1 La place du livre dans l’information de l’homme moderne (1970)a Mesdames et Messieurs, à ma stupéfaction,

2 Il y a tout de même un exemple, c’est la manière de psalmodier la table des multiplications à l’école primaire qui m’a to

3 que la liturgie n’est pas seulement l’expression d’ une émotion mais un moyen mnémotechnique dans certains cas. Ceci dit,

4 on en pensant au livre et au caractère spécifique de l’information que l’on peut avoir par un livre : je le prends dans so

5 i est très proche de formation. Il y a des livres de pure information, comme on dit, d’information courante, qui sont les

6 y a des livres de pure information, comme on dit, d’ information courante, qui sont les dictionnaires, les encyclopédies, q

7 aires, les encyclopédies, qui sont des réservoirs de recettes, de noms, de dates, des « data banks » comme on dit aujourd’

8 cyclopédies, qui sont des réservoirs de recettes, de noms, de dates, des « data banks » comme on dit aujourd’hui. Je ne sa

9 es, qui sont des réservoirs de recettes, de noms, de dates, des « data banks » comme on dit aujourd’hui. Je ne sais pas la

10 . Je ne sais pas la traduction française. Banques d’ informations. Mais le livre, au sens noble du mot, au sens de la Renai

11 ons. Mais le livre, au sens noble du mot, au sens de la Renaissance, le livre d’humaniste, le livre de philosophe, le livr

12 noble du mot, au sens de la Renaissance, le livre d’ humaniste, le livre de philosophe, le livre d’essayiste, de romancier,

13 de la Renaissance, le livre d’humaniste, le livre de philosophe, le livre d’essayiste, de romancier, le livre de poète, je

14 vre d’humaniste, le livre de philosophe, le livre d’ essayiste, de romancier, le livre de poète, je le vois par contraste a

15 te, le livre de philosophe, le livre d’essayiste, de romancier, le livre de poète, je le vois par contraste avec les moyen

16 phe, le livre d’essayiste, de romancier, le livre de poète, je le vois par contraste avec les moyens audiovisuels comme un

17 ste avec les moyens audiovisuels comme une espèce d’ appareil très simple, aussi simple dans ses éléments constitutifs que

18 s que les transistors qui sont pour moi le comble de l’élégance en technique, ce petit truc tout simple… Donc des appareil

19 petit truc tout simple… Donc des appareils formés d’ éléments extrêmement simples à usages complexes et nombreux, dont le p

20 complexes et nombreux, dont le pouvoir spécifique d’ information consiste en ceci que, quand vous lisez un livre, vous avez

21 nte, vous organise, et qualifie un certain nombre de signes et de significations. Je vois le livre donc comme un appareil

22 anise, et qualifie un certain nombre de signes et de significations. Je vois le livre donc comme un appareil formé de mot

23 s. Je vois le livre donc comme un appareil formé de mots et de phrases, disposés de telle sorte que le sens spécifique qu

24 le livre donc comme un appareil formé de mots et de phrases, disposés de telle sorte que le sens spécifique que l’auteur

25 un appareil formé de mots et de phrases, disposés de telle sorte que le sens spécifique que l’auteur veut faire passer ne

26 passer ne passe que dans la mesure où ce système de mots et de phrases oriente l’esprit du lecteur de la manière la plus

27 passe que dans la mesure où ce système de mots et de phrases oriente l’esprit du lecteur de la manière la plus précise dan

28 de mots et de phrases oriente l’esprit du lecteur de la manière la plus précise dans une seule bonne direction sur les mil

29 possibles. Alors, qu’est-ce qui produit cet effet d’ orientation, d’organisation de l’information et de qualification ? C’e

30 s, qu’est-ce qui produit cet effet d’orientation, d’ organisation de l’information et de qualification ? C’est quelquefois

31 i produit cet effet d’orientation, d’organisation de l’information et de qualification ? C’est quelquefois le style ; dans

32 d’orientation, d’organisation de l’information et de qualification ? C’est quelquefois le style ; dans ce cas, c’est le st

33 tionne donc comme orientateur, comme polarisateur de l’esprit et pas seulement de l’esprit mais aussi de la sensibilité et

34 , comme polarisateur de l’esprit et pas seulement de l’esprit mais aussi de la sensibilité et du sentiment. Quelquefois, c

35 l’esprit et pas seulement de l’esprit mais aussi de la sensibilité et du sentiment. Quelquefois, c’est l’agencement des a

36 e romanesque. Mais toujours un livre digne du nom de livre, est un appareil qui fonctionne de cette manière-là, opère, tra

37 e du nom de livre, est un appareil qui fonctionne de cette manière-là, opère, transmet son message, est lui-même un messag

38 é dans la mémoire individuelle, dans cette banque d’ informations qu’est la mémoire individuelle. Donc il semble que la fon

39 ue la fonction essentielle du livre, si on laisse de côté les encyclopédies, les dictionnaires, et les autres recueils de

40 pédies, les dictionnaires, et les autres recueils de références ou répertoires, c’est de faire passer un message unique et

41 tres recueils de références ou répertoires, c’est de faire passer un message unique et qui est global, qui tient à tout le

42 , alors qu’il peut y avoir un nombre considérable de moyens de faire passer une même information objective non qualifiée,

43 ’il peut y avoir un nombre considérable de moyens de faire passer une même information objective non qualifiée, non organi

44 formation objective non qualifiée, non organisée, de la formuler et de la transmettre. J’entends par information objective

45 e non qualifiée, non organisée, de la formuler et de la transmettre. J’entends par information objective un nombre, un nom

46 rocédé, un fait, un accident. Le livre c’est donc de l’information formatrice. C’est un organisme formateur indépendamment

47 s en lisant un livre, nous faisons une expérience de transformation qui nous transforme nous-mêmes, nous digérons ce qu’il

48 qu’en revanche et en retour le livre nous digère d’ une certaine manière. Quand nous disons que nous sommes « absorbés » d

49 , et cela me fait penser à ce passage très fameux de l’Apocalypse où l’auteur entend une voix du ciel qui lui dit : « Va a

50 end une voix du ciel qui lui dit : « Va au-devant de cet ange et prends ce petit livre ouvert qu’il a dans les mains, et q

51 prophètes. Mais vous voyez qu’il y a cette espèce d’ interaction qui indique bien la valeur transformatrice qui existe dans

52 ister pour que l’on ne croie pas, puisqu’on parle d’ information, que le livre est une manière surannée d’informer les gens

53 nformation, que le livre est une manière surannée d’ informer les gens. La radio, la télévision ou de bons dictionnaires po

54 e d’informer les gens. La radio, la télévision ou de bons dictionnaires pourraient faire plus vite ? Peut-être… Si vous me

55 donnez une minute, je voudrais vous lire une page de Nietzsche que j’ai retrouvée ce matin même, sur « la lente lecture ».

56 rès, très vite ; il absorbait, je ne sais combien de milliers de mots à la minute. Alors je crois que toute la propagande

57 te ; il absorbait, je ne sais combien de milliers de mots à la minute. Alors je crois que toute la propagande en faveur du

58 r la spécificité du livre, doit être dans le sens de ces quelques lignes de Nietzsche que je vais vous lire. C’est dans la

59 re, doit être dans le sens de ces quelques lignes de Nietzsche que je vais vous lire. C’est dans la préface de son recueil

60 sche que je vais vous lire. C’est dans la préface de son recueil Aurore. « Philologue », dit-il, et en disant cela il veut

61 veut dire, et il faut traduire ça ainsi : amateur de lettres, de langage, amateur d’humanisme. Philologue, cela veut dire

62 t il faut traduire ça ainsi : amateur de lettres, de langage, amateur d’humanisme. Philologue, cela veut dire maître de l

63 a ainsi : amateur de lettres, de langage, amateur d’ humanisme. Philologue, cela veut dire maître de la lente lecture. On

64 r d’humanisme. Philologue, cela veut dire maître de la lente lecture. On finit même par écrire lentement. Ne rien écrire

65 n finit même par écrire lentement. Ne rien écrire d’ autre que ce qui pourrait désespérer l’espèce d’homme qui se hâte ! [v

66 e d’autre que ce qui pourrait désespérer l’espèce d’ homme qui se hâte ! [voilà pour l’annonce que je vous citais]. Car la

67 is]. Car la philologie est cet art vénérable qui, de ses admirateurs, exige avant tout une chose : se tenir à l’écart, pre

68 u temps, devenir silencieux, devenir lent. Un art d’ orfèvrerie, une maîtrise d’orfèvre. C’est justement à cause de cela qu

69 , devenir lent. Un art d’orfèvrerie, une maîtrise d’ orfèvre. C’est justement à cause de cela qu’il est aujourd’hui plus né

70 plus au milieu d’un âge du travail, je veux dire de la précipitation, de la hâte indécente qui s’échauffe et qui veut vit

71 âge du travail, je veux dire de la précipitation, de la hâte indécente qui s’échauffe et qui veut vite en finir de toutes

72 ndécente qui s’échauffe et qui veut vite en finir de toutes choses, même d’un livre fût-il ancien ou nouveau. Il enseigne

73 et qui veut vite en finir de toutes choses, même d’ un livre fût-il ancien ou nouveau. Il enseigne à bien lire, c’est-à-di

74 ntenant répondre, à son tour, à un certain nombre de questions posées. Eh bien, ce ne sont pas les sujets qui manquent, ce

75 ui manquent, ce qui est difficile, c’est le temps de lente lecture pour bien se pénétrer des questions. Je disais que les

76 ais que les sujets ne manquent pas, mais le temps de les lire lentement me manque à cette tribune, et je devrais manger le

77 après les autres, et puis vous demander le temps de les digérer. J’essaierai de grouper plusieurs de ces questions qui s

78 us demander le temps de les digérer. J’essaierai de grouper plusieurs de ces questions qui se réfèrent à l’audiovisuel, a

79 de les digérer. J’essaierai de grouper plusieurs de ces questions qui se réfèrent à l’audiovisuel, aux rapports entre l’a

80 ros avantage sur la télévision que : « les moyens de communication de masse — écrit-on — sont en fait de plus en plus cent

81 la télévision que : « les moyens de communication de masse — écrit-on — sont en fait de plus en plus centralisés, contrôlé

82 ontrôlés, par un nombre de plus en plus restreint d’ hommes ou d’intérêts. Le dissentiment dans ce qu’il y a de plus scanda

83 r un nombre de plus en plus restreint d’hommes ou d’ intérêts. Le dissentiment dans ce qu’il y a de plus scandaleux, et non

84 u’il y a de plus scandaleux, et non pas seulement de pittoresque et de folklorique, ne rencontre-t-il pas plus de difficul

85 candaleux, et non pas seulement de pittoresque et de folklorique, ne rencontre-t-il pas plus de difficultés à s’exprimer q

86 que et de folklorique, ne rencontre-t-il pas plus de difficultés à s’exprimer qu’au temps où il suffisait d’une très modes

87 ficultés à s’exprimer qu’au temps où il suffisait d’ une très modeste mise de fonds pour publier un livre ? » Cette critiqu

88 ’au temps où il suffisait d’une très modeste mise de fonds pour publier un livre ? » Cette critique-là s’adresse essentiel

89 ’est-à-dire qui peut être comme le livre un agent d’ individualisme, d’individualisation en face de cet agent collectivisan

90 ut être comme le livre un agent d’individualisme, d’ individualisation en face de cet agent collectivisant qu’est la télévi

91 a télévision recrée le tribalisme, les sentiments de tribu, d’autant plus fortement aujourd’hui qu’elle ne dépasse guère u

92 on recrée le tribalisme, les sentiments de tribu, d’ autant plus fortement aujourd’hui qu’elle ne dépasse guère un certain

93 ement au livre et à l’imprimé qui, eux, n’ont pas de limite en général. La télévision, c’est quelque chose qu’on vous impo

94 e qu’on vous impose ; il y a un très petit nombre de programmes, vous n’avez aucun choix. C’est fait pour un certain ensem

95 ain ensemble, une certaine tribu, une partie même de la nation, si la nation est grande. Vous n’avez aucun moyen de répliq

96 si la nation est grande. Vous n’avez aucun moyen de répliquer. Vous pouvez protester quelquefois — moi ça m’arrive souven

97 uefois — moi ça m’arrive souvent devant mon poste de télévision — mais c’est une protestation absolument vaine, sans aucun

98 lez voir. Je cherchais les moyens, avec un groupe de gens, de contre-battre les effets de certaines télévisions, notamment

99 Je cherchais les moyens, avec un groupe de gens, de contre-battre les effets de certaines télévisions, notamment pour int

100 ec un groupe de gens, de contre-battre les effets de certaines télévisions, notamment pour introduire un angle de vision p

101 s télévisions, notamment pour introduire un angle de vision plus européen dans les programmes. Et alors, on se disait : « 

102 faire ? Est-ce qu’il faut créer un poste européen de télévision ? » Ça sera très difficile d’abord de le créer, et de le f

103 de télévision ? » Ça sera très difficile d’abord de le créer, et de le financer, et ensuite de transmettre cela assez loi

104  » Ça sera très difficile d’abord de le créer, et de le financer, et ensuite de transmettre cela assez loin, parce qu’il f

105 ’abord de le créer, et de le financer, et ensuite de transmettre cela assez loin, parce qu’il faut des autorisations de ce

106 la assez loin, parce qu’il faut des autorisations de certains pays et de certains gouvernements. Alors, quelqu’un m’a fait

107 qu’il faut des autorisations de certains pays et de certains gouvernements. Alors, quelqu’un m’a fait observer qu’on pouv

108 peut-être s’en tirer pour le moment en diffusant de petits films que l’on peut faire passer sur la télévision, sur son po

109 s pouvez choisir votre cassette ; vous n’avez pas d’ actualité immédiate, vous ne l’avez pas non plus dans le livre. Il fau

110 i les deux choses. Je pense que c’est une affaire d’ entraînement, de goût personnel, de possibilités différentes. Quelqu’

111 s. Je pense que c’est une affaire d’entraînement, de goût personnel, de possibilités différentes. Quelqu’un me demande « 

112 st une affaire d’entraînement, de goût personnel, de possibilités différentes. Quelqu’un me demande « si le livre étant t

113 elqu’un me demande « si le livre étant tributaire de la langue, il n’y aurait pas lieu de développer la recherche d’une la

114 t tributaire de la langue, il n’y aurait pas lieu de développer la recherche d’une langue internationale ? L’espéranto, pa

115 il n’y aurait pas lieu de développer la recherche d’ une langue internationale ? L’espéranto, par exemple, ce qu’on a essay

116 ale ? L’espéranto, par exemple, ce qu’on a essayé de faire jusqu’ici mais sans grand succès ? » Alors là, je crois pouvoir

117 tre deux sens du mot « information ». S’il s’agit d’ informations courantes, que vous pourrez aussi bien trouver dans un di

118 information objective, détachée, le petit élément d’ information. Mais si vous voulez de l’information au sens de formation

119 petit élément d’information. Mais si vous voulez de l’information au sens de formation, sur lequel j’ai insisté tout à l’

120 ion. Mais si vous voulez de l’information au sens de formation, sur lequel j’ai insisté tout à l’heure, alors là, la langu

121 ne le fera jamais. La langue française, si on est de langue française, ça vous apporte plus que de l’information objective

122 est de langue française, ça vous apporte plus que de l’information objective. Ça vous apporte une orientation de la sensib

123 mation objective. Ça vous apporte une orientation de la sensibilité et du sentiment d’une manière que vous ne pouvez pas d

124 une orientation de la sensibilité et du sentiment d’ une manière que vous ne pouvez pas dissocier de l’information objectiv

125 nt d’une manière que vous ne pouvez pas dissocier de l’information objective qu’il y a dans le livre ; c’est quelque chose

126 t quelque chose que vous ne pouvez jamais espérer d’ une langue synthétique comme l’espéranto. J’ai pris cette question par

127 J’ai pris cette question parce qu’elle me permet de préciser ce que j’appellerais « information » tout à l’heure. Quelqu’

128 , mais encore faudrait-il que l’ouvrier, la femme de ménage, l’employé de bureau, le contremaître, aient assez de temps. E

129 t-il que l’ouvrier, la femme de ménage, l’employé de bureau, le contremaître, aient assez de temps. Est-ce que, face au ry

130 l’employé de bureau, le contremaître, aient assez de temps. Est-ce que, face au rythme de la vie actuelle auquel nous somm

131 aient assez de temps. Est-ce que, face au rythme de la vie actuelle auquel nous sommes tous soumis, il est encore possibl

132 assez de temps. Est-ce que, face au rythme de la vie actuelle auquel nous sommes tous soumis, il est encore possible de se

133 l nous sommes tous soumis, il est encore possible de se ménager des moments de lente lecture ? » Première remarque : ce ne

134 il est encore possible de se ménager des moments de lente lecture ? » Première remarque : ce ne sont pas les gens qui ont

135 emarque : ce ne sont pas les gens qui ont le plus de temps qui lisent le mieux, ni même qui lisent le plus. Je connais des

136 s gens qui sont tout à fait dans le style employé de bureau, femme de ménage, contremaître, qui sont d’énormes lecteurs. I

137 out à fait dans le style employé de bureau, femme de ménage, contremaître, qui sont d’énormes lecteurs. Ils trouvent toujo

138 e bureau, femme de ménage, contremaître, qui sont d’ énormes lecteurs. Ils trouvent toujours le temps nécessaire, aux dépen

139 t dommage, il faudrait arriver à réduire ce temps de travail ; c’est au fond tout l’effort de la technique actuelle qui va

140 ce temps de travail ; c’est au fond tout l’effort de la technique actuelle qui va là absolument dans le sens du livre, c’e

141 ns du livre, c’est-à-dire qu’il diminue les temps de travail et augmente les temps de loisir. Alors, je voudrais que, pend

142 iminue les temps de travail et augmente les temps de loisir. Alors, je voudrais que, pendant ces temps de loisir, après la

143 loisir. Alors, je voudrais que, pendant ces temps de loisir, après la très rapide lecture de tri, comme dirait M. le Lionn

144 ces temps de loisir, après la très rapide lecture de tri, comme dirait M. le Lionnais, on mette de côté un certain nombre

145 ure de tri, comme dirait M. le Lionnais, on mette de côté un certain nombre de livres, qu’on relira pendant toute sa vie,

146 . le Lionnais, on mette de côté un certain nombre de livres, qu’on relira pendant toute sa vie, dans lesquels on découvrir

147 n nombre de livres, qu’on relira pendant toute sa vie , dans lesquels on découvrira toujours plus de choses. Je crois qu’on

148 sa vie, dans lesquels on découvrira toujours plus de choses. Je crois qu’on va vers une époque où le loisir va devenir le

149 ers une époque où le loisir va devenir le sérieux de la vie, le loisir et la culture. Jusqu’à présent, le sérieux de la vi

150 e époque où le loisir va devenir le sérieux de la vie , le loisir et la culture. Jusqu’à présent, le sérieux de la vie c’est

151 loisir et la culture. Jusqu’à présent, le sérieux de la vie c’est, bien entendu, le temps qu’on consacre au travail, à gag

152 et la culture. Jusqu’à présent, le sérieux de la vie c’est, bien entendu, le temps qu’on consacre au travail, à gagner sa

153 , le temps qu’on consacre au travail, à gagner sa vie . Et puis ensuite, on se repose comme on peut, on s’amuse un peu. Il s

154 e depuis à peu près deux-cents ans que le sérieux de la vie, c’est le temps du travail. C’est en train de changer. L’accen

155 is à peu près deux-cents ans que le sérieux de la vie , c’est le temps du travail. C’est en train de changer. L’accent est e

156 est en train de passer sur le temps des loisirs, de la culture, parce que, justement, le nombre d’heures de travail dimin

157 s, de la culture, parce que, justement, le nombre d’ heures de travail diminue constamment ; il pourra diminuer beaucoup pl

158 culture, parce que, justement, le nombre d’heures de travail diminue constamment ; il pourra diminuer beaucoup plus rapide

159 t pas à mon voisin, que j’irai apprendre ce genre de choses. Je pense que nous allons maintenant vers un état de la sociét

160 Je pense que nous allons maintenant vers un état de la société où, tout doucement, l’aiguille va passer du travail au loi

161 vail au loisir et ce sera pour le loisir, sérieux de la vie, qu’on travaillera un petit peu, pour s’assurer ce qu’il faut,

162 u loisir et ce sera pour le loisir, sérieux de la vie , qu’on travaillera un petit peu, pour s’assurer ce qu’il faut, pour a

163 pour s’assurer ce qu’il faut, pour avoir le temps de lire lentement. Quelqu’un demandait — c’était à M. Louis Armand d’ail

164 evue » et faisait observer « qu’on lit énormément de revues en France, ce qui pourrait compenser les chiffres un peu pessi

165 s bien que les revues sont faites en bonne partie de chapitres de livres publiés d’avance ou de critiques de livres. Enfin

166 s revues sont faites en bonne partie de chapitres de livres publiés d’avance ou de critiques de livres. Enfin, la revue, ç

167 es en bonne partie de chapitres de livres publiés d’ avance ou de critiques de livres. Enfin, la revue, ça tourne autour du

168 partie de chapitres de livres publiés d’avance ou de critiques de livres. Enfin, la revue, ça tourne autour du livre, c’es

169 pitres de livres publiés d’avance ou de critiques de livres. Enfin, la revue, ça tourne autour du livre, c’est une anticha

170 du livre ou c’est le lieu où l’on parle du livre d’ une manière un peu plus prolongée. Je ne voudrais pas prendre plus de

171 u plus prolongée. Je ne voudrais pas prendre plus de temps, M. Le Lionnais a encore beaucoup de choses à dire sans doute.

172 e choses à dire sans doute. a. Rougemont Denis de , « [Interventions] La place du livre dans l’information de l’homme mo

173 terventions] La place du livre dans l’information de l’homme moderne », Premier festival international du livre de Nice :

174 oderne », Premier festival international du livre de Nice : colloques 1969, Nice, Festival international du livre, 1970, p

175 onales et locales. Cela veut dire qu’il n’y a pas d’ autre solution à la fois désirable et praticable que l’union dans la d

176 oncé, des hurlements éclatent sur tous les bancs, de la gauche à la droite et du Marais à la Montagne. Car pour les uns, f

177 nationales, et pour les autres, il signifie refus de tout pouvoir central, repli sur soi, voire séparatisme, aux dépens de

178 cule qui bloque depuis vingt ans tous les efforts d’ union, parce qu’il paralyse la pensée politique non seulement des nati

179 des nationalistes et des jacobins en colère, mais de beaucoup des partisans sincères d’une « union plus étroite de nos pay

180 n colère, mais de beaucoup des partisans sincères d’ une « union plus étroite de nos pays », comme disaient les traités de

181 des partisans sincères d’une « union plus étroite de nos pays », comme disaient les traités de naguère. (Plus étroite que

182 étroite de nos pays », comme disaient les traités de naguère. (Plus étroite que quelle autre, antérieure, on se le demande

183 nctionnaire tenait le fédéralisme pour un système d’ unification intégrale, sans respect pour la diversité des pays membres

184 t belge ait pu écrire en ce temps-là (il a changé d’ avis depuis) : Ce n’est pas dans le fédéralisme, ce n’est pas en se re

185 ou en français. Et l’on a pu entendre le recteur d’ une de nos universités cantonales condamner publiquement le principe m

186 français. Et l’on a pu entendre le recteur d’une de nos universités cantonales condamner publiquement le principe même d’

187 antonales condamner publiquement le principe même d’ une subvention fédérale à sa haute école, parce qu’ici, disait-il, nou

188 e prendrai mon dernier exemple dans cette dépêche de Londres publiée par un quotidien genevois le 30 janvier : M. Schuman

189 : soutien à la candidature britannique en échange d’ une opposition commune au fédéralisme, ce qu’il a traduit en ces terme

190 evoir à l’égard de l’Europe, le moyen le plus sûr de contribuer à son unité, c’est-à-dire avant tout à la définition de se

191 on unité, c’est-à-dire avant tout à la définition de ses objectifs communs, est de préserver leur personnalité individuell

192 out à la définition de ses objectifs communs, est de préserver leur personnalité individuelle en tant que nation. » Je m’

193 ann n’était nullement censé « traduire » un refus de la formule fédérale — bien au contraire ! Il est clair que l’erreur e

194 Un système bon pour les sauvages Dans l’espoir de sortir de tant de confusions, le francophone recourt à son Littré, dé

195 bon pour les sauvages Dans l’espoir de sortir de tant de confusions, le francophone recourt à son Littré, dépositaire

196 dant la révolution, projet attribué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédératio

197 ibué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédération de petits États. Aux jacobins

198 ale et de transformer la France en une fédération de petits États. Aux jacobins on agita gravement la question du fédérali

199 le fureurs contre les girondins. Thiers, Histoire de la Révolution. La cause est entendue : le fédéralisme est un système

200 le fédéralisme interne comme visant à la division de l’État souverain, mais chose curieuse, cela ne l’empêche nullement de

201 mais chose curieuse, cela ne l’empêche nullement de condamner le fédéralisme externe comme visant cette fois-ci à l’intég

202 . Cette deuxième « idée » du fédéralisme, inverse de la première mais non moins fausse, est la plus répandue en Amérique.

203 jectif fédéral évoque d’abord l’autorité centrale de Washington. Fédéral : qui favorise un gouvernement fédéral fort, c’es

204 partagées par les hommes politiques responsables de ces pays. Comme on pourra s’en assurer en lisant les ouvrages de Pier

205 mme on pourra s’en assurer en lisant les ouvrages de Pierre Elliott Trudeau, Premier ministre du Canada1, et de Nelson A.

