1
enry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts
de
Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une tradition
2
un (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier
d’
une tradition chevaleresque, mène sa vie comme une ardente aventure. L
3
ieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour
de
nouvelles conquêtes. Terriblement lucide, ce regard en arrière. Month
4
dur pour ses erreurs plus encore que pour celles
de
l’adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je
5
Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent
de
barbarie, un assez malsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans
6
bre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs
de
ne pas nous tromper en nous inquiétant de faire, à notre place modest
7
es sûrs de ne pas nous tromper en nous inquiétant
de
faire, à notre place modeste, si peu que ce soit pour la paix », c’es
8
ce soit pour la paix », c’est une affirmation qui
d’
un coup condamne beaucoup d’antérieures protestations belliqueuses. Il
9
t une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup
d’
antérieures protestations belliqueuses. Il nous montre « des Français
10
ui tiennent qu’une telle attitude est responsable
de
ces carnages ». Naguère il était des premiers ; il s’affirme aujourd’
11
ir contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie
de
la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte,
12
avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert
d’
exalter, d’une si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Ver
13
ie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter,
d’
une si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun, et ce
14
si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires
de
Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils trouvaient au front. D’une p
15
dats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton
de
vie » qu’ils trouvaient au front. D’une phrase, il justifie son livre
16
e « haut ton de vie » qu’ils trouvaient au front.
D’
une phrase, il justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour les v
17
st-ce pas une éclatante mise au point ? Et venant
de
l’auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front d
18
e mise au point ? Et venant de l’auteur du Songe,
d’
un de ces hommes qui « descendirent » du front dans notre paix lassée,
19
e au point ? Et venant de l’auteur du Songe, d’un
de
ces hommes qui « descendirent » du front dans notre paix lassée, ne p
20
ncore transparaît un doute, parfois : « On craint
d’
être injuste en décidant si… cette absence de haine ; cette épouvante,
21
aint d’être injuste en décidant si… cette absence
de
haine ; cette épouvante, devant la guerre… proviennent de plus d’huma
22
épouvante, devant la guerre… proviennent de plus
d’
humanité ou de moins de santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre
23
vant la guerre… proviennent de plus d’humanité ou
de
moins de santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre d’affirmation,
24
uerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins
de
santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre d’affirmation, une tell
25
de santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre
d’
affirmation, une telle inquiétude, un amer « à quoi bon » percèrent so
26
s quels buts ? On verra plus tard. L’urgent c’est
d’
avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevées où les élémen
27
ix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence
de
guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vertus guerriè
28
a paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré
de
souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour la paix, c’est vers d
29
va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir
de
l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa t
30
n. Toute son œuvre pourrait se définir : la lutte
d’
un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’aut
31
e que nous admirons dans le Chant funèbre. Ce mot
de
grandeur revient souvent lorsqu’on parle de cette œuvre : je ne sais
32
e mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle
de
cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de
33
ne sais s’il faut en voir la raison dans la force
de
la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Pérille
34
ce de la personnalité révélée ou dans la noblesse
de
sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est
35
la noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière
de
la grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que
36
carrière de la grandeur où Montherlant est entré
de
plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que de sacrifices ne lu
37
plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que
de
sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les romans « intéressan
38
l est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu
de
vérité » qui brûle dans son temple intérieur, s’il veut rester digne
39
dans son temple intérieur, s’il veut rester digne
de
son rôle et vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consum
40
rester digne de son rôle et vraiment le coryphée
d’
une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse, flamme d’u
41
oryphée d’une génération casquée. Feu consumateur
de
toute faiblesse, flamme d’une pureté si rare en notre siècle, qu’elle
42
squée. Feu consumateur de toute faiblesse, flamme
d’
une pureté si rare en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque la
43
e comme cette « flamme pensante » dans l’ossuaire
de
Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie.
44
ire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau
d’
un large vent de joie. a. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Henr
45
. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent
de
joie. a. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant
46
au d’un large vent de joie. a. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts
47
enry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts
de
Verdun », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
48
s de Verdun », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mars 1925, p. 380-382.
49
e du surréalisme (juin 1925)b Sous une « vague
de
rêves », la logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va péri
50
une « vague de rêves », la logique, dernier agent
de
liaison de nos esprits, va périr. C’est du moins ce que proclame M. B
51
de rêves », la logique, dernier agent de liaison
de
nos esprits, va périr. C’est du moins ce que proclame M. Breton en un
52
r notre poncif moderne, — si propre à égarer dans
d’
ingénieuses métaphores quiconque chercherait une idée là-dessous, — ne
53
it pas toujours chez Breton à masquer la banalité
de
la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directem
54
s chez Breton à masquer la banalité de la pensée.
D’
autant plus que les rares passages où il expose directement les princi
55
s passages où il expose directement les principes
de
sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque terne manuel
56
de sa « révolution » semblent au contraire tirés
de
quelque terne manuel de philosophie ou de psychanalyse. Ces principes
57
mblent au contraire tirés de quelque terne manuel
de
philosophie ou de psychanalyse. Ces principes ? Ils se laissent hélas
58
e tirés de quelque terne manuel de philosophie ou
de
psychanalyse. Ces principes ? Ils se laissent hélas résumer en un cou
59
Ils se laissent hélas résumer en un court article
de
dictionnaire : « Surréalisme, n.m. Automatisme psychique pur par lequ
60
utomatisme psychique pur par lequel on se propose
d’
exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manièr
61
’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit
de
toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de l
62
it de toute autre manière, le fonctionnement réel
de
la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé p
63
ière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée
de
la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en deho
64
el de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence
de
tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation
65
2). Le surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte
de
méthode des textes généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est
66
scientes M. Breton peut-il préconiser l’existence
d’
une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule ma
67
éconiser l’existence d’une littérature fondée sur
de
tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde
68
le matière poétique. Dans le monde du Rêve autant
de
cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le
69
s le monde du Rêve autant de cellules isolées que
de
rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le poète étant un simple st
70
ommunicable, le poète étant un simple sténographe
de
ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette conclusion pratique : in
71
e étant un simple sténographe de ses rêves. Soit.
De
ces faits, je tire cette conclusion pratique : inutile de publier des
72
aits, je tire cette conclusion pratique : inutile
de
publier des poèmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les l
73
t, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils
d’
eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprend
74
n poème » cette mystification est dans la logique
de
ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son mani
75
e de ses principes, mais je lui conteste le droit
de
faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui servent
76
i conteste le droit de faire suivre son manifeste
de
proses — Poisson soluble — qui servent d’illustration à sa défense de
77
nifeste de proses — Poisson soluble — qui servent
d’
illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois
78
ne me seraient-elles perceptibles que par le fait
d’
une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ? Je comp
79
l’univers du poète et le mien ? Je comprends trop
de
choses dans ces poèmes qui devraient m’être parfaitement impénétrable
80
serait un très curieux poète s’il ne s’efforçait
de
donner raison aux 75 pages où il voulut nous persuader que tout poème
81
non corrigée du Rêve. Je reconnais à chaque ligne
de
Poisson soluble cette « vieillerie poétique » qui, avoue Rimbaud, ent
82
’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher
d’
accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dès lors, tout cet appar
83
rbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton
de
préméditation… À quoi sert, dès lors, tout cet appareil psychologique
84
si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté
d’
un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette mystificati
85
un art purement formel. Car c’est ici le tragique
de
cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont rien à dire,
86
donc en doctrine leur impuissance. « Il n’y a pas
de
pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores co
87
sée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils
de
métaphores comme d’autres de raisonnements. Plaisante ironie, si cett
88
Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres
de
raisonnements. Plaisante ironie, si cette attitude n’était qu’une pro
89
nos poncifs intellectuels. Mais elle risque bien
de
nous en rendre un peu plus esclaves. Car depuis Freud — dont ils se r
90
emment, — on sait ce que c’est que la « liberté »
d’
un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour l’
91
t ce que c’est que la « liberté » d’un esprit pur
de
tout finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour l’exploitation de
92
Surréalisme S.A., entreprise pour l’exploitation
de
matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’est pas ainsi q
93
S.A., entreprise pour l’exploitation de matériaux
de
démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’est pas ainsi que nous sorti
94
r Dada S.A. Ce n’est pas ainsi que nous sortirons
d’
une anarchie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendance
95
tout morales. Les tendances encore un peu vagues
d’
un groupe tel que Philosophies laissent pressentir des révolutions plu
96
t en des jeux moins lassants. Dada, éclat de rire
d’
un désespoir exaspéré, commandait une certaine sympathie. L’agaçant, a
97
s surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot
de
Cocteau — ils « embaument de vieilles anarchies ». L’ironie qui sauva
98
our reprendre un mot de Cocteau — ils « embaument
de
vieilles anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici
99
e qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton
de
mage qui ne fera plus longtemps impression. C’est grand dommage pour
100
dommage pour les lettres françaises qui risquent
d’
y perdre au moins deux grands artistes : Aragon, Éluard. Sans oublier
101
qui peuplent les ténèbres. b. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] André Breton, Manifeste du surréalisme », Biblioth
102
surréalisme », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, juin 1925, p. 775-776.
