1 1974, Articles divers (1974-1977). La personne comme fondement des valeurs européennes (19 septembre 1974)
1 un cas, promesse dans l’autre — que par le climat qui les baigne. La première souhaitait approfondir en réflexion morale et
2 ement des effets politiques (mais c’est l’inverse qui s’est produit). Celle d’aujourd’hui veut affronter les premières mani
3 ronde et celle d’aujourd’hui, expliquant tout ce qui les rend différentes, il y a eu le rapport du club de Rome. Mais ceci
4 ofondeur, de quelques « lieux communs » européens qui ont sans doute orienté l’action d’hommes politiques tels que De Gaspe
5 nous les douze invités à la table — et vous tous qui entrerez, je l’espère, dans le débat — aux prises avec une question s
6 son bureau, le Conseil de l’Europe a fait un acte qui mérite d’être qualifié de politique, au sens du terme le plus éminent
7 , disait Paul Valéry. C’est le scandale, le choc, qui déclenche les circuits. Adam ne pensait pas avant la Chute. Tous ici
8 à partir de la Crise, c’est-à-dire à partir de ce qui nous apparaît menaçant pour nos libertés, pour notre économie, pour l
9 és se multiplient ces grands points d’exclamation qui , dans la signalisation routière, annoncent un passage dangereux, quan
10 masses et de la qualité artisanale — la jeunesse qui ne lit plus que des onomatopées en bulles ; la manipulation des désir
11 élévision ; les ravages de la division du travail qui est en réalité une division de l’homme, comme l’avait annoncé Kropotk
12 le d’une sorte d’anorexie civique, d’un fatalisme qui devrait inquiéter bien plus encore que les prévisions du club de Rome
13 que les prévisions du club de Rome, car c’est lui qui les rendra vraies, quand elles n’étaient que monitoires et n’ambition
14 démenties ! Oui, je sens parmi nous quelque chose qui me paraît beaucoup plus inquiétant que les vues apocalyptiques des éc
15 ues apocalyptiques des écologistes, quelque chose qui est là déjà, bel et bien là, et qui est la Question du siècle, une qu
16 quelque chose qui est là déjà, bel et bien là, et qui est la Question du siècle, une question pure, béante, qui se posait d
17 la Question du siècle, une question pure, béante, qui se posait du temps de ma jeunesse à quelques-uns, et qui a subitement
18 posait du temps de ma jeunesse à quelques-uns, et qui a subitement éclaté dans les universités de tout l’Occident et dans l
19 à ? Quel est le sens de ma vie dans cette société qui n’en est pas une, puisqu’elle n’est plus une communauté ? Que vaut so
20 n, et surtout qu’elle demeure sans réponse, voilà qui devrait nous effrayer vraiment, parce que cela nous laisse béants sur
21 ». Car le plus profond des désordres, c’est celui qui est au cœur d’une société dont le seul principe absolu est le profit,
22 eur dans son palais, mais on ne peut renverser ce qui ne tient pas debout, ce qui n’a pas de principe de cohésion interne,
23 ne peut renverser ce qui ne tient pas debout, ce qui n’a pas de principe de cohésion interne, — ou plutôt ce qui n’en a pa
24 s de principe de cohésion interne, — ou plutôt ce qui n’en a pas d’autre que l’obsession de la Puissance, vrai moteur de la
25 t entier, et par lui tous les peuples de la terre qui copient notre civilisation industrielle, scientifico-technique, quant
26 ? Ce n’est pas une entité philosophique. C’est ce qui nous permet de choisir, ordonne nos choix, et définit leur sens. Face
27 de valeurs, c’est qu’il y a donc des valeurs ! Et qui décident ou plutôt nous permettent de décider. Nous ne prenons consci
28 t ans, comme nous le répètent les producteurs (ce qui suppose une production multipliée par 16 384 en un peu moins d’un siè
29 animique et physiologique, que rien ne mesure, et qui vaut plus que tout ? Bien sûr, les choix sont rarement aussi simples.
30 ilemme fondamental entre l’impératif catégorique, qui est moral, et les impératifs technocratiques, qui sont des questions
31 qui est moral, et les impératifs technocratiques, qui sont des questions de gros sous, quand ce n’est pas de puissance mili
32 bsolu les régler ? Et comment évaluer les valeurs qui les guident ? Ici se pose la question décisive du référentiel, c’est-
33 stion décisive du référentiel, c’est-à-dire de ce qui gage les valeurs, de l’évaluant fondamental. Il n’est pas toujours bi
34 à ne décrire que des enchaînements nécessaires et qui échappent à toute considération morale. Cependant, la passion qui ani
35 toute considération morale. Cependant, la passion qui anime Le Capital est celle de la justice, ou je n’y ai rien compris.
36 rien compris. C’est la justice, non la nécessité, qui est le vrai référentiel de l’œuvre. Pour l’homme d’Europe, qu’il le s
37 l’on croirait intemporelles et universelles, mais qui ont leur date et leurs coordonnées spatiales. Notre notion de la pers
38 a Deuxième Personne de la Trinité, celle du Fils, qui allait fonder la conception chrétienne de l’homme. En déclarant qu’il
39 ant de penser ensemble des réalités antinomiques, qui s’excluent en logique mais coexistent en fait, ou comme diront les sc
40 istent en fait, ou comme diront les scolastiques, qui sont « distinguées par la raison mais unies par la réalité ». En form
41 e la coincidentia oppositorum de Nicolas de Cues, qui anime les œuvres de Goethe, de William Blake, des philosophes du roma
42 des autonomies locales — cette pensée en tension qui est vraiment l’idée formatrice de l’Europe parce qu’elle engendre l’h
43 ne, « technique » en quelque sorte, de la notion, qui ne tarda pas à être transposée du plan théologique à celui de l’humai
44 rsonne ; puis par Boèce, philosophe non chrétien, qui traduit en termes laïques les définitions conciliaires, et sera comme
45 istence en tension de l’individu naturel et de ce qui dans l’homme « passe infiniment l’homme » comme dit Pascal : le trans
46 investie par une vocation, une notion de l’homme qui implique la transcendance de l’homme par rapport à lui-même. Certes,
47 la personne c’est l’œuvre essentielle de chacun, qui consiste à trouver sa voie et à courir son aventure sans précédent. C
48 sans précédent. Car chacun naît de quelque chose qui n’a jamais été auparavant, qui n’est exactement pareil à rien, croise
49 t de quelque chose qui n’a jamais été auparavant, qui n’est exactement pareil à rien, croisement de chromosomes eux-mêmes s
50 int de départ d’un chemin particulier vers le But qui l’appelle, qu’il le nomme Dieu, ou l’Absolu, la Vérité ou le Bonheur.
51 physiologique, pour rejoindre les fins dernières qui m’appellent, je ne puis pas aller par la route nationale : elle condu
52 ’aurai le courage d’y marcher dans la nuit. Voilà qui implique la foi, cette forme de confiance dont Saint-Paul dit qu’elle
53 surance des choses qu’on ne voit pas ». Le chemin qui se crée sous les pas qui le foulent, conduit au But qui se révèle lor
54 ne voit pas ». Le chemin qui se crée sous les pas qui le foulent, conduit au But qui se révèle lorsqu’on marche vers lui, p
55 crée sous les pas qui le foulent, conduit au But qui se révèle lorsqu’on marche vers lui, pas autrement. Il s’agit d’une a
56 ement. Il s’agit d’une activité jamais achevée et qui sans fin cherche sa fin, et qui la reconnaît lorsqu’elle éprouve un s
57 jamais achevée et qui sans fin cherche sa fin, et qui la reconnaît lorsqu’elle éprouve un sentiment de convenance entre ses
58 ale, de concept superflu. Mais j’observe que ceux qui la nient ont commencé par répéter, après Nietzsche, que Dieu est mort
59 te personne. Or, ce n’est là qu’une métaphore. Ce qui peut provoquer la mort de l’homme, c’est la mort d’une nature tuée pa
60 , c’est la mort d’une nature tuée par l’homme, et qui nécessairement entraînerait dans sa perte l’espèce humaine. Car l’hom
61 t variées de l’aliénation, j’ose vous demander ce qui , selon vous, est aliéné ? Si ce n’est pas la personne, alors quoi ? Q
62 ors quoi ? Quelle abstraction politicienne ? Ceux qui prétendent que l’homme n’est qu’une illusion, que le sujet n’existe p
63 ’aliénation de l’homme ne saurait désigner que ce qui compromet sa possibilité de se mouvoir, librement, à la fois selon le
64 ent, à la fois selon le naturel et selon le divin qui est en lui. L’aliéner, c’est le mécaniser — au sens argotique qu’a pr
65 -à-dire le manipuler, lui imposer un comportement qui même très bénéfique, très bien payé, ne lui serait pas propre, ne pou
66 forme d’originalité chez les élèves. Tout pouvoir qui s’exerce sur autrui, non sur soi (comme celui que procure la richesse
67 a tôt ou tard monopolisé par l’État. Tout pouvoir qui s’exerce sur autrui conduit donc à l’État totalitaire, dans le systèm
68 non sur soi-même (bien au contraire), le pouvoir qui aliène, non celui qui libère. Au surplus, elle crée tant de liens ave
69 n au contraire), le pouvoir qui aliène, non celui qui libère. Au surplus, elle crée tant de liens avec ce qui n’est pas ma
70 bère. Au surplus, elle crée tant de liens avec ce qui n’est pas ma vocation, que toutes les religions de la terre l’ont con
71 mons le répètent tous les dimanches aux banquiers qui vont à l’église… Le prestige national se révèle fausse valeur, évalu
72 n’est que l’accroissement des pouvoirs matériels, qui conduisent à la guerre, aux crises économiques, au gaspillage des res
73 En revanche, l’amour est une valeur fondamentale, qui ne saurait être niée ou contestée que par des infirmes de l’âme ou de
74 gens de pouvoir faible ou nul sur soi-même ; ceux qui ne s’aiment pas eux-mêmes et qui par suite ne valent rien pour aimer
75 soi-même ; ceux qui ne s’aiment pas eux-mêmes et qui par suite ne valent rien pour aimer leur prochain. Car toute la tradi
76 n. Car toute la tradition hébraïque et chrétienne qui a formé vingt siècles d’Europe nous dit qu’il faut aimer son prochain
77 sur un sentiment, mais sur un acte ! Sur l’amour qui agit, l’amour qui aide, et non pas sur cette chose qui se lamente 12
78 mais sur un acte ! Sur l’amour qui agit, l’amour qui aide, et non pas sur cette chose qui se lamente 12 heures par jour à
79 git, l’amour qui aide, et non pas sur cette chose qui se lamente 12 heures par jour à la radio. Car aimer son prochain comm
80 onne entre le transcendant et l’incarné, entre ce qui libère, dégage, universalise d’une part, et ce qui lie, engage, enrac
81 ui libère, dégage, universalise d’une part, et ce qui lie, engage, enracine d’autre part. J’ai dit que la liberté de la per
82 vocation dont l’appel me libère, c’est elle aussi qui me relie à mes prochains dans la cité, parce que c’est parmi eux, ave
83 e : j’y vois la tâche principale de la génération qui monte. J’y vois aussi la condition de toute union possible de l’Europ
84 e que tout appelle ne pourra s’édifier que sur ce qui déborde, non seulement par en haut mais par en bas, le cadre inadapté
85 rée comme le référentiel de nos valeurs, comme ce qui nous permet de les éprouver et au besoin de les transvaluer, nous avo
86 ommunautaire. Morale et politique, soulignons-le, qui se déduisent immédiatement de la structure bipolaire de la personne e
87 rsonne appelle la création de petites communautés qui , pour défendre leur autonomie, seront amenées à se fédérer et donc à
88 rope, de son union, et de la création des régions qui rendra seule possible cette union. Tout le problème politique, social
2 1974, Articles divers (1974-1977). Alexandre Marc et l’invention du personnalisme (1974)
89 sont différents… Je donnerai donc ici ma version ( qui est la bonne) telle que je l’ai publiée dans le Journal d’une époque
90 nait Alexandre Marc des articles d’un ton violent qui paraissaient dans la revue Plans, où il m’introduisit bientôt. C’est
91 je rencontre peu de temps après Emmanuel Mounier, qui préparait Esprit , et Arnaud Dandieu qui allait inspirer le groupe d
92 ounier, qui préparait Esprit , et Arnaud Dandieu qui allait inspirer le groupe de L’Ordre nouveau . Une pléiade de petits
93 cintiller sur le tableau de bord d’une génération qui démarre. On voit que le faible élément d’incertitude qui subsiste su
94 rre. On voit que le faible élément d’incertitude qui subsiste sur ma première rencontre avec Alexandre Marc s’accentue for
95 il s’agit de mes premiers contacts avec Mounier, qui fondait alors Esprit , avec Dandieu, qui allait inspirer L’Ordre no
96 ounier, qui fondait alors Esprit , avec Dandieu, qui allait inspirer L’Ordre nouveau , et tout d’abord avec Philippe Lamo
97 et certaine dans tout cela : c’est Alexandre Marc qui a provoqué presque toutes les rencontres, combinaisons et permutation
98 e viens de citer n’est connu du grand public — ce qui est normal, ils ont de 21 à 32 ans — mais encore ils ne se connaissen
99 s’est déclarée, et quels que soient les conflits qui l’animent, elle a reconnu les éléments fondamentaux d’une « cause com
100 s, profond et précieux critique catholique, voilà qui n’importe guère : dans les deux cas, nos chemins se croisaient au poi
101 résence à la misère du siècle, une présence enfin qui soit un acte », ainsi que je l’écrirai un an plus tard — et c’est, je
102 ’on me pardonne, ici, quelques mots sur moi-même, qui me paraissent nécessaires pour mieux situer le point de départ et le
103 cussions avec les maurrassiens de Suisse romande, qui me traitaient de communiste, et à des manifestations de rue en faveur
104 ’il portait à Versailles des guêtres blanches, ce qui était banal à l’époque pour peu qu’on surveillât sa mise, mais je le
105 niant tour à tour l’exclusive jusqu’à la scission qui mutile pour mieux sauver, et l’appel généreux aux larges regroupement
106 ne recherche de l’homme et de ses fins dernières, qui « passent infiniment l’homme » selon Pascal, recherche dont la nature
107 d’un petit groupe à fortes tensions intérieures, qui se nomma le Club du Moulin-Vert (ou du moins c’est ainsi qu’on le nom
108 strictement formulées. Or c’est cela, justement, qui est personnaliste. Et le paradoxe œcuménique apparaît parfaitement ho
109 s sur l’Ordre nouveau que le Club du Moulin-Vert ( qui se réunissait au-dessus d’un café de la rue du même nom) comportait u
110 ère. Nous étions une trentaine dans une salle nue qui me rappelait mes salles d’écoles primaires. Il y avait là des orthodo
111 let (ancien bénédictin) et le peintre Kowalewski, qui deviendra plus tard évêque ; des protestants comme les pasteurs Pierr
112 certain que nous nous sommes connus grâce à Marc, qui m’avait d’abord introduit à la revue Plans, puis invité au colloque d
113 chef du groupe Gegner — Les Adversaires —, celui qui animera plus tard l’Orchestre rouge et mourra sous la hache des nazis
114 Mounier, Izard, Galey, Touchard et toute l’équipe qui a préparé la revue, que nous voulons ouverte à tous les groupes perso
115 inquisiteurs ». Or, il sait bien que Marc et moi, qui faisons partie de sa première équipe de rédacteurs, appartenons avant
116 es divergences avec le nietzschéisme antichrétien qui anime alors plusieurs des dirigeants de l’Ordre nouveau. Sur ces base
117 s causes du conflit tour à tour déclaré ou latent qui ne cessa d’opposer l’ON en tant que groupe et le directeur d’ Esprit
118 on seulement devant Maritain mais devant l’Église qui s’inquiète (il a pu craindre, en 1936 précisément, une condamnation d
119 prit en Cour de Rome), quand il écrit à Berdiaev, qui fut marxiste, Mounier cède aux clichés communistes sur l’ON, dans le
120 holiques » face aux « trois autres grandes revues qui sont de direction communiste », à savoir commune, Europe, et la NRF
121  », à savoir commune, Europe, et la NRF …5 Voilà qui eût amusé Paulhan. (Mais après tout, si la NRF est « communiste »,
122 lement notre aîné : il était le seul d’entre nous qui ait lu tout Marx et tout Proudhon. Auteur d’une étude profondément or
123 tion nécessaire, un des rares livres de ce siècle qui renouvelle la pensée politique6. Bibliothécaire à la Nationale, Dandi
124 remier y retournera comme professeur ; le second, qui vient de l’Action française, est alors collaborateur de Dautry à la S
125 u près tous les jours… Du point de vue religieux, qui est capital, en dépit de ce que pense un vain peuple d’intellectuels
126 tel point qu’on ne sait pas quel fut l’apport de qui dans notre doctrine unanime. Sous l’impulsion de Marc — et c’est typi
127 us répétaient les surréalistes après Lautréamont, qui se trompait, ou se moquait simplement. Mais nous savions qu’une socié
128 e je viens de le faire depuis quelques jours — ce qui me reste des numéros de L’Ordre nouveau , de 1933 à 1938, et de la c
129 ques-uns de ces thèmes — illustrés de citations — qui n’ont fait, depuis ce temps-là, que gagner (si possible) en actualité
130 ve et non native. Elle est le fait de « personnes qui ont su trouver en elles-mêmes la force de se libérer des particularis
131 nation dans le mécanisme économico-administratif qui n’en devrait être que le soutien. Par là les valeurs spirituelles se
132 le de droit antérieure et supérieure à l’état, et qui s’impose à lui » (ON 29, p. 19). Sur ce thème central, quatre grands
133 ctrine personnaliste, mais à la théorie du droit, qui se trouve renouvelée par cette application hardie de la « méthode dic
134 té, mais dans la conquête… Le possédant est celui qui marque, que ce soit un objet, une terre, ou le cœur d’un être. Ni l’é
135 jours : la transcendance de cet « être vertical » qui s’appelle l’homme debout, répond victorieusement à l’« horizontalité 
136 torieusement à l’« horizontalité » de l’immanence qui voudrait tout ramener au stable, au stagnant, à l’étale. (ON 20) St