206 Elliott Trudeau, Premier ministre du Canada1, et de Nelson A. Rockefeller, gouverneur de l’État de New York2. Le parad

207 Canada1, et de Nelson A. Rockefeller, gouverneur de l’État de New York2. Le paradoxe fondamental Les essais de P. E

208 w York2. Le paradoxe fondamental Les essais de P. E. Trudeau illustrent tous le paradoxe fondamental du fédéralisme 

209 autonomies mais pour les sauvegarder, car, faute d’ union, elles seraient vite absorbées par une puissance voisine. Le féd

210 yaient dans la fédération européenne l’imposition d’ un volapük universel. Mais à vrai dire, c’est l’idée même d’un pacte n

211 ük universel. Mais à vrai dire, c’est l’idée même d’ un pacte non dénonçable au gré du Prince et des seuls intérêts de son

212 dénonçable au gré du Prince et des seuls intérêts de son État qui demeure inacceptable aux vrais croyants de la religion n

213 État qui demeure inacceptable aux vrais croyants de la religion nationaliste. Quant à Nelson Rockefeller, il écrit : Pour

214 ur moi, l’idée fédéraliste suppose une conception d’ ensemble de la vie politique selon laquelle un peuple souverain délègu

215 dée fédéraliste suppose une conception d’ensemble de la vie politique selon laquelle un peuple souverain délègue, en vue d

216 déraliste suppose une conception d’ensemble de la vie politique selon laquelle un peuple souverain délègue, en vue de sa sa

217 verain délègue, en vue de sa sauvegarde, une part de sa souveraineté à une organisation politique ne possédant pas un cent

218 ation politique ne possédant pas un centre unique de pouvoir, d’impulsion et de création, mais plusieurs. Il est frappant

219 que ne possédant pas un centre unique de pouvoir, d’ impulsion et de création, mais plusieurs. Il est frappant de retrouve

220 t pas un centre unique de pouvoir, d’impulsion et de création, mais plusieurs. Il est frappant de retrouver sous la plume

221 et de création, mais plusieurs. Il est frappant de retrouver sous la plume du gouverneur républicain d’un État typiqueme

222 retrouver sous la plume du gouverneur républicain d’ un État typiquement capitaliste des phrases que l’on croirait tirées d

223 es que l’on croirait tirées du Principe fédératif de Proudhon sur la souveraineté partagée, sur la distribution des pouvoi

224 nes et des régions autonomes), enfin, sur le rôle d’ impulsion réservé au pouvoir fédéral en vue non de substituer aux gouv

225 d’impulsion réservé au pouvoir fédéral en vue non de substituer aux gouvernements d’État mais de les aider à résoudre leur

226 édéral en vue non de substituer aux gouvernements d’ État mais de les aider à résoudre leurs problèmes de la façon qui conv

227 e non de substituer aux gouvernements d’État mais de les aider à résoudre leurs problèmes de la façon qui convient. Pour N

228 État mais de les aider à résoudre leurs problèmes de la façon qui convient. Pour Nelson Rockefeller, comme pour Trudeau, c

229 s et des pensées originales et enfin un équilibre de forces qui exclut toute démesure et favorise le libre jeu des initiat

230  cartésiens » ? Il nous faudrait alors désespérer de toute union vivante de l’Europe. Car il n’y a pas d’union et pas de v

231 faudrait alors désespérer de toute union vivante de l’Europe. Car il n’y a pas d’union et pas de vie possibles hors du pa

232 toute union vivante de l’Europe. Car il n’y a pas d’ union et pas de vie possibles hors du paradoxe fondamental de l’Un et

233 ante de l’Europe. Car il n’y a pas d’union et pas de vie possibles hors du paradoxe fondamental de l’Un et du divers, hors

234 e de l’Europe. Car il n’y a pas d’union et pas de vie possibles hors du paradoxe fondamental de l’Un et du divers, hors de

235 pas de vie possibles hors du paradoxe fondamental de l’Un et du divers, hors de la volonté de maintenir ensemble et de pen

236 damental de l’Un et du divers, hors de la volonté de maintenir ensemble et de penser ensemble ces deux termes : dans tous

237 vers, hors de la volonté de maintenir ensemble et de penser ensemble ces deux termes : dans tous les domaines et à tous le

238 es : dans tous les domaines et à tous les niveaux de la vie publique comme de la vie organique, ils sont conditions l’un d

239 ans tous les domaines et à tous les niveaux de la vie publique comme de la vie organique, ils sont conditions l’un de l’aut

240 es et à tous les niveaux de la vie publique comme de la vie organique, ils sont conditions l’un de l’autre. Le refus d’ass

241 à tous les niveaux de la vie publique comme de la vie organique, ils sont conditions l’un de l’autre. Le refus d’assumer le

242 mme de la vie organique, ils sont conditions l’un de l’autre. Le refus d’assumer le paradoxe et l’incapacité de traduire s

243 ue, ils sont conditions l’un de l’autre. Le refus d’ assumer le paradoxe et l’incapacité de traduire ses exigences en terme

244 e. Le refus d’assumer le paradoxe et l’incapacité de traduire ses exigences en termes de politique concrète sont causes de

245 de politique concrète sont causes des confusions de langage que j’ai citées et se révèlent nécessairement en elles. « Sim

246 lent nécessairement en elles. « Simples questions de mots », si l’on veut. Pourtant, il serait fou d’espérer que l’Europe

247 de mots », si l’on veut. Pourtant, il serait fou d’ espérer que l’Europe se fasse un jour dans l’histoire si elle ne se fa

248 ? Apprenons donc à bien parler, voilà le principe de la bonne politique. 1. Le Fédéralisme et la société canadienne, P

249 968. 2. L’Avenir du fédéralisme, Paris, Presses d’ Europe, 1964. Avec une préface d’Alexandre Marc. b. Rougemont Denis

250 , Paris, Presses d’Europe, 1964. Avec une préface d’ Alexandre Marc. b. Rougemont Denis de, « Deux en un, ou le fédéralis

251 ne préface d’Alexandre Marc. b. Rougemont Denis de , « Deux en un, ou le fédéralisme », 30 jours d’Europe, Paris, mars 19

252 s de, « Deux en un, ou le fédéralisme », 30 jours d’ Europe, Paris, mars 1970, p. 22-23.

253 d On assiste depuis quelque temps à un effort de rapprochement entre la CEE et les pays de l’AELE. Pour l’instant, les

254 effort de rapprochement entre la CEE et les pays de l’AELE. Pour l’instant, les principales préoccupations sont d’ordre é

255 ur l’instant, les principales préoccupations sont d’ ordre économique. Pensez-vous, Denis de Rougemont, que c’est là la mei

256 là la meilleure voie pour une intégration future de l’Europe ? Eh bien ! beaucoup de gens se figurent — surtout en Suisse

257 ue c’est la seule voie sérieuse. Que ce qu’il y a de sérieux quand on parle de l’Europe, c’est uniquement l’économie. C’es

258 ieuse. Que ce qu’il y a de sérieux quand on parle de l’Europe, c’est uniquement l’économie. C’est une considérable illusio

259 ’est entrée que dans l’AELE et a refusé jusqu’ici d’ entrer dans la CEE. Parce que l’AELE n’a que des buts économiques, n’a

260 uisse, pensant que les visées politiques, c’était de l’utopie ou que c’était dangereux, a voulu se borner à l’économie, c’

261 êts réputés sérieux, surtout sur les bords du lac de Zurich, comme vous le savez. Vous me demandez si c’est la meilleure v

262 us pensons que le problème européen dépasse celui d’ une simple organisation de notre économie, si nous ne voulons pas être

263 européen dépasse celui d’une simple organisation de notre économie, si nous ne voulons pas être « américanisés », comme o

264 l’économie. On peut donc prévoir d’autres formes d’ intégration pour l’Europe. Elles se dessinent au sein de la CEE, comme

265 up plus même que la CEE à mon sens. L’intégration de l’Europe… disons, d’un mot moins savant, l’union de l’Europe doit s’o

266 EE à mon sens. L’intégration de l’Europe… disons, d’ un mot moins savant, l’union de l’Europe doit s’opérer sur tous les pl

267 l’Europe… disons, d’un mot moins savant, l’union de l’Europe doit s’opérer sur tous les plans. Elle doit être sociale aut

268 Car, en fait, si nos peuples ont une possibilité d’ union, c’est parce qu’il y a, à la base de notre histoire, une unité.

269 ibilité d’union, c’est parce qu’il y a, à la base de notre histoire, une unité. C’est sur une unité que l’on peut fonder u

270 union solide. Quelle est cette unité ? Eh bien ! de culture. Il n’y a pas de cultures nationales, contrairement à ce que

271 cette unité ? Eh bien ! de culture. Il n’y a pas de cultures nationales, contrairement à ce que l’on nous a appris à l’éc

272 Nous avons tout cela en commun. Tous les procédés de nos beaux-arts, tous les procédés de nos littératures autant que nos

273 les procédés de nos beaux-arts, tous les procédés de nos littératures autant que nos techniques, les thèmes de nos réflexi

274 ittératures autant que nos techniques, les thèmes de nos réflexions historiques, tout cela est complètement commun à tous

275 un à tous les Européens. N’a jamais été l’apanage d’ un seul de nos pays. Ne s’est jamais arrêté aux frontières actuelles d

276 les Européens. N’a jamais été l’apanage d’un seul de nos pays. Ne s’est jamais arrêté aux frontières actuelles de nos pays

277 . Ne s’est jamais arrêté aux frontières actuelles de nos pays, qui n’existaient pas pendant tout le Moyen Âge, notamment,

278 éenne existait bel et bien. Donc, sur cette unité de culture qui est commune aux Suisses et à tous les voisins de ce pays,

279 qui est commune aux Suisses et à tous les voisins de ce pays, on peut édifier une union. Je dis bien : une « union » et no

280 , et la seule à laquelle la Suisse puisse adhérer de tout cœur, c’est une union dans la diversité. C’est-à-dire une union

281 iversités qui tout de même subsistent sur ce fond d’ unité. Denis de Rougemont, à votre point de vue, un écrivain allemand

282 ain allemand ou suisse alémanique est très proche d’ un écrivain français ou espagnol ? Beaucoup plus qu’il ne pense. Par l

283 n Europe, on fait depuis des siècles des tableaux de chevalet, des romans, des pièces de théâtre, on donne des concerts. E

284 des tableaux de chevalet, des romans, des pièces de théâtre, on donne des concerts. Eh bien ! tout cela n’existait pas da

285 dans les autres cultures, où l’on n’écrivait que de la littérature religieuse, sacrée. En Inde, par exemple, il n’y a pas

286 ieuse, sacrée. En Inde, par exemple, il n’y a pas de romans qui racontent des petites histoires qui se passent tous les jo

287 ous les jours. Il n’y a que des écrits religieux, de la sculpture religieuse dans les temples, de la peinture religieuse.

288 eux, de la sculpture religieuse dans les temples, de la peinture religieuse. Ce n’est qu’en Europe que l’on a utilisé tous

289 ns et rapprochent naturellement tous les artistes de l’Europe… … que l’on pourrait englober dans une forme de culture occi

290 rope… … que l’on pourrait englober dans une forme de culture occidentale. Mais dans ces hypothèses d’intégration sous tout

291 de culture occidentale. Mais dans ces hypothèses d’ intégration sous toutes ses formes, quelles qu’elles soient, quelle pa

292 ple. La Suisse a beaucoup à apporter dans l’union de l’Europe. Elle a à apporter ce qu’elle est, ce qu’elle est devenue au

293 aite peu à peu, qu’elle s’est créée sous la forme d’ une confédération en 1848. Et depuis lors, elle essaie d’approfondir c

294 onfédération en 1848. Et depuis lors, elle essaie d’ approfondir cette formule, celle-là même qui pourrait servir de modèle

295 cette formule, celle-là même qui pourrait servir de modèle à l’Europe. On rejoint la pensée de votre livre : La Suisse ou

296 servir de modèle à l’Europe. On rejoint la pensée de votre livre : La Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux, où vous éc

297 a pensée de votre livre : La Suisse ou l’histoire d’ un peuple heureux, où vous écrivez : « L’Europe fédérée reste la seule

298 à comprendre, et même à vivre, que je connaisse. De toutes les doctrines politiques, c’est certainement la plus difficile

299 il faut penser ensemble des choses qui ont l’air de s’exclure logiquement. Il faut penser, par exemple : union et diversi

300 ts avec des grands. Il faut penser à une quantité de choses qui répugnent à la logique. J’entendais l’autre jour encore à

301 doit proportionner ses interventions sur le plan de la politique étrangère à sa modeste importance… (entendant par là — j

302 ne petite armée, encore que ce soit la plus forte d’ Europe !)… que ce n’est pas une grande puissance comme les États-Unis

303 ait erronée, car ce qui fait le poids, l’autorité d’ un pays dans le monde, ce qui donne du poids à ses interventions dans

304 onne du poids à ses interventions dans le domaine de la politique étrangère, de la politique générale, ce sont les initiat

305 ntions dans le domaine de la politique étrangère, de la politique générale, ce sont les initiatives, les exemples qu’il pe

306 ves qu’il peut prendre. Si l’importance politique d’ un pays était mesurée uniquement à sa taille, à l’importance de son ar

307 it mesurée uniquement à sa taille, à l’importance de son armée et de son économie, comment expliquer que les États-Unis n’

308 ement à sa taille, à l’importance de son armée et de son économie, comment expliquer que les États-Unis n’aient pas gagné

309 ace d’eux un pays qui agit beaucoup sur l’opinion d’ une partie du monde : la Russie. La Russie qui n’agit pas du tout par

310 ie. La Russie qui n’agit pas du tout par la force de ses armées mais par la force de sa doctrine, d’un certain idéal commu

311 tout par la force de ses armées mais par la force de sa doctrine, d’un certain idéal communiste. Les États-Unis savent qu’

312 e de ses armées mais par la force de sa doctrine, d’ un certain idéal communiste. Les États-Unis savent qu’ils ne peuvent o

313 t opposer à cet idéal qu’un idéal démocratique et de liberté, et qu’ils l’illustrent fort mal en faisant la guerre du Viet

314 s comme la Suisse aurait les plus grandes chances d’ agir sur le plan international s’il avait le courage de prendre des in

315 r sur le plan international s’il avait le courage de prendre des initiatives. De prendre notamment cette initiative de pro

316 s’il avait le courage de prendre des initiatives. De prendre notamment cette initiative de proposer une formule fédérale p

317 nitiatives. De prendre notamment cette initiative de proposer une formule fédérale pour l’union de l’Europe. Car cette pro

318 ive de proposer une formule fédérale pour l’union de l’Europe. Car cette proposition-là, elle sortirait de toute son histo

319 ’Europe. Car cette proposition-là, elle sortirait de toute son histoire, elle sortirait de ce que nous sommes, nous Suisse

320 e sortirait de toute son histoire, elle sortirait de ce que nous sommes, nous Suisses, dont nous avons à prendre toujours

321 tite qu’elle soit, n’aurait pas seulement un rôle de parti minoritaire à jouer au sein de cette grande Europe… Prendre

322 un rôle qui serait peut-être décisif, qui serait de donner justement la formule de l’avenir européen. Naturellement, avan

323 écisif, qui serait de donner justement la formule de l’avenir européen. Naturellement, avant que la Suisse soit capable de

324 . Naturellement, avant que la Suisse soit capable de le faire, de le proposer sur un plan international, il faut que nous

325 nt, avant que la Suisse soit capable de le faire, de le proposer sur un plan international, il faut que nous autres, les S

326 res, les Suisses, prenions conscience plus claire de ce qu’est notre fédéralisme, des richesses de cette formule chez nous

327 ire de ce qu’est notre fédéralisme, des richesses de cette formule chez nous. Il faut que nous l’appliquions de mieux en m

328 formule chez nous. Il faut que nous l’appliquions de mieux en mieux, que nous cessions de penser que fédéralisme signifie

329 ’appliquions de mieux en mieux, que nous cessions de penser que fédéralisme signifie repli sur soi dans chaque canton, alo

330 udrait appliquer cette formule maintenant au-delà de nos frontières, ne pas l’arrêter à nos frontières cantonales, ne pas

331 oir plus loin, voir qu’il y a des tâches qui sont de dimensions continentales, européennes, et que la raison, le bon sens

332 esponsabilités nouvelles qu’implique la formation de l’Europe puisqu’il manque d’initiative ? Qu’en sait-on ? Est-ce qu’on

333 mplique la formation de l’Europe puisqu’il manque d’ initiative ? Qu’en sait-on ? Est-ce qu’on a jamais demandé aux Suisses

334 a jamais demandé aux Suisses ce qu’ils pensaient de l’Europe et d’une intégration de l’Europe, d’une intégration, je dis

335 dé aux Suisses ce qu’ils pensaient de l’Europe et d’ une intégration de l’Europe, d’une intégration, je dis bien, selon la

336 qu’ils pensaient de l’Europe et d’une intégration de l’Europe, d’une intégration, je dis bien, selon la formule fédérale,

337 ent de l’Europe et d’une intégration de l’Europe, d’ une intégration, je dis bien, selon la formule fédérale, la seule qui

338 e ? Dans ces conditions, le Suisse moyen, l’homme de la rue, quand on lui demande ce qu’il pense de l’Europe, répète natur

339 me de la rue, quand on lui demande ce qu’il pense de l’Europe, répète naturellement ce qu’il a entendu dire à la radio, à

340 dans la presse, ce qu’il entend dans les discours de ses hommes d’État, de ses députés. Eh bien ! il faut que cela change,

341 il entend dans les discours de ses hommes d’État, de ses députés. Eh bien ! il faut que cela change, lentement. On lui a t

342 coin, ne nous rendons pas ridicules en proposant de grandes choses… » Il faut que cela cesse ; et c’est une question d’éd

343  » Il faut que cela cesse ; et c’est une question d’ éducation ; cela doit commencer à l’école déjà. Je connais heureusemen

344 ement beaucoup de professeurs secondaires et même de maîtres primaires qui ont adopté ce point de vue, qui se mettent à en

345 que, dans un esprit européen. Voilà qui va former de nouvelles générations, lesquelles seront complètement d’accord d’entr

346 érations, lesquelles seront complètement d’accord d’ entrer dans une Europe unie. Elles trouveront même bien curieux que l’

347 s nous reprocheront — à la génération des aînés — d’ avoir gardé une prudence exemplaire, qui n’est exemplaire pour personn

348 éclarations des hommes qui sont chargés notamment de nos affaires étrangères. c. Rougemont Denis de, « [Entretien] Ce

349 e nos affaires étrangères. c. Rougemont Denis de , « [Entretien] Ce que la Suisse peut apporter à l’Europe », Construir

350 e l’Europe ? Cette question, nous sommes en droit de la poser et nous pouvons partiellement y répondre. 1969, en effet, a

351 969, en effet, a été l’année des voyages. Voyages de nos conseillers fédéraux à l’étranger et, aussi, visites importantes

352 tes dans notre pays. Il n’y a qu’à songer à celle de M. Jean Rey, il y a quelques mois seulement, dans la capitale fédéral

353 Suisse peut-elle jouer un rôle dans la formation de l’Europe ? Pour y répondre, il fallait faire appel à un écrivain d’ex

354 y répondre, il fallait faire appel à un écrivain d’ expression française traduit dans le monde entier, à un citoyen suisse

355 monde entier, à un citoyen suisse, à un pionnier de l’Europe unie. Ces qualités sont réunies dans la même personnalité. J

356 réunies dans la même personnalité. Je veux parler de Denis de Rougemont, qui m’a fait part de ses impressions sur cette gr

357 x parler de Denis de Rougemont, qui m’a fait part de ses impressions sur cette grave question, et je vous livre l’entretie

358 « Un acte de reconnaissance » [à propos du prix Robert Schuman] (24 mars 1970)e f

359 nis de Rougemont, hier après-midi, à son domicile de Ferney-Voltaire, où il prépare actuellement le discours qu’il prononc

360 l prononcera le mois prochain à Bonn à l’occasion de la remise officielle du prix [Robert Schuman]. Un prix auquel, d’aill

361 tendait : Je n’ai pas été surpris par la décision de la Fondation Freiherr von Stein puisque, en juillet dernier déjà, ell

362 Robert Schuman ? J’y vois essentiellement un acte de reconnaissance. Reconnaissance d’un long effort fait souvent, depuis

363 llement un acte de reconnaissance. Reconnaissance d’ un long effort fait souvent, depuis près de vingt-cinq ans, aux dépens

364 contre vents et marées et sans toujours beaucoup d’ appuis. Or ce prix est un appui formel. Vous êtes donc particulièremen

365 ait suite, après un prix théologique, à une série de prix littéraires. Ensuite parce pour un écrivain, c’est toujours un p

366 rivain, c’est toujours un plaisir particulier que d’ être récompensé pour des travaux réalisés en marge de son métier propr

367 Centre européen de la culture que je dirige. Et, de recevoir un prix qui porte son nom est aussi, pour moi, un sujet de s

368 x qui porte son nom est aussi, pour moi, un sujet de satisfaction. e. Rougemont Denis de, « [Entretien] Le prix Robert

369 , un sujet de satisfaction. e. Rougemont Denis de , « [Entretien] Le prix Robert Schuman : un acte de reconnaissance »,

370 e, « [Entretien] Le prix Robert Schuman : un acte de reconnaissance », La Suisse, Genève, 24 mars 1970. f. Propos recueil

371 e chapeau suivant : « Le conseil d’administration de la Fondation Freiherr von Stein (FVS), à Hambourg, vient de décider à

372 (FVS), à Hambourg, vient de décider à l’unanimité de remettre le prix Robert Schuman pour 1970 à l’écrivain neuchâtelois D

373 du Centre européen de la culture, pour l’ensemble de son œuvre consacrée à la promotion de l’esprit européen. Parmi cette

374 l’ensemble de son œuvre consacrée à la promotion de l’esprit européen. Parmi cette œuvre, il faut notamment citer L’Aven

375 , il faut notamment citer L’Aventure occidentale de l’homme , Vingt-huit siècles d’Europe , Les Chances de l’Europe ,

376 ture occidentale de l’homme , Vingt-huit siècles d’ Europe , Les Chances de l’Europe , L’Europe en jeu et La Suisse ou

377 mme , Vingt-huit siècles d’Europe , Les Chances de l’Europe , L’Europe en jeu et La Suisse ou l’histoire d’un peuple

378 e , L’Europe en jeu et La Suisse ou l’histoire d’ un peuple heureux . Doté d’une somme de 25 000 marks, le prix Robert S

379 a Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux . Doté d’ une somme de 25 000 marks, le prix Robert Schuman est remis chaque ann

380 l’histoire d’un peuple heureux . Doté d’une somme de 25 000 marks, le prix Robert Schuman est remis chaque année par le re

381 ert Schuman est remis chaque année par le recteur de l’Université de Bonn. Il a été créé en 1966 par la Fondation FVS, à H

382 remis chaque année par le recteur de l’Université de Bonn. Il a été créé en 1966 par la Fondation FVS, à Hambourg, et est

383 s, se distinguent en contribuant à la réalisation de l’unité européenne. La remise du prix aura lieu le 15 avril prochain

384 rix aura lieu le 15 avril prochain à l’Université de Bonn. À cette occasion, l’écrivain suisse prononcera une allocution :

385 permettez-moi une remarque dont je serais obligé de faire part à vos lecteurs. « L’acte de reconnaissance » mis en valeur

386 ais obligé de faire part à vos lecteurs. « L’acte de reconnaissance » mis en valeur par votre titre ne saurait signifier q

387 ut) mais simplement que je lui suis reconnaissant d’ avoir reconnu le travail du Centre européen de la culture. Il y a là u

388 ance, vous en conviendrez ! g. Rougemont Denis de , « Après l’attribution du prix Schuman à M. D. de Rougemont », La Sui

389 assion, écrit Denis de Rougemont, est cette forme de l’amour qui refuse l’immédiat, fuit le prochain, veut la distance et

390 isir et s’exalter. » Cette passion qui se nourrit d’ obstacles par définition, que devient-elle à notre époque où les obsta

391 odernes, qui ne sont en principe que des mariages de passion, comment s’accommode-t-elle de l’immédiat quotidien ou du pro

392 s mariages de passion, comment s’accommode-t-elle de l’immédiat quotidien ou du prochain accessible ? Je ne condamne ni la

393 ement qu’il y a un conflit, si toutefois on parle de passion, qui est autre chose que l’amour. En effet, si l’on se marie

394 e que l’amour. En effet, si l’on se marie en état de passion, c’est-à-dire en état de fièvre, c’est exactement comme si l’

395 se marie en état de passion, c’est-à-dire en état de fièvre, c’est exactement comme si l’on voulait prendre une décision g

396 dre une décision grave le jour où l’on a un rhume de cerveau, quand l’esprit et ses facultés sont embrumés et en état de t

397 l’esprit et ses facultés sont embrumés et en état de transe. La décision risque de n’être pas excellente. La passion, d’au

398 embrumés et en état de transe. La décision risque de n’être pas excellente. La passion, d’autre part, est une projection n

399 narcissique : on aime, en l’autre, la projection de soi-même, alors que le mariage tue l’aspect narcissique de la relatio

400 me, alors que le mariage tue l’aspect narcissique de la relation. Pour moi, un mariage réussi l’est, quand les deux conjoi

