1 1963, Articles divers (1963-1969). Le fédéralisme suisse (1963)
1 , marquant leur temps ou propageant un style doté du nom de sa terre natale. Il n’y eut jamais de peinture suisse, au sens
2 e restée longtemps sans nom et sans doctrine — ou du moins, sans doctrine trop clairement formulée. Ce n’est guère qu’au x
3 r les premiers, fédération veut dire « communauté du Serment » (Eidgenossenschaft) ou « lien » (Bund). Pour les seconds, f
4 ltivé et qui se demande quel est le « vrai » sens du mot fédéralisme, recourt à son Littré, où il trouve ceci : Fédérali
5 Fédéralisme s.m. Néologisme. Système, doctrine du gouvernement fédératif. — « Le fédéralisme était une des formes polit
6 s. « Aux jacobins, on agita gravement la question du fédéralisme, et on souleva mille fureurs contre les girondins. » Thie
7 peut l’être, en cette affaire où le sens concret du bien public a beaucoup plus à voir que l’idéologie. ⁂ Comme toutes le
8 compétition, et loin de fuir devant la complexité du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bre
9 te de moyen terme entre ces deux extrêmes ? Point du tout ! La santé n’est pas un moyen terme entre la peste et le choléra
10 des proportions, d’ouverture d’esprit et d’amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne se borne pas à reconnaître d’une
11 goniste. L’attitude fédéraliste veut une maîtrise du divers, comme tout art. Elle est un art de la composition, qui requie
12 n d’ensemble, celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y
13 duction forcée à l’uniforme, — dans tous les sens du mot. Ces images, qui sont autant d’évidences, suffisent à définir le
14 s lesquelles se fourvoie l’organisation politique du monde moderne proviennent du fait que l’on oublie ces évidences. Je n
15 ganisation politique du monde moderne proviennent du fait que l’on oublie ces évidences. Je n’en donnerai qu’un seul exemp
16 un organe bien différencié ne saurait vivre isolé du corps. Quelle serait alors la solution fédéraliste ? J’en propose ici
17 olitique, le seul « régime de coexistence » digne du nom. C’est aussi, et c’est même avant tout, une méthode de compositio
18 valeurs diversifiées, — et voilà, me semble-t-il, du même coup, une assez bonne définition de la culture ! ⁂ Pour qu’il y
19 ulture en général — au sens occidental et moderne du terme —, il faut une variété aussi riche que possible de créations hu
20 et xive siècles dans un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, puis en Île
21 iècles dans un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, puis en Île-de-France.
22 aint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xxe siècle, plusieurs Russes, tels que Stravinsky, influenceront à l
23 de l’illusion des « cultures nationales », fût-ce du seul fait de la composition linguistique si variée de leur État. Nous
24 au même. 5° nous ne sommes pas seulement voisins du monde germanique : nous sommes en osmose avec lui, bien davantage que
25 de nos jours, cette espèce de critère privilégié du niveau de culture d’un peuple, qu’elle fut au temps de l’Europe class
26 tants d’un pays, de 1901 à 1960. Voici un extrait du tableau1 : 1. Suisse 2,62 7. Royaume-Uni 0,67 2. Danemark 1,
27 déraliste, leur sentiment direct, leur expérience du fédéralisme vécu. Nous avons produit peu de génies du premier ordre,
28 édéralisme vécu. Nous avons produit peu de génies du premier ordre, tels que Rousseau ou C. G. Jung, Léonard Euler ou Ferd
29 rticulière dans le monde de cette deuxième moitié du xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’apport de l’Europe au tiers-
30 fiévré par les virus nationalistes que la culture du dernier siècle et notre crise totalitaire ont propagés. L’apport suis
2 1963, Articles divers (1963-1969). Aspects fédéralistes dans les plans et projets d’union européenne du Moyen Âge à nos jours (1963)
31 stes dans les plans et projets d’union européenne du Moyen Âge à nos jours (1963)j k Au seuil des activités d’enseignem
32 iences pratiques et de publications dans le cadre du Centre européen de la culture, il ne sera sans doute pas inutile de s
33 re, depuis plusieurs années, dans d’autres villes du continent. Très près de l’actualité, en raison même de leur objet, qu
34 e naît, ou renaît en Europe le vieux rêve d’union du Continent. Et cela commence, comme toujours, par des manifestes d’int
35 n et son niveau de vie. Jean Monnet et son équipe du Plan français se mettent à l’œuvre en silence, loin des congrès et de
36 us nos pays, ne fût-ce que par la seule existence du Marché commun. Telle est donc la question européenne. Formulée tout d
37 ire, c’est à ce niveau que la discussion générale du problème dans la presse, les partis, les parlements, les congrès et l
38 istoriques, ni aux données actuelles et concrètes du problème à résoudre. Il importe toutefois de la mentionner, ne fût-ce
39 ays, et ceux qui insistent avant tout sur l’unité du continent. Raisons particulières ensuite. La solution fédéraliste est
40 rme à l’expérience de la vie politique et civique du pays où nous sommes, et dont je suis, pays que l’on a souvent appelé,
41 nos précédents travaux à étudier certains aspects du problème fédéraliste, aspects complémentaires, qui n’épuisent pas le
42 l’approcher de manières variées, avec les moyens du bord, dans un esprit commun. Or je pense qu’il existe une harmonie pr
43 nc des exemples précis d’évolution des structures du stade national aux divers stades d’une intégration progressive à l’éc
44 tes dans les projets et plans d’union européenne, du Moyen Âge à nos jours. Parallèlement aux cours et aux travaux de sém
45 nt d’entreprendre là où on le peut, dans l’esprit du proverbe chinois qui dit : « Mieux vaut allumer une petite chandelle
46 Fédéralisme, s.m. Néologisme. Système, doctrine du gouvernement fédératif. « Le fédéralisme était une des formes politiq
47 actically impracticable)11 ». Quant aux partisans du fédéralisme comme méthode ou attitude, et des régimes qui s’en inspir
48 ). En France, c’est l’œuvre posthume de Proudhon, Du Principe fédératif, qui, en 1863 (l’année même où Littré publie l’art
49 er sereinement) ; Georges Scelle, dans son Précis du droit des gens, tome I, paru en 1932, généralise la méthode fédéralis
50 itique : il est un des grands types d’aménagement du rapport politique, et peut-être plus encore, un des grands styles de
51 écrits des précurseurs de l’Europe unie, à partir du xive siècle, et en remontant peu à peu vers notre époque, les élémen
52 ssance de notre confédération, qui résulte, elle, du mouvement des communes12, troisième composante de l’époque. Vous pres
53 r dans ces plans avortés les étymologies vivantes du vocabulaire politique européen de la plupart de ses termes de base, t
54 er fréquemment un phénomène curieux : la pratique du fédéralisme a précédé de plusieurs siècles sa théorie (ceci peut être
55 ations économiques, totalement absentes des plans du xive siècle, apparaissent avec les plans du xviie , dont celui du mo
56 lans du xive siècle, apparaissent avec les plans du xviie , dont celui du moine parisien Émeric Crucé, qui propose une sé
57 apparaissent avec les plans du xviie , dont celui du moine parisien Émeric Crucé, qui propose une série de « grands travau
58 de déchets idéologiques. Qu’il s’agisse au début du plus grand poète du Moyen Âge, Dante, ou du roi hussite Podiebrad, et
59 ques. Qu’il s’agisse au début du plus grand poète du Moyen Âge, Dante, ou du roi hussite Podiebrad, et ensuite du ministre
60 début du plus grand poète du Moyen Âge, Dante, ou du roi hussite Podiebrad, et ensuite du ministre déchu qu’était le duc d
61 e, Dante, ou du roi hussite Podiebrad, et ensuite du ministre déchu qu’était le duc de Sully, ou du créateur d’un grand Ét
62 te du ministre déchu qu’était le duc de Sully, ou du créateur d’un grand État qu’était William Penn, puis d’un économiste
63 stes dans les plans et projets d’union européenne du Moyen Âge à nos jours », Bastions de Genève, Genève, 1963, p. 61-72.
64 il dirige encore aujourd’hui. Dès 1951, président du comité exécutif du Congrès pour la liberté de la culture. Auteur de 2
65 jourd’hui. Dès 1951, président du comité exécutif du Congrès pour la liberté de la culture. Auteur de 24 ouvrages qui ont
3 1963, Articles divers (1963-1969). Apport à la civilisation occidentale (janvier 1963)
66 al et solidement constitué. Auparavant, de la fin du xiiie jusqu’au milieu du xixe siècle, elle n’était guère qu’une con
67 zerains de la région, mais, par-dessus leur tête, du seul empereur. Leur liberté, c’était ce qu’on nommait alors « l’imméd
68 s grands voisins — constitue la raison suffisante du phénomène exceptionnel que je constatais tout à l’heure. Genève, avec
69 mais également auteur de la célèbre Vue générale du genre humain, entre au service des empereurs autrichiens puis de la P
70 re la sensibilité occidentale. De Zurich au début du xviiie siècle, rayonne l’école suisse du doyen Bodmer puis des Idyll
71 u début du xviiie siècle, rayonne l’école suisse du doyen Bodmer puis des Idylles de Salomon Gessner et des spéculations
72 u des Claparède, Bovet et Jean Piaget, et l’école du grand C. G. Jung : les fondements de la pédagogie et de la psychologi
73 aissance, à la peinture hollandaise ou vénitienne du xviiie siècle, et qu’elle s’est conformée par anticipation à cette r
74 icipation à cette règle devenue évidente à partir du xixe siècle : point de grand art dans les petits pays. Un Ludwig Sen
75 une « culture suisse » — qui ne saurait exister — du moins d’une attitude d’esprit commune aux créateurs issus de nos dive
76 ra plus de chances de les trouver dans le domaine du roman : La Nouvelle Héloïse, l’Émile, Adolphe, le Grüne Heinrich de G
77 Uli de Jeremias Gotthelf, le Léonard et Gertrude du fameux pédagogue Pestalozzi, voire à certains égards les récits d’un
78 nglais ou russes des mêmes époques par la gravité du propos, le dédain pour l’invention romanesque ou les situations excep
79 tre. Mais le goût de la mesure, de l’intériorité, du réalisme et de la psychologie moyenne expriment surtout les condition
80 conditions dictées par les dimensions restreintes du pays et des communautés diverses qui s’y côtoient. Pays pauvre, au su
81 au surplus, et dont les seules richesses naissent du travail humain, bien concerté : la Suisse est née de coopératives for
82 de coopératives forestières exploitant le passage du Gothard, « Un pour tous, tous pour un », c’est moins un idéal qu’une
83 s-Unis qu’il ira construire les plus grands ponts du monde comme l’ingénieur Ammann, c’est en France ou en Inde qu’il trou
84 rne, puritain révolutionnaire, né dans une vallée du Jura neuchâtelois. Voilà pourquoi les Suisses qui ont excellé furent
85 res publiques, théologiens et pédagogues, savants du premier rang, mais qui restent soucieux d’applications industrielles
86 turel ? Il me paraît que la structure fédéraliste du pays et l’autonomie dans son sein non seulement des cantons, mais des
87 ns privées de peinture sont parmi les plus belles du monde, Reinhart à Winterthour et Hahnloser à Berne tenant la tête. Le
88 ur elle que pour ses grands voisins. Ce n’est pas du projet d’union européenne que provient cette menace de nivellement, m
4 1963, Articles divers (1963-1969). Le fédéralisme et notre temps (mars 1963)
89 compétition, et loin de fuir devant la complexité du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bre
90 te de moyen terme entre ces deux extrêmes ? Point du tout ! La santé n’est pas un moyen terme entre la peste et le choléra
91 des proportions, d’ouverture d’esprit et d’amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne se borne pas à reconnaître d’une
92 goniste. L’attitude fédéraliste veut une maîtrise du divers — comme tout art ! Elle est un art de la composition qui requi
93 n d’ensemble, celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y
94 s lesquelles se fourvoie l’organisation politique du monde moderne proviennent du fait que l’on oublie ces évidences. Je n
95 ganisation politique du monde moderne proviennent du fait que l’on oublie ces évidences. Je n’en donnerai qu’un seul exemp
96 un organe bien différencié ne saurait vivre isolé du corps. Quelle serait alors la solution fédéraliste ? Je vous en propo
97 on politique, le seul régime de coexistence digne du nom. C’est aussi, et c’est même avant tout, une méthode de compositio
98 lier. Essayons pourtant d’illustrer les principes du fédéralisme en les appliquant à la culture. Pour qu’il y ait culture
99 ’il y ait culture en général — au sens occidental du terme, très différent de l’asiatique — il faut une variété aussi rich
100 au xiiie siècle dans un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, puis en Île
101 siècle dans un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, puis en Île-de-France.
