1
tion des cultures nationales [commentaires] (1982)
a
Un des buts principaux de notre colloque était d’examiner pourquoi
2
re liquidée… Mais je ne peux pas m’en tenir là. J’
ai
réfléchi à ce que vous avez dit ici, les uns et les autres. J’ai aper
3
ux pas m’en tenir là. J’ai réfléchi à ce que vous
avez
dit ici, les uns et les autres. J’ai aperçu de nouvelles manières, no
4
e que vous avez dit ici, les uns et les autres. J’
ai
aperçu de nouvelles manières, non pas d’établir des compromis mais au
5
tourner, à certains égards, l’interdiction que j’
avais
posée au départ, en parlant de l’inexistence, voire de l’impossibilit
6
aire un cercle carré ou c’est vouloir, comme je l’
ai
dit souvent, fonder une amicale des misanthropes. On peut écrire ces
7
je veux dire de la Paix. Les divers travaux que j’
ai
pu entendre ici m’ont permis d’entrevoir comment on pourrait tout de
8
ix. Les divers travaux que j’ai pu entendre ici m’
ont
permis d’entrevoir comment on pourrait tout de même rendre un certain
9
l de l’expression de culture nationale : l’Europe
a
existé et elle a été cultivée bien avant l’existence de nos premiers
10
de culture nationale : l’Europe a existé et elle
a
été cultivée bien avant l’existence de nos premiers États. Il ne faut
11
de notre ère par la confluence des sources que j’
ai
énumérées tout à l’heure, alors que les plus anciens États que l’on t
12
ècle pour voir se former les premiers États que j’
ai
appelés États-nations. C’est la France de Philippe le Bel, l’Espagne
13
’Angleterre des petits rois autour de Londres qui
ont
fusionné. Le premier noyau de la Confédération suisse se forme en 129
14
e, tout le monde les connaît. C’est ce que Valéry
a
résumé dans la formule : Tout ce qui descend d’Athènes, de Rome et de
15
es exemples, portant surtout sur l’usage que l’on
a
fait de la culture commune dans nos différents pays : usage politique
16
communautés, ou mainteneurs de communautés. Vous
avez
le cas de la Hongrie, l’un des tout premiers États formés en Europe.
17
des tout premiers États formés en Europe. Nous l’
avons
vu lors des exposés de MM. Boldizsar et Molnar, il y a là un cas uniq
18
lui, sa culture était sa raison d’être. Mais vous
avez
à l’extrême inverse la Suisse, qui n’a pas de culture nationale, mais
19
is vous avez à l’extrême inverse la Suisse, qui n’
a
pas de culture nationale, mais une confédération de plusieurs ethnies
20
s, langues et traditions historiques. La Suisse n’
a
pas de culture nationale. Elle a pourtant vécu sans faille, depuis le
21
ues. La Suisse n’a pas de culture nationale. Elle
a
pourtant vécu sans faille, depuis le xiiie siècle. La culture n’a pa
22
ans faille, depuis le xiiie siècle. La culture n’
a
pas été son élément formateur. Ce qui a été son élément formateur, c’
23
culture n’a pas été son élément formateur. Ce qui
a
été son élément formateur, c’est une sorte de philosophie politique q
24
u deux cas inverses très intéressants. La Pologne
a
pour particularité unique d’être un État slave de population, mais ro
25
rance qui, contrairement à l’Europe, comme nous l’
a
expliqué M. Diez del Corral, a toujours eu une royauté unique, décidé
26
rope, comme nous l’a expliqué M. Diez del Corral,
a
toujours eu une royauté unique, décidée à tout unifier par la force e
27
nous l’a expliqué M. Diez del Corral, a toujours
eu
une royauté unique, décidée à tout unifier par la force et par la rus
28
la ruse. C’est vraiment la royauté française qui
a
fait la France, sans jamais obtenir, je crois, le libre consentement
29
s, le libre consentement des parties annexées. Ça
a
été fait par la conquête, le non-respect des contrats sacrés (cas de
30
sens ancien, dont la grande culture occitane, qui
a
été étouffée, et d’autres comme la bretonne, la provençale ou l’allem
31
lois de la « République une et indivisible ». On
a
beaucoup parlé de culture nationale en France. C’est le seul pays au
32
ne phrase souvent répétée par Michel Debré, qu’il
a
encore utilisée dernièrement dans Le Monde, et selon laquelle l’école
33
er des citoyens français. C’est tout juste s’il n’
a
pas parlé de sujets… Donc, en France, on arrive à une espèce de cultu
34
i qu’elle est entièrement politisée, comme nous l’
a
très bien montré hier Stanley Hoffmann. La culture française est nati
35
a mesure où elle est politisée, à tel point qu’on
a
l’impression quelquefois, à entendre les discussions entre la gauche
36
à la santé de la nation réelle. À l’inverse, nous
avons
le cas de l’Espagne. Nous avons vu qu’elle a eu plusieurs monarchies,
37
À l’inverse, nous avons le cas de l’Espagne. Nous
avons
vu qu’elle a eu plusieurs monarchies, que la « monarchie espagnole »
38
avons le cas de l’Espagne. Nous avons vu qu’elle
a
eu plusieurs monarchies, que la « monarchie espagnole » est multiple,
39
vons le cas de l’Espagne. Nous avons vu qu’elle a
eu
plusieurs monarchies, que la « monarchie espagnole » est multiple, pl
40
depuis ses origines, depuis le Moyen Âge. Il n’y
a
jamais eu volonté d’effacer les différences. Et encore plus différen
41
es origines, depuis le Moyen Âge. Il n’y a jamais
eu
volonté d’effacer les différences. Et encore plus différent du modèl
42
ichienne. L’Empire austro-hongrois ne pouvait pas
avoir
de culture nationale pour la bonne raison, comme on l’a rappelé ce ma
43
ulture nationale pour la bonne raison, comme on l’
a
rappelé ce matin, qu’il réunissait douze nationalités. Qu’aurait-il f
44
ce matin, qu’il réunissait douze nationalités. Qu’
aurait
-il fallu choisir comme culture nationale à imposer à toutes les autre
45
utes les autres ? C’était impensable. Aussi, ça n’
a
pas été fait, et le résultat est que ces douze cultures nationales on
46
le résultat est que ces douze cultures nationales
ont
continué, chacune pour elle-même, certaines avec un grand succès même
47
-hongrois. Grâce à ce fédéralisme sous-jacent, on
a
pu arriver à un développement culturel merveilleux et vraiment très e
48
pée autour de Vienne, j’englobe ici tous ceux qui
ont
relevé de l’Empire « K. und K. » : Rilke, Kafka, Hugo von Hofmannstha
49
librement les unes avec les autres. Ensuite vous
avez
eu un très remarquable exposé de M. Romano sur l’Italie, où il nous a
50
ement les unes avec les autres. Ensuite vous avez
eu
un très remarquable exposé de M. Romano sur l’Italie, où il nous a fa
51
able exposé de M. Romano sur l’Italie, où il nous
a
fait remarquer que la culture en Italie, quand l’Italie a fait son un
52
emarquer que la culture en Italie, quand l’Italie
a
fait son unité, selon l’idée alors régnante que toute nation « fait s
53
t son unité » comme un homme « fait sa puberté »,
a
traversé une sérieuse crise de développement. Un certain nombre de gr
54
ment. Un certain nombre de grands hommes italiens
ont
prétendu reconquérir l’unité culturelle du pays, alors qu’ils ne fais
55
’Allemagne, le cas n’est pas trop différent. Vous
avez
une grande culture germanique, on peut le dire, parce que l’accent es
56
mpire de nostalgie reconstitué. Aujourd’hui, vous
avez
cette même culture qui est le seul lien communautaire entre des gens
57
aire. Les moyens du dialogue, je crois que je les
ai
indiqués, c’est cette culture une et diverse qui permet à toutes sort
58
tout dialogue entre les différentes nations que j’
ai
énumérées, avec toutes leurs diversités, c’est la reconnaissance du f
59
langage commun, condition de tout dialogue. Nous
avons
tous vu, depuis trente ans, qu’on ne peut pas faire l’Europe sur la b
60
parce que ce n’est pas la bonne base. Jean Monnet
a
pensé que, si l’on maîtrisait les relations économiques en Europe, la
61
e reste suivraient, mais le général de Gaulle lui
a
bien fait voir que, pour lui, les intérêts économiques étaient second
62
de l’homme en référence permanente à ce que nous
avons
tous en commun, à nos valeurs de base, d’où qu’elles viennent. Voilà
63
Pourquoi pas un colloque sur chacune d’elles ?
a
. Rougemont Denis de, « [Commentaires] L’Europe une et diverse : la c
64
récédent, un sentier qu’il doit inventer et qui n’
a
été foulé par personne avant lui. Il doit y avancer par la foi, dans
65
lisme déchaîné, l’égoïsme et l’absence de civisme
ont
permis un développement monstrueux des États et pas seulement des Éta
66
excessive à l’imitation de l’État napoléonien qui
a
été copié presque par tout le monde. Je l’ai dit il y a longtemps, «
67
n qui a été copié presque par tout le monde. Je l’
ai
dit il y a longtemps, « c’est avec la poussière des individus que les
68
ntre le nucléaire civil et le nucléaire militaire
a
été par ailleurs démontrée. Bien entendu, tout cela sert à faire des
69
ues et les fusées occidentales ? C’est ce qu’on m’
a
répondu récemment à Paris, lorsque je demandais aux responsables de l
70
majeur qui pourrait arriver à Creys-Malville. On
a
refusé de me répondre en me disant que la probabilité était faible, e
71
emont (25 mai 1982)h Dans l’interview que vous
avez
publiée le 25 mars et que j’avais accordée à Richard Labévière, il y
72
terview que vous avez publiée le 25 mars et que j’
avais
accordée à Richard Labévière, il y a plusieurs mois, se sont glissées
73
me fait dire exactement le contraire de ce que j’
ai
dit et souvent écrit. Voici la phrase telle qu’elle doit être lue : «
74
« Que puis-je faire ? » » Les dix mots soulignés
ont
été omis. 2. À l’avant-dernière question concernant la menace pour la
75
générateur de Creys-Malville : il est exact que j’
ai
mentionné le refus de réponse que m’ont opposé les responsables de l’
76
xact que j’ai mentionné le refus de réponse que m’
ont
opposé les responsables de l’EDF, affirmant que la probabilité d’acci
77
nnent compte. Mais ce ne sont pas les mêmes qui m’
ont
opposé le danger « cent fois plus grand » présenté par les fusées ato
78
x silos du plateau d’Albion sur lequel les Russes
ont
pointé leurs SS20. Ce danger « cent fois plus grand » a été signalé p
79
té leurs SS20. Ce danger « cent fois plus grand »
a
été signalé par M. Francis Perrin, de l’Académie des sciences, physic
80
ncien haut-commissaire à l’énergie atomique. Il m’
a
paru important de préciser qu’une révélation aussi sensationnelle pro
81
« Vous
avez
dit Rolling Stones ? » (28 mai 1982)i Sondage-minute, sondage-clin
82
ougemont Denis de, « [Réponse à une enquête] Vous
avez
dit Rolling Stones ? », L’Hebdo, Lausanne, 28 mai 1982, p. 11.
83
volonté de défense de l’Occident. À tout cela, j’
ai
envie de répondre que cette campagne contre les pacifistes est elle-m
84
es armes nucléaires, premier moyen que les hommes
aient
inventé pour anéantir toute l’humanité. Sans parade ? Il n’y a aucune
85
r anéantir toute l’humanité. Sans parade ? Il n’y
a
aucune espèce de parade possible à la guerre nucléaire. Ce qu’il y a
86
elle, des deux côtés, d’essayer ces armements qui
ont
coûté à l’humanité en 1981, 600 milliards de dollars. On n’avait enco
87
’humanité en 1981, 600 milliards de dollars. On n’
avait
encore jamais dépensé une somme pareille. L’industrie des armements d
88
ayer et pour ce qui est de l’arsenal atomique, on
a
trouvé récemment les bombes dites tactiques. Il s’agit de l’idée, qui
89
amp de bataille — par exemple à l’Europe, comme l’
a
si aimablement dit le président Reagan. Eh bien, c’est de la folie !
90
’est de la folie ! Le groupe de Bellerive — que j’
ai
contribué à fonder et qui comprend des savants atomistes de premier o
91
comprend des savants atomistes de premier ordre —
a
publié un manifeste contre l’illusion d’une limitation de l’escalade
92
ereux que le pacifisme. Alors, que faire ? Il n’y
a
qu’un moyen d’éviter la tempête nucléaire en Europe, à mon sens et à
93
s étaient jamais tentés d’occuper l’Europe, ils n’
auraient
pas intérêt à se faire précéder par leurs bombes atomiques, qui leur
94
il faudrait aussi recourir à la défense civile. J’
ai
fait naguère une proposition qui est peut-être moins comique qu’il n’
95
es énormes pour acheter des chars modernes et des
avions
vite démodés, on pourrait dépenser un peu d’argent pour enseigner le
96
usqu’à avancer ceci : les seuls qui soient sûrs d’
avoir
raison sont ceux qui disent : désarmons-nous, commençons les premiers
97
eux mois, ou dans deux ans, je me demande si nous
aurions
le temps de préparer techniquement cette défense non violente. Parce
98
t à imaginer des procédés de résistance au mal. J’
ai
été frappé, depuis longtemps, par ces deux versets des Proverbes (Pro
99
26 avril (n° 911) écrit, à propos du procès que j’
ai
intenté à Dominique Grisoni : Le malentendu était à son comble. Roug
100
e à tous les écrits dans lesquels, dès 1932, je n’
ai
cessé d’attaquer les totalitaires, noirs, rouges ou bruns, et le « fa
101
e. Œuvre de longue haleine, direz-vous ? — Il n’y
a
donc pas une seule minute à perdre. m. Rougemont Denis de, « Des r
102
é 1982)d e Vous êtes considéré comme celui qui
a
lancé l’idée du régionalisme. Pourquoi vous occupez-vous plus particu
103
culièrement des régions ? Ces dernières années, j’
ai
proposé à Ecoropa de s’occuper des régions, d’établir un réseau entre
104
effet, lorsque je suis arrivé à Paris en 1931, j’
ai
fait la connaissance d’une trentaine de jeunes gens de mon âge, entre
105
i dure encore, et L’Ordre nouveau , nom qui nous
a
été volé par qui vous savez ! Pour nous, il s’agissait de « l’ordre v
106
éveloppée dans le livre de Théodore Roszak et qui
a
inspiré le n° 3 de notre revue. Mais on ne connaît pas toujours ses p
107
ectivistes. Nous sommes personnalistes. » Mounier
a
vite parlé de révolution personnaliste et communautaire. Cette révolu
108
g terme car ça ne correspond pas à la vie. Il n’y
a
pas deux individus qui se ressemblent : Albert Jacquard l’a démontré.
109
individus qui se ressemblent : Albert Jacquard l’
a
démontré. La « personne », c’est l’individu qui cherche quelle est sa
110
est unique. Il faut trouver son sentier : il n’y
a
pas de route nationale ! Il faut donc avoir une certaine foi pour pos
111
: il n’y a pas de route nationale ! Il faut donc
avoir
une certaine foi pour poser le pied là où nul autre ne s’est avancé.
112
elles ne peuvent pas faire toutes seules. Vous en
avez
une vision tout à fait organique. Cela relève plus de l’horticulture
113
la mécanique ! J’aime beaucoup la définition qui
a
été donnée par un sénateur américain qui fut ambassadeur de son pays
114
rts » ! Les régions, naissant d’une communauté, n’
ont
pas d’autre limite que celles des champs cultivés ensemble. Le mot «
115
ne barrière, ou d’une limite quelconque et cela n’
a
aucun rapport avec ce qu’est devenue la frontière. La frontière est u
116
re est une chose complètement condamnable. Elle n’
a
pas une seule utilité : les frontières empêchent de passer tout ce qu
117
ies, ou des mythes, qui s’affrontent. S’il doit y
avoir
des « fermetures », ce devrait être comme des membranes entre les cel
118
onction que la région est censée remplir. On peut
avoir
des régions écologiques qui ne seront pas du tout les mêmes que des r
119
ussi à une autre communauté qui est mondiale et n’
a
pas de frontière délimitée. J’appartiens à l’école personnaliste et à
120
vec d’autres fédérations. Dans votre livre, vous
avez
résumé trois schémas d’organisation : le schéma français, le pire… Vo
121
oriciens politiques : la formule de l’État-nation
a
conquis le monde en moins de deux siècles… » Les deux autres schémas
122
t beaucoup trop grande. Toutefois, les Américains
ont
gardé un plus grand sentiment de la communauté qu’en Europe. Un autre
123
i, si elles ne parlent plus la langue originelle,
ont
du mal à communiquer entre elles parce que la colonisation leur a imp
124
niquer entre elles parce que la colonisation leur
a
imposé l’anglais ou le français… Oui, toute l’Afrique est mutilée pa
125
s gens qui, revêtus de leurs manches de lustrine,
ont
pris une carte de l’Afrique et ont tracé des frontières toutes droite
126
s de lustrine, ont pris une carte de l’Afrique et
ont
tracé des frontières toutes droites de 300 km de long au tire-ligne.