103
Colin, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume
de
la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinqui
104
Le nouveau volume de la collection des « Maîtres
de
l’art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France su
105
nt des vues assez neuves. M. Colin s’est contenté
de
narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que d
106
uves. M. Colin s’est contenté de narrer les faits
de
la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions criti
107
olin s’est contenté de narrer les faits de la vie
de
Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critiques s’en
108
té de narrer les faits de la vie de Vincent, mais
d’
une telle manière que des conclusions critiques s’en dégagent avec évi
109
est peu intéressant. On en a connu bien d’autres
de
ces jeunes gens prétentieux et sincères qui se croient une vocation,
110
se croient une vocation, végètent dans des œuvres
d’
évangélisation, fondent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que
111
’est que le plus sauvage génie ait choisi un être
de
cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effr
112
t-ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont
de
gauches copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas.
113
c ? » Ses premiers dessins sont de gauches copies
de
Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violen
114
sont de gauches copies de Millet. Mais son manque
de
talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaill
115
vaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement
d’
Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique terrassant un cor
116
ue les flammes, les soleils et aussi les grimaces
de
douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’avoir rien cac
117
mes, les soleils et aussi les grimaces de douleur
de
ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’avoir rien caché des médi
118
douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin
de
n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions q
119
Paul Colin de n’avoir rien caché des médiocrités
de
cette vie : les reproductions qui suivent sa courte biographie fourni
120
risme dont on a voulu charger la « vie héroïque »
de
Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce miracle. Il nous lai
121
l nous laisse à notre émotion devant le spectacle
d’
une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent
122
spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme,
d’
une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent. c. Rou
123
’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre
de
pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent. c. Rougemont Denis
124
an Gogh, génie sans talent. c. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Paul Colin, Van Gogh », Bibliothèque universelle e
125
n, Van Gogh », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, août 1925, p. 1033.
126
court », curieux homme. Il se livre à des travaux
de
précision : il calcule un plan, un poème. Il écrit un livre sur Einst
127
tion : les faits s’y pressent et s’y bousculent ;
de
temps à autre une notation d’artiste ou de psychologue se glisse dans
128
et s’y bousculent ; de temps à autre une notation
d’
artiste ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà le lecteur e
129
lent ; de temps à autre une notation d’artiste ou
de
psychologue se glisse dans leur flot. Voilà le lecteur entraîné, ébah
130
le lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint
de
suivre jusqu’au bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si la l
131
ionné, contraint de suivre jusqu’au bout un roman
de
500 pages comme Rabevel. Car si la liquidation des questions traitées
132
est rapide, elle est complète aussi. On s’étonne
de
ce que Fabre, disciple de Valéry, puisse rédiger des romans si bouill
133
lète aussi. On s’étonne de ce que Fabre, disciple
de
Valéry, puisse rédiger des romans si bouillonnants, si mal équarris.
134
mande pas non plus au puissant boxeur sur le ring
d’
être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du brasseur
135
abevel, c’était un portrait balzacien du brasseur
d’
affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitu
136
la nouvelle mise en servitude du peuple rustique
de
France ». En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France —
137
ats et des capitalistes des villes. Mais dans une
de
ces provinces du Midi où le souvenir des luttes religieuses encore vi
138
t, le libérateur va se lever. C’est un descendant
de
Roland le Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de la terre
139
le Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme
de
la terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation c
140
terre », qui va susciter un formidable mouvement
de
protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidemen
141
œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain
de
ressaisir les foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se
142
n clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments
d’
un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et brûlant, une
143
e avait là les éléments d’un grand roman : autour
d’
un sujet de vaste envergure, et brûlant, une intrigue puissante, des p
144
les éléments d’un grand roman : autour d’un sujet
de
vaste envergure, et brûlant, une intrigue puissante, des personnages
145
brûlant, une intrigue puissante, des personnages
d’
une belle richesse psychologique. En fermant le livre on a presque l’i
146
nd roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’absence
de
style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C’est plutô
147
tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes
de
la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œu
148
l reste que le Tarramagnou est un livre émouvant,
d’
une saine puissance. Il reste que Lucien Fabre a tenté, et en somme, r
149
t en somme, réussi, une entreprise bien téméraire
de
nos jours : un roman à thèse aussi intelligent que vivant. d. Roug
150
ssi intelligent que vivant. d. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Lucien Fabre, Le Tarramagnou », Bibliothèque unive
151
Tarramagnou », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1925, p. 1151-1152.
152
Les Appels
de
l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècl
153
925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle
de
la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de c
154
u monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle
de
critique pour lequel nos contemporains accumulent les documents. La l
155
mporains accumulent les documents. La littérature
de
ces dernières années n’est qu’une forme de reportage international. L
156
rature de ces dernières années n’est qu’une forme
de
reportage international. L’Europe menant cette immense enquête manife
157
nt l’Europe du xviiie prenait surtout conscience
de
son propre génie, l’Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une con
158
surtout conscience de son propre génie, l’Europe
d’
aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Orient, plut
159
avec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance
de
l’Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer
160
e réelle connaissance de l’Orient, une conscience
d’
elle-même. C’est peut-être pour provoquer cette confrontation seulemen
161
oriental, car il semble bien que dans le domaine
de
la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie
162
n peut prévoir que si le bouddhisme jouit un jour
d’
un renouveau, c’est à quelques savants européens qu’il le devra, tandi
163
ques savants européens qu’il le devra, tandis que
d’
un mouvement inverse, le christianisme débarrassé de son déguisement g
164
un mouvement inverse, le christianisme débarrassé
de
son déguisement gréco-latin retournera vers ses sources pour s’y retr
165
a vers ses sources pour s’y retremper. Les appels
de
l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre,
166
fort intéressant tableau des multiples réactions
de
l’Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, dis
167
enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit la Revue
de
Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André
168
lle qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir
de
l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car
169
« l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses
d’
André Gide en particulier). Car la plupart des enquêtés se font de l’O
170
particulier). Car la plupart des enquêtés se font
de
l’Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’a
171
t poétique. « Orient…, toi qui n’as qu’une valeur
de
symbole », a dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’il s’agit, et Jean
172
u’une valeur de symbole », a dit A. Breton. C’est
de
cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger le définit encore : « …
173
sé à l’esprit occidental, tout ce qui peut servir
d’
antidote à sa fièvre et à sa logique. » On confond Japon et Arabie, In
174
bie, Indes et Chine sous une dénomination qui n’a
de
sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain de tenter un classeme
175
e sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain
de
tenter un classement parmi les réponses d’une extraordinaire diversit
176
t vain de tenter un classement parmi les réponses
d’
une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses — qui compose
177
rents, si différentes même les conclusions tirées
de
points de vue semblables, qu’un esprit analytique et organisateur d’o
178
mblables, qu’un esprit analytique et organisateur
d’
occidental se perdra ici dans un ensemble kaléidoscopique d’idées et d
179
al se perdra ici dans un ensemble kaléidoscopique
d’
idées et de jugements contradictoires, et de termes dont le sens chang
180
a ici dans un ensemble kaléidoscopique d’idées et
de
jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l’éc
181
pique d’idées et de jugements contradictoires, et
de
termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. É
182
, et de termes dont le sens change avec l’échelle
de
valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de
183
mes dont le sens change avec l’échelle de valeurs
de
l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plu
184
ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité
de
l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstr
185
upériorité de l’Europe réside dans sa « puissance
de
choix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecq
186
ide dans sa « puissance de choix », dans le génie
d’
abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attribuent ce
187
e dans une Europe vieillie, les parfums puissants
de
l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repous
188
rfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller
de
beaux rêves. Il y a ceux qui repoussent une Asie ignorante du thomism
189
u thomisme et ceux qui pensent inévitable le choc
de
deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’adoucira
190
provisoire et qui porte en son principe le germe
de
sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinent toutes
191
ses, conclusions ou interrogations, ont le défaut
de
n’être pas suffisamment motivées par des faits et des documents. Pour
192
ar exemple, qui cependant produit un grand nombre
de
citations à l’appui de ses sophismes, ne se livre pas moins à des déd
193
ions in abstracto qui le mènent à des conclusions
de
ce genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’éducation hist
194
nclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen
de
« suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont p
195
historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu
de
Moyen Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la religion rom
196
listes, qui, eux, apportent des documents, savent
de
quoi ils parlent, ils se récusent lorsqu’il s’agit de conclure. Un éc
197
uoi ils parlent, ils se récusent lorsqu’il s’agit
de
conclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé la formule qui déf
198
, je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun
d’
en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guéri
199
réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer
de
nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos
200
frages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons
de
maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous au
201
isons de maudire l’Orient ou chercher la guérison
de
nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la première fois
202
s entrevu peut-être pour la première fois le rôle
de
l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vites
203
conscience du monde », entre une Amérique affolée
de
vitesse, édifiant ses gratte-ciel comme des tours de Babel, et une As
204
vitesse, édifiant ses gratte-ciel comme des tours
de
Babel, et une Asie immobile dans sa méditation éternelle. e. Rouge
205
ns sa méditation éternelle. e. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Les Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois
206
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels
de
l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et
207
ers du Mois) », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1925, p. 1152-1154.
