1
l point, c’est quand il dit que les mathématiques
ne
se prêtent pas à la liturgie, ne se prêtent pas au chant. Il y a tout
2
es mathématiques ne se prêtent pas à la liturgie,
ne
se prêtent pas au chant. Il y a tout de même un exemple, c’est la man
3
a toujours frappé, et ceci prouve que la liturgie
n’
est pas seulement l’expression d’une émotion mais un moyen mnémotechni
4
, des « data banks » comme on dit aujourd’hui. Je
ne
sais pas la traduction française. Banques d’informations. Mais le liv
5
le sens spécifique que l’auteur veut faire passer
ne
passe que dans la mesure où ce système de mots et de phrases oriente
6
oins autant qu’à l’enchaînement des arguments. Il
n’
y a pas deux livres pareils, alors qu’il peut y avoir un nombre consid
7
ça, tu pourras simplement agir ou méditer ». Nous
ne
sommes pas tous destinés à devenir des prophètes. Mais vous voyez qu’
8
e, dans ce petit appareil qu’est le livre dont on
ne
sait jamais si c’est lui qui nous avale, ou nous lui. Voilà, me sembl
9
du livre. Et je voulais y insister pour que l’on
ne
croie pas, puisqu’on parle d’information, que le livre est une manièr
10
Kennedy lisait très, très vite ; il absorbait, je
ne
sais combien de milliers de mots à la minute. Alors je crois que tout
11
ente lecture. On finit même par écrire lentement.
Ne
rien écrire d’autre que ce qui pourrait désespérer l’espèce d’homme q
12
oigts et des yeux délicats. Ami patient, ce livre
ne
souhaite pour lui que des lecteurs parfaits. Apprenez à bien me lire.
13
n certain nombre de questions posées. Eh bien, ce
ne
sont pas les sujets qui manquent, ce qui est difficile, c’est le temp
14
pénétrer des questions. Je disais que les sujets
ne
manquent pas, mais le temps de les lire lentement me manque à cette t
15
n pas seulement de pittoresque et de folklorique,
ne
rencontre-t-il pas plus de difficultés à s’exprimer qu’au temps où il
16
ribu, d’autant plus fortement aujourd’hui qu’elle
ne
dépasse guère un certain rayon, contrairement à la radio qui va beauc
17
t contrairement au livre et à l’imprimé qui, eux,
n’
ont pas de limite en général. La télévision, c’est quelque chose qu’on
18
; il y a un très petit nombre de programmes, vous
n’
avez aucun choix. C’est fait pour un certain ensemble, une certaine tr
19
même de la nation, si la nation est grande. Vous
n’
avez aucun moyen de répliquer. Vous pouvez protester quelquefois — moi
20
r cela. C’est la cassette. C’est un palliatif. Ce
n’
est pas suffisant, mais c’est l’équivalent du livre par rapport à la t
21
vision. Vous pouvez choisir votre cassette ; vous
n’
avez pas d’actualité immédiate, vous ne l’avez pas non plus dans le li
22
tte ; vous n’avez pas d’actualité immédiate, vous
ne
l’avez pas non plus dans le livre. Il faut toujours au moins un mois
23
enregistrée pourrait succéder au livre », moi je
ne
le pense pas. Il y a des gens pour lesquels l’ouïe est le sens le plu
24
e « si le livre étant tributaire de la langue, il
n’
y aurait pas lieu de développer la recherche d’une langue internationa
25
r dans un dictionnaire ou un répertoire, pourquoi
ne
pas les diffuser en espéranto, à supposer qu’il y ait beaucoup de gen
26
ngue fait partie du message du livre. L’espéranto
ne
le fera jamais. La langue française, si on est de langue française, ç
27
ensibilité et du sentiment d’une manière que vous
ne
pouvez pas dissocier de l’information objective qu’il y a dans le liv
28
y a dans le livre ; c’est quelque chose que vous
ne
pouvez jamais espérer d’une langue synthétique comme l’espéranto. J’a
29
ments de lente lecture ? » Première remarque : ce
ne
sont pas les gens qui ont le plus de temps qui lisent le mieux, ni mê
30
et à mesure [que] l’automation se développera. Ce
n’
est pas à mon voisin, que j’irai apprendre ce genre de choses. Je pens
31
t — c’était à M. Louis Armand d’ailleurs — « s’il
ne
fallait pas opposer le livre à la revue » et faisait observer « qu’on
32
des statistiques disant qu’on lit trop peu ». On
ne
peut pas vraiment opposer les deux choses parce que vous savez très b
33
du livre d’une manière un peu plus prolongée. Je
ne
voudrais pas prendre plus de temps, M. Le Lionnais a encore beaucoup
34
ales, régionales et locales. Cela veut dire qu’il
n’
y a pas d’autre solution à la fois désirable et praticable que l’union
35
e en ce temps-là (il a changé d’avis depuis) : Ce
n’
est pas dans le fédéralisme, ce n’est pas en se repliant sur elle-même
36
is depuis) : Ce n’est pas dans le fédéralisme, ce
n’
est pas en se repliant sur elle-même que la Wallonie trouvera son salu
37
qu’ici, disait-il, nous sommes fédéralistes ! Je
n’
ai cité que des européistes on ne peut plus engagés. Que sera-ce aille
38
édéralistes ! Je n’ai cité que des européistes on
ne
peut plus engagés. Que sera-ce ailleurs, dans la grande presse, dans
39
presse, dans la grande masse des citoyens dont il
n’
est pas exclu qu’avant longtemps on l’appelle à se prononcer sur la qu
40
. » Je m’assure que ce qu’a dit Maurice Schumann
n’
était nullement censé « traduire » un refus de la formule fédérale — b
41
on de l’État souverain, mais chose curieuse, cela
ne
l’empêche nullement de condamner le fédéralisme externe comme visant
42
fois, et cela change tout, ces erreurs populaires
ne
sont point partagées par les hommes politiques responsables de ces pa
43
ompromis : si le consensus dans tous les domaines
n’
est pas désirable ou ne peut être atteint, on le réduit à certains dom
44
sus dans tous les domaines n’est pas désirable ou
ne
peut être atteint, on le réduit à certains domaines. Sur un pacte ou
45
tains domaines. Sur un pacte ou quasi-traité : on
ne
peut unilatéralement en modifier les termes. Voilà qui devrait rassur
46
t de sa souveraineté à une organisation politique
ne
possédant pas un centre unique de pouvoir, d’impulsion et de création
47
spérer de toute union vivante de l’Europe. Car il
n’
y a pas d’union et pas de vie possibles hors du paradoxe fondamental d
48
l’Europe se fasse un jour dans l’histoire si elle
ne
se fait pas d’abord dans les esprits, et voilà qui implique un langag
49
prits, et voilà qui implique un langage, et qu’on
ne
laisse pas impunies ses erreurs. Car si l’on ne fait pas attention au
50
n ne laisse pas impunies ses erreurs. Car si l’on
ne
fait pas attention aux mots, c’est que l’on n’a pas bien vu la chose,
51
on ne fait pas attention aux mots, c’est que l’on
n’
a pas bien vu la chose, et comment pourrait-on la vouloir ? Apprenons
52
à mon sens, mais qui explique pourquoi la Suisse
n’
est entrée que dans l’AELE et a refusé jusqu’ici d’entrer dans la CEE.
53
jusqu’ici d’entrer dans la CEE. Parce que l’AELE
n’
a que des buts économiques, n’a jamais voulu viser à autre chose qu’à
54
E. Parce que l’AELE n’a que des buts économiques,
n’
a jamais voulu viser à autre chose qu’à des avantages commerciaux, par
55
qui sont ceux du libre-échange, tandis que la CEE
n’
a jamais caché depuis le début qu’elle avait des visées politiques. La
56
voie ? Je vous répondrai évidemment non, car s’il
n’
y avait que les questions économiques qui se posaient, nous aurions to
57
ne simple organisation de notre économie, si nous
ne
voulons pas être « américanisés », comme on le dit tous les jours, c’
58
Quelle est cette unité ? Eh bien ! de culture. Il
n’
y a pas de cultures nationales, contrairement à ce que l’on nous a app
59
irement à ce que l’on nous a appris à l’école. Il
n’
y a qu’une grande culture européenne qui vient de nos ancêtres communs
60
ela est complètement commun à tous les Européens.
N’
a jamais été l’apanage d’un seul de nos pays. Ne s’est jamais arrêté a
61
. N’a jamais été l’apanage d’un seul de nos pays.
Ne
s’est jamais arrêté aux frontières actuelles de nos pays, qui n’exist
62
arrêté aux frontières actuelles de nos pays, qui
n’
existaient pas pendant tout le Moyen Âge, notamment, où la culture eur
63
rivain français ou espagnol ? Beaucoup plus qu’il
ne
pense. Par l’ensemble des procédés que les uns et les autres utilisen
64
éâtre, on donne des concerts. Eh bien ! tout cela
n’
existait pas dans les autres cultures, où l’on n’écrivait que de la li
65
n’existait pas dans les autres cultures, où l’on
n’
écrivait que de la littérature religieuse, sacrée. En Inde, par exempl
66
ture religieuse, sacrée. En Inde, par exemple, il
n’
y a pas de romans qui racontent des petites histoires qui se passent t
67
tites histoires qui se passent tous les jours. Il
n’
y a que des écrits religieux, de la sculpture religieuse dans les temp
68
e dans les temples, de la peinture religieuse. Ce
n’
est qu’en Europe que l’on a utilisé tous ces procédés tels que le sonn
69
— je pense — le fait que c’est un petit pays, qui
n’
a qu’une petite armée, encore que ce soit la plus forte d’Europe !)… q
70
ore que ce soit la plus forte d’Europe !)… que ce
n’
est pas une grande puissance comme les États-Unis ou la Russie… » J’es
71
on économie, comment expliquer que les États-Unis
n’
aient pas gagné tout de suite la guerre contre le petit Vietcong ? Pou
72
guerre contre le petit Vietcong ? Pourquoi ? Ils
n’
ont pas osé utiliser toutes leurs forces, la bombe atomique notamment,
73
aient eu contre eux l’opinion du monde entier. Ce
n’
est donc pas du tout la force, comme on le répète toujours, qui dirige
74
d’une partie du monde : la Russie. La Russie qui
n’
agit pas du tout par la force de ses armées mais par la force de sa do
75
in idéal communiste. Les États-Unis savent qu’ils
ne
peuvent opposer à cet idéal qu’un idéal démocratique et de liberté, e
76
e grande idée. La Suisse, si petite qu’elle soit,
n’
aurait pas seulement un rôle de parti minoritaire à jouer au sein de c
77
u’ils se mettent tous ensemble. Aucun d’entre eux
ne
pourrait se défendre tout seul contre les puissants voisins. Ils n’on
78
endre tout seul contre les puissants voisins. Ils
n’
ont pu défendre leurs petites autonomies qu’en se groupant. Eh bien !
79
tte formule maintenant au-delà de nos frontières,
ne
pas l’arrêter à nos frontières cantonales, ne pas l’arrêter à notre f
80
es, ne pas l’arrêter à nos frontières cantonales,
ne
pas l’arrêter à notre frontière nationale, mais voir plus loin, voir
81
appartient à ce peuple heureux que vous décrivez,
ne
semble pas très prêt à assumer les responsabilités nouvelles qu’impli
82
puisse être acceptable aux yeux des Suisses ? On
n’
a jamais fait cette enquête, que je sache. Alors que voulez-vous qu’il
83
rve, restons bien modestes dans notre petit coin,
ne
nous rendons pas ridicules en proposant de grandes choses… » Il faut
84
unie. Elles trouveront même bien curieux que l’on
ne
l’ait pas encore fait. Elles nous reprocheront — à la génération des
85
înés — d’avoir gardé une prudence exemplaire, qui
n’
est exemplaire pour personne et qui fait que nous sommes restés à la t
86
t, aussi, visites importantes dans notre pays. Il
n’
y a qu’à songer à celle de M. Jean Rey, il y a quelques mois seulement
87
. Un prix auquel, d’ailleurs, il s’attendait : Je
n’
ai pas été surpris par la décision de la Fondation Freiherr von Stein
88
de reconnaissance » mis en valeur par votre titre
ne
saurait signifier que la Fondation FVS de Hambourg m’aurait exprimé s
89
comme on pourrait croire que je l’ai dit (si l’on
ne
me connaissait pas du tout) mais simplement que je lui suis reconnais
90
que devient-elle à notre époque où les obstacles
ne
se dressent plus entre les amants ? La distance matérielle ou morale
91
ge, affaibli par la relative facilité du divorce,
n’
offre plus qu’une barrière fragile aux passions ; si on aime ailleurs,
92
e. Et la passion, dans nos mariages modernes, qui
ne
sont en principe que des mariages de passion, comment s’accommode-t-e
93
immédiat quotidien ou du prochain accessible ? Je
ne
condamne ni la passion ni le mariage, dit Denis de Rougemont, je dis
94
rumés et en état de transe. La décision risque de
n’
être pas excellente. La passion, d’autre part, est une projection narc
95
heureux que les premiers ? C’est que les premiers
n’
étaient que des mariages-maquettes. Pour moi, le mariage, si on veut f
96
de deux éléments contradictoires, entre lesquels
n’
existent ni fusion, ni subordination, ni unification. C’est très diffé
97
près Denis de Rougemont, la crise du mariage (qui
ne
date pas d’aujourd’hui) procède à la fois d’un culte exagéré de la pa
98
couple, les gens se posent des questions dont ils
ne
trouvent pas toujours les réponses. Et ces fameux obstacles à la pass
99
passion ? Pour Denis de Rougemont, ces obstacles
n’
ont pas été supprimés, ils ont été déplacés. On parle un peu abusiveme
100
xemple. Il est certain que, depuis Freud, le sexe
n’
est plus passé sous silence. Cela dit, nous n’avons rien inventé et l’
101
exe n’est plus passé sous silence. Cela dit, nous
n’
avons rien inventé et l’explosion sexuelle s’est surtout produite au n
102
ir » ! Les interdits, les tabous, les convenances
ne
sont pas arbitraires. Ils expriment des répulsions humaines. Supprime
103
ieurs. Si on supprime des gênes extérieures, cela
ne
correspond qu’à des permissions extérieures. Voyez Tristan et Iseut.
104
simplement absorber par d’autres économies. Cela
ne
revient-il pas à se poser la question fondamentale du sens même de no
105
ardin plein de surprises, mais un peu désordonné…
Ne
craignez-vous pas l’utopie ? Comment sera-t-il possible de changer le
106
u profit ? Mais le système de la société actuelle
n’
existe pas ! Il y a précisément une crise universelle ! Il faut faire
107
de est à la limite de ses possibilités : les lacs
ne
sont plus nageables, les rues ne sont plus respirables, les villes ne
108
lités : les lacs ne sont plus nageables, les rues
ne
sont plus respirables, les villes ne sont plus gouvernables, l’explos
109
es, les rues ne sont plus respirables, les villes
ne
sont plus gouvernables, l’explosion de population est formidable. Tou
110
au ? L’Europe a la chance d’avoir une culture. Je
ne
crois pas aux cultures nationalistes, en dépit des manuels scolaires
111
ationalistes, en dépit des manuels scolaires : il
n’
y a que des divisions tout arbitraires opérées dans l’ensemble vivant
112
commune comme dénominateur commun : là aussi, je
ne
suis pas d’accord. La politique ne doit pas être une activité séparée
113
: là aussi, je ne suis pas d’accord. La politique
ne
doit pas être une activité séparée : c’est la vie dans la cité, « l’a
114
, est excellent, hormis peut-être les cantons qui
ne
sont pas d’une originalité débordante. Unir les États européens en un
115
uement l’Europe d’aujourd’hui est plus petite que
ne
l’était la Suisse à l’époque où elle s’est fédérée ; et les disparité
116
esse, de langue, de confession, voire de régimes,
ne
sont guère plus marquées ou plus frappantes entre les États de l’Euro
117
s frappantes entre les États de l’Europe qu’elles
ne
l’étaient entre les cantons suisses avant 1848. Il ne faut pas non pl
118
’étaient entre les cantons suisses avant 1848. Il
ne
faut pas non plus oublier les moyens techniques dont nous disposons à
119
s dont nous disposons à l’heure actuelle et qu’il
ne
faudrait surtout pas renier : je suis persuadé que le fédéralisme eur
120
tant, Robert de Traz et Gonzague de Reynold, pour
ne
vous citer qu’eux. Mais que pensez-vous de la réserve mise par la Sui
121
ustifiée jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, elle
ne
se justifierait plus en tout cas dans une Europe unie. Mais je verrai
122
ent une catastrophe pour la Suisse. Mais personne
ne
la préconise, je crois. Il est clair, en revanche, qu’une Europe fédé
123
Schuman à la fin de sa vie, je lis ces mots qu’on
ne
saurait souhaiter plus éclairants et qui servent de titre au deuxième
124
ait, à la culture. Unité non pas homogène, et qui
ne
résulte pas d’un processus forcé d’uniformisation, de nivellement et
125
stances universelles, et toutes les créations qui
ne
cessent de jaillir de cette discorde permanente. Dès l’aube de la phi
126
ù les excès de l’individualisme hellénistique qui
ne
manqueront pas d’appeler la tyrannie. Rome, en réponse à ce défi de l
127
et chrétiennes, qui se contredisent avec passion,
ne
se détruisent pas pour autant : entre leurs triomphes alternés, elles
128
es, bouddhistes, ou sans croyance aucune… Mais ce
n’
est pas tout. Avec les trois sources classiques d’Athènes, de Rome et
129
tique. Faut-il enfin rappeler l’apport arabe, qui
ne
se limite pas au zéro précédant la suite des nombres, mais qui est l’
130
iques, c’est, de toute évidence : fédéralisme. Je
ne
vois pas d’autre réponse imaginable au défi que l’Histoire nous pose
131
, ferait leur force ; mais en retour, cette union
ne
saurait être acquise au prix des libertés qu’elle est censée servir.
