1 1974, Articles divers (1974-1977). La personne comme fondement des valeurs européennes (19 septembre 1974)
1 ncipalement sur une construction économique, dont on croyait qu’elle devait entraîner nécessairement des effets politiques
2 ire… (Situation moins nouvelle dans l’histoire qu’ on ne le pense : c’est celle du peuple juif devant ses grands prophètes 
3 es expériences du passé, toujours ambiguës, comme on le sait, que sur une espérance active, sur cette « substance des chos
4 es calculables. Nous pensons à partir de là. Et l’ on ne peut pas faire autrement. Car la pensée, en général, n’est peut-êt
5 e blessure, d’une agression subie ou d’un défi. «  On pense comme on se heurte », disait Paul Valéry. C’est le scandale, le
6 ne agression subie ou d’un défi. « On pense comme on se heurte », disait Paul Valéry. C’est le scandale, le choc, qui décl
7 aines et la dissolution des liens communautaires. On y décrirait le désert surpeuplé de nos villes hantées par l’immense f
8 és : cela conduit tout droit à la guerre de 1914. On décrirait l’abaissement du niveau intellectuel des masses et de la qu
9 cende le crier dans la rue : il serait anormal qu’ on ne lui réponde que par des coups de matraque. Il est normal qu’il jug
10 ls se trompent d’une manière pathétique, parce qu’ on peut renverser des voitures dans la rue, un dictateur dans son palais
11 s dans la rue, un dictateur dans son palais, mais on ne peut renverser ce qui ne tient pas debout, ce qui n’a pas de princ
12 asses, il faut des choix. Il faut savoir ce que l’ on est prêt à sacrifier et quelles sont les priorités. Veut-on d’abord e
13 t à sacrifier et quelles sont les priorités. Veut- on d’abord et à tout prix la Puissance, ou la Liberté ? Tout changera se
14 rne le jugement et la conduite. Ainsi chez Marx : on a relevé que cet auteur semble bannir de son vocabulaire le terme de
15 ne histoire, comme bien d’autres structures que l’ on croirait intemporelles et universelles, mais qui ont leur date et leu
16 l dit qu’elle est « ferme assurance des choses qu’ on ne voit pas ». Le chemin qui se crée sous les pas qui le foulent, con
17 i le foulent, conduit au But qui se révèle lorsqu’ on marche vers lui, pas autrement. Il s’agit d’une activité jamais achev
18 ntre ses démarches et cette fin. Je conçois que l’ on puisse n’y pas croire. Que l’on puisse nier l’existence de ce que j’a
19 Je conçois que l’on puisse n’y pas croire. Que l’ on puisse nier l’existence de ce que j’appelle la personne, la traiter d
20 peut rien contre Dieu, tout contre l’homme. Quand on nie Dieu, comme la plupart des écoles de pensée modernes, existential
21 tes, freudo-marxistes, ou structuralistes ; quand on répète que la mort de l’homme s’ensuit « logiquement » ; quand on nie
22 mort de l’homme s’ensuit « logiquement » ; quand on nie le sujet, et qu’on répond comme Ulysse au Cyclope : « Je me nomme
23 it « logiquement » ; quand on nie le sujet, et qu’ on répond comme Ulysse au Cyclope : « Je me nomme personne, je n’y suis
24 Je me nomme personne, je n’y suis pas », c’est qu’ on prépare un mauvais coup, ou qu’on tente d’échapper à certaines respon
25 pas », c’est qu’on prépare un mauvais coup, ou qu’ on tente d’échapper à certaines responsabilités en se dissimulant derriè
26 ans les buissons quand Dieu l’interpelle en Eden. On peut très bien ne pas croire à la personne. Et je ne cherche pas, ici
27 llectifs soient détenus par des particuliers : qu’ on se rappelle la lutte des rois contre les féodaux, des États modernes
28 t le plus souvent inconnue. La découvrir comme si on l’inventait est la tâche singulière de chacune de nos vies. La tyrann
29 besoins et de produits matériels, croissance dont on a remarqué que le rythme est celui des cellules cancéreuses. En revan
30 égionales, qu’il s’agit désormais de recréer si l’ on veut que la personne s’épanouisse : j’y vois la tâche principale de l
31 e « amicale des misanthropes » — quelque chose qu’ on peut dire mais non pas faire. L’Europe que tout appelle ne pourra s’é
2 1974, Articles divers (1974-1977). Alexandre Marc et l’invention du personnalisme (1974)
32 Pris dans une rafle, des tracts plein les poches, on le pousse dans une file de prisonniers vers le lieu de l’exécution. U
33 le tableau de bord d’une génération qui démarre. On voit que le faible élément d’incertitude qui subsiste sur ma première
34 agement, terme dont d’autres ont abusé depuis. Qu’ on me pardonne, ici, quelques mots sur moi-même, qui me paraissent néces
35 iques et politiques1, moralement « libéré » comme on dit aujourd’hui, mais sentant la nécessité de me faire une morale per
36 anches, ce qui était banal à l’époque pour peu qu’ on surveillât sa mise, mais je le mentionne pour attester ma bonne mémoi
37 e Club du Moulin-Vert (ou du moins c’est ainsi qu’ on le nomme aujourd’hui dans les histoires de cette période). ⁂ L’idée œ
38 sieurs décennies sur l’évolution de l’œcuménisme. On sait que c’est par l’action de la base, non plus par des négociations
39 rs. La rencontre avec Dandieu a mal tourné, comme on peut le voir aux pages 100 à 102 de l’ouvrage intitulé Mounier et sa
40 et malgré ces tensions — pas toujours déclarées, on vient de le voir — va s’engager une collaboration durable : de 1932 à
41 plusieurs brouilles majeures entre le groupe de l’ ON et la revue Esprit , les liens personnels ne seront jamais coupés en
42 à tour déclaré ou latent qui ne cessa d’opposer l’ ON en tant que groupe et le directeur d’ Esprit . 9 novembre 1932. Émou
43 aîner).2 Quels sont ces articles « venant de l’ ON  » ? J’en trouve trois : Jean-Pierre Cartier (c’était moi) sur le proc
44 trie et la mort »). Mounier va-t-il rompre avec l’ ON  ? Il préfère écrire, au seuil du numéro : « Nous sommes le parti de l
45 une importante étude sur « Le prolétariat », où l’ on peut lire que « la distribution planée sera assurée par un service so
46 e chaque article fourni par l’un des membres de l’ ON . Elles confirment que l’apport du groupe, d’abord représenté par Alex
47 qu’en 1936, l’année même de la publication par L’ ON de Mission ou démission de la France, réponse à Hitler, du numéro sp
48 u numéro spécial intitulé Après les grèves (où l’ ON prend parti pour l’occupation des usines, niant, contre Léon Blum, l
49 à penser que la seconde opinion de Mounier sur l’ ON ne saurait s’expliquer que par une réaction de surcompensation à la p
50 ation avec Maritain). Débordé sur sa gauche par l’ ON , « entraîné » comme il l’écrit, et très soucieux de s’en défendre non
51 xiste, Mounier cède aux clichés communistes sur l’ ON , dans le même temps qu’il écrit à l’archevêque de Paris qu’ Esprit e
52 tout, si la NRF est « communiste », pourquoi l’ ON ne serait-il pas « fasciste » ?) Quelle qu’ait été l’importance de se
53 uotidiens avec chacun des membres du groupe que l’ ON dut sa cohésion de 1930 la guerre. Car jamais unité ne fut achevée à
54 ous étions huit à diriger L’Ordre nouveau , si l’ on en croit l’en-tête du numéro 2. Arnaud Dandieu, brillant intellectuel
55 e Minkowski des recherches psycholinguistiques qu’ on eût appelées plus tard structuralistes. Et il venait de signer avec R
56 Voilà ce que je n’arrive pas à me rappeler, et l’ on se voyait à peu près tous les jours… Du point de vue religieux, qui e
57 d’intellectuels parisiens, voici l’état du groupe ON en 1933 : Rops et Jardin (et peut-être Dupuis) sont catholiques décla
58 alité religieuse totale pour l’ensemble du groupe ON , tandis que l’obédience confessionnelle d’ Esprit ne fait aucun dout
59 ons un groupe étonnamment compact, à tel point qu’ on ne sait pas quel fut l’apport de qui dans notre doctrine unanime. Sou
60 le des titres. En avril 1936, paraît la brochure ON intitulée Mission ou démission de la France. Quatre ans plus tard, j
61 lexandre Marc met en épigraphe à un article de L’ ON cette phrase de moi : « Une politique à hauteur d’homme », et en 194
62 mental des écrits d’Alexandre Marc. La revue de L’ ON se refusera systématiquement à écrire état avec une majuscule : maniè
63 é, du « chez-soi », dont procède le patriotisme. ( ON 32) Si la patrie est chair, attachement, affectivité, la nation repr
64 nt patriotique se manifeste le plus spontanément… On peut parler de la patrie alsacienne, bretonne, catalane. Il n’en rest
65 teurs élémentaires de l’attachement à la patrie. ( ON 39) Mais grâce aux jacobins et à leur disciple Napoléon, la confusio
66 entre états-nations, c’est la guerre. (Proudhon) ( ON 39) Source du droit. La seconde thèse fondamentale de Marc, durant
67 et supérieure à l’état, et qui s’impose à lui » ( ON 29, p. 19). Sur ce thème central, quatre grands articles de Marc dan
68 e Marc dans les numéros 20, 22-23, 29 et 31 de L’ ON apportent une contribution inégalée non seulement à la doctrine pers
69 uêtes et les créations spirituelles nouvelles ? » On peut d’ailleurs en dire autant de l’économie, dont « la zone planée t
70 en vue d’autres combats et d’autres conquêtes » ( ON 22-23). La statolâtrie universelle. La statolâtrie apparaît comme l’
71 nous épargner l’obligation d’insister là-dessus. ( ON 22-23) Distinction entre communauté et société, la communauté étant
72 s, « non d’individus ou d’organismes étatiques » ( ON 22-23). (On pensera là à la distinction faite par Tönnies entre Gemei
73 ndividus ou d’organismes étatiques » (ON 22-23). ( On pensera là à la distinction faite par Tönnies entre Gemeinschaft et G
74 x éléments prolétariens les terres personnelles. ( ON 16) Personne. Elle est toujours « supérieure à l’état ». La person
75 tout ramener au stable, au stagnant, à l’étale. ( ON 20) Structure antinomique de la personne. On n’insistera jamais ass
76 . (ON 20) Structure antinomique de la personne. On n’insistera jamais assez sur l’importance fondamentale du conflit en
77 age (en collaboration avec Claude Chevalley) où l’ on trouvera déjà l’essentiel de la description existentielle (dont Sartr
78 onal (c’est-à-dire du conflit fondamental) auquel on se heurte dans cette perspective et que toute tentative de réduction
79 humain qu’en fonction de l’attitude de l’homme. ( ON 38) Le Plan sans contrainte et son dynamisme « libérateur ». La «
80 n, initiative, émulation, lutte, risque, profit… ( ON 22-23) Ces deux paragraphes évoquent irrésistiblement Proudhon, dont
81 raphes évoquent irrésistiblement Proudhon, dont l’ ON 33 donnait cette admirable citation : Toute force suppose une direc
82 édérale En triomphant de la tentation de l’Unité, on reconquiert le chemin de l’union ; en renonçant aux prestiges morbide
83 ; en renonçant aux prestiges morbides du monisme, on retrouve l’unité vivante — à la fois intelligente et libre — de la pe
84 e la personne humaine, créatrice de communautés. ( ON 37) L’état totalitaire n’est pas autre chose que l’erreur moniste p
85 tance des conflits, refoulés mais non supprimés. ( ON 38) L’État-nation, trop petit et trop grand. L’homme n’est pas fait
86 lle de ces immenses conglomérats politiques que l’ on essaie de lui faire prendre pour « sa patrie » : ils sont beaucoup tr
87 grands… ou trop petits pour lui. Trop petits si l’ on prétend borner son horizon spirituel aux frontières de l’État-nation 
88 ux frontières de l’État-nation ; trop grands si l’ on tente d’en faire le lieu de ce contact direct avec la chair et la ter
89 chair et la terre qui est nécessaire à l’homme. ( ON 15) (On sait que l’argument « trop petit et trop grand » est devenu
