1 1963, Articles divers (1963-1969). Le fédéralisme suisse (1963)
1 opageant un style doté du nom de sa terre natale. Il n’y eut jamais de peinture suisse, au sens où l’on a pu parler d’une
2 it à parler de fédéralisme. Encore la chose était- elle entendue de manière assez différente par les Alémaniques et les Roman
3 ez nos voisins français, épris de logique, disent- ils , et centralisateurs. Un Français cultivé et qui se demande quel est l
4 sens du mot fédéralisme, recourt à son Littré, où il trouve ceci : Fédéralisme s.m. Néologisme. Système, doctrine du gou
5 ’oppositions et de tensions. On peut même dire qu’ il est fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les autre
6 les autres systèmes politiques ou philosophiques, il ne cherche pas à les résoudre, à les neutraliser ou à les effacer par
7 par les moyens de la logique ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les faire vivre ensemble, telles qu’elles
8 maîtresse de les faire vivre ensemble, telles qu’ elles sont. Mais parce qu’il accepte les contradictions, les oppositions, l
9 vre ensemble, telles qu’elles sont. Mais parce qu’ il accepte les contradictions, les oppositions, les tensions, et cherche
10 définition l’uniformité imposée par un centre, qu’ il s’agisse d’une capitale ou d’un parti, d’un pouvoir clérical ou polit
11 u d’un parti, d’un pouvoir clérical ou politique. Il est donc le contraire absolu de tout régime totalitaire, de tout ordr
12 on, et loin de fuir devant la complexité du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’a
13 uir devant la complexité du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’aime. D’autre par
14 é du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’aime. D’autre part, le fédéralisme refus
15 il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’aime. D’autre part, le fédéralisme refuse avec non moins de fermeté
16 ge avec le monde extérieur. Car le fédéralisme, s’ il aime les diversités régionales, aime aussi leur santé, qui est celle
17 anté, qui est celle de l’ensemble. C’est pourquoi il veut leur union, leur entraide, et même, dans certains cas bien défin
18 rticularismes clos, le fédéralisme représenterait- il alors une sorte de moyen terme entre ces deux extrêmes ? Point du tou
19 er, à mi-chemin entre la dictature et l’anarchie. Il est sur un autre plan que ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être q
20 ux erreurs, qui n’en sont peut-être qu’une seule. Il représente la seule attitude rigoureusement contraire à celle que les
21 lité que le totalitarisme, à l’échelle nationale. Il traduit le même manque d’imagination, de vitalité, de sens des propor
22 ’autre part la légitimité des autonomies locales. Elle exige à la fois l’une et l’autre, en dépit de leur caractère logiquem
23 iste veut une maîtrise du divers, comme tout art. Elle est un art de la composition, qui requiert à la fois et en même temps
24 sation. Prenons l’exemple d’une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’harmonie possible dans un tableau sans contrastes de
25 , celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que
26 ’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bi
27 ère d’un rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut que ce rouge soit contrasté et composé avec des verts, par exemp
28 rsité des petites nations qui la composent, sinon elle trahira sa mission dans le monde ; et qu’en même temps la Suisse appr
29 observe dans le cadre de la Confédération, sinon elle trahira sa raison d’être. Mais le fédéralisme n’est pas seulement un
30 des valeurs diversifiées, — et voilà, me semble-t- il , du même coup, une assez bonne définition de la culture ! ⁂ Pour qu’i
31 néral — au sens occidental et moderne du terme —, il faut une variété aussi riche que possible de créations humaines, un f
32 s, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes ces œuvres variées, et qui leur off
33 une culture, cohérente et vivante, de la culture. Il faut donc à la fois l’Un et le Divers, une très riche diversité se dé
34 ur lequel se détache notre individualité, et dont elle tire ses nourritures élémentaires ? Ce ne peut être que l’Europe enti
35 uis un siècle que les Suisses, selon la langue qu’ ils parlent, se rattachent à l’une ou à l’autre des trois grandes culture
36 res nationales voisines. Pour que cela soit vrai, il faudrait tout d’abord que le concept de « culture nationale » corresp
37 nale » corresponde à des réalités culturelles. Or il ne correspond qu’à des prétentions nationales. L’idée qu’il y aurait
38 t une pure et simple illusion d’optique scolaire. Elle se dissipe comme brume au soleil à la lumière de l’Histoire. La cultu
39 a jamais une addition de « cultures nationales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui ont pensé et créé depuis 28 siè
40 la plupart n’ont même pas cent ans d’existence : il faut bien admettre que la culture s’était constituée avant elles et s
41 admettre que la culture s’était constituée avant elles et sans elles ! Je me contenterai, pour illustrer ce point, d’un seul
42 la culture s’était constituée avant elles et sans elles  ! Je me contenterai, pour illustrer ce point, d’un seul exemple : cel
43 gnes, voici l’évolution de la musique en Europe : elle naît et se constitue entre les xiie et xive siècles dans un certain
44 nce, puis en Île-de-France. Des cités italiennes, elle se propage jusqu’aux cités flamandes, le long du grand axe commercial
45 Une nouvelle école s’épanouit dans les Flandres. Elle influence bientôt la Bourgogne, et redescend vers l’Italie qu’elle en
46 entôt la Bourgogne, et redescend vers l’Italie qu’ elle enrichit de ses nombreuses découvertes. Plus tard, les Allemands (com
47 dizaines de nos frontières nationales actuelles. Elles relient des cités, des foyers de création, des maîtres, et non pas de
48 re, c’est simplement l’école locale dans laquelle il s’est formé. D’où vient alors cette illusion d’optique dont je parlai
49 tion française actuelle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut imposée que par un décret de François Ier, en 1543. On parle e
50 qui vivent dans sept ou huit nations différentes. Il faut donc commencer par faire violence aux réalités linguistiques pou
51 odernes. Mais il y a plus. La langue ne saurait à elle seule définir une culture : elle n’est guère qu’un des éléments de la
52 gue ne saurait à elle seule définir une culture : elle n’est guère qu’un des éléments de la culture en général, si essentiel
53 ments de la culture en général, si essentiel soit- il . Tous les autres éléments : la religion, la philosophie, la morale, l
54 ngtemps déchiré le corps de notre continent. ⁂ Or il se trouve que les Suisses sont, ou devraient être, préservés mieux qu
55 ache directement à l’ensemble culturel européen : elle est « immédiate à l’Europe », comme les villes libres au Moyen Âge et
56 rotestantisme est majoritaire en Suisse romande ; il a déterminé en grande partie nos mœurs, notre exigeant souci moral et
57 es allégeances civiques, économiques et sociales, il se rattache à sa commune, à son canton, à la Confédération ; par son
58 lisme les implique et permet de les composer. Et il est vrai que ce régime peut conduire moralement à la médiocrité dorée
59 et de grandes dimensions à composer diversement, il satisfait trop facilement, dit-on, ceux qui choisissent de s’installe
60 uisse, mais peut-être les Suisses moyens trouvent- ils dans les structures fédérales de leur pays une protection plus effica
61 et civique, comme de leur paix. On voit mal ce qu’ ils gagneraient à échanger cette paix — que l’on jalouse un peu tout en l
62 ceux qui assument leurs plus grandes dimensions, il faut admettre qu’un régime fédéraliste et pluraliste leur ouvre de be
63 pluraliste leur ouvre de belles perspectives : qu’ ils y entrent et qu’ils les explorent, ils s’y sentiront vite chez eux, s
64 e de belles perspectives : qu’ils y entrent et qu’ ils les explorent, ils s’y sentiront vite chez eux, sans avoir à renier l
65 tives : qu’ils y entrent et qu’ils les explorent, ils s’y sentiront vite chez eux, sans avoir à renier leur clocher. Défini
66 prendre que cet exemple, le plus délicat, puisqu’ il est lié à la langue, laquelle ne pose pas de problèmes pour le savant
67 ria, Gonzague de Reynold. Européens en ce sens qu’ ils n’ont pas hésité à puiser aux sources les plus variées de la culture
68 z, à titre d’argument massue contre ma thèse. Est- il besoin de rappeler que ce grand artiste s’est formé à l’école de Pari
69 ne, puis des romanciers russes, enfin de Goethe ? Il se voulait un pur Vaudois, séparatiste (car c’était là le véritable s
70 l’a peut-être soutenu, en tant qu’artiste, comme il arrive ; elle n’en fut pas moins responsable de certaines limitations
71 re soutenu, en tant qu’artiste, comme il arrive ; elle n’en fut pas moins responsable de certaines limitations de son œuvre.
72 e privilégié du niveau de culture d’un peuple, qu’ elle fut au temps de l’Europe classique puis romantique. Les sciences ont
73 lace, à cet égard. Or quel rang la Suisse y tient- elle  ? « L’indice Nobel » peut nous l’apprendre : il donne le nombre de pr
74 elle ? « L’indice Nobel » peut nous l’apprendre : il donne le nombre de prix Nobel par million d’habitants d’un pays, de 1
75 le monde de cette deuxième moitié du xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’apport de l’Europe au tiers-monde, tout enfi
2 1963, Articles divers (1963-1969). Aspects fédéralistes dans les plans et projets d’union européenne du Moyen Âge à nos jours (1963)
76 s dans le cadre du Centre européen de la culture, il ne sera sans doute pas inutile de situer notre projet, d’en préciser
77 ues moments à cette introduction plus générale. S’ il paraît opportun d’entreprendre aujourd’hui, ou plutôt de poursuivre e
78 e se trouve posée à cette génération, et parce qu’ elle met en jeu bien autre chose que des intérêts matériels. Il serait don
79 jeu bien autre chose que des intérêts matériels. Il serait donc vain de se dissimuler que l’une des raisons d’être de cet
80 on européenne n’est pas une question académique ! Elle n’appartient pas à un passé qu’il suffirait de décrire et d’interprét
81 académique ! Elle n’appartient pas à un passé qu’ il suffirait de décrire et d’interpréter, mais à un avenir auquel nous s
82 uel nous sommes tous vitalement intéressés, et qu’ il s’agit de préparer. Elle est moins un acquis à transmettre qu’un prob
83 talement intéressés, et qu’il s’agit de préparer. Elle est moins un acquis à transmettre qu’un problème à résoudre. Est-ce à
84 ettre qu’un problème à résoudre. Est-ce à dire qu’ il faille en laisser le soin au seul réalisme des hommes d’État, aux seu
85 globale, économique et politique au premier chef, elle implique en réalité, quantité de problèmes moraux, juridiques, histor
86 ux, juridiques, historiques, philosophiques, dont il faut bien reconnaître que beaucoup attendent encore d’être étudiés ob
87 , représente autre chose et un peu plus que ce qu’ elle est dans sa réalité physique, qui est à peine 4 % des terres émergées
88 ntral de notre enseignement et de nos recherches, il importe de rappeler tout d’abord à grands traits dans quels termes el
89 er tout d’abord à grands traits dans quels termes elle se pose, et qui l’a posée. Le monde issu de la Seconde Guerre mondial
90 , qui a peut-être le vent de l’histoire en poupe. Ils ne sont pas nombreux d’abord, ils ne sont pas suivis par la majorité
91 toire en poupe. Ils ne sont pas nombreux d’abord, ils ne sont pas suivis par la majorité de leurs collègues. Mais ce sont,
92 onomie commande les armements, surtout au prix où ils sont. La politique en dépend donc aussi étroitement qu’elle dépend pa
93 La politique en dépend donc aussi étroitement qu’ elle dépend par ailleurs de l’opinion, des idéologies nationales et des do
94 ant par là même alerté les intérêts et l’opinion, elle débouche enfin sur le plan politique. Mais il serait excessif de dire
95 , elle débouche enfin sur le plan politique. Mais il serait excessif de dire qu’elle y débouche en pleine clarté. Au contr
96 lan politique. Mais il serait excessif de dire qu’ elle y débouche en pleine clarté. Au contraire, c’est à ce niveau que la d
97 Si l’on examine son vocabulaire, on s’aperçoit qu’ il utilise à peu près au petit bonheur les termes d’union et d’unificati
98 vaincante des solutions proprement politiques, qu’ il faudra bien donner un jour prochain à la question européenne. En vue
99 voit que l’unification de l’Europe, à supposer qu’ elle soit praticable, ne serait conforme ni aux données historiques, ni au
100 es actuelles et concrètes du problème à résoudre. Il importe toutefois de la mentionner, ne fût-ce qu’à titre de limite, d
101 ulle lui-même (conférence de presse de mai 1962), elle ne désigne en réalité qu’une Europe des États. Dans une telle Europe,
102 ui ont posé, précisément, la question européenne. Elle supposerait en tout cas un retrait, éventuellement impraticable ou tr
103 ou modifiées par le Marché commun. D’autre part, elle se fonde sur une certaine idée de la souveraineté des États, considér
104 rés comme seule réalité tangible, ou par là même, elle présente un attrait certain pour ceux qui souhaiteraient laisser les
105 isser les choses autant que possible en l’état où elles sont. Mais est-il sûr que cet état soit bien celui que l’on croit ? P
106 nt que possible en l’état où elles sont. Mais est- il sûr que cet état soit bien celui que l’on croit ? Pour répondre à cet
107 que l’on croit ? Pour répondre à cette question, il conviendrait d’examiner, après Léon Duguit, Preuss, Lapradelle, Chabo
108 et reprise par le xixe siècle des nationalismes. Il faudrait voir, d’une part, dans quelle mesure cette notion est compat
109 est compatible avec le droit, et d’autre part, si elle correspond encore à des réalités tangibles, à des droits et à des dev
110 ité, leurs libertés collectives ou individuelles. Il faudrait examiner objectivement si, et dans quelle mesure, « les chos
111 , et dans quelle mesure, « les choses étant ce qu’ elles sont », la notion d’indépendance n’a pas déjà cédé le pas, en fait pl
112 e, les États ne seraient pas effacés ou dissouts, ils ne seraient pas non plus maintenus dans une fiction de souveraineté a
113 us dans une fiction de souveraineté absolue, mais ils joueraient un rôle plus ou moins analogue à celui des cantons suisses
114 antirait leur souveraineté — dans les domaines où elle peut et doit rester entière — tout en l’exerçant collectivement dans
115 vement dans d’autres domaines où, de toute façon, elle ne peut plus guère s’exercer individuellement. Convient-il de considé
116 t plus guère s’exercer individuellement. Convient- il de considérer comme un quatrième type, la solution qui consisterait à
117 des Six, faite à Bonn le 18 juillet 1961, parle, il est vrai, de « donner forme à la volonté d’union politique déjà impli
118 ont institué les Communautés européennes », mais elle ne suggère pas les voies et moyens qui pourraient permettre d’opérer
119 être la préfigure, ou l’amorce. Ce régime serait- il interétatique, super étatique, ou extraétatique, pour reprendre les d
120 radictoires, mais qui sont là, incontestablement. Elle paraît aussi la plus propre à rallier ou à faire converger un jour ou
121 unie. Enfin, raisons immédiates et personnelles. Il se trouve que mes collaborateurs et moi-même, si différents que soien
122 ns du bord, dans un esprit commun. Or je pense qu’ il existe une harmonie préétablie entre le fédéralisme comme objet d’étu
123 est pas une doctrine toute faite, un dogme auquel il s’agirait de plier les réalités, mais une méthode générale d’aménagem
124 n Europe, la CECA, le Marché commun, l’AELE, etc. Il étudiera donc des exemples précis d’évolution des structures du stade
125 auxquelles se développe ce contenu économique, et il montrera dans quelle mesure ces structures tendent ou non à se rappro
126 t ou non à se rapprocher des formes fédéralistes. Il rejoindra de la sorte les études de méthode et d’évaluation des tenda
127 l’intégration, réunies dans le nouvel ouvrage qu’ il publie ces jours-ci : Dimensions européennes de la science politique.
128 i dépasse évidemment nos forces actuelles mais qu’ il semble urgent d’entreprendre là où on le peut, dans l’esprit du prove
129 jet particulier de mon cours, mais je souhaite qu’ ils aient permis déjà d’en pressentir les intentions. Il pourrait sembler
130 aient permis déjà d’en pressentir les intentions. Il pourrait sembler logique de commencer par définir le fédéralisme avan
131 ique serait trompeur dans le cas particulier, car il se trouve que le fédéralisme n’est précisément pas un système logique
132 es régimes qui s’en inspirent, nous constatons qu’ il leur faut des livres entiers pour l’exposer ou, mieux, pour en décrir
133 l’étend à toutes les structures intersociales, qu’ elles soient ou non étatiques ; l’équipe de l’Ordre nouveau, de 1932 à 1939
134 se qu’une simple recette juridique ou politique : il est un des grands types d’aménagement du rapport politique, et peut-ê
135 secrètement partisane, ou entachée d’abstraction, il était plus honnête et enseignant d’aller rechercher dans les écrits d
136 ons et croyances régnantes en leur temps, soit qu’ ils les reflètent fidèlement — et ce sera une occasion de les décrire —,
137 et ce sera une occasion de les décrire —, soit qu’ ils s’opposent expressément à « ce qui allait de soi » du vivant de leurs
138 lait de soi » du vivant de leurs auteurs, et dont ils annoncent la modification ou anticipent le dépassement. Ainsi, la con
139 la naissance de notre confédération, qui résulte, elle , du mouvement des communes12, troisième composante de l’époque. Vous
140 et j’en examinerai les causes. Dans ce contexte, il s’agira de repérer la nature des obstacles traditionnels de l’union,
141 bstacles sont en train de céder aujourd’hui. Mais il n’est pas moins important de rechercher dans ces plans avortés les ét
142 fédéralisme, terme inventé par Rousseau, prétend- il , à l’occasion de sa critique des utopies de l’abbé de Saint-Pierre, e
143 ée par un puissant parti, les jacobins, tandis qu’ elle se réalisait enfin, mais hors d’Europe, dans la Constitution américai
144 e série de « grands travaux européens » ; comment elles se développent dans les plans de Bentham et de Saint-Simon ; enfin co
145 lans de Bentham et de Saint-Simon ; enfin comment elles aboutissent aux réalisations que l’on sait dans notre temps. C’est do
146 d’échecs pratiques et de déchets idéologiques. Qu’ il s’agisse au début du plus grand poète du Moyen Âge, Dante, ou du roi
147 llons parcourir n’est pas seulement pittoresque : elle nous conduit au cœur des débats idéologiques et politiques de l’Europ
148 948 le Centre européen de la culture à Genève, qu’ il dirige encore aujourd’hui. Dès 1951, président du comité exécutif du
3 1963, Articles divers (1963-1969). Apport à la civilisation occidentale (janvier 1963)
149 dans le développement de la culture occidentale ; ils n’y entrent en fait et d’une manière distincte qu’au troisième quart
150 la fin du xiiie jusqu’au milieu du xixe siècle, elle n’était guère qu’une confédération plus ou moins lâche de petits État
151 politique, l’économie, la confession, la langue. Elle dépendait ainsi, à des titres divers, de plusieurs grands ensembles c
152 n’est parfois qu’une ville, Bâle ou Genève) mais ils ne trouvent à se réaliser qu’au sein d’une entité beaucoup plus vaste
153 , qui n’ont vécu que dans leur seule nation, et d’ elle seule ont nourri leur carrière) mais par leur biographie, leurs horiz
154 leurs allégeances spirituelles, par les lieux où ils agirent de leur vivant, et par les influences subies ou exercées. Pa
155 ens moyens, oui, disait Lucien Fèbvre. Mais quand ils réussissent à se dégager de leur canton, alors pas de milieu, ils att
156 à se dégager de leur canton, alors pas de milieu, ils atteignent à l’universel… Et plus d’obstacle devant la pensée. Le Sui
157 vant la pensée. Le Suisse s’appelle Jean-Jacques. Il s’appelle Burckhardt ou, dans un autre domaine, Karl Barth. Son canto
158 es : quelle que soit leur petite patrie locale, s’ ils la dépassent, c’est pour rejoindre immédiatement les grands courants
159 immédiateté à l’Empire » (Reichsunmittelbarkeit). Il en va de même dans le domaine culturel. Nous sommes, nous Suisses, im
160 rnit à la Suisse ses meilleures chances, et c’est elle qui, dans le cas de la Suisse — compartimentée à l’extrême, mais liée
161 la plus moderne, vagabonde en de nombreux pays où il invente et exerce son art, puis revient enseigner en Suisse dans les
162 mondiale de la pensée théologique de Karl Barth : elle dépasse largement les limites de la confession protestante. ⁂ Mais s’
163 es limites de la confession protestante. ⁂ Mais s’ il reste vrai que la Suisse n’est pas une nation comme les autres, n’aya
164 ollandaise ou vénitienne du xviiie siècle, et qu’ elle s’est conformée par anticipation à cette règle devenue évidente à par
165 mateur non prévenu n’y verra pas la Suisse, comme il voit à coup sûr l’Espagne dans les œuvres de Picasso, le ghetto russe
166 end de créer quelque chose, tout se passe comme s’ il avait à se faire pardonner son ambition ou son génie individuel en dé
167 ambition ou son génie individuel en démontrant qu’ il fait une œuvre utile au bien commun ; ou bien, il lui faudra courir s
168 il fait une œuvre utile au bien commun ; ou bien, il lui faudra courir son aventure loin de son pays. L’architecte suisse
169 t voir plutôt petit, fonctionnel et très sobre, s’ il reste en Suisse. Mais s’il a le goût de la grandeur, c’est à Rome qu’
170 onnel et très sobre, s’il reste en Suisse. Mais s’ il a le goût de la grandeur, c’est à Rome qu’il ira terminer l’énorme dô
171 is s’il a le goût de la grandeur, c’est à Rome qu’ il ira terminer l’énorme dôme de Saint-Pierre comme Maderno et les deux
172 erno et les deux Fontana, c’est aux États-Unis qu’ il ira construire les plus grands ponts du monde comme l’ingénieur Amman
173 l’ingénieur Ammann, c’est en France ou en Inde qu’ il trouvera des commandes pour bâtir une église de Ronchamps ou une capi
174 l’efficacité transformatrice. Et c’est en cela qu’ ils sont typiquement suisses. ⁂ Cependant, une série de grands noms ne re
175 ant, une série de grands noms ne représente pas à elle seule tout l’apport culturel d’un pays, de même qu’un prestigieux éta
176 résistance qui l’appuie dans la population. Ce qu’ il est important de savoir sur l’armée suisse, c’est que chacun de ses s
177 équipement militaire dans son armoire. Qu’en est- il de notre équipement culturel ? Il me paraît que la structure fédérali
178 oire. Qu’en est-il de notre équipement culturel ? Il me paraît que la structure fédéraliste du pays et l’autonomie dans so
179 inentale où l’arme secrète sera la matière grise. Elle le doit sans nul doute à ses structures très concrètement fédéraliste
180 rès concrètement fédéralistes depuis des siècles. Il s’ensuit que la menace d’uniformisation et d’oblitération des traditi
181 n des traditions locales est bien plus grave pour elle que pour ses grands voisins. Ce n’est pas du projet d’union européenn
182 qu’ici les valeurs et les forces culturelles dont elle dispose. N’est-elle pas le pays d’Europe qui a les raisons les plus f
183 t les forces culturelles dont elle dispose. N’est- elle pas le pays d’Europe qui a les raisons les plus fortes et les plus co
4 1963, Articles divers (1963-1969). Le fédéralisme et notre temps (mars 1963)
184 ’oppositions et de tensions. On peut même dire qu’ il est fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les autre
185 les autres systèmes politiques ou philosophiques, il ne cherche pas à les résoudre, à les neutraliser ou à les effacer par
186 par les moyens de la logique ou de la force, car il a pour passion maîtresse de les faire vivre ensemble, telles qu’elles
187 maîtresse de les faire vivre ensemble, telles qu’ elles sont. Mais parce qu’il accepte les contradictions, les oppositions, l
188 vre ensemble, telles qu’elles sont. Mais parce qu’ il accepte les contradictions, les oppositions, les tensions, et cherche
189 définition l’uniformité imposée par un centre, qu’ il s’agisse d’une capitale, d’un État, d’un parti, d’un pouvoir clérical
190 d’un pouvoir clérical, politique, ou économique. Il est donc le contraire absolu de tout régime totalitaire de tout ordre
191 on, et loin de fuir devant la complexité du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’a
192 uir devant la complexité du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’aime. D’autre par
193 é du réel, il la respecte, il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’aime. D’autre part, le fédéralisme refus
194 il croit à ses vertus, il en épouse la loi, bref, il l’aime. D’autre part, le fédéralisme refuse avec non moins de fermeté