132
. Si vous voulez, je suis maoïste ! La révolution
ne
peut se faire que par les superstructures, car l’infrastructure est l
133
part, que ce qui peut entraîner l’économique, ce
n’
est pas la politique. Celle-ci peut même le freiner, comme l’a démontr
134
taine culture qui l’a marqué et qui postule qu’il
n’
y a de sérieux que les nations. Deux de mes étudiants, ont fait un tra
135
le monde a changé depuis et de telles conceptions
n’
ont plus de sens. Tout se passe, dans ces manuels, comme si la nation
136
es dit : les institutions économiques européennes
ne
fonctionneront que si le politique le permet et le politique présuppo
137
ditionnel, est la plus ennuyeuse… Notre intention
n’
est pas, du reste, d’introduire une heure de plus dans des programmes
138
gés, mais de montrer que tout est européen, qu’il
ne
peut plus y avoir de perspective nationaliste. Les leçons types sont
139
enne joue un grand rôle au niveau de la jeunesse.
Ne
l’a-t-on pas constaté tout particulièrement lors de Mai 68 ? Exacteme
140
à ce moment-là qu’est sorti un manifeste dont on
n’
a pas assez parlé, bien qu’il fût signé par des gens comme Jacques Mon
141
imension a été constamment appliqué au CEC ; nous
n’
avons centralisé que ce qui fonctionnait mieux en étant centralisé. No
142
en relation quotidienne avec 150 personnes. Nous
ne
voulons pas coiffer d’autres institutions mais, selon le principe féd
143
re l’Europe sur les régions. Une telle conception
ne
va-t-elle pas compliquer à l’excès les réalités socioéconomiques ? Il
144
e les régions culturelles, ethniques, économiques
ne
se recouperont pas nécessairement. Je pense qu’une telle Europe ne se
145
pas nécessairement. Je pense qu’une telle Europe
ne
sera possible que par l’intermédiaire des ordinateurs. Il conviendra,
146
les à la réalisation de l’Europe ? Le fédéralisme
n’
est pas possible dans une seule nation. L’État national constitue donc
147
une consternante médiocrité… L’Europe des esprits
n’
est pas encore, il s’en faut même de beaucoup, devenue l’Europe réelle
148
z un véritable cri d’alarme : selon vous, l’heure
n’
est plus de savoir si on veut rester Français, Suisse ou Italien, mais
149
olonisation possible par les États-Unis — si nous
ne
faisons pas les États-Unis d’Europe — c’est une colonisation essentie
150
de l’Europe, qui sont réellement colonisés… Et il
n’
est pas impensable, si nous continuons à rester divisés par nations, c
151
. C’était extrêmement tragique parce que l’Europe
n’
était pas là. Il n’y avait personne pour leur répondre. Et vous pensez
152
nt tragique parce que l’Europe n’était pas là. Il
n’
y avait personne pour leur répondre. Et vous pensez que, actuellement,
153
; et ce sera toujours pire, car aucun de nos pays
ne
peut se défendre. Il n’est pas trop tard Mais ne pensez-vous pas
154
, car aucun de nos pays ne peut se défendre. Il
n’
est pas trop tard Mais ne pensez-vous pas qu’il est déjà trop tard
155
eut se défendre. Il n’est pas trop tard Mais
ne
pensez-vous pas qu’il est déjà trop tard et que les « États-Unis d’Eu
156
Europe des États-Unis ? Est-ce qu’une Europe unie
ne
faciliterait pas, au contraire, la pénétration américaine ? Je n’ai r
157
pas, au contraire, la pénétration américaine ? Je
n’
ai rien contre la pénétration américaine si c’est une question d’échan
158
les d’affirmer notre originalité européenne. Nous
ne
pouvons le faire désunis ; mais si nous nous mettons tous ensemble, n
159
ens plus importants que ceux des Américains. Nous
ne
sommes pas du tout écrasés par les deux géants que sont l’Union sovié
160
ci montaient sur les épaules l’un de l’autre, ils
n’
arriveraient pas à notre hauteur. Au point de vue démographique, certe
161
recherches nucléaires. On pouvait se dire : « Ce
n’
est pas la peine de partir, ils ont pratiquement un siècle d’avance su
162
iquement un siècle d’avance sur nous. » Mais nous
n’
avons pas tenu ce raisonnement. Nous nous sommes dit que les Américain
163
organisation, rien de plus. Nous avons dit : « Il
n’
est pas du tout trop tard. Nous avons les cerveaux, nous avons, par ex
164
le entraîne une série de conditions auxquelles on
n’
avait jamais réfléchi avant : l’industrie est en train de détruire la
165
la nature qui nous entoure et sans laquelle nous
ne
pourrions pas vivre ? Il y a de grands choix à faire et cela pour la
166
e fois, car jamais avant notre génération l’homme
n’
avait été en mesure de porter des coups pareils à la terre elle-même.
167
, capitaliste : pourvu que le PNB augmente, qu’il
n’
y ait pas de chômage, tout ira bien et tant pis pour la nature. Nous c
168
on, ce dilemme entre niveau de vie et mode de vie
ne
se pose même pas. Pour eux, le problème se résume encore à celui de l
169
celui de la survie dans la rareté. Attention ! Je
ne
suis pas du tout pour que l’on freine le développement de la société
170
beaucoup plus que nos compartimentages nationaux
ne
permettent de le faire. Il nous faut dépasser les Américains, mais il
171
tion complète. Deux mouvements antagonistes
Ne
touche-t-on pas là un problème de structures politiques et économique
172
illes, la voiture par des moyens de transport qui
ne
fassent pas de bruit, qui ne dégagent pas de gaz. Quant à savoir si c
173
ens de transport qui ne fassent pas de bruit, qui
ne
dégagent pas de gaz. Quant à savoir si cela touche l’organisation soc
174
t-ils contraires, comme ils ont l’air de l’être ?
Ne
sont-ils pas plutôt un seul et même mouvement qui pourrait se définir
175
é trop longtemps dénaturée pour qu’un tel ouvrage
ne
soulève pas questions, réticences ou scepticisme. Ce sont là des obst
176
erme d’une agence fédérale pour l’économie car ce
n’
est pas encore une autorité de politique économique et cela ne couvre
177
core une autorité de politique économique et cela
ne
couvre qu’une petite partie de l’Europe. Il faudra bien un jour qu’il
178
une très large mesure, pourront avoir leur siège
n’
importe où en Europe. Le Marché commun est implanté à Bruxelles. Mais
179
neutralité. Parce que vous pensez que la Suisse
ne
pourrait pas rester l’écart d’un tel mouvement ? Non, c’est absolumen
180
’un Fonds européen d’écologie, par exemple ? Elle
ne
peut pas fermer ses frontières aux vents ou la pollution du Rhin. La
181
que les Suisses poussent encore plus loin qu’ils
ne
l’ont fait jusqu’ici leur sens du fédéralisme : il faut qu’ils compre
182
munes. Il faut qu’ils vivent, encore mieux qu’ils
ne
le font, l’esprit de leur fédéralisme qui est très ancien. Il ne faut
183
sprit de leur fédéralisme qui est très ancien. Il
ne
faut jamais oublier que la Suisse s’est fondée sur les communes, et n
184
ralisme. S’il y avait les États-Unis d’Europe, on
ne
voit pas comment la Suisse serait neutre entre ces États-Unis et, par
185
qu’a la Suisse pour adhérer à l’Europe. Pourquoi
ne
parlerait-on pas de l’autre difficulté qui est beaucoup plus intéress
186
rer à la Suisse ? » De ce point de vue, la Suisse
ne
perdrait rien en entrant dans une construction européenne. Ce serait
187
par « Idée suisse » le véritable fédéralisme, qui
n’
est d’ailleurs pas toujours appliqué en Suisse. Ce fédéralisme va de l
188
is au monde. C’est là une chose nouvelle car elle
n’
a jamais été appliquée systématiquement, pas même en Suisse. C’est une
189
ent, pas même en Suisse. C’est une expérience qui
n’
est possible qu’aujourd’hui, grâce au développement de la technique. P
190
reprenez l’exemple de la Suisse, vous voyez qu’on
n’
y a jamais eu cette idée folle de faire coïncider l’économie et la lan
191
ours pensé qu’il y avait des ordres de réalités à
ne
pas mélanger. Il n’était pas question d’imposer la même religion, la
192
vait des ordres de réalités à ne pas mélanger. Il
n’
était pas question d’imposer la même religion, la même économie, les m
193
st d’ailleurs beaucoup plus révolutionnaire qu’on
ne
le pense. Elle suppose la fin du gigantisme des villes, la recréation
194
Denis de Rougemont, après avoir montré comment il
ne
restait plus aujourd’hui d’autre choix que celui de faire l’Europe ou
195
ation d’une Europe fédérale. De telles réflexions
ne
sauraient mieux venir propos, au moment où commencent les négociation
196
surréalisme. Pas un seul de ces foyers culturels
n’
a coïncidé avec les frontières nationales. Comment envisagez-vous la c
197
Rennes. Il faut beaucoup de souplesse. Une région
ne
doit pas être contenue à l’intérieur de limites, elle doit rayonner.
198
Divers s’opposent, ont besoin l’un de l’autre, et
ne
se réalisent que l’un par l’autre. Le fédéralisme est l’expression po
199
e phrase de Robert Schuman : “L’unité de l’Europe
ne
se fera ni uniquement ni principalement par des institutions européen
200
ures : — parce qu’il faut FAIRE L’EUROPE et qu’on
ne
la fera jamais sur la base des États centralisés. — et parce qu’il fa
201
de l’Europe et de l’humanité solidaire. La région
ne
saurait donc être imposée d’en haut, dictée et planifiée par les bure
202
ar les bureaux d’une métropole tentaculaire. Elle
ne
saurait être créée par quelque découpage sur la carte, mais seulement
203
seulement par le rayonnement de sa vitalité. Elle
ne
saurait être octroyée de l’extérieur, mais seulement instaurée par l’
204
l’essor de ses énergies créatrices. Surtout, elle
ne
doit pas se donner pour objectif de saisir « une plus grande part du
205
ûts, qui définissent ses vrais besoins. La région
ne
doit pas être imaginée comme un mini État-nation, qui aurait tous les
206
’on se sent heureux de vivre, de travailler ou de
ne
rien faire, ce qui est sans doute le meilleur test d’un environnement
207
doit chercher à se rendre utile, et son problème
n’
est pas d’exploiter le voisin mais de coopérer avec lui. Elle n’a donc
208
ploiter le voisin mais de coopérer avec lui. Elle
n’
a donc nul besoin d’être, comme on le répète, « de taille européenne »
209
e on le répète, « de taille européenne » — ce qui
ne
veut strictement rien dire hors du jargon de la guerre commerciale —
210
. Vous voulez être libres ? Devenez responsables.
