1 1957, Articles divers (1957-1962). La voie et l’aventure (janvier 1957)
1 les qu’il a prises au plan religieux. Au nom même du désir d’union de l’humanité qui anime de part et d’autre les meilleur
2 finale des esprits ne sera jamais acquise au prix du sacrifice de nos diversités vivantes ; elle suppose bien plutôt la co
3 ive ne naîtra pas d’aspirations mal informées, ni du refus de bien voir l’état présent des choses, encore moins du recours
4 bien voir l’état présent des choses, encore moins du recours à quelque « Tradition » universelle, remontant à la nuit des
5 t de tous les efforts des réformateurs religieux, du Bouddha, de l’islam, mais non pas des Anglais… À l’Ouest, en revanche
6 rançaise marquent les étapes de cette dissolution du système social tripartite hérité de l’ancêtre aryen. Sur l’arrière-fo
7 e notre histoire, nonobstant la longue parenthèse du Moyen Âge. À bien des égards, en effet, le Moyen Âge a représenté la
8 s, c’est-à-dire le saint homme qui se « détache » du clan, de la coutume, de la magie, du dogme même, devenant hétérodoxe
9 « détache » du clan, de la coutume, de la magie, du dogme même, devenant hétérodoxe moins par la négation de l’orthodoxie
10 nsions dialectiques qui devaient provoquer la fin du nôtre. À partir de la Renaissance, l’angle de divergence s’agrandit r
11 rès diamétrale des deux mondes s’atteste aux yeux du voyageur le moins prévenu. Atténuée en Europe par toutes les subsista
12 utes les subsistances monumentales et religieuses du Moyen Âge, elle éclate aux États-Unis dont le passé vivant ne remonte
13 deux directions maîtresses de sa Quête inlassable du Réel. Pour passer du sens géographique et historique de nos deux term
14 esses de sa Quête inlassable du Réel. Pour passer du sens géographique et historique de nos deux termes à leur sens symbol
15 es Formes de lumière, contrastant avec l’Occident du monde terrestre et l’Extrême-Occident de la Matière pure. L’ange qui
16 mos symbolique ? À droite, l’Orient des Formes et du Soleil levant, au-delà duquel réside l’univers angélique ; à gauche,
17 angélique ; à gauche, l’Occident de la Matière et du soleil couchant, au bord le plus lointain duquel s’étend une « mer ch
18 âme, son « exil » dans les liens de la matière et du corps qui la retiennent captive dans leurs noires forteresses, son dé
19 esprits occidentaux nourris de la pensée mystique du Proche-Orient8 ont accolés à nos deux termes. Nous aurons le tableau
20 e « orientation » de la psyché occidentale. Mais, du prestige de cet Orient qui n’est pas celui de l’atlas, l’Orient réel,
21 s tenté, en Inde aussi, de calculer la quadrature du cercle ? » Le yogi répondit : « Nous cherchons au contraire à ramener
22 s deux voies de réalisations de soi, l’une allant du cercle au carré, et l’autre inversement, s’expriment les missions dif
23 e — celui de l’esprit. En sorte que la quadrature du cercle est la transformation de l’esprit en matière, ou encore la mat
24 atérialisation de l’esprit. Tandis que le passage du carré au cercle figure le retour de la matière à l’esprit. La premièr
25 er là où ils sont, par la seule foi dans l’action du pardon, de l’amour et de la grâce de Dieu. Le fils d’un roi de ce mon
26 litude la plus dénuée, et là découvre que la voie du salut est de refuser le monde, le corps et la souffrance, pour s’élev
27 r l’Hindou, il s’agit d’arriver à la connaissance du divin non par le « saut de la foi », qui ne procure pas une connaissa
28 lières, discipline ordonnant l’intellect aux lois du réel observé, et le corps à l’action efficace, afin de mieux pénétrer
29 un solipsisme exténuant ?… Maîtriser les secrets du cosmos, et peut-être demain de la vie, pense l’Oriental, n’est-ce pas
30 contradiction. » Dépourvu de sensibilité au sens du xviiie siècle, de souci moralisateur ou d’esprit révolutionnaire, ig
31 e son appartenance : il forme le bord, la lisière du monde du saint, comme les idoles le bord ou la lisière des Réalités d
32 artenance : il forme le bord, la lisière du monde du saint, comme les idoles le bord ou la lisière des Réalités divines. »
33 is que la voie de l’individu en Inde, comme celle du mystique médiéval, ne peut être que fuite en l’Absolu. Ainsi le moi d
34 ende, le reliant à l’esprit comme au prochain. Et du même coup paraît la société, en lieu et place du corps magique. Y
35 du même coup paraît la société, en lieu et place du corps magique. Yin yang Dans le symbole central de la pensée
36 l’élément masculin n’est pas absent de la région du yin tandis que l’élément féminin reste présent dans la région du yang
37 ue l’élément féminin reste présent dans la région du yang. Vérifiée par les sexologues, cette relation d’inter-présence de
38 ue pas d’écoles hindoues pour affirmer la réalité du Moi, l’action de la Grâce, voire un Dieu personnel. L’idée de la « vo
39 ien de commun, et l’usage qu’on en fait n’est pas du tout le même. La foule de Bénarès n’est pas la foule de Lourdes, même
40 ique : Une histoire d’Hérodote traite d’un grand du royaume qui, en échange de tout ce qu’il avait fait pour Xerxès et so
41 armées se trouveront les quatre frères et le père du coupé en deux. Ce qui manque ici, c’est l’idée grecque de mesure et,
42 s et ses opinions. Ce qu’il pense de la personne, du destin, ce qu’il proclame moral ou immoral, son attitude en face de l
43 on attitude en face de la mort — tout cela dépend du rang qu’il assigne au libre arbitre. Même sans être philosophe, il s’
44 mais dans ses faits et gestes. Ceci vaut surtout du cas qu’il fait de la vie même. Lorsqu’en 1194, le comte de Champagne,
45 passe, et ce qui en provient, ne peut naître que du libre arbitre, sous peine de devenir vain, et même vil, comme le sont
46 qui souffre tout, sauf d’être vérifié, un négatif du présent qu’ils refusent. 3. Celle des Sudras, ou indigènes assujetti
47 nts, si l’on songe que le nombre des dieux connus du panthéon hindou est estimé à 33 crores, c’est-à-dire 330 millions. 5
48 partiellement l’Indonésie, enfin le Japon. C’est du catholicisme qu’est issue la Réforme, pour essaimer ensuite en Amériq
49 age de l’islam, et n’a pu s’esquisser qu’à partir du xixe siècle ; la seconde s’opère sous nos yeux, provoquée par le cho
50 et le récit visionnaire, 2 vol. Téhéran, 1954, et du même auteur : Œuvres philosophiques et mystiques de Sohrawardi, tome
51 it de l’exil occidental de l’âme. Le premier date du xe siècle, le second du xiie siècle. 7. Relevons qu’Avicenne et le
52 e l’âme. Le premier date du xe siècle, le second du xiie siècle. 7. Relevons qu’Avicenne et le mystique soufi écrivaien
53 es, et bien sûr, à tous les occultistes européens du Moyen Âge jusqu’à nos jours. 9. Cf. Hans Hasso von Veltheim : Tagebü
54 le progrès ou l’invention, mais l’identification du chercheur avec un Objet que l’on situe au-delà de tout changement pos
55 13. Quitte à la rendre inoffensive en la gorgeant du sang impur d’un domestique hors-caste, qui se couche le premier dans
56 onde, Paris, janvier 1957, p. 9-22. b. Il s’agit du chapitre I de L’Aventure occidentale de l’homme , qui sera publié ch
2 1957, Articles divers (1957-1962). De l’unité de culture à l’union politique (mai 1957)
57 it avec une précision qui ne pardonne pas : celle du ressentiment, de l’envie, voire de la haine, plus souvent je le crain
58 ’Europe, fournit à nos intellectuels l’équivalent du procédé parlementaire connu sous le nom de filibuster. Je n’en citera
59 es limites. L’Europe ne serait-elle donc pas née du tout, parce qu’on ne s’accorde pas sur sa date de naissance ? Mais le
60 es historiens font remonter sa naissance au Pacte du Grütli, conclu par trois cantons en 1291. Cette alliance excluait à p
61 Ou n’aurait-elle pris forme et nom qu’à mi-chemin du travail entrepris, qui a soudain changé de sens et trouvé son vrai se
62 s les nations sont venues se constituer, à partir du xviiie siècle. On nous rappelle, non sans aigreur ni sans dédain, qu
63 la prose poétique des banquets et des éditoriaux du temps de guerre. Passons sur ces excès, voyons la thèse elle-même, et
64 nos États. Mais sur les autres plans, qui ne voit du premier coup que les réalités décisives ont cessé d’être nationales a
65 ue, dans les limites d’un même cordon douanier et du pouvoir d’une même police, on obtient finalement ce qu’on mérite, j’e
66 empirique et subtil de louvoyer entre le Charybde du particularisme étroit et le Scylla du centralisme niveleur, c’est le
67 le Charybde du particularisme étroit et le Scylla du centralisme niveleur, c’est le secret de la santé européenne. Ici, cu
68 érale de nos peuples. 14. Emmanuel Berl, « Hors du réel », La Table ronde, janvier 1957. 15. D’une lettre que m’écrit à
3 1957, Articles divers (1957-1962). Lettre en réponse à Emmanuel Berl (mai 1957)
69 r recommandé l’imposture ou la tyrannie, le refus du Droit, la guerre à l’Est, le chauvinisme européen, etc. J’approuve au
70 en effet son article intitulé « L’Europe au pied du mur » par ce post-scriptum : « Je sentais l’urgence de rappeler que l
4 1957, Articles divers (1957-1962). La fin du pessimisme (juin 1957)
71 La fin du pessimisme (juin 1957)f Le fameux sens de l’histoire, argument nu
72 984. Il y eut d’abord ce titre subversif à l’aube du siècle : Les Illusions du progrès, de Georges Sorel. Puis on se mit à
73 itre subversif à l’aube du siècle : Les Illusions du progrès, de Georges Sorel. Puis on se mit à citer Bergson, réclamant
74 -ce pas lui qui ouvrit, en 1919, le grand courant du pessimisme européen, par cette lettre fameuse qui nous rappelle d’abo
75 udel, optimiste de style baroque et fonctionnaire du premier rang ; mais sa phrase est plus subversive que tout ce qui pas
76 ki. Il est remarquable que ce siècle n’ait retenu du précédent que les génies antisociaux, les héros du refus individuel,
77 u précédent que les génies antisociaux, les héros du refus individuel, les révoltés contre le monde moderne, ceux qui reme
78 r les héritiers de leurs ennemis ! La bourgeoisie du xixe fut optimiste en dépit des souffrances affreuses des prolétaire
79 s en ont, la connaissance qu’elles ont pu prendre du Capital ou de la Science des rêves, et les jugements qu’elles avouera
80 eur, d’un renversement des tabous. La bourgeoisie du xixe frappait d’interdit deux sujets dans les conversations de la ta
81 x grasseyante : parlons d’argent, c’est le secret du drame social. Mais Freud un peu plus tard : parlons du sexe, c’est le
82 ame social. Mais Freud un peu plus tard : parlons du sexe, c’est le secret du drame individuel. Et voilà le choc de la rec
83 peu plus tard : parlons du sexe, c’est le secret du drame individuel. Et voilà le choc de la reconnaissance, l’illuminati
84 utes ses prévisions (sauf dans celle sur l’avenir du despotisme russe !) voilà qui n’empêche pas que ces deux grands génie
85 t modelé le xxe siècle et modifié notre approche du réel. Cependant les déterminismes qu’ils croyaient avoir « découverts
86 imensions de la planète fait apparaître la psyché du monde bourgeois (seule étudiée par Freud autour de 1900) comme un cas
87 hute posthume, les grandes explosions libertaires du « Printemps » polonais et de l’Octobre hongrois, enfin l’essor libéra
88 emblait nous conduire sans merci vers le triomphe du plan total, ordonnant toute la vie au service de l’État. Un certain d
89 de la classe ouvrière, les USA le dernier bastion du capitalisme exploiteur, promis aux crises cycliques et à la paupérisa
90 ’ignore que l’ouvrier américain est le plus riche du monde, l’ouvrier soviétique l’un des plus pauvres. Cet argument concr
91 ais qu’après quarante ans elle a rejoint le stade du capitalisme exploiteur, largement dépassé par les États-Unis. Marx di
92 t industriel : l’une marquée par « l’accumulation du capital » et « l’exploitation du travailleur », avait pour agent hist
93 « l’accumulation du capital » et « l’exploitation du travailleur », avait pour agent historique le capitalisme ; l’autre d
94 ailleur des fruits de son travail, serait l’œuvre du communisme. Or l’examen des chiffres et des faits conduit à la conclu
95 t à le savoir. 330 millions d’habitants à l’ouest du rideau de fer, plus 100 millions récupérés à l’Est, feraient un ensem
96 ar le nouvel essor d’une Europe reprenant la tête du progrès. Et c’est une autre prophétie, qui deviendra vraie, celle de
97 Cessons de chercher le sens de l’Histoire, alibi du refus de notre vocation ; apprenons à le décider. Troisième illusion
98 es disciplinées. C’en sera fait de la liberté, et du droit d’hésiter, d’errer… Les savants, apprentis sorciers, ont déchaî
99 ’est la Bombe. Elle va détruire les neuf dixièmes du genre humain. Un jour elle fera sauter la terre. J’entends cela tous
100 enir le téléphone ! Vous me parlez de l’esclavage du téléphone ? Mais a-t-on jamais vu qu’un appareil, prenant l’initiativ
101 écidez à répondre. Vous n’êtes donc pas l’esclave du téléphone, mais de votre seule curiosité. Le règne des machines, à vo
102 siècle, ni leurs penseurs, mais bien les ouvriers du xixe et les travailleurs à la chaîne dans les usines américaines. Ca
103 onde de plus inoffensif. En revanche, l’invention du couteau, pourtant si rarement dénoncée, a provoqué la destruction de
104 angereuse à manier, mais aussi de la monotonie et du rythme inhumain de travail qu’imposaient la machine et la chaîne. Le
105 ppement plus poussé de la technique, non l’action du parti communiste, ni même de la classe ouvrière, qui sera l’agent du
106 , ni même de la classe ouvrière, qui sera l’agent du dépassement concret des conflits institués par la technique elle-même
107 i et de temps de travail, le problème de l’emploi du temps, qui se pose à l’homme. Le problème de la liberté. Le problème
108 à l’homme. Le problème de la liberté. Le problème du sens de nos vies… Je propose à nos philosophes du déclin de la bourg
109 u sens de nos vies… Je propose à nos philosophes du déclin de la bourgeoisie, du déclin de l’Occident, du déclin de la cu
110 se à nos philosophes du déclin de la bourgeoisie, du déclin de l’Occident, du déclin de la culture, et de la fatalité des
111 éclin de la bourgeoisie, du déclin de l’Occident, du déclin de la culture, et de la fatalité des tyrannies prochaines, de
112 rd en imagination. Je propose une idée renouvelée du Progrès, au-delà de nos illusions mais aussi de nos scepticismes. Ce
113 ntraire le progrès véritable dans l’accroissement du risque humain… Mais il y a trop à dire, et d’autres vont parler. Je n
114 ir des portes. f. Rougemont Denis de, « La fin du pessimisme », Réalités, Paris, juin 1957, p. 27-29.