195 ge avec le monde extérieur. Car le fédéralisme, s’ il aime les diversités régionales, aime aussi leur santé et celle de l’e
196 leur santé et celle de l’ensemble. C’est pourquoi il veut leur union, leur entraide, et même, dans certains cas bien défin
197 rticularismes clos, le fédéralisme représenterait- il alors une sorte de moyen terme entre ces deux extrêmes ? Point du tou
198 er, à mi-chemin entre la dictature et l’anarchie. Il est sur un autre plan que ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être q
199 alité que le totalitarisme à l’échelle nationale. Il traduit le même manque d’imagination, de vitalité, de sens des propor
200 ’autre part la légitimité des autonomies locales. Elle exige à la fois l’une et l’autre, en dépit de leur caractère logiquem
201 te veut une maîtrise du divers — comme tout art ! Elle est un art de la composition qui requiert à la fois et en même temps
202 isation. Prenez l’exemple d’une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’harmonie possible sans contrastes de couleurs, et sa
203 , celle de l’artiste, hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que
204 ’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bi
205 ère d’un rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut que ce rouge soit contrasté et composé avec des verts, par exemp
206 rsité des petites nations qui la composent, sinon elle trahira sa mission dans le monde ; et qu’en même temps la Suisse appr
207 observe dans le cadre de la Confédération, sinon elle trahira sa raison d’être. Mais le fédéralisme n’est pas seulement un
208 des valeurs diversifiées, — et voilà, me semble-t- il , une assez bonne définition de la culture ! II Avec ces quelques
209 idental du terme, très différent de l’asiatique — il faut une variété aussi riche que possible de créations humaines, un f
210 s, de méthodes, de doctrines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes ces œuvres variées et qui leur offr
211 une culture, cohérente et vivante, de la culture. Il faut donc à la fois l’Un et le Divers, une très riche diversité se dé
212 ur lequel se détache notre individualité, et dont elle tire ses nourritures élémentaires ? Ce ne peut être que l’Europe enti
213 uis un siècle que les Suisses, selon la langue qu’ ils parlent, se rattachent à l’une ou à l’autre des trois grandes culture
214 res nationales voisines. Pour que cela soit vrai, il faudrait tout d’abord que le concept de « culture nationale » corresp
215 nale » corresponde à des réalités culturelles. Or il ne correspond qu’à des prétentions nationales. L’idée qu’il y aurait
216 t une pure et simple illusion d’optique scolaire. Elle se dissipe comme brume au soleil à la lumière de l’Histoire. La cultu
217 a jamais une addition de « cultures nationales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui ont pensé et créé depuis 28 siè
218 la plupart n’ont même pas cent ans d’existence : il faut bien admettre que la culture s’était constituée avant elles et s
219 admettre que la culture s’était constituée avant elles et sans elles ! Je me contenterai, pour illustrer ce point, d’un seul
220 la culture s’était constituée avant elles et sans elles  ! Je me contenterai, pour illustrer ce point, d’un seul exemple : cel
221 gnes, voici l’évolution de la musique en Europe : elle naît et se constitue au xiiie siècle dans un certain nombre de cités
222 nce, puis en Île-de-France. Des cités italiennes, elle se propage jusqu’aux cités flamandes, le long du grand axe commercial
223 cole nouvelle s’épanouit alors dans les Flandres. Elle influence bientôt la Bourgogne, et redescend vers l’Italie qu’elle en
224 entôt la Bourgogne, et redescend vers l’Italie qu’ elle enrichit de ses nombreuses découvertes. Plus tard, les Allemands et l
225 dizaines de nos frontières nationales actuelles. Elles relient des cités, des foyers de création, des maîtres, et non pas de
226 re, c’est simplement l’école locale dans laquelle il s’est formé. D’où vient alors cette illusion d’optique dont je parlai
227 tion française actuelle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut imposée que par un décret de François Ier, en 1543. On parle e
228 qui vivent dans sept ou huit nations différentes. Il faut donc commencer par faire violence aux réalités linguistiques pou
229 odernes. Mais il y a plus. La langue ne saurait à elle seule définir une culture : elle n’est guère qu’un des éléments de la
230 gue ne saurait à elle seule définir une culture : elle n’est guère qu’un des éléments de la culture en général. Or tous les
231 État dans le corps de ce continent. III Or il se trouve que les Suisses sont, ou devraient être, préservés mieux qu
232 ache directement à l’ensemble culturel européen : elle est « immédiate à l’Europe », comme les villes libres au Moyen Âge et
233 e protestantisme est dominant en Suisse romande ; il détermine en grande partie nos mœurs, notre exigeant souci moral et n
234 prendre que cet exemple, le plus délicat, puisqu’ il est lié à la langue, laquelle ne pose pas de problèmes pour le savant
235 ria, Gonzague de Reynold. Européens en ce sens qu’ ils n’ont pas hésité à puiser aux sources les plus variées de la culture
236 z, à titre d’argument massue contre ma thèse. Est- il besoin de rappeler que ce grand artiste s’est formé à l’école de Pari
237 ne, puis des romanciers russes, enfin de Goethe ? Il se voulait un pur Vaudois, séparatiste (car c’était là le véritable s
238 mpris). Cette erreur l’a peut-être soutenu, comme il arrive, mais n’en fut pas moins responsable de certaines limitations
239 le monde de cette deuxième moitié du xxe siècle. Il symbolise et préfigure l’apport de l’Europe au tiers-monde, tout enfi
240 icielle, de nos particularismes les plus désuets. Il voudrait que chacune de nos cités se suffise à elle-même dans tous le
241 re que cela n’est pas possible, en plus d’un cas, il pousse à préférer des solutions médiocres, mais « bien de chez nous »
242 x en restant libre et dispersé, voire anarchique. Il est clair que nos villes sont trop petites pour se payer chacune un l
243 rendre que cet exemple. Mais qu’on ne dise pas qu’ elles sont trop petites pour que s’y développent à foison des écoles de pei
244 s plus petites que nos villes romandes actuelles. Elles sont tout de même devenues des foyers rayonnants de créations du prem
245 nt de princes et de grands marchands de l’époque. Il est trop clair qu’à l’absence de cette passion créatrice et de ce sen
246 st normalement de rationaliser les activités dont ils s’occupent, pour les rendre plus économiques ou plus rentables. Mais
247 égeant en revanche trop de médiocrité pour peu qu’ elles aient été un jour inscrites à quelque budget d’État, et sous prétexte
5 1963, Articles divers (1963-1969). À propos de la culture européenne (avril 1963)
248 de présenter une culture européenne unitaire » ; il nierait que l’Europe soit « la patrie des contradictions » ; et il pr
249 Europe soit « la patrie des contradictions » ; et il pratiquerait le « nationalisme culturel » au nom d’un « anticommunism
250 es cultures ou Les Chances de l’Europe , etc.), ils partageront notre stupeur. M. Chiti-Batelli accuse le CEC d’un « défa
251 » ses travaux. Quelle est donc sa méthode à lui ? Elle consiste à lire « unitaire » là où nous disons « pluraliste » ; à lir
252 nous ne cessons d’écrire qu’avec Rome et Athènes ils sont les éléments fondamentaux de notre culture, à nous opposer ma pr
253 ote suivante : « À la suite de l’article : “Y a-t- il une culture européenne ?” publié dans notre numéro de décembre, nous
6 1963, Articles divers (1963-1969). Orientations vers une Europe fédérale (10 mai 1963)
254 e pourra se faire qu’en vertu d’une volonté, mais il n’est pas de volonté sans but, sans quelque utopie directrice, imagin
255 ions fondamentales les mieux partagées en Europe, il en est deux qui me paraissent les plus propres à motiver chez l’homme
256 à désirer des régimes pluralistes, arrangés comme ils viennent, ménageant les complexités et l’imprévu de l’existence ; rég
257 e primitive des soviets (conçue par Lénine lorsqu’ il était en Suisse), l’anarchisme à la Bakounine et les brèves flambées
258 rfection (nulle société ne saurait y survivre) et elles coexistent en nous. L’Européen normal vit quelque part entre les deux
259 ive d’un seul n’aurait aucune chance de succès si elle ne rencontrait dans les masses des prédispositions de même nature, qu
260 e d’un dictateur réussit dans la mesure exacte où elle rencontre et satisfait un besoin largement partagé de subir la puissa
261 contraignant n’est féconde que dans la mesure où elle éveille et libère chez beaucoup la possibilité de s’affirmer, de se c
262 iquement celui du manager et celui du professeur. Ils ont en commun une volonté déclarée d’objectivité (technique ou scient
263 ions des deux autres types. Mais peut-être s’agit- il d’un double refoulement. Chez le manager, la volonté de puissance ne
264 lée à celle d’atteinte aux droits acquis, fussent- ils les souverainetés traditionnelles des États, de plus en plus incompat
265 rs d’utopies et de plans, et de leurs critiques : elle reste à écrire, on le voit. Il m’importait seulement de situer ma pos
266 eurs critiques : elle reste à écrire, on le voit. Il m’importait seulement de situer ma position, c’est-à-dire mon option
267 a logique rationaliste de nos pères. En revanche, elle apparaît conforme à la logique déduite des sciences physiques, et bio
268 ades récents de notre aventure intellectuelle, et il en demeure indépendant. (Le premier ne suffit pas mieux à le réfuter,
269 uter, que le second à le fonder en principe.) Car il est véritablement la projection au plan continental d’une notion de l
270 os sciences et nos logiques ne seraient pas ce qu’ elles sont, ou n’auraient pas eu lieu. Lors du premier congrès de l’Union e
271 elons que les conquêtes sociales ne sont rien, si elles n’aboutissent pas à rendre chaque individu plus libre dans l’exercice
272 libre et engagé, à la fois autonome et solidaire. Il vit dans la tension entre ces deux pôles : le particulier et le génér
273 ion et la cité ; entre ces deux amours : celui qu’ il se doit à lui-même et celui qu’il doit à son prochain — indissolubles
274 ours : celui qu’il se doit à lui-même et celui qu’ il doit à son prochain — indissolubles. Cet homme qui vit dans la tensi
275 ma trop rapide, mais qui me paraît indispensable, il ne faut pas penser que la personne soit un moyen terme ou un juste mi
276 est pas à mi-chemin entre la peste et le choléra, elle représente la santé civique. Un homme qui boit de l’eau et qui se lav
277 i vraiment un système, et encore moins un plan qu’ il faudrait appliquer aux réalités humaines et politiques, toujours « ma
278 me dit Descartes. C’est un art de composer, quand il s’agit d’élaborer une constitution et des lois, et une méthode de pil
279 ion et des lois, et une méthode de pilotage quand il s’agit de gouverner entre le Charybde de l’anarchie des particularism
280 echniques éprouvées, sans secrets du métier, mais il serait vain d’en faire un traité théorique. Plutôt que d’essayer de l
281 un État impérialiste détient la force nécessaire, il ne fédère pas, il annexe ; il n’unit pas, il unifie. Et les coalition
282 te détient la force nécessaire, il ne fédère pas, il annexe ; il n’unit pas, il unifie. Et les coalitions qui se forment c
283 a force nécessaire, il ne fédère pas, il annexe ; il n’unit pas, il unifie. Et les coalitions qui se forment contre lui ne
284 ire, il ne fédère pas, il annexe ; il n’unit pas, il unifie. Et les coalitions qui se forment contre lui ne survivent pas
285 chniques et de richesses dans une caisse commune, ils agissent alors en fondateurs d’une fédération. Ne mérite donc le titr
286 nité de l’Europe, sont des avertissements utiles. Ils nous confirment dans l’idée qu’on ne peut pas atteindre une fin fédér
287 arranger selon leurs caractères particuliers, qu’ il s’agit à la fois de respecter, et d’articuler dans un tout. Troisièm
288 n chiffre, et le plus petit. Pour le fédéraliste, il va de soi qu’une minorité puisse compter pour autant, voire pour plus
289 e majorité dans certains cas, parce qu’à ses yeux elle représente une qualité irremplaçable. (On pourrait aussi dire une fon
290 du divers, comme tout art. Art de la composition, elle requiert à la fois et en même temps la vivacité des contrastes et leu
291 sation. Prenons l’exemple d’une œuvre picturale : il n’y aurait pas d’harmonie possible, dans un tableau, sans contrastes
292 elle de l’artiste) et hors de l’unité du tableau, il n’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que
293 ’y aurait pas de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait que la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bi
294 ère d’un rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut que ce rouge soit contrasté et composé avec des verts, par exemp
295 arrivaient à se concevoir dans un rôle analogue, elles comprendraient que leur harmonie est une nécessité vitale, et non pas
296 demande, ou une diminution de leur valeur propre. Elles comprendraient aussi que dans une fédération elles n’auraient pas à s
297 lles comprendraient aussi que dans une fédération elles n’auraient pas à se mélanger, mais au contraire à fonctionner de conc
298 poumon que possible, et, dans cette mesure même, il aidera le cœur à être un bon cœur. Cinquième principe. Le fédéralism
299 ue dès 1880, dans une lettre prophétique, ceux qu’ il appelait les « terribles simplificateurs ». Lorsque les étrangers s’é
300 ux, cantonaux, fédéraux, si diversement engrenés, il convient de leur montrer que cette complexité — cause de tant de lent
301 la condition même de nos libertés. C’est grâce à elle que nos fonctionnaires sont rappelés au concret, et que nos législate
302 et qui se recoupent de cent manières différentes. Il est clair que des lois ou des institutions conçues dans un esprit uni
303 personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur table rase, de simplifier les réalité
304 ité technique, et de compréhension des peuples qu’ elle administre. Elle exige beaucoup plus de vrai sens politique. Finaleme
305 de compréhension des peuples qu’elle administre. Elle exige beaucoup plus de vrai sens politique. Finalement, si l’on y réf
306 taires sont antipolitiques par définition, puisqu’ elles consistent simplement à supprimer les diversités, par incapacité de l
307 humaines est beaucoup plus près de s’organiser qu’ il ne le semble. Elle est déjà beaucoup plus unie, en réalité, qu’elle n
308 coup plus près de s’organiser qu’il ne le semble. Elle est déjà beaucoup plus unie, en réalité, qu’elle ne le croit. C’est s
309 Elle est déjà beaucoup plus unie, en réalité, qu’ elle ne le croit. C’est sur le plan de l’action gouvernementale que les op
310 itions et les rivalités éclatent, et là seulement elles semblent ou deviennent irréductibles. Il paraît difficile d’espérer
311 ment elles semblent ou deviennent irréductibles. Il paraît difficile d’espérer que les gouvernements puissent jamais réal
312 pour arbitrer le jeu des nations. Chacun sait qu’ il serait déraisonnable de choisir comme arbitres d’un match les capitai
313 chacune des communautés constituantes et pour qu’ elles puissent exercer ensemble des fonctions qui dépassent les forces de c
314 s fonctions qui dépassent les forces de chacune d’ elle . Ni les menaces arabes puis mongoles, ni l’entreprise des croisades,
315 st et nous minant à l’intérieur par les partis qu’ ils commandaient chez nous, n’ont réussi à provoquer la fédération de nos
316 ses impérialistes des Européens — les colonies —, elles sont restées le fait des États en concurrence nationaliste : elles n’
317 s le fait des États en concurrence nationaliste : elles n’ont contribué qu’à notre division, et presque à notre ruine à deux
318 ux cantons suisses en 1848, ont compris qu’isolés ils tombaient, mais qu’unis ils pouvaient à la fois sauver leurs libertés
319 ont compris qu’isolés ils tombaient, mais qu’unis ils pouvaient à la fois sauver leurs libertés locales et agir comme une s
320 éfinir en quelques mots, en une formule. C’est qu’ elle est d’un type organique plutôt que rationnel, et dialectique plutôt q
321 nel, et dialectique plutôt que seulement logique. Elle échappe aux catégories statiques et géométriques du rationalisme vulg
322 e.3 La pensée fédéraliste ne projette pas devant elle une utopie bien cohérente qu’il s’agirait d’imposer, ou des plans sta
323 ette pas devant elle une utopie bien cohérente qu’ il s’agirait d’imposer, ou des plans statiques qu’il faudrait réaliser e
324 il s’agirait d’imposer, ou des plans statiques qu’ il faudrait réaliser en quatre ou cinq ans, par la réduction impitoyable
325 on impitoyable des réalités vivantes et gênantes. Elle cherche au contraire le secret d’un équilibre souple et constamment m
326 ouple et constamment mouvant entre des groupes qu’ il s’agit de composer en sauvegardant à la fois leur individualité et le
327 soi. Or les uns et les autres ont tort, parce qu’ ils n’ont qu’à moitié raison. Le véritable fédéralisme ne consiste ni dan
328 union des cantons, ni dans leur seule autonomie. Il consiste dans l’équilibre continuellement rajusté entre les deux néce
329 t apporter à chaque région et à chaque personne. Il est infiniment probable que, sur le plan européen, nous allons voir s
330 velle gauche et une nouvelle droite, en somme. Et il faudra sans cesse rappeler aux deux partis que le fédéralisme véritab
331 alogue, dans leur tension féconde. Toutefois — et il m’importe au plus haut point de le préciser ici et de le souligner —,
332  : celui des transports, et celui de l’éducation. Il est facile de voir que chacun des membres d’une fédération bénéficier
333 es autonomies locales ou régionales. D’autre part il n’est pas moins évident que l’ensemble fédéral européen bénéficiera d
334 e conditionne la puissance créatrice de l’Europe. Il convient donc d’attribuer aux régions une totale autonomie en matière
335 surplus à leur financement fédéral.) Ceci posé, il va sans dire que dans certains domaines publics, il apparaîtra normal
336 va sans dire que dans certains domaines publics, il apparaîtra normal ou nécessaire soit de déléguer aux membres de la fé
337 r et à mesure de leur évolution, d’une part ce qu’ il devient avantageux pour chacun de confier au pouvoir fédéral ; d’autr
338 confier au pouvoir fédéral ; d’autre part, ce qu’ il reste indispensable de laisser à la libre initiative des États ou rég
339 les deviennent des phénomènes d’ampleur publique, il est normal qu’un pouvoir central prenne la charge de les organiser, r
340 n de l’esprit devant ses propres inventions ! Car il est clair que la machine a été inventée par les Européens pour les li
341 les libérer du travail qui pouvait être fait par elle  ; et s’ils ne savent mettre à profit les libertés ainsi conquises, à
342 du travail qui pouvait être fait par elle ; et s’ ils ne savent mettre à profit les libertés ainsi conquises, à la fois phy
343 en est le vrai responsable. Le mécanisme quel qu’ il soit — de la machine-outil à l’État, du plan de travail d’un écrivain
344 e créatrice, un moyen ordonné à sa fin. De même, il serait néfaste et faux de considérer la centralisation, l’organisatio
345 tés fédérées de tâches devenues trop lourdes pour elles , mais dont la bonne exécution ouvre à chacun de leurs citoyens des mo
346 esanteur naturelle, aux routines, aux machines qu’ elle s’est construites mais qu’elle accuse ensuite de l’asservir, cette ma
347 s, aux machines qu’elle s’est construites mais qu’ elle accuse ensuite de l’asservir, cette mauvaise foi trahissant à vrai di
348 soit de s’imaginer, comme la colombe de Kant, qu’ elle volerait beaucoup mieux dans le vide. Bureaucratie, technocratie, péd
349 ces objets, et les doue des pouvoirs de sujets qu’ elle abdique… ⁂ IV. Passage des buts aux moyens Quels sont alors les
350 ies à venir ? Et de quels mécanismes l’Europe a-t- elle besoin pour atteindre ces buts, ou pour s’en rapprocher ? Buts. Aut
351 ts personnels (les plus immédiats à l’universel). Il s’agit donc : — d’une part, à l’intérieur, d’éviter que les indépenda
352 de l’Europe n’étant pas ici discutée mais admise, il faut chercher à voir maintenant quelles formes d’organisation politiq
353 ode personnaliste, c’est d’une vision des Buts qu’ il faut partir : car elle seule permettra d’éclairer les chemins qui peu
354 est d’une vision des Buts qu’il faut partir : car elle seule permettra d’éclairer les chemins qui peuvent y conduire. Nous a
355 ment ces grands principes abstraits se traduisent- ils , aux yeux de l’Européen vivant en 1980 ? Tout d’abord, par un sentim
356 u la Chine, l’Europe est tellement plus variée qu’ elle est en fait, si on la traverse, infiniment plus riche en expériences
357 éens en déplacement professionnel ou en vacances. Ils sont chez eux partout, du Cap Nord à Stamboul, comme c’était le cas n
358 Saint-Gallois à Genève, du Sicilien en Lombardie. Ils disent « nous » en parlant de n’importe quel autre peuple. Ils appren
359 nous » en parlant de n’importe quel autre peuple. Ils apprennent à considérer les gloires et les hontes du passé de chaque
360 ux dimensions continentales, et donc mondiales. S’ ils veulent sortir de l’Europe, vers l’Afrique ou l’Asie, les Amériques o
361 l’Afrique ou l’Asie, les Amériques ou la Russie, ils produisent un passeport européen, délivré à leur lieu d’origine. Chac
362 é à leur lieu d’origine. Chacun peut s’établir où il le veut, sur tout le territoire de la fédération, soit pour y travail
363 de se sentir écrasée entre les « deux grands » : elle est plus « grande » que chacun d’eux, et presque autant que les deux
364 d’un pays d’origine, d’une communauté définie où il a (ou prend) ses racines ; et il peut y exercer ses droits civiques.
365 nauté définie où il a (ou prend) ses racines ; et il peut y exercer ses droits civiques. Le droit à une patrie locale est
366 de la Personne. Pour devenir citoyen de l’Europe, il faut et il suffit que l’on devienne d’abord citoyen de l’un des pays
367 nne. Pour devenir citoyen de l’Europe, il faut et il suffit que l’on devienne d’abord citoyen de l’un des pays membres, vo
368 bénéficie de tous les droits civiques et sociaux. Il y vote, et il y est éligible après un certain délai, qui varie selon
369 ous les droits civiques et sociaux. Il y vote, et il y est éligible après un certain délai, qui varie selon qu’il s’agit d
370 igible après un certain délai, qui varie selon qu’ il s’agit d’emplois publics municipaux, régionaux, ou nationaux. Le droi
371 traînant dans une guerre ou une ruine générales : ils participent tous également au droit de déterminer leur destin, sur ce
372 fédération européenne a solennellement déclaré qu’ elle renonçait à la guerre comme moyen politique. Pour sa police interne e
373 et pour garantir ses membres contre l’extérieur, elle entretient des forces défensives organisées selon le système des mili
374 r les libertés fondamentales de l’homme européen. Il en résulte immédiatement que l’organisation politique de l’Europe ne
375 mmun de plusieurs de leurs fonctions principales. Elle se trouve être, de la sorte, au moins aussi réelle que dans l’ancien
376 iciles, à l’intérieur de la fédération vers 1980. Elle ne saurait s’expliquer qu’en fonction des problèmes qui se posaient a
377 etour en arrière, examinons la situation telle qu’ elle se présentait aux environs de 1963, lorsqu’on se mit à envisager les
378 ainte-Alliance, interdisant toute union efficace, il s’agit de manœuvrer selon les meilleures recettes de pilotage, de tro
379 plus épineux est celui de la souveraineté : faut- il exiger des États qu’ils y renoncent ? Si c’est une condition sine qua
380 de la souveraineté : faut-il exiger des États qu’ ils y renoncent ? Si c’est une condition sine qua non, y a-t-il une chanc
381 cent ? Si c’est une condition sine qua non, y a-t- il une chance quelconque qu’on l’obtienne jamais, donc qu’on arrive jama
382 sont pas des personnes libres et responsables, et il est tout à fait inconcevable qu’ils puissent agir sous le coup d’un e
383 sponsables, et il est tout à fait inconcevable qu’ ils puissent agir sous le coup d’un enthousiasme collectif. « L’État est
384 onstres froids », comme l’a dit Nietzsche. Mais s’ il est vain de fonder l’espoir d’une construction européenne sur un gest
385 ste qu’aucun grand État n’est en mesure de faire, il est sans doute dangereux de s’épuiser à combattre des souverainetés e
386 des cantons une renonciation à leur souveraineté, elle la garantit expressément, en même temps qu’elle en délègue partiellem
387 , elle la garantit expressément, en même temps qu’ elle en délègue partiellement l’exercice au pouvoir fédéral. Voici les tex
388 itée par la Constitution fédérale, et comme tels, ils exercent tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral.
