1
u Conseil en matière d’éducation et de culture ».
Je
crois qu’il serait juste d’ajouter à ces dispositions techniques la d
2
, pour ne citer que les plus évidents et ceux que
j’
ai le mieux connus. Ce n’est pas rien, mais il faut bien admettre que
3
uissance, comme l’a décrit Lewis Mumford et comme
je
n’ai cessé de le dénoncer depuis que je m’occupe de l’Europe. Nous vo
4
et comme je n’ai cessé de le dénoncer depuis que
je
m’occupe de l’Europe. Nous voici, nous les douze invités à la table —
5
comme je n’ai cessé de le dénoncer depuis que je
m’
occupe de l’Europe. Nous voici, nous les douze invités à la table — et
6
e invités à la table — et vous tous qui entrerez,
je
l’espère, dans le débat — aux prises avec une question simple tout au
7
s rouge et blanc de la voie barrée, de l’impasse.
Je
n’en dirai pas plus sur ce chapitre : tout le monde a lu Forrester ou
8
ites à la croissance (matérielle) reste à écrire.
Je
l’intitulerais pour ma part Rapport sur la dégradation des relations
9
n’ambitionnaient rien que d’être démenties ! Oui,
je
sens parmi nous quelque chose qui me paraît beaucoup plus inquiétant
10
nties ! Oui, je sens parmi nous quelque chose qui
me
paraît beaucoup plus inquiétant que les vues apocalyptiques des écolo
11
question pure, béante, qui se posait du temps de
ma
jeunesse à quelques-uns, et qui a subitement éclaté dans les universi
12
1968 : Que faisons-nous là ? Quel est le sens de
ma
vie dans cette société qui n’en est pas une, puisqu’elle n’est plus u
13
qui anime Le Capital est celle de la justice, ou
je
n’y ai rien compris. C’est la justice, non la nécessité, qui est le v
14
e la personne ? Il semble qu’à une telle question
je
ne pourrais répondre que pour moi, et pourtant j’oserai dire que la p
15
e telle question je ne pourrais répondre que pour
moi
, et pourtant j’oserai dire que la personne c’est l’œuvre essentielle
16
je ne pourrais répondre que pour moi, et pourtant
j’
oserai dire que la personne c’est l’œuvre essentielle de chacun, qui c
17
re voie, et frayer son propre sentier. Partant de
moi
, individu sans précédent historique ni physiologique, pour rejoindre
18
siologique, pour rejoindre les fins dernières qui
m’
appellent, je ne puis pas aller par la route nationale : elle conduira
19
our rejoindre les fins dernières qui m’appellent,
je
ne puis pas aller par la route nationale : elle conduirait au mieux à
20
se pose, et se repose à tout instant, à savoir si
je
découvre mon chemin tel qu’il était prévu pour moi depuis toujours, o
21
se repose à tout instant, à savoir si je découvre
mon
chemin tel qu’il était prévu pour moi depuis toujours, ou si je l’inv
22
je découvre mon chemin tel qu’il était prévu pour
moi
depuis toujours, ou si je l’invente en osant y avancer sans l’avoir v
23
qu’il était prévu pour moi depuis toujours, ou si
je
l’invente en osant y avancer sans l’avoir vu. Ce que je sais, c’est q
24
nvente en osant y avancer sans l’avoir vu. Ce que
je
sais, c’est qu’il n’existera qu’autant que j’aurai le courage d’y mar
25
que je sais, c’est qu’il n’existera qu’autant que
j’
aurai le courage d’y marcher dans la nuit. Voilà qui implique la foi,
26
t de convenance entre ses démarches et cette fin.
Je
conçois que l’on puisse n’y pas croire. Que l’on puisse nier l’existe
27
roire. Que l’on puisse nier l’existence de ce que
j’
appelle la personne, la traiter de fantôme métaphysique, d’illusion ve
28
ue, d’illusion verbale, de concept superflu. Mais
j’
observe que ceux qui la nient ont commencé par répéter, après Nietzsch
29
ujet, et qu’on répond comme Ulysse au Cyclope : «
Je
me nomme personne, je n’y suis pas », c’est qu’on prépare un mauvais
30
t, et qu’on répond comme Ulysse au Cyclope : « Je
me
nomme personne, je n’y suis pas », c’est qu’on prépare un mauvais cou
31
comme Ulysse au Cyclope : « Je me nomme personne,
je
n’y suis pas », c’est qu’on prépare un mauvais coup, ou qu’on tente d
32
On peut très bien ne pas croire à la personne. Et
je
ne cherche pas, ici, à vous convaincre qu’elle existe, mais simplemen
33
les plus diaboliquement variées de l’aliénation,
j’
ose vous demander ce qui, selon vous, est aliéné ? Si ce n’est pas la
34
, le détourner de sa vocation — et c’est cela que
j’
appelle le péché. Le problème de l’aliénation, essentiellement lié à c
35
tion, essentiellement lié à celui de la personne,
me
paraît se ramener au problème du pouvoir : pouvoir sur soi ou pouvoir
36
pouvoir : pouvoir sur soi ou pouvoir sur autrui ?
J’
ai fait allusion tout à l’heure au dilemme Puissance ou Liberté. Or, c
37
ux termes désignent deux formes de pouvoir, qu’il
m’
importe de préciser. Le pouvoir sur autrui, c’est la Puissance, et le
38
ion personnelle. Mais cette vocation personnelle,
je
le répète, nous est le plus souvent inconnue. La découvrir comme si o
39
le type même de l’aliénation : c’est la dictée de
mon
aventure individuelle par l’autre, l’étranger, l’alien comme dit l’an
40
us, elle crée tant de liens avec ce qui n’est pas
ma
vocation, que toutes les religions de la terre l’ont condamnée : « He
41
donc être qu’un acte : le prochain est celui que
je
puis aider en fait. Mais la notion même de prochain suppose quelque p
42
rt, et ce qui lie, engage, enracine d’autre part.
J’
ai dit que la liberté de la personne implique sa responsabilité, et qu
43
e n’est pas moins vraie. La vocation dont l’appel
me
libère, c’est elle aussi qui me relie à mes prochains dans la cité, p
44
tion dont l’appel me libère, c’est elle aussi qui
me
relie à mes prochains dans la cité, parce que c’est parmi eux, avec e
45
’appel me libère, c’est elle aussi qui me relie à
mes
prochains dans la cité, parce que c’est parmi eux, avec eux et pour e
46
parmi eux, avec eux et pour eux, autant que pour
moi
, qu’elle va peut-être se réaliser. Pas de liberté réelle pour un irre
47
créer si l’on veut que la personne s’épanouisse :
j’
y vois la tâche principale de la génération qui monte. J’y vois aussi
48
s la tâche principale de la génération qui monte.
J’
y vois aussi la condition de toute union possible de l’Europe. J’ai di
49
la condition de toute union possible de l’Europe.
J’
ai dit souvent mon scepticisme à l’égard de l’Europe des États, que j’
50
oute union possible de l’Europe. J’ai dit souvent
mon
scepticisme à l’égard de l’Europe des États, que j’ai nommée une « am
51
scepticisme à l’égard de l’Europe des États, que
j’
ai nommée une « amicale des misanthropes » — quelque chose qu’on peut
52
donc à pratiquer la seule méthode capable, selon
moi
, d’unir nos peuples et de sauver nos libertés. C’est à cause de cela,
53
libertés. C’est à cause de cela, finalement, que
je
suis venu une fois de plus, ici, parler de l’Europe, de son union, et
54
uté retrouvée. Voilà le but. L’atteindrons-nous ?
J’
ai toujours estimé que nous ne sommes pas au monde — ni vous ni moi —
55
timé que nous ne sommes pas au monde — ni vous ni
moi
— pour essayer de deviner l’avenir. C’est à le faire que nous sommes
56
us rencontrés ? Rien de plus difficile à établir.
J’
ai tenté récemment de confronter mes souvenirs avec ceux d’Alexandre M
57
ile à établir. J’ai tenté récemment de confronter
mes
souvenirs avec ceux d’Alexandre Marc, mais sur ce point, du moins, no
58
se rappelle très bien certains détails précis — «
Je
t’entends encore me dire… » — mais les détails sont différents… Je do
59
n certains détails précis — « Je t’entends encore
me
dire… » — mais les détails sont différents… Je donnerai donc ici ma v
60
re me dire… » — mais les détails sont différents…
Je
donnerai donc ici ma version (qui est la bonne) telle que je l’ai pub
61
les détails sont différents… Je donnerai donc ici
ma
version (qui est la bonne) telle que je l’ai publiée dans le Journal
62
donc ici ma version (qui est la bonne) telle que
je
l’ai publiée dans le Journal d’une époque, p. 93 et 94 : Chez Charl
63
p. 93 et 94 : Chez Charles Du Bos à Versailles,
j’
avais rencontré un personnage d’aspect massif, courtois et souriant, d
64
de « rigueur doctrinale et révolutionnaire ». Il
me
remit un manifeste de deux pages dont cette phrase me frappa, tapée e
65
emit un manifeste de deux pages dont cette phrase
me
frappa, tapée en majuscules : Ni individualistes ni collectivistes, n
66
d’un coup : « Tu as de la chance, c’est l’âge de
mon
fils ! Tiens, voilà tout ce que tu mérites [un grand coup de pied] et
67
e que tu mérites [un grand coup de pied] et fiche-
moi
le camp ! ») Sa famille avait fui en Allemagne. À Fribourg-en-Brisgau
68
olent qui paraissaient dans la revue Plans, où il
m’
introduisit bientôt. C’est par lui que j’ai connu — ou reconnu — le no
69
s, où il m’introduisit bientôt. C’est par lui que
j’
ai connu — ou reconnu — le nom même du personnalisme et les rudiments
70
personnalisme et les rudiments d’une doctrine que
ma
récente découverte de la théologie barthienne me préparait à accueill
71
ma récente découverte de la théologie barthienne
me
préparait à accueillir comme une expression adéquate de mes certitude
72
ait à accueillir comme une expression adéquate de
mes
certitudes naissantes. Et c’est aussi par l’entremise de Marc, je pen
73
issantes. Et c’est aussi par l’entremise de Marc,
je
pense, que je rencontre peu de temps après Emmanuel Mounier, qui prép
74
’est aussi par l’entremise de Marc, je pense, que
je
rencontre peu de temps après Emmanuel Mounier, qui préparait Esprit
75
le faible élément d’incertitude qui subsiste sur
ma
première rencontre avec Alexandre Marc s’accentue fortement quand il
76
ndre Marc s’accentue fortement quand il s’agit de
mes
premiers contacts avec Mounier, qui fondait alors Esprit , avec Dand
77
vec Philippe Lamour et sa revue Plans, à laquelle
je
collabore en 1931. Une seule chose sûre et certaine dans tout cela :
78
leurs animateurs, et cela durant une période que
je
puis facilement délimiter par deux repères personnels. Lorsque je m’i
79
nt délimiter par deux repères personnels. Lorsque
je
m’installe à Paris, à l’automne de 1930, non seulement aucun de ceux
80
délimiter par deux repères personnels. Lorsque je
m’
installe à Paris, à l’automne de 1930, non seulement aucun de ceux que
81
’automne de 1930, non seulement aucun de ceux que
je
viens de citer n’est connu du grand public — ce qui est normal, ils o
82
ier. Ce « front commun » ne durera pas au-delà de
ma
« présentation des jeunes groupes révolutionnaires ». Il n’importe :
83
ants et au capitalisme en crise. Mais ce dont il
m’
importe, ici, de témoigner, c’est du rôle de pionnier, d’inventeur d’i
84
e Marc. ⁂ Que nous nous soyons rencontrés grâce à
mon
ami Max Dominicé, alors pasteur à Belleville, ou (comme je le crois p
85
x Dominicé, alors pasteur à Belleville, ou (comme
je
le crois plutôt) chez Charles Du Bos, profond et précieux critique ca
86
cas, nos chemins se croisaient au point précis où
j’
éprouvais le besoin de dépasser — sans rien en sacrifier d’ailleurs —
87
r — sans rien en sacrifier d’ailleurs — à la fois
mes
récentes certitudes théologiques et ma passion de l’écriture en soi,
88
à la fois mes récentes certitudes théologiques et
ma
passion de l’écriture en soi, de les dépasser ou transcender par « un
89
une présence enfin qui soit un acte », ainsi que
je
l’écrirai un an plus tard — et c’est, je crois, la première expressio
90
insi que je l’écrirai un an plus tard — et c’est,
je
crois, la première expression de l’engagement, terme dont d’autres on
91
ment, terme dont d’autres ont abusé depuis. Qu’on
me
pardonne, ici, quelques mots sur moi-même, qui me paraissent nécessai
92
me pardonne, ici, quelques mots sur moi-même, qui
me
paraissent nécessaires pour mieux situer le point de départ et le cha
93
on dit aujourd’hui, mais sentant la nécessité de
me
faire une morale personnelle, dont j’allais chercher le modèle dans l
94
écessité de me faire une morale personnelle, dont
j’
allais chercher le modèle dans la biographie de Goethe ; oscillant ent
95
entre les extrêmes de Pascal et de Rimbaud, tout
me
portait à déboucher sur une action, fût-elle spirituelle d’abord, au-
96
u-delà de la littérature. Alexandre Marc fut pour
moi
l’initiateur à la réalité politique. (Avant cela, mes options politiq
97
l’initiateur à la réalité politique. (Avant cela,
mes
options politiques s’étaient bornées à d’acerbes discussions avec les
98
ions avec les maurrassiens de Suisse romande, qui
me
traitaient de communiste, et à des manifestations de rue en faveur de
99
estations de rue en faveur de Sacco et Vanzetti.)
Mon
premier article publié à Paris s’intitulait « Le péril Ford », mon pr
100
le publié à Paris s’intitulait « Le péril Ford »,
mon
premier petit livre Les Méfaits de l’instruction publique : anticap
101
mocratie », bourgeoise ou stalinienne d’ailleurs,
j’
inclinais vers un anarchisme fort dépourvu de prolongements concrets…
102
ts concrets… Les formules du petit manifeste que
me
remit Alexandre Marc m’apportaient donc en clair l’énoncé le plus sim
103
es du petit manifeste que me remit Alexandre Marc
m’
apportaient donc en clair l’énoncé le plus simple de ce que je tentais
104
t donc en clair l’énoncé le plus simple de ce que
je
tentais péniblement de décrypter, et croyais déjà sans le savoir. ⁂ I
105
le savoir. ⁂ Il y a plus de quarante ans de cela.
Je
le retrouve aujourd’hui inchangé dans les données de sa personne mora
106
rure morale. Pour l’apparence et le comportement,
je
l’ai un peu décrit plus haut. J’ajouterai à ces quelques traits : qu’
107
le comportement, je l’ai un peu décrit plus haut.
J’
ajouterai à ces quelques traits : qu’il portait à Versailles des guêtr
108
l’époque pour peu qu’on surveillât sa mise, mais
je
le mentionne pour attester ma bonne mémoire ; et que, s’il riait haut
109
illât sa mise, mais je le mentionne pour attester
ma
bonne mémoire ; et que, s’il riait haut et fort, par éclats brusques,
110
t parfaitement homologue au paradoxe fédéraliste.
Je
lis dans les travaux récents publiés sur l’Ordre nouveau que le Club
111
igieuses et une section de recherches politiques.
Je
n’ai souvenir que de la première. Nous étions une trentaine dans une
112
Nous étions une trentaine dans une salle nue qui
me
rappelait mes salles d’écoles primaires. Il y avait là des orthodoxes
113
une trentaine dans une salle nue qui me rappelait
mes
salles d’écoles primaires. Il y avait là des orthodoxes, Nicolas Berd
114
ain que nous nous sommes connus grâce à Marc, qui
m’
avait d’abord introduit à la revue Plans, puis invité au colloque de F
115
paraître. Il contient des articles de Marc et de
moi
. C’est dire que depuis plusieurs mois, nous travaillons avec Mounier,
116
icles que Marc, Dandieu, Aron, Dupuis, Prévost ou
moi
avons pu lui donner, elle reste marquée avant tout par le catholicism
117
se d’inquisiteurs ». Or, il sait bien que Marc et
moi
, qui faisons partie de sa première équipe de rédacteurs, appartenons
118
c le catholicisme et Péguy ; et en dépit aussi de
mes
sérieuses divergences avec le nietzschéisme antichrétien qui anime al
119
. Marc aura son bureau à Esprit de 1932 à 1934.
Je
m’occuperai ensuite, dès 1936, de la partie littéraire de la revue et
120
arc aura son bureau à Esprit de 1932 à 1934. Je
m’
occuperai ensuite, dès 1936, de la partie littéraire de la revue et ne
121
e page du carnet intime tenu par Mounier fin 1932
me
paraît bien révélatrice des causes du conflit tour à tour déclaré ou
122
2 Quels sont ces articles « venant de l’ON » ?
J’
en trouve trois : Jean-Pierre Cartier (c’était moi) sur le procès d’un
123
J’en trouve trois : Jean-Pierre Cartier (c’était
moi
) sur le procès d’un objecteur de conscience, et deux chroniques : « L
124
la période de lancement d’ Esprit . En revanche,
je
suis témoin qu’à quatre ou cinq reprises l’intervention de Marc a seu
125
uestion de doctrine ou sur une saute d’humeur. Et
je
fus certes le premier à l’appuyer, comme je fus le seul à collaborer
126
r. Et je fus certes le premier à l’appuyer, comme
je
fus le seul à collaborer régulièrement aux deux revues, de leur numér
127
1 jusqu’à la guerre. Mais le fait est que Marc et
moi
étions fort loin de soupçonner qu’en 1936, l’année même de la publica
128
la liberté, Mounier pouvait écrire à Berdiaev :
Je
vous expliquerai moi-même, ou Maritain si vous le voyez avant, ce con
129
ons admettre.3 Ce n’est pas sans tristesse que
je
transcris ces phrases d’une injustice proprement aberrante4. À distan
130
’une injustice proprement aberrante4. À distance,
j’
en viens à penser que la seconde opinion de Mounier sur l’ON ne saurai
131
ne réaction de surcompensation à la première, que
j’
ai citée plus haut (conversation avec Maritain). Débordé sur sa gauche
132
de Dautry à la SNCF. Seul non-Français du groupe,
je
dirige les collections d’une petite maison d’édition protestante, don
133
s d’une petite maison d’édition protestante, dont
je
suis censé vivre, tout en écrivant pour la NRF , Esprit , L’Ordre
134
a NRF , Esprit , L’Ordre nouveau , et publiant
mes
premiers livres. Alexandre Marc a travaillé chez Hachette, mais que f
135
fait-il et de quoi vit-il en 1933 ? Voilà ce que
je
n’arrive pas à me rappeler, et l’on se voyait à peu près tous les jou
136
i vit-il en 1933 ? Voilà ce que je n’arrive pas à
me
rappeler, et l’on se voyait à peu près tous les jours… Du point de vu
137
(et peut-être Dupuis) sont catholiques déclarés ;
moi
, protestant d’école barthienne. Arnaud Dandieu d’origine catholique,
138
Idée chrétienne peut-être, mais russe assurément.
