1
i, ou le Total, ou l’Être, Ramakrishna disait : «
Il
n’y a aucune différence, que vous l’appeliez ‟Toi” ou que vous pensie
2
liez ‟Toi” ou que vous pensiez ‟Je suis Lui”. » S’
il
n’y avait « aucune différence », il n’y aurait pas non plus d’antinom
3
uis Lui”. » S’il n’y avait « aucune différence »,
il
n’y aurait pas non plus d’antinomie foncière entre la foi chrétienne
4
urs liens avec certaines options fondamentales qu’
il
a prises au plan religieux. Au nom même du désir d’union de l’humanit
5
i anime de part et d’autre les meilleurs esprits,
il
me paraît vital d’admettre en toute franchise l’existence historique
6
mise au point qui suivent. Certains penseront qu’
il
est dangereux de souligner ce qui nous distingue, au lieu de mettre e
7
t conduire à la synthèse. Je vois le danger. Mais
il
faut voir aussi que l’union finale des esprits ne sera jamais acquise
8
au prix du sacrifice de nos diversités vivantes ;
elle
suppose bien plutôt la connaissance des raisons d’être de ces diversi
9
eut survivre à l’aube ! Si l’Orient et l’Occident
doivent
un jour converger au lieu de s’ignorer ou de se combattre, ils le dev
10
onverger au lieu de s’ignorer ou de se combattre,
ils
le devront bien moins à un « retour aux sources » qu’à un progrès con
11
r au lieu de s’ignorer ou de se combattre, ils le
devront
bien moins à un « retour aux sources » qu’à un progrès conscient et t
12
e et l’Europe une parenté antérieure aux Aryens. (
Elle
paraît attestée par les symboles communs aux Dravidiens et aux Crétoi
13
en Europe, où Platon l’idéalisa, tandis que César
devait
en retrouver des traces en Gaule. Cette identité primitive, peut-être
14
ultérieures. À l’Est, l’Inde codifie les castes ;
elle
en ajoute même une3, multiplie les sous-castes, et fait durer le syst
15
’arrière-fond commun, les différences s’accusent.
Elles
ne cesseront de s’affirmer dans l’ensemble de notre histoire, nonobst
16
elà était tenu pour plus réel que l’ici-bas, dont
il
convenait par suite de s’évader, plutôt que d’essayer de l’aménager s
17
térodoxe moins par la négation de l’orthodoxie qu’
il
croit encore servir, que par son dépassement réalisé. Mais l’Orient n
18
e, trahit l’absence des tensions dialectiques qui
devaient
provoquer la fin du nôtre. À partir de la Renaissance, l’angle de div
19
stances monumentales et religieuses du Moyen Âge,
elle
éclate aux États-Unis dont le passé vivant ne remonte pas au-delà d’u
20
t l’Oriental qui circule dans nos villes songe qu’
il
n’y voit qu’agitation désordonnée, absence de sens et d’harmonie, et
21
conds à étudier que leur distinction progressive.
Ils
sont cela, sans nul doute, mais ils sont beaucoup plus : deux voies d
22
progressive. Ils sont cela, sans nul doute, mais
ils
sont beaucoup plus : deux voies de l’homme, deux directions maîtresse
23
paremment physiques se transmuent en symboles, et
il
termine par une invitation à entreprendre le voyage mystique vers l’O
24
ire : « C’est celle que l’on connaît le mieux… » (
Il
s’agit de notre vie terrestre.) Dans son Récit de l’exil occidental d
25
r si le soleil se lève à l’Orient pour les Grecs,
il
en va de même pour les Hindous, et ceux-ci ne figurent pas pour autan
26
Malaisie, ni le Japon l’Occident de l’Amérique !
Elle
révèle donc une forme de l’âme, une pente de l’âme, voire une « orien
27
que, relevant un défi qui semblait écrasant et qu’
il
se portait à lui-même, acceptant de « s’enfoncer dans la matière », a
28
êt une valeur différente, encore que par sa forme
elle
semble correspondre au tableau que l’on vient d’établir. Un voyageur
29
termes de leur existence, et de les sauver là où
ils
sont, par la seule foi dans l’action du pardon, de l’amour et de la g
30
ntée — ne sont qu’apparemment superposables ; car
il
s’agit en réalité dans le premier cas d’une descente créatrice de Die
31
’Occidental, tournant le dos au soleil, en lequel
il
croit sans le voir, décide d’imiter Dieu le Créateur en œuvrant dans
32
a Voie : deux formes d’expérience. Pour l’Hindou,
il
s’agit d’arriver à la connaissance du divin non par le « saut de la f
33
ti (le monde manifesté, qui est illusion) afin qu’
elle
aille vers l’Esprit, sachant ce qu’elle fait. « Ô bien-aimé ! si impr
34
) afin qu’elle aille vers l’Esprit, sachant ce qu’
elle
fait. « Ô bien-aimé ! si imprégné de la Connaissance, si détaché, si
35
ché, si versé dans la Loi, et si maître de lui qu’
il
soit, un dieu lui-même ne peut sans le yoga atteindre la libération.
36
n. » (Yoga-anka.) Pour l’Occidental au contraire,
il
s’agit de connaître Dieu non pas en écartant le monde manifesté, ou b
37
éfiances. Car chacun pense de l’autre : est-ce qu’
il
dit vrai ? trouve-t-il vraiment l’objet de sa recherche ? et cet obje
38
nse de l’autre : est-ce qu’il dit vrai ? trouve-t-
il
vraiment l’objet de sa recherche ? et cet objet lui-même, est-il vrai
39
bjet de sa recherche ? et cet objet lui-même, est-
il
vraiment réel ? S’identifier à l’Un, à la divinité, ne serait-ce pas,
40
s les « preuves » dont l’autre se prévaut, puisqu’
elles
s’appliquent à une « réalité » qu’on tient elle-même pour illusion. E
41
réalité » qu’on tient elle-même pour illusion. Et
il
semble à chacun que les explications les plus sincères données par l’
42
soit individualiste et l’Orient traditionaliste,
il
paraît difficile de le mettre en doute10 : tous les auteurs qui trait
43
nes sur une seule bicyclette ! Ces gens ne seront-
ils
jamais seuls ? L’individu peut-il vraiment compter, dans ce grouillem
44
gens ne seront-ils jamais seuls ? L’individu peut-
il
vraiment compter, dans ce grouillement sempiternel ? Mais je vais aux
45
ntifs dans une cour écoute le lecteur de poèmes :
il
s’agit de légendes sacrées. Jamais la vie ne m’a paru plus solennelle
46
aire. Nous avons inventé l’ecclesia. Et tandis qu’
ils
se purifient par l’isolement, comme le veut la magie, nous prions et
47
agie, nous prions et chantons ensemble. » Ici, je
dois
citer Rudolf Kassner, essayiste autrichien de génie. Personne n’a mie
48
parlé de l’Hindou « grégaire » ; terme inexact s’
il
fait penser à « collectif », à je ne sais quoi d’organisé ou d’encadr
49
se. Kassner m’offre ce mot : le corps magique, et
il
le commente en ces termes11 : « Âme corporisée, ou corps spiritualisé
50
magique n’a pas d’ironie ni de paradoxe, parce qu’
il
n’a ni contraire ni contradiction. » Dépourvu de sensibilité au sens
51
d’esprit révolutionnaire, ignorant la curiosité,
il
ne peut avoir cure ni de ses droits distincts, ni de sa chance, ni d’
52
homme des supercheries, est de son appartenance :
il
forme le bord, la lisière du monde du saint, comme les idoles le bord
53
te opposition : panthéisme ou Dieu personnel. Car
il
n’est pas de personne sans un Dieu qui interpelle. Et l’Orient ne con
54
rient ne connaît rien de tel. Soit qu’on pense qu’
il
n’y a pas de Dieu — selon le système Sankya et le bouddhisme — soit q
55
elon l’Advaïta, que Dieu n’« existe » pas mais qu’
il
est Tout, et que le Tout ou le Réel n’est que le Moi pleinement réali
56
pleinement réalisé et accompli (That Thwam Asi) —
il
n’y a pas plus de personne dans la gnose hindouiste que de moi distin
57
ouiste que de moi distinct dans le bouddhisme. Qu’
il
n’y ait point de Dieu, ou que Je sois le Tout, dans les deux cas l’Au
58
s le Tout, dans les deux cas l’Autre s’évanouit ;
il
n’est pas de dialogue possible, ni d’appel, ni donc de vocation, ni p
59
akrishna que je citais en tête de ce chapitre : «
Il
n’y a aucune différence, que vous l’appeliez Toi ou que Vous disiez J
60
éfinition de l’attitude religieuse orientale. Car
il
est bien certain que l’identité qu’elle pose évacue l’existence perso
61
entale. Car il est bien certain que l’identité qu’
elle
pose évacue l’existence personnelle, et que la négation de la personn
62
la différence est tenue pour essentielle, car en
elle
seule se fonde la personne véritable, qui assume l’individu mais auss
63
partie blanche et un point blanc la partie noire.
Il
est ainsi montré que l’élément masculin n’est pas absent de la région
64
que. Un Sankara parfois préfigure le thomisme, et
il
arrive à Maître Eckhart de s’exprimer comme un bouddhiste. La Bhagava
65
ions (condamnées et souvent détruites), tandis qu’
il
ne manque pas d’écoles hindoues pour affirmer la réalité du Moi, l’ac
66
quelle yâna bouddhique relève celui qui a dit : «
Il
faut que tu aimes Dieu comme non-Dieu, non-Esprit, non-Personne, non-
67
solu, dépourvu de toute dualité, dans lequel nous
devons
nous enfoncer éternellement d’un néant à un néant » ? Et à l’inverse,
68
e engagé sur la voie de la connaissance divine, «
il
faut demeurer dans l’action, gardant un esprit égal que l’action port
69
Croix, Eckhart, et la Bhagavad-Gita. Et pourtant
il
serait faux, plus encore que banal, de répéter ici « tout est dans to
70
. La partie blanche contient un cercle noir, mais
elle
est blanche tout de même, et non pas grise. Que vaut un homme ?
71
e. Que vaut un homme ? Et finalement, ce qu’
il
importe de voir, ce sont les résultantes majeures des complexes doctr
72
Nos mystiques ne font pas nos mœurs, en Occident.
Ils
se fondent sur la négation de nos croyances communes, et de nos insti
73
e nos croyances communes, et de nos institutions.
Ils
représentent le point d’Orient dans notre sphère. En revanche, l’Orie
74
si l’on pense que Dieu reconnaîtra les siens, qu’
ils
se baignent vêtus ou nus. La croyance à la métempsycose est plus natu
75
u’on ne le pense à l’esprit des Occidentaux, mais
elle
n’a pas d’effet dans leur vie religieuse, moins encore dans leur vie
76
Je trouve le premier dans Kassner, au chapitre où
il
décrit le corps magique : Une histoire d’Hérodote traite d’un grand
77
un grand du royaume qui, en échange de tout ce qu’
il
avait fait pour Xerxès et son armée, pour l’équipement de la campagne
78
’est l’idée grecque de mesure et, en liaison avec
elle
, l’idée de liberté. Seule l’idée de la mesure de l’homme renferme l’i
79
arbitre remonte à ses origines. Aussi lui reste-t-
elle
le plus souvent cachée ; il faut la déchiffrer dans ses actes et ses
80
. Aussi lui reste-t-elle le plus souvent cachée ;
il
faut la déchiffrer dans ses actes et ses opinions. Ce qu’il pense de
81
déchiffrer dans ses actes et ses opinions. Ce qu’
il
pense de la personne, du destin, ce qu’il proclame moral ou immoral,
82
. Ce qu’il pense de la personne, du destin, ce qu’
il
proclame moral ou immoral, son attitude en face de la mort — tout cel
83
en face de la mort — tout cela dépend du rang qu’
il
assigne au libre arbitre. Même sans être philosophe, il s’entend sur
84
igne au libre arbitre. Même sans être philosophe,
il
s’entend sur ce point aux distinctions les plus fines, bien que leurs
85
ses faits et gestes. Ceci vaut surtout du cas qu’
il
fait de la vie même. Lorsqu’en 1194, le comte de Champagne, dans son
86
lui montra au passage ses palais et ses châteaux.
Ils
arrivèrent devant une place forte flanquée de très hautes tours : deu
87
s vêtus de blanc étaient en faction sur chacune d’
elles
. Le grand maître voulut faire voir au comte que les siens lui obéissa
88
ent mieux qu’aux princes chrétiens leurs sujets :
il
leva le bras, et deux des gardes se jetèrent dans le vide, pour s’écr
89
le vide, pour s’écraser sur le sol rocheux. Puis
il
demanda au comte s’il devait d’un second signe livrer à la mort toute
90
er sur le sol rocheux. Puis il demanda au comte s’
il
devait d’un second signe livrer à la mort toute la garde des créneaux
91
sur le sol rocheux. Puis il demanda au comte s’il
devait
d’un second signe livrer à la mort toute la garde des créneaux ; l’au
92
le pria de n’en rien faire, tout en confessant qu’
il
ne saurait attendre de ses vassaux une telle docilité […]. Et chaque
93
ici le même sentiment que le comte de Champagne :
il
se verra mené à un point où éclatera en lui le plus sincère, le plus
94
violent des refus. Les formes fondamentales dont
il
se croyait sûr, telles que courage et fidélité, obéissance, sacrifice
95
ui respecte en l’homme un noyau de liberté auquel
il
n’est pas permis de porter atteinte. Ce qui s’y passe, et ce qui en p
96
ve, pour notre objet présent que les histoires qu’
ils
rapportent. Tous les deux établissent la même liaison entre le peu de
97
écoupe la victime en tranches ou qu’on l’épargne,
elle
ne sera pas sauvée de la nécessité de renaître un millier ou cent-mil
98
revient, portant sa tête sous le bras ! Qu’en est-
il
de notre Occident ? Certes, l’Europe qui croit à l’absolue valeur de
99
ine et les massacres (patriotiques ou religieux).
Elle
a même inventé la guerre totale ! D’où provient alors cette « horreur
100
esure, sans péché, sans contradiction ni remords.
Elle
est divine, et nous sommes criminels. Si le moi n’est qu’une illusion
101
à l’avantage de l’un ou de l’autre « camp » : car
il
n’y a pas de camps, ni de lutte engagée, ceci soit dit ici une fois p
102
es. Il y a seulement deux expériences globales qu’
il
importe de déchiffrer. Mais l’infinie complexité de leurs données nou
103
les qui ont donné cours à deux voies divergentes.
Il
m’a semblé que c’était dans la mystique, la religion et leurs explica
104
car on les voyait là dans leur état naissant. Qu’
elles
soient causes premières ou effets ; qu’elles résument une série de fa
105
. Qu’elles soient causes premières ou effets ; qu’
elles
résument une série de facteurs antécédents, ou qu’au contraire elles
106
série de facteurs antécédents, ou qu’au contraire
elles
initient l’histoire, tout cela m’importe moins que de les avoir bien
107
ut, sauf d’être vérifié, un négatif du présent qu’
ils
refusent. 3. Celle des Sudras, ou indigènes assujettis ; les parias
108
son sens strict, initiatique et religieux, qui ne
doit
pas être confondu avec « conservateur », « routinier », « réactionnai
109
La Table ronde, Paris, janvier 1957, p. 9-22. b.
Il
s’agit du chapitre I de L’Aventure occidentale de l’homme , qui sera
110
de culture à l’union politique (mai 1957)c 1.
Il
suffit de s’éloigner de l’Europe dans n’importe quelle direction pour
111
et les Castillans sont vus comme des Européens :
il
doit y avoir à cela quelque raison. Tout bien considéré, je n’en trou
112
les Castillans sont vus comme des Européens : il
doit
y avoir à cela quelque raison. Tout bien considéré, je n’en trouve pa
113
o-Asiatiques et les Arabes savent trop bien ce qu’
elle
représente : l’entité qui seule les rassemble dans une hostilité sans
114
ns doute ambivalente, mais commune. On me dira qu’
il
est bien « dangereux » d’écrire cela. Je réponds qu’il est plus dange
115
t bien « dangereux » d’écrire cela. Je réponds qu’
il
est plus dangereux de vouloir ignorer Bandung. 2. J’ai cru remarquer
116
économique, sociale ou scientifique à l’Europe qu’
il
faudrait unir, sont bien souvent les mêmes qui, faisant demi-tour, dé
117
nces qui séparent nos nations depuis des siècles.
Il
n’y aurait donc, à les en croire, pas de différences bien notables (d
118
e l’Europe et le Congo ou le Cachemire, tandis qu’
il
y en aurait d’insurmontables entre les Britanniques et les Français,
119
’est un dernier refuge pour les nationalistes. Or
il
se trouve que l’argument, précisément, n’est pas soutenable au plan d
120
outenable au plan de la nation. Comment le serait-
il
donc au plan de l’Europe entière ? On nous dit que les contrastes ent
121
s contrastes entre Suédois et Grecs, par exemple,
il
n’en reste pas moins qu’un Suédois lisant Kazantzaki, un Grec lisant
122
fort peu de choses près le même plaisir, parce qu’
ils
y reconnaîtront les mêmes passions, les mêmes souffrances, les mêmes
123
espoirs et les mêmes doutes, et malgré tout ce qu’
il
serait tellement facile de dire, la même foi dominant l’arrière-plan
124
’ont pas cessé de se déplacer au cours des temps.
Elle
ne serait donc définissable que par sa culture, qui ne l’est guère. C
125
par sa culture, qui ne l’est guère. Conclusion :
il
n’y a pas d’Europe, et si l’on en veut une, il faudra l’inventer. Ce
126
: il n’y a pas d’Europe, et si l’on en veut une,
il
faudra l’inventer. Ce qui ne facilite guère l’œuvre d’union… Ainsi jo
127
jouent les sophistes, et le lecteur s’inquiète :
il
sent vaguement qu’il est en train de se laisser prendre dans une prob
128
, et le lecteur s’inquiète : il sent vaguement qu’
il
est en train de se laisser prendre dans une problématique artificiell
129
ela n’a de sens que pour les professeurs. Ceux-ci
doivent
circonscrire exactement l’objet d’un éventuel enseignement ; s’ils n’
130
exactement l’objet d’un éventuel enseignement ; s’
ils
n’arrivent pas à le définir, ils le réputent inexistant selon les nor
131
enseignement ; s’ils n’arrivent pas à le définir,
ils
le réputent inexistant selon les normes académiques. Ce légitime souc
132
mple expression. En effet, selon le thème connu,
elle
ne se localise guère mieux dans le temps que dans l’espace […]. On a
133
romain fût une première ébauche de l’Europe. Mais
il
excluait Francfort, Copenhague, Amsterdam. Spengler tient que l’Europ
134
mieux connue que ses limites. L’Europe ne serait-
elle
donc pas née du tout, parce qu’on ne s’accorde pas sur sa date de nai
135
tégories pour les faire correspondre au réel, car
il
s’agit maintenant de sauver ce réel, et non pas d’ergoter sur sa défi
136
éories s’affrontent inutilement je le crains, car
il
en va d’une civilisation, d’une culture et même d’une nation, à peu p
137
nation, à peu près comme d’une œuvre d’art : est-
elle
née de ce jour où l’on a fait son plan, ou reçu sa commande, ou senti
138
récise, plusieurs années auparavant ? Ou n’aurait-
elle
pris forme et nom qu’à mi-chemin du travail entrepris, qui a soudain
139
soudain changé de sens et trouvé son vrai sens ?
Il
importe assez peu, l’œuvre est là. Depuis quand parle-t-on de l’Europ
140
. Depuis quand parle-t-on de l’Europe ? S’agirait-
il
d’une invention de Victor Hugo, voire des fédéralistes de notre temps
141
jectif européen est d’un usage bien plus ancien :
il
paraît déjà au lendemain de la bataille de Poitiers (732) dans l’œuvr
142
que telle, et (ce qui est encore plus important)
ils
étaient le témoignage de l’intérêt porté au caractère culturel et pol
143
u caractère culturel et politique des terres dont
ils
décrivaient les côtes16 ». Mais pour voir les vocables Europe et euro
144
e et européen entrer dans le vocabulaire courant,
il
faut attendre les xive et xve siècles, époque où la chrétienté perd
145
e Rome et de la Grèce. Chacun sait la fortune que
devait
connaître cette définition de l’Europe par ses trois sources principa
146
ous rappelle, non sans aigreur ni sans dédain, qu’
elles
sont la vraie réalité. Que dis-je, on les déclare même éternelles dan
147
cès, voyons la thèse elle-même, et le jugement qu’
elle
implique sur la réalité. On a souvent tenté de nier l’existence d’une
148
l’importance des influences extracontinentales qu’
elle
a subies. Ces arguments prennent toute leur force contre le concept d
149
tu que tu n’aies reçu ? dit l’Europe aux nations.
Elles
seraient bien en peine de répondre. Spécifiquement européenne ou non,
150
26 ou 27 États-nations, dont on attend encore qu’
ils
définissent la soi-disant autonomie de leur culture. En vérité, sur c
151
l’Europe. Que l’idée nationale soit forte encore,
il
serait absurde de le contester : elle ne peut rien sauver, mais elle
152
forte encore, il serait absurde de le contester :
elle
ne peut rien sauver, mais elle pourrait tout perdre. Gardons-nous de
153
de le contester : elle ne peut rien sauver, mais
elle
pourrait tout perdre. Gardons-nous de la sous-estimer ! Mais gardons-
154
éalisme politique. La patrie n’est pas la nation,
elle
est en général beaucoup plus petite. La nation culturelle n’est pas l
155
us petite. La nation culturelle n’est pas l’État,
elle
est en général beaucoup plus grande. Et si l’on confond tout, patrie,
156
nt ce qu’on mérite, j’entends l’État totalitaire.
Il
reste, hélas ! qu’aux yeux de beaucoup d’intellectuels, la nation cac
157
te l’existence même de la forêt. (Sait-on bien où
elle
s’arrête ? Sait-on quand elle est née ? Et combien d’arbres il faut p
158
t. (Sait-on bien où elle s’arrête ? Sait-on quand
elle
est née ? Et combien d’arbres il faut pour former une forêt ? J’ai me
159
Sait-on quand elle est née ? Et combien d’arbres
il
faut pour former une forêt ? J’ai mes racines, voilà qui est vrai, le
160
, voilà qui est vrai, le reste est mythe…) N’est-
il
pas temps de faire voir à ces nationalistes qu’une Europe fédérée ser
161
de la fédération : la souveraineté peut-être (si
elle
est le droit d’un groupe à faire ou à ne pas faire la guerre quand il
162
groupe à faire ou à ne pas faire la guerre quand
il
l’entend) ; la prospérité sans doute (si elle traduit un mieux-vivre,
163
quand il l’entend) ; la prospérité sans doute (si
elle
traduit un mieux-vivre, et non pas simplement le résultat matériel d’
164
ment abrutissant) ; l’indépendance assurément (si
elle
est le pouvoir de ne pas subir la loi d’une puissance étrangère)… Tou
165
de l’union supranationale, et de l’allégeance qu’
elle
requiert. Mais la condition suffisante sera donnée par d’autres effor
166
conçues comme on vient de l’indiquer, le rapport
devrait
être analogue au rapport entre forme et contenu. Une politique d’unio
167
d’abord communauté de culture entre les hommes qu’
elle
envisage d’unir. Cette politique, ensuite, ne sera valable que si ell
168
Cette politique, ensuite, ne sera valable que si
elle
exprime, traduit et tend à préserver ce qu’il y a de créateur dans ce
169
mmunauté. J’en conclus que la forme politique que
devrait
revêtir une union authentiquement européenne, ne saurait être que féd
170
de notre créativité, dans la mesure toutefois où
elles
ne s’isolent pas ni ne se mélangent indiscernablement, mais demeurent
171
lland, que pour triompher d’un épouvantail auquel
il
accroche mon nom. Je n’attaquais rien de ce qu’il défend avec tant de
172
il accroche mon nom. Je n’attaquais rien de ce qu’
il
défend avec tant de passion et de juste colère. Je suis très loin de
173
nir par des liens fédéraux — si d’abord on nie qu’
elle
existe comme entité de culture et Aventure unique. Je ne pense pas av
174
opéen, etc. J’approuve au contraire M. Berl quand
il
crie Vive l’Europe ! contre tout cela. Mais pourquoi le crier contre
175
ttre en doute l’existence même de cette Europe qu’
il
faut sauver. d. Rougemont Denis de, « [Lettre en réponse à Emmanue
176
l’urgence de rappeler que l’Europe ne peut et ne
doit
pas être regardée comme une entité ni comme une fin, mais comme un mo
177
ue l’urgence était plus grande que je ne pensais.
Il
regarde comme “sophistes” ceux qui disent que l’Europe ne sera pas, s
178
sophistes. Guéhenno dirigeait la revue : Europe,
il
ne pensait pas que l’Europe fut déjà faite. M. de Rougemont me dit qu
179
où était, ce que faisait la Suisse. En 14, en 39,
elle
était neutre. Mais l’Europe ? était-elle pendant la bataille de Stali
180
, en 39, elle était neutre. Mais l’Europe ? était-
elle
pendant la bataille de Stalingrad avec Staline ou avec Hitler ? Et, a
181
che ? Et à Leipzig, avec Napoléon ou contre lui ?
Il
ne suffit pas d’ignorer quand une personne est née pour avoir la cert
182
d une personne est née pour avoir la certitude qu’
elle
vit. Filibusterie à part, je prétends rester européen et même bon eur
183
t de la tyrannie. Je crierai : vive l’Europe ! si
elle
rétablit la concorde, non si elle attise la discorde entre l’Est et l
184
e l’Europe ! si elle rétablit la concorde, non si
elle
attise la discorde entre l’Est et l’Ouest, si elle nourrit les affamé
185
lle attise la discorde entre l’Est et l’Ouest, si
elle
nourrit les affamés, non si elle les massacre, si elle apaise les nat
186
t et l’Ouest, si elle nourrit les affamés, non si
elle
les massacre, si elle apaise les nationalismes, non si elle leur en s
187
nourrit les affamés, non si elle les massacre, si
elle
apaise les nationalismes, non si elle leur en superpose un nouveau. P
188
assacre, si elle apaise les nationalismes, non si
elle
leur en superpose un nouveau. Pourquoi donc accorderais-je au fédéral
189
inisme ? Il y avait une Europe de Romain Rolland.