127
s. Au fond, c’est exactement le même réflexe qui
a
dû se produire sous les jacobins et faire si facilement de la France
128
observer, sous nos yeux, le phénomène vivant qui
a
dû se déclencher avec 1789. Paul Valéry disait déjà que toute politiq
129
s révolutionnaires, des guerres de Napoléon qui l’
a
consolidé et centralisé en vue de la guerre et de la mobilisation. Ce
130
cette guerre, c’est que la souveraineté nationale
a
été atteinte. L’honneur de l’État-nation a été atteint. Donc, toute l
131
ionale a été atteinte. L’honneur de l’État-nation
a
été atteint. Donc, toute la structure des États-nations conduit à la
132
ualistes s’imaginent qu’ils seront libres s’ils n’
ont
pas de responsabilités. Malheureusement, cette idée est d’un de mes c
133
s compatriotes, Benjamin Constant. C’est ce qu’il
a
nommé « le libéralisme ». Pour lui, la politique devait être faite pa
134
ce qui conduit tout droit à l’État totalitaire. J’
ai
écrit dans un de mes livres : « C’est avec la poussière des individus
135
ue virulente de l’État-nation comme notre école l’
avait
fait dans les années 1930, pendant la poussée du nazisme, du stalinis
136
ntières, et trop petit à l’échelle du monde. Vous
avez
écrit aussi « une région, comme telle, ne sera jamais compétitive ».
137
s « aimés ». C’est complètement différent. Il n’y
a
pas déterminisme, mais responsabilité. Cette notion d’amour est très
138
ne déclenche pas d’amour pour ses bureaux, vous l’
avez
, vous aussi, souvent dit ! Les États-nations ne sont que des individ
139
inels à l’échelle mondiale, des gangsters… Il n’y
a
pas d’amour là-dedans. Ce n’est pas comme la patrie. Ne pensez-vous p
140
pas comme la patrie. Ne pensez-vous pas que l’on
a
« bluffé » les citoyens en introduisant une énorme confusion entre «
141
c’est exact et c’est en français que la confusion
a
été la plus grave entre l’attachement à la patrie et l’obligation de
142
l’Europe. Ils veulent se mettre ensemble car ils
ont
l’impression d’une centralité continentale, ce qui est vrai à tous po
143
sible que sur la base des régions. C’est ce que j’
avais
proposé à Ecoropa : des régions qui se forment spontanément un peu pa
144
artout. Spontanément, c’est très important. Elles
ont
envie de se connaître. Elles nomment des délégués pour un congrès ann
145
réunissent comme le font les délégués de ceux qui
ont
des problèmes professionnels en commun. Aucune réglementation nationa
146
nt de la capitale ne sont jamais lues : on ne les
a
pas demandées. Peu à peu des liens se créeront, des ministères fédéra
147
card, sont d’origine huguenote et les protestants
ont
toujours été opposés au centralisme. Cela va paraître énorme aux Fran
148
isme. Cela va paraître énorme aux Français ! Vous
avez
dit à un journaliste suisse qu’il faudrait au moins trois générations
149
vienne normale, mais simplement possible. Quand j’
ai
commencé à reparler systématiquement des régions, cela a beaucoup éne
150
ncé à reparler systématiquement des régions, cela
a
beaucoup énervé des gens comme Pompidou pour qui c’était le retour à
151
ur complète pour le Français moyen, mais qui n’en
a
aucune idée exacte : Debré a traité mon livre de « livre infâme » ! P
152
moyen, mais qui n’en a aucune idée exacte : Debré
a
traité mon livre de « livre infâme » ! Pour conclure, je vais vous ci
153
our conclure, je vais vous citer une phrase que j’
ai
écrite et que j’aime beaucoup : « la puissance, c’est le pouvoir que
154
st le pouvoir que l’on prend sur soi-même. » Vous
avez
aussi parlé de « la peur d’être libre »… C’est la maladie de notre so
155
et introduits par le chapeau suivant : « Beaucoup
ont
entendu parler de Denis de Rougemont à cause de son célèbre livre L’
156
personnalité de l’Europe, que Denis de Rougemont
a
poursuivi tout au long de son œuvre. Dans L’Avenir est notre affaire
157
écologique européenne Ecoropa, Denis de Rougemont
a
toujours milité pour que l’Europe trouve son identité à travers les p
158
ique du lac Léman. C’est là que Claudine Brelet l’
a
rencontré pour CoÉvolution. » f. L’original indiquait « Mark ». g.
159
À l’occasion de notre 20e anniversaire, nous
avons
demandé à quelques personnalités de notre pays, connaissant parfois n
160
soit dit en passant, le thème du seul roman que j’
aie
jamais écrit — à mes années de formation, entre 15 et 25 ans. Dès mon
161
à mes yeux, c’était la littérature. Auparavant, j’
avais
pensé, curieusement, que je deviendrais un grand chimiste. Je m’y éta
162
rois leçons de chimie, au Gymnase de Neuchâtel, j’
ai
compris que ce n’était pas tout à fait ça… Donc je ne jurais que par
163
leure du monde, parce que la plus minuscule. On y
avait
comme professeurs, des gens comme Max Niedermann, l’un des disciples
164
ouvrions la linguistique nouvelle. En outre, nous
avions
un autre professeur étonnant, en la personne de Jean Piaget, qui nous
165
les ! Une époque bouillonnante Après cela, j’
ai
voyagé. J’ai passé un an à l’Université de Vienne, où l’on ne me voya
166
poque bouillonnante Après cela, j’ai voyagé. J’
ai
passé un an à l’Université de Vienne, où l’on ne me voyait guère à vr
167
diriger une maison d’édition. Dès ce moment-là, j’
ai
été plongé dans un bouillonnement d’idées que je n’ai jamais retrouvé
168
té plongé dans un bouillonnement d’idées que je n’
ai
jamais retrouvé par la suite. D’une part, nous faisions découvrir, en
169
depuis quelque trente-cinq ans. Cela étant, je n’
ai
jamais cessé pour autant d’être écrivain. Pour l’instant, j’ai douze
170
sé pour autant d’être écrivain. Pour l’instant, j’
ai
douze livres en chantier. À la suite de mon Journal d’une époque , d
171
uvre d’écrivain et de penseur, Denis de Rougemont
a
bien voulu évoquer les circonstances dans lesquelles s’est formé et d
172
llé, plagié (l’inénarrable Jean-Edern Hallier lui
a
ainsi “piqué” des paragraphes entiers pour les resservir dans certain
173
ologie française, qui l’accuse ignominieusement d’
avoir
flirté avec le fascisme, alors qu’il fut, et ses livres en témoignent
174
e Marcel Proust et de Michel Moret (1983)v Qui
auriez
-vous aimé être ? Moi, mais pleinement réalisé. Le principal trait de
175
John Perse. Le don de la nature que vous aimeriez
avoir
? Une santé qui puisse résister à pas mal d’excès. v. Rougemont De
176
guerre hitlérienne : aujourd’hui comme alors nous
avons
droit aux mêmes discours très fermes et aux mêmes arguments sans pris
177
’assurer nos défenses nationales. Les démocraties
ont
vaincu, en 1945, à l’aide de la bombe atomique, arme totalitaire par
178
L’équilibre de la terreur, tel est le nom qu’ils
ont
inventé pour la paix. Nous disons que cet équilibre ne saurait être m
179
d higher.1 Non, messieurs les ministres, vous n’
avez
pas le droit de « jouer au poker » la survie de l’humanité. En attend
180
sarmement nucléaire intégral, dont je suis. — Ils
ont
été traumatisés par la bombe d’Hiroshima. Vous non, sans doute ? Vous
181
bombe d’Hiroshima. Vous non, sans doute ? Vous n’
avez
rien senti ? Voilà qui est grave. Névrosé est celui qui réagit d’une
182
sa position névrotique, un certain profit2 ». On
a
reconnu les partisans du nucléaire en général, et de la dissuasion en
183
de l’Occident. Et en effet, certains d’entre eux
ont
pris pour devise le fameux Better red than dead (plutôt rouge que mor
184
décisifs. Mettons qu’aujourd’hui, les États-Unis
aient
de quoi tuer 32 000 fois tous les humains. Mais comme les Soviétiques
185
relève d’un âge mental de joueurs de billes. Si j’
ai
trois billes (ou missiles) et toi six, j’ai raison d’être inquiet. Ma
186
Si j’ai trois billes (ou missiles) et toi six, j’
ai
raison d’être inquiet. Mais si j’en ai 30 000 et toi 60 000, nous som
187
toi six, j’ai raison d’être inquiet. Mais si j’en
ai
30 000 et toi 60 000, nous sommes « à égalité » à toutes fins utiles,
188
prennent cette évidence arithmétique : comparer n’
a
plus aucun sens sitôt qu’on entre dans le démesuré ? IV. Vous ave
189
sitôt qu’on entre dans le démesuré ? IV. Vous
avez
dit : « Catastrophisme » ? Vous oubliez que les prophètes sont là
190
nt du vrai prophète : Seigneur, tu le sais, je n’
ai
pas désiré le jour du malheur ! (Jérémie, 17.16) 1. « Poker nuclé
191
titre. Parce que cela me convenait sans doute, j’
avais
cru comprendre qu’il s’agirait du problème global de la Suisse et de
192
global de la Suisse et de l’union de l’Europe. J’
avais
dit oui, bien sûr et bravo. Puis j’ai lu l’énoncé exact : La Suisse e
193
urope. J’avais dit oui, bien sûr et bravo. Puis j’
ai
lu l’énoncé exact : La Suisse et la CEE élargie, et j’ai tout de suit
194
’énoncé exact : La Suisse et la CEE élargie, et j’
ai
tout de suite fait savoir aux organisateurs que sur ce thème je n’ava
195
it savoir aux organisateurs que sur ce thème je n’
avais
pas grand-chose à dire, sinon que son énoncé me paraissait boiteux. I
196
e et l’union de l’Europe Sur le premier titre, j’
aurais
tout de suite à observer ceci : que les réalités économiques qu’il dé
197
xelles, de Strasbourg ou super-État européent
a
) L’Europe de Bruxelles ou la Communauté élargie. S’il s’agit d’un éla
198
es dans le seul domaine économique. Jean Monnet l’
a
cru possible. Ce fut à la fois le ressort de son action créatrice, et
199
en fait déjà partie ; l’obstacle de la neutralité
a
donc été écarté. Mais le Conseil de l’Europe est sans pouvoirs. Il ne
200
, non des peuples par leurs élus. C’est lui qu’il
eût
fallu élire au suffrage universel. Et doter de pouvoirs élargis jusqu
201
igue défensive des nations souveraines, où il n’y
aurait
de sérieux que les USA d’une part, l’URSS de l’autre. Restent deux po
202
eris, d’une innovation politique, pour laquelle j’
ai
proposé le nom d’Europe des régions. 4. État fédéral européen ou E
203
i de Strasbourg sert nos intérêts immédiats, nous
avons
à déterminer les conditions posées par l’identité suisse à toute part
204
os refus ou nos retards, attitude défensive, nous
avons
à formuler les conditions de notre acceptation éventuelle, c’est-à-di
205
e, je me bornerai à rappeler quelques évidences :
a
) La défense locale (guérilla, défense « en hérisson ») s’est montrée
206
us tarder des initiatives créatrices, ainsi que l’
a
proposé ici même Mme Bauer-Lagier. On m’objecte que « la Suisse ne fa
207
ns ma longue carrière d’historien des idées, je n’
ai
jamais observé que la justesse et la fécondité d’une seule idée ait d
208
que la justesse et la fécondité d’une seule idée
ait
dépendu de la taille de celui qui l’avait conçue. 5. Dans quelle d
209
eule idée ait dépendu de la taille de celui qui l’
avait
conçue. 5. Dans quelle direction chercher ? Les deux obstacles
210
ressif des cadres stato-nationaux, la Suisse peut
avoir
recours au Conseil de l’Europe, je veux dire à sa Conférence des pouv
211
Conférence des pouvoirs locaux et régionaux, qui
a
déjà organisé quatre rencontres des régions transfrontalières : Stras
212
asbourg, Innsbruck, Galway, Bordeaux. Les progrès
ont
été si rapides qu’à Bordeaux, en 1978, on a discuté sérieusement la p
213
rès ont été si rapides qu’à Bordeaux, en 1978, on
a
discuté sérieusement la possibilité d’élections au suffrage universel
214
ns d’Europe — et cela dans les termes mêmes que j’
avais
proposés dès 1972 dans mes articles, conférences et livres. Pour ce q
215
— mais réellement fédéral (ou confédéral, cela n’
a
aucune importance : la Constitution suisse est intitulée Constitution
216
on fédérale de la Confédération suisse, et cela n’
a
jamais fait problème), pourquoi ne pas envisager la multiplication d’
217
ons. 6. Possibilités ? Rêveries ? La Suisse
a
toujours été, dès les débuts du xiiie siècle, à contre-courant des é
218
courant des évolutions d’ensemble en Europe. On l’
a
écrit (notamment l’historien E. Gagliardi) : elle est demeurée jusqu’
219
ndre une union fédérale de nos peuples, dont elle
aura
été, dans le même temps, la première figuration et la promesse. r.
