1
homme moderne (1970)a Mesdames et Messieurs, à
ma
stupéfaction, je me trouve en plein accord avec mon ami Louis Armand,
2
70)a Mesdames et Messieurs, à ma stupéfaction,
je
me trouve en plein accord avec mon ami Louis Armand, sauf sur un seul
3
a Mesdames et Messieurs, à ma stupéfaction, je
me
trouve en plein accord avec mon ami Louis Armand, sauf sur un seul po
4
a stupéfaction, je me trouve en plein accord avec
mon
ami Louis Armand, sauf sur un seul point, c’est quand il dit que les
5
table des multiplications à l’école primaire qui
m’
a toujours frappé, et ceci prouve que la liturgie n’est pas seulement
6
moyen mnémotechnique dans certains cas. Ceci dit,
j’
aurai une seule remarque, non pas du tout en contradiction avec ce que
7
t complémentaire à propos du mot « information ».
Je
prends le mot information en pensant au livre et au caractère spécifi
8
l’information que l’on peut avoir par un livre :
je
le prends dans son sens étymologique qui est très proche de formation
9
tes, des « data banks » comme on dit aujourd’hui.
Je
ne sais pas la traduction française. Banques d’informations. Mais le
10
vre d’essayiste, de romancier, le livre de poète,
je
le vois par contraste avec les moyens audiovisuels comme une espèce d
11
ts constitutifs que les transistors qui sont pour
moi
le comble de l’élégance en technique, ce petit truc tout simple… Donc
12
n certain nombre de signes et de significations.
Je
vois le livre donc comme un appareil formé de mots et de phrases, dis
13
n organisée, de la formuler et de la transmettre.
J’
entends par information objective un nombre, un nom, un procédé, un fa
14
êmes, nous digérons ce qu’il y a dans le livre et
je
dirai qu’en revanche et en retour le livre nous digère d’une certaine
15
? C’est une question qu’on peut se poser, et cela
me
fait penser à ce passage très fameux de l’Apocalypse où l’auteur ente
16
la bouche et après cela tu pourras prophétiser. »
Moi
, je dirais : « après ça, tu pourras simplement agir ou méditer ». Nou
17
uche et après cela tu pourras prophétiser. » Moi,
je
dirais : « après ça, tu pourras simplement agir ou méditer ». Nous ne
18
si c’est lui qui nous avale, ou nous lui. Voilà,
me
semble-t-il, le bon usage du livre. Et je voulais y insister pour que
19
Voilà, me semble-t-il, le bon usage du livre. Et
je
voulais y insister pour que l’on ne croie pas, puisqu’on parle d’info
20
s pourraient faire plus vite ? Peut-être… Si vous
me
donnez une minute, je voudrais vous lire une page de Nietzsche que j’
21
s vite ? Peut-être… Si vous me donnez une minute,
je
voudrais vous lire une page de Nietzsche que j’ai retrouvée ce matin
22
, je voudrais vous lire une page de Nietzsche que
j’
ai retrouvée ce matin même, sur « la lente lecture ». Je voudrais qu’o
23
etrouvée ce matin même, sur « la lente lecture ».
Je
voudrais qu’on affiche cette page dans toutes les librairies et je vo
24
affiche cette page dans toutes les librairies et
je
voudrais l’opposer à une annonce publicitaire qu’on voit paraître de
25
nt Kennedy lisait très, très vite ; il absorbait,
je
ne sais combien de milliers de mots à la minute. Alors je crois que t
26
is combien de milliers de mots à la minute. Alors
je
crois que toute la propagande en faveur du livre, aujourd’hui, si l’o
27
s le sens de ces quelques lignes de Nietzsche que
je
vais vous lire. C’est dans la préface de son recueil Aurore. « Philol
28
e d’homme qui se hâte ! [voilà pour l’annonce que
je
vous citais]. Car la philologie est cet art vénérable qui, de ses adm
29
et séduit le plus au milieu d’un âge du travail,
je
veux dire de la précipitation, de la hâte indécente qui s’échauffe et
30
ur lui que des lecteurs parfaits. Apprenez à bien
me
lire. Lisez-moi lentement. M. Denis de Rougemont va maintenant répo
31
lecteurs parfaits. Apprenez à bien me lire. Lisez-
moi
lentement. M. Denis de Rougemont va maintenant répondre, à son tour
32
ente lecture pour bien se pénétrer des questions.
Je
disais que les sujets ne manquent pas, mais le temps de les lire lent
33
manquent pas, mais le temps de les lire lentement
me
manque à cette tribune, et je devrais manger les fiches, les unes apr
34
les lire lentement me manque à cette tribune, et
je
devrais manger les fiches, les unes après les autres, et puis vous de
35
, et puis vous demander le temps de les digérer.
J’
essaierai de grouper plusieurs de ces questions qui se réfèrent à l’au
36
aux rapports entre l’audiovisuel et le livre. On
me
fait remarquer que le livre a ce gros avantage sur la télévision que
37
? » Cette critique-là s’adresse essentiellement,
me
semble-t-il, à la télévision, ou dans un sens moins grave à la radio,
38
de répliquer. Vous pouvez protester quelquefois —
moi
ça m’arrive souvent devant mon poste de télévision — mais c’est une p
39
iquer. Vous pouvez protester quelquefois — moi ça
m’
arrive souvent devant mon poste de télévision — mais c’est une protest
40
ster quelquefois — moi ça m’arrive souvent devant
mon
poste de télévision — mais c’est une protestation absolument vaine, s
41
à votre curiosité, à votre faim du moment. Alors,
je
pense que loin de dire que le livre doit être supplanté par la télévi
42
les fonds nécessaires pour le faire. À cet égard,
je
voudrais ajouter un petit renseignement. Ça touche au livre, vous all
43
nseignement. Ça touche au livre, vous allez voir.
Je
cherchais les moyens, avec un groupe de gens, de contre-battre les ef
44
ys et de certains gouvernements. Alors, quelqu’un
m’
a fait observer qu’on pouvait peut-être s’en tirer pour le moment en d
45
s pour sortir un livre sur l’actualité. Quelqu’un
me
demande « si par exemple, la bande enregistrée pourrait succéder au l
46
a bande enregistrée pourrait succéder au livre »,
moi
je ne le pense pas. Il y a des gens pour lesquels l’ouïe est le sens
47
nde enregistrée pourrait succéder au livre », moi
je
ne le pense pas. Il y a des gens pour lesquels l’ouïe est le sens le
48
a vision. On peut combiner aussi les deux choses.
Je
pense que c’est une affaire d’entraînement, de goût personnel, de pos
49
ersonnel, de possibilités différentes. Quelqu’un
me
demande « si le livre étant tributaire de la langue, il n’y aurait pa
50
re jusqu’ici mais sans grand succès ? » Alors là,
je
crois pouvoir reprendre en réponse la distinction que je faisais tout
51
s pouvoir reprendre en réponse la distinction que
je
faisais tout à l’heure entre deux sens du mot « information ». S’il s
52
de l’information au sens de formation, sur lequel
j’
ai insisté tout à l’heure, alors là, la langue est essentielle. La lan
53
pérer d’une langue synthétique comme l’espéranto.
J’
ai pris cette question parce qu’elle me permet de préciser ce que j’ap
54
espéranto. J’ai pris cette question parce qu’elle
me
permet de préciser ce que j’appellerais « information » tout à l’heur
55
estion parce qu’elle me permet de préciser ce que
j’
appellerais « information » tout à l’heure. Quelqu’un me dit : « C’est
56
llerais « information » tout à l’heure. Quelqu’un
me
dit : « C’est très joli, lente lecture, mais encore faudrait-il que l
57
qui lisent le mieux, ni même qui lisent le plus.
Je
connais des gens qui sont tout à fait dans le style employé de bureau
58
e travail et augmente les temps de loisir. Alors,
je
voudrais que, pendant ces temps de loisir, après la très rapide lectu
59
s lesquels on découvrira toujours plus de choses.
Je
crois qu’on va vers une époque où le loisir va devenir le sérieux de
60
[que] l’automation se développera. Ce n’est pas à
mon
voisin, que j’irai apprendre ce genre de choses. Je pense que nous al
61
on se développera. Ce n’est pas à mon voisin, que
j’
irai apprendre ce genre de choses. Je pense que nous allons maintenant
62
voisin, que j’irai apprendre ce genre de choses.
Je
pense que nous allons maintenant vers un état de la société où, tout
63
rle du livre d’une manière un peu plus prolongée.
Je
ne voudrais pas prendre plus de temps, M. Le Lionnais a encore beauco
64
antérieure, on se le demande.) Si l’on croit que
j’
exagère, voici quelques exemples. Le mot fédéralisme est tabou à Stra
65
s années un représentant du Conseil de l’Europe :
je
compris par la suite que ce haut fonctionnaire tenait le fédéralisme
66
rce qu’ici, disait-il, nous sommes fédéralistes !
Je
n’ai cité que des européistes on ne peut plus engagés. Que sera-ce ai
67
ppelle à se prononcer sur la question européenne.
Je
prendrai mon dernier exemple dans cette dépêche de Londres publiée pa
68
prononcer sur la question européenne. Je prendrai
mon
dernier exemple dans cette dépêche de Londres publiée par un quotidie
69
personnalité individuelle en tant que nation. »
Je
m’assure que ce qu’a dit Maurice Schumann n’était nullement censé « t
70
rsonnalité individuelle en tant que nation. » Je
m’
assure que ce qu’a dit Maurice Schumann n’était nullement censé « trad
71
sent fédéralistes contre Berne, les Québécois que
j’
ai visités l’automne dernier se veulent antifédéralistes contre Ottawa
72
iste. Quant à Nelson Rockefeller, il écrit : Pour
moi
, l’idée fédéraliste suppose une conception d’ensemble de la vie polit
73
oncrète sont causes des confusions de langage que
j’
ai citées et se révèlent nécessairement en elles. « Simples questions
74
ent l’économie. C’est une considérable illusion à
mon
sens, mais qui explique pourquoi la Suisse n’est entrée que dans l’AE
75
bords du lac de Zurich, comme vous le savez. Vous
me
demandez si c’est la meilleure voie ? Je vous répondrai évidemment no
76
ez. Vous me demandez si c’est la meilleure voie ?
Je
vous répondrai évidemment non, car s’il n’y avait que les questions é
77
ommune Il faut beaucoup plus même que la CEE à
mon
sens. L’intégration de l’Europe… disons, d’un mot moins savant, l’uni
78
es voisins de ce pays, on peut édifier une union.
Je
dis bien : une « union » et non pas une unification. Car la seule uni
79
t non pas une unification. Car la seule union que
je
vois possible pour l’Europe, et la seule à laquelle la Suisse puisse
80
ndre la Suisse ? Beaucoup à apporter Alors,
je
pense que la réponse est simple. La Suisse a beaucoup à apporter dans
81
lus difficiles à comprendre, et même à vivre, que
je
connaisse. De toutes les doctrines politiques, c’est certainement la
82
ne quantité de choses qui répugnent à la logique.
J’
entendais l’autre jour encore à la télévision suisse romande : « La Su
83
gère à sa modeste importance… (entendant par là —
je
pense — le fait que c’est un petit pays, qui n’a qu’une petite armée,
84
de puissance comme les États-Unis ou la Russie… »
J’
estime que c’est là une attitude tout à fait erronée, car ce qui fait
85
l en faisant la guerre du Vietnam. Voilà pourquoi
je
pense qu’un petit pays comme la Suisse aurait les plus grandes chance
86
d’une intégration de l’Europe, d’une intégration,
je
dis bien, selon la formule fédérale, la seule qui puisse être accepta
87
s Suisses ? On n’a jamais fait cette enquête, que
je
sache. Alors que voulez-vous qu’il se passe ? Dans ces conditions, le
88
d’éducation ; cela doit commencer à l’école déjà.
Je
connais heureusement beaucoup de professeurs secondaires et même de m
89
ière les autres. Alors que toute notre histoire —
je
le répète — toute notre vocation historique nous indique que nous avo
90
le initiative sur le plan européen. Et pour cela,
je
fais confiance au Conseil fédéral qui me paraît tout à fait disposé d
91
ur cela, je fais confiance au Conseil fédéral qui
me
paraît tout à fait disposé dans ce sens, à en juger par les récentes
92
qualités sont réunies dans la même personnalité.
Je
veux parler de Denis de Rougemont, qui m’a fait part de ses impressio
93
nalité. Je veux parler de Denis de Rougemont, qui
m’
a fait part de ses impressions sur cette grave question, et je vous li
94
t de ses impressions sur cette grave question, et
je
vous livre l’entretien intégral que j’ai eu avec lui. »
95
estion, et je vous livre l’entretien intégral que
j’
ai eu avec lui. »
96
an]. Un prix auquel, d’ailleurs, il s’attendait :
Je
n’ai pas été surpris par la décision de la Fondation Freiherr von Ste
97
dernier déjà, elle avait annoncé que le prix 1970
me
serait décerné. Quelle signification attachez-vous au fait que ce soi
98
era attribué cette année le prix Robert Schuman ?
