de l’union de ses victimes. Mais, comme en fait il n’y avait pas d’union, cela reve

1346 es victimes. Mais, comme en fait il n’y avait pas d’ union, cela revenait à opposer aux chars d’Hitler une forte page de rh

1347 it pas d’union, cela revenait à opposer aux chars d’ Hitler une forte page de rhétorique. Nous voici donc ramenés à la néce

1348 enait à opposer aux chars d’Hitler une forte page de rhétorique. Nous voici donc ramenés à la nécessité d’une autorité sup

1349 hétorique. Nous voici donc ramenés à la nécessité d’ une autorité supérieure à celle des nations « souveraines ». Einstein

1350 dictateurs, les « classes régnantes » au respect de la loi nouvelle ? Tandis que le physicien rêve d’une autorité d’ordre

1351 de la loi nouvelle ? Tandis que le physicien rêve d’ une autorité d’ordre moral, le psychologue paraît attendre davan­tage

1352 lle ? Tandis que le physicien rêve d’une autorité d’ ordre moral, le psychologue paraît attendre davan­tage de la terreur q

1353 moral, le psychologue paraît attendre davan­tage de la terreur qu’inspirent les armes physiques : « La guerre de demain,

1354 ur qu’inspirent les armes physiques : « La guerre de demain, écrit Freud, par suite du perfectionnement des engins de dest

1355 t Freud, par suite du perfectionnement des engins de destruction, équivaudrait à l’extermination de l’un des adversaires,

1356 ns de destruction, équivaudrait à l’extermination de l’un des adversaires, et peut-être même des deux. » D’où l’idée d’une

1357 un des adversaires, et peut-être même des deux. » D’ où l’idée d’une « paix éternelle » imposée par une arme assez puissant

1358 saires, et peut-être même des deux. » D’où l’idée d’ une « paix éternelle » imposée par une arme assez puissante pour que l

1359 éplore que le super-État qu’il rêve soit dépourvu d’ une force à sa mesure. Il la cherche en vain, ne voit rien… Et c’est à

1360 s qui aboutira treize ans plus tard à l’explosion d’ Hiroshima. Tragique et sublime ironie de ce dialogue de deux génies, d

1361 explosion d’Hiroshima. Tragique et sublime ironie de ce dialogue de deux génies, dont l’un voit bien l’avenir, mais ignore

1362 oshima. Tragique et sublime ironie de ce dialogue de deux génies, dont l’un voit bien l’avenir, mais ignore qu’il en parle

1363 avoir ! Rêvons là-dessus. Einstein n’a pas cessé de protester contre le péril atomique, ni d’afficher un pacifisme désarm

1364 s cessé de protester contre le péril atomique, ni d’ afficher un pacifisme désarmant. Pourtant, un soir de fièvre, il a sig

1365 fficher un pacifisme désarmant. Pourtant, un soir de fièvre, il a signé la lettre proposant à Roosevelt de fabriquer la bo

1366 ièvre, il a signé la lettre proposant à Roosevelt de fabriquer la bombe. Tout ne s’est-il point passé comme si le calcul p

1367 abitait en lui, déjouant les conclusions sincères de sa raison, l’avait inconsciemment conduit à doter l’homme d’un suprêm

1368 n, l’avait inconsciemment conduit à doter l’homme d’ un suprême instrument de guerre, qui rendrait la guerre impossible ? E

1369 t conduit à doter l’homme d’un suprême instrument de guerre, qui rendrait la guerre impossible ? En fait, la situation s’e

1370 des espaces intersidéraux ? l. Rougemont Denis de , « Pourquoi la guerre ? Un échange de lettres prophétique entre Einst

1371 emont Denis de, « Pourquoi la guerre ? Un échange de lettres prophétique entre Einstein et Freud », Réalités, Paris, avril

1372  Une expérience de fédéralisme : la Suisse (1959)n 1. Du pacte des communes à l’all

1373 rd’hui. En réalité il a fallu neuf mois, au terme d’ une crise de trente-trois ans, succédant à cinq siècles et demi d’alli

1374 éalité il a fallu neuf mois, au terme d’une crise de trente-trois ans, succédant à cinq siècles et demi d’alliances et de