220
s en novembre font tomber ce nombre à 196, Hitler
ayant
perdu en quelques mois deux millions de voix, à la suite d’une entent
221
une grève à Berlin. Et Léon Blum écrit : « Hitler
a
perdu ses dernières chances d’accéder au pouvoir. » S’ensuivent des m
222
s les destins de notre siècle. La défaite de 1918
avait
précipité l’Allemagne dans un chaos sans précédent ; six millions de
223
s théories politiques, marxistes ou capitalistes,
ont
échoué depuis un demi-siècle dans l’analyse de cette situation initia
224
ut ces effets, et rien d’autre. Démontrer qu’il n’
a
pas existé serait un jeu : père inconnu, cadavre disparu, témoignages
225
isparu, témoignages contradictoires de ceux qui l’
ont
approché ou servi — et ses photos donnent toutes l’impression d’un tr
226
e plus grand théologien contemporain, Karl Barth,
a
écrit : « Le prophète n’a pas de biographie. Il se lève et tombe avec
227
ntemporain, Karl Barth, a écrit : « Le prophète n’
a
pas de biographie. Il se lève et tombe avec sa mission. » Ainsi d’Hit
228
ique, ce quasi-néant d’homme ridicule et tragique
a
été le prophète du Néant collectif, où il a presque réussi à entraîne
229
gique a été le prophète du Néant collectif, où il
a
presque réussi à entraîner toute sa génération. C’est ainsi que je l’
230
traîner toute sa génération. C’est ainsi que je l’
ai
senti, éprouvé de tout l’être, enregistré au radar de quelque intuiti
231
’écrivais dans un journal suisse : L’envahisseur
avait
prophétisé : « Le 15 juin j’entrerai dans Paris ». Il y entre en effe
232
la mort du Führer : Hitler s’est tu. L’aventure
a
pris fin dans la catastrophe prévue. Et devant le cadavre gisant de l
233
Courrier de Saint-Étienne intitulée : « Le Führer
a
perdu la guerre des nerfs. » Il entre dans une rage folle. « Vous voy
234
Führer, mais parce que moi je ne suis rien, je n’
ai
que mon prestige vis-à-vis de mon peuple ! Je ne suis qu’un petit hom
235
forme, ce petit homme du commun, Charlot soldat l’
avait
représenté d’avance, et cette anticipation grotesque nous paraît aujo
236
rtes, Hitler n’était pas le diable. Mais certains
ont
pensé, pour l’avoir éprouvé en sa présence par un frisson d’horreur s
237
it pas le diable. Mais certains ont pensé, pour l’
avoir
éprouvé en sa présence par un frisson d’horreur sacrée, qu’il était l
238
déchoir dans un corps d’homme et l’occuper. Je l’
ai
entendu prononcer l’un de ses grands discours, et je l’ai vu à la sor
239
du prononcer l’un de ses grands discours, et je l’
ai
vu à la sortie de ce culte, debout dans sa voiture qui longeait très
240
dans les poches de mon pardessus. Un bon tireur l’
eût
descendu très facilement. Mais ce bon tireur ne s’est jamais trouvé d
241
i sensé ni intelligent. Il ne s’appartient pas, n’
a
pas de qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en
242
ission », Schickelgruber habité par un trône ! On
a
ri. On a cessé de rire… Le national-socialisme, raciste et adorateur
243
Schickelgruber habité par un trône ! On a ri. On
a
cessé de rire… Le national-socialisme, raciste et adorateur du sang
244
uis la formation de la première société. Hitler n’
a
fait que lui prêter figure et nom, à l’occasion de son éruption la pl
245
’inconscient Tout s’est passé comme si Hitler,
ayant
posé le diagnostic exact de notre société occidentale, avait aussitôt
246
le diagnostic exact de notre société occidentale,
avait
aussitôt abusé de l’élan de confiance déclenché dans les foules, en l
247
ons aux masses, car de tout temps les forces qui
ont
produit les plus grands changements dans le monde ont été trouvées no
248
produit les plus grands changements dans le monde
ont
été trouvées non pas dans la connaissance scientifique, mais dans le
249
flammer si « la cruelle déesse de la Misère » les
a
d’abord conditionnées. Sous toutes ses formes, privées et publiques,
250
rrivera au pouvoir grâce à la crise démente que j’
ai
rappelée, anarchie spirituelle, chômage et inflation… Sa parole n’est
251
onsables dans une masse, donc pas de culpabilité.
Ayant
ainsi rétabli les liturgies civiques, une masse allemande, réellement
252
n désastre imminent et mondial. Pourtant, on ne l’
a
pas arrêté. Voilà le point qu’il faut élucider. Replaçons-nous dans l
253
tler, mieux que les communistes et les fascistes,
a
su répondre à la question centrale du siècle, qui est religieuse au s
254
s ruines matérielles et morales d’une société qui
avait
généralement perdu la Foi, l’Espérance et l’Amour, il a fondé le cult
255
ralement perdu la Foi, l’Espérance et l’Amour, il
a
fondé le culte de la masse déifiée, animée par les trois antivertus t
256
ge que, de sa prison, à la veille de la guerre, m’
avait
fait passer un théologien anonyme dont j’ignore encore s’il était chr
257
gger — un temps séduit par les mythes du nazisme.
Ayant
pour force unique l’appel communautaire et par là submergeant tous le
258
s inapplicable : une idée de fou. Il ne saurait y
avoir
toute-puissance d’une partie sur un tout humain. Il n’y a en fait que
259
puissance d’une partie sur un tout humain. Il n’y
a
en fait que la puissance d’un parti sur sa propre nation, systématiqu
260
constitutif du national-socialisme. L’Occident n’
a
pas eu de pire ennemi, et il est loin d’être certain qu’il ait été va
261
itutif du national-socialisme. L’Occident n’a pas
eu
de pire ennemi, et il est loin d’être certain qu’il ait été vaincu ai
262
pire ennemi, et il est loin d’être certain qu’il
ait
été vaincu ailleurs que dans les ruines de Berlin. Hitler donnait la
263
la représente parmi nous ce matin. Ce colloque n’
a
ressemblé à rien de ce que j’ai connu jusqu’ici. Vous savez comment i
264
tin. Ce colloque n’a ressemblé à rien de ce que j’
ai
connu jusqu’ici. Vous savez comment il est né : de l’envoi à des cent
265
i les trois-cents réponses reçues, cent-cinquante
ont
paru intéressantes aux organisateurs. Une trentaine de leurs auteurs
266
aux organisateurs. Une trentaine de leurs auteurs
ont
prouvé leur intérêt en envoyant des textes : ce sont ceux que nous av
267
êt en envoyant des textes : ce sont ceux que nous
avons
discutés ici. Il y a donc eu d’une part quelque chose d’aléatoire, de
268
ont ceux que nous avons discutés ici. Il y a donc
eu
d’une part quelque chose d’aléatoire, de fortuit dans ce rassemblemen
269
à tous, féliciter vivement la Fondation Veillon d’
avoir
pris cette initiative qui est une création en son genre, et dont peut
270
de son initiative, mais de la manière dont elle l’
a
réalisée, dans une atmosphère à la fois détendue et attentive, dans u
271
tous égards privilégié, et je comprends que l’on
ait
eu l’idée d’y construire cette espèce de couvent avec son cloître et
272
s égards privilégié, et je comprends que l’on ait
eu
l’idée d’y construire cette espèce de couvent avec son cloître et sa
273
ître et sa chapelle, que nous sommes si heureux d’
avoir
découvert. Cher Monsieur Veillon, puis-je vous prier de transmettre à
274
c’est lui qui est l’occasion de notre colloque. J’
avais
passé la première année de la guerre mobilisé dans l’armée suisse, ma
275
ion de l’oratorio Nicolas de Flue à New York. J’
ai
publié là-bas un petit livre sur la Suisse, The Heart of Europe , j’
276
tit livre sur la Suisse, The Heart of Europe , j’
ai
travaillé à l’Office of War Information, section « La voix de l’Améri
277
a voix de l’Amérique parle aux Français », puis j’
ai
écrit encore deux ou trois livres, dont l’un sur le diable , et l’aut
278
par les Rencontres internationales de Genève, qui
avaient
pris comme sujet « L’Esprit européen ». C’était au lendemain de la gu
279
j’étais à peine installé près de Genève, quand j’
ai
reçu la visite de deux amis, dont Alexandre Marc, que j’avais bien co
280
a visite de deux amis, dont Alexandre Marc, que j’
avais
bien connu dans le mouvement personnaliste : ils m’ont jeté bon gré m
281
ien connu dans le mouvement personnaliste : ils m’
ont
jeté bon gré mal gré dans l’action fédéraliste européenne, en m’offra
282
je me suis senti « obligé », en quelque sorte. J’
ai
dit à mes amis : « Je suis prêt à donner deux ans de ma vie à la caus
283
eulement de ma famille neuchâteloise… Mais cela n’
a
pas été facile, car à la suite d’une série de grandes manifestations,
284
e européenne de la culture à Lausanne en 1949, il
a
fallu mettre sur pied un certain nombre d’institutions, dont le Centr
285
tutions, dont le Centre européen de la culture. J’
ai
été son directeur-fondateur à partir de 1949. Tout a dû être créé à p
286
té son directeur-fondateur à partir de 1949. Tout
a
dû être créé à partir de zéro, et avec très peu d’argent, car les gou
287
dit la vérité ! Le Centre européen de la culture
a
donné naissance au Centre européen de recherches nucléaires, qui s’ap
288
une Campagne d’éducation civique européenne, qui
a
été reprise récemment par Bruxelles. Nous avons donc fait du militant
289
, qui a été reprise récemment par Bruxelles. Nous
avons
donc fait du militantisme sous forme créatrice. Mais bientôt les mouv
290
ements fédéralistes se sont mis à décliner. Ils n’
avaient
au fond plus grand-chose à se mettre sous la dent. Ils continuaient d
291
Parlement européen pour désigner l’assemblée qui
a
été élue ce printemps et qui vient de se réunir à Strasbourg. Elle n’
292
la Finlande, pour des raisons que chacun sait, n’
a
pu y entrer.) S’il y avait un vrai Parlement européen à élire au suff
293
entre dans mon projet de vous expliquer comment j’
ai
été appelé à écrire L’Avenir est notre affaire . Au cours de la der
294
écologiques, de la préoccupation écologique qui m’
a
tout de suite paru capable de donner un sang nouveau au mouvement féd
295
par notre Campagne d’éducation civique européenne
a
pris pour thème l’enseignement de l’écologie à l’école. J’ai senti qu
296
r thème l’enseignement de l’écologie à l’école. J’
ai
senti qu’il y avait là un deuxième souffle pour les fédéralistes euro
297
st développée l’idée de région, sur laquelle nous
avions
tenu de nombreux colloques à Genève dès 1962. De cette convergence es
298
ie, ni les régions, ni la fédération européenne n’
ont
d’avenir séparable de celui des deux autres : ces trois avenirs sont
299
idée des circonstances dans lesquelles mon livre
a
pris naissance, sans rappeler une soirée mémorable chez un ami, Erico
300
ire : « Écologie – régions – Europe », — et qui m’
a
fait écrire mon livre. Je l’ai commencé en 1973 ; j’en avais écrit le
301
urope », — et qui m’a fait écrire mon livre. Je l’
ai
commencé en 1973 ; j’en avais écrit les cent premières pages, décriva
302
écrire mon livre. Je l’ai commencé en 1973 ; j’en
avais
écrit les cent premières pages, décrivant les catastrophes qui nous m
303
al — de telle manière que toute notre économie en
eût
été complètement bouleversée —, je prenais l’image d’une grosse boule
304
tout. C’était ce qui risquait de se passer. Je l’
ai
même dit pendant le tournage d’un film de la télévision française, ch
305
e, chez moi, à Ferney, le 22 août 1973. Le film n’
a
pu passer que six mois plus tard, amputé de moitié, parce que quelque
306
la confirmation concrète de ce que j’annonçais. J’
ai
dû réécrire toute cette partie de mon livre, que je n’ai pu achever q
307
éécrire toute cette partie de mon livre, que je n’
ai
pu achever qu’en cinq ans. Je ne m’en plains pas trop, parce que cela
308
ans. Je ne m’en plains pas trop, parce que cela m’
a
obligé à m’éloigner un peu de l’actualité et des chiffres qui font l’
309
actualité et des chiffres qui font l’actualité. J’
ai
pu faire mon aggiornamento tout au long de l’écriture de ce livre. À
310
ments, comme les manifestations à Creys-Malville,
ont
alerté l’opinion, et mon livre en a bénéficié, parce qu’il a paru deu
311
s-Malville, ont alerté l’opinion, et mon livre en
a
bénéficié, parce qu’il a paru deux mois après. L’éditeur m’a dit : «
312
opinion, et mon livre en a bénéficié, parce qu’il
a
paru deux mois après. L’éditeur m’a dit : « S’il avait paru en juin,
313
, parce qu’il a paru deux mois après. L’éditeur m’
a
dit : « S’il avait paru en juin, peut-être que cela n’aurait pas marc
314
paru deux mois après. L’éditeur m’a dit : « S’il
avait
paru en juin, peut-être que cela n’aurait pas marché ! » Pour une foi
315
: « S’il avait paru en juin, peut-être que cela n’
aurait
pas marché ! » Pour une fois dans ma vie, j’ai eu l’impression que j’
316
urait pas marché ! » Pour une fois dans ma vie, j’
ai
eu l’impression que j’arrivais au bon moment ! D’où un succès, attest
317
it pas marché ! » Pour une fois dans ma vie, j’ai
eu
l’impression que j’arrivais au bon moment ! D’où un succès, attesté e
318
entre autres par le présent colloque, auquel je n’
avais
pas été habitué par mes autres livres, trop difficiles ou trop en ava
319
es, je voudrais résumer la démarche qui me semble
avoir
caractérisé notre colloque. Cela s’est centré tout de suite et tout n
320
elle servir ? Ce sont les États-nations seuls qui
auront
le droit de peser sur le bouton rouge, personne d’autre, une région n
321
ne pourrait pas le faire. Et les États-nations n’
ont
de comptes à rendre à personne ! J’ai demandé à Einstein, le seul jou
322
-nations n’ont de comptes à rendre à personne ! J’
ai
demandé à Einstein, le seul jour où je l’ai vu — c’était en 1947 (au
323
e ! J’ai demandé à Einstein, le seul jour où je l’
ai
vu — c’était en 1947 (au moment de notre conversation, l’humanité com
324
de l’humanité en cas de guerre atomique ? » Il m’
a
dit : « Eh bien, d’après mes calculs, environ 20 millions de gens sur
325
n veut éviter cette guerre, qui serait comme on l’
a
dit hier le grand incendie final, la fin de l’histoire, et sinon de l
326
ui est le domaine des techniques dures comme je l’
ai
dit tout à l’heure. C’est la minéralisation de nos existences par la
327
cellules, de ce qui part d’en bas, de l’humus. J’
ai
toujours insisté sur cette puissance de la germination, qui peut fiss
328
e paraît symboliser cette nouvelle tendance. Ceci
a
été très bien mis en relief par plusieurs d’entre vous, par plusieurs
329
is aussi par le travail de Jacques Juillet, qui n’
a
pu être des nôtres. Il s’agit de l’opposition entre ce qui vient d’en
330
ards, et sur laquelle aussi certains d’entre vous
ont
insisté à très juste titre. Nécessité de concevoir la planète entière
331
ive au-dehors. Au nom du vieux principe que Hegel
avait
déduit de la Révolution française, « L’État-national — on ne disait p
332
par la guerre au-dehors, la tranquillité qu’il n’
a
plus au-dedans ». L’Europe, unie — j’insiste — est impossible à conce
333
tir des États-nations ; c’est un cercle carré ! J’
ai
appelé, il y a longtemps, la volonté de faire l’Europe à partir des É
334
u bien ils restent misanthropes, mais alors ils n’
ont
pas l’idée de faire une amicale, ou seulement pour tromper le monde,
335
autre part, n’est plus une formule viable. Nous n’
avons
pas, j’insiste, à le renverser. Je crois qu’il serait tout à fait ill
336
n’est pas sûr, les armes de la Révolution de 1917
ont
très vite changé de mains. Il nous faut au contraire construire, crée
337
aux. Nous en venons ici au cœur du débat qui nous
a
occupés ces deux derniers jours. Je crois que nous avons bien fait de
338
ccupés ces deux derniers jours. Je crois que nous
avons
bien fait de ne pas nous attarder à toutes les définitions que l’on p
339
a donc toute espèce de définitions des régions, j’
ai
donné la mienne qui me paraît la plus englobante : un espace de parti
340
ire d’abord que c’est petit, car autrement il n’y
a
pas de participation possible, qu’elle soit civique, économique ou po
341
ns tenir compte d’aucune réalité spécifique. Nous
avons
été tout de suite, je crois, assez profondément d’accord pour reconna
342
cessité des régions ; même celui d’entre nous qui
a
été le plus réservé, M. Knoepfler, du Conseil municipal de Neuchâtel,
343
se, mais il se pose des questions auxquelles il n’
a
pas trouvé de réponses quant à la réalisation de ces « régions à géom
344
riable », comme je les nomme, sur lesquelles nous
avons
beaucoup discuté le premier jour. Plusieurs des travaux présentés ici
345
outelier, entre autres, y sont revenus. M. Norton
a
apporté des vues très importantes sur cette notion de géométrie varia
346
variable, ainsi que M. Naef, qui malheureusement
a
dû nous quitter hier et dont l’avis m’importait beaucoup, car il est
347
du gouvernement suisse. Enfin, M. Strassoldo qui
a
joué « l’avocat du diable » avec un brio certain ! Je constate, après
348
onstate, après ces deux jours de débats, qu’ils m’
ont
obligé à me poser des questions plus précises, plus concrètes sur bie
349
ères (comme dans les mathématiques modernes, vous
avez
des ensembles topologiques en intersections, et il s’agit de voir que
350
onc, pose une quantité de problèmes auxquels je n’
ai
pas trouvé un système de réponses claires, nettes, et définitives. Ma
351
réponses claires, nettes, et définitives. Mais j’
ai
été encouragé par cette phrase du professeur Norton, que j’ai recopié
352
ragé par cette phrase du professeur Norton, que j’
ai
recopiée pour vous la relire à propos des complexités que pose la rég
353
ies in advance, but one can overcome complexities
as
one proceeds. » Vous avez tous compris : on ne peut pas poser d’avanc
354
can overcome complexities as one proceeds. » Vous
avez
tous compris : on ne peut pas poser d’avance la réponse à des questio
355
va tout à fait au fond de la chose. Bien d’autres
ont
été dites ici, qui m’ont encouragé. Et quand je pense à vos travaux e
356
la chose. Bien d’autres ont été dites ici, qui m’
ont
encouragé. Et quand je pense à vos travaux et à nos discussions, j’en
357
ce que j’appelle la pluralité des allégeances. J’
ai
l’habitude, je m’en excuse, de prendre mon cas personnel pour illustr
358
, c’est là que ma famille s’est développée, que j’
ai
passé mes vingt premières années et que j’ai mes racines, comme on le
359
ue j’ai passé mes vingt premières années et que j’
ai
mes racines, comme on le dit par une métaphore critiquable mais coura
360
Tout cela, c’est très joli, mais désormais, tu n’
auras
plus qu’une seule allégeance : c’est mon État, et tu vas faire rentre
361
’abord, que nous devons dépasser. Car, comme on l’
a
dit ce matin, les villes, au fond, elles sont « nulle part », elles o
362
villes, au fond, elles sont « nulle part », elles
ont
détruit souvent leur relief, et toujours leur humus. Elles sont donc
363
s, un principe très simple qui est celui que l’on
a
appelé dans les écoles sociologiques catholiques de la fin du xixe l
364
la règle de formation du fédéralisme, telle que l’
a
exprimée le sénateur américain, David Moynihan. Sa formulation s’appl
365
ne feront que cela, mais qui le feront bien, qui
auront
un pouvoir clairement limité, mais tout à fait réel dans leur domaine
366
de gens voient là une contradiction. C’est qu’ils
ont
l’esprit mal formé par Descartes ! Il n’y a aucune contradiction entr
367
ils ont l’esprit mal formé par Descartes ! Il n’y
a
aucune contradiction entre le pouvoir des petites autonomies et le po
368
une, qui est tellement riche. Les choses que l’on
a
en commun, les choses communes de la vie de tous les jours, la commun
369
s’autogérer malgré les menaces extérieures. Elles
ont
créé un pouvoir commun de défense qui était réel mais limité à cela,
370
fédération : cela se dit universitas. Voilà qui m’
a
toujours frappé. D’autant plus frappé que l’un des premiers ouvrages
371
uvrages philosophiques et peut-être le seul qui m’
ait
vraiment fait impression quand j’avais 15 ou 16 ans, a été l’Éthique
372
e seul qui m’ait vraiment fait impression quand j’
avais
15 ou 16 ans, a été l’Éthique de Spinoza, où j’ai trouvé ce théorème
373
iment fait impression quand j’avais 15 ou 16 ans,
a
été l’Éthique de Spinoza, où j’ai trouvé ce théorème : « D’autant plu
374
is 15 ou 16 ans, a été l’Éthique de Spinoza, où j’
ai
trouvé ce théorème : « D’autant plus nous connaissons les choses part
375
de tout ce que nous imaginons de la région. Cela
a
été en tout cas à la base de ce qu’avec mes amis Mounier, Alexandre M
376
is Mounier, Alexandre Marc, Aron et Dandieu, nous
avons
lancé dans les années 1930, sous le nom de mouvement personnaliste, e
377
e peux pas y croire une seconde, parce que moi, j’
ai
les deux pieds sur terre ! », je réponds : « Tant pis pour vous, car
378
lité ! » Si un homme veut marcher, il ne peut pas
avoir
plus d’un pied à la fois sur la terre ! Et s’il fait un grand bond, i
379
s sur la terre ! Et s’il fait un grand bond, il n’
a
plus aucun pied sur la terre, mais il va très loin ! Je vais conclur
380
ration européenne, c’est l’unité de culture. Nous
avons
une culture commune, nous les Européens. Je vous rappelle ce que Paul
381
es Européens. Je vous rappelle ce que Paul Valéry
a
écrit là-dessus (et qui devrait être complété) : « Est Européen tout
382
it être complété) : « Est Européen tout homme qui
a
subi profondément les influences de Rome, d’Athènes et de Jérusalem.