208
Jean Prévost, Tentative
de
solitude (septembre 1925)f « Dès que nous sommes seuls, nous somme
209
mes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle
de
nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous im
210
rôle que les autres nous imposent », dit un héros
de
Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par le dedans » M. Jean
211
ourci psychologique. « Tout homme normal est fait
de
plusieurs fous qui s’annulent », écrit-il. Ce fou qui veut être soi p
212
fou qui veut être soi purement, qui veut éliminer
de
soi tout ce qui est déterminé par l’extérieur, — ce fou que nous port
213
s il l’a poussé impitoyablement dans sa recherche
d’
un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille »
214
st avant tout une démonstration ; mais, puissante
de
sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théo
215
une démonstration ; mais, puissante de sûreté et
d’
évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Spino
216
d’évidence, elle a cette beauté froide et massive
d’
un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent
217
le a cette beauté froide et massive d’un théorème
de
Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent seules l’écriv
218
’écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est
de
la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemo
219
ussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse
de
nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont Denis de, « [
220
frissonnent les étoiles. » f. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Jean Prévost, Tentative de solitude », Bibliothèqu
221
enis de, « [Compte rendu] Jean Prévost, Tentative
de
solitude », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, sep
222
de solitude », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.
223
nationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches
de
la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M.
224
ciété », pour reprendre la pittoresque définition
de
M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnai
225
au des auteurs édités depuis lors les grands noms
de
la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du
226
lors les grands noms de la littérature européenne
d’
avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du renouveau idéaliste allemand
227
nd et viennois, Hesse, Hofmannsthal… Les extraits
de
ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une juste idée d
228
mposent l’Almanach Fischer donnent une juste idée
de
ce que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, l
229
nnent une juste idée de ce que fut la littérature
d’
avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu
230
ourgeoisée… Disons plutôt que voici venu le temps
de
la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemo
231
u le temps de la moisson, — le temps des éditions
d’
œuvres complètes. g. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] S. Fische
232
ditions d’œuvres complètes. g. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] S. Fischer Verlag, Almanach 1925 », Bibliothèque u
233
manach 1925 », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1925, p. 1162-1163.
234
g-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux
de
l’Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins fa
235
quelque superficialité, du moins faut-il le louer
d’
avoir conservé une vision générale de notre temps et un évident besoin
236
-il le louer d’avoir conservé une vision générale
de
notre temps et un évident besoin d’impartialité. Son art bénéficie de
237
sion générale de notre temps et un évident besoin
d’
impartialité. Son art bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer
238
évident besoin d’impartialité. Son art bénéficie
de
cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son
239
. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties
de
son dernier roman sans exposer et discuter toutes les idées qu’elles
240
les meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent
d’
une accumulation de petites touches précises des types d’après-guerre
241
ments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation
de
petites touches précises des types d’après-guerre d’une étrange vérit
242
ccumulation de petites touches précises des types
d’
après-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec les problèmes socia
243
petites touches précises des types d’après-guerre
d’
une étrange vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe l
244
rtège pittoresque et désolant à celui qui, revenu
de
l’étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon
245
celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre
de
son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la r
246
de son pays, suivra obstinément le « bon chemin »
de
la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur
247
ivra obstinément le « bon chemin » de la santé et
de
la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre.
248
et de la raison. C’est à lui que va la sympathie
de
l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto
249
ie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Otto Flake, Der Gute Weg », Bibliothèque universel
250
er Gute Weg », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « Flasce »
251
. Pour présenter au public français cette œuvre «
d’
importance européenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à l’émot
252
u’il aille s’abandonner à l’émotion communicative
de
qui découvre un sommet ? Point. Précision, modération dans le jugemen
253
éger, notation suggestive, telles sont les vertus
de
sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une grande œuvre
254
à louer une grande œuvre qu’on trouvera la mesure
de
son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois n
255
n trouvera la mesure de son admiration et le gage
de
sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne susci
256
êt très profond : elles nous transportent au cœur
de
préoccupations des plus modernes, problème de la réalité littéraire,
257
œur de préoccupations des plus modernes, problème
de
la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pou
258
rnes, problème de la réalité littéraire, problème
de
la personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui
259
r Prologue pourrait presque aussi bien être celui
d’
une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnages des tr
260
ourrait presque aussi bien être celui d’une pièce
de
Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelle
261
ges des trois nouvelles « sont réels, très réels,
de
la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans
262
réels, très réels, de la réalité la plus intime,
de
celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volonté d’être ou de
263
u’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volonté
d’
être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent
264
onnent eux-mêmes dans leur pure volonté d’être ou
de
ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, sub
265
lonté d’être ou de ne pas être… ». Mais les héros
de
Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils sont, le g
266
issent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu
de
la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les pos
267
personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté
d’
action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés
268
erine, ou cet Alexandro Gomez cynique et puissant
de
confiance en soi, qu’une volonté presque inhumaine torture et conduit
269
ar on imagine difficilement un art plus dépouillé
de
détail extérieur ou d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies,
270
ment un art plus dépouillé de détail extérieur ou
d’
enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriét
271
é de détail extérieur ou d’enjolivure. La lecture
de
ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une brutalité et
272
d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies,
d’
une classique sobriété mais d’une brutalité et d’une ironie romantique
273
es trois tragédies, d’une classique sobriété mais
d’
une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse la même impression d
274
d’une classique sobriété mais d’une brutalité et
d’
une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désolée
275
une ironie romantiques, laisse la même impression
de
grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’am
276
urs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation
de
barre d’acier sur la nuque. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu
277
’amère volupté des formes. Une sensation de barre
d’
acier sur la nuque. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Miguel
278
barre d’acier sur la nuque. j. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et u
279
un prologue », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1925, p. 1164.
280
Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien
de
la pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop ta
281
-être n’est-il pas trop tard pour parler du Vinet
de
M. Seillière, de ce nouveau chapitre qu’il vient d’ajouter à sa grand
282
s trop tard pour parler du Vinet de M. Seillière,
de
ce nouveau chapitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur les r
283
M. Seillière, de ce nouveau chapitre qu’il vient
d’
ajouter à sa grande étude sur les rapports du christianisme et du roma
284
tique un témoin dont le jugement eut « l’autorité
d’
un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme naturiste ». Il
285
l’œuvre du penseur vaudois la substance originale
de
la plupart des idées dont lui-même s’est fait le moderne champion. Po
286
le Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop
de
peine à l’annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je
287
s eu trop de peine à l’annexer à son propre corps
de
doctrines critiques. Dirai-je pourtant que je crains qu’il n’ait été
288
ue inconsciemment, à gauchir légèrement la pensée
de
Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais par ailleu
289
ais par ailleurs Vinet déborde le « sellièrisme »
de
tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas sans gêner M. Seill
290
ithète ». Croit-il éluder ainsi le protestantisme
de
Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protestant qu’une telle at
291
nt qu’une telle attitude ? Mais ces réserves sont
de
peu d’importance si l’on songe au service que M. Seillière nous rend
292
ne telle attitude ? Mais ces réserves sont de peu
d’
importance si l’on songe au service que M. Seillière nous rend en réin
293
s sa position purement chrétienne — un mysticisme
de
cadre solidement moral, c’est-à-dire rationnel, dit M. Seillière — me
294
lière — me paraît infiniment plus forte que celle
d’
un Maurras ou que celle d’un Maritain. Son unité est plus réellement p
295
nt plus forte que celle d’un Maurras ou que celle
d’
un Maritain. Son unité est plus réellement profonde, son point d’appui
296
Son unité est plus réellement profonde, son point
d’
appui plus central. Pour notre époque déchirée entre un thomisme et un
297
tre nouveau mal du siècle, il n’est peut-être pas
de
pensée plus vivante, ni de plus tonique que celle de ce « Pascal prot
298
pensée plus vivante, ni de plus tonique que celle
de
ce « Pascal protestant ». k. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
299
e ce « Pascal protestant ». k. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la
300
ndu] Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien
de
la pensée française », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
301
e française », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, octobre 1925, p. 1797-1798.
302
e et la mort « où se reflète le passage incessant
d’
oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes
303
rt « où se reflète le passage incessant d’oiseaux
de
la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels
304
ité qui n’est pas familière. C’est bien la poésie
d’
une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche sans vert
305
se penche sans vertige sur ses abîmes. Simplicité
de
notre temps ! Au-dessus de la trépidation immense des machines, un Sa
306
ses abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus
de
la trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervie
307
-John-Perse, un Supervielle parlent avec des mots
de
tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comm
308
mbler un sourire ». Comme Max Jacob il lui arrive
de
situer une anecdote purement poétique dans un monde qu’il s’est créé.
309
pourtant l’autel et le surréalisme l’ont enrichie
d’
images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seulement co-généra
310
lité se retrouve dans la manière dont ils tentent
de
fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter
311
J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive
de
graviter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près
312
me cosmique. On est plus près de l’infini au fond
de
soi qu’au fond du ciel. l. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Ju
313
de soi qu’au fond du ciel. l. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Jules Supervielle, Gravitations », Bibliothèque un
314
ravitations », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1925, p. 1560.