90 la terre qui est nécessaire à l’homme. (ON 15) ( On sait que l’argument « trop petit et trop grand » est devenu le pont a
91 s de toute critique fédéraliste de l’État-nation. On le retrouve de nos jours dans les écrits de J. Buchmann, de Robert La
92 es ; limites de la fédération Ordre nouveau). ( L’ ON 12) Faire éclater l’État-nation. Enfin, voici en quelques lignes
93 personnes considérées comme supérieures à tout ». On peut concevoir la nécessité de l’Europe unie en partant de la situati
94 ui sur nos peuples, à l’Ouest comme à l’Est. Mais on peut aussi partir d’une conception de l’homme et de sa vocation perso
95 prit un important article sur les positions de l’ ON , et Jean Lacroix loue son nouvel ouvrage, Dictature de la liberté. Je
3 1974, Articles divers (1974-1977). Quelques-unes des choses curieuses qui me sont arrivées (1974)
96 hones Octobre 1930 Je viens de passer ma licence. On m’offre un poste de professeur en Chine, mais c’est à Paris que se pa
97 a fenêtre : « Dépêche-toi, téléphone de Paris ! » On m’offrait un job de directeur littéraire d’une maison d’éditions prot
98 , lus au micro par des équipes d’announcers comme on dit en anglais — speaker n’étant employé qu’en français — qui allaien
99 l’enveloppe jaune, elle contenait un journal où l’ on revient sur mon pamphlet de l’hiver dernier 15. New York City, 16e ru
100 rias où il suffit de désigner du doigt le plat qu’ on veut), et ce soir je décide de « sortir » : des amis m’ont invité « a
101 euf heures et demie. J’hésite sur le seuil : va-t- on me servir encore ? Au fond de la salle, deux hommes et une femme atta
102 s six et heureusement accordés, je suggérai que l’ on jouât aux questions et réponses. Ce jeu, purement télépathique et poé
103 un petit jardin fermé qui s’ouvrira à Pâques. » ( On sait que le hortus clausus est un symbole fondamental du mysticisme,
4 1974, Articles divers (1974-1977). Un modèle pour l’Europe ? (1974)
104  ! Mais à trop bien cacher le secret d’un peuple, on expose le peuple à oublier le secret. D’où les malentendus multipliés
105 ion à toute l’Europe — de proche en proche. (Et l’ on peut espérer que le reste du monde finira bien par l’imiter.) B) Nou
106 l’ensemble des peuples de l’Europe, non pas comme on le croit généralement le modèle 1848 d’une Confédération d’États « so
107 eulement, je le répète, la plus rationnelle que l’ on puisse imaginer aujourd’hui, mais aussi celle qui a le plus de chance
108 ’an de crise qui s’écoule tandis que j’écris. Or, on aura reconnu dans mon esquisse d’exécutif européen tous les traits ca
5 1974, Articles divers (1974-1977). Philosophie du prix littéraire Prince-Pierre-de-Monaco (1974)
109 colâtres qui sévissent parmi nous depuis Boileau. On considère aujourd’hui couramment, et pas seulement dans le public des
110 t non-fiction, c’est-à-dire non-littérature, où l’ on jette pêle-mêle les reportages et l’histoire, la métaphysique et les
111 e « Papillon », et tout ce que, faute de mieux, l’ on nomme « essais », quels qu’en soient les sujets et le style, les dime
112 ellectuelle. À ce titre, Montaigne et Pascal dont on ne connaît ni romans ni poèmes, n’appartiennent pas à la littérature 
6 1974, Articles divers (1974-1977). À propos de Théodore Strawinsky [préface] (1974)
113 je n’exagère pas : lors d’une Biennale de Venise, on a donné le grand prix de peinture à l’auteur d’objets en métal et en
114 iéter ou amuser. Tout cela m’a souvent passionné. On peut tout faire, on doit tout faire pour peu que l’on sache inventer,
115 t cela m’a souvent passionné. On peut tout faire, on doit tout faire pour peu que l’on sache inventer, et qu’importe le ge
116 eut tout faire, on doit tout faire pour peu que l’ on sache inventer, et qu’importe le genre choisi ou que l’on crée. Je di
117 inventer, et qu’importe le genre choisi ou que l’ on crée. Je dis que Théodore Strawinsky, lui, fait de la peinture. Ses h
118 l’essentielle impossibilité de communiquer : et l’ on nous présente l’informel comme le résultat de cette crise. Je réponds
119 e opération mal explicable, presque magique, si l’ on songe que le cosmos tout entier est fait de vide, ponctué d’électrons
120 ivin, procèdent authentiquement du même esprit. «  On ne risque rien à affirmer une parenté », écrit excellemment le fils,
121 brassaient au lieu de leur rencontre créatrice. On ne le répétera jamais assez : ce dont l’Église a besoin, ce qui a été
7 1974, Articles divers (1974-1977). Recherche pour un modèle de société européenne (février 1974)
122 emps d’inventer mieux. Et en troisième lieu, si l’ on recherche un modèle européen, c’est que l’on ne pense pas pouvoir s’a
123 si l’on recherche un modèle européen, c’est que l’ on ne pense pas pouvoir s’accommoder de modèles étrangers et pour nous a
124 s, ou chinois. Cela ne signifie pas un instant qu’ on tienne l’Europe pour supérieure — ou inférieure — à telle autre parti
125 re — à telle autre partie du monde ; mais bien qu’ on la constate différente, et qu’elle appelle des solutions spécifiques.
126 que va doubler désormais tous les sept ans, et si on leur demande comment ils le savent, ils répondent qu’il s’agit d’un f
127 384 en moins d’un siècle, car c’est le chiffre qu’ on obtient au bout de quatre-vingt-dix-huit ans en multipliant une quant
128 guées et de soi-disant « impératifs techniques », on nous empêche d’élaborer une politique responsable, et d’agir sur nos
129 ts au mètre carré du sol émergé et immergé ! Mais on peut avancer des chiffres encore plus saugrenus. Dans quelques millia
130 quelque chose l’arrête, un jour ou l’autre. Si l’ on ne veut pas que ce soit une catastrophe, il faudra bien que ce soit u
131 urs, est calculée par de nombreux futurologues qu’ on dit atteints de sinistrose, mais dont je serais tenté de dire qu’ils
132 ntir. Car elles ne demandent qu’à être démenties, on peut même dire qu’elles ne sont là que pour ça. Si on ne les croit pa
133 eut même dire qu’elles ne sont là que pour ça. Si on ne les croit pas, parce qu’on les juge trop pessimistes, elles vont c
134 là que pour ça. Si on ne les croit pas, parce qu’ on les juge trop pessimistes, elles vont certainement devenir vraies. Qu
135 0. Son système de prévision est le plus simple qu’ on ait jamais imaginé : il repose entièrement sur la technologie et son
136 de « surprenants et presque toujours inattendus » on trouve : Première Guerre mondiale. Destruction d’une partie de l’Eu
137 es tue d’une manière irréversible. Car pour elle, on bétonne les campagnes (18 % de la Hollande déjà) et c’est autant d’hu
138 ’État-nation, et en deçà. Comme il convient quand on présente une recherche, je ne saurais anticiper sur ses résultats, ni
139 étrable, apparemment inébranlable ? À supposer qu’ on y arrive, créerait-on un chaos ? Une anarchie ? C’est ce que me disen
140 nébranlable ? À supposer qu’on y arrive, créerait- on un chaos ? Une anarchie ? C’est ce que me disent ceux qui se croient
141 e déclarer la guerre et de conclure la paix quand on le veut, et de poser ou de casser les lois. Qui a encore ce droit ? L
142 ouvrent pas plus que les réalités fonctionnelles. On imagine la complexité du tissu régional créé par ces fonctions divers
8 1974, Articles divers (1974-1977). L’Europe des régions (juin-juillet 1974)
143 rontières s’abaissent, les régions « remontent ». On ne fera jamais l’Europe avec les États-nations. Donc, on la fera avec
144 era jamais l’Europe avec les États-nations. Donc, on la fera avec les régions. Comment voyez-vous la montée de l’idée de r
145 e, le Sud-Tyrol, le Nord du canton de Berne (où l’ on parle français), les conflits entre Flamands et Wallons… Et puis il y
146 parés, mais au contraire reliés par les Pyrénées. On nous a raconté que le Rhin était une frontière naturelle entre les Fr
147 ence et les gens qui habitent du côté du Centre ? On dit absolument n’importe quoi pour les besoins de la cause. Comment ê
148 re, qu’il était vital de « faire l’Europe » comme on disait, d’arriver à une union fédérale, ou d’un autre type. Je me su
149 d’un autre type. Je me suis aperçu très vite qu’ on ne pourrait pas y arriver à cause de la formule de l’État-nation, à s
150 pe unie. D’autre part, dans la faible mesure où l’ on est arrivé à abaisser un peu les frontières, on s’aperçoit que les ré
151 l’on est arrivé à abaisser un peu les frontières, on s’aperçoit que les régions resurgissent, soit qu’il s’agisse d’ancien
152 la dans un sens politique uniquement. Parce que l’ on ne peut pas faire une région sur une seule fonction : cela ne mènerai
153 r une seule fonction : cela ne mènerait pas loin. On ne peut pas bâtir des régions sur un seul facteur qui serait la langu
154 e économique, à la vie de cette région ; et alors on retombe dans toutes les équivoques de l’État-nation, qui consiste (po
155 la géographie par l’histoire ». Aujourd’hui, si l’ on parle tellement des régions en Europe, c’est à cause du formidable re
156 micale des misanthropes » : c’est une chose que l’ on peut dire, mais que l’on ne peut pas faire. Si vous faites une « amic
157  : c’est une chose que l’on peut dire, mais que l’ on ne peut pas faire. Si vous faites une « amicale », vous cessez d’être
158 es devant un dilemme parfaitement clair : ou bien on fait l’Europe et il faut abandonner la formule des États-nations à so
159 urner vers les régions. Ou bien il faut avouer qu’ on ne veut pas faire l’Europe ; et il faut savoir aussi ce que ça signif
160 la décadence totale d’un peuple ; c’est ce que l’ on a vu dans tous les pays colonisés. Donc les raisons de faire l’Europe
161 t qu’il faille renverser les États-nations, ni qu’ on puisse faire l’Europe d’une manière violente ou révolutionnaire. Je p
162 manière violente ou révolutionnaire. Je pense qu’ on peut renverser des voitures dans la rue, qu’on peut renverser un dict
163 qu’on peut renverser des voitures dans la rue, qu’ on peut renverser un dictateur, un système parfaitement cohérent et très
164 cohérent et très simpliste de gouvernement ; mais on ne peut pas renverser notre système actuel, parce qu’il n’a pas de pr
165 e déclarer la guerre et de conclure la paix comme on le veut, et quand on le veut. Vous avez vu lors de la guerre de Suez
166 et de conclure la paix comme on le veut, et quand on le veut. Vous avez vu lors de la guerre de Suez la France et la Grand
167 L’ambiguïté du jacobinisme libéral Quoi qu’ on pense de la mise en place des nouvelles institutions régionales en Fr
168 en circulation, l’erreur fondamentale de ce que l’ on appelle « la réforme régionale ». Le même phénomène se reproduit dans
169 il aurait fallu faire exactement le contraire et on sera bien obligé de le faire un jour ou l’autre. Il aurait fallu une
170 onome, autogérée, et à partir de là, voir comment on pourrait organiser ces régions, car il faut un minimum d’organisation
171 tte (je vais y revenir tout à l’heure) à ce que l’ on organise des régions différemment suivant des fonctions, suivant la n
172 stiques, quelques courbes pour ensuite décréter : on fera 21 régions, ou 9 comme le proposait le Marché commun. Avons-nous
173 ? C’est une expression sans aucune signification. On dit « tiens, c’est intéressant ; maintenant tout le monde parle de l’
174 ant ; maintenant tout le monde parle de l’Europe, on va donc faire des régions de taille européenne ». Qu’est-ce que ça ve
175 e qu’il faut être bien conscient des finalités qu’ on donne à la création des régions. Pourquoi veut-on faire des régions ?
