1 suisse (1963)a La Suisse ne saurait se targuer d’ avoir donné à l’Europe et au monde une « culture nationale » bien cara

2 « culture nationale » bien caractérisée ; ni même d’ avoir été la mère de grandes écoles d’art, de littérature ou de pensée

3 » bien caractérisée ; ni même d’avoir été la mère de grandes écoles d’art, de littérature ou de pensée, marquant leur temp

4 e ; ni même d’avoir été la mère de grandes écoles d’ art, de littérature ou de pensée, marquant leur temps ou propageant un

5 même d’avoir été la mère de grandes écoles d’art, de littérature ou de pensée, marquant leur temps ou propageant un style

6 a mère de grandes écoles d’art, de littérature ou de pensée, marquant leur temps ou propageant un style doté du nom de sa

7 ant leur temps ou propageant un style doté du nom de sa terre natale. Il n’y eut jamais de peinture suisse, au sens où l’o

8 doté du nom de sa terre natale. Il n’y eut jamais de peinture suisse, au sens où l’on a pu parler d’une peinture vénitienn

9 s de peinture suisse, au sens où l’on a pu parler d’ une peinture vénitienne ou hollandaise ; ni de musique suisse, comme o

10 ler d’une peinture vénitienne ou hollandaise ; ni de musique suisse, comme on parle d’une musique flamande ou allemande ;

11 ollandaise ; ni de musique suisse, comme on parle d’ une musique flamande ou allemande ; ni de poésie, ou de dramaturgie, o

12 on parle d’une musique flamande ou allemande ; ni de poésie, ou de dramaturgie, ou de roman suisses, comme il y eut un lyr

13 musique flamande ou allemande ; ni de poésie, ou de dramaturgie, ou de roman suisses, comme il y eut un lyrisme languedoc

14 u allemande ; ni de poésie, ou de dramaturgie, ou de roman suisses, comme il y eut un lyrisme languedocien, un théâtre éli

15 n point que l’apport des Suisses en ces domaines, de la Renaissance à nos jours, ait été globalement inférieur à celui de

16 nos jours, ait été globalement inférieur à celui de toute autre région de dimensions à peu près analogues. (Le contraire

17 obalement inférieur à celui de toute autre région de dimensions à peu près analogues. (Le contraire me paraît probable.) M

18 is cet apport ne fut jamais typique et spécifique d’ une unité bien évidente, à la fois culturelle et politique, comme le f

19 omme le furent la Sérénissime, les états généraux de Hollande, l’Angleterre de la première Élisabeth, la France de Louis X

20 ime, les états généraux de Hollande, l’Angleterre de la première Élisabeth, la France de Louis XIV, le Portugal manuélin,

21 ouis XIV, le Portugal manuélin, ou le grand-duché de Weimar. C’est que l’ensemble suisse n’a jamais été défini par autre c

22 ais été défini par autre chose que par un système d’ alliances, embrassant de multiples unités locales — vallées, cités, pr

23 chose que par un système d’alliances, embrassant de multiples unités locales — vallées, cités, principautés et république

24 bliques — dont on sait la diversité non seulement de langue, de confession et de coutumes, mais de régime politique, penda

25 ont on sait la diversité non seulement de langue, de confession et de coutumes, mais de régime politique, pendant des sièc

26 versité non seulement de langue, de confession et de coutumes, mais de régime politique, pendant des siècles. C’est ce sys

27 ent de langue, de confession et de coutumes, mais de régime politique, pendant des siècles. C’est ce système, ou pour mieu

28 ème, ou pour mieux dire, cette pratique séculaire de l’union dans les diversités jalousement préservées, qui constitue le

29 ent préservées, qui constitue le véritable apport de la Suisse comme telle à l’Europe. Pratique restée longtemps sans nom

30 st guère qu’au xixe siècle qu’on se mit à parler de fédéralisme. Encore la chose était-elle entendue de manière assez dif

31 fédéralisme. Encore la chose était-elle entendue de manière assez différente par les Alémaniques et les Romands. Pour les

32 les seconds, fédéralisme signifie surtout volonté de maintenir les autonomies locales et cantonales, contre les empiètemen

33 es locales et cantonales, contre les empiètements de l’autorité centrale. Rien d’étonnant si une telle pratique est mal co

34 tre les empiètements de l’autorité centrale. Rien d’ étonnant si une telle pratique est mal connue ou mal comprise à l’exté

35 ur, et notamment chez nos voisins français, épris de logique, disent-ils, et centralisateurs. Un Français cultivé et qui s

36 dant la révolution, projet attribué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédératio

37 ibué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédération de petits États. « Aux jacobi

38 ale et de transformer la France en une fédération de petits États. « Aux jacobins, on agita gravement la question du fédér

39 transformer la France en une fédération de petits États . « Aux jacobins, on agita gravement la question du fédéralisme, et on

40 fureurs contre les girondins. » Thiers, Histoire de la révolution, chap. I. Pour un Français, la cause est entendue : fé

41 n Suisse, c’est Littré qui perd la face. Essayons d’ expliquer ce qui peut l’être, en cette affaire où le sens concret du b

42 niques et intéressantes, le fédéralisme est plein de contradictions, d’oppositions et de tensions. On peut même dire qu’il

43 ntes, le fédéralisme est plein de contradictions, d’ oppositions et de tensions. On peut même dire qu’il est fait de contra

44 sme est plein de contradictions, d’oppositions et de tensions. On peut même dire qu’il est fait de contradictions, mais qu

45 et de tensions. On peut même dire qu’il est fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les autres systèmes p

46 t fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les autres systèmes politiques ou philosophiques, il ne cherche

47 à les neutraliser ou à les effacer par les moyens de la logique ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les fai

48 ou à les effacer par les moyens de la logique ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les faire vivre ensemble

49 e ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les faire vivre ensemble, telles qu’elles sont. Mais parce qu’il acce

50 ons pas croire que le fédéralisme soit une espèce d’ éclectisme universel ou d’opportunisme lâche, qui tolère tout et ne s’

51 ralisme soit une espèce d’éclectisme universel ou d’ opportunisme lâche, qui tolère tout et ne s’oppose à rien. Le fédérali

52 ’uniformité imposée par un centre, qu’il s’agisse d’ une capitale ou d’un parti, d’un pouvoir clérical ou politique. Il est

53 e par un centre, qu’il s’agisse d’une capitale ou d’ un parti, d’un pouvoir clérical ou politique. Il est donc le contraire

54 tre, qu’il s’agisse d’une capitale ou d’un parti, d’ un pouvoir clérical ou politique. Il est donc le contraire absolu de t

55 cal ou politique. Il est donc le contraire absolu de tout régime totalitaire, de tout ordre géométrique simpliste, et par-

56 c le contraire absolu de tout régime totalitaire, de tout ordre géométrique simpliste, et par-là même tyrannique. (« La ty

57 ’autre part, le fédéralisme refuse avec non moins de fermeté l’esprit de clocher, les particularismes régionaux ou locaux

58 ralisme refuse avec non moins de fermeté l’esprit de clocher, les particularismes régionaux ou locaux qui prétendraient vi

59 régionales, aime aussi leur santé, qui est celle de l’ensemble. C’est pourquoi il veut leur union, leur entraide, et même

60 dans certains cas bien définis, la mise en commun de leurs ressources. Voulant donc le contraire de l’uniformité imposée p

61 un de leurs ressources. Voulant donc le contraire de l’uniformité imposée par un centre, mais aussi le contraire des parti

62 le fédéralisme représenterait-il alors une sorte de moyen terme entre ces deux extrêmes ? Point du tout ! La santé n’est

63 s un moyen terme entre la peste et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre un homme

64 e entre la peste et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt d

65 eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’

66 ve n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est pas à mi-

67 mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est pas à mi-chemin entre la c

68 in entre la centralisation oppressive et l’esprit de clocher, à mi-chemin entre la dictature et l’anarchie. Il est sur un

69 es ont en commun ! On aurait bien tort, en effet, de s’imaginer que la volonté de centralisation totale d’une nation, et l

70 bien tort, en effet, de s’imaginer que la volonté de centralisation totale d’une nation, et la volonté de la fragmenter en

71 ’imaginer que la volonté de centralisation totale d’ une nation, et la volonté de la fragmenter en petites cellules locales

72 centralisation totale d’une nation, et la volonté de la fragmenter en petites cellules locales jalousement closes, manifes

73 closes, manifestent deux tendances incompatibles de l’esprit. Car en réalité, ceux qui n’admettent aucune diversité polit

74 même état d’esprit que ceux qui n’admettent rien d’ autre que leur manière de vivre locale, définie par la majorité locale

75 eux qui n’admettent rien d’autre que leur manière de vivre locale, définie par la majorité locale, traitent tout le reste

76 ie par la majorité locale, traitent tout le reste d’ étranger, donc d’impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier

77 é locale, traitent tout le reste d’étranger, donc d’ impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier par traités avec

78 d’étranger, donc d’impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier par traités avec leurs voisins, de s’ouvrir aux

79 donc d’impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier par traités avec leurs voisins, de s’ouvrir aux échanges. Ce

80 pérer, de se lier par traités avec leurs voisins, de s’ouvrir aux échanges. Ce nationalisme local, ce chauvinisme cantonal

81 nal (on l’appelle chez nous Kantönligeist) relève de la même mentalité que le totalitarisme, à l’échelle nationale. Il tra

82 à l’échelle nationale. Il traduit le même manque d’ imagination, de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’espri

83 tionale. Il traduit le même manque d’imagination, de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’esprit et d’amour du

84 raduit le même manque d’imagination, de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’esprit et d’amour du réel. Mais l

85 magination, de vitalité, de sens des proportions, d’ ouverture d’esprit et d’amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne

86 de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’ esprit et d’amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne se borne pas

87 de sens des proportions, d’ouverture d’esprit et d’ amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne se borne pas à reconnaît

88 e borne pas à reconnaître d’une part la nécessité de l’union, d’autre part la légitimité des autonomies locales. Elle exig

89 îtrise du divers, comme tout art. Elle est un art de la composition, qui requiert à la fois et en même temps la vivacité d

90 ntrastes et leur harmonisation. Prenons l’exemple d’ une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’harmonie possible dans un ta

91 exemple d’une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’ harmonie possible dans un tableau sans contrastes de couleurs, et sans

92 harmonie possible dans un tableau sans contrastes de couleurs, et sans nuances complexes ; de même que sans une vision d’e

93 s nuances complexes ; de même que sans une vision d’ ensemble, celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurai

94 s ; de même que sans une vision d’ensemble, celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contraste

95 te, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que la simple juxtapos

96 s tons, il n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre dans leur boîte. Pour que

97 l n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre dans leur boîte. Pour que la qualit

98 dans leur boîte. Pour que la qualité particulière d’ un rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut que ce rouge soit

99 avec des verts, par exemple, dans l’unité globale d’ une œuvre au sein de laquelle s’opèrent alors mille échanges d’une inf

100 u sein de laquelle s’opèrent alors mille échanges d’ une infinie complexité. Voilà ce que j’appelle une harmonie fédéralist

101 litaire, lui, trouve plus simple et plus efficace de broyer mécaniquement toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce

102 toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce de brun, celui des chemises brunes par exemple, de sinistre mémoire. Et

103 e de brun, celui des chemises brunes par exemple, de sinistre mémoire. Et voilà toute la différence entre l’harmonie fédér

104 tous les sens du mot. Ces images, qui sont autant d’ évidences, suffisent à définir le fédéralisme, art de composer en un e

105 vidences, suffisent à définir le fédéralisme, art de composer en un ensemble animé des diversités vivantes, et fonctionnan

106 u’un seul exemple : l’impasse à laquelle risquent d’ aboutir les négociations entre la Suisse et l’Europe, représentée pour

107 cramponne à une souveraineté nationale qui a peur de se laisser englober dans un plus grand corps. Les uns sont tentés d’o

108 ber dans un plus grand corps. Les uns sont tentés d’ oublier que la santé d’un corps exige le souple jeu d’organes bien dif

109 corps. Les uns sont tentés d’oublier que la santé d’ un corps exige le souple jeu d’organes bien différenciés ; et les autr

110 blier que la santé d’un corps exige le souple jeu d’ organes bien différenciés ; et les autres sont tentés d’oublier qu’un

111 nes bien différenciés ; et les autres sont tentés d’ oublier qu’un organe bien différencié ne saurait vivre isolé du corps.

112 mps la Suisse apprenne à respecter, dans le cadre d’ une Europe fédérée, les règles que chacun de ses cantons observe dans

113 cadre d’une Europe fédérée, les règles que chacun de ses cantons observe dans le cadre de la Confédération, sinon elle tra

114 s que chacun de ses cantons observe dans le cadre de la Confédération, sinon elle trahira sa raison d’être. Mais le fédéra

115 de la Confédération, sinon elle trahira sa raison d’ être. Mais le fédéralisme n’est pas seulement un mode d’organisation p

116 . Mais le fédéralisme n’est pas seulement un mode d’ organisation politique, le seul « régime de coexistence » digne du nom

117 n mode d’organisation politique, le seul « régime de coexistence » digne du nom. C’est aussi, et c’est même avant tout, un

118 ’est aussi, et c’est même avant tout, une méthode de composition des valeurs diversifiées, — et voilà, me semble-t-il, du

119 le-t-il, du même coup, une assez bonne définition de la culture ! ⁂ Pour qu’il y ait culture en général — au sens occident

120 e —, il faut une variété aussi riche que possible de créations humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d

121 e possible de créations humaines, un foisonnement d’ œuvres, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de

122 de créations humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines

123 s humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles,

124 , un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d’ expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et

125 s, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui

126 , de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes c

127 expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’ écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes ces œuvres vari

128 mmune mesure ; sans quoi, nous ne saurions parler d’ une culture, cohérente et vivante, de la culture. Il faut donc à la fo

129 rions parler d’une culture, cohérente et vivante, de la culture. Il faut donc à la fois l’Un et le Divers, une très riche

130 une très riche diversité se détachant sur un fond d’ unité essentielle. Quelle est donc, pour nous autres Suisses, l’unité

131 uelle est donc, pour nous autres Suisses, l’unité de base, d’origine et de but, à laquelle nous nous référons implicitemen

132 donc, pour nous autres Suisses, l’unité de base, d’ origine et de but, à laquelle nous nous référons implicitement dans to

133 ous autres Suisses, l’unité de base, d’origine et de but, à laquelle nous nous référons implicitement dans toutes nos œuvr

134 nous qui n’avons pas eu la chance, ou le malheur, d’ avoir une soi-disant « culture nationale », intermédiaire entre l’Euro

135 oit vrai, il faudrait tout d’abord que le concept de « culture nationale » corresponde à des réalités culturelles. Or il n

136 L’idée qu’il y aurait en Europe un certain nombre de « cultures nationales » bien distinctes et autonomes dont l’addition

137 ulture européenne est une pure et simple illusion d’ optique scolaire. Elle se dissipe comme brume au soleil à la lumière d

138 as, n’a jamais été et ne sera jamais une addition de « cultures nationales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui o

139 tion de « cultures nationales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui ont pensé et créé depuis 28 siècles, indépenda

140 urope, et dont la plupart n’ont même pas cent ans d’ existence : il faut bien admettre que la culture s’était constituée av

141 les ! Je me contenterai, pour illustrer ce point, d’ un seul exemple : celui de la musique, élément important et typiquemen

142 our illustrer ce point, d’un seul exemple : celui de la musique, élément important et typiquement européen de notre cultur

143 usique, élément important et typiquement européen de notre culture. Dans ses grandes lignes, voici l’évolution de la musiq

144 lture. Dans ses grandes lignes, voici l’évolution de la musique en Europe : elle naît et se constitue entre les xiie et x

145 les xiie et xive siècles dans un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, pu

146 s un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, puis en Île-de-France. Des cités

147 cités flamandes, le long du grand axe commercial de la Renaissance, reliant Venise à Bruges. Une nouvelle école s’épanoui

148 ogne, et redescend vers l’Italie qu’elle enrichit de ses nombreuses découvertes. Plus tard, les Allemands (comme Schütz) v

149 italiens. Bach copie avec application des œuvres de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européen

150 des œuvres de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européenne se déplace vers les régions germaniq

151 de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européenne se déplace vers les régions germaniques, Hanovr

152 s maîtres allemands que les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xx

153 emands que les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xxe siècle, pl

154 le, en imposant leurs œuvres à Paris… L’évolution de la peinture suit à peu de choses près les mêmes voies. Or ces voies,

155 sent avec une glorieuse indifférence des dizaines de nos frontières nationales actuelles. Elles relient des cités, des foy

156 es actuelles. Elles relient des cités, des foyers de création, des maîtres, et non pas des nations. Ce que l’on nomme parf

157 me parfois, pendant la Renaissance, la « nation » d’ un musicien ou d’un peintre, c’est simplement l’école locale dans laqu

158 nt la Renaissance, la « nation » d’un musicien ou d’ un peintre, c’est simplement l’école locale dans laquelle il s’est for

159 ment l’école locale dans laquelle il s’est formé. D’ où vient alors cette illusion d’optique dont je parlais, cette croyanc

160 e il s’est formé. D’où vient alors cette illusion d’ optique dont je parlais, cette croyance si rarement mise en doute depu

161 en doute depuis un siècle environ, en l’existence de « cultures nationales » ? C’est avant tout le fait de la langue qui l

162  cultures nationales » ? C’est avant tout le fait de la langue qui l’entretient. Quand on dit que les Suisses romands se r

163 française. Mais celle-ci n’est pas une propriété de la nation française actuelle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut im

164 été de la nation française actuelle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut imposée que par un décret de François Ier, en 15

165 de laquelle elle ne fut imposée que par un décret de François Ier, en 1543. On parle encore dans la France d’aujourd’hui s

166 çois Ier, en 1543. On parle encore dans la France d’ aujourd’hui sept ou huit langues différentes : l’allemand, le flamand,

167 « culture nationale » étant la langue maternelle de populations qui vivent dans sept ou huit nations différentes. Il faut

168 à coïncider approximativement avec les frontières d’ une de nos nations modernes. Mais il y a plus. La langue ne saurait à

169 cider approximativement avec les frontières d’une de nos nations modernes. Mais il y a plus. La langue ne saurait à elle s

170 une culture : elle n’est guère qu’un des éléments de la culture en général, si essentiel soit-il. Tous les autres éléments

171 nt indépendants des langues modernes, et ne sont, de toute évidence, pas réductibles à des cadres nationaux. « Qu’as-tu qu

172 ons qui ont découpé et longtemps déchiré le corps de notre continent. ⁂ Or il se trouve que les Suisses sont, ou devraient

173 ou devraient être, préservés mieux que les autres de l’illusion des « cultures nationales », fût-ce du seul fait de la com

174 des « cultures nationales », fût-ce du seul fait de la composition linguistique si variée de leur État. Nous sommes en me

175 eul fait de la composition linguistique si variée de leur État. Nous sommes en mesure de savoir mieux que les autres que l

176 de la composition linguistique si variée de leur État . Nous sommes en mesure de savoir mieux que les autres que la vie cult

177 que si variée de leur État. Nous sommes en mesure de savoir mieux que les autres que la vie culturelle de nos régions et d

178 savoir mieux que les autres que la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réalités nationales, mai

179 es autres que la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réalités nationales, mais se rattache dire

180 elle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réalités nationales, mais se rattache directement à l’ensemble cultur

181 », Reichs unmittelbar, et c’était là une garantie de liberté contre les princes de l’époque, — nous dirions aujourd’hui :

182 ait là une garantie de liberté contre les princes de l’époque, — nous dirions aujourd’hui : contre les États-nations. La v

183 ui : contre les États-nations. La véritable unité de base étant de la sorte identifiée, la question qui se pose est de sav

184 s États-nations. La véritable unité de base étant de la sorte identifiée, la question qui se pose est de savoir comment ce

185 la sorte identifiée, la question qui se pose est de savoir comment certaines cités ou certaines régions parviennent alors

186 le, se différencient des Français, ou en tout cas de l’image convenue que l’École nous donne depuis cent ans de la « cultu

187 e convenue que l’École nous donne depuis cent ans de la « culture française », bien que nous parlions à peu près la même l

188 la culture, dans nos cantons, n’est pas liée à l’ État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’État. 2° la culture vit

189 ’est pas liée à l’État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’État. 2° la culture vit chez nous dans de petits compa

190 à l’État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’État. 2° la culture vit chez nous dans de petits compartiments natu

191 État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’ État . 2° la culture vit chez nous dans de petits compartiments naturels ou

192 sance de l’État. 2° la culture vit chez nous dans de petits compartiments naturels ou historiques, qui n’ont jamais été un

193 t le cas des provinces françaises. 3° nous sommes de vieilles républiques — même Neuchâtel, en dépit de ses princes — fond

194 érémonies, à moins que son adoption n’ait résulté de notre tempérament particulier, mais cela revient au même. 5° nous ne

195 n’en ont conscience ou ne voudraient l’admettre. D’ où résulte qu’un Suisse romand — et tout ce que je viens d’en dire vau

196 lte qu’un Suisse romand — et tout ce que je viens d’ en dire vaut aussi, mutatis mutandis, pour le Suisse alémanique par ra

197 sse alémanique par rapport à l’Allemagne — dépend de plusieurs entités indépendantes et d’ordres divers, les unes plus pet

198 ne — dépend de plusieurs entités indépendantes et d’ ordres divers, les unes plus petites que la Suisse et les autres beauc

199 français, et par sa culture, aux sources variées de l’Europe antique, médiévale et moderne. Autant de réalités ou d’entit

200 de l’Europe antique, médiévale et moderne. Autant de réalités ou d’entités qui n’ont pas les mêmes frontières, qui ne se c

201 ique, médiévale et moderne. Autant de réalités ou d’ entités qui n’ont pas les mêmes frontières, qui ne se couvrent que trè

202 partiellement, et qui permettent un grand nombre de combinaisons originales. On ne saurait être moins conforme aux devise

203 On ne saurait être moins conforme aux devises des États totalitaires (« Une Foi, une Loi, un Roi » sous Louis XIV. « Ein Volk

204 rer » sous Hitler). On ne saurait être plus libre de se choisir, j’entends de se faire homme à sa manière, et non point à

205 saurait être plus libre de se choisir, j’entends de se faire homme à sa manière, et non point à celle de l’État. D’où la

206 e plus libre de se choisir, j’entends de se faire homme à sa manière, et non point à celle de l’État. D’où la densité culture

207 se faire homme à sa manière, et non point à celle de l’État. D’où la densité culturelle de ce petit coin de pays, — éducat

208 ire homme à sa manière, et non point à celle de l’ État . D’où la densité culturelle de ce petit coin de pays, — éducation, le

209 mme à sa manière, et non point à celle de l’État. D’ où la densité culturelle de ce petit coin de pays, — éducation, lettre

210 int à celle de l’État. D’où la densité culturelle de ce petit coin de pays, — éducation, lettres et arts, sciences et tech

211 État. D’où la densité culturelle de ce petit coin de pays, — éducation, lettres et arts, sciences et techniques. Densité s

212 niques. Densité sans nul doute supérieure à celle d’ une tranche quelconque d’un million et demi d’habitants, prise au hasa

213 doute supérieure à celle d’une tranche quelconque d’ un million et demi d’habitants, prise au hasard dans l’une des grandes

214 lle d’une tranche quelconque d’un million et demi d’ habitants, prise au hasard dans l’une des grandes nations voisines. Qu

215 nes. Qu’on m’entende bien : ce n’est pas un éloge de la petitesse en soi que je fais ici, ni des petites dimensions matéri

216 is au contraire de la pluralité des dimensions et de la variété des allégeances possibles, les unes locales ou régionales,

217  telles que le fédéralisme les implique et permet de les composer. Et il est vrai que ce régime peut conduire moralement

218 la médiocrité dorée, politiquement au neutralisme de l’autruche, et dans le domaine culturel, à préférer les moyennes rass

219 nes rassurantes aux œuvres fortes. Offrant un jeu de petites et de grandes dimensions à composer diversement, il satisfait

220 s aux œuvres fortes. Offrant un jeu de petites et de grandes dimensions à composer diversement, il satisfait trop facileme

221 ait trop facilement, dit-on, ceux qui choisissent de s’installer dans les petites. Mais la plupart des hommes veulent, et

222 s’installer dans les petites. Mais la plupart des hommes veulent, et méritent sans doute, la sécurité avant tout. Ce phénomène

223 moyens trouvent-ils dans les structures fédérales de leur pays une protection plus efficace de leur vie culturelle et civi

224 dérales de leur pays une protection plus efficace de leur vie culturelle et civique, comme de leur paix. On voit mal ce qu

225 efficace de leur vie culturelle et civique, comme de leur paix. On voit mal ce qu’ils gagneraient à échanger cette paix —

226 aix — que l’on jalouse un peu tout en la couvrant de sarcasmes — contre les régimes prestigieux, épris de grandeur et d’id

227 sarcasmes — contre les régimes prestigieux, épris de grandeur et d’idéologies, et qui aboutissent périodiquement à faire t

228 tre les régimes prestigieux, épris de grandeur et d’ idéologies, et qui aboutissent périodiquement à faire tuer quelques mi

229 ent périodiquement à faire tuer quelques millions d’ hommes au nom de principes réputés immortels, mais que les générations

230 t périodiquement à faire tuer quelques millions d’ hommes au nom de principes réputés immortels, mais que les générations suiva

231 qu’un régime fédéraliste et pluraliste leur ouvre de belles perspectives : qu’ils y entrent et qu’ils les explorent, ils s

232 eux, sans avoir à renier leur clocher. Définition de la liberté fédéraliste. Nos meilleurs auteurs (pour ne prendre que ce

233 isqu’il est lié à la langue, laquelle ne pose pas de problèmes pour le savant, l’architecte ou le musicien) ont été nos me

234 ousseau, Constant, Mme de Staël dans le passé, et de nos jours, Robert de Traz, Charles-Albert Cingria, Gonzague de Reynol

235 pas hésité à puiser aux sources les plus variées de la culture européenne, germanique et anglo-saxonne autant que françai

236 ans s’arrêter à ces barrages ou à ces faux relais de paresse que représentent ailleurs les cultures soi-disant « nationale

237 l’on reconnaît le plus vite leur commun caractère de Suisses romands, si profondes qu’aient été leurs différences de doctr

238 ands, si profondes qu’aient été leurs différences de doctrine, d’esthétique ou de tempérament ? Certains citeront alors C.

