1 1970, Articles divers (1970-1973). La place du livre dans l’information de l’homme moderne (1970)
1 quand il dit que les mathématiques ne se prêtent pas à la liturgie, ne se prêtent pas au chant. Il y a tout de même un exe
2 es ne se prêtent pas à la liturgie, ne se prêtent pas au chant. Il y a tout de même un exemple, c’est la manière de psalmod
3 ours frappé, et ceci prouve que la liturgie n’est pas seulement l’expression d’une émotion mais un moyen mnémotechnique dan
4 ns cas. Ceci dit, j’aurai une seule remarque, non pas du tout en contradiction avec ce que vient de vous dire M. Armand, ma
5 data banks » comme on dit aujourd’hui. Je ne sais pas la traduction française. Banques d’informations. Mais le livre, au se
6 me orientateur, comme polarisateur de l’esprit et pas seulement de l’esprit mais aussi de la sensibilité et du sentiment. Q
7 utant qu’à l’enchaînement des arguments. Il n’y a pas deux livres pareils, alors qu’il peut y avoir un nombre considérable
8 rras simplement agir ou méditer ». Nous ne sommes pas tous destinés à devenir des prophètes. Mais vous voyez qu’il y a cett
9 . Et je voulais y insister pour que l’on ne croie pas , puisqu’on parle d’information, que le livre est une manière surannée
10 n nombre de questions posées. Eh bien, ce ne sont pas les sujets qui manquent, ce qui est difficile, c’est le temps de lent
11 s questions. Je disais que les sujets ne manquent pas , mais le temps de les lire lentement me manque à cette tribune, et je
12 ment dans ce qu’il y a de plus scandaleux, et non pas seulement de pittoresque et de folklorique, ne rencontre-t-il pas plu
13 pittoresque et de folklorique, ne rencontre-t-il pas plus de difficultés à s’exprimer qu’au temps où il suffisait d’une tr
14 oins grave à la radio, à quoi il faut opposer non pas seulement le livre, mais le disque. La bande enregistrée, la bande ma
15 rairement au livre et à l’imprimé qui, eux, n’ont pas de limite en général. La télévision, c’est quelque chose qu’on vous i
16 . C’est la cassette. C’est un palliatif. Ce n’est pas suffisant, mais c’est l’équivalent du livre par rapport à la télévisi
17 Vous pouvez choisir votre cassette ; vous n’avez pas d’actualité immédiate, vous ne l’avez pas non plus dans le livre. Il
18 n’avez pas d’actualité immédiate, vous ne l’avez pas non plus dans le livre. Il faut toujours au moins un mois pour sortir
19 pourrait succéder au livre », moi je ne le pense pas . Il y a des gens pour lesquels l’ouïe est le sens le plus développé e
20 ans un dictionnaire ou un répertoire, pourquoi ne pas les diffuser en espéranto, à supposer qu’il y ait beaucoup de gens qu
21 et du sentiment d’une manière que vous ne pouvez pas dissocier de l’information objective qu’il y a dans le livre ; c’est
22 lente lecture ? » Première remarque : ce ne sont pas les gens qui ont le plus de temps qui lisent le mieux, ni même qui li
23 esure [que] l’automation se développera. Ce n’est pas à mon voisin, que j’irai apprendre ce genre de choses. Je pense que n
24 à M. Louis Armand d’ailleurs — « s’il ne fallait pas opposer le livre à la revue » et faisait observer « qu’on lit énormém
25 tistiques disant qu’on lit trop peu ». On ne peut pas vraiment opposer les deux choses parce que vous savez très bien que l
26 une manière un peu plus prolongée. Je ne voudrais pas prendre plus de temps, M. Le Lionnais a encore beaucoup de choses à d
2 1970, Articles divers (1970-1973). Deux en un, ou le fédéralisme (mars 1970)
27 régionales et locales. Cela veut dire qu’il n’y a pas d’autre solution à la fois désirable et praticable que l’union dans l
28 e temps-là (il a changé d’avis depuis) : Ce n’est pas dans le fédéralisme, ce n’est pas en se repliant sur elle-même que la
29 uis) : Ce n’est pas dans le fédéralisme, ce n’est pas en se repliant sur elle-même que la Wallonie trouvera son salut ? En
30 , dans la grande masse des citoyens dont il n’est pas exclu qu’avant longtemps on l’appelle à se prononcer sur la question
31 is : si le consensus dans tous les domaines n’est pas désirable ou ne peut être atteint, on le réduit à certains domaines.
32 raineté à une organisation politique ne possédant pas un centre unique de pouvoir, d’impulsion et de création, mais plusieu
33 de toute union vivante de l’Europe. Car il n’y a pas d’union et pas de vie possibles hors du paradoxe fondamental de l’Un
34 vivante de l’Europe. Car il n’y a pas d’union et pas de vie possibles hors du paradoxe fondamental de l’Un et du divers, h
35 fasse un jour dans l’histoire si elle ne se fait pas d’abord dans les esprits, et voilà qui implique un langage, et qu’on
36 voilà qui implique un langage, et qu’on ne laisse pas impunies ses erreurs. Car si l’on ne fait pas attention aux mots, c’e
37 sse pas impunies ses erreurs. Car si l’on ne fait pas attention aux mots, c’est que l’on n’a pas bien vu la chose, et comme
38 e fait pas attention aux mots, c’est que l’on n’a pas bien vu la chose, et comment pourrait-on la vouloir ? Apprenons donc
3 1970, Articles divers (1970-1973). Ce que la Suisse peut apporter à l’Europe (19 mars 1970)
39 rganisation de notre économie, si nous ne voulons pas être « américanisés », comme on le dit tous les jours, c’est qu’il y
40 est cette unité ? Eh bien ! de culture. Il n’y a pas de cultures nationales, contrairement à ce que l’on nous a appris à l
41 rontières actuelles de nos pays, qui n’existaient pas pendant tout le Moyen Âge, notamment, où la culture européenne exista
42 ier une union. Je dis bien : une « union » et non pas une unification. Car la seule union que je vois possible pour l’Europ
43 onne des concerts. Eh bien ! tout cela n’existait pas dans les autres cultures, où l’on n’écrivait que de la littérature re
44 eligieuse, sacrée. En Inde, par exemple, il n’y a pas de romans qui racontent des petites histoires qui se passent tous les
45 e ce soit la plus forte d’Europe !)… que ce n’est pas une grande puissance comme les États-Unis ou la Russie… » J’estime qu
46 mie, comment expliquer que les États-Unis n’aient pas gagné tout de suite la guerre contre le petit Vietcong ? Pourquoi ? I
47 e contre le petit Vietcong ? Pourquoi ? Ils n’ont pas osé utiliser toutes leurs forces, la bombe atomique notamment, parce
48 ntre eux l’opinion du monde entier. Ce n’est donc pas du tout la force, comme on le répète toujours, qui dirige le monde, c
49 partie du monde : la Russie. La Russie qui n’agit pas du tout par la force de ses armées mais par la force de sa doctrine,
50 idée. La Suisse, si petite qu’elle soit, n’aurait pas seulement un rôle de parti minoritaire à jouer au sein de cette grand
51 formule maintenant au-delà de nos frontières, ne pas l’arrêter à nos frontières cantonales, ne pas l’arrêter à notre front
52 ne pas l’arrêter à nos frontières cantonales, ne pas l’arrêter à notre frontière nationale, mais voir plus loin, voir qu’i
53 à ce peuple heureux que vous décrivez, ne semble pas très prêt à assumer les responsabilités nouvelles qu’implique la form
54 n modestes dans notre petit coin, ne nous rendons pas ridicules en proposant de grandes choses… » Il faut que cela cesse ;
55 es trouveront même bien curieux que l’on ne l’ait pas encore fait. Elles nous reprocheront — à la génération des aînés — d’
4 1970, Articles divers (1970-1973). « Un acte de reconnaissance » [à propos du prix Robert Schuman] (24 mars 1970)
56 prix auquel, d’ailleurs, il s’attendait : Je n’ai pas été surpris par la décision de la Fondation Freiherr von Stein puisqu
5 1970, Articles divers (1970-1973). Après l’attribution du prix Schuman à M. D. de Rougemont (30 mars 1970)
57 croire que je l’ai dit (si l’on ne me connaissait pas du tout) mais simplement que je lui suis reconnaissant d’avoir reconn
