1 1963, Articles divers (1963-1969). Le fédéralisme suisse (1963)
1 union dans les diversités jalousement préservées, qui constitue le véritable apport de la Suisse comme telle à l’Europe. Pr
2 t-ils, et centralisateurs. Un Français cultivé et qui se demande quel est le « vrai » sens du mot fédéralisme, recourt à so
3 sauvage, ou traître. Pour un Suisse, c’est Littré qui perd la face. Essayons d’expliquer ce qui peut l’être, en cette affai
4 Littré qui perd la face. Essayons d’expliquer ce qui peut l’être, en cette affaire où le sens concret du bien public a bea
5 e d’éclectisme universel ou d’opportunisme lâche, qui tolère tout et ne s’oppose à rien. Le fédéralisme s’oppose en fait à
6 clocher, les particularismes régionaux ou locaux qui prétendraient vivre en autarcie, refermés sur eux-mêmes, hostiles à t
7 les diversités régionales, aime aussi leur santé, qui est celle de l’ensemble. C’est pourquoi il veut leur union, leur entr
8 oyen terme entre la peste et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre un homme qui
9 este et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un
10 qui se lave n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est
11 emin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est pas à mi-chemin entre la centr
12 e. Il est sur un autre plan que ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être qu’une seule. Il représente la seule attitude rig
13 s incompatibles de l’esprit. Car en réalité, ceux qui n’admettent aucune diversité politique ou culturelle dans une nation
14 nation manifestent le même état d’esprit que ceux qui n’admettent rien d’autre que leur manière de vivre locale, définie pa
15 omme tout art. Elle est un art de la composition, qui requiert à la fois et en même temps la vivacité des contrastes et leu
16 e de broyer mécaniquement toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce de brun, celui des chemises brunes par exemple,
17 là toute la différence entre l’harmonie fédérale, qui est la libre union dans la diversité, et l’unification totalitaire, c
18 l’unification totalitaire, centraliste, jacobine, qui est réduction forcée à l’uniforme, — dans tous les sens du mot. Ces i
19 niforme, — dans tous les sens du mot. Ces images, qui sont autant d’évidences, suffisent à définir le fédéralisme, art de c
20 D’une part, on affirme une souveraineté globale, qui ne laisserait jouer qu’à regret, et à titre de concession, la diversi
21 art, on se cramponne à une souveraineté nationale qui a peur de se laisser englober dans un plus grand corps. Les uns sont
22 enne à respecter la diversité des petites nations qui la composent, sinon elle trahira sa mission dans le monde ; et qu’en
23 trines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes ces œuvres variées, et qui leur offre une commune mesure ;
24 elque chose qui lie toutes ces œuvres variées, et qui leur offre une commune mesure ; sans quoi, nous ne saurions parler d’
25 lle nous pouvons nous rattacher directement, nous qui n’avons pas eu la chance, ou le malheur, d’avoir une soi-disant « cul
26 ici sur un concept aussi néfaste qu’invétéré, et qui me paraît exemplairement incompatible avec la réalité fédéraliste. On
27 ionales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui ont pensé et créé depuis 28 siècles, indépendamment des nations qui d
28 réé depuis 28 siècles, indépendamment des nations qui divisent aujourd’hui l’Europe, et dont la plupart n’ont même pas cent
29 ionales » ? C’est avant tout le fait de la langue qui l’entretient. Quand on dit que les Suisses romands se rattachent à la
30 onale » étant la langue maternelle de populations qui vivent dans sept ou huit nations différentes. Il faut donc commencer
31 culture européenne à chacun des 24 États-nations qui ont découpé et longtemps déchiré le corps de notre continent. ⁂ Or il
32 de base étant de la sorte identifiée, la question qui se pose est de savoir comment certaines cités ou certaines régions pa
33 de petits compartiments naturels ou historiques, qui n’ont jamais été unifiés, uniformisés par un pouvoir central, comme c
34 eligieuse, à la Réforme ou à l’Église catholique, qui sont mondiales ; par sa langue, au domaine français, et par sa cultur
35 évale et moderne. Autant de réalités ou d’entités qui n’ont pas les mêmes frontières, qui ne se couvrent que très partielle
36 ou d’entités qui n’ont pas les mêmes frontières, qui ne se couvrent que très partiellement, et qui permettent un grand nom
37 es, qui ne se couvrent que très partiellement, et qui permettent un grand nombre de combinaisons originales. On ne saurait
38 ement, il satisfait trop facilement, dit-on, ceux qui choisissent de s’installer dans les petites. Mais la plupart des homm
39 restigieux, épris de grandeur et d’idéologies, et qui aboutissent périodiquement à faire tuer quelques millions d’hommes au
40 les générations suivantes récusent… Quant à ceux qui assument leurs plus grandes dimensions, il faut admettre qu’un régime
41 s beaucoup d’excellents ou même de grands esprits qui avaient ce sens, trop rare chez nos voisins. Cet apport très typiquem
2 1963, Articles divers (1963-1969). Aspects fédéralistes dans les plans et projets d’union européenne du Moyen Âge à nos jours (1963)
42 thème général de nos travaux pendant le semestre qui s’ouvre. Permettez-moi donc, avant d’en venir à l’objet particulier d
43 vingt-cinq autres instituts d’études européennes qui sont à l’œuvre, depuis plusieurs années, dans d’autres villes du cont
44 rès de l’actualité, en raison même de leur objet, qui se compose, se définit et se modifie sous nos yeux, ces instituts tie
45 nnections et par rapport à ces notions de l’homme qui ont fait que l’Europe, malgré tout, représente autre chose et un peu
46 plus que ce qu’elle est dans sa réalité physique, qui est à peine 4 % des terres émergées de la planète. Cette question eur
47 grands traits dans quels termes elle se pose, et qui l’a posée. Le monde issu de la Seconde Guerre mondiale a vu surgir, e
48 cherche de quelque union encore mal définie, mais qui a déjà force de mythe, en Afrique noire et dans le monde arabe. La te
49 oire et dans le monde arabe. La tendance générale qui se dessine dans les années 1945 à 1950 va donc aux grandes unités pol
50 n mesure, non plus, de parler au nom de l’Europe. Qui pourrait assumer, dans ces conditions, les fonctions et les devoirs q
51 dans ces conditions, les fonctions et les devoirs qui vont bientôt incomber à l’Occident au plan mondial, tels que l’aide a
52 er l’expression Europe, sinon un ensemble de pays qui vivent, comme le dit alors P.-H. Spaak, « dans la peur des Russes et
53 l’hitlérisme, même en Allemagne et en Italie — et qui bientôt formeront l’Union européenne des fédéralistes et le Mouvement
54 loin des congrès et des associations de militants qui leur ont préparé la voie dans les esprits. Puis des hommes politiques
55 se proposent pour diriger ce mouvement naissant, qui a peut-être le vent de l’histoire en poupe. Ils ne sont pas nombreux
56 l’en croire, mais en fait dans le même sens final qui est celui d’une Europe autonome rendue forte par son union, de Gaulle
57 stion de nos jours. Je n’en vois guère que trois, qui se distinguent nettement par le rôle qu’y joueraient nos États. On pe
58 ements dans une République une et indivisible, ce qui amènerait à les redécouper en circonscriptions administratives moins
59 de limite, de conséquence extrême, inaccessible, qui marquerait le triomphe exclusif d’une seule des tendances contradicto
60 xclusif d’une seule des tendances contradictoires qui composent l’esprit européen, je veux dire la tendance à l’unité abstr
61 . À l’autre extrême, on peut concevoir une Europe qui ne serait organisée que par un système d’alliances entre États souver
62 ette solution pose un certain nombre de problèmes qui pourraient et devraient faire l’objet de recherches, dont je suggère
63 nouveaux besoins d’union apparus depuis 1945, et qui ont posé, précisément, la question européenne. Elle supposerait en to
64 même, elle présente un attrait certain pour ceux qui souhaiteraient laisser les choses autant que possible en l’état où el
65 e considérer comme un quatrième type, la solution qui consisterait à étendre au plan politique les règles et méthodes de l’
66 e au plan économique par le Marché commun ? Voilà qui paraît difficile. En effet, le traité de Rome n’évoque aucune solutio
67 d’union politique déjà implicite dans les traités qui ont institué les Communautés européennes », mais elle ne suggère pas
68 s », mais elle ne suggère pas les voies et moyens qui pourraient permettre d’opérer un jour ou l’autre ce passage de l’écon
69 tés économiques, serait celle des trois solutions qui aurait le moins de chances dans cette compétition. ⁂ Les raisons qui
70 de chances dans cette compétition. ⁂ Les raisons qui nous ont fait retenir la solution fédéraliste comme thème central de
71 traditionnels d’autonomie de nos peuples, besoins qui semblent contradictoires, mais qui sont là, incontestablement. Elle p
72 uples, besoins qui semblent contradictoires, mais qui sont là, incontestablement. Elle paraît aussi la plus propre à rallie
73 e des États et ceux des États-Unis d’Europe, ceux qui insistent avant tout sur l’autonomie de leur pays, et ceux qui insist
74 avant tout sur l’autonomie de leur pays, et ceux qui insistent avant tout sur l’unité du continent. Raisons particulières
75 du problème fédéraliste, aspects complémentaires, qui n’épuisent pas le sujet, bien sûr, mais qui permettent tout au moins
76 ires, qui n’épuisent pas le sujet, bien sûr, mais qui permettent tout au moins de l’approcher de manières variées, avec les
77 e objet d’études et la méthode interdisciplinaire qui s’impose à nous. Car le fédéralisme n’est pas une doctrine toute fait
78 des choses humaines, méthode d’allure pragmatique qui ne se comprend et ne s’explique bien que par son fonctionnement dans
79 . C’est ainsi que M. Henri Schwamm, en économiste qui suit de très près l’évolution et les répercussions de l’intégration,
80 ois dans quelques semaines. Les étudiants avancés qui auront présenté en conférence des travaux intéressants, auront la pos
81 Institut. Moyens modestes, longues visées, tâche qui dépasse évidemment nos forces actuelles mais qu’il semble urgent d’en
82 où on le peut, dans l’esprit du proverbe chinois qui dit : « Mieux vaut allumer une petite chandelle que de maudire l’obsc
83 Aux yeux de la plupart des auteurs contemporains qui s’en déclarent les adeptes, c’est une attitude de pensée et une métho
84 Voilà sans doute pourquoi ce sont ses adversaires qui éprouvent le moins de scrupules à en donner des caractérisations brèv
85 i, le dictionnaire de Littré, dans sa 1re édition qui date de 1863 : Fédéralisme, s.m. Néologisme. Système, doctrine du g
86 me, c’est-à-dire une association des départements qui eussent formé autant de républiques distinctes, comme les cantons sui
87 s favorable au fédéralisme que l’esprit français, qui passe pour cartésien. Ce sont pourtant deux juristes britanniques, Si
88 s britanniques, Sir Ivor Jennings et C. M. Young, qui définissent ainsi la structure fédérale : « Une forme de gouvernement
89 ralisme comme méthode ou attitude, et des régimes qui s’en inspirent, nous constatons qu’il leur faut des livres entiers po
90 uvre posthume de Proudhon, Du Principe fédératif, qui , en 1863 (l’année même où Littré publie l’article que je viens de cit
91 stantin Franz, conservateur subversif malgré lui, qui publie en 1879 Der Föderalismus. Puis des savants français entreprenn
92 , Alexandre Marc et moi-même, puis Henri Brugmans qui s’inspire de ses travaux, rénove ce que j’ai nommé « l’attitude fédér
93 r, après la Seconde Guerre mondiale, le mouvement qui aboutit au congrès de Montreux (1947) suivi par le Congrès de l’Europ
94 sprit occidental que je me propose de retracer et qui mérite de retenir l’attention des étudiants. Ces plans et projets con
95 ire —, soit qu’ils s’opposent expressément à « ce qui allait de soi » du vivant de leurs auteurs, et dont ils annoncent la
96 sidération d’un traité de Dante (le De Monarchia, qui date de 1308) et d’un plan confédéral de Pierre Dubois (le De Recuper
97 Pierre Dubois (le De Recuperatione Terre Sancte, qui date de 1306), nous permettront d’analyser les deux grandes origines
98 emporains de la naissance de notre confédération, qui résulte, elle, du mouvement des communes12, troisième composante de l
99 ire. L’échec historique de ces projets et de ceux qui les suivront au cours des siècles jusqu’à nous, est certes significat
100 viie , dont celui du moine parisien Émeric Crucé, qui propose une série de « grands travaux européens » ; comment elles se
101 , Saint-John Perse, de son vrai nom Alexis Léger, qui rédige le Mémorandum sur l’organisation d’un régime d’union fédérale
102 r la liberté de la culture. Auteur de 24 ouvrages qui ont été traduits en 12 langues. »
3 1963, Articles divers (1963-1969). Apport à la civilisation occidentale (janvier 1963)
103 s un « carré suisse » — cette formation guerrière qui dominait sur les champs de bataille de l’époque, rangs pressés de por
104 piques, de hallebardes, d’épées et d’arquebuses — qui fait son entrée résolue sur la grande scène européenne : ses capitain
105 le et artistique dans l’ensemble des petits États qui constituent l’actuelle Confédération est sans doute supérieure à cell
106 région prise au hasard dans les pays voisins, et qui serait comparable à la Suisse par l’étendue et la population. (On exc
107 istes suisses sont d’abord d’un canton déterminé ( qui n’est parfois qu’une ville, Bâle ou Genève) mais ils ne trouvent à se
108 ewton, d’un Kant, d’un Novalis, d’un Kierkegaard, qui n’ont vécu que dans leur seule nation, et d’elle seule ont nourri leu
109 les fermées puis internationales ; par des styles qui ne connaissaient ni péages ni frontières politiques ; et par des trad
110 à la Suisse ses meilleures chances, et c’est elle qui , dans le cas de la Suisse — compartimentée à l’extrême, mais liée par
111 e l’économie et l’autre de la politique libérales qui allaient marquer tout le xixe siècle. Cinquante ans plus tard, c’est
112 ’histoire, dont son fervent disciple, Nietzsche — qui est aussi son plus jeune collègue de faculté — nourrira son génie bou
113 negger et un Frank Martin de nos jours, mais rien qui vraiment compte dans l’entre-deux, cela ne fait pas une tradition mus
114 uer les éléments sinon d’une « culture suisse » — qui ne saurait exister — du moins d’une attitude d’esprit commune aux cré
115 s restreintes du pays et des communautés diverses qui s’y côtoient. Pays pauvre, au surplus, et dont les seules richesses n
116 du Jura neuchâtelois. Voilà pourquoi les Suisses qui ont excellé furent presque tous, à des titres divers, hommes utiles,
117 iens et pédagogues, savants du premier rang, mais qui restent soucieux d’applications industrielles ou humanitaires — comme
118 ombat d’une armée et sur la volonté de résistance qui l’appuie dans la population. Ce qu’il est important de savoir sur l’a
119 ement prévu de la population, dans les trente ans qui viennent, sur un très petit territoire, agira totalement dans le même
120 ont elle dispose. N’est-elle pas le pays d’Europe qui a les raisons les plus fortes et les plus concrètes de savoir que le
4 1963, Articles divers (1963-1969). Le fédéralisme et notre temps (mars 1963)
121 e d’éclectisme universel, ou d’opportunisme lâche qui tolère tout et ne s’oppose à rien. Le fédéralisme s’oppose en fait à
122 clocher, les particularismes régionaux ou locaux qui prétendraient vivre en autarcie, refermés sur eux-mêmes, hostiles à t
123 oyen terme entre la peste et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave, n’est pas à mi-chemin entre un homme qu
124 este et le choléra. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave, n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un
125 qui se lave, n’est pas à mi-chemin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est
126 emin entre un homme qui meurt de soif et un homme qui se noie. De même, le fédéralisme n’est pas à mi-chemin entre la centr
127 e. Il est sur un autre plan que ces deux erreurs, qui n’en sont peut-être qu’une seule. Oui, le fédéralisme représente la s
128 s incompatibles de l’esprit. Car en réalité, ceux qui n’admettent aucune diversité politique ou culturelle dans la nation,
129 ation, manifestent le même état d’esprit que ceux qui n’admettent rien d’autre que leur manière de vivre locale, définie pa
130 omme tout art ! Elle est un art de la composition qui requiert à la fois et en même temps la vivacité des contrastes et leu
131 e de broyer mécaniquement toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce de brun, celui des chemises brunes par exemple,
132 là toute la différence entre l’harmonie fédérale, qui est libre union dans la diversité, et l’unification totalitaire, qui
133 dans la diversité, et l’unification totalitaire, qui est réduction forcée à l’uniforme. Ces images, qui sont autant d’évid
134 ui est réduction forcée à l’uniforme. Ces images, qui sont autant d’évidences, suffisent à définir le fédéralisme, art de c
135 D’une part, on affirme une souveraineté globale, qui ne laisserait pas jouer la diversité des fonctions nationales ; d’aut
136 art, on se cramponne à une souveraineté nationale qui a peur de se laisser englober dans un plus grand corps. Les uns oubli
137 enne à respecter la diversité des petites nations qui la composent, sinon elle trahira sa mission dans le monde ; et qu’en
138 II Avec ces quelques précisions de doctrine — qui paraîtraient bien théoriques et bien abstraites à un public français,
139 mais je parle après tout à des citoyens suisses, qui n’auront éprouvé aucune peine à me traduire en termes d’expérience po
140 trines, d’écoles, etc. — et il faut quelque chose qui lie toutes ces œuvres variées et qui leur offre une commune mesure ;
141 uelque chose qui lie toutes ces œuvres variées et qui leur offre une commune mesure ; sans quoi, nous ne saurions parler d’
142 lle nous pouvons nous rattacher directement, nous qui n’avons pas eu la chance, ou le malheur, d’avoir une soi-disant cultu
143 ionales ». Elle est l’œuvre de tous les Européens qui ont pensé et créé depuis 28 siècles, indépendamment des nations qui d
144 réé depuis 28 siècles, indépendamment des nations qui divisent aujourd’hui l’Europe, et dont la plupart n’ont même pas cent
145 ionales » ? C’est avant tout le fait de la langue qui l’entretient. Quand on dit que les Suisses romands se rattachent à la
146 onale » étant la langue maternelle de populations qui vivent dans sept ou huit nations différentes. Il faut donc commencer
147 ure européenne à chacune des vingt-quatre nations qui ont découpé leur État dans le corps de ce continent. III Or il
148 de base étant de la sorte identifiée, la question qui se pose est de savoir comment certaines cités ou certaines régions pa
149 de petits compartiments naturels ou historiques, qui n’ont jamais été unifiés, uniformisés par un pouvoir central, comme c
150 s beaucoup d’excellents ou même de grands esprits qui avaient ce sens, trop rare chez nos voisins. Cet apport très typiquem
151 vu, au génie de la culture en Europe, la question qui se pose maintenant est de savoir comment nous saurons illustrer notre
152 rejoins le propos de l’entreprise très opportune qui nous réunit. Deux erreurs de méthode menacent toute tentative de réve
153 s c’est une autre erreur, inverse de la première, qui ne cessera de vous tenter : celle de l’organisation rationnelle d’act
154 : celle de l’organisation rationnelle d’activités qui par essence, ne le sont pas. Tout le secret du fédéralisme réside dan
155 éside dans l’art de distinguer, de cas en cas, ce qui marcherait mieux en étant centralisé et ce qui marcherait mieux en re
156 ce qui marcherait mieux en étant centralisé et ce qui marcherait mieux en restant libre et dispersé, voire anarchique. Il e
157 des groupes d’écrivains, voire des petites revues qui expriment ces groupes avec l’intransigeance nécessaire. N’oublions pa
158 sigeance nécessaire. N’oublions pas que les cités qui ont fait la Renaissance en Italie, en Flandres ou en Bourgogne, étaie
159 la passion créatrice un peu folle de jeunes gens qui se groupaient en écoles, autour d’un maître du métier ; secondement,
160 nifique, le goût de la nouveauté et du somptueux, qui caractérisent tant de princes et de grands marchands de l’époque. Il
161 s passions individuelles et par de petits groupes qui ne craignent pas de passer pour extravagants ou excessifs. Les comité
162 étexte de répartition géographique équitable — ce qui n’est, soit dit en passant, qu’une parodie du vrai fédéralisme — c’es
163 une parodie du vrai fédéralisme — c’est tout cela qui mérite aujourd’hui d’inquiéter les amis de la culture, et c’est aussi
164 les amis de la culture, et c’est aussi tout cela qui menace dans ses sources notre vitalité fédéraliste. On parle beaucoup
165 ais ce n’est pas le fait de supprimer nos douanes qui mettrait en danger nos « raisons d’être » ! C’est bien plutôt le fait
5 1963, Articles divers (1963-1969). À propos de la culture européenne (avril 1963)
166 ébut à quels « Européens » l’auteur s’en prenait, qui d’une part refuseraient de reconnaître les apports judaïque, chrétien
167 Centre européen de la culture et ses publications qui sont « l’exemple typique » de l’altitude visée. Le CEC se livrerait d
168 le CEC d’un « défaut capital d’esprit critique » qui « vicie » ses travaux. Quelle est donc sa méthode à lui ? Elle consis
169 crits, et non pas à les interpréter d’une manière qui pourrait prêter à discussion, mais à les falsifier radicalement. Qu’i
170 se pose est de savoir quelles sont les traditions qui doivent collaborer à notre « Europe en formation », et à la vôtre.