5 1957, Articles divers (1957-1962). La fin justifie les moyens (9 juin 1957)
115 llaient de flashes quand je me trouvais aux côtés du maréchal Juin, j’ai pu dire : Vous rendez-vous compte ? Me photograph
116 endez-vous compte ? Me photographier, moi, auprès du Maréchal ? Moi qui ne suis que lieutenant dans l’armée suisse ? » L’
117 Il ne peut écrire de livres qu’entre onze heures du soir et quatre heures du matin, mais ce régime doit lui convenir puis
118 res qu’entre onze heures du soir et quatre heures du matin, mais ce régime doit lui convenir puisqu’il annonce deux import
6 1957, Articles divers (1957-1962). Le rôle mondial des valeurs occidentales (octobre 1957)
119 acilement ce qui est beaucoup plus bas, au niveau du contact brutal entre leurs coutumes et nos armes, leur sagesse quotid
120 la densité maxima. Les Amériques et certains pays du Commonwealth forment une zone de diffusion occidentale parfois plus h
121 dense, parce que moins ancienne et moins complexe du point de vue des valeurs et des tensions. Le Sud-Est européen, de la
122 otoirement occidentalisé depuis la seconde moitié du xixe siècle. Le colonialisme a laissé des quartiers européens à Bomb
123 d’art. Principes de vie publique : la séparation du temporel et du spirituel ; la séparation des pouvoirs et la réglement
124 es de vie publique : la séparation du temporel et du spirituel ; la séparation des pouvoirs et la réglementation de leurs
125 galité devant la loi, la liberté de l’individu ou du groupe garantie par la justice (habeas corpus et droit d’association)
126 le ; le respect de la vérité objective, condition du progrès de la recherche autant que de la liberté, l’interdépendance é
127 la reconnaissance de la réalité de la matière et du corps ; la croyance à la raison et à la rationalité du cosmos ; la fo
128 rps ; la croyance à la raison et à la rationalité du cosmos ; la foi au transcendant, l’amour de Dieu et du prochain. On v
129 smos ; la foi au transcendant, l’amour de Dieu et du prochain. On voit sans peine que nos produits sont les plus faciles à
130 s sont difficiles à « vendre » (au sens américain du verbe) et sont le plus souvent totalement ignorées. Mais ce qu’il m’i
131 urope ait seule développé la technique dès la fin du xviiie siècle ? C’est qu’il se produisit à ce moment, en Europe, une
132 ence, s’établissant enfin sur les bases autonomes du calcul et de l’expérimentation ; de la philanthropie illuministe, hér
133 ocèdent. User des uns ou invoquer les autres hors du contexte spirituel de l’Occident, entraîne des conséquences incalcula
134 la tâche la plus importante de la seconde moitié du xxe siècle. Et c’est sans doute la première fois dans toute l’histoi
135 t, Bruxelles, octobre 1957, p. 39-42. i. Précédé du chapeau suivant : « Le grand schisme mondial fait parfois oublier le
7 1958, Articles divers (1957-1962). Demain l’Europe sans frontières ?[préface] (1958)
136 332 millions d’habitants qu’elle compte à l’ouest du rideau de fer — en attendant les 98 millions retenus à l’est dans l’o
137 aient supprimées en Europe ? Telle était la règle du jeu. Nous ne demandions pas comment faire pour obtenir l’union économ
138 ncore qu’aux résultats prévisibles — soit garante du sérieux avec lequel ils ont essayé néanmoins de répondre à notre ques
139 mondiale. 18. Voir en particulier : Promesses du Marché commun par Raymond Racine, directeur des séminaires du CEC ;
140 mun par Raymond Racine, directeur des séminaires du CEC ; Marché commun et Euratom , et L’Europe s’inscrit dans les fai
141 L’Europe s’inscrit dans les faits , publications du CEC. j. Rougemont Denis de, « [Préface] Demain l’Europe sans fronti
8 1958, Articles divers (1957-1962). Europe et culture (1958)
142 , hélas ! courantes, mais qu’aucune science digne du nom ne cautionne plus19. Le seul problème sérieux qui doit nous occup
143 e nous indique clairement la conjoncture mondiale du xxe siècle, la culture des Européens peut-elle contribuer à cette un
144 décisif de cette Europe dans les transformations du monde au xxe siècle, sa vocation, et son avenir si elle s’unit. 3° C
145 lture se réunit à Lausanne, et définit les tâches du Centre européen de la culture, du Collège d’Europe (Bruges), d’une as
146 init les tâches du Centre européen de la culture, du Collège d’Europe (Bruges), d’une association des universitaires, et d
147 e.) Le Conseil de l’Europe, issu d’une résolution du congrès de La Haye, est constitué neuf mois plus tard, et comporte dè
148 blics et le mécénat privé pour répondre aux défis du temps ? Est-il coordonné à la mesure des besoins ? Aurait-il réussi à
149 rganisations que je viens de citer (à l’exception du CERN en construction) équivaudrait à peine aux possibilités d’une des
150 te à ce qu’elle est sur la carte : 4 % des terres du globe (et très pauvres en matières premières) ; 2° que la culture, en
151 sa vitalité si les États et les mécènes virtuels du continent s’obstinent à lui refuser même le centième de l’aide que lu
152 eu théoriques, qui précèdent. La mission générale du CEC est de contribuer à l’union de l’Europe en ralliant les forces vi
153 ’études et d’initiatives. Fondé sous les auspices du Mouvement européen, le CEC est issu des délibérations du congrès de L
154 ement européen, le CEC est issu des délibérations du congrès de La Haye (mai 1948). Dès février 1949, un Bureau d’études s
155 ausanne en décembre 1949, et formula le programme du CEC L’institution fut inaugurée à Genève le 7 octobre 1950. Elle n’es
156 vente de ses publications. Le choix des objectifs du CEC est déterminé par deux critères : l’urgence d’un problème culture
157 en de littérature, et l’initiative de la création du CERN, bornons-nous à décrire les trois principaux champs d’activité e
158 é entre lesquels se répartissent les secrétariats du CEC : éducation, information, recherches. Faire l’Europe, c’est d’abo
159 publications, films et conférences. Le Bulletin du CEC édite chaque année six à huit numéros spéciaux consacrés à des s
160 tifiques et économiques rédigées par les services du CEC. Quant au département des Recherches, il a déjà organisé deux imp
161 n culturel, les difficultés immenses qui naissent du contact inévitable entre notre civilisation libérale et technique d’u
162 civilisations diverses de l’Asie, de l’Afrique et du Moyen-Orient d’autre part, appellent des solutions qu’aucun de nos Ét
163 entation commune de ces forces vis-à-vis du reste du monde nous appellent et nous poussent dans le même sens. Rien de plus
164 udget total des fondations privées aux USA : 10 % du revenu national. k. Rougemont Denis de, « Europe et culture », Quel
9 1958, Articles divers (1957-1962). Pourquoi la guerre ? Un échange de lettres prophétique entre Einstein et Freud (avril 1958)
165 es deux génies de premier ordre, à la veille même du déchaînement dont ils avaient choisi d’examiner les causes, afin de p
166 ns. Non, la force, dit-il, n’est pas le contraire du droit. Car le droit n’est en somme qu’une autre forme de la violence
167 n réduisant l’opposition classique de la Force et du Droit à celle de deux violences, il définit les conditions de toute p
168 ler réoccupait la Rhénanie. À Paris, le président du Conseil criait au monde : « Nous opposerons au droit de la Force, la
169 « Nous opposerons au droit de la Force, la force du Droit ! » Traduite dans les termes de Freud, cette déclaration signif
170 s : « La guerre de demain, écrit Freud, par suite du perfectionnement des engins de destruction, équivaudrait à l’extermin
171 e s’est-il point passé comme si le calcul profond du daimôn qui habitait en lui, déjouant les conclusions sincères de sa r
172 éal ou peur collective — qui provoquerait l’union du genre humain ? Devrons-nous aller dans la Lune pour en éprouver le sa
10 1959, Articles divers (1957-1962).  Une expérience de fédéralisme : la Suisse (1959)
173 rience de fédéralisme : la Suisse (1959)n 1. Du pacte des communes à l’alliance des États (xiiie au xixe siècle)
174 es. Les manuels d’histoire suisse donnent la date du 1er août 1291 comme celle de la naissance de la Confédération. Il y a
175 wyz et d’Unterwald, maîtresses des débouchés nord du Gothard. Ce col était le seul à relier au travers d’une seule chaîne
176 ne seule chaîne des Alpes les moitiés nord et sud du Saint-Empire. D’où son importance stratégique, commerciale et même cu
177 pays. En effet, ce fut bien pour assurer la garde du col au nom de l’Empire, contre les entreprises des féodaux voisins, q
178 1231, c’est-à-dire peu d’années après l’ouverture du col. Au nombre des seigneurs entreprenants qu’il fallait empêcher de
179 bertés locales et contre leur mission de gardiens du Col. Et c’est pourquoi, au début du mois d’août 1291, — « considérant
180 n de gardiens du Col. Et c’est pourquoi, au début du mois d’août 1291, — « considérant la malice des temps, et afin de se
181 u étrangères incessantes, se poursuivit de la fin du xiiie siècle à la fin du xviiie siècle. Un enchevêtrement d’allianc
182 se poursuivit de la fin du xiiie siècle à la fin du xviiie siècle. Un enchevêtrement d’alliances particulières et un sen
183 comme les « Confédérés » (Eidgenossen, compagnons du serment). Le Directoire français, en 1798, tenta d’imposer une Consti
184 quelque peu leur politique étrangère. La formule du Pacte de 1291, bien qu’élargie, subsistait essentiellement. Quant aux
185 de susciter les passions nationales, était celui du renforcement de leur unité et de la création d’un État. Il est remarq
186 pas les seuls à poser ce problème, dans l’Europe du xixe siècle, ils furent les seuls à le résoudre d’une manière effica
187 re d’une manière efficace et durable. 2. Crise du Pacte fédéral (1815-1848) La crise ouverte par le Pacte de 1815 de
188 ncore W. Martin, et il signale que le seul canton du Tessin « ne prélevait pas moins de treize taxes différentes sur la ro
189 as moins de treize taxes différentes sur la route du Gothard, avec obligation de décharger chaque fois la marchandise pour
190 onctionnaires, mais elle n’en dépendait pas moins du bon plaisir des cantons, dans ce domaine.) Cependant, la population a
191 ’expatriaient ou s’engageaient dans les régiments du « service étranger », commandés par des fils de familles nobles suiss
192 cantons « régénérés », le principe d’une révision du Pacte fédéral. Une commission de 15 membres fut chargée de rédiger un
193 ques mois comportait un commentaire dû à la plume du délégué de Genève, Pellegrino Rossi24. Il vaut la peine d’en citer qu
194 ndiale. Rossi remarquait d’abord que la faiblesse du lien fédéral institué en Suisse par le Pacte de 1815 créait « une ill
195 tour les hommes de la Confédération et les hommes du canton… Il n’est, ce me semble, aucun motif de conserver un pareil ét
196 ition avait joué sur la « réalité prépondérante » du sentiment cantonal, souvent qualifié de « national » à l’époque. C’es
197 Parlement de Genève : « Que veulent les partisans du nouveau Pacte ?… Une république fédérative au lieu d’une réunion d’Ét
198 ntons. Cependant la « chimère » restait à l’ordre du jour, même au sein de la Diète qui l’avait rejetée ; Les adversaires
199 de la Diète qui l’avait rejetée ; Les adversaires du Projet d’union l’avaient dénoncé comme introduisant « un brandon de d
200 rè­rent à le combattre et à refuser les évidences du bien commun, au nom des préjugés de la souveraineté. Les cantons cath
201 urtant, mais d’abord antilibéral), de Metternich, du tsar, du roi de Sardaigne et du roi de Prusse. La France lui fournit