389 ent pragmatique ou doctrinaire. Un fait demeure : il n’est pas de constitution plus fédéraliste que celle de la Suisse, et
390 s fédéraliste que celle de la Suisse, et pourtant elle garantit la souveraineté de ses membres ! Souveraineté fictive, dira-
391 e ses membres ! Souveraineté fictive, dira-t-on ? Elle l’est certes en partie ; pas davantage toutefois que celle de nos Éta
392 tats contemporains. Au surplus, dans la mesure où elle subsiste, elle se voit garantie et défendue par une constitution, par
393 ins. Au surplus, dans la mesure où elle subsiste, elle se voit garantie et défendue par une constitution, par une armée, et
394 rendre parti dans leurs querelles. Mais qu’en est- il de ces voisins et de leur souveraineté illimitée ? L’affaire de Suez
395 ux autres puissances de cesser les hostilités, qu’ ils venaient d’engager contre l’Égypte. Ils ont immédiatement obtempéré.
396 lités, qu’ils venaient d’engager contre l’Égypte. Ils ont immédiatement obtempéré. Or, ces puissances n’étaient pas même eu
397 a pas. Leur souveraineté relative, pour autant qu’ elle subsiste, n’est en rien garantie (ni d’ailleurs menacée) par leurs vo
398 dangereuse qu’humiliante indique clairement ce qu’ il nous reste à faire : — une Constitution fédérale, afin que l’Europe r
399 s’en inquiètent, aux environs de 1963 : c’est qu’ il est plus nouveau que celui des souverainetés, et qu’il est même sans
400 t plus nouveau que celui des souverainetés, et qu’ il est même sans précédent dans l’ère moderne. Voici comment on peut l’i
401 très ardus d’aménagement du territoire européen. Ils requièrent des solutions neuves, à la recherche desquelles concourent
402 mmerciales des associations ou unions régionales. Elle s’efforce d’harmoniser la vitalité des nouveaux centres, les besoins
403 s que la communauté politique (État ou région) où il est né ; et enfin le libre jeu dans la fédération d’innombrables tens
404 édération européenne a solennellement proclamé qu’ elle renonçait à la guerre comme moyen d’imposer sa politique commune. Le
405 e, la question se ramène à celle des alliances qu’ elle peut être amenée à conclure avec d’autres États ou fédérations. Si el
406 à conclure avec d’autres États ou fédérations. Si elle accepte de lier son sort à un État ou à un groupe d’États qui s’inter
407 État ou à un groupe d’États qui s’interdit comme elle tout recours à la guerre, elle reste neutre en théorie, et fidèle à l
408 i s’interdit comme elle tout recours à la guerre, elle reste neutre en théorie, et fidèle à l’esprit de sa Constitution ains
409 sa Constitution ainsi étendu à l’alliance ; mais elle peut être entraînée dans une guerre qu’un tiers parti ferait à l’alli
410 uerre qu’un tiers parti ferait à l’allié, comme s’ il la faisait à l’un de ses membres. Une disposition de ce genre présent
411 de circulation des biens sur tout son territoire, elle se charge d’organiser et de subventionner les activités qui dépassent
412 ités qui dépassent la capacité des États membres. Elle administre les douanes fédérales. Elle élabore une politique de produ
413 s membres. Elle administre les douanes fédérales. Elle élabore une politique de production, de répartition intérieure, et d’
414 intérieure, et d’échanges à l’échelle mondiale. Elle soutient et harmonise les plans d’aménagement du territoire entrepris
415 nt du territoire entrepris par les États membres. Elle légifère sur les transports, les postes, les grands travaux à l’échel
416 nner des structures et des pouvoirs autonomes, et elles peuvent aussi s’associer avec d’autres entités comparables relevant d
417 ministres, représente le chef de l’État européen. Il gère collégialement les affaires fédérales. Ses membres sont élus pou
418 même pays. Son président est élu par l’Assemblée. Il porte le titre de président de la fédération d’Europe. Le Conseil féd
419 on « synthétique » édifiée sur un terrain vague — il n’y en a d’ailleurs plus d’assez vaste, dans l’Europe de 1980. Le Dis
420 fédéral doit être situé au centre du Continent ; il doit être facile à défendre, en temps de troubles, mais d’accès facil
421 troubles, mais d’accès facile en temps de paix ; il ne peut être qu’un petit pays, cependant très diversifié et si possib
422 tion fédéraliste ; enfin, comme Washington, D.C., il doit accepter de demeurer, en tant qu’État, à l’écart des luttes poli
423 ans ses villes principales, Zurich, Bâle, Genève. Elles sont placées sous la protection de l’armée suisse. Des dispositions s
424 de neutralité, dont nous avons vu par ailleurs qu’ il a perdu ses anciennes justifications. VI. Chances de réalisation
425 et très puissant. Quant aux libéraux agnostiques, ils peuvent trouver dans un régime fédéraliste la garantie à des droits q
426 un régime fédéraliste la garantie à des droits qu’ ils ont longtemps revendiqués contre les cléricalismes unitaires, voire t
427 nse de la personne, on peut tenir pour certain qu’ elle jouera, elle aussi — si peu que ce soit — en faveur d’un régime fédér
428 sonne, on peut tenir pour certain qu’elle jouera, elle aussi — si peu que ce soit — en faveur d’un régime fédéraliste. 5. L
429 es deviennent chaque année plus concrets, soit qu’ ils se posent en termes d’intérêts, soit qu’ils réveillent des passions p
430 it qu’ils se posent en termes d’intérêts, soit qu’ ils réveillent des passions partisanes ou nationales. « Fédérer les Europ
431 orables que jamais à une action fédéraliste. Mais il faut, pour les réaliser, un élément catalyseur : une vision non utopi
432 e n’est pas que ces obstacles soient bien forts — ils n’ont guère plus de consistance que les ténèbres — mais c’est que les
433 els de l’union paraissent encore bien peu hardis. Ils donnent l’impression de mal voir ce qu’ils disent qu’il faudrait voul
434 ardis. Ils donnent l’impression de mal voir ce qu’ ils disent qu’il faudrait vouloir. Ils hésitent, ils discutent, ils piéti
435 nent l’impression de mal voir ce qu’ils disent qu’ il faudrait vouloir. Ils hésitent, ils discutent, ils piétinent dans l’o
436 mal voir ce qu’ils disent qu’il faudrait vouloir. Ils hésitent, ils discutent, ils piétinent dans l’ombre ; il leur arrive
437 ’ils disent qu’il faudrait vouloir. Ils hésitent, ils discutent, ils piétinent dans l’ombre ; il leur arrive d’accuser de s
438 il faudrait vouloir. Ils hésitent, ils discutent, ils piétinent dans l’ombre ; il leur arrive d’accuser de sabotage ceux qu
439 tent, ils discutent, ils piétinent dans l’ombre ; il leur arrive d’accuser de sabotage ceux qui demandent : « Quelle Europ
440 ’étudier les modalités et le coût de l’opération. Ils concluent que rien n’est possible dans l’état actuel des choses. Et l
441 yens, mais personne ne saurait vouloir une fin qu’ il distingue mal. Et c’est pourquoi, dans le domaine qui nous occupe, la
442 ortance. Mon regard trop souvent n’a vu que ce qu’ il cherchait, ce qui était dans mon esprit et non dans la réalité. Cet e
443 bition que d’appeler des mises au point optiques. Il y faut le travail d’une équipe munie de meilleurs instruments, multip
444 esprits paraît la seule immédiatement réalisable. Elle peut être la plus efficace, à long terme. 2. Extrait de « L’attitu
445 e fer sont fédéraux en Suisse, privés aux USA, où ils sont d’ailleurs en pleine crise. L’aviation appartient encore au sect
7 1963, Articles divers (1963-1969). L’amour ? le mariage ? la fidélité ? l’adultère ? la passion ? le couple ? (25 octobre 1963)
446 te donc beaucoup… mais se porte plutôt mal. Y a-t- il vraiment une crise du mariage ? Naturellement. Seulement il serait fa
447 t une crise du mariage ? Naturellement. Seulement il serait faux d’y voir un mal du siècle, du nôtre. Sans la crise du mar
448 u mariage, que seraient toutes nos littératures ? Elle ne fait pas simplement la fortune du cinéma, le théâtre, le roman, la
449 isant ou en ironisant sur le fameux « trio » dont ils tirent un répertoire inépuisable de situations comiques ou cyniques.
450 ême, que tout homme doit un jour connaître, et qu’ il appelle secrètement. Pourquoi mariage et passion sont-ils incompatibl
451 lle secrètement. Pourquoi mariage et passion sont- ils incompatibles ? Parce que le mariage c’est la coexistence pacifique,
452 é quotidienne, l’accoutumance, et que la passion, elle , veut des obstacles qui rendent l’amour plus intense et plus conscien
453 i nous est si familière que nous nous figurons qu’ elle a toujours existé a, en fait, une date et des origines bien précises.
454 e-Orient au cours d’une croisade et en Espagne où il avait épousé la veuve d’un roi d’Aragon. Aux poètes arabes de l’école
455 ’Aragon. Aux poètes arabes de l’école de Cordoue, il emprunta leur rhétorique amoureuse, leurs expressions, la forme de l’
456 deux orientales, pourquoi cette forme d’amour est- elle totalement inconnue dans les pays orientaux, pourquoi n’a-t-elle fait
457 inconnue dans les pays orientaux, pourquoi n’a-t- elle fait fortune qu’en Occident ? C’est que la passion ne s’approfondit e
458 ge ses énergies qu’à la mesure des résistances qu’ elle rencontre. Et c’est l’Europe catholique et nordique qui devait offrir
459 ristan aurait pu garder Iseut aux cheveux d’or qu’ il est allé conquérir pour son roi : les mœurs du temps sanctionnaient l
460 t au long du roman comme supérieur aux autres. Or il n’use pas de ce droit et livre Iseut au roi Marc. Quand Tristan et Is
461 és de la cour de Marc vivent seuls dans la forêt, ils dorment pourtant séparés par une épée. Enfin, malgré son amour toujou
462 es. Profanées et reniées par nos codes officiels, elles sont devenues d’autant plus contraignantes qu’elles n’ont plus de pou
463 les sont devenues d’autant plus contraignantes qu’ elles n’ont plus de pouvoir que sur nos rêves. Quel rapport a donc au juste
464 r romanesque triomphe d’une quantité d’obstacles, il en est un contre lequel il se brisera presque toujours : c’est la dur
465 quantité d’obstacles, il en est un contre lequel il se brisera presque toujours : c’est la durée. Et notre culte de la be
466 oules, disqualifiant automatiquement l’épouse, si elle ne ressemble pas à la star. Ne peut-on quand même supposer que l’homm
467 n type, rencontre un jour son Iseut ? Admettons ! Il rencontre cette femme, il reconnaît son Iseut. Elle est mariée, natur
468 son Iseut ? Admettons ! Il rencontre cette femme, il reconnaît son Iseut. Elle est mariée, naturellement. Qu’elle divorce,
469 Il rencontre cette femme, il reconnaît son Iseut. Elle est mariée, naturellement. Qu’elle divorce, il l’épouse ! Avec elle,
470 aît son Iseut. Elle est mariée, naturellement. Qu’ elle divorce, il l’épouse ! Avec elle, ce sera la vraie vie, l’épanouissem
471 Elle est mariée, naturellement. Qu’elle divorce, il l’épouse ! Avec elle, ce sera la vraie vie, l’épanouissement de ce Tr
472 aturellement. Qu’elle divorce, il l’épouse ! Avec elle , ce sera la vraie vie, l’épanouissement de ce Tristan qu’il porte en
473 a la vraie vie, l’épanouissement de ce Tristan qu’ il porte en soi. Mais aussitôt paraît une anxiété dans l’entourage : l’a
474 ne anxiété dans l’entourage : l’amant comblé va-t- il encore aimer Iseut une fois épousée ? Car Iseut, c’est toujours l’étr
475 ors un jour ou l’autre dans l’infidélité. Alors, il n’y a pas de solution ? Si. Il faut complètement reconsidérer le mari
476 nfidélité. Alors, il n’y a pas de solution ? Si. Il faut complètement reconsidérer le mariage. Ne pas essayer de le fonde
477 cider » d’aimer et d’épouser n’importe qui ? Non, il existe certaines chances de réussite qu’il serait stupide de ne pas m
478 ? Non, il existe certaines chances de réussite qu’ il serait stupide de ne pas mettre de son côté : buts communs, rythmes d
479 e) pour toute la vie, finalement c’est parier. Et il serait beaucoup plus conforme à l’essence du mariage d’enseigner aux
480 es, relève toujours d’une sorte d’arbitraire dont ils s’engagent à assumer les suites heureuses ou non. La fidélité, alors,
481 confondu avec le sien. Cette fidélité résistera-t- elle à la passion, si elle la rencontre ? Un homme ne peut à la fois croir
482 Cette fidélité résistera-t-elle à la passion, si elle la rencontre ? Un homme ne peut à la fois croire au mariage — à la vo
483 et la crise du mariage se dénouera d’elle-même ? Il est vrai que la passion est l’ennemie jurée du mariage mais c’est ell
484 passion est l’ennemie jurée du mariage mais c’est elle aussi qui le défie, l’anime, l’oblige à redevenir un choix vital et n
485 aintenant si peu d’obstacles et de contraintes qu’ elle semble condamnée faute d’adversaire à sa taille) et nous irons tout d
486 e quelque chose qui soit au-delà de l’ordre et qu’ il n’appelle alors un autre xiie siècle de l’amour… qui sera peut-être
487 élité ? l’adultère ? la passion ? le couple ?… », Elle , Paris, 25 octobre 1963, p. 84-85, 151, 155. h. Introduit par cette
488 ples ont des histoires, même les couples heureux. Ils ont des problèmes, des déceptions, des inquiétudes… Est-ce inévitable
489 le café et la pomme de terre — au xiie siècle — elle n’en est pas moins elle aussi une “importation”, non une fatalité. D’
490 terre — au xiie siècle — elle n’en est pas moins elle aussi une “importation”, non une fatalité. D’où vient-elle ? Qui l’a
491 i une “importation”, non une fatalité. D’où vient- elle  ? Qui l’a introduite en France ? Comment l’affronter ? Et enfin, comm
8 1963, Articles divers (1963-1969). Une interview de Denis de Rougemont : l’écrivain nous parle des centres culturels internationaux (16 novembre 1963)
492 3)i À la suite de la remarquable conférence qu’ il a faite jeudi soir au Club 44, M. Denis de Rougemont a bien voulu nou
493 blir la compréhension entre les peuples. Existe-t- il actuellement de tels centres ? Nous nous sommes réunis à Genève, il y
494 u Centre européen de la culture. À cette réunion, il a été décidé de former de tels centres, un peu partout dans le monde.
495 tée vers le machinisme intégral. L’automation met- elle en danger les valeurs fondamentales de notre culture ? Cela dépend de
496 éparés. Toute la question est là. Pour l’instant, il faut reconnaître que l’automation pose de grands problèmes, dans le d
497 travail d’éducation à effectuer. Sous ce rapport, il est intéressant de mentionner l’essor remarquable de l’édition dite «
9 1964, Articles divers (1963-1969). L’idée européenne en Suisse (1964)
498 Morgarten et le Pacte public de Brunnen en 1315, il n’y avait pas de Suisse, ni sur les cartes, ni dans les chartes. Le n
499 eu du Saint-Empire, de cette première Europe dont elles sont nées, c’est parce que l’Empire lui-même se dénature, se dissout
500 comme les autres. Du moins les Ligues conservent- elles le principe même de l’Empire d’Occident, l’idée d’union sans unificat
501 teur d’aujourd’hui. Comme dans le Contrat social, il s’y fait l’avocat d’une confédération de nos pays inspirée de celle d
502 , et de la « Ligue helvétique ». L’Europe unie qu’ il appelle de ses vœux ne serait nullement unifiée par un despote ou par
503 ment unifiée par un despote ou par une idéologie, elle devrait être en somme une Europe des cités (ou des communes), formée
504  ». C’est une Europe intégralement fédéraliste qu’ il préconise, et son module (élément type) se révèle, en dernière analys
505 ». Germaine de Staël est suisse dans la mesure où elle ouvre des perspectives européennes, soit par son action personnelle à
506 peut-être souvenu de son passage à Neuchâtel (où il fut un temps typographe) en écrivant son grand livre posthume, Du Pri
507 rand livre posthume, Du Principe fédératif ; mais il est bien certain qu’un de ses contemporains, J. C. Bluntschli, célèbr
508 connaît les mécanismes de notre vie confédérale : il n’hésite pas à les proposer en modèle pour l’édification de l’Europe.
509 i cet idéal de l’avenir se réalise un jour, écrit- il en 1875, la nationalité suisse devra s’incorporer à la communauté de
510 a communauté de la Grande Europe. De cette façon, elle n’aura pas vécu en vain ni sans gloire14. » Pratiquement ignoré de no
511 conde Guerre mondiale jusqu’aux environs de 1960, il faut reconnaître que nos autorités et notre presse ont été dans l’ens
512 r », comme on appelait à l’époque la CECA : 1° qu’ il n’était pas réalisable, 2° qu’il serait néfaste pour la Suisse, à cau
513 la CECA : 1° qu’il n’était pas réalisable, 2° qu’ il serait néfaste pour la Suisse, à cause de ses incidences sur nos tran
514 e les objections du scepticisme invétéré (ou faut- il dire traditionnel ?) qui tendait à paralyser non seulement toute init
515 l’Europe s’avérait bel et bien réalisable, puisqu’ elle devenait réalité, mais elle nous prenait par surprise, et chaque déma
516 en réalisable, puisqu’elle devenait réalité, mais elle nous prenait par surprise, et chaque démarche de nos gouvernants pour
517 ce par la presse moyenne de la Suisse allemande : elle relevait en effet des affaires « étrangères », plutôt mal vues à caus
518 e », — comme disaient mes instituteurs. Qu’en est- il de la seconde objection que je citais : « Si cela se fait, par imposs
519 r, et c’en serait fait du « rôle particulier » qu’ elle se réserve d’invoquer plus souvent encore que d’autres nations, au no
520 bons offices lors de la guerre d’Algérie, etc.). Il n’est donc pas question que la Suisse prenne la moindre initiative vi
521 ve visant à l’union européenne au plan politique. Elle ne pourrait qu’y perdre son prestige international. Arguments consti
522 nomie à celle d’un groupe de nations européennes. Elle tient à garder libres ses échanges avec le monde au-delà de l’Europe.