137 e l’animal — dans le sens étymologique du terme — qui ne lui permettent pas de dominer réellement la situation). Par contre
138 itation : Toute force suppose une direction ; à qui la direction du pouvoir social ? À tout le monde, ce qui veut dire à
139 direction du pouvoir social ? À tout le monde, ce qui veut dire à personne… : de sorte que l’ordre dans l’être collectif, c
140 eu de ce contact direct avec la chair et la terre qui est nécessaire à l’homme. (ON 15) (On sait que l’argument « trop pet
141 C’est la patrie concrète, c’est-à-dire la région qui est l’élément constitutif et le fondement réel de notre fédéralisme…
142 ndance absolue… Tous les mouvements régionalistes qui n’adhèrent pas à la Révolution échouent complètement ou, pis encore,
143 e la différenciation, d’adhésion ou de sécession, qui se poseront dans la perspective de notre communalisme intégral… L’ex
144 Enfin, voici en quelques lignes un condensé de ce qui sera, dans les années septante, le programme des fédéralistes europée
145 patrice de la pensée de Marc dans les années 1930 qui me frappe à la relecture, c’est aussi le fait que Marc soit venu à l’
146 synthèse culturelle, de la vocation mondialisante qui fut la sienne dans ses plus hauts moments, et des menaces de colonisa
147 lus hauts moments, et des menaces de colonisation qui pèsent aujourd’hui sur nos peuples, à l’Ouest comme à l’Est. Mais on
148 a vocation personnelle, d’une attitude de l’homme qui assume et transforme en création le conflit permanent entre le partic
149 le mondial, l’individuel et l’universel, conflit qui l’incite à créer de proche en proche des relations sociales et des co
150 te illustration du texte capital cité plus haut9, qui concluait qu’une situation n’a de sens humain qu’en fonction de l’att
151 udrais dédier cette citation aux ouvriers de Lip, qui poursuivent leur lutte, pendant que j’écris ceci, dans la pure tradit
3 1974, Articles divers (1974-1977). Quelques-unes des choses curieuses qui me sont arrivées (1974)
152 Quelques-unes des choses curieuses qui me sont arrivées (1974)m Deux téléphones Octobre 1930 Je viens de
153 ivain. L’ennui, c’est que je n’y connais personne qui touche de près ou de loin à la vie littéraire et à l’édition. Seul es
154 porte : le téléphone sonnait. C’est un ami suisse qui vient de quitter l’Office of War Information, pour prendre un poste à
155 nglais — speaker n’étant employé qu’en français — qui allaient devenir mes collaborateurs quotidiens. André Breton, Amédée
156 nde. Et de là datent quelques-unes des rencontres qui ont le mieux fécondé mon aventure personnelle, vécue bien plus encore
157 et je venais de raconter comment parfois j’ai su qui m’attendait à la lisière de cette forêt tel soir d’été, quel sujet d’
158 st pas encore convaincu. Il prétend que je savais qui allait m’écrire, et que j’avais d’assez bonnes chances de deviner jus
159 mégarde sur un petit fait indifférent en soi, et qui n’est pas encore « arrivé » dans le temps. Les trois lettres sont tim
160 née, une à Neuchâtel à sept heures du soir. Celle qui est bordée de noir est d’un ami ainé, Robert de Traz, qui mentionne e
161 bordée de noir est d’un ami ainé, Robert de Traz, qui mentionne en passant la mort de sa belle-mère, survenue il y a quelqu
162 quart du livre. Je n’ai pas adressé un mot à âme qui vive (mangé dans des cafétérias où il suffit de désigner du doigt le
163 . Cet incident ne me rappelle pas seulement celui qui a marqué ma naissance, mais une soirée où nous fûmes « visités » dans
164 tique ? » Réponse : « C’est un petit jardin fermé qui s’ouvrira à Pâques. » (On sait que le hortus clausus est un symbole f
165 hénan notamment.) Mais c’est le troisième échange qui m’amène à rappeler ici cette soirée mémorable. L’un de nous avait écr
166 nt Denis de, « Quelques-unes des choses curieuses qui me sont arrivées », Gymnase cantonal de Neuchâtel : 1873-1973, Neuchâ
4 1974, Articles divers (1974-1977). Un modèle pour l’Europe ? (1974)
167 « Restons modestes ! La Suisse est un petit pays qui doit savoir se tenir à sa place. En proposant de grandes idées pour l
168 on de la justesse d’une idée à la taille de celui qui l’énonce ; et que l’importance ou la grandeur d’une vocation communau
169 onction du territoire occupé par le groupe humain qui en est le porteur. Les Suisses sont les dépositaires d’une grande id
170 tten, Orte, universitates dans le texte original) qui n’étaient nullement des États et ne se prétendaient nullement souvera
171 souveraines, mais voulaient rester autonomes, ce qui est tout à fait différent. La Suisse est née de la fédération tout em
172 États, de démocraties directes et d’oligarchies, qui n’avaient guère en commun que l’essentiel : la volonté de rester libr
173 des plus simples : les communautés de tous ordres qui ont peu à peu formé la fédération suisse ont été motivées par la doub
174 onfédération…) Or c’est exactement cette solution qui serait susceptible de résoudre les principales difficultés de la soci
175 ion fédéraliste des pouvoirs de décision. Blocage qui explique seul, sans la justifier, la plainte des politiciens et polit
176 ifier, la plainte des politiciens et politologues qui annoncent régulièrement « la fin du fédéralisme » dès qu’une tâche no
177  ! Deuxième erreur. Mais s’il existe des tâches qui débordent la capacité communale et appellent le canton, puis dépassen
178 dération, il en existe aussi, et de plus en plus, qui par leurs dimensions (économiques, financières, énergétiques, spatial
179 la Suisse naît du fait qu’à l’instar des nations qui l’entourent, elle est de plus en plus tentée de se considérer comme u
180 trait insensible aux réflexes stato-nationalistes qui sont communs à ses voisins.) Pour tout dire en une phrase qui rappell
181 muns à ses voisins.) Pour tout dire en une phrase qui rappelle la thèse de Trotski contre Staline, le fédéralisme dans un s
182 evient plus important que « bien penser ». De ce qui précède, je déduirai maintenant deux séries de conséquences politique
183 1848 le processus fédéraliste fondamental, celui qui attribue le pouvoir de décision à la communauté dont les dimensions c
184 éens12 et d’autre part des aménagements régionaux qui ne tiennent aucun compte des frontières politiques. Il en va de même
185 réalités écologiques : la pollution industrielle qui les met partout en danger ne connaît de frontières ni dans les airs,
186 Comment, dès lors, concevoir un exécutif européen qui ne s’appuie pas sur le relai stato-national, mais qui soit capable si
187 ne s’appuie pas sur le relai stato-national, mais qui soit capable simultanément de gérer les intérêts communs à l’échelle
188 nts. Ces agences s’occuperont des problèmes réels qui se manifestent au niveau des régions : elles pourront notamment mener
189 à l’inverse du système actuel des secrets d’État, qui met la science au service des gouvernements et des états-majors. Elle
190 litique européenne, l’établissement des priorités qui l’expriment et la juste répartition des ressources communes, les resp
191 ’on puisse imaginer aujourd’hui, mais aussi celle qui a le plus de chances de se réaliser au cours de la prochaine décennie
192 alistes les plus obtus, au cours de l’an de crise qui s’écoule tandis que j’écris. Or, on aura reconnu dans mon esquisse d’
193 torielles subordonnées à la compétence politique, qui s’exprime dans la collégialité. Je demeure convaincu que l’expérience
5 1974, Articles divers (1974-1977). Philosophie du prix littéraire Prince-Pierre-de-Monaco (1974)
194 onaco (1974)d Parmi nombre de traits originaux qui distinguent de tous les autres le prix du Prince Pierre de Monaco, je
195 le concevoir. Ce n’était guère possible à Paris, qui a toujours peine à croire qu’au-delà de ses Portes il existe autre ch
196 gloire du petit État dans la culture européenne, qui est née de lui. Le petit État présente sur le grand à peu près tous l
197 ine de la culture au sens le plus large du terme ( qui englobe les sciences exactes, naturelles et humaines, et l’urbanisme,
198 ique, la peinture, les lettres, et la philosophie qui oriente les sciences, sont nées de nos cités-États médiévales, renais
199 , Padoue, Tolède, Oxford, le Paris de la Sorbonne qui était une commune libre ; la Nuremberg de Dürer ; les villes libres d
200 ds États-nations modernes. En revanche la langue, qui est l’âme de toute culture, ne connaît pas les frontières politiques
201 s frontières des quelque vingt-huit États-nations qui divisent l’Europe ont en moyenne, quant à leur tracé actuel, un peu m
202 des domaines linguistiques est millénaire ! Voilà qui fait sentir à quel point la culture et la politique des États vivent
203 ières des genres, inventions de pédants écolâtres qui sévissent parmi nous depuis Boileau. On considère aujourd’hui couramm
204 ge, non pas aux Confessions ni au Contrat social, qui ne sont pas « fictions » — du moins l’affirme-t-il… Or, une fois pri
6 1974, Articles divers (1974-1977). À propos de Théodore Strawinsky [préface] (1974)
205 u’ils devraient être — et quel beau titre : celui qui aime ! — ce qu’ils éprouvent devant une œuvre. La peinture de Théodor
206 . Il n’est donc pas facile d’en parler — et voilà qui est devenu plutôt rare aujourd’hui, où tant d’artistes exposent des p
207 peinture à l’auteur d’objets en métal et en verre qui n’utilise jamais ni pinceaux ni couleurs. Et cet abstrait se voit déj
208 au, la craie, selon les exigences du rêve continu qui se déroule en toute vie d’artiste et qui saisit au vol des surprises
209 continu qui se déroule en toute vie d’artiste et qui saisit au vol des surprises de lumière, compose des expressions de la
210 vent, pleines d’allusions sinistres à la bombe H qui , paraît-il, ne permet plus de peindre un beau paysage ni les yeux à l
211 lumineuses, des figures désirables, des paysages qui se composent, des visages qui nous regardent — apparences ou mirages
212 ables, des paysages qui se composent, des visages qui nous regardent — apparences ou mirages aux yeux de la science, appari
213 de pinceau ! — l’envie de participer à ce travail qui est, chez l’artiste sensible au spirituel, la vraie part du sacré aut
214 André Malraux, car s’il n’est pas un art au monde qui ne soit issu du sacré, il n’en est pas non plus qui ne tire du sacré
215 i ne soit issu du sacré, il n’en est pas non plus qui ne tire du sacré sa raison d’être indiscutable, j’entends bien : de n
216 n respect du sens premier, du référentiel absolu, qui est le sacré dans son action indéfiniment créatrice, que ne le sont l
217 enise, le futur Jean XXIII, pape de l’œcuménisme, qui est la forme sublime du fédéralisme, de l’unité dans la diversité, ho
218 tera jamais assez : ce dont l’Église a besoin, ce qui a été consacré en l’an 787 par le IIe concile œcuménique de Nicée, c’
219 es apparences de ce monde — cette transfiguration qui se trouve être le nom théologique, le sujet même du chef-d’œuvre à ce
7 1974, Articles divers (1974-1977). Recherche pour un modèle de société européenne (février 1974)
220 r en modèle exemplaire. Une troisième possibilité qui serait en somme : la réponse particulière des Européens au défi de la
221 . Il s’agissait de survivre, donc de continuer ce qui avait réussi aux plus forts, aux plus féconds, aux plus habiles de se
222 uccès même de l’effort civilisateur de l’Occident qui nous force à choisir notre avenir, et par là nous met en demeure de f
223 insiste : ce succès même se traduit par une crise qui remet ou met tout en question. ⁂ Choisir librement son avenir veut di
224 nées. Gouverner c’est prévoir, dit l’adage. Mais qui prévoit ? Vous lisez tous les jours dans la presse les déclarations l
225 l’avenir prochain, à l’an 2000, au xxie siècle. Qui croire ? Des futurologues distingués vous assurent que les réserves e
226 ainsi nos esprits de la seule question sérieuse, qui est la suivante : étant donné l’impossibilité manifeste d’accroître i
227 istes, c’est-à-dire des futurologues indépendants qui s’efforcent de prendre en compte les dangers écologiques et les risqu
228 pour établir son coût réel, tantôt de promoteurs qui n’invoquent que les besoins supposés et les profits escomptés, et pen
229 aîne, des catastrophes en système, ou en boucles, qui doivent presque nécessairement résulter non pas des échecs de notre m
230 , mais au contraire de ses succès. Et c’est là ce qui doit nous retenir. Je ne vais pas résumer ici le fameux rapport du cl
231 l’explosion démographique, dans les années 1960, qui nous a tout d’abord alertés. La publication par les Nations unies de
232 moins peur que celles dont ils ne parlent pas, et qui sont liées inexorablement aux succès de la croissance des villes, des
233 ent devenir vraies. Question de calcul. (La pomme qui tombe : si rien ne la retient, vous pouvez calculer au millième de se
234 irs, et pour tout dire les mieux payés, sont ceux qui nous annoncent encore l’âge d’or pour le siècle qui vient, tel le Hud
235 i nous annoncent encore l’âge d’or pour le siècle qui vient, tel le Hudson Institute d’Herman Kahn par exemple, qui n’hésit
236 el le Hudson Institute d’Herman Kahn par exemple, qui n’hésite pas à nous promettre un revenu de 20 000 dollars par tête po
237 plus probable au cours des vingt à trente années qui viennent. Il s’agit donc de supputer les inventions techniques qui se
238 s’agit donc de supputer les inventions techniques qui seront faites dans ce temps, et les conséquences politiques qu’elles
239 de se référer à des finalités humaines ou divines qui pourraient seules permettre de récuser les prétendus « impératifs tec
240 responsabilités. Si utiles que puissent être ceux qui calculent nos risques et définissent les contraintes que nous devons
241 d’écrire cette épopée, ou cette histoire de fous, qui aurait pour titre : L’Autodestruction d’une civilisation. Je ne puis
242 rvit. Ivan Illich a calculé que l’Américain moyen qui roule ses 10 000 km par an, doit consacrer pour payer sa voiture, son
243 tre ou cinq émirs et dictateurs du Proche-Orient, qui ne savent où les investir, et qui pourraient, selon les déclarations
244 Proche-Orient, qui ne savent où les investir, et qui pourraient, selon les déclarations récentes du petit-fils de Henry Fo
245 e et l’économie tout entière suspendues à l’auto, qui est elle-même suspendue aux ressources de pétrole, qui dépendent de l
246 st elle-même suspendue aux ressources de pétrole, qui dépendent de la politique des Arabes, laquelle est déterminée par l’e
247 laquelle est déterminée par l’existence d’Israël, qui a été rendue possible et nécessaire par les camps de la mort et de la
248 on déroulement — ou alors un homme très sensible, qui au premier contact avec la première auto, eût refusé d’instinct ce br
249 ent « inattendues », aberrantes, erronées, — mais qui hélas ont fait notre histoire ! Herman Kahn vient d’avouer qu’à ses y
250 onalisme de bêtes à cornes », et l’antisémitisme, qui se manifestent déjà en Allemagne, et dont il annonce le sinistre avèn
251 ’ailleurs le succès des grands dictateurs, succès qui leur paraît inévitable — pour un temps —, du seul fait que les dictat
252 ament qu’ils apportent une réponse au grand appel qui monte de leur peuple vers une communauté nouvelle. Cette réponse est
253 gestion de notre terre et de ses ressources. Mais qui était le Gérant responsable ? La réponse est dangereusement simple. L
254 toute la terre, au xxe siècle. Ce sont eux seuls qui ont prétendu gérer la terre. Qui s’en sont octroyé le droit souverain
255 e sont eux seuls qui ont prétendu gérer la terre. Qui s’en sont octroyé le droit souverain. Eux seuls qui en avaient les mo
256 i s’en sont octroyé le droit souverain. Eux seuls qui en avaient les moyens. Et vous voyez ce qu’ils en ont fait. Ils ont g
257 que je voudrais appeler Prestige National Brutal) qui ramène tout à l’État-nation et rien à l’homme, — chef-d’œuvre inégalé
258 inégalé de bêtise codée. Au principe de la crise qui résulte de cette mauvaise gestion de la terre, nous tenons donc un re
259 oyons dans quelle direction il faut aller : celle qui nous permettra de refaire une communauté, des communautés, au-delà de
260 haos ? Une anarchie ? C’est ce que me disent ceux qui se croient « réalistes ». Et même certains autres, comme Malraux, leq
261 nd on le veut, et de poser ou de casser les lois. Qui a encore ce droit ? La guerre de Suez en 1956 a permis d’en mesurer l
262 , à définir, ne seront pas des mini-États-nations qui reproduiraient en pire les prétentions absurdes des grandes : souvera
263 urope créatrice a toujours cultivé la complexité, qui rend justice aux caractères spécifiques de nos peuples et, plus encor
8 1974, Articles divers (1974-1977). L’Europe des régions (juin-juillet 1974)
264 aire une montée puissante de l’idée de région. Ce qui est en crise c’est l’État-nation napoléonien qui s’oppose aux régions
265 qui est en crise c’est l’État-nation napoléonien qui s’oppose aux régions et propose contre elles sa « régionalisation » a
266 s il y a toutes les régions « transfrontalières » qui se situent pour la plupart sur l’axe rhénan, ou rhodanien. Ça commenc
267 ommuns, les mêmes des deux côtés de la frontière, qui ne peuvent être résolus d’un seul côté. Le Marché commun en 1960-1961
268 vous avez par exemple les Basques et les Catalans qui sont, eux, à la fois dans des régions ethniques et transfrontalières.