401 l’est, quand les deux conjoints estiment que leur vie commune est favorable à l’épanouissement de chacun. C’est le contrair

402 leur vie commune est favorable à l’épanouissement de chacun. C’est le contraire d’une relation narcissique. Mais si l’on a

403 à l’épanouissement de chacun. C’est le contraire d’ une relation narcissique. Mais si l’on arrive à passer de la transe à

404 elation narcissique. Mais si l’on arrive à passer de la transe à la réalité, la passion peut conduire à l’amour. Le mariag

405 tient lieu de fiançailles, me semble un bon moyen de faciliter ce passage et d’éviter les trop mauvais mariages. Pourquoi

406 me semble un bon moyen de faciliter ce passage et d’ éviter les trop mauvais mariages. Pourquoi les seconds mariages sont-i

407 faire une comparaison politique, est le type même d’ un rapport fédéral : l’association de deux éléments contradictoires, e

408 le type même d’un rapport fédéral : l’association de deux éléments contradictoires, entre lesquels n’existent ni fusion, n

409 bordination, ni unification. C’est très différent d’ une union basée sur la passion qu’on subit et dont on pâtit, par défin

410 e Rougemont, la crise du mariage (qui ne date pas d’ aujourd’hui) procède à la fois d’un culte exagéré de la passion, de la

411 (qui ne date pas d’aujourd’hui) procède à la fois d’ un culte exagéré de la passion, de la romance, pour reprendre le terme

412 aujourd’hui) procède à la fois d’un culte exagéré de la passion, de la romance, pour reprendre le terme anglais et de la r

413 ocède à la fois d’un culte exagéré de la passion, de la romance, pour reprendre le terme anglais et de la revendication de

414 de la romance, pour reprendre le terme anglais et de la revendication des femmes pour l’égalité avec les hommes, alors qu’

415 Je suis contre l’égalité, dit-il, c’est la source de toutes les tyrannies. Enfin, troisième raison ; la vulgarisation mode

416 ommes et les femmes plus exigeants sur la qualité de leur mariage, c’est-à-dire qu’à force d’entendre prôner l’idéale harm

417 qualité de leur mariage, c’est-à-dire qu’à force d’ entendre prôner l’idéale harmonie psychologique, indispensable dans un

418 ils ont été déplacés. On parle un peu abusivement de la suppression des tabous. Le tabou sexuel, par exemple. Il est certa

419 s’est surtout produite au niveau de la parole et de l’information, qui donnent l’impression d’une liberté fantastique. J’

420 ole et de l’information, qui donnent l’impression d’ une liberté fantastique. J’ai lu, l’autre jour, qu’il y avait à Paris,

421 il y avait à Paris, autour de 1890, une quinzaine de théâtres de nus qui offraient des spectacles beaucoup plus provocants

422 Paris, autour de 1890, une quinzaine de théâtres de nus qui offraient des spectacles beaucoup plus provocants que celui d

423 des spectacles beaucoup plus provocants que celui de « Hair » ! Les interdits, les tabous, les convenances ne sont pas arb

424 la fois leur passion (présence du roi Marc, mari d’ Iseut), quand ils se retrouvent seuls dans la forêt, ils inventent un

425 leur passion : l’épée déposée entre eux, symbole de chasteté. La passion est toujours possible. Le mythe de Tristan et Is

426 steté. La passion est toujours possible. Le mythe de Tristan et Iseut est assez rusé pour se reproduire, quelles que soien

427 e soient les circonstances. i. Rougemont Denis de , « [Entretien] La passion en 1970, est-ce possible ? », Marie Claire,

428 « S’unir, au-delà de nos fausses souverainetés, pour préserver nos vraies diversités » (ma

429 versités » (mai-juin 1970)h Vous êtes l’auteur d’ une phrase fameuse : « Il faut faire des Européens avant de faire l’Eu

430 rope » ; comment y parvenir ? Le véritable centre de gravité de ma théorie est le mythe de l’« État-nation », tel que Napo

431 mment y parvenir ? Le véritable centre de gravité de ma théorie est le mythe de l’« État-nation », tel que Napoléon en a p

432 able centre de gravité de ma théorie est le mythe de l’« État-nation », tel que Napoléon en a posé le modèle, intégralemen

433 en vue de la guerre. C’est le culte du sol sacré de la patrie qui a engendré cet État-nation où coïncident, à l’intérieur

434 hétérogènes. Rien de plus hostile à toute espèce d’ union tant soit peu sérieuse que cet État-nation qui se révèle incapab

435 ieuse que cet État-nation qui se révèle incapable de répondre aux exigences concrètes de notre temps, puisqu’à la fois tro

436 èle incapable de répondre aux exigences concrètes de notre temps, puisqu’à la fois trop petit pour agir à l’échelle mondia

437 vique réelle. Je vous dirai donc qu’entre l’union de l’Europe et les États-nations sacralisés, entre une nécessité humaine

438 é humaine des plus concrètes et le culte prolongé d’ un mythe, il faut choisir ! Ce choix doit s’opérer dans une certaine f

439 nécessaire est assuré, on se bat pour le contrôle de zones d’influence plus idéologiques que commerciales. Il va falloir m

440 e est assuré, on se bat pour le contrôle de zones d’ influence plus idéologiques que commerciales. Il va falloir maintenant

441 défini du produit national brut, ou la recréation d’ un habitat décent, d’une communauté vivante ? Il faut d’autre part épa

442 ional brut, ou la recréation d’un habitat décent, d’ une communauté vivante ? Il faut d’autre part épargner à l’Europe de s

443 ivante ? Il faut d’autre part épargner à l’Europe de se faire purement et simplement absorber par d’autres économies. Cela

444 à se poser la question fondamentale du sens même de notre vie ? Oui, je crois à la personne humaine et à sa liberté. Pour

445 er la question fondamentale du sens même de notre vie  ? Oui, je crois à la personne humaine et à sa liberté. Pour surmonter

446 uelles structures pensez-vous qu’il soit possible de l’établir ? J’admets qu’il y a une pluralité d’allégeances, civiques,

447 e de l’établir ? J’admets qu’il y a une pluralité d’ allégeances, civiques, politiques, culturelles, idéologiques et religi

448 idéologiques et religieuses, contre la prétention de l’État-nation à leur monopole absolu. Il faut donc distribuer les pou

449 uer les pouvoirs étatiques aux différents niveaux de décision indiqués par la nature des tâches, leurs dimensions et celle

450 la nature des tâches, leurs dimensions et celles de la communauté la plus apte à les administrer. Concrètement, cela revi

451 ions aux frontières fonctionnelles, tenant compte de cette pluralité des allégeances en se fractionnant en un certain nomb

452 légeances en se fractionnant en un certain nombre d’ « agences » (culturelles, économiques, etc.) à la mesure des décisions

453 re ! Je vois l’Europe comme un grand jardin plein de surprises, mais un peu désordonné… Ne craignez-vous pas l’utopie ? Co

454 ez-vous pas l’utopie ? Comment sera-t-il possible de changer le système actuel de notre société, irréversible course au pr

455 t sera-t-il possible de changer le système actuel de notre société, irréversible course au profit ? Mais le système de la

456 , irréversible course au profit ? Mais le système de la société actuelle n’existe pas ! Il y a précisément une crise unive

457 ordre universel nouveau. Le monde est à la limite de ses possibilités : les lacs ne sont plus nageables, les rues ne sont

458 les villes ne sont plus gouvernables, l’explosion de population est formidable. Tous les équilibres anciens sont détruits 

459 tenant ou jamais qu’on peut trouver quelque chose de neuf, l’Ordre après le Désordre ! Quel dénominateur commun peut-il ai

460 trouver cet ordre nouveau ? L’Europe a la chance d’ avoir une culture. Je ne crois pas aux cultures nationalistes, en dépi

461 s tout arbitraires opérées dans l’ensemble vivant de la culture européenne. On parle souvent d’une politique européenne co

462 vivant de la culture européenne. On parle souvent d’ une politique européenne commune comme dénominateur commun : là aussi,

463 ne doit pas être une activité séparée : c’est la vie dans la cité, « l’art d’aménager les relations humaines », et en Euro

464 vité séparée : c’est la vie dans la cité, « l’art d’ aménager les relations humaines », et en Europe l’art d’équilibrer tou

465 ager les relations humaines », et en Europe l’art d’ équilibrer tous les contraires, toutes les tensions, évitant toute uni

466 ns, évitant toute uniformisation, et tirant parti de toutes ces cellules qui font la complexité de l’Europe. On parle souv

467 rti de toutes ces cellules qui font la complexité de l’Europe. On parle souvent d’helvétisation de l’Europe : pensez-vous

468 font la complexité de l’Europe. On parle souvent d’ helvétisation de l’Europe : pensez-vous que le modèle suisse soit le m

469 ité de l’Europe. On parle souvent d’helvétisation de l’Europe : pensez-vous que le modèle suisse soit le meilleur et qu’il

470 ent, hormis peut-être les cantons qui ne sont pas d’ une originalité débordante. Unir les États européens en un corps polit

471 puissant pour sauvegarder et garantir l’autonomie de chacun de ses membres, c’est un problème parfaitement homologue à cel

472 our sauvegarder et garantir l’autonomie de chacun de ses membres, c’est un problème parfaitement homologue à celui que la

473 c l’avion. On peut dire que pratiquement l’Europe d’ aujourd’hui est plus petite que ne l’était la Suisse à l’époque où ell

474 ’époque où elle s’est fédérée ; et les disparités de coutumes ou de richesse, de langue, de confession, voire de régimes,

475 s’est fédérée ; et les disparités de coutumes ou de richesse, de langue, de confession, voire de régimes, ne sont guère p

476 e ; et les disparités de coutumes ou de richesse, de langue, de confession, voire de régimes, ne sont guère plus marquées

477 disparités de coutumes ou de richesse, de langue, de confession, voire de régimes, ne sont guère plus marquées ou plus fra

478 s ou de richesse, de langue, de confession, voire de régimes, ne sont guère plus marquées ou plus frappantes entre les Éta

479 elles doivent être accomplies)… Bluntschi, auteur d’ un code civil cantonal, disait lui-même au siècle passé que la nationa

480 caractère très international et que c’est ce type d’ union pluraliste qui peut seul assurer la paix de l’Europe ! Il me sem

481 d’union pluraliste qui peut seul assurer la paix de l’Europe ! Il me semble ainsi que l’idée européenne ait trouvé son cl

482 mat autant que son modèle en Suisse. L’anthologie de l’idée européenne réserve d’ailleurs une place de choix à Rousseau, C

483 de l’idée européenne réserve d’ailleurs une place de choix à Rousseau, Constant, Robert de Traz et Gonzague de Reynold, po

484 , pour ne vous citer qu’eux. Mais que pensez-vous de la réserve mise par la Suisse à l’idée de l’intégration européenne, q

485 ez-vous de la réserve mise par la Suisse à l’idée de l’intégration européenne, qui tient surtout à l’obstacle de sa neutra

486 ration européenne, qui tient surtout à l’obstacle de sa neutralité ? La neutralité est une survivance historique ! Elle es

487 orique ! Elle est encore attachée à la conception de l’État-nation. Tout à fait justifiée jusqu’à la Seconde Guerre mondia

488 is tout à fait une Suisse-district fédéral, siège de toutes les « agences » de l’Europe unie dont je vous parlais tout à l

489 district fédéral, siège de toutes les « agences » de l’Europe unie dont je vous parlais tout à l’heure. Il est vrai que le

490 parlais tout à l’heure. Il est vrai que le projet d’ union de l’Europe a généralement passé pour chimérique en Suisse. Et j

491 tout à l’heure. Il est vrai que le projet d’union de l’Europe a généralement passé pour chimérique en Suisse. Et jusqu’à p

492 que en Suisse. Et jusqu’à présent, à chaque étape de cette lente unification, notre gouvernement a dû faire des pieds et d

493 re ! On craint souvent en Suisse que la politique d’ unification européenne vise à mêler les peuples pour éliminer peu à pe

494 en revanche, qu’une Europe fédérée, respectueuse de ses diversités comme nous des nôtres, s’accorderait avec la vocation

495 es, s’accorderait avec la vocation traditionnelle de la Suisse. Savoir si elle se fera dépend de nous aussi : c’est à nous

496 nelle de la Suisse. Savoir si elle se fera dépend de nous aussi : c’est à nous de faire valoir dans les Conseils qui élabo

497 elle se fera dépend de nous aussi : c’est à nous de faire valoir dans les Conseils qui élaborent l’Europe future les avan

498 seils qui élaborent l’Europe future les avantages de la formule fédéraliste. Car je pense que prétendre conserver les béné

499 ar je pense que prétendre conserver les bénéfices de notre fédéralisme pour nous seuls, serait le plus sûr moyen de les pe

500 ralisme pour nous seuls, serait le plus sûr moyen de les perdre ! h. Rougemont Denis de, « S’unir, au-delà de nos fauss

501 s sûr moyen de les perdre ! h. Rougemont Denis de , « S’unir, au-delà de nos fausses souverainetés, pour préserver nos v

502 dre ! h. Rougemont Denis de, « S’unir, au-delà de nos fausses souverainetés, pour préserver nos vraies diversités », Fe

503 éserver nos vraies diversités », Feuille centrale de Zofingue, Zofingue, mai–juin 1970, p. 242-245.

504 Pour l’Europe, publié par Robert Schuman à la fin de sa vie, je lis ces mots qu’on ne saurait souhaiter plus éclairants et

505 ’Europe, publié par Robert Schuman à la fin de sa vie , je lis ces mots qu’on ne saurait souhaiter plus éclairants et qui se

506 saurait souhaiter plus éclairants et qui servent de titre au deuxième chapitre : L’Europe, avant d’être une alliance mili

507 t de titre au deuxième chapitre : L’Europe, avant d’ être une alliance militaire ou une entité économique, doit être une co

508 Je pense, avec Robert Schuman, qu’il est possible d’ unir nos pays pour cette raison littéralement fondamentale qu’une unit

509 te raison littéralement fondamentale qu’une unité de base existe, sur laquelle fonder cette union. Il s’agit de l’unité d’

510 xiste, sur laquelle fonder cette union. Il s’agit de l’unité d’une culture, de laquelle participent tous les Européens, qu

511 laquelle fonder cette union. Il s’agit de l’unité d’ une culture, de laquelle participent tous les Européens, qu’ils soient

512 cette union. Il s’agit de l’unité d’une culture, de laquelle participent tous les Européens, qu’ils soient d’ailleurs « c

513 d’ailleurs « cultivés » ou non, conscients ou non de ce qu’ils doivent, en fait, à la culture. Unité non pas homogène, et

514 re. Unité non pas homogène, et qui ne résulte pas d’ un processus forcé d’uniformisation, de nivellement et d’exclusion de

515 ogène, et qui ne résulte pas d’un processus forcé d’ uniformisation, de nivellement et d’exclusion de ce qui diffère, mais

516 ésulte pas d’un processus forcé d’uniformisation, de nivellement et d’exclusion de ce qui diffère, mais qui au contraire e

517 ocessus forcé d’uniformisation, de nivellement et d’ exclusion de ce qui diffère, mais qui au contraire englobe, et compose

518 é d’uniformisation, de nivellement et d’exclusion de ce qui diffère, mais qui au contraire englobe, et compose largement,

519 des valeurs bien souvent antinomiques, provenant d’ origines multiples, dont les contrastes et les combinaisons entretienn

520 tretiennent des tensions toujours renouvelées. Et de là vient le dynamisme qui a porté la civilisation européenne sur tous

521 eur et pour le pire. Héraclite donne la formule de l’unité européenne Et de là viennent aussi nos divisions mortelles

522 lite donne la formule de l’unité européenne Et de là viennent aussi nos divisions mortelles, nos efforts pour les surmo

523 verselles, et toutes les créations qui ne cessent de jaillir de cette discorde permanente. Dès l’aube de la philosophie oc

524 et toutes les créations qui ne cessent de jaillir de cette discorde permanente. Dès l’aube de la philosophie occidentale,

525 jaillir de cette discorde permanente. Dès l’aube de la philosophie occidentale, dans l’une de ces cités d’Ionie où prit n

526 l’aube de la philosophie occidentale, dans l’une de ces cités d’Ionie où prit naissance la dialectique de notre histoire,

527 philosophie occidentale, dans l’une de ces cités d’ Ionie où prit naissance la dialectique de notre histoire, Héraclite éc

528 es cités d’Ionie où prit naissance la dialectique de notre histoire, Héraclite écrivait cette phrase décisive, qu’il faut

529 e décisive, qu’il faut tenir pour la formule même de l’unité européenne : Ce qui s’oppose coopère, et de la lutte des cont

530 l’unité européenne : Ce qui s’oppose coopère, et de la lutte des contraires procède la plus belle harmonie. De ce temps j

531 te des contraires procède la plus belle harmonie. De ce temps jusqu’au nôtre, tout concourt à nourrir ce paradoxe qui para

532 paradoxe qui paraît bien être la loi constitutive de notre histoire et le ressort de notre pensée : l’antinomie de l’Un et

533 loi constitutive de notre histoire et le ressort de notre pensée : l’antinomie de l’Un et du divers, l’unité dans la dive

534 toire et le ressort de notre pensée : l’antinomie de l’Un et du divers, l’unité dans la diversité, et la coexistence fécon

535 conséquences, découvre ainsi en même temps l’idée de l’atome, et celle de l’individu, d’où les excès de l’individualisme h

536 e ainsi en même temps l’idée de l’atome, et celle de l’individu, d’où les excès de l’individualisme hellénistique qui ne m

537 temps l’idée de l’atome, et celle de l’individu, d’ où les excès de l’individualisme hellénistique qui ne manqueront pas d

538 e l’atome, et celle de l’individu, d’où les excès de l’individualisme hellénistique qui ne manqueront pas d’appeler la tyr

539 ndividualisme hellénistique qui ne manqueront pas d’ appeler la tyrannie. Rome, en réponse à ce défi de l’anarchie, invente

540 d’appeler la tyrannie. Rome, en réponse à ce défi de l’anarchie, invente l’État et les institutions centralisées : Rome po

541 ’irrémédiable et dangereux Ennui, jusqu’à ce vide de l’âme inoccupée qui appelle les tempêtes et les révolutions. Le chris

542 Le christianisme apporte alors un troisième monde de valeurs, assez mal conciliable avec celles de la sagesse grecque, et

543 nde de valeurs, assez mal conciliable avec celles de la sagesse grecque, et totalement contraire à celles de Rome. À la mo

544 sagesse grecque, et totalement contraire à celles de Rome. À la morale de la mesure et de la raison utilitaire, il oppose

545 otalement contraire à celles de Rome. À la morale de la mesure et de la raison utilitaire, il oppose les élans de l’amour

546 ire à celles de Rome. À la morale de la mesure et de la raison utilitaire, il oppose les élans de l’amour sans calcul, au

547 e et de la raison utilitaire, il oppose les élans de l’amour sans calcul, au droit de la force le service du prochain, au

548 ice. Bien plus, il porte la contradiction au cœur de l’Être, et la traduit dans l’énoncé de ses dogmes fondamentaux : la T

549 on au cœur de l’Être, et la traduit dans l’énoncé de ses dogmes fondamentaux : la Trinité transporte en Dieu lui-même le p

550 a Trinité transporte en Dieu lui-même le paradoxe de l’Un et du divers, tandis que l’incarnation porte à l’extrême la coex

551 existence des contraires, l’impensable définition de la Personne de Jésus-Christ comme « vrai Dieu et vrai homme » à la fo

552 ontraires, l’impensable définition de la Personne de Jésus-Christ comme « vrai Dieu et vrai homme » à la fois selon les fo

553 homme » à la fois selon les formules conciliaires de Nicée et de Chalcédoine. Le couple d’antinomies inséparables Or

554 fois selon les formules conciliaires de Nicée et de Chalcédoine. Le couple d’antinomies inséparables Or, ces valeur

555 iliaires de Nicée et de Chalcédoine. Le couple d’ antinomies inséparables Or, ces valeurs grecques, romaines et chrét

556 urs triomphes alternés, elles durent dans l’ombre de l’Histoire, dans la tradition, dans les livres, et dans l’inconscient

557 f. Elles agissent toutes, sans exception, dans la vie des hommes d’aujourd’hui. Un seul exemple : le dogme de la Trinité, h

558 nt toutes, sans exception, dans la vie des hommes d’ aujourd’hui. Un seul exemple : le dogme de la Trinité, hors de la trad

559 hommes d’aujourd’hui. Un seul exemple : le dogme de la Trinité, hors de la tradition ecclésiastique, a fourni le modèle d

560 e la tradition ecclésiastique, a fourni le modèle de la dialectique hégélienne, repris par Marx puis par Lénine avec les c

561 ue l’on sait, jusque dans l’existence quotidienne de 700 millions de Chinois qui se croyaient confucianistes, bouddhistes,

562 sque dans l’existence quotidienne de 700 millions de Chinois qui se croyaient confucianistes, bouddhistes, ou sans croyanc

563 n’est pas tout. Avec les trois sources classiques d’ Athènes, de Rome et de Jérusalem, viennent confluer dans le haut Moyen

564 out. Avec les trois sources classiques d’Athènes, de Rome et de Jérusalem, viennent confluer dans le haut Moyen Âge la sou

565 es trois sources classiques d’Athènes, de Rome et de Jérusalem, viennent confluer dans le haut Moyen Âge la source germani

566 droit communautaire et personnel, et les valeurs d’ honneur et de fidélité, la seconde apportant le sens du rêve et le gra

567 autaire et personnel, et les valeurs d’honneur et de fidélité, la seconde apportant le sens du rêve et le grand thème de l

568 conde apportant le sens du rêve et le grand thème de la Quête aventureuse d’un Lancelot et d’un Perceval, symbole mystique

569 du rêve et le grand thème de la Quête aventureuse d’ un Lancelot et d’un Perceval, symbole mystique. Faut-il enfin rappeler

570 nd thème de la Quête aventureuse d’un Lancelot et d’ un Perceval, symbole mystique. Faut-il enfin rappeler l’apport arabe,

571 mbres, mais qui est l’une des sources principales de la poésie amoureuse, donc de l’amour tel qu’on le parle et qu’on croi

572 sources principales de la poésie amoureuse, donc de l’amour tel qu’on le parle et qu’on croit le sentir en Occident ; l’a

573 xxe siècle ? Tout cela dure, agit et vit en nous de mille manières. Tout cela se combine en figures et en structures vari

574 variées à l’infini, mais dont la plus fréquente, de très loin, est le couple d’antinomies inséparables : spirituel et tem

575 nt la plus fréquente, de très loin, est le couple d’ antinomies inséparables : spirituel et temporel, autorité et liberté,

576 ence, hérésie créatrice et saine doctrine, besoin de sécurité et goût du risque, conformité qui maintient les valeurs, ori

577 ns. Enfin, tout cela dénote l’Europe comme patrie de la diversité. Si l’on me demande maintenant comment on peut traduire

578 re en termes de structures politiques cette unité de culture non unitaire et si hautement diversifiée, je répondrai que la

579 ent par l’union dans la diversité, et cette forme d’ union porte un nom bien connu dans l’histoire des régimes politiques,

580 nu dans l’histoire des régimes politiques, c’est, de toute évidence : fédéralisme. Je ne vois pas d’autre réponse imaginab

581 , de toute évidence : fédéralisme. Je ne vois pas d’ autre réponse imaginable au défi que l’Histoire nous pose dans les ter

582 échappatoire possible désormais : s’unir, au-delà de nos fausses souverainetés, pour préserver nos vraies diversités — cré

583 tés — créer un pouvoir fédéral pour la sauvegarde de nos autonomies. Car ces autonomies seront perdues une à une si nous r

584 qu’elle est censée servir. j. Rougemont Denis de , « Qu’est‑ce que la culture européenne ? », 30 Jours d’Europe, Paris,

585 Qu’est‑ce que la culture européenne ? », 30 Jours d’ Europe, Paris, juin 1970, p. 21.

586 rstructures, car l’infrastructure est le résultat de nos options morales, spirituelles, religieuses, d’où procèdent des op

587 e nos options morales, spirituelles, religieuses, d’ où procèdent des options économiques. C’est exactement le contraire du

588 ’est exactement le contraire du marxisme. L’homme d’ aujourd’hui est aliéné dans le matériel, le quantitatif, qui tend à le

589 atériel, le quantitatif, qui tend à le déposséder de lui-même. Je me sens assez proche de Maurice Clavel et de son analyse

590 ême. Je me sens assez proche de Maurice Clavel et de son analyse de l’aliénation ; je déplore la vague de marxisme qui déf

591 assez proche de Maurice Clavel et de son analyse de l’aliénation ; je déplore la vague de marxisme qui déferle sur l’Univ

592 son analyse de l’aliénation ; je déplore la vague de marxisme qui déferle sur l’Université française avec cent ans de reta

593 déferle sur l’Université française avec cent ans de retard. La bourgeoisie occidentale, qui place l’économique avant tout

594 a démontré de Gaulle ! Les conceptions politiques de ce dernier reposent sur une certaine culture qui l’a marqué et qui po

595 culture qui l’a marqué et qui postule qu’il n’y a de sérieux que les nations. Deux de mes étudiants, ont fait un travail s

596 tule qu’il n’y a de sérieux que les nations. Deux de mes étudiants, ont fait un travail sur les manuels d’histoire utilisé

597 es étudiants, ont fait un travail sur les manuels d’ histoire utilisés en France et en Allemagne entre 1900 et 1914. Ils on

598 urs, les mêmes préjugés, où l’on décèle l’origine de toutes les idées gaullistes ; le fameux cliché d’une Europe « de Gibr

599 de toutes les idées gaullistes ; le fameux cliché d’ une Europe « de Gibraltar à l’Oural » s’y trouve déjà… Or, le monde a

600 dées gaullistes ; le fameux cliché d’une Europe «  de Gibraltar à l’Oural » s’y trouve déjà… Or, le monde a changé depuis e

601 s’y trouve déjà… Or, le monde a changé depuis et de telles conceptions n’ont plus de sens. Tout se passe, dans ces manuel

602 changé depuis et de telles conceptions n’ont plus de sens. Tout se passe, dans ces manuels, comme si la nation avait été c

603 Dieu ; ce serait par volonté divine que les rois de France ont unifié l’hexagone, alors qu’il s’est agi d’une conquête pa

604 ance ont unifié l’hexagone, alors qu’il s’est agi d’ une conquête par la force et la ruse… Comment avez-vous réagi, au Cent

605 l’histoire par nations. Alors que la seule unité d’ étude intelligible est une culture, c’est-à-dire, dans notre cas, l’Eu

606 ort sur l’éducation, en réunissant dans le comité de la Campagne d’éducation civique européenne, un certain nombre d’assoc

607 tion, en réunissant dans le comité de la Campagne d’ éducation civique européenne, un certain nombre d’associations d’ensei

608 d’éducation civique européenne, un certain nombre d’ associations d’enseignants. Nous avons pu démultiplier notre effort en

609 ique européenne, un certain nombre d’associations d’ enseignants. Nous avons pu démultiplier notre effort en organisant des

610 ents. Ces stages, qui réunissent une cinquantaine de pédagogues, durent une semaine et comportent des conférences, suivies

611 ne semaine et comportent des conférences, suivies de débats. Le thème principal est de savoir comment introduire le point

612 rences, suivies de débats. Le thème principal est de savoir comment introduire le point de vue européen dans l’enseignemen

613 ire le point de vue européen dans l’enseignement, de créer de futurs citoyens de l’Europe. Actuellement, on a pu établir q

614 int de vue européen dans l’enseignement, de créer de futurs citoyens de l’Europe. Actuellement, on a pu établir que la leç

615 dans l’enseignement, de créer de futurs citoyens de l’Europe. Actuellement, on a pu établir que la leçon d’instruction ci

616 urope. Actuellement, on a pu établir que la leçon d’ instruction civique, sous son aspect traditionnel, est la plus ennuyeu

617 s ennuyeuse… Notre intention n’est pas, du reste, d’ introduire une heure de plus dans des programmes déjà surchargés, mais

618 de plus dans des programmes déjà surchargés, mais de montrer que tout est européen, qu’il ne peut plus y avoir de perspect

619 que tout est européen, qu’il ne peut plus y avoir de perspective nationaliste. Les leçons types sont données dans les écol

620 ement 1500 maîtres et une publication nous permet de communiquer de la documentation et des critiques de livres. Quels son

621 res et une publication nous permet de communiquer de la documentation et des critiques de livres. Quels sont les thèmes ab

622 communiquer de la documentation et des critiques de livres. Quels sont les thèmes abordés au cours de ces stages ? L’hist

623 hème me paraît fondamental, car c’est l’écologie, de nos jours, qui constitue la véritable politique. Des stages sont cons

624 sprit européen chez les maîtres, ce qui permettra d’ espérer un changement sérieux en une génération. La Journée de l’Europ

625 changement sérieux en une génération. La Journée de l’Europe, avec les rédactions qui sont faites par les élèves à cette

626 édération européenne. Si l’on examine les classes d’ âge, on voit que le 75 % des partisans de l’Europe a moins de 35 ans.