1375 rente-trois ans, succédant à cinq siècles et demi d’ alliances et de guerres entre petits États souverains, et d’inexistenc

1376 , succédant à cinq siècles et demi d’alliances et de guerres entre petits États souverains, et d’inexistence d’un pouvoir

1377 s et de guerres entre petits États souverains, et d’ inexistence d’un pouvoir central. Et cela s’est produit entre le 17 fé

1378 s entre petits États souverains, et d’inexistence d’ un pouvoir central. Et cela s’est produit entre le 17 février et le 17

1379 us obligent à un rappel des origines. Les manuels d’ histoire suisse donnent la date du 1er août 1291 comme celle de la nai

1380 isse donnent la date du 1er août 1291 comme celle de la naissance de la Confédération. Il y a là un étrange anachronisme.

1381 date du 1er août 1291 comme celle de la naissance de la Confédération. Il y a là un étrange anachronisme. Car ce qui se pr

1382 produisit ce jour-là, fut simplement la signature d’ un pacte entre les trois « communes » rurales d’Uri, de Schwyz et d’Un

1383 e d’un pacte entre les trois « communes » rurales d’ Uri, de Schwyz et d’Unterwald, maîtresses des débouchés nord du Gothar

1384 pacte entre les trois « communes » rurales d’Uri, de Schwyz et d’Unterwald, maîtresses des débouchés nord du Gothard. Ce c

1385 es trois « communes » rurales d’Uri, de Schwyz et d’ Unterwald, maîtresses des débouchés nord du Gothard. Ce col était le s

1386 Gothard. Ce col était le seul à relier au travers d’ une seule chaîne des Alpes les moitiés nord et sud du Saint-Empire. D’

1387 es Alpes les moitiés nord et sud du Saint-Empire. D’ où son importance stratégique, commerciale et même culturelle. On n’in

1388 rôle décisif qu’il devait jouer dans la formation de la Suisse et dans la détermination de la mission singulière de ce pay

1389 a formation de la Suisse et dans la détermination de la mission singulière de ce pays. En effet, ce fut bien pour assurer

1390 et dans la détermination de la mission singulière de ce pays. En effet, ce fut bien pour assurer la garde du col au nom de

1391 té impériale ; et cela dès 1231, c’est-à-dire peu d’ années après l’ouverture du col. Au nombre des seigneurs entreprenants

1392 es seigneurs entreprenants qu’il fallait empêcher de dominer la route figuraient en bonne place les Habsbourg, possesseurs

1393 uraient en bonne place les Habsbourg, possesseurs d’ une série de châteaux au nord de la Suisse actuelle, et qui ne cessaie

1394 onne place les Habsbourg, possesseurs d’une série de châteaux au nord de la Suisse actuelle, et qui ne cessaient d’étendre

1395 ourg, possesseurs d’une série de châteaux au nord de la Suisse actuelle, et qui ne cessaient d’étendre leurs domaines vers

1396 u nord de la Suisse actuelle, et qui ne cessaient d’ étendre leurs domaines vers le Gothard. Lorsque Rodolphe de Habsbourg

1397 tre leurs libertés locales et contre leur mission de gardiens du Col. Et c’est pourquoi, au début du mois d’août 1291, — «

1398 diens du Col. Et c’est pourquoi, au début du mois d’ août 1291, — « considérant la malice des temps, et afin de se défendre

1399 ps, et afin de se défendre et maintenir avec plus d’ efficace », les trois coopératives forestières prirent l’engagement de

1400 ois coopératives forestières prirent l’engagement de « s’assister mutuellement de toutes leurs forces, secours et bons off

1401 prirent l’engagement de « s’assister mutuellement de toutes leurs forces, secours et bons offices… envers quiconque tenter

1402 cours et bons offices… envers quiconque tenterait de leur faire violence, de les inquiéter ou molester, en leurs personnes

1403 nvers quiconque tenterait de leur faire violence, de les inquiéter ou molester, en leurs personnes et en leurs biens ». Et

1404 devait « s’il plaît à Dieu, durer à perpétuité ». De fait, il a duré jusqu’à nos jours. Mais ses auteurs étaient bien loin

1405 n jour, la Suisse. Cette première alliance locale d’ hommes libres des campagnes, directement inspirée des pactes en vigueu