N’
attendez pas qu’on vous en donne la permission et les moyens. PRENEZ v
211
s, inventez les moyens de les exercer ! La région
ne
sera pas l’œuvre des technocrates de l’État central, mais des habitan
212
Dans le monde de l’esprit et de ses œuvres, il
n’
est pas de chance imméritée : les choses ne viennent à point que pour
213
es, il n’est pas de chance imméritée : les choses
ne
viennent à point que pour qui s’y attendait, pour qui s’était obscuré
214
e, avec et pour cet homme selon mon cœur… Mais ce
n’
était pas pour tout de suite ! Je venais d’écrire coup sur coup, en mo
215
en train de sortir mes uniformes d’une malle, je
n’
avais pas de sujet et je défiais quiconque d’en trouver un, en Suisse,
216
Je demandai quelques jours « pour réfléchir » et
n’
en fis rien, certain qu’avant le terme fixé, la catastrophe réglerait
217
essage secret qu’il envoie à la Diète, et dont on
ne
connaît que le résultat : la paix sauvée, « comme par miracle », dise
218
mental des prophètes et des psalmistes. Nul autre
ne
possède, dans notre tradition, cette violente simplicité qui peut s’a
219
Tout cela crée l’appel au musicien — et celui-ci
ne
peut être qu’Honegger. La part de la commande Je vais le voir à
220
art de la commande Je vais le voir à Paris. Je
ne
le connaissais pas. En pleine gloire, à 46 ans, il vient d’écrire Jea
221
quinze ans son cadet, inconnu du grand public, je
ne
lui apporte rien qu’une commande peu munificente. Je lui en résume le
222
es mous dans la fanfare de La Chaux-de-Fonds. (Je
n’
en sais rien.) Il me prête un recueil de chorals luthériens, pour que
223
me joue au piano ce qu’il a fait. Il joue mal, je
ne
distingue pas grand-chose, une fin de choral pourtant, dont il me dit
224
paroles. » Je le crois, c’est évident, mais cela
n’
explique pas tout. Il y a là plus qu’un processus psychologique de tra
225
ission par les mots. Jamais, pas un instant, nous
n’
avons eu l’idée de parler du sens profond de la pièce, ni de la religi
226
ni de nos positions personnelles à son égard. Je
ne
sais pas pourquoi d’ailleurs. Par pudeur ? Je ne le pense pas. Mais p
227
ne sais pas pourquoi d’ailleurs. Par pudeur ? Je
ne
le pense pas. Mais peut-être tout simplement parce qu’il fallait d’ab
228
n proprement dite nous prit deux mois — voilà qui
ne
pouvait signifier qu’un accord plus profond, par nature implicite, j’
229
nature implicite, j’entends de telle nature qu’il
ne
pût se traduire d’une manière authentique et fidèle que dans l’œuvre
230
sive. Cette espèce d’harmonie préétablie, comment
ne
pas admettre après coup qu’elle ait gouverné dans le fait plusieurs s
231
n confessionnel et du genre pieux, ce qu’Honegger
n’
est à aucun degré. Je ne crois même pas qu’il se soit jamais dit croya
232
nre pieux, ce qu’Honegger n’est à aucun degré. Je
ne
crois même pas qu’il se soit jamais dit croyant, encore moins incroya
233
t croyant, encore moins incroyant, d’ailleurs. Ce
n’
est pas avec des traces « d’éducation chrétienne » et des formes vidée
234
qu’on a jamais créé un style : avec tout cela on
ne
fait que du folklore, et le pire est le folklore religieux. Si le sty
235
doit être qualifié d’essentiellement chrétien, ce
n’
est pas à cause des sujets, ni des paroles et situations mises en musi
236
ignes, l’aléatoire devient liberté de choisir qui
ne
se renonce que dans le choix du sens. Or ce sens tout d’abord jalonné
237
les signes, doit être décidé par la personne, et
ne
peut l’être que dans l’acte de foi, par quoi je n’entends pas du tout
238
e peut l’être que dans l’acte de foi, par quoi je
n’
entends pas du tout l’adhésion à quelque credo, mais la réalité de l’o
239
on en nous de quelque chose, disons l’Esprit, qui
n’
est pas vérifiable autrement que par ses créations ou incarnations. Ce
240
temps le Comité du Centre : « L’unité de l’Europe
ne
se fera ni uniquement, ni principalement par des institutions europée
241
é de plus en plus mythique — cette Europe divisée
n’
a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéol
242
utumes sociales par les Américains. Mais l’Europe
ne
pourra jamais se faire que selon la formule fédéraliste, respectueuse
243
laire ou millénaire qu’ils prétendaient inaugurer
n’
a duré que dix à douze ans. (La Suisse, en regard, approche du viie s
244
cte secret de 1273, que le Pacte du 1er août 1291
ne
fera guère que copier.) Or il se trouve que cette formule fédéraliste
245
t acceptable pour la Suisse. Tout serait parfait,
n’
était l’obstacle majeur que l’on dresse sans relâche et toujours à nou
246
. L’école, surtout secondaire — mais l’université
n’
était pas en reste vers 1914 —, l’école apprend depuis un siècle aux j
247
la plupart, en tant qu’État, et en moyenne, elles
n’
ont même pas un siècle d’âge. Seules la France, l’Angleterre et l’Espa
248
soit une hésitation d’un millénaire et demi, qui
ne
manque pas d’une certaine « grandeur ». Mais si l’on peut admettre qu
249
il est absolument certain que l’Italie comme État
n’
a que 110 ans, l’Allemagne 100 tout juste, la Norvège 66, la Tchécoslo
250
ifférents les uns des autres pour s’unir et qu’on
ne
pourra jamais les fédérer, parce que nos vingt-cinq États-nations ne
251
s fédérer, parce que nos vingt-cinq États-nations
ne
sauraient céder sans trahir un pouce de leur sacro-sainte souverainet
252
vous montrer aussi les conclusions politiques qui
ne
manqueront pas de résulter de ces mises au point. Et tout d’abord :
253
lter de ces mises au point. Et tout d’abord : il
n’
y a pas de cultures nationales. La culture européenne n’est pas la som
254
pas de cultures nationales. La culture européenne
n’
est pas la somme de vingt-cinq cultures nationales, puisqu’elle exista
255
taire, rien de plus. Mais à l’université même, on
ne
parlait qu’en latin, et l’on ignorait tout des appartenances « nation
256
enne Gilson —, pas un seul des grands professeurs
n’
était français : ils étaient napolitain comme Thomas d’Aquin, pisan co
257
, ceux qui parlent une même langue ? Oui, mais il
n’
était pas question de les enfermer pour si peu dans les frontières d’u
258
ans les frontières d’un même État. D’ailleurs, il
n’
est pas vrai que nos stato-nations modernes correspondent à l’aire de
259
s unes aux autres, et qu’en Inde, le Pandit Nehru
ne
pouvait se faire comprendre qu’en anglais de l’immense majorité de se
260
ais. Alors que les Chinois de langues différentes
ne
peuvent communiquer entre eux qu’au moyen d’idéogrammes dessinés dans
261
é culturelle de l’Europe est un fait que personne
ne
conteste — à part nos bons nationalistes. Enfin, il y a l’affaire de
262
unit ; allez savoir pourquoi ! (Mais non, surtout
ne
le demandez pas, vous passeriez pour un mauvais Français !) De même,
263
lair — à condition qu’un esprit fort (ou un naïf)
ne
remarque pas que l’on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catala
264
cœur des Alpes. Non, les frontières de nos États
n’
ont jamais été « naturelles ». Elles sont accidentelles et arbitraires
265
autour de Genève, en suivant cette frontière qui
ne
rime à rien, qui ne sert à rien, ne protège contre rien, n’arrête rie
266
n suivant cette frontière qui ne rime à rien, qui
ne
sert à rien, ne protège contre rien, n’arrête rien de ce qu’il faudra
267
frontière qui ne rime à rien, qui ne sert à rien,
ne
protège contre rien, n’arrête rien de ce qu’il faudrait arrêter — la
268
rien, qui ne sert à rien, ne protège contre rien,
n’
arrête rien de ce qu’il faudrait arrêter — la tempête, les épidémies,
269
u symbole de la souveraineté stato-nationale, qui
ne
peut plus avoir d’effets que négatifs ! En nous présentant l’Europe c
270
davantage et s’entendront mieux entre eux qu’ils
ne
s’entendent avec les hommes de droite de leur propre nation ; que les
271
tes de leur propre nation ; et ainsi de suite. Ce
ne
sont pas nos appartenances nationales qui nous diversifient vraiment,
272
nation. Supprimez les frontières nationales, vous
n’
appauvrirez en rien l’Europe une et diverse, et vous ne risquerez pas
273
auvrirez en rien l’Europe une et diverse, et vous
ne
risquerez pas un instant de créer ce fameux volapük que dénonçait de
274
ilisant à Paris tous les esprits distingués qu’il
n’
avait pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre cul
275
iversité, vous remarquerez que l’échelon national
ne
joue aucun rôle, est simplement omis, inexistant. Et voilà qui nous
276
elle quelque chose, à nous Suisses. Car la Suisse
n’
a jamais connu l’illusion d’une « culture nationale » — ne fût-ce qu’e
277
is connu l’illusion d’une « culture nationale » —
ne
fût-ce qu’en raison de son appartenance à trois domaines linguistique
278
roportionnellement, à tout ce qui s’est fait dans
n’
importe quelle tranche de six millions d’hommes découpée dans n’import
279
le tranche de six millions d’hommes découpée dans
n’
importe lequel des pays qui nous entourent —, tout s’est fait dans nos
280
il est arrivé de nos frontières cantonales, et je
ne
crois pas que nous y ayons perdu quoi que ce soit de vraiment précieu
281
mun, de nous laisser entraîner sur un terrain qui
n’
est pas le nôtre, dans des termes qui sont étrangers à notre tradition
282
onalistes. L’Europe que nous voulons, nous aussi,
ne
sera jamais un laborieux et problématique échafaudage d’accords tarif
283
, en maintiennent et renforcent le principe. Nous
ne
croyons pas à une Europe des États-nations souverains. Je l’ai souven
284
car ou bien on a une vraie amicale, mais alors il
n’
y a pas de misanthropes, ou bien on a de vrais misanthropes, mais alor
285
ou bien on a de vrais misanthropes, mais alors il
n’
y a pas d’amicale. L’Europe que nous voulons sera fédérale — ou alors
286
pe que nous voulons sera fédérale — ou alors elle
ne
se fera pas sérieusement. Voilà, je pense, la perspective qui s’ouvre
287
je pense, la perspective qui s’ouvre à nous. Elle
n’
a rien pour nous effrayer, puisque nous sommes le seul pays européen q
288
er, puisque nous sommes le seul pays européen qui
n’
ait pas pris la forme d’un État-nation au siècle dernier. Le seul cons
289
communautés qui le constituent. Donc le seul qui
n’
ait rien à redouter de la disparition des frontières. Mais je vois là
290
ernationales, le philosophe allemand Karl Jaspers
n’
hésita pas à déclarer que l’Europe n’avait plus le choix qu’entre deux
291
Karl Jaspers n’hésita pas à déclarer que l’Europe
n’
avait plus le choix qu’entre deux solutions : la balkanisation et l’he
292
contre leur modestie ! Helvétiser l’Europe, cela
ne
se fera pas tout seul. C’est maintenant ou jamais que la Suisse doit
293
vre un certain avenir et par avance le limite. Je
ne
le connaîtrai vraiment qu’en découvrant à l’expérience ce qu’il me di
294
urs vivant en nous, ce passé jamais accompli, nul
n’
en peut prendre les mesures : il s’agrandit sans fin au regard du cher
295
et dont ils peuvent tirer de libres créations ou
ne
rien faire, mais pose aussi des limitations précises à leur action, q
296
si des limitations précises à leur action, qu’ils
ne
peuvent éluder, surtout s’ils les ignorent. 3. L’héritage culturel en
297
l enfin reste une somme de virtualités, dont nous
ne
pouvons en général actualiser qu’une part infime. Il n’est pour nous,
298
vons en général actualiser qu’une part infime. Il
n’
est pour nous, au sens concret, que ce que nous sommes capables d’en u
299
nécessairement vont constituer des hérésies. Nous
ne
deviendrons nous-mêmes qu’à ce prix, qui est d’assumer les risques de
300
l’évolution des arts en avouant volontiers qu’on
ne
comprend plus — et voilà quelqu’un de cultivé. Si je dis au contraire
301
nulle autorité incontestée et nul pouvoir central
ne
totalisent et ne peuvent unifier les conduites créatrices, mais encor
302
contestée et nul pouvoir central ne totalisent et
ne
peuvent unifier les conduites créatrices, mais encore, à la différenc
303
Rome et Jérusalem, toujours citées, mais dont on
ne
dira jamais assez combien les valeurs qu’elles transportent sont étra
304
t cela est européen. Tout cela est culturel ou je
ne
sais pas ce que c’est. Et tout cela vit en chacun de nous, sous forme
305
e — notre seule unité fondamentale, répétons-le —
n’
est pas exceptionnel : il est irrécusable. J’entends qu’il est univers
306
nds qu’il est universel. Pas un seul d’entre nous
n’
y échappe. Que nous soyons « très cultivés » ou illettrés y change bie
307
cultivés » ou illettrés y change bien moins qu’on
ne
l’imagine. Nous sommes tous tributaires de deux mémoires, celle des p
308
s également vains. Car la « pureté » d’une langue
n’
est nullement sa vertu, comme l’a fait voir T. S. Eliot. L’anglais, di
309
nt coupées les unes des autres, et que les poètes
ne
lisent plus d’autre littérature que celle de leur propre langue, la p
310
s. » Voilà pour les bienfaits du chauvinisme : il
ne
cesse de trahir ce qu’il prétend sauver. Quant à la diversité des lan
311
la diversité des langues, si on la respecte, elle
n’
empêche pas l’union, bien au contraire, elle ne condamne que l’unifica
312
le n’empêche pas l’union, bien au contraire, elle
ne
condamne que l’unification forcée. Entre le breton, l’alsacien, le ca
313
danois, l’allemand et le tchèque. Ces différences
n’
ont nullement empêché l’édit de Villers-Cotterêts, imposant à toutes l
314
le français comme seule langue officielle. Elles
n’
ont pas empêché non plus les dragonnades linguistiques perpétrées par
315
rées par l’école primaire depuis un siècle. Elles
n’
ont pas empêché le pire, qui est l’unification forcée. Mais grâce à la
316
ion librement décidée des vraies « nations », qui
ne
peut se faire que dans le cadre européen. Car des vraies « nations »
317
e européen. Car des vraies « nations » ou régions
ne
seront vraiment elles-mêmes que toutes ensemble, dans leurs interrela
318
outes ensemble, dans leurs interrelations. Aucune
ne
sera jamais une « culture nationale », ou un microcosme de l’Europe,
319
éristique du véritable Européen que sa volonté de
n’
être pas comme son voisin, de ne ressembler à aucun autre. Cette volon
320
que sa volonté de n’être pas comme son voisin, de
ne
ressembler à aucun autre. Cette volonté de différer fait partie intég
321
ie intégrante de l’héritage commun. Ceci noté, il
n’
en est que plus frappant de constater qu’un même mot originel, grec, l
322
leuves et rivières de l’Europe. « Qu’as-tu que tu
n’
aies reçu ? », dit notre « mère l’Europe » — comme l’appelait déjà une
323
, tout héritier est hérétique, du seul fait qu’il
ne
peut embrasser la totalité de l’héritage. Ses données génétiques le p
324
le produit optimal de leurs interactions — et qui
n’
existera jamais. Donnons maintenant quelques exemples de limitations h
325
le jeu politique de nos pays, ces deux partis qui
n’
arrivent plus à se définir autrement que par leur opposition. Cette l
326
critique et l’agressivité stérile qui en résulte
n’
ont jamais existé (avant notre influence) en Inde, en Chine, ou dans l
327
stations planétaires que l’on sait. Les Européens
ne
sont pas plus cruels et violents que les Asiates ou les Noirs, loin d
328
d’hier, ou les marxistes de tout à l’heure, s’il
ne
les comprend pas davantage. Le scientifique gouverne ; c’est lui qui
329
nateurs. Le laïque, le politicien et le militaire
ne
peuvent que subir sans comprendre. Il en résulte une inégalité fondam
330
ages, dont la sécession des hippies (ou drop off)
ne
donne qu’une faible et trop aimable idée. 4. L’Européen romanisé, org
331
n romanisé, organisé, étatisé depuis des siècles,
ne
peut guère plus concevoir « Dieu » et la vie spirituelle que dans les
332
ndition de l’œuvre d’art et lien social sans quoi
ne
sauraient exister ni crédit ni institutions, ni États ni fédérations
333
il nous est possible de dilapider. Car ces vertus
ne
contraignent pas l’individu comme le fait un programme génétique, si
334
sont ce qui permet seul de le dépasser. Tout cela
n’
existe guère comme vertus, ou s’est vu décrié dans les cultures antiqu
335
uisse pour le suffrage féminin. Cette affirmation
n’
est pas immédiatement évidente à chacun. Et pourquoi dès le xiie sièc
336
de la femme dans les pays d’Europe. Mais la femme
n’
avait-elle pas plutôt un rôle d’inspiratrice, un rôle passif en quelqu
337
langés en Suisse romande, cette idée que la femme
n’
a pas sa place dans les affaires publiques qui doivent être le domaine
338
mplet dans la société actuelle, où même la guerre
n’
est plus faite par les gens qui portent un sabre. Si l’on sort des myt
339
issent toujours des choses très anciennes dont on
n’
est plus maître, dont on n’a plus conscience, justement. Toutes ces va
340
très anciennes dont on n’est plus maître, dont on
n’
a plus conscience, justement. Toutes ces valeurs qui tiennent à des ép
341
es « ont été l’agent principal de civilisation »,
n’
exagérez-vous pas leur rôle ? En tous les cas, ça choque… Ce que nous
342
s mères plus qu’à nos pères, en grande partie. Je
n’
entends pas culture au sens scolaire, universitaire du terme. Mais la
343
pour l’uniforme, plus que les hommes souvent. Il
n’
en reste pas moins, que bien ou mal, c’est par les femmes que se fait
344
à la culture européenne ? D’autres civilisations
n’
ont pas accordé le même poids au rôle de la femme. Je pense que c’est
345
ès l’égale de l’homme, moralement parlant. Ce qui
n’
est absolument pas le cas en Asie, ce qui n’est pas le cas dans les ci
346
e qui n’est absolument pas le cas en Asie, ce qui
n’
est pas le cas dans les civilisations où il y a beaucoup de femmes pou
347
emmes pour un homme. Chez nous, considérons qu’il
n’
y a aucune espèce de différence au point de vue public entre hommes et
348
au point de vue public entre hommes et femmes. Je
ne
dis pas du tout qu’il n’y a pas de différence entre masculin et fémin
349
tre hommes et femmes. Je ne dis pas du tout qu’il
n’
y a pas de différence entre masculin et féminin. Je dis que sur le pla
350
nin. Je dis que sur le plan de la vie publique il
n’
y en a pas. Je n’en vois pas. Les seules que nous croyons voir, que no
351
ur le plan de la vie publique il n’y en a pas. Je
n’
en vois pas. Les seules que nous croyons voir, que nous imaginons voir
352
e Paris, en 1871 : … le communisme de la Commune
ne
saurait être compris que si on ne le sépare pas du communalisme de la
353
e de la Commune ne saurait être compris que si on
ne
le sépare pas du communalisme de la Commune, c’est-à-dire de la tradi
354
onnalité humaine. L’homme est une personne, ou il
n’
est rien du tout ; ni race, ni régime ne sauraient changer cette vérit
355
ne, ou il n’est rien du tout ; ni race, ni régime
ne
sauraient changer cette vérité. Il a fallu un effort gigantesque pour
356
un accord dans notre groupe dès 1933), ces textes
ne
peuvent manquer de frapper par leur actualité permanente. Ils anticip
357
culier (régional, local, autonomiste) la personne
n’
existant, au sens fort, que dans la tension entre ces deux pôles. Ces
358
ulé les concepts opératoires. Et pour ma part, je
ne
cesse de mieux mesurer ce que j’ai dû et dois encore aux trop brèves
359
ngues, ni les traditions religieuses et sociales,
ne
sont séparées par les fleuves ou les crêtes des chaînes montagneuses.