J’
y vois essentiellement un acte de reconnaissance. Reconnaissance d’un
99
ent, depuis près de vingt-cinq ans, aux dépens de
mon
œuvre littéraire et aussi, parfois, contre vents et marées et sans to
100
éalisés en marge de son métier propre. Et ce sont
mes
livres sur l’Europe et mon activité au Centre européen de la culture
101
ier propre. Et ce sont mes livres sur l’Europe et
mon
activité au Centre européen de la culture qui m’ont valu ce prix, att
102
mon activité au Centre européen de la culture qui
m’
ont valu ce prix, attribué jusqu’ici à des hommes politiques seulement
103
ut président du Centre européen de la culture que
je
dirige. Et, de recevoir un prix qui porte son nom est aussi, pour moi
104
ecevoir un prix qui porte son nom est aussi, pour
moi
, un sujet de satisfaction. e. Rougemont Denis de, « [Entretien] Le
105
u publier dans votre numéro du 24 mars, permettez-
moi
une remarque dont je serais obligé de faire part à vos lecteurs. « L’
106
uméro du 24 mars, permettez-moi une remarque dont
je
serais obligé de faire part à vos lecteurs. « L’acte de reconnaissanc
107
aurait signifier que la Fondation FVS de Hambourg
m’
aurait exprimé sa gratitude émue, comme on pourrait croire que je l’ai
108
é sa gratitude émue, comme on pourrait croire que
je
l’ai dit (si l’on ne me connaissait pas du tout) mais simplement que
109
me on pourrait croire que je l’ai dit (si l’on ne
me
connaissait pas du tout) mais simplement que je lui suis reconnaissan
110
e me connaissait pas du tout) mais simplement que
je
lui suis reconnaissant d’avoir reconnu le travail du Centre européen
111
l’immédiat quotidien ou du prochain accessible ?
Je
ne condamne ni la passion ni le mariage, dit Denis de Rougemont, je d
112
la passion ni le mariage, dit Denis de Rougemont,
je
dis seulement qu’il y a un conflit, si toutefois on parle de passion,
113
age tue l’aspect narcissique de la relation. Pour
moi
, un mariage réussi l’est, quand les deux conjoints estiment que leur
114
nt et de plus en plus, tient lieu de fiançailles,
me
semble un bon moyen de faciliter ce passage et d’éviter les trop mauv
115
emiers n’étaient que des mariages-maquettes. Pour
moi
, le mariage, si on veut faire une comparaison politique, est le type
116
mmes, alors qu’elles sont plutôt complémentaires.
Je
suis contre l’égalité, dit-il, c’est la source de toutes les tyrannie
117
i donnent l’impression d’une liberté fantastique.
J’
ai lu, l’autre jour, qu’il y avait à Paris, autour de 1890, une quinza
118
nt y parvenir ? Le véritable centre de gravité de
ma
théorie est le mythe de l’« État-nation », tel que Napoléon en a posé
119
pour permettre une participation civique réelle.
Je
vous dirai donc qu’entre l’union de l’Europe et les États-nations sac
120
ion fondamentale du sens même de notre vie ? Oui,
je
crois à la personne humaine et à sa liberté. Pour surmonter les alién
121
es pensez-vous qu’il soit possible de l’établir ?
J’
admets qu’il y a une pluralité d’allégeances, civiques, politiques, cu
122
sera complexe, mais combien plus simple à vivre !
Je
vois l’Europe comme un grand jardin plein de surprises, mais un peu d
123
uveau ? L’Europe a la chance d’avoir une culture.
Je
ne crois pas aux cultures nationalistes, en dépit des manuels scolair
124
nne commune comme dénominateur commun : là aussi,
je
ne suis pas d’accord. La politique ne doit pas être une activité sépa
125
ble à l’échelle européenne ? Le système suisse, à
mon
avis, est excellent, hormis peut-être les cantons qui ne sont pas d’u
126
ctuelle et qu’il ne faudrait surtout pas renier :
je
suis persuadé que le fédéralisme européen se construira grâce aux ord
127
te qui peut seul assurer la paix de l’Europe ! Il
me
semble ainsi que l’idée européenne ait trouvé son climat autant que s
128
erait plus en tout cas dans une Europe unie. Mais
je
verrais tout à fait une Suisse-district fédéral, siège de toutes les
129
e de toutes les « agences » de l’Europe unie dont
je
vous parlais tout à l’heure. Il est vrai que le projet d’union de l’E
130
he pour la Suisse. Mais personne ne la préconise,
je
crois. Il est clair, en revanche, qu’une Europe fédérée, respectueuse
131
ture les avantages de la formule fédéraliste. Car
je
pense que prétendre conserver les bénéfices de notre fédéralisme pour
132
pe, publié par Robert Schuman à la fin de sa vie,
je
lis ces mots qu’on ne saurait souhaiter plus éclairants et qui serven
133
économique, doit être une communauté culturelle.
Je
pense, avec Robert Schuman, qu’il est possible d’unir nos pays pour c
134
te l’Europe comme patrie de la diversité. Si l’on
me
demande maintenant comment on peut traduire en termes de structures p
135
culture non unitaire et si hautement diversifiée,
je
répondrai que la solution se trouve dans les termes mêmes du problème
136
litiques, c’est, de toute évidence : fédéralisme.
Je
ne vois pas d’autre réponse imaginable au défi que l’Histoire nous po
137
ion culturelle ! » (15 octobre 1970)k l Ce qui
me
frappe, Denis de Rougemont, en lisant votre Lettre ouverte aux Europ
138
r social. L’Europe est, en effet, avant tout pour
moi
une révolution culturelle. Si vous voulez, je suis maoïste ! La révol
139
ur moi une révolution culturelle. Si vous voulez,
je
suis maoïste ! La révolution ne peut se faire que par les superstruct
140
uantitatif, qui tend à le déposséder de lui-même.
Je
me sens assez proche de Maurice Clavel et de son analyse de l’aliénat
141
titatif, qui tend à le déposséder de lui-même. Je
me
sens assez proche de Maurice Clavel et de son analyse de l’aliénation
142
aurice Clavel et de son analyse de l’aliénation ;
je
déplore la vague de marxisme qui déferle sur l’Université française a
143
gt dernières années ont dissipé cette illusion et
je
pense, d’autre part, que ce qui peut entraîner l’économique, ce n’est
144
e qu’il n’y a de sérieux que les nations. Deux de
mes
étudiants, ont fait un travail sur les manuels d’histoire utilisés en
145
uction civique, l’environnement. Ce dernier thème
me
paraît fondamental, car c’est l’écologie, de nos jours, qui constitue
146
us sommes en commun avec elles. Un autre principe
me
paraît important : il faut fédérer des choses neuves, sinon l’on perd
147
économiques ne se recouperont pas nécessairement.
Je
pense qu’une telle Europe ne sera possible que par l’intermédiaire de
148
tat national constitue donc l’obstacle principal.
Je
pense que le problème le plus important est celui de l’environnement,
149
sation commence avec le respect des forêts, comme
je
l’ai écrit, ce qui va dans le même sens que le respect de l’autre. L’
150
soviétique. Colonisé de manière assez différente.
Je
veux éviter ce parallèle que l’on fait trop facilement entre l’Amériq
151
l’Europe désunie mais pas de même nature. Ce que
j’
appelle la colonisation possible par les États-Unis — si nous ne faiso
152
xtrêmement grave. Par exemple, dans ce village où
j’
habite depuis vingt-trois ans : quand j’y suis arrivé, il y avait 1800
153
illage où j’habite depuis vingt-trois ans : quand
j’
y suis arrivé, il y avait 1800 habitants ; aujourd’hui, il y en a 5500
154
it pas, au contraire, la pénétration américaine ?
Je
n’ai rien contre la pénétration américaine si c’est une question d’éc
155
à ce développement, à l’infini, du niveau de vie.
Je
pense que maintenant se dessine une réaction assez forte que l’on peu
156
ou un compte en banque. Pour les Européens, cela
me
paraît une très bonne direction d’évolution. L’Europe, qui a hérité d
157
à celui de la survie dans la rareté. Attention !
Je
ne suis pas du tout pour que l’on freine le développement de la socié
158
que l’on freine le développement de la société ;
je
suis au contraire pour qu’on le pousse, beaucoup plus que nos compart
159
sociale et politique ? Oui, profondément. Ce que
j’
essaie de montrer depuis un certain temps, c’est que nous sommes en pr
160
économique, qui sont faits ? Le Marché commun, à
mes
yeux, est une première agence fédérale du type que je voudrais voir s
161
eux, est une première agence fédérale du type que
je
voudrais voir se multiplier. C’est, plutôt, le germe d’une agence féd
162
. Le Marché commun est implanté à Bruxelles. Mais
je
vois très bien d’autres agences fédérales européennes, en Suisse par
163
édérales européennes, en Suisse par exemple. Dans
mon
livre La Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux , j’avais lancé l’
164
re La Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux ,
j’
avais lancé l’idée de transformer la Suisse en district fédéral de l’E
165
it que cela signifierait la fin de la neutralité.
Je
pense au contraire que cela signifierait une helvétisation de l’Europ
166
ez l’adhésion de l’Europe à l’Idée suisse ? Quand
je
parle de l’adhésion de l’Europe à l’Idée suisse, j’entends par « Idée
167
parle de l’adhésion de l’Europe à l’Idée suisse,
j’
entends par « Idée suisse » le véritable fédéralisme, qui n’est d’aill
168
t de la technique. Par exemple, sans ordinateurs,
je
défie qui que ce soit de maîtriser les mécanismes d’une fédération co
169
que nous avons des petites communautés. En fait,
mon
modèle de gouvernement de l’Europe reproduit le Conseil fédéral suiss
170
nt l’exécutif, le souverain étant le peuple. Cela
me
paraît un modèle parfaitement valable pour l’Europe et qui pourrait d
171
niversaire du Centre européen de la culture. Dans
ma
Lettre ouverte aux Européens , je donne un programme, pour les vingt
172
culture. Dans ma Lettre ouverte aux Européens ,
je
donne un programme, pour les vingt ans qui viennent, de l’avant-garde
173
lus politique. Dans Le Cheminement des esprits ,
je
me suis surtout attaché aux recherches et à l’action culturelle que s
174
politique. Dans Le Cheminement des esprits , je
me
suis surtout attaché aux recherches et à l’action culturelle que supp
175
e que suppose la fédération de l’Europe telle que
je
l’entends. Recherches et action qui portent sur l’éducation, le civis
176
l’éducation, le civisme, qui, comme le dit un de
mes
titres, commence au respect des forêts, c’est-à-dire englobe tous les
177
bien urbain que rural. Les problèmes d’éducation
m’
ont amené au problème de l’Université, et là, je montre la fécondité d
178
n m’ont amené au problème de l’Université, et là,
je
montre la fécondité des études régionales. Jusqu’à présent, on enseig
179
à reconnaître leur existence. Elles se formeront,
je
pense, par la force des choses, par des échanges humains, des relatio
180
re, Italie, etc. sont-ils appelés à disparaître ?
Je
pense que peu à peu ils se déferont. À mesure que le tissu de liens r
181
omprendre le fédéralisme. De nombreux témoignages
me
sont parvenus de gens qui m’appuient fortement, comme Louis Armand, J
182
nombreux témoignages me sont parvenus de gens qui
m’
appuient fortement, comme Louis Armand, Jean-Jacques Servan-Schreiber
183
Message aux régionalistes (16 mars 1973)ay
Je
suis régionaliste pour deux raisons majeures : — parce qu’il faut FAI
184
s recevoir. Il importe au propos de ces pages que
je
marque d’abord la part des hasards apparents dans la création du Nic
185
parents dans la création du Nicolas de Flue qui
me
valut le bonheur de travailler avec Arthur Honegger. Le mercredi 28 s
186
edi 28 septembre 1938, au milieu de l’après-midi,
je
suis appelé au téléphone par un ami qui est à la radio suisse. Est-ce
187
donner surtout… Deux semaines plus tôt, à Venise,
j’
écoutais Honegger dirigeant son Nocturne au théâtre de la Fenice. J’ép
188
r dirigeant son Nocturne au théâtre de la Fenice.
J’
éprouvais une fois de plus que sa musique me touchait plus qu’aucune d
189
nice. J’éprouvais une fois de plus que sa musique
me
touchait plus qu’aucune de notre temps, si haut que fût à mes yeux St
190
plus qu’aucune de notre temps, si haut que fût à
mes
yeux Stravinski, et je me disais qu’un jour je ferais quelque chose,
191
temps, si haut que fût à mes yeux Stravinski, et
je
me disais qu’un jour je ferais quelque chose, un opéra peut-être, ave
192
mps, si haut que fût à mes yeux Stravinski, et je
me
disais qu’un jour je ferais quelque chose, un opéra peut-être, avec e
193
à mes yeux Stravinski, et je me disais qu’un jour
je
ferais quelque chose, un opéra peut-être, avec et pour cet homme selo
194
un opéra peut-être, avec et pour cet homme selon
mon
cœur… Mais ce n’était pas pour tout de suite ! Je venais d’écrire cou
195
on cœur… Mais ce n’était pas pour tout de suite !
Je
venais d’écrire coup sur coup, en moins de neuf mois, L’Amour et l’O
196
ait assez pour cette année. Les menaces de guerre
me
firent rentrer en Suisse plus tôt que prévu. C’est à ce moment que l’
197
se plus tôt que prévu. C’est à ce moment que l’on
m’
offrit d’écrire une pièce pour l’Exposition nationale qui devait s’ouv
198
le qui devait s’ouvrir à Zurich l’année suivante.