Il
y en a une de Pierre Dominique, qui espère en elle pour répondre du t
190
Il y en a une de Pierre Dominique, qui espère en
elle
pour répondre du tac au tac à Khrouchtchev et même à Dulles, et veut
191
u tac à Khrouchtchev et même à Dulles, et veut qu’
elle
fasse déjà sonner le sabre qu’elle n’a pas encore. Est-ce ma faute si
192
es, et veut qu’elle fasse déjà sonner le sabre qu’
elle
n’a pas encore. Est-ce ma faute si elles ne se ressemblent pas. La “f
193
sabre qu’elle n’a pas encore. Est-ce ma faute si
elles
ne se ressemblent pas. La “filibusterie” consiste-t-elle à les distin
194
se ressemblent pas. La “filibusterie” consiste-t-
elle
à les distinguer ou à les confondre ? Je le vois, il y a des hommes s
195
ommes si engagés dans les affaires européennes qu’
ils
oublient les motifs mêmes de leur engagement. Tels les philanthropes
196
leur “œuvre” accablaient et exploitaient ceux qu’
elle
devait secourir. Je ne prônerai l’Europe ni contre la Vérité, ni cont
197
“œuvre” accablaient et exploitaient ceux qu’elle
devait
secourir. Je ne prônerai l’Europe ni contre la Vérité, ni contre la R
198
utes le cap sur 1984 et sa fourmilière ; voilà qu’
il
se détourne horrifié et vire de bord, aux accents de la Marseillaise,
199
ement, au nom de la réaction ou de la révolution,
ils
ne nous parlaient plus que d’une Crise de l’Esprit, d’une Décadence d
200
État. Orwell n’eut qu’à pousser un peu plus loin.
Il
n’eut qu’à mettre au point l’exemple soviétique, à l’étendre à l’Euro
201
manière exemplaire — convainquant les lecteurs qu’
il
voulait révolter. Le masochisme européen avait trouvé son expression
202
les lettres, les arts et la philosophie, sait qu’
il
faut être subversif ou pessimiste, ou les deux à la fois, sous peine
203
rrait m’objecter Saint-John Perse, mais justement
il
a choisi l’exil en soi. Tous les autres sont contre le siècle, d’une
204
ècle, d’une manière encore plus évidente, soit qu’
ils
attaquent avec acharnement la morale dite bourgeoise ou les règles de
205
e dite bourgeoise ou les règles des arts, soit qu’
ils
opposent à l’anarchie flagrante des esprits quelque orthodoxie restau
206
esprits quelque orthodoxie restaurée, justifiant
elle
aussi, fût-ce par son seul échec, la dissidence de la pensée dans le
207
he, de Rimbaud, de Kierkegaard et de Dostoïevski.
Il
est remarquable que ce siècle n’ait retenu du précédent que les génie
208
n ne compte en fait que par la bourgeoisie. C’est
elle
seule, par ses franges cultivées et conscientes, qui a fait le succès
209
s, ignorés ou refoulés par ses ancêtres. Et c’est
elle
aujourd’hui qui est prise d’angoisse devant ce qu’ils dénonçaient en
210
aujourd’hui qui est prise d’angoisse devant ce qu’
ils
dénonçaient en vain. C’est elle qui croit aux catastrophes prochaines
211
oisse devant ce qu’ils dénonçaient en vain. C’est
elle
qui croit aux catastrophes prochaines qu’ils prophétisaient dans le d
212
est elle qui croit aux catastrophes prochaines qu’
ils
prophétisaient dans le désert, elle qui perd sa foi dans le progrès.
213
prochaines qu’ils prophétisaient dans le désert,
elle
qui perd sa foi dans le progrès. C’est elle enfin qui cède au vertige
214
sert, elle qui perd sa foi dans le progrès. C’est
elle
enfin qui cède au vertige de l’histoire, s’imagine que son heure est
215
gine que son heure est passée, que le Prolétariat
doit
la déposséder, comme elle avait elle-même dépossédé les nobles, qu’il
216
sée, que le Prolétariat doit la déposséder, comme
elle
avait elle-même dépossédé les nobles, qu’il ne peut imposer qu’un rég
217
mme elle avait elle-même dépossédé les nobles, qu’
il
ne peut imposer qu’un régime soviétique, et qu’Orwell a dit vrai malg
218
es de l’Occident dépasse de loin la conscience qu’
elles
en ont, la connaissance qu’elles ont pu prendre du Capital ou de la S
219
la conscience qu’elles en ont, la connaissance qu’
elles
ont pu prendre du Capital ou de la Science des rêves, et les jugement
220
l ou de la Science des rêves, et les jugements qu’
elles
avoueraient à leur sujet. Marx et Freud ont beaucoup en commun, et, p
221
n, et, par-dessus tout, leur succès parmi ceux qu’
ils
ont « démasqués » avec un zèle amer et quelque peu sadique. Ce succès
222
amer et quelque peu sadique. Ce succès n’est pas
dû
à la lecture de leurs œuvres ardues et complexes, mais à l’intention
223
ent leurs thèses ou contestaient leurs arguments.
Il
s’agit, au plein sens des termes, d’un succès de scandale, d’un choc
224
es salons, et c’étaient le Sexe et l’Argent. Tout
devait
avoir l’air de se passer dans le monde comme si ces choses n’existaie
225
nt qu’on le produit au grand jour, explique tout.
Il
faudra plusieurs décennies pour qu’on en vienne à relativiser, en les
226
doute, méritèrent à ce point qu’on dise d’eux qu’
ils
ont « fait leur temps », au double sens de l’expression. Que Freud so
227
par le retour en force de réalités religieuses qu’
il
tenait pour autant d’illusions ; que Marx se soit trompé dans toutes
228
approche du réel. Cependant les déterminismes qu’
ils
croyaient avoir « découverts », quand c’était bien plutôt leur influe
229
ogique démente pour l’annonce d’une fatalité. A-t-
il
vraiment suffi d’un « dégel » temporaire, d’une révolution écrasée, d
230
en Asie, et plus qu’on ne pense en URSS, n’aurait-
il
pas créé l’illusion romantique d’un renouveau de la liberté, d’un fau
231
Admettons que cela n’est pas tout. Mais qu’en est-
il
de l’Occident ? Trois représentations vagues mais obsédantes assombr
232
ics paralysants, dissipe les illusions tenaces qu’
ils
prolongeaient et révèle une tendance générale au réveil des valeurs d
233
les jette dans des crises aiguës de dialectique.
Ils
le jugent grossièrement matérialiste, et au surplus de mauvaise foi.
234
eloppement historique, mais qu’après quarante ans
elle
a rejoint le stade du capitalisme exploiteur, largement dépassé par l
235
uniste l’URSS qui se trouve dans la première. » «
Il
n’empêche que l’URSS est l’avenir ! », répéteront nos maniaques de l’
236
classe ouvrière mieux informée qu’endoctrinée, si
elle
a à choisir d’émigrer, choisirait en masse l’Amérique. Comme l’ont fa
237
ongrois réfugiés en Autriche et libres de parler.
Il
n’en reste pas moins frappant de constater que l’avenir, aux yeux de
238
nstater que l’avenir, aux yeux de ces Hongrois, s’
il
n’est pas l’URSS n’est pas non plus l’Europe… On devine, pour quelles
239
On devine, pour quelles raisons. Mais que valent-
elles
? Deuxième illusion fataliste : « L’Europe est condamnée. » — L’Euro
240
ouverains » — incapables d’ailleurs de prouver qu’
ils
le sont — se voyait promise par l’Histoire à des partages ignominieux
241
l de l’Europe, CECA, le Marché commun et Euratom.
Il
serait plus qu’étrange qu’on puisse l’arrêter là. L’Assemblée constit
242
tuante est sa prochaine étape. Un Pouvoir fédéral
devrait
en résulter, car tout l’appelle et sa nécessité est inscrite dans les
243
e et sa nécessité est inscrite dans les faits, si
elle
ne l’est pas encore dans l’esprit des nationalistes attardés. Aucun d
244
vivre en autarcie économique, ni commercer comme
il
l’entend. Aucun donc n’est indépendant. Mais ils peuvent l’être tous
245
e il l’entend. Aucun donc n’est indépendant. Mais
ils
peuvent l’être tous ensemble, et ils commencent à le savoir. 330 mill
246
endant. Mais ils peuvent l’être tous ensemble, et
ils
commencent à le savoir. 330 millions d’habitants à l’ouest du rideau
247
ent nos vies, nous allons devenir leurs esclaves.
Elles
asservissent déjà nos corps, dictent nos gestes et le rythme de nos j
248
ont déchaîné dans le monde des forces inconnues.
Il
fait trop chaud, il fait trop froid pour la saison, les accidents biz
249
e monde des forces inconnues. Il fait trop chaud,
il
fait trop froid pour la saison, les accidents bizarres et les fous se
250
, les avions tombent, croyez-moi, c’est la Bombe.
Elle
va détruire les neuf dixièmes du genre humain. Un jour elle fera saut
251
truire les neuf dixièmes du genre humain. Un jour
elle
fera sauter la terre. J’entends cela tous les jours. Qui ne l’a pas d
252
achines envahissent nos vies ? Si seulement ! Car
elles
sont très chères. Mais jamais une Talbot n’est entrée dans ma cour, s
253
exprès d’un président, d’un général. Ce n’est pas
elle
qui est dangereuse, c’est l’homme. Et les cerveaux électroniques (par
254
hore) ne font rien qu’on ne leur ait prescrit. Qu’
ils
travaillent pour nous, c’est tant mieux. Mais si vous me dites qu’ils
255
nous, c’est tant mieux. Mais si vous me dites qu’
ils
vont penser pour vous, c’est que vous l’aurez bien mérité. L’Apprenti
256
connue. Mais nos savants font tout le contraire :
ils
domestiquent des énergies décelées par leurs calculs. Ce qui se décha
257
selon l’expression terrible et juste de Marx. Or
il
se trouve précisément que les robots viennent les délivrer de la chaî
258
plusieurs millions de vies humaines. C’est ici qu’
il
convient de rappeler le décalage de la conscience dont j’ai parlé. Le
259
le. Tout retour en arrière étant exclu, le remède
devait
être cherché dans l’automatisme total, libérant l’ouvrier non seuleme
260
érale prit récemment le nom anglais d’automation.
Il
est curieux que la pensée occidentale, découvrant le péril avec cent
261
ues. Mais ses effets médiats seront plus étendus.
Ils
sont littéralement incalculables. L’usine sans ouvriers, produisant j
262
upe d’opérateurs, signifie simplement, partout où
elle
fonctionne, la suppression de la condition prolétarienne. Généralisée
263
ndition prolétarienne. Généralisée dans l’avenir,
elle
rendra superflu et sans objet le moment dialectique de la révolution
264
e de faire l’Europe comme a été faite l’Amérique.
Il
suffit, dit-il, de se trouver en Amérique, pour savoir que l’Europe e
265
rope comme a été faite l’Amérique. Il suffit, dit-
il
, de se trouver en Amérique, pour savoir que l’Europe existe, ne serai
266
que, plutôt que discuter de frontières mouvantes,
il
vaut mieux se préoccuper de définir la civilisation européenne à trav
267
mais voyez la Chine, voyez l’Inde : ne se mettent-
elles
pas à l’heure européenne ? L’Europe dévore les nuits et les jours de
268
ore les nuits et les jours de Denis de Rougemont.
Il
ne peut écrire de livres qu’entre onze heures du soir et quatre heure
269
du soir et quatre heures du matin, mais ce régime
doit
lui convenir puisqu’il annonce deux importants ouvrages : l’un qui ét
270
du matin, mais ce régime doit lui convenir puisqu’
il
annonce deux importants ouvrages : l’un qui établira une sorte de mor
271
etiré de justesse des mains de l’éditeur avant qu’
il
ne soit livré à l’imprimeur. Mais je n’ai pas renoncé. Je prends des
272
fort et de plus exaltant. Voilà l’Europe suprême,
elle
n’ira pas plus haut, peut-être ; mais qui serait en mesure d’exiger d
273
s sommets, mais ce sont tout de même ses sommets.
Elle
n’est pas souvent digne de ces œuvres, mais c’est elle qui les a créé
274
n’est pas souvent digne de ces œuvres, mais c’est
elle
qui les a créées. Nous l’oublions souvent et les « autres » l’ignoren
275
l’oublions souvent et les « autres » l’ignorent ;
ils
voient plus facilement ce qui est beaucoup plus bas, au niveau du con
276
chés sont criants, et tout Bandung les crie, mais
il
n’entend pas nos grandeurs, car la musique est le sublime de l’Occide
277
st un bruit vague, une espèce de rumeur insensée…
Il
fallait bien rappeler ici qu’une réflexion sur nos valeurs occidental
278
valeurs occidentales ne saurait être académique ;
elle
s’inscrit dans une situation dominée par le malentendu et toute charg
279
produits et n’en est pas non plus contemporaine ;
elle
reste loin derrière dans l’espace et le temps. Tel est le drame. Il i
280
ière dans l’espace et le temps. Tel est le drame.
Il
intéresse l’avenir de tous les peuples de la Terre. Si l’on cherche à
281
de la civilisation occidentale, on s’aperçoit qu’
elle
n’est pas loin de recouvrir l’ensemble des terres habitées, mais que
282
lé rouge et blanc. Quant à l’Asie et à l’Afrique,
il
faudrait y marquer des points rouges, indiquant la plupart des grande
283
vous avez eu l’idée de les construire et comment
ils
expriment et transportent, en fait, tout un monde de valeurs complète
284
nos croyances traditionnelles ? » Une autre fois,
il
me raconte que sa femme, qui est une Hollandaise, donnait des leçons
285
ge aux enfants d’une école de Djakarta ; et quand
ils
eurent appris les notes de notre gamme, elle leur dit : composez main
286
quand ils eurent appris les notes de notre gamme,
elle
leur dit : composez maintenant une chanson dans le goût de ce pays ;
287
tenant une chanson dans le goût de ce pays ; mais
ils
ne purent écrire que de petites mélodies qui ne rappelaient rien de l
288
nter les lieux communs de chansons européennes qu’
ils
ne connaissaient pas. Ainsi chaque machine exportée est, en fait, un
289
caces et plus puissants, car c’est aux pensées qu’
ils
commandent, aux sentiments, aux sources mêmes de l’invention et de la
290
dent avec anxiété, non point de les laisser comme
ils
sont, dans leur « sagesse » intacte et leur famine, mais de déclarer
291
te et leur famine, mais de déclarer nos valeurs ?
Ils
nous obligent à nous interroger sur ce qui va de soi dans nos façons
292
principalement contre nous, et dans la mesure où
ils
condamnent notre présence ; enfin que nos valeurs sont difficiles à «
293
t le plus souvent totalement ignorées. Mais ce qu’
il
m’importe de montrer, c’est comment ces produits et ces principes pro
294
en réalité de nos valeurs, et ne trouvent que par
elles
, dans le champ magnétique qu’elles définissent et qu’elles propagent,
295
ouvent que par elles, dans le champ magnétique qu’
elles
définissent et qu’elles propagent, leurs vertus créatrices, leurs mes
296
ns le champ magnétique qu’elles définissent et qu’
elles
propagent, leurs vertus créatrices, leurs mesures et leur sens. La ma
297
duit le plus typique de l’Occident. D’où provient-
elle
? De la technique évidemment. Mais comment expliquer que l’Europe ait
298
technique dès la fin du xviiie siècle ? C’est qu’
il
se produisit à ce moment, en Europe, une conjonction sans précédent :
299
soumis aux caprices des divinités monstrueuses ;
il
vaut la peine d’en scruter les lois et il attend de l’homme d’être co
300
euses ; il vaut la peine d’en scruter les lois et
il
attend de l’homme d’être compris, révélé, voire sauvé, selon saint Pa
301
aint Paul. Quant à nos principes de vie publique,
ils
s’inspirèrent tous, d’une manière plus ou moins directe ou correcte,
302
pes ou les produits qui manifestent son activité,
il
apparaît clairement que l’usage de ces produits et le recours à ces p
303
t aller sans impliquer le système de valeurs dont
ils
procèdent. User des uns ou invoquer les autres hors du contexte spiri
304
bes en Algérie nous en donne un exemple tragique.
Il
ne s’agit nullement ici de politique, et ce n’est qu’en vertu d’un ac
305
affaire, car en réalité le problème est mondial,
il
concerne tout l’Occident, dans ses relations avec le Monde qu’il infl
306
t l’Occident, dans ses relations avec le Monde qu’
il
influence. Théoriquement, deux solutions nettes et radicales se conço
307
ative est utopique, chacun de ses termes l’étant.
Il
nous reste à trouver des formules d’équilibre ou de compromis tolérab
308
Europe. Pour unir les 332 millions d’habitants qu’
elle
compte à l’ouest du rideau de fer — en attendant les 98 millions rete
309
l’économie, incroyablement négligée par l’École,
doit
devenir partie intégrante de la culture d’un honnête homme au xxe si
310
se, ou plus souvent par députés interposés ; mais
il
sait trop rarement ce qu’il fait, dans ce domaine tout au moins. D’au
311
tés interposés ; mais il sait trop rarement ce qu’
il
fait, dans ce domaine tout au moins. D’autre part, les travaux des ex
312
énéralement inaccessibles au grand public, même s’
ils
sont édités en librairie ; leurs auteurs ne prévoient d’être lus que
313
arge audience, peu ou point d’échanges efficaces.
Il
faudrait réfléchir librement sur les problèmes économiques, et il fau
314
échir librement sur les problèmes économiques, et
il
faudrait y réfléchir en groupe, car ces problèmes sont trop complexes
315
p complexes pour le plus génial des chercheurs, s’
il
reste seul. Mais qui le fait ? Les experts des gouvernements ne sont
316
une simplicité presque choquante, une question qu’
il
jugeait présente et vraiment agissante dans l’opinion : Que se passer
317
iment agissante dans l’opinion : Que se passerait-
il
si… les frontières économiques étaient supprimées en Europe ? Telle é
318
prévisibles — soit garante du sérieux avec lequel
ils
ont essayé néanmoins de répondre à notre question. Nous nous étions e
319
s étions efforcés de les persuader dès l’abord qu’
il
importait de réduire certaines objections de principe, ou mieux certa
320
le jeu de « ce qui se passerait si… » Seulement,
il
a tendance à jouer perdant, à préjuger de catastrophes dont rien ne p
321
à préjuger de catastrophes dont rien ne prouve qu’
elles
se produiraient. Il ne croit guère qu’à des fantômes, tandis que les
322
hes dont rien ne prouve qu’elles se produiraient.
Il
ne croit guère qu’à des fantômes, tandis que les experts croient aux
323
endemain, au détriment de leur véritable utilité.
Elles
ont déjà servi de base à plusieurs brochures de large diffusion18, à
324
eil qui leur donnera leur vraie valeur, chacune d’
elles
appuyant, nuançant ou parfois corrigeant les autres. Aux économistes,
325
res. Aux économistes, industriels et commerçants,
elles
apporteront des analyses d’une rare objectivité. Que se passerait-il
326
analyses d’une rare objectivité. Que se passerait-
il
si… ? — Rien ou presque rien de ce que vous redoutiez, mais beaucoup
327
vous redoutiez, mais beaucoup de bonnes choses qu’
il
vous reste à vouloir — avec au moins autant de lucidité que les total
328
des cas, assurés. Étrange Europe, qui a tout pour
elle
si elle s’unit mais qui a tant de peine à s’accepter, à saisir ses ch
329
assurés. Étrange Europe, qui a tout pour elle si
elle
s’unit mais qui a tant de peine à s’accepter, à saisir ses chances de
330
)k On peut créer une fédération européenne, et
il
le faut. Mais on ne peut pas créer une culture européenne et personne
331
surplus la culture européenne existe. C’est même
elle
, et elle seule, qui nous permet de parler de l’Europe comme d’une uni
332
la culture européenne existe. C’est même elle, et
elle
seule, qui nous permet de parler de l’Europe comme d’une unité exista
333
’Europe comme d’une unité existante, sur laquelle
il
devient possible de construire notre union nécessaire. Ceux qui disen
334
écessaire. Ceux qui disent redouter on ne sait qu’
elle
« uniformisation culturelle » comme conséquence lugubre et fatale de
335
e sort de la culture leur importe très peu ; mais
ils
sont plus souvent les innocentes victimes d’une illusion scolaire : i
336
les innocentes victimes d’une illusion scolaire :
ils
ont retenu de leurs manuels que l’Europe se divise en autant de cultu
337
s que l’Europe se divise en autant de cultures qu’
elle
a de nations, celles-ci correspondant d’ailleurs aux langues, aux cou
338
ne cautionne plus19. Le seul problème sérieux qui
doit
nous occuper est le suivant : étant donné qu’il faut unir l’Europe po
339
doit nous occuper est le suivant : étant donné qu’
il
faut unir l’Europe pour les motifs que nous indique clairement la con
340
ale du xxe siècle, la culture des Européens peut-
elle
contribuer à cette union, ou bien lui fait-elle obstacle ? Je pense q
341
t-elle contribuer à cette union, ou bien lui fait-
elle
obstacle ? Je pense qu’il faut répondre oui aux deux questions. Et ce
342
ion, ou bien lui fait-elle obstacle ? Je pense qu’
il
faut répondre oui aux deux questions. Et ce paradoxe apparent définit
343
paradoxe apparent définit assez bien le rôle que
doit
aujourd’hui s’assigner toute institution culturelle soucieuse des des
344
ns de l’Europe. D’une part, une telle institution
devra
montrer que l’Europe est d’abord une culture, qu’elle doit à sa cultu
345
montrer que l’Europe est d’abord une culture, qu’
elle
doit à sa culture d’avoir dominé le monde, qui retourne aujourd’hui c
346
rer que l’Europe est d’abord une culture, qu’elle
doit
à sa culture d’avoir dominé le monde, qui retourne aujourd’hui contre
347
dominé le monde, qui retourne aujourd’hui contre
elle
les armes physiques et morales que son génie seul a créées pour le me
348
, non l’inverse. D’autre part, cette institution
devra
s’efforcer de réduire les résistances invétérées à notre union, les «
349
la vraie base de notre union ; mais d’autre part,
elle
seule peut expliquer les divisions mortelles qui s’opposent à l’union
350
à l’union. On ne fera pas l’Europe en répétant qu’
il
est indispensable de s’unir : tout le monde le sait ; ni en ratifiant
351
ersonne n’y croit. (On attend de voir…) Et certes
il
fallait dire : unissons-nous ! Certes, il fallait ratifier des traité
352
certes il fallait dire : unissons-nous ! Certes,
il
fallait ratifier des traités. Mais voilà qui est fait désormais. La c
353
nde au xxe siècle, sa vocation, et son avenir si
elle
s’unit. 3° Créer des instruments de coopération pour les différentes
354
tituts d’études européennes se créent dès 194620.
Ils
nouent des liens entre eux dès 1950. On en compte aujourd’hui plus d’
355
un Comité d’experts des 16 gouvernements membres.
Il
élabore et fait ratifier une Convention culturelle européenne, convoq
356
illiers de brochures. Cet effort est immense. Est-
il
trop dispersé pour porter plein effet ? Est-il suffisamment soutenu p
357
st-il trop dispersé pour porter plein effet ? Est-
il
suffisamment soutenu par les pouvoirs publics et le mécénat privé pou
358
énat privé pour répondre aux défis du temps ? Est-
il
coordonné à la mesure des besoins ? Aurait-il réussi à s’imposer à la
359
Est-il coordonné à la mesure des besoins ? Aurait-
il
réussi à s’imposer à la conscience des Européens ? Hélas ! la somme t
360
ns qui existent par milliers en Amérique du Nord.
Il
serait temps que nos États prennent conscience de ces deux vérités pr
361
ités primordiales, à savoir : 1° que l’Europe n’a
dû
sa puissance qu’aux inventions, procédés et systèmes de tous ordres d
362
ue, par suite, sans la vitalité de cette culture,
elle
se réduirait vite à ce qu’elle est sur la carte : 4 % des terres du g
363
de cette culture, elle se réduirait vite à ce qu’
elle
est sur la carte : 4 % des terres du globe (et très pauvres en matièr
364
a décidé dès 1950 de tenter l’aventure d’exister.
Il
existe depuis sept ans. Son exemple peut éclairer. J’essaierai donc d
365
itution fut inaugurée à Genève le 7 octobre 1950.
Elle
n’est rattachée à aucune organisation internationale officielle, ni à
366
onstituée en association régie par la loi suisse,
elle
jouit de la personnalité juridique. Ses ressources sont assurées par
367
antes. Les associations créées par le CEC et dont
il
assume en règle générale le secrétariat, gardent leur autonomie, tout
368
ssi ses possibilités d’avenir au plan mondial, si
elle
unit ses forces pendant qu’il en est temps. Le Centre a donc suscité
369
plan mondial, si elle unit ses forces pendant qu’
il
en est temps. Le Centre a donc suscité dans plusieurs de nos pays des
370
s de culture populaire en milieu rural ou urbain.
Il
leur fournit des moyens audiovisuels d’enseignement, des publications
371
Grande-Bretagne et les États scandinaves). Enfin,
il
les fait bénéficier de ses moyens d’information européenne. Ceux-ci c
372
ieux populaires ou des groupes militants auxquels
ils
s’adressent, permettent de multiplier les exposés documentés donnés d
373
ices du CEC. Quant au département des Recherches,
il
a déjà organisé deux importants Séminaires, l’un sur l’avenir économi
374
talité et des tensions fécondes de notre culture.