360
ar les manuels et les doctrines nationalistes, je
n’
imagine pas de principe méthodologique plus fécond, pour cette renaiss
361
ires publiques en tant qu’acteur, non-spectateur,
n’
étant possible et praticable en général que dans le cadre communal et
362
puis d’Oxford et aux structuralistes de Paris. Il
n’
y a pas de rayonnement continental ou planétaire sans foyers locaux, m
363
ntal ou planétaire sans foyers locaux, mais aucun
ne
s’arrête aux nations, entre le particulier et l’universel. Écologi
364
ésultantes et de leur possible optimisation. Elle
ne
connaît en fait ni frontières nationales, ni circonscriptions élector
365
uve la racine de mondes politiques différents. Ce
n’
est que peu à peu, d’ailleurs, que s’est révélé à moi le principe de c
366
valables, mais différentes ou même antinomiques.
N’
est-ce pas le cas du couple ? Un jour, on m’a demandé dans un débat à
367
jour, on m’a demandé dans un débat à la radio : «
Ne
craignez-vous pas que les Européens ne soient trop différents les uns
368
radio : « Ne craignez-vous pas que les Européens
ne
soient trop différents les uns des autres pour jamais pouvoir s’unir
369
s pour jamais pouvoir s’unir ? » J’ai répondu : «
Ne
craignez-vous pas que les hommes et les femmes ne soient trop différe
370
Ne craignez-vous pas que les hommes et les femmes
ne
soient trop différents pour pouvoir jamais former des couples ? » Voi
371
s de l’amour-passion nous conditionne au point de
n’
être plus capables d’aimer l’autre en tant qu’autre, nous ne serons pl
372
s capables d’aimer l’autre en tant qu’autre, nous
ne
serons plus capables non plus de devenir les éléments d’une cité, d’u
373
treuse pour le mariage ? Je le disais en 1938, je
n’
ai pas changé d’avis. Nous entrons dans le mariage généralement par er
374
illogique qu’il faut se marier. Eh bien, non, on
ne
reste pas amoureux tout le temps ! Chacun sait que le mariage, c’est
375
sion, sur quelque chose dont chacun sait que cela
ne
durera pas, c’est vouloir le construire sur le principe même de tout
376
le principe même de tout divorce. L’amour-passion
n’
est pas possible dans le mariage ? Non. Je dis autre chose : je dis qu
377
chose : je dis qu’il est l’ennemi du mariage. Ce
n’
est pas par hasard que le jugement de la comtesse Marie de Champagne,
378
tal dans la vie de tous les Européens, même s’ils
n’
ont jamais lu une ligne de l’histoire de Tristan. La passion amoureuse
379
de la supprimer en tant que force antisociale qui
ne
peut que gêner le rendement. C’est un fait : l’Asie bouddhiste, brahm
380
t. C’est un fait : l’Asie bouddhiste, brahmanique
n’
a jamais connu notre amour et elle le considère avec un étonnement mêl
381
qui désigne pour nous le sentiment de la passion,
n’
a pris de sens dans le Languedoc du xiie siècle qu’avec la poésie des
382
seut devenant Mme Tristan ! Mais Tristan et Iseut
n’
ont-ils pas été merveilleusement heureux ? Ils ont été merveilleusemen
383
eilleusement malheureux ! Comprenez-moi bien : je
n’
ai aucune recette pour l’amour. Je constate que la passion et le maria
384
n tend vers l’impossible fusion, qui, finalement,
ne
peut conduire qu’à la mort. L’amour-passion tel que nous le concevons
385
cevons a inspiré tous les arts en Europe, mais il
ne
vaut rien pour cette œuvre d’art qu’est le couple. C’est une thèse qu
386
crit : « Combien d’hommes seraient amoureux s’ils
n’
avaient jamais entendu parler d’amour ? » Il n’y a pas d’amour inexpri
387
ls n’avaient jamais entendu parler d’amour ? » Il
n’
y a pas d’amour inexprimé. Il y a des désirs, des instincts, faire l’a
388
n. L’amour-passion, c’est autre chose. Tant qu’il
n’
est pas « déclaré », c’est comme s’il n’existait pas. Grâce à la litté
389
ant qu’il n’est pas « déclaré », c’est comme s’il
n’
existait pas. Grâce à la littérature, la passion obsède nos rêves. Et
390
se passe-t-il dans les autres civilisations ? Je
n’
ai rien trouvé de tel en Orient, en Inde, en Chine, où n’existe aucune
391
en trouvé de tel en Orient, en Inde, en Chine, où
n’
existe aucune littérature d’amour-passion. Si l’on excepte, peut-être,
392
imposer une retenue aux instincts. Car la passion
ne
s’approfondit et ne dégage ses puissances qu’à la mesure des résistan
393
aux instincts. Car la passion ne s’approfondit et
ne
dégage ses puissances qu’à la mesure des résistances qu’elle rencontr
394
à la mesure des résistances qu’elle rencontre. On
ne
retrouve en Orient que la technique érotique des épreuves, signalée p
395
oit, quarante jours sur elle, sans la toucher. Ce
n’
est qu’après cette épreuve que peut s’opérer l’union sexuelle, qui ne
396
e épreuve que peut s’opérer l’union sexuelle, qui
ne
doit d’ailleurs pas aboutir à la procréation. Mais ce n’est qu’une te
397
d’ailleurs pas aboutir à la procréation. Mais ce
n’
est qu’une technique ? Ainsi que l’a confirmé le maître du zen, Suzuki
398
r tel que nous l’entendons depuis le xiie siècle
n’
a même pas de nom dans leur langue. Ce qui se rapproche le plus de not
399
ne problématique à peu près unique au monde : ils
ne
peuvent pas devenir des problèmes là où tout est réglé, programmé. La
400
crise du mariage est typique de l’Occident. Elle
n’
existe pas ailleurs. Mais c’est le prix de notre liberté. Mais vous, q
401
suis évidemment pour l’amour-passion, bien qu’il
ne
soit pas viable. Trop rares sont les « beaux moments d’équilibre doré
402
social et les vocations personnelles. Car les uns
ne
vivent pas sans les autres. Comment ont été accueillies vos thèses de
403
xixe siècle. Et le mariage à l’essai, même s’il
ne
garantit pas de l’erreur, augmente les chances de l’éviter. Mais, d’a
404
et programmé. Ce qui nous menace aujourd’hui, ce
n’
est plus un excès d’anarchie et de tyrannie brutale, c’est au contrair
405
passion. Parce que l’amour-passion, lui non plus,
ne
peut pas exister en dehors d’un certain monde spirituel. Si vous avil
406
l. Si vous avilissez ce monde-là, l’amour-passion
n’
a plus de sens. Vous tombez dans la pariade animale. Konrad Lorenz par
407
affadissement possible des relations amoureuses.
Ne
reste-t-il pas l’érotisme ? Même pas. C’est une évidence. L’érotisme
408
ormes d’amour. En ce sens, la révolution sexuelle
ne
veut rien dire. Quel est l’ordre neuf que l’on peut déduire de la cop
409
ui nous ont fait croire que le « péché originel »
n’
est autre que la sexualité. Quant aux pseudo-tabous qui règnent sur no
410
écrétion normale de la Société, car nulle société
ne
peut vivre sans feux verts et sans feux rouges. Savez-vous quel est l
411
Dr Tissot s’appelle révolution sexuelle, alors ce
n’
est qu’un progrès normal vers le bon sens. En somme, vous trouvez qu’o
412
, vous trouvez qu’on s’agite beaucoup, mais qu’il
n’
y a guère de révolution ? Il est clair que les tabous de la morale bou
413
est clair que les tabous de la morale bourgeoise
ne
tiennent plus. Est-ce que cela signifie que la sexualité est plus vig
414
dans ce qu’il a de meilleur et de plus personnel
n’
aboutira complètement. Il y aura toujours quelque chose d’irréductible
415
Isolde, plus de Tristan. » Le masochiste intégral
ne
vaut rien pour aimer. Tristan n’aime pas réellement Isolde. Il ne la
416
ochiste intégral ne vaut rien pour aimer. Tristan
n’
aime pas réellement Isolde. Il ne la voit pas. Il projette. Ce qu’il a
417
r aimer. Tristan n’aime pas réellement Isolde. Il
ne
la voit pas. Il projette. Ce qu’il aime, c’est l’amour, être en état
418
emmes rêvées, les produits d’une projection. Vous
n’
aimez pas telle femme réelle, vous aimez votre projection sur une femm
419
t que nous appelions le « désordre établi ». Nous
ne
voulions pas qu’on critique l’Allemagne et l’URSS au nom de l’esprit
420
es totalitaires qui fermait notre horizon, et qui
n’
était pas notre guerre. À cette époque, toute une génération s’est exp
421
prend conscience des choses quand on les perd. Je
n’
étais pas le seul dans ce cas à New York. Quand j’ai rencontré Einstei
422
contré Einstein, à Princeton, il m’a dit : « Vous
n’
avez pas idée de la transformation intellectuelle de l’Amérique sous l
423
ste. Cela prendra un temps fou. En tout cas, cela
ne
se fera pas avec un nationaliste comme Churchill : il est dangereux.
424
d’États-nations visant à la puissance, disait-il,
n’
aurait fait qu’un troisième larron armé jusqu’aux dents. Eh bien, c’es
425
pendant quelques mois, Simone Weil. Aucun de nous
n’
était certain de jamais revoir l’Europe. J’écrivais deux textes par jo
426
européenne. Mais l’Europe est loin d’être faite.
Ne
craignez-vous pas d’avoir perdu votre temps ? Je suis probablement l’
427
doutes sur l’Europe et la vitalité de sa culture
n’
existent que dans l’esprit des intellectuels européens, et pas ailleur
428
s de Soviétiques et 203 millions d’Américains, on
n’
arrive pas même au total européen. Si ces chiffres ne nous rassurent p
429
rrive pas même au total européen. Si ces chiffres
ne
nous rassurent pas, c’est que nous nous sentons seulement Français, o
430
r le dollar. Aucun de nos pays, tous trop petits,
ne
pourra bientôt plus nous raconter sa petite histoire d’indépendance.
431
vous reproche de faire de l’européocentrisme ? Je
ne
donne une place ni grande ni petite à l’Europe : je dis ce qu’elle es
432
upart des formes artistiques et littéraires. Cela
ne
veut pas dire que l’Europe soit moralement supérieure aux autres civi
433
yrannies sans exemple, raté ses révolutions. Cela
ne
veut pas dire qu’il n’y a pas eu Hitler, Staline, Guernica… L’Europe
434
raté ses révolutions. Cela ne veut pas dire qu’il
n’
y a pas eu Hitler, Staline, Guernica… L’Europe est une unité complexe,
435
lle aussi, une invention européenne. Ailleurs, il
n’
y a jamais eu, avant le contact avec notre culture et nos doctrines, q
436
s prises de pouvoir par des chefs militaires, qui
ne
remettaient jamais en cause le système des valeurs régnantes. En 1961
437
rs occidentales : « Je sais, leur ai-je dit, vous
n’
y croyez plus. Mais qu’est-ce qui existe à la place, selon vous ? Pren
438
ez le monde par vos antipodes : l’Asie du Sud-Est
n’
a qu’une idée, c’est d’imiter la Chine maoïste, qui, elle, voudrait êt
439
l’Europe au xixe siècle. » Pourquoi, selon vous,
n’
est-ce pas encore fait, la fédération européenne ? D’abord, parce qu’o
440
ommun la religion de l’État-nation centralisé. Il
n’
y a que des différences de degré. Après la guerre, toutes les ancienne
441
uvelle sur la base des États-nations. Or l’Europe
ne
pourra se fédérer que par la volonté délibérée des Européens, et non
442
par une espèce de complot des gouvernements. Vous
ne
croyez pas à l’homme politique ? C’est probablement une fonction à su
443
s administrateurs. À quoi sert le politicien s’il
ne
sait rien de tout cela ? N’importe quel ordinateur ferait mieux, et a
444
rt le politicien s’il ne sait rien de tout cela ?