J’
étais en train de sortir mes uniformes d’une malle, je n’avais pas de
199
rich l’année suivante. J’étais en train de sortir
mes
uniformes d’une malle, je n’avais pas de sujet et je défiais quiconqu
200
ais en train de sortir mes uniformes d’une malle,
je
n’avais pas de sujet et je défiais quiconque d’en trouver un, en Suis
201
uniformes d’une malle, je n’avais pas de sujet et
je
défiais quiconque d’en trouver un, en Suisse, qui fût de taille à occ
202
, qui fût de taille à occuper l’énorme scène dont
j’
avais vu les plans : 35 m de large, 18 de profondeur, trois niveaux re
203
tout cela béant devant une salle de 6000 places.
Je
demandai quelques jours « pour réfléchir » et n’en fis rien, certain
204
églerait tout. Sur quoi, le coup de téléphone que
j’
ai dit, toute la vie qui se reprend à vivre, les délais à courir, le s
205
reprend à vivre, les délais à courir, le sujet à
me
fuir. Le jour même, une vieille dame américaine m’avait fait remettre
206
e fuir. Le jour même, une vieille dame américaine
m’
avait fait remettre sans raison apparente une biographie nouvelle de N
207
rente une biographie nouvelle de Nicolas de Flue.
J’
en avais parcouru distraitement quelques pages. L’image scolaire que j
208
istraitement quelques pages. L’image scolaire que
je
gardais de cet ermite du xve siècle était bien pâle. Mais ce soir-là
209
du xve siècle était bien pâle. Mais ce soir-là,
je
reprends le livre et je découvre un personnage fascinant. Mystique na
210
en pâle. Mais ce soir-là, je reprends le livre et
je
découvre un personnage fascinant. Mystique naïf, au bord de l’hérésie
211
Nuit blanche. Trois actes se composent. Au matin
j’
ai tout le plan de la pièce et j’en ai vu le paradoxe essentiel : peup
212
posent. Au matin j’ai tout le plan de la pièce et
j’
en ai vu le paradoxe essentiel : peupler et animer une scène immense a
213
-il l’adapter à la structure chrétienne du sujet.
Je
songe alors au style monumental des prophètes et des psalmistes. Nul
214
ut être qu’Honegger. La part de la commande
Je
vais le voir à Paris. Je ne le connaissais pas. En pleine gloire, à 4
215
a part de la commande Je vais le voir à Paris.
Je
ne le connaissais pas. En pleine gloire, à 46 ans, il vient d’écrire
216
De quinze ans son cadet, inconnu du grand public,
je
ne lui apporte rien qu’une commande peu munificente. Je lui en résume
217
lui apporte rien qu’une commande peu munificente.
Je
lui en résume les données, j’esquisse la structure de la pièce, suggé
218
de peu munificente. Je lui en résume les données,
j’
esquisse la structure de la pièce, suggérée par celle de la scène, et
219
étés, et l’on fabriquera les costumes à domicile.
Je
tombe bien : Honegger vient d’écrire que la seule forme théâtrale à l
220
vail dès novembre. En janvier, tout sera terminé.
J’
écris d’abord le deuxième acte, et le lui envoie, puis le premier, pui
221
, puis le troisième. Une ou deux fois la semaine,
je
descends à Paris, de La Celle-Saint-Cloud où j’habite, et je monte au
222
, je descends à Paris, de La Celle-Saint-Cloud où
j’
habite, et je monte au boulevard de Clichy avec quelques pages dans ma
223
à Paris, de La Celle-Saint-Cloud où j’habite, et
je
monte au boulevard de Clichy avec quelques pages dans ma poche. (J’ai
224
e au boulevard de Clichy avec quelques pages dans
ma
poche. (J’ai écrit le chœur des Compagnons de la Follevie sur les mar
225
ard de Clichy avec quelques pages dans ma poche. (
J’
ai écrit le chœur des Compagnons de la Follevie sur les marches de son
226
.) Nos entretiens sont strictement techniques. Il
me
demande combien il y a de cuivres durs et de cuivres mous dans la fan
227
ivres mous dans la fanfare de La Chaux-de-Fonds. (
Je
n’en sais rien.) Il me prête un recueil de chorals luthériens, pour q
228
are de La Chaux-de-Fonds. (Je n’en sais rien.) Il
me
prête un recueil de chorals luthériens, pour que j’en étudie la proso
229
prête un recueil de chorals luthériens, pour que
j’
en étudie la prosodie précise. Il veut savoir la fonction, la durée et
230
acune des interventions d’un des trois chœurs que
j’
ai prévus. Quelquefois il m’appelle au téléphone : « Au 5e vers, 3e re
231
des trois chœurs que j’ai prévus. Quelquefois il
m’
appelle au téléphone : « Au 5e vers, 3e reprise du Choral I, il manque
232
faire ? — Eh bien ! nous mettrons un soupir ». Il
m’
a dit : « Quand vous écrivez les paroles d’un chœur, chantez-les sur u
233
que. » À chaque visite dans son grand atelier, il
me
joue au piano ce qu’il a fait. Il joue mal, je ne distingue pas grand
234
il me joue au piano ce qu’il a fait. Il joue mal,
je
ne distingue pas grand-chose, une fin de choral pourtant, dont il me
235
grand-chose, une fin de choral pourtant, dont il
me
dit en riant : « Vous voyez, ça finit comme à l’église — catholique o
236
ce sera la dernière : la guerre est pour demain —
je
me sens littéralement transporté ! Voici chanté, clamé ou soutenu par
237
sera la dernière : la guerre est pour demain — je
me
sens littéralement transporté ! Voici chanté, clamé ou soutenu par le
238
de la précision dans le sentiment, non seulement
mon
texte, mais tout ce que j’ai pensé, arrière-pensé en l’écrivant et re
239
timent, non seulement mon texte, mais tout ce que
j’
ai pensé, arrière-pensé en l’écrivant et renoncé à y mettre faute de m
240
Et surtout, l’arrière-plan religieux (voire pour
moi
théologique, à cette époque) de ma « Légende dramatique » est révélé
241
x (voire pour moi théologique, à cette époque) de
ma
« Légende dramatique » est révélé tantôt en majesté, — toute la prièr
242
oile du matin ». La part du cœur Plus tard,
je
lui ai demandé le secret de cette divination spirituelle, et il m’a d
243
le secret de cette divination spirituelle, et il
m’
a dit modestement : « J’apprends par cœur les paroles, et puis je me l
244
nation spirituelle, et il m’a dit modestement : «
J’
apprends par cœur les paroles, et puis je me les répète continuellemen
245
ment : « J’apprends par cœur les paroles, et puis
je
me les répète continuellement, dans mon atelier, dans la rue, en cond
246
t : « J’apprends par cœur les paroles, et puis je
me
les répète continuellement, dans mon atelier, dans la rue, en conduis
247
s, et puis je me les répète continuellement, dans
mon
atelier, dans la rue, en conduisant ma Bugatti. Jusqu’à ce que la mél
248
ent, dans mon atelier, dans la rue, en conduisant
ma
Bugatti. Jusqu’à ce que la mélodie sorte des paroles. » Je le crois,
249
i. Jusqu’à ce que la mélodie sorte des paroles. »
Je
le crois, c’est évident, mais cela n’explique pas tout. Il y a là plu
250
al, ni de nos positions personnelles à son égard.
Je
ne sais pas pourquoi d’ailleurs. Par pudeur ? Je ne le pense pas. Mai
251
Je ne sais pas pourquoi d’ailleurs. Par pudeur ?
Je
ne le pense pas. Mais peut-être tout simplement parce qu’il fallait d
252
qu’un accord plus profond, par nature implicite,
j’
entends de telle nature qu’il ne pût se traduire d’une manière authent
253
genre pieux, ce qu’Honegger n’est à aucun degré.
Je
ne crois même pas qu’il se soit jamais dit croyant, encore moins incr
254
s la plupart des œuvres « à sujet religieux » que
je
viens d’énumérer, doit être qualifié d’essentiellement chrétien, ce n
255
d’Ansermet, « le fondement commun du monde et de
ma
propre existence » (de ma conscience), ou encore « le fondement de l’
256
t commun du monde et de ma propre existence » (de
ma
conscience), ou encore « le fondement de l’être dans le monde, à savo
257
nt, tout s’éclaire et s’enchaîne. L’anecdote dont
je
parlais prend force d’exemple, les hasards apparents deviennent autan
258
t ne peut l’être que dans l’acte de foi, par quoi
je
n’entends pas du tout l’adhésion à quelque credo, mais la réalité de
259
l Martin voulait faire courir l’Europe (1971)u
Ma
première rencontre avec Paul Martin s’est produite sur la scène du Th
260
n nous balançant tantôt à gauche tantôt à droite.
Mon
bras droit tenait le gauche d’un aîné prestigieux capable de courir 8
261
ns plus tard reparaît Paul Martin, plutôt rajeuni
me
semble-t-il (les petites différences d’âge s’effacent avec le temps).
262
auvinisme vociférant —, voilà une belle idée, que
j’
accepte d’enthousiasme. C’était en 1954. Après deux ans d’études, de r
263
l’olympisme officiel. Quelques années plus tard,
j’
eus la surprise de recevoir des papiers à en-tête du Conseil de l’Euro
264
e dernier d’un « Brevet européen du sportif ». On
m’
en communiquait le texte « pour mon information, pensant que ce sujet
265
u sportif ». On m’en communiquait le texte « pour
mon
information, pensant que ce sujet était peut-être de nature à m’intér
266
pensant que ce sujet était peut-être de nature à
m’
intéresser ». Je reconnus au premier coup d’œil « notre » texte. Stras
267
sujet était peut-être de nature à m’intéresser ».
Je
reconnus au premier coup d’œil « notre » texte. Strasbourg s’attribua
268
ope est d’abord une unité de culture (1971)x y
Je
pars de ce qui me paraît une évidence majeure : il nous faut faire l’
269
e unité de culture (1971)x y Je pars de ce qui
me
paraît une évidence majeure : il nous faut faire l’Europe afin de res
270
ologique, militaire et policière par les Russes —
je
songe aux pays de l’Est européen —, d’autre part à la colonisation de
271
t toujours à nouveau contre toute union fédérale,
je
veux parler de l’État national de type xixe siècle, jacobin et napol
272
ignement, et dans les croyances qui en résultent.
Je
voudrais vous le montrer rapidement, et vous montrer aussi les conclu
273
. C’est ainsi qu’à la Sorbonne, vers 1267 — comme
me
le faisait observer un jour Étienne Gilson —, pas un seul des grands
274
ien antérieure à l’idée même d’État-nation. Mais,
me
direz-vous, le mot « nation » désignait, dès ce temps, ceux qui parle
275
, des pays baltes et de la région de la Volga. On
m’
objecte souvent que nos langues sont trop différentes pour que nous pu
276
cieuses diversités » sont celles de nos nations ?
Je
vous propose là-dessus deux observations faciles à vérifier. Chacun
277
stes, des progressistes et des conservateurs. Or,
je
mets en fait que dans la plupart des cas, les hommes de gauche de pay
278
e, voilà, identiquement, la Suisse. Si maintenant
je
transpose en termes politiques mon équation culturelle : Europe de l
279
. Si maintenant je transpose en termes politiques
mon
équation culturelle : Europe de la culture = courants continentaux e
280
me il est arrivé de nos frontières cantonales, et
je
ne crois pas que nous y ayons perdu quoi que ce soit de vraiment préc
281
ns pas à une Europe des États-nations souverains.
Je
l’ai souvent dit : ce serait une amicale des misanthropes — chose qu’
282
ou alors elle ne se fera pas sérieusement. Voilà,
je
pense, la perspective qui s’ouvre à nous. Elle n’a rien pour nous eff
283
à redouter de la disparition des frontières. Mais
je
vois là aussi plus qu’une incitation : un appel, un devoir d’agir. Il
284
il nous dicte une ligne de conduite et d’action.
Je
sais bien que les Suisses sont timides et qu’ils en font même une ver
285
’avenir. Il est cette part du passé qui à la fois
m’
ouvre un certain avenir et par avance le limite. Je ne le connaîtrai v
286
’ouvre un certain avenir et par avance le limite.
Je
ne le connaîtrai vraiment qu’en découvrant à l’expérience ce qu’il me
287
vraiment qu’en découvrant à l’expérience ce qu’il
me
dicte ou m’interdit, mais aussi ce qu’il m’incite ou m’autorise à mod
288
en découvrant à l’expérience ce qu’il me dicte ou
m’
interdit, mais aussi ce qu’il m’incite ou m’autorise à modifier d’une
289
qu’il me dicte ou m’interdit, mais aussi ce qu’il
m’
incite ou m’autorise à modifier d’une manière inédite — qui sera moi.
290
te ou m’interdit, mais aussi ce qu’il m’incite ou
m’
autorise à modifier d’une manière inédite — qui sera moi. Distinguons
291
orise à modifier d’une manière inédite — qui sera
moi
. Distinguons donc trois sens possibles, du moins pour un Européen, de
292
comprend plus — et voilà quelqu’un de cultivé. Si
je
dis au contraire que la culture est ce que l’homme ajoute à la nature
293
ysage européen est un fait de culture au sens que
je
viens de noter.) Et non seulement le phénomène culturel englobe les a
294
Tout cela est européen. Tout cela est culturel ou
je
ne sais pas ce que c’est. Et tout cela vit en chacun de nous, sous fo
295
le — n’est pas exceptionnel : il est irrécusable.