176 on donne à la création des régions. Pourquoi veut- on faire des régions ? J’ai dit l’avantage des petites communautés, mais
177 aire une chose petite. C’est là un commentaire qu’ on peut faire sur la réalité, et non une finalité. Ce n’est pas cela qui
178 ui ne tiennent plus compte des frontières. Dès qu’ on prononce ce terme de sociétés « multinationales » on provoque aujourd
179 prononce ce terme de sociétés « multinationales » on provoque aujourd’hui des jugements stéréotypés qui ne vont pas du tou
180 lique, horriblement mauvais dans tous les cas, et on dit par exemple à l’encontre du Marché commun : « qu’est-ce que le Ma
181 ail offert ». À travailler en faveur des régions, on pointe vers une même résultante qui est l’autogestion. L’autogestion
182 eure qui sont exactement comparables à ceux que l’ on reproche aux multinationales. La seule différence c’est que les front
183 ue, végétale ou animale, et cette croissance dont on parle par métaphore dans l’industrie. La croissance du vivant, cela v
184 ment décisif. Quelles que soient les critiques qu’ on puisse faire sur le choix des paramètres, je n’ai jamais vu un averti
185 aut la multiplier par 16 384, ce qui est dément : on ne peut transformer toute la substance de la terre en énergie. Il fau
186 essité d’exploiter toutes les formes d’énergie qu’ on avait laissé de côté avant, comme l’énergie éolienne, l’énergie géoth
187 bien de la région, finalement. Je crois que si l’ on veut passer à une croissance autoréglée — qui est la croissance norma
188 est par le moyen des petites unités régionales qu’ on y arrivera le mieux. La région et la commune Pourtant on s’aper
189 le mieux. La région et la commune Pourtant on s’aperçoit qu’actuellement, et depuis un certain nombre d’années, le
190 pression régionale spontanée pourrait en sortir ? On voit mal comment… La description que vous faites de la mentalité d’au
191 e importance parce qu’ils croient à la publicité. On leur dit à la radio, à la télé, qu’ils ne peuvent pas vivre heureux s
192 veux faire quelque chose qui m’intéresse ». Peut- on donner le pas au désir de participation sur le désir de prospérité ?
193 ahies par le flot de la circulation des voitures. On a détruit les bases mêmes de la démocratie, c’est-à-dire les lieux ph
194 , où ils formaient spontanément des groupes, où l’ on pouvait parler à un inconnu, où l’on pouvait tenir un meeting public.
195 roupes, où l’on pouvait parler à un inconnu, où l’ on pouvait tenir un meeting public. Cette place n’existant plus, les vil
196 dissociation, de destruction du principe social. On arrive à cette grande angoisse communautaire qui est absolument incon
197 st-à-dire faire sortir la communauté du sol comme on fait pousser un arbre, au lieu de planter, comme le fait l’EDF, des p
198 peut-être par plus petit que la commune. Ce que l’ on appelle des « communes » par exemple en Amérique ; des colonies, n’im
199 . Si « le génie du lieu » agit ainsi, c’est que l’ on peut prendre des racines, et même si l’on change de lieu. L’important
200 t que l’on peut prendre des racines, et même si l’ on change de lieu. L’important c’est d’en avoir. Parce que l’homme a bes
201 a besoin à la fois de racines et de mobilité. Si on le force à être enraciné comme un paysan lié à la terre, c’est un gra
202 exandre, toutes ces normes ont été délaissées, et on a bâti des villes énormes, comme Antioche où il y avait 25 km de rues
203 ut absolument en revenir aux formules communales. On ne peut pas détruire les énormes villes. Il y a une ville aux États-U
204 lle aux États-Unis qui va de Boston à Washington. On ne peut pas la détruire, personne n’aurait la fortune nécessaire, mai
205 re, personne n’aurait la fortune nécessaire, mais on peut y recréer des quartiers, des communes, au prix de certaines dest
206 des communes, au prix de certaines destructions. On peut recréer des places qui ne soient pas des parkings, on peut inter
207 ecréer des places qui ne soient pas des parkings, on peut interdire les rues aux voitures, cela demande une renaissance de
208 ques et sociales et en interdisent d’autres. Si l’ on prenait la ville communale au Moyen Âge c’est autour d’une grande pla
209 cas de révolution. Ainsi, au premier coup d’œil, on arrive très bien à repérer, d’après l’architecture d’une ville, quel
210 sens le plus précis du terme, c’est-à-dire que l’ on est en train de fabriquer des petits soldats, des sujets bien alignés
211 e fait est fait par les autres (« Ils », l’État). On les subit. Tout ce que l’on peut, c’est se révolter de temps en temps
212 es (« Ils », l’État). On les subit. Tout ce que l’ on peut, c’est se révolter de temps en temps, mais cela ne sert pas à gr
213 certain nombre de tâches (produits et services). On peut presque dire que c’est la loi économique qui a fait que ces vill
214 iger, l’économie est là au service des hommes. Si on vous dit que les dimensions optimums d’une ville exigent une économie
215 ntralisée, l’économie doit se décentraliser. Si l’ on continue, comme on l’a fait jusqu’à présent, il se pourrait bien que
216 ie doit se décentraliser. Si l’on continue, comme on l’a fait jusqu’à présent, il se pourrait bien que l’on arrive à des d
217 a fait jusqu’à présent, il se pourrait bien que l’ on arrive à des désastres, qui sont calculables d’ores et déjà. « L’a
218 e. Ce n’est pas l’affaire de fatalités auxquelles on ne peut rien comprendre, auxquelles seuls quelques initiés-technocrat
219 pas être responsables de leur sort, surtout quand on les cache derrière des fatalités comme Adam se cachait derrière un bu
220 politique véritable, ce n’est pas de savoir si l’ on est de gauche ou de droite. La politique qui doit être à la base de l
9 1974, Articles divers (1974-1977). Surréalisme : un jeu qui dure depuis 50 ans (7-8 septembre 1974)
221 si possible traînantes, où la mode voulait que l’ on fît quelques accrocs ou, avec des cigarettes, quelques trous artistem
222 tre, en même temps, écrivait trois réponses. Puis on lisait à haute voix les résultats. C’était prodigieux. J’ai gardé un
223 umières se sont éteintes dans la salle (et, comme on l’a su plus tard, dans tout le canton de Genève). Naturellement, les
224 malgré lui. Les insultes de Breton Un soir, on avait décidé que l’on me banderait les yeux et que l’on me mettrait d
225 ultes de Breton Un soir, on avait décidé que l’ on me banderait les yeux et que l’on me mettrait dans la main, successiv
226 it décidé que l’on me banderait les yeux et que l’ on me mettrait dans la main, successivement, un objet appartenant à chac
227 à qui appartenaient ces objets ? Absolument pas. On me plaçait quelque chose dans le creux de la main, j’avais quatre ou
228 chassé du paradis. Et là, il y a quelque chose qu’ on ne peut guère pardonner à Breton, cette faculté qu’il avait d’insulte
229 ison ». En fait, après la sortie du « coupable », on s’aperçut qu’il restait 21 personnes dans la salle… La « victime » av
230 e dit, après un silence : « Et pourquoi ne ferait- on pas une religion dédiée au culte d’une pierre bleue ? » Et puis il es
231 chapeau : « Le surréalisme a cinquante ans, si l’ on admet que sa naissance coïncide avec la publication du Manifeste d’An
10 1975, Articles divers (1974-1977). Notre complexe de culpabilité (1975)
232 l’Histoire » ; est-ce que ça va durer, est-ce qu’ on va nous laisser longtemps encore tranquilles dans notre coin ? (Motif
233 ’une doctrine : « Voilà qui est bien français ! » on entend : Voilà qui est excellent, typique du premier pays du monde, e
234 d’être approuvé par tous ses citoyens. Mais quand on dit en Suisse (romande surtout) : « Ça, c’est bien suisse ! » il y a
235 Cette réaction fondamentale — et plus générale qu’ on ne le pense — provient du vieux fond religieux, et les jeunes intelle
236 ce que je veux dire. Un homme de cœur a besoin qu’ on lui pardonne de jouir de son bien-être pendant que d’autres souffrent
237 octrine d’État ces derniers temps, et là-dessus l’ on peut et l’on doit discuter —, mais la traiter de péché n’est pas une
238 t ces derniers temps, et là-dessus l’on peut et l’ on doit discuter —, mais la traiter de péché n’est pas une solution et e
239 a neutralité peut se justifier dans bien des cas, on en prendra trop facilement prétexte pour nier que Barth ait raison de
240 ise suisse dus à de jeunes auteurs progressistes, on ne peut que lui donner raison, et puis les vrais problèmes se posent,
241 ent, ou plutôt : ils sont encore là, attendant qu’ on les examine une fois passés nos examens de conscience. « Quels problè
242 n peu déconcerté… Eh bien, lisez nos quotidiens : on y parle à longueur d’éditoriaux de la surchauffe et du manque de main
243 de Lyon, de Manchester, de Malmö ou de Livourne. On pensait que tous ces problèmes étaient moins difficiles chez vous, da
244 enir humain de l’Europe ! Il est menacé, nous dit- on  ? Rien de tel pour tirer un homme de ses doutes brumeux et de son anx
11 1975, Articles divers (1974-1977). Au-delà de la société industrielle (1975)
245 signifier, ou peut-être devrait signifier. Quand on parle de société post-industrielle, que veut-on dire ? Je vois d’abor
246 d on parle de société post-industrielle, que veut- on dire ? Je vois d’abord ce qui est exclu : une société dans laquelle i
247 tif de lampes à huile ou de coutume des cavernes. On ne veut pas dire non plus, je crois, qu’une société post-industrielle
248 société industrielle étant satisfaits et comblés, on déciderait d’arrêter le progrès matériel pour se vouer à l’artisanat,
249 tinuelle de besoins nouveaux « justifiant », si l’ on peut dire, la volonté de produire toujours plus, d’où la publicité et
250 elle à une société post-industrielle, je crois qu’ on pourrait le résumer aussi par le contraste entre les attitudes de deu
251 istinction entre labeur et jeu, entre la peine qu’ on prend et le plaisir qu’on en a, entre les contraintes de la matière e
