1
ou le Total, ou l’Être, Ramakrishna disait : « Il
n’
y a aucune différence, que vous l’appeliez ‟Toi” ou que vous pensiez ‟
2
z ‟Toi” ou que vous pensiez ‟Je suis Lui”. » S’il
n’
y avait « aucune différence », il n’y aurait pas non plus d’antinomie
3
Lui”. » S’il n’y avait « aucune différence », il
n’
y aurait pas non plus d’antinomie foncière entre la foi chrétienne de
4
il faut voir aussi que l’union finale des esprits
ne
sera jamais acquise au prix du sacrifice de nos diversités vivantes ;
5
durée. Une sagesse supérieure et vraiment unitive
ne
naîtra pas d’aspirations mal informées, ni du refus de bien voir l’ét
6
», dit le proverbe. Mauvaise formule d’union, qui
ne
peut survivre à l’aube ! Si l’Orient et l’Occident doivent un jour co
7
ive, peut-être, cette parenté certaine au départ,
ne
rendent que plus frappante la divergence des évolutions ultérieures.
8
re-fond commun, les différences s’accusent. Elles
ne
cesseront de s’affirmer dans l’ensemble de notre histoire, nonobstant
9
tuation « orientale », la tendance individualiste
ne
pouvait trouver d’exutoire que dans l’aventure mystique. Le véritable
10
r, que par son dépassement réalisé. Mais l’Orient
n’
a pas eu de Renaissance. La durée même de son Moyen Âge, confronté tou
11
, elle éclate aux États-Unis dont le passé vivant
ne
remonte pas au-delà d’une post-Renaissance importée. En Inde, on ne v
12
delà d’une post-Renaissance importée. En Inde, on
ne
voit partout que pèlerinages, sanctuaires, lieux et quartiers de vill
13
sses. L’Occidental retour d’Orient s’écrie : « Je
n’
ai vu que des foules, pas une personne ! » Et l’Oriental qui circule d
14
’Oriental qui circule dans nos villes songe qu’il
n’
y voit qu’agitation désordonnée, absence de sens et d’harmonie, et pas
15
ient et de l’Occident 5. — L’Orient et l’Occident
ne
sont donc pas seulement des entités géographiques faciles à situer, s
16
historiques, dont les mélanges et superpositions
ne
seraient d’ailleurs pas moins féconds à étudier que leur distinction
17
rres, de disputes, de tumultes : « joie et beauté
n’
y sont qu’un emprunt procuré d’un lieu lointain ». Entre l’Orient et l
18
orable à l’Orient, de nos deux termes symboliques
ne
peut manquer d’impressionner. On ne saurait la réduire à rien d’accid
19
s symboliques ne peut manquer d’impressionner. On
ne
saurait la réduire à rien d’accidentel, de physique ou d’anecdotique.
20
cs, il en va de même pour les Hindous, et ceux-ci
ne
figurent pas pour autant l’Occident de la Chine ou de la Malaisie, ni
21
occidentale. Mais, du prestige de cet Orient qui
n’
est pas celui de l’atlas, l’Orient réel, qui va de la Perse au Japon b
22
ir. Un voyageur allemand9 demandait à un yogi : «
N’
avez-vous pas tenté, en Inde aussi, de calculer la quadrature du cercl
23
ant. Les deux mouvements — descente et remontée —
ne
sont qu’apparemment superposables ; car il s’agit en réalité dans le
24
sance du divin non par le « saut de la foi », qui
ne
procure pas une connaissance suffisante, n’ouvre pas une voie vérifia
25
, qui ne procure pas une connaissance suffisante,
n’
ouvre pas une voie vérifiable et qu’on puisse librement parcourir ; ma
26
et si maître de lui qu’il soit, un dieu lui-même
ne
peut sans le yoga atteindre la libération. » (Yoga-anka.) Pour l’Occi
27
agues (sur la nature de l’atome, par exemple) qui
ne
permettent pas de refaire le chemin à volonté par l’intellect et par
28
aiment réel ? S’identifier à l’Un, à la divinité,
ne
serait-ce pas, pense l’Occidental, une illusion psychologique chez le
29
et peut-être demain de la vie, pense l’Oriental,
n’
est-ce pas régner sur la Maya ? Et chacun sera tenté de tenir pour ill
30
xplications les plus sincères données par l’autre
ne
sont en vérité que des implications de son option fondamentale. Tauto
31
ou de leur jugement de valeur. Pourtant la chose
ne
me paraît pas si simple, et j’y sens une complexité dont j’essaierai
32
inq personnes sur une seule bicyclette ! Ces gens
ne
seront-ils jamais seuls ? L’individu peut-il vraiment compter, dans c
33
es : il s’agit de légendes sacrées. Jamais la vie
ne
m’a paru plus solennelle ni plus simplement adorable. Tintements de c
34
e liturgie, d’église organisée. L’Hindou grégaire
n’
est seul que devant le divin. L’Occidental, jaloux de sa vie privée, s
35
s chœurs. Messes de Mozart, Passions de Bach : je
ne
sais rien de plus européen, ni de plus véritablement communautaire. N
36
Kassner, essayiste autrichien de génie. Personne
n’
a mieux traduit l’impression qui submerge l’Européen livré à l’Inde, i
37
me inexact s’il fait penser à « collectif », à je
ne
sais quoi d’organisé ou d’encadré. Je cherchais à dire autre chose. K
38
corps spiritualisé, sans Moi, ou avec un Moi qui
n’
est qu’un simple centre. L’homme magique, le corps magique n’a pas d’i
39
simple centre. L’homme magique, le corps magique
n’
a pas d’ironie ni de paradoxe, parce qu’il n’a ni contraire ni contrad
40
ique n’a pas d’ironie ni de paradoxe, parce qu’il
n’
a ni contraire ni contradiction. » Dépourvu de sensibilité au sens du
41
esprit révolutionnaire, ignorant la curiosité, il
ne
peut avoir cure ni de ses droits distincts, ni de sa chance, ni d’un
42
ntent si peu dans son existence que rien au monde
ne
semble moins le mettre en danger ou le compromettre que le mystificat
43
ons de liberté, action, de personne et d’histoire
n’
ont plus de pointe ni de but. Le monde magique est en forme de Boule,
44
sont en contradiction, tension ou dissension, et
ne
cessent de refaire le signe de la Croix. Je disais que la voie de l’i
45
dividu en Inde, comme celle du mystique médiéval,
ne
peut être que fuite en l’Absolu. Ainsi le moi devient conscient et se
46
opposition : panthéisme ou Dieu personnel. Car il
n’
est pas de personne sans un Dieu qui interpelle. Et l’Orient ne connaî
47
personne sans un Dieu qui interpelle. Et l’Orient
ne
connaît rien de tel. Soit qu’on pense qu’il n’y a pas de Dieu — selon
48
nt ne connaît rien de tel. Soit qu’on pense qu’il
n’
y a pas de Dieu — selon le système Sankya et le bouddhisme — soit qu’o
49
sme — soit qu’on pense, selon l’Advaïta, que Dieu
n’
« existe » pas mais qu’il est Tout, et que le Tout ou le Réel n’est qu
50
as mais qu’il est Tout, et que le Tout ou le Réel
n’
est que le Moi pleinement réalisé et accompli (That Thwam Asi) — il n’
51
inement réalisé et accompli (That Thwam Asi) — il
n’
y a pas plus de personne dans la gnose hindouiste que de moi distinct
52
ste que de moi distinct dans le bouddhisme. Qu’il
n’
y ait point de Dieu, ou que Je sois le Tout, dans les deux cas l’Autre
53
e Tout, dans les deux cas l’Autre s’évanouit ; il
n’
est pas de dialogue possible, ni d’appel, ni donc de vocation, ni par
54
ishna que je citais en tête de ce chapitre : « Il
n’
y a aucune différence, que vous l’appeliez Toi ou que Vous disiez Je s
55
noire. Il est ainsi montré que l’élément masculin
n’
est pas absent de la région du yin tandis que l’élément féminin reste
56
gues, cette relation d’inter-présence des opposés
n’
est pas moins évidente dans les zones respectives de l’Orient et de l’
57
ou de grands physiciens en Orient ? Mais personne
n’
a l’idée de parler de l’Orient scientifique, ou de l’Occident mystique
58
s (condamnées et souvent détruites), tandis qu’il
ne
manque pas d’écoles hindoues pour affirmer la réalité du Moi, l’actio
59
hesse en contradictions apparentes. Nos mystiques
ne
font pas nos mœurs, en Occident. Ils se fondent sur la négation de no
60
d’Orient dans notre sphère. En revanche, l’Orient
ne
connaît pas d’Églises. La Bible et les Vedas n’ont vraiment rien de c
61
t ne connaît pas d’Églises. La Bible et les Vedas
n’
ont vraiment rien de commun, et l’usage qu’on en fait n’est pas du tou
62
vraiment rien de commun, et l’usage qu’on en fait
n’
est pas du tout le même. La foule de Bénarès n’est pas la foule de Lou
63
it n’est pas du tout le même. La foule de Bénarès
n’
est pas la foule de Lourdes, même si l’on pense que Dieu reconnaîtra l
64
oyance à la métempsycose est plus naturelle qu’on
ne
le pense à l’esprit des Occidentaux, mais elle n’a pas d’effet dans l
65
ne le pense à l’esprit des Occidentaux, mais elle
n’
a pas d’effet dans leur vie religieuse, moins encore dans leur vie soc
66
évélatrices de l’Orient et de l’Occident, et rien
n’
illustre mieux la divergence réelle des résultantes majeures dont je p
67
toute la garde des créneaux ; l’autre le pria de
n’
en rien faire, tout en confessant qu’il ne saurait attendre de ses vas
68
pria de n’en rien faire, tout en confessant qu’il
ne
saurait attendre de ses vassaux une telle docilité […]. Et chaque Eur
69
respecte en l’homme un noyau de liberté auquel il
n’
est pas permis de porter atteinte. Ce qui s’y passe, et ce qui en prov
70
tteinte. Ce qui s’y passe, et ce qui en provient,
ne
peut naître que du libre arbitre, sous peine de devenir vain, et même
71
ent. La réaction de nos deux auteurs occidentaux
n’
est pas moins significative, pour notre objet présent que les histoire
72
ine13. Pourtant, l’adoration de la vie en général
n’
entraîne pas le respect de la vie humaine. La Bhagavad-Gita, qui n’a r
73
respect de la vie humaine. La Bhagavad-Gita, qui
n’
a rien de bouddhique, enseigne que la mort étant le sort commun, tuer
74
, enseigne que la mort étant le sort commun, tuer
n’
est vraiment grave qu’aux yeux de l’ignorance. Qu’on découpe la victim
75
e la victime en tranches ou qu’on l’épargne, elle
ne
sera pas sauvée de la nécessité de renaître un millier ou cent-millie
76
solue valeur de la personne dans chaque individu,
n’
en a pas moins connu les tortures, les bûchers, la guillotine et les m
77
on Jünger, devant la cruauté des Orientaux ? Nous
ne
sommes pas moins cruels, mais nous le sommes autrement. Car nous le s
78
s le drame, eux selon la magie. Nulle « sagesse »
ne
nous innocente ; au contraire, notre foi nous condamne. La cruauté de
79
e est divine, et nous sommes criminels. Si le moi
n’
est qu’une illusion temporaire, celui qui tue ne détruit rien qui comp
80
i n’est qu’une illusion temporaire, celui qui tue
ne
détruit rien qui compte ; mais au contraire, si le moi libre et uniqu
81
nique est une réalité tenue pour inviolable, rien
ne
peut justifier notre délire guerrier. Je ne juge pas. Je constate. Il
82
rien ne peut justifier notre délire guerrier. Je
ne
juge pas. Je constate. Il y a des différences. Et mon propos n’est pa
83
e constate. Il y a des différences. Et mon propos
n’
est pas de les mettre en relief pour inciter le lecteur à des comparai
84
’avantage de l’un ou de l’autre « camp » : car il
n’
y a pas de camps, ni de lutte engagée, ceci soit dit ici une fois pour
85
infinie complexité de leurs données nous oblige à
n’
examiner que des prises partielles et typiques. On a vu que j’ai chois
86
xemples dans le domaine religieux, de préférence.