Il
ne s’agit nullement de les uniformiser. Cependant, il est urgent de l
375
e s’agit nullement de les uniformiser. Cependant,
il
est urgent de leur offrir les moyens pratiques d’échanger leurs expér
376
ces — mais celles-là seules ! — qui semblent bien
devoir
bénéficier d’une intégration plus poussée. À l’heure où les instituti
377
services et leurs assemblées, un effort parallèle
doit
être entrepris dans le domaine de la culture. Coordonner les autonomi
378
e de la culture. Coordonner les autonomies, telle
doit
être à mes yeux la devise, spécifiquement fédéraliste, de cet effort.
379
ire avec les autres traditions de culture, que si
elles
se présentent au nom de l’Europe entière, sûre de sa vocation, donc o
380
mier ordre, à la veille même du déchaînement dont
ils
avaient choisi d’examiner les causes, afin de proposer les moyens de
381
e borne à poser des questions, dans un domaine où
il
n’en sait guère plus que le citoyen raisonnable et moyen. L’autre rép
382
en. L’autre répond dans la rigueur de sa pensée :
il
est chez lui. Que dit Einstein ? Il dit que, la guerre étant devenue
383
e sa pensée : il est chez lui. Que dit Einstein ?
Il
dit que, la guerre étant devenue le fait des nations, il faut créer l
384
que, la guerre étant devenue le fait des nations,
il
faut créer l’autorité législative et judiciaire qui leur retire la so
385
éduise à la raison. Mais pourquoi la raison n’a-t-
elle
pas plus de force ? Pourquoi les masses suivent-elles leur « classe r
386
e pas plus de force ? Pourquoi les masses suivent-
elles
leur « classe régnante » ? Comment dominer les instincts ? Et comment
387
res. Freud répond de sa Vienne natale en sursis —
elle
n’en aura plus pour longtemps — et le pacifisme d’Einstein se voit so
388
rtois, mais dénué d’illusions. Non, la force, dit-
il
, n’est pas le contraire du droit. Car le droit n’est en somme qu’une
389
et sur le sentiment les lois de leur communauté.
Il
s’agit donc de transférer le pouvoir à quelque « plus vaste unité ».
390
guerre ? Ici, Freud va nous étonner. D’une part,
il
fait appel (« sans rougir », mais vaguement) à l’amour qui relie les
391
se, l’école et les « organisations religieuses ».
Ils
domineraient ainsi les masses, les poussant à la haine, d’où sortirai
392
conversation, cédait facilement aux clichés quand
il
s’exprimait en public. Dans son rôle de critique des clichés « pacifi
393
e la Force et du Droit à celle de deux violences,
il
définit les conditions de toute politique réaliste. Quatre ans après
394
e de l’union de ses victimes. Mais, comme en fait
il
n’y avait pas d’union, cela revenait à opposer aux chars d’Hitler une
395
es en 1932. Einstein déplore que le super-État qu’
il
rêve soit dépourvu d’une force à sa mesure. Il la cherche en vain, ne
396
qu’il rêve soit dépourvu d’une force à sa mesure.
Il
la cherche en vain, ne voit rien… Et c’est à lui que Freud écrit prop
397
ies, dont l’un voit bien l’avenir, mais ignore qu’
il
en parle au seul homme qui en détienne le secret sans le savoir ! Rê
398
pacifisme désarmant. Pourtant, un soir de fièvre,
il
a signé la lettre proposant à Roosevelt de fabriquer la bombe. Tout n
399
à Roosevelt de fabriquer la bombe. Tout ne s’est-
il
point passé comme si le calcul profond du daimôn qui habitait en lui,
400
tive — qui provoquerait l’union du genre humain ?
Devrons
-nous aller dans la Lune pour en éprouver le saisissement, ou plus loi
401
iècle) On se figure, et l’on écrit souvent, qu’
il
a fallu quelque six siècles à la Suisse pour devenir, par une évoluti
402
our devenir, par une évolution, l’État fédéral qu’
elle
est aujourd’hui. En réalité il a fallu neuf mois, au terme d’une cris
403
’État fédéral qu’elle est aujourd’hui. En réalité
il
a fallu neuf mois, au terme d’une crise de trente-trois ans, succédan
404
n n’insistera jamais assez sur le rôle décisif qu’
il
devait jouer dans la formation de la Suisse et dans la détermination
405
’insistera jamais assez sur le rôle décisif qu’il
devait
jouer dans la formation de la Suisse et dans la détermination de la m
406
du col. Au nombre des seigneurs entreprenants qu’
il
fallait empêcher de dominer la route figuraient en bonne place les Ha
407
leurs personnes et en leurs biens ». Et ce pacte
devait
« s’il plaît à Dieu, durer à perpétuité ». De fait, il a duré jusqu’à
408
onnes et en leurs biens ». Et ce pacte devait « s’
il
plaît à Dieu, durer à perpétuité ». De fait, il a duré jusqu’à nos jo
409
s’il plaît à Dieu, durer à perpétuité ». De fait,
il
a duré jusqu’à nos jours. Mais ses auteurs étaient bien loin de se do
410
ais ses auteurs étaient bien loin de se douter qu’
ils
fondaient un État nouveau, lequel serait un jour, la Suisse. Cette pr
411
es pactes en vigueur dans les communes lombardes,
devait
s’élargir et se compliquer au cours des siècles par l’adhésion ou la
412
ticulières et un sens remarquable de la foi jurée
devaient
rester, pendant toute cette période, le seul gage d’unité (relative)
413
02, Napoléon écrivait aux délégués helvétiques qu’
il
avait convoqués à Paris : « La Suisse ne ressemble à aucun autre État
414
le retour à l’état de choses prérévolutionnaire.
Il
restaurait la pleine souveraineté des cantons, remplaçait le pouvoir
415
it essentiellement. Quant aux régimes intérieurs,
ils
variaient de la démocratie directe (cantons primitifs) à la monarchie
416
cement de leur unité et de la création d’un État.
Il
est remarquable qu’ils n’aient pas cherché la solution de ce problème
417
t de la création d’un État. Il est remarquable qu’
ils
n’aient pas cherché la solution de ce problème dans l’unification sys
418
nguistiques, religieuses, politiques et sociales.
Ils
ne se demandèrent pas : comment devenir une Nation ? mais bien : comm
419
s (Staatenbund) à un État fédéral (Bundestaat). S’
ils
ne furent pas les seuls à poser ce problème, dans l’Europe du xixe s
420
poser ce problème, dans l’Europe du xixe siècle,
ils
furent les seuls à le résoudre d’une manière efficace et durable.
421
15-1848) La crise ouverte par le Pacte de 1815
devait
se prolonger, sans progrès appréciable, pendant trente-trois ans. Ell
422
ns progrès appréciable, pendant trente-trois ans.
Elle
ne fut résolue, très subitement, en 1848, qu’au lendemain d’une guerr
423
mune à l’égard des grandes nations voisines, mais
ils
n’hésitaient pas à décréter des mesures de blocus contre tel d’entre
424
canton à un autre ou d’une commune à une autre. «
Il
y en avait partout, sauf aux frontières extérieures » relève encore W
425
ntières extérieures » relève encore W. Martin, et
il
signale que le seul canton du Tessin « ne prélevait pas moins de trei
426
strie suisse put survivre à de telles conditions,
elle
ne le dut qu’à l’initiative privée et à la haute qualité de sa main-d
427
e put survivre à de telles conditions, elle ne le
dut
qu’à l’initiative privée et à la haute qualité de sa main-d’œuvre, hé
428
la décision. « Je mènerai ces gens à la baguette,
il
suffit de les diviser ! », écrivait alors à son gouvernement l’ambass
429
alors à son gouvernement l’ambassadeur de France.
Il
n’exagérait pas. Que pouvait entreprendre, en effet, une Confédératio
430
acun pour son compte, par les États souverains ? (
Elle
avait bien en propre une « caisse de guerre », et le droit de nommer
431
son état-major, et quelques fonctionnaires, mais
elle
n’en dépendait pas moins du bon plaisir des cantons, dans ce domaine.
432
ner. Cette agitation et ces déséquilibres sociaux
devaient
nourrir le mouvement de « Régénération » qui se prononça dès 1830. In
433
rédiger un projet de Constitution. Le rapport qu’
elle
présenta après quelques mois comportait un commentaire dû à la plume
434
nta après quelques mois comportait un commentaire
dû
à la plume du délégué de Genève, Pellegrino Rossi24. Il vaut la peine
435
reuse que l’isolement » par la fausse sécurité qu’
elle
inspirait. Il en résultait que les puissances voisines pouvaient « em
436
ement » par la fausse sécurité qu’elle inspirait.
Il
en résultait que les puissances voisines pouvaient « embrasser dans l
437
lpes était un désert livré au premier occupant ».
Il
décrivait la paralysie qui frappe une Diète formée de délégués d’État
438
non de députés des peuples : « Lequel de nous n’a
dû
souvent déplorer la forme actuelle des délibérations fédérales ? Ces
439
directeurs se trouvent dans une situation fausse.
Ils
doivent, pour ainsi dire, servir deux maîtres, être tour à tour les h
440
cteurs se trouvent dans une situation fausse. Ils
doivent
, pour ainsi dire, servir deux maîtres, être tour à tour les hommes de
441
mmes de la Confédération et les hommes du canton…
Il
n’est, ce me semble, aucun motif de conserver un pareil état de chose
442
cette anxiété elle-même, et ce malaise général qu’
il
est impossible de méconnaître, et cette espérance que dans un nouveau
443
ouveau Pacte, dans une confédération plus solide,
doit
se trouver le remède aux maux qui affligent la patrie. » Ce « nouveau
444
utifs, judiciaires, administratifs et militaires,
devait
être transformée en un État moderne de forme fédérative. L’éloquence
445
nt « un brandon de discorde » parmi les cantons :
il
le devint en effet, de par l’acharnement qu’eux-mêmes montrèrent à l
446
itaires supérieurs en nombre et en armement. Mais
ils
savaient que les grandes puissances voisines se tenaient prêtes à int
447
dangereux tyrans » partisans de la Révolution) :
il
pressentait que l’instauration d’une Suisse unie et libérale donnerai
448
ssue un encouragement efficace aux libéraux. Mais
il
convient de souligner qu’en retour, l’imminence des révolutions de 18
449
acteur important du succès des radicaux suisses :
elle
retarda ou même paralysa l’action des Puissances. La campagne fut men
450
uscription publique dans les cantons protestants,
ils
contribuèrent à couvrir la dette de guerre des catholiques. Et dans l
451
profitèrent du répit que leur laissaient, malgré
elles
, les Puissances, pour accomplir en quelques mois la transformation de
452
ste ou pur intellectuel. Dès la première réunion,
ils
décidèrent que leurs débats se tiendraient à huis clos, ceci surtout
453
sept semaines, au cours de 31 séances plénières,
ils
élaborèrent un projet de 17 articles. Nombre de ces articles s’inspir
454
résentants des cantons. La ratification populaire
devait
avoir lieu avant le 1er septembre. Dans la plupart des cantons, le Pa
455
hoisie comme « ville fédérale »). Le 16 novembre,
elles
procédèrent à l’élection du premier Conseil fédéral, inaugurant un ré
456
mier Conseil fédéral, inaugurant un régime qui ne
devait
plus être remis en question jusqu’à nos jours. L’essor économique, so
457
ne mérite pas seulement l’épithète de fédérale :
elle
est précisément fédéraliste, dans ses visées comme par ses principale
458
tée par la constitution fédérale, et, comme tels,
ils
exercent tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral.
459
d’association, de pétition et d’expression, et qu’
elle
établit l’égalité devant la loi ; qu’elle crée une armée fédérale ; q
460
, et qu’elle établit l’égalité devant la loi ; qu’
elle
crée une armée fédérale ; qu’elle supprime les péages intérieurs et r
461
ant la loi ; qu’elle crée une armée fédérale ; qu’
elle
supprime les péages intérieurs et reporte les douanes aux frontières
462
nfédération, quitte à indemniser les cantons ; qu’
elle
uniformise les poids, mesures et monnaies, et nationalise les postes
463
t éducatif à la discrétion des cantons ; qu’enfin
elle
prévoit une procédure de révision « en tout temps » par initiative po
464
l’événement capital de l’histoire des Confédérés.
Elle
tira les leçons de cinq siècles d’expériences souvent amères, confirm
465
iences souvent amères, confirma les droits et les
devoirs
lentement élaborés par les divers régimes des républiques locales, et
466
me le gage du triomphe des radicaux. À vrai dire,
elle
portait toutes les marques de cette modération, née du juste équilibr
467
des frontières économiques. Notons en passant qu’
il
n’est pas un des arguments des opposants à l’union suisse qui n’ait é
468
te Suisse du siècle dernier. A-t-on pris garde qu’
il
fallait trois jours à un député des Grisons pour se rendre à Berne, t
469
uté des Grisons pour se rendre à Berne, tandis qu’
il
ne faut qu’une matinée à un délégué grec ou scandinave pour se rendre
470
Appenzell des patriciens cosmopolites de Genève ;
ils
sont moins nombreux, et souvent, de moins ancienne tradition national
471
onçant des applications futures à grande échelle,
il
faut relever qu’à son époque elle se produisit comme à contre-courant
472
à grande échelle, il faut relever qu’à son époque
elle
se produisit comme à contre-courant de l’Histoire. Déjà, le pacte de
473
action tardive, une exception, dont les destinées
devaient
être exceptionnellement heureuses. « La Confédération suisse est le s
474
r l’idée démocratique et communale au Moyen Âge ;
elle
représente le résultat d’une révolution générale qui a été vaincue pa
475
olence populaire. Une dernière remarque s’impose.
Elle
concerne le sens du mot fédéralisme, qui est le mot-clé de l’histoire
476
caux de 1848 voulaient une vraie fédération, mais
ils
passaient pour des centralistes unitaires. Leurs ennemis, catholiques
477
e disaient au contraire « fédéralistes », bien qu’
ils
fussent opposés à tout ce qui menaçait de diminuer les souverainetés
478
ique de l’union dans la diversité. Le fédéralisme
doit
donc souligner le thème de l’union quand les diversités tendent à dev
479
tte dialectique, en Suisse, n’est pas abstraite :
elle
exprime la vie même de la Confédération, et donne la formule générale
480
nt alors les sociétés helvétiques de tous ordres,
il
faut ajouter le rôle accidentel mais très efficace que joua la cause
481
me réfugié politique au début de la Restauration,
il
fut le premier professeur catholique à l’Académie de Calvin et l’orne
482
. L’Europe n’a pas seulement découvert le monde :
elle
l’a fait. Épousons cette idée d’une Europe qui n’existe que dans son
483
son dépassement et qui ne serait pas elle-même si
elle
n’était plus qu’elle-même. Quatre constatations fondamentales, et que
484
vement mondiale. Certes, Alexandre se trompait, s’
il
a cru qu’il régnait sur le monde : il n’en connaissait qu’un canton.
485
ale. Certes, Alexandre se trompait, s’il a cru qu’
il
régnait sur le monde : il n’en connaissait qu’un canton. Mais nous ne
486
trompait, s’il a cru qu’il régnait sur le monde :
il
n’en connaissait qu’un canton. Mais nous ne sommes pas victimes d’une
487
nimer le courant des échanges mondiaux. Car c’est
elle
qui les a mis en branle dès l’époque des grandes découvertes, en bali
488
en balisant les voies du commerce maritime. C’est
elle
qui a su trouver les substituts de l’ancienne route de la soie. Et so
489
. Ne parlons pas ici d’une vocation de l’Europe ;
il
ne s’agit que d’une nécessité, qui n’en dicte pas moins une politique
490
enu national. L’Europe n’est rien sans le monde :
elle
doit être mondiale, par une nécessité vitale. 4. C’est l’Europe qui r
491
ational. L’Europe n’est rien sans le monde : elle
doit
être mondiale, par une nécessité vitale. 4. C’est l’Europe qui représ
492
mal gré, pour la première fois dans l’Histoire. S’
il
est vrai que le monde, irréductiblement, tend à devenir un organisme,
493
Du seul point de vue de l’économie des échanges,
elle
n’est rien si elle n’est pas l’animatrice d’une circulation planétair
494
ue de l’économie des échanges, elle n’est rien si
elle
n’est pas l’animatrice d’une circulation planétaire. Qui peut en dire
495
r la relève, avec les moyens que l’on sait ; mais
ils
n’y sont pas vitalement contraints. Part des importations dans le rev
496
rope seule périrait, sans discussion possible, si
elle
en était réduite à vivre sur elle-même. L’Europe seule ne peut plus s
497
peut plus se payer une politique provincialiste.
Elle
se voit condamnée par l’histoire à reprendre son rôle d’animatrice de
498
ou à redevenir — désormais sans hégémonie — ce qu’
elle
fut dès la Renaissance : une fonction mondiale, un foyer, une perpétu
499
, l’Europe ne peut répondre que dans la mesure où
elle
est forte et saine : c’est la mesure de son intégration, c’est-à-dire
500
res, s’imaginent qu’on les voit différents, comme
ils
se voient eux-mêmes en restant nez à nez. Les Américains les confonde
501
ricains les confondent ; et quant aux Asiatiques,
ils
les distinguent très mal, suprême outrage, de leurs cousins américain
502
s ont été les sujets de nos États colonialistes :
ils
exceptent aussitôt cet État de la communauté européenne. Je me rappel
503
u crédit qui s’attache à l’Europe tout entière, s’
il
se présente en tant que nation distincte. Et cela s’explique. Car les
504
monde, ne sont universelles que dans la mesure où
elles
résultent de nos variétés infinies et de leur équilibre en tension.
505
, répondent les nécessités internes de l’union. S’
il
est vrai qu’aucun de nos pays ne peut prétendre à représenter valable
506
lusion de la « souveraineté nationale » persiste.
Elle
règne encore sur l’affectivité de la plupart de nos hommes d’État, vi
507
dante », en dépit des plus dures évidences, quand
il
est clair que vouloir s’isoler dans une souveraineté vide de tout con
508
est liée aux dominions par tous les océans, mais
elle
est isolée de l’Europe par la Manche. La Suisse est neutre parce qu’e
509
rope par la Manche. La Suisse est neutre parce qu’
elle
est au centre de l’Europe, et à cause d’une histoire très ancienne ;
510
s ancienne ; l’Autriche est neutre aussi parce qu’
elle
touche la Russie, et à cause d’histoires très récentes. Ainsi tout se
511
s souverainetés, tout leur est bon pour croire qu’
elles
existent encore, puisqu’elles gardent au moins le pouvoir de refuser
512
bon pour croire qu’elles existent encore, puisqu’
elles
gardent au moins le pouvoir de refuser l’union sous ce prétexte, tout
513
pas seulement la plus opportune qui se présente :
elle
est le principe même de l’existence européenne, elle est l’Europe en
514
e est le principe même de l’existence européenne,
elle
est l’Europe en tant que pouvoir créateur. Une Europe uniformisée per
515
nt à l’envi. Mais le risque de courts-circuits ne
doit
pas entraîner la suppression des installations électriques, productri
516
e). Prenez la peinture : les couleurs chantent si
elles
sont bien opposées dans leur pureté ou leurs nuances précises, non si
517
es par les frontières de leur domaine, auxquelles
ils
tentent abusivement de réduire des réalités aussi hétérogènes que la
518
trale et chicanière des âges prétechniques. C’est
elle
encore qui impose aux services de l’État la tâche idiote de faire coï
519
non d’une nation reculant un peu ses bornes, que
doit
être considérée l’union partielle des six pays qui ont initié le Marc
520
’avoir voulu « limiter l’Europe à six pays » sont-
ils
sincères, ou simplement vexés que l’Europe ait commencé en dépit de l
521
Petite Europe, déjà réelle, une Grande Europe qu’
ils
n’ont cessé depuis dix ans de refuser comme utopique — d’où la nécess
522
ù la nécessité de commencer par la Petite ! — ont-
ils
bien vu le problème dans son cadre mondial, ou défendent-ils plutôt q
523
le problème dans son cadre mondial, ou défendent-
ils
plutôt quelque nationalisme exalté par sa crise finale ? Il paraît di
524
quelque nationalisme exalté par sa crise finale ?
Il
paraît difficile d’affirmer honnêtement que les promoteurs de la Peti
525
ue) n’est au fond qu’une mesure de fortune : sans
elle
, pourtant, rien ne se fût mis en branle et l’on ne parlerait pas d’un
526
des Six étant de déclencher un processus d’union,
il
serait manqué si les Six, dès maintenant, tentaient de se suffire à e
527
-dire d’une Europe qui ne serait pas elle-même si
elle
ne tendait sans cesse à être plus qu’elle-même. Ce qu’il y a de fonci
528
dans l’existence encore fragile des Six, c’est qu’
ils
sont vitalement intéressés à devenir ces Dix-Sept que tout en eux app
529
lon les textes) se verront réunis en une famille,
ils
sauront bien, c’est dans leur sang, que l’Europe entière n’est qu’un
530
de la liberté, et qui trouve dans les risques qu’
elle
assume, qu’elle fomente à plaisir comme pour mieux s’éprouver et se m
531
et qui trouve dans les risques qu’elle assume, qu’
elle
fomente à plaisir comme pour mieux s’éprouver et se mettre elle-même
532
eul destin du monde gréco-romain, le mieux connu.
Il
se trouve que l’exemple est mauvais. Bien d’autres civilisations ont
533
romaine, dont l’essentiel vit dans la nôtre, sont-
elles
mortes ? Leurs conquêtes n’ont-elles pas été préservées et développée
534
nôtre, sont-elles mortes ? Leurs conquêtes n’ont-
elles
pas été préservées et développées par le Musée et le Laboratoire euro
535
être diffusées de nos jours sur toute la terre ?
Il
s’en faut de beaucoup que leurs rivales asiatiques, qu’on dit plus ra
536
er décadence plutôt que renaissance. Observons qu’
elles
étaient locales, comme le furent la chinoise, l’hindoue, l’indonésien
537
es candidats à la relève étaient nombreux. En est-
il
un seul aujourd’hui qui réclame l’oblitération, ou simplement la repr
538
ise des charges de notre civilisation ? Les USA ?
Ils
s’européanisent en profondeur, plus rapidement que l’Europe ne s’amér
539
ricanise par quelques signes extérieurs. L’URSS ?
Elle
s’essouffle à rattraper les USA et n’apporte rien de bien neuf — beau
540
possible par sa technique. La Chine ? L’Afrique ?
Elles
paraissent moins critiques à notre égard, et plus promptes à nous imi
541
ion à des sages des cinq continents ; si l’Europe
devait
disparaître, emportée par un cataclysme ou défaite, nation par nation
542
ue le génie européen rayonne sur le monde entier,
ils
préfèrent nous parler de notre éclipse. C’est ce paradoxe planétaire
543
savons maintenant que nous sommes mortelles. Et
il
ajoutait : Elam, Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues, et
544
de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables :
elles
sont dans les journaux. L’écho de cette page fut immense, et je sais
545
ir, va donc probablement périr. Pour émouvante qu’
elle
soit, elle exprime, à mon avis, l’une des erreurs les plus célèbres d
546
probablement périr. Pour émouvante qu’elle soit,
elle
exprime, à mon avis, l’une des erreurs les plus célèbres de notre tem
547
llantes créations de la main de l’homme ? Où sont-
ils
, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de Persépol
548
un individu dans la marche de l’Histoire » et qu’
il
obéit donc, comme tout individu, à une loi de croissance, d’épanouiss
549
ivilisations, on en venait à penser que chacune d’
elles
devait fatalement décliner et mourir après une période d’apogée, — la
550
ations, on en venait à penser que chacune d’elles
devait
fatalement décliner et mourir après une période d’apogée, — la nôtre
551
ux débuts du xxe siècle, Spengler va plus loin ;
il
est convaincu que toute culture est un organisme, et correspond morph
552
rphologiquement à un individu, animal ou végétal.
Il
en résulte inexorablement que toute culture est mortelle, et nous rej
553
moins de peine à nous convaincre que d’une part,
ils
rejoignent, par leurs conclusions, notre angoisse quant à l’état prés
554
tre ses conquêtes coloniales et ses protectorats.
Elle
ne voit pas encore, mais elle pressent déjà la perte de sa longue roy
555
t ses protectorats. Elle ne voit pas encore, mais
elle
pressent déjà la perte de sa longue royauté mondiale. Déjà le communi
556
les prophètes du désastre européen ? Que faudrait-
il
de plus, pour qu’on ait le droit de parler d’une éclipse ou d’une mor
557
ge eut une civilisation sans hégémonie. Secundo,
il
n’est pas du tout certain que les précédents historiques soient appli
558
occidentale de l’Empire au moins. Cet exemple est-
il
valable pour nous ? La civilisation européenne est-elle une civilisat
559
alable pour nous ? La civilisation européenne est-
elle
une civilisation comme les autres ? Est-elle donc vraiment comparable
560
est-elle une civilisation comme les autres ? Est-
elle
donc vraiment comparable à celles qui l’ont précédée ? Son destin peu
561
ble à celles qui l’ont précédée ? Son destin peut-
il
être prédit par extrapolation des exemples antiques ? Voilà qui n’est
562
ples antiques ? Voilà qui n’est pas sûr du tout.
Il
se pourrait, en effet, que notre civilisation présente certains carac
563
apport à toutes les autres, et quel seuil mondial
elle
aurait été la première et la seule à franchir, s’affranchissant ainsi
564
leurs souvent contradictoires ou incompatibles qu’
elle
en a héritées, la civilisation européenne s’est trouvée fondée sur un
565
e sur une culture de dialogue et de contestation.
Elle
n’a jamais pu, et surtout, elle n’a jamais voulu se laisser ordonner
566
de contestation. Elle n’a jamais pu, et surtout,
elle
n’a jamais voulu se laisser ordonner à une seule doctrine qui eût rég
567
l’a décrite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’
il
n’en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne fu
568
s produit seulement de l’anarchie et des guerres.