6 1963, Articles divers (1963-1969). Orientations vers une Europe fédérale (10 mai 1963)
171 les les mieux partagées en Europe, il en est deux qui me paraissent les plus propres à motiver chez l’homme soucieux de la
172 t d’action politique, des dispositions dominantes qui déterminent nettement leur type. Pour étayer ses arguments, l’unitair
173 iance affichée à l’endroit des motifs passionnels qui prédéterminent visiblement les opinions des deux autres types. Mais p
174 nettement pluraliste, au seuil des considérations qui suivent sur l’avenir d’une Europe unie. ⁂ II. L’attitude fédéralis
175 e fédéraliste L’attitude fédéraliste est celle qui conduit à imaginer (pour mieux la vouloir) une Europe qui serait unie
176 uit à imaginer (pour mieux la vouloir) une Europe qui serait unie par des liens proprement fédéraux. Cette Europe fédérale
177 continental d’une notion de l’homme dans la cité qui est constitutive de l’Europe, et sans laquelle nos sciences et nos lo
178 r congrès de l’Union européenne des fédéralistes, qui se tint à Montreux en 1947, j’avais tenté de situer à grands traits c
179 is ramené, inévitablement, à son point de départ, qui est l’homme de notre Europe, redéfini dans les catégories concrètes d
180 l doit à son prochain — indissolubles. Cet homme qui vit dans la tension, le débat créateur, le dialogue permanent, c’est
181 ersonne. Voilà donc définis trois types humains, qui favorisent trois types différents de régimes politiques, et sont en r
182 ncore, pour compléter ce schéma trop rapide, mais qui me paraît indispensable, il ne faut pas penser que la personne soit u
183 oléra, elle représente la santé civique. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre celui qui me
184 e la santé civique. Un homme qui boit de l’eau et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre celui qui meurt de soif et celui
185 et qui se lave n’est pas à mi-chemin entre celui qui meurt de soif et celui qui se noie. Et, de même, le fédéralisme ne na
186 mi-chemin entre celui qui meurt de soif et celui qui se noie. Et, de même, le fédéralisme ne naîtra jamais d’un habile dos
187 , en ce sens précis que les éléments antagonistes qui trouvent leur composition dans la personne sont homologues de ceux qu
188 position dans la personne sont homologues de ceux qui trouvent leur composition dans le fédéralisme : ici l’individu et la
189 e passe comme si les hommes d’État et les groupes qui les instituaient avaient constamment obéi à certains principes direct
190 on peut dégager après coup. On retiendra ici ceux qui paraissent les plus faciles à transposer dans l’actualité immédiate,
191 exe ; il n’unit pas, il unifie. Et les coalitions qui se forment contre lui ne survivent pas à sa défaite. L’hégémonie ni s
192 ou la communauté d’États, ou le parti politique, qui agit comme catalyseur de volontés libres, comme maître de sagesse, ou
193 sagesse, ou comme inventeur, proposant une vision qui se trouve correspondre à la fois aux besoins réels d’une communauté e
194 d’une communauté en puissance, et à des solutions qui figurent l’optimum entre les maxima contradictoires de la liberté ind
195 s pour les minorités, destructeurs des diversités qui sont la condition de toute vie organique. Rappelons-nous toujours que
196 problème : mais c’est en supprimant les minorités qui le posaient. Il y a totalitarisme (au moins en germe) dans tout systè
197  ; il y a fédéralisme partout où c’est la qualité qui prime. Par exemple : le totalitaire voit une injustice ou une erreur
198 it l’individualité qualitative des États membres, qui y délèguent le même nombre de représentants quelle que soit leur popu
199 Mais le jeu des minorités raciales et religieuses qui composent l’ensemble ne se manifeste guère au plan municipal. En Sui
200 , se verraient soumis aux mêmes lois et coutumes, qui ne pourrait satisfaire aucun de ces groupes ; et qui les brimerait to
201 ne pourrait satisfaire aucun de ces groupes ; et qui les brimerait tous. L’attitude fédéraliste veut une maîtrise du diver
202 e de broyer mécaniquement toutes les couleurs, ce qui aboutit à une espèce de brun, celui des chemises brunes par exemple,
203 là toute la différence entre l’harmonie fédérale, qui est libre union dans la diversité, et l’unification totalitaire, cent
204 l’unification totalitaire, centraliste, jacobine, qui est réduction forcée à l’uniforme, — dans tous les sens du mot. Preno
205 mot. Prenons une autre image. Chacune des nations qui composent l’Europe y représente une fonction propre, irremplaçable, c
206 e simple question de tolérance, vertu négative et qui naît le plus souvent du scepticisme, mais plutôt de participation, ve
207 , mais plutôt de participation, vertu positive et qui naît d’une juste ambition. Chaque nation serait mise au défi de donne
208 omplexité, par contraste avec le simplisme brutal qui caractérise l’esprit totalitaire. Je dis bien l’amour, et non pas le
209 inistratifs, culturels, linguistiques, religieux, qui n’ont pas les mêmes frontières, et qui se recoupent de cent manières
210 religieux, qui n’ont pas les mêmes frontières, et qui se recoupent de cent manières différentes. Il est clair que des lois
211 sieurs de ses dimensions la personne même de ceux qui s’y rattachent. Certes, il est plus facile de décréter sur table rase
212 forcer ensuite leur exécution en écrasant tout ce qui résiste, ou simplement tout ce qui dépasse. Mais ce qu’on écrase ains
213 rasant tout ce qui résiste, ou simplement tout ce qui dépasse. Mais ce qu’on écrase ainsi, c’est la vitalité d’un peuple. U
214 tente économique, là c’est une parenté culturelle qui s’affirme. Ici, ce sont deux églises de confessions voisines qui s’ou
215 Ici, ce sont deux églises de confessions voisines qui s’ouvrent l’une à l’autre, et là ce sont des professions qui s’organi
216 nt l’une à l’autre, et là ce sont des professions qui s’organisent. Et surtout, ce sont des personnes, des groupes, des éco
217 , ce sont des personnes, des groupes, des écoles, qui créent peu à peu des réseaux variés d’échanges européens. Rien de tou
218 ns. Rien de tout cela n’est inutile. Et tout cela qui paraît si dispersé, si peu efficace souvent, forme peu à peu des stru
219 sature et le système des vaisseaux sanguins de ce qui deviendra un jour le corps de l’Europe unie. Au-dessous et au-dessus
220 pourtant bien ce qu’avait tenté de faire la SDN, qui en est morte, et ce qu’a tenté à nouveau l’ONU, que cela empêche de v
221 mais peut être l’œuvre de groupes et de personnes qui ont pris l’initiative de se fédérer en dehors des gouvernements natio
222 de l’Europe à La Haye en 1948, et ses suites) et qui , par le détour de l’opinion publique et de groupes de pression économ
223 if issus des peuples et des groupes de tout ordre qui animent la vie publique. Septième principe. Une fédération ne se cré
224 qu’elles puissent exercer ensemble des fonctions qui dépassent les forces de chacune d’elle. Ni les menaces arabes puis mo
225 ne saurait trop insister sur ce double mouvement qui caractérise la pensée fédéraliste, sur cette interaction, cette diale
226 e dialectique, cette bipolarité, comme on voudra, qui est le battement même du cœur de tout régime fédéraliste. L’oublier s
227 romands. En allemand, confédération se dit Bund, qui signifie union, et qui évoque avant tout l’idée de centralisation. En
228 confédération se dit Bund, qui signifie union, et qui évoque avant tout l’idée de centralisation. En Suisse romande, au con
229 ralisation. En Suisse romande, au contraire, ceux qui se proclament « fédéralistes » sont en réalité les défenseurs jaloux
230 aler pour la Suisse. Nous aurons des fédéralistes qui ne penseront qu’à faire l’union et à la renforcer, et nous aurons des
231 x, quelque part à mi-chemin entre les buts visés, qui sont l’établissement de l’union générale et le respect des droits par
232 us les ordres, à chaque niveau, de cas en cas, ce qui doit être carrément centralisé pour bien fonctionner, et ce qui doit
233 carrément centralisé pour bien fonctionner, et ce qui doit rester pleinement autonome pour bien vivre. Deux cas extrêmes il
234 au principe de la méthode indiquée ci-dessus, et qui consiste à distinguer dans tous les domaines de la vie publique, au f
235 d’une méthode générale de travail et de création, qui rend compte du dynamisme particulier de notre civilisation : la libér
236 correspond une organisation de la zone conquise, qui , ainsi colonisée, permet soit de se lancer vers des aventures ou des
237 tée par les Européens pour les libérer du travail qui pouvait être fait par elle ; et s’ils ne savent mettre à profit les l
238 rsonnelles et sociales, c’est leur esprit d’abord qui en est le vrai responsable. Le mécanisme quel qu’il soit — de la mach
239 e ne perdrai pas de temps à rappeler les maladies qui la menacent en permanence. La tyrannie de l’État et de ses mécanismes
240 individualiste (ou impérialisme local) de groupes qui se veulent souverains, comme si le reste du monde n’existait pas : j’
241 de réalité et d’action, soit dans la vie privée ( qui relève de la métaphysique), soit dans la vie du groupe ou de la cité
242 sique), soit dans la vie du groupe ou de la cité ( qui relève de l’éthique), soit dans les relations intercollectives (qui r
243 hique), soit dans les relations intercollectives ( qui relèvent de la politique). Moyens. Union (économie d’énergies) capa
244 té sans espoir aux praticiens de la vie politique qui se contentent des routines et recettes « réalistes » héritées du sièc
245 e à la paresse d’esprit d’une classe politicienne qui n’a pas su prévoir Hitler, et qui trouvait le Marché commun trop tech
246 se politicienne qui n’a pas su prévoir Hitler, et qui trouvait le Marché commun trop technique pour être sérieux. Philosoph
247 sophie de la personne et technique d’organisation qui la traduise. En bonne méthode personnaliste, c’est d’une vision des B
248 : car elle seule permettra d’éclairer les chemins qui peuvent y conduire. Nous allons essayer de la décrire à grands traits
249 e ses produits partout, sans taxes, et acheter ce qui se fait partout, au même prix et en francs européens. Ce marché commu
250 ces ouvertures plus vastes à l’esprit d’aventure, qui sera toujours le fait d’une minorité, n’empêchent nullement ceux qui
251 e fait d’une minorité, n’empêchent nullement ceux qui préfèrent la sécurité maternelle et la protection d’une partie limité
252 ne de ses communes. Tout citoyen d’un État membre qui s’établit sur le territoire administré par un autre État membre y bén
253 ote, et il y est éligible après un certain délai, qui varie selon qu’il s’agit d’emplois publics municipaux, régionaux, ou
254 s’exprime désormais par des décisions fédérales, qui traduisent la conscience et la volonté de la majorité des États et de
255 éfense, selon les plans de l’état-major européen, qui dépend du pouvoir fédéral. Moyens, ou institutions Les institut
256 ait atteinte au droit fondamental des communautés qui est, d’une part, d’être déchargées des tâches d’organisation (ou « mé
257 évolution vers des groupements de leurs régions, qui parfois nouent des liens assez étroits, par-delà les frontières étati
258 saurait s’expliquer qu’en fonction des problèmes qui se posaient au départ de la construction de l’Europe. Ouvrons donc en
259 e, on pourrait recourir à un précédent historique qui me paraît tout à fait indiqué en la matière : La Constitution fédéral
260 rale, et comme tels, ils exercent tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral. Article 5. — La Confédérati
261 é unanime des peuples et des États confédérés. Ce qui est bien loin d’être le cas des souverainetés soi-disant « absolues »
262 is seulement par l’une des puissances extérieures qui ont la souveraineté atomique. Cette situation aussi dangereuse qu’hum
263 ps des grands empires, l’indépendance de décision qui échappe en fait à ses nations. b) Libération des dynamismes régio
264 e du continent et aux îles britanniques le régime qui est en train de s’instaurer entre les Six (effacement des frontières
265 fédérée de 1980. On y assiste à des regroupements qui ne tiennent plus compte des frontières nationales et modifient profon
266 ne constellation de foyers, ou de « métropoles », qui ne sont plus définis par leur contour, mais par leur force de rayonne
267 e de complexes à la fois économiques et culturels qui ne recouvrent pas nécessairement les anciennes provinces ou régions,
268 ssairement les anciennes provinces ou régions, et qui chevauchent souvent les frontières « nationales » dessinées au xviiie
269 s’en déduisent sans autres difficultés que celles qui naissent d’une volonté fédéraliste de respecter autant que possible l
270 s États membres ni au-dehors, c’est la fédération qui assure la représentation diplomatique de l’Europe entière, pour toute
271 s et consulats chargés d’entretenir les relations qui ne sont pas du ressort fédéral. (Relations économiques et commerciale
272 des forces armées aux ordres du pouvoir fédéral, qui ne peuvent entrer en action qu’en cas d’attaque contre la fédération
273 de lier son sort à un État ou à un groupe d’États qui s’interdit comme elle tout recours à la guerre, elle reste neutre en
274 lure une alliance militaire avec aucune puissance qui maintiendrait son « droit » de recourir à la guerre. Dans le domaine
275 rge d’organiser et de subventionner les activités qui dépassent la capacité des États membres. Elle administre les douanes
276 e la compétence de l’Assemblée sont toutes celles qui relèvent expressément de la fédération : législation fédérale, garant
277 s de développement aussi différenciées que celles qui existent en Europe, ne saurait être gouverné que par un Collège où s’
278 ote de l’Assemblée (éventuellement au référendum) qui peut les rejeter ou les modifier, sans que le Conseil fédéral ou le m
279 olte concernant la fédération, et d’autres causes qui lui sont soumises par accord des parties, quand le litige atteint le
280 iège des autorités fédérales Les mêmes raisons qui veulent que la fédération soit gouvernée par un Collège, et non par u
281 en tant qu’État, à l’écart des luttes politiques qui se jouent à l’échelle du continent. Ces conditions idéales se trouven
282 ns les affaires fédérales européennes. La Suisse, qui n’inquiète personne, se trouve ainsi confirmée dans son statut tradit
283 Voici une liste, non exhaustive, des facteurs qui paraissent aujourd’hui susceptibles de jouer dans le sens d’une solut
284 rme de pensée politique spécifiquement européenne qui prend ses sources dans la théologie chrétienne et dans la philosophie
285 éralisme est une méthode d’organisation politique qui a fait ses preuves notamment en Suisse et aux États-Unis et qui est p
286 preuves notamment en Suisse et aux États-Unis et qui est pratiquée aujourd’hui dans les processus de décision des Communau
287 réorganisés de fond en comble au xxe siècle ; ce qui incline à penser que les réussites suisse et nord-américaine ont une
288 régression rapide, d’ailleurs. 3. Les catholiques qui prennent au sérieux les déclarations réitérées du Vatican, et les pro
289 arations réitérées du Vatican, et les protestants qui ont gardé vivante la tradition calvinienne, ne peuvent, en bonne doct
290 lles municipales et provinciales, et de tous ceux qui disent redouter « l’américanisation » de l’Europe ou sa « bolchevisat
291 taire à se replier sur des solutions praticables, qui se trouveront être fédéralistes par nécessité, sinon par choix délibé
292 der par deux séries de déductions inévitables, et qui sont au surplus convergentes. L’une a pour point de départ la définit
293 rcée par celle des Six ; pression du tiers-monde, qui exige l’aide de l’Europe et n’en oppose pas moins à son passé mal vu
294 ombre ; il leur arrive d’accuser de sabotage ceux qui demandent : « Quelle Europe voulez-vous ? Qu’on nous la montre ! » Ce
295 clairer le But est donc la première tâche de ceux qui veulent se mettre en marche. Inventer des chemins vers le But est la
296 raduit exactement l’incertitude des hommes d’État qui les emploient. Qui veut la fin veut les moyens, mais personne ne sau
297 incertitude des hommes d’État qui les emploient. Qui veut la fin veut les moyens, mais personne ne saurait vouloir une fin
298 distingue mal. Et c’est pourquoi, dans le domaine qui nous occupe, la prévision est une action. Bien voir le But, se concen
299 rd trop souvent n’a vu que ce qu’il cherchait, ce qui était dans mon esprit et non dans la réalité. Cet essai n’a donc d’au
300 rrigeant, complétant, cadrant mieux le sujet ; et qui dira, au terme de l’étude : voilà le But. Cette « relance européenne 
301 revue L’Ordre nouveau (publiée de 1932 à 1937) qui s’inspirait de ces idées. 6. « The task before us, at this congress,
7 1963, Articles divers (1963-1969). L’amour ? le mariage ? la fidélité ? l’adultère ? la passion ? le couple ? (25 octobre 1963)