N’
est-ce pas là que l’irritante question de la « supériorité » de ceci s
87
ins de sens, et de fait perd sa pointe, puisqu’on
n’
y dispose pas d’éléments mesurables, comme ce serait le cas au plan de
88
et religieux de l’Inde qui conçoivent que le Tout
n’
est autre que le Je pleinement réalisé. 2. C’est l’attitude générale
89
e pendant longtemps par le barrage de l’islam, et
n’
a pu s’esquisser qu’à partir du xixe siècle ; la seconde s’opère sous
90
cident, c’est la Grèce d’Aristote, et leur Orient
n’
est pas l’Inde ou la Chine, mais celui de la mystique « illuminée » de
91
ns son sens strict, initiatique et religieux, qui
ne
doit pas être confondu avec « conservateur », « routinier », « réacti
92
dividuelle, et que le but de la recherche humaine
ne
peut pas être le progrès ou l’invention, mais l’identification du che
93
)c 1. Il suffit de s’éloigner de l’Europe dans
n’
importe quelle direction pour sentir la réalité de notre unité de cult
94
ir à cela quelque raison. Tout bien considéré, je
n’
en trouve pas de meilleure que cette fameuse communauté de culture qui
95
que nous vivons la définit avec une précision qui
ne
pardonne pas : celle du ressentiment, de l’envie, voire de la haine,
96
les mêmes qui, faisant demi-tour, déclarent qu’on
ne
peut unir notre vieux continent à cause des profondes différences qui
97
s qui séparent nos nations depuis des siècles. Il
n’
y aurait donc, à les en croire, pas de différences bien notables (dans
98
oire, qui est l’union nécessaire de l’Europe. (Je
ne
parle pas ici de politique, mais seulement de formes d’esprit et de m
99
invoqué sans fatigue contre l’union de l’Europe,
n’
est qu’une étourderie aux yeux de l’historien et de l’observateur des
100
tes. Or il se trouve que l’argument, précisément,
n’
est pas soutenable au plan de la nation. Comment le serait-il donc au
101
nsulaires et Continentaux, Suédois et Grecs (pour
ne
parler que de géographie, d’histoire récente et de modes de vie, mais
102
e l’Appenzell et banquiers protestants de Genève,
n’
ont pas empêché l’unification nationale de la France, de l’Allemagne,
103
ses — pas plus que cette unification, d’ailleurs,
n’
a supprimé ces différences. (Encore que les écoles d’État s’y soient e
104
y soient efforcées depuis un siècle : or personne
n’
a jamais attendu rien de pareil d’un État fédéral européen.) Ainsi l’o
105
ontrastes entre Suédois et Grecs, par exemple, il
n’
en reste pas moins qu’un Suédois lisant Kazantzaki, un Grec lisant Sel
106
t — et cela dure depuis des années — que l’Europe
n’
existe pas comme entité géographique et historique, car ses frontières
107
té géographique et historique, car ses frontières
n’
ont pas cessé de se déplacer au cours des temps. Elle ne serait donc d
108
pas cessé de se déplacer au cours des temps. Elle
ne
serait donc définissable que par sa culture, qui ne l’est guère. Conc
109
serait donc définissable que par sa culture, qui
ne
l’est guère. Conclusion : il n’y a pas d’Europe, et si l’on en veut u
110
r sa culture, qui ne l’est guère. Conclusion : il
n’
y a pas d’Europe, et si l’on en veut une, il faudra l’inventer. Ce qui
111
si l’on en veut une, il faudra l’inventer. Ce qui
ne
facilite guère l’œuvre d’union… Ainsi jouent les sophistes, et le lec
112
pport avec le drame qui vient. Au vrai, tout cela
n’
a de sens que pour les professeurs. Ceux-ci doivent circonscrire exact
113
tement l’objet d’un éventuel enseignement ; s’ils
n’
arrivent pas à le définir, ils le réputent inexistant selon les normes
114
parlementaire connu sous le nom de filibuster. Je
n’
en citerai qu’un exemple qui me tombe sous les yeux pendant que j’écri
115
l’Europe, M. Berl estime aujourd’hui que l’Europe
n’
est pas une entité, mais une pure et simple expression. En effet, selo
116
expression. En effet, selon le thème connu, elle
ne
se localise guère mieux dans le temps que dans l’espace […]. On a vou
117
toute l’Europe de l’Est. La naissance de l’Europe
ne
nous est pas mieux connue que ses limites. L’Europe ne serait-elle d
118
s est pas mieux connue que ses limites. L’Europe
ne
serait-elle donc pas née du tout, parce qu’on ne s’accorde pas sur sa
119
ne serait-elle donc pas née du tout, parce qu’on
ne
s’accorde pas sur sa date de naissance ? Mais le même raisonnement co
120
on. En privant le concept Europe de son passé, on
ne
tend à rien de moins qu’à miner son avenir, et l’on déprime l’élan ve
121
tuition précise, plusieurs années auparavant ? Ou
n’
aurait-elle pris forme et nom qu’à mi-chemin du travail entrepris, qui
122
t, la prise de conscience d’une entité européenne
ne
peut être attestée à l’aide de documents qu’à partir de l’an 1300 : l
123
tionales, apparu au xixe siècle. Qu’as-tu que tu
n’
aies reçu ? dit l’Europe aux nations. Elles seraient bien en peine de
124
n vérité, sur ce plan-là, nulle réalité créatrice
ne
se confond avec les limites accidentelles et souvent fort récentes d’
125
d’un de nos États. Mais sur les autres plans, qui
ne
voit du premier coup que les réalités décisives ont cessé d’être nati
126
encore, il serait absurde de le contester : elle
ne
peut rien sauver, mais elle pourrait tout perdre. Gardons-nous de la
127
atriotisme, avec le réalisme politique. La patrie
n’
est pas la nation, elle est en général beaucoup plus petite. La nation
128
énéral beaucoup plus petite. La nation culturelle
n’
est pas l’État, elle est en général beaucoup plus grande. Et si l’on c
129
acines, voilà qui est vrai, le reste est mythe…)
N’
est-il pas temps de faire voir à ces nationalistes qu’une Europe fédér
130
e de sauver le concret de nos vies nationales, et
n’
en sacrifierait que l’illusoire, j’entends ce qui est déjà perdu de to
131
tends ce qui est déjà perdu de toute façon et qui
ne
pourrait être récupéré — pour autant que ce soit désirable — qu’au ni
132
re (si elle est le droit d’un groupe à faire ou à
ne
pas faire la guerre quand il l’entend) ; la prospérité sans doute (si
133
ndépendance assurément (si elle est le pouvoir de
ne
pas subir la loi d’une puissance étrangère)… Tout cela suppose le dév
134
us vaste, plus ancien, et plus fort désormais que
ne
l’est aucune de nos nations. Or cet ensemble humain n’est encore, auj
135
est aucune de nos nations. Or cet ensemble humain
n’
est encore, aujourd’hui, qu’un fait de culture au sens large. Prendre
136
ous débouchons ici dans le domaine politique, qui
n’
est autre, à mon sens, que celui des moyens d’ordonner l’existence d’u
137
l’existence d’un groupe humain. Or un tel groupe
ne
saurait être défini par son cadre institutionnel, mais par un style d
138
ort entre forme et contenu. Une politique d’union
ne
devient possible que s’il y a tout d’abord communauté de culture entr
139
u’elle envisage d’unir. Cette politique, ensuite,
ne
sera valable que si elle exprime, traduit et tend à préserver ce qu’i
140
ait revêtir une union authentiquement européenne,
ne
saurait être que fédéraliste. En effet, nos diversités constituent le
141
tre créativité, dans la mesure toutefois où elles
ne
s’isolent pas ni ne se mélangent indiscernablement, mais demeurent en
142
la mesure toutefois où elles ne s’isolent pas ni
ne
se mélangent indiscernablement, mais demeurent en tension — autonomes
143
anuel Berl (mai 1957)d e Je crains que M. Berl
ne
mobilise la Vérité, la Raison, la Justice, le Droit, et Romain Rollan
144
r d’un épouvantail auquel il accroche mon nom. Je
n’
attaquais rien de ce qu’il défend avec tant de passion et de juste col
145
Europe reste à « faire » ; je dis seulement qu’on
ne
peut la vouloir et la faire — donc l’unir par des liens fédéraux — si
146
te comme entité de culture et Aventure unique. Je
ne
pense pas avoir recommandé l’imposture ou la tyrannie, le refus du Dr
147
: « Je sentais l’urgence de rappeler que l’Europe
ne
peut et ne doit pas être regardée comme une entité ni comme une fin,
148
ais l’urgence de rappeler que l’Europe ne peut et
ne
doit pas être regardée comme une entité ni comme une fin, mais comme
149
me prouve que l’urgence était plus grande que je
ne
pensais. Il regarde comme “sophistes” ceux qui disent que l’Europe ne
150
de comme “sophistes” ceux qui disent que l’Europe
ne
sera pas, si on ne la fait pas être : la plupart des “européens” fure
151
” ceux qui disent que l’Europe ne sera pas, si on
ne
la fait pas être : la plupart des “européens” furent donc des sophist
152
phistes. Guéhenno dirigeait la revue : Europe, il
ne
pensait pas que l’Europe fut déjà faite. M. de Rougemont me dit qu’il
153
? Et à Leipzig, avec Napoléon ou contre lui ? Il
ne
suffit pas d’ignorer quand une personne est née pour avoir la certitu
154
t veut qu’elle fasse déjà sonner le sabre qu’elle
n’
a pas encore. Est-ce ma faute si elles ne se ressemblent pas. La “fili
155
qu’elle n’a pas encore. Est-ce ma faute si elles
ne
se ressemblent pas. La “filibusterie” consiste-t-elle à les distingue
156
et exploitaient ceux qu’elle devait secourir. Je
ne
prônerai l’Europe ni contre la Vérité, ni contre la Raison, ni contre
157
e hausser les épaules et de répondre : “Tout cela
n’
a de sens que pour les professeurs.” Le mensonge n’est pas mon fort, f
158
’a de sens que pour les professeurs.” Le mensonge
n’
est pas mon fort, fût-ce pour “favoriser l’union”. Je m’en excuse. »
159
t, au nom de la réaction ou de la révolution, ils
ne
nous parlaient plus que d’une Crise de l’Esprit, d’une Décadence de l
160
anonymes, la machine, la police et l’État. Orwell
n’
eut qu’à pousser un peu plus loin. Il n’eut qu’à mettre au point l’exe
161
t. Orwell n’eut qu’à pousser un peu plus loin. Il
n’
eut qu’à mettre au point l’exemple soviétique, à l’étendre à l’Europe
162
éen avait trouvé son expression suprême. Et Kafka
n’
était plus que le Jean-Baptiste d’une sorte d’Évangile à rebours, « ma
163
ée par Sartre, triomphait dans une génération qui
n’
avait appris que le mensonge. Ses pouvoirs de résistance à Big Brother
164
’est quatre-vingt-quatre inversé. Jamais chiffres
ne
furent plus chargés de symboles. Essayons de les interpréter. Tout c
165
pessimiste, ou les deux à la fois, sous peine de
ne
plus compter. Inutile de citer des noms : ce seraient ceux, justement
166
e et persuadé de la valeur des conventions ; mais
n’
est-ce pas lui qui ouvrit, en 1919, le grand courant du pessimisme eur
167
de Dostoïevski. Il est remarquable que ce siècle
n’
ait retenu du précédent que les génies antisociaux, les héros du refus
168
le domaine de l’éthique et de l’esprit. Mais rien
ne
compte en fait que par la bourgeoisie. C’est elle seule, par ses fran
169
elle avait elle-même dépossédé les nobles, qu’il
ne
peut imposer qu’un régime soviétique, et qu’Orwell a dit vrai malgré
170
ec un zèle amer et quelque peu sadique. Ce succès
n’
est pas dû à la lecture de leurs œuvres ardues et complexes, mais à l’
171
ir de se passer dans le monde comme si ces choses
n’
existaient pas. Les grands industriels se croyaient « philanthropes »
172
lle sur l’avenir du despotisme russe !) voilà qui
n’
empêche pas que ces deux grands génies aient puissamment modelé le xxe
173
s à coups de mensonges. Si les ouvriers de Czepel
ne
sont pas des « fascistes importés », la dialectique n’est plus qu’une
174
nt pas des « fascistes importés », la dialectique
n’
est plus qu’une « mystification » comme eût dit Marx lui-même, et le «
175
t d’opposition redevient créateur. Et la question
n’
est plus de supputer le « sens inévitable » de l’Histoire, mais de la
176
toute l’Europe, mais aussi en Asie, et plus qu’on
ne
pense en URSS, n’aurait-il pas créé l’illusion romantique d’un renouv
177
is aussi en Asie, et plus qu’on ne pense en URSS,
n’
aurait-il pas créé l’illusion romantique d’un renouveau de la liberté,
178
dants d’ailleurs des récents événements de l’Est,
ne
venaient corroborer un optimisme neuf. Budapest a gagné sa partie — m
179
gagné sa partie — moralement. Admettons que cela
n’
est pas tout. Mais qu’en est-il de l’Occident ? Trois représentations
180
gion des « progressistes ». Voyons les faits. Nul
n’
ignore que l’ouvrier américain est le plus riche du monde, l’ouvrier s
181
tique l’un des plus pauvres. Cet argument concret
n’
inquiète pas les marxistes mais les jette dans des crises aiguës de di
182
t de l’URSS, a montré que l’entreprise communiste
n’
apporte rien qui la distingue essentiellement de l’entreprise capitali
183
ste l’URSS qui se trouve dans la première. » « Il
n’
empêche que l’URSS est l’avenir ! », répéteront nos maniaques de l’His
184
rois réfugiés en Autriche et libres de parler. Il
n’
en reste pas moins frappant de constater que l’avenir, aux yeux de ces
185
ater que l’avenir, aux yeux de ces Hongrois, s’il
n’
est pas l’URSS n’est pas non plus l’Europe… On devine, pour quelles ra
186
, aux yeux de ces Hongrois, s’il n’est pas l’URSS
n’
est pas non plus l’Europe… On devine, pour quelles raisons. Mais que v
187
sa nécessité est inscrite dans les faits, si elle
ne
l’est pas encore dans l’esprit des nationalistes attardés. Aucun de n
188
it des nationalistes attardés. Aucun de nos États
ne
peut se défendre seul. Aucun ne peut faire la guerre sans lever la ma
189
ucun de nos États ne peut se défendre seul. Aucun
ne
peut faire la guerre sans lever la main pour demander la permission —
190
demander la permission — qu’on lui refuse. Aucun
ne
peut garder seul ses colonies. Aucun ne peut vivre en autarcie économ
191
se. Aucun ne peut garder seul ses colonies. Aucun
ne
peut vivre en autarcie économique, ni commercer comme il l’entend. Au
192
mique, ni commercer comme il l’entend. Aucun donc
n’
est indépendant. Mais ils peuvent l’être tous ensemble, et ils commenc
193
aux Soviétiques et aux Américains additionnés. Je
ne
parle que des chiffres, non de la qualité. Alors les prophéties lugub
194
re de mille ans. » Au fait, nous en sommes là, ce
n’
est plus une hypothèse. L’Histoire dépend de nouveau de ce que nous en
195
uter la terre. J’entends cela tous les jours. Qui
ne
l’a pas dit ? Curieusement, tout est faux dans ce langage ; tout n’es
196
urieusement, tout est faux dans ce langage ; tout
n’
est que manière de parler abusivement prise à la lettre, et donc fauti
197
ar elles sont très chères. Mais jamais une Talbot
n’
est entrée dans ma cour, spontanément, dans l’intention de m’envahir.
198
est toujours quelqu’un qui l’actionne. Comme vous
ne
savez pas qui, et que le bruit vous agace, vous vous décidez à répond
199
it vous agace, vous vous décidez à répondre. Vous
n’
êtes donc pas l’esclave du téléphone, mais de votre seule curiosité. L
200
e plaindre. Vous citez l’apprenti sorcier. Et qui
ne
l’a pas cité, quel journaliste ? En pensant à la Bombe, bien sûr. Mai
201
? En pensant à la Bombe, bien sûr. Mais la Bombe
n’
a jamais rien fait sans l’ordre exprès d’un président, d’un général. C
202
s l’ordre exprès d’un président, d’un général. Ce
n’
est pas elle qui est dangereuse, c’est l’homme. Et les cerveaux électr
203
me. Et les cerveaux électroniques (par métaphore)
ne
font rien qu’on ne leur ait prescrit. Qu’ils travaillent pour nous, c
204
électroniques (par métaphore) ne font rien qu’on
ne
leur ait prescrit. Qu’ils travaillent pour nous, c’est tant mieux. Ma
205
qui aient eu le droit de maudire la technique, ce
ne
sont pas les bourgeois de ce siècle, ni leurs penseurs, mais bien les
206
à ce mot synthétique. Qu’est-ce qu’un robot ? Ce
n’
est pas un homme automatique, comme des millions de personnes le croie
207
des travaux monotones, épuisants ou dangereux. On
ne
connaît rien au monde de plus inoffensif. En revanche, l’invention du
208
en son temps par Karl Marx et Proudhon, que l’on
n’
écoutait pas, tenait à la semi-automatisation de la production industr
209
gmenter le mal si longuement déploré par ceux qui
ne
le subissaient pas, peut dès maintenant délivrer l’ouvrier des servit
210
nos illusions mais aussi de nos scepticismes. Ce
n’
est pas l’accroissement de nos biens, ni la solution de nos maux, car
211
s il y a trop à dire, et d’autres vont parler. Je
n’
étais pas venu pour conclure, mais pour ouvrir des portes. f. Rouge
212
, quelqu’un qui se levait pour déclarer : Mais ce
n’
est pas possible ? Rougemont ? Un Suisse ? Un étranger ? J’ai donc auj
213
photographier, moi, auprès du Maréchal ? Moi qui
ne
suis que lieutenant dans l’armée suisse ? » L’Aventure de l’homme oc
214
ver en Amérique, pour savoir que l’Europe existe,
ne
serait-ce que dans l’esprit des Américains qui ne veulent pas savoir
215
ne serait-ce que dans l’esprit des Américains qui
ne
veulent pas savoir qu’il y a ici des frontières. L’Italie, la France,
216
ntière est en train de s’occidentaliser. Personne
ne
se convertit au mode de vie de l’islam, mais voyez la Chine, voyez l’
217
e de l’islam, mais voyez la Chine, voyez l’Inde :
ne
se mettent-elles pas à l’heure européenne ? L’Europe dévore les nuits
218
les nuits et les jours de Denis de Rougemont. Il
ne
peut écrire de livres qu’entre onze heures du soir et quatre heures d
219
he, en considérant que, par exemple, la puissance
n’
est pas une fin juste. Le second ouvrage essaiera de situer cette mora
220
nger à l’auteur de ce Nicolas de Flue dont nous
n’
avons pas encore eu la représentation scénique, nous satisfaisant de l
221
ré de justesse des mains de l’éditeur avant qu’il
ne
soit livré à l’imprimeur. Mais je n’ai pas renoncé. Je prends des not
222
avant qu’il ne soit livré à l’imprimeur. Mais je
n’
ai pas renoncé. Je prends des notes. Au fait, je considère et rédige c
223
et de plus exaltant. Voilà l’Europe suprême, elle
n’
ira pas plus haut, peut-être ; mais qui serait en mesure d’exiger dava
224
mets, mais ce sont tout de même ses sommets. Elle
n’
est pas souvent digne de ces œuvres, mais c’est elle qui les a créées.
