1
n théâtre élisabéthain, un roman russe. Non point
que
l’apport des Suisses en ces domaines, de la Renaissance à nos jours,
2
ugal manuélin, ou le grand-duché de Weimar. C’est
que
l’ensemble suisse n’a jamais été défini par autre chose que par un sy
3
mble suisse n’a jamais été défini par autre chose
que
par un système d’alliances, embrassant de multiples unités locales —
4
doctrine trop clairement formulée. Ce n’est guère
qu’
au xixe siècle qu’on se mit à parler de fédéralisme. Encore la chose
5
ement formulée. Ce n’est guère qu’au xixe siècle
qu’
on se mit à parler de fédéralisme. Encore la chose était-elle entendue
6
ens concret du bien public a beaucoup plus à voir
que
l’idéologie. ⁂ Comme toutes les choses vivantes, organiques et intére
7
, d’oppositions et de tensions. On peut même dire
qu’
il est fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les aut
8
même dire qu’il est fait de contradictions, mais
qu’
à la différence de tous les autres systèmes politiques ou philosophiqu
9
ion maîtresse de les faire vivre ensemble, telles
qu’
elles sont. Mais parce qu’il accepte les contradictions, les oppositio
10
u sein d’un organisme vivant, n’allons pas croire
que
le fédéralisme soit une espèce d’éclectisme universel ou d’opportunis
11
ar définition l’uniformité imposée par un centre,
qu’
il s’agisse d’une capitale ou d’un parti, d’un pouvoir clérical ou pol
12
dictature et l’anarchie. Il est sur un autre plan
que
ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être qu’une seule. Il représente
13
lan que ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être
qu’
une seule. Il représente la seule attitude rigoureusement contraire à
14
a seule attitude rigoureusement contraire à celle
que
les deux autres ont en commun ! On aurait bien tort, en effet, de s’i
15
un ! On aurait bien tort, en effet, de s’imaginer
que
la volonté de centralisation totale d’une nation, et la volonté de la
16
dans une nation manifestent le même état d’esprit
que
ceux qui n’admettent rien d’autre que leur manière de vivre locale, d
17
at d’esprit que ceux qui n’admettent rien d’autre
que
leur manière de vivre locale, définie par la majorité locale, traiten
18
z nous Kantönligeist) relève de la même mentalité
que
le totalitarisme, à l’échelle nationale. Il traduit le même manque d’
19
de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait
que
la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre
20
rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut
que
ce rouge soit contrasté et composé avec des verts, par exemple, dans
21
mille échanges d’une infinie complexité. Voilà ce
que
j’appelle une harmonie fédéraliste. Le totalitaire, lui, trouve plus
22
on politique du monde moderne proviennent du fait
que
l’on oublie ces évidences. Je n’en donnerai qu’un seul exemple : l’im
23
t que l’on oublie ces évidences. Je n’en donnerai
qu’
un seul exemple : l’impasse à laquelle risquent d’aboutir les négociat
24
une souveraineté globale, qui ne laisserait jouer
qu’
à regret, et à titre de concession, la diversité des fonctions nationa
25
n plus grand corps. Les uns sont tentés d’oublier
que
la santé d’un corps exige le souple jeu d’organes bien différenciés ;
26
ifférenciés ; et les autres sont tentés d’oublier
qu’
un organe bien différencié ne saurait vivre isolé du corps. Quelle ser
27
tion fédéraliste ? J’en propose ici le principe :
que
l’Europe unie apprenne à respecter la diversité des petites nations q
28
sinon elle trahira sa mission dans le monde ; et
qu’
en même temps la Suisse apprenne à respecter, dans le cadre d’une Euro
29
r, dans le cadre d’une Europe fédérée, les règles
que
chacun de ses cantons observe dans le cadre de la Confédération, sino
30
derne du terme —, il faut une variété aussi riche
que
possible de créations humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues,
31
re ses nourritures élémentaires ? Ce ne peut être
que
l’Europe entière. L’Europe est la seule et véritable unité culturelle
32
s cités. Je bute ici sur un concept aussi néfaste
qu’
invétéré, et qui me paraît exemplairement incompatible avec la réalité
33
lité fédéraliste. On nous répète depuis un siècle
que
les Suisses, selon la langue qu’ils parlent, se rattachent à l’une ou
34
depuis un siècle que les Suisses, selon la langue
qu’
ils parlent, se rattachent à l’une ou à l’autre des trois grandes cult
35
Pour que cela soit vrai, il faudrait tout d’abord
que
le concept de « culture nationale » corresponde à des réalités cultur
36
e à des réalités culturelles. Or il ne correspond
qu’
à des prétentions nationales. L’idée qu’il y aurait en Europe un certa
37
orrespond qu’à des prétentions nationales. L’idée
qu’
il y aurait en Europe un certain nombre de « cultures nationales » bie
38
pas cent ans d’existence : il faut bien admettre
que
la culture s’était constituée avant elles et sans elles ! Je me conte
39
bientôt la Bourgogne, et redescend vers l’Italie
qu’
elle enrichit de ses nombreuses découvertes. Plus tard, les Allemands
40
ayreuth. C’est alors auprès des maîtres allemands
que
les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennen
41
. Au début du xxe siècle, plusieurs Russes, tels
que
Stravinsky, influenceront à leur tour la musique occidentale, en impo
42
création, des maîtres, et non pas des nations. Ce
que
l’on nomme parfois, pendant la Renaissance, la « nation » d’un musici
43
fait de la langue qui l’entretient. Quand on dit
que
les Suisses romands se rattachent à la « culture française », on ne p
44
ent à la « culture française », on ne pense guère
qu’
à la langue française. Mais celle-ci n’est pas une propriété de la nat
45
lle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut imposée
que
par un décret de François Ier, en 1543. On parle encore dans la Franc
46
elle seule définir une culture : elle n’est guère
qu’
un des éléments de la culture en général, si essentiel soit-il. Tous l
47
idence, pas réductibles à des cadres nationaux. «
Qu’
as-tu que tu n’aies reçu ? » peut donc dire la culture européenne à ch
48
as réductibles à des cadres nationaux. « Qu’as-tu
que
tu n’aies reçu ? » peut donc dire la culture européenne à chacun des
49
ré le corps de notre continent. ⁂ Or il se trouve
que
les Suisses sont, ou devraient être, préservés mieux que les autres d
50
Suisses sont, ou devraient être, préservés mieux
que
les autres de l’illusion des « cultures nationales », fût-ce du seul
51
leur État. Nous sommes en mesure de savoir mieux
que
les autres que la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dé
52
s sommes en mesure de savoir mieux que les autres
que
la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réa
53
des Français, ou en tout cas de l’image convenue
que
l’École nous donne depuis cent ans de la « culture française », bien
54
al et notre méfiance pour les cérémonies, à moins
que
son adoption n’ait résulté de notre tempérament particulier, mais cel
55
: nous sommes en osmose avec lui, bien davantage
que
beaucoup d’entre nous n’en ont conscience ou ne voudraient l’admettre
56
science ou ne voudraient l’admettre. D’où résulte
qu’
un Suisse romand — et tout ce que je viens d’en dire vaut aussi, mutat
57
re. D’où résulte qu’un Suisse romand — et tout ce
que
je viens d’en dire vaut aussi, mutatis mutandis, pour le Suisse aléma
58
ndantes et d’ordres divers, les unes plus petites
que
la Suisse et les autres beaucoup plus vastes. Par ses allégeances civ
59
’ont pas les mêmes frontières, qui ne se couvrent
que
très partiellement, et qui permettent un grand nombre de combinaisons
60
u hasard dans l’une des grandes nations voisines.
Qu’
on m’entende bien : ce n’est pas un éloge de la petitesse en soi que j
61
en : ce n’est pas un éloge de la petitesse en soi
que
je fais ici, ni des petites dimensions matérielles ou morales, mais a
62
régionales, et les autres universelles, — telles
que
le fédéralisme les implique et permet de les composer. Et il est vra
63
plique et permet de les composer. Et il est vrai
que
ce régime peut conduire moralement à la médiocrité dorée, politiqueme
64
le et civique, comme de leur paix. On voit mal ce
qu’
ils gagneraient à échanger cette paix — que l’on jalouse un peu tout e
65
mal ce qu’ils gagneraient à échanger cette paix —
que
l’on jalouse un peu tout en la couvrant de sarcasmes — contre les rég
66
ommes au nom de principes réputés immortels, mais
que
les générations suivantes récusent… Quant à ceux qui assument leurs p
67
t leurs plus grandes dimensions, il faut admettre
qu’
un régime fédéraliste et pluraliste leur ouvre de belles perspectives
68
et pluraliste leur ouvre de belles perspectives :
qu’
ils y entrent et qu’ils les explorent, ils s’y sentiront vite chez eux
69
uvre de belles perspectives : qu’ils y entrent et
qu’
ils les explorent, ils s’y sentiront vite chez eux, sans avoir à renie
70
déraliste. Nos meilleurs auteurs (pour ne prendre
que
cet exemple, le plus délicat, puisqu’il est lié à la langue, laquelle
71
ingria, Gonzague de Reynold. Européens en ce sens
qu’
ils n’ont pas hésité à puiser aux sources les plus variées de la cultu
72
re européenne, germanique et anglo-saxonne autant
que
française, sans s’arrêter à ces barrages ou à ces faux relais de pare
73
er à ces barrages ou à ces faux relais de paresse
que
représentent ailleurs les cultures soi-disant « nationales ». Et n’es
74
-ce pas à ce caractère « immédiatement européen »
que
l’on reconnaît le plus vite leur commun caractère de Suisses romands,
75
commun caractère de Suisses romands, si profondes
qu’
aient été leurs différences de doctrine, d’esthétique ou de tempéramen
76
massue contre ma thèse. Est-il besoin de rappeler
que
ce grand artiste s’est formé à l’école de Paris, mais aussi à l’école
77
tère privilégié du niveau de culture d’un peuple,
qu’
elle fut au temps de l’Europe classique puis romantique. Les sciences
78
Russie et URSS 0,03 À la question de savoir ce
que
les Suisses peuvent apporter de meilleur à la culture, je réponds don
79
illeur à la culture, je réponds donc sans hésiter
que
c’est surtout leur sens fédéraliste, leur sentiment direct, leur expé
80
vons produit peu de génies du premier ordre, tels
que
Rousseau ou C. G. Jung, Léonard Euler ou Ferdinand de Saussure, mais
81
-monde, tout enfiévré par les virus nationalistes
que
la culture du dernier siècle et notre crise totalitaire ont propagés.
82
1963)j k Au seuil des activités d’enseignement
que
cet Institut commence aujourd’hui, après une longue période de recher
83
ion, et parce qu’elle met en jeu bien autre chose
que
des intérêts matériels. Il serait donc vain de se dissimuler que l’un
84
s matériels. Il serait donc vain de se dissimuler
que
l’une des raisons d’être de cet Institut, sans doute la principale, t
85
ion académique ! Elle n’appartient pas à un passé
qu’
il suffirait de décrire et d’interpréter, mais à un avenir auquel nous
86
auquel nous sommes tous vitalement intéressés, et
qu’
il s’agit de préparer. Elle est moins un acquis à transmettre qu’un pr
87
préparer. Elle est moins un acquis à transmettre
qu’
un problème à résoudre. Est-ce à dire qu’il faille en laisser le soin
88
nsmettre qu’un problème à résoudre. Est-ce à dire
qu’
il faille en laisser le soin au seul réalisme des hommes d’État, aux s
89
es, philosophiques, dont il faut bien reconnaître
que
beaucoup attendent encore d’être étudiés objectivement, un à un, et a
90
par rapport à ces notions de l’homme qui ont fait
que
l’Europe, malgré tout, représente autre chose et un peu plus que ce q
91
algré tout, représente autre chose et un peu plus
que
ce qu’elle est dans sa réalité physique, qui est à peine 4 % des terr
92
out, représente autre chose et un peu plus que ce
qu’
elle est dans sa réalité physique, qui est à peine 4 % des terres émer
93
i de poursuivre une politique étrangère autonome.
Que
deviennent, dans ces conditions de fait, leur souveraineté et même le
94
entôt incomber à l’Occident au plan mondial, tels
que
l’aide aux pays sous-développés, ou l’intervention effective en cas d
95
ale, ou en cas d’agression contre un pays isolé ?
Que
peut encore signifier l’expression Europe, sinon un ensemble de pays
96
e la charité des Américains » ? C’est à ce moment
que
naît, ou renaît en Europe le vieux rêve d’union du Continent. Et cela
97
ce Allais déclare au congrès de La Haye, en 1948,
qu’
une Europe unie serait en mesure de doubler sa production et son nivea
98
nt. La politique en dépend donc aussi étroitement
qu’
elle dépend par ailleurs de l’opinion, des idéologies nationales et de
99
posé, inéluctablement, à tous nos pays, ne fût-ce
que
par la seule existence du Marché commun. Telle est donc la question e
100
e plan politique. Mais il serait excessif de dire
qu’
elle y débouche en pleine clarté. Au contraire, c’est à ce niveau que
101
en pleine clarté. Au contraire, c’est à ce niveau
que
la discussion générale du problème dans la presse, les partis, les pa
102
n. Si l’on examine son vocabulaire, on s’aperçoit
qu’
il utilise à peu près au petit bonheur les termes d’union et d’unifica
103
édération, d’union « plus étroite » (plus étroite
que
quoi, on ne le dit pas) et de communauté, de supranationalité et de s
104
convaincante des solutions proprement politiques,
qu’
il faudra bien donner un jour prochain à la question européenne. En vu
105
ment en question de nos jours. Je n’en vois guère
que
trois, qui se distinguent nettement par le rôle qu’y joueraient nos É
106
e trois, qui se distinguent nettement par le rôle
qu’
y joueraient nos États. On peut concevoir idéalement une Europe unitai
107
elle Europe, nos États actuels ne joueraient plus
qu’
un rôle comparable à celui des départements dans une République une e
108
fre pas un champ d’études utiles, car chacun voit
que
l’unification de l’Europe, à supposer qu’elle soit praticable, ne ser
109
un voit que l’unification de l’Europe, à supposer
qu’
elle soit praticable, ne serait conforme ni aux données historiques, n
110
Il importe toutefois de la mentionner, ne fût-ce
qu’
à titre de limite, de conséquence extrême, inaccessible, qui marquerai
111
peut concevoir une Europe qui ne serait organisée
que
par un système d’alliances entre États souverains. C’est, de fait, la
112
ession hélas impropre en l’occurrence, car, ainsi
qu’
a tenu à le préciser le général de Gaulle lui-même (conférence de pres
113
e presse de mai 1962), elle ne désigne en réalité
qu’
une Europe des États. Dans une telle Europe, nos États-nations actuels
114
ceux qui souhaiteraient laisser les choses autant
que
possible en l’état où elles sont. Mais est-il sûr que cet état soit b
115
possible en l’état où elles sont. Mais est-il sûr
que
cet état soit bien celui que l’on croit ? Pour répondre à cette quest
116
ont. Mais est-il sûr que cet état soit bien celui
que
l’on croit ? Pour répondre à cette question, il conviendrait d’examin
117
réalités tangibles, à des droits et à des devoirs
que
les États puissent réellement exercer, comme faire la guerre ou la pa
118
si, et dans quelle mesure, « les choses étant ce
qu’
elles sont », la notion d’indépendance n’a pas déjà cédé le pas, en fa
119
nce n’a pas déjà cédé le pas, en fait plus encore
qu’
en droit, à la notion d’interdépendance. Mais l’objet de pareilles étu
120
ominance finale d’un des trois types de solutions
que
je viens de caractériser très brièvement. Mais rien ne nous autorise
121
ès brièvement. Mais rien ne nous autorise à juger
que
le fédéralisme, déjà pratiqué quasi journellement dans les processus
122
que du pays où nous sommes, et dont je suis, pays
que
l’on a souvent appelé, à tort ou à raison, une préfigure de l’Europe
123
raisons immédiates et personnelles. Il se trouve
que
mes collaborateurs et moi-même, si différents que soient nos tempéram
124
que mes collaborateurs et moi-même, si différents
que
soient nos tempéraments, nos origines et nos champs d’intérêts partic
125
oyens du bord, dans un esprit commun. Or je pense
qu’
il existe une harmonie préétablie entre le fédéralisme comme objet d’é
126
nt dans les domaines les plus divers. C’est ainsi
que
M. Henri Schwamm, en économiste qui suit de très près l’évolution et
127
ers l’intégration, réunies dans le nouvel ouvrage
qu’
il publie ces jours-ci : Dimensions européennes de la science politiqu
128
qui dépasse évidemment nos forces actuelles mais
qu’
il semble urgent d’entreprendre là où on le peut, dans l’esprit du pro
129
i dit : « Mieux vaut allumer une petite chandelle
que
de maudire l’obscurité ! » ⁂ Ces quelques propos d’introduction génér
130
sujet particulier de mon cours, mais je souhaite
qu’
ils aient permis déjà d’en pressentir les intentions. Il pourrait semb
131
rompeur dans le cas particulier, car il se trouve
que
le fédéralisme n’est précisément pas un système logique que l’on puis
132
éralisme n’est précisément pas un système logique
que
l’on puisse déduire dans l’abstrait à partir d’une définition simple
133
titude de pensée et une méthode de conduite, plus
qu’
une doctrine ou une notion juridique ; une expérience multiforme et no
134
pragmatique et donc plus favorable au fédéralisme
que
l’esprit français, qui passe pour cartésien. Ce sont pourtant deux ju
135
t des régimes qui s’en inspirent, nous constatons
qu’
il leur faut des livres entiers pour l’exposer ou, mieux, pour en décr
136
en 1863 (l’année même où Littré publie l’article
que
je viens de citer) inaugure la révolte fédéraliste contre l’orthodoxi
137
onfédération d’États (distinction classique, mais
que
les dictionnaires déjà cités et contemporains continuent d’ignorer se
138
et l’étend à toutes les structures intersociales,
qu’
elles soient ou non étatiques ; l’équipe de l’Ordre nouveau, de 1932 à
139
Brugmans qui s’inspire de ses travaux, rénove ce
que
j’ai nommé « l’attitude fédéraliste ». Plusieurs des membres de ce gr
140
second de ces auteurs écrit ceci : Tout démontre
que
, quel que soit son avenir, [le fédéralisme] est autre chose qu’une si
141
ces auteurs écrit ceci : Tout démontre que, quel
que
soit son avenir, [le fédéralisme] est autre chose qu’une simple recet
142
soit son avenir, [le fédéralisme] est autre chose
qu’
une simple recette juridique ou politique : il est un des grands types
143
de vie et de civilisation, capable, au même titre
que
le libéralisme, le socialisme ou la démocratie, d’alimenter la pensée
144
et le fédéralisme considéré par la nouvelle école
que
décrit Pierre Duclos comme un des grands styles de vie et de civilisa
145
ands styles de vie et de civilisation, vous voyez
que
la discussion est très ouverte… J’ai donc estimé qu’au lieu de partir
146
la discussion est très ouverte… J’ai donc estimé
qu’
au lieu de partir d’une définition pseudo-scientifique, ou secrètement
147
édéraliste, ni des curiosa de l’esprit occidental
que
je me propose de retracer et qui mérite de retenir l’attention des ét
148
ptions et croyances régnantes en leur temps, soit
qu’
ils les reflètent fidèlement — et ce sera une occasion de les décrire
149
— et ce sera une occasion de les décrire —, soit
qu’
ils s’opposent expressément à « ce qui allait de soi » du vivant de le
150
unité de l’empire et de la papauté. Et je relève
que
ces deux ouvrages sont pratiquement contemporains de la naissance de
151
troisième composante de l’époque. Vous pressentez
qu’
il y aura, là-dessus, beaucoup à dire. L’échec historique de ces proje
152
uropéen de la plupart de ses termes de base, tels
que
: unité, union, unification, ou encore nation, souveraineté nationale
153
que des utopies de l’abbé de Saint-Pierre, encore
que
Proudhon, cent ans plus tard, revendique également cette paternité.
154
ent dans l’histoire suisse). Le mot n’a été connu
qu’
au moment où la chose était niée par un puissant parti, les jacobins,
155
enfin comment elles aboutissent aux réalisations
que
l’on sait dans notre temps. C’est donc une sorte de généalogie des gr
156
sorte de généalogie des grands desseins européens
que
nous aurons à établir, au moins autant qu’un constat déprimant d’éche
157
opéens que nous aurons à établir, au moins autant
qu’
un constat déprimant d’échecs pratiques et de déchets idéologiques. Qu
158
nt d’échecs pratiques et de déchets idéologiques.
Qu’
il s’agisse au début du plus grand poète du Moyen Âge, Dante, ou du ro
159
i hussite Podiebrad, et ensuite du ministre déchu
qu’
était le duc de Sully, ou du créateur d’un grand État qu’était William
160
t le duc de Sully, ou du créateur d’un grand État
qu’
était William Penn, puis d’un économiste visionnaire comme Saint-Simon
161
Nations en 1930, la galerie des auteurs de plans
que
nous allons parcourir n’est pas seulement pittoresque : elle nous con
162
ontré en premier lieu des historiens suisses tels
que
Karl Meyer puis E. Gagliardi, notamment. j. Rougemont Denis de, « A
163
n 1948 le Centre européen de la culture à Genève,
qu’
il dirige encore aujourd’hui. Dès 1951, président du comité exécutif d
164
ls n’y entrent en fait et d’une manière distincte
qu’
au troisième quart de l’ère chrétienne : au xvie siècle. Mais c’est a
165
remarquable ? Et dans quelle mesure peut-on dire
que
cet apport des Suisses à la culture représente une contribution de la
166
e valeurs spécifique ? C’est à ces deux questions
que
je vais tenter de répondre. ⁂ La Suisse n’existe que depuis cent-quin
167
je vais tenter de répondre. ⁂ La Suisse n’existe
que
depuis cent-quinze ans sous la forme d’un État fédéral et solidement
168
squ’au milieu du xixe siècle, elle n’était guère
qu’
une confédération plus ou moins lâche de petits États souverains, très
169
litiques dépassant largement les frontières de ce
que
l’on nommait les ligues suisses. Les plus grands esprits et les meill
170
d’abord d’un canton déterminé (qui n’est parfois
qu’
une ville, Bâle ou Genève) mais ils ne trouvent à se réaliser qu’au se
171
âle ou Genève) mais ils ne trouvent à se réaliser
qu’
au sein d’une entité beaucoup plus vaste, impériale, papale ou réformé
172
t, d’un Novalis, d’un Kierkegaard, qui n’ont vécu
que
dans leur seule nation, et d’elle seule ont nourri leur carrière) mai
173
Ainsi, le stade national est sauté. J’oserai dire
que
je vois là, précisément, l’un des grands privilèges culturels des Sui
174
grands privilèges culturels des Suisses : quelle
que
soit leur petite patrie locale, s’ils la dépassent, c’est pour rejoin
175
tête, du seul empereur. Leur liberté, c’était ce
qu’
on nommait alors « l’immédiateté à l’Empire » (Reichsunmittelbarkeit).
176
ien antérieures aux découpages en couleurs plates
que
montrent nos atlas d’école. La multiplicité des foyers créateurs four
177
ue la raison suffisante du phénomène exceptionnel
que
je constatais tout à l’heure. Genève, avec Calvin et Théodore de Bèze
178
lan d’union fédérale de l’Europe, et modifie plus
que
nul autre la sensibilité occidentale. De Zurich au début du xviiie s
179
xe siècle. Cinquante ans plus tard, c’est à Bâle
que
s’allume un nouveau foyer : Bachofen inaugure par son Matriarcat une
180
la confession protestante. ⁂ Mais s’il reste vrai
que
la Suisse n’est pas une nation comme les autres, n’ayant été pendant
181
comme les autres, n’ayant été pendant des siècles
qu’
un agglomérat de foyers sans capitale, et moins en relations les uns a
182
le, et moins en relations les uns avec les autres
qu’
avec les grands ensembles européens, peut-on déceler des caractères co
183
profil caractéristique par ses dépressions autant
que
par ses sommets. Dépressions : la musique, la poésie et la métaphysiq
184
eur Descartes. Mais force est bien de reconnaître
que
la Suisse n’a rien de comparable à la musique flamande de la Renaissa
185
e hollandaise ou vénitienne du xviiie siècle, et
qu’
elle s’est conformée par anticipation à cette règle devenue évidente à
186
ne trouve un répondant, par ailleurs discutable,
qu’
au xxe siècle avec Hodler ; entretemps, un Liotard, un Füssli, un Boe
187
n pour tous, tous pour un », c’est moins un idéal
qu’
une vitale obligation de solidarité pratique. Quand un Suisse entrepre
188
on ambition ou son génie individuel en démontrant
qu’
il fait une œuvre utile au bien commun ; ou bien, il lui faudra courir
189
Mais s’il a le goût de la grandeur, c’est à Rome
qu’
il ira terminer l’énorme dôme de Saint-Pierre comme Maderno et les deu
190
Maderno et les deux Fontana, c’est aux États-Unis
qu’
il ira construire les plus grands ponts du monde comme l’ingénieur Amm
191
me l’ingénieur Ammann, c’est en France ou en Inde
qu’
il trouvera des commandes pour bâtir une église de Ronchamps ou une ca
192
et penseurs engagés dans leur communauté, plutôt
que
créateurs d’art ou de grands systèmes. Médecins praticiens, guérisseu
193
de l’efficacité transformatrice. Et c’est en cela
qu’
ils sont typiquement suisses. ⁂ Cependant, une série de grands noms ne
194
de résistance qui l’appuie dans la population. Ce
qu’
il est important de savoir sur l’armée suisse, c’est que chacun de ses
195
est important de savoir sur l’armée suisse, c’est
que
chacun de ses soldats garde son fusil et son équipement militaire dan
196
sil et son équipement militaire dans son armoire.
Qu’
en est-il de notre équipement culturel ? Il me paraît que la structure
197
st-il de notre équipement culturel ? Il me paraît
que
la structure fédéraliste du pays et l’autonomie dans son sein non seu
198
igés par des prix Nobel. Soulignons, à ce propos,
que
la Suisse, avec 11 prix Nobel pour les sciences, se place au premier
199
sse semble donc en mesure de tenir une place plus
qu’
honorable dans une compétition continentale où l’arme secrète sera la
200
ment fédéralistes depuis des siècles. Il s’ensuit
que
la menace d’uniformisation et d’oblitération des traditions locales e
201
traditions locales est bien plus grave pour elle
que
pour ses grands voisins. Ce n’est pas du projet d’union européenne qu
202
oisins. Ce n’est pas du projet d’union européenne
que
provient cette menace de nivellement, mais plutôt d’un certain matéri
203
agir à temps en soutenant plus « matériellement »
que
jusqu’ici les valeurs et les forces culturelles dont elle dispose. N’
204
s les plus fortes et les plus concrètes de savoir
que
le terme de culture n’est pas un synonyme de superflu ? b. Rougemo
205
, d’oppositions et de tensions. On peut même dire
qu’
il est fait de contradictions, mais qu’à la différence de tous les aut
206
même dire qu’il est fait de contradictions, mais
qu’
à la différence de tous les autres systèmes politiques ou philosophiqu
207
ion maîtresse de les faire vivre ensemble, telles
qu’
elles sont. Mais parce qu’il accepte les contradictions, les oppositio
208
au sein d’un organisme vivant, n’allez pas croire
que
le fédéralisme soit une espèce d’éclectisme universel, ou d’opportuni
209
ar définition l’uniformité imposée par un centre,
qu’
il s’agisse d’une capitale, d’un État, d’un parti, d’un pouvoir cléric
210
dictature et l’anarchie. Il est sur un autre plan
que
ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être qu’une seule. Oui, le fédér
211
lan que ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être
qu’
une seule. Oui, le fédéralisme représente la seule attitude rigoureuse
212
a seule attitude rigoureusement contraire à celle
que
les deux autres ont en commun ! On aurait bien tort, en effet, de s’i
213
un ! On aurait bien tort, en effet, de s’imaginer
que
la volonté de centralisation totale d’une nation et la volonté de la
214
dans la nation, manifestent le même état d’esprit
que
ceux qui n’admettent rien d’autre que leur manière de vivre locale, d
215
at d’esprit que ceux qui n’admettent rien d’autre
que
leur manière de vivre locale, définie par la majorité locale, traiten
216
Ce nationalisme local relève de la même mentalité
que
le totalitarisme à l’échelle nationale. Il traduit le même manque d’i
217
de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait
que
la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre
218
rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut
que
ce rouge soit contrasté et composé avec des verts, par exemple, dans
219
mille échanges d’une infinie complexité. Voilà ce
que
j’appelle une harmonie fédéraliste. Le totalitaire, lui, trouve plus
220
on politique du monde moderne proviennent du fait
que
l’on oublie ces évidences. Je n’en donnerai qu’un seul exemple : l’im
221
t que l’on oublie ces évidences. Je n’en donnerai
qu’
un seul exemple : l’impasse à laquelle risquent bien d’aboutir les nég
222
glober dans un plus grand corps. Les uns oublient
que
la santé d’un corps exige le souple jeu d’organes bien différenciés ;
223
d’organes bien différenciés ; les autres oublient
qu’
un organe bien différencié ne saurait vivre isolé du corps. Quelle ser
224
on fédéraliste ? Je vous en propose le principe :
que
l’Europe unie apprenne à respecter la diversité des petites nations q
225
sinon elle trahira sa mission dans le monde ; et
qu’
en même temps la Suisse apprenne à respecter dans le cadre d’une Europ
226
er dans le cadre d’une Europe fédérée, les règles
que
chacun de ses cantons observe dans le cadre de la Confédération, sino
227
e très concrète —, tout est dit en principe de ce
que
nous aurions à dire sur les rapports entre le fédéralisme et la cultu
228
e fédéralisme et la culture, et sur les problèmes
que
nous pose la vie culturelle de la Suisse romande en particulier. Essa
229
de l’asiatique — il faut une variété aussi riche
que
possible de créations humaines, un foisonnement d’œuvres, de langues,
230
re ses nourritures élémentaires ? Ce ne peut être
que
l’Europe entière. L’Europe est la seule et véritable unité culturelle
231
rompre une lance contre le concept aussi néfaste
qu’
invétéré de « culture nationale ». On nous répète depuis un siècle que
232
ture nationale ». On nous répète depuis un siècle
que
les Suisses, selon la langue qu’ils parlent, se rattachent à l’une ou
233
depuis un siècle que les Suisses, selon la langue
qu’
ils parlent, se rattachent à l’une ou à l’autre des trois grandes cult
234
Pour que cela soit vrai, il faudrait tout d’abord
que
le concept de « culture nationale » corresponde à des réalités cultur
235
e à des réalités culturelles. Or il ne correspond
qu’
à des prétentions nationales. L’idée qu’il y aurait en Europe un certa
236
orrespond qu’à des prétentions nationales. L’idée
qu’
il y aurait en Europe un certain nombre de « cultures nationales » bie
237
pas cent ans d’existence : il faut bien admettre
que
la culture s’était constituée avant elles et sans elles ! Je me conte
238
bientôt la Bourgogne, et redescend vers l’Italie
qu’
elle enrichit de ses nombreuses découvertes. Plus tard, les Allemands
239
ayreuth. C’est alors auprès des maîtres allemands
que
les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennen
240
. Au début du xxe siècle, plusieurs Russes, tels
que
Stravinsky, influenceront à leur tour la musique occidentale, en impo
241
création, des maîtres, et non pas des nations. Ce
que
l’on nomme parfois, pendant la Renaissance, la « nation » d’un musici
242
fait de la langue qui l’entretient. Quand on dit
que
les Suisses romands se rattachent à la « culture française », on ne p
243
ent à la « culture française », on ne pense guère
qu’
à la langue française. Mais celle-ci n’est pas une propriété de la nat
244
lle, à l’ensemble de laquelle elle ne fut imposée
que
par un décret de François Ier, en 1543. On parle encore dans la Franc
245
elle seule définir une culture : elle n’est guère
qu’
un des éléments de la culture en général. Or tous les autres éléments
246
idence, pas réductibles à des cadres nationaux. «
Qu’
as-tu que tu n’aies reçu ? » peut donc dire la culture européenne à ch
247
as réductibles à des cadres nationaux. « Qu’as-tu
que
tu n’aies reçu ? » peut donc dire la culture européenne à chacune des
248
corps de ce continent. III Or il se trouve
que
les Suisses sont, ou devraient être, préservés mieux que les autres d
249
Suisses sont, ou devraient être, préservés mieux
que
les autres de l’illusion des « cultures nationales », du seul fait de
250
leur État. Nous sommes en mesure de savoir mieux
que
les autres que la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dé
251
s sommes en mesure de savoir mieux que les autres
que
la vie culturelle de nos régions et de nos cités ne dépend pas de réa
252
des Français, ou en tout cas de l’image convenue
que
l’État français nous donne depuis cent ans de la « culture française
253
l et notre méfiance pour les cérémonies — à moins
que
son adoption n’ait résulté de notre tempérament particulier, mais cel
254
: nous sommes en osmose avec lui, bien davantage
que
beaucoup d’entre nous n’en ont conscience ou ne voudraient l’admettre
255
Tels étant nos principaux caractères spécifiques,
que
devons-nous faire maintenant pour rester fidèles à nous-mêmes, j’ente
256
ée ? Je ne crois guère aux mesures de « défense »
qu’
on nous propose périodiquement : défense contre l’influence germanique
257
uropéenne. Nos meilleurs auteurs (pour ne prendre
que
cet exemple, le plus délicat, puisqu’il est lié à la langue, laquelle
258
ingria, Gonzague de Reynold. Européens en ce sens
qu’
ils n’ont pas hésité à puiser aux sources les plus variées de la cultu
259
re européenne, germanique et anglo-saxonne autant
que
française, sans s’arrêter à ces barrages ou à ces faux relais de pare
260
er à ces barrages ou à ces faux relais de paresse
que
représentent ailleurs les cultures soi-disant « nationales ». Et n’es
261
-ce pas à ce caractère « immédiatement européen »
que
l’on reconnaît le plus vite leur commun caractère de Suisses romands,
262
commun caractère de Suisses romands, si profondes
qu’
aient été leurs différences de doctrine, d’esthétique ou de tempéramen
263
massue contre ma thèse. Est-il besoin de rappeler
que
ce grand artiste s’est formé à l’école de Paris, mais aussi à l’école
264
de son œuvre. IV À la question de savoir ce
que
les Suisses romands peuvent apporter de meilleur à la culture, je rép
265
illeur à la culture, je réponds donc sans hésiter
que
c’est surtout leur sens fédéraliste, leur sentiment direct, leur expé
266
-monde, tout enfiévré par les virus nationalistes
que
la culture du dernier siècle et notre crise totalitaire ont propagés.