6 1970, Articles divers (1970-1973). La passion en 1970, est-ce possible ? (mai 1970)
58 t en état de transe. La décision risque de n’être pas excellente. La passion, d’autre part, est une projection narcissique 
59 is de Rougemont, la crise du mariage (qui ne date pas d’aujourd’hui) procède à la fois d’un culte exagéré de la passion, de
60 gens se posent des questions dont ils ne trouvent pas toujours les réponses. Et ces fameux obstacles à la passion ? Pour De
61 on ? Pour Denis de Rougemont, ces obstacles n’ont pas été supprimés, ils ont été déplacés. On parle un peu abusivement de l
62 es interdits, les tabous, les convenances ne sont pas arbitraires. Ils expriment des répulsions humaines. Supprimez des obs
7 1970, Articles divers (1970-1973). « S’unir, au-delà de nos fausses souverainetés, pour préserver nos vraies diversités » (mai-juin 1970)
63 sorber par d’autres économies. Cela ne revient-il pas à se poser la question fondamentale du sens même de notre vie ? Oui,
64 dre, se mettre en commun pour certaines choses et pas pour d’autres, trouver une unité diversifiée, en un mot. Par quelles
65 rprises, mais un peu désordonné… Ne craignez-vous pas l’utopie ? Comment sera-t-il possible de changer le système actuel de
66 ? Mais le système de la société actuelle n’existe pas  ! Il y a précisément une crise universelle ! Il faut faire maintenant
67 rope a la chance d’avoir une culture. Je ne crois pas aux cultures nationalistes, en dépit des manuels scolaires : il n’y a
68 comme dénominateur commun : là aussi, je ne suis pas d’accord. La politique ne doit pas être une activité séparée : c’est
69 si, je ne suis pas d’accord. La politique ne doit pas être une activité séparée : c’est la vie dans la cité, « l’art d’amén
70 cellent, hormis peut-être les cantons qui ne sont pas d’une originalité débordante. Unir les États européens en un corps po
71 entre les cantons suisses avant 1848. Il ne faut pas non plus oublier les moyens techniques dont nous disposons à l’heure
72 s à l’heure actuelle et qu’il ne faudrait surtout pas renier : je suis persuadé que le fédéralisme européen se construira g
8 1970, Articles divers (1970-1973). Qu’est-ce que la culture européenne ? (juin 1970)
73 qu’ils doivent, en fait, à la culture. Unité non pas homogène, et qui ne résulte pas d’un processus forcé d’uniformisation
74 ulture. Unité non pas homogène, et qui ne résulte pas d’un processus forcé d’uniformisation, de nivellement et d’exclusion
75 l’individualisme hellénistique qui ne manqueront pas d’appeler la tyrannie. Rome, en réponse à ce défi de l’anarchie, inve
76 ui se contredisent avec passion, ne se détruisent pas pour autant : entre leurs triomphes alternés, elles durent dans l’omb
77 uddhistes, ou sans croyance aucune… Mais ce n’est pas tout. Avec les trois sources classiques d’Athènes, de Rome et de Jéru
78 l enfin rappeler l’apport arabe, qui ne se limite pas au zéro précédant la suite des nombres, mais qui est l’une des source
79 ’est, de toute évidence : fédéralisme. Je ne vois pas d’autre réponse imaginable au défi que l’Histoire nous pose dans les
9 1970, Articles divers (1970-1973). « L’Europe ? Une révolution culturelle ! » (15 octobre 1970)
80 que ce qui peut entraîner l’économique, ce n’est pas la politique. Celle-ci peut même le freiner, comme l’a démontré de Ga
81 nel, est la plus ennuyeuse… Notre intention n’est pas , du reste, d’introduire une heure de plus dans des programmes déjà su
82 grand rôle au niveau de la jeunesse. Ne l’a-t-on pas constaté tout particulièrement lors de Mai 68 ? Exactement, puisque c
83 e moment-là qu’est sorti un manifeste dont on n’a pas assez parlé, bien qu’il fût signé par des gens comme Jacques Monod, K
84 n quotidienne avec 150 personnes. Nous ne voulons pas coiffer d’autres institutions mais, selon le principe fédéraliste, no
85 ur les régions. Une telle conception ne va-t-elle pas compliquer à l’excès les réalités socioéconomiques ? Il est certain q
86 urelles, ethniques, économiques ne se recouperont pas nécessairement. Je pense qu’une telle Europe ne sera possible que par
87 la réalisation de l’Europe ? Le fédéralisme n’est pas possible dans une seule nation. L’État national constitue donc l’obst
88 nsternante médiocrité… L’Europe des esprits n’est pas encore, il s’en faut même de beaucoup, devenue l’Europe réelle. Mais,
10 1970, Articles divers (1970-1973). L’Europe à l’heure de ses choix I : Niveau de vie ou mode de vie ? (15 novembre 1970)
89 tuelles pour les nations de l’Europe désunie mais pas de même nature. Ce que j’appelle la colonisation possible par les Ét
90 possible par les États-Unis — si nous ne faisons pas les États-Unis d’Europe — c’est une colonisation essentiellement écon
91 urope, qui sont réellement colonisés… Et il n’est pas impensable, si nous continuons à rester divisés par nations, chacune
92 t extrêmement tragique parce que l’Europe n’était pas là. Il n’y avait personne pour leur répondre. Et vous pensez que, act
93 aller. Cela a complètement transformé le village. Pas seulement le passage de 1800 à 5500 habitants, mais les mœurs, le ryt
94 aucun de nos pays ne peut se défendre. Il n’est pas trop tard Mais ne pensez-vous pas qu’il est déjà trop tard et que
95 . Il n’est pas trop tard Mais ne pensez-vous pas qu’il est déjà trop tard et que les « États-Unis d’Europe » risquent
96 -Unis ? Est-ce qu’une Europe unie ne faciliterait pas , au contraire, la pénétration américaine ? Je n’ai rien contre la pén
97 mportants que ceux des Américains. Nous ne sommes pas du tout écrasés par les deux géants que sont l’Union soviétique et le
98 r les épaules l’un de l’autre, ils n’arriveraient pas à notre hauteur. Au point de vue démographique, certes … Oui, mais il
99 parce qu’ils disposent d’un grand espace et nous pas . Prenez le cas de la France, qui a un retard presque scandaleux dans
100 rches nucléaires. On pouvait se dire : « Ce n’est pas la peine de partir, ils ont pratiquement un siècle d’avance sur nous.
101 un siècle d’avance sur nous. » Mais nous n’avons pas tenu ce raisonnement. Nous nous sommes dit que les Américains avaient
102 sation, rien de plus. Nous avons dit : « Il n’est pas du tout trop tard. Nous avons les cerveaux, nous avons, par exemple,
103 i nous entoure et sans laquelle nous ne pourrions pas vivre ? Il y a de grands choix à faire et cela pour la première fois,
104 liste : pourvu que le PNB augmente, qu’il n’y ait pas de chômage, tout ira bien et tant pis pour la nature. Nous commençons
105 ntre niveau de vie et mode de vie ne se pose même pas . Pour eux, le problème se résume encore à celui de la survie dans la
106 la survie dans la rareté. Attention ! Je ne suis pas du tout pour que l’on freine le développement de la société ; je suis
107 Deux mouvements antagonistes Ne touche-t-on pas là un problème de structures politiques et économiques, plutôt qu’un
108 oiture par des moyens de transport qui ne fassent pas de bruit, qui ne dégagent pas de gaz. Quant à savoir si cela touche l
109 port qui ne fassent pas de bruit, qui ne dégagent pas de gaz. Quant à savoir si cela touche l’organisation sociale et polit
110 ires, comme ils ont l’air de l’être ? Ne sont-ils pas plutôt un seul et même mouvement qui pourrait se définir ainsi : adap
111 temps dénaturée pour qu’un tel ouvrage ne soulève pas questions, réticences ou scepticisme. Ce sont là des obstacles dont D
11 1970, Articles divers (1970-1973). L’Europe à l’heure de ses choix II : Se rallier à l’idée suisse (22 novembre 1970)
112 ’une agence fédérale pour l’économie car ce n’est pas encore une autorité de politique économique et cela ne couvre qu’une
113 Parce que vous pensez que la Suisse ne pourrait pas rester l’écart d’un tel mouvement ? Non, c’est absolument impensable.