202 ais d’abord antilibéral), de Metternich, du tsar, du roi de Sardaigne et du roi de Prusse. La France lui fournit en secret
203 ), de Metternich, du tsar, du roi de Sardaigne et du roi de Prusse. La France lui fournit en secret des canons et des fusi
204 d’une Suisse unie et libérale donnerait le signal du renversement de l’ordre imposé à l’Europe par la Sainte-Alliance. La
205 e par la Sainte-Alliance. La courte guerre civile du Sonderbund (équivalent presque littéral de la guerre de Sécession amé
206 des révolutions de 1848 fut un facteur important du succès des radicaux suisses : elle retarda ou même paralysa l’action
207 re des protestants sur les catholiques, la guerre du Sonderbund venait de marquer le triomphe des fédéralistes sur les nat
208 au long de l’année 1848, les Suisses profitèrent du répit que leur laissaient, malgré elles, les Puissances, pour accompl
209 17 articles. Nombre de ces articles s’inspiraient du projet de 1832, mais les plus importants furent le fruit original des
210 portants furent le fruit original des discussions du groupe. Dès le 15 mai, le projet ayant été transmis préalablement aux
211 ). Le 16 novembre, elles procédèrent à l’élection du premier Conseil fédéral, inaugurant un régime qui ne devait plus être
212 t. 3, leur constitution, la liberté et les droits du peuple (etc.). Si l’on ajoute que la Constitution assure les libertés
213 iginalité. La rapidité qui présida à la rédaction du projet, à son examen par la Diète, à sa ratification par les cantons
214 e célérité d’exécution, mais aussi à la stabilité du futur État. Plus révolutionnaire en fait que les chartes revendiquées
215 euple comme un compromis, non point comme le gage du triomphe des radicaux. À vrai dire, elle portait toutes les marques d
216 rtait toutes les marques de cette modération, née du juste équilibre des contraires, qui dénote la présence d’un sentiment
217 semer le chaos et la ruine dans la vie économique du pays. On prédisait la faillite des industries « protégées », l’envahi
218 e sont pas homologues de ceux de la petite Suisse du siècle dernier. A-t-on pris garde qu’il fallait trois jours à un dépu
219 ’Histoire. Déjà, le pacte de 1291, dernier reflet du mouvement des communes italiennes, françaises et flamandes, était app
220 vaincue partout ailleurs »26. De même, la guerre du Sonderbund a produit, en créant la Suisse, le seul résultat durable q
221 dernière remarque s’impose. Elle concerne le sens du mot fédéralisme, qui est le mot-clé de l’histoire suisse. Les radicau
222 n Suisse, sont les adversaires de toute extension du pouvoir central, tandis que ceux qui s’intitulent « fédéralistes » au
223 ment verbale s’explique par la nature dialectique du fédéralisme, doctrine pratique de l’union dans la diversité. Le fédér
224 uisse considérée dans son unité datent des débuts du xxe siècle : H. Barth, Bibliographie der Schweizergeschichte, 3 vol
225 48 (ouvrage de base, contenant de larges extraits du Protocole de la Commission constituante et des journaux privés des me
226 r catholique à l’Académie de Calvin et l’ornement du Conseil représentatif genevois, avant de devenir ambassadeur et pair
227 r et pair de France, et de mourir assassiné, chef du gouvernement pontifical de Pie IX, en 1848 ». (L’année même où ses id
228 de fédéralisme : la Suisse », L’Europe du XIXe et du XXe siècle, vol. 1, Milan, Carlo Marzorati, 1959, p. 465-476.
11 1959, Articles divers (1957-1962). La nature profonde de l’Europe (juin 1959)
229 équilibre des contraires, d’une certaine formule du progrès, qui est l’accroissement du risque humain ; secret de notre o
230 taine formule du progrès, qui est l’accroissement du risque humain ; secret de notre ordre et aussi de notre désordre ; ve
231 nité, la vision planétaire d’un genre humain issu du Dieu unique de la Genèse et destiné au grand rassemblement « des nati
232 outes choses selon Protagoras, le « cosmopolite » du Portique, le « citoyen du monde » de Socrate. Et Plutarque loue Alexa
233 ras, le « cosmopolite » du Portique, le « citoyen du monde » de Socrate. Et Plutarque loue Alexandre d’avoir voulu « réuni
234 unir comme en un seul grand vase tous les peuples du monde entier » et d’avoir « ordonné que tous considèrent la Terre com
235 e les membres variés d’un même corps, participant du même Esprit — et des notions conjointes d’Église et de personne dériv
236 xemple. Chose étrange, c’est avec la fin de l’ère du colonialisme européen que coïncide cette contagion occidentale accélé
237 ue des grandes découvertes, en balisant les voies du commerce maritime. C’est elle qui a su trouver les substituts de l’an
238 qui représente aujourd’hui non seulement le Musée du Monde, mais son premier laboratoire. « Tout est venu à l’Europe et to
239 hives ; ce Musée est une invention, cette Mémoire du Monde est un acte, et cette immense Récapitulation du genre humain es
240 onde est un acte, et cette immense Récapitulation du genre humain est une création de l’histoire. Qui d’autre que l’Europe
241 e tout » de ce qui donne sa figure à la modernité du monde. L’idée même de modernité, cet instantané du Progrès… L’idée mê
242 u monde. L’idée même de modernité, cet instantané du Progrès… L’idée même de Laboratoire, ce lieu privilégié où l’on viole
243 mplices à jamais, comme la systole et la diastole du cœur humain. Europe, donc, cœur du monde, et jamais plus qu’au siècle
244 et la diastole du cœur humain. Europe, donc, cœur du monde, et jamais plus qu’au siècle où, par nos œuvres et nos techniqu
245 le fonction ou s’y trouve à ce point prédestinée. Du seul point de vue de l’économie des échanges, elle n’est rien si elle
246 pouvoir vendre au monde les produits de son école du soir industrielle. L’URSS vit en autarcie, grâce à des conditions qui
247 ture. » Aucun de nos pays ne peut donc bénéficier du crédit qui s’attache à l’Europe tout entière, s’il se présente en tan
248 s’explique. Car les valeurs européennes, aux yeux du monde, ne sont universelles que dans la mesure où elles résultent de
249 ter valablement l’ensemble Europe devant le reste du monde, aucun non plus ne peut prétendre à subsister par ses propres m
250 Le Message aux Européens , que je lus en clôture du congrès de La Haye, le 12 mai 1948, commence ainsi : L’Europe est me
251 comme l’union et l’autonomie — qui est le secret du fédéralisme. Mais tout ce qui a fait l’Europe illustre cette méthode.
252 gue, la défense militaire, la religion, la nature du sous-sol exploité et l’idéologie qui règne à sa surface, l’histoire t
253 organigrammes de lignes aériennes. L’Europe unie du xxe siècle, fonction mondiale et foyer de rayonnement planétaire, ne
254 le Marché commun. Ceux qui reprochent aux auteurs du traité de Rome d’avoir voulu « limiter l’Europe à six pays » sont-ils
255 teurs actuels la voulaient grande ou la voulaient du tout. Chacun voit, au contraire, que cette Petite Europe (qui égale s
256 échec des Six serait adopter en fait la politique du Kremlin, très alertée sur le « danger » de l’Europe unie, et cela dep
257 seconde. C’est ensuite méconnaître la nature même du processus d’association des Six, étonnamment conforme à la définition
258 au monde entier ses mesures et ses lois, son idée du cosmos et son idée de l’homme. Ou plutôt ses idées sur l’homme, son d
259 dans notre siècle, en passant par les philosophes du romantisme qui n’avaient pas attendu Valéry, une habitude de pensée p
260 viens de citer se référaient tous au seul destin du monde gréco-romain, le mieux connu. Il se trouve que l’exemple est ma
261 . Mais les civilisations anciennes de l’Égypte et du Proche-Orient, prolongées par la grecque et la romaine, dont l’essent
262 l’Europe ne serait guère, n’ont pas été retirées du jeu mondial, mais seulement détrônées régulièrement, puis métamorphos
263 thées pour qui le doute est une forme essentielle du culte que l’homme sincère rend à la Vérité. Je me promets un jour de
264 équilibre des contraires, d’une certaine formule du progrès, qui est l’accroissement du risque humain ; et ce ne sont pas
265 taine formule du progrès, qui est l’accroissement du risque humain ; et ce ne sont pas seulement les secrets de notre ordr
12 1960, Articles divers (1957-1962). Éclipse ou disparition d’une civilisation ? (1960)
266 vilisateurs de l’Europe, au lieu de s’émerveiller du fait que le génie européen rayonne sur le monde entier, ils préfèrent
267 ire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux. L’écho de cette p
268 t si sur les rivages de la Seine, de la Tamise ou du Zuyderzee… qui sait si un voyageur comme moi ne s’assiéra pas un jour
269 ne période d’apogée, — la nôtre aussi. Aux débuts du xxe siècle, Spengler va plus loin ; il est convaincu que toute cultu
270 dmirable pour embrasser l’ensemble des conditions du monde humain, croit pouvoir établir empiriquement, par l’examen compa
271 nde, et que d’autre part, les plus grands esprits du siècle précédent n’ont cessé d’annoncer les catastrophes qui ont fond
272 partie de sa propre jeunesse, son rôle de porteur du « flambeau de la civilisation ». La Seconde Guerre mondiale, née de c
273 … N’est-ce pas assez pour justifier les prophètes du désastre européen ? Que faudrait-il de plus, pour qu’on ait le droit
274 une peut être perdue sans que l’autre soit ruinée du même coup. Chacun sait que Gengis Khan eut l’hégémonie sans la civili
275 vilisation sans hégémonie. Secundo, il n’est pas du tout certain que les précédents historiques soient applicables dans n
276 n des exemples antiques ? Voilà qui n’est pas sûr du tout. Il se pourrait, en effet, que notre civilisation présente cert
277 et de l’astronomie élaborés par les civilisations du Proche-Orient. Mais il a été fortement développé par la théodicée chr
278 , on ne peut pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’il a créé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous ne
279 ssairement s’aiguiser en Europe plus qu’ailleurs, du fait même de la coexistence de nos diverses origines, en perpétuelle
280 vérité dite objective, de la simple véracité, et du recours aux preuves par neuf. Il faut songer cependant que l’Asie et
281 re de vous secourir matériellement, c’est à cause du travail acharné que nous nous sommes imposé pendant des siècles, conf
282 oire la solidarité, puisqu’elle refuse la réalité du prochain, la dignité de la personne distincte. Et certes, cela ne sig
283 armé ; pour le Romain, c’est de jouir des droits du citoyen à part entière, et tous ces éléments spirituels, juridiques,
284 onnaires de l’URSS, ni dans les masses de l’Inde, du Sud-Est asiatique ou de la Chine. Ou bien, s’il prend soudain un sens
285 expliquent la plupart de nos créations. En effet, du sens de la vérité objective dérivent nos sciences, et par suite, nos
286 vent nos sciences, et par suite, nos techniques ; du sens de la responsabilité personnelle, lié au sens de la liberté déri
287 é littéralement incomparable. Certes, les peuples du Proche-Orient avaient créé l’astronomie, les Hindous avaient inventé
288 ro bien avant nous. Mais l’Europe, ce laboratoire du monde, a poussé les sciences et les techniques qui en dérivent jusqu’
289 non moins d’audace, l’exploration de l’espace et du temps. L’espace d’abord. Ce sont les Européens qui ont découvert la T
290 ain est une création des Européens. L’exploration du temps, ensuite. Ce sont les Européens qui ont inventé l’histoire et l
291 istoire, constitution d’archives, examen critique du passé, leçons qu’on en tire, renouvellement des arts, sujets de roman