N’
importe quel ordinateur ferait mieux, et avec moins de bavardage. Vous
445
urnaux : « Le souverain s’est prononcé hier. » Ce
n’
est pas une manière de parler, c’est la réalité. On ne dit pas, en Sui
446
t pas une manière de parler, c’est la réalité. On
ne
dit pas, en Suisse : « Un tel a été un grand serviteur de l’État. » P
447
gouverne ; le Conseil fédéral, lui, exécute, mais
ne
gouverne pas les hommes. C’est absolument le contraire des habitudes
448
je finis toujours par leur dire : « Monsieur, je
ne
suis pas votre sujet, mais un libre citoyen. C’est le fonctionnaire q
449
s vient des rois de France. Eh bien, non : l’État
n’
est qu’un appareil, au mieux utile ! » Tandis que l’État-nation ? Le c
450
er à mort ses hérétiques et incroyants, droit que
n’
a plus aucune Église, Dieu merci ! Refus de servir et on vous emprison
451
Au contraire de ce que pensent les ministres, on
ne
fera pas l’Europe sans casser des œufs. Il nous faut entreprendre dél
452
ut entreprendre délibérément cette révolution qui
n’
est pas violente, mais qui implique le démantèlement progressif des Ét
453
et actif, l’Europe sera pratiquement faite. Mais
n’
est-ce pas mettre la charrue devant les bœufs ? Un Jean Monnet ne vous
454
ttre la charrue devant les bœufs ? Un Jean Monnet
ne
vous traiterait-il pas d’utopiste ? Jean Monnet a très bien fait ce q
455
Nous sommes contraints de voir aujourd’hui que ce
n’
est pas ainsi que les choses se passent. Et que ce n’est pas Karl Marx
456
st pas ainsi que les choses se passent. Et que ce
n’
est pas Karl Marx qui a raison sur ce point, mais Mao Zedong, qui a ba
457
fondamentales de notre esprit. Et que l’économie
n’
en sera jamais que le produit. Vous restez donc optimiste en ce qui co
458
meurt tous les jours plus d’anti-Européens qu’il
n’
en naît. » Je suis certain que nous irons vers des solutions fédéralis
459
olutions fédéralistes, régionalistes, parce qu’il
n’
y en a pas d’autres. Mais il reste toujours la part du diable. Qui est
460
été, et vous avez le totalitarisme. Quand l’homme
ne
sert plus à rien, n’a plus de vocation, on le jette à la poubelle ; p
461
totalitarisme. Quand l’homme ne sert plus à rien,
n’
a plus de vocation, on le jette à la poubelle ; pour moi, c’est cela,
462
les institutions de la tyrannie. Mais une société
ne
se retourne pas comme un homme. Il ne suffit pas de toucher deux ou t
463
une société ne se retourne pas comme un homme. Il
ne
suffit pas de toucher deux ou trois-centres nerveux pour que tout mar
464
idée d’en faire. Pas une seule de nos révolutions
n’
a réussi. Dans ce sens, on ne peut pas être trop fier de l’Europe. Com
465
e de nos révolutions n’a réussi. Dans ce sens, on
ne
peut pas être trop fier de l’Europe. Comment voyez-vous l’avenir ? Je
466
ectif. Mais il me semble improbable que cet ennui
ne
recrée pas en profondeur la soif de quelque chose qui soit au-delà de
467
uelque chose qui soit au-delà de l’ordre et qu’il
ne
provoque pas une rébellion de l’esprit, une sédition de l’inconscient
468
iècle, ce qui nous menace le plus, c’est que nous
ne
tenons plus compte de lui dans nos calculs. Nous parlons — enfin ! —
469
oblèmes politiques du siècle, en effet. Mais nous
ne
prenons pas garde aux autres pollutions, celles qui sont spirituelles
470
utions, celles qui sont spirituelles. Et quand on
ne
tient plus compte du diable, on risque de ne plus discerner le mal. P
471
d on ne tient plus compte du diable, on risque de
ne
plus discerner le mal. Pour quelqu’un qui n’est pas croyant, qu’est-c
472
e de ne plus discerner le mal. Pour quelqu’un qui
n’
est pas croyant, qu’est-ce que cela représente, le diable ? Croyant ou
473
ce qu’est le mal et par conséquent le bien. Qu’on
ne
raconte pas d’histoires ! Aujourd’hui, beaucoup disent : « On en a as
474
er ce qu’est pour vous le diable ? C’est quand il
n’
y a personne. Qui peut-on convaincre avec une telle définition ? Le di
475
tion ? Le diable vous convainc très facilement de
ne
pas croire à son action, qui est spirituelle. C’est son incognito qui
476
ier tour du diable est de nous faire croire qu’il
n’
existe pas ». Le diable, c’est celui qui nous dit, comme dans L’Odyssé
477
Mon nom est Personne. De quoi aurais-tu peur ? Je
ne
suis pas là… » C’est ce que fait Satan ? Singeant Dieu, mais à rebour
478
mais à rebours, il nous dit : « Je suis celui qui
n’
est pas ! ». Il est la force dépersonnalisante de l’univers. Il nous f
479
nalisante de l’univers. Il nous fait croire qu’il
n’
y a personne, et pourquoi ? Parce que alors il n’y a plus de responsab
480
n’y a personne, et pourquoi ? Parce que alors il
n’
y a plus de responsabilité, donc plus de culpabilité. C’est l’uniformi
481
re à un niveau inférieur d’énergie. Non, Hitler
n’
était pas le diable C’est donc cela, pour vous, « la part du diable
482
il arrive, et à tous risques. Car lorsque l’homme
ne
sert plus à rien, n’a plus de vocation, un jour arrive où on le jette
483
risques. Car lorsque l’homme ne sert plus à rien,
n’
a plus de vocation, un jour arrive où on le jette à la poubelle. C’est
484
ille. C’était la décharge municipale, « où le feu
ne
s’éteint jamais », comme l’observait Jésus. Et de là est venue l’idée
485
risques. S’ils sont rejetés au bout du compte, ce
n’
est pas par un tribunal, mais par eux-mêmes ! Et si l’on se trompe sur
486
e, selon vous, fait tout ce qu’il faut pour qu’on
ne
le détecte pas ? Je disais que Satan nous fait croire, premièrement,
487
s que Satan nous fait croire, premièrement, qu’il
n’
existe pas, deuxièmement, qu’il est seulement Hitler et personne d’aut
488
re, et ainsi de suite. Or le mal connu et dénoncé
n’
est jamais très dangereux. Lorsque nous sommes attaqués de front, nous
489
st alertée. La menace véritable, c’est quand nous
ne
savons pas que nous sommes attaqués, quand nous sommes entraînés malg
490
Qu’est-ce que tu as fait ? », il proteste : « Je
n’
y étais pas, c’est elle qui a tout fait, c’est elle qui m’a tendu la p
491
fait, c’est elle qui m’a tendu la pomme ; moi, je
n’
ai rien vu, je ne sais pas ce qui s’est passé ; j’étais derrière les b
492
qui m’a tendu la pomme ; moi, je n’ai rien vu, je
ne
sais pas ce qui s’est passé ; j’étais derrière les buissons, au milie
493
diable. Jacques Maritain m’avait dit : « Pourquoi
n’
écrivez-vous pas un livre sur le diable ? ». J’ai répondu : « Si j’écr
494
us et les folles, ou les soldats ont dit : « Nous
n’
avons fait qu’obéir ! » Les uns, à leur maître ou gourou, les autres à
495
plus évidente. Remontez jusqu’au Pentagone, vous
ne
trouverez vraiment plus personne ! Les gens qui ont fait le massacre
496
auteuil où vous êtes assis ! Là, vous êtes sûr de
ne
pas le rater. C’est en vous qu’il existe : personne d’autre ne peut v
497
er. C’est en vous qu’il existe : personne d’autre
ne
peut vous “dépersonnaliser” que vous-même ! » af. Rougemont Denis
498
Le général de Gaulle estimait que les deux mots
ne
différaient que d’une syllabe insignifiante et qu’il n’y avait pas li
499
féraient que d’une syllabe insignifiante et qu’il
n’
y avait pas lieu d’en disputer. Il est bien vrai qu’aucune raison logi
500
bien vrai qu’aucune raison logique ou sémantique
ne
saurait justifier la distinction des termes par la distinction des co
501
n pacte, « con-fédérer » ou « associer ensemble »
ne
peut rien dire de plus dès lors qu’on ne saurait s’associer avec soi
502
semble » ne peut rien dire de plus dès lors qu’on
ne
saurait s’associer avec soi seul, ni se fédérer isolément. Pour Littr
503
politique d’États », est défectueuse puisqu’elle
ne
mentionne que l’union et ne dit rien de l’autonomie. Or, une union qu
504
fectueuse puisqu’elle ne mentionne que l’union et
ne
dit rien de l’autonomie. Or, une union qui ne respecterait pas l’auto
505
et ne dit rien de l’autonomie. Or, une union qui
ne
respecterait pas l’autonomie des parties constituantes n’aurait pas l
506
cterait pas l’autonomie des parties constituantes
n’
aurait pas lieu d’être appelée fédérale. Ce serait simplement une unio
507
enir là, et déclarer le problème inexistant, s’il
n’
y avait dans le même Littré ces deux précisions mémorables ajoutées à
508
ique, c’est qu’il a fallu cinq à six siècles pour
ne
pas fédérer les communes, cités, principautés et pays suisses ; mais,
509
confédérale, après une dernière guerre civile, il
n’
a fallu que neuf mois, à un jour près, pour concevoir, élaborer et met
510
ons sont souverains en tant que leur souveraineté
n’
est pas limitée par la Constitution fédérale, et comme tels exercent t
511
érale, et comme tels exercent tous les droits qui
ne
sont pas délégués au pouvoir fédéral » ; cependant que l’article 5 «
512
, autonomie ou « souveraineté » relative que rien
ne
protège aujourd’hui — sauf le « parapluie » que l’on sait. Toute con
513
mmes d’État. Ceci dit, les fédéralistes européens
ne
sauraient se contenter du modèle suisse transposé à l’échelle europée
514
mmunautés les plus aptes à les gérer. Ainsi, pour
ne
donner que ces exemples simples : aux municipalités les chemins vicin
515
wels répond, dans de nombreuses interviews, qu’il
ne
s’agit là que d’une opération publicitaire destinée à recueillir des
516
lypses provoqués par la technologie, et bien ! il
ne
s’agit que d’une opération publicitaire destinée à faire vendre la de
517
e Pauwels : beaucoup de personnes, surtout âgées,
ne
demandent qu’à se réfugier avec un soulagement profond et jubilant da
518
e participation à des responsabilités. Or l’homme
n’
est responsable (étymologiquement : capable de répondre, de se porter
519
s’il est sujet libre de son action. Un homme qui
n’
est pas reconnu comme libre ne peut être tenu pour responsable de ses
520
ction. Un homme qui n’est pas reconnu comme libre
ne
peut être tenu pour responsable de ses actes. Inversement, un homme p
521
é de la possibilité d’assumer des responsabilités
ne
saurait être tenu pour libre ni se sentir vraiment tel. Quant aux tro
522
ux trois adjectifs social, civique, politique, il
n’
est guère possible de les distinguer théoriquement, car ils définissen
523
gislation sociale, recherches. Ainsi la politique
n’
est pas la fin dernière de l’homme, pas plus que ne le sont la cité ou
524
’est pas la fin dernière de l’homme, pas plus que
ne
le sont la cité ou la Société. Elle est la stratégie (dont le civisme
525
et personnels — transcendent toute communauté, ce
n’
est pourtant qu’au sein de la communauté, dans le complexe des relatio
526
s du xxe siècle, une importance décisive qu’elle
n’
avait peut-être jamais pu revêtir dans toute l’histoire. C’est au xxe
527
bilité — la liberté. Depuis les origines, l’homme
n’
avait pu que répondre aux durs défis de la nature. Il s’agissait pour
528
nts ». On nous dit aussi (mais je m’assure que ce
ne
sont pas les auteurs qui ont écrit cela) que « depuis 1960, la spécul
529
) que « depuis 1960, la spéculation sur le futur (
n’
est plus) prophétique mais rationnelle et méthodique ». Sur quoi je li
530
puleux) sont en fait des devins, car, attentifs à
ne
pas « prophétiser », ils cherchent à prévoir objectivement, donc pass
531
férente aux fins ; toute préférence ou parti pris
ne
pourraient que la gêner dans la recherche et la prévision des chemine
532
on inerte de ce qui « se passera », en vertu d’on
ne
sait quels dynamismes anonymes, impersonnels, voire non humains. Or,
533
ts », veut changer les données d’un phénomène, il
n’
est plus « scientifique ». Objectivité et normativité, ces deux « vari
534
de la prévision « exacte » par son propre effet,
n’
est-ce pas en fin de compte un cas particulier d’une dialectique de l’
535
is projettent sur le grand écran de l’avenir. Ils
ne
nient pas la possibilité que certains cauchemars se réalisent dans l’
536
ur à explosion dans les mégalopolis de l’an 2000,
ne
sont pas plus « débrayés » de l’évolution historique que le sociologu
537
notre avenir et de ses « surprises ». L’humanité
n’
invente pas n’importe quoi, ni rien d’entièrement imprévu ; toutes nos
538
et de ses « surprises ». L’humanité n’invente pas
n’
importe quoi, ni rien d’entièrement imprévu ; toutes nos grandes ou pe
539
re avenir à déchiffrer, qu’aucune de nos sciences
n’
en pourrait chiffrer. 4. Ceux qui prévoient l’an 2000 ne sont pas c
540
rait chiffrer. 4. Ceux qui prévoient l’an 2000
ne
sont pas ceux qui le vivront « Vous dites : Où vas-tu ? Je l’ignor
541
tor Hugo. Voilà qui est beaucoup plus sensé qu’il
n’
y paraît à première vue. Car si je savais ce qui m’attend « là-bas » e
542
ippies. Mais je me tromperais : car ce « là-bas »
ne
m’attend pas tel que je suis. Imaginer l’avenir est faux et dangereux
543
difié, etc. — et tout cela d’une manière que nous
ne
pourrions prévoir qu’aux conditions suivantes : — si nous pouvions se
544
ution même de nos manières de pressentir l’avenir
ne
le modifiait pas en cours de route, ou si nous pouvions évaluer ces m
545
participation du citoyen au management de la cité
ne
seront pas les mêmes, d’ici là, aux États-Unis, en URSS, en Europe, d
546
e. II. Les invariants humains La prévision
ne
prend son sens et sa valeur que pour autant qu’il y a dans le domaine
547
bles. Si tout variait simultanément, la prévision
n’
aurait pas de sens ; si rien n’était variable, le besoin de prévision
548
ment, la prévision n’aurait pas de sens ; si rien
n’
était variable, le besoin de prévision serait nul. Par rapport à la pa
549
trois à quatre centimètres depuis deux-cents ans)
ne
variera plus guère une fois l’urbanisation achevée et les nourritures
550
générale des techniques à la miniaturisation : on
ne
peut faire une chambre, une auto ou une cabine de transport plus peti
551
rtains besoins fondamentaux de l’homme occidental
ne
semblent pas susceptibles de disparaître sans que disparaisse en même
552
ain le refuge paisible ou la vraie communauté, et
ne
trouve d’autre alternance que celle de la promiscuité à domicile et d
553
une promenade plaisante, un beau lieu de réunion,
ne
sont guère différents… Les hommes n’ont pas tant changé10. » D’où l’i
554
de réunion, ne sont guère différents… Les hommes
n’
ont pas tant changé10. » D’où l’idée du « droit de vivre dans un envir
555
t l’hétérogénéité de leurs populations, mais cela
n’
affecte guère la spécificité de leurs comportements civiques. La compo
556
tumes civiques et le climat des débats politiques
n’
ont guère changé pour l’essentiel et rappellent davantage la France vo
557
tis et la faible participation aux « votations »,
n’
ont été modifiés ni par les changements qualitatifs et quantitatifs de
558
is les structures restent, les dimensions du pays
n’
ont pas varié, et le genius loci agit (par des moyens que je n’ai pas
559
ié, et le genius loci agit (par des moyens que je
n’
ai pas à examiner ici) de manière à maintenir l’invariant local et les
560
e union respectant les différences des cantons et
n’
ayant d’autre fin que la sauvegarde de leurs autonomies. Mais des obse
561
itants), et Aristote une ville dont la superficie
n’
excédât pas la portée de la voix d’un homme criant sur l’agora. Jusqu’
562
itique par excellence —, le Sénat et le Parlement
n’
étant qu’une dépendance ou délégation du forum. Là s’exerçait au maxim
563
litaires. Mais si le peuple d’une cité trop vaste
ne
peut plus s’assembler pour discuter, s’il est ensuite chassé de la ru
564
villas d’une banlieue dénuée de structures, s’il
n’
y a plus qu’un vide au centre de la ville — bureaux déserts dès la fin
565
à « couvrir » ou à révoquer après coup — alors il
n’
y a plus de participation, ni de démocratie concevables ou réelles. En
566
conscience des fins dernières de la société qu’on
ne
saurait exiger ni des spécialistes aux sources, ni des agents de prés
567
. b) L’information (dont l’enseignement scolaire
n’
est qu’un chapitre) aura des actions très différentes selon que, par u
568
isciple, ou même par un instituteur à des enfants
n’
ayant pas encore atteint le stade réflexif-critique, n’est pas une att
569
nt pas encore atteint le stade réflexif-critique,
n’
est pas une atteinte à la liberté de jugement mais une empreinte dont
570
e à ses risques et périls : « Le Roi est nu. » Il
n’
en va plus de même lorsque l’information s’adresse à l’inconscient (hi
571
variants et les variables principales repérés, il
ne
nous reste qu’à tenter quelques coups simples du jeu dont nous venons
572
ons de poser les règles. Étant bien entendu qu’il
ne
s’agit encore que d’essais de vérifier quelques groupes de connexions
573
et au Nord. La participation civique et politique
ne
saurait être alors que minimale ou nulle, tout étant dirigé, programm
574
n moyenne) ; de même, si aucune révolte populaire
n’
arrive à ébranler le système. Cependant, elle ne saurait être qu’une i
575
e n’arrive à ébranler le système. Cependant, elle
ne
saurait être qu’une image-limite, irréalisable à l’état pur, car non