302 ance, et que la passion, elle, veut des obstacles qui rendent l’amour plus intense et plus conscient. Le mariage, en forman
303 autre naturellement), favorise cet amour-passion qui se dénoue alors dans l’adultère. Cette passion tant espérée, neuf foi
304 as ! L’amour-passion, cette conception de l’amour qui nous est si familière que nous nous figurons qu’elle a toujours exist
305 courtois chanté par les troubadours. Ce sont eux qui ont apporté le langage nécessaire aux aspirations de l’âme médiévale,
306 ge nécessaire aux aspirations de l’âme médiévale, qui leur ont permis de s’exprimer et de s’avouer au grand jour. Pour la p
307 ière fois, l’homme devient le servant de la femme qui est élevée au-dessus de lui, de la Dame. Pour la première fois, l’amo
308 t aussi la chasteté incompatible avec le mariage ( qui n’est alors que l’union des corps et des biens). Pour la première foi
309 si une sorte de religion. Cet « amour courtois » qui contredisait si fort la conception du mariage et la condition de la f
310 hrétienne d’origine orientale, l’hérésie cathare, qui l’a fourni ; cette hérésie qui s’installe solidement dans les cours e
311 l’hérésie cathare, qui l’a fourni ; cette hérésie qui s’installe solidement dans les cours et les châteaux du Midi (Albi fu
312 pas de toutes relations érotiques, mais de celles qui sont procréatrices et qui auraient pour effet de faire tomber une âme
313 otiques, mais de celles qui sont procréatrices et qui auraient pour effet de faire tomber une âme de plus dans un corps vil
314 ncontre. Et c’est l’Europe catholique et nordique qui devait offrir les résistances les plus durables à l’épanouissement de
315 ment codifiées, la retenue imposée aux instincts, qui permet à l’attrait naturel de s’exalter, de devenir une passion. Et c
316 ne passion. Et c’est le roman de Tristan et Iseut qui restera le prototype éternel de l’amour-passion qui se nourrit d’obst
317 i restera le prototype éternel de l’amour-passion qui se nourrit d’obstacles qu’on lui oppose, qui les invente au besoin :
318 sion qui se nourrit d’obstacles qu’on lui oppose, qui les invente au besoin : Tristan aurait pu garder Iseut aux cheveux d’
319 s justifier : la morale chrétienne, l’orthodoxie, qui ne s’appuie plus sur une foi vivante, est devenue la « morale bourgeo
320 ombat et voici les « ruses » d’une passion débile qui cherche à s’entretenir : jalousie désirée, provoquée, favorisée, non
321 l’amour en soi… Et voici le rêve sournois du mari qui ne peut plus désirer sa femme qu’en l’imaginant sa maîtresse (ou dans
322 ’un autre). Cet amour-passion de Tristan et Iseut qui se dénouait dans la mort, se dénouera alors un jour ou l’autre dans l
323 n peut « décider » d’aimer et d’épouser n’importe qui  ? Non, il existe certaines chances de réussite qu’il serait stupide d
324 -là, ce n’est pas seulement de ne pas tromper (ce qui serait une preuve d’indigence et non d’amour). C’est vouloir le bien
325 ngoisse, c’est l’acceptation de l’autre : une vie qui m’est alliée pour toute la vie, qui veut mon bien autant que le sien
326 tre : une vie qui m’est alliée pour toute la vie, qui veut mon bien autant que le sien parce confondu avec le sien. Cette f
327 l’ennemie jurée du mariage mais c’est elle aussi qui le défie, l’anime, l’oblige à redevenir un choix vital et non pas une
328 et ennui ne recrée alors la soif de quelque chose qui soit au-delà de l’ordre et qu’il n’appelle alors un autre xiie siècl
329 n’appelle alors un autre xiie siècle de l’amour… qui sera peut-être le xxie siècle. g. Rougemont Denis de, « [Entretie
330 ccident (Collection 10/18), un livre passionnant qui étudie et qui explique pourquoi les hommes et les femmes ont tant de
331 ection 10/18), un livre passionnant qui étudie et qui explique pourquoi les hommes et les femmes ont tant de difficultés, a
332 fet, tout le mal vient d’un monstrueux contresens qui consiste à fonder le mariage sur la passion, son ennemie intime. Or,
333 importation”, non une fatalité. D’où vient-elle ? Qui l’a introduite en France ? Comment l’affronter ? Et enfin, comment ré
334 nt réussir son mariage, car rien n’est perdu pour qui veut comprendre ? Nous avons demandé à Denis de Rougemont de répondre
335 à Denis de Rougemont de répondre à ces questions qui sont dans le cœur de toutes les femmes. »
8 1963, Articles divers (1963-1969). Une interview de Denis de Rougemont : l’écrivain nous parle des centres culturels internationaux (16 novembre 1963)
336 urs duquel nous lui avons posé quelques questions qui nous tenaient particulièrement à cœur. Lors de votre conférence : « L
337 s de ces petits livres ont été vendus en 1960, ce qui représente une moyenne d’un million par jour ! L’entretien a pris fin
9 1964, Articles divers (1963-1969). L’idée européenne en Suisse (1964)
338 s Waldstätten reçoivent les lettres d’immédiateté qui garantissent leurs « libertés » et les dégagent de la tutelle des gra
339 and-garde du col du Gothard ; et c’est l’empereur qui leur accorde ces franchises, dans les intérêts de l’Empire entier — d
340 pire d’Occident, l’idée d’union sans unification, qui deviendra l’idée fédéraliste. Lorsque plus tard les nations s’absolut
341 amitié, soit par des livres comme De l’Allemagne, qui rétablissent la circulation internationale des idées, malgré les jaco
342 émonie et de centralisme national, mais c’est lui qui rédige, pendant les Cent-Jours, le projet de fédération européenne13
343 . Et son fédéralisme européen préfigure le régime qui triomphera, en 1848, à l’échelle suisse : « La variété, c’est de l’or
344 liste, antiunitaire, authentiquement fédéraliste, qui lui paraît destiné à assurer un jour la paix en Europe. « Si cet idéa
345 éens voit le jour : l’Europa-Union ; et c’est lui qui convoque la première rencontre internationale au lendemain de la guer
346 rigeants d’Europa-Union, rédigent une déclaration qui va servir de base à la création de l’Union européenne des fédéraliste
347 de l’Union européenne des fédéralistes. Celle-ci, qui groupe rapidement une vingtaine de mouvements nationaux, et plus de 1
348 conduit à la convocation du Congrès de l’Europe, qui se tient à La Haye au mois de mai 1948. De La Haye naît le Mouvement
349 mai 1948. De La Haye naît le Mouvement européen, qui propose et obtient en neuf mois la création du Conseil de l’Europe. L
350 Genève et convoque aussitôt une grande conférence qui se tient à Lausanne, au mois de décembre 1949. De la conférence de La
351 . Et j’ai marqué la filiation — trop mal connue — qui va de Hertenstein au congrès de Montreux, du congrès de Montreux à ce
352 rope », et ce sont quelques Suisses entreprenants qui l’ont permis. Qu’a fait, pendant ce même temps, la Suisse légale ? Et
353 ticisme invétéré (ou faut-il dire traditionnel ?) qui tendait à paralyser non seulement toute initiative de la Suisse, mais
354 l’imagination et la faculté de prévision de ceux qui faisaient notre opinion. L’union de l’Europe s’avérait bel et bien ré
355 r fédéral serait amené à promulguer des décisions qui sont actuellement du ressort des cantons. Le droit d’établissement, l
356 ojets d’Europe unie « une politique d’unification qui vise à mêler les peuples d’Europe pour éliminer peu à peu les caracté
357 intérêts de l’Europe entière ». Or c’est l’union qui est aujourd’hui dans l’intérêt de tous les peuples de l’Europe. Si no
358 à l’édification de l’Europe unie. Sinon, l’Europe qui se fera sans elle, risque bien de se faire contre elle, — c’est-à-dir
359 utisant jusqu’à devenir tabou — traître est celui qui ose la discuter — a changé de nature et de finalité. Isolée de l’Hist
360 le conjoncture, les rêveries des experts fédéraux qui , sans oser prôner une autarcie plus impossible encore chez nous qu’ai
361 onnelle de la Suisse. Mais se fera-t-elle ? Voilà qui dépend de nous aussi. C’est à nous de faire valoir dans les conseils
362 i. C’est à nous de faire valoir dans les conseils qui élaborent l’Europe future les avantages de la formule fédéraliste. Pr
363 en Allemagne.) Mais ce n’est pas le Marché commun qui les amène. C’est l’expansion de l’industrie suisse, aux destinées de
364 nitivement interrompu pour ceux de la Mégalopolis qui menace de couvrir le Plateau, de Genève à Romanshorn, avant la fin du
365 édéralistes de tolérance calculée et d’empirisme, qui supposent qu’on ne pousse pas sa pointe à fond et qu’on ne se laisse
366 pas entraîner par une verve logique ou polémique qui risquerait de paraître peu réaliste, voire peu suisse. Mais je sens d
367 eux autres motifs à cette espèce d’embarras. Ceux qui se réclament très haut de nos traditions savent bien que chacun sait
368 re mieux ainsi. Mais notre peuple comprend mal ce qui est en jeu. Je ne suis d’accord, pour ma part, ni avec ceux qui refus
369 . Je ne suis d’accord, pour ma part, ni avec ceux qui refusent l’Europe au nom de notre neutralité, ni avec ceux (beaucoup
370 té, ni avec ceux (beaucoup plus rares d’ailleurs) qui voudraient que la Suisse renonce sans condition à toute idée de neutr
371 nion européenne de type expressément fédéraliste, qui renoncerait à la guerre comme moyen politique. Une telle Europe repre
372 que. Une telle Europe reprendrait à son compte ce qui demeure valable et même indispensable dans la neutralité d’une fédéra
373 même mondiale en tant que Suisses, et comme État qui entend garder une raison d’être. Il s’agit de savoir et de dire ce qu
374 que l’Europe est en droit d’attendre d’une Suisse qui fait partie de sa communauté et qui en est bénéficiaire, et pas seule
375 d’une Suisse qui fait partie de sa communauté et qui en est bénéficiaire, et pas seulement ce que nous attendons et surtou
376 nitiatives pacifiques, je dis bien, dans l’esprit qui est devenu celui de la Suisse moderne, laquelle ne saurait croire à l
377 sse peut et doit opposer la solution fédéraliste, qui maintient les patries et l’union. Et cela non seulement parce que cet
378 our l’Europe. Or, si la Suisse ne la propose pas, qui le fera ? Notre fédéralisme est peu connu, ou très mal connu hors de
379 urquoi parler toujours de cette neutralité, vertu qui ennuie et pratique négative, quand nous avons à proposer une expérien
380 imidité ? L’histoire n’est pas faite par des gens qui défendent leur position, mais bien par ceux qui créent des positions
381 s qui défendent leur position, mais bien par ceux qui créent des positions nouvelles. Ce que l’Europe et le monde attendent
382 ue d’autres proposent, mais c’est un plan d’union qui nous convienne et auquel nous puissions adhérer « sans réserve et de
10 1964, Articles divers (1963-1969). Les arts dans la vie en Suisse (1964)
383 rs différences — et vraiment il n’en est pas deux qui se ressemblent : l’un catholique et l’autre protestant ; l’un qui est
384 nt : l’un catholique et l’autre protestant ; l’un qui est une ville moderne, l’autre une vallée des Alpes ; ici l’on parle
385 n’aurait pas duré longtemps ne sont pas de celles qui excitent au plus haut point l’esprit de risque et d’aventure créatric
386 nt l’esprit de risque et d’aventure créatrice, ni qui entretiennent le mieux ce climat passionné de polémiques et d’engouem
387 ’essor d’une carrière prestigieuse ou d’une école qui impose un style. Le sens du compromis, la réserve prudente dans l’exp
388 re ces chiffres en relation avec l’indice Nobel — qui indique la proportion des prix décernés pour les sciences par million
389 illion d’habitants d’un pays, de 1901 à 1961 — et qui atteint le maximum de 2,62 pour la Suisse, l’indice du Danemark, deux
390 s nos cantons, est donc liée au vrai fédéralisme, qui n’est pas l’esprit de clocher, ni l’abandon à l’uniformité imposée pa
391 i-même, ou le devenir de mieux en mieux, voilà ce qui me paraît digne de retenir l’attention des visiteurs de la section « 
11 1964, Articles divers (1963-1969). De la marche / De l’échec (1964)
392 rquoi certains des incidents de la vie militaire, qui n’étaient que routine aux yeux de mes instructeurs, m’apparurent tout
393 instructeurs, m’apparurent tout chargés d’un sens qui dépassait de beaucoup leur portée immédiate et l’intention du règleme
394 moment. Le colonel de P. cachait sous des manies, qui le faisaient passer pour un original, une véritable originalité d’all
395 ique dans les casernes, une indépendance d’esprit qui chez un officier plus jeune n’eût pas manqué d’être taxée d’insolence
396 ation scolaire, interrompant d’un geste bref ceux qui s’annonçaient encore pour répondre, il scanda : « L’énergie, c’est qu
397 dre, il scanda : « L’énergie, c’est quelque chose qui dort en chacun de vous et qu’il s’agit de réveiller. » Puis il sortit
398 pli quelque chose d’excessif, et fourni un effort qui dépassât de beaucoup le maximum que nous pensions pouvoir tirer de no
399 raignant. Nous étions préparés pour quelque chose qui nous paraissait à la fois démesuré, inévitable et sans raison. Tout c
400 ntes des Préalpes, puis nous longerions la vallée qui monte lentement jusqu’aux hôtels de la Lenk ; il nous faudrait franch
401 melle — détails infimes et insensibles au départ, qui se révèlent à longueur de marche, causant d’abord une légère irritati
402 des forces ordinairement insoupçonnées par celui qui se bornait à de courtes visées. Elles étaient là, ces forces, à porté
403 temps de marche devant lui, et certains objectifs qui , peut-être, parce qu’ils ne sont que vaguement entrevus, semblent alo
404 se préparent pour une course de fond et, c’est ce qui définit, biologiquement et moralement, l’état de jeunesse. Resteront
405 état de jeunesse. Resteront longtemps jeunes ceux qui gardent longtemps devant eux des buts grands et lointains. Et c’est p
406 -midi découpait chaque détail des parois orangées qui s’élevaient par degrés autour de nous, modelait largement les croupes
407 sorte de durée suspendue dans l’espace obscur, et qui n’était plus mesurée que par l’alourdissement des membres. Un vent fr
408 usses des canapés, dans des chambres glaciales et qui sentaient le camphre, nous nous sommes affalés, tout équipés. Un cama
409 six d’entre nous allèrent s’annoncer au colonel, qui buvait du café au restaurant. — « Je vous remercie, nous dit-il lente
410 e caisse très lourde, et elle est vide. Le savant qui poursuit une longue recherche apprend qu’un collègue a trouvé. Une na
411 erche apprend qu’un collègue a trouvé. Une nation qui a tendu ses forces vives vers la victoire, et qui l’atteint, voit s’o
412 qui a tendu ses forces vives vers la victoire, et qui l’atteint, voit s’ouvrir une paix marécageuse. Le mystique, aux appro
413 la Lenk, cette nuit-là, j’eus un accès de fièvre qui me tint éveillé jusqu’au matin. Les énergies alertées dans mon corps
414 ins entraîné, ou soudain délivré de la discipline qui m’attendait avec le jour, — c’était mon tour de commander la classe e
415 évité cette débâcle nerveuse que les Américains, qui en ont fait une catégorie courante, nomment un break-down. Si la prem
416 le monde réel où nous vivons, dans le temps bref qui nous est imparti, dans les limitations de toute nature confrontant l’
417 e la durée même de l’Histoire. Et malheur à celui qui n’est pas prêt à tirer son bien de ce mal ! Malheur à celui qui exige
418 prêt à tirer son bien de ce mal ! Malheur à celui qui exigerait de réussir pour persévérer, après n’avoir entrepris qu’en e
12 1964, Articles divers (1963-1969). Le sentier perdu (1964)
419 que par ces roses un peu gris que je me rappelle, qui s’exagèrent sans doute dans mon souvenir visuel, ajoutés à des verts
420 reconnaît sans l’avoir jamais vu nulle part, mais qui ressemble absolument. L’informel a rejoint le style du rêve. Au-delà
13 1965, Articles divers (1963-1969). La technique, facteur de paix (6 mars 1965)
421 e que j’en puis faire comme usager moyen et homme qui réfléchit sur cet usage dans notre civilisation. Disons, symboliqueme
422 er quelques grandes questions des plus naïves, et qui ne portent pas sur tel ou tel problème précis que se posent les techn
423 taines recherches plutôt que d’autres, recherches qui à leur tour devaient conduire à certaines découvertes plutôt qu’à d’a
424 couvertes plutôt qu’à d’autres, — chaîne continue qui va des grands conciles des ive et ve siècles, comme ceux de Nicée e
425 de Chalcédoine, jusqu’à la bombe atomique. Voilà qui peut surprendre, mais qui est en somme très simple : la religion prép
426 a bombe atomique. Voilà qui peut surprendre, mais qui est en somme très simple : la religion prépondérante de l’Europe se f
427 l’Incarnation, sinon Dieu lui-même, l’Esprit pur, qui choisit de se rendre connaissable dans un corps d’homme. Il en résult
428 là un programme grandiose d’action sur le cosmos, qui s’offre à l’homme en tant que spirituel, précisément. Programme grand
429 ent. Programme grandiose, pratiquement infini, ou qui ne finira qu’avec la fin des temps. Mais la croyance en un Dieu créat