267
nos particularismes les plus désuets. Il voudrait
que
chacune de nos cités se suffise à elle-même dans tous les domaines :
268
: université, radio, publications, etc. Et plutôt
que
de reconnaître que cela n’est pas possible, en plus d’un cas, il pous
269
, publications, etc. Et plutôt que de reconnaître
que
cela n’est pas possible, en plus d’un cas, il pousse à préférer des s
270
iocres, mais « bien de chez nous », aux avantages
que
pourrait procurer une coopération sans réserve avec d’autres cantons
271
libre et dispersé, voire anarchique. Il est clair
que
nos villes sont trop petites pour se payer chacune un laboratoire de
272
ratoire de recherches nucléaires, pour ne prendre
que
cet exemple. Mais qu’on ne dise pas qu’elles sont trop petites pour q
273
nucléaires, pour ne prendre que cet exemple. Mais
qu’
on ne dise pas qu’elles sont trop petites pour que s’y développent à f
274
e prendre que cet exemple. Mais qu’on ne dise pas
qu’
elles sont trop petites pour que s’y développent à foison des écoles d
275
avec l’intransigeance nécessaire. N’oublions pas
que
les cités qui ont fait la Renaissance en Italie, en Flandres ou en Bo
276
ndres ou en Bourgogne, étaient alors plus petites
que
nos villes romandes actuelles. Elles sont tout de même devenues des f
277
e grands marchands de l’époque. Il est trop clair
qu’
à l’absence de cette passion créatrice et de ce sens du mécénat, nul c
278
remédier. Les comités ne peuvent faire, au mieux,
que
des choses raisonnables, mais la culture est faite par des passions i
279
le gaspillage des forces et des sommes. Je crains
que
nous soyons encore, en Suisse romande, aux antipodes de ce climat d’e
280
rotégeant en revanche trop de médiocrité pour peu
qu’
elles aient été un jour inscrites à quelque budget d’État, et sous pré
281
ue équitable — ce qui n’est, soit dit en passant,
qu’
une parodie du vrai fédéralisme — c’est tout cela qui mérite aujourd’h
282
liste. On parle beaucoup, ces jours-ci, du danger
que
le Marché commun représenterait pour notre Suisse fédéraliste. Mais c
283
C’est bien plutôt le fait de ne plus s’intéresser
qu’
au niveau de notre vie matérielle, de traiter la culture en mendiante,
284
nd ses sources dans les mêmes attitudes de pensée
que
la culture créatrice. On ne sauvera pas l’un sans l’autre. c. Rou
285
er une culture européenne unitaire » ; il nierait
que
l’Europe soit « la patrie des contradictions » ; et il pratiquerait l
286
où nous écrivons « trait distinctif », à déplorer
que
nous éliminions le judaïsme ou le christianisme, quand nous ne cesson
287
le christianisme, quand nous ne cessons d’écrire
qu’
avec Rome et Athènes ils sont les éléments fondamentaux de notre cultu
288
à discussion, mais à les falsifier radicalement.
Qu’
il y ait une tradition « européenne » du fascisme et de ses procédés,
289
eu de tout en Europe, de la sottise aussi, autant
qu’
ailleurs. La seule question qu’on se pose est de savoir quelles sont l
290
tise aussi, autant qu’ailleurs. La seule question
qu’
on se pose est de savoir quelles sont les traditions qui doivent colla
291
berté ? L’union de l’Europe ne pourra se faire
qu’
en vertu d’une volonté, mais il n’est pas de volonté sans but, sans qu
292
pouvoir et les autres en prison ». En proclamant
que
« le coup électrique de la Raison » doit se transmettre instantanémen
293
umain », définissait très bien l’utopie unitaire,
que
la technique met à portée de nos mains. En chemin vers l’autre limite
294
animateur sans pouvoir contraignant n’est féconde
que
dans la mesure où elle éveille et libère chez beaucoup la possibilité
295
olonté de puissance personnelle. Parmi les hommes
que
le souci de la chose publique conduit à prendre part à l’élaboration
296
en, je vois deux types intermédiaires, entre ceux
que
l’on vient de caractériser : je les nommerai symboliquement celui du
297
le manager, la volonté de puissance ne se traduit
que
d’une manière abstraite, en termes d’organisation sans défaut, et par
298
nt. (Le premier ne suffit pas mieux à le réfuter,
que
le second à le fonder en principe.) Car il est véritablement la proje
299
e nos sciences et nos logiques ne seraient pas ce
qu’
elles sont, ou n’auraient pas eu lieu. Lors du premier congrès de l’Un
300
ontribue à promouvoir un certain type d’humanité,
qu’
on le veuille ou non, qu’on le sache ou non. Quelle est donc la défini
301
certain type d’humanité, qu’on le veuille ou non,
qu’
on le sache ou non. Quelle est donc la définition de l’homme sur laque
302
alisme ? Nous ne serions pas ici si nous pensions
que
le type d’homme le plus souhaitable est l’individu isolé, dégagé de t
303
us si nous pensions avec Hitler et les staliniens
que
l’homme n’est qu’un soldat politique, totalement absorbé par le servi
304
s avec Hitler et les staliniens que l’homme n’est
qu’
un soldat politique, totalement absorbé par le service de la communaut
305
n esprit tout au moins. Si nous sommes ici, c’est
que
nous savons que l’homme est un être doublement responsable : vis-à-vi
306
moins. Si nous sommes ici, c’est que nous savons
que
l’homme est un être doublement responsable : vis-à-vis de sa vocation
307
s’exerce. Aux individualistes nous rappelons donc
que
l’homme ne peut se réaliser intégralement sans se trouver engagé du m
308
exe social. Et aux collectivistes, nous rappelons
que
les conquêtes sociales ne sont rien, si elles n’aboutissent pas à ren
309
cation et la cité ; entre ces deux amours : celui
qu’
il se doit à lui-même et celui qu’il doit à son prochain — indissolubl
310
amours : celui qu’il se doit à lui-même et celui
qu’
il doit à son prochain — indissolubles. Cet homme qui vit dans la ten
311
ui me paraît indispensable, il ne faut pas penser
que
la personne soit un moyen terme ou un juste milieu entre l’individu s
312
e, c’est l’homme réel, et les deux autres ne sont
que
des déviations morbides, des démissions de l’humanité complète. La pe
313
oppressive. Le fédéralisme est sur un autre plan
que
ces deux erreurs complémentaires. Chacun sait que l’individualisme ou
314
que ces deux erreurs complémentaires. Chacun sait
que
l’individualisme outré fait le lit du collectivisme : ces deux extrêm
315
oussière des individus civiquement irresponsables
que
les dictateurs font leur ciment. Et nous avons pu voir, pendant la de
316
t nous avons pu voir, pendant la dernière guerre,
que
les résistances que rencontrent les dictateurs sont au contraire le f
317
, pendant la dernière guerre, que les résistances
que
rencontrent les dictateurs sont au contraire le fait de groupes de ci
318
, c’est-à-dire des personnes fédérées.2 On voit
que
le passage de la personne au fédéralisme s’opère tout naturellement,
319
t, et presque irrésistiblement, le second n’étant
que
la projection de la première au plan politique, en ce sens précis que
320
la première au plan politique, en ce sens précis
que
les éléments antagonistes qui trouvent leur composition dans la perso
321
bre dynamique ne pouvant d’ailleurs être maintenu
qu’
au prix d’une vigilance toujours alertée, de rétablissements, ajusteme
322
ons en perpétuel renouvellement. C’est assez dire
que
le fédéralisme n’est pas une doctrine fixe, ni vraiment un système, e
323
, ni vraiment un système, et encore moins un plan
qu’
il faudrait appliquer aux réalités humaines et politiques, toujours «
324
erait vain d’en faire un traité théorique. Plutôt
que
d’essayer de les déduire dans l’abstrait, observons des exemples réus
325
incipes directeurs ou réflexes quasi instinctifs,
que
l’on peut dégager après coup. On retiendra ici ceux qui paraissent le
326
Premier principe. Une fédération ne peut naître
qu’
au prix du renoncement formel et vigilant à toute idée d’hégémonie org
327
éens — selon laquelle une fédération ne peut être
que
l’œuvre d’un tout-puissant « fédérateur » (potentat ou État), n’est c
328
e sont principes fédérateurs, même négatifs. Mais
qu’
un État ou une coalition, disposant de l’hégémonie, décident expressém
329
fédération. Ne mérite donc le titre de fédérateur
que
le groupe, ou l’État, ou la communauté d’États, ou le parti politique
330
fois qu’un des cantons plus riche ou plus peuplé
que
les autres, comme Zurich, ou un groupe de cantons coalisés au nom de
331
que), les vainqueurs n’ont eu rien de plus pressé
que
de rendre aux vaincus leur pleine égalité de droits. Et de cet acte d
332
issements utiles. Ils nous confirment dans l’idée
qu’
on ne peut pas atteindre une fin fédérative par des moyens impérialist
333
moyens impérialistes. Ceux-ci ne peuvent conduire
qu’
à l’unification forcée, caricature de l’union véritable. Deuxième pri
334
Deuxième principe. Le fédéralisme ne peut naître
que
du renoncement à tout esprit de système idéologique ou technocratique
335
prit de système idéologique ou technocratique. Ce
que
je viens de dire au sujet de l’impérialisme ou de l’hégémonie d’une n
336
n de toute vie organique. Rappelons-nous toujours
que
fédérer, ce n’est pas mettre en ordre d’après un plan géométrique à p
337
, composer ces réalités concrètes et hétéroclites
que
sont les nations, les régions économiques, les unités culturelles, re
338
les arranger selon leurs caractères particuliers,
qu’
il s’agit à la fois de respecter, et d’articuler dans un tout. Troisi
339
nnaît pas de problème des minorités. On objectera
que
le totalitarisme, lui aussi, supprime ce problème : mais c’est en sup
340
ire voit une injustice ou une erreur dans le fait
qu’
une minorité ait les mêmes droits qu’une majorité. C’est qu’à ses yeux
341
dans le fait qu’une minorité ait les mêmes droits
qu’
une majorité. C’est qu’à ses yeux la minorité ne représente qu’un chif
342
orité ait les mêmes droits qu’une majorité. C’est
qu’
à ses yeux la minorité ne représente qu’un chiffre, et le plus petit.
343
té. C’est qu’à ses yeux la minorité ne représente
qu’
un chiffre, et le plus petit. Pour le fédéraliste, il va de soi qu’une
344
le plus petit. Pour le fédéraliste, il va de soi
qu’
une minorité puisse compter pour autant, voire pour plus qu’une majori
345
orité puisse compter pour autant, voire pour plus
qu’
une majorité dans certains cas, parce qu’à ses yeux elle représente un
346
délèguent le même nombre de représentants quelle
que
soit leur population. Mais le jeu des minorités raciales et religieus
347
de contrastes réels entre les tons, il n’y aurait
que
la simple juxtaposition de tubes de couleurs pures, bien mis en ordre
348
rouge se manifeste et chante sa chanson, il faut
que
ce rouge soit contrasté et composé avec des verts, par exemple, dans
349
evoir dans un rôle analogue, elles comprendraient
que
leur harmonie est une nécessité vitale, et non pas une concession qu’
350
t une nécessité vitale, et non pas une concession
qu’
on leur demande, ou une diminution de leur valeur propre. Elles compre
351
de leur valeur propre. Elles comprendraient aussi
que
dans une fédération elles n’auraient pas à se mélanger, mais au contr
352
le poumon n’a pas à « tolérer » le cœur. Tout ce
qu’
on lui demande, c’est d’être un vrai poumon, d’être aussi poumon que p
353
c’est d’être un vrai poumon, d’être aussi poumon
que
possible, et, dans cette mesure même, il aidera le cœur à être un bon
354
venue dès 1880, dans une lettre prophétique, ceux
qu’
il appelait les « terribles simplificateurs ». Lorsque les étrangers s
355
s, de cette espèce de mouvement d’horlogerie fine
que
composent nos rouages communaux, cantonaux, fédéraux, si diversement
356
diversement engrenés, il convient de leur montrer
que
cette complexité — cause de tant de lenteurs et d’excessives prudence
357
ondition même de nos libertés. C’est grâce à elle
que
nos fonctionnaires sont rappelés au concret, et que nos législateurs
358
e nos fonctionnaires sont rappelés au concret, et
que
nos législateurs sont obligés de garder un contact attentif avec les
359
oupent de cent manières différentes. Il est clair
que
des lois ou des institutions conçues dans un esprit unitaire, jacobin
360
siste, ou simplement tout ce qui dépasse. Mais ce
qu’
on écrase ainsi, c’est la vitalité d’un peuple. Une politique fédérali
361
iosité technique, et de compréhension des peuples
qu’
elle administre. Elle exige beaucoup plus de vrai sens politique. Fina
362
e. Finalement, si l’on y réfléchit, on s’aperçoit
que
la politique fédéraliste n’est rien d’autre que la politique par exce
363
t que la politique fédéraliste n’est rien d’autre
que
la politique par excellence, c’est-à-dire l’art d’organiser la cité a
364
és humaines est beaucoup plus près de s’organiser
qu’
il ne le semble. Elle est déjà beaucoup plus unie, en réalité, qu’elle
365
le. Elle est déjà beaucoup plus unie, en réalité,
qu’
elle ne le croit. C’est sur le plan de l’action gouvernementale que le
366
it. C’est sur le plan de l’action gouvernementale
que
les oppositions et les rivalités éclatent, et là seulement elles semb
367
ent irréductibles. Il paraît difficile d’espérer
que
les gouvernements puissent jamais réaliser une union viable. Leurs di
368
iés pour arbitrer le jeu des nations. Chacun sait
qu’
il serait déraisonnable de choisir comme arbitres d’un match les capit
369
s des équipes en présence. C’est pourtant bien ce
qu’
avait tenté de faire la SDN, qui en est morte, et ce qu’a tenté à nouv
370
it tenté de faire la SDN, qui en est morte, et ce
qu’
a tenté à nouveau l’ONU, que cela empêche de vivre. La fédération euro
371
i en est morte, et ce qu’a tenté à nouveau l’ONU,
que
cela empêche de vivre. La fédération européenne ne saurait être l’œuv
372
l’Est et nous minant à l’intérieur par les partis
qu’
ils commandaient chez nous, n’ont réussi à provoquer la fédération de
373
concurrence nationaliste : elles n’ont contribué
qu’
à notre division, et presque à notre ruine à deux reprises. En revanch
374
s vingt-deux cantons suisses en 1848, ont compris
qu’
isolés ils tombaient, mais qu’unis ils pouvaient à la fois sauver leur
375
n 1848, ont compris qu’isolés ils tombaient, mais
qu’
unis ils pouvaient à la fois sauver leurs libertés locales et agir com
376
à définir en quelques mots, en une formule. C’est
qu’
elle est d’un type organique plutôt que rationnel, et dialectique plut
377
ule. C’est qu’elle est d’un type organique plutôt
que
rationnel, et dialectique plutôt que seulement logique. Elle échappe
378
nique plutôt que rationnel, et dialectique plutôt
que
seulement logique. Elle échappe aux catégories statiques et géométriq
379
rojette pas devant elle une utopie bien cohérente
qu’
il s’agirait d’imposer, ou des plans statiques qu’il faudrait réaliser
380
qu’il s’agirait d’imposer, ou des plans statiques
qu’
il faudrait réaliser en quatre ou cinq ans, par la réduction impitoyab
381
e souple et constamment mouvant entre des groupes
qu’
il s’agit de composer en sauvegardant à la fois leur individualité et
382
tomber sans cesse dans un malentendu fondamental,
que
l’exemple de la vie politique suisse illustre très clairement. En eff
383
es uns et les autres ont tort, parce qu’ils n’ont
qu’
à moitié raison. Le véritable fédéralisme ne consiste ni dans la seule
384
nion, tandis que « tous pour un » signifie l’aide
que
l’union doit apporter à chaque région et à chaque personne. Il est i
385
et à chaque personne. Il est infiniment probable
que
, sur le plan européen, nous allons voir se dessiner deux tendances to
386
essiner deux tendances toutes semblables à celles
que
je viens de signaler pour la Suisse. Nous aurons des fédéralistes qui
387
se. Nous aurons des fédéralistes qui ne penseront
qu’
à faire l’union et à la renforcer, et nous aurons des fédéralistes pré
388
Et il faudra sans cesse rappeler aux deux partis
que
le fédéralisme véritable n’est ni dans l’une ni dans l’autre de ces t
389
particuliers. Car cela ne conduirait en pratique
qu’
à une union trop faible mais bientôt accusée d’oppression par ses memb
390
s, et celui de l’éducation. Il est facile de voir
que
chacun des membres d’une fédération bénéficiera d’une organisation un
391
gionales. D’autre part il n’est pas moins évident
que
l’ensemble fédéral européen bénéficiera de la vitalité culturelle de
392
ons sociales et des psychologies dont chacun sait
que
la variété même conditionne la puissance créatrice de l’Europe. Il co
393
financement fédéral.) Ceci posé, il va sans dire
que
dans certains domaines publics, il apparaîtra normal ou nécessaire so
394
fur et à mesure de leur évolution, d’une part ce
qu’
il devient avantageux pour chacun de confier au pouvoir fédéral ; d’au
395
de confier au pouvoir fédéral ; d’autre part, ce
qu’
il reste indispensable de laisser à la libre initiative des États ou r
396
des groupes et des individus. Étant bien entendu
que
les frontières entre le secteur centralisé et le secteur libre doiven
397
des phénomènes d’ampleur publique, il est normal
qu’
un pouvoir central prenne la charge de les organiser, rationaliser et
398
e devant l’essor technique, ont popularisé l’idée
que
la machine était en passe d’asservir l’homme. Étrange démission de l’
399
devant ses propres inventions ! Car il est clair
que
la machine a été inventée par les Européens pour les libérer du trava
400
qui en est le vrai responsable. Le mécanisme quel
qu’
il soit — de la machine-outil à l’État, du plan de travail d’un écriva
401
lois — n’est en fin de compte, comme à l’origine,
qu’
un auxiliaire de la vie créatrice, un moyen ordonné à sa fin. De même
402
e ses « fatalités » natives… N’est-ce point là ce
que
l’homme européen, depuis des siècles, appelle sa liberté ? Subordonne
403
este du monde n’existait pas : j’ai dit plus haut
que
ce sont, à la racine, les maladies de la personne elle-même. Car la p
404
a pesanteur naturelle, aux routines, aux machines
qu’
elle s’est construites mais qu’elle accuse ensuite de l’asservir, cett
405
ines, aux machines qu’elle s’est construites mais
qu’
elle accuse ensuite de l’asservir, cette mauvaise foi trahissant à vra
406
i ; soit de s’imaginer, comme la colombe de Kant,
qu’
elle volerait beaucoup mieux dans le vide. Bureaucratie, technocratie,
407
s, ces objets, et les doue des pouvoirs de sujets
qu’
elle abdique… ⁂ IV. Passage des buts aux moyens Quels sont alors
408
des buts aux moyens Quels sont alors les buts
que
l’homme européen peut et doit projeter au plan de la politique et de
409
nner une Voix à l’ensemble historique et culturel
qu’
est l’Europe. Tout le problème est d’ordonner, subordonner, articuler
410
agit donc : — d’une part, à l’intérieur, d’éviter
que
les indépendances personnelles et locales soient dissoutes dans un ré
411
d’autre part, vis-à-vis de l’extérieur, d’éviter
que
soit reportée aux frontières de l’union la somme des tendances autarc
412
x experts), mais je la tiens pour moins difficile
que
celles qu’on demande, par exemple, aux constructeurs d’une fusée bali
413
mais je la tiens pour moins difficile que celles
qu’
on demande, par exemple, aux constructeurs d’une fusée balistique ou d
414
ront capables de satisfaire aux doubles exigences
que
l’on vient d’énoncer : Autonomie et Union, Buts et Moyens, philosophi
415
éthode personnaliste, c’est d’une vision des Buts
qu’
il faut partir : car elle seule permettra d’éclairer les chemins qui p
416
Acte constituant la fédération européenne déclare
que
l’union de ses peuples a pour fins, d’une part, d’assurer les liberté
417
y veille, leur commune les protège.) Moins grande
que
les États-Unis, la Russie soviétique ou la Chine, l’Europe est tellem
418
e ou la Chine, l’Europe est tellement plus variée
qu’
elle est en fait, si on la traverse, infiniment plus riche en expérien
419
re les « deux grands » : elle est plus « grande »
que
chacun d’eux, et presque autant que les deux additionnés. Mais cette
420
us « grande » que chacun d’eux, et presque autant
que
les deux additionnés. Mais cette grande liberté cosmopolite n’est pas
421
on d’une partie limitée, d’en jouir et même mieux
qu’
avant. Car chaque citoyen de l’Europe relève d’un pays d’origine, d’un
422
devenir citoyen de l’Europe, il faut et il suffit
que
l’on devienne d’abord citoyen de l’un des pays membres, voire d’une d
423
éligible après un certain délai, qui varie selon
qu’
il s’agit d’emplois publics municipaux, régionaux, ou nationaux. Le dr
424
Le droit fondamental à une patrie locale entraîne
que
les communautés constituées, régions associées ou États, sont respons
425
1948 au Congrès de l’Europe à La Haye6). Le fait
que
leur fédération ait désormais, en tant que telle, une politique étran
426
telle, une politique étrangère commune, signifie
que
les citoyens d’un de nos petits États ne sont plus à la merci de la p
427
er leur destin, sur ce plan aussi. (Et l’on verra
que
ce droit joue en faveur de la paix.) La vocation culturelle, sociale,
428
La fédération européenne a solennellement déclaré
qu’
elle renonçait à la guerre comme moyen politique. Pour sa police inter
429
de l’homme européen. Il en résulte immédiatement
que
l’organisation politique de l’Europe ne saurait être l’État-nation un
430
e trouve être, de la sorte, au moins aussi réelle
que
dans l’ancien régime, quoiqu’expressément limitée. Mais ces États sou
431
fédération vers 1980. Elle ne saurait s’expliquer
qu’
en fonction des problèmes qui se posaient au départ de la construction
432
t retour en arrière, examinons la situation telle
qu’
elle se présentait aux environs de 1963, lorsqu’on se mit à envisager
433
litique, et à supputer les conséquences probables
qu’
entraînerait une fédération. Parenthèse 1963 a) Rapports ent
434
lui de la souveraineté : faut-il exiger des États
qu’
ils y renoncent ? Si c’est une condition sine qua non, y a-t-il une ch
435
tion sine qua non, y a-t-il une chance quelconque
qu’
on l’obtienne jamais, donc qu’on arrive jamais à une fédération ? Ains
436
e chance quelconque qu’on l’obtienne jamais, donc
qu’
on arrive jamais à une fédération ? Ainsi posé, le problème est insolu
437
ais dont personne ne semble tenir compte, exigent
que
les États renoncent expressément à cette souveraineté théorique. Or,
438
responsables, et il est tout à fait inconcevable
qu’
ils puissent agir sous le coup d’un enthousiasme collectif. « L’État e
439
espoir d’une construction européenne sur un geste
qu’
aucun grand État n’est en mesure de faire, il est sans doute dangereux
440
s souverainetés en grande partie inexistantes, et
qu’
on ne pourrait que renforcer temporairement en les obligeant à se défe
441
grande partie inexistantes, et qu’on ne pourrait
que
renforcer temporairement en les obligeant à se défendre au nom sacré
442
it d’habile compromis, soit d’échappatoire, selon
qu’
on a le tempérament pragmatique ou doctrinaire. Un fait demeure : il n
443
e : il n’est pas de constitution plus fédéraliste
que
celle de la Suisse, et pourtant elle garantit la souveraineté de ses
444
l’est certes en partie ; pas davantage toutefois
que
celle de nos États contemporains. Au surplus, dans la mesure où elle
445
ns ou de prendre parti dans leurs querelles. Mais
qu’
en est-il de ces voisins et de leur souveraineté illimitée ? L’affaire
446
ent tenté de faire valoir les droits fondamentaux
que
la doctrine classique attribue aux « souverains » : celui de déclarer
447
deux autres puissances de cesser les hostilités,
qu’
ils venaient d’engager contre l’Égypte. Ils ont immédiatement obtempér
448
ucun n’est autonome et ne pourra plus l’être tant
que
l’Europe entière ne le sera pas. Leur souveraineté relative, pour aut
449
aineté atomique. Cette situation aussi dangereuse
qu’
humiliante indique clairement ce qu’il nous reste à faire : — une Cons
450
si dangereuse qu’humiliante indique clairement ce
qu’
il nous reste à faire : — une Constitution fédérale, afin que l’Europe
451
ou s’en inquiètent, aux environs de 1963 : c’est
qu’
il est plus nouveau que celui des souverainetés, et qu’il est même san
452
x environs de 1963 : c’est qu’il est plus nouveau
que
celui des souverainetés, et qu’il est même sans précédent dans l’ère
453
est plus nouveau que celui des souverainetés, et
qu’
il est même sans précédent dans l’ère moderne. Voici comment on peut l
454
. Voici comment on peut l’imaginer. En admettant
que
l’union fédérale étende à l’ensemble du continent et aux îles britann
455
er en autant de régions nouvelles (ou réanimées),
qu’
il y aura de « métropoles » prouvant leur droit à une autonomie de fai
456
ant leur droit à une autonomie de fait. C’est ici
que
l’exemple de la Suisse cesse de nous servir de modèle, du moins trans
457
que d’effacer leurs diversités, tant provinciales
que
régionales ; dont certaines au surplus, coupées de gré ou de force pa
458
l : ces derniers devant faire preuve, plus encore
que
les autres, d’imagination créatrice. Une jurisprudence fédérale des r
459
s haut, et s’en déduisent sans autres difficultés
que
celles qui naissent d’une volonté fédéraliste de respecter autant que
460
ent d’une volonté fédéraliste de respecter autant
que
possible les situations spéciales et locales. Les compétences du pouv
461
pouvoir fédéral, qui ne peuvent entrer en action
qu’
en cas d’attaque contre la fédération ou l’un de ses membres, ou en ca
462
rels et spirituels plus restreints ou plus vastes
que
la communauté politique (État ou région) où il est né ; et enfin le l
463
versités ne saurait être impérialiste. (Rappelons
que
les anciens empires coloniaux avaient été créés par les États nationa
464
es États nationalistes en compétition brutale, et
que
leur liquidation a seule permis le rapprochement des peuples de l’Eur
465
a fédération européenne a solennellement proclamé
qu’
elle renonçait à la guerre comme moyen d’imposer sa politique commune.