1406 u cours des siècles par l’adhésion ou la conquête de communautés voisines, villes ou vallées, petits États indépendants, a

1407 locales, bailliages et pays sujets, toutes unités de langues et d’économies fort diverses. Ce long processus d’agrégations

1408 iages et pays sujets, toutes unités de langues et d’ économies fort diverses. Ce long processus d’agrégations contractuelle

1409 s et d’économies fort diverses. Ce long processus d’ agrégations contractuelles ou forcées, à la faveur de guerres civiles

1410 grégations contractuelles ou forcées, à la faveur de guerres civiles ou étrangères incessantes, se poursuivit de la fin du

1411 civiles ou étrangères incessantes, se poursuivit de la fin du xiiie siècle à la fin du xviiie siècle. Un enchevêtrement

1412 cle à la fin du xviiie siècle. Un enchevêtrement d’ alliances particulières et un sens remarquable de la foi jurée devaien

1413 d’alliances particulières et un sens remarquable de la foi jurée devaient rester, pendant toute cette période, le seul ga

1414 rester, pendant toute cette période, le seul gage d’ unité (relative) de ceux qui se désignaient comme les « Confédérés » (

1415 te cette période, le seul gage d’unité (relative) de ceux qui se désignaient comme les « Confédérés » (Eidgenossen, compag

1416 serment). Le Directoire français, en 1798, tenta d’ imposer une Constitution unitaire aux cantons. Cette expérience jacobi

1417 n unitaire aux cantons. Cette expérience jacobine de « République une et indivisible » échoua contre la résistance presque

1418 différentes religions et cette extrême différence de mœurs qui existent entre ses diverses parties. La nature a fait votre

1419 t fédératif. Vouloir la vaincre, ne peut pas être d’ un homme sage ». En conséquence, l’empereur se déclarait partisan d’un

1420 En conséquence, l’empereur se déclarait partisan d’ une « organisation fédérative où chaque canton se trouve organisé suiv

1421 ntérêt et son opinion ». L’année suivante, l’Acte de Médiation rétablissait l’indépendance des cantons. Au lendemain de la

1422 blissait l’indépendance des cantons. Au lendemain de la chute de l’empereur, en 1815, un nouveau Pacte fédéral consacra le

1423 ndépendance des cantons. Au lendemain de la chute de l’empereur, en 1815, un nouveau Pacte fédéral consacra le retour à l’

1424 le pouvoir central par une simple Diète composée de plénipotentiaires des États, et supprimait le terme de « citoyen suis

1425 énipotentiaires des États, et supprimait le terme de « citoyen suisse » qu’avait utilisé l’Acte de Médiation. Le « Corps h

1426 rme de « citoyen suisse » qu’avait utilisé l’Acte de Médiation. Le « Corps helvétique », ainsi que l’on nommait alors l’en

1427 l’espace délimité par les Alpes, le Jura, le lac de Constance et le Léman, n’était donc encore, après cinq siècles, guère

1428 près cinq siècles, guère plus qu’une simple Ligue d’ États souverains, une alliance visant à assurer leur sécurité collecti

1429 peu leur politique étrangère. La formule du Pacte de 1291, bien qu’élargie, subsistait essentiellement. Quant aux régimes

1430 ment. Quant aux régimes intérieurs, ils variaient de la démocratie directe (cantons primitifs) à la monarchie (principauté

1431 e (cantons primitifs) à la monarchie (principauté de Neuchâtel) en passant par les systèmes les plus complexes d’oligarchi

1432 l) en passant par les systèmes les plus complexes d’ oligarchies patriciennes pures ou mitigées. Un lien si lâche ne représ

1433 les grandes puissances unifiées, aux portes mêmes de la Suisse : l’Italie et l’Allemagne. Le problème brûlant qui se posai

1434 t aux Suisses, dans cette Europe où les campagnes de Napoléon venaient de susciter les passions nationales, était celui du

1435 passions nationales, était celui du renforcement de leur unité et de la création d’un État. Il est remarquable qu’ils n’a

1436 les, était celui du renforcement de leur unité et de la création d’un État. Il est remarquable qu’ils n’aient pas cherché

1437 i du renforcement de leur unité et de la création d’ un État. Il est remarquable qu’ils n’aient pas cherché la solution de

1438 emarquable qu’ils n’aient pas cherché la solution de ce problème dans l’unification systématique, à la manière jacobine, m

1439 rme à leurs anciennes traditions comme au respect de leurs diversités linguistiques, religieuses, politiques et sociales.

