1 1974, Articles divers (1974-1977). La personne comme fondement des valeurs européennes (19 septembre 1974)
1 ble ronde et celle d’aujourd’hui, expliquant tout ce qui les rend différentes, il y a eu le rapport du club de Rome. Mais
2 s plus évidents et ceux que j’ai le mieux connus. Ce n’est pas rien, mais il faut bien admettre que cela n’a pas suffi pou
3 r avec une logique infernale (le nom l’indique et ce n’est pas un hasard) ce « Pentagone de la Puissance » ou mieux : de l
4 nale (le nom l’indique et ce n’est pas un hasard) ce « Pentagone de la Puissance » ou mieux : de l’obsession de Puissance,
5 ns à partir de la Crise, c’est-à-dire à partir de ce qui nous apparaît menaçant pour nos libertés, pour notre économie, po
6 n routière, annoncent un passage dangereux, quand ce ne sont pas déjà les disques rouge et blanc de la voie barrée, de l’i
7 barrée, de l’impasse. Je n’en dirai pas plus sur ce chapitre : tout le monde a lu Forrester ou Meadows. Mais ils sont loi
8 tateur dans son palais, mais on ne peut renverser ce qui ne tient pas debout, ce qui n’a pas de principe de cohésion inter
9 on ne peut renverser ce qui ne tient pas debout, ce qui n’a pas de principe de cohésion interne, — ou plutôt ce qui n’en
10 pas de principe de cohésion interne, — ou plutôt ce qui n’en a pas d’autre que l’obsession de la Puissance, vrai moteur d
11 ser par la violence serait bien pire que vain car ce serait faire son jeu. Cette crise morale affecte l’Occident tout enti
12 e ses impasses, il faut des choix. Il faut savoir ce que l’on est prêt à sacrifier et quelles sont les priorités. Veut-on
13 re avait tenté de décréter l’inexistence. Qu’est- ce qu’une valeur, dans le contexte de notre Crise ? Ce n’est pas une ent
14 qu’une valeur, dans le contexte de notre Crise ? Ce n’est pas une entité philosophique. C’est ce qui nous permet de chois
15 se ? Ce n’est pas une entité philosophique. C’est ce qui nous permet de choisir, ordonne nos choix, et définit leur sens.
16 sept ans, comme nous le répètent les producteurs ( ce qui suppose une production multipliée par 16 384 en un peu moins d’un
17 iques, qui sont des questions de gros sous, quand ce n’est pas de puissance militaire. Or, ces choix de finalités, et les
18 question décisive du référentiel, c’est-à-dire de ce qui gage les valeurs, de l’évaluant fondamental. Il n’est pas toujour
19 oexistence en tension de l’individu naturel et de ce qui dans l’homme « passe infiniment l’homme » comme dit Pascal : le t
20 et de Quête spirituelle. Mais aujourd’hui, qu’est- ce donc que la personne ? Il semble qu’à une telle question je ne pourra
21 je l’invente en osant y avancer sans l’avoir vu. Ce que je sais, c’est qu’il n’existera qu’autant que j’aurai le courage
22 y pas croire. Que l’on puisse nier l’existence de ce que j’appelle la personne, la traiter de fantôme métaphysique, d’illu
23 et donc de toute identité, de toute personne. Or, ce n’est là qu’une métaphore. Ce qui peut provoquer la mort de l’homme,
24 toute personne. Or, ce n’est là qu’une métaphore. Ce qui peut provoquer la mort de l’homme, c’est la mort d’une nature tué
25 ment variées de l’aliénation, j’ose vous demander ce qui, selon vous, est aliéné ? Si ce n’est pas la personne, alors quoi
26 vous demander ce qui, selon vous, est aliéné ? Si ce n’est pas la personne, alors quoi ? Quelle abstraction politicienne ?
27 oitation de l’homme par l’homme, disent-ils. Mais ce serait l’exploitation d’une illusion par une inexistence, à les en cr
28 . L’aliénation de l’homme ne saurait désigner que ce qui compromet sa possibilité de se mouvoir, librement, à la fois selo
29 les, même « rénovées plastique »l. La richesse, à ce banc d’essai, se révèle une fausse valeur : elle procure le pouvoir s
30 libère. Au surplus, elle crée tant de liens avec ce qui n’est pas ma vocation, que toutes les religions de la terre l’ont
31 estige national se révèle fausse valeur, évalué à ce test de la personne. Une petite phrase de Simone Weil, géniale dans s
32 ersonne entre le transcendant et l’incarné, entre ce qui libère, dégage, universalise d’une part, et ce qui lie, engage, e
33 e qui libère, dégage, universalise d’une part, et ce qui lie, engage, enracine d’autre part. J’ai dit que la liberté de la
34 rope que tout appelle ne pourra s’édifier que sur ce qui déborde, non seulement par en haut mais par en bas, le cadre inad
35 e l’État-nation imposé par Napoléon : par en bas, ce sont les régions, par en haut, la fédération continentale. Et nous ve
36 idérée comme le référentiel de nos valeurs, comme ce qui nous permet de les éprouver et au besoin de les transvaluer, nous
37 fie : créer des régions et les fédérer, avec tout ce que cela implique d’autogestion à tous les degrés, de responsabilité
2 1974, Articles divers (1974-1977). Alexandre Marc et l’invention du personnalisme (1974)
38 es souvenirs avec ceux d’Alexandre Marc, mais sur ce point, du moins, nos divergences menacent de demeurer irréductibles.
39 ance, c’est l’âge de mon fils ! Tiens, voilà tout ce que tu mérites [un grand coup de pied] et fiche-moi le camp ! ») Sa f
40 e je viens de citer n’est connu du grand public — ce qui est normal, ils ont de 21 à 32 ans — mais encore ils ne se connai
41 eprésentant de la Jeune droite, Thierry Maulnier. Ce « front commun » ne durera pas au-delà de ma « présentation des jeune
42 cismes montants et au capitalisme en crise. Mais ce dont il m’importe, ici, de témoigner, c’est du rôle de pionnier, d’in
43 ortaient donc en clair l’énoncé le plus simple de ce que je tentais péniblement de décrypter, et croyais déjà sans le savo
44 qu’il portait à Versailles des guêtres blanches, ce qui était banal à l’époque pour peu qu’on surveillât sa mise, mais je
45 de pratiques comme l’intercommunion « sauvage », ce que les instances ecclésiastiques se révèlent encore incapables d’aut
46 rai moi-même, ou Maritain si vous le voyez avant, ce conflit avec L’Ordre nouveau … Le mouvement s’oriente nettement vers
47 bourgeois (sic) que nous ne pouvons admettre.3 Ce n’est pas sans tristesse que je transcris ces phrases d’une injustice
48 La Révolution nécessaire, un des rares livres de ce siècle qui renouvelle la pensée politique6. Bibliothécaire à la Natio
49 le seul d’entre nous à toucher le grand public en ce temps-là. (Plusieurs d’entre nous lui reprochent de le toucher seulem
50 ais que fait-il et de quoi vit-il en 1933 ? Voilà ce que je n’arrive pas à me rappeler, et l’on se voyait à peu près tous
51 nt de vue religieux, qui est capital, en dépit de ce que pense un vain peuple d’intellectuels parisiens, voici l’état du g
52 omme je viens de le faire depuis quelques jours — ce qui me reste des numéros de L’Ordre nouveau , de 1933 à 1938, et de
53 — illustrés de citations — qui n’ont fait, depuis ce temps-là, que gagner (si possible) en actualité. Contre l’État-nati
54 tre indéfiniment distendues sans que soit détruit ce sentiment de la familiarité, du « chez-soi », dont procède le patriot
55 tat, et qui s’impose à lui » (ON 29, p. 19). Sur ce thème central, quatre grands articles de Marc dans les numéros 20, 22
56 ins systématiquement au culte inhumain de l’état. Ce point a été suffisamment mis en lumière dans tous nos écrits antérieu
57 conquête… Le possédant est celui qui marque, que ce soit un objet, une terre, ou le cœur d’un être. Ni l’état, ni même la
58 mme est placé dans une certaine situation : c’est ce que les idéalistes sont toujours tentés d’oublier. L’homme en général
59 la direction du pouvoir social ? À tout le monde, ce qui veut dire à personne… : de sorte que l’ordre dans l’être collecti
60 ; trop grands si l’on tente d’en faire le lieu de ce contact direct avec la chair et la terre qui est nécessaire à l’homme
61 nous a tous précédés d’une trentaine d’années sur ce point.) Régions. C’est la patrie concrète, c’est-à-dire la région
62 une « théorie » ultérieure devra tenir compte de ce point — que les limites territoriales, dans une société Ordre nouveau
63 n. Enfin, voici en quelques lignes un condensé de ce qui sera, dans les années septante, le programme des fédéralistes eur
64 à côte, dès le congrès de Montreux en 1947. Mais ce n’est pas seulement la vertu anticipatrice de la pensée de Marc dans
65 ettre de Mounier à Berdiaev), J. Lacroix écrit de ce livre : « C’est décidément un maître ouvrage, à placer sur le même ra
3 1974, Articles divers (1974-1977). Quelques-unes des choses curieuses qui me sont arrivées (1974)
66 res, et une demi-heure plus tard, je me mettais à ce travail, nouveau pour moi : écrire des textes d’information et des co
67 n de plus, donc rien d’utilisable éventuellement. Ce matin, en trouvant les trois lettres sur mon assiette, j’ai dit : « C
68 intérêt de l’affaire : cette perception soudaine, ce regard par mégarde sur un petit fait indifférent en soi, et qui n’est
69 e en deux ? Ma boite est bien assez profonde pour ce format, le facteur devrait le savoir ! » Je voyais une mince envelopp
70 ffit de désigner du doigt le plat qu’on veut), et ce soir je décide de « sortir » : des amis m’ont invité « après le dîner
71 i et rient. J’ai fui. Pas d’autre restaurant dans ce quartier. Je suis monté sans dîner chez mes amis. Trois pannes d’é
72 naugurale de deux instituts universitaires réunis ce jour-là, celui des hautes études internationales et celui des études
73 uggérai que l’on jouât aux questions et réponses. Ce jeu, purement télépathique et poétique, se joue par paires, dans le p
74 pe serait luthérien. » Deuxième échange. « Qu’est- ce que la mystique ? » Réponse : « C’est un petit jardin fermé qui s’ouv
4 1974, Articles divers (1974-1977). Un modèle pour l’Europe ? (1974)
75 ussitôt, puisqu’elle les a si bien gardés jusqu’à ce jour, des utopies de type jacobin, bolchéviste, anarchiste, fasciste
76 rope et dans le monde, mais en Suisse même. C’est ce que je voudrais marquer d’abord. Nous commettons généralement en Sui
77 ent souveraines, mais voulaient rester autonomes, ce qui est tout à fait différent. La Suisse est née de la fédération tou
78 éralisme à toute l’Europe, en attendant le monde, ce serait de l’orgueil, de la jactance, pire encore, de la vanité ! Soyo
79 e devient plus important que « bien penser ». De ce qui précède, je déduirai maintenant deux séries de conséquences polit
5 1974, Articles divers (1974-1977). Philosophie du prix littéraire Prince-Pierre-de-Monaco (1974)
80 jourd’hui. Mais d’abord, il fallait le concevoir. Ce n’était guère possible à Paris, qui a toujours peine à croire qu’au-d
81 État gouverné par un grand ami des Lettres, — et ce fut le Prince Rainier III de Monaco. ⁂ Je ne me lasserai jamais de ch
82 ’ont de toute évidence aucune frontière commune — ce serait miracle, et ce miracle, sauf peut-être en Islande, ne s’est ja
83 aucune frontière commune — ce serait miracle, et ce miracle, sauf peut-être en Islande, ne s’est jamais produit —, il est
84 l importe avant tout d’effacer dans nos têtes, et ce sont les frontières des genres, inventions de pédants écolâtres qui s
85 physique et les Mémoires de « Papillon », et tout ce que, faute de mieux, l’on nomme « essais », quels qu’en soient les su
86 e, les dimensions et l’ambition intellectuelle. À ce titre, Montaigne et Pascal dont on ne connaît ni romans ni poèmes, n’
6 1974, Articles divers (1974-1977). À propos de Théodore Strawinsky [préface] (1974)
87 nt être — et quel beau titre : celui qui aime ! —  ce qu’ils éprouvent devant une œuvre. La peinture de Théodore Strawinsky