102 aint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xxe siècle, plusieurs Russes, tels que Stravinsky, influenceront à l
103 autres de l’illusion des « cultures nationales », du seul fait de la composition linguistique si variée de leur État. Nous
104 au même ; 5° nous ne sommes pas seulement voisins du monde germanique : nous sommes en osmose avec lui, bien davantage que
105 déraliste, leur sentiment direct, leur expérience du fédéralisme vécu. Nous n’avons pas produit de génies du premier ordre
106 éralisme vécu. Nous n’avons pas produit de génies du premier ordre, à part Rousseau, mais beaucoup d’excellents ou même de
107 rticulière dans le monde de cette deuxième moitié du xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’apport de l’Europe au tiers-
108 fiévré par les virus nationalistes que la culture du dernier siècle et notre crise totalitaire ont propagés. L’apport spéc
109 s. L’apport spécifique de la Suisse étant le sens du fédéralisme, et ce sens étant lié, nous l’avons vu, au génie de la cu
110 s qui par essence, ne le sont pas. Tout le secret du fédéralisme réside dans l’art de distinguer, de cas en cas, ce qui ma
111 même devenues des foyers rayonnants de créations du premier ordre. Et cela, je crois, pour les deux raisons suivantes : p
112 s qui se groupaient en écoles, autour d’un maître du métier ; secondement, le sens de la dépense magnifique, le goût de la
113 la dépense magnifique, le goût de la nouveauté et du somptueux, qui caractérisent tant de princes et de grands marchands d
114 ’absence de cette passion créatrice et de ce sens du mécénat, nul comité de coordination ne pourra jamais remédier. Les co
115 tistique. Nos habitudes utilitaires, notre notion du sérieux confondu avec le rentable, nos réflexes jalousement égalitair
116 ce qui n’est, soit dit en passant, qu’une parodie du vrai fédéralisme — c’est tout cela qui mérite aujourd’hui d’inquiéter
117 ité fédéraliste. On parle beaucoup, ces jours-ci, du danger que le Marché commun représenterait pour notre Suisse fédérali
5 1963, Articles divers (1963-1969). À propos de la culture européenne (avril 1963)
118 e se reporter à l’une quelconque des publications du CEC (l’un de nos 52 bulletins , ou à Vingt-huit siècles d’Europe ,
119 alement. Qu’il y ait une tradition « européenne » du fascisme et de ses procédés, comme le rappelle votre auteur — non san
120 lettre suivante de Denis de Rougemont, directeur du Centre européen de la culture. »
6 1963, Articles divers (1963-1969). Orientations vers une Europe fédérale (10 mai 1963)
121 antanément de Paris jusqu’à toutes les extrémités du territoire national, Anarcharsis Clootz, l’« Ami du genre humain », d
122 territoire national, Anarcharsis Clootz, l’« Ami du genre humain », définissait très bien l’utopie unitaire, que la techn
123 ’anarchisme à la Bakounine et les brèves flambées du communisme anabaptiste ou de l’anarcho-syndicalisme. Ni l’une ni l’au
124 ractériser : je les nommerai symboliquement celui du manager et celui du professeur. Ils ont en commun une volonté déclaré
125 nommerai symboliquement celui du manager et celui du professeur. Ils ont en commun une volonté déclarée d’objectivité (tec
126 ent consenti. Cette ambition évoque la quadrature du cercle aux yeux de la logique rationaliste de nos pères. En revanche,
127 ysiques, et biologiques dans cette seconde moitié du xxe siècle. Mais en fait, le projet d’une Europe fédérale est antéri
128 ce qu’elles sont, ou n’auraient pas eu lieu. Lors du premier congrès de l’Union européenne des fédéralistes, qui se tint à
129 ant de reprendre ici la description de l’ensemble du projet, je me vois ramené, inévitablement, à son point de départ, qui
130 re Europe, redéfini dans les catégories concrètes du présent. Toute politique implique une certaine idée de l’homme, et c
131 ent, puisqu’en fait nous voici réunis pour parler du fédéralisme ? Nous ne serions pas ici si nous pensions que le type d’
132 ommunauté. Car alors nous serions de l’autre côté du rideau de fer, en esprit tout au moins. Si nous sommes ici, c’est que
133 se réaliser intégralement sans se trouver engagé du même coup dans le complexe social. Et aux collectivistes, nous rappel
134 hacun sait que l’individualisme outré fait le lit du collectivisme : ces deux extrêmes, eux, sont dans le même plan, se co
135 rincipes, sans techniques éprouvées, sans secrets du métier, mais il serait vain d’en faire un traité théorique. Plutôt qu
136 rincipe. Une fédération ne peut naître qu’au prix du renoncement formel et vigilant à toute idée d’hégémonie organisatrice
137 xième principe. Le fédéralisme ne peut naître que du renoncement à tout esprit de système idéologique ou technocratique. C
138 se traduit pas seulement dans le mode d’élection du Conseil des États (deux députés par canton), mais surtout, et d’une m
139 it tous. L’attitude fédéraliste veut une maîtrise du divers, comme tout art. Art de la composition, elle requiert à la foi
140 ’ensemble (celle de l’artiste) et hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y
141 duction forcée à l’uniforme, — dans tous les sens du mot. Prenons une autre image. Chacune des nations qui composent l’Eur
142 lle d’un organe dans un corps. Or, la vie normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses organes, de même que la
143 rance, vertu négative et qui naît le plus souvent du scepticisme, mais plutôt de participation, vertu positive et qui naît
144 logiques, et même économiques, telle est la santé du régime fédéraliste. Et ses pires ennemis sont ceux dont Jacob Burckha
145 attentif avec les réalités humaines et naturelles du pays. La Suisse est formée d’une multitude de groupes et d’organismes
146 endre les intérêts de leur nation contre le reste du monde, mais peut être l’œuvre de groupes et de personnes qui ont pris
147 lle des cantons suisses au lendemain de la guerre du Sonderbund, et notamment devant le double défi de sauvegarder leurs l
148 ssi leurs tâches mondiales. ⁂ III. Dialectique du fédéralisme Comme toutes les grandes idées, l’idée fédéraliste est
149 échappe aux catégories statiques et géométriques du rationalisme vulgaire ; mais correspond assez bien aux formes de pens
150 arité, comme on voudra, qui est le battement même du cœur de tout régime fédéraliste. L’oublier serait se condamner à reto
151 e chaque nation ou région contre les empiètements du pouvoir central. Une nouvelle gauche et une nouvelle droite, en somme
152 istration locale d’activités relevant en principe du pouvoir fédéral (régime fiscal, entretien des routes, par exemple) so
153 i ses compétences administratives — mais libérant du même coup les énergies individuelles ou locales pour de nouvelles cré
154 nérale de travail et de création, qui rend compte du dynamisme particulier de notre civilisation : la libération permanent
155 sonnelle de l’homme.5 Durant la première moitié du xxe siècle, la plupart des penseurs européens, pris d’angoisse devan
156 a été inventée par les Européens pour les libérer du travail qui pouvait être fait par elle ; et s’ils ne savent mettre à
157 e quel qu’il soit — de la machine-outil à l’État, du plan de travail d’un écrivain au plan de production d’un pool interna
158 upes qui se veulent souverains, comme si le reste du monde n’existait pas : j’ai dit plus haut que ce sont, à la racine, l
159 antisme agressif des administrations et dictature du plan, d’une part ; condition prolétarienne, travail humain à la chaîn
160 eter au plan de la politique et de l’organisation du continent, pour les décennies à venir ? Et de quels mécanismes l’Euro
161 (qui relève de la métaphysique), soit dans la vie du groupe ou de la cité (qui relève de l’éthique), soit dans les relatio
162 ions, capable donc : a) d’organiser à l’intérieur du continent les services libérant personnes et groupes des tâches mécan
163 t des routines et recettes « réalistes » héritées du siècle dernier (jeux des réflexes partisans et nationalistes, usage d
164 stronautique. Et l’on ne voit pas comment « l’art du possible » pourrait encore servir d’excuse à la paresse d’esprit d’un
165 ivent déterminer conjointement toute vision digne du nom de politique, dans l’ère d’universelle interaction inaugurée par
166 en découvertes de soi-même et des autres hommes. Du rocher de Gibraltar à la steppe monotone, des lacs de l’Écosse aux îl
167 ays membres de la fédération européenne circulent du nord au sud et de l’est à l’ouest sans passeports ni visas, sans visi
168 ionnel ou en vacances. Ils sont chez eux partout, du Cap Nord à Stamboul, comme c’était le cas naguère du Provençal à Pari
169 Cap Nord à Stamboul, comme c’était le cas naguère du Provençal à Paris, du Saint-Gallois à Genève, du Sicilien en Lombardi
170 omme c’était le cas naguère du Provençal à Paris, du Saint-Gallois à Genève, du Sicilien en Lombardie. Ils disent « nous »
171 du Provençal à Paris, du Saint-Gallois à Genève, du Sicilien en Lombardie. Ils disent « nous » en parlant de n’importe qu
172 apprennent à considérer les gloires et les hontes du passé de chaque pays européen comme les leurs, et l’avenir de l’ensem
173 ateurs est de loin le plus riche et le plus varié du monde. L’Europe a donc cessé de se sentir écrasée entre les « deux gr
174 illé par la Cour fédérale de justice, dépositaire du Statut de la Personne. Pour devenir citoyen de l’Europe, il faut et i
175 river les minorités.) D’autre part, face au reste du monde et dans le monde, nos peuples peuvent enfin faire entendre la V
176 on les plans de l’état-major européen, qui dépend du pouvoir fédéral. Moyens, ou institutions Les institutions europ
177 té théorique. Or, on ne saurait attendre une nuit du 4 août des États : ce ne sont pas des personnes libres et responsable
178 a Suisse (1848) semble avoir résolu la quadrature du cercle. Loin d’exiger des cantons une renonciation à leur souverainet
179 3, leurs constitutions, la liberté et les droits du peuple… (etc.) Ratifiés par la majorité du peuple et des cantons, ces
180 droits du peuple… (etc.) Ratifiés par la majorité du peuple et des cantons, ces articles ont résolu le problème à la satis
181 dmettant que l’union fédérale étende à l’ensemble du continent et aux îles britanniques le régime qui est en train de s’in
182 mple de la Suisse cesse de nous servir de modèle, du moins transposable tel quel du régime des cantons à celui des États.
183 servir de modèle, du moins transposable tel quel du régime des cantons à celui des États. Car les cantons correspondent à
184 is que les États centralisés de l’Europe, hérités du dernier siècle ont poursuivi le dessein systématique d’effacer leurs
185 voient à juste titre privilégiées. L’Europe noire du charbon, des corons, des banlieues ouvrières et des mines se vide, au
186 sans poser des problèmes très ardus d’aménagement du territoire européen. Ils requièrent des solutions neuves, à la recher
187 iénistes, urbanistes, éducateurs, et spécialistes du droit fédéral : ces derniers devant faire preuve, plus encore que les
188 talité des nouveaux centres, les besoins généraux du continent, et les échanges toujours plus intenses à l’échelle mondial
189 situations spéciales et locales. Les compétences du pouvoir fédéral s’exercent donc d’abord dans le domaine de la politiq
190 hargés d’entretenir les relations qui ne sont pas du ressort fédéral. (Relations économiques et commerciales, dans la mesu
191 rope est assurée par des forces armées aux ordres du pouvoir fédéral, qui ne peuvent entrer en action qu’en cas d’attaque
192 rre. Dans le domaine économique, les attributions du pouvoir fédéral sont déterminées en fonction de la méthode dichotomiq
193 lle soutient et harmonise les plans d’aménagement du territoire entrepris par les États membres. Elle légifère sur les tra
194 fférentes de l’Occident, de l’Afrique, de l’Asie, du monde arabe, au sein d’une même civilisation technique née en Europe
195 Europe mais rapidement adoptée par tous les pays du monde, ont montré la nécessité d’une politique commune des Européens
196 mission économique, prolongement de la commission du Marché commun. Le ministre des Relations culturelles et le ministre d
197 80. Le District fédéral doit être situé au centre du Continent ; il doit être facile à défendre, en temps de troubles, mai
198 t des luttes politiques qui se jouent à l’échelle du continent. Ces conditions idéales se trouvent réunies par la Suisse,
199 « l’immédiateté impériale » pour défendre le col du Gothard au nom de la communauté européenne du Saint-Empire, de même l
200 col du Gothard au nom de la communauté européenne du Saint-Empire, de même la Confédération suisse se voit dotée d’un stat
201 eur à Washington, D.C. : on sait que les citoyens du district fédéral américain n’avaient pas le droit de vote lors de l’é
202 n’avaient pas le droit de vote lors de l’élection du président)9 préviennent toute ingérence particulière des affaires sui
203 dans la philosophie grecque, et peut se réclamer du thomisme puis du calvinisme, plus tard du socialisme proudhonien, auj
204 hie grecque, et peut se réclamer du thomisme puis du calvinisme, plus tard du socialisme proudhonien, aujourd’hui des scie
205 éclamer du thomisme puis du calvinisme, plus tard du socialisme proudhonien, aujourd’hui des sciences les plus avancées. D
206 ui prennent au sérieux les déclarations réitérées du Vatican, et les protestants qui ont gardé vivante la tradition calvin
207 ombe H, mais aussi à des procédés de manipulation du psychisme collectif et de conditionnement physiologique de certaines
208 les traditions internationalistes et autoritaires du socialisme marxiste jouent dans le sens d’une opposition systématique
209 à la critique ou à l’enthousiasme. 8. L’existence du Marché commun est un facteur irréversible dans l’évolution vers l’uni
210 n économique amorcée par celle des Six ; pression du tiers-monde, qui exige l’aide de l’Europe et n’en oppose pas moins à
211 iste et plus néfaste pour les traditions valables du tiers-monde que ne fut jamais notre colonialisme ; nécessité, à cet é
212 mais surtout l’ignorance ou mieux : la non-vision du But possible et nécessaire. Si l’Europe n’est pas encore faite, ce n’
213 e tâche, indispensable, mais que la claire vision du But rend seule possible. On ne trace pas un chemin tant qu’on ne sait
214 la Baconnière, Neuchâtel, 1948). 3. Dépassement du principe de non-contradiction ; principe de complémentarité ; théorie
215 ais rattaché à la masse protestante et alémanique du canton de Berne. Un mouvement séparatiste s’y manifeste. 8. Cas de l
216 as de la Catalogne, de la Wallonie, des Flandres, du Tyrol, de la Silésie, de la Macédoine, par exemple. 9. Jusqu’au 3 av
217 ndement à la Constitution a autorisé les citoyens du District of Columbia à prendre part à l’élection présidentielle. f.