466
utre, la question se ramène à celle des alliances
qu’
elle peut être amenée à conclure avec d’autres États ou fédérations. S
467
e ; mais elle peut être entraînée dans une guerre
qu’
un tiers parti ferait à l’allié, comme s’il la faisait à l’un de ses m
468
la méthode dichotomique définie plus haut. Outre
que
la fédération assure les libertés d’établissement, de travail, de com
469
en matière d’éducation et de culture, notamment,
que
les États conservent les plus larges compétences. La principale modif
470
stice. Les lois fédérales ne peuvent être rendues
qu’
avec l’accord des deux chambres. En cas de différend irréductible, un
471
possibilités de développement aussi différenciées
que
celles qui existent en Europe, ne saurait être gouverné que par un Co
472
qui existent en Europe, ne saurait être gouverné
que
par un Collège où s’équilibrent les diversités en évolution permanent
473
orités fédérales Les mêmes raisons qui veulent
que
la fédération soit gouvernée par un Collège, et non par un seul homme
474
par un Collège, et non par un seul homme, veulent
que
son centre ne soit pas une capitale, mais un District fédéral. La féd
475
ècles d’histoire commune et toutes les diversités
que
l’on sait, le District fédéral ne saurait être, lui non plus, une cré
476
d’accès facile en temps de paix ; il ne peut être
qu’
un petit pays, cependant très diversifié et si possible de tradition f
477
à celles en vigueur à Washington, D.C. : on sait
que
les citoyens du district fédéral américain n’avaient pas le droit de
478
el de neutralité, dont nous avons vu par ailleurs
qu’
il a perdu ses anciennes justifications. VI. Chances de réalisati
479
n comble au xxe siècle ; ce qui incline à penser
que
les réussites suisse et nord-américaine ont une valeur probante pour
480
ition calvinienne, ne peuvent, en bonne doctrine,
que
se montrer favorables aux solutions fédéralistes. Celles-ci sont d’ai
481
ns un régime fédéraliste la garantie à des droits
qu’
ils ont longtemps revendiqués contre les cléricalismes unitaires, voir
482
encore plus puissantes et beaucoup plus maniables
que
la bombe H, mais aussi à des procédés de manipulation du psychisme co
483
éfense de la personne, on peut tenir pour certain
qu’
elle jouera, elle aussi — si peu que ce soit — en faveur d’un régime f
484
lèmes deviennent chaque année plus concrets, soit
qu’
ils se posent en termes d’intérêts, soit qu’ils réveillent des passion
485
soit qu’ils se posent en termes d’intérêts, soit
qu’
ils réveillent des passions partisanes ou nationales. « Fédérer les Eu
486
tend à prendre un sens précis et spécifique, tel
que
nous l’avons défini plus haut. Cet ensemble de facteurs positifs, nég
487
ivalents, ménage des possibilités plus favorables
que
jamais à une action fédéraliste. Mais il faut, pour les réaliser, un
488
lément catalyseur : une vision non utopique de ce
que
peut être l’Europe fédérée. ⁂ VII. La vraie « relance » de l’Europ
489
te esquisse d’une union fédérale, nous n’avons eu
qu’
à nous laisser guider par deux séries de déductions inévitables, et qu
490
faste pour les traditions valables du tiers-monde
que
ne fut jamais notre colonialisme ; nécessité, à cet égard, d’une poli
491
é urgente d’un troisième partenaire, moins neutre
que
central, entre les deux partis extrêmes de l’Occident, armés de la Bo
492
Si l’Europe n’est pas encore faite, ce n’est pas
que
ces obstacles soient bien forts — ils n’ont guère plus de consistance
493
bien forts — ils n’ont guère plus de consistance
que
les ténèbres — mais c’est que les partisans officiels de l’union para
494
plus de consistance que les ténèbres — mais c’est
que
les partisans officiels de l’union paraissent encore bien peu hardis.
495
u hardis. Ils donnent l’impression de mal voir ce
qu’
ils disent qu’il faudrait vouloir. Ils hésitent, ils discutent, ils pi
496
donnent l’impression de mal voir ce qu’ils disent
qu’
il faudrait vouloir. Ils hésitent, ils discutent, ils piétinent dans l
497
eux qui demandent : « Quelle Europe voulez-vous ?
Qu’
on nous la montre ! » Ces discussions préliminaires sont vaines. On ne
498
le But est la seconde tâche, indispensable, mais
que
la claire vision du But rend seule possible. On ne trace pas un chemi
499
nd seule possible. On ne trace pas un chemin tant
qu’
on ne sait pas au juste où l’on a décidé d’aller : on se contente de c
500
odalités et le coût de l’opération. Ils concluent
que
rien n’est possible dans l’état actuel des choses. Et leur déni tradu
501
moyens, mais personne ne saurait vouloir une fin
qu’
il distingue mal. Et c’est pourquoi, dans le domaine qui nous occupe,
502
trop d’importance. Mon regard trop souvent n’a vu
que
ce qu’il cherchait, ce qui était dans mon esprit et non dans la réali
503
importance. Mon regard trop souvent n’a vu que ce
qu’
il cherchait, ce qui était dans mon esprit et non dans la réalité. Cet
504
s la réalité. Cet essai n’a donc d’autre ambition
que
d’appeler des mises au point optiques. Il y faut le travail d’une équ
505
al du siècle, du nôtre. Sans la crise du mariage,
que
seraient toutes nos littératures ? Elle ne fait pas simplement la for
506
ations comiques ou cyniques. Et tout cela ne fait
que
trahir le tourment innombrable et obsédant de l’amour hors-la-loi. La
507
a quand même doublé depuis cinquante ans ? C’est
que
cette crise a des causes nombreuses et complexes. Les unes sont liées
508
les connaissances ont créé de nouvelles exigences
que
nos grands-parents n’avaient pas. La recherche du bonheur individuel
509
il y a une cause essentielle et séculaire : c’est
que
tous les adolescents sont élevés dans l’idée du mariage (normal, souh
510
e romantique, la passion étant l’épreuve suprême,
que
tout homme doit un jour connaître, et qu’il appelle secrètement. Pour
511
uprême, que tout homme doit un jour connaître, et
qu’
il appelle secrètement. Pourquoi mariage et passion sont-ils incompati
512
que, la proximité quotidienne, l’accoutumance, et
que
la passion, elle, veut des obstacles qui rendent l’amour plus intense
513
ère. Cet amour-passion est sans doute aussi vieux
que
le monde, au moins aussi vieux que le mariage ? Absolument pas ! L’am
514
te aussi vieux que le monde, au moins aussi vieux
que
le mariage ? Absolument pas ! L’amour-passion, cette conception de l’
515
e conception de l’amour qui nous est si familière
que
nous nous figurons qu’elle a toujours existé a, en fait, une date et
516
qui nous est si familière que nous nous figurons
qu’
elle a toujours existé a, en fait, une date et des origines bien préci
517
: c’était deux domaines, ou deux lopins de terre
qu’
on mettait ensemble. C’est au xiie siècle qu’est né l’amour moderne :
518
rre qu’on mettait ensemble. C’est au xiie siècle
qu’
est né l’amour moderne : c’est la « cortezia », l’amour courtois chant
519
t leurs poèmes (cause ou conséquence ?) considère
que
l’âme, partie de l’homme créée par Dieu, est emprisonnée dans le corp
520
pays orientaux, pourquoi n’a-t-elle fait fortune
qu’
en Occident ? C’est que la passion ne s’approfondit et ne dégage ses é
521
oi n’a-t-elle fait fortune qu’en Occident ? C’est
que
la passion ne s’approfondit et ne dégage ses énergies qu’à la mesure
522
assion ne s’approfondit et ne dégage ses énergies
qu’
à la mesure des résistances qu’elle rencontre. Et c’est l’Europe catho
523
égage ses énergies qu’à la mesure des résistances
qu’
elle rencontre. Et c’est l’Europe catholique et nordique qui devait of
524
nel de l’amour-passion qui se nourrit d’obstacles
qu’
on lui oppose, qui les invente au besoin : Tristan aurait pu garder Is
525
: Tristan aurait pu garder Iseut aux cheveux d’or
qu’
il est allé conquérir pour son roi : les mœurs du temps sanctionnaient
526
arations sont aussi souvent inventées par Tristan
qu’
imposées par l’extérieur. Ce roman de Tristan dont le succès prodigieu
527
mpossible, c’est le mythe européen de l’adultère.
Qu’
est-ce qu’un mythe ? Un mythe c’est une histoire simple et frappante r
528
c’est le mythe européen de l’adultère. Qu’est-ce
qu’
un mythe ? Un mythe c’est une histoire simple et frappante résumant un
529
elles sont devenues d’autant plus contraignantes
qu’
elles n’ont plus de pouvoir que sur nos rêves. Quel rapport a donc au
530
lus contraignantes qu’elles n’ont plus de pouvoir
que
sur nos rêves. Quel rapport a donc au juste le roman de Tristan et la
531
e roman de Tristan et la crise du mariage ? C’est
que
finalement notre crise du mariage n’est rien de moins que le conflit
532
lement notre crise du mariage n’est rien de moins
que
le conflit de ce mythe et de la morale chrétienne, donc de deux tradi
533
traditions religieuses, c’est-à-dire une décision
que
nous prenons presque toujours inconsciemment, en faveur d’une morale
534
inconsciemment, en faveur d’une morale survivante
que
nous ne savons plus justifier : la morale chrétienne, l’orthodoxie, q
535
ef, le mythe dégradé, profané, ne se traduit plus
que
par l’envahissement du roman d’amour, du film sentimental et de la pi
536
chaque jour, c’est donc sur les débris d’un mythe
qu’
est édifié notre moderne mariage d’amour ? Exactement. Or, si l’amour
537
ble pas à la star. Ne peut-on quand même supposer
que
l’homme parvienne à se fixer sur un type, rencontre un jour son Iseut
538
onnaît son Iseut. Elle est mariée, naturellement.
Qu’
elle divorce, il l’épouse ! Avec elle, ce sera la vraie vie, l’épanoui
539
sera la vraie vie, l’épanouissement de ce Tristan
qu’
il porte en soi. Mais aussitôt paraît une anxiété dans l’entourage : l
540
alors un peu simple — mais on en vient à désirer
que
l’être aimé soit infidèle pour qu’on puisse de nouveau le poursuivre
541
ournois du mari qui ne peut plus désirer sa femme
qu’
en l’imaginant sa maîtresse (ou dans les bras d’un autre). Cet amour-p
542
ge. Ne pas essayer de le fonder sur une obsession
qu’
on subit mais sur une décision qu’on assume. Être amoureux est un état
543
r une obsession qu’on subit mais sur une décision
qu’
on assume. Être amoureux est un état, aimer, un acte. On subit un état
544
ui ? Non, il existe certaines chances de réussite
qu’
il serait stupide de ne pas mettre de son côté : buts communs, rythmes
545
l’essence du mariage d’enseigner aux jeunes gens
que
leur choix — même garanti d’apparences très raisonnables, relève touj
546
sentera pour beaucoup une contrainte exorbitante.
Que
peut-on en attendre ? Son but n’est pas le bonheur, c’est la volonté
547
, le couple devant être considéré comme une œuvre
qu’
on construit à deux et dont on tâche de faire une œuvre d’art. Cette f
548
lliée pour toute la vie, qui veut mon bien autant
que
le sien parce confondu avec le sien. Cette fidélité résistera-t-elle
549
é, la grande menace du mariage, c’est la passion.
Que
le mythe de Tristan, origine de tous nos malheurs, soit définitivemen
550
du mariage se dénouera d’elle-même ? Il est vrai
que
la passion est l’ennemie jurée du mariage mais c’est elle aussi qui l
551
primer l’un des pôles de notre tension créatrice.
Que
la passion disparaisse (et le mariage lui oppose maintenant si peu d’
552
e maintenant si peu d’obstacles et de contraintes
qu’
elle semble condamnée faute d’adversaire à sa taille) et nous irons to
553
d’hui — les Derniers Mohicans de l’amour. À moins
que
cet ennui ne recrée alors la soif de quelque chose qui soit au-delà d
554
f de quelque chose qui soit au-delà de l’ordre et
qu’
il n’appelle alors un autre xiie siècle de l’amour… qui sera peut-êtr
555
1963)i À la suite de la remarquable conférence
qu’
il a faite jeudi soir au Club 44, M. Denis de Rougemont a bien voulu n
556
e but est de grouper les centres existants, ainsi
que
ceux à créer par la suite, en une fédération ayant pour siège Genève.
557
stion est là. Pour l’instant, il faut reconnaître
que
l’automation pose de grands problèmes, dans le domaine social, notamm
558
domaine social, notamment. Mais nous n’en sommes
qu’
au premier pas, hésitant. Mon attitude est franchement positive, optim
559
. Lorsque plus tard les nations s’absolutisent et
que
leurs guerres font rage sur tout le continent, des voix suisses vont
560
ont s’élever au nom de ce principe, pour rappeler
que
la paix, la prospérité et les libertés de l’Europe ne seront rétablie
561
é et les libertés de l’Europe ne seront rétablies
que
par cette union-là. C’est comme « citoyen de Genève » que Rousseau si
562
cette union-là. C’est comme « citoyen de Genève »
que
Rousseau signe ses fameux exposés critiques (l’Extrait de 1761 et le
563
nde, et de la « Ligue helvétique ». L’Europe unie
qu’
il appelle de ses vœux ne serait nullement unifiée par un despote ou p
564
les citoyens se connaissent mutuellement », mais
qu’
unissent les liens d’une « commune législation… et subordination au co
565
que ». C’est une Europe intégralement fédéraliste
qu’
il préconise, et son module (élément type) se révèle, en dernière anal
566
révèle, en dernière analyse, n’être rien d’autre
que
la cité de Genève ! Un peu plus tard, le Schaffhousois Jean de Müller
567
ire du genre humain (1797) annonce comme Rousseau
que
« tous les États de l’Europe courent à leur ruine » faute d’un princi
568
nt à leur ruine » faute d’un principe d’union, et
que
si leurs divisions persistent, l’avenir appartiendra « soit à la Russ
569
Cent-Jours, le projet de fédération européenne13
que
va signer Napoléon, — hélas trop tard. Et son fédéralisme européen pr
570
ne, de l’union dans la diversité. C’est en Suisse
que
Mazzini publie en 1836 le manifeste et les journaux de la « Jeune Eur
571
ifeste et les journaux de la « Jeune Europe », et
que
le général Garibaldi préside un Congrès de la paix par l’unité europé
572
Du Principe fédératif ; mais il est bien certain
qu’
un de ses contemporains, J. C. Bluntschli, célèbre professeur à Heidel
573
le, c’est encore en Suisse, dans les années 1930,
que
le premier mouvement de militants fédéralistes européens voit le jour
574
. En effet, c’est au cours du congrès de Montreux
que
germe l’idée de réunir des états généraux de l’Europe sous la préside
575
européenne, discussion généralisée sur les formes
que
devra prendre l’union politique de l’Europe… Impossible d’omettre, da
576
ue, les aspects culturels du mouvement et le rôle
qu’
y joue notre pays. Le congrès de La Haye ayant préconisé la création d
577
anthologie de l’idée européenne. C’est en Suisse
que
le fondateur du mouvement paneuropéen, le comte Coudenhove-Kalergi, é
578
gi, établit son quartier général. C’est en Suisse
que
Churchill choisit de parler de l’Europe, et que la même année 1946, l
579
e que Churchill choisit de parler de l’Europe, et
que
la même année 1946, les premières Rencontres internationales de Genèv
580
quelques Suisses entreprenants qui l’ont permis.
Qu’
a fait, pendant ce même temps, la Suisse légale ? Et que pensaient les
581
ait, pendant ce même temps, la Suisse légale ? Et
que
pensaient les Suisses moyens ? ⁂ Des lendemains de la Seconde Guerre
582
e jusqu’aux environs de 1960, il faut reconnaître
que
nos autorités et notre presse ont été dans l’ensemble pour le moins «
583
té dans l’ensemble pour le moins « réservées » et
que
notre peuple l’est peut-être plus encore, s’agissant de l’idée europé
584
cier », comme on appelait à l’époque la CECA : 1°
qu’
il n’était pas réalisable, 2° qu’il serait néfaste pour la Suisse, à c
585
que la CECA : 1° qu’il n’était pas réalisable, 2°
qu’
il serait néfaste pour la Suisse, à cause de ses incidences sur nos tr
586
vis dans l’obligation un peu gênante de rappeler
que
le premier passage à la frontière franco-allemande d’un train de char
587
« justifiée », — comme disaient mes instituteurs.
Qu’
en est-il de la seconde objection que je citais : « Si cela se fait, p
588
nstituteurs. Qu’en est-il de la seconde objection
que
je citais : « Si cela se fait, par impossible, ce sera néfaste pour l
589
ieur, et c’en serait fait du « rôle particulier »
qu’
elle se réserve d’invoquer plus souvent encore que d’autres nations, a
590
qu’elle se réserve d’invoquer plus souvent encore
que
d’autres nations, au nom de son action philanthropique par exemple (C
591
erre d’Algérie, etc.). Il n’est donc pas question
que
la Suisse prenne la moindre initiative visant à l’union européenne au
592
on européenne au plan politique. Elle ne pourrait
qu’
y perdre son prestige international. Arguments constitutionnels. — Si
593
les remplacer par un sentiment européen », ainsi
que
le déclarait le 3 mai 1962 M. Homberger, délégué du Vorort de l’Union
594
rce. ⁂ Résumons maintenant les arguments inverses
qu’
invoquent les partisans de l’entrée de la Suisse dans une Europe unie
595
’ailleurs la Suisse l’a fait maintes fois, depuis
qu’
au xvie siècle ses circonstances politiques intérieures l’ont contrai
596
issances militaires. La neutralité n’a jamais été
qu’
un moyen au service de notre indépendance ; « elle ne fait pas partie
597
us en plaindre. À quoi l’on pourrait ajouter : 1°
que
s’il est vrai que notre neutralité a permis les interventions de la C
598
quoi l’on pourrait ajouter : 1° que s’il est vrai
que
notre neutralité a permis les interventions de la Croix-Rouge lors de
599
tement les chances de leur retour à l’avenir ; 2°
que
la neutralité suisse, en s’absolutisant jusqu’à devenir tabou — traît
600
Histoire, en quelque sorte, elle n’est plus celle
que
les Puissances garantirent en 1815. Si elle en vient un jour à s’oppo
601
aux intérêts de l’Europe entière, on s’apercevra
qu’
elle a perdu ses bases contractuelles. Déclarer par exemple que la Sui
602
du ses bases contractuelles. Déclarer par exemple
que
la Suisse se devrait de rester neutre, même en cas de conflit entre l
603
absurde : car la Suisse fait partie de l’Europe,
qu’
elle le veuille ou non, et rester neutre entre l’Europe et ses ennemis
604
ul Guggenheim a démontré d’une manière magistrale
que
l’adhésion de la Suisse à une organisation européenne telle que la CE
605
de la Suisse à une organisation européenne telle
que
la CEE ne serait pas incompatible avec la Constitution actuelle. Si,
606
cte », mais uniquement par des motifs politiques,
qu’
elle reste libre d’avancer18. Et ceci nous renvoie au groupe d’argumen
607
nde (sans cesse invoqué par les abstentionnistes)
qu’
elle commerce le plus, mais avec les Six. Les chiffres globaux sont co
608
rtations, deux tiers vont à l’Europe. Il est vrai
que
notre balance commerciale reste déficitaire avec l’Europe (de 447 mil
609
1 millions) avec l’outre-mer. Mais il faut avouer
que
ces chiffres ne suffisent pas à justifier notre refus de participer a
610
E ! La Suisse est si peu indépendante de l’Europe
que
l’immigration de main-d’œuvre européenne nécessaire à l’expansion de
611
000 personnes en 1950 a plus de 800 000 en 1963.
Que
peuvent bien signifier, dans une telle conjoncture, les rêveries des
612
ner une autarcie plus impossible encore chez nous
qu’
ailleurs, n’en affirment pas moins que s’il le faut un jour, la Suisse
613
e chez nous qu’ailleurs, n’en affirment pas moins
que
s’il le faut un jour, la Suisse fara da se et saura bien se défendre
614
pons de fer aux pieds et une résolution farouche,
que
nous pourrons faire face à une Europe unie, — j’entends unie sans nou
615
nous. Arguments traditionalistes. — Il est clair
qu’
une Europe « une et indivisible » serait une catastrophe pour la Suiss
616
préconise, en réalité. Il est clair, en revanche,
qu’
une Europe fédérée, donc respectueuse de ses diversités comme nous des
617
yen de les perdre. Il n’est pas vrai, d’ailleurs,
que
l’union de l’Europe menace d’effacer nos « caractéristiques nationale
618
iques cantonales. Et il est pour le moins bizarre
qu’
un porte-parole des industriels suisses accuse la « politique d’unific
619
s peuples d’Europe ». Je rappelais tout à l’heure
qu’
il y a aujourd’hui plus de 800 000 travailleurs étrangers en Suisse :
620
t à fait étranger. Si M. Homberger croit vraiment
que
le mélange des peuples est un danger majeur pour son pays, il n’a pas
621
effet de la technique, laquelle n’a pas été créée
que
l’on sache par le mouvement d’union européenne. De nos jours encore,
622
es vivant de l’agriculture ne représentaient plus
qu’
un tiers de la population totale. En 1963, c’est 10,5 %. On peut le dé
623
n peut le déplorer, non le nier. On peut redouter
que
le contact vivant avec les traditions de l’ancienne Suisse, déjà rend
624
du siècle, quand la population aura doublé. Mais
que
la Suisse entre ou non dans le Marché commun n’y changera rien. (À mo
625
dans le Marché commun n’y changera rien. (À moins
que
notre isolement n’entraîne un retour à la misère naturelle du pays ?)
626
gnan, ou du xviiie siècle, ni même celle de 1848
qu’
il s’agit de sauver aujourd’hui, mais bien la Suisse réelle de la seco
627
ndance » dont notre peuple n’est pas disposé plus
qu’
un autre à payer le prix exorbitant. ⁂ Tels étant les termes du débat
628
prix exorbitant. ⁂ Tels étant les termes du débat
que
l’idée européenne suscite chez nous — et l’on sait dans quel camp j’a
629
p j’ai toujours milité — il faut bien reconnaître
que
des deux côtés, une sorte de gêne empêche d’aller en toute franchise
630
tolérance calculée et d’empirisme, qui supposent
qu’
on ne pousse pas sa pointe à fond et qu’on ne se laisse pas entraîner
631
supposent qu’on ne pousse pas sa pointe à fond et
qu’
on ne se laisse pas entraîner par une verve logique ou polémique qui r
632
réclament très haut de nos traditions savent bien
que
chacun sait qu’il s’agit d’intérêts ; et quant aux enthousiastes de l
633
aut de nos traditions savent bien que chacun sait
qu’
il s’agit d’intérêts ; et quant aux enthousiastes de l’Europe, ils sav
634
t quant aux enthousiastes de l’Europe, ils savent
qu’
ils n’ont aucune espèce de chances d’être écoutés s’ils proposent de r
635
x (beaucoup plus rares d’ailleurs) qui voudraient
que
la Suisse renonce sans condition à toute idée de neutralité. Mon idéa
636
utralité. Mon idéal très clair — mon utopie — est
que
la Suisse adhère un jour à une union européenne de type expressément
637
ité d’une fédération. Mais il n’y a aucune chance
qu’
on nous offre cela, si nous fédéralistes ne l’exigeons pas. Tout le dé
638
dans ce domaine de la majorité. Certes, je crois
qu’
une Europe fédérée sauverait seule à long terme nos chères diversités
639
hères diversités et nos intérêts bien compris, et
qu’
il est dangereusement irréaliste de raisonner comme s’il était possibl
640
raison d’être. Il s’agit de savoir et de dire ce
que
nous avons à donner, et non pas seulement à sauver ; ce que l’Europe
641
vons à donner, et non pas seulement à sauver ; ce
que
l’Europe est en droit d’attendre d’une Suisse qui fait partie de sa c
642
é et qui en est bénéficiaire, et pas seulement ce
que
nous attendons et surtout redoutons de l’action des autres. Situés au
643
tinent européen, nous avons réussi beaucoup mieux
que
cette fameuse neutralité, — nécessité subie, à l’origine et dont nous
644
ries à l’union, ou sacrifier l’union aux égoïsmes
qu’
on déguise en patriotismes, la Suisse peut et doit opposer la solution
645
l connu hors de Suisse ; notre neutralité n’y est
que
trop connue. Pourquoi parler toujours de cette neutralité, vertu qui
646
n par ceux qui créent des positions nouvelles. Ce
que
l’Europe et le monde attendent de nous, ce n’est pas l’exposé lassant
647
t des raisons de notre « réserve » devant tout ce
que
d’autres proposent, mais c’est un plan d’union qui nous convienne et
648
istoire aura le dernier mot. Mais encore faut-il
qu’
elle le dise ! 13. Il s’agit de l’Acte additionnel aux Constitutions
649
se discuter. Je rappelais au début de cet article
que
c’est pour une mission spéciale, la garde du Gothard dans les intérêt
650
du Gothard dans les intérêts de l’Empire entier,
que
les Waldstätten ont reçu leurs franchises de l’empereur. N’y avait-il
651
lturels bien distincts ! Et chacun veut rester ce
qu’
il est, mais ils n’en vivent pas moins en harmonie, égaux en droit dan
652
ls écrivent et publient, il y aura peu de chances
qu’
ils se lisent mutuellement. L’un voudra se faire connaître à Zurich, p
653
ute jamais et n’entendront parler l’un de l’autre
qu’
à l’occasion de leurs éventuels succès… à l’étranger ! D’autre part, l
654
expression de la pensée s’il s’agit d’autre chose
que
des grands lieux communs mainteneurs d’une communauté, font la force
655
ité, la Suisse se verrait condamnée à ne produire
que
des œuvres moyennes ou d’intérêt purement local et folklorique si cha
656
r de plein droit à des ensembles bien plus vastes
que
la Suisse : culture germanique ou culture latine, tradition réformée
657
as de relais national pour leur culture. C’est ce
qu’
a très bien vu Lucien Febvre, excellent historien français contemporai
658
rl Barth. Son canton — ou l’Europe. » C’est ainsi
que
les Suisses ont donné à l’Europe plusieurs des plus grands noms du xx
659
l’art comme Wölfflin. Sans oublier le grand clown
que
fut Grock. Ce palmarès plus qu’honorable ne suffit pas à définir un s
660
er le grand clown que fut Grock. Ce palmarès plus
qu’
honorable ne suffit pas à définir un style ni une école particulière,
661
’une densité probablement très supérieure à celle
qu’
on pourrait mesurer dans n’importe quelle tranche de cinq à six millio
662
la Russie puis de l’URSS de 0,03 ? Il semble donc
que
les petits pays bénéficient de grands avantages culturels, et la Suis
663
grandes compétitions de cette fin du xxe siècle
que
dans la mesure où elles sauront grouper leurs authentiques forces loc
664
ait entièrement le cœur, je trouvais à l’armée ce
que
d’autres vont demander à une retraite conventuelle. Cette circonstanc
665
des incidents de la vie militaire, qui n’étaient
que
routine aux yeux de mes instructeurs, m’apparurent tout chargés d’un
666
mais accentuait, par contraste avec le ton bourru
qu’
on tient pour énergique dans les casernes, une indépendance d’esprit q
667
ence ou d’humeur subversive. Je l’admirais autant
que
je détestais l’ambiance de la place d’armes, où il était de mise de n
668
le de cours, il nous posa cette question simple :
Qu’
est-ce que l’énergie ? Et après nous avoir laissé patauger quelques mo
669
s, il nous posa cette question simple : Qu’est-ce
que
l’énergie ? Et après nous avoir laissé patauger quelques moments dans
670
c’est quelque chose qui dort en chacun de vous et
qu’
il s’agit de réveiller. » Puis il sortit. Ce n’était pas une définitio
671
inition, c’était plus grave : nous comprîmes tous
que
quelque chose se préparait. Et en effet, l’ordre du jour pour le lend
672
. Et en effet, l’ordre du jour pour le lendemain,
que
nous lûmes en sortant de cette classe écourtée, annonçait : 04.00 : d
673
kilomètres, une semaine plus tard. Et ce n’était
qu’
une préparation pour la « grande course » finale : 150 kilomètres par-
674
oujours suivi d’un grand chien blanc. On répétait
qu’
une troupe moderne se déplace en camion ou en train et que ces marches
675
roupe moderne se déplace en camion ou en train et
que
ces marches ne servaient à rien… Pour ma part, j’observais que le col
676
es ne servaient à rien… Pour ma part, j’observais
que
le colonel prenait grand soin de ne pas les justifier, malgré la sour
677
ne pas les justifier, malgré la sourde résistance
qu’
il devait bien sentir chez ses subordonnés. Quels pouvaient être ses m
678
’armée en général, et celle d’un pays neutre plus
qu’
une autre, comme l’instrument d’éducation de certaines énergies déprim
679
de sa philosophie, j’ai toutes raisons de croire
qu’
en imposant cette épreuve « inutile » à notre école, il poursuivait un
680
rni un effort qui dépassât de beaucoup le maximum
que
nous pensions pouvoir tirer de nous. Il était de la nature d’un tel p
681
er de nous. Il était de la nature d’un tel projet
que
ses motifs ne fussent point divulgués, mais en même temps qu’il nous
682
re de sa « Grande course » un mythe, avec tout ce
que
le mythe comporte d’effrayant et de contraignant. Nous étions préparé
683
s conditions nécessaires au succès, et aux leçons
que
devait illustrer l’entreprise. Au départ, à cinq heures du matin, dan
684
ur froide de la caserne de Fribourg, nous savions
que
la première étape serait de 25 kilomètres, et devait nous porter d’un
685
s de marche sur route nous laissaient aussi frais
qu’
une promenade. Et tout d’un coup je découvris ceci : Quand on part pou
686
e trente-trois heures, les cinq premières n’étant
qu’
une mise en train, ne fatiguent pas. L’organisme, tout simplement, ne
687
donner les moyens d’y répondre. Et je ne dis pas
que
l’entraînement que nous avions subi au préalable n’était pour rien da
688
d’y répondre. Et je ne dis pas que l’entraînement
que
nous avions subi au préalable n’était pour rien dans la facilité avec
689
ur, cet entraînement n’avait été reçu et surmonté
qu’
en vue de la grande course, du but lointain… Aujourd’hui, repassant ce
690
ie force d’un homme jeune ne vient-elle pas de ce
qu’
il imagine un très long temps de marche devant lui, et certains object
691
ns objectifs qui, peut-être, parce qu’ils ne sont
que
vaguement entrevus, semblent alors grands et lointains ? Le corps et
692
ins. Et c’est pourquoi le créateur vieillit moins
que
l’homme de la routine. Mais vers la quarantaine poindra l’angoisse de
693
l’avenir — marquent un temps d’hésitation : c’est
qu’
on n’exige plus autant d’elles, et c’est vieillir. Il faudrait au cont
694
et l’avance très lente, mais l’attrait du sommet
qu’
on distinguait derrière des épaulements sans cesse renaissants produis
695
le dernier nous mettrait au défi d’en tirer plus
que
la mesure. Devant nous, fermant une vallée qu’il nous fallait d’abord
696
us que la mesure. Devant nous, fermant une vallée
qu’
il nous fallait d’abord aller rejoindre, environ mille mètres plus bas
697
s Alpes. La descente paraît au novice plus facile
que
la montée, mais c’est aussi l’épreuve la plus dure pour le corps, con
698
ses plans lumineux virant très lentement à mesure
que
nous descendions, occupaient constamment nos regards. Notre marche en
699
À notre vue, ou peut-être à nos cris, on eût dit
qu’
une vague électrique parcourait le troupeau de bout en bout : il ondul
700
La peur et la faim le guidaient dans ces détours
qu’
on eût dit capricieux. Notre colonne, cependant, elle aussi précédée p
701
le talus devint la nuit, et le monde ne fut plus
qu’
un chemin où des pierres roulaient sous nos pas, jetant parfois des ét
702
dans l’espace obscur, et qui n’était plus mesurée
que
par l’alourdissement des membres. Un vent froid descendait des Alpes,
703
s’établit. Tout ne fut plus, pendant des heures,
qu’
automatismes à peine surveillés, rêveries au loin d’une conscience en
704
e, se redressait… Si l’on nous avait dit : « Plus
qu’
une heure à marcher », je pense que la plupart auraient flanché pendan
705
t dit : « Plus qu’une heure à marcher », je pense
que
la plupart auraient flanché pendant cette étape nocturne. De fait, no
706
sieurs semaines et la saison d’hiver ne s’ouvrait
qu’
en décembre. Un hôtel vide nous accueillit. Après la collation d’étape
707
ler reconnaître le sentier du col. Un guide a dit
qu’
il neige au-dessus de deux-mille. Cinq ou six d’entre nous allèrent s’
708
en nous regardant l’un après l’autre. J’apprends
qu’
il y a déjà un demi-mètre de neige là-haut. Le col sera donc impratica
709
savant qui poursuit une longue recherche apprend
qu’
un collègue a trouvé. Une nation qui a tendu ses forces vives vers la
710
une épreuve plus difficile à surmonter, parfois,
que
l’obstacle lui-même, si grand soit-il. À la Lenk, cette nuit-là, j’eu
711
e ne sais si j’eusse évité cette débâcle nerveuse
que
les Américains, qui en ont fait une catégorie courante, nomment un br
712
ssait la nécessaire contrepartie : il m’apprenait
que
pour franchir certains obstacles, il faut moins d’énergie maîtrisée q
713
ains obstacles, il faut moins d’énergie maîtrisée
que
pour y renoncer dans le moment où l’élan s’est déjà ramassé. Apprendr
714
. Apprendre à réussir, ou à marcher, n’est encore
qu’
une moitié de l’art de vivre. Mais apprendre à ne pas réussir jusqu’au
715
ture confrontant l’esprit et ses œuvres non moins
que
le corps et ses gestes, la frustration de nos élans les plus hardis c
716
réussir pour persévérer, après n’avoir entrepris
qu’
en espoir ! Il avouerait que son espoir était trop court. o. Rouge
717
rès n’avoir entrepris qu’en espoir ! Il avouerait
que
son espoir était trop court. o. Rougemont Denis de, « De la march
718
rès grands yeux : ils n’ont pas fini de s’étonner
que
déjà commence l’angoisse. Mais tout d’un coup, voici deux ou trois an
719
té disparaît de la peinture de Nora Auric. Est-ce
qu’
il y a trop de gens sur la terre ? On le penserait devant ces tableaux
720
ces tableaux, à cause du sentiment de libération
que
procurent leurs déserts à ravir, comme si l’étonnement et l’angoisse,
721
in de compte, pouvaient faire sans nous. Le monde
que
peint Nora Auric a ceci de particulier qu’on ne sait s’il est vu de s
722
monde que peint Nora Auric a ceci de particulier
qu’
on ne sait s’il est vu de sous l’eau ou d’un nuage : ce seraient à peu
723
est féminin, sans aucun doute possible. Ne fût-ce
que
par ces roses un peu gris que je me rappelle, qui s’exagèrent sans do
724
possible. Ne fût-ce que par ces roses un peu gris
que
je me rappelle, qui s’exagèrent sans doute dans mon souvenir visuel,
725
it, tout est lisible et composé, comme un paysage
qu’
on reconnaît sans l’avoir jamais vu nulle part, mais qui ressemble abs
726
de son rôle dans notre société, et non pas de ce
que
j’en sais, mais plutôt de ce que j’en puis faire comme usager moyen e
727
et non pas de ce que j’en sais, mais plutôt de ce
que
j’en puis faire comme usager moyen et homme qui réfléchit sur cet usa
728
dans notre civilisation. Disons, symboliquement,
que
l’éclairage à l’électricité étant donné, je m’interroge sur ses avant
729
orpusculaire, ou les deux à la fois, mais je sais
que
j’aime bien y voir clair pendant la nuit. I Comme la très grande
730
qui ne portent pas sur tel ou tel problème précis
que
se posent les techniciens, mais sur le phénomène technique en général
731
ière question : Comment s’explique le fait patent
que
la technique moderne — mettons depuis le xviie siècle — ait été la c
732
les-mêmes, sans l’exemple et le défi occidental ?