225
s sont criants, et tout Bandung les crie, mais il
n’
entend pas nos grandeurs, car la musique est le sublime de l’Occident,
226
ici qu’une réflexion sur nos valeurs occidentales
ne
saurait être académique ; elle s’inscrit dans une situation dominée p
227
us simple, je crois : la diffusion de nos valeurs
n’
est pas co-extensive avec celle de nos produits et n’en est pas non pl
228
st pas co-extensive avec celle de nos produits et
n’
en est pas non plus contemporaine ; elle reste loin derrière dans l’es
229
a civilisation occidentale, on s’aperçoit qu’elle
n’
est pas loin de recouvrir l’ensemble des terres habitées, mais que la
230
, est demeuré sans nul doute moins occidental que
ne
le sont devenus le Canada, le Chili ou l’Australie. Vient ensuite l’e
231
li, cela nous amuse et c’est utile, mais pourquoi
n’
y joignez-vous pas un petit livre expliquant d’où viennent ces objets,
232
nt une chanson dans le goût de ce pays ; mais ils
ne
purent écrire que de petites mélodies qui ne rappelaient rien de leur
233
ils ne purent écrire que de petites mélodies qui
ne
rappelaient rien de leur musique indonésienne et ne faisaient que réi
234
rappelaient rien de leur musique indonésienne et
ne
faisaient que réinventer les lieux communs de chansons européennes qu
235
les lieux communs de chansons européennes qu’ils
ne
connaissaient pas. Ainsi chaque machine exportée est, en fait, un che
236
ens, appelant d’autres ensembles de valeurs, mais
ne
pouvant les communiquer, les expliquer et les faire vivre. Les troi
237
principes procèdent en réalité de nos valeurs, et
ne
trouvent que par elles, dans le champ magnétique qu’elles définissent
238
a croyance profonde que le cosmos, créé par Dieu,
n’
est pas absurde ni soumis aux caprices des divinités monstrueuses ; il
239
age de ces produits et le recours à ces principes
ne
peuvent aller sans impliquer le système de valeurs dont ils procèdent
240
en Algérie nous en donne un exemple tragique. Il
ne
s’agit nullement ici de politique, et ce n’est qu’en vertu d’un accid
241
e. Il ne s’agit nullement ici de politique, et ce
n’
est qu’en vertu d’un accident de l’histoire que la France paraît seule
242
s se conçoivent : ou bien garder pour nous ce qui
ne
peut que troubler et déséquilibrer les autres, ou bien imposer nos va
243
ait que « Naples est la seule ville orientale qui
n’
ait pas de quartier européen ». h. Rougemont Denis de, « Le rôle mon
244
t les valeurs occidentales même dans les pays qui
ne
se sentent pas ou ne se veulent pas des nôtres. L’Occident apporté à
245
tales même dans les pays qui ne se sentent pas ou
ne
se veulent pas des nôtres. L’Occident apporté à l’humanité des connai
246
ope sans frontières ?[préface] (1958)j L’homme
ne
vit pas de pain seulement, mais ne vit pas longtemps sans pain. Ainsi
247
8)j L’homme ne vit pas de pain seulement, mais
ne
vit pas longtemps sans pain. Ainsi de l’Europe. Pour unir les 332 mil
248
éussite dans douze ans d’institutions économiques
ne
peut évidemment suffire ; mais leur échec serait bientôt mortel. Or l
249
une Grande Europe associée aux nations africaines
ne
supposent pas seulement une politique à long terme, mais aussi et peu
250
me s’ils sont édités en librairie ; leurs auteurs
ne
prévoient d’être lus que par leurs étudiants et leurs collègues. Entr
251
Mais qui le fait ? Les experts des gouvernements
ne
sont pas libres. Les chercheurs libres ne sont pas groupés. C’est pou
252
nements ne sont pas libres. Les chercheurs libres
ne
sont pas groupés. C’est pourquoi le Centre européen de la culture a j
253
ées en Europe ? Telle était la règle du jeu. Nous
ne
demandions pas comment faire pour obtenir l’union économique, mais su
254
’intellectuels et suivi par beaucoup de députés —
n’
hésite pas, lui, à jouer le jeu de « ce qui se passerait si… » Seuleme
255
uer perdant, à préjuger de catastrophes dont rien
ne
prouve qu’elles se produiraient. Il ne croit guère qu’à des fantômes,
256
dont rien ne prouve qu’elles se produiraient. Il
ne
croit guère qu’à des fantômes, tandis que les experts croient aux chi
257
une fédération européenne, et il le faut. Mais on
ne
peut pas créer une culture européenne et personne ne l’a jamais deman
258
peut pas créer une culture européenne et personne
ne
l’a jamais demandé, pour la simple raison qu’une culture ne se crée p
259
ais demandé, pour la simple raison qu’une culture
ne
se crée pas comme une institution, et qu’au surplus la culture europé
260
tre union nécessaire. Ceux qui disent redouter on
ne
sait qu’elle « uniformisation culturelle » comme conséquence lugubre
261
naturelles (chaînes de montagnes ou rivières). On
ne
perdra pas son temps à expliquer que tout est faux dans ces notions,
262
! courantes, mais qu’aucune science digne du nom
ne
cautionne plus19. Le seul problème sérieux qui doit nous occuper est
263
adies chroniques de notre culture millénaire. On
ne
fera pas l’Europe sans sa culture, car ce serait faire l’Europe sans
264
divisions mortelles qui s’opposent à l’union. On
ne
fera pas l’Europe en répétant qu’il est indispensable de s’unir : tou
265
le sait ; ni en ratifiant des traités : personne
n’
y croit. (On attend de voir…) Et certes il fallait dire : unissons-nou
266
est acquise non la condition suffisante. Celle-ci
ne
sera pas donnée par la fatalité, qui joue toujours perdant sur l’homm
267
vérités primordiales, à savoir : 1° que l’Europe
n’
a dû sa puissance qu’aux inventions, procédés et systèmes de tous ordr
268
on fut inaugurée à Genève le 7 octobre 1950. Elle
n’
est rattachée à aucune organisation internationale officielle, ni à au
269
lturel » peut servir à désigner (sinon à définir)
n’
est pas un mal en soi, bien au contraire. Cette multiplicité traduit l
270
ité et des tensions fécondes de notre culture. Il
ne
s’agit nullement de les uniformiser. Cependant, il est urgent de leur
271
une politique commune, se contredisent souvent et
ne
convergent jamais, faute d’une institution unique et compétente. L’Eu
272
llent des solutions qu’aucun de nos États-nations
ne
peut élaborer, et moins encore faire accepter à lui tout seul. Ces di
273
tout évident. En retour, nos différentes nations
ne
pourront engager le dialogue nécessaire avec les autres traditions de
274
orne à poser des questions, dans un domaine où il
n’
en sait guère plus que le citoyen raisonnable et moyen. L’autre répond
275
les réduise à la raison. Mais pourquoi la raison
n’
a-t-elle pas plus de force ? Pourquoi les masses suivent-elles leur «
276
Freud répond de sa Vienne natale en sursis — elle
n’
en aura plus pour longtemps — et le pacifisme d’Einstein se voit soumi
277
s, mais dénué d’illusions. Non, la force, dit-il,
n’
est pas le contraire du droit. Car le droit n’est en somme qu’une autr
278
il, n’est pas le contraire du droit. Car le droit
n’
est en somme qu’une autre forme de la violence inévitable. C’est la vi
279
ion de plusieurs faibles ». La violence d’un seul
ne
peut être brisée que par l’union de ses victimes, fondant sur l’intér
280
« plus vaste unité ». Mais la Société des Nations
ne
dispose pas d’une force à son échelle et ne provoque pas l’« identifi
281
tions ne dispose pas d’une force à son échelle et
ne
provoque pas l’« identification » créatrice de communauté. Passant au
282
trop longue échéance ? Sans aucun doute. Mais on
ne
peut prendre son parti de la guerre, pourtant « biologiquement fondée
283
i « règne » en Occident, il y a beau temps que ce
n’
est plus une classe ! Les décisions qui font l’histoire concrète, et l
284
e l’union de ses victimes. Mais, comme en fait il
n’
y avait pas d’union, cela revenait à opposer aux chars d’Hitler une fo
285
u d’une force à sa mesure. Il la cherche en vain,
ne
voit rien… Et c’est à lui que Freud écrit prophétiquement, à lui parm
286
cret sans le savoir ! Rêvons là-dessus. Einstein
n’
a pas cessé de protester contre le péril atomique, ni d’afficher un pa
287
proposant à Roosevelt de fabriquer la bombe. Tout
ne
s’est-il point passé comme si le calcul profond du daimôn qui habitai
288
sible ? En fait, la situation s’est renversée. Ce
n’
est pas un super-État qui attend son arme, mais cette arme qui attend
289
e stratégique, commerciale et même culturelle. On
n’
insistera jamais assez sur le rôle décisif qu’il devait jouer dans la
290
de châteaux au nord de la Suisse actuelle, et qui
ne
cessaient d’étendre leurs domaines vers le Gothard. Lorsque Rodolphe
291
iques qu’il avait convoqués à Paris : « La Suisse
ne
ressemble à aucun autre État, soit par les événements qui s’y sont su
292
a fait votre État fédératif. Vouloir la vaincre,
ne
peut pas être d’un homme sage ». En conséquence, l’empereur se déclar
293
Alpes, le Jura, le lac de Constance et le Léman,
n’
était donc encore, après cinq siècles, guère plus qu’une simple Ligue
294
patriciennes pures ou mitigées. Un lien si lâche
ne
représentait en vérité qu’une faible garantie pour l’indépendance des
295
la création d’un État. Il est remarquable qu’ils
n’
aient pas cherché la solution de ce problème dans l’unification systém
296
stiques, religieuses, politiques et sociales. Ils
ne
se demandèrent pas : comment devenir une Nation ? mais bien : comment
297
taatenbund) à un État fédéral (Bundestaat). S’ils
ne
furent pas les seuls à poser ce problème, dans l’Europe du xixe sièc
298
ogrès appréciable, pendant trente-trois ans. Elle
ne
fut résolue, très subitement, en 1848, qu’au lendemain d’une guerre c
299
des et 50 poids différents. » Le régime monétaire
n’
était pas moins chaotique. « Incapables de s’entendre sur aucune mesur
300
ue l’on invoque aujourd’hui au plan européen pour
ne
pas corriger des erreurs analogues. Les cantons se montraient incapab
301
à l’égard des grandes nations voisines, mais ils
n’
hésitaient pas à décréter des mesures de blocus contre tel d’entre eux
302
des mesures de blocus contre tel d’entre eux. On
ne
comptait pas moins de 400 taxes et droits de péages sur les marchandi
303
tin, et il signale que le seul canton du Tessin «
ne
prélevait pas moins de treize taxes différentes sur la route du Gotha
304
suisse put survivre à de telles conditions, elle
ne
le dut qu’à l’initiative privée et à la haute qualité de sa main-d’œu
305
s Heinrich Zschokke). Politiquement, la situation
n’
était pas meilleure. Nulle autorité centrale et incontestée ne pouvait
306
meilleure. Nulle autorité centrale et incontestée
ne
pouvait parler au nom de la Suisse entière. La Diète représentant 25
307
é pratiquement requise pour les grandes décisions
n’
était jamais atteinte. (Les députés votaient sur instructions de leur
308
structions de leur État. La chancellerie fédérale
n’
était qu’un bureau chargé de préparer les affaires, et changeait de ré
309
rs à son gouvernement l’ambassadeur de France. Il
n’
exagérait pas. Que pouvait entreprendre, en effet, une Confédération q
310
ait entreprendre, en effet, une Confédération qui
ne
disposait que de contingents militaires levés et entretenus, chacun p
311
état-major, et quelques fonctionnaires, mais elle
n’
en dépendait pas moins du bon plaisir des cantons, dans ce domaine.) C
312
et non de députés des peuples : « Lequel de nous
n’
a dû souvent déplorer la forme actuelle des délibérations fédérales ?
313
sard, dans vingt-deux législatures, dont les unes
ne
connaissaient pas les motifs qui peuvent agir sur les autres… Ces dép
314
s de la Confédération et les hommes du canton… Il
n’
est, ce me semble, aucun motif de conserver un pareil état de choses…
315
motif de conserver un pareil état de choses… Rien
ne
milite en sa faveur, pas même la raison, d’ailleurs bien faible, de l
316
t les masses : « Oui, l’idée d’une commune patrie
ne
nous est point étrangère… Et quoi qu’en disent les détracteurs des te
317
rée, les cantons conservant « tous les droits qui
ne
sont pas expressément cédés au pouvoir fédéral ». La Ligue des canton
318
moderne de forme fédérative. L’éloquence de Rossi
ne
parvint pas à convaincre les partisans de l’esprit de clocher et de l
319
e langue, qui nous distingue des confédérés, nous
ne
pouvons vouloir un ordre de choses qui nous engagerait au sacrifice d
320
ques, où le parti conservateur restait le maître,
n’
hésitèrent pas à conclure une alliance séparée, le Sonderbund, et à né
321
rément, étaient amenés à la reddition. L’étranger
n’
avait pas eu le temps d’intervenir. Les vainqueurs se montrèrent génér
322
Commission, une seconde lecture et le vote final
ne
prirent en tout que six semaines. Le 27 juin, le projet était accepté
323
premier Conseil fédéral, inaugurant un régime qui
ne
devait plus être remis en question jusqu’à nos jours. L’essor économi
324
et calculées par les adversaires de la fédération
ne
se produisit. Souple synthèse des autonomies locales ou cantonales d’
325
de l’union d’autre part, la Constitution de 1848
ne
mérite pas seulement l’épithète de fédérale : elle est précisément fé
326
at à sept têtes et d’un cabinet de ministres ; on
ne
peut choisir plus d’un de ses membres dans le même canton. Un Tribuna
327
ons sont souverains en tant que leur souveraineté
n’
est pas limitée par la constitution fédérale, et, comme tels, ils exer
328
et, comme tels, ils exercent tous les droits qui
ne
sont pas délégués au pouvoir fédéral. Article 5. La Confédération ga
329
ance un peu plus centralisatrice) opérée en 1874,
n’
en ont changé depuis plus d’un siècle ni l’esprit ni le caractère spéc
330
ublicité des débats et le soin que l’on apporta à
ne
point passionner les esprits (au lendemain d’une guerre civile et rel
331
éraliste authentique… Nulle mesure de transition
ne
fut prévue entre l’ordre (ou le désordre) traditionnel et le nouveau
332
erva sa physionomie propre, nul mélange dégradant
ne
se produisit, en dépit de la suppression instantanée des frontières é
333
s frontières économiques. Notons en passant qu’il
n’
est pas un des arguments des opposants à l’union suisse qui n’ait été
334
des arguments des opposants à l’union suisse qui
n’
ait été repris, dans les débats actuels, par les opposants à l’union e
335
tuels, par les opposants à l’union européenne. On
ne
manquera pas de dire que dans la grande Europe moderne, les problèmes
336
que dans la grande Europe moderne, les problèmes
ne
sont pas homologues de ceux de la petite Suisse du siècle dernier. A-
337
des Grisons pour se rendre à Berne, tandis qu’il
ne
faut qu’une matinée à un délégué grec ou scandinave pour se rendre à
338
etite que la Suisse de 1848. Ses États souverains
ne
sont guère plus différents entre eux que ne l’étaient les paysans pri
339
rains ne sont guère plus différents entre eux que
ne
l’étaient les paysans primitifs d’Appenzell des patriciens cosmopolit
340
unification forcée. Cette dialectique, en Suisse,
n’
est pas abstraite : elle exprime la vie même de la Confédération, et d
341
antonales et locales, jusqu’au xixe siècle. Nous
ne
pouvons songer à en donner ici même un aperçu : la Suisse compte 25 c
342
; et leur fusion dégage une énergie dont le champ
ne
saurait être que la planète entière, conquérante d’abord, belliqueuse
343
pirituelle par vocation, puis unifiante. L’Europe
n’
a pas seulement découvert le monde : elle l’a fait. Épousons cette idé
344
le l’a fait. Épousons cette idée d’une Europe qui
n’
existe que dans son dépassement et qui ne serait pas elle-même si elle
345
rope qui n’existe que dans son dépassement et qui
ne
serait pas elle-même si elle n’était plus qu’elle-même. Quatre consta
346
épassement et qui ne serait pas elle-même si elle
n’
était plus qu’elle-même. Quatre constatations fondamentales, et que ch
347
éens sans doute ; et, que l’on sache, ces notions
ne
sont point parvenues à provoquer là-bas les mêmes effets, à dégager l
348
mpait, s’il a cru qu’il régnait sur le monde : il
n’
en connaissait qu’un canton. Mais nous ne sommes pas victimes d’une il
349
nde : il n’en connaissait qu’un canton. Mais nous
ne
sommes pas victimes d’une illusion semblable lorsque nous constatons
350
ne et de notre alphabet. Nul mouvement réciproque
n’
est encore observé, ni même pressenti. 3. C’est l’Europe qui peut seul
351
qu’offrent aux hommes les variétés continentales.
Ne
parlons pas ici d’une vocation de l’Europe ; il ne s’agit que d’une n
352
e parlons pas ici d’une vocation de l’Europe ; il
ne
s’agit que d’une nécessité, qui n’en dicte pas moins une politique mo
353
l’Europe ; il ne s’agit que d’une nécessité, qui
n’
en dicte pas moins une politique mondiale. À la veille de la guerre de
354
rce. Aujourd’hui, les importations des États-Unis
ne
correspondent qu’à 4 % de leur revenu national. L’Europe n’est rien s
355
ondent qu’à 4 % de leur revenu national. L’Europe
n’
est rien sans le monde : elle doit être mondiale, par une nécessité vi
356
est venu. Ou presque tout », dit Valéry. Mais je
ne
vois rien, ou presque rien, à part le jazz, qui soit venu à l’Europe
357
irréductiblement, tend à devenir un organisme, on
ne
voit pas quelle autre partie de ce grand corps peut prétendre à parei
358
eul point de vue de l’économie des échanges, elle
n’
est rien si elle n’est pas l’animatrice d’une circulation planétaire.