88 étoiles ne le sont de la terre, et que c’est sur ce vide sidéral, infini, cette vacuité fondamentale, universelle, que se
89 oser la couleur, dans l’une et l’autre, manifeste ce caractère d’apparition des apparences — composant la structure des ob
90 une envie de pinceau ! — l’envie de participer à ce travail qui est, chez l’artiste sensible au spirituel, la vraie part
91 publie en 1948, Le Message d’Igor Stravinsky. Sur ce livre, nous possédons une lettre émouvante du père : « Ton merveilleu
92 de saint Marc, j’ai vu l’auteur, le plus grand de ce temps, s’incliner et puis comme plonger dans les bras étendus du patr
93 a diversité, hors de laquelle point de salut pour ce siècle. Byzance et Rome s’embrassaient au lieu de leur rencontre créa
94 tre créatrice. On ne le répétera jamais assez : ce dont l’Église a besoin, ce qui a été consacré en l’an 787 par le IIe
95 épétera jamais assez : ce dont l’Église a besoin, ce qui a été consacré en l’an 787 par le IIe concile œcuménique de Nicée
96 and-œuvre d’une transfiguration des apparences de ce monde — cette transfiguration qui se trouve être le nom théologique,
97 nom théologique, le sujet même du chef-d’œuvre à ce jour de Théodore Strawinsky, les fresques de l’église de Gennep — en
7 1974, Articles divers (1974-1977). Recherche pour un modèle de société européenne (février 1974)
98 le tiers-monde, doivent nous rendre méfiants sur ce chapitre. Il y a vingt ans de cela, en 1953, pendant la table ronde o
99 epli résigné que de la volonté de dominer (ne fût- ce que moralement) ou de se poser en modèle exemplaire. Une troisième po
100 ent. Il s’agissait de survivre, donc de continuer ce qui avait réussi aux plus forts, aux plus féconds, aux plus habiles d
101 olitique de l’homme et de l’humanité. J’insiste : ce succès même se traduit par une crise qui remet ou met tout en questio
102 arrêter une politique du pétrole ? ou du cuivre ? Ce n’est pas tout. Une troisième sorte de prévision a cours dans notre s
103 rologues calculent un avenir de catastrophes, que ce soit à moyen ou à long terme. Ils nous annoncent des désastres en cha
104 nce, mais au contraire de ses succès. Et c’est là ce qui doit nous retenir. Je ne vais pas résumer ici le fameux rapport d
105 e-cinq ans, nous a permis à tous de calculer qu’à ce taux-là, nous serions six milliards et demi en l’an 2000, 26 milliard
106 atique : Si la population continuait à croître à ce rythme, elle dépasserait un milliard de milliards d’âmes dans mille a
107 rête, un jour ou l’autre. Si l’on ne veut pas que ce soit une catastrophe, il faudra bien que ce soit une libre décision d
108 s que ce soit une catastrophe, il faudra bien que ce soit une libre décision des hommes et des femmes. Mais où s’arrêter ?
109 au-delà des pires prévisions de nos futurologues, ce qu’un vieux mythe des Indiens Navahos représente comme l’Ère de l’Acc
110 les inventions techniques qui seront faites dans ce temps, et les conséquences politiques qu’elles entraîneront. Sans vou
111 ’une pareille méthode, je me contenterai de citer ce que ses auteurs eux-mêmes en disent. À la page 54 de la traduction fr
112 L’An 2000, ils donnent un bref tableau (n° IV) de ce que leur méthode n’eût pas permis de prévoir, si elle eût été appliqu
113 s et établissement de diverses dictatures. Voilà ce que la méthode n’eût pas permis de prévoir selon les propres dires de
114  », c’est-à-dire une machine agricole à moteur. «  Ce fut mon chemin de Damas », écrit-il cinquante ans plus tard. Depuis l
115 t et conduit sa première « machine de roule ». (À ce moment, la Grande-Bretagne interdit ce moyen de transport, la France
116 oule ». (À ce moment, la Grande-Bretagne interdit ce moyen de transport, la France tente de l’adapter à la « science milit
117 ord gagne une course de vitesse, et encouragé par ce succès, fonde la Société des automobiles Ford. Dans sa première publi
118 grand air et vous rafraîchir les poumons grâce à ce tonique des toniques : une atmosphère salubre ». En 1910, Ford introd
119 tact avec la première auto, eût refusé d’instinct ce bruit, ces vapeurs, ces odeurs, et l’idée même d’aller plus vite à n’
120 porte quel prix, sans savoir où… Mais voilà bien ce que nos futurologues n’eussent pas deviné davantage que l’aventure na
121 lificateurs » et décrit d’une manière saisissante ce que sera la vie des ouvriers dans les pays totalitaires du xxe siècl
122 et multipliés sur toute la terre, au xxe siècle. Ce sont eux seuls qui ont prétendu gérer la terre. Qui s’en sont octroyé
123 ux seuls qui en avaient les moyens. Et vous voyez ce qu’ils en ont fait. Ils ont géré et détruit ses ressources en vue de
124 ses directions majeures : nous voyons maintenant ce qu’il s’agit de changer dans notre société européenne : c’est le modè
125 de jeu, plus de vide entre eux. Que faire contre ce mur impénétrable, apparemment inébranlable ? À supposer qu’on y arriv
126 rive, créerait-on un chaos ? Une anarchie ? C’est ce que me disent ceux qui se croient « réalistes ». Et même certains aut
127 e aussi sont des « réalités » typiques du siècle. Ce n’est pas une raison pour les accepter, moins encore pour les glorifi
128 , et de poser ou de casser les lois. Qui a encore ce droit ? La guerre de Suez en 1956 a permis d’en mesurer le peu de réa
129 l’espace, correspondent aux mêmes frontières, et ce miracle ne s’est jamais réalisé. L’idée de la coïncidence territorial
130 de l’homme en général. 13. À l’instant même où ce mot était prononcé, les lumières s’éteignirent dans tout le canton de
8 1974, Articles divers (1974-1977). L’Europe des régions (juin-juillet 1974)
131 ntraire une montée puissante de l’idée de région. Ce qui est en crise c’est l’État-nation napoléonien qui s’oppose aux rég
132 ien à voir ensemble, comme la langue, l’économie, ce qu’il y a dans le sous-sol, l’état civil, l’histoire, les développeme
133 nnes provinces essaient de les faire rentrer dans ce « lit de Procuste » d’une frontière commune qui serait un mini-État-n
134 frontière commune qui serait un mini-État-nation. Ce qu’il nous faut éviter à tout prix. Je pense que faire en Europe 300
135 les a appelées « des cicatrices de l’histoire », ce qui était assez joli. Le professeur Ancel, de la Sorbonne, dit : « ce
136 oli. Le professeur Ancel, de la Sorbonne, dit : «  ce sont le résultat des viols répétés de la géographie par l’histoire ».
137 t un cercle carré, c’est une impossibilité, c’est ce que j’ai appelé souvent « une amicale des misanthropes » : c’est une
138 veut pas faire l’Europe ; et il faut savoir aussi ce que ça signifierait : la colonisation de l’Europe, économiquement par
139 es rênes à un autre pour son sort quotidien, pour ce qu’il doit penser, pour ce qu’il doit acheter, pour ce qu’il doit cul
140 n sort quotidien, pour ce qu’il doit penser, pour ce qu’il doit acheter, pour ce qu’il doit cultiver, alors il est perdu.
141 ’il doit penser, pour ce qu’il doit acheter, pour ce qu’il doit cultiver, alors il est perdu. C’est la décadence totale d’
142 du. C’est la décadence totale d’un peuple ; c’est ce que l’on a vu dans tous les pays colonisés. Donc les raisons de faire
143 ement de l’ours russe. Eh bien, il a été démontré ce jour-là que la souveraineté nationale absolue était un mythe. Moi je
144 Et c’est là le sentiment des jeunes, de même que ce sont les jeunes qui sont responsables de la montée de l’idée de régio
145 ont mise en circulation, l’erreur fondamentale de ce que l’on appelle « la réforme régionale ». Le même phénomène se repro
146 tive, quitte (je vais y revenir tout à l’heure) à ce que l’on organise des régions différemment suivant des fonctions, sui
147 faire des régions de taille européenne ». Qu’est- ce que ça veut dire ? Quand je pousse un peu les gens qui défendent ce p
148 e ? Quand je pousse un peu les gens qui défendent ce point de vue, ils finissent par me dire « il faut qu’une région en Fr
149 740 km2 ? Mais en France, comment, en partant de ce qui existe, pouvons-nous créer et animer des régions ? Je pense qu’il
150 n peut faire sur la réalité, et non une finalité. Ce n’est pas cela qui meut les gens, qui les motive : faire une chose pe
151 s gens, qui les motive : faire une chose petite ! Ce qui les motive, c’est deux choses : la prospérité, et pas seulement q
152 uvernements français n’ont su dire qu’une chose — ce qu’elle ne devait pas être : ni une atteinte à l’unité nationale, ni
153 d’attente de l’Europe fédérale. Quand diront-ils ce qu’elle doit être ? Ce qu’il y a de plus grave dans les États-nations
154 fédérale. Quand diront-ils ce qu’elle doit être ? Ce qu’il y a de plus grave dans les États-nations actuels, c’est surtout
155 au pouvoir, c’est-à-dire maître de l’État — c’est ce qu’ils appellent la dictature du prolétariat — l’État dépérira nécess
156 nt plus compte des frontières. Dès qu’on prononce ce terme de sociétés « multinationales » on provoque aujourd’hui des jug
157 exemple à l’encontre du Marché commun : « qu’est- ce que le Marché commun réussit à faire sinon à créer un espace pour les
158 s ? » Et alors la question est réglée à partir de ce moment-là. Or, je voudrais faire observer ceci : il y a au moins deux
159 contraire à leurs intérêts, [elles] le renversent ce qui revient au même. Disons qu’il n’y a pas seulement des sociétés am
160 e sociétés multinationales européennes qui jouent ce rôle-là, par exemple : les pétroliers, et ça embarrasse beaucoup de g
161 s’implanter et qui n’y cherchent que leur profit. Ce que je dis là ne vise pas à exonérer toutes les multinationales, mais
162 au Congrès américain, qui donnait l’essentiel de ce qui est devenu plus tard le rapport sur le club de Rome signé par les
163 t pas de question : petit enfant deviendra grand, ce qui commence par un germe invisible s’épanouira un jour en arbre, en
164 s depuis l’ère industrielle sur des absurdités de ce genre ; nous ne nous sommes absolument pas rendu compte que les courb
165 -dix-huit ans ? Il faut la multiplier par 16 384, ce qui est dément : on ne peut transformer toute la substance de la terr
166 r tout de suite. Il me paraît essentiel pour tout ce qui touche les régions, de nous rendre compte que la croissance indus
167 jà, et puis les mass-médias raisonnent ainsi. Est- ce qu’une expression régionale spontanée pourrait en sortir ? On voit ma
168 lités d’intervenir et d’avoir une efficacité. Est- ce que l’angoisse communautaire est un effet de la concentration urbaine
169 ensemble. Mais les villes n’existent plus guère : ce sont des faubourgs, des banlieues. Des agglomérations qui n’ont plus
170 ensemble. Ils avaient une raison de vivre pendant ce temps. Cela vous ne pouvez le faire que dans un état de société très
171  ? Oui ; peut-être par plus petit que la commune. Ce que l’on appelle des « communes » par exemple en Amérique ; des colon
172 porte quoi, des associations, des paroisses, tout ce qui peut rassembler des hommes autour d’une idée et d’une chose qui a
173 s’occupent un jour pour voir comment se transmet ce genre de réflexe. Si « le génie du lieu » agit ainsi, c’est que l’on
174 . Besoin de communauté et besoin de solitude. Est- ce que la région, reposant sur la commune, reposant sur des groupes de q
175 s la polis n’a jamais dépassé 100 000 habitants — ce qui était considéré comme la limite extrême pour que les gens restent
176 e sentent plus responsables de rien dans la cité. Ce qui se fait est fait par les autres (« Ils », l’État). On les subit.