Que
signifie l’effort technique des Européens, et quelles sont ses racine
733
mettant et favorisant certaines recherches plutôt
que
d’autres, recherches qui à leur tour devaient conduire à certaines dé
734
devaient conduire à certaines découvertes plutôt
qu’
à d’autres, — chaîne continue qui va des grands conciles des ive et v
735
Europe se fonde sur le dogme de l’Incarnation. Or
qu’
est-ce que l’Incarnation, sinon Dieu lui-même, l’Esprit pur, qui chois
736
fonde sur le dogme de l’Incarnation. Or qu’est-ce
que
l’Incarnation, sinon Dieu lui-même, l’Esprit pur, qui choisit de se r
737
connaissable dans un corps d’homme. Il en résulte
que
le corps physique, et la matière du même coup, se trouvent fortement
738
une simple illusion, une partie du voile de Maya
que
tout l’effort spirituel doit tendre à dissiper, comme le veulent les
739
ransformés par l’homme spirituel et sauvés, ainsi
que
l’avait déjà dit saint Paul, dont je rappelle ici une déclaration rée
740
la révélation des fils de Dieu, avec l’espérance
qu’
elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption… pour avoi
741
grandiose, pratiquement infini, ou qui ne finira
qu’
avec la fin des temps. Mais la croyance en un Dieu créateur et régulat
742
laquelle il ne s’agit plus de se conformer, mais
qu’
il faut au contraire transformer hardiment, illuminer el finalement sa
743
ment, illuminer el finalement sauver : c’est cela
que
la Nature attend de l’homme, une action qui la maîtrise et la libère,
744
de la technique en Europe : effort plus ascétique
que
magique, et plus rigoureux qu’hédoniste, de maîtrise et de transforma
745
ort plus ascétique que magique, et plus rigoureux
qu’
hédoniste, de maîtrise et de transformation de la matière et de la Nat
746
ssions tout à fait naturelles et païennes, plutôt
qu’
avec les développements de la vie spirituelle en Occident ? Et de fait
747
s de la vie spirituelle en Occident ? Et de fait,
que
ce soit la technique occidentale qui ait favorisé les guerres, ou l’i
748
le qui ait favorisé les guerres, ou l’inverse, ce
que
l’on observe à coup sûr, c’est un parallélisme ou une interaction con
749
qui ne dépendent pour leurs fournitures de guerre
que
des forgerons et des menuisiers. Cet artisanat primitif correspond à
750
s’armer, mais non pas de désarmer. Et il est vrai
que
les armes nouvelles inventées par les techniciens n’ont guère fait qu
751
es inventées par les techniciens n’ont guère fait
que
s’ajouter aux anciennes, curieusement appelées « conventionnelles »,
752
s, curieusement appelées « conventionnelles », et
que
l’effort de la science, mobilisée au service des États, a dû se borne
753
. L’immense utilité de la bombe H, c’est en somme
qu’
elle n’est pas utilisable. Elle se trouve interdire de la sorte, ou li
754
risquerait de nous jeter dans une guerre atomique
qu’
il semble bien qu’on ait décidé de ne pas faire. On a donc atteint une
755
à la paix de durer tant bien que mal, et c’est ce
que
l’on a baptisé l’équilibre de la terreur. La prodigieuse réussite tec
756
de la terreur. La prodigieuse réussite technique
que
représente la bombe H sert la paix en ceci qu’elle a suscité un senti
757
ue que représente la bombe H sert la paix en ceci
qu’
elle a suscité un sentiment encore plus violent que les passions natio
758
u’elle a suscité un sentiment encore plus violent
que
les passions nationalistes ou idéologiques, et qui neutralise ou refo
759
on parle tant, peur d’une espèce de fin du monde
qu’
entraînerait la guerre atomique, et que j’avoue ne pas ressentir très
760
n du monde qu’entraînerait la guerre atomique, et
que
j’avoue ne pas ressentir très fortement ni en moi, ni autour de moi,
761
ent ni en moi, ni autour de moi, tant il est vrai
que
l’idée d’un malheur universel et définitif agit peu sur l’imagination
762
Je n’ai pu observer la peur de la menace atomique
qu’
aux États-Unis, il y a trois ans, à une époque où toute la presse parl
763
ait — on ne sait comment — à un conflit atomique,
que
sur une crainte bien raisonnée, basée sur des informations précises,
764
de peser sur le bouton rouge, crainte plus forte
que
toute autre passion, conviction ou ambition, et qui de la sorte déval
765
st donc bien à la technique, en dernière analyse,
que
nous devons ce blocage de la guerre en Europe et au sein du plus gran
766
rés d’interdépendance économique et industrielle,
qu’
un conflit armé entre deux de nos nations paraît devenu impraticable.
767
re jour, aux Rencontres de Genève, et je songeais
que
ces armes d’une puissance folle nous laissent en fait à la merci d’un
768
i d’une saute de vent. Mais si l’on peut admettre
que
la technique a réussi à pacifier l’Europe en désarmant et jugulant pr
769
de l’Histoire, et, si l’on constate d’autre part
que
la menace atomique tient en respect les deux empires occidentaux de l
770
en Europe, dans le contexte spirituel et culturel
que
j’évoquais tout à l’heure, qui a mis en relation les divers continent
771
s peuples du tiers-monde ne connaissaient de nous
que
d’assez rares exemplaires de colons et de soldats, qui n’avaient rien
772
élas, ce qui les a rendues possibles. Ils croient
qu’
ils pourraient acheter ces beaux objets (ou plutôt se les faire donner
773
oût. Mais la technique occidentale fait bien plus
que
leur révéler cette misère relative : dans une mesure sans cesse crois
774
faibles… Voilà le drame, et la menace plus grave
que
celle de la bombe H. Ainsi le contact avec l’Occident non seulement p
775
yant la bombe les regroupe et se met à leur tête.
Que
peut faire l’Occident, pour éviter ce désastre qui serait bien pire q
776
ent, pour éviter ce désastre qui serait bien pire
que
tout ce que nous faisait redouter la guerre froide au temps de Stalin
777
iter ce désastre qui serait bien pire que tout ce
que
nous faisait redouter la guerre froide au temps de Staline ? Il sembl
778
au temps de Staline ? Il semble hors de question
que
l’Occident puisse nourrir les milliards d’affamés qui se multiplient
779
au moins doublé d’ici vingt ans. À supposer même
que
notre science découvre les moyens de créer des aliments synthétiques,
780
ents synthétiques, tirés de l’air et de l’eau, et
qu’
elle réussisse à nourrir des dizaines de milliards d’humains, ceux-ci
781
s. On ne peut pas agrandir la terre. Il faut donc
que
notre technique, qui a créé sans le vouloir ce problème gigantesque,
782
e développer lui-même les ressources nécessaires,
que
d’ailleurs il possède matériellement. Si un peu de technique a créé l
783
de la surmonter. (Ce sont là d’énormes problèmes,
qu’
une conférence prochaine, à Bâle, sur le thème « L’Europe et le monde
784
e, en principe, n’est pas plus un facteur de paix
qu’
un facteur de guerre. Elle fournit aux armées des moyens de faire la g
785
assez vite pour ne pas tomber. (« Vole aussi bas
que
possible et surtout pas trop vite », écrivait une mère angoissée à so
786
ême les bloque. III Ceci dit, reconnaissons
que
la guerre bloquée, ce n’est pas encore la vraie paix. Celle-ci ne peu
787
pas encore la vraie paix. Celle-ci ne peut naître
qu’
à la faveur d’un équilibre qui ne soit pas celui de la terreur, mais d
788
qui ne substituerait aux explosions belliqueuses
qu’
une sorte d’implosion des énergies humaines, domestiquées, mécanisées,
789
? (horribile dictu !) C’est la dernière question
que
je voudrais non pas traiter, le temps me manque, mais évoquer par tro
790
s et des élites culturelles du tiers-monde autant
que
de l’Europe, et j’entends d’une Europe agissant comme un tout et non
791
sur la terre. Déjà nous vivons dans un cadre plus
qu’
à moitié artificiel. J’ai habité quelques années à New York dans un pa
792
complexité, où la Nature n’était plus représentée
que
par des pans de ciel abstrait entre les parois des gratte-ciel, un co
793
sur les plages pendant l’été. Et je mets en fait
que
la jeunesse qui ne parle, dit-on, que de marques d’autos, connaît mie
794
ets en fait que la jeunesse qui ne parle, dit-on,
que
de marques d’autos, connaît mieux les forêts, les montagnes et les pl
795
es et les plages de plusieurs régions de l’Europe
que
ses ancêtres en redingote, qui ne parlaient que de politique. Un peu
796
e que ses ancêtres en redingote, qui ne parlaient
que
de politique. Un peu de technique industrielle rudimentaire nous avai
797
intimité nouvelle avec une nature mieux protégée
que
nous n’avons su le faire dans cette génération. Enfin, il y a la gran
798
nt pas nées pour satisfaire des besoins matériels
que
personne n’éprouvait avant elles, mais c’est généralement l’inverse q
799
s rêveurs un peu bizarres. C’est du rêve de voler
qu’
est né l’avion, et du rêve de partir au hasard sur les routes qu’est n
800
on, et du rêve de partir au hasard sur les routes
qu’
est née l’auto : vous en trouverez le récit détaillé dans l’autobiogra
801
r à explosion interne. On n’ignore pas d’ailleurs
que
des dizaines d’ingénieurs — en France surtout — avaient construit des
802
tifs réels, d’ordre psychologique, autant ou plus
que
par ses succès ultérieurs. Aujourd’hui, l’on entend les belles âmes s
803
Aujourd’hui, l’on entend les belles âmes soupirer
que
l’homme est devenu l’esclave de sa voiture, et c’est vrai dans ce sen
804
esclave de sa voiture, et c’est vrai dans ce sens
que
l’homme moyen croit qu’il ne pourrait plus se passer de cet objet, ma
805
t c’est vrai dans ce sens que l’homme moyen croit
qu’
il ne pourrait plus se passer de cet objet, mais le fautif n’est pas l
806
pas la technique. Je voudrais observer au surplus
que
s’il est bien certain que l’invention de Ford est née d’un rêve d’éva
807
ais observer au surplus que s’il est bien certain
que
l’invention de Ford est née d’un rêve d’évasion hors des voies imposé
808
eux être libre de rêver, c’est justement un train
que
je vais prendre. Dans mon wagon, je lis, je dors, je mange et je puis
809
à loisir. À mon volant, rien de pareil : tout ce
que
je peux lire, ce sont des chiffres, des ordres de police routière ; s
810
de police routière ; si je mange, ce n’est guère
qu’
un sandwich, si je rêvasse un klaxon me réveille brutalement, et si je
811
ses effets sur l’homme et sur la société. Tout ce
que
j’avais à vous dire aujourd’hui se résume en propositions d’une extrê
812
et excès d’honneur ni cette indignité. Elle n’est
que
le moyen de nos passions et de nos rêves, le moyen de nos vraies fins
813
ons et de nos rêves, le moyen de nos vraies fins,
que
nous voulions ignorer, ou bien que nous avions perdu de vue ; et alor
814
s vraies fins, que nous voulions ignorer, ou bien
que
nous avions perdu de vue ; et alors nous trichons, et nous nous persu
815
; et alors nous trichons, et nous nous persuadons
que
la technique n’est après tout qu’un ensemble de procédés ingénieux et
816
nous persuadons que la technique n’est après tout
qu’
un ensemble de procédés ingénieux et utilitaires, destinés à nous faci
817
res, destinés à nous faciliter la vie, mais voilà
que
tout d’un coup, par une inexplicable malice des choses, dont nous ne
818
te espèce de vie sur la terre. La technique n’est
qu’
un instrument, n’est qu’un moyen, soit de la guerre, soit de la paix,
819
terre. La technique n’est qu’un instrument, n’est
qu’
un moyen, soit de la guerre, soit de la paix, soit de la tyrannie des
820
en même temps, toujours plus facilement maniables
qu’
elle met entre nos mains — il suffit du plus petit geste, comme de pre
821
ience de nos options réelles devant la vie. Telle
qu’
elle est devenue de nos jours, obsédée d’efficacité immédiate et renta
822
té humaine qui paraisse moins métaphysique en soi
que
la technique. Mais en même temps, il n’en est pas qui nous contraigne
823
uvoirs inouïs qui sont devenus les nôtres. Ainsi,
qu’
on le veuille ou non, c’est la technique elle-même qui nous oblige à r
824
du tourisme fut inventé par les Anglais. Un pays
que
tout le monde croit connaître même sans y avoir jamais été, car tout
825
e sans y avoir jamais été, car tout le monde sait
qu’
il est beau mais sérieux, très cossu mais égalitaire, petit mais telle
826
ais tellement élevé et de sol si richement plissé
que
si l’on pouvait le repasser et l’aplanir, on verrait qu’il est bien a
827
l’on pouvait le repasser et l’aplanir, on verrait
qu’
il est bien aussi grand que la France… Cette Suisse des Alpes et des l
828
l’aplanir, on verrait qu’il est bien aussi grand
que
la France… Cette Suisse des Alpes et des lacs, des quatre langues, de
829
un cliché mais juste et bien tiré. Il ne retient
que
certaines apparences, mais qui suffisent à remplir les hôtels. Pourta
830
r les hôtels. Pourtant la Suisse est autre chose,
qu’
on ne voit pas sur les cartes postales. On croit que c’est le pays le
831
’on ne voit pas sur les cartes postales. On croit
que
c’est le pays le plus évident du monde, où tout est concerté, bien ne
832
oi ; et puis on s’aperçoit en vivant cela de près
que
tout repose en réalité sur un tissu serré de contradictions théorique
833
me — il faut en croire ses yeux — ce ne peut être
qu’
en vertu de certains secrets d’usage plusieurs fois séculaires. Car en
834
lusieurs fois séculaires. Car enfin voici un pays
que
la Providence a privé d’absolument tous les facteurs classiques garan
835
plus pauvre en matières premières — il n’a guère
que
l’eau des glaciers pour en tirer de l’énergie — est l’un des plus ind
836
: 10 % de paysans seulement. Orson Welles prétend
que
les Suisses n’ont rien inventé à part la pendule à coucou mais c’est
837
té à part la pendule à coucou mais c’est chez eux
que
l’on trouve la plus forte densité de prix Nobel des sciences, pour ne
838
peut dire mieux, sur ce continent ? Il n’empêche
qu’
à Paris, à Londres ou à Berlin, on se moque un peu des Suisses et on l
839
la patrie d’un Guillaume Tell qui n’exista jamais
que
dans le mythe à une Europe fédérée qui par malheur n’existe encore qu
840
ne Europe fédérée qui par malheur n’existe encore
que
dans l’espoir. Entre les deux, où est la vraie Suisse ? Deux sondages
841
rs pays de l’Europe et aux États-Unis, ont révélé
que
les Suisses sont tout simplement les gens les plus heureux de la Terr
842
question : « D’une manière générale, diriez-vous
que
vous êtes très heureux, — plutôt heureux, — pas très heureux ? » 42 %
843
pas très heureux, ce qui ne laisse guère de place
qu’
à 1 % de révoltés ou de désespérés. Ce phénomène mérite la plus grande
844
t les vallées traversées par la route du Gothard,
que
l’on venait d’ouvrir au xiii e siècle. C’était le seul col reliant d’
845
s de cités libres ou épiscopales et des campagnes
qu’
elles avaient soumises, entre les Alpes et le Jura. Et ce fut la pério
846
arder leurs existences distinctes. On dit souvent
que
la Suisse illustre la formule de « l’union dans la diversité ». C’est
847
ule de « l’union dans la diversité ». C’est mieux
que
cela : elle a fait son union précisément pour sauver ses diversités.
848
ir central une certaine part de leur indépendance
que
pour mieux assurer la part qu’ils en gardaient. Autrement, ils l’euss
849
leur indépendance que pour mieux assurer la part
qu’
ils en gardaient. Autrement, ils l’eussent toute perdue, car les empir
850
étrant mais sans se confondre, n’allez pas croire
qu’
elles soient unies par je ne sais quelle ferveur sentimentale — oh ! n
851
entimentale — oh ! non. Personne n’a jamais exigé
que
les Thurgoviens et les Vaudois ou les Grisons romanches et les Bâlois
852
re et pas de langage commun. Mais ils savent bien
qu’
ils font partie de cette même Suisse dont les institutions communes le
853
st idéologie. Avec tout cela, je crois avoir plus
qu’
à moitié répondu à la seconde question, celle de savoir si les recette
854
je ne vois et ne puis imaginer une autre solution
que
l’helvétique. Et je ne vois pas de raison sérieuse qui empêcherait qu
855
je ne vois pas de raison sérieuse qui empêcherait
qu’
on l’applique à l’échelle continentale. On me dira : la Suisse est pet
856
s d’égaler le médiocre à l’auguste. Je ne compare
que
des rapports et constate qu’entre la France par exemple et la Belgiqu
857
guste. Je ne compare que des rapports et constate
qu’
entre la France par exemple et la Belgique ou l’Irlande, le rapport es
858
s de Zurich et de Zoug ou de Glaris. Et je me dis
qu’
un système qui peut harmoniser les relations entre des cantons inégaux
859
ue, incomparable. Or cette fonction reste la même
qu’
il s’agisse du corps d’un petit enfant ou de celui d’un colosse. Notez
860
enfant ou de celui d’un colosse. Notez d’ailleurs
que
l’Europe actuelle est pratiquement plus petite que ne l’était la Suis
861
ue l’Europe actuelle est pratiquement plus petite
que
ne l’était la Suisse quand elle s’est fédérée. En 1848, il fallait de
862
-le d’un œil européen et prospectif : vous verrez
que
tout y correspond à quelque chose qui pourrait très bien être l’aveni
863
t des secondes galeries sur les premières… Je dis
que
j’admirais la liberté de ton du représentant de l’Espagne à Paris. —
864
e l’Espagne à Paris. — Eh bien, fit-il, je trouve
qu’
un ambassadeur, ça doit savoir engueuler le monde ! Et nous allâmes pr
865
nt : « — Excellence, vous avez été superbe ! Ah !
que
ce doit être beau de pouvoir ainsi faire le Bien ! — Non Madame, fair
866
t l’affaire du Bon Dieu. Et de lui seul ! Tout ce
que
l’on peut demander d’un homme, c’est qu’il fasse le moins de mal poss
867
Tout ce que l’on peut demander d’un homme, c’est
qu’
il fasse le moins de mal possible. » (Ce que je trouvai, par-devers mo
868
c’est qu’il fasse le moins de mal possible. » (Ce
que
je trouvai, par-devers moi, fort calviniste.) ⁂ New York, mars 1947.
869
ait être réservé à ceux-là seuls qui prouveraient
qu’
ils ne peuvent pas vivre sans elle. Pour les autres, qu’on élève des b
870
ne peuvent pas vivre sans elle. Pour les autres,
qu’
on élève des barrières infranchissables ! C’est le point de vue qu’il
871
arrières infranchissables ! C’est le point de vue
qu’
il a voulu défendre quand il était ministre de l’Éducation. Le Cabinet
872
al des écoles de l’État de New York fait observer
que
Madariaga « is running against the times ». — « Oh yes ! and the Hera
873
ld Tribune too ! » fait-il, sérieux. « Je suppose
que
vous n’entendez tout de même pas défendre les instituteurs, n’est-ce
874
. — Oh ! cela, c’est de vous, chère amie. Tout ce
que
j’ai dit, c’est que si Dieu était conçu comme féminin, nous refuserio
875
de vous, chère amie. Tout ce que j’ai dit, c’est
que
si Dieu était conçu comme féminin, nous refuserions tous le pouvoir q
876
u comme féminin, nous refuserions tous le pouvoir
qu’
ont pris les femmes dans notre société. — Mais si Dieu était féminin…
877
umaine. Nous avons aussi parlé de l’Europe, de ce
qu’
il faut faire pour son union. ⁂ À Royaumont, le 4 avril 1948, au terme
878
le rapporteur, je suggérai Madariaga. Il se peut
que
dans mon esprit se soit opéré à ce moment-là une complexe synthèse in
879
u des composantes aussi désespérément hétérogènes
que
la politique et la morale, l’histoire, et la psychologie d’une vingta
880
’une vingtaine de peuples n’ayant guère en commun
que
leur conviction d’occuper chacun une position absolument particulière
881
s, artistes et savants) à militer par un peu plus
qu’
une signature au bas d’un manifeste, Don Salvador se vit contraint de
882
it pour présider congrès et comités en chaîne. Ce
qu’
il fit, avec autant de soins formels et de fermeté dans l’approche des
883
rmels et de fermeté dans l’approche des puissants
que
de désinvolture à l’égard des pédants et autres fanatiques de la rout
884
rnaux : « Oui, Messieurs, si l’Europe doit périr,
que
ce soit au moins une injustice ! » Mais les grandes heures captées pa
885
ui voit très loin » (Zeus europos dans l’Odyssée)
que
l’innombrable succession des comités hélas indispensables, et qu’il n
886
e succession des comités hélas indispensables, et
qu’
il ne suffit pas de présider mais qu’il faut surtout animer, sinon l’a
887
ensables, et qu’il ne suffit pas de présider mais
qu’
il faut surtout animer, sinon l’action la mieux conçue va somnoler. À
888
s, parce que le président nous donne l’impression
qu’
il s’amuse. Il y a là, d’ordinaire, Étienne Gilson, Julien Cain, Kenne
889
e je ne sais plus quoi, Gilson ayant dit : — Mais
que
vont en penser nos amis anglais ?, Madariaga réplique : « Penser ? Qu
890
s amis anglais ?, Madariaga réplique : « Penser ?
Que
voulez-vous dire ? Les Anglais ne pensent pas. Écoutez donc notre ami
891
I think”. Si les Anglais pensent, c’est autrement
que
nous, c’est avec leur corps, avec leurs muscles, avec leurs bras, leu
892
ût, un temps qui du même coup devait manquer à ce
qu’
on nomme leur œuvre personnelle, et de ceux-là, nul ne l’a fait avec u
893
ne l’a fait avec un désintéressement aussi total
que
notre premier président du Centre européen de la culture. ⁂ Mais avan
894
l’est plus. Je l’ai entendu, à Bombay, prétendre
que
l’Espagne, c’est l’Inde de l’Europe, ou que l’Inde est l’Espagne de l
895
endre que l’Espagne, c’est l’Inde de l’Europe, ou
que
l’Inde est l’Espagne de l’Asie. C’était à se demander si l’on pouvait
896
n Auden et André Malraux à la table des orateurs,
que
je préside, tandis qu’une quarantaine d’écrivains du monde entier occ
897
beaux discours, sur le thème de la liberté telle
que
la conçoit un véritable libéral. Le public français intellectuel, c’e
898
intellectuel, c’est-à-dire de gauche, n’aime pas
qu’
on touche à sa Révolution, qu’on lui rappelle qu’une révolution violen
899
gauche, n’aime pas qu’on touche à sa Révolution,
qu’
on lui rappelle qu’une révolution violente, après tout, c’est une mala
900
qu’on touche à sa Révolution, qu’on lui rappelle
qu’
une révolution violente, après tout, c’est une maladie du corps social
901
ne philosophie politique et sociale. Et j’ai aimé
qu’
après vingt ans ce meeting de la salle Pleyel fasse écho à mes souveni
902
a liberté demeuré libéral avec rigueur. Démontrer
qu’
en plein xxe siècle on peut être vraiment engagé et vraiment libéral
903
du douanier est aussi la fin de la fraude. Quelle
que
soit la monnaie, l’achat sera fait au même compte. Lorsqu’il ouvrit
904
es inspire : les nazis vont apprendre au monde ce
que
veut dire le mot nation, au sens total et absolu. C’est dans la Résis
905
au sens total et absolu. C’est dans la Résistance
que
se constitueront les nombreux groupes de fédéralistes européens qui d
906
1947 à 1950, proclamant la nécessité d’une union
que
les uns veulent sérieuse, donc fédérale, mais que les autres entenden
907
que les uns veulent sérieuse, donc fédérale, mais
que
les autres entendent bien limiter à des accords opportunistes, donc r
908
ra le moment pour l’opinion publique de découvrir
que
le problème de l’union ou de la fédération, qui est essentiellement p
909
out projet de fédération européenne digne du nom,
que
va-t-il se passer ? Des mesures propres à « favoriser » (faute de vou
910
de vouloir la créer) une « union plus étroite » (
que
quoi ? on se le demande) entre États-nations souverains, feront l’obj
911
chefs de gouvernements décidés à poursuivre coûte
que
coûte la politique d’hégémonie de leur pays (ou bien celle d’équilibr
912
e sérieuse pour leurs grands-pères. C’est tout ce
qu’
on peut prévoir selon nos analystes, professeurs et commentateurs qui
913
rt de créer le possible au service de grands buts
qu’
il faut prophétiser, sinon tout s’affaisse en routines, en répétitions
914
l’Europe n’est pas encore unie, depuis vingt ans
que
nos gouvernements proclament cette union nécessaire et même urgente.