Je
donnerai l’exemple des titres. En avril 1936, paraît la brochure ON
139
ou démission de la France. Quatre ans plus tard,
je
publierai à Neuchâtel Mission ou démission de la Suisse . En novembr
140
épigraphe à un article de L’ON cette phrase de
moi
: « Une politique à hauteur d’homme », et en 1948 paraît son livre in
141
et de propriété communautaire. ⁂ Et pourtant, si
je
relis — comme je viens de le faire depuis quelques jours — ce qui me
142
communautaire. ⁂ Et pourtant, si je relis — comme
je
viens de le faire depuis quelques jours — ce qui me reste des numéros
143
viens de le faire depuis quelques jours — ce qui
me
reste des numéros de L’Ordre nouveau , de 1933 à 1938, et de la coll
144
d’octobre 1932 jusqu’à l’interdiction par Vichy,
je
constate que la plupart des thèmes juridiques et politiques de la pen
145
t sur la postérité pour honorer Marc l’inventeur,
je
voudrais relever quelques-uns de ces thèmes — illustrés de citations
146
économique, administrative, etc.), recherche que
je
me vois amené à reprendre aujourd’hui en relation avec ma théorie des
147
onomique, administrative, etc.), recherche que je
me
vois amené à reprendre aujourd’hui en relation avec ma théorie des ré
148
is amené à reprendre aujourd’hui en relation avec
ma
théorie des régions fonctionnelles. Les deux passages que je vais cit
149
des régions fonctionnelles. Les deux passages que
je
vais citer (non sans scrupules, car ils souffriront d’être privés de
150
friront d’être privés de l’éclairage du contexte)
me
paraissent aujourd’hui correspondre à la problématique la plus actuel
151
) ⁂ Tout, dans ces textes, annonce « l’Europe »,
j’
entends la lutte pour la fédération de l’Europe, où nous nous retrouve
152
n de l’Europe, où nous nous retrouverons, Marc et
moi
, côte à côte, dès le congrès de Montreux en 1947. Mais ce n’est pas s
153
ice de la pensée de Marc dans les années 1930 qui
me
frappe à la relecture, c’est aussi le fait que Marc soit venu à l’Eur
154
s humain qu’en fonction de l’attitude de l’homme.
Je
conclus pour ma part que s’il y a un avenir, et qu’il demeure ou rede
155
re Marc est promise à beaucoup d’avenir. 1. Cf.
mon
essai « Adieu, beau désordre… », publié en mars 1926 par la Revue de
156
., p. 174. 4. À quelques semaines de là, Mounier
me
rend visite à Francfort, et ne me souffle mot de cette grande affaire
157
de là, Mounier me rend visite à Francfort, et ne
me
souffle mot de cette grande affaire. Mieux encore : dans le numéro d’
158
dans le numéro d’octobre 1936 de L’Ordre nouveau,
je
salue les « solides promesses d’accord » que nous apporte le Manifest
159
loue son nouvel ouvrage, Dictature de la liberté.
Je
donne pour ma part cinq grands articles et deux notes critiques à Es
160
temps Léon Blum a publié À l’Échelle humaine. 8.
Je
voudrais dédier cette citation aux ouvriers de Lip, qui poursuivent l
161
s de Lip, qui poursuivent leur lutte, pendant que
j’
écris ceci, dans la pure tradition de Proudhon, leur concitoyen franc-
162
Quelques-unes des choses curieuses qui
me
sont arrivées (1974)m Deux téléphones Octobre 1930 Je viens de pas
163
arrivées (1974)m Deux téléphones Octobre 1930
Je
viens de passer ma licence. On m’offre un poste de professeur en Chin
164
Deux téléphones Octobre 1930 Je viens de passer
ma
licence. On m’offre un poste de professeur en Chine, mais c’est à Par
165
es Octobre 1930 Je viens de passer ma licence. On
m’
offre un poste de professeur en Chine, mais c’est à Paris que se passe
166
vraie vie » pour un écrivain. L’ennui, c’est que
je
n’y connais personne qui touche de près ou de loin à la vie littérair
167
que rien ne permet de prévoir. Cet après-midi-là,
j’
ai flâné dans Neuchâtel, librairie Delachaux, « tour de ville », et to
168
cinq heures, la certitude qu’il faut rentrer chez
moi
dare-dare. Tram n° 5. Je saute de la voiture encore en marche à l’arr
169
qu’il faut rentrer chez moi dare-dare. Tram n° 5.
Je
saute de la voiture encore en marche à l’arrêt facultatif d’Areuse et
170
if d’Areuse et cours vers la maison. Au moment où
je
passe le grand portail, je vois ma mère à la fenêtre : « Dépêche-toi,
171
a maison. Au moment où je passe le grand portail,
je
vois ma mère à la fenêtre : « Dépêche-toi, téléphone de Paris ! » On
172
. Au moment où je passe le grand portail, je vois
ma
mère à la fenêtre : « Dépêche-toi, téléphone de Paris ! » On m’offrai
173
enêtre : « Dépêche-toi, téléphone de Paris ! » On
m’
offrait un job de directeur littéraire d’une maison d’éditions protest
174
pouvait être prise dès le lendemain, mais serais-
je
candidat ? Il fallait une réponse immédiate… Trois mois plus tard je
175
llait une réponse immédiate… Trois mois plus tard
je
commençais mon métier d’éditeur, à Clamart, et j’entrais dans la vie
176
nse immédiate… Trois mois plus tard je commençais
mon
métier d’éditeur, à Clamart, et j’entrais dans la vie littéraire de P
177
je commençais mon métier d’éditeur, à Clamart, et
j’
entrais dans la vie littéraire de Paris, mieux encore, dans le mouveme
178
ir de l’Occident, politique et social. 5 mai 1941
J’
étais allé passer le week-end à Long Island, et le dimanche matin déjà
179
eek-end à Long Island, et le dimanche matin déjà,
j’
annonce subitement à mes hôtes que je dois rentrer à New York pour une
180
et le dimanche matin déjà, j’annonce subitement à
mes
hôtes que je dois rentrer à New York pour une affaire pressante. En v
181
matin déjà, j’annonce subitement à mes hôtes que
je
dois rentrer à New York pour une affaire pressante. En vérité j’ignor
182
à New York pour une affaire pressante. En vérité
j’
ignorais quelle affaire, mais je sentais qu’il fallait rentrer. Je mon
183
ssante. En vérité j’ignorais quelle affaire, mais
je
sentais qu’il fallait rentrer. Je monte l’escalier quatre à quatre, j
184
e affaire, mais je sentais qu’il fallait rentrer.
Je
monte l’escalier quatre à quatre, j’ouvre ma porte : le téléphone son
185
ait rentrer. Je monte l’escalier quatre à quatre,
j’
ouvre ma porte : le téléphone sonnait. C’est un ami suisse qui vient d
186
rer. Je monte l’escalier quatre à quatre, j’ouvre
ma
porte : le téléphone sonnait. C’est un ami suisse qui vient de quitte
187
après-midi, et sans doute aussitôt repourvue. Si
je
vais me présenter dès demain matin, j’ai les plus grandes chances. J’
188
idi, et sans doute aussitôt repourvue. Si je vais
me
présenter dès demain matin, j’ai les plus grandes chances. J’y suis a
189
ourvue. Si je vais me présenter dès demain matin,
j’
ai les plus grandes chances. J’y suis allé le lendemain à neuf heures,
190
dès demain matin, j’ai les plus grandes chances.
J’
y suis allé le lendemain à neuf heures, et une demi-heure plus tard, j
191
emain à neuf heures, et une demi-heure plus tard,
je
me mettais à ce travail, nouveau pour moi : écrire des textes d’infor
192
in à neuf heures, et une demi-heure plus tard, je
me
mettais à ce travail, nouveau pour moi : écrire des textes d’informat
193
us tard, je me mettais à ce travail, nouveau pour
moi
: écrire des textes d’information et des commentaires politiques dest
194
nes plus tard, intégré dans la section française,
je
me voyais chargé d’écrire chaque jour deux « shows » de quinze pages
195
plus tard, intégré dans la section française, je
me
voyais chargé d’écrire chaque jour deux « shows » de quinze pages cha
196
ant employé qu’en français — qui allaient devenir
mes
collaborateurs quotidiens. André Breton, Amédée Ozenfant, Georges Dut
197
ques-unes des rencontres qui ont le mieux fécondé
mon
aventure personnelle, vécue bien plus encore que littéraire : amitié
198
phénomène s’est produit à plusieurs reprises dans
ma
vie : voir des lettres en route vers moi, celles que m’apportera dema
199
ises dans ma vie : voir des lettres en route vers
moi
, celles que m’apportera demain matin cet « homme de lettres » qu’est
200
: voir des lettres en route vers moi, celles que
m’
apportera demain matin cet « homme de lettres » qu’est le facteur, sel
201
estion notre image du monde et de l’espace-temps.
J’
en donnerai deux exemples tirés de mon Journal d’une époque . Calw en
202
space-temps. J’en donnerai deux exemples tirés de
mon
Journal d’une époque . Calw en Wurtemberg, 30 juin 1929 Hier soir su
203
ollines, pendant une promenade d’après dîner avec
mes
hôtes, nous parlions de prémonitions, et je venais de raconter commen
204
avec mes hôtes, nous parlions de prémonitions, et
je
venais de raconter comment parfois j’ai su qui m’attendait à la lisiè
205
nitions, et je venais de raconter comment parfois
j’
ai su qui m’attendait à la lisière de cette forêt tel soir d’été, quel
206
je venais de raconter comment parfois j’ai su qui
m’
attendait à la lisière de cette forêt tel soir d’été, quel sujet d’exa
207
rêt tel soir d’été, quel sujet d’examen venait de
m’
être réservé, ou quelles lettres j’allais recevoir le lendemain. Le so
208
amen venait de m’être réservé, ou quelles lettres
j’
allais recevoir le lendemain. Le soir montait autour de nous, des fenê
209
e bourg, et le père Reinecke refusait de croire à
mes
histoires. Soudain j’ai dit : « Voilà que ça me prend, tout justement
210
necke refusait de croire à mes histoires. Soudain
j’
ai dit : « Voilà que ça me prend, tout justement ! Attendez, que je vo
211
mes histoires. Soudain j’ai dit : « Voilà que ça
me
prend, tout justement ! Attendez, que je vous dise… Sur mon assiette
212
à que ça me prend, tout justement ! Attendez, que
je
vous dise… Sur mon assiette de petit déjeuner, demain matin, il y a u
213
tout justement ! Attendez, que je vous dise… Sur
mon
assiette de petit déjeuner, demain matin, il y a une grande enveloppe
214
dans une lumière sobre et mate.) Telle a donc été
ma
« vision » : formats et couleurs très nettement perçus, mais rien de
215
ment. Ce matin, en trouvant les trois lettres sur
mon
assiette, j’ai dit : « C’est bien cela », sans plus d’étonnement que
216
, en trouvant les trois lettres sur mon assiette,
j’
ai dit : « C’est bien cela », sans plus d’étonnement que les autres fo
217
après, n’est pas encore convaincu. Il prétend que
je
savais qui allait m’écrire, et que j’avais d’assez bonnes chances de
218
re convaincu. Il prétend que je savais qui allait
m’
écrire, et que j’avais d’assez bonnes chances de deviner juste. Mais j
219
prétend que je savais qui allait m’écrire, et que
j’
avais d’assez bonnes chances de deviner juste. Mais je n’ai rien devin
220
ais d’assez bonnes chances de deviner juste. Mais
je
n’ai rien deviné du tout, puisque j’ai vu ! C’est là tout l’intérêt d
221
juste. Mais je n’ai rien deviné du tout, puisque
j’
ai vu ! C’est là tout l’intérêt de l’affaire : cette perception soudai
222
e Girard, personnage imprévisible s’il en fut, et
je
n’avais aucune raison d’attendre qu’il m’écrive. Quant à l’enveloppe
223
fut, et je n’avais aucune raison d’attendre qu’il
m’
écrive. Quant à l’enveloppe jaune, elle contenait un journal où l’on r
224
ne, elle contenait un journal où l’on revient sur
mon
pamphlet de l’hiver dernier 15. New York City, 16e rue Ouest, le 16 m
225
a quelques minutes, il est onze heures du matin,
je
me suis dit : « Pourquoi cette lettre est-elle pliée en deux ? Ma boi
226
quelques minutes, il est onze heures du matin, je
me
suis dit : « Pourquoi cette lettre est-elle pliée en deux ? Ma boite
227
« Pourquoi cette lettre est-elle pliée en deux ?
Ma
boite est bien assez profonde pour ce format, le facteur devrait le s
228
pour ce format, le facteur devrait le savoir ! »
Je
voyais une mince enveloppe grise pliée en V derrière la porte sans jo
229
rrière la porte sans jour de la boite métallique.
J’
ai passé ma robe de chambre et suis descendu les trois étages jusqu’au
230
orte sans jour de la boite métallique. J’ai passé
ma
robe de chambre et suis descendu les trois étages jusqu’au vestibule
231
est là, pliée. (Une facture de blanchisseur !) Il
me
semble que la chose ne m’était plus arrivée depuis douze ou treize an
232
e de blanchisseur !) Il me semble que la chose ne
m’
était plus arrivée depuis douze ou treize ans, depuis Calw… Ma faculté
233
arrivée depuis douze ou treize ans, depuis Calw…
Ma
faculté de petite voyance (voyance de détails sans intérêt) ne m’a ja
234
tite voyance (voyance de détails sans intérêt) ne
m’
a jamais servi à rien, sinon à vérifier précisément, chaque fois qu’el
235
cisément, chaque fois qu’elle se manifestait, que
j’
étais déconnecté du monde de l’utile. « Tiens, voilà le diable ! »
236
s de 1942, dans un studio du Village, à New York,
je
décide de me mettre à écrire La Part du diable , et m’enferme sans p
237
ns un studio du Village, à New York, je décide de
me
mettre à écrire La Part du diable , et m’enferme sans plus bouger ni
238
ide de me mettre à écrire La Part du diable , et
m’
enferme sans plus bouger ni plus répondre au téléphone entre mon faute
239
s plus bouger ni plus répondre au téléphone entre
mon
fauteuil et ma table, devant un bloc de papier blanc. Pendant trois j
240
plus répondre au téléphone entre mon fauteuil et
ma
table, devant un bloc de papier blanc. Pendant trois jours et nuits d
241
r blanc. Pendant trois jours et nuits de travail,
j’
ai écrit cinquante pages, un quart du livre. Je n’ai pas adressé un mo
242
l, j’ai écrit cinquante pages, un quart du livre.
Je
n’ai pas adressé un mot à âme qui vive (mangé dans des cafétérias où
243
désigner du doigt le plat qu’on veut), et ce soir
je
décide de « sortir » : des amis m’ont invité « après le dîner ». Je s
244
t), et ce soir je décide de « sortir » : des amis
m’
ont invité « après le dîner ». Je sors. Je vais marcher, me dis-je, ma
245
tir » : des amis m’ont invité « après le dîner ».
Je
sors. Je vais marcher, me dis-je, mais j’ai faim. J’entre au hasard d
246
es amis m’ont invité « après le dîner ». Je sors.
Je
vais marcher, me dis-je, mais j’ai faim. J’entre au hasard dans un pe
247
ité « après le dîner ». Je sors. Je vais marcher,
me
dis-je, mais j’ai faim. J’entre au hasard dans un petit restaurant, a
248
près le dîner ». Je sors. Je vais marcher, me dis-
je
, mais j’ai faim. J’entre au hasard dans un petit restaurant, au bas d
249
îner ». Je sors. Je vais marcher, me dis-je, mais
j’
ai faim. J’entre au hasard dans un petit restaurant, au bas de Madison
250
sors. Je vais marcher, me dis-je, mais j’ai faim.
J’
entre au hasard dans un petit restaurant, au bas de Madison Avenue. La
251
vide. Il doit être environ neuf heures et demie.
J’
hésite sur le seuil : va-t-on me servir encore ? Au fond de la salle,
252
heures et demie. J’hésite sur le seuil : va-t-on
me
servir encore ? Au fond de la salle, deux hommes et une femme attablé
253
emme attablés causent et boivent. L’un des hommes
m’
ayant remarqué s’écrie : « Tiens, voilà le diable ! » Les autres se re
254
ble ! » Les autres se retournent à demi et rient.
J’
ai fui. Pas d’autre restaurant dans ce quartier. Je suis monté sans dî
255
’ai fui. Pas d’autre restaurant dans ce quartier.
Je
suis monté sans dîner chez mes amis. Trois pannes d’électricité
256
t dans ce quartier. Je suis monté sans dîner chez
mes
amis. Trois pannes d’électricité Au moment où je naissais au pr
257
is. Trois pannes d’électricité Au moment où
je
naissais au presbytère de Couvet, Val-de-Travers, canton de Neuchâtel
258
tin, il y eut une panne de quartier, en sorte que
je
ne « vis le jour » qu’à la lueur d’une lampe à pétrole hâtivement all
259
lampe à pétrole hâtivement allumée et que tenait
mon
père. Soixante-sept ans plus tard, je donnais la leçon inaugurale de
260
que tenait mon père. Soixante-sept ans plus tard,
je
donnais la leçon inaugurale de deux instituts universitaires réunis c
261
internationales et celui des études européennes.
Je
décrivais la crise du monde occidental, en progression rapide et calc
262
calculable vers une apocalypse à court terme, et
je
constatais que « nous arrivons au point où le moteur de la croissance
263
ait durer vingt et une minutes, durant lesquelles
je
poursuivis ma conférence sans micro, en éclairant mes notes d’une tor
264
t et une minutes, durant lesquelles je poursuivis
ma
conférence sans micro, en éclairant mes notes d’une torche. Et comme
265
poursuivis ma conférence sans micro, en éclairant
mes
notes d’une torche. Et comme j’en venais à cette phrase : « En vérité
266
ro, en éclairant mes notes d’une torche. Et comme
j’
en venais à cette phrase : « En vérité, à y regarder de plus près, l’É
267
« près » les lumières revinrent. Cet incident ne
me
rappelle pas seulement celui qui a marqué ma naissance, mais une soir
268
t ne me rappelle pas seulement celui qui a marqué
ma
naissance, mais une soirée où nous fûmes « visités » dans notre maiso
269
orable, nous étions six et heureusement accordés,
je
suggérai que l’on jouât aux questions et réponses. Ce jeu, purement t
270
stions, et l’autre ses réponses. De cette soirée,
je
retiens trois échanges remarquables. Il y avait là Jean-Paul de Dadel
271
emarquables. Il y avait là Jean-Paul de Dadelsen,
mon
collaborateur au Centre européen de la culture, que j’ai appelé, aprè
272
llaborateur au Centre européen de la culture, que
j’
ai appelé, après sa mort prématurée en 1957, « le seul grand poète lut
273
n notamment.) Mais c’est le troisième échange qui
m’
amène à rappeler ici cette soirée mémorable. L’un de nous avait écrit
274
enis de, « Quelques-unes des choses curieuses qui
me
sont arrivées », Gymnase cantonal de Neuchâtel : 1873-1973, Neuchâtel
275
les idées générales. Crainte salutaire, ajouterai-
je
aussitôt, puisqu’elle les a si bien gardés jusqu’à ce jour, des utopi
276
ie les empêche d’assumer leur vocation. Lorsqu’il
m’
est arrivé de soutenir quelques idées sur le rôle de la Suisse dans le
277
ns le monde, ou du moins à l’échelle de l’Europe,
je
me suis fait répondre en haut lieu comme dans nos journaux : « Reston
278
le monde, ou du moins à l’échelle de l’Europe, je
me
suis fait répondre en haut lieu comme dans nos journaux : « Restons m
279
tre écoutée, ou bien se couvrirait de ridicule. »
Je
persiste à penser, au contraire, qu’il n’y a pas la moindre proportio
280
ses sont les dépositaires d’une grande idée, dont
je
crains qu’ils la comprennent mal, toujours plus mal, après l’avoir si
281
dans le monde, mais en Suisse même. C’est ce que
je
voudrais marquer d’abord. Nous commettons généralement en Suisse, à
282
sue. Il est faux de répéter, comme les manuels de
mon
enfance, que la Confédération a été fondée par « les trois cantons pr
283
promoteurs, comme ils le peuvent et le doivent à
mon
avis, les Suisses feraient bien de l’appliquer chez eux, et d’en fini
284
devant une confusion morale, typiquement suisse,
je
le crains, au demeurant des plus respectables. Elle consiste à juger
285
tique ou économique en termes de morale courante,
j’
entends de modestie ou de vanité, de prudence bourgeoise ou d’orgueil.