359
l’économie des échanges, elle n’est rien si elle
n’
est pas l’animatrice d’une circulation planétaire. Qui peut en dire au
360
? Les uns m’en paraissent incapables, et d’autres
n’
en ont le même besoin vital. Écartons pour longtemps l’Afrique noire,
361
relève, avec les moyens que l’on sait ; mais ils
n’
y sont pas vitalement contraints. Part des importations dans le revenu
362
t des importations dans le revenu national : 4 %,
ne
l’oublions pas. L’Europe seule périrait, sans discussion possible, si
363
ait réduite à vivre sur elle-même. L’Europe seule
ne
peut plus se payer une politique provincialiste. Elle se voit condamn
364
’animatrice des échanges internationaux. Par quoi
n’
entendez point je ne sais quel leadership (nom moderne de l’hégémonie)
365
nges internationaux. Par quoi n’entendez point je
ne
sais quel leadership (nom moderne de l’hégémonie), conception déjà dé
366
uant leur ambition de l’exercer à leur tour, mais
n’
en montrant pas les moyens. L’Europe dans son ensemble se voit donc ap
367
ent d’elle-même. À cet appel, toutefois, l’Europe
ne
peut répondre que dans la mesure où elle est forte et saine : c’est l
368
Europe entière et sa culture. » Aucun de nos pays
ne
peut donc bénéficier du crédit qui s’attache à l’Europe tout entière,
369
. Car les valeurs européennes, aux yeux du monde,
ne
sont universelles que dans la mesure où elles résultent de nos variét
370
es de l’union. S’il est vrai qu’aucun de nos pays
ne
peut prétendre à représenter valablement l’ensemble Europe devant le
371
e Europe devant le reste du monde, aucun non plus
ne
peut prétendre à subsister par ses propres moyens, en Europe même. Le
372
res qui empêchent ses biens de circuler, mais qui
ne
sauraient plus la protéger, notre Europe désunie marche à sa fin. Auc
373
Europe désunie marche à sa fin. Aucun de nos pays
ne
peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Auc
374
e sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays
ne
peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économie moderne.
375
es que lui pose l’économie moderne. La situation
n’
a guère changé depuis ce congrès, qui marqua le départ de l’action pou
376
neté vide de tout contenu économique ou politique
ne
saurait mener théoriquement qu’à la misère et ne mène pratiquement qu
377
ne saurait mener théoriquement qu’à la misère et
ne
mène pratiquement qu’à tomber sous la coupe d’un des deux « grands ».
378
ie l’est aussi… La France est « un grand pays qui
n’
a besoin de personne ». L’Angleterre est liée aux dominions par tous l
379
et des autres, comment concevoir cette union ? On
ne
peut l’imaginer que fédérale, si le fédéralisme est bien compris comm
380
thode d’union dans la diversité. Or cette méthode
n’
est pas seulement la plus opportune qui se présente : elle est le prin
381
tiré son dynamisme incomparable. Qu’un tel régime
n’
aille pas sans grands risques, toutes nos guerres le démontrent à l’en
382
trent à l’envi. Mais le risque de courts-circuits
ne
doit pas entraîner la suppression des installations électriques, prod
383
certaine logique prétendue cartésienne, mais qui
n’
est guère que l’esprit de système tantôt paresseux, tantôt fanatique e
384
cises, non si on les mêle pour simplifier, ce qui
ne
donne que le brun des uniformes. Prenez, le corps humain. Prenez, la
385
seule conforme à la formule même de l’Europe, et
n’
ayant d’autre but que d’entretenir un foyer permanent d’animation mond
386
oyer permanent d’animation mondiale des échanges,
ne
saurait se définir en termes jacobins de nation, de supernation, d’au
387
tion mondiale et foyer de rayonnement planétaire,
ne
saurait donc être conçue selon le modèle archaïque d’un État-nation.
388
-nation. Les questions de bornes et de passeports
n’
ont plus de quoi l’intéresser. Le problème, sans cesse reposé par des
389
des fusées intercontinentales. Un pôle d’énergie
n’
est pas défini par ses « limites », mais par l’intensité de son pouvoi
390
oir d’attraction et d’émission. Un bassin fluvial
n’
est pas défini par son contour, mais par sa navigabilité. Une personne
391
n contour, mais par sa navigabilité. Une personne
n’
est pas définie par sa fiche de police. Déclencher un processus d’u
392
ite Europe, déjà réelle, une Grande Europe qu’ils
n’
ont cessé depuis dix ans de refuser comme utopique — d’où la nécessité
393
t dépasse bien souvent le « colosse » soviétique)
n’
est au fond qu’une mesure de fortune : sans elle, pourtant, rien ne se
394
une mesure de fortune : sans elle, pourtant, rien
ne
se fût mis en branle et l’on ne parlerait pas d’une zone de libre-éch
395
e, pourtant, rien ne se fût mis en branle et l’on
ne
parlerait pas d’une zone de libre-échange. L’objectif évident des Six
396
ope comme fonction, c’est-à-dire d’une Europe qui
ne
serait pas elle-même si elle ne tendait sans cesse à être plus qu’ell
397
d’une Europe qui ne serait pas elle-même si elle
ne
tendait sans cesse à être plus qu’elle-même. Ce qu’il y a de foncière
398
bien, c’est dans leur sang, que l’Europe entière
n’
est qu’un appel au monde. Quelles sont les chances actuelles de notre
399
en passant par les philosophes du romantisme qui
n’
avaient pas attendu Valéry, une habitude de pensée pessimiste s’est in
400
par quelques œuvres d’art ; celle des Mongols qui
ne
laisse rien qu’une herbe rase. Mais les civilisations anciennes de l’
401
ans la nôtre, sont-elles mortes ? Leurs conquêtes
n’
ont-elles pas été préservées et développées par le Musée et le Laborat
402
ses hindoues, ni le mandarinat, ni le Bushido (je
ne
juge pas de valeurs, j’enregistre des faits.) Les civilisations antiq
403
civilisations antiques, sans lesquelles l’Europe
ne
serait guère, n’ont pas été retirées du jeu mondial, mais seulement d
404
tiques, sans lesquelles l’Europe ne serait guère,
n’
ont pas été retirées du jeu mondial, mais seulement détrônées régulièr
405
osées et baptisées, au cours d’un processus qu’on
ne
voit aucune raison de nommer décadence plutôt que renaissance. Observ
406
isent en profondeur, plus rapidement que l’Europe
ne
s’américanise par quelques signes extérieurs. L’URSS ? Elle s’essouff
407
L’URSS ? Elle s’essouffle à rattraper les USA et
n’
apporte rien de bien neuf — beaucoup d’archaïsme au contraire — à l’en
408
qui est l’accroissement du risque humain ; et ce
ne
sont pas seulement les secrets de notre ordre, mais aussi de notre dé
409
es de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre
ne
sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux. L’éc
410
qui furent le théâtre de tant de splendeur, et je
n’
ai vu qu’abandon et que solitude… Qui sait si sur les rivages de la Se
411
u du Zuyderzee… qui sait si un voyageur comme moi
ne
s’assiéra pas un jour sur de muettes ruines, et ne pleurera pas solit
412
e s’assiéra pas un jour sur de muettes ruines, et
ne
pleurera pas solitaire sur la cendre des peuples et la mémoire de leu
413
part, les plus grands esprits du siècle précédent
n’
ont cessé d’annoncer les catastrophes qui ont fondu de nos jours sur l
414
es conquêtes coloniales et ses protectorats. Elle
ne
voit pas encore, mais elle pressent déjà la perte de sa longue royaut
415
armes, tant sociales et morales que matérielles…
N’
est-ce pas assez pour justifier les prophètes du désastre européen ? Q
416
rudence historique. Primo, l’hégémonie politique
n’
est pas toujours et nécessairement liée à la vitalité d’une civilisati
417
eut une civilisation sans hégémonie. Secundo, il
n’
est pas du tout certain que les précédents historiques soient applicab
418
r extrapolation des exemples antiques ? Voilà qui
n’
est pas sûr du tout. Il se pourrait, en effet, que notre civilisation
419
une culture de dialogue et de contestation. Elle
n’
a jamais pu, et surtout, elle n’a jamais voulu se laisser ordonner à u
420
ontestation. Elle n’a jamais pu, et surtout, elle
n’
a jamais voulu se laisser ordonner à une seule doctrine qui eût régi à
421
a décrite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’il
n’
en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne furen
422
et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge
ne
furent pas moins violents que ceux que nous vivons. L’unité de notre
423
re et de la civilisation créée par cette culture,
n’
a jamais été autre chose qu’une unité dans la diversité, une unité par
424
mité. Cependant, cet état de polémique permanente
n’
a pas produit seulement de l’anarchie et des guerres. Il a contraint l
425
ntenant définir brièvement ces trois vertus et ce
ne
sera pas dans un esprit d’orgueil occidental, mais avec le souci de d
426
Jaspers. Pour le chrétien, Dieu est la Vérité. On
ne
peut pas tricher avec lui, on ne peut pas tricher non plus avec la ré
427
st la Vérité. On ne peut pas tricher avec lui, on
ne
peut pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’il a créé. Dans
428
éé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous
ne
pouvons pas nous satisfaire d’illusions flatteuses, d’à peu près oppo
429
e vie. Les cultures traditionnelles au contraire,
n’
exigent guère de l’individu que l’observation des rites sacrés. Pour l
430
ervation des rites sacrés. Pour le reste, l’homme
n’
est pas responsable. Le Karma, la magie, les sorciers ou les dieux ont
431
e de l’Asie et de l’Afrique, — le climat tropical
n’
explique pas tout, loin de là ! Et lorsque les pays « sous-développés
432
uent à grands cris et non sans haine une aide qui
ne
leur est due qu’au nom de l’amour chrétien, nous avons le droit de le
433
dignité de la personne distincte. Et certes, cela
ne
signifie pas théoriquement que la sagesse védantique, par exemple, so
434
calviniste. Mais cela signifie pratiquement qu’on
ne
peut pas « eat his cake and have it » et qu’il y a lieu de reconsidér
435
lui de la responsabilité personnelle, et que l’un
n’
irait pas sans l’autre. Un homme n’est vraiment libre que dans la seul
436
e, et que l’un n’irait pas sans l’autre. Un homme
n’
est vraiment libre que dans la seule mesure où il est responsable de s
437
l est responsable de son sort, et à l’inverse, on
ne
saurait tenir un homme pour responsable de ses actes que dans la seul
438
doses variables dans notre idée de la liberté. Il
n’
est pas de concept plus difficile à définir, plus facile à nier en thé
439
e à définir, plus facile à nier en théorie, et il
n’
est pas d’idée plus exaltante en fait pour les Européens de toute nati
440
civilisation profane. Or, ce même mot de liberté
n’
éveille aucune passion fondamentale chez les peuplades africaines ou c
441
aleur ces trois vertus cardinales de l’Europe, ce
n’
est pas seulement parce qu’elles permettent d’illustrer ce qui nous di
442
qué de notre empreinte la Terre entière, nous qui
n’
occupons guère que 5 % de sa surface solide, c’est bien à la complexit
443
ert la Terre entière, alors qu’aucun autre peuple
ne
songeait à venir les découvrir. Ce sont eux qui ont ainsi permis à l’
444
qu’elle offre désormais au monde entier, et elle
ne
peut faire autrement, car toutes les créations que je viens d’énumére
445
si cette unité fomentée par la culture européenne
ne
va pas se réaliser à nos dépens. C’est un fait que l’Europe a répandu
446
procédés et un peu de leur logique… Mais l’Europe
n’
a pas exporté sa sagesse régulatrice, faite d’équilibres sans cesse re
447
en un mot, le monde reçoit nos produits. Mais il
ne
reçoit pas les valeurs religieuses, éthiques et philosophiques, qui e
448
s penseurs ? J’oserai dire contre eux tous que je
ne
le crois nullement, et je vais en donner trois raisons principales. P
449
se trompaient, tout simplement, mais cette erreur
ne
saurait plus être commise, à présent que la Terre entière est exploré
450
ropéens du xxe siècle, nous savons bien que nous
ne
dominons plus politiquement sur tous les continents, comme avant 1914
451
ce mouvement d’imitation s’opère à sens unique et
n’
est plus réversible. Mais comment expliquer ce phénomène sans précéden
452
e. Mais il faut voir enfin que cette civilisation
n’
a pu devenir universelle qu’en vertu de quelque chose de très fondamen
453
nation, sa couleur ou sa race. L’Égypte ancienne
ne
croyait rien de tel. Le mot homme y était synonyme d’habitant de la v
454
t les barbares, c’est-à-dire tous les autres, qui
n’
étaient pas vraiment et complètement humains. Ces très hautes civilisa
455
ception chrétienne, exprimée par saint Paul (« il
n’
y a plus ni juifs, ni Grecs, ni esclaves ni hommes libres, ni hommes n
456
es de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre
ne
sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux ». Dep
457
tre, sont-elles vraiment mortes ? Leurs conquêtes
n’
ont-elles pas été préservées et développées par le Musée et le Laborat
458
i les civilisations mouraient tout à fait, Valéry
ne
pourrait pas le dire, car il n’en saurait rien. » Et il proposait de
459
ut à fait, Valéry ne pourrait pas le dire, car il
n’
en saurait rien. » Et il proposait de corriger comme suit le passage q
460
ions, nous avons depuis peu la certitude que nous
ne
mourrons jamais entièrement et que nos cendres sont fécondes. Le temp
461
ance dans la longévité de notre civilisation : on
ne
voit pas de candidats sérieux à la relève d’une civilisation devenue
462
fleuri une civilisation déterminée. Et les autres
n’
en savaient rien. Mais ce fut plus souvent l’agression d’une civilisat
463
anisent à nouveau, plus profondément que l’Europe
ne
s’américanise par quelques signes extérieurs. Il y a surtout l’URSS,
464
Le marxisme plus l’électricité. » Or le marxisme
n’
est pas une invention marxiste au sens politique de ce terme, et encor
465
rme, et encore moins une invention soviétique. Ce
n’
est pas Popov qui l’a inventé, mais c’est Karl Marx, un juif allemand
466
, l’industrie, les nationalismes et la presse. On
ne
saurait imaginer complexe de forces spirituelles, morales et matériel
467
n. Le fameux « bond en avant » de la Chine de Mao
n’
a guère été jusqu’ici qu’un bond vers l’industrie et vers le socialism
468
que son émancipation actuelle, si spectaculaire,
ne
consiste nullement dans l’avènement d’une civilisation originale ou r
469
d’un péril jaune, en attendant le péril noir. Je
n’
y crois guère. Notre éclipse n’est rien que notre aveuglement sur nos
470
le péril noir. Je n’y crois guère. Notre éclipse
n’
est rien que notre aveuglement sur nos propres pouvoirs et notre vocat
471
pouvoirs et notre vocation. Aux yeux du monde, il
n’
y a qu’un seul péril sérieux : le péril blanc ! La civilisation europé
472
c ! La civilisation européenne, devenue mondiale,
n’
est menacée en fait que par les maladies qu’elle a produites et propag
473
et de la culture au xxe siècle, le nationalisme
n’
en poursuit pas moins ses ravages dans l’esprit des Européens comme da
474
sens, une saveur à nos vies. Ce matérialisme plat
ne
serait guère plus dangereux que la bêtise humaine en général, s’il n’
475
dangereux que la bêtise humaine en général, s’il
n’
avait pour effet de détendre les ressorts créateurs du progrès dont il
476
otalitaire, qui est l’essence du nationalisme. Il
n’
en va pas de même sur d’autres continents. Quant à nous : nos sages no
477
millions de morts, il est vrai… Et maintenant, ce
n’
est pas chez nous, mais chez les autres qu’il triomphe. Permettez-moi
478
cant. Ces masses humaines dans les grandes usines
ne
peuvent pas être éternellement abandonnées à leur pauvreté et à leur
479
voilà ce qui doit logiquement se produire. Or ce
n’
est pas chez nous, en Europe, mais en Chine, que cette prédiction se r
480
se dirigèrent d’un pas martial aux champs. Ici on
ne
voit plus de petits groupes de deux ou trois paysans qui fument tout
481
ction forcée, forme matérialiste du nationalisme,
n’
a jamais atteint en Europe de tels excès. Certes elle est née chez nou
482
rckhardt en avait pressenti les périls. Mais nous
n’
y avons pas succombé, nous l’avons refusée sous sa forme hitlérienne,