915
dale, je propose une explication tellement simple
que
c’est elle qui va choquer. Je suis parvenu à la conviction que les ho
916
e qui va choquer. Je suis parvenu à la conviction
que
les hommes d’État les mieux intentionnés, les ministres, les parlemen
917
réel, ils ont voulu partir des États-nations tels
que
les a formés le xixe siècle et achevés le totalitarisme (plus ou moi
918
« seules réalités politiques existantes » (ainsi
que
le répète volontiers le général de Gaulle), ils ont essayé de les uni
919
ayé de les unir, et ils constatent, évidemment, «
qu’
elles ne sont pas encore prêtes à s’unir ». Or, il est clair — il devr
920
nir ». Or, il est clair — il devrait être clair —
qu’
en tant qu’États souverains les nations ne seront jamais prêtes à s’un
921
e. L’union, pour deux États-nations, n’est jamais
qu’
une mesure de fortune, voire qu’un expédient désespéré (comme par exem
922
ons, n’est jamais qu’une mesure de fortune, voire
qu’
un expédient désespéré (comme par exemple l’union de la Grande-Bretagn
923
ill en juin 1940) autrement dit : ce n’est jamais
qu’
une concession douloureuse à la nécessité, quand on se sent trop faibl
924
veut unir l’Europe, il faut partir d’autre chose
que
de ses facteurs de division, il faut bâtir sur autre chose que sur le
925
cteurs de division, il faut bâtir sur autre chose
que
sur les obstacles à l’union ; il faut opérer sur un autre plan que ce
926
cles à l’union ; il faut opérer sur un autre plan
que
celui-là, précisément, où le problème se révèle insoluble. Il faut se
927
e nouveau, à la fois plus grande et plus complexe
que
la cité antique, mais plus dense, mieux structurée et offrant un meil
928
frant un meilleur milieu de participation civique
que
la nation telle que nous l’a léguée le siècle dernier : la région. Il
929
lieu de participation civique que la nation telle
que
nous l’a léguée le siècle dernier : la région. Il n’est rien dont les
930
s’occupent avec plus de passion en Europe. C’est
qu’
en effet il s’agit là d’un phénomène complexe et neuf, que nous voyons
931
fet il s’agit là d’un phénomène complexe et neuf,
que
nous voyons lentement prendre forme au seuil de ce dernier tiers de n
932
ent peu à peu sur le fond chaotique de la société
que
le xixe siècle a laissé se faire au petit bonheur, la société stato-
933
s intellectuelles, techniques et bancaires autant
que
matérielles ou naturelles, la densité des réseaux de communications e
934
is au contraire par la force de rayonnement de ce
qu’
on appelle une « métropole », c’est-à-dire une grande ville ou un comp
935
ssayer de faire sentir le concret du problème tel
que
je l’ai découvert, voici un exemple vécu. Il y a quelques années, je
936
e me trouvais le seul non-Français : j’en conclus
que
j’étais censé représenter dans le colloque l’idée européenne. Invité
937
ler tout au début, j’improvisai donc sur le thème
que
voici : Il peut sembler curieux, Messieurs, qu’à l’âge des intégrati
938
que voici : Il peut sembler curieux, Messieurs,
qu’
à l’âge des intégrations continentales, vous vous préoccupiez d’abord
939
n vue de l’union et votre tentative régionaliste,
qu’
on soupçonnera de vouloir la division, peuvent sembler logiquement con
940
les vois complémentaires. Car au fur et à mesure
que
se dévalorisent les frontières de nos États-nations, les régions vont
941
d’un seul tenant quant au sous-sol, sous prétexte
qu’
à la surface les gens parlaient allemand d’un côté, français de l’autr
942
lations d’échanges aussi nombreuses et fréquentes
que
possible. Elles seront amenées à se grouper selon leurs affinités, se
943
s réduites au rôle mineur et invisible à l’œil nu
que
jouent les délimitations entre les cantons suisses : simples commodit
944
gendarmerie. Et c’est sur ces régions, Messieurs,
que
nous bâtirons l’Europe, non sur les cadres en bonne partie vidés des
945
ent un écho pour moi, des plus inattendus : c’est
qu’
elles venaient à la rencontre non seulement des souhaits des organisat
946
que, déjà beaucoup plus large et solidement fondé
que
je n’osais l’espérer. Au cours de ces dernières années, on a vu se mu
947
ns une collection de livres de poche : c’est dire
que
l’éditeur estime qu’il peut répondre à la curiosité d’un grand public
948
livres de poche : c’est dire que l’éditeur estime
qu’
il peut répondre à la curiosité d’un grand public. Certes, on n’en est
949
ité d’un grand public. Certes, on n’en est encore
qu’
au stade de la prise de conscience du phénomène région et des motifs d
950
e. À peine a-t-on pris la mesure des perspectives
qu’
il nous invite à explorer, notamment politiques et institutionnelles.
951
ent être décrétées sans transition. Il est normal
qu’
elles exigent une période d’expériences, et celle-ci connaîtra forcéme
952
’une génération, vingt à trente ans, en admettant
que
tout se passe bien plus vite de nos jours qu’à l’aube grecque de notr
953
ant que tout se passe bien plus vite de nos jours
qu’
à l’aube grecque de notre histoire. Je ne cite pas la Grèce par hasard
954
communauté aussi nouvelle dans notre civilisation
que
le fut au vie siècle avant notre ère, l’apparition de la polis, dans
955
, dans la société grecque archaïque. Et l’on sait
que
la polis devint en moins d’un siècle l’unité de base de toute vie soc
956
e partager le monde. Chacun de nos États-nations (
qu’
on appelait naguère des « Puissances ») se rêve ou s’est rêvé un jour
957
lle-même dont, après tout, l’impérialisme ne fait
que
révéler en les exagérant la vraie nature et les vraies ambitions. Nou
958
et les vraies ambitions. Nous n’en sommes encore
qu’
à l’aube de la formation des régions, qui seront les éléments de l’Eur
959
œil sur l’Histoire, lequel fait voir premièrement
que
les nations sont de formation récente, deuxièmement qu’elles ont dépa
960
s nations sont de formation récente, deuxièmement
qu’
elles ont dépassé le sommet de leur évolution, et descendent vers leur
961
acera. On n’en continue pas moins à nous répéter
que
les nations sont « encore » les seules réalités. Et c’est vrai, elles
962
ut ce qui coopère, se fédère ou s’unit en Europe,
qu’
il s’agisse de savants, de festivals de musique, d’Églises, de firmes,
963
éalité plus d’importance économique et culturelle
que
les capitales anciennes, la révolution régionaliste sera faite et du
964
pe se révélera immédiatement possible. Il se peut
que
cette évolution exige bien plus de temps que les pionniers de l’Europ
965
peut que cette évolution exige bien plus de temps
que
les pionniers de l’Europe unie ne l’exigeaient et ne l’annonçaient da
966
e unité géographique beaucoup plus opérationnelle
que
le département et même que la nation. Qu’une telle déclaration ait p
967
up plus opérationnelle que le département et même
que
la nation. Qu’une telle déclaration ait pu être faite en France, et
968
nnelle que le département et même que la nation.
Qu’
une telle déclaration ait pu être faite en France, et cela précisément
969
onomies régionales, voilà qui nous donne à penser
que
la révolution régionaliste, condition de l’Europe unie, est bien plus
970
condition de l’Europe unie, est bien plus avancée
que
nous n’osions l’espérer et que ne peuvent encore l’imaginer les polit
971
bien plus avancée que nous n’osions l’espérer et
que
ne peuvent encore l’imaginer les politiciens qui se croient réalistes
972
lection « Idées », Paris, Gallimard, 1967. 20. «
Qu’
est-ce qu’une nation ? », Paris, 1882. u. Rougemont Denis de, « Au-d
973
Idées », Paris, Gallimard, 1967. 20. « Qu’est-ce
qu’
une nation ? », Paris, 1882. u. Rougemont Denis de, « Au-delà des na
974
biennes, par exemple, n’attendent de leurs sujets
qu’
une obéissance aveugle. Mais la démocratie exige pour fonctionner d’êt
975
frage universel. Une démocratie ne mérite son nom
que
dans la mesure où, soit par l’enseignement, soit par la famille, soit
976
former des citoyens et un civisme européens tant
qu’
il n’y a pas de Cité européenne ? Inversement, comment fonder une Cité
977
t fonder une Cité européenne, l’Europe unie, tant
qu’
il n’y a pas de civisme européen ? Cercle vicieux pour ceux-là seuls q
978
ercle vicieux pour ceux-là seuls qui ne demandent
qu’
à croire qu’ils y sont enfermés. Au-delà des impasses logiques, le dés
979
x pour ceux-là seuls qui ne demandent qu’à croire
qu’
ils y sont enfermés. Au-delà des impasses logiques, le désir bâtit la
980
ontanée, ni fatale, ni imposée, elle ne peut être
que
choisie et voulue — exactement comme la démocratie — par une majorité
981
ne voudra pas forcer mais convaincre. C’est dire
qu’
on ne fera pas l’Europe sans faire des Européens. Mais ceux-ci, qui le
982
fera, sinon l’éducation ? Or il faut bien avouer
que
jusqu’ici, l’éducation (enseignement, école primaire et secondaire, h
983
et réels qui se posent à la cité et à l’État, et
que
le citoyen devra trancher quand il votera. La plus ennuyeuse des l
984
eux, car si elle passionnait, les choses étant ce
qu’
elles sont, ce serait inévitablement au bénéfice du chauvinisme nation
985
bénéfice du chauvinisme national. Un remède pire
que
le mal serait de substituer à l’heure d’ennui civique national une he
986
Schmid22 je lis ceci : Il faut absolument éviter
qu’
aux yeux des jeunes Allemands, Italiens ou Français l’intégration de l
987
e compte pas au regard des problèmes réels — ceux
qu’
il ne s’agit pas de réciter par cœur mais de comprendre intimement. I
988
comprendre intimement. Il faut cesser de croire
qu’
éducation civique signifie connaissance scolaire d’institutions et de
989
onnement concret. Il faut comprendre et proclamer
que
la seule préparation valable au civisme (à tous les degrés) consiste
990
Les problèmes vivants et réels de l’Europe, telle
qu’
elle est aujourd’hui désunie et telle qu’elle pourrait être unie demai
991
e, telle qu’elle est aujourd’hui désunie et telle
qu’
elle pourrait être unie demain, n’apparaissent pas souvent dans les di
992
e, sans adjurations pathétiques, sans propagande,
qu’
il faut unir l’Europe pour la sauver mais aussi pour servir le Monde.
993
nos problèmes communs, l’un des plus réels étant
que
nous sommes tous différents, et que nous y tenons ; b) Problèmes écon
994
s réels étant que nous sommes tous différents, et
que
nous y tenons ; b) Problèmes économiques, en tant qu’ils relèvent de
995
faite au-delà de ses cantons, mais pour sauver ce
qu’
on pouvait de leur autonomie, précisément : sans l’union, cette autono
996
s occasions et en tire le meilleur parti, il faut
que
le professeur ait été lui-même sensibilisé aux réalités de l’Europe e
997
et aux possibilités de son union prochaine. Dire
que
tout dépend de l’éducation, c’est dire que tout dépend des éducateurs
998
. Dire que tout dépend de l’éducation, c’est dire
que
tout dépend des éducateurs et de leur formation. L’avenir de l’Europe
999
a se jouer dans les écoles normales. En attendant
que
celles-ci prennent conscience de leurs responsabilités européennes, e
1000
tout crûment comme je le crois : aussi longtemps
que
la Campagne (ou quelque chose d’équivalent) n’aura pas fait sentir se
1001
ra, ou ne prendra vraiment le départ. Est-ce dire
que
l’Europe attend son « petit livre rouge » à distribuer aux dizaines d
1002
que et le besoin d’invention, tandis que l’autre,
que
j’ai sous les yeux, n’est qu’un recueil de réponses toutes faites, un
1003
tandis que l’autre, que j’ai sous les yeux, n’est
qu’
un recueil de réponses toutes faites, uniformément optimistes et prop
1004
ou de création personnelle. Je n’y trouve en tout
que
deux points d’interrogation sur 340 pages ; encore sont-ils de pure r
1005
de pure rhétorique et destinés à supprimer plutôt
qu’
à poser la question24. Voici en revanche notre pari d’européistes : no
1006
tif de la situation, et nous sommes bien certains
qu’
il révélera de la sorte la nécessité de l’union, et même les formes sp
1007
essité de l’union, et même les formes spécifiques
que
celle-ci devra prendre, et pourra prendre. Il fourmillera de points d
1008
Right or wrong, our Europe ! » mais il fera voir
que
l’Europe serait détruite par ce qui tue l’esprit critique, déprime le
1009
erté, étouffe le cri de la justice, plus sûrement
que
par ceux qui attaquent notre culture démocratique au nom des idéaux q
1010
uent notre culture démocratique au nom des idéaux
qu’
elle seule leur enseigna. 21. Cf. Enquête sur l’état de l’instructi
1011
23. Voir numéro 3 de cette revue. 24. « Tout ce
que
nous faisons est au service du peuple, de quel défaut ne pourrions-no
1012
: Je voudrais apporter une légère correction à ce
qu’
a dit M. Mach tout à l’heure, à savoir qu’il était le seul chercheur a
1013
on à ce qu’a dit M. Mach tout à l’heure, à savoir
qu’
il était le seul chercheur autour de cette table. Je me considère moi
1014
oudrais m’élever contre la hiérarchie des valeurs
qu’
on est en train d’instaurer. M. Mach se plaignait qu’on n’accorde pas
1015
on est en train d’instaurer. M. Mach se plaignait
qu’
on n’accorde pas un respect suffisant aux chercheurs scientifiques. Il
1016
ercheurs scientifiques. Il me semble au contraire
qu’
on leur accorde un respect presque exclusif. Pourquoi ? Parce qu’ils s
1017
strie, au PNB, produit national brut. Je voudrais
qu’
on fasse aussi une petite place — comme l’a demandé M. Lalive tout à l
1018
non purement scientifiques. C’est en tant que tel
que
je suis désireux d’élargir ce débat. Au risque de vous scandaliser, j
1019
eur d’un exode généralisé des cerveaux ! Je crois
que
la santé de la culture a toujours consisté dans ses échanges, dans so
1020
? Je vous donnerai tout de suite un exemple de ce
qu’
on peut entendre par là. J’ai eu la curiosité de regarder quelle était
1021
l’autre italien. Vous voyez par ce petit exemple
qu’
une certaine balance des échanges intellectuels peut nous être parfait
1022
pas, ce serait le même prix !) Quand je vous dis
que
les échanges, c’est la santé de la culture, je pense aussi aux univer
1023
ous expliquant, au Congrès de l’Europe à La Haye,
qu’
une certaine année, au milieu du xiie siècle, il n’y avait à la Sorbo
1024
ntenant, pour nous en tenir aux exemples suisses,
qu’
y a-t-il eu comme importation et exportation des cerveaux en Suisse ?
1025
’Histoire du soldat. On peut citer les prix Nobel
que
je vous disais tout à l’heure, qui sont venus de l’étranger. On pourr
1026
nger facilement cette liste. Du côté exportation,
qu’
avons-nous fait en Suisse ? Il y a d’abord eu le service étranger. Ce
1027
de. Dans le domaine des mathématiques, vous savez
que
les Suisses ont été de grands exportateurs. Les Bernoulli de Bâle, Le
1028
uisse, a été les faire en Amérique avec le succès
que
vous savez. L’ingénieur Ammann a été faire des ponts, aux États-Unis,
1029
mples, de positive devient négative, c’est-à-dire
qu’
il y a un moment où cette exportation devient ce que nous avons appelé
1030
’il y a un moment où cette exportation devient ce
que
nous avons appelé l’exode des cerveaux. M. de Rougemont : Oui, et il
1031
ver des critères pour déterminer à quel moment ce
que
j’appelle des échanges — et qui est la santé même — devient un exode
1032
ges — et qui est la santé même — devient un exode
qu’
il faudrait déplorer ou arrêter si on le peut. Je crois qu’il faut con
1033
drait déplorer ou arrêter si on le peut. Je crois
qu’
il faut considérer là-dedans les dimensions des activités en jeu, et l
1034
imensions ? Voilà à peu près la formule d’analyse
que
je propose. Une analyse nationaliste consisterait à dire — à dire san
1035
analyse d’ailleurs : je veux tout pour ma nation,
qu’
elle soit grande ou petite, et que tout soit fait dans ses limites. Il
1036
pour ma nation, qu’elle soit grande ou petite, et
que
tout soit fait dans ses limites. Il lui faut une industrie automobile
1037
est le point de vue nationaliste. Le point de vue
que
je viens de vous proposer, c’est celui que j’appelle fédéraliste, qui
1038
de vue que je viens de vous proposer, c’est celui
que
j’appelle fédéraliste, qui consiste à répartir les tâches d’après leu
1039
evient professeur d’université, on ne va pas dire
que
c’est un exode de cerveau, puisque le village n’a pas les dimensions
1040
— professeurs et étudiants ensemble — à tel point
que
, à Bologne, on dût faire des lois terribles contre les « voleurs d’un
1041
de des cerveaux ». Je reviens à deux des exemples
que
je vous ai cités tout à l’heure. Celui de Blaise Cendrars d’abord. Bl
1042
s n’était pas parti à 17 ans pour le vaste monde,
qu’
est-ce qui se serait passé ? Croyez-vous que La Chaux-de-Fonds se sera
1043
onde, qu’est-ce qui se serait passé ? Croyez-vous
que
La Chaux-de-Fonds se serait plainte d’avoir perdu un cerveau ? Pas du
1044
d écrivain et c’est seulement quand nous avons su
qu’
il y avait un grand écrivain qui s’appelait Blaise Cendrars que nous a
1045
un grand écrivain qui s’appelait Blaise Cendrars
que
nous avons découvert qu’il était suisse ! De même l’ingénieur Ammann,
1046
appelait Blaise Cendrars que nous avons découvert
qu’
il était suisse ! De même l’ingénieur Ammann, qui a fait ces immenses
1047
Gate à San Francisco qui a 2750 mètres de long :
qu’
eût-il fait, ce malheureux, s’il était resté en Suisse ? Il n’aurait p
1048
Prince Louis de Broglie qui a formulé cette idée,
que
nous avons fait aboutir ensuite, via l’Unesco, de manière à pouvoir r
1049
ir retenir en Europe un certain nombre de savants
qu’
il était important de garder pour la communauté continentale, vu les f
1050
ités (qui n’étaient pas toutes de recherche pure)
qu’
il y avait dans la science atomique à ce moment-là. Vous voyez de quoi
1051
tivité. M. Nordmann : J’aimerais faire remarquer
que
, entre ce qui a été dit sur une politique d’option, et ce qui vient d
1052
xode quand il n’a pas le caractère d’échange mais
qu’
il sanctionne un manque d’organisation ou de structure qui incite les
1053
M. de Rougemont : Votre question revient à savoir
que
faire pour empêcher cet échange à sens unique que l’on appelle exode
1054
que faire pour empêcher cet échange à sens unique
que
l’on appelle exode par rapport à une certaine communauté et dans une
1055
qui consisterait à les racheter un peu plus cher
que
ce que le concurrent offre. C’est un moyen d’essayer de pallier les e
1056
nsisterait à les racheter un peu plus cher que ce
que
le concurrent offre. C’est un moyen d’essayer de pallier les effets s
1057
les effets sans toucher les causes. Si on estime
qu’
un certain échange devient un exode dommageable, je suis d’avis qu’on
1058
ange devient un exode dommageable, je suis d’avis
qu’
on essaie d’y remédier en renversant le flux, c’est-à-dire en créant d
1059
es gens suffisamment, il ne faut pas vous étonner
qu’
ils aillent ailleurs plutôt que de crever de faim. Mais ce préalable é
1060
t pas vous étonner qu’ils aillent ailleurs plutôt
que
de crever de faim. Mais ce préalable étant acquis, comment renverser
1061
ctuel, c’est aussi difficile à faire et à définir
qu’
une œuvre d’art, parce que c’en est une ! Une œuvre d’art, il faut la
1062
utre, ce n’est pas le tout de la décrire. Tout ce
que
je puis proposer ici, ce sont quelques conditions qui me paraissent r
1063
. Mach tout à l’heure. Je peux très bien imaginer
qu’
un physicien, ou un médecin, ou un dentiste, soit retenu à Genève, mêm
1064
soit retenu à Genève, même s’il y est moins payé
qu’
ailleurs, parce qu’il n’est pas uniquement physicien, il n’est pas uni
1065
n, sur des enquêtes rapides relatives à l’intérêt
que
les gens ont ou n’ont pas pour certaines émissions, et l’on transform
1066
missions selon la quantité des réponses. Je crois
que
c’est faux. Il faudrait que la télévision et la radio aient l’héroïsm
1067
es réponses. Je crois que c’est faux. Il faudrait
que
la télévision et la radio aient l’héroïsme, pendant deux ou trois ans
1068
ou trois ans, d’aller à contre-courant. Je crois
que
ce serait payant assez vite. Il y aurait beaucoup à dire là-dessus, m
1069
traction, de ce climat intellectuel. Il me semble
que
l’Université est mieux placée que n’importe quel autre corps ou profe
1070
l. Il me semble que l’Université est mieux placée
que
n’importe quel autre corps ou profession ou ensemble de professions,
1071
buer à cette création intellectuelle. À condition
que
l’Université ne soit pas uniquement la juxtaposition de quelques écol
1072
comble du jour au lendemain, mais il ne faut pas
qu’
elle soit uniquement cela : quelques écoles de formation professionnel
1073
e et sans rien à se dire entre elles. Il faudrait
que
l’Université devienne ou redevienne le lieu vivant de création intell
1074
bats sur le fond. Je vais lâcher le mot : il faut
que
l’Université redevienne le lieu de contestation. Mais attention : con
1075
uis sa création, au xiie siècle. Voilà une chose
qu’
on oublie complètement aujourd’hui. La méthode d’enseignement, de rech
1076
les sujets abordés. Et je vous prierai de croire
que
ce n’était pas toujours des sujets purement techniques ou de grammair
1077
Âge, on ne s’était autant occupé des universités
que
depuis qu’on a découvert qu’il fallait les réformer. Je souhaite que
1078
s’était autant occupé des universités que depuis
qu’
on a découvert qu’il fallait les réformer. Je souhaite que la réforme
1079
cupé des universités que depuis qu’on a découvert
qu’
il fallait les réformer. Je souhaite que la réforme universitaire dont
1080
découvert qu’il fallait les réformer. Je souhaite
que
la réforme universitaire dont on parle depuis des années, aboutisse v
1081
années, aboutisse vite, mais surtout je souhaite
qu’
on ne s’en tienne pas là. Car l’Université, à mon sens, a été, doit re
1082
sionnelle — mais dans certains cours. Il faudrait
qu’
il soit admis que la substance même de ces cours soit la remise en que
1083
dans certains cours. Il faudrait qu’il soit admis
que
la substance même de ces cours soit la remise en question permanente
1084
lités de notre société, dont je refuse absolument
que
ce soit simplement l’industrie qui les fixe. […] M. de Rougemont :
1085
de cette table. Tout d’abord, M. Renold. Je crois
que
nous sommes presque entièrement d’accord. J’ai peut-être un peu forcé
1086
un peu trop simplifié dans votre sens, en disant
que
, pour vous, le climat, c’est « un financement + une organisation ». J
1087
t rien sans ça. L’organisation aussi. Mais croire
qu’
un climat, c’est un financement + une organisation, ça c’est croire ce
1088
inancement + une organisation, ça c’est croire ce
que
croient les Américains. Eh bien, j’estime que l’Europe se doit d’appo
1089
ce que croient les Américains. Eh bien, j’estime
que
l’Europe se doit d’apporter quelque chose de plus. Ce plus, c’est ce
1090
apporter quelque chose de plus. Ce plus, c’est ce
que
j’appelle « œuvre d’art », faute de pouvoir traiter cet immense sujet
1091
sens de la vie, une certaine saveur, ce qui fait
que
, moi, je suis rentré en Europe, par exemple. Ce n’est pas du tout que
1092
ntré en Europe, par exemple. Ce n’est pas du tout
que
j’aie été racheté par l’État de Genève (n’est-ce pas M. Lalive ?) je
1093
uis venu ici parce que j’y trouvais quelque chose
que
je ne trouvais pas en Amérique, quelque chose qu’il m’est difficile d
1094
que je ne trouvais pas en Amérique, quelque chose
qu’
il m’est difficile de vous décrire, et si vous voulez en avoir une bon
1095
cription, adressez-vous aux Américains qui disent
qu’
ils voudraient vivre en Europe. Ils vous expliqueront cela très bien.
1096
e Rougemont : Ce n’est pas tellement étonnant, vu
que
l’effort culturel des Américains n’est pas porté vers la création de
1097
n. D’ailleurs, nous ne pouvons pas dire en Suisse
que
nous soyons complètement indemnes de toute influence américaine. Il y
1098
nce américaine. Il y en a tout de même, ne fût-ce
que
le jazz. Nous avons pris aux États-Unis beaucoup de choses très impor
1099
ion, le bicaméralisme, importé des États-Unis. Ce
qu’
a dit M. Mach m’a paru un peu curieux. Il a parlé de mon optimisme béa
1100
pe optimiste — ou pessimiste d’ailleurs. Je crois
que
vous avez parfaitement raison dans tout ce que vous avez dit sur votr
1101
is que vous avez parfaitement raison dans tout ce
que
vous avez dit sur votre domaine de recherche scientifique. J’avais pr
1102
le danger, qui serait un danger un peu américain,
qu’
il y aurait à isoler complètement votre recherche scientifique de tout
1103
péenne, si vous voulez, mais je persiste à penser
que
c’est cela que nous devons au monde, et notamment aux Américains qui
1104
voulez, mais je persiste à penser que c’est cela
que
nous devons au monde, et notamment aux Américains qui nous le demande
1105
stituer les États-Unis d’Europe, sous quelque nom
que
ce soit, il faut commencer maintenant… Debout l’Europe ! » Il y a vin
1106
lement dans le sens de la nation.25 Il est vrai
que
le même André Malraux quelques jours plus tard, interrogé par des jeu
1107
t importante de notre temps.26 Mais qui ne voit
que
ceci s’oppose à cela, dramatiquement, — que cette « réalité fondament
1108
voit que ceci s’oppose à cela, dramatiquement, —
que
cette « réalité fondamentale du siècle » que serait la nation, est pr
1109
t, — que cette « réalité fondamentale du siècle »
que
serait la nation, est précisément celle qui fait obstacle à cette « s
1110
blement importante de notre temps » ? Qui ne voit
que
si l’Europe qu’appelait Winston Churchill n’est pas faite, c’est parc
1111
te de notre temps » ? Qui ne voit que si l’Europe
qu’
appelait Winston Churchill n’est pas faite, c’est parce que les nation
1112
hill n’est pas faite, c’est parce que les nations
qu’
exalte le ministre d’État du général de Gaulle s’y opposent encore irr
1113
e nations « souveraines » ? Quand on nous affirme
que
le xxe siècle ne sera pas celui du triomphe de l’internationale, com
1114
it prévu, mais bien le siècle des nations, est-ce
qu’
on s’en félicite, ou bien est-ce qu’on dit cela comme on dirait de tel
1115
tions, est-ce qu’on s’en félicite, ou bien est-ce
qu’
on dit cela comme on dirait de telle année : — C’était l’année de ma p
1116
ée de ma pneumonie ? Autre chose est de constater
que
la réalité politique de notre temps est encore la nation, autre chose
1117
on, autre chose est de s’en féliciter, d’affirmer
qu’
on ne peut rien y changer, que c’est là-dessus qu’il faut bâtir, et d’
1118
liciter, d’affirmer qu’on ne peut rien y changer,
que
c’est là-dessus qu’il faut bâtir, et d’appeler ça du réalisme. Le can
1119
qu’on ne peut rien y changer, que c’est là-dessus
qu’
il faut bâtir, et d’appeler ça du réalisme. Le cancer et les maladies
1120
importantes de notre temps, mais je ne pense pas
que
le réalisme consiste à le proclamer avec fierté. Il ne consiste pas n
1121
à faire en sorte qu’elles cessent d’être réelles.
Que
les nations soient encore bien réelles et très fortes à quelques égar
1122
le démontre avec une évidence presque écrasante.