286
mportant que « bien penser ». De ce qui précède,
je
déduirai maintenant deux séries de conséquences politiques. A) Nous
287
e d’un gouvernement européen n’est pas seulement,
je
le répète, la plus rationnelle que l’on puisse imaginer aujourd’hui,
288
au cours de l’an de crise qui s’écoule tandis que
j’
écris. Or, on aura reconnu dans mon esquisse d’exécutif européen tous
289
oule tandis que j’écris. Or, on aura reconnu dans
mon
esquisse d’exécutif européen tous les traits caractéristiques de notr
290
ce politique, qui s’exprime dans la collégialité.
Je
demeure convaincu que l’expérience suisse ne saurait offrir à l’Europ
291
us les autres le prix du Prince Pierre de Monaco,
je
voudrais mettre en valeur celui-ci ; qu’il partage seul avec le prix
292
s, — et ce fut le Prince Rainier III de Monaco. ⁂
Je
ne me lasserai jamais de chanter la gloire du petit État dans la cult
293
t ce fut le Prince Rainier III de Monaco. ⁂ Je ne
me
lasserai jamais de chanter la gloire du petit État dans la culture eu
294
e des genres, en couronnant, premier d’une série (
je
l’espère) l’auteur de ces lignes ? d. Rougemont Denis de, « Philos
295
tte absence de signifié physique. Croyez bien que
je
n’exagère pas : lors d’une Biennale de Venise, on a donné le grand pr
296
me. Tout cela peut inquiéter ou amuser. Tout cela
m’
a souvent passionné. On peut tout faire, on doit tout faire pour peu q
297
, et qu’importe le genre choisi ou que l’on crée.
Je
dis que Théodore Strawinsky, lui, fait de la peinture. Ses huiles, pa
298
opage ses gémissements sur la difficulté, que dis-
je
, sur l’essentielle impossibilité de communiquer : et l’on nous présen
299
ente l’informel comme le résultat de cette crise.
Je
réponds que l’informel ne prouve rien, sinon le refus temporaire et p
300
rmi les œuvres de Théodore Strawinsky, celles que
je
préfère sont par exemple une certaine toute petite nature morte aux t
301
artout la texture de la toile ou de la brique… Et
j’
en fais volontiers l’aveu : devant cette petite toile, devant ces briq
302
balafrées de larges touches de blanc et de bleu,
je
sens s’éveiller dans ma main, ma main à plume, une envie de pinceau !
303
ches de blanc et de bleu, je sens s’éveiller dans
ma
main, ma main à plume, une envie de pinceau ! — l’envie de participer
304
lanc et de bleu, je sens s’éveiller dans ma main,
ma
main à plume, une envie de pinceau ! — l’envie de participer à ce tra
305
i ne tire du sacré sa raison d’être indiscutable,
j’
entends bien : de n’être pas discuté, d’être reçu. L’art et la techniq
306
ettre émouvante du père : « Ton merveilleux livre
m’
est cher infiniment et me donne de la joie. Avec quelle conviction, qu
307
« Ton merveilleux livre m’est cher infiniment et
me
donne de la joie. Avec quelle conviction, quel savoir-faire et quelle
308
s intérêts spirituels » du père… Il se trouve que
j’
écris ces lignes à Venise. Et c’est ici que j’ai vécu l’un des plus ha
309
que j’écris ces lignes à Venise. Et c’est ici que
j’
ai vécu l’un des plus hauts moments de la culture européenne. Après la
310
asilique, du Cantique en l’honneur de saint Marc,
j’
ai vu l’auteur, le plus grand de ce temps, s’incliner et puis comme pl
311
er Théodore Strawinsky dans l’aventure du siècle,
je
prendrai référence du mot figuration en des sens opposés que lui donn
312
des sens opposés que lui donnent trois préfixes.
Je
dirai que le travail du peintre n’a jamais consisté à disposer avec p
313
1974)g h Précisons tout d’abord les termes de
mon
titre. J’emploie le terme de modèle dans son sens scientifique et pas
314
Précisons tout d’abord les termes de mon titre.
J’
emploie le terme de modèle dans son sens scientifique et pas du tout m
315
composer un modèle européen ne signifie pas pour
moi
donner l’Europe en exemple au reste du monde, mais simplement cherche
316
e, seront-elles valables pour le reste du monde ?
Je
n’en sais rien et n’ose pas même le souhaiter : les expériences du pa
317
ormant en communauté modèle. Vingt ans plus tard,
me
voici à la recherche d’une troisième possibilité : aussi loin du repl
318
moyens d’aménager les relations entre nations. ⁂
Je
pars d’une constatation fondamentale que j’essaierai de formuler en u
319
ns. ⁂ Je pars d’une constatation fondamentale que
j’
essaierai de formuler en une seule phrase, que voici : Pour la premièr
320
rmuler une politique de l’homme et de l’humanité.
J’
insiste : ce succès même se traduit par une crise qui remet ou met tou
321
des plus sérieux, Raymond Barre, leur répond — et
je
le cite — que ces réserves sont « pratiquement inépuisables, en dépit
322
ses succès. Et c’est là ce qui doit nous retenir.
Je
ne vais pas résumer ici le fameux rapport du club de Rome, que je sup
323
ésumer ici le fameux rapport du club de Rome, que
je
suppose connu de chacun d’entre vous. Je vous rappellerai seulement q
324
ome, que je suppose connu de chacun d’entre vous.
Je
vous rappellerai seulement que la crise mondiale — et c’est je crois
325
llerai seulement que la crise mondiale — et c’est
je
crois sa formule la plus simple — est née de la volonté typiquement o
326
trente ans plus tard tout le monde se touche, et
je
m’arrête là dans mes calculs, mais d’autres ont été plus loin. Je lis
327
ente ans plus tard tout le monde se touche, et je
m’
arrête là dans mes calculs, mais d’autres ont été plus loin. Je lis da
328
d tout le monde se touche, et je m’arrête là dans
mes
calculs, mais d’autres ont été plus loin. Je lis dans le beau livre d
329
ans mes calculs, mais d’autres ont été plus loin.
Je
lis dans le beau livre de Paul Ehrlich, Population, ressources, envir
330
tre s’allongerait à la vitesse de la lumière. Et
je
fais mienne la sobre conclusion de Paul Ehrlich : De tels calculs de
331
à avoir des ratés*13 très inquiétants… Tout cela,
je
le répète, est assez exactement quantifiable, mesurable et datable. C
332
ogues qu’on dit atteints de sinistrose, mais dont
je
serais tenté de dire qu’ils pèchent au contraire par excès d’optimism
333
r leurs méthodes plus ou moins rigoureuses, elles
me
font bien moins peur que celles dont ils ne parlent pas, et qui sont
334
reprendre ici la critique d’une pareille méthode,
je
me contenterai de citer ce que ses auteurs eux-mêmes en disent. À la
335
rendre ici la critique d’une pareille méthode, je
me
contenterai de citer ce que ses auteurs eux-mêmes en disent. À la pag
336
ermis de prévoir selon les propres dires de Kahn.
J’
en déduis que la méthode ne vaut rien. Les faits déterminants du xxe
337
du territoire, presque tous les futurologues que
je
connais me paraissent pécher également par l’incapacité où ils se tro
338
ire, presque tous les futurologues que je connais
me
paraissent pécher également par l’incapacité où ils se trouvent et pa
339
otre siècle, les deux fléaux majeurs de l’Europe,
je
veux dire l’auto et Hitler. L’aventure totalement imprévisible de l’a
340
de l’auto mériterait une très ample monographie.
Je
suis parfois tenté d’écrire cette épopée, ou cette histoire de fous,
341
our titre : L’Autodestruction d’une civilisation.
Je
ne puis ici qu’en résumer l’intrigue. Tout commence en 1875 (il y a d
342
st-à-dire une machine agricole à moteur. « Ce fut
mon
chemin de Damas », écrit-il cinquante ans plus tard. Depuis l’instant
343
crise monétaire mondiale est due principalement,
m’
expliquent des banquiers, aux milliards de dollars — 16 environ — déte
344
Herman Kahn n’a pas prévu. Une histoire de fous,
je
vous l’ai dit. Et seul peut-être un fou eût pu prévoir son déroulemen
345
utaires, donc du civisme et de la morale sociale.
Je
le trouve aussi à l’origine de la grande crise dénoncée par le club d
346
le fait voir leur procédé de mesure, le PNB (que
je
voudrais appeler Prestige National Brutal) qui ramène tout à l’État-n
347
ins très clairement annoncé, sur la recherche que
je
propose et sur ses directions majeures : nous voyons maintenant ce qu
348
omme il convient quand on présente une recherche,
je
ne saurais anticiper sur ses résultats, ni donc les décrire en détail
349
restez en droit d’attendre, à tout le moins, que
je
vous donne mes hypothèses de travail, et le plan général de mon enquê
350
it d’attendre, à tout le moins, que je vous donne
mes
hypothèses de travail, et le plan général de mon enquête. La critique
351
mes hypothèses de travail, et le plan général de
mon
enquête. La critique de l’État-nation centralisé constitue le point d
352
réerait-on un chaos ? Une anarchie ? C’est ce que
me
disent ceux qui se croient « réalistes ». Et même certains autres, co
353
ion est la réalité par excellence du xxe siècle.
Je
lui réponds : oui, mais le cancer aussi, la pollution aussi, l’État t
354
et les chefs d’État, et c’est là leur hypocrisie.
Je
l’appelle l’amicale des misanthropes. Cela peut se dire, non se faire
355
éenne de demain. Mais attention : les régions que
je
conçois et cherche à repérer, à définir, ne seront pas des mini-États
356
odèle de société fédéraliste dont l’établissement
me
paraît définir la vocation de cette génération, et non seulement la d
357
ette remise en cause est-elle purement fortuite ?
Je
ne pense pas qu’il y ait une crise de la notion de région, mais au co
358
de région ? C’est à partir de l’idée d’Europe que
je
suis parvenu à l’idée de région. J’ai pensé, avec beaucoup de gens, a
359
d’Europe que je suis parvenu à l’idée de région.
J’
ai pensé, avec beaucoup de gens, au lendemain de la guerre, qu’il étai
360
rriver à une union fédérale, ou d’un autre type.
Je
me suis aperçu très vite qu’on ne pourrait pas y arriver à cause de l
361
ver à une union fédérale, ou d’un autre type. Je
me
suis aperçu très vite qu’on ne pourrait pas y arriver à cause de la f
362
t les plus visibles, et les plus brillantes, et à
mon
sens peut-être les moins sérieuses, et les régions qui sont définies
363
iques est peut-être le moins sérieux ? Attention,
j’
ai dit cela dans un sens politique uniquement. Parce que l’on ne peut
364
hénomènes complètement hétérogènes, hétéroclites.
J’
ai très peur que des gens qui voudraient ressusciter les anciennes pro
365
at-nation. Ce qu’il nous faut éviter à tout prix.
Je
pense que faire en Europe 300 mini États-nations, au lieu de 25 États
366
ational » d’une manière absolument insupportable.
J’
écarte donc cette idée de créer des États sur la seule base des langue
367
tats sur la seule base des langues. D’autre part,
j’
ai dit tout à l’heure que la définition d’une région aujourd’hui est b
368
rogressiste, futuriste. Une remarque sur laquelle
je
voudrais insister : les frontières de nos États-nations sont indéfend
369
rcle carré, c’est une impossibilité, c’est ce que
j’
ai appelé souvent « une amicale des misanthropes » : c’est une chose q
370
urs faits sur l’« indépendance totale » du pays !
Je
ne dirai pas que je suis antiaméricain ou que je suis antirusse, il f
371
dépendance totale » du pays ! Je ne dirai pas que
je
suis antiaméricain ou que je suis antirusse, il faut ne pas se trompe
372
Je ne dirai pas que je suis antiaméricain ou que
je
suis antirusse, il faut ne pas se tromper là-dessus. Je pense que la
373
s antirusse, il faut ne pas se tromper là-dessus.
Je
pense que la colonisation est une très mauvaise chose. Je ne pense pa
374
que la colonisation est une très mauvaise chose.
Je
ne pense pas que les Américains et les Russes soient des gens pires q
375
ins et les Russes soient des gens pires que nous,
je
pense que la colonisation est pire que tout. Quand un peuple se met à
376
mment résoudre cette contradiction fondamentale ?
Je
ne pense pas du tout qu’il faille renverser les États-nations, ni qu’
377
Europe d’une manière violente ou révolutionnaire.
Je
pense qu’on peut renverser des voitures dans la rue, qu’on peut renve
378
tre Europe, parallèle, une Europe des réalités. À
mon
sens l’Europe des États-nations est une Europe des mythes, puisqu’ell
379
la souveraineté nationale absolue était un mythe.
Moi
je demande simplement que nous fassions une Europe sur la base des ré
380
ouveraineté nationale absolue était un mythe. Moi
je
demande simplement que nous fassions une Europe sur la base des réali
381
de « mise en place » des organismes régionaux. À
mon
sens, elle symbolise, certainement pas dans votre esprit, mais dans c
382
donnée la tradition centralisatrice sur laquelle
je
n’ai pas besoin d’insister. Les régions au sens réel, devraient être
383
ent de toute consultation des gens sur place. Ça,
je
crois que c’est incontestable. À mon sens, il aurait fallu faire exac
384
ur place. Ça, je crois que c’est incontestable. À
mon
sens, il aurait fallu faire exactement le contraire et on sera bien o
385
un minimum d’organisation administrative, quitte (
je
vais y revenir tout à l’heure) à ce que l’on organise des régions dif
386
européenne ». Qu’est-ce que ça veut dire ? Quand
je
pousse un peu les gens qui défendent ce point de vue, ils finissent p
387
qui défendent ce point de vue, ils finissent par
me
dire « il faut qu’une région en France soit compétitive avec un Land
388
e soit compétitive avec un Land allemand ». Alors
je
leur dis : « avec quel Land ? » Par exemple avec le Land de Bavière,
389
xiste, pouvons-nous créer et animer des régions ?
Je
pense qu’il faut être bien conscient des finalités qu’on donne à la c
390
des régions. Pourquoi veut-on faire des régions ?
J’
ai dit l’avantage des petites communautés, mais personne n’a jamais vo
391
tyrannie, l’inconsistance des relations civiques.
Je
pense que cela mène aussi à la criminalité, la délinquance, et pas se
392
et voilà le principal motif de faire des régions.
Je
dis que les États-nations sont trop petits à l’échelle internationale
393
s communes devraient-elles reprendre le pouvoir ?
Je
ne suis pas du tout d’accord avec le terme « prendre le pouvoir ». Et
394
le terme « prendre le pouvoir ». Et c’est là que
je
me sépare radicalement des marxistes. Ils croient qu’une fois leur Pa
395
terme « prendre le pouvoir ». Et c’est là que je
me
sépare radicalement des marxistes. Ils croient qu’une fois leur Parti
396
question est réglée à partir de ce moment-là. Or,
je
voudrais faire observer ceci : il y a au moins deux types complètemen
397
mmun avec ITT ou les pétroliers ? Unilever, elle,
me
paraît entre les deux ; Unilever n’est pas liée à des histoires milit
398
a pas seulement des histoires militaires… Aussi,
je
vous demande de bien vouloir vous prononcer sur la liberté des gouver
399
ir vous prononcer sur la liberté des gouvernants,
je
pense plus particulièrement à un cas récent : la Belgique face aux pé
400
sément, vis-à-vis des multinationales du type que
j’
appellerai colonisateur, il s’agit de trouver un pouvoir qui pourrait
401
nter et qui n’y cherchent que leur profit. Ce que
je
dis là ne vise pas à exonérer toutes les multinationales, mais à augm
402
r régional quelconque, d’une autonomie régionale.
Je
n’insiste pas tellement sur le mot « pouvoir régional », qui évoquera
403
e allusion au célèbre rapport du club de Rome qui
m’
a fait très forte impression quand j’en ai eu connaissance, sous la fo
404
de Rome qui m’a fait très forte impression quand
j’
en ai eu connaissance, sous la forme d’un texte de 20 pages dactylogra
405
de Rome signé par les Meadows. Tout d’un coup, ça
m’
a révélé une chose à laquelle je n’avais jamais pensé : à savoir qu’il
406
out d’un coup, ça m’a révélé une chose à laquelle
je
n’avais jamais pensé : à savoir qu’il y a deux sens au mot « croissan
407
« croissance », qui sont absolument différents —
je
dirais presque antinomiques — en tous cas qu’il est très dangereux de
408
ier lieu les gestionnaires de notre civilisation.
Je
m’explique : il faut être absolument clair là-dessus. La croissance d
409
lieu les gestionnaires de notre civilisation. Je
m’
explique : il faut être absolument clair là-dessus. La croissance du v
410
s qu’on puisse faire sur le choix des paramètres,
je
n’ai jamais vu un avertissement aussi brutal, aussi justement pensé e
411
eu un impact comparable sur une société humaine.
J’
ai eu de vives discussions à Bruxelles il y a quelques mois, avant la
412
vant la crise du pétrole, sur cette assertion que
j’
entendais répéter partout : « il nous faut faire des centrales nucléai
413
à donc le type d’une croissance illimitée. À quoi
je
répondais : « avez-vous jamais fait le calcul à quoi mène une croissa
414
un jour, alors, autant y penser tout de suite. Il
me
paraît essentiel pour tout ce qui touche les régions, de nous rendre
415
er conformément à la finalité que nous acceptons.
Je
suis très optimiste après la crise du pétrole, parce que je vois des
416
ès optimiste après la crise du pétrole, parce que
je
vois des gens conscients de la nécessité d’exploiter toutes les forme
417
’intérêt local, ou c’est de l’intérêt régional ».
Moi
, je trouve que c’est particulièrement intéressant si c’est de l’intér
418
rêt local, ou c’est de l’intérêt régional ». Moi,
je
trouve que c’est particulièrement intéressant si c’est de l’intérêt r
419
ien des gens ni le bien de la région, finalement.
Je
crois que si l’on veut passer à une croissance autoréglée — qui est l
420
plus importantes pour eux que gagner de l’argent.
Je
le vois chez beaucoup de jeunes gens qui me disent : « moi, je ne veu
421
gent. Je le vois chez beaucoup de jeunes gens qui
me
disent : « moi, je ne veux pas gagner de l’argent je veux faire quelq
422
is chez beaucoup de jeunes gens qui me disent : «
moi
, je ne veux pas gagner de l’argent je veux faire quelque chose qui m’
423
ez beaucoup de jeunes gens qui me disent : « moi,
je
ne veux pas gagner de l’argent je veux faire quelque chose qui m’inté
424
disent : « moi, je ne veux pas gagner de l’argent
je
veux faire quelque chose qui m’intéresse ». Peut-on donner le pas au
425
agner de l’argent je veux faire quelque chose qui
m’
intéresse ». Peut-on donner le pas au désir de participation sur le dé
426
re raison que celle-là. Il leur disait : « Suivez-
moi
et vous serez tous ensemble. » Et cela suffisait à tout justifier pou
427
le de Genève, vous avez une minorité de Genevois,
je
crois 27 %, et 44 % de Confédérés, c’est-à-dire de Suisses d’autres c
428
rand malheur. Et s’il est purement nomade, aussi.
Mon
idée de l’homme complet, la personne, c’est l’homme en tension entre
429
de quartiers, renforcés par des associations, si
j’
ai bien compris votre pensée, est possible dans un monde sans racines
430
s d’action beaucoup plus dangereux à manier. Mais
je
pense, en accord avec bien des urbanistes, américains surtout, et ang
431
nnez-vous à l’urbanisme dans tout cela ? Eh bien,
je
pense que c’est une place absolument essentielle parce que tout tient
432
bez dans la loi des rendements décroissants. Cela
me
semble exact, mais je me pose cependant une question : 50 000 habitan
433
ndements décroissants. Cela me semble exact, mais
je
me pose cependant une question : 50 000 habitants, cela doit faire à
434
ments décroissants. Cela me semble exact, mais je
me
pose cependant une question : 50 000 habitants, cela doit faire à peu
435
centration et conduit à faire des grandes villes.