483
tins de l’Europe et de l’Occident, encore qu’elle
n’
ait jamais cessé de se proclamer essentiellement universelle. Il se pe
484
er… Au surplus, le sort temporel du christianisme
n’
inspire pas d’inquiétudes excessives : c’est de loin la religion la mi
485
iste enferme un nombre équivalent d’individus, ce
n’
est qu’officiellement, par contrainte d’État : les communistes militan
486
baltes et les Arméniens du Caucase). Le PC russe
n’
a jamais dépassé 8 millions de membres inscrits. Mais laissons ces spé
487
l’Amour qui cherche l’union, et de la Vérité qui
ne
saurait être qu’une. C’est pour cela, et non point en vertu d’une con
488
andes divisions historiques se sont produites. Il
n’
est rien que je respecte au monde autant que l’institution de l’Église
489
ses séparées, la volonté de l’unité formelle, qui
n’
est pas l’union libre et réelle, et qui eut tôt fait de transformer en
490
s’il est vrai que l’Évangile demande l’union, ce
n’
est jamais aux dépens des vocations diverses, dont nulle instance huma
491
s vocations diverses, dont nulle instance humaine
n’
est juge en dernier ressort. Chaque Église a son Ange, selon l’Apocaly
492
meures dans la maison de mon Père. » Cette parole
ne
peut être écartée. Elle reste au centre du mystère de l’unité. Voie
493
mon seul nom ou peut-être au nom de plusieurs, je
ne
puis en appeler qu’à l’union des chrétiens comme étant l’unique voie
494
tion unitaire me paraît utopique, et sa poursuite
n’
évoque en moi que des images qui offensent la pudeur spirituelle : épr
495
up de catholiques se figurent que les protestants
ne
croient pas à la divinité du Christ, ont supprimé les sacrements et n
496
ivinité du Christ, ont supprimé les sacrements et
n’
ont guère qu’un seul dogme, qui est le libre examen. Et beaucoup de pr
497
romaine, où l’habitude était, au xvie siècle, de
ne
communier qu’une fois l’an. Les positions se sont interchangées au mi
498
iens : qu’un fidèle, en tous lieux et tous temps,
n’
importe où, dans le monde entier, puisse entrer au sanctuaire qui s’of
499
me une patrie, mais l’amour est lucide, la patrie
n’
est pas le monde… Voici qu’ils peuvent sans la trahir aller plus loin,
500
plus loin, vers le But qu’elle leur désignait. Je
ne
suis pas étranger plus qu’un autre aux problèmes concrets de mon temp
501
ins d’avoir lancé le terme d’engagement). Mais je
ne
connais pas de problème qui prime aujourd’hui celui-là. Qui est celui
502
Le nationalisme, dans les peuples du tiers-monde,
n’
est guère qu’une revendication d’indépendance, proclamée contre l’Occi
503
t ou sabotant l’union de l’Europe, mais cet effet
ne
suffit pas à le définir : ses motivations sont ailleurs, et surtout,
504
ple ou Bien suprême ; Dieu lui-même, s’il existe,
ne
peut être que notre allié, garant de notre justice ; sinon c’est qu’i
505
llié, garant de notre justice ; sinon c’est qu’il
n’
existe pas ; il n’y a donc plus d’instance supérieure à la nation, ni
506
tre justice ; sinon c’est qu’il n’existe pas ; il
n’
y a donc plus d’instance supérieure à la nation, ni plus d’appel possi
507
ité. Il a péri des hommes ; mais c’est pour qu’il
n’
en périsse plus. Je le jure, au nom de la fraternité universelle que v
508
liberté répandus sur la surface de l’Europe, qui
n’
attendent plus que cette heureuse diversion pour attaquer et renverser
509
semblée nationale, au nom du genre humain dont il
n’
a jamais mieux mérité d’être appelé l’ami. C’est en effet à Jean-Bapt
510
ent « nivelé » par les lois de la Liberté : Nous
ne
sommes pas libres, si un seul obstacle moral arrête notre marche phys
511
la liberté plénière, intacte, irrésistible, nous
ne
voulons pas d’autre maître que l’expression de la volonté générale, a
512
mondiale dont le centre serait Paris : Un corps
ne
se fait pas la guerre à lui-même, et le genre humain vivra en paix, l
513
même, et le genre humain vivra en paix, lorsqu’il
ne
formera qu’un seul corps, la nation unique… La commune de Paris sera
514
examiner l’humanité sous tous les rapports : nous
ne
sommes pas les représentants du genre humain. Je veux donc que le lég
515
eur de la France oublie un instant l’univers pour
ne
s’occuper que de son pays ; je veux cette espèce d’égoïsme national s
516
s, sans lequel nous stipulerons ici pour ceux qui
ne
nous ont pas commis, et non en faveur de ceux au profit desquels nous
517
à l’empereur moderne qui, sans doute à l’origine,
ne
fut considéré que comme général de la chrétienté, devant être pour l’
518
ts commerciaux complètement fermés. Or, l’Europe
n’
en est encore qu’à la période des essais pour former de véritables Nat
519
obtenir : ses frontières naturelles. Dès lors, il
n’
a plus rien à demander à un autre État, car il a trouvé ce qu’il cherc
520
l’utopie de l’État naturellement raisonnable. Il
n’
y a plus qu’à tirer les conséquences logiques de ces prémices : fermer
521
ntre une nouvelle monnaie nationale, c’est-à-dire
n’
ayant cours que dans le pays même, mais dans celui-ci exclusivement… L
522
rement ce but. Il doit y marcher avec méthode, et
ne
laisser passer aucun moment sans retirer quelque avantage en faveur d
523
le public a moins besoin de ces marchandises qui
ne
peuvent être produites en leur pureté ni remplacées par des succédané
524
pour les nationaux, de la manière convenable. Il
ne
cherche pas en effet à acquérir une prépondérance commerciale, ce qui
525
nation entièrement indépendante et autonome. Ce
ne
sont pas seulement les échanges commerciaux qu’il faut supprimer, mai
526
n de voyager hors de l’État commercial fermé : il
ne
doit pas être permis plus longtemps à une vaine curiosité et à la rec
527
ue dans une nation ainsi fermée, dont les membres
ne
vivent qu’entre eux et fort peu avec des étrangers, qui acquiert par
528
t partagé entre eux tout le reste. Nul État fermé
ne
supprimera ce lien, il le favorisera plutôt, car l’enrichissement de
529
e établie parmi les peuples, aucun État sur terre
n’
aura le moindre intérêt à ne pas communiquer à un autre ses découverte
530
aucun État sur terre n’aura le moindre intérêt à
ne
pas communiquer à un autre ses découvertes, puisque chaque État en ef
531
tre ses découvertes, puisque chaque État en effet
ne
peut les utiliser que pour lui à l’intérieur et nullement pour en ass
532
la Science et libérée de tout impérialisme… Nous
n’
en sommes peut-être pas loin dans cette seconde moitié du xxe siècle
533
coûté plus cher à l’Europe et au monde que Fichte
ne
pouvait l’imaginer vers 1800 : ne fut-ce que par la collusion de la s
534
onde que Fichte ne pouvait l’imaginer vers 1800 :
ne
fut-ce que par la collusion de la science et des nationalismes, ces d
535
de la guerre et vivant d’elle. « Vive la Nation »
ne
signifie pas « Vive mon pays », mais « Vive l’idéal pour lequel je me
536
i au pouvoir. Tensions internes : « Que personne
ne
diffère, il deviendrait mon juge ! » pense l’État-nation né de la Rév
537
ifice « temporaire » de certaines libertés. Or il
n’
est presque aucune de ces mesures d’urgence, prises par l’État, qu’on
538
e la nation comme une croisade pour l’idée : « Ce
ne
sont pas les déterminations naturelles de la nation qui lui donnent s
539
d comme à sa fin. Une fois cette fin atteinte, il
n’
a plus rien à faire dans le monde. Et encore : À chaque époque domin
540
rouvé déchaîner en fait des passions que l’esprit
ne
pouvait contrôler, mais que seuls les États surent exploiter et bient
541
fait, la liberté de la nation, une fois acquise,
ne
sera rien que la souveraineté de l’État qui s’en prévaudra. Et l’anar
542
te, voit l’inverse se réaliser. Jamais les idéaux
n’
ont été mieux démentis par les faits, ni mieux détournés de leurs buts
543
attendant, achève de la subjuguer par les armes,
ne
s’est montrée à la fois moins humanitaire et moins unie. Tout se fait
544
son particulier à « l’harmonie universelle ». Il
n’
en redoute pas moins les « terribles niveleurs de l’Europe » que sont
545
te la Hongrie. Enlevez-lui cette qualité, et elle
n’
est plus rien pour l’Europe, si peu que rien même ; car elle ne peut d
546
en pour l’Europe, si peu que rien même ; car elle
ne
peut devenir que l’avant-garde de la monarchie universelle de la Russ
547
se tait… Honte à cette Europe silencieuse Et qui
n’
a pas conquis sa liberté ! Lâches, les peuples t’ont abandonné Ô Magya
548
-nous ! Reconnais ton peuple ! Alors que d’autres
n’
osent même pas verser des larmes Nous les Magyars, nous versons notre
549
J’ai appelé par la bouche de ces pèlerins, et tu
ne
m’as pas écoutée ; va donc en servitude, là où il y aura le sifflemen
550
celui qui se heurtera contre elle, il tombera et
ne
se relèvera point. Et du grand édifice politique européen, il ne rest
551
point. Et du grand édifice politique européen, il
ne
restera pas pierre sur pierre. « Aujourd’hui, l’Occident meurt de se
552
unification qui tend à embrasser le genre humain,
n’
a pas d’autre origine. La Pologne et la Hongrie sont des nationalités
553
avec l’idée d’Europe unie : une nation en devenir
n’
a pas encore d’intérêts « traditionnels » qui l’opposent au plus vaste
554
les de l’État national fortement constitué et qui
ne
veut rien devoir à personne ? À la différence de l’Espagne, qui se re
555
intentions de la nouvelle République : celle-ci «
ne
fera point de propagande sourde ou incendiaire chez ses voisins ». Ce
556
et de nationalité des peuples ». Cependant, elle
n’
entend pas : incendier le monde, mais briller de sa place sur l’horiz
557
ue nationale du romantisme politique. Parce qu’il
n’
est pas suspect de nationalisme borné, et parce qu’il fut au xixe siè
558
versel, de se transfigurer en Europe et en monde,
ne
sera-t-elle pas nécessairement interprétée par les autres comme un dé
559
e ; parce qu’elle manque d’égoïsme, parce qu’elle
ne
travaille pas pour elle seule, parce qu’elle est créatrice d’espéranc
560
extraordinaire. Cette nation sera grande, ce qui
ne
l’empêchera pas d’être libre. Elle sera illustre, riche, pensante, pa
561
ée. […] Cette nation aura pour capitale Paris, et
ne
s’appellera point la France ; elle s’appellera l’Europe. Elle s’appel
562
e dans la plus grande communauté européenne. Elle
n’
aura pas vécu en vain, ni sans gloire. Ainsi se réaliserait ce passag
563
France et Mazzini pour l’Italie ; mais voilà qui
ne
paraît concevable que dans le cas d’une nation non unitaire, c’est-à-
564
la donne : Il va de soi qu’une telle fédération
ne
saurait être instituée d’un seul coup. Elle a besoin, d’abord, d’une
565
de grouper l’humanité en un seul faisceau, car ce
n’
est pas seulement la Russie et le panslavisme que nous servons, c’est
566
servons, c’est l’humanité entière… Les Européens
ne
savent pas que nous sommes invincibles, que si nous pouvons fort bien
567
nous pouvons fort bien perdre des batailles, nous
n’
en resterons pas moins invincibles, grâce à l’unité de notre esprit na
568
e serait aux dépens de nos intérêts actuels. Nous
n’
en croirons que plus fortement à la véritable mission de la Russie, à
569
de survoler les faits et dotant l’évolution d’on
ne
sait quelle énergie intrinsèque : « Chaque génération est immédiate à
570
le célèbre. Une nation ou une société, selon lui,
ne
conquiert que par sa culture le droit de jouer un rôle actif dans l’h
571
s empereurs germains, la communauté des Européens
n’
a cessé de se développer et de s’affirmer. Ranke ne croit nullement qu
572
’a cessé de se développer et de s’affirmer. Ranke
ne
croit nullement que le conflit de la papauté et de l’Empire, puis du
573
uverainetés nationales vont nous dominer, ceux-là
ne
savent pas pour qui sonne le glas. Car ces efforts se sont conjugués
574
à vivre ensemble. Ce qui constitue une nation, ce
n’
est pas de parler la même langue ou d’appartenir au même groupe ethnog
575
e diffère essentiellement de la zoologie. La race
n’
y est pas tout, comme chez les rongeurs ou les félins, et on n’a pas l
576
out, comme chez les rongeurs ou les félins, et on
n’
a pas le droit d’aller par le monde tâter le crâne des gens, puis les
577
de la langue. La langue invite à se réunir ; elle
n’
y force pas. Les États-Unis et l’Angleterre, l’Amérique espagnole et l
578
espagnole et l’Espagne parlent la même langue et
ne
forment pas une seule nation. Au contraire, la Suisse, si bien faite,
579
rête une sorte de faculté limitante à priori ? Je
ne
connais pas de doctrine plus arbitraire ni plus funeste. Avec cela, o
580
s réunissent plutôt. Et puis toutes les montagnes
ne
sauraient découper des États. Quelles sont celles qui séparent et cel
581
s. Quelles sont celles qui séparent et celles qui
ne
séparent pas ? De Biarritz à Tornea, il n’y a pas une embouchure de f
582
es qui ne séparent pas ? De Biarritz à Tornea, il
n’
y a pas une embouchure de fleuve qui ait plus qu’une autre un caractèr
583
rait à ce point jaloux, égoïste, querelleur ; qui
ne
pourrait rien supporter sans dégainer, serait le plus insupportable d
584
t le plus insupportable des hommes. … Les nations
ne
sont pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront.
585
ale ou despotisme absolu et sans lois, ce dernier
n’
étant plus exercé par des dynasties, désormais trop faibles de cœur, m
586
onne mieux que Nietzsche, disciple de Burckhardt,
n’
a dénoncé le délire nationaliste, déguisé en « patriotisme jovial et s
587
nt plus de temps à en finir avec ce qui chez nous
n’
occupe que quelques heures et se passe en quelques heures : pour les u
588
ce à tout cela, et à bien des choses encore qu’on
ne
peut dire aujourd’hui, on méconnaît ou on déforme mensongèrement les
589
éen à venir ; s’ils appartinrent à une patrie, ce
ne
fut jamais que par les régions superficielles de leur intelligence, o
590
hoven, Stendhal, Henri Heine, Schopenhauer. Qu’on
ne
m’en veuille pas trop de nommer à leur suite Richard Wagner… Dans un
591
de ses compatriotes au début de ce siècle, Sorel
n’
a parlé de l’Europe que sur le ton d’un sombre dépit prophétique. Voic
592
ille de la Première Guerre mondiale34 : Personne
n’
a le courage de dire ou d’écrire que l’état de paix en Europe est un é
593
ns leurs mœurs, et dans leurs ambitions. L’Europe
n’
a pas de chance. Tous ses habitants ne peuvent faire que mauvais voisi
594
s. L’Europe n’a pas de chance. Tous ses habitants
ne
peuvent faire que mauvais voisinage. Quand on parle des États-Unis d
595
ite la guerre qui surgit. Les peuples de l’Europe
ne
peuvent s’unir que dans une seule idée : se faire la guerre. … Et il
596
ujours fait deux ou trois fois par siècle. … Rien
n’
améliorera le sort de l’Europe. Pourquoi voulez-vous qu’il s’améliore
597
imisme qui attend que les choses s’arrangent ? Il
n’
y a aucune raison pour cela. Des composés chimiques, qui sont séparéme
598
vé d’entendre dire : « Une culture européenne, ça
n’
existe pas. » Le fait même qu’une telle phrase ne puisse être énoncée
599
n’existe pas. » Le fait même qu’une telle phrase
ne
puisse être énoncée qu’en Europe, et seulement par la bouche d’Europé
600
’Europe existe et qu’elle ait une culture commune
ne
saurait être un Asiatique, un Africain ou un Américain, mais seulemen
601
opositions contradictoires que voici : primo ; il
n’
y a pas de culture européenne commune, mais seulement des cultures nat
602
x pour former une unité quelconque ; secundo : il
ne
saurait y avoir de culture spécifiquement européenne, car toute vraie
603
ie, belliqueux et buveurs de bière ; les Français
ne
pensent qu’à l’amour ; les Suisses sont des paysans, les Italiens des
604
La seconde attitude, celle qui fait dire que nous
n’
avons pas de problèmes spécifiques, différents de ceux du reste du mon
605
coup à sentir « cette inimitable saveur que l’on
ne
trouve qu’à soi-même »35 et que je ne trouve qu’à l’Europe. Poussons
606
ur que l’on ne trouve qu’à soi-même »35 et que je
ne
trouve qu’à l’Europe. Poussons plus loin le paradoxe (jusqu’au point
607
qu’au point où nous allons le voir se renverser).