114 s européen d’écologie, par exemple ? Elle ne peut pas fermer ses frontières aux vents ou la pollution du Rhin. La Suisse es
115 S’il y avait les États-Unis d’Europe, on ne voit pas comment la Suisse serait neutre entre ces États-Unis et, par exemple,
116 pour adhérer à l’Europe. Pourquoi ne parlerait-on pas de l’autre difficulté qui est beaucoup plus intéressante : celle qu’a
117  » le véritable fédéralisme, qui n’est d’ailleurs pas toujours appliqué en Suisse. Ce fédéralisme va de la commune aux entr
118 r elle n’a jamais été appliquée systématiquement, pas même en Suisse. C’est une expérience qui n’est possible qu’aujourd’hu
119 s pensé qu’il y avait des ordres de réalités à ne pas mélanger. Il n’était pas question d’imposer la même religion, la même
120 ordres de réalités à ne pas mélanger. Il n’était pas question d’imposer la même religion, la même économie, les mêmes impô
12 1970, Articles divers (1970-1973). Denis de Rougemont, propos recueillis par E. Liard (décembre 1970)
121 e la pensée, de l’art roman jusqu’au surréalisme. Pas un seul de ces foyers culturels n’a coïncidé avec les frontières nati
122 Il faut beaucoup de souplesse. Une région ne doit pas être contenue à l’intérieur de limites, elle doit rayonner. Les États
13 1970, Articles divers (1970-1973). Message aux régionalistes (16 mars 1973)
123 de ses énergies créatrices. Surtout, elle ne doit pas se donner pour objectif de saisir « une plus grande part du gâteau »
124 définissent ses vrais besoins. La région ne doit pas être imaginée comme un mini État-nation, qui aurait tous les inconvén
125 chercher à se rendre utile, et son problème n’est pas d’exploiter le voisin mais de coopérer avec lui. Elle n’a donc nul be
126 ez être libres ? Devenez responsables. N’attendez pas qu’on vous en donne la permission et les moyens. PRENEZ vos responsab
127 tez les moyens de les exercer ! La région ne sera pas l’œuvre des technocrates de l’État central, mais des habitants de la
14 1971, Articles divers (1970-1973). Souvenir d’Honegger et de Nicolas de Flue (1971)
128 s le monde de l’esprit et de ses œuvres, il n’est pas de chance imméritée : les choses ne viennent à point que pour qui s’y
129 et pour cet homme selon mon cœur… Mais ce n’était pas pour tout de suite ! Je venais d’écrire coup sur coup, en moins de ne
130 n de sortir mes uniformes d’une malle, je n’avais pas de sujet et je défiais quiconque d’en trouver un, en Suisse, qui fût
131 Je vais le voir à Paris. Je ne le connaissais pas . En pleine gloire, à 46 ans, il vient d’écrire Jeanne au bûcher et La
132 ano ce qu’il a fait. Il joue mal, je ne distingue pas grand-chose, une fin de choral pourtant, dont il me dit en riant : « 
133 Je le crois, c’est évident, mais cela n’explique pas tout. Il y a là plus qu’un processus psychologique de transmission pa
134 ychologique de transmission par les mots. Jamais, pas un instant, nous n’avons eu l’idée de parler du sens profond de la pi
135 os positions personnelles à son égard. Je ne sais pas pourquoi d’ailleurs. Par pudeur ? Je ne le pense pas. Mais peut-être
136 pourquoi d’ailleurs. Par pudeur ? Je ne le pense pas . Mais peut-être tout simplement parce qu’il fallait d’abord bien voir
137 e. Cette espèce d’harmonie préétablie, comment ne pas admettre après coup qu’elle ait gouverné dans le fait plusieurs série
138 qu’Honegger n’est à aucun degré. Je ne crois même pas qu’il se soit jamais dit croyant, encore moins incroyant, d’ailleurs.
139 ant, encore moins incroyant, d’ailleurs. Ce n’est pas avec des traces « d’éducation chrétienne » et des formes vidées de la
140 tre qualifié d’essentiellement chrétien, ce n’est pas à cause des sujets, ni des paroles et situations mises en musique, ni
141 tre que dans l’acte de foi, par quoi je n’entends pas du tout l’adhésion à quelque credo, mais la réalité de l’opération en
142 nous de quelque chose, disons l’Esprit, qui n’est pas vérifiable autrement que par ses créations ou incarnations. Celles-ci
15 1971, Articles divers (1970-1973). Quand Paul Martin voulait faire courir l’Europe (1971)
143 aison, sans doute. C’était assez pour se tutoyer, pas assez pour vraiment se connaître. Quelque trente ans plus tard repara
16 1971, Articles divers (1970-1973). L’Europe est d’abord une unité de culture (1971)
144 plus en plus mythique — cette Europe divisée n’a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéologiqu
145 e, surtout secondaire — mais l’université n’était pas en reste vers 1914 —, l’école apprend depuis un siècle aux jeunes Fra
146 en tant qu’État, et en moyenne, elles n’ont même pas un siècle d’âge. Seules la France, l’Angleterre et l’Espagne comptent
147 hésitation d’un millénaire et demi, qui ne manque pas d’une certaine « grandeur ». Mais si l’on peut admettre que l’État fr
148 ussi les conclusions politiques qui ne manqueront pas de résulter de ces mises au point. Et tout d’abord : il n’y a pas de
149 e ces mises au point. Et tout d’abord : il n’y a pas de cultures nationales. La culture européenne n’est pas la somme de v
150 cultures nationales. La culture européenne n’est pas la somme de vingt-cinq cultures nationales, puisqu’elle existait bien
151 me le faisait observer un jour Étienne Gilson —, pas un seul des grands professeurs n’était français : ils étaient napolit
152 ui parlent une même langue ? Oui, mais il n’était pas question de les enfermer pour si peu dans les frontières d’un même Ét
153 s frontières d’un même État. D’ailleurs, il n’est pas vrai que nos stato-nations modernes correspondent à l’aire de diffusi
154 voir pourquoi ! (Mais non, surtout ne le demandez pas , vous passeriez pour un mauvais Français !) De même, les Pyrénées sép
155 dition qu’un esprit fort (ou un naïf) ne remarque pas que l’on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les de
156 doctrine politique ont été paneuropéennes, et non pas nationales : l’art roman et le gothique, le classique, le baroque, le
157 ités, des foyers de création, des maîtres, et non pas des nations au sens moderne. Les grands courants européens, les grand
158 eur propre nation ; et ainsi de suite. Ce ne sont pas nos appartenances nationales qui nous diversifient vraiment, c’est la
159 ien l’Europe une et diverse, et vous ne risquerez pas un instant de créer ce fameux volapük que dénonçait de Gaulle, non sa
160 à Paris tous les esprits distingués qu’il n’avait pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture euro
161 rivé de nos frontières cantonales, et je ne crois pas que nous y ayons perdu quoi que ce soit de vraiment précieux. Ces vér
162 e nous laisser entraîner sur un terrain qui n’est pas le nôtre, dans des termes qui sont étrangers à notre tradition fédéra
163 ennent et renforcent le principe. Nous ne croyons pas à une Europe des États-nations souverains. Je l’ai souvent dit : ce s
164 bien on a une vraie amicale, mais alors il n’y a pas de misanthropes, ou bien on a de vrais misanthropes, mais alors il n’
165 n on a de vrais misanthropes, mais alors il n’y a pas d’amicale. L’Europe que nous voulons sera fédérale — ou alors elle ne
166 voulons sera fédérale — ou alors elle ne se fera pas sérieusement. Voilà, je pense, la perspective qui s’ouvre à nous. Ell
167 isque nous sommes le seul pays européen qui n’ait pas pris la forme d’un État-nation au siècle dernier. Le seul constitué p
168 les, le philosophe allemand Karl Jaspers n’hésita pas à déclarer que l’Europe n’avait plus le choix qu’entre deux solutions
169 r modestie ! Helvétiser l’Europe, cela ne se fera pas tout seul. C’est maintenant ou jamais que la Suisse doit prendre l’in
17 1971, Articles divers (1970-1973). L’héritage culturel de l’Europe (1971)
170 st européen. Tout cela est culturel ou je ne sais pas ce que c’est. Et tout cela vit en chacun de nous, sous forme de confl
171 tre seule unité fondamentale, répétons-le — n’est pas exceptionnel : il est irrécusable. J’entends qu’il est universel. Pas
172 l est irrécusable. J’entends qu’il est universel. Pas un seul d’entre nous n’y échappe. Que nous soyons « très cultivés » o