J’
entends qu’il est universel. Pas un seul d’entre nous n’y échappe. Que
296
nt trop connus et trop souvent exaltés pour qu’il
me
soit besoin de les analyser. Il s’agit de : —l’esprit critique ou rem
297
nomènes qui se sont produits au xiie siècle dont
j’
ai longuement parlé dans mon livre L’Amour et l’Occident . Et mainten
298
s au xiie siècle dont j’ai longuement parlé dans
mon
livre L’Amour et l’Occident . Et maintenant, c’est une chose admise
299
errier et si l’on entre dans la société actuelle,
je
défie qui que ce soit de m’expliquer en quoi les hommes seraient priv
300
la société actuelle, je défie qui que ce soit de
m’
expliquer en quoi les hommes seraient privilégiés par rapport aux femm
301
isses d’accorder l’égalité politique aux femmes ?
Je
crois que cela forme l’inconscient des Suisses, très fortement. Et vo
302
nos mères plus qu’à nos pères, en grande partie.
Je
n’entends pas culture au sens scolaire, universitaire du terme. Mais
303
ès important et on l’oublie toujours. D’ailleurs,
je
reproche beaucoup aux femmes suisses d’avoir transporté ces valeurs m
304
nt pas accordé le même poids au rôle de la femme.
Je
pense que c’est spécifiquement européen, parce que notre civilisation
305
ce au point de vue public entre hommes et femmes.
Je
ne dis pas du tout qu’il n’y a pas de différence entre masculin et fé
306
’y a pas de différence entre masculin et féminin.
Je
dis que sur le plan de la vie publique il n’y en a pas. Je n’en vois
307
e sur le plan de la vie publique il n’y en a pas.
Je
n’en vois pas. Les seules que nous croyons voir, que nous imaginons v
308
rnaud Dandieu définissait la seule révolution que
je
tienne aujourd’hui encore pour nécessaire et réalisable comme un élan
309
rence qu’il donnait en 1931 sur l’idée de nation,
je
recopie ces lignes4 : Plaçons-nous sur le plan de la tradition révol
310
ormulé les concepts opératoires. Et pour ma part,
je
ne cesse de mieux mesurer ce que j’ai dû et dois encore aux trop brèv
311
pour ma part, je ne cesse de mieux mesurer ce que
j’
ai dû et dois encore aux trop brèves années de notre collaboration pol
312
tique au sens étroit du terme, il est un fait que
je
crois indispensable de mettre en relief ; c’est que les études région
313
s par les manuels et les doctrines nationalistes,
je
n’imagine pas de principe méthodologique plus fécond, pour cette rena
314
commun entre ces deux activités ? En somme, vous
me
demandez si mon système est sérieux ? Dans ma Lettre ouverte aux Eur
315
es deux activités ? En somme, vous me demandez si
mon
système est sérieux ? Dans ma Lettre ouverte aux Européens j’ai écr
316
ous me demandez si mon système est sérieux ? Dans
ma
Lettre ouverte aux Européens j’ai écrit que l’Europe, c’est 480 mil
317
sérieux ? Dans ma Lettre ouverte aux Européens
j’
ai écrit que l’Europe, c’est 480 millions d’Européens qui s’ignorent,
318
nous unir très vite dans une fédération. Or, pour
moi
, le couple est la première cellule de ce que j’appelle le fédéralisme
319
moi, le couple est la première cellule de ce que
j’
appelle le fédéralisme, c’est-à-dire l’union dans la diversité. Commen
320
n fait : dans l’amour, dans nos manières d’aimer,
je
trouve la racine de mondes politiques différents. Ce n’est que peu à
321
est que peu à peu, d’ailleurs, que s’est révélé à
moi
le principe de cohérence entre le couple, la personne et le fédéralis
322
est très difficile d’exprimer, et c’est pourquoi
j’
écris tant de livres : la coexistence des contraires. Vous connaissez
323
taires ! Le meilleur de l’esprit européen est né,
je
crois, de cette formule du premier philosophe grec, au vie siècle av
324
xistence des contraires est donc le couple ? Dans
mon
action en faveur d’une fédération européenne, j’ai défini le fédérali
325
mon action en faveur d’une fédération européenne,
j’
ai défini le fédéralisme comme la coexistence en tension de réalités é
326
ques. N’est-ce pas le cas du couple ? Un jour, on
m’
a demandé dans un débat à la radio : « Ne craignez-vous pas que les Eu
327
les uns des autres pour jamais pouvoir s’unir ? »
J’
ai répondu : « Ne craignez-vous pas que les hommes et les femmes ne so
328
s ? » Voilà dévoilée l’équation de base de ce que
j’
ai écrit aussi bien dans L’Amour et l’Occident sur le couple humain
329
il passionné depuis trente ans ? Cherchez bien et
je
suis sûr que vous trouverez. Regardez autour de vous : le mariage occ
330
Serait-ce une base désastreuse pour le mariage ?
Je
le disais en 1938, je n’ai pas changé d’avis. Nous entrons dans le ma
331
sastreuse pour le mariage ? Je le disais en 1938,
je
n’ai pas changé d’avis. Nous entrons dans le mariage généralement par
332
passion n’est pas possible dans le mariage ? Non.
Je
dis autre chose : je dis qu’il est l’ennemi du mariage. Ce n’est pas
333
sible dans le mariage ? Non. Je dis autre chose :
je
dis qu’il est l’ennemi du mariage. Ce n’est pas par hasard que le jug
334
animement admise par les troubadours. Finalement,
j’
ai découvert que le mythe de Tristan et Iseut est l’ennemi intime du m
335
romanesque au Moyen Âge. L’avez-vous influencé ?
J’
ai rencontré McLuhan à Toronto, en 1969. Je sais par ses étudiants qu’
336
encé ? J’ai rencontré McLuhan à Toronto, en 1969.
Je
sais par ses étudiants qu’il parle souvent de mes thèses dans ses cou
337
Je sais par ses étudiants qu’il parle souvent de
mes
thèses dans ses cours. Quand l’historien Charles Seignobos écrivit dé
338
u’on l’écrit, tel qu’on le vit jusqu’à nos jours.
Je
pense surtout aux effets dégradés du mythe à travers les siècles, s’e
339
s ont été merveilleusement malheureux ! Comprenez-
moi
bien : je n’ai aucune recette pour l’amour. Je constate que la passio
340
erveilleusement malheureux ! Comprenez-moi bien :
je
n’ai aucune recette pour l’amour. Je constate que la passion et le ma
341
z-moi bien : je n’ai aucune recette pour l’amour.
Je
constate que la passion et le mariage sont des adversaires fondamenta
342
riage sont des adversaires fondamentaux, bien que
je
sois pris, moi aussi, dans le drame qui les oppose. Aujourd’hui, je d
343
adversaires fondamentaux, bien que je sois pris,
moi
aussi, dans le drame qui les oppose. Aujourd’hui, je distingue l’amou
344
aussi, dans le drame qui les oppose. Aujourd’hui,
je
distingue l’amour dans le mariage — amour actif — de l’amour-passion
345
plupart des gens peuvent difficilement admettre.
Je
peux vous dire pourquoi, car tout est parti du mythe de Tristan. La R
346
que se passe-t-il dans les autres civilisations ?
Je
n’ai rien trouvé de tel en Orient, en Inde, en Chine, où n’existe auc
347
contraire, au dépassement et à la dissolution du
moi
. En revanche, la littérature érotique y est très développée, sacrée m
348
’a confirmé le maître du zen, Suzuki, à propos de
mes
livres, pour le Japonais traditionnel les relations entre les sexes s
349
re liberté. Mais vous, que souhaitez-vous ? Quand
je
pense à l’amour « programmé », calculé, je suis évidemment pour l’amo
350
Quand je pense à l’amour « programmé », calculé,
je
suis évidemment pour l’amour-passion, bien qu’il ne soit pas viable.
351
venant l’une par l’autre ce qu’elles sont. Ce que
je
veux défendre, c’est donc, en fin de compte, un certain état de tensi
352
les « spécialistes » de la Sorbonne, indignés de
me
voir transgresser les frontières de leurs disciplines. Aujourd’hui, m
353
les frontières de leurs disciplines. Aujourd’hui,
mon
livre est au programme de licence… Il a influencé beaucoup d’auteurs
354
nné pour un anniversaire son propre exemplaire de
mon
livre, abondamment annoté), voire des sociologues, comme Lewis Mumfor
355
rotisme, l’amour-passion et une éthique. En 1969,
j’
ai fait sur ce sujet une conférence à l’université d’Indiana, et, l’ét
356
l’été dernier, un professeur de cette université
m’
a dit : « Cela a été la dernière fois que les contestataires et les ge
357
us, quel est l’avenir de l’amour ? D’une part, il
me
semble que les jeunes gens d’aujourd’hui tiennent un peu mieux compte
358
e les psychanalystes les rassurent : « Très bien,
mes
enfants, pas d’excès, mais enfin, il faut bien apprendre les choses…
359
immédiat. Dans un livre, Les Mythes de l’amour ,
j’
ai analysé trois succès mondiaux : Lolita, de Vladimir Nabokov, Le Doc
360
ernak, et L’Homme sans qualités, de Robert Musil.
J’
ai retrouvé l’archétype de Tristan à travers ces trois livres ; les tr
361
compte, pour vous, quel serait le couple idéal ?
Je
voudrais que Tristan découvre Iseut, qu’Iseut découvre Tristan, et qu
362
t découvre Tristan, et qu’ils sachent leurs noms.
Je
voudrais qu’ils cessent de dire comme dans l’opéra de Wagner : « Non,
363
quand combattez-vous le totalitarisme ? Dès 1932,
j’
ai contribué avec mes amis Emmanuel Mounier, Arnaud Dandieu, Alexandre
364
le totalitarisme ? Dès 1932, j’ai contribué avec
mes
amis Emmanuel Mounier, Arnaud Dandieu, Alexandre Marc, le mathématici
365
âtir une société ? Niveau de vie ou mode de vie ?
Je
me suis senti justifié. La jeunesse a redécouvert notre question tren
366
r une société ? Niveau de vie ou mode de vie ? Je
me
suis senti justifié. La jeunesse a redécouvert notre question trente
367
aison nécessaire entre personne et communauté que
je
lançai alors un mot qui allait faire fortune un peu plus tard : engag
368
lait faire fortune un peu plus tard : engagement.
Mon
opposition au nazisme me valut d’ailleurs, en 1940, d’être envoyé en
369
plus tard : engagement. Mon opposition au nazisme
me
valut d’ailleurs, en 1940, d’être envoyé en Amérique… où j’allais déc
370
’ailleurs, en 1940, d’être envoyé en Amérique… où
j’
allais découvrir l’Europe. Comment cela ? On prend conscience des chos
371
On prend conscience des choses quand on les perd.
Je
n’étais pas le seul dans ce cas à New York. Quand j’ai rencontré Eins
372
n’étais pas le seul dans ce cas à New York. Quand
j’
ai rencontré Einstein, à Princeton, il m’a dit : « Vous n’avez pas idé
373
k. Quand j’ai rencontré Einstein, à Princeton, il
m’
a dit : « Vous n’avez pas idée de la transformation intellectuelle de
374
s l’impact des Européens immigrés. En 1922, quand
je
suis allé aux États-Unis pour une tournée de conférences sur le sioni
375
es sur le sionisme, la médiocrité des universités
m’
a surpris. Le changement inouï qui s’est produit depuis lors est dû en
376
lles circonstances avez-vous rencontré Einstein ?
Je
venais d’écrire les Lettres sur la bombe atomique , à la suite de Hi
377
suite de Hiroshima. Un soir, le téléphone sonne.
J’
entends : « Ici, Einstein. » C’est un peu comme si vous entendiez : «
378
farce ou c’est un esprit… Einstein venait de lire
mon
livre « pour la deuxième fois » et me demandait si j’étais libre ce s
379
it de lire mon livre « pour la deuxième fois » et
me
demandait si j’étais libre ce soir… En Amérique, on l’accusait de com
380
ivre « pour la deuxième fois » et me demandait si
j’
étais libre ce soir… En Amérique, on l’accusait de communisme, parce q
381
ngs ! Nous avons parlé de l’union de l’Europe. Il
m’
a dit : « Vous êtes bien optimiste. Cela prendra un temps fou. En tout
382
e nous n’était certain de jamais revoir l’Europe.
J’
écrivais deux textes par jour pour « La Voix de l’Amérique parle aux F
383
Breton, Lévi-Strauss étaient les « parleurs » de
mes
textes. Mais pourquoi êtes-vous allé en Amérique pendant la guerre ?
384
pris l’entrée de Hitler à Paris, le 15 juin 1940.
J’
écrivais : « C’est ici l’impuissance tragique de ce victorieux : tout
385
des services de renseignements de l’armée suisse
m’
apprit qu’une démarche avait été faite le matin même de la parution de
386
« Vous mettez en danger la sécurité de la Suisse,
me
dit ce colonel, mais j’ai aimé votre article. » Plus tard, le Conseil
387
la sécurité de la Suisse, me dit ce colonel, mais
j’
ai aimé votre article. » Plus tard, le Conseil fédéral jugea plus prud
388
us tard, le Conseil fédéral jugea plus prudent de
m’
expédier en mission aux États-Unis, où les circonstances m’ont contrai
389
r en mission aux États-Unis, où les circonstances
m’
ont contraint à demeurer six ans. Depuis vingt ans, vous consacrez une
390
Ne craignez-vous pas d’avoir perdu votre temps ?
Je
suis probablement l’écrivain qui a présidé le plus grand nombre de co
391
à quelque chose. C’est une des lois de l’action.
Je
crois que nous pourrons faire l’Europe d’ici à vingt ans sur la base
392
r la base des régions, au-delà des nationalismes.