7 1963, Articles divers (1963-1969). L’amour ? le mariage ? la fidélité ? l’adultère ? la passion ? le couple ? (25 octobre 1963)
218 se porte plutôt mal. Y a-t-il vraiment une crise du mariage ? Naturellement. Seulement il serait faux d’y voir un mal du
219 llement. Seulement il serait faux d’y voir un mal du siècle, du nôtre. Sans la crise du mariage, que seraient toutes nos l
220 ulement il serait faux d’y voir un mal du siècle, du nôtre. Sans la crise du mariage, que seraient toutes nos littératures
221 ’y voir un mal du siècle, du nôtre. Sans la crise du mariage, que seraient toutes nos littératures ? Elle ne fait pas simp
222 ératures ? Elle ne fait pas simplement la fortune du cinéma, le théâtre, le roman, la poésie en vivent depuis des siècles,
223 able et obsédant de l’amour hors-la-loi. La crise du mariage n’est donc pas un phénomène de l’ère atomique. Le nombre des
224 ue nos grands-parents n’avaient pas. La recherche du bonheur individuel prime aussi à l’heure actuelle et très nettement,
225 que tous les adolescents sont élevés dans l’idée du mariage (normal, souhaitable, presque inévitable) et en même temps ba
226 ècles, les relations entre les sexes sont restées du domaine de la nature ou de la moralité sociale ou religieuse. Toute e
227 courtois » qui contredisait si fort la conception du mariage et la condition de la femme d’alors, d’où venait-il ? D’« ail
228 nstalle solidement dans les cours et les châteaux du Midi (Albi fut la grande capitale du catharisme, dit aussi hérésie al
229 les châteaux du Midi (Albi fut la grande capitale du catharisme, dit aussi hérésie albigeoise) où justement les troubadour
230 rop difficile, les cathares se bornaient à médire du mariage et à louer des formes d’amour plus ou moins platoniques ! Les
231 qu’il est allé conquérir pour son roi : les mœurs du temps sanctionnaient le droit du plus fort et Tristan apparaît tout a
232 roi : les mœurs du temps sanctionnaient le droit du plus fort et Tristan apparaît tout au long du roman comme supérieur a
233 oit du plus fort et Tristan apparaît tout au long du roman comme supérieur aux autres. Or il n’use pas de ce droit et livr
234 s types de relations constantes et de les dégager du fouillis des apparences quotidiennes. Tristan, c’est un « type » de r
235 un groupe historique donné : la société courtoise du xiie siècle. Ce groupe est dissous depuis longtemps. Pourtant ses lo
236 t a donc au juste le roman de Tristan et la crise du mariage ? C’est que finalement notre crise du mariage n’est rien de m
237 ise du mariage ? C’est que finalement notre crise du mariage n’est rien de moins que le conflit de ce mythe et de la moral
238 ofané, ne se traduit plus que par l’envahissement du roman d’amour, du film sentimental et de la pièce de boulevard (le ro
239 it plus que par l’envahissement du roman d’amour, du film sentimental et de la pièce de boulevard (le roi Marc est devenu
240 ntes religieuses, sociales et familiales, perdant du terrain chaque jour, c’est donc sur les débris d’un mythe qu’est édif
241 entir » l’amour en soi… Et voici le rêve sournois du mari qui ne peut plus désirer sa femme qu’en l’imaginant sa maîtresse
242 . Et il serait beaucoup plus conforme à l’essence du mariage d’enseigner aux jeunes gens que leur choix — même garanti d’a
243 se une « fatalité » ! En résumé, la grande menace du mariage, c’est la passion. Que le mythe de Tristan, origine de tous n
244 balayé des consciences occidentales, et la crise du mariage se dénouera d’elle-même ? Il est vrai que la passion est l’en
245  ? Il est vrai que la passion est l’ennemie jurée du mariage mais c’est elle aussi qui le défie, l’anime, l’oblige à redev
246 as une routine subie : la passion c’est le secret du mariage vivant. Mon but n’est pas de condamner la passion, mais de dé
8 1963, Articles divers (1963-1969). Une interview de Denis de Rougemont : l’écrivain nous parle des centres culturels internationaux (16 novembre 1963)
247 is ans pour discuter de ce problème dans le cadre du Centre européen de la culture. À cette réunion, il a été décidé de fo
248 re. Un Centre vient de se créer à Lagos, capitale du Nigéria, et l’on projette d’en créer deux autres, l’un à Dakar, pour
9 1964, Articles divers (1963-1969). L’idée européenne en Suisse (1964)
249 était inconnu. La Suisse s’est formée peu à peu, du xive au xvie siècle, dans le Saint-Empire et par lui. En effet, si
250 ause de leur position particulière de grand-garde du col du Gothard ; et c’est l’empereur qui leur accorde ces franchises,
251 leur position particulière de grand-garde du col du Gothard ; et c’est l’empereur qui leur accorde ces franchises, dans l
252 e ». Si les Ligues suisses se détachent peu à peu du Saint-Empire, de cette première Europe dont elles sont nées, c’est pa
253 s et devient finalement un État comme les autres. Du moins les Ligues conservent-elles le principe même de l’Empire d’Occi
254 ques (l’Extrait de 1761 et le Jugement, posthume) du projet de paix perpétuelle de l’abbé de Saint-Pierre, puis sa Considé
255 d’une confédération de nos pays inspirée de celle du « corps germanique », ou Saint-Empire, des états généraux de Hollande
256 ean de Müller, dans sa Vue générale de l’histoire du genre humain (1797) annonce comme Rousseau que « tous les États de l’
257 té, c’est de l’organisation : l’uniformité, c’est du mécanisme. La variété, c’est la vie : l’uniformité, c’est la mort. »
258 typographe) en écrivant son grand livre posthume, Du Principe fédératif ; mais il est bien certain qu’un de ses contempora
259 on d’une société d’États européens (1879). Auteur du Code civil de son canton natal, Zurich, Bluntschli connaît les mécani
260 les fédéralistes européens, le projet très précis du juriste zurichois reste une des hypothèses de travail les plus fécond
261 on politique européenne. En effet, c’est au cours du congrès de Montreux que germe l’idée de réunir des états généraux de
262 hurchill, — dont le discours appelant les peuples du continent à former « une sorte de lien fédéral » a été prononcé à Zur
263 par les leaders de l’UEF conduit à la convocation du Congrès de l’Europe, qui se tient à La Haye au mois de mai 1948. De L
264 , qui propose et obtient en neuf mois la création du Conseil de l’Europe. L’impulsion est donnée, l’opinion se réveille, l
265 e reste va s’en suivre : plan Schuman, Communauté du charbon et de l’acier, tentative avortée d’une communauté de défense,
266 vortée d’une communauté de défense, puis réussite du Marché commun des Six et réplique des Sept de l’AELE, essor de l’écon
267 e, dans ce bref historique, les aspects culturels du mouvement et le rôle qu’y joue notre pays. Le congrès de La Haye ayan
268 1949. De la conférence de Lausanne et de l’action du Centre à Genève, jusqu’à ce jour, vont naître successivement le Labor
269 Bâle (fin septembre 1964) sous le haut patronage du Conseil fédéral. Ainsi l’idée européenne semble avoir trouvé parmi no
270 idée européenne. C’est en Suisse que le fondateur du mouvement paneuropéen, le comte Coudenhove-Kalergi, établit son quart
271 e — qui va de Hertenstein au congrès de Montreux, du congrès de Montreux à celui de La Haye, puis à Strasbourg, d’où l’on
272 uche sur l’ensemble complexe, en plein mouvement, du grand projet européen. Mais tout cela, c’est la Suisse idéale, réputé
273 ofesseurs de sciences politiques déclara au sujet du « pool charbon-acier », comme on appelait à l’époque la CECA : 1° qu’
274 vaient réduire l’une après l’autre les objections du scepticisme invétéré (ou faut-il dire traditionnel ?) qui tendait à p
275 rdres d’un pouvoir extérieur, et c’en serait fait du « rôle particulier » qu’elle se réserve d’invoquer plus souvent encor
276 à promulguer des décisions qui sont actuellement du ressort des cantons. Le droit d’établissement, la législation du trav
277 cantons. Le droit d’établissement, la législation du travail, le régime fiscal — par exemple — devraient être uniformisés
278 le déclarait le 3 mai 1962 M. Homberger, délégué du Vorort de l’Union suisse pour l’industrie et le commerce. ⁂ Résumons
279 itiques intérieures l’ont contrainte à se retirer du jeu des puissances militaires. La neutralité n’a jamais été qu’un moy
280 ments économiques. — La Suisse est située au cœur du Marché commun. Ce n’est évidemment pas avec le reste du monde (sans c
281 ché commun. Ce n’est évidemment pas avec le reste du monde (sans cesse invoqué par les abstentionnistes) qu’elle commerce
282 s Six, pour 13,4 % des Sept, pour 21,3 % du reste du monde. De nos exportations, deux tiers vont à l’Europe. Il est vrai q
283 trie suisse, aux destinées de laquelle le délégué du Vorort n’est pas tout à fait étranger. Si M. Homberger croit vraiment
284 pays, il n’a pas le droit d’en conclure au refus du Marché commun, mais il a le devoir de freiner l’expansion de l’indust
285 l’expansion de l’industrie suisse, cause directe du « mal » en question, si c’en est un. Mais il y a plus. Les traits typ
286 le Plateau, de Genève à Romanshorn, avant la fin du siècle, quand la population aura doublé. Mais que la Suisse entre ou
287 lement n’entraîne un retour à la misère naturelle du pays ?) Bref, ce n’est pas la Suisse de Morgarten, de Marignan, ou du
288 n’est pas la Suisse de Morgarten, de Marignan, ou du xviiie siècle, ni même celle de 1848 qu’il s’agit de sauver aujourd’
289 , mais bien la Suisse réelle de la seconde moitié du xxe siècle. Refuser de coopérer à l’édification de l’Europe unie, so
290 payer le prix exorbitant. ⁂ Tels étant les termes du débat que l’idée européenne suscite chez nous — et l’on sait dans que
291 sur ce point, un autre aspect non moins important du problème resterait posé hic et nunc : celui de notre responsabilité e
292 autres. Situés au cœur géographique et historique du continent européen, nous avons réussi beaucoup mieux que cette fameus
293 igine et dont nous fîmes peu à peu vertu à partir du xixe siècle ; nous avons réussi notre fédéralisme ! Contrairement à
294 rope. Aux deux solutions en présence, à l’échelle du continent : sacrifier les patries à l’union, ou sacrifier l’union aux
295 enfin déclarer une attitude constructive, au-delà du philanthropisme en fin de compte intéressé dont elle a fait la « lign
296 cle que c’est pour une mission spéciale, la garde du Gothard dans les intérêts de l’Empire entier, que les Waldstätten ont
297 enis de, « L’idée européenne en Suisse », Aspects du devenir helvétique, Berne, Nouvelle Société helvétique, 1964, p. 176-
10 1964, Articles divers (1963-1969). Les arts dans la vie en Suisse (1964)
298 ie, égaux en droit dans l’inégalité de l’étendue, du nombre d’habitants, des ressources matérielles et du mode de vie trad
299 nombre d’habitants, des ressources matérielles et du mode de vie traditionnel. Mais cette réussite exemplaire suppose d’in
300 ieuse ou d’une école qui impose un style. Le sens du compromis, la réserve prudente dans l’expression de la pensée s’il s’
301 t donné à l’Europe plusieurs des plus grands noms du xxe siècle : Ferdinand de Saussure pour la linguistique, C. G. Jung
302 teint le maximum de 2,62 pour la Suisse, l’indice du Danemark, deuxième sur la liste, étant de 1,43, celui des États-Unis
303 t affronter les grandes compétitions de cette fin du xxe siècle que dans la mesure où elles sauront grouper leurs authent
304 locales pour mieux participer aux grands courants du monde et s’en nourrir, au lieu de s’y laisser dissoudre une à une. La
11 1964, Articles divers (1963-1969). De la marche / De l’échec (1964)
305 de beaucoup leur portée immédiate et l’intention du règlement. J’accueillais toute épreuve comme une leçon, et toute leço
306 alité exceptionnelle, et par là même impopulaire, du commandant de cette école était faite pour favoriser mes dispositions
307 école était faite pour favoriser mes dispositions du moment. Le colonel de P. cachait sous des manies, qui le faisaient pa
308 quelque chose se préparait. Et en effet, l’ordre du jour pour le lendemain, que nous lûmes en sortant de cette classe éco
309 illustrer l’entreprise. Au départ, à cinq heures du matin, dans la cour froide de la caserne de Fribourg, nous savions qu