269 -il un lien naturel entre la Provence et les gens qui habitent du côté du Centre ? On dit absolument n’importe quoi pour le
270 rmule de l’État-nation, à souveraineté illimitée, qui s’opposerait toujours à la création d’une Europe unie. D’autre part,
271 les, ou créées par l’économie et par des réalités qui ne tiennent pas compte des frontières. À mesure que les frontières se
272 fet deux types de régions : les régions ethniques qui sont les plus visibles, et les plus brillantes, et à mon sens peut-êt
273 ens peut-être les moins sérieuses, et les régions qui sont définies par un certain nombre de facteurs à la fois ethniques,
274 ne peut pas bâtir des régions sur un seul facteur qui serait la langue par exemple : les Bretons réclament une région Breta
275 dans une partie du pays, le reste c’est le gallo qui va jusqu’à Rennes et jusqu’à Nantes, villes qui sont indispensables,
276 o qui va jusqu’à Rennes et jusqu’à Nantes, villes qui sont indispensables, du point de vue économique, à la vie de cette ré
277 ombe dans toutes les équivoques de l’État-nation, qui consiste (pour le dire en termes rapides) à vouloir imposer une même
278 vouloir imposer une même frontière à des réalités qui n’ont rien à voir ensemble, comme la langue, l’économie, ce qu’il y a
279 loppements récents de la technique, toutes choses qui n’ont aucune probabilité de coïncider dans l’espace. Ça c’est la form
280 ogènes, hétéroclites. J’ai très peur que des gens qui voudraient ressusciter les anciennes provinces essaient de les faire
281 ns ce « lit de Procuste » d’une frontière commune qui serait un mini-État-nation. Ce qu’il nous faut éviter à tout prix. Je
282 avenir ; que la plupart des régions intéressantes qui sont en train de prendre forme en Europe sont transnationales, donc p
283 ières. Il y a là toute une problématique nouvelle qui est loin d’être passéiste, qui est progressiste, futuriste. Une remar
284 lématique nouvelle qui est loin d’être passéiste, qui est progressiste, futuriste. Une remarque sur laquelle je voudrais in
285 s a appelées « des cicatrices de l’histoire », ce qui était assez joli. Le professeur Ancel, de la Sorbonne, dit : « ce son
286 artie réalisé pour le quart de l’Europe, à l’est, qui est satellisé par les Russes, et c’est réalisé en bonne partie par l’
287 ne partie par l’économie de nos États de l’Ouest, qui est envahie par les Américains qui rachètent des dizaines d’entrepris
288 ts de l’Ouest, qui est envahie par les Américains qui rachètent des dizaines d’entreprises tous les jours. Les chiffres son
289 rs que jamais : c’est la formule de l’État-nation qui prétend à une souveraineté absolue, quoique perdue depuis longtemps e
290 sur le mythe de la souveraineté nationale, mythe qui a explosé lors de la guerre de Suez par exemple. Vous savez que la dé
291 pas de temps et d’énergie à renverser des choses qui n’existent plus, qui sont des symboles, des mythes d’un passé révolu
292 ergie à renverser des choses qui n’existent plus, qui sont des symboles, des mythes d’un passé révolu et que nous commencio
293 timent des jeunes, de même que ce sont les jeunes qui sont responsables de la montée de l’idée de région. L’ambiguïté du
294 t pas dans votre esprit, mais dans celui des gens qui l’ont mise en circulation, l’erreur fondamentale de ce que l’on appel
295 lle a d’une région. Des possibilités de solutions qui pourraient être données sur une base autonome, autogérée, et à partir
296 ue ça veut dire ? Quand je pousse un peu les gens qui défendent ce point de vue, ils finissent par me dire « il faut qu’une
297 uel Land ? » Par exemple avec le Land de Bavière, qui a 12 millions d’habitants et 71 000 km2, la Rhénanie-Westphalie qui a
298 d’habitants et 71 000 km2, la Rhénanie-Westphalie qui a 19 millions d’habitants, ou avec le Land de Hamburg qui n’a guère p
299 millions d’habitants, ou avec le Land de Hamburg qui n’a guère plus d’un et demi-million d’habitants et 740 km2 ? Mais en
300 0 km2 ? Mais en France, comment, en partant de ce qui existe, pouvons-nous créer et animer des régions ? Je pense qu’il fau
301 a réalité, et non une finalité. Ce n’est pas cela qui meut les gens, qui les motive : faire une chose petite ! Ce qui les m
302 ne finalité. Ce n’est pas cela qui meut les gens, qui les motive : faire une chose petite ! Ce qui les motive, c’est deux c
303 ens, qui les motive : faire une chose petite ! Ce qui les motive, c’est deux choses : la prospérité, et pas seulement quant
304 chniques, économiques, avec ordinateur à l’appui, qui interdit l’idée de faire de l’avenir notre affaire. Alors, cela c’est
305 rtes de troubles mentaux, et à un grand désespoir qui pousse les jeunes gens à se jeter dans les minorités vociférantes au
306 le signe, ou dans cette « majorité silencieuse », qui est une sorte d’imbécilité civique, de désertion. Discours ou indiffé
307 é civique, de désertion. Discours ou indifférence qui sont aussi morbides l’un que l’autre. Contre cela il faut recréer des
308 u évident que l’État est plus fort que les hommes qui croient s’en emparer. Il les digère, il les phagocyte, quelle que soi
309 s aborder maintenant une autre « internationale » qui semble remettre en cause les États-nations, celle des sociétés multin
310 ’industrie et du commerce conduise à des sociétés qui ne tiennent plus compte des frontières. Dès qu’on prononce ce terme d
311 on provoque aujourd’hui des jugements stéréotypés qui ne vont pas du tout dans la réalité de la chose : « société multinati
312 érents de sociétés multinationales. Il y a celles qui sont axées sur la puissance, qui réunissent le plus grand nombre poss
313 s. Il y a celles qui sont axées sur la puissance, qui réunissent le plus grand nombre possible de productions différentes,
314 nd nombre possible de productions différentes, et qui envahissent certains pays ou tout un continent. Ayant pour but le pro
315 traire à leurs intérêts, [elles] le renversent ce qui revient au même. Disons qu’il n’y a pas seulement des sociétés améric
316 beaucoup de sociétés multinationales européennes qui jouent ce rôle-là, par exemple : les pétroliers, et ça embarrasse bea
317 sse beaucoup de gens. Mais il existe des sociétés qui ont un tout autre mode de développement, qui s’adaptent au pays dans
318 étés qui ont un tout autre mode de développement, qui s’adaptent au pays dans lequel elles s’installent et qui sont obligée
319 daptent au pays dans lequel elles s’installent et qui sont obligées par la nature même de leurs activités économiques de s’
320 à caractère de développement ? Une multinationale qui travaille par exemple dans le lait, l’alimentation et les produits an
321 rai colonisateur, il s’agit de trouver un pouvoir qui pourrait les freiner, les forcer à s’intégrer ou à respecter des comm
322 t deux : le premier serait un pouvoir continental qui serait bien supérieur à celui des États-nations, et l’autre serait le
323 consultées et pourraient dire : « voilà une chose qui ne cadre absolument pas avec nos coutumes, qui est destructrice de l’
324 se qui ne cadre absolument pas avec nos coutumes, qui est destructrice de l’environnement, qui est trop grande pour nous, q
325 outumes, qui est destructrice de l’environnement, qui est trop grande pour nous, qui n’est pas adaptée à nos traditions, ou
326 e l’environnement, qui est trop grande pour nous, qui n’est pas adaptée à nos traditions, ou qui démoralise et dégrade notr
327 nous, qui n’est pas adaptée à nos traditions, ou qui démoralise et dégrade notre population, par exemple en l’appâtant par
328 ppâtant par des salaires trop forts pour des gens qui ne sont pas doués pour le genre de travail offert ». À travailler en
329 r des régions, on pointe vers une même résultante qui est l’autogestion. L’autogestion à tous les degrés et dans tous les s
330 Notez cependant que le danger des multinationales qui fascine actuellement l’attention de la presse, des partis, de l’opini
331 ionales, en France ou en Allemagne, ou en Italie, qui se conduisent vis-à-vis de telle ou telle région exactement de la mêm
332 ltinationales vis-à-vis de telle ou telle nation, qui sont en train de détruire sans scrupules les équilibres écologiques o
333 us avez des phénomènes de colonisation intérieure qui sont exactement comparables à ceux que l’on reproche aux multinationa
334 ons dans lesquelles elles viennent s’implanter et qui n’y cherchent que leur profit. Ce que je dis là ne vise pas à exonére
335 r la méfiance à l’égard des trop grandes sociétés qui ne rencontrent jamais le barrage d’un pouvoir régional quelconque, d’
336 te pas tellement sur le mot « pouvoir régional », qui évoquerait trop une délégation du pouvoir central dans une région, ma
337 faite allusion au célèbre rapport du club de Rome qui m’a fait très forte impression quand j’en ai eu connaissance, sous la
338 apport confidentiel adressé au Congrès américain, qui donnait l’essentiel de ce qui est devenu plus tard le rapport sur le
339 Congrès américain, qui donnait l’essentiel de ce qui est devenu plus tard le rapport sur le club de Rome signé par les Mea
340 savoir qu’il y a deux sens au mot « croissance », qui sont absolument différents — je dirais presque antinomiques — en tous
341 as de question : petit enfant deviendra grand, ce qui commence par un germe invisible s’épanouira un jour en arbre, en élép
342 vant est autoréglée : c’est la même loi de la vie qui fait qu’une plante ou un corps animal grandit, s’épanouit, se stabili
343 s croissances également régulées par un programme qui est dans les chaînes de chromosomes et dans les gènes. La croissance
344 e. Rien de pareil dans la croissance industrielle qui augmente indéfiniment, mécaniquement, tant qu’elle ne bute pas sur un
345 n obstacle extérieur ; elle n’a rien en elle-même qui la règle. Elle peut conduire à toutes les monstruosités, à toutes les
346 aussi brutal, aussi justement pensé et conçu, et qui ait eu un impact comparable sur une société humaine. J’ai eu de vives
347 jamais fait le calcul à quoi mène une croissance qui double tous les sept ans ? Savez-vous par combien il faut la multipli
348 x-huit ans ? Il faut la multiplier par 16 384, ce qui est dément : on ne peut transformer toute la substance de la terre en
349 out de suite. Il me paraît essentiel pour tout ce qui touche les régions, de nous rendre compte que la croissance industrie
350 par tête d’habitant n’est pas une mesure humaine qui puisse diriger une politique, il faut absolument abandonner ça, et no
351 onal. Ça évite les monopoles des États, monopoles qui visent uniquement la puissance, non pas le bien des gens ni le bien d
352 si l’on veut passer à une croissance autoréglée — qui est la croissance normale, biologique — c’est par le moyen des petite
353 l’argent. Je le vois chez beaucoup de jeunes gens qui me disent : « moi, je ne veux pas gagner de l’argent je veux faire qu
354 as gagner de l’argent je veux faire quelque chose qui m’intéresse ». Peut-on donner le pas au désir de participation sur le
355 des faubourgs, des banlieues. Des agglomérations qui n’ont plus de centre, qui n’ont plus de rues où les gens puissent se
356 ues. Des agglomérations qui n’ont plus de centre, qui n’ont plus de rues où les gens puissent se rencontrer, depuis que les
357 . On arrive à cette grande angoisse communautaire qui est absolument inconsciente chez l’homme, chez la grande majorité des
358 l’homme, chez la grande majorité des hommes, mais qui fait qu’aussitôt que quelqu’un prétend leur apporter une réponse, ils
359 te quoi, des associations, des paroisses, tout ce qui peut rassembler des hommes autour d’une idée et d’une chose qui ait u
360 mbler des hommes autour d’une idée et d’une chose qui ait une valeur affective, une valeur concrète et quotidienne. C’est c
361 e, une valeur concrète et quotidienne. C’est cela qui est important, partir d’en bas… Mais les gens ont changé, ont quitté
362 quitté leur région, quitté leur ville… En Suisse, qui donne toujours l’idée d’une grande stabilité, vue de l’extérieur, en
363 ur, en Suisse il n’y a plus qu’un homme sur trois qui habite dans sa commune d’origine. Presque tous sont déplacés. Prenez
364 st entièrement nouvelle, et les Suisses allemands qui viennent à Genève, qui votaient à 80 % chez eux dans certains cantons
365 , et les Suisses allemands qui viennent à Genève, qui votaient à 80 % chez eux dans certains cantons, au bout d’une générat
366 nante urbaine, caractérisée par l’« atomisation » qui conduit toujours à la tyrannie. Car c’est avec la poussière des indiv
367 bitants, une partie émigrerait (10 000 personnes, qui allaient faire une colonie ailleurs, laquelle colonie bien sûr rester
368 a polis n’a jamais dépassé 100 000 habitants — ce qui était considéré comme la limite extrême pour que les gens restent enc
369 s énormes villes. Il y a une ville aux États-Unis qui va de Boston à Washington. On ne peut pas la détruire, personne n’aur
370 ertaines destructions. On peut recréer des places qui ne soient pas des parkings, on peut interdire les rues aux voitures,
371 des villes en étoile avec de très larges avenues qui servent au défilé des troupes, elles peuvent aussi être balayées par
372 quer des petits soldats, des sujets bien alignés, qui n’ont plus aucune espèce de résistance, qui ne se sentent plus respon
373 gnés, qui n’ont plus aucune espèce de résistance, qui ne se sentent plus responsables de rien dans la cité. Ce qui se fait
374 entent plus responsables de rien dans la cité. Ce qui se fait est fait par les autres (« Ils », l’État). On les subit. Tout
375 d’identité, un producteur-consommateur docile, et qui n’existe pour l’État que sous la forme d’un dossier électronique. Que
376 out à fait aux besoins de l’économie industrielle qui , par une intégration très poussée et une concentration de moyens et d
377 On peut presque dire que c’est la loi économique qui a fait que ces villes se sont agrandies démesurément et que notre éco
378 se pourrait bien que l’on arrive à des désastres, qui sont calculables d’ores et déjà. « L’avenir est notre affaire »
379 t global, général : responsabilités. C’est le mot qui est antinomique d’« irresponsabilité » générale de l’homme perdu dans
380 si l’on est de gauche ou de droite. La politique qui doit être à la base de la région, doit être la politique d’autogestio
381 tre la politique d’autogestion de la commune — ce qui n’existe pas non plus (pas de ressources financières propres, etc.).
382 re des entreprises. Il y a beaucoup d’expériences qui ont été faites, allant plus ou moins de la cogestion à l’autogestion,
383 ion des tâches et de la dimension des communautés qui sont amenées à prendre des décisions. C’est cela le fédéralisme : que
384 au, ce qu’il est capable de faire et que, pour ce qui dépasse son niveau, il s’unisse à d’autres. Qu’il ne se fédère que po
385 puissance telle que l’État-nation, une puissance qui sert à faire n’importe quoi, surtout la guerre. Qu’il se fédère pour
386 é. Voilà au fond ce que j’appelle fédéralisme, et qui résume toute ma doctrine : situer l’homme au centre de la société.
9 1974, Articles divers (1974-1977). Surréalisme : un jeu qui dure depuis 50 ans (7-8 septembre 1974)
387 Surréalisme : un jeu qui dure depuis 50 ans (7-8 septembre 1974)i j En août 1940, Denis de
388 partie de ce groupe, ni partagé son idéologie, ce qui m’a évité d’être excommunié tôt ou tard. C’était entre nous, à New Yo
389 rimentation du psychisme, de la surréalité, de ce qui dépasse le monde de la conscience rationnelle. Quelles sortes de jeux
390 eu dans ma maison de Ferney. Un soir, la personne qui jouait avec moi avait écrit : « Qu’arriverait-il si le diable entrait
391 crit à New York. Il se demandait comment un homme qui croit en Dieu pouvait avoir des relations avec la magie. Car c’est un
392 des femmes présentes. Chaque fois, j’ai deviné à qui était l’objet. Breton était comme « transfixé » par ce genre de chose
393 genre de choses. Vous vous souveniez des femmes à qui appartenaient ces objets ? Absolument pas. On me plaçait quelque chos
394 Y avait-il d’autres jeux ? Oui, par exemple celui qui consiste à qualifier chacune des personnes présentes, sans réfléchir,
395 e sacré, il y a toute une littérature là-dessus — qui avait joué un certain rôle dans ma vie. Nous avions lancé 21 invitati
396 publier un article sur l’ethnographe Malinowski, qui critiquait Freud. Fureur jupitérienne de Breton, qui expulsa le perso
397 critiquait Freud. Fureur jupitérienne de Breton, qui expulsa le personnage sur l’heure : « Sortez ! tonna-t-il. Et je me r
398 lui. Il a passé toute sa vie à une religion [sic] qui n’aurait pas été le christianisme et dont il aurait été un des grands
399 mont Denis de, « [Entretien] Surréalisme : un jeu qui dure depuis cinquante ans », 24 Heures, Lausanne, 7–8 septembre 1974,
400 publication du Manifeste d’André Breton, en 1924, qui proclamait : “la toute-puissance du rêve, le jeu désintéressé de la p
401 amp et leurs amis. D’une conversation enregistrée qui s’est poursuivie une soirée entière, nous avons extrait les passages
402 e soirée entière, nous avons extrait les passages qui se rapportent à l’une des activités du groupe : le jeu. Concernant ce
10 1975, Articles divers (1974-1977). Notre complexe de culpabilité (1975)
403 ulpabilité (1975)p Au premier rang des peuples qui se disent heureux, selon les sondages d’opinion, les Suisses n’en son
404 fs spécifiques de ce comportement paradoxal (mais qui est en somme celui des riches et de l’Occident en général), il m’a se
405 re sport national, et je ne vois pas d’autre pays qui puisse nous battre sur ce terrain-là. (C’est le seul record qui nous
406 s battre sur ce terrain-là. (C’est le seul record qui nous reste, d’ailleurs.) Il paraîtrait que les Suisses ne cessent de
407 u cette fameuse phrase que dans la bouche de ceux qui la raillaient, et je ne l’ai jamais lue que sous la plume de Suisses
408 e ne l’ai jamais lue que sous la plume de Suisses qui affirmaient que les autres suisses pensent ainsi et qu’ils ont tort.
409 é nationale ou à la simple et naïve complaisance, qui frappe l’observateur de ce pays. Quand un homme d’État français dit d
410 une œuvre, d’un produit, d’une doctrine : « Voilà qui est bien français ! » on entend : Voilà qui est excellent, typique du
411 Voilà qui est bien français ! » on entend : Voilà qui est excellent, typique du premier pays du monde, et bien digne d’être
412 ntellectuel français approuve en principe tout ce qui est français, sauf le régime au pouvoir (quel qu’il soit). L’intellec
413 er dans un épais matérialisme, et dans un égoïsme qui dément leurs grands idéaux officiels ? Cette réaction fondamentale —
414 er avec un sentiment diffus, presque inconscient, qui tourmente la Suisse du xxe siècle : une sorte de complexe de culpabi
415 utres ! », déclaraient fièrement nos publicistes, qui surcompensaient le reproche qu’ils devinaient chez le voisin français
416 nt le malade, du riche devant le pauvre, de celui qui échappe à l’Histoire devant celui qui la subit. Pendant l’entre-deux-
417 e, de celui qui échappe à l’Histoire devant celui qui la subit. Pendant l’entre-deux-guerres, en 1936, Karl Barth interrogé
418 sont, par nature, des pharisiens de la politique, qui remercient Dieu de ce qu’ils ne sont pas comme les autres. Le Suisse
419 isse vit de compromis. Le Suisse est un bourgeois qui place au premier rang de ses préoccupations son repos et sa sécurité.