252 jeu, entre la peine qu’on prend et le plaisir qu’ on en a, entre les contraintes de la matière et la liberté de l’esprit q
253 esoins humains. La société industrielle, quoi qu’ on en dise, n’est pas née pour satisfaire des besoins réels de l’homme,
254 r croissance provoquée. Le meilleur exemple que l’ on puisse donner d’un tel processus, c’est de toute évidence celui de l’
255 hie. En 1892, il construit sa première voiture. «  On la considérait plutôt comme une peste, écrit-il, à cause de son vacar
256 pour millionnaires resteront sans lendemain, si l’ on en croit les autorités de l’époque. Ainsi, le Brockhaus, dictionnaire
257 a publicité et par elle seule — la réclame, comme on dit alors —, Ford va changer tout cela. C’est dire qu’il va changer l
258 l’auto voit sa fonction primitive inversée dès qu’ on la multiplie par des millions. Elle mène à l’usine, au bureau, plus s
259 profit, non moral, ni social, mais financier. Qu’ on m’entende bien : je n’ai rien contre le profit en soi, que tout le mo
260 blicité, ou déduits de courbes de consommation qu’ on tentait de relever jusqu’à l’exponentiel. Le marketing a introduit de
261 ments paralyse en pratique les mieux armés, comme on l’a bien vu au Vietnam. Enfin, les villes : les mégalopoles du xxe s
262 plus administrables, ni en fait gouvernées, comme on le voit ces jours-ci à New York ; et les hommes y sont seuls en masse
263 t devoir se doter d’armements à leur taille. Si l’ on ne peut pas réduire la masse critique d’une bombe H, ne faut-il pas r
264 n finirais plus. Je terminerai sur la question qu’ on va me poser, inévitable : « Votre modèle post-industriel a-t-il des c
265 Et que la décadence d’une société commence quand on pose la question : « Que va-t-il arriver ? » au lieu de se demander :
12 1975, Articles divers (1974-1977). Suisse 1975 (1975)
266 ce que je veux dire. Un homme de cœur a besoin qu’ on lui pardonne de jouir de son bien-être pendant que d’autres souffrent
267 suisse dès 1946 : Neutralité et solidarité. Où l’ on voit bien que la volonté de solidarité compense cette gêne que l’on é
268 a volonté de solidarité compense cette gêne que l’ on éprouve au chevet de l’Europe malade. Mais cette « neutralité active 
269 e malade. Mais cette « neutralité active », comme on l’appelle aussi, ne se borne plus à refuser de prendre parti dans les
270 que restant le meilleur atout de notre industrie. On s’agite au niveau des cantons, où l’on dénonce « l’emprise croissante
271 industrie. On s’agite au niveau des cantons, où l’ on dénonce « l’emprise croissante de Berne », particulièrement lourde à
272 ion déclarée de la population. Mais en même temps on demande des subsides fédéraux pour les tomates, la vigne, l’horlogeri
273 formule suisse est la solution qui s’impose si l’ on veut vraiment « faire l’Europe », c’est-à-dire non pas l’unifier en l
274 rraient en faire. Dans la partie romande surtout, on a pris l’habitude de confondre le fédéralisme avec le réflexe de rési
275 sistance à « Berne », c’est-à-dire aux mesures qu’ on baptise « centralisatrices », alors qu’elles sont, justement, « fédér
276  ». Car si, dans les domaines indiqués plus haut, on voulait limiter la coopération pratique aux frontières douanières de
277 e le rêvent, semble-t-il, nombre de Suisses (si l’ on en juge par les dernières votations), ne pourrait réussir qu’au prix
13 1975, Articles divers (1974-1977). Le Morgarten du xxe siècle (1975)
278 ole, une fois de plus, qui a répandu ces erreurs. On nous a fait apprendre qu’à l’origine, la Suisse s’était formée par la
279 base des communes d’Uri, de Nidwald et de Schwyz. On ne parlait pas de cantons, mais bien de communes (Gemeinde en alleman
280 à l’origine du fédéralisme suisse se trouve ce qu’ on appellerait aujourd’hui la volonté d’autonomie locale et d’autogestio
281 Flandre, était déjà presque écrasé. Aujourd’hui, on découvre la nécessité vitale d’introduire le fédéralisme dans les rel
282 e malentendu provient du fait qu’en Suisse aussi, on raisonne encore trop souvent en fonction de catégories politiques scl
283 lèmes a changé. Cependant, malgré les apparences, on retrouve toujours le même conflit entre les réalités locales et ce qu
284 même conflit entre les réalités locales et ce qu’ on appelle trop facilement les « nécessités » nationales, continentales
285 » avant la lettre que les Suisses se sont ligués. On observe un phénomène comparable aujourd’hui, autour du coude du Rhin,
286 nçais d’Alsace et d’Allemands du pays de Bade. Qu’ on ne vienne pas attribuer le mérite des manifestations de Kaiseraugst a
287 endre sur place, fût-ce au prix d’une illégalité. On a beaucoup dit, dans la presse — de gauche comme de droite, une fois
288 xactement : leur consommation d’électricité. Mais on ne peut pas avoir, comme on dit chez moi, le beurre et l’argent du be
289 n d’électricité. Mais on ne peut pas avoir, comme on dit chez moi, le beurre et l’argent du beurre. Il s’agit de savoir qu
290 nt du beurre. Il s’agit de savoir quelle finalité on vise. Est-ce qu’on attache vraiment plus d’importance au « niveau de
291 agit de savoir quelle finalité on vise. Est-ce qu’ on attache vraiment plus d’importance au « niveau de vie » qu’à la liber
292 ernier mot de la vie, c’est le confort, et que si on éliminait les choses excessives, les tensions trop fortes, tout se pa
14 1975, Articles divers (1974-1977). L’amour (1975)
293 autant que psychologique, que « l’Amour » tel qu’ on le parle et qu’on le vit dans la culture occidentale, à la différence
294 logique, que « l’Amour » tel qu’on le parle et qu’ on le vit dans la culture occidentale, à la différence de l’amour tel qu
295 les — à la seule exception du christianisme (dont on peut nier d’ailleurs qu’il soit une « religion » au sens sociologique
296 sions littéraires (au « discours amoureux » comme on disait naguère), et limitée de la sorte (à peu d’exceptions près) à l
297 constitue l’apport principal de la Grèce à ce qu’ on peut appeler la métaphysique de l’amour (R. Flacelière, L’Amour en Gr
298 est résolument positive, édifiante, idéalisante, on aurait tort d’en inférer que les Grecs n’ont pas connu le couple somb
299 ie. (Le premier sert de modèle aux deux autres.) On peut penser, cependant, que ces trois mythes illustrent davantage le
300 gnages de son existence en Europe, parmi lesquels on peut citer les Carmina de l’évêque Fortunat (fin du vie siècle) dédi
301 e vouée à la Sainte Vierge. La « cortezia » On connaît la boutade de Charles Seignobos : « L’amour est une invention
302 zia (amour à la manière des cours seigneuriales), on ne peut croire qu’elle n’ait été que la trouvaille plus ou moins fort
303 l’amour est cela qui se « déclare » par des mots. On peut soutenir que l’histoire de l’Éros en Occident, des troubadours à
304 de nos jours, dans les mass médias audiovisuels. On s’en tiendra ici à la littérature. Le mythe de l’amour-passion
305 at amoureux plus que de l’Autre tel qu’il est, qu’ on ne rejoindra que pour mourir ; et même l’élan de l’hérésie ne manque
306 rs religieux, que la foi même, à la limite (comme on le voit par exemple dans l’épisode du « jugement de Dieu » commenté p
307 d’un code sacré et d’un système d’interdits comme on en trouve dans les autres religions. Un seul tabou, d’ailleurs univer
308 istant, du pire obstacle imaginable — celui que l’ on pressent comme le plus « efficace » pour enflammer le désir des amant
309 ête aux fantasmes de l’homme. Le « héros » (comme on le dit encore des personnages de roman les plus falots) doit en être
310 ent, le respect quasi religieux de la femme que l’ on met sur un piédestal pour mieux pouvoir se plaindre qu’elle soit situ
311 forme de l’amour qui se nourrit des obstacles qu’ on lui oppose, ou qu’elle sait inventer au besoin. Sans obstacles, point
312 ception quelque chose dont elle soit l’exception. On ne peut vivre d’une négation pure. Musil, ici, fait écho à l’épisode
313 uasi totalitaire de la nation et de la culture qu’ on baptise aujourd’hui « le Grand Siècle », la passion imagine des forme
314 rtois et de la passion fatale, à la Tristan, dont on peut voir qu’elle est devenue la manière de « ressentir l’amour » qui
315 que la servante Brangaine à Iseut : Vous aimez. On ne peut vaincre sa destinée : Par un charme fatal vous fûtes entraî
316 e l’amour y passent pour de vraies faiblesses. On est loin du dessein « d’exciter les passions » pour plaire à un besoi
317 dame des lettres, Madame du Deffand, qui écrit : On trouve encore parmi les gens de condition inférieure de bons ménages
318 réalités spirituelles sont incapables de passion. On ne parle plus que de « passionnettes », mais bien plus souvent de fem
319 ectique du mythe mais une impitoyable stratégie : on a reconnu la formule des Liaisons dangereuses de Laclos. Leur cruauté
320 la monotonie de l’obsession. Quant à ses valeurs, on ne saurait trop souligner qu’elles sont celles de la noblesse la plus
321 que J. Huizinga nommait « l’idéal de la luxure ». On pourrait croire que cette littérature anticourtoise remplit le siècle
322 ral, non plus de la fascination mortelle. Ainsi l’ on a passé, en plus de cinq siècles de progressive sensibilisation, des
323 elle aussi dans un seul cri : J’aime, mais comme on doit aimer : dans le désespoir ! À quoi Novalis fait écho : Quand o
324 le désespoir ! À quoi Novalis fait écho : Quand on fuit la douleur, c’est qu’on ne veut plus aimer… Que Dieu me conserve
325 s fait écho : Quand on fuit la douleur, c’est qu’ on ne veut plus aimer… Que Dieu me conserve cette douleur qui m’est indi
326 s du cœur plus qu’elle ne traduit leurs pulsions. On a vu le rôle créateur de la conduite passionnelle des troubadours et
327 xpression de Stendhal) devient la part du rêve qu’ on oppose au mariage bourgeois, union notariale. C’est en 1830 et 1848 q
328 é de procréer pour conserver l’espèce ». En bref, on peut affirmer qu’aux yeux de Freud l’amour du prochain, désintéressé