Je
mets cela en question. L’économie n’a rien à exiger, l’économie est l
436
ochain livre ? C’est essentiellement ce titre que
je
donne au livre que je suis en train de terminer. Je dis : « l’avenir
437
ssentiellement ce titre que je donne au livre que
je
suis en train de terminer. Je dis : « l’avenir est notre affaire ». C
438
donne au livre que je suis en train de terminer.
Je
dis : « l’avenir est notre affaire ». Comme de toutes ces choses dont
439
entation de 2 % du salaire. Quant à l’autogestion
je
la prends dans un sens absolument global, général : responsabilités.
440
d’activités, autant en atelier qu’en entreprise.
J’
entends ce terme d’atelier au sens où Proudhon l’entendait. Il disait
441
elier de communauté, l’atelier de municipalité ».
Je
suis tout à fait d’accord, je pense que l’autogestion doit se dévelop
442
de municipalité ». Je suis tout à fait d’accord,
je
pense que l’autogestion doit se développer dans tous les secteurs, da
443
que, au niveau de l’administration de la commune.
J’
appelle « politique » l’aménagement des rapports humains, dans une com
444
De la formule allemande à la formule yougoslave…
Je
pense surtout à l’autogestion des groupes et des petites communes et
445
sans réserve, en solidarité. Voilà au fond ce que
j’
appelle fédéralisme, et qui résume toute ma doctrine : situer l’homme
446
ce que j’appelle fédéralisme, et qui résume toute
ma
doctrine : situer l’homme au centre de la société. e. Rougemont D
447
anger. Comment avez-vous rencontré André Breton ?
Je
l’ai vu pour la première fois à New York en 1941, à l’Office of War I
448
New York en 1941, à l’Office of War Information.
J’
étais devenu le rédacteur principal de l’émission La Voix de l’Amériqu
449
mission La Voix de l’Amérique parle aux Français.
Mes
deux textes quotidiens étaient lus par deux équipes d’« announcers »
450
ude Lévi-Strauss et André Breton. Entre Breton et
moi
, ce fut une sorte de coup de foudre d’amitié. Nous avons décidé de no
451
. De jeunes femmes ravissantes Pour ma part,
je
n’ai jamais fait partie de ce groupe, ni partagé son idéologie, ce qu
452
ie de ce groupe, ni partagé son idéologie, ce qui
m’
a évité d’être excommunié tôt ou tard. C’était entre nous, à New York,
453
s, comme celui des questions et des réponses, que
je
préférais. Il se jouait par paires. L’un écrivait trois questions : q
454
t à haute voix les résultats. C’était prodigieux.
J’
ai gardé un certain nombre de ces petits papiers, où je retrouve souve
455
gardé un certain nombre de ces petits papiers, où
je
retrouve souvent l’écriture de Breton, mais les plus étonnants datent
456
ture de Breton, mais les plus étonnants datent de
mon
retour en Europe, lorsque je repris ce jeu dans ma maison de Ferney.
457
étonnants datent de mon retour en Europe, lorsque
je
repris ce jeu dans ma maison de Ferney. Un soir, la personne qui joua
458
n retour en Europe, lorsque je repris ce jeu dans
ma
maison de Ferney. Un soir, la personne qui jouait avec moi avait écri
459
n de Ferney. Un soir, la personne qui jouait avec
moi
avait écrit : « Qu’arriverait-il si le diable entrait dans cette pièc
460
rait-il si le diable entrait dans cette pièce ? »
Je
lus ma réponse : « Toutes les lumières s’éteindraient. » Et, dans la
461
si le diable entrait dans cette pièce ? » Je lus
ma
réponse : « Toutes les lumières s’éteindraient. » Et, dans la seconde
462
? Oui, dans des circonstances assez différentes.
Je
donnais la leçon inaugurale de l’année 1973-1974 à l’Institut univers
463
uste avant la première grande crise de l’énergie.
J’
en prédisais le processus, l’enchaînement inexorable, en soulignant qu
464
rs ont cru à une mise en scène, d’autant plus que
j’
ai continué à parler, suivant mes notes à la lueur d’une torche électr
465
d’autant plus que j’ai continué à parler, suivant
mes
notes à la lueur d’une torche électrique. Après vingt minutes, au mom
466
che électrique. Après vingt minutes, au moment où
je
lis dans mes notes : « Ceci devrait être regardé de plus près », tout
467
ue. Après vingt minutes, au moment où je lis dans
mes
notes : « Ceci devrait être regardé de plus près », toutes les lumièr
468
allumées. Était-ce « la part du diable » ? Breton
m’
a souvent parlé de ce livre, que j’ai écrit à New York. Il se demandai
469
ble » ? Breton m’a souvent parlé de ce livre, que
j’
ai écrit à New York. Il se demandait comment un homme qui croit en Die
470
listes d’intuition, de divination, de télépathie,
je
devinais presque toujours juste. Et Breton ? Lui, jamais ! C’était d’
471
es de Breton Un soir, on avait décidé que l’on
me
banderait les yeux et que l’on me mettrait dans la main, successiveme
472
décidé que l’on me banderait les yeux et que l’on
me
mettrait dans la main, successivement, un objet appartenant à chacune
473
nant à chacune des femmes présentes. Chaque fois,
j’
ai deviné à qui était l’objet. Breton était comme « transfixé » par ce
474
qui appartenaient ces objets ? Absolument pas. On
me
plaçait quelque chose dans le creux de la main, j’avais quatre ou cin
475
e plaçait quelque chose dans le creux de la main,
j’
avais quatre ou cinq secondes pour réfléchir, et je disais : « C’est à
476
’avais quatre ou cinq secondes pour réfléchir, et
je
disais : « C’est à Leonora, c’est à Consuelo, c’est à Barbara, etc. »
477
e là-dessus — qui avait joué un certain rôle dans
ma
vie. Nous avions lancé 21 invitations à dîner dans un restaurant port
478
s des docks de New York. Vers dix heures du soir,
je
suis monté sur un escabeau pour lire le chapitre consacré au nombre 2
479
Strauss, il lui adressa un adjectif louangeur que
j’
ai oublié, puis il le traita de « calomniateur de Freud » parce que Lé
480
ersonnage sur l’heure : « Sortez ! tonna-t-il. Et
je
me réjouis de ne plus jamais rencontrer sur mon chemin votre sale gue
481
onnage sur l’heure : « Sortez ! tonna-t-il. Et je
me
réjouis de ne plus jamais rencontrer sur mon chemin votre sale gueule
482
Et je me réjouis de ne plus jamais rencontrer sur
mon
chemin votre sale gueule de faux témoin ! » Le malheureux sortit de l
483
York, qu’il trouvait vide, artificiel, sans âme.
Je
me rappelle un dimanche matin, à Madison Avenue. La rue était déserte
484
rk, qu’il trouvait vide, artificiel, sans âme. Je
me
rappelle un dimanche matin, à Madison Avenue. La rue était déserte, t
485
était déserte, tout le monde était à l’église, et
j’
y allais moi-même, quand je me suis trouvé pile devant André Breton. I
486
e était à l’église, et j’y allais moi-même, quand
je
me suis trouvé pile devant André Breton. Il marchait tête levée, rega
487
tait à l’église, et j’y allais moi-même, quand je
me
suis trouvé pile devant André Breton. Il marchait tête levée, regarda
488
les nuages entre les gratte-ciel. Il s’arrêta et
me
dit, après un silence : « Et pourquoi ne ferait-on pas une religion d
489
tourné vers nous : « Voilà, dit-il, une Église où
j’
aurais pu être évêque ! » i. Rougemont Denis de, « [Entretien] Sur
490
celui des riches et de l’Occident en général), il
m’
a semblé que l’inquiétude suisse s’expliquait par trois groupes de rai
491
avenir suisse est devenu notre sport national, et
je
ne vois pas d’autre pays qui puisse nous battre sur ce terrain-là. (C
492
essent de répéter : « Y en a point comme nous ! »
Je
n’ai jamais entendu cette fameuse phrase que dans la bouche de ceux q
493
que dans la bouche de ceux qui la raillaient, et
je
ne l’ai jamais lue que sous la plume de Suisses qui affirmaient que l
494
t jamais trouvé au chevet d’un malade sait ce que
je
veux dire. Un homme de cœur a besoin qu’on lui pardonne de jouir de s
495
culpabilité sont des concepts théologiques17 dont
je
ne vois pas qu’ils trouvent dans le cas du « malaise suisse » une app
496
degré. Les exemples cités au cours de cet ouvrage
me
semblent révéler une tendance générale — et pour le coup, « bien suis
497
nos examens de conscience. « Quels problèmes ? »,
me
demande l’Européen qui venait admirer notre libre Helvétie et qui est
498
? Satiriques, vengeurs ou navrés, les sermons que
j’
ai cités ne changeront rien à l’évolution qu’ils dénoncent, tant qu’il
499
astes, qui soient les leurs. Mieux vaudrait donc,
me
semble-t-il, proposer que les Suisses s’élèvent à la hauteur de leur
500
rchique. La vraie chance de grandeur des Suisses,
je
ne la vois pas ailleurs que dans les raisons d’être de leur communaut
501
du progrès permet seule de se dire progressistes,
j’
ose penser que la Suisse a mieux à faire qu’à cultiver ses inquiétudes
502
sente pour une Europe qui n’en sait rien encore !
Je
ne conçois pas d’autre remède à ses névroses de prospérité. C’est dan
503
tion, 1936 (trad. de l’auteur). Helveticus sum… :
Je
suis suisse, je suis un être humain, je suis un pécheur. 17. Nuançon
504
. de l’auteur). Helveticus sum… : Je suis suisse,
je
suis un être humain, je suis un pécheur. 17. Nuançons : la culpabili
505
us sum… : Je suis suisse, je suis un être humain,
je
suis un pécheur. 17. Nuançons : la culpabilité est aussi un état ou
506
« société post-industrielle » et de ses valeurs,
mon
premier mouvement a été de recul devant un sujet qui me paraissait ap
507
mier mouvement a été de recul devant un sujet qui
me
paraissait appeler la compétence de l’économiste que je ne suis pas.
508
aissait appeler la compétence de l’économiste que
je
ne suis pas. Mais je dois vous faire un aveu : si j’ai finalement acc
509
mpétence de l’économiste que je ne suis pas. Mais
je
dois vous faire un aveu : si j’ai finalement accepté de vous parler d
510
ne suis pas. Mais je dois vous faire un aveu : si
j’
ai finalement accepté de vous parler de la société post-industrielle,
511
parler de la société post-industrielle, c’est que
j’
ai vu là une occasion inespérée d’essayer de comprendre moi-même ce qu
512
de société post-industrielle, que veut-on dire ?
Je
vois d’abord ce qui est exclu : une société dans laquelle il n’y aura
513
utume des cavernes. On ne veut pas dire non plus,
je
crois, qu’une société post-industrielle serait celle où les besoins e
514
que déjà nous concevons quelque chose, au-delà —
je
le définis comme l’époque où l’homme devait s’adapter à l’industrie,
515
à l’automobile ». La société post-industrielle, à
mes
yeux, aura pour première caractéristique d’inverser cette déclaration
516
été industrielle à une société post-industrielle,
je
crois qu’on pourrait le résumer aussi par le contraste entre les atti
517
tant, ce sont les hommes et non les firmes. » Il
me
semble que tout le contraste entre les deux types de sociétés est là
518
’est sur l’opposition de ces deux conceptions que
je
voudrais vous présenter quelques remarques et suggestions. III
519
ude manifestée des facultés créatrices de chacun.
J’
ajouterai que la société post-industrielle devrait aussi permettre à t
520
-il, son « chemin de Damas » : « Dès l’instant où
je
l’aperçus, jusqu’au jour présent, ma grande et constante ambition a é
521
l’instant où je l’aperçus, jusqu’au jour présent,
ma
grande et constante ambition a été de construire une bonne machine ro
522
on d’automobiles. Et il note à ce moment-là, — et
je
vous prie de savourer la phrase, elle le mérite ! — « Ma résolution p
523
prie de savourer la phrase, elle le mérite ! — «
Ma
résolution pouvait passer pour téméraire, car à cette époque-là, il n
524
l’Auto, et qui favorise les ventes. V Vous
me
pardonnerez, je l’espère, de m’être un peu étendu sur le chapitre san
525
favorise les ventes. V Vous me pardonnerez,
je
l’espère, de m’être un peu étendu sur le chapitre sans doute le plus
526
tes. V Vous me pardonnerez, je l’espère, de
m’
être un peu étendu sur le chapitre sans doute le plus illustratif de l
527
souvent même scandaleuses. Cette réaction est, à
mes
yeux, l’indicateur très certain du déclin d’une certaine société, aut
528
es, mais spirituelles, morales et psychologiques,
je
poserai au fondement de tout le respect de chaque personne humaine, l
529
ofit, non moral, ni social, mais financier. Qu’on
m’
entende bien : je n’ai rien contre le profit en soi, que tout le monde
530
ni social, mais financier. Qu’on m’entende bien :
je
n’ai rien contre le profit en soi, que tout le monde approuve en prat
531
soi, que tout le monde approuve en pratique. Mais
je
suis contre le profit considéré comme référentiel absolu, comme « mes
532
tions humaines, née des grandes villes, devrait à
mon
sens faire l’objet d’un nouveau rapport dramatique au club de Rome. C
533
on ami hollandais le physicien Hendrijk Lorentz ?
J’
aurais dû vous parler de la technologie douce, qui, dans la nouvelle s
534
une société de gaspillage à bout de souffle… Mais
je
m’arrête, je n’en finirais plus. Je terminerai sur la question qu’on
535
société de gaspillage à bout de souffle… Mais je
m’
arrête, je n’en finirais plus. Je terminerai sur la question qu’on va
536
e gaspillage à bout de souffle… Mais je m’arrête,
je
n’en finirais plus. Je terminerai sur la question qu’on va me poser,
537
souffle… Mais je m’arrête, je n’en finirais plus.
Je
terminerai sur la question qu’on va me poser, inévitable : « Votre mo
538
rais plus. Je terminerai sur la question qu’on va
me
poser, inévitable : « Votre modèle post-industriel a-t-il des chances
539
-industriel a-t-il des chances de se réaliser ? »
J’
ai coutume de répondre à cette question que nous ne sommes pas là pour
540
l arriver ? » au lieu de se demander : « Que puis-
je
faire ? » o. Rougemont Denis de, « Au-delà de la société industri
541
t jamais trouvé au chevet d’un malade sait ce que
je
veux dire. Un homme de cœur a besoin qu’on lui pardonne de jouir de s
542
et le moteur d’une fédéralisation de l’Europe, ai-
je
écrit, il y a plus de dix ans, dans La Suisse ou l’histoire d’un peu
543
l’histoire d’un peuple heureux . Aujourd’hui, il
me
semble que ce « modèle » (au sens scientifique) reste viable tel que
544
èle » (au sens scientifique) reste viable tel que
je
le décrivais alors, à quelques précisions près. J’ai été amené à préc
545
e le décrivais alors, à quelques précisions près.
J’
ai été amené à préciser notamment ceci : je ne vois pas, dans la Confé
546
près. J’ai été amené à préciser notamment ceci :
je
ne vois pas, dans la Confédération fabriquée en 1848 par la réunion d
547
ration des 27 États souverains du continent, mais
je
vois dans le Conseil fédéral le modèle d’un gouvernement fédéral euro
548
tion et de la création des grands États-nations. (
J’
appelle État-nation la mainmise d’un appareil étatique sur l’ensemble
549
, méconnaissent le véritable sens du fédéralisme.
Je
suis frappé de constater que la plupart de ceux qui se disent fédéral
550
dire contre la fédération. Ramuz avait coutume de
me
dire : « Entre nous, nous sommes contre Berne, nous sommes fédéralist
551
es fédéralistes, donc nous sommes séparatistes… »
Je
lui répondais : « Vous pouvez être séparatiste ou nationaliste vaudoi
552
s, comme celles de la gauche et de la droite. Or,
je
trouve des nationalistes et des centralistes cantonaux à gauche comme
553
à des réalités du xxe siècle et non du xixe . Il
me
semble qu’aujourd’hui, ceux qui défendent l’autogestion régionale et
554
éralisme. Qu’ils soient de gauche ou de droite ne
m’
intéresse guère : l’essentiel, c’est la forme concrète de communauté q
555
la forme concrète de communauté qu’ils défendent.
Je
retrouve, chez les partisans de l’autogestion au sens politique, juri
556
essités » nationales, continentales ou mondiales.
Je
vois par exemple un parallèle frappant entre la situation de nos troi
557
, et qui ne va pas exactement dans leur sens, car
je
ne vois pas comment des maoïstes ou des trotskystes pourraient être d
558
’ils étaient les « fossoyeurs de la démocratie ».
Je
ne sais pas si les gens qui ont écrit des choses pareilles connaissen
559
t été le premier manifestant de Kaiseraugst. Cela
m’
a d’ailleurs amené à dire dans un message aux dix mille personnes qui
560
ité. Mais on ne peut pas avoir, comme on dit chez
moi
, le beurre et l’argent du beurre. Il s’agit de savoir quelle finalité
561
s bas, le niveau zéro, qui est la mort… Mais pour
moi
, une Suisse qui ferait ce choix-là ne serait plus elle-même. Elle dev
562
C’est le rêve secret de tous les administrateurs.
J’
ignore si les citoyens suisses sont aptes à saisir l’ampleur du danger
563
s à saisir l’ampleur du danger qui les menace. Et
je
ne suis pas optimiste sur les possibilités d’endoctriner les gens. Je
564
iste sur les possibilités d’endoctriner les gens.
Je
ne me fais pas d’illusions : d’une manière générale, les hommes font
565
ur les possibilités d’endoctriner les gens. Je ne
me
fais pas d’illusions : d’une manière générale, les hommes font toujou
566
entendre un discours raisonnable, comme celui que
je
tiens ici, sur quoi compter alors ? Sur un certain nombre de désastre
567
u’un », tous ceux qui qualifient l’être aimé de «
ma
moitié » (variante : « ma meilleure moitié »), et tous ceux qui écriv
568
ifient l’être aimé de « ma moitié » (variante : «
ma
meilleure moitié »), et tous ceux qui écrivent sur Éros. Si l’idée pl
569
linienne consiste dans la proclamation que « tout
m’
est permis, mais tout n’est pas utile » (Épître aux Romains) relative
570
it sentir plus vite dans le roman qu’au théâtre. (
Je
parle ici, bien entendu, d’ouvrages littéraires, et non pas de romans
571
voilé de l’amour incestueux pour la Mère. « Dois-
je
épouser ses droits contre un père irrité ? » se demande le jeune homm
572
t, du même coup, à celle de l’auteur : Les dieux
m’
en sont témoins, ces dieux qui dans mon flanc Ont allumé le feu fata
573
Les dieux m’en sont témoins, ces dieux qui dans
mon
flanc Ont allumé le feu fatal à tout mon sang. Et la servante Œnon
574
i dans mon flanc Ont allumé le feu fatal à tout
mon
sang. Et la servante Œnone tient à Phèdre le même langage que la ser
575
sincère dans sa préface lorsqu’il écrit : Ce que
je
puis assurer, c’est que je n’en ai point fait [de tragédie] où la ver
576
squ’il écrit : Ce que je puis assurer, c’est que
je
n’en ai point fait [de tragédie] où la vertu soit plus mise en jour q
577
de bons ménages mais, parmi les gens de qualité,
je
ne connais pas un seul exemple d’affection réciproque ni de fidélité.