383
ntes à bien des égards, plus près de nous, et qui
ont
recouvert le tout. Mais que de contradictions entre ces origines ! Pe
384
iennes d’humilité. Or, ce sont ces antinomies qui
ont
donné à la culture européenne et à l’Europe dans le monde, son dynami
385
omogènes. Ce sont ces évidences historiques qui m’
ont
toujours empêché de prendre l’économie comme base de la construction
386
tions économiques, pour n’en prendre que trois. J’
ai
trouvé, et vous pouvez facilement le vérifier, que le rythme de varia
387
aint-Étienne en passant au sud de Grenoble : on y
a
parlé de l’an 900 jusqu’aux débuts du xixe siècle, soit près de mill
388
ent immédiatement. Je leur dis par exemple « Tu n’
as
pas peur de t’encoubler ? » Eh bien, ils savent très bien que cela ve
389
tif. Il y a donc des rythmes millénaires, il y en
a
d’autres comme la mobilité de nos frontières, qui sont à peine centen
390
e nos frontières, qui sont à peine centenaires. J’
ai
calculé la moyenne d’âge des frontières de nos trente États de l’Euro
391
s les huit États de l’Est : c’est 89 ans. Il y en
a
un qui fait beaucoup monter la moyenne à lui seul, c’est le Portugal,
392
ans modifications. Mais c’est le seul, les autres
ont
varié dans des proportions inouïes. La France a été pendant longtemps
393
ont varié dans des proportions inouïes. La France
a
été pendant longtemps le petit « pré carré » entre Paris, Bourges, Or
394
ie par annexions et conquêtes jusqu’en 1861. Elle
a
très peu varié au xxe siècle. Mais on est étonné de voir que ce ryth
395
re, au sens symboliquement élargi du terme. On m’
a
demandé hier, si je voyais des conclusions pratiques se dégager de ce
396
oudrais vous rappeler quelques-unes de celles qui
ont
été suggérées. Dans le papier de M. Jacques Juillet, il y a une sugge
397
qui existe depuis une trentaine d’années, et qui
avait
au départ pour présidents MM. Gaston Defferre et Jacques Chaban-Delma
398
le papier de M. et Mme Cosma sur la stratégie, j’
ai
salué bien sûr avec une complète approbation, la proposition d’une st
399
ns, de M. et Mme André Birre, avec ce qu’ils nous
ont
appris sur l’humus, qui donne vraiment et symboliquement une base à t
400
uement une base à tout cela. « Partir d’en bas »,
ont
dit M. Juillet et beaucoup d’autres parmi vous. Je crois que nous som
401
moi. Si vous ne gardez pas cela à l’esprit, vous
aurez
l’impression que c’est une proportion inverse qu’évoque la lecture de
402
que l’on s’arrête à elle seule. Bien entendu, il
a
parfaitement raison, on peut toujours dire cela, seulement on ne réfo
403
chose ! » Strassoldo le sait mieux que personne,
ayant
été l’un des promoteurs de cette belle région transfrontalière Carint
404
etite échelle, il y a deux-cents ans que Rousseau
a
réfuté le sophisme, qui équivaudrait à exclure la possibilité d’exist
405
itabilité des conflits de frontière Personne n’
a
jamais dit que le système des régions éliminerait tous les conflits.
406
IV. De la nécessité des fondements sacrés Il
a
raison : ni le personnalisme, ni les régions, ni même le fédéralisme
407
écisément contre ces entraînements religieux, qui
ont
donné les résultats que vous voyez autour de nous, que se sont dressé
408
éens, puis les régionalistes aujourd’hui. Nous en
avons
assez de ces grands entraînements, de ces grands mythes. Ceux qui che
409
, de ces grands mythes. Ceux qui cherchent cela n’
ont
rien à trouver à Crêt-Bérard ! Vous vous doutez bien que ce n’est pas
410
eusement un pur et simple jeu de l’esprit. Il n’y
a
aucune espèce d’incompatibilité entre les deux choses, à moins qu’on
411
ond à une nécessité absolue, sans laquelle il n’y
a
aucune société possible. On ne va pas demander à chacun s’il a besoin
412
été possible. On ne va pas demander à chacun s’il
a
besoin de participer. C’est une évidence qui saute aux yeux : s’il n’
413
C’est une évidence qui saute aux yeux : s’il n’y
a
pas de participation des citoyens, il n’y a pas de société, en tout c
414
l n’y a pas de participation des citoyens, il n’y
a
pas de société, en tout cas pas démocratique. VII. Du choix électr
415
ais majestueuses » centrales nucléaires. Mais qui
a
jamais demandé de vastes surfaces de panneaux solaires ? Cela me rapp
416
nneaux solaires ? Cela me rappelle un débat que j’
ai
eu une fois, tout à fait improvisé, après la fin d’un congrès fédéral
417
aux solaires ? Cela me rappelle un débat que j’ai
eu
une fois, tout à fait improvisé, après la fin d’un congrès fédéralist
418
dans la salle, formée de militants fédéralistes,
ont
répliqué : « Qu’est-ce que c’est que cette obsession des grandes cent
419
t un phénomène important. Il cite Longo Maï que j’
ai
cité dans mon livre. Il ajoute : « Mais je ne crois pas qu’il y ait l
420
is les jeunes gens qui font partie de Longo Maï n’
ont
parlé de retour à la nature, ils disent simplement : « Nourrir l’huma
421
ousseau, dans le sens de Marie-Antoinette, cela n’
a
aucun rapport ! IX. De la généralisation des modèles fédératifs su
422
ifs suisse et yougoslave Je dois dire que je n’
ai
pas pensé une seconde au modèle yougoslave — si même il y en a un ! —
423
ne seconde au modèle yougoslave — si même il y en
a
un ! — en écrivant mon livre. Je me suis inspiré du modèle suisse, ma
424
même les épidémies. Les fédérations existantes n’
ont
jamais été formées par des catastrophes, mais par la nécessité de s’u
425
sophie personnaliste plus les ordinateurs. » Il m’
a
répondu : « Ah, celle-là, je vous en veux de l’avoir dite avant moi !
426
’a répondu : « Ah, celle-là, je vous en veux de l’
avoir
dite avant moi ! » XI. Des régions à géométrie variable Je pens
427
XI. Des régions à géométrie variable Je pense
avoir
toujours dit et décrit le contraire de ce qu’il m’est ici reproché d’
428
rit le contraire de ce qu’il m’est ici reproché d’
avoir
défendu ou attaqué. Je crois que Strassoldo a tort d’invoquer la théo
429
avoir défendu ou attaqué. Je crois que Strassoldo
a
tort d’invoquer la théorie de Konrad Lorenz sur le territoire des ani
430
est presque entièrement racine ; c’est celui qui
a
la plus mauvaise réputation en littérature, c’est le navet. L’homme e
431
oit à l’enracinement » sur lequel Ortega y Gasset
a
écrit de belles choses. Il est un temps pour vivre de ses racines dan
432
it celui qui se voudrait exclusif. Les kibboutzim
ont
de très grandes vertus, mais ne comprennent que 3 % de la population
433
ressens d’abord est un vertige de chiffres. Nous
avons
chacun 2 parents, 4 grands-parents, 8 arrière-grands-parents… À la si
434
’ancêtre dont on se réclame est éloigné, moins on
a
de chances de tenir de lui ! » Mais si les noms sont vérifiés, les ch
435
par l’Europe. Comment quinze millions d’Européens
eussent
-ils pu nous fournir plus de 2 milliards d’ancêtres ? La seule explica
436
mariages entre cousins plus ou moins rapprochés,
ayant
, par conséquent, les mêmes ancêtres. Première conclusion : tous les N
437
urtout, sont de la grande famille européenne. (On
eût
fait rire un Flamand d’avant Napoléon en lui disant qu’il serait « Be
438
léon en lui disant qu’il serait « Belge » et l’on
eût
scandalisé un Bavarois ou un Saxon en le qualifiant simplement d’« Al
439
s » et son humour, alliés à un sens politique qui
a
permis que nous devenions Suisses. L’arrière-grand-mère Philippine du
440
e de l’ascendance franc-comtoise, dont mon père m’
a
souvent parlé, au point que j’ai baptisé la maison que nous habitons
441
, dont mon père m’a souvent parlé, au point que j’
ai
baptisé la maison que nous habitons aujourd’hui « La Chevance », parc
442
à Pierre-Arnold, dans la direction de Besançon. J’
ai
quelques pièces tout à fait inédites à lui montrer.) D’autres récits
443
nis de Rougemont, de tous les intellectuels que j’
ai
interrogés jusqu’ici sur l’idée qu’ils se font de l’Europe, vous êtes
444
« Européen militant » ? Il me semble que tout m’y
a
conduit, à commencer par ma naissance. Dès mon enfance, j’ai entendu
445
à commencer par ma naissance. Dès mon enfance, j’
ai
entendu parler chez mes parents des tantes de Dresde, auxquelles nous
446
terre des pères et le continent des rêves, il n’y
avait
aucune opposition : je l’ai écrit dans un petit ouvrage intitulé Sui
447
des rêves, il n’y avait aucune opposition : je l’
ai
écrit dans un petit ouvrage intitulé Suite neuchâteloise , publiée e
448
’Europe franco-germanique, c’est que d’abord je l’
ai
trouvée dans ma famille, où tant de traditions se croisent et se mari
449
te dans mon cas. Dès l’âge de 15 ans, je pense, j’
ai
découvert Rimbaud, qui était pour ma génération notre ange révolté, m
450
adolescence, je ne croyais qu’à la poésie, puis j’
ai
découvert la théologie avec Karl Barth, dans la lignée « existentiell
451
y, quand il affirmait qu’est européen tout ce qui
a
été marqué par Athènes, Rome et Jérusalem. On cite toujours ces trois
452
ique et la celtique, voire plus tard l’arabe, qui
ont
été et restent capitales pour la littérature européenne. C’est en som
453
s œuvres japonaises, comme le Roman de Genji, qui
a
joué au Moyen Âge un rôle un peu analogue à celui du Roman de Tristan
454
Tristan pour l’Europe. Cette découverte éblouie m’
a
fait écrire en trois mois L’Amour et l’Occident , un titre qui peut
455
eterre, grâce à T. S. Eliot, et aux États-Unis, m’
a
beaucoup aidé à gagner l’intérêt des éditeurs et l’amitié des critiqu
456
es critiques américains, pendant les années que j’
ai
passées là-bas, de 1941 à 1947. Vous avez dit et écrit à plusieurs re
457
ées que j’ai passées là-bas, de 1941 à 1947. Vous
avez
dit et écrit à plusieurs reprises que c’est en Amérique que vous avez
458
plusieurs reprises que c’est en Amérique que vous
avez
découvert l’Europe. Comment cela s’est-il passé ? De deux manières.