329 ntitulé Génital (amour), les auteurs concèdent qu’ on trouve chez Freud l’idée d’une forme achevée de la sexualité et même
330 a satisfaction des pulsions d’autoconservation. ( On a reconnu l’action du « principe de plaisir », principe économique qu
331 prédisaient ce retour des puissances affectives. On distingue déjà les signes avant-coureurs de cette revanche des puissa
332 e trop haut et ce trop bas également prévisibles, on peut imaginer que l’avenir de l’amour dépendra désormais de notre fac
15 1975, Articles divers (1974-1977). « Le sort des écrivains emprisonnés constitue un drame et un avertissement » (juin 1975)
333 être assimilé à une marque de folie ? Je pense qu’ on ne lui refuse pas d’avoir une opinion mais on accepte mal qu’il l’aff
334 qu’on ne lui refuse pas d’avoir une opinion mais on accepte mal qu’il l’affirme et qu’il continue à l’affirmer avec véhém
335 été totalitaire je dirais même qu’il est naturel. On les condamne donc pour remettre leurs idées en place, en ordre ? Il f
336 aut se mettre à la place du magistrat soviétique. On lui amène quelqu’un dont on lui dit qu’il est fou. Sa première réacti
337 magistrat soviétique. On lui amène quelqu’un dont on lui dit qu’il est fou. Sa première réaction va consister à lui laver
338 tes sortes de traitements, ceux que, précisément, on réserve aux fous. Si j’étais en Russie je serais enfermé depuis longt
339 de si je ne deviendrais pas fou réellement. Quand on vous dit que vous êtes seul à penser de la sorte, vous pouvez réellem
340 s qui avaient participé à la fondation de l’URSS. On enfermait ces gens et on leur disait : vous prétendez n’avoir jamais
341 la fondation de l’URSS. On enfermait ces gens et on leur disait : vous prétendez n’avoir jamais rien dit contre Staline m
342 ur dans votre sommeil, vous avez rêvé de le tuer. On vous a interrogé sous hypnose et vous avez confirmé que vous rêviez s
343 y avait la passion considérée comme une maladie — on tombait de passion — puis les relations sensuelles entre l’homme et l
344 une femme inaccessible, une déesse pour laquelle on nourrissait un amour impossible, quelque chose de tout à fait différe
345 ’un immense conditionnement. Et sans doute lorsqu’ on prend les gens par grandes masses on ne peut pas gouverner autrement.
346 doute lorsqu’on prend les gens par grandes masses on ne peut pas gouverner autrement. Cette « nécessité » d’écarter toute
347 ter d’être l’objet d’un pareil conditionnement où on lui dirait ce qu’il doit écrire. C’est sa nature même qui s’y oppose.
348 l est responsable. C’est une vieille notion que l’ on retrouve encore en justice. Si votre avocat prouve que vous avez agi
349 e pouvoir est concentré entre quelques mains — et on n’a plus besoin d’être Napoléon pour être à la tête d’un État moderne
350 us en plus courant, de plus en plus dangereux. Et on ne devra pas s’étonner si, à la fin il ne reste plus, pour s’opposer
351 r rang de ceux qui se sont engagés dans ce combat on trouve le nom de l’un des plus grands écrivains suisses contemporains
352 ien dans la logique de son œuvre et de ses actes. On n’a pas oublié qu’il avait pris publiquement la défense de l’un de se
353 es anciens étudiants, objecteur de conscience, et on sait que dans une actualité récente il a notamment envoyé un message
16 1975, Articles divers (1974-1977). « L’État-nation, voilà l’ennemi » (1er juillet 1975)
354 ntalité et un changement de finalité. Je sais qu’ on ne manquera pas de me dire, comme certains l’ont fait à Berlin : « Vo
355 és. « L’État-nation peut seul les défendre », a-t- on dit. Mais les défendre contre quoi ? Contre d’autres États-nations ?
17 1975, Articles divers (1974-1977). « Il ne s’agit pas de créer des régions qui soient de petits États-nations » (septembre 1975)
356 tats-nations » (septembre 1975)w x Ne risque-t- on pas de remplacer un chauvinisme national par un chauvinisme régional 
357 nc les habitants des rives — contre le mercure qu’ on déverse chaque jour dans le lac, au point que la lotte n’est plus com
358 estion de coopérer parce que, en temps de guerre, on serait très embêté si on avait la même station de pompage… Il y a les
359 que, en temps de guerre, on serait très embêté si on avait la même station de pompage… Il y a les problèmes de l’aéroport
360 de Verbois-ou-de-pas-Verbois-nucléaire, parce qu’ on ne me fera pas croire que la frontière arrêterait les effets d’un acc
361 ribourg – Lausanne – Neuchâtel. Dans ce triangle, on trouve seize instituts universitaires. Vu cette densité extraordinair
362 e de sédition ? Il y a des centaines de choses qu’ on peut faire ensemble et pour lesquelles on n’a pas besoin d’autorisati
363 oses qu’on peut faire ensemble et pour lesquelles on n’a pas besoin d’autorisations. Si vous demandez à d’autres le droit
364 vous êtes perdu ! La liberté, c’est une chose qu’ on prend, qu’on mérite et, surtout, dont on se montre digne en étant res
365 rdu ! La liberté, c’est une chose qu’on prend, qu’ on mérite et, surtout, dont on se montre digne en étant responsable. Res
366 chose qu’on prend, qu’on mérite et, surtout, dont on se montre digne en étant responsable. Responsable : je tiens au mot.
18 1976, Articles divers (1974-1977). Message de M. Denis de Rougemont (1976)
367 par lui à la fin de sa vie, je trouve ces mots qu’ on ne saurait souhaiter plus éclairants et qui servent de titre à son de
368 , surtout en ce sens que le chemin est long et qu’ on le parcourt lentement ». On sent bien ici que Schuman n’a jamais eu e
369 chemin est long et qu’on le parcourt lentement ». On sent bien ici que Schuman n’a jamais eu en réalité à « interrompre sa
19 1976, Articles divers (1974-1977). L’Europe, l’été [préface] (1976)
370 1961) et Varsovie, le plus délibérément novateur ( on n’y donne que de la musique d’aujourd’hui). Et les pointes d’une gran
371 , Andalousie, Catalogne, Dalmatie, Grèce… Certes, on connaît bien d’autres festivals, des douzaines d’autres, rescapés de
372 ’ouverture d’un « concert des Nations ». En fait, on n’entendit qu’une cacophonie en crescendo perpétuel et le bruit des c
373 reconstruire ses villes et une économie de paix, on vit aussi renaître dans tous nos pays d’une part des initiatives loca
374 ’homme européen et qui le définit le mieux, quand on le compare à l’homme d’autres cultures et civilisations. De cette aff
375 rope et spécialement de sa culture, suppose que l’ on s’occupe de la musique ; et, d’autre part, que la musique est l’expre
376 te définition, et son utilité majeure ?) De plus, on a fait observer qu’elle ne tenait pas compte assez expressément de l’
377 avait été composée. C’est grâce aux festivals qu’ on s’est remis de nos jours non seulement à jouer Hamlet sur les rempart
378 ’il est vrai qu’un paysage est un « état d’âme », on pourra contempler aux pages de ce livre tant d’apparitions mémorables
20 1976, Articles divers (1974-1977). Histoire et prospective de l’identité européenne (1976)
379 européennes, quelle est votre discipline ? Quand on sent qu’on ne peut pas répondre facilement à une question toute simpl
380 s, quelle est votre discipline ? Quand on sent qu’ on ne peut pas répondre facilement à une question toute simple, comme ce
381 e chose qui aurait existé historiquement et que l’ on se proposerait de ressusciter. Mais ce n‘est pas non plus une utopie,
382 d’applications immédiates. C’est ainsi, nous dit- on , que le CERN étudie la constitution de la matière par besoin de savoi
383 rche fondamentale n‘est pas aussi « gratuite » qu’ on le croyait : il arrive même qu’elle soit la mieux payée et la plus pa
384 himistes, les astronomes et même les biologistes, on peut admettre que la métaphysique et l’anthropologie philosophique jo
385 mon sujet soit « sérieux » du point de vue que l’ on nommait naguère académique, mais bien qu’il touche à quelque chose de
386 ompatibles avec l’idée du sérieux scientifique qu’ on cultivait au xixe siècle, mais qui s’en plaindrait aujourd’hui ? Vos
387 péocentrisme ? Vous en êtes parfois accusé. Quand on fait « simplement » du droit, des lettres, de la médecine ou de l’his
388 it, des lettres, de la médecine ou de l’histoire, on peut penser qu’on reste dans l’universel ou tout au moins dans le gén
389 e la médecine ou de l’histoire, on peut penser qu’ on reste dans l’universel ou tout au moins dans le général. Et que ceux
21 1976, Articles divers (1974-1977). Changer de cap (novembre 1976)
390 Changer de cap (novembre 1976)ab Ce que l’ on appelle « politique » n’est en général qu’une tactique partisane, mai
391 mmandé, je donnerai ici un exemple récent et — qu’ on me le pardonne — personnel. ⁂ Parlant au cours d’une émission de la T
392 mande : « Concorde, à quoi est-ce que ça sert ? » On m’assure que cet appareil ira de Paris à New York en trois heures et
393 res du « jet-set » qui en « bénéficieront », si l’ on peut dire, que feront-ils de ces heures gagnées ? Est-ce qu’elles vau
394 re est si précieuse, sont à tel point suroccupés, on leur rendrait meilleur service en leur faisant « perdre » quelques he
395 u centre de la ville par hélicoptère ou métro. 3. On me dit qu’arrêter la fabrication de Concorde mettrait au chômage 40 0
396 et comme pour la guerre du Vietnam, ici encore — on invoque les « retombées technologiques » (Concorde lui-même étant une
397 nes) ; cela signifie qu’en construisant Concorde, on aurait découvert des procédés qui permettront de construire d’autres
22 1977, Articles divers (1974-1977). Souvenir de 1938 (1977)
398 crire quelque chose. À peine de retour en Suisse, on m’offre de composer un Festspiel pour l’« Expo » nationale de 1939. L
399 m’annonce Munich30 : « C’est la paix ! », me dit- on . (On le croyait ce jour-là !) C’est aussi toute la vie qui se reprend
400 nonce Munich30 : « C’est la paix ! », me dit-on. ( On le croyait ce jour-là !) C’est aussi toute la vie qui se reprend à vi
401 me fuir… Le matin même, sans raisons apparentes, on m’avait remis une biographie nouvelle de Nicolas de Flüe. J’en avais