1440 t devenir une Nation ? mais bien : comment passer d’ une alliance d’États (Staatenbund) à un État fédéral (Bundestaat). S’i

1441 ation ? mais bien : comment passer d’une alliance d’ États (Staatenbund) à un État fédéral (Bundestaat). S’ils ne furent pa

1442 xixe siècle, ils furent les seuls à le résoudre d’ une manière efficace et durable. 2. Crise du Pacte fédéral (1815-18

1443 éral (1815-1848) La crise ouverte par le Pacte de 1815 devait se prolonger, sans progrès appréciable, pendant trente-tr

1444 ésolue, très subitement, en 1848, qu’au lendemain d’ une guerre civile qui en fit éclater à tous les yeux la gravité littér

1445 aliste William Martin — ressemblait sous le Pacte de 1815 à l’Europe d’aujourd’hui. Les cantons souverains étaient les maî

1446 in — ressemblait sous le Pacte de 1815 à l’Europe d’ aujourd’hui. Les cantons souverains étaient les maîtres incontestés de

1447 antons souverains étaient les maîtres incontestés de leur politique économique. On comptait alors en Suisse 11 mesures de

1448 conomique. On comptait alors en Suisse 11 mesures de pieds, 60 espèces d’armes, 87 mesures de grain, 81 pour les liquides

1449 t alors en Suisse 11 mesures de pieds, 60 espèces d’ armes, 87 mesures de grain, 81 pour les liquides et 50 poids différent

1450 mesures de pieds, 60 espèces d’armes, 87 mesures de grain, 81 pour les liquides et 50 poids différents. » Le régime monét

1451 nétaire n’était pas moins chaotique. « Incapables de s’entendre sur aucune mesure commune, les cantons multipliaient les m

1452 ue toutes les erreurs que nous avons vu commettre de nos jours en Europe ont eu leurs précédents sous la Restauration22. »

1453 s analogues. Les cantons se montraient incapables de pratiquer une politique commune à l’égard des grandes nations voisine

1454 mais ils n’hésitaient pas à décréter des mesures de blocus contre tel d’entre eux. On ne comptait pas moins de 400 taxes

1455 contre tel d’entre eux. On ne comptait pas moins de 400 taxes et droits de péages sur les marchandises passant d’un canto

1456 . On ne comptait pas moins de 400 taxes et droits de péages sur les marchandises passant d’un canton à un autre ou d’une c

1457 et droits de péages sur les marchandises passant d’ un canton à un autre ou d’une commune à une autre. « Il y en avait par

1458 es marchandises passant d’un canton à un autre ou d’ une commune à une autre. « Il y en avait partout, sauf aux frontières

1459 le seul canton du Tessin « ne prélevait pas moins de treize taxes différentes sur la route du Gothard, avec obligation de

1460 férentes sur la route du Gothard, avec obligation de décharger chaque fois la marchandise pour la peser ». Le trafic étran

1461 évitait donc la Suisse. Bien plus, un industriel de Saint-Gall avait intérêt à faire passer ses produits destinés à l’Ita

1462 ue par les routes suisses traversant une douzaine de frontières cantonales, par des routes et des ponts également frappés

1463 es, par des routes et des ponts également frappés de droits. Si l’industrie suisse put survivre à de telles conditions, el

1464 s de droits. Si l’industrie suisse put survivre à de telles conditions, elle ne le dut qu’à l’initiative privée et à la ha

1465 ut qu’à l’initiative privée et à la haute qualité de sa main-d’œuvre, héritière d’un très vieil artisanat : les États fais

1466 à la haute qualité de sa main-d’œuvre, héritière d’ un très vieil artisanat : les États faisaient tout pour l’étouffer, so

1467 atteinte. (Les députés votaient sur instructions de leur État. La chancellerie fédérale n’était qu’un bureau chargé de pr

1468 chancellerie fédérale n’était qu’un bureau chargé de préparer les affaires, et changeait de résidence tous les deux ans.)