459
s’est-il passé ? De deux manières. D’une part, j’
ai
retrouvé à New York beaucoup d’écrivains, d’intellectuels et d’artist
460
ntellectuels et d’artistes, que je fréquentais ou
aurais
pu fréquenter à Paris dans les années 1930, et avec lesquels je me su
461
nostalgie lancinante, révélatrice de ce que nous
avions
perdu et que nous ne pourrions retrouver un jour que si l’Autre était
462
rdre nouveau. C’était l’aventure permanente. Nous
avions
en commun l’essentiel de nos refus et de nos propositions. Je vais es
463
uteurs, comme Edgar Morin et Jean-Marie Domenach,
ont
insisté sur le caractère récent de leur sympathie européenne, et sur
464
r sympathie européenne, et sur la méfiance qu’ils
ont
ressentie après la guerre à l’égard d’une Europe qui leur semblait êt
465
le jeu de la guerre froide. Ce n’est pas et ce n’
a
jamais été votre position. Pourquoi ? Je n’ai jamais, pas un instant,
466
ce n’a jamais été votre position. Pourquoi ? Je n’
ai
jamais, pas un instant, senti les choses de cette manière. Pour moi,
467
nées de ce que je considérais comme un exil, je n’
avais
qu’une idée, qui était de fédérer les Européens pour leur propre salu
468
marxiste de l’époque, le Hongrois Georg Lukács, j’
ai
soutenu la thèse que le sort de la paix dépendait désormais d’une uni
469
plus tard, à peine rentré pour de bon des USA, j’
ai
accepté d’introduire par un discours le premier congrès des fédéralis
470
se tenir à Montreux au début de septembre 1947. J’
ai
retrouvé là de vieux amis de l’Ordre nouveau, comme Alexandre Marc et
471
coup, Henri Brugmans, qui présidait l’affaire. J’
ai
parlé de « l’Attitude fédéraliste », et le succès a été tel que je me
472
parlé de « l’Attitude fédéraliste », et le succès
a
été tel que je me suis vu en quelque sorte catapulté dans un rôle de
473
e ou « libre et engagé » selon les formules que j’
avais
lancées dans les années 1930, et dont on me disait maintenant que c’é
474
’était « l’engagement, comme dit Sartre… » Je lui
ai
laissé le mot, et j’ai gardé la chose. J’ai dit à mes amis fédéralist
475
comme dit Sartre… » Je lui ai laissé le mot, et j’
ai
gardé la chose. J’ai dit à mes amis fédéralistes que j’étais prêt à c
476
e lui ai laissé le mot, et j’ai gardé la chose. J’
ai
dit à mes amis fédéralistes que j’étais prêt à consacrer à leur campa
477
ai 1948, présidé par Winston Churchill, et dont j’
ai
assumé la partie culturelle présidée à La Haye par Salvador de Madari
478
de la politique. Dans une série de réunions que j’
avais
convoquées à Paris, à Genève, à Royaumont, à la Chambre des communes,
479
des communes, la commission culturelle du congrès
a
mis au point non seulement le Rapport culturel, mais bien plus que ce
480
éens », qui devait clôturer le congrès, et dont j’
avais
exigé et obtenu qu’il fût rédigé par moi au nom de ma commission. J’é
481
ar moi au nom de ma commission. J’étais embarqué.
Avez
-vous été soutenu, durant ces années de création du Mouvement européen
482
résidée par Salvador de Madariaga, Ignazio Silone
ayant
décliné cet honneur — mais il devait être par la suite l’un des intel
483
. Il y avait dans la commission ou parmi ceux qui
avaient
contribué à ses travaux préparatoires des hommes tels que Bertrand Ru
484
même quelques anciens ministres… Quels résultats
avez
-vous enregistrés ? Après la lecture de mon « Message aux Européens »,
485
l’espoir. Le principal, pour ce qui me concerne,
a
été la décision de créer un « Centre européen de la culture », chargé
486
u Mouvement européen, né du congrès de La Haye, j’
ai
ouvert à Genève un « Bureau d’études pour un Centre européen de la cu
487
urs de l’Union européenne des fédéralistes, qui m’
avait
déjà secondé à La Haye. Ensemble, nous avons préparé une Conférence e
488
ui m’avait déjà secondé à La Haye. Ensemble, nous
avons
préparé une Conférence européenne de la culture qui devait définir le
489
rapporteur général, et Silva secrétaire général,
avait
préparé et conduisit la conférence. On entendit dès l’ouverture le pr
490
ns qui furent adoptées à la séance de clôture, 21
ont
été suivies de réalisations, chiffre, je crois, jamais atteint par au
491
, et qu’on n’imagine pas confié à un écrivain. Qu’
avez
-vous pu réaliser, ou essayé de réaliser pendant les trente-trois ans
492
de réaliser pendant les trente-trois ans que vous
avez
passés à la tête du Centre, soit comme son directeur, soit depuis 197
493
e temps. Je mentionnerai d’abord deux idées que j’
ai
lancées et qui se sont réalisées grâce au Centre mais hors de lui. La
494
ion étroite avec Raoul Dautry, puis Pierre Auger,
a
été le Centre européen de recherches nucléaires, ou CERN, foyer de re
495
tions de leurs résultats à la vie civile. Le CERN
a
été un succès exemplaire, retentissant, mais qui s’est réalisé en deh
496
sco puis de treize gouvernements. La seconde idée
a
été celle d’une fondation, l’actuelle Fondation européenne de la cult
497
dée par le prince Bernhard des Pays-Bas, et que j’
ai
instituée et dirigée au siège de notre Centre d’abord, pendant deux a
498
is, Paul Rykens, président de Unilever. Mais nous
avons
créé et gardé au CEC — présidence, secrétariat, lieu de rencontre — n
499
t enfin des colloques, séminaires et congrès, qui
ont
rassemblé à la Villa Moynier, siège genevois du CEC, des centaines d’
500
s de Rougemont, comme écrivain, pendant ce temps,
avez
-vous encore trouvé le moyen d’écrire pour vous ? C’est le problème de
501
nseigne encore à titre de professeur honoraire, j’
ai
été amené à publier une dizaine d’ouvrages sur l’Europe et ses problè
502
comités et de congrès. Mais dans le même temps, j’
ai
écrit et publié une quinzaine d’ouvrages littéraires et philosophique
503
génération et de celle des grands aînés que vous
avez
cités. Est-ce à vos yeux décourageant ? Il est certain que les écriva
504
uccessives de J.-P. Sartre. Dans le texte qu’il m’
avait
envoyé pour la conférence de Lausanne, Sartre expliquait que la cultu
505
it encore dans le tiers-monde, car « l’Européen n’
a
pu se faire homme qu’en fabriquant des esclaves et des monstres ». Il
506
onstres ». Il va jusqu’à dire que les Européens n’
ont
édifié leurs cathédrales (sic) que grâce à l’exploitation colonialist
507
terrogiez sur l’intellectuel et l’Europe. Je vous
ai
donné un exemple concret, le mien. Les mouvements européens avec lesq
508
le mien. Les mouvements européens avec lesquels j’
ai
travaillé dans les années 1950 et 1960 font du surplace, c’est éviden
509
e nouvelle génération, dont je me sens solidaire,
a
relancé le combat pour l’avenir. Elle fait sienne, dans sa majorité,
510
enne, dans sa majorité, le mot d’ordre que je lui
ai
proposé : Écologie, régions, Europe fédérée : même avenir. L’Europe n
511
n sûr, mais aussi les Germains et les Celtes, qui
ont
recouvert le continent (sauf Rome et Delphes, mises à sac par jalousi
512
e note : « Écrivain et philosophe dont les œuvres
ont
été traduites en 18 langues, Denis de Rougemont a fondé en 1949 à Gen
513
t été traduites en 18 langues, Denis de Rougemont
a
fondé en 1949 à Genève le Centre européen de la culture. Il en a été
514
à Genève le Centre européen de la culture. Il en
a
été le directeur de 1949 à 1978 et en reste le président. Il a égalem
515
cteur de 1949 à 1978 et en reste le président. Il
a
également présidé le Congrès pour la liberté de la culture (1952-1966
516
nir est notre affaire (1977). Cette conversation
a
été enregistrée chez lui, à Saint-Genis-Pouilly, en juin 1982. »
517
entier. Moins de bien : car Orwell, à mon sens, n’
a
pas été le vrai prophète que l’on célèbre à l’unisson. Et cela pour d
518
e déroule l’action de son roman, l’Europe entière
a
été absorbée par la Russie soviétique et la Grande-Bretagne par les A
519
la grande puissance totalitaire de l’Est et qui l’
a
comme frappée de stupeur interdite, par la voix et l’action d’un chré
520
ou comme Jérémie : « Seigneur, tu le sais ! je n’
ai
pas désiré le jour du malheur ! » Le vrai prophète veut détourner son
521
veiller en nous le courage de réagir, jamais il n’
a
montré les buts d’une action libératrice, ni les finalités de l’espri
522
es exigences de leur vocation de liberté. Orwell
a
pressenti l’avenir effrayant qu’allaient rendre possible à bref délai
523
ues et de leurs technologies de pointe, dont il n’
a
pu connaître en 1948 que les balbutiements : je veux parler des armes
524
oici les phrases capitales dans lesquelles Orwell
a
prévu ce que nous sommes en train de vivre dans nos États-nations de
525
TV dans tous les ménages. Mais c’est cela qui lui
a
suggéré l’idée maîtresse du livre : l’omniprésence, à tous les moment
526
u et c’est le côté un peu Tintin de ce roman). En
avons
-nous conscience ? Sans relâche, à toutes les heures du jour et de la
527
uvoir, soit contre lui, mais sur les thèmes qu’il
a
choisis. Il y a là, beaucoup plus qu’on ne le croit, une entreprise p
528
ens fichiers manuels, mais que les Pouvoirs seuls
ont
établi et dont ils sont seuls responsables. Ce qui me fait peur, — c’
529
ux nous apprennent que des gamins de 16 ou 17 ans
ont
« pénétré » les codes d’une banque, d’une institution médicale, voire
530
la bombe atomique , publié d’abord à New York, j’
avais
écrit le Post-scriptum que voici : Un dernier mot, et dire que j’a
531
rriblement dangereux c’est l’homme. C’est lui qui
a
fait la Bombe et qui se prépare à l’employer. Le contrôle de la Bombe
532
e paraît aujourd’hui nécessaire. La Bombe ne peut
avoir
aucun emploi bénéfique pour l’homme, ni pour sa liberté. Il n’en va p
533
e employé pour le bien autant que pour le mal. On
a
beaucoup dit qu’il favoriserait non seulement la surveillance policiè
534
à, dit mon ami, vous me rendez jaloux de ne pas l’
avoir
trouvée ! » Je vous ferai grâce, aujourd’hui, de la démonstration fa
535
nient sont des faibles d’esprit. Or le chômage n’
a
pas cessé d’augmenter depuis ce temps-là. Qu’en est-il aujourd’hui d
536
e : « le syndicat de l’automobile, un des rares à
avoir
essayé de mesurer les conséquences de l’automatisation, prévoit que l
537
978 et 1990 de 1 million à 800 000, bien que l’on
ait
retenu comme hypothèse une croissance de 1,8 % des ventes de voiture
538
: « dans les postes américaines, l’automatisation
a
entraîné une baisse des effectifs de 10 % depuis 1970, faisant de la
539
Les récentes grèves dans les P&T françaises n’
avaient
pas d’autre motif.) Le rapport Nora et Minc, établi en 1978, prévoyai
540
, le patronat ni même la plupart des syndicats, n’
ont
prêté la moindre attention aux répercussions possibles de l’automatis
541
ces déclarations optimistes… Quelques indications
ont
paru, au contraire, précisant que depuis dix ans, l’augmentation stup
542
tation stupéfiante de la production d’ordinateurs
a
correspondu à une baisse marquée dans la main-d’œuvre qui les fabriqu
543
des psychologiques poursuivies en Grande-Bretagne
ont
montré que beaucoup d’usagers de l’ordinateur se sentent aujourd’hui
544
ec l’ordinateur provoque en eux un stress dont on
a
mesuré les effets. Dans le domaine du dessin industriel, par exemple,
545
reau international du travail, saisi du problème,
a
formulé des mesures de protection contre ce stress. L’économiste angl
546
occidentale : liberté ou chômage ? La question n’
a
toujours pas reçu de réponse. L’informatisation de l’industrie n’a fa
547
çu de réponse. L’informatisation de l’industrie n’
a
fait que rendre plus urgent et dramatique le problème, toujours renvo
548
». Il va jusqu’à suggérer que la machine pourrait
avoir
quelques rapports avec l’affectivité, puisque certaines notions de la
549
otre expérience en intelligence artificielle nous
a
montré que de nombreuses notions comme la créativité, l’affectivité,
550
nature humaine, il répond qu’en effet, « comme l’
a
fait la religion dans le passé, l’ordinateur est en train d’amorcer u
551
re qu’un ordinateur espère. » Non : la machine n’
a
pas de mémoire, n’a pas d’espoir non plus, ni d’affectivité, et n’est
552
espère. » Non : la machine n’a pas de mémoire, n’
a
pas d’espoir non plus, ni d’affectivité, et n’est donc pas humaine. C
553
ons de nous précipiter vers un avenir dont nous n’
avons
pas même pris le temps d’évaluer les enjeux humains, obsédés que nous
554
que nous sommes par des gains immédiats. Je vous
ai
cité des chiffres effarants sur le chômage que nous prépare l’informa
555
e trentaine de points noirs sur la carte. Comme j’
avais
l’esprit occupé par la promesse d’une préface pour cette brochure, pe
556
cette brochure, pendant une fraction de seconde j’
ai
cru qu’il s’agissait de la répartition des centrales nucléaires, et l
557
éaires, et la similitude ou plutôt le contraste m’
a
frappé : les grands monuments symboliques de la civilisation du Moyen
558
ments symboliques de la civilisation du Moyen Âge
ont
été les cathédrales, ceux de notre époque seront les lourdes tours nu
559
es édifiées par la piété des communautés urbaines
ont
été les sources puissantes de l’énergie spirituelle de l’Occident, ce
560
teints ! Car en laissant les choses aller, il les
a
livrées à une logique qui s’est imposée à nous tous, celle du concept
561
r ce trajet géographico-historique : il me semble
avoir
curieusement contourné l’Empire romain, et par là même corrigé quelqu
562
, de Rome et de Jérusalem. Je regrette que nous n’
ayons
pas eu l’occasion de souligner assez fortement que trois influences o
563
et de Jérusalem. Je regrette que nous n’ayons pas
eu
l’occasion de souligner assez fortement que trois influences originel
564
otre histoire. (Une autre fois, j’espère que nous
aurons
le temps de mieux définir deux autres apports importants qui compliqu
565
ales (yoga hindou et bouddhisme zen.) Enfin, nous
avons
tenté quelques survols de cette unité dans la pluralité des sources e
566
long de ces trois journées, il me semble que nous
avons
fourni un effort unanime et, je crois, réussi, pour entretenir le dia
567
’Ouest. ⁂ Resserrons-nous maintenant sur ce que j’
ai
appelé la logique interne de tout débat sur le patrimoine culturel eu
568
t débat sur le patrimoine culturel européen. Nous
avons
constaté que le patrimoine, au sens de passé dont nous héritons, ne p
569
des antinomies, dont voici une petite liste que j’
ai
établie pendant que vous parliez, les uns et les autres : — tradition
570
ourage d’affronter les risques ; — l’union solide
ayant
pour fonction de garantir l’autonomie de ses membres. ⁂ Tout cela, po
571
e fédération d’une Europe ouverte sur le monde. J’
ai
eu ici la très heureuse surprise de constater que la nécessité modern
572
édération d’une Europe ouverte sur le monde. J’ai
eu
ici la très heureuse surprise de constater que la nécessité moderne d
573
usions pour apporter une importante précision. On
a
coutume, à propos des régions, d’insister sur le nécessaire enracinem
574
s un milieu naturel et humain où l’on dit « qu’il
a
ses racines ». Mais en fait l’homme n’est pas un légume, c’est un ani
575
acinement mais la mobilité qui le caractérise. On
a
beaucoup exagéré l’importance des racines — c’est-à-dire du passé — d
576
ns, qui oublient que parmi les légumes, celui qui
a
la plus grosse racine de tous, qui est même presque tout entier racin
577
e presque tout entier racine, est aussi celui qui
a
la plus mauvaise réputation en littérature : c’est le navet. À l’idée
578
emarques générales sur nos colloques. Ce que nous
avons
essayé de faire dans celui-ci, comme dans celui de l’an dernier, c’es
579
divisions morbides que la folie des nationalités
a
mises et met encore entre les peuples de l’Europe, grâce aux politici
580
t profonds de ce siècle, l’œuvre commune de l’âme
a
consisté à préparer, à supputer et à anticiper cette nouvelle synthès
581
crise, c’est le mot dominant, crise que l’Europe
a
fomentée en répandant imprudemment sa civilisation industrielle et te
582
tures les moins faites pour l’accueillir, qu’elle
a
profondément déstabilisées, et dont le désarroi peut être exploité co
583
contre nous, y compris dans ce que notre culture
a
créé de meilleur. Ce qui doit dominer nos préoccupations aujourd’hui,
584
as de page d’une chronique de ce temps, qu’il n’y
aura
plus personne pour lire. Nous avons rappelé et défini les principale
585
ps, qu’il n’y aura plus personne pour lire. Nous
avons
rappelé et défini les principales diversités, qui constituent notre u
586
éer dans toutes les sociétés qu’elle touche. Nous
avons
fait beaucoup pour nous connaître mieux, nous les Européens fauteurs
587
les anticorps des virus que nous propageons. Nous
avons
essayé de mieux nous connaître et nous y sommes arrivés quelquefois,
588
te idée de comparaison active, prospective, que j’
ai
proposé depuis plus de vingt ans, avec une certaine obstination, ce q
589
des plus fructueux et encourageants auxquels il m’
ait
été donné de prendre part au cours de ces dernières années. ac. Ro
590
audois : avec Denis de Rougemont (19 juin 1984)ah
ai
L’ensemble des conflits qui couvent ou se déclarent en cette fin d
591
réelle sans nulle puissance, ni de puissance qui
ait
quelque saveur sans au moins l’illusion qu’on l’exerce « librement ».