173 té des langues, si on la respecte, elle n’empêche pas l’union, bien au contraire, elle ne condamne que l’unification forcée
174 ançais comme seule langue officielle. Elles n’ont pas empêché non plus les dragonnades linguistiques perpétrées par l’école
175 ar l’école primaire depuis un siècle. Elles n’ont pas empêché le pire, qui est l’unification forcée. Mais grâce à la renais
176 ue du véritable Européen que sa volonté de n’être pas comme son voisin, de ne ressembler à aucun autre. Cette volonté de di
177 idéale et théoriquement orthodoxe, qui serait non pas la somme de toutes ses sources mais le produit optimal de leurs inter
178 planétaires que l’on sait. Les Européens ne sont pas plus cruels et violents que les Asiates ou les Noirs, loin de là. Mai
179 marxistes de tout à l’heure, s’il ne les comprend pas davantage. Le scientifique gouverne ; c’est lui qui a fait la Bombe,
180 ible de dilapider. Car ces vertus ne contraignent pas l’individu comme le fait un programme génétique, si elles sont ce qui
18 1971, Articles divers (1970-1973). 6 et 7 février, vote sur le suffrage féminin : supprimer un anachronisme et une injustice (4 février 1971)
181 pour le suffrage féminin. Cette affirmation n’est pas immédiatement évidente à chacun. Et pourquoi dès le xiie siècle ? C’
182 ans les pays d’Europe. Mais la femme n’avait-elle pas plutôt un rôle d’inspiratrice, un rôle passif en quelque sorte ? Just
183 rice, un rôle passif en quelque sorte ? Justement pas . Elle devenait la maîtresse, le seigneur. Ce qui s’est passé au xiie
184 és en Suisse romande, cette idée que la femme n’a pas sa place dans les affaires publiques qui doivent être le domaine des
185 gent principal de civilisation », n’exagérez-vous pas leur rôle ? En tous les cas, ça choque… Ce que nous avons de culture,
186 us qu’à nos pères, en grande partie. Je n’entends pas culture au sens scolaire, universitaire du terme. Mais la transmissio
187 forme, plus que les hommes souvent. Il n’en reste pas moins, que bien ou mal, c’est par les femmes que se fait la culture p
188 culture européenne ? D’autres civilisations n’ont pas accordé le même poids au rôle de la femme. Je pense que c’est spécifi
189 omme, moralement parlant. Ce qui n’est absolument pas le cas en Asie, ce qui n’est pas le cas dans les civilisations où il
190 n’est absolument pas le cas en Asie, ce qui n’est pas le cas dans les civilisations où il y a beaucoup de femmes pour un ho
191 t de vue public entre hommes et femmes. Je ne dis pas du tout qu’il n’y a pas de différence entre masculin et féminin. Je d
192 mmes et femmes. Je ne dis pas du tout qu’il n’y a pas de différence entre masculin et féminin. Je dis que sur le plan de la
193 is que sur le plan de la vie publique il n’y en a pas . Je n’en vois pas. Les seules que nous croyons voir, que nous imagino
194 de la vie publique il n’y en a pas. Je n’en vois pas . Les seules que nous croyons voir, que nous imaginons voir, c’est à c
19 1971, Articles divers (1970-1973). Arnaud Dandieu, la révolution et les régions (mars 1971)
195 ne ne saurait être compris que si on ne le sépare pas du communalisme de la Commune, c’est-à-dire de la tradition régionali
20 1971, Articles divers (1970-1973). Les régions et la civilisation (mars 1971)
196 uels et les doctrines nationalistes, je n’imagine pas de principe méthodologique plus fécond, pour cette renaissance, que c
197 ’Oxford et aux structuralistes de Paris. Il n’y a pas de rayonnement continental ou planétaire sans foyers locaux, mais auc
21 1971, Articles divers (1970-1973). L’Amour et l’Europe : L’Express va plus loin… avec D. de Rougemont (12 avril 1971)
198 , mais différentes ou même antinomiques. N’est-ce pas le cas du couple ? Un jour, on m’a demandé dans un débat à la radio :
199 ndé dans un débat à la radio : « Ne craignez-vous pas que les Européens ne soient trop différents les uns des autres pour j
200 voir s’unir ? » J’ai répondu : « Ne craignez-vous pas que les hommes et les femmes ne soient trop différents pour pouvoir j
201 r la diversité, en faveur de la diversité, et non pas la subordination de l’un à l’autre ou la fusion des deux, l’uniformis
202 e pour le mariage ? Je le disais en 1938, je n’ai pas changé d’avis. Nous entrons dans le mariage généralement par erreur,
203 e qu’il faut se marier. Eh bien, non, on ne reste pas amoureux tout le temps ! Chacun sait que le mariage, c’est la durée.
204 quelque chose dont chacun sait que cela ne durera pas , c’est vouloir le construire sur le principe même de tout divorce. L’
205 ncipe même de tout divorce. L’amour-passion n’est pas possible dans le mariage ? Non. Je dis autre chose : je dis qu’il est
206  : je dis qu’il est l’ennemi du mariage. Ce n’est pas par hasard que le jugement de la comtesse Marie de Champagne, au xiie
207 . Le mariage est en train de voler en éclats, non pas à cause de la passion dans sa beauté insoutenable, mais de ses dégrad
208 ant Mme Tristan ! Mais Tristan et Iseut n’ont-ils pas été merveilleusement heureux ? Ils ont été merveilleusement malheureu
209 vaient jamais entendu parler d’amour ? » Il n’y a pas d’amour inexprimé. Il y a des désirs, des instincts, faire l’amour, f
210 mour-passion, c’est autre chose. Tant qu’il n’est pas « déclaré », c’est comme s’il n’existait pas. Grâce à la littérature,
211 ’est pas « déclaré », c’est comme s’il n’existait pas . Grâce à la littérature, la passion obsède nos rêves. Et c’est une in
212 s’opérer l’union sexuelle, qui ne doit d’ailleurs pas aboutir à la procréation. Mais ce n’est qu’une technique ? Ainsi que
213 nous l’entendons depuis le xiie siècle n’a même pas de nom dans leur langue. Ce qui se rapproche le plus de notre verbe a
214 tique à peu près unique au monde : ils ne peuvent pas devenir des problèmes là où tout est réglé, programmé. La crise du ma
215 mariage est typique de l’Occident. Elle n’existe pas ailleurs. Mais c’est le prix de notre liberté. Mais vous, que souhait
216 idemment pour l’amour-passion, bien qu’il ne soit pas viable. Trop rares sont les « beaux moments d’équilibre doré » dont p
217 les vocations personnelles. Car les uns ne vivent pas sans les autres. Comment ont été accueillies vos thèses de L’Amour et
218 e. Et le mariage à l’essai, même s’il ne garantit pas de l’erreur, augmente les chances de l’éviter. Mais, d’autre part, l’
219 Parce que l’amour-passion, lui non plus, ne peut pas exister en dehors d’un certain monde spirituel. Si vous avilissez ce
220 possible des relations amoureuses. Ne reste-t-il pas l’érotisme ? Même pas. C’est une évidence. L’érotisme est l’usage cul
221 s amoureuses. Ne reste-t-il pas l’érotisme ? Même pas . C’est une évidence. L’érotisme est l’usage culturel, non procréateur
222 alystes les rassurent : « Très bien, mes enfants, pas d’excès, mais enfin, il faut bien apprendre les choses… », etc. Si lu
223 intégral ne vaut rien pour aimer. Tristan n’aime pas réellement Isolde. Il ne la voit pas. Il projette. Ce qu’il aime, c’e
224 istan n’aime pas réellement Isolde. Il ne la voit pas . Il projette. Ce qu’il aime, c’est l’amour, être en état d’amour. Tou
225 vées, les produits d’une projection. Vous n’aimez pas telle femme réelle, vous aimez votre projection sur une femme, qui la
226 ppelions le « désordre établi ». Nous ne voulions pas qu’on critique l’Allemagne et l’URSS au nom de l’esprit petit-bourgeo
227 itaires qui fermait notre horizon, et qui n’était pas notre guerre. À cette époque, toute une génération s’est exprimée dan
228 nscience des choses quand on les perd. Je n’étais pas le seul dans ce cas à New York. Quand j’ai rencontré Einstein, à Prin
229 Einstein, à Princeton, il m’a dit : « Vous n’avez pas idée de la transformation intellectuelle de l’Amérique sous l’impact
230 rendra un temps fou. En tout cas, cela ne se fera pas avec un nationaliste comme Churchill : il est dangereux. » Une Europe
231 combattre ce nationalisme fauteur de guerres ; et pas seulement Hitler, mais ce qui l’avait permis, donc l’idée de « faire
232 l’Europe est loin d’être faite. Ne craignez-vous pas d’avoir perdu votre temps ? Je suis probablement l’écrivain qui a pré