177 les autres (« Ils », l’État). On les subit. Tout ce que l’on peut, c’est se révolter de temps en temps, mais cela ne sert
178 dans votre prochain livre ? C’est essentiellement ce titre que je donne au livre que je suis en train de terminer. Je dis 
179 re aux jeunes aujourd’hui que c’est leur affaire. Ce n’est pas l’affaire de fatalités auxquelles on ne peut rien comprendr
180 és-technocrates peuvent comprendre quelque chose. Ce n’est pas l’affaire des ordinateurs, ce n’est pas l’affaire des impér
181 ue chose. Ce n’est pas l’affaire des ordinateurs, ce n’est pas l’affaire des impératifs X et Y, c’est leur affaire. Souven
182 és, autant en atelier qu’en entreprise. J’entends ce terme d’atelier au sens où Proudhon l’entendait. Il disait : « il y a
183 e des besoins… c’est cela la politique véritable, ce n’est pas de savoir si l’on est de gauche ou de droite. La politique
184 t être la politique d’autogestion de la commune — ce qui n’existe pas non plus (pas de ressources financières propres, etc
185 lèmes bien particuliers suivant les entreprises : ce n’est pas le même problème, suivant la nature des entreprises. Il y a
186 a le fédéralisme : que chacun fasse à son niveau, ce qu’il est capable de faire et que, pour ce qui dépasse son niveau, il
187 iveau, ce qu’il est capable de faire et que, pour ce qui dépasse son niveau, il s’unisse à d’autres. Qu’il ne se fédère qu
188 rs là, sans réserve, en solidarité. Voilà au fond ce que j’appelle fédéralisme, et qui résume toute ma doctrine : situer l
189 vant tout orienté vers l’avenir : la prospective. Ce philosophe et historien est un futurologue passionné d’écologie, il c
190 et que nous sommes maîtres de notre destin. C’est ce qu’il dira prochainement dans son ouvrage intitulé L’Avenir est notr
9 1974, Articles divers (1974-1977). Surréalisme : un jeu qui dure depuis 50 ans (7-8 septembre 1974)
191 évi-Strauss et André Breton. Entre Breton et moi, ce fut une sorte de coup de foudre d’amitié. Nous avons décidé de nous r
192 es Pour ma part, je n’ai jamais fait partie de ce groupe, ni partagé son idéologie, ce qui m’a évité d’être excommunié
193 it partie de ce groupe, ni partagé son idéologie, ce qui m’a évité d’être excommunié tôt ou tard. C’était entre nous, à Ne
194 xpérimentation du psychisme, de la surréalité, de ce qui dépasse le monde de la conscience rationnelle. Quelles sortes de
195 ar paires. L’un écrivait trois questions : qu’est- ce que ceci ou cela ? ou : qu’arriverait-il si… ? Et l’autre, en même te
196 datent de mon retour en Europe, lorsque je repris ce jeu dans ma maison de Ferney. Un soir, la personne qui jouait avec mo
197 s », toutes les lumières se sont rallumées. Était- ce « la part du diable » ? Breton m’a souvent parlé de ce livre, que j’a
198 la part du diable » ? Breton m’a souvent parlé de ce livre, que j’ai écrit à New York. Il se demandait comment un homme qu
199 ait l’objet. Breton était comme « transfixé » par ce genre de choses. Vous vous souveniez des femmes à qui appartenaient c
200 7. j. Entretien avec Franck Jotterand précédé de ce chapeau : « Le surréalisme a cinquante ans, si l’on admet que sa nais
10 1975, Articles divers (1974-1977). Notre complexe de culpabilité (1975)
201 inquiets. Réfléchissant aux motifs spécifiques de ce comportement paradoxal (mais qui est en somme celui des riches et de
202 tude du nanti, « spectateur de l’Histoire » ; est- ce que ça va durer, est-ce qu’on va nous laisser longtemps encore tranqu
203 eur de l’Histoire » ; est-ce que ça va durer, est- ce qu’on va nous laisser longtemps encore tranquilles dans notre coin ?
204 ans notre coin ? (Motif accessoire : faisons-nous ce qu’il faut pour garder notre rang ?) Inquiétude du patriote : dans le
205 des grands ensembles politiques en formation, est- ce que nos libertés, et la Suisse elle-même, en tant qu’État, gardent en
206 er ? Inquiétude spirituelle et morale enfin : est- ce que tant de paix et de prospérité n’ont pas été gagnées au prix de no
207 vois pas d’autre pays qui puisse nous battre sur ce terrain-là. (C’est le seul record qui nous reste, d’ailleurs.) Il par
208 t naïve complaisance, qui frappe l’observateur de ce pays. Quand un homme d’État français dit d’une œuvre, d’un produit, d
209 L’intellectuel français approuve en principe tout ce qui est français, sauf le régime au pouvoir (quel qu’il soit). L’inte
210 ouvrage d’Alain : Le Citoyen contre les Pouvoirs. Ce ne sont pas les Pouvoirs que le Suisse inquiet met en cause, mais plu
211 ns aux grandes puissances notre reconnaissance de ce qu’elles nous dispensent de nous mêler à leurs sanglants différends.
212 ue s’est jamais trouvé au chevet d’un malade sait ce que je veux dire. Un homme de cœur a besoin qu’on lui pardonne de jou
213 e réjouissent de leur liberté et de leur sagesse. Ce sont, par nature, des pharisiens de la politique, qui remercient Dieu
214 harisiens de la politique, qui remercient Dieu de ce qu’ils ne sont pas comme les autres. Le Suisse est assis dans sa peti
215 responsabilité (à l’égard de notre patrie), mais ce devoir est celui d’un accusé et d’un coupable. Helveticus sum, homo s
216 anière dont les Suisses s’examinent : mettons que ce soit de l’autocritique au second degré. Les exemples cités au cours d
217 urs comprise. Notre fédéralisme est compromis, et ce qu’il en reste freine l’élan des entreprises. Est-ce qu’il y aura une
218 qu’il en reste freine l’élan des entreprises. Est- ce qu’il y aura une place pour nous dans le monde qui vient ? Satiriques
219 être de leur communauté peu croyable mais vraie — ce miracle qu’il faut traduire en formules désormais communicables, et q
11 1975, Articles divers (1974-1977). Au-delà de la société industrielle (1975)
220 casion inespérée d’essayer de comprendre moi-même ce que cette expression peut signifier, ou peut-être devrait signifier.
221 -industrielle, que veut-on dire ? Je vois d’abord ce qui est exclu : une société dans laquelle il n’y aurait plus d’indust
222 qu’impliquait et imposait la société précédente. Ce changement est encore très loin d’être accompli parmi nous, mais il e
223 ntalités, nos attitudes et nos manières d’évaluer ce qui compte le plus dans la vie. II La société industrielle repos
224 if, ou psychique, ou spirituel. Le référentiel de ce système de valeurs était la croissance ; mais une croissance indéfini
225 ’autorégulation, l’accroissement indéfini de tout ce qui peut être mesuré, pesé et compté, et de cela seul. Ce que nous po
226 eut être mesuré, pesé et compté, et de cela seul. Ce que nous pouvons nommer aujourd’hui société industrielle — parce que
227 rise, Giovanni Agnelli a répondu : « L’important, ce sont les hommes et non les firmes. » Il me semble que tout le contra
228 ravail sera le chômage, véritable « temps vide ». Ce que la société nouvelle doit apporter, c’est le dépassement de l’oppo
229 nommé Henry Ford, croise à huit miles de Detroit ce qu’il appelle « une locomotive routière ». Il a vécu ce jour-là, dit-
230 il appelle « une locomotive routière ». Il a vécu ce jour-là, dit-il, son « chemin de Damas » : « Dès l’instant où je l’ap
231 rce rude, il cache une stupéfiante insensibilité. Ce qui ne l’empêche pas du tout de désirer très sincèrement faire du bie
232 prise de construction d’automobiles. Et il note à ce moment-là, — et je vous prie de savourer la phrase, elle le mérite !