523 pe. En s’associant au Marché commun, par exemple, elle perdrait de nombreux avantages, bancaires notamment, et son agricultu
524 l’Europe. Si notre neutralité s’oppose à l’union, il faut en réviser les termes, comme d’ailleurs la Suisse l’a fait maint
525 qu’un moyen au service de notre indépendance ; «  elle ne fait pas partie de l’essence de la Confédération » (prof. Henri Mi
526 e l’Europe unie. Sinon, l’Europe qui se fera sans elle , risque bien de se faire contre elle, — c’est-à-dire contre son essen
527 se fera sans elle, risque bien de se faire contre elle , — c’est-à-dire contre son essence fédéraliste ; mais nous aurons per
528 plaindre. À quoi l’on pourrait ajouter : 1° que s’ il est vrai que notre neutralité a permis les interventions de la Croix-
529 ence d’une Europe unie eût peut-être été capable, elle , de prévenir ces crises, et elle diminuerait très fortement les chanc
530 tre été capable, elle, de prévenir ces crises, et elle diminuerait très fortement les chances de leur retour à l’avenir ; 2°
531 finalité. Isolée de l’Histoire, en quelque sorte, elle n’est plus celle que les Puissances garantirent en 1815. Si elle en v
532 celle que les Puissances garantirent en 1815. Si elle en vient un jour à s’opposer aux intérêts de l’Europe entière, on s’a
533 x intérêts de l’Europe entière, on s’apercevra qu’ elle a perdu ses bases contractuelles. Déclarer par exemple que la Suisse
534 surde : car la Suisse fait partie de l’Europe, qu’ elle le veuille ou non, et rester neutre entre l’Europe et ses ennemis, ce
535 compatible avec la Constitution actuelle. Si, dit- il , la Suisse se refuse à entrer sans réserve dans le Marché commun, ell
536 fuse à entrer sans réserve dans le Marché commun, elle ne saurait justifier ce refus par des motifs juridiques et des prétex
537  », mais uniquement par des motifs politiques, qu’ elle reste libre d’avancer18. Et ceci nous renvoie au groupe d’arguments p
538 (sans cesse invoqué par les abstentionnistes) qu’ elle commerce le plus, mais avec les Six. Les chiffres globaux sont connus
539 De nos exportations, deux tiers vont à l’Europe. Il est vrai que notre balance commerciale reste déficitaire avec l’Europ
540 itaire avec l’Europe (de 447 millions), tandis qu’ elle est bénéficiaire (de 51 millions) avec l’outre-mer. Mais il faut avou
541 éficiaire (de 51 millions) avec l’outre-mer. Mais il faut avouer que ces chiffres ne suffisent pas à justifier notre refus
542 nous qu’ailleurs, n’en affirment pas moins que s’ il le faut un jour, la Suisse fara da se et saura bien se défendre ? Nou
543 us et malgré nous. Arguments traditionalistes. — Il est clair qu’une Europe « une et indivisible » serait une catastrophe
544 uisse. Mais personne ne la préconise, en réalité. Il est clair, en revanche, qu’une Europe fédérée, donc respectueuse de s
545 ation traditionnelle de la Suisse. Mais se fera-t- elle  ? Voilà qui dépend de nous aussi. C’est à nous de faire valoir dans l
546 ous seuls, c’est le plus sûr moyen de les perdre. Il n’est pas vrai, d’ailleurs, que l’union de l’Europe menace d’effacer
547 ’a pas effacé nos caractéristiques cantonales. Et il est pour le moins bizarre qu’un porte-parole des industriels suisses
548 e des peuples est un danger majeur pour son pays, il n’a pas le droit d’en conclure au refus du Marché commun, mais il a l
549 oit d’en conclure au refus du Marché commun, mais il a le devoir de freiner l’expansion de l’industrie suisse, cause direc
550 n, ou du xviiie siècle, ni même celle de 1848 qu’ il s’agit de sauver aujourd’hui, mais bien la Suisse réelle de la second
551 t l’on sait dans quel camp j’ai toujours milité — il faut bien reconnaître que des deux côtés, une sorte de gêne empêche d
552 nchise au bout des arguments, au fond des choses. Elle s’explique peut-être en partie par nos coutumes fédéralistes de tolér
553 de nos traditions savent bien que chacun sait qu’ il s’agit d’intérêts ; et quant aux enthousiastes de l’Europe, ils saven
554 ntérêts ; et quant aux enthousiastes de l’Europe, ils savent qu’ils n’ont aucune espèce de chances d’être écoutés s’ils pro
555 uant aux enthousiastes de l’Europe, ils savent qu’ ils n’ont aucune espèce de chances d’être écoutés s’ils proposent de reno
556 s n’ont aucune espèce de chances d’être écoutés s’ ils proposent de renoncer à la neutralité : c’est devenu, dans la Suisse
557 ensable dans la neutralité d’une fédération. Mais il n’y a aucune chance qu’on nous offre cela, si nous fédéralistes ne l’
558 es diversités et nos intérêts bien compris, et qu’ il est dangereusement irréaliste de raisonner comme s’il était possible
559 st dangereusement irréaliste de raisonner comme s’ il était possible de dissocier durablement notre salut de celui de l’ens
560 t comme État qui entend garder une raison d’être. Il s’agit de savoir et de dire ce que nous avons à donner, et non pas se
561 otre fédéralisme ! Contrairement à la neutralité, il tient à l’essence même de notre État. C’est notre création majeure. I
562 même de notre État. C’est notre création majeure. Il nous oblige. Et en son nom, nous nous devons dorénavant de prendre de
563 u philanthropisme en fin de compte intéressé dont elle a fait la « ligne Maginot » de sa défense. Et cela, non seulement par
564 l’histoire aura le dernier mot. Mais encore faut- il qu’elle le dise ! 13. Il s’agit de l’Acte additionnel aux Constitut
565 oire aura le dernier mot. Mais encore faut-il qu’ elle le dise ! 13. Il s’agit de l’Acte additionnel aux Constitutions de
566 mot. Mais encore faut-il qu’elle le dise ! 13. Il s’agit de l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire. 14. Die
567 nt reçu leurs franchises de l’empereur. N’y avait- il pas là un premier germe de la neutralité « charismatique » de notre C
10 1964, Articles divers (1963-1969). Les arts dans la vie en Suisse (1964)
568 ins, si jaloux de leurs différences — et vraiment il n’en est pas deux qui se ressemblent : l’un catholique et l’autre pro
569 rels bien distincts ! Et chacun veut rester ce qu’ il est, mais ils n’en vivent pas moins en harmonie, égaux en droit dans
570 tincts ! Et chacun veut rester ce qu’il est, mais ils n’en vivent pas moins en harmonie, égaux en droit dans l’inégalité de
571 site exemplaire suppose d’inévitables sacrifices. Elle exclut, par définition, la possibilité d’une culture nationale et uni
572 livres sur les bancs de l’école ; et si plus tard ils écrivent et publient, il y aura peu de chances qu’ils se lisent mutue
573 écrivent et publient, il y aura peu de chances qu’ ils se lisent mutuellement. L’un voudra se faire connaître à Zurich, puis
574 itutions, tous deux bien contents d’être suisses, ils ne se rencontreront sans doute jamais et n’entendront parler l’un de
575 réserve prudente dans l’expression de la pensée s’ il s’agit d’autre chose que des grands lieux communs mainteneurs d’une c
576 zons continentaux. Entre le petit compartiment où ils sont nés et la grande unité européenne, pas de relais national pour l
577 contemporain : « Pays de gens moyens, oui », dit- il de la Suisse. « Mais quand ils réussissent à se dégager de leur canto
578 moyens, oui », dit-il de la Suisse. « Mais quand ils réussissent à se dégager de leur canton — alors, pas de milieu, ils a
579 se dégager de leur canton — alors, pas de milieu, ils atteignent à l’universel. Au fond de son trou, l’homme de Disentis, d
580 ge — entre les hautes parois de sa prison. Mais s’ il monte sur la montagne… Alors, cette ivresse des sommets. L’intuition
581 vant la pensée. Le Suisse s’appelle Jean-Jacques. Il s’appelle Germaine de Staël. Il s’appelle Burckhardt ou, dans un autr
582 lle Jean-Jacques. Il s’appelle Germaine de Staël. Il s’appelle Burckhardt ou, dans un autre domaine, Karl Barth. Son canto
583 es arts et les lettres, dans tout cela ? Eh bien, ils peuvent se prévaloir en Suisse d’un Arthur Honegger pour la musique,
584 définir un style ni une école particulière, mais il suppose un climat de culture d’une densité probablement très supérieu
585 rois millions dans les autres pays d’Europe. Faut- il mettre ces chiffres en relation avec l’indice Nobel — qui indique la
586 4, et celui de la Russie puis de l’URSS de 0,03 ? Il semble donc que les petits pays bénéficient de grands avantages cultu
587 de cette fin du xxe siècle que dans la mesure où elles sauront grouper leurs authentiques forces locales pour mieux particip
588 visiteurs de la section « Les arts dans la vie ». Ils y verront peut-être une préfigure de l’Europe à venir, cherchant l’un
11 1964, Articles divers (1963-1969). De la marche / De l’échec (1964)
589 nal, une véritable originalité d’allure et d’âme. Il parlait peu, mais l’élégance précise de ses sentences intimidait, cep
590 nces intimidait, cependant que la courtoisie dont il ne se départissait jamais accentuait, par contraste avec le ton bourr
591 e je détestais l’ambiance de la place d’armes, où il était de mise de ne pas aimer ce chef. Un jour, à peine entré dans no
592 Un jour, à peine entré dans notre salle de cours, il nous posa cette question simple : Qu’est-ce que l’énergie ? Et après
593 bref ceux qui s’annonçaient encore pour répondre, il scanda : « L’énergie, c’est quelque chose qui dort en chacun de vous
594 st quelque chose qui dort en chacun de vous et qu’ il s’agit de réveiller. » Puis il sortit. Ce n’était pas une définition,
595 acun de vous et qu’il s’agit de réveiller. » Puis il sortit. Ce n’était pas une définition, c’était plus grave : nous comp
596 et permanent d’irritation et de protestations : «  Il nous fera tous crever avec ses manies », disait-on à mi-voix quand pa
597 pas les justifier, malgré la sourde résistance qu’ il devait bien sentir chez ses subordonnés. Quels pouvaient être ses mot
598 es subordonnés. Quels pouvaient être ses motifs ? Il concevait l’armée en général, et celle d’un pays neutre plus qu’une a
599 t pourtant nécessaires à l’homme complet. Quoi qu’ il en soit d’ailleurs de sa philosophie, j’ai toutes raisons de croire q
600 imposant cette épreuve « inutile » à notre école, il poursuivait un but précis. Il voulait nous laisser le souvenir d’avoi
601 le » à notre école, il poursuivait un but précis. Il voulait nous laisser le souvenir d’avoir une fois au moins dans notre
602 maximum que nous pensions pouvoir tirer de nous. Il était de la nature d’un tel projet que ses motifs ne fussent point di
603 ne fussent point divulgués, mais en même temps qu’ il nous fût présenté de manière à frapper nos imaginations. C’est pourqu
604 qui monte lentement jusqu’aux hôtels de la Lenk ; il nous faudrait franchir les Alpes pendant la nuit, par un col escarpé
605 de l’imagination, se sont mises en état d’alerte. Elles ont pris leur régime d’exception. La connaissance anticipée du but le
606 ées par celui qui se bornait à de courtes visées. Elles étaient là, ces forces, à portée de la main mais endormies, laissant
607 sse. Car la vraie force d’un homme jeune ne vient- elle pas de ce qu’il imagine un très long temps de marche devant lui, et c
608 force d’un homme jeune ne vient-elle pas de ce qu’ il imagine un très long temps de marche devant lui, et certains objectif
609 i, et certains objectifs qui, peut-être, parce qu’ ils ne sont que vaguement entrevus, semblent alors grands et lointains ?
610 d’hésitation : c’est qu’on n’exige plus autant d’ elles , et c’est vieillir. Il faudrait au contraire, à ce point, oser voir p
611 n n’exige plus autant d’elles, et c’est vieillir. Il faudrait au contraire, à ce point, oser voir plus grand et plus loin 
612 eur, tandis que l’autre était plutôt subie… Comme elle l’était avec bonheur, ce matin-là, avec quelle plénitude animale ! No
613 que la mesure. Devant nous, fermant une vallée qu’ il nous fallait d’abord aller rejoindre, environ mille mètres plus bas,
614 chamois. Leur chef en tête bien détaché du gros, ils se déplaçaient par à-coups, au pied d’une paroi de rochers couronnant
615 ectrique parcourait le troupeau de bout en bout : il ondula d’abord sur place comme une houle, puis se mit tout entier à c
616 ’on eût dit capricieux. Notre colonne, cependant, elle aussi précédée par son chef veillant au rythme égal de la marche, pou
617 sée devant nous par des servantes ensommeillées — il devait être plus de minuit — on nous donna la permission inattendue d
618 onel demande des volontaires pour une patrouille. Il faut aller reconnaître le sentier du col. Un guide a dit qu’il neige
619 reconnaître le sentier du col. Un guide a dit qu’ il neige au-dessus de deux-mille. Cinq ou six d’entre nous allèrent s’an
620 afé au restaurant. — « Je vous remercie, nous dit- il lentement, en nous regardant l’un après l’autre. J’apprends qu’il y a
621 me prépare à soulever une caisse très lourde, et elle est vide. Le savant qui poursuit une longue recherche apprend qu’un c
622 , parfois, que l’obstacle lui-même, si grand soit- il . À la Lenk, cette nuit-là, j’eus un accès de fièvre qui me tint éveil
623 ape m’en fournissait la nécessaire contrepartie : il m’apprenait que pour franchir certains obstacles, il faut moins d’éne
624 m’apprenait que pour franchir certains obstacles, il faut moins d’énergie maîtrisée que pour y renoncer dans le moment où
625 ersévérer, après n’avoir entrepris qu’en espoir ! Il avouerait que son espoir était trop court. o. Rougemont Denis de,
12 1964, Articles divers (1963-1969). Le sentier perdu (1964)
626 Le sentier perdu (1964)m Je voyais d’ elle , chez des amis, de fascinants portraits d’enfants aux très grands yeu
627 inants portraits d’enfants aux très grands yeux : ils n’ont pas fini de s’étonner que déjà commence l’angoisse. Mais tout d
628 Nora Auric a ceci de particulier qu’on ne sait s’ il est vu de sous l’eau ou d’un nuage : ce seraient à peu près les mêmes
629 peurs denses. Ce n’est pas un monde inhumain, car il est féminin, sans aucun doute possible. Ne fût-ce que par ces roses u
13 1965, Articles divers (1963-1969). La technique, facteur de paix (6 mars 1965)
630 e de l’électricité et de la lumière : j’ignore si elle est ondulatoire ou corpusculaire, ou les deux à la fois, mais je sais
631 de se rendre connaissable dans un corps d’homme. Il en résulte que le corps physique, et la matière du même coup, se trou
632 révélation des fils de Dieu, avec l’espérance qu’ elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption… pour avoir pa
633 cosmos le rend cependant concevable pour la foi. Il faut voir là sinon l’origine immédiate de la science, du moins l’anno
634 et à toute la Nature naturée — Nature à laquelle il ne s’agit plus de se conformer, mais qu’il faut au contraire transfor
635 quelle il ne s’agit plus de se conformer, mais qu’ il faut au contraire transformer hardiment, illuminer el finalement sauv
636 echnique ainsi définie dans ses motivations n’ont- elles pas coïncidé historiquement avec les guerres, c’est-à-dire avec des e
637 s moyens de s’armer, mais non pas de désarmer. Et il est vrai que les armes nouvelles inventées par les techniciens n’ont
638 les éliminer ou de les rendre inutiles. Pourtant, il semble bien que l’excès même de la puissance des armes inventées par
639 ti la production des armes conventionnelles, mais elles ont rendu leur emploi pratiquement impossible à grande échelle, depui
640 ’immense utilité de la bombe H, c’est en somme qu’ elle n’est pas utilisable. Elle se trouve interdire de la sorte, ou limite
641 e H, c’est en somme qu’elle n’est pas utilisable. Elle se trouve interdire de la sorte, ou limiter rigoureusement, l’emploi
642 querait de nous jeter dans une guerre atomique qu’ il semble bien qu’on ait décidé de ne pas faire. On a donc atteint une l
643 que représente la bombe H sert la paix en ceci qu’ elle a suscité un sentiment encore plus violent que les passions nationali
644 mmencement de la sagesse des nations. Encore faut- il s’entendre sur ce terme de peur. Je pense bien moins ici à la peur de
645 très fortement ni en moi, ni autour de moi, tant il est vrai que l’idée d’un malheur universel et définitif agit peu sur
646 mpose à eux et suscite leur envie, leur jalousie. Ils prennent conscience d’une misère relative, qui autrefois leur paraiss
647 le ou en tout cas inévitable, dans l’ignorance où ils étaient de la simple possibilité d’une vie meilleure ou différente, p
648 e des dures nécessités et limitations naturelles. Ils voient cela, et ils exigent nos machines, mais ils ne voient pas, hél
649 és et limitations naturelles. Ils voient cela, et ils exigent nos machines, mais ils ne voient pas, hélas, ce qui les a ren
650 ls voient cela, et ils exigent nos machines, mais ils ne voient pas, hélas, ce qui les a rendues possibles. Ils croient qu’
651 oient pas, hélas, ce qui les a rendues possibles. Ils croient qu’ils pourraient acheter ces beaux objets (ou plutôt se les
652 s, ce qui les a rendues possibles. Ils croient qu’ ils pourraient acheter ces beaux objets (ou plutôt se les faire donner) e
653 racité, et d’une sorte d’ascèse disciplinée, dont ils n’ont guère la notion, et encore moins le goût. Mais la technique occ
654 relative : dans une mesure sans cesse croissante, elle la crée. Il a suffi de leur communiquer les rudiments de notre hygièn
655 s une mesure sans cesse croissante, elle la crée. Il a suffi de leur communiquer les rudiments de notre hygiène pour provo
656 teur de guerres planétaires ; non pas demain, car ils sont encore faibles et démunis, mais après-demain, si une grande nati
657 t redouter la guerre froide au temps de Staline ? Il semble hors de question que l’Occident puisse nourrir les milliards d
658 ser la faim du monde sont hélas en pleine utopie. Ils entretiennent notre mauvaise conscience sans fournir les moyens de no
659 s synthétiques, tirés de l’air et de l’eau, et qu’ elle réussisse à nourrir des dizaines de milliards d’humains, ceux-ci sero
660 os démographes. On ne peut pas agrandir la terre. Il faut donc que notre technique, qui a créé sans le vouloir ce problème
661 i-même les ressources nécessaires, que d’ailleurs il possède matériellement. Si un peu de technique a créé la famine, beau
662 plus un facteur de paix qu’un facteur de guerre. Elle fournit aux armées des moyens de faire la guerre, mais ce n’est pas e
663 des moyens de faire la guerre, mais ce n’est pas elle qui cause les guerres, ce sont au contraire les passions, qui utilise
664 ais bien ambivalent : pas de guerre possible sans elle , mais si elle bénéficie des guerres, c’est elle aussi qui leur met fi
665 alent : pas de guerre possible sans elle, mais si elle bénéficie des guerres, c’est elle aussi qui leur met fin, et aujourd’
666 s elle, mais si elle bénéficie des guerres, c’est elle aussi qui leur met fin, et aujourd’hui les freine ou même les bloque.
667 entre les cultures différentes. La technique peut- elle contribuer à établir et enrichir cet équilibre ? Ou au contraire, com
668 ce à le croire dans nos élites humanistes, serait- elle un facteur de déshumanisation, qui ne substituerait aux explosions be
669 ccentué des disparités intolérables, d’autre part elle pourrait les réduire, à condition de concerter ses plans avec ceux de
670 des saisons, les citadins du xxe siècle seraient- ils des monstres, pâles victimes d’une technique qui les enferme dans un
671 à la chaîne et ouvriers esclaves de la machine ; elle peut et doit signifier dès demain usines de verre entourées d’arbres,
672 mes en réalité les esclaves de nos machines ou si elles nous servent, et surtout — cette question résumant toutes les autres
673 pas matérialiste, seul l’homme peut l’être, quand il se laisse aller à ses instincts abâtardis ou quand il se laisse domin
674 e laisse aller à ses instincts abâtardis ou quand il se laisse dominer par ses propres mécanismes psychologiques. La techn
675 : dans ses intentions primitives, dans sa genèse, elle n’est même pas utilitaire ! L’histoire des grandes inventions, de cel
676 histoire de « besoins » qui auraient existé avant elles , c’est plutôt l’histoire de nos rêves. L’hypothèse si longtemps admis
677 besoins matériels que personne n’éprouvait avant elles , mais c’est généralement l’inverse qui s’est produit. Personne n’avai
678 st produit. Personne n’avait besoin d’autos quand il n’y en avait pas encore — à part quelques rêveurs un peu bizarres. C’
679 de construire une « locomotive routière », comme il l’appelait, c’est-à-dire un véhicule rapide qui ne fût pas astreint à
680 ’est vrai dans ce sens que l’homme moyen croit qu’ il ne pourrait plus se passer de cet objet, mais le fautif n’est pas la
681 technique. Je voudrais observer au surplus que s’ il est bien certain que l’invention de Ford est née d’un rêve d’évasion
682 ourd’hui, dans nos villes embouteillées, et quand il faut payer les autoroutes. Si je veux être libre de rêver, c’est just
683 es ou morales, tantôt mise en accusation parce qu’ elle aurait produit le danger atomique ou voudrait nous réduire à l’état d
684 ique ou voudrait nous réduire à l’état de robots, elle ne mérite en vérité ni cet excès d’honneur ni cette indignité. Elle n
685 vérité ni cet excès d’honneur ni cette indignité. Elle n’est que le moyen de nos passions et de nos rêves, le moyen de nos v
686 s, dont nous ne serions pas du tout responsables, elle menace au contraire d’anéantir toute espèce de vie sur la terre. La t
687 même temps, toujours plus facilement maniables qu’ elle met entre nos mains — il suffit du plus petit geste, comme de presser
688 acilement maniables qu’elle met entre nos mains — il suffit du plus petit geste, comme de presser sur un bouton pour produ
689 ce de nos options réelles devant la vie. Telle qu’ elle est devenue de nos jours, obsédée d’efficacité immédiate et rentable
690 aire, l’économie, l’hygiène ou le simple confort, il n’est peut-être pas d’activité humaine qui paraisse moins métaphysiqu
691 ique en soi que la technique. Mais en même temps, il n’en est pas qui nous contraigne davantage, et avec une urgence plus
14 1965, Articles divers (1963-1969). La Suisse, maquette pour une Europe du bonheur (automne 1965)
692 ans y avoir jamais été, car tout le monde sait qu’ il est beau mais sérieux, très cossu mais égalitaire, petit mais telleme
693 n pouvait le repasser et l’aplanir, on verrait qu’ il est bien aussi grand que la France… Cette Suisse des Alpes et des lac
694 s jodleurs est un cliché mais juste et bien tiré. Il ne retient que certaines apparences, mais qui suffisent à remplir les
695 ment impraticables. Si cela marche tout de même —  il faut en croire ses yeux — ce ne peut être qu’en vertu de certains sec
696 uniformes. La Suisse n’a rien de tout cela, mais elle a le régime le plus stable de l’Europe. Ce pays le plus pauvre en mat
697 e. Ce pays le plus pauvre en matières premières —  il n’a guère que l’eau des glaciers pour en tirer de l’énergie — est l’u
698 lation égales peut dire mieux, sur ce continent ? Il n’empêche qu’à Paris, à Londres ou à Berlin, on se moque un peu des S
699 lement disait Victor Hugo, il y a cent ans. Mais il a dit aussi, une autre fois : La Suisse, dans l’histoire, aura le de
700 t ses recettes, si l’on peut les donner, seraient- elles applicables ailleurs ? Le premier secret des Suisses, c’est la coopér
701 ’un seul trait le nord et le sud du Saint-Empire. Il fallait le garder libre pour l’Europe, contre tous les seigneurs loca
702 i ne fut certes pas rédigé par des pâtres, puisqu’ il était en beau latin — s’agrégèrent au cours des siècles quantité de p
703 e cités libres ou épiscopales et des campagnes qu’ elles avaient soumises, entre les Alpes et le Jura. Et ce fut la période pa
704 patricienne et guerrière des « ligues suisses ». Elle aboutit en 1815 à une espèce de confédération insuffisante. Privée de
705 uffisante. Privée de tout pouvoir supra-cantonal, elle ne sut pas empêcher, en 1847, une guerre civile opposant les cantons
706 union dans la diversité ». C’est mieux que cela : elle a fait son union précisément pour sauver ses diversités. Et ses vingt
707 ur indépendance que pour mieux assurer la part qu’ ils en gardaient. Autrement, ils l’eussent toute perdue, car les empires
708 x assurer la part qu’ils en gardaient. Autrement, ils l’eussent toute perdue, car les empires voisins eussent eu vite fait
709 n mode de vie, sa langue, son credo ou son parti. Il n’en fut pas toujours ainsi, et les Suisses ont connu pendant des siè
710 te et se nourrit de ces appartenances multiples ; elle réfute les devises totalitaires : une foi, une loi, un roi (sur un mê
711 ant mais sans se confondre, n’allez pas croire qu’ elles soient unies par je ne sais quelle ferveur sentimentale — oh ! non. P
712 ille, sa piété catholique, son patois médiéval, s’ il rencontrait un jour un banquier de Genève, avec son chic anglais, ses
713 son chic anglais, ses principes et ses complexes, ils n’auraient guère à se dire et pas de langage commun. Mais ils savent
714 nt guère à se dire et pas de langage commun. Mais ils savent bien qu’ils font partie de cette même Suisse dont les institut
715 et pas de langage commun. Mais ils savent bien qu’ ils font partie de cette même Suisse dont les institutions communes leur
716 incomparable. Or cette fonction reste la même qu’ il s’agisse du corps d’un petit enfant ou de celui d’un colosse. Notez d
717 uement plus petite que ne l’était la Suisse quand elle s’est fédérée. En 1848, il fallait deux ou trois jours à un député de
718 tait la Suisse quand elle s’est fédérée. En 1848, il fallait deux ou trois jours à un député de Genève ou des Grisons pour
15 1966, Articles divers (1963-1969). Un libéral engagé (1966)
719 e, index pointé vers les groupes de vociférants : il les couvrait de sarcasmes acérés, lancés comme des fléchettes, et s’a
720 représentant de l’Espagne à Paris. — Eh bien, fit- il , je trouve qu’un ambassadeur, ça doit savoir engueuler le monde ! Et
721 ut ce que l’on peut demander d’un homme, c’est qu’ il fasse le moins de mal possible. » (Ce que je trouvai, par-devers moi,
722 être réservé à ceux-là seuls qui prouveraient qu’ ils ne peuvent pas vivre sans elle. Pour les autres, qu’on élève des barr
723 qui prouveraient qu’ils ne peuvent pas vivre sans elle . Pour les autres, qu’on élève des barrières infranchissables ! C’est
724 ières infranchissables ! C’est le point de vue qu’ il a voulu défendre quand il était ministre de l’Éducation. Le Cabinet n
725 ’est le point de vue qu’il a voulu défendre quand il était ministre de l’Éducation. Le Cabinet n’a pas tardé à démissionne
726 er deux jours plus tard avec les mêmes sauf lui : il a compris. — Sur quoi, un intendant général des écoles de l’État de N
727 — « Oh yes ! and the Herald Tribune too ! » fait- il , sérieux. « Je suppose que vous n’entendez tout de même pas défendre
728 pas défendre les instituteurs, n’est-ce pas ? Car ils sont… indéfendables ! » Une jeune fille lui demande de définir le bon
729 s si Dieu était féminin… — Mais Dieu est féminin, il n’y a pas de question ! — Comment le savez-vous ? — D’abord parce que
730 ’aime. Alors ? Vous voyez bien. Ensuite, parce qu’ il défie notre logique. » Je retiens aussi de cette soirée une théorie p
731 ine. Nous avons aussi parlé de l’Europe, de ce qu’ il faut faire pour son union. ⁂ À Royaumont, le 4 avril 1948, au terme d
732 ont j’étais le rapporteur, je suggérai Madariaga. Il se peut que dans mon esprit se soit opéré à ce moment-là une complexe
733 méritait un traitement tout à fait exceptionnel, il ne fallait ni un doctrinaire ni un journaliste, ni un spéculatif, ni
734 l’on me chargea de prendre contact. À ma lettre, il répondit vite : « Je vous consacrerai volontiers un temps qui, à vrai
735 pour présider congrès et comités en chaîne. Ce qu’ il fit, avec autant de soins formels et de fermeté dans l’approche des p
736 s pédants et autres fanatiques de la routine, fût- elle d’étiquette « progressiste ». Il a le sens du trait qui porte et qui
737 a routine, fût-elle d’étiquette « progressiste ». Il a le sens du trait qui porte et qui assure le succès durable d’un dis
738 uccession des comités hélas indispensables, et qu’ il ne suffit pas de présider mais qu’il faut surtout animer, sinon l’act
739 ables, et qu’il ne suffit pas de présider mais qu’ il faut surtout animer, sinon l’action la mieux conçue va somnoler. À Pa
740 parce que le président nous donne l’impression qu’ il s’amuse. Il y a là, d’ordinaire, Étienne Gilson, Julien Cain, Kenneth
741 ne pensent pas. Écoutez donc notre ami Lindsay : il dit “I feel » et non “I think”. Si les Anglais pensent, c’est autreme
742 leurs mains, mais jamais avec leur cerveau. Et s’ ils ont une tête, eh bien, c’est pour porter un chapeau ! » Bien peu d’ho
743 ont donné à la cause de l’Europe, cause commune s’ il en fût, un temps qui du même coup devait manquer à ce qu’on nomme leu
744 un Gujerati d’un Ibérique. Dans le même discours, il montre les difficultés du dialogue avec les staliniens : « Je suis un
745 r de Madariaga est l’un des présidents d’honneur. Il a fait ce jour-là l’un de ses plus beaux discours, sur le thème de la
746 e, après tout, c’est une maladie du corps social. Il fallait du courage pour lui dire : « Vous vous vantez d’avoir fait un
747 une superbe pneumonie ? » Cette boutade va loin, elle symbolise toute une philosophie politique et sociale. Et j’ai aimé qu
748 un sort inverse est échu à notre ami. Et parce qu’ il en a maîtrisé les périls et surmonté l’amertume par la création et l’
749 surmonté l’amertume par la création et l’action, il nous donne aujourd’hui le rare et haut exemple d’un combattant de la
16 1967, Articles divers (1963-1969). Au-delà des nations (1967)
750 nnaie, l’achat sera fait au même compte. Lorsqu’ il ouvrit à Vienne en 1927 le premier congrès du mouvement paneuropéen,
751 s portraits décoraient la tribune. En même temps, il proposait aux hommes d’État européens un plan d’union selon lequel « 
752 ver le chemin menant à la Communauté politique ». Il marquait ainsi le passage de l’Idée à l’Action européennes, en contin
753 ’Action européennes, en continuité historique, et il inaugurait la stratégie qui serait vingt ans plus tard celle de Jean
754 Marché commun » figure là pour la première fois : il est donc dû non pas à un politicien et encore moins à un économiste,
755 t de fédération européenne digne du nom, que va-t- il se passer ? Des mesures propres à « favoriser » (faute de vouloir la
756 ncore la politique pour l’art du possible — quand elle est l’art de créer le possible au service de grands buts qu’il faut p
757 de créer le possible au service de grands buts qu’ il faut prophétiser, sinon tout s’affaisse en routines, en répétitions d
758 ropose une explication tellement simple que c’est elle qui va choquer. Je suis parvenu à la conviction que les hommes d’État
759 e à l’envers : soucieux de s’appuyer sur le réel, ils ont voulu partir des États-nations tels que les a formés le xixe siè
760 ou moins déclaré selon les pays) au xxe siècle ; ils ont voulu partir de ces nations comme des « seules réalités politique
761 i que le répète volontiers le général de Gaulle), ils ont essayé de les unir, et ils constatent, évidemment, « qu’elles ne
762 énéral de Gaulle), ils ont essayé de les unir, et ils constatent, évidemment, « qu’elles ne sont pas encore prêtes à s’unir
763 de les unir, et ils constatent, évidemment, « qu’ elles ne sont pas encore prêtes à s’unir ». Or, il est clair — il devrait ê
764 u’elles ne sont pas encore prêtes à s’unir ». Or, il est clair — il devrait être clair — qu’en tant qu’États souverains le
765 pas encore prêtes à s’unir ». Or, il est clair — il devrait être clair — qu’en tant qu’États souverains les nations ne se
766 ns les nations ne seront jamais prêtes à s’unir ! Il appartient à leur être même d’État, à leur définition même de nations
767 orber les voisins. Si donc on veut unir l’Europe, il faut partir d’autre chose que de ses facteurs de division, il faut bâ
768 ir d’autre chose que de ses facteurs de division, il faut bâtir sur autre chose que sur les obstacles à l’union ; il faut
769 sur autre chose que sur les obstacles à l’union ; il faut opérer sur un autre plan que celui-là, précisément, où le problè
770 précisément, où le problème se révèle insoluble. Il faut se fonder sur ce qui est destiné à devenir demain la vraie réali
771 ue nous l’a léguée le siècle dernier : la région. Il n’est rien dont les sociologues d’aujourd’hui s’occupent avec plus de
772 avec plus de passion en Europe. C’est qu’en effet il s’agit là d’un phénomène complexe et neuf, que nous voyons lentement
773 ébut, j’improvisai donc sur le thème que voici : Il peut sembler curieux, Messieurs, qu’à l’âge des intégrations continen
774 se dessiner, s’organiser et s’affirmer. Et comme elles seront jeunes et souples, pleines de vitalité, ouvertes sur le monde,
775 ples, pleines de vitalité, ouvertes sur le monde, elles noueront entre elles des relations d’échanges aussi nombreuses et fré
776 lité, ouvertes sur le monde, elles noueront entre elles des relations d’échanges aussi nombreuses et fréquentes que possible.