239 ondes qu’aient été leurs différences de doctrine, d’ esthétique ou de tempérament ? Certains citeront alors C. F. Ramuz, à

240 té leurs différences de doctrine, d’esthétique ou de tempérament ? Certains citeront alors C. F. Ramuz, à titre d’argument

241 nt ? Certains citeront alors C. F. Ramuz, à titre d’ argument massue contre ma thèse. Est-il besoin de rappeler que ce gran

242 d’argument massue contre ma thèse. Est-il besoin de rappeler que ce grand artiste s’est formé à l’école de Paris, mais au

243 ppeler que ce grand artiste s’est formé à l’école de Paris, mais aussi à l’école de Cézanne, puis des romanciers russes, e

244 st formé à l’école de Paris, mais aussi à l’école de Cézanne, puis des romanciers russes, enfin de Goethe ? Il se voulait

245 ole de Cézanne, puis des romanciers russes, enfin de Goethe ? Il se voulait un pur Vaudois, séparatiste (car c’était là le

246 is, séparatiste (car c’était là le véritable sens de son fédéralisme étroit). Cette erreur l’a peut-être soutenu, en tant

247 e il arrive ; elle n’en fut pas moins responsable de certaines limitations de son œuvre. Mais la littérature n’est plus,

248 ut pas moins responsable de certaines limitations de son œuvre. Mais la littérature n’est plus, de nos jours, cette espèc

249 ns de son œuvre. Mais la littérature n’est plus, de nos jours, cette espèce de critère privilégié du niveau de culture d’

250 ittérature n’est plus, de nos jours, cette espèce de critère privilégié du niveau de culture d’un peuple, qu’elle fut au t

251 urs, cette espèce de critère privilégié du niveau de culture d’un peuple, qu’elle fut au temps de l’Europe classique puis

252 espèce de critère privilégié du niveau de culture d’ un peuple, qu’elle fut au temps de l’Europe classique puis romantique.

253 obel » peut nous l’apprendre : il donne le nombre de prix Nobel par million d’habitants d’un pays, de 1901 à 1960. Voici u

254 re : il donne le nombre de prix Nobel par million d’ habitants d’un pays, de 1901 à 1960. Voici un extrait du tableau1 :

255 e le nombre de prix Nobel par million d’habitants d’ un pays, de 1901 à 1960. Voici un extrait du tableau1 : 1. Suis

256 de prix Nobel par million d’habitants d’un pays, de 1901 à 1960. Voici un extrait du tableau1 : 1. Suisse 2,62 7.

257 gne 0,71 19. Russie et URSS 0,03 À la question de savoir ce que les Suisses peuvent apporter de meilleur à la culture,

258 ion de savoir ce que les Suisses peuvent apporter de meilleur à la culture, je réponds donc sans hésiter que c’est surtout

259 ard Euler ou Ferdinand de Saussure, mais beaucoup d’ excellents ou même de grands esprits qui avaient ce sens, trop rare ch

260 d de Saussure, mais beaucoup d’excellents ou même de grands esprits qui avaient ce sens, trop rare chez nos voisins. Cet a

261 e revêt une importance particulière dans le monde de cette deuxième moitié du xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’app

262 u xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’apport de l’Europe au tiers-monde, tout enfiévré par les virus nationalistes qu

263 uisse, aujourd’hui, se confond donc avec l’apport d’ une Europe rajeunie, découvrant le fédéralisme, sa morale et sa philos

264 phie, et surtout ses recettes pratiques, — celles de la paix. 1. Léo Moulin, La Nationalité des prix Nobel de sciences d

265 x. 1. Léo Moulin, La Nationalité des prix Nobel de sciences de 1901 à 1960, Cahiers internationaux de sociologie, Paris,

266 Moulin, La Nationalité des prix Nobel de sciences de 1901 à 1960, Cahiers internationaux de sociologie, Paris, 1961. a.

267 e sciences de 1901 à 1960, Cahiers internationaux de sociologie, Paris, 1961. a. Rougemont Denis de, « Le fédéralisme su

268 de sociologie, Paris, 1961. a. Rougemont Denis de , « Le fédéralisme suisse », La Suisse face à l’avenir : interrogation

269 isse », La Suisse face à l’avenir : interrogation d’ un petit pays, Berne, Nouvelle Société helvétique, 1963, p. 66-75.

270 Aspects fédéralistes dans les plans et projets d’ union européenne du Moyen Âge à nos jours (1963)j k Au seuil des ac

271 e à nos jours (1963)j k Au seuil des activités d’ enseignement que cet Institut commence aujourd’hui, après une longue p

272 ut commence aujourd’hui, après une longue période de recherches, d’expériences pratiques et de publications dans le cadre

273 ourd’hui, après une longue période de recherches, d’ expériences pratiques et de publications dans le cadre du Centre europ

274 période de recherches, d’expériences pratiques et de publications dans le cadre du Centre européen de la culture, il ne se

275 de la culture, il ne sera sans doute pas inutile de situer notre projet, d’en préciser les coordonnées, et d’exposer ensu

276 ra sans doute pas inutile de situer notre projet, d’ en préciser les coordonnées, et d’exposer ensuite le thème général de

277 r notre projet, d’en préciser les coordonnées, et d’ exposer ensuite le thème général de nos travaux pendant le semestre qu

278 oordonnées, et d’exposer ensuite le thème général de nos travaux pendant le semestre qui s’ouvre. Permettez-moi donc, avan

279 e semestre qui s’ouvre. Permettez-moi donc, avant d’ en venir à l’objet particulier de mon cours, de consacrer quelques mom

280 -moi donc, avant d’en venir à l’objet particulier de mon cours, de consacrer quelques moments à cette introduction plus gé

281 nt d’en venir à l’objet particulier de mon cours, de consacrer quelques moments à cette introduction plus générale. S’il p

282 introduction plus générale. S’il paraît opportun d’ entreprendre aujourd’hui, ou plutôt de poursuivre et d’élargir partout

283 ît opportun d’entreprendre aujourd’hui, ou plutôt de poursuivre et d’élargir partout où cela se peut, et donc aussi à Genè

284 reprendre aujourd’hui, ou plutôt de poursuivre et d’ élargir partout où cela se peut, et donc aussi à Genève, des études eu

285 s études européennes, c’est parce que la question de l’union de l’Europe se trouve posée à cette génération, et parce qu’e

286 ropéennes, c’est parce que la question de l’union de l’Europe se trouve posée à cette génération, et parce qu’elle met en

287 e que des intérêts matériels. Il serait donc vain de se dissimuler que l’une des raisons d’être de cet Institut, sans dout

288 donc vain de se dissimuler que l’une des raisons d’ être de cet Institut, sans doute la principale, tient à la conjoncture

289 ain de se dissimuler que l’une des raisons d’être de cet Institut, sans doute la principale, tient à la conjoncture présen

290 ient à la conjoncture présente, aux circonstances de notre temps. Ce fait détermine le caractère particulier de notre Inst

291 temps. Ce fait détermine le caractère particulier de notre Institut, comme d’ailleurs des quelque vingt-cinq autres instit

292 ’ailleurs des quelque vingt-cinq autres instituts d’ études européennes qui sont à l’œuvre, depuis plusieurs années, dans d

293 ntinent. Très près de l’actualité, en raison même de leur objet, qui se compose, se définit et se modifie sous nos yeux, c

294 Elle n’appartient pas à un passé qu’il suffirait de décrire et d’interpréter, mais à un avenir auquel nous sommes tous vi

295 ient pas à un passé qu’il suffirait de décrire et d’ interpréter, mais à un avenir auquel nous sommes tous vitalement intér

296 ommes tous vitalement intéressés, et qu’il s’agit de préparer. Elle est moins un acquis à transmettre qu’un problème à rés

297 premier chef, elle implique en réalité, quantité de problèmes moraux, juridiques, historiques, philosophiques, dont il fa

298 ut bien reconnaître que beaucoup attendent encore d’ être étudiés objectivement, un à un, et aussi d’être envisagés dans l’

299 e d’être étudiés objectivement, un à un, et aussi d’ être envisagés dans l’ensemble de leurs interconnections et par rappor

300 n à un, et aussi d’être envisagés dans l’ensemble de leurs interconnections et par rapport à ces notions de l’homme qui on

301 urs interconnections et par rapport à ces notions de l’homme qui ont fait que l’Europe, malgré tout, représente autre chos

302 nterconnections et par rapport à ces notions de l’ homme qui ont fait que l’Europe, malgré tout, représente autre chose et un

303 physique, qui est à peine 4 % des terres émergées de la planète. Cette question européenne constituant l’objet central de

304 e question européenne constituant l’objet central de notre enseignement et de nos recherches, il importe de rappeler tout

305 stituant l’objet central de notre enseignement et de nos recherches, il importe de rappeler tout d’abord à grands traits d

306 tre enseignement et de nos recherches, il importe de rappeler tout d’abord à grands traits dans quels termes elle se pose,

307 mes elle se pose, et qui l’a posée. Le monde issu de la Seconde Guerre mondiale a vu surgir, en lieu et place de la prépon

308 sunis et rivaux, une constellation toute nouvelle de grands ensembles fortement unifiés, comme les États-Unis, la Russie e

309 ’Inde et l’Insulinde, tandis que d’autres groupes de nations récentes et plus instables, sont à la recherche de quelque un

310 s récentes et plus instables, sont à la recherche de quelque union encore mal définie, mais qui a déjà force de mythe, en

311 e union encore mal définie, mais qui a déjà force de mythe, en Afrique noire et dans le monde arabe. La tendance générale

312 945 à 1950 va donc aux grandes unités politiques, de 200 à 600 millions d’hommes. Dans un tel monde, quel peut être l’aven

313 grandes unités politiques, de 200 à 600 millions d’ hommes. Dans un tel monde, quel peut être l’avenir des États de l’Euro

314 randes unités politiques, de 200 à 600 millions d’ hommes . Dans un tel monde, quel peut être l’avenir des États de l’Europe, pe

315 etits et moyens désormais — c’est-à-dire comptant de 3 à 50 millions d’habitants ? Aucun ne paraît en mesure de se relever

316 ormais — c’est-à-dire comptant de 3 à 50 millions d’ habitants ? Aucun ne paraît en mesure de se relever de ses ruines sans

317 millions d’habitants ? Aucun ne paraît en mesure de se relever de ses ruines sans aide extérieure ; ni d’assurer à lui se

318 bitants ? Aucun ne paraît en mesure de se relever de ses ruines sans aide extérieure ; ni d’assurer à lui seul sa défense

319 e relever de ses ruines sans aide extérieure ; ni d’ assurer à lui seul sa défense et sa prospérité économique ; ni de pour

320 seul sa défense et sa prospérité économique ; ni de poursuivre une politique étrangère autonome. Que deviennent, dans ces

321 ère autonome. Que deviennent, dans ces conditions de fait, leur souveraineté et même leur indépendance, au sens classique

322 neté et même leur indépendance, au sens classique de ces expressions ? Aucun de nos pays n’est en mesure, non plus, de par

323 nce, au sens classique de ces expressions ? Aucun de nos pays n’est en mesure, non plus, de parler au nom de l’Europe. Qui

324 ns ? Aucun de nos pays n’est en mesure, non plus, de parler au nom de l’Europe. Qui pourrait assumer, dans ces conditions,

325 us-développés, ou l’intervention effective en cas de crise internationale, ou en cas d’agression contre un pays isolé ? Qu

326 fective en cas de crise internationale, ou en cas d’ agression contre un pays isolé ? Que peut encore signifier l’expressio

327 signifier l’expression Europe, sinon un ensemble de pays qui vivent, comme le dit alors P.-H. Spaak, « dans la peur des R

328 t alors P.-H. Spaak, « dans la peur des Russes et de la charité des Américains » ? C’est à ce moment que naît, ou renaît e

329 oment que naît, ou renaît en Europe le vieux rêve d’ union du Continent. Et cela commence, comme toujours, par des manifest

330 cela commence, comme toujours, par des manifestes d’ intellectuels, des écrits de visionnaires, des groupuscules de militan

331 s, par des manifestes d’intellectuels, des écrits de visionnaires, des groupuscules de militants — pour la plupart issus d

332 els, des écrits de visionnaires, des groupuscules de militants — pour la plupart issus de la résistance à l’hitlérisme, mê

333 groupuscules de militants — pour la plupart issus de la résistance à l’hitlérisme, même en Allemagne et en Italie — et qui

334 listes et le Mouvement européen. Les économistes, de leur côté, supputent et calculent l’avenir immédiat. Le professeur Ma

335 . Le professeur Maurice Allais déclare au congrès de La Haye, en 1948, qu’une Europe unie serait en mesure de doubler sa p

336 aye, en 1948, qu’une Europe unie serait en mesure de doubler sa production et son niveau de vie. Jean Monnet et son équipe

337 en silence, loin des congrès et des associations de militants qui leur ont préparé la voie dans les esprits. Puis des hom

338 ur ont préparé la voie dans les esprits. Puis des hommes politiques se proposent pour diriger ce mouvement naissant, qui a peu

339 er ce mouvement naissant, qui a peut-être le vent de l’histoire en poupe. Ils ne sont pas nombreux d’abord, ils ne sont pa

340 x d’abord, ils ne sont pas suivis par la majorité de leurs collègues. Mais ce sont, notons-le, les plus illustres de l’épo

341 gues. Mais ce sont, notons-le, les plus illustres de l’époque : Churchill, De Gasperi, Léon Blum, Paul Reynaud, Robert Sch

342 s-le, les plus illustres de l’époque : Churchill, De Gasperi, Léon Blum, Paul Reynaud, Robert Schuman, Adenauer, Paul-Henr

343 ais en fait dans le même sens final qui est celui d’ une Europe autonome rendue forte par son union, de Gaulle lui-même. Le

344 dès 1953, Marché commun et Euratom dès 1959. Les États , les services ministériels et les parlements ne se croient pas encore

345 s parlements ne se croient pas encore en mesure «  d’ aller plus loin ». Mais dans notre civilisation moderne, une transform

346 vilisation moderne, une transformation économique de quelque envergure ne saurait être limitée au domaine purement économi

347 it naguère. D’une part, le social est inséparable de l’économique, d’autre part, l’économie commande les armements, surtou

348 onc aussi étroitement qu’elle dépend par ailleurs de l’opinion, des idéologies nationales et des doctrines. Créer une unio

349 virtuellement modifier les conditions politiques de toute l’Europe. Le problème de l’union politique se trouve donc posé,

350 ditions politiques de toute l’Europe. Le problème de l’union politique se trouve donc posé, inéluctablement, à tous nos pa

351 in sur le plan politique. Mais il serait excessif de dire qu’elle y débouche en pleine clarté. Au contraire, c’est à ce ni

352 ès et les déclarations des hommes d’État témoigne de la plus grande confusion. Si l’on examine son vocabulaire, on s’aperç

353 il utilise à peu près au petit bonheur les termes d’ union et d’unification, d’intégration et de fédération, d’union « plus

354 à peu près au petit bonheur les termes d’union et d’ unification, d’intégration et de fédération, d’union « plus étroite »

355 etit bonheur les termes d’union et d’unification, d’ intégration et de fédération, d’union « plus étroite » (plus étroite q

356 termes d’union et d’unification, d’intégration et de fédération, d’union « plus étroite » (plus étroite que quoi, on ne le

357 et d’unification, d’intégration et de fédération, d’ union « plus étroite » (plus étroite que quoi, on ne le dit pas) et de

358 te » (plus étroite que quoi, on ne le dit pas) et de communauté, de supranationalité et de super-État, ou encore d’États-U

359 ite que quoi, on ne le dit pas) et de communauté, de supranationalité et de super-État, ou encore d’États-Unis d’Europe, c

360 dit pas) et de communauté, de supranationalité et de super-État, ou encore d’États-Unis d’Europe, comme si ces termes étai

361 , de supranationalité et de super-État, ou encore d’ États-Unis d’Europe, comme si ces termes étaient, à toutes fins utiles

362 s fins utiles et grosso modo, synonymes. Cet état de confusion générale et d’aimable anarchie sémantique, traduit non seul

363 odo, synonymes. Cet état de confusion générale et d’ aimable anarchie sémantique, traduit non seulement l’ignorance courant

364 nce courante des problèmes ou l’inévitable manque d’ information de l’opinion, mais peut-être surtout, et c’est plus grave,

365 es problèmes ou l’inévitable manque d’information de l’opinion, mais peut-être surtout, et c’est plus grave, l’absence d’u

366 peut-être surtout, et c’est plus grave, l’absence d’ une vision claire et convaincante des solutions proprement politiques,

367 ain à la question européenne. En vue de cerner et de choisir au mieux l’objet de nos études dans un champ aussi vaste, ess

368 . En vue de cerner et de choisir au mieux l’objet de nos études dans un champ aussi vaste, essayons donc de définir les qu

369 s études dans un champ aussi vaste, essayons donc de définir les quelques types principaux de solutions théoriquement imag

370 ons donc de définir les quelques types principaux de solutions théoriquement imaginables ou pratiquement en question de no

371 riquement imaginables ou pratiquement en question de nos jours. Je n’en vois guère que trois, qui se distinguent nettement

372 inguent nettement par le rôle qu’y joueraient nos États . On peut concevoir idéalement une Europe unitaire, unifiée sur le mod

373 sur le modèle élargi aux dimensions continentales de nos États-nations centralisés, dont l’exemple typique est la France.

374 typique est la France. Dans une telle Europe, nos États actuels ne joueraient plus qu’un rôle comparable à celui des dépar­te

375 le défendue par personne, et n’offre pas un champ d’ études utiles, car chacun voit que l’unification de l’Europe, à suppos

376 ’études utiles, car chacun voit que l’unification de l’Europe, à supposer qu’elle soit praticable, ne serait conforme ni a

377 ètes du problème à résoudre. Il importe toutefois de la mentionner, ne fût-ce qu’à titre de limite, de conséquence extrême

378 de la mentionner, ne fût-ce qu’à titre de limite, de conséquence extrême, inaccessible, qui marquerait le triomphe exclusi

379 inaccessible, qui marquerait le triomphe exclusif d’ une seule des tendances contradictoires qui composent l’esprit europée

380 ux dire la tendance à l’unité abstraite, l’esprit de géométrie d’un planificateur supposé capable de modeler à son gré la

381 ndance à l’unité abstraite, l’esprit de géométrie d’ un planificateur supposé capable de modeler à son gré la société. Dans

382 t de géométrie d’un planificateur supposé capable de modeler à son gré la société. Dans les discussions sur la question eu

383 oue un rôle non négligeable, fût-ce au seul titre de repoussoir, disons même d’épouvantail. À l’autre extrême, on peut con

384 , fût-ce au seul titre de repoussoir, disons même d’ épouvantail. À l’autre extrême, on peut concevoir une Europe qui ne se

385 Europe qui ne serait organisée que par un système d’ alliances entre États souverains. C’est, de fait, la solution préconis

386 it organisée que par un système d’alliances entre États souverains. C’est, de fait, la solution préconisée par les tenants de

387 ystème d’alliances entre États souverains. C’est, de fait, la solution préconisée par les tenants de « l’Europe des patrie

388 , de fait, la solution préconisée par les tenants de « l’Europe des patries », belle expression hélas impropre en l’occurr

389 général de Gaulle lui-même (conférence de presse de mai 1962), elle ne désigne en réalité qu’une Europe des États. Dans u

390 62), elle ne désigne en réalité qu’une Europe des États . Dans une telle Europe, nos États-nations actuels resteraient pleinem

391 nces mêmes. Cette solution pose un certain nombre de problèmes qui pourraient et devraient faire l’objet de recherches, do

392 oblèmes qui pourraient et devraient faire l’objet de recherches, dont je suggère seulement quelques têtes de chapitre. On

393 herches, dont je suggère seulement quelques têtes de chapitre. On peut se demander d’abord si cette solution apparemment d

394 se demander d’abord si cette solution apparemment de statu quo, répond d’une manière adéquate aux nouveaux besoins d’union

395 i cette solution apparemment de statu quo, répond d’ une manière adéquate aux nouveaux besoins d’union apparus depuis 1945,

396 épond d’une manière adéquate aux nouveaux besoins d’ union apparus depuis 1945, et qui ont posé, précisément, la question e

397 D’autre part, elle se fonde sur une certaine idée de la souveraineté des États, considérés comme seule réalité tangible, o

398 onde sur une certaine idée de la souveraineté des États , considérés comme seule réalité tangible, ou par là même, elle présen

399 ? Pour répondre à cette question, il conviendrait d’ examiner, après Léon Duguit, Preuss, Lapradelle, Chabod et tant d’autr

400 s, Lapradelle, Chabod et tant d’autres, la notion de souveraineté sans limites, constituée pendant la période absolutiste,

401 tangibles, à des droits et à des devoirs que les États puissent réellement exercer, comme faire la guerre ou la paix à leur

402 « les choses étant ce qu’elles sont », la notion d’ indépendance n’a pas déjà cédé le pas, en fait plus encore qu’en droit

403 pas, en fait plus encore qu’en droit, à la notion d’ interdépendance. Mais l’objet de pareilles études risquerait d’être pa

404 roit, à la notion d’interdépendance. Mais l’objet de pareilles études risquerait d’être par trop transitoire, trop lié à u

405 ance. Mais l’objet de pareilles études risquerait d’ être par trop transitoire, trop lié à une actualité mouvante, suscepti

406 e, trop lié à une actualité mouvante, susceptible de déboucher plus ou moins rapidement sur une problématique plus vaste e

407 e solution concevable, essentiellement différente de celle de l’unification et de celle des alliances entre souverains, c’

408 n concevable, essentiellement différente de celle de l’unification et de celle des alliances entre souverains, c’est la so

409 iellement différente de celle de l’unification et de celle des alliances entre souverains, c’est la solution fédéraliste.

410 olution fédéraliste. Dans une Europe fédérée, les États ne seraient pas effacés ou dissouts, ils ne seraient pas non plus mai

411 seraient pas non plus maintenus dans une fiction de souveraineté absolue, mais ils joueraient un rôle plus ou moins analo

412 ont l’autonomie se voit assurée par la force même de leur union. La fédération garantirait leur souveraineté — dans les do

413 xerçant collectivement dans d’autres domaines où, de toute façon, elle ne peut plus guère s’exercer individuellement. Conv

414 lus guère s’exercer individuellement. Convient-il de considérer comme un quatrième type, la solution qui consisterait à ét

415 étendre au plan politique les règles et méthodes de l’intégration déjà réalisée au plan économique par le Marché commun ?