402 u message secret qu’il envoie à la Diète, et dont on ne connaît que le résultat : la paix sauvée, « comme par miracle », d
403 400 figurants fournis par diverses sociétés, et l’ on fabriquera les costumes à domicile. Je tombe bien, Honegger vient d’é
404 uper toute une population ». C’est donc oui, et l’ on se met au travail dès novembre. En janvier, tout sera terminé. Mais u
405 eux opinions contradictoires, et une troisième On a écrit que si l’oratorio Nicolas de Flüe « n’est pas devenu populair
23 1977, Articles divers (1974-1977). Les débuts de la construction européenne (1977)
406 telligibles les débuts et l’évolution de ce que l’ on est convenu de nommer, non sans optimisme, quant à la vraie nature du
407 te est présenté en 1930 à la Société des Nations. On peut y lire : S’unir pour vivre et prospérer : telle est la stricte
408 cier) mais pour la production de l’union entière. On demande « la mise en commun des ressources d’énergie des marées et de
409 e à La Haye, sur lequel nous allons revenir. Mais on imagine bien que les positions politiques, sociales et économiques, d
410 versel, dans les six mois, un parlement européen. On ne retint que l’idée d’une assemblée dont les membres seraient élus p
411 de La Haye « tout s’est déroulé très vite » comme on dit dans les romans policiers. Une fois les objectifs définis, les pl
412 eux résultats les plus spectaculaires de ce que l’ on peut appeler la période des congrès demeurent sans contredit la CECA
413 Ce n’était pas une réforme, mais une révolution. On peut penser que c’est à la faveur d’une espèce de distraction tant du
414 . Lorsque René Pleven ranima le projet, fin 1951, on lui fit observer de divers côtés qu’une armée sans gouvernement poser
415 ture à confirmer le diagnostic des fédéralistes : on ne peut fonder l’union des Européens sur cet obstacle majeur à toute
416 Montreux. Édité par l’UEF, Genève 1948, 142 p. — On appelait alors Plan Monnet l’ensemble des mesures décidées pour relev
417 de demain, Éditions de la Baconnière, 1946, où l’ on peut lire aussi les déclarations européennes du journal Combat et le
24 1977, Articles divers (1974-1977). Robert Schuman (1886-1963) : l’homme de la frontière (1977)
418 mme de la frontière (1977)ae af Cet homme dont on a pu écrire « qu’il n’avait l’air de rien », qu’il entrait dans la sa
419 politicien et du célibataire presque timide que l’ on a si souvent décrit, un homme d’État soudain s’est déclaré. Et tandis
420 isant un texte inattendu, donc mal compris, et qu’ on accepte à cause de cela seulement, a peut-être changé le cours de nos
421 mpleur de ses suites, s’expliquent seulement si l’ on rapporte l’attitude de Schuman lors du 9 mai 1950 aux motivations mêm
422 ojet ou celui qui le réalise ? Peut-être pourrait- on évoquer ici, plutôt que la relation classique entre le dramaturge et
423 par lui à la fin de sa vie, je trouve ces mots qu’ on ne saurait souhaiter plus éclairants, et qui servent de titre à son d
424 leur création suivra le cheminement des esprits. On sent bien ici que Schuman n’a jamais eu, en réalité, à « interrompre
425 s, vol. 6, Paris, Mazenod, 1977, p. 254-257. af. On a intégré les corrections effectuées par Rougemont sur l’exemplaire.
25 1977, Articles divers (1974-1977). Hérétiques de toutes les religions, unissez-vous ! (1977)
426 cable par tous, en tout lieu et tout temps, et qu’ on ne saurait violer sans s’égarer ; — ou au contraire une forme d’exist
427 on de l’objet est indépendante de la manière dont on l’observe, et peut être vérifiée ubique et semper, — ou au contraire
428 c désigner aussi bien l’orthodoxie que l’hérésie. On voit ici que ces deux phénomènes radicalement antinomiques sont en re
429 la police de la route qu’il faut s’adresser si l’ on cherche le chemin du Graal. ⁂ La complémentarité de l’orthodoxie et d
430 -être qu’une question de tempérament. Selon que l’ on relève du type introverti ou du type extraverti, on sera porté à priv
431 relève du type introverti ou du type extraverti, on sera porté à privilégier soit la personne, soit la communauté. Il exi
432 te confession offre un climat de bonheur (ou si l’ on veut de créativité) à tel tempérament plus qu’à tel autre : ainsi le
433 tel que tu es en marche par la foi, et non tel qu’ on l’entend — maîtres, coutume d’Église ou règlements de la société. ⁂ C
26 1977, Articles divers (1974-1977). La nature du pouvoir (9 octobre 1977)
434 rès belle leçon de modération philosophique, dont on pourrait tirer également — je pense que l’auteur le pensait ainsi — d
435 tinction qui, en général, amuse l’auditoire quand on la cite, à savoir la distinction entre le sens du pouvoir en France,
436 rance, et le sens du pouvoir en Suisse. En Suisse on n’a pas du tout l’idée de la majesté du pouvoir, ni celle de renverse
437 sté du pouvoir, ni celle de renverser le pouvoir. On ne parle simplement pas du pouvoir, et il y a là deux mots complèteme
438 peu comme cet homme politique français qui, quand on lui demandait, un jour : « Que faites-vous devant un problème insolub
439 re reconnu le président de la Chambre française.) On se sent tout de même un peu frustré devant ce recul devant la définit
440 tte tragédie car cette « prise du pouvoir », dont on parle toujours, va prendre les agresseurs, va les « phagocyter ». Je
441 que le pouvoir est, aussi, dans la liberté, et qu’ on ne peut concevoir la liberté sans l’intervention du pouvoir. La formu
442 suivante : « La puissance, c’est le pouvoir que l’ on prend sur autrui ; la liberté, c’est le pouvoir que l’on prend sur so
443 d sur autrui ; la liberté, c’est le pouvoir que l’ on prend sur soi-même. » [Réagissant aux remerciements et demande de pr
27 1977, Articles divers (1974-1977). La puissance et les choix (mai 1977)
444 dans la communauté. Comment se sentir libre si l’ on n’est responsable de rien ? Et comment serait-on responsable si l’on
445 ’on n’est responsable de rien ? Et comment serait- on responsable si l’on n’est pas libre de ses actes ? N’allons pas croir
446 e de rien ? Et comment serait-on responsable si l’ on n’est pas libre de ses actes ? N’allons pas croire pourtant qu’entre
447 ui ait quelque saveur sans au moins l’illusion qu’ on l’exerce « librement ». Mais le choix proprement politique au sens le
448 tats les adoptent. Car « très grand » suppose, qu’ on le veuille ou non : très centralisé. « Très cher » implique l’interve
449 nergie solaire implique, entraîne et favorise, qu’ on le veuille ou non, des groupuscules, des communes, des régions à la f
28 1977, Articles divers (1974-1977). Du passé à l’avenir d’une région (27 juin 1977)
450 magnes. Dans le courant du xixe siècle, ce que l’ on nommera « l’esprit romand » se signale et se caractérise par des œuvr
451 Suisse romande va devenir la mère patrie de ce qu’ on nomme aujourd’hui les sciences humaines. Ferdinand de Saussure fonde
452 e et de la pédagogie scientifique du xxe siècle. On a beaucoup écrit sur cet « esprit romand », que dans la plupart des o
453 que dans la plupart des ouvrages à lui consacrés, on considère comme grave et scrupuleux, ennemi des extrêmes, introspecti
454 voire de toute expression lyrique gratuite… Bref, on a fait du Romand-type l’antithèse du Français-tel-qu’on-le-parle. Inu
455 tagnes, vigneron de Lavaux, banquier genevois… Qu’ on m’entende bien : je ne limite pas « l’esprit romand » à ses expressio
456 s conflits confessionnels ont beaucoup contribué, on l’a vu, à différencier nos cantons. Si ces conflits sont apaisés de n
457 tre Genève et ses voisins gessiens et savoyards. ( On sait que la crainte de recevoir trop de catholiques avait joué un rôl
458 rve dans cette aire — tout empiriquement définie, on va le voir — une série de phénomènes de tous ordres, dont chacun se t
459 des impôts versés en Suisse par les frontaliers, on peut aussi parler d’une région fiscale transfrontalière. C’est celle
460 otre histoire oubliée ? 31. Et même deux, si l’ on fait rentrer dans la Romandie l’ancien Évêché de Bâle, c’est-à-dire l
461 er au sein de celle-ci une nouvelle entité, que l’ on peut définir grosso modo comme la partie francophone de la Suisse ; e
462 de la Suisse ; et dès ce moment, mais pas avant, on a parlé d’une Suisse romande, par opposition à la Suisse alémanique e
29 1977, Articles divers (1974-1977). « Il faut changer de cap » (27 septembre 1977)
463 nous menacent et que l’auteur dénonce lucidement, on n’est certes pas obligé d’apporter les mêmes réponses, mais on doit c
464 es pas obligé d’apporter les mêmes réponses, mais on doit convenir avec lui de l’urgence de solutions. Pour étayer votre t
465 s en Occident, mais dans le tiers-monde. Parce qu’ on nous dit que l’humanité va doubler tous les trente ans, nous croyons
466 nous reste du pétrole pour trente ans. Que fera-t- on dans trente ans des autos et des autoroutes ? Réponse des technocrate
467 os et des autoroutes ? Réponse des technocrates : on bâtira des centrales nucléaires qui prendront la relève. Mais l’urani
468 ranium qui les nourrit sera aussi épuisé, pense-t- on , en trente ans. Qu’à cela ne tienne, disent les technocrates, nous fe
469 e la cité. Dans les énormes villes d’aujourd’hui, on assiste à une dramatique dégradation des relations humaines. Mais ces
470 t évident que les frontières seraient débordées ? On dénombre actuellement une vingtaine de régions transfrontalières du D
471 s personnes. La puissance, c’est le pouvoir que l’ on prend sur les autres, la liberté, c’est le pouvoir que l’on prend sur
472 ur les autres, la liberté, c’est le pouvoir que l’ on prend sur soi-même. al. Rougemont Denis de, « Il faut changer de c
30 1977, Articles divers (1974-1977). Au tableau d’honneur de Parents : L’Avenir est notre affaire (octobre 1977)
473 du comprimé d’algues marines en guise de steak qu’ on lui a promis dès les années 1950. » Ce n’est qu’un aspect ! Mais nous