Je
constate d’ailleurs que les doutes sur l’Europe et la vitalité de sa
393
Marché commun, hommes politiques, universitaires,
je
crois vraiment que l’action du Centre européen de la culture a imposé
394
autres cherchent à bâtir l’Europe de l’économie ;
moi
, j’ai cherché celle des valeurs et celle des hommes. On vous reproche
395
s cherchent à bâtir l’Europe de l’économie ; moi,
j’
ai cherché celle des valeurs et celle des hommes. On vous reproche de
396
On vous reproche de faire de l’européocentrisme ?
Je
ne donne une place ni grande ni petite à l’Europe : je dis ce qu’elle
397
donne une place ni grande ni petite à l’Europe :
je
dis ce qu’elle est parmi les vingt-deux ou vingt-trois civilisations
398
e sont ajoutées des influences arabes, slaves, et
j’
en passe. Tout cela l’a distinguée des autres grandes civilisations, f
399
udiants progressistes de l’Université de Berkeley
m’
ont demandé de leur parler des valeurs occidentales : « Je sais, leur
400
mandé de leur parler des valeurs occidentales : «
Je
sais, leur ai-je dit, vous n’y croyez plus. Mais qu’est-ce qui existe
401
ler des valeurs occidentales : « Je sais, leur ai-
je
dit, vous n’y croyez plus. Mais qu’est-ce qui existe à la place, selo
402
règne majestueux sur des sujets. En France, quand
j’
ai des démêlés, comme tout le monde, avec des fonctionnaires, douanier
403
onctionnaires, douaniers, percepteurs, gendarmes,
je
finis toujours par leur dire : « Monsieur, je ne suis pas votre sujet
404
es, je finis toujours par leur dire : « Monsieur,
je
ne suis pas votre sujet, mais un libre citoyen. C’est le fonctionnair
405
n la forme une et indivisible de l’État français.
Je
connais un Breton qui a fait un livre sur l’Europe régionaliste… Eh b
406
réation de la CECA et à la CE. Mais il y a ce que
j’
appelle l’illusion Monnet : croire que l’économique entraînera nécessa
407
part des superstructures. Eh bien, en ce sens-là,
je
suis maoïste ! Je crois que la révolution part des grandes options, d
408
ctures. Eh bien, en ce sens-là, je suis maoïste !
Je
crois que la révolution part des grandes options, d’une culture, des
409
l’Europe ? Les statistiques sur l’idée européenne
me
permettent de rappeler cette phrase un peu cynique de Louis Armand :
410
es jours plus d’anti-Européens qu’il n’en naît. »
Je
suis certain que nous irons vers des solutions fédéralistes, régional
411
lus de vocation, on le jette à la poubelle ; pour
moi
, c’est cela, l’Enfer. Pour combattre ce que vous appelez l’Enfer, cro
412
p fier de l’Europe. Comment voyez-vous l’avenir ?
Je
crois au progrès. Je l’ai décrit, dans L’Aventure occidentale de l’h
413
omment voyez-vous l’avenir ? Je crois au progrès.
Je
l’ai décrit, dans L’Aventure occidentale de l’homme , en tant qu’acc
414
la science, qui est à double tranchant. Ou bien,
je
vous l’ai dit, nous irons vers l’ennui collectif. Mais il me semble i
415
i dit, nous irons vers l’ennui collectif. Mais il
me
semble improbable que cet ennui ne recrée pas en profondeur la soif d
416
e au cyclope aveuglé à l’entrée de la caverne : «
Mon
nom est Personne. De quoi aurais-tu peur ? Je ne suis pas là… » C’est
417
« Mon nom est Personne. De quoi aurais-tu peur ?
Je
ne suis pas là… » C’est ce que fait Satan ? Singeant Dieu, mais à reb
418
? Singeant Dieu, mais à rebours, il nous dit : «
Je
suis celui qui n’est pas ! ». Il est la force dépersonnalisante de l’
419
oderne du diable, tel que vous le concevez ? Pour
m’
exprimer en des termes empruntés à la physique moderne, je dirais que
420
er en des termes empruntés à la physique moderne,
je
dirais que le diable, c’est l’entropie. Qu’est-ce que l’entropie ? C’
421
al de notre siècle, le contraire absolu de ce que
j’
ai appelé le « personnalisme », qui consiste à assumer sa vocation per
422
tout ce qu’il faut pour qu’on ne le détecte pas ?
Je
disais que Satan nous fait croire, premièrement, qu’il n’existe pas,
423
: « Qu’est-ce que tu as fait ? », il proteste : «
Je
n’y étais pas, c’est elle qui a tout fait, c’est elle qui m’a tendu l
424
s pas, c’est elle qui a tout fait, c’est elle qui
m’
a tendu la pomme ; moi, je n’ai rien vu, je ne sais pas ce qui s’est p
425
a tout fait, c’est elle qui m’a tendu la pomme ;
moi
, je n’ai rien vu, je ne sais pas ce qui s’est passé ; j’étais derrièr
426
ut fait, c’est elle qui m’a tendu la pomme ; moi,
je
n’ai rien vu, je ne sais pas ce qui s’est passé ; j’étais derrière le
427
le qui m’a tendu la pomme ; moi, je n’ai rien vu,
je
ne sais pas ce qui s’est passé ; j’étais derrière les buissons, au mi
428
n’ai rien vu, je ne sais pas ce qui s’est passé ;
j’
étais derrière les buissons, au milieu des arbres du jardin. » L’actio
429
t le cas de la passion amoureuse vulgarisée, dont
j’
ai parlé dans L’Amour et l’Occident . La passion, qui devient une dro
430
onversation sur les Américains, dont la faiblesse
me
paraissait être dans leur incapacité à croire au mal pur, donc au dia
431
oire au mal pur, donc au diable. Jacques Maritain
m’
avait dit : « Pourquoi n’écrivez-vous pas un livre sur le diable ? ».
432
oi n’écrivez-vous pas un livre sur le diable ? ».
J’
ai répondu : « Si j’écris un livre sur le diable, tout le monde va me
433
s un livre sur le diable ? ». J’ai répondu : « Si
j’
écris un livre sur le diable, tout le monde va me croire diabolique… »
434
j’écris un livre sur le diable, tout le monde va
me
croire diabolique… » J’ai pourtant commencé l’ouvrage après un an de
435
diable, tout le monde va me croire diabolique… »
J’
ai pourtant commencé l’ouvrage après un an de mon séjour en Amérique.
436
» J’ai pourtant commencé l’ouvrage après un an de
mon
séjour en Amérique. La Suisse m’y avait envoyé en mission à la suite
437
après un an de mon séjour en Amérique. La Suisse
m’
y avait envoyé en mission à la suite d’un article que j’avais publié s
438
ait envoyé en mission à la suite d’un article que
j’
avais publié sur l’entrée de Hitler à Paris, et qui m’avait valu quinz
439
ais publié sur l’entrée de Hitler à Paris, et qui
m’
avait valu quinze jours de prison militaire. J’ai écrit les cinquante
440
ui m’avait valu quinze jours de prison militaire.
J’
ai écrit les cinquante premières pages en vingt-quatre heures, sans so
441
ères pages en vingt-quatre heures, sans sortir de
mon
atelier, puis j’ai voulu aller dans un restaurant du quartier. Il éta
442
t-quatre heures, sans sortir de mon atelier, puis
j’
ai voulu aller dans un restaurant du quartier. Il était tard, les patr
443
les patrons étaient seuls, et l’on s’est écrié en
me
voyant entrer : « Voilà le diable ! ». J’ai déguerpi, sans demander m
444
crié en me voyant entrer : « Voilà le diable ! ».
J’
ai déguerpi, sans demander mon reste. Cinq semaines plus tard, le livr
445
Voilà le diable ! ». J’ai déguerpi, sans demander
mon
reste. Cinq semaines plus tard, le livre était fini : soixante-six co
446
ini : soixante-six courts chapitres, et voilà que
je
découvre que 666… est le chiffre du diable, qui refuse d’arriver à 7,
447
élèbre. L’un des meurtriers, en effet, criait : «
Je
suis le diable ici pour faire l’œuvre du diable ! ». Il portait les c
448
r maître ou gourou, les autres à leurs officiers.
Je
dis que c’est le second cas qui est vraiment diabolique, parce que l’
449
été en plein cœur. Peut-on rencontrer le diable ?
J’
ai écrit un jour : « Si vous voulez sérieusement trouver le diable et
450
er de l’expérience suisse de 1848 une formule qui
me
paraîtrait susceptible de faciliter l’union de l’Europe d’aujourd’hui
451
ne partie de leurs souverainetés réaffirmées ! On
me
dira que c’est un tour de passe-passe. Je réponds qu’il a bien réussi
452
es ! On me dira que c’est un tour de passe-passe.
Je
réponds qu’il a bien réussi. Et j’observe qu’un pouvoir fédéral europ
453
e passe-passe. Je réponds qu’il a bien réussi. Et
j’
observe qu’un pouvoir fédéral européen, constitué selon la même formul
454
ent par une nécessité qu’ils espèrent temporaire,
je
pense que les fédéralistes européens peuvent accepter le mot s’il fac
455
llution et des gens savants qui s’en occupent : «
Je
donne aux inventeurs de cette psychose le prix Nobel de l’escroquerie
456
dextrose de M. Pauwels — dextrose étant synonyme,
je
le rappelle, de glucose, liquide sucré. Le succès foudroyant de son l
457
liquide sucré. Le succès foudroyant de son livre
me
paraît d’ailleurs plus significatif que le livre lui-même. Comment vo
458
mes préparés à répondre à ce défi sans précédent.
Je
vais avouer d’abord mes raisons d’en douter. I. Le savant et le cit
459
à ce défi sans précédent. Je vais avouer d’abord
mes
raisons d’en douter. I. Le savant et le citoyen Je lis sur la co
460
sons d’en douter. I. Le savant et le citoyen
Je
lis sur la couverture d’un des ouvrages de prospective les plus fameu
461
ns à celle des savants ». On nous dit aussi (mais
je
m’assure que ce ne sont pas les auteurs qui ont écrit cela) que « dep
462
à celle des savants ». On nous dit aussi (mais je
m’
assure que ce ne sont pas les auteurs qui ont écrit cela) que « depuis
463
étique mais rationnelle et méthodique ». Sur quoi
je
lis l’ouvrage et je constate que nos savants (d’ailleurs honnêtes et
464
lle et méthodique ». Sur quoi je lis l’ouvrage et
je
constate que nos savants (d’ailleurs honnêtes et scrupuleux) sont en
465
ement, ce qui se fera dans tel avenir… sans eux !
J’
entends sans nulle action dont ils se fassent les avocats, qu’ils se p
466
e l’avenir paraît aller de soi pour la plupart de
mes
contemporains. C’est pour cela, précisément, que j’éprouve le besoin
467
contemporains. C’est pour cela, précisément, que
j’
éprouve le besoin d’analyser les difficultés qu’elle implique, apories
468
e dans la structure dynamique du phénomène, comme
j’
ai tenté de le montrer dans L’Amour et l’Occident 9. Le positivisme
469
ceux qui le vivront « Vous dites : Où vas-tu ?
Je
l’ignore et j’y vais », osait écrire Victor Hugo. Voilà qui est beauc
470
ront « Vous dites : Où vas-tu ? Je l’ignore et
j’
y vais », osait écrire Victor Hugo. Voilà qui est beaucoup plus sensé
471
lus sensé qu’il n’y paraît à première vue. Car si
je
savais ce qui m’attend « là-bas » en l’an 2000, je refuserais sans do
472
’y paraît à première vue. Car si je savais ce qui
m’
attend « là-bas » en l’an 2000, je refuserais sans doute d’avancer, j’
473
e savais ce qui m’attend « là-bas » en l’an 2000,
je
refuserais sans doute d’avancer, j’irais plutôt chez les hippies. Mai
474
en l’an 2000, je refuserais sans doute d’avancer,
j’
irais plutôt chez les hippies. Mais je me tromperais : car ce « là-bas
475
d’avancer, j’irais plutôt chez les hippies. Mais
je
me tromperais : car ce « là-bas » ne m’attend pas tel que je suis. Im
476
avancer, j’irais plutôt chez les hippies. Mais je
me
tromperais : car ce « là-bas » ne m’attend pas tel que je suis. Imagi
477
ies. Mais je me tromperais : car ce « là-bas » ne
m’
attend pas tel que je suis. Imaginer l’avenir est faux et dangereux da
478
erais : car ce « là-bas » ne m’attend pas tel que
je
suis. Imaginer l’avenir est faux et dangereux dans la mesure même où
479
varié, et le genius loci agit (par des moyens que
je
n’ai pas à examiner ici) de manière à maintenir l’invariant local et
480
nt la participation sociale, civique et politique
me
paraissent être la dimension dans l’habitat ou le cadre urbain, le ni
481
différents niveaux communautaires ? Voilà qui ne
me
paraît ni souhaitable ni possible, non pas que j’aie des doutes sur l
482
me paraît ni souhaitable ni possible, non pas que
j’
aie des doutes sur la valeur du modèle — il est le meilleur que je pui
483
sur la valeur du modèle — il est le meilleur que
je
puisse imaginer — mais du fait même qu’il aura pour fonction de conju
484
ité à moyen terme d’investissements spéculatifs. (
Je
reviendrai plus loin sur le droit à l’inadaptation comme condition de
485
c’est-à-dire globale. Si la commune est l’aire où
ma
voix peut se faire entendre, alors « le monde est ma commune » peut d
486
voix peut se faire entendre, alors « le monde est
ma
commune » peut dire l’homme de la fin de ce siècle. Pour Teilhard de
487
ispensable la formule des assemblées à distance :
je
veux parler de la pluralité des types de régions et des associations
488
es d’action », comme l’a fort bien dit A. Clarke.