Il
a contraint les élites religieuses, intellectuelles et politiques, et
569
eligieuses, intellectuelles et politiques, et par
elles
la partie agissante des masses européennes, à développer ce que je vo
570
s’impliquent mutuellement en Europe. En revanche,
il
est évident qu’elles se voient réprimées, débilitées, sinon radicalem
571
llement en Europe. En revanche, il est évident qu’
elles
se voient réprimées, débilitées, sinon radicalement exclues, par les
572
distinguent le mieux d’autres cultures, qui ont,
elles
, d’autres vertus. Le sens de la vérité objective nous vient sans dout
573
orés par les civilisations du Proche-Orient. Mais
il
a été fortement développé par la théodicée chrétienne, comme l’ont mo
574
pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’
il
a créé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous ne pouvons pas
575
ilosophiques, mais aussi de nos sciences exactes.
Elle
développera dans nos élites intellectuelles le sens critique, au nom
576
absolu de vérité. D’autre part, le sens critique
devrait
nécessairement s’aiguiser en Europe plus qu’ailleurs, du fait même de
577
ple véracité, et du recours aux preuves par neuf.
Il
faut songer cependant que l’Asie et l’Afrique ignorent cette exigence
578
». Quand un ingénieur européen énonce un chiffre,
il
le veut exact à la nième virgule près, car autrement le pont cédera s
579
n Oriental énonce un chiffre exorbitant, c’est qu’
il
espère en obtenir un autre, ou qu’il veut plaire ou intimider, ou se
580
nt, c’est qu’il espère en obtenir un autre, ou qu’
il
veut plaire ou intimider, ou se faire valoir. Il plaide, il marchande
581
’il veut plaire ou intimider, ou se faire valoir.
Il
plaide, il marchande, il joue, pendant que nous vérifions une fois de
582
aire ou intimider, ou se faire valoir. Il plaide,
il
marchande, il joue, pendant que nous vérifions une fois de plus nos c
583
der, ou se faire valoir. Il plaide, il marchande,
il
joue, pendant que nous vérifions une fois de plus nos calculs… Deuxiè
584
ture : le sens de la responsabilité personnelle.
Il
s’enracine dans la notion chrétienne de la personne humaine, c’est-à-
585
personne humaine, c’est-à-dire de l’individu qui
doit
répondre de ses actes à la fois devant Dieu et devant la société, don
586
destin sur la terre comme au ciel. De ce destin,
il
se croit ou se veut maître, pour une part tout au moins, grande ou in
587
’Europe existe ! — mais décisive quant au sens qu’
il
donne à sa vie. D’où résulte une double exigence de recueillement en
588
s cris et non sans haine une aide qui ne leur est
due
qu’au nom de l’amour chrétien, nous avons le droit de leur dire : si
589
qui exclut comme illusoire la solidarité, puisqu’
elle
refuse la réalité du prochain, la dignité de la personne distincte. E
590
culture européenne, c’est le sens de la liberté.
Il
est clair que ce sens est étroitement lié à celui de la responsabilit
591
n’est vraiment libre que dans la seule mesure où
il
est responsable de son sort, et à l’inverse, on ne saurait tenir un h
592
à doses variables dans notre idée de la liberté.
Il
n’est pas de concept plus difficile à définir, plus facile à nier en
593
cile à définir, plus facile à nier en théorie, et
il
n’est pas d’idée plus exaltante en fait pour les Européens de toute n
594
, du Sud-Est asiatique ou de la Chine. Ou bien, s’
il
prend soudain un sens précis pour les meneurs nationalistes de ces pe
595
st un sens emprunté à l’Europe, même et surtout s’
il
justifie un élan de révolte contre elle, prétextant un colonialisme p
596
t surtout s’il justifie un élan de révolte contre
elle
, prétextant un colonialisme périmé. Si j’ai cru bon de mettre en vale
597
ales de l’Europe, ce n’est pas seulement parce qu’
elles
permettent d’illustrer ce qui nous distingue des autres cultures. C’e
598
ingue des autres cultures. C’est surtout parce qu’
elles
expliquent la plupart de nos créations. En effet, du sens de la vérit
599
bien à la complexité de nos origines que nous le
devons
, aux conflits spirituels, drames et tensions qui devaient nécessairem
600
, aux conflits spirituels, drames et tensions qui
devaient
nécessairement en résulter et qui nous condamnaient à la recherche, à
601
les techniques qui en dérivent jusqu’au point où
elles
permettent non seulement à l’homme de dominer la matière, mais à l’hu
602
es Européens qui ont inventé l’archéologie, comme
ils
ont inventé l’ethnographie à partir de la découverte géographique du
603
continents que sont nos musées et bibliothèques,
ils
ont élaboré les préalables d’une science comparée des cultures et des
604
t cette sociologie totale, ou planétaire, prépare
elle
aussi les voies de l’unité future du genre humain. Voilà ce que l’Eur
605
humain. Voilà ce que l’Europe a créé, voilà ce qu’
elle
offre désormais au monde entier, et elle ne peut faire autrement, car
606
là ce qu’elle offre désormais au monde entier, et
elle
ne peut faire autrement, car toutes les créations que je viens d’énum
607
e — en un mot, le monde reçoit nos produits. Mais
il
ne reçoit pas les valeurs religieuses, éthiques et philosophiques, qu
608
mplement notre psychologie et notre spiritualité.
Il
exige nos machines, mais refuse notre éthique du travail. Il veut que
609
s machines, mais refuse notre éthique du travail.
Il
veut que nous l’aidions à mieux vivre, mais dédaigne notre idéal de l
610
dépossédés de leurs pouvoirs par ce monde même qu’
ils
ont suscité. Et Dieu sait de quelle manière les autres continents men
611
mondiale. Moment dramatique et passionnant, dont
il
nous faut tâcher d’évaluer les risques angoissants et les chances adm
612
omplète — dans toute l’humanité, cette crise va-t-
elle
devenir « mortelle » comme l’ont prédit depuis un siècle la majorité
613
s avaient cru cela d’elles-mêmes, avant la nôtre.
Elles
se trompaient, tout simplement, mais cette erreur ne saurait plus êtr
614
e Grand et les empereurs chinois s’imaginèrent qu’
ils
dominaient le monde entier : c’était moins orgueilleux que naïf, car
615
lithiques et homogènes. Voilà sans doute pourquoi
elle
s’est trouvé la seule assez complexe et multiforme pour pouvoir sinon
616
tous les peuples du monde. Nous avons aussi vu qu’
elle
exporte ses produits sans les valeurs qui contribuèrent à les créer.
617
s sans les valeurs qui contribuèrent à les créer.
Elle
envoie, dans le monde d’aujourd’hui, plus de machines et d’assistants
618
nts techniques que de livres et de missionnaires.
Elle
s’est laïcisée, profanisée, et détachée du christianisme qui a contri
619
la condition de son « succès » le plus visible —
elle
s’est rendue plus transportable, plus acceptable et imitable qu’aucun
620
plus acceptable et imitable qu’aucune autre. Mais
il
faut voir enfin que cette civilisation n’a pu devenir universelle qu’
621
gyptien. Pour les Grecs et les Chinois également,
il
existait deux espèces différentes de bipèdes verticaux : les Grecs, o
622
mplètement humains. Ces très hautes civilisations
devaient
donc nécessairement demeurer régionales, et décliner dans les limites
623
conception chrétienne, exprimée par saint Paul («
il
n’y a plus ni juifs, ni Grecs, ni esclaves ni hommes libres, ni homme
624
êtes tous un en Jésus-Christ »), cette conception
devait
(seule) permettre à ceux qu’elle formerait intimement, de considérer
625
tte conception devait (seule) permettre à ceux qu’
elle
formerait intimement, de considérer tous les hommes comme dignes et c
626
sa transmission aux âges futurs, en même temps qu’
elle
redécouvrait et faisait revivre des cultures disparues ou en voie d’e
627
de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables :
elles
sont dans les journaux ». Depuis lors, on a retrouvé — et même joué —
628
ier, enregistrées sur bandes et sur microsillons,
elles
sont en mesure de résister au temps beaucoup mieux que les fresques d
629
romaine, dont l’essentiel vit dans la nôtre, sont-
elles
vraiment mortes ? Leurs conquêtes n’ont-elles pas été préservées et d
630
ont-elles vraiment mortes ? Leurs conquêtes n’ont-
elles
pas été préservées et développées par le Musée et le Laboratoire euro
631
nat, ni le Bushido. On peut le regretter, mais on
doit
le constater. Un sociologue français, Roger Caillois, écrivait non sa
632
tout à fait, Valéry ne pourrait pas le dire, car
il
n’en saurait rien. » Et il proposait de corriger comme suit le passag
633
rrait pas le dire, car il n’en saurait rien. » Et
il
proposait de corriger comme suit le passage que je vous ai cité : « N
634
s’emparant de l’empire des Aztèques et des Incas.
Il
s’agissait dans tous ces cas, de civilisations locales, entourées de
635
es candidats à la relève étaient nombreux. En est-
il
un seul aujourd’hui qui réclame l’oblitération ou simplement la repri
636
l y a pourtant les États-Unis, me dira-t-on. Mais
ils
sont nés de la substance même de l’Europe, et de nos jours ils s’euro
637
de la substance même de l’Europe, et de nos jours
ils
s’européanisent à nouveau, plus profondément que l’Europe ne s’améric
638
surtout l’URSS, penserez-vous. Mais qu’apporte-t-
elle
de nouveau du point de vue de la civilisation ? Est-elle une autre ci
639
nouveau du point de vue de la civilisation ? Est-
elle
une autre civilisation ? Lénine définissait ainsi sa Révolution : « L
640
péen. Quant à l’électricité, dont parlait Lénine,
elle
symbolise l’industrialisation. En électrifiant la Russie, le communis
641
Troie de l’Occident : la Technique et tout ce qu’
elle
entraîne de proche en proche dans les mœurs et les modes de penser d’
642
es pouvoirs et notre vocation. Aux yeux du monde,
il
n’y a qu’un seul péril sérieux : le péril blanc ! La civilisation eur
643
le, n’est menacée en fait que par les maladies qu’
elle
a produites et propagées elle-même. C’est dans ses sources, c’est au
644
vitalité créatrice, c’est en Europe, que ce péril
doit
être conjuré. Car ce qui nous menace de l’extérieur c’est aussi ce qu
645
le nationalisme et la superstition matérialiste.
Il
en va du nationalisme comme de notre rhume de cerveau, qui devient mo
646
sons de prendre au tragique, cette passion, quand
elle
atteint l’Asie, ou le monde arabe, ou l’Afrique, dresse contre nous a
647
plant au-dehors la force belliqueuse de ceux dont
il
fait nos ennemis. Quant au second virus secrété par l’Europe, et que
648
’Europe, et que je nommerai le matérialisme plat,
il
prend chez nous les formes les plus diverses. Il va du culte du confo
649
il prend chez nous les formes les plus diverses.
Il
va du culte du confort chez l’ouvrier et le bourgeois, et de l’utilit
650
lus dangereux que la bêtise humaine en général, s’
il
n’avait pour effet de détendre les ressorts créateurs du progrès dont
651
e détendre les ressorts créateurs du progrès dont
il
est trop souvent l’aboutissement. Or chacun sait que les ressorts du
652
on de défier le destin, le refus des choses comme
elles
vont, inquiétude, passion et refus sans quoi la science et la techniq
653
e du genre humain que pour l’Europe elle-même, où
elles
sont nées. Car l’Europe, à travers des crises atroces, s’est vaccinée
654
es. L’Europe a secrété Hitler, mais en douze ans,
elle
l’a éliminé, et je crois qu’elle s’en trouve immunisée pour très long
655
is en douze ans, elle l’a éliminé, et je crois qu’
elle
s’en trouve immunisée pour très longtemps contre la tentation totalit
656
n totalitaire, qui est l’essence du nationalisme.
Il
n’en va pas de même sur d’autres continents. Quant à nous : nos sages
657
u, en peu de temps, au prix de millions de morts,
il
est vrai… Et maintenant, ce n’est pas chez nous, mais chez les autres
658
, ce n’est pas chez nous, mais chez les autres qu’
il
triomphe. Permettez-moi de vous citer à ce propos deux textes dont le
659
erminée par un roulement de tambour, voilà ce qui
doit
logiquement se produire. Or ce n’est pas chez nous, en Europe, mais
660
’a jamais atteint en Europe de tels excès. Certes
elle
est née chez nous, et c’était bien chez nous que Burckhardt en avait
661
e de notre action dans le monde et pour le monde.
Il
nous faut l’Europe parce qu’il faut faire le monde. Et parce que l’Eu
662
et pour le monde. Il nous faut l’Europe parce qu’
il
faut faire le monde. Et parce que l’Europe seule, en faisant le monde
663
ème de l’union des Églises chrétiennes concerne-t-
il
aussi les non-chrétiens, qui sont les deux tiers de notre humanité pr
664
x destins de l’Europe et de l’Occident, encore qu’
elle
n’ait jamais cessé de se proclamer essentiellement universelle. Il se
665
essé de se proclamer essentiellement universelle.
Il
se peut que l’union de nos Églises les renforce, devant le défi que p
666
y rattachent, qui est de l’ordre d’un milliard. S’
il
est vrai que le monde communiste enferme un nombre équivalent d’indiv
667
ne chose, la vérité de l’Esprit en est une autre.
Il
s’agit, pour le christianisme, non de gagner le monde mais de sauver
668
auver son âme. Si tout homme qui se veut chrétien
doit
vouloir l’union des Églises, c’est pour des motifs spirituels command
669
grandes divisions historiques se sont produites.
Il
n’est rien que je respecte au monde autant que l’institution de l’Égl
670
l’organisation et les tentations de la puissance
devaient
faire prévaloir dans l’Église mère, puis dans les Églises séparées, l
671
s. Tant et si bien qu’au point où nous en sommes,
il
nous faut constater qu’en fait et avant tout, ce qui s’oppose à la gr
672
méfiante, et non de confiance évangélique. Car, s’
il
est vrai que l’Évangile demande l’union, ce n’est jamais aux dépens d
673
de mon Père. » Cette parole ne peut être écartée.
Elle
reste au centre du mystère de l’unité. Voies vers l’union Parlan
674
t nunc, et déjà pratiquée par beaucoup. Qu’en est-
il
de cette existence, dans les diverses confessions ? Je suis frappé de
675
jours du Purgatoire. En revanche, combien savent-
ils
, de part et d’autre, que, dans toutes les Églises chrétiennes, la cat
676
onnent, et que les fidèles ignorent. Que faudrait-
il
pour rapprocher tous ces fidèles, qui ramèneraient ensuite leurs guid
677
, les luthériens, les anglicans, les catholiques,
elles
tendent à devenir indiscernables. J’oserai dire qu’il y a plus : en d
678
— anglicans, luthériens de Suède et d’Amérique —
ils
ouvrent la voie de l’union. Le renouveau des études liturgiques dans
679
e — je pense au cas de Simone Weil — trouveraient-
ils
alors le courage d’entrer, de se mettre à genoux, puis ouvrant les ye
680
ouvrant les yeux sur l’autel, reconnaîtraient qu’
ils
sont enfin chez eux ! Et je songe à tous ceux que laisse insatisfaits
681
e laisse insatisfaits la confession dans laquelle
ils
sont nés (soit par hasard ou providence), dans laquelle ils ont eu le
682
és (soit par hasard ou providence), dans laquelle
ils
ont eu le bonheur d’être élevés, qu’ils aiment comme on aime une patr
683
laquelle ils ont eu le bonheur d’être élevés, qu’
ils
aiment comme on aime une patrie, mais l’amour est lucide, la patrie n
684
st lucide, la patrie n’est pas le monde… Voici qu’
ils
peuvent sans la trahir aller plus loin, vers le But qu’elle leur dési
685
nt sans la trahir aller plus loin, vers le But qu’
elle
leur désignait. Je ne suis pas étranger plus qu’un autre aux problème
686
de notre temps. Calviniste de la Suisse romande,
il
représente, au sein du protestantisme, l’un des éléments les plus con
687
éflexes conditionnés, finalement force politique,
il
a pour résultante actuelle de s’opposer, lui aussi, à l’Occident, en
688
inir : ses motivations sont ailleurs, et surtout,
elles
sont antérieures à la nécessité présente de l’union, au regard de laq
689
essité présente de l’union, au regard de laquelle
elles
apparaissent comme les survivances d’une autre ère. Pour comprendre l
690
dans le mouvement de sa genèse intellectuelle qu’
il
faut le saisir. Car le nationalisme est idéologie, avant d’être histo
691
ationalisme est idéologie, avant d’être histoire.
Il
est né d’une dialectique idéale et non du jeu des forces économiques,
692
e idéale et non du jeu des forces économiques, qu’
il
a faussé en y intervenant, et qui tend à l’éliminer dans la mesure où
693
enant, et qui tend à l’éliminer dans la mesure où
il
tend à se normaliser. Plutôt donc que de retracer la chronique des tr
694
r notre bien, toute guerre est sainte, et de plus
elle
est préventive, car il s’agit de défendre contre les jaloux, les rétr
695
e est sainte, et de plus elle est préventive, car
il
s’agit de défendre contre les jaloux, les rétrogrades et les impurs,
696
elle du peuple ou Bien suprême ; Dieu lui-même, s’
il
existe, ne peut être que notre allié, garant de notre justice ; sinon
697
e allié, garant de notre justice ; sinon c’est qu’
il
n’existe pas ; il n’y a donc plus d’instance supérieure à la nation,
698
notre justice ; sinon c’est qu’il n’existe pas ;
il
n’y a donc plus d’instance supérieure à la nation, ni plus d’appel po
699
mai 1790, Robespierre a cette formule parfaite :
Il
est de l’intérêt des nations de protéger la nation française, parce q
700
ation française, parce que c’est de la France que
doit
partir la liberté et le bonheur du monde. Il faut donc protéger par
701
e doit partir la liberté et le bonheur du monde.
Il
faut donc protéger par les armes cette France qui annonce la paix uni
702
hantez une victoire qui sera celle de l’humanité.
Il
a péri des hommes ; mais c’est pour qu’il n’en périsse plus. Je le ju
703
manité. Il a péri des hommes ; mais c’est pour qu’
il
n’en périsse plus. Je le jure, au nom de la fraternité universelle qu
704
’Assemblée nationale, au nom du genre humain dont
il
n’a jamais mieux mérité d’être appelé l’ami. C’est en effet à Jean-B
705
ance mais aristocrate hollandais d’ascendance, qu’
il
appartiendra de formuler de la manière la plus théâtrale l’idéal unit
706
se dit souveraine, blesse grièvement l’humanité,
elle
est en pleine révolte contre le bon sens et le bonheur ; elle coupe l
707
pleine révolte contre le bon sens et le bonheur ;
elle
coupe les canaux de la prospérité universelle ; sa Constitution, manq
708
e intitulé la République universelle, dans lequel
il
demandait la suppression des gouvernements locaux, et leur remplaceme
709
ui-même, et le genre humain vivra en paix, lorsqu’
il
ne formera qu’un seul corps, la nation unique… La commune de Paris se
710
d’égoïsme national sans lequel nous trahirons nos
devoirs
, sans lequel nous stipulerons ici pour ceux qui ne nous ont pas commi
711
élire d’unité universelle nivelée et centralisée,
devait
conduire la Révolution, par une nécessité concrète, à la négation mêm
712
précise les délires totalitaires du xxe siècle.
Il
peut être résumé par quelques citations tirées de l’ouvrage intitulé
713
es conceptions primitives des forêts de Germanie,
ils
furent aussi liés les uns aux autres, depuis leur expansion dans les
714
due, par le hasard. … Les citoyens d’un même État
doivent
tous trafiquer entre eux. L’Europe chrétienne formant un tout, le com
715
mant un tout, le commerce des Européens entre eux
devait
être libre. Il est facile de faire l’application à l’état actuel des
716
mmerce des Européens entre eux devait être libre.
Il
est facile de faire l’application à l’état actuel des choses. Si tout
717
ssurément le commerce de toutes les parties entre
elles
doit rester libre, comme il l’était à l’origine. Si elle est au contr
718
ent le commerce de toutes les parties entre elles
doit
rester libre, comme il l’était à l’origine. Si elle est au contraire
719
les parties entre elles doit rester libre, comme
il
l’était à l’origine. Si elle est au contraire divisée en plusieurs Ét
720
it rester libre, comme il l’était à l’origine. Si
elle
est au contraire divisée en plusieurs États sous divers gouvernements
721
sée en plusieurs États sous divers gouvernements,
elle
doit être divisée de même en plusieurs États commerciaux complètement
722
n plusieurs États sous divers gouvernements, elle
doit
être divisée de même en plusieurs États commerciaux complètement ferm
723
ode des essais pour former de véritables Nations.
Il
s’agit donc de pousser vivement ce processus, si l’on veut sortir de
724
ù nous vivons. Si l’on veut supprimer la guerre,
il
faut en supprimer la cause. Il faut que chaque État obtienne ce qu’il
725
pprimer la guerre, il faut en supprimer la cause.
Il
faut que chaque État obtienne ce qu’il projette d’obtenir par la guer
726
la cause. Il faut que chaque État obtienne ce qu’
il
projette d’obtenir par la guerre et ce que seulement il peut projeter
727
jette d’obtenir par la guerre et ce que seulement
il
peut projeter raisonnablement d’obtenir : ses frontières naturelles.
728
d’obtenir : ses frontières naturelles. Dès lors,
il
n’a plus rien à demander à un autre État, car il a trouvé ce qu’il ch
729
il n’a plus rien à demander à un autre État, car
il
a trouvé ce qu’il cherchait. Ainsi, à l’utopie rousseauiste de l’hom
730
à demander à un autre État, car il a trouvé ce qu’
il
cherchait. Ainsi, à l’utopie rousseauiste de l’homme naturellement b
731
hte l’utopie de l’État naturellement raisonnable.
Il
n’y a plus qu’à tirer les conséquences logiques de ces prémices : fer
732
ser entièrement après un laps de temps déterminé.
Il
lui faut donc prendre des mesures permettant d’atteindre bientôt sûre
733
s permettant d’atteindre bientôt sûrement ce but.
Il
doit y marcher avec méthode, et ne laisser passer aucun moment sans r
734
ermettant d’atteindre bientôt sûrement ce but. Il
doit
y marcher avec méthode, et ne laisser passer aucun moment sans retire
735
poursuivie. Tous les ans l’importation étrangère
doit
diminuer. D’une année à l’autre le public a moins besoin de ces march
736
emplacées par des succédanés dans le pays, puisqu’
il
doit s’en déshabituer entièrement, entraîné d’ailleurs activement à c
737
lacées par des succédanés dans le pays, puisqu’il
doit
s’en déshabituer entièrement, entraîné d’ailleurs activement à cela p
738
stante hausse des prix. … L’exportation également
doit
diminuer : car suivant le plan, le gouvernement diminue le nombre des
739
aux pour les nationaux, de la manière convenable.
Il
ne cherche pas en effet à acquérir une prépondérance commerciale, ce
740
ne sont pas seulement les échanges commerciaux qu’
il
faut supprimer, mais aussi les échanges culturels, et le tourisme. Se
741
soin de voyager hors de l’État commercial fermé :
il
ne doit pas être permis plus longtemps à une vaine curiosité et à la
742
e voyager hors de l’État commercial fermé : il ne
doit
pas être permis plus longtemps à une vaine curiosité et à la recherch
743
de l’État ; loin de les empêcher, le gouvernement
devrait
même les encourager et faire voyager aux frais de l’État savants et a
744
voyager aux frais de l’État savants et artistes.
Il
est évident que dans une nation ainsi fermée, dont les membres ne viv
745
est véritablement la création. Le seul lien qui
devra
subsister entre les peuples sera celui de la Science : … Grâce à ell
746
les peuples sera celui de la Science : … Grâce à
elle
, mais à elle seule, les hommes s’uniront de manière durable et ils le
747
era celui de la Science : … Grâce à elle, mais à
elle
seule, les hommes s’uniront de manière durable et ils le doivent, qua
748
seule, les hommes s’uniront de manière durable et
ils
le doivent, quand pour tout le reste, leur division en peuples divers
749
les hommes s’uniront de manière durable et ils le
doivent
, quand pour tout le reste, leur division en peuples divers sera achev
750
te, leur division en peuples divers sera achevée.
Elle
seule demeure leur propriété commune, après qu’ils ont partagé entre
751
le seule demeure leur propriété commune, après qu’
ils
ont partagé entre eux tout le reste. Nul État fermé ne supprimera ce
752
t le reste. Nul État fermé ne supprimera ce lien,
il
le favorisera plutôt, car l’enrichissement de la Science par la puiss
753
s utopies issues de la philosophie préromantique,
il
faut avouer que celle de Fichte, pour absurde qu’elle nous paraisse,
754
faut avouer que celle de Fichte, pour absurde qu’
elle
nous paraisse, se trouve avoir le mieux correspondu aux réalités hist
755
r. Comme Goethe assistant à la bataille de Valmy,
il
a compris que la clameur des sans-culottes : « Vive la Nation ! » ina
756
it une ère nouvelle, née de la guerre et vivant d’
elle
. « Vive la Nation » ne signifie pas « Vive mon pays », mais « Vive l’
757
. Tensions internes : « Que personne ne diffère,
il
deviendrait mon juge ! » pense l’État-nation né de la Révolution et q
758
passive des opposants. À la faveur des guerres qu’
il
présentera toujours comme une « défense de nos foyers »30, il mobilis
759
a toujours comme une « défense de nos foyers »30,
il
mobilise l’instinct patriotique et opère sur lui la première en date
760
ts de groupe. Notons au passage que la guerre, qu’
elle
soit civile ou étrangère, froide ou déclarée, justifie toujours le sa
761
acrifice « temporaire » de certaines libertés. Or
il
n’est presque aucune de ces mesures d’urgence, prises par l’État, qu’
762
non seulement conduit à la guerre, mais trouve en
elle
les conditions du renforcement continuel de son pouvoir. Tensions ext
763
est « un individu dans la marche de l’Histoire ».