315
raine offre un spectacle bien passionnant : celui
de
la renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet d
316
ctacle bien passionnant : celui de la renaissance
d’
une littérature nationale à la fois cause et effet de la libération po
317
ne littérature nationale à la fois cause et effet
de
la libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libér
318
n, un Yeats, un A.E., bien d’autres, ont su payer
de
leur personne. Effet, puisque l’héroïsme d’une révolution en faveur d
319
payer de leur personne. Effet, puisque l’héroïsme
d’
une révolution en faveur du passé, révolution tout de même, ne pouvait
320
ne pouvait produire qu’une littérature très neuve
de
forme et traditionaliste d’inspiration, comme fut celle des Yeats, Sy
321
ittérature très neuve de forme et traditionaliste
d’
inspiration, comme fut celle des Yeats, Synge, Joyce même… Trois noms
322
Joyce même… Trois noms qui permettent, je crois,
de
parler d’un grand siècle littéraire irlandais ; ce que d’ailleurs Mll
323
e… Trois noms qui permettent, je crois, de parler
d’
un grand siècle littéraire irlandais ; ce que d’ailleurs Mlle Simone T
324
et conserver dans l’admiration son sens critique
de
Parisienne. C’est une sympathie malicieuse qui anime ses amusants por
325
res parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu
de
rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme
326
lle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité
de
l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient un
327
éalisme également lyriques. m. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Simone Téry, L’Île des bardes », Bibliothèque univ
328
des bardes », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567.
329
Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman
d’
aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orl
330
-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle
de
la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont do
331
écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné
de
beaux exemples du parti que peut tirer le nouveau romantisme de ce ch
332
les du parti que peut tirer le nouveau romantisme
de
ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épopée dans Prikaz, cette
333
uveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté
d’
en écrire l’épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme
334
l’épopée dans Prikaz, cette traduction française
de
l’énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées
335
rikaz, cette traduction française de l’énorme cri
de
délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’un brasier. P
336
vrance du peuple fou. Belles étincelles échappées
d’
un brasier. Pour les causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpol
337
tincelles échappées d’un brasier. Pour les causes
de
l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman que
338
t plus riche pouvait-on rêver pour un psychologue
de
la puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour l
339
vait-on rêver pour un psychologue de la puissance
de
Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien reste
340
vu la Révolution sans romantisme, dans le détail
de
la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante d
341
olution sans romantisme, dans le détail de la vie
d’
une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions
342
. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante
de
millions de petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dan
343
’un grand mouvement est la résultante de millions
de
petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dans une famill
344
bouleversement accompli dans la « Cité secrète »
de
la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en précis
345
mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin
d’
entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour constater qu
346
trement que les individus. L’auteur, qui est l’un
de
ces Anglais, tombe malade avec à-propos et perd connaissance chaque f
347
», d’ailleurs assez peu choquants, que le revers
de
grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situations dra
348
peu choquants, que le revers de grandes qualités
de
réalisation d’idées en faits ou en situations dramatiques. Je donnera
349
que le revers de grandes qualités de réalisation
d’
idées en faits ou en situations dramatiques. Je donnerai tous les essa
350
tuations dramatiques. Je donnerai tous les essais
de
M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secr
351
e Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes
de
La Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Mar
352
ière sa vitre, tremblait si fort qu’il avait peur
de
trébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi.
353
remblait si fort qu’il avait peur de trébucher et
de
faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quelle
354
russe : mais des possibilités, à chaque instant,
d’
explosion. Le géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleure
355
ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent
de
toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exem
356
nté qui enchantera M. Gide. n. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Hugh Walpole, La Cité secrète », Bibliothèque univ
357
ité secrète », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567-1568.
358
ible ou désirable subissent cette rage désespérée
de
course pure, vers ailleurs, vers autre chose. À certains signes — dém
359
s, vers autre chose. À certains signes — démences
de
fatigués, prophétismes, excessives lassitudes ou faim de violences —
360
gués, prophétismes, excessives lassitudes ou faim
de
violences — on sent l’approche de quelque chose, catastrophe ou révél
361
situdes ou faim de violences — on sent l’approche
de
quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée sur des pa
362
la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur
de
conscience inquiète quelques chefs, montre à quelques meneurs aveugle
363
uelques chefs, montre à quelques meneurs aveugles
d’
une société affolée et ridiculement opportuniste où mène la pente de n
364
lée et ridiculement opportuniste où mène la pente
de
notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des financier
365
jouerait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs
de
l’opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait ba
366
, quelques autres, sont parmi les plus conscients
de
ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâles opportunistes s
367
s de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons
de
pâles opportunistes sans culture qui se chargent de gaver les masses
368
pâles opportunistes sans culture qui se chargent
de
gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, o
369
se chargent de gaver les masses du pain quotidien
de
la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il f
370
e gaver les masses du pain quotidien de la bêtise
de
tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balay
371
velles. Toute la jeune littérature décrit un type
d’
homme profondément antisocial, glorifie une morale résolument anarchis
372
nque une certitude foncière, une foi en la valeur
de
l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale
373
’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop
d’
importance à leurs tentatives morales, si singulières soient-elles — d
374
le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur
de
la crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoud
375
ouvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise
de
notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre, une cons
376
a crise de notre civilisation, il y a un problème
de
morale à résoudre, une conscience individuelle à recréer. Nous y empl
377
oyer, pour l’heure, c’est la seule façon efficace
de
servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans le chaos des
378
des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas
d’
esprit du siècle, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous les ép
379
certain « confusionnisme ». Mais sous les épaves
de
tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradi
380
es vagues soulevées par une même tempête. L’unité
de
notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude. Barrès
381
e notre temps est en profondeur : c’est une unité
d’
inquiétude. Barrès et Gide : ils ont construit des édifices très diffé
382
: ils ont construit des édifices très différents
de
style, et dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieu
383
maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles
de
famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces deux moralistes ad
384
ssent bien les ancêtres des nouvelles générations
de
héros de roman, lesquels sont tous éperdument égoïstes. Égoïstes avec
385
n les ancêtres des nouvelles générations de héros
de
roman, lesquels sont tous éperdument égoïstes. Égoïstes avec une prof
386
profonde conviction ; par vertu. Ce qui n’a rien
d’
étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or
387
étonnant : ils ne sont que les projections du moi
de
leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mai
388
r le créateur. Mais quel est ce besoin si général
de
s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œu
389
ce besoin si général de s’incarner, dans le héros
de
son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception
390
énéral de s’incarner, dans le héros de son roman,
de
se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la li
391
re, dans son œuvre ? C’est ici la conception même
de
la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comm
392
ttérature, telle qu’elle apparaît chez les émules
de
Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’e
393
pparaît chez les émules de Barrès comme chez ceux
de
Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans
394
ue et l’esthétique convergent dans la littérature
d’
aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les sépare
395
neuves, — pour le libérer. Il n’est pas question
de
rechercher ici les origines historiques d’une conception qui, de plus
396
estion de rechercher ici les origines historiques
d’
une conception qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les p
397
ception qui, de plus en plus, se révèle à la base
de
tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appli
398
littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans un
de
ses derniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le
399
de ses derniers articles2. Il rendait responsable
de
tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il
400
e probable. Mais il en tirait une raison nouvelle
de
le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de
401
nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain
de
dire qu’une époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet la suivant
402
ivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face
de
la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelqu
403
conséquences. Connaissance intégrale et culture
de
soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il
404
le et culture de soi, telle peut être l’épigraphe
de
toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français
405
des combinaisons possibles. Exaltation méthodique
de
nos facultés de plaisir : déjà nous en sommes à cultiver certaines do
406
possibles. Exaltation méthodique de nos facultés
de
plaisir : déjà nous en sommes à cultiver certaines douleurs, plaisirs
407
les dissonances les plus aiguës prennent la place
d’
honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de sensibil
408
ans des esthétiques construites en hâte à l’usage
de
sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé. Dégoût,
409
chose, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût
de
la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la soci
410
lté.) Dégoût de la vie, dégoût du bonheur, dégoût
de
soi, — on l’étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisatio
411
i, — on l’étend vite à la société entière. Dégoût
d’
une civilisation qui aboutit logiquement à cet épuisant et forcené gas
412
nous avons un corps, et c’est très beau, Breton,
de
crier « Révolution toujours » — tant qu’il y a des gens pour vous fai
413
vous faire du pain ; et c’est très beau, Aragon,
de
ne plus rien attendre du monde, mais on voudrait que de moins de glor
414
plus rien attendre du monde, mais on voudrait que
de
moins de gloriole s’accompagnât votre ultimatum à Dieu. Mais, secouan
415
attendre du monde, mais on voudrait que de moins
de
gloriole s’accompagnât votre ultimatum à Dieu. Mais, secouant son dég
416
violence. Une sensualité moins énervée lui permet
de
brutaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti
417
reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir
d’
action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où l’art trouvait mal sa
418
ence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré
de
contradictions, tire du désordre de ses certitudes fragmentaires la m
419
, et, déchiré de contradictions, tire du désordre
de
ses certitudes fragmentaires la matière de quelques pamphlets par quo
420
sordre de ses certitudes fragmentaires la matière
de
quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais il a touch
421
che au monde. Mais il a touché certains bas-fonds
de
l’âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mys
422
’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin
d’
une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus, Marcel Arland, —
423
même désenchantement précoce, sans la brusquerie
de
ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ; mais jusqu’au
424
’est complu dans son dégoût ; mais jusqu’au point
d’
y percevoir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin la cause secr
425
cause secrète des inquiétudes modernes : la perte