777 nges aussi nombreuses et fréquentes que possible. Elles seront amenées à se grouper selon leurs affinités, selon leur voisina
778 un écho pour moi, des plus inattendus : c’est qu’ elles venaient à la rencontre non seulement des souhaits des organisateurs
779 lisé du continent et le plus allergique, semblait- il , au fédéralisme à base régionale : j’entends la République française
780 e tranquillement La Révolution régionaliste 19 et il figure dans une collection de livres de poche : c’est dire que l’édit
781 res de poche : c’est dire que l’éditeur estime qu’ il peut répondre à la curiosité d’un grand public. Certes, on n’en est e
782 À peine a-t-on pris la mesure des perspectives qu’ il nous invite à explorer, notamment politiques et institutionnelles. De
783 veau ne sauraient être décrétées sans transition. Il est normal qu’elles exigent une période d’expériences, et celle-ci co
784 être décrétées sans transition. Il est normal qu’ elles exigent une période d’expériences, et celle-ci connaîtra forcément de
785 e base de toute vie sociale et publique en Grèce. Elle donna même son nom à cette forme d’activité : la politique ! De même
786 e toute espèce d’hégémonie, ou impérialisme quand il s’agit d’unir l’Europe, mais plus encore à nous méfier de la formule
787 d’hui de le voir, ou d’en croire leurs yeux quand ils le voient, c’est le dogme inculqué dans les esprits pendant plusieurs
788 la forme nationale en général. Croyance réfutée, il est vrai, par un simple coup d’œil sur l’Histoire, lequel fait voir p
789 ations sont de formation récente, deuxièmement qu’ elles ont dépassé le sommet de leur évolution, et descendent vers leur crép
790 Les nations ne sont pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront. La confédération européenne, probableme
791 pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront. La confédération européenne, probablement, les remplacera.
792 nt « encore » les seules réalités. Et c’est vrai, elles existent « encore » — mais si mal ! Trop petites pour assurer seules
793 ur souveraineté est devenue tout illusoire dès qu’ elle n’est plus purement négative — en bien ou en mal. Ainsi, elle leur pe
794 lus purement négative — en bien ou en mal. Ainsi, elle leur permet de procéder au désarmement tarifaire, ou au contraire, el
795 océder au désarmement tarifaire, ou au contraire, elle leur sert de prétexte à refuser encore, ici ou là, les mesures nécess
796 ce qui coopère, se fédère ou s’unit en Europe, qu’ il s’agisse de savants, de festivals de musique, d’Églises, de firmes, d
797 n de l’Europe se révélera immédiatement possible. Il se peut que cette évolution exige bien plus de temps que les pionnier
798 mpire » et tiraient de là leurs libertés — sera-t- elle fondée sur des réalités en plein essor, non sur des vieilles carcasse
799 s politiciens qui se croient réalistes — parce qu’ ils sont en retard d’une génération sur les réalités du temps. 19. Robe
17 1967, Articles divers (1963-1969). Le civisme européen : notes pour un « Petit Livre rouge » (été 1967)
800 tres moyens sociaux, partis, presse, mass médias, elle réussit à former des citoyens puis à les informer. Comment former des
801 rmer des citoyens et un civisme européens tant qu’ il n’y a pas de Cité européenne ? Inversement, comment fonder une Cité e
802 onder une Cité européenne, l’Europe unie, tant qu’ il n’y a pas de civisme européen ? Cercle vicieux pour ceux-là seuls qui
803 our ceux-là seuls qui ne demandent qu’à croire qu’ ils y sont enfermés. Au-delà des impasses logiques, le désir bâtit la cit
804 s traditions civiques, et le besoin d’en changer. Il s’agit donc pour nous, ici et maintenant, d’éveiller chez les jeunes
805 r d’habiter demain une grande Cité européenne : s’ ils la veulent, ils la bâtiront. Ni spontanée, ni fatale L’union de
806 in une grande Cité européenne : s’ils la veulent, ils la bâtiront. Ni spontanée, ni fatale L’union de l’Europe ne se f
807 ute seule par un processus mécanique, ou parce qu’ elle se trouverait coïncider avec « le sens de l’Histoire » comme certains
808 « le sens de l’Histoire » comme certains disent. Elle ne sera pas non plus l’œuvre d’un dictateur : Napoléon, Hitler ont éc
809 r longtemps. Ni spontanée, ni fatale, ni imposée, elle ne peut être que choisie et voulue — exactement comme la démocratie —
810 ais ceux-ci, qui les fera, sinon l’éducation ? Or il faut bien avouer que jusqu’ici, l’éducation (enseignement, école prim
811 e, hautes écoles et télévision) dans la mesure où elle façonne les caractères et les esprits, ne fait pas des Européens. Qua
812 et les esprits, ne fait pas des Européens. Quand elle fait quelque chose au niveau du civisme, elle ne fait en tout cas pas
813 and elle fait quelque chose au niveau du civisme, elle ne fait en tout cas pas cela, et l’on peut être heureux si elle ne fa
814 n tout cas pas cela, et l’on peut être heureux si elle ne fait pas le contraire. L’éducation du citoyen qui se pratique dans
815 à l’État, et que le citoyen devra trancher quand il votera. La plus ennuyeuse des leçons La leçon d’instruction civ
816 euse de toutes. En un sens, c’est heureux, car si elle passionnait, les choses étant ce qu’elles sont, ce serait inévitablem
817 , car si elle passionnait, les choses étant ce qu’ elles sont, ce serait inévitablement au bénéfice du chauvinisme national. U
818 irklichung, du prof. Karl Schmid22 je lis ceci : Il faut absolument éviter qu’aux yeux des jeunes Allemands, Italiens ou
819 eu d’institutions européennes au sujet desquelles il serait bon de savoir quelque chose, ne compte pas au regard des probl
820 ompte pas au regard des problèmes réels — ceux qu’ il ne s’agit pas de réciter par cœur mais de comprendre intimement. Il
821 réciter par cœur mais de comprendre intimement. Il faut cesser de croire qu’éducation civique signifie connaissance scol
822 tutions dont on ignore le fonctionnement concret. Il faut comprendre et proclamer que la seule préparation valable au civi
823 problèmes vivants et réels de l’Europe, telle qu’ elle est aujourd’hui désunie et telle qu’elle pourrait être unie demain, n
824 telle qu’elle est aujourd’hui désunie et telle qu’ elle pourrait être unie demain, n’apparaissent pas souvent dans les discou
825 sans adjurations pathétiques, sans propagande, qu’ il faut unir l’Europe pour la sauver mais aussi pour servir le Monde. La
826 s y tenons ; b) Problèmes économiques, en tant qu’ ils relèvent de l’initiative privée, de la commune, de la région, d’un pl
827 sociaux, démographiques et culturels, en tant qu’ ils relèvent de la patrie locale, de la région, de la nation, de l’Europe
828 ieurs, ou supérieurs à nos diversités nationales. Il convient d’écarter résolument la solution de facilité qui consisterai
829 t très vite sa version européenne. Et d’ailleurs, il serait absurde d’essayer de substituer l’une à l’autre : car l’Europe
830 urope se fera au-delà des nations mais pas contre elles , ni sans elles. (La Suisse s’est faite au-delà de ses cantons, mais p
831 u-delà des nations mais pas contre elles, ni sans elles . (La Suisse s’est faite au-delà de ses cantons, mais pour sauver ce q
832 littérature prévue par le programme. Mais pour qu’ il saisisse ces occasions et en tire le meilleur parti, il faut que le p
833 sisse ces occasions et en tire le meilleur parti, il faut que le professeur ait été lui-même sensibilisé aux réalités de l
834 sponsabilités européennes, et pour les y pousser, il importe d’agir sans délai sur des groupes forcément restreints d’éduc
835 des économistes. Car avant de « faire l’Europe », il faut « faire de l’Europe ». Et cela se passera d’abord dans les espri
836 oints d’interrogation sur 340 pages ; encore sont- ils de pure rhétorique et destinés à supprimer plutôt qu’à poser la quest
837 de la situation, et nous sommes bien certains qu’ il révélera de la sorte la nécessité de l’union, et même les formes spéc
838 es que celle-ci devra prendre, et pourra prendre. Il fourmillera de points d’interrogation ! Il ne dira jamais : « Right o
839 endre. Il fourmillera de points d’interrogation ! Il ne dira jamais : « Right or wrong, our Europe ! » mais il fera voir q
840 ra jamais : « Right or wrong, our Europe ! » mais il fera voir que l’Europe serait détruite par ce qui tue l’esprit critiq
841 t notre culture démocratique au nom des idéaux qu’ elle seule leur enseigna. 21. Cf. Enquête sur l’état de l’instruction c
18 1968, Articles divers (1963-1969). L’Exode des cerveaux [débat] (1968)
842 à ce qu’a dit M. Mach tout à l’heure, à savoir qu’ il était le seul chercheur autour de cette table. Je me considère moi au
843 n respect suffisant aux chercheurs scientifiques. Il me semble au contraire qu’on leur accorde un respect presque exclusif
844 un respect presque exclusif. Pourquoi ? Parce qu’ ils sont très utiles à l’économie, au commerce, à l’industrie, au PNB, pr
845 qui ont reçu le prix Nobel, depuis 1901, date où il fut créé. Il y a 6 chercheurs nés Suisses et qui le sont restés, et 5
846 En revanche, la Suisse a envoyé à l’étranger, où ils ont reçu le prix Nobel, deux chercheurs, peut-être trois, qui étaient
847 de dictionnaires comme français, peut-être l’est- il devenu ? Les deux autres sont Félix Bloch et Daniel Bovet, l’un deven
848 nous être parfaitement favorable. (D’ailleurs, si elle ne l’était pas, ce serait le même prix !) Quand je vous dis que les é
849 qu’une certaine année, au milieu du xiie siècle, il n’y avait à la Sorbonne pas un seul professeur français. Les grands m
850 pour nous en tenir aux exemples suisses, qu’y a-t- il eu comme importation et exportation des cerveaux en Suisse ? Comment
851 cerveaux en Suisse ? Comment notre culture s’est- elle faite ? D’abord par la conquête romaine, qui nous a apporté une civil
852 é l’exode des cerveaux. M. de Rougemont : Oui, et il faudrait donc essayer de trouver des critères pour déterminer à quel
853 — et qui est la santé même — devient un exode qu’ il faudrait déplorer ou arrêter si on le peut. Je crois qu’il faut consi
854 it déplorer ou arrêter si on le peut. Je crois qu’ il faut considérer là-dedans les dimensions des activités en jeu, et les
855 lyse d’ailleurs : je veux tout pour ma nation, qu’ elle soit grande ou petite, et que tout soit fait dans ses limites. Il lui
856 u petite, et que tout soit fait dans ses limites. Il lui faut une industrie automobile, une industrie aéronautique, il lui
857 industrie automobile, une industrie aéronautique, il lui faut des ordinateurs, il lui faut un synchrocyclotron et tout. Ça
858 ustrie aéronautique, il lui faut des ordinateurs, il lui faut un synchrocyclotron et tout. Ça, c’est le point de vue natio
859 terribles contre les « voleurs d’universités » : ils étaient punis de mort — alors là, il s’agira bel et bien d’un « exode
860 ersités » : ils étaient punis de mort — alors là, il s’agira bel et bien d’un « exode des cerveaux ». Je reviens à deux de
861 Blaise Cendrars est né à La Chaux-de-Fonds, mais il était originaire d’un petit village de l’Oberland bernois qui s’appel
862 plainte d’avoir perdu un cerveau ? Pas du tout ! Il serait resté à La Chaux-de-Fonds et nous n’en aurions rien su ; il au
863 La Chaux-de-Fonds et nous n’en aurions rien su ; il aurait continué à s’appeler Fritz Sauser. Mais il est parti dans le v
864 il aurait continué à s’appeler Fritz Sauser. Mais il est parti dans le vaste monde qui en a fait Blaise Cendrars, puis il
865 e vaste monde qui en a fait Blaise Cendrars, puis il est allé à Paris qui en a fait un grand écrivain et c’est seulement q
866 elait Blaise Cendrars que nous avons découvert qu’ il était suisse ! De même l’ingénieur Ammann, qui a fait ces immenses po
867 San Francisco qui a 2750 mètres de long : qu’eût- il fait, ce malheureux, s’il était resté en Suisse ? Il n’aurait pas tro
868 mètres de long : qu’eût-il fait, ce malheureux, s’ il était resté en Suisse ? Il n’aurait pas trouvé assez de place pour se
869 fait, ce malheureux, s’il était resté en Suisse ? Il n’aurait pas trouvé assez de place pour ses ponts, simplement. Nos di
870 sse, ni d’ailleurs d’aucun de nos pays d’Europe : elle est de dimensions continentales. C’est pourquoi, lors de la Conférenc
871 retenir en Europe un certain nombre de savants qu’ il était important de garder pour la communauté continentale, vu les fin
872 anismes de l’ONU, on ne peut pas dire non plus qu’ il s’agit là d’une perte, d’un exode. Simplement, la Suisse prend sa par
873 ses obligations internationales ; car après tout, elle fait partie, elle aussi, de la communauté internationale. Je crois vo
874 ternationales ; car après tout, elle fait partie, elle aussi, de la communauté internationale. Je crois vous avoir donné ain
875 vient d’être dit sur une politique de dimension, il est facile de retrouver des éléments d’unité. Ce sont là des notions
876 elles mesures prendre pour empêcher l’exode quand il n’a pas le caractère d’échange mais qu’il sanctionne un manque d’orga
877 e quand il n’a pas le caractère d’échange mais qu’ il sanctionne un manque d’organisation ou de structure qui incite les ch
878 able. Si vous ne payez pas les gens suffisamment, il ne faut pas vous étonner qu’ils aillent ailleurs plutôt que de crever
879 gens suffisamment, il ne faut pas vous étonner qu’ ils aillent ailleurs plutôt que de crever de faim. Mais ce préalable étan
880 des pôles d’attraction ? On y fait allusion déjà. Il s’agit de concentrer les ressources intellectuelles sur certains poin
881 ées sur tout le territoire de la Confédération. S’ il ne s’agit pas purement de choses financières, il ne s’agit pas non pl
882 ’il ne s’agit pas purement de choses financières, il ne s’agit pas non plus de questions d’emploi, ou pas uniquement. Il s
883 on plus de questions d’emploi, ou pas uniquement. Il s’agit de créer un climat intellectuel. Je ne vais pas vous en donner
884 d’art, parce que c’en est une ! Une œuvre d’art, il faut la faire, comme dit l’autre, ce n’est pas le tout de la décrire.
885 cin, ou un dentiste, soit retenu à Genève, même s’ il y est moins payé qu’ailleurs, parce qu’il n’est pas uniquement physic
886 même s’il y est moins payé qu’ailleurs, parce qu’ il n’est pas uniquement physicien, il n’est pas uniquement médecin, et s
887 eurs, parce qu’il n’est pas uniquement physicien, il n’est pas uniquement médecin, et s’il trouve un bon orchestre, un bon
888 physicien, il n’est pas uniquement médecin, et s’ il trouve un bon orchestre, un bon quatuor qui joue de la musique modern
889 évision pourraient faire énormément dans ce sens. Elles font déjà beaucoup ; elles ont fait ces dernières années un effort co
890 ormément dans ce sens. Elles font déjà beaucoup ; elles ont fait ces dernières années un effort considérable pour intéresser
891 omme ceux dont nous parlons ce soir, par exemple. Elles pourraient peut-être faire encore plus en faisant davantage confiance
892 a quantité des réponses. Je crois que c’est faux. Il faudrait que la télévision et la radio aient l’héroïsme, pendant deux
893 es pôles d’attraction, de ce climat intellectuel. Il me semble que l’Université est mieux placée que n’importe quel autre
894 de quelques écoles de formation professionnelle. Elle doit être aussi cela ; bien entendu, il ne s’agit pas de la transform
895 nnelle. Elle doit être aussi cela ; bien entendu, il ne s’agit pas de la transformer de fond en comble du jour au lendemai
896 rmer de fond en comble du jour au lendemain, mais il ne faut pas qu’elle soit uniquement cela : quelques écoles de formati
897 mble du jour au lendemain, mais il ne faut pas qu’ elle soit uniquement cela : quelques écoles de formation professionnelle j
898 sans lien organique et sans rien à se dire entre elles . Il faudrait que l’Université devienne ou redevienne le lieu vivant d
899 ien organique et sans rien à se dire entre elles. Il faudrait que l’Université devienne ou redevienne le lieu vivant de cr
900 et de débats sur le fond. Je vais lâcher le mot : il faut que l’Université redevienne le lieu de contestation. Mais attent
901 é des universités que depuis qu’on a découvert qu’ il fallait les réformer. Je souhaite que la réforme universitaire dont o
902 dernier mot — en dehors de l’Université et contre elle , mais dans les cours — je ne dis pas dans tous les cours, il faut pré
903 ns les cours — je ne dis pas dans tous les cours, il faut préserver l’élément de formation professionnelle — mais dans cer
904 ation professionnelle — mais dans certains cours. Il faudrait qu’il soit admis que la substance même de ces cours soit la
905 nnelle — mais dans certains cours. Il faudrait qu’ il soit admis que la substance même de ces cours soit la remise en quest
906 nt d’accord. J’ai peut-être un peu forcé parce qu’ il faut simplifier quand on aborde une quantité de sujets importants com
907 e de pouvoir traiter cet immense sujet sur lequel il faudrait revenir une autre année. L’Europe doit ajouter à tout le res
908 je ne trouvais pas en Amérique, quelque chose qu’ il m’est difficile de vous décrire, et si vous voulez en avoir une bonne
909 ption, adressez-vous aux Américains qui disent qu’ ils voudraient vivre en Europe. Ils vous expliqueront cela très bien. Sur
910 ins qui disent qu’ils voudraient vivre en Europe. Ils vous expliqueront cela très bien. Sur le même sujet des États-Unis, M
911 plètement indemnes de toute influence américaine. Il y en a tout de même, ne fût-ce que le jazz. Nous avons pris aux États
912 nis. Ce qu’a dit M. Mach m’a paru un peu curieux. Il a parlé de mon optimisme béat. Je ne vois pas du tout à quel moment j
913 t défavorable. Cette méthode peut être discutée ; il s’agit surtout de l’appliquer, mais je refuse absolument de prendre u
19 1968, Articles divers (1963-1969). De l’État-nation aux régions fédérées (1968)
914 appelait la création de quelque chose qui, disait- il , « s’appellerait — peut-être — les États-Unis d’Europe » et il s’écri
915 lerait — peut-être — les États-Unis d’Europe » et il s’écriait : « Je dois vous donner un avertissement. Le temps presse.