627 classes d’âge, on voit que le 75 % des partisans de l’Europe a moins de 35 ans. L’idée européenne joue un grand rôle au n

628 oit que le 75 % des partisans de l’Europe a moins de 35 ans. L’idée européenne joue un grand rôle au niveau de la jeunesse

629 et les communes. Mai 68 a vu reparaître beaucoup d’ idées qui avaient déjà été défendues par notre mouvement l’Ordre nouve

630 Bakounine, en particulier la notion proudhonienne de la distribution de l’État. D’autre, part, les mouvements personnalist

631 culier la notion proudhonienne de la distribution de l’État. D’autre, part, les mouvements personnalistes des années 1930

632 otion proudhonienne de la distribution de l’État. D’ autre, part, les mouvements personnalistes des années 1930 mettaient d

633 ce qui marche mieux si on l’intègre. Le principe de la dimension a été constamment appliqué au CEC ; nous n’avons central

634 x en étant centralisé. Notre but était, toujours, de servir les parties composantes. Lors de la Campagne d’éducation civiq

635 rvir les parties composantes. Lors de la Campagne d’ éducation civique, nous avions un appareil administratif minuscule qui

636 t fédérer des choses neuves, sinon l’on perd trop de temps. C’est ce que nous avons fait au CEC, où les premières nécessit

637 C, où les premières nécessités ressenties ont été de créer un laboratoire européen de recherche nucléaire et d’assurer une

638 ssenties ont été de créer un laboratoire européen de recherche nucléaire et d’assurer une organisation coordonnée des fest

639 un laboratoire européen de recherche nucléaire et d’ assurer une organisation coordonnée des festivals. Nous avons désiré a

640 pe des régions sera très complexe et diversifiée, d’ autant plus que les régions culturelles, ethniques, économiques ne se

641 ire des ordinateurs. Il conviendra, d’autre part, de maintenir de petites communautés, lesquelles sont les seules à même d

642 ateurs. Il conviendra, d’autre part, de maintenir de petites communautés, lesquelles sont les seules à même de protéger l’

643 es communautés, lesquelles sont les seules à même de protéger l’individu, de l’amener à se sentir encadré. Les régions nou

644 es sont les seules à même de protéger l’individu, de l’amener à se sentir encadré. Les régions nous permettront de revenir

645 à se sentir encadré. Les régions nous permettront de revenir à des entités plus petites, de recréer des communautés centré

646 ermettront de revenir à des entités plus petites, de recréer des communautés centrées. Votre fédéralisme dérive directemen

647 ont, à votre avis, les obstacles à la réalisation de l’Europe ? Le fédéralisme n’est pas possible dans une seule nation. L

648 pense que le problème le plus important est celui de l’environnement, car la civilisation commence avec le respect des for

649 écrit, ce qui va dans le même sens que le respect de l’autre. L’Europe devrait redevenir une sorte de jardin du monde ; c’

650 de l’autre. L’Europe devrait redevenir une sorte de jardin du monde ; c’est la raison pour laquelle nous devons sauver ce

651 our laquelle nous devons sauver ce qui nous reste de nature et de cellule civique, la commune tout particulièrement. Il fa

652 nous devons sauver ce qui nous reste de nature et de cellule civique, la commune tout particulièrement. Il faut freiner le

653 e communauté. Il faut dépasser la fausse solitude de l’homme dans la rue et la fausse solitude de l’homme dans l’habitat.

654 tude de l’homme dans la rue et la fausse solitude de l’homme dans l’habitat. Après avoir rencontré un esprit aussi éminent

655 un esprit aussi éminent, il est assez surprenant de retrouver la réalité des frontières et trois douaniers français d’une

656 éalité des frontières et trois douaniers français d’ une consternante médiocrité… L’Europe des esprits n’est pas encore, il

657 e des esprits n’est pas encore, il s’en faut même de beaucoup, devenue l’Europe réelle. Mais, au-delà des uniformes qui sé

658 es qui séparent, il nous reste, traçant un chemin de rigueur et d’audace, la voix de Denis de Rougemont. k. Rougemont D

659 t, il nous reste, traçant un chemin de rigueur et d’ audace, la voix de Denis de Rougemont. k. Rougemont Denis de, « [En

660 traçant un chemin de rigueur et d’audace, la voix de Denis de Rougemont. k. Rougemont Denis de, « [Entretien] L’Europe 

661 voix de Denis de Rougemont. k. Rougemont Denis de , « [Entretien] L’Europe ? Une révolution culturelle ! », Feuille d’Av

662 L’Europe ? Une révolution culturelle ! », Feuille d’ Avis de Lausanne, Lausanne, 15 octobre 1970, p. 57. l. Propos recueil

663 e ? Une révolution culturelle ! », Feuille d’Avis de Lausanne, Lausanne, 15 octobre 1970, p. 57. l. Propos recueillis par

664 L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou mode de vie ? (15 novembre 1970)m n

665 L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou mode de vie ? (15 novembre 1970)m n Dans votre dernier ouvr

666 L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou mode de vie ? (15 novembre 1970)m n Dans votre dernier ouvrage,

667 e dernier ouvrage, reprenant l’une des constantes de toute votre œuvre, vous lancez un véritable cri d’alarme : selon vous

668 e toute votre œuvre, vous lancez un véritable cri d’ alarme : selon vous, l’heure n’est plus de savoir si on veut rester Fr

669 ble cri d’alarme : selon vous, l’heure n’est plus de savoir si on veut rester Français, Suisse ou Italien, mais si on sera

670 ou Italien, mais si on sera Européen ou une sorte de colonisé américain ou soviétique. Colonisé de manière assez différent

671 rte de colonisé américain ou soviétique. Colonisé de manière assez différente. Je veux éviter ce parallèle que l’on fait t

672 Ce sont deux menaces virtuelles pour les nations de l’Europe désunie mais pas de même nature. Ce que j’appelle la coloni

673 du côté soviétique est déjà un fait dans les pays de l’est de l’Europe, qui sont réellement colonisés… Et il n’est pas imp

674 oviétique est déjà un fait dans les pays de l’est de l’Europe, qui sont réellement colonisés… Et il n’est pas impensable,

675 cune trop faible pour se défendre, qu’une ou deux de celles-ci deviennent plus ou moins communistes. Quand, par exemple, l

676 z que les derniers qui ont été tués dans le poste de Radio Budapest appelaient l’Europe à leur secours. C’était extrêmemen

677 gence cruciale ? C’est déjà un fait pour les pays de l’Est. Pour ce qui est de l’Ouest, la colonisation américaine devient

678 à un fait pour les pays de l’Est. Pour ce qui est de l’Ouest, la colonisation américaine devient chaque année plus pénétra

679 icaine se précipitent. Tant qu’il y aura cet état de divisions nationales, voire nationalistes, des Européens, les América

680 es, des Européens, les Américains auront beau jeu d’ intervenir dans ce contexte sans aucune contrepartie. Vous voyez une q

681 une contrepartie. Vous voyez une quantité immense d’ entreprises européennes qui sont contrôlées par le dollar, par le « kn

682 affaire américaine qui, chassée des États-Unis et de Suisse, s’est installée ici ; maintenant, on bâtit 321 appartements (

683 1300 habitants de plus) pour une usine américaine d’ ordinateurs qui va s’installer. Cela a complètement transformé le vill

684 t transformé le village. Pas seulement le passage de 1800 à 5500 habitants, mais les mœurs, le rythme de la vie des gens :

685 1800 à 5500 habitants, mais les mœurs, le rythme de la vie des gens : tous les petits magasins ont fait faillite les uns

686 à 5500 habitants, mais les mœurs, le rythme de la vie des gens : tous les petits magasins ont fait faillite les uns après l

687 ement grave ; et ce sera toujours pire, car aucun de nos pays ne peut se défendre. Il n’est pas trop tard Mais ne pen

688 tard et que les « États-Unis d’Europe » risquent d’ être l’Europe des États-Unis ? Est-ce qu’une Europe unie ne facilitera

689 e la pénétration américaine si c’est une question d’ échanges, si nous produisons suffisamment et si nous sommes capables d

690 roduisons suffisamment et si nous sommes capables d’ affirmer notre originalité européenne. Nous ne pouvons le faire désuni

691 image, si ceux-ci montaient sur les épaules l’un de l’autre, ils n’arriveraient pas à notre hauteur. Au point de vue démo

692 , tout aussi importants : par exemple, la qualité de la main-d’œuvre ouvrière européenne, de l’artisanat qui vit encore da

693 a qualité de la main-d’œuvre ouvrière européenne, de l’artisanat qui vit encore dans beaucoup de nos pays, qui se perdra s

694 : celle du « management », parce qu’ils disposent d’ un grand espace et nous pas. Prenez le cas de la France, qui a un reta

695 sent d’un grand espace et nous pas. Prenez le cas de la France, qui a un retard presque scandaleux dans le domaine de la t

696 ui a un retard presque scandaleux dans le domaine de la technique. Cela tient au fait qu’elle s’est toujours défendue cont

697 res. On pouvait se dire : « Ce n’est pas la peine de partir, ils ont pratiquement un siècle d’avance sur nous. » Mais nous

698 a peine de partir, ils ont pratiquement un siècle d’ avance sur nous. » Mais nous n’avons pas tenu ce raisonnement. Nous no

699 t eu comme supériorité les capitaux, la situation de guerre qui leur ont permis de mettre la bombe atomique au point dans

700 itaux, la situation de guerre qui leur ont permis de mettre la bombe atomique au point dans le plus grand secret. C’était

701 t dans le plus grand secret. C’était une question d’ organisation, rien de plus. Nous avons dit : « Il n’est pas du tout tr

702 ns un pays comme la Suisse, l’industrie mécanique de précision ; nous avons tous les savants qui pourraient rester chez no

703 qui pourraient rester chez nous s’ils disposaient d’ un appareil de recherche suffisant ». Cela s’est parfaitement réalisé,

704 rester chez nous s’ils disposaient d’un appareil de recherche suffisant ». Cela s’est parfaitement réalisé, nous avons ré

705 lisé, nous avons réussi à renverser la vapeur. De grands choix à faire Ce serait donc le moment de « renverser la va

706 grands choix à faire Ce serait donc le moment de « renverser la vapeur » et nous serions aujourd’hui à la croisée des

707 ois dans l’histoire — l’homme serait en situation de choisir librement son avenir. Pourquoi serions-nous à ce moment privi

708 uis le milieu du xxe siècle, il y a eu une sorte de mouvement de bascule qui s’est fait et nous arrivons à un point où la

709 du xxe siècle, il y a eu une sorte de mouvement de bascule qui s’est fait et nous arrivons à un point où la production d

710 ment le minimum vital, où elle entraîne une série de conditions auxquelles on n’avait jamais réfléchi avant : l’industrie

711 question : que voulons-nous en fait ? Est-ce plus de voitures ? Ou voulons-nous sauver la nature qui nous entoure et sans

712 ans laquelle nous ne pourrions pas vivre ? Il y a de grands choix à faire et cela pour la première fois, car jamais avant

713 nt notre génération l’homme n’avait été en mesure de porter des coups pareils à la terre elle-même. Maintenant, il a ces m

714 . Maintenant, il a ces moyens, donc il est obligé d’ avoir une politique. Il s’agit aujourd’hui de choisir entre mode de vi

715 ligé d’avoir une politique. Il s’agit aujourd’hui de choisir entre mode de vie et niveau de vie, mesuré purement quantitat

716 ns, augmenter simplement le produit national brut de chacun de nos pays ou de l’Europe dans son ensemble, au prix de la de

717 ter simplement le produit national brut de chacun de nos pays ou de l’Europe dans son ensemble, au prix de la destruction

718 le produit national brut de chacun de nos pays ou de l’Europe dans son ensemble, au prix de la destruction de la nature ?

719 rope dans son ensemble, au prix de la destruction de la nature ? C’est l’idée matérialiste, capitaliste : pourvu que le PN

720 e : pourvu que le PNB augmente, qu’il n’y ait pas de chômage, tout ira bien et tant pis pour la nature. Nous commençons à

721 pour la nature. Nous commençons à nous réveiller de cette illusion. L’autre politique pour l’avenir est beaucoup plus eur

722 qu’un mode de vie ? C’est l’ensemble des rythmes de la vie, c’est l’ensemble des valeurs. À quoi est-on prêt à sacrifier

723 mode de vie ? C’est l’ensemble des rythmes de la vie , c’est l’ensemble des valeurs. À quoi est-on prêt à sacrifier beaucou

724 dans la jeunesse américaine pour le développement d’ un niveau de vie où toutes les valeurs intellectuelles, spirituelles,

725 rales reprendraient leur importance. Les colonies de hippies essaient de recréer un mode de vie qui corresponde à un certa

726 leur importance. Les colonies de hippies essaient de recréer un mode de vie qui corresponde à un certain nombre de valeurs

727 n mode de vie qui corresponde à un certain nombre de valeurs qu’ils jugent plus importantes que l’accumulation des objets

728 uropéens, cela me paraît une très bonne direction d’ évolution. L’Europe, qui a hérité de civilisations comme la Grèce domi

729 nne direction d’évolution. L’Europe, qui a hérité de civilisations comme la Grèce dominée par l’idée de nature, a toujours

730 e civilisations comme la Grèce dominée par l’idée de nature, a toujours ressenti un certain malaise devant le gigantisme a

731 que dans tous les pays européens, pour une partie de la population, ce dilemme entre niveau de vie et mode de vie ne se po

732 s. Pour eux, le problème se résume encore à celui de la survie dans la rareté. Attention ! Je ne suis pas du tout pour que

733 pas du tout pour que l’on freine le développement de la société ; je suis au contraire pour qu’on le pousse, beaucoup plus

734 que nos compartimentages nationaux ne permettent de le faire. Il nous faut dépasser les Américains, mais il nous faut aus

735 s à nos fins. Par exemple, il est absolument faux de continuer à faire des automobiles qui marchent à l’essence, alors que

736 marchent à l’essence, alors que l’on a les moyens de les faire marcher à l’électricité. Ce serait là un développement tech

737 ns le monde. Mais on y viendra s’il y a une masse d’ Européens telle qu’elle permettra d’envisager une véritable politique

738 y a une masse d’Européens telle qu’elle permettra d’ envisager une véritable politique de production, qui tienne compte de

739 lle permettra d’envisager une véritable politique de production, qui tienne compte de certains buts généraux que l’on donn

740 itable politique de production, qui tienne compte de certains buts généraux que l’on donnera à la vie. Ce serait une révol

741 e de certains buts généraux que l’on donnera à la vie . Ce serait une révolution complète. Deux mouvements antagonistes

742 antagonistes Ne touche-t-on pas là un problème de structures politiques et économiques, plutôt qu’un problème de dimens

743 politiques et économiques, plutôt qu’un problème de dimension et d’organisation des pays ? Le type de société que vous év

744 conomiques, plutôt qu’un problème de dimension et d’ organisation des pays ? Le type de société que vous évoquez prend ses

745 de dimension et d’organisation des pays ? Le type de société que vous évoquez prend ses distances par rapport à la notion

746 dividuelle, et là, nous sommes à l’opposé du type de civilisation capitaliste qui se développe en Europe, qu’elle soit féd

747 des transports, ce serait un progrès considérable de remplacer, dans les villes, la voiture par des moyens de transport qu

748 lacer, dans les villes, la voiture par des moyens de transport qui ne fassent pas de bruit, qui ne dégagent pas de gaz. Qu

749 re par des moyens de transport qui ne fassent pas de bruit, qui ne dégagent pas de gaz. Quant à savoir si cela touche l’or

750 qui ne fassent pas de bruit, qui ne dégagent pas de gaz. Quant à savoir si cela touche l’organisation sociale et politiqu

751 et politique ? Oui, profondément. Ce que j’essaie de montrer depuis un certain temps, c’est que nous sommes en présence de

752 monde, qui ont l’air antagonistes : un mouvement de convergence et un mouvement de divergence. Vous avez un mouvement de

753 tes : un mouvement de convergence et un mouvement de divergence. Vous avez un mouvement de convergence au-delà des États :

754 n mouvement de divergence. Vous avez un mouvement de convergence au-delà des États : les organisations mondiales, les orga

755 obéissent. Mais il y a en même temps un mouvement de « séparatisme », de différentiation, presque d’atomisation : les régi

756 a en même temps un mouvement de « séparatisme », de différentiation, presque d’atomisation : les régions. Ces deux mouvem

757 t de « séparatisme », de différentiation, presque d’ atomisation : les régions. Ces deux mouvements sont-ils contraires, co

758 uvements sont-ils contraires, comme ils ont l’air de l’être ? Ne sont-ils pas plutôt un seul et même mouvement qui pourrai

759 qui pourrait se définir ainsi : adapter le niveau de décisions et les communautés chargées d’exécuter ces dernières aux di

760 e niveau de décisions et les communautés chargées d’ exécuter ces dernières aux dimensions des tâches à réaliser ? Il y a d

761 Il y a des tâches qui, par nature, sont du niveau de décision communal ou de l’entreprise ; d’autres sont de dimension sup

762 ar nature, sont du niveau de décision communal ou de l’entreprise ; d’autres sont de dimension supranationale, à cause de

763 ision communal ou de l’entreprise ; d’autres sont de dimension supranationale, à cause de leur prix ou de leur extension.

764 dimension supranationale, à cause de leur prix ou de leur extension. Il s’agit d’une reclassification des tâches d’après l

765 ause de leur prix ou de leur extension. Il s’agit d’ une reclassification des tâches d’après les dimensions des diverses co

766 des diverses communautés. m. Rougemont Denis de , « [Entretien] L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou m

767 gemont Denis de, « [Entretien] L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou mode de vie ? », Tribune de Lausanne —

768 etien] L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou mode de vie ? », Tribune de Lausanne — Le Matin, Lausanne, 15

769 en] L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou mode de vie ? », Tribune de Lausanne — Le Matin, Lausanne, 15 nove

770 oix I : Niveau de vie ou mode de vie ? », Tribune de Lausanne — Le Matin, Lausanne, 15 novembre 1970, p. 25 et 27. n. Pro

771 par la notice suivante : « Intellectuel et homme d’ action, essayiste et écrivain engagé, Denis de Rougemont est de ceux q

772 ayiste et écrivain engagé, Denis de Rougemont est de ceux qui, tout au long de leur carrière, ont su accorder leurs actes

773 Denis de Rougemont est de ceux qui, tout au long de leur carrière, ont su accorder leurs actes à leurs écrits. Ce Neuchât

774 châtelois qui, dès 1930, contribuait au lancement de plusieurs revues, a été — avec Emmanuel Mounier — l’un des fondateurs

775 me constitue pour l’Europe la seule chance réelle de dépasser les contradictions et les affrontements provoqués par la jux

776 fait figurer parmi les noms les plus prestigieux de l’intelligentsia occidentale contemporaine, il continue de se disting

777 lligentsia occidentale contemporaine, il continue de se distinguer comme l’un des animateurs de l’action européenne. Il jo

778 ntinue de se distinguer comme l’un des animateurs de l’action européenne. Il jouera ainsi un rôle notable dans les congrès

779 Il jouera ainsi un rôle notable dans les congrès de La Haye, de Rome et de Lausanne et fonde, dès 1949, à Genève, le Cent

780 insi un rôle notable dans les congrès de La Haye, de Rome et de Lausanne et fonde, dès 1949, à Genève, le Centre européen

781 e notable dans les congrès de La Haye, de Rome et de Lausanne et fonde, dès 1949, à Genève, le Centre européen de la cultu

782 ssent l’arrêter, animé qu’il est par la certitude d’ exprimer la seule issue pour l’Europe. Nous avons soulevé un certain n

783 ur l’Europe. Nous avons soulevé un certain nombre de ces problèmes et de ces objections, au cours d’un entretien qu’il nou

784 ons soulevé un certain nombre de ces problèmes et de ces objections, au cours d’un entretien qu’il nous a accordé dans sa

785 e de ces problèmes et de ces objections, au cours d’ un entretien qu’il nous a accordé dans sa maison de Ferney-Voltaire. »

786 ’un entretien qu’il nous a accordé dans sa maison de Ferney-Voltaire. »

787 L’Europe à l’heure de ses choix II : Se rallier à l’idée suisse (22 novembre 1970)o p Da

788 uisse (22 novembre 1970)o p Dans cette optique d’ une Europe fédérale, comment appréciez-vous une entreprise comme celle

789 prise comme celle du Marché commun et les efforts d’ intégration politique, financière, économique, qui sont faits ? Le Mar

790 drais voir se multiplier. C’est, plutôt, le germe d’ une agence fédérale pour l’économie car ce n’est pas encore une autori

791 r l’économie car ce n’est pas encore une autorité de politique économique et cela ne couvre qu’une petite partie de l’Euro

792 économique et cela ne couvre qu’une petite partie de l’Europe. Il faudra bien un jour qu’il y ait une agence fédérale euro

793 n jour qu’il y ait une agence fédérale européenne de l’économie ; il faudra qu’il y en ait d’autres qui s’occupent des tra

794 s, des recherches scientifiques, des universités, de l’écologie, de la défense — si c’est encore nécessaire — des relation

795 es scientifiques, des universités, de l’écologie, de la défense — si c’est encore nécessaire — des relations hors de la fé

796 exemple. Dans mon livre La Suisse ou l’histoire d’ un peuple heureux , j’avais lancé l’idée de transformer la Suisse en d

797 stoire d’un peuple heureux , j’avais lancé l’idée de transformer la Suisse en district fédéral de l’Europe. Ce qui résoudr

798 idée de transformer la Suisse en district fédéral de l’Europe. Ce qui résoudrait beaucoup de questions, et notamment celle

799 oudrait beaucoup de questions, et notamment celle de la neutralité. Parce que vous pensez que la Suisse ne pourrait pas r

800 nsez que la Suisse ne pourrait pas rester l’écart d’ un tel mouvement ? Non, c’est absolument impensable. Comment la Suisse

801 ensable. Comment la Suisse resterait-elle l’écart d’ un Fonds européen d’écologie, par exemple ? Elle ne peut pas fermer se

802 Suisse resterait-elle l’écart d’un Fonds européen d’ écologie, par exemple ? Elle ne peut pas fermer ses frontières aux ven

803 on du Rhin. La Suisse est destinée à être au cœur de l’Europe et elle doit l’être dans ses entreprises communes. On dit qu

804 ses communes. On dit que cela signifierait la fin de la neutralité. Je pense au contraire que cela signifierait une helvét

805 contraire que cela signifierait une helvétisation de l’Europe. L’Europe fédérale serait une sorte de Suisse grande échelle

806 n de l’Europe. L’Europe fédérale serait une sorte de Suisse grande échelle ? Pour cela il faut que les Suisses poussent en

807 vivent, encore mieux qu’ils ne le font, l’esprit de leur fédéralisme qui est très ancien. Il ne faut jamais oublier que l

808 arce que c’est la vraie source du fédéralisme. Et de là il faut dépasser les frontières de la Suisse avec le fédéralisme.