416 ? Voilà qui paraît difficile. En effet, le traité de Rome n’évoque aucune solution de cet ordre. La déclaration des chefs

417 effet, le traité de Rome n’évoque aucune solution de cet ordre. La déclaration des chefs d’État des Six, faite à Bonn le 1

418 te à Bonn le 18 juillet 1961, parle, il est vrai, de « donner forme à la volonté d’union politique déjà implicite dans les

419 arle, il est vrai, de « donner forme à la volonté d’ union politique déjà implicite dans les traités qui ont institué les C

420 pas les voies et moyens qui pourraient permettre d’ opérer un jour ou l’autre ce passage de l’économique au politique. Ni

421 permettre d’opérer un jour ou l’autre ce passage de l’économique au politique. Ni cette déclaration, ni le traité lui-mêm

422 éclaration, ni le traité lui-même, ne fournissent d’ indications sur le type de régime politique dont l’intégration économi

423 ui-même, ne fournissent d’indications sur le type de régime politique dont l’intégration économique pourrait être la préfi

424 par Georges Scelle ? On ne sait. Et cela dépendra de la prédominance finale d’un des trois types de solutions que je viens

425 sait. Et cela dépendra de la prédominance finale d’ un des trois types de solutions que je viens de caractériser très briè

426 ra de la prédominance finale d’un des trois types de solutions que je viens de caractériser très brièvement. Mais rien ne

427 à pratiqué quasi journellement dans les processus de décision des Communautés économiques, serait celle des trois solution

428 ait celle des trois solutions qui aurait le moins de chances dans cette compétition. ⁂ Les raisons qui nous ont fait reten

429 tenir la solution fédéraliste comme thème central de nos études, au cours de ce premier semestre tout au moins, sont de na

430 cours de ce premier semestre tout au moins, sont de nature assez diverse. Raisons générales, d’abord. La solution fédéral

431 solution fédéraliste paraît la mieux susceptible de répondre à la fois aux besoins nouveaux d’union, et aux besoins tradi

432 ptible de répondre à la fois aux besoins nouveaux d’ union, et aux besoins traditionnels d’autonomie de nos peuples, besoin

433 ns nouveaux d’union, et aux besoins traditionnels d’ autonomie de nos peuples, besoins qui semblent contradictoires, mais q

434 d’union, et aux besoins traditionnels d’autonomie de nos peuples, besoins qui semblent contradictoires, mais qui sont là,

435 faire converger un jour ou l’autre les partisans de l’Europe des États et ceux des États-Unis d’Europe, ceux qui insisten

436 un jour ou l’autre les partisans de l’Europe des États et ceux des États-Unis d’Europe, ceux qui insistent avant tout sur l’

437 pe, ceux qui insistent avant tout sur l’autonomie de leur pays, et ceux qui insistent avant tout sur l’unité du continent.

438 te est évidemment la plus conforme à l’expérience de la vie politique et civique du pays où nous sommes, et dont je suis,

439 souvent appelé, à tort ou à raison, une préfigure de l’Europe unie. Enfin, raisons immédiates et personnelles. Il se trouv

440 ient nos tempéraments, nos origines et nos champs d’ intérêts particuliers, avons tous les trois été amenés par nos précéde

441 ujet, bien sûr, mais qui permettent tout au moins de l’approcher de manières variées, avec les moyens du bord, dans un esp

442 mais qui permettent tout au moins de l’approcher de manières variées, avec les moyens du bord, dans un esprit commun. Or

443 monie préétablie entre le fédéralisme comme objet d’ études et la méthode interdisciplinaire qui s’impose à nous. Car le fé

444 octrine toute faite, un dogme auquel il s’agirait de plier les réalités, mais une méthode générale d’aménagement des chose

445 de plier les réalités, mais une méthode générale d’ aménagement des choses humaines, méthode d’allure pragmatique qui ne s

446 nérale d’aménagement des choses humaines, méthode d’ allure pragmatique qui ne se comprend et ne s’explique bien que par so

447 insi que M. Henri Schwamm, en économiste qui suit de très près l’évolution et les répercussions de l’intégration, abordera

448 uit de très près l’évolution et les répercussions de l’intégration, abordera le problème de la manière la plus concrète pa

449 ercussions de l’intégration, abordera le problème de la manière la plus concrète par une comparaison des marchés avant et

450 l’AELE, etc. Il étudiera donc des exemples précis d’ évolution des structures du stade national aux divers stades d’une int

451 es structures du stade national aux divers stades d’ une intégration progressive à l’échelle européenne. Problème préfédéra

452 usement, mais préalable nécessaire, et d’ailleurs d’ intérêt suffisant en soi. M. Dusan Sidjanski de son côté, décrira les

453 rs d’intérêt suffisant en soi. M. Dusan Sidjanski de son côté, décrira les structures institutionnelles dans lesquelles et

454 rapprocher des formes fédéralistes. Il rejoindra de la sorte les études de méthode et d’évaluation des tendances politiqu

455 fédéralistes. Il rejoindra de la sorte les études de méthode et d’évaluation des tendances politiques vers l’intégration,

456 Il rejoindra de la sorte les études de méthode et d’ évaluation des tendances politiques vers l’intégration, réunies dans l

457 u’il publie ces jours-ci : Dimensions européennes de la science politique. Enfin, je me propose, pour ma part, d’aborder l

458 ce politique. Enfin, je me propose, pour ma part, d’ aborder le problème sur le plan de l’histoire des idées, en traitant d

459 , pour ma part, d’aborder le problème sur le plan de l’histoire des idées, en traitant des aspects fédéralistes dans les p

460 es aspects fédéralistes dans les projets et plans d’ union européenne, du Moyen Âge à nos jours. Parallèlement aux cours e

461 os jours. Parallèlement aux cours et aux travaux de séminaire, nous avons convoqué un groupe d’une vingtaine de juristes,

462 avaux de séminaire, nous avons convoqué un groupe d’ une vingtaine de juristes, philosophes, historiens, économistes, théor

463 re, nous avons convoqué un groupe d’une vingtaine de juristes, philosophes, historiens, économistes, théoriciens et pratic

464 istoriens, économistes, théoriciens et praticiens de l’intégration, pour étudier les perspectives d’une solution fédéralis

465 s de l’intégration, pour étudier les perspectives d’ une solution fédéraliste de la question européenne. Le groupe doit se

466 udier les perspectives d’une solution fédéraliste de la question européenne. Le groupe doit se réunir pour la première foi

467 e des travaux intéressants, auront la possibilité d’ y participer. Voilà donc le programme initial de notre petit Institut.

468 é d’y participer. Voilà donc le programme initial de notre petit Institut. Moyens modestes, longues visées, tâche qui dépa

469 ent nos forces actuelles mais qu’il semble urgent d’ entreprendre là où on le peut, dans l’esprit du proverbe chinois qui d

470 t : « Mieux vaut allumer une petite chandelle que de maudire l’obscurité ! » ⁂ Ces quelques propos d’introduction générale

471 de maudire l’obscurité ! » ⁂ Ces quelques propos d’ introduction générale ne me laissent pas beaucoup de temps pour introd

472 oup de temps pour introduire le sujet particulier de mon cours, mais je souhaite qu’ils aient permis déjà d’en pressentir

473 cours, mais je souhaite qu’ils aient permis déjà d’ en pressentir les intentions. Il pourrait sembler logique de commencer

474 entir les intentions. Il pourrait sembler logique de commencer par définir le fédéralisme avant d’en étudier les exemples,

475 que de commencer par définir le fédéralisme avant d’ en étudier les exemples, soit dans l’expression, soit dans l’applicati

476 que l’on puisse déduire dans l’abstrait à partir d’ une définition simple et de quelques principes axiomatiques. On l’a mê

477 ns l’abstrait à partir d’une définition simple et de quelques principes axiomatiques. On l’a même décrit comme l’antisystè

478 ui s’en déclarent les adeptes, c’est une attitude de pensée et une méthode de conduite, plus qu’une doctrine ou une notion

479 ptes, c’est une attitude de pensée et une méthode de conduite, plus qu’une doctrine ou une notion juridique ; une expérien

480 es simples et aux structures géométriques. Tenter de le définir d’entrée de jeu serait donc s’exposer à trahir méthodiquem

481 aux structures géométriques. Tenter de le définir d’ entrée de jeu serait donc s’exposer à trahir méthodiquement sa nature

482 tures géométriques. Tenter de le définir d’entrée de jeu serait donc s’exposer à trahir méthodiquement sa nature même. Voi

483 oi ce sont ses adversaires qui éprouvent le moins de scrupules à en donner des caractérisations brèves et simples. Et voil

484 e un système politique. La plupart nous renvoient de fédéralisme à fédératif et à fédération, voire à confédération indiff

485 lisent carrément le terme. Ainsi, le dictionnaire de Littré, dans sa 1re édition qui date de 1863 : Fédéralisme, s.m. Né

486 tionnaire de Littré, dans sa 1re édition qui date de 1863 : Fédéralisme, s.m. Néologisme. Système, doctrine du gouvernem

487 dant la révolution, projet attribué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédératio

488 ibué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédération de petits États. Vingt-et-un

489 ale et de transformer la France en une fédération de petits États. Vingt-et-un ans plus tard, le dictionnaire historique

490 transformer la France en une fédération de petits États . Vingt-et-un ans plus tard, le dictionnaire historique de Grégoire r

491 t-et-un ans plus tard, le dictionnaire historique de Grégoire récidive, et je cite : Fédéralisme. En 1792 et 1793, on ac

492 ralisme. En 1792 et 1793, on accusa les girondins de vouloir substituer à l’unité nationale le fédéralisme, c’est-à-dire u

493 ciation des départements qui eussent formé autant de républiques distinctes, comme les cantons suisses… Cette calomnie pro

494 nie propagée par les montagnards excita le peuple de Paris contre les girondins… Les dictionnaires anglais renvoient, eux

495 nissent ainsi la structure fédérale : « Une forme de gouvernement extravagante et inefficace, justifiable là seulement où

496 ustifiable là seulement où une forme plus stricte d’ organisation est pratiquement impraticable (practically impracticable)

497 paru en 1957). En France, c’est l’œuvre posthume de Proudhon, Du Principe fédératif, qui, en 1863 (l’année même où Littré

498 Puis des savants français entreprennent une série de mises au point systéma­tiques : Le Fur publie en 1896 son ouvrage int

499 ques : Le Fur publie en 1896 son ouvrage intitulé État fédératif et Confédération d’États (distinction classique, mais que l

500 ouvrage intitulé État fédératif et Confédération d’ États (distinction classique, mais que les dictionnaires déjà cités et

501 uvrage intitulé État fédératif et Confédération d’ États (distinction classique, mais que les dictionnaires déjà cités et cont

502 tionnaires déjà cités et contemporains continuent d’ ignorer sereinement) ; Georges Scelle, dans son Précis du droit des ge

503 ales, qu’elles soient ou non étatiques ; l’équipe de l’Ordre nouveau, de 1932 à 1939, avec Arnaud Dandieu, Robert Aron, Al

504 t ou non étatiques ; l’équipe de l’Ordre nouveau, de 1932 à 1939, avec Arnaud Dandieu, Robert Aron, Alexandre Marc et moi-

505 rc et moi-même, puis Henri Brugmans qui s’inspire de ses travaux, rénove ce que j’ai nommé « l’attitude fédéraliste ». Plu

506 « l’attitude fédéraliste ». Plusieurs des membres de ce groupe, dispersé dès 1939, se retrouvent pour déclencher, après la

507 rre mondiale, le mouvement qui aboutit au congrès de Montreux (1947) suivi par le Congrès de l’Europe, à La Haye, en 1948,

508 u congrès de Montreux (1947) suivi par le Congrès de l’Europe, à La Haye, en 1948, d’où sont issues les premières réalisat

509 i par le Congrès de l’Europe, à La Haye, en 1948, d’ où sont issues les premières réalisations européennes, le Conseil de l

510 e l’Europe notamment. Citons enfin les deux tomes d’ Études sur le fédéralisme, composés par une trentaine de professeurs a

511 es sur le fédéralisme, composés par une trentaine de professeurs américains sous la direction de Robert Bowie et de Carl F

512 taine de professeurs américains sous la direction de Robert Bowie et de Carl Friedrich, et récemment traduits en français.

513 s américains sous la direction de Robert Bowie et de Carl Friedrich, et récemment traduits en français. Dans le dernier en

514 , par Henri Brugmans et Pierre Duclos — le second de ces auteurs écrit ceci : Tout démontre que, quel que soit son avenir

515 ridique ou politique : il est un des grands types d’ aménagement du rapport politique, et peut-être plus encore, un des gra

516 e, et peut-être plus encore, un des grands styles de vie et de civilisation, capable, au même titre que le libéralisme, le

517 -être plus encore, un des grands styles de vie et de civilisation, capable, au même titre que le libéralisme, le socialism

518 e le libéralisme, le socialisme ou la démocratie, d’ alimenter la pensée des sociétés. Ainsi donc, entre le fédéralisme co

519 sme considéré par l’esprit jacobin comme trahison de l’unité nationale sacro-sainte, le fédéralisme considéré simplement c

520 le fédéralisme considéré simplement comme système d’ association d’États, et le fédéralisme considéré par la nouvelle école

521 considéré simplement comme système d’association d’ États, et le fédéralisme considéré par la nouvelle école que décrit Pi

522 onsidéré simplement comme système d’association d’ États , et le fédéralisme considéré par la nouvelle école que décrit Pierre

523 e décrit Pierre Duclos comme un des grands styles de vie et de civilisation, vous voyez que la discussion est très ouverte

524 ierre Duclos comme un des grands styles de vie et de civilisation, vous voyez que la discussion est très ouverte… J’ai don

525 ès ouverte… J’ai donc estimé qu’au lieu de partir d’ une définition pseudo-scientifique, ou secrètement partisane, ou entac

526 ientifique, ou secrètement partisane, ou entachée d’ abstraction, il était plus honnête et enseignant d’aller rechercher da

527 ’abstraction, il était plus honnête et enseignant d’ aller rechercher dans les écrits des précurseurs de l’Europe unie, à p

528 ’aller rechercher dans les écrits des précurseurs de l’Europe unie, à partir du xive siècle, et en remontant peu à peu ve

529 montant peu à peu vers notre époque, les éléments d’ une tradition fédéraliste de l’Europe ; quitte à déduire, finalement,

530 époque, les éléments d’une tradition fédéraliste de l’Europe ; quitte à déduire, finalement, de cette enquête, quelques c

531 liste de l’Europe ; quitte à déduire, finalement, de cette enquête, quelques critères permanents, voire même, si possible,

532 ces plans sont restés peu connus, voire inconnus de leurs contemporains. Aucun d’entre eux, avant celui de Coudenhove-Kal

533 urs contemporains. Aucun d’entre eux, avant celui de Coudenhove-Kalergi, publié en 1923, n’a entraîné d’action politique c

534 Coudenhove-Kalergi, publié en 1923, n’a entraîné d’ action politique concrète, et moins encore de résultats. Cependant, ce

535 aîné d’action politique concrète, et moins encore de résultats. Cependant, ce n’est pas une histoire des échecs de l’idée

536 . Cependant, ce n’est pas une histoire des échecs de l’idée européenne, ni des déchets de la pensée fédéraliste, ni des cu

537 e des échecs de l’idée européenne, ni des déchets de la pensée fédéraliste, ni des curiosa de l’esprit occidental que je m

538 déchets de la pensée fédéraliste, ni des curiosa de l’esprit occidental que je me propose de retracer et qui mérite de re

539 curiosa de l’esprit occidental que je me propose de retracer et qui mérite de retenir l’attention des étudiants. Ces plan

540 ental que je me propose de retracer et qui mérite de retenir l’attention des étudiants. Ces plans et projets constituent a

541 tudiants. Ces plans et projets constituent autant de prises sur leur époque, autant de documents paléontologiques sur les

542 stituent autant de prises sur leur époque, autant de documents paléontologiques sur les conceptions et croyances régnantes

543 es reflètent fidèlement — et ce sera une occasion de les décrire —, soit qu’ils s’opposent expressément à « ce qui allait

544 nticipent le dépassement. Ainsi, la considération d’ un traité de Dante (le De Monarchia, qui date de 1308) et d’un plan co

545 dépassement. Ainsi, la considération d’un traité de Dante (le De Monarchia, qui date de 1308) et d’un plan confédéral de

546 Ainsi, la considération d’un traité de Dante (le De Monarchia, qui date de 1308) et d’un plan confédéral de Pierre Dubois

547 n d’un traité de Dante (le De Monarchia, qui date de 1308) et d’un plan confédéral de Pierre Dubois (le De Recuperatione T

548 é de Dante (le De Monarchia, qui date de 1308) et d’ un plan confédéral de Pierre Dubois (le De Recuperatione Terre Sancte,

549 archia, qui date de 1308) et d’un plan confédéral de Pierre Dubois (le De Recuperatione Terre Sancte, qui date de 1306), n

550 308) et d’un plan confédéral de Pierre Dubois (le De Recuperatione Terre Sancte, qui date de 1306), nous permettront d’ana

551 ubois (le De Recuperatione Terre Sancte, qui date de 1306), nous permettront d’analyser les deux grandes origines antinomi

552 Terre Sancte, qui date de 1306), nous permettront d’ analyser les deux grandes origines antinomiques de la question europée

553 d’analyser les deux grandes origines antinomiques de la question européenne, l’empire et les nations. Dante écrit son trai

554 son traité au moment où le Saint-Empire, principe d’ unité, est en crise, en décadence. Pierre Dubois, avocat de Philippe l

555 est en crise, en décadence. Pierre Dubois, avocat de Philippe le Bel, propose son plan d’union au moment où la première na

556 bois, avocat de Philippe le Bel, propose son plan d’ union au moment où la première nation se constitue, menaçant la double

557 ère nation se constitue, menaçant la double unité de l’empire et de la papauté. Et je relève que ces deux ouvrages sont pr

558 onstitue, menaçant la double unité de l’empire et de la papauté. Et je relève que ces deux ouvrages sont pratiquement cont

559 ces deux ouvrages sont pratiquement contemporains de la naissance de notre confédération, qui résulte, elle, du mouvement

560 s sont pratiquement contemporains de la naissance de notre confédération, qui résulte, elle, du mouvement des communes12,

561 du mouvement des communes12, troisième composante de l’époque. Vous pressentez qu’il y aura, là-dessus, beaucoup à dire. L

562 a, là-dessus, beaucoup à dire. L’échec historique de ces projets et de ceux qui les suivront au cours des siècles jusqu’à

563 coup à dire. L’échec historique de ces projets et de ceux qui les suivront au cours des siècles jusqu’à nous, est certes s

564 aminerai les causes. Dans ce contexte, il s’agira de repérer la nature des obstacles traditionnels de l’union, et d’essaye

565 de repérer la nature des obstacles traditionnels de l’union, et d’essayer de mieux voir, de la sorte, pourquoi certains d

566 nature des obstacles traditionnels de l’union, et d’ essayer de mieux voir, de la sorte, pourquoi certains de ces obstacles

567 obstacles traditionnels de l’union, et d’essayer de mieux voir, de la sorte, pourquoi certains de ces obstacles sont en t

568 itionnels de l’union, et d’essayer de mieux voir, de la sorte, pourquoi certains de ces obstacles sont en train de céder a

569 yer de mieux voir, de la sorte, pourquoi certains de ces obstacles sont en train de céder aujourd’hui. Mais il n’est pas m

570 er aujourd’hui. Mais il n’est pas moins important de rechercher dans ces plans avortés les étymologies vivantes du vocabul

571 logies vivantes du vocabulaire politique européen de la plupart de ses termes de base, tels que : unité, union, unificatio

572 re politique européen de la plupart de ses termes de base, tels que : unité, union, unification, ou encore nation, souvera

573 me inventé par Rousseau, prétend-il, à l’occasion de sa critique des utopies de l’abbé de Saint-Pierre, encore que Proudho

574 étend-il, à l’occasion de sa critique des utopies de l’abbé de Saint-Pierre, encore que Proudhon, cent ans plus tard, reve

575 e paternité. À cet égard, nous aurons l’occasion d’ illustrer fréquemment un phénomène curieux : la pratique du fédéralism

576 ne curieux : la pratique du fédéralisme a précédé de plusieurs siècles sa théorie (ceci peut être vérifié le plus exacteme

577 ins, tandis qu’elle se réalisait enfin, mais hors d’ Europe, dans la Constitution américaine. Nous montrerons aussi dans qu

578 oine parisien Émeric Crucé, qui propose une série de « grands travaux européens » ; comment elles se développent dans les

579 s » ; comment elles se développent dans les plans de Bentham et de Saint-Simon ; enfin comment elles aboutissent aux réali

580 elles se développent dans les plans de Bentham et de Saint-Simon ; enfin comment elles aboutissent aux réalisations que l’

581 l’on sait dans notre temps. C’est donc une sorte de généalogie des grands desseins européens que nous aurons à établir, a

582 établir, au moins autant qu’un constat déprimant d’ échecs pratiques et de déchets idéologiques. Qu’il s’agisse au début d

583 ant qu’un constat déprimant d’échecs pratiques et de déchets idéologiques. Qu’il s’agisse au début du plus grand poète du

584 re déchu qu’était le duc de Sully, ou du créateur d’ un grand État qu’était William Penn, puis d’un économiste visionnaire

585 ’était le duc de Sully, ou du créateur d’un grand État qu’était William Penn, puis d’un économiste visionnaire comme Saint-S

586 ateur d’un grand État qu’était William Penn, puis d’ un économiste visionnaire comme Saint-Simon ou d’un solide juriste sui

587 d’un économiste visionnaire comme Saint-Simon ou d’ un solide juriste suisse comme Bluntschli, et finalement d’un autre gr

588 de juriste suisse comme Bluntschli, et finalement d’ un autre grand poète, Saint-John Perse, de son vrai nom Alexis Léger,

589 alement d’un autre grand poète, Saint-John Perse, de son vrai nom Alexis Léger, qui rédige le Mémorandum sur l’organisatio

590 éger, qui rédige le Mémorandum sur l’organisation d’ un régime d’union fédérale européenne adressé par Briand à la Société

591 dige le Mémorandum sur l’organisation d’un régime d’ union fédérale européenne adressé par Briand à la Société des Nations

592 ciété des Nations en 1930, la galerie des auteurs de plans que nous allons parcourir n’est pas seulement pittoresque : ell

593 uit au cœur des débats idéologiques et politiques de l’Europe actuelle. J’inscris donc sur son seuil : nostra res agitur !

594 uis E. Gagliardi, notamment. j. Rougemont Denis de , « Aspects fédéralistes dans les plans et projets d’union européenne

595 « Aspects fédéralistes dans les plans et projets d’ union européenne du Moyen Âge à nos jours », Bastions de Genève, Genèv

596 n européenne du Moyen Âge à nos jours », Bastions de Genève, Genève, 1963, p. 61-72. k. L’auteur est présenté par cette n

597 nis de Rougemont : né en 1906 à Neuchâtel. Études de lettres et de philosophie. Éditeur à Paris dès 1931. Lecteur à l’Univ

598 nt : né en 1906 à Neuchâtel. Études de lettres et de philosophie. Éditeur à Paris dès 1931. Lecteur à l’Université de Fran

599 Éditeur à Paris dès 1931. Lecteur à l’Université de Francfort 1935-1936. Cours à l’École libre des hautes études de New Y

600 935-1936. Cours à l’École libre des hautes études de New York de 1941 à 1946. Fonde en 1948 le Centre européen de la cultu

601 urs à l’École libre des hautes études de New York de 1941 à 1946. Fonde en 1948 le Centre européen de la culture à Genève,

602 ent du comité exécutif du Congrès pour la liberté de la culture. Auteur de 24 ouvrages qui ont été traduits en 12 langues.