430 e de l’attitude fondamentale, de l’option de base qui va rendre la science possible et qui va donner bonne conscience à la
431 tion de base qui va rendre la science possible et qui va donner bonne conscience à la recherche appliquée non plus à l’espr
432 cela que la Nature attend de l’homme, une action qui la maîtrise et la libère, et non pas une révérence dévotieuse et crai
433 , la religion judéo-chrétienne d’un Dieu incarné, qui appelle l’homme à la liberté dans sa condition concrète et non dans l
434 de véracité contrôlée et mesurée. Cette synthèse, qui est l’œuvre du Moyen Âge, dès le xiiie siècle, produit ses effets à
435 nds bien d’une science des corps et de la matière qui ne se veut pas seulement spéculative, mais transformatrice du réel. A
436 Et de fait, que ce soit la technique occidentale qui ait favorisé les guerres, ou l’inverse, ce que l’on observe à coup sû
437 sses permettent d’armer de petits corps de troupe qui ne dépendent pour leurs fournitures de guerre que des forgerons et de
438 ivement avec la première révolution industrielle, qui aboutit à la Materialschlacht de Verdun. La fin de la guerre de 14-18
439 is le point final de la Deuxième Guerre mondiale, qui fut une guerre motorisée, est posé par la bombe d’Hiroshima, début d’
440 technique, ou si ce n’est pas plutôt la technique qui a bénéficié des commandes militaires. Entre les deux guerres mondiale
441 une limite, une sorte de point mort de la guerre, qui permet à la paix de durer tant bien que mal, et c’est ce que l’on a b
442 ue les passions nationalistes ou idéologiques, et qui neutralise ou refoule ces passions — la peur, commencement de la sage
443 e bien moins sur une angoisse panique des peuples qui s’opposerait — on ne sait comment — à un conflit atomique, que sur un
444 n raisonnée, basée sur des informations précises, qui retient les gouvernants de peser sur le bouton rouge, crainte plus fo
445 e toute autre passion, conviction ou ambition, et qui de la sorte dévalorise les enjeux idéologiques et démystifie les pass
446 ous sommes trop près les uns des autres, et celui qui en lancerait une risquerait d’en recevoir dans l’heure suivante les r
447 t et de l’Ouest, malgré les conflits idéologiques qui semblaient devoir les opposer irréductiblement, quels ont été les eff
448 rituel et culturel que j’évoquais tout à l’heure, qui a mis en relation les divers continents et qui a révélé à leurs peupl
449 e, qui a mis en relation les divers continents et qui a révélé à leurs peuples l’existence d’autres civilisations, à certai
450 s, en tout cas plus prospères. C’est la technique qui a fait voir l’Occident aux peuples de l’Afrique, du monde arabe, de l
451 ’assez rares exemplaires de colons et de soldats, qui n’avaient rien de bien attirant. Mais aujourd’hui, le cinéma leur fai
452 e. Ils prennent conscience d’une misère relative, qui autrefois leur paraissait normale ou en tout cas inévitable, dans l’i
453 t nos machines, mais ils ne voient pas, hélas, ce qui les a rendues possibles. Ils croient qu’ils pourraient acheter ces be
454 ux un accroissement démographique vertigineux, et qui dépasse de très loin l’accroissement de leurs ressources dans le même
455 ue peut faire l’Occident, pour éviter ce désastre qui serait bien pire que tout ce que nous faisait redouter la guerre froi
456 l’Occident puisse nourrir les milliards d’affamés qui se multiplient sans frein dans le tiers-monde. Les philanthropes qui
457 sans frein dans le tiers-monde. Les philanthropes qui nous adjurent de nous priver de notre superflu pour apaiser la faim d
458 andir la terre. Il faut donc que notre technique, qui a créé sans le vouloir ce problème gigantesque, branché sur des passi
459  : et cela suppose un effort immédiat d’éducation qui permettra seul au tiers-monde de freiner l’accroissement de sa popula
460 moyens de faire la guerre, mais ce n’est pas elle qui cause les guerres, ce sont au contraire les passions, qui utilisent l
461 e les guerres, ce sont au contraire les passions, qui utilisent la technique comme instrument. C’est l’explosion des nation
462 ment. C’est l’explosion des nationalismes en 1914 qui a déclenché la Première Guerre mondiale, et non pas la mitrailleuse,
463 et non pas la mitrailleuse, ou ces avions biplans qui volaient tout juste assez vite pour ne pas tomber. (« Vole aussi bas
464 ie, mais restaient ignorés par les gouvernements, qui a déclenché la Deuxième Guerre mondiale, mais au contraire, c’est sa
465 re, c’est sa réalisation par Fermi et Oppenheimer qui a mis fin à cette guerre le 5 août 1945, à Hiroshima. Voilà donc la t
466 s si elle bénéficie des guerres, c’est elle aussi qui leur met fin, et aujourd’hui les freine ou même les bloque. III
467 e-ci ne peut naître qu’à la faveur d’un équilibre qui ne soit pas celui de la terreur, mais des diverses facultés humaines
468 istes, serait-elle un facteur de déshumanisation, qui ne substituerait aux explosions belliqueuses qu’une sorte d’implosion
469 ou non l’équilibre entre les différentes cultures qui se partagent aujourd’hui la planète, je viens de vous donner une répo
470 éographique et à la vision instantanée de tout ce qui arrive d’important sur la terre. Déjà nous vivons dans un cadre plus
471 -ils des monstres, pâles victimes d’une technique qui les enferme dans un milieu de brique et de ciment, d’air pollué et de
472 pendant l’été. Et je mets en fait que la jeunesse qui ne parle, dit-on, que de marques d’autos, connaît mieux les forêts, l
473 égions de l’Europe que ses ancêtres en redingote, qui ne parlaient que de politique. Un peu de technique industrielle rudim
474 in usines de verre entourées d’arbres, automation qui libère l’ouvrier, loisirs accrus, intimité nouvelle avec une nature m
475 fin de compte sur une illusion enfantine : celle qui consiste à battre la table à laquelle on s’est heurté. La technique n
476 ’est pas une puissance indépendante de l’homme et qui pourrait se tourner subitement contre lui. La technique n’est pas mat
477 sée spatiale, n’est pas l’histoire de « besoins » qui auraient existé avant elles, c’est plutôt l’histoire de nos rêves. L’
478 ale, et plus près de nous, les grandes inventions qui ont modifié nos vies — je ne parle pas de nos gadgets — ne sont pas n
479 it avant elles, mais c’est généralement l’inverse qui s’est produit. Personne n’avait besoin d’autos quand il n’y en avait
480 me il l’appelait, c’est-à-dire un véhicule rapide qui ne fût pas astreint à suivre la loi rigide des « voies ferrées » et s
481 xtrême simplicité. La technique est un instrument qui ne saurait être, en soi, mauvais ou bon. Tantôt révérée comme instanc
482 r trancher en dernier ressort de grands problèmes qui appelleraient en réalité des décisions politiques ou morales, tantôt
483 onfort, il n’est peut-être pas d’activité humaine qui paraisse moins métaphysique en soi que la technique. Mais en même tem
484 la technique. Mais en même temps, il n’en est pas qui nous contraigne davantage, et avec une urgence plus dramatique, dans
485 erroger sur le meilleur usage des pouvoirs inouïs qui sont devenus les nôtres. Ainsi, qu’on le veuille ou non, c’est la tec
486 n le veuille ou non, c’est la technique elle-même qui nous oblige à reconsidérer d’une manière tout à fait concrète la ques
14 1965, Articles divers (1963-1969). La Suisse, maquette pour une Europe du bonheur (automne 1965)
487 iré. Il ne retient que certaines apparences, mais qui suffisent à remplir les hôtels. Pourtant la Suisse est autre chose, q
488 ces, pour ne rien dire de cette galaxie de génies qui va de Paracelse à C. G. Jung, en passant par Euler, les Bernouilli, R
489 é à l’utopie, et de la patrie d’un Guillaume Tell qui n’exista jamais que dans le mythe à une Europe fédérée qui par malheu
490 sta jamais que dans le mythe à une Europe fédérée qui par malheur n’existe encore que dans l’espoir. Entre les deux, où est
491 51 % plutôt heureux, et 6 % pas très heureux, ce qui ne laisse guère de place qu’à 1 % de révoltés ou de désespérés. Ce ph
492 re tous les seigneurs locaux, dont les Habsbourg, qui essayaient d’en prendre le contrôle. Et c’est pourquoi le grand emper
493 aux communes du Gothard l’immédiateté impériale, qui signifiait le droit de se régir à leur manière, sans dépendre des com
494 cette première alliance — un traité en due forme qui ne fut certes pas rédigé par des pâtres, puisqu’il était en beau lati
495 e transitoire. Vingt-deux États « souverains » et qui le demeurent aux termes de la constitution, mettaient en commun certa
496 nce et la tradition familiale, fils de la Réforme qui est un phénomène occidental au sens le plus large du terme, Suisse pa
497 n Reich, ein Führer, devises de ces nationalismes qui ont risqué de faire de l’Europe au xx e siècle un fouillis d’autarcie
498 ’helvétique. Et je ne vois pas de raison sérieuse qui empêcherait qu’on l’applique à l’échelle continentale. On me dira : l
499 que ou l’Irlande, le rapport est analogue à celui qui existe entre les cantons de Zurich et de Zoug ou de Glaris. Et je me
500 de Zoug ou de Glaris. Et je me dis qu’un système qui peut harmoniser les relations entre des cantons inégaux à tant d’égar
501 vous verrez que tout y correspond à quelque chose qui pourrait très bien être l’avenir commun de nos nations. Et quand vous
15 1966, Articles divers (1963-1969). Un libéral engagé (1966)
502 adeur d’Espagne à Paris », me dit Robert de Traz, qui m’avait amené sur la scène où une centaine de « personnalités » avaie
503 iatribe contre les écoles publiques obligatoires, qui font perdre tout son génie au petit vendeur d’oranges du port de Vale
504 ’instruction devrait être réservé à ceux-là seuls qui prouveraient qu’ils ne peuvent pas vivre sans elle. Pour les autres,
505 nsacrées à la préparation du Congrès de l’Europe ( qui allait se tenir à La Haye dès le 8 mai), comme on cherchait à qui off
506 nir à La Haye dès le 8 mai), comme on cherchait à qui offrir la présidence de la section culturelle dont j’étais le rapport
507 de la Sacred Giraffe. Pour présider à une affaire qui mettait en jeu des composantes aussi désespérément hétérogènes que la
508 er chacun une position absolument particulière et qui leur méritait un traitement tout à fait exceptionnel, il ne fallait n
509 diplomate doublé d’un militant, un historien mais qui ait été mêlé à la vie politique, un idéaliste non exempt de cynisme p
510 tout chez lui mais toujours exilé, bref quelqu’un qui eût un peu le sens du paradoxe… Je me bornai à faire état de ses titr
511 vite : « Je vous consacrerai volontiers un temps qui , à vrai dire, me manque. » Le congrès de La Haye, qui est l’origine d
512 à vrai dire, me manque. » Le congrès de La Haye, qui est l’origine de tout — comme chacun sait ou va le savoir — on prépar
513 — fut l’occasion pour notre ami de voler au temps qui se dérobait (ou si l’on veut : de dérober au vol du temps) quelques p
514 veut : de dérober au vol du temps) quelques pages qui ne vieilliront plus sur l’Europe des paysages, des fleuves, des ville
515 , Don Salvador se vit contraint de créer ce temps qui lui manquait pour présider congrès et comités en chaîne. Ce qu’il fit
516 étiquette « progressiste ». Il a le sens du trait qui porte et qui assure le succès durable d’un discours même de pure circ
517 rogressiste ». Il a le sens du trait qui porte et qui assure le succès durable d’un discours même de pure circonstance. Sa
518 compteront moins, finalement, aux yeux du « dieu qui voit très loin » (Zeus europos dans l’Odyssée) que l’innombrable succ
519 de l’Europe, cause commune s’il en fût, un temps qui du même coup devait manquer à ce qu’on nomme leur œuvre personnelle,
520 libéral, toujours prêt à discuter avec n’importe qui , je peux discuter avec mon plus grand adversaire, mais je ne peux pas
521 e polémique ne se laissaient pas oublier, mais ce qui désormais donnait autorité à la pensée de Madariaga, ce n’était pas l
16 1967, Articles divers (1963-1969). Au-delà des nations (1967)
522 tinuité historique, et il inaugurait la stratégie qui serait vingt ans plus tard celle de Jean Monnet. En septembre 1930, l
523 . C’est Aristide Briand convaincu par Coudenhove, qui a lancé le projet dans son discours du 5 septembre de l’année précéde
524 laborateur du président du Conseil, Alexis Léger, qui a rédigé ce document historique, préfiguration parfois fort précise n
525 omiste, mais à un grand poète, Saint-John Perse — qui sera prix Nobel — pseudonyme d’Alexis Léger.) Pour la première fois d
526 négatives et le nationalisme plus ou moins avoué qui les inspire : les nazis vont apprendre au monde ce que veut dire le m
527 nt les nombreux groupes de fédéralistes européens qui dès la guerre finie vont se réunir avec des politiciens et des économ
528 e de la rapide dégradation de l’idéal fédéraliste qui avait animé la Résistance et la période des congrès. Un petit signe l
529 ique) entre six pays seulement sur les vingt-cinq qui composent l’Europe. Cette « Europe » partiellement sectorielle (tarif
530 r que le problème de l’union ou de la fédération, qui est essentiellement politique, n’est pas encore abordé par les Six, e
531 ys (ou bien celle d’équilibre des « Puissances ») qui était la seule sérieuse pour leurs grands-pères. C’est tout ce qu’on
532 selon nos analystes, professeurs et commentateurs qui tiennent encore la politique pour l’art du possible — quand elle est
533 e une explication tellement simple que c’est elle qui va choquer. Je suis parvenu à la conviction que les hommes d’État les
534 ème se révèle insoluble. Il faut se fonder sur ce qui est destiné à devenir demain la vraie réalité de notre société, et je
535 inimum de 2 millions et maximum de 6 millions. Ce qui donnerait, par exemple, huit à neuf régions pour la France, une dizai
536 y a quelques années, je fus invité à un colloque qui allait se tenir à Aix-en-Provence sur le thème suivant : création d’u
537 l’on coupait en deux le bassin de la Ruhr-Moselle qui est d’un seul tenant quant au sous-sol, sous prétexte qu’à la surface
538 elon leur voisinage, selon les réalités nouvelles qui les auront formées, par-dessus les anciennes frontières nationales dé
539 ement des souhaits des organisateurs du colloque, qui connaissaient les besoins de leur région, mais de tout un mouvement d
540 s préoccupations des sociologues et chez les Six, qui dès 1961 réunissaient à Bruxelles un important groupe de travail sur
541 poser aux empires centralistes et monopolisateurs qui prétendent aujourd’hui se partager le monde. Chacun de nos États-nati
542 s encore qu’à l’aube de la formation des régions, qui seront les éléments de l’Europe à venir, mais déjà nous touchons au c
543 au crépuscule de la période des États-nations. Ce qui empêche la plupart des hommes d’aujourd’hui de le voir, ou d’en croir
544 ions culturelles, professionnelles et régionales, qui nouent leurs liens concrets en dépit des nations. Presque tout ce qui
545 ns concrets en dépit des nations. Presque tout ce qui coopère, se fédère ou s’unit en Europe, qu’il s’agisse de savants, de
546 usqu’au souvenir des autonomies régionales, voilà qui nous donne à penser que la révolution régionaliste, condition de l’Eu
547 que ne peuvent encore l’imaginer les politiciens qui se croient réalistes — parce qu’ils sont en retard d’une génération s
17 1967, Articles divers (1963-1969). Le civisme européen : notes pour un « Petit Livre rouge » (été 1967)
548 isme européen ? Cercle vicieux pour ceux-là seuls qui ne demandent qu’à croire qu’ils y sont enfermés. Au-delà des impasses
549 ésir d’être citoyen pousse à construire la ville, qui à son tour formera des traditions civiques, et le besoin d’en changer
550 jorité sera suscitée et conduite par une minorité qui ne voudra pas forcer mais convaincre. C’est dire qu’on ne fera pas l’
551 l’Europe sans faire des Européens. Mais ceux-ci, qui les fera, sinon l’éducation ? Or il faut bien avouer que jusqu’ici, l
552 ne fait pas le contraire. L’éducation du citoyen qui se pratique dans les écoles de nos pays est, aux dires de ses respons
553 ut, on ne dit rien des problèmes vivants et réels qui se posent à la cité et à l’État, et que le citoyen devra trancher qua
554 ique national une heure d’ennui civique européen, qui aurait le défaut supplémentaire de parler d’une communauté encore ine
555 rentiels, des philanthropes, managers et trustees qui suggèrent des échanges de cartes postales, de sourires officiels, de
556 de communauté et les facteurs de différenciation qui font de l’Europe dans l’histoire une unité caractérisée par sa divers
557 ient d’écarter résolument la solution de facilité qui consisterait à préconiser l’utilisation d’une heure hebdomadaire de «
558 e. Les programmes sont déjà trop chargés. L’ennui qui s’attache à l’instruction civique nationale contaminerait très vite s