J’
ai rappelé divers sens du verbe participer, et que certains sont actif
489
er. Il n’est pas sans intérêt de relever ici que
ma
description des passifs et des actifs civiques recouvre assez exactem
490
ques recouvre assez exactement la distinction que
je
posais en débutant entre futurologues scientifiques et prophètes. L’a
491
emps que les nécessités de se déplacer diminuent.
J’
ai parlé tout à l’heure des conseils d’administration tenus en vidéoph
492
es personnels ? Il est possible — et pour ma part
j’
y crois, sans rien pouvoir prouver — que la présence « en chair et en
493
nt de civisme. 7. La liberté d’inadaptation
J’
ai parlé de dysfonctions sociales et de discordances chronologiques po
494
égativité. En conclusion ouverte sur l’avenir, il
me
reste à définir, pour le revendiquer, ce droit suprême de la personne
495
a cité (1971-1972)w La question « Que faire de
ma
vie ? » définit l’anxiété du jeune homme d’aujourd’hui lorsqu’il atte
496
ntes coutumières : la majorité des jeunes gens de
ma
génération me paraissent avoir choisi le métier qui était à la fois l
497
es : la majorité des jeunes gens de ma génération
me
paraissent avoir choisi le métier qui était à la fois le moins éloign
498
re le comportement de la plupart des Occidentaux,
je
vois paraître une motivation aussi différente de la coutume que du pr
499
te de la coutume que du profit : celle du sens de
ma
vie, du sens de la société, et du sens de ma participation — ou non —
500
s de ma vie, du sens de la société, et du sens de
ma
participation — ou non — à cette société. Prenons l’exemple de l’ingé
501
au centre de l’Europe : la Suisse (1972)ak al
Je
rentrais de l’espace. Des heures durant, je l’avais vue qui tournait
502
al Je rentrais de l’espace. Des heures durant,
je
l’avais vue qui tournait lentement, merveilleuse, éclatante, seule vi
503
bleue, verte et blanche dans le noir éternel, et
je
l’avais aimée comme une femme qui vient, comme une patrie d’enfance q
504
carrefour des grands axes nord-sud et est-ouest,
je
reconnais immédiatement la Suisse. Or, il y a vingt-cinq Suisses, vin
505
le voir des airs, tandis que nous descendons vers
mon
pays natal. Un certain éclat, des couleurs, du vert d’abord. Souvenir
506
uste — ou l’adhésion d’une ferveur déconcertante.
Je
voudrais essayer, pour ma part, d’énumérer au sujet de Lavaux quelque
507
Lavaux quelques faits vrais, dont la discordance
m’
inquiète : elle m’empêche de m’abandonner à l’euphorie d’un lyrisme co
508
aits vrais, dont la discordance m’inquiète : elle
m’
empêche de m’abandonner à l’euphorie d’un lyrisme contemplatif, ou de
509
ont la discordance m’inquiète : elle m’empêche de
m’
abandonner à l’euphorie d’un lyrisme contemplatif, ou de céder à cette
510
cœur du bassin de l’industrie lourde de l’URSS.)
J’
ai mis deux de mes étudiants sur ce problème. Ils ont trouvé que la gr
511
e l’industrie lourde de l’URSS.) J’ai mis deux de
mes
étudiants sur ce problème. Ils ont trouvé que la grande majorité des
512
lenchement du processus fédéraliste européen. Or,
je
ne vois aucune méthode meilleure que celle qu’ont adoptée, depuis dix
513
tiques, au sens de stratégie de l’humanité. Qu’il
me
suffise d’une phrase-image pour résumer toute la révolution que nous
514
ication de L’Amour et l’Occident ? Effectivement,
j’
ai publié L’Amour et l’Occident au début des années 1939, mais ce n’
515
s années 1939, mais ce n’était pas tombé du ciel.
Je
m’occupais de questions politiques depuis les années 1930, quand je s
516
nnées 1939, mais ce n’était pas tombé du ciel. Je
m’
occupais de questions politiques depuis les années 1930, quand je suis
517
uestions politiques depuis les années 1930, quand
je
suis arrivé à Paris et que j’ai tout de suite collaboré avec des grou
518
années 1930, quand je suis arrivé à Paris et que
j’
ai tout de suite collaboré avec des groupes de jeunes écrivains, socio
519
Dandieu, Alexandre Marc et Robert Aron. Moi-même,
j’
étais à cheval sur les deux groupes. J’ai collaboré aux deux premiers
520
Moi-même, j’étais à cheval sur les deux groupes.
J’
ai collaboré aux deux premiers numéros et ensuite à la plupart des aut
521
spécialement économiques, d’autres sociologiques.
Moi
, je faisais des études qui étaient plus portées vers une sociologie d
522
alement économiques, d’autres sociologiques. Moi,
je
faisais des études qui étaient plus portées vers une sociologie de la
523
ie de la culture ou de la morale. C’est ainsi que
j’
ai écrit un de mes premiers livres. Il est intitulé : Penser avec les
524
ou de la morale. C’est ainsi que j’ai écrit un de
mes
premiers livres. Il est intitulé : Penser avec les mains 15 et il e
525
actement qui l’a dit en premier, de Mounier ou de
moi
. En tout cas, dans un premier livre publié à Paris, en 1934, intitulé
526
uite, par toutes sortes de raisons biographiques,
j’
ai été amené à m’intéresser beaucoup à l’opposition entre la passion e
527
sortes de raisons biographiques, j’ai été amené à
m’
intéresser beaucoup à l’opposition entre la passion et le mariage dans
528
ginelle en Occident. Et d’autre part, le mariage.
J’
ai étudié cette question par une espèce de symétrie entre les deux gra
529
vous voulez, c’est simplement une application de
mes
doctrines de la personne au domaine de l’amour et du mariage. Je repr
530
la personne au domaine de l’amour et du mariage.
Je
représentais le mariage comme le régime même de la personne, la manif
531
es antinomies ou les maintenir en tension. Alors,
j’
ai poussé plus loin. Quand j’ai été rappelé en Suisse par la mobilisat
532
r en tension. Alors, j’ai poussé plus loin. Quand
j’
ai été rappelé en Suisse par la mobilisation — j’étais officier, charg
533
j’ai été rappelé en Suisse par la mobilisation —
j’
étais officier, chargé des relations entre l’état-major, les troupes e
534
ns entre l’état-major, les troupes et le public —
j’
ai été amené à me poser un tas de questions sur la politique, sur la f
535
ajor, les troupes et le public — j’ai été amené à
me
poser un tas de questions sur la politique, sur la formule politique
536
alisme de votre pays semble être une découverte ?
J’
y pensais depuis longtemps mais je ne savais pas à quel point la Suiss
537
ne découverte ? J’y pensais depuis longtemps mais
je
ne savais pas à quel point la Suisse avait réalisé le fédéralisme. Bi
538
éralisme. Bien qu’élevé en Suisse, effectivement,
je
ne m’étais jamais intéressé à la vie politique du pays. Parce que vou
539
me. Bien qu’élevé en Suisse, effectivement, je ne
m’
étais jamais intéressé à la vie politique du pays. Parce que vous avez
540
Parce que vous avez beaucoup vécu à l’étranger ?
J’
ai vécu à Paris depuis l’âge de 25 ans. J’ai été ramené en Suisse par
541
anger ? J’ai vécu à Paris depuis l’âge de 25 ans.
J’
ai été ramené en Suisse par la mobilisation, en 1939 ; j’avais 33 ans.
542
é ramené en Suisse par la mobilisation, en 1939 ;
j’
avais 33 ans. Puis, j’ai été envoyé aux États-Unis pour y faire des co
543
la mobilisation, en 1939 ; j’avais 33 ans. Puis,
j’
ai été envoyé aux États-Unis pour y faire des conférences sur le fédér
544
isse. Mais aussi pour y faire jouer une pièce que
j’
avais écrite pour l’Exposition nationale de 1939 et qui avait été mise
545
ger. Nous en avions tiré un oratorio16. La guerre
m’
a surpris là-bas et j’y suis resté six ans. Je ne suis rentré définiti
546
ré un oratorio16. La guerre m’a surpris là-bas et
j’
y suis resté six ans. Je ne suis rentré définitivement qu’en 1947. Aux
547
rre m’a surpris là-bas et j’y suis resté six ans.
Je
ne suis rentré définitivement qu’en 1947. Aux États-Unis, j’ai découv
548
rentré définitivement qu’en 1947. Aux États-Unis,
j’
ai découvert l’Europe. Il fallait donc s’éloigner pour la retrouver ?
549
relation les uns avec les autres. C’est ainsi que
je
suis devenu ami d’André Breton et de tout le groupe des peintres surr
550
tout le groupe des peintres surréalistes. Breton
me
voyait tous les jours, parce qu’il était un des parleurs des textes q
551
parce qu’il était un des parleurs des textes que
j’
écrivais pour la voix de l’Amérique parle aux Français. Ainsi, à ma ma
552
a voix de l’Amérique parle aux Français. Ainsi, à
ma
manière, bien que ressortissant d’un pays neutre, j’ai pu faire la gu
553
manière, bien que ressortissant d’un pays neutre,
j’
ai pu faire la guerre, ne fût-ce que sur les ondes, en écrivant des te
554
ur les ondes, en écrivant des textes d’émissions.
Je
suis donc rentré des États-Unis en 1947, en me disant ; je suis l’aut
555
s. Je suis donc rentré des États-Unis en 1947, en
me
disant ; je suis l’auteur de la doctrine de l’engagement, je suis féd
556
onc rentré des États-Unis en 1947, en me disant ;
je
suis l’auteur de la doctrine de l’engagement, je suis fédéraliste ; i
557
je suis l’auteur de la doctrine de l’engagement,
je
suis fédéraliste ; il s’agit maintenant d’appliquer ces théories, de
558
t alors fort à la mode à Paris. Et tout le monde,
je
ne sais pas pourquoi, l’attribuait à Sartre. Or, Sartre, comme on le
559
t parce qu’il avait lu cela dans Esprit et dans
mes
livres. Vous connaissiez Jean-Paul Sartre ? Il est venu me voir à New
560
. Vous connaissiez Jean-Paul Sartre ? Il est venu
me
voir à New York en 1944 ou 1945, premier journaliste français. Dans s
561
le et que l’homme doit s’engager. Alors, un jour,
je
lui ai dit : « J’espère que vous savez où vous avez pris cela. » Il m
562
doit s’engager. Alors, un jour, je lui ai dit : «
J’
espère que vous savez où vous avez pris cela. » Il m’a répondu : « Je
563
spère que vous savez où vous avez pris cela. » Il
m’
a répondu : « Je le sais très bien. » Mais il ne l’a jamais dit à pers
564
avez où vous avez pris cela. » Il m’a répondu : «
Je
le sais très bien. » Mais il ne l’a jamais dit à personne d’autre… Ma
565
en Suisse. Que se passe-t-il ? Pendant la guerre,
je
m’étais aperçu que ma doctrine du fédéralisme était illustrée par la
566
Suisse. Que se passe-t-il ? Pendant la guerre, je
m’
étais aperçu que ma doctrine du fédéralisme était illustrée par la pra
567
e-t-il ? Pendant la guerre, je m’étais aperçu que
ma
doctrine du fédéralisme était illustrée par la pratique suisse. Que j
568
lisme était illustrée par la pratique suisse. Que
j’
avais apprise à l’école mais que je n’avais jamais très bien comprise.
569
ue suisse. Que j’avais apprise à l’école mais que
je
n’avais jamais très bien comprise. Alors, je me suis dit que maintena
570
que je n’avais jamais très bien comprise. Alors,
je
me suis dit que maintenant il fallait faire l’Europe. Qu’on ne pouvai
571
e je n’avais jamais très bien comprise. Alors, je
me
suis dit que maintenant il fallait faire l’Europe. Qu’on ne pouvait u
572
que les tâches envisagées devenaient plus vastes.
Mon
fédéralisme est basé, notamment, sur la loi de l’extension des tâches
573
e siècles — constituent la base de la Suisse. Et
je
trouve que le système marche très bien. Il autorise toutes les divers
574
s, diversités de confession, diversités sociales.
J’
ai compté : il y a 54 types de combinaisons existantes. Bref, une dive
575
du fédéralisme ? Dans quelles circonstances ? Dès
mon
arrivée dans cette maison de Ferney, en 1947, j’ai eu la visite d’ami
576
mon arrivée dans cette maison de Ferney, en 1947,
j’
ai eu la visite d’amis de l’époque d’ Esprit et de L’Ordre nouveau .
577
l’époque d’ Esprit et de L’Ordre nouveau . Ils
m’
ont convaincu d’aller, un mois plus tard, parler au premier congrès de
578
éenne des fédéralistes qui avait lieu à Montreux.
J’
y ai prononcé le discours d’introduction sur le thème de l’attitude fé
579
personnes, 16 présidents du conseil, 300 députés.
J’
ai écrit le message final : « Message aux Européens » qui demandait no
580
té pour lancer l’idée de l’Europe. Nous avons, si
je
puis dire, été « refaits ». Parce que loin de faire une fédération, l
581
stant sur le plan des États-nations. C’est ce que
j’
attaque maintenant à boulets rouges. Comment voulez-vous réussir l’Eur
582
ope actuelle n’est qu’une juxtaposition d’États ?