310 itaient pour rajuster minutieusement une courroie du paquetage, le pli d’un sous-vêtement ou d’une chaussette, un clou de
311 re de lassitude. Les puissances de l’inconscient, du corps et de l’imagination, se sont mises en état d’alerte. Elles ont
312 eur régime d’exception. La connaissance anticipée du but leur a permis de mesurer l’effort, de le doser, et de réveiller l
313 Tout se passait donc ce matin-là comme si l’appel du but avait suffi à nous donner les moyens d’y répondre. Et je ne dis p
314 é reçu et surmonté qu’en vue de la grande course, du but lointain… Aujourd’hui, repassant ces souvenirs, je me laisse alle
315 me de lion couché. Je me souviens de l’élasticité du sol un peu glissant sous nos semelles cloutées, et de l’alacrité de l
316 ort raide, et l’avance très lente, mais l’attrait du sommet qu’on distinguait derrière des épaulements sans cesse renaissa
317 ses dimensions les moins trompeuses. La grandeur du décor, l’infinie variété de ses plans lumineux virant très lentement
318 ntaine de chamois. Leur chef en tête bien détaché du gros, ils se déplaçaient par à-coups, au pied d’une paroi de rochers
319 t cette étape nocturne. De fait, nous approchions du village de la Lenk, signalé par quelques lumières. L’ordre vint de re
320 patrouille. Il faut aller reconnaître le sentier du col. Un guide a dit qu’il neige au-dessus de deux-mille. Cinq ou six
321 e nous allèrent s’annoncer au colonel, qui buvait du café au restaurant. — « Je vous remercie, nous dit-il lentement, en n
322 une paix marécageuse. Le mystique, aux approches du sommet de l’ascension graduelle vers l’Être, fait l’expérience du Néa
323 scension graduelle vers l’Être, fait l’expérience du Néant… Dans tous les ordres et à tous les degrés, la déception de l’e
324 les degrés, la déception de l’effort, de l’élan, du désir, est une épreuve plus difficile à surmonter, parfois, que l’obs
325 Les énergies alertées dans mon corps par l’appel du but assigné, soudain privées d’issue, me consumaient. Moins entraîné,
326 r la classe et je dus faire l’appel à sept heures du matin, au garde à vous, sur le quai de la gare — je ne sais si j’euss
327 une recette de succès, au sens le moins vulgaire du terme, l’échec accidentel de la dernière étape m’en fournissait la né
328 tion à un essai philosophique inédit : La Morale du But . »
12 1964, Articles divers (1963-1969). Le sentier perdu (1964)
329 re ? On le penserait devant ces tableaux, à cause du sentiment de libération que procurent leurs déserts à ravir, comme si
330 ssemble absolument. L’informel a rejoint le style du rêve. Au-delà des querelles d’école, l’éternel féminin nous entraîne,
13 1965, Articles divers (1963-1969). La technique, facteur de paix (6 mars 1965)
331 Je ne suis pas un technicien, ni au sens étroit du terme, sujet de récentes controverses et d’une votation fédérale, ni
332 une chaîne continue sinon de causes et d’effets, du moins d’attitudes spirituelles permettant et favorisant certaines rec
333 l en résulte que le corps physique, et la matière du même coup, se trouvent fortement valorisés comme objet des recherches
334 é, et ne sont pas une simple illusion, une partie du voile de Maya que tout l’effort spirituel doit tendre à dissiper, com
335 ais la croyance en un Dieu créateur et régulateur du cosmos le rend cependant concevable pour la foi. Il faut voir là sino
336 voir là sinon l’origine immédiate de la science, du moins l’annonce de l’attitude fondamentale, de l’option de base qui v
337 rôlée et mesurée. Cette synthèse, qui est l’œuvre du Moyen Âge, dès le xiiie siècle, produit ses effets à partir de la Re
338 t pas seulement spéculative, mais transformatrice du réel. Ajoutez-y le goût du travail, vertu ou vice des populations nor
339 , mais transformatrice du réel. Ajoutez-y le goût du travail, vertu ou vice des populations nordiques, d’ailleurs approuvé
340 nfin, la nécessité de survivre dans un petit coin du monde peu favorisé par les dons gratuits de la Nature, — j’entends no
341 tre le progrès de nos techniques et l’aggravation du pouvoir destructeur des guerres. Le couteau de silex puis le glaive s
342 Le couteau de silex puis le glaive sont les armes du combat singulier entre chefs. L’arquebuse, les machines de siège, les
343 i l’élargissement de la guerre a vraiment résulté du progrès de la technique, ou si ce n’est pas plutôt la technique qui a
344 idus dont on parle tant, peur d’une espèce de fin du monde qu’entraînerait la guerre atomique, et que j’avoue ne pas resse
345 les effets de l’expansion technique dans le reste du monde ? Ici, le tableau change à vue. C’est la technique née en Europ
346 a fait voir l’Occident aux peuples de l’Afrique, du monde arabe, de l’Inde et de l’Extrême-Orient. Au temps de la colonis
347 -Orient. Au temps de la colonisation, les peuples du tiers-monde ne connaissaient de nous que d’assez rares exemplaires de
348 ous priver de notre superflu pour apaiser la faim du monde sont hélas en pleine utopie. Ils entretiennent notre mauvaise c
349 vrir au maximum un sixième de la demande actuelle du tiers-monde, et cette demande aura au moins doublé d’ici vingt ans. À
350 historiquement, et de la manière la plus précise, du reproche populaire d’être fauteuse de guerre. Par rapport à la guerre
351 es humaines, domestiquées, mécanisées, canalisées du berceau à la tombe, et soumises aux seules lois de la production de s
352 vec ceux des éducateurs et des élites culturelles du tiers-monde autant que de l’Europe, et j’entends d’une Europe agissan
353 lle ans de progrès lents, marqués par la maîtrise du feu, l’invention de la roue, et la métallurgie, a subitement abouti,
354 et quelques mouettes sur un îlot rocheux. Coupés du contact quotidien avec la terre et la végétation, en partie libérés d
355 la vie animale et même des saisons, les citadins du xxe siècle seraient-ils des monstres, pâles victimes d’une technique
356 ire ! L’histoire des grandes inventions, de celle du feu à celle de la fusée spatiale, n’est pas l’histoire de « besoins »
357 — à part quelques rêveurs un peu bizarres. C’est du rêve de voler qu’est né l’avion, et du rêve de partir au hasard sur l
358 res. C’est du rêve de voler qu’est né l’avion, et du rêve de partir au hasard sur les routes qu’est née l’auto : vous en t
359 cable malice des choses, dont nous ne serions pas du tout responsables, elle menace au contraire d’anéantir toute espèce d
360 maniables qu’elle met entre nos mains — il suffit du plus petit geste, comme de presser sur un bouton pour produire les pl
361 e polytechnique de l’Université de Lausanne, lors du congrès mondial de ce groupement, le 18 septembre, en l’aula de l’EPU
14 1965, Articles divers (1963-1969). La Suisse, maquette pour une Europe du bonheur (automne 1965)
362 La Suisse, maquette pour une Europe du bonheur (automne 1965)s Robustes, bien glacées, aux couleurs franc
363 se sur le monde, répandant une image très sincère du pays où l’art du tourisme fut inventé par les Anglais. Un pays que to
364 répandant une image très sincère du pays où l’art du tourisme fut inventé par les Anglais. Un pays que tout le monde croit
365 tales. On croit que c’est le pays le plus évident du monde, où tout est concerté, bien net et bien honnête, et pourvu de s
366 alouse un peu, comme si chaque Suisse bénéficiait du secret des banques mais sentait les vertus agricoles… Le Suisse trai
367 se, dans l’histoire, aura le dernier mot. Passer du premier vers au second, c’est passer du cliché à l’utopie, et de la p
368 . Passer du premier vers au second, c’est passer du cliché à l’utopie, et de la patrie d’un Guillaume Tell qui n’exista j
369 oici, au cœur même de l’Europe et en plein milieu du xx e siècle, un peuple à peu près unanime à s’estimer et à se dire he
370 ollectivement les vallées traversées par la route du Gothard, que l’on venait d’ouvrir au xiii e siècle. C’était le seul c
371 eul col reliant d’un seul trait le nord et le sud du Saint-Empire. Il fallait le garder libre pour l’Europe, contre tous l
372 e grand empereur Frédéric II conféra aux communes du Gothard l’immédiateté impériale, qui signifiait le droit de se régir
373 tre. Ainsi, le vrai secret de la Suisse n’est pas du tout celui des banques mais celui du fédéralisme, celui d’une solidar
374 se n’est pas du tout celui des banques mais celui du fédéralisme, celui d’une solidarité garante des autonomies. Autre sec
375 Français de langue, Européen par la culture mais du canton de Neuchâtel par la naissance et la tradition familiale, fils
376 est un phénomène occidental au sens le plus large du terme, Suisse par le passeport et les obligations militaires, habitan
377 es et de camps de concentration. Troisième secret du régime suisse : toutes ces communautés de nature ou librement institu
378 seconde question, celle de savoir si les recettes du bonheur suisse sont applicables à l’échelle de l’Europe. En effet, si
379 e. Or cette fonction reste la même qu’il s’agisse du corps d’un petit enfant ou de celui d’un colosse. Notez d’ailleurs qu
380 t Denis de, « La Suisse, maquette pour une Europe du bonheur », Revue des voyages, Genève, automne 1965, p. 57-59.
15 1966, Articles divers (1963-1969). Un libéral engagé (1966)
381 Un libéral engagé (1966)t Palais du Trocadéro (vers 1934 ?). — Face à une salle en plein tumulte où les C
382 and nous sortîmes, tandis qu’on se battait encore du parterre au poulailler, des hommes tombant des secondes galeries sur
383 remières… Je dis que j’admirais la liberté de ton du représentant de l’Espagne à Paris. — Eh bien, fit-il, je trouve qu’un
384 en ! — Non Madame, faire le bien, c’est l’affaire du Bon Dieu. Et de lui seul ! Tout ce que l’on peut demander d’un homme,
385 perdre tout son génie au petit vendeur d’oranges du port de Valencia. L’accès de l’instruction devrait être réservé à ceu
386 e théorie pseudo-arithmétique sur l’impossibilité du bonheur durable, et un argument du type Pyrrhus et Cinéas sur l’inuti
387 ’impossibilité du bonheur durable, et un argument du type Pyrrhus et Cinéas sur l’inutilité finale ou la finale gratuité d
388 es dernières réunions consacrées à la préparation du Congrès de l’Europe (qui allait se tenir à La Haye dès le 8 mai), com
389 ours exilé, bref quelqu’un qui eût un peu le sens du paradoxe… Je me bornai à faire état de ses titres d’ancien ministre e
390 se dérobait (ou si l’on veut : de dérober au vol du temps) quelques pages qui ne vieilliront plus sur l’Europe des paysag
391 t-elle d’étiquette « progressiste ». Il a le sens du trait qui porte et qui assure le succès durable d’un discours même de
392 tard la TV compteront moins, finalement, aux yeux du « dieu qui voit très loin » (Zeus europos dans l’Odyssée) que l’innom
393 era souvent, après La Haye, la section culturelle du Mouvement européen (et de là sortiront le Centre européen de la cultu
394 l’Europe, cause commune s’il en fût, un temps qui du même coup devait manquer à ce qu’on nomme leur œuvre personnelle, et
395 ressement aussi total que notre premier président du Centre européen de la culture. ⁂ Mais avant d’être Européen, et après
396 Dans le même discours, il montre les difficultés du dialogue avec les staliniens : « Je suis un libéral, toujours prêt à
397 je préside, tandis qu’une quarantaine d’écrivains du monde entier occupent la scène derrière nous. C’est la séance de clôt
398 a scène derrière nous. C’est la séance de clôture du « Festival du xxe siècle » organisé par le Congrès pour la liberté d
399 re nous. C’est la séance de clôture du « Festival du xxe siècle » organisé par le Congrès pour la liberté de la culture,
400 évolution violente, après tout, c’est une maladie du corps social. Il fallait du courage pour lui dire : « Vous vous vante
401 ut, c’est une maladie du corps social. Il fallait du courage pour lui dire : « Vous vous vantez d’avoir fait une glorieuse
402 salle Pleyel fasse écho à mes souvenirs de celui du Trocadéro, mais dans un registre plus grave : le combatif ambassadeur
16 1967, Articles divers (1963-1969). Au-delà des nations (1967)
403 Au-delà des nations (1967)u La fin du douanier est aussi la fin de la fraude. Quelle que soit la monnaie, l