233 ande, et même une certaine répugnance au début de ce siècle, est devenue le besoin numéro un de la plupart des Occidentaux
234 oin numéro un de la plupart des Occidentaux. Mais ce n’est pas encore le plus curieux de l’histoire. Née du rêve typiqueme
235 : « Nous ne sommes plus accoutumés à aller où que ce soit autrement qu’en auto. Les trains reviennent à la mode, mais ce n
236 qu’en auto. Les trains reviennent à la mode, mais ce n’est qu’une passade. Ce pays a développé une manière de vivre partic
237 viennent à la mode, mais ce n’est qu’une passade. Ce pays a développé une manière de vivre particulière à cause de l’autom
238 faudra l’aide d’une échelle, et c’est précisément ce que l’escalier avait pour seule fonction de vous éviter. Nous avons v
12 1975, Articles divers (1974-1977). Suisse 1975 (1975)
239 ue s’est jamais trouvé au chevet d’un malade sait ce que je veux dire. Un homme de cœur a besoin qu’on lui pardonne de jou
240 lupart des Suisses dans les années 1945 à 1950 de ce siècle vont trouver leur expression la plus juste dans la formule par
241 alors à l’Université de Bâle) exprime avec force ce point de vue : « … dans l’avenir, ou bien l’Europe deviendra le champ
242 pondent qu’une certaine humilité convient seule à ce petit pays, et qu’il serait parfaitement illusoire et utopique d’imag
243 tantiellement de celle des « puissances » d’hier, ce n’est plus par les dimensions, mais par le régime politique, c’est-à-
244 tres peuples de l’Europe — qui ne voient pas bien ce qu’ils pourraient en faire. Dans la partie romande surtout, on a pris
245 , qu’une manière de se mettre ensemble pour faire ce dont aucun ne serait capable seul. C’est une méthode de répartition d
246 l’Europe et l’Europe même, dont elle fait partie. Ce serait vouloir rester neutre entre le microbe et le malade. Toute la
247 la dispenser de choisir sa politique mondiale, et ce choix se pose entre la solidarité et l’égoïsme. Un égoïsme fermé sur
248 e d’aujourd’hui se voit amenée à s’interroger. Et ce n’est qu’au nom de ses buts humains en tant qu’État fédératif qu’elle
13 1975, Articles divers (1974-1977). Le Morgarten du xxe siècle (1975)
249 un peuple heureux . Aujourd’hui, il me semble que ce « modèle » (au sens scientifique) reste viable tel que je le décrivai
250 éralisme, c’est que peu de gens savent réellement ce que c’est. Il est presque totalement méconnu hors de Suisse, et les S
251 re qu’à l’origine du fédéralisme suisse se trouve ce qu’on appellerait aujourd’hui la volonté d’autonomie locale et d’auto
252 res, la Suisse a toujours été à contre-courant de ce qui se passait dans le reste de l’Europe. Elle est née de l’esprit de
253 le est née de l’esprit des communes, au moment où ce grand mouvement libertaire, au nord de l’Italie et en Flandre, était
254 alité des nationalistes cantonaux. Se fondant sur ce qu’ils tiennent pour les erreurs de 1848, ils s’imaginent que la vie
255 déralisme est précisément le contraire de cela. » Ce genre de malentendu provient du fait qu’en Suisse aussi, on raisonne
256 urs le même conflit entre les réalités locales et ce qu’on appelle trop facilement les « nécessités » nationales, continen
257 âle. Il y a en projet seize centrales nucléaires. Ce qui est de la démence pure. Aux yeux de n’importe quel savant sérieux
258 duit par la volonté de se défendre sur place, fût- ce au prix d’une illégalité. On a beaucoup dit, dans la presse — de gauc
259 Il s’agit de savoir quelle finalité on vise. Est- ce qu’on attache vraiment plus d’importance au « niveau de vie » qu’à la
260 tance au « niveau de vie » qu’à la liberté ? Dans ce cas, autant faire des centrales nucléaires, quitte à se voir réduits
261 est la mort… Mais pour moi, une Suisse qui ferait ce choix-là ne serait plus elle-même. Elle deviendrait semblable à n’imp
262 . Des tragédies. Les Suisses n’aiment pas du tout ce mot. Les Suisses s’imaginent, surtout depuis une centaine d’années, q
263 de place pour les soldats américains. Nous avons ce même avantage d’une décentralisation extrêmement poussée, donc d’une
264 de qui vient. Il faut donc que la Suisse retrouve ce qui était son attitude et sa mentalité originelles, celles qui ont cr
14 1975, Articles divers (1974-1977). L’amour (1975)
265 s opéras. C’est le sentiment qui s’exalte de tout ce qui s’oppose au désir, sépare les corps et fait obstacle à l’accompli
266 u’elle constitue l’apport principal de la Grèce à ce qu’on peut appeler la métaphysique de l’amour (R. Flacelière, L’Amour
267 d’ailleurs tant de réminiscences de l’Antiquité : ce sont ceux d’Orphée et d’Eurydice, d’Admète et d’Alceste, de Protésila
268 irée au monastère qu’elle avait fondé à Poitiers. Ce clerc fait à la femme une place capitale qui annonce déjà la concepti
269 us le sentiment, le désir et la passion, n’a pris ce sens qu’avec la poésie des troubadours. Cette poésie apparaît subitem
270 surprenante rapidité. Elle ne ressemble à rien de ce qu’avaient connu le monde antique et le monde christianisé, à part le
271 l’âme et jugent que, le corps étant vil, rien de ce qu’il fait ne saurait engager le salut : « Point de péché au-dessous
272 rée, pour peu qu’une parenté soit découverte, fût- ce au septième degré, entre mari et femme. Robert le Pieux se voit contr
273 ont la dame est le « prix ». S’il n’en fait rien, ce n’est pas seulement par respect de son suzerain (déjà trompé en fait)
274 ême s’il est fascinant comme une drogue. Et n’est- ce pas d’une intoxication — le « vin herbé » servi par une « erreur » sa
275 ait naturel de s’exalter, de devenir une passion. Ce trait fondamental, la retenue, les contraintes, se manifestera d’une
276 l’Irlande et de la Cornouailles. Des analyses de ce « roman par excellence » se dégage la conclusion que la passion est c
277 enne s’est convertie au style des troubadours. De ce temps jusqu’au xxe siècle, nous assistons aux péripéties d’un duel s
278 ncore dans la représentation d’une tragédie. Mais ce que la passion gagne à se déclarer par le moyen de la littérature, el
279 e ne pourrait pas s’entretenir (au double sens de ce terme) — s’est fait sentir plus vite dans le roman qu’au théâtre. (Je
280 itique des générations qui vont suivre ? En fait, ce fut assez d’un décret de Boileau, dans son Dialogue sur les héros de
281 aiment sincère dans sa préface lorsqu’il écrit : Ce que je puis assurer, c’est que je n’en ai point fait [de tragédie] où
282 bous. Quant à la religion chrétienne (ou du moins ce qu’elle est devenue : morale prêchée parfois par des évêques qui bâti
283 olitique, leur stratégie subtile. « Les femmes de ce temps n’aiment pas avec le cœur, elles aiment avec la tête », dit l’a
284 ne d’elles n’a publié de souvenirs. Mais écoutons ce cri d’Adrienne Lecouvreur, quand elle dit du très inconstant Maurice
285 idermes », selon l’aphorisme célèbre de Chamfort. Ce qui compte aux yeux du romancier, c’est une intrigue délibérée et qui
286 epté la raison ». Privé en fait d’amour physique, ce descendant de la Laure de Pétrarque (Laure de Noves) trouve dans la t
287 an. Par une sorte de dépit amoureux, il veut tuer ce que la courtoisie adorait. Le crime d’amour impur sauvera seul la « p
288 remplit le siècle, de la Régence à la Révolution. Ce serait oublier son plus grand écrivain, Rousseau le gêneur, qui d’ail
289 intime : Notre engagement n’était pas pris pour ce monde. Et dans les Hymnes à la nuit : Que ton feu spirituel dévore
290 par contraste, de l’Éros passionnel, anarchisant, ce « vert paradis des amours enfantines » (Baudelaire) où ceux qui aimen
291 S. Eliot], trop de savants contemporains), c’est ce qu’a fort bien relevé Georges Bataille dans ses ouvrages sur Éros et
292 force qu’il devait au péché ; de lui donner tout ce qui, jusqu’ici, était donné à l’amour ; d’en faire le moyen de notre
293 pression de la sexualité qui n’est plus réprimée, ce qui signifie que la plupart des interdits sociaux, légaux et religieu
294 . Les derniers ouvrages de C. G. Jung prédisaient ce retour des puissances affectives. On distingue déjà les signes avant-
295 nciliation avec la science ou la théologie. Entre ce trop haut et ce trop bas également prévisibles, on peut imaginer que
296 la science ou la théologie. Entre ce trop haut et ce trop bas également prévisibles, on peut imaginer que l’avenir de l’am
297 ontradictoires de l’érotisme et de la passion. Et ce sera la fonction retrouvée et renouvelée de la littérature romanesque
15 1975, Articles divers (1974-1977). « Le sort des écrivains emprisonnés constitue un drame et un avertissement » (juin 1975)
298 rd’hui, notamment dans les sociétés occidentales. Ce qui se passe d’une manière scandaleuse dans les pays totalitaires est
299 qu’il est manieur de mots, donneur de sens. Dans ce qu’il écrit il y a presque toujours quelque chose qui peut contribuer
300 même. Il y a un mot pour désigner ces individus : ce sont des mauvaises têtes. De mauvaise tête à « dérangé du cerveau » l
301 éaction va consister à lui laver le cerveau. Pour ce magistrat le dogme, la vérité avec un grand V constituent la norme. H
302 llement vous demander : Mais en fin de compte est- ce que je n’ai pas tort puisque tous les autres pensent autrement ? Et c
303 rt puisque tous les autres pensent autrement ? Et ce doute répété, amplifié, peut très bien vous amener à la folie. J’ai s
304 s sur les bûchers de la première Inquisition. Est- ce que les dirigeants d’aujourd’hui, particulièrement ceux des sociétés
305 e ? Je crois qu’ils sont emplis d’angoisse devant ce monde impossible à gouverner et que, même dans nos sociétés occidenta
306 sont les seuls qui avouent ouvertement pratiquer ce conditionnement. La révolution culturelle chinoise n’a pas été autre
307 enfer pour les écrivains. Aucun écrivain digne de ce nom ne peut accepter d’être l’objet d’un pareil conditionnement où on
308 bjet d’un pareil conditionnement où on lui dirait ce qu’il doit écrire. C’est sa nature même qui s’y oppose. Il sera donc
309 arement les limites d’un petit canton suisse. Est- ce que cette dimension avait une influence ? C’est une évidence. Dans un
310 quement cette mesure reste juste. D’ailleurs tout ce qui intéresse notre vie quotidienne se passe à l’échelon des communes
311 re sa voix. Pour vous il n’y a pas de nécessité à ce qu’un État moderne soit regroupé, donc plus puissant ? Quelle nécessi
312 ansports, en fait il se mêle de tout y compris de ce qui ne le regarde pas. Son rêve — et ce qui se passe en Union soviéti
313 ompris de ce qui ne le regarde pas. Son rêve — et ce qui se passe en Union soviétique de façon scandaleuse préfigure peut-
314 nce, par exemple, insiste pour garder la main sur ce moyen c’est bien parce qu’il permet d’influencer les gens. Même aux É
315 ires parce que dans le fondement de notre société ce n’est pas la masse qui constitue l’unité de mesure mais l’individu. P
316 plus, pour s’opposer au pouvoir, que l’écrivain, ce fou !!! 19. Date de l’interview, c’est-à-dire le 4 juin. s. Rouge
317 e” de Soljenitsyne sur ces camps peuvent imaginer ce que ces arrêts des juges représentent pour un être humain. Le crime q
318 Au premier rang de ceux qui se sont engagés dans ce combat on trouve le nom de l’un des plus grands écrivains suisses con