559 nauté européenne, et cela, à la faveur d’exemples qui ne peuvent manquer de se présenter dans chaque leçon d’histoire, de g
560 « Petit livre rouge » posera toutes les questions qui résultent de l’examen objectif de la situation, et nous sommes bien c
561 il fera voir que l’Europe serait détruite par ce qui tue l’esprit critique, déprime le goût de la liberté, étouffe le cri
562 le cri de la justice, plus sûrement que par ceux qui attaquent notre culture démocratique au nom des idéaux qu’elle seule
18 1968, Articles divers (1963-1969). L’Exode des cerveaux [débat] (1968)
563 e des 14 Suisses — de passeport ou de naissance — qui ont reçu le prix Nobel, depuis 1901, date où il fut créé. Il y a 6 ch
564 ù il fut créé. Il y a 6 chercheurs nés Suisses et qui le sont restés, et 5 non Suisses de naissance, mais naturalisés et qu
565 t 5 non Suisses de naissance, mais naturalisés et qui ont reçu le prix une fois devenus suisses et après des travaux poursu
566 le prix Nobel, deux chercheurs, peut-être trois, qui étaient nés suisses. Je ne suis pas tout à fait sûr de Charles Édouar
567 le plus exactement — s’appelaient Thomas d’Aquin, qui était napolitain, Bonaventure, qui venait de Pise, Roger Bacon, qui é
568 homas d’Aquin, qui était napolitain, Bonaventure, qui venait de Pise, Roger Bacon, qui était anglais, Siger de Brabant, qui
569 in, Bonaventure, qui venait de Pise, Roger Bacon, qui était anglais, Siger de Brabant, qui était brabançon, et Albert le Gr
570 Roger Bacon, qui était anglais, Siger de Brabant, qui était brabançon, et Albert le Grand, qui était souabe. Maintenant, po
571 Brabant, qui était brabançon, et Albert le Grand, qui était souabe. Maintenant, pour nous en tenir aux exemples suisses, qu
572 est-elle faite ? D’abord par la conquête romaine, qui nous a apporté une civilisation dont nous n’avions pas la moindre idé
573 de de cerveaux irlandais : c’est Colomban et Gall qui ont apporté le christianisme en Suisse. Ensuite, il y a eu un exode d
574 xode de cerveaux picards, sous la forme de Calvin qui a apporté la Réforme et qui a fait Genève. À peu près en même temps,
575 us la forme de Calvin qui a apporté la Réforme et qui a fait Genève. À peu près en même temps, il y eut Érasme, Hollandais
576 temps, il y eut Érasme, Hollandais exilé à Bâle, qui a fait l’humanisme et qui a fait Bâle. Beaucoup plus près de nous, on
577 ollandais exilé à Bâle, qui a fait l’humanisme et qui a fait Bâle. Beaucoup plus près de nous, on peut citer Nietzsche, qui
578 ucoup plus près de nous, on peut citer Nietzsche, qui a été professeur à Bâle lui aussi et qui a beaucoup vécu en Suisse, e
579 etzsche, qui a été professeur à Bâle lui aussi et qui a beaucoup vécu en Suisse, en Engadine. On peut citer Stravinsky, qui
580 en Suisse, en Engadine. On peut citer Stravinsky, qui a créé en Suisse la meilleure œuvre musicale « de chez nous », L’Hist
581 les prix Nobel que je vous disais tout à l’heure, qui sont venus de l’étranger. On pourrait allonger facilement cette liste
582 de milliers, les centaines de milliers de Suisses qui ont été dans les armées étrangères, il y eut des centaines de générau
583 es étrangères, il y eut des centaines de généraux qui avaient un peu de cervelle, quelquefois ; et il y avait même des amir
584 e, entre les deux guerres, était l’amiral Eberlé, qui venait tout droit de Suisse allemande. Dans le domaine des mathématiq
585 s en Russie, dans les Pays-Bas. Ensuite, Agassiz, qui était un savant neuchâtelois, a fondé les sciences naturelles aux Éta
586 se. Tous les grands architectes de la Renaissance qui ont fait la Rome baroque étaient tessinois. Les Borromini, Maderno, F
587 e grande tradition d’architectes suisses exportés qui a abouti à Le Corbusier, plus près de nous. Parmi les ingénieurs, vou
588 vous avez des hommes comme Chevrolet par exemple, qui , ne pouvant pas faire de voitures en Suisse, a été les faire en Améri
589 eur Ammann a été faire des ponts, aux États-Unis, qui sont les plus grands du monde. Et on pourrait multiplier ces exemples
590 à quel moment ce que j’appelle des échanges — et qui est la santé même — devient un exode qu’il faudrait déplorer ou arrêt
591 tivités en jeu, et les dimensions des communautés qui peuvent les prendre en charge. Étant donné la nature, les conditions
592 certaine activité, quel est le type de communauté qui lui correspond le mieux par ses moyens et par ses dimensions ? Voilà
593 proposer, c’est celui que j’appelle fédéraliste, qui consiste à répartir les tâches d’après leur nature et d’après les gra
594 deurs, les dimensions, les moyens des communautés qui peuvent s’en occuper. Autrement dit, du point de vue fédéraliste, on
595 a le droit de se plaindre d’un exode de ses fils qui vont exercer leur activité ailleurs. Prenez un village suisse quelcon
596 iversité. Mais prenez maintenant cette université qui est bien à la taille du canton (l’activité et la communauté étant de
597 iginaire d’un petit village de l’Oberland bernois qui s’appelle Sigriswil. Si Blaise Cendrars n’était pas parti à 17 ans po
598 pas parti à 17 ans pour le vaste monde, qu’est-ce qui se serait passé ? Croyez-vous que La Chaux-de-Fonds se serait plainte
599 itz Sauser. Mais il est parti dans le vaste monde qui en a fait Blaise Cendrars, puis il est allé à Paris qui en a fait un
600 a fait Blaise Cendrars, puis il est allé à Paris qui en a fait un grand écrivain et c’est seulement quand nous avons su qu
601 and nous avons su qu’il y avait un grand écrivain qui s’appelait Blaise Cendrars que nous avons découvert qu’il était suiss
602 qu’il était suisse ! De même l’ingénieur Ammann, qui a fait ces immenses ponts, le Washington Bridge à New York, qui a plu
603 immenses ponts, le Washington Bridge à New York, qui a plus d’un kilomètre, et le Golden Gate à San Francisco qui a 2750 m
604 d’un kilomètre, et le Golden Gate à San Francisco qui a 2750 mètres de long : qu’eût-il fait, ce malheureux, s’il était res
605 quarante ans. Et puis, il y a un cas particulier, qui a déjà été évoqué tout à l’heure par M. Renold. C’est celui du CERN.
606 aire. C’est un message du Prince Louis de Broglie qui a formulé cette idée, que nous avons fait aboutir ensuite, via l’Unes
607 our la communauté continentale, vu les finalités ( qui n’étaient pas toutes de recherche pure) qu’il y avait dans la science
608 es moyens la création d’une fédération européenne qui permettra de multiplier les organismes dont le CERN est le prototype.
609 dont le CERN est le prototype. Quant aux Suisses qui vont à l’Unesco ou dans d’autres organismes de l’ONU, on ne peut pas
610 éthodique d’organisation, comme disait M. Renold, qui permet de fixer les différents niveaux de communautés qui doivent pre
611 et de fixer les différents niveaux de communautés qui doivent prendre en charge telle ou telle activité. M. Nordmann : J’a
612 rdmann : J’aimerais faire remarquer que, entre ce qui a été dit sur une politique d’option, et ce qui vient d’être dit sur
613 e qui a été dit sur une politique d’option, et ce qui vient d’être dit sur une politique de dimension, il est facile de ret
614 uver des éléments d’unité. Ce sont là des notions qui se recouvrent. Avant de passer à la discussion générale, je voudrais
615 nctionne un manque d’organisation ou de structure qui incite les chercheurs à aller ailleurs ? M. de Rougemont : Votre ques
616 contre toute mesure négative, contre tout barrage qui consisterait à empêcher les gens de s’en aller, ou bien qui consister
617 terait à empêcher les gens de s’en aller, ou bien qui consisterait à les racheter un peu plus cher que ce que le concurrent
618 éveloppant des pôles et des climats intellectuels qui attirent. Ce n’est pas uniquement une question financière. Naturellem
619 ut inadéquate — ces ressources et les subventions qui doivent y être attachées sur tout le territoire de la Confédération.
620 je puis proposer ici, ce sont quelques conditions qui me paraissent requises pour qu’il y ait une vie intellectuelle, un cl
621 , et s’il trouve un bon orchestre, un bon quatuor qui joue de la musique moderne, cela pourra peut-être le retenir ici. La
622 ni même par Sartre. Contestation, c’est un terme qui est lié à l’Université depuis sa création, au xiie siècle. Voilà une
623 xemple, c’était la méthode introduite par Abélard qui s’appelait le « sic et non », le oui et le non. La discussion dans le
624 ement techniques ou de grammaire. La grande lutte qui a opposé Siger de Brabant et saint Thomas d’Aquin était une lutte con
625 engagée si vous voulez, pour prendre un autre mot qui a été à la mode lui aussi. Ces notions-là ont repris une vie très int
626 de la hiérarchie de ses options. Une contestation qui ne se fasse pas — ce sera mon dernier mot — en dehors de l’Université
627 use absolument que ce soit simplement l’industrie qui les fixe. […] M. de Rougemont : Je voudrais répondre quelques mots
628 e voudrais répondre quelques mots très brefs à ce qui m’a été dit autour de cette table. Tout d’abord, M. Renold. Je crois
629 n certain sens de la vie, une certaine saveur, ce qui fait que, moi, je suis rentré en Europe, par exemple. Ce n’est pas du
630 e bonne description, adressez-vous aux Américains qui disent qu’ils voudraient vivre en Europe. Ils vous expliqueront cela
631 t à l’heure : Je n’ai pas vu de génies américains qui viennent en Europe en échange de nos Félix Bloch, Agassiz, Ammann et
632 eaucoup plus collectif, par team, c’est un effort qui est porté sur la préparation du terrain. D’ailleurs, nous ne pouvons
633 e d’un exode, quand — je me répète — les échanges qui sont normaux et bénéfiques, tendent à devenir un exode qui est une pe
634 normaux et bénéfiques, tendent à devenir un exode qui est une perte, qui est défavorable. Cette méthode peut être discutée 
635 es, tendent à devenir un exode qui est une perte, qui est défavorable. Cette méthode peut être discutée ; il s’agit surtout
636 ste rien du tout. Mais je vous signale le danger, qui serait un danger un peu américain, qu’il y aurait à isoler complèteme
637 nous devons au monde, et notamment aux Américains qui nous le demandent. La culture, c’est un tout, c’est un ensemble dont
19 1968, Articles divers (1963-1969). De l’État-nation aux régions fédérées (1968)
638 n Churchill appelait la création de quelque chose qui , disait-il, « s’appellerait — peut-être — les États-Unis d’Europe » e
639 pouvait suffire à la créer… Au lieu d’une Europe qui se fait, nous entendons aujourd’hui des déclarations inquiétantes, co
640 véritablement importante de notre temps.26 Mais qui ne voit que ceci s’oppose à cela, dramatiquement, — que cette « réali
641 cle » que serait la nation, est précisément celle qui fait obstacle à cette « seule chose véritablement importante de notre
642 chose véritablement importante de notre temps » ? Qui ne voit que si l’Europe qu’appelait Winston Churchill n’est pas faite
643 delà des nations, partout ressenti et déclaré, et qui a donné naissance au Marché commun notamment, enfin par l’existence d
644 e stade de crise finale d’une forme d’association qui a dominé et animé l’Europe du xixe siècle, mais qui ne pourrait que
645 a dominé et animé l’Europe du xixe siècle, mais qui ne pourrait que tuer l’Europe du xxe siècle si elle n’est pas surmon
646 c’est que les hommes et les femmes d’aujourd’hui qui ont passé par l’école et croient savoir l’histoire s’imaginent qu’il
647 d’où viennent la nation, l’État, et l’État-nation qui est né de leur collusion moderne. Il faudrait rappeler qu’après la pr
648 rne. Il faudrait rappeler qu’après la préhistoire qui ne connaissait que les tribus et leurs clans, l’histoire commence ave
649 e Roy de France est empereur en son royaume », ce qui veut dire que le chef de l’État d’un domaine de moyenne grandeur cent
650 ces de l’Italie, de l’Europe de l’Est et du Nord, qui dès lors se déclarent eux aussi « souverains absolus », superiorem in
651 s selon la formule du xive siècle. Ce spectacle, qui est celui de la naissance des nations, remplit d’effroi les sages de
652 s son traité de La Monarchie, appel désespéré, et qui restera vain, à l’Empire condamné et bafoué. Les cinq siècles suivant
653 s l’idée fatale de la souveraineté absolue — idée qui est à peine supportable quand un prince l’incarne, s’il n’est pas un
654 ncarne, s’il n’est pas un génie ou un saint, mais qui devient proprement révoltante — et par ailleurs massivement meurtrièr
655 urs massivement meurtrière — quand c’est un parti qui s’en empare au nom du peuple, comme ce fut le cas des jacobins et des
656 tion de l’idéal national par l’appareil étatique, qui est l’œuvre de Napoléon, la nationalisation de l’État royal et l’état
657 tisation de la nation révolutionnaire, c’est cela qui va créer dans la première décennie du xixe siècle le modèle de l’Éta
658 ésultat d’une volonté abstraite, peut-être folle, qui entend faire coïncider à tout prix dans les mêmes limites imposées du
659 on est devenu sacré, intangible dans nos esprits, qui résistent à l’idée qu’il pourrait n’être après tout qu’une forme tran
660 mais de ceux des autres27. C’est donc une partie qui se veut aussi grande que le tout. L’État-nation moderne, unitaire et
661 ir politiquement au niveau des empires véritables qui dominent notre monde, et surtout pour résister à la satellisation pol
662 és humaines, et cela, c’est la plus grave maladie qui puisse miner un corps politique. Telle étant la crise présente de l’É
663 r souveraineté absolue au profit d’une fédération qui les protège. C’est ce second parti qu’ont adopté en 1848 nos vingt-ci
664 ns leur nature même, quelque chose de constitutif qui les retient de s’unir. Et nous voyons mieux ce que c’est, maintenant
665 lue, donc d’indépendance totale, donc d’autarcie, qui est son ambition proprement impériale. C’est donc par définition et p
666 à une indépendance de moins en moins croyable, et qui se borne en fait à la liberté (souvent illusoire) de choisir les dépe
667  ; et c’est ensuite trouver les éléments nouveaux qui rendraient l’union praticable. Parlant de la mise en place progressiv
668 , Louis Armand formulait récemment une règle d’or qui trouve ici son application majeure : Développons en commun ce qui e
669 application majeure : Développons en commun ce qui est neuf. Laissons de côté les héritages du passé dont l’unification
670 ème se révèle insoluble. Il faut se fonder sur ce qui est destiné à devenir demain la vraie réalité de notre société, et je
671 un à deux millions et maximum de six millions. Ce qui donnerait, par exemple, neuf régions pour la France, une dizaine pour
672 y a quelques années, je fus invité à un colloque qui allait se tenir à Aix-en-Provence sur le thème suivant : création d’u
673 l’on coupait en deux le bassin de la Ruhr-Moselle qui est d’un seul tenant quant au sous-sol, sous prétexte qu’à la surface
674 elon leur voisinage, selon les réalités nouvelles qui les auront formées, par-dessus les anciennes frontières nationales dé
675 ement des souhaits des organisateurs du colloque, qui connaissaient les besoins de leur région, mais de tout un mouvement d
676 préoccupations des sociologues, et chez les Six, qui dès 1961 réunissaient à Bruxelles un important colloque sur ce problè
677 lace d’exécutifs régionaux, — toutes propositions qui étaient proprement impensables pour un esprit français il y a dix ou
678 fs, législatifs et judiciaires comparables à ceux qui existent, par exemple, pour les États-Unis d’Amérique. Les États rég
679 es nécessités, appelant des réformes de structure qui , de proche en proche, mèneront très loin… Ce sont ces nécessités qui
680 roche, mèneront très loin… Ce sont ces nécessités qui expliquent que le Marché commun ait cru devoir convoquer le très impo
681 de la France, de l’Italie, ou même de l’Allemagne qui a obligé les gouvernements de ces pays à étudier très sérieusement le
682 iques plurinationales. Prenez la région lilloise, qui touche la Belgique. Vue de Paris, Lille est une gare terminus, et Rou
683 mun de demain, tout change : effacée la frontière qui depuis cent-cinquante ans coupait la région de son aire d’expansion n
684 usqu’au souvenir des autonomies régionales, voilà qui nous donne à penser que la révolution régionaliste, condition de l’Eu
685 aux vrais empires centralistes et monopolisateurs qui prétendent aujourd’hui se partager le monde. Nous n’en sommes encore
686 au crépuscule de la période des États-nations. Ce qui empêche la plupart des hommes d’aujourd’hui de le voir, ou d’en croir
687 suscite dans l’espace des formes de polarisation qui naissent de relations d’interdépendance et de complémentarité géograp
688 e part de subjectivité dans l’appréciation. En ce qui concerne l’emplacement exact des limites, une certaine indéterminatio
689 de nous faire sortir de l’ère néolithique, celle qui a été marquée par la fixation des tribus nomades sur des territoires