404 squ’il ouvrit à Vienne en 1927 le premier congrès du mouvement paneuropéen, le comte Coudenhove-Kalergi se plaçait sous l’
405 udenhove, qui a lancé le projet dans son discours du 5 septembre de l’année précédente, et c’est le plus proche collaborat
406 précédente, et c’est le plus proche collaborateur du président du Conseil, Alexis Léger, qui a rédigé ce document historiq
407 t c’est le plus proche collaborateur du président du Conseil, Alexis Léger, qui a rédigé ce document historique, préfigura
408 préfiguration parfois fort précise non seulement du Conseil de l’Europe, mais de la CECA et du Marché commun. (Le terme m
409 lement du Conseil de l’Europe, mais de la CECA et du Marché commun. (Le terme même de « Marché commun » figure là pour la
410 e — de tout projet de fédération européenne digne du nom, que va-t-il se passer ? Des mesures propres à « favoriser » (fau
411 teurs qui tiennent encore la politique pour l’art du possible — quand elle est l’art de créer le possible au service de gr
412 sinon tout s’affaisse en routines, en répétitions du passé. La jeunesse se demande pourquoi l’Europe n’est pas encore unie
413 fédérale. Pour essayer de faire sentir le concret du problème tel que je l’ai découvert, voici un exemple vécu. Il y a que
414 ntre non seulement des souhaits des organisateurs du colloque, qui connaissaient les besoins de leur région, mais de tout
415 problème, mais encore dans les milieux dirigeants du pays le plus centralisé du continent et le plus allergique, semblait-
416 les milieux dirigeants du pays le plus centralisé du continent et le plus allergique, semblait-il, au fédéralisme à base r
417 est encore qu’au stade de la prise de conscience du phénomène région et des motifs de son apparition en ce moment précis
418 n, et descendent vers leur crépuscule. Dès la fin du siècle dernier, Ernest Renan pouvait s’écrier dans un discours célèbr
419 ciennes, la révolution régionaliste sera faite et du même coup, la fédération de l’Europe se révélera immédiatement possib
420 tes, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Du moins, cette fédération de régions « immédiates à l’Europe » — comme
421 sont en retard d’une génération sur les réalités du temps. 19. Robert Lafont, La Révolution régionaliste, collection « 
17 1967, Articles divers (1963-1969). Le civisme européen : notes pour un « Petit Livre rouge » (été 1967)
422 l’instruction publique est apparue vers le milieu du siècle passé, rendant possible la lecture des affiches et des journau
423 uropéens. Quand elle fait quelque chose au niveau du civisme, elle ne fait en tout cas pas cela, et l’on peut être heureux
424 eux si elle ne fait pas le contraire. L’éducation du citoyen qui se pratique dans les écoles de nos pays est, aux dires de
425 ’elles sont, ce serait inévitablement au bénéfice du chauvinisme national. Un remède pire que le mal serait de substituer
426 ns fragmentaires, limitées à une partie seulement du seul domaine économique, dans un tiers ou un quart de nos pays. Dans
427 ne, Europa zwischen Idéologie und Verwirklichung, du prof. Karl Schmid22 je lis ceci : Il faut absolument éviter qu’aux y
428 e participer à la vie de la cité, et dans l’éveil du désir d’y tenir son rôle de citoyen. (« Cité » signifiant ici toute c
429 stence sociale dans l’Europe de la seconde moitié du xxe siècle. Quand on a vu de quoi la vie de l’Europe est faite, on v
430 nche de plus dans l’enseignement déjà pléthorique du second degré, mais bien de sensibiliser l’esprit des jeunes aux réali
431 état de l’instruction civique en Europe, Bulletin du Centre européen de la culture, 1964 (épuisé), et Civisme et éducation
432 e. 24. « Tout ce que nous faisons est au service du peuple, de quel défaut ne pourrions-nous donc nous débarrasser ? » « 
433 ions-nous donc nous débarrasser ? » « Si la masse du peuple se lève tout entière pour enlever avec nous ces montagnes, com
18 1968, Articles divers (1963-1969). L’Exode des cerveaux [débat] (1968)
434 curiosité de regarder quelle était la composition du groupe des 14 Suisses — de passeport ou de naissance — qui ont reçu l
435 leure œuvre musicale « de chez nous », L’Histoire du soldat. On peut citer les prix Nobel que je vous disais tout à l’heur
436 ger. On pourrait allonger facilement cette liste. Du côté exportation, qu’avons-nous fait en Suisse ? Il y a d’abord eu le
437 e, Leonhard Euler, les plus grands mathématiciens du xviiie siècle, ont fondé les mathématiques en Russie, dans les Pays-
438 s ponts, aux États-Unis, qui sont les plus grands du monde. Et on pourrait multiplier ces exemples : en théologie nous avo
439 munautés qui peuvent s’en occuper. Autrement dit, du point de vue fédéraliste, on se demandera à partir de quelle dimensio
440 ntenant cette université qui est bien à la taille du canton (l’activité et la communauté étant de tailles correspondantes)
441 se serait plainte d’avoir perdu un cerveau ? Pas du tout ! Il serait resté à La Chaux-de-Fonds et nous n’en aurions rien
442 évoqué tout à l’heure par M. Renold. C’est celui du CERN. Un chercheur suisse va travailler au CERN : nous ne pouvons pas
443 européen de recherche nucléaire. C’est un message du Prince Louis de Broglie qui a formulé cette idée, que nous avons fait
444 les recherches atomiques à cause de la proximité du CERN — ça, c’est presque un accident — et les recherches psychologiqu
445 ce à la partie la plus éveillée, la plus curieuse du public. On se base souvent, à la radio et à la télévision, sur des en
446 ne s’agit pas de la transformer de fond en comble du jour au lendemain, mais il ne faut pas qu’elle soit uniquement cela :
447 suis rentré en Europe, par exemple. Ce n’est pas du tout que j’aie été racheté par l’État de Genève (n’est-ce pas M. Lali
448 c’est un effort qui est porté sur la préparation du terrain. D’ailleurs, nous ne pouvons pas dire en Suisse que nous soyo
449 Il a parlé de mon optimisme béat. Je ne vois pas du tout à quel moment j’ai pu tomber dans ce penchant vicieux. J’ai prop
450 commençant. Dans ce domaine, je ne conteste rien du tout. Mais je vous signale le danger, qui serait un danger un peu amé
19 1968, Articles divers (1963-1969). De l’État-nation aux régions fédérées (1968)
451 pourrait-elle donc répondre à l’appel pathétique du célèbre homme d’État ? Un appel ne pouvait suffire à la créer… Au lie
452 nations sont redevenues le phénomène fondamental du siècle. L’évolution a joué et joue incontestablement dans le sens de
453 ramatiquement, — que cette « réalité fondamentale du siècle » que serait la nation, est précisément celle qui fait obstacl
454 arce que les nations qu’exalte le ministre d’État du général de Gaulle s’y opposent encore irréductiblement, de tout leur
455 nous affirme que le xxe siècle ne sera pas celui du triomphe de l’internationale, comme Marx l’avait dit, ni le siècle de
456 c’est là-dessus qu’il faut bâtir, et d’appeler ça du réalisme. Le cancer et les maladies mentales sont aussi des réalités
457 fournie par les deux guerres mondiales, résultant du nationalisme et de l’État totalitaire, — par le besoin d’union au-del
458 tence d’un problème chaque année plus aigu, celui du sous-développement de certaines régions de nos plus grands pays, cont
459 orme d’association qui a dominé et animé l’Europe du xixe siècle, mais qui ne pourrait que tuer l’Europe du xxe siècle s
460 e siècle, mais qui ne pourrait que tuer l’Europe du xxe siècle si elle n’est pas surmontée et remplacée à temps. La gran
461 boutissement final, logique, normal et inévitable du Progrès. Pour dissiper cette illusion, il faudrait enseigner dans nos
462 ionaux n’apparaissent qu’après tout cela, au cœur du Moyen Âge, et se forment aux dépens de l’Empire et de la papauté, voi
463 voire même contre ces grands symboles de l’unité du globe, de l’universalité du genre humain. Et que la naissance de la p
464 s symboles de l’unité du globe, de l’universalité du genre humain. Et que la naissance de la première nation, la France, p
465 peut être datée de cette déclaration des légistes du Philippe de Bel : « Le Roy de France est empereur en son royaume », c
466 des Juifs qu’il fait dépouiller et des chevaliers du Temple qu’il fait exécuter, une merveilleuse opération sur l’or ! (si
467 les princes de l’Italie, de l’Europe de l’Est et du Nord, qui dès lors se déclarent eux aussi « souverains absolus », sup
468 rem in terris non recognoscentes selon la formule du xive siècle. Ce spectacle, qui est celui de la naissance des nations
469 es « démocraties » plébiscitaires et totalitaires du xxe siècle. La confiscation de l’idéal national par l’appareil étati
470 c’est cela qui va créer dans la première décennie du xixe siècle le modèle de l’État-nation, bientôt imité dans toute l’E
471 ue républicaine, et au xxe siècle, dans le reste du monde. Qu’est-ce en somme que l’État-nation de modèle napoléonien ? C
472 cider à tout prix dans les mêmes limites imposées du territoire hérité ou conquis, déclarées frontières naturelles, les ré
473 nes, langues parlées dans les villes et richesses du sous-sol, monnaie et programmes scolaires, politique et industrie, et
474 qu’un empire manqué. Voilà la vérité fondamentale du xxe siècle des nations. Et il faut souligner à ce propos une constat
475 ticipation réelle à la vie politique. Le problème du petit État dans le monde des grands (titre de la série dans laquelle
476 e), c’est en vérité le problème de tous les États du monde, sauf trois, c’est-à-dire d’environ cent-trente petits États co
477 tre démontré28 — mais aussi pour répondre au défi du tiers-monde, c’est-à-dire de tous ces États-nations inconsidérément m
478 s de problème, ou bien modifier les données mêmes du problème, c’est-à-dire chercher à fonder l’union sur autre chose que
479 plus profitables. Mais changer les données mêmes du problème de l’union pour le rendre soluble, c’est d’abord accepter de
480 n ce qui est neuf. Laissons de côté les héritages du passé dont l’unification prendrait trop de temps, demanderait trop d’
481 fédérale. Pour tenter de faire sentir le concret du problème tel que je l’ai découvert, voici un exemple vécu. Il y a que
482 ntre non seulement des souhaits des organisateurs du colloque, qui connaissaient les besoins de leur région, mais de tout
483 oblème32, mais encore dans les milieux dirigeants du pays le plus centralisé du continent et le plus allergique, semblait-
484 les milieux dirigeants du pays le plus centralisé du continent et le plus allergique, semblait-il, au fédéralisme à base r
485 es, à des juristes, mais aussi à des responsables du Plan, à des hommes politiques comme Mendès-France, Pleven, Debré. Par
486 era pas. Dans cette Europe unie la représentation du peuple français sera assurée par l’État fédéral français. Parmi les p
487 stes régions de France. La nation doit réparation du tort ainsi causé. On n’est pas loin de l’agitation populaire et de l
488 ès sérieusement le problème de la régionalisation du territoire. On s’est aperçu que ce sous-développement provenait direc
489 dans un coin de l’Hexagone33. Mais dans l’optique du Marché commun de demain, tout change : effacée la frontière qui depui
490 anciennes, la révolution régionale sera faite, et du même coup la fédération de l’Europe se révélera immédiatement possibl
491 tes, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Du moins, cette fédération de régions « immédiates à l’Europe » — comme
492 ujourd’hui, qu’au stade de la prise de conscience du phénomène région et des motifs de son apparition en ce moment précis
493 it à réfuter cette croyance. Bien sûr, dès la fin du siècle dernier, Ernest Renan s’était écrié dans un discours célèbre à
494 ration, cela ne se fera point par le jeu spontané du fameux « mouvement de l’Histoire ». Il faudra que la succession, le r
495 ’une extrême affectivité, irritabilité, résultant du souvenir de tant de guerres récentes, de cent ans de propagande des n
496 gories politiques qu’exige la prise de conscience du phénomène régional opposé au stato-national. Et d’abord, un changemen
497 éfinition de la région que j’emprunte aux travaux du colloque de Bruxelles : L’activité économique suscite dans l’espace