603 du Congrès pour la liberté de la culture. Auteur de 24 ouvrages qui ont été traduits en 12 langues. »

604 Les Suisses sont tard venus dans le développement de la culture occidentale ; ils n’y entrent en fait et d’une manière dis

605 culture occidentale ; ils n’y entrent en fait et d’ une manière distincte qu’au troisième quart de l’ère chrétienne : au x

606 et d’une manière distincte qu’au troisième quart de l’ère chrétienne : au xvie siècle. Mais c’est alors un « carré suiss

607 e formation guerrière qui dominait sur les champs de bataille de l’époque, rangs pressés de porteurs de longues piques, de

608 guerrière qui dominait sur les champs de bataille de l’époque, rangs pressés de porteurs de longues piques, de hallebardes

609 les champs de bataille de l’époque, rangs pressés de porteurs de longues piques, de hallebardes, d’épées et d’arquebuses —

610 e bataille de l’époque, rangs pressés de porteurs de longues piques, de hallebardes, d’épées et d’arquebuses — qui fait so

611 que, rangs pressés de porteurs de longues piques, de hallebardes, d’épées et d’arquebuses — qui fait son entrée résolue su

612 és de porteurs de longues piques, de hallebardes, d’ épées et d’arquebuses — qui fait son entrée résolue sur la grande scèn

613 urs de longues piques, de hallebardes, d’épées et d’ arquebuses — qui fait son entrée résolue sur la grande scène européenn

614 ilosophe Paracelse, et l’architecte Fontana. Mais de cette époque à nos jours, la densité de création intellectuelle et ar

615 ana. Mais de cette époque à nos jours, la densité de création intellectuelle et artistique dans l’ensemble des petits État

616 ectuelle et artistique dans l’ensemble des petits États qui constituent l’actuelle Confédération est sans doute supérieure à

617 e Confédération est sans doute supérieure à celle de toute autre région prise au hasard dans les pays voisins, et qui sera

618 Suisses à la culture représente une contribution de la Suisse en tant qu’entité ou système de valeurs spécifique ? C’est

619 ibution de la Suisse en tant qu’entité ou système de valeurs spécifique ? C’est à ces deux questions que je vais tenter de

620 e ? C’est à ces deux questions que je vais tenter de répondre. ⁂ La Suisse n’existe que depuis cent-quinze ans sous la for

621 n’existe que depuis cent-quinze ans sous la forme d’ un État fédéral et solidement constitué. Auparavant, de la fin du xiii

622 ste que depuis cent-quinze ans sous la forme d’un État fédéral et solidement constitué. Auparavant, de la fin du xiiie jusq

623 État fédéral et solidement constitué. Auparavant, de la fin du xiiie jusqu’au milieu du xixe siècle, elle n’était guère

624 it guère qu’une confédération plus ou moins lâche de petits États souverains, très variés par la forme politique, l’économ

625 u’une confédération plus ou moins lâche de petits États souverains, très variés par la forme politique, l’économie, la confes

626 angue. Elle dépendait ainsi, à des titres divers, de plusieurs grands ensembles culturels, religieux, linguistiques ou pol

627 ou politiques dépassant largement les frontières de ce que l’on nommait les ligues suisses. Les plus grands esprits et le

628 ts et les meilleurs artistes suisses sont d’abord d’ un canton déterminé (qui n’est parfois qu’une ville, Bâle ou Genève) m

629 ement par leur rayonnement (comme le furent celle d’ un Racine, d’un Newton, d’un Kant, d’un Novalis, d’un Kierkegaard, qui

630 r rayonnement (comme le furent celle d’un Racine, d’ un Newton, d’un Kant, d’un Novalis, d’un Kierkegaard, qui n’ont vécu q

631 (comme le furent celle d’un Racine, d’un Newton, d’ un Kant, d’un Novalis, d’un Kierkegaard, qui n’ont vécu que dans leur

632 furent celle d’un Racine, d’un Newton, d’un Kant, d’ un Novalis, d’un Kierkegaard, qui n’ont vécu que dans leur seule natio

633 ’un Racine, d’un Newton, d’un Kant, d’un Novalis, d’ un Kierkegaard, qui n’ont vécu que dans leur seule nation, et d’elle s

634 rd, qui n’ont vécu que dans leur seule nation, et d’ elle seule ont nourri leur carrière) mais par leur biographie, leurs h

635 eances spirituelles, par les lieux où ils agirent de leur vivant, et par les influences subies ou exercées. Pays de gens

636 , et par les influences subies ou exercées. Pays de gens moyens, oui, disait Lucien Fèbvre. Mais quand ils réussissent à

637 n Fèbvre. Mais quand ils réussissent à se dégager de leur canton, alors pas de milieu, ils atteignent à l’universel… Et pl

638 éussissent à se dégager de leur canton, alors pas de milieu, ils atteignent à l’universel… Et plus d’obstacle devant la pe

639 de milieu, ils atteignent à l’universel… Et plus d’ obstacle devant la pensée. Le Suisse s’appelle Jean-Jacques. Il s’appe

640 suisses reçurent leurs libertés non des suzerains de la région, mais, par-dessus leur tête, du seul empereur. Leur liberté

641 ndamnés à l’Europe, dirais-je, quand nous sortons de notre commune originelle. Cette situation particulière est très confo

642 situation particulière est très conforme au génie de la culture occidentale, car celle-ci a toujours été faite par des foy

643 oupages en couleurs plates que montrent nos atlas d’ école. La multiplicité des foyers créateurs fournit à la Suisse ses me

644 eilleures chances, et c’est elle qui, dans le cas de la Suisse — compartimentée à l’extrême, mais liée par tout un réseau

645 imentée à l’extrême, mais liée par tout un réseau d’ échanges spirituels avec ses grands voisins — constitue la raison suff

646 rich avec Zwingli, sont les trois premiers foyers de rayonnement européen des ligues. Aussitôt prolifèrent autour d’eux le

647 européen des ligues. Aussitôt prolifèrent autour d’ eux les bases de lancement de nos fusées culturelles. Paracelse, natif

648 gues. Aussitôt prolifèrent autour d’eux les bases de lancement de nos fusées culturelles. Paracelse, natif d’Einsiedeln, g

649 t prolifèrent autour d’eux les bases de lancement de nos fusées culturelles. Paracelse, natif d’Einsiedeln, grand précurse

650 ement de nos fusées culturelles. Paracelse, natif d’ Einsiedeln, grand précurseur de la médecine la plus moderne, vagabonde

651 . Paracelse, natif d’Einsiedeln, grand précurseur de la médecine la plus moderne, vagabonde en de nombreux pays où il inve

652 seur de la médecine la plus moderne, vagabonde en de nombreux pays où il invente et exerce son art, puis revient enseigner

653 ent enseigner en Suisse dans les dernières années de sa vie. Les Bernouilli et Léonard Euler, héritiers de la tradition hu

654 a vie. Les Bernouilli et Léonard Euler, héritiers de la tradition humaniste et piétiste de Bâle et rivalisant de génie dan

655 , héritiers de la tradition humaniste et piétiste de Bâle et rivalisant de génie dans les mathématiques et la physique, vi

656 ition humaniste et piétiste de Bâle et rivalisant de génie dans les mathématiques et la physique, vivent aux cours de Russ

657 es mathématiques et la physique, vivent aux cours de Russie et de Prusse, ou professent à Groningue et à Londres. Jean de

658 ues et la physique, vivent aux cours de Russie et de Prusse, ou professent à Groningue et à Londres. Jean de Müller, « his

659 « historien des Suisses », mais également auteur de la célèbre Vue générale du genre humain, entre au service des empereu

660 , entre au service des empereurs autrichiens puis de la Prusse. Jean-Jacques Rousseau, « citoyen de Genève », vit en Franc

661 is de la Prusse. Jean-Jacques Rousseau, « citoyen de Genève », vit en France, en Italie, en Angleterre, défend avec éloque

662 lie, en Angleterre, défend avec éloquence un plan d’ union fédérale de l’Europe, et modifie plus que nul autre la sensibili

663 e, défend avec éloquence un plan d’union fédérale de l’Europe, et modifie plus que nul autre la sensibilité occidentale. D

664 ie plus que nul autre la sensibilité occidentale. De Zurich au début du xviiie siècle, rayonne l’école suisse du doyen Bo

665 e l’école suisse du doyen Bodmer puis des Idylles de Salomon Gessner et des spéculations mystiques de Lavater ; et Zurich

666 de Salomon Gessner et des spéculations mystiques de Lavater ; et Zurich devient le foyer d’une renaissance de la littérat

667 mystiques de Lavater ; et Zurich devient le foyer d’ une renaissance de la littérature dans les Allemagnes. De Coppet rayon

668 er ; et Zurich devient le foyer d’une renaissance de la littérature dans les Allemagnes. De Coppet rayonne sur la France l

669 enaissance de la littérature dans les Allemagnes. De Coppet rayonne sur la France le génie de Mme de Staël et de sa cour c

670 emagnes. De Coppet rayonne sur la France le génie de Mme de Staël et de sa cour cosmopolite, où brillent Sismondi et Benja

671 rayonne sur la France le génie de Mme de Staël et de sa cour cosmopolite, où brillent Sismondi et Benjamin Constant, initi

672 t Sismondi et Benjamin Constant, initiateurs l’un de l’économie et l’autre de la politique libérales qui allaient marquer

673 nstant, initiateurs l’un de l’économie et l’autre de la politique libérales qui allaient marquer tout le xixe siècle. Cin

674 re par son Matriarcat une conception sociologique de l’ethnographie, Jacob Burckhardt par ses ouvrages sur la Renaissance

675 e Betrachtungen renouvelle une vision synthétique de l’histoire, dont son fervent disciple, Nietzsche — qui est aussi son

676 Nietzsche — qui est aussi son plus jeune collègue de faculté — nourrira son génie bouleversant. Puis c’est le tour de Genè

677 urrira son génie bouleversant. Puis c’est le tour de Genève, une fois de plus, et de Zurich tôt après, d’où rayonnent sur

678 uis c’est le tour de Genève, une fois de plus, et de Zurich tôt après, d’où rayonnent sur l’Europe entière et l’Amérique l

679 Genève, une fois de plus, et de Zurich tôt après, d’ où rayonnent sur l’Europe entière et l’Amérique l’Institut Rousseau de

680 , et l’école du grand C. G. Jung : les fondements de la pédagogie et de la psychologie occidentales en seront transformés

681 nd C. G. Jung : les fondements de la pédagogie et de la psychologie occidentales en seront transformés sans retour. Enfin,

682 etour. Enfin, n’oublions pas l’influence mondiale de la pensée théologique de Karl Barth : elle dépasse largement les limi

683 pas l’influence mondiale de la pensée théologique de Karl Barth : elle dépasse largement les limites de la confession prot

684 e Karl Barth : elle dépasse largement les limites de la confession protestante. ⁂ Mais s’il reste vrai que la Suisse n’est

685 n’ayant été pendant des siècles qu’un agglomérat de foyers sans capitale, et moins en relations les uns avec les autres q

686 s dans cette succession chronologique très serrée de puissants émetteurs d’énergie culturelle ? Une énumération complète d

687 chronologique très serrée de puissants émetteurs d’ énergie culturelle ? Une énumération complète de nos gloires ayant att

688 s d’énergie culturelle ? Une énumération complète de nos gloires ayant atteint le niveau européen, ou même mondial, dessin

689 e, la psychologie et la pédagogie, la littérature d’ idées, les sciences et la technique. Comment interpréter cette courbe

690 Baudelaire ou leur Descartes. Mais force est bien de reconnaître que la Suisse n’a rien de comparable à la musique flamand

691 ce est bien de reconnaître que la Suisse n’a rien de comparable à la musique flamande de la Renaissance, à la peinture hol

692 isse n’a rien de comparable à la musique flamande de la Renaissance, à la peinture hollandaise ou vénitienne du xviiie si

693 devenue évidente à partir du xixe siècle : point de grand art dans les petits pays. Un Ludwig Senfl au xvie siècle, un A

694 ie siècle, un Arthur Honegger et un Frank Martin de nos jours, mais rien qui vraiment compte dans l’entre-deux, cela ne f

695 musicale ; et les épopées symboliques démesurées d’ un Carl Spitteler ne suffisent pas à compenser des siècles de médiocri

696 pitteler ne suffisent pas à compenser des siècles de médiocrité dans nos productions versifiées. La peinture avait pris un

697 u départ au xvie siècle, mais l’école turbulente de Conrad Witz, de Nicolas Manuel, de Hans Friess et d’Urs Graf ne trouv

698 siècle, mais l’école turbulente de Conrad Witz, de Nicolas Manuel, de Hans Friess et d’Urs Graf ne trouve un répondant,

699 ole turbulente de Conrad Witz, de Nicolas Manuel, de Hans Friess et d’Urs Graf ne trouve un répondant, par ailleurs discut

700 Conrad Witz, de Nicolas Manuel, de Hans Friess et d’ Urs Graf ne trouve un répondant, par ailleurs discutable, qu’au xxe s

701 ès se font à Paris, Londres et Berlin. Un tableau de Paul Klee, une sculpture d’Alberto Giacometti, un poème de Blaise Cen

702 et Berlin. Un tableau de Paul Klee, une sculpture d’ Alberto Giacometti, un poème de Blaise Cendrars : l’amateur non préven

703 lee, une sculpture d’Alberto Giacometti, un poème de Blaise Cendrars : l’amateur non prévenu n’y verra pas la Suisse, comm

704 omme il voit à coup sûr l’Espagne dans les œuvres de Picasso, le ghetto russe dans celles de Chagall, ou les Flandres myst

705 es œuvres de Picasso, le ghetto russe dans celles de Chagall, ou les Flandres mystiques dans celles de Maeterlinck. Si l’o

706 de Chagall, ou les Flandres mystiques dans celles de Maeterlinck. Si l’on veut distinguer les éléments sinon d’une « cultu

707 linck. Si l’on veut distinguer les éléments sinon d’ une « culture suisse » — qui ne saurait exister — du moins d’une attit

708 ture suisse » — qui ne saurait exister — du moins d’ une attitude d’esprit commune aux créateurs issus de nos divers canton

709 qui ne saurait exister — du moins d’une attitude d’ esprit commune aux créateurs issus de nos divers cantons, on aura plus

710 une attitude d’esprit commune aux créateurs issus de nos divers cantons, on aura plus de chances de les trouver dans le do

711 éateurs issus de nos divers cantons, on aura plus de chances de les trouver dans le domaine du roman : La Nouvelle Héloïse

712 us de nos divers cantons, on aura plus de chances de les trouver dans le domaine du roman : La Nouvelle Héloïse, l’Émile,

713 ue Pestalozzi, voire à certains égards les récits d’ un réalisme stylisé de C. F. Ramuz, se distinguent des romans français

714 certains égards les récits d’un réalisme stylisé de C. F. Ramuz, se distinguent des romans français, anglais ou russes de

715 drame moral dans la vie quotidienne. Le sentiment de la nature, toujours présente, mélancolique, maternelle ou menaçante,

716 olique, maternelle ou menaçante, y tient la place de l’inquiétude métaphysique chez un Dostoïevski et un Kafka ou de l’arr

717 e métaphysique chez un Dostoïevski et un Kafka ou de l’arrière-plan de compétition sociale chez un Balzac et un Stendhal.

718 z un Dostoïevski et un Kafka ou de l’arrière-plan de compétition sociale chez un Balzac et un Stendhal. Ces traits sont pr

719 traits sont protestants, peut-être. Mais le goût de la mesure, de l’intériorité, du réalisme et de la psychologie moyenne

720 rotestants, peut-être. Mais le goût de la mesure, de l’intériorité, du réalisme et de la psychologie moyenne expriment sur

721 ût de la mesure, de l’intériorité, du réalisme et de la psychologie moyenne expriment surtout les conditions dictées par l

722 travail humain, bien concerté : la Suisse est née de coopératives forestières exploitant le passage du Gothard, « Un pour

723  », c’est moins un idéal qu’une vitale obligation de solidarité pratique. Quand un Suisse entreprend de créer quelque chos

724 e solidarité pratique. Quand un Suisse entreprend de créer quelque chose, tout se passe comme s’il avait à se faire pardon

725 ’architecte suisse par exemple — et nous en avons d’ excellents — doit voir plutôt petit, fonctionnel et très sobre, s’il r

726 sobre, s’il reste en Suisse. Mais s’il a le goût de la grandeur, c’est à Rome qu’il ira terminer l’énorme dôme de Saint-P

727 ur, c’est à Rome qu’il ira terminer l’énorme dôme de Saint-Pierre comme Maderno et les deux Fontana, c’est aux États-Unis

728 u’il trouvera des commandes pour bâtir une église de Ronchamps ou une capitale — et c’est le cas de Le Corbusier, père de

729 se de Ronchamps ou une capitale — et c’est le cas de Le Corbusier, père de l’architecture moderne, puritain révolutionnair

730 capitale — et c’est le cas de Le Corbusier, père de l’architecture moderne, puritain révolutionnaire, né dans une vallée

731 excellé furent presque tous, à des titres divers, hommes utiles, au sens le plus noble, et penseurs engagés dans leur communau

732 ngagés dans leur communauté, plutôt que créateurs d’ art ou de grands systèmes. Médecins praticiens, guérisseurs d’âme, réf

733 ns leur communauté, plutôt que créateurs d’art ou de grands systèmes. Médecins praticiens, guérisseurs d’âme, réformateurs

734 grands systèmes. Médecins praticiens, guérisseurs d’ âme, réformateurs politiques ou religieux, négociateurs de grande affa

735 éformateurs politiques ou religieux, négociateurs de grande affaires publiques, théologiens et pédagogues, savants du prem

736 avants du premier rang, mais qui restent soucieux d’ applications industrielles ou humanitaires — comme Euler inventant la

737 éducatifs ou spirituels, avec un souci primordial de l’efficacité transformatrice. Et c’est en cela qu’ils sont typiquemen

738 sont typiquement suisses. ⁂ Cependant, une série de grands noms ne représente pas à elle seule tout l’apport culturel d’u

739 eprésente pas à elle seule tout l’apport culturel d’ un pays, de même qu’un prestigieux état-major ne suffit pas à renseign

740 at-major ne suffit pas à renseigner sur la valeur d’ un combat d’une armée et sur la volonté de résistance qui l’appuie dan

741 suffit pas à renseigner sur la valeur d’un combat d’ une armée et sur la volonté de résistance qui l’appuie dans la populat

742 valeur d’un combat d’une armée et sur la volonté de résistance qui l’appuie dans la population. Ce qu’il est important de

743 appuie dans la population. Ce qu’il est important de savoir sur l’armée suisse, c’est que chacun de ses soldats garde son

744 nt de savoir sur l’armée suisse, c’est que chacun de ses soldats garde son fusil et son équipement militaire dans son armo

745 uipement militaire dans son armoire. Qu’en est-il de notre équipement culturel ? Il me paraît que la structure fédéraliste

746 els favorise une implantation relativement serrée de la vie culturelle. J’en citerai quelques exemples. La souveraineté de

747 souveraineté des cantons en matière de culture et d’ éducation explique et justifie l’existence de sept universités, de deu

748 e et d’éducation explique et justifie l’existence de sept universités, de deux écoles polytechniques, et de plusieurs diza

749 ique et justifie l’existence de sept universités, de deux écoles polytechniques, et de plusieurs dizaines d’instituts spéc

750 pt universités, de deux écoles polytechniques, et de plusieurs dizaines d’instituts spécialisés de niveau universitaire, p

751 x écoles polytechniques, et de plusieurs dizaines d’ instituts spécialisés de niveau universitaire, pour une population de

752 et de plusieurs dizaines d’instituts spécialisés de niveau universitaire, pour une population de 5 millions. Chaque gros

753 isés de niveau universitaire, pour une population de 5 millions. Chaque gros village possède son chœur, et souvent sa fanf

754 e son chœur, et souvent sa fanfare ; chaque ville de quelque importance a ses sociétés de concerts, de théâtre et de confé

755 chaque ville de quelque importance a ses sociétés de concerts, de théâtre et de conférences hebdomadaires, son musée, ses

756 de quelque importance a ses sociétés de concerts, de théâtre et de conférences hebdomadaires, son musée, ses expositions,

757 ortance a ses sociétés de concerts, de théâtre et de conférences hebdomadaires, son musée, ses expositions, ses bibliothèq

758 xpositions, ses bibliothèques et ses associations d’ éducation, d’amis des arts ou de la nature. Les plus grandes cités — d

759 es bibliothèques et ses associations d’éducation, d’ amis des arts ou de la nature. Les plus grandes cités — de 150 à 500 0

760 ses associations d’éducation, d’amis des arts ou de la nature. Les plus grandes cités — de 150 à 500 000 habitants — entr

761 es arts ou de la nature. Les plus grandes cités — de 150 à 500 000 habitants — entretiennent chacune un ou deux orchestres

762 ival, plusieurs théâtres. Les collections privées de peinture sont parmi les plus belles du monde, Reinhart à Winterthour

763 et Hahnloser à Berne tenant la tête. Les bureaux d’ étude des grandes firmes industrielles financent des recherches orient

764 hnique, mais dont la science pure bénéficie. Deux de ces bureaux sont dirigés par des prix Nobel. Soulignons, à ce propos,

765 es sciences, se place au premier rang mondial, et de très loin, relativement à sa population (Hollande : 9 prix Nobel pour

766 ne population neuf fois plus grande). ⁂ À l’heure de l’Europe unie, la Suisse semble donc en mesure de tenir une place plu

767 de l’Europe unie, la Suisse semble donc en mesure de tenir une place plus qu’honorable dans une compétition continentale o

768 tes depuis des siècles. Il s’ensuit que la menace d’ uniformisation et d’oblitération des traditions locales est bien plus

769 es. Il s’ensuit que la menace d’uniformisation et d’ oblitération des traditions locales est bien plus grave pour elle que

770 e pour ses grands voisins. Ce n’est pas du projet d’ union européenne que provient cette menace de nivellement, mais plutôt

771 ojet d’union européenne que provient cette menace de nivellement, mais plutôt d’un certain matérialisme philistin favorisé

772 provient cette menace de nivellement, mais plutôt d’ un certain matérialisme philistin favorisé par les succès de la techni

773 in matérialisme philistin favorisé par les succès de la technique. Et le doublement prévu de la population, dans les trent

774 es succès de la technique. Et le doublement prévu de la population, dans les trente ans qui viennent, sur un très petit te

775 a totalement dans le même sens. La Suisse se doit de réagir à temps en soutenant plus « matériellement » que jusqu’ici les

776 urelles dont elle dispose. N’est-elle pas le pays d’ Europe qui a les raisons les plus fortes et les plus concrètes de savo

777 les raisons les plus fortes et les plus concrètes de savoir que le terme de culture n’est pas un synonyme de superflu ?

778 rtes et les plus concrètes de savoir que le terme de culture n’est pas un synonyme de superflu ? b. Rougemont Denis de,

779 oir que le terme de culture n’est pas un synonyme de superflu ? b. Rougemont Denis de, « Apport à la civilisation occid

780 s un synonyme de superflu ? b. Rougemont Denis de , « Apport à la civilisation occidentale », Associations international

781 niques et intéressantes, le fédéralisme est plein de contradictions, d’oppositions et de tensions. On peut même dire qu’il

782 ntes, le fédéralisme est plein de contradictions, d’ oppositions et de tensions. On peut même dire qu’il est fait de contra

783 sme est plein de contradictions, d’oppositions et de tensions. On peut même dire qu’il est fait de contradictions, mais qu

784 et de tensions. On peut même dire qu’il est fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les autres systèmes p

785 t fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les autres systèmes politiques ou philosophiques, il ne cherche

786 à les neutraliser ou à les effacer par les moyens de la logique ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les fai

787 ou à les effacer par les moyens de la logique ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les faire vivre ensemble

788 e ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les faire vivre ensemble, telles qu’elles sont. Mais parce qu’il acce

789 lez pas croire que le fédéralisme soit une espèce d’ éclectisme universel, ou d’opportunisme lâche qui tolère tout et ne s’

790 alisme soit une espèce d’éclectisme universel, ou d’ opportunisme lâche qui tolère tout et ne s’oppose à rien. Le fédéralis

791 ’uniformité imposée par un centre, qu’il s’agisse d’ une capitale, d’un État, d’un parti, d’un pouvoir clérical, politique,

792 sée par un centre, qu’il s’agisse d’une capitale, d’ un État, d’un parti, d’un pouvoir clérical, politique, ou économique.