16 1975, Articles divers (1974-1977). « L’État-nation, voilà l’ennemi » (1er juillet 1975)
319 moment donné des unités exactement superposables, ce miracle ne durerait guère, pour la simple raison que la langue, les f
320 t et plus de mal au tiers-monde qu’aux Européens. Ce n’est pas peu dire ! Il est grand temps de le dépouiller de son prest
17 1975, Articles divers (1974-1977). « Il ne s’agit pas de créer des régions qui soient de petits États-nations » (septembre 1975)
321 r des régions qui soient de petits États-nations. Ce serait bien pire que les grands. Ce seraient les défauts des grands p
322 tats-nations. Ce serait bien pire que les grands. Ce seraient les défauts des grands plus l’esprit de clocher. Ce qu’il fa
323 les défauts des grands plus l’esprit de clocher. Ce qu’il faut, c’est tout recommencer par en bas, créer des liens réels
324 Valais, du Val d’Aoste et du canton de Vaud, tout ce qui est autour du Léman. Une quantité de problèmes seraient à résoudr
325 e – Aoste – Fribourg – Lausanne – Neuchâtel. Dans ce triangle, on trouve seize instituts universitaires. Vu cette densité
326 rsités doivent être uniformisés. Même cela, n’est- ce pas déjà une manière de sédition ? Il y a des centaines de choses qu’
18 1976, Articles divers (1974-1977). Message de M. Denis de Rougemont (1976)
327 ue, doit être une communauté culturelle. Et dans ce même chapitre, je souligne cette phrase : L’unité de l’Europe ne se
328 miner » et cheminer « faire du chemin, surtout en ce sens que le chemin est long et qu’on le parcourt lentement ». On sent
329 , aura été plus créateur que les grands ténors de ce siècle. Piéton tranquille sur les chemins de l’histoire, il a frayé l
330 nation souveraine, dans laquelle j’ai été élevé. Ce sera l’affaire de votre génération. Trois lustres ont passé déjà san
331 s. Quant à repasser le flambeau, selon le cliché, ce serait une démission, voire une abdication qui ne trouverait plus per
19 1976, Articles divers (1974-1977). L’Europe, l’été [préface] (1976)
332 erne à travers tout le romantisme occidental. Là, ce sont quelques heures d’autoroute à travers forêts et vallées qui reli
333 dimensions mondiales, au xxe siècle, ont montré ce que « l’Europe des nations » savait faire. Au lendemain de la Seconde
334 ticle sur la coopération dans le domaine musical. Ce jeune chef prestigieux connaissait les problèmes artistiques et prati
335 mettait à l’œuvre. ⁂ La musique est d’Europe, en ce sens qu’elle est liée à l’Europe non seulement historiquement, dans s
336 s noms s’échangent, et des projets s’esquissent : ce sont tous les grands noms de la musique, compositeurs, exécutants et
337 champions de la dernière école postsérielle ; et ce sont des projets de concerts, de ballets, d’opéras de tous les siècle
338 alienne me paraît typiquement occidentale, ne fût- ce que par les antinomies qu’elle embrasse, les paradoxes et les ambiguï
339 nse que seule une brève durée permet de soutenir. Ce caractère d’exception doit lui être conféré non seulement par la haut
340 , plutôt que réaliste et descriptive. (Mais n’est- ce pas le fait de toute définition, et son utilité majeure ?) De plus, o
341 tte évolution sociale. 4. Au xixe et au début de ce siècle, la musique était confinée dans les salles de concert, séparée
342 sur le bassin de la cour des Myrtes à l’Alhambra. Ce retour de la musique à son milieu d’origine et d’usage, à la communau
343 que et mémorial d’une communauté. Il est beau que ce soit à la musique, plutôt qu’à quelque mascarade folklorique, que déj
344 « état d’âme », on pourra contempler aux pages de ce livre tant d’apparitions mémorables. aa. Rougemont Denis de, « [Pr
20 1976, Articles divers (1974-1977). Histoire et prospective de l’identité européenne (1976)
345 et plus sérieuse, de l’identité de l’Europe et de ce qui motive son étude aujourd’hui. Tout le reste en dépendra, et d’abo
346 este en dépendra, et d’abord mes réponses. Qu’est- ce donc pour vous, l’Europe ? Ce n‘est pas une réalité faite et achevée,
347 es réponses. Qu’est-ce donc pour vous, l’Europe ? Ce n‘est pas une réalité faite et achevée, ou bien en train de se défair
348 faite et achevée, ou bien en train de se défaire. Ce n’est pas une forme idéale à rejoindre, ni quelque chose qui aurait e
349 t et que l’on se proposerait de ressusciter. Mais ce n‘est pas non plus une utopie, comme le furent les projets d’union de
350 té est un élément) et leurs manières de vivre. Et ce problème ne se pose pas dans l’espace vide de la théorie intemporelle
351 que vous me semblez faire, après tant d’autres — ce fut une mode dans les années 1960 — entre la recherche fondamentale e
352 nseignement, cours et travaux de séminaires, tout ce qui touche aux régions, notamment. Disons que dans notre domaine, la
353 les à mieux savoir et mieux comprendre en général ce qu’est l’Europe comme fonction dans le Monde ; et en particulier, c’e
354 ticulier, c’est là ma branche, à mieux comprendre ce que cela signifie d’être un Européen. Ce n’est pas un métier ni même
355 mprendre ce que cela signifie d’être un Européen. Ce n’est pas un métier ni même une profession. C’est une manière d’être
356 les de facultés ! Je souhaitais simplement savoir ce que vous enseignez au juste. Je vous en donnerai deux exemples. J’ai
357 gt-cinquième anniversaire du Conseil de l’Europe. Ce qui ne prouve d’ailleurs pas que mon sujet soit « sérieux » du point
358 de la prospective, sont plus encore que le savoir ce que j’ai le désir de transmettre, c’est-à-dire de rendre sensible et
359 des auditeurs d’un cours. Car penser, après tout, ce n‘est peut-être que cela : mettre en système du savoir et du non-savo
360 système du savoir et du non-savoir, du réalisé — ce sont les « faits » — et du virtuel ou potentiel, c’est ce qui reste «
361 les « faits » — et du virtuel ou potentiel, c’est ce qui reste « à faire ». C’est peut-être ce que je pressens comme sans
362 , c’est ce qui reste « à faire ». C’est peut-être ce que je pressens comme sans le connaître, qui apparaîtra un jour comme
363 ui apparaîtra un jour comme étant le principal de ce que j’avais à faire passer, dans le cadre rigoureux du savoir vérifié
364 philosophique, sur les problèmes de l’Europe, est- ce que cela ne vous condamne pas à l’européocentrisme ? Vous en êtes par
365 ité me paraissent faibles, dans la conjoncture de ce troisième tiers du xxe siècle. L’étude de la chimie est utile, l’étu
21 1976, Articles divers (1974-1977). Changer de cap (novembre 1976)
366 Changer de cap (novembre 1976)ab Ce que l’on appelle « politique » n’est en général qu’une tactique parti
367 n’est en général qu’une tactique partisane, mais ce qui m’intéresse est autre chose : la stratégie de notre civilisation.
368 autre chose : la stratégie de notre civilisation. Ce sont donc les grands choix moraux qui déterminent parfois à notre ins
369 nsidérer quelques-uns des arguments échangés dans ce grand débat, non pas pour leur valeur scientifique ou technique, mais
370 volonté certaine de l’empêcher de savoir à temps ce qui se prépare, et de le placer devant le fait accompli. Puis, devant
371 clusions scientifiques. De ces diverses formes de ce que je nommerai le mensonge en service commandé, je donnerai ici un e
372 es et naïves, je demande : « Concorde, à quoi est- ce que ça sert ? » On m’assure que cet appareil ira de Paris à New York
373 dire, que feront-ils de ces heures gagnées ? Est- ce qu’elles vaudront les seize milliards déjà dépensés par l’État, donc
374 c par les contribuables français et anglais ? Est- ce qu’elles justifieront le risque planétaire que des savants redoutent,
375 ment indispensable de « gagner » trois heures sur ce trajet, en voici le moyen simple et qui eût déjà permis environ 15,8
376 de la vitesse et du fracas pour épater le monde. Ce qui commence à valoir des fortunes, c’est le contraire de ce que Conc
377 ence à valoir des fortunes, c’est le contraire de ce que Concorde symbolise. Le luxe suprême de demain, je l’ai défini au
378 la lenteur au sein du silence. Je crois bien que ce soir-là, j’ai trouvé la formule de tout ce qui me répugnait dans l’af
379 en que ce soir-là, j’ai trouvé la formule de tout ce qui me répugnait dans l’affaire nucléaire comme dans celle de Concord
380 e, nulle différence à cet égard !), la logique de ce système de Production-Puissance-Pouvoir-Police et Plutonium, que le g
381 plus de l’État, et vous trouvez enfin normal que ce soit lui — comme les Rois antiques — qui dispense seul l’Énergie. Une
22 1977, Articles divers (1974-1977). Souvenir de 1938 (1977)
382  : « C’est la paix ! », me dit-on. (On le croyait ce jour-là !) C’est aussi toute la vie qui se reprend à vivre, les délai
383 e cet ermite du xve siècle était bien pâle. Mais ce jour-là, je reprends le livre et je découvre un personnage fascinant.
384 lence ! Revenir au théâtre grec, avec son chœur ? Ce serait la solution formelle ; encore faudrait-il l’adapter à la struc
385 la première fois à une répétition des chœurs — et ce sera la dernière : la guerre est pour demain — je me sens littéraleme
386 le sentiment, non seulement mon texte, mais tout ce que j’ai pensé, arrière-pensé en l’écrivant et renoncé à y mettre fau
387 r, dans la rue, en conduisant ma Bugatti. Jusqu’à ce que la mélodie sorte des paroles. » Cette espèce d’harmonie préétabli
388 e Flüe « n’est pas devenu populaire » c’est que «  ce pacifiste était inopportun en un moment où il s’agissait de résister
389 Il se peut que les deux jugements soient justes. Ce qui est certain, c’est que l’homme de la paix est seul capable de gag
390 que l’homme de la paix est seul capable de gagner ce que toute guerre, même victorieuse, perd à coup sûr : les raisons d’ê
391 sique d’Honegger reste en dehors — au-dessus — de ce débat. Ansermet disait des petits chœurs d’anges ou d’enfants de Nico
23 1977, Articles divers (1974-1977). Les débuts de la construction européenne (1977)
392 rendre intelligibles les débuts et l’évolution de ce que l’on est convenu de nommer, non sans optimisme, quant à la vraie
393 , et dès lors administré par l’OECE, rien de tout ce qui va suivre n’eût été possible. Il s’agit là d’un fait patent et me
394 verbale. Pour le meilleur et pour le pire, c’est ce vocabulaire qui sera repris dans les traités européens de l’après-gue
395 ans les traités européens de l’après-guerre. Mais ce qui exige alors d’être expliqué, c’est le passage de l’échec du proje
396 eil des ministres français décidait de « donner à ce projet son concours actif », bientôt suivi par les quatre autres sign
397 parlements européens. Lacune fort importante dans ce complexe : l’économie. Le plan Marshall, entré en vigueur dès 1946, a
398 ais les deux résultats les plus spectaculaires de ce que l’on peut appeler la période des congrès demeurent sans contredit
399 es difficultés communes à résoudre en commun »29. Ce n’était pas une réforme, mais une révolution. On peut penser que c’es
400 s ministres français, la veille, que de la presse ce jour-là, puis de l’opinion européenne et finalement des parlements, q