809 ralisme. Et de là il faut dépasser les frontières de la Suisse avec le fédéralisme. S’il y avait les États-Unis d’Europe,

810 adhérer à l’Europe. Pourquoi ne parlerait-on pas de l’autre difficulté qui est beaucoup plus intéressante : celle qu’a l’

811 celle qu’a l’Europe pour adhérer à la Suisse ? » De ce point de vue, la Suisse ne perdrait rien en entrant dans une const

812 ne construction européenne. Ce serait le triomphe de son Idée, au sens platonicien du terme. Pouvez-vous préciser comment

813 vous préciser comment vous concevez les modalités de ce que vous appelez l’adhésion de l’Europe à l’Idée suisse ? Quand je

814 z les modalités de ce que vous appelez l’adhésion de l’Europe à l’Idée suisse ? Quand je parle de l’adhésion de l’Europe à

815 sion de l’Europe à l’Idée suisse ? Quand je parle de l’adhésion de l’Europe à l’Idée suisse, j’entends par « Idée suisse »

816 pe à l’Idée suisse ? Quand je parle de l’adhésion de l’Europe à l’Idée suisse, j’entends par « Idée suisse » le véritable

817 as toujours appliqué en Suisse. Ce fédéralisme va de la commune aux entreprises jusqu’à l’Europe puis au monde. C’est là u

818 t possible qu’aujourd’hui, grâce au développement de la technique. Par exemple, sans ordinateurs, je défie qui que ce soit

819 emple, sans ordinateurs, je défie qui que ce soit de maîtriser les mécanismes d’une fédération continentale ou alors, ce s

820 défie qui que ce soit de maîtriser les mécanismes d’ une fédération continentale ou alors, ce serait une tyrannie effroyabl

821 Tandis qu’avec les ordinateurs, on est en mesure de respecter les diversités. Aujourd’hui, vous savez ces carcans que son

822 s carcans que sont les frontières que l’on essaie de faire coïncider tant bien que mal avec un tas de réalités complètemen

823 s et des guerres. Mais si vous reprenez l’exemple de la Suisse, vous voyez qu’on n’y a jamais eu cette idée folle de faire

824 vous voyez qu’on n’y a jamais eu cette idée folle de faire coïncider l’économie et la langue, et nous avons toujours pensé

825 ous avons toujours pensé qu’il y avait des ordres de réalités à ne pas mélanger. Il n’était pas question d’imposer la même

826 alités à ne pas mélanger. Il n’était pas question d’ imposer la même religion, la même économie, les mêmes impôts d’après l

827 vons des petites communautés. En fait, mon modèle de gouvernement de l’Europe reproduit le Conseil fédéral suisse. Qu’est-

828 communautés. En fait, mon modèle de gouvernement de l’Europe reproduit le Conseil fédéral suisse. Qu’est-ce que le Consei

829 rables, à l’échelle du continent. Cette recherche d’ un équilibre humain est d’ailleurs beaucoup plus révolutionnaire qu’on

830 se la fin du gigantisme des villes, la recréation de petites unités de 25 000 ou 50 000 habitants, avec leur vie civique,

831 tisme des villes, la recréation de petites unités de 25 000 ou 50 000 habitants, avec leur vie civique, c’est une transfor

832 s unités de 25 000 ou 50 000 habitants, avec leur vie civique, c’est une transformation du cadre européen qui peut aller tr

833 n qui peut aller très loin. o. Rougemont Denis de , « [Entretien] L’Europe à l’heure de ses choix II : Se rallier à l’id

834 gemont Denis de, « [Entretien] L’Europe à l’heure de ses choix II : Se rallier à l’idée suisse », Tribune de Lausanne — Le

835 choix II : Se rallier à l’idée suisse », Tribune de Lausanne — Le Matin, Lausanne, 22 novembre 1970, p. 33 et 37. p. Pro

836 oir montré comment il ne restait plus aujourd’hui d’ autre choix que celui de faire l’Europe ou alors d’accepter de devenir

837 restait plus aujourd’hui d’autre choix que celui de faire l’Europe ou alors d’accepter de devenir une sorte de satellite,

838 ’autre choix que celui de faire l’Europe ou alors d’ accepter de devenir une sorte de satellite, des États-Unis ou de l’URS

839 x que celui de faire l’Europe ou alors d’accepter de devenir une sorte de satellite, des États-Unis ou de l’URSS, esquissa

840 l’Europe ou alors d’accepter de devenir une sorte de satellite, des États-Unis ou de l’URSS, esquissait ce problème crucia

841 devenir une sorte de satellite, des États-Unis ou de l’URSS, esquissait ce problème crucial devant lequel se trouvent aujo

842 equel se trouvent aujourd’hui confrontés les pays de l’Europe industrialisée : continuer la course effrénée et suicidaire

843 uer la course effrénée et suicidaire au niveau de vie ou se mettre en quête d’un mode de vie qui soit conforme aux traditio

844 suicidaire au niveau de vie ou se mettre en quête d’ un mode de vie qui soit conforme aux traditions européennes. Dans la s

845 onforme aux traditions européennes. Dans la suite de l’entretien que nous publions aujourd’hui, Denis de Rougemont montre

846 a Suisse peut et doit s’insérer dans ce processus d’ édification d’une Europe fédérale. De telles réflexions ne sauraient m

847 et doit s’insérer dans ce processus d’édification d’ une Europe fédérale. De telles réflexions ne sauraient mieux venir pro

848 ce processus d’édification d’une Europe fédérale. De telles réflexions ne sauraient mieux venir propos, au moment où comme

849 Liard (décembre 1970)q r Quelle est l’occasion de la parution de ces deux livres, qui sortent peu de temps après un ouv

850 1970)q r Quelle est l’occasion de la parution de ces deux livres, qui sortent peu de temps après un ouvrage publié che

851 ne un programme, pour les vingt ans qui viennent, de l’avant-garde européenne. C’est donc un livre plus politique. Dans L

852 t à l’action culturelle que suppose la fédération de l’Europe telle que je l’entends. Recherches et action qui portent sur

853 sur l’éducation, le civisme, qui, comme le dit un de mes titres, commence au respect des forêts, c’est-à-dire englobe tous

854 s forêts, c’est-à-dire englobe tous les problèmes d’ environnement, aussi bien urbain que rural. Les problèmes d’éducation

855 ement, aussi bien urbain que rural. Les problèmes d’ éducation m’ont amené au problème de l’Université, et là, je montre la

856 Les problèmes d’éducation m’ont amené au problème de l’Université, et là, je montre la fécondité des études régionales. Ju

857 inement des esprits introduisent, qu’il s’agisse de festivals de musique, de guildes du livre et d’édition, d’éducation o

858 sprits introduisent, qu’il s’agisse de festivals de musique, de guildes du livre et d’édition, d’éducation ou de civisme,

859 oduisent, qu’il s’agisse de festivals de musique, de guildes du livre et d’édition, d’éducation ou de civisme, toutes s’ét

860 e de festivals de musique, de guildes du livre et d’ édition, d’éducation ou de civisme, toutes s’établissent à travers les

861 als de musique, de guildes du livre et d’édition, d’ éducation ou de civisme, toutes s’établissent à travers les frontières

862 de guildes du livre et d’édition, d’éducation ou de civisme, toutes s’établissent à travers les frontières. Dans tous ces

863 avers les frontières. Dans tous ces cas, on passe de la région à l’ensemble européen. Dans les régions, dans les centres l

864 ait la culture en Europe et c’est dans l’ensemble de l’Europe que se sont établis les grands courants de l’art et de la pe

865 l’Europe que se sont établis les grands courants de l’art et de la pensée, de l’art roman jusqu’au surréalisme. Pas un se

866 e se sont établis les grands courants de l’art et de la pensée, de l’art roman jusqu’au surréalisme. Pas un seul de ces fo

867 lis les grands courants de l’art et de la pensée, de l’art roman jusqu’au surréalisme. Pas un seul de ces foyers culturels

868 de l’art roman jusqu’au surréalisme. Pas un seul de ces foyers culturels n’a coïncidé avec les frontières nationales. Com

869 tats-nations, qui ont tout fait pour les empêcher de vivre (voir la France) et qui maintenant sont contraints par les réal

870 s choses, par des échanges humains, des relations de voisinage, en dépit des capitales, et, un beau jour, elles auront tis

871 au jour, elles auront tissé entre elles tellement de liens qu’on s’apercevra que l’Europe « s’est faite ». Les liens entre

872 s plus solides que les liens qui unissent chacune de ces régions à sa capitale nationale. Et à ce moment-là, il suffira d’

873 capitale nationale. Et à ce moment-là, il suffira d’ installer des agences fédérales européennes sur le modèle des départem

874 le des départements fédéraux suisses. Chaque type de région, car il y aura des régions économiques, des régions sociocultu

875 écologiques, aura son agence fédérale et le siège de ces différentes agences pourrait s’établir en Suisse, notre pays deve

876 nt un district fédéral. Quels seront les critères de délimitation des régions ? Les régions se formeront d’après la dimens

877 s décisions seront prises, puis établir le niveau de décision dans la communauté qui est assez grande pour la tâche consid

878 he considérée. La tâche du CERN, par exemple, est de dimension continentale, celle de l’Université s’étend à la région. Un

879 par exemple, est de dimension continentale, celle de l’Université s’étend à la région. Une région bretonne devrait déborde

880 sur les Cornouailles anglaises et sur les villes de Nantes et Rennes. Il faut beaucoup de souplesse. Une région ne doit p

881 peu à peu ils se déferont. À mesure que le tissu de liens réels se resserrera entre les régions, les liens avec les capit

882 atre une entité telle que le bassin Ruhr-Moselle. De quelle manière le Centre européen de la culture contribue-t-il à la c

883 ropéen de la culture contribue-t-il à la création d’ une Europe unie ? Le Cheminement des esprits donne une idée du trav

884 s chaque domaine. Nous avons réuni les directeurs de centres nucléaires, les directeurs de guildes, les directeurs d’insti

885 directeurs de centres nucléaires, les directeurs de guildes, les directeurs d’instituts de recherches européennes, les di

886 éaires, les directeurs de guildes, les directeurs d’ instituts de recherches européennes, les directeurs de festivals de mu

887 directeurs de guildes, les directeurs d’instituts de recherches européennes, les directeurs de festivals de musique, car i

888 stituts de recherches européennes, les directeurs de festivals de musique, car il est plus facile d’associer d’abord les c

889 cherches européennes, les directeurs de festivals de musique, car il est plus facile d’associer d’abord les choses nouvell

890 s de festivals de musique, car il est plus facile d’ associer d’abord les choses nouvelles. Les problèmes sont les mêmes po

891 mes sont les mêmes pour tous et tous sont heureux de se rencontrer en terrain neutre. Estimez-vous que vos idées sur la fé

892 tre. Estimez-vous que vos idées sur la fédération de l’Europe ont fait du chemin dans les esprits ces dernières années ? O

893 urtout en France, qui est le pays le plus éloigné de comprendre le fédéralisme. De nombreux témoignages me sont parvenus d

894 ays le plus éloigné de comprendre le fédéralisme. De nombreux témoignages me sont parvenus de gens qui m’appuient fortemen

895 ralisme. De nombreux témoignages me sont parvenus de gens qui m’appuient fortement, comme Louis Armand, Jean-Jacques Serva

896 me Louis Armand, Jean-Jacques Servan-Schreiber et de nombreux jeunes universitaires de toutes couleurs politiques. 65 % de

897 an-Schreiber et de nombreux jeunes universitaires de toutes couleurs politiques. 65 % de la population des pays du Marché

898 niversitaires de toutes couleurs politiques. 65 % de la population des pays du Marché commun est favorable aux États-Unis

899 un est favorable aux États-Unis d’Europe, et 75 % de ces Européens sont des jeunes. q. Rougemont Denis de, « [Entretien

900 Européens sont des jeunes. q. Rougemont Denis de , « [Entretien] L’Un et le Divers et Le Cheminement des esprits  », Li

901 iard et présentés par cette note : « Les Éditions de la Baconnière ont publié, dans le courant du mois d’octobre, deux ouv

902 la Baconnière ont publié, dans le courant du mois d’ octobre, deux ouvrages de Denis de Rougemont, un grand Européen que l’

903 dans le courant du mois d’octobre, deux ouvrages de Denis de Rougemont, un grand Européen que l’on peut placer à côté de

904 que l’on peut placer à côté de Robert Schuman et de Jean Monnet. Ce sont L’Un et le Divers et Le Cheminement des espri

905 nissant deux discours qui illustrent cette parole d’ Héraclite : “Ce qui s’oppose coopère et de la lutte des contraires pro

906 parole d’Héraclite : “Ce qui s’oppose coopère et de la lutte des contraires procède la plus belle harmonie ». Depuis l’au

907 s procède la plus belle harmonie ». Depuis l’aube de la pensée occidentale, l’Un et de Divers s’opposent, ont besoin l’un

908 . Depuis l’aube de la pensée occidentale, l’Un et de Divers s’opposent, ont besoin l’un de l’autre, et ne se réalisent que

909 le, l’Un et de Divers s’opposent, ont besoin l’un de l’autre, et ne se réalisent que l’un par l’autre. Le fédéralisme est

910 ’autre. Le fédéralisme est l’expression politique de l’harmonie qui naît de leur lutte créatrice. Le titre du second est e

911 est l’expression politique de l’harmonie qui naît de leur lutte créatrice. Le titre du second est emprunté à une phrase de

912 ice. Le titre du second est emprunté à une phrase de Robert Schuman : “L’unité de l’Europe ne se fera ni uniquement ni pri

913 mprunté à une phrase de Robert Schuman : “L’unité de l’Europe ne se fera ni uniquement ni principalement par des instituti

914 textes recueillis dans ce livre sont très variés de forme, allant du « discours solennel » devant tous les recteurs de l’

915 du « discours solennel » devant tous les recteurs de l’Europe à l’interview improvisée pour une revue de militants. Chacun

916 l’Europe à l’interview improvisée pour une revue de militants. Chacun marque une péripétie dans la Quête de l’union de no

917 itants. Chacun marque une péripétie dans la Quête de l’union de nos peuples et de leurs élites responsables. Cheminement v

918 cun marque une péripétie dans la Quête de l’union de nos peuples et de leurs élites responsables. Cheminement vers l’Europ

919 ipétie dans la Quête de l’union de nos peuples et de leurs élites responsables. Cheminement vers l’Europe fédérée : il s’a

920 es. Cheminement vers l’Europe fédérée : il s’agit de surmonter les obstacles à l’union, qui sont d’abord dans les esprits.

921 l’union, qui sont d’abord dans les esprits. Puis d’ orienter espoirs et volontés vers une communauté nouvelle. Au-delà des

922 rs une communauté nouvelle. Au-delà des problèmes de niveau de vie, la fédération de l’Europe devient alors la condition d

923 elà des problèmes de niveau de vie, la fédération de l’Europe devient alors la condition d’un nouveau mode de vie, plus li

924 fédération de l’Europe devient alors la condition d’ un nouveau mode de vie, plus libre et riche de sens. Pour les lecteurs

925 ion d’un nouveau mode de vie, plus libre et riche de sens. Pour les lecteurs de Livres ouverts, nous avons posé à Denis de

926 e, plus libre et riche de sens. Pour les lecteurs de Livres ouverts, nous avons posé à Denis de Rougemont quelques questio

927 emont quelques questions suggérées par la lecture de ses ouvrages. »

928 États centralisés. — et parce qu’il faut REFAIRE DE VRAIES COMMUNAUTÉS, si l'on veut prévenir les désastres moraux , écol

929 volution actuelle. La région seule nous permettra de « faire l’Europe », sur la base de ses réalités, et nous offrira seul

930 nous permettra de « faire l’Europe », sur la base de ses réalités, et nous offrira seule les structures nécessaires à tout

931 s blés, la vigne et les forêts : elle doit monter d’ une terre, d’un peuple, d’une histoire, de leurs besoins et de leurs d

932 gne et les forêts : elle doit monter d’une terre, d’ un peuple, d’une histoire, de leurs besoins et de leurs désirs, à la r

933 rêts : elle doit monter d’une terre, d’un peuple, d’ une histoire, de leurs besoins et de leurs désirs, à la rencontre d’un

934 monter d’une terre, d’un peuple, d’une histoire, de leurs besoins et de leurs désirs, à la rencontre d’un appel qui vient

935 d’un peuple, d’une histoire, de leurs besoins et de leurs désirs, à la rencontre d’un appel qui vient de l’Europe et de l

936 leurs besoins et de leurs désirs, à la rencontre d’ un appel qui vient de l’Europe et de l’humanité solidaire. La région n

937 la rencontre d’un appel qui vient de l’Europe et de l’humanité solidaire. La région ne saurait donc être imposée d’en hau

938 solidaire. La région ne saurait donc être imposée d’ en haut, dictée et planifiée par les bureaux d’une métropole tentacula

939 ée d’en haut, dictée et planifiée par les bureaux d’ une métropole tentaculaire. Elle ne saurait être créée par quelque déc

940 e sur la carte, mais seulement par le rayonnement de sa vitalité. Elle ne saurait être octroyée de l’extérieur, mais seule

941 ent de sa vitalité. Elle ne saurait être octroyée de l’extérieur, mais seulement instaurée par l’essor de ses énergies cré

942 l’extérieur, mais seulement instaurée par l’essor de ses énergies créatrices. Surtout, elle ne doit pas se donner pour obj

943 Surtout, elle ne doit pas se donner pour objectif de saisir « une plus grande part du gâteau » étatique. Elle doit cuire s

944 rait tous les inconvénients des grands, plus ceux de la petitesse physique. Il faut la concevoir, au contraire, comme la c

945 aut la concevoir, au contraire, comme la création d’ une communauté SUI GENERIS, d’un milieu humain où l’on se sent heureux

946 , comme la création d’une communauté SUI GENERIS, d’ un milieu humain où l’on se sent heureux de vivre, de travailler ou de

947 NERIS, d’un milieu humain où l’on se sent heureux de vivre, de travailler ou de ne rien faire, ce qui est sans doute le me

948 n milieu humain où l’on se sent heureux de vivre, de travailler ou de ne rien faire, ce qui est sans doute le meilleur tes

949 ù l’on se sent heureux de vivre, de travailler ou de ne rien faire, ce qui est sans doute le meilleur test d’un environnem

950 ien faire, ce qui est sans doute le meilleur test d’ un environnement de qualité. Plutôt que de chercher à se rendre concur

951 st sans doute le meilleur test d’un environnement de qualité. Plutôt que de chercher à se rendre concurrentielle, elle doi

952 ur test d’un environnement de qualité. Plutôt que de chercher à se rendre concurrentielle, elle doit chercher à se rendre

953 cher à se rendre utile, et son problème n’est pas d’ exploiter le voisin mais de coopérer avec lui. Elle n’a donc nul besoi

954 son problème n’est pas d’exploiter le voisin mais de coopérer avec lui. Elle n’a donc nul besoin d’être, comme on le répèt

955 is de coopérer avec lui. Elle n’a donc nul besoin d’ être, comme on le répète, « de taille européenne » — ce qui ne veut st

956 n’a donc nul besoin d’être, comme on le répète, « de taille européenne » — ce qui ne veut strictement rien dire hors du ja

957 qui ne veut strictement rien dire hors du jargon de la guerre commerciale — mais on attend d’elle, au contraire, qu’elle

958 jargon de la guerre commerciale — mais on attend d’ elle, au contraire, qu’elle soit différente des autres, séduisante pou

959 ur les touristes, unique en son genre et heureuse de l’être, et d’autant plus curieuse d’échanges. Vous voulez être libres

960 es, unique en son genre et heureuse de l’être, et d’ autant plus curieuse d’échanges. Vous voulez être libres ? Devenez res

961 et heureuse de l’être, et d’autant plus curieuse d’ échanges. Vous voulez être libres ? Devenez responsables. N’attendez p

962 . PRENEZ vos responsabilités, inventez les moyens de les exercer ! La région ne sera pas l’œuvre des technocrates de l’Éta

963 ! La région ne sera pas l’œuvre des technocrates de l’État central, mais des habitants de la région eux-mêmes. ay. Rou

964 echnocrates de l’État central, mais des habitants de la région eux-mêmes. ay. Rougemont Denis de, « Message aux régiona

965 ts de la région eux-mêmes. ay. Rougemont Denis de , « Message aux régionalistes », Mouvement Région Savoie, Servoz, 16 m

966 Souvenir d’ Honegger et de Nicolas de Flue (1971)v La part du hasard Dans

967 Souvenir d’Honegger et de Nicolas de Flue (1971)v La part du hasard Dans le monde de l’

968 e (1971)v La part du hasard Dans le monde de l’esprit et de ses œuvres, il n’est pas de chance imméritée : les cho

969 La part du hasard Dans le monde de l’esprit et de ses œuvres, il n’est pas de chance imméritée : les choses ne viennent

970 monde de l’esprit et de ses œuvres, il n’est pas de chance imméritée : les choses ne viennent à point que pour qui s’y at

971 ment disposé à les recevoir. Il importe au propos de ces pages que je marque d’abord la part des hasards apparents dans la

972 tion du Nicolas de Flue qui me valut le bonheur de travailler avec Arthur Honegger. Le mercredi 28 septembre 1938, au mi

973 à la radio suisse. Est-ce la guerre, qu’on attend d’ une heure à l’autre ? C’est Munich, c’est la paix (pense-t-on vraiment

974 aix (pense-t-on vraiment ce jour-là…) et l’avenir d’ un coup qui se rouvre, mais aussi les problèmes qui reviennent, cette

975 outais Honegger dirigeant son Nocturne au théâtre de la Fenice. J’éprouvais une fois de plus que sa musique me touchait pl

976 de plus que sa musique me touchait plus qu’aucune de notre temps, si haut que fût à mes yeux Stravinski, et je me disais q

977 mme selon mon cœur… Mais ce n’était pas pour tout de suite ! Je venais d’écrire coup sur coup, en moins de neuf mois, L’A

978 ais ce n’était pas pour tout de suite ! Je venais d’ écrire coup sur coup, en moins de neuf mois, L’Amour et l’Occident ,

979 uite ! Je venais d’écrire coup sur coup, en moins de neuf mois, L’Amour et l’Occident , le Journal d’Allemagne , un troi

980 e neuf mois, L’Amour et l’Occident , le Journal d’ Allemagne , un troisième ouvrage (demeuré inédit) et une série de conf

981 n troisième ouvrage (demeuré inédit) et une série de conférences. C’était assez pour cette année. Les menaces de guerre me

982 nces. C’était assez pour cette année. Les menaces de guerre me firent rentrer en Suisse plus tôt que prévu. C’est à ce mom

983 ôt que prévu. C’est à ce moment que l’on m’offrit d’ écrire une pièce pour l’Exposition nationale qui devait s’ouvrir à Zur

984 uivante. J’étais en train de sortir mes uniformes d’ une malle, je n’avais pas de sujet et je défiais quiconque d’en trouve

985 sortir mes uniformes d’une malle, je n’avais pas de sujet et je défiais quiconque d’en trouver un, en Suisse, qui fût de

986 , je n’avais pas de sujet et je défiais quiconque d’ en trouver un, en Suisse, qui fût de taille à occuper l’énorme scène d

987 ais quiconque d’en trouver un, en Suisse, qui fût de taille à occuper l’énorme scène dont j’avais vu les plans : 35 m de l

988 r l’énorme scène dont j’avais vu les plans : 35 m de large, 18 de profondeur, trois niveaux reliés par des marches, point

989 ène dont j’avais vu les plans : 35 m de large, 18 de profondeur, trois niveaux reliés par des marches, point de décors ni

990 deur, trois niveaux reliés par des marches, point de décors ni de rideaux, tout cela béant devant une salle de 6000 places

991 iveaux reliés par des marches, point de décors ni de rideaux, tout cela béant devant une salle de 6000 places. Je demandai

992 s ni de rideaux, tout cela béant devant une salle de 6000 places. Je demandai quelques jours « pour réfléchir » et n’en fi

993 la catastrophe réglerait tout. Sur quoi, le coup de téléphone que j’ai dit, toute la vie qui se reprend à vivre, les déla

994 quoi, le coup de téléphone que j’ai dit, toute la vie qui se reprend à vivre, les délais à courir, le sujet à me fuir. Le j

995 tre sans raison apparente une biographie nouvelle de Nicolas de Flue. J’en avais parcouru distraitement quelques pages. L’

996 t quelques pages. L’image scolaire que je gardais de cet ermite du xve siècle était bien pâle. Mais ce soir-là, je repren

997 t. Mystique naïf, au bord de l’hérésie, exerçant, de son ermitage dans les Alpes, un empire étendu et profond sur l’esprit

998 s Alpes, un empire étendu et profond sur l’esprit de ses compatriotes, s’il a prévenu in extremis la guerre entre les cant

999 les cantons suisses, c’est par l’autorité que sa vie d’ascète donne au message secret qu’il envoie à la Diète, et dont on

1000 cantons suisses, c’est par l’autorité que sa vie d’ ascète donne au message secret qu’il envoie à la Diète, et dont on ne

1001 soudain un contact s’établit, le passé se charge de l’émotion présente et lui prête en retour une dimension nouvelle, com

1002 le, le peuple attend l’annonce fatidique, et tout d’ un coup, à grandes volées, les cloches de la délivrance : c’est cela q

1003 et tout d’un coup, à grandes volées, les cloches de la délivrance : c’est cela que l’Europe vient de vivre ! Nuit blanche

1004 is actes se composent. Au matin j’ai tout le plan de la pièce et j’en ai vu le paradoxe essentiel : peupler et animer une

1005 tiel : peupler et animer une scène immense autour d’ un seul personnage important, le Solitaire par excellence ! Revenir au

1006 ité qui peut s’adapter à la fois à la déclamation d’ un chœur en marche et au dialogue du drame civique et spirituel. Tout

1007 et celui-ci ne peut être qu’Honegger. La part de la commande Je vais le voir à Paris. Je ne le connaissais pas. En

1008 aissais pas. En pleine gloire, à 46 ans, il vient d’ écrire Jeanne au bûcher et La Danse des morts avec Claudel. De quinze

1009 nne au bûcher et La Danse des morts avec Claudel. De quinze ans son cadet, inconnu du grand public, je ne lui apporte rien

1010 ui en résume les données, j’esquisse la structure de la pièce, suggérée par celle de la scène, et les ressources du canton

1011 isse la structure de la pièce, suggérée par celle de la scène, et les ressources du canton qui patronnera l’œuvre : une co

1012 du canton qui patronnera l’œuvre : une compagnie de théâtre d’amateurs et deux petits chœurs à Neuchâtel, un grand chœur

1013 qui patronnera l’œuvre : une compagnie de théâtre d’ amateurs et deux petits chœurs à Neuchâtel, un grand chœur et une fanf

1014 stumes à domicile. Je tombe bien : Honegger vient d’ écrire que la seule forme théâtrale à laquelle il croit pour l’avenir

1015 Une ou deux fois la semaine, je descends à Paris, de La Celle-Saint-Cloud où j’habite, et je monte au boulevard de Clichy

1016 Saint-Cloud où j’habite, et je monte au boulevard de Clichy avec quelques pages dans ma poche. (J’ai écrit le chœur des Co

1017 ans ma poche. (J’ai écrit le chœur des Compagnons de la Follevie sur les marches de son escalier, un jour qu’il était en r

1018 œur des Compagnons de la Follevie sur les marches de son escalier, un jour qu’il était en retard.) Nos entretiens sont str

1019 ictement techniques. Il me demande combien il y a de cuivres durs et de cuivres mous dans la fanfare de La Chaux-de-Fonds.