578
dit du très inconstant Maurice de Saxe : « Voici
mon
univers, mon espoir, et mes dieux ! » L’idéal donjuanesque, comme la
579
inconstant Maurice de Saxe : « Voici mon univers,
mon
espoir, et mes dieux ! » L’idéal donjuanesque, comme la légende qu’il
580
ice de Saxe : « Voici mon univers, mon espoir, et
mes
dieux ! » L’idéal donjuanesque, comme la légende qu’il inverse, donne
581
e, qui l’exprimera elle aussi dans un seul cri :
J’
aime, mais comme on doit aimer : dans le désespoir ! À quoi Novalis f
582
douleur, c’est qu’on ne veut plus aimer… Que Dieu
me
conserve cette douleur qui m’est indiciblement chère. L’amour rom
583
lus aimer… Que Dieu me conserve cette douleur qui
m’
est indiciblement chère. L’amour romantique C’est à partir de l
584
Hymnes à la nuit : Que ton feu spirituel dévore
mon
corps, qu’en une étreinte aérienne je m’unisse étroitement à toi, et
585
uel dévore mon corps, qu’en une étreinte aérienne
je
m’unisse étroitement à toi, et que dure alors éternellement notre nui
586
dévore mon corps, qu’en une étreinte aérienne je
m’
unisse étroitement à toi, et que dure alors éternellement notre nuit n
587
né. Pourquoi ? Au-delà du cas précis de Boukovski
je
pense que la situation des écrivains soviétiques emprisonnés ou enfer
588
e peut donc être assimilé à une marque de folie ?
Je
pense qu’on ne lui refuse pas d’avoir une opinion mais on accepte mal
589
issement est facile. Dans une société totalitaire
je
dirais même qu’il est naturel. On les condamne donc pour remettre leu
590
s, ceux que, précisément, on réserve aux fous. Si
j’
étais en Russie je serais enfermé depuis longtemps et je me demande si
591
sément, on réserve aux fous. Si j’étais en Russie
je
serais enfermé depuis longtemps et je me demande si je ne deviendrais
592
s en Russie je serais enfermé depuis longtemps et
je
me demande si je ne deviendrais pas fou réellement. Quand on vous dit
593
n Russie je serais enfermé depuis longtemps et je
me
demande si je ne deviendrais pas fou réellement. Quand on vous dit qu
594
rais enfermé depuis longtemps et je me demande si
je
ne deviendrais pas fou réellement. Quand on vous dit que vous êtes se
595
vous demander : Mais en fin de compte est-ce que
je
n’ai pas tort puisque tous les autres pensent autrement ? Et ce doute
596
amplifié, peut très bien vous amener à la folie.
J’
ai su comment s’étaient passés les grands procès de Moscou lorsque Sta
597
t : celui de changer les mœurs parce qu’ils sont,
je
l’ai dit, manieurs de mots, donneurs de sens. Les mœurs dépendent du
598
res, mesurent bien cette influence de l’artiste ?
Je
crois qu’ils sont emplis d’angoisse devant ce monde impossible à gouv
599
création que « contre » une société. Pour ma part
je
regrette que le développement de la société amène toujours davantage
600
elle. D’ailleurs ça n’a pas toujours été le cas :
je
pense à Racine et à Corneille qui étaient au service de Louis XIV. Le
601
votre acte, vous serez acquitté. C’est parce que
je
crois à cette liberté de l’homme liée à sa responsabilité que j’oppos
602
e liberté de l’homme liée à sa responsabilité que
j’
oppose à tous les États-nations l’idée de communauté régionale. Même s
603
e si la voix porte aujourd’hui beaucoup plus loin
je
suis fidèle à la définition d’Aristote selon laquelle une cité ne dev
604
Verbois nous expliquent qu’il y a une nécessité,
je
leur demande laquelle. Rien ne nous oblige concrètement à avoir plus
605
individu n’est pas aussi directement menacé. Mais
je
vous rends attentif à un fait. Aujourd’hui19 Garry Davis purge à Bâle
606
Davis purge à Bâle une nouvelle peine de prison.
J’
ai écrit au président de la Confédération pour obtenir sa libération.
607
e la Confédération pour obtenir sa libération. Il
m’
a fait répondre par le Département de justice et police ! Or quel mal
608
nte, non de prestige, en fin de compte militaire.
Je
ne propose pas de renverser l’État-nation : nous péririons tous dans
609
dans ses ruines. Au niveau des pouvoirs concrets,
je
vois très peu à renverser, tout à construire. Et force nous sera de l
610
ement de mentalité et un changement de finalité.
Je
sais qu’on ne manquera pas de me dire, comme certains l’ont fait à Be
611
nt de finalité. Je sais qu’on ne manquera pas de
me
dire, comme certains l’ont fait à Berlin : « Votre point de vue est t
612
l’Est comme pour l’Europe de l’Ouest, la solution
me
paraît consister dans la structure de petites régions fonctionnelles.
613
dresser un plan. Par exemple, dans la région que
j’
appelle lémano-alpine, pour rester volontairement un peu vague, c’est
614
rbois-ou-de-pas-Verbois-nucléaire, parce qu’on ne
me
fera pas croire que la frontière arrêterait les effets d’un accident
615
montre digne en étant responsable. Responsable :
je
tiens au mot. Car après tout, sans responsabilité, il n’y a pas de ci
616
communes, d’amitiés et de voisinage retrouvé, qui
me
motive, quand je lutte pour la région. w. Rougemont Denis de, « [E
617
és et de voisinage retrouvé, qui me motive, quand
je
lutte pour la région. w. Rougemont Denis de, « [Entretien] Il ne s
618
pourrait bien en être la source. Personnellement,
je
vois la preuve de cela dans le fait qu’il accepta de présider, pour u
619
ais décisif, deux institutions au sort desquelles
j’
avais eu le bonheur de l’intéresser : le Centre européen de la culture
620
Pour l’Europe, réunis par lui à la fin de sa vie,
je
trouve ces mots qu’on ne saurait souhaiter plus éclairants et qui ser
621
communauté culturelle. Et dans ce même chapitre,
je
souligne cette phrase : L’unité de l’Europe ne se fera ni uniquement
622
l’illusion qu’il irait lui-même jusqu’au but. Il
m’
avait dit un jour de 1960, dans un moment de confidence : Je suis san
623
un jour de 1960, dans un moment de confidence :
Je
suis sans doute trop vieux pour surmonter l’idée de nation souveraine
624
monter l’idée de nation souveraine, dans laquelle
j’
ai été élevé. Ce sera l’affaire de votre génération. Trois lustres on
625
che visiblement du but. Comment sauver la face de
ma
génération ? Il nous reste assez peu d’années. Quant à repasser le fl
626
qui ne trouverait plus personne pour l’accepter,
je
le crains. Parce qu’il n’y aurait plus même d’Européens. z. Rougem
627
ue délimitent ces villes ouvertes vers cinq mers,
j’
imagine maintenant que s’élève une vaste rumeur symphonique mariant le
628
grande rumeur musicale de nos étés européens ? Si
je
n’en ai nommé qu’une trentaine, c’est parce qu’il s’agissait des « gr
629
icace. Un beau jour de 1950, Igor Markevitch vint
me
voir. Je lui avais écrit tôt après la lecture de son article sur la c
630
beau jour de 1950, Igor Markevitch vint me voir.
Je
lui avais écrit tôt après la lecture de son article sur la coopératio
631
sical… Il avait son idée là-dessus. Pour ma part,
je
venais de fonder le Centre européen de la culture, à Genève, dont le
632
sson. En un mot fédérer, mot-clé de notre Centre.
Je
prie les historiens de prendre note d’un petit fait qui a son importa
633
ublication concertée des programmes et des dates,
je
voudrais souligner ici que l’association a eu et garde le mérite, à m
634
ici que l’association a eu et garde le mérite, à
mes
yeux principal, de provoquer la réflexion des dirigeants de festivals
635
cessé de revenir sur quelques thèmes majeurs que
je
voudrais indiquer brièvement. 1. Sur le grand fond des origines sacré
636
tistique et touristique, la formule festivalienne
me
paraît typiquement occidentale, ne fût-ce que par les antinomies qu’e
637
ée dans les salles de concert, séparée de la vie,
j’
entends des cadres architecturaux, des fonctions religieuses et de tou
638
ose ne le croyait. Avant donc d’essayer de nommer
ma
discipline, posons-nous la question préalable, et plus sérieuse, de l
639
ujourd’hui. Tout le reste en dépendra, et d’abord
mes
réponses. Qu’est-ce donc pour vous, l’Europe ? Ce n‘est pas une réali
640
tiques, et non pas d’une recherche fondamentale ?
J’
avoue que je saisis mal l’opposition de nature que vous me semblez fai
641
on pas d’une recherche fondamentale ? J’avoue que
je
saisis mal l’opposition de nature que vous me semblez faire, après ta
642
que je saisis mal l’opposition de nature que vous
me
semblez faire, après tant d’autres — ce fut une mode dans les années
643
en est-il dans le domaine des sciences humaines ?
Je
serais tenté de revendiquer la qualité de « recherche fondamentale »
644
niversitaires — pour Ies parties métaphysiques de
mes
cours ; et la qualité de « recherche finalement appliquée » — qui imp
645
ments — pour les parties proprement politiques de
mon
enseignement, cours et travaux de séminaires, tout ce qui touche aux
646
ction dans le Monde ; et en particulier, c’est là
ma
branche, à mieux comprendre ce que cela signifie d’être un Européen.
647
e vivre l’Europe en vivant sa culture, qui est, à
mes
yeux, sa profonde identité. Cette culture a produit — comme déchets,
648
oir ! Et c’est le moment que vous choisissez pour
me
poser vos colles de facultés ! Je souhaitais simplement savoir ce que
649
choisissez pour me poser vos colles de facultés !
Je
souhaitais simplement savoir ce que vous enseignez au juste. Je vous
650
simplement savoir ce que vous enseignez au juste.
Je
vous en donnerai deux exemples. J’ai professé à notre Institut et à l
651
gnez au juste. Je vous en donnerai deux exemples.
J’
ai professé à notre Institut et à l’EPFZ simultanément, puis sous une
652
nève, un cours sur la Philosophie du fédéralisme.
J’
y parlais d’histoire, bien sûr, d’anthropologie et de religion comparé
653
de l’Europe. Ce qui ne prouve d’ailleurs pas que
mon
sujet soit « sérieux » du point de vue que l’on nommait naguère acadé
654
, mais englobée, non englobante. Second exemple :
Je
donne depuis deux ans, en alternance avec André Reszler, un cours sur
655
ur Les Mythes formateurs de la psyché européenne.
J’
ai parlé des mythes grecs, puis des mythes de la Genèse, et enfin de l
656
’Inde, de la Chine, ou de la Polynésie. Tout cela
m’
a conduit à de multiples incursions dans l’histoire et l’ethnographie,
657
tique et du structuralisme. Là encore, vous allez
me
dire que ces démarches sont peu compatibles avec l’idée du sérieux sc
658
rospective, sont plus encore que le savoir ce que
j’
ai le désir de transmettre, c’est-à-dire de rendre sensible et comme u
659
ce qui reste « à faire ». C’est peut-être ce que
je
pressens comme sans le connaître, qui apparaîtra un jour comme étant
660
raîtra un jour comme étant le principal de ce que
j’
avais à faire passer, dans le cadre rigoureux du savoir vérifié. Centr
661
rêts, dont ils font le centre de leur monde. Or à
mon
sens, c’est le contraire qui est vrai. Il arrive bien souvent que cel
662
se encore tant de ravages dans le tiers-monde. Et
je
parle de mettre en garde non seulement les Européens mais les étudian
663
intéressé ? Les termes d’opportunité et d’utilité
me
paraissent faibles, dans la conjoncture de ce troisième tiers du xxe
664
en général qu’une tactique partisane, mais ce qui
m’
intéresse est autre chose : la stratégie de notre civilisation. Ce son
665
yens aux affaires de leurs communautés autonomes.
Je
vais donc considérer quelques-uns des arguments échangés dans ce gran
666
servent objectivement. Depuis six ans environ que
je
m’occupe de ces choses, et que j’en écris, je suis de plus en plus fr
667
vent objectivement. Depuis six ans environ que je
m’
occupe de ces choses, et que j’en écris, je suis de plus en plus frapp
668
ans environ que je m’occupe de ces choses, et que
j’
en écris, je suis de plus en plus frappé par le rôle qu’y joue le mens
669
que je m’occupe de ces choses, et que j’en écris,
je
suis de plus en plus frappé par le rôle qu’y joue le mensonge systéma
670
éaire, ou de Concorde, ou du bétonnage universel,
j’
observe les mêmes comportements. Au début, un refus général d’informer
671
s scientifiques. De ces diverses formes de ce que
je
nommerai le mensonge en service commandé, je donnerai ici un exemple
672
que je nommerai le mensonge en service commandé,
je
donnerai ici un exemple récent et — qu’on me le pardonne — personnel.
673
ndé, je donnerai ici un exemple récent et — qu’on
me
le pardonne — personnel. ⁂ Parlant au cours d’une émission de la TV f
674
ant d’interruptions agressives du meneur de jeu —
j’
ai essayé de formuler mes objections et mes mises en question du Conco
675
ssives du meneur de jeu — j’ai essayé de formuler
mes
objections et mes mises en question du Concorde selon le schéma suiva
676
e jeu — j’ai essayé de formuler mes objections et
mes
mises en question du Concorde selon le schéma suivant que je reconsti
677
question du Concorde selon le schéma suivant que
je
reconstitue : I. Le philosophe étant celui qui pose des questions sim
678
t celui qui pose des questions simples et naïves,
je
demande : « Concorde, à quoi est-ce que ça sert ? » On m’assure que c
679
de : « Concorde, à quoi est-ce que ça sert ? » On
m’
assure que cet appareil ira de Paris à New York en trois heures et dem
680
ntre les rayons ultraviolets ? « Votre pari — dis-
je
aux promoteurs de Concorde alignés devant moi, et consternés — c’est
681
dis-je aux promoteurs de Concorde alignés devant
moi
, et consternés — c’est le contraire du pari de Pascal. Si vous perdez
682
nez trois heures pour quelques-uns. Étrange pari.
Moi
, je ne le tiendrais pas… » 2. Si les clients prévus, dont l’heure es
683
rois heures pour quelques-uns. Étrange pari. Moi,
je
ne le tiendrais pas… » 2. Si les clients prévus, dont l’heure est si
684
le temps de se reposer, de réfléchir, ou de lire
mes
livres par exemple. Et s’il était vraiment indispensable de « gagner
685
entre de la ville par hélicoptère ou métro. 3. On
me
dit qu’arrêter la fabrication de Concorde mettrait au chômage 40 000
686
nts occupe des centaines de milliers d’ouvriers ?
Je
pense que si la Société est ainsi faite que la seule alternative qu’e
687
ur nos têtes. 5. Indépendamment de ces arguments,
je
suis contre Concorde pour deux raisons fondamentales. a) Tout comme
688
simplement l’enseigne d’un modèle de société que
je
récuse radicalement. Car l’humain s’y voit sacrifié non pas même au P
689
rofits privés — absolument contraire aux fins que
je
défends dans toute mon œuvre, de liberté et de responsabilité de la p
690
ment contraire aux fins que je défends dans toute
mon
œuvre, de liberté et de responsabilité de la personne, d’autonomie et
691
ne, d’autonomie et de fédération des groupes. b)
Je
suis convaincu que les promoteurs de Concorde sont animés par un cert
692
ue Concorde symbolise. Le luxe suprême de demain,
je
l’ai défini au lendemain d’Hiroshima : la lenteur au sein du silence.
693
main d’Hiroshima : la lenteur au sein du silence.
Je
crois bien que ce soir-là, j’ai trouvé la formule de tout ce qui me r
694
au sein du silence. Je crois bien que ce soir-là,
j’
ai trouvé la formule de tout ce qui me répugnait dans l’affaire nucléa
695
ce soir-là, j’ai trouvé la formule de tout ce qui
me
répugnait dans l’affaire nucléaire comme dans celle de Concorde, en f
696
s individus et des communautés locales. Personne,
je
le sais, ne viendra dire devant un parlement ou dans une assemblée po
697
ission ! C’est cette mission, et non pas eux, que
je
réprouve. ⁂ Allons plus loin et plus profond : derrière les deux atti
698
t plus profond : derrière les deux attitudes dont
je
viens d’esquisser l’opposition radicale, il y a deux attitudes oppos
699
e conversion pour une image, si vous voulez, mais
je
suis convaincu qu’en réalité, elle signifie bien davantage, et peut
700
infinies, de très profondes remises en ordre. Et
je
ne dis pas qu’en alertant les énergies qui sont en nous nous pourrion
701
ous nous pourrions aller aussi vite que Concorde.
Je
dis seulement qu’en faisant appel toujours plus aux forces qui sont e
702
e Concorde apparaîtraient tout à fait incongrues.
Je
ne dis pas qu’en nous confiant de plus en plus à nos énergies intérie
703
lle qui culmine dans la Bombe à fusion nucléaire,
je
dis que nous ferions une autre société — et je pense qu’elle serait m
704
e, je dis que nous ferions une autre société — et
je
pense qu’elle serait meilleure. 21. Aujourd’hui, Air France et la S
705
Souvenir de 1938 (1977)ag
Je
venais d’entendre, à Venise, Honegger diriger son Nocturne et je m’ét
706
endre, à Venise, Honegger diriger son Nocturne et
je
m’étais dit : Voilà celui pour qui je voudrais écrire quelque chose.
707
re, à Venise, Honegger diriger son Nocturne et je
m’
étais dit : Voilà celui pour qui je voudrais écrire quelque chose. À p
708
Nocturne et je m’étais dit : Voilà celui pour qui
je
voudrais écrire quelque chose. À peine de retour en Suisse, on m’offr
709
re quelque chose. À peine de retour en Suisse, on
m’
offre de composer un Festspiel pour l’« Expo » nationale de 1939. La g
710
ationale de 1939. La guerre paraissait imminente,
j’
étais en train de sortir mes uniformes d’une malle. Je ne trouvais pas
711
paraissait imminente, j’étais en train de sortir
mes
uniformes d’une malle. Je ne trouvais pas de « sujet national » à la
712
ais en train de sortir mes uniformes d’une malle.
Je
ne trouvais pas de « sujet national » à la mesure des événements — et
713
à la mesure des événements — et de la scène dont
j’
avais vu les plans : trente-cinq mètres de large, trois niveaux, point
714
de rideau, devant une salle de dix mille places.
Je
demandais quelques jours « pour réfléchir » et n’en fis rien, certain
715
, le 28 septembre vers 17 h, un coup de téléphone
m’
annonce Munich30 : « C’est la paix ! », me dit-on. (On le croyait ce j
716
léphone m’annonce Munich30 : « C’est la paix ! »,
me
dit-on. (On le croyait ce jour-là !) C’est aussi toute la vie qui se
717
reprend à vivre, les délais à courir, le sujet à
me
fuir… Le matin même, sans raisons apparentes, on m’avait remis une bi
718
fuir… Le matin même, sans raisons apparentes, on
m’
avait remis une biographie nouvelle de Nicolas de Flüe. J’en avais par
719
remis une biographie nouvelle de Nicolas de Flüe.
J’
en avais parcouru distraitement quelques pages. L’image scolaire que j
720
istraitement quelques pages. L’image scolaire que
je
gardais de cet ermite du xve siècle était bien pâle. Mais ce jour-là
721
du xve siècle était bien pâle. Mais ce jour-là,
je
reprends le livre et je découvre un personnage fascinant. Mystique, n
722
en pâle. Mais ce jour-là, je reprends le livre et
je
découvre un personnage fascinant. Mystique, naïf, au bord de l’hérési
723
Nuit blanche. Trois actes se composent. Au matin
j’
ai tout le plan de la pièce et j’en ai vu le paradoxe essentiel : peup
724
posent. Au matin j’ai tout le plan de la pièce et
j’
en ai vu le paradoxe essentiel : peupler et animer une scène immense a
725
-il l’adapter à la structure chrétienne du sujet.
Je
songe alors au style monumental des prophètes et des psalmistes. Nul
726
musicien — et celui-ci ne peut être qu’Honegger.