420 s la conscience nationale que le jugement de Dieu qui pèse sur le monde nous devient clair. Ceci ne nous dispense nullement
421 a neutralité ne pourrait être péché que chez ceux qui s’en font une vertu, mais pas en soi. Elle est une mesure politique —
422 e (ou contenu) que sur les mérites moraux de ceux qui ont à le résoudre, ou qui l’auraient déjà tranché à leur manière. Que
423 mérites moraux de ceux qui ont à le résoudre, ou qui l’auraient déjà tranché à leur manière. Que la critique de l’utilitar
424 nce. « Quels problèmes ? », me demande l’Européen qui venait admirer notre libre Helvétie et qui est un peu déconcerté… Eh
425 ropéen qui venait admirer notre libre Helvétie et qui est un peu déconcerté… Eh bien, lisez nos quotidiens : on y parle à l
426 ysages, de la laideur des petites maisons neuves, qui poussent partout sans le moindre plan, ou de beaucoup de grands ensem
427 , ou de beaucoup de grands ensembles à bon marché qui détruisent le plaisir de vivre, de l’insuffisante éducation de base e
428 ce qu’il y aura une place pour nous dans le monde qui vient ? Satiriques, vengeurs ou navrés, les sermons que j’ai cités ne
429 l faudrait leur montrer des horizons plus vastes, qui soient les leurs. Mieux vaudrait donc, me semble-t-il, proposer que l
430 ce de l’avenir qu’elle représente pour une Europe qui n’en sait rien encore ! Je ne conçois pas d’autre remède à ses névros
431 sa pire tentation et vraiment son péché virtuel — qui est la peur d’assumer sa vocation. 16. Karl Barth : Gottes Gnadenwa
11 1975, Articles divers (1974-1977). Au-delà de la société industrielle (1975)
432 premier mouvement a été de recul devant un sujet qui me paraissait appeler la compétence de l’économiste que je ne suis pa
433 dustrielle, que veut-on dire ? Je vois d’abord ce qui est exclu : une société dans laquelle il n’y aurait plus d’industrie,
434 été dans laquelle il n’y aurait plus d’industrie, qui arrêterait les machines et cesserait toute recherche technologique, p
435 velle hiérarchie des valeurs, par rapport à celle qui a caractérisé la société industrielle née en Europe au xixe siècle,
436 té industrielle née en Europe au xixe siècle, et qui s’est épanouie au xxe jusqu’à Los Angeles et Vladivostok, jusqu’à To
437 e société post-industrielle sera donc une société qui adopte et promeut des valeurs tout à fait différentes de celles qu’im
438 lités, nos attitudes et nos manières d’évaluer ce qui compte le plus dans la vie. II La société industrielle reposait
439 reposait sur un certain nombre de « principes », qui allaient de soi, n’étaient pas discutés ni discutables, mais que la c
440 , sans autre mesure que numérique, une croissance qui n’avait donc rien de commun, sauf le nom, avec la croissance vivante
441 , des animaux et de l’individu humain, croissance qui , elle, comporte son programme génétique, ses propres lois d’épanouiss
442 torégulation, l’accroissement indéfini de tout ce qui peut être mesuré, pesé et compté, et de cela seul. Ce que nous pouvon
443 on et de dire que, dorénavant, c’est l’automobile qui doit s’adapter à Paris — c’est-à-dire l’industrie à l’homme. Le passa
444 ncore beaucoup trop de la mentalité industrielle, qui oppose radicalement travail et absence de travail, sans analyser ni l
445 ntraintes de la matière et la liberté de l’esprit qui la façonne, dans le temps plein, la plénitude manifestée des facultés
446 comme une peste, écrit-il, à cause de son vacarme qui effrayait les chevaux. » Elle restera longtemps unique. Certes, plusi
447 ique allemand, écrit en 1880 : « Automobile : nom qui a quelquefois été donné à de curieux véhicules mus par un moteur à ex
448 anisme naïf et le soutien de la morale utilitaire qui règne sans problème sur les États-Unis depuis l’époque de Benjamin Fr
449 rude, il cache une stupéfiante insensibilité. Ce qui ne l’empêche pas du tout de désirer très sincèrement faire du bien à
450 n midi, le ciel de nos grandes villes. Mais voici qui est encore plus fou : elle jette l’économie de nos démocraties occide
451 de droit divin, avec des conséquences poli­tiques qui relèvent du carambolage non calculé et peuvent à tout instant devenir
452 ris, permet de faire du quatre ou cinq à l’heure, qui est la vitesse d’un piéton peu pressé, et par l’embouteillage crée l’
453 on. » L’aventure de l’Auto est bouclée. Le besoin qui n’existait pas est devenu prioritaire. L’Américain moyen — et nous do
454 s’en tenir au mode de vie instauré par l’Auto, et qui favorise les ventes. V Vous me pardonnerez, je l’espère, de m’ê
455 donc maintenant d’inverser la plupart des valeurs qui ont assuré le succès d’Henry Ford. Partant de l’idée que les solution
456 e l’empire des besoins, parce que c’est le besoin qui soumet l’homme aux forces matérielles, aux « impératifs techniques »,
457 es Américains. Il nous faut un nouveau marketing, qui analyse les besoins réels, et non les possibilités de vendre plus. L’
458 cher, lançait il y a deux ou trois ans, un slogan qui est en train de faire fortune : Small is beautiful. Non que la petite
459 bombe H, ne faut-il pas réduire la taille de ceux qui seraient tentés de s’en servir ? Si la guerre est le pire désastre qu
460 e s’en servir ? Si la guerre est le pire désastre qui menace aujourd’hui le genre humain, n’est-il pas urgent et vital de s
461 J’aurais dû vous parler de la technologie douce, qui , dans la nouvelle société, doit remplacer nos techniques dures et pol
12 1975, Articles divers (1974-1977). Suisse 1975 (1975)
462 plus à refuser de prendre parti dans les guerres qui opposent nos voisins. Au-delà de cette fonction traditionnelle défini
463 tembre 1946, le philosophe allemand Karl Jaspers ( qui enseigne alors à l’Université de Bâle) exprime avec force ce point de
464 té d’une idée ne dépend pas de la taille de celui qui la formule, et que les « petits pays » — voyez les statistiques — ont
465 ns de la Seconde Guerre mondiale. Mais l’illusion qui permettait de parler encore de « grandes puissances » à propos de nos
466 especter au plus près les diversités foisonnantes qui font la richesse du pays. Mais dans un temps de crise comme celui qui
467 du pays. Mais dans un temps de crise comme celui qui s’est instauré dès l’automne de 1973, la neutralité, qui était une fo
468 st instauré dès l’automne de 1973, la neutralité, qui était une forme de sagesse apaisante, devient une source de controver
469 le fédéralisme de formule suisse est la solution qui s’impose si l’on veut vraiment « faire l’Europe », c’est-à-dire non p
470 lisme n’est guère mieux compris par les Suisses — qui s’en réclament — que par les autres peuples de l’Europe — qui ne voie
471 lament — que par les autres peuples de l’Europe — qui ne voient pas bien ce qu’ils pourraient en faire. Dans la partie roma
472 le sens et la fonction du vrai fédéralisme, celui qui a fait la Suisse à partir des communes médiévales, forestières, agric
473 selon la taille des groupes sociaux et politiques qui peuvent s’en charger, d’autre part. À la commune, les chemins vicinau
474 pouvait encore la définir. Les problèmes concrets qui se posent à la Suisse actuelle dans les domaines les plus divers, tel
475 nt, obligent à penser que la formule de bon sens, qui est celle du fédéralisme helvétique, ne saurait arrêter ses effets au
476 serait seule capable de faire face aux problèmes qui se posent à l’échelle mondiale — énergie, pollution, famine, paix. C’
13 1975, Articles divers (1974-1977). Le Morgarten du xxe siècle (1975)
477 à la différence, précisément, du Conseil fédéral, qui est composé de manière à pouvoir traiter dans l’intérêt commun les pr
478 uvoir traiter dans l’intérêt commun les problèmes qui se posent au niveau de la Confédération. La difficulté, avec le fédér
479 urs à son sujet. C’est l’École, une fois de plus, qui a répandu ces erreurs. On nous a fait apprendre qu’à l’origine, la Su
480 ur autonomie et leur différence. L’une des choses qui sont le plus clairement soulignées, dans le pacte du Grütli, c’est la
481 sse a changé, sous l’influence des États voisins, qui étaient tous en train de s’unifier. Certains achevaient leur unité et
482 partiellement subi le courant régnant en Europe, qui était celui de la centralisation et de la création des grands États-n
483 , la Suisse a toujours été à contre-courant de ce qui se passait dans le reste de l’Europe. Elle est née de l’esprit des co
484 ropéens, et la Suisse se trouve être le seul pays qui ait traversé à peu près indemne la période des grands États-nations.
485 e suis frappé de constater que la plupart de ceux qui se disent fédéralistes sont en réalité des nationalistes cantonaux. S
486 autonomie à la base, cette autonomie des communes qui devient, à l’échelle européenne, l’autonomie des régions, dans les pa
487 t non du xixe . Il me semble qu’aujourd’hui, ceux qui défendent l’autogestion régionale et communale sont ceux qui se situe
488 nt l’autogestion régionale et communale sont ceux qui se situent le mieux dans le droit-fil de la pratique du fédéralisme.
489 s trois communes primitives et celle des communes qui essaient aujourd’hui de se défendre contre l’implantation de centrale
490 . Il y a en projet seize centrales nucléaires. Ce qui est de la démence pure. Aux yeux de n’importe quel savant sérieux et
491 ’est soutenu, d’ailleurs, que par les trois États qui se partagent la région de Bâle, c’est-à-dire la France, la Suisse et
492 les Suisses de Kaiseraugst retrouvent le réflexe qui fut celui des Uranais, des Nidwaldiens et des Schwyzois : se mettre e
493 dre à la grande majorité des hommes et des femmes qui s’étaient installés sur le camp. Ils tentaient d’exploiter une situat
494 iter une situation qu’ils n’avaient pas créée, et qui ne va pas exactement dans leur sens, car je ne vois pas comment des m
495 tout autres vues. Mais qu’importe ! L’essentiel, qui est une chose historique, c’est la réaction de défense des habitants
496 a région de Bâle. C’est le réflexe d’autogestion, qui se traduit par la volonté de se défendre sur place, fût-ce au prix d’
497 rs de la démocratie ». Je ne sais pas si les gens qui ont écrit des choses pareilles connaissent la légende de Guillaume Te
498 né à dire dans un message aux dix mille personnes qui sont allées manifester à Kaiseraugst, lors d’un fameux dimanche sous
499 au « niveau de vie » le plus bas, le niveau zéro, qui est la mort… Mais pour moi, une Suisse qui ferait ce choix-là ne sera
500 zéro, qui est la mort… Mais pour moi, une Suisse qui ferait ce choix-là ne serait plus elle-même. Elle deviendrait semblab
501 s suisses sont aptes à saisir l’ampleur du danger qui les menace. Et je ne suis pas optimiste sur les possibilités d’endoct
502 changer tout d’un coup, dans les quelques années qui viennent, et que par exemple ils renoncent aux centrales nucléaires.
503 un certain nombre de désastres et de catastrophes qui se préparent. Des tragédies. Les Suisses n’aiment pas du tout ce mot.
504 l n’y aurait plus qu’une espèce de raison moyenne qui dominerait, dans l’ennui total et fédéral. Cela ne va évidemment pas
505 avez de chances de survivre au tohu-bohu général qui est en train de se déchaîner sur la planète. C’est pour cette raison
506 nète. C’est pour cette raison que les États-Unis, qui sont de loin la plus grande puissance militaire du monde, n’ont pas p
507 tnam. Ils ne pouvaient pas venir à bout de choses qui renaissaient partout, de petits centres sur lesquels il ne valait pas
508 ement poussée, donc d’une vulnérabilité minimale, qui sera la meilleure sécurité dans le monde qui vient. Il faut donc que
509 ale, qui sera la meilleure sécurité dans le monde qui vient. Il faut donc que la Suisse retrouve ce qui était son attitude
510 qui vient. Il faut donc que la Suisse retrouve ce qui était son attitude et sa mentalité originelles, celles qui ont créé l
511 son attitude et sa mentalité originelles, celles qui ont créé les institutions de la première confédération. Elle n’y sera
14 1975, Articles divers (1974-1977). L’amour (1975)
512 et de la psychanalyse, une troisième psychologie qui , faute de rigueur, se dirait littéraire, mais bien de mettre en valeu
513 leurs termes de base dans la tradition littéraire qui est la nôtre, d’Œdipe à Sade et à Sacher-Masoch. Pour situer cette fo
514 rer les grandes étapes d’une évolution historique qui s’est stratifiée dans la psyché occidentale, et dont la connaissance
515 rme une perversion, le détournement d’un instinct qui était générique et génésique, au profit d’un plaisir individuel et st
516 ation nostalgique ou jubilante, comparée à un feu qui couve en secret et qui soudain éclate, flambe et « se déclare ». C’es
517 bilante, comparée à un feu qui couve en secret et qui soudain éclate, flambe et « se déclare ». C’est l’amour qui se prend
518 n éclate, flambe et « se déclare ». C’est l’amour qui se prend pour son objet, qui aime sa propre intensité et non pas l’Au
519 are ». C’est l’amour qui se prend pour son objet, qui aime sa propre intensité et non pas l’Autre. C’est l’auto-intoxicatio
520 s, nos chansons et nos opéras. C’est le sentiment qui s’exalte de tout ce qui s’oppose au désir, sépare les corps et fait o
521 péras. C’est le sentiment qui s’exalte de tout ce qui s’oppose au désir, sépare les corps et fait obstacle à l’accomplissem
522 te altérité. Mais l’obstacle suprême est la mort, qui provoque la passion transfigurante, la « joie suprême » d’Isolde agon
523 ue et d’une souffrance délicieusement entretenue, qui , à l’extrême, seront extase et mort. L’amour du prochain tel qu’il es
524 pas disert ni exalté mais réaliste, d’une manière qui ne prête guère à la littérature. Au dernier stade de « sublimation »,
525 Le vocabulaire de la Grèce antique est le seul qui exerce encore une influence permanente et vérifiable sur l’expression
526 simple use couramment d’expressions et de notions qui remontent à Platon (J. Ortega y Gasset). Illustrant cette remarque,
527 ns platoniciens inconscients, ou naïfs, tous ceux qui , de la cortezia des troubadours au romantisme allemand, puis à la poé
528 amants croient « ne plus faire qu’un », tous ceux qui qualifient l’être aimé de « ma moitié » (variante : « ma meilleure mo
529 variante : « ma meilleure moitié »), et tous ceux qui écrivent sur Éros. Si l’idée platonicienne de l’amour est résolument
530 yen Âge courtois et le roman de Tristan et Iseut, qui contient d’ailleurs tant de réminiscences de l’Antiquité : ce sont ce
531 mort » que la passion de « l’amour pour la mort » qui est, comme nous le verrons, le secret de Tristan. La révolution ch
532 , si profus dans les grandes religions de l’Asie, qui va créer le « problème sexuel » de l’Occident christianisé. Contre l’
533 D’autre part, il n’hésite pas à écrire : « Celui qui n’est pas marié s’inquiète du Seigneur, des moyens de plaire au Seign
534 gneur, des moyens de plaire au Seigneur, et celui qui est marié s’inquiète des choses du monde, des moyens de plaire à sa f
535 iers. Ce clerc fait à la femme une place capitale qui annonce déjà la conception de la « courtoisie », mais il s’agit d’une
536 e femme idéalisée, objet d’une adoration mystique qui se confond bientôt avec celle vouée à la Sainte Vierge. La « corte
537 amour est une invention du xiie siècle. » Amour, qui désigne pour nous le sentiment, le désir et la passion, n’a pris ce s
538 contraire le signe d’une révolution plus générale qui s’opérait à cette époque dans la psyché occidentale ? Dès la fin du x
539 oujours plus tragiques, et s’exaltant du tourment qui en résulte. Une forme toute nouvelle de poésie chantée naît dans le P
540 ivi par des dizaines puis des centaines de poètes qui se nomment « troubadours » (c’est-à-dire trouveurs, inventeurs, compo
541 amante —, l’assimilant ainsi au seigneur féodal à qui le chevalier doit allégeance ; elle oppose au mariage « de raison » c
542 d’avoir découvert, en somme, que c’est le langage qui permet de transformer la pulsion instinctuelle en sentiment, et l’exp
543 t des trouvères du xiie siècle, l’amour est cela qui se « déclare » par des mots. On peut soutenir que l’histoire de l’Éro
544 llégeance féodale, mariage, séparations physiques qui semblent souvent provoquées par les amants eux-mêmes), et l’obstacle
545 par les amants eux-mêmes), et l’obstacle suprême, qui est la mort, portera le désir jusqu’à l’extase ; service de la Dame à
546 ectique du vrai jour et de l’évidence quotidienne qui domine le roman est gnostique… Ainsi, le roman de Tristan décrit, ana
547 ur premier « aveu » sur le pont brûlant du bateau qui les ramène d’Irlande. Tristan, qui est le plus fort des chevaliers et
548 lant du bateau qui les ramène d’Irlande. Tristan, qui est le plus fort des chevaliers et qui a conquis Iseut par valeur et
549 . Tristan, qui est le plus fort des chevaliers et qui a conquis Iseut par valeur et prouesse, serait en droit de la garder
550 n — que naît l’amour-passion, l’amour subi, celui qui fera dire à l’ermite recevant la confession des deux amants : « Amor
551 tés puis surmontés, sauf le dernier… Et l’auteur, qui reste inconscient de la présence impérieuse du mythe, l’en traduira p
552 s Don Quichotte, et l’histoire du roman européen, qui semble celle d’une longue dégradation du mythe, peut être aussi celle
553 c’est encore et toujours l’image du Père — celui qui interdit la Mère au Fils. De même, Iseut peut devenir la Béatrice de
554 la radieuse Adrienne de Gérard de Nerval, l’« Éva qui donc es-tu… » des plus beaux vers de Vigny, objet d’un « amour tacitu
555 , la fée Viviane ou la Velléda des Martyrs, celle qui se prête aux fantasmes de l’homme. Le « héros » (comme on le dit enco
556 roman contemporain, il n’en reste pas moins celui qui affronte la mort d’amour, celui auquel son amour interdit « donne l’a
557 mettre une distance entre les amants. C’est cela qui permet à l’attrait naturel de s’exalter, de devenir une passion. Ce t
558 clusion que la passion est cette forme de l’amour qui se nourrit des obstacles qu’on lui oppose, ou qu’elle sait inventer a
559 de la légende, exilés dans la forêt de Morois, et qui , le philtre ayant cessé d’agir au bout de trois ans, découvrent l’exi
560 mps et ses coutumes, ou la littérature elle-même, qui ne serait qu’un sous-produit des mystiques créatrices de formes et de
561 n phénomène de décadence morale d’une société, et qui offre peu de résistance à la critique des générations qui vont suivre
562 e peu de résistance à la critique des générations qui vont suivre ? En fait, ce fut assez d’un décret de Boileau, dans son
563 t mutuel, et la chevalerie fait place à la vertu, qui conclut en faveur du monde, de sa morale. Cependant, le mythe garde s
564 les plus policées, « cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie » (Racine, préface de Bérénice).