d’
une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : «
426
études modernes : la perte d’une foi. Il a besoin
de
Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : « C’est peut-être que je
427
ncérité si voulue qu’elle va parfois à l’encontre
de
son dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans les profondeurs. E
428
lus incurable. Ces jeunes gens n’en finissent pas
de
peindre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des m
429
pas de peindre leur déséquilibre. Il serait temps
de
faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant que de p
430
s de faire la critique des méthodes et des façons
de
vivre autant que de penser qui les ont amenés aux positions qu’on vie
431
ue des méthodes et des façons de vivre autant que
de
penser qui les ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais
432
nser qui les ont amenés aux positions qu’on vient
d’
esquisser. Mais on trouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous,
433
tachée à chercher dans le seul moi les fondements
d’
une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une morale qui « d
434
une éthique. Presque tous sont hantés par la peur
d’
une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle, qui éla
435
ague, qui opère un choix parmi les éléments mêlés
de
la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seul
436
à leurs yeux, mais « tabou » ; et c’est vertu que
de
favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, r
437
l’emportent, il est plus facile et plus enivrant
de
se laisser glisser que de construire. Et l’on y prend vite goût. Cel
438
facile et plus enivrant de se laisser glisser que
de
construire. Et l’on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion
439
y prend vite goût. Cela tourne alors en passion
de
détruire, en haine de toute stabilité, de toute forme. Attitude parfa
440
ela tourne alors en passion de détruire, en haine
de
toute stabilité, de toute forme. Attitude parfaitement folle, mais c’
441
passion de détruire, en haine de toute stabilité,
de
toute forme. Attitude parfaitement folle, mais c’est justement de quo
442
Attitude parfaitement folle, mais c’est justement
de
quoi se glorifient ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le d
443
la suprême liberté. Le désir se précisait en moi
de
commettre enfin l’acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’
444
i de commettre enfin l’acte vraiment indéfendable
de
tout point de vue… J’avais goûté à l’alcool singulièrement perfide de
445
… J’avais goûté à l’alcool singulièrement perfide
de
perdre ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser les longues v
446
’alors enviées, et une nuit, nous fîmes le procès
de
toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dan
447
ocès de toutes les jouissances humaines. L’espèce
de
sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous menait n
448
urellement à repousser avec horreur tout argument
d’
utilité, et bien que nous niions toute vérité, nous étions dominés par
449
ons toute vérité, nous étions dominés par le sens
d’
une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent acheté au
450
que certains d’entre nous eussent acheté au prix
d’
un martyre… Cette lassitude facile à juger du dehors n’était pas ce qu
451
aît inutile et vain ? Je cite ces phrases, tirées
d’
un récit d’ailleurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer l’abouti
452
phrases, tirées d’un récit d’ailleurs admirable4,
de
Louis Aragon, pour marquer l’aboutissement d’une évolution qui a son
453
e4, de Louis Aragon, pour marquer l’aboutissement
d’
une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourri
454
nt d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre
de
Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada,
455
ican et Dada, il y a place pour tous les chaînons
d’
inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complètes au gré de
456
il y a place pour tous les chaînons d’inquiétude,
de
malaises, de révoltes plus ou moins complètes au gré des tempéraments
457
pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises,
de
révoltes plus ou moins complètes au gré des tempéraments. Le geste de
458
moins complètes au gré des tempéraments. Le geste
de
Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratuit commis
459
te de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme.
De
l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que pr
460
urréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros
de
roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’
461
alistes, il n’a fallu que le temps pour une folie
de
s’emballer. La plupart des romans de jeunes qui se situent entre Gide
462
ur une folie de s’emballer. La plupart des romans
de
jeunes qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent le même pers
463
me personnage : un être sans foi, à qui une sorte
de
« sincérité » interdit de commettre aucun acte volontaire et raisonné
464
ns foi, à qui une sorte de « sincérité » interdit
de
commettre aucun acte volontaire et raisonné parce que ce serait fauss
465
l méprise toutes également ; n’attendant rien que
de
ses impulsions et contemplant avec une lucidité parfois douloureuse s
466
ropres actes dont il s’étonne mais qu’il se garde
de
juger5. Il y a véritablement une littérature de l’acte gratuit, qui r
467
e de juger5. Il y a véritablement une littérature
de
l’acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gi
468
re de l’acte gratuit, qui restera caractéristique
de
notre époque. Mais Gide est responsable d’une autre méthode de cultu
469
tique de notre époque. Mais Gide est responsable
d’
une autre méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie »,
470
e. Mais Gide est responsable d’une autre méthode
de
culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à po
471
de est responsable d’une autre méthode de culture
de
soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’e
472
ponsable d’une autre méthode de culture de soi, «
d’
intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême cer
473
re méthode de culture de soi, « d’intensification
de
la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus »,
474
usqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début
de
la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Ce
475
intes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect
de
moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe q
476
la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni
de
mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’empêc
477
ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi
d’
après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien —
478
mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’empêcheront
de
joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’orgueil, sachant une
479
— rien que l’orgueil, sachant une chose si forte,
de
me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si
480
chose si forte, de me sentir plus fort encore et
de
la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si dou
481
plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie
d’
une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas si bonne
482
n’est pas si douce encore, n’est pas si bonne que
de
céder à vous, désirs, et d’être vaincu sans bataille. On voit assez à
483
’est pas si bonne que de céder à vous, désirs, et
d’
être vaincu sans bataille. On voit assez à quel genre de sophismes con
484
vaincu sans bataille. On voit assez à quel genre
de
sophismes conduit ce mouvement de l’esprit qui n’utilise une borne qu
485
ez à quel genre de sophismes conduit ce mouvement
de
l’esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’
486
un certain immoralisme comme la seule vertu digne
d’
une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralis
487
vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit
de
la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de paradoxe serait bien p
488
it de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot
de
paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter à son
489
adoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin
de
porter à son excès toute chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a
490
besoin de porter à son excès toute chose, au-delà
de
toutes limites. « Il n’y a que les excès qui méritent notre enthousia
491
propre intérêt6… » c’est proprement la perversion
d’
une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité p
492
Je ne vais point nier la fécondité psychologique
d’
une attitude par ailleurs si proche de certain mysticisme. Mais pousse
493
s. Nous ne pensons plus par ensembles7 : symptôme
de
fatigue. Mais tout cela : dégoût universel, désir de violences, gratu
494
fatigue. Mais tout cela : dégoût universel, désir
de
violences, gratuité des pensées et des actes, rêves éveillés, tout ce
495
tes, rêves éveillés, tout cela ne dérive-t-il pas
d’
une fatigue immense. Nous voyons se fausser le rythme des jours et des
496
tion mécanicienne. (Les machines n’ont pas besoin
de
sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de n
497
tigue devient un des éléments les plus importants
de
notre psychologie. Images des surréalistes — ils l’indiquent eux-même
498
calembours, expression métaphorique et symbolique
de
la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La
499
rique et symbolique de la pensée : la littérature
d’
avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour mo
500
a pensée : la littérature d’avant-garde est fille
de
la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu
501
grenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un amour
de
fatigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë
502
n amour de fatigués (Les Nuits, l’Europe galante,
de
Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque i
503
, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë
de
nos psychologues est cet état presque inhumain de celui qui n’a pas d
504
de nos psychologues est cet état presque inhumain
de
celui qui n’a pas dormi et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations
505
art, la fatigue est un des états les plus riches
de
visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nou
506
ement nous y perdons graduellement l’intelligence
de
nos instincts, la conscience de nos limites naturelles, tout ce qui s
507
nt l’intelligence de nos instincts, la conscience
de
nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein à notre glissa
508
de nos limites naturelles, tout ce qui servirait
de
frein à notre glissade vers des folies. ⁂ Recréer une conscience indi
509
proportions ; rééduquer les instincts du corps et
de
l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complèt
510
du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale
de
demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui, parce qu
511
de demain sera en réaction complète contre celle
d’
aujourd’hui, parce que nous sommes à bout. Il ne s’agit pas, encore un
512
sommes à bout. Il ne s’agit pas, encore une fois,
de
renier l’immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie a
513
fois, de renier l’immense effort pour se libérer
de
l’universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent
514
ntraire profiter des démonstrations par l’absurde
de
quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup sacrifièr
515
rent leur jeunesse. (« Nous sommes une génération
de
cobayes » remarque Paul Morand.) Il faut agir, ou bien être agi. Donn
516
ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient
d’
oubli — (mais avant de s’y perdre, quelles révolutions, quelles anarch
517
ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas
de
la Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne mépri
518
pas la culture ; sans autre parti pris que celui
de
vivre, c’est-à-dire de construire ; sobres de langage et maîtres de l
519
autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire
de
construire ; sobres de langage et maîtres de leurs corps exercés, ils
520
lui de vivre, c’est-à-dire de construire ; sobres
de
langage et maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de
521
dire de construire ; sobres de langage et maîtres
de
leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de pensée valable qu’assu
522
es de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a
de
pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de liberté que
523
ée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a
de
liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur effort e
524
umission aux lois naturelles ; et leur effort est
de
retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de choisir parmi leurs inst
525
est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas
de
choisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est
526
raignent pas de choisir parmi leurs instincts, ni
de
les améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktai
527
es se recueillent encore dans l’attente angoissée
d’
une révélation et dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux
528
ngoissée d’une révélation et dans la connaissance
de
leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils s’en vont « épia
529
ait qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions
de
l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décr
530
hent, quand viendra le moment, détourner les yeux
de
leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se faire viol
531
core Vinet, ne voir d’abord que les grands traits
de
sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suiv
532
ts de sa nature, ne connaître que les grands mots
de
la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangi
533
e morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode
de
l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en
534