1020 . Il me demande combien il y a de cuivres durs et de cuivres mous dans la fanfare de La Chaux-de-Fonds. (Je n’en sais rien

1021 e cuivres durs et de cuivres mous dans la fanfare de La Chaux-de-Fonds. (Je n’en sais rien.) Il me prête un recueil de cho

1022 onds. (Je n’en sais rien.) Il me prête un recueil de chorals luthériens, pour que j’en étudie la prosodie précise. Il veut

1023 voir la fonction, la durée et presque la tonalité de chacune des interventions d’un des trois chœurs que j’ai prévus. Quel

1024 presque la tonalité de chacune des interventions d’ un des trois chœurs que j’ai prévus. Quelquefois il m’appelle au télép

1025  ». Il m’a dit : « Quand vous écrivez les paroles d’ un chœur, chantez-les sur un air quelconque, comme “Frère Jacques”. Ce

1026 oue mal, je ne distingue pas grand-chose, une fin de choral pourtant, dont il me dit en riant : « Vous voyez, ça finit com

1027 olique ou protestante peu importe. » Mais un soir d’ août 1939, à La Chaux-de-Fonds, assistant pour la première fois à une

1028 chanté, clamé ou soutenu par le chœur au sublime de la précision dans le sentiment, non seulement mon texte, mais tout ce

1029 ieux (voire pour moi théologique, à cette époque) de ma « Légende dramatique » est révélé tantôt en majesté, — toute la pr

1030 du cœur Plus tard, je lui ai demandé le secret de cette divination spirituelle, et il m’a dit modestement : « J’apprend

1031 out. Il y a là plus qu’un processus psychologique de transmission par les mots. Jamais, pas un instant, nous n’avons eu l’

1032 s. Jamais, pas un instant, nous n’avons eu l’idée de parler du sens profond de la pièce, ni de la religion en général, ni

1033 nous n’avons eu l’idée de parler du sens profond de la pièce, ni de la religion en général, ni de nos positions personnel

1034 l’idée de parler du sens profond de la pièce, ni de la religion en général, ni de nos positions personnelles à son égard.

1035 ond de la pièce, ni de la religion en général, ni de nos positions personnelles à son égard. Je ne sais pas pourquoi d’ail

1036 nées fixes du problème et mettre au point un code de collaboration, et, cela fait, chacun s’absorbe en son travail, selon

1037 , chacun s’absorbe en son travail, selon les lois de son langage particulier. Or, l’aisance même à nous mettre d’accord su

1038 d sur ces règles du jeu, puis à jouer — la partie de création proprement dite nous prit deux mois — voilà qui ne pouvait s

1039 ord plus profond, par nature implicite, j’entends de telle nature qu’il ne pût se traduire d’une manière authentique et fi

1040 ’entends de telle nature qu’il ne pût se traduire d’ une manière authentique et fidèle que dans l’œuvre commune, non sous u

1041 mune, non sous une forme discursive. Cette espèce d’ harmonie préétablie, comment ne pas admettre après coup qu’elle ait go

1042 u’elle ait gouverné dans le fait plusieurs séries de « hasards objectifs », comme dit Breton, et tiré bon parti de leur co

1043 objectifs », comme dit Breton, et tiré bon parti de leur convergence avec l’événement historique, pour aboutir à notre or

1044 n 1945 à son exécution au Vatican, lors des fêtes de la canonisation (combien tardive) de Nicolas, premier saint suisse, c

1045 rs des fêtes de la canonisation (combien tardive) de Nicolas, premier saint suisse, célébrée par deux protestants ! La

1046 uisse, célébrée par deux protestants ! La part de Dieu Il serait vain de faire appel à des éléments contingents pour

1047 rotestants ! La part de Dieu Il serait vain de faire appel à des éléments contingents pour expliquer le phénomène. T

1048 ntitulé le Calvaire ; à 15 ans, il reçoit le choc de sa vie lorsque Caplet vient diriger au temple protestant des cantates

1049 é le Calvaire ; à 15 ans, il reçoit le choc de sa vie lorsque Caplet vient diriger au temple protestant des cantates de Bac

1050 t vient diriger au temple protestant des cantates de Bach. Parmi ses plus belles œuvres et ses plus grands succès, les tro

1051 , la Danse des morts, Nicolas de Flue, l’Oratorio de Noël, mais aussi le Cantique pour Pâques dès 1918, les Psaumes de 194

1052 ssi le Cantique pour Pâques dès 1918, les Psaumes de 1940, la Symphonie liturgique. Une connaissance intime du lyrisme bib

1053 Antiquité », dit Ramuz —, du choral luthérien et de la polyphonie du xvie siècle calviniste, ce serait assez pour défini

1054 calviniste, ce serait assez pour définir le style d’ un musicien confessionnel et du genre pieux, ce qu’Honegger n’est à au

1055 oyant, d’ailleurs. Ce n’est pas avec des traces «  d’ éducation chrétienne » et des formes vidées de la foi qui les forma qu

1056 s « d’éducation chrétienne » et des formes vidées de la foi qui les forma qu’on a jamais créé un style : avec tout cela on

1057 et le pire est le folklore religieux. Si le style d’ Honegger, dans la plupart des œuvres « à sujet religieux » que je vien

1058 art des œuvres « à sujet religieux » que je viens d’ énumérer, doit être qualifié d’essentiellement chrétien, ce n’est pas

1059 eux » que je viens d’énumérer, doit être qualifié d’ essentiellement chrétien, ce n’est pas à cause des sujets, ni des paro

1060 ituations mises en musique, ni même des croyances de l’homme, quelles qu’elles fussent. Sa musique est chrétienne parce qu

1061 e qu’elle est une prière, si la prière est l’acte de celui qui s’ouvre et s’ordonne à l’amour, c’est-à-dire : à Dieu tel q

1062 t-à-dire : à Dieu tel qu’il s’annonce au « cœur » de l’homme. Sa musique est chrétienne en cela qu’elle signifie, par son

1063 ar son affectivité même, « l’adéquation physique ( de l’homme) au monde », pour reprendre une formule d’Ansermet, « le fond

1064 e l’homme) au monde », pour reprendre une formule d’ Ansermet, « le fondement commun du monde et de ma propre existence » (

1065 ule d’Ansermet, « le fondement commun du monde et de ma propre existence » (de ma conscience), ou encore « le fondement de

1066 ment commun du monde et de ma propre existence » ( de ma conscience), ou encore « le fondement de l’être dans le monde, à s

1067 ce » (de ma conscience), ou encore « le fondement de l’être dans le monde, à savoir Dieu »3. En ce point, tout s’éclaire e

1068 ’enchaîne. L’anecdote dont je parlais prend force d’ exemple, les hasards apparents deviennent autant de signes, l’aléatoir

1069 ’exemple, les hasards apparents deviennent autant de signes, l’aléatoire devient liberté de choisir qui ne se renonce que

1070 ent autant de signes, l’aléatoire devient liberté de choisir qui ne se renonce que dans le choix du sens. Or ce sens tout

1071 ar la personne, et ne peut l’être que dans l’acte de foi, par quoi je n’entends pas du tout l’adhésion à quelque credo, ma

1072 tout l’adhésion à quelque credo, mais la réalité de l’opération en nous de quelque chose, disons l’Esprit, qui n’est pas

1073 que credo, mais la réalité de l’opération en nous de quelque chose, disons l’Esprit, qui n’est pas vérifiable autrement qu

1074 n certaines actions, pour l’autre certains objets de mots ou de couleurs ; pour Arthur Honegger, elles furent sa musique.

1075 actions, pour l’autre certains objets de mots ou de couleurs ; pour Arthur Honegger, elles furent sa musique. 3. Ernes

1076 sa musique. 3. Ernest Ansermet, Les Fondements de la musique dans la conscience humaine, tome I, p. 200, 188, 178. v.

1077 e, tome I, p. 200, 188, 178. v. Rougemont Denis de , « Souvenirs d’Honegger et de Nicolas de Flue  », Encyclopédie des Mu

1078 0, 188, 178. v. Rougemont Denis de, « Souvenirs d’ Honegger et de Nicolas de Flue  », Encyclopédie des Musiques sacrées,

1079 v. Rougemont Denis de, « Souvenirs d’Honegger et de Nicolas de Flue  », Encyclopédie des Musiques sacrées, vol. t. III, P

1080 les principaux textes qui ont jalonné l’évolution de cette entreprise si féconde en initiatives d’union des hommes au-delà

1081 ion de cette entreprise si féconde en initiatives d’ union des hommes au-delà des nations. Le titre est emprunté à une phra

1082 à des nations. Le titre est emprunté à une phrase de Robert Schuman — qui présida un temps le Comité du Centre : « L’unité

1083 présida un temps le Comité du Centre : « L’unité de l’Europe ne se fera ni uniquement, ni principalement par des institut

1084 ». Ainsi chemine Lancelot dans la forêt normande, d’ épreuves du courage en aventures de l’âme. Les textes ici recueillis s

1085 orêt normande, d’épreuves du courage en aventures de l’âme. Les textes ici recueillis sont très variés de forme, allant du

1086 l’âme. Les textes ici recueillis sont très variés de forme, allant du « discours solennel » devant tous les recteurs de l’

1087 du « discours solennel » devant tous les recteurs de l’Europe à l’interview improvisée pour une revue de militants. Chacun

1088 l’Europe à l’interview improvisée pour une revue de militants. Chacun marque une péripétie dans la Quête de l’union de no

1089 itants. Chacun marque une péripétie dans la Quête de l’union de nos peuples et de leurs élites responsables. Cheminement v

1090 cun marque une péripétie dans la Quête de l’union de nos peuples et de leurs élites responsables. Cheminement vers l’Europ

1091 ipétie dans la Quête de l’union de nos peuples et de leurs élites responsables. Cheminement vers l’Europe fédérée : il s’a

1092 es. Cheminement vers l’Europe fédérée : il s’agit de surmonter les obstacles à l’union, qui sont d’abord dans les esprits.

1093 l’union, qui sont d’abord dans les esprits. Puis d’ orienter espoirs et volontés vers une communauté nouvelle. Au-delà des

1094 rs une communauté nouvelle. Au-delà des problèmes de niveau de vie, la fédération de l’Europe devient alors la condition d

1095 elà des problèmes de niveau de vie, la fédération de l’Europe devient alors la condition d’un nouveau mode de vie, plus li

1096 fédération de l’Europe devient alors la condition d’ un nouveau mode de vie, plus libre et riche de sens. s. Rougemont D

1097 ion d’un nouveau mode de vie, plus libre et riche de sens. s. Rougemont Denis de, « Le cheminement des esprits », Bâtir

1098 lus libre et riche de sens. s. Rougemont Denis de , « Le cheminement des esprits », Bâtir l’Europe unie : témoignages re

1099 témoignages recueillis par l’Association des amis de Robert Schuman, Metz, Éditions Le Lorrain, 1971, p. 1.

1100 aul Martin s’est produite sur la scène du Théâtre de Lausanne, envahie par les bellettriens : bras dessus, bras dessous no

1101 tantôt à droite. Mon bras droit tenait le gauche d’ un aîné prestigieux capable de courir 800 mètres d’un trait et champio

1102 it tenait le gauche d’un aîné prestigieux capable de courir 800 mètres d’un trait et champion olympique pour cette raison,

1103 ’un aîné prestigieux capable de courir 800 mètres d’ un trait et champion olympique pour cette raison, sans doute. C’était

1104 t rajeuni me semble-t-il (les petites différences d’ âge s’effacent avec le temps). Il vient, de concert avec notre ami com

1105 rences d’âge s’effacent avec le temps). Il vient, de concert avec notre ami commun Raymond Silva — alors secrétaire généra

1106 ns les sports aussi — tous plus ou moins atteints de chauvinisme vociférant —, voilà une belle idée, que j’accepte d’entho

1107 vociférant —, voilà une belle idée, que j’accepte d’ enthousiasme. C’était en 1954. Après deux ans d’études, de réunions au

1108 e d’enthousiasme. C’était en 1954. Après deux ans d’ études, de réunions au Centre, de démarches auprès des grandes associa

1109 siasme. C’était en 1954. Après deux ans d’études, de réunions au Centre, de démarches auprès des grandes associations spor

1110 . Après deux ans d’études, de réunions au Centre, de démarches auprès des grandes associations sportives et des gouverneme

1111 s sportives et des gouvernements, la « Commission de pédagogie sportive », animée par Martin et Silva, met au point une ch

1112 al du Souzy et M. Bourdeau de Fontenay, directeur de l’École nationale d’administration, tous amis de Paul Martin et amené

1113 rdeau de Fontenay, directeur de l’École nationale d’ administration, tous amis de Paul Martin et amenés par ses soins à col

1114 de l’École nationale d’administration, tous amis de Paul Martin et amenés par ses soins à collaborer avec le Centre. Une

1115 échouer — en dépit des appuis les plus efficaces de dernière heure, comme celui de S. A. R. le prince Bernhard des Pays-B

1116 les plus efficaces de dernière heure, comme celui de S. A. R. le prince Bernhard des Pays-Bas — devant les susceptibilités

1117 ernhard des Pays-Bas — devant les susceptibilités de l’olympisme officiel. Quelques années plus tard, j’eus la surprise de

1118 iel. Quelques années plus tard, j’eus la surprise de recevoir des papiers à en-tête du Conseil de l’Europe annonçant la cr

1119 de l’Europe annonçant la création par ce dernier d’ un « Brevet européen du sportif ». On m’en communiquait le texte « pou

1120 information, pensant que ce sujet était peut-être de nature à m’intéresser ». Je reconnus au premier coup d’œil « notre »

1121 rtin avait gagné la course. u. Rougemont Denis de , « Quand Paul Martin voulait faire courir l’Europe », Hommage à Paul

1122 L’Europe est d’abord une unité de culture (1971)x y Je pars de ce qui me paraît une évidence majeure

1123 d’abord une unité de culture (1971)x y Je pars de ce qui me paraît une évidence majeure : il nous faut faire l’Europe a

1124 — cette Europe divisée n’a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéologique, militaire et polic

1125 e et policière par les Russes — je songe aux pays de l’Est européen —, d’autre part à la colonisation de notre économie et

1126 l’Est européen —, d’autre part à la colonisation de notre économie et de nos coutumes sociales par les Américains. Mais l

1127 autre part à la colonisation de notre économie et de nos coutumes sociales par les Américains. Mais l’Europe ne pourra jam

1128 pe unifiée et uniformisée, deux hommes ont essayé de la faire : Napoléon et Hitler. Dans les deux cas, l’expérience sécula

1129 . (La Suisse, en regard, approche du viie siècle de sa continuité historique, continuité que l’on peut très bien faire re

1130 ’on peut très bien faire remonter au pacte secret de 1273, que le Pacte du 1er août 1291 ne fera guère que copier.) Or il

1131 uveau contre toute union fédérale, je veux parler de l’État national de type xixe siècle, jacobin et napoléonien, copié p

1132 union fédérale, je veux parler de l’État national de type xixe siècle, jacobin et napoléonien, copié par plus de cent pay

1133 e siècle, jacobin et napoléonien, copié par plus de cent pays dans le monde entier, l’État-nation à souveraineté théoriqu

1134 qui nous fait croire depuis plusieurs générations de bons élèves et de maîtres eux-mêmes trop crédules, que l’État nationa

1135 re depuis plusieurs générations de bons élèves et de maîtres eux-mêmes trop crédules, que l’État national centralisé et ab

1136 l’aboutissement nécessaire, inévitable et naturel de toute l’évolution humaine. L’école, surtout secondaire — mais l’unive

1137 ortelles, ce qui suggère qu’elles auraient existé de toute éternité, alors qu’en vérité, pour la plupart, en tant qu’État,

1138 at, et en moyenne, elles n’ont même pas un siècle d’ âge. Seules la France, l’Angleterre et l’Espagne comptent, comme État,

1139 général de Gaulle, l’un des plus grands champions de l’immortalité des nations, a beaucoup varié lui-même quant à la date

1140 ême quant à la date qu’il attribue à la naissance de l’histoire de France : tantôt il la fait remonter à Brennus, chef gau

1141 date qu’il attribue à la naissance de l’histoire de France : tantôt il la fait remonter à Brennus, chef gaulois probablem

1142 notre ère, tantôt à Clovis, qui est du ve siècle de notre ère, ou enfin à Hugues Capet, qui est du xe siècle, soit une h

1143 Capet, qui est du xe siècle, soit une hésitation d’ un millénaire et demi, qui ne manque pas d’une certaine « grandeur ».

1144 tation d’un millénaire et demi, qui ne manque pas d’ une certaine « grandeur ». Mais si l’on peut admettre que l’État franç

1145 7, et Malte 10. L’école vous a raconté que chacun de nos États-nations correspond à une langue, à une ethnie, à un ensembl

1146 Et vous l’avez cru ! Vous croyez donc que chacun de nos États-nations a sa langue et que ses frontières coïncident avec s

1147 s-nations ne sauraient céder sans trahir un pouce de leur sacro-sainte souveraineté, et qu’ils sont immortels. Or, tout es

1148 les conclusions politiques qui ne manqueront pas de résulter de ces mises au point. Et tout d’abord : il n’y a pas de cu

1149 ions politiques qui ne manqueront pas de résulter de ces mises au point. Et tout d’abord : il n’y a pas de cultures natio

1150 s mises au point. Et tout d’abord : il n’y a pas de cultures nationales. La culture européenne n’est pas la somme de ving

1151 ionales. La culture européenne n’est pas la somme de vingt-cinq cultures nationales, puisqu’elle existait bien avant la fo

1152 nt la formation, récente, nous venons de la voir, de nos États. Le mot nation, natio en latin, désignait au Moyen Âge, dan

1153 n Âge, dans une ville universitaire, les colonies d’ étudiants venus d’une même région d’Europe et parlant entre eux la mêm

1154 lle universitaire, les colonies d’étudiants venus d’ une même région d’Europe et parlant entre eux la même langue : nation

1155 les colonies d’étudiants venus d’une même région d’ Europe et parlant entre eux la même langue : nation anglaise, nation f

1156 de culture commune, bien antérieure à l’idée même d’ État-nation. Mais, me direz-vous, le mot « nation » désignait, dès ce

1157 e même langue ? Oui, mais il n’était pas question de les enfermer pour si peu dans les frontières d’un même État. D’ailleu

1158 n de les enfermer pour si peu dans les frontières d’ un même État. D’ailleurs, il n’est pas vrai que nos stato-nations mode

1159 nos stato-nations modernes correspondent à l’aire de diffusion d’une langue. Prenez la France : on parle huit langues à l’

1160 ions modernes correspondent à l’aire de diffusion d’ une langue. Prenez la France : on parle huit langues à l’intérieur de

1161 , imposé comme seule langue officielle par l’édit de Villers-Cotterêts donné par François 1er en 1539. Si la France entend

1162 endiquer la Wallonie, la Suisse romande et le Val d’ Aoste au nom de l’unité linguistique, elle devrait s’amputer, pour le

1163 ique, elle devrait s’amputer, pour le même motif, de près de la moitié de ses territoires actuels. Prenez la langue allema

1164 amputer, pour le même motif, de près de la moitié de ses territoires actuels. Prenez la langue allemande : si elle devait

1165 nique et les Sudètes, les minorités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, des pay

1166 ètes, les minorités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, des pays baltes et de l

1167 orités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, des pays baltes et de la région de l

1168 de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, des pays baltes et de la région de la Volga. On m’object

1169 Transylvanie, de la Slovénie, des pays baltes et de la région de la Volga. On m’objecte souvent que nos langues sont trop

1170 , de la Slovénie, des pays baltes et de la région de la Volga. On m’objecte souvent que nos langues sont trop différentes

1171 ehru ne pouvait se faire comprendre qu’en anglais de l’immense majorité de ses concitoyens quand il les appelait préciséme

1172 re comprendre qu’en anglais de l’immense majorité de ses concitoyens quand il les appelait précisément à se libérer du jou

1173 se libérer du joug anglais. Alors que les Chinois de langues différentes ne peuvent communiquer entre eux qu’au moyen d’id

1174 ntes ne peuvent communiquer entre eux qu’au moyen d’ idéogrammes dessinés dans la paume de leur main, les Européens retrouv

1175 qu’au moyen d’idéogrammes dessinés dans la paume de leur main, les Européens retrouvent sans peine dans toutes leurs lang

1176 lement toutes les formes et tous les mots dérivés de leur commune origine indo-européenne, mais encore tout ce que leur hi

1177 viendront se superposer les influences dominantes de l’italien à la fin du Moyen Âge, du français au xviiie siècle, de l’

1178 fin du Moyen Âge, du français au xviiie siècle, de l’allemand des philosophes et des savants au xixe , et de l’anglo-amé

1179 emand des philosophes et des savants au xixe , et de l’anglo-américain de nos jours. Le mot « évêque », par exemple, véhic

1180 et des savants au xixe , et de l’anglo-américain de nos jours. Le mot « évêque », par exemple, véhiculé par l’usage ecclé

1181 de même des termes militaires comme « canon », et de tous les termes techniques d’aujourd’hui. Vues de loin, de l’Asie ou

1182 comme « canon », et de tous les termes techniques d’ aujourd’hui. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langu

1183 de tous les termes techniques d’aujourd’hui. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues se ressemblent co

1184 es termes techniques d’aujourd’hui. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues se ressemblent comme des s

1185 hniques d’aujourd’hui. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues se ressemblent comme des sœurs. Vue de

1186 s nos langues se ressemblent comme des sœurs. Vue de loin, l’unité culturelle de l’Europe est un fait que personne ne cont

1187 comme des sœurs. Vue de loin, l’unité culturelle de l’Europe est un fait que personne ne conteste — à part nos bons natio

1188 française, et elle a triomphé dans l’enseignement de la géographie au xixe , là encore contre toute évidence, mais au serv

1189 core contre toute évidence, mais au service dévot de l’État-nation. C’est ainsi qu’on nous a inculqué que le Rhin sépare l

1190 on nous a inculqué que le Rhin sépare les peuples de ses deux rives, mais que le Rhône les unit ; allez savoir pourquoi !