576
lisable à l’état pur, car non seulement « le pire
n’
est pas toujours sûr », mais encore et surtout, le pire se limite par
577
ire se limite par ses propres effets : la maladie
ne
peut survivre au corps qu’elle tue. Ainsi, l’État-nation, paralysant
578
seul — le plus clair de son « indépendance » : il
ne
pourra longtemps survivre à cette dissolution de ses cadres rigides e
579
létarisation civique, persistante ou potentielle,
n’
en devra pas moins rester présente en filigrane dans toute image plus
580
cas pas plus — et peut-être pas autrement — qu’on
ne
le fait pour des écosystèmes ; b) l’autonomie de régions restreintes
581
sa suppression !) à des niveaux de décision où il
ne
soit plus seulement contrôleur mais surtout contrôlable par des citoy
582
dès les années 1980. Mais la société de l’an 2000
n’
en sera pas moins compromise par la survivance encombrante de quartier
583
e participation civique (communes et entreprises)
ne
peuvent être exercées qu’à l’échelle d’une fédération continentale. C
584
nt d’harmonisation des dynamismes civiques, qu’il
n’
y aurait plus qu’à « faire jouer » aux différents niveaux communautair
585
aux différents niveaux communautaires ? Voilà qui
ne
me paraît ni souhaitable ni possible, non pas que j’aie des doutes su
586
liberté elle-même. Un jeu parfait de notre modèle
n’
est pas souhaitable, car il rendrait la participation inévitable, obli
587
cipation authentique.) Au surplus, un jeu parfait
n’
est possible que s’il est limité dans le temps, terminé par une fin au
588
rminé par une fin automatique ou convenue, ce qui
n’
est pas le cas dans la cité envisagée : ses éléments ne sont pas des p
589
pas le cas dans la cité envisagée : ses éléments
ne
sont pas des pions solides en nombre déterminé mais des flux, des cou
590
négalités, de déséquilibres, de conflits, dont on
ne
peut être sûr qu’ils finiront « bien », mais dont il est certain qu’i
591
s l’avons vu, des conditions précises, dont nulle
n’
est suffisante, mais qui sont toutes nécessaires : 1. Information des
592
es, innovations et examens critiques. L’écart qui
n’
a cessé de croître entre les deux clientèles de l’information est deve
593
ision en relief, toucher peut-être un jour ?) qui
ne
manqueront pas de se multiplier dans les prochaines décennies, viendr
594
d’Attique ou de Sicile. La différence principale
ne
consistera donc pas dans les dimensions physiques de la cité nouvelle
595
e de l’État ») ou les conditions architectoniques
ne
s’y prêteraient pas. Mais d’autres phénomènes majeurs, très susceptib
596
ues, écologiques, socioculturelles et politiques,
n’
auront pas les mêmes aires de rayonnement et ne seront donc ni superpo
597
s, n’auront pas les mêmes aires de rayonnement et
ne
seront donc ni superposables ni juxtaposables ; ce qui entraînera une
598
ou provinces ; et les stato-nations. Les communes
n’
ont plus assez de compétences pour intéresser le citoyen, et elles en
599
es dans les régions urbaines (vide social), elles
ne
coïncident plus que par hasard avec les dimensions utiles ou efficace
600
à la fois trop grands et trop petits, leur procès
n’
est plus à faire : le verdict a été prononcé à deux reprises par l’his
601
rieure de l’Église. Notons que ni l’un ni l’autre
ne
sont délimités ou définis par une frontière. L’un et l’autre rayonnen
602
a différence entre participants actifs et passifs
n’
en sera que plus marquée, sinon plus sensible : car la plupart des hom
603
ommes s’imaginent avoir « participé » à ce qu’ils
n’
ont fait que voir, et se vantent de s’être « engagés » quand ils n’ont
604
ir, et se vantent de s’être « engagés » quand ils
n’
ont qu’assisté en faisant un peu de bruit. Nous retrouvons ici l’idée
605
atrice des préjugés « progressistes » d’hier. Il
n’
est pas sans intérêt de relever ici que ma description des passifs et
606
des forces qu’on pourrait enregistrer, mais qu’on
ne
retrouverait pas dans la rencontre des images sonores et visuelles ém
607
et chiffrables de l’homme. Un x ou un y dont nous
n’
avons encore aucune idée et qui intervient — peut-être — dans les rela
608
s ou intersexuelles, ou interraciales. Ces effets
ne
pourraient être mesurés que sur la base de statistiques qu’il reste e
609
es au sol » et des « liens charnels » ; mais nous
ne
savons pas encore quoi. Notons ici que l’expression « contact physiqu
610
tiques Les modes et degrés de la participation
ne
dépendent pas seulement de l’information, des dimensions de la commun
611
gère, économique, fiscale, culturelle, le citoyen
ne
dispose d’aucun moyen d’intervenir activement ni de faire valoir son
612
s relatives aux cadres de la vie : a) l’urbanisme
ne
peut être laissé ni aux architectes, ni aux ingénieurs, et encore moi
613
e l’architecture ; b) l’aménagement des campagnes
ne
peut être laissé ni aux maires, ni aux entrepreneurs, ni aux industri
614
croissance économique « aveugle », sacralisée, il
n’
y a plus guère d’avenir à supputer : cent ans au maximum pour la survi
615
au maximum pour la survie de l’humanité, si l’on
ne
renverse pas la vapeur d’ici à dix ans : c’est tout ce que nous accor
616
ments mêmes de toute société politique. Celui qui
ne
révère plus rien, que fera-t-il pour son prochain ? Sans respect pour
617
s chronologiques potentiellement créatrices, mais
n’
ai encore donné que des exemples de leur quasi-nécessité ou inévitabil
618
’objection civique et politique : les hippies. Ce
ne
sont là que deux exemples pris au passé récent mais il est clair que,
619
ici l’an 2000, bien d’autres surgiront, dont nous
n’
avons aucune idée. Kierkegaard et Nietzsche ont créé, au xixe siècle,
620
bres de l’élite intellectuelle et spirituelle qui
ne
sont possesseurs ni de biens, ni de pouvoirs officiels, des Inadaptés
621
orsqu’il atteint l’âge des études. Cette question
n’
est devenue générale, et anxieuse, qu’au xxe siècle. Autrefois, le fi
622
s « sûrs de leur vocation » peuvent se flatter de
ne
l’avoir jamais connu. Non seulement on n’imagine plus de suivre les t
623
tter de ne l’avoir jamais connu. Non seulement on
n’
imagine plus de suivre les traces de son père, mais on fera de préfére
624
es traces de son père, mais on fera de préférence
n’
importe quoi d’autre. Or prendre le contre-pied de la tradition de fam
625
ce pillage. Et l’idée se fait jour en lui que ce
n’
est plus aux seuls « besoins de l’économie » qu’il s’agit désormais de
626
conomie » qu’il s’agit désormais de répondre (ils
ne
sont trop souvent que le profit des firmes et le dividende de leurs a
627
et des airs qui l’entourent. Par un juste retour,
n’
est-ce point aux scientifiques, aux techniciens, aux urbanistes qu’il
628
ives unanimes en sauvant du même coup la nature ?
N’
y a-t-il pas là une vocation proprement exaltante pour l’ingénieur ? U
629
son job en toute conscience professionnelle mais
ne
veut pas chercher à comprendre le reste, au technicien du seul rendem
630
évolution au troisième tiers du xxe siècle. Elle
n’
est pas idéologique. C’est une opération de sauvetage de la Terre. Tou
631
ouverte scientifique en pollution universelle. On
ne
peut plus s’en remettre au Temps pour adapter, roder, domestiquer l’i
632
fins et pour motivations non plus le rendement à
n’
importe quel prix pour le profit privé ou collectif, mais l’équilibre
633
de vie quantitatif au mode de vie qualitatif, il
ne
faut pas rêver, comme les hippies, qu’il pourra s’opérer par un quelc
634
culer, avec autant de soins et de précision qu’on
ne
le fit jamais pour un prix de revient ou une épreuve de résistance du
635
ie d’enfance qu’on retrouve. Aimée aux larmes. Il
n’
y avait qu’elle au monde ! Puis une ombre innombrable vient à notre re
636
’éclairent, touchés par le soleil rasant. Ah ! ce
ne
peut être que l’Europe ! Ces champs morcelés et striés dans tous les
637
argement irriguée et de très dense habitation, ce
n’
est pas l’Europe des confins dénudés et brûlés, rocailleux ou glaciair
638
aversez cette Suisse-là en chemin de fer, et vous
ne
verrez plus guère que maisons et fabriques, jardins bien clos et entr
639
lle unique, sa présence partout imminente. Ce qui
ne
trompe pas, à l’observer du ciel, c’est la structure des agglomératio
640
es villes, et les autos. Les grands ensembles qui
n’
aménagent pas leur propre centre de vie civique, c’est-à-dire un espac
641
quand les hommes pouvaient se rencontrer. Or, il
n’
est pas de pays au monde que le gigantisme humain menace dans ses fond
642
uteur du grand vignoble de Lavaux, cette évidence
ne
saurait exiger ni d’ailleurs endurer la moindre preuve : vous la vive
643
la vivez « comme on respire », ou c’est que vous
n’
êtes jamais vraiment venu, n’avez jamais existé dans ce lieu. Tout ce
644
», ou c’est que vous n’êtes jamais vraiment venu,
n’
avez jamais existé dans ce lieu. Tout ce qui touche à un centre et tou
645
me. L’homme a besoin de solitude. Mais la plupart
n’
osant aimer que ce qui par d’autres est aimé, ils détruisent à coup sû
646
ont déjà leurs longues blessures. Tout cela — nul
n’
y peut rien — aux dépens du paysage. Les « nécessités » de la vie tend
647
divine — une lumière neutre comme les dieux, qui
ne
sont de gauche ni de droite, mais toujours d’en haut, rayonnants. Il
648
e la foi sans les œuvres est morte. Sauver Lavaux
ne
suppose rien de moins que la prédominance accordée par un peuple à la
649
s habitez un pays ravissant et radieux. Mais vous
ne
le sauverez pas sans héroïsme. Si Lavaux doit faire son salut, ce s
650
étique aux calculs des vrais réalistes — lesquels
ne
sont nullement ceux qui pensent court et bas et nous jettent dans la
651
u’elle aura réussi son union ; car autrement elle
ne
pourra rien à opposer aux entreprises des deux impérialismes, l’écono
652
gique. Mais pour qu’elle réussisse son union, qui
ne
peut être que fédérale, il faut que les jeunes Européens soient élevé
653
s manuels d’histoire français, les rois de France
ne
les ont pas conquises par la force ou la ruse, ils les ont simplement
654
appelle. Il faut que l’horizon de l’enseignement
ne
soit plus la nation et ses mythes orgueilleux, mais la région et ses
655
, unité biologique, écologique et spirituelle. Il
n’
y aura pas d’Europe unie en l’an 2000 si l’on ne commence pas aujourd’
656
l n’y aura pas d’Europe unie en l’an 2000 si l’on
ne
commence pas aujourd’hui et si l’on n’achève pas dans les années qui
657
00 si l’on ne commence pas aujourd’hui et si l’on
n’
achève pas dans les années qui viennent, une véritable mutation de l’e
658
’Europe, Communautés européennes, CERN. Mais elle
ne
deviendra vivante que par les citoyens qui la vivront, conscients de
659
ation. Mais comment devenir citoyen d’un pays qui
n’
en est pas un, puisqu’il n’a pas encore de politique commune et d’orga
660
citoyen d’un pays qui n’en est pas un, puisqu’il
n’
a pas encore de politique commune et d’organes gouvernementaux ? Point
661
e moyen pratique pour sortir de ce cercle vicieux
ne
serait-il pas de s’appuyer sur quelque chose qui existe déjà bel et b
662
ayé cela par les deux guerres mondiales. Pourquoi
ne
ferait-elle pas dorénavant, des citoyens pour une Europe unie, équili
663
e long terme de l’intégration de la personne. Nul
ne
peut dire dans quelle mesure exacte les enseignants de nos pays ont é
664
chement du processus fédéraliste européen. Or, je
ne
vois aucune méthode meilleure que celle qu’ont adoptée, depuis dix an
665
enne, civique, professionnelle et personnelle. Ce
ne
sont pas nos États qui feront l’Europe, n’ont-ils pas prouvé depuis d
666
le. Ce ne sont pas nos États qui feront l’Europe,
n’
ont-ils pas prouvé depuis des siècles qu’ils étaient là pour l’empêche
667
u’ils étaient là pour l’empêcher de se faire ? Ce
ne
sont pas les grandes bureaucraties de Bruxelles, de Strasbourg, de Lu
668
é des catastrophes On nous dit que les esprits
ne
sont pas mûrs pour l’union des Européens. Quand le seront-ils jamais
669
ésumer toute la révolution que nous appelons, qui
n’
est ni de gauche ni de droite, qui n’oppose au profit matériel que l’h
670
ppelons, qui n’est ni de gauche ni de droite, qui
n’
oppose au profit matériel que l’honneur et le bonheur humain, et dont
671
et l’Occident au début des années 1939, mais ce
n’
était pas tombé du ciel. Je m’occupais de questions politiques depuis
672
c’est l’homme à la fois libre et responsable. Ce
n’
était pas l’individu isolé. Ce n’était pas le soldat politique qu’on n
673
responsable. Ce n’était pas l’individu isolé. Ce
n’
était pas le soldat politique qu’on nous montrait dans les pays totali
674
dans lequel la personne peut s’enraciner mais qui
ne
doit pas être fermé. Qui doit toujours être ouvert vers de plus grand
675
fois libre et responsable, deux qualités que nous
ne
pouvions séparer. Sur cette base de fédéralisme et de personnalisme,
676
l’écrivain. Un terme dont vous êtes le père ? On
ne
sait pas exactement qui l’a dit en premier, de Mounier ou de moi. En
677
ce qu’il dépasse le mariage vers un au-delà où il
n’
a plus besoin de la société et du monde. Il a tout dans une femme, il
678
yeusement. Puis, en deçà du mariage, Don Juan qui
ne
peut se fixer sur aucune femme, qui essaie toujours de trouver la fem
679
jours de trouver la femme qui le retiendra et qui
ne
la trouve pas. Ces préoccupations étaient-elles antérieures au mouvem
680
découverte ? J’y pensais depuis longtemps mais je
ne
savais pas à quel point la Suisse avait réalisé le fédéralisme. Bien
681
lisme. Bien qu’élevé en Suisse, effectivement, je
ne
m’étais jamais intéressé à la vie politique du pays. Parce que vous a
682
m’a surpris là-bas et j’y suis resté six ans. Je
ne
suis rentré définitivement qu’en 1947. Aux États-Unis, j’ai découvert
683
ent des gens extraordinairement différents et qui
ne
se seraient peut-être jamais connus en France ou en Allemagne ou en I
684
issant d’un pays neutre, j’ai pu faire la guerre,
ne
fût-ce que sur les ondes, en écrivant des textes d’émissions. Je suis
685
lors fort à la mode à Paris. Et tout le monde, je
ne
sais pas pourquoi, l’attribuait à Sartre. Or, Sartre, comme on le sai
686
aintenant par les mémoires de Simone de Beauvoir,
ne
s’était jamais intéressé le moins du monde à la politique avant 1943-
687
l m’a répondu : « Je le sais très bien. » Mais il
ne
l’a jamais dit à personne d’autre… Mais il est bien évident que cette
688
suisse. Que j’avais apprise à l’école mais que je
n’
avais jamais très bien comprise. Alors, je me suis dit que maintenant
689
t que maintenant il fallait faire l’Europe. Qu’on
ne
pouvait unifier l’Europe sur le modèle hitlérien ou napoléonien, qu’o
690
ope sur le modèle hitlérien ou napoléonien, qu’on
ne
pouvait pas non plus faire l’Europe avec l’État-nation. Il fallait do
691
urope ? Les communes, bien avant les cantons — on
ne
commence à parler des cantons qu’aux xviiie et xixe siècles — const
692
quelque chose de créateur. Et ces tensions qu’on
n’
essaie pas de réduire ou d’anéantir mais qu’on conserve et qu’on tâche
693
liser le fédéralisme dans un seul pays. La Suisse
ne
peut pas rester un régime réellement fédéraliste si elle est seule, s
694
qui devait se tenir avec d’autres groupements qui
n’
étaient pas fédéralistes mais qui voulaient aussi l’Europe. Et nous no
695
Puisqu’il s’est avéré que le Conseil de l’Europe
n’
était pas du tout ce que nous voulions, n’était pas du tout la représe
696
’Europe n’était pas du tout ce que nous voulions,
n’
était pas du tout la représentation des « forces vives de nos nations
697
assignée les États. Selon vous, l’Europe actuelle
n’
est qu’une juxtaposition d’États ? Moi, j’appelle cela l’amicale des m
698
n, il y a une amicale et les membres de l’amicale
ne
sont plus des misanthropes ; ou bien, ils restent des misanthropes et
699
ils restent des misanthropes et, par définition,
ne
feront jamais d’amicale. C’est exactement ce qui se passe avec les Ét
700
isait toujours le général de Gaulle. Et alors, on
ne
voit pas du tout ce que ces pays veulent faire ensemble. Sinon, en ca
701
x voisins d’appliquer des mesures raisonnables et
ne
pas les appliquer eux-mêmes et profiter de la crise pour faire des bé
702
ne l’Europe des nations. Vous êtes déçu ? Non. Je
ne
suis pas déçu. Je n’y ai jamais cru. Je n’ai jamais cru que cette Eur
703
ns. Vous êtes déçu ? Non. Je ne suis pas déçu. Je
n’
y ai jamais cru. Je n’ai jamais cru que cette Europe-là pouvait se fai
704
on. Je ne suis pas déçu. Je n’y ai jamais cru. Je
n’
ai jamais cru que cette Europe-là pouvait se faire. Mais j’ai pensé qu
705
uisse. Pourquoi ce pays s’est-il fait ? La Suisse
ne
s’est pas faite pour créer une union plus forte que les voisins. Elle
706
le européenne de l’écologie. Qui peut être placée
n’
importe où et donner des directives. En économie, vous avez déjà un ex
707
es autrement que pour des questions d’état civil.