565  le Grand Siècle », la passion imagine des formes qui vont l’avouer dans toute sa force, à la Cour même, par le théâtre. An
566 e est devenue la manière de « ressentir l’amour » qui paraît désormais naturelle en Europe. L’empire du mythe tristanien su
567 t à Hippolyte, Racine le fait amoureux d’Aricie «  qui est la fille et la sœur des ennemis mortels de son père ». Aricie ser
568 ’auteur : Les dieux m’en sont témoins, ces dieux qui dans mon flanc Ont allumé le feu fatal à tout mon sang. Et la serv
569 la critique rationaliste ou ridiculisés par ceux qui font la mode, telle cette grande dame des lettres, Madame du Deffand,
570 cette grande dame des lettres, Madame du Deffand, qui écrit : On trouve encore parmi les gens de condition inférieure de b
571 devenue : morale prêchée parfois par des évêques qui bâtissent des palais pour leur maîtresse, comme à Salzbourg, casuisti
572 pse du mythe. De Molière à Mozart, c’est Don Juan qui occupe la scène de sa présence insolente, bondissante, mais secrèteme
573 , cherchant en vain parmi toutes les femmes celle qui pourrait retenir son amour, quand Tristan était l’homme d’un seul amo
574 donnent le ton aux mœurs et à l’esprit. Or, ceux qui demeurent insensibles aux réalités spirituelles sont incapables de pa
575 mule d’un donjuanisme féminin. Car c’est la femme qui rêve Don Juan, c’est le désir féminin qui crée « l’homme sans visage 
576 a femme qui rêve Don Juan, c’est le désir féminin qui crée « l’homme sans visage », l’homme d’une nuit sans lendemains qui
577 sans visage », l’homme d’une nuit sans lendemains qui geignent, l’homme du plaisir qui ne laissera qu’un souvenir de bonheu
578 sans lendemains qui geignent, l’homme du plaisir qui ne laissera qu’un souvenir de bonheur, quoi qu’en dise Dona Anna. Cas
579 rmes », selon l’aphorisme célèbre de Chamfort. Ce qui compte aux yeux du romancier, c’est une intrigue délibérée et qui tra
580 eux du romancier, c’est une intrigue délibérée et qui traduit non plus la dialectique du mythe mais une impitoyable stratég
581 n : il ne peut donc s’agir que de fantasmes, mais qui n’en sont que plus révélateurs de l’inconscient collectif du siècle e
582 te évidence, un malade mental, un de ces « fous » qui , selon Chesterton, « a tout perdu excepté la raison ». Privé en fait
583 sirs du seigneur. Il ne retiendra pas les valeurs qui « obligent » la vraie noblesse féodale à la vertu et au service, cell
584 noblesse féodale à la vertu et au service, celles qui pourraient favoriser les « attachements », les « fidélités » réciproq
585 stucieux et le fou, s’étend toute une littérature qui va du réalisme libertin des Liaisons dangereuses aux fantasmagories p
586 lier son plus grand écrivain, Rousseau le gêneur, qui d’ailleurs vient de Genève et déteste les modes régnantes. Par le suj
587 tats d’âme poétiques. Mais la mélancolie profonde qui baigne l’histoire de Tristan s’attache encore au roman de Rousseau co
588 oureuse célèbre de l’époque, Julie de Lespinasse, qui l’exprimera elle aussi dans un seul cri : J’aime, mais comme on doit
589 ut plus aimer… Que Dieu me conserve cette douleur qui m’est indiciblement chère. L’amour romantique C’est à partir d
590 cation célèbre : Levez-vous vite, orages désirés qui devez emporter René dans les espaces d’une autre vie ! À partir de l
591 ionné, répétons-le, prend sa source dans cet élan qui par ailleurs fait naître le langage. Et l’invention d’une rhétorique
592 adis des amours enfantines » (Baudelaire) où ceux qui aiment situent leur vraie patrie. L’amour-passion (selon l’expression
593 de Melmoth aux sœurs Brontë puis à Thomas Hardy, qui traduira le mieux l’action souterraine du mythe de Tristan, réactivé
594 éactivé par les tabous de la nouvelle société, et qui réinventera les tourments bienheureux des amours interdites et imposs
595 amours interdites et impossibles. Et c’est Wagner qui en révélera musicalement le sens ésotérique, au moment où le mariage
596 ption chrétienne du monde, c’est l’attrait sexuel qui n’est qu’un cas particulier de cet Amour cosmique et spirituel qui, s
597 as particulier de cet Amour cosmique et spirituel qui , selon Dante, « meut le soleil et les autres étoiles ». La psychanaly
598 e d’érotisation générale de la psyché européenne, qui ne caractérise pas seulement la Vienne de Freud, mais le Paris de la
599 geoise, les théâtres et la littérature romanesque qui , désormais, va étudier les mœurs des courtisanes, l’inceste, l’homose
600 « déchaîné la sexualité » comme le répètent ceux qui l’attaquent sans le connaître. Il a seulement autorisé une nouvelle m
601 ité, est défini comme une attitude envers autrui qui perpétue ou reproduit le premier mode de la relation amoureuse de l’e
602 n du « principe de plaisir », principe économique qui tend à la réduction par satisfaction des excitations libidinales.) To
603 et les angoisses que ces interdits expriment (ou qui en résultent par la suite) aient préexisté de longue date au christia
604 rce qu’il devait au péché ; de lui donner tout ce qui , jusqu’ici, était donné à l’amour ; d’en faire le moyen de notre prop
605 mps. C’est seulement l’expression de la sexualité qui n’est plus réprimée, ce qui signifie que la plupart des interdits soc
606 ssion de la sexualité qui n’est plus réprimée, ce qui signifie que la plupart des interdits sociaux, légaux et religieux on
607 ristan et Iseut. Ils cherchent partout l’obstacle qui résiste et ils n’en trouvent plus guère. L’Homme sans qualités de Rob
608 lus guère. L’Homme sans qualités de Robert Musil, qui décrit une passion incestueuse entre frère et sœur, et la Lolita de N
609 use entre frère et sœur, et la Lolita de Nabokov, qui décrit la passion d’un quadragénaire pour une nymphette de 12 ans, so
610 roman n’eût pas été. Anticipant sur une évolution qui devrait logiquement conduire à l’extinction de l’élément passionnel o
611 s de toute psychologie, ils peignent des tableaux qui ne représentent rien, composent de la musique qui n’exprime plus aucu
612 qui ne représentent rien, composent de la musique qui n’exprime plus aucun mouvement du cœur. Nouveau roman, peinture abstr
613 raite, musique concrète utilisent des instruments qui ne peuvent plus exprimer la passion mais seulement des combinaisons d
614 phénomène comparable, à bien des égards, à celui qui se produisit dans la psyché collective du xiie siècle : une vaste re
615 ’érotisme généralisé, le budget privé de la magie qui , en France, dépasse le budget de la recherche scientifique, l’envahis
616 xie siècle : L’amour est une maladie incurable qui ne peut trouver remède qu’en elle-même. C’est une condition délectabl
617 ion délectable et un mal que nous désirons. Celui qui n’en est pas atteint ne souhaite nullement rester sain. Et celui qui
618 teint ne souhaite nullement rester sain. Et celui qui en souffre ne trouve aucun plaisir à en être guéri. r. Rougemont
15 1975, Articles divers (1974-1977). « Le sort des écrivains emprisonnés constitue un drame et un avertissement » (juin 1975)
619 hui, notamment dans les sociétés occidentales. Ce qui se passe d’une manière scandaleuse dans les pays totalitaires est en
620 talitaires est en germe chez nous. Face à un État qui veut tout régenter, y compris la morale, l’écrivain qui veut dire la
621 ut tout régenter, y compris la morale, l’écrivain qui veut dire la vérité se voit de plus en plus amené à critiquer, à s’op
622 qu’il écrit il y a presque toujours quelque chose qui peut contribuer à changer les mœurs. Et le changement est la dernière
623 l’affirmer avec véhémence. Il est comme un soldat qui n’accepte pas la discipline, se fait punir mais recommence quand même
624 st sincèrement qu’il le condamne. Un Soljenitsyne qui , pour lui, est un écrivain « dérangé » doit être guéri et il a justem
625 ne s’est débarrassé de tous les vieux communistes qui avaient participé à la fondation de l’URSS. On enfermait ces gens et
626 l’amour sensuel. Et c’est cette notion de l’amour qui a été vulgarisée à travers toutes les littératures, toutes les sociét
627 pensées. Les Russes et les Chinois sont les seuls qui avouent ouvertement pratiquer ce conditionnement. La révolution cultu
628 dirait ce qu’il doit écrire. C’est sa nature même qui s’y oppose. Il sera donc toujours un opposant, un « agent de la révol
629 urs été le cas : je pense à Racine et à Corneille qui étaient au service de Louis XIV. Les grands peintres de la Renaissanc
630 Louis XIV. Les grands peintres de la Renaissance qui décoraient les églises, illustraient des croyances populaires, citaie
631 aient des croyances populaires, citaient les gens qui faisaient l’ordre dans la cité, étaient eux aussi proches du pouvoir.
632 ment cette mesure reste juste. D’ailleurs tout ce qui intéresse notre vie quotidienne se passe à l’échelon des communes ou
633 plus puissant ? Quelle nécessité ? Quand les gens qui vont construire Verbois nous expliquent qu’il y a une nécessité, je l
634 n’avaient jamais pu réunir complètement la France qui fut longtemps composée de neuf nations parlant chacune leur langue. C
635 possession de tous les moyens de commander, ceux qui étaient à la tête des États ont eu naturellement plus de prétention q
636 ports, en fait il se mêle de tout y compris de ce qui ne le regarde pas. Son rêve — et ce qui se passe en Union soviétique
637 ris de ce qui ne le regarde pas. Son rêve — et ce qui se passe en Union soviétique de façon scandaleuse préfigure peut-être
638 onde et il n’en veut pas d’autres. C’est un choix qui ne menace personne. Lorsqu’il était pilote de chasse et qu’il faisait
639 fondement de notre société ce n’est pas la masse qui constitue l’unité de mesure mais l’individu. Partout ailleurs où la d
640 d’un mot — et cinq de camp de travail. Tous ceux qui ont lu le magistral “reportage” de Soljenitsyne sur ces camps peuvent
641 mondiale le cas de l’écrivain Vladimir Boukovski qui , aux dernières nouvelles, était détenu dans la prison de Vladimir où
642 demandant sa libération. Au premier rang de ceux qui se sont engagés dans ce combat on trouve le nom de l’un des plus gran
16 1975, Articles divers (1974-1977). « L’État-nation, voilà l’ennemi » (1er juillet 1975)
643 Beau résultat, brillante gestion ! Mais, au fait, qui était le gérant ? La réponse est dangereusement simple. Les responsab
644 mple. Les responsables sont les 150 États-nations qui se partagent aujourd’hui la totalité (sans nul reste) des territoires
645 tous sont nés, et selon l’obsession de puissance qui explique seule, sans la justifier, leur prétention à faire rentrer da
646 n Grand Ordinateur. Ou bien des groupes d’hommes, qui se veulent à la fois libres et responsables, trouvent et appliquent à
647 t plus d’espace libre, il n’y a plus que l’avenir qui leur échappe. Pas question de détruire l’État, mais de le distribuer
648 s pas question non plus de constituer des régions qui ne soient que des mini-États-nations, et qui prétendent imposer le ca
649 ions qui ne soient que des mini-États-nations, et qui prétendent imposer le carcan de frontières fixes, omnivalentes, à tou
650 tion sauvage de l’ère industrielle, de l’angoisse qui en résulte chez les individus perdus dans les foules solitaires, dans
651 u énergétiques, écologiques ou sociales. Et voilà qui représente bien plus qu’une mesure opportune de « décentralisation »
652 ropéen, mais que vaut-il pour tous ces pays neufs qui ont adopté le modèle de l’État-nation qui leur était livré dans le mê
653 s neufs qui ont adopté le modèle de l’État-nation qui leur était livré dans le même paquet que la technique et le DDT, et q
654 ans le même paquet que la technique et le DDT, et qui était pour eux, au départ, le moyen de leur libération ? » Deux répon
17 1975, Articles divers (1974-1977). « Il ne s’agit pas de créer des régions qui soient de petits États-nations » (septembre 1975)
655 « Il ne s’agit pas de créer des régions qui soient de petits États-nations » (septembre 1975)w x Ne risque-t-o
656 régional ? Il ne s’agit pas de créer des régions qui soient de petits États-nations. Ce serait bien pire que les grands. C
657 ais, du Val d’Aoste et du canton de Vaud, tout ce qui est autour du Léman. Une quantité de problèmes seraient à résoudre su
658 etage du Léman, de l’épuration des eaux du Rhône ( qui intéresse toute la vallée jusqu’à Marseille et même, au-delà, une par
659 on de pompage… Il y a les problèmes de l’aéroport qui sont évidemment communs aux deux côtés de la frontière. Il y a le pro
660 tes communes, d’amitiés et de voisinage retrouvé, qui me motive, quand je lutte pour la région. w. Rougemont Denis de, «
661 [Entretien] Il ne s’agit pas de créer des régions qui soient de petits États-nations », Le Mois de Candide, Ferney, septemb
18 1976, Articles divers (1974-1977). Message de M. Denis de Rougemont (1976)
662  ! L’Europe des esprits et des cœurs, c’est elle qui motiva au premier chef Robert Schuman. Aux yeux de l’histoire, il res
663 , en fait, d’une manière invisible mais réelle et qui , loin d’être marginale par rapport à son œuvre politique, pourrait bi
664 ots qu’on ne saurait souhaiter plus éclairants et qui servent de titre à son deuxième chapitre : L’Europe, avant d’être un
665 hé, ce serait une démission, voire une abdication qui ne trouverait plus personne pour l’accepter, je le crains. Parce qu’i
19 1976, Articles divers (1974-1977). L’Europe, l’été [préface] (1976)
666 es heures d’autoroute à travers forêts et vallées qui relient les hauts lieux de la vie musicale. Le circuit le plus intéri
667 vie musicale. Le circuit le plus intérieur, celui qui pourrait partir de Lucerne, par exemple, pour remonter au nord-est pa
668 nes d’autres, rescapés de ces deux ou trois-cents qui ont tenté un jour d’exister pour disparaître après quelques saisons,
669 s une tradition régionale mais aussi des premiers qui aient pris conscience de leur commune appartenance au grand ensemble
670 a nature, étant née du complexe physico-spirituel qui a formé l’homme européen et qui le définit le mieux, quand on le comp
671 physico-spirituel qui a formé l’homme européen et qui le définit le mieux, quand on le compare à l’homme d’autres cultures
672 ie les historiens de prendre note d’un petit fait qui a son importance symbolique : l’Association des festivals européens a
673 n aux rivalités stériles, favoriser les échanges, qui sont la santé de la culture comme de l’économie, et, de la sorte, éle
674 enade à Helsinki. À partir de 1957, des festivals qui , hors d’Europe, assurent le rayonnement de la musique et de la cultur
675 oncerts, de ballets, d’opéras de tous les siècles qui , durant la saison prochaine, animeront l’Europe pour la joie de centa
676 és — d’ailleurs vrais — sur « la musique, langage qui ne connaît pas de frontière », il y a cette réalité de demain, la rég
677 édiévales, la région élément organique d’un monde qui ne connaîtra plus les frontières nationales dessinées par les diploma
678 l particulier, mais bien par une certaine manière qui n’est qu’à lui de mettre en œuvre et d’accueillir la musique d’hier e
20 1976, Articles divers (1974-1977). Histoire et prospective de l’identité européenne (1976)
679 ‘en réalité elle est bien plus complexe que celui qui la pose ne le croyait. Avant donc d’essayer de nommer ma discipline,
680 plus sérieuse, de l’identité de l’Europe et de ce qui motive son étude aujourd’hui. Tout le reste en dépendra, et d’abord m
681 as une forme idéale à rejoindre, ni quelque chose qui aurait existé historiquement et que l’on se proposerait de ressuscite
682 r leurs impatiences. Bien. Mais les gouvernements qui financent l’organisation le font en vue des applications non prévues
683 ne. Pour eux, la recherche fondamentale est celle qui peut « rendre » en vingt ans, pour le prestige et la puissance de l’É
684 diquer la qualité de « recherche fondamentale » — qui importe aux universitaires — pour Ies parties métaphysiques de mes co
685 a qualité de « recherche finalement appliquée » — qui importe aux gouvernements — pour les parties proprement politiques de
686 ignement, cours et travaux de séminaires, tout ce qui touche aux régions, notamment. Disons que dans notre domaine, la rech
687 otre domaine, la recherche fondamentale est celle qui a pour objet l’homme lui-même, la personne. Si la mathématique est sc
688 aux d’études de nos grandes industries. Mais vous qui traitez de l’Europe, à quoi préparez-vous au juste ? Un institut d’ét
689 ssi de faire vivre l’Europe en vivant sa culture, qui est, à mes yeux, sa profonde identité. Cette culture a produit — comm
690 onise », « L’Europe, c’est fini ! » Comme si ceux qui écrivent ces slogans n’en étaient pas, de cette Europe qu’ils jugent
691 ttitudes morales, d’une définition de la personne qui intéressait les juristes de Zurich, et d’une définition de la région
692 région (notamment de la région transfrontalière) qui a entraîné depuis des adhésions aussi diverses que celles d’un maire
693 cinquième anniversaire du Conseil de l’Europe. Ce qui ne prouve d’ailleurs pas que mon sujet soit « sérieux » du point de v
694 cientifique qu’on cultivait au xixe siècle, mais qui s’en plaindrait aujourd’hui ? Vos étudiants s’en plaignent-ils ? Ceux
695 urd’hui ? Vos étudiants s’en plaignent-ils ? Ceux qui font des études dans la seule intention de se préparer à un job bien
696 « faits » — et du virtuel ou potentiel, c’est ce qui reste « à faire ». C’est peut-être ce que je pressens comme sans le c
697 -être ce que je pressens comme sans le connaître, qui apparaîtra un jour comme étant le principal de ce que j’avais à faire
698 sel ou tout au moins dans le général. Et que ceux qui orientent leurs recherches sur les virtualités européennes méritent l
699 de leur monde. Or à mon sens, c’est le contraire qui est vrai. Il arrive bien souvent que celui qui fait des lettres, de l
700 re qui est vrai. Il arrive bien souvent que celui qui fait des lettres, de la médecine ou de l’histoire, de l’économie libé
701 elque chose « d’objectif » et « d’universel », et qui ne dépend ni des concepts de la Grèce antique ni des définitions théo
702 en garde générale contre l’européocentrisme naïf qui a causé et qui cause encore tant de ravages dans le tiers-monde. Et j
703 ale contre l’européocentrisme naïf qui a causé et qui cause encore tant de ravages dans le tiers-monde. Et je parle de mett
704 t les Européens mais les étudiants du tiers-monde qui suivent nos cours : c’est sans doute le plus nécessaire. Vous paraiss
21 1976, Articles divers (1974-1977). Changer de cap (novembre 1976)
705 est en général qu’une tactique partisane, mais ce qui m’intéresse est autre chose : la stratégie de notre civilisation. Ce