401 eurs et des consommateurs de charbon et d’acier ! Ce qui a frappé à juste titre l’opinion de tous nos pays, c’est l’idée d
402 ciété des Nations. Plutôt que l’Europe elle-même, ce qui naissait avec la CECA, c’était une méthode pour faire l’Europe. N
403 sionné de l’après-guerre. L’échec retentissant de ce combat mal engagé, mais tenu peut-être à tort pour décisif par opposa
404 iers de la population des Six, puis des Neuf. Sur ce nombre, trois quarts des jeunes. Devant la nécessité inchangée — voir
405 l’adhésion de la majorité, surtout des jeunes, à ce projet, et l’urgence ressentie par tous d’une action capable de préve
24 1977, Articles divers (1974-1977). Robert Schuman (1886-1963) : l’homme de la frontière (1977)
406 aires — qui sera le MRP de la Libération —, n’est- ce pas surtout parce que c’est le parti qui affirme le plus clairement u
407 ment l’homme du Plan qui porte son nom, parce que ce plan résultait du problème dans lequel s’était noué son drame personn
408 el s’était noué son drame personnel, et parce que ce plan figurait le dénouement possible de ce drame. Interrogeons sur ce
409 ce que ce plan figurait le dénouement possible de ce drame. Interrogeons sur cette affaire l’autre protagoniste principal,
410 mentale, le problème de la paternité politique de ce qui allait devenir l’Europe des Six, puis des Neuf, en attendant la v
411 ue, doit être une Communauté culturelle. Et dans ce même chapitre, je souligne cette phrase : L’unité de l’Europe ne se
412 , aura été plus créateur que les grands ténors de ce siècle. Piéton tranquille sur les chemins de l’Histoire, il a frayé l
413 nation souveraine, dans laquelle j’ai été élevé. Ce sera l’affaire de votre génération… ae. Rougemont Denis de, « Rob
25 1977, Articles divers (1974-1977). Hérétiques de toutes les religions, unissez-vous ! (1977)
414 sme de Maritain, néo-calvinisme de Barth. C’était ce que croyaient voir les journalistes, quand il leur arrivait de regard
415 urnalistes, quand il leur arrivait de regarder de ce côté. De fait, il s’agissait de bien autre chose, d’une réaction vita
416 s, mais non point comme « contraires au dogme » : ce que nous referons comme « hérétique », c’est tout choix exclusif d’un
417 ette phrase morale par orthodoxie, et vous saurez ce que nous pensions alors. La vérité ne pouvait être à nos yeux quelque
418 rbin part pour Byzance et le Proche-Orient ; puis ce sera la guerre, et pour moi, plus de six années d’exil américain. Et
419 temps, mais une prise de conscience renouvelée de ce qui animait en profondeur nos écrits de l’époque de Hic et Nunc . Lu
420 s pouvoirs totalitaires ne m’intéressent pas dans ce contexte. Note 2. Si, comme le veulent les dictionnaires, l’orthodoxi
421 hoix personnel » est un sentier imprévisible ; et ce n’est pas aux ponts et chaussées ni à la police de la route qu’il fau
422 s pourrait aussi bien qualifier selon D. Suzuki «  ce qui est dans la ligne authentique de transmission », i.e. la communic
423 yens de découvrir personnellement la vérité. Dans ce second sens, le témoignage de l’esprit ne consiste nullement à réitér
424 nage de l’esprit ne consiste nullement à réitérer ce qui est vrai pour n’importe qui, et encore moins à s’y conformer en s
425 auté et vocation, entre universel et unique. Mais ce n’est peut-être qu’une question de tempérament. Selon que l’on relève
426 La lampe n’éclaire que le terrain où je m’avance, ce chemin qui commence à mes pas. L’homme de la foi ne suit sa voie qu’e
26 1977, Articles divers (1974-1977). La nature du pouvoir (9 octobre 1977)
427 ats, parce que je suis d’accord avec presque tout ce qu’a dit Jeanne Hersch hier soir. Il aurait peut-être mieux valu comm
428 ujourd’hui, décisive. Elle domine absolument tout ce qui va se passer à la fin de ce siècle. S’agissant de définir le pouv
429 e absolument tout ce qui va se passer à la fin de ce siècle. S’agissant de définir le pouvoir, Jeanne Hersch n’a pas préte
430 e.) On se sent tout de même un peu frustré devant ce recul devant la définition. Mais, qu’y faire après tout ? Le pouvoir
431 ité hier soir par Jeanne Hersch c’est, peut-être, ce sentiment d’impuissance que nous avons devant les pouvoirs, qui nous
432 tion. Comment, alors, préserver l’individu contre ce pouvoir extérieur contraignant et, de plus en plus, absolu ? Jeanne H
433 sch nous a hier soir indiqué une voie : opposer à ce pouvoir d’autres pouvoirs garants de liberté, c’est-à-dire le pouvoir
434 a fait, une fois pour toutes, de sa souveraineté. Ce n’est donc ni l’anarchie, ni la révolution à la mode des siècles dern
435 a illustré lui-même, d’une manière parfaite, tout ce qu’il avait dénoncé quelques mois plus tôt. Je pense qu’il n’y a qu’u
436 à la fédération continentale. Cette distribution, ce double dépassement, c’est ce que j’appelle le fédéralisme, mouvement
437 Cette distribution, ce double dépassement, c’est ce que j’appelle le fédéralisme, mouvement qui s’inscrit, à mes yeux, da
438 Ayant écrit, dans un assez gros livre récent, que ce drame est celui de notre époque, j’ai trouvé, l’autre jour, et après
439 ur, et après coup, la formule la plus simple pour ce que je voulais dire dans ce livre, et dans beaucoup d’autres. Je pens
440 e la plus simple pour ce que je voulais dire dans ce livre, et dans beaucoup d’autres. Je pense que cette formule rejoint
441 ersch :] Il n’y a pas vraiment d’opposition entre ce que vous avez dit plus longuement hier soir, et ce que j’ai dit, très
442 e que vous avez dit plus longuement hier soir, et ce que j’ai dit, très vite, aujourd’hui. Voilà pourquoi j’ai paru trop c
27 1977, Articles divers (1974-1977). La puissance et les choix (mai 1977)
443 e par la volonté de puissance exercée sur autrui, ce sont les chefs ; mais la plupart cèdent tout simplement au besoin de
444 laquelle les moyens ont pour devoir de concourir. Ce qu’il faut voir, et qui est peut-être décisif, c’est que le paralléli
445 ix solaire est la condition même de la paix : car ce choix signifie du même coup la fin de nos États-nations, liés au plut
446 fins, car les fins seules dicteront leurs moyens. Ce qu’il faut voir, c’est que le but de la société n’est pas du tout d’a
447 , et ils continuent de la faire, dans le cadre de ce qu’ils considèrent, eux, comme l’intérêt public. Récemment, ils ont e
448 niveau des structures de la société et de l’État. Ce sont les implications politiques de ce qu’il nomme « le Choix du sièc
449 de l’État. Ce sont les implications politiques de ce qu’il nomme « le Choix du siècle » que l’auteur de L’Avenir est notr
28 1977, Articles divers (1974-1977). Du passé à l’avenir d’une région (27 juin 1977)
450 ques de l’ennemi séculaire, le duc de Savoie. Dès ce moment, et jusqu’aux débuts du xixe siècle, deux facteurs principaux
451 ntre ces cinq pays, principautés et républiques : ce sont la Réforme (pour Genève, Neuchâtel et Vaud) et les liens de comb
452 omand » va se constituer. Il sera l’expression de ce que les cinq cantons — et surtout les trois protestants — sentiront q
453 la nouvelle Confédération. La Suisse romande dès ce moment-là, se met à exister comme telle dans le cadre de la Suisse co
454 . Quant à Madame de Staël et à Benjamin Constant, ce sont eux qui, par « la trouée de Coppet », vont faire entrer en Franc
455 les Allemagnes. Dans le courant du xixe siècle, ce que l’on nommera « l’esprit romand » se signale et se caractérise par
456 e, la Suisse romande va devenir la mère patrie de ce qu’on nomme aujourd’hui les sciences humaines. Ferdinand de Saussure
457 L’esprit romand implique aussi, en relation avec ce qui précède, une vie culturelle d’une exceptionnelle intensité : cinq
458 ugmenter dans les cantons à dominante catholique. Ce phénomène sociologique (et non pas proprement religieux) se trouve av
459 ute l’histoire européenne. Et que devient pendant ce temps « l’esprit romand » ? Sa dominante protestante — Benjamin Const
460 is inégalée dans le reste de l’Europe. Frappé par ce fait, j’avais entrepris il y a quelques années une étude sur les poss
461 , Zurich, 27 juin 1977, p. 6-7. ak. Présenté par ce résumé : « La Suisse romande est l’expression moderne — elle ne date
462 comme la partie francophone de la Suisse ; et dès ce moment, mais pas avant, on a parlé d’une Suisse romande, par oppositi
29 1977, Articles divers (1974-1977). « Il faut changer de cap » (27 septembre 1977)
463 ression technicienne contre la nature » ? Oui, et ce qui la rend dangereuse, c’est qu’elle s’opère aujourd’hui sous l’égid
464 êtises, c’est-à-dire de grandes guerres. Au fond, ce que vous nous proposez, c’est le modèle suisse ? C’est quelque chose
465 éconise sont autre chose que les seules ethnies : ce sont les communautés qu’il s’agit de reconnaître, comme le disait Vid
30 1977, Articles divers (1974-1977). Au tableau d’honneur de Parents : L’Avenir est notre affaire (octobre 1977)
466 s paravents de nos inerties intellectuelles quand ce n’est pas de nos lâchetés morales. » C’est ainsi que Denis de Rougemo
467 e steak qu’on lui a promis dès les années 1950. » Ce n’est qu’un aspect ! Mais nous sommes libres aussi de réagir, « de re
468 jamais. Tout est possible mais il faut choisir. » Ce n’est pas un homme à renoncer. Son acharnement à défendre l’Europe, e
469 rce qu’elle lui apparaît comme l’aboutissement de ce personnalisme communautaire, fondamental, qui fut la recherche de sa
470 démographique et industrielle) est à l’origine de ce déclic : J’ai vu sous forme de courbes ce qui allait se passer si on
471 gine de ce déclic : J’ai vu sous forme de courbes ce qui allait se passer si on continuait comme maintenant. Je me suis di
472 agne, en Scandinavie. Et nous y venons en France. Ce n’est pas un hasard ! Un architecte grec contemporain, Doxiadis, qui
473 s responsables de la crise de notre civilisation. Ce sont eux seuls qui ont géré la terre. Eux seuls qui en avaient les mo
474 e, l’État doit être dessaisi des pleins pouvoirs. Ce n’est qu’en décidant de reprendre leur destin en main à l’échelon loc
475 i perpétue les vieux clichés, qui fait croire que ce qui existe a toujours existé et que nous n’y pouvons rien changer. El
476 pouvons rien changer. Elle fait des citoyens pour ce qu’on veut, et trop souvent pour ce que l’État lui demande. Longtemps
477 citoyens pour ce qu’on veut, et trop souvent pour ce que l’État lui demande. Longtemps elle a fait des citoyens pour la na
478 on nationales. Car l’enfant s’intéresse d’abord à ce qu’il voit, à ce qu’il peut toucher. Parlons-lui de l’histoire nature
479 r l’enfant s’intéresse d’abord à ce qu’il voit, à ce qu’il peut toucher. Parlons-lui de l’histoire naturelle de sa région,
480 Dulhoste et précédés du chapeau suivant : « Sous ce titre va paraître le livre retentissant d’un grand humaniste. L’inter
31 1977, Articles divers (1974-1977). Denis de Rougemont : le retour d’un hérétique (3 octobre 1977)
481 ur à la mode ? La mode ? Je ne sais pas très bien ce que c’est ! Tout de même, avec la naissance d’une nouvelle sensibilit
482 ductiviste… Absolument. J’ajouterai cependant que ce qui, dans les années 1930, pouvait passer pour une intuition est deve
483 oissance que les pays riches ont choisi pour eux. Ce type de croissance suppose nécessairement un pillage du tiers-monde e