793 ar un centre, qu’il s’agisse d’une capitale, d’un État , d’un parti, d’un pouvoir clérical, politique, ou économique. Il est

794 centre, qu’il s’agisse d’une capitale, d’un État, d’ un parti, d’un pouvoir clérical, politique, ou économique. Il est donc

795 l s’agisse d’une capitale, d’un État, d’un parti, d’ un pouvoir clérical, politique, ou économique. Il est donc le contrair

796 e, ou économique. Il est donc le contraire absolu de tout régime totalitaire de tout ordre géométrique, simpliste, et par

797 nc le contraire absolu de tout régime totalitaire de tout ordre géométrique, simpliste, et par là même tyrannique. Or la t

798 ’autre part, le fédéralisme refuse avec non moins de fermeté l’esprit de clocher, les particularismes régionaux ou locaux

799 ralisme refuse avec non moins de fermeté l’esprit de clocher, les particularismes régionaux ou locaux qui prétendraient vi

800 rsités régionales, aime aussi leur santé et celle de l’ensemble. C’est pourquoi il veut leur union, leur entraide, et même

801 dans certains cas bien définis, la mise en commun de leurs ressources. Voulant donc le contraire de l’uniformité imposée p

802 un de leurs ressources. Voulant donc le contraire de l’uniformité imposée par un centre, mais aussi le contraire des parti

803 le fédéralisme représenterait-il alors une sorte de moyen terme entre ces deux extrêmes ? Point du tout ! La santé n’est

804 s un moyen terme entre la peste et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave, n’est pas à mi-chemin entre un homm

805 e entre la peste et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave, n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt

806 au et qui se lave, n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’

807 e, n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est pas à mi-

808 mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est pas à mi-chemin entre la c

809 in entre la centralisation oppressive et l’esprit de clocher, à mi-chemin entre la dictature et l’anarchie. Il est sur un

810 es ont en commun ! On aurait bien tort, en effet, de s’imaginer que la volonté de centralisation totale d’une nation et la

811 bien tort, en effet, de s’imaginer que la volonté de centralisation totale d’une nation et la volonté de la fragmenter en

812 ’imaginer que la volonté de centralisation totale d’ une nation et la volonté de la fragmenter en petites cellules locales

813 centralisation totale d’une nation et la volonté de la fragmenter en petites cellules locales jalousement closes manifest

814 t closes manifestent deux tendances incompatibles de l’esprit. Car en réalité, ceux qui n’admettent aucune diversité polit

815 même état d’esprit que ceux qui n’admettent rien d’ autre que leur manière de vivre locale, définie par la majorité locale

816 eux qui n’admettent rien d’autre que leur manière de vivre locale, définie par la majorité locale, traitent tout le reste

817 ie par la majorité locale, traitent tout le reste d’ étranger, donc d’impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier

818 é locale, traitent tout le reste d’étranger, donc d’ impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier par traités avec

819 d’étranger, donc d’impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier par traités avec leurs voisins, de s’ouvrir aux

820 donc d’impur, et par suite, refusent de coopérer, de se lier par traités avec leurs voisins, de s’ouvrir aux échanges. Ce

821 pérer, de se lier par traités avec leurs voisins, de s’ouvrir aux échanges. Ce nationalisme local relève de la même mental

822 ouvrir aux échanges. Ce nationalisme local relève de la même mentalité que le totalitarisme à l’échelle nationale. Il trad

823 à l’échelle nationale. Il traduit le même manque d’ imagination, de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’espri

824 tionale. Il traduit le même manque d’imagination, de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’esprit et d’amour du

825 raduit le même manque d’imagination, de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’esprit et d’amour du réel. Mais l

826 magination, de vitalité, de sens des proportions, d’ ouverture d’esprit et d’amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne

827 de vitalité, de sens des proportions, d’ouverture d’ esprit et d’amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne se borne pas

828 de sens des proportions, d’ouverture d’esprit et d’ amour du réel. Mais l’attitude fédéraliste ne se borne pas à reconnaît

829 e borne pas à reconnaître d’une part la nécessité de l’union, d’autre part la légitimité des autonomies locales. Elle exig

830 rise du divers — comme tout art ! Elle est un art de la composition qui requiert à la fois et en même temps la vivacité de

831 ontrastes et leur harmonisation. Prenez l’exemple d’ une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’harmonie possible sans contr

832 exemple d’une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’ harmonie possible sans contrastes de couleurs, et sans nuances complex

833 ’y aurait pas d’harmonie possible sans contrastes de couleurs, et sans nuances complexes ; de même que sans une vision d’e

834 s nuances complexes ; de même que sans une vision d’ ensemble, celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurai

835 s ; de même que sans une vision d’ensemble, celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contraste

836 te, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que la simple juxtapos

837 s tons, il n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre dans leur boîte. Pour que

838 l n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre dans leur boîte. Pour que la qualit

839 dans leur boîte. Pour que la qualité particulière d’ un rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut que ce rouge soit

840 avec des verts, par exemple, dans l’unité globale d’ une œuvre au sein de laquelle s’opèrent mille échanges d’une infinie c

841 uvre au sein de laquelle s’opèrent mille échanges d’ une infinie complexité. Voilà ce que j’appelle une harmonie fédéralist

842 litaire, lui, trouve plus simple et plus efficace de broyer mécaniquement toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce

843 toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce de brun, celui des chemises brunes par exemple, de sinistre mémoire. Et

844 e de brun, celui des chemises brunes par exemple, de sinistre mémoire. Et voilà toute la différence entre l’harmonie fédér

845 forcée à l’uniforme. Ces images, qui sont autant d’ évidences, suffisent à définir le fédéralisme, art de composer en un e

846 vidences, suffisent à définir le fédéralisme, art de composer en un ensemble animé des diversités vivantes, et fonctionnan

847 seul exemple : l’impasse à laquelle risquent bien d’ aboutir les négociations entre la Suisse et l’Europe, représentée pour

848 cramponne à une souveraineté nationale qui a peur de se laisser englober dans un plus grand corps. Les uns oublient que la

849 n plus grand corps. Les uns oublient que la santé d’ un corps exige le souple jeu d’organes bien différenciés ; les autres

850 lient que la santé d’un corps exige le souple jeu d’ organes bien différenciés ; les autres oublient qu’un organe bien diff

851 emps la Suisse apprenne à respecter dans le cadre d’ une Europe fédérée, les règles que chacun de ses cantons observe dans

852 cadre d’une Europe fédérée, les règles que chacun de ses cantons observe dans le cadre de la Confédération, sinon elle tra

853 s que chacun de ses cantons observe dans le cadre de la Confédération, sinon elle trahira sa raison d’être. Mais le fédéra

854 de la Confédération, sinon elle trahira sa raison d’ être. Mais le fédéralisme n’est pas seulement un mode d’organisation p

855 . Mais le fédéralisme n’est pas seulement un mode d’ organisation politique, le seul régime de coexistence digne du nom. C’

856 un mode d’organisation politique, le seul régime de coexistence digne du nom. C’est aussi, et c’est même avant tout, une

857 ’est aussi, et c’est même avant tout, une méthode de composition des valeurs diversifiées, — et voilà, me semble-t-il, une

858 voilà, me semble-t-il, une assez bonne définition de la culture ! II Avec ces quelques précisions de doctrine — qui p

859 la culture ! II Avec ces quelques précisions de doctrine — qui paraîtraient bien théoriques et bien abstraites à un p

860 litique très concrète —, tout est dit en principe de ce que nous aurions à dire sur les rapports entre le fédéralisme et l

861 sur les problèmes que nous pose la vie culturelle de la Suisse romande en particulier. Essayons pourtant d’illustrer les p

862 Suisse romande en particulier. Essayons pourtant d’ illustrer les principes du fédéralisme en les appliquant à la culture.

863 ral — au sens occidental du terme, très différent de l’asiatique — il faut une variété aussi riche que possible de créatio

864 ue — il faut une variété aussi riche que possible de créations humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d

865 e possible de créations humaines, un foisonnement d’ œuvres, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de

866 de créations humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines

867 s humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles,

868 , un foisonnement d’œuvres, de langues, de moyens d’ expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et

869 s, de langues, de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui

870 , de moyens d’expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes c

871 expression plastiques, de méthodes, de doctrines, d’ écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes ces œuvres vari

872 mmune mesure ; sans quoi, nous ne saurions parler d’ une culture, cohérente et vivante, de la culture. Il faut donc à la fo

873 rions parler d’une culture, cohérente et vivante, de la culture. Il faut donc à la fois l’Un et le Divers, une très riche

874 une très riche diversité se détachant sur un fond d’ unité essentielle. Quelle est donc, pour nous autres Suisses romands,

875 t donc, pour nous autres Suisses romands, l’unité de base, d’origine et de but, à laquelle nous nous référons implicitemen

876 our nous autres Suisses romands, l’unité de base, d’ origine et de but, à laquelle nous nous référons implicitement dans to

877 es Suisses romands, l’unité de base, d’origine et de but, à laquelle nous nous référons implicitement dans toutes nos œuvr

878 nous qui n’avons pas eu la chance, ou le malheur, d’ avoir une soi-disant culture nationale, intermédiaire entre l’Europe e

879 ntre l’Europe et nos cités. Ici, je me permettrai de rompre une lance contre le concept aussi néfaste qu’invétéré de « cul

880 lance contre le concept aussi néfaste qu’invétéré de « culture nationale ». On nous répète depuis un siècle que les Suisse

881 oit vrai, il faudrait tout d’abord que le concept de « culture nationale » corresponde à des réalités culturelles. Or il n

882 L’idée qu’il y aurait en Europe un certain nombre de « cultures nationales » bien distinctes et autonomes dont l’ensemble

883 ulture européenne est une pure et simple illusion d’ optique scolaire. Elle se dissipe comme brume au soleil à la lumière d

884 as, n’a jamais été et ne sera jamais une addition de « cultures nationales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui o

885 tion de « cultures nationales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui ont pensé et créé depuis 28 siècles, indépenda

886 urope, et dont la plupart n’ont même pas cent ans d’ existence : il faut bien admettre que la culture s’était constituée av

887 les ! Je me contenterai, pour illustrer ce point, d’ un seul exemple : celui de la musique, élément important et typiquemen

888 our illustrer ce point, d’un seul exemple : celui de la musique, élément important et typiquement européen de notre cultur

889 usique, élément important et typiquement européen de notre culture. Dans ses grandes lignes, voici l’évolution de la musiq

890 lture. Dans ses grandes lignes, voici l’évolution de la musique en Europe : elle naît et se constitue au xiiie siècle dan

891 constitue au xiiie siècle dans un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, pu

892 s un certain nombre de cités du Nord et du Centre de la péninsule italienne, en Provence, puis en Île-de-France. Des cités

893 cités flamandes, le long du grand axe commercial de la Renaissance, reliant Venise à Bruges. Une école nouvelle s’épanoui

894 ogne, et redescend vers l’Italie qu’elle enrichit de ses nombreuses découvertes. Plus tard, les Allemands et les Autrichie

895 italiens. Bach copie avec application des œuvres de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européen

896 des œuvres de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européenne se déplace vers les régions germaniq

897 de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européenne se déplace vers les régions germaniques, Hanovr

898 s maîtres allemands que les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xx

899 emands que les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xxe siècle, pl

900 le, en imposant leurs œuvres à Paris… L’évolution de la peinture suit à peu de choses près les mêmes voies. Or ces voies,

901 sent avec une glorieuse indifférence des dizaines de nos frontières nationales actuelles. Elles relient des cités, des foy

902 es actuelles. Elles relient des cités, des foyers de création, des maîtres, et non pas des nations. Ce que l’on nomme parf

903 me parfois, pendant la Renaissance, la « nation » d’ un musicien ou d’un peintre, c’est simplement l’école locale dans laqu

904 nt la Renaissance, la « nation » d’un musicien ou d’ un peintre, c’est simplement l’école locale dans laquelle il s’est for

905 ment l’école locale dans laquelle il s’est formé. D’ où vient alors cette illusion d’optique dont je parlais, cette croyanc

906 e il s’est formé. D’où vient alors cette illusion d’ optique dont je parlais, cette croyance si rarement mise en doute depu

907 en doute depuis un siècle environ, en l’existence de « cultures nationales » ? C’est avant tout le fait de la langue qui l

908  cultures nationales » ? C’est avant tout le fait de la langue qui l’entretient. Quand on dit que les Suisses romands se r

909 française. Mais celle-ci n’est pas une propriété de la nation française actuelle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut im

910 été de la nation française actuelle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut imposée que par un décret de François Ier, en 15

911 de laquelle elle ne fut imposée que par un décret de François Ier, en 1543. On parle encore dans la France d’aujourd’hui s

912 çois Ier, en 1543. On parle encore dans la France d’ aujourd’hui sept ou huit langues différentes : l’allemand, le flamand,

913 « culture nationale » étant la langue maternelle de populations qui vivent dans sept ou huit nations différentes. Il faut

914 à coïncider approximativement avec les frontières d’ une de nos nations modernes. Mais il y a plus. La langue ne saurait à

915 cider approximativement avec les frontières d’une de nos nations modernes. Mais il y a plus. La langue ne saurait à elle s

916 une culture : elle n’est guère qu’un des éléments de la culture en général. Or tous les autres éléments : la religion, la

917 nt indépendants des langues modernes, et ne sont, de toute évidence, pas réductibles à des cadres nationaux. « Qu’as-tu qu

918 une des vingt-quatre nations qui ont découpé leur État dans le corps de ce continent. III Or il se trouve que les Suis

919 e nations qui ont découpé leur État dans le corps de ce continent. III Or il se trouve que les Suisses sont, ou devr

920 ou devraient être, préservés mieux que les autres de l’illusion des « cultures nationales », du seul fait de la compositio

921 llusion des « cultures nationales », du seul fait de la composition linguistique si variée de leur État. Nous sommes en me

922 eul fait de la composition linguistique si variée de leur État. Nous sommes en mesure de savoir mieux que les autres que l

923 de la composition linguistique si variée de leur État . Nous sommes en mesure de savoir mieux que les autres que la vie cult

924 que si variée de leur État. Nous sommes en mesure de savoir mieux que les autres que la vie culturelle de nos régions et d

925 savoir mieux que les autres que la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réalités nationales, don

926 es autres que la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réalités nationales, donc politiques, mais

927 elle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réalités nationales, donc politiques, mais se rattache directement à

928 », Reichs unmittelbar, et c’était là une garantie de liberté contre les princes de l’époque — nous dirions aujourd’hui : c

929 ait là une garantie de liberté contre les princes de l’époque — nous dirions aujourd’hui : contre les États-nations. L’uni

930 s aujourd’hui : contre les États-nations. L’unité de base étant de la sorte identifiée, la question qui se pose est de sav

931 : contre les États-nations. L’unité de base étant de la sorte identifiée, la question qui se pose est de savoir comment ce

932 la sorte identifiée, la question qui se pose est de savoir comment certaines cités ou certaines régions parviennent à se

933 nds se différencient des Français, ou en tout cas de l’image convenue que l’État français nous donne depuis cent ans de la

934 rançais, ou en tout cas de l’image convenue que l’ État français nous donne depuis cent ans de la « culture française », bien

935 ue que l’État français nous donne depuis cent ans de la « culture française », bien que nous parlions à peu près la même l

936 la culture, dans nos cantons, n’est pas liée à l’ État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’État ; 2° la culture vit

937 ’est pas liée à l’État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’État ; 2° la culture vit chez nous dans de petits comp

938 à l’État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’État ; 2° la culture vit chez nous dans de petits compartiments nat

939 État et n’a jamais été un moyen de puissance de l’ État  ; 2° la culture vit chez nous dans de petits compartiments naturels o

940 ance de l’État ; 2° la culture vit chez nous dans de petits compartiments naturels ou historiques, qui n’ont jamais été un

941 le cas des provinces françaises ; 3° nous sommes de vieilles républiques — même Neuchâtel, en dépit de ses princes — fond

942 rémonies — à moins que son adoption n’ait résulté de notre tempérament particulier, mais cela revient au même ; 5° nous ne

943 à nous-mêmes, j’entends : pour illustrer, au plan de la culture, nos raisons d’être, pour légitimer notre accent particuli

944 our illustrer, au plan de la culture, nos raisons d’ être, pour légitimer notre accent particulier, pour nous exprimer d’un

945 imer notre accent particulier, pour nous exprimer d’ une manière authentique et non pas empruntée, imitée ? Je ne crois guè

946 empruntée, imitée ? Je ne crois guère aux mesures de « défense » qu’on nous propose périodiquement : défense contre l’infl

947 d’autre part. La défensive n’est pas une attitude de créateurs, et la culture est d’abord création, avant d’être héritage,

948 ateurs, et la culture est d’abord création, avant d’ être héritage, ou enseignement. Si nous voulons rester nous-mêmes, con

949 nuons en toute confiance, curiosité, et ouverture d’ esprit, à vivre en symbiose permanente avec l’ensemble de la culture e

950 t, à vivre en symbiose permanente avec l’ensemble de la culture européenne. Nos meilleurs auteurs (pour ne prendre que cet

951 isqu’il est lié à la langue, laquelle ne pose pas de problèmes pour le savant, l’architecte ou le musicien) ont été nos me

952 ousseau, Constant, Mme de Staël dans le passé, et de nos jours, parmi nos aînés, Robert de Traz, Charles-Albert Cingria, G

953 pas hésité à puiser aux sources les plus variées de la culture européenne, germanique et anglo-saxonne autant que françai

954 ans s’arrêter à ces barrages ou à ces faux relais de paresse que représentent ailleurs les cultures soi-disant « nationale

955 l’on reconnaît le plus vite leur commun caractère de Suisses romands, si profondes qu’aient été leurs différences de doctr

956 ands, si profondes qu’aient été leurs différences de doctrine, d’esthétique ou de tempérament ? Certains citeront alors Ra

957 ondes qu’aient été leurs différences de doctrine, d’ esthétique ou de tempérament ? Certains citeront alors Ramuz, à titre

958 té leurs différences de doctrine, d’esthétique ou de tempérament ? Certains citeront alors Ramuz, à titre d’argument massu

959 pérament ? Certains citeront alors Ramuz, à titre d’ argument massue contre ma thèse. Est-il besoin de rappeler que ce gran

960 d’argument massue contre ma thèse. Est-il besoin de rappeler que ce grand artiste s’est formé à l’école de Paris, mais au

961 ppeler que ce grand artiste s’est formé à l’école de Paris, mais aussi à l’école de Cézanne, puis des romanciers russes, e

962 st formé à l’école de Paris, mais aussi à l’école de Cézanne, puis des romanciers russes, enfin de Goethe ? Il se voulait

963 ole de Cézanne, puis des romanciers russes, enfin de Goethe ? Il se voulait un pur Vaudois, séparatiste (car c’était là le

964 is, séparatiste (car c’était là le véritable sens de son fédéralisme mal compris). Cette erreur l’a peut-être soutenu, com

965 me il arrive, mais n’en fut pas moins responsable de certaines limitations de son œuvre. IV À la question de savoir

966 ut pas moins responsable de certaines limitations de son œuvre. IV À la question de savoir ce que les Suisses romand

967 limitations de son œuvre. IV À la question de savoir ce que les Suisses romands peuvent apporter de meilleur à la c

968 avoir ce que les Suisses romands peuvent apporter de meilleur à la culture, je réponds donc sans hésiter que c’est surtout

969 nce du fédéralisme vécu. Nous n’avons pas produit de génies du premier ordre, à part Rousseau, mais beaucoup d’excellents

970 du premier ordre, à part Rousseau, mais beaucoup d’ excellents ou même de grands esprits qui avaient ce sens, trop rare ch

971 part Rousseau, mais beaucoup d’excellents ou même de grands esprits qui avaient ce sens, trop rare chez nos voisins. Cet a

972 e revêt une importance particulière dans le monde de cette deuxième moitié du xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’app

973 u xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’apport de l’Europe au tiers-monde, tout enfiévré par les virus nationalistes qu

974 ise totalitaire ont propagés. L’apport spécifique de la Suisse étant le sens du fédéralisme, et ce sens étant lié, nous l’

975 , et ce sens étant lié, nous l’avons vu, au génie de la culture en Europe, la question qui se pose maintenant est de savoi

976 en Europe, la question qui se pose maintenant est de savoir comment nous saurons illustrer notre vocation décisive dans l’

977 notre vocation décisive dans l’existence concrète de nos vies cantonales. Ici je rejoins le propos de l’entreprise très op

978 de nos vies cantonales. Ici je rejoins le propos de l’entreprise très opportune qui nous réunit. Deux erreurs de méthode

979 rise très opportune qui nous réunit. Deux erreurs de méthode menacent toute tentative de réveil culturel en Suisse romande

980 Deux erreurs de méthode menacent toute tentative de réveil culturel en Suisse romande : l’esprit de clocher et l’esprit d

981 e de réveil culturel en Suisse romande : l’esprit de clocher et l’esprit d’administration. L’esprit de clocher tend à conf

982 Suisse romande : l’esprit de clocher et l’esprit d’ administration. L’esprit de clocher tend à confondre l’amour fédéralis

983 de clocher et l’esprit d’administration. L’esprit de clocher tend à confondre l’amour fédéraliste de la diversité avec la

984 t de clocher tend à confondre l’amour fédéraliste de la diversité avec la sauvegarde organisée, et si possible officielle,

985 sauvegarde organisée, et si possible officielle, de nos particularismes les plus désuets. Il voudrait que chacune de nos

986 arismes les plus désuets. Il voudrait que chacune de nos cités se suffise à elle-même dans tous les domaines : université,

987 iversité, radio, publications, etc. Et plutôt que de reconnaître que cela n’est pas possible, en plus d’un cas, il pousse

988 reconnaître que cela n’est pas possible, en plus d’ un cas, il pousse à préférer des solutions médiocres, mais « bien de c

989 e à préférer des solutions médiocres, mais « bien de chez nous », aux avantages que pourrait procurer une coopération sans

990 u pays. Votre congrès ayant pour premier objectif de surmonter cette tendance défensive, faussement traditionnelle et auta

991 faussement traditionnelle et autarcique, inutile d’ insister sur ce point. Mais c’est une autre erreur, inverse de la prem

992 ur ce point. Mais c’est une autre erreur, inverse de la première, qui ne cessera de vous tenter : celle de l’organisation

993 re erreur, inverse de la première, qui ne cessera de vous tenter : celle de l’organisation rationnelle d’activités qui par

994 a première, qui ne cessera de vous tenter : celle de l’organisation rationnelle d’activités qui par essence, ne le sont pa

995 vous tenter : celle de l’organisation rationnelle d’ activités qui par essence, ne le sont pas. Tout le secret du fédéralis

996 . Tout le secret du fédéralisme réside dans l’art de distinguer, de cas en cas, ce qui marcherait mieux en étant centralis

997 t du fédéralisme réside dans l’art de distinguer, de cas en cas, ce qui marcherait mieux en étant centralisé et ce qui mar

998 trop petites pour se payer chacune un laboratoire de recherches nucléaires, pour ne prendre que cet exemple. Mais qu’on ne

999 ites pour que s’y développent à foison des écoles de peintres, des galeries d’exposition, des troupes d’acteurs, des group

1000 ent à foison des écoles de peintres, des galeries d’ exposition, des troupes d’acteurs, des groupes d’écrivains, voire des

1001 peintres, des galeries d’exposition, des troupes d’ acteurs, des groupes d’écrivains, voire des petites revues qui exprime

1002 d’exposition, des troupes d’acteurs, des groupes d’ écrivains, voire des petites revues qui expriment ces groupes avec l’i

1003 sont tout de même devenues des foyers rayonnants de créations du premier ordre. Et cela, je crois, pour les deux raisons

1004 : premièrement, la passion créatrice un peu folle de jeunes gens qui se groupaient en écoles, autour d’un maître du métier

1005 e jeunes gens qui se groupaient en écoles, autour d’ un maître du métier ; secondement, le sens de la dépense magnifique, l

1006 tour d’un maître du métier ; secondement, le sens de la dépense magnifique, le goût de la nouveauté et du somptueux, qui c

1007 dement, le sens de la dépense magnifique, le goût de la nouveauté et du somptueux, qui caractérisent tant de princes et de

1008 u somptueux, qui caractérisent tant de princes et de grands marchands de l’époque. Il est trop clair qu’à l’absence de cet

1009 actérisent tant de princes et de grands marchands de l’époque. Il est trop clair qu’à l’absence de cette passion créatrice

1010 nds de l’époque. Il est trop clair qu’à l’absence de cette passion créatrice et de ce sens du mécénat, nul comité de coord

1011 lair qu’à l’absence de cette passion créatrice et de ce sens du mécénat, nul comité de coordination ne pourra jamais reméd

1012 on créatrice et de ce sens du mécénat, nul comité de coordination ne pourra jamais remédier. Les comités ne peuvent faire,

1013 e est faite par des passions individuelles et par de petits groupes qui ne craignent pas de passer pour extravagants ou ex

1014 les et par de petits groupes qui ne craignent pas de passer pour extravagants ou excessifs. Les comités sont par définitio

1015 prudents et économes : leur rôle est normalement de rationaliser les activités dont ils s’occupent, pour les rendre plus

1016 es ou plus rentables. Mais la culture vivante vit d’ imprudence, et prospère dans le gaspillage des forces et des sommes. J

1017 s soyons encore, en Suisse romande, aux antipodes de ce climat d’excitation intellectuelle et artistique. Nos habitudes ut

1018 re, en Suisse romande, aux antipodes de ce climat d’ excitation intellectuelle et artistique. Nos habitudes utilitaires, no

1019 nitiatives hardies et protégeant en revanche trop de médiocrité pour peu qu’elles aient été un jour inscrites à quelque bu

1020 lles aient été un jour inscrites à quelque budget d’ État, et sous prétexte de répartition géographique équitable — ce qui

1021 es aient été un jour inscrites à quelque budget d’ État , et sous prétexte de répartition géographique équitable — ce qui n’es

1022 éralisme — c’est tout cela qui mérite aujourd’hui d’ inquiéter les amis de la culture, et c’est aussi tout cela qui menace

1023 cela qui mérite aujourd’hui d’inquiéter les amis de la culture, et c’est aussi tout cela qui menace dans ses sources notr

1024 tre Suisse fédéraliste. Mais ce n’est pas le fait de supprimer nos douanes qui mettrait en danger nos « raisons d’être » !