N’
est-ce pas une utopie ? L’utopie, ce n’est pas de vouloir définir les
708
tat civil. N’est-ce pas une utopie ? L’utopie, ce
n’
est pas de vouloir définir les régions d’après les fonctions et de rel
709
u imposer les mêmes frontières à des réalités qui
n’
ont rien à voir ensemble comme la langue, le sous-sol, l’économie, l’h
710
tomatiquement Suisse. La Suisse est sa nation qui
n’
a pas les mêmes frontières ni les mêmes langues que le canton. De plus
711
Belgique, un petit bout de l’Italie. Cet ensemble
ne
correspond à aucun de nos États-nations actuels. D’autre part, je sui
712
Voilà un autre ensemble auquel je me rattache qui
ne
correspond ni à l’ensemble national, ni à l’ensemble linguistique, ni
713
à une dizaine de sources différentes. Donc, rien
n’
est plus simple. Au fond, nous vivons dans ce que j’appelle la plurali
714
réation, que c’est le sommet de l’histoire, qu’on
ne
peut pas le dépasser et que c’est de la rêverie absurde de vouloir dé
715
sinon, nous serons colonisés un peu plus que nous
ne
le sommes par l’économie américaine et nous risquons d’être colonisés
716
e plus en plus de couples. Les régions, dès lors,
ne
risquent-elles pas de connaître le même phénomène ? Cette comparaison
717
l’orthodoxie russe, grecque, roumaine. Mais vous
n’
avez jamais eu de régime totalitaire dans un pays protestant. C’est as
718
aduction du fédéralisme sur le plan religieux. Il
ne
s’agit pas d’uniformiser tout le monde et de voir une seule croyance
719
au, de l’air pour tout le monde, indéfiniment. On
n’
avait donc pas besoin de politique de développement car on pensait que
720
empoigne. Chacun pour soi et Dieu pour tous et on
ne
croyait pas en Dieu en disant cela. Aujourd’hui, depuis une dizaine d
721
quatre ans dans l’opinion publique, on sait qu’il
n’
en est rien. Et que nous touchons partout des limites. Les ressources
722
ns partout des limites. Les ressources naturelles
ne
sont pas infinies. Certains calculent déjà l’épuisement du charbon, d
723
r les moyens sur ces finalités. Or, jusqu’ici, il
n’
y avait d’autre politique que cette finalité générale qu’est le profit
724
nos ministres travaillent sur cette idiotie. Vous
ne
semblez guère apprécier les hommes politiques ? Je les trouve funeste
725
eprésentants des partis ou des États-nations, ils
ne
sont pas des hommes politiques, ils sont des partisans ou des nationa
726
rnés et résolus d’après le génie du lieu. Mais ce
n’
est pas possible avec le système de découpage des États-nations, compl
727
ie d’enfance qu’on retrouve. Aimée aux larmes. Il
n’
y avait qu’elle au monde ! Puis une ombre innombrable vient à notre re
728
’éclairent, touchés par le soleil rasant, ah ! ce
ne
peut être que l’Europe ! Ces champs morcelés et striés dans tous les
729
argement irriguée et de très dense habitation, ce
n’
est pas l’Europe des confins dénudés et brûlés, rocailleux ou glaciair
730
Rousseau déjà jugeait que la Suisse de son temps
ne
constituait plus qu’une seule ville. Il ne parlait que du Plateau, ce
731
temps ne constituait plus qu’une seule ville. Il
ne
parlait que du Plateau, ce « Pays des Collines », comme disent les Su
732
aversez cette Suisse-là en chemin de fer, et vous
ne
verrez plus guère que maisons et fabriques, jardins bien clos et entr
733
lle unique, sa présence partout imminente. Ce qui
ne
trompe pas, à l’observer du ciel, c’est la structure des agglomératio
734
es villes, et les autos. Les grands ensembles qui
n’
aménagent par leur propre centre de vie civique, c’est-à-dire un espac
735
quand les hommes pouvaient se rencontrer. Or, il
n’
est pas de pays au monde que le gigantisme humain menace dans ses fond
736
ge. Le Corbusier, natif de La Chaux-de-Fonds, qui
n’
a guère fait en Suisse que la maison de sa mère, ira bâtir des capital
737
si vous tenez à votre démesure, exportez-la, mais
ne
touchez pas au trésor, au mystère de la « pax helvetica », votre cont
738
et une hypothèse (juin 1972)ar 1. Ce qu’elle
n’
est pas La culture ne consiste pas à lire des romans, à parler pein
739
972)ar 1. Ce qu’elle n’est pas La culture
ne
consiste pas à lire des romans, à parler peinture, à participer à des
740
stes culturels et d’experts en informatique. Elle
ne
se reconnaît pas au port des cheveux longs par les romantiques, de la
741
cumulation sur la tête des gauchistes. La culture
n’
est nullement une distinction, quelque chose qui distingue du vulgaire
742
ulgaire et que l’on acquiert par des études. Elle
n’
est pas l’affaire des « salons », comme l’imaginent encore quelques am
743
maginent encore quelques amateurs de clichés, qui
ne
savent pas qu’il n’y a plus de salons, qu’ils ont été remplacés depui
744
ques amateurs de clichés, qui ne savent pas qu’il
n’
y a plus de salons, qu’ils ont été remplacés depuis le xviiie siècle
745
depuis le xviiie siècle par les cafés, et qu’il
n’
y a plus de cafés littéraires depuis vingt ans, même à Paris. La cultu
746
raires depuis vingt ans, même à Paris. La culture
n’
est pas faite par les « gens cultivés ». Elle n’est pas leur propriété
747
e n’est pas faite par les « gens cultivés ». Elle
n’
est pas leur propriété, elle ne dépend pas d’eux et ne leur doit rien
748
s cultivés ». Elle n’est pas leur propriété, elle
ne
dépend pas d’eux et ne leur doit rien (même si elle leur donne tout).
749
t pas leur propriété, elle ne dépend pas d’eux et
ne
leur doit rien (même si elle leur donne tout). Enfin la culture n’est
750
(même si elle leur donne tout). Enfin la culture
n’
est pas nécessairement sérieuse. Ceux qui n’ont pas le sens de l’arbit
751
lture n’est pas nécessairement sérieuse. Ceux qui
n’
ont pas le sens de l’arbitraire, de l’humour fût-il noir, de la désinv
752
peut très bien disparaître, être « oublié » : il
n’
en sera pas moins retrouvé, « remémoré » par la réactivation de la str
753
logiques ou somatiques. Ainsi définie, la culture
n’
est plus une affaire de fiches, de bibliothèque ou d’œuvres, c’est-à-d
754
fie progressivement à la personne constituée — je
ne
dis pas à ce qui la constitue, qui est l’appel de sa fin, sa vocation
755
qui est l’appel de sa fin, sa vocation. 4. Il
n’
y a pas de cultures nationales Cette thèse est démontrée sans aucun
756
e que nos divisions nationales. « Qu’as-tu que tu
n’
aies reçu ? », dit l’Europe aux nations. Elles n’ont en propre que leu
757
n’aies reçu ? », dit l’Europe aux nations. Elles
n’
ont en propre que leurs vanités, leurs chauvinismes, partout pareils e
758
nités, leurs chauvinismes, partout pareils et qui
ne
les distinguent en rien. Il n’y a pas plus de « musique française » q
759
out pareils et qui ne les distinguent en rien. Il
n’
y a pas plus de « musique française » que de « mathématiques soviétiqu
760
genèse, continentales dans leur évolution. Elles
n’
ont tout de même pas pu tenir compte par anticipation de frontières qu
761
u tenir compte par anticipation de frontières qui
ne
seront tracées que plusieurs siècles plus tard au hasard des bataille
762
e, le Rhône unit…). Nos « précieuses diversités »
ne
sont pas du tout nationales. Elles divisent et animent nos nations sa
763
r compte des frontières étatiques dont la réalité
n’
est plus que négative. 5. La contestation comme tradition centrale
764
ntasme qu’ils appellent « Système ». Nier le père
ne
résout pas le complexe d’Œdipe dont certains, en Mai 68, revendiquaie
765
mais moi je vous dis… » Cette phrase évangélique
ne
nie pas le passé. Elle s’y réfère, l’englobe, le situe et le dépasse.
766
comme l’amour prévaut contre l’indifférence, qui
n’
est souvent qu’angoisse refoulée. Elle l’abolit en création. Tel est l
767
vre en une seule expression moins pédante qu’elle
ne
paraît à première vue : avec la légende de Tristan, c’est l’étymologi
768
l’existence proprement humaine, qui est l’âme. Je
ne
prends pas ce mot dans le sens noble et vague que lui donnent un peu
769
pianiste, par exemple, manifeste une réalité qui
n’
est ni proprement physique ni proprement spirituelle, qui n’est pas ce
770
roprement physique ni proprement spirituelle, qui
n’
est pas celle du corps ni celle de l’intellect, encore qu’elle tienne
771
le. Mais la réalité est lourdement présente. Elle
ne
saurait donc que freiner l’élan de l’âme vers l’Ange désiré. « Ce n’e
772
freiner l’élan de l’âme vers l’Ange désiré. « Ce
n’
est pas amour, qui tourne à réalité », s’écrie un troubadour tardif, c
773
quel est le faux amour qui « tourne » ainsi ? Ce
n’
est pas le désir comblé, au sens sexuel de l’expression, car cet acte
774
, car cet acte instinctif, lié aux lois du corps,
ne
mérite pas en soi le nom d’amour. Mais c’est l’amour « bouché » par l
775
t reconnaître aussi que la vraie victime du mythe
n’
est pas Tristan, n’est pas Iseut, et n’est pas non plus leur passion,
776
que la vraie victime du mythe n’est pas Tristan,
n’
est pas Iseut, et n’est pas non plus leur passion, qui triomphe au con
777
e du mythe n’est pas Tristan, n’est pas Iseut, et
n’
est pas non plus leur passion, qui triomphe au contraire de tout. La v
778
L’histoire du mythe, dans nos mœurs et coutumes,
ne
serait-elle que l’histoire d’une longue profanation ? Faut-il penser
779
d’Iseut avec le Roi, père adoptif du héros —, il
n’
y aurait pas de roman, ni de passion mortelle, il n’y aurait donc pas
780
y aurait pas de roman, ni de passion mortelle, il
n’
y aurait donc pas eu de mythe. On ne saurait imaginer le grand roi Mar
781
mortelle, il n’y aurait donc pas eu de mythe. On
ne
saurait imaginer le grand roi Marc s’inclinant devant les « droits di
782
us en sommes aujourd’hui, dès lors que le mariage
n’
est plus un lien sacré, adversaire à la taille de la passion ; et que,
783
omanciers. Ils savent bien que le roman véritable
n’
est jamais qu’une version renouvelée de l’archétype de Tristan et Iseu
784
cherchent donc partout l’obstacle qui résiste, et
n’
en trouvent guère. L’Homme sans qualités, de Musil, la Lolita de Nabok
785
mental. Un psychanalyste l’eût guéri, et le roman
n’
eût pas eu lieu. Si les derniers tabous viennent à céder, c’en sera fa
786
ogues, la passion doit mourir. Je vous dis que je
n’
en crois rien. Car s’il est vrai que la passion se nourrit d’obstacles
787
t-ils, dans les voies d’une destinée « qui jamais
ne
leur fauldra jour de leur vie, car ils ont beu leur destruction et le
788
inspiré lui-même des Bretons, de Béroul, et d’on
ne
sait qui d’autre, Wagner décrit par sa musique, vrai langage du mythe
789
ueuse et défigurée qui reflète son état déchu. Je
ne
puis m’empêcher d’imaginer que cette « rencontre aurorale » avec le m
790
se passe trois jours après la mort d’amour. Iseut
n’
évoque-t-elle point cette forme de lumière qu’on ne rejoint que dans u
791
’évoque-t-elle point cette forme de lumière qu’on
ne
rejoint que dans un au-delà, et qui aurait été, sur la Terre, le véri
792
demande souvent si l’angélologie de l’ancien Iran
ne
détient pas le secret dernier de notre mythe. La tradition chrétienne
793
e. La tradition chrétienne de l’amour du prochain
ne
s’en trouverait-elle pas éclairée, à son tour ? ⁂ Aimer le prochain «
794
entre l’individu et le vrai moi, sans laquelle on
ne
saurait s’aimer soi-même, puisqu’« il faut être deux pour aimer », co
795
notre amour, provoquant la passion créatrice, ce
ne
serait plus la mort, ce serait dès ici-bas, l’altérité même du procha
796
prochain. Que l’Autre soit un Autre impénétrable
ne
tient pas à quelque interdit, à quelque tabou religieux, à quelque dé
797
onne. Nulle technique et nulle science de l’homme
ne
peut nous être ici d’aucun secours. Il faut aimer pour le comprendre,
798
de justesse dans le style de nos émotions. Et ce
n’
est pas seulement de la littérature qu’ils ont bien mérité, mais de l’
799
assé, condensé, pathétique au lyrisme contenu qui
n’
éclate malgré lui que dans l’épisode bref, tel Tristan fou ; Mary plus
800
les « originaux » de la légende, et qui, en fait,
n’
étaient eux-mêmes que des versions renouvelées, souvent critiques et p
801
lices-victimes-auteurs-recréateurs du Mythe, rien
ne
vaut le contact personnel avec les textes médiévaux, une fois le lect
802
ose parle de la mort comme nul moderne adaptateur
ne
l’a osé. Tristan surpris par le roi Marc implore son pardon pour la R
803
n prose, lorsque Tristan meurt : « Douce amie, je
ne
vous verrai plus. Adieu, je m’en vais et vous salue. Et le cœur lui c
804
ique. Ou simplement, la conviction que la réalité
n’
est pas divisée en compartiments correspondant aux facultés. Mais auss
805
i que la forme d’amour que je cherchais à décrire
ne
pouvait être saisie par aucune de nos disciplines universitaires (étu
806
nomie, anthropologie culturelle, etc.) isolément,
ne
devenait saisissable qu’au lieu même de leur convergence, là où il s’
807
on. L’Institut universitaire d’études européennes
n’
est-il pas, en vertu même de son titre, condamné à la spécialisation ?