1469 eau chargé de préparer les affaires, et changeait de résidence tous les deux ans.) Les pressions étrangères, venant de la

1470 s les deux ans.) Les pressions étrangères, venant de la France, de Metternich, ou de la Grande-Bretagne, finissaient donc,

1471 .) Les pressions étrangères, venant de la France, de Metternich, ou de la Grande-Bretagne, finissaient donc, dans la plupa

1472 trangères, venant de la France, de Metternich, ou de la Grande-Bretagne, finissaient donc, dans la plupart des cas, par im

1473 n. « Je mènerai ces gens à la baguette, il suffit de les diviser ! », écrivait alors à son gouvernement l’ambassadeur de F

1474 , écrivait alors à son gouvernement l’ambassadeur de France. Il n’exagérait pas. Que pouvait entreprendre, en effet, une C

1475 en effet, une Confédération qui ne disposait que de contingents militaires levés et entretenus, chacun pour son compte, p

1476 verains ? (Elle avait bien en propre une « caisse de guerre », et le droit de nommer le Général en chef, son état-major, e

1477 n en propre une « caisse de guerre », et le droit de nommer le Général en chef, son état-major, et quelques fonctionnaires

1478 s du « service étranger », commandés par des fils de familles nobles suisses. Les idées libérales, qu’on nommait alors « r

1479 répandaient dans la bourgeoisie, et provoquèrent de nombreuses révolutions cantonales, visant et aboutissant souvent à dé

1480 et aboutissant souvent à déposséder le patriciat de ses droits exclusifs à gouverner. Cette agitation et ces déséquilibre

1481 séquilibres sociaux devaient nourrir le mouvement de « Régénération » qui se prononça dès 1830. Influencée par l’action de

1482 qui se prononça dès 1830. Influencée par l’action de nom­breuses sociétés plus ou moins « culturelles » (de chanteurs, de

1483 m­breuses sociétés plus ou moins « culturelles » ( de chanteurs, de savants, d’étudiants, de gymnastes, de médecins ou de t

1484 étés plus ou moins « culturelles » (de chanteurs, de savants, d’étudiants, de gymnastes, de médecins ou de tireurs au fusi

1485 moins « culturelles » (de chanteurs, de savants, d’ étudiants, de gymnastes, de médecins ou de tireurs au fusil !)23 qui s

1486 urelles » (de chanteurs, de savants, d’étudiants, de gymnastes, de médecins ou de tireurs au fusil !)23 qui seules entrete

1487 chanteurs, de savants, d’étudiants, de gymnastes, de médecins ou de tireurs au fusil !)23 qui seules entretenaient l’idéal

1488 avants, d’étudiants, de gymnastes, de médecins ou de tireurs au fusil !)23 qui seules entretenaient l’idéal d’une patrie c

1489 rs au fusil !)23 qui seules entretenaient l’idéal d’ une patrie commune et d’une véritable fédération, la Régénération conq

1490 les entretenaient l’idéal d’une patrie commune et d’ une véritable fédération, la Régénération conquit le pouvoir dans plus

1491 ans plusieurs cantons en vue de hâter l’avènement d’ une Suisse unie. En 1832, la Diète admit, sous la pression des cantons

1492 a pression des cantons « régénérés », le principe d’ une révision du Pacte fédéral. Une commission de 15 membres fut chargé

1493 e d’une révision du Pacte fédéral. Une commission de 15 membres fut chargée de rédiger un projet de Constitution. Le rappo

1494 fédéral. Une commission de 15 membres fut chargée de rédiger un projet de Constitution. Le rapport qu’elle présenta après

1495 on de 15 membres fut chargée de rédiger un projet de Constitution. Le rapport qu’elle présenta après quelques mois comport

1496 omportait un commentaire dû à la plume du délégué de Genève, Pellegrino Rossi24. Il vaut la peine d’en citer quelques pass

1497 é de Genève, Pellegrino Rossi24. Il vaut la peine d’ en citer quelques passages, qui évoquent irrésistiblement des situatio