292 s politiques et finalement : superstition moderne du « sens inévitable de l’histoire », qui influence parfois si profondém
293 hnographie à partir de la découverte géographique du monde. Et l’on sait le rôle décisif que ces sciences ont joué dans l’
294 , pour emmagasiner tous les trésors ainsi ramenés du fond des temps et de l’espace, les Européens ont inventé le Musée. Et
295 e, prépare elle aussi les voies de l’unité future du genre humain. Voilà ce que l’Europe a créé, voilà ce qu’elle offre dé
296 Il exige nos machines, mais refuse notre éthique du travail. Il veut que nous l’aidions à mieux vivre, mais dédaigne notr
297 mieux vivre, mais dédaigne notre idéal de l’amour du prochain. Nous sommes au point de l’évolution de l’humanité où les Eu
298 l’abri de ce genre d’illusion. Nous les Européens du xxe siècle, nous savons bien que nous ne dominons plus politiquement
299 lexe et multiforme pour pouvoir sinon satisfaire, du moins séduire tous les peuples du monde. Nous avons aussi vu qu’elle
300 non satisfaire, du moins séduire tous les peuples du monde. Nous avons aussi vu qu’elle exporte ses produits sans les vale
301 res. Elle s’est laïcisée, profanisée, et détachée du christianisme qui a contribué de tant de manières à la former. Par là
302 homme y était synonyme d’habitant de la vallée et du delta du Nil. Il y avait un mot différent pour désigner les habitants
303 tait synonyme d’habitant de la vallée et du delta du Nil. Il y avait un mot différent pour désigner les habitants des terr
304 ire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux ». Depuis lors, on
305 . Mais les civilisations anciennes de l’Égypte et du Proche-Orient, prolongées par la grecque et la romaine, dont l’essent
306 aissance nos Découvreurs de l’espace terrestre et du temps de l’humanité. Ceci m’amène à ma troisième raison d’avoir confi
307 la dernière période glaciaire, ou le dessèchement du Sahara, affectant la région entière où avait fleuri une civilisation
308 penserez-vous. Mais qu’apporte-t-elle de nouveau du point de vue de la civilisation ? Est-elle une autre civilisation ? L
309 Devant le recul, ou la métamorphose prévisible du péril rouge, déguisé par les Russes en coexistence pacifique — nom qu
310 nos propres pouvoirs et notre vocation. Aux yeux du monde, il n’y a qu’un seul péril sérieux : le péril blanc ! La civili
311 nalisme et la superstition matérialiste. Il en va du nationalisme comme de notre rhume de cerveau, qui devient mortel, dit
312 end chez nous les formes les plus diverses. Il va du culte du confort chez l’ouvrier et le bourgeois, et de l’utilitarisme
313 nous les formes les plus diverses. Il va du culte du confort chez l’ouvrier et le bourgeois, et de l’utilitarisme à courte
314 ait pour effet de détendre les ressorts créateurs du progrès dont il est trop souvent l’aboutissement. Or chacun sait que
315 l’aboutissement. Or chacun sait que les ressorts du progrès sont l’inquiétude philosophique, la passion de défier le dest
316 er, et de nous livrer sans défense aux fanatiques du statu quo, par où j’entends les bureaucrates et la police des États.
317 s de l’Europe sont plus dangereuses pour le reste du genre humain que pour l’Europe elle-même, où elles sont nées. Car l’E
318 ontre la tentation totalitaire, qui est l’essence du nationalisme. Il n’en va pas de même sur d’autres continents. Quant à
319 et. Je prendrai le premier dans la correspondance du grand historien suisse Jacob Burckhardt, à la fin du siècle passé ; e
320 grand historien suisse Jacob Burckhardt, à la fin du siècle passé ; et le second dans un quotidien du parti communiste de
321 du siècle passé ; et le second dans un quotidien du parti communiste de Pékin, il y a deux ans. Burckhardt décrit le sort
322 igion de la production forcée, forme matérialiste du nationalisme, n’a jamais atteint en Europe de tels excès. Certes elle
323 in de résister à son tour à nos poisons, au virus du nationalisme et au virus du matérialisme, cette forme d’asthénie du s
324 nos poisons, au virus du nationalisme et au virus du matérialisme, cette forme d’asthénie du spirituel. C’est dire que no
325 au virus du matérialisme, cette forme d’asthénie du spirituel. C’est dire que notre vocation est désormais de présenter
13 1960, Articles divers (1957-1962). Un péché mortel : la désunion des chrétiens (mars 1960)
326 de les relativiser… Au surplus, le sort temporel du christianisme n’inspire pas d’inquiétudes excessives : c’est de loin
327 ligion la mieux organisée, et c’est la plus forte du monde par le nombre de ceux qui s’y rattachent, qui est de l’ordre d’
328 t les luthériens des pays baltes et les Arméniens du Caucase). Le PC russe n’a jamais dépassé 8 millions de membres inscri
329 des pays baltes et les Arméniens du Caucase). Le PC russe n’a jamais dépassé 8 millions de membres inscrits. Mais laisson
330 motifs spirituels commandés par la substance même du christianisme et non point par des hypothèses sur son « succès » dans
331 évisible, que la désunion persistante et déclarée du monde chrétien est un scandale, j’entends bien : un scandale spiritue
332 communauté fondée sur l’espérance, non sur la loi du sang, essentiellement ouverte et non pas exclusive. Mais les nécessit
333 parole ne peut être écartée. Elle reste au centre du mystère de l’unité. Voies vers l’union Parlant ici sans nulle au
334 les disciplinaires, diplomatie secondant l’action du Saint-Esprit, finalement mise aux voix de la vérité. La voie vers l’u
335 que les protestants ne croient pas à la divinité du Christ, ont supprimé les sacrements et n’ont guère qu’un seul dogme,
336 lte de la Vierge, sa morale au décompte des jours du Purgatoire. En revanche, combien savent-ils, de part et d’autre, que,
337 cane et la luthérienne, et celles qui sont issues du calvinisme, tous les dogmes fondamentaux sur Dieu, le Christ, le Sain
338 s formules de la consécration, de la communion et du baptême, celles du mariage et de la confirmation sont toujours identi
339 nsécration, de la communion et du baptême, celles du mariage et de la confirmation sont toujours identiques par l’esprit,
340 liques dans le catholicisme romain, la découverte du problème social (un peu forcée) dans l’orthodoxie gréco-russe, et l’u
341 iée : voilà qui m’apparaît l’objectif raisonnable du grand élan œcuménique au xxe siècle. Au concret, cela signifierait c
342 ème qui prime aujourd’hui celui-là. Qui est celui du sens de nos vies. q. Rougemont Denis de, « Un péché mortel : la d
343 tés connaissent bien par ses articles sur “La fin du pessimisme” en juin 1957 et “La nature profonde de l’Europe” en juin
344 des éléments les plus conscients de l’importance du rapprochement entre les différentes communautés chrétiennes. »
14 1960, Articles divers (1957-1962). Le nationalisme et l’Europe (mars 1960)
345 (mars 1960)p Le nationalisme, dans les peuples du tiers-monde, n’est guère qu’une revendication d’indépendance, proclam
346 d’une autre ère. Pour comprendre la vraie nature du phénomène c’est dans le mouvement de sa genèse intellectuelle qu’il f
347 stoire. Il est né d’une dialectique idéale et non du jeu des forces économiques, qu’il a faussé en y intervenant, et qui t
348 etracer la chronique des triomphes et des méfaits du nationalisme en Europe, — ce serait refaire l’histoire du plus long d
349 nalisme en Europe, — ce serait refaire l’histoire du plus long de nos siècles, le xixe , — marquons ici l’évolution du seu
350 nos siècles, le xixe , — marquons ici l’évolution du seul concept, au moyen de repères bien précis : une série de textes,
351 ets d’époque, dûment signés, témoins irréfutables du style de pensée des Européens de 1789 à 191427. I. Des jacobins à H
352 191427. I. Des jacobins à Hegel Au principe du nationalisme, nous trouvons le raisonnement suivant, toujours lié à u
353 ut, puisque l’État incarne la mission universelle du peuple ou Bien suprême ; Dieu lui-même, s’il existe, ne peut être que
354 tes de la Révolution française. Dans son discours du 15 mai 1790, Robespierre a cette formule parfaite : Il est de l’inté
355 a France que doit partir la liberté et le bonheur du monde. Il faut donc protéger par les armes cette France qui annonce
356 al arrête notre marche physique sur un seul point du globe. Les droits de l’homme s’étendent sur la totalité des hommes. U
357 ssairement la souveraineté solidaire, indivisible du genre humain ; car nous voulons la liberté plénière, intacte, irrésis
358 s rapports : nous ne sommes pas les représentants du genre humain. Je veux donc que le législateur de la France oublie un
359 e comme étape « dialectique » vers l’unité finale du genre humain. Le raisonnement de Fichte annonce souvent de la manière
360 manière la plus précise les délires totalitaires du xxe siècle. Il peut être résumé par quelques citations tirées de l’o
361 ercial fermé 28, qui parut en 1800. Les peuples du monde antique étaient séparés les uns des autres d’une manière très r
362 nière. … Plus tard seulement, avec l’introduction du droit romain et l’application des concepts romains concernant les Imp
363 n, comme on a coutume de décrire dans la doctrine du droit la formation d’un État par le rassemblement et la réunion d’ind
364 rce qui s’y sont ajoutées dans les autres parties du monde, forme encore un tout, alors assurément le commerce de toutes l
365 rcie absolue qui naît sous nos yeux. C’est la fin du processus exactement inverse de celui du Marché commun [dont] Fichte
366 t la fin du processus exactement inverse de celui du Marché commun [dont] Fichte se fait l’avocat : Toute la monnaie mond
367 une étrange précision les pratiques totalitaires du xxe siècle : Le savant seul, et l’artiste supérieur ont besoin de v
368 mmes peut-être pas loin dans cette seconde moitié du xxe siècle ; mais le « processus dialectique » aura coûté plus cher
369 ur lequel je me bats ». Or cet idéal, étant celui du Parti qui a saisi le pouvoir par la violence, provoque des résistance
370 tention à régner au nom de tous contre une partie du peuple. Mais l’État-nation exige davantage que l’obéissance passive d
371 t à la guerre, mais trouve en elle les conditions du renforcement continuel de son pouvoir. Tensions externes : Hegel, con
372 rançais, l’Allemand, au nom de la Civilisation ou du Droit, etc. Jusqu’au jour où seront proclamés certains « concepts de
373 érés a-t-il été brutalement démenti au terme même du processus de formation des grandes et petites nations européennes, qu
374 us que nation égale liberté. Ils s’inspirent tous du messianisme de la Révolution française : libérer sa propre nation du
375 a Révolution française : libérer sa propre nation du joug des tyrans intérieurs ou étrangers, c’est libérer l’Europe et le
376 de Saint-Simon aboutit entre autres au percement du canal de Suez dont aussitôt la politique des États, après s’y être op
377 l. Et c’est pourquoi les grands esprits de la fin du xixe siècle, enregistrant cette dissolution de l’idéal européen, de
378 ion historique : Tous les peuples de l’Europe et du monde devront traverser cette agonie, pour que la vie surgisse de la
379 et au poète-soldat Alexandre Petőfi, aide de camp du général polonais Bem, et qui fut tué dans un combat. Kossuth, à Bruxe
380 st : Lorsque la Liberté siègera dans la capitale du monde, elle jugera les nations. Et elle dira à la première : Voilà qu
381 donc en servitude, là où il y aura le sifflement du knout et le cliquetis des ukases. … Les Puissances ont rejeté votre p
382 ntre elle, il tombera et ne se relèvera point. Et du grand édifice politique européen, il ne restera pas pierre sur pierre