Ne
serait-ce pas, précisément, la multiplicité de nos différences — régi
608
ritique, et toutes les tensions qui en résultent,
ne
seraient-ce pas en un mot nos diversités mêmes qui dénoteraient le mi
609
ommunauté, — l’unité de notre culture ? Mais cela
n’
apparaîtra clairement et ne deviendra vraiment sensible et convaincant
610
re culture ? Mais cela n’apparaîtra clairement et
ne
deviendra vraiment sensible et convaincant, que si nous comparons not
611
es que l’URSS de Staline et la Chine de Mao (pour
ne
rien dire des tentatives rapidement avortées du national-socialisme e
612
ent concevable et vérifiable, tandis que l’Europe
ne
trouve son unité paradoxale, à la fois évidente et presque informulab
613
rqué de notre empreinte le monde entier, nous qui
n’
habitons après tout qu’un petit 5 % des terres du Globe, c’est bien à
614
ent incompatibles qu’elle en a héritées, l’Europe
n’
a jamais pu s’ordonner à une seule doctrine qui eût régi à la fois ses
615
a décrite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’il
n’
en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne furen
616
et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge
ne
furent pas moins violents que ceux que nous vivons. Cependant, cet ét
617
sur les principes fondamentaux de toute culture,
n’
a pas produit seulement de l’anarchie et des guerres. Il a contraint l
618
Jaspers. Pour le chrétien, Dieu est la Vérité. On
ne
peut pas tricher avec Lui, on ne peut pas tricher non plus avec la ré
619
st la Vérité. On ne peut pas tricher avec Lui, on
ne
peut pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’il a créé. Dans
620
éé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous
ne
pouvons pas nous satisfaire d’illusions flatteuses, d’à peu près oppo
621
européen énonce un chiffre, il le veut exact à la
ne
virgule près, car autrement le pont cédera sous la charge, ou l’avion
622
e vie. Les cultures traditionnelles au contraire,
n’
exigent guère de l’individu que l’observation des rites sacrés. Pour l
623
ervation des rites sacrés. Pour le reste, l’homme
n’
est pas responsable. Le karma, la magie, les sorciers ou les dieux ont
624
nse de l’Asie et de l’Afrique, le climat tropical
n’
explique pas tout, loin de là ! Et lorsque les pays « sous-développés
625
revendiquent à grands cris de haine une aide qui
ne
leur est due qu’au nom de l’amour chrétien, nous avons le droit de le
626
le refuse la réalité du prochain. Et certes, cela
ne
signifie pas théoriquement que la sagesse védantique, par exemple, so
627
calviniste. Mais cela signifie pratiquement qu’on
ne
peut pas « eat his cake and have it » et qu’il y a lieu de reconsidér
628
lui de la responsabilité personnelle, et que l’un
n’
irait pas sans l’autre. Un homme n’est vraiment libre que dans la seul
629
e, et que l’un n’irait pas sans l’autre. Un homme
n’
est vraiment libre que dans la seule mesure où il est responsable de s
630
l est responsable de son sort, et à l’inverse, on
ne
saurait tenir un homme pour responsable de ses actes que dans la seul
631
doses variables dans notre idée de la liberté. Il
n’
est pas de concept plus difficile à définir, plus facile à nier en thé
632
e à définir, plus facile à nier en théorie, et il
n’
est pas d’idée plus exaltante en fait pour les Européens de toute nati
633
civilisation profane. Or, ce même mot de liberté
n’
éveille aucune passion fondamentale, n’a guère de sens chez les peupla
634
de liberté n’éveille aucune passion fondamentale,
n’
a guère de sens chez les peuplades africaines ou chez les « apparatchi
635
aleur ces trois vertus cardinales de l’Europe, ce
n’
est pas seulement parce qu’elles permettent d’illustrer ce qui nous di
636
ns l’aire géographique de cette civilisation ? Je
n’
en crois rien. Il existe sur notre planète trois régions comparables d
637
st évident que les mêmes pressions démographiques
n’
ont pas produit les mêmes conséquences dans ces trois régions. Le rayo
638
auniques au Kablenberg, et de Poitiers à Lépante,
n’
ont rien suscité de marquant ni de nouveau dans notre civilisation. Se
639
isades ont été productives à cet égard ; or elles
ne
résultèrent pas d’un défi venu de l’extérieur, mais au contraire d’un
640
ert la Terre entière, alors qu’aucun autre peuple
ne
songeait à venir les découvrir. Ce sont eux qui ont ainsi permis à l’
641
nt son unité après avoir exploré ses variétés. Je
ne
tenterai pas aujourd’hui de démontrer la cohérence profonde des créat
642
ppeler, mais avec la plus vive insistance, que ce
n’
est pas par hasard que l’Europe a produit non seulement les notions de
643
ous apparaître ces différentes créations. Non, ce
n’
est pas par hasard mais c’est en vertu même de cette dialectique infin
644
volonté de responsabilité, et volonté de vérité à
n’
importe quel prix. Voici donc notre situation dans le monde du xxe si
645
la possibilité d’un genre humain qui, sans elle,
n’
eût jamais pris conscience de son unité virtuelle, ni des problèmes ef
646
-produits. L’originalité de la culture européenne
n’
est nullement supprimée, et ne doit pas être masquée, par le fait actu
647
culture européenne n’est nullement supprimée, et
ne
doit pas être masquée, par le fait actuel de sa diffusion mondiale. O
648
nique sont aujourd’hui des réalités mondiales, et
n’
appartiennent plus à l’Europe, mais plutôt aux Américains et aux Russe
649
procédés et un peu de leur logique… Mais l’Europe
n’
a pas exporté sa sagesse régulatrice, faite d’équilibres mouvants, de
650
sance matérielle, nos produits en un mot. Mais il
ne
reçoit pas les valeurs, religieuses, éthiques et philosophiques, qui
651
s dédaigne notre idéal de l’amour du prochain. On
ne
peut donc pas encore affirmer que notre culture soit devenue réelleme
652
ture soit devenue réellement universelle. Mais on
n’
en voit pas d’autre qui soit en mesure d’y prétendre mieux qu’elle, ou
653
, notre salut, le sens de notre vie individuelle,
n’
est-il pas beaucoup plus important ? Question européenne par excellenc
654
ssagers embarqués sur le même bateau. » Ce bateau
ne
porte pas aujourd’hui nos seuls destins, mais ceux de l’humanité enti
655
nité entière, embarquée pour la découverte d’elle
ne
sait quel Eldorado, d’elle ne sait quelle Toison d’or, symboles du se
656
a découverte d’elle ne sait quel Eldorado, d’elle
ne
sait quelle Toison d’or, symboles du sens dernier de la vie. Il ne po
657
ison d’or, symboles du sens dernier de la vie. Il
ne
porte pas des fuyards, des émigrants, des rescapés d’une catastrophe
658
elles la voilure, le tonnage nécessaire ? Ou bien
ne
faut-il pas nous demander, plutôt, si l’homme qui les conduit a la fo
659
ents — mais voici le point important : ce Congrès
n’
est pas un parti, n’est pas un front discipliné mais un simple rassemb
660
point important : ce Congrès n’est pas un parti,
n’
est pas un front discipliné mais un simple rassemblement d’hommes de c
661
it le mot capital. Car la liberté, voyez-vous, ce
n’
est pas quelque chose dont nous devons parler, mais quelque chose que
662
aujourd’hui, que les menaces contre les libertés
ne
viennent pas seulement des régimes que vous savez. Elles viennent de
663
lions d’êtres humains qui souffrent avant tout de
ne
pas trouver un sens à leur vie individuelle. L’absence de sens, dans
664
femme en vient à constater que sa vie personnelle
n’
a pas de sens, la liberté perd un de ses points d’appui, et la dictatu
665
t dont il comprend les symboles. Mais la sécurité
n’
est que la moitié de l’affaire : l’aventure personnelle, la nouveauté,
666
alors se révèle l’autre aspect de la culture, qui
n’
est plus seulement transmission mais critique et rupture s’il le faut
667
ssion mais critique et rupture s’il le faut ; qui
n’
est plus seulement tradition mais création, et qui n’est plus seulemen
668
st plus seulement tradition mais création, et qui
n’
est plus seulement initiation mais invention. Ces deux aspects de la c
669
viens de le faire, j’ai voulu vous montrer qu’il
n’
agit pas au niveau de la politique proprement dite, mais au niveau de
670
s humain pour chaque personne. La politique, nous
n’
y échapperons pas, et il est inutile d’insister sur ce fait, ici, dans
671
lui donnent les totalitaires — tant qu’un jour il
n’
y a plus rien d’autre à faire qu’à se jeter à mains nues contre les ta
672
aujourd’hui, que les menaces contre les libertés
ne
viennent pas seulement des formes de vie matérialistes que notre civi
673
lions d’êtres humains qui souffrent avant tout de
ne
pas trouver un sens à leur vie individuelle. L’absence de sens, dans
674
femme en vient à constater que sa vie personnelle
n’
a pas de sens, la liberté perd un de ses points d’appui, et la dictatu
675
t dont il comprend les symboles. Mais la sécurité
n’
est que la moitié de l’affaire : l’aventure personnelle, la nouveauté,
676
alors se révèle l’autre aspect de la culture, qui
n’
est plus seulement transmission mais critique et rupture s’il le faut
677
ssion mais critique et rupture s’il le faut ; qui
n’
est plus seulement tradition mais création, et qui n’est plus seulemen
678
st plus seulement tradition mais création, et qui
n’
est plus seulement initiation mais invention. Ces deux aspects de la c
679
viens de le faire, j’ai voulu vous montrer qu’il
n’
agit pas au niveau de la politique proprement dite, mais au niveau de
680
humain, pour chaque personne. La politique, nous
n’
y échapperons pas, et il est inutile d’insister sur ce fait, ici, dans
681
lui donnent les totalitaires, tant qu’un jour il
n’
y a plus rien d’autre à faire qu’à se jeter à mains nues contre les ta
682
de loisir, et tant d’action que de méditation. Ce
n’
est point par des statistiques, portant sur les résultats d’un régime
683
r qu’une forme de vie ou un système d’institution
n’
apportent pas seulement un Progrès, mais un Bien. v. Rougemont Den
684
la phrase suivante : « Une culture européenne, ça
n’
existe pas. » Le fait même qu’une telle phrase ne puisse être entendue
685
n’existe pas. » Le fait même qu’une telle phrase
ne
puisse être entendue qu’en Europe et seulement dans la bouche d’Europ
686
’Europe existe et qu’elle ait une culture commune
ne
saurait être un Asiatique, un Africain ou un Américain, mais seulemen
687
adictoires que voici. Ils affirment primo : qu’il
n’
y a pas de culture européenne commune, mais seulement des cultures nat
688
nité quelconque. Et ils affirment secundo : qu’il
ne
saurait y avoir de culture spécifiquement européenne, car, disent-ils
689
hie, belliqueux et buveurs de bière, les Français
ne
pensent qu’à l’amour, les Suisses sont des paysans, les Italiens des
690
La seconde attitude, celle qui fait dire que nous
n’
avons pas de problèmes spécifiques, différents de ceux du reste du mon
691
me coup à sentir cette inimitable saveur que l’on
ne
trouve qu’à l’Europe38. 2. Poussons plus loin le paradoxe, jusqu’au p
692
squ’au point où nous allons le voir se renverser.
Ne
serait-ce pas, précisément, la multiplicité de nos différences — régi
693
ritique, et toutes les tensions qui en résultent,
ne
seraient-ce pas en un mot nos diversités mêmes qui dénoteraient le mi
694
uelques années, agacé par les objections que l’on
ne
cessait d’opposer à l’idée même d’une unité de la culture européenne,
695
d’une fois citée et publiée depuis : L’Européen
ne
serait-il pas cet homme étrange qui se manifeste comme Européen dans
696
tion de l’originalité de notre culture. Mais cela
n’
apparaîtra clairement et ne deviendra vraiment sensible et convaincant
697
tre culture. Mais cela n’apparaîtra clairement et
ne
deviendra vraiment sensible et convaincant, que si nous comparons not
698
es que l’URSS de Staline et la Chine de Mao (pour
ne
rien dire des brèves tentatives avortées du national-socialisme et du
699
ent concevable et vérifiable, tandis que l’Europe
ne
trouve son unité paradoxale, à la fois évidente et presque informulab
700
rqué de notre empreinte le monde entier, nous qui
n’
habitons après tout qu’un petit 5 % des terres du Globe, c’est bien à
701
ent incompatibles qu’elle en a héritées, l’Europe
n’
a jamais pu s’ordonner à une seule doctrine qui eût régi à la fois ses
702
a décrite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’il
n’
en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne furen
703
et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge
ne
furent pas moins violents que ceux que nous vivons. Cependant, cet ét
704
pes fondamentaux de toute culture ou civilisation
n’
a pas produit seulement de l’anarchie et des guerres. Il a contraint l
705
Jaspers. Pour le chrétien, Dieu est la Vérité. On
ne
peut pas tricher avec Lui, on ne peut pas tricher non plus avec la ré
706
st la Vérité. On ne peut pas tricher avec Lui, on
ne
peut pas tricher non plus avec la réalité du monde qu’il a créé. Dans
707
éé. Dans nos rapports avec Dieu et le monde, nous
ne
pouvons pas nous satisfaire d’illusions flatteuses, d’à peu près, opp
708
e vie. Les cultures traditionnelles au contraire,
n’
exigent guère de l’individu que l’observation des rites sacrés. Pour l
709
ervation des rites sacrés. Pour le reste, l’homme
n’
est pas responsable. Le karma, la magie, les sorciers ou les dieux ont
710
se de l’Asie et de l’Afrique — le climat tropical
n’
explique pas tout, loin de là ! Et lorsque les pays « sous-développés
711
revendiquent à grands cris de haine une aide qui
ne
leur est due qu’au nom de l’amour chrétien, nous avons le droit de le
712
le refuse la réalité du prochain. Et certes, cela
ne
signifie pas théoriquement que la sagesse védantique, par exemple, so
713
calviniste. Mais cela signifie pratiquement qu’on
ne
peut pas « eat his cake and have it » et qu’il y a lieu de reconsidér
714
lui de la responsabilité personnelle, et que l’un
n’
irait pas sans l’autre. Un homme n’est vraiment libre que dans la seul
715
e, et que l’un n’irait pas sans l’autre. Un homme
n’
est vraiment libre que dans la seule mesure où il est responsable de s
716
l est responsable de son sort, et à l’inverse, on
ne
saurait tenir un homme pour responsable de ses actes que dans la seul
717
doses variables dans notre idée de la liberté. Il
n’
est pas de concept plus difficile à définir, ni plus facile à nier en
718
définir, ni plus facile à nier en théorie, et il
n’
est pas d’idée plus exaltante en fait pour les Européens de toute nati
719
ert la Terre entière, alors qu’aucun autre peuple
ne
songeait à venir les découvrir. Ce sont eux qui ont ainsi permis à l’
720
logie, psychologie, philosophie critique, — et je
n’
indique ici que des têtes de chapitre, et j’ai laissé de côté l’immens
721
nt son unité après avoir exploré ses variétés. Je
n’
essaierai pas ici de démontrer la cohérence profonde des créations eur
722
ppeler, mais avec la plus vive insistance, que ce
n’
est pas par hasard que l’Europe a produit non seulement les notions de
723
ous apparaître ces différentes créations. Non, ce
n’
est pas par hasard mais c’est en vertu même de cette dialectique infin
724
volonté de responsabilité, et volonté de vérité à
n’
importe quel prix. Voici donc notre situation dans le monde du xxe si
725
la possibilité d’un genre humain qui, sans elle,
n’
eût jamais pris conscience de son existence virtuelle, ni des problème
726
e culture. L’originalité de la culture européenne
n’
est nullement supprimée, et ne doit pas être masquée, par le fait actu
727
culture européenne n’est nullement supprimée, et
ne
doit pas être masquée, par le fait actuel de sa diffusion mondiale. O
728
nique sont aujourd’hui des réalités mondiales, et
n’
appartiennent plus à l’Europe, mais plutôt aux Américains et aux Russe