Il
se fait par sa propre activité, s’épanouit, atteint sa pleine vigueur
764
ipe, non à en jouir… Chacun a son principe auquel
il
tend comme à sa fin. Une fois cette fin atteinte, il n’a plus rien à
765
tend comme à sa fin. Une fois cette fin atteinte,
il
n’a plus rien à faire dans le monde. Et encore : À chaque époque do
766
tion, une fois doué de toute la personnalité dont
il
tend à priver les hommes réels, comment va-t-il se comporter dans le
767
t il tend à priver les hommes réels, comment va-t-
il
se comporter dans le monde. L’idéal primitif de la nation, confisqué
768
ominer l’époque. À cette fin, chacun prétendra qu’
il
incarne « le plus haut concept de l’esprit ». L’Allemand tuera le Fra
769
n globale vers l’harmonie des peuples libérés a-t-
il
été brutalement démenti au terme même du processus de formation des g
770
les premières victimes, enthousiastes et bernées.
Ils
croient tous que nation égale liberté. Ils s’inspirent tous du messia
771
rnées. Ils croient tous que nation égale liberté.
Ils
s’inspirent tous du messianisme de la Révolution française : libérer
772
ées et des faits, en divergence vertigineuse, qui
devait
nous mener à 1914. Henri Heine épouse au début l’idéologie de Herde
773
lemands : celle d’une Europe des nationalités, qu’
il
considère lui aussi comme une étape inévitable, quoique dangereuse de
774
rique : Tous les peuples de l’Europe et du monde
devront
traverser cette agonie, pour que la vie surgisse de la mort et pour q
775
ien d’une « Internationale des nationalités », et
il
loue Herder d’avoir considéré l’humanité « comme une grande harpe dan
776
un son particulier à « l’harmonie universelle ».
Il
n’en redoute pas moins les « terribles niveleurs de l’Europe » que so
777
s Hongrois et les Polonais écrasés par la Russie,
elle
est le synonyme concret des libertés élémentaires. Et malheur à l’Eur
778
s libertés élémentaires. Et malheur à l’Europe si
elle
abandonne ces peuples ! Voici deux textes brefs comme deux cris, écha
779
la mémoire des incalculables services rendus par
elle
à la chrétienté et à la civilisation, que l’immense intérêt que l’Eur
780
porte à sa vigoureuse existence, tout atteste qu’
elle
fut, tout exige qu’elle reste la Hongrie. Enlevez-lui cette qualité,
781
xistence, tout atteste qu’elle fut, tout exige qu’
elle
reste la Hongrie. Enlevez-lui cette qualité, et elle n’est plus rien
782
e reste la Hongrie. Enlevez-lui cette qualité, et
elle
n’est plus rien pour l’Europe, si peu que rien même ; car elle ne peu
783
us rien pour l’Europe, si peu que rien même ; car
elle
ne peut devenir que l’avant-garde de la monarchie universelle de la R
784
ous les Magyars, nous versons notre sang. Te faut-
il
encore plus, ô Liberté, Pour que ta grâce daigne sur nous descendre ?
785
que la Liberté siègera dans la capitale du monde,
elle
jugera les nations. Et elle dira à la première : Voilà que j’étais at
786
la capitale du monde, elle jugera les nations. Et
elle
dira à la première : Voilà que j’étais attaquée par les brigands, et
787
ef de voûte de l’édifice futur ; et celui sur qui
elle
tombera, elle l’écrasera, et celui qui se heurtera contre elle, il to
788
l’édifice futur ; et celui sur qui elle tombera,
elle
l’écrasera, et celui qui se heurtera contre elle, il tombera et ne se
789
elle l’écrasera, et celui qui se heurtera contre
elle
, il tombera et ne se relèvera point. Et du grand édifice politique eu
790
l’écrasera, et celui qui se heurtera contre elle,
il
tombera et ne se relèvera point. Et du grand édifice politique europé
791
ra point. Et du grand édifice politique européen,
il
ne restera pas pierre sur pierre. « Aujourd’hui, l’Occident meurt de
792
à Bruxelles, puis réhabilité par le Piémont dont
il
devint le Premier ministre, Gioberti fut un néo-guelfe. Il voulait l’
793
le Premier ministre, Gioberti fut un néo-guelfe.
Il
voulait l’union de l’Italie et il voulait aussi l’union de l’Europe :
794
un néo-guelfe. Il voulait l’union de l’Italie et
il
voulait aussi l’union de l’Europe : l’une étant condition de l’autre.
795
ses yeux, l’Italie (« cet Orient de l’Occident »)
devait
jouer pour l’Europe le rôle de nation-guide, sous la haute direction
796
ent des diverses chrétientés nationales écrivait-
il
en 1843, dans un ouvrage publié à Bruxelles : De la primauté morale e
797
ssant. Dans son traité Della Nazionalità italiana
il
donnait la formule du passage « dialectique » de la cité à la nation,
798
pposent au plus vaste ensemble. Mais qu’en sera-t-
il
des grands aînés, de l’Espagne, de la Grande-Bretagne et de la France
799
national fortement constitué et qui ne veut rien
devoir
à personne ? À la différence de l’Espagne, qui se replie sur son pass
800
sourde ou incendiaire chez ses voisins ». Certes,
elle
va protéger, par la force au besoin, « les mouvements légitimes de cr
801
sance et de nationalité des peuples ». Cependant,
elle
n’entend pas : incendier le monde, mais briller de sa place sur l’ho
802
chelet, lui aussi, exalte « l’intime harmonie qui
doit
unir toutes les parties constituantes de l’Europe », parmi lesquelles
803
a France. Mais c’est finalement à Victor Hugo qu’
il
appartiendra, bien des années plus tard, d’opérer la « transfiguratio
804
tique nationale du romantisme politique. Parce qu’
il
n’est pas suspect de nationalisme borné, et parce qu’il fut au xixe
805
st pas suspect de nationalisme borné, et parce qu’
il
fut au xixe siècle le prophète le plus exalté de l’union européenne,
806
se transfigurer en Europe et en monde, ne sera-t-
elle
pas nécessairement interprétée par les autres comme un désir secret d
807
templer à Paris l’Exposition universelle de 1867,
il
a des phrases qui découragent la critique : Ces yeux saturés de nuit
808
yeux saturés de nuit viennent regarder la vérité…
Ils
savent qu’il existe un peuple de réconciliation… une nation ouverte,
809
e nuit viennent regarder la vérité… Ils savent qu’
il
existe un peuple de réconciliation… une nation ouverte, qui appelle c
810
onciliation… une nation ouverte, qui appelle chez
elle
quiconque est frère ou veut l’être. De leur côté, invasion ; du côté
811
ges inspirées : La France a cela d’admirable, qu’
elle
est destinée à mourir, mais à mourir comme les dieux, par la transfig
812
urquoi ? Parce que la France le mérite ; parce qu’
elle
manque d’égoïsme, parce qu’elle ne travaille pas pour elle seule, par
813
mérite ; parce qu’elle manque d’égoïsme, parce qu’
elle
ne travaille pas pour elle seule, parce qu’elle est créatrice d’espér
814
ue d’égoïsme, parce qu’elle ne travaille pas pour
elle
seule, parce qu’elle est créatrice d’espérances universelles, parce q
815
u’elle ne travaille pas pour elle seule, parce qu’
elle
est créatrice d’espérances universelles, parce qu’elle représente tou
816
est créatrice d’espérances universelles, parce qu’
elle
représente toute la bonne volonté humaine, parce que là où les autres
817
à où les autres nations sont seulement des sœurs,
elle
est mère.31 Au xxe siècle, il y aura une nation extraordinaire. Cet
818
a grande, ce qui ne l’empêchera pas d’être libre.
Elle
sera illustre, riche, pensante, pacifique, cordiale au reste de l’hum
819
ante, pacifique, cordiale au reste de l’humanité.
Elle
aura la gravité douce d’une aînée. […] Cette nation aura pour capital
820
pitale Paris, et ne s’appellera point la France ;
elle
s’appellera l’Europe. Elle s’appellera l’Europe au xxe siècle et, au
821
lera point la France ; elle s’appellera l’Europe.
Elle
s’appellera l’Europe au xxe siècle et, aux siècles suivants, plus tr
822
, aux siècles suivants, plus transfigurée encore,
elle
s’appellera l’Humanité. L’Humanité, nation définitive, est dès à prés
823
soudre dans la plus grande communauté européenne.
Elle
n’aura pas vécu en vain, ni sans gloire. Ainsi se réaliserait ce pas
824
st comme à l’Ouest, et en Suisse comme en France.
Il
manquait à ce concert une note allemande, et Constantin Frantz nous l
825
allemande, et Constantin Frantz nous la donne :
Il
va de soi qu’une telle fédération ne saurait être instituée d’un seul
826
ération ne saurait être instituée d’un seul coup.
Elle
a besoin, d’abord, d’une base réelle, sur laquelle elle repose et d’o
827
besoin, d’abord, d’une base réelle, sur laquelle
elle
repose et d’où la première impulsion soit donnée… S’il est vrai que c
828
pose et d’où la première impulsion soit donnée… S’
il
est vrai que c’est de l’Allemagne qu’est venue la division de l’Églis
829
l’Allemagne qu’est venue la division de l’Église,
il
est donc du devoir de ce pays, plus que de tout autre, de recréer la
830
est venue la division de l’Église, il est donc du
devoir
de ce pays, plus que de tout autre, de recréer la communauté des nati
831
plume d’Ivan Kirievsky, son principal rédacteur,
elle
oppose à l’Europe la notion d’enthousiasme, qui serait restée le priv
832
pe se constitue organiquement et harmonieusement,
il
est nécessaire qu’il existe à cette fin un centre déterminé, un peupl
833
iquement et harmonieusement, il est nécessaire qu’
il
existe à cette fin un centre déterminé, un peuple qui domine les autr
834
c’est aussi ce que pensera Dostoïevski, et ce qu’
il
exprimera cent fois dans son Journal d’un écrivain, gazette qu’il pub
835
t fois dans son Journal d’un écrivain, gazette qu’
il
publie seul, à intervalles irréguliers, en 1876 et 1877. L’avenir de
836
es hautes missions que nous autres Russes sentons
devoir
assumer un jour, c’est la mission de grouper l’humanité en un seul fa
837
t de notre conscience nationale. Tirons l’épée, s’
il
le faut, au nom des malheureux persécutés, quand bien même ce serait
838
au nom des prétendus intérêts de la civilisation.
Il
faut que les organes politiques reconnaissent la vérité, cette vérité
839
telle quelle est reconnue par le simple croyant.
Il
faut bien que la vérité soit conservée quelque part, que tout au moin
840
oins une nation serve de flambeau. Qu’adviendrait-
il
sans cela ? Au nom de la véritable religion, et pour leur bien, les
841
ynisme » et d’y trouver leur fin, « vers laquelle
il
semble bien qu’ils s’acheminent ». III. Les prophètes de la catast
842
ouver leur fin, « vers laquelle il semble bien qu’
ils
s’acheminent ». III. Les prophètes de la catastrophe Le grand h
843
« Chaque génération est immédiate à Dieu », écrit-
il
en une formule célèbre. Une nation ou une société, selon lui, ne conq
844
rimauté appartient donc à l’ensemble européen, qu’
il
définit comme le domaine « romano-germanique » : Italie — France — Es
845
1882 sur le thème : « Qu’est-ce qu’une nation ? »
il
écrit : Une nation, c’est pour nous une âme, un esprit, une famille
846
ens !… » … Ce que nous venons de dire de la race,
il
faut le dire de la langue. La langue invite à se réunir ; elle n’y fo
847
dire de la langue. La langue invite à se réunir ;
elle
n’y force pas. Les États-Unis et l’Angleterre, l’Amérique espagnole e
848
n. Au contraire, la Suisse, si bien faite, puisqu’
elle
a été faite par l’assentiment de ses différentes parties, compte troi
849
ui forment ces prétendues frontières naturelles ?
Il
est incontestable que les montagnes séparent ; mais les fleuves réuni
850
elles qui ne séparent pas ? De Biarritz à Tornea,
il
n’y a pas une embouchure de fleuve qui ait plus qu’une autre un carac
851
Les nations ne sont pas quelque chose d’éternel.
Elles
ont commencé, elles finiront. La confédération, européenne, probablem
852
pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé,
elles
finiront. La confédération, européenne, probablement, les remplacera.
853
militaire33. Dans une de ses lettres à von Preen,
il
prévoit pour les masses ouvrières entassées dans les usines et condam
854
rminée par un roulement de tambours, voilà ce qui
doit
logiquement se produire… Il est clair que le monde va vers l’alternat
855
bours, voilà ce qui doit logiquement se produire…
Il
est clair que le monde va vers l’alternative suivante : démocratie to
856
es et se passe en quelques heures : pour les uns,
il
faut la moitié d’une année, pour les autres la moitié d’une vie humai
857
ers ce but unique du travail secret de leur âme :
ils
voulurent frayer les voies à un nouvel accord et tentèrent de réalise
858
t de réaliser en eux-mêmes l’Européen à venir ; s’
ils
appartinrent à une patrie, ce ne fut jamais que par les régions super
859
ce, ou aux heures de défaillance, ou l’âge venu :
ils
se reposaient d’eux-mêmes en devenant « patriotes ». Je songe à des h
860
e — j’entends tous nos empires et États actuels —
doivent
nécessairement devenir non viables, économiquement parlant, sous la p
861
Europe est un état anormal. Pourquoi l’Europe est-
elle
par excellence la terre des cataclysmes guerriers ? Parce qu’elle est
862
nce la terre des cataclysmes guerriers ? Parce qu’
elle
est habitée par une quantité de races qui sont singulièrement opposée
863
rquoi lui cacher ce qui l’attend ? Avant dix ans,
elle
sombrera dans la guerre et l’anarchie, comme elle a toujours fait deu
864
elle sombrera dans la guerre et l’anarchie, comme
elle
a toujours fait deux ou trois fois par siècle. … Rien n’améliorera le
865
rera le sort de l’Europe. Pourquoi voulez-vous qu’
il
s’améliore ? Que signifie ce vieux fond d’optimisme qui attend que le
866
optimisme qui attend que les choses s’arrangent ?
Il
n’y a aucune raison pour cela. Des composés chimiques, qui sont sépar
867
qui sont séparément amorphes, provoquent le feu s’
ils
sont amalgamés dans un récipient. L’Europe est un récipient rempli de
868
pe des nations et de son impérialisme planétaire.
Il
faudra cependant en venir aux excès de l’autarcie affirmée sans scrup
869
rtigen Zeitalters, 1804-1805. 30. « On dirait qu’
il
appelle foyers tous les endroits où il a porté le feu », remarque Ben
870
dirait qu’il appelle foyers tous les endroits où
il
a porté le feu », remarque Benjamin Constant. 31. Article intitulé l
871
C’est en Europe seulement, jamais ailleurs, qu’
il
m’est arrivé d’entendre dire : « Une culture européenne, ça n’existe
872
inent. Un homme qui nie que l’Europe existe et qu’
elle
ait une culture commune ne saurait être un Asiatique, un Africain ou
873
propositions contradictoires que voici : primo ;
il
n’y a pas de culture européenne commune, mais seulement des cultures
874
eux pour former une unité quelconque ; secundo :
il
ne saurait y avoir de culture spécifiquement européenne, car toute vr
875
ori, l’originalité de notre culture et le fait qu’
elle
nous est commune du Cap Nord au Péloponnèse et de Madrid à Varsovie,
876
e) serviront d’exemples pour la deuxième formule.
Il
suffira, je crois, de ces brèves indications, pour faire bien voir qu
877
le, que dans le libre jeu de ses diversités. Mais
il
est temps de nous demander d’où proviennent ces fameuses diversités,
878
ù proviennent ces fameuses diversités, et comment
il
se fait que l’Europe en ait tant, et même les multiplie comme à plais
879
pluralité des origines de notre civilisation. Et
elles
sont entretenues ou renouvelées sans cesse par notre refus déclaré de
880
foi, le guerrier germain qui se sent libre quand
il
touche son épée, le Celte romantique et magique, — et nous descendons
881
omplexité de nos origines culturelles que nous le
devons
, aux conflits spirituels, drames et tensions qui devaient nécessairem
882
, aux conflits spirituels, drames et tensions qui
devaient
nécessairement en résulter, et qui nous condamnaient à la recherche,
883
multiples et des valeurs souvent incompatibles qu’
elle
en a héritées, l’Europe n’a jamais pu s’ordonner à une seule doctrine
884
l’a décrite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’
il
n’en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne fu
885
s produit seulement de l’anarchie et des guerres.
Il
a contraint les élites, et par elles la partie agissante des masses e
886
et des guerres. Il a contraint les élites, et par
elles
la partie agissante des masses européennes, à développer ce que je vo
887
s’impliquent mutuellement en Europe. En revanche,
il
est évident qu’elles se voient réprimées, débilitées, sinon radicalem
888
llement en Europe. En revanche, il est évident qu’
elles
se voient réprimées, débilitées, sinon radicalement exclues, par tout
889
rées par les civilisations du Proche-Orient. Mais
il
a été fortement développé par la théodicée chrétienne, comme l’ont mo
890
pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’
il
a créé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous ne pouvons pas
891
ilosophiques, mais aussi de nos sciences exactes.
Elle
développera dans nos élites intellectuelles le sens critique, au nom
892
ssible à vérifier. D’autre part, le sens critique
devait
nécessairement s’aiguiser en Europe plus qu’ailleurs, du fait même de
893
». Quand un ingénieur européen énonce un chiffre,
il
le veut exact à la ne virgule près, car autrement le pont cédera sous
894
n Oriental énonce un chiffre exorbitant, c’est qu’
il
espère en obtenir un autre, ou qu’il veut plaire ou intimider, ou se
895
nt, c’est qu’il espère en obtenir un autre, ou qu’
il
veut plaire ou intimider, ou se faire valoir. Il plaide, il marchande
896
’il veut plaire ou intimider, ou se faire valoir.
Il
plaide, il marchande, il joue, pendant que nous vérifions une fois de
897
aire ou intimider, ou se faire valoir. Il plaide,
il
marchande, il joue, pendant que nous vérifions une fois de plus nos c
898
der, ou se faire valoir. Il plaide, il marchande,
il
joue, pendant que nous vérifions une fois de plus nos calculs… Deuxiè
899
lture : le sens de la responsabilité personnelle.
Il
s’enracine dans la notion chrétienne de la personne humaine, c’est-à-
900
personne humaine, c’est-à-dire de l’individu qui
doit
répondre de ses actes à la fois devant Dieu et devant la société, don
901
on destin sur la terre comme au ciel, destin dont
il
se croit ou se veut le maître, pour une part tout au moins — grande o
902
’Europe existe ! — mais décisive quant au sens qu’
il
donne à sa vie. D’où résulte une double exigence de recueillement en
903
t à grands cris de haine une aide qui ne leur est
due
qu’au nom de l’amour chrétien, nous avons le droit de leur dire : si
904
qui exclut comme illusoire la solidarité, puisqu’
elle
refuse la réalité du prochain. Et certes, cela ne signifie pas théori
905
culture européenne, c’est le sens de la liberté.
Il
est clair que ce sens est étroitement lié à celui de la responsabilit
906
n’est vraiment libre que dans la seule mesure où
il
est responsable de son sort, et à l’inverse, on ne saurait tenir un h
907
ponsable de ses actes que dans la seule mesure où
ils
sont faits librement. Notre sens de la liberté est aussi complexe que
908
à doses variables dans notre idée de la liberté.
Il
n’est pas de concept plus difficile à définir, plus facile à nier en
909
cile à définir, plus facile à nier en théorie, et
il
n’est pas d’idée plus exaltante en fait pour les Européens de toute n
910
, du Sud-Est asiatique ou de la Chine. Ou bien, s’
il
prend soudain un sens précis, pour les meneurs nationalistes de ces p
911
st un sens emprunté à l’Europe, même et surtout s’
il
justifie un élan de révolte contre elle, prétextant un colonialisme p
912
t surtout s’il justifie un élan de révolte contre
elle
, prétextant un colonialisme périmé. Si j’ai cru bon de mettre en vale
913
ales de l’Europe, ce n’est pas seulement parce qu’
elles
permettent d’illustrer ce qui nous distingue des autres cultures. C’e
914
ingue des autres cultures. C’est surtout parce qu’
elles
expliquent la plupart de nos créations. En effet, du sens de la vérit
915
hique de cette civilisation ? Je n’en crois rien.
Il
existe sur notre planète trois régions comparables du point de vue de
916
ation : ce sont la Chine, l’Inde et l’Europe. Or,
il
est évident que les mêmes pressions démographiques n’ont pas produit
917
maximum. Le dynamisme d’une culture proviendrait-
il
plutôt, si l’on en croit Toynbee, des défis auxquels elle se voit sou
918
tôt, si l’on en croit Toynbee, des défis auxquels
elle
se voit soumise ? S’il s’agit de défis extérieurs, je réponds non. Ca
919
nbee, des défis auxquels elle se voit soumise ? S’
il
s’agit de défis extérieurs, je réponds non. Car les invasions asiatiq
920
es Croisades ont été productives à cet égard ; or
elles
ne résultèrent pas d’un défi venu de l’extérieur, mais au contraire d
921
les techniques qui en dérivent jusqu’au point où
elles
permettent non seulement à l’homme de dominer la matière, mais à l’hu
922
les Européens qui ont inventé l’archéologie comme
ils
ont inventé l’ethnographie à partir de la découverte géographique du
923
e siècles et de continents que sont leurs musées,
ils
ont élaboré les préalables d’une science comparée des cultures et des
924
cette sociologie totale, ou planétaire, prépare,
elle
aussi, les voies de l’unité future du genre humain. Voilà ce que l’Eu
925
humain. Voilà ce que l’Europe a créé, voilà ce qu’
elle
offre désormais au monde entier. Or, toutes ces créations sont nées d
926
ces créations sont en expansion vers le monde, qu’
elles
appellent le monde, qu’elles s’en nourrissent, et que toutes, elles p
927
on vers le monde, qu’elles appellent le monde, qu’
elles
s’en nourrissent, et que toutes, elles préparent son unité après avoi
928
monde, qu’elles s’en nourrissent, et que toutes,
elles
préparent son unité après avoir exploré ses variétés. Je ne tenterai
929
e profonde des créations que je viens d’énumérer.
Il
y faudrait un livre, et je l’ai déjà écrit37. Je me bornerai donc à v
930
ntends la possibilité d’un genre humain qui, sans
elle
, n’eût jamais pris conscience de son unité virtuelle, ni des problème
931
dépossédés de leurs pouvoirs par ce monde même qu’
ils
ont suscité. Et Dieu sait de quelle manière les autres continents men
932
mondiale. Moment dramatique et passionnant, dont
il
nous faut tâcher d’évaluer les risques angoissants et les chances adm
933
es bien forcés d’imaginer pour y faire face. Nous
devons
tout d’abord, nous les Européens, prendre une conscience à la fois pl
934
mes, ce que nous avons fait, et pourquoi. Et nous
devons
en même temps nous préparer à affronter des synthèses nouvelles, mais
935
lture européenne n’est nullement supprimée, et ne
doit
pas être masquée, par le fait actuel de sa diffusion mondiale. On nou
936
uissance matérielle, nos produits en un mot. Mais
il
ne reçoit pas les valeurs, religieuses, éthiques et philosophiques, q
937
es permettraient de les maintenir en composition.
Il
retourne contre nous ces produits — tels que le nationalisme par exem
938
plement, notre psychologie et notre spiritualité.
Il
exige nos machines, mais refuse notre éthique du travail. Il veut que
939
s machines, mais refuse notre éthique du travail.
Il
veut que nous l’aidions à mieux vivre, mais dédaigne notre idéal de l
940
d’autre qui soit en mesure d’y prétendre mieux qu’
elle
, ou qui soit susceptible mieux qu’elle d’animer la civilisation née d
941
e mieux qu’elle, ou qui soit susceptible mieux qu’
elle
d’animer la civilisation née de nos œuvres. Alors, que faire ? que de
942
isation née de nos œuvres. Alors, que faire ? que
devons
-nous faire, nous qui sommes aussi les « produits » de la culture euro
943
, qui a inventé le monde dans la mesure exacte où
elle
a découvert le genre humain. Or le sort de l’Europe dépend de son uni
944
maintenant d’autres motifs, beaucoup plus vastes.
Il
nous faut faire l’Europe, parce qu’il faut faire le monde, et que l’E
945
lus vastes. Il nous faut faire l’Europe, parce qu’
il
faut faire le monde, et que l’Europe seule peut le faire, mais elle d
946
monde, et que l’Europe seule peut le faire, mais
elle
doit d’abord exister. Certains me diront, et une part de moi-même me
947
e, et que l’Europe seule peut le faire, mais elle
doit
d’abord exister. Certains me diront, et une part de moi-même me le ré
948
e salut, le sens de notre vie individuelle, n’est-
il
pas beaucoup plus important ? Question européenne par excellence. Mai
949
’humanité entière, embarquée pour la découverte d’
elle
ne sait quel Eldorado, d’elle ne sait quelle Toison d’or, symboles du
950
our la découverte d’elle ne sait quel Eldorado, d’
elle
ne sait quelle Toison d’or, symboles du sens dernier de la vie. Il ne
951
Toison d’or, symboles du sens dernier de la vie.