1498 ons que l’Europe a bien connues depuis, aux temps de la Société des Nations, puis au lendemain de la Deuxième Guerre mondi

1499 emps de la Société des Nations, puis au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Rossi remarquait d’abord que la faibless

1500 e du lien fédéral institué en Suisse par le Pacte de 1815 créait « une illusion plus dangereuse que l’isolement » par la f

1501 écrivait la paralysie qui frappe une Diète formée de délégués d’États souverains et non de députés des peuples : « Lequel

1502 paralysie qui frappe une Diète formée de délégués d’ États souverains et non de députés des peuples : « Lequel de nous n’a

1503 iète formée de délégués d’États souverains et non de députés des peuples : « Lequel de nous n’a dû souvent déplorer la for

1504 uverains et non de députés des peuples : « Lequel de nous n’a dû souvent déplorer la forme actuelle des délibérations fédé

1505 r sur les autres… Ces députés obligés quelquefois de résister aux vérités les mieux démontrées… Les magistrats directeurs

1506 servir deux maîtres, être tour à tour les hommes de la Confédération et les hommes du canton… Il n’est, ce me semble, auc

1507 es du canton… Il n’est, ce me semble, aucun motif de conserver un pareil état de choses… Rien ne milite en sa faveur, pas

1508 veur, pas même la raison, d’ailleurs bien faible, de l’économie… » Et Rossi concluait en montrant les progrès « mémorables

1509 dérale dans l’élite et les masses : « Oui, l’idée d’ une commune patrie ne nous est point étrangère… Et quoi qu’en disent l

1510 acteurs des temps modernes, c’est une des gloires de ces temps, que cette idée ait acquis plus de netteté, ce sentiment pl

1511 ires de ces temps, que cette idée ait acquis plus de netteté, ce sentiment plus d’énergie. Ce mémorable progrès, tout nous

1512 dée ait acquis plus de netteté, ce sentiment plus d’ énergie. Ce mémorable progrès, tout nous le révèle. Les paroles, les é

1513 és littéraires et savantes, les vœux, les projets d’ un grand nombre de cantons, et cette anxiété elle-même, et ce malaise

1514 savantes, les vœux, les projets d’un grand nombre de cantons, et cette anxiété elle-même, et ce malaise général qu’il est

1515 -même, et ce malaise général qu’il est impossible de méconnaître, et cette espérance que dans un nouveau Pacte, dans une c

1516 u Pacte » se résumait essentiellement dans l’idée de créer un équilibre vivant entre la souveraineté des cantons et leur u

1517 voir fédéral ». La Ligue des cantons, enfin dotée d’ organes législatifs, exécutifs, judiciaires, administratifs et militai

1518 aires, devait être transformée en un État moderne de forme fédérative. L’éloquence de Rossi ne parvint pas à convaincre le

1519 un État moderne de forme fédérative. L’éloquence de Rossi ne parvint pas à convaincre les partisans de l’esprit de cloche

1520 e Rossi ne parvint pas à convaincre les partisans de l’esprit de clocher et de l’égoïsme cantonal. Les radicaux jugèrent l

1521 arvint pas à convaincre les partisans de l’esprit de clocher et de l’égoïsme cantonal. Les radicaux jugèrent le projet tim

1522 onvaincre les partisans de l’esprit de clocher et de l’égoïsme cantonal. Les radicaux jugèrent le projet timide et trop re

1523 dérante » du sentiment cantonal, souvent qualifié de « national » à l’époque. C’est ainsi qu’un député (le grand savant A.

1524 e Candolle) pouvait s’écrier en 1832 au Parlement de Genève : « Que veulent les partisans du nouveau Pacte ?… Une républiq

1525 … Une république fédérative au lieu d’une réunion d’ États souverains ! Avec une position géographique, des mœurs, des anté

1526 des confédérés, nous ne pouvons vouloir un ordre de choses qui nous engagerait au sacrifice de notre nationalité. » Un au

1527 ordre de choses qui nous engagerait au sacrifice de notre nationalité. » Un autre député qualifiait de « chimère » l’idée

1528 e notre nationalité. » Un autre député qualifiait de « chimère » l’idée d’une Union suisse s’opposant aux seules réalités