592
st le choix d’une priorité, à laquelle les moyens
ont
pour devoir de concourir. Choisir les centrales nucléaires — quelle q
593
», L’Est vaudois, Montreux, 19 juin 1984, p. 6.
ai
. Précédé de cette note : « En vue des votations relatives aux initiat
594
us ses membres et sympathisants, texte qu’il nous
a
semblé utile de reproduire ici. Par ailleurs, le même Club-Énergie an
595
’Emmanuel Mounier [témoignage I] (1985)al Nous
avions
entre vingt-cinq et trente ans pour la plupart dans les équipes fonda
596
thèse bien connue de Jean-Louis Loubet del Bayle
a
nommée « les non-conformistes des années 1930 », je vais vous apporte
597
ue de la « génération des années 1930 » me semble
avoir
été déterminé par la nature particulière de l’affrontement de l’Est e
598
juifs, agnostiques et nietzschéens ensemble, nous
avons
choisi de fonder sur la personne, c’est-à-dire sur cet homme à la foi
599
Et là-dessus, deux précisions d’actualité. 1. On
a
dit que nous étions « totalement négatifs ». Et c’est un fait que, fa
600
s dans le cas des régimes totalitaires, dont nous
avions
tenté très sérieusement de comprendre les motivations — ce qui nous f
601
la mesure même où ils étaient totalitaires. 2. On
a
dit que nous étions « fascinés » par les jeunes fascistes, et que nou
602
t atteindre sa pleine stature en Allemagne, après
avoir
conquis la Russie soviétique et l’Italie, nous voulions le dénoncer e
603
de même ! que l’expression d’« État totalitaire »
a
été introduite par Mussolini, qui venait de faire sa carrière politiq
604
du tsarisme ; et, enfin, que la guerre, en 1939,
a
été déclenchée par le pacte scélérat entre nazis et communistes, sous
605
oudrais pas affirmer ici un seul instant que nous
avions
raison sur tout et dans toutes nos diverses options, assez diverses s
606
lles étaient alors nos motivations, qu’ainsi nous
avons
vécu notre époque, dans les années 1930. Il me semble que nous étions
607
jourd’hui. Ce que j’affirme ici, c’est que nous n’
avons
pas fini de nous battre pour une société des personnes libres et resp
608
ociété des personnes libres et responsables. Nous
avons
à peine commencé. al. Rougemont Denis de, « Témoignage I : Le pers
609
anuel Mounier [témoignage II] (1985)am Je vous
ai
dit hier comment je me rappelais avoir vécu le personnalisme du début
610
am Je vous ai dit hier comment je me rappelais
avoir
vécu le personnalisme du début d’Esprit. On vient de nous dire commen
611
début d’Esprit. On vient de nous dire comment il
avait
été perçu. Si les notes que j’ai prises pendant qu’il parlait sont ex
612
re comment il avait été perçu. Si les notes que j’
ai
prises pendant qu’il parlait sont exactes, John Hellman voit dans le
613
les jugements du cardinal Verdier sur Esprit, qui
aurait
été en tant que Troisième force un curieux centre, à mi-chemin entre
614
u-nalisme », plutôt que du personnalisme que nous
avons
vécu. Hellman nous dit que, dans un tract intitulé Le Voltigeur, j’au
615
s dit que, dans un tract intitulé Le Voltigeur, j’
aurais
réclamé la création en France d’un « fascisme antifasciste ». L’erreu
616
évidente et elle est aussi grave que possible. J’
ai
souvent mis en garde, en effet, contre le danger d’un antifascisme sy
617
re biblique des Proverbes 6 en deux versets que j’
ai
cités dans une réédition récente de La Part du diable . Les voici :
618
rde pas comme sage. Inutile de dire qu’en fait j’
avais
choisi l’antifascisme déclaré, mais fondé sur les exigences créatrice
619
ant et le plus pathétique sans nul doute. Quand j’
ai
publié en 1934 un recueil d’essais et de conférences intitulé Politi
620
é Politique de la personne , la Pravda de Moscou
a
déclaré que « toutes les positions d’un fascisme français étaient déf
621
ans ce livre ». C’est ainsi que les communistes m’
avaient
sinon « perçu », du moins avaient décidé qu’il fallait me percevoir.
622
s communistes m’avaient sinon « perçu », du moins
avaient
décidé qu’il fallait me percevoir. Cette phrase se trouve préfigurée
623
tions » des jeunes groupes révolutionnaires que j’
avais
composé pour le numéro de décembre 1932 de la NRF . C’est Jean Paulh
624
cembre 1932 de la NRF . C’est Jean Paulhan qui m’
avait
proposé ce « Cahier », à la suite d’un petit article paru dans une re
625
semaine après cette visite, Nizan m’écrivit qu’il
avait
remis son papier à Paulhan, et qu’il allait nous envoyer des « propos
626
a revue Europe, dirigée par Jean Guéhenno (dont j’
ai
cité tout à l’heure la lettre à Romain Rolland qui nous qualifie de f
627
n, qui m’attaque avec une extrême violence : je l’
avais
trompé, affirme-t-il, en lui cachant l’identité des participants non
628
participants non communistes à mon enquête. S’il
avait
su, il n’eût jamais accepté de collaborer. Et il me traite de « serge
629
on communistes à mon enquête. S’il avait su, il n’
eût
jamais accepté de collaborer. Et il me traite de « sergent recruteur
630
u’il est faux d’écrire aujourd’hui que Paul Nizan
a
« perçu » le personnalisme comme préparant les voies du fascisme fran
631
sance de cause, par un mensonge délibéré, il nous
a
dénoncés comme fascistes sur ordre du Parti. Le totalitaire, c’était
632
ustes mesures la notion de « perçu », telle qu’on
a
tenté de l’opposer à celle du vécu, — ce vécu dont il nous appartient
633
, vous savez, j’y viens presque tous les jours, j’
ai
un bureau en bas, non, vraiment… » — « Eh bien, fait-il, le jour où j
634
tard en physique atomique une chambre à bulles »,
ai
-je écrit ailleurs8. J’avais rencontré là plusieurs des demi-dieux de
635
une chambre à bulles », ai-je écrit ailleurs8. J’
avais
rencontré là plusieurs des demi-dieux de mon adolescence littéraire,
636
rtinentes, et sans doute obscures à leurs yeux. J’
avais
fini par m’en accommoder, m’en amuser, en dépit des malices de Paulha
637
s est-ce vrai ce que l’on dit, que c’est vous qui
avez
écrit le dernier recueil d’essais de Daniel Halévy ? » Je le connais
638
nt de m’arriver quelque chose de bien décevant. J’
ai
essayé de relire Cicéron dans l’espoir de le trouver surréaliste… Eh
639
t-il, justement nous parlions de Commerce 9. On m’
a
dit que la revue allait être reprise par vos Éditions “Je sers”… » —
640
en discussion. Quelques exemples parmi ceux que j’
ai
gardésao : le 12 octobre 1949 Cher ami Merci. Je suis ravi de ces pa
641
irable10. Nous le citerons (et je voudrais bien l’
avoir
écrit). amicalement J. P. Les N. C. 11 ne sont pas seulement assomm
642
pas seulement assommants (depuis qq. temps). Ils
ont
je ne sais quoi d’empêché, de contraint. Pourquoi ? Je voudrais bien
643
mpêché, de contraint. Pourquoi ? Je voudrais bien
avoir
votre avis sur la note jointe. 21.VIII.1949 Mon cher ami ah j’aura
644
la note jointe. 21.VIII.1949 Mon cher ami ah j’
aurais
tout à fait besoin du Saint-John Perse avant le 10 septembre. Est-ce
645
une table, discutant les menus, et contents. Je n’
ai
revu Artaud qu’une seule fois, après mon retour d’Amérique, à l’autom
646
uette à droite du tourniquet d’entrée. Mes amis m’
ayant
quitté, j’ai été m’asseoir à son côté. Je le salue. Il me prend la ma
647
u tourniquet d’entrée. Mes amis m’ayant quitté, j’
ai
été m’asseoir à son côté. Je le salue. Il me prend la main. Moment de
648
les bureaux de l’Office of War Information, où il
avait
un job, et où j’en cherchais un. On nous présente. « Dire que nous av
649
n cherchais un. On nous présente. « Dire que nous
avons
vécu des années à Paris sans nous rencontrer ! » s’écrie-t-il, et il
650
« Votre dernier livre est un livre dangereux ! J’
ai
pu le voir, par les réactions d’Elisa ! » (sa nouvelle femme). Il s’a
651
et peut-être engageante dans le cas d’Elisa pour
avoir
été tolérée par ses jeunes amis du groupe surréaliste reformé à New Y
652
l faut bien sauver la face… L’athéisme flamboyant
a
toujours été l’un des dogmes de la secte surréaliste. Tout d’un coup,
653
ogmes de la secte surréaliste. Tout d’un coup, il
a
trouvé la solution : « Nous allons demander à Marcel de trancher le d
654
ce que cela peut bien lui faire ? Avec ça qu’il n’
a
pas fait une religion de son surréalisme ! » Ce sera tout. Commande d
655
e la plus belle contrepèterie du siècle ? Je ne l’
ai
jamais entendu citer par d’autres. Je vais pour sortir de chez Gallim
656
nouveaux commandeurs de la Légion d’honneur. « J’
ai
pas su pleurer dans les ministères. J’ai pas su dire : “C’est pas pou
657
eur. « J’ai pas su pleurer dans les ministères. J’
ai
pas su dire : “C’est pas pour moi, c’est pour ma mère ! La pauvre, el
658
e est morte il y a douze ans…” » Ce matin même, j’
ai
lu dans un journal qu’il l’avait enfin, sa cravate ! Et le voilà. Je
659
» Ce matin même, j’ai lu dans un journal qu’il l’
avait
enfin, sa cravate ! Et le voilà. Je lui dis : « Léon-Paul, je n’ose p
660
Léon-Paul, je n’ose plus vous serrer la main ! J’
ai
peur d’être Don Juan au dernier acte… » Il s’arrête. « June homme ! M
661
homme ! Moi, je vais vous en dire une ! Avant, j’
avais
la roseur de la Légion d’honnête. À présent, j’ai la candeur de la Co
662
is la roseur de la Légion d’honnête. À présent, j’
ai
la candeur de la Comment-ça-vat !… » Et il ajoute, après avoir enregi
663
eur de la Comment-ça-vat !… » Et il ajoute, après
avoir
enregistré ma réaction : « Hein ! Comme contrepèterie, a s’pose là !
664
istré ma réaction : « Hein ! Comme contrepèterie,
a
s’pose là ! Il y a quinze jours que j’y travaille… » Au restaurant «
665
t il dit : « Ça ira pour cette fois. Mais la mort
a
fait un nœud à son mouchoir… » La valise Lettre de Charles-Albe
666
ous écrirai plutôt dans quelques jours, dès que j’
aurai
une adresse. Et vous me direz alors si vous consentez à donner quelqu
667
us tard, sur le quai de la gare de Berne, où nous
avons
pris rendez-vous. Il arrive, lentement, poussant son vélo à la main,
668
je n’entends rien de ce que l’autre peut dire… J’
ai
quitté la maison de Budry, et j’ai été m’installer de l’autre côté de
669
e peut dire… J’ai quitté la maison de Budry, et j’
ai
été m’installer de l’autre côté de la place, dans un petit hôtel. J’a
670
l’autre côté de la place, dans un petit hôtel. J’
ai
une chambre qui donne sur la place. Le matin, je m’installe sur le ba
671
aul Valéry, Léon-Paul Fargue, Valery Larbaud. » J’
avais
entendu dire que la princesse Bassiano venait de décider d’interrompr
672
mes collègues jurés du Prix européen de l’essai m’
ont
demandé de prononcer l’éloge du lauréat que nous venions de choisir,
673
ue nous venions de choisir, mon premier mouvement
a
été de joyeuse acceptation, et puis un scrupule m’est venu, presque u
674
prudent et circonspect en tous domaines, je ne l’
ai
jamais été, hélas, dans aucun. Il est analytique et méthodique, moi p
675
que, moi plutôt polémique et passionné. Autant il
a
su préserver l’irénisme du philosophe dans ses écrits et son comporte
676
omme le dit si joliment Montaigne, alors que je n’
ai
jamais cessé de m’engager pour des causes, et tant pis pour moi. Ceci
677
es causes, et tant pis pour moi. Ceci encore : il
a
tout lu et se souvient de tout, à l’instant où il le faut ; moi j’ess
678
e suis dit : voyons un peu plus large. Ensuite, j’
ai
lu ce Montaigne en mouvement, ce maître livre, dont je vous parlerai
679
es antinomies apparentes. Le simple fait que nous
ayons
, à partir d’origines si différentes, choisi Genève pour y vivre et tr
680
availler, plutôt que Paris et les États-Unis, qui
avaient
de quoi nous tenter l’un et l’autre à la fin de la dernière guerre ;
681
us. Enracinés dans la littérature française, nous
avons
l’un et l’autre été nourris par l’Europe germanique et le monde anglo
682
de l’engagement tel qu’on le parle, Starobinski n’
a
jamais négligé le devoir civique : c’en était un pour lui que de prés
683
ce de la phrase. D’un texte de Starobinski dont j’
eus
un jour connaissance, je voudrais vous citer, en toute indiscrétion,
684
xigences de la science sans offenser la clarté. J’
ai
donc ambitieusement défini ma tâche : conférer à l’essai littéraire,
685
qu’on lise à cet égard l’importante préface qu’il
a
donnée aux Noces et à Sueur de sang de Pierre-Jean Jouve ; mais aussi
686
ands albums de Skira, ces images du xviiie qu’il
a
choisies pour illustrer L’Invention de la liberté. On n’a pas mieux é
687
es pour illustrer L’Invention de la liberté. On n’
a
pas mieux écrit en prose dans ce pays. Et Jean Starobinski est certai
688
ttéraire de notre temps, dès lors que sa critique
a
valeur « littéraire » par elle-même. Écrivain comme peu d’autres, ici
689
hui, quoi qu’il publie et sur quelque sujet qu’il
ait
choisi. C’est ici l’occasion de lui adresser un éloge accessoire sans
690
aujourd’hui l’un des très rares à mériter : il n’
a
jamais cédé à la mode jargonnante qui tyrannise nos soi-disant scienc
691
Il semble que les astres mêmes ordonnent que nous
avons
assez duré… Le plus voisin mal qui nous menace n’est pas altération d
692
Montaigne est un labyrinthe où les faux-semblants
ont
, pour ainsi dire, cours légal… Le mensonge se cache si peu qu’il pren
693
ensonges officiels, du « paraître ». Pourtant, il
a
bien vu l’insuffisance d’une attitude de refus pur et simple et de l’
694
illusion, nous dit-il, consiste à croire que l’on
a
quitté le domaine incertain de la décision éthique pour entrer dans c
695
faire croire qu’elle nous est extérieure, pour n’
avoir
pas à s’avouer nôtre… Tout cela prolonge les analyses de Montaigne, e
696
hacun sait que les portraits peints par Rembrandt
ont
tous un air de ressemblance, qui est le sien. Ainsi va-t-il de Montai
697
e réelle (décembre 1984-janvier 1985)aj Vous m’
avez
demandé ce que signifie pour moi le terme agora. Je vous réponds d’au
698
s d’autant plus volontiers que le concept d’agora
a
toujours joué un rôle fondamental dans ma théorie du fédéralisme. L’a
699
ter, par l’action publique. Platon et Aristote en
ont
beaucoup parlé. Aristote surtout a traité du rôle indispensable de l’
700
Aristote en ont beaucoup parlé. Aristote surtout
a
traité du rôle indispensable de l’agora dans la vie d’une cité, et il
701
pensable de l’agora dans la vie d’une cité, et il
a
décrit les dispositions architecturales typiques de la place publique
702
reffiers-là, passant le col ouvert vers 1240, qui
ont
fourni aux premiers confédérés les instruments nécessaires pour expri
703
s liens jurés, leurs « foederationes »5, puis ils
ont
poursuivi leur voyage vers le nord, appelés par les villes rhénanes,
704
, plaza, praça, Platz, plein ou même square, on l’
a
vu, selon les pays du continent. Les règles impératives à respecter s
705
s à respecter si l’on veut que l’agora fonctionne
ont
été formulées par Aristote, notamment dans sa politique. La première
706
remière règle est celle de la dimension, que nous
avons
signalée tout à l’heure : il s’agit de trouver un optimum entre trop
707
précise Aristote. On répond aujourd’hui que nous
avons
des haut-parleurs et que cela change tout. Oui, cela change tout pour
708
cela change tout. Oui, cela change tout pour qui
a
la haute main sur les radios et sur la télévision, l’État-nation cent
709
res et se faire entendre à l’échelle nationale, n’
ayant
que sa voix naturelle ? Il est évident qu’un Mussolini en 1922 ou sur
710
en 1922 ou surtout un Hitler dix ans plus tard n’
auraient
jamais pu prendre ou garder le pouvoir s’ils n’avaient pas disposé —
711
nt jamais pu prendre ou garder le pouvoir s’ils n’
avaient
pas disposé — et eux seuls — des haut-parleurs, c’est-à-dire des radi
712
rez ce que je veux dire. C’est l’expérience que j’
ai
subie à Francfort en 1936, à l’occasion d’un discours d’Hitler, qui m
713
1936, à l’occasion d’un discours d’Hitler, qui m’
a
révélé d’un seul coup, dramatiquement, l’essence horriblement religie
714
rement antichrétienne du régime totalitaire. J’en
ai
donné une description rigoureusement fidèle dans mon Journal d’Allem
715
mon Journal d’une époque en 1968. Ce jour-là, j’
ai
vécu jusqu’à l’horreur sacrée la réalité de l’anti-agora, de la dimen
716
’homme libre et responsable, formule que Sartre m’
a
empruntée sans jamais songer à me la rendre, vous le savez, c’est ma
717
passant : toutes les sottises monumentales qu’on
a
pu écrire contre Rousseau comme « précurseur des États totalitaires »
718
e symbole et même la définition du lieu où chacun
a
le droit de s’exprimer, de critiquer, de questionner et de proposer,
719
s. II. Elle est aussi le seul pays d’Europe qui n’
a
pas de culture nationale — et cela tient à sa structure fédéraliste n
720
le de l’Europe : du Moyen Âge à nos jours, elle n’
a
cessé d’illustrer la structure spécifiquement européenne de la format
721
e européenne ». Observons que nos États-nations n’
ont
en moyenne qu’environ deux-cents ans d’existence : où était donc la c
722
nne primitive sur laquelle Charles-Albert Cingria
a
écrit un petit chef-d’œuvre de poétique et d’intuitive érudition. C’é
723
ans conteste jusqu’à la fin du siècle, et qu’elle
a
contribué plus que toute autre circonstance à faire entrer dans la li
724
i, né Autrichien, et de C. G. Jung, né Bâlois. On
a
vu évoquer dans ces pages plusieurs des plus grands noms de l’aventur
725
de Suisses par naissance ou par choix. Mais on l’
aura
peut-être remarqué : nous n’avons pas produit en Suisse de poètes de
726
choix. Mais on l’aura peut-être remarqué : nous n’
avons
pas produit en Suisse de poètes de génie, ni de peintres qui aient fa
727
en Suisse de poètes de génie, ni de peintres qui
aient
fait époque, ni de compositeurs du plus haut rang. Hölderlin ou Dante
728
libre de tout souci d’obligation « morale » leur
eussent
été probablement refusés par nos coutumes les plus invétérées. En rev
729
es. En revanche, la plupart des grands noms que j’
ai
cités ne seraient guère pensables hors du complexe suisse. Et c’est à
730
Barth, qui, après de longs séjours loin du pays,
ont
fait le principal de leur carrière en Suisse, ce n’est pas la Suisse
731
ur carrière en Suisse, ce n’est pas la Suisse qui
a
découvert et propagé leur nom dans le monde ; c’est au contraire de l
732
age évident des petits pays sur les grands. 13.