r ce moyen nous met tout d’abord en présence, non
de
nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes
535
tout d’abord en présence, non de nous-mêmes, mais
de
Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes qu’ils écrivent des
536
nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas
d’
exiger des poètes qu’ils écrivent des odes civiques. Mais que nos mora
537
resque tous les jeunes écrivains — se souviennent
de
penser en fonction du temps présent, soit qu’ils veuillent en amélior
538
le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus
d’
agir sur l’époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La cris
539
leur refus d’agir sur l’époque, c’est une manière
d’
agir contre elle. 2. « La crise du concept de littérature », NRF, 192
540
ère d’agir contre elle. 2. « La crise du concept
de
littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était développé en nous un goût
541
3. « Il s’était développé en nous un goût furieux
de
l’expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans L
542
t est fini » dans Libertinage. (NRF) 5. Détours
de
René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Mauric
543
e. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les romans
de
Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains personnage
544
l ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain
de
Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Aragon, de Dri
545
’Incertain de Maurice Betz ; certains personnages
d’
Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus
546
de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland,
de
Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significa
547
; certains personnages d’Arland, de Louis Aragon,
de
Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon,
548
nd du romantisme moderne nous empêche secrètement
de
construire et de nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’i
549
moderne nous empêche secrètement de construire et
de
nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : a
550
n veut tout cultiver, et en fait l’on se contente
d’
une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Certaines expériences
551
iver, et en fait l’on se contente d’une violence,
d’
un vice, d’une inquiétude. 8. « Certaines expériences littéraires son
552
fait l’on se contente d’une violence, d’un vice,
d’
une inquiétude. 8. « Certaines expériences littéraires sont plus dang
553
leurs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge
de
la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de c
554
èneraient vite l’âge de la pierre, à la condition
d’
homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalism
555
condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée
de
celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suf
556
celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe
d’
hommes solides suffirait à restaurer une élite, efficace. (Je vois Jea
557
e, efficace. (Je vois Jean Prévost, deux ou trois
de
Philosophies, des Cahiers du Mois, et peut-être Drieu la Rochelle, s’
558
la Rochelle, s’il voulait…) o. Rougemont Denis
de
, « Adieu, beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale
559
t la morale) », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mars 1926, p. 311-319.
560
(avril 1926)p Au creux des couleurs assourdies
d’
un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de
561
tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel
de
Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaça
562
s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang,
de
la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a
563
le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et
de
la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoir
564
’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire
de
passion mystique et de crime, intense et tragique comme un couchant d
565
Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et
de
crime, intense et tragique comme un couchant d’automne, émouvante enc
566
t de crime, intense et tragique comme un couchant
d’
automne, émouvante encore après tant d’autres, comme chaque soir un no
567
te en brèves notations lyriques suivant le rythme
d’
un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confondus du dési
568
é par les élans alternés ou confondus du désir et
de
la prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère m
569
ondus du désir et de la prière. On sort lentement
d’
une chambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et
570
e même, pour suivre la naissance et l’embrasement
de
la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime
571
uivre la naissance et l’embrasement de la passion
de
Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrang
572
la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement
d’
une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hésité entre plusieurs st
573
Jouve semble avoir hésité entre plusieurs styles
de
roman. Un chapitre d’observation psychologique ironique et minutieuse
574
sité entre plusieurs styles de roman. Un chapitre
d’
observation psychologique ironique et minutieuse, à la Stendhal, succè
575
me lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche
de
passions inconscientes qui donnent à tous les actes une signification
576
une signification plus profonde. (Il serait aisé
de
montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes de famille freudien
577
montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes
de
famille freudiens, ou d’analyses de démences mystiques ; mais tout ce
578
a su tirer des complexes de famille freudiens, ou
d’
analyses de démences mystiques ; mais tout cela est sublimé dans un mo
579
des complexes de famille freudiens, ou d’analyses
de
démences mystiques ; mais tout cela est sublimé dans un monde poétiqu
580
é dans un monde poétique où il paraît inconvenant
d’
introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à l
581
e où il paraît inconvenant d’introduire le jargon
de
la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre i
582
science moderne.) Si nous reconnaissons à la base
de
cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les droits
583
des idées vieilles comme Rousseau sur les droits
de
la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque li
584
quelques chapitres inspirés presque littéralement
d’
une anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part l’évolution mysti
585
és presque littéralement d’une anecdote italienne
de
Stendhal ; si d’autre part l’évolution mystique de Paulina semble par
586
e Stendhal ; si d’autre part l’évolution mystique
de
Paulina semble parfois un peu trop « classique » et prévue, l’origina
587
ique » et prévue, l’originalité foncière du roman
de
Jouve reste indéniable : c’est son mouvement purement lyrique, sa pro
588
énements inconscients. Certaines proses mystiques
de
Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiqu
589
de Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes
de
l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Den
590
u couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur
de
Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis de, « [Co
591
les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et
de
Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pier
592
et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 », Bibliothèque un
593
aulina 1880 », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, avril 1926, p. 530-531.
594
Alix de Watteville, La Folie
de
l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre
595
La Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste
de
grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’éco
596
qui la guerre a fait perdre le goût des théories
d’
écoles et de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-le aux pris
597
re a fait perdre le goût des théories d’écoles et
de
quelques autres plaisirs pour civils : mettez-le aux prises avec une
598
principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet
de
conte moral, avec ses personnages un peu conventionnels et l’invraise
599
onventionnels et l’invraisemblance assez piquante
de
ses péripéties. Quel dommage que l’auteur l’ait alourdi d’une idéolog
600
ripéties. Quel dommage que l’auteur l’ait alourdi
d’
une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui eût gagné à êt
601
se en action plutôt qu’en commentaires. Le talent
de
Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description du milieu
602
cription du milieu patricien que dans la création
d’
un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longueurs, on ne l
603
ieu patricien que dans la création d’un caractère
de
grand peintre. Pourtant, malgré des longueurs, on ne lira pas sans pl
604
in le vent du large, parmi des gens qui craignent
de
s’enrhumer. q. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Alix de Wattev
605
ui craignent de s’enrhumer. q. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de l’espace », Biblio
606
de, « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie
de
l’espace », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avr
607
de l’espace », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, avril 1926, p. 531.
608
ourit avec une grâce un peu frileuse et se permet
de
bâiller en public. On connaît le danger… r. Rougemont Denis de, «
609
blic. On connaît le danger… r. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Wilfred Chopard, Spicilège ironique », Bibliothèqu
610
ge ironique », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
611
ire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit
de
la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Inv
612
ée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte
de
Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invraisemblablement
613
ée dans l’athéisme. Invraisemblablement ignorante
de
toute religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à « la vie », laque
614
r l’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin
de
la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’
615
ivre à thèse est plutôt une argumentation à coups
d’
exemples vivants qu’un véritable roman. La profusion souvent facile de
616
cidents et le style volontairement sec permettent
de
suivre sans passion ni fatigue le développement un peu théorique mais
617
e développement un peu théorique mais intelligent
d’
un problème que l’on pressent trop complètement résolu dès les premièr
618
premières pages, mais qu’il faut louer Mme Rivier
d’
avoir posé courageusement. Dirai-je que l’abus des points d’exclamatio
619
sé courageusement. Dirai-je que l’abus des points
d’
exclamation — trait commun à presque toutes les femmes auteur, et qui
620
un peu ? C’est une vétille. s. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Cécile-Claire Rivier, L’Athée », Bibliothèque univ
621
er, L’Athée », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
622
Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur
de
son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arleq
623
i me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits
de
critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le
624
meilleur de son œuvre : ses récits de critique et
d’
esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret profess
625
d par ordre, et montrer que si cet ordre l’écarte
de
Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour alle
626
Académie. Disons pour aller vite que sa recherche
de
l’ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le gr
627
echerche de l’ordre révèle simplement une volonté
de
construire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’o
628
r les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur
de
Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’est jamais moins qu’en ve
629
ofessionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse
de
beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sen
630
hisme cubiste qui dépasse de beaucoup les limites
de
cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer d
631
de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens
de
vouloir illustrer de pédants exercices poétiques. Mais quelle intelli
632
’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer
de
pédants exercices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont l’auda
633
s. Mais quelle intelligence, et dont l’audace est
de
se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les mi
634
urs que les miracles les plus étonnants sont ceux
de
la lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. »
635
et à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté
de
son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en musique. Suppres
636
. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et
de
l’art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obsc
637
nture, en musique. Suppression du clair-obscur et
de
la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il
638
t sur une machine luisante et tournante. L’esprit
de
Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance mécanique et
639
nante. L’esprit de Cocteau est une arme admirable
de
précision, d’élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce que
640
t de Cocteau est une arme admirable de précision,
d’
élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujour
641
e admirable de précision, d’élégance mécanique et
de
rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Coctea
642
charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs
de
cristal, si elles sont sans parfum, ne se faneront pas. t. Rougemo
643
parfum, ne se faneront pas. t. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Jean Cocteau, Rappel à l’ordre », Bibliothèque uni
644
l à l’ordre », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1926, p. 661-662.