383 le rôle de nation-guide, sous la haute direction du pape, Rome devenant la métropole d’un monde au sein duquel toutes les
384 ns un rapport d’union dialectique : La dictature du pape, chef civil de l’Italie et ordonnateur de l’Europe, sera le fond
385 Della Nazionalità italiana il donnait la formule du passage « dialectique » de la cité à la nation, puis à l’Europe et au
386 tyonie des nations chrétiennes et degré supérieur du processus d’unification qui tend à embrasser le genre humain, n’a pas
387 outre-mer et qui voit d’un bon œil les puissances du Continent se multiplier, « s’équilibrer », et en fait se neutraliser,
388 mais dans l’imaginaire — la dialectique nationale du romantisme politique. Parce qu’il n’est pas suspect de nationalisme b
389 e aux Allemagnes, confère à ces régions centrales du Continent la vocation d’unir l’Europe sur le modèle fédéraliste : res
390 qu’est venue la division de l’Église, il est donc du devoir de ce pays, plus que de tout autre, de recréer la communauté d
391 le système européen… Faire de l’Allemagne la base du nouveau système (fédéraliste), voilà qui serait vraiment un acte de g
392 nt ainsi une vocation nationale, au meilleur sens du terme, mais de portée universelle ? Non, disent les Russes, — ou tout
393 es Russes, — ou tout au moins les penseurs russes du xixe , — c’est la Russie qui a pour mission de régénérer l’Europe et
394 tiques reconnaissent la vérité, cette vérité même du Christ telle quelle est reconnue par le simple croyant. Il faut bien
395 que le conflit de la papauté et de l’Empire, puis du catholicisme et de la Réforme, aient été des grands malheurs pour l’E
396 e deuils et de regrets communs ; dans le présent, du désir de continuer à vivre ensemble. Ce qui constitue une nation, ce
397 les remplacera. On connaît la célèbre prophétie du grand Jacob Burckhardt, historien bâlois, sur la venue des « terrible
398 isme jovial et solennel ». Voici entre cent pages du même ton, quelques extraits tirés de Par-delà le bien et le mal : No
399 ains promptes qui règnent aujourd’hui avec l’aide du patriotisme, sans soupçonner à quel point leur politique de désunion
400 e qu’a vus ce siècle ont tendu vers ce but unique du travail secret de leur âme : ils voulurent frayer les voies à un nouv
401 viables, économiquement parlant, sous la pression du grand commerce et des échanges mondiaux transcendant toutes les front
402 ar les grands historiens contre les grands poètes du xixe . Plus européen, sans doute, qu’aucun de ses compatriotes au déb
403 t en 1908 de « cette Europe qui est la terre-type du malheur de l’humanité », et qui réinventait à peu de mots près la phr
404 eur Constitution des articles prévoyant l’abandon du dogme sacro-saint de la souveraineté totale. 27. Les citations qui
15 1960, Articles divers (1957-1962). Originalité de la culture européenne comparée aux autres cultures (juin 1960)
405 ès les mêmes que ceux qui se posent dans le reste du monde. Comment expliquer ces deux attitudes négatives, d’ailleurs con
406 , sur une expérience, vécue jusqu’à l’irritation, du tempérament, des coutumes et des préjugés de nos voisins. La seconde
407 roblèmes spécifiques, différents de ceux du reste du monde, s’explique par une glorieuse méconnaissance des réalités de ce
408 glorieuse méconnaissance des réalités de ce reste du monde. La première attitude est en somme celle d’un myope, et la seco
409 endrons très vite à la constatation suivante. Vue du dehors, l’Europe est évidente. Vue de l’Asie, de l’Afrique, ou même d
410 notre culture et le fait qu’elle nous est commune du Cap Nord au Péloponnèse et de Madrid à Varsovie, je répondrai d’un se
411 nt « étrangères » cette fois-ci, vous commencerez du même coup à sentir « cette inimitable saveur que l’on ne trouve qu’à
412 rtout contemporaines, l’unité résulte d’un décret du Pouvoir, d’une uniformité imposée par la force. Donc, d’une part unit
413 r ne rien dire des tentatives rapidement avortées du national-socialisme et du fascisme) serviront d’exemples pour la deux
414 ves rapidement avortées du national-socialisme et du fascisme) serviront d’exemples pour la deuxième formule. Il suffira,
415 érusalem, et derrière ces trois villes illustres, du Proche-Orient sémite, de l’Iran, et de l’Inde. Nous venons aussi des
416 ’Inde. Nous venons aussi des profondeurs obscures du monde celtique et du monde germanique, et parfois même du monde arabe
417 ssi des profondeurs obscures du monde celtique et du monde germanique, et parfois même du monde arabe et du monde slave. E
418 celtique et du monde germanique, et parfois même du monde arabe et du monde slave. Entre ces origines diverses, hétérogèn
419 nde germanique, et parfois même du monde arabe et du monde slave. Entre ces origines diverses, hétérogènes, se sont produi
420 n’habitons après tout qu’un petit 5 % des terres du Globe, c’est bien à la complexité de nos origines culturelles que nou
421 n dynamisme unique et sans rival dans les annales du genre humain. En dépit de ce que je viens de dire sur la complexité i
422 profane. Culture de dialogue et de contestation, du seul fait de ses origines multiples et des valeurs souvent incompatib
423 t de l’astronomie élaborées par les civilisations du Proche-Orient. Mais il a été fortement développé par la théodicée chr
424 , on ne peut pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’il a créé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous ne
425 ssairement s’aiguiser en Europe plus qu’ailleurs, du fait même de la coexistence de nos diverses origines en perpétuelle s
426 vérité dite objective, de la simple véracité, et du recours aux preuves par neuf. Veuillez songer cependant que l’Asie et
427 re de vous secourir matériellement, c’est à cause du travail acharné que nous nous sommes imposé pendant des siècles, conf
428 oire la solidarité, puisqu’elle refuse la réalité du prochain. Et certes, cela ne signifie pas théoriquement que la sagess
429 armé ; pour le Romain, c’est de jouir des droits du citoyen à part entière, et tous ces éléments spirituels, juridiques,
430 hiks »36 de l’URSS, ni dans les masses de l’Inde, du Sud-Est asiatique ou de la Chine. Ou bien, s’il prend soudain un sens
431 expliquent la plupart de nos créations. En effet, du sens de la vérité objective dérivent nos sciences et par suite, nos t
432 ent nos sciences et par suite, nos techniques. Et du sens de la responsabilité personnelle, lié au sens de la liberté, dér
433 xiste sur notre planète trois régions comparables du point de vue de la pression démographique, c’est-à-dire de la relatio
434 é littéralement incomparable. Certes, les peuples du Proche-Orient avaient créé l’astronomie, les Hindous avaient inventé
435 ro bien avant nous. Mais l’Europe, ce Laboratoire du Monde, a poussé les sciences et les techniques qui en dérivent jusqu’
436 non moins d’audace, l’exploration de l’espace et du temps. L’espace d’abord. Ce sont les Européens qui ont découvert la T
437 umain est une création des Européens. Exploration du temps, ensuite. Ce sont les Européens qui ont inventé l’histoire et l
438 istoire, constitution d’archives, examen critique du passé, leçons qu’on en tire, renouvellement des arts, sujets de roman
439 politiques, et finalement : superstition moderne du « sens de l’histoire », qui non seulement alimente les plus vives pol
440 hnographie à partir de la découverte géographique du monde. Et l’on sait le rôle décisif que ces sciences ont joué dans l’
441 n pour emmagasiner tous les trésors ainsi ramenés du fond des temps et de l’espace, les Européens ont inventé le Musée. Et
442 prépare, elle aussi, les voies de l’unité future du genre humain. Voilà ce que l’Europe a créé, voilà ce qu’elle offre dé
443 el prix. Voici donc notre situation dans le monde du xxe siècle : Nos créations les plus typiques et les plus spectaculai
444 Il exige nos machines, mais refuse notre éthique du travail. Il veut que nous l’aidions à mieux vivre, mais dédaigne notr
445 mieux vivre, mais dédaigne notre idéal de l’amour du prochain. On ne peut donc pas encore affirmer que notre culture soit
446 ur suggérer l’angle de vision que voici : le sort du monde dépend aujourd’hui de l’Europe, qui a inventé le monde dans la
447 ne : après tout, que peut bien nous faire le sort du monde ? Notre sort personnel, notre salut, le sens de notre vie indiv
448 n dehors du sort de l’Europe, dont dépend le sort du monde de demain ? Au xviie siècle déjà, Amos Comenius écrivait : « N
449 rado, d’elle ne sait quelle Toison d’or, symboles du sens dernier de la vie. Il ne porte pas des fuyards, des émigrants, d
450 nture, les petites caravelles de Colomb, au matin du départ à Palos de Moguer. Auront-elles la voilure, le tonnage nécessa
451 rivées, je répondrai simplement ceci : l’angoisse du monde qui nous appelle est sans doute plus grave que la nôtre ; et no
452 r notre histoire que de la faire, pour l’ensemble du genre humain. 35. Paul Valéry. 36. Membres de l’Appareil, des cadr
453 ul Valéry. 36. Membres de l’Appareil, des cadres du régime. 37. L’Aventure occidentale de l’homme , 1957. s. Rougemo
16 1960, Articles divers (1957-1962). Allocution de Denis de Rougemont, président du Congrès pour la liberté de la culture, à la séance de clôture de la rencontre de Berlin (extraits) (juin-juillet 1960)
454 Allocution de Denis de Rougemont, président du Congrès pour la liberté de la culture, à la séance de clôture de la r
455 er et rassembler leurs grands symboles : — celles du corps et de l’intellect (d’où la technique) dont s’occupe surtout l’O
17 1960, Articles divers (1957-1962). La liberté et le sens de la vie (8 juillet 1960)
456 er et rassembler leurs grands symboles : — celles du corps et de l’intellect (d’où la technique) dont s’occupe surtout l’O
457 ans, s’élargissant progressivement aux dimensions du monde entier, est désormais : d’organiser un ample effort de réflexio
458 un ample effort de réflexions entre intellectuels du monde entier sur les problèmes que pose le même progrès technique, éd
459 différentes de l’Europe, de l’Afrique, de l’Asie, du Proche-Orient et des deux Amériques ; mais ceci dans la perspective q
460 ective qui nous est propre : celle des incidences du progrès sur les vraies libertés humaines. On nous demande souvent, de
461 et à notre foi. Et alors, la liberté serait-elle du nombre de ces fins dernières, serait-elle à son tour un absolu ? Non,
462 1960, p. 1 et 6. w. Présenté par cette note : «  Du 16 au 22 juin s’est tenu à Berlin (Ouest), le 3e Congrès internationa
463 niversité d’Oxford, Carlo Schmidt, vice-président du Bundestag, etc. Dans la délégation française figuraient : MM. Raymond
464 recteur de la France catholique ; Jean Duvignaud, du CNRS ; Manès Sperber, etc. La conférence de clôture de M. Denis de Ro
465 ce de clôture de M. Denis de Rougemont, directeur du Centre culturel du Conseil de l’Europe [sic], a été particulièrement
466 Denis de Rougemont, directeur du Centre culturel du Conseil de l’Europe [sic], a été particulièrement remarquée. L’auteur
18 1960, Articles divers (1957-1962). Originalité de la culture européenne comparée aux autres cultures (août 1960)
467 ès les mêmes que ceux qui se posent dans le reste du monde. Comment expliquer ces deux attitudes négatives, d’ailleurs con
468 s, sur une expérience vécue jusqu’à l’irritation, du tempérament, des coutumes et des préjugés de nos voisins. La seconde
469 roblèmes spécifiques, différents de ceux du reste du monde, s’explique par une glorieuse méconnaissance des réalités de ce