690 ribus nomades sur des territoires cultivés, celle qui a donc été dominée pendant douze à quinze millénaires par les notions
691 les réalités et les valeurs de la paysannerie, —  qui brusquement font place aux réalités et aux valeurs de la société indu
692 stitue au terme d’indépendance celui d’autonomie, qui a l’avantage de rappeler le gouvernement des cités par elles-mêmes, e
693 iations et clubs lointains ou proches. Mais ceci, qui est très nouveau et presque révolutionnaire pour les citoyens des Éta
694 ique de la Suisse dans la révolution régionaliste qui vient, et qui verra, en cas de succès, le triomphe du fédéralisme int
695 sse dans la révolution régionaliste qui vient, et qui verra, en cas de succès, le triomphe du fédéralisme intégral. Depuis
696  ! » Politique bien typique de la paysannerie, et qui d’ailleurs a contribué à la réduire un peu partout au sort d’assistée
697 ons toujours voulu défendre, et à raison. Tout ce qui s’est fait de grand dans notre monde, s’est fait par les petits ; de
698 l’espère. Belle raison d’être nationale que celle qui dépendrait des seuls douaniers et qui serait à la merci d’un accord t
699 e que celle qui dépendrait des seuls douaniers et qui serait à la merci d’un accord tarifaire ! Si Genève, par exemple, sup
700 l’Ain, s’intégrait au complexe nommé Rhône-Alpes, qui est sa région naturelle, croit-on vraiment que cela lui ferait perdre
701 t la Suisse de cultiver sa vocation particulière, qui est d’ordre politique et culturel, rien ne pourrait empêcher les Suis
702 ur association. Nous sommes le seul pays européen qui n’ait jamais été tenté de devenir un État-nation unitaire, d’uniformi
703 igieux, linguistiques, sociaux ; le seul en somme qui soit une vraie fédération et qui ait une expérience séculaire de l’ex
704 le seul en somme qui soit une vraie fédération et qui ait une expérience séculaire de l’existence fédérale. Cela nous indiq
705 e modèle ! — sont en train d’élaborer une théorie qui me paraît mieux adaptée à notre société industrielle et mobile. Mais
706 nos concitoyens une sorte d’habitus fédéraliste, qui les fait dépasser en pratique ce qu’il y a de périmé en doctrine dans
707 les Suisses peuvent donner de meilleur à l’Europe qui se fait : non pas seulement une grande idée qui est capable d’ouvrir
708 e qui se fait : non pas seulement une grande idée qui est capable d’ouvrir les voies de l’avenir politique pour l’Europe et
709 de nations comme celles de la vieille Europe […] qui pourrait admettre de bonne foi, à moins d’être un imbécile, qu’une se
710 ivait François Mauriac, dans le Figaro littéraire qui parut le jour même où je prononçai ma conférence. 30. Cf. Remarques
20 1968, Articles divers (1963-1969). Vingt ans après La Haye : où en est l’Europe ? (mai 1968)
711 ntre Retinger et Dautry, encadrant le grand homme qui essuie une larme : ma déception commence à ce triomphe verbal. D’autr
712 en grande partie aux efforts de Joseph Retinger, qui m’écrivait le 29 mars : Je suis d’avis que cette déclaration doit fo
713 ants, Churchill en tête, signeraient le document, qui circulerait ensuite dans toute l’Europe pour récolter les millions de
714 la Ridderzaal la séance plénière sur l’économie, qui devait être suivie, après une brève suspension, de la séance de clôtu
715 vai flanqué de son beau-frère Randolph Churchill ( qui n’était là qu’à titre de journaliste). Ils m’apprirent que le Messag
716 commune », que le congrès n’avait pas discutée et qui ne figurait pas dans les résolutions finales. Au cours de l’explicati
717 tions finales. Au cours de l’explication orageuse qui s’ensuivit, Sandys et Churchill Jr invoquèrent l’unanimité nécessaire
718 hrase sur la défense. Par chance, un journaliste, qui était en train de m’interviewer lorsque Sandys m’avait fait appeler,
719 terviewer lorsque Sandys m’avait fait appeler, et qui avait assisté au début de l’incident, revint me dire que tous les syn
720 où l’on aurait barré une phrase aussi voyante, et qui d’ailleurs semblait s’être volatilisé au secrétariat de la presse38.
721 peuple européen, pour la donner à des ministres, qui en ont fait l’usage que l’on sait. 2. Ne vous semble-t-il pas paradox
722 s peuvent encore soit refuser les mesures d’union qui s’imposent, soit abaisser les barrières douanières et supprimer les c
723 uter que les Communautés, bridées par les nations qui les composent, loin d’amorcer un processus quelconque d’union politiq
724 s « réalistes » et pragmatistes à l’anglo-saxonne qui n’ont cessé de répéter, bien avant de Gaulle, que les choses étant ce
725 vente mais plus ou moins passive de quelque chose qui ne peut manquer de se produire du fait des autres, ou de la providenc
726 e La Haye. 37. Il est remarquable que Retinger, qui ne passait pas pour fédéraliste, ait été le premier à préconiser cett
727 où devaient l’écrire de leur côté Jean Buchmann, qui la publie dans L’Europe en formation d’octobre 1967, et Robert Lafont
728 pe en formation d’octobre 1967, et Robert Lafont, qui l’utilise dans Révolution régionaliste parue ou printemps de 1967. Je
21 1969, Articles divers (1963-1969). De l’Aar à l’Europe (1969)
729 adition occidentale, celles d’Héraclite l’Obscur, qui florit à Éphèse au vie siècle avant notre ère, sont nées de la consi
730 ins de l’économie, mais de la contemplation de ce qui coule, résiste, brûle ou s’évapore, c’est-à-dire des quatre éléments
731 ite a déduit du fleuve ces sentences : Pour ceux qui entrent dans les mêmes fleuves, autres et toujours autres sont les ea
732 fleuves, autres et toujours autres sont les eaux qui s’écoulent, et les âmes à partir des liquides s’en vont en vapeurs… L
733 ent la métamorphose des éléments : le feu solaire qui aspire en vapeur l’eau des fleuves jaillis des blessures de la terre,
734 ves qu’il a formées, événement toujours fuyant et qui fascine, figure originelle de ce qui change sans relâche dans un traj
735 rs fuyant et qui fascine, figure originelle de ce qui change sans relâche dans un trajet presque immuable, qu’il faudra plu
736 de la durée et de l’immobilité, et la loi unique qui règle ce mouvement. Et s’illustrent ici les deux sens et la profonde
737 mbiguïté du mot durée : il désigne à la fois « ce qui ne change pas » et l’écoulement du temps irréversible ; le devenir in
738 du temps irréversible ; le devenir indéfini et ce qui dure en résistant précisément à la durée ; ce qui est posé et sa méta
739 qui dure en résistant précisément à la durée ; ce qui est posé et sa métamorphose ; le Même et l’Autre vus ensemble, génial
740 homme ! — que ce réseau de fleuves et de rivières qui a si profondément découpé, dentelé, raviné, compartimenté jusqu’en so
741 llant ailleurs : c’est la circulation continuelle qui crée le visage d’un pays. Europe sans déserts et sans steppes, jardin
742 bordent et nous quittent. Mais il est une rivière qui d’un large mouvement du sud à l’ouest, puis à l’est, ramasse toutes l
743 r n’est pas seulement la plus longue des rivières qui coulent en Suisse d’un bout à l’autre (280 kilomètres, c’est la longu
744 . Berne est la seule cité de la communauté suisse qui ait été carrément impérialiste, étendant ses pouvoirs par la force ou
745 écrit comme « un centaure franco-allemand », mais qui nous laisse une image classique des régimes patriciens du xviiie . L’
746 la carte : libérée par la Révolution, c’est elle qui va donner naissance à plusieurs des mentors de la Suisse nouvelle et
747 régime radical. Ce cours de l’Aar d’ouest en est qui fut jadis route commerciale des Romains, d’Aventicum à Vindonissa, pu
748 intenant, comme l’Aar nous l’enseigne avec force, qui rassemble vingt lacs et vingt rivières en un courant puissant qu’elle
749 le cours physique de l’Aar. À cause des fleuves, qui sont un phénomène tellement typique de cette « péninsule occidentale
750 ends romano-germanique, et généralement gibeline, qui fait du massif du Gothard le lieu le plus européen du continent. Et n
751 est l’accord des tons purs de nos diversités. Ce qui est européen n’est pas d’abord ce qui est international, ce qui est l
752 rsités. Ce qui est européen n’est pas d’abord ce qui est international, ce qui est le même partout, dans chacun de nos pay
753 en n’est pas d’abord ce qui est international, ce qui est le même partout, dans chacun de nos pays, indifférent au lieu et
754 u et sans accent ; mais bien, et au contraire, ce qui est différent, s’affirme singulier et manifeste une vocation incompar
755 ommes libres. Rien n’est authentiquement européen qui ne soit d’abord d’un pays. D’un pays à nul autre pareil et pourtant f
756 et pourtant fraternel au voisin, accueillant à ce qui diffère. Ouvert et fermé à la fois. Fidèle à soi mais dans le mouveme
757 ustesse que cette rivière germano-celte romanisée qui porte le nom même du cours d’eau en soi, fait du redoublement de la p
758 ns toute l’Europe, mais ici tirant après soi un r qui roule comme les pierres charriées par les torrents alpestres. Ainsi l
22 1969, Articles divers (1963-1969). À la fontaine Castalie (1969)
759 et les temples, allons jusqu’au pied des rochers qui dominent et referment le cirque, là où la route s’infléchit vers la d
760 . Soudain l’un n’est plus là. Puis ils sont trois qui virent, s’évanouissent dans la lumière et reparaissent, tombent sur q
761 étroite et haute, doucement modelée par la source qui sourd des entrailles de la Terre, par mille veines de la pierre, et s
762 nt primordial, dans le noir pur. ⁂ Toutes choses qui naissent et croissent sont de la terre et de l’eau. Car nous somm
763 s pierres nues, et la paix solennelle. Le silence qui suit le crime et la naissance, stupéfiant le monde et notre cœur. Là-
764 fils du Ciel a vaincu, imposant la loi du soleil, qui est celle du Père, à ce lieu dont le nom reste l’Ombre. Mais ici même
765 la fontaine Castalie, c’est le combat fondamental qui s’est livré. Le drame originel s’accomplit, à jamais suspendu dans l’
766 plit, à jamais suspendu dans l’instant de stupeur qui vient après l’acte tragique. Paix sur le cœur du héros criminel dans
767 ux souffles du ciel de descendre Dans un cœur qui s’émeut et connaît leur présence…) ⁂ Nous avons déjeuné sur une terr
23 1969, Articles divers (1963-1969). Pour une définition nouvelle du fédéralisme (1969)
768 gence inspire les mouvements d’union continentale qui créent le Conseil de l’Europe et le Marché commun, puis leurs contrep
769 . Renaissance donc des micronationalismes locaux, qui revendiquent leur autonomie au nom de leur langue, de leurs coutumes,
770 umes, ou des nécessités économiques nouvelles, et qui enfièvrent tour à tour la Bretagne, les Flandres ou le Pays basque. C
771 ières… À tous les coups, c’est donc l’État-nation qui perd. Il ne correspond plus ni aux conditions de liberté et de partic
772 ? Sur les quelque cent-trente nations souveraines qui divisent notre humanité, je ne compte guère que deux douzaines d’État
773 t et au-delà l’URSS, l’Inde et l’Australie. Voilà qui réfute le cliché du fédéralisme « désuet ». Mais l’étiquette fédérale
774 nales et les diversités religieuses et politiques qui sont opprimées par l’État central dont un parti unique s’est emparé ;
775 éria, c’est au contraire une des régions fédérées qui s’érige en État unitaire ; en Suisse, c’est le régime fédératif lui-m
776 e ; en Suisse, c’est le régime fédératif lui-même qui se voit invoqué (non sans paradoxe d’ailleurs), pour refuser de se la
777 mies plus locales et vers des unions plus vastes, qui est le battement même du cœur d’un régime sain, j’entends immunisé co
778 . Or je ne vois pas de terme du langage politique qui prête à pires malentendus ! Un Français cultivé qui demande à son Lit
779 i prête à pires malentendus ! Un Français cultivé qui demande à son Littré le sens du mot fédéralisme trouve ceci : « Fédér
780 ssurément moins éclairante que les deux citations qui l’illustrent : 1) « Le fédéralisme était une des formes politiques le
781 on de petits États. » Pour le Français cultivé et qui a coutume de se reporter à son Littré quand il veut savoir ce qu’un m
782 nifie, la cause est jugée. Il s’agit d’un système qui est bon pour les sauvages et qui semble n’avoir été préconisé que par
783 git d’un système qui est bon pour les sauvages et qui semble n’avoir été préconisé que par des traîtres à la République… Il
784 e reste d’être un concept dialectique, ambigu, et qui autorise — ou incite en tout cas — aux plus invraisemblables pataquès
785 l’un à l’autre, mais seulement dans une création qui englobe, satisfasse et transcende les exigences de l’un et de l’autre
786 pellerai donc solution fédéraliste toute solution qui prend pour règle de respecter les deux termes antinomiques en conflit
787 cellule de base des ligues et fédérations. Voilà qui est proprement occidental : devant ce même problème de l’un et du div
788 et effort, toujours renouvelé et toujours menacé, qui dénote la santé de la pensée européenne, sa justesse, sa mesure conqu
789 ues ou physiques, esthétiques ou politiques. « Ce qui s’oppose coopère et de la lutte des contraires procède la plus belle
790 raires mais également valables, voilà je crois ce qui définit l’apport original et spécifique de la pensée occidentale ; or
791 lle a sauvegardé les propriétés de chaque nature, qui se rencontrent dans une seule personne… » Abstraction faite de la foi
792 es « sans confusion ni séparation » et de l’union qui « loin de supprimer la différence des natures sauvegarde leurs propri
793 respectueux du réel et des conditions de la vie, qui sont : antinomies, oppositions, lutte des contraires « d’où procède l
794 résulte d’un couple d’exigences contradictoires, qui paraissent exclusives l’une de l’autre quoique indispensables l’une à
795 hésion à des communautés plus vastes et de cadres qui rassurent, d’enracinement et de mobilité… La situation de l’homme qui
796 acinement et de mobilité… La situation de l’homme qui veut à la fois sa vie privée et une vie sociale est homologue de la s
797 ociale est homologue de la situation de la région qui veut à la fois son autonomie et sa participation à un plus grand ense
798 bon marché, trop serré avec d’autres chez soi, et qui voudrait être enfin seul, sort et se mêle à la foule anonyme… Mais c’
799 ’une constitution, de type plus ou moins fédéral, qui peut résoudre une fois pour toutes ce conflit permanent. Il y faut un
800 les confédérations sont des formules transitoires qui sont destinées à se défaire assez rapidement si elles ne passent pas
801 ent pas à la fédération et qu’en général les pays qui aujourd’hui s’appellent confédération sont des fédérations qui, pour
802 ui s’appellent confédération sont des fédérations qui , pour certaines raisons, n’ont pas voulu dire leur nom. C’est le cas
803 s voulu dire leur nom. C’est le cas de la Suisse, qui présente toutes les notes de la fédération absolument classique et pa
804 ation est une mesure d’opportunisme pour des gens qui voient que l’on ne peut pas continuer sans faire quelque chose dans l
805 quelque chose dans le sens d’une fédération, mais qui n’osent pas aller jusqu’au bout. Vous avez dit que le sens civique, e
806 me, c’est-à-dire l’intervention dans les affaires qui regardent chacun : les affaires de la commune, de la région. Tandis q
807 peut très bien concevoir des régions comme celle qui est en train de s’organiser autour de Bâle, la Regio Basiliensis, qui
808 s’organiser autour de Bâle, la Regio Basiliensis, qui chevauche trois pays : Bâle et son hinterland en Suisse, le Haut-Rhin
809 ope de demain correspondant aux réalités diverses qui sont des réalités techniques, culturelles, économiques, linguistiques
810 prix, imposer les mêmes frontières à des réalités qui n’ont rien en commun, totalement hétérogènes, comme les réalités cult
811 t de l’état civil ou de la langue qu’on parle, et qui aboutit par exemple à la division de la région Ruhr-Moselle, qui est
812 exemple à la division de la région Ruhr-Moselle, qui est d’un seul tenant au point de vue du sous-sol, d’après la langue q
813 chaque tracé doit être discuté avec les cantons, qui sont maîtres d’œuvre, et avec les communes qui peuvent refuser qu’on
814 s, qui sont maîtres d’œuvre, et avec les communes qui peuvent refuser qu’on ruine la vie d’une petite ville en la coupant e
24 1969, Articles divers (1963-1969). « La lecture des Nourritures terrestres… » [réponse à un questionnaire sur l’influence d’André Gide] (printemps 1969)
815 i foncé vers le lac. « Partir ! » et toute la vie qui change, tout était libre devant moi ! J’ai erré jusqu’au soir dans l’
816 te évanoui d’émotion. Dix ans plus tard, le voici qui entre dans le petit bureau de la NRF  ; Paulhan me dit, un peu plus
817 ôte ou n’ajoute rien à la valeur d’une œuvre pour qui sait la comprendre. (Pour les autres, il est vrai, cela change tout :
818 s littéraires.) C’est son style et son personnage qui m’ont touché. La plupart des « actuels » écrivent mal, ou sont plats.