645
émoignages ne manquent pas sur la détresse morale
de
la génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore
646
, « artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge
de
l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune trans
647
ansposition romanesque le trouble caractéristique
de
sa génération. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même la force
648
e caractéristique de sa génération. Terrible aveu
d’
impuissance, il n’a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un
649
ble aveu d’impuissance, il n’a plus même la force
de
l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvie
650
ec une intelligence dont la triste profession est
de
détruire le désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologu
651
l’élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse
de
sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiologiques do
652
isse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversion
de
tout ce qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable
653
parvenue au point où elle « ne semble avoir rien
d’
autre à faire que son propre procès », une intelligence qui se dégoût
654
Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage
de
contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait Baudelaire.
655
implorait Baudelaire. Encore avait-il le courage
de
prier… u. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, Mon co
656
ait-il le courage de prier… u. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] René Crevel, Mon corps et moi », Bibliothèque univ
657
orps et moi », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1926, p. 662-663.
658
us disons adieu aux charmes troubles et inhumains
de
la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et b
659
mes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit
de
créer à notre vie moderne un décor utile et beau. Or « la grande vill
660
or utile et beau. Or « la grande ville, phénomène
de
force en mouvement, est aujourd’hui une catastrophe menaçante pour n’
661
catastrophe menaçante pour n’avoir pas été animée
de
l’esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des mill
662
menaçante pour n’avoir pas été animée de l’esprit
de
géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des milliers d’êtres
663
lle use et conduit lentement l’usure des milliers
d’
êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles de t
664
Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles
de
travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Con
665
us adaptée aux conditions nouvelles de travail ou
de
repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Congestion : « un
666
i, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème
de
l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et
667
sement des préoccupations esthétiques et sociales
d’
aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation sous cet asp
668
et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre la crise
de
notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il nous fau
669
faut mieux que des dictateurs : des Architectes,
de
l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera
670
des dictateurs : des Architectes, de l’esprit et
de
la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que M
671
rt que Mussolini (lequel s’est d’ailleurs inspiré
de
lui dans son fameux discours aux édiles de Rome). Urbanisme est une
672
nspiré de lui dans son fameux discours aux édiles
de
Rome). Urbanisme est une étude technique et un pamphlet dont l’argum
673
e parfois en boutades mordantes, en brèves fusées
de
lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans la statistique. On e
674
des mordantes, en brèves fusées de lyrisme. C’est
d’
une verve puissante jusque dans la statistique. On en sort convaincu o
675
On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé
d’
avoir trouvé la formule même de tant d’aspirations modernes. Voici san
676
ersé, enthousiasmé d’avoir trouvé la formule même
de
tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute un des livres les
677
thousiasmé d’avoir trouvé la formule même de tant
d’
aspirations modernes. Voici sans aucun doute un des livres les plus re
678
aucun doute un des livres les plus représentatifs
de
l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme
679
un des livres les plus représentatifs de l’époque
de
Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un ossuaire
680
monde comme un ossuaire est couvert des détritus
d’
époques mortes. Une tâche nous incombe, construire le cadre de notre e
681
rtes. Une tâche nous incombe, construire le cadre
de
notre existence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie
682
e cadre de notre existence… construire les villes
de
notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contemporaine ». Pu
683
les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan
d’
une « ville contemporaine ». Pures géométries de verre et de ciment bl
684
n d’une « ville contemporaine ». Pures géométries
de
verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gr
685
lle contemporaine ». Pures géométries de verre et
de
ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de
686
mboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel
de
la cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire,
687
tte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour
d’
un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans le silence de l’azur
688
e-gare circulaire, prismes perdus dans le silence
de
l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartie
689
s dans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs
de
la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins su
690
umeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers
de
résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de ver
691
es jardins suspendus à tous les étages soulignent
de
verdure l’horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives rég
692
s, et minces en regard de leur hauteur, entourant
de
leurs multiples « redents » des terrains de jeux et des parcs, la nat
693
urant de leurs multiples « redents » des terrains
de
jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle
694
e organisé par l’Architecture avec les ressources
de
la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisat
695
vec les ressources de la plastique qui est le jeu
de
formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de rai
696
jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation
d’
un rêve de joie et de raison où de grandes ordonnances élèvent leur ch
697
rmes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve
de
joie et de raison où de grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopi
698
a lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et
de
raison où de grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopie ! Oui, si
699
Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où
de
grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopie ! Oui, si notre civili
700
tériels formidables des ensembles soumis aux lois
de
l’esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique.
701
bles des ensembles soumis aux lois de l’esprit et
de
la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lign
702
archique. Tirer des lignes droites, est le propre
de
l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace a
703
es, ce serait peut-être tuer au soleil des germes
de
révolution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation
704
ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation
de
ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporaine ». Un labeur
705
ont mis à calculer la réalisation de ce phénomène
de
haute poésie — la « ville contemporaine ». Un labeur précis et anonym
706
scurément à cette parfaite expression du triomphe
de
l’homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du ca
707
era la passion du siècle ». v. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Le Corbusier, Urbanisme », Bibliothèque universell
708
, Urbanisme », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, juin 1926, p. 797-798.
709
ssages (juillet 1926)w Je ne crois pas exagéré
de
dire qu’en publiant ce recueil d’essais, M. Fernandez a donné la prem
710
ois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil
d’
essais, M. Fernandez a donné la première œuvre importante du mouvement
711
a donné la première œuvre importante du mouvement
de
construction et de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains
712
œuvre importante du mouvement de construction et
de
synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La «
713
synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains
d’
aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer «
714
qu’il voudrait inaugurer « ne se contenterait pas
d’
étudier les œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique
715
ification historique ou technique, mais tâcherait
d’
épouser le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans
716
ouser le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis
de
les situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’
717
e talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit
de
cité. Voici enfin un critique qui sait tirer une leçon constructive d
718
ées dans leurs recherches, il ne les condamne pas
d’
un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholique ; mais tenan
719
non vers le passé catholique ; mais tenant compte
de
leur effort, il puise dans l’échec même de leurs analyses les élément
720
compte de leur effort, il puise dans l’échec même
de
leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi conti
721
dans l’échec même de leurs analyses les éléments
de
sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, comme une déco
722
ur œuvre, comme une découverte couronne une série
d’
expériences négatives. La critique de ces expériences négatives est co
723
ne une série d’expériences négatives. La critique
de
ces expériences négatives est contenue surtout dans ses essais sur Pr
724
it temps que l’on dénonce la confusion romantique
de
l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modern
725
iter que M. Fernandez aborde par ce biais l’œuvre
de
Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusion. Mais
726
confusion. Mais s’il est bien établi que les lois
de
la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il
727
la vie sont essentiellement différentes des lois
de
l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute
728
phie et le Roman, dont pour ma part je suis loin
d’
admettre plusieurs thèses beaucoup trop absolues. M. Fernandez tente d
729
thèses beaucoup trop absolues. M. Fernandez tente
de
prouver par exemple que l’œuvre d’art ne peut être un moyen de connai
730
r exemple que l’œuvre d’art ne peut être un moyen
de
connaissance personnelle. Après quoi il écrit : « II y a, en fait, de
731
quoi il écrit : « II y a, en fait, deux manières
de
se connaître, à savoir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l
732
ais l’œuvre n’est-elle pas une façon particulière
de
s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une discussion de ces thèses subti
733
s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une discussion
de
ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’auteur dans cet es
734
de ces thèses subtiles, d’autant que la position
de
l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demande
735
peut se demander s’il nie vraiment l’interaction
de
la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusion
736
nder s’il nie vraiment l’interaction de la vie et
de
l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y déc
737
tement par opposition à la conception proustienne
de
la personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il défi
738
ption proustienne de la personnalité — « mosaïque
de
sensations juxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de la « ga
739
s juxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie
de
la « garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe
740
« garantie des sentiments », où l’on est en droit
de
voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur
741
ntiments », où l’on est en droit de voir le germe
d’
un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les données moder
742
se fonderait solidement sur les données modernes
de
la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pou
743
ent sur les données modernes de la psychologie et
de
la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une
744
philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir
d’
analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moin
745
d’analyse — une analyse qui retient les éléments
de
la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologi
746
point si dangereux, il nous propose l’expérience
d’
un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « p
747
us propose l’expérience d’un Newman, les exemples
d’
un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’a
748
rience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et
d’
un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire de l
749
d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train
de
l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’h
750
ont su « penser dans le train de l’action, faire
de
la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qu
751
du cubisme littéraire, et qu’il serait bien utile
d’
adopter, si l’on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter s
752
tient surtout à sa forme : il est parfois agaçant
de
pressentir sous l’expression trop technique ou obscure, une richesse
753
xpression trop technique ou obscure, une richesse
d’
idées neuves et fortes, mais péniblement comprimées. Ce défaut de form
754
et fortes, mais péniblement comprimées. Ce défaut
de
forme est peut-être inhérent, dans une certaine mesure, au genre de c
755
être inhérent, dans une certaine mesure, au genre
de
critique pratiqué par Fernandez. Périlleuse situation que la sienne,
756
sienne, en effet, où l’on court le double risque
de
paraître trop littéraire aux philosophes, et trop philosophe aux litt
757
n’empêche que son livre manifeste une belle unité
de
pensée, et qu’il propose quelques directions très nettes de synthèse.