233 que dans l’esprit des intellectuels européens, et pas ailleurs. Car l’Europe, aujourd’hui, y compris les pays de l’Est, c’e
234 étiques et 203 millions d’Américains, on n’arrive pas même au total européen. Si ces chiffres ne nous rassurent pas, c’est
235 total européen. Si ces chiffres ne nous rassurent pas , c’est que nous nous sentons seulement Français, ou Suisses, ou Danoi
236 es révolutions. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu Hitler, Staline, Guernica… L’Europe est une unité complexe, pétrie
237 au xixe siècle. » Pourquoi, selon vous, n’est-ce pas encore fait, la fédération européenne ? D’abord, parce qu’on est part
238 ue par la volonté délibérée des Européens, et non pas par une espèce de complot des gouvernements. Vous ne croyez pas à l’h
239 pèce de complot des gouvernements. Vous ne croyez pas à l’homme politique ? C’est probablement une fonction à supprimer. Il
240  : « Le souverain s’est prononcé hier. » Ce n’est pas une manière de parler, c’est la réalité. On ne dit pas, en Suisse : «
241 ne manière de parler, c’est la réalité. On ne dit pas , en Suisse : « Un tel a été un grand serviteur de l’État. » Pourquoi
242 e Conseil fédéral, lui, exécute, mais ne gouverne pas les hommes. C’est absolument le contraire des habitudes héritées de L
243 s toujours par leur dire : « Monsieur, je ne suis pas votre sujet, mais un libre citoyen. C’est le fonctionnaire qui est au
244 raire de ce que pensent les ministres, on ne fera pas l’Europe sans casser des œufs. Il nous faut entreprendre délibérément
245 reprendre délibérément cette révolution qui n’est pas violente, mais qui implique le démantèlement progressif des États-nat
246 , l’Europe sera pratiquement faite. Mais n’est-ce pas mettre la charrue devant les bœufs ? Un Jean Monnet ne vous traiterai
247 les bœufs ? Un Jean Monnet ne vous traiterait-il pas d’utopiste ? Jean Monnet a très bien fait ce qu’il a fait avec l’appu
248 ommes contraints de voir aujourd’hui que ce n’est pas ainsi que les choses se passent. Et que ce n’est pas Karl Marx qui a
249 ainsi que les choses se passent. Et que ce n’est pas Karl Marx qui a raison sur ce point, mais Mao Zedong, qui a baptisé l
250 fédéralistes, régionalistes, parce qu’il n’y en a pas d’autres. Mais il reste toujours la part du diable. Qui est-ce, le di
251 s de la tyrannie. Mais une société ne se retourne pas comme un homme. Il ne suffit pas de toucher deux ou trois-centres ner
252 é ne se retourne pas comme un homme. Il ne suffit pas de toucher deux ou trois-centres nerveux pour que tout marche. Ou bie
253 que quelques idéologues ont eu l’idée d’en faire. Pas une seule de nos révolutions n’a réussi. Dans ce sens, on ne peut pas
254 révolutions n’a réussi. Dans ce sens, on ne peut pas être trop fier de l’Europe. Comment voyez-vous l’avenir ? Je crois au
255 s il me semble improbable que cet ennui ne recrée pas en profondeur la soif de quelque chose qui soit au-delà de l’ordre et
256 qui soit au-delà de l’ordre et qu’il ne provoque pas une rébellion de l’esprit, une sédition de l’inconscient, dont nous p
22 1971, Articles divers (1970-1973). [Entretien] Le diable existe, vous pouvez le rencontrer (17 mai 1971)
257 e plus discerner le mal. Pour quelqu’un qui n’est pas croyant, qu’est-ce que cela représente, le diable ? Croyant ou non, t
258 e mal et par conséquent le bien. Qu’on ne raconte pas d’histoires ! Aujourd’hui, beaucoup disent : « On en a assez de la mo
259 n ? Le diable vous convainc très facilement de ne pas croire à son action, qui est spirituelle. C’est son incognito qui fai
260 du diable est de nous faire croire qu’il n’existe pas  ». Le diable, c’est celui qui nous dit, comme dans L’Odyssée Ulysse a
261 est Personne. De quoi aurais-tu peur ? Je ne suis pas là… » C’est ce que fait Satan ? Singeant Dieu, mais à rebours, il nou
262 rebours, il nous dit : « Je suis celui qui n’est pas  ! ». Il est la force dépersonnalisante de l’univers. Il nous fait cro
263 iformisation des corps et des esprits, la mise au pas totalitaire des réflexes, la collectivisation des individus isolés, d
264 niveau inférieur d’énergie. Non, Hitler n’était pas le diable C’est donc cela, pour vous, « la part du diable » ? C’es
265 s. S’ils sont rejetés au bout du compte, ce n’est pas par un tribunal, mais par eux-mêmes ! Et si l’on se trompe sur le cho
266 fait tout ce qu’il faut pour qu’on ne le détecte pas  ? Je disais que Satan nous fait croire, premièrement, qu’il n’existe
267 an nous fait croire, premièrement, qu’il n’existe pas , deuxièmement, qu’il est seulement Hitler et personne d’autre, et ain
268 . La menace véritable, c’est quand nous ne savons pas que nous sommes attaqués, quand nous sommes entraînés malgré nous. Ca
269 que tu as fait ? », il proteste : « Je n’y étais pas , c’est elle qui a tout fait, c’est elle qui m’a tendu la pomme ; moi,
270 tendu la pomme ; moi, je n’ai rien vu, je ne sais pas ce qui s’est passé ; j’étais derrière les buissons, au milieu des arb
271 Maritain m’avait dit : « Pourquoi n’écrivez-vous pas un livre sur le diable ? ». J’ai répondu : « Si j’écris un livre sur
272 euil où vous êtes assis ! Là, vous êtes sûr de ne pas le rater. C’est en vous qu’il existe : personne d’autre ne peut vous
23 1971, Articles divers (1970-1973). Fédération ou confédération ? (juillet-août 1971)
273 de l’autonomie. Or, une union qui ne respecterait pas l’autonomie des parties constituantes n’aurait pas lieu d’être appelé
274 e, c’est qu’il a fallu cinq à six siècles pour ne pas fédérer les communes, cités, principautés et pays suisses ; mais, au
275 nt souverains en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la Constitution fédérale, et comme tels exercent tous les
276 t comme tels exercent tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral » ; cependant que l’article 5 « garantit
24 1972, Articles divers (1970-1973). Europe divisée ou Europe fédérée ? (1972)
277 est sujet libre de son action. Un homme qui n’est pas reconnu comme libre ne peut être tenu pour responsable de ses actes.
278 ion sociale, recherches. Ainsi la politique n’est pas la fin dernière de l’homme, pas plus que ne le sont la cité ou la Soc
279 n nous dit aussi (mais je m’assure que ce ne sont pas les auteurs qui ont écrit cela) que « depuis 1960, la spéculation sur
280 eux) sont en fait des devins, car, attentifs à ne pas « prophétiser », ils cherchent à prévoir objectivement, donc passivem
281 ection de la volonté, de plan stratégique, et non pas un sens scientifique de prévision inerte de ce qui « se passera », en
282 évision « exacte » par son propre effet, n’est-ce pas en fin de compte un cas particulier d’une dialectique de l’informatio
283 tent sur le grand écran de l’avenir. Ils ne nient pas la possibilité que certains cauchemars se réalisent dans l’Histoire —
284 nt cauchemars certains complexes de phénomènes et pas d’autres implique une hiérarchie donnant le pas au rationnel, au calc
285 t pas d’autres implique une hiérarchie donnant le pas au rationnel, au calculable, et l’assimilant au « normal ». Il faut i
286 losion dans les mégalopolis de l’an 2000, ne sont pas plus « débrayés » de l’évolution historique que le sociologue d’aujou
287 nir et de ses « surprises ». L’humanité n’invente pas n’importe quoi, ni rien d’entièrement imprévu ; toutes nos grandes ou
288 ffrer. 4. Ceux qui prévoient l’an 2000 ne sont pas ceux qui le vivront « Vous dites : Où vas-tu ? Je l’ignore et j’y
289 je me tromperais : car ce « là-bas » ne m’attend pas tel que je suis. Imaginer l’avenir est faux et dangereux dans la mesu
290 s manières de pressentir l’avenir ne le modifiait pas en cours de route, ou si nous pouvions évaluer ces modifications ; —
291 ion du citoyen au management de la cité ne seront pas les mêmes, d’ici là, aux États-Unis, en URSS, en Europe, dans le tier
292 tout variait simultanément, la prévision n’aurait pas de sens ; si rien n’était variable, le besoin de prévision serait nul