Il
ne porte pas des fuyards, des émigrants, des rescapés d’une catastrop
952
ale, mais des pionniers de l’aventure humaine. Et
il
évoque irrésistiblement le souvenir d’un autre moment de cette aventu
953
omb, au matin du départ à Palos de Moguer. Auront-
elles
la voilure, le tonnage nécessaire ? Ou bien ne faut-il pas nous deman
954
voilure, le tonnage nécessaire ? Ou bien ne faut-
il
pas nous demander, plutôt, si l’homme qui les conduit a la foi nécess
955
? Beaucoup hésitent encore à s’embarquer parce qu’
ils
doutent de l’avenir prochain de notre Europe, et de son pouvoir de fa
956
est sans doute plus grave que la nôtre ; et notre
devoir
aujourd’hui, est bien moins de prévoir notre histoire que de la faire
957
s donc d’abord un Congrès — un congrès permanent,
il
est vrai, puisqu’il a tenu des réunions successivement dans plus de v
958
ngrès — un congrès permanent, il est vrai, puisqu’
il
a tenu des réunions successivement dans plus de vingt-cinq pays sur l
959
eur première conférence à Berlin, il y a dix ans,
ils
décidèrent de se grouper afin de créer ainsi, en cas d’urgence et au
960
et au service des libertés de l’esprit partout où
elles
sont attaquées, une certaine force de frappe, de protestation efficac
961
de frappe, de protestation efficace. Mais aussi,
ils
éprouvèrent le besoin de se grouper pour dialoguer et réfléchir ensem
962
é. Sur ce mot Liberté, je serai très bref bien qu’
il
soit le mot capital. Car la liberté, voyez-vous, ce n’est pas quelque
963
voyez-vous, ce n’est pas quelque chose dont nous
devons
parler, mais quelque chose que nous devons créer, dont nous devons cr
964
t nous devons parler, mais quelque chose que nous
devons
créer, dont nous devons créer les conditions, quelque chose que nous
965
is quelque chose que nous devons créer, dont nous
devons
créer les conditions, quelque chose que nous devons reconquérir chaqu
966
vons créer les conditions, quelque chose que nous
devons
reconquérir chaque jour et sans relâche, sur nous-mêmes tout d’abord,
967
n connues et localisées, contre les idéologies qu’
elles
voulaient imposer, et contre le défaitisme fataliste qui préparait le
968
iste qui préparait leur lit dans nos démocraties.
Il
nous fallait courir au plus pressé, secourir les persécutés accusés d
969
iennent pas seulement des régimes que vous savez.
Elles
viennent de la misère et de la faim pour une large partie de l’humani
970
t de la faim pour une large partie de l’humanité.
Elles
viennent aussi des formes de vie matérialistes que notre civilisation
971
es traditionnelles mal préparées à les assimiler.
Elles
viennent enfin, ces menaces contre la liberté, de la misère morale où
972
ici qu’intervient la Culture, ou, en tout cas, qu’
elle
doit et peut intervenir. Car la culture, c’est justement l’ensemble d
973
u’intervient la Culture, ou, en tout cas, qu’elle
doit
et peut intervenir. Car la culture, c’est justement l’ensemble des ac
974
uer à sa place dans le monde, et dans un monde qu’
il
approuve et dont il comprend les symboles. Mais la sécurité n’est que
975
le monde, et dans un monde qu’il approuve et dont
il
comprend les symboles. Mais la sécurité n’est que la moitié de l’affa
976
seulement transmission mais critique et rupture s’
il
le faut ; qui n’est plus seulement tradition mais création, et qui n’
977
ngereux pour l’homme et pour sa liberté réelle, s’
ils
restent séparés, isolés l’un de l’autre. En revanche, équilibrées et
978
qui peut rendre un sens à l’existence humaine. Or
il
se trouve que la plupart des conférences et groupes d’études organisé
979
et démocratique. Pour que notre vie ait un sens,
il
faut que la culture vivante recrée pour les hommes de ce temps des en
980
s hommes de ce temps des ensembles intelligibles.
Il
faut que nos activités humaines que nous avons spécialisées et séparé
981
ire de l’Inde traditionnelle. C’est pourquoi nous
devons
attacher tant de prix aux contacts que permet un congrès comme le nôt
982
je viens de le faire, j’ai voulu vous montrer qu’
il
n’agit pas au niveau de la politique proprement dite, mais au niveau
983
sonne. La politique, nous n’y échapperons pas, et
il
est inutile d’insister sur ce fait, ici, dans ce Berlin où elle nous
984
le d’insister sur ce fait, ici, dans ce Berlin où
elle
nous cerne de toute part. Mais nous refusons d’accorder à la politiqu
985
ue lui donnent les totalitaires — tant qu’un jour
il
n’y a plus rien d’autre à faire qu’à se jeter à mains nues contre les
986
es traditionnelles mal préparées à les assimiler.
Elles
viennent enfin, ces menaces contre la liberté, de la misère morale où
987
ici qu’intervient la Culture, ou, en tout cas, qu’
elle
doit et peut intervenir. Vous avez lu et entendu depuis longtemps tan
988
u’intervient la Culture, ou, en tout cas, qu’elle
doit
et peut intervenir. Vous avez lu et entendu depuis longtemps tant de
989
uer à sa place dans le monde, et dans un monde qu’
il
approuve et dont il comprend les symboles. Mais la sécurité n’est que
990
le monde, et dans un monde qu’il approuve et dont
il
comprend les symboles. Mais la sécurité n’est que la moitié de l’affa
991
seulement transmission mais critique et rupture s’
il
le faut ; qui n’est plus seulement tradition mais création, et qui n’
992
ngereux pour l’homme et pour sa liberté réelle, s’
ils
restent séparés, isolés l’un de l’autre. En revanche, équilibrées et
993
qui peut rendre un sens à l’existence humaine. Or
il
se trouve que la plupart des conférences et groupes d’études organisé
994
et démocratique. Pour que notre vie ait un sens,
il
faut que la culture vivante recrée pour les hommes de ce temps des en
995
s hommes de ce temps des ensembles intelligibles.
Il
faut que nos activités humaines que nous avons spécialisées et séparé
996
re de l’Inde traditionnelle. C’est pourquoi nous
devons
attacher tant de prix aux contacts que permet un congrès comme le nôt
997
n déduis que la fonction de notre Congrès, tel qu’
il
est devenu depuis dix ans, s’élargissant progressivement aux dimensio
998
e tous côtés : Êtes-vous un mouvement politique ?
Il
me semble que le commentaire que je viens de vous donner de nos buts
999
je viens de le faire, j’ai voulu vous montrer qu’
il
n’agit pas au niveau de la politique proprement dite, mais au niveau
1000
sonne. La politique, nous n’y échapperons pas, et
il
est inutile d’insister sur ce fait, ici, dans ce Berlin où elle nous
1001
le d’insister sur ce fait, ici, dans ce Berlin où
elle
nous cerne de toutes parts. Mais nous refusons d’accorder à la politi
1002
que lui donnent les totalitaires, tant qu’un jour
il
n’y a plus rien d’autre à faire qu’à se jeter à mains nues contre les
1003
la politique totale et absolutisée. La politique
doit
rester pour nous un moyen dominé par des fins humaines, ces fins que
1004
lonté et à notre foi. Et alors, la liberté serait-
elle
du nombre de ces fins dernières, serait-elle à son tour un absolu ? N
1005
rait-elle du nombre de ces fins dernières, serait-
elle
à son tour un absolu ? Non, certes, mais elle seule nous conduit à no
1006
ait-elle à son tour un absolu ? Non, certes, mais
elle
seule nous conduit à nos fins. Car la liberté se concrétise dans l’au
1007
C’est en Europe seulement, jamais ailleurs, qu’
il
m’est arrivé bien souvent d’entendre prononcer la phrase suivante : «
1008
inent. Un homme qui nie que l’Europe existe et qu’
elle
ait une culture commune ne saurait être un Asiatique, un Africain ou
1009
les deux propositions contradictoires que voici.
Ils
affirment primo : qu’il n’y a pas de culture européenne commune, mais
1010
ntradictoires que voici. Ils affirment primo : qu’
il
n’y a pas de culture européenne commune, mais seulement des cultures
1011
is seulement des cultures nationales, car, disent-
ils
, les Allemands et les Français, ou les Scandinaves et les Italiens, p
1012
ts entre eux pour former une unité quelconque. Et
ils
affirment secundo : qu’il ne saurait y avoir de culture spécifiquemen
1013
e unité quelconque. Et ils affirment secundo : qu’
il
ne saurait y avoir de culture spécifiquement européenne, car, disent-
1014
de culture spécifiquement européenne, car, disent-
ils
encore, toute vraie culture est universelle par définition, et nos pr
1015
d’un myope, et la seconde, celle d’un presbyte. (
Il
est d’autant plus curieux de les trouver souvent réunies chez un même
1016
ori, l’originalité de notre culture et le fait qu’
elle
nous est commune du Cap Nord au Péloponnèse et de Madrid à Varsovie,
1017
s citée et publiée depuis : L’Européen ne serait-
il
pas cet homme étrange qui se manifeste comme Européen dans la mesure
1018
anifeste comme Européen dans la mesure précise où
il
doute qu’il le soit et prétend au contraire s’identifier soit avec l’
1019
me Européen dans la mesure précise où il doute qu’
il
le soit et prétend au contraire s’identifier soit avec l’homme univer
1020
une seule nation du grand complexe européen, dont
il
révèle ainsi qu’il fait partie par le seul fait qu’il le conteste ?
1021
grand complexe européen, dont il révèle ainsi qu’
il
fait partie par le seul fait qu’il le conteste ? C’est donc dans le
1022
évèle ainsi qu’il fait partie par le seul fait qu’
il
le conteste ? C’est donc dans le fait de notre exceptionnelle divers
1023
e) serviront d’exemples pour la deuxième formule.
Il
suffira, je crois, de ces brèves indications, pour faire bien voir qu
1024
e, que dans le libre jeu de ses diversités. Mais
il
est temps de nous demander d’où proviennent ces fameuses diversités,
1025
ù proviennent ces fameuses diversités, et comment
il
se fait que l’Europe en ait tant et même les multiplie comme à plaisi
1026
pluralité des origines de notre civilisation ; et
elles
sont entretenues ou renouvelées sans cesse par notre refus déclaré de
1027
foi, le guerrier germain qui se sent libre quand
il
touche son épée, le Celte romantique et magique — et nous descendons
1028
omplexité de nos origines culturelles que nous le
devons
, aux conflits spirituels, drames et tensions qui devaient nécessairem
1029
, aux conflits spirituels, drames et tensions qui
devaient
nécessairement en résulter, et qui nous condamnaient à la recherche,
1030
ultiples, et des valeurs souvent incompatibles qu’
elle
en a héritées, l’Europe n’a jamais pu s’ordonner à une seule doctrine
1031
l’a décrite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’
il
n’en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne fu
1032
s produit seulement de l’anarchie et des guerres.
Il
a contraint les élites, et par elles la partie agissante des masses e
1033
et des guerres. Il a contraint les élites, et par
elles
la partie agissante des masses européennes, à développer ce que je vo
1034
s’impliquent mutuellement en Europe. En revanche,
il
est évident qu’elles se voient réprimées, débilitées, sinon radicalem
1035
llement en Europe. En revanche, il est évident qu’
elles
se voient réprimées, débilitées, sinon radicalement exclues, par tout
1036
rées par les civilisations du Proche-Orient. Mais
il
a été fortement développé par la théodicée chrétienne, comme l’ont mo
1037
pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’
il
a créé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous ne pouvons pas
1038
ilosophiques, mais aussi de nos sciences exactes.
Elle
développera dans nos élites intellectuelles le sens critique, au nom
1039
ssible à vérifier. D’autre part, le sens critique
devait
nécessairement s’aiguiser en Europe plus qu’ailleurs, du fait même de
1040
». Quand un ingénieur européen énonce un chiffre,
il
le veut exact à la nième virgule près, car autrement le pont cédera s
1041
n Oriental énonce un chiffre exorbitant, c’est qu’
il
espère en obtenir un autre, ou qu’il veut plaire ou intimider, ou se
1042
nt, c’est qu’il espère en obtenir un autre, ou qu’
il
veut plaire ou intimider, ou se faire valoir. Il plaide, il marchande
1043
’il veut plaire ou intimider, ou se faire valoir.
Il
plaide, il marchande, il joue, pendant que nous vérifions une fois de
1044
aire ou intimider, ou se faire valoir. Il plaide,
il
marchande, il joue, pendant que nous vérifions une fois de plus nos c
1045
der, ou se faire valoir. Il plaide, il marchande,
il
joue, pendant que nous vérifions une fois de plus nos calculs… Deuxiè
1046
lture : le sens de la responsabilité personnelle.
Il
s’enracine dans la notion chrétienne de la personne humaine, c’est-à-
1047
personne humaine, c’est-à-dire de l’individu qui
doit
répondre de ses actes à la fois devant Dieu et devant la société, don
1048
on destin sur la terre comme au ciel, destin dont
il
se croit ou se veut le maître, pour une part tout au moins, grande ou
1049
e l’Europe existe — mais décisive pour le sens qu’
il
donne à sa vie. D’où résulte une double exigence de recueillement en
1050
t à grands cris de haine une aide qui ne leur est
due
qu’au nom de l’amour chrétien, nous avons le droit de leur dire : si
1051
qui exclut comme illusoire la solidarité, puisqu’
elle
refuse la réalité du prochain. Et certes, cela ne signifie pas théori
1052
culture européenne, c’est le sens de la liberté.
Il
est clair que ce sens est étroitement lié à celui de la responsabilit
1053
n’est vraiment libre que dans la seule mesure où
il
est responsable de son sort, et à l’inverse, on ne saurait tenir un h
1054
ponsable de ses actes que dans la seule mesure où
ils
sont faits librement. Notre sens de la liberté est aussi complexe que
1055
à doses variables dans notre idée de la liberté.
Il
n’est pas de concept plus difficile à définir, ni plus facile à nier
1056
e à définir, ni plus facile à nier en théorie, et
il
n’est pas d’idée plus exaltante en fait pour les Européens de toute n
1057
rdinales, paraîtront peut-être un peu abstraites.
Il
est temps que je les illustre. Au lieu d’expliquer laborieusement les
1058
les techniques qui en dérivent jusqu’au point où
elles
permettent non seulement à l’homme de dominer la matière, mais à l’hu
1059
es Européens qui ont inventé l’archéologie, comme
ils
ont inventé l’ethnographie à partir de la découverte géographique du
1060
sations prodigieuses de siècles et de continents,
ils
ont élaboré les préalables d’une science comparée des cultures et des
1061
et cette sociologie totale ou planétaire, prépare
elle
aussi les voies de l’unité future du genre humain. Sciences, physique
1062
ons ! — voilà ce que l’Europe a créé, voilà ce qu’
elle
offre désormais au monde entier. Or toutes ces créations sont nées de
1063
es ces créations sont en expansion vers le monde,
elles
appellent le monde, elles s’en nourrissent, et toutes, elles préparen
1064
xpansion vers le monde, elles appellent le monde,
elles
s’en nourrissent, et toutes, elles préparent son unité après avoir ex
1065
lent le monde, elles s’en nourrissent, et toutes,
elles
préparent son unité après avoir exploré ses variétés. Je n’essaierai
1066
es créations européennes que je viens d’énumérer.
Il
y faudrait tout un livre, et il se trouve que je l’ai déjà écrit. Je
1067
viens d’énumérer. Il y faudrait tout un livre, et
il
se trouve que je l’ai déjà écrit. Je me bornerai donc à rappeler, mai
1068
’Europe et de son histoire, et voici que pourtant
elle
crée le monde, elle crée la possibilité d’un genre humain qui, sans e
1069
stoire, et voici que pourtant elle crée le monde,
elle
crée la possibilité d’un genre humain qui, sans elle, n’eût jamais pr
1070
e crée la possibilité d’un genre humain qui, sans
elle
, n’eût jamais pris conscience de son existence virtuelle, ni des prob
1071
dépossédés de leurs pouvoirs par ce monde même qu’
ils
ont suscité. Et Dieu sait de quelle manière les autres continents men
1072
mondiale. Moment dramatique et passionnant, dont
il
nous faut tâcher d’évaluer les risques angoissants et les chances adm
1073
uré devant nos yeux, et sur la politique que nous
devons
imaginer pour y faire face. Nous devons tout d’abord, nous les Europé
1074
que nous devons imaginer pour y faire face. Nous
devons
tout d’abord, nous les Européens, prendre une conscience à la fois pl
1075
mes, ce que nous avons fait, et pourquoi. Et nous
devons
en même temps nous préparer à affronter des synthèses nouvelles, mais
1076
lture européenne n’est nullement supprimée, et ne
doit
pas être masquée, par le fait actuel de sa diffusion mondiale. On nou
1077
uissance matérielle, nos produits en un mot. Mais
il
ne reçoit pas les valeurs religieuses, éthiques et philosophiques, qu
1078
es permettraient de les maintenir en composition.
Il
retourne contre nous ces produits — tels que le nationalisme par exem
1079
plement, notre psychologie et notre spiritualité.
Il
exige nos machines, mais refuse ou ignore notre éthique de travail. I
1080
, mais refuse ou ignore notre éthique de travail.
Il
veut que nous l’aidions à mieux vivre, mais dédaigne notre idéal de l
1081
d’autre qui soit en mesure d’y prétendre mieux qu’
elle
, ou qui soit susceptible mieux qu’elle d’animer la civilisation née d
1082
e mieux qu’elle, ou qui soit susceptible mieux qu’
elle
d’animer la civilisation née de nos œuvres. Alors, que faire ? Que de
1083
isation née de nos œuvres. Alors, que faire ? Que
devons
-nous faire, nous qui sommes aussi les « produits » de la culture euro
1084
, qui a inventé le monde dans la mesure exacte où
elle
a découvert le genre humain. Et le sort de l’Europe dépend de son uni
1085
maintenant d’autres motifs, beaucoup plus vastes.
Il
nous faut faire l’Europe, parce qu’il faut faire le monde, et que l’E
1086
lus vastes. Il nous faut faire l’Europe, parce qu’
il
faut faire le monde, et que l’Europe seule peut le faire. Or, elle do
1087
e monde, et que l’Europe seule peut le faire. Or,
elle
doit d’abord exister. Mais on me dira, et une part de moi-même me dit
1088
de, et que l’Europe seule peut le faire. Or, elle
doit
d’abord exister. Mais on me dira, et une part de moi-même me dit : ap
1089
e salut, le sens de notre vie individuelle, n’est-
il
pas beaucoup plus important ? Question européenne par excellence. Mai
1090
’humanité entière, embarquée pour la découverte d’
elle
ne sait quel Eldorado, d’elle ne sait quelle Toison d’or, symboles du
1091
our la découverte d’elle ne sait quel Eldorado, d’
elle
ne sait quelle Toison d’or, symboles du sens dernier de la vie. Ceci
1092
omb, au matin du départ à Palos de Moguer. Auront-
elles
le tonnage, la voilure nécessaires ? Ou bien ne faut-il pas nous dema
1093
tonnage, la voilure nécessaires ? Ou bien ne faut-
il
pas nous demander, plutôt, si l’homme qui les conduit a la foi nécess
1094
es lecteurs hésitent à me donner raison, parce qu’
ils
doutent de l’avenir prochain de notre Europe, et de son pouvoir de fa
1095
est sans doute plus grave que la nôtre ; et notre
devoir
aujourd’hui, est bien moins de prévoir notre histoire que de la faire
1096
e premier rang dans le monde pendant des siècles,
elle
l’a dû à sa faculté de créer des valeurs morales, des structures de l
1097
rang dans le monde pendant des siècles, elle l’a
dû
à sa faculté de créer des valeurs morales, des structures de la socié
1098
re fiers d’une telle culture. Cependant, que font-
ils
aujourd’hui non seulement pour la conserver, mais encore et surtout,
1099
du xxe siècle né de leurs propres œuvres ? Quand
il
s’agit de financer un projet culturel, un institut nouveau, des reche
1100
t bien accepter la présidence de la Fondation, et
il
n’a cessé de l’exercer effectivement depuis lors. Pour faciliter les
1101
nsi être réduits au minimum. Ce régime provisoire
devait
permettre à la Fondation d’une part de s’organiser et d’élaborer son
1102
sembler les fonds qui lui avaient été promis. Car
elle
ne disposait pas, comme les fondations américaines, d’un capital init
1103
les fonds viennent à qui sait entreprendre, et qu’
ils
seraient donc trouvés dans la mesure même où les activités paraîtraie
1104
-pilotes d’éducation européenne (dont l’exécution
devait
être confiée dès 1956 au CEC) et le second commanda des œuvres nouvel
1105
éunion des gouverneurs à Genève, le 16 mars 1957,
il
fut convenu que la Fondation établirait son siège d’opérations à Amst
1106
es institutions culturelles existantes. Dès 1960,
elle
compte répartir entre ses membres des subventions et des bourses pour
1107
nationaux pour la recherche en commun des fonds,
doit
fournir les moyens nécessaires à la mise en pratique de cette troisiè
1108
notre Fondation atteint ainsi, en 1960, le but qu’
elle
s’était fixé au départ, ce succès se trouvera coïncider fort heureuse
1109
tions européennes, économiques et politiques, qui
doit
se réaliser d’ici la fin de l’année. z. Rougemont Denis de, « Une
1110
s soins de Joseph Bédier : Seigneurs, vous plaît-
il
d’entendre un beau conte d’amour et de mort ? Seigneurs et dames ici
1111
e Valéry, mais aussi à jamais adolescent, nous le
devons
tous aux travaux inspirés, et pourtant précis à l’extrême, de quelque
1112
cientifique, et sérieuse aux yeux des confrères :
ils
ont permis à l’Occident moderne de reprendre conscience d’une de ses
1113
r œuvre en une seule expression, moins pédante qu’
elle
ne paraît à première vue : avec la légende de Tristan, c’est l’étymol
1114
tre le mot primitif et les mots dérivés. De plus,
elles
donnent de la justesse dans le choix de l’expression. Il me plaît de
1115
nt de la justesse dans le choix de l’expression.
Il
me plaît de traduire cette belle définition dans les termes de notre
1116
dans nos littératures et dans nos vies. De plus,
elles
donnent de la justesse dans le style de nos émotions. » À mon sens,
1117
nt bien autre chose qu’un thème romanesque, — fût-
il
même le thème exemplaire, l’archétype de tous les romans vraiment dig
1118
hétype de tous les romans vraiment dignes du nom.
Ils
sont comme les premières apparitions, comme les épiphanies quasi sacr
1119
l’âme ? Tout auteur qui se permet ces grands mots
doit
au public une justification de l’usage personnel qu’il en fait. Un my
1120
public une justification de l’usage personnel qu’
il
en fait. Un mythe, au sens où je l’entends, c’est une histoire, génér
1121
rigueur en formules de biochimie. De quoi s’agit-
il
donc ici ? Entre le corps et l’intellect, la tradition distingue une
1122
ieux de l’éloquence classique de la chaire, quand
elle
parle du « salut des âmes », ou « d’immortalité de l’âme ». Je prends
1123
celle du corps ni celle de l’intellect, encore qu’
elle
tienne aux deux, c’est l’évidence, mais qui est bien plutôt celle du
1124
ce de l’âme. Or c’est dans le mythe de Tristan qu’
il
a trouvé son expression la plus totale, délicieuse et tragique à la f
1125
cieuse et tragique à la fois. C’est à ce mythe qu’
il
doit, depuis le xiie siècle, et dans nos sociétés occidentales, son
1126
use et tragique à la fois. C’est à ce mythe qu’il
doit
, depuis le xiie siècle, et dans nos sociétés occidentales, son pouvo
1127
pouvoirs, mais aussi dans l’erreur innombrable qu’
il
suscite ou qu’il entretient au niveau de l’existence banale. Tristan,
1128
ssi dans l’erreur innombrable qu’il suscite ou qu’
il
entretient au niveau de l’existence banale. Tristan, c’est tout d’abo
1129
oujours fuyante mais en fuite vers la hauteur, où
elle
entraîne l’amant ravi. Vous avez reconnu la conclusion gnostique du S
1130
the de Tristan élève ainsi devant nos yeux, ce qu’
il
illustre en sa simplicité majestueuse, c’est l’intensité de l’amour,
1131
’âme ouverte sur l’esprit, libérée des corps dont
elle
vient, et survolant les irritantes vicissitudes de notre incarnation
1132
la passion s’en fait. Cette image, étant idéale,
doit
demeurer toujours fuyante, inaccessible. Mais la réalité est lourdeme
1133
essible. Mais la réalité est lourdement présente.
Elle
ne saurait donc que freiner l’élan de l’âme vers l’Ange désiré. « Ce
1134
l’amour. Le mari, lui, a partagé la vie d’Iseut.
Il
reste seul vivant, mais sans amour. Aux yeux du mythe, il est perdant
1135
seul vivant, mais sans amour. Aux yeux du mythe,
il
est perdant. À ce premier aspect de notre légende : l’amour-passion t
1136
e du mythe, dans nos mœurs et coutumes, ne serait-
elle
que l’histoire d’une longue profanation ? Faut-il penser que les pouv
1137
le que l’histoire d’une longue profanation ? Faut-
il
penser que les pouvoirs du mythe sont épuisés et que nous serons peut
1138
nde primitive ? Mais si le mythe est épuisé, et s’
il
était vraiment un mythe de l’âme, faut-il conclure que c’est l’âme el
1139
é, et s’il était vraiment un mythe de l’âme, faut-
il
conclure que c’est l’âme elle-même, la fonction émotive, dans l’homme
1140
et la science, et une dose de psychanalyse, vont-
elles
exorciser la société future, évacuant les dernières passions ? Une an
1141
ours des siècles, inclinerait à cette conclusion.
Elle
consisterait à montrer la dégradation continue et, semble-t-il, irrév
1142
it à montrer la dégradation continue et, semble-t-
il
, irréversible, des obstacles opposés à la passion. Or on sait que la
1143
es, naturels ou sacrés, coutumiers ou légaux ; qu’
elle
s’en nourrit et même les invente au besoin. Sans les obstacles accumu
1144
age d’Iseut avec le Roi, père adoptif du héros —,
il
n’y aurait pas de roman, ni de passion mortelle, il n’y aurait donc p
1145
n’y aurait pas de roman, ni de passion mortelle,
il
n’y aurait donc pas eu de mythe. On ne saurait imaginer le grand roi
1146
provoquer celle-ci par ses refus intransigeants,
il
prétend se fonder sur l’amour-sentiment, succédané édulcoré, achevant
1147
ndements. La passion se fait rare de nos jours, s’
il
faut en croire nos romanciers. Ils savent bien que le roman véritable
1148
de nos jours, s’il faut en croire nos romanciers.
Ils
savent bien que le roman véritable n’est jamais qu’une version renouv
1149
on renouvelée de l’archétype de Tristan et Iseut.