Moi
, j’appelle cela l’amicale des misanthropes. Ou bien, il y a une amica
583
ctuelle n’est qu’une juxtaposition d’États ? Moi,
j’
appelle cela l’amicale des misanthropes. Ou bien, il y a une amicale e
584
omine l’Europe des nations. Vous êtes déçu ? Non.
Je
ne suis pas déçu. Je n’y ai jamais cru. Je n’ai jamais cru que cette
585
tions. Vous êtes déçu ? Non. Je ne suis pas déçu.
Je
n’y ai jamais cru. Je n’ai jamais cru que cette Europe-là pouvait se
586
? Non. Je ne suis pas déçu. Je n’y ai jamais cru.
Je
n’ai jamais cru que cette Europe-là pouvait se faire. Mais j’ai pensé
587
is cru que cette Europe-là pouvait se faire. Mais
j’
ai pensé qu’il valait mieux que les États pratiquent cet hommage que l
588
mariage ? C’est la coexistence de deux êtres qui,
je
l’ai dit, ont chacun leurs lois, parfois antinomiques, et qui doivent
589
s, chacun étant complètement supérieur à l’autre.
Je
préfère dire que l’homme est supérieur à la femme et la femme supérie
590
ons pour sauvegarder les autonomies. Voilà ce que
j’
ai découvert dans l’histoire de la Suisse. Pourquoi ce pays s’est-il f
591
unes, de chacun des cantons. Voilà le système que
je
voudrais étendre de proche en proche à toute l’Europe, en suivant la
592
Fribourg. Chacune de ces régions devrait avoir, à
mon
sens, son autorité régionale et relever de l’agence fédérale européen
593
nt hétérogènes. Très souvent, les gens disent que
mon
modèle est folie pure. Que c’est une complication ce que je veux fair
594
est folie pure. Que c’est une complication ce que
je
veux faire. Alors, voici mon exemple personnel. Je suis né à Neuchâte
595
e complication ce que je veux faire. Alors, voici
mon
exemple personnel. Je suis né à Neuchâtel qui, jusqu’en 1848, a été u
596
e veux faire. Alors, voici mon exemple personnel.
Je
suis né à Neuchâtel qui, jusqu’en 1848, a été une principauté dont le
597
ères ni les mêmes langues que le canton. De plus,
je
suis écrivain français. Donc, je fais partie de l’ensemble francophon
598
canton. De plus, je suis écrivain français. Donc,
je
fais partie de l’ensemble francophone qui a des limites tout à fait d
599
aucun de nos États-nations actuels. D’autre part,
je
suis protestant. Voilà un autre ensemble auquel je me rattache qui ne
600
e suis protestant. Voilà un autre ensemble auquel
je
me rattache qui ne correspond ni à l’ensemble national, ni à l’ensemb
601
uis protestant. Voilà un autre ensemble auquel je
me
rattache qui ne correspond ni à l’ensemble national, ni à l’ensemble
602
arties de la France, la moitié de la Suisse, etc.
Je
fais également partie d’un certain nombre de sociétés. Je paie des im
603
également partie d’un certain nombre de sociétés.
Je
paie des impôts à une dizaine de sources différentes. Donc, rien n’es
604
est plus simple. Au fond, nous vivons dans ce que
j’
appelle la pluralité des allégeances. L’utopie, c’est vouloir que tout
605
s allégeances. L’utopie, c’est vouloir que toutes
mes
allégeances soient limitées par une même frontière. C’est ce qu’ont v
606
sans subordination. Ce sont les mêmes termes que
j’
ai utilisés pour définir le couple et définir la coexistence des auton
607
ieux joue un très grand rôle dans vos activités ?
Ma
formation protestante m’a permis de mieux formuler le personnalisme e
608
ôle dans vos activités ? Ma formation protestante
m’
a permis de mieux formuler le personnalisme en ajoutant le terme de vo
609
ui a été fortement souligné par Luther et Calvin.
Je
garde aussi du protestantisme un certain sens civique qui est très dé
610
qui est très développé dans les pays calvinistes.
J’
ai fait cette observation bien avant 1939 : il y a des régimes totalit
611
cun doit l’inventer tous les jours. D’autre part,
je
suis distingué de la tribu par ma vocation, et en même temps relié à
612
. D’autre part, je suis distingué de la tribu par
ma
vocation, et en même temps relié à la communauté par l’exercice de ce
613
té par l’exercice de cette vocation. C’est ce que
j’
ai de plus fondamentalement protestant. À part cela, je suis pour un c
614
de plus fondamentalement protestant. À part cela,
je
suis pour un christianisme œcuménique dépassant définitivement les co
615
ique dépassant définitivement les confessions que
j’
estime valables dans la mesure où il y a des tempéraments religieux di
616
re fédéralisme et œcuménisme ? L’œcuménisme, pour
moi
, est la traduction du fédéralisme sur le plan religieux. Il ne s’agit
617
vis-à-vis de l’écologie ? Dans cette conférence,
j’
explique une chose qui me tient fort à cœur depuis quelques années : j
618
? Dans cette conférence, j’explique une chose qui
me
tient fort à cœur depuis quelques années : j’ai découvert que l’human
619
qui me tient fort à cœur depuis quelques années :
j’
ai découvert que l’humanité, aujourd’hui, se voit contrainte de choisi
620
us oblige à choisir nos finalités. Voilà pourquoi
j’
en viens à cette formule paradoxale : contraints de choisir librement
621
e semblez guère apprécier les hommes politiques ?
Je
les trouve funestes. En tant qu’ils sont des représentants des partis
622
ils sont des partisans ou des nationalistes. Mais
j’
ai le plus grand respect pour des hommes qui ont une vision politique
623
Je
rentrais de l’espace… (27-28 mai 1972)aq Je rentrais de l’espace.
624
Je rentrais de l’espace… (27-28 mai 1972)aq
Je
rentrais de l’espace. Des heures durant, je l’avais vue qui tournait
625
aq Je rentrais de l’espace. Des heures durant,
je
l’avais vue qui tournait lentement, merveilleuse, éclatante, seule vi
626
bleue, verte et blanche dans le noir éternel, et
je
l’avais aimée comme une femme qui vient, comme une patrie d’enfance q
627
carrefour des grands axes nord-sud et est-ouest,
je
reconnais immédiatement la Suisse. Or, il y a vingt-cinq Suisses, vin
628
le voir des airs, tandis que nous descendons vers
mon
pays natal. Un certain éclat, des couleurs, du vert d’abord. Souvenir
629
nts. Étrange anachronisme de la photographie : si
j’
en crois mes yeux, vu de l’air une Suisse verte et paysanne survit à l
630
e anachronisme de la photographie : si j’en crois
mes
yeux, vu de l’air une Suisse verte et paysanne survit à l’ère industr
631
l’aventure humaine. aq. Rougemont Denis de, «
Je
rentrais de l’espace… », 24 Heures, Lausanne, 27–28 mai 1972, p. 53.
632
se sur la culture. On l’a prise pour une boutade.
J’
y vois plutôt une anticipation de certains résultats des recherches le
633
ntifie progressivement à la personne constituée —
je
ne dis pas à ce qui la constitue, qui est l’appel de sa fin, sa vocat
634
dix heures du soir ».) « Il vous a été dit… mais
moi
je vous dis… » Cette phrase évangélique ne nie pas le passé. Elle s’y
635
heures du soir ».) « Il vous a été dit… mais moi
je
vous dis… » Cette phrase évangélique ne nie pas le passé. Elle s’y ré
636
onstitutives, celle de l’émotion, celle de l’âme.
Je
voudrais résumer leur œuvre en une seule expression moins pédante qu’
637
e la justesse dans le choix de l’expression. Il
me
plaît de traduire cette belle définition dans les termes de notre suj
638
de la justesse dans le style de nos émotions. » À
mon
sens, en effet, les textes primitifs de la légende de Tristan, qui re
639
de l’existence proprement humaine, qui est l’âme.
Je
ne prends pas ce mot dans le sens noble et vague que lui donnent un p
640
lut des âmes », ou de l’« immortalité de l’âme ».
Je
prends le mot au sens précis et véritablement traditionnel, qui se re
641
volution du xiie siècle jusqu’à nos jours, comme
j’
ai tenté de le faire jadis, serait hélas illustrer la lente dégradatio
642
ans histoire. Ou bien encore, et ce serait mieux,
je
crois, il leur reste le mythe de Don Juan, ce cliché négatif de Trist
643
l. Selon les sociologues, la passion doit mourir.
Je
vous dis que je n’en crois rien. Car s’il est vrai que la passion se
644
iologues, la passion doit mourir. Je vous dis que
je
n’en crois rien. Car s’il est vrai que la passion se nourrit d’obstac
645
ssion de Tristan et d’Iseut : et c’est la mort. ⁂
J’
ai laissé jusqu’ici dans l’ombre cet aspect, trop souvent, trop facile
646
au mythe, ose parler d’un plaisir que l’usage en
moi
a fait si fort qu’il me donne l’audace de négocier avec la mort. E
647
laisir que l’usage en moi a fait si fort qu’il
me
donne l’audace de négocier avec la mort. Et Wagner, le dernier auteu
648
ire — et germe d’un être éternel qui est son vrai
moi
, et qui est un ange au ciel. Or, ces anges, nommés Fravartis, sont de
649
terrestre : c’est la rencontre de l’âme avec son
moi
céleste à l’entrée du pont Chinvat. Dans un paysage nimbé de la Lumiè
650
son entrée, se dresse devant l’âme sa Dâenâ, son
moi
céleste, jeune femme d’une beauté resplendissante et qui lui dit : —
651
e d’une beauté resplendissante et qui lui dit : —
Je
suis toi-même ! Mais si l’homme sur la Terre a maltraité son moi, au
652
me ! Mais si l’homme sur la Terre a maltraité son
moi
, au lieu de la Fravarti c’est une apparition monstrueuse et défigurée
653
strueuse et défigurée qui reflète son état déchu.
Je
ne puis m’empêcher d’imaginer que cette « rencontre aurorale » avec l
654
défigurée qui reflète son état déchu. Je ne puis
m’
empêcher d’imaginer que cette « rencontre aurorale » avec le moi céles
655
imaginer que cette « rencontre aurorale » avec le
moi
céleste en forme d’ange, et femme, figure la conclusion du mythe de T
656
ise à part — ce serait le sujet d’autres études —
je
me demande souvent si l’angélologie de l’ancien Iran ne détient pas l
657
à part — ce serait le sujet d’autres études — je
me
demande souvent si l’angélologie de l’ancien Iran ne détient pas le s
658
e d’abord une dualité entre l’individu et le vrai
moi
, sans laquelle on ne saurait s’aimer soi-même, puisqu’« il faut être
659
e — un franglais primitif, si l’on préfère — dont
je
citerai quelques exemples à la volée : Thomas et Mary Anglais
660
ses douleurs ! » Il en reste chez Bédier : « Que
m’
importe de mourir ! » — chez Mary, rien du tout, ce qui vaut sans dout
661
n en prose, lorsque Tristan meurt : « Douce amie,
je
ne vous verrai plus. Adieu, je m’en vais et vous salue. Et le cœur lu
662
rt : « Douce amie, je ne vous verrai plus. Adieu,
je
m’en vais et vous salue. Et le cœur lui crève, et son âme s’en va. »
663
: « Douce amie, je ne vous verrai plus. Adieu, je
m’
en vais et vous salue. Et le cœur lui crève, et son âme s’en va. » And
664
on industrielle. Exemples de b) L’amour-passion.
J’
ai étudié ce phénomène, si spécifiquement européen par sa genèse, dans
665
péen par sa genèse, dans L’Amour et l’Occident .
J’
ai très vite pressenti que la forme d’amour que je cherchais à décrire
666
J’ai très vite pressenti que la forme d’amour que
je
cherchais à décrire ne pouvait être saisie par aucune de nos discipli
667
pécialités, les facultés même ! Toute la Sorbonne
m’
a condamné, mais le même ouvrage, aujourd’hui, figure au programme de
668
me de l’objet de ses études, qui est l’Europe, il
me
paraît condamné à l’interdisciplinarité de type b). L’Europe est un p
669
re Cette loi structurelle tout à fait générale
me
paraît gouverner, comme à leur insu, les entreprises régionalistes le
670
Seconde Guerre mondiale, joue dans le même sens :
je
veux parler de la crise de l’État-nation centralisé, de modèle jacobi
671
vique, économique, sociale et politique, par quoi
je
veux dire : l’exercice de responsabilités réelles par les citoyens. L
672
ées d’autres âges. De la création des régions que
je
viens de définir, ce n’est pas plus Genève qui bénéficiera que le pay
673
tives du régionalisme dans notre avenir prochain,
j’
imagine quelques solutions qu’il va s’agir de réaliser simultanément :
674
s face à l’urgence des périls que court l’Europe,
j’
entends sa colonisation par une hégémonie politique à l’Est, une hégém
675
end de nous, non des astres. S’il est vrai, comme
je
l’ai toujours pensé, que nous n’avons pas à prévoir notre histoire, m
676
a place publique (1er juillet 1973)bc Dire que
j’
approuve les idées de ces douze articlesbd serait faible : je m’y reco
677
les idées de ces douze articlesbd serait faible :
je
m’y reconnais. Il s’agirait maintenant de les illustrer. Car elles de
678
idées de ces douze articlesbd serait faible : je
m’
y reconnais. Il s’agirait maintenant de les illustrer. Car elles demeu
679
s sous la forme condensée que demande le journal.