293 ns fondamentaux de l’homme occidental ne semblent pas susceptibles de disparaître sans que disparaisse en même temps tout c
294 union, ne sont guère différents… Les hommes n’ont pas tant changé10. » D’où l’idée du « droit de vivre dans un environnemen
295 structures restent, les dimensions du pays n’ont pas varié, et le genius loci agit (par des moyens que je n’ai pas à exami
296 t le genius loci agit (par des moyens que je n’ai pas à examiner ici) de manière à maintenir l’invariant local et les diffé
297 t Aristote une ville dont la superficie n’excédât pas la portée de la voix d’un homme criant sur l’agora. Jusqu’à nos jours
298 ou même par un instituteur à des enfants n’ayant pas encore atteint le stade réflexif-critique, n’est pas une atteinte à l
299 encore atteint le stade réflexif-critique, n’est pas une atteinte à la liberté de jugement mais une empreinte dont le juge
300 e à l’état pur, car non seulement « le pire n’est pas toujours sûr », mais encore et surtout, le pire se limite par ses pro
301 n civique, persistante ou potentielle, n’en devra pas moins rester présente en filigrane dans toute image plus réaliste (pl
302 régions qu’il s’agira d’abord d’organiser (et non pas de « délimiter »), en tout cas pas plus — et peut-être pas autrement
303 aniser (et non pas de « délimiter »), en tout cas pas plus — et peut-être pas autrement — qu’on ne le fait pour des écosyst
304 délimiter »), en tout cas pas plus — et peut-être pas autrement — qu’on ne le fait pour des écosystèmes ; b) l’autonomie d
305 -dire la distribution de l’appareil étatique (non pas du tout sa suppression !) à des niveaux de décision où il ne soit plu
306 nées 1980. Mais la société de l’an 2000 n’en sera pas moins compromise par la survivance encombrante de quartiers de villes
307 qui ne me paraît ni souhaitable ni possible, non pas que j’aie des doutes sur la valeur du modèle — il est le meilleur que
308 pour fonction de conjuguer des dynamismes, et non pas d’imposer un certain type d’équilibre ou de stabilité. Disons qu’il e
309 s qu’il est méthode d’invention permanente et non pas utopie à joindre un jour. Car il suppose la liberté, tandis que l’uto
310 é elle-même. Un jeu parfait de notre modèle n’est pas souhaitable, car il rendrait la participation inévitable, obligatoire
311 par une fin automatique ou convenue, ce qui n’est pas le cas dans la cité envisagée : ses éléments ne sont pas des pions so
312 cas dans la cité envisagée : ses éléments ne sont pas des pions solides en nombre déterminé mais des flux, des couples de f
313 f, toucher peut-être un jour ?) qui ne manqueront pas de se multiplier dans les prochaines décennies, viendra probablement
314 cile. La différence principale ne consistera donc pas dans les dimensions physiques de la cité nouvelle, mais dans le fait
315 es conditions architectoniques ne s’y prêteraient pas . Mais d’autres phénomènes majeurs, très susceptibles de dominer la sc
316 ogiques, socioculturelles et politiques, n’auront pas les mêmes aires de rayonnement et ne seront donc ni superposables ni
317 des préjugés « progressistes » d’hier. Il n’est pas sans intérêt de relever ici que ma description des passifs et des act
318 pourrait enregistrer, mais qu’on ne retrouverait pas dans la rencontre des images sonores et visuelles émises par ces même
319 » et des « liens charnels » ; mais nous ne savons pas encore quoi. Notons ici que l’expression « contact physique » est san
320 modes et degrés de la participation ne dépendent pas seulement de l’information, des dimensions de la communauté et des mo
321 pour la survie de l’humanité, si l’on ne renverse pas la vapeur d’ici à dix ans : c’est tout ce que nous accordent certains
25 1972, Articles divers (1970-1973). L’ingénieur dans la cité (1971-1972)
322 es en sauvant du même coup la nature ? N’y a-t-il pas là une vocation proprement exaltante pour l’ingénieur ? Une nouvelle
323 en toute conscience professionnelle mais ne veut pas chercher à comprendre le reste, au technicien du seul rendement (qui
324 ion au troisième tiers du xxe siècle. Elle n’est pas idéologique. C’est une opération de sauvetage de la Terre. Tout va vi
325 quantitatif au mode de vie qualitatif, il ne faut pas rêver, comme les hippies, qu’il pourra s’opérer par un quelconque ret
26 1972, Articles divers (1970-1973). Forteresse au centre de l’Europe : la Suisse (1972)
326 nt irriguée et de très dense habitation, ce n’est pas l’Europe des confins dénudés et brûlés, rocailleux ou glaciaires. Dev
327 a vache et vit paisiblement », disait Hugo), mais pas du tout aux statistiques. La Suisse est l’une des régions de la Terre
328 , sa présence partout imminente. Ce qui ne trompe pas , à l’observer du ciel, c’est la structure des agglomérations : elle r
329 t les autos. Les grands ensembles qui n’aménagent pas leur propre centre de vie civique, c’est-à-dire un espace interdit au
330 les hommes pouvaient se rencontrer. Or, il n’est pas de pays au monde que le gigantisme humain menace dans ses fondements
27 1972, Articles divers (1970-1973). Au centre du monde, Lavaux (1972)
331 à en vivre ? Sauver Lavaux, oui, mais vivant non pas figé. Et vivant, c’est-à-dire changeant selon sa loi. Il est d’autres
332 blables. Ainsi, qu’est-ce que sauver Venise ? Non pas offrir des étages de palais sur le Grand Canal à des riches. Il faut
333 ys. Et qu’ils y trouvent un intérêt vital, et non pas archéologique. Pour sauver Venise, il faudra la changer. Inaliénable,
334 ys ravissant et radieux. Mais vous ne le sauverez pas sans héroïsme.   Si Lavaux doit faire son salut, ce sera par la grâce
28 1972, Articles divers (1970-1973). Le sort de l’an 2000 se joue dans nos écoles (mars 1972)
335 ’histoire français, les rois de France ne les ont pas conquises par la force ou la ruse, ils les ont simplement « réunies »
336 iologique, écologique et spirituelle. Il n’y aura pas d’Europe unie en l’an 2000 si l’on ne commence pas aujourd’hui et si
337 as d’Europe unie en l’an 2000 si l’on ne commence pas aujourd’hui et si l’on n’achève pas dans les années qui viennent, une
338 n ne commence pas aujourd’hui et si l’on n’achève pas dans les années qui viennent, une véritable mutation de l’enseignemen
339 is comment devenir citoyen d’un pays qui n’en est pas un, puisqu’il n’a pas encore de politique commune et d’organes gouver
340 oyen d’un pays qui n’en est pas un, puisqu’il n’a pas encore de politique commune et d’organes gouvernementaux ? Point d’Eu
341 que pour sortir de ce cercle vicieux ne serait-il pas de s’appuyer sur quelque chose qui existe déjà bel et bien et qui jou
342 s deux guerres mondiales. Pourquoi ne ferait-elle pas dorénavant, des citoyens pour une Europe unie, équilibrée, et pour un
343 par l’École, et avec l’aide des enseignants, non pas en ajoutant à des programmes déjà trop chargés des heures sur l’Europ
344 vique, professionnelle et personnelle. Ce ne sont pas nos États qui feront l’Europe, n’ont-ils pas prouvé depuis des siècle
345 sont pas nos États qui feront l’Europe, n’ont-ils pas prouvé depuis des siècles qu’ils étaient là pour l’empêcher de se fai
346 aient là pour l’empêcher de se faire ? Ce ne sont pas les grandes bureaucraties de Bruxelles, de Strasbourg, de Luxembourg
347 tastrophes On nous dit que les esprits ne sont pas mûrs pour l’union des Européens. Quand le seront-ils jamais sans la p
29 1972, Articles divers (1970-1973). Autopsie d’un cas : Denis de Rougemont (15 mars 1972)
348 cident au début des années 1939, mais ce n’était pas tombé du ciel. Je m’occupais de questions politiques depuis les année
349 ’homme à la fois libre et responsable. Ce n’était pas l’individu isolé. Ce n’était pas le soldat politique qu’on nous montr
350 able. Ce n’était pas l’individu isolé. Ce n’était pas le soldat politique qu’on nous montrait dans les pays totalitaires. N
351 uel la personne peut s’enraciner mais qui ne doit pas être fermé. Qui doit toujours être ouvert vers de plus grandes commun
352 ain. Un terme dont vous êtes le père ? On ne sait pas exactement qui l’a dit en premier, de Mounier ou de moi. En tout cas,