Ils
cherchent donc partout l’obstacle qui résiste, et n’en trouvent guère
1150
t de la passion. Que deviendront nos romanciers ?
Il
leur reste le réalisme, le regard pseudo-scientifique détaillant des
1151
re. Ou bien encore, et ce serait mieux, je crois,
il
leur reste le mythe de Don Juan, ce cliché négatif de Tristan : la su
1152
s du spirituel. Selon les sociologues, la passion
doit
mourir. Je vous dis que je n’en crois rien. Car s’il est vrai que la
1153
mourir. Je vous dis que je n’en crois rien. Car s’
il
est vrai que la passion se nourrit d’obstacles choisis, et que notre
1154
oisis, et que notre culture tend à les supprimer,
il
reste un obstacle suprême, celui-là justement dont triomphe la passio
1155
dé à nos sciences, ou c’est tout comme. Qu’en est-
il
du dernier barrage que notre condition d’êtres finis oppose à notre a
1156
l’Amour même ? Si la passion vit de séparations,
il
est bien clair que la séparation la plus irrémédiable est dans la mor
1157
, les amants légendaires sont entrés, nous disent-
ils
, dans les voies d’une destinée « qui jamais ne leur fauldra jour de l
1158
qui jamais ne leur fauldra jour de leur vie, car
ils
ont beu leur destruction et leur mort ». Certes, c’est vrai pour leur
1159
’est vrai pour leur existence dans ce monde, mais
ils
ont aussi bu l’Amour, un amour qui s’adresse à la part immortelle que
1160
n plaisir que l’usage en moi a fait si fort qu’
il
me donne l’audace de négocier avec la mort. Et Wagner, le dernier au
1161
t. Et Wagner, le dernier auteur de la légende qu’
il
a su recréer d’après nature, s’inspirant de Gottfried de Strasbourg,
1162
rizon de la mort est l’ultime sens du mythe. Mais
il
faut croire aux anges pour y croire. Selon la mythologie de l’ancien
1163
ois jours après la mort d’amour. Iseut n’évoque-t-
elle
point cette forme de lumière qu’on ne rejoint que dans un au-delà, et
1164
étienne de l’amour du prochain ne s’en trouverait-
elle
pas éclairée, à son tour ? Aimer le prochain « comme soi-même » suppo
1165
laquelle on ne saurait s’aimer soi-même, puisqu’«
il
faut être deux pour aimer », comme dit la sagesse populaire. Aimer vr
1166
de l’homme ne peut nous être ici d’aucun secours.
Il
faut aimer, pour le comprendre et rapporter l’amour à ses fins spirit
1167
s. Et ce n’est pas seulement de la littérature qu’
ils
ont bien mérité, mais de l’âme. aa. Rougemont Denis de, « Tristan
1168
b. Précédé de la note suivante : « Le fauteuil où
il
est élu n’ayant jamais eu de titulaire depuis la fondation de l’Acadé
1169
ait pas à rappeler le souvenir d’un prédécesseur.
Il
lui fut donc loisible d’y indiquer d’intéressantes théories sur le ro
1170
Delbouille qui avait traité le même thème. Quand
elle
eut appris que tel était le dessein des deux orateurs, l’Académie s’a
1171
’Occident . Celui-ci, par un fâcheux contretemps,
dut
renoncer le matin même à gagner Bruxelles, l’avion qui devait l’amene
1172
cer le matin même à gagner Bruxelles, l’avion qui
devait
l’amener n’ayant pu quitter Genève à cause du brouillard. C’est donc
1173
uisse n’a donné au monde que la pendule à coucou.
Il
entendait que la Suisse n’a pas produit de grands hommes, comme l’Ita
1174
-Unis Orson Welles. Sa boutade est moins sotte qu’
elle
n’en a l’air. Trois raisons l’excusent à mes yeux, sans la justifier
1175
x, sans la justifier pour autant. Et tout d’abord
il
faut bien constater que dans la petite phrase incriminée, la plupart
1176
s compatriotes ne voient pas malice, persuadés qu’
ils
sont que l’horlogerie suisse donne l’heure au monde entier et ne crai
1177
ne l’heure au monde entier et ne craint personne.
Il
faut admettre ensuite que notre aurea mediocritas saute aux yeux du p
1178
dotés d’une bonne culture moyenne. Et finalement,
il
faut avouer que le statut du « grand homme » en Suisse, en vertu de l
1179
sible. Comment veut-on qu’un étranger le voit ? S’
il
vient chez nous et cite l’un des Suisses qu’il connaît par sa réputat
1180
S’il vient chez nous et cite l’un des Suisses qu’
il
connaît par sa réputation mondiale, pas une personne sur mille, prise
1181
vre entier : imaginons du moins son argument. ⁂ S’
il
me fallait décrire la Suisse en une seule phrase, comme il arrive que
1182
lait décrire la Suisse en une seule phrase, comme
il
arrive que des touristes l’exigent, je dirais : un pays de petits com
1183
en une demi-heure, parfois en deux minutes comme
il
arrive quand on traverse le tunnel de Chexbres : la vue se ferme sur
1184
i bien que l’homme de poids y sera surtout local.
Il
sera le grand homme d’une vallée, d’une cité, plus rarement celui d’u
1185
and musicien, un grand poète ou un grand peintre,
il
faut un milieu, une école, un public excité, un snobisme ou une cour,
1186
ue fera l’homme de talent, d’ambition, de génie ?
Il
ne peut que se cacher dans son coin, ou tenter de se rendre utile, ou
1187
la Suisse : Pays de gens moyens, oui. Mais quand
ils
réussissent à se dégager de leur canton — alors pas de milieu, ils at
1188
se dégager de leur canton — alors pas de milieu,
ils
atteignent à l’universel. Au fond de son trou, l’homme de Disentis, d
1189
ège, entre les hautes parois de sa prison. Mais s’
il
monte sur la montagne… Alors cette ivresse des sommets. L’intuition d
1190
vant la pensée. Le Suisse s’appelle Jean-Jacques.
Il
s’appelle Germaine de Staël. Il s’appelle Burckhardt ou, dans un autr
1191
lle Jean-Jacques. Il s’appelle Germaine de Staël.
Il
s’appelle Burckhardt ou, dans un autre domaine, Karl Barth. Son canto
1192
est bien dit et bien vu, mais le Français ne fait-
il
pas trop belle la part des Suisses dans la culture humaine, tandis qu
1193
ndis que notre Américain la réduisait au joujou ?
Il
est vrai que nos meilleurs esprits, hors de l’étroit compartiment nat
1194
me : un ou deux exceptés (et cela se discuterait)
ils
furent tous, à des titres divers, des hommes utiles, des penseurs eng
1195
s et pédagogues, nous les voyons tous assumer des
devoirs
sociaux ou civiques, éducatifs ou spirituels, comme si le fait d’être
1196
ors du complexe suisse. C’est à eux que la Suisse
doit
de représenter une plus grande densité de conscience européenne et d’
1197
optée par l’URSS et de là, transplantée en Chine,
elle
est devenue, au cours de ces dernières années, non seulement l’idéal,
1198
alifiés. L’URSS est peut-être la seule exception.
Il
en résulte qu’on propose un peu partout d’orienter les études, dès l’
1199
la technique ne saurait faire de vrais progrès si
elle
se coupe de la culture. Je pense donc que l’opposition entre la cultu
1200
peu de temps. Pour établir cette thèse centrale,
il
faudrait des volumes et toute une vie de recherches. Je vais devoir m
1201
s volumes et toute une vie de recherches. Je vais
devoir
me contenter de vous rappeler quelques exemples très typiques d’inven
1202
très typiques d’inventions techniques décisives.
Elles
dépendent, non point des « lois de l’économie » dont parlaient Marx e
1203
ons de notre culture. Pourquoi l’homme fabrique-t-
il
des outils ? Quels sont donc les motifs profonds de la technique ? To
1204
umains. L’homme primitif crée des outils parce qu’
il
joue avec les démons cachés dans le feu ou dans la pierre, dans l’eau
1205
l’animal, dans ses songes et ses rêves éveillés.
Il
exorcise prudemment la Nature peuplée de dieux ou de malicieux lutins
1206
dieux ou de malicieux lutins. L’homme moderne est-
il
très différent ? Prenons quelques exemples de ses inventions techniqu
1207
s scientifiques, cherchait à construire, nous dit-
il
, une « locomotive routière » qui ne fût pas astreinte à suivre la loi
1208
ntiel et intégral et la philosophie de la Nature,
il
prit le temps d’imaginer les plans d’une machine nouvelle, qui devint
1209
t du xviiie siècle était des plus rudimentaire :
il
fallait qu’un surveillant introduise de temps à autre un jet d’eau fr
1210
oide, rendant ainsi le processus automatique ; et
il
fit cela, nous disent les récits de l’époque, afin de pouvoir aller j
1211
énie inventèrent un beau jour ces mécaniques, qui
devaient
permettre l’industrie moderne. Si le besoin matériel expliquait les c
1212
s matériels, pourquoi ferait-on de la publicité ?
Il
n’en reste pas moins qu’aujourd’hui, l’explication utilitaire ou écon
1213
ittèrent la Terre. Mais vous êtes tous témoins qu’
il
n’en est rien. C’est la nature de nos rêves constants qui détermine n
1214
niques. Mais nos rêves à leur tour, d’où viennent-
ils
? Ils expriment nos croyances autant que nos instincts, les interdits
1215
. Mais nos rêves à leur tour, d’où viennent-ils ?
Ils
expriment nos croyances autant que nos instincts, les interdits socia
1216
s sciences et la littérature. C’est évident. Mais
il
ne faut pas oublier qu’ils se nourrissent en retour de la culture : n
1217
re. C’est évident. Mais il ne faut pas oublier qu’
ils
se nourrissent en retour de la culture : nos lectures, les tableaux q
1218
que nous aurions à subir, mais bien au contraire,
elle
exprime des vœux profonds dont nous sommes responsables. Il en résult
1219
des vœux profonds dont nous sommes responsables.
Il
en résulte que la culture et la technique ne sauraient être opposées
1220
auraient être opposées dans leurs sources, puisqu’
elles
procèdent de nos mêmes rêves fondamentaux. Cette thèse présente l’av
1221
les robots, les cerveaux électroniques. Que faut-
il
donc penser de cette longue plainte qui fut mise à la mode par Bergso
1222
vases de Chine. Si on laisse la bombe tranquille,
elle
ne fera rien, c’est clair. Elle se tiendra coite dans sa caisse. Qu’o
1223
bombe tranquille, elle ne fera rien, c’est clair.
Elle
se tiendra coite dans sa caisse. Qu’on ne nous raconte donc pas d’his
1224
Qu’on ne nous raconte donc pas d’histoires. Ce qu’
il
nous faut, c’est un contrôle de l’homme. Il n’est pas d’invention, s
1225
e qu’il nous faut, c’est un contrôle de l’homme.
Il
n’est pas d’invention, si simple et si utilitaire soit-elle, qui ne p
1226
pas d’invention, si simple et si utilitaire soit-
elle
, qui ne puisse être mise au service des passions meurtrières de l’hom
1227
sommes parvenus au seuil d’une ère nouvelle, qui
doit
et peut, progressivement, nous permettre non plus seulement d’amélior
1228
achines, qui semblait inhumain tant que l’ouvrier
devait
y adapter son rythme, devient au contraire libérateur dès qu’il est p
1229
on rythme, devient au contraire libérateur dès qu’
il
est poussé jusqu’au bout, et qu’il n’a plus besoin d’être servi, mais
1230
érateur dès qu’il est poussé jusqu’au bout, et qu’
il
n’a plus besoin d’être servi, mais seulement surveillé par l’homme. M
1231
et privée du même coup du droit de se plaindre qu’
elle
n’a pas le temps de se cultiver ! Bien sûr, nous ne confondrons pas l
1232
travail, c’est même le vrai travail humain. Mais
il
est clair que si le temps libre est augmenté, la consommation de la c
1233
ugmenté, la consommation de la culture augmentera
elle
aussi, et que par suite, les conditions du producteur de la culture s
1234
ivement plus importants que le travail routinier.
Il
en résultera que la culture deviendra le sérieux de la vie. Je résume
1235
techniciens. Deux exemples : la France déclare qu’
elle
manque dès aujourd’hui d’environ cinquante mille techniciens et ingén
1236
mille techniciens et ingénieurs. Quant à l’URSS,
elle
subordonne toute son éducation scolaire et universitaire à la seule f
1237
r laquelle est assise notre puissance technique ;
elle
se nomme culture générale. Les plus grands inventeurs de tous les tem
1238
s politiquement disciplinées, ou même d’écoles où
ils
n’auraient reçu qu’une instruction purement technique. L’ère nouvelle
1239
enseignement à leur seule formation spécialisée,
il
en résultera 1° que nous aurons moins de grands inventeurs et 2° que
1240
théoriquement la culture et la technique comme s’
il
s’agissait de deux entités indépendantes et au surplus rivales. Nous
1241
vu que leurs sources créatrices sont communes, qu’
elles
jaillissent du même fonds et s’alimentent aux mêmes nappes profondes
1242
mbre de ces amateurs est en même temps multiplié.
Il
en va de même pour les pièces de théâtre, grâce à la radio, pour les
1243
ociété a besoin d’innombrables techniciens, et qu’
il
s’agit de les former d’urgence aux dépens des humanités et de la cult
1244
RSS a décidé de sacrifier la culture générale, et
elle
a produit les Spoutniks. Je crains pour elle que ses premiers succès
1245
, et elle a produit les Spoutniks. Je crains pour
elle
que ses premiers succès ne l’aveuglent et que sa politique éducative
1246
que sa politique éducative ne soit à courte vue ;
elle
repose en effet sur l’idée que la formation technique exclusive favor
1247
ens qui ont réalisé la fission de l’atome comment
il
travaillait à cette époque. Il me décrivit en détail ses méthodes, et
1248
de l’atome comment il travaillait à cette époque.
Il
me décrivit en détail ses méthodes, et il conclut : « Vous voyez, not
1249
époque. Il me décrivit en détail ses méthodes, et
il
conclut : « Vous voyez, notre activité réelle, c’est un mélange de po
1250
asses, à la stagnation, ou à des monstruosités. S’
il
nous faut davantage de techniciens et de chercheurs scientifiques, il
1251
ge de techniciens et de chercheurs scientifiques,
il
nous faut donc davantage de culture générale, et non pas moins, et se
1252
d’emploi, et nos remèdes deviendront des poisons.
Il
est donc temps, pour nous Occidentaux, d’adjoindre à l’assistance tec
1253
clusion : L’économie occidentale qui sait bien qu’
elle
dépend de la technique, doit comprendre aussi que la technique dépend
1254
ale qui sait bien qu’elle dépend de la technique,
doit
comprendre aussi que la technique dépend de la culture créatrice. Il
1255
que la technique dépend de la culture créatrice.
Il
est vital pour l’avenir de l’économie en Occident, de soutenir la cul
1256
voudrais appeler l’indice de l’équilibre humain.
Il
appartient à la culture de concevoir cet équilibre, d’en formuler les
1257
z souple pour servir de modèle à tous les hommes.
Il
appartient donc conjointement à la culture et à l’économie, qui trouv
1258
emise, vint s’asseoir à côté de moi sur le tapis.
Il
arrivait tout droit de la rédaction de Combat et voulait savoir son a
1259
ns beaucoup à faire ensemble. Deux ans plus tard,
il
devenait mon collaborateur le plus actif et imaginatif au Centre euro
1260
if au Centre européen de la culture, à Genève, qu’
il
ne devait quitter qu’un an avant sa mort. Je parlerai de sa personne.
1261
Centre européen de la culture, à Genève, qu’il ne
devait
quitter qu’un an avant sa mort. Je parlerai de sa personne. ⁂ Il étai
1262
n an avant sa mort. Je parlerai de sa personne. ⁂
Il
était alsacien, né à Strasbourg, et son père descendait d’une famille
1263
e sang slave et possédant la bourgeoisie de Bâle.
Il
avait épousé une Anglaise. Il rêvait d’être un jour Suisse, ou Chilie
1264
ourgeoisie de Bâle. Il avait épousé une Anglaise.
Il
rêvait d’être un jour Suisse, ou Chilien peut-être. Avec tout cela, F
1265
langage, d’impeccable ordonnance intellectuelle.
Il
excellait en tout et passait au-delà, avec cette « casual brilliance
1266
, titulaire d’une émission française de la BBC qu’
il
rendit rapidement fameuse, finalement animateur et conseiller d’organ
1267
sations européennes et internationales auxquelles
il
prêtait le rayonnement d’une culture exceptionnellement étendue, d’un
1268
eilleur des qualités germaniques et françaises, —
il
semblait toujours que tout cela devait le conduire ailleurs, le prépa
1269
françaises, — il semblait toujours que tout cela
devait
le conduire ailleurs, le préparait seulement… Rejoignant enfin sa vra
1270
t… Rejoignant enfin sa vraie vocation, peut-être,
il
venait de donner les témoignages d’une soudaine maîtrise poétique, d’
1271
nt réaliste et religieux. Puis, une fois de plus,
il
est passé au-delà, emporté par un mal qu’il avait su décrire dans un
1272
plus, il est passé au-delà, emporté par un mal qu’
il
avait su décrire dans un bref poème prophétique, quelques semaines av
1273
taque, suivie d’une opération au cerveau. Fallait-
il
vraiment, écrivait-il alors, être « nettoyé » par cette maladie morte
1274
ération au cerveau. Fallait-il vraiment, écrivait-
il
alors, être « nettoyé » par cette maladie mortelle, en vue d’un « nou
1275
die mortelle, en vue d’un « nouveau travail » ? ⁂
Il
n’aimait pas les discussions métaphysiques ni qu’on lui demandât ce q
1276
ussions métaphysiques ni qu’on lui demandât ce qu’
il
croyait. D’une thèse ou d’un point de vue qu’on le pressait d’adopter
1277
n le pressait d’adopter, de fonder ou de réfuter,
il
disait, coupant court, et comme en aparté : « Ceci n’est pas conforme
1278
pas conforme à ma théologie. » Et l’on sentait qu’
il
s’agissait en lui non pas d’une objection logique ou de doctrine, mai
1279
tait celui d’un absolu monothéisme, au nom duquel
il
récusait toutes les constructions dogmatiques — saint Thomas, Calvin
1280
ar le nihilisme ou simplement par la révolte. Car
il
croyait que notre incohérence aveugle avait un sens ailleurs, heureux
1281
désirs et décisions évoluaient à ses yeux, comme
il
aimait à dire : « dans la confusion générale ». Tel étant de toute év
1282
». Tel étant de toute évidence le train du monde,
il
fallait naviguer dans la vie d’un signe à l’autre, guidé par la seule
1283
me et des conditions élémentaires d’une carrière.
Il
avait de lui-même et du monde une idée telle que les soucis multiplié
1284
ie quotidienne mal ordonnée, et les besognes dont
il
s’acquittait pour s’en tirer ne l’atteignaient pas, quoique l’empêcha
1285
quoique l’empêchant, hélas ! d’écrire son œuvre.
Il
avait été Roi dans une autre existence, il le savait absolument ; il
1286
œuvre. Il avait été Roi dans une autre existence,
il
le savait absolument ; il pouvait être dans cette vie reporter et boh
1287
ns une autre existence, il le savait absolument ;
il
pouvait être dans cette vie reporter et bohème, romancier ou poète, —
1288
tte vie reporter et bohème, romancier ou poète, —
il
voulut même, un temps, devenir banquier, et riche. L’insignifiance fo
1289
ouvoir apparent passait parfois dans ses propos. (
Il
eût fait un fort bel empereur romain-germanique et d’expression franç
1290
permettaient de donner le change au premier venu.
Il
protégeait en lui le grand poète qu’il se sentait devenir dans « le t
1291
mier venu. Il protégeait en lui le grand poète qu’
il
se sentait devenir dans « le temps saugrenu » de la vie brève, et qu’
1292
dans « le temps saugrenu » de la vie brève, et qu’
il
deviendra parmi nous, pour quelques-uns, dans le temps signifiant de
1293
e sang slave et possédant la bourgeoisie de Bâle.
Il
avait épousé une Anglaise. Il rêvait d’être un jour suisse ou chilien
1294
ourgeoisie de Bâle. Il avait épousé une Anglaise.
Il
rêvait d’être un jour suisse ou chilien peut-être. Avant tout cela, F
1295
langage, d’impeccable ordonnance intellectuelle.
Il
excellait en tout et passait au-delà, avec cette « brillante désinvol
1296
, titulaire d’une émission française de la BBC qu’
il
rendit rapidement fameuse, finalement animateur et conseiller d’organ
1297
sations européennes et internationales auxquelles
il
prêtait le rayonnement d’une culture exceptionnellement étendue, d’un
1298
meilleur des qualités germaniques et françaises,
il
semblait toujours que tout cela devait le conduire ailleurs, le prépa
1299
et françaises, il semblait toujours que tout cela
devait
le conduire ailleurs, le préparait seulement… Rejoignant enfin sa vra
1300
t… Rejoignant enfin sa vraie vocation, peut-être,
il
venait de donner les témoignages d’une soudaine maîtrise poétique, d’
1301
nt réaliste et religieux. Puis, une fois de plus,
il
est passé au-delà, emporté par un mal qu’il avait su décrire dans un
1302
plus, il est passé au-delà, emporté par un mal qu’
il
avait su décrire dans un bref poème prophétique, quelques semaines av
1303
taque, suivie d’une opération au cerveau. Fallait-
il
vraiment, écrivait-il alors, être « nettoyé » par cette maladie morte
1304
ération au cerveau. Fallait-il vraiment, écrivait-
il
alors, être « nettoyé » par cette maladie mortelle, en vue d’un « nou
1305
1509 à Noyon, d’une famille de bourgeoisie aisée.
Il
reçoit une bonne instruction générale, puis va à Paris étudier la thé
1306
étudier le droit. Quand son père meurt, en 1531,
il
réalise sa part d’héritage, vend ses bénéfices, et ne s’occupe plus q
1307
s bénéfices, et ne s’occupe plus que de religion.
Il
prêche. Il doit s’enfuir à Nérac auprès de la reine de Navarre, puis
1308
, et ne s’occupe plus que de religion. Il prêche.
Il
doit s’enfuir à Nérac auprès de la reine de Navarre, puis à Bâle, où
1309
t ne s’occupe plus que de religion. Il prêche. Il
doit
s’enfuir à Nérac auprès de la reine de Navarre, puis à Bâle, où il éc
1310
ac auprès de la reine de Navarre, puis à Bâle, où
il
écrit L’Institution chrétienne qu’il publie en 1536. Après un séjour
1311
s à Bâle, où il écrit L’Institution chrétienne qu’
il
publie en 1536. Après un séjour à Ferrare, il est retenu à Genève par
1312
qu’il publie en 1536. Après un séjour à Ferrare,
il
est retenu à Genève par Guillaume Farel et invité à y organiser l’Égl
1313
gistrats en 1538, Calvin s’en va à Strasbourg, où
il
se marie. Rappelé à Genève en 1540, il y reste jusqu’à sa mort, qui s
1314
sbourg, où il se marie. Rappelé à Genève en 1540,
il
y reste jusqu’à sa mort, qui survient le 27 mai 1564. Œuvres. Christ
1315
t manifeste39 que « l’écrivain, dans la mesure où
il
s’occupe des vicissitudes de l’époque et tente de s’y mêler — de les
1316
d’écrivain », alors Calvin n’est pas un écrivain.
Il
a créé un style et un vocabulaire, et la langue des idées en France,
1317
poque, et diriger les hommes à leur fin de salut.
Il
n’a écrit que pour mieux faire comprendre l’Écriture, parlé que pour
1318
ini. Les manuels ont beau dire, je ne vois pas qu’
il
ait eu la moindre « influence » vérifiable sur la littérature françai
1319
jours par « la littérature » dans les milieux où
elle
se crée et se cultive pour elle-même, se définit précisément comme qu
1320
ages de décrire par le terme d’engagement, — dont
il
semble qu’on ait abusé — s’origine sans nul doute chez Calvin et n’a
1321
er est aussi gras et sanguin que Thomas d’Aquin —
il
ne séduit que par la démesure d’une inflexible discipline intime. Rie
1322
estinait à la science des lois, pour la raison qu’
elle
enrichit ceux qui la suivent, nous dit-il. Dieu toutefois me fit tou
1323
on qu’elle enrichit ceux qui la suivent, nous dit-
il
. Dieu toutefois me fit tourner bride… Ayant donc reçu quelque goût e
1324
it tournoyer par divers changements que toutefois
il
ne m’a jamais laissé de repos en lieu quelconque jusques à ce que, ma
1325
quelconque jusques à ce que, malgré mon naturel,
il
m’a produit en lumière et fait venir en jeu, comme on dit. L’aventur
1326
sous peine de mort d’imprimer aucun livre quel qu’
il
soit. Calvin qui fuit de ville en ville arrive à Bâle, pour y vivre c
1327
e la défense des « saints martyrs », de peur, dit-
il
, qu’en se taisant il ne se montre lâche et déloyal. C’est ainsi qu’il
1328
ints martyrs », de peur, dit-il, qu’en se taisant
il
ne se montre lâche et déloyal. C’est ainsi qu’il rédige en latin, de
1329
il ne se montre lâche et déloyal. C’est ainsi qu’
il
rédige en latin, de mars à août, les cinq-cent-vingt pages de sa prem
1330
en français l’épître liminaire au roi de France.
Il
a vingt-cinq ans. Il vient d’élaborer en quelques mois, — « dans des
1331
liminaire au roi de France. Il a vingt-cinq ans.
Il
vient d’élaborer en quelques mois, — « dans des veilles mémorables, c
1332
urs de notre histoire occidentale. Et de nouveau,
il
fuit devant l’éclat que fait dans le monde ce « petit livret », comme
1333
que fait dans le monde ce « petit livret », comme
il
l’appelle. Passant à Genève par hasard, il comptait n’y rester qu’une
1334
comme il l’appelle. Passant à Genève par hasard,
il
comptait n’y rester qu’une nuit. Mais là, « maître Guillaume Farel me
1335
aix de ses études, maudite par les cris de Farel.