819 luencé, b) et quels sont les aspects de sa pensée qui vous paraissent les plus actuels ? 2. Gide fut de son temps un grand
25 1969, Articles divers (1963-1969). Un souvenir de Solférino de Henry Dunant [préface] (1969)
820 jugés et les recettes éprouvées de l’immobilisme, qui s’est toujours paré du nom de réalisme. Aristide Briand avait coutume
821 de prononcer à la Chambre française des discours qui défiaient la syntaxe et qu’il fallait recomposer pour l’impression au
822 ennent et reprennent « des crêtes et des collines qui aboutissent au gracieux mamelon des Cyprès, rendu pour jamais célèbre
823 n ne trouve dans ces pages pas même une inflexion qui puisse trahir le moindre doute de l’auteur quant à la valeur des armé
824 e faits d’armes dont il n’a pas été le témoin, et qui auraient tous été, s’il faut l’en croire, de hauts exemples de bravou
825 s exemples de bravoure ou de cette grandeur d’âme qui fait la gloire des armes et justifie la guerre aux yeux de beaucoup.
826 une captatio benevolentiae délibérée, un procédé qui assure l’auteur, dès le départ, d’une audience sympathique auprès des
827 ctorienne, et des grandes dames de toute l’Europe qui croient aux mâles vertus des officiers bien nés ? Louant leurs frères
828 ortage de scènes vécues durant les jours et nuits qui suivent la bataille. Vers la petite ville de Castiglione — où Dunant
829 Un général a eu l’épaule fracassée par un boulet qui reste enclavé dans les muscles de l’aisselle. Des centaines agonisent
830 silence, ou hurlent. La figure noire de mouches qui s’attachent à leurs plaies, ceux-ci portent de tous côtés des regards
831 ceux-ci portent de tous côtés des regards éperdus qui n’obtiennent aucune réponse ; la capote, la chemise, les chairs et le
832 ers, qu’ils croient voir sortir de leur corps, et qui proviennent des myriades de mouches dont l’air est infesté. Ici est u
833 se l’eau de cette éponge dans l’ouverture informe qui remplace sa bouche. Cet acte de compassion signale la présence de Du
834 acte de compassion signale la présence de Dunant, qui avait écrit peu de pages auparavant, de la manière la plus impersonne
835 st bien difficile au milieu d’un pareil désordre, qui se complique d’une espèce de panique… » Or c’est lui seul (mais rien
836 t lui seul (mais rien ne l’indique dans le texte) qui a pris l’initiative de secourir les blessés et d’organiser ces secour
837 d’un Belge exalté et d’un négociant de Neuchâtel qui écrit pour les mourants des lettres d’adieux à leurs familles. Peu à
838 ance à tous ces hommes d’origines si diverses, et qui leur sont tous également étrangers. Tutti fratelli, répétaient-elles
839 vue d’un simple incident, d’un détail inattendu, qui va plus directement à l’âme, et qui ébranle les fibres les plus sensi
840 il inattendu, qui va plus directement à l’âme, et qui ébranle les fibres les plus sensibles de notre être. Hanté par les v
841 t l’appui fut décisif, ou sans le général Dufour, qui accepta de présider le premier Comité. Reste que rien n’eût été fait
842 de son auteur. ⁂ Le personnage est peu croyable, qui parcourt par hasard, dans son cabriolet, les arrières du champ de bat
843 puis Waterloo : il n’a qu’une seule idée en tête, qui est d’approcher l’empereur et d’obtenir de lui la permission (refusée
844 on livre, il se borne à écrire cette seule phrase qui est sans doute l’une des plus saugrenues de l’histoire : Simple tour
845 e Victor Hugo. Je vois ici la situation classique qui définit une vocation. On court après un but habituel et quelconque, l
846 st pris par quelque chose qu’on ne cherchait pas, qui passionne bientôt plus que tout, apportant souvent la misère, mais pe
847 e Convention de Genève est signée par douze États qui , à leur tour, fondent des sociétés nationales de secours en cas de gu
848 t à le faire parler, et publie sur lui un article qui , bientôt reproduit partout, rend Dunant en quelques semaines célèbre
849 . Et c’est enfin le premier prix Nobel de la paix qui vient le couronner en 190142. Chargé d’honneurs dans sa retraite moro
850 10 — tout près de la vraie fin de ce xixe siècle qui a commencé au soir de Waterloo et qui va se terminer au seuil sanglan
851 ixe siècle qui a commencé au soir de Waterloo et qui va se terminer au seuil sanglant de la Première Guerre « mondiale ».
852 vait : « Ah ! la guerre n’est pas morte ! Tout ce qui fait la gloire de votre prétendue civilisation sera employé à son ser
853 is vouloir « diminuer les horreurs de la guerre » qui est son intention déclarée à toutes fins d’efficacité, c’est encore u
854 vrai discours contre la guerre et le militarisme qui la prépare, c’est dans ses inédits qu’il faut le chercher, dans ces t
855 e intitulé La Charité sur les champs de bataille, qui date de 1864, marque la transition entre l’attitude initiale d’Un Sou
856 ématoire : La guerre, cette science du désordre, qui provient de l’anarchie d’en haut, ne tue pas seulement le corps, mais
857 nouveaux et aux compensations fictives d’utopies qui , comme celle de la paix perpétuelle, supposent toujours la fin de l’H
858 mes d’utopie et de réalisme. L’utopiste est celui qui voit la fin sans imaginer ses moyens. Mais c’est aussi celui qui fait
859 sans imaginer ses moyens. Mais c’est aussi celui qui fait erreur sur l’adéquation des moyens qu’il préconise aux fins qu’i
860 qu’il préconise aux fins qu’il allègue, tel celui qui répète (se croyant réaliste) : si vis pacem para bellum, alors que to
861 es préparer. Mais il y a plus. Réaliste est celui qui , non content d’avoir dénoncé le mal qui est dans le monde, s’en prend
862 est celui qui, non content d’avoir dénoncé le mal qui est dans le monde, s’en prend à ses principes qui sont dans l’homme,
863 qui est dans le monde, s’en prend à ses principes qui sont dans l’homme, et sur lesquels nous pouvons exercer les pouvoirs
864 les liens nécessaires et l’interaction génétique qui unissent la guerre et les États-nations. Mais il fallait beaucoup de
865 de 1900, que les facteurs principaux de la guerre qui se préparait étaient les mêmes que ceux qui, justement, achevaient de
866 uerre qui se préparait étaient les mêmes que ceux qui , justement, achevaient de former l’État-nation : l’École étatisée, la
867 sme. Tels sont les procédés nés de la Révolution, qui ont permis à l’État (de droite, à gauche) d’aboutir à l’alignement de
868 en feraient partie. » La Presse : « … c’est elle qui fait l’opinion publique… le plus puissant des potentats… » Elle a cha
869 rvis : c’est l’opium, le rhum, et les armes, « ce qui ruine et ce qui détruit, au moral comme au physique… Cette civilisati
870 pium, le rhum, et les armes, « ce qui ruine et ce qui détruit, au moral comme au physique… Cette civilisation, en fondant s
871 te dernière fort peu probable.) Dans les conflits qui se préparent, inévitables désormais, les peuples dits civilisés seron
872 destruction ». Les ministres cyniques ou prudents qui croyaient diriger le « concert des nations » et contrôler le système
873 is pacem tout en exaltant le Progrès, ce sont eux qui nageaient dans l’utopie : au moment où Dunant disparaît, ils courent
874 ntre la vision juste d’un vieillard en colère, et qui avait fait en outre plus de bien qu’aucun homme de son siècle ou du n
875 u nôtre. 41. « La guerre est agréable pour ceux qui ne l’ont pas faite » ou mieux : « Pour les civils, la guerre est bell
26 1969, Articles divers (1963-1969). Toujours disponible (1969)
876 Comme il m’arrive pour la plupart de ceux avec qui j’ai longtemps collaboré et dans des circonstances très diverses, je
877 aucoup plus tard), quoiqu’également résistant. Ce qui est certain, c’est que les premiers efforts d’union de l’Europe, au l
878 ait être la suivante : « Développons en commun ce qui est neuf ». Laissons de côté les héritages du passé dont l’unificatio
879 d’oppositions. Bien avant d’avoir lu ces lignes, qui datent de 1968, nous avions adopté cette règle d’or, dès les débuts d
880 les plus neuves et les problèmes les plus urgents qui se manifestaient dans chacun de ces domaines de la culture. En scienc
881 rence (résultante : notre association européenne, qui groupe aujourd’hui les trente-deux plus grands festivals européens).
882 à l’initiative de celui des membres de son comité qui avait le mieux démontré le mouvement en marchant : Hans Oprecht n’éta
883 ittéraires, par ceux des grands éditeurs d’Europe qui , dès le début, s’étaient montrés les plus intolérants à l’égard de la
884 isses les plus remarquables et les plus originaux qui soient : l’un des rares qui ait trouvé le secret d’être à la fois eff
885 et les plus originaux qui soient : l’un des rares qui ait trouvé le secret d’être à la fois efficace et d’humeur enjouée, r
27 1969, Articles divers (1963-1969). « Il faut donner aux gens le goût des belles choses » (15 février 1969)
886 blème n’est pas particulier à Ferney-Voltaire. Ce qui me frappe, c’est l’extrême laideur de tout ce que l’on construit, une
887 e avec une place, une église, des cafés… C’est ce qui a été fait à Meyrin et Meyrin est vivant à cause de cette place où le
888 d’or car on n’a pas pensé que l’on détruisait ce qui faisait l’attrait du pays. On a l’impression que le seul souci qu’on
889 puissent discuter des projets car c’est leur vie qui va être modifiée. Il faut rendre les gens attentifs à l’importance du
890 la beauté. C’est un immense problème d’éducation qui doit se traiter au niveau des écoles. Mais des usines nouvelles se cr
891 du pays de Gex, voilà quelques chiffres grisants qui semblent annoncer un avenir brillant… Comment, cependant, ne pas être
28 1969, Articles divers (1963-1969). Les résistances mentales à l’Europe des régions (avril 1969)
892 les objections les plus fréquentes à l’entreprise qui fait l’objet de la présente publication. Je note d’abord que le terme
893 on aujourd’hui encore impondérable, d’une volonté qui peut surgir demain, posant un but nouveau et créant ses moyens. Si l’
894 est pas très intéressant de chercher à deviner ce qui sera : « l’objectivité scientifique » dissimulant une démission civiq
895 régions fédérées. Cela prendra des décennies. Ce qui est urgent, c’est le prix du lait et le taux d’accroissement de la pr
896 s encore faite ? b) Le seul projet de fédération qui ait réussi en Europe, la Suisse, a été conçu, formé et accouché en ne
897 ndier des subventions à Paris. Voyez les Bretons, qui votent gaulliste. Les conflits entre les régions seront forcément plu
898 ons d’habitants, est plus petite que le Limousin, qui n’a que 0,7 million d’habitants. Ça ne se tient pas ! La Bretagne n’e
899 etagne n’est pas une entité économique viable. Et qui parle breton à Rennes ? Les ethnies et les économies ne coïncident pr
900 est ce dernier groupe d’objections ou difficultés qui est la cause principale de l’ajournement des solutions régionalistes,
901 ire de l’incertitude ou insécurité intellectuelle qui caractérise la plupart des projets d’Europe fédérale, dès qu’on abord
902 guerres et les calculs des arpenteurs. — Tout ce qui relève du domaine public (économie, politique, enseignement, fiscalit
903 ), il devient une « nation immortelle » et l’État qui agit en son nom dispose de la vie et de la mort de ses membres, plus
904 ues, mais l’État a le devoir de sévir contre ceux qui contestent l’un de ses dogmes (objecteurs de conscience, par exemple)
905 iècles de l’histoire moderne, ce sont les guerres qui ont servi de prétexte à ces concentrations forcées, c’est leur prépar
906 t leur préparation, leur conduite et leurs suites qui ont notamment accrédité l’idée que l’économie est au service des dess
907 l’identification du « voir » et du « comprendre » qui s’en suit. L’homme de la civilisation visuelle, de l’imprimé, de la l
908 ution, au sens où j’ai toujours entendu le terme, qui ne signifie pas « tout casser » mais, au contraire, poser un nouvel o
909 ans compter la paresse naturelle de notre esprit, qui cherche en tout et avant tout la réduction à la rassurante unité, ou
910 é ? C’est un problème d’éducation ou de recyclage qui va nous prendre au moins douze ans, si nous commençons tout de suite.
911 iées des tâches entreprises et des cadres sociaux qui leur offrent appui. Qu’on me permette un exemple personnel, pour alle
912 nce culturelle. Mais je suis aussi protestant, ce qui représente une allégeance mondiale (ce serait pareil si j’étais commu
913 les, intellectuelles, spirituelles ou affectives, qui n’ont pas de frontières communes, et souvent pas de frontières du tou
914 en un seul lieu, accaparés par l’État national et qui le seront, demain, par l’État régional. IV. Vers une formule fédér
915 — je veux dire : séparer dans le pouvoir tout ce qui peut être séparé, définir tout ce qui peut être défini, distribuer en
916 oir tout ce qui peut être séparé, définir tout ce qui peut être défini, distribuer entre organes ou fonctionnaires différen
917 ntre organes ou fonctionnaires différents tout ce qui aura été séparé et défini ; ne rien laisser dans l’indivision.49 Pr
918 rien laisser dans l’indivision » : grande maxime, qui conteste un monde : celui de la République une et indivisible des jac
919 indivisible des jacobins, de l’Empire napoléonien qui la continue, et des totalitaires du xxe siècle qui l’achèvent. Il ne
920 i la continue, et des totalitaires du xxe siècle qui l’achèvent. Il ne s’agit donc, pour Proudhon, ni de décentraliser ni
921 ence ou un retard d’éducation démocratique. (« Ce qui n’est pas prescrit à tous, d’une manière uniforme, sans choix possibl
922 ines bien définis. Le Marché commun, par exemple, qui est un pouvoir économique, doit-il entretenir des visées politiques,
923 ion de régions libérées de leur État-nation, mais qui jugeraient souhaitable de renouer librement des liens du type nationa
924 s, sociaux ou culturels noués ailleurs. d) Voilà qui nous donnera, sans aucun doute, plusieurs Europes régionales de défin
925 uelles sociétés il cotise, où il paie ses impôts, qui est de sa paroisse et quels sont les paysages de son cœur, et aucun d
29 1969, Articles divers (1963-1969). Le mariage est à réinventer (14 avril 1969)
926 second mari c’est aussi l’amant légitime, l’homme qui fait découvrir les délices et les délires de l’amour physique tels qu
927 pour vous le tour de ce problème de notre époque qui a été aussi son problème à lui ; Denis de Rougemont n’est pas seuleme
928 Denis de Rougemont n’est pas seulement l’écrivain qui a le mieux analysé et expliqué l’amour et le couple, il est aussi dep
929 ar la législation — dans tous les pays — aux gens qui veulent divorcer : le nombre des foyers détruits par le divorce équiv
930 ment géographique mais sociale et professionnelle qui donne aux gens l’occasion de vivre plusieurs vies — on change de pays
931 res dans un couple — le cas classique de la femme qui n’a pas su « suivre » son mari ou l’inverse. Il y a enfin la remise e
932 enfants, etc. Il faut aussi savoir distinguer ce qui tient aux acteurs — les conjoints — et ce qui tient à la situation en
933 ce qui tient aux acteurs — les conjoints — et ce qui tient à la situation en soi, qu’est le deuxième mariage. Faute de mat
934 il y a des écueils inhérents à un premier mariage qui ne le sont plus à un second. Comme dit mon beau-père, le Dr Répond, q
935 un second. Comme dit mon beau-père, le Dr Répond, qui est psychanalyste, lors du premier mariage, on épouse ses complexes.