353 e est un appel à l’engagement des écrivains. Mais pas à l’embrigadement dans un parti. Il s’agissait d’assumer sa responsab
354 ver la femme qui le retiendra et qui ne la trouve pas . Ces préoccupations étaient-elles antérieures au mouvement personnali
355 e de la personne sur le plan de la vie amoureuse, pas seulement sexuelle, mais aussi sentimentale dans les rapports quotidi
356  ? J’y pensais depuis longtemps mais je ne savais pas à quel point la Suisse avait réalisé le fédéralisme. Bien qu’élevé en
357 t à la mode à Paris. Et tout le monde, je ne sais pas pourquoi, l’attribuait à Sartre. Or, Sartre, comme on le sait mainten
358 modèle hitlérien ou napoléonien, qu’on ne pouvait pas non plus faire l’Europe avec l’État-nation. Il fallait donc unir l’Eu
359 chose de créateur. Et ces tensions qu’on n’essaie pas de réduire ou d’anéantir mais qu’on conserve et qu’on tâche d’équilib
360 fédéralisme dans un seul pays. La Suisse ne peut pas rester un régime réellement fédéraliste si elle est seule, si elle es
361 se tenir avec d’autres groupements qui n’étaient pas fédéralistes mais qui voulaient aussi l’Europe. Et nous nous sommes r
362 il s’est avéré que le Conseil de l’Europe n’était pas du tout ce que nous voulions, n’était pas du tout la représentation d
363 n’était pas du tout ce que nous voulions, n’était pas du tout la représentation des « forces vives de nos nations ». Il éta
364 ujours le général de Gaulle. Et alors, on ne voit pas du tout ce que ces pays veulent faire ensemble. Sinon, en cas de cris
365 oisins d’appliquer des mesures raisonnables et ne pas les appliquer eux-mêmes et profiter de la crise pour faire des bénéfi
366 ope des nations. Vous êtes déçu ? Non. Je ne suis pas déçu. Je n’y ai jamais cru. Je n’ai jamais cru que cette Europe-là po
367 urquoi ce pays s’est-il fait ? La Suisse ne s’est pas faite pour créer une union plus forte que les voisins. Elle s’est fai
368 ent que pour des questions d’état civil. N’est-ce pas une utopie ? L’utopie, ce n’est pas de vouloir définir les régions d’
369 vil. N’est-ce pas une utopie ? L’utopie, ce n’est pas de vouloir définir les régions d’après les fonctions et de relever de
370 tiquement Suisse. La Suisse est sa nation qui n’a pas les mêmes frontières ni les mêmes langues que le canton. De plus, je
371 que c’est le sommet de l’histoire, qu’on ne peut pas le dépasser et que c’est de la rêverie absurde de vouloir dépasser ce
372 couples. Les régions, dès lors, ne risquent-elles pas de connaître le même phénomène ? Cette comparaison relève de la même
373 u fédéralisme sur le plan religieux. Il ne s’agit pas d’uniformiser tout le monde et de voir une seule croyance imposée à t
374 pour tout le monde, indéfiniment. On n’avait donc pas besoin de politique de développement car on pensait que le progrès ét
375 hacun pour soi et Dieu pour tous et on ne croyait pas en Dieu en disant cela. Aujourd’hui, depuis une dizaine d’années pour
376 ut des limites. Les ressources naturelles ne sont pas infinies. Certains calculent déjà l’épuisement du charbon, du pétrole
377 ants des partis ou des États-nations, ils ne sont pas des hommes politiques, ils sont des partisans ou des nationalistes. M
378 t résolus d’après le génie du lieu. Mais ce n’est pas possible avec le système de découpage des États-nations, complètement
30 1972, Articles divers (1970-1973). Je rentrais de l’espace… (27-28 mai 1972)
379 nt irriguée et de très dense habitation, ce n’est pas l’Europe des confins dénudés et brûlés, rocailleux ou glaciaires. Dev
380 a vache et vit paisiblement », disait Hugo), mais pas du tout aux statistiques. La Suisse est l’une des régions de la Terre
381 , sa présence partout imminente. Ce qui ne trompe pas , à l’observer du ciel, c’est la structure des agglomérations : elle r
382 les hommes pouvaient se rencontrer. Or, il n’est pas de pays au monde que le gigantisme humain menace dans ses fondements
383 ez à votre démesure, exportez-la, mais ne touchez pas au trésor, au mystère de la « pax helvetica », votre contribution à l
31 1972, Articles divers (1970-1973). Qu’est-ce que la culture ? : quatre thèses et une hypothèse (juin 1972)
384 hypothèse (juin 1972)ar 1. Ce qu’elle n’est pas La culture ne consiste pas à lire des romans, à parler peinture, à
385 1. Ce qu’elle n’est pas La culture ne consiste pas à lire des romans, à parler peinture, à participer à des jeux télévis
386 t d’experts en informatique. Elle ne se reconnaît pas au port des cheveux longs par les romantiques, de la barbe par les na
387 e et que l’on acquiert par des études. Elle n’est pas l’affaire des « salons », comme l’imaginent encore quelques amateurs
388 ncore quelques amateurs de clichés, qui ne savent pas qu’il n’y a plus de salons, qu’ils ont été remplacés depuis le xviiie
389 depuis vingt ans, même à Paris. La culture n’est pas faite par les « gens cultivés ». Elle n’est pas leur propriété, elle
390 t pas faite par les « gens cultivés ». Elle n’est pas leur propriété, elle ne dépend pas d’eux et ne leur doit rien (même s
391  ». Elle n’est pas leur propriété, elle ne dépend pas d’eux et ne leur doit rien (même si elle leur donne tout). Enfin la c
392 si elle leur donne tout). Enfin la culture n’est pas nécessairement sérieuse. Ceux qui n’ont pas le sens de l’arbitraire,
393 n’est pas nécessairement sérieuse. Ceux qui n’ont pas le sens de l’arbitraire, de l’humour fût-il noir, de la désinvolture
394 bien disparaître, être « oublié » : il n’en sera pas moins retrouvé, « remémoré » par la réactivation de la structure qu’i
395 logique, consciente, laborieusement stratifiée et pas toujours facile à consulter, se substitue une mnémoélectronique d’une
396 gressivement à la personne constituée — je ne dis pas à ce qui la constitue, qui est l’appel de sa fin, sa vocation. 4.
397 st l’appel de sa fin, sa vocation. 4. Il n’y a pas de cultures nationales Cette thèse est démontrée sans aucun doute
398 reils et qui ne les distinguent en rien. Il n’y a pas plus de « musique française » que de « mathématiques soviétiques » ou
399 les dans leur évolution. Elles n’ont tout de même pas pu tenir compte par anticipation de frontières qui ne seront tracées
400 ône unit…). Nos « précieuses diversités » ne sont pas du tout nationales. Elles divisent et animent nos nations sans le moi
401 ils appellent « Système ». Nier le père ne résout pas le complexe d’Œdipe dont certains, en Mai 68, revendiquaient l’abolit
402 oi je vous dis… » Cette phrase évangélique ne nie pas le passé. Elle s’y réfère, l’englobe, le situe et le dépasse. Elle le
32 1973, Articles divers (1970-1973). La Merveilleuse histoire de Tristan et Iseut [préface] (1973)
403 lique, une structure de notre existence. Mais non pas de notre existence intellectuelle, qui a bien d’autres manières de s’
404 ois, comme la logique et la mathématique ; et non pas de notre existence physique ou animale, car celle-là échappe au disco
405 e proprement humaine, qui est l’âme. Je ne prends pas ce mot dans le sens noble et vague que lui donnent un peu trop facile
406 ent physique ni proprement spirituelle, qui n’est pas celle du corps ni celle de l’intellect, encore qu’elle tienne aux deu
407 er l’élan de l’âme vers l’Ange désiré. « Ce n’est pas amour, qui tourne à réalité », s’écrie un troubadour tardif, contempo
408 est le faux amour qui « tourne » ainsi ? Ce n’est pas le désir comblé, au sens sexuel de l’expression, car cet acte instinc
409 acte instinctif, lié aux lois du corps, ne mérite pas en soi le nom d’amour. Mais c’est l’amour « bouché » par la présence
410 nnaître aussi que la vraie victime du mythe n’est pas Tristan, n’est pas Iseut, et n’est pas non plus leur passion, qui tri
411 a vraie victime du mythe n’est pas Tristan, n’est pas Iseut, et n’est pas non plus leur passion, qui triomphe au contraire
412 ythe n’est pas Tristan, n’est pas Iseut, et n’est pas non plus leur passion, qui triomphe au contraire de tout. La vraie vi
413 ec le Roi, père adoptif du héros —, il n’y aurait pas de roman, ni de passion mortelle, il n’y aurait donc pas eu de mythe.