484 oins lui épargner de nouvelles désillusions. Pour ce faire, il faudrait que nous commencions par changer de cap nous-mêmes
485 le bord incontestable de leur identité. Or qu’est- ce qu’une frontière ? C’est, généralement, le résultat d’une guerre ou l
486 sait découper par des abstractions guerrières, et ce au mépris des réalités de sous-sol, de langue, de culture ou de régio
487 st plaisant d’observer qu’aujourd’hui, en France, ce sont les deux grandes traditions jacobines — les gaullistes et les co
488 e. Toutes les institutions stato-nationales — que ce soit le centralisme, les méthodes de répression, ou la destruction de
489 aire à l’organisation de la société. En revanche, ce qui me semble important, c’est de hâter la désacralisation de cet Éta
490 , on a le sentiment très vif que, contrairement à ce que vous semblez croire, l’idée d’une Europe unie n’a jamais cessé de
491 suite et, avec quelques amisau, j’avais milité en ce sens. Il se trouve que des manœuvres politiques ont empêché ce vaste
492 e trouve que des manœuvres politiques ont empêché ce vaste mouvement d’aboutir. Ce fut un rendez-vous manqué dont nous pay
493 itiques ont empêché ce vaste mouvement d’aboutir. Ce fut un rendez-vous manqué dont nous payons encore le prix. J’ai l’imp
494 s multinationales. Si cette Europe-là se réalise, ce sera pour le plus grand profit d’un mode de production et de civilisa
495 pourquoi soutenez-vous une telle entreprise ? De ce point de vue, il n’y a rien à craindre. L’Europe des marchands ne se
496 d de Gaulle a bloqué la construction de l’Europe, ce fut pour des raisons strictement politiques ou culturelles. On a alor
497 os jours. Même pour les « grands intellectuels », ce n’est pas un thème très mobilisateur… À vrai dire, on a l’impression
498 une modalité de l’impérialisme germano-américain, ce qui, à mon sens, témoigne d’une grande méconnaissance des réalités et
499 nce des réalités et des forces en présence. Mais, ce faisant, il obéit sans le savoir à un vieux réflexe de chauvinisme do
500 » sitôt qu’on entreprend de le dénoncer ? Certes, ce n’est pas une abstraction, mais il est désolant que de grands esprits
501 er, comme ça, en se crispant sur son État-nation, ce n’est pas une façon de le conjurer, au contraire… C’est en refusant l
502 , que les jeunes gens suivent presque à la lettre ce que vous appelez mes « prophéties ». Tenez, en mai 1968, ça m’a fait
503 d Dandieu, ni de Robert Aron — reprendre en chœur ce que nous écrivions, à l’époque, dans L’Ordre nouveau . Avouez que, p
504 e nazie. Peut-être, mais c’était un malentenduay. Ce sur quoi je voulais mettre l’accent — quand je dis « moi », je pense
505 e, quand une jeunesse a faim, elle ne regarde pas ce qu’elle mange. Dans ces conditions, l’antifascisme et l’anticommunism
506 identaux, pouvions déjà constater la faillite. En ce temps-là, Bakounine et Proudhon me semblaient plus toniques que l’aut
507 ienne à ses commencements. Bien sûr, en m’offrant ce poste à Francfort, il s’imaginait que je ne tarderais pas à me conver
508 . Voulait-il donc me convertir ou m’éclairer ? De ce point de vue, il ne faut pas oublier qu’Otto Abetz lui-même n’était q
509 parti « socialiste personnaliste » au pouvoir. À ce moment-là, n’avez-vous pas eu envie de vous engager plus directement
510 ce. De plus, j’ai toujours eu horreur des partis. Ce qui ne m’a pas empêché de militer un peu partoutbb afin de conjurer,
511 éril les industries occidentales de l’automobile, ce qui, finalement, peut être un bienfait pour notre mode de développeme
512 e Hölderlin, « Là où croît le danger, croît aussi ce qui sauve. »be D’où l’ambiguïté fondamentale de votre rapport à la p
513 l’Occident … C’est absolument exact puisque, dans ce livre, je me livrais à une étude du couple à travers l’histoire de l’
514 ple à travers l’histoire de l’Occident. Or qu’est- ce qu’un couple ? C’est l’assemblage d’un certain nombre de différences
515 emblage d’un certain nombre de différences et, de ce point de vue, ça fonctionne exactement comme une fédération de groupe
516 ération de groupes ayant chacun ses lois propres. Ce type de contrat exclut, par définition, l’uniformisation et la fusion
517 ’autonomie, la garantit. Or il existe en Occident ce que l’on appelle la passion et qui, en fait, n’est qu’une sorte d’uto
518 Pouvoir, cet analogue de la passion dévastatrice. Ce faisant, les États-nations ne se sentent même pas coupables puisqu’il
519 toutes les versions du mythe de Tristan), n’était- ce pas ainsi qu’il désignait les hommes de parti qui risquaient de s’int
520 le. On peut refuser tout cela mais il faut savoir ce qu’il en coûte. Avant la guerre, Emmanuel Mounier avait dit ; « Denis
521 cueillis par Jean-Paul Enthoven et introduits par ce chapeau : « Depuis quarante ans, il parle d’environnement, d’autogest
522 ires, ne fut pas une circonstance atténuante pour ce “penseur” à contre-courant qui, aujourd’hui, à soixante-dix ans, est
523 rge. bc. Grand point d’interrogation en marge de ce paragraphe. bd. Sous le paragraphe entre parenthèses : « Je n’ai jam
524 a. » be. Grand point d’interrogation en marge de ce paragraphe. bf. « et de l’individu qui sont » souligné et marqué d’u
525 sentiment me l’inspire aussi bien que la raison. Ce qu’il y a, en moi, d’affectif imagine naturellement la France, telles
32 1977, Articles divers (1974-1977). Pierre Desgraupes fait le point avec Denis de Rougemont (10 octobre 1977)
526 s survivants ne raconteront pas…, etc. » Quel est ce cataclysme que vous annoncez ? D’abord je vous ferai remarquer que ce
527 mes, j’essaie au contraire de les prévenir. C’est ce qui me distingue de beaucoup de gens qui adorent jouer les Cassandre.
528 beaucoup de gens qui adorent jouer les Cassandre. Ce sont d’ailleurs généralement les mêmes — vous le noterez — qui annonc
529 ces « mécanismes désastreux » qui nous menacent. Ce n’est pas vous que j’étonnerai en disant qu’il y en a beaucoup et qu’
530 ’il y en a beaucoup et qu’on en a beaucoup parlé. Ce qui m’intéresse moi, c’est de dénoncer la fausseté de la métaphore do
531 gique est une croissance autorégulée ; c’est même ce qui la définit : les plantes et les corps ont leurs chromosomes, leur
532 C’est tout à fait abusivement qu’on a transporté ce terme de croissance dans le domaine des choses matérielles où il n’a
533 faudrait que l’économie s’arrête de croître. Est- ce 10 %, 7 %, 3 % par an ? Personne ne le sait. Or la terre n’est pas in
534 de cela ? Nous, sinon qui d’autre ? C’est bien là ce que je veux dire. L’avenir dépend entièrement de nous ; mis à part le
535 ciété commence quand l’homme se demande : “Qu’est- ce qui va arriver ?” au lieu de se demander : “Que puis-je faire ?” » Pe
536  ! Alors, pour revenir à nos propos sur l’avenir, ce n’est quand même pas Dieu qui remplit sans nous consulter les réservo
537 gramme vaudra son pesant de platine… Alors qu’est- ce qu’on va faire ? Eh bien, personne ne se le demande aujourd’hui, la r
538 s attention, nous aurons l’air de quoi ? Regardez ce qui s’est passé il y a deux mois à New York quand le courant est venu
539 du récit des civilisations, fin de l’Histoire. » Ce n’est tout de même pas à la panne d’essence que vous songez en écriva
540 t puis, après moi, le déluge… » Je vous l’ai dit, ce sont ceux qui annoncent les catastrophes qui les fabriquent. Il est é
541 uisent du plutonium, et avec le plutonium, qu’est- ce qu’on fait ? Des bombes et rien d’autre. Donc, si on vend des central
542 les de retraitement du plutonium à certains pays, ce n’est pas pour autre chose d’imaginable que pour les mettre en possib
543 intestins, je dirai, des mensonges énormes. Comme ce sont souvent des gens très importants et très intelligents, ils ne pe
544 s par exemple. Eh bien, posez la question : « Est- ce qu’il y a une solution au problème des déchets ? » Pas un savant séri
545 it rien, ils continuent à mentir. C’est justement ce qui me frappe dans tout cela : c’est que des gens qui se connaissent
546 la ? Je ne voudrais pas être trop polémique, mais ce que je vais vous dire est couvert par de très hautes autorités scient
547 des fabricants de pièces de centrales nucléaires, ce ne sont pas des experts, ce sont des vendeurs. » Ils étaient tous doc
548 centrales nucléaires, ce ne sont pas des experts, ce sont des vendeurs. » Ils étaient tous docteurs en quelque chose… Je n
549 ne suspecte pas particulièrement la Suisse, mais ce n’est là qu’un exemple pris dans un seul pays. Détrompez-vous, le pro
550 ie nucléaire aux États-Unis ! Inutile de dire que ce sont ces « experts »-là que les gouvernements consultent… Tout cela n
551 et même, parfois, décroître. Alors je dis : « Est- ce que vous comptez envoyer votre électricité nucléaire en Amazonie ou e
552 out le problème. Il n’y a aucun impératif à cela. Ce sont encore des « experts » qui ont inventé cet « impératif » ! Ils n
553 ricité double tous les sept ans. S’il faut suivre ce rythme, ça voudrait dire que d’ici moins de cent ans, il faudrait mul
554 r ? La puissance. La puissance de qui ? La leur ? Ce serait dérisoire. Non, pas la leur. Ce serait en effet dérisoire, mai
555 La leur ? Ce serait dérisoire. Non, pas la leur. Ce serait en effet dérisoire, mais plus facile. Ce qu’ils poursuivent, c
556 . Ce serait en effet dérisoire, mais plus facile. Ce qu’ils poursuivent, chacun dans sa sphère — et même parfois inconscie
557 , agissant comme un roi, n’avait rien pu faire de ce qu’il voulait parce que l’État c’était les fonctionnaires, l’administ
558 onnaires ? Les fonctionnaires ne font qu’incarner ce mythe qui est autrement plus puissant qu’eux. C’est un mythe dévorant
559 é, à partir de Paris ; ils se plaignaient même de ce qu’en approchant des frontières, les carrés ne seraient plus bien rég
560 en a débattu passionnément. Et si vous croyez que ce sont là des divagations, rappelez-vous ce qui s’est passé, chez les e
561 yez que ce sont là des divagations, rappelez-vous ce qui s’est passé, chez les esprits les plus intelligents, au moment de
562  de Dunkerque à Tamanrasset ! » Mais pourquoi est- ce à notre siècle en particulier que vous faites dans votre livre ce pro
563 e en particulier que vous faites dans votre livre ce procès du « mythe de la puissance » avec tant de passion. Tout ce que
564 ythe de la puissance » avec tant de passion. Tout ce que vous venez de dire ne montre-t-il pas que les États-nations, que
565 étant sa propre puissance, c’est en mettant fin à ce mythe de la puissance qu’on mettra fin à la tyrannie de l’État. Je pr
566 dèle ? Eh bien, je pourrais vous citer évidemment ce grand modèle de la démocratie qu’étaient les cités grecques qui se ma
567 r faire des tissus. Le début de la puissance… Est- ce que ces communautés sont vos modèles ? Non, mais elles montrent, expé
568 ue simplement devenir toujours plus grand jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucune possibilité matérielle de prendre son desti
569 nombreux petits cantons, nous avons eu longtemps ce que nous appelons « Landsgemeinde », l’assemblée de canton qui se ten