706 ivilisation. Ce sont donc les grands choix moraux qui déterminent parfois à notre insu les arguments échangés avec tant de
707 lonté certaine de l’empêcher de savoir à temps ce qui se prépare, et de le placer devant le fait accompli. Puis, devant l’i
708 que je reconstitue : I. Le philosophe étant celui qui pose des questions simples et naïves, je demande : « Concorde, à quoi
709 ques dizaines de PDG et de membres du « jet-set » qui en « bénéficieront », si l’on peut dire, que feront-ils de ces heures
710 edoutent, l’atteinte possible à la couche d’ozone qui protège notre vie terrestre contre les rayons ultraviolets ? « Votre
711 heures sur ce trajet, en voici le moyen simple et qui eût déjà permis environ 15,8 milliards d’économies : 1° supprimer les
712 uisant Concorde, on aurait découvert des procédés qui permettront de construire d’autres avions encore plus chers et plus p
713 lus chers et plus problématiques, et puis surtout qui permettront la mise au point d’armements de plus en plus sophistiqués
714 u’il nous faut dépasser si nous voulons survivre, qui détruisent à la fois la nature et la Communauté des hommes, au nom du
715 la vitesse et du fracas pour épater le monde. Ce qui commence à valoir des fortunes, c’est le contraire de ce que Concorde
716 que ce soir-là, j’ai trouvé la formule de tout ce qui me répugnait dans l’affaire nucléaire comme dans celle de Concorde, e
717 ormal que ce soit lui — comme les Rois antiques — qui dispense seul l’Énergie. Une énergie qui vous vient donc de l’extérie
718 tiques — qui dispense seul l’Énergie. Une énergie qui vous vient donc de l’extérieur et que les Pouvoirs publics vous assur
719 e, force des vents, lumière et chaleur du soleil ( qui ne souffrent pas la centralisation, c’est pourquoi nos États les décr
720 dre. Et je ne dis pas qu’en alertant les énergies qui sont en nous nous pourrions aller aussi vite que Concorde. Je dis seu
721 ment qu’en faisant appel toujours plus aux forces qui sont en nous, le besoin que nous avions de forces extérieures diminue
722 ons faire l’équivalent de la société industrielle qui culmine dans la Bombe à fusion nucléaire, je dis que nous ferions une
22 1977, Articles divers (1974-1977). Souvenir de 1938 (1977)
723 son Nocturne et je m’étais dit : Voilà celui pour qui je voudrais écrire quelque chose. À peine de retour en Suisse, on m’o
724 le croyait ce jour-là !) C’est aussi toute la vie qui se reprend à vivre, les délais à courir, le sujet à me fuir… Le matin
725 ouvelle, comme si c’était le message du Solitaire qui venait de suspendre nos destins ! Cette menace, cette attente au bord
726 , dans notre tradition, cette violente simplicité qui peut s’adapter à la fois à la déclaration d’un chœur en marche et au
727 ar celle de la scène, et les ressources du canton qui patronnera l’œuvre : une compagnie de théâtre d’amateurs et deux peti
728 ale à laquelle il croit pour l’avenir est « celle qui arrive à grouper toute une population ». C’est donc oui, et l’on se m
729 se peut que les deux jugements soient justes. Ce qui est certain, c’est que l’homme de la paix est seul capable de gagner
730 Neville Chamberlain et Édouard Daladier, accords qui en livrant la Tchécoslovaquie à l’Allemagne nazie laissa à l’Europe u
23 1977, Articles divers (1974-1977). Les débuts de la construction européenne (1977)
731 e : Une série généalogique de « grands desseins » qui s’origine au xvie siècle, et à travers Sully, William Penn, Kant et
732 t dès lors administré par l’OECE, rien de tout ce qui va suivre n’eût été possible. Il s’agit là d’un fait patent et mesura
733 un réflexe de défense de la communauté européenne qui s’éprouve obscurément menacée, ainsi que Dante va l’écrire dans le De
734 multiples têtes » de l’État national naissant, et qui essaie de rallier la communauté chrétienne contre les infidèles. De s
735 contradictions violentes entre les États-nations qui se multiplient en Europe — ces parties qui se veulent chacune plus gr
736 ations qui se multiplient en Europe — ces parties qui se veulent chacune plus grande que le tout continental — vont provoqu
737 iale. L’holocauste de vingt millions d’Européens qui s’ensuit pose des questions fondamentales à quelques bons esprits (qu
738 » qu’ils estiment menacée par toute forme d’union qui ne soit pas purement verbale. Pour le meilleur et pour le pire, c’est
739 le meilleur et pour le pire, c’est ce vocabulaire qui sera repris dans les traités européens de l’après-guerre. Mais ce qui
740 les traités européens de l’après-guerre. Mais ce qui exige alors d’être expliqué, c’est le passage de l’échec du projet Br
741 aite sur le modèle du fédéralisme intégral, celui qui part des pouvoirs locaux et institue des « pouvoirs fédéraux limités
742 sociales et économiques, définies à Montreux, et qui marquent une étape décisive dans l’évolution de l’Europe, n’ont pas é
743 nce, il y a toute une préparation intellectuelle, qui remonte aux mouvements personnalistes des années 1930, quand les fond
744 elque chose se fait, cela sera dû à la complicité qui s’établit, sous le couvert d’ambiguïtés ou d’équivoques implicitement
745 ses, entre la pression de mouvements idéologiques qui prétendent parler au nom de l’opinion, et la réaction de quelques hom
746 État non moins « nationaux » que les autres, mais qui prétendent parler au nom de la Paix. Le Congrès de l’Europe à La Haye
747 ure illustration de ces coopérations temporaires, qui produisirent parfois des compromis féconds, parfois aussi des comprom
748 ffrontent : celle des unionistes (à la Churchill) qui demandent des mesures « d’union plus étroite » ne limitant en rien le
749 ropéen devant les parlements. Les six mouvements qui avaient organisé et mené à bien le congrès de La Haye se fédérèrent t
750 us vivement enlevé. Mais dès la séance inaugurale qui eut lieu à Strasbourg au début d’août de la même année, la faiblesse
751 Bruxelles, en février 1949, un congrès politique qui ne marqua pas de grands progrès sur La Haye, mais lui valut l’adhésio
752 minster, en avril 1949, une Conférence économique qui relança l’idée d’une autorité européenne à laquelle les États remettr
753 on et de l’acier, bien peu parmi les journalistes qui se pressaient dans le Salon de l’Horloge comprirent qu’ils vivaient u
754 s et des consommateurs de charbon et d’acier ! Ce qui a frappé à juste titre l’opinion de tous nos pays, c’est l’idée de cr
755 té des Nations. Plutôt que l’Europe elle-même, ce qui naissait avec la CECA, c’était une méthode pour faire l’Europe. Nous
756 nt d’un pouvoir politique, en vertu de la méthode qui veut que « la création d’une situation déséquilibrée oblige à faire u
757 plus de vingt-cinq ans. Ils ont lu les sondages, qui donnent en général une forte majorité aux partisans de l’union : 65 %
24 1977, Articles divers (1974-1977). Robert Schuman (1886-1963) : l’homme de la frontière (1977)
758 s la salle du parlement « comme un ecclésiastique qui se rend à la chaire » et qu’il « pesait longuement ses arguments comm
759 ieux pharmacien ses pilules », c’est bien le même qui , selon les mêmes auteurs, a accompli « une action bouleversante sans
760 cette ancienne Lotharingie devenue Bourgogne, et qui forme aujourd’hui la grande avenue centrale, l’axe vertical de l’Euro
761 n 1931 au jeune Parti des démocrates populaires — qui sera le MRP de la Libération —, n’est-ce pas surtout parce que c’est
762 —, n’est-ce pas surtout parce que c’est le parti qui affirme le plus clairement une politique extérieure certes « résolume
763 mais, traduisant le premier membre de l’équation qui est le rapport origines/horizon, elle exprime l’expérience durement a
764 du célibataire endurci que fut Robert Schuman : à qui faut-il attribuer la Déclaration du 9 mai 1950 ? Le plan Schuman fut-
765 un texte en acte et une épure en fait d’histoire. Qui est le vrai père ? Celui qui conçoit le projet ou celui qui le réalis
766 en fait d’histoire. Qui est le vrai père ? Celui qui conçoit le projet ou celui qui le réalise ? Peut-être pourrait-on évo
767 vrai père ? Celui qui conçoit le projet ou celui qui le réalise ? Peut-être pourrait-on évoquer ici, plutôt que la relatio
768 elation classique entre le dramaturge et l’acteur qui fait triompher sa pièce, la coopération créatrice entre l’auteur du s
769 30. Robert Schuman fut réellement l’homme du Plan qui porte son nom, parce que ce plan résultait du problème dans lequel s’
770 r été déterminée moins par ses souvenirs du passé qui eussent pu au contraire l’aveugler, que par sa vision lucide de l’ave
771 : il n’est pas motivé par le même passé. Et voilà qui permet de résoudre par une sorte de contre-épreuve expérimentale, le
772 tale, le problème de la paternité politique de ce qui allait devenir l’Europe des Six, puis des Neuf, en attendant la vraie
773 es peuples, des cœurs et des esprits : c’est elle qui motiva au premier chef Robert Schuman. Aux yeux de l’Histoire, il res
774 ts qu’on ne saurait souhaiter plus éclairants, et qui servent de titre à son deuxième chapitre : L’Europe, avant d’être un
25 1977, Articles divers (1974-1977). Hérétiques de toutes les religions, unissez-vous ! (1977)
775 Hic et Nunc , petite revue de pensée religieuse qui se réclamait de Kierkegaard et de sa double descendance — « existenti
776 : Deux hommes se trompent insondablement : celui qui affirme que la morale est suffisante, et celui qui nie qu’elle soit n
777 ui affirme que la morale est suffisante, et celui qui nie qu’elle soit nécessaire… Le moralisme donne une réponse universel
778 s de juger si c’est la Parole de Dieu, donc Dieu, qui est le sujet de ces énoncés, ou bien au contraire si l’homme se les a
779 t justement d’Henry Corbin. Et je n’en trouve pas qui expriment mieux notre attitude commune d’alors. ⁂ Après les années de
780 ps, mais une prise de conscience renouvelée de ce qui animait en profondeur nos écrits de l’époque de Hic et Nunc . Lui s’
781 la franchir, à cause des deux farouches gardiens qui se tiennent auprès, jusqu’au jour où il dit à l’un d’eux : Mais perso
782 pressentions qu’il n’y a de porte que pour celui qui osera la franchir, à tous risques, sans laissez-passer d’aucune sorte
783 aucune sorte ; qu’il n’y a de sens que pour celui qui se met en marche, et que la vraie voie est unique. ⁂ Pour entrer dans
784 traire qu’il y a pour chacun une voie, une vérité qui ne vaut que pour lui seul, particulière et subjective. La « voie uniq
785 au contraire une forme d’exister sans précédent, qui ne peut être décrite ni prescrite mais seulement vécue, et une seule
786 nelle » et donc « imprévisible »22 d’un événement qui dépend de l’observateur et de sa position hic et nunc ; — Le way of l
787 et de sa position hic et nunc ; — Le way of life qui canalise les aspirations, uniformise les mœurs et unifie une société,
788 société, – ou au contraire le cheminement secret qui conduit seul à l’intégration d’un moi distinct… La « voie unique » pe
789 relation de complémentarité. Note 1. Les hérésies qui se constituent en doctrine imposée à une communauté dont elles devien
790 ourrait aussi bien qualifier selon D. Suzuki « ce qui est dans la ligne authentique de transmission », i.e. la communicatio
791 e de l’esprit ne consiste nullement à réitérer ce qui est vrai pour n’importe qui, et encore moins à s’y conformer en s’y f
792 llement à réitérer ce qui est vrai pour n’importe qui , et encore moins à s’y conformer en s’y forçant comme dans un lit de
793 acle — l’ouverture à la haute poésie mystique, et qui possède une vertu de contagion que je voudrais dire convertissante. (
794 raverait la séparation. Reste une seule solution, qui est de longer la rivière jusqu’à sa source, là où les deux pentes se
795 ’éclaire que le terrain où je m’avance, ce chemin qui commence à mes pas. L’homme de la foi ne suit sa voie qu’en la frayan
796 mmune à tous les « hérétiques » malgré eux : ceux qui ont un jour compris qu’ils étaient bien forcés d’inventer leur chemin
797 min sans aucune garantie, puisque le vrai chemin, qui conduit l’homme à Dieu, part toujours d’une personne sans précédent.
26 1977, Articles divers (1974-1977). La nature du pouvoir (9 octobre 1977)
798 i aussi relevé, dans cette leçon, une distinction qui , en général, amuse l’auditoire quand on la cite, à savoir la distinct
799 mple cas de ces deux pays ; c’est une distinction qui va beaucoup plus loin, la distinction, en somme, entre la notion de p
800 oir, définie par Jean Bodin au xvie siècle, pour qui le Prince est celui qui impose et casse les lois comme il le veut, co
801 din au xvie siècle, pour qui le Prince est celui qui impose et casse les lois comme il le veut, commence et termine les gu
802 éversible, et le pouvoir que nous avons en Suisse qui , lui, est un pouvoir réparti. C’est le pouvoir fédéraliste, qui est b
803 un pouvoir réparti. C’est le pouvoir fédéraliste, qui est beaucoup moins sensible parce qu’il s’exerce à tous les niveaux,
804 urd’hui, décisive. Elle domine absolument tout ce qui va se passer à la fin de ce siècle. S’agissant de définir le pouvoir,
805 rétendu faire beaucoup plus que tous les auteurs, qui ont essayé cette définition impossible, d’Aristote à Max Weber. Elle
806 « mixte », et a été jusqu’à parler d’un « mixte » qui compose le pouvoir et, en même temps, l’écartèle. Moi je veux bien, m
807 a fait un peu comme cet homme politique français qui , quand on lui demandait, un jour : « Que faites-vous devant un problè
808 d’impuissance que nous avons devant les pouvoirs, qui nous amène à toutes sortes d’excès de langage contre le pouvoir, à to
809 ationale, par exemple, que le pouvoir allègue, et qui coupent court à toute espèce de discussion, à tout dialogue, à toute
810 r nous ne savons que trop à quoi cela mène : ceux qui croyaient prendre le pouvoir sont pris par lui. Le pouvoir abusif de
811 , ni la révolution à la mode des siècles derniers qui peuvent nous secourir dans cette tragédie car cette « prise du pouvoi
812 e, c’est-à-dire que l’État s’était emparé de ceux qui voulaient s’en emparer. Là-dessus, il a pris le pouvoir, et a illustr
813 pouvoir de l’État devenu extérieur à nous-mêmes, qui n’est pas de supprimer toute espèce de pouvoir, mais de distribuer le
814 c’est ce que j’appelle le fédéralisme, mouvement qui s’inscrit, à mes yeux, dans cette alternative fondamentale que je cit
27 1977, Articles divers (1974-1977). La puissance et les choix (mai 1977)
815 choix (mai 1977)ah ai L’ensemble des conflits qui couvent ou se déclarent en cette fin du xxe siècle me paraissent se
816 es et d’effets en interdépendance inéluctable, et qui tendent à composer deux modèles de société théoriquement antinomiques
817 citoyens, des groupes, des communes, des régions, qui entendent tout simplement et autant qu’ils le peuvent, rester maîtres
818 ter maîtres de leur propre destin. Or, parmi ceux qui optent pour la Puissance d’abord ou finalement, une minorité très res
819 e tous leurs droits à l’État, au chef ou au Parti qui s’en est emparé. Quant à ceux qui optent pour la Liberté, ils pensent
820 hef ou au Parti qui s’en est emparé. Quant à ceux qui optent pour la Liberté, ils pensent y être conduits par quelque indiv
821 erté réelle sans nulle puissance, ni de puissance qui ait quelque saveur sans au moins l’illusion qu’on l’exerce « libremen
822 pour devoir de concourir. Ce qu’il faut voir, et qui est peut-être décisif, c’est que le parallélisme inversé entre les de
823 e de leur capitale. Les adversaires des centrales qui les dénoncent comme gigantesques, trop chères et trop dangereuses, ig
824 s, ignorent qu’ils dénoncent là les raisons mêmes qui font que nos États les adoptent. Car « très grand » suppose, qu’on le
825 éaires accumulés pendant le petit quart de siècle qui nous sépare de l’an 2000. À l’inverse absolu, le choix de l’énergie s
826 s et des usines de retraitement du métal infernal qui permet de faire des bombes, augmente chaque jour les chances de la gu
827 qu’elles sont les pièces principales d’un système qui conduit à renforcer l’emprise universelle des États-nations, c’est-à-
828 t du ciel, vient de Zeus, c’est-à-dire de « celui qui voit très loin ». ah. Rougemont Denis de, « La puissance et les ch
829 quartier ancien et rompant les liens sentimentaux qui devraient toujours unir l’homme à son environnement. Pour Denis de Ro
830 Il vient de terminer L’Avenir est notre affaire qui va sortir incessamment en librairie (Éditions Stock). Denis de Rougem
28 1977, Articles divers (1974-1977). Du passé à l’avenir d’une région (27 juin 1977)
831 r donner une idée de la diversité des communautés qui formeront plus tard la Romandie, prenons à titre d’exemple l’état de
832 illes fournissant les membres d’un Conseil d’État qui s’appuie tantôt sur la France, tantôt sur Berne, pour échapper à la t
833 à la tutelle de l’autre. Aux Orléans-Longueville qui s’éteignent, succéderont dès 1707 les rois de Prusse : ils seront Pri
834 ion, mais plutôt la règle, parmi les petits États qui formeront plus tard la Romandie. C’est ainsi que Neuchâtel qui avait
835 plus tard la Romandie. C’est ainsi que Neuchâtel qui avait entretenu pendant des siècles des liens étroits avec la Franche
836 édérale, en 1848 (phénomène proprement politique) qui a créé la Suisse romande, bien plutôt que la géographie (point de fro
837 gine française. Seul Pierre Viret est autochtone, qui domine la Réforme vaudoise. Leurs descendants donneront naissance à u
838 ès petites communautés, « seul système, écrit-il, qui réunisse les avantages des grands et des petits États ». Quant à Mada
839 dame de Staël et à Benjamin Constant, ce sont eux qui , par « la trouée de Coppet », vont faire entrer en France la philosop
840 ivisme à fondement théologique, et l’introspectif qui s’efforce à la traversée clandestine et craintive du territoire des t
841 itut Rousseau, centre de recherches pédagogiques, qui par Édouard Claparède, Pierre Bovet, Jean Piaget, et tant d’autres, v
842 une bonhomie un peu cynique, une sorte de paresse qui peut être rusée mais que l’accent rend désarmante ; chez le Neuchâtel
843 aux, fourbe et courtois », une rudesse utilitaire qui semble se méfier de la courtoisie comme d’une espèce de fourberie, pr
844 esprit romand implique aussi, en relation avec ce qui précède, une vie culturelle d’une exceptionnelle intensité : cinq uni
845 ersités au xxe siècle pour 1 200 000 habitants — qui dira mieux sur notre continent ? Réalité récente — qui peut change
846 mieux sur notre continent ? Réalité récente — qui peut changer… Si je me suis étendu quelque peu sur la genèse histo