498 es jouent presque toujours un rôle très important du point de vue intellectuel et culturel. Ces agglomérations ont dès lor
499 transports, toutes choses mobiles, indépendantes du sol. Pour la première fois dans l’histoire, la cité se détache du ter
500 première fois dans l’histoire, la cité se détache du territoire, elle « décolle » ; une unité politique se définit non plu
501 ient, et qui verra, en cas de succès, le triomphe du fédéralisme intégral. Depuis qu’il est question d’une entrée éventuel
502 sur la morale à courte vue qu’illustre l’anecdote du patriarche vaudois : il réunit ses fils autour de son lit de mort et
503 duelle. Les régions combinent ainsi les avantages du petit État (culturels, ethniques, économiques, civiques) qu’avaient e
504 , car ces deux choses existent à un autre niveau, du moins je l’espère. Belle raison d’être nationale que celle qui dépend
505 pure et simple de notre fédéralisme, à l’échelle du continent. Car ce fédéralisme date un peu : c’est un fédéralisme d’Ét
506 ritoires, des cadres fixes ; il doit « décoller » du sol, pour devenir de plus en plus une méthode de résolution de chaque
507 s, 30 octobre-5 novembre 1967. 27. Cf. éditorial du Monde, 30 novembre 1967. 28. Cf. Le Défi américain, par J.-J. Servan
508 par Le Monde, 30 novembre 1967, sur la métropole du Nord, à l’occasion de l’ouverture de l’autoroute Paris-Lille. 34. « 
20 1968, Articles divers (1963-1969). Vingt ans après La Haye : où en est l’Europe ? (mai 1968)
509 écédant le congrès à La Haye même, où les séances du Comité de coordination des six mouvements participants se prolongeaie
510 longeaient jusque fort avant dans la nuit (4 h 30 du matin le 6 mai, par exemple). Quand Churchill se rassit après son dis
511 Lorsque Duncan Sandys et Retinger, organisateurs du congrès, étaient venus à Ferney demander mon concours, j’avais posé c
512 a vie culturelle, je discutai avec eux les termes du préambule, puis je le soumis au comité d’organisation du congrès. Cel
513 mbule, puis je le soumis au comité d’organisation du congrès. Celui-ci décida, le 8 avril, que « le texte appelé jusqu’ici
514 ver par acclamations » et formerait la conclusion du congrès. Ce succès était dû en grande partie aux efforts de Joseph Re
515 tituer l’un des objectifs principaux et immédiats du congrès et de notre mouvement. Le fait de recueillir des signatures d
516 , mis au point une dernière fois à la veille même du congrès, le Message avait été imprimé au haut d’un long rouleau de
517 apier parcheminé, et il était entendu qu’au terme du congrès, tous les participants, Churchill en tête, signeraient le doc
518 rès une brève suspension, de la séance de clôture du congrès, je fus appelé d’urgence par Duncan Sandys, que je trouvai fl
519 clamation fut unanime, mais la campagne populaire du même coup se trouvait annulée : plus moyen de signer un document où l
520 resse38. C’est à ce moment précis que les maîtres du congrès retirèrent la parole au peuple européen, pour la donner à des
521 terests) des États-nations. Pour réussir l’Europe du peuple européen, il eût fallu : 1) lancer une campagne populaire de t
522 poir que le Conseil de l’Europe — créé à la suite du congrès de La Haye — conduirait progressivement à l’unification polit
523 autres pouvoirs réels, à l’échelle de l’Europe et du monde, que négatifs. Ils peuvent encore soit refuser les mesures d’un
524 Mouvement européen — créé lui aussi au lendemain du congrès de La Haye — a-t-il tenu ses promesses ? Quelles furent son a
525 ent voyez-vous son avenir ? Comment voir l’avenir du Mouvement européen quand on ne voit même plus son présent ? Son impui
526 rtement minoritaires dans les conseils directeurs du Mouvement. Ce qu’il a proclamé avec une si louable mesure, et, il fau
527 quelque chose qui ne peut manquer de se produire du fait des autres, ou de la providence, ou du « mouvement de l’Histoire
528 duire du fait des autres, ou de la providence, ou du « mouvement de l’Histoire », alors oui, nous en sommes pour nos frais
529 eux exemplaires que je conserve dans les archives du Centre européen de la culture. 39. J’employais cette formule dans me
21 1969, Articles divers (1963-1969). De l’Aar à l’Europe (1969)
530 ération d’un fleuve. Il s’agissait sans nul doute du Méandre, puisque cet ancêtre éponyme de tous les cours d’eau sinueux
531 les choses et les dieux, ne partaient pas encore du seul langage, ni de l’histoire, ni des sciences exactes, et encore mo
532 par le regard ou par le bain, Héraclite a déduit du fleuve ces sentences : Pour ceux qui entrent dans les mêmes fleuves,
533 strent ici les deux sens et la profonde ambiguïté du mot durée : il désigne à la fois « ce qui ne change pas » et l’écoule
534 la fois « ce qui ne change pas » et l’écoulement du temps irréversible ; le devenir indéfini et ce qui dure en résistant
535 pays. Europe sans déserts et sans steppes, jardin du monde, fille des fleuves ! IV Rien de plus fluvial que la Suiss
536 rces. Cinq bassins fluviaux s’originent au massif du Gothard, château d’eau de l’Europe. Par eux la terre des Suisses est
537 terre des Suisses est liée sans relâche à l’océan du Nord, où va le Rhin, et à trois mers du sud, où vont le Rhône, l’Inn
538 à l’océan du Nord, où va le Rhin, et à trois mers du sud, où vont le Rhône, l’Inn danubienne et les deux moindres fleuves
539 Suisse dans toute l’Europe germanique et latine : du sommet du Gothard, écrivait le chevalier de Boufflers, « l’on peut cr
540 s toute l’Europe germanique et latine : du sommet du Gothard, écrivait le chevalier de Boufflers, « l’on peut cracher dans
541 e, et l’œuvre d’art à l’émotion. Les fleuves nés du cœur granitique de la Suisse nous quittent après avoir formé deux gra
542 avoir formé deux grandes nappes de tous les bleus du monde, le Bodan, le Léman, vastes miroirs horizontaux en réponse inve
543 l’affirmation farouche, le nœud serré des gorges du Gothard. Les grands fleuves nous bordent et nous quittent. Mais il es
544 Mais il est une rivière qui d’un large mouvement du sud à l’ouest, puis à l’est, ramasse toutes les autres rivières du Pl
545 puis à l’est, ramasse toutes les autres rivières du Plateau suisse et les déverse d’un seul geste dans le Rhin, vers l’At
546 hin, vers l’Atlantique. Elle relie les deux pôles du drame originel de notre histoire, le Gothard des premières communes c
547 l’autre (280 kilomètres, c’est la longueur exacte du Méandre !), mais elle draine tous les lacs entièrement suisses, du la
548 is elle draine tous les lacs entièrement suisses, du lac de Joux à l’ouest, à travers ceux de Neuchâtel, Morat et Bienne,
549 insi de sa source, à quelques kilomètres de celle du Rhône, jusqu’à son confluent avec le Rhin, l’Aar draine tous nos lacs
550 ses eaux, tend plutôt vers le monde rhodanien, et du Pays de Vaud à l’Argovie, contrées assujetties pendant des siècles. B
551 e et sa noblesse aux noms français, son ambassade du Roy de France, le souvenir de Besenval et celui de Casanova, Soleure
552 laisse une image classique des régimes patriciens du xviiie . L’Argovie, ou « pays de l’Aar », vient ensuite, en aval dans
553 ns, d’Aventicum à Vindonissa, puis route des vins du Pays de Vaud et route du sel de la Bourgogne — produits sur lesquels
554 ssa, puis route des vins du Pays de Vaud et route du sel de la Bourgogne — produits sur lesquels les gens d’Aarburg prélev
555 ège impérial — va devenir au xxe siècle le cours du progrès social et de la conquête industrielle. Olten est le symbole d
556 de la conquête industrielle. Olten est le symbole du mouvement ouvrier, comme Brugg du syndicalisme paysan, cependant que
557 est le symbole du mouvement ouvrier, comme Brugg du syndicalisme paysan, cependant que de Sienne à Baden les grandes usin
558 pour les faire déboucher sur l’espace et le temps du continent de notre destin. L’Europe est partout dans l’histoire comme
559 no-germanique, et généralement gibeline, qui fait du massif du Gothard le lieu le plus européen du continent. Et nos liber
560 que, et généralement gibeline, qui fait du massif du Gothard le lieu le plus européen du continent. Et nos libertés en son
561 ait du massif du Gothard le lieu le plus européen du continent. Et nos libertés en sont nées, comme en naissent les fleuve
562 e voies ouvertes à l’imagination vers les plaines du continent et les quatre points cardinaux. Et rien en Suisse n’est sui
563 ère germano-celte romanisée qui porte le nom même du cours d’eau en soi, fait du redoublement de la première — insistance
564 qui porte le nom même du cours d’eau en soi, fait du redoublement de la première — insistance sur l’origine et sur la forc
22 1969, Articles divers (1963-1969). À la fontaine Castalie (1969)
565 ain état d’âme, d’alerte au monde est le vrai but du dé-placement : il renouvelle la syntaxe émotive de mon dialogue avec
566 vants. Quelqu’un dit : Delphes. ⁂ Jusqu’au pied du Parnasse j’irai, et dès que dans l’ombre des chênes Aux yeux de l’err
567 chauffeur a orné son tableau de bord, le pourtour du parebrise et le feutre du plafond de photos miniatures encadrées, fle
568 au de bord, le pourtour du parebrise et le feutre du plafond de photos miniatures encadrées, fleurs séchées, amulettes, cr
569 pans de montagne s’élèvent, cachant les hauteurs du Parnasse. Le paysage s’assombrit, s’agrandit en même temps devant nou
570 nant, beaucoup plus bas, sur la mare scintillante du petit port, par instants j’ai cru voir le bateau, comme un trait. Pas
571 une porte noire semble s’ouvrir vers l’intérieur du rocher. Au bas de la paroi court une sorte d’auge creusée dans la pi
572 e dalles verticales, puis s’enfonce dans le flanc du rocher. Pieds nus dans l’eau lustrale et remontant le flot, avec piét
573 et suinte de la nuit des Temps. Jamais plus près du Néant primordial, dans le noir pur. ⁂ Toutes choses qui naissent et
574 tard, nous avons essayé de mieux voir l’ensemble du site et d’en prendre quelques photos. Mais il y a peu de recul, peu d
575 a pierre sacrée, l’omphalos lourd et noir, centre du Monde. Au retrait de l’ombre des chênes, j’ai trompé le sommeil pour
576 ompé le sommeil pour tenter de surprendre l’éveil du mythe dans l’espace du rêve, et pour entendre ce qu’on voit ici. Épia
577 nter de surprendre l’éveil du mythe dans l’espace du rêve, et pour entendre ce qu’on voit ici. Épiant le lent progrès de l
578 ourd escalier, dévalant des hauteurs vers le fond du ravin, le dieu solaire a tué Python, le grand serpent, défenseur de l
579 il la garde, elle servira son culte. Apollon fils du Ciel a vaincu, imposant la loi du soleil, qui est celle du Père, à ce
580 e. Apollon fils du Ciel a vaincu, imposant la loi du soleil, qui est celle du Père, à ce lieu dont le nom reste l’Ombre. M
581 vaincu, imposant la loi du soleil, qui est celle du Père, à ce lieu dont le nom reste l’Ombre. Mais ici même, près de la
582 ui, attendant la parole de son destin, et l’ombre du destin l’a revêtu. Selon la volonté de la Nuit, de la Terre, du sol p
583 revêtu. Selon la volonté de la Nuit, de la Terre, du sol profond et de la caverne où suinte l’eau sacrée du sanctuaire mat
584 l profond et de la caverne où suinte l’eau sacrée du sanctuaire maternel, selon la loi de l’aveuglant Désir, il va prendre
585 ui vient après l’acte tragique. Paix sur le cœur du héros criminel dans son triomphe, l’Ordonnateur ! Et piété pour les m
586 oté sur une des pages de garde de mon guide. Paix du bassin, eau verte et noire, le silence et l’ombre dorée devant l’imme
587 le temple deux fois frappé par des roches tombées du Parnasse : dans la lumière précise des hauteurs, dans la proximité ai
588 és — ils me rappellent parfois les hauts plateaux du Jura familier de mon enfance… Delphes s’est tue. Le sombre esprit ne
589 r il plaît aujourd’hui comme alors aux souffles du ciel de descendre Dans un cœur qui s’émeut et connaît leur présence
590 une terrasse d’auberge accrochée juste au-dessous du tournant de la route, à deux-cents pas de la fontaine. Pain gris, fro
591 es noires et une cruche bien fraîche de vin rouge du pays. Bonheur pur. 46. Xénophane de Colophon, vie siècle av. J.-C.