470 glorieuse méconnaissance des réalités de ce reste du monde. La première attitude est en somme celle d’un myope, et la seco
471 ation suivante, qui sera ma première thèse : Vue du dehors, l’Europe est évidente. Vue de l’Asie, de l’Afrique, ou même d
472 notre culture et le fait qu’elle nous est commune du Cap Nord au Péloponnèse et de Madrid à Varsovie, je répondrai d’un se
473 ent « étrangère » cette fois-ci, vous commencerez du même coup à sentir cette inimitable saveur que l’on ne trouve qu’à l’
474 e universel, soit avec l’homme d’une seule nation du grand complexe européen, dont il révèle ainsi qu’il fait partie par l
475 ns d’autres cultures, l’unité résulte d’un décret du Pouvoir, d’une uniformité imposée par la force. Donc, d’une part unit
476 (pour ne rien dire des brèves tentatives avortées du national-socialisme et du fascisme) serviront d’exemples pour la deux
477 ves tentatives avortées du national-socialisme et du fascisme) serviront d’exemples pour la deuxième formule. Il suffira,
478 érusalem, et derrière ces trois villes illustres, du Proche-Orient sémite, de l’Iran, et de l’Inde. Nous venons aussi des
479 ’Inde. Nous venons aussi des profondeurs obscures du monde celtique et du monde germanique, et parfois même du monde arabe
480 ssi des profondeurs obscures du monde celtique et du monde germanique, et parfois même du monde arabe. Entre ces origines
481 celtique et du monde germanique, et parfois même du monde arabe. Entre ces origines diverses, hétérogènes, se sont produi
482 n’habitons après tout qu’un petit 5 % des terres du Globe, c’est bien à la complexité de nos origines culturelles que nou
483 n dynamisme unique et sans rival dans les annales du genre humain. 4. En dépit de ce que je viens de dire sur la complexit
484 profane. Culture de dialogue et de contestation, du seul fait de ses origines multiples, et des valeurs souvent incompati
485 t de l’astronomie élaborées par les civilisations du Proche-Orient. Mais il a été fortement développé par la théodicée chr
486 , on ne peut pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’il a créé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous ne
487 ssairement s’aiguiser en Europe plus qu’ailleurs, du fait même de la coexistence de nos diverses origines, en perpétuelle
488 vérité dite objective, de la simple véracité, et du recours aux preuves par neuf. L’Asie et l’Afrique ignorent cette exig
489 re de vous secourir matériellement, c’est à cause du travail acharné que nous nous sommes imposé pendant des siècles, conf
490 oire la solidarité, puisqu’elle refuse la réalité du prochain. Et certes, cela ne signifie pas théoriquement que la sagess
491 armé ; pour le Romain, c’est de jouir des droits du citoyen à part entière — et tous ces éléments spirituels, juridiques,
492 é littéralement incomparable. Certes, les peuples du Proche-Orient avaient créé l’astronomie, les Hindous avaient inventé
493 ro bien avant nous. Mais l’Europe, ce Laboratoire du Monde, a poussé les sciences et les techniques qui en dérivent jusqu’
494 uère moins d’audace, l’exploration de l’espace et du temps. L’espace d’abord. Ce sont les Européens qui ont découvert la T
495 umain est une création des Européens. Exploration du temps, ensuite. Ce sont les Européens qui ont inventé l’histoire et l
496 istoire, constitution d’archives, examen critique du passé, leçons qu’on en tire, renouvellement des arts, sujets de roman
497 politiques, et finalement : superstition moderne du « sens de l’histoire », qui non seulement alimente les plus vives pol
498 hnographie à partir de la découverte géographique du monde. Et l’on sait le rôle décisif que ces sciences ont joué dans l’
499 , pour emmagasiner tous les trésors ainsi ramenés du fond des temps et de l’espace, les Européens ont inventé le Musée. Et
500 e, prépare elle aussi les voies de l’unité future du genre humain. Sciences, physiques, techniques et machines, découverte
501 es, physiques, techniques et machines, découverte du globe, histoire, archéologie, ethnographie, sociologie, psychologie,
502 el prix. Voici donc notre situation dans le monde du xxe siècle : Nos créations les plus typiques et les plus spectaculai
503 mieux vivre, mais dédaigne notre idéal de l’amour du prochain. On ne peut donc pas encore affirmer que notre culture soit
504 ur suggérer l’angle de vision que voici : le sort du monde dépend aujourd’hui de l’Europe, qui a inventé le monde dans la
505 it : après tout, que peut bien nous faire le sort du monde ? Notre sort personnel, notre salut, le sens de notre vie indiv
506 n dehors du sort de l’Europe, dont dépend le sort du monde de demain ? Au xviie siècle déjà, Amos Comenius écrivait : « N
507 rado, d’elle ne sait quelle Toison d’or, symboles du sens dernier de la vie. Ceci m’évoque les petites caravelles de Colom
508 évoque les petites caravelles de Colomb, au matin du départ à Palos de Moguer. Auront-elles le tonnage, la voilure nécessa
509 rivées, je répondrai simplement ceci : l’angoisse du monde qui nous appelle est sans doute plus grave que la nôtre ; et no
510 r notre histoire que de la faire, pour l’ensemble du genre humain. 38. Si l’on me permet de paraphraser ainsi un vers fa
19 1960, Articles divers (1957-1962). Une fusée à trois étages : bref historique de la Fondation (octobre 1960)
511 ut exposée pour la première fois par le directeur du Centre européen de la culture, lors d’une réunion qui se tint dans la
512 i tout nouveau que lui porte le Monde, — ce Monde du xxe siècle né de leurs propres œuvres ? Quand il s’agit de financer
513 — ces huit personnes constituant le premier noyau du Conseil des gouverneurs de la Fondation. Dès la première session plén
514 de la Fondation. Dès la première session plénière du Conseil des gouverneurs, le 11 mai 1955, à Genève, S. A. R. le prince
515 taires d’Europe, et au département cartographique du Collège d’Europe. Lors de la réunion des gouverneurs à Genève, le 16
516 nt elle-même ses plans — se trouvaient éclaircies du même coup. Je comparerais volontiers cette opération à la mise à feu
517 rerais volontiers cette opération à la mise à feu du 2e étage d’une fusée de l’espace, se séparant au moment voulu du prem
518 ne fusée de l’espace, se séparant au moment voulu du premier moteur. La Fondation décida également d’organiser chaque anné
519 es furent organisés par la Fondation à l’occasion du congrès de Vienne, et se réuniront de nouveau lors du congrès de Cope
520 ongrès de Vienne, et se réuniront de nouveau lors du congrès de Copenhague, en 1960. La table ronde est destinée à permett
521 re conclu entre la Fondation et le Fonds culturel du Conseil de l’Europe, permettant la création de comités nationaux pour
20 1961, Articles divers (1957-1962). Tristan et Iseut à travers le temps (1961)
522 ntre vous ne se souvient de cette première phrase du Tristan rendu naguère au grand public européen par les soins de Josep
523 brez aujourd’hui. En restituant pour les lecteurs du xxe siècle les textes originaux de la légende, et leur contexte cult
524 ions de Tristan servent à faire entendre la force du mythe, par la liaison qui se trouve entre la légende primitive et ses
525 e, l’archétype de tous les romans vraiment dignes du nom. Ils sont comme les premières apparitions, comme les épiphanies q
526 loquence classique de la chaire, quand elle parle du « salut des âmes », ou « d’immortalité de l’âme ». Je prends le mot a
527 ue ni proprement spirituelle, qui n’est pas celle du corps ni celle de l’intellect, encore qu’elle tienne aux deux, c’est
528 c’est l’évidence, mais qui est bien plutôt celle du « cœur » comme on dit —, celle de l’âme. L’âme est en propre le domai
529 e de l’âme, tout comme la sensation est la preuve du corps, et la pensée, la preuve de l’intellect. La passion, c’est une
530 r à jamais contagieux. Ceci posé — et je m’excuse du ton quelque peu didactique de ce rappel au sens des mots — considéron
531 raments qui s’accordèrent un jour, dans l’instant du premier regard, mais que le temps modifie fatalement, créant un risqu
532 t ravi. Vous avez reconnu la conclusion gnostique du Second Faust de Goethe, mais aussi, le mouvement de l’ascension mysti
533 expression, car cet acte instinctif, lié aux lois du corps, ne mérite pas en soi le nom d’amour. Mais c’est l’amour comblé
534 vie, c’est reconnaître aussi que la vraie victime du mythe n’est pas Tristan, n’est pas Iseut, et n’est pas non plus leur
535 out. La vraie victime, c’est le roi Marc, symbole du mariage légal. Les amants ont perdu la vie, gagné l’amour. Le mari, l
536 . Il reste seul vivant, mais sans amour. Aux yeux du mythe, il est perdant. À ce premier aspect de notre légende : l’amour
537 ect de notre légende : l’amour-passion triomphant du mariage, c’est-à-dire de l’amour-réalité, se rattachent deux grandes
538 e romantisme et le roman. Retracer leur évolution du xiiie siècle jusqu’à nos jours, comme j’ai tenté de le faire jadis,
539 adis, serait hélas illustrer la lente dégradation du mythe, grandiose en sa simplicité première, jusqu’au niveau des confu
540 ement commercial : comédies à succès sur le thème du triangle, roman pour midinettes et films de série, dont le love inter
541 t l’ingrédient forcé, dernière dilution populaire du philtre magique de la Reine, du « vin herbé » dont la vertu jadis fut
542 ilution populaire du philtre magique de la Reine, du « vin herbé » dont la vertu jadis fut mortelle aux amants séparés, ma
543 éparés, mais fut aussi transfigurante. L’histoire du mythe, dans nos mœurs et coutumes, ne serait-elle que l’histoire d’un
544 gue profanation ? Faut-il penser que les pouvoirs du mythe sont épuisés et que nous serons peut-être les derniers à subir
545 ions ? Une analyse sociologique de la dégradation du mythe, au cours des siècles, inclinerait à cette conclusion. Elle con
546 tant le mariage d’Iseut avec le Roi, père adoptif du héros —, il n’y aurait pas de roman, ni de passion mortelle, il n’y a
547 il, la Lolita de Nabokov, sont les derniers échos du mythe ressuscité grâce aux derniers tabous qui tiennent encore. Mais
548 monumentale, les jeux d’esprit au lieu des drames du spirituel. Selon les sociologues, la passion doit mourir. Je vous dis
549 re cet aspect trop souvent, trop facilement cité, du « beau conte d’amour et de mort ». Les obstacles sociaux, coutumiers
550 à nos sciences, ou c’est tout comme. Qu’en est-il du dernier barrage que notre condition d’êtres finis oppose à notre amou
551 autre, Wagner décrit par sa musique, vrai langage du mythe essentiel, la mort transfigurante des amants. Cette mince bande
552 mmes et de leur peine quotidienne, mais l’horizon du nouveau Jour qui révélera le sens caché de nos « apparences actuelles
553 l’Ange. Cet horizon de la mort est l’ultime sens du mythe. Mais il faut croire aux anges pour y croire. Selon la mytholog
554 r y croire. Selon la mythologie de l’ancien Iran, du mazdéisme de Zarathoustra, toutes les actions d’un homme sur la terre
555 otre mythe. L’événement majeur, la scène capitale du drame de la personne ainsi constituée se produit à l’aube de la trois
556 encontre de l’âme avec son moi céleste à l’entrée du pont Chinvat. Dans un paysage nimbé de la Lumière-de-Gloire restituan
557 croissent les plantes d’immortalité », au centre du monde spirituel (qui est le monde réel des Archétypes), le pont Chinv
558 e en forme d’ange, et femme, figure la conclusion du mythe de Tristan : ce qui se passe trois jours après la mort d’amour.