1529 Un autre député qualifiait de « chimère » l’idée d’ une Union suisse s’opposant aux seules réalités solides : le sentiment

1530 e qui l’avait rejetée ; Les adversaires du Projet d’ union l’avaient dénoncé comme introduisant « un brandon de discorde »

1531 l’avaient dénoncé comme introduisant « un brandon de discorde » parmi les cantons : il le devint en effet, de par l’acharn

1532 les évidences du bien commun, au nom des préjugés de la souveraineté. Les cantons catholiques, où le parti conservateur re

1533 bund, et à négocier l’intervention des puissances de la Sainte-Alliance, qui avaient imposé et garanti le Pacte de 1815. L

1534 -Alliance, qui avaient imposé et garanti le Pacte de 1815. Le Sonderbund pouvait compter sur l’appui de Guizot (protestant

1535 e 1815. Le Sonderbund pouvait compter sur l’appui de Guizot (protestant pourtant, mais d’abord antilibéral), de Metternich

1536 (protestant pourtant, mais d’abord antilibéral), de Metternich, du tsar, du roi de Sardaigne et du roi de Prusse. La Fran

1537 les cantons libéraux décrétèrent le bannissement de l’ordre des jésuites, en 1847, la guerre civile éclata. Les libéraux

1538 radicaux ») détenaient la majorité et disposaient de contingents militaires supérieurs en nombre et en armement. Mais ils

1539 tes à intervenir pour empêcher toute modification de régime favorable au libéralisme. Seul, Palmerston appuyait les réform

1540 formistes (considérés par les chancelleries comme de « dangereux tyrans » partisans de la Révolution) : il pressentait que

1541 celleries comme de « dangereux tyrans » partisans de la Révolution) : il pressentait que l’instauration d’une Suisse unie

1542 a Révolution) : il pressentait que l’instauration d’ une Suisse unie et libérale donnerait le signal du renversement de l’o

1543 e et libérale donnerait le signal du renversement de l’ordre imposé à l’Europe par la Sainte-Alliance. La courte guerre ci

1544 civile du Sonderbund (équivalent presque littéral de la guerre de Sécession américaine) fut suivie avec passion par l’opin

1545 derbund (équivalent presque littéral de la guerre de Sécession américaine) fut suivie avec passion par l’opinion européenn

1546 uragement efficace aux libéraux. Mais il convient de souligner qu’en retour, l’imminence des révolutions de 1848 fut un fa

1547 uligner qu’en retour, l’imminence des révolutions de 1848 fut un facteur important du succès des radicaux suisses : elle r

1548 la reddition. L’étranger n’avait pas eu le temps d’ intervenir. Les vainqueurs se montrèrent généreux : par souscription p

1549 protestants, ils contribuèrent à couvrir la dette de guerre des catholiques. Et dans l’atmosphère de réconciliation nation

1550 e de guerre des catholiques. Et dans l’atmosphère de réconciliation nationale ainsi créée, la Diète décida d’entreprendre

1551 nciliation nationale ainsi créée, la Diète décida d’ entreprendre sans plus de délai la rédaction d’une Constitution fédéra

1552 da d’entreprendre sans plus de délai la rédaction d’ une Constitution fédérale. Plus qu’une victoire des protestants sur le

1553 déralistes sur les nationalistes cantonaux. 3. De la Ligue d’États à l’État fédératif (17 février-17 novembre 1848)

1554 ur les nationalistes cantonaux. 3. De la Ligue d’ États à l’État fédératif (17 février-17 novembre 1848) Tandis que l

1555 les diverses capitales européennes, tout au long de l’année 1848, les Suisses profitèrent du répit que leur laissaient, m

1556 pour accomplir en quelques mois la transformation de leur séculaire Ligue d’États en un État fédératif durable et fort. La

1557 es mois la transformation de leur séculaire Ligue d’ États en un État fédératif durable et fort. La commission de révision,

1558 un État fédératif durable et fort. La commission de révision, nommée par la Diète et comprenant un délégué par canton, se

1559 8. La majorité des commissaires étaient des chefs de gouvernements cantonaux ou des magistrats supérieurs, d’autres des co

1560 périeurs, d’autres des commerçants, des médecins, d’ anciens commandants de divisions de l’armée victorieuse ; tous hommes