729
procédés et un peu de leur logique… Mais l’Europe
n’
a pas exporté sa sagesse régulatrice, faite d’équilibres mouvants, de
730
sance matérielle, nos produits en un mot. Mais il
ne
reçoit pas les valeurs religieuses, éthiques et philosophiques, qui e
731
dire que Naples est la seule ville orientale qui
n’
ait pas de quartier européen. Mais ce même monde méprise, ou ignore si
732
s dédaigne notre idéal de l’amour du prochain. On
ne
peut donc pas encore affirmer que notre culture soit devenue réelleme
733
ture soit devenue réellement universelle. Mais on
n’
en voit pas d’autre qui soit en mesure d’y prétendre mieux qu’elle, ou
734
, notre salut, le sens de notre vie individuelle,
n’
est-il pas beaucoup plus important ? Question européenne par excellenc
735
sagers embarqués sur le même bateau. » Ce bateau
ne
porte pas aujourd’hui nos seuls destins, mais ceux de l’humanité enti
736
nité entière, embarquée pour la découverte d’elle
ne
sait quel Eldorado, d’elle ne sait quelle Toison d’or, symboles du se
737
a découverte d’elle ne sait quel Eldorado, d’elle
ne
sait quelle Toison d’or, symboles du sens dernier de la vie. Ceci m’é
738
lles le tonnage, la voilure nécessaires ? Ou bien
ne
faut-il pas nous demander, plutôt, si l’homme qui les conduit a la fo
739
’aide des fondations américaines. Cette situation
n’
est ni normale ni saine, et peut même devenir démoralisante. Un moyen
740
ien accepter la présidence de la Fondation, et il
n’
a cessé de l’exercer effectivement depuis lors. Pour faciliter les déb
741
er les fonds qui lui avaient été promis. Car elle
ne
disposait pas, comme les fondations américaines, d’un capital initial
742
le temps (1961)aa ab I. Qui d’entre vous
ne
se souvient de cette première phrase du Tristan rendu naguère au gran
743
vous répondez tous dans vos cœurs : Rien au monde
ne
saurait nous plaire davantage. Or, songez-y : ce plaisir au secret de
744
re en une seule expression, moins pédante qu’elle
ne
paraît à première vue : avec la légende de Tristan, c’est l’étymologi
745
l’existence proprement humaine, qui est l’âme. Je
ne
prends pas ce mot dans le sens noble et vague que lui donnent un peu
746
pianiste, par exemple, manifeste une réalité qui
n’
est ni proprement physique ni proprement spirituelle, qui n’est pas ce
747
roprement physique ni proprement spirituelle, qui
n’
est pas celle du corps ni celle de l’intellect, encore qu’elle tienne
748
le. Mais la réalité est lourdement présente. Elle
ne
saurait donc que freiner l’élan de l’âme vers l’Ange désiré. « Ce n’e
749
freiner l’élan de l’âme vers l’Ange désiré. « Ce
n’
est pas amour, qui tourne à réalité », s’écrie un troubadour tardif, c
750
r qui « tourne » ainsi, « tourne à réalité » ? Ce
n’
est pas le désir comblé, au sens sexuel de l’expression, car cet acte
751
, car cet acte instinctif, lié aux lois du corps,
ne
mérite pas en soi le nom d’amour. Mais c’est l’amour comblé par la pr
752
t reconnaître aussi que la vraie victime du mythe
n’
est pas Tristan, n’est pas Iseut, et n’est pas non plus leur passion,
753
que la vraie victime du mythe n’est pas Tristan,
n’
est pas Iseut, et n’est pas non plus leur passion, qui triomphe au con
754
e du mythe n’est pas Tristan, n’est pas Iseut, et
n’
est pas non plus leur passion, qui triomphe au contraire de tout. La v
755
L’histoire du mythe, dans nos mœurs et coutumes,
ne
serait-elle que l’histoire d’une longue profanation ? Faut-il penser
756
d’Iseut avec le Roi, père adoptif du héros —, il
n’
y aurait pas de roman, ni de passion mortelle, il n’y aurait donc pas
757
y aurait pas de roman, ni de passion mortelle, il
n’
y aurait donc pas eu de mythe. On ne saurait imaginer le grand roi Mar
758
mortelle, il n’y aurait donc pas eu de mythe. On
ne
saurait imaginer le grand roi Marc s’inclinant devant les « droits di
759
us en sommes aujourd’hui, dès lors que le mariage
n’
est plus un lien sacré, adversaire à la taille de la passion ; et que,
760
omanciers. Ils savent bien que le roman véritable
n’
est jamais qu’une version renouvelée de l’archétype de Tristan et Iseu
761
cherchent donc partout l’obstacle qui résiste, et
n’
en trouvent guère. L’Homme sans qualités, de Musil, la Lolita de Nabok
762
mental. Un psychanalyste l’eût guéri, et le roman
n’
eût pas eu lieu. Si les derniers tabous viennent à céder, c’en sera fa
763
ogues, la passion doit mourir. Je vous dis que je
n’
en crois rien. Car s’il est vrai que la passion se nourrit d’obstacles
764
t-ils, dans les voies d’une destinée « qui jamais
ne
leur fauldra jour de leur vie, car ils ont beu leur destruction et le
765
inspiré lui-même des Bretons, de Béroul, et d’on
ne
sait qui d’autre, Wagner décrit par sa musique, vrai langage du mythe
766
euse et défigurée qui reflète son état déchu. Je
ne
puis m’empêcher d’imaginer que cette « rencontre aurorale » avec le m
767
se passe trois jours après la mort d’amour. Iseut
n’
évoque-t-elle point cette forme de lumière qu’on ne rejoint que dans u
768
’évoque-t-elle point cette forme de lumière qu’on
ne
rejoint que dans un au-delà, et qui aurait été, sur la Terre, le véri
769
demande souvent si l’angélologie de l’ancien Iran
ne
détient pas le secret dernier de notre mythe. La tradition chrétienne
770
e. La tradition chrétienne de l’amour du prochain
ne
s’en trouverait-elle pas éclairée, à son tour ? Aimer le prochain « c
771
entre l’individu et le vrai moi, sans laquelle on
ne
saurait s’aimer soi-même, puisqu’« il faut être deux pour aimer », co
772
notre amour, provoquant la passion créatrice, ce
ne
serait plus la mort, ce serait dès ici-bas, l’altérité même du procha
773
prochain. Que l’Autre soit un Autre impénétrable,
ne
tient pas à quelque interdit, à quelque tabou religieux, à quelque dé
774
onne. Nulle technique et nulle science de l’homme
ne
peut nous être ici d’aucun secours. Il faut aimer, pour le comprendre
775
de justesse dans le style de nos émotions. Et ce
n’
est pas seulement de la littérature qu’ils ont bien mérité, mais de l’
776
de la note suivante : « Le fauteuil où il est élu
n’
ayant jamais eu de titulaire depuis la fondation de l’Académie, M. Eug
777
M. Eugène Vinaver, en son discours de réception,
n’
avait pas à rappeler le souvenir d’un prédécesseur. Il lui fut donc lo
778
e à gagner Bruxelles, l’avion qui devait l’amener
n’
ayant pu quitter Genève à cause du brouillard. C’est donc en son absen
779
uère célèbre, Orson Welles assurait que la Suisse
n’
a donné au monde que la pendule à coucou. Il entendait que la Suisse n
780
e la pendule à coucou. Il entendait que la Suisse
n’
a pas produit de grands hommes, comme l’Italie a produit Dante, l’Alle
781
Orson Welles. Sa boutade est moins sotte qu’elle
n’
en a l’air. Trois raisons l’excusent à mes yeux, sans la justifier pou
782
phrase incriminée, la plupart de nos compatriotes
ne
voient pas malice, persuadés qu’ils sont que l’horlogerie suisse donn
783
orlogerie suisse donne l’heure au monde entier et
ne
craint personne. Il faut admettre ensuite que notre aurea mediocritas
784
e, pas une personne sur mille, prise dans la rue,
n’
aura jamais entendu ce nom. En revanche, les noms d’hommes importants
785
qui se côtoient partout mais qui s’ignorent ; je
ne
sais combien de races, de classes et de dialectes, jalousement préser
786
upe, et sociétés. Mais petits groupes de gens qui
ne
se connaissent que trop, et sociétés solides si leur but est restrein
787
de la culture, cet égalitarisme à petite échelle
ne
présente guère que des inconvénients. Car pour faire un grand musicie
788
fera l’homme de talent, d’ambition, de génie ? Il
ne
peut que se cacher dans son coin, ou tenter de se rendre utile, ou co
789
ilà qui est bien dit et bien vu, mais le Français
ne
fait-il pas trop belle la part des Suisses dans la culture humaine, t
790
nre humain, dès la fin du xviiie siècle. Mais ce
n’
est pas en grimpant sur nos Alpes que ces hommes s’illustrèrent et app
791
n Jean Piaget, qui ont surtout vécu en Suisse, ce
n’
est pas la Suisse qui a fait leur nom et qui l’a propagé au loin ; c’e
792
esprits mériterait une étude plus ample, dont je
n’
indique ici que le thème : un ou deux exceptés (et cela se discuterait
793
dons aux yeux de leur conscience helvétique… Nous
n’
avons pas en Suisse de purs poètes, ni de peintres qui aient fait époq
794
vanche, les grands noms que j’énumérais plus haut
ne
seraient guère pensables hors du complexe suisse. C’est à eux que la
795
européenne et d’efficacité transformatrice qu’on
ne
saurait en trouver dans nulle autre région d’étendue comparable, sur
796
nt. Le lecteur de ce recueil m’aura vu venir : je
n’
entendais poser que les prolégomènes à toute étude future sur l’œuvre
797
es réactionnaires. Leur erreur commune consiste à
ne
pas voir à quel point la technique résulte de la culture occidentale
798
it la technique occidentale ; et que la technique
ne
saurait faire de vrais progrès si elle se coupe de la culture. Je pen
799
que moderne, et par suite de notre économie, nous
ne
trouvons pas le désir de gain, ni le besoin de confort, ni la volonté
800
ire, nous dit-il, une « locomotive routière » qui
ne
fût pas astreinte à suivre la loi rigide des voies ferrées et des hor
801
avant Ford, mais son invention ou sa ré-invention
n’
en demeure pas moins exemplaire. L’un des inventeurs de la turbine fut
802
que ses livres de science pure, écrits en latin,
ne
servaient pas assez directement l’humanité. En marge de ses travaux i
803
in de pouvoir aller jouer. James Watt, plus tard,
ne
fit que perfectionner la trouvaille du petit garçon qui avait été ain
804
de ces exemples d’inventions techniques, le motif
n’
est utilitaire, économique ou financier. Ce sont des besoins d’un tout
805
nt l’industrie et les gros dividendes : mais ceci
n’
explique pas cela. Au début, il y a ces jouets pour grandes personnes
806
La vérité est simplement inverse : l’homme moyen
n’
éprouve le besoin de prendre le train, l’avion, ou son auto, que parce
807
atériels, pourquoi ferait-on de la publicité ? Il
n’
en reste pas moins qu’aujourd’hui, l’explication utilitaire ou économi
808
cherche des moyens d’explorer le cosmos. Personne
ne
peut savoir à quoi cela servira. Ce qui explique ces dilapidations dé
809
même scandaleuses, aux yeux de l’utilitarisme, ce
ne
sont pas les lois de l’économie et encore moins les besoins matériels
810
èrent la Terre. Mais vous êtes tous témoins qu’il
n’
en est rien. C’est la nature de nos rêves constants qui détermine nos
811
ciences et la littérature. C’est évident. Mais il
ne
faut pas oublier qu’ils se nourrissent en retour de la culture : nos
812
me rêve qui a créé notre culture ; — la technique
n’
est donc pas un destin objectif et que nous aurions à subir, mais bien
813
les. Il en résulte que la culture et la technique
ne
sauraient être opposées dans leurs sources, puisqu’elles procèdent de
814
sque de transformer en panique planétaire ? Si je
ne
partage nullement ce pessimisme, c’est que les motifs de craindre la
815
s machines et la bombe sont faites par l’homme et
ne
feront rien sans lui. J’écrivais au lendemain d’Hiroshima : La bom
816
J’écrivais au lendemain d’Hiroshima : La bombe
n’
est pas dangereuse du tout. C’est un objet. Ce qui est horriblement da
817
de Chine. Si on laisse la bombe tranquille, elle
ne
fera rien, c’est clair. Elle se tiendra coite dans sa caisse. Qu’on n
818
lair. Elle se tiendra coite dans sa caisse. Qu’on
ne
nous raconte donc pas d’histoires. Ce qu’il nous faut, c’est un contr
819
u’il nous faut, c’est un contrôle de l’homme. Il
n’
est pas d’invention, si simple et si utilitaire soit-elle, qui ne puis
820
ention, si simple et si utilitaire soit-elle, qui
ne
puisse être mise au service des passions meurtrières de l’homme : le
821
produite. Dire que la machine domine l’homme, ce
n’
est qu’une manière de parler. Ce qui par contre ne fut pas une illusio
822
n’est qu’une manière de parler. Ce qui par contre
ne
fut pas une illusion, ni une manière de parler, ce qui fut même une d
823
taylorisé, travaillant à la chaîne. Et certes ce
n’
étaient pas non plus les machines ou les chaînes qui forçaient l’ouvri
824
ccidentale. Chose étrange et bien remarquable, ce
ne
sont pas les justes indignations d’un Marx, ni l’action politique des
825
rolétariat, mais c’est la technique elle-même. Ce
n’
est pas en freinant ses progrès, mais au contraire en les accélérant,
826
teur dès qu’il est poussé jusqu’au bout, et qu’il
n’
a plus besoin d’être servi, mais seulement surveillé par l’homme. Mais
827
ivée du même coup du droit de se plaindre qu’elle
n’
a pas le temps de se cultiver ! Bien sûr, nous ne confondrons pas le s
828
n’a pas le temps de se cultiver ! Bien sûr, nous
ne
confondrons pas le simple loisir et la culture. La culture ne consist
829
ns pas le simple loisir et la culture. La culture
ne
consiste pas seulement à se cultiver, à lire des livres, à écouter de
830
ion obligatoire absorbe 67 % du temps d’étude, et
ne
laisse à peu près aucune place à la culture générale, réduite aux cou
831
ale. Les plus grands inventeurs de tous les temps
n’
ont pas été des techniciens au sens étroit, mais des poètes, des philo
832
litiquement disciplinées, ou même d’écoles où ils
n’
auraient reçu qu’une instruction purement technique. L’ère nouvelle ex
833
en relation de promotion réciproque. La technique
ne
permet pas seulement une augmentation quantitative du temps libre, ma
834
niks. Je crains pour elle que ses premiers succès
ne
l’aveuglent et que sa politique éducative ne soit à courte vue ; elle
835
ccès ne l’aveuglent et que sa politique éducative
ne
soit à courte vue ; elle repose en effet sur l’idée que la formation
836
nent plus tard. »… Et de même, Robert Oppenheimer
ne
cesse d’insister sur la nécessité absolue d’une vaste culture général
837
n veut que la recherche scientifique et technique
n’
aboutisse pas à des impasses, à la stagnation, ou à des monstruosités.
838
pendant le temps de la scolarité : car le métier
ne
s’apprend qu’en dehors des études. Cherchons d’abord à concevoir les
839
ue sera donnée par-dessus. Troisième conclusion :
Ne
perdons jamais de vue le contexte culturel de la technique. Car c’es
840
sans laquelle tous nos dons, même désintéressés,
ne
créeront outre-mer que le chaos, et n’engendreront que la haine. Quat
841
ntéressés, ne créeront outre-mer que le chaos, et
n’
engendreront que la haine. Quatrième et dernière conclusion : L’économ
842
ulture sous toutes ses formes : cette culture qui
n’
est pas seulement la source de nos inventions mais la seule garantie d
843
ie d’un progrès véritable. L’avenir de l’Occident
ne
dépend pas de nos dividendes immédiats, mais de notre faculté d’imagi
844
rêves et de notre action. L’avenir de l’Occident
ne
peut se lire seulement dans les indices de production, mais dans ce q
845
au Centre européen de la culture, à Genève, qu’il
ne
devait quitter qu’un an avant sa mort. Je parlerai de sa personne. ⁂
846
mortelle, en vue d’un « nouveau travail » ? ⁂ Il
n’
aimait pas les discussions métaphysiques ni qu’on lui demandât ce qu’i
847
isait, coupant court, et comme en aparté : « Ceci
n’
est pas conforme à ma théologie. » Et l’on sentait qu’il s’agissait en
848
’économie, et sans doute la morale. Pourtant, nul
n’
était moins que lui tenté par le nihilisme ou simplement par la révolt
849
la perfection des temps ». Sa faculté de travail
n’
était guère égalée que par sa faculté d’évasion vagabonde ; son perfec
850
les besognes dont il s’acquittait pour s’en tirer
ne
l’atteignaient pas, quoique l’empêchant, hélas ! d’écrire son œuvre.