Que
les nations soient en même temps mal adaptées (pour dire le moins) à
1123
de notre temps. Ils ne me semblent pas confirmer
que
« l’évolution joue dans le sens de la nation », mais bien plutôt que
1124
oue dans le sens de la nation », mais bien plutôt
que
nous atteignons le stade de crise finale d’une forme d’association qu
1125
mé l’Europe du xixe siècle, mais qui ne pourrait
que
tuer l’Europe du xxe siècle si elle n’est pas surmontée et remplacée
1126
à temps. La grande force de l’État-nation, c’est
que
les hommes et les femmes d’aujourd’hui qui ont passé par l’école et c
1127
l’école et croient savoir l’histoire s’imaginent
qu’
il y a toujours eu des États, que les nations sont immortelles (en tou
1128
oire s’imaginent qu’il y a toujours eu des États,
que
les nations sont immortelles (en tout cas la leur !), que rien d’autr
1129
nations sont immortelles (en tout cas la leur !),
que
rien d’autre n’est donc possible, et que d’ailleurs l’État, ou la nat
1130
leur !), que rien d’autre n’est donc possible, et
que
d’ailleurs l’État, ou la nation, c’est l’aboutissement final, logique
1131
é de leur collusion moderne. Il faudrait rappeler
qu’
après la préhistoire qui ne connaissait que les tribus et leurs clans,
1132
ppeler qu’après la préhistoire qui ne connaissait
que
les tribus et leurs clans, l’histoire commence avec les grands empire
1133
arlemagne, puis Saint-Empire. Il faudrait montrer
que
les premiers États nationaux n’apparaissent qu’après tout cela, au cœ
1134
r que les premiers États nationaux n’apparaissent
qu’
après tout cela, au cœur du Moyen Âge, et se forment aux dépens de l’E
1135
é du globe, de l’universalité du genre humain. Et
que
la naissance de la première nation, la France, peut être datée de cet
1136
e est empereur en son royaume », ce qui veut dire
que
le chef de l’État d’un domaine de moyenne grandeur centré sur l’Île-d
1137
en Avignon, et puis réalise aux dépens des Juifs
qu’
il fait dépouiller et des chevaliers du Temple qu’il fait exécuter, un
1138
qu’il fait dépouiller et des chevaliers du Temple
qu’
il fait exécuter, une merveilleuse opération sur l’or ! (si l’on veut
1139
e toutes les instances universelles, — sauf celle
que
l’on peut contrôler — sera vite suivi par les rois d’Angleterre et d’
1140
ntôt imité dans toute l’Europe monarchique autant
que
républicaine, et au xxe siècle, dans le reste du monde. Qu’est-ce en
1141
caine, et au xxe siècle, dans le reste du monde.
Qu’
est-ce en somme que l’État-nation de modèle napoléonien ? C’est le rés
1142
iècle, dans le reste du monde. Qu’est-ce en somme
que
l’État-nation de modèle napoléonien ? C’est le résultat d’une volonté
1143
x, si l’on y réfléchit, mais c’est précisément ce
que
l’on ne fait pas, parce que l’État-nation est devenu sacré, intangibl
1144
tangible dans nos esprits, qui résistent à l’idée
qu’
il pourrait n’être après tout qu’une forme transitoire, comme tant d’a
1145
sistent à l’idée qu’il pourrait n’être après tout
qu’
une forme transitoire, comme tant d’autres. On enseigne son catéchisme
1146
l’État peuvent mettre à mort leurs hérétiques, ce
que
ne peuvent plus faire les Églises, Dieu merci. L’État-nation centrali
1147
mplet, suffisant en lui-même tant pour sa culture
que
pour son économie, et seul juge non seulement de ses intérêts mais de
1148
7. C’est donc une partie qui se veut aussi grande
que
le tout. L’État-nation moderne, unitaire et absolu n’est enfin qu’un
1149
at-nation moderne, unitaire et absolu n’est enfin
qu’
un empire manqué. Voilà la vérité fondamentale du xxe siècle des nati
1150
pos une constatation des plus paradoxales : c’est
que
, si tous les États-nations unitaires ont été et sont des empires manq
1151
rdons maintenant ces États-nations unitaires tels
qu’
ils sont dans leur être et leur agir concret, non plus dans leurs prét
1152
lus dans leurs prétentions. Nous verrons aussitôt
que
tous, sans exception, sont à la fois trop petits et trop grands. Ils
1153
t et de l’Ouest leur pose un dilemme aussi simple
qu’
inexorable : — ou bien ils se contentent de proclamer leur volonté far
1154
lement satellisés un à un ; — ou bien ils font ce
qu’
il faut pour pouvoir résister, c’est-à-dire qu’ils décident de résiste
1155
ce qu’il faut pour pouvoir résister, c’est-à-dire
qu’
ils décident de résister tous ensemble, et alors ils renoncent à leur
1156
fédération qui les protège. C’est ce second parti
qu’
ont adopté en 1848 nos vingt-cinq petits États suisses et bien leur en
1157
fédération politique. Force m’est donc de penser
qu’
il y a quelque chose d’essentiel dans leur nature même, quelque chose
1158
ui les retient de s’unir. Et nous voyons mieux ce
que
c’est, maintenant que nous avons défini l’ambition profonde et consti
1159
ir. Et nous voyons mieux ce que c’est, maintenant
que
nous avons défini l’ambition profonde et constitutive de l’État-natio
1160
on et par structure, non par méchanceté ou bêtise
que
les États-nations sont impropres à l’union. Leurs relations normales
1161
ts-nations paraissant insoluble en théorie autant
qu’
il le reste en pratique dans l’état actuel de ses données29, il va fal
1162
-à-dire chercher à fonder l’union sur autre chose
que
les États-nations. Renoncer à résoudre le problème de l’union, c’est
1163
le problème de l’union, c’est faire, en somme, ce
que
l’on fait actuellement, c’est-à-dire laisser nos États continuer à pr
1164
: L’union, pour deux États-nations, n’est jamais
qu’
une mesure de fortune, voire un expédient désespéré (comme par exemple
1165
ll en juin 1940), autrement dit : ce n’est jamais
qu’
une concession douloureuse à la nécessité, quand on se sent trop faibl
1166
veut unir l’Europe, il faut partir d’autre chose
que
de ses facteurs de division, il faut bâtir sur autre chose que sur le
1167
cteurs de division, il faut bâtir sur autre chose
que
sur les obstacles à l’union ; opérer sur un autre plan que celui-là,
1168
es obstacles à l’union ; opérer sur un autre plan
que
celui-là, précisément, où le problème se révèle insoluble. Il faut se
1169
e nouveau, à la fois plus grande et plus complexe
que
la cnté antique, mais plus dense, mieux structurée et offrant un meil
1170
frant un meilleur milieu de participation civique
que
la nation telle que nous l’a léguée le siècle dernier : — la région.3
1171
lieu de participation civique que la nation telle
que
nous l’a léguée le siècle dernier : — la région.31 Il n’est rien do
1172
s’occupent avec plus de passion en Europe. C’est
qu’
en effet, il s’agit là d’un phénomène complexe et neuf, que nous voyon
1173
et, il s’agit là d’un phénomène complexe et neuf,
que
nous voyons lentement prendre forme au seuil de ce dernier tiers de n
1174
ent peu à peu sur le fond chaotique de la société
que
le xixe siècle a laissé se faire au petit bonheur, la société stato-
1175
re de la combinaison de forces les plus diverses,
qu’
il s’agit de capter et d’harmoniser, dont les principales sont : l’exp
1176
is au contraire par la force de rayonnement de ce
qu’
on appelle une « métropole », grande ville ou complexe de villes moyen
1177
tenter de faire sentir le concret du problème tel
que
je l’ai découvert, voici un exemple vécu. Il y a quelques années, je
1178
e me trouvais le seul non-Français : j’en conclus
que
j’étais censé représenter dans le colloque l’idée européenne. Invité
1179
er tout au début, j’improvisais donc sur le thème
que
voici : Il peut sembler curieux, Messieurs, qu’à l’âge de l’union de
1180
que voici : Il peut sembler curieux, Messieurs,
qu’
à l’âge de l’union des nations et des intégrations continentales, vous
1181
moins autonome. L’effort d’union et votre effort,
qu’
on soupçonnera de vouloir la division, peuvent sembler logiquement con
1182
les vois complémentaires. Car au fur et à mesure
que
se dévalorisent les frontières de nos États-nations, les régions vont
1183
d’un seul tenant quant au sous-sol, sous prétexte
qu’
à la surface les gens parlaient allemand d’un côté, français de l’autr
1184
lations d’échanges aussi nombreuses et fréquentes
que
possible. Elles seront amenées à se grouper selon leurs affinités, se
1185
s réduites au rôle mineur et invisible à l’œil nu
que
jouent les délimitations entre les cantons suisses : simples commodit
1186
gendarmerie. Et c’est sur ces régions, Messieurs,
que
nous bâtirons l’Europe, non sur les cadres en bonne partie vidés des
1187
rent un écho pour moi des plus inattendus : c’est
qu’
elles venaient à la rencontre non seulement des souhaits des organisat
1188
que, déjà beaucoup plus large et solidement fondé
que
je n’osais l’espérer. Au cours de ces dernières années, on a vu se mu
1189
r notre indépendance nationale ne peut être menée
que
dans le cadre de l’Europe unie, laquelle sera fédéraliste ou ne sera
1190
pression quasi coloniale de la région si ancienne
que
Saint-Brieuc était l’endroit tout indiqué pour tenir le premier collo
1191
es : 1° De Gaulle lui-même ne peut tenir en main…
que
son État. Or la souveraineté de l’État est devenue tout illusoire, qu
1192
n régionaliste naissante, il y a bien autre chose
qu’
un mécontentement accidentel, il y a de sérieuses nécessités, appelant
1193
très loin… Ce sont ces nécessités qui expliquent
que
le Marché commun ait cru devoir convoquer le très important colloque
1194
que de Bruxelles sur les économies régionales, et
que
ses six États-nations membres y aient pris part. C’est l’arriération,
1195
la régionalisation du territoire. On s’est aperçu
que
ce sous-développement provenait directement de la structure de l’État
1196
rplus liée au sud de l’Angleterre. Or Lille n’est
qu’
un exemple entre bien d’autres : nous avons, tout près d’ici, celui de
1197
is rayonnant sur trois pays. Imaginez maintenant
que
dans ces métropoles, peu à peu, se forment ces centres de décision ré
1198
e décision régionaux dont tout le monde parle, et
qu’
ils acquièrent de la force : lorsqu’ils auront pris en fait (sinon en
1199
droit) plus d’importance économique et culturelle
que
les capitales anciennes, la révolution régionale sera faite, et du mê
1200
pe se révélera immédiatement possible. Il se peut
que
cette évolution exige bien plus de temps que les pionniers de l’Europ
1201
peut que cette évolution exige bien plus de temps
que
les pionniers de l’Europe unie ne l’exigeaient et ne l’annonçaient da
1202
e unité géographique beaucoup plus opérationnelle
que
le département et même que la nation. Qu’une telle déclaration ait p
1203
up plus opérationnelle que le département et même
que
la nation. Qu’une telle déclaration ait pu être faite en France, et
1204
nnelle que le département et même que la nation.
Qu’
une telle déclaration ait pu être faite en France, et cela précisément
1205
onomies régionales, voilà qui nous donne à penser
que
la révolution régionaliste, condition de l’Europe unie, est bien plus
1206
condition de l’Europe unie, est bien plus avancée
que
nous n’osions l’espérer. Toutefois, ne nous y trompons pas : le proce
1207
ur le jour. Nous n’en sommes encore, aujourd’hui,
qu’
au stade de la prise de conscience du phénomène région et des motifs d
1208
peine avons-nous pris la mesure des perspectives
qu’
il nous invite à explorer, notamment institutionnelles. Des réalisatio
1209
ent être décrétées sans transition. Il est normal
qu’
elles exigent une longue période de mise en place silencieuse des réal
1210
’une génération, vingt à trente ans, en admettant
que
tout se passe bien plus vite de nos jours qu’à l’aube grecque de notr
1211
ant que tout se passe bien plus vite de nos jours
qu’
à l’aube grecque de notre Histoire. Je ne cite pas la Grèce par hasard
1212
communauté aussi nouvelle dans notre civilisation
que
le fut au vie siècle avant notre ère l’apparition de la polis, dans
1213
, dans la société grecque archaïque. Et l’on sait
que
la polis devint en moins d’un siècle l’unité de base de toute vie soc
1214
hui se partager le monde. Nous n’en sommes encore
qu’
à la petite aube de la formation des régions en tant qu’éléments de ba
1215
a pas lu Renan, de nos jours… Et cette succession
qu’
il annonce, ce remplacement des États-nations par la fédération, cela
1216
du fameux « mouvement de l’Histoire ». Il faudra
que
la succession, le remplacement s’opèrent dans les esprits d’abord, pa
1217
ont vécu tous nos ancêtres depuis des siècles, et
que
nous ont inculquées tous les classiques de la philosophie politique.
1218
et de cette religion civique dont je vous disais
qu’
elle s’était substituée à la foi chrétienne dans l’esprit des masses.
1219
mutations de concepts et de catégories politiques
qu’
exige la prise de conscience du phénomène régional opposé au stato-nat
1220
suite en entendant cette définition de la région
que
j’emprunte aux travaux du colloque de Bruxelles : L’activité économi
1221
ux et volontiers ombrageux. Louis Armand remarque
que
« la notion d’indépendance économique a changé complètement de conten
1222
t chercher à être aussi indispensables aux autres
que
les autres nous sont indispensables.36” » Je proposerais, pour ma par
1223
ndispensables.36” » Je proposerais, pour ma part,
que
l’on substitue au terme d’indépendance celui d’autonomie, qui a l’ava
1224
es États-nations. Enfin, il est une grande notion
que
les régions nous amèneront à mettre en lumière, c’est celle de la plu
1225
rsonne, soit d’un groupe ou d’une région. Au lieu
que
l’État-nation voulait tout faire coïncider dans le même cadre : cultu
1226
envers le Prince maître de tout, et d’autant plus
qu’
il devenait anonyme et sans visage — dans le monde régional, la libert
1227
ccès, le triomphe du fédéralisme intégral. Depuis
qu’
il est question d’une entrée éventuelle de la Suisse dans le Marché co
1228
a Suisse dans le Marché commun, j’entends répéter
qu’
elle y perdrait sa souveraineté, qu’elle s’y perdrait. Et si je parle
1229
tends répéter qu’elle y perdrait sa souveraineté,
qu’
elle s’y perdrait. Et si je parle d’une fédération basée sur les régio
1230
ne fédération basée sur les régions, on me répond
que
ce serait pire encore, et que la Confédération dans ce cas serait « d
1231
gions, on me répond que ce serait pire encore, et
que
la Confédération dans ce cas serait « dissociée ». Je réponds qu’il e
1232
tion dans ce cas serait « dissociée ». Je réponds
qu’
il est temps, qu’il est grand temps que nous cessions d’opposer un ref
1233
serait « dissociée ». Je réponds qu’il est temps,
qu’
il est grand temps que nous cessions d’opposer un refus quasi automati
1234
Je réponds qu’il est temps, qu’il est grand temps
que
nous cessions d’opposer un refus quasi automatique à toutes les propo
1235
d’union un peu hardies, sous le double prétexte «
qu’
on n’est pas sûr qu’elles réussiront », ou bien « qu’on n’est pas sûr
1236
es, sous le double prétexte « qu’on n’est pas sûr
qu’
elles réussiront », ou bien « qu’on n’est pas sûr que cela servirait n
1237
on n’est pas sûr qu’elles réussiront », ou bien «
qu’
on n’est pas sûr que cela servirait nos intérêts ». Assez de cette pol
1238
elles réussiront », ou bien « qu’on n’est pas sûr
que
cela servirait nos intérêts ». Assez de cette politique fondée en fai
1239
litique fondée en fait sur la morale à courte vue
qu’
illustre l’anecdote du patriarche vaudois : il réunit ses fils autour
1240
leur dit : « Le secret de ma réussite tient à ce
que
j’ai fondé ma vie sur deux principes : Méfiance ! Méfiance ! » Politi
1241
l’État. Face au projet régionaliste, je voudrais
que
nous disions : Travaillons dans ce sens, car c’est celui de nos tradi
1242
es. Les régions de demain seront les petits États
que
nous avons toujours voulu défendre, et à raison. Tout ce qui s’est fa
1243
ublime, par les infimes ; et de divin par un bébé
qu’
on ne savait trop comment déclarer… Les régions de demain seront en mê
1244
r, comme l’ont fait nos cantons, quand ils ont vu
que
l’union fédérale était la condition de leur survie individuelle. Les
1245
tat (culturels, ethniques, économiques, civiques)
qu’
avaient effacés nos nations écrasant toute diversité, et les avantages
1246
othèse de travail régionaliste : on verra bien ce
qu’
elle donne pour nous, quand nous aurons aidé au succès de l’entreprise
1247
moins je l’espère. Belle raison d’être nationale
que
celle qui dépendrait des seuls douaniers et qui serait à la merci d’u
1248
s, qui est sa région naturelle, croit-on vraiment
que
cela lui ferait perdre son caractère de cité suisse plus que ne le fo
1249
i ferait perdre son caractère de cité suisse plus
que
ne le font sa population étrangère et les institutions internationale
1250
ion étrangère et les institutions internationales
qu’
elle est fière d’accueillir ? Non, même « dissociée » économiquement,
1251
ité propre vis-à-vis de l’Europe. Je ne crois pas
que
nous ayons mission de préconiser urbi et orbi la transposition pure e
1252
e date un peu : c’est un fédéralisme d’États plus
que
de fonction, de défense plus que de coopération. Aujourd’hui, le fédé
1253
sme d’États plus que de fonction, de défense plus
que
de coopération. Aujourd’hui, le fédéralisme doit se détacher, comme j
1254
fédéraliste, qui les fait dépasser en pratique ce
qu’
il y a de périmé en doctrine dans la Constitution de 1848. Voilà sans
1255
dans la Constitution de 1848. Voilà sans doute ce
que
les Suisses peuvent donner de meilleur à l’Europe qui se fait : non p
1256
r politique pour l’Europe et le monde, mais mieux
que
cela : un exemple vécu. 25. Gazette littéraire , Lausanne, 28 oct
1257
dmettre de bonne foi, à moins d’être un imbécile,
qu’
une seule d’entre elles consentira jamais à remettre une part de ses p
1258
de l’ouverture de l’autoroute Paris-Lille. 34. «
Qu’
est-ce qu’une nation ? », Paris, 1882. 35. Commission de la CEE, Docu
1259
ture de l’autoroute Paris-Lille. 34. « Qu’est-ce
qu’
une nation ? », Paris, 1882. 35. Commission de la CEE, Documents de l
1260
l’Europe ». Quel est le souvenir le plus marquant
que
vous conservez de cette grande manifestation européenne ? Alternance
1261
nie, et le sentiment, dès l’ouverture solennelle,
que
désormais un mécanisme a été mis en marche et nous porte, mais pas né
1262
ngrès sans précédent : je ne voudrais évoquer ici
qu’
un incident de couloir dont personne n’a parlé, et dont je fus alors l
1263
: je ne prendrais en charge la section culturelle
que
s’il était bien entendu qu’il lui reviendrait de dire le sens de tout
1264
la section culturelle que s’il était bien entendu
qu’
il lui reviendrait de dire le sens de toute l’entreprise, d’inspirer e
1265
nisation du congrès. Celui-ci décida, le 8 avril,
que
« le texte appelé jusqu’ici préambule constituerait un Message aux E
1266
nger, qui m’écrivait le 29 mars : Je suis d’avis
que
cette déclaration doit fournir le point de départ de notre action com
1267
au de fort papier parcheminé, et il était entendu
qu’
au terme du congrès, tous les participants, Churchill en tête, signera
1268
ngrès, je fus appelé d’urgence par Duncan Sandys,
que
je trouvai flanqué de son beau-frère Randolph Churchill (qui n’était
1269
son beau-frère Randolph Churchill (qui n’était là
qu’
à titre de journaliste). Ils m’apprirent que le Message aux Européens
1270
it là qu’à titre de journaliste). Ils m’apprirent
que
le Message aux Européens ne pourrait être présenté à la séance fina
1271
te phrase : « Nous voulons une défense commune »,
que
le congrès n’avait pas discutée et qui ne figurait pas dans les résol
1272
, sans doute anglais, dont ils affirmaient savoir
qu’
ils s’opposeraient à mon Message à cause de la phrase sur la défense
1273
it assisté au début de l’incident, revint me dire
que
tous les syndicalistes, Français en tête, quitteraient le congrès à g
1274
a demande, vint arbitrer le différend : on décida
que
je lirais le Message , mais en omettant la petite phrase. Ainsi fut
1275
rétariat de la presse38. C’est à ce moment précis
que
les maîtres du congrès retirèrent la parole au peuple européen, pour
1276
a donner à des ministres, qui en ont fait l’usage
que
l’on sait. 2. Ne vous semble-t-il pas paradoxal qu’en mai 1948, alors
1277
e l’on sait. 2. Ne vous semble-t-il pas paradoxal
qu’
en mai 1948, alors que n’existaient encore ni le Conseil de l’Europe,
1278
édération européenne apparaissait plus accessible
qu’
aujourd’hui ? Nous imaginions une Europe constituée par les « forces v
1279
la fédération sur d’autres éléments constitutifs
que
les États-nations inutilisables et irréformables (mais nous n’avions
1280
» (mais non les fédéralistes) ont nourri l’espoir
que
le Conseil de l’Europe — créé à la suite du congrès de La Haye — cond
1281
de ces dernières années, pensez-vous aujourd’hui
que
les Communautés peuvent constituer l’amorce d’une fédération européen
1282
amorce d’une fédération européenne ? Estimez-vous
que
l’on puisse encore compter sur les gouvernements nationaux pour « fai
1283
l’Europe n’a pas progressé d’un centimètre depuis
que
Churchill (en 1946 à Zurich) parlait de son urgence dramatique. La pr
1284
voirs réels, à l’échelle de l’Europe et du monde,
que
négatifs. Ils peuvent encore soit refuser les mesures d’union qui s’i
1285
as, ils ne le pourraient pas. Et il faut redouter
que
les Communautés, bridées par les nations qui les composent, loin d’am
1286
on présent ? Son impuissance avérée tient au fait
qu’
il a opté, dès le lendemain de La Haye, pour les notables contre les m
1287
Haye, pour les notables contre les militants. Ce
qu’
il a initié dans le domaine économique et mis sur pied dans le domaine
1288
res dans les conseils directeurs du Mouvement. Ce
qu’
il a proclamé avec une si louable mesure, et, il faut bien le reconnaî
1289
qui n’ont cessé de répéter, bien avant de Gaulle,
que
les choses étant ce qu’elles sont, il convenait d’adapter les exigenc
1290
er, bien avant de Gaulle, que les choses étant ce
qu’
elles sont, il convenait d’adapter les exigences de l’union aux intérê
1291
r nos frais. Mais j’appelle espérance l’intuition
qu’
il existe des moyens de rejoindre le but que l’on veut atteindre. Et c
1292
ition qu’il existe des moyens de rejoindre le but
que
l’on veut atteindre. Et cette espérance-là, je l’éprouve aujourd’hui
1293
espérance-là, je l’éprouve aujourd’hui plus vive
que
jamais ; s’il est vrai qu’on ne peut bâtir sur de l’ancien (les États
1294
aujourd’hui plus vive que jamais ; s’il est vrai
qu’
on ne peut bâtir sur de l’ancien (les États-nations), mais seulement s
1295
uis imposer leur existence. Bâtir sur autre chose
que
sur les cadres durs mais en train de se vider des États-nations, cela
1296
engagements de La Haye. 37. Il est remarquable
que
Retinger, qui ne passait pas pour fédéraliste, ait été le premier à p
1297
38. J’en ai récupéré plus tard deux exemplaires
que
je conserve dans les archives du Centre européen de la culture. 39.
1298
rue ou printemps de 1967. Je ne serais pas étonné
que
d’autres fédéralistes l’aient inventée pour leur part à la même époqu
1299
ialectique. Ce discours méandrique nous dit aussi
qu’
un fleuve est à la fois mouvement perpétuel et dessin permanent, flot
1300
sans fin dans une forme arrêtée, celle des rives
qu’
il a formées, événement toujours fuyant et qui fascine, figure origine
1301
nge sans relâche dans un trajet presque immuable,
qu’
il faudra plusieurs millénaires pour déplacer de quelques champs… Deu
1302
éraclite me proposent une idée de l’Europe, telle
qu’
on l’a quelquefois définie par ses vertus paradoxales d’innovation au
1303
depuis l’aurore des temps, bien avant l’homme ! —
que
ce réseau de fleuves et de rivières qui a si profondément découpé, de
1304
l’usage de l’homme. Ils divisent et isolent plus
qu’
ils ne mettent en relations civilisantes. Ils inondent plus qu’ils n’i
1305
tent en relations civilisantes. Ils inondent plus
qu’
ils n’irriguent. Mais les fleuves et rivières de l’Europe sont pareils
1306
fille des fleuves ! IV Rien de plus fluvial
que
la Suisse. Si l’Europe est la terre des ports, où les fleuves ont for
1307
où les fleuves ont formé plus de baies favorables
que
n’en comptent ensemble les plus grands continents, la Suisse est la t
1308
ouvenir de Besenval et celui de Casanova, Soleure
qu’
un pasteur indigné décrit comme « un centaure franco-allemand », mais
1309
ngt lacs et vingt rivières en un courant puissant
qu’
elle jette au large Rhin, rassemblons en un seul faisceau nos argument
1310
cette « péninsule occidentale de l’Asie », ainsi
que
l’on nommait l’Europe dans les traités de géographie, au xviiie sièc
1311
tes, et seulement suisse : à cause de cela, mieux
que
toute autre — Rhône ou Rhin, Danube ou Adige —, elle me paraît illust
1312
pparaît alors d’une plus forte densité européenne
que
la Suisse : autour de son cœur, quatre langues et autant d’accents qu
1313
r de son cœur, quatre langues et autant d’accents
que
de vallées, mais aussi l’origine de quatre grands systèmes de ramific
1314
en en Suisse n’est suisse avec plus de robustesse
que
cette rivière germano-celte romanisée qui porte le nom même du cours
1315
e et sur la force originante —, l’Aar gothique et
qu’
on retrouve dans toute l’Europe, mais ici tirant après soi un r qui ro
1316
uelque part mais pour être-en-voyage, absolument,
que
parfois je quitte mon lieu. Un certain état d’âme, d’alerte au monde
1317
re. Mais voyager en Grèce est une autre aventure.
Qu’
on le veuille et le sache ou non, c’est un itinéraire spirituel que le
1318
et le sache ou non, c’est un itinéraire spirituel
que
le hasard propose et dont les mythes disposent, si peu que l’on y prê
1319
des prises de conscience ; et il n’a d’autre fin
que
d’être parcouru. Le voilier — un schooner de vingt-deux-mètres — cher
1320
n schooner de vingt-deux-mètres — cherche la voie
qu’
il va tracer sur l’eau. Nous venons de quitter Poros, non loin des por
1321
s parois monumentales. Cet espace est pourtant ce
que
l’on voudrait « prendre », mais aucun objectif ne pourra l’enregistre
1322
mythe dans l’espace du rêve, et pour entendre ce
qu’
on voit ici. Épiant le lent progrès de la réminiscence. Le mot crime…
1323
t Désir, il va prendre la route de Thèbes — celle
que
rejoint à droite ce bref sentier — vers le carrefour fatal où il tuer
1324
silencieux… Tout paraît naturel mais à tel point
que
parfois une arrière-pensée se meut dans l’ombre : est-ce bien ainsi ?
1325
meut dans l’ombre : est-ce bien ainsi ? n’est-ce
que
cela ? n’y a-t-il Personne ? Ces grands buissons, ces murets de pierr
1326
Delphes s’est tue. Le sombre esprit ne parle plus
qu’
au silence monumental de la fontaine Castalie. (Plus tard, j’ai repri
1327
es communalistes, régionalistes et nationalistes,
qu’
on voit partout en plein essor, qu’il s’agisse de nations en instance
1328
nationalistes, qu’on voit partout en plein essor,
qu’
il s’agisse de nations en instance de divorce avec l’OTAN ou avec le P
1329
contre le contrat étatique (inégal à leurs yeux)
que
jadis ou naguère leur imposa l’élément formateur ou hégémonique de ch
1330
contradictoire, c’est en effet l’État-nation, tel
qu’
il est né de la Révolution et du Premier Empire, produit de la confisc
1331
siècle, l’État-nation européen nous apparaît, tel
que
les accidents de l’Histoire nous l’ont laissé, à la fois trop petit e
1332
et trop grand. Il est trop petit pour assurer ce
qu’
on persiste à nommer son indépendance et sa souveraineté absolue : car
1333
e et les accusent de colonialisme. Il est certain
que
la prétention à une politique indépendante, au plein sens du terme, n
1334
s du terme, ne saurait être soutenue à la rigueur
que
par la Chine, l’URSS et surtout les USA, s’ils acceptaient toutefois
1335
lus forts, dépendent autant de l’opinion mondiale
que
celle-ci du dollar ou de la télévision. Une interdépendance universel
1336
, je ne vois guère d’État-nation de type unitaire
que
ce double mouvement de convergence mondiale et de diversification loc
1337
ité et de sécurité auxquelles ne peuvent répondre
que
de grands espaces économiques constitués à la mesure des possibilités
1338
à des formules de type fédéraliste. À la question
que
je me posais sur la prophétie proudhonienne, voici donc une première
1339
s qui divisent notre humanité, je ne compte guère
que
deux douzaines d’États fédératifs, mais ils regroupent 40 % de la pop
1340
ulation du globe, et il est frappant de constater
qu’
on trouve parmi eux les plus grands États et les plus modernes des cin
1341
marchandises de qualités au moins diverses selon
qu’
il s’agit par exemple de l’empire soviétique, du Nigéria, ou de la Con
1342
te dans ces trois États officiellement fédératifs
que
dans les nations unitaires : en URSS, ce sont les autonomies régional
1343
a fédération des cantons suisses ! Il est certain
que
dans ces trois cas, c’est moins le fédéralisme qu’on est en droit d’i
1344
ue dans ces trois cas, c’est moins le fédéralisme
qu’
on est en droit d’incriminer que sa trahison pure et simple, ou son us
1345
ns le fédéralisme qu’on est en droit d’incriminer
que
sa trahison pure et simple, ou son usage mal compris, ou son blocage
1346
t de fédéralisme ! Et l’on est en droit de penser
que
l’application correcte de la méthode fédéraliste rétablirait bientôt
1347
Cette définition est assurément moins éclairante
que
les deux citations qui l’illustrent : 1) « Le fédéralisme était une d
1348
se reporter à son Littré quand il veut savoir ce
qu’
un mot signifie, la cause est jugée. Il s’agit d’un système qui est bo
1349
les sauvages et qui semble n’avoir été préconisé
que
par des traîtres à la République… Il est vrai que mon Littré date de
1350
que par des traîtres à la République… Il est vrai
que
mon Littré date de 1865 : « fédéralisme » y est encore qualifié de «
1351
ent dû suffire, semble-t-il, à clarifier un terme
que
le problème européen et nos situations nationales nous amènent à util
1352
uggérai au comité directeur d’un congrès européen
qu’
une journée fût réservée à des travaux sur le fédéralisme. Le représen
1353
t du Conseil de l’Europe tint à déclarer aussitôt
que
le terme de fédéralisme étant tabou à Strasbourg, il se verrait oblig
1354
adoptait ma proposition. Je compris par la suite
que
ce haut fonctionnaire tenait le fédéralisme pour un système d’unifica
1355
, c’est-à-dire très exactement le contraire de ce
qu’
il est. À l’inverse, le fédéralisme est assimilé par beaucoup à une at
1356
des autonomies locales ou régionales. C’est ainsi
qu’
un illustre homme d’État belge, et grand Européen, écrivait récemment
1357
alisme, ce n’est pas en se repliant sur elle-même
que
la Wallonie trouvera son salut. » Plus étonnant encore, en Suisse mêm
1358
ls ou de gardiens jaloux des traditions helvètes,
que
sera-ce ailleurs ? Le fédéralisme n’étant ni ceci, ni cela, mais la c
1359
xistence en tension de ceci et de cela, il semble
que
le danger d’interprétations partielles, donc ruineuses dans son cas,
1360
soit pour ainsi dire congénital. Or s’il est vrai
que
l’union de l’Europe est l’entreprise capitale de ce siècle et s’il es
1361
e capitale de ce siècle et s’il est vraisemblable
que
cette union sera fédérale ou ne sera pas, on sent tous les dangers qu
1362
fédérale ou ne sera pas, on sent tous les dangers
qu’
entraînent en fait les malentendus que j’ai dits et par suite l’import
1363
les dangers qu’entraînent en fait les malentendus
que
j’ai dits et par suite l’importance pratique de tout effort de clarif
1364
ais également valables et vitales, de telle sorte
que
la solution ne puisse être cherchée ni dans la réduction de l’un des
1365
en conflit tout en les composant de telle manière
que
la résultante de leur tension soit positive (on dirait, dans le langa
1366
a théorie des jeux de von Neumann et Morgenstern,
qu’
il s’agit de déterminer l’optimum en lequel se concilient deux maxima
1367
èmes et des solutions ainsi définies constitue ce
que
je nommerai la politique fédéraliste, au sens le plus large du terme.