1561 commerçants, des médecins, d’anciens commandants de divisions de l’armée victorieuse ; tous hommes d’expérience politique

1562 des médecins, d’anciens commandants de divisions de l’armée victorieuse ; tous hommes d’expérience politique, pas un seul

1563 de divisions de l’armée victorieuse ; tous hommes d’ expérience politique, pas un seul publiciste ou pur intellectuel. Dès

1564 r les discours démagogiques et les comptes rendus de presse qui « à peu d’exceptions près — comme le déclarait un des memb

1565 iques et les comptes rendus de presse qui « à peu d’ exceptions près — comme le déclarait un des membres — relatent ordinai

1566 des membres — relatent ordinairement le contraire de ce qui s’est dit dans une commission ». En sept semaines, au cours de

1567 e 31 séances plénières, ils élaborèrent un projet de 17 articles. Nombre de ces articles s’inspiraient du projet de 1832,

1568 ils élaborèrent un projet de 17 articles. Nombre de ces articles s’inspiraient du projet de 1832, mais les plus important

1569 s. Nombre de ces articles s’inspiraient du projet de 1832, mais les plus importants furent le fruit original des discussio

1570 aborda l’examen. Une première lecture, un renvoi de quelques articles à une Commission, une seconde lecture et le vote fi

1571 Les votes populaires eurent lieu pendant le mois d’ août. Le 4 septembre, la Diète se réunit une dernière fois pour prendr

1572 nos jours. L’essor économique, social et culturel de la nouvelle Suisse unie fut immédiat. Aucune des catastrophes prédite

1573 trophes prédites et calculées par les adversaires de la fédération ne se produisit. Souple synthèse des autonomies locales

1574 u cantonales d’une part, des nécessités pratiques de l’union d’autre part, la Constitution de 1848 ne mérite pas seulement

1575 ratiques de l’union d’autre part, la Constitution de 1848 ne mérite pas seulement l’épithète de fédérale : elle est précis

1576 tution de 1848 ne mérite pas seulement l’épithète de fédérale : elle est précisément fédéraliste, dans ses visées comme pa

1577 ositions. Le législatif, par exemple, s’y compose de deux chambres dont l’une représente le peuple, l’autre les États. L’e

1578 u par ces chambres réunies, combine les attributs d’ un chef d’État à sept têtes et d’un cabinet de ministres ; on ne peut

1579 ne les attributs d’un chef d’État à sept têtes et d’ un cabinet de ministres ; on ne peut choisir plus d’un de ses membres

1580 uts d’un chef d’État à sept têtes et d’un cabinet de ministres ; on ne peut choisir plus d’un de ses membres dans le même

1581 un cabinet de ministres ; on ne peut choisir plus d’ un de ses membres dans le même canton. Un Tribunal fédéral connaît des

1582 binet de ministres ; on ne peut choisir plus d’un de ses membres dans le même canton. Un Tribunal fédéral connaît des diff

1583 anton. Un Tribunal fédéral connaît des différends de droit civil entre l’État central et les cantons, corporations ou part

1584 le problème théoriquement tenu pour « insoluble » de l’abolition des souverainetés nationales se trouve résolu par un comp

1585 ue, satisfait au bon sens. Escamotage ou solution de sagesse, voici ce compromis qui tient en trois articles : Article 1.

1586 1. Les peuples des vingt-deux cantons souverains de la Suisse, unis par la présente alliance, … forment dans leur ensembl

1587 on ajoute que la Constitution assure les libertés d’ établissement, de culte, d’association, de pétition et d’expression, e

1588 Constitution assure les libertés d’établissement, de culte, d’association, de pétition et d’expression, et qu’elle établit

1589 on assure les libertés d’établissement, de culte, d’ association, de pétition et d’expression, et qu’elle établit l’égalité

1590 ibertés d’établissement, de culte, d’association, de pétition et d’expression, et qu’elle établit l’égalité devant la loi 

1591 issement, de culte, d’association, de pétition et d’ expression, et qu’elle établit l’égalité devant la loi ; qu’elle crée

1592 intérieurs et reporte les douanes aux frontières de la Confédération, quitte à indemniser les cantons ; qu’elle uniformis