851
éalise sa part d’héritage, vend ses bénéfices, et
ne
s’occupe plus que de religion. Il prêche. Il doit s’enfuir à Nérac au
852
e de s’y mêler — de les diriger, pourquoi pas ? —
ne
fait pas précisément œuvre d’écrivain », alors Calvin n’est pas un éc
853
pas précisément œuvre d’écrivain », alors Calvin
n’
est pas un écrivain. Il a créé un style et un vocabulaire, et la langu
854
ussi bien écrit qu’homme de son siècle », mais ce
n’
était pas pour faire de la littérature : c’était pour enseigner des vé
855
ue, et diriger les hommes à leur fin de salut. Il
n’
a écrit que pour mieux faire comprendre l’Écriture, parlé que pour mie
856
un ton quelconque, — l’idée même d’être original
ne
lui a pas fait perdre une seconde. On ne joue pas avec les mots quand
857
original ne lui a pas fait perdre une seconde. On
ne
joue pas avec les mots quand on est « ministre du Verbe », minister v
858
ister verbi divini. Les manuels ont beau dire, je
ne
vois pas qu’il ait eu la moindre « influence » vérifiable sur la litt
859
définit précisément comme quelque chose où Calvin
ne
trouverait pas sa place et, de fait, ne joue plus aucun rôle. En reva
860
où Calvin ne trouverait pas sa place et, de fait,
ne
joue plus aucun rôle. En revanche, l’une des traditions maîtresses de
861
t abusé — s’origine sans nul doute chez Calvin et
n’
a jamais encore égalé son modèle. Calvin n’est pas aimable, on le sait
862
vin et n’a jamais encore égalé son modèle. Calvin
n’
est pas aimable, on le sait de reste. Maigre et mélancolique, comme l’
863
est aussi gras et sanguin que Thomas d’Aquin — il
ne
séduit que par la démesure d’une inflexible discipline intime. Rien d
864
d’un si grand désir de profiter, qu’encore que je
ne
quittasse pas du tout les autres études, je m’y employai toutefois pl
865
e rangeaient à moi pour apprendre, combien que je
ne
fisse que commencer moi-même. De mon côté, d’autant qu’étant d’un nat
866
tournoyer par divers changements que toutefois il
ne
m’a jamais laissé de repos en lieu quelconque jusques à ce que, malgr
867
s martyrs », de peur, dit-il, qu’en se taisant il
ne
se montre lâche et déloyal. C’est ainsi qu’il rédige en latin, de mar
868
appelle. Passant à Genève par hasard, il comptait
n’
y rester qu’une nuit. Mais là, « maître Guillaume Farel me retint, non
869
de ses études, maudite par les cris de Farel. Il
n’
accepte pourtant qu’une charge de docteur, et commence à « dresser » l
870
re en repos un bien peu de temps, que toujours je
n’
eusse à soutenir quelque combat, ou de ceux du dehors, ou de ceux de d
871
ivre sa vocation, au contraire de ce qu’on croit,
n’
est pas suivre sa pente (même en la remontant) mais c’est être emporté
872
soi vers des buts et dans une action à quoi rien
ne
nous inclinait. J’étais l’homme le moins fait pour cela ! gémit l’ind
873
igée sans relâche à l’individu naturel par ce qui
n’
est pas lui, mais qui vient l’appeler et le réalise à jamais. Toutes
874
s jugeons pittoresques, par erreur, des tours qui
ne
voulaient qu’être clairs et convaincants pour l’auditeur d’alors. À l
875
chaque jour à la cathédrale de Saint-Pierre. Rien
n’
est plus près de la parole improvisée, rien n’est plus varié quant aux
876
ien n’est plus près de la parole improvisée, rien
n’
est plus varié quant aux rythmes ; et pourtant rien n’est plus altière
877
t plus varié quant aux rythmes ; et pourtant rien
n’
est plus altièrement monotone quant à la pensée directrice : à Dieu se
878
qu’il semble que jamais le moindre doute frivole
n’
ait fait broncher l’esprit qui la préméditait. C’est ici le langage d’
879
vel, ce grand mal-entendu. J’écarte Nietzsche. Je
ne
vois plus que Marx, et encore. Un empire international se réclame de
880
ssi paradoxale que celle des Pères de la Réforme,
n’
a jamais pu créer une éthique, ni même une formule d’équilibre entre l
881
re bien moins entre l’État et le citoyen. Calvin
n’
était pas démocrate, mais il a fomenté les chefs qui ont appris aux si
882
les chefs qui ont appris aux siècles futurs qu’il
n’
est pas de liberté concrète qui ne soit responsable en retour devant D
883
es futurs qu’il n’est pas de liberté concrète qui
ne
soit responsable en retour devant Dieu et dans la cité ; et que le ti
884
qui ont refusé de payer ce prix en sont mortes ou
ne
valent guère mieux. Le régime synodal des églises calvinistes préfigu
885
vin et l’aire des dictatures totalitaires : elles
ne
se recouvrent nulle part. Enfin, loin d’avoir instauré la théocratie
886
dans les limites de son juste pouvoir, elle-même
n’
en demandant aucun puisqu’elle détient l’autorité, qui est de l’esprit
887
l’histoire des cités les plus libres, parce qu’il
ne
croyait pas à l’Histoire déifiée mais qu’il en appelait à son juge.
888
égions froides. L’étiquette de la cour victoriale
n’
a jamais été codifiée : plus mystérieuse que la Constitution anglaise,
889
us mystérieuse que la Constitution anglaise, elle
ne
s’explique pas, on la sent. Ses exigences sont aggravées par une dose
890
empérées par les plus capricieuses tolérances. On
ne
sait jamais, mais si l’on ne s’inquiète pas de trop savoir, on est ad
891
euses tolérances. On ne sait jamais, mais si l’on
ne
s’inquiète pas de trop savoir, on est admis, on est heureux. Contrair
892
s embourgeoisées, les petites « bonnes manières »
ne
suffisent aucunement, mais parfois les « mauvaises » sont pardonnées
893
tre-Dame. Victoria m’a trouvé là, et parce que je
ne
disais rien, m’a fortement pincé le bras pour que je crie mon admirat
894
. Et c’est pourquoi son amitié est un honneur. On
n’
oserait pas l’avouer n’était l’humour et cette espèce de rigueur fémin
895
amitié est un honneur. On n’oserait pas l’avouer
n’
était l’humour et cette espèce de rigueur féminine — déconcertant tout
896
. L’Europe qui se fait, dans la réalité concrète,
n’
est-elle pas avant tout l’Europe économique, c’est-à-dire le Marché co
897
ibutions efficaces a-t-elle apportées à l’union ?
N’
est-elle pas au contraire, ajoutent certains, l’un des derniers bastio
898
le Marché commun serait impensable (et au surplus
n’
aurait jamais vu le jour) s’il ne s’inscrivait pas dans une longue tra
899
e (et au surplus n’aurait jamais vu le jour) s’il
ne
s’inscrivait pas dans une longue tradition culturelle européenne ; 3°
900
uement ; 5° enfin, que l’Europe, sans sa culture,
ne
serait pas l’Europe mais un cap de l’Asie. Doutes sur l’utilité de
901
re beaucoup de nos États. Les problèmes culturels
ne
seraient par conséquent que des problèmes marginaux. La culture serai
902
ondations culturelles existant dans nos pays, qui
ne
se chiffre qu’en millions de francs, marks ou florins. Mais quelle qu
903
ne des trois grandes puissances de la planète, ce
n’
est pas à ses richesses naturelles qu’elle le doit : simple cap de l’A
904
pe » ? L’Europe existe depuis des millénaires. Il
n’
est pas question de la créer ; mais simplement, les circonstances du x
905
les esprits qu’il s’agit de le combattre. Et ceci
n’
est pas une question de technique ou de calculs tarifaires, mais une q
906
re, d’éducation nouvelle. Mais « faire l’Europe »
ne
veut pas dire seulement réduire les obstacles à l’union. Et c’est là
907
s et les meilleurs hommes politiques du continent
n’
ont cessé de préconiser une union fédérale de nos peuples, respectant
908
ndrait » matériellement. Elle serait unifiée mais
ne
serait plus l’Europe. Aux seconds, vous direz : votre Europe harmonie
909
dialogue est vital pour l’avenir de l’Europe. Ce
n’
est pas un dialogue politique, et encore moins économique. C’est vraim
910
che de la culture et sa vocation prospective. Il
n’
y aurait pas d’Europe sans tout ce que la culture a su tirer de nos pa
911
n et divers » de la culture européenne. L’Europe
n’
est pas une addition de cultures nationales. Celles-ci sont des appari
912
chniquement parfaites, si les Européens de demain
ne
croyaient plus à leurs valeurs, à leurs idéaux, à tout ce qui a fait
913
européenne à des gens qui répondent que l’Europe
n’
est plus rien, qu’elle n’a pas d’idéal à opposer aux ambitions mondial
914
i répondent que l’Europe n’est plus rien, qu’elle
n’
a pas d’idéal à opposer aux ambitions mondiales du communisme, ni de v
915
ues, sans tenir compte de cette situation morale,
ne
serait pas seulement dangereux mais vain. Cette méthode soi-disant ré
916
in (aux trois degrés orientés vers l’Europe unie)
ne
sont pas fortement soutenus dès maintenant, les plus belles réalisati
917
nales. Au terme de l’intégration européenne, s’il
ne
devait y avoir que dividendes, bombes atomiques, autos et frigidaires
918
eut leur donner, l’indispensable union économique
ne
pourra jamais prendre vie : trop de contre-courants psychologiques, t
919
avant nous à des positions de puissance dont ils
ne
manqueront pas d’abuser contre l’homme, du moins tel que nous le conc
920
e à nos peuples passifs, si les forces de culture
ne
l’animent pas, une Europe techniquement unifiée ne sera jamais qu’une
921
e l’animent pas, une Europe techniquement unifiée
ne
sera jamais qu’une coque vide. L’apport vital des forces culturelles
922
papiers. Compris. Telle était l’atmosphère, et je
n’
ai vu ce jour-là, comme les jours suivants à la troupe, où je suis ret
923
it-il, c’est une idée… (et pendant une seconde je
n’
ai pas su s’il était ironique ou sérieux) une bonne idée… Seulement ce
924
ironique ou sérieux) une bonne idée… Seulement ce
n’
est rien d’en parler. Il faut le faire ! » J’ai senti sous son regard
925
comme chaque matin la Gazette . Mon article — je
n’
y pensais plus — en première page, à côté d’un appel à se taire lancé
926
taire lancé par le gouvernement vaudois ! (« Qui
ne
sait se taire, nuit à son pays ! ») Je le relis rapidement dans l’esc
927
aux autres camarades, ils le trouvent bien, mais
ne
paraissent pas spécialement frappés. Cela passera donc sans histoires
928
upérieurs ? — Non, mon colonel. — Pourquoi ? — Je
ne
suis pas officier de carrière. — Vous deviez le faire quand même. Vou
929
bilistes munis de passeports français, mais aucun
n’
était Français. La population, sortie pour voir, avait l’air en fête.
930
out nu. Faute de soldats baïonnette au canon — on
n’
en trouve point — c’est le lieutenant-colonel M. qui m’accompagne à la
931
ppose que vous êtes d’accord avec mon article. Là
n’
est pas la question… La question est de me déférer au tribunal militai
932
Mercredi 19 juin 1940 Atmosphère d’imminence, je
ne
puis la caractériser mieux. Tout est immédiat, concret, naturel et ex
933
n instant des hommes qui nous tireront dessus. Je
n’
ai même plus mon pistolet, que je déposais chaque soir à côté de mon l
934
ur son propre cas, et sur le sort des nations. Il
ne
reste que la préoccupation des petites choses précises à faire. 20 ju
935
r vous. Maintenant, écoutez. La justice militaire
ne
veut pas de votre cas. C’est donc le général lui-même qui vous condam
936
nt-Maurice. Tout ce que je vous demande, c’est de
ne
pas sortir dans les rues de Berne chaque soir avec une petite femme à
937
l’ennemi sur le point de la liberté d’expression,
n’
est-ce point perdre, avant de se battre, l’une des raisons que l’on au
938
ate que « la Suisse est réduite à elle-même. Elle
n’
a pas d’autre garantie que son armée, pas d’autre allié que son terrai
939
édérés peuvent s’unir dans leurs diversités… Nous
n’
avons qu’un seul but : maintenir la Suisse dans le présent et pour l’a
940
la Suisse dans le présent et pour l’avenir. Nous
ne
vous promettons qu’un grand effort commun. Mais il nous rendra fiers
941
res, mais l’une est atroce. Je veux, croire qu’il
ne
l’a pas senti. Mais ce matin, un officier de l’E.-M. du Général me di
942
ailleurs la démission de notre Directoire : or il
n’
en a jamais été membre. Rien de plus normal. En dépit du choc causé pa
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causé par la défaite française, l’opinion suisse
n’
a pas encore compris toute l’ampleur du péril, c’est bien le tout de n
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qu’un autre, qui est radicalement menacé. Pas un
n’
aurait la moindre chance de « s’arranger » avec l’occupant hitlérien.
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usanne et bridé par mes fonctions militaires, je
ne
puis faire partie de la délégation. J’attends les résultats de la dém
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pour la transmettre à ses collègues, et bien sûr,
n’
a pu faire davantage. Mais les banderilles ont été plantées. (Note de
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es fédérales. On devait s’y attendre. Et personne
n’
ébruita la chose à l’époque. On comprend donc que M. Kimche n’ait pas
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chose à l’époque. On comprend donc que M. Kimche
n’
ait pas pu faire état de l’incident, si pittoresque et surprenant qu’i
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, il devait nous faire arrêter sur-le-champ. S’il
ne
nous croyait pas, notre démarche était ratée, et au surplus couvrait
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us. Le Conseil fédéral devait donc nous croire et
ne
pas nous croire à la fois. Finalement, il résista, comme on sait.)
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article qui lui vaut d’être mis aux arrêts (“Qui
ne
sait se taire nuit à son pays”). Le moral des Suisses va-t-il flanche
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ès quelques heures d’essais peu convaincants — on
ne
peut pas écrire en groupe — ils me confient la rédaction. Ma position
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l, un Bernois. Mais quoi ! D’une part, le général
ne
saura pas que le texte est de ma main. D’autre part, je suis sûr qu’i
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tés de travail », esquissées dans divers cantons,
n’
auraient pas vu si tôt le jour. Nous savons qu’en réunissant des effor
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il y eut l’incident de mon article sur Paris. Je
n’
étais certes plus persona grata. Pourtant, le 16 juillet, Pro Helvetia
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udences officielles — bien typiques de l’époque —
n’
eurent d’autre effet que de me piquer au jeu. Bien décidé à n’en pas t
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utre effet que de me piquer au jeu. Bien décidé à
n’
en pas tenir compte, je finis par accepter la proposition de voyage au
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êmes peuvent rire de l’armée suisse parce qu’elle
n’
eut pas l’occasion de se battre. Pourtant elle l’aurait eue, probablem
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tainement passé à la pratique si le moral du pays
ne
s’était pas ressaisi. Le seul fait qu’à ce redressement la Ligue ait
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travaux d’écrivain, mais pratiquement condamné à
ne
plus aborder en public que les sujets admis par la censure, et ce n’é
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public que les sujets admis par la censure, et ce
n’
était, littéralement, pas beaucoup dire. Me taire ou ne parler que de
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it, littéralement, pas beaucoup dire. Me taire ou
ne
parler que de notre belle nature me semblait également intolérable, t
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otre continent, l’élément décisif allait venir et
ne
pouvait venir que de l’Amérique. Peut-être bien était-ce là-bas qu’il
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à partir. Et, certes, les raisons qui m’animaient
n’
étaient point exactement celles qu’on eut alors au Palais fédéral pour
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nis, sauf sur un point, qui est d’importance : je
ne
crois pas un instant que les officiers ligueurs aient pu douter de la
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e résistance à tout prix du Général. Leur complot
ne
visait que le Conseil fédéral, et c’est pourquoi il dut être un compl
967
onne des responsables de ce dernier Mouvement, il
ne
saurait s’agir que d’une organisation civile qui apparut durant l’aut
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disant d’une part que « l’Action de résistance »
n’
intervint qu’« après mon départ pour les États-Unis », d’autre part qu
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la substitution à cette ligue d’un mouvement qui
n’
eut d’autre tort à mes yeux que celui de n’avoir pas existé pendant la
970
nt qui n’eut d’autre tort à mes yeux que celui de
n’
avoir pas existé pendant la période que décrit Kimche, n’est pas seule
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pas existé pendant la période que décrit Kimche,
n’
est pas seulement une erreur de fait que l’auteur pourra corriger sans
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n papier à la gloire de la capitale française qui
n’
était pas tendre pour le Führer triomphant. »
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p plus vite et avec plus d’intensité que personne
n’
osait le croire ou le redouter. Sommes-nous autorisés à prolonger les
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onté de ceux qui luttent pour cette union. Car il
ne
s’agit pas — je le dis une fois de plus — de deviner l’histoire qui v
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itesses plusieurs fois supérieures à celle du son
n’
étonnent plus ; on découvre au contraire les charmes souverains de la
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mi ou trois jours est de règle.) La vie politique
ne
ressemble plus du tout à ce qu’elle était sous la IIIe République, pa
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mondiale. Le mythe des deux grands a disparu, on
ne
s’en souvient guère davantage que de la Triplice et de la Triple Ente
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2)as Anciens villages et villes d’Europe, vous
n’
en trouverez pas deux dont les plans soient superposables. S’ils se re
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e long des routes frayées par les pionniers : ils
ne
sont guère enracinés, ils sont en marche. Ces maisons boisées, espacé
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sur la place principale.) Lire et parler Il
n’
est pas de démocratie, au sens européen du terme, qui ne repose sur la
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pas de démocratie, au sens européen du terme, qui
ne
repose sur la libre discussion, sur le libre jeu des partis, et sur l
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enfin sortie des cabinets d’études et de l’école.
N’
oublions donc pas, sur la place, la présence du kiosque à journaux, po
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uvoirs locaux, apparus depuis la dernière guerre,
ne
livrent pas un combat d’arrière-garde contre l’État, mais au contrair