1368
homme elle entend préparer ou éduquer, constatons
qu’
elle traduit une forme de pensée, une structure de relations bipolaire
1369
s dont le « modèle » nous est connu : c’est celui
qu’
ont élaboré les fondateurs de la philosophie occidentale dans le dialo
1370
quise sur le chaos de la masse indistincte autant
que
sur l’anarchie des individus isolés, qu’il s’agisse de réalités métap
1371
e autant que sur l’anarchie des individus isolés,
qu’
il s’agisse de réalités métaphysiques ou physiques, esthétiques ou pol
1372
t intégralement pour le fédéralisme, du moins tel
que
je l’entends, après avoir valu pour la Grèce des grands siècles avec
1373
une seule personne… » Abstraction faite de la foi
que
l’on accorde ou non à la substance de ces énoncés, je retiens que leu
1374
ou non à la substance de ces énoncés, je retiens
que
leurs formes et structures posent un certain type de relations, posen
1375
ce caractère va se transmettre à tous les groupes
qu’
il formera avec d’autres hommes, ses semblables. Ces groupes devront ê
1376
de l’œcuménisme n’est-il pas le même en sa forme
que
ceux que nous venons d’évoquer, puisqu’il consiste à concilier des co
1377
ménisme n’est-il pas le même en sa forme que ceux
que
nous venons d’évoquer, puisqu’il consiste à concilier des confessions
1378
liste d’une situation part du concret, en ce sens
que
d’abord elle considère la nature d’une tâche ou d’une fonction partic
1379
inentale ou mondiale, selon les cas), il ne reste
qu’
à désigner le niveau de compétence où seront prises les décisions rela
1380
oivent différer selon les tâches, j’entends selon
qu’
elles intéressent tous les hommes de toutes les régions, certains homm
1381
quelques régions, ou d’une seule. Je conviendrai
que
le nombre des combinaisons auxquelles peut conduire cette méthode a d
1382
ordinateurs vont prendre la relève. Lénine disait
que
la révolution communiste, c’était les soviets plus l’électricité. Pou
1383
grande phrase : « Le but de la société n’est pas
que
l’administration soit facile, mais qu’elle soit juste et éclairée. »
1384
n’est pas que l’administration soit facile, mais
qu’
elle soit juste et éclairée. » Nous allons voir, enfin, que nos critèr
1385
oit juste et éclairée. » Nous allons voir, enfin,
que
nos critères d’évaluation des dimensions et d’attribution des niveaux
1386
tude, née de l’absence de communication avec ceux
que
l’on côtoie comme s’ils n’étaient pas là. La solution consisterait à
1387
voir professionnel souvent d’autant plus rentable
qu’
il est plus étroitement spécialisé ; mais la révolte actuelle des étud
1388
litique — c’est le même mot, selon l’étymologie —
que
nous allons enfin retrouver le problème classique du fédéralisme : co
1389
our pouvoir se charger de tâches communes (telles
que
la défense, les affaires étrangères et la politique économique ou cer
1390
t permanent. Il y faut une méthode vivante, celle
que
j’ai dite : sans cesse évaluer à nouveau les dimensions des tâches à
1391
ntrations de forces proportionnées à la puissance
que
l’on veut obtenir et en même temps multiplier les petites unités de b
1392
du civisme, c’est dans cette dialectique concrète
que
sont en train de se former sous nos yeux, en Europe, plus d’une centa
1393
on par les auteurs classiques, n’était en réalité
qu’
un cas particulier d’une conception beaucoup plus large des relations
1394
ité, des relations publiques en général. C’est ce
qu’
avait bien vu le regretté Pierre Duclos, lorsqu’il relevait que « le f
1395
vu le regretté Pierre Duclos, lorsqu’il relevait
que
« le fédéralisme vit d’une vie que la forme institutionnelle dénommée
1396
qu’il relevait que « le fédéralisme vit d’une vie
que
la forme institutionnelle dénommée État ne suffit pas à qualifier et
1397
Et il ajoutait : Le fédéralisme est autre chose
qu’
une simple recette juridique ou politique : il est un des grands types
1398
de vie et de civilisation, capable, au même titre
que
le libéralisme, le socialisme ou la démocratie, d’alimenter la pensée
1399
gement des relations humaines, le fédéralisme tel
que
j’ai tenté de le définir ne fait que commencer. Il n’est pas matière
1400
éralisme tel que j’ai tenté de le définir ne fait
que
commencer. Il n’est pas matière historique, mais prospective. Il a pl
1401
historique, mais prospective. Il a plus d’avenir
que
de passé. [Suivent deux brèves interventions de MM. Léon Noël et J
1402
uestion sur confédération ou fédération. Je crois
que
toute l’histoire prouve que les confédérations sont des formules tran
1403
fédération. Je crois que toute l’histoire prouve
que
les confédérations sont des formules transitoires qui sont destinées
1404
dement si elles ne passent pas à la fédération et
qu’
en général les pays qui aujourd’hui s’appellent confédération sont des
1405
ne mesure d’opportunisme pour des gens qui voient
que
l’on ne peut pas continuer sans faire quelque chose dans le sens d’un
1406
ui n’osent pas aller jusqu’au bout. Vous avez dit
que
le sens civique, en Suisse, pouvait seul permettre le fédéralisme. Je
1407
déralisme. Je retournerai la proposition et dirai
que
, s’il y a un sens civique en Suisse, c’est dû précisément au système
1408
imensions sont celles d’un peuple de 50 millions,
qu’
est-ce qu’il se produit ? On vote, de temps en temps, sur de grandes o
1409
sont celles d’un peuple de 50 millions, qu’est-ce
qu’
il se produit ? On vote, de temps en temps, sur de grandes options gén
1410
. Je n’irai pas jusqu’à demander, comme Aristote,
que
les communes ne soient pas plus vastes que la portée de la voix d’un
1411
stote, que les communes ne soient pas plus vastes
que
la portée de la voix d’un homme criant sur l’agora, mais il faut gard
1412
tion de l’institution et du civisme. Si on trouve
qu’
il n’y a pas assez de civisme quelque part, le premier remède c’est d’
1413
ouvent la question. Il faudrait s’entendre sur ce
qu’
on appelle région. Je ne m’étendrai pas sur cette question complexe, m
1414
ai pas sur cette question complexe, mais je crois
que
la plupart des craintes que l’on a, en parlant de régions, viennent d
1415
mplexe, mais je crois que la plupart des craintes
que
l’on a, en parlant de régions, viennent de ce qu’on s’imagine une rég
1416
que l’on a, en parlant de régions, viennent de ce
qu’
on s’imagine une région comme un petit État-nation. C’est autre chose.
1417
comme le veulent ses promoteurs, on croit souvent
qu’
elle doit nécessairement coïncider avec une région politique. Pas du t
1418
s, du sous-sol et de l’état civil ou de la langue
qu’
on parle, et qui aboutit par exemple à la division de la région Ruhr-M
1419
nt au point de vue du sous-sol, d’après la langue
qu’
on parlait d’un côté ou de l’autre d’une frontière tracée à la surface
1420
r autre chose du côté des régions. Il est certain
que
le système stato-national actuel n’est plus tolérable, ne fonctionne
1421
d’œuvre, et avec les communes qui peuvent refuser
qu’
on ruine la vie d’une petite ville en la coupant en deux, par exemple.
1422
alisme, c’est-à-dire le respect poussé aussi loin
que
possible des diversités, devient possible, aujourd’hui, à cause de pr
1423
, c’est singulier, mais vous l’intimidez. » C’est
qu’
il ne m’était plus un dieu, et que j’étais jeune. Il s’efforçait trist
1424
imidez. » C’est qu’il ne m’était plus un dieu, et
que
j’étais jeune. Il s’efforçait tristement de lire Marx, et trouvait Ki
1425
Sa pensée n’a pour moi rien d’actuel et je doute
qu’
il en aille autrement pour mes cadets. Je serais tenté de dire : tant
1426
n de son « actualité » reste intéressante en ceci
que
Gide se persuadait que l’avenir seul lui ferait « gagner son procès e
1427
reste intéressante en ceci que Gide se persuadait
que
l’avenir seul lui ferait « gagner son procès en appel ». Or peu furen
1428
té sérieusement, des fondements de notre société,
que
son orthodoxie sexuelle. Puis le colonialisme français. Sur tout le r
1429
e, avec un sens critique d’autant plus exemplaire
que
les contestataires de 1968 ont la faiblesse insigne d’en faire fi. Ma
1430
rançaise des discours qui défiaient la syntaxe et
qu’
il fallait recomposer pour l’impression au Journal officiel. C’est qu’
1431
oser pour l’impression au Journal officiel. C’est
qu’
il pensait — et disait à ses proches — qu’il ne doit rien rester d’un
1432
. C’est qu’il pensait — et disait à ses proches —
qu’
il ne doit rien rester d’un bon discours, sauf la loi qu’il a fait vot
1433
e doit rien rester d’un bon discours, sauf la loi
qu’
il a fait voter. Quelle que soit la valeur littéraire que nous accordo
1434
discours, sauf la loi qu’il a fait voter. Quelle
que
soit la valeur littéraire que nous accordons aujourd’hui au bref ouvr
1435
fait voter. Quelle que soit la valeur littéraire
que
nous accordons aujourd’hui au bref ouvrage intitulé (non sans une pro
1436
nébranlable constance » des maréchaux n’a d’égale
que
« le sang-froid admirable » des deux empereurs, et l’énergie de leurs
1437
e sans réserve à leurs catégories. C’est le style
qu’
elles attendent, et après tout c’est bien ainsi qu’il faut parler de l
1438
u’elles attendent, et après tout c’est bien ainsi
qu’
il faut parler de la guerre telle qu’on l’exalte aussi longtemps qu’on
1439
t bien ainsi qu’il faut parler de la guerre telle
qu’
on l’exalte aussi longtemps qu’on ne l’a pas vue. Dulce bellum inexper
1440
de la guerre telle qu’on l’exalte aussi longtemps
qu’
on ne l’a pas vue. Dulce bellum inexpertis 41, fameux titre d’Érasme,
1441
, une intention de souligner le contraste avec ce
que
l’on va lire dans le reste du livre, comme pour nous faire comprendre
1442
e comprendre sans le dire : voilà la guerre telle
qu’
on la conte et qu’on la vante, et maintenant je vais vous dire ce qu’e
1443
le dire : voilà la guerre telle qu’on la conte et
qu’
on la vante, et maintenant je vais vous dire ce qu’elle est, telle que
1444
u’on la vante, et maintenant je vais vous dire ce
qu’
elle est, telle que je l’ai vue… Car voici que le récit quittant le st
1445
aintenant je vais vous dire ce qu’elle est, telle
que
je l’ai vue… Car voici que le récit quittant le style noble et conven
1446
ce qu’elle est, telle que je l’ai vue… Car voici
que
le récit quittant le style noble et convenu, tourne au plus sobre rep
1447
rémissent à la pensée d’être rongés par ces vers,
qu’
ils croient voir sortir de leur corps, et qui proviennent des myriades
1448
une poignée de charpie, je la trempe dans le seau
que
l’on porte derrière moi, et je presse l’eau de cette éponge dans l’ou
1449
familles. Peu à peu, les femmes du lieu « voyant
que
je ne fais aucune distinction de nationalité, suivent mon exemple en
1450
e vue de près et dans sa nue réalité : Il arrive
que
le cœur se brise parfois tout d’un coup, et comme frappé soudain d’un
1451
s tard, et il se borne à suggérer, dans une note,
que
si ces pages pouvaient faire naître, ou développer et presser la que
1452
lifiés pour une pareille œuvre ? Tel est l’homme
que
l’on a traité d’utopiste et d’illuminé, et auquel on a tant reproché
1453
tre plus prudent, plus modéré : il n’est question
que
« de quelques pas » et non pas de révolutionner mais simplement « d’a
1454
éliorer l’état de choses », d’ailleurs révoltant,
que
l’on vient d’évoquer avec une émotion si contagieuse. On ne saurait ê
1455
qui accepta de présider le premier Comité. Reste
que
rien n’eût été fait sans le Souvenir, ni sans l’impulsion créatrice d
1456
plus meurtrier du siècle depuis Waterloo : il n’a
qu’
une seule idée en tête, qui est d’approcher l’empereur et d’obtenir de
1457
« Société anonyme des Moulins de Mons Djemila »,
qu’
il a fondée. Mais d’autres soucis, ce jour-là, retiennent l’empereur.
1458
lières, de pouvoir assister aux scènes émouvantes
que
je me suis décidé à retracer. Ce n’est pas du tout Fabrice à Waterlo
1459
ces », dit-on, et l’on est pris par quelque chose
qu’
on ne cherchait pas, qui passionne bientôt plus que tout, apportant so
1460
u’on ne cherchait pas, qui passionne bientôt plus
que
tout, apportant souvent la misère, mais peu importe, pour prix d’une
1461
un jeune journaliste, Georg Baumberger, découvre
que
« le fondateur de la Croix-Rouge vit encore ! » Il va le voir à l’hôp
1462
ng, encore du sang, du sang partout. » ⁂ J’ai dit
qu’
on chercherait en vain, dans un Souvenir, la moindre note d’antimilita
1463
me implicite). Dunant se limite, par une tactique
que
je ne saurais croire toute inconsciente, à « attirer l’attention » su
1464
mettre, avec les bien-pensants de tous les temps,
que
ces horreurs sont fatales et voulues par les dieux ; c’est encore adm
1465
par les dieux ; c’est encore admettre la guerre. (
Que
serait une guerre sans « horreurs » ?) J’avoue qu’à ma première lectu
1466
ue serait une guerre sans « horreurs » ?) J’avoue
qu’
à ma première lecture du Souvenir, j’avais achoppé sur ce point. Mais
1467
pensée la plus authentique d’Henry Dunant, celle
qu’
il ne pouvait pas encore avouer, ni peut-être s’avouer à lui-même, alo
1468
ilitarisme qui la prépare, c’est dans ses inédits
qu’
il faut le chercher, dans ces textes écrits pour lui seul, et dans le
1469
se limiter est réitérée, mais déjà la possibilité
que
la guerre ne soit ni légitime ni fatale est nettement impliquée dans
1470
me de la légitimité de la guerre », dit seulement
que
« si elle est inévitable, elle doit être faite avec le moins de barba
1471
ère Convention de Genève, signée en 1864 ! Encore
que
Dunant n’en tire d’autres conclusions que la nécessité de s’en tenir
1472
Encore que Dunant n’en tire d’autres conclusions
que
la nécessité de s’en tenir à « quelques conventions diplomatiques spé
1473
particulière », on ne peut manquer de sentir ici
qu’
un doute profond s’est éveillé en lui quant à la nature finale des rel
1474
ans plus tard, dans sa retraite, loin de l’action
que
d’autres poursuivent et de ses contingences « réalistes », Dunant att
1475
e front. Il note dans ses cahiers : En attendant
que
d’autres plus habiles que nous, prennent la plume et fassent mieux, n
1476
cahiers : En attendant que d’autres plus habiles
que
nous, prennent la plume et fassent mieux, nous entassons ici tant bie
1477
nces, afin de justifier à tout prix des instincts
que
la raison et la religion répriment : Pourquoi bénir des bataillons p
1478
ament chrétiennes ? Non, « titre dérisoire autant
que
blasphématoire dans les bouches officielles ». Car Jésus dit : Heureu
1479
que religieusement… Au moins Caïn tua sans savoir
qu’
il tuait ». Et qu’on ne répète pas que la guerre est la suprême éducat
1480
… Au moins Caïn tua sans savoir qu’il tuait ». Et
qu’
on ne répète pas que la guerre est la suprême éducatrice du genre huma
1481
sans savoir qu’il tuait ». Et qu’on ne répète pas
que
la guerre est la suprême éducatrice du genre humain ! À cet antique a
1482
Les vertus guerrières ne sont, le plus souvent,
que
des utopies traditionnelles intéressées… Ce qu’on désigne sous le nom
1483
, que des utopies traditionnelles intéressées… Ce
qu’
on désigne sous le nom de « bravoure » s’allie très bien quelquefois a
1484
Souvenir et de ses prudences tactiques. Serait-ce
que
Dunant, écarté de l’action, n’ayant plus rien à espérer ni à ménager,
1485
ent toujours la fin de l’Histoire, du moins telle
que
nous l’entendons ? Il convient de s’entendre sur le sens des termes
1486
celui qui fait erreur sur l’adéquation des moyens
qu’
il préconise aux fins qu’il allègue, tel celui qui répète (se croyant
1487
l’adéquation des moyens qu’il préconise aux fins
qu’
il allègue, tel celui qui répète (se croyant réaliste) : si vis pacem
1488
para bellum, alors que toute l’histoire démontre
que
les guerres croissent en étendue comme en puissance de mort à proport
1489
anciers et des efforts de développement technique
qu’
on consacre à les préparer. Mais il y a plus. Réaliste est celui qui,
1490
s sur les causes de la guerre dans l’ère moderne,
qu’
il écrit vers la fin du siècle dernier. Il est difficile aujourd’hui d
1491
d’esprit pour distinguer, aux alentours de 1900,
que
les facteurs principaux de la guerre qui se préparait étaient les mêm
1492
x de la guerre qui se préparait étaient les mêmes
que
ceux qui, justement, achevaient de former l’État-nation : l’École éta
1493
poirs et des peurs, et des curiosités, bref, à ce
que
Dunant nomme très exactement : encaserner l’esprit humain. Quelques b
1494
ouvre, avec une sorte d’étonnement reconnaissant,
qu’
il est celui que j’utilisais depuis quelques années pour mes cours :
1495
sorte d’étonnement reconnaissant, qu’il est celui
que
j’utilisais depuis quelques années pour mes cours : L’École : « L’en
1496
plus beau, rien de plus grand, rien de plus noble
que
les empire rapaces et sanguinaires d’Alexandre et des Césars, de Char
1497
tion universelle : les philosophes avaient prédit
que
les peuples, en se libérant, aboliraient le service militaire dû aux
1498
upprimer les armées permanentes, elles ont décidé
que
tous les citoyens valides en feraient partie. » La Presse : « … c’es
1499
re, au lieu d’être l’influence la plus oppressive
que
le monde ait jamais connue, elle deviendrait un véritable bienfait… »
1500
lui de châtier leur insolence… C’est sans remords
que
les pays qu’on appelle chrétiens commettent ces crimes qu’ils décoren
1501
r leur insolence… C’est sans remords que les pays
qu’
on appelle chrétiens commettent ces crimes qu’ils décorent du nom de p
1502
ays qu’on appelle chrétiens commettent ces crimes
qu’
ils décorent du nom de politique coloniale ». Or ce n’est pas la vraie
1503
oloniale ». Or ce n’est pas la vraie civilisation
qu’
on apporte aux peuples asservis : c’est l’opium, le rhum, et les armes
1504
fondant sur ces peuples, leur enlève souvent plus
que
des coutumes barbares, elle les dépouille de leur vieille et respecta
1505
science, des moyens si prodigieux de faire le mal
qu’
il ne pourra être sauvé de lui-même, au milieu d’épouvantables désastr
1506
de lui-même, au milieu d’épouvantables désastres,
que
par une intervention divine ». (On sent que Dunant juge cette dernièr
1507
tres, que par une intervention divine ». (On sent
que
Dunant juge cette dernière fort peu probable.) Dans les conflits qui
1508
ffet, « de toutes les inventions, il n’en est pas
que
le genre humain se soit plus appliqué à perfectionner que celle dont
1509
enre humain se soit plus appliqué à perfectionner
que
celle dont le but est le meurtre en grand de nos semblables ». Car dé
1510
étrangère aux difficultés, insolites elles aussi,
que
lui ont faites les administrations métropolitaines en partie responsa
1511
ondait l’automne suivant un mouvement rival (à ce
qu’
il m’apprit beaucoup plus tard), quoiqu’également résistant. Ce qui es
1512
qu’également résistant. Ce qui est certain, c’est
que
les premiers efforts d’union de l’Europe, au lendemain de la guerre,
1513
ulement dans les trains suisses — car chacun sait
que
Hans Oprecht a été l’un des premiers à utiliser cette forme moderne d
1514
ières interventions nous portèrent en effet, soit
qu’
il s’agît de sciences, d’arts ou d’éditions, vers les formes les plus
1515
rapide de la formule des festivals et les dangers
qu’
entraînait leur multiplication en concurrence (résultante : notre asso
1516
p de ses activités, le CEC ne pouvait mieux faire
que
de s’en remettre à l’expérience et à l’initiative de celui des membre
1517
e du Livre, à Lausanne. Ce fut autour de ce noyau
que
se constitua rapidement la Communauté européenne des guildes et clubs
1518
leurs relations avec le vrai public, les chiffres
que
je viens de citer permettent de les mesurer avec une certaine précisi
1519
on, pays par pays. Si bien que l’on peut affirmer
que
les guildes ont au moins triplé le nombre des Européens contaminés pa
1520
ce. La plupart de ces malheureux ne savent pas ce
qu’
ils doivent à l’initiateur de la Büchergilde Gutenberg ! Mais nous, au
1521
i bien heureux de cette occasion d’avouer tout ce
que
nous devons à l’un des Suisses les plus remarquables et les plus orig
1522
ez pas les villes » et peut-être est-ce pour cela
que
vous êtes venu vous installer dans le pays de Gex. Que pensez-vous de
1523
ous êtes venu vous installer dans le pays de Gex.
Que
pensez-vous de la transformation que subit notre région ? J’adore cet
1524
pays de Gex. Que pensez-vous de la transformation
que
subit notre région ? J’adore cette maison, ce village… mais toutes le
1525
qui me frappe, c’est l’extrême laideur de tout ce
que
l’on construit, une laideur irréversible. En Hollande, dans le Sud du
1526
a tué la poule aux œufs d’or car on n’a pas pensé
que
l’on détruisait ce qui faisait l’attrait du pays. On a l’impression q
1527
qui faisait l’attrait du pays. On a l’impression
que
le seul souci qu’on ait soit la spéculation. Il faut construire vite
1528
rait du pays. On a l’impression que le seul souci
qu’
on ait soit la spéculation. Il faut construire vite parce que cela coû
1529
er... Pourquoi ce secret jaloux ? Savez-vous
que
dans le pays de Gex, plus de deux-mille logements seront construits d
1530
its dans les cinq années à venir ? Il est heureux
qu’
une enquête telle que la vôtre le révèle, car autour de tout ceci, on
1531
ées à venir ? Il est heureux qu’une enquête telle
que
la vôtre le révèle, car autour de tout ceci, on garde un secret jalou
1532
d’un débat public. La vraie démocratie, ce serait
que
les gens puissent discuter des projets car c’est leur vie qui va être
1533
e dans lequel ils vivent. Cela est plus important
que
de savoir si l’on est de droite ou de gauche. Une telle discussion ne
1534
dans des casernes accrochées à de vieux villages
que
cela détruit. Un grand espoir : « la régionalisation » Vous sem
1535
prés, les bois, une image paisible du pays de Gex
que
bientôt peut-être on ne pourra plus contempler. »
1536
objet de la présente publication. Je note d’abord
que
le terme de difficulté est souvent plus exact que celui d’objection.
1537
que le terme de difficulté est souvent plus exact
que
celui d’objection. Dans la plupart des cas, la résistance ne provient
1538
tinguons quatre groupes parmi les « difficultés »
que
l’on oppose au concept de région et aux projets fondés sur lui. Obj
1539
u et créant ses moyens. Si l’on ne déclare pas ce
qu’
on veut, il n’est pas très intéressant de chercher à deviner ce qui se
1540
un cordon douanier commun, par exemple.) Il n’y a
qu’
une transition du projet au succès : c’est l’acte créateur, ou révolut
1541
s seront forcément plus nombreux et plus mesquins
que
les conflits entre nos nations. Voulez-vous donc balkaniser l’Europe
1542
Quelles seront leurs frontières exactes ? Faut-il
qu’
elles aient des superficies ou des populations à peu près égales ? La
1543
ses 9 ou 10 millions d’habitants, est plus petite
que
le Limousin, qui n’a que 0,7 million d’habitants. Ça ne se tient pas
1544
bitants, est plus petite que le Limousin, qui n’a
que
0,7 million d’habitants. Ça ne se tient pas ! La Bretagne n’est pas u
1545
litique. C’est donc ce dernier groupe d’arguments
que
l’on va tenter d’analyser.) II. Que la région ne doit pas être co
1546
arguments que l’on va tenter d’analyser.) II.
Que
la région ne doit pas être conçue comme un État-notion en réduction
1547
ltés, obscurités, incertitudes, blocages mentaux,
qu’
éprouve un homme de cette seconde moitié du xxe siècle à concevoir un
1548
une Europe des régions, proviennent du « modèle »
que
l’École (aux trois degrés) a imposé depuis un siècle au moins. L’homm
1549
t leurs suites qui ont notamment accrédité l’idée
que
l’économie est au service des desseins politiques d’un État et non de
1550
t décrite par McLuhan ne peut vraiment comprendre
que
ce qu’il voit. L’expression « Faut-il vous faire un dessin ? » évoque
1551
te par McLuhan ne peut vraiment comprendre que ce
qu’
il voit. L’expression « Faut-il vous faire un dessin ? » évoque le mod
1552
ce monde-là. Aux yeux de cet homme gutenbergien,
que
nous sommes tous, peu ou prou, et dans son système de représentation,
1553
e représentation, la région ne saurait apparaître
que
sous la forme d’un mini-État centralisé, et d’une mini-nation régie p
1554
nt pas d’un ordre essentiellement différent de ce
qu’
elles sont aujourd’hui. La vie communale — seule école efficace du civ
1555
pays en vingt et une régions, par exemple, plutôt
qu’
en quatre-vingt-onze départements. La région en tant qu’État-nation ré
1556
chances de favoriser l’inquisition administrative
que
d’accroître les libertés civiques. Elle ne serait à aucun titre un mo
1557
istes intégraux. II n’en reste pas moins probable
qu’
elle va constituer le premier stade, non pas certes de l’ordre nouveau
1558
grands États-nations européens. (C’est un peu ce
que
l’on voit se dessiner — encore un terme visuel ! — avec l’essai de «
1559
mieux assuré, de nos jours, par les petits États
que
par les ex-puissances — et cela pour une série de raisons (pas seulem
1560
r une série de raisons (pas seulement militaires)
qu’
il serait trop long de développer ici : qu’il suffise d’évoquer la séc
1561
aires) qu’il serait trop long de développer ici :
qu’
il suffise d’évoquer la sécurité suisse et ses motifs. Mais le fédéral
1562
ses et des cadres sociaux qui leur offrent appui.