23 1969, Articles divers (1963-1969). Pour une définition nouvelle du fédéralisme (1969)
592 Pour une définition nouvelle du fédéralisme (1969)z aa En 1863 paraissait le dernier grand ouvrage
593 paraissait le dernier grand ouvrage de Proudhon, Du Principe fédératif, où l’on pouvait lire cette phrase devenue célèbre
594 e Pacte de Varsovie, ou de nations au sens ancien du mot, régions ou ethnies en révolte plus ou moins ouverte contre le co
595 État-nation, tel qu’il est né de la Révolution et du Premier Empire, produit de la confiscation d’une mystique — la nation
596 atomisé et trituré par les dynamismes contraires du xxe siècle, l’État-nation européen nous apparaît, tel que les accide
597 ntion à une politique indépendante, au plein sens du terme, ne saurait être soutenue à la rigueur que par la Chine, l’URSS
598 pendent autant de l’opinion mondiale que celle-ci du dollar ou de la télévision. Une interdépendance universelle dans tous
599 es années à la Chambre italienne sur le règlement du statut des régions autonomes. Risque d’éclatement de la Belgique. En
600 ions d’organismes de coopérations multinationales du type de la Regio Basiliensis, mesures professionnelles et industriell
601 ratifs, mais ils regroupent 40 % de la population du globe, et il est frappant de constater qu’on trouve parmi eux les plu
602 l’Inde et l’Australie. Voilà qui réfute le cliché du fédéralisme « désuet ». Mais l’étiquette fédérale couvre des marchand
603 qu’il s’agit par exemple de l’empire soviétique, du Nigéria, ou de la Confédération suisse. Car la double exigence antino
604 opéenne et mondiale, même s’ils disent s’inspirer du propre exemple de la fédération des cantons suisses ! Il est certain
605 s d’un État fédéral. Il ne s’agit pas d’un défaut du fédéralisme, mais d’un défaut de fédéralisme ! Et l’on est en droit d
606 des unions plus vastes, qui est le battement même du cœur d’un régime sain, j’entends immunisé contre le virus totalitaire
607 rès sûr de sa formule. Or je ne vois pas de terme du langage politique qui prête à pires malentendus ! Un Français cultivé
608 Français cultivé qui demande à son Littré le sens du mot fédéralisme trouve ceci : « Fédéralisme : substantif masculin. Né
609 ubstantif masculin. Néologisme. Système, doctrine du gouvernement fédératif. » Cette définition est assurément moins éclai
610 nous amènent à utiliser quotidiennement. Mais pas du tout : le malheur congénital du fédéralisme reste d’être un concept d
611 nnement. Mais pas du tout : le malheur congénital du fédéralisme reste d’être un concept dialectique, ambigu, et qui autor
612 à des travaux sur le fédéralisme. Le représentant du Conseil de l’Europe tint à déclarer aussitôt que le terme de fédérali
613 lus variés et les moins politiques au sens étroit du mot. ⁂ Tout d’abord, trois définitions. Je propose d’appeler problèm
614 i la politique fédéraliste, au sens le plus large du terme. Avant de chercher à quel type d’homme correspond une telle pol
615 s au sujet de l’antinomie fondamentale de l’Un et du Divers, ou encore de la permanence et du changement. Parallèlement se
616 l’Un et du Divers, ou encore de la permanence et du changement. Parallèlement se constituaient les premières définitions
617 t occidental : devant ce même problème de l’un et du divers, les métaphysiques orientales prennent le parti de supprimer l
618 t également et intégralement pour le fédéralisme, du moins tel que je l’entends, après avoir valu pour la Grèce des grands
619 cidentale vers l’approfondissement et l’expansion du modèle des contraires en tension créatrice, nous le trouvons dans le
620 définir en grec la nature à la fois triple et une du Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit, et la personne à la fois une et dou
621 ris par tous les penseurs occidentaux respectueux du réel et des conditions de la vie, qui sont : antinomies, oppositions,
622 ême devenue principe fondamental d’interprétation du réel (je pense aux théories de de Broglie sur la lumière, faite de vr
623 e mot de Victor Hugo repris par Camus), distingué du troupeau par cette vocation même dont l’exercice le relie à la commun
624 auté ? L’analyse fédéraliste d’une situation part du concret, en ce sens que d’abord elle considère la nature d’une tâche
625 ons plus les ordinateurs, c’est-à-dire le respect du réel et de ses infinies complexités enfin rendu possible par la techn
626 d’une place remplissant la fonction de l’agora ou du forum dans la cité antique, place délimitée par tous les bâtiments sy
627 r réévaluer les dimensions d’une université digne du nom, ménageant des possibilités de recherches très spécialisées et de
628 s, et je retrouve ici la solution préconisée lors du fameux colloque de Caen, en 1966. L’université fut une commune libre
629 nous allons enfin retrouver le problème classique du fédéralisme : comment assurer la cohésion d’un ensemble assez vaste p
630 tat, de la formation des esprits et de l’exercice du civisme, c’est dans cette dialectique concrète que sont en train de s
631 itique : il est un des grands types d’aménagement du rapport politique et peut-être plus encore, un des grands styles de v
632 nitions étroitement légales et constitutionnelles du xixe siècle. Nous voici sur le seuil de l’ère de grandes unions et d
633 otes de la fédération absolument classique et pas du tout des confédérations. La confédération est une mesure d’opportunis
634 un député ; cela n’est pas réellement l’activité du civisme, c’est-à-dire l’intervention dans les affaires qui regardent
635 e civisme. Il y a interaction de l’institution et du civisme. Si on trouve qu’il n’y a pas assez de civisme quelque part,
636 airement coïncider avec une région politique. Pas du tout, ni avec une région linguistique. On peut très bien continuer à
637 nes, comme les réalités culturelles, économiques, du sous-sol et de l’état civil ou de la langue qu’on parle, et qui about
638 Moselle, qui est d’un seul tenant au point de vue du sous-sol, d’après la langue qu’on parlait d’un côté ou de l’autre d’u
639 e intenable et nous oblige à chercher autre chose du côté des régions. Il est certain que le système stato-national actuel
640 ètres, dont il fallait tenir compte : l’intensité du trafic, le prix des travaux d’après la nature du sous-sol, les questi
641 du trafic, le prix des travaux d’après la nature du sous-sol, les questions de tourisme, de main-d’œuvre, d’aménagement u
642 ougemont Denis de, « Pour une définition nouvelle du fédéralisme », Revue des travaux de l’Académie des sciences morales e
643 141-153. aa. Discours prononcé lors de la séance du 10 mars 1969. ab. Pierre Duclos écrivait en 1962 dans son excellent
24 1969, Articles divers (1963-1969). « La lecture des Nourritures terrestres… » [réponse à un questionnaire sur l’influence d’André Gide] (printemps 1969)
644 es Nourritures terrestres à 16 ans m’a fait jouer du violon comme jamais, mais ce n’était pas assez, je suis sorti, sur mo
645 re neuf — seule valable contestation, à mes yeux, du désordre établi. ac. Rougemont Denis de, « La lecture des Nourritu
25 1969, Articles divers (1963-1969). Un souvenir de Solférino de Henry Dunant [préface] (1969)
646 ir ; cette approche soigneusement conventionnelle du phénomène de la guerre devait conduire à une innovation proprement ré
647 rouvées de l’immobilisme, qui s’est toujours paré du nom de réalisme. Aristide Briand avait coutume de prononcer à la Cham
648 d il sacrifie si libéralement aux clichés obligés du récit militaire, c’est avec le plus grand naturel, semble-t-il. Mais
649 contraste avec ce que l’on va lire dans le reste du livre, comme pour nous faire comprendre sans le dire : voilà la guerr
650 gement de ton trahit l’entrée sur la scène réelle du narrateur : le cliché vient de faire place à la chose vue. Et du coup
651 le cliché vient de faire place à la chose vue. Et du coup cela devient effroyable. On croirait lire une description d’Hiro
652 ïonnette au ventre, d’un coup de sabre au travers du visage. Un général a eu l’épaule fracassée par un boulet qui reste en
653 d’adieux à leurs familles. Peu à peu, les femmes du lieu « voyant que je ne fais aucune distinction de nationalité, suive
654 illuminé, et auquel on a tant reproché de manquer du sens élémentaire des réalités. On ne saurait être plus respectueux de
655 Solférino, un an après la parution hors commerce du Souvenir, la Croix-Rouge est fondée à Genève. Et certes, il n’eût pas
656 ourt par hasard, dans son cabriolet, les arrières du champ de bataille le plus meurtrier du siècle depuis Waterloo : il n’
657 s arrières du champ de bataille le plus meurtrier du siècle depuis Waterloo : il n’a qu’une seule idée en tête, qui est d’
658 s que je me suis décidé à retracer. Ce n’est pas du tout Fabrice à Waterloo dans la Chartreuse de Parme, mais plutôt un p
659 ce de vagabond sans bagage échoue dans un village du canton d’Appenzell, Heiden. Il y vivra obscurément dans la misère, pe
660 , lucide et sans espoir quant à l’avenir prochain du monde, le reclus de la chambre 12 du petit hôpital de Heiden meurt en
661 nir prochain du monde, le reclus de la chambre 12 du petit hôpital de Heiden meurt enfin le 30 octobre 1910 — tout près de
662 a barbarie scientifique !… Le résumé reste ceci : du sang, du sang, encore du sang, du sang partout. » ⁂ J’ai dit qu’on ch
663 e scientifique !… Le résumé reste ceci : du sang, du sang, encore du sang, du sang partout. » ⁂ J’ai dit qu’on chercherait
664 … Le résumé reste ceci : du sang, du sang, encore du sang, du sang partout. » ⁂ J’ai dit qu’on chercherait en vain, dans u
665 mé reste ceci : du sang, du sang, encore du sang, du sang partout. » ⁂ J’ai dit qu’on chercherait en vain, dans un Souveni
666 « horreurs » ?) J’avoue qu’à ma première lecture du Souvenir, j’avais achoppé sur ce point. Mais la mise au jour des cahi
667 ir et finale des cahiers de Heiden. La « modestie du but » auquel Dunant veut se limiter est réitérée, mais déjà la possib
668 ’on pourra puiser pour construire une œuvre digne du but.43 Il ne s’agit plus d’améliorer la peste, mais de dénoncer le
669 épète pas que la guerre est la suprême éducatrice du genre humain ! À cet antique adage de la sagesse commune à toutes les
670 anisme blasphématoire : La guerre, cette science du désordre, qui provient de l’anarchie d’en haut, ne tue pas seulement
671 spérer ni à ménager, s’abandonnerait au zèle amer du censeur des temps nouveaux et aux compensations fictives d’utopies qu
672 étuelle, supposent toujours la fin de l’Histoire, du moins telle que nous l’entendons ? Il convient de s’entendre sur le
673 uerre dans l’ère moderne, qu’il écrit vers la fin du siècle dernier. Il est difficile aujourd’hui de ne pas voir les liens
674 éveloppement scientifico-technique mis au service du nationalisme. Tels sont les procédés nés de la Révolution, qui ont pe
675 e chrétiens commettent ces crimes qu’ils décorent du nom de politique coloniale ». Or ce n’est pas la vraie civilisation q
676 tes, Dunant, pas plus que tant d’autres prophètes du même temps, Jakob Burckhardt, Nietzsche, ou Georges Sorel, n’a rien p
677 utre plus de bien qu’aucun homme de son siècle ou du nôtre. 41. « La guerre est agréable pour ceux qui ne l’ont pas fait
678 inée à un ouvrage collectif consacré aux lauréats du prix Nobel de la paix (Fratelli Fabri Editori). 43. BPU Ms fr. 4556.
26 1969, Articles divers (1963-1969). Toujours disponible (1969)
679 des circonstances très diverses, je n’arrive plus du tout à retrouver quand j’ai rencontré pour la première fois Hans Opre
680 s de la guerre à Berne ? Mais je fondais la Ligue du Gothard avec Theo Spoerri en mai 1940, et Hans Oprecht fondait l’auto
681 l’un des premiers à utiliser cette forme moderne du cabinet de travail étiré sur plusieurs centaines de kilomètres — mais
682 ce qui est neuf ». Laissons de côté les héritages du passé dont l’unification prendrait trop de temps, demanderait trop d’
683 té cette règle d’or, dès les débuts de l’activité du Centre européen de la culture. Nos premières interventions nous portè
684 ans l’édition, la création et l’essor des guildes du livre, alors considérées — mais nous pensions le contraire — comme un
685 r les libraires, les éditeurs et les corporations du livre en général. Dans ce dernier champ de ses activités, le CEC ne p
686 : Hans Oprecht n’était pas pour nous le président du Parti socialiste, mais avant tout le directeur de la Büchergilde Gute
687 nberg, laquelle avait donné naissance à la Guilde du Livre, à Lausanne. Ce fut autour de ce noyau que se constitua rapidem
27 1969, Articles divers (1963-1969). « Il faut donner aux gens le goût des belles choses » (15 février 1969)
688 ne laideur irréversible. En Hollande, dans le Sud du Portugal, toutes les maisons sont belles, sans être plus luxueuses. C
689 J’ai pu le constater à propos d’un petit village du Midi où je possède une maison. On y a tué la poule aux œufs d’or car
690 ensé que l’on détruisait ce qui faisait l’attrait du pays. On a l’impression que le seul souci qu’on ait soit la spéculati
691 Il faut rendre les gens attentifs à l’importance du cadre dans lequel ils vivent. Cela est plus important que de savoir s
692 s’équilibrer dans le chaos ». C’est ma conclusion du Journal d’une époque . ai. Rougemont Denis de, « [Entretien] Il
693 et, soit en cours de réalisation, dans l’ensemble du pays de Gex, voilà quelques chiffres grisants qui semblent annoncer u
694 voltairienne, où logeait, dit-on, le garde-chasse du château. La porte du cabinet de travail s’ouvre sur les prés, les boi
695 ait, dit-on, le garde-chasse du château. La porte du cabinet de travail s’ouvre sur les prés, les bois, une image paisible
696 ’ouvre sur les prés, les bois, une image paisible du pays de Gex que bientôt peut-être on ne pourra plus contempler. »
28 1969, Articles divers (1963-1969). Les résistances mentales à l’Europe des régions (avril 1969)
697 I. Les objections courantes Depuis 1963, date du premier essai quelque peu développé dans lequel — revenant d’ailleurs
698 , des émotions par l’éloquence patriotique, enfin du sentiment religieux par le culte du Soldat inconnu et la sacralisatio
699 otique, enfin du sentiment religieux par le culte du Soldat inconnu et la sacralisation des bornes-frontières. Distinguons
700 ypothèses prospectives, formées par extrapolation du passé ou du présent, sont toutes à la merci d’une équation nouvelle,
701 ospectives, formées par extrapolation du passé ou du présent, sont toutes à la merci d’une équation nouvelle, d’une action
702 a des décennies. Ce qui est urgent, c’est le prix du lait et le taux d’accroissement de la productivité industrielle. (Pr
703 conçu, formé et accouché en neuf mois exactement, du 17 février au 16 novembre 1848, et il est entré en vigueur à cette de
704 commun, par exemple.) Il n’y a qu’une transition du projet au succès : c’est l’acte créateur, ou révolution, procédant d’
705 taux, qu’éprouve un homme de cette seconde moitié du xxe siècle à concevoir une Europe des régions, proviennent du « modè
706 e à concevoir une Europe des régions, proviennent du « modèle » que l’École (aux trois degrés) a imposé depuis un siècle a
707 les calculs des arpenteurs. — Tout ce qui relève du domaine public (économie, politique, enseignement, fiscalité, défense
708 l’homme néolithique (nomade fixé au sol à partir du Xe millénaire avant notre ère). Au cours des siècles de l’histoire mo
709 e de la fonction visuelle et par l’identification du « voir » et du « comprendre » qui s’en suit. L’homme de la civilisati
710 n visuelle et par l’identification du « voir » et du « comprendre » qui s’en suit. L’homme de la civilisation visuelle, de
711 tale. Les possibilités pratiques de participation du citoyen à la vie d’une région de ce type ne seraient pas d’un ordre e
712 ourd’hui. La vie communale — seule école efficace du civisme — ne serait pas nécessairement restaurée par la simple divisi
713 modèle neuf de relations humaines et de structure du pouvoir. Elle ne représenterait aucune révolution, au sens où j’ai to
714 ogiques s’ajoutent d’ailleurs au refus instinctif du saut qualitatif et révolutionnaire, pour favoriser cette évolution, o
715 riser cette évolution, ou plutôt cette dévolution du centralisme de la capitale au centralisme des métropoles de développe
716 frontières communes, et souvent pas de frontières du tout. Si l’on exigeait que tout cela soit unifié et uniformisé dans l
717 es ambitions de Napoléon et celles d’un dictateur du xxe siècle il y ait d’autres différences que celles dues aux moyens
718 à les régir en souverain. Je demande la division du phénomène État en autant de foyers, et sa répartition à autant de niv
719 napoléonien qui la continue, et des totalitaires du xxe siècle qui l’achèvent. Il ne s’agit donc, pour Proudhon, ni de d
720 , Proudhon s’en tient à un partage ou répartition du pouvoir entre les échelons géographiques : commune, province (région)
721 raient souhaitable de renouer librement des liens du type national, politique ; non exclusifs, bien entendu, de liens écon
722 lraux dit que la nation est le phénomène dominant du xxe siècle, on doute qu’il pense à autre chose qu’à la France… 49.