936 Complexe d’Œdipe, recherche d’un type de conjoint qui est (sans qu’on le sache) celui de la mère, ou du père. Ou au contrai
937 Elle, eh bien, elle a aussi son image de l’homme qui lui fait faire les mêmes erreurs. « Je suis tombée amoureuse de lui a
938 ’il ait dit un mot… » Y a-t-il des causes d’échec qui soient plus spécifiquement attachées à telle classe d’âge ? Oui, l’im
939 t de prendre le contre-pied de leurs conseils. Ce qui conduit souvent à un mariage « d’attitude » : on veut prouver aux aut
940 rs un super-amour mais une certaine forme d’amour qui veut l’obstacle et qui l’invente au besoin pour mieux s’exalter. La p
941 une certaine forme d’amour qui veut l’obstacle et qui l’invente au besoin pour mieux s’exalter. La passion suppose toujours
942 sujet et l’objet — Tristan et Iseut — un roi Marc qui les sépare : la morale, la société, le père, le mari ou simplement le
943 is où est le roi Marc entre le garçon et la fille qui se marient « avec passion » ? Il n’y en a plus, aujourd’hui. Il n’y a
944 t s’arrange. Aussi n’est-ce pas la morale sociale qui détruit la passion, mais le manque d’obstacles, la quotidienneté, la
945 la banalité. Ne peut-on pas imaginer une passion qui ne serait pas fatale, qui pourrait flamber au grand jour et même au j
946 as imaginer une passion qui ne serait pas fatale, qui pourrait flamber au grand jour et même au jour le jour ? Non, la pass
947 a compris que l’essentiel ce sont les caractères, qui ne changent jamais (« on ne peut pas changer de place les raies du zè
948 ales à un deuxième mariage ? Oui, il y en a deux, qui tiennent, elles aussi, à ses motivations. La peur de la solitude, la
949 remarié ? C’est ici qu’il s’agit de distinguer ce qui tient aux « acteurs » et ce qui tient à la situation. Ce qui tient au
950 de distinguer ce qui tient aux « acteurs » et ce qui tient à la situation. Ce qui tient aux acteurs ce sont les difficulté
951 ux « acteurs » et ce qui tient à la situation. Ce qui tient aux acteurs ce sont les difficultés inévitables de la vie en co
952 on elle tient en une phrase ou un fait évident et qui sera ressenti plus ou moins douloureusement : ce n’est plus la premiè
953 ns qu’il s’en doute, ou alors une certaine beauté qui est l’idéal standard de sa génération. Sa passion n’est que la projec
954 on n’est que la projection sur l’autre d’un idéal qui n’existe pas — et l’on s’en aperçoit très vite — alors que le vrai am
955 eut devenir s’il y est appelé. C’est son mystère, qui n’a rien de littéraire, de romantique, le mystère de sa réalité diffé
956 es. Il faudrait tout d’abord dédramatiser tout ce qui touche à l’amour, au mariage, au divorce. À la surestimation de la pa
957 ’hui on parle du sexe — d’abondance — mais, en ce qui concerne l’amour, beaucoup de gens continuent à croire que l’analyser
958 essai ». Qu’en pensez-vous ? Je suis pour tout ce qui peut aider les gens à prendre conscience du sérieux, de la beauté, ma
959 « mariage-maquette », un numéro zéro comme celui qui précède dans les revues la sortie du numéro 1, le premier numéro offi
960 st très supérieur aux fiançailles traditionnelles qui fortifiaient par des obstacles artificiels — défense de cohabiter, de
961 rtir ensemble en vacances — l’idée de passion. Et qui négligeaient toutes les difficultés réelles, celles qui naissent de l
962 gligeaient toutes les difficultés réelles, celles qui naissent de la cohabitation. Là, on vit, on travaille, on organise so
963 e reconnu par les autres comme un vrai couple, ce qui est un ciment — et surtout l’idée que ça doit durer toujours. « Après
964 ment et j’ai fait à cette occasion une découverte qui a joué un rôle important dans ma vie : si l’on part pour une promenad
965 té, en Amérique, au mariage d’une jeune héritière qui répétait avec enthousiasme : « Comme c’est merveilleux de se marier p
966 leux de se marier pour la première fois ! » Voilà qui ne laissait pas prévoir autre chose que les quatre ou cinq échecs qui
967 prévoir autre chose que les quatre ou cinq échecs qui ont suivi. Donc le mariage-maquette donne une idée de ce qu’est le ma
968 ons réalistes, du désir de ressentir une passion, qui fait croire que « ça y est », avec la réalité. Quand les gens cessero
969 e croire que la passion est l’épreuve privilégiée qui seule donne un sens à la vie, quand ils comprendront que la passion n
970 base de la santé, ne fondez pas le mariage sur ce qui vit de sa crise et l’entretient ! Et le mariage lui-même, pensez-vous
971 per sa femme : c’est une œuvre d’art exigeante et qui tente le meilleur en chacun de nous. Je sais bien que depuis des sièc
972 « Je suis sage de toi », le mariage sera sauvé ! Qui l’osera ? al. Rougemont Denis de, « [Entretien] Le mariage est à
973 ce livre est un chef-d’œuvre de lucidité et ceux qui l’ont lu sont mieux armés pour réussir leur vie à deux —, vous expliq
30 1969, Articles divers (1963-1969). Le personnalisme, la contestation, les hippies et… le fédéralisme (27 septembre 1969)
974 entissante, L’Amour et l’Occident . Cet ouvrage, qui démontrait que l’idée de passion amoureuse trouvait ses origines dans
975 trouvait ses origines dans la poésie cathare, et qui nous faisait ensuite descendre les différents cercles de la passion,
976 ’Université McGill. Le sujet de cette conférence, qui était placée sous les auspices du Département de français de l’Univer
977 eçu, en 1963, le Grand Prix littéraire de Monaco, qui couronnait de façon éclatante l’ensemble de son œuvre, on décerne auj
978 à la cause de l’unification de l’Europe. Ce prix, qui lui sera décerné officiellement à Bonn en février prochain, nous rapp
979 ur au Canada, je veux parler du prix Paul Tillich qui est, en quelque sorte, un prix de théologie, on aura, je crois, défin
980 n de M de Rougemont. Le personnalisme « Mais qui est donc M Denis de Rougemont ? », se demandait-on au lendemain de l’
981 édéralisme, c’est-à-dire du système d’aménagement qui permet à des natures diverses de vivre ensemble, de coexister en tens
982 x définitions des conciles du ive au vie siècle qui ont défini la personne à propos des personnes de la Trinité. Le conci
983 que fois qu’il y a deux réalités contraires, mais qui sont bonnes l’une et l’autre, il ne faut pas s’empresser de s’en sort
984 que j’appellerai ma philosophie. Une philosophie qui s’est lentement élaborée, en réaction surtout contre « cette ignoranc
985 ges Izard, et enfin sa propre revue Hic et Nunc qui regroupe autour de lui des écrivains, des philosophes et des théologi
986 illeurs un ouvrage d’une importance capitale pour qui veut comprendre le personnalisme, ouvrage malheureusement assez mal c
987 a personne . On peut y lire, en effet, un article qui avait déjà paru dans la revue Esprit et qui constitue, nous fait re
988 cle qui avait déjà paru dans la revue Esprit et qui constitue, nous fait remarquer M. de Rougemont, « la seule définition
989 e Rougemont, « la seule définition de la personne qui ait jamais paru dans ces revues personnalistes ». Cet article, « Défi
990 nt tout acte. Ainsi, la vocation est à la fois ce qui distingue l’homme et le relie à la communauté où il exerce. Ce qui l’
991 omme et le relie à la communauté où il exerce. Ce qui l’amena — avant Sartre, ce qu’on ignore généralement — à parler de l’
992 rouve fondée une certaine notion de la communauté qui postule l’engagement de l’individu. Mais cet engagement, tient-il à n
993 ar la modernité surtout de ses prises de position qui étaient formulées, rappelons-le, avant la guerre. Mais justement la c
994 guerre. Mais justement la contestation étudiante qui sévit aujourd’hui de Paris à Tokyo n’est-elle pas une contestation pe
995 effet, nous dit-il une contestation personnaliste qui s’ignore. Dans ces motivations, on retrouve plusieurs de celles qui f
996 ces motivations, on retrouve plusieurs de celles qui furent à la base du mouvement personnaliste. Ce que nous appelions en
997 onnaliste et communautaire, c’était quelque chose qui se posait dans les termes d’aujourd’hui. Nous y avions peut-être un p
998 ure n’était visiblement pas aussi grave que celle qui prévaut aujourd’hui. Ce qui nous avait alors alerté et réveillé c’éta
999 aussi grave que celle qui prévaut aujourd’hui. Ce qui nous avait alors alerté et réveillé c’était l’exemple du nazisme et d
1000 que j’ai souvent pu déceler dans la contestation qui s’est développée à Paris, à Berlin, et ailleurs quelque chose que je
1001 lque chose que je crois extrêmement dangereux, et qui ne ressemble pas du tout à notre réaction personnaliste et communauta
1002 a réaction des jeunes fascistes italiens et nazis qui ne respectaient plus rien finalement que la force. Quand on dit, il f
1003 asser et après on verra bien, moi j’ai déjà vu ce qui va se passer : c’est la police qui arrive. Je ne suis donc pas du tou
1004 ’ai déjà vu ce qui va se passer : c’est la police qui arrive. Je ne suis donc pas du tout d’accord avec Sartre quand celui-
1005 emont la seule contestation efficace, c’est celle qui est faite précisément au nom d’autre chose. Je n’ai pas du tout varié
1006 om d’autre chose. Je n’ai pas du tout varié en ce qui concerne la définition de la révolution que nous avions en 1932. Il s
1007 re établi. La contestation véritable, c’est celle qui conteste le désordre établi au nom d’un ordre plus réel. Ce qui paraî
1008 e désordre établi au nom d’un ordre plus réel. Ce qui paraît être, pour beaucoup de jeunes contestataires, une conception i
1009 e chacun de nous, discipline absolument sournoise qui se manifeste par la publicité, par la mode, par les feuilles d’impôt.
1010 une réaction vitale de leur part contre ce monde qui est en train de ruiner les bases mêmes de la passion. Car, finalement
1011 lors qu’avec le mouvement anarchisant des hippies qui essaient aussi de recréer une communauté véritable, tout redevient po
1012 te, néanmoins, que des rassemblements comme celui qui a eu lieu récemment à Bethel, près de New York, sont la démonstration
1013 ork, sont la démonstration éclatante de ce besoin qui existe d’une nouvelle communauté, d’un principe de communauté qui soi
1014 nouvelle communauté, d’un principe de communauté qui soit l’amour : un amour pas seulement sexuel, mais également spiritue
1015 ertes, mais qu’il faut reconstruire. Cette guerre qui vient de se terminer, M. de Rougemont a pu en mesurer toute l’absurdi
1016 nation dans l’Europe fédérée que je préconise et qui n’est que la transposition à une échelle géante de la Confédération h
1017 de l’État-nation du xixe siècle ; une conception qui ne s’accorde plus aux exigences de notre époque, car cet État serait
1018 onstruire une Europe unie, faite de régions, mais qui seraient découpées différemment suivant qu’il s’agirait de régions éc
1019 t M. de Rougemont, il vous faudra séparer tout ce qui peut être séparé, ou comme disait Proudhon, « ne rien laisser dans l’
1020 e premier à l’admettre. Mais « contre les risques qui se lèvent, l’esprit de risque est la seule assurance », lit-on dans
31 1969, Articles divers (1963-1969). La révolution des meilleurs (4 octobre 1969)
1021 Ordre nouveau — tout le mouvement personnaliste, qui est devenu ensuite le mouvement fédéraliste européen — et nous défini
1022 rdre par rapport à l’homme. C’est-à-dire un ordre qui ne reposait — et c’est encore bien plus visible aujourd’hui qu’alors
1023 ussi pauvres que cela, pour créer une communauté. Qui , au fond, ont eu comme résultat que la communauté est en train de se
1024 est-ce pas, que j’ai lancée en France en 1933, et qui forme les deux premiers chapitres de mon premier livre, publié à Pari
1025 te, chez beaucoup de jeunes Français, notamment — qui était de s’engager dans un parti, c’est-à-dire de démissionner complè
1026 mement, c’est-à-dire l’être même de la personne — qui est actualité, agir. Alors je trouve dans ma définition de la personn
1027 ope, du fédéralisme — je prépare un grand ouvrage qui s’appellera Théorie générale du fédéralisme, où je constate que le mo
1028 s. Et c’est presque fatal, parce que c’est un mot qui joint deux réalités contradictoires : la réalité des autonomies local
1029 s locales, personnelles, et la réalité de l’union qui , dans mon esprit, est destinée à garantir ces autonomies. Si vous vou
1030 ontre l’État-nation dans sa formule xixe siècle, qui ne visait qu’à la puissance collective, et qui aboutit aux guerres qu
1031 e, qui ne visait qu’à la puissance collective, et qui aboutit aux guerres que l’on sait. […] Souveraineté nationale groupan
1032 ulez — on met tout ça dans une même frontière, ce qui est démentiel, n’est-ce pas ? C’est une absurdité totale, qu’on a vou
1033 l’unification européenne, des efforts économiques qui étaient faits à Luxembourg par Jean Monnet, et des efforts politiques
1034 mbourg par Jean Monnet, et des efforts politiques qui étaient faits par le Conseil de l’Europe à Strasbourg. Il nous sembla
1035 us, d’ailleurs, qu’il fallait un troisième volet, qui était la culture… Alors, j’ai créé ce centre à Genève, très petit, av
1036 orce, réussi à créer ce Centre et à le maintenir. Qui devait être un lieu de rencontre pour les hommes de culture qui voula
1037 e un lieu de rencontre pour les hommes de culture qui voulaient l’union de l’Europe, un lieu, un foyer de recherche, un foy
1038 oses absolument hétéroclites, d’après les besoins qui se manifestaient et les possibilités d’y répondre : une Association e
1039 des directeurs d’agences nucléaires de six pays, qui a donné lieu à la création du CERN — le Centre européen de recherche
1040 he nucléaire, le plus grand laboratoire européen, qui a permis de garder en Europe nos physiciens qui, autrement, seraient
1041 , qui a permis de garder en Europe nos physiciens qui , autrement, seraient tous partis en Amérique — exode des cerveaux ! N
1042 bilité d’y répondre, et un certain nombre de gens qui ont envie qu’on le fasse, nous les réunissons. Ceci avec un tout peti
1043 nnes, nous avons créé un Institut universitaire — qui est lié à une université — qui se consacre à des études d’intérêt lar
1044 ut universitaire — qui est lié à une université — qui se consacre à des études d’intérêt largement européen : économiques,
1045 eunesse — des manuels scolaires, n’est-ce pas ? —  qui présentaient l’Europe comme une addition de cultures nationales. Nous
1046 lligible, en dehors d’une unité de civilisation — qui est l’unité européenne. Ma passion fondamentale : trouver un sens
1047 rentes activités d’un homme. J’ai un ami français qui se dit mon disciple en érotique personnaliste, et qui m’a défié, il y
1048 se dit mon disciple en érotique personnaliste, et qui m’a défié, il y a deux ans, de prouver que mon idée du mariage et de
1049 omme et une femme. […] Vous avez du monde une vue qui est religieuse en ceci que vous dites que l’amour ou les modes d’expr
1050 a une débandade des institutions religieuses — ce qui est tout à fait autre chose, n’est-ce pas ? Les cadres étatiques de l
1051 a loi, le deuxième principe de la thermodynamique qui dit que tout ensemble de forces tend à une certaine dégradation de l’
1052 le diable, c’est une espèce de symbole de tout ce qui tend à détendre les énergies humaines, n’est-ce pas ?, à unifier, à u
1053 plus totalitaire. Contre ça, il faut des révoltes qui ne peuvent être que personnelles, individuelles, qui recréent des pet
1054 ne peuvent être que personnelles, individuelles, qui recréent des petits foyers de rayonnement, d’inégalité, de lumière, d
1055 ouve vite en lui le jeune homme dans la vingtaine qui se lance, avec toute sa génération, à la recherche d’un humanisme soc