1191 un naïf) ne remarque pas que l’on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les deux versants, et à l’ouest l

1192 ôtés à la hauteur des vallées vaudoises et du Val d’ Aoste, plus loin l’allemand, puis le ladin, puis l’allemand de nouveau

1193 u Gothard, au cœur des Alpes. Non, les frontières de nos États n’ont jamais été « naturelles ». Elles sont accidentelles e

1194 storien français, le résultat des « viols répétés de la géographie par l’histoire », comme on le voit si bien autour de Ge

1195 ert à rien, ne protège contre rien, n’arrête rien de ce qu’il faudrait arrêter — la tempête, les épidémies, la pollution d

1196 arrêter — la tempête, les épidémies, la pollution de l’air et de l’eau — mais gêne tous les mouvements et vexe tout le mon

1197 tempête, les épidémies, la pollution de l’air et de l’eau — mais gêne tous les mouvements et vexe tout le monde : beau sy

1198 s mouvements et vexe tout le monde : beau symbole de la souveraineté stato-nationale, qui ne peut plus avoir d’effets que

1199 veraineté stato-nationale, qui ne peut plus avoir d’ effets que négatifs ! En nous présentant l’Europe comme un puzzle de n

1200 ifs ! En nous présentant l’Europe comme un puzzle de nations en teintes pâles, et la culture de l’Europe comme une additio

1201 puzzle de nations en teintes pâles, et la culture de l’Europe comme une addition de prétendues « cultures nationales » bie

1202 les, et la culture de l’Europe comme une addition de prétendues « cultures nationales » bien distinctes et rivales, les ma

1203 ionales » bien distinctes et rivales, les manuels de notre enfance non seulement se trouvaient justifier les pires chauvin

1204 vaient justifier les pires chauvinismes, fauteurs de deux guerres mondiales où l’Europe a failli périr, mais encore ils fa

1205 li périr, mais encore ils faussaient notre vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. La vérité qu’on no

1206 saient notre vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. La vérité qu’on nous cachait, c’est que la cultu

1207 notre vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. La vérité qu’on nous cachait, c’est que la culture de t

1208 re vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. La vérité qu’on nous cachait, c’est que la culture de tous

1209 a vérité qu’on nous cachait, c’est que la culture de tous nos peuples est une, qu’elle s’est formée à partir des mêmes inf

1210 soyons cultivés ou non. Toutes les grandes écoles d’ art, d’architecture, de musique, de philosophie et de doctrine politiq

1211 cultivés ou non. Toutes les grandes écoles d’art, d’ architecture, de musique, de philosophie et de doctrine politique ont

1212 Toutes les grandes écoles d’art, d’architecture, de musique, de philosophie et de doctrine politique ont été paneuropéenn

1213 grandes écoles d’art, d’architecture, de musique, de philosophie et de doctrine politique ont été paneuropéennes, et non p

1214 rt, d’architecture, de musique, de philosophie et de doctrine politique ont été paneuropéennes, et non pas nationales : l’

1215 e et le marxisme, bref tout ce qui compte dans la vie de la culture et qui a marqué les élites intellectuelles de tous nos

1216 le marxisme, bref tout ce qui compte dans la vie de la culture et qui a marqué les élites intellectuelles de tous nos pay

1217 ulture et qui a marqué les élites intellectuelles de tous nos pays, puis, à travers elles, formé nos sensibilités. Prenez

1218 s elles, formé nos sensibilités. Prenez l’exemple de la musique : rien de national dans son évolution. Elle naît avec le c

1219 nsibilités. Prenez l’exemple de la musique : rien de national dans son évolution. Elle naît avec le chant grégorien — prem

1220 u vie siècle en Italie ; s’enrichit aux couvents de Jumiège, puis de Saint-Gall avec les séquences et les tropes de Notke

1221 Italie ; s’enrichit aux couvents de Jumiège, puis de Saint-Gall avec les séquences et les tropes de Notker ; se constitue

1222 is de Saint-Gall avec les séquences et les tropes de Notker ; se constitue d’une manière autonome avec les troubadours du

1223 séquences et les tropes de Notker ; se constitue d’ une manière autonome avec les troubadours du Languedoc, dès le xiie s

1224 siècle, à Saint-Martial de Limoges, à Notre-Dame de Paris, puis plus tard en Champagne et dans le Nord et à Florence simu

1225 ltanément — laudi et madrigaux —, enfin à la cour de Bourgogne et dans les Flandres. Entre les cités flamandes et les cité

1226 cités italiennes, le long du grand axe commercial de la Renaissance, celui qui relie Venise à Bruges, les échanges de comp

1227 ce, celui qui relie Venise à Bruges, les échanges de compositeurs et de styles se multiplient au xve siècle. Une nouvelle

1228 Venise à Bruges, les échanges de compositeurs et de styles se multiplient au xve siècle. Une nouvelle école s’épanouit d

1229 rance et redescend vers l’Italie qu’elle enrichit de ses nombreuses découvertes, jusqu’au xvie siècle, quand Roland de La

1230 tiens. Bach copie avec application des partitions de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européen

1231 partitions de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européenne se déplace vers les régions germaniq

1232 de Vivaldi. Au xixe siècle, le centre de gravité de la musique européenne se déplace vers les régions germaniques, Hanovr

1233 s maîtres allemands que les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xx

1234 emands que les premiers compositeurs de Moscou et de Saint-Pétersbourg apprennent leur métier. Au début du xxe siècle, pl

1235 le, en imposant leurs œuvres à Paris… L’évolution de la peinture suit à peu de choses près les mêmes voies. Or ces voies,

1236 vec une glorieuse indifférence une bonne douzaine de nos frontières actuelles. Elles relient des cités, des foyers de créa

1237 es actuelles. Elles relient des cités, des foyers de création, des maîtres, et non pas des nations au sens moderne. Les gr

1238 Les grands courants européens, les grandes écoles d’ art et de pensée : c’est l’unité de notre culture commune. Mais qu’en

1239 s courants européens, les grandes écoles d’art et de pensée : c’est l’unité de notre culture commune. Mais qu’en est-il de

1240 grandes écoles d’art et de pensée : c’est l’unité de notre culture commune. Mais qu’en est-il de ses diversités tant vanté

1241 unité de notre culture commune. Mais qu’en est-il de ses diversités tant vantées, et à juste titre ? Est-il vrai, comme le

1242 titre ? Est-il vrai, comme le disent trop souvent d’ éloquents ministres à Bruxelles ou à Strasbourg, que ces « précieuses

1243 rg, que ces « précieuses diversités » sont celles de nos nations ? Je vous propose là-dessus deux observations faciles à v

1244 sus deux observations faciles à vérifier. Chacun de nos pays a un nord et un midi, dans chacun vous trouverez des croyant

1245 uverez des croyants et des incroyants, des hommes de gauche et des hommes de droite, des romantiques-surréalistes et des c

1246 es incroyants, des hommes de gauche et des hommes de droite, des romantiques-surréalistes et des classiques plus ou moins

1247 s en fait que dans la plupart des cas, les hommes de gauche de pays différents se ressembleront davantage et s’entendront

1248 que dans la plupart des cas, les hommes de gauche de pays différents se ressembleront davantage et s’entendront mieux entr

1249 x entre eux qu’ils ne s’entendent avec les hommes de droite de leur propre nation ; que les surréalistes d’un pays s’accor

1250 x qu’ils ne s’entendent avec les hommes de droite de leur propre nation ; que les surréalistes d’un pays s’accorderont mie

1251 oite de leur propre nation ; que les surréalistes d’ un pays s’accorderont mieux avec les surréalistes de l’étranger qu’ave

1252 un pays s’accorderont mieux avec les surréalistes de l’étranger qu’avec les conformistes de leur propre nation ; et ainsi

1253 rréalistes de l’étranger qu’avec les conformistes de leur propre nation ; et ainsi de suite. Ce ne sont pas nos appartenan

1254 les conformistes de leur propre nation ; et ainsi de suite. Ce ne sont pas nos appartenances nationales qui nous diversifi

1255 ersifient vraiment, c’est la pluralité des écoles de pensée et des styles de vie dans chaque nation. Supprimez les frontiè

1256 t la pluralité des écoles de pensée et des styles de vie dans chaque nation. Supprimez les frontières nationales, vous n’a

1257 a pluralité des écoles de pensée et des styles de vie dans chaque nation. Supprimez les frontières nationales, vous n’appau

1258 e et diverse, et vous ne risquerez pas un instant de créer ce fameux volapük que dénonçait de Gaulle, non sans démagogie u

1259 bservation : la création culturelle en Europe est d’ autant plus riche et intense qu’elle est moins centralisée et que ses

1260 yers sont plus nombreux. Au Moyen Âge, ces foyers de création sont les universités, à la renaissance les petites cités du

1261 petites cités du Nord de l’Italie, des Flandres, de la Bourgogne et de la Rhénanie. On sait le rôle merveilleusement féco

1262 ord de l’Italie, des Flandres, de la Bourgogne et de la Rhénanie. On sait le rôle merveilleusement fécondant de petites vi

1263 nanie. On sait le rôle merveilleusement fécondant de petites villes comme Tubingue, Iéna, Weimar ou Dresde dans l’Allemagn

1264 des Humboldt, au moment même où Napoléon faisait de la France un désert culturel en mobilisant à Paris tous les esprits d

1265 tingués qu’il n’avait pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture européenne, il est dans cette i

1266 s bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture européenne, il est dans cette interaction perpétuelle d

1267 unité vivante et dynamique, et des foyers locaux de création, qui sans cesse remettent en question et renouvellent les do

1268 uisses. Car la Suisse n’a jamais connu l’illusion d’ une « culture nationale » — ne fût-ce qu’en raison de son appartenance

1269 majoritaires dans les pays voisins. La situation de la culture en Suisse reflète exactement en microcosme la situation de

1270 sse reflète exactement en microcosme la situation de la culture à l’échelle du continent. Ce qui s’est fait en Suisse au p

1271 nent. Ce qui s’est fait en Suisse au point de vue de la culture — et qui est supérieur, proportionnellement, à tout ce qui

1272 t ce qui s’est fait dans n’importe quelle tranche de six millions d’hommes découpée dans n’importe lequel des pays qui nou

1273 ait dans n’importe quelle tranche de six millions d’ hommes découpée dans n’importe lequel des pays qui nous entourent —, t

1274 is éteints, le Saint-Gall de Notker et des débuts de la musique, l’Einsiedeln de la culture bénédictine, le Bâle d’Érasme,

1275 Notker et des débuts de la musique, l’Einsiedeln de la culture bénédictine, le Bâle d’Érasme, Holbein, Paracelse, puis la

1276 puis la Genève de Calvin. Ensuite l’École suisse de Zurich, qui règne au xviie siècle sur les lettres allemandes, puis B

1277 t du xxe siècle : Ferdinand de Saussure, le père de nos « sciences humaines », l’institut Rousseau, Jean Piaget, les Renc

1278 s — en sautant le stade national : voilà l’Europe de la culture, voilà, identiquement, la Suisse. Si maintenant je transpo

1279 rmes politiques mon équation culturelle : Europe de la culture = courants continentaux et foyers locaux cela va donner :

1280 paraître pratiquement, un peu comme il est arrivé de nos frontières cantonales, et je ne crois pas que nous y ayons perdu

1281 crois pas que nous y ayons perdu quoi que ce soit de vraiment précieux. Ces vérités sont assez dures à entendre pour les c

1282 tout. Pour nous autres Suisses, il devrait s’agir d’ évidences et presque de banalités. Toutefois, nous devons prendre gard

1283 Suisses, il devrait s’agir d’évidences et presque de banalités. Toutefois, nous devons prendre garde, dans le débat qui ba

1284 n à propos de notre entrée dans le Marché commun, de nous laisser entraîner sur un terrain qui n’est pas le nôtre, dans de

1285 jamais un laborieux et problématique échafaudage d’ accords tarifaires et de conventions intergouvernementales qui, sous p

1286 problématique échafaudage d’accords tarifaires et de conventions intergouvernementales qui, sous prétexte de faciliter un

1287 n on a une vraie amicale, mais alors il n’y a pas de misanthropes, ou bien on a de vrais misanthropes, mais alors il n’y a

1288 alors il n’y a pas de misanthropes, ou bien on a de vrais misanthropes, mais alors il n’y a pas d’amicale. L’Europe que n

1289 a de vrais misanthropes, mais alors il n’y a pas d’ amicale. L’Europe que nous voulons sera fédérale — ou alors elle ne se

1290 le seul pays européen qui n’ait pas pris la forme d’ un État-nation au siècle dernier. Le seul constitué par la libre adhés

1291 nstituent. Donc le seul qui n’ait rien à redouter de la disparition des frontières. Mais je vois là aussi plus qu’une inci

1292 ussi plus qu’une incitation : un appel, un devoir d’ agir. Il y a vingt-cinq ans, aux premières Rencontres internationales,

1293 plus vrai aujourd’hui et il nous dicte une ligne de conduite et d’action. Je sais bien que les Suisses sont timides et qu

1294 urd’hui et il nous dicte une ligne de conduite et d’ action. Je sais bien que les Suisses sont timides et qu’ils en font mê

1295 des et qu’ils en font même une vertu, sous le nom de modestie. Qu’ils fassent donc un effort, un courageux effort contre l

1296 ou jamais que la Suisse doit prendre l’initiative de proposer sa propre solution fédéraliste, de l’exposer en temps et hor

1297 ative de proposer sa propre solution fédéraliste, de l’exposer en temps et hors de temps, et d’exiger enfin qu’on la prenn

1298 liste, de l’exposer en temps et hors de temps, et d’ exiger enfin qu’on la prenne au sérieux. Ce sera « dans les intérêts d

1299 la prenne au sérieux. Ce sera « dans les intérêts de l’Europe entière », pour reprendre une formule célèbre, qui désignait

1300 alifier notre intervention. x. Rougemont Denis de , « L’Europe est d’abord une unité de culture », Intégration : Viertel

1301 gemont Denis de, « L’Europe est d’abord une unité de culture », Intégration : Vierteljahreshefte zur Europaforschung, Brux

1302 1 devant le parti libéral genevois. » Accompagnée de ce résumé, également traduit en allemand, anglais, italien et néerlan

1303 opéens, l’État-nation oppose le dogme sacro-saint de sa souveraineté illimitée, illusoire d’ailleurs, à cela près qu’elle

1304 fait croire que l’État-nation est le dernier mot de l’évolution, qu’il correspond à une langue et à une culture particuli

1305 est la création commune et trois fois millénaire de tous les Européens. Ses grands courants, écoles et styles relient des

1306 ment les frontières nationales. C’est sur la base de cette unité de culture que nous pourrons édifier l’union fédérale de

1307 ères nationales. C’est sur la base de cette unité de culture que nous pourrons édifier l’union fédérale de nos diversités.

1308 ulture que nous pourrons édifier l’union fédérale de nos diversités. »

1309 L’héritage culturel de l’Europe (1971)t Tout héritage du passé est porteur d’avenir. Il e

1310 ope (1971)t Tout héritage du passé est porteur d’ avenir. Il est cette part du passé qui à la fois m’ouvre un certain av

1311 aussi ce qu’il m’incite ou m’autorise à modifier d’ une manière inédite — qui sera moi. Distinguons donc trois sens possib

1312 trois sens possibles, du moins pour un Européen, de l’expression héritage culturel. 1. Il représente d’abord la somme de

1313 tage culturel. 1. Il représente d’abord la somme de tous les « produits » de la culture au cours des âges : religions et

1314 résente d’abord la somme de tous les « produits » de la culture au cours des âges : religions et philosophies, arts et let

1315 ux et pratiques politiques, législations et codes de la cité, jugements moraux, esthétiques et critiques, réflexes acquis

1316 d les langues et tout ce qu’elles conditionnent — modes de sentir, de juger, de penser —, à quoi s’ajoutent, puisque ces élém

1317 langues et tout ce qu’elles conditionnent — modes de sentir, de juger, de penser —, à quoi s’ajoutent, puisque ces élément

1318 tout ce qu’elles conditionnent — modes de sentir, de juger, de penser —, à quoi s’ajoutent, puisque ces éléments constitut

1319 ’elles conditionnent — modes de sentir, de juger, de penser —, à quoi s’ajoutent, puisque ces éléments constitutifs sont p

1320 es, successifs ou simultanés, et les interactions de ces systèmes… Ce donné historique toujours vivant en nous, ce passé j

1321 ieu, que nous le sachions ou non, un grand nombre de chances spécifiques proposées aux Européens, et dont ils peuvent tire

1322 roposées aux Européens, et dont ils peuvent tirer de libres créations ou ne rien faire, mais pose aussi des limitations pr

1323 ent. 3. L’héritage culturel enfin reste une somme de virtualités, dont nous ne pouvons en général actualiser qu’une part i

1324 au sens concret, que ce que nous sommes capables d’ en utiliser pour nos fins propres. Tout héritage culturel est en parti

1325 ie offert mais en partie subi. Devant l’immensité de l’offre européenne et ses complexités au moins trimillénaires, nous s

1326 au moins trimillénaires, nous sommes bien obligés de choisir. Nous assumons ou récusons certaines valeurs ou systèmes de v

1327 ssumons ou récusons certaines valeurs ou systèmes de valeurs selon nos problèmes présents. C’est dire que mis en face de l

1328 itage total, nous sentons qu’il comporte une part d’ hérédité inéluctable, mais que, dans la part libre, nos choix nécessai

1329 s ne deviendrons nous-mêmes qu’à ce prix, qui est d’ assumer les risques de notre différence personnelle ; et par là même,

1330 mêmes qu’à ce prix, qui est d’assumer les risques de notre différence personnelle ; et par là même, non point en revêtant

1331 un uniforme (matériel ou moral), nous deviendrons de vrais Européens. Les dimensions de l’héritage La bourgeoisie occ

1332 deviendrons de vrais Européens. Les dimensions de l’héritage La bourgeoisie occidentale (et tout le peuple à sa suit

1333 des deuxièmes programmes, et se tenir au courant de l’évolution des arts en avouant volontiers qu’on ne comprend plus — e

1334 tiers qu’on ne comprend plus — et voilà quelqu’un de cultivé. Si je dis au contraire que la culture est ce que l’homme ajo

1335 présente en fait tout ce que nous sommes capables de penser et presque tout ce que nous voyons sur notre petit coin de la

1336 sque tout ce que nous voyons sur notre petit coin de la planète, entre le sol et les nuages. La culture des Européens, qui

1337 té, est à la fois la somme et le produit complexe de nombreuses sociétés, de civilisations affrontées, mélangées, superpos

1338 me et le produit complexe de nombreuses sociétés, de civilisations affrontées, mélangées, superposées, partiellement absor

1339 tres, ou absorbantes, évoluant à travers les âges de Sumer à Thulé — ou l’inverse peut-être — avec leur chargement contine

1340 erse peut-être — avec leur chargement continental de mœurs et de coutumes, d’œuvres de tous les ordres, de systèmes religi

1341 re — avec leur chargement continental de mœurs et de coutumes, d’œuvres de tous les ordres, de systèmes religieux, cosmiqu

1342 r chargement continental de mœurs et de coutumes, d’ œuvres de tous les ordres, de systèmes religieux, cosmiques et monétai

1343 ent continental de mœurs et de coutumes, d’œuvres de tous les ordres, de systèmes religieux, cosmiques et monétaires, poli

1344 œurs et de coutumes, d’œuvres de tous les ordres, de systèmes religieux, cosmiques et monétaires, politiques ou métaphysiq

1345 iques et monétaires, politiques ou métaphysiques, de monuments et de paysages. (Presque tout le paysage européen est un fa

1346 res, politiques ou métaphysiques, de monuments et de paysages. (Presque tout le paysage européen est un fait de culture au

1347 es. (Presque tout le paysage européen est un fait de culture au sens que je viens de noter.) Et non seulement le phénomène

1348 nalisation, l’éducation continue, l’urbanisme, la mode et la psychanalyse, outre les disciplines traditionnelles ; non seule

1349 roche-oriental, précolombien, l’héritage culturel de l’Occident se révèle pluraliste jusqu’au vertige. Dans ses sources gé

1350 se. C’est qu’elle y a vu, ou pressenti, le secret de son dynamisme. Aux trois sources d’Athènes, Rome et Jérusalem, toujou

1351 ti, le secret de son dynamisme. Aux trois sources d’ Athènes, Rome et Jérusalem, toujours citées, mais dont on ne dira jama

1352 troisième —, il faut que nous prenions l’habitude de combiner en contrepoint la source celte, la germanique, la scandinave

1353 , ou deux d’entre elles. L’apport celtique — sens de la Quête, sens de l’échec transfigurant, sens de la démesure créatric

1354 elles. L’apport celtique — sens de la Quête, sens de l’échec transfigurant, sens de la démesure créatrice ; l’apport grec

1355 de la Quête, sens de l’échec transfigurant, sens de la démesure créatrice ; l’apport grec des grands mythes, des tragique

1356 ; l’apport grec des grands mythes, des tragiques, de Platon ; l’apport hébreu des psaumes et du Cantique, à travers le cul

1357 Cantique, à travers le culte chrétien ; l’apport de la cortezia occitane mêlée de gnose et d’érotique arabe : voilà la po

1358 chrétien ; l’apport de la cortezia occitane mêlée de gnose et d’érotique arabe : voilà la poésie et le roman de l’Europe.

1359 ’apport de la cortezia occitane mêlée de gnose et d’ érotique arabe : voilà la poésie et le roman de l’Europe. Ils auront c

1360 et d’érotique arabe : voilà la poésie et le roman de l’Europe. Ils auront contre eux, dès le départ, contre leur conceptio

1361 l’État qui entend totaliser ces trois puissances de mise en ordre, mais aussi les cyniques et libertins d’une part, et de

1362 is aussi les cyniques et libertins d’une part, et de l’autre les scientifiques, rationalistes, empiristes logiques, ou mar

1363 sais pas ce que c’est. Et tout cela vit en chacun de nous, sous forme de conflits, de défis passionnants, de crises latent

1364 la vit en chacun de nous, sous forme de conflits, de défis passionnants, de crises latentes ou de schizophrénie, d’harmoni

1365 s, sous forme de conflits, de défis passionnants, de crises latentes ou de schizophrénie, d’harmonie des contraires par su

1366 its, de défis passionnants, de crises latentes ou de schizophrénie, d’harmonie des contraires par sublime exception : Dant

1367 ionnants, de crises latentes ou de schizophrénie, d’ harmonie des contraires par sublime exception : Dante, Leibniz ou Bach

1368 et plaisirs alternés. Les meilleurs sont en quête de leur vrai nom ; la masse est fuite devant la personne responsable ; e

1369 figure irremplaçable dans le ballet des milliards de possibles sans relâche rythmé et rompu par la culture européenne. Un

1370 u par la culture européenne. Un très grand nombre de combinaisons, voire de permutations des éléments de base, sont compat

1371 enne. Un très grand nombre de combinaisons, voire de permutations des éléments de base, sont compatibles ; d’autres non. E

1372 combinaisons, voire de permutations des éléments de base, sont compatibles ; d’autres non. Einstein, Churchill, C. G. Jun

1373 très bien se détester, ils sont dans le droit fil de l’héritage européen ; Hitler et Staline en travers. Les deux mémoi

1374 . Harmonieux ou non, conscient ou non, le rapport d’ un Européen à la culture européenne — notre seule unité fondamentale,

1375 qu’on ne l’imagine. Nous sommes tous tributaires de deux mémoires, celle des peuples et celle des gènes. Celle des grande

1376 grandes bibliothèques, des monuments, des codes, de la langue, des jurisprudences, des croyances et des œuvres dominantes

1377 nantes, des data banks et du système des préjugés de notre siècle — mémoire externe. Et celle des chromosomes, des chaînes

1378 re externe. Et celle des chromosomes, des chaînes de l’ADN, des formules de l’intégration biologique, des réflexes conditi

1379 s chromosomes, des chaînes de l’ADN, des formules de l’intégration biologique, des réflexes conditionnés et des programmes

1380 ammes physiologiques ou sociaux, des complexes et de l’hérédité — mémoire interne. Quantité de chances culturelles et de h

1381 exes et de l’hérédité — mémoire interne. Quantité de chances culturelles et de handicaps en résultent. Nul besoin d’avoir

1382 moire interne. Quantité de chances culturelles et de handicaps en résultent. Nul besoin d’avoir lu Homère, Platon, Virgile

1383 turelles et de handicaps en résultent. Nul besoin d’ avoir lu Homère, Platon, Virgile et saint Thomas, Hölderlin et Roussea

1384 Proudhon, Sigmund Freud et les surréalistes ; ni de savoir l’histoire de l’art. Les grands et petits bourgeois les plus i

1385 eud et les surréalistes ; ni de savoir l’histoire de l’art. Les grands et petits bourgeois les plus ignares, les paysans,

1386 qui firent leur temps, littéralement. Dans chacun de nos chromosomes, il y a l’histoire entière des hommes du passé, plus

1387 passé, plus une nouvelle virtualité. Dans chacun de nos codes civiques ou juridiques, il y a la féodalité, les coutumes g

1388 x, derrière eux, il y a l’Égypte et Sumer. Chacun de nous, dans chacun de ses jugements moraux, civiques, sociaux ou jurid

1389 a l’Égypte et Sumer. Chacun de nous, dans chacun de ses jugements moraux, civiques, sociaux ou juridiques, parle au nom d

1390 coles nationales, nous nous croyons si différents de nos voisins ! Nous sommes si fiers de nos langues, nous affirmons qu’

1391 différents de nos voisins ! Nous sommes si fiers de nos langues, nous affirmons qu’il faut les garder « pures », et nous

1392 qu’à prétendre que leur diversité empêche l’union de l’Europe. Orgueils, craintes et prétextes également vains. Car la « p

1393 s et prétextes également vains. Car la « pureté » d’ une langue n’est nullement sa vertu, comme l’a fait voir T. S. Eliot.