916 tats-Unis d’Europe, sous quelque nom que ce soit, il faut commencer maintenant… Debout l’Europe ! » Il y a vingt-et-un ans
917 Sans corps constitué, sans tête, comment pourrait- elle donc répondre à l’appel pathétique du célèbre homme d’État ? Un appel
918 incontestablement dans le sens de la nation.25 Il est vrai que le même André Malraux quelques jours plus tard, interrog
919 on ne peut rien y changer, que c’est là-dessus qu’ il faut bâtir, et d’appeler ça du réalisme. Le cancer et les maladies me
920 le réalisme consiste à le proclamer avec fierté. Il ne consiste pas non plus à les nier, mais bien à faire en sorte qu’el
921 on plus à les nier, mais bien à faire en sorte qu’ elles cessent d’être réelles. Que les nations soient encore bien réelles et
922 ues, techniques et démographiques de notre temps. Ils ne me semblent pas confirmer que « l’évolution joue dans le sens de l
923 i ne pourrait que tuer l’Europe du xxe siècle si elle n’est pas surmontée et remplacée à temps. La grande force de l’État-n
924 vitable du Progrès. Pour dissiper cette illusion, il faudrait enseigner dans nos écoles un minimum d’histoire générale de
925 État-nation qui est né de leur collusion moderne. Il faudrait rappeler qu’après la préhistoire qui ne connaissait que les
926 Europe, empire de Charlemagne, puis Saint-Empire. Il faudrait montrer que les premiers États nationaux n’apparaissent qu’a
927 Avignon, et puis réalise aux dépens des Juifs qu’ il fait dépouiller et des chevaliers du Temple qu’il fait exécuter, une
928 il fait dépouiller et des chevaliers du Temple qu’ il fait exécuter, une merveilleuse opération sur l’or ! (si l’on veut bi
929 à peine supportable quand un prince l’incarne, s’ il n’est pas un génie ou un saint, mais qui devient proprement révoltant
930 gible dans nos esprits, qui résistent à l’idée qu’ il pourrait n’être après tout qu’une forme transitoire, comme tant d’aut
931 e, on vénère ses statues sur toutes les places. «  Il faut une religion pour le peuple » assure-t-on, et comme ce n’est plu
932 itionnels jusqu’au Saint-Empire médiéval, bien qu’ il n’en ait ni la pluralité ethnique et linguistique, ni le caractère d’
933 et linguistique, ni le caractère d’universalité. Il se rêve et se veut fermé, complet, suffisant en lui-même tant pour sa
934 érité fondamentale du xxe siècle des nations. Et il faut souligner à ce propos une constatation des plus paradoxales : c’
935 ns maintenant ces États-nations unitaires tels qu’ ils sont dans leur être et leur agir concret, non plus dans leurs prétent
936 ption, sont à la fois trop petits et trop grands. Ils sont trop petits si on les regarde à l’échelle mondiale. Ils sont tro
937 op petits si on les regarde à l’échelle mondiale. Ils sont trop grands si l’on en juge par leur incapacité d’animer leurs r
938 ts États confrontés aux trois seuls vrais grands. Ils sont trop petits « à l’échelle des moyens techniques modernes, à la m
939 54 Jean Monnet. (Lettre de démission de la CECA.) Ils sont trop petits pour se défendre seuls, même avec l’aide d’une petit
940 ée par les barrages antimissiles des deux grands. Ils sont trop petits dans le domaine économique pour répondre au « défi a
941 retrait des puissances naguère coloniales. Enfin, ils sont trop petits pour agir politiquement au niveau des empires vérita
942 e à prescrire paraît facile à formuler : Parce qu’ ils sont trop petits, les États-nations devraient se fédérer à l’échelle
943 se fédérer à l’échelle continentale ; et parce qu’ ils sont trop grands, ils devraient se fédéraliser à l’intérieur. Facile
944 continentale ; et parce qu’ils sont trop grands, ils devraient se fédéraliser à l’intérieur. Facile à formuler, mais presq
945 un dilemme aussi simple qu’inexorable : — ou bien ils se contentent de proclamer leur volonté farouche d’indépendance et le
946 d’indépendance et leur souveraineté absolue, dont ils refusent de rien déléguer à une autorité supranationale, fédérale, et
947 à une autorité supranationale, fédérale, et alors ils seront fatalement satellisés un à un ; — ou bien ils font ce qu’il fa
948 seront fatalement satellisés un à un ; — ou bien ils font ce qu’il faut pour pouvoir résister, c’est-à-dire qu’ils déciden
949 ent satellisés un à un ; — ou bien ils font ce qu’ il faut pour pouvoir résister, c’est-à-dire qu’ils décident de résister
950 qu’il faut pour pouvoir résister, c’est-à-dire qu’ ils décident de résister tous ensemble, et alors ils renoncent à leur sou
951 ’ils décident de résister tous ensemble, et alors ils renoncent à leur souveraineté absolue au profit d’une fédération qui
952 de la première Internationale à Genève, en 1867, il avait dénoncé l’impossibilité de constituer les États-Unis d’Europe s
953 nations paraissant insoluble en théorie autant qu’ il le reste en pratique dans l’état actuel de ses données29, il va fallo
954 en pratique dans l’état actuel de ses données29, il va falloir ou bien renoncer à l’union et alors il n’y aura plus de pr
955 il va falloir ou bien renoncer à l’union et alors il n’y aura plus de problème, ou bien modifier les données mêmes du prob
956 absorber les voisins. Si l’on veut unir l’Europe, il faut partir d’autre chose que de ses facteurs de division, il faut bâ
957 ir d’autre chose que de ses facteurs de division, il faut bâtir sur autre chose que sur les obstacles à l’union ; opérer s
958 précisément, où le problème se révèle insoluble. Il faut se fonder sur ce qui est destiné à devenir demain la vraie réali
959 s l’a léguée le siècle dernier : — la région.31 Il n’est rien dont les jeunes sociologues s’occupent avec plus de passio
960 vec plus de passion en Europe. C’est qu’en effet, il s’agit là d’un phénomène complexe et neuf, que nous voyons lentement
961 de la combinaison de forces les plus diverses, qu’ il s’agit de capter et d’harmoniser, dont les principales sont : l’explo
962 but, j’improvisais donc sur le thème que voici : Il peut sembler curieux, Messieurs, qu’à l’âge de l’union des nations et
963 se dessiner, s’organiser et s’affirmer. Et comme elles seront jeunes et souples, pleines de vitalité, ouvertes sur le monde,
964 ples, pleines de vitalité, ouvertes sur le monde, elles noueront entre elles des relations d’échanges aussi nombreuses et fré
965 lité, ouvertes sur le monde, elles noueront entre elles des relations d’échanges aussi nombreuses et fréquentes que possible.
966 nges aussi nombreuses et fréquentes que possible. Elles seront amenées à se grouper selon leurs affinités, selon leur voisina
967 t un écho pour moi des plus inattendus : c’est qu’ elles venaient à la rencontre non seulement des souhaits des organisateurs
968 lisé du continent et le plus allergique, semblait- il , au fédéralisme à base régionale : j’entends la République française
969 ineté de l’État est devenue tout illusoire, quand elle n’est pas toute négative, ne consiste pas à dire non, ou à consentir
970 pas à dire non, ou à consentir un abandon. Ainsi, elle permet aux États de procéder à leur désarmement tarifaire, de renonce
971 de renoncer aux droits de douane, ou au contraire elle leur sert de prétextes à refuser, ici ou là, les mesures nécessaires
972 ci ou là, les mesures nécessaires à l’union. Mais elle ne peut rien faire de plus. On l’a bien vu lors de la Première Guerre
973 écision régionaux dont tout le monde parle, et qu’ ils acquièrent de la force : lorsqu’ils auront pris en fait (sinon en dro
974 parle, et qu’ils acquièrent de la force : lorsqu’ ils auront pris en fait (sinon en droit) plus d’importance économique et
975 n de l’Europe se révélera immédiatement possible. Il se peut que cette évolution exige bien plus de temps que les pionnier
976 mpire » et tiraient de là leurs libertés — sera-t- elle fondée sur des réalités en plein essor, non sur des vieilles carcasse
977 y trompons pas : le processus sera très long, et il nous paraîtra nécessairement très lent, au jour le jour. Nous n’en so
978 ine avons-nous pris la mesure des perspectives qu’ il nous invite à explorer, notamment institutionnelles. Des réalisations
979 veau ne sauraient être décrétées sans transition. Il est normal qu’elles exigent une longue période de mise en place silen
980 être décrétées sans transition. Il est normal qu’ elles exigent une longue période de mise en place silencieuse des réalités
981 e base de toute vie sociale et publique en Grèce. Elle donna même son nom à cette forme d’activité : la politique ! De même
982 d’hui de le voir, ou d’en croire leurs yeux quand ils le voient, c’est le dogme inculqué dans les esprits pendant plusieurs
983 Les nations ne sont pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront. Et il ajoutait : La confédération eur
984 pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront. Et il ajoutait : La confédération européenne, probablemen
985 ’éternel. Elles ont commencé, elles finiront. Et il ajoutait : La confédération européenne, probablement, les remplacera
986 as lu Renan, de nos jours… Et cette succession qu’ il annonce, ce remplacement des États-nations par la fédération, cela ne
987 u spontané du fameux « mouvement de l’Histoire ». Il faudra que la succession, le remplacement s’opèrent dans les esprits
988 de cette religion civique dont je vous disais qu’ elle s’était substituée à la foi chrétienne dans l’esprit des masses. Je v
989 ans l’histoire, la cité se détache du territoire, elle « décolle » ; une unité politique se définit non plus en termes de li
990 échanges, de “flux” diraient les scientifiques : “ il faut chercher à être aussi indispensables aux autres que les autres n
991 soire dont se vantaient les États-nations. Enfin, il est une grande notion que les régions nous amèneront à mettre en lumi
992 ers le Prince maître de tout, et d’autant plus qu’ il devenait anonyme et sans visage — dans le monde régional, la liberté
993 s, le triomphe du fédéralisme intégral. Depuis qu’ il est question d’une entrée éventuelle de la Suisse dans le Marché comm
994 uisse dans le Marché commun, j’entends répéter qu’ elle y perdrait sa souveraineté, qu’elle s’y perdrait. Et si je parle d’un
995 ds répéter qu’elle y perdrait sa souveraineté, qu’ elle s’y perdrait. Et si je parle d’une fédération basée sur les régions,
996 n dans ce cas serait « dissociée ». Je réponds qu’ il est temps, qu’il est grand temps que nous cessions d’opposer un refus
997 ait « dissociée ». Je réponds qu’il est temps, qu’ il est grand temps que nous cessions d’opposer un refus quasi automatiqu
998 sous le double prétexte « qu’on n’est pas sûr qu’ elles réussiront », ou bien « qu’on n’est pas sûr que cela servirait nos in
999 ue qu’illustre l’anecdote du patriarche vaudois : il réunit ses fils autour de son lit de mort et il leur dit : « Le secre
1000 : il réunit ses fils autour de son lit de mort et il leur dit : « Le secret de ma réussite tient à ce que j’ai fondé ma vi
1001 our coopérer, comme l’ont fait nos cantons, quand ils ont vu que l’union fédérale était la condition de leur survie individ
1002 èse de travail régionaliste : on verra bien ce qu’ elle donne pour nous, quand nous aurons aidé au succès de l’entreprise. Si
1003 étrangère et les institutions internationales qu’ elle est fière d’accueillir ? Non, même « dissociée » économiquement, rien
1004 rattacher politiquement à l’idéal fédéraliste — s’ ils y tiennent vraiment — et de maintenir leur association. Nous sommes l
1005 xistence fédérale. Cela nous indique, me semble-t- il , notre responsabilité propre vis-à-vis de l’Europe. Je ne crois pas q
1006 r, des États, des territoires, des cadres fixes ; il doit « décoller » du sol, pour devenir de plus en plus une méthode de
1007 J.-J. Servan-Schreiber, Paris, 1967. 29. « Quand il s’agit de nations comme celles de la vieille Europe […] qui pourrait
1008 à moins d’être un imbécile, qu’une seule d’entre elles consentira jamais à remettre une part de ses pouvoirs à une autorité
20 1968, Articles divers (1963-1969). Vingt ans après La Haye : où en est l’Europe ? (mai 1968)
1009 e prendrais en charge la section culturelle que s’ il était bien entendu qu’il lui reviendrait de dire le sens de toute l’e
1010 section culturelle que s’il était bien entendu qu’ il lui reviendrait de dire le sens de toute l’entreprise, d’inspirer et
1011 t d’un long rouleau de fort papier parcheminé, et il était entendu qu’au terme du congrès, tous les participants, Churchil
1012 chill (qui n’était là qu’à titre de journaliste). Ils m’apprirent que le Message aux Européens ne pourrait être présenté
1013 urrait être présenté à la séance finale, parce qu’ il contenait cette petite phrase : « Nous voulons une défense commune »,
1014 état de trente délégués, sans doute anglais, dont ils affirmaient savoir qu’ils s’opposeraient à mon Message à cause de l
1015 ans doute anglais, dont ils affirmaient savoir qu’ ils s’opposeraient à mon Message à cause de la phrase sur la défense. P
1016 t fait l’usage que l’on sait. 2. Ne vous semble-t- il pas paradoxal qu’en mai 1948, alors que n’existaient encore ni le Con
1017 ations. Pour réussir l’Europe du peuple européen, il eût fallu : 1) lancer une campagne populaire de très grande envergure
1018 l’unification politique de l’Europe. Cet espoir, ils l’ont reporté ensuite sur les Communautés européennes. Après l’expéri
1019 de la souveraineté absolue et de l’indépendance ( ils n’osent plus parler d’autarcie), nos États-nations n’ont plus d’autre
1020 l’échelle de l’Europe et du monde, que négatifs. Ils peuvent encore soit refuser les mesures d’union qui s’imposent, soit
1021 ent, de circulation de la main-d’œuvre, etc. Mais ils ne peuvent rien de plus. (Il se cachent aujourd’hui derrière les refu
1022 -d’œuvre, etc. Mais ils ne peuvent rien de plus. ( Il se cachent aujourd’hui derrière les refus gaulliens. Demain, ils trou
1023 aujourd’hui derrière les refus gaulliens. Demain, ils trouveront d’autres prétextes.) Trop petits et trop grands à la fois
1024  les États-nations ne feront rien pour nous unir. Ils ne le veulent pas, ils ne le pourraient pas. Et il faut redouter que
1025 eront rien pour nous unir. Ils ne le veulent pas, ils ne le pourraient pas. Et il faut redouter que les Communautés, bridée
1026 s ne le veulent pas, ils ne le pourraient pas. Et il faut redouter que les Communautés, bridées par les nations qui les co
1027 ui aussi au lendemain du congrès de La Haye — a-t- il tenu ses promesses ? Quelles furent son action et son influence en pr
1028 présent ? Son impuissance avérée tient au fait qu’ il a opté, dès le lendemain de La Haye, pour les notables contre les mil
1029 ye, pour les notables contre les militants. Ce qu’ il a initié dans le domaine économique et mis sur pied dans le domaine c
1030 dans les conseils directeurs du Mouvement. Ce qu’ il a proclamé avec une si louable mesure, et, il faut bien le reconnaîtr
1031 qu’il a proclamé avec une si louable mesure, et, il faut bien le reconnaître, dans l’indifférence générale, c’est l’opini
1032 bien avant de Gaulle, que les choses étant ce qu’ elles sont, il convenait d’adapter les exigences de l’union aux intérêts na
1033 de Gaulle, que les choses étant ce qu’elles sont, il convenait d’adapter les exigences de l’union aux intérêts nationaux,
1034 os frais. Mais j’appelle espérance l’intuition qu’ il existe des moyens de rejoindre le but que l’on veut atteindre. Et cet
1035 je l’éprouve aujourd’hui plus vive que jamais ; s’ il est vrai qu’on ne peut bâtir sur de l’ancien (les États-nations), mai
1036 era tenir enfin les engagements de La Haye. 37. Il est remarquable que Retinger, qui ne passait pas pour fédéraliste, ai
21 1969, Articles divers (1963-1969). De l’Aar à l’Europe (1969)
1037 e ère, sont nées de la considération d’un fleuve. Il s’agissait sans nul doute du Méandre, puisque cet ancêtre éponyme de
1038 incurvait près d’Éphèse, vers Priène et Milet, où il trouvait son embouchure dans l’Égée. En ce temps-là, temps des cités
1039 baigner deux fois dans le même fleuve. II Il est permis de lire bien des choses dans ces phrases. Elles décrivent
1040 permis de lire bien des choses dans ces phrases. Elles décrivent la métamorphose des éléments : le feu solaire qui aspire en
1041 ns fin dans une forme arrêtée, celle des rives qu’ il a formées, événement toujours fuyant et qui fascine, figure originell
1042 sans relâche dans un trajet presque immuable, qu’ il faudra plusieurs millénaires pour déplacer de quelques champs… Deux
1043 deux sens et la profonde ambiguïté du mot durée : il désigne à la fois « ce qui ne change pas » et l’écoulement du temps i
1044 rop larges et trop longs pour l’usage de l’homme. Ils divisent et isolent plus qu’ils ne mettent en relations civilisantes.
1045 usage de l’homme. Ils divisent et isolent plus qu’ ils ne mettent en relations civilisantes. Ils inondent plus qu’ils n’irri
1046 plus qu’ils ne mettent en relations civilisantes. Ils inondent plus qu’ils n’irriguent. Mais les fleuves et rivières de l’E
1047 t en relations civilisantes. Ils inondent plus qu’ ils n’irriguent. Mais les fleuves et rivières de l’Europe sont pareils au
1048 leurs branches divergeant librement dans le ciel. Ils embrassent les peuples et ils les organisent, eux et leurs paysages,
1049 ement dans le ciel. Ils embrassent les peuples et ils les organisent, eux et leurs paysages, en très nombreux bassins large
1050 rands fleuves nous bordent et nous quittent. Mais il est une rivière qui d’un large mouvement du sud à l’ouest, puis à l’e
1051 d’un seul geste dans le Rhin, vers l’Atlantique. Elle relie les deux pôles du drame originel de notre histoire, le Gothard
1052 munes confédérées, vaste massif aux flancs duquel elle prend ses sources, et ce district de forteresses médiévales édifiées
1053 res, c’est la longueur exacte du Méandre !), mais elle draine tous les lacs entièrement suisses, du lac de Joux à l’ouest, à
1054 ion suédoise ses grands hommes blonds. Comme Uri, il fut terre d’Empire et longtemps défendit contre Berne ses libertés tr
1055 fendit contre Berne ses libertés traditionnelles. Il illustre au départ torrentueux l’esprit des communes médiévales, sour
1056 i bien nommée « la République de l’Aar » parce qu’ elle a montré les mêmes pouvoirs souverains de rassemblement, Berne est un
1057 e sur la carte : libérée par la Révolution, c’est elle qui va donner naissance à plusieurs des mentors de la Suisse nouvelle
1058 lacs et vingt rivières en un courant puissant qu’ elle jette au large Rhin, rassemblons en un seul faisceau nos arguments su
1059 e toute autre — Rhône ou Rhin, Danube ou Adige —, elle me paraît illustrative d’une authenticité européenne. VII Car l
1060 singulier et manifeste une vocation incomparable. Il n’y a pas d’accent européen, mais l’Europe est partout où une langue
22 1969, Articles divers (1963-1969). À la fontaine Castalie (1969)
1061 alerte au monde est le vrai but du dé-placement : il renouvelle la syntaxe émotive de mon dialogue avec la nature et l’his
1062 e ; ses étapes sont des prises de conscience ; et il n’a d’autre fin que d’être parcouru. Le voilier — un schooner de ving
1063 chooner de vingt-deux-mètres — cherche la voie qu’ il va tracer sur l’eau. Nous venons de quitter Poros, non loin des porte
1064 milans planent. Soudain l’un n’est plus là. Puis ils sont trois qui virent, s’évanouissent dans la lumière et reparaissent
1065 de immense et tranchée en plein roc. À mi-hauteur elle est creusée de larges niches irrégulières et peu profondes, aux voûte
1066 ne sorte d’auge creusée dans la pierre calcaire ; elle débouche à gauche dans une vaste pièce d’eau rectangulaire. (Au-delà,
1067 alier monte vers la gorge noire.) Vers la droite, elle disparaît derrière une cloison de dalles verticales, puis s’enfonce d
1068 e », mais aucun objectif ne pourra l’enregistrer, il y faudrait un œil de l’âme, œil intérieur : on est ici dans l’événeme
1069 sse encore — mais toujours vient d’être accompli. Il en reste un silence énorme, ces pierres nues, et la paix solennelle.
1070 e grand serpent, défenseur de la nuit maternelle. Il a forcé le sanctuaire de la Terre. Sa prêtresse, il la garde, elle se
1071 a forcé le sanctuaire de la Terre. Sa prêtresse, il la garde, elle servira son culte. Apollon fils du Ciel a vaincu, impo
1072 anctuaire de la Terre. Sa prêtresse, il la garde, elle servira son culte. Apollon fils du Ciel a vaincu, imposant la loi du
1073 aire maternel, selon la loi de l’aveuglant Désir, il va prendre la route de Thèbes — celle que rejoint à droite ce bref se
1074 oite ce bref sentier — vers le carrefour fatal où il tuera le Père. À la fontaine Castalie, c’est le combat fondamental q
1075 au grand bassin. Le prêtre a béni l’eau païenne. Elles sont parties. Noté sur une des pages de garde de mon guide. Paix du
1076 : est-ce bien ainsi ? n’est-ce que cela ? n’y a-t- il Personne ? Ces grands buissons, ces murets de pierre sèche, ces senti
1077 iers de troupeaux entre deux pâturages bosselés — ils me rappellent parfois les hauts plateaux du Jura familier de mon enfa
1078 e Castalie. (Plus tard, j’ai repris Hölderlin : Il s’est tu, sol de Delphes, ton Dieu !… Mais là-haut la lumière encor
1079 eviner des propos pleins de sens merveilleux… Car il plaît aujourd’hui comme alors aux souffles du ciel de descendre D
23 1969, Articles divers (1963-1969). Pour une définition nouvelle du fédéralisme (1969)
1080 ionalistes, qu’on voit partout en plein essor, qu’ il s’agisse de nations en instance de divorce avec l’OTAN ou avec le Pac
1081 tradictoire, c’est en effet l’État-nation, tel qu’ il est né de la Révolution et du Premier Empire, produit de la confiscat
1082 l’ont laissé, à la fois trop petit et trop grand. Il est trop petit pour assurer ce qu’on persiste à nommer son indépendan
1083 nos États centralisés — et dans la mesure même où ils sont centralisés — se révèlent trop grands pour animer la vie économi
1084 x ou sa capitale et les accusent de colonialisme. Il est certain que la prétention à une politique indépendante, au plein
1085 ur que par la Chine, l’URSS et surtout les USA, s’ ils acceptaient toutefois d’en payer le prix, lequel serait celui d’une a
1086 ous les coups, c’est donc l’État-nation qui perd. Il ne correspond plus ni aux conditions de liberté et de participation c
1087 guère que deux douzaines d’États fédératifs, mais ils regroupent 40 % de la population du globe, et il est frappant de cons
1088 ils regroupent 40 % de la population du globe, et il est frappant de constater qu’on trouve parmi eux les plus grands État
1089 rchandises de qualités au moins diverses selon qu’ il s’agit par exemple de l’empire soviétique, du Nigéria, ou de la Confé
1090 nts de convergence européenne et mondiale, même s’ ils disent s’inspirer du propre exemple de la fédération des cantons suis
1091 re exemple de la fédération des cantons suisses ! Il est certain que dans ces trois cas, c’est moins le fédéralisme qu’on
1092 n blocage délibéré aux limites d’un État fédéral. Il ne s’agit pas d’un défaut du fédéralisme, mais d’un défaut de fédéral
1093 comme le remède spécifique au stato-nationalisme, il faudrait, avant de le prescrire, être très sûr de sa formule. Or je n
1094 t qui a coutume de se reporter à son Littré quand il veut savoir ce qu’un mot signifie, la cause est jugée. Il s’agit d’un
1095 savoir ce qu’un mot signifie, la cause est jugée. Il s’agit d’un système qui est bon pour les sauvages et qui semble n’avo
1096 é préconisé que par des traîtres à la République… Il est vrai que mon Littré date de 1865 : « fédéralisme » y est encore q
1097 parus sur le sujet auraient dû suffire, semble-t- il , à clarifier un terme que le problème européen et nos situations nati
1098 le terme de fédéralisme étant tabou à Strasbourg, il se verrait obligé de quitter le comité si l’on adoptait ma propositio
1099 ’est-à-dire très exactement le contraire de ce qu’ il est. À l’inverse, le fédéralisme est assimilé par beaucoup à une atti
1100 d’une subvention fédérale « parce qu’ici, disait- il , nous sommes fédéralistes » ! Pareils malentendus, s’ils sont le fait
1101 us sommes fédéralistes » ! Pareils malentendus, s’ ils sont le fait d’Européens professionnels ou de gardiens jaloux des tra
1102 ais la coexistence en tension de ceci et de cela, il semble que le danger d’interprétations partielles, donc ruineuses dan
1103 on cas, lui soit pour ainsi dire congénital. Or s’ il est vrai que l’union de l’Europe est l’entreprise capitale de ce sièc
1104 urope est l’entreprise capitale de ce siècle et s’ il est vraisemblable que cette union sera fédérale ou ne sera pas, on se
1105 héorie des jeux de von Neumann et Morgenstern, qu’ il s’agit de déterminer l’optimum en lequel se concilient deux maxima co
1106 respond une telle politique, et quel type d’homme elle entend préparer ou éduquer, constatons qu’elle traduit une forme de p
1107 me elle entend préparer ou éduquer, constatons qu’ elle traduit une forme de pensée, une structure de relations bipolaires do
1108 utant que sur l’anarchie des individus isolés, qu’ il s’agisse de réalités métaphysiques ou physiques, esthétiques ou polit
1109 sonne à la fois une et double de Jésus-Christ. Et ils écrivent : « Nous enseignons un seul et même Seigneur Jésus-Christ, v
1110 s supprimé la différence des natures, mais plutôt elle a sauvegardé les propriétés de chaque nature, qui se rencontrent dans
1111 ste ainsi posé à la clé de l’histoire européenne, il reste à repérer les principaux domaines de la réalité moderne où l’on
1112 caractère va se transmettre à tous les groupes qu’ il formera avec d’autres hommes, ses semblables. Ces groupes devront êtr
1113 Enfin, le problème général de l’œcuménisme n’est- il pas le même en sa forme que ceux que nous venons d’évoquer, puisqu’il
1114 forme que ceux que nous venons d’évoquer, puisqu’ il consiste à concilier des confessions distinctes dans l’unité de l’Égl
1115 situation part du concret, en ce sens que d’abord elle considère la nature d’une tâche ou d’une fonction particulière dont o
1116 onnu la nécessité ou l’agrément. Deuxième étape : elle évalue les dimensions optimales de l’aire d’exécution requise, et ell
1117 sions optimales de l’aire d’exécution requise, et elle le fait en fonction des trois facteurs suivants : possibilités de par
1118 ionale, continentale ou mondiale, selon les cas), il ne reste qu’à désigner le niveau de compétence où seront prises les d
1119 ont prises les décisions relatives à cette tâche. Il peut y avoir d’ailleurs plusieurs niveaux de décisions, hiérarchisés.