559 qui aurait été, sur la Terre, le véritable objet du désir de Tristan, sa princesse lointaine et son « amour de loin » com
560 e notre mythe. La tradition chrétienne de l’amour du prochain ne s’en trouverait-elle pas éclairée, à son tour ? Aimer le
561 s la mort, ce serait dès ici-bas, l’altérité même du prochain. Que l’Autre soit un Autre impénétrable, ne tient pas à quel
562 férent, M. Denis de Rougemont, qui a traité, lui, du « mythe » de Tristan et Iseut dans plusieurs ouvrages. M. Robert Guie
563 devait l’amener n’ayant pu quitter Genève à cause du brouillard. C’est donc en son absence que M. Guiette a rappelé que “d
564 secret…” M. Carlo Bronne a ensuite donné lecture du discours écrit par M. Denis de Rougemont. »
21 1961, Articles divers (1957-1962). Nos meilleurs esprits (1961)
565 nsuite que notre aurea mediocritas saute aux yeux du premier venu, tandis que la grandeur de la Suisse reste un mystère, m
566 enne. Et finalement, il faut avouer que le statut du « grand homme » en Suisse, en vertu de lois non écrites, mais très an
567 s importants qu’on lui donnera sont inconnus hors du canton. Ces trois points appelleraient d’infinis commentaires, un liv
568 infinis commentaires, un livre entier : imaginons du moins son argument. ⁂ S’il me fallait décrire la Suisse en une seule
569 que ce fut un Suisse qui bâtit le plus grand dôme du monde, Saint-Pierre de Rome ; qu’un autre Suisse construit des capita
570 , fut aussi le premier à publier une Vue générale du genre humain, dès la fin du xviiie siècle. Mais ce n’est pas en grim
571 lier une Vue générale du genre humain, dès la fin du xviiie siècle. Mais ce n’est pas en grimpant sur nos Alpes que ces h
572 eintres qui aient fait époque, ni de compositeurs du plus haut rang. Hölderlin et Keats, Mozart et Rubens, Shakespeare et
573 émesure, un grand théâtre, un sens de la pompe et du style, libre de tout souci d’application « morale », leur eussent été
574 mérais plus haut ne seraient guère pensables hors du complexe suisse. C’est à eux que la Suisse doit de représenter une pl
22 1961, Articles divers (1957-1962). Culture et technique (juillet 1961)
575 n parfois bruyante et turbulente de tous les pays du tiers-monde, même les plus farouchement hostiles à l’Occident, en tou
576 ale et une éducation spécialisée est le type même du faux problème. Car sans culture occidentale, point de technique, au s
577 t de technique, au sens actuel, au sens universel du terme ; et à l’inverse, sans technique, point d’avenir pour la cultur
578 oint d’avenir pour la culture, au sens occidental du terme. L’une se nourrit de l’autre et l’une sans l’autre serait conda
579 c’est par défi aux dieux, c’est pour ravir le feu du ciel, comme Prométhée, et pour soumettre la Nature à notre volonté de
580 théories. À l’origine des inventions européennes du xvie au xixe siècle, qui ont décidé du sort de la technique moderne
581 opéennes du xvie au xixe siècle, qui ont décidé du sort de la technique moderne, et par suite de notre économie, nous ne
582 ne à vapeur, la turbine, l’auto et l’avion. C’est du rêve de voler qu’est né l’avion, et non pas de la prévision des avant
583 s que présenterait un jour l’aviation. L’histoire du vol d’Icare est le récit d’un rêve que presque tous les hommes ont fa
584 re, y compris Léonard de Vinci. Le motif onirique du vol, attesté par des centaines d’auteurs depuis trois-mille ans, est
585 à toute espèce de considération utilitaire. C’est du rêve de partir au hasard sur les routes qu’est née l’auto, comme le p
586 la machine à vapeur. Celle qui existait au début du xviiie siècle était des plus rudimentaire : il fallait qu’un surveil
587 plus tard, ne fit que perfectionner la trouvaille du petit garçon qui avait été ainsi, sans le savoir, l’inventeur de l’au
588 érifient, en revanche, une fois de plus, la thèse du rêve créateur : l’exemple des fusées vers la Lune et Vénus me suffira
589 ures, les tableaux que nous avons vus, les images du divin que nous livrent les siècles de notre civilisation, modifient s
590 . En résumé — notre technique occidentale est née du rêve occidental, de ce même rêve qui a créé notre culture ; — la tech
591 eule formation technique. Dans la première moitié du xxe siècle, nous avons assisté à ce que l’on nomme souvent l’envahis
592 ain d’Hiroshima : La bombe n’est pas dangereuse du tout. C’est un objet. Ce qui est horriblement dangereux, c’est l’homm
593 e de nos populations occidentales, ce fut le sort du travailleur industriel, de cet immense prolétariat créé par l’expansi
594 t immense prolétariat créé par l’expansion subite du machinisme dès le premier tiers du xixe siècle — l’homme attaché au
595 pansion subite du machinisme dès le premier tiers du xixe siècle — l’homme attaché au service des machines jusqu’à seize
596 ts par leur passion de produire sans tenir compte du facteur humain et de la dignité de la personne humaine, dans leurs pl
597 en fin de compte, c’est le loisir ! La réduction du temps de travail moyen à l’usine ou au bureau, obtenue depuis trois q
598 notre humanité occidentale partiellement libérée du travail mécanique, pourvue de loisirs tout nouveaux, et privée du mêm
599 ique, pourvue de loisirs tout nouveaux, et privée du même coup du droit de se plaindre qu’elle n’a pas le temps de se cult
600 de loisirs tout nouveaux, et privée du même coup du droit de se plaindre qu’elle n’a pas le temps de se cultiver ! Bien s
601 tera elle aussi, et que par suite, les conditions du producteur de la culture seront sensiblement améliorées. Donc, tout c
602 chnique. Cette formation obligatoire absorbe 67 % du temps d’étude, et ne laisse à peu près aucune place à la culture géné
603 uche-à-tout. La brouette, la roulette et les lois du hasard, la machine à calculer, ancêtre des cerveaux électroniques, c’
604 es créatrices sont communes, qu’elles jaillissent du même fonds et s’alimentent aux mêmes nappes profondes de la psyché, à
605 ermet pas seulement une augmentation quantitative du temps libre, mais une meilleure utilisation qualitative des loisirs :
606 ays sous-développés sont les équivalents modernes du cheval de Troie. Et si nous persistons à l’ignorer, nous donnerons au
607 e volumes — traduits en douze langues — directeur du Centre européen de la culture, engagé dans le mouvement fédéraliste e
608 mont est entre autres fondateur, avec E. Mounier, du mouvement personnaliste, président du comité exécutif du Congrès pour
609 E. Mounier, du mouvement personnaliste, président du comité exécutif du Congrès pour la liberté de la culture, et gouverne
610 ement personnaliste, président du comité exécutif du Congrès pour la liberté de la culture, et gouverneur de la Fondation
23 1961, Articles divers (1957-1962). Le Temps de la louange (été 1961)
611 s-uns dans le hall d’un hôtel, vers quatre heures du matin, et je tirais les cartes. Un grand et fort garçon, dans la tren
612 rre et à Berlin, mémorable correspondant étranger du Combat d’Albert Camus, titulaire d’une émission française de la BBC q
613  » biblique décidément incompatible avec son sens du symbolisme universel. Bach en automne est un poème luthérien, le seu
614 iescement au monde charnel, par son sens cosmique du langage musical, par sa rondeur, sa pesanteur et sa bonhomie sensuell
615 générale ». Tel étant de toute évidence le train du monde, il fallait naviguer dans la vie d’un signe à l’autre, guidé pa
616 ables, petits remous dans la « platitude divine » du grand fleuve d’un seul tenant reliant « l’origine et la perfection de
617 mentaires d’une carrière. Il avait de lui-même et du monde une idée telle que les soucis multipliés par une vie quotidienn
24 1962, Articles divers (1957-1962). Jonas [préface] (1962)
618 rre et à Berlin, mémorable correspondant étranger du Combat d’Albert Camus, titulaire d’une émission française de la BBC q
25 1962, Articles divers (1957-1962). Calvin (1962)
619 ne joue pas avec les mots quand on est « ministre du Verbe », minister verbi divini. Les manuels ont beau dire, je ne vois
620 ir de profiter, qu’encore que je ne quittasse pas du tout les autres études, je m’y employai toutefois plus lâchement. Or,
621 je n’eusse à soutenir quelque combat, ou de ceux du dehors, ou de ceux de dedans ». Ainsi donc, d’appel en appel, Jehan C
622 vocation ; comme aussi ses défauts, à notre goût du jour. Il est moins séduisant qu’impérieux, moins impérieux pourtant q
623 plus abrupte et prosaïque. Son baroque est celui du bon sens et du langage quotidien de son temps : nous jugeons pittores
624 t prosaïque. Son baroque est celui du bon sens et du langage quotidien de son temps : nous jugeons pittoresques, par erreu
625 parts de l’Église harassée par la persécution, ou du cœur si faible de l’homme en butte aux attaques du monde. Il s’agit d
626 u cœur si faible de l’homme en butte aux attaques du monde. Il s’agit de « presser » l’auditoire, de l’instruire « à salut
627 mais aussi son pouvoir de contagion. Ce ministre du Verbe a fait un monde. Il est même le seul écrivain dont les doctrine
628 nement par les élus de la communauté. Le principe du droit de révolte, refusé aux individus, mais confié comme devoir aux
26 1962, Articles divers (1957-1962). Le règne de Victoria (1962)
629 déplaise, Victoria disparaît dans les profondeurs du parc, vers les barrancas mélancoliques aux grands arbres fleuris habi
630 trouvant à Buenos Aires le groupe de Sur, honneur du Sud, autour de celle qui l’avait suscité, c’était à la fois le passé,
27 1962, Articles divers (1957-1962). La culture et l’union de l’Europe (avril 1962)
631 touche que mettraient les décorateurs à l’édifice du nouveau consortium européen. Elle deviendrait un parasite si elle ins
632 t : simple cap de l’Asie (4 % des terres émergées du globe), un peu moins peuplée que l’Inde et beaucoup plus pauvre en ma
633 la différence des cultures, au sens le plus large du terme, qui va de la religion à la technique en passant par la philoso
634 de la créer ; mais simplement, les circonstances du xxe siècle, — très largement créées par nos œuvres, d’ailleurs ! — n
635 ours un plan géométrique d’unification rigoureuse du continent, supprimant non seulement les douanes, mais toutes les diff
636 peler que depuis Dante et Pierre Dubois, au début du xive siècle, en passant par le roi de Bohême, Georges Podiebrad, au
637 lleurs esprits et les meilleurs hommes politiques du continent n’ont cessé de préconiser une union fédérale de nos peuples
638 ère nationaliste et colonialiste — seconde moitié du xixe et première moitié du xxe siècle — en s’appuyant sur la divers
639 iste — seconde moitié du xixe et première moitié du xxe siècle — en s’appuyant sur la diversité de nos langues. La premi
640 tent une contribution essentielle à l’intégration du continent. Ils réduisent les obstacles mentaux qui entravent encore l
641 n’a pas d’idéal à opposer aux ambitions mondiales du communisme, ni de valeurs à proposer au tiers-monde récemment libéré 
642 ion individuelle d’une part, et de l’organisation du travail en équipe selon un plan commun, d’autre part. Dans le domaine
643 ne de l’éducation civique, par la double exigence du développement de l’esprit critique et de l’information d’une part, de
644 ormation d’une part, de l’esprit communautaire et du sens des responsabilités sociales d’autre part. Ces deux grandes tâch
645 plus belles réalisations économiques de l’OCDE et du Marché commun resteront pauvres de substance humaine, mal intégrées à
646 nt ils ne manqueront pas d’abuser contre l’homme, du moins tel que nous le concevons. En admettant qu’une armature d’insti
647 celui de l’union dans la diversité, c’est-à-dire du fédéralisme. Si l’on me dit que j’aligne ici des évidences, j’en sera
28 1962, Articles divers (1957-1962). Journal d’un témoin (23-24 juin 1962)
648 t en effet l’importance symbolique et stratégique du Saint-Gothard dès les débuts de notre histoire. Le 11 mai, les nazis
649 romande, moi de la Suisse alémanique. En sortant du studio, nous apprenons que Paris vient d’être bombardé pour la premiè
650 ître de soi-même. Petite maison louée, à mi-pente du Gurten. Au-dessous, des cités-jardins et des usines. Plus loin la vil
651 es. Plus loin la ville, la longue façade verdâtre du Palais fédéral sur une falaise. À l’horizon, la barrière sombre du Ju
652 sur une falaise. À l’horizon, la barrière sombre du Jura, et au-delà se passe la guerre. Derrière la maison, des prairies
653 aremment paisible, et la ligne précise des crêtes du Jura sur un ciel tourmenté où je guettais des lueurs. Quelques camion
654 timental, je me demande s’il est bien à la mesure du tragique dans lequel nous baignons… L’ai fait lire au lieutenant-colo