414 roman, ni de passion mortelle, il n’y aurait donc pas eu de mythe. On ne saurait imaginer le grand roi Marc s’inclinant dev
415 . Un psychanalyste l’eût guéri, et le roman n’eût pas eu lieu. Si les derniers tabous viennent à céder, c’en sera fait de l
416 une au bas du ciel, c’est un jour qui renaît, non pas le jour des hommes et de leur peine quotidienne, mais l’horizon du no
417 vent si l’angélologie de l’ancien Iran ne détient pas le secret dernier de notre mythe. La tradition chrétienne de l’amour
418 ne de l’amour du prochain ne s’en trouverait-elle pas éclairée, à son tour ? ⁂ Aimer le prochain « comme soi-même » suppose
419 . Que l’Autre soit un Autre impénétrable ne tient pas à quelque interdit, à quelque tabou religieux, à quelque décret de la
420 stesse dans le style de nos émotions. Et ce n’est pas seulement de la littérature qu’ils ont bien mérité, mais de l’âme. ⁂
421 sion inspirée des anciennes. Continuateurs et non pas rewriters, ils se sont pénétrés des textes des trouvères français, an
33 1973, Articles divers (1970-1973). Université et universalité (janvier 1973)
422 Ou simplement, la conviction que la réalité n’est pas divisée en compartiments correspondant aux facultés. Mais aussi, deux
423 titut universitaire d’études européennes n’est-il pas , en vertu même de son titre, condamné à la spécialisation ? En vertu
424 psychologie des peuples, ou la sociologie seules. Pas une seule de ces disciplines ne serait capable de saisir l’Europe dan
425 es, vers un même but. Nous sommes en convergence, pas encore en symbiose, mais elle est potentielle. Quelles sont vos chanc
34 1973, Articles divers (1970-1973). De Genève à l’Europe par les régions (mars 1973)
426 l remède aux trop petites dimensions ne serait-il pas la création d’agences fédérales européennes, qui seraient compétentes
427 ues, motifs économiques Mais le problème n’est pas seulement spéculatif et prospectif. Il est posé en vrac, en termes co
428 ns notre inconscient collectif… Il ne s’agit donc pas de créer autour de Genève une sorte de mini-État-nation nouveau, qui
429 ion des régions que je viens de définir, ce n’est pas plus Genève qui bénéficiera que le pays de Gex, la Savoie, la Romandi
430 une génération et créer les régions, ne sont-ils pas trop longs face à l’urgence des périls que court l’Europe, j’entends
431 i, comme je l’ai toujours pensé, que nous n’avons pas à prévoir notre histoire, mais à la faire. aw. Rougemont Denis de
35 1973, Articles divers (1970-1973). Recréer la place publique (1er juillet 1973)
432 émocratie, au sens actif et créatif du mot, n’est pas possible, s’il n’y a pas une « agora » ou un « forum » — une « place 
433 et créatif du mot, n’est pas possible, s’il n’y a pas une « agora » ou un « forum » — une « place » au cœur de la cité. Si
434 s » (parlant de Berne). Non, le fédéralisme n’est pas l’autarcie cantonale, l’État-nation cantonal, la fermeture du canton
36 1973, Articles divers (1970-1973). L’Europe, c’est d’abord une culture (juillet-août 1973)
435 plus en plus mythique — cette Europe divisée n’a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéologiqu
436 qui ont des problèmes régionaux (laquelle n’en a pas  ?), pour les ethnies qui se trouvent soit divisées par les frontières
437 e, surtout secondaire — mais l’Université n’était pas en reste vers 1914 —, l’École apprend depuis un siècle aux jeunes Fra
438 en tant qu’État, et en moyenne, elles n’ont même pas un siècle d’âge. Seules la France, l’Angleterre et l’Espagne comptent
439 yances qui en résultent. Tout d’abord : il n’y a pas de cultures nationales, si l’on entend par « nations », comme on le f
440 modernes de l’Europe. La culture européenne n’est pas la somme de vingt-huit cultures nationales, puisqu’elle existait bien
441 me le faisait observer un jour Étienne Gilson —, pas un seul des grands professeurs n’était français : ils étaient napolit
442 ui parlent une même langue ? Oui, mais il n’était pas question de les enfermer pour autant dans les frontières d’un même Ét
443 s frontières d’un même État. D’ailleurs, il n’est pas vrai que nos stato-nations modernes correspondent à l’aire de diffusi
444 dition qu’un esprit fort (ou un naïf) ne remarque pas que l’on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les de
445 doctrine politique ont été paneuropéennes, et non pas nationales : l’art roman et le gothique, le classique, le baroque, le
446 ités, des foyers de création, des maîtres, et non pas des nations au sens moderne. Les grands courants européens, les gran
447 eur propre nation ; et ainsi de suite. Ce ne sont pas nos appartenances nationales qui nous diversifient vraiment, c’est la
448 en l’Europe une et diverse, et nous ne risquerons pas un instant de créer ce fameux volapük que dénonçait de Gaulle, non sa
449 à Paris tous les esprits distingués qu’il n’avait pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture euro
450 intiennent et renforcent le principe. Je ne crois pas à une Europe des États-nations souverains, parce qu’on ne peut pas fo
451 des États-nations souverains, parce qu’on ne peut pas fonder l’union sur l’obstacle par excellence et par définition à tout
452 isanthropes, chose que l’on peut énoncer mais non pas faire ; car ou bien l’on fait une vraie amicale, mais alors on cesse
453 bien l’on reste misanthrope, mais alors il n’y a pas d’amicale. La fédération européenne s’établira sur la base des région
454 a sur la base des régions, et celles-ci ne seront pas des mini-États-nations, prétendant enfermer dans les mêmes frontières
455 e pluralité d’ensembles fonctionnels, qui ne sont pas de même aire territoriale ni de même appartenance politique, sociale,
456 ato-nationaux. La fédération européenne ne naîtra pas d’accords au sommet, mais de groupements de communes et d’entreprises
37 1973, Articles divers (1970-1973). « La famille est devenue un choix » (23 septembre 1973)
457 euchâteloise : « Cela fait, au début et à la fin, pas mal de robes et de rabats » et entre-temps plus de deux siècles de pa
458 sens de son histoire personnelle ». On ne connaît pas le sens d’une histoire, si on ne connaît pas le passé. Il a donc fait
459 naît pas le sens d’une histoire, si on ne connaît pas le passé. Il a donc fait des recherches généalogiques qui l’ont condu
460 nts Gilles et Charlotte Corday. Cela ne vous fait pas peur ? J’ai toujours en tête une recommandation d’un de mes oncles :
461 de l’Europe vous vient de vos ancêtres ? Ce n’est pas une idée suisse. Le Suisse est cosmopolite. L’idée est au contraire t
462 j’étais limité à l’une ou à l’autre. « Comment ne pas croire à l’influence des professions héréditaires » ? C’est vous qui
463 éressant de savoir d’où l’on vient. Cela ne dicte pas une carrière. Je descends des troubadours — c’est sans doute pourquoi
464 une revue à Genève qui l’a publiée. Je n’en étais pas plus fier pour ça : je me voulais poète et seulement poète. L’hérédit
465 ulement poète. L’hérédité des dons ? Je n’y crois pas . Disons que j’ai eu un milieu favorable. Dans la famille de ma mère,
466 t des pastels. L’hérédité des dons, cela n’existe pas . Disons qu’il y a des dispositions complémentaires chez le père et ch
467 de la famille ? La famille est devenue un choix, pas une nécessité. Ce que je trouve assez bien. Il y avait une homogénéit
468 r implantation géographique. La famille ne mourra pas  ? Non, elle se transformera. En ce qui vous concerne ? À partir de ma
38 1973, Articles divers (1970-1973). Sur la taille des régions (octobre 1973)
469 es, ce serait en vertu de ses seuls intérêts, non pas de ceux de la région, et ses déficits seuls, sous forme de « coûts ex
470 ompétitifs ». Qu’en auraient-ils de plus ? Ça n’a pas de sens pour eux. C’est une idée de technocrate, de ministre ou de fo
471 qu’en termes de pouvoir et de prestige. Ce n’est pas un souci d’homme réel, de femme réelle, c’est trop loin de la vie quo
472 e de la région elle-même et sa réalité vécue, non pas les bobards du « prestige national » dont les grandes firmes et l’Éta
473 ntières — ces « cicatrices de l’histoire »23 — et pas seulement les réalités, mais selon la volonté de puissance d’un chef
474 on, contrairement à celui d’un État-nation, n’est pas d’affirmer sa puissance mais d’exercer sa liberté ; n’est pas de se m
475 er sa puissance mais d’exercer sa liberté ; n’est pas de se montrer plus fort que tel voisin par les armes ou par la riches
476 visible, la France est trop grande, et il n’en va pas autrement de la Grande-Bretagne, de l’Espagne, de la République fédér
477 lle aujourd’hui les petites unités. Et cela n’est pas contradictoire avec la tendance qui nous porte à la fédération du con
478 uin 1973. 22. Tous les pays du monde ne peuvent pas exporter plus qu’ils n’importent, faites le calcul. 23. G. Bidault.
39 1973, Articles divers (1970-1973). Une possibilité européenne : la région genevoise (novembre 1973)
479 vant les mass médias d’État, où tout ce qui n’est pas publicité tonitruée pour des produits, des modes ou des révolutions m
480 ns notre inconscient collectif… Il ne s’agit donc pas de créer autour de Genève — et encore moins de Lyon — une sorte de mi
481 ion des régions que je viens de définir, ce n’est pas plus Genève qui bénéficiera que le pays de Gex, la Savoie, la Romandi
482 pulations que les cordons douaniers ne séparaient pas . C’est à partir du coup de force de Poincaré que tout s’est gâté. Et
40 1973, Articles divers (1970-1973). Face à la crise de notre continent, l’utopie de Denis de Rougemont : l’Europe des régions (1er-2 décembre 1973)
483 ut le monde dit qu’il faut faire l’Europe, on n’a pas avancé d’un millimètre, hormis quelques progrès en matière économique
484 est plutôt le recul. Les États-nations ne veulent pas abandonner une parcelle de leur souveraineté. La carence de toute pol
485 toutes leurs industries, si ça leur plaisait, et pas seulement leurs industries, comme on ne le voit que trop ces jours-ci
486 s s’arrêtaient aux frontières ! La région ne doit pas être circonscrite par une frontière qui enferme tout. Elle se définit
487 ns, dont les aires géographiques ne se recouvrent pas  : par exemple une région écologique, définie par les problèmes du Lém
488 ntaux de sa vie. Ce que les États-nations ne font pas . La participation, l’autogestion civique exige de petites communautés
489 ! Cette réorganisation du continent ne remet-elle pas en cause le parlementarisme, lequel, il faut bien le reconnaître, est
490 les sociétés multinationales ? Ne constituent-ils pas une entrave tout aussi puissante ? L’existence des sociétés multinati
491 able, on peut penser que… Notez que je ne me fais pas l’avocat des sociétés multinationales ! … sans se faire l’avocat du d
492 r voisinage, puis de l’Europe et du monde. Et non pas sur les seuls mythes nationaux. Si enthousiasmantes que puissent être
493 éens » sans faire la moindre propagande. N’est-ce pas limiter volontairement l’horizon de l’enfant ? Je dis qu’il faut part
494 nscients que les frontières politiques n’existent pas pour la pollution. Les poissons sont les mêmes des deux côtés du Léma