570 e. » Et la démocratie est dialogue. Peut-être est- ce parce qu’il ressent ce manque que M. Giscard d’Estaing va dîner chez
571 st dialogue. Peut-être est-ce parce qu’il ressent ce manque que M. Giscard d’Estaing va dîner chez l’habitant, ou dialogue
572 a télévision avec des lycéens. Probablement, mais ce n’est encore qu’une intention, et il ne peut y avoir de vraie démocra
573 c’est un vice, une maladie, de la Confédération, ce n’est pas son fonctionnement normal. Pour donner de l’actualité à ces
574 ensions européennes actuelles me paraît terminé ; ce n’est pas une idée que j’ai aujourd’hui. Je l’ai découverte et nous l
575 vons à résoudre d’urgence. Regardez, par exemple, ce qui se passe avec la pollution des eaux. Le Léman, le Rhin, la Manche
576 des gens qui ont fait des palinodies éclatantes, ce qui attire beaucoup l’attention. Mais vous notez qu’aujourd’hui, aprè
577 te ans, ils disent soudain la même chose que moi. Ce qui fait beaucoup d’effet mais ne leur donne pas une grande crédibili
578 À partir de maintenant, il arrivera dans le monde ce que les hommes voudront qu’il arrive. » Et les hommes réfléchissent e
579 st le rôle des intellectuels de les y aider. Mais ce n’est pas facile, car les hommes non plus n’aiment pas changer. Ils c
580 e la crise du pétrole en 1973, qui est le type de ce que j’appelle une catastrophe enseignante ; parce que ça a fait peur
581 réalités du monde moderne au grand public. C’est ce que j’appelle dans mon livre « la pédagogie des catastrophes ». Car i
582 ontinuer à agir à l’abri de tout ça en disant : «  Ce n’est pas moi qui le veux, ce sont les impératifs. » Exactement comme
583 ut ça en disant : « Ce n’est pas moi qui le veux, ce sont les impératifs. » Exactement comme Adam, quand Dieu est venu le
584 pas là. » Et quand Dieu lui a demandé : « Qu’est- ce que tu as fait ? », il a dit : « Ce n’est pas moi, c’est Ève » ; alor
585 dé : « Qu’est-ce que tu as fait ? », il a dit : «  Ce n’est pas moi, c’est Ève » ; alors Dieu a demandé à Ève : « Qu’est-ce
586 est Ève » ; alors Dieu a demandé à Ève : « Qu’est- ce que tu as fait ? » Et Ève a dit : « Ce n’est pas moi, c’est le serpen
587 : « Qu’est-ce que tu as fait ? » Et Ève a dit : «  Ce n’est pas moi, c’est le serpent. » Et le serpent, bien sûr, n’était p
33 1977, Articles divers (1974-1977). L’Avenir est votre affaire (11 octobre 1977)
588 Le sort de l’humanité se décidera en fonction de ce que nous allons choisir. Nous n’avons jamais été dans une situation a
589 ire une bombe avec cinq à six kilos de plutonium. Ce qui permettra à n’importe quel État d’exercer un chantage terrible ;
590 ou trop grands, ils n’ont plus rien à faire dans ce siècle. Je n’accuse pas les gouvernants d’être méchants, mais totalem
591 ruire seize dans un rayon de quarante kilomètres, ce qui est tout simplement dément ! Notez que si vous discutez, dans le
592 alors qu’il a pris conscience de l’impuissance de ce pouvoir ? Car c’est une vérité dont il faudra bien un jour s’aviser :
593 itre à lui seul est éloquent : « Le péril Ford ». Ce texte, publié dans une revue protestante, tomba à l’époque dans le pl
594 besoin humain existant (les Américains trouvaient ce moyen de locomotion bruyant et polluant), mais que Henry Ford a réuss
595 océdé, on devrait toujours se demander : « Qu’est- ce qui arriverait si ça réussissait ? » Et plus prosaïquement encore : «
596 ue 18 % du territoire de la Hollande est bétonné, ce qui est une catastrophe du point de vue écologique. Quand on pense qu
597 onge qui va plus vite que le son », comme il dit, ce somptueux gadget de seize milliards dont les contribuables français e
598 me flatte d’avoir souvent été à contre-courant ! Ce qui est en jeu dans ce livre, comme dans toute mon œuvre, va tout de
599 ent été à contre-courant ! Ce qui est en jeu dans ce livre, comme dans toute mon œuvre, va tout de même bien au-delà d’une
600 nalyse tout en m’obligeant à jeter à la corbeille ce que j’avais écrit. Je ne pouvais pas me donner l’air de prophétiser a
601 ais pas me donner l’air de prophétiser après coup ce qui s’était produit ! En un sens, je suis content de ce long temps de
602 s’était produit ! En un sens, je suis content de ce long temps de maturation qui a été nécessaire, car j’ai pu prendre de
603 de la « gauche » et de la « droite » et découvre ce que nous disions dans les années 1930, au sein du mouvement personnal
604 personnaliste. On dit que l’Europe n’avance pas. Ce n’est pas entièrement vrai, il y a des points positifs : je mentionne
605 st désormais impensable entre des pays européens, ce qui représente un immense progrès par rapport au passé ! Je relèverai
606 ces dernières années, et cela sans bain de sang. Ce n’est pas rien ! Homme de clairvoyance, Denis de Rougemont est égalem
607  ». La terre du xxie siècle sera très exactement ce que nous aurons voulu et c’est à chaque seconde de notre vie présente
34 1977, Articles divers (1974-1977). « Je suis un pessimiste actif » (17 octobre 1977)
608 tous les autres, espérons-le. Ne pas oublier que ce monsieur de 71 ans est directeur du Centre européen de la culture, qu
609 ! J’ai toujours combattu pour le régionalisme, et ce qui me fait plaisir c’est que la réalité commence à me rejoindre ! Je
610 ptimiste aujourd’hui qu’il y a cinq ans. Regardez ce qui mobilise les foules : les mouvements autonomistes, la lutte antin
611 e d’un peuple commence quand on se demande qu’est- ce qui va arriver au lieu de se demander : Qu’est-ce que je vais faire ?
612 ce qui va arriver au lieu de se demander : Qu’est- ce que je vais faire ? » Je ne crois pas que l’homme soit bon mais je cr
613 re une société qui le corrompe le moins possible. Ce qui est grave actuellement c’est que les vrais problèmes ne sont pas
614 es textes de Michel Debré et de Georges Marchais. Ce sont à peu près les mêmes, encore plus cocorico pour Marchais. La Fra
615 ut faire appel au sens de la responsabilité. Mais ce n’est possible que dans de petites communautés. C’est pour cela que j
35 1977, Articles divers (1974-1977). « L’avenir, c’est notre affaire ! » (18 octobre 1977)
616 ’est chargé très rapidement de confirmer lui-même ce diagnostic. La « grande révolution » de France a permis de réaliser u
617 à la Festhalle de Francfort, j’ai vu, j’ai senti ce qu’il faut bien appeler l’âme de la foule. Une fausse communauté née
618 pour un agent allemand chargé de leur faire peur… Ce qui est tragique, c’est que l’esprit jacobin règne encore et qu’on om
619 oyé à faux — de puissance, de grandeur. On oublie ce que j’appelle depuis toujours l’individu libre et responsable. Vous é
36 1977, Articles divers (1974-1977). La fonction et la structure de la ville future (décembre 1977)
620 elle-même. Le Paradis était un jardin. Chassés de ce jardin les hommes errants et anxieux tentent d’abord de se bâtir une
621 les moyens et s’unir sur des finalités communes… Ce n’est pas se trouver juxtaposés, mais vivre en relations dans une ori
622 thode que refaire des villes viables et vivables, ce n’est pas une question d’architecture ni de technologie au premier ch
623 Nous aurons, demain — c’est mon vœu, et celui de ce congrès je l’espère — les villes que leurs citoyens actifs auront vou
37 1977, Articles divers (1974-1977). Demain le soleil (20 décembre 1977)
624 ’hui un grand classique, L’Amour et l’Occident . Ce succès mondial est à l’origine d’un malentendu qu’il a voulu dissiper
625 orze pays, mais toujours avec de faibles tirages. Ce succès n’a jamais été un best-seller. On vient de raconter que j’en a
626 it un peu de bruit à l’époque, mais qui est resté ce qu’on appelle aujourd’hui un groupuscule. Quand la guerre est arrivée
627 e âge, nous serions obligés de la faire, mais que ce ne serait pas notre guerre. Vous discerniez donc des points communs e
628 fférence à cet égard. Une compétition acharnée de ce genre ne peut conduire qu’à la guerre. Elle est inévitable entre des
629 À partir de maintenant, il arrivera dans le monde ce que les hommes voudront qu’il arrive. » Vous n’acceptez pas qu’on se
630 nant « Que puis-je faire ? », plutôt que « Qu’est- ce qui va arriver ? » Vous refusez de voir l’intervention du doigt de Di
631 e trouve trop facile qu’on appelle volonté divine ce qui nous échappe. Que peut l’homme sur son destin ? Par sa science et
632 arriver. La véritable futurologie devrait prévoir ce qui met notre avenir en danger. Ce sont des super-cerveaux, des savan
633 evrait prévoir ce qui met notre avenir en danger. Ce sont des super-cerveaux, des savants rassemblés dans de doctes sémina
634 ns de doctes séminaires qui doivent donc imaginer ce que demain pourrait être ? Le club de Rome le fait de façon admirable
635 y a des futurologues auxquels personne ne pense, ce sont des hommes sensibles. Plutôt que de les tourner en dérision, il
636 hardie est de mon ami Bertrand de Jouvenel. Tout ce qui n’est pas calculable reste prévisible par la sensibilité. Ces ind
637 je pense que le Führer est l’exemple éclatant de ce que les futurologues étaient impuissants à deviner. Les conséquences
638 du passage d’Hitler sur la terre, surtout lorsque ce passage a croisé la progression de l’automobile. À première vue, cett
639 ur. Il y a d’abord le jeune Henry Ford qui trahit ce rêve d’adolescent (une voiture pour être libre) lorsqu’il s’aperçoit
640 éalisées pour plaire à l’auto et au pétrole. Mais ce pétrole indispensable se trouvait enfoui principalement dans le sous-
641 Hitler apparaît-il dans les sables ? Hitler a eu ce succès gigantesque en Allemagne parce qu’il a senti que, dans le mond
642 ommunauté. Nos sociétés n’avaient pas de raison à ce besoin et Hitler a apporté la sienne, qui était aberrante, à l’Allema
643 bituelles contraint à l’utilisation du nucléaire, ce mot qui sème l’épouvante à tort ou à raison. Les parties de campagne
644 soleil. C’est impossible. C’est un slogan. Qu’est- ce que le progrès selon vos vœux ? J’appelle progrès ce qui est favorabl
645 que le progrès selon vos vœux ? J’appelle progrès ce qui est favorable à un meilleur épanouissement des personnes. Comment
646 ’est servi de son nom pour baptiser le plutonium, ce n’est pas par hasard. Selon la mythologie, Pluton s’enfouit sous la t
38 1977, Articles divers (1974-1977). Écologie, régionalisme, fédéralisme : l’avenir selon Denis de Rougemont (30 décembre 1977)
647 la crise que traverse aujourd’hui le monde et de ce qu’il appelle la « religion de la croissance : ceux qui croient qu’on
648 roissance : ceux qui croient qu’on peut continuer ce qu’on a fait depuis vingt-cinq ans, sont en pleine utopie au mauvais
649 agissent entre eux sont aujourd’hui bloqués : que ce soit l’énergie, le chômage, l’inflation. La crise de l’Occident mondi
650 Le fossé s’est accru depuis la décolonisation. ⁂ Ce que Denis de Rougemont a apporté de neuf, c’est d’avoir démontré que
651 souverain, c’est toujours du peuple qu’on parle. Ce sont les États-nations et eux seuls, qui ont géré la terre. Ils ont g
652 le sont les caractéristiques de la droite, qu’est- ce qui la différencie du Parti communiste français ? Il y a un véritable
653 n espoir. Les choses peuvent aller très vite. Car ce mouvement n’est-il pas le seul aujourd’hui à pouvoir mobiliser des ce