723 autre chose qu’à la France… 49. P.-J. Proudhon, Du principe fédératif, Paris, 1863, p. 82. 50. Louis Armand propose le
29 1969, Articles divers (1963-1969). Le mariage est à réinventer (14 avril 1969)
724 souvenirs, quelques cheveux blancs et des enfants du premier lit : ça pose des problèmes (voir Elle n° 1216) mais on ne fa
725 ouvent l’heureux mariage qu’on n’a pas su réussir du premier coup. Mais faut-il vraiment se marier deux fois ? Denis de Ro
726 mais un problème d’avenir. C’est une conséquence du divorce plus fréquent mais aussi du progrès médical. Ce qu’on nomme «
727 e conséquence du divorce plus fréquent mais aussi du progrès médical. Ce qu’on nomme « l’espérance de vie » ayant doublé,
728 e. Il y a enfin la remise en question quotidienne du mariage : chacun sait désormais qu’il y a problème et qu’on peut en p
729 ême en parler librement et sérieusement. La crise du mariage et la cellulite sont même devenues les deux mamelles de la pr
730 mariage. Pourquoi ? L’une des grandes difficultés du sujet tient à ce qu’il n’existe pas de littérature romanesque sur le
731 er les âges et les motivations des conjoints lors du premier et du second mariage. Analyser leur évolution, les réactions
732 les motivations des conjoints lors du premier et du second mariage. Analyser leur évolution, les réactions des enfants, e
733 u-père, le Dr Répond, qui est psychanalyste, lors du premier mariage, on épouse ses complexes. Or, contrairement à ce que
734 ls sont gênants, voire dangereux. Les motivations du premier mariage sont la plupart du temps inconscientes. Complexe d’Œd
735 ui est (sans qu’on le sache) celui de la mère, ou du père. Ou au contraire, inhibition devant une femme aimée, parce que l
736 , l’immaturité des conjoints, souvent accompagnée du désir (conscient ou non) de se libérer de sa famille, cas plus fréque
737 ement les circonstances réelles. L’ennemi n° 1 du mariage, c’est la passion Mais où est le roi Marc entre le garçon
738 era forcément malheureuse. Le défi sentimental du passionné Vous avez démontré dans L’Amour et l’Occident que l’am
739 n’est donc pas une invention récente. Or la crise du mariage n’a pas six siècles. Quel rapport y a-t-il entre l’un et l’au
740 iait pour des raisons : fortune, terres, agrément du caractère et du physique, et on restait marié pour des raisons : reli
741 isons : fortune, terres, agrément du caractère et du physique, et on restait marié pour des raisons : religieuses, sociale
742 er, sur une crise affective. La passion retranche du monde comme la fièvre ; quand la fièvre est retombée, la réalité est
743 défi sentimental, le défi téméraire et dérisoire du passionné. Tout ça, ce sont les défauts possibles et même courants d’
744 iminées quand on se remarie ? Pas automatiquement du tout. Quand l’expérience n’a pas été comprise, on se remarie trois fo
745 mais (« on ne peut pas changer de place les raies du zèbre », dit un proverbe oriental) et, comme on a pris conscience de
746 ux éléments durables et indispensables à la durée du mariage. Attention, ne vous remariez pas pour vous venger N’y a
747 aient qu’un mariage de raison ? C’est l’intuition du véritable moi de l’autre. C’est l’acceptation de cet être tel qu’il e
748 divorce. À la surestimation de la passion, issue du mythe de Tristan, et de toute la littérature romanesque, se sont ajou
749 manesque, se sont ajoutés tous les tabous sexuels du xixe siècle. L’effet de révélation produit par l’œuvre de Freud, cet
750 ses recherches « scientifiques », on osait parler du sexe ! Aujourd’hui on parle du sexe — d’abondance — mais, en ce qui c
751 », on osait parler du sexe ! Aujourd’hui on parle du sexe — d’abondance — mais, en ce qui concerne l’amour, beaucoup de ge
752 t ce qui peut aider les gens à prendre conscience du sérieux, de la beauté, mais aussi de la difficulté du mariage et je p
753 érieux, de la beauté, mais aussi de la difficulté du mariage et je pense que « l’essai » peut aider. Bien sûr, l’expérienc
754 comme celui qui précède dans les revues la sortie du numéro 1, le premier numéro officiel. Ce type d’expérience se répand
755 gement total. Je ne crois pas à la valeur magique du « oui » solennel mais bien à la valeur psychologique de protection qu
756 s la fatigue et cela changeait tout. La valeur du « oui » solennel Mais vous n’avez pas fait lors du premier coup un
757  oui » solennel Mais vous n’avez pas fait lors du premier coup une marche de 140 km ? C’est pourquoi le mariage-maquett
758 tation de la passion ou plutôt, soyons réalistes, du désir de ressentir une passion, qui fait croire que « ça y est », ave
759 spéré à cause de lui pendant huit jours, la crise du mariage sera résolue en principe et la majorité des divorces évités.
760 t la majorité des divorces évités. Mais l’emprise du mythe est tellement forte que notre vocabulaire le plus courant en es
761 re à l’autre avec continuité ! C’est le contraire du « coup de foudre » aveuglant, de la passion « fatale » mais changeant
762 vés pour être heureux ! Le contraire de la folie, du déséquilibre, de la passion, dans l’esprit des gens, c’est l’ennui. E
763 vie à deux —, vous explique comment les problèmes du deuxième mariage éclairent la grande crise du mariage moderne. »
764 mes du deuxième mariage éclairent la grande crise du mariage moderne. »
30 1969, Articles divers (1963-1969). Le personnalisme, la contestation, les hippies et… le fédéralisme (27 septembre 1969)
765 tembre 1969)an ao Denis de Rougemont, aux yeux du grand public, c’est l’auteur d’un livre « unique », d’une thèse reten
766 era, au fil des ans, Doctrine fabuleuse, Personne du drame [sic] et Les Mythes de l’amour. C’est donc l’illustre théoricie
767 te conférence, qui était placée sous les auspices du Département de français de l’Université McGill et du Consulat général
768 Département de français de l’Université McGill et du Consulat général de Suisse, répondait d’ailleurs on ne peut mieux aux
769 on non moins importante de « l’écrivain engagé », du promoteur infatigable de l’idée fédéraliste en Europe, en faveur de l
770 cette autre thèse chère à M de Rougemont : celle du fédéralisme. Il l’a non seulement défendue par ses écrits, mais égale
771 is également par son action en tant que directeur du Centre européen de la culture, qu’il a fondé et qu’il dirige depuis 1
772 -Unis, après son séjour au Canada, je veux parler du prix Paul Tillich qui est, en quelque sorte, un prix de théologie, on
773  », se demandait-on au lendemain de l’attribution du Grand Prix littéraire de Monaco. La question, on le voit reste toujou
774 je lui montre cette cohérence entre mon érotique du mariage, du couple et mes théories fédéralistes. À quoi je lui ai rép
775 re cette cohérence entre mon érotique du mariage, du couple et mes théories fédéralistes. À quoi je lui ai répondu que rie
776 our moi, le couple est une espèce de banc d’essai du fédéralisme, c’est-à-dire du système d’aménagement qui permet à des n
777 pèce de banc d’essai du fédéralisme, c’est-à-dire du système d’aménagement qui permet à des natures diverses de vivre ense
778 ujours, poursuit-il, aux définitions des conciles du ive au vie siècle qui ont défini la personne à propos des personnes
779 protestants. Mais, 1932 marque aussi la naissance du personnalisme à laquelle il devait participer. C’était la réponse à «
780 retrouve plusieurs de celles qui furent à la base du mouvement personnaliste. Ce que nous appelions en 1932 la révolution
781 avait alors alerté et réveillé c’était l’exemple du nazisme et du communisme stalinien. Et puis il y a eu la montée de la
782 lerté et réveillé c’était l’exemple du nazisme et du communisme stalinien. Et puis il y a eu la montée de la guerre. On vo
783 grandes causes à défendre et nous ne voyions pas du tout lesquelles à ce moment-là. Cette crise existentielle dont nous a
784 is extrêmement dangereux, et qui ne ressemble pas du tout à notre réaction personnaliste et communautaire. Elle ressemble
785 : c’est la police qui arrive. Je ne suis donc pas du tout d’accord avec Sartre quand celui-ci prêche la destruction de l’U
786 ite précisément au nom d’autre chose. Je n’ai pas du tout varié en ce qui concerne la définition de la révolution que nous
787 ite retentissante des systèmes centralisateurs et du nationalisme étatisé. C’est la guerre la plus antisuisse de l’histoir
788 . Et depuis, il travaille sans relâche à la cause du fédéralisme. Il ne nous cache d’ailleurs pas qu’il désirait venir au
789 fédéraliste nous amène, on l’aura remarqué, loin du fédéralisme canadien. M. de Rougemont nous confiera d’ailleurs ses im
790 retombé dans la vieille formule de l’État-nation du xixe siècle ; une conception qui ne s’accorde plus aux exigences de
791 èle pyramidal, mais sans s’arrêter aux frontières du Québec ou même au niveau de la fédération canadienne. Il faut aller j
792 ques. Si vous voulez avoir une vision fédéraliste du monde, nous dit M. de Rougemont, il vous faudra séparer tout ce qui p
793 ent les intellectuels. Que cette idée fédéraliste du monde soit utopique, M de Rougemont serait le premier à l’admettre. M
794 me, l’attentisme ne représentent-ils pas la ruine du monde ? » C’est la leçon en tout cas que nous rappelle M de Rougemont
31 1969, Articles divers (1963-1969). La révolution des meilleurs (4 octobre 1969)
795 européen — et nous définissions la révolution pas du tout comme le grand chambardement ou la violence ou verser du sang et
796 e le grand chambardement ou la violence ou verser du sang et tout ça, mais comme la substitution d’un ordre nouveau à ce q
797 n industrielle, de la distribution des richesses, du profit, et de choses aussi pauvres que cela, pour créer une communaut
798 ain de se défaire, n’est-ce pas : la grande crise du xxe siècle, c’est la dissolution du sens de la communauté humaine. A
799 grande crise du xxe siècle, c’est la dissolution du sens de la communauté humaine. Alors, c’est dans ce sens que, je pens
800 tes passé — ou peut-on dire que vous êtes passé — du personnalisme au fédéralisme ? Par un cheminement absolument normal e
801 e suis devenu, presque, le théoricien, en Europe, du fédéralisme — je prépare un grand ouvrage qui s’appellera Théorie gén
802 un grand ouvrage qui s’appellera Théorie générale du fédéralisme, où je constate que le mot fédéralisme est toujours mal c
803 aires de six pays, qui a donné lieu à la création du CERN — le Centre européen de recherche nucléaire, le plus grand labor
804 Nous avons créé aussi des fédérations de guildes du livre, d’historiens, pour la révision des manuels, une agence de dist
805 a défié, il y a deux ans, de prouver que mon idée du mariage et de l’amour me conduit au fédéralisme. J’ai dit : rien n’es
806 st plus facile. Le mariage, c’est le banc d’essai du fédéralisme. Qu’est-ce que le fédéralisme ? C’est faire coexister ens
807 chose entre un homme et une femme. […] Vous avez du monde une vue qui est religieuse en ceci que vous dites que l’amour o
808 à se tient-elle aujourd’hui ? Moi, je ne suis pas du tout d’accord : il n’y a pas du tout de débandade de l’idée religieus
809 i, je ne suis pas du tout d’accord : il n’y a pas du tout de débandade de l’idée religieuse, du phénomène religieux. Au co
810 a pas du tout de débandade de l’idée religieuse, du phénomène religieux. Au contraire, il y a une débandade des instituti
811 ivre écrit pendant la guerre à New York, La Part du diable , nous allons vers le règne de l’ennui mécanique et technique,
812 rtie contre la psychanalyse. Est-ce que… Non, pas du tout. Je suis très intéressé par la psychanalyse et il y a très longt
813 e je trouve ça très important. Non. Dans La Part du diable , j’opposais au fond la créativité humaine, la responsabilité
814 à ce que j’appelais le pouvoir de « décréation » du diable. Je suis en train de préparer une cinquième réédition de ce li
815 à uniformiser, à égaliser, et toujours au profit du degré le plus bas d’organisation, le plus simpliste, le plus totalita
816 tendre approfondir la conclusion de sa conférence du 25 septembre à l’Université McGill, on sent que la place qu’il accord