847 s écrits d’auteurs fribourgeois comme Reynold) et qui différencie la culture romande de celle de la France une et indivisib
848 Si ces conflits sont apaisés de nos jours, voilà qui n’est pas dû seulement au long travail de l’œcuménisme dans les Églis
849 simplement au mouvement de brassage démographique qui , par exemple, a fait de la « Rome protestante » une ville à très nett
850 uis en 1861, de rattacher au canton les districts qui forment aujourd’hui la Haute-Savoie.) En revanche, du point de vue éc
851 ons dessine l’aire d’une vaste région potentielle qui engloberait la Suisse romande (augmentée du Jura, bien entendu) et le
852 les usines de Genève quelque 23 000 travailleurs, qui chaque soir regagnent leur cité-dortoir. Voilà qui définit une région
853 ui chaque soir regagnent leur cité-dortoir. Voilà qui définit une région transfrontalière de main-d’œuvre, d’environ 40 km
854 environnement. — Le Léman est pollué par le Rhône qui y déverse du mercure (déchet d’industries pharmaceutiques), par les é
855 de Creys-Malville générateur de plutonium, voilà qui définit une région écologique, d’aire différente de la première, mais
856 s, ni par la ligne de démarcation toute théorique qui passe au milieu du Léman. — Les flux commerciaux qui vont de Genève a
857 passe au milieu du Léman. — Les flux commerciaux qui vont de Genève au pays de Gex, à la Savoie, à l’Isère, à l’Ain, et vi
858 et vice versa, définissent une région économique qui ne recouvre pas les deux autres et reste susceptible de variations ra
859 e, caractérise depuis des siècles l’arc jurassien qui va de Genève à Bâle-Campagne, avec des prolongements vers Cluse au su
860 é — d’un complexe de petites unités territoriales qui menaient chacune, depuis un millénaire au moins, leur histoire fort i
29 1977, Articles divers (1974-1977). « Il faut changer de cap » (27 septembre 1977)
861  : L’Avenir est notre affaire. À tous les dangers qui nous menacent et que l’auteur dénonce lucidement, on n’est certes pas
862 technocrates : on bâtira des centrales nucléaires qui prendront la relève. Mais l’uranium qui les nourrit sera aussi épuisé
863 ucléaires qui prendront la relève. Mais l’uranium qui les nourrit sera aussi épuisé, pense-t-on, en trente ans. Qu’à cela n
864 sion technicienne contre la nature » ? Oui, et ce qui la rend dangereuse, c’est qu’elle s’opère aujourd’hui sous l’égide de
865 sez, c’est le modèle suisse ? C’est quelque chose qui s’en inspire, dans la mesure où la Suisse est née de la fédération de
866 lée de ces régions-là et d’une trentaine d’autres qui sont en train de se faire reconnaître en Europe et, à mon sens, c’est
867 vont devenir sages dans les dix années décisives qui viennent, mais je pense qu’un certain nombre de catastrophes vont les
868 e forme de progrès. Je ne propose pas la violence qui aboutit toujours à des régimes policiers, ni le renversement des pouv
30 1977, Articles divers (1974-1977). Au tableau d’honneur de Parents : L’Avenir est notre affaire (octobre 1977)
869 ropéenne, s’adresse à nous dans son dernier livre qui vient de paraître. L’Avenir est notre affaire . Un titre qui est la
870 paraître. L’Avenir est notre affaire . Un titre qui est la profession de foi mais aussi l’avertissement que lance sans mé
871 nt que lance sans ménagement cet homme de 71 ans, qui a perdu bien des illusions sur notre monde mais pas encore sa confian
872 ceau de la démocratie, modèle idéal d’une société qui était tournée vers l’homme. Nous avons perdu cette mesure : alors, to
873 ue Esprit, avec E. Mounier, il pense à une Europe qui naîtrait de la fédération des régions. Après la guerre, il en devient
874 t de ce personnalisme communautaire, fondamental, qui fut la recherche de sa vie. Recherche de la personne, de la vocation
875 itler a répondu à la question centrale du siècle, qui est religieuse au sens élémentaire, en offrant une camaraderie, un co
876 du club de Rome (comité international de savants qui a alerté le monde sur les excès de la croissance démographique et ind
877 e de ce déclic : J’ai vu sous forme de courbes ce qui allait se passer si on continuait comme maintenant. Je me suis dit :
878 Denis de Rougemont se tourne vers le feu de bois qui crépite dans la cheminée, le regard songeur : Oui, nous avons vraimen
879 ssance qu’il faut absolument combattre. C’est lui qui mène la jeunesse à la délinquance. La dissolution de la communauté da
880 sard ! Un architecte grec contemporain, Doxiadis, qui était l’animateur de tous les urbanistes avancés, est arrivé à la fin
881 ur l’adaptation des hommes. Effrayante adaptation qui les mutile moralement. Comment veut-on que l’homme soit encore un cit
882 Contre cela aussi nous devons lutter. Et le voilà qui passe à l’action. Pour que nous connaissions la vérité, puisqu’elle s
883 emont et un physicien, Lew Kovarski (un des trois qui découvrit avec Joliot-Curie et von Halban la fission de l’atome). Cet
884 la crise de notre civilisation. Ce sont eux seuls qui ont géré la terre. Eux seuls qui en avaient les moyens. Pour que l’av
885 e sont eux seuls qui ont géré la terre. Eux seuls qui en avaient les moyens. Pour que l’avenir devienne notre affaire, l’Ét
886 u professeur courroucé. L’école ! mais c’est elle qui perpétue les vieux clichés, qui fait croire que ce qui existe a toujo
887 ! mais c’est elle qui perpétue les vieux clichés, qui fait croire que ce qui existe a toujours existé et que nous n’y pouvo
888 erpétue les vieux clichés, qui fait croire que ce qui existe a toujours existé et que nous n’y pouvons rien changer. Elle f
889 personne », il prône la plus profonde révolution qui soit : celle que chacun doit accomplir en lui-même. ao. Rougemont
31 1977, Articles divers (1974-1977). Denis de Rougemont : le retour d’un hérétique (3 octobre 1977)
890 n’a pas parlé dans le vide. Mais, parmi tous ceux qui défendent aujourd’hui les thèmes que je défendais moi-même dans les a
891 tiviste… Absolument. J’ajouterai cependant que ce qui , dans les années 1930, pouvait passer pour une intuition est devenu a
892 ous y serons contraints ; les experts américains, qui adorent les scénarios « absurdes », ont calculé que, si notre démogra
893 é, il serait le grand responsable de l’apocalypse qui se prépare… Qui pourrait en douter ? Les États, qui sont des entités
894 grand responsable de l’apocalypse qui se prépare… Qui pourrait en douter ? Les États, qui sont des entités absurdes, n’en f
895 i se prépare… Qui pourrait en douter ? Les États, qui sont des entités absurdes, n’en finissent pas de se multiplier, de fo
896 . On pourrait faire le même constat pour le Rhin, qui est actuellement pollué par cinq pays. Vous voyez donc comment l’idée
897 s jacobines — les gaullistes et les communistes — qui se retrouvent pour brandir des slogans, incapables qu’ils sont de voi
898 et régionaliste à la base… En effet, depuis Hegel qui en fit la philosophie, on sait que l’État-nation est génétiquement li
899 ste, c’est plutôt inattendu de la part d’un homme qui cite plus souvent Luther que Bakounine… Je ne suis pas anarchiste dan
900 e à l’organisation de la société. En revanche, ce qui me semble important, c’est de hâter la désacralisation de cet État. A
901 ys d’Europe. À la Libération, l’idée européenne — qui avait été un grand espoir de la Résistance — aurait dû s’imposer tout
902 ous étiez résolument anticapitaliste. Or l’Europe qui se fait aujourd’hui est une Europe taillée à la convenance des multin
903 s et mobilisatrices. Si, aujourd’hui, les princes qui nous gouvernent voulaient vraiment faire l’Europe, ils invoqueraient,
904 s’enthousiasment pour les marathons de Bruxelles, qui , dans le meilleur des cas, ne fixeront jamais que le prix du seigle o
905 aient raison de « tirer à vue » sur tout Européen qui se présenterait à eux. C’était pour le moins curieux car, d’une part,
906 ction au suffrage universel du parlement européen qui affirment que l’Europe ne sera jamais qu’une modalité de l’impérialis
907 modalité de l’impérialisme germano-américain, ce qui , à mon sens, témoigne d’une grande méconnaissance des réalités et des
908 logique. Manifestement, la prophétie est un genre qui ne vous déplaît pas… … Surtout quand je m’aperçois, quarante ans aprè
909 curieuse impression de voir tant de jeunes gens — qui n’avaient probablement pas lu une seule ligne de moi, ni d’Arnaud Dan
910 nt pas à ces petites brutes d’extrême droite pour qui « nouveau » veut dire « ancien » et pour qui l’ordre se confond avec
911 pour qui « nouveau » veut dire « ancien » et pour qui l’ordre se confond avec la tyrannie. Dans les années 1930, notre gran
912 d’abord la Révolution… Laquelle ? Les révolutions qui avaient déjà eu lieu — comme celle de 1917, en Russie, ou comme celle
913 — comme celle de 1917, en Russie, ou comme celle qui se déployait, sous nos yeux, en Allemagne — ne nous convenaient guère
914 — c’était sur le drame d’une jeunesse européenne qui avait été abusée par les grandes doctrines du moment. Cette jeunesse
915 mocratique et une élection parfaitement régulière qui avaient permis à Hitler de devenir chancelier. Au fond, je faisais pa
916 to Abetz, dont vous faites alors la connaissance, qui vous procure un poste de lecteur de français à l’Université de Francf
917 l’occasion d’un congrès de la jeunesse européenne qui s’était tenu à Francfort, et auquel participèrent des gens aussi diff
918 l’expression « ordre nouveau » parvint à Hitler, qui en fit le mauvais usage que l’on sait. Au fond, vous ne cessiez pas d
919 prolétarienne et des idéologies stato-nationales qui portaient en elles la guerre « comme la nuée porte l’orage ». À cette
920 De plus, j’ai toujours eu horreur des partis. Ce qui ne m’a pas empêché de militer un peu partoutbb afin de conjurer, de d
921 impose à notre civilisation un type de transport qui , par conséquences secondaires, amène les États à accorder une énorme
922 r une énorme importance au pétrole, donc aux pays qui en produisent. Parallèlement, Hitler, en organisant un effrayant géno
923 es producteurs de pétrole. D’où la crise de 1973, qui aboutit à la hausse des prix que l’on sait et qui, en retour, met en
924 qui aboutit à la hausse des prix que l’on sait et qui , en retour, met en péril les industries occidentales de l’automobile,
925 l les industries occidentales de l’automobile, ce qui , finalement, peut être un bienfait pour notre mode de développement.b
926 ölderlin, « Là où croît le danger, croît aussi ce qui sauve. »be D’où l’ambiguïté fondamentale de votre rapport à la polit
927 é d’une politique de la personne et de l’individu qui sont les seuls pôles de résistance à la terreur d’Étatbf. Même si le
928 , au lieu de prendre le pouvoir, c’est le pouvoir qui nous prend et nous phagocyte. Vous parlez du pouvoir comme vous parli
929 ste en Occident ce que l’on appelle la passion et qui , en fait, n’est qu’une sorte d’utopie unificatrice. Tristan en est l’
930 , face à cette certitude, il n’est pas de réalité qui vaille… Tout doit leur être subordonné et s’anéantir au nom du Pouvoi
931 la a commencé, chez nousbl, avec Philippe le Bel, qui s’est laissé persuader par ses légistes que « le roi de France est em
932 . Pensez encore à sa haine des « barons félons » ( qui jouent un si grand rôle dans toutes les versions du mythe de Tristan)
933 -ce pas ainsi qu’il désignait les hommes de parti qui risquaient de s’interposer entre lui-même et sa passion ? Tout cela p
934 ense qu’il vaut mieux être du côté du roi Marcbn, qui symbolise la légalité, que du côté de Tristan. Le drame, c’est que le
935 s dernier chez Stock, pour qu’on redécouvre celui qui fut, à la veille de la guerre, le maître à penser de toute une généra
936 humanisme chrétien et la tradition libertaire, et qui fait encore figure d’accusée pour avoir refusé le militantisme et l’e
937 ent. L’immense succès de L’Amour et l’Occident , qui se vendit à partir de 1939 dans le monde entier à près de douze milli
938 nce atténuante pour ce “penseur” à contre-courant qui , aujourd’hui, à soixante-dix ans, est tout étonné de reconnaître sa p
939 exclamation en marge. az. En marge : « C’est lui qui le dit ! » ba. Point d’interrogation en marge. bb. Deux points d’in
940 n marge de ce paragraphe. bf. « et de l’individu qui sont » souligné et marqué d’un point d’interrogation. bg. Remplacé p
32 1977, Articles divers (1974-1977). Pierre Desgraupes fait le point avec Denis de Rougemont (10 octobre 1977)
941 , j’essaie au contraire de les prévenir. C’est ce qui me distingue de beaucoup de gens qui adorent jouer les Cassandre. Ce
942 ir. C’est ce qui me distingue de beaucoup de gens qui adorent jouer les Cassandre. Ce sont d’ailleurs généralement les même
943 lleurs généralement les mêmes — vous le noterez — qui annoncent les cataclysmes et qui les provoquent ! En revanche, les éc
944 ous le noterez — qui annoncent les cataclysmes et qui les provoquent ! En revanche, les écologistes, dont je suis, pensent
945 touchera le sol… En somme, vous êtes un prophète qui espère se tromper. Exactement. C’était la formule des Latins : « Utin
946 ! » : c’est-à-dire, que les mécanismes désastreux qui sont en train de se monter puissent être arrêtés à temps ! J’écris po
947 mment vous décrivez ces « mécanismes désastreux » qui nous menacent. Ce n’est pas vous que j’étonnerai en disant qu’il y en
948 y en a beaucoup et qu’on en a beaucoup parlé. Ce qui m’intéresse moi, c’est de dénoncer la fausseté de la métaphore dont o
949 ue est une croissance autorégulée ; c’est même ce qui la définit : les plantes et les corps ont leurs chromosomes, leurs ce
950 t les corps ont leurs chromosomes, leurs cellules qui sont programmés, comme on dit, pour pousser, croître, se développer,
951 s, vous le savez, sont limitées. Mais, justement, qui peut décider de cela ? Nous, sinon qui d’autre ? C’est bien là ce que
952 justement, qui peut décider de cela ? Nous, sinon qui d’autre ? C’est bien là ce que je veux dire. L’avenir dépend entièrem
953 té commence quand l’homme se demande : “Qu’est-ce qui va arriver ?” au lieu de se demander : “Que puis-je faire ?” » Permet
954 propos sur l’avenir, ce n’est quand même pas Dieu qui remplit sans nous consulter les réservoirs de nos voitures, c’est le
955 ttention, nous aurons l’air de quoi ? Regardez ce qui s’est passé il y a deux mois à New York quand le courant est venu à m
956 sur la base d’une société formée d’États-nations qui se disent tous plus souverains les uns que les autres, qui s’imaginen
957 sent tous plus souverains les uns que les autres, qui s’imaginent chacun qu’ils vont pouvoir continuer à augmenter leurs ex
958 e d’imaginer sans rire que les 175 États-nations, qui aujourd’hui se partagent la planète sans aucun reste, puissent tous,
959 s exportations aux dépens de leurs importations ! Qui fera les différences ? Or, le plus aberrant est que les gens ne se po
960 que est celui des centrales nucléaires. Les États qui ont augmenté leur PNB se mettent à vendre des centrales nucléaires —
961 moi, le déluge… » Je vous l’ai dit, ce sont ceux qui annoncent les catastrophes qui les fabriquent. Il est évident que les
962 dit, ce sont ceux qui annoncent les catastrophes qui les fabriquent. Il est évident que les pays qui achètent des centrale
963 s qui les fabriquent. Il est évident que les pays qui achètent des centrales de retraitement de plutonium, alors qu’ils n’o
964 traiter, ne s’amusent pas à faire de tels achats, qui sont extrêmement coûteux, pour rien. C’est parce qu’ainsi ils produis
965 tous pays racontent, mais il n’y en a pas un seul qui y croit ! Ils ne pourraient pas se regarder entre eux dans les yeux s
966 is plus ou moins intimement beaucoup de ces gens, qui sont des gens honnêtes et détestent mentir dans la vie courante ; mai
967 ’est plus un problème, ça a été réglé. » Les gens qui profèrent ces mensonges savent très bien que — comme le dit un prover
968 rien, ils continuent à mentir. C’est justement ce qui me frappe dans tout cela : c’est que des gens qui se connaissent tous
969 qui me frappe dans tout cela : c’est que des gens qui se connaissent tous entre eux se comportent comme s’ils s’étaient mis
970 né, qu’il existait chez nous un conseil d’experts qui conseillait le gouvernement fédéral en matière d’énergie ; c’était la
971 on avec éclat d’un certain professeur de physique qui faisait partie de cette commission. Il a dit : « Je ne veux plus cont
972 côté, a-t-il dit en substance, il y a des savants qui affirment que tous les risques du nucléaire sont maîtrisés ; de l’aut
973  ; de l’autre, il y en a tout autant, sinon plus, qui affirment le contraire. Qui croire ? » Et sa réponse a été : « C’est
974 t autant, sinon plus, qui affirment le contraire. Qui croire ? » Et sa réponse a été : « C’est très simple, il faut croire
975 a été : « C’est très simple, il faut croire ceux qui n’ont rien à gagner de la position qu’ils prennent. » Et il observe q
976 t il observe que sur les vingt-six universitaires qui ont signé la déclaration en faveur des centrales, quatorze occupent e
977 s consultent… Tout cela nous ramène à la question qui nous intéresse et dont nous parlions au début de cet entretien : quel
978 s et qu’on va manquer d’énergie. Or cet argument, qui pouvait, à la limite, impressionner il y a encore cinq ans, parce que
979 impératif à cela. Ce sont encore des « experts » qui ont inventé cet « impératif » ! Ils nous disent : « Si on n’a pas rec
980 oindre mal. D’ailleurs, écoutez. Faites un calcul qui est tout bête : selon les experts, la consommation d’électricité doub
981 sent pas afficher ? La puissance. La puissance de qui  ? La leur ? Ce serait dérisoire. Non, pas la leur. Ce serait en effet
982 C’est un mythe extrêmement puissant et nocif. Car qui ou quoi est l’État-nation ? À voir les choses de près, c’est une chos
983 ? Les fonctionnaires ne font qu’incarner ce mythe qui est autrement plus puissant qu’eux. C’est un mythe dévorant. Prenez,
984 dévorant. Prenez, par exemple, l’idée de l’unité qui est déjà chez les rois de France mais se développe surtout pendant la
985 que ce sont là des divagations, rappelez-vous ce qui s’est passé, chez les esprits les plus intelligents, au moment de la
986 le de la démocratie qu’étaient les cités grecques qui se maintenaient volontairement petites. Le plus bel exemple, c’est la
987 exemple, c’est la cité de Milet, sur la mer Égée, qui avait eu la sagesse de savoir que si elle dépassait mettons 100 000 h
988 ndrait la tâche de quelques spécialistes délégués qui s’imposeraient et les autres n’auraient plus rien à faire que subir s
989 le, la communauté de Longo Maï en Haute-Provence, qui , sans du tout connaître l’exemple de Milet, a retrouvé cette sagesse.