808
inarité de type b). L’Europe est un phénomène qui
n’
existe, au sens fort, ni dans les réalités économiques seules, ni dans
809
ciologie seules. Pas une seule de ces disciplines
ne
serait capable de saisir l’Europe dans son être historique et virtuel
810
storique et virtuel, dans son évolution. L’Europe
n’
apparaît qu’à leur carrefour, elle est définie par leurs intersections
811
t définie par leurs intersections, et ses reliefs
ne
se révèlent qu’au croisement de leurs faisceaux lumineux. De même, s’
812
iable (syndicats intercommunaux transfrontaliers)
ne
peut être concrétisée, actualisée, que par des approches multiples et
813
’interdisciplinarité requise par l’objet d’études
ne
peut exister qu’à des degrés très variables chez les sujets qui la pr
814
anétaire. Aucun de nos vingt-huit États européens
ne
peut plus assurer seul sa défense militaire et sa prospérité, son équ
815
iques. Le seul remède aux trop petites dimensions
ne
serait-il pas la création d’agences fédérales européennes, qui seraie
816
uanier, qui a moins d’un siècle d’âge en moyenne,
n’
est plus capable d’assurer la prospérité des régions et provinces et d
817
cal plus irrespirable encore que l’autre, si elle
ne
répondait en réalité à une prise de conscience européenne et d’horizo
818
-nation à une souveraineté sans limites (laquelle
ne
peut plus rien animer si elle peut encore tout bloquer) amènent à con
819
ethniques, motifs économiques Mais le problème
n’
est pas seulement spéculatif et prospectif. Il est posé en vrac, en te
820
nées du hasard des guerres et des traités, et qui
ne
correspondent plus à nulle réalité, ni ethnique ni économique. Sur to
821
les régions ethniques et les régions économiques
ne
sauraient coïncider territorialement. Il y faudrait un vrai miracle,
822
t. Il y faudrait un vrai miracle, mais ce miracle
ne
s’est jamais produit. Et il aurait encore moins de chance de survenir
823
pénalisées ou bloquées par un cordon douanier qui
ne
sert à rien ni à personne, mais qui symbolise la « souveraineté » (d’
824
ustriels, commerciaux et de services, dont l’aire
ne
recouvre ni celle de la région de main-d’œuvre, ni celle de la région
825
doute actifs dans notre inconscient collectif… Il
ne
s’agit donc pas de créer autour de Genève une sorte de mini-État-nati
826
création des régions que je viens de définir, ce
n’
est pas plus Genève qui bénéficiera que le pays de Gex, la Savoie, la
827
pour former une génération et créer les régions,
ne
sont-ils pas trop longs face à l’urgence des périls que court l’Europ
828
est vrai, comme je l’ai toujours pensé, que nous
n’
avons pas à prévoir notre histoire, mais à la faire. aw. Rougemont
829
e la démocratie, au sens actif et créatif du mot,
n’
est pas possible, s’il n’y a pas une « agora » ou un « forum » — une «
830
actif et créatif du mot, n’est pas possible, s’il
n’
y a pas une « agora » ou un « forum » — une « place » au cœur de la ci
831
Si la place du village, du quartier, de la ville,
n’
est plus qu’un parking, et si les rues sont livrées aux autos qui essa
832
étons qui aimeraient se rencontrer, la démocratie
n’
existe plus, ses racines sont coupées et ses sources taries. Dans cet
833
atistes » (parlant de Berne). Non, le fédéralisme
n’
est pas l’autarcie cantonale, l’État-nation cantonal, la fermeture du
834
é de plus en plus mythique — cette Europe divisée
n’
a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéol
835
riels des États-Unis. De plus, une Europe divisée
ne
peut jouer aucun rôle à l’échelle mondiale. Elle ne peut que subir l’
836
peut jouer aucun rôle à l’échelle mondiale. Elle
ne
peut que subir l’histoire faite par les autres, les guerres des autre
837
s autres, les compromis des autres. Mais l’Europe
ne
pourra jamais se faire que selon la formule fédéraliste, respectueuse
838
laire ou millénaire qu’ils prétendaient inaugurer
n’
a duré qu’une douzaine d’années. La Suisse fédérale, en regard, approc
839
nations qui ont des problèmes régionaux (laquelle
n’
en a pas ?), pour les ethnies qui se trouvent soit divisées par les fr
840
gnonnages, sectes et groupuscules dont l’identité
ne
coïncide avec aucune frontière et ne s’incline devant aucune majorité
841
t l’identité ne coïncide avec aucune frontière et
ne
s’incline devant aucune majorité. L’État-nation contre l’Europe
842
. L’École, surtout secondaire — mais l’Université
n’
était pas en reste vers 1914 —, l’École apprend depuis un siècle aux j
843
la plupart, en tant qu’État, et en moyenne, elles
n’
ont même pas un siècle d’âge. Seules la France, l’Angleterre et l’Espa
844
il est absolument certain que l’Italie comme État
n’
a que 112 ans, l’Allemagne 102, la Norvège 70, la Tchécoslovaquie, la
845
ifférents les uns des autres pour s’unir et qu’on
ne
pourra jamais les fédérer, parce que leurs vingt-huit États-nations n
846
fédérer, parce que leurs vingt-huit États-nations
ne
sauraient céder sans trahir un pouce de leur sacro-sainte souverainet
847
es croyances qui en résultent. Tout d’abord : il
n’
y a pas de cultures nationales, si l’on entend par « nations », comme
848
tions modernes de l’Europe. La culture européenne
n’
est pas la somme de vingt-huit cultures nationales, puisqu’elle exista
849
taire, rien de plus. Mais à l’Université même, on
ne
parlait qu’en latin, et l’on ignorait tout des appartenances « nation
850
enne Gilson —, pas un seul des grands professeurs
n’
était français : ils étaient napolitain comme Thomas d’Aquin, pisan co
851
, ceux qui parlent une même langue ? Oui, mais il
n’
était pas question de les enfermer pour autant dans les frontières d’u
852
ans les frontières d’un même État. D’ailleurs, il
n’
est pas vrai que nos stato-nations modernes correspondent à l’aire de
853
lair — à condition qu’un esprit fort (ou un naïf)
ne
remarque pas que l’on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catala
854
cœur des Alpes. Non, les frontières de nos États
n’
ont jamais été « naturelles ». Elles sont accidentelles et arbitraires
855
davantage et s’entendront mieux entre eux qu’ils
ne
s’entendent avec les hommes de droite (ou de gauche) de leur propre n
856
tes de leur propre nation ; et ainsi de suite. Ce
ne
sont pas nos appartenances nationales qui nous diversifient vraiment,
857
tions. Supprimons les frontières nationales, nous
n’
appauvrirons en rien l’Europe une et diverse, et nous ne risquerons pa
858
uvrirons en rien l’Europe une et diverse, et nous
ne
risquerons pas un instant de créer ce fameux volapük que dénonçait de
859
ilisant à Paris tous les esprits distingués qu’il
n’
avait pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre cul
860
té, il faut bien constater que l’échelon national
ne
joue aucun rôle, est simplement omis, inexistant. Vers l’Europe de
861
r et qui est la seule que nous puissions espérer,
ne
sera jamais un laborieux et problématique échafaudage d’accords tarif
862
res en maintiennent et renforcent le principe. Je
ne
crois pas à une Europe des États-nations souverains, parce qu’on ne p
863
Europe des États-nations souverains, parce qu’on
ne
peut pas fonder l’union sur l’obstacle par excellence et par définiti
864
pe, ou bien l’on reste misanthrope, mais alors il
n’
y a pas d’amicale. La fédération européenne s’établira sur la base des
865
s’établira sur la base des régions, et celles-ci
ne
seront pas des mini-États-nations, prétendant enfermer dans les mêmes
866
s, puisque les échanges commerciaux, par exemple,
n’
ont aucune raison de coïncider avec un bassin écologique, ou avec une
867
ver d’une pluralité d’ensembles fonctionnels, qui
ne
sont pas de même aire territoriale ni de même appartenance politique,
868
xquelles je cotise. Cette pluralité d’allégeances
ne
me pose aucun problème ni théorique ni pratique. Si maintenant un fou
869
s au fou, — et ce fou serait Napoléon, Hitler, ou
n’
importe lequel de nos États-nations s’il pouvait aller jusqu’au bout d
870
iation des personnes à la Vérité unique, dont nul
n’
est maître. Cette diversité, à la limite, ruine toute Église en tant q
871
ion. La véritable orthodoxie, la « voie droite »,
ne
saurait être que la voie personnelle inventée par chaque vocation : c
872
ne expérience séculaire montre suffisamment qu’il
n’
y a rien à attendre à cet égard des gouvernements comme tels, soit ecc
873
s, soit stato-nationaux. La fédération européenne
ne
naîtra pas d’accords au sommet, mais de groupements de communes et d’
874
t avoir le sens de son histoire personnelle ». On
ne
connaît pas le sens d’une histoire, si on ne connaît pas le passé. Il
875
. On ne connaît pas le sens d’une histoire, si on
ne
connaît pas le passé. Il a donc fait des recherches généalogiques qui
876
tains ascendants Gilles et Charlotte Corday. Cela
ne
vous fait pas peur ? J’ai toujours en tête une recommandation d’un de
877
unité de l’Europe vous vient de vos ancêtres ? Ce
n’
est pas une idée suisse. Le Suisse est cosmopolite. L’idée est au cont
878
si j’étais limité à l’une ou à l’autre. « Comment
ne
pas croire à l’influence des professions héréditaires » ? C’est vous
879
s héréditaires » ? C’est vous qui l’écrivez. Vous
n’
avez jamais songé à être pasteur ? Il est intéressant de savoir d’où l
880
l est intéressant de savoir d’où l’on vient. Cela
ne
dicte pas une carrière. Je descends des troubadours — c’est sans dout
881
ais quand j’ai pris des leçons j’ai compris qu’il
ne
saurait plus en être question. Vous savez, quand la passion est deven
882
envoyée à une revue à Genève qui l’a publiée. Je
n’
en étais pas plus fier pour ça : je me voulais poète et seulement poèt
883
oète et seulement poète. L’hérédité des dons ? Je
n’
y crois pas. Disons que j’ai eu un milieu favorable. Dans la famille d
884
re faisait des pastels. L’hérédité des dons, cela
n’
existe pas. Disons qu’il y a des dispositions complémentaires chez le
885
use de leur implantation géographique. La famille
ne
mourra pas ? Non, elle se transformera. En ce qui vous concerne ? À p
886
». Beaucoup l’emploient, l’air entendu, mais nul
ne
sait ce qu’elle signifie. Les régions, nous dit-on, doivent être de «
887
ont ou les Midlands. Car une région, comme telle,
ne
sera jamais compétitive : l’adjectif ne saurait s’appliquer qu’à une
888
me telle, ne sera jamais compétitive : l’adjectif
ne
saurait s’appliquer qu’à une firme. Dassault, Fiat, Péchiney peuvent
889
oyons sérieux : jamais les habitants d’une région
ne
se rassembleront dans l’intention de devenir « compétitifs ». Qu’en a
890
« compétitifs ». Qu’en auraient-ils de plus ? Ça
n’
a pas de sens pour eux. C’est une idée de technocrate, de ministre ou
891
technocrate, de ministre ou de fonctionnaire qui
ne
raisonne qu’en termes de pouvoir et de prestige. Ce n’est pas un souc
892
isonne qu’en termes de pouvoir et de prestige. Ce
n’
est pas un souci d’homme réel, de femme réelle, c’est trop loin de la
893
étitive serait tout simplement puérile22, si l’on
ne
distinguait derrière l’argument de la « taille européenne » le modèle
894
e région, contrairement à celui d’un État-nation,
n’
est pas d’affirmer sa puissance mais d’exercer sa liberté ; n’est pas
895
affirmer sa puissance mais d’exercer sa liberté ;
n’
est pas de se montrer plus fort que tel voisin par les armes ou par la
896
ntages du grand État sur la petite communauté, on
n’
en trouve qu’un : le grand État peut faire de grandes guerres. Pour to
897
et indivisible, la France est trop grande, et il
n’
en va pas autrement de la Grande-Bretagne, de l’Espagne, de la Républi
898
uvoir central entende l’imposer à sa manière). Ce
ne
sont là que signes avant-coureurs d’un phénomène beaucoup plus ample
899
t appelle aujourd’hui les petites unités. Et cela
n’
est pas contradictoire avec la tendance qui nous porte à la fédération
900
e l’État. Juin 1973. 22. Tous les pays du monde
ne
peuvent pas exporter plus qu’ils n’importent, faites le calcul. 23.
901
pays du monde ne peuvent pas exporter plus qu’ils
n’
importent, faites le calcul. 23. G. Bidault. be. Rougemont Denis de
902
sse devant les mass médias d’État, où tout ce qui
n’
est pas publicité tonitruée pour des produits, des modes ou des révolu
903
roduits, des modes ou des révolutions manipulées,
ne
s’entend plus. L’angoisse des individus qui ont perdu prise sur leur
904
es individus qui ont perdu prise sur leur vie, et
n’
ont plus foi dans les mythes nationaux — tout nous pousse aujourd’hui
905
comment savent-ils dans quel pays ils sont ? S’il
n’
y avait que les poissons ! Les vents, les fleuves et les nuages, la fa
906
es ignorent sereinement les frontières. Celles-ci
n’
arrêtent ni les tempêtes, ni la pollution, ni rien de ce qu’il faudrai
907
l’écrit le professeur J. Ancel —, les frontières
ne
sont plus utiles qu’aux seuls douaniers, lesquels, pour la plupart, a
908
par jour les mêmes questions convenues (personne
n’
y croit). ⁂ Un problème d’une portée politique décisive se trouve posé
909
nées du hasard des guerres et des traités, et qui
ne
correspondent plus à nulle réalité, ni ethnique ni économique. Sur to
910
les régions ethniques et les régions économiques
ne
sauraient coïncider territorialement. Il y faudrait un vrai miracle,
911
t. Il y faudrait un vrai miracle, mais ce miracle
ne
s’est jamais produit, et il aurait encore moins de chance de survenir
912
pénalisées ou bloquées par un cordon douanier qui
ne
sert à rien ni à personne, mais qui symbolise la « souveraineté » (d’
913
striels, commerciaux, et de services, dont l’aire
ne
recouvre ni celle de la région de main-d’œuvre, ni celle de la région
914
doute actifs dans notre inconscient collectif… Il
ne
s’agit donc pas de créer autour de Genève — et encore moins de Lyon —
915
création des régions que je viens de définir, ce
n’
est pas plus Genève qui bénéficiera que le pays de Gex, la Savoie, la
916
1815 à 1919, ces facteurs ancestraux de division
n’
ont nullement empêché la prospérité et l’entente de populations que le
917
’entente de populations que les cordons douaniers
ne
séparaient pas. C’est à partir du coup de force de Poincaré que tout
918
aces sont mêlées, l’évolution historique oubliée (
n’
en restent que les marmites de l’Escalade), la majorité confessionnell
919
i parlait dans leur inconscient. Avant que Genève
ne
fût annexée à la France, en 1798, Charles Pictet de Rochemont, le fut
920
convaincus que nous étions différents au point de
ne
pouvoir rien faire ensemble. C’est par l’École, aux trois degrés, qu’
921
u cours des trois lustres qui viennent. La région
n’
est nullement un relai de croissance. C’est un milieu commun de partic
922
e tout le monde dit qu’il faut faire l’Europe, on
n’
a pas avancé d’un millimètre, hormis quelques progrès en matière écono
923
litique, c’est plutôt le recul. Les États-nations
ne
veulent pas abandonner une parcelle de leur souveraineté. La carence
924
sait, et pas seulement leurs industries, comme on
ne
le voit que trop ces jours-ci… La formule de l’État-nation est à bo
925
as en organisant les régions. Les deux opérations
ne
peuvent être que simultanées : un pouvoir supranational et un tissu d
926
s fleuves s’arrêtaient aux frontières ! La région
ne
doit pas être circonscrite par une frontière qui enferme tout. Elle s
927
, écologiques, de transport ou d’enseignement. Il
n’
y a aucune raison que ces fonctions correspondent à une seule et même
928
différentes régions, dont les aires géographiques
ne
se recouvrent pas : par exemple une région écologique, définie par le
929
fondamentaux de sa vie. Ce que les États-nations
ne
font pas. La participation, l’autogestion civique exige de petites co
930
aux, en somme ! Cette réorganisation du continent
ne
remet-elle pas en cause le parlementarisme, lequel, il faut bien le r
931
st devenu l’affaire des seuls partis, car ceux-ci
ne
correspondent plus à grand-chose aujourd’hui. Ce que je souhaite, per
932
rs économiques, et les sociétés multinationales ?
Ne
constituent-ils pas une entrave tout aussi puissante ? L’existence de
933
encore qu’il y ait des économies nationales ? Il
n’
y a aucune raison pour qu’une entité économique coïncide avec les fron
934
, pour revenir à mon sujet, il me semble que rien
ne
les empêche de chercher à s’adapter aux réalités régionales. … sans s
935
vocat du diable, on peut penser que… Notez que je
ne
me fais pas l’avocat des sociétés multinationales ! … sans se faire l
936
ux et naturels d’un pays. Mais je le répète, rien
ne
les empêche d’accorder leur profit à celui d’une région, et certaines
937
énumérer les affluents de l’Amazone, alors qu’on
ne
vous disait rien, par exemple, sur les liens étroits, historiques, éc
938
s « européens » sans faire la moindre propagande.
N’
est-ce pas limiter volontairement l’horizon de l’enfant ? Je dis qu’il
939
aitement conscients que les frontières politiques
n’
existent pas pour la pollution. Les poissons sont les mêmes des deux c