Il
n’accepte pourtant qu’une charge de docteur, et commence à « dresser
1336
ses formes. Bientôt, une sédition le chasse. Peut-
il
se croire « en liberté et quitte de sa vocation » ? Déjà Bucer exige
1337
ent le pasteur de la première Église réformée, et
il
la dote d’une liturgie, qu’il met en vers pour être mieux chantée. Tr
1338
Église réformée, et il la dote d’une liturgie, qu’
il
met en vers pour être mieux chantée. Trois ans s’écoulent et sa pensé
1339
xercé depuis ce temps-là, et par quelles épreuves
il
m’a examiné, ce serait une longue histoire. » Semblable au roi David
1340
; comme aussi ses défauts, à notre goût du jour.
Il
est moins séduisant qu’impérieux, moins impérieux pourtant que contra
1341
le mouvement pressant et familier des Sermons qu’
il
prononce chaque jour à la cathédrale de Saint-Pierre. Rien n’est plus
1342
ant à la pensée directrice : à Dieu seul tout est
dû
et de Lui seul tout vient. La phrase est souvent longue, mais d’une d
1343
rme, conduisant vers un but si fortement conçu qu’
il
semble que jamais le moindre doute frivole n’ait fait broncher l’espr
1344
s spirituel — parlant dans une ville assiégée, qu’
il
s’agisse de Genève où l’on veille aux remparts de l’Église harassée p
1345
faible de l’homme en butte aux attaques du monde.
Il
s’agit de « presser » l’auditoire, de l’instruire « à salut », de le
1346
semblée devant lui, au pied de la chaire, et dont
il
connaît bien les circonstances concrètes : d’où l’absence de doute et
1347
contagion. Ce ministre du Verbe a fait un monde.
Il
est même le seul écrivain dont les doctrines aient suscité dans l’Occ
1348
e de son œuvre, ou au moins de son nom : mais est-
il
justifié à le faire ? Certes, on peut bien soutenir que les États-Uni
1349
t le citoyen. Calvin n’était pas démocrate, mais
il
a fomenté les chefs qui ont appris aux siècles futurs qu’il n’est pas
1350
té les chefs qui ont appris aux siècles futurs qu’
il
n’est pas de liberté concrète qui ne soit responsable en retour devan
1351
révolte, refusé aux individus, mais confié comme
devoir
aux groupes constitués quand l’État outrepasse ses fonctions, a proté
1352
de Calvin et l’aire des dictatures totalitaires :
elles
ne se recouvrent nulle part. Enfin, loin d’avoir instauré la théocrat
1353
te pouvoir, elle-même n’en demandant aucun puisqu’
elle
détient l’autorité, qui est de l’esprit. Faut-il ranger Calvin au cam
1354
lle détient l’autorité, qui est de l’esprit. Faut-
il
ranger Calvin au camp de la liberté ? Oui certes, dans la mesure où p
1355
la mesure où par la seule vertu de la vocation qu’
il
portait, il fut l’incarnation de l’autorité ; et dans la mesure encor
1356
par la seule vertu de la vocation qu’il portait,
il
fut l’incarnation de l’autorité ; et dans la mesure encore où cet hom
1357
it l’histoire des cités les plus libres, parce qu’
il
ne croyait pas à l’Histoire déifiée mais qu’il en appelait à son juge
1358
qu’il ne croyait pas à l’Histoire déifiée mais qu’
il
en appelait à son juge. 39. Introduction à la Nouvelle NRF, 1953.
1359
es grands noms deviennent des prénoms, les titres
doivent
être mérités, la familiarité dénote le respect, et les pédants sont e
1360
: plus mystérieuse que la Constitution anglaise,
elle
ne s’explique pas, on la sent. Ses exigences sont aggravées par une d
1361
mais parfois les « mauvaises » sont pardonnées si
elles
s’affirment dans un grand style tumultueux à la mongole, à l’espagnol
1362
toria dataient tout juste de deux ans auparavant.
Elles
restent liées dans ma mémoire avec tout ce que Paris comptait de plus
1363
finit la seule Société des esprits. Et j’ai vu qu’
elle
était Argentine avant tout, dans ses grandes dimensions vitales, as l
1364
s nordiques, et trop facilement rationnelles — qu’
elle
fait régner sur les relations humaines. Un jour le Sud aura sa revanc
1365
ulture et l’union de l’Europe (avril 1962)ai S’
il
est question d’intégration européenne et qu’on lui parle de culture,
1366
n lui parle de culture, l’homme d’aujourd’hui, qu’
il
soit d’ailleurs industriel ou philosophe, a d’abord un réflexe de dou
1367
rope qui se fait, dans la réalité concrète, n’est-
elle
pas avant tout l’Europe économique, c’est-à-dire le Marché commun ? L
1368
e là-dedans ? Quelles contributions efficaces a-t-
elle
apportées à l’union ? N’est-elle pas au contraire, ajoutent certains,
1369
ns efficaces a-t-elle apportées à l’union ? N’est-
elle
pas au contraire, ajoutent certains, l’un des derniers bastions de l’
1370
able (et au surplus n’aurait jamais vu le jour) s’
il
ne s’inscrivait pas dans une longue tradition culturelle européenne ;
1371
teurs à l’édifice du nouveau consortium européen.
Elle
deviendrait un parasite si elle insistait pour qu’on augmente son bud
1372
sortium européen. Elle deviendrait un parasite si
elle
insistait pour qu’on augmente son budget. Cette vue très populaire, n
1373
agée par les élites sociales de notre continent :
il
suffit pour s’en assurer de comparer nos budgets de la culture avec c
1374
ssance jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, et si
elle
est encore aujourd’hui l’une des trois grandes puissances de la planè
1375
anète, ce n’est pas à ses richesses naturelles qu’
elle
le doit : simple cap de l’Asie (4 % des terres émergées du globe), un
1376
e n’est pas à ses richesses naturelles qu’elle le
doit
: simple cap de l’Asie (4 % des terres émergées du globe), un peu moi
1377
urope » ? L’Europe existe depuis des millénaires.
Il
n’est pas question de la créer ; mais simplement, les circonstances d
1378
fire. Tel étant le problème véritable, on voit qu’
il
est bien moins économique que politique, et en fin de compte, culture
1379
tional, ces méfiances séculaires, pour périmés qu’
ils
soient, sont profondément enracinés dans un millénaire au moins de cu
1380
on dans les faits. C’est donc dans les esprits qu’
il
s’agit de le combattre. Et ceci n’est pas une question de technique o
1381
cales et nationales de traditions et de régimes ;
ils
peuvent vous démontrer que ce plan serait rentable, et que votre inté
1382
re Europe technicienne marcherait sans nul doute,
elle
« rendrait » matériellement. Elle serait unifiée mais ne serait plus
1383
sans nul doute, elle « rendrait » matériellement.
Elle
serait unifiée mais ne serait plus l’Europe. Aux seconds, vous direz
1384
e nos peuples divers, mais voilà six-cents ans qu’
elle
échoue dans tous ses efforts vers l’union. Les uns et les autres ont
1385
. Les uns et les autres ont raison, en ce sens qu’
ils
sont nécessaires, soit comme moteur, soit comme volant ; les uns et l
1386
mme volant ; les uns et les autres ont tort quand
ils
se prétendent suffisants, à eux seuls. Leur dialogue est vital pour l
1387
attitude fédéraliste : l’union dans la diversité.
Il
faut prendre au sérieux les deux termes ensemble. Tel est le secret s
1388
tâche de la culture et sa vocation prospective.
Il
n’y aurait pas d’Europe sans tout ce que la culture a su tirer de nos
1389
divisions, presque mortelles. De la culture enfin
doit
venir le remède à nos maux, et il est double : réduire les préjugés n
1390
culture enfin doit venir le remède à nos maux, et
il
est double : réduire les préjugés nationalistes, qui s’opposent à tou
1391
s de culture que notre Fondation entend soutenir,
doit
comprendre les deux tâches suivantes : 1° organiser la coopération de
1392
ibution essentielle à l’intégration du continent.
Ils
réduisent les obstacles mentaux qui entravent encore la construction
1393
ns qui répondent que l’Europe n’est plus rien, qu’
elle
n’a pas d’idéal à opposer aux ambitions mondiales du communisme, ni d
1394
eux grandes tâches, je le répète, sont vitales et
elles
relèvent de la culture au premier chef, j’entends par là : de la rech
1395
l’Europe. Contre la volonté de leurs initiateurs,
elles
risqueront, un jour, de dénaturer cette Europe que l’on croyait « fai
1396
t « faire ». Car, en fin de compte, pourquoi faut-
il
créer un grand marché européen ? Sinon pour mettre ou remettre l’Euro
1397
tionales. Au terme de l’intégration européenne, s’
il
ne devait y avoir que dividendes, bombes atomiques, autos et frigidai
1398
es. Au terme de l’intégration européenne, s’il ne
devait
y avoir que dividendes, bombes atomiques, autos et frigidaires, les f
1399
ront avant nous à des positions de puissance dont
ils
ne manqueront pas d’abuser contre l’homme, du moins tel que nous le c
1400
de la culture et de son « utilité ». On verra qu’
elles
s’opposent diamétralement. Si les croyances populaires ont raison, le
1401
contraire mes arguments sont « évidents », alors
il
est grand temps que la très riche Europe en tire les conséquences log
1402
nt en Suisse pendant la crise de mai à août 1940.
Il
insiste notamment sur la fameuse « ligue des officiers », affaire don
1403
», affaire dont M. Kurz, de son côté, souhaite qu’
elle
soit un jour élucidée. Je serais heureux que les notes qui suivent co
1404
ssée, telle que j’ai pu la voir de près, à Berne.
Il
s’agit de notes tirées de mon journal privé, nécessairement trop per
1405
lan révèle l’idée qui me hantait à cette époque :
il
décrit en effet l’importance symbolique et stratégique du Saint-Gotha
1406
ice de Berne, qui a demandé quelques volontaires.
Il
nous expose notre tâche : prendre le commandement des pelotons chargé
1407
astion sacré, et je l’ai dit hier soir encore. Or
il
se trouve que le Gothard est le type même de la position imprenable d
1408
e la position imprenable dans la guerre actuelle.
Il
faudrait déclencher une action dans le pays, pour la résistance à tou
1409
d comme symbole et comme grand atout militaire. »
Il
acquiesce. Je poursuis : « Une action qui réunirait tous les groupeme
1410
tiques, trop lents et trop peu sûrs. » « Oui, dit-
il
, c’est une idée… (et pendant une seconde je n’ai pas su s’il était ir
1411
ne idée… (et pendant une seconde je n’ai pas su s’
il
était ironique ou sérieux) une bonne idée… Seulement ce n’est rien d’
1412
bonne idée… Seulement ce n’est rien d’en parler.
Il
faut le faire ! » J’ai senti sous son regard direct le danger d’avoi
1413
Allemands sont entrés à Paris. » — Merci. Repos !
Il
est sorti, me voyant incapable de rien dire de plus. Je suis resté im
1414
Pas d’autre bruit. Me suis recouché pensant que s’
il
se passait quelque chose, je serais alerté par téléphone. Peu dormi,
1415
ays ! ») Je le relis rapidement dans l’escalier :
il
me paraît un peu sentimental, je me demande s’il est bien à la mesure
1416
il me paraît un peu sentimental, je me demande s’
il
est bien à la mesure du tragique dans lequel nous baignons… L’ai fait
1417
au lieutenant-colonel M. et aux autres camarades,
ils
le trouvent bien, mais ne paraissent pas spécialement frappés. Cela p
1418
la Censure. Oui, il y aura des histoires, paraît-
il
. Mais rien de nouveau jusqu’à six heures. Je me prépare à sortir. Son
1419
i ? — Je ne suis pas officier de carrière. — Vous
deviez
le faire quand même. Vous êtes accusé d’injures à chef d’État étrange
1420
l’été de 1940 d’un « mouvement de résistance » —
il
en distingue deux, l’un civil, l’autre formé d’officiers — qui entend
1421
et extravagant à la fois, comme l’événement quand
il
arrive. Je vois ce pré et je sais qu’il peut y apparaître dans un ins
1422
ent quand il arrive. Je vois ce pré et je sais qu’
il
peut y apparaître dans un instant des hommes qui nous tireront dessus
1423
e sur son propre cas, et sur le sort des nations.
Il
ne reste que la préoccupation des petites choses précises à faire. 20
1424
e petite maison du Gurten. Je prends la position.
Il
tient dans chaque main un petit paquet attaché par un ruban. — Ça, c’
1425
u pays et de maintenir l’intégrité du territoire.
Il
est clair que pour défendre un territoire, il est parfois indiqué de
1426
re. Il est clair que pour défendre un territoire,
il
est parfois indiqué de céder du terrain : cela s’appelle une retraite
1427
elle une retraite stratégique. On peut me dire qu’
il
est aussi des retraites nécessaires (des silences opportuns) pour déf
1428
constate que « la Suisse est réduite à elle-même.
Elle
n’a pas d’autre garantie que son armée, pas d’autre allié que son ter
1429
e vous promettons qu’un grand effort commun. Mais
il
nous rendra fiers d’être hommes, et d’être Suisses. Ce texte va para
1430
des chefs de la ligue des officiers — tout ce qu’
il
possède, paraît-il. 26 juin 1940 Hier, discours de Pilet-Golaz. À pro
1431
gue des officiers — tout ce qu’il possède, paraît-
il
. 26 juin 1940 Hier, discours de Pilet-Golaz. À propos du cessez-le-fe
1432
Pilet-Golaz. À propos du cessez-le-feu en France,
il
a parlé de notre « soulagement » ! Cela peut s’entendre de diverses m
1433
nières, mais l’une est atroce. Je veux, croire qu’
il
ne l’a pas senti. Mais ce matin, un officier de l’E.-M. du Général me
1434
ue dans l’armée. La presse a publié le Manifeste.
Elle
en parle ! Beaucoup de lettres, de pamphlets, d’articles, nous accuse
1435
ar ailleurs la démission de notre Directoire : or
il
n’en a jamais été membre. Rien de plus normal. En dépit du choc causé
1436
fait est que la grande industrie boude la Ligue :
elle
attend de voir comment les choses tournent. Le Conseil fédéral paraît
1437
i, solliciteront une audience du Conseil fédéral.
Ils
ont mission de lui déclarer que s’il cède aux exigences des nazis, to
1438
il fédéral. Ils ont mission de lui déclarer que s’
il
cède aux exigences des nazis, tout est prêt pour le renverser, des tr
1439
tion. Si au contraire le Conseil fédéral résiste,
il
aura l’appui sans réserve de la Ligue civile et militaire. L’audience
1440
de cette démarche dans les archives fédérales. On
devait
s’y attendre. Et personne n’ébruita la chose à l’époque. On comprend
1441
at de l’incident, si pittoresque et surprenant qu’
il
puisse apparaître, après coup. Il y avait une sorte de pari insensé d
1442
re à un gouvernement : « Nous vous avertissons qu’
il
existe un complot pour vous renverser, et que nous en sommes les faut
1443
! » Logiquement, si le gouvernement nous croyait,
il
devait nous faire arrêter sur-le-champ. S’il ne nous croyait pas, not
1444
Logiquement, si le gouvernement nous croyait, il
devait
nous faire arrêter sur-le-champ. S’il ne nous croyait pas, notre déma
1445
ait, il devait nous faire arrêter sur-le-champ. S’
il
ne nous croyait pas, notre démarche était ratée, et au surplus couvra
1446
i qui reçut cette délégation comprit très bien qu’
il
s’agissait pour nous d’appuyer les durs et de faire peur aux mous. Le
1447
urs et de faire peur aux mous. Le Conseil fédéral
devait
donc nous croire et ne pas nous croire à la fois. Finalement, il rési
1448
oire et ne pas nous croire à la fois. Finalement,
il
résista, comme on sait.) 40. Néanmoins, un sergent de mes amis, syn
1449
rouleaux enregistrant vos conversations ! » 41.
Il
s’agit de M. Auguste Lindt, aujourd’hui ambassadeur de Suisse à Washi
1450
aire nuit à son pays”). Le moral des Suisses va-t-
il
flancher devant le raz de marée nazi ? Le Gothard, pense Rougemont, d
1451
raz de marée nazi ? Le Gothard, pense Rougemont,
devrait
fournir le symbole et la clef d’une résistance à tout prix. Voici la
1452
convaincants — on ne peut pas écrire en groupe —
ils
me confient la rédaction. Ma position est un peu délicate. « Le génér
1453
exte est de ma main. D’autre part, je suis sûr qu’
il
en approuvera la pensée. Fin juillet 1940 Je rédige une brochure inti
1454
a produit un choc salutaire sur l’opinion suisse.
Elle
a rendu confiance à beaucoup de citoyens, elle a fait naître un grand
1455
e. Elle a rendu confiance à beaucoup de citoyens,
elle
a fait naître un grand espoir et dissipé certaines brumes de défaitis
1456
duit une émulation inattendue du côté des partis.
Il
est incontestable que sans la Ligue, les « communautés de travail »,
1457
Labhardt, commandant l’unité d’armée de Sargans.
Ils
avaient essayé d’obtenir son appui pendant une partie de la nuit. Il
1458
’obtenir son appui pendant une partie de la nuit.
Il
leur a laissé croire qu’il marchait, et à 6 heures ce matin, les a fa
1459
une partie de la nuit. Il leur a laissé croire qu’
il
marchait, et à 6 heures ce matin, les a fait boucler. » Le lieutenant
1460
e fois de plus ce voyage aux États-Unis ? Ici, je
dois
revenir un peu en arrière dans mes souvenirs. Dès le mois de mai, le
1461
me ceux qui sont indiqués sous les chiffres 1 à 3
devraient
, par conséquent, être évités ». (J’ai conservé la lettre, signée par
1462
plus qu’un symbole. Centre du Réduit national 42
il
se dressait vraiment comme ce bastion de l’Europe libre dont nous avi
1463
avions rêvé sans oser croire qu’en quelques mois
il
deviendrait une réalité. L’opinion s’était ressaisie. La Ligue du Got
1464
tance, voyait ainsi son premier objectif atteint.
Elle
s’orientait vers un programme plus vaste d’entraide sociale et de rén
1465
sociale et de rénovation économique et politique.
Elle
avait au départ formé le noyau du premier mouvement de résistance, au
1466
emier mouvement de résistance, au sens que ce mot
devait
prendre un peu plus tard dans les pays occupés par Hitler. Je suis co
1467
Les mêmes peuvent rire de l’armée suisse parce qu’
elle
n’eut pas l’occasion de se battre. Pourtant elle l’aurait eue, probab
1468
’elle n’eut pas l’occasion de se battre. Pourtant
elle
l’aurait eue, probablement, si les Allemands avaient senti la Suisse
1469
petit mouvement de résistance, pour préventif qu’
il
soit resté, eût certainement passé à la pratique si le moral du pays
1470
es yeux. En ce mois d’août de 1940, j’estimais qu’
elle
avait réussi dans la mesure précise où elle devenait, en tant que « r
1471
is qu’elle avait réussi dans la mesure précise où
elle
devenait, en tant que « résistance », inutile. ⁂ L’armée démobilisait
1472
de l’Amérique. Peut-être bien était-ce là-bas qu’
il
me serait donné, quoique « neutre », de faire la guerre à ma façon, d
1473
al pour favoriser mon voyage. Mais le fait est qu’
elles
jouèrent dans le même sens. Le 20 août, à 7 heures du matin, je prena
1474
visait que le Conseil fédéral, et c’est pourquoi
il
dut être un complot. Le général Guisan écrit dans son rapport que leu
1475
sait que le Conseil fédéral, et c’est pourquoi il
dut
être un complot. Le général Guisan écrit dans son rapport que leur se
1476
leur seule faute fut « d’agir en secret ». Mais s’
ils
avaient agi « ouvertement », le Conseil fédéral eût exigé sur l’heure
1477
heure que le Général mît fin à leurs activités qu’
il
connaissait ou pressentait sans aucun doute : certains d’entre eux dî
1478
d’entre eux dînaient régulièrement à sa table. 2.
Il
est probable que la ligue des officiers et la ligue civile naquirent
1479
rs et la ligue civile naquirent simultanément, et
il
est certain qu’elles « s’imbriquaient étroitement », on l’a vu par me
1480
ile naquirent simultanément, et il est certain qu’
elles
« s’imbriquaient étroitement », on l’a vu par mes notes. Mais Kimche
1481
onfondant la ligue civile de juin 1940 avec ce qu’
il
appelle tantôt « l’Action nationale de résistance », tantôt le « Mouv
1482
sistance national ». Si j’en juge par les noms qu’
il
donne des responsables de ce dernier Mouvement, il ne saurait s’agir
1483
l donne des responsables de ce dernier Mouvement,
il
ne saurait s’agir que d’une organisation civile qui apparut durant l’
1484
mon départ pour les États-Unis », d’autre part qu’
elle
se forma « contre la Ligue du Gothard ». « Le Gothardbund, c’était du
1485
Gothardbund, c’était du romantisme ! », ajoute-t-
il
. Romantique ou non, c’est la Ligue du Gothard qui agit seule en liais
1486
de fait que l’auteur pourra corriger sans peine.
Elle
empêche d’évaluer correctement la situation psychologique qui régnait
1487
ut prise la décision de créer le Réduit national.
Elle
empêche en particulier M. Kimche de se poser la question suivante : p
1488
ci les circonstances de l’action de résistance qu’
il
entreprit avec quelques amis groupés sous l’enseigne de la Ligue du G
1489
alors en situation délicate auprès de ses chefs —
il
était incorporé à l’état-major général — pour avoir écrit, au lendema
1490
uoique jugés impossibles par les experts, mais qu’
ils
se sont produits beaucoup plus vite et avec plus d’intensité que pers
1491
s, et par la carence des mouvements fédéralistes.
Il
en résulte alors, nécessairement, une renaissance des nationalismes ;
1492
volonté de ceux qui luttent pour cette union. Car
il
ne s’agit pas — je le dis une fois de plus — de deviner l’histoire qu
1493
. Les géographes ont démontré depuis longtemps qu’
elle
est le pôle de « l’hémisphère privilégié » qui comprend environ 95 %
1494
Europe anime les échanges intercontinentaux, dont
elle
fut le moteur unique depuis cinq siècles. Elle équilibre ces échanges
1495
nt elle fut le moteur unique depuis cinq siècles.
Elle
équilibre ces échanges, elle les dose, elle les adapte aux possibilit
1496
depuis cinq siècles. Elle équilibre ces échanges,
elle
les dose, elle les adapte aux possibilités d’assimilation du tiers-mo
1497
cles. Elle équilibre ces échanges, elle les dose,
elle
les adapte aux possibilités d’assimilation du tiers-monde, après en a
1498
technique, désormais universalisée, a compris qu’
elle
se doit d’inventer les moyens d’humaniser l’usage des ressources maté
1499
ue, désormais universalisée, a compris qu’elle se
doit
d’inventer les moyens d’humaniser l’usage des ressources matérielles
1500
a vie politique ne ressemble plus du tout à ce qu’
elle
était sous la IIIe République, par exemple. Ses passions sont transpo
1501
ation et de réalisation de soi lui sont ouvertes.
Il
est donc probable que la différence s’accentue entre une majorité pas
1502
formation interdisciplinaire se sont multipliés.
Ils
se distinguent par une insistance simultanée sur la culture générale
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fûmes les témoins depuis la dernière guerre, mais
ils
sont plus spectaculaires : les résultats des mutations récentes que j
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sont devenus généralement visibles et sensibles ;
ils
affectent l’ensemble de la population. En revanche, la généralisation
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J’écris ceci pour amuser les lecteurs de 1980, s’
ils
retrouvent par hasard mon petit essai ; et pour que certains, aujourd
1506
, aujourd’hui, voient un peu mieux vers quoi nous
devons
choisir d’aller. aq. Rougemont Denis de, « Dans vingt ans, une Eur
1507
ça le mot d’ordre d’engagement de l’écrivain dont
il
devait renier plus tard les interprétations qui en furent faites. Env
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le mot d’ordre d’engagement de l’écrivain dont il
devait
renier plus tard les interprétations qui en furent faites. Envoyé aux
1509
n Argentine pour y faire des conférences en 1940,
il
devint en 1942-1943 le principal rédacteur des émissions françaises d
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La Voix de l’Amérique. Revenu en Europe en 1946,
il
s’engagea dans le mouvement pour une fédération européenne et il orga
1511
ns le mouvement pour une fédération européenne et
il
organisa, en 1949, à Lausanne, le Congrès européen de la culture. L’a
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Congrès européen de la culture. L’année suivante,
il
fondait à Genève le Centre européen de la culture. Il a publié dix-hu
1513
ondait à Genève le Centre européen de la culture.
Il
a publié dix-huit ouvrages (essais et récits sous forme de journaux,
1514
z pas deux dont les plans soient superposables. S’
ils
se ressemblent, c’est par leur complication, ou par leur manière d’êt
1515
rd le long des routes frayées par les pionniers :
ils
ne sont guère enracinés, ils sont en marche. Ces maisons boisées, esp
1516
par les pionniers : ils ne sont guère enracinés,
ils
sont en marche. Ces maisons boisées, espacées, bordant une route, on
1517
le Town-Hall) soit ou non bâtie sur la place — et
il
se trouve qu’elle l’est en général — c’est bien là qu’elle tire son s
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it ou non bâtie sur la place — et il se trouve qu’
elle
l’est en général — c’est bien là qu’elle tire son sens originel. Les
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rouve qu’elle l’est en général — c’est bien là qu’
elle
tire son sens originel. Les partis qui décident de la composition des
1520
ing sur la place principale.) Lire et parler
Il
n’est pas de démocratie, au sens européen du terme, qui ne repose sur
1521
e toute place digne du nom : le café. C’est là qu’
elle
se parle d’abord, s’écrit bien souvent et se lit. C’est dans les café
1522
e la cité : celui de l’unanimité fondamentale qui
doit
transcender les partis, les ambitions et les doctrines en vogue. La m