1025 nos douanes qui mettrait en danger nos « raisons d’ être » ! C’est bien plutôt le fait de ne plus s’intéresser qu’au nivea

1026 os « raisons d’être » ! C’est bien plutôt le fait de ne plus s’intéresser qu’au niveau de notre vie matérielle, de traiter

1027 ’intéresser qu’au niveau de notre vie matérielle, de traiter la culture en mendiante, de refuser de la faire participer à

1028 e matérielle, de traiter la culture en mendiante, de refuser de la faire participer à une prospérité économique sans précé

1029 e, de traiter la culture en mendiante, de refuser de la faire participer à une prospérité économique sans précédent. Nos r

1030 prospérité économique sans précédent. Nos raisons d’ être et de rester Suisses ne sont pas des raisons économiques. Le fédé

1031 économique sans précédent. Nos raisons d’être et de rester Suisses ne sont pas des raisons économiques. Le fédéralisme, j

1032 s raisons économiques. Le fédéralisme, j’ai tenté de vous le montrer une fois de plus, vit des mêmes réalités spirituelles

1033 es, et prend ses sources dans les mêmes attitudes de pensée que la culture créatrice. On ne sauvera pas l’un sans l’autre.

1034 era pas l’un sans l’autre. c. Rougemont Denis de , « Le fédéralisme et notre temps », Cahiers de l’Alliance culturelle

1035 is de, « Le fédéralisme et notre temps », Cahiers de l’Alliance culturelle romande, Genève, mars 1963, p. 15-19.

1036 lu avec un étonnement croissant le petit article de M. Chiti-Batelli dans votre numéro de décembre. Je me demandais au dé

1037 tit article de M. Chiti-Batelli dans votre numéro de décembre. Je me demandais au début à quels « Européens » l’auteur s’e

1038 ’auteur s’en prenait, qui d’une part refuseraient de reconnaître les apports judaïque, chrétien et arabe, à la formation d

1039 ports judaïque, chrétien et arabe, à la formation de la culture européenne, d’autre part réduiraient l’Europe à l’anticomm

1040 hique mais « géographique ». N’ayant jamais connu d’ « Européens » à ce point illettrés et fanatiques, j’attendais avec cur

1041 t ses publications qui sont « l’exemple typique » de l’altitude visée. Le CEC se livrerait donc à « l’effort vain et absur

1042 EC se livrerait donc à « l’effort vain et absurde de présenter une culture européenne unitaire » ; il nierait que l’Europe

1043 ionalisme culturel » au nom d’un « anticommunisme de type maccarthyste ». Si vos lecteurs prennent la peine de se reporter

1044 maccarthyste ». Si vos lecteurs prennent la peine de se reporter à l’une quelconque des publications du CEC (l’un de nos 5

1045 à l’une quelconque des publications du CEC (l’un de nos 52 bulletins , ou à Vingt-huit siècles d’Europe , ou le Dialog

1046 n de nos 52 bulletins , ou à Vingt-huit siècles d’ Europe , ou le Dialogue des cultures ou Les Chances de l’Europe , e

1047 e , ou le Dialogue des cultures ou Les Chances de l’Europe , etc.), ils partageront notre stupeur. M. Chiti-Batelli acc

1048 ont notre stupeur. M. Chiti-Batelli accuse le CEC d’ un « défaut capital d’esprit critique » qui « vicie » ses travaux. Que

1049 Chiti-Batelli accuse le CEC d’un « défaut capital d’ esprit critique » qui « vicie » ses travaux. Quelle est donc sa méthod

1050 daïsme ou le christianisme, quand nous ne cessons d’ écrire qu’avec Rome et Athènes ils sont les éléments fondamentaux de n

1051 ome et Athènes ils sont les éléments fondamentaux de notre culture, à nous opposer ma propre définition de l’Europe comme

1052 otre culture, à nous opposer ma propre définition de l’Europe comme « patrie des contradictions », etc. Bref, la méthode c

1053 contradictions », etc. Bref, la méthode critique de votre auteur consiste à lire à rebours tous nos écrits, et non pas à

1054 urs tous nos écrits, et non pas à les interpréter d’ une manière qui pourrait prêter à discussion, mais à les falsifier rad

1055 y ait une tradition « européenne » du fascisme et de ses procédés, comme le rappelle votre auteur — non sans une évidente

1056 dente Schadenfreude — c’est indéniable. Il y a eu de tout en Europe, de la sottise aussi, autant qu’ailleurs. La seule que

1057 — c’est indéniable. Il y a eu de tout en Europe, de la sottise aussi, autant qu’ailleurs. La seule question qu’on se pose

1058 qu’ailleurs. La seule question qu’on se pose est de savoir quelles sont les traditions qui doivent collaborer à notre « E

1059 formation », et à la vôtre. d. Rougemont Denis de , « À propos de la culture européenne », L’Europe en formation, Nice,

1060 ne culture européenne ?” publié dans notre numéro de décembre, nous avons reçu la lettre suivante de Denis de Rougemont, d

1061 o de décembre, nous avons reçu la lettre suivante de Denis de Rougemont, directeur du Centre européen de la culture. »

1062 f I. La puissance ou la liberté ? L’union de l’Europe ne pourra se faire qu’en vertu d’une volonté, mais il n’est

1063 aire qu’en vertu d’une volonté, mais il n’est pas de volonté sans but, sans quelque utopie directrice, imaginée, vue par l

1064 rice, imaginée, vue par l’esprit, et comme saisie d’ avance par sa passion maîtresse. Or, parmi les passions fondamentales

1065 i me paraissent les plus propres à motiver chez l’ homme soucieux de la chose publique la conception d’un but lointain, la vis

1066 les plus propres à motiver chez l’homme soucieux de la chose publique la conception d’un but lointain, la vision d’un ave

1067 homme soucieux de la chose publique la conception d’ un but lointain, la vision d’un avenir politique au sens large : et ce

1068 blique la conception d’un but lointain, la vision d’ un avenir politique au sens large : et ce sont le besoin de puissance

1069 ir politique au sens large : et ce sont le besoin de puissance et le besoin de liberté. Le premier porte à vouloir des rég

1070  : et ce sont le besoin de puissance et le besoin de liberté. Le premier porte à vouloir des régimes unitaires, centralisé

1071 ois simples et mécaniques, réglant tout le détail de l’existence : régimes totalitaires à la limite. Le second porte à dés

1072 viennent, ménageant les complexités et l’imprévu de l’existence ; régimes dont l’anarchie serait la limite, en prenant le

1073 tendu, ne furent jamais atteintes dans l’histoire de l’Europe. Mais en chemin vers la première, nous trouvons le règne de

1074 n chemin vers la première, nous trouvons le règne de Louis XIV, la doctrine des jacobins, le national-socialisme, le marxi

1075 marxisme-léninisme, le stalinisme et les devises de ces régimes : « Une foi, une loi, un roi », « Ein Volk, ein Reich, ei

1076 prison ». En proclamant que « le coup électrique de la Raison » doit se transmettre instantanément de Paris jusqu’à toute

1077 de la Raison » doit se transmettre instantanément de Paris jusqu’à toutes les extrémités du territoire national, Anarchars

1078 l’utopie unitaire, que la technique met à portée de nos mains. En chemin vers l’autre limite ou utopie, celle d’un plural

1079 s. En chemin vers l’autre limite ou utopie, celle d’ un pluralisme intégral, nous trouvons le régime féodal mais aussi les

1080 les brèves flambées du communisme anabaptiste ou de l’anarcho-syndicalisme. Ni l’une ni l’autre des deux tendances n’a ja

1081 ue part entre les deux extrémités, et ainsi tient de toutes les deux. Mais on remarque, chez les initiateurs des mouvement

1082 on remarque, chez les initiateurs des mouvements de pensée et d’action politique, des dispositions dominantes qui détermi

1083 chez les initiateurs des mouvements de pensée et d’ action politique, des dispositions dominantes qui déterminent nettemen

1084 rces vives à faire jouer ; l’un se soucie d’abord de la stabilité, l’autre plutôt de la fluidité ; l’un fait confiance aux

1085 se soucie d’abord de la stabilité, l’autre plutôt de la fluidité ; l’un fait confiance aux règlements et aux décrets, l’au

1086 aux règlements et aux décrets, l’autre aux règles d’ action commune et aux méthodes. Mais la volonté ou l’initiative d’un

1087 et aux méthodes. Mais la volonté ou l’initiative d’ un seul n’aurait aucune chance de succès si elle ne rencontrait dans l

1088 ou l’initiative d’un seul n’aurait aucune chance de succès si elle ne rencontrait dans les masses des prédispositions de

1089 asses des prédispositions de même nature, quoique de signe inverse : la volonté de puissance d’un dictateur réussit dans l

1090 ême nature, quoique de signe inverse : la volonté de puissance d’un dictateur réussit dans la mesure exacte où elle rencon

1091 uoique de signe inverse : la volonté de puissance d’ un dictateur réussit dans la mesure exacte où elle rencontre et satisf

1092 encontre et satisfait un besoin largement partagé de subir la puissance d’un autre, d’être commandé, d’obéir, donc d’être

1093 un besoin largement partagé de subir la puissance d’ un autre, d’être commandé, d’obéir, donc d’être libéré de sa propre li

1094 rgement partagé de subir la puissance d’un autre, d’ être commandé, d’obéir, donc d’être libéré de sa propre liberté. Et de

1095 e subir la puissance d’un autre, d’être commandé, d’ obéir, donc d’être libéré de sa propre liberté. Et de même, l’initiati

1096 ssance d’un autre, d’être commandé, d’obéir, donc d’ être libéré de sa propre liberté. Et de même, l’initiative d’un animat

1097 tre, d’être commandé, d’obéir, donc d’être libéré de sa propre liberté. Et de même, l’initiative d’un animateur sans pouvo

1098 ré de sa propre liberté. Et de même, l’initiative d’ un animateur sans pouvoir contraignant n’est féconde que dans la mesur

1099 le éveille et libère chez beaucoup la possibilité de s’affirmer, de se charger de ses propres responsabilités, et donc d’a

1100 ibère chez beaucoup la possibilité de s’affirmer, de se charger de ses propres responsabilités, et donc d’actualiser à son

1101 ucoup la possibilité de s’affirmer, de se charger de ses propres responsabilités, et donc d’actualiser à son échelle sa vo

1102 e charger de ses propres responsabilités, et donc d’ actualiser à son échelle sa volonté de puissance personnelle. Parmi le

1103 és, et donc d’actualiser à son échelle sa volonté de puissance personnelle. Parmi les hommes que le souci de la chose publ

1104 le sa volonté de puissance personnelle. Parmi les hommes que le souci de la chose publique conduit à prendre part à l’élaborat

1105 ssance personnelle. Parmi les hommes que le souci de la chose publique conduit à prendre part à l’élaboration des plans d’

1106 conduit à prendre part à l’élaboration des plans d’ avenir européen, je vois deux types intermédiaires, entre ceux que l’o

1107 rofesseur. Ils ont en commun une volonté déclarée d’ objectivité (technique ou scientifique), et une méfiance affichée à l’

1108 s des deux autres types. Mais peut-être s’agit-il d’ un double refoulement. Chez le manager, la volonté de puissance ne se

1109 n double refoulement. Chez le manager, la volonté de puissance ne se traduit que d’une manière abstraite, en termes d’orga

1110 anager, la volonté de puissance ne se traduit que d’ une manière abstraite, en termes d’organisation sans défaut, et par le

1111 ermes d’organisation sans défaut, et par le souci d’ éliminer l’imprévu, l’improvisation, l’excès de « jeu » dans les rouag

1112 ci d’éliminer l’imprévu, l’improvisation, l’excès de « jeu » dans les rouages ; l’idée de liberté se trouvant obscurément

1113 ion, l’excès de « jeu » dans les rouages ; l’idée de liberté se trouvant obscurément assimilée à celle d’atteinte aux droi

1114 liberté se trouvant obscurément assimilée à celle d’ atteinte aux droits acquis, fussent-ils les souverainetés traditionnel

1115 fussent-ils les souverainetés traditionnelles des États , de plus en plus incompatibles avec les libertés de la personne… Born

1116 , de plus en plus incompatibles avec les libertés de la personne… Bornons là cette esquisse caractérologique des faiseurs

1117 s là cette esquisse caractérologique des faiseurs d’ utopies et de plans, et de leurs critiques : elle reste à écrire, on l

1118 quisse caractérologique des faiseurs d’utopies et de plans, et de leurs critiques : elle reste à écrire, on le voit. Il m’

1119 érologique des faiseurs d’utopies et de plans, et de leurs critiques : elle reste à écrire, on le voit. Il m’importait seu

1120 te à écrire, on le voit. Il m’importait seulement de situer ma position, c’est-à-dire mon option très nettement pluraliste

1121 seuil des considérations qui suivent sur l’avenir d’ une Europe unie. ⁂ II. L’attitude fédéraliste L’attitude fédéral

1122 ne serait donc : — ni totalement unifiée autour d’ un centre, — ni simplement liée par l’alliance temporaire d’une vingta

1123 e, — ni simplement liée par l’alliance temporaire d’ une vingtaine d’États absolument souverains, — mais dotée d’un pouvoir

1124 nt liée par l’alliance temporaire d’une vingtaine d’ États absolument souverains, — mais dotée d’un pouvoir supérieur aux n

1125 liée par l’alliance temporaire d’une vingtaine d’ États absolument souverains, — mais dotée d’un pouvoir supérieur aux nation

1126 taine d’États absolument souverains, — mais dotée d’ un pouvoir supérieur aux nations, fortement établi au bénéfice des aut

1127 ure du cercle aux yeux de la logique rationaliste de nos pères. En revanche, elle apparaît conforme à la logique déduite d

1128 de moitié du xxe siècle. Mais en fait, le projet d’ une Europe fédérale est antérieur à ces deux stades récents de notre a

1129 fédérale est antérieur à ces deux stades récents de notre aventure intellectuelle, et il en demeure indépendant. (Le prem

1130 t véritablement la projection au plan continental d’ une notion de l’homme dans la cité qui est constitutive de l’Europe, e

1131 nt la projection au plan continental d’une notion de l’homme dans la cité qui est constitutive de l’Europe, et sans laquel

1132 projection au plan continental d’une notion de l’ homme dans la cité qui est constitutive de l’Europe, et sans laquelle nos s

1133 tion de l’homme dans la cité qui est constitutive de l’Europe, et sans laquelle nos sciences et nos logiques ne seraient p

1134 u n’auraient pas eu lieu. Lors du premier congrès de l’Union européenne des fédéralistes, qui se tint à Montreux en 1947,

1135 es, qui se tint à Montreux en 1947, j’avais tenté de situer à grands traits cette idée de l’homo europaeus dans la conjonc

1136 ’avais tenté de situer à grands traits cette idée de l’homo europaeus dans la conjoncture politique d’où allait naître le

1137 de l’homo europaeus dans la conjoncture politique d’ où allait naître le Mouvement européen. S’agissant de reprendre ici la

1138 ù allait naître le Mouvement européen. S’agissant de reprendre ici la description de l’ensemble du projet, je me vois rame

1139 opéen. S’agissant de reprendre ici la description de l’ensemble du projet, je me vois ramené, inévitablement, à son point

1140 t, je me vois ramené, inévitablement, à son point de départ, qui est l’homme de notre Europe, redéfini dans les catégories

1141 inévitablement, à son point de départ, qui est l’ homme de notre Europe, redéfini dans les catégories concrètes du présent.

1142 tablement, à son point de départ, qui est l’homme de notre Europe, redéfini dans les catégories concrètes du présent. Tou

1143 sent. Toute politique implique une certaine idée de l’homme, et contribue à promouvoir un certain type d’humanité, qu’on

1144 Toute politique implique une certaine idée de l’ homme , et contribue à promouvoir un certain type d’humanité, qu’on le veuil

1145 ’homme, et contribue à promouvoir un certain type d’ humanité, qu’on le veuille ou non, qu’on le sache ou non. Quelle est d

1146 on le sache ou non. Quelle est donc la définition de l’homme sur laquelle nous pouvons tomber d’accord, ou pour mieux dire

1147 sache ou non. Quelle est donc la définition de l’ homme sur laquelle nous pouvons tomber d’accord, ou pour mieux dire, sur la

1148 s ne serions pas ici si nous pensions que le type d’ homme le plus souhaitable est l’individu isolé, dégagé de toute respon

1149 ne serions pas ici si nous pensions que le type d’ homme le plus souhaitable est l’individu isolé, dégagé de toute responsabil

1150 le plus souhaitable est l’individu isolé, dégagé de toute responsabilité vis-à-vis de la communauté. Car, dans ce cas, no

1151 nous pensions avec Hitler et les staliniens que l’ homme n’est qu’un soldat politique, totalement absorbé par le service de la

1152 ldat politique, totalement absorbé par le service de la communauté. Car alors nous serions de l’autre côté du rideau de fe

1153 service de la communauté. Car alors nous serions de l’autre côté du rideau de fer, en esprit tout au moins. Si nous somme

1154 Car alors nous serions de l’autre côté du rideau de fer, en esprit tout au moins. Si nous sommes ici, c’est que nous savo

1155 . Si nous sommes ici, c’est que nous savons que l’ homme est un être doublement responsable : vis-à-vis de sa vocation propre

1156 ce. Aux individualistes nous rappelons donc que l’ homme ne peut se réaliser intégralement sans se trouver engagé du même coup

1157 rendre chaque individu plus libre dans l’exercice de sa vocation. L’homme est donc à la fois libre et engagé, à la fois au

1158 vidu plus libre dans l’exercice de sa vocation. L’ homme est donc à la fois libre et engagé, à la fois autonome et solidaire.

1159 i qu’il doit à son prochain — indissolubles. Cet homme qui vit dans la tension, le débat créateur, le dialogue permanent, c’

1160 es humains, qui favorisent trois types différents de régimes politiques, et sont en retour favorisés par eux. À l’homme co

1161 itiques, et sont en retour favorisés par eux. À l’ homme considéré comme pur individu, libre mais non engagé, correspond un ré

1162 ésordre, lequel prépare toujours la tyrannie. À l’ homme considéré comme soldat politique, totalement engagé mais non libre, c

1163 bre, correspond le régime totalitaire. Enfin, à l’ homme considéré comme personne, à la fois libre et engagé, et vivant dans l

1164 politique sans liberté. Car la personne, c’est l’ homme réel, et les deux autres ne sont que des déviations morbides, des dém

1165 sont que des déviations morbides, des démissions de l’humanité complète. La personne n’est pas à mi-chemin entre la peste

1166 le choléra, elle représente la santé civique. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre celui qu

1167 le représente la santé civique. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre celui qui meurt de s

1168 lave n’est pas à mi-chemin entre celui qui meurt de soif et celui qui se noie. Et, de même, le fédéralisme ne naîtra jama

1169 oie. Et, de même, le fédéralisme ne naîtra jamais d’ un habile dosage d’anarchie et de dictature, de particularisme borné e

1170 e fédéralisme ne naîtra jamais d’un habile dosage d’ anarchie et de dictature, de particularisme borné et de centralisation

1171 ne naîtra jamais d’un habile dosage d’anarchie et de dictature, de particularisme borné et de centralisation oppressive. L

1172 is d’un habile dosage d’anarchie et de dictature, de particularisme borné et de centralisation oppressive. Le fédéralisme

1173 rchie et de dictature, de particularisme borné et de centralisation oppressive. Le fédéralisme est sur un autre plan que c

1174 contrent les dictateurs sont au contraire le fait de groupes de citoyens responsables, c’est-à-dire des personnes fédérées

1175 s dictateurs sont au contraire le fait de groupes de citoyens responsables, c’est-à-dire des personnes fédérées.2 On voi

1176 des personnes fédérées.2 On voit que le passage de la personne au fédéralisme s’opère tout naturellement, et presque irr

1177 sistiblement, le second n’étant que la projection de la première au plan politique, en ce sens précis que les éléments ant

1178 leur composition dans la personne sont homologues de ceux qui trouvent leur composition dans le fédéralisme : ici l’indivi

1179 ue ne pouvant d’ailleurs être maintenu qu’au prix d’ une vigilance toujours alertée, de rétablissements, ajustements, réarr

1180 tenu qu’au prix d’une vigilance toujours alertée, de rétablissements, ajustements, réarrangements, inventions et créations

1181 al compassées » comme dit Descartes. C’est un art de composer, quand il s’agit d’élaborer une constitution et des lois, et

1182 cartes. C’est un art de composer, quand il s’agit d’ élaborer une constitution et des lois, et une méthode de pilotage quan

1183 orer une constitution et des lois, et une méthode de pilotage quand il s’agit de gouverner entre le Charybde de l’anarchie

1184 lois, et une méthode de pilotage quand il s’agit de gouverner entre le Charybde de l’anarchie des particularismes et le S

1185 ge quand il s’agit de gouverner entre le Charybde de l’anarchie des particularismes et le Scylla de la centralisation tota

1186 de de l’anarchie des particularismes et le Scylla de la centralisation totalitaire. Cet art et cette méthode ne vont pas s

1187 vées, sans secrets du métier, mais il serait vain d’ en faire un traité théorique. Plutôt que d’essayer de les déduire dans

1188 t vain d’en faire un traité théorique. Plutôt que d’ essayer de les déduire dans l’abstrait, observons des exemples réussis

1189 n faire un traité théorique. Plutôt que d’essayer de les déduire dans l’abstrait, observons des exemples réussis de fédéra

1190 e dans l’abstrait, observons des exemples réussis de fédérations politiques — les États-Unis et la Suisse. Bien que ces ré

1191 la Suisse. Bien que ces régimes se soient formés d’ une manière empirique, tout se passe comme si les hommes d’État et les

1192 ix du renoncement formel et vigilant à toute idée d’ hégémonie organisatrice, exercée par l’une des nations composantes. La

1193 e populaire — et d’ailleurs partagée par certains hommes d’États européens — selon laquelle une fédération ne peut être que l’

1194 aire — et d’ailleurs partagée par certains hommes d’ États européens — selon laquelle une fédération ne peut être que l’œuv

1195 re — et d’ailleurs partagée par certains hommes d’ États européens — selon laquelle une fédération ne peut être que l’œuvre d’

1196 laquelle une fédération ne peut être que l’œuvre d’ un tout-puissant « fédérateur » (potentat ou État), n’est confirmée pa

1197 re d’un tout-puissant « fédérateur » (potentat ou État ), n’est confirmée par rien dans notre histoire, et tout la réfute en

1198 t tout la réfute en pratique. Si un despote ou un État impérialiste détient la force nécessaire, il ne fédère pas, il annexe

1199 principes fédérateurs, même négatifs. Mais qu’un État ou une coalition, disposant de l’hégémonie, décident expressément d’y

1200 tifs. Mais qu’un État ou une coalition, disposant de l’hégémonie, décident expressément d’y renoncer au profit d’ensemble

1201 , disposant de l’hégémonie, décident expressément d’ y renoncer au profit d’ensemble plus vaste, c’est-à-dire déposent leur

1202 nie, décident expressément d’y renoncer au profit d’ ensemble plus vaste, c’est-à-dire déposent leur surplus de moyens tech

1203 le plus vaste, c’est-à-dire déposent leur surplus de moyens techniques et de richesses dans une caisse commune, ils agisse

1204 ire déposent leur surplus de moyens techniques et de richesses dans une caisse commune, ils agissent alors en fondateurs d

1205 caisse commune, ils agissent alors en fondateurs d’ une fédération. Ne mérite donc le titre de fédérateur que le groupe, o