Qu’
on me permette un exemple personnel, pour aller vite et rester dans le
1563
uvent pas de frontières du tout. Si l’on exigeait
que
tout cela soit unifié et uniformisé dans les limites géographiques d’
1564
crierais à la dictature totalitaire, c’est-à-dire
que
je crierais à l’assassin, au gangster et au fou ! Voyez Hitler. Mais
1565
fou ! Voyez Hitler. Mais personne ne m’a démontré
qu’
entre les ambitions de Napoléon et celles d’un dictateur du xxe siècl
1566
teur du xxe siècle il y ait d’autres différences
que
celles dues aux moyens techniques de mise au pas d’une nation. Et de
1567
orain, la continuité est indéniable… Ce n’est pas
que
je récuse l’État ni l’ordre contractuel d’une société, avec ses cadre
1568
es cadres et ses mécanismes. Je demande seulement
qu’
il corresponde aux réalités humaines et qu’il les serve, au lieu de pr
1569
lement qu’il corresponde aux réalités humaines et
qu’
il les serve, au lieu de prétendre à les régir en souverain. Je demand
1570
de foyers, et sa répartition à autant de niveaux,
qu’
il y a de fonctions diverses dans l’humanité et d’ordres de grandeur d
1571
lle de son Principe fédératif, où Proudhon estime
qu’
il « résume toute la science constitutionnelle », je trouve cette prop
1572
e n’est pas seulement entre sept ou huit élus […]
que
doit être partagé le gouvernement d’un pays, c’est entre les province
1573
ont parfois englobés l’un par l’autre. Il se peut
que
les régions politiques soient définies demain comme les intersections
1574
t le carrefour ou l’intersection50. La résistance
qu’
opposent certains esprits à concevoir cette liberté (ou variété) d’app
1575
ramme d’études Le champ d’études régionaliste,
que
ces quelques remarques définissent, est à peine exploré, inutile de l
1576
es paysages de son cœur, et aucun de nous n’exige
que
tout cela soit inscrit dans les limites peintes en couleurs plates, s
1577
1968, p. 107, note 1. 48. Mais quand Malraux dit
que
la nation est le phénomène dominant du xxe siècle, on doute qu’il pe
1578
st le phénomène dominant du xxe siècle, on doute
qu’
il pense à autre chose qu’à la France… 49. P.-J. Proudhon, Du princip
1579
u xxe siècle, on doute qu’il pense à autre chose
qu’
à la France… 49. P.-J. Proudhon, Du principe fédératif, Paris, 1863,
1580
me de « régions carrefours ». 51. Il est certain
que
le Marché commun ne cessera d’être menacé par les États-nations tant
1581
cessera d’être menacé par les États-nations tant
que
ceux-ci n’auront pas renoncé au « totalitarisme » de leurs pouvoirs e
1582
qu’entités politiques, des « droits » économiques
qu’
ils s’arrogent en barons pillards ; et tant qu’il n’y aura pas, au niv
1583
es qu’ils s’arrogent en barons pillards ; et tant
qu’
il n’y aura pas, au niveau continental, une autorité politique fédéral
1584
s délices et les délires de l’amour physique tels
qu’
on ne les soupçonnait guère à 20 ans, tels qu’on espère les connaître
1585
els qu’on ne les soupçonnait guère à 20 ans, tels
qu’
on espère les connaître longtemps. Amours, délices et mairie (pas d’or
1586
és), le remariage c’est souvent l’heureux mariage
qu’
on n’a pas su réussir du premier coup. Mais faut-il vraiment se marier
1587
e plus fréquent mais aussi du progrès médical. Ce
qu’
on nomme « l’espérance de vie » ayant doublé, cela double aussi les «
1588
e et on admet avoir d’autres aspirations à 40 ans
qu’
à 20 ans. D’où la multiplication des déséquilibres dans un couple — le
1589
on quotidienne du mariage : chacun sait désormais
qu’
il y a problème et qu’on peut en parler, qu’il faut même en parler lib
1590
age : chacun sait désormais qu’il y a problème et
qu’
on peut en parler, qu’il faut même en parler librement et sérieusement
1591
rmais qu’il y a problème et qu’on peut en parler,
qu’
il faut même en parler librement et sérieusement. La crise du mariage
1592
L’une des grandes difficultés du sujet tient à ce
qu’
il n’existe pas de littérature romanesque sur le second mariage et peu
1593
onjoints — et ce qui tient à la situation en soi,
qu’
est le deuxième mariage. Faute de matériel, je me vois réduit à ma pro
1594
propre expérience et à celle des couples remariés
que
je connais. La première fois, on épouse ses complexes D’abord la
1595
lexes D’abord la grande question : pensez-vous
que
le deuxième mariage soit plus heureux que le premier ? Ce qu’on peut
1596
ez-vous que le deuxième mariage soit plus heureux
que
le premier ? Ce qu’on peut dire avec certitude, c’est qu’il a beaucou
1597
ème mariage soit plus heureux que le premier ? Ce
qu’
on peut dire avec certitude, c’est qu’il a beaucoup plus de chances de
1598
remier ? Ce qu’on peut dire avec certitude, c’est
qu’
il a beaucoup plus de chances de l’être : il y a des écueils inhérents
1599
, on épouse ses complexes. Or, contrairement à ce
que
fait croire le langage courant, avec des phrases comme « Je suis plei
1600
n) de se libérer de sa famille, cas plus fréquent
qu’
on ne pense chez les jeunes filles surtout. Spécifique de la jeunesse,
1601
eu ; leur couple est-il si bien réussi ? On pense
que
le seul moyen de réussir ce qu’ils ont raté c’est de prendre le contr
1602
réussi ? On pense que le seul moyen de réussir ce
qu’
ils ont raté c’est de prendre le contre-pied de leurs conseils. Ce qui
1603
de » : on veut prouver aux autres — et à soi-même
qu’
on sait ce qu’on veut et qu’on n’a besoin de personne. Moins on est sû
1604
prouver aux autres — et à soi-même qu’on sait ce
qu’
on veut et qu’on n’a besoin de personne. Moins on est sûr de la durée
1605
utres — et à soi-même qu’on sait ce qu’on veut et
qu’
on n’a besoin de personne. Moins on est sûr de la durée de ses sentime
1606
cle objectif : si l’un des deux est marié, il n’a
qu’
à divorcer et tout s’arrange. Aussi n’est-ce pas la morale sociale qui
1607
incompatibles avec les miens mais c’est plus fort
que
moi, il arrivera ce qu’il arrivera, ce n’est pas ma faute. » La fatal
1608
iens mais c’est plus fort que moi, il arrivera ce
qu’
il arrivera, ce n’est pas ma faute. » La fatalité, c’est l’alibi. Et i
1609
Vous avez démontré dans L’Amour et l’Occident
que
l’amour tel qu’on le rêve — l’amour-passion — est né avec « Tristan e
1610
ntré dans L’Amour et l’Occident que l’amour tel
qu’
on le rêve — l’amour-passion — est né avec « Tristan et Iseut » et que
1611
our-passion — est né avec « Tristan et Iseut » et
que
, depuis des siècles, nous vivons sous l’emprise de ce mythe dégénéré
1612
el rapport y a-t-il entre l’un et l’autre ? C’est
qu’
autrefois on se mariait pour des raisons : fortune, terres, agrément d
1613
e, la réalité est là : les problèmes inéluctables
que
posent les caractères et les tempéraments. On pense toujours qu’on se
1614
caractères et les tempéraments. On pense toujours
qu’
on sera l’exception, qu’on réussira où les autres ont raté. C’est le d
1615
aments. On pense toujours qu’on sera l’exception,
qu’
on réussira où les autres ont raté. C’est le défi sentimental, le défi
1616
ue plus la comédie — ni aux parents. On a compris
que
l’essentiel ce sont les caractères, qui ne changent jamais (« on ne p
1617
ticulières une fois qu’on est remarié ? C’est ici
qu’
il s’agit de distinguer ce qui tient aux « acteurs » et ce qui tient à
1618
deuxième fois n’a davantage de chances de réussir
que
s’il n’y a pas nostalgie de la passion chez l’un ou chez l’autre. Se
1619
s et les antécédents. Un mariage où il n’y aurait
que
des « convenances » a plus de chances de durer mais guère plus de cha
1620
es de durer mais guère plus de chances de bonheur
qu’
un mariage où il n’y aurait que de l’amour. Le vrai amour c’est le
1621
chances de bonheur qu’un mariage où il n’y aurait
que
de l’amour. Le vrai amour c’est le contraire de la passion Il f
1622
es goûts, les aspirations communs ne réussiraient
qu’
un mariage de raison ? C’est l’intuition du véritable moi de l’autre.
1623
i de l’autre. C’est l’acceptation de cet être tel
qu’
il est, limité et réel mais secrètement en marche vers lui-même que l’
1624
et réel mais secrètement en marche vers lui-même
que
l’on choisit, non pas comme prétexte à s’exalter ou comme objet de co
1625
idéal standard de sa génération. Sa passion n’est
que
la projection sur l’autre d’un idéal qui n’existe pas — et l’on s’en
1626
est agent de personnalisation par excellence : ce
qu’
il a su voir c’est l’irremplaçable, l’unique, ce que chaque être peut
1627
’il a su voir c’est l’irremplaçable, l’unique, ce
que
chaque être peut devenir s’il y est appelé. C’est son mystère, qui n’
1628
n arriver à le prôner systématiquement ? Je pense
que
des solutions « préventives » sont infiniment préférables. Il faudrai
1629
produit par l’œuvre de Freud, cette impression «
qu’
il expliquait tout », vient de ce que pour la première fois, grâce à c
1630
impression « qu’il expliquait tout », vient de ce
que
pour la première fois, grâce à ce savant et à ses recherches « scient
1631
rne l’amour, beaucoup de gens continuent à croire
que
l’analyser l’amoindrit. Une passion « inexplicable » paraît plus fort
1632
t. Une passion « inexplicable » paraît plus forte
qu’
un amour justifié par de bonnes raisons. Or il faudrait toujours pouvo
1633
œurs lorsqu’on envisage le « mariage à l’essai ».
Qu’
en pensez-vous ? Je suis pour tout ce qui peut aider les gens à prendr
1634
ais aussi de la difficulté du mariage et je pense
que
« l’essai » peut aider. Bien sûr, l’expérience est limitée : on sait
1635
der. Bien sûr, l’expérience est limitée : on sait
que
ça pourrait ne pas durer et l’on décide qu’on n’aura pas d’enfants ;
1636
sait que ça pourrait ne pas durer et l’on décide
qu’
on n’aura pas d’enfants ; il n’y aura donc pas de victimes. Appelons c
1637
ples. Pour avoir une valeur expérimentale il faut
qu’
un mariage-maquette se prolonge plusieurs années. Aucun rapport avec l
1638
couple, ce qui est un ciment — et surtout l’idée
que
ça doit durer toujours. « Après tout, je ne suis pas mariée avec lui
1639
mais bien à la valeur psychologique de protection
qu’
il y a dans la décision « pour toujours » anticipant la plus longue du
1640
age une plus grande énergie — pour le rejoindre —
que
le but proche. Quand je faisais mon service militaire on nous imposai
1641
e après trois quarts d’heure. Quand nous pensions
que
nous aurions 20 à 30 km à couvrir, nous commencions à être fatigués a
1642
t de 10 à 12 kilomètres. Mais quand nous avons su
que
cette fois-ci c’était sérieux, que nous partions pour la marche final
1643
nous avons su que cette fois-ci c’était sérieux,
que
nous partions pour la marche finale de 140 km, nous n’avons ressenti
1644
s élevé ou plus éloigné dans la « longue marche »
qu’
est le vrai mariage. Pour avoir toute sa valeur il faut aussi que le p
1645
mariage. Pour avoir toute sa valeur il faut aussi
que
le pacte soit sans arrière-pensée. J’ai assisté, en Amérique, au mari
1646
! » Voilà qui ne laissait pas prévoir autre chose
que
les quatre ou cinq échecs qui ont suivi. Donc le mariage-maquette don
1647
vi. Donc le mariage-maquette donne une idée de ce
qu’
est le mariage, mais ne peut guère, faute de pacte, remplacer le premi
1648
es, comme le préconise Margaret Mead, dans l’idée
qu’
il est normal et inévitable de divorcer ? Il vaudrait beaucoup mieux l
1649
orcer ? Il vaudrait beaucoup mieux leur apprendre
que
la vraie vie, c’est la vie quotidienne et qu’elle n’a rien de terne e
1650
dre que la vraie vie, c’est la vie quotidienne et
qu’
elle n’a rien de terne et d’ennuyeux (si les gens ne sont pas eux-même
1651
sont pas eux-mêmes ternes et ennuyeux). Car enfin
qu’
est-ce qu’un premier mariage ? La confrontation de la passion ou plutô
1652
ux-mêmes ternes et ennuyeux). Car enfin qu’est-ce
qu’
un premier mariage ? La confrontation de la passion ou plutôt, soyons
1653
u désir de ressentir une passion, qui fait croire
que
« ça y est », avec la réalité. Quand les gens cesseront de croire que
1654
ec la réalité. Quand les gens cesseront de croire
que
la passion est l’épreuve privilégiée qui seule donne un sens à la vie
1655
le donne un sens à la vie, quand ils comprendront
que
la passion n’est jamais une raison de se marier mais au contraire une
1656
s au contraire une raison de ne pas se marier, et
qu’
être heureux longtemps avec quelqu’un vaut mieux qu’être intensément d
1657
’être heureux longtemps avec quelqu’un vaut mieux
qu’
être intensément désespéré à cause de lui pendant huit jours, la crise
1658
ités. Mais l’emprise du mythe est tellement forte
que
notre vocabulaire le plus courant en est atteint : « passionnant » c’
1659
en est atteint : « passionnant » c’est bien mieux
qu’
intéressant. Il ne s’agit d’ailleurs pas de condamner la passion. Les
1660
’entretient ! Et le mariage lui-même, pensez-vous
qu’
il doit être « modernisé » ? Le mariage ne peut renoncer ni à la durée
1661
il doit sans cesse lutter contre le doute (est-ce
que
ça vaut vraiment la peine ?), la paresse (c’est bon, je vais tout pla
1662
s tableaux à la fois, de tout saccager lorsque ce
qu’
il fait paraît trop éloigné de ce qu’il voudrait faire. De même le mar
1663
r lorsque ce qu’il fait paraît trop éloigné de ce
qu’
il voudrait faire. De même le mariage exige que l’on se consacre à l’a
1664
ce qu’il voudrait faire. De même le mariage exige
que
l’on se consacre à l’autre avec continuité ! C’est le contraire du «
1665
irresponsable. La fidélité c’est bien autre chose
que
de se borner à ne pas tromper sa femme : c’est une œuvre d’art exigea
1666
tente le meilleur en chacun de nous. Je sais bien
que
depuis des siècles, la fidélité nous est présentée comme une sorte de
1667
Amour et l’Occident . Cet ouvrage, qui démontrait
que
l’idée de passion amoureuse trouvait ses origines dans la poésie cath
1668
est donc l’illustre théoricien de l’amour-passion
qu’
un public nombreux et enthousiaste était venu entendre jeudi soir à l’
1669
epuis 1946. On s’étonnera alors moins d’apprendre
qu’
après avoir reçu, en 1963, le Grand Prix littéraire de Monaco, qui cou
1670
t que directeur du Centre européen de la culture,
qu’
il a fondé et qu’il dirige depuis 1949. Si à ses nombreux titres on aj
1671
u Centre européen de la culture, qu’il a fondé et
qu’
il dirige depuis 1949. Si à ses nombreux titres on ajoutait celui qu’i
1672
1949. Si à ses nombreux titres on ajoutait celui
qu’
il s’apprête à recevoir aux États-Unis, après son séjour au Canada, je
1673
ntrée de jeu, il tient à nous mettre en garde. Ce
que
je voudrais bien marquer, nous dit-il, c’est que pour moi il n’y a au
1674
que je voudrais bien marquer, nous dit-il, c’est
que
pour moi il n’y a aucune séparation entre L’Amour et l’Occident et
1675
ion entre L’Amour et l’Occident et les ouvrages
que
je suis en train d’écrire ou que j’ai déjà écrit sur le fédéralisme.
1676
et les ouvrages que je suis en train d’écrire ou
que
j’ai déjà écrit sur le fédéralisme. Il n’y a jamais eu en moi deux ac
1677
des thèmes, il y a continuité de pensée. C’est ce
que
nous explique M. de Rougemont. Mon ami Jacques de Bourbon-Busset m’a
1678
n ami Jacques de Bourbon-Busset m’a dit, un jour,
qu’
il se considérait comme mon disciple en érotique personnaliste et qu’i
1679
t comme mon disciple en érotique personnaliste et
qu’
il exigeait que je lui montre cette cohérence entre mon érotique du ma
1680
ciple en érotique personnaliste et qu’il exigeait
que
je lui montre cette cohérence entre mon érotique du mariage, du coupl
1681
s théories fédéralistes. À quoi je lui ai répondu
que
rien n’était plus facile. Car pour moi, le couple est une espèce de b
1682
ité. Le concile de Chalcédoine dit, en substance,
que
les deux natures, l’homme et Dieu, dans le Christ sont simultanément
1683
sion et sans subordination de l’une à l’autre, et
que
de plus, leur union, loin d’évacuer les différences, ne fait que les
1684
ur union, loin d’évacuer les différences, ne fait
que
les renforcer et les confirmer. Cette définition théologique, on la r
1685
etrouve naturellement aussi bien dans le mariage,
que
dans le fédéralisme. Aussi chaque fois qu’il y a deux réalités contra
1686
st là, nous fait-il remarquer, le fondement de ce
que
j’appellerai ma philosophie. Une philosophie qui s’est lentement élab
1687
emont a, alors, 26 ans. Il habite Paris. C’est là
qu’
il participera à la naissance de trois revues : L’Ordre nouveau , au
1688
locuteur pour nous définir la « personne », telle
que
l’entendent naturellement les personnalistes. Pour moi, nous dit-il,
1689
é où il exerce. Ce qui l’amena — avant Sartre, ce
qu’
on ignore généralement — à parler de l’« engagement » de l’écrivain. C
1690
parler de l’« engagement » de l’écrivain. Car ce
qu’
il appelle engagement ce n’est rien moins que de tirer les conclusions
1691
r ce qu’il appelle engagement ce n’est rien moins
que
de tirer les conclusions pour la cité de ce qu’il appelle la personne
1692
s que de tirer les conclusions pour la cité de ce
qu’
il appelle la personne, puisque celle-ci est définie par son acte. Ain
1693
, tient-il à nous faire remarquer, n’implique pas
qu’
on s’inscrive dans un parti ou qu’on accepte la discipline de ce parti
1694
n’implique pas qu’on s’inscrive dans un parti ou
qu’
on accepte la discipline de ce parti. C’est réaliser ce que l’on croit
1695
epte la discipline de ce parti. C’est réaliser ce
que
l’on croit le plus intimement, que ce soit d’un point de vue religieu
1696
st réaliser ce que l’on croit le plus intimement,
que
ce soit d’un point de vue religieux, politique ou philosophique. L
1697
i furent à la base du mouvement personnaliste. Ce
que
nous appelions en 1932 la révolution personnaliste et communautaire,
1698
on extérieure n’était visiblement pas aussi grave
que
celle qui prévaut aujourd’hui. Ce qui nous avait alors alerté et réve
1699
montée de la guerre. On voulait nous faire croire
qu’
il y avait de grandes causes à défendre et nous ne voyions pas du tout
1700
ins apporter une légère correction : Je dois dire
que
j’ai souvent pu déceler dans la contestation qui s’est développée à P
1701
ppée à Paris, à Berlin, et ailleurs quelque chose
que
je crois extrêmement dangereux, et qui ne ressemble pas du tout à not
1702
et nazis qui ne respectaient plus rien finalement
que
la force. Quand on dit, il faut tout casser et après on verra bien, m
1703
destruction de l’Université et refuse de dire ce
qu’
il y mettra à la place. C’est de la démagogie facile et extrêmement da
1704
rêmement dangereuse. Car, finalement cela ne fait
que
servir le fascisme. Pour M. de Rougemont la seule contestation effica
1705
en ce qui concerne la définition de la révolution
que
nous avions en 1932. Il s’agissait alors de substituer un nouvel ordr
1706
agissait alors de substituer un nouvel ordre à ce
que
nous appelions le désordre établi. La contestation véritable, c’est c
1707
nacceptable. Mais je suis malheureusement certain
qu’
ils se trompent. Et cela il le regrette profondément. Car, pour notre
1708
re le monde de la technique, contre la discipline
qu’
exige la production industrielle de chacun de nous, discipline absolum
1709
ne nous cache pas son pessimisme. Il ne pense pas
que
cela ira très loin. Il reste, néanmoins, que des rassemblements comme
1710
pas que cela ira très loin. Il reste, néanmoins,
que
des rassemblements comme celui qui a eu lieu récemment à Bethel, près
1711
mmunauté nouvelle dont tout le monde aspire, mais
que
personne n’ose construire, M. de Rougemont s’est employé à la définir
1712
tourne en Europe, une Europe en paix certes, mais
qu’
il faut reconstruire. Cette guerre qui vient de se terminer, M. de Rou
1713
enant, la preuve est faite, attestée par le sang,
que
la solution suisse et fédérale est seule capable de fonder la paix, p
1714
e du fédéralisme. Il ne nous cache d’ailleurs pas
qu’
il désirait venir au Canada pour étudier le système fédéral canadien,
1715
la « personne » au fédéralisme. Je vous avais dit
que
l’homme doit être à la fois libre et responsable, il en est de même p
1716
de même pour chaque nation dans l’Europe fédérée
que
je préconise et qui n’est que la transposition à une échelle géante d
1717
ns l’Europe fédérée que je préconise et qui n’est
que
la transposition à une échelle géante de la Confédération helvétique.
1718
onfiera d’ailleurs ses impressions. J’ai constaté
qu’
ici au Québec, on appelait fédéraliste la tendance unitaire par opposi
1719
c séparé signifierait donc, pour M. de Rougemont,
qu’
on est retombé dans la vieille formule de l’État-nation du xixe siècl
1720
ecréation de communauté de 5 à 20 mille habitants
qu’
on appelle, en urbanisme moderne, des unités d’habitation. Ces autonom
1721
revenons à l’Europe. Là-bas, il est bien certain
qu’
on n’arrivera jamais à unir ces États-nations. Il faut donc, nous répè
1722
tions. Il faut donc, nous répète M. de Rougemont,
que
ces États se dissolvent en régions, et alors, et ce n’est seulement q
1723
lvent en régions, et alors, et ce n’est seulement
qu’
alors, qu’on arrivera à fédérer l’Europe, car ces régions n’auront auc
1724
égions, et alors, et ce n’est seulement qu’alors,
qu’
on arrivera à fédérer l’Europe, car ces régions n’auront aucune peine
1725
mais qui seraient découpées différemment suivant
qu’
il s’agirait de régions économiques, politiques, culturelles. Cela par
1726
là, me diriez-vous, vision de la plus pure utopie
qu’
affectionnent tout particulièrement les intellectuels. Que cette idée
1727
tionnent tout particulièrement les intellectuels.
Que
cette idée fédéraliste du monde soit utopique, M de Rougemont serait
1728
la ruine du monde ? » C’est la leçon en tout cas
que
nous rappelle M de Rougemont tout au long d’une œuvre qu’on découvre
1729
rappelle M de Rougemont tout au long d’une œuvre
qu’
on découvre avec ravissement. an. Rougemont Denis de, « [Entretien
1730
Serait-ce vous insulter ou simplifier par trop
que
de dire que vous vous placez résolument du côté de la révolution ? Je
1731
vous insulter ou simplifier par trop que de dire
que
vous vous placez résolument du côté de la révolution ? Je m’y suis to
1732
ais comme la substitution d’un ordre nouveau à ce
que
nous appelions le « désordre établi ». Désordre par rapport à l’homme
1733
t — et c’est encore bien plus visible aujourd’hui
qu’
alors — que sur les nécessités de la production industrielle, de la di
1734
t encore bien plus visible aujourd’hui qu’alors —
que
sur les nécessités de la production industrielle, de la distribution
1735
richesses, du profit, et de choses aussi pauvres
que
cela, pour créer une communauté. Qui, au fond, ont eu comme résultat
1736
e communauté. Qui, au fond, ont eu comme résultat
que
la communauté est en train de se défaire, n’est-ce pas : la grande cr
1737
la communauté humaine. Alors, c’est dans ce sens
que
, je pense, il nous faut retrouver les formules d’une communauté nouve
1738
ent faire une communauté ? Est-ce dans ce sens-là
que
vous êtes passé — ou peut-on dire que vous êtes passé — du personnali
1739
ce sens-là que vous êtes passé — ou peut-on dire
que
vous êtes passé — du personnalisme au fédéralisme ? Par un cheminemen
1740
absolument liées. C’est une formule, d’ailleurs,
que
Sartre m’a prise sachant très bien, me disant qu’il la prenait de moi
1741
que Sartre m’a prise sachant très bien, me disant
qu’
il la prenait de moi, mais que tous les journalistes après la guerre l
1742
rès bien, me disant qu’il la prenait de moi, mais
que
tous les journalistes après la guerre lui ont attribuée, en oubliant
1743
uerre lui ont attribuée, en oubliant complètement
que
c’était dans tous mes premiers livres. C’est la formule de l’engageme
1744
. C’est la formule de l’engagement, n’est-ce pas,
que
j’ai lancée en France en 1933, et qui forme les deux premiers chapitr
1745
mon premier livre, publié à Paris en 1934… Est-ce
que
le mot et la chose « engagement » ont encore aujourd’hui une signific
1746
er, pieds et poings liés, à un parti, à condition
qu’
il soit de gauche d’étiquette. Pour moi — enfin, pour nous : Mounier,
1747
ellement manifester au niveau de la communauté ce
qu’
on croyait le plus intimement, c’est-à-dire l’être même de la personne
1748
est toujours mal compris Vous savez sans doute
que
le Canada a un régime politique fédéral ? Est-ce que vous avez étudié
1749
le Canada a un régime politique fédéral ? Est-ce
que
vous avez étudié le fédéralisme canadien ? Un peu. Mais je suis deven
1750
a Théorie générale du fédéralisme, où je constate
que
le mot fédéralisme est toujours mal compris. Et c’est presque fatal,
1751
ation dans sa formule xixe siècle, qui ne visait
qu’
à la puissance collective, et qui aboutit aux guerres que l’on sait. [
1752
puissance collective, et qui aboutit aux guerres
que
l’on sait. […] Souveraineté nationale groupant à l’intérieur d’une fr
1753
e imposée à toutes espèces de réalités humaines —
que
ce soit des réalités religieuses, politiques, monétaires, économiques
1754
économiques, d’état civil, commerciales, tout ce
que
vous voulez — on met tout ça dans une même frontière, ce qui est déme
1755
ntiel, n’est-ce pas ? C’est une absurdité totale,
qu’
on a voulu nous faire avaler pendant tout le xixe siècle, et dans nos
1756
encore, comme une forme possible de gouvernement.
Qu’
est-ce que le Centre européen de la culture, que vous avez fondé, je p
1757
mme une forme possible de gouvernement. Qu’est-ce
que
le Centre européen de la culture, que vous avez fondé, je pense, et q
1758
. Qu’est-ce que le Centre européen de la culture,
que
vous avez fondé, je pense, et que vous présidez, à Genève ? J’ai créé
1759
de la culture, que vous avez fondé, je pense, et
que
vous présidez, à Genève ? J’ai créé ce Centre en 1949-1950 comme la c
1760
Strasbourg. Il nous semblait à tous, d’ailleurs,
qu’
il fallait un troisième volet, qui était la culture… Alors, j’ai créé
1761
ondre, et un certain nombre de gens qui ont envie
qu’
on le fasse, nous les réunissons. Ceci avec un tout petit staff, à Gen
1762
elles. Depuis la fondation de ces centres, est-ce
que
l’idée de culture, la notion de culture a évolué ? Oui, je crois que
1763
re, la notion de culture a évolué ? Oui, je crois
que
nous sommes arrivés tout de même à combattre avec pas mal de succès c
1764
n montrant, comme Toynbee le faisait de son côté,
qu’
il n’y a pas d’histoire de la culture concevable, intelligible, en deh
1765
der autant d’attention à l’amour ? Je vous dirais
qu’
au fond, ma passion fondamentale, c’est de trouver un sens à la vie. T
1766
te, et qui m’a défié, il y a deux ans, de prouver
que
mon idée du mariage et de l’amour me conduit au fédéralisme. J’ai dit
1767
Le mariage, c’est le banc d’essai du fédéralisme.
Qu’
est-ce que le fédéralisme ? C’est faire coexister ensemble des natures
1768
, c’est le banc d’essai du fédéralisme. Qu’est-ce
que
le fédéralisme ? C’est faire coexister ensemble des natures différent
1769
avez du monde une vue qui est religieuse en ceci
que
vous dites que l’amour ou les modes d’expression de l’amour sont basé
1770
une vue qui est religieuse en ceci que vous dites
que
l’amour ou les modes d’expression de l’amour sont basés sur des choix
1771
me de fond religieuse — gnostique, hérétique tant
qu’
on voudra — mais religieuse. Je vois ça sortir ces jours-ci ! Il ne
1772
ement la traduction anglaise de ce livre, j’ai vu
que
vous insistez beaucoup sur l’opposition Dieu et diable, sur l’opposit
1773
tamment une sortie contre la psychanalyse. Est-ce
que
… Non, pas du tout. Je suis très intéressé par la psychanalyse et il y
1774
essé par la psychanalyse et il y a très longtemps
que
je m’en occupe et que je trouve ça très important. Non. Dans La Part
1775
se et il y a très longtemps que je m’en occupe et
que
je trouve ça très important. Non. Dans La Part du diable , j’opposai
1776
vité humaine, la responsabilité personnelle, à ce
que
j’appelais le pouvoir de « décréation » du diable. Je suis en train d
1777
érique, pour laquelle on m’a demandé une postface
que
j’ai presque terminée, et dans laquelle je décris le diable comme, au
1778
ond, l’augmentation de l’entropie — vous voyez ce
que
je veux dire ? — la dégradation de l’énergie. L’entropie c’est la loi
1779
e deuxième principe de la thermodynamique qui dit
que
tout ensemble de forces tend à une certaine dégradation de l’énergie,
1780
récédente. Alors contre ça, il faut lutter par ce
qu’
on appelle en science la néguentropie. Et par la récréation de foyers
1781
aine correspondance, une analogie. Il est certain
que
pour moi, le diable, c’est une espèce de symbole de tout ce qui tend
1782
ntre ça, il faut des révoltes qui ne peuvent être
que
personnelles, individuelles, qui recréent des petits foyers de rayonn
1783
’humanité, n’est-ce pas ? L’humanité ne progresse
que
par les meilleurs, et ne dure que par les moyens. Il faut les deux, m
1784
té ne progresse que par les meilleurs, et ne dure
que
par les moyens. Il faut les deux, mais il ne faut pas donner tout l’a
1785
t a maintenant passé la soixantaine, c’est-à-dire
qu’
il a deux fois l’âge où l’on commence à être suspect pour les jeunes.
1786
ce du 25 septembre à l’Université McGill, on sent
que
la place qu’il accorde, par exemple, comme valeur de signe, au mouvem
1787
embre à l’Université McGill, on sent que la place
qu’
il accorde, par exemple, comme valeur de signe, au mouvement hippie oc
1788
llement de l’ordre des choses actuelles n’est pas
qu’
un clin d’œil poli ou cajoleur à la jeunesse. Qu’il ne se gêne cependa
1789
qu’un clin d’œil poli ou cajoleur à la jeunesse.
Qu’
il ne se gêne cependant pas de critiquer quand il en sent le besoin. C
1790
iquer quand il en sent le besoin. C’est là-dessus
que
je devais d’abord l’interroger — dans le Metro Bar de l’hôtel Mont-Ro