655 qu’à six heures. Je me prépare à sortir. Sonnerie du téléphone. On va me parler de l’E.-M. du Général. — Ici colonel Masso
656 heures tapantes au bureau, surtout. Notre projet du 6 juin se précise. Ph. Mottu est en train de convoquer pour le 22 jui
657 e par l’Axe — les colonnes de Guderian descendent du Nord vers la Faucille. aj. Rougemont Denis de, « Journal d’un témo
658 Genève, Genève, 23 juin 1962, p. 1. ak. Précédé du chapeau suivant : « Nos lecteurs se souviennent sans doute de l’étude
659 Nos lecteurs se souviennent sans doute de l’étude du journaliste anglo-suisse Jon Kimche parue cet hiver dans nos colonnes
660 t pu être tentés d’intégrer notre pays au système du Troisième Reich alors triomphant. Le général Guisan a d’ailleurs briè
29 1962, Articles divers (1957-1962). La Ligue du Gothard : premier mouvement de résistance : Journal d’un témoin II (25 juin 1962)
661 La Ligue du Gothard : premier mouvement de résistance : Journal d’un témoin II (2
662 nel se présente à la porte de notre petite maison du Gurten. Je prends la position. Il tient dans chaque main un petit paq
663 un petit paquet attaché par un ruban. — Ça, c’est du chocolat pour votre femme, ça c’est des cigarettes parisiennes, pour
664 s avez pour mission de sauvegarder l’indépendance du pays et de maintenir l’intégrité du territoire. Il est clair que pour
665 ’indépendance du pays et de maintenir l’intégrité du territoire. Il est clair que pour défendre un territoire, il est parf
666 re un territoire, il est parfois indiqué de céder du terrain : cela s’appelle une retraite stratégique. On peut me dire qu
667 silences opportuns) pour défendre l’indépendance du pays. Cela se discute, mais j’ai pris mon parti, tout comme le généra
668 Mottu, nos conjurés sont réunis pour la fondation du mouvement de résistance à tout prix, contre tous les défaitismes et o
669 de notre mouvement, qui a pris le nom de « Ligue du Gothard », pour ma plus grande satisfaction. Discuté et corrigé ce te
670 . Discuté et corrigé ce texte jusqu’à cinq heures du matin, avec les fondateurs, dans une petite salle de café enfumée par
671 aire converger nos efforts, nous fondons la Ligue du Gothard. Bastion naturel de la Suisse, cœur de l’Europe et limite des
672 e Suisses. Ce texte va paraître dans 74 journaux du pays. Dans chacun, nous avons acheté une page entière. (Formule de la
673 , à Berne ou à la campagne, soit avec des membres du Directoire de la Ligue, soit avec notre seul homme de liaison entre l
674 ion suisse n’a pas encore compris toute l’ampleur du péril, c’est bien le tout de notre vie suisse et non pas tel parti pl
675 leur analyse détaillée, le directoire de la Ligue du Gothard entreprend alors une démarche que je crois sans précédent dan
676 ofesseur Theo Spoerri, solliciteront une audience du Conseil fédéral. Ils ont mission de lui déclarer que s’il cède aux ex
677 les résultats de la démarche dans un café proche du Palais fédéral. Les délégués m’y retrouvent après une heure. Le titul
678 trouvent après une heure. Le titulaire ad interim du Département politique les a reçus avec beaucoup de calme, a pris note
679 amis, syndicaliste, membre fondateur de la Ligue du Gothard, me dit, quelques jours plus tard : « Vous êtes imprudent au
680 ont Denis de, « Journal d’un témoin II : La Ligue du Gothard, premier mouvement de résistance », Tribune de Genève, Genève
681 Genève, Genève, 25 juin 1962, p. 1. an. Précédé du chapeau suivant : « Juin 1940, la débâcle des armées françaises. Au l
682 clef d’une résistance à tout prix. Voici la suite du journal de ces jours dramatiques. »
30 1962, Articles divers (1957-1962). La conjuration des officiers en juin 1940 : Journal d’un témoin III (26 juin 1962)
683 iers de l’E.-M. G. chargés de préparer le message du 1er août du général. Après quelques heures d’essais peu convaincants
684 -M. G. chargés de préparer le message du 1er août du général. Après quelques heures d’essais peu convaincants — on ne peut
685 une brochure intitulée : Qu’est-ce que la Ligue du Gothard ? Dernière page : La création de la Ligue du Gothard a produ
686 othard ? Dernière page : La création de la Ligue du Gothard a produit un choc salutaire sur l’opinion suisse. Elle a rend
687 la concurrence a produit une émulation inattendue du côté des partis. Il est incontestable que sans la Ligue, les « commun
688 otre action la renforce. De tout temps, à l’appel du danger, nos ancêtres se sont levés. C’est notre tour. 25 juillet 194
689 tour. 25 juillet 1940 Hier a eu lieu le rapport du Grütli. Tout notre dispositif de défense regroupé autour du Gothard !
690 Tout notre dispositif de défense regroupé autour du Gothard ! Notre rêve devient vrai ! Profonde impression dans l’armée
691 1940 La section Armée et Foyer publie le message du général. Convergence parfaite avec le rapport du Grütli, que j’ignora
692 du général. Convergence parfaite avec le rapport du Grütli, que j’ignorais, naturellement, quand j’ai rédigé ces quelques
693 i rédigé ces quelques pages. Mi-août 1940 Réunion du Directoire de la Ligue à Zurich, dans une villa de l’Utliberg. Tandis
694 s que nous nous dirigeons vers un café, à l’heure du déjeuner, sur une route presque campagnarde, entre deux murs, une voi
695 dans l’armée viennent d’être arrêtés, sur l’ordre du colonel Labhardt, commandant l’unité d’armée de Sargans. Ils avaient
696 atre sujets suivants : 1) les causes spirituelles du drame européen ; 2) la mission européenne de la Suisse ; 3) le fédéra
697 ommunautaire en Suisse. Le 27 juillet, une lettre du Département politique m’offrait un passeport diplomatique (censé me f
698 ne réalité. L’opinion s’était ressaisie. La Ligue du Gothard, fondée sur l’idée simple d’organiser les volontés de résista
699 et politique. Elle avait au départ formé le noyau du premier mouvement de résistance, au sens que ce mot devait prendre un
700 ns les pays occupés par Hitler. Je suis conscient du léger ridicule qu’aux yeux de beaucoup présentera cette comparaison,
701 eût certainement passé à la pratique si le moral du pays ne s’était pas ressaisi. Le seul fait qu’à ce redressement la Li
702 ouèrent dans le même sens. Le 20 août, à 7 heures du matin, je prenais la route de Lisbonne. J’avais acheté, avant de mont
703 é, avant de monter dans l’autobus, trois journaux du matin et de la veille : tous les trois consacraient leur éditorial au
704 pu douter de la volonté de résistance à tout prix du Général. Leur complot ne visait que le Conseil fédéral, et c’est pour
705 , d’autre part qu’elle se forma « contre la Ligue du Gothard ». « Le Gothardbund, c’était du romantisme ! », ajoute-t-il.
706 la Ligue du Gothard ». « Le Gothardbund, c’était du romantisme ! », ajoute-t-il. Romantique ou non, c’est la Ligue du Got
707 », ajoute-t-il. Romantique ou non, c’est la Ligue du Gothard qui agit seule en liaison avec les officiers pendant la crise
708 é 1940. 3. L’absence de toute mention de la Ligue du Gothard et la substitution à cette ligue d’un mouvement qui n’eut d’a
709 ques semaines plus tard, allait devenir le centre du Réduit ? Je tenterai de répondre à cette question dans un prochain ar
710 es officiers supérieurs de l’armée sur la prairie du Grütli pour leur exposer son plan de défense à outrance autour du mas
711 eur exposer son plan de défense à outrance autour du massif du Gothard. ao. Rougemont Denis de, « Journal d’un témoin II
712 r son plan de défense à outrance autour du massif du Gothard. ao. Rougemont Denis de, « Journal d’un témoin III : La con
713 Genève, Genève, 26 juin 1962, p. 1. ap. Précédé du chapeau suivant : « Denis de Rougemont retrace ici les circonstances
714 quelques amis groupés sous l’enseigne de la Ligue du Gothard alors que le Troisième Reich venait de triompher des armées f
31 1962, Articles divers (1957-1962). Dans vingt ans une Europe neuve (novembre 1962)
715 ue mortel des nationalismes autarciques au succès du Marché commun, qui gage matériellement la réconciliation franco-allem
716 vague angoisse devant l’explosion démographique ; du chômage endémique au suremploi ; des empires d’outre-mer français, an
717 ope de 1980 est redevenue à tous égards le centre du monde humain. Les géographes ont démontré depuis longtemps qu’elle es
718 environ 95 % de la population et de la production du globe. À cette réalité de géographie humaine correspond une activité
719 s supérieure à tout ce qui se passe dans le reste du monde. L’Europe anime les échanges intercontinentaux, dont elle fut l
720 , elle les adapte aux possibilités d’assimilation du tiers-monde, après en avoir discuté avec les responsables des autres
721 lon la méthode fédéraliste, antidote ou anticorps du nationalisme bourgeois (xixe siècle) que les petits pays neufs s’eff
722 de copier dans les années 1950 à 1970. Le succès du fédéralisme européen les a fait réfléchir et leurs nouvelles générati
723 . Les vitesses plusieurs fois supérieures à celle du son n’étonnent plus ; on découvre au contraire les charmes souverains
724 un système général de freinage ou de décantation du progrès mécanique, qui l’adapte et le subordonne à la sécurité, à la
725 de la Méditerranée, abandon progressif des villes du Nord qui avaient proliféré pendant l’ère du charbon, sale et noire. L
726 illes du Nord qui avaient proliféré pendant l’ère du charbon, sale et noire. L’énergie électrique ou nucléaire a permis de
727 rent le mur plein, l’isolement, l’antique formule du château. On construit des maisons sur les îles — artificielles ou nat
728 dans les rochers et les montagnes, loin des lieux du travail, réduit à cinq journées de six heures par semaine, en moyenne
729 est de règle.) La vie politique ne ressemble plus du tout à ce qu’elle était sous la IIIe République, par exemple. Ses pas
730 a Chine, à l’Inde, et aux ligues encore instables du monde arabe et de l’Afrique noire, l’Occident se regroupe autour de l
731 l’uniformisation sociale, économique et éducative du continent. Fédéralistes et unitaires, mondialistes et nationalistes e
732 x s’opposent au sujet des problèmes d’aménagement du territoire européen, d’urbanisme, d’éducation, de formation professio
733 partie sérieuse de l’existence, en lieu et place du travail et du gain, désormais assurés à moindres frais d’énergie. L’a
734 se de l’existence, en lieu et place du travail et du gain, désormais assurés à moindres frais d’énergie. L’accroissement d
735 surés à moindres frais d’énergie. L’accroissement du temps des loisirs et l’accroissement de la population produisent des
736 ion. En revanche, la généralisation des bénéfices du progrès technique, rendue possible par l’union économique et politiqu
737 ’accroissement de la population et l’urbanisation du continent développent des mécanismes de freinage. La nécessité d’huma
32 1962, Articles divers (1957-1962). La commune, base essentielle de notre civilisation (novembre-décembre 1962)
738 dra communauté humaine, village ou ville, au-delà du stade originel de la défense, du Burg central et des remparts. En Amé
739 u ville, au-delà du stade originel de la défense, du Burg central et des remparts. En Amérique, les villages naissent comm
740 nalement fédérées. Quittant maintenant le silence du ciel et l’art abstrait qu’évoquent si curieusement les photos prises
741 ait qu’évoquent si curieusement les photos prises du haut des airs, nous nous posons enfin sur le sol de l’Europe, dans la
742 re civilisation. Un service religieux, une séance du conseil municipal, une heure de classe, les discussions autour d’une
743 uelques-uns des secrets (pour nous trop évidents) du dynamisme européen, c’est-à-dire de la communauté spirituelle, le règ
744 ctoires et subversives) et l’échange des produits du travail — une vitalité librement ordonnée, faite de visions multiples
745 ise et côté de l’école, côté de la mairie et côté du café ; marché au centre, et carrefour principal des apports régionaux
746 r Il n’est pas de démocratie, au sens européen du terme, qui ne repose sur la libre discussion, sur le libre jeu des pa
747 cet autre élément nécessaire de toute place digne du nom : le café. C’est là qu’elle se parle d’abord, s’écrit bien souven
748 glaises que se lisent à haute voix les éditoriaux du journal que Daniel Defoe rédige seul de 1704 à 1713. Et c’est encore
749 e. N’oublions donc pas, sur la place, la présence du kiosque à journaux, point d’insertion de la rumeur du monde entre le
750 iosque à journaux, point d’insertion de la rumeur du monde entre le café et le marché. Face à l’hôtel de ville, l’église.
751 bole de la commune, qui est dans le cadre concret du civisme, a survécu tant bien que mal, à plus d’un siècle d’empiètemen
752 ermédiaire des communes, des régions défavorisées du territoire. Même dans les nations les plus centralisées, comme la Fra