1206 dateurs d’une fédération. Ne mérite donc le titre de fédérateur que le groupe, ou l’État, ou la communauté d’États, ou le

1207 e donc le titre de fédérateur que le groupe, ou l’ État , ou la communauté d’États, ou le parti politique, qui agit comme cata

1208 rateur que le groupe, ou l’État, ou la communauté d’ États, ou le parti politique, qui agit comme catalyseur de volontés li

1209 teur que le groupe, ou l’État, ou la communauté d’ États , ou le parti politique, qui agit comme catalyseur de volontés libres,

1210 ou le parti politique, qui agit comme catalyseur de volontés libres, comme maître de sagesse, ou comme inventeur, proposa

1211 comme catalyseur de volontés libres, comme maître de sagesse, ou comme inventeur, proposant une vision qui se trouve corre

1212 e trouve correspondre à la fois aux besoins réels d’ une communauté en puissance, et à des solutions qui figurent l’optimum

1213 gurent l’optimum entre les maxima contradictoires de la liberté individuelle et de la solidarité sociale. L’histoire suiss

1214 ima contradictoires de la liberté individuelle et de la solidarité sociale. L’histoire suisse illustre à l’envi ce process

1215 L’histoire suisse illustre à l’envi ce processus de création fédéraliste par négation de toute hégémonie. Chaque fois qu

1216 ce processus de création fédéraliste par négation de toute hégémonie. Chaque fois qu’un des cantons plus riche ou plus pe

1217 peuplé que les autres, comme Zurich, ou un groupe de cantons coalisés au nom de leurs intérêts particuliers, ou de leur id

1218 oalisés au nom de leurs intérêts particuliers, ou de leur idéologie, a cru pouvoir imposer sa primauté, les autres se sont

1219 Lors de la dernière crise grave, la guerre civile de 1847 opposant catholiques et protestants (le Sonderbund ou « Alliance

1220 atholiques, assez analogue à la « Sécession » des États sudistes de l’Amérique), les vainqueurs n’ont eu rien de plus pressé

1221 ez analogue à la « Sécession » des États sudistes de l’Amérique), les vainqueurs n’ont eu rien de plus pressé que de rendr

1222 , les vainqueurs n’ont eu rien de plus pressé que de rendre aux vaincus leur pleine égalité de droits. Et de cet acte de r

1223 ssé que de rendre aux vaincus leur pleine égalité de droits. Et de cet acte de renoncement à l’hégémonie conquise, a résul

1224 dre aux vaincus leur pleine égalité de droits. Et de cet acte de renoncement à l’hégémonie conquise, a résulté la Constitu

1225 cus leur pleine égalité de droits. Et de cet acte de renoncement à l’hégémonie conquise, a résulté la Constitution de 1848

1226 à l’hégémonie conquise, a résulté la Constitution de 1848, base de notre État fédératif moderne. C’est pourquoi la Suisse

1227 conquise, a résulté la Constitution de 1848, base de notre État fédératif moderne. C’est pourquoi la Suisse ne verra jamai

1228 a résulté la Constitution de 1848, base de notre État fédératif moderne. C’est pourquoi la Suisse ne verra jamais sans méfi

1229 fiance certains « grands » s’arroger l’initiative d’ une fédération continentale ou mondiale. L’échec de Napoléon, puis cel

1230 ’une fédération continentale ou mondiale. L’échec de Napoléon, puis celui d’Hitler, dans leurs tentatives pour faire l’uni

1231 tale ou mondiale. L’échec de Napoléon, puis celui d’ Hitler, dans leurs tentatives pour faire l’unité de l’Europe, sont des

1232 ’Hitler, dans leurs tentatives pour faire l’unité de l’Europe, sont des avertissements utiles. Ils nous confirment dans l’

1233 nt conduire qu’à l’unification forcée, caricature de l’union véritable. Deuxième principe. Le fédéralisme ne peut naître

1234 e ne peut naître que du renoncement à tout esprit de système idéologique ou technocratique. Ce que je viens de dire au suj

1235 ue je viens de dire au sujet de l’impérialisme ou de l’hégémonie d’une nation vaut également pour l’impérialisme d’une idé

1236 dire au sujet de l’impérialisme ou de l’hégémonie d’ une nation vaut également pour l’impérialisme d’une idéologie. On pour

1237 e d’une nation vaut également pour l’impérialisme d’ une idéologie. On pourrait définir l’attitude fédéraliste comme un ref

1238 fédéraliste comme un refus constant et instinctif de recourir aux solutions systématiques, aux plans simples de lignes, cl

1239 ir aux solutions systématiques, aux plans simples de lignes, clairs et satisfaisants pour la logique, mais par là même inf

1240 destructeurs des diversités qui sont la condition de toute vie organique. Rappelons-nous toujours que fédérer, ce n’est pa

1241 tre en ordre d’après un plan géométrique à partir d’ un centre ou d’un axe ; fédérer, c’est tout simplement arranger ensemb

1242 après un plan géométrique à partir d’un centre ou d’ un axe ; fédérer, c’est tout simplement arranger ensemble, composer ce

1243 s caractères particuliers, qu’il s’agit à la fois de respecter, et d’articuler dans un tout. Troisième principe. Le fédér

1244 iculiers, qu’il s’agit à la fois de respecter, et d’ articuler dans un tout. Troisième principe. Le fédéralisme ne connaît

1245 Troisième principe. Le fédéralisme ne connaît pas de problème des minorités. On objectera que le totalitarisme, lui aussi,

1246 le Sénat garantit l’individualité qualitative des États membres, qui y délèguent le même nombre de représentants quelle que s

1247 des États membres, qui y délèguent le même nombre de représentants quelle que soit leur population. Mais le jeu des minori

1248 qualités ne se traduit pas seulement dans le mode d’ élection du Conseil des États (deux députés par canton), mais surtout,

1249 seulement dans le mode d’élection du Conseil des États (deux députés par canton), mais surtout, et d’une manière beaucoup pl

1250 États (deux députés par canton), mais surtout, et d’ une manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de la vie politi

1251 manière beaucoup plus efficace, dans les coutumes de la vie politique et culturelle, où l’on voit la Suisse romande et la

1252 nne jouer un rôle sans proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. Quatrième principe. L

1253 proportion avec le chiffre de leurs habitants ou de leurs kilomètres carrés. Quatrième principe. La fédération n’a pas p

1254 uatrième principe. La fédération n’a pas pour but d’ effacer les diversités et de fondre toutes les nations en un seul bloc

1255 tion n’a pas pour but d’effacer les diversités et de fondre toutes les nations en un seul bloc, mais, au contraire, de sau

1256 les nations en un seul bloc, mais, au contraire, de sauvegarder leurs qualités propres. La richesse de l’Europe et l’esse

1257 e sauvegarder leurs qualités propres. La richesse de l’Europe et l’essence même de sa culture seraient perdues si l’on ten

1258 ropres. La richesse de l’Europe et l’essence même de sa culture seraient perdues si l’on tentait d’unifier le continent, d

1259 me de sa culture seraient perdues si l’on tentait d’ unifier le continent, de tout y mélanger, et d’obtenir une sorte de na

1260 t perdues si l’on tentait d’unifier le continent, de tout y mélanger, et d’obtenir une sorte de nation européenne où Latin

1261 it d’unifier le continent, de tout y mélanger, et d’ obtenir une sorte de nation européenne où Latins et Germains, Slaves e

1262 inent, de tout y mélanger, et d’obtenir une sorte de nation européenne où Latins et Germains, Slaves et Anglo-Saxons, Scan

1263 ois et coutumes, qui ne pourrait satisfaire aucun de ces groupes ; et qui les brimerait tous. L’attitude fédéraliste veut

1264 veut une maîtrise du divers, comme tout art. Art de la composition, elle requiert à la fois et en même temps la vivacité

1265 ntrastes et leur harmonisation. Prenons l’exemple d’ une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’harmonie possible, dans un t

1266 exemple d’une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’ harmonie possible, dans un tableau, sans contrastes de couleurs et san

1267 rmonie possible, dans un tableau, sans contrastes de couleurs et sans nuances complexes ; de même que sans une vision d’en

1268 s nuances complexes ; de même que sans une vision d’ ensemble (celle de l’artiste) et hors de l’unité du tableau, il n’y au

1269 s ; de même que sans une vision d’ensemble (celle de l’artiste) et hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contra

1270 et hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que la simple juxtapos

1271 s tons, il n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre dans leur boîte. Pour que

1272 l n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre dans leur boîte. Pour que la qualit

1273 dans leur boîte. Pour que la qualité particulière d’ un rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut que ce rouge soit

1274 avec des verts, par exemple, dans l’unité globale d’ une œuvre au sein de laquelle s’opèrent alors mille échanges d’une inf

1275 u sein de laquelle s’opèrent alors mille échanges d’ une infinie complexité. Le totalitaire, lui, trouve plus simple et plu

1276 litaire, lui, trouve plus simple et plus efficace de broyer mécaniquement toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce

1277 toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce de brun, celui des chemises brunes par exemple, de sinistre mémoire. Et

1278 e de brun, celui des chemises brunes par exemple, de sinistre mémoire. Et voilà toute la différence entre l’harmonie fédér

1279 e une fonction propre, irremplaçable, comme celle d’ un organe dans un corps. Or, la vie normale du corps dépend de la vita

1280 dans un corps. Or, la vie normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses organes, de même que la vie d’un organe

1281 Or, la vie normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses organes, de même que la vie d’un organe dépend de son h

1282 normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses organes, de même que la vie d’un organe dépend de son harmonie av

1283 lité de chacun de ses organes, de même que la vie d’ un organe dépend de son harmonie avec tous les autres. Si les nations

1284 es organes, de même que la vie d’un organe dépend de son harmonie avec tous les autres. Si les nations de l’Europe arrivai

1285 son harmonie avec tous les autres. Si les nations de l’Europe arrivaient à se concevoir dans un rôle analogue, elles compr

1286 concession qu’on leur demande, ou une diminution de leur valeur propre. Elles comprendraient aussi que dans une fédératio

1287 as à se mélanger, mais au contraire à fonctionner de concert, chacune selon sa vocation. Ce ne serait pas une simple quest

1288 sa vocation. Ce ne serait pas une simple question de tolérance, vertu négative et qui naît le plus souvent du scepticisme,

1289 naît le plus souvent du scepticisme, mais plutôt de participation, vertu positive et qui naît d’une juste ambition. Chaqu

1290 utôt de participation, vertu positive et qui naît d’ une juste ambition. Chaque nation serait mise au défi de donner le mei

1291 juste ambition. Chaque nation serait mise au défi de donner le meilleur d’elle-même à sa manière et selon son génie. Après

1292 nation serait mise au défi de donner le meilleur d’ elle-même à sa manière et selon son génie. Après tout, le poumon n’a p

1293 lérer » le cœur. Tout ce qu’on lui demande, c’est d’ être un vrai poumon, d’être aussi poumon que possible, et, dans cette

1294 e qu’on lui demande, c’est d’être un vrai poumon, d’ être aussi poumon que possible, et, dans cette mesure même, il aidera

1295 uième principe. Le fédéralisme repose sur l’amour de la complexité, par contraste avec le simplisme brutal qui caractérise

1296 mplificateurs ». Lorsque les étrangers s’étonnent de l’extrême complication des institutions suisses, de cette espèce de m

1297 l’extrême complication des institutions suisses, de cette espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages

1298 ication des institutions suisses, de cette espèce de mouvement d’horlogerie fine que composent nos rouages communaux, cant

1299 nstitutions suisses, de cette espèce de mouvement d’ horlogerie fine que composent nos rouages communaux, cantonaux, fédéra

1300 x, fédéraux, si diversement engrenés, il convient de leur montrer que cette complexité — cause de tant de lenteurs et d’ex

1301 ient de leur montrer que cette complexité — cause de tant de lenteurs et d’excessives prudences — est la condition même de

1302 e cette complexité — cause de tant de lenteurs et d’ excessives prudences — est la condition même de nos libertés. C’est gr

1303 et d’excessives prudences — est la condition même de nos libertés. C’est grâce à elle que nos fonctionnaires sont rappelés

1304 au concret, et que nos législateurs sont obligés de garder un contact attentif avec les réalités humaines et naturelles d

1305 aines et naturelles du pays. La Suisse est formée d’ une multitude de groupes et d’organismes politiques, administratifs, c

1306 les du pays. La Suisse est formée d’une multitude de groupes et d’organismes politiques, administratifs, culturels, lingui

1307 a Suisse est formée d’une multitude de groupes et d’ organismes politiques, administratifs, culturels, linguistiques, relig

1308 ont pas les mêmes frontières, et qui se recoupent de cent manières différentes. Il est clair que des lois ou des instituti

1309 taire, brimeraient nécessairement un ou plusieurs de ces groupes, tendraient à réduire leur variété, et mutileraient ainsi

1310 eur variété, et mutileraient ainsi dans plusieurs de ses dimensions la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, i

1311 dans plusieurs de ses dimensions la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur t

1312 ux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plu

1313 s, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la

1314 créter sur table rase, de simplifier les réalités d’ un trait de plume, de tirer des plans à la règle, dans un bureau, et d

1315 table rase, de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle, dans un bureau, et de forcer en

1316 , de simplifier les réalités d’un trait de plume, de tirer des plans à la règle, dans un bureau, et de forcer ensuite leur

1317 de tirer des plans à la règle, dans un bureau, et de forcer ensuite leur exécution en écrasant tout ce qui résiste, ou sim

1318 se. Mais ce qu’on écrase ainsi, c’est la vitalité d’ un peuple. Une politique fédéraliste soucieuse de se mouler sur la réa

1319 d’un peuple. Une politique fédéraliste soucieuse de se mouler sur la réalité, toujours complexe, suppose infiniment plus

1320 alité, toujours complexe, suppose infiniment plus de soins, d’ingéniosité technique, et de compréhension des peuples qu’el

1321 jours complexe, suppose infiniment plus de soins, d’ ingéniosité technique, et de compréhension des peuples qu’elle adminis

1322 niment plus de soins, d’ingéniosité technique, et de compréhension des peuples qu’elle administre. Elle exige beaucoup plu

1323 ples qu’elle administre. Elle exige beaucoup plus de vrai sens politique. Finalement, si l’on y réfléchit, on s’aperçoit q

1324 ’aperçoit que la politique fédéraliste n’est rien d’ autre que la politique par excellence, c’est-à-dire l’art d’organiser

1325 e la politique par excellence, c’est-à-dire l’art d’ organiser la cité au bénéfice des citoyens. Tandis que les méthodes to

1326 lement à supprimer les diversités, par incapacité de les composer en un tout organique et vivant. Sixième principe. Une f

1327 ivant. Sixième principe. Une fédération se forme de proche en proche, par le moyen des personnes et des groupes, et non p

1328 s personnes et des groupes, et non point à partir d’ un centre ou par le moyen des gouvernements. Nous voyons la fédération

1329 opéenne se composer lentement, un peu partout, et de toutes sortes de manières. Ici, c’est une entente économique, là c’es

1330 er lentement, un peu partout, et de toutes sortes de manières. Ici, c’est une entente économique, là c’est une parenté cul

1331 lturelle qui s’affirme. Ici, ce sont deux églises de confessions voisines qui s’ouvrent l’une à l’autre, et là ce sont des

1332 s écoles, qui créent peu à peu des réseaux variés d’ échanges européens. Rien de tout cela n’est inutile. Et tout cela qui

1333 peu des réseaux variés d’échanges européens. Rien de tout cela n’est inutile. Et tout cela qui paraît si dispersé, si peu

1334 des structures complexes, dessine les linéaments d’ une ossature et le système des vaisseaux sanguins de ce qui deviendra

1335 une ossature et le système des vaisseaux sanguins de ce qui deviendra un jour le corps de l’Europe unie. Au-dessous et au-

1336 aux sanguins de ce qui deviendra un jour le corps de l’Europe unie. Au-dessous et au-dessus des gouvernements, l’Europe de

1337 n réalité, qu’elle ne le croit. C’est sur le plan de l’action gouvernementale que les oppositions et les rivalités éclaten

1338 ou deviennent irréductibles. Il paraît difficile d’ espérer que les gouvernements puissent jamais réaliser une union viabl

1339 s nations. Chacun sait qu’il serait déraisonnable de choisir comme arbitres d’un match les capitaines des équipes en prése

1340 il serait déraisonnable de choisir comme arbitres d’ un match les capitaines des équipes en présence. C’est pourtant bien c

1341 n présence. C’est pourtant bien ce qu’avait tenté de faire la SDN, qui en est morte, et ce qu’a tenté à nouveau l’ONU, que

1342 t ce qu’a tenté à nouveau l’ONU, que cela empêche de vivre. La fédération européenne ne saurait être l’œuvre des gouvernan

1343 e ne saurait être l’œuvre des gouvernants chargés de défendre les intérêts de leur nation contre le reste du monde, mais p

1344 des gouvernants chargés de défendre les intérêts de leur nation contre le reste du monde, mais peut être l’œuvre de group

1345 contre le reste du monde, mais peut être l’œuvre de groupes et de personnes qui ont pris l’initiative de se fédérer en de

1346 te du monde, mais peut être l’œuvre de groupes et de personnes qui ont pris l’initiative de se fédérer en dehors des gouve

1347 groupes et de personnes qui ont pris l’initiative de se fédérer en dehors des gouvernements nationaux (Congrès de l’Europe

1348 er en dehors des gouvernements nationaux (Congrès de l’Europe à La Haye en 1948, et ses suites) et qui, par le détour de l

1349 aye en 1948, et ses suites) et qui, par le détour de l’opinion publique et de groupes de pression économiques ou idéologiq

1350 s) et qui, par le détour de l’opinion publique et de groupes de pression économiques ou idéologiques, amèneront quelques p

1351 par le détour de l’opinion publique et de groupes de pression économiques ou idéologiques, amèneront quelques parlements à

1352 ux, c’est-à-dire supranationaux. On ne voit guère d’ autre voie possible ou praticable. Les USA ne sont pas dirigés par une

1353 le. Les USA ne sont pas dirigés par une assemblée de gouverneurs des cinquante États, ni la Suisse par les délégués des vi

1354 és par une assemblée de gouverneurs des cinquante États , ni la Suisse par les délégués des vingt-deux cantons. Ce serait impr

1355 . Ces deux fédérations sont gouvernées, au-dessus de leurs États, et en dehors d’eux, par un exécutif et un législatif iss

1356 x fédérations sont gouvernées, au-dessus de leurs États , et en dehors d’eux, par un exécutif et un législatif issus des peupl

1357 et un législatif issus des peuples et des groupes de tout ordre qui animent la vie publique. Septième principe. Une fédér

1358 s au contraire : pour l’avantage et la survivance de chacune des communautés constituantes et pour qu’elles puissent exerc

1359 r ensemble des fonctions qui dépassent les forces de chacune d’elle. Ni les menaces arabes puis mongoles, ni l’entreprise

1360 des fonctions qui dépassent les forces de chacune d’ elle. Ni les menaces arabes puis mongoles, ni l’entreprise des croisad

1361 chez nous, n’ont réussi à provoquer la fédération de nos craintes et de nos forces de défense. Aux yeux de l’histoire, la

1362 ussi à provoquer la fédération de nos craintes et de nos forces de défense. Aux yeux de l’histoire, la cause est entendue.

1363 er la fédération de nos craintes et de nos forces de défense. Aux yeux de l’histoire, la cause est entendue. Et quant aux

1364 — les colonies —, elles sont restées le fait des États en concurrence nationaliste : elles n’ont contribué qu’à notre divisi

1365 re ruine à deux reprises. En revanche, les treize États américains en 1783, et les vingt-deux cantons suisses en 1848, ont co

1366 gir comme une seule nation au niveau des réalités de leur époque. Ni les paniques générales, ni les délires de conquête n’

1367 époque. Ni les paniques générales, ni les délires de conquête n’ont jamais rien construit en Europe. Seules, les prises de

1368 mais rien construit en Europe. Seules, les prises de conscience dramatiques de l’incapacité de subsister isolément, et en

1369 ope. Seules, les prises de conscience dramatiques de l’incapacité de subsister isolément, et en même temps, la reconnaissa

1370 prises de conscience dramatiques de l’incapacité de subsister isolément, et en même temps, la reconnaissance des capacité

1371 on virtuelle, ont réussi à provoquer la formation d’ institutions fédératives durables. Les conséquences de la dernière gue

1372 stitutions fédératives durables. Les conséquences de la dernière guerre mondiale ont placé les nations européennes dans un

1373 s égards à celle des cantons suisses au lendemain de la guerre du Sonderbund, et notamment devant le double défi de sauveg

1374 du Sonderbund, et notamment devant le double défi de sauvegarder leurs libertés civiques et leurs coutumes nationales, mai

1375 ertés civiques et leurs coutumes nationales, mais d’ assumer aussi leurs tâches mondiales. ⁂ III. Dialectique du fédéral

1376 quelques mots, en une formule. C’est qu’elle est d’ un type organique plutôt que rationnel, et dialectique plutôt que seul

1377 vulgaire ; mais correspond assez bien aux formes de pensée introduites par la science relativiste.3 La pensée fédéralist

1378 nt elle une utopie bien cohérente qu’il s’agirait d’ imposer, ou des plans statiques qu’il faudrait réaliser en quatre ou c

1379 et gênantes. Elle cherche au contraire le secret d’ un équilibre souple et constamment mouvant entre des groupes qu’il s’a

1380 onstamment mouvant entre des groupes qu’il s’agit de composer en sauvegardant à la fois leur individualité et leurs relati

1381 omme on voudra, qui est le battement même du cœur de tout régime fédéraliste. L’oublier serait se condamner à retomber san

1382 sse dans un malentendu fondamental, que l’exemple de la vie politique suisse illustre très clairement. En effet, les mots

1383 , les mots fédération et fédéralisme sont compris de deux manières très différentes par les Suisses alémaniques et par les

1384 i signifie union, et qui évoque avant tout l’idée de centralisation. En Suisse romande, au contraire, ceux qui se proclame

1385 éralistes » sont en réalité les défenseurs jaloux de l’autonomie des cantons contre la centralisation. Pour les uns, fédér

1386 deux nécessités, dans la composition perpétuelle de ces deux forces de sens contraire, en vue de leur renforcement mutuel

1387 ans la composition perpétuelle de ces deux forces de sens contraire, en vue de leur renforcement mutuel. Ce dernier point

1388 ous aurons des fédéralistes préoccupés avant tout de sauvegarder les droits de chaque nation ou région contre les empiètem

1389 s préoccupés avant tout de sauvegarder les droits de chaque nation ou région contre les empiètements du pouvoir central. U

1390 sme véritable n’est ni dans l’une ni dans l’autre de ces tendances, mais bien dans leur coexistence acceptée, dans leur di

1391 e. Toutefois — et il m’importe au plus haut point de le préciser ici et de le souligner —, cette coexistence, ce dialogue,

1392 ’importe au plus haut point de le préciser ici et de le souligner —, cette coexistence, ce dialogue, cette tension ne doiv

1393 doivent pas être imaginés sous la forme négative d’ une tolérance mutuelle, d’une neutralisation des différences, d’un com

1394 sous la forme négative d’une tolérance mutuelle, d’ une neutralisation des différences, d’un compromis conclu par gain de

1395 e mutuelle, d’une neutralisation des différences, d’ un compromis conclu par gain de paix, quelque part à mi-chemin entre l

1396 n des différences, d’un compromis conclu par gain de paix, quelque part à mi-chemin entre les buts visés, qui sont l’établ

1397 in entre les buts visés, qui sont l’établissement de l’union générale et le respect des droits particuliers. Car cela ne c

1398 e qu’à une union trop faible mais bientôt accusée d’ oppression par ses membres, et à des droits trop limités mais taxés d’

1399 membres, et à des droits trop limités mais taxés d’ abusifs par le centre. La saine méthode fédéraliste consiste à disting

1400 distinguer dans tous les ordres, à chaque niveau, de cas en cas, ce qui doit être carrément centralisé pour bien fonctionn

1401 treront ce point : celui des transports, et celui de l’éducation. Il est facile de voir que chacun des membres d’une fédér

1402 ransports, et celui de l’éducation. Il est facile de voir que chacun des membres d’une fédération bénéficiera d’une organi

1403 ion. Il est facile de voir que chacun des membres d’ une fédération bénéficiera d’une organisation uniforme et centralisée

1404 e chacun des membres d’une fédération bénéficiera d’ une organisation uniforme et centralisée des chemins de fer, des poste