1120 ent différer selon les tâches, j’entends selon qu’ elles intéressent tous les hommes de toutes les régions, certains hommes de
1121 est pas que l’administration soit facile, mais qu’ elle soit juste et éclairée. » Nous allons voir, enfin, que nos critères d
1122 e communication avec ceux que l’on côtoie comme s’ ils n’étaient pas là. La solution consisterait à recréer les conditions d
1123 tous pays et tous régimes politico-économiques : ils ont pour motif profond l’antinomie entre la culture générale au sens
1124 r professionnel souvent d’autant plus rentable qu’ il est plus étroitement spécialisé ; mais la révolte actuelle des étudia
1125 Multipliez par dix les dimensions d’un escalier, il devient impraticable. De même, le décuplement des effectifs estudiant
1126 soudre une fois pour toutes ce conflit permanent. Il y faut une méthode vivante, celle que j’ai dite : sans cesse évaluer
1127 u’avait bien vu le regretté Pierre Duclos, lorsqu’ il relevait que « le fédéralisme vit d’une vie que la forme institutionn
1128 pas à qualifier et moins encore à épuiser » … Et il ajoutait : Le fédéralisme est autre chose qu’une simple recette juri
1129 se qu’une simple recette juridique ou politique : il est un des grands types d’aménagement du rapport politique et peut-êt
1130 e j’ai tenté de le définir ne fait que commencer. Il n’est pas matière historique, mais prospective. Il a plus d’avenir qu
1131 l n’est pas matière historique, mais prospective. Il a plus d’avenir que de passé.   [Suivent deux brèves interventions d
1132 i sont destinées à se défaire assez rapidement si elles ne passent pas à la fédération et qu’en général les pays qui aujourd’
1133 t celles d’un peuple de 50 millions, qu’est-ce qu’ il se produit ? On vote, de temps en temps, sur de grandes options génér
1134 ée de la voix d’un homme criant sur l’agora, mais il faut garder cet exemple dans l’esprit, si l’on veut donner un contenu
1135 n de l’institution et du civisme. Si on trouve qu’ il n’y a pas assez de civisme quelque part, le premier remède c’est d’ap
1136 ion de la Suisse, on me pose souvent la question. Il faudrait s’entendre sur ce qu’on appelle région. Je ne m’étendrai pas
1137 me le veulent ses promoteurs, on croit souvent qu’ elle doit nécessairement coïncider avec une région politique. Pas du tout,
1138 langues, bien que l’allemand y soit majoritaire. Il faut s’orienter vers une vision de l’Europe de demain correspondant a
1139 s niveaux ne seront pas nécessairement les mêmes, elles ne se recouvriront pas toutes comme l’exige la tradition unitaire laq
1140 blige à chercher autre chose du côté des régions. Il est certain que le système stato-national actuel n’est plus tolérable
1141 onne plus. Le mouvement de régionalisation sera-t- il assez puissant pour aboutir, pour former la base d’une fédération ? J
1142 ous citer un exemple tiré de l’expérience suisse. Il s’est agi, il y a cinq ou six ans, de décider de la priorité pour la
1143 cé de ces routes : il y avait 48 paramètres, dont il fallait tenir compte : l’intensité du trafic, le prix des travaux d’a
1144 e fédération. Les ordinateurs ont trouvé par quoi il fallait commencer. Le fédéralisme, c’est-à-dire le respect poussé aus
1145 reconnaissables — dont se compose la fédération. Il est une symbiose sans confusion ni disparition des spécificités ».
24 1969, Articles divers (1963-1969). « La lecture des Nourritures terrestres… » [réponse à un questionnaire sur l’influence d’André Gide] (printemps 1969)
1146 aulhan me dit, un peu plus tard, dans un coin : «  Il refuse de dîner avec nous, c’est singulier, mais vous l’intimidez. »
1147 ’est singulier, mais vous l’intimidez. » C’est qu’ il ne m’était plus un dieu, et que j’étais jeune. Il s’efforçait tristem
1148 il ne m’était plus un dieu, et que j’étais jeune. Il s’efforçait tristement de lire Marx, et trouvait Kierkegaard « trop l
1149 ierkegaard « trop long ». Fin d’un prestige. Puis il m’a, très généreusement, hébergé quelques semaines avec ma femme, rue
1150 pensée n’a pour moi rien d’actuel et je doute qu’ il en aille autrement pour mes cadets. Je serais tenté de dire : tant pi
1151 re pour qui sait la comprendre. (Pour les autres, il est vrai, cela change tout : Marcuse, ni lu ni connu mais « actuel »
1152 Puis le colonialisme français. Sur tout le reste, il ne cesse d’alterner éloge et doute, avec un sens critique d’autant pl
1153 1968 ont la faiblesse insigne d’en faire fi. Mais il n’a pas créé l’image d’un ordre neuf — seule valable contestation, à
1154 elle mesure l’œuvre et la pensée de Gide vous ont- elles influencé, b) et quels sont les aspects de sa pensée qui vous paraiss
1155 e son temps un grand contestateur ; vous semble-t- il garder aujourd’hui valeur d’exemple ? »
25 1969, Articles divers (1963-1969). Un souvenir de Solférino de Henry Dunant [préface] (1969)
1156 cette phraséologie d’époque prête à sourire, mais elle a fait pleurer, elle nous émeut encore, et surtout elle a fait agir ;
1157 époque prête à sourire, mais elle a fait pleurer, elle nous émeut encore, et surtout elle a fait agir ; cette approche soign
1158 fait pleurer, elle nous émeut encore, et surtout elle a fait agir ; cette approche soigneusement conventionnelle du phénomè
1159 çaise des discours qui défiaient la syntaxe et qu’ il fallait recomposer pour l’impression au Journal officiel. C’est qu’il
1160 r pour l’impression au Journal officiel. C’est qu’ il pensait — et disait à ses proches — qu’il ne doit rien rester d’un bo
1161 ’est qu’il pensait — et disait à ses proches — qu’ il ne doit rien rester d’un bon discours, sauf la loi qu’il a fait voter
1162 oit rien rester d’un bon discours, sauf la loi qu’ il a fait voter. Quelle que soit la valeur littéraire que nous accordons
1163 ées et de la chose militaire en général. Et quand il sacrifie si libéralement aux clichés obligés du récit militaire, c’es
1164 taire, c’est avec le plus grand naturel, semble-t- il . Mais on peut se demander dans quel dessein il consacre à peu près un
1165 -t-il. Mais on peut se demander dans quel dessein il consacre à peu près un tiers de son écrit à la chronique de faits d’a
1166 de son écrit à la chronique de faits d’armes dont il n’a pas été le témoin, et qui auraient tous été, s’il faut l’en croir
1167 ’a pas été le témoin, et qui auraient tous été, s’ il faut l’en croire, de hauts exemples de bravoure ou de cette grandeur
1168 et justifie la guerre aux yeux de beaucoup. Faut- il voir là une captatio benevolentiae délibérée, un procédé qui assure l
1169 ou leurs maris « glorieusement » blessés ou tués, il se range sans réserve à leurs catégories. C’est le style qu’elles att
1170 ans réserve à leurs catégories. C’est le style qu’ elles attendent, et après tout c’est bien ainsi qu’il faut parler de la gue
1171 lles attendent, et après tout c’est bien ainsi qu’ il faut parler de la guerre telle qu’on l’exalte aussi longtemps qu’on n
1172 ici. Mais alors, au-delà de la captatio, n’y a-t- il une secrète et profonde ironie, une intention de souligner le contras
1173 n la vante, et maintenant je vais vous dire ce qu’ elle est, telle que je l’ai vue… Car voici que le récit quittant le style
1174 tement situé, chiffré, détaillé d’heure en heure. Il n’y a presque plus d’adjectifs. Mais seul ce changement de ton trahit
1175 issent à la pensée d’être rongés par ces vers, qu’ ils croient voir sortir de leur corps, et qui proviennent des myriades de
1176 démesurément de sa mâchoire déchirée et brisée ; il s’agite et veut se lever, j’arrose d’eau fraîche ses lèvres desséchée
1177 -inexistence des secours médicaux aux blessés : «  Il faut donc, tant bien que mal, organiser un service volontaire, mais c
1178 s également étrangers. Tutti fratelli, répétaient- elles avec émotion ». Le spectacle « de cette formidable et auguste tragédi
1179 e la guerre vue de près et dans sa nue réalité : Il arrive que le cœur se brise parfois tout d’un coup, et comme frappé s
1180 Hanté par les visions de l’enfer de Castiglione, il se décide à rassembler ses souvenirs, trois ans plus tard, et il se b
1181 rassembler ses souvenirs, trois ans plus tard, et il se borne à suggérer, dans une note, que si ces pages pouvaient faire
1182 aux militaires blessés en temps de guerre… et si elles pouvaient attirer l’attention des personnes douées d’humanité et de p
1183 ne phrase, au surplus interrogative : N’y aurait- il pas moyen de constituer des sociétés de secours dont le but serait de
1184  ! On ne saurait être plus prudent, plus modéré : il n’est question que « de quelques pas » et non pas de révolutionner ma
1185 r, la Croix-Rouge est fondée à Genève. Et certes, il n’eût pas pu la fonder seul, sans Gustave Moynier notamment, homme de
1186 lle le plus meurtrier du siècle depuis Waterloo : il n’a qu’une seule idée en tête, qui est d’approcher l’empereur et d’ob
1187 Société anonyme des Moulins de Mons Djemila », qu’ il a fondée. Mais d’autres soucis, ce jour-là, retiennent l’empereur. No
1188 stiglione. On sait la suite, mais dans son livre, il se borne à écrire cette seule phrase qui est sans doute l’une des plu
1189 un parfait gentleman de Toepffer gardant, quoi qu’ il arrive d’invraisemblable, sa dignité en redingote et son désir de se
1190 ité en redingote et son désir de se rendre utile. Il cherchait un empereur et il trouve une idée, aurait pu dire Victor Hu
1191 r de se rendre utile. Il cherchait un empereur et il trouve une idée, aurait pu dire Victor Hugo. Je vois ici la situation
1192 Un jour, on lui a demandé de parler à Plymouth : il ne peut arriver au bout de son discours, il est trop affaibli par la
1193 uth : il ne peut arriver au bout de son discours, il est trop affaibli par la faim. Quand ses chaussettes sont trouées, il
1194 par la faim. Quand ses chaussettes sont trouées, il teint à l’encre ses talons. En 1887, une espèce de vagabond sans baga
1195 ue dans un village du canton d’Appenzell, Heiden. Il y vivra obscurément dans la misère, pendant huit ans, jusqu’au jour o
1196 e « le fondateur de la Croix-Rouge vit encore ! » Il va le voir à l’hôpital de Heiden, chambre 12, réussit à le faire parl
1197 Chargé d’honneurs dans sa retraite morose, comme il l’avait été d’opprobres au temps de sa vie la plus entreprenante, por
1198 euil sanglant de la Première Guerre « mondiale ». Il l’avait vue venir. Il écrivait : « Ah ! la guerre n’est pas morte ! T
1199 emière Guerre « mondiale ». Il l’avait vue venir. Il écrivait : « Ah ! la guerre n’est pas morte ! Tout ce qui fait la glo
1200 nsée la plus authentique d’Henry Dunant, celle qu’ il ne pouvait pas encore avouer, ni peut-être s’avouer à lui-même, alors
1201 vouer, ni peut-être s’avouer à lui-même, alors qu’ il écrivait le début d’Un Souvenir. Son vrai discours contre la guerre e
1202 tarisme qui la prépare, c’est dans ses inédits qu’ il faut le chercher, dans ces textes écrits pour lui seul, et dans le se
1203 légitimité de la guerre », dit seulement que « si elle est inévitable, elle doit être faite avec le moins de barbarie possib
1204 re », dit seulement que « si elle est inévitable, elle doit être faite avec le moins de barbarie possible ». Autre étape dé
1205 l’époque de civilisation où nous vivons, parce qu’ il semblerait légitimer par trop un état de choses regardé aujourd’hui c
1206 tingences « réalistes », Dunant attaque de front. Il note dans ses cahiers : En attendant que d’autres plus habiles que n
1207 uiser pour construire une œuvre digne du but.43 Il ne s’agit plus d’améliorer la peste, mais de dénoncer le mal, d’en di
1208 auses permanentes : L’essence de la guerre n’est- elle pas de tuer ? Pourquoi donc ne pas stigmatiser la guerre elle-même ?
1209 religieusement… Au moins Caïn tua sans savoir qu’ il tuait ». Et qu’on ne répète pas que la guerre est la suprême éducatri
1210 e pas seulement le corps, mais trop souvent aussi elle tue l’âme. Elle abaisse, elle corrompt, elle flétrit, elle dégrade.
1211 le corps, mais trop souvent aussi elle tue l’âme. Elle abaisse, elle corrompt, elle flétrit, elle dégrade. Et ailleurs : L
1212 trop souvent aussi elle tue l’âme. Elle abaisse, elle corrompt, elle flétrit, elle dégrade. Et ailleurs : Les vertus guer
1213 ussi elle tue l’âme. Elle abaisse, elle corrompt, elle flétrit, elle dégrade. Et ailleurs : Les vertus guerrières ne sont,
1214 l’âme. Elle abaisse, elle corrompt, elle flétrit, elle dégrade. Et ailleurs : Les vertus guerrières ne sont, le plus souve
1215 semble beaucoup au banditisme, mais en grand.44 Il faut donc condamner et supprimer la guerre, ou cesser de parler de la
1216 ’Histoire, du moins telle que nous l’entendons ? Il convient de s’entendre sur le sens des termes d’utopie et de réalisme
1217 ui qui fait erreur sur l’adéquation des moyens qu’ il préconise aux fins qu’il allègue, tel celui qui répète (se croyant ré
1218 adéquation des moyens qu’il préconise aux fins qu’ il allègue, tel celui qui répète (se croyant réaliste) : si vis pacem pa
1219 ur les causes de la guerre dans l’ère moderne, qu’ il écrit vers la fin du siècle dernier. Il est difficile aujourd’hui de
1220 derne, qu’il écrit vers la fin du siècle dernier. Il est difficile aujourd’hui de ne pas voir les liens nécessaires et l’i
1221 qui unissent la guerre et les États-nations. Mais il fallait beaucoup de lucidité et beaucoup de liberté d’esprit pour dis
1222 re, avec une sorte d’étonnement reconnaissant, qu’ il est celui que j’utilisais depuis quelques années pour mes cours : L’
1223 ent, au lieu de supprimer les armées permanentes, elles ont décidé que tous les citoyens valides en feraient partie. » La Pr
1224 ides en feraient partie. » La Presse : « … c’est elle qui fait l’opinion publique… le plus puissant des potentats… » Elle a
1225 inion publique… le plus puissant des potentats… » Elle a changé en trois générations l’esprit de bien des peuples. « Si, en
1226 ’esprit de bien des peuples. « Si, en s’unissant, elle se mettait résolument à l’œuvre pour blâmer sévèrement la guerre, au
1227 a plus oppressive que le monde ait jamais connue, elle deviendrait un véritable bienfait… » Le Nationalisme et le coloniali
1228 bienfait… » Le Nationalisme et le colonialisme : il pousse les nations de l’Europe à envahir des pays inoffensifs (Afriqu
1229 ue, Asie) pour les asservir, pour les massacrer s’ ils résistent, « toujours en alléguant un prétexte dérisoire, celui de ch
1230 qu’on appelle chrétiens commettent ces crimes qu’ ils décorent du nom de politique coloniale ». Or ce n’est pas la vraie ci
1231 ur enlève souvent plus que des coutumes barbares, elle les dépouille de leur vieille et respectable moralité ». (Il a fallu
1232 uille de leur vieille et respectable moralité ». ( Il a fallu plus de soixante ans pour que l’Europe commence à le soupçonn
1233 ence, des moyens si prodigieux de faire le mal qu’ il ne pourra être sauvé de lui-même, au milieu d’épouvantables désastres
1234 ntifique ». En effet, « de toutes les inventions, il n’en est pas que le genre humain se soit plus appliqué à perfectionne
1235 nt dans l’utopie : au moment où Dunant disparaît, ils courent vers le réveil tragique de l’été 1914, aboutissement normal,
1236 n volume intitulé la Régence de Tunis dans lequel il témoigne d’un respect, des plus insolites à l’époque, pour les « indi
1237 n’a pas été étrangère aux difficultés, insolites elles aussi, que lui ont faites les administrations métropolitaines en part
26 1969, Articles divers (1963-1969). Toujours disponible (1969)
1238 Toujours disponible (1969)ae Comme il m’arrive pour la plupart de ceux avec qui j’ai longtemps collaboré et
1239 ait l’automne suivant un mouvement rival (à ce qu’ il m’apprit beaucoup plus tard), quoiqu’également résistant. Ce qui est
1240 es interventions nous portèrent en effet, soit qu’ il s’agît de sciences, d’arts ou d’éditions, vers les formes les plus ne
1241 ropéenne des guildes et clubs du livre, dès 1951. Elle devait grouper au cours des années suivantes jusqu’à neuf guildes tot
1242 centaines de milliers de lecteurs, en sept pays. Elle créa un Prix européen destiné à lancer de jeunes auteurs sur le plan
1243 s à l’égard de la formule guildienne… Et surtout, elle contribua à régulariser les relations des dirigeants des guildes entr
1244 La plupart de ces malheureux ne savent pas ce qu’ ils doivent à l’initiateur de la Büchergilde Gutenberg ! Mais nous, au Ce
27 1969, Articles divers (1963-1969). « Il faut donner aux gens le goût des belles choses » (15 février 1969)
1245 «  Il faut donner aux gens le goût des belles choses » (15 février 1969)ai
1246 ays, créer une atmosphère, un style. Mais n’était- il pas urgent de construire des logements ? On aurait pu faire, plus loi
1247 que le seul souci qu’on ait soit la spéculation. Il faut construire vite parce que cela coûte moins cher... Pourquoi ce
1248 seront construits dans les cinq années à venir ? Il est heureux qu’une enquête telle que la vôtre le révèle, car autour d
1249 projets car c’est leur vie qui va être modifiée. Il faut rendre les gens attentifs à l’importance du cadre dans lequel il
1250 ens attentifs à l’importance du cadre dans lequel ils vivent. Cela est plus important que de savoir si l’on est de droite o
1251 te ou de gauche. Une telle discussion ne risque-t- elle pas de faire obstacle à tous les projets ? Je ne suis pas partisan d’
1252 e ne suis pas partisan d’une stagnation complète. Il faut éduquer les gens, les rendre sensibles à la beauté. C’est un imm
1253 s usines nouvelles se créent. Où les construire ? Il faut les édifier loin des villes et loger le personnel dans des cités
1254 gionalisation » Vous semblez bien pessimiste ? Il existe un grand espoir, c’est la régionalisation, si elle se réalise
1255 ste un grand espoir, c’est la régionalisation, si elle se réalise véritablement. On arrivera, sur des régions plus petites,
1256 plus homogènes, à créer un style. Mais n’y aurait- il pas un grand bouleversement, dans tous les domaines ? Il faudra « s’é
1257 un grand bouleversement, dans tous les domaines ? Il faudra « s’équilibrer dans le chaos ». C’est ma conclusion du Journa
1258 poque . ai. Rougemont Denis de, « [Entretien] Il faut donner aux gens le goût des belles choses », Le Progrès, Lyon, 1
1259 , de la solidité, de la simplicité ne souffrira-t- il pas d’une mutation aussi profonde ? Nous avons posé cette troublante
1260 ain Denis de Rougemont. Depuis plus de vingt ans, il a choisi de vivre dans la “Maison des Bois“, demeure simple et belle
28 1969, Articles divers (1963-1969). Les résistances mentales à l’Europe des régions (avril 1969)
1261 ses moyens. Si l’on ne déclare pas ce qu’on veut, il n’est pas très intéressant de chercher à deviner ce qui sera : « l’ob
1262 en plus sûr.) Objections tactiques Comme s’ il n’était déjà pas assez difficile de faire l’Europe avec les Six, et d
1263 ndustrielle. (Principes d’une réponse : a) N’est- il pas justement trop difficile de faire l’Europe politique sur la base
1264 exactement, du 17 février au 16 novembre 1848, et il est entré en vigueur à cette dernière date sans la moindre mesure de
1265 lation d’un cordon douanier commun, par exemple.) Il n’y a qu’une transition du projet au succès : c’est l’acte créateur,
1266 gens n’en veulent pas, de vos régions autonomes. Ils préfèrent mendier des subventions à Paris. Voyez les Bretons, qui vot
1267  ? Quelles seront leurs frontières exactes ? Faut- il qu’elles aient des superficies ou des populations à peu près égales ?