Je
voudrais souligner une idée dominante : que les structures d’une cité
680
nager. Encore faudrait-il décrire ces structures.
J’
ai toujours soutenu que la démocratie, au sens actif et créatif du mot
681
tion de fédéralisme première et deuxième manière.
Je
suis pour la deuxième. Ramuz était pour la première. Il me disait un
682
our la deuxième. Ramuz était pour la première. Il
me
disait un jour au Central, à Lausanne : « Entre nous, nous sommes féd
683
ausanne : « Entre nous, nous sommes fédéralistes,
je
veux bien dire séparatistes » (parlant de Berne). Non, le fédéralisme
684
e, où le beau mot de voisinage reprenne son sens.
J’
applaudis au projet d’une grande discussion sur le sens concret de l’e
685
che. L’affaire Lip est déjà prévue, définie, et à
mon
sens résolue, dans la pensée du grand fédéraliste franc-comtois. bc
686
e l’Europe unie : la liberté, non la puissance
Je
pars de ce qui me paraît une évidence majeure : il nous faut « faire
687
la liberté, non la puissance Je pars de ce qui
me
paraît une évidence majeure : il nous faut « faire l’Europe » afin de
688
. C’est ainsi qu’à la Sorbonne, vers 1260 — comme
me
le faisait observer un jour Étienne Gilson —, pas un seul des grands
689
cieuses diversités » sont celles de nos nations ?
Je
propose là-dessus deux observations faciles à vérifier. Chacun de nos
690
s, des « protestants » et des « catholiques ». Or
je
mets en fait que dans la plupart des cas, les hommes de gauche (ou de
691
nt. Vers l’Europe des régions Si maintenant
je
transpose en termes politiques mon équation culturelle, soit : Euro
692
Si maintenant je transpose en termes politiques
mon
équation culturelle, soit : Europe de la culture = courants contine
693
tières en maintiennent et renforcent le principe.
Je
ne crois pas à une Europe des États-nations souverains, parce qu’on n
694
e par excellence et par définition à toute union.
Je
l’ai dit souvent : l’Europe des États, rêvée par de Gaulle, ce serait
695
ire au statut des sujets d’un État-nation, et que
je
nomme : pluralité des allégeances. Cela veut dire : relever d’une plu
696
. Un exemple personnel suffira pour l’illustrer :
je
suis Neuchâtelois de naissance, ce qui veut dire que la communauté et
697
squ’en 1848, date de l’adhésion à la Suisse) sont
ma
patrie. En tant que citoyen du canton de Neuchâtel, je suis Suisse de
698
trie. En tant que citoyen du canton de Neuchâtel,
je
suis Suisse de nationalité. En tant qu’écrivain, je relève de la fran
699
suis Suisse de nationalité. En tant qu’écrivain,
je
relève de la francophonie, qui couvre deux tiers de la France, un tie
700
erritoires différents. Du point de vue religieux,
je
relève du protestantisme, ensemble mondial. (Ce serait pareil si j’ét
701
stantisme, ensemble mondial. (Ce serait pareil si
j’
étais catholique, ou juif, ou communiste.) Enfin, j’appartiens à une v
702
étais catholique, ou juif, ou communiste.) Enfin,
j’
appartiens à une vingtaine de sociétés locales, régionales, continenta
703
cales, régionales, continentales et mondiales, et
je
sais très bien auxquelles je cotise. Cette pluralité d’allégeances ne
704
les et mondiales, et je sais très bien auxquelles
je
cotise. Cette pluralité d’allégeances ne me pose aucun problème ni th
705
elles je cotise. Cette pluralité d’allégeances ne
me
pose aucun problème ni théorique ni pratique. Si maintenant un fou ve
706
héorique ni pratique. Si maintenant un fou venait
me
dire : toutes tes allégeances doivent désormais relever d’un seul pou
707
ir central qui les limitera à un seul territoire,
je
crierais au fou, — et ce fou serait Napoléon, Hitler, ou n’importe le
708
t donc la condition du régime fédéraliste tel que
je
le conçois — seul possible pour l’Europe réelle — et c’est aussi cond
709
at-nation, nomme hérésie. La solution fédéraliste
m’
apparaît donc comme la transposition en termes d’aménagement de la cit
710
et Charlotte Corday. Cela ne vous fait pas peur ?
J’
ai toujours en tête une recommandation d’un de mes oncles : « Plus l’a
711
J’ai toujours en tête une recommandation d’un de
mes
oncles : « Plus l’ancêtre dont on se réclame est éloigné, moins on a
712
ugemont une lettre de reconnaissance de noblesse.
Je
suis le quatorzième du nom. Point de militaires chez vous. Pourquoi ?
713
e militaires chez vous. Pourquoi ? Cela distingue
ma
famille de beaucoup d’autres en Suisse. C’est une lignée de conseille
714
sentez-vous seulement Suisse ? Au point de vue de
ma
communauté politique, je me sens complètement Suisse. Vous habitez en
715
sse ? Au point de vue de ma communauté politique,
je
me sens complètement Suisse. Vous habitez en France. J’ai besoin d’êt
716
? Au point de vue de ma communauté politique, je
me
sens complètement Suisse. Vous habitez en France. J’ai besoin d’être
717
sens complètement Suisse. Vous habitez en France.
J’
ai besoin d’être à cheval sur une frontière. Je sens les choses frança
718
e. J’ai besoin d’être à cheval sur une frontière.
Je
sens les choses françaises comme si j’étais Français et je suis compl
719
frontière. Je sens les choses françaises comme si
j’
étais Français et je suis complètement Suisse. Est-ce que l’idée de l’
720
es choses françaises comme si j’étais Français et
je
suis complètement Suisse. Est-ce que l’idée de l’unité de l’Europe vo
721
Votre vie intellectuelle commence à Paris ? Oui,
j’
y ai publié mes premiers livres. La France ou la Suisse ? Je me sentir
722
ellectuelle commence à Paris ? Oui, j’y ai publié
mes
premiers livres. La France ou la Suisse ? Je me sentirais très mal si
723
lié mes premiers livres. La France ou la Suisse ?
Je
me sentirais très mal si j’étais limité à l’une ou à l’autre. « Comme
724
mes premiers livres. La France ou la Suisse ? Je
me
sentirais très mal si j’étais limité à l’une ou à l’autre. « Comment
725
France ou la Suisse ? Je me sentirais très mal si
j’
étais limité à l’une ou à l’autre. « Comment ne pas croire à l’influen
726
d’où l’on vient. Cela ne dicte pas une carrière.
Je
descends des troubadours — c’est sans doute pourquoi les châteaux en
727
c’est sans doute pourquoi les châteaux en ruines
me
touchent tant, mais je suis tourné vers l’avenir. Avez-vous songé à l
728
uoi les châteaux en ruines me touchent tant, mais
je
suis tourné vers l’avenir. Avez-vous songé à l’Église ? Quand je suis
729
vers l’avenir. Avez-vous songé à l’Église ? Quand
je
suis parti pour Vienne, j’étais très loin de l’Église. Je voulais dev
730
ngé à l’Église ? Quand je suis parti pour Vienne,
j’
étais très loin de l’Église. Je voulais devenir chimiste quand j’étais
731
parti pour Vienne, j’étais très loin de l’Église.
Je
voulais devenir chimiste quand j’étais jeune, mais quand j’ai pris de
732
in de l’Église. Je voulais devenir chimiste quand
j’
étais jeune, mais quand j’ai pris des leçons j’ai compris qu’il ne sau
733
devenir chimiste quand j’étais jeune, mais quand
j’
ai pris des leçons j’ai compris qu’il ne saurait plus en être question
734
nd j’étais jeune, mais quand j’ai pris des leçons
j’
ai compris qu’il ne saurait plus en être question. Vous savez, quand l
735
us savez, quand la passion est devenue un devoir…
j’
ai compris que j’étais écrivain. J’avais lu un Paradis à l’ombre des
736
a passion est devenue un devoir… j’ai compris que
j’
étais écrivain. J’avais lu un Paradis à l’ombre des épées, de Monther
737
nue un devoir… j’ai compris que j’étais écrivain.
J’
avais lu un Paradis à l’ombre des épées, de Montherlant. J’ai écrit u
738
un Paradis à l’ombre des épées, de Montherlant.
J’
ai écrit une critique que j’ai envoyée à une revue à Genève qui l’a pu
739
pées, de Montherlant. J’ai écrit une critique que
j’
ai envoyée à une revue à Genève qui l’a publiée. Je n’en étais pas plu
740
’ai envoyée à une revue à Genève qui l’a publiée.
Je
n’en étais pas plus fier pour ça : je me voulais poète et seulement p
741
’a publiée. Je n’en étais pas plus fier pour ça :
je
me voulais poète et seulement poète. L’hérédité des dons ? Je n’y cro
742
publiée. Je n’en étais pas plus fier pour ça : je
me
voulais poète et seulement poète. L’hérédité des dons ? Je n’y crois
743
s poète et seulement poète. L’hérédité des dons ?
Je
n’y crois pas. Disons que j’ai eu un milieu favorable. Dans la famill
744
’hérédité des dons ? Je n’y crois pas. Disons que
j’
ai eu un milieu favorable. Dans la famille de ma mère, il y avait des
745
e j’ai eu un milieu favorable. Dans la famille de
ma
mère, il y avait des artistes. Ma mère faisait des pastels. L’hérédit
746
s la famille de ma mère, il y avait des artistes.
Ma
mère faisait des pastels. L’hérédité des dons, cela n’existe pas. Dis
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é pour les socialistes — ce qui faisait scandale.
J’
ai été très influencé par lui jusqu’à l’âge de 18 ans. De votre mère ?
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De votre mère ? À 97 ans, elle est comme un fil.
Je
lui ressemble physiquement. Elle vient d’une famille de bons vivants
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ille de bons vivants avec des tendances artistes.
Mon
père et ma mère : deux tempéraments fort différents. Vous qui vivez d
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vivants avec des tendances artistes. Mon père et
ma
mère : deux tempéraments fort différents. Vous qui vivez dans l’aveni
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e est devenue un choix, pas une nécessité. Ce que
je
trouve assez bien. Il y avait une homogénéité dans les familles d’aut
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ansformera. En ce qui vous concerne ? À partir de
ma
génération, on faisait autre chose que son père. Vos enfants ? Mon fi
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n faisait autre chose que son père. Vos enfants ?
Mon
fils est psychologue, ma fille assistante du maître de conférences à
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son père. Vos enfants ? Mon fils est psychologue,
ma
fille assistante du maître de conférences à l’Université de Paris. C’
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Paris. C’est amusant, car elle est enseignante et
moi
je suis membre du conseil dans la même université. Nous nous retrouvo
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s. C’est amusant, car elle est enseignante et moi
je
suis membre du conseil dans la même université. Nous nous retrouvons
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n décide ? Au nom de quoi ? Que veut-on dire ? On
me
répond qu’il s’agit de « découper » des régions qui soient assez gran
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itives » avec quoi ? — Avec les Länder allemands,
me
dit-on. Encore faudrait-il savoir lesquels : la Bavière, 71 000 km2 e
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France, lequel des deux États a-t-il la taille ?
Je
vais vous le dire : c’est le plus petit. En tant qu’État souverain, u
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es d’autres âges. De la création des régions que
je
viens de définir, ce n’est pas plus Genève qui bénéficiera que le pay
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-2 décembre 1973)bg bh « Grâce aux Arabes, que
je
remercie officiellement, nous savons tous maintenant que l’Europe est
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ivent s’élaborer en même temps, l’un par l’autre.
Mon
utopie, c’est qu’à la longue, ces réalités s’avéreront plus solides q
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en désuétude. La région ? Pouvez-vous préciser ?
Je
dirai que c’est une structure de participation civique à base de synd
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cipation civique à base de syndicats de communes.
Je
me garde bien de la découper dans le terrain. On nous a trop appris,
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ation civique à base de syndicats de communes. Je
me
garde bien de la découper dans le terrain. On nous a trop appris, à l
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’Institut universitaire d’études européennes, que
je
dirige, nous étudions le cas de la région lémano-alpine. Nous avons d
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respondent plus à grand-chose aujourd’hui. Ce que
je
souhaite, personnellement, c’est la renaissance d’assemblées politiqu
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certains intérêts nationaux, mais, pour revenir à
mon
sujet, il me semble que rien ne les empêche de chercher à s’adapter a
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êts nationaux, mais, pour revenir à mon sujet, il
me
semble que rien ne les empêche de chercher à s’adapter aux réalités r
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l’avocat du diable, on peut penser que… Notez que
je
ne me fais pas l’avocat des sociétés multinationales ! … sans se fair
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at du diable, on peut penser que… Notez que je ne
me
fais pas l’avocat des sociétés multinationales ! … sans se faire l’av
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es équilibres sociaux et naturels d’un pays. Mais
je
le répète, rien ne les empêche d’accorder leur profit à celui d’une r
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certaines le font. Disons, pour résumer beaucoup
ma
position, que dans un monde qui serait structuré par régions, mais da
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Franche-Comté voisine. Alors, que proposez-vous ?
Je
propose d’éveiller la conscience civique des enfants en attirant leur
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s actuels réels. Une petite phrase de Simone Weil
m’
a frappé : « L’orgueil national est loin de la vie quotidienne. » Je s
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rgueil national est loin de la vie quotidienne. »
Je
suis convaincu qu’en partant de ce que l’enfant peut connaître le mie
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as limiter volontairement l’horizon de l’enfant ?
Je
dis qu’il faut partir des réalités immédiates — pour aller plus loin