Je
vais le voir à Paris. Je ne le connaissais pas. En pleine gloire, à 4
727
e peut être qu’Honegger. Je vais le voir à Paris.
Je
ne le connaissais pas. En pleine gloire, à 46 ans, il vient d’écrire
728
De quinze ans son cadet, inconnu du grand public,
je
ne lui apporte rien qu’une commande peu munificente. Je lui en résume
729
lui apporte rien qu’une commande peu munificente.
Je
lui en résume les données, j’esquisse la structure de la pièce, suggé
730
de peu munificente. Je lui en résume les données,
j’
esquisse la structure de la pièce, suggérée par celle de la scène, et
731
étés, et l’on fabriquera les costumes à domicile.
Je
tombe bien, Honegger vient d’écrire que la seule forme théâtrale à la
732
ce sera la dernière : la guerre est pour demain —
je
me sens littéralement transporté ! Voici chanté, clamé ou soutenu par
733
sera la dernière : la guerre est pour demain — je
me
sens littéralement transporté ! Voici chanté, clamé ou soutenu par le
734
de la précision dans le sentiment, non seulement
mon
texte, mais tout ce que j’ai pensé, arrière-pensé en l’écrivant et re
735
timent, non seulement mon texte, mais tout ce que
j’
ai pensé, arrière-pensé en l’écrivant et renoncé à y mettre faute de m
736
de mots… Et surtout, l’arrière-plan religieux de
ma
« Légende dramatique » est révélé tantôt par un lyrisme aérien, alpes
737
le chœur fugué : « Étoile du matin ». Plus tard,
je
lui ai demandé le secret de cette divination spirituelle, et il m’a d
738
le secret de cette divination spirituelle, et il
m’
a dit modestement : « J’apprends par cœur les paroles, et puis je me l
739
nation spirituelle, et il m’a dit modestement : «
J’
apprends par cœur les paroles, et puis je me les répète continuellemen
740
ment : « J’apprends par cœur les paroles, et puis
je
me les répète continuellement, dans mon atelier, dans la rue, en cond
741
t : « J’apprends par cœur les paroles, et puis je
me
les répète continuellement, dans mon atelier, dans la rue, en conduis
742
s, et puis je me les répète continuellement, dans
mon
atelier, dans la rue, en conduisant ma Bugatti. Jusqu’à ce que la mél
743
ent, dans mon atelier, dans la rue, en conduisant
ma
Bugatti. Jusqu’à ce que la mélodie sorte des paroles. » Cette espèce
744
e et non par goût, et moins encore par ambition.
J’
étais alors, écrira-t-il, un juriste quelque peu candide, inexpériment
745
ean Monnet lui-même : L’action de Robert Schuman
me
paraît avoir été déterminée moins par ses souvenirs du passé qui euss
746
ais décisif, deux institutions au sort desquelles
j’
avais eu le bonheur de l’intéresser, le Centre européen de la culture,
747
Pour l’Europe, réunis par lui à la fin de sa vie,
je
trouve ces mots qu’on ne saurait souhaiter plus éclairants, et qui se
748
Communauté culturelle. Et dans ce même chapitre,
je
souligne cette phrase : L’unité de l’Europe ne se fera ni uniquement
749
l’illusion qu’il irait lui-même jusqu’au but. Il
m’
avait dit un jour de 1960, dans un moment de confidence : Je suis san
750
un jour de 1960, dans un moment de confidence :
Je
suis sans doute trop vieux pour surmonter l’idée de nation souveraine
751
monter l’idée de nation souveraine, dans laquelle
j’
ai été élevé. Ce sera l’affaire de votre génération… ae. Rougemont
752
érétiques de toutes les religions, unissez-vous !
J’
ai souvent médité sur cette phrase, depuis lors. ⁂ Au temps de nos pre
753
cès de Moscou et la persécution des Églises. Mais
je
relis les onze numéros de notre revue : il n’y est jamais question d’
754
passages cités sont justement d’Henry Corbin. Et
je
n’en trouve pas qui expriment mieux notre attitude commune d’alors. ⁂
755
e Proche-Orient ; puis ce sera la guerre, et pour
moi
, plus de six années d’exil américain. Et pourtant, le bravo silencieu
756
cain. Et pourtant, le bravo silencieux par lequel
j’
accueille à Ferney l’exclamation de l’ami retrouvé ne marque aucune ru
757
aucune rupture avec notre passé, ni encore moins
mon
ralliement à quelque antidoctrine nouvelle élaborée dans l’entre-temp
758
urtout de Sohrawardi, dès 1931. Cette même année,
je
publiais divers essais parmi les tout premiers parus en France sur Ki
759
n’est jamais entré ni sorti, depuis des mois que
j’
attends ici ! À quoi le gardien répond : Elle n’était là que pour toi.
760
ment secret qui conduit seul à l’intégration d’un
moi
distinct… La « voie unique » peut donc désigner aussi bien l’orthodox
761
matiques imposés par les pouvoirs totalitaires ne
m’
intéressent pas dans ce contexte. Note 2. Si, comme le veulent les dic
762
iptum récemment ajouté à L’Amour et l’Occident ,
je
parle « d’hérésies libératrices des âmes et d’orthodoxie conservatric
763
e la cité ». Une attitude personnaliste cohérente
m’
incite à tenir balance égale entre communauté et vocation, entre unive
764
stique, et qui possède une vertu de contagion que
je
voudrais dire convertissante. (Pour, moi, s’il faut en croire les tes
765
agion que je voudrais dire convertissante. (Pour,
moi
, s’il faut en croire les tests que j’ai passés, je me verrais plutôt
766
te. (Pour, moi, s’il faut en croire les tests que
j’
ai passés, je me verrais plutôt entre deux pentes, soit sur le chemin
767
i, s’il faut en croire les tests que j’ai passés,
je
me verrais plutôt entre deux pentes, soit sur le chemin de crête, ten
768
s’il faut en croire les tests que j’ai passés, je
me
verrais plutôt entre deux pentes, soit sur le chemin de crête, tenté
769
s, soit au fond de la vallée, et tout effort pour
m’
élever d’un côté ou de l’autre aggraverait la séparation. Reste une se
770
nvente en y marchant. « Ta parole est une lampe à
mes
pieds, une lumière sur mon sentier », dit le psalmiste. La lampe n’éc
771
parole est une lampe à mes pieds, une lumière sur
mon
sentier », dit le psalmiste. La lampe n’éclaire que le terrain où je
772
e psalmiste. La lampe n’éclaire que le terrain où
je
m’avance, ce chemin qui commence à mes pas. L’homme de la foi ne suit
773
salmiste. La lampe n’éclaire que le terrain où je
m’
avance, ce chemin qui commence à mes pas. L’homme de la foi ne suit sa
774
terrain où je m’avance, ce chemin qui commence à
mes
pas. L’homme de la foi ne suit sa voie qu’en la frayant, « sentier ét
775
La nature du pouvoir (9 octobre 1977)am an
Je
ne sais si c’est un très bon choix de m’avoir demandé d’ouvrir les dé
776
am an Je ne sais si c’est un très bon choix de
m’
avoir demandé d’ouvrir les débats, parce que je suis d’accord avec pre
777
de m’avoir demandé d’ouvrir les débats, parce que
je
suis d’accord avec presque tout ce qu’a dit Jeanne Hersch hier soir.
778
eut-être celle-ci viendra-t-elle plus tard, après
moi
. Nous avons entendu, hier soir, une très belle leçon de modération ph
779
philosophique, dont on pourrait tirer également —
je
pense que l’auteur le pensait ainsi — des leçons de modération politi
780
centrale au xxe siècle, dans tous les domaines.
Je
voudrais, d’abord, souligner l’importance de cette notion de limitati
781
e notion de limitation d’un pouvoir par d’autres.
J’
ai aussi relevé, dans cette leçon, une distinction qui, en général, am
782
versible. C’est une distinction fondamentale dont
je
me suis occupé, au fond, depuis très longtemps, depuis des décennies,
783
sible. C’est une distinction fondamentale dont je
me
suis occupé, au fond, depuis très longtemps, depuis des décennies, et
784
puis très longtemps, depuis des décennies, et que
j’
appelle l’opposition entre la puissance et la liberté. La puissance es
785
rté est la poursuite de la liberté des personnes.
J’
oppose puissance et liberté comme fins de la société, et je crois que
786
puissance et liberté comme fins de la société, et
je
crois que cette distinction est, aujourd’hui, décisive. Elle domine a
787
compose le pouvoir et, en même temps, l’écartèle.
Moi
je veux bien, mais il me semble que cela permet de faire entrer un pe
788
ose le pouvoir et, en même temps, l’écartèle. Moi
je
veux bien, mais il me semble que cela permet de faire entrer un peu t
789
même temps, l’écartèle. Moi je veux bien, mais il
me
semble que cela permet de faire entrer un peu trop de choses dans la
790
n problème insoluble ? », répondait : « Eh bien !
je
le complique. » (Vous avez peut-être reconnu le président de la Chamb
791
ul besoin de nous l’expliquer pour le subir. Ceci
me
rappelle une très jolie épigraphe que Jean Cocteau avait mise à son S
792
le pouvoir comme limite à la contrainte. Mais il
me
semble insuffisant de s’en tenir à la condamnation des jeunes contest
793
re conduite, et finit dans l’État totalitaire. Il
me
semble qu’il y aurait lieu, ici, de marquer beaucoup plus fermement l
794
contraintes dans cette préparation à la guerre —
je
vous renvoie, là-dessus, au classique ouvrage de Bertrand de Jouvenel
795
sions civiques, et tend à les rendre définitives.
Je
rappelle, là encore, la définition de Jean Bodin : le pouvoir du souv
796
va prendre les agresseurs, va les « phagocyter ».
Je
vous rappelle l’exemple de Lénine : Lénine avait écrit, au début de 1
797
ut ce qu’il avait dénoncé quelques mois plus tôt.
Je
pense qu’il n’y a qu’un moyen d’opposer le pouvoir de liberté au pouv
798
distribution, ce double dépassement, c’est ce que
j’
appelle le fédéralisme, mouvement qui s’inscrit, à mes yeux, dans cett
799
ppelle le fédéralisme, mouvement qui s’inscrit, à
mes
yeux, dans cette alternative fondamentale que je citais tout à l’heur
800
mes yeux, dans cette alternative fondamentale que
je
citais tout à l’heure entre la puissance et la liberté, et s’y inscri
801
e récent, que ce drame est celui de notre époque,
j’
ai trouvé, l’autre jour, et après coup, la formule la plus simple pour
802
après coup, la formule la plus simple pour ce que
je
voulais dire dans ce livre, et dans beaucoup d’autres. Je pense que c
803
is dire dans ce livre, et dans beaucoup d’autres.
Je
pense que cette formule rejoint les thèses de Jeanne Hersch, hier soi
804
té sans l’intervention du pouvoir. La formule que
je
vous propose est la suivante : « La puissance, c’est le pouvoir que l
805
ous avez dit plus longuement hier soir, et ce que
j’
ai dit, très vite, aujourd’hui. Voilà pourquoi j’ai paru trop clair su
806
j’ai dit, très vite, aujourd’hui. Voilà pourquoi
j’
ai paru trop clair sur certains points. J’étais obligé de me résumer,
807
ourquoi j’ai paru trop clair sur certains points.
J’
étais obligé de me résumer, de résumer des résumés faits depuis longte
808
trop clair sur certains points. J’étais obligé de
me
résumer, de résumer des résumés faits depuis longtemps ; j’insisterai
809
, de résumer des résumés faits depuis longtemps ;
j’
insisterai, tout de même, sur cette liaison entre le pouvoir, au sens
810
trand de Jouvenel dans son livre Du Pouvoir, dont
je
ne me lasse pas de citer cette phrase : « Le pouvoir est lié à la gue
811
de Jouvenel dans son livre Du Pouvoir, dont je ne
me
lasse pas de citer cette phrase : « Le pouvoir est lié à la guerre, e
812
uvent ou se déclarent en cette fin du xxe siècle
me
paraissent se ramener, symboliquement mais concrètement aussi, à l’op
813
a consommation d’énergie double tous les dix ans,
je
serais contre, parce qu’elles sont les pièces principales d’un systèm
814
s tabous de la bourgeoisie. Deux pensées de Vinet
me
paraissent définir la pointe militante de la pensée romande : Quand
815
liberté, toute la tranquillité dans la servitude,
je
préférerais encore la liberté : car la liberté c’est la vie, et la se
816
nes, vigneron de Lavaux, banquier genevois… Qu’on
m’
entende bien : je ne limite pas « l’esprit romand » à ses expressions
817
Lavaux, banquier genevois… Qu’on m’entende bien :
je
ne limite pas « l’esprit romand » à ses expressions littéraires, phil
818
TVA. « L’esprit romand » implique une politique,
je
veux dire une certaine approche des problèmes de la cité. Il implique
819
nt ? Réalité récente — qui peut changer… Si
je
me suis étendu quelque peu sur la genèse historique de notre Romandie
820
? Réalité récente — qui peut changer… Si je
me
suis étendu quelque peu sur la genèse historique de notre Romandie, c
821
Premier fait : les cinq ou six petits États dont
je
viens d’évoquer les diversités les plus frappantes n’ont acquis le se
822
de Grenoble. Le sommet se situe près de Belfort.
J’
observe dans cette aire — tout empiriquement définie, on va le voir —
823
te aire, certes plus historique que géographique,
je
repère une vingtaine d’universités et d’instituts universitaires32, d
824
ités et d’instituts universitaires32, densité que
je
crois inégalée dans le reste de l’Europe. Frappé par ce fait, j’avais
825
ée dans le reste de l’Europe. Frappé par ce fait,
j’
avais entrepris il y a quelques années une étude sur les possibilités
826
ein de cette vaste région universitaire. Et comme
j’
expliquais mes projets à l’un de nos recteurs romands, tout en m’excus
827
vaste région universitaire. Et comme j’expliquais
mes
projets à l’un de nos recteurs romands, tout en m’excusant du caractè
828
s projets à l’un de nos recteurs romands, tout en
m’
excusant du caractère très empirique et presque accidentel de mon fame
829
caractère très empirique et presque accidentel de
mon
fameux triangle, il me dit : — « Détrompez-vous ! Le triangle que vou
830
et presque accidentel de mon fameux triangle, il
me
dit : — « Détrompez-vous ! Le triangle que vous venez de dessiner cou
831
populations du ixe au début du xixe siècles. »
Je
devais découvrir peu après que Pictet de Rochemont, porte-parole de G
832
-il arriver ?” au lieu de se demander : “Que puis-
je
faire ?”. À ces deux questions, curieusement, il n’est qu’une réponse
833
« crise universelle ». Qu’entendez-vous par là ?
J’
entends que, à l’Est comme à l’Ouest, les idéaux de progrès matériel,
834
n’y a pas que la pollution par l’industrie. Pour
moi
, la pollution majeure et définitive de la terre serait la guerre atom
835
ans la régionalisation ? N’allons pas trop vite !
Je
constate, en historien, qu’à l’origine de nos maux actuels, il y a le
836
langue et une culture commune ? L’État-nation que
je
dénonce a 180 ans d’âge. Il a détruit, lentement mais sûrement et mét
837
ens civique dans l’Hexagone. Mais les régions que
je
préconise sont autre chose que les seules ethnies : ce sont les commu
838
en train de se faire reconnaître en Europe et, à
mon
sens, c’est là la voie d’une union européenne possible. Mais comment
839
comment pourrions-nous aboutir à ces solutions ?
Je
ne pense pas que les hommes vont devenir sages dans les dix années dé
840
dans les dix années décisives qui viennent, mais
je
pense qu’un certain nombre de catastrophes vont les forcer à réfléchi
841
te révolution vers une nouvelle forme de progrès.
Je
ne propose pas la violence qui aboutit toujours à des régimes policie
842
t des pouvoirs existants, déjà si compromis. Pour
moi
, le but général de la civilisation et de la société politique n’est p
843
e et industrielle) est à l’origine de ce déclic :
J’
ai vu sous forme de courbes ce qui allait se passer si on continuait c
844
lait se passer si on continuait comme maintenant.
Je
me suis dit : « il faut faire quelque chose ». Vastes villes trop
845
t se passer si on continuait comme maintenant. Je
me
suis dit : « il faut faire quelque chose ». Vastes villes trop peu
846
te est devenue le mensonge. Accusation gratuite ?
J’
ai relevé douze mensonges officiels à propos du nucléaire, répond Deni
847
Vous êtes un farouche ennemi de l’État-nation ?
J’
ai toujours été antinationaliste et antiétatiste. Tout prouve aujourd’
848
sir de redevenir un penseur à la mode ? La mode ?
Je
ne sais pas très bien ce que c’est ! Tout de même, avec la naissance
849
retrouvez, bon gré mal gré, dans l’air du temps…
J’
ai plutôt l’impression que l’air du temps retrouve un certain nombre d
850
etrouve un certain nombre d’idées pour lesquelles
je
me bats obstinément depuis près de cinquante ans. Évidemment, cette c
851
ouve un certain nombre d’idées pour lesquelles je
me
bats obstinément depuis près de cinquante ans. Évidemment, cette conv
852
s de cinquante ans. Évidemment, cette convergence
m’
émeut car ça fait toujours plaisir de constater qu’on n’a pas parlé da
853
ous ceux qui défendent aujourd’hui les thèmes que
je
défendais moi-même dans les années 1930, combien m’ont vraiment lu ?
854
défendais moi-même dans les années 1930, combien
m’
ont vraiment lu ? Combien savent seulement que j’existe ? Tout de même
855
m’ont vraiment lu ? Combien savent seulement que
j’
existe ? Tout de même… L’Amour et l’Occident fut un best-seller mond
856
ite. Cela dit, il y a un vieux proverbe latin que
je
me répète souvent : « Plaise aux dieux que je sois un faux prophète.
857
. Cela dit, il y a un vieux proverbe latin que je
me
répète souvent : « Plaise aux dieux que je sois un faux prophète. » L
858
que je me répète souvent : « Plaise aux dieux que
je
sois un faux prophète. » Le drame, aujourd’hui, c’est que la prophéti
859
es d’une même tendance productiviste… Absolument.
J’
ajouterai cependant que ce qui, dans les années 1930, pouvait passer p
860
as l’un et l’autre, il se sentira frustré, exclu.
Je
pense donc qu’après l’avoir exploité pendant plusieurs siècles l’Occi
861
opéenne, le régionalisme et l’écologie sont, pour
moi
, des thèmes très étroitement liés. En face, il n’y a que des illusion
862
homme qui cite plus souvent Luther que Bakounine…
Je
ne suis pas anarchiste dans la mesure où je sais qu’un minimum d’État
863
nine… Je ne suis pas anarchiste dans la mesure où
je
sais qu’un minimum d’État est nécessaire à l’organisation de la socié
864
l’organisation de la société. En revanche, ce qui
me
semble important, c’est de hâter la désacralisation de cet État. Au x
865
e ? Rien n’est moins sûr. Il y a quelques années,
j’
ai mêmeas écrit un livre intitulé Vingt-huit siècles d’Europe dans l
866
ntitulé Vingt-huit siècles d’Europe dans lequel
je
m’étais amusé à collectionner tous les textes où s’exprimait une nost
867
tulé Vingt-huit siècles d’Europe dans lequel je
m’
étais amusé à collectionner tous les textes où s’exprimait une nostalg
868
s’imposer tout de suite et, avec quelques amisau,
j’
avais milité en ce sens. Il se trouve que des manœuvres politiques ont
869
ndez-vous manqué dont nous payons encore le prix.
J’
ai l’impression qu’il y a un malentendu : dans votre jeunesse, disiez-
870
enez l’exemple de Sartre : en 1949, à l’époque où
je
créais le Centre européen de la culture, il m’avait envoyé un long ra
871
où je créais le Centre européen de la culture, il
m’
avait envoyé un long rapport dans lequel il expliquait que la culture
872
r que si l’Europe politique devenait une réalité.