1268 lles seront leurs frontières exactes ? Faut-il qu’ elles aient des superficies ou des populations à peu près égales ? La régio
1269 et indivisible. — De son siège dans la capitale, il régit souverainement toute l’existence publique de la nation, c’est-à
1270 nt « fait son unité » (comme on fait sa puberté), il devient une « nation immortelle » et l’État qui agit en son nom dispo
1271 par McLuhan ne peut vraiment comprendre que ce qu’ il voit. L’expression « Faut-il vous faire un dessin ? » évoque le modèl
1272 comprendre que ce qu’il voit. L’expression « Faut- il vous faire un dessin ? » évoque le modèle même de toute explication p
1273 pas d’un ordre essentiellement différent de ce qu’ elles sont aujourd’hui. La vie communale — seule école efficace du civisme
1274 nistrative que d’accroître les libertés civiques. Elle ne serait à aucun titre un modèle neuf de relations humaines et de st
1275 de relations humaines et de structure du pouvoir. Elle ne représenterait aucune révolution, au sens où j’ai toujours entendu
1276 es intégraux. II n’en reste pas moins probable qu’ elle va constituer le premier stade, non pas certes de l’ordre nouveau féd
1277 ne série de raisons (pas seulement militaires) qu’ il serait trop long de développer ici : qu’il suffise d’évoquer la sécur
1278 es) qu’il serait trop long de développer ici : qu’ il suffise d’évoquer la sécurité suisse et ses motifs. Mais le fédéralis
1279 oins douze ans, si nous commençons tout de suite. Il nous faut apprendre à penser par problèmes et non par nations. Devant
1280 participation civique, Université, par exemple), il nous faut apprendre : 1° à déterminer les éléments de base ou modules
1281 cadres et ses mécanismes. Je demande seulement qu’ il corresponde aux réalités humaines et qu’il les serve, au lieu de prét
1282 ent qu’il corresponde aux réalités humaines et qu’ il les serve, au lieu de prétendre à les régir en souverain. Je demande
1283 de son Principe fédératif, où Proudhon estime qu’ il « résume toute la science constitutionnelle », je trouve cette propos
1284 le, de garantie mutuelle et de surveillance ». Et il estime puéril de restreindre la séparation des pouvoirs aux membres d
1285 t des totalitaires du xxe siècle qui l’achèvent. Il ne s’agit donc, pour Proudhon, ni de décentraliser ni de déconcentrer
1286 intes, enfin fédération de fédérations (Europe). Il faut aller plus loin. 1° Les pouvoirs politiques peuvent très bien ad
1287 éremment, sont parfois englobés l’un par l’autre. Il se peut que les régions politiques soient définies demain comme les i
1288 ntes, définissant des régions spécifiques. « Faut- il vous faire un dessin ? » Ce ne serait pas facile. Essayez de figurer,
1289 ple, ma définition personnelle, donnée plus haut. Il est assez facile de visualiser l’appartenance d’un élément à deux ens
1290 ent, est à peine exploré, inutile de le dire. a) Il faudrait commencer par opérer les dissociations nécessaires des pouvo
1291 par exemple, qui est un pouvoir économique, doit- il entretenir des visées politiques, ou laisser cela à des organes diver
1292 ormules de participation civique et l’urbanisme : il serait facile de multiplier ce type de problèmes à résoudre au niveau
1293  » de régions ouvre un autre champ de recherches. Il s’agirait ici de la réunion de régions libérées de leur État-nation,
1294 chacun de nous sait très bien à quelles sociétés il cotise, où il paie ses impôts, qui est de sa paroisse et quels sont l
1295 s sait très bien à quelles sociétés il cotise, où il paie ses impôts, qui est de sa paroisse et quels sont les paysages de
1296 le phénomène dominant du xxe siècle, on doute qu’ il pense à autre chose qu’à la France… 49. P.-J. Proudhon, Du principe
1297 propose le terme de « régions carrefours ». 51. Il est certain que le Marché commun ne cessera d’être menacé par les Éta
1298 entités politiques, des « droits » économiques qu’ ils s’arrogent en barons pillards ; et tant qu’il n’y aura pas, au niveau
1299 qu’ils s’arrogent en barons pillards ; et tant qu’ il n’y aura pas, au niveau continental, une autorité politique fédérale.
29 1969, Articles divers (1963-1969). Le mariage est à réinventer (14 avril 1969)
1300 aussi celui de la maturité sur la jeunesse (voir Elle n° 1215) : les hommes se marient en moyenne à 25 ans la première fois
1301 ants du premier lit : ça pose des problèmes (voir Elle n° 1216) mais on ne fait pas pour autant un remariage de « raison »,
1302 ’on n’a pas su réussir du premier coup. Mais faut- il vraiment se marier deux fois ? Denis de Rougemont a accepté de faire
1303 e mieux analysé et expliqué l’amour et le couple, il est aussi depuis seize ans le (deuxième) mari de Nanik et il forme av
1304 i depuis seize ans le (deuxième) mari de Nanik et il forme avec sa (seconde) femme l’un de ces couples dont on dit simplem
1305 is qu’il y a problème et qu’on peut en parler, qu’ il faut même en parler librement et sérieusement. La crise du mariage et
1306 ne des grandes difficultés du sujet tient à ce qu’ il n’existe pas de littérature romanesque sur le second mariage et peu o
1307 enquêtes sociologiques, enquêtes psychologiques). Il faudrait pouvoir comparer les âges et les motivations des conjoints l
1308 r leur évolution, les réactions des enfants, etc. Il faut aussi savoir distinguer ce qui tient aux acteurs — les conjoints
1309 ier ? Ce qu’on peut dire avec certitude, c’est qu’ il a beaucoup plus de chances de l’être : il y a des écueils inhérents à
1310 hrases comme « Je suis pleine de complexes » ou «  Il me donne un complexe d’infériorité », les complexes sont des ensemble
1311 és inconscients. On ne connaît pas ses complexes, ils nous dirigent à notre insu, à notre corps défendant et c’est en quoi
1312 re insu, à notre corps défendant et c’est en quoi ils sont gênants, voire dangereux. Les motivations du premier mariage son
1313 uve marié avec une femme réelle, bien différente. Elle , eh bien, elle a aussi son image de l’homme qui lui fait faire les mê
1314 une femme réelle, bien différente. Elle, eh bien, elle a aussi son image de l’homme qui lui fait faire les mêmes erreurs. « 
1315 . « Je suis tombée amoureuse de lui avant même qu’ il ait dit un mot… » Y a-t-il des causes d’échec qui soient plus spécifi
1316 e de lui avant même qu’il ait dit un mot… » Y a-t- il des causes d’échec qui soient plus spécifiquement attachées à telle c
1317 es des parents, en premier lieu ; leur couple est- il si bien réussi ? On pense que le seul moyen de réussir ce qu’ils ont
1318 ssi ? On pense que le seul moyen de réussir ce qu’ ils ont raté c’est de prendre le contre-pied de leurs conseils. Ce qui co
1319 plus on s’entête et plus on se dépêche. À 20 ans, il est classique de se marier en claquant la porte. Mais la cause d’éche
1320 çon et la fille qui se marient « avec passion » ? Il n’y en a plus, aujourd’hui. Il n’y a plus d’obstacle objectif : si l’
1321 « avec passion » ? Il n’y en a plus, aujourd’hui. Il n’y a plus d’obstacle objectif : si l’un des deux est marié, il n’a q
1322 d’obstacle objectif : si l’un des deux est marié, il n’a qu’à divorcer et tout s’arrange. Aussi n’est-ce pas la morale soc
1323 bles avec les miens mais c’est plus fort que moi, il arrivera ce qu’il arrivera, ce n’est pas ma faute. » La fatalité, c’e
1324 s mais c’est plus fort que moi, il arrivera ce qu’ il arrivera, ce n’est pas ma faute. » La fatalité, c’est l’alibi. Et il
1325 st pas ma faute. » La fatalité, c’est l’alibi. Et il est nécessaire d’en avoir un, de pouvoir accuser le sort, puisque la
1326 u mariage n’a pas six siècles. Quel rapport y a-t- il entre l’un et l’autre ? C’est qu’autrefois on se mariait pour des rai
1327 nts d’un premier mariage. Ces causes d’échec sont- elles automatiquement éliminées quand on se remarie ? Pas automatiquement d
1328 ne vous remariez pas pour vous venger N’y a-t- il pas des causes d’échec spéciales à un deuxième mariage ? Oui, il y en
1329 es d’échec spéciales à un deuxième mariage ? Oui, il y en a deux, qui tiennent, elles aussi, à ses motivations. La peur de
1330 ième mariage ? Oui, il y en a deux, qui tiennent, elles aussi, à ses motivations. La peur de la solitude, la peur de rester «
1331 est toujours ressenti comme un échec. Mais autant il est bon de vouloir en tirer une leçon, de vouloir faire mieux la deux
1332 , de vouloir faire mieux la deuxième fois, autant il est mauvais de vouloir se venger de cet échec, de se remarier très vi
1333 ulières une fois qu’on est remarié ? C’est ici qu’ il s’agit de distinguer ce qui tient aux « acteurs » et ce qui tient à l
1334 elles, etc. Quant à la difficulté de la situation elle tient en une phrase ou un fait évident et qui sera ressenti plus ou m
1335 me fois n’a davantage de chances de réussir que s’ il n’y a pas nostalgie de la passion chez l’un ou chez l’autre. Se dire 
1336 ères, les goûts et les antécédents. Un mariage où il n’y aurait que des « convenances » a plus de chances de durer mais gu
1337 guère plus de chances de bonheur qu’un mariage où il n’y aurait que de l’amour. Le vrai amour c’est le contraire de la
1338 Le vrai amour c’est le contraire de la passion Il faut donc « quelque chose de plus » et ça ne peut être la passion. Qu
1339 e l’autre. C’est l’acceptation de cet être tel qu’ il est, limité et réel mais secrètement en marche vers lui-même que l’on
1340 pe de femme », souvent l’image de la mère sans qu’ il s’en doute, ou alors une certaine beauté qui est l’idéal standard de
1341 agent de personnalisation par excellence : ce qu’ il a su voir c’est l’irremplaçable, l’unique, ce que chaque être peut de
1342 able, l’unique, ce que chaque être peut devenir s’ il y est appelé. C’est son mystère, qui n’a rien de littéraire, de roman
1343 iage ayant en général de meilleures chances, faut- il en arriver à le prôner systématiquement ? Je pense que des solutions
1344 ions « préventives » sont infiniment préférables. Il faudrait tout d’abord dédramatiser tout ce qui touche à l’amour, au m
1345 oduit par l’œuvre de Freud, cette impression « qu’ il expliquait tout », vient de ce que pour la première fois, grâce à ce
1346 te qu’un amour justifié par de bonnes raisons. Or il faudrait toujours pouvoir analyser les motivations de son mariage. De
1347 our le divorce : si l’on veut en tirer une leçon, il est essentiel de ne pas le refouler comme un acte dont on a honte ou
1348 durer et l’on décide qu’on n’aura pas d’enfants ; il n’y aura donc pas de victimes. Appelons cette expérience un « mariage
1349 oujours très favorables au « mariage-maquette » ? Ils ont tort. L’Église leur donne l’exemple en exigeant avant l’entrée en
1350 religion plusieurs années de noviciat. D’ailleurs il n’est pas question d’essais multiples. Pour avoir une valeur expérime
1351 is multiples. Pour avoir une valeur expérimentale il faut qu’un mariage-maquette se prolonge plusieurs années. Aucun rappo
1352 me des différences énormes avec un vrai mariage : il manque les enfants et il manque tout le côté social — être reconnu pa
1353 s avec un vrai mariage : il manque les enfants et il manque tout le côté social — être reconnu par les autres comme un vra
1354 as à l’effort, à la tolérance, l’amour difficile. Il manque le pacte. L’engagement total. Je ne crois pas à la valeur magi
1355 ait disposé pour le long effort, la longue durée. Il ne se permettait pas de flancher, n’acceptait simplement pas la fatig
1356 u’est le vrai mariage. Pour avoir toute sa valeur il faut aussi que le pacte soit sans arrière-pensée. J’ai assisté, en Am
1357 aute de pacte, remplacer le premier mariage. Faut- il donc élever ses filles, comme le préconise Margaret Mead, dans l’idée
1358 comme le préconise Margaret Mead, dans l’idée qu’ il est normal et inévitable de divorcer ? Il vaudrait beaucoup mieux leu
1359 idée qu’il est normal et inévitable de divorcer ? Il vaudrait beaucoup mieux leur apprendre que la vraie vie, c’est la vie
1360 que la vraie vie, c’est la vie quotidienne et qu’ elle n’a rien de terne et d’ennuyeux (si les gens ne sont pas eux-mêmes te
1361 ivilégiée qui seule donne un sens à la vie, quand ils comprendront que la passion n’est jamais une raison de se marier mais
1362 « passionnant » c’est bien mieux qu’intéressant. Il ne s’agit d’ailleurs pas de condamner la passion. Les troubadours, le
1363 tretient ! Et le mariage lui-même, pensez-vous qu’ il doit être « modernisé » ? Le mariage ne peut renoncer ni à la durée n
1364 , une construction à deux et comme toute création il a ses difficultés. Il faut sans cesse comprendre à nouveau, risquer e
1365 eux et comme toute création il a ses difficultés. Il faut sans cesse comprendre à nouveau, risquer et se risquer, découvri
1366 une « convenance » ou un « agent de répression », elle est la base indispensable d’une création. Quand un peintre commence u
1367 une création. Quand un peintre commence une toile il doit sans cesse lutter contre le doute (est-ce que ça vaut vraiment l
1368 ableaux à la fois, de tout saccager lorsque ce qu’ il fait paraît trop éloigné de ce qu’il voudrait faire. De même le maria
1369 orsque ce qu’il fait paraît trop éloigné de ce qu’ il voudrait faire. De même le mariage exige que l’on se consacre à l’aut
1370 de, « [Entretien] Le mariage est à réinventer », Elle , Paris, 14 avril 1969, p. 29, 32, 34, 37, 39, 43-44. am. Propos recu
30 1969, Articles divers (1963-1969). Le personnalisme, la contestation, les hippies et… le fédéralisme (27 septembre 1969)
1371 eut mieux aux vœux de l’assistance. Ne s’agissait- il pas en effet de « L’invention de l’amour en Occident » ? Mais l’œuvre
1372 . de Rougemont ne se réduit pas à un seul titre : elle ne gravite pas uniquement autour de ce seul thème de l’amour-passion.
1373 idée fédéraliste en Europe, en faveur de laquelle il n’a cessé de militer depuis la fin de la guerre, c’est-à-dire depuis
1374 se chère à M de Rougemont : celle du fédéralisme. Il l’a non seulement défendue par ses écrits, mais également par son act
1375 ue directeur du Centre européen de la culture, qu’ il a fondé et qu’il dirige depuis 1949. Si à ses nombreux titres on ajou
1376 entre européen de la culture, qu’il a fondé et qu’ il dirige depuis 1949. Si à ses nombreux titres on ajoutait celui qu’il
1377 49. Si à ses nombreux titres on ajoutait celui qu’ il s’apprête à recevoir aux États-Unis, après son séjour au Canada, je v
1378 près, ce personnage énigmatique. D’entrée de jeu, il tient à nous mettre en garde. Ce que je voudrais bien marquer, nous d
1379 garde. Ce que je voudrais bien marquer, nous dit- il , c’est que pour moi il n’y a aucune séparation entre L’Amour et l’Oc
1380 ais bien marquer, nous dit-il, c’est que pour moi il n’y a aucune séparation entre L’Amour et l’Occident et les ouvrages
1381 écrire ou que j’ai déjà écrit sur le fédéralisme. Il n’y a jamais eu en moi deux activités distinctes, mais au contraire o
1382 mi Jacques de Bourbon-Busset m’a dit, un jour, qu’ il se considérait comme mon disciple en érotique personnaliste et qu’il
1383 omme mon disciple en érotique personnaliste et qu’ il exigeait que je lui montre cette cohérence entre mon érotique du mari
1384 ies locales et de l’union dans une fédération, où il s’agit précisément de respecter complètement les droits et de l’auton
1385 x, naturellement. Je me réfère toujours, poursuit- il , aux définitions des conciles du ive au vie siècle qui ont défini l
1386 imultanément présentes, complètes chacune d’entre elles , sans séparation mais sans confusion et sans subordination de l’une à
1387 ontraires, mais qui sont bonnes l’une et l’autre, il ne faut pas s’empresser de s’en sortir en supprimant l’une des deux,
1388 t, ou encore en les subordonnant l’une à l’autre. Il faut, au contraire, œuvrer avec ces deux réalités. C’est là, nous fai
1389 uvrer avec ces deux réalités. C’est là, nous fait- il remarquer, le fondement de ce que j’appellerai ma philosophie. Une ph
1390 mène à 1932. Denis de Rougemont a, alors, 26 ans. Il habite Paris. C’est là qu’il participera à la naissance de trois revu
1391 nt a, alors, 26 ans. Il habite Paris. C’est là qu’ il participera à la naissance de trois revues : L’Ordre nouveau , au cô
1392 ue aussi la naissance du personnalisme à laquelle il devait participer. C’était la réponse à « la spoliation de l’identité
1393 a spoliation de l’identité profonde de l’homme ». Il publiera d’ailleurs un ouvrage d’une importance capitale pour qui veu
1394 urellement les personnalistes. Pour moi, nous dit- il , la personne n’est ni un individu refermé sur lui-même, ni la minuscu
1395 distingue l’homme et le relie à la communauté où il exerce. Ce qui l’amena — avant Sartre, ce qu’on ignore généralement —
1396 rler de l’« engagement » de l’écrivain. Car ce qu’ il appelle engagement ce n’est rien moins que de tirer les conclusions p
1397 ue de tirer les conclusions pour la cité de ce qu’ il appelle la personne, puisque celle-ci est définie par son acte. Ainsi
1398 agement de l’individu. Mais cet engagement, tient- il à nous faire remarquer, n’implique pas qu’on s’inscrive dans un parti
1399 ante qui sévit aujourd’hui de Paris à Tokyo n’est- elle pas une contestation personnaliste ? M. de Rougemont n’hésite pas à r
1400 dre par l’affirmative : C’est, en effet, nous dit- il une contestation personnaliste qui s’ignore. Dans ces motivations, on
1401 ont nous avions été les témoins stupéfaits lorsqu’ elle éclata pour la première fois parmi les étudiants à Berkeley, M. de Ro
1402 s à Berkeley, M. de Rougemont l’avait déjà vécue. Il désire néanmoins apporter une légère correction : Je dois dire que j’
1403 à notre réaction personnaliste et communautaire. Elle ressemble plus souvent à la réaction des jeunes fascistes italiens et
1404 plus rien finalement que la force. Quand on dit, il faut tout casser et après on verra bien, moi j’ai déjà vu ce qui va s
1405 struction de l’Université et refuse de dire ce qu’ il y mettra à la place. C’est de la démagogie facile et extrêmement dang
1406 inition de la révolution que nous avions en 1932. Il s’agissait alors de substituer un nouvel ordre à ce que nous appelion
1407 ceptable. Mais je suis malheureusement certain qu’ ils se trompent. Et cela il le regrette profondément. Car, pour notre int
1408 lheureusement certain qu’ils se trompent. Et cela il le regrette profondément. Car, pour notre interlocuteur, la réaction
1409 cela, sans les analyser toujours exactement, mais ils le sentent et y réagissent instinctivement en anarchistes. Les hip
1410 leur réaction absolument normale et saine, même s’ ils vont parfois trop loin, même s’il y a trop de drogues à l’appui. C’es
1411 tout redevient possible. Mais jusqu’où cela ira-t- il  ? M de Rougemont ne nous cache pas son pessimisme. Il ne pense pas qu
1412 M de Rougemont ne nous cache pas son pessimisme. Il ne pense pas que cela ira très loin. Il reste, néanmoins, que des ras
1413 ssimisme. Il ne pense pas que cela ira très loin. Il reste, néanmoins, que des rassemblements comme celui qui a eu lieu ré
1414 M de Rougemont. Après six ans d’exil en Amérique, il retourne en Europe, une Europe en paix certes, mais qu’il faut recons
1415 rne en Europe, une Europe en paix certes, mais qu’ il faut reconstruire. Cette guerre qui vient de se terminer, M. de Rouge
1416 toute l’absurdité puisque, de par sa nationalité, il était neutre. Nous sommes ici à patauger, pouvons-nous lire dans son
1417 s , parce que nos voisins se font la guerre, et s’ ils la font, c’est parce qu’ils n’ont pas su se fédérer progressivement,
1418 font la guerre, et s’ils la font, c’est parce qu’ ils n’ont pas su se fédérer progressivement, au lieu de s’unifier brutale
1419 on valable pour la survie de l’Europe. Et depuis, il travaille sans relâche à la cause du fédéralisme. Il ne nous cache d’
1420 travaille sans relâche à la cause du fédéralisme. Il ne nous cache d’ailleurs pas qu’il désirait venir au Canada pour étud
1421 u fédéralisme. Il ne nous cache d’ailleurs pas qu’ il désirait venir au Canada pour étudier le système fédéral canadien, ma
1422 nder ses impressions sur le fédéralisme canadien, il nous paraissait nécessaire de lui demander comment il était passé de
1423 ous paraissait nécessaire de lui demander comment il était passé de sa définition de la « personne » au fédéralisme. Je vo
1424 l’homme doit être à la fois libre et responsable, il en est de même pour chaque nation dans l’Europe fédérée que je précon
1425 r le fédéralisme, pour moi, est tout autre chose. Il consiste précisément à maintenir ces deux éléments en apparence contr
1426 chose de beaucoup plus petit. En d’autres termes, il s’agirait pour l’auteur de L’Amour et l’Occident de créer des auton
1427 moderne, des unités d’habitation. Ces autonomies, il faut donc aller les chercher très bas. On les regroupera alors suivan
1428 ec ou même au niveau de la fédération canadienne. Il faut aller jusqu’au niveau mondial. Mais revenons à l’Europe. Là-bas,
1429 niveau mondial. Mais revenons à l’Europe. Là-bas, il est bien certain qu’on n’arrivera jamais à unir ces États-nations. Il
1430 qu’on n’arrivera jamais à unir ces États-nations. Il faut donc, nous répète M. de Rougemont, que ces États se dissolvent e
1431 is qui seraient découpées différemment suivant qu’ il s’agirait de régions économiques, politiques, culturelles. Cela paraî
1432 n fédéraliste du monde, nous dit M. de Rougemont, il vous faudra séparer tout ce qui peut être séparé, ou comme disait Pro
1433 t-on dans Journal d’une époque . Et ailleurs : «  il faut être absolument moderne. L’immobilisme, l’attentisme ne représen
1434 erne. L’immobilisme, l’attentisme ne représentent- ils pas la ruine du monde ? » C’est la leçon en tout cas que nous rappell
31 1969, Articles divers (1963-1969). La révolution des meilleurs (4 octobre 1969)
1435 humaine. Alors, c’est dans ce sens que, je pense, il nous faut retrouver les formules d’une communauté nouvelle — il nous
1436 etrouver les formules d’une communauté nouvelle — il nous faut tout refaire ! Nos villes deviennent inhabitables, impratic
1437 ois libre et responsable. Libre dans la mesure où il est responsable, et responsable dans la mesure où il est libre […] Le
1438 est responsable, et responsable dans la mesure où il est libre […] Les deux choses sont absolument liées. C’est une formul
1439 Sartre m’a prise sachant très bien, me disant qu’ il la prenait de moi, mais que tous les journalistes après la guerre lui
1440 pieds et poings liés, à un parti, à condition qu’ il soit de gauche d’étiquette. Pour moi — enfin, pour nous : Mounier, Da
1441 nt faits par le Conseil de l’Europe à Strasbourg. Il nous semblait à tous, d’ailleurs, qu’il fallait un troisième volet, q
1442 rasbourg. Il nous semblait à tous, d’ailleurs, qu’ il fallait un troisième volet, qui était la culture… Alors, j’ai créé ce
1443 ontrant, comme Toynbee le faisait de son côté, qu’ il n’y a pas d’histoire de la culture concevable, intelligible, en dehor
1444 la chose religion, comment cette vue-là se tient- elle aujourd’hui ? Moi, je ne suis pas du tout d’accord : il n’y a pas du
1445 ourd’hui ? Moi, je ne suis pas du tout d’accord : il n’y a pas du tout de débandade de l’idée religieuse, du phénomène rel
1446 s religieuse. Je vois ça sortir ces jours-ci ! Il ne faut pas donner l’avantage au diable En consultant justement la
1447 rgie inférieure à la précédente. Alors contre ça, il faut lutter par ce qu’on appelle en science la néguentropie. Et par l
1448 il y a une certaine correspondance, une analogie. Il est certain que pour moi, le diable, c’est une espèce de symbole de t
1449 e plus simpliste, le plus totalitaire. Contre ça, il faut des révoltes qui ne peuvent être que personnelles, individuelles
1450 par les meilleurs, et ne dure que par les moyens. Il faut les deux, mais il ne faut pas donner tout l’avantage aux moyens 
1451 e dure que par les moyens. Il faut les deux, mais il ne faut pas donner tout l’avantage aux moyens : ça serait donner l’av
1452 u et introduits par la note suivante : « Parce qu’ il est né à Neuchâtel (Suisse) en 1906, Denis de Rougemont a maintenant
1453 maintenant passé la soixantaine, c’est-à-dire qu’ il a deux fois l’âge où l’on commence à être suspect pour les jeunes. Et
1454 ntendre parler de personnalisme, mouvement auquel il est associé avec Emmanuel Mounier dans la fondation d’Esprit, et dans
1455 re à l’Université McGill, on sent que la place qu’ il accorde, par exemple, comme valeur de signe, au mouvement hippie occi
1456 ’un clin d’œil poli ou cajoleur à la jeunesse. Qu’ il ne se gêne cependant pas de critiquer quand il en sent le besoin. C’e
1457 Qu’il ne se gêne cependant pas de critiquer quand il en sent le besoin. C’est là-dessus que je devais d’abord l’interroger
1458 oger — dans le Metro Bar de l’hôtel Mont-Royal où il avait insisté pour m’attirer. »