990 dizaine de communautés répandues sur quatre pays qui restent plus ou moins en relation ; par exemple, ils avaient d’immens
991 s il n’est pas si naïf. Dans mon pays, la Suisse, qui est composée de nombreux petits cantons, nous avons eu longtemps ce q
992 appelons « Landsgemeinde », l’assemblée de canton qui se tenait sur la place publique. Il y a encore plusieurs cantons — le
993 y a encore plusieurs cantons — les plus petits — qui en ont conservé la coutume. Bien sûr, vous allez me dire qu’aujourd’h
994 llez me dire qu’aujourd’hui il y a l’électronique qui a tout changé et que le chef de l’État peut se faire entendre à des m
995 faire entendre à des milliers de kilomètres. Mais qui peut lui répondre ? Qui peut lever la main et dire : « À moi la parol
996 liers de kilomètres. Mais qui peut lui répondre ? Qui peut lever la main et dire : « À moi la parole. » Et la démocratie es
997 t y avoir de vraie démocratie dans des dimensions qui sont incompatibles avec le dialogue ou, du moins, la concertation. Do
998 des bêtises. Regardez la Confédération helvétique qui est pour moi un modèle assez proche de la cité grecque. Elle s’est fo
999 le voulaient. Pas pour faire une grande puissance qui irait ensuite dévaster tout autour d’elle, comme ont voulu le faire l
1000 rois de France, de Castille et d’Angleterre, pour qui faire l’unité c’était conquérir le plus de gens qu’on pouvait, deveni
1001 ors voilà encore un autre modèle de quelque chose qui a duré maintenant sept-cents ans et qui fonctionne très bien, parce q
1002 que chose qui a duré maintenant sept-cents ans et qui fonctionne très bien, parce que ça reste petit. Mais on entend parfoi
1003 r central capable de résoudre nombre de problèmes qui ne peuvent être résolus au niveau, trop étroit, des cantons. C’est vr
1004 est né. En 1934, nous avions inventé une formule qui est devenue banale par la suite : pour qualifier déjà l’État-nation,
1005 on — et en particulier la région transfrontalière qui est le cas le plus fréquent en Europe — me paraît être le cadre le mi
1006 s à résoudre d’urgence. Regardez, par exemple, ce qui se passe avec la pollution des eaux. Le Léman, le Rhin, la Manche son
1007 s se renvoient la balle et créent des commissions qui sont, bien entendu, impuissantes parce qu’au-delà il y a quatre souve
1008 qu’au-delà il y a quatre souverainetés nationales qui se défient. Mais les poissons se moquent bien des souverainetés natio
1009 dant longtemps j’ai été moins écouté que des gens qui ont fait des palinodies éclatantes, ce qui attire beaucoup l’attentio
1010 s gens qui ont fait des palinodies éclatantes, ce qui attire beaucoup l’attention. Mais vous notez qu’aujourd’hui, après tr
1011 ans, ils disent soudain la même chose que moi. Ce qui fait beaucoup d’effet mais ne leur donne pas une grande crédibilité p
1012 iver maintenant un certain nombre de catastrophes qui seront assez mineures au début, comme la crise du pétrole en 1973, qu
1013 ures au début, comme la crise du pétrole en 1973, qui est le type de ce que j’appelle une catastrophe enseignante ; parce q
1014 Quelques petits nuages de sodium ou de plutonium qui iront se balader sur des villes comme c’est déjà arrivé sans qu’on no
1015 l’abri de tout ça en disant : « Ce n’est pas moi qui le veux, ce sont les impératifs. » Exactement comme Adam, quand Dieu
1016 tualisant, quelques-uns des thèmes personnalistes qui l’ont rendu célèbre il y a plus de trente ans et font de lui aujourd’
33 1977, Articles divers (1974-1977). L’Avenir est votre affaire (11 octobre 1977)
1017 ntrales de retraitement des déchets à des nations qui ne peuvent rien en faire, sinon en tirer du plutonium. On leur fait p
1018 une bombe avec cinq à six kilos de plutonium. Ce qui permettra à n’importe quel État d’exercer un chantage terrible ; de m
1019 lus fort que les chefs d’État. C’est surtout cela qui me fait peur… Et d’après vous, les États-nations ne peuvent plus rien
1020 re seize dans un rayon de quarante kilomètres, ce qui est tout simplement dément ! Notez que si vous discutez, dans le priv
1021 sur les habitants des régions. Les gouvernements, qui crèvent de peur devant n’importe quelle vérité, font les matamores, a
1022 omme contemporain, piégé par la technique et ceux qui en vivent, s’est trompé sur ses vrais besoins. « Il n’y a d’impératif
1023 r contre les technocrates, contre les producteurs qui « essaient de nous faire prendre leurs désirs pour nos fatalités ». L
1024 . La vraie politique de l’énergie n’est pas celle qui se calculera en fonction du produit national brut — cette funeste ido
1025 uneste idole des États contemporains — mais celle qui s’articulera aux « conceptions de l’homme et de son rôle sur la terre
1026 onceptions de l’homme et de son rôle sur la terre qui nous animent en vérité ». Un exemple particulièrement frappant de la
1027 dé, on devrait toujours se demander : « Qu’est-ce qui arriverait si ça réussissait ? » Et plus prosaïquement encore : « À q
1028 18 % du territoire de la Hollande est bétonné, ce qui est une catastrophe du point de vue écologique. Quand on pense que Po
1029 ive ingénuité à propos de Concorde, « le mensonge qui va plus vite que le son », comme il dit, ce somptueux gadget de seize
1030 is de Rougemont propose la solution toute simple, qui économise seize milliards. Il suffirait de supprimer les formalités d
1031 semblables succès de librairie à des « penseurs » qui n’ont cessé de se renier et barbotent dans les plus inénarrables pali
1032 flatte d’avoir souvent été à contre-courant ! Ce qui est en jeu dans ce livre, comme dans toute mon œuvre, va tout de même
1033 ine de pages, où je prévoyais certains événements qui pouvaient se passer, notamment dans le monde arabe. Puis vint la guer
1034 s le monde arabe. Puis vint la guerre du Kippour, qui vérifiait mon analyse tout en m’obligeant à jeter à la corbeille ce q
1035 pas me donner l’air de prophétiser après coup ce qui s’était produit ! En un sens, je suis content de ce long temps de mat
1036 s, je suis content de ce long temps de maturation qui a été nécessaire, car j’ai pu prendre de la distance par rapport à l’
1037 avons de nos jours une opposition entre les gens qui veulent la puissance (au niveau des États-nations surtout) et ceux qu
1038 nce (au niveau des États-nations surtout) et ceux qui veulent la liberté des personnes. On dit qu’il n’y a pas de liberté s
1039 ation. Tout en voyant très clairement les menaces qui pèsent sur l’humanité, l’ardent défenseur de la personne, de l’Europe
1040 désormais impensable entre des pays européens, ce qui représente un immense progrès par rapport au passé ! Je relèverai ens
1041 vain de notoriété internationale, un intellectuel qui pourrait se contenter de déguster une gloire confortable. Et voici qu
1042 ant de courage que d’efficacité aux grands périls qui menacent notre planète et met en évidence les conditions du seul futu
1043 nce les conditions du seul futur possible : celui qui verra l’homme prendre en charge sa propre destinée, projeter et assum
1044 ropre destinée, projeter et assumer des finalités qui ne seront plus celles des technocrates, mais de la personne. »
34 1977, Articles divers (1974-1977). « Je suis un pessimiste actif » (17 octobre 1977)
1045 le sourire. Pas banal. Les diseurs d’avenir, ceux qui ne se sont jamais trompés (Denis de Rougemont a dénoncé en 1932 le pé
1046 calme suisse (il est né à Neuchâtel) et son livre qui vient de paraître aux éditions Stock a un beau titre : L’Avenir est
1047 c très volontiers cédé la place à un jeune auteur qui s’appelait Charles de Gaulle et qui publiait La France et son armée.
1048 jeune auteur qui s’appelait Charles de Gaulle et qui publiait La France et son armée. Entre L’Amour et l’Occident qui es
1049 rance et son armée. Entre L’Amour et l’Occident qui est une méditation sur le mythe de Tristan et Iseut, sur le goût des
1050 ’ai toujours combattu pour le régionalisme, et ce qui me fait plaisir c’est que la réalité commence à me rejoindre ! Je sui
1051 miste aujourd’hui qu’il y a cinq ans. Regardez ce qui mobilise les foules : les mouvements autonomistes, la lutte antinuclé
1052 ’un peuple commence quand on se demande qu’est-ce qui va arriver au lieu de se demander : Qu’est-ce que je vais faire ? » J
1053 ais je crois que l’on peut construire une société qui le corrompe le moins possible. Ce qui est grave actuellement c’est qu
1054 une société qui le corrompe le moins possible. Ce qui est grave actuellement c’est que les vrais problèmes ne sont pas du t
35 1977, Articles divers (1974-1977). « L’avenir, c’est notre affaire ! » (18 octobre 1977)
1055 uand quelqu’un prend le pouvoir, c’est le pouvoir qui le prend. Il suffit qu’un homme s’assoie dans les fauteuils de l’État
1056 tez le terme : « révolution » ? Ces révolutions qui nivellent… Comme Lénine le constatait quelques mois avant de prend
1057 norer. La révolution de 1789 a créé l’État-nation qui , ensuite, s’est répandu dans le monde. La révolution russe, elle, a c
1058 . La révolution russe, elle, a créé l’État-parti, qui concentre encore plus de moyens en un centre de décision encore plus
1059 me méfie des révolutions… Le « toujours plus » qui conduit à l’absurde J’aimerais ajouter que l’État-nation, en invoq
1060 t utile aux États, non aux peuples. L’État-parti, qui domine à l’Est, a suivi la même voie. C’est d’autant plus dangereux q
1061 lace, obéit à des impératifs de « toujours plus » qui conduisent à l’absurde. D’autre part, la puissance, aux mains de gouv
1062 os mains [sic] (1977) : il y a un fil conducteur qui relie ces œuvres. Comment voyez-vous votre propre évolution ? Personn
1063 r un agent allemand chargé de leur faire peur… Ce qui est tragique, c’est que l’esprit jacobin règne encore et qu’on omet s
1064 s votre livre, les nombreux mouvements populaires qui se sont créés au cours de ces dernières années. Vous les considérez c
1065 st faite la « puissance » ? Il y a des mouvements qui sont de tous les temps. Les « hippies », par exemple, dont les chroni
1066 je me méfie des attaques frontales contre l’État, qui renforcent toujours ce dernier. Je suis persuadé, en revanche, qu’une
1067  : « Dans son dernier livre, le célèbre essayiste qui , depuis plus de quarante ans, défend l’homme libre et multiple contre
36 1977, Articles divers (1974-1977). La fonction et la structure de la ville future (décembre 1977)
1068 on des jargons et l’oubli des finalités communes, qui font échouer l’entreprise dans l’anarchie et la dispersion. Les homme
1069 transfiguration de la ville à « mesure d’homme » qui devient « mesure d’ange » (Apoc – 21,17.) C’est la « nouvelle Jérusal
1070 descend du Ciel « préparée comme une épouse », et qui n’a besoin « ni du Soleil ni de la Lune pour l’éclairer, car la gloir
1071 ministres, mais au besoins humains des citoyens, qui constituent l’impératif prioritaire, que les technologies doivent ser
1072 au milieu : toutes les tensions entre ces entités qui font la société européenne se concrétisent sur la place. Aujourd’hui
1073 rd’hui les villes que leurs habitants ont subies, qui ont été faites pour le profit de quelques-uns, avec l’aide forcée de
1074 uns, avec l’aide forcée de tous les contribuables qui avaient oublié d’être des citoyens. Nous aurons, demain — c’est mon v
37 1977, Articles divers (1974-1977). Demain le soleil (20 décembre 1977)
1075 sions d’aujourd’hui. C’est un prophète pessimiste qui dit volontiers : « Plaise aux dieux que je sois un faux prophète ». I
1076 es d’Europe , Journal d’une époque , et le livre qui lui a apporté la célébrité et qui est aujourd’hui un grand classique,
1077 e , et le livre qui lui a apporté la célébrité et qui est aujourd’hui un grand classique, L’Amour et l’Occident . Ce succè
1078 er S’il fallait que j’explique très simplement qui vous êtes à un enfant, par exemple, que devrais-je lui dire ? D’abord
1079 rais-je lui dire ? D’abord, que je suis quelqu’un qui voudrait qu’il vive dans un monde agréable quand il sera grand. Ensui
1080 nnées 1930, j’ai fondé le mouvement personnaliste qui a fait un peu de bruit à l’époque, mais qui est resté ce qu’on appell
1081 liste qui a fait un peu de bruit à l’époque, mais qui est resté ce qu’on appelle aujourd’hui un groupuscule. Quand la guerr
1082 ns eu des rapports avec le fameux Orchestre rouge qui passait via la Suisse des renseignements aux Alliés. Suisses, Françai
1083 une démocratie libérale dirigée par les partis et qui paraissait fatalement glisser soit vers une complète anarchie, soit v
1084 ’État, né de la résistance aux États totalitaires qui se dressaient : Russie stalinienne, Italie fasciste, Allemagne nation
1085 la guerre. Elle est inévitable entre des nations qui poursuivent des chimères identiques. Vous disiez, vous écriviez déjà
1086 t « Que puis-je faire ? », plutôt que « Qu’est-ce qui va arriver ? » Vous refusez de voir l’intervention du doigt de Dieu d
1087 rouve trop facile qu’on appelle volonté divine ce qui nous échappe. Que peut l’homme sur son destin ? Par sa science et son
1088 iver. La véritable futurologie devrait prévoir ce qui met notre avenir en danger. Ce sont des super-cerveaux, des savants r
1089 des savants rassemblés dans de doctes séminaires qui doivent donc imaginer ce que demain pourrait être ? Le club de Rome l
1090 rdie est de mon ami Bertrand de Jouvenel. Tout ce qui n’est pas calculable reste prévisible par la sensibilité. Ces indicat
1091 faite Denis de Rougemont, la menace apocalyptique qui pèse sur l’avenir est une conséquence du passage d’Hitler sur la terr
1092 outé Denis de Rougemont m’expliquer comment Ford, qui généralisa l’automobile, et Hitler se sont trouvés être les alliés ob
1093 quer le futur. Il y a d’abord le jeune Henry Ford qui trahit ce rêve d’adolescent (une voiture pour être libre) lorsqu’il s
1094 alement dans le sous-sol des pays sous-développés qui étaient maîtres de la richesse du monde et qui n’en avaient pas consc
1095 és qui étaient maîtres de la richesse du monde et qui n’en avaient pas conscience. Nous sommes loin d’Hitler… Au contraire,
1096 raison à ce besoin et Hitler a apporté la sienne, qui était aberrante, à l’Allemagne : le racisme, il en arriva à extermine
1097 ces agencements de l’Histoire dont on se demande qui a pu les imaginer. Ford part d’une extrémité, Hitler de l’autre. Ils
1098 es contraint à l’utilisation du nucléaire, ce mot qui sème l’épouvante à tort ou à raison. Les parties de campagne casquées
1099 s sont puériles et organisées par des jeunes gens qui ne voient pas plus loin que le bout de leur contestation. Ils sont co
1100 ougemont, lui, a le droit de parler d’un problème qui est le centre de ses préoccupations. Voilà des années qu’il étudie, l
1101 froid et les ténèbres ? Ne parlons pas d’un choix qui nous est imposé, qui tombe du ciel : nous sommes les seuls responsabl
1102  ? Ne parlons pas d’un choix qui nous est imposé, qui tombe du ciel : nous sommes les seuls responsables car nous avons cré
1103 ar nous avons créé une société vorace en énergie. Qui nous a obligés à respecter la religion qui consiste à doubler tous le
1104 ergie. Qui nous a obligés à respecter la religion qui consiste à doubler tous les dix ans la consommation en électricité. V
1105 le progrès selon vos vœux ? J’appelle progrès ce qui est favorable à un meilleur épanouissement des personnes. Comment les
1106 celles où seront enfouis les déchets radioactifs qui auront, auparavant, ruiné l’humanité. Denis de Rougemont est reparti
1107 e FIN, mais À SUIVRE au bas de la longue histoire qui s’écrit depuis des siècles. bz. Rougemont Denis de, « [Entretien]
38 1977, Articles divers (1974-1977). Écologie, régionalisme, fédéralisme : l’avenir selon Denis de Rougemont (30 décembre 1977)
1108 ’il appelle la « religion de la croissance : ceux qui croient qu’on peut continuer ce qu’on a fait depuis vingt-cinq ans, s
1109 mauvais sens du terme ». Les différents éléments qui font marcher le système industriel depuis le xixe siècle et qui inte
1110 r le système industriel depuis le xixe siècle et qui interagissent entre eux sont aujourd’hui bloqués : que ce soit l’éner
1111 plus. Ils effectuent quotidiennement des travaux qui ne les intéressent pas, des travaux ingrats au sens exact du terme, c
1112 vaux ingrats au sens exact du terme, c’est-à-dire qui ne leur apportent aucune gratification. Ils ne sont pas heureux et il
1113 ni le chômage ni l’inflation. C’est saint Thomas qui disait que « le fini n’est pas capable d’infini ». N’en est-il pas de
1114 urelles ? Et les hommes politiques le savent bien qui l’avouent en privé et qui, en public, prêchent la croissance sans fin
1115 litiques le savent bien qui l’avouent en privé et qui , en public, prêchent la croissance sans fin. Après moi le déluge, sem
1116 s ont été marqués par les « économies d’échelle » qui ont conduit à une concentration toujours de plus en plus grande et à
1117 ait plus de mal après que pendant la colonisation qui n’a duré en fin de compte que quatre-vingts ans. Le fossé s’est accru
1118 tout. Et particulièrement de l’État-nation, celui qui dit : Le roi, c’est moi. Alors qu’en Suisse quand on dit le souverain
1119 on parle. Ce sont les États-nations et eux seuls, qui ont géré la terre. Ils ont géré et détruit les ressources en vue de l
1120 et la lutte contre la pollution. C’est l’Amérique qui a exporté l’inflation, née de la guerre du Vietnam, en Europe : seule
1121 sont les caractéristiques de la droite, qu’est-ce qui la différencie du Parti communiste français ? Il y a un véritable cha