1394 r T. S. Eliot. L’anglais, dit-il, « offre le plus de richesses à qui veut écrire de la poésie ». Et il en voit la raison,

1395 l, « offre le plus de richesses à qui veut écrire de la poésie ». Et il en voit la raison, précisément, dans la variété de

1396 ts scandinave puis franco-normand, une succession d’ influences françaises et latines, l’élément celtique enfin. Et il ajou

1397 eltique enfin. Et il ajoute : « Quand les nations de l’Europe sont coupées les unes des autres, et que les poètes ne lisen

1398 unes des autres, et que les poètes ne lisent plus d’ autre littérature que celle de leur propre langue, la poésie dépérit n

1399 ètes ne lisent plus d’autre littérature que celle de leur propre langue, la poésie dépérit nécessairement dans chaque pays

1400 à pour les bienfaits du chauvinisme : il ne cesse de trahir ce qu’il prétend sauver. Quant à la diversité des langues, si

1401 e. Ces différences n’ont nullement empêché l’édit de Villers-Cotterêts, imposant à toutes les nations annexées par les roi

1402 posant à toutes les nations annexées par les rois de France le français comme seule langue officielle. Elles n’ont pas emp

1403 amais une « culture nationale », ou un microcosme de l’Europe, mais seulement un ensemble d’œuvres composées d’éléments em

1404 icrocosme de l’Europe, mais seulement un ensemble d’ œuvres composées d’éléments empruntés à l’héritage commun, et qui vont

1405 pe, mais seulement un ensemble d’œuvres composées d’ éléments empruntés à l’héritage commun, et qui vont l’enrichir en reto

1406 retour. Rien de plus commun à toutes les nations de l’Europe que leur désir de se trouver une vocation originale. Rien de

1407 n à toutes les nations de l’Europe que leur désir de se trouver une vocation originale. Rien de plus caractéristique du vé

1408 actéristique du véritable Européen que sa volonté de n’être pas comme son voisin, de ne ressembler à aucun autre. Cette vo

1409 en que sa volonté de n’être pas comme son voisin, de ne ressembler à aucun autre. Cette volonté de différer fait partie in

1410 in, de ne ressembler à aucun autre. Cette volonté de différer fait partie intégrante de l’héritage commun. Ceci noté, il n

1411 Cette volonté de différer fait partie intégrante de l’héritage commun. Ceci noté, il n’en est que plus frappant de consta

1412 commun. Ceci noté, il n’en est que plus frappant de constater qu’un même mot originel, grec, latin, germanique ou celtiqu

1413 ous nos États et montre bien ce qu’il faut penser de leur soi-disant « originalité culturelle ». Ainsi le mot dubron : eau

1414 n Hollande, et à vingt autres fleuves et rivières de l’Europe. « Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? », dit notre « mère l’Europ

1415 bérations Tout héritage comporte donc une part d’ hérédité subie et une part d’hérésie active (ou de libre choix personn

1416 mporte donc une part d’hérédité subie et une part d’ hérésie active (ou de libre choix personnel), de nombreuses et précise

1417 d’hérédité subie et une part d’hérésie active (ou de libre choix personnel), de nombreuses et précises prédéterminations,

1418 t d’hérésie active (ou de libre choix personnel), de nombreuses et précises prédéterminations, et un grand risque, par déf

1419 un grand risque, par définition mal défini, celui de devenir soi-même, par quelque différence de structure. Moins une cult

1420 celui de devenir soi-même, par quelque différence de structure. Moins une culture est homogène, mieux elle incite à cette

1421 cite à cette autonomie, à cette autostructuration de la personne, de l’œuvre, des régions ou nations… À la limite, osons l

1422 onomie, à cette autostructuration de la personne, de l’œuvre, des régions ou nations… À la limite, osons le dire : l’hérit

1423 À la limite, osons le dire : l’héritage culturel de l’Europe oblige tous ses bénéficiaires au génie pur, qui est d’être m

1424 lige tous ses bénéficiaires au génie pur, qui est d’ être malgré tout dans le tout. Chaque homme d’Europe est une dramatis

1425 est d’être malgré tout dans le tout. Chaque homme d’ Europe est une dramatis persona qui crée son rôle avec plus ou moins d

1426 atis persona qui crée son rôle avec plus ou moins de bonheur dans la communauté la plus follement complexe de toute l’hist

1427 eur dans la communauté la plus follement complexe de toute l’histoire de l’humanité. En revanche, tout héritier est héréti

1428 té la plus follement complexe de toute l’histoire de l’humanité. En revanche, tout héritier est hérétique, du seul fait qu

1429 du seul fait qu’il ne peut embrasser la totalité de l’héritage. Ses données génétiques le prédisposent ou le commandent e

1430 oriquement orthodoxe, qui serait non pas la somme de toutes ses sources mais le produit optimal de leurs interactions — et

1431 mme de toutes ses sources mais le produit optimal de leurs interactions — et qui n’existera jamais. Donnons maintenant que

1432 tera jamais. Donnons maintenant quelques exemples de limitations héritées par tout Européen moyen, dans la mesure exacte o

1433 yen, dans la mesure exacte où il reste tributaire de son programme génétique. 1. Le nationalisme ou partisanerie, besoin e

1434 . Le nationalisme ou partisanerie, besoin et goût d’ être d’un parti contre un autre, indépendamment de leurs buts allégués

1435 tionalisme ou partisanerie, besoin et goût d’être d’ un parti contre un autre, indépendamment de leurs buts allégués. Ce be

1436 d’être d’un parti contre un autre, indépendamment de leurs buts allégués. Ce besoin et ce goût stimulent sans aucun doute,

1437 quent l’émulation, l’ardeur au jeu pour une élite de joueurs. Mais dans la masse des spectateurs passifs, la partisanerie

1438 existe partout en Europe, des Bleus et des Verts de Byzance aux « sportifs » des cinq continents et surtout à la droite e

1439 à la droite et à la gauche dans le jeu politique de nos pays, ces deux partis qui n’arrivent plus à se définir autrement

1440 ce) en Inde, en Chine, ou dans les grands empires de l’Afrique noire et des Aztèques. 2. L’Européen moderne (produit des s

1441 rence) est à la fois trop englué dans la matière ( d’ où son impuissance spirituelle, manque de distance, de détachement et

1442 matière (d’où son impuissance spirituelle, manque de distance, de détachement et de liberté, si on le compare à l’Hindou o

1443 son impuissance spirituelle, manque de distance, de détachement et de liberté, si on le compare à l’Hindou ou aux bouddhi

1444 pirituelle, manque de distance, de détachement et de liberté, si on le compare à l’Hindou ou aux bouddhistes), et trop dés

1445 uddhistes), et trop désincarné par l’abstraction ( d’ où sa pauvreté animique si on le compare à l’Africain noir). Il en rés

1446 ricain noir). Il en résulte une étonnante absence de grandes qualités sociales et personnelles et quantité de maladies « n

1447 des qualités sociales et personnelles et quantité de maladies « nerveuses » ou « somatiques », nées du refoulement de l’an

1448 erveuses » ou « somatiques », nées du refoulement de l’animique ou du mépris des réalités non calculables écartées sous le

1449 des réalités non calculables écartées sous le nom de subjectivité à partir du xixe siècle mais déjà condamnées par Descar

1450 les deux demeurent en friche ces grandes réserves d’ énergies archaïques, affectives et rythmiques dont dépendent l’euphori

1451 s natives combinées — nationalisme et disjonction de l’homme en matière et intellect abstrait — ont causé les grandes guer

1452 urtes (intérêt national) ou utopiques (autarcie). D’ où les dévastations planétaires que l’on sait. Les Européens ne sont p

1453 Mais ils ont causé, en fait, les grands massacres de l’Histoire : 1914-1918 au nom du nationalisme et de ses finalités bor

1454 l’Histoire : 1914-1918 au nom du nationalisme et de ses finalités bornées. Hiroshima et Nagasaki en vertu de calculs « po

1455 onomiques » monstrueux, qui faisaient abstraction de l’humain. 3. Conditionné par le respect de la Science, qui a pris la

1456 action de l’humain. 3. Conditionné par le respect de la Science, qui a pris la place qu’occupaient la théologie au xiiie

1457 ceux qui savent » mais il croit mieux les savants d’ aujourd’hui que les curés d’hier, ou les marxistes de tout à l’heure,

1458 oit mieux les savants d’aujourd’hui que les curés d’ hier, ou les marxistes de tout à l’heure, s’il ne les comprend pas dav

1459 ujourd’hui que les curés d’hier, ou les marxistes de tout à l’heure, s’il ne les comprend pas davantage. Le scientifique g

1460 et la masse des incultes médusés. Cette inégalité de formation prépare des clivages sociaux sans précédent. Elle annonce u

1461 ce un nouvel esclavage par manipulation des gènes de pharmacologie au service du Pouvoir. Elle annonce des révoltes sauvag

1462 cles, ne peut guère plus concevoir « Dieu » et la vie spirituelle que dans les cadres institutionnels des Églises. Si bien

1463 tien) et ainsi se mutile en esprit pour se venger d’ une trahison, si longtemps arrogante, de l’esprit. 5. L’Européen moyen

1464 se venger d’une trahison, si longtemps arrogante, de l’esprit. 5. L’Européen moyen hérite de son histoire mille raisons de

1465 rrogante, de l’esprit. 5. L’Européen moyen hérite de son histoire mille raisons de mépriser l’Histoire et de s’occuper plu

1466 ropéen moyen hérite de son histoire mille raisons de mépriser l’Histoire et de s’occuper plutôt des « réalités », c’est-à-

1467 histoire mille raisons de mépriser l’Histoire et de s’occuper plutôt des « réalités », c’est-à-dire de son pouvoir d’acha

1468 e s’occuper plutôt des « réalités », c’est-à-dire de son pouvoir d’achat, ou de la « gauche » sacralisée, c’est-à-dire du

1469 tôt des « réalités », c’est-à-dire de son pouvoir d’ achat, ou de la « gauche » sacralisée, c’est-à-dire du « sens de l’His

1470 alités », c’est-à-dire de son pouvoir d’achat, ou de la « gauche » sacralisée, c’est-à-dire du « sens de l’Histoire », fic

1471 la « gauche » sacralisée, c’est-à-dire du « sens de l’Histoire », fiction commode. Ce faisant, il se coupe de la mémoire

1472 toire », fiction commode. Ce faisant, il se coupe de la mémoire humaine, de l’approche familière des symboles, que nous dé

1473 e. Ce faisant, il se coupe de la mémoire humaine, de l’approche familière des symboles, que nous découvrons dans nos rêves

1474 e des nations par les proverbes. Le petit citadin d’ aujourd’hui, prisonnier d’un « ensemble » où chacun se sent seul et co

1475 erbes. Le petit citadin d’aujourd’hui, prisonnier d’ un « ensemble » où chacun se sent seul et coupé de l’Histoire autant q

1476 d’un « ensemble » où chacun se sent seul et coupé de l’Histoire autant que de la nature, a tout ce qu’il faut pour devenir

1477 un se sent seul et coupé de l’Histoire autant que de la nature, a tout ce qu’il faut pour devenir aliéné. Quant aux éléme

1478 r devenir aliéné. Quant aux éléments libérateurs de l’héritage culturel européen, ils sont trop connus et trop souvent ex

1479 et trop souvent exaltés pour qu’il me soit besoin de les analyser. Il s’agit de : —l’esprit critique ou remise en question

1480 r qu’il me soit besoin de les analyser. Il s’agit de  : —l’esprit critique ou remise en question perpétuelle de toutes chos

1481 esprit critique ou remise en question perpétuelle de toutes choses (héritage grec, sans lequel point de sciences) ; —l’amo

1482 e toutes choses (héritage grec, sans lequel point de sciences) ; —l’amour de Dieu et du prochain comme de soi-même (hérita

1483 e grec, sans lequel point de sciences) ; —l’amour de Dieu et du prochain comme de soi-même (héritage judéo-chrétien) ; — l

1484 sciences) ; —l’amour de Dieu et du prochain comme de soi-même (héritage judéo-chrétien) ; — la notion de personne humaine,

1485 soi-même (héritage judéo-chrétien) ; — la notion de personne humaine, autonome et chargée d’une vocation unique mais fond

1486 a notion de personne humaine, autonome et chargée d’ une vocation unique mais fondatrice de communauté (héritage gréco-chré

1487 et chargée d’une vocation unique mais fondatrice de communauté (héritage gréco-chrétien, coloré de valeurs germaniques et

1488 ce de communauté (héritage gréco-chrétien, coloré de valeurs germaniques et celtiques) ; —la fidélité, fondement du couple

1489 ; —la fidélité, fondement du couple, du groupe et de la commune, condition de l’œuvre d’art et lien social sans quoi ne sa

1490 du couple, du groupe et de la commune, condition de l’œuvre d’art et lien social sans quoi ne sauraient exister ni crédit

1491 i institutions, ni États ni fédérations (héritage de la cité grecque, de l’Ecclesia chrétienne, des « libertés » germaniqu

1492 tats ni fédérations (héritage de la cité grecque, de l’Ecclesia chrétienne, des « libertés » germaniques et celtiques) ; —

1493 ré et du culte des morts, des mythes tribaux, des modes révérées de la Cour avant de l’être de la Ville, et de toutes les rel

1494 des morts, des mythes tribaux, des modes révérées de la Cour avant de l’être de la Ville, et de toutes les religions nées

1495 ux, des modes révérées de la Cour avant de l’être de la Ville, et de toutes les religions nées de la peur (héritage très p

1496 vérées de la Cour avant de l’être de la Ville, et de toutes les religions nées de la peur (héritage très précisément évang

1497 être de la Ville, et de toutes les religions nées de la peur (héritage très précisément évangélique). Tout cela représente

1498 représente sans nul doute la part la plus menacée de notre héritage, celle qu’il nous est possible de dilapider. Car ces v

1499 de notre héritage, celle qu’il nous est possible de dilapider. Car ces vertus ne contraignent pas l’individu comme le fai

1500 ramme génétique, si elles sont ce qui permet seul de le dépasser. Tout cela n’existe guère comme vertus, ou s’est vu décri

1501 us, ou s’est vu décrié dans les cultures antiques de l’Inde, de la Chine, du Mali, des Incas, ou de la Rome impériale. Tou

1502 t vu décrié dans les cultures antiques de l’Inde, de la Chine, du Mali, des Incas, ou de la Rome impériale. Tout cela est

1503 es de l’Inde, de la Chine, du Mali, des Incas, ou de la Rome impériale. Tout cela est mal vu de nouveau en URSS et dans la

1504 t bien à tout cela que l’Europe a dû ses pouvoirs d’ invention, d’innovation, d’expansion planétaire, d’universalité : au r

1505 cela que l’Europe a dû ses pouvoirs d’invention, d’ innovation, d’expansion planétaire, d’universalité : au respect de la

1506 rope a dû ses pouvoirs d’invention, d’innovation, d’ expansion planétaire, d’universalité : au respect de la véracité des p

1507 ’invention, d’innovation, d’expansion planétaire, d’ universalité : au respect de la véracité des poids et mesures, de la p

1508 expansion planétaire, d’universalité : au respect de la véracité des poids et mesures, de la parole exacte, de l’autre en

1509 : au respect de la véracité des poids et mesures, de la parole exacte, de l’autre en tant que tel, et de la foi jurée. Tou

1510 racité des poids et mesures, de la parole exacte, de l’autre en tant que tel, et de la foi jurée. Tout cela peut permettre

1511 la parole exacte, de l’autre en tant que tel, et de la foi jurée. Tout cela peut permettre à chaque Européen de dépasser

1512 jurée. Tout cela peut permettre à chaque Européen de dépasser un jour, fût-ce d’une manière infime — mais décisive, puisqu

1513 tre à chaque Européen de dépasser un jour, fût-ce d’ une manière infime — mais décisive, puisque sa personne même se défini

1514 sque sa personne même se définit dans cette marge de liberté — le programme hérité de ses ancêtres et de vingt-huit siècle

1515 dans cette marge de liberté — le programme hérité de ses ancêtres et de vingt-huit siècles de pensée occidentale. t. R

1516 liberté — le programme hérité de ses ancêtres et de vingt-huit siècles de pensée occidentale. t. Rougemont Denis de,

1517 e hérité de ses ancêtres et de vingt-huit siècles de pensée occidentale. t. Rougemont Denis de, « L’héritage culturel

1518 les de pensée occidentale. t. Rougemont Denis de , « L’héritage culturel de l’Europe », Mémoires de l’Europe, Paris, La

1519 t. Rougemont Denis de, « L’héritage culturel de l’Europe », Mémoires de l’Europe, Paris, Laffont, 1971, p. 1-4.

1520 de, « L’héritage culturel de l’Europe », Mémoires de l’Europe, Paris, Laffont, 1971, p. 1-4.

1521 iie siècle, les femmes ont été l’agent principal de civilisation des hommes. » Cette phrase, signée Denis de Rougemont, e

1522 e phrase, signée Denis de Rougemont, est extraite d’ un tract publié par l’Association suisse pour le suffrage féminin. Cet

1523 e des troubadours qui consistait dans l’adoration de la femme. Elle était considérée par le poète-troubadour comme le seig

1524 traordinaire évolution dans les mœurs et ce culte de la femme coïncide avec le culte de la Vierge dans l’Église catholique

1525 rs et ce culte de la femme coïncide avec le culte de la Vierge dans l’Église catholique. Ceci coïncide aussi avec la créat

1526 catholique. Ceci coïncide aussi avec la création de la poésie, de la vraie littérature en Europe, et il y a donc un lien

1527 eci coïncide aussi avec la création de la poésie, de la vraie littérature en Europe, et il y a donc un lien tout à fait év

1528 ilisation, le raffinement des mœurs et le respect de la femme. Il y a tout un ordre de phénomènes qui se sont produits au

1529 s et le respect de la femme. Il y a tout un ordre de phénomènes qui se sont produits au xiie siècle dont j’ai longuement

1530 nt, c’est une chose admise : le rôle civilisateur de la femme dans les pays d’Europe. Mais la femme n’avait-elle pas plutô

1531  : le rôle civilisateur de la femme dans les pays d’ Europe. Mais la femme n’avait-elle pas plutôt un rôle d’inspiratrice,

1532 pe. Mais la femme n’avait-elle pas plutôt un rôle d’ inspiratrice, un rôle passif en quelque sorte ? Justement pas. Elle de

1533 le, c’est que les femmes sont devenues des sujets de la vie non seulement culturelle, mais politique. Aliénor d’Aquitaine

1534 est que les femmes sont devenues des sujets de la vie non seulement culturelle, mais politique. Aliénor d’Aquitaine — petit

1535 figures agissantes du siècle. Les hommes, autour d’ elle, ont l’air de rien du tout. Après cela, il est inutile de dire qu

1536 s du siècle. Les hommes, autour d’elle, ont l’air de rien du tout. Après cela, il est inutile de dire que le rôle de la fe

1537 l’air de rien du tout. Après cela, il est inutile de dire que le rôle de la femme a été considérable dans tout le développ

1538 t. Après cela, il est inutile de dire que le rôle de la femme a été considérable dans tout le développement de la culture,

1539 mme a été considérable dans tout le développement de la culture, surtout en France, en Angleterre, en Espagne, moins en Al

1540 uisse ? En Suisse, nous sommes un peu tributaires de la civilisation germanique, où les hommes porteurs de l’épée étaient

1541 a civilisation germanique, où les hommes porteurs de l’épée étaient seuls aptes à la liberté, parce que l’épée est le sign

1542 aptes à la liberté, parce que l’épée est le signe de la liberté pour les Germains. Ce qui fait que les hommes qui vont à l

1543 iques qui doivent être le domaine des guerrières, de l’homme armé, ce qui est un anachronisme complet dans la société actu

1544 ent un sabre. Si l’on sort des mythes germaniques de l’homme guerrier et si l’on entre dans la société actuelle, je défie

1545 ans la société actuelle, je défie qui que ce soit de m’expliquer en quoi les hommes seraient privilégiés par rapport aux f

1546 anique serait donc à la base du refus des Suisses d’ accorder l’égalité politique aux femmes ? Je crois que cela forme l’in

1547 nous sont proches, qui sont encore mêlées à notre vie , des vieilles coutumes germaniques. Justement la survivance de ce pay

1548 les coutumes germaniques. Justement la survivance de ce paysan, homme libre dont la liberté est démontrée parce qu’il a so

1549 e était défini par l’arme. Vous avez une quantité de gens, en Suisse, qui vous disent : c’est très bien les femmes, qu’ell

1550 est très bien les femmes, qu’elles aient le droit de vote, mais alors qu’elles fassent aussi du service militaire. Vous av

1551 de suite cette liaison qui vient très directement de ce fond germanique, médiéval. Lorsque vous dites que les femmes « ont

1552 dites que les femmes « ont été l’agent principal de civilisation », n’exagérez-vous pas leur rôle ? En tous les cas, ça c

1553 e ? En tous les cas, ça choque… Ce que nous avons de culture, nous le devons à nos mères plus qu’à nos pères, en grande pa

1554 me. Mais la transmission des mœurs, des coutumes, de la morale, c’est par les femmes que cela se fait en Europe. C’est trè

1555 ailleurs, je reproche beaucoup aux femmes suisses d’ avoir transporté ces valeurs militaires, d’avoir une certaine vénérati

1556 uisses d’avoir transporté ces valeurs militaires, d’ avoir une certaine vénération pour l’uniforme, plus que les hommes sou

1557 lisations n’ont pas accordé le même poids au rôle de la femme. Je pense que c’est spécifiquement européen, parce que notre

1558 que notre civilisation est fondée sur cette idée de la famille, de la femme qui est à peu près l’égale de l’homme, morale

1559 lisation est fondée sur cette idée de la famille, de la femme qui est à peu près l’égale de l’homme, moralement parlant. C

1560 a famille, de la femme qui est à peu près l’égale de l’homme, moralement parlant. Ce qui n’est absolument pas le cas en As

1561 Chez nous, considérons qu’il n’y a aucune espèce de différence au point de vue public entre hommes et femmes. Je ne dis p

1562 et femmes. Je ne dis pas du tout qu’il n’y a pas de différence entre masculin et féminin. Je dis que sur le plan de la vi

1563 entre masculin et féminin. Je dis que sur le plan de la vie publique il n’y en a pas. Je n’en vois pas. Les seules que nou

1564 masculin et féminin. Je dis que sur le plan de la vie publique il n’y en a pas. Je n’en vois pas. Les seules que nous croyo

1565 nt dit, il faudrait une bonne petite psychanalyse de la santé des Suisses… z. Rougemont Denis de, « [Entretien] Suppri

1566 e de la santé des Suisses… z. Rougemont Denis de , « [Entretien] Supprimer un anachronisme et une injustice (à propos d

1567 diktat du gouvernement français imposait le droit de vote aux citoyens suisses. À cette époque, la Confédération était tom

1568 onfédération était tombée sous la coupe militaire de la France. C’est donc une révolution extérieure qui a accordé aux Sui

1569 ntal. Aujourd’hui, après cent-soixante-treize ans de “dictature” masculine, les citoyens suisses donneront-ils aux femmes

1570 anc et massif”. À dire vrai, la seule originalité de la votation de ce week-end réside dans le fait que c’est “le peuple”,

1571 À dire vrai, la seule originalité de la votation de ce week-end réside dans le fait que c’est “le peuple”, en l’occurrenc

1572 cquis l’égalité civique, elle le doit à une sorte de coup d’État venu d’en haut : par simple décision gouvernementale ou p

1573 égalité civique, elle le doit à une sorte de coup d’ État venu d’en haut : par simple décision gouvernementale ou par l’éla

1574 que, elle le doit à une sorte de coup d’État venu d’ en haut : par simple décision gouvernementale ou par l’élaboration d’u

1575 ple décision gouvernementale ou par l’élaboration d’ une constitution qui leur accordait sans autre le droit de vote. Le mo

1576 nstitution qui leur accordait sans autre le droit de vote. Le mode de faire suisse explique, partiellement, la lenteur mis

1577 ui leur accordait sans autre le droit de vote. Le mode de faire suisse explique, partiellement, la lenteur mise par les homm

1578 ur accordait sans autre le droit de vote. Le mode de faire suisse explique, partiellement, la lenteur mise par les hommes

1579 ce. Mais il y a d’autres raisons, plus profondes, d’ ordre historique et psychologique. Qui, mieux que Denis de Rougemont,

1580 is de Rougemont, pouvait analyser les motivations de ce refus, aujourd’hui anachronique ? »

1581 yeux fixés à la fois bien en deçà et bien au-delà de la nation. Gabriel Marcel, Les Hommes contre l’humain Face aux tota

1582 Les Hommes contre l’humain Face aux totalitaires de toutes couleurs et aux démocraties plutôt décolorées des années 1930,

1583 e à la fois vers l’universel et vers la personne. De la conclusion d’une conférence qu’il donnait en 1931 sur l’idée de na

1584 l’universel et vers la personne. De la conclusion d’ une conférence qu’il donnait en 1931 sur l’idée de nation, je recopie