474 Recherche de la personne, de la vocation d’homme. On la retrouve dans tous ses livres, dans ses articles, dans toutes ses
475 était simpliste et ridicule, aussi aberrant que l’ on voudra. C’était un idéal commun, et terriblement effectif. Alors, si
476 sous forme de courbes ce qui allait se passer si on continuait comme maintenant. Je me suis dit : « il faut faire quelque
477 dèle idéal ? Absolument ! Et chose extraordinaire on commence à y revenir aujourd’hui. Plus personne ne nie la nécessité d
478 daptation qui les mutile moralement. Comment veut- on que l’homme soit encore un citoyen ! Et pourtant c’est de l’homme que
479 éaire. Mais, d’ores et déjà, une chose est sûre : on ne pourra bâtir des centrales qu’à l’abri d’un rideau de CRS, donc da
480 s rien changer. Elle fait des citoyens pour ce qu’ on veut, et trop souvent pour ce que l’État lui demande. Longtemps elle
481 leçons de nos écoles secondaires. Or qu’y apprend- on  ? Des mensonges. L’histoire des frontières naturelles par exemple on
482 L’histoire des frontières naturelles par exemple on apprend que les Pyrénées séparent la France de l’Espagne alors qu’ell
483 le entre Français et Allemands ? Absolument faux, on parle allemand des deux côtés du Rhin. Les exemples sont multiples. L
31 1977, Articles divers (1974-1977). Denis de Rougemont : le retour d’un hérétique (3 octobre 1977)
484 meut car ça fait toujours plaisir de constater qu’ on n’a pas parlé dans le vide. Mais, parmi tous ceux qui défendent aujou
485 ntestable. Grâce à ces experts — et à d’autres —, on sait désormais que le pire, s’il n’est pas sûr, est en tout cas proba
486 e, pour une fois, lui donner l’exemple. Bien sûr, on peut rêver… On peut aussi limiter les dégâts. D’ailleurs, nous y sero
487 s, lui donner l’exemple. Bien sûr, on peut rêver… On peut aussi limiter les dégâts. D’ailleurs, nous y serons contraints ;
488 planète soit occupé par une dizaine d’individus. On ne pourra même plus s’allonger… L’autre grande critique que vous avez
489 impossible une gestion raisonnable de la nature. On pourrait faire le même constat pour le Rhin, qui est actuellement pol
490 En effet, depuis Hegel qui en fit la philosophie, on sait que l’État-nation est génétiquement lié à la guerre : « C’est pa
491 quillité qu’il n’a plus au-dedans. » À cet égard, on peut dater avec précision la naissance de l’État-nation : c’est le 20
492 et où tous deviennent identiques. Par conséquent, on comprend pourquoi, tôt ou tard, l’État-nation aura besoin d’y recouri
493 de jusqu’à Jean Monnet… À relire tous ces textes, on a le sentiment très vif que, contrairement à ce que vous semblez croi
494 de nos jours, c’est encore plus sensible car, qu’ on le veuille ou non, c’est parce que l’idée européenne est tacitement a
495 pas autrement. En gros, cela voulait dire : si l’ on tient les gens par le fric, on les tiendra par la peau. À l’inverse,
496 oulait dire : si l’on tient les gens par le fric, on les tiendra par la peau. À l’inverse, quand de Gaulle a bloqué la con
497 es raisons strictement politiques ou culturelles. On a alors pu constater combien celles-ci étaient efficaces et mobilisat
498 ’est pas un thème très mobilisateur… À vrai dire, on a l’impression que leurs idées sur le sujet ne sont pas très précises
499 . Or, peu de temps après, Sartre devient, comme l’ on sait, le compagnon de route du PCF. Du même coup, l’antieuropéanisme
500 éditait l’idée d’une « nature européenne » (comme on dit « nature humaine ») que les colonisés auraient raison de haïr. Au
501 er d’une « méconnaissance des réalités » sitôt qu’ on entreprend de le dénoncer ? Certes, ce n’est pas une abstraction, mai
502 ’une sorte de poujadisme instinctif. Depuis 1945, on sait que le « péril allemand » sera d’autant moins probable que l’on
503 ril allemand » sera d’autant moins probable que l’ on s’engagera plus franchement dans le processus d’une fédération europé
504 urer, au contraire… C’est en refusant l’Europe qu’ on renforcera l’axe germano-américain. De même, c’est en refusant l’Euro
505 « ordre nouveau » n’avait pas du tout le sens qu’ on lui prête aujourd’hui. Nous ne ressemblions vraiment pas à ces petite
506 t à la guerre et au totalitarisme… Pourtant, si l’ on ouvre le premier numéro de L’Ordre nouveau, on y trouve des choses as
507 l’on ouvre le premier numéro de L’Ordre nouveau, on y trouve des choses assez déplaisantes, surtoutaw si on les replace d
508 rouve des choses assez déplaisantes, surtoutaw si on les replace dans leur contexte. Ainsi, en 1933, vousax trouvez opport
509 semblaient plus toniques que l’auteur du Capital. On passait donc pour des anarchistes, des libertaires. Aujourd’hui, on d
510 ur des anarchistes, des libertaires. Aujourd’hui, on dirait « nouveaux philosophes »az… C’est tout de même Otto Abetz, don
511 rvint à Hitler, qui en fit le mauvais usage que l’ on sait. Au fond, vous ne cessiez pas de jouer avec la politique sans ja
512 afin de conjurer, de différer les apocalypses qu’ on nous prépare. D’après vous, l’« apocalypse » pourrait être différée ?
513 e de 1973, qui aboutit à la hausse des prix que l’ on sait et qui, en retour, met en péril les industries occidentales de l
514 ur notre mode de développement.bc bd Ainsi, si l’ on considère rétrospectivement ces chaînes de causalités, il apparaît qu
515 ommun, chacun doit inventer son chemin, car, si l’ on prend les routes nationales, on arrive toujoursbg à la capitale, au c
516 chemin, car, si l’on prend les routes nationales, on arrive toujoursbg à la capitale, au centre, et alors, au lieu de pren
517 e, la garantit. Or il existe en Occident ce que l’ on appelle la passion et qui, en fait, n’est qu’une sorte d’utopie unifi
518 sublime mais aussi, toujours, avec la mort. Si l’ on prolongeait cette analogie, on en viendrait à dire que l’impérialisme
519 avec la mort. Si l’on prolongeait cette analogie, on en viendrait à dire que l’impérialisme, par exemple, n’est jamais que
520 excès et de la loi contre la violence ? Dès que l’ on se prononce sur les affaires humaines, je pense qu’il vaut mieux être
521 mme un certain classicisme de pensée et de style. On peut refuser tout cela mais il faut savoir ce qu’il en coûte. Avant l
522 hrase de Luther que je me répète souvent : « Si l’ on m’apprenait que la fin du monde est pour demain, je planterais quand
523 orée du bord du lac Léman, prêche dans le désert. On pardonne tout aux prophètes, sauf d’avoir raison… Il fallut son derni
524 ffaire , paru le mois dernier chez Stock, pour qu’ on redécouvre celui qui fut, à la veille de la guerre, le maître à pense
525 le chœur indigné de tous ses cadets en colère. » On précise en notes les commentaires de Rougemont, manifestement agacé p
32 1977, Articles divers (1974-1977). Pierre Desgraupes fait le point avec Denis de Rougemont (10 octobre 1977)
526 vanche, les écologistes, dont je suis, pensent qu’ on peut au contraire tout sauver à condition de changer de direction. Ma
527 sauver à condition de changer de direction. Mais on ne peut pas cacher que, si on laisse les choses aller, c’est perdu !
528 de direction. Mais on ne peut pas cacher que, si on laisse les choses aller, c’est perdu ! Si une comète est en train de
529 e de la retenir ou de la détourner dans sa chute, on sait exactement à quel moment elle touchera le sol… En somme, vous êt
530 j’étonnerai en disant qu’il y en a beaucoup et qu’ on en a beaucoup parlé. Ce qui m’intéresse moi, c’est de dénoncer la fau
531 ’est de dénoncer la fausseté de la métaphore dont on use pour les justifier. Elle tient en un mot magique : croissance. Or
532 osomes, leurs cellules qui sont programmés, comme on dit, pour pousser, croître, se développer, s’épanouir, fleurir et ens
533 sont associées. C’est tout à fait abusivement qu’ on a transporté ce terme de croissance dans le domaine des choses matéri
534 s matérielles où il n’a plus aucun sens, parce qu’ on envisage là une croissance indéfinie ; personne n’a jamais dit à quel
535 erre. Je crois que tout dépend de nous. Autrefois on disait : « L’avenir n’appartient à personne mais à Dieu. » Ou « De qu
536 de mes livres, d’avoir écrit cette phrase ! Mais on l’a si souvent citée comme étant de moi que je l’adopte volontiers !
537 vaudra son pesant de platine… Alors qu’est-ce qu’ on va faire ? Eh bien, personne ne se le demande aujourd’hui, la recherc
538 pothèse plausible ? Elle est absolument fatale si on continue comme ça. Un exemple typique est celui des centrales nucléai
539 songe. Les responsables se disent simplement : «  On va essayer d’augmenter nos exportations pendant quelques années et pu
540 du plutonium, et avec le plutonium, qu’est-ce qu’ on fait ? Des bombes et rien d’autre. Donc, si on vend des centrales de
541 qu’on fait ? Des bombes et rien d’autre. Donc, si on vend des centrales de retraitement du plutonium à certains pays, ce n
542 par commission comme disent les théologiens) dont on entoure dans nos pays les problèmes du nucléaire. Vous vous interroge
543 t immédiatement, ça ferait beaucoup de bruit si l’ on savait que quelqu’un a trouvé la réponse. Mais vous entendez dire tou
544 ser tout de suite des arguments d’autorité dès qu’ on les pousse trop. La question que vous soulevez ainsi est doublement g
545 ncore un exemple dans mon propre pays, la Suisse. On a appris, à un moment donné, qu’il existait chez nous un conseil d’ex
546 Le citoyen ne savait rien de cette chose-là quand on a annoncé la démission avec éclat d’un certain professeur de physique
547 -ils ? Eh bien, regardons d’abord le but affiché. On nous répète à satiété : vous ne couperez pas au nucléaire parce que l
548 double maintenant en l’espace de trente ans et qu’ on va manquer d’énergie. Or cet argument, qui pouvait, à la limite, impr
549 Inde ? » Sans compter que l’excédent d’énergie qu’ on peut attendre de l’atome est insignifiant par rapport à notre fameuse
550 nventé cet « impératif » ! Ils nous disent : « Si on n’a pas recours au nucléaire, on devra retourner dans les cavernes ! 