1405 s de fer, des postes et télécommunications, voire de l’aviation4, la fonction même de ces moyens coûteux étant de dépasser

1406 nications, voire de l’aviation4, la fonction même de ces moyens coûteux étant de dépasser les cadres physiques dans lesque

1407 on4, la fonction même de ces moyens coûteux étant de dépasser les cadres physiques dans lesquels s’exercent les autonomies

1408 ident que l’ensemble fédéral européen bénéficiera de la vitalité culturelle de chacun de ses membres : or cette vitalité n

1409 al européen bénéficiera de la vitalité culturelle de chacun de ses membres : or cette vitalité ne supporterait pas l’unifo

1410 n bénéficiera de la vitalité culturelle de chacun de ses membres : or cette vitalité ne supporterait pas l’uniformisation

1411 ne supporterait pas l’uniformisation des régimes d’ éducation, liés dans chacun de nos pays à des langues, des coutumes, d

1412 isation des régimes d’éducation, liés dans chacun de nos pays à des langues, des coutumes, des traditions religieuses, des

1413 a variété même conditionne la puissance créatrice de l’Europe. Il convient donc d’attribuer aux régions une totale autonom

1414 puissance créatrice de l’Europe. Il convient donc d’ attribuer aux régions une totale autonomie en matière d’enseignement (

1415 ibuer aux régions une totale autonomie en matière d’ enseignement (comme c’est le cas aux États-Unis et en Suisse). Les élé

1416 ats-Unis et en Suisse). Les éléments fondamentaux de culture commune étant par ailleurs assez forts pour assurer spontaném

1417 assez forts pour assurer spontanément la cohésion de l’ensemble, sans interventions fédérales. (Le cas de la recherche est

1418 l’ensemble, sans interventions fédérales. (Le cas de la recherche est très différent : dès que ses besoins dépassent les m

1419 dividus et les régions, se manifeste la nécessité d’ un Centre inspirant, équilibrant, coordonnant les efforts et veillant

1420 publics, il apparaîtra normal ou nécessaire soit de déléguer aux membres de la fédération l’administration locale d’activ

1421 normal ou nécessaire soit de déléguer aux membres de la fédération l’administration locale d’activités relevant en princip

1422 membres de la fédération l’administration locale d’ activités relevant en principe du pouvoir fédéral (régime fiscal, entr

1423 e fiscal, entretien des routes, par exemple) soit d’ admettre l’existence parallèle de services fédéraux et de services nat

1424 ar exemple) soit d’admettre l’existence parallèle de services fédéraux et de services nationaux ou régionaux (police, trib

1425 tre l’existence parallèle de services fédéraux et de services nationaux ou régionaux (police, tribunaux, par exemple) aux

1426 distinctes. Mais ceci ne change rien au principe de la méthode indiquée ci-dessus, et qui consiste à distinguer dans tous

1427 qui consiste à distinguer dans tous les domaines de la vie publique, au fur et à mesure de leur évolution, d’une part ce

1428 s domaines de la vie publique, au fur et à mesure de leur évolution, d’une part ce qu’il devient avantageux pour chacun de

1429 ’une part ce qu’il devient avantageux pour chacun de confier au pouvoir fédéral ; d’autre part, ce qu’il reste indispensab

1430 éral ; d’autre part, ce qu’il reste indispensable de laisser à la libre initiative des États ou régions, des groupes et de

1431 ndispensable de laisser à la libre initiative des États ou régions, des groupes et des individus. Étant bien entendu que les

1432 ndividuelles ou locales deviennent des phénomènes d’ ampleur publique, il est normal qu’un pouvoir central prenne la charge

1433 est normal qu’un pouvoir central prenne la charge de les organiser, rationaliser et simplifier, élargissant ainsi ses comp

1434 e coup les énergies individuelles ou locales pour de nouvelles créations ou conquêtes. En dernière analyse, nous pouvons d

1435 déralisme comme l’application à la chose publique d’ une méthode générale de travail et de création, qui rend compte du dyn

1436 cation à la chose publique d’une méthode générale de travail et de création, qui rend compte du dynamisme particulier de n

1437 ose publique d’une méthode générale de travail et de création, qui rend compte du dynamisme particulier de notre civilisat

1438 réation, qui rend compte du dynamisme particulier de notre civilisation : la libération permanente de nouvelles énergies,

1439 de notre civilisation : la libération permanente de nouvelles énergies, grâce à l’organisation croissante des activités i

1440 e nouvelle effectuée, correspond une organisation de la zone conquise, qui, ainsi colonisée, permet soit de se lancer vers

1441 zone conquise, qui, ainsi colonisée, permet soit de se lancer vers des aventures ou des explorations nouvelles, soit d’ac

1442 des aventures ou des explorations nouvelles, soit d’ accroître les possibilités de libération personnelle de l’homme.5 Du

1443 ions nouvelles, soit d’accroître les possibilités de libération personnelle de l’homme.5 Durant la première moitié du xx

1444 roître les possibilités de libération personnelle de l’homme.5 Durant la première moitié du xxe siècle, la plupart des

1445 e les possibilités de libération personnelle de l’ homme .5 Durant la première moitié du xxe siècle, la plupart des penseurs

1446 siècle, la plupart des penseurs européens, pris d’ angoisse devant l’essor technique, ont popularisé l’idée que la machin

1447 t popularisé l’idée que la machine était en passe d’ asservir l’homme. Étrange démission de l’esprit devant ses propres inv

1448 l’idée que la machine était en passe d’asservir l’ homme . Étrange démission de l’esprit devant ses propres inventions ! Car il

1449 it en passe d’asservir l’homme. Étrange démission de l’esprit devant ses propres inventions ! Car il est clair que la mach

1450 vrai responsable. Le mécanisme quel qu’il soit — de la machine-outil à l’État, du plan de travail d’un écrivain au plan d

1451 canisme quel qu’il soit — de la machine-outil à l’ État , du plan de travail d’un écrivain au plan de production d’un pool int

1452 u’il soit — de la machine-outil à l’État, du plan de travail d’un écrivain au plan de production d’un pool international,

1453 de la machine-outil à l’État, du plan de travail d’ un écrivain au plan de production d’un pool international, des habitud

1454 l’État, du plan de travail d’un écrivain au plan de production d’un pool international, des habitudes et routines privées

1455 an de travail d’un écrivain au plan de production d’ un pool international, des habitudes et routines privées aux règlement

1456 in de compte, comme à l’origine, qu’un auxiliaire de la vie créatrice, un moyen ordonné à sa fin. De même, il serait néfa

1457 nné à sa fin. De même, il serait néfaste et faux de considérer la centralisation, l’organisation, les lois fédérales comm

1458 , l’organisation, les lois fédérales comme autant de dangers en soi pour les libertés locales ou personnelles. Ces mécanis

1459 nnelles. Ces mécanismes ont pour fonction normale de décharger les communautés fédérées de tâches devenues trop lourdes po

1460 ion normale de décharger les communautés fédérées de tâches devenues trop lourdes pour elles, mais dont la bonne exécution

1461 lles, mais dont la bonne exécution ouvre à chacun de leurs citoyens des moyens de mieux vivre sa vie propre, et de plus li

1462 ution ouvre à chacun de leurs citoyens des moyens de mieux vivre sa vie propre, et de plus librement se choisir : sécurité

1463 ches indifférenciées et niveleuses ; possibilités de déplacement, donc de contacts ou d’éloignement à volonté, et par suit

1464 et niveleuses ; possibilités de déplacement, donc de contacts ou d’éloignement à volonté, et par suite d’élargissement de

1465 possibilités de déplacement, donc de contacts ou d’ éloignement à volonté, et par suite d’élargissement de la conscience ;

1466 contacts ou d’éloignement à volonté, et par suite d’ élargissement de la conscience ; faculté accrue de s’engager selon ses

1467 oignement à volonté, et par suite d’élargissement de la conscience ; faculté accrue de s’engager selon ses goûts, ses idée

1468 d’élargissement de la conscience ; faculté accrue de s’engager selon ses goûts, ses idées ou sa foi, mais aussi de se déga

1469 selon ses goûts, ses idées ou sa foi, mais aussi de se dégager de ses « fatalités » natives… N’est-ce point là ce que l’h

1470 ts, ses idées ou sa foi, mais aussi de se dégager de ses « fatalités » natives… N’est-ce point là ce que l’homme européen,

1471 « fatalités » natives… N’est-ce point là ce que l’ homme européen, depuis des siècles, appelle sa liberté ? Subordonner sans t

1472 fié, le collectif au personnel, tel est le secret de cette méthode, de cette « fonction dichotomique », par définition pro

1473 au personnel, tel est le secret de cette méthode, de cette « fonction dichotomique », par définition progressiste, libérat

1474 enant comme la traduction politique. Ayant défini de la sorte la santé de l’Europe à construire, je ne perdrai pas de temp

1475 tion politique. Ayant défini de la sorte la santé de l’Europe à construire, je ne perdrai pas de temps à rappeler les mala

1476 santé de l’Europe à construire, je ne perdrai pas de temps à rappeler les maladies qui la menacent en permanence. La tyran

1477 ladies qui la menacent en permanence. La tyrannie de l’État et de ses mécanismes, l’anarchie individualiste (ou impérialis

1478 s qui la menacent en permanence. La tyrannie de l’ État et de ses mécanismes, l’anarchie individualiste (ou impérialisme loca

1479 menacent en permanence. La tyrannie de l’État et de ses mécanismes, l’anarchie individualiste (ou impérialisme local) de

1480 l’anarchie individualiste (ou impérialisme local) de groupes qui se veulent souverains, comme si le reste du monde n’exist

1481 plus haut que ce sont, à la racine, les maladies de la personne elle-même. Car la personne sera toujours tentée soit de c

1482 e-même. Car la personne sera toujours tentée soit de céder à la pesanteur naturelle, aux routines, aux machines qu’elle s’

1483 lle s’est construites mais qu’elle accuse ensuite de l’asservir, cette mauvaise foi trahissant à vrai dire un manque de fo

1484 tte mauvaise foi trahissant à vrai dire un manque de foi ; soit de s’imaginer, comme la colombe de Kant, qu’elle volerait

1485 oi trahissant à vrai dire un manque de foi ; soit de s’imaginer, comme la colombe de Kant, qu’elle volerait beaucoup mieux

1486 que de foi ; soit de s’imaginer, comme la colombe de Kant, qu’elle volerait beaucoup mieux dans le vide. Bureaucratie, tec

1487 la révolte individuelle, d’autre part, résultent d’ une seule et même démission de la personne devant sa liberté et devant

1488 tre part, résultent d’une seule et même démission de la personne devant sa liberté et devant sa responsabilité. Mais la pe

1489 mécanismes, ces objets, et les doue des pouvoirs de sujets qu’elle abdique… ⁂ IV. Passage des buts aux moyens Quels

1490 uts aux moyens Quels sont alors les buts que l’ homme européen peut et doit projeter au plan de la politique et de l’organi

1491 ue l’homme européen peut et doit projeter au plan de la politique et de l’organisation du continent, pour les décennies à

1492 peut et doit projeter au plan de la politique et de l’organisation du continent, pour les décennies à venir ? Et de quels

1493 ion du continent, pour les décennies à venir ? Et de quels mécanismes l’Europe a-t-elle besoin pour atteindre ces buts, ou

1494 groupes, des communes, des régions, et finalement de l’Europe entière, pour exercer de mieux en mieux leur vocation partic

1495 , et finalement de l’Europe entière, pour exercer de mieux en mieux leur vocation particulière, à leur degré de réalité et

1496 en mieux leur vocation particulière, à leur degré de réalité et d’action, soit dans la vie privée (qui relève de la métaph

1497 vocation particulière, à leur degré de réalité et d’ action, soit dans la vie privée (qui relève de la métaphysique), soit

1498 et d’action, soit dans la vie privée (qui relève de la métaphysique), soit dans la vie du groupe ou de la cité (qui relèv

1499 e la métaphysique), soit dans la vie du groupe ou de la cité (qui relève de l’éthique), soit dans les relations intercolle

1500 t dans la vie du groupe ou de la cité (qui relève de l’éthique), soit dans les relations intercollectives (qui relèvent de

1501 dans les relations intercollectives (qui relèvent de la politique). Moyens. Union (économie d’énergies) capable de surmo

1502 èvent de la politique). Moyens. Union (économie d’ énergies) capable de surmonter les tendances anarchiques-autarciques d

1503 e). Moyens. Union (économie d’énergies) capable de surmonter les tendances anarchiques-autarciques des individus, groupe

1504 es individus, groupes, régions, capable donc : a) d’ organiser à l’intérieur du continent les services libérant personnes e

1505 personnes et groupes des tâches mécanisables ; b) de manifester à l’échelle mondiale la vocation générale des Européens, c

1506 la vocation générale des Européens, c’est-à-dire de donner une Voix à l’ensemble historique et culturel qu’est l’Europe.

1507 et culturel qu’est l’Europe. Tout le problème est d’ ordonner, subordonner, articuler ces moyens collectifs à ces buts pers

1508 l). Il s’agit donc : — d’une part, à l’intérieur, d’ éviter que les indépendances personnelles et locales soient dissoutes

1509 ient dissoutes dans un réseau toujours plus serré d’ interdépendances mécaniques proliférant sans contrôle ni orientation,

1510 n, par suite niveleuses et accroissant l’entropie de l’ensemble ; — d’autre part, vis-à-vis de l’extérieur, d’éviter que s

1511 emble ; — d’autre part, vis-à-vis de l’extérieur, d’ éviter que soit reportée aux frontières de l’union la somme des tendan

1512 érieur, d’éviter que soit reportée aux frontières de l’union la somme des tendances autarciques-impérialistes dont une uni

1513 ion forcée (uniformisation) aurait frustré chacun de ses membres, au lieu de lui permettre de les transmuer en émulation c

1514 é chacun de ses membres, au lieu de lui permettre de les transmuer en émulation créatrice au sein d’un ensemble plus vaste

1515 d’un ensemble plus vaste. Ainsi posé, le problème d’ une organisation fédérative de l’Europe se ramène à la recherche d’un

1516 i posé, le problème d’une organisation fédérative de l’Europe se ramène à la recherche d’un optimum pratique entre les max

1517 n fédérative de l’Europe se ramène à la recherche d’ un optimum pratique entre les maxima possiblement contradictoires (en

1518 ment contradictoires (en vérité, complémentaires) de l’autonomie et de l’union. Sa solution peut apparaître d’une complexi

1519 es (en vérité, complémentaires) de l’autonomie et de l’union. Sa solution peut apparaître d’une complexité sans espoir aux

1520 onomie et de l’union. Sa solution peut apparaître d’ une complexité sans espoir aux praticiens de la vie politique qui se c

1521 aître d’une complexité sans espoir aux praticiens de la vie politique qui se contentent des routines et recettes « réalist

1522 les qu’on demande, par exemple, aux constructeurs d’ une fusée balistique ou d’un vaisseau astronautique. Et l’on ne voit p

1523 mple, aux constructeurs d’une fusée balistique ou d’ un vaisseau astronautique. Et l’on ne voit pas comment « l’art du poss

1524 ment « l’art du possible » pourrait encore servir d’ excuse à la paresse d’esprit d’une classe politicienne qui n’a pas su

1525 le » pourrait encore servir d’excuse à la paresse d’ esprit d’une classe politicienne qui n’a pas su prévoir Hitler, et qui

1526 rait encore servir d’excuse à la paresse d’esprit d’ une classe politicienne qui n’a pas su prévoir Hitler, et qui trouvait

1527 our être sérieux. Philosophie des buts et science de leurs moyens doivent déterminer conjointement toute vision digne du n

1528 éterminer conjointement toute vision digne du nom de politique, dans l’ère d’universelle interaction inaugurée par la tech

1529 oute vision digne du nom de politique, dans l’ère d’ universelle interaction inaugurée par la technique occidentale. La néc

1530 ugurée par la technique occidentale. La nécessité d’ une union de l’Europe n’étant pas ici discutée mais admise, il faut ch

1531 a technique occidentale. La nécessité d’une union de l’Europe n’étant pas ici discutée mais admise, il faut chercher à voi

1532 il faut chercher à voir maintenant quelles formes d’ organisation politique seront capables de satisfaire aux doubles exige

1533 s formes d’organisation politique seront capables de satisfaire aux doubles exigences que l’on vient d’énoncer : Autonomie

1534 e satisfaire aux doubles exigences que l’on vient d’ énoncer : Autonomie et Union, Buts et Moyens, philosophie de la person

1535 : Autonomie et Union, Buts et Moyens, philosophie de la personne et technique d’organisation qui la traduise. En bonne mét

1536 t Moyens, philosophie de la personne et technique d’ organisation qui la traduise. En bonne méthode personnaliste, c’est d’

1537 a traduise. En bonne méthode personnaliste, c’est d’ une vision des Buts qu’il faut partir : car elle seule permettra d’écl

1538 Buts qu’il faut partir : car elle seule permettra d’ éclairer les chemins qui peuvent y conduire. Nous allons essayer de la

1539 emins qui peuvent y conduire. Nous allons essayer de la décrire à grands traits, en nous plaçant en imagination dans la pé

1540 s, en nous plaçant en imagination dans la période de 1975-1980. ⁂ V. Vue générale d’une Europe fédérée Buts Le

1541 ans la période de 1975-1980. ⁂ V. Vue générale d’ une Europe fédérée Buts Le préambule de l’Acte constituant la

1542 le d’une Europe fédérée Buts Le préambule de l’Acte constituant la fédération européenne déclare que l’union de se

1543 uant la fédération européenne déclare que l’union de ses peuples a pour fins, d’une part, d’assurer les libertés et les re

1544 e l’union de ses peuples a pour fins, d’une part, d’ assurer les libertés et les responsabilités civiques à l’intérieur de

1545 es à l’intérieur de la fédération ; d’autre part, de représenter dans le monde la vocation et les intérêts propres de l’en

1546 dans le monde la vocation et les intérêts propres de l’ensemble européen. Comment ces grands principes abstraits se tradui

1547 vivant en 1980 ? Tout d’abord, par un sentiment de grand espace ouvert. Euphorie pour les uns — les meilleurs ; nostalgi

1548 les uns — les meilleurs ; nostalgie ou sentiment de vague insécurité pour les autres. (Mais on y veille, leur commune les

1549 expériences à vivre, en aventures, en découvertes de soi-même et des autres hommes. Du rocher de Gibraltar à la steppe mon

1550 entures, en découvertes de soi-même et des autres hommes . Du rocher de Gibraltar à la steppe monotone, des lacs de l’Écosse au

1551 ertes de soi-même et des autres hommes. Du rocher de Gibraltar à la steppe monotone, des lacs de l’Écosse aux îles grecque

1552 ocher de Gibraltar à la steppe monotone, des lacs de l’Écosse aux îles grecques, de la Finlande à la Sicile, tout s’ouvre

1553 monotone, des lacs de l’Écosse aux îles grecques, de la Finlande à la Sicile, tout s’ouvre aux ambitions ou aux rêves d’un

1554 a Sicile, tout s’ouvre aux ambitions ou aux rêves d’ un jeune homme. Les citoyens de tous les pays membres de la fédération

1555 tions ou aux rêves d’un jeune homme. Les citoyens de tous les pays membres de la fédération européenne circulent du nord a

1556 eune homme. Les citoyens de tous les pays membres de la fédération européenne circulent du nord au sud et de l’est à l’oue

1557 fédération européenne circulent du nord au sud et de l’est à l’ouest sans passeports ni visas, sans visites de douanes, sa

1558 à l’ouest sans passeports ni visas, sans visites de douanes, sans embouteillages à Menton, sans contrôles aux aérodromes,

1559 ns contrôles aux aérodromes, sans avoir à changer de monnaies en y perdant à chaque guichet, sans rien déclarer à personne

1560 het, sans rien déclarer à personne. Des milliards d’ heures de vie active ou de loisirs sont ainsi gagnées chaque année, pa

1561 rien déclarer à personne. Des milliards d’heures de vie active ou de loisirs sont ainsi gagnées chaque année, par des mil

1562 personne. Des milliards d’heures de vie active ou de loisirs sont ainsi gagnées chaque année, par des millions d’Européens

1563 sont ainsi gagnées chaque année, par des millions d’ Européens en déplacement professionnel ou en vacances. Ils sont chez e

1564 lien en Lombardie. Ils disent « nous » en parlant de n’importe quel autre peuple. Ils apprennent à considérer les gloires

1565 t à considérer les gloires et les hontes du passé de chaque pays européen comme les leurs, et l’avenir de l’ensemble europ

1566 chaque pays européen comme les leurs, et l’avenir de l’ensemble européen comme leur avenir. Leur horizon, leur projet d’ex

1567 péen comme leur avenir. Leur horizon, leur projet d’ existence n’est plus borné par les frontières rigides de leur nation,

1568 tence n’est plus borné par les frontières rigides de leur nation, moyenne ou petite, mais s’ouvre aux dimensions continent

1569 nentales, et donc mondiales. S’ils veulent sortir de l’Europe, vers l’Afrique ou l’Asie, les Amériques ou la Russie, ils p

1570 uisent un passeport européen, délivré à leur lieu d’ origine. Chacun peut s’établir où il le veut, sur tout le territoire d

1571 t s’établir où il le veut, sur tout le territoire de la fédération, soit pour y travailler, soit pour y vivre à sa manière

1572 nelles à ce droit fondamental découlent des plans d’ aménagement locaux, urbains ou agricoles, harmonisés dans le cadre féd

1573 a à éviter les congestions locales et les goulots d’ étranglement, dans les régions les plus favorisées par une mode, un cl

1574 ême prix et en francs européens. Ce marché commun de 400 millions de producteurs et de consommateurs est de loin le plus r

1575 rancs européens. Ce marché commun de 400 millions de producteurs et de consommateurs est de loin le plus riche et le plus

1576 e marché commun de 400 millions de producteurs et de consommateurs est de loin le plus riche et le plus varié du monde. L’

1577 0 millions de producteurs et de consommateurs est de loin le plus riche et le plus varié du monde. L’Europe a donc cessé d

1578 et le plus varié du monde. L’Europe a donc cessé de se sentir écrasée entre les « deux grands » : elle est plus « grande 

1579 ux grands » : elle est plus « grande » que chacun d’ eux, et presque autant que les deux additionnés. Mais cette grande lib

1580 rande liberté cosmopolite n’est pas payée au prix d’ un déracinement général ; ces ouvertures plus vastes à l’esprit d’aven

1581 t général ; ces ouvertures plus vastes à l’esprit d’ aventure, qui sera toujours le fait d’une minorité, n’empêchent nullem

1582 à l’esprit d’aventure, qui sera toujours le fait d’ une minorité, n’empêchent nullement ceux qui préfèrent la sécurité mat

1583 préfèrent la sécurité maternelle et la protection d’ une partie limitée, d’en jouir et même mieux qu’avant. Car chaque cito

1584 maternelle et la protection d’une partie limitée, d’ en jouir et même mieux qu’avant. Car chaque citoyen de l’Europe relève

1585 jouir et même mieux qu’avant. Car chaque citoyen de l’Europe relève d’un pays d’origine, d’une communauté définie où il a

1586 x qu’avant. Car chaque citoyen de l’Europe relève d’ un pays d’origine, d’une communauté définie où il a (ou prend) ses rac

1587 . Car chaque citoyen de l’Europe relève d’un pays d’ origine, d’une communauté définie où il a (ou prend) ses racines ; et

1588 e citoyen de l’Europe relève d’un pays d’origine, d’ une communauté définie où il a (ou prend) ses racines ; et il peut y e

1589 ution fédérale, et surveillé par la Cour fédérale de justice, dépositaire du Statut de la Personne. Pour devenir citoyen d

1590 a Cour fédérale de justice, dépositaire du Statut de la Personne. Pour devenir citoyen de l’Europe, il faut et il suffit q

1591 re du Statut de la Personne. Pour devenir citoyen de l’Europe, il faut et il suffit que l’on devienne d’abord citoyen de l

1592 ut et il suffit que l’on devienne d’abord citoyen de l’un des pays membres, voire d’une de ses communes. Tout citoyen d’un

1593 e d’abord citoyen de l’un des pays membres, voire d’ une de ses communes. Tout citoyen d’un État membre qui s’établit sur l

1594 ord citoyen de l’un des pays membres, voire d’une de ses communes. Tout citoyen d’un État membre qui s’établit sur le terr

1595 embres, voire d’une de ses communes. Tout citoyen d’ un État membre qui s’établit sur le territoire administré par un autre