J’
étais ravi. Or, peu de temps après, Sartre devient, comme l’on sait, l
873
té de l’impérialisme germano-américain, ce qui, à
mon
sens, témoigne d’une grande méconnaissance des réalités et des forces
874
un genre qui ne vous déplaît pas… … Surtout quand
je
m’aperçois, quarante ans après, que les jeunes gens suivent presque à
875
genre qui ne vous déplaît pas… … Surtout quand je
m’
aperçois, quarante ans après, que les jeunes gens suivent presque à la
876
s suivent presque à la lettre ce que vous appelez
mes
« prophéties ». Tenez, en mai 1968, ça m’a fait une bien curieuse imp
877
ppelez mes « prophéties ». Tenez, en mai 1968, ça
m’
a fait une bien curieuse impression de voir tant de jeunes gens — qui
878
n’avaient probablement pas lu une seule ligne de
moi
, ni d’Arnaud Dandieu, ni de Robert Aron — reprendre en chœur ce que n
879
oir, c’était un titre bien fâcheux… Tout d’abord,
je
vous rappellerai que Gramsci, dans les années 1920, avait intitulé sa
880
t-être, mais c’était un malentenduay. Ce sur quoi
je
voulais mettre l’accent — quand je dis « moi », je pense aussi aux in
881
y. Ce sur quoi je voulais mettre l’accent — quand
je
dis « moi », je pense aussi aux intellectuels « personnalistes » regr
882
quoi je voulais mettre l’accent — quand je dis «
moi
», je pense aussi aux intellectuels « personnalistes » regroupés par
883
e voulais mettre l’accent — quand je dis « moi »,
je
pense aussi aux intellectuels « personnalistes » regroupés par Emmanu
884
s faciles parce qu’ils arrivaient et disaient : «
Moi
, je vais vous offrir du communautaire, du religieux. » Et, en histoir
885
iles parce qu’ils arrivaient et disaient : « Moi,
je
vais vous offrir du communautaire, du religieux. » Et, en histoire, q
886
moderne des religions d’État. C’est pour cela que
j’
ai souvent défini le marxisme comme « l’opium de la révolution ». Quan
887
pticisme devant les vertus du suffrage universel,
je
reconnais que c’était un diagnostic trop abrupt. Mais n’oubliez pas q
888
t permis à Hitler de devenir chancelier. Au fond,
je
faisais partie d’un groupe d’intellectuels pour lesquels le phénomène
889
a faillite. En ce temps-là, Bakounine et Proudhon
me
semblaient plus toniques que l’auteur du Capital. On passait donc pou
890
de Francfort… C’est vrai. C’est grâce à Abetz que
j’
ai pu voir de près l’horreur hitlérienne à ses commencements. Bien sûr
891
eur hitlérienne à ses commencements. Bien sûr, en
m’
offrant ce poste à Francfort, il s’imaginait que je ne tarderais pas à
892
’offrant ce poste à Francfort, il s’imaginait que
je
ne tarderais pas à me convertir à l’idéologie du IIIe Reich. Pourtant
893
ancfort, il s’imaginait que je ne tarderais pas à
me
convertir à l’idéologie du IIIe Reich. Pourtant, il n’ignorait rien d
894
ie du IIIe Reich. Pourtant, il n’ignorait rien de
mes
prises de position antinazies. Voulait-il donc me convertir ou m’écla
895
es prises de position antinazies. Voulait-il donc
me
convertir ou m’éclairer ? De ce point de vue, il ne faut pas oublier
896
ition antinazies. Voulait-il donc me convertir ou
m’
éclairer ? De ce point de vue, il ne faut pas oublier qu’Otto Abetz lu
897
i-même n’était qu’à demi nazi. Une moitié suffit…
Je
vous l’accorde. Toujours est-il que, dès 1932, il avait témoigné un c
898
ord dans des organisations vaguement pétainistes (
je
pense surtout aux fameux Chantiers de jeunesse d’Uriage), mais, pour
899
rectement dans l’action politique ? Étant suisse,
je
ne pouvais pas prétendre à une carrière politique en France. De plus,
900
ndre à une carrière politique en France. De plus,
j’
ai toujours eu horreur des partis. Ce qui ne m’a pas empêché de milite
901
s, j’ai toujours eu horreur des partis. Ce qui ne
m’
a pas empêché de militer un peu partoutbb afin de conjurer, de différe
902
lypse » pourrait être différée ? Plus exactement,
je
crois que l’histoire se réserve toujours le droit de nous surprendre
903
’asphyxie et à l’embouteillage mondial. Bien sûr,
je
caricature. Mais enfin… Cela me fait penser au vers de Hölderlin, « L
904
ondial. Bien sûr, je caricature. Mais enfin… Cela
me
fait penser au vers de Hölderlin, « Là où croît le danger, croît auss
905
politique… Pourquoi parler d’ambiguïté ? Fidèle à
mes
premières intuitions, je crois, et de toute mon énergie, à la possibi
906
d’ambiguïté ? Fidèle à mes premières intuitions,
je
crois, et de toute mon énergie, à la possibilité d’une politique de l
907
à mes premières intuitions, je crois, et de toute
mon
énergie, à la possibilité d’une politique de la personne et de l’indi
908
… C’est absolument exact puisque, dans ce livre,
je
me livrais à une étude du couple à travers l’histoire de l’Occident.
909
C’est absolument exact puisque, dans ce livre, je
me
livrais à une étude du couple à travers l’histoire de l’Occident. Or
910
e. Tristan en est l’archétype. Manifestement — et
je
l’ai prouvé —, Tristan n’aime pas Iseut. Il aime l’amour dans lequel
911
t se sentir coupable. « C’est le philtre, dit-il,
je
n’y suis pour rien… » C’est exactement ainsi que procèdent les États-
912
s États-nations. Comme Tristan, ils disent « seul
je
suis, moi,bj le monde » et, face à cette certitude, il n’est pas de r
913
ations. Comme Tristan, ils disent « seul je suis,
moi
,bj le monde » et, face à cette certitude, il n’est pas de réalité qui
914
Mémoires : « De tout temps, la France ne fut pour
moi
qu’une princesse de légende vouée à des malheurs exemplaires. »bm Et
915
s que l’on se prononce sur les affaires humaines,
je
pense qu’il vaut mieux être du côté du roi Marcbn, qui symbolise la l
916
ce, vous n’avez pas changé… C’est vrai. Qu’y puis-
je
? Le classicisme, en morale, c’est aussi une forme d’espoir. À cet ég
917
oir. À cet égard, il y a une phrase de Luther que
je
me répète souvent : « Si l’on m’apprenait que la fin du monde est pou
918
. À cet égard, il y a une phrase de Luther que je
me
répète souvent : « Si l’on m’apprenait que la fin du monde est pour d
919
se de Luther que je me répète souvent : « Si l’on
m’
apprenait que la fin du monde est pour demain, je planterais quand mêm
920
m’apprenait que la fin du monde est pour demain,
je
planterais quand même un pommier. » 33. Voir l’éditorial de Jean Da
921
he. bd. Sous le paragraphe entre parenthèses : «
Je
n’ai jamais dit ça. » be. Grand point d’interrogation en marge de ce
922
citation exacte tirée des Mémoires est : « Toute
ma
vie, je me suis fait une certaine idée de la France. Le sentiment me
923
n exacte tirée des Mémoires est : « Toute ma vie,
je
me suis fait une certaine idée de la France. Le sentiment me l’inspir
924
xacte tirée des Mémoires est : « Toute ma vie, je
me
suis fait une certaine idée de la France. Le sentiment me l’inspire a
925
fait une certaine idée de la France. Le sentiment
me
l’inspire aussi bien que la raison. Ce qu’il y a, en moi, d’affectif
926
nspire aussi bien que la raison. Ce qu’il y a, en
moi
, d’affectif imagine naturellement la France, telles la princesse des
927
vouée à une destinée éminente et exceptionnelle.
J’
ai, d’instinct, l’impression que la Providence l’a créée pour des succ
928
ont (10 octobre 1977)bo bp Denis de Rougemont,
je
vais vous lire une des premières phrases de votre livre : « Si nous n
929
uel est ce cataclysme que vous annoncez ? D’abord
je
vous ferai remarquer que cette phrase est au conditionnel : « Si nous
930
librement notre avenir, il arrivera…, etc. » Donc
je
n’annonce pas des cataclysmes, j’essaie au contraire de les prévenir.
931
a…, etc. » Donc je n’annonce pas des cataclysmes,
j’
essaie au contraire de les prévenir. C’est ce qui me distingue de beau
932
essaie au contraire de les prévenir. C’est ce qui
me
distingue de beaucoup de gens qui adorent jouer les Cassandre. Ce son
933
s provoquent ! En revanche, les écologistes, dont
je
suis, pensent qu’on peut au contraire tout sauver à condition de chan
934
« Utinam vates falsus sim », « Plaise au ciel que
je
sois un faux prophète ! » : c’est-à-dire, que les mécanismes désastre
935
rain de se monter puissent être arrêtés à temps !
J’
écris pour que les choses changent, pas pour qu’elles continuent. Eh b
936
streux » qui nous menacent. Ce n’est pas vous que
j’
étonnerai en disant qu’il y en a beaucoup et qu’on en a beaucoup parlé
937
n a beaucoup et qu’on en a beaucoup parlé. Ce qui
m’
intéresse moi, c’est de dénoncer la fausseté de la métaphore dont on u
938
et qu’on en a beaucoup parlé. Ce qui m’intéresse
moi
, c’est de dénoncer la fausseté de la métaphore dont on use pour les j
939
? Nous, sinon qui d’autre ? C’est bien là ce que
je
veux dire. L’avenir dépend entièrement de nous ; mis à part les tremb
940
t de nous ; mis à part les tremblements de terre.
Je
crois que tout dépend de nous. Autrefois on disait : « L’avenir n’app
941
va arriver ?” au lieu de se demander : “Que puis-
je
faire ?” » Permettez-moi d’ouvrir une parenthèse : je ne me souviens
942
e se demander : “Que puis-je faire ?” » Permettez-
moi
d’ouvrir une parenthèse : je ne me souviens pas, dans aucun de mes li
943
aire ?” » Permettez-moi d’ouvrir une parenthèse :
je
ne me souviens pas, dans aucun de mes livres, d’avoir écrit cette phr
944
” » Permettez-moi d’ouvrir une parenthèse : je ne
me
souviens pas, dans aucun de mes livres, d’avoir écrit cette phrase !
945
parenthèse : je ne me souviens pas, dans aucun de
mes
livres, d’avoir écrit cette phrase ! Mais on l’a si souvent citée com
946
ase ! Mais on l’a si souvent citée comme étant de
moi
que je l’adopte volontiers ! Alors, pour revenir à nos propos sur l’a
947
is on l’a si souvent citée comme étant de moi que
je
l’adopte volontiers ! Alors, pour revenir à nos propos sur l’avenir,
948
aura plus de pétrole pour les faire rouler. Donc,
je
ne prédis pas une catastrophe des autos, je dis simplement de faire a
949
Donc, je ne prédis pas une catastrophe des autos,
je
dis simplement de faire attention, car si nous ne faisons pas attenti
950
imaginez le même incident avec le pétrole ! Puis-
je
vous citer la fin de votre phrase de tout à l’heure sur les cataclysm
951
d’essence que vous songez en écrivant cela ? Non,
je
songeais tout simplement à la guerre nucléaire. C’est un des aspects
952
ts du cataclysme, le plus éclatant naturellement.
Je
suis absolument persuadé, et personne n’a jamais pu me faire d’object
953
is absolument persuadé, et personne n’a jamais pu
me
faire d’objection sérieuse contre cette théorie, que si nous continuo
954
NB se mettent à vendre des centrales nucléaires —
je
n’ai pas besoin de dire lesquels, tout le monde le sait — c’est une m
955
portations pendant quelques années et puis, après
moi
, le déluge… » Je vous l’ai dit, ce sont ceux qui annoncent les catast
956
quelques années et puis, après moi, le déluge… »
Je
vous l’ai dit, ce sont ceux qui annoncent les catastrophes qui les fa
957
ème psychologique très curieux : personnellement,
je
connais plus ou moins intimement beaucoup de ces gens, qui sont des g
958
alors ils se mettent à mentir par les intestins,
je
dirai, des mensonges énormes. Comme ce sont souvent des gens très imp
959
gents, ils ne peuvent pas ne pas le savoir. Citez-
moi
l’un de ces mensonges par exemple. Eh bien, posez la question : « Est
960
, ils continuent à mentir. C’est justement ce qui
me
frappe dans tout cela : c’est que des gens qui se connaissent tous en
961
vez ne l’est guère. Comment expliquez-vous cela ?
Je
ne voudrais pas être trop polémique, mais ce que je vais vous dire es
962
ne voudrais pas être trop polémique, mais ce que
je
vais vous dire est couvert par de très hautes autorités scientifiques
963
uvert par de très hautes autorités scientifiques.
Je
vais prendre encore un exemple dans mon propre pays, la Suisse. On a
964
ntifiques. Je vais prendre encore un exemple dans
mon
propre pays, la Suisse. On a appris, à un moment donné, qu’il existai
965
faisait partie de cette commission. Il a dit : «
Je
ne veux plus continuer à me prêter à cette comédie, je suis le seul m
966
mission. Il a dit : « Je ne veux plus continuer à
me
prêter à cette comédie, je suis le seul membre indépendant de la comm
967
veux plus continuer à me prêter à cette comédie,
je
suis le seul membre indépendant de la commission ! Mes dix-neuf collè
968
uis le seul membre indépendant de la commission !
Mes
dix-neuf collègues représentent tous des multinationales, des product
969
rs. » Ils étaient tous docteurs en quelque chose…
Je
ne suspecte pas particulièrement la Suisse, mais ce n’est là qu’un ex
970
lation stagner et même, parfois, décroître. Alors
je
dis : « Est-ce que vous comptez envoyer votre électricité nucléaire e
971
a très bien montré dans Le Mal français. Sa thèse
m’
aide plus qu’elle ne me contrarie ; car il a très bien montré, dans le
972
Le Mal français. Sa thèse m’aide plus qu’elle ne
me
contrarie ; car il a très bien montré, dans le cas de problèmes qu’il
973
nique, nucléaire notamment. La première phrase de
mon
livre dit à peu près : pour la première fois dans l’histoire, l’homme
974
nt ? Faut-il briser l’État ? Et si oui, comment ?
Je
dirai qu’il faut en finir avec l’État-nation et qu’il faut, pour cela
975
issance qu’on mettra fin à la tyrannie de l’État.
Je
précise à cet égard que je ne mets bien entendu aucune différence ent
976
la tyrannie de l’État. Je précise à cet égard que
je
ne mets bien entendu aucune différence entre l’État-nation socialiste
977
itut de l’État a-t-il jamais existé ? Pouvez-vous
m’
en citer un modèle ? Eh bien, je pourrais vous citer évidemment ce gra
978
sté ? Pouvez-vous m’en citer un modèle ? Eh bien,
je
pourrais vous citer évidemment ce grand modèle de la démocratie qu’ét
979
Ils l’ont fait soixante-dix fois, figurez-vous !
Je
suppose que les linguistes grecs n’avaient pas encore inventé le mot
980
t volontairement parce que tous en décidaient. Et
je
connais aujourd’hui des communautés non nationales, par exemple, la c
981
prendre son destin en main. Il y aurait donc, si
je
vous entends, une taille à ne pas dépasser sous peine de mort pour la
982
sser sous peine de mort pour la démocratie ? Oui,
je
pense en effet que la démocratie est une question de dimension matéri
983
ore — d’un modèle mais il n’est pas si naïf. Dans
mon
pays, la Suisse, qui est composée de nombreux petits cantons, nous av
984
en ont conservé la coutume. Bien sûr, vous allez
me
dire qu’aujourd’hui il y a l’électronique qui a tout changé et que le
985
i répondre ? Qui peut lever la main et dire : « À
moi
la parole. » Et la démocratie est dialogue. Peut-être est-ce parce qu
986
ensions nous conduisent à des grandes guerres ?bq
J’
ai fait une comparaison assez poussée entre le petit État ou la petite
987
État ou la petite communauté et le grand État, et
je
montre assez facilement (après beaucoup d’autres d’ailleurs) que le p
988
Regardez la Confédération helvétique qui est pour
moi
un modèle assez proche de la cité grecque. Elle s’est formée sur la b
989
-nation dans ses dimensions européennes actuelles
me
paraît terminé ; ce n’est pas une idée que j’ai aujourd’hui. Je l’ai
990
les me paraît terminé ; ce n’est pas une idée que
j’
ai aujourd’hui. Je l’ai découverte et nous l’avons formulée pour la pr
991
iné ; ce n’est pas une idée que j’ai aujourd’hui.
Je
l’ai découverte et nous l’avons formulée pour la première fois lorsqu
992
lière qui est le cas le plus fréquent en Europe —
me
paraît être le cadre le mieux adapté aux problèmes que nous avons à r
993
tenant près d’un demi-siècle que vous écrivez… Et
je
dis toujours la même chose ? Oui, parce que j’y crois. Et aussi parce
994
Et je dis toujours la même chose ? Oui, parce que
j’
y crois. Et aussi parce que pendant longtemps j’ai été moins écouté qu
995
e j’y crois. Et aussi parce que pendant longtemps
j’
ai été moins écouté que des gens qui ont fait des palinodies éclatante
996
trente ans, ils disent soudain la même chose que
moi
. Ce qui fait beaucoup d’effet mais ne leur donne pas une grande crédi
997
une grande influence sur le réel ? Au contraire,
je
pense que leur pouvoir est plus grand que jamais. J’en reviens toujou
998
pense que leur pouvoir est plus grand que jamais.
J’
en reviens toujours à ma première phrase : « À partir de maintenant, i
999
st plus grand que jamais. J’en reviens toujours à
ma
première phrase : « À partir de maintenant, il arrivera dans le monde
1000
mais ils continuent à vouloir, comme on dit chez
moi
, le beurre et l’argent du beurre. Les Américains disent : « Manger so
1001
ise du pétrole en 1973, qui est le type de ce que
j’
appelle une catastrophe enseignante ; parce que ça a fait peur à tout
1002
és du monde moderne au grand public. C’est ce que
j’
appelle dans mon livre « la pédagogie des catastrophes ». Car il y en
1003
erne au grand public. C’est ce que j’appelle dans
mon
livre « la pédagogie des catastrophes ». Car il y en aura d’autres. Q
1004
n’êtes pas très optimiste sur la nature humaine.
Je
dirai que, quoique Suisse, je ne suis pas du tout rousseauiste : je n
1005
la nature humaine. Je dirai que, quoique Suisse,
je
ne suis pas du tout rousseauiste : je ne pense pas, comme Jean-Jacque
1006
que Suisse, je ne suis pas du tout rousseauiste :
je
ne pense pas, comme Jean-Jacques, que l’homme est né bon et que la so
1007
’homme est né bon et que la société le corrompt :
je
pense que l’homme est né méchant et faible et tâche d’utiliser des im
1008
ir à l’abri de tout ça en disant : « Ce n’est pas
moi
qui le veux, ce sont les impératifs. » Exactement comme Adam, quand D
1009
s buissons. C’est tout juste s’il n’a pas dit : «
Je
ne suis pas là. » Et quand Dieu lui a demandé : « Qu’est-ce que tu as
1010
-ce que tu as fait ? », il a dit : « Ce n’est pas
moi
, c’est Ève » ; alors Dieu a demandé à Ève : « Qu’est-ce que tu as fai
1011
que tu as fait ? » Et Ève a dit : « Ce n’est pas
moi
, c’est le serpent. » Et le serpent, bien sûr, n’était plus là. Mais m
1012
» Et le serpent, bien sûr, n’était plus là. Mais
moi
je crois à la liberté et à la responsabilité de l’homme. Et j’espère
1013
t le serpent, bien sûr, n’était plus là. Mais moi
je
crois à la liberté et à la responsabilité de l’homme. Et j’espère que
1014
la liberté et à la responsabilité de l’homme. Et
j’
espère que le danger sera un bon maître d’école. bo. Rougemont Deni
1015
n va lire donne ainsi un prolongement inattendu à
ma
récente enquête sur “Les déchets du progrès”. » bq. On a ici conserv
1016
venir est votre affaire (11 octobre 1977)bs bt
J’
ai rencontré Denis de Rougemont dans sa maison de Pouilly, tout près d
1017
pas, auparavant, les moyens de tout faire sauter.