A
Study in History, 1947, p. 11. « … l’Unité intelligible d’étude histo
733
ble d’étude historique » n’est ni un État-nation (
a
Nation-state) ni l’humanité prise comme un tout, mais un certain grou
734
dent 15, qui fait désormais figure de classique,
a
sans doute quelque peu occulté les premiers écrits politiques16. Ces
735
sont, aujourd’hui, souvent introuvables, faute d’
avoir
été réédités. Rougemont dénonçait, dès le début des années 1930, l’in
736
ndre : tel est le sort des non-conformistes18. On
a
peut-être trop négligé la dimension téléologique de son système de pe
737
éclin. On proclame que Marx est mort, alors qu’on
aurait
pu penser, pour l’avoir tellement entendu répéter, que Dieu l’était.
738
rx est mort, alors qu’on aurait pu penser, pour l’
avoir
tellement entendu répéter, que Dieu l’était. Le retour de Dieu, préci
739
marxisme. Je ne me suis pas borné à condamner ; j’
ai
proposé les principes d’une société personnaliste à créer. Quant à me
740
e que sur le stalinisme totalitaire. Certes, je n’
ai
jamais été marxiste, mais il y a beaucoup de choses que Marx a découv
741
marxiste, mais il y a beaucoup de choses que Marx
a
découvertes, qui sont entrées dans le domaine commun, et qui sont dés
742
à prendre dans les écrits du jeune Marx, que nous
avait
révélés Arnaud Dandieu, alors qu’ils n’étaient qu’à peine connus et p
743
c’est que vous faisiez à l’époque déjà ce qu’on n’
a
vraiment commencé à faire ouvertement en France que beaucoup plus tar
744
expressément socialistes à l’origine. Ensuite il
a
pu y avoir des conflits entre Hitler, Mussolini et Staline, mais ce n
745
sément socialistes à l’origine. Ensuite il a pu y
avoir
des conflits entre Hitler, Mussolini et Staline, mais ce n’étaient pa
746
uvent trompé sur ce que nous appelions l’État. On
a
cru que nous voulions le supprimer, et nous voulions seulement précis
747
respectable, et même indispensable. Mais l’État n’
a
aucune autorité en soi. On s’arrange par convention pour qu’un certai
748
l’on voit tout le temps revenir en France : « Il
a
été un grand serviteur de l’État ». C’est l’État qui est un service ;
749
ont du même pays, ils sont de la même langue, ils
ont
des liens de parenté, ils ont des traditions communes et des idéaux c
750
la même langue, ils ont des liens de parenté, ils
ont
des traditions communes et des idéaux communs, ils forment un tissu s
751
dividus isolés, séparés. Ils sont « reliés ». Ils
ont
des prochains, non plus seulement des « voisins inévitables », comme
752
qu’il y a eu mauvaise interprétation du terme. On
a
pu croire que vous étiez contre l’individualisme, au sens d’une limit
753
apoléonien et jacobin comme modèle de tout ce qui
avait
été fortement aggravé par Mussolini : l’État au-dessus de tout. C’est
754
i : l’État au-dessus de tout. C’est Mussolini qui
a
inventé l’expression d’État totalitaire, considéré comme valeur suprê
755
istoire. L’homme était au service de l’État. Cela
a
été repris en bonne partie par Hitler, qui a tout de même insisté bea
756
Cela a été repris en bonne partie par Hitler, qui
a
tout de même insisté beaucoup plus sur les éléments de communauté qu’
757
lus bas, par exemple dans la race, ce qui ne nous
avait
jamais effleurés. Parmi les personnalistes anglais, allemands, espagn
758
ructive. C’est d’ailleurs dans Nietzsche que nous
avons
lu les premiers textes énergiquement favorables à l’union de l’Europe
759
de l’Europe, que les meilleurs esprits du temps l’
ont
déjà compris. Tout indique, dit Nietzsche, que nous devons dépasser c
760
plus que ça, vers une république européenne, qui
a
toujours été le rêve et l’idéal des grands esprits : c’est seulement
761
ons opposées aux siennes sur le plan religieux. J’
ai
en effet le sentiment que pour vous le personnalisme et ensuite le fé
762
sa théorie, sa politique, son sens du civisme. J’
avais
fait, comme tout un chacun, ma révolte entre 19 et 23 ans. Si on m’av
763
un chacun, ma révolte entre 19 et 23 ans. Si on m’
avait
demandé alors ce que je croyais, j’aurais dit que je croyais à n’impo
764
Si on m’avait demandé alors ce que je croyais, j’
aurais
dit que je croyais à n’importe quoi sauf au protestantisme traditionn
765
’entendais prêcher le dimanche. C’est alors que j’
ai
découvert Kierkegaard. J’ai commencé à lire quelques fragments de lui
766
he. C’est alors que j’ai découvert Kierkegaard. J’
ai
commencé à lire quelques fragments de lui — intitulés Diapsalmata — p
767
plus exaltant que cette revue. Or c’est là que j’
ai
lu pour la première fois le nom de Kierkegaard. À quelle époque est-c
768
Ça remonte aux années 1927 à 1930. Je devais donc
avoir
21 à 24 ans. Je me suis mis à chercher ce qui était traduit de Kierke
769
était traduit de Kierkegaard en français : il n’y
avait
à peu près rien. Mais j’ai trouvé une belle anthologie en allemand. C
770
n français : il n’y avait à peu près rien. Mais j’
ai
trouvé une belle anthologie en allemand. Ce fut une lecture enthousia
771
thousiasmante. Je suis convaincu que si Nietzsche
avait
pu lire Kierkegaard, tout aurait changé dans la pensée philosophico-r
772
que si Nietzsche avait pu lire Kierkegaard, tout
aurait
changé dans la pensée philosophico-religieuse de la deuxième moitié d
773
ligieuse de la deuxième moitié du xixe siècle. J’
ai
d’ailleurs trouvé une lettre (je donne ce détail en passant parce qu’
774
grand interprète de la philosophie allemande, qui
avait
beaucoup entendu parler de Kierkegaard, professeur à Copenhague où il
775
ler de Kierkegaard, professeur à Copenhague où il
avait
été le premier à donner des cours sur lui. Il écrivait souvent à Niet
776
tzsche n’était pas devenu fou juste un mois après
avoir
reçu cette lettre ? Question vraiment tragique. Je redécouvrais donc
777
avec Kierkegaard le protestantisme dans ce qu’il
avait
de plus radical et révolutionnaire, tandis qu’en revenant à Calvin, p
778
alvin, peu après, je découvrais ce que la Réforme
avait
apporté de plus constructif du point de vue de la communauté civique.
779
leurs ni kierkegaardiens ni protestants. Enfin, j’
ai
découvert peu après, vers 1930, une théologie qui était nettement ins
780
th, membre actif du parti socialiste (ce que je n’
ai
jamais été), mais enfin cela indiquait une certaine direction, une ap
781
personne remonte à décembre 1934 ?23 Celle que j’
ai
publiée, mais ça résultait déjà de plusieurs années de réflexion phil
782
réflexion philosophique et théologique. Ce qui m’
a
beaucoup aidé c’était un article que j’avais lu dans Esprit d’un pe
783
Ce qui m’a beaucoup aidé c’était un article que j’
avais
lu dans Esprit d’un personnage haut en couleur, qui s’appelait l’ab
784
en couleur, qui s’appelait l’abbé Plaquevent. Il
avait
publié deux ou trois articles sensationnels dans Esprit dans lesque
785
dans lesquels il montrait comment le mot personne
a
été conçu, a été imaginé, pour désigner les trois êtres de même « sub
786
il montrait comment le mot personne a été conçu,
a
été imaginé, pour désigner les trois êtres de même « substance », mai
787
Père, Dieu le Fils, Dieu le Saint-Esprit. Il n’y
avait
pas de terme grec qui convenait. Le Père, le Fils et le Saint-Esprit
788
de l’Église à partir du concile de Nicée, et cela
a
finalement été résolu cent-vingt-cinq ans plus tard au concile de Cha
789
cinq ans plus tard au concile de Chalcédoine. Ils
ont
adopté le mot latin persona, qui désignait d’abord le rôle d’un acteu
790
roduit d’une division, comme l’atome, ce que Marx
avait
appelé la société atomisée, mais le sujet responsable de son rôle dan
791
« Définition de la personne ». Oui, l’individu n’
a
plus de valence civique, comme un atome dépourvu de sa puissance de c
792
ns que, dans la démocratie individualiste, il n’y
a
plus rien pour résister aux tendances totalitaires, parce que les tot
793
autaire. C’est une réponse qui ne vaut rien, je l’
ai
largement montré dans Penser avec les mains , mais c’est une réponse
794
est de dire « non », simplement. Une chose qui m’
avait
aussi beaucoup frappé c’était un petit livre de Thomas Mann qui s’int
795
on prive les hommes de leur volonté. Lui, on ne l’
aura
pas ! Il dira non jusqu’au bout. Mais il est hypnotisé comme les autr
796
e narrateur donne alors l’explication : l’homme n’
a
pu résister parce qu’il n’avait pas d’autre idée en tête que de dire
797
plication : l’homme n’a pu résister parce qu’il n’
avait
pas d’autre idée en tête que de dire non, ce qui fait qu’il n’avait p
798
idée en tête que de dire non, ce qui fait qu’il n’
avait
plus aucune volonté, ou une volonté purement négative, une « nolonté
799
être, à mon sens, le plus important de ceux que j’
aurai
écrits, mais qui n’est pas encore achevé. J’en ai une première versio
800
ai écrits, mais qui n’est pas encore achevé. J’en
ai
une première version écrite en 1945-1946, mais qui n’a jamais été pub
801
première version écrite en 1945-1946, mais qui n’
a
jamais été publiée. Elle n’a que 120 pages, et depuis lors j’ai accum
802
945-1946, mais qui n’a jamais été publiée. Elle n’
a
que 120 pages, et depuis lors j’ai accumulé au moins 400 pages de not
803
publiée. Elle n’a que 120 pages, et depuis lors j’
ai
accumulé au moins 400 pages de notes. Ça s’intitule La Morale du But
804
otes. Ça s’intitule La Morale du But , titre qui
a
mis en fureur des sociologues français que j’avais rencontrés à New Y
805
ui a mis en fureur des sociologues français que j’
avais
rencontrés à New York24. Ils trouvaient cela insensé. Ma thèse était
806
sont déterminés pour la rejoindre, elle seule. On
a
toujours triché avec cette phrase. On l’a appliquée à Ravaillac, à qu
807
ule. On a toujours triché avec cette phrase. On l’
a
appliquée à Ravaillac, à qui les jésuites avaient demandé de tuer Hen
808
On l’a appliquée à Ravaillac, à qui les jésuites
avaient
demandé de tuer Henri IV « pour la plus grande gloire de Dieu ». C’ét
809
atteint pas la vérité de la phrase. D’ailleurs, j’
ai
rencontré un philosophe américain nommé Max Lerner, avec qui j’avais
810
philosophe américain nommé Max Lerner, avec qui j’
avais
discuté cela, et qui avait mis au point sur ce sujet une question d’u
811
Max Lerner, avec qui j’avais discuté cela, et qui
avait
mis au point sur ce sujet une question d’une miraculeuse simplicité :
812
n what does ? »… Belle question socratique ! Kant
avait
absolument tort avec l’impératif catégorique, qui appartient au domai
813
dant la guerre, qui évitait de parler de Dieu. Il
avait
peur de tomber dans le langage pieux et il parlait plutôt de l’Absolu
814
pieux et il parlait plutôt de l’Absolu, ce qui l’
avait
rendu très populaire. L’Absolu, tout le monde peut l’accepter, car to
815
ça m’allait très bien d’appeler cela Dieu. Il n’y
a
qu’un Dieu pour tous les hommes. Qu’on le connaisse ou non, il est là
816
une personne. Chacun est différent de tout ce qui
a
jamais existé, de tout ce qui existera jamais (oh, un tout petit peu
817
’Ancien Testament, par exemple cette phrase qui m’
a
toujours frappé : « Ta parole est une lampe à mes pieds, une lumière
818
qui n’éclaire mon sentier que dans la mesure où j’
ai
le courage d’avancer, puisqu’elle est comme attachée à mon pied : ell
819
avance par la foi, et voilà le rôle de la foi : j’
ai
quelque part une certitude que mon pied ne va pas tomber dans le vide
820
. Mon chemin, je le répète, c’est mon moyen. Là j’
ai
retrouvé des choses qui sont dans Nietzsche, la création de soi en ve
821
a pensée. Et je vais l’écrire tout de suite après
avoir
achevé le livre auquel je travaille en ce moment, intitulé Journal d’
822
clusion de mon « journal non intime », comme je l’
ai
appelé, parce que je tais presque tout de ma vie privée, mais décris
823
r une certaine ambition littéraire que d’autres n’
avaient
pas, qui n’était pas dans leurs préoccupations maîtresses. Moi je me
824
ure était ma préoccupation fondamentale. Ce qui m’
a
fait découvrir Kierkegaard, c’est la littérature. Et tout ce que j’éc
825
s — c’est pour moi une question de rigueur — doit
avoir
une valeur littéraire à mes yeux. Vous disiez que chez vous plus que
826
éoccupation de formulation et de communication. J’
ai
été amené à discuter ces choses avec des gens qui étaient surtout des
827
à connaître des hommes politiques, mais je ne les
ai
jamais admirés ou vénérés de la même manière que des écrivains. Un de
828
même manière que des écrivains. Un de ceux qui m’
a
le plus marqué est Paul Valéry, que j’ai à peine rencontré. Il y en a
829
eux qui m’a le plus marqué est Paul Valéry, que j’
ai
à peine rencontré. Il y en a d’autres que j’ai beaucoup mieux connus.