551 us disent : « Si on n’a pas recours au nucléaire, on devra retourner dans les cavernes ! » C’est une ânerie monstrueuse. A
552 30 % d’économie tout de suite ; depuis la crise, on a fait 20 % en Suisse comme on a voulu, sans le moindre mal. D’ailleu
553 ; depuis la crise, on a fait 20 % en Suisse comme on a voulu, sans le moindre mal. D’ailleurs, écoutez. Faites un calcul q
554 ’était les fonctionnaires, l’administration, le «  on  » anonyme sur lequel on ne peut rien. C’est ça, la vraie réalité de l
555 s, l’administration, le « on » anonyme sur lequel on ne peut rien. C’est ça, la vraie réalité de l’État. Ne vous semble-t-
556 lus bien réguliers… C’était une idée de fou, mais on en a débattu passionnément. Et si vous croyez que ce sont là des diva
557 lligents, au moment de la guerre d’Algérie, quand on parlait de l’unité de la France « de Dunkerque à Tamanrasset ! » Mais
558 ’est en mettant fin à ce mythe de la puissance qu’ on mettra fin à la tyrannie de l’État. Je précise à cet égard que je ne
559 liste et l’État-nation capitaliste. Mais que peut- on substituer à l’État ? Des communautés vivantes ayant d’autres fins qu
560 aire l’unité c’était conquérir le plus de gens qu’ on pouvait, devenir toujours plus fort pour aller conquérir plus loin en
561 ctionne très bien, parce que ça reste petit. Mais on entend parfois les Suisses se plaindre justement d’un manque de pouvo
562 puisqu’ils se sont trompés si longtemps. Ne peut- on en tirer aussi la conclusion que les intellectuels n’exercent pas une
563 leur avenir, mais ils continuent à vouloir, comme on dit chez moi, le beurre et l’argent du beurre. Les Américains disent 
564 ais en réalité, ils font tout autre chose. Alors, on prêche dans le désert ? Non, il y a encore un espoir, c’est qu’il va
565 er sur des villes comme c’est déjà arrivé sans qu’ on nous le dise. On les a arrêtés au dernier moment, à plusieurs reprise
566 comme c’est déjà arrivé sans qu’on nous le dise. On les a arrêtés au dernier moment, à plusieurs reprises, mais quand les
567 écurseurs du mouvement écologique. L’entretien qu’ on va lire donne ainsi un prolongement inattendu à ma récente enquête su
568 ente enquête sur “Les déchets du progrès”. » bq. On a ici conservé l’original, même s’il semble que cette question soit d
33 1977, Articles divers (1974-1977). L’Avenir est votre affaire (11 octobre 1977)
569 ens disent qu’une telle guerre est impossible, qu’ on n’utilisera pas les bombes atomiques… Je répondrai ceci : la France e
570 uvent rien en faire, sinon en tirer du plutonium. On leur fait promettre qu’elles ne s’en serviront pas à des fins belliqu
571 des fins belliqueuses, mais tout le monde sait qu’ on peut faire une bombe avec cinq à six kilos de plutonium. Ce qui perme
572 acilite l’escalade de la violence et du chantage. On justifie ces ventes en affirmant qu’elles équilibrent la balance comm
573 ’exemple de la France : sur le plan international on ne l’écoute pas, elle ne compte plus. Mais elle est trop grande, en t
574 entrales nucléaires, quand ils se sont aperçus qu’ on allait en construire seize dans un rayon de quarante kilomètres, ce q
575 ent les révolutionnaires, le pouvoir est à créer. On ne peut plus compter sur les gouvernements, mais sur les habitants de
576 nes ! Personne n’a prouvé que c’était nécessaire. On dit qu’il faudrait économiser 30 % d’électricité pour pouvoir se pass
577 ssaire » dans l’esprit de ses compatriotes. Quand on lance une nouvelle technique, un nouveau procédé, on devrait toujours
578 lance une nouvelle technique, un nouveau procédé, on devrait toujours se demander : « Qu’est-ce qui arriverait si ça réuss
579 prosaïquement encore : « À quoi ça sert ? » Si l’ on s’était interrogé à propos de la voiture, on aurait évité, par exempl
580 Si l’on s’était interrogé à propos de la voiture, on aurait évité, par exemple, de voir aujourd’hui que 18 % du territoire
581 une catastrophe du point de vue écologique. Quand on pense que Pompidou a pu commettre cette bourde monumentale : « Il est
582 es conceptions longuement mûries en un temps où l’ on fait d’invraisemblables succès de librairie à des « penseurs » qui n’
583 ent dans les plus inénarrables palinodies… Lorsqu’ on lui demande s’il est « à la mode », Denis de Rougemont sourit ironiqu
584 ut) et ceux qui veulent la liberté des personnes. On dit qu’il n’y a pas de liberté sans puissance. À quoi je réponds que
585 je réponds que la puissance est le pouvoir que l’ on prend sur autrui et la liberté le pouvoir que l’on prend sur soi-même
586 n prend sur autrui et la liberté le pouvoir que l’ on prend sur soi-même. C’est de nous-mêmes que nous devons tirer l’énerg
587 années 1930, au sein du mouvement personnaliste. On dit que l’Europe n’avance pas. Ce n’est pas entièrement vrai, il y a
588 présente que se dessine le futur visage du monde. On ne saurait trouver meilleur ouvrage que L’Avenir est notre affaire
34 1977, Articles divers (1974-1977). « Je suis un pessimiste actif » (17 octobre 1977)
589 pposition complète avec la passion amoureuse où l’ on ne « voit pas » l’autre. Je me rallie à la conception du mariage que
590 re. Je me rallie à la conception du mariage que l’ on trouve dans une tribu africaine. Le marié dit à sa femme : « Je te vo
591 le-ci : « La décadence d’un peuple commence quand on se demande qu’est-ce qui va arriver au lieu de se demander : Qu’est-c
592 rois pas que l’homme soit bon mais je crois que l’ on peut construire une société qui le corrompe le moins possible. Ce qui
593 ement ? La France est un pays centralisateur où l’ on a le goût du secret. Pour les Français, le régionalisme c’est une red
594 lourd dans les discussions à propos du nucléaire. On met dans la tête des gens l’idée qu’ils ne peuvent pas comprendre… Je
35 1977, Articles divers (1974-1977). « L’avenir, c’est notre affaire ! » (18 octobre 1977)
595 de Rougemont forge prudemment ses phrases, comme on se fraie un chemin dans la forêt. Pas de formules toutes faites, pas
596 ation. Je constate que cette situation est grave. On vient me dire, alors, que je suis pessimiste. Cela ne veut rien dire.
597 réaliser un nivellement sans précédent. En 1790, on traduisait encore les textes officiels de la Constituante en cinq lan
598 t personnaliste » fut lancé, nous savions déjà qu’ on s’enfonçait dans un monde anonyme et artificiel, où l’on créait de fa
599 fonçait dans un monde anonyme et artificiel, où l’ on créait de faux besoins, où la disparition de toute communauté véritab
600 ue, c’est que l’esprit jacobin règne encore et qu’ on omet soigneusement de montrer où il mène. On ne parle qu’en termes de
601 t qu’on omet soigneusement de montrer où il mène. On ne parle qu’en termes de croissance — un terme d’ailleurs employé à f
602 leurs employé à faux — de puissance, de grandeur. On oublie ce que j’appelle depuis toujours l’individu libre et responsab
36 1977, Articles divers (1974-1977). La fonction et la structure de la ville future (décembre 1977)
603 le quant-à-soi par l’égoïsme hargneux. Etc., etc. On ne peut plus continuer dans les mêmes directions. Alors, vers quoi fa
604 plus spécialement urbanisme — est de savoir si l’ on va repartir de l’homme et de ses besoins fondamentaux, ou continuer à
37 1977, Articles divers (1974-1977). Demain le soleil (20 décembre 1977)
605 tirages. Ce succès n’a jamais été un best-seller. On vient de raconter que j’en avais vendu douze millions d’exemplaires,
606 ur à 400 000 exemplaires en trente-huit ans, mais on le réimprime en permanence. Le soleil peut tout nous donner S’il
607 ous êtes du pays de Rousseau et un peu utopiste ? On ne ferait jamais rien si chacun n’avait pas sa petite utopie. Depuis
608 peu de bruit à l’époque, mais qui est resté ce qu’ on appelle aujourd’hui un groupuscule. Quand la guerre est arrivée, on a
609 ’hui un groupuscule. Quand la guerre est arrivée, on aurait pu croire que ces idées et cette doctrine allaient disparaître
610 s voudront qu’il arrive. » Vous n’acceptez pas qu’ on se retranche derrière la formule commode « l’avenir n’appartient à pe
611 Je suis chrétien, mais je trouve trop facile qu’ on appelle volonté divine ce qui nous échappe. Que peut l’homme sur son
612 se sont développées en fonction de l’automobile. On a dépassé les limites humaines et des utopies se sont réalisées pour
613 à pièce, un de ces agencements de l’Histoire dont on se demande qui a pu les imaginer. Ford part d’une extrémité, Hitler d
614 une horrible régression vers des tyrannies que l’ on croyait dépassées. Le choix ne doit-il pas se faire entre l’énergie n
615 st le Concorde. C’est de la très mauvaise poésie. On ne va pas plus vite que le soleil. C’est impossible. C’est un slogan.
616 laire — à Pluton — dieu des Enfers, dieu aveugle. On s’est servi de son nom pour baptiser le plutonium, ce n’est pas par h
38 1977, Articles divers (1974-1977). Écologie, régionalisme, fédéralisme : l’avenir selon Denis de Rougemont (30 décembre 1977)
617 « religion de la croissance : ceux qui croient qu’ on peut continuer ce qu’on a fait depuis vingt-cinq ans, sont en pleine
618 nce : ceux qui croient qu’on peut continuer ce qu’ on a fait depuis vingt-cinq ans, sont en pleine utopie au mauvais sens d
619 -vous qu’avec de telles mutations non contrôlées, on ne détruit pas le tissu social ? Les hommes ne se connaissent plus. I
620 ont pas heureux et ils en viennent à se détester. On sait aujourd’hui que les ressources en pétrole seront épuisées d’ici
621 ole seront épuisées d’ici à vingt ou trente ans ; on en trouvera bien sûr toujours quelque part (on cherche même dans la r
622  ; on en trouvera bien sûr toujours quelque part ( on cherche même dans la région parisienne) : mais à quel prix ? Épuisé o
623 nutilisable, le résultat est le même. Et pourtant on parle de relance de l’économie ! C’est une aberration totale, une abs
624 ne aberration totale, une absurdité. En relançant on ne parviendra qu’à accroître, à aggraver la situation actuelle. On ne
625 qu’à accroître, à aggraver la situation actuelle. On ne résorbera ni le chômage ni l’inflation. C’est saint Thomas qui dis
626 dit : Le roi, c’est moi. Alors qu’en Suisse quand on dit le souverain, c’est toujours du peuple qu’on parle. Ce sont les É
627 on dit le souverain, c’est toujours du peuple qu’ on parle. Ce sont les États-nations et eux seuls, qui ont géré la terre.
628 être utilisée aux fins de défendre les centrales. On se livre à des enquêtes sur la vie des savants, des personnes, de leu