Je
parle d’un délai de dix ans, car après, il sera vraisemblablement tro
1018
ible, qu’on n’utilisera pas les bombes atomiques…
Je
répondrai ceci : la France et l’Allemagne vendent des centrales de re
1019
fort que les chefs d’État. C’est surtout cela qui
me
fait peur… Et d’après vous, les États-nations ne peuvent plus rien en
1020
pour faire face à ces immenses problèmes ? Comme
je
le montre dans mon livre, les États-nations ne sont plus adaptés aux
1021
ces immenses problèmes ? Comme je le montre dans
mon
livre, les États-nations ne sont plus adaptés aux grands enjeux de no
1022
ands, ils n’ont plus rien à faire dans ce siècle.
Je
n’accuse pas les gouvernants d’être méchants, mais totalement inadapt
1023
train de s’éveiller selon vous ? Certainement et
je
prendrai comme exemple la « Regio Basiliensis » où des Allemands, des
1024
ourit ironiquement et se fâche un tout petit peu…
Je
ne suis tout de même pas Yves Saint-Laurent ou Cardin ! Je m’honore d
1025
s tout de même pas Yves Saint-Laurent ou Cardin !
Je
m’honore de n’avoir jamais été à la mode et je me flatte d’avoir souv
1026
out de même pas Yves Saint-Laurent ou Cardin ! Je
m’
honore de n’avoir jamais été à la mode et je me flatte d’avoir souvent
1027
! Je m’honore de n’avoir jamais été à la mode et
je
me flatte d’avoir souvent été à contre-courant ! Ce qui est en jeu da
1028
Je m’honore de n’avoir jamais été à la mode et je
me
flatte d’avoir souvent été à contre-courant ! Ce qui est en jeu dans
1029
Ce qui est en jeu dans ce livre, comme dans toute
mon
œuvre, va tout de même bien au-delà d’une simple question de mode int
1030
n. Combien de temps avez-vous mis pour l’écrire ?
J’
ai mis quatre ans et demi pour achever L’Avenir est notre affaire . J
1031
t demi pour achever L’Avenir est notre affaire .
Je
n’avais fait cela pour aucun de mes livres. J’ai écrit, par exemple,
1032
otre affaire . Je n’avais fait cela pour aucun de
mes
livres. J’ai écrit, par exemple, L’Amour et l’Occident en trois moi
1033
. Je n’avais fait cela pour aucun de mes livres.
J’
ai écrit, par exemple, L’Amour et l’Occident en trois mois… En été 1
1034
’Amour et l’Occident en trois mois… En été 1973,
j’
avais déjà écrit une centaine de pages, où je prévoyais certains événe
1035
973, j’avais déjà écrit une centaine de pages, où
je
prévoyais certains événements qui pouvaient se passer, notamment dans
1036
be. Puis vint la guerre du Kippour, qui vérifiait
mon
analyse tout en m’obligeant à jeter à la corbeille ce que j’avais écr
1037
rre du Kippour, qui vérifiait mon analyse tout en
m’
obligeant à jeter à la corbeille ce que j’avais écrit. Je ne pouvais p
1038
tout en m’obligeant à jeter à la corbeille ce que
j’
avais écrit. Je ne pouvais pas me donner l’air de prophétiser après co
1039
eant à jeter à la corbeille ce que j’avais écrit.
Je
ne pouvais pas me donner l’air de prophétiser après coup ce qui s’éta
1040
corbeille ce que j’avais écrit. Je ne pouvais pas
me
donner l’air de prophétiser après coup ce qui s’était produit ! En un
1041
r après coup ce qui s’était produit ! En un sens,
je
suis content de ce long temps de maturation qui a été nécessaire, car
1042
ong temps de maturation qui a été nécessaire, car
j’
ai pu prendre de la distance par rapport à l’actualité immédiate. Comm
1043
sez-vous la perspective centrale de votre livre ?
Je
dirai que c’est un essai d’une morale de l’homme libre et responsable
1044
qu’il n’y a pas de liberté sans puissance. À quoi
je
réponds que la puissance est le pouvoir que l’on prend sur autrui et
1045
comme la « foule solitaire » des grandes villes.
J’
ai une certaine confiance, car j’observe qu’une immense révolution se
1046
grandes villes. J’ai une certaine confiance, car
j’
observe qu’une immense révolution se prépare dans les pays européens,
1047
de la communauté. Une expérience comme Longo Maï
me
paraît hautement positive et je l’appuie entièrement. Je suis égaleme
1048
e comme Longo Maï me paraît hautement positive et
je
l’appuie entièrement. Je suis également heureux de voir que la jeune
1049
ît hautement positive et je l’appuie entièrement.
Je
suis également heureux de voir que la jeune génération est en train d
1050
as entièrement vrai, il y a des points positifs :
je
mentionnerai tout d’abord le fait qu’une guerre est désormais impensa
1051
résente un immense progrès par rapport au passé !
Je
relèverai ensuite que trois dictatures ont disparu de l’Europe ces de
1052
«
Je
suis un pessimiste actif » (17 octobre 1977)bu bv Denis de Rougemo
1053
mi lesquels L’Amour et l’Occident paru en 1939.
Je
n’avais pas commencé mon essai sur L’Amour et l’Occident à la date
1054
l’Occident paru en 1939. Je n’avais pas commencé
mon
essai sur L’Amour et l’Occident à la date à laquelle mon éditeur m’
1055
sur L’Amour et l’Occident à la date à laquelle
mon
éditeur m’avait demandé de le remettre. J’ai donc très volontiers céd
1056
r et l’Occident à la date à laquelle mon éditeur
m’
avait demandé de le remettre. J’ai donc très volontiers cédé la place
1057
uelle mon éditeur m’avait demandé de le remettre.
J’
ai donc très volontiers cédé la place à un jeune auteur qui s’appelait
1058
lle est la parenté ? Il y en a une très visible !
Je
défends une certaine idée du mariage dans L’Amour et l’Occident , en
1059
assion amoureuse où l’on ne « voit pas » l’autre.
Je
me rallie à la conception du mariage que l’on trouve dans une tribu a
1060
ion amoureuse où l’on ne « voit pas » l’autre. Je
me
rallie à la conception du mariage que l’on trouve dans une tribu afri
1061
une tribu africaine. Le marié dit à sa femme : «
Je
te vois », et réciproquement. Cela veut dire : je te vois dans ta réa
1062
Je te vois », et réciproquement. Cela veut dire :
je
te vois dans ta réalité donc dans la différence. Pas de subordination
1063
! L’égalité dans la différence, sans uniformité !
J’
ai toujours combattu pour le régionalisme, et ce qui me fait plaisir c
1064
toujours combattu pour le régionalisme, et ce qui
me
fait plaisir c’est que la réalité commence à me rejoindre ! Je suis b
1065
i me fait plaisir c’est que la réalité commence à
me
rejoindre ! Je suis beaucoup plus optimiste aujourd’hui qu’il y a cin
1066
ir c’est que la réalité commence à me rejoindre !
Je
suis beaucoup plus optimiste aujourd’hui qu’il y a cinq ans. Regardez
1067
s un « pessimiste actif ». Il y a une phrase que
j’
ai écrite et à laquelle je tiens, c’est celle-ci : « La décadence d’un
1068
Il y a une phrase que j’ai écrite et à laquelle
je
tiens, c’est celle-ci : « La décadence d’un peuple commence quand on
1069
va arriver au lieu de se demander : Qu’est-ce que
je
vais faire ? » Je ne crois pas que l’homme soit bon mais je crois que
1070
de se demander : Qu’est-ce que je vais faire ? »
Je
ne crois pas que l’homme soit bon mais je crois que l’on peut constru
1071
ire ? » Je ne crois pas que l’homme soit bon mais
je
crois que l’on peut construire une société qui le corrompe le moins p
1072
n matière nucléaire ne sont pas très différentes.
Je
fais commenter à mes élèves des textes de Michel Debré et de Georges
1073
ne sont pas très différentes. Je fais commenter à
mes
élèves des textes de Michel Debré et de Georges Marchais. Ce sont à p
1074
des gens l’idée qu’ils ne peuvent pas comprendre…
Je
les invite à méditer un argument très simple : intéressez-vous aux an
1075
de réflexion. Et à partir de là, informez-vous !
Je
crois qu’il faut faire appel au sens de la responsabilité. Mais ce n’
1076
dans de petites communautés. C’est pour cela que
je
crois aux régions, contre l’État centralisateur. bu. Rougemont Den
1077
isateur. bu. Rougemont Denis de, « [Entretien]
Je
suis un pessimiste actif », Elle, Paris, 17 octobre 1977, p. 8. bv.
1078
sa demeure de Pouilly, en France : « Le pays dont
je
préfère me plaindre », comme il dit. Quand quelqu’un prend le pouvoir
1079
de Pouilly, en France : « Le pays dont je préfère
me
plaindre », comme il dit. Quand quelqu’un prend le pouvoir, c’est le
1080
urante. En écrivant L’Avenir est notre affaire ,
j’
entendais faire le point de la situation. Je constate que cette situat
1081
ire , j’entendais faire le point de la situation.
Je
constate que cette situation est grave. On vient me dire, alors, que
1082
constate que cette situation est grave. On vient
me
dire, alors, que je suis pessimiste. Cela ne veut rien dire. Je ne di
1083
situation est grave. On vient me dire, alors, que
je
suis pessimiste. Cela ne veut rien dire. Je ne dis pas que l’asphyxie
1084
, que je suis pessimiste. Cela ne veut rien dire.
Je
ne dis pas que l’asphyxie « naturelle » ou le cataclysme militaire so
1085
le » ou le cataclysme militaire sont inévitables.
Je
dis qu’il est de notre devoir de les éviter en changeant de cap. De n
1086
re de décision encore plus réduit. Voilà pourquoi
je
me méfie des révolutions… Le « toujours plus » qui conduit à l’abs
1087
de décision encore plus réduit. Voilà pourquoi je
me
méfie des révolutions… Le « toujours plus » qui conduit à l’absurd
1088
Le « toujours plus » qui conduit à l’absurde
J’
aimerais ajouter que l’État-nation, en invoquant les nécessités de la
1089
ez-vous votre propre évolution ? Personnellement,
je
préfère mes textes plus poétiques, plus immédiats. Ceux réunis en 196
1090
re propre évolution ? Personnellement, je préfère
mes
textes plus poétiques, plus immédiats. Ceux réunis en 1968 sous le ti
1091
ous le titre Journal d’une époque , par exemple.
Je
m’en sens plus proche que de L’Amour et l’Occident , en un sens. Mai
1092
le titre Journal d’une époque , par exemple. Je
m’
en sens plus proche que de L’Amour et l’Occident , en un sens. Mais l
1093
L’esprit jacobin La réalité s’est chargée de
me
confirmer dans ma voie. Lecteur en Allemagne, j’ai donné, en 1935 et
1094
La réalité s’est chargée de me confirmer dans
ma
voie. Lecteur en Allemagne, j’ai donné, en 1935 et 1936, un cours sur
1095
me confirmer dans ma voie. Lecteur en Allemagne,
j’
ai donné, en 1935 et 1936, un cours sur la littérature de la Révolutio
1096
rs sur la littérature de la Révolution française.
Je
parle de tout cela dans mon Journal d’Allemagne . Des chemises brune
1097
Révolution française. Je parle de tout cela dans
mon
Journal d’Allemagne . Des chemises brunes et des chemises noires aux
1098
premiers rangs, des textes révolutionnaires sous
mes
yeux : cela m’a appris beaucoup de choses. En fait, les nazis étaient
1099
des textes révolutionnaires sous mes yeux : cela
m’
a appris beaucoup de choses. En fait, les nazis étaient des jacobins,
1100
jacobins, la convergence était évidente. Et puis
j’
ai vu Hitler célébrer le culte nazi à la Festhalle de Francfort, j’ai
1101
lébrer le culte nazi à la Festhalle de Francfort,
j’
ai vu, j’ai senti ce qu’il faut bien appeler l’âme de la foule. Une fa
1102
culte nazi à la Festhalle de Francfort, j’ai vu,
j’
ai senti ce qu’il faut bien appeler l’âme de la foule. Une fausse comm
1103
nauté née de la grisaille et de l’anonymat. Quand
j’
en ai parlé en France, en 1936, les uns m’ont taxé de folie et les aut
1104
. Quand j’en ai parlé en France, en 1936, les uns
m’
ont taxé de folie et les autres m’ont pris pour un agent allemand char
1105
n 1936, les uns m’ont taxé de folie et les autres
m’
ont pris pour un agent allemand chargé de leur faire peur… Ce qui est
1106
aux — de puissance, de grandeur. On oublie ce que
j’
appelle depuis toujours l’individu libre et responsable. Vous évoquez,
1107
des intérêts précis, dans une région précise. Il
me
semble que c’est sérieux et encourageant. Voyez-vous : je me méfie de
1108
e que c’est sérieux et encourageant. Voyez-vous :
je
me méfie des attaques frontales contre l’État, qui renforcent toujour
1109
ue c’est sérieux et encourageant. Voyez-vous : je
me
méfie des attaques frontales contre l’État, qui renforcent toujours c
1110
ontre l’État, qui renforcent toujours ce dernier.
Je
suis persuadé, en revanche, qu’une participation de plus en plus acti
1111
d’être des citoyens. Nous aurons, demain — c’est
mon
vœu, et celui de ce congrès je l’espère — les villes que leurs citoye
1112
s, demain — c’est mon vœu, et celui de ce congrès
je
l’espère — les villes que leurs citoyens actifs auront voulues et mes
1113
miste qui dit volontiers : « Plaise aux dieux que
je
sois un faux prophète ». Il écrit pour avertir avant qu’il soit trop
1114
mais été un best-seller. On vient de raconter que
j’
en avais vendu douze millions d’exemplaires, quel bobard ! J’ai fait l
1115
vendu douze millions d’exemplaires, quel bobard !
J’
ai fait l’addition, le chiffre de vente réel est inférieur à 400 000 e
1116
soleil peut tout nous donner S’il fallait que
j’
explique très simplement qui vous êtes à un enfant, par exemple, que d
1117
i vous êtes à un enfant, par exemple, que devrais-
je
lui dire ? D’abord, que je suis quelqu’un qui voudrait qu’il vive dan
1118
r exemple, que devrais-je lui dire ? D’abord, que
je
suis quelqu’un qui voudrait qu’il vive dans un monde agréable quand i
1119
monde agréable quand il sera grand. Ensuite, que
j’
ai écrit des livres, que je suis l’initiateur du mouvement fédéraliste
1120
ra grand. Ensuite, que j’ai écrit des livres, que
je
suis l’initiateur du mouvement fédéraliste européen. Que j’espère êtr
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initiateur du mouvement fédéraliste européen. Que
j’
espère être démenti dans mes prédictions les plus désastreuses, que je
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éraliste européen. Que j’espère être démenti dans
mes
prédictions les plus désastreuses, que je crois que le soleil peut to
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i dans mes prédictions les plus désastreuses, que
je
crois que le soleil peut tout nous donner. Enfin que je suis écologis
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is que le soleil peut tout nous donner. Enfin que
je
suis écologiste. Que vous êtes du pays de Rousseau et un peu utopiste
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en si chacun n’avait pas sa petite utopie. Depuis
mon
plus jeune âge, je crois à une forme de société où une communauté ent
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pas sa petite utopie. Depuis mon plus jeune âge,
je
crois à une forme de société où une communauté entre les hommes serai
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les hommes serait possible. Dès les années 1930,
j’
ai fondé le mouvement personnaliste qui a fait un peu de bruit à l’épo
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l y a plus de trente ans et… Vous voulez dire que
je
n’ai rien empêché, c’est vrai. Mais la fonction de l’intellectuel est
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forcer les hommes à réfléchir et à s’interroger.
Je
remarque que mes idées et mes propositions d’il y a trente ans sont à
1130
es à réfléchir et à s’interroger. Je remarque que
mes
idées et mes propositions d’il y a trente ans sont à la mode aujourd’
1131
r et à s’interroger. Je remarque que mes idées et
mes
propositions d’il y a trente ans sont à la mode aujourd’hui. Peut-êtr
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ous allons jouer notre dernière chance. Ainsi que
je
l’écris dans la première page de L’Avenir est notre affaire : « À p
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l’avenir n’appartient à personne, mais à Dieu » ?
Je
préfère que l’homme se demande maintenant « Que puis-je faire ? », pl
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fère que l’homme se demande maintenant « Que puis-
je
faire ? », plutôt que « Qu’est-ce qui va arriver ? » Vous refusez de
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certains événements ? Des hommes sensibles
Je
suis chrétien, mais je trouve trop facile qu’on appelle volonté divin
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Des hommes sensibles Je suis chrétien, mais
je
trouve trop facile qu’on appelle volonté divine ce qui nous échappe.
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ris conscience. Cette idée neuve et hardie est de
mon
ami Bertrand de Jouvenel. Tout ce qui n’est pas calculable reste prév
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ous êtes l’un de ces hommes sensibles ? Dès 1932,
j’
avais prévu les victoires et la chute d’Adolf Hitler. Le désastre étai
1139
nversation de Denis de Rougemont, c’est parce que
je
pense que le Führer est l’exemple éclatant de ce que les futurologues
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ses ruines, ses massacres ses exterminations. Si
j’
ai bien compris la démonstration que m’a faite Denis de Rougemont, la
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ations. Si j’ai bien compris la démonstration que
m’
a faite Denis de Rougemont, la menace apocalyptique qui pèse sur l’ave
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eurs xxe siècle et que la futurologie a manqués.
J’
ai donc écouté Denis de Rougemont m’expliquer comment Ford, qui généra
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ie a manqués. J’ai donc écouté Denis de Rougemont
m’
expliquer comment Ford, qui généralisa l’automobile, et Hitler se sont
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falsifiant leur désir à la source même. À 21 ans,
j’
ai écrit un article pour dénoncer cette entreprise et annoncer à quell
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C’est ainsi que, d’une voix tranquille, comme il
m’
aurait raconté quelque fable plaisante, Rougemont venait de démonter,
1146
ble plaisante, Rougemont venait de démonter, pour
moi
, pièce à pièce, un de ces agencements de l’Histoire dont on se demand
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ller toujours plus vite, plus haut et plus loin ?
Je
crois surtout qu’il va plus bas. Les innovations techniques peuvent m
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slogan. Qu’est-ce que le progrès selon vos vœux ?
J’
appelle progrès ce qui est favorable à un meilleur épanouissement des
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tout cela. Voilà de la poésie si vous en voulez.
J’
oppose Zeus — dieu de l’énergie solaire — à Pluton — dieu des Enfers,
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en public, prêchent la croissance sans fin. Après
moi
le déluge, semblent-ils dire. Ils ne pensent qu’aux élections et au p
1151
es qu’ils ont promises. L’État : le roi, c’est
moi
Les xixe et xxe siècles ont été marqués par les « économies d’éc
1152
t de l’État-nation, celui qui dit : Le roi, c’est
moi
. Alors qu’en Suisse quand on dit le souverain, c’est toujours du peup
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société nucléaire est une société policière. «
J’
ai bon espoir » L’énergie solaire, au contraire, et c’est sans dout
1154
aîtra des mouvements sociaux sans précédent. Mais
j’
ai bon espoir. Les choses peuvent aller très vite. Car ce mouvement n’