830
Paul Valéry, que j’ai à peine rencontré. Il y en
a
d’autres que j’ai beaucoup mieux connus. Georges Bataille ? Bataille,
831
j’ai à peine rencontré. Il y en a d’autres que j’
ai
beaucoup mieux connus. Georges Bataille ? Bataille, moins que d’autre
832
lle ? Bataille, moins que d’autres, en fait. Je l’
ai
connu au Collège de sociologie, qu’il avait fondé avec Roger Caillois
833
it. Je l’ai connu au Collège de sociologie, qu’il
avait
fondé avec Roger Caillois. On y faisait des communications autour des
834
munications, sur sa demande et celle de Caillois,
a
porté sur la présentation d’un chapitre de L’Amour et l’Occident, « L
835
mour et l’Occident, « L’amour et la guerre », qui
avait
entièrement convaincu Bataille. Enfin, nous étions en bons termes, ma
836
lle. Enfin, nous étions en bons termes, mais je l’
ai
assez peu connu. Et Caillois ? Caillois, lui, c’était un ami, tout à
837
Caillois, lui, c’était un ami, tout à fait. Vous
avez
dû échanger beaucoup d’idées. Je pense en particulier à la notion de
838
à plusieurs reprises dans vos écrits. Caillois m’
a
beaucoup apporté, surtout pour mon étude des Règles du jeu, ouvrage q
839
uire La Morale du But , mais pour le moment, j’y
ai
renoncé… Êtes-vous toujours en rapport avec certains écrivains person
840
ns personnalistes ? Il se trouve qu’à mon âge — j’
aurai
78 ans dans un mois — eh bien, je ne me sens pas du tout vieux, mais
841
i s’est déclarée entre 1932 et 1939. Quelques-uns
ont
été tués, beaucoup sont morts depuis, et avec Alexandre Marc, je suis
842
rt de l’ambassadeur du Reich. Rougemont, accusé d’
avoir
mis en danger la sécurité du pays pour « insulte à chef d’État étrang
843
L’Europe des consciences (1986)ar
as
Depuis le xixe siècle romantique, le grand public et la plupart d
844
s il se perd dans les comités »… Combien d’autres
ont
dit ou écrit que mes engagements européens étaient « au détriment de
845
défis de l’Histoire auxquels toute ma génération
eut
à faire face, et d’autre part l’évolution intérieure qui fut la mienn
846
lerai d’abord la nature du défi que ma génération
eut
à relever. Arthur Koestler l’a fort bien dit : ce fut l’affrontement
847
ue ma génération eut à relever. Arthur Koestler l’
a
fort bien dit : ce fut l’affrontement entre un mensonge total, celui
848
es. La guerre entre eux devenait inévitable. Nous
aurions
à la faire, vu notre âge, mais ce ne serait pas notre guerre. Entre l
849
le là-bas, pensait-on sans doute en haut lieu. Qu’
ai
-je fait durant mes six années américaines ? J’ai écrit quelques livre
850
’ai-je fait durant mes six années américaines ? J’
ai
écrit quelques livres, sur la Suisse, sur le diable, et sur la bombe
851
e constante et poignante nostalgie, en Amérique j’
ai
découvert l’Europe, et la nécessité vitale de son union, si les Allié
852
s peuples. À mes amis fédéralistes, dont beaucoup
avaient
milité avant la guerre dans nos groupements personnalistes, puis insp
853
nts personnalistes, puis inspiré la Résistance, j’
ai
dit que j’étais prêt à donner à leur cause deux ans de ma vie, et tan
854
s que je vienne. Vers ma vingt-quatrième année, j’
avais
découvert deux auteurs qui furent décisifs pour ma vie : Kierkegaard
855
ue qui le relie à la communauté. Paul Valéry nous
avait
convaincus de ce que « toute politique suppose une certaine idée de l
856
t tenu pour responsable de ses actes si ceux-ci n’
ont
pas été accomplis librement (les juristes connaissent bien cela) et à
857
rter et où n’importe qui puisse lui répondre sans
avoir
l’organe de Stentor. Nous retrouvions l’idéal d’Aristote, qu’il décri
858
r de cette communauté. Voilà pour la doctrine. J’
ai
dit les conséquences qu’elle a entraînées dans ma vie. M’ont-elles «
859
ur la doctrine. J’ai dit les conséquences qu’elle
a
entraînées dans ma vie. M’ont-elles « perdu pour la littérature » ? J
860
conséquences qu’elle a entraînées dans ma vie. M’
ont
-elles « perdu pour la littérature » ? J’ose dire que non. De mon acti
861
? J’ose dire que non. De mon action européenne, j’
ai
tiré huit volumes, c’est près d’un quart de ce que j’ai publié jusqu’
862
é huit volumes, c’est près d’un quart de ce que j’
ai
publié jusqu’ici. Mais je ne voudrais surtout pas que l’on déduisît d
863
déduire qu’après coup, d’une analyse de ce que j’
ai
vécu. Mais dans le fait, au jour le jour, tout s’est passé autrement,
864
, par hasard. Certains moments décisifs de ma vie
ont
été décidés par des coups d’émotion, et d’autres par des décisions lo
865
crit en une demi-heure après que mon ordonnance m’
eut
annoncé ce qu’on venait d’entendre à la radio. Ces deux pages ont cha
866
u’on venait d’entendre à la radio. Ces deux pages
ont
changé ma vie en m’expédiant en Amérique pour plus de six ans. Mais à
867
présidence de Churchill, ce texte de trois pages
a
décidé de ma carrière professionnelle et notamment de l’existence du
868
iale actuelle est née des œuvres de l’Europe, qui
a
répandu sur toute la Terre ce qu’elle nomme le Progrès, c’est-à-dire
869
acifistes mais aussi de nationalismes furieux qui
ont
suscité le Terrorisme universel. Quelles issues possibles à cette cri
870
affirmant la vouloir. L’Europe des nationalismes
a
été responsable de deux guerres mondialisées. Elle a été aussi l’agen
871
té responsable de deux guerres mondialisées. Elle
a
été aussi l’agent mondialisant d’une forme de culture technico-scient
872
eux peuples de l’Europe : fait capital, dont nous
avons
trop peu conscience. Déjà le problème des régions devient le problème
873
inavoués, les plus actifs. Je serai content si j’
ai
pu contribuer par mes écrits et mon action à une prise de conscience
874
ences », Entailles, Montpellier, 1986, p. 77-83.
as
. Présenté par cette note : « « Denis de Rougemont nous a quittés le 6
875
enté par cette note : « « Denis de Rougemont nous
a
quittés le 6 décembre 1985 ; il avait 79 ans. Pour saluer sa mémoire,
876
Rougemont nous a quittés le 6 décembre 1985 ; il
avait
79 ans. Pour saluer sa mémoire, voici le texte inédit de l’allocution
877
rononça à Genève en octobre 1982, après qu’on lui
eut
remis le Grand Prix de la Fondation Schiller Suisse. »
878
ter, par l’action publique. Platon et Aristote en
ont
beaucoup parlé. Aristote surtout a traité du rôle indispensable de l’
879
Aristote en ont beaucoup parlé. Aristote surtout
a
traité du rôle indispensable de l’agora dans la vie d’une cité, et il
880
pensable de l’agora dans la vie d’une cité, et il
a
décrit les dispositions architecturales typiques de la place publique
881
reffiers-là, passant le col ouvert vers 1240, qui
ont
fourni aux premiers confédérés les instruments nécessaires pour expri
882
leurs liens jurés, leurs foederationes, puis ils
ont
poursuivi leur voyage vers le Nord, appelés par les villes rhénanes,
883
à respecter, si l’on veut que l’agora fonctionne,
ont
été formulées par Aristote, notamment dans sa Politique. La première
884
e symbole et même la définition du lieu où chacun
a
le droit de s’exprimer, de répliquer, de critiquer, de questionner et
885
oixante premières années de son existence, l’URSS
a
été dotée par les chefs du Parti communiste de quatre constitutions d
886
voir l’analyse des principaux chapitres (il y en
a
XIII) du texte officiel. Le chapitre Ier sur l’Organisation sociale a
887
oviets [conseils] de députés des travailleurs qui
ont
grandi et se sont affermis […] grâce à la conquête de la dictature du
888
’art. 7 prévoit que « chaque foyer kolkhozien […]
a
la jouissance personnelle d’un petit terrain [attenant à la maison] e
889
cipes directeurs de la révision paraissent être :
a
) une volonté de rendre les textes constitutionnels de 1936 mieux comp
890
damentale, 750 000 propositions de rectifications
ont
été envoyées à la presse, 650 000 meetings d’entreprises ont eu lieu
891
oyées à la presse, 650 000 meetings d’entreprises
ont
eu lieu réunissant plusieurs dizaines de millions de travailleurs, et
892
es de millions de travailleurs, et quant au PC il
a
organisé 180 000 meetings de ses adhérents. Il est intéressant de rel
893
« abolir le fédéralisme », tandis que d’autres n’
avaient
pas compris que « le socialisme développé n’est pas encore le communi
894
terdite. Les personnes qui s’en rendent coupables
ont
à en répondre ». Pouvait-on déduire de ces articles que les dissident
895
’est beaucoup dire. Pessimiste, optimiste, cela n’
a
pas de sens. Je ne cesserai de me sentir optimiste tant que je verrai
896
pessimisme actif ». (Encore une expression qu’on
a
beaucoup reprise…) Mon attitude générale n’est pas celle d’un pessimi
897
tombées du ciel. Mais voilà, l’homme aujourd’hui
a
une curieuse propension à nier sa responsabilité. Devant tout ce qui
898
auvais dans le monde, il dit : « qu’est-ce qu’ils
ont
encore fait ? » « Ils » ou l’État ou les lois économiques, tout nous
899
t déjà racontée au chapitre III de la Genèse. Ève
a
mangé la pomme et en a donné à Adam. Yahvé se fâche. Il vient en Eden
900
itre III de la Genèse. Ève a mangé la pomme et en
a
donné à Adam. Yahvé se fâche. Il vient en Eden, vers le soir, et appe
901
! » Yahvé les trouve et demande à l’homme : « Qu’
as
-tu fait ? » Adam dit : « Ce n’est pas moi, c’est Ève qui m’a forcé ».
902
» Adam dit : « Ce n’est pas moi, c’est Ève qui m’
a
forcé ». Ève dit : « Ce n’est pas moi, c’est le serpent qui m’a sédui
903
dit : « Ce n’est pas moi, c’est le serpent qui m’
a
séduite ». Et le serpent, bien sûr, n’est plus là. Il n’est pas vrai
904
les seraient censées résoudre, c’est nous qui les
avons
créés, tout comme le plutonium. C’est nous qui le fabriquons. Tous no
905
ent, la veulent comme garantie de leur sécurité :
avoir
un État fort, quitte à s’en plaindre sans arrêt, avoir un roi — fût-i
906
un État fort, quitte à s’en plaindre sans arrêt,
avoir
un roi — fût-il de Gaulle — quitte à lui couper la tête quand cela se
907
ser soi-même, pouvoir obéir à sa vocation. Il n’y
a
pas deux hommes semblables. Chaque homme doit se réaliser comme lui s
908
s outils mis à notre disposition. Par exemple, on
a
donné à l’homme d’aujourd’hui l’énergie atomique, la bombe H et les É
909
chelle. Les petits États, les petites communautés
ont
tous les avantages des grands : il suffit de voir les statistiques de
910
eut prouver que vous n’étiez pas libre quand vous
avez
commis un délit, on vous acquitte. Mais on ne peut être responsable q
911
ions, Europe : même avenir. C’est la devise que j’
ai
proposée aux mouvements écologiques français et il semble bien qu’ils
912
s écologiques français et il semble bien qu’ils l’
aient
adoptée. Si mon livre a apporté quelque chose de nouveau au débat des
913
semble bien qu’ils l’aient adoptée. Si mon livre
a
apporté quelque chose de nouveau au débat des idées politiques du siè
914
bit, c’est le contraire de l’acte d’amour vrai. J’
ai
montré les conséquences infinies de la passion dans de nombreux domai
915
te ans. Pouvez-vous citer des romanciers que vous
avez
influencés ? Lawrence Durrell et Michel Tournier et un poète, Wystan
916
poète, Wystan Auden. Certains jeunes écrivains m’
ont
confié qu’ils avaient renoncé à écrire tel roman déjà commencé, parce
917
en. Certains jeunes écrivains m’ont confié qu’ils
avaient
renoncé à écrire tel roman déjà commencé, parce que m’ayant lu, ils s
918
ncé à écrire tel roman déjà commencé, parce que m’
ayant
lu, ils savaient trop bien ce qu’ils faisaient. Dois-je me le reproch
919
toute urgence un studio et ne trouvais rien, il m’
avait
offert à l’improviste d’habiter avec ma femme, pour quelques mois, un
920
’Amour et l’Occident et non pas dans Freud que j’
ai
découvert l’explication de mon cas et les raisons qui m’ont fait comm
921
ert l’explication de mon cas et les raisons qui m’
ont
fait commettre dans ma jeunesse… une terrible erreur d’aiguillage. »
922
s. » Je lui dis qu’en effet, plusieurs semblent l’
avoir
été que cela n’a rien de surprenant : ils mettaient la femme, la Dame
923
effet, plusieurs semblent l’avoir été que cela n’
a
rien de surprenant : ils mettaient la femme, la Dame sur un piédestal
924
ssifs, mais des joueurs, en pleine activité. Je l’
ai
souvent dit : la décadence d’une société commence quand l’homme se de
925
cherche autre chose, qu’on change de cap… Mais n’
avez
-vous pas été le premier à plaider en faveur du CERN ? Oui bien sûr et
926
inent la recherche dans ce domaine. Tant qu’ils n’
auront
pas trouvé le moyen d’intercaler un compteur entre le soleil et les c
927
il est à tout le monde et que demain vous pourrez
avoir
un four solaire sur votre maison qui ne devra rien ni à l’EDF, ni à l
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mme dit Max Frisch : « il ne suffit pas de ne pas
avoir
d’idées pour être réaliste ». ax. Rougemont Denis de, « [Entretien
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décembre 1985, la journaliste Jacqueline Baron l’
a
rencontré à plusieurs reprises, dans sa maison de Ferney-Voltaire. Ce
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e fut relue et corrigée par Denis de Rougemont, n’
ont
jamais été publiés. Nous en présentons ici de larges extraits. »