758
et qu’il propose quelques directions très nettes
de
synthèse. Avec une œuvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et
759
synthèse. Avec une œuvre comme Plaisir des Sports
de
Jean Prévost, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Mess
760
Sports de Jean Prévost, et les essais politiques
de
Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez sont les premières contr
761
ais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages
de
Fernandez sont les premières contributions à l’établissement d’une ét
762
ont les premières contributions à l’établissement
d’
une éthique adaptée aux besoins modernes. w. Rougemont Denis de, «
763
aptée aux besoins modernes. w. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Ramon Fernandez, Messages », Bibliothèque universe
764
z, Messages », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, juillet 1926, p. 124-125.
765
ement littéraire sur ce nouveau tome des mémoires
de
Montherlant : dans ce récit plus encore que dans les œuvres précédent
766
ins l’œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait
de
Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel q
767
vre vaut par son allure plus que par des qualités
de
composition ou de perfection formelle. Pour quelques-uns de ces trait
768
llure plus que par des qualités de composition ou
de
perfection formelle. Pour quelques-uns de ces traits d’énergie ou de
769
tion ou de perfection formelle. Pour quelques-uns
de
ces traits d’énergie ou de savante sensualité, pour ces insolences jo
770
fection formelle. Pour quelques-uns de ces traits
d’
énergie ou de savante sensualité, pour ces insolences jolies et les su
771
lle. Pour quelques-uns de ces traits d’énergie ou
de
savante sensualité, pour ces insolences jolies et les subites violenc
772
les subites violences, qui composent la séduction
de
cet « homme de la Renaissance », pour quelques descriptions des prair
773
lences, qui composent la séduction de cet « homme
de
la Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles
774
ques descriptions des prairies espagnoles pleines
de
simple grandeur, j’ai supporté mille fastidieux détails techniques et
775
t longue fidélité aux taureaux braves et simplets
d’
esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans les prairies célestes, pou
776
sir certaines pages magnifiques et sobres, jetées
de
haut avec la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura f
777
des valeurs plus humaines. x. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires », Bibliothèq
778
Bestiaires », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1926, p. 397-398.
779
lques idées graves en leur présentant les miroirs
de
personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un certain manq
780
souhait, qui manifestent, avec un certain manque
de
conviction et des poses de mannequins, les tendances contradictoires
781
avec un certain manque de conviction et des poses
de
mannequins, les tendances contradictoires d’un individu. C’est pour t
782
oses de mannequins, les tendances contradictoires
d’
un individu. C’est pour traiter ce sujet pirandellien qu’on s’embarque
783
pirandellien qu’on s’embarque dans une croisière
de
vacances, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire su
784
oit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte
d’
unité vivante dans le rythme des désirs jamais simultanés de ses petit
785
vante dans le rythme des désirs jamais simultanés
de
ses petits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on le sent ; pour
786
irituellement « poétique ». y. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Jacques Spitz, La Croisière indécise », Bibliothèq
787
re indécise », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1926, p. 810.
788
Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme
d’
un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop claire où les
789
ur fatigué se reprend à souffrir, il ne sait plus
de
quels souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d’un amour réveil
790
els souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette
d’
un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable b
791
osain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple
de
juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, dans une av
792
uteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet,
d’
un pathétique assez neuf. z. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] A
793
d’un pathétique assez neuf. z. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Alfred Colling, L’Iroquois », Bibliothèque univers
794
L’Iroquois », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1926, p. 810-811.
795
André Malraux, La Tentation
de
l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un França
796
l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit
d’
Europe à un Français qui lui répond de Chine. Nous sommes loin du ton
797
inois écrit d’Europe à un Français qui lui répond
de
Chine. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes : le Chinois s’ét
798
e on devine une détresse. C’est encore une vision
de
l’Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chi
799
e. C’est encore une vision de l’Occident qui naît
de
ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’Europe
800
« une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée
de
la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». No
801
t ordonnée, où l’idée de la civilisation et celle
de
l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non
802
humilions sans trêve notre sensibilité au profit
de
ce « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit. La passion apparaî
803
cadres — perpétuel conflit du réel avec nos rêves
de
puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne s
804
tesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal
de
l’Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacr
805
té essentielle » que le Chinois distingue au cœur
de
la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiat
806
vie occidentale apparaît mieux par la comparaison
de
l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence
807
ritiques du Chinois et sympathiser avec son idéal
de
culture. Il n’y a pas là deux points de vue irréductibles, du moins M
808
es, du moins M. Malraux a fait parler son Chinois
de
telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme an
809
lativisme angoissant qui semblait devoir résulter
de
cette confrontation, s’évanouit : c’est bien plutôt une unité supérie
810
évanouit : c’est bien plutôt une unité supérieure
de
l’esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à
811
humain que nous découvrons, et qui nous permettra
de
juger à notre tour certaines démences qui enfièvrent l’Europe. Tandi
812
us prenons chaque jour une conscience plus claire
de
la vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais ple
813
aque jour une conscience plus claire de la vanité
de
nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût
814
plus claire de la vanité de nos buts, « capables
d’
agir jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté d’act
815
« capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins
de
dégoût devant la volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ».
816
acrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté
d’
action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’est-il pas d
817
ourd’hui notre race… ». Et peut-être n’est-il pas
de
position plus périlleuse, puisqu’elle risque de ne laisser subsister
818
s de position plus périlleuse, puisqu’elle risque
de
ne laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la destruction e
819
ne laisser subsister en nous qu’un « étrange goût
de
la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement su
820
en nous qu’un « étrange goût de la destruction et
de
l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitud
821
e goût de la destruction et de l’anarchie, exempt
de
passion, divertissement suprême de l’incertitude… » aa. Rougemont
822
archie, exempt de passion, divertissement suprême
de
l’incertitude… » aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Ma
823
uprême de l’incertitude… » aa. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de l’Occident », Bibli
824
de, « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation
de
l’Occident », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, d
825
l’Occident », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1926, p. 811-812.
826
Louis Aragon, Le Paysan
de
Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne mes parole
827
s, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes
d’
un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour le
828
les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité
de
paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques,
829
ur temps à recenser les incohérences pittoresques
de
ce petit livre. Quant à ceux que certaines envolées magnifiques et ha
830
il leur réserve mieux encore : après une kyrielle
d’
injures qui ne font pas honneur à l’imagination d’autres fois si prest
831
ent ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie
de
la persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion
832
et une passion farouche pour la liberté, qui font
de
cet ombrageux personnage une manière de Rousseau surréaliste. Devant
833
qui font de cet ombrageux personnage une manière
de
Rousseau surréaliste. Devant cette ostentation de révolte, ce mélange
834
de Rousseau surréaliste. Devant cette ostentation
de
révolte, ce mélange de fanfaronnade et d’intense désespoir, on songe
835
. Devant cette ostentation de révolte, ce mélange
de
fanfaronnade et d’intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et
836
ntation de révolte, ce mélange de fanfaronnade et
d’
intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à qui
837
ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon
de
ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’em
838
fais-tu le bouffon de ta propre détresse ? » Tant
d’
insistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon
839
nsistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas
de
le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus origi
840
le tempérament le plus hardi et le plus original
de
la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la gr
841
nts ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi trop
de
talents intéressants, un écrivain qui s’impose avec des qualités et d
842
tre littérature pour trouver semblable domination
de
la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image,
843
e. Et parmi les modernes, il bat tous les records
de
l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques
844
fatigantes et quelques sombres délires, des pages
d’
un lyrisme inouï. Que Louis Aragon ne se croie pas tenu de justifier s
845
isme inouï. Que Louis Aragon ne se croie pas tenu
de
justifier ses visions par le moyen d’une métaphysique aussi prétentie
846
ie pas tenu de justifier ses visions par le moyen
d’
une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est
847
l’hallucination du décor des capitales, créatrice
d’
un merveilleux de chaque instant, d’une véritable « mythologie moderne
848
u décor des capitales, créatrice d’un merveilleux
de
chaque instant, d’une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de
849
es, créatrice d’un merveilleux de chaque instant,
d’
une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite
850
d’une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan
de
Paris est une suite de promenades dont la composition n’est pas sans
851
logie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite
de
promenades dont la composition n’est pas sans rappeler celle des Nuit
852
mposition n’est pas sans rappeler celle des Nuits
d’
octobre de Nerval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de la phil
853
d’octobre de Nerval ; forme qui permet à l’auteur
de
divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par
854
Nerval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer
de
la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la descript
855
n passant par la description réaliste ou imaginée
d’
une boîte de nuit, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le
856
r la description réaliste ou imaginée d’une boîte
de
nuit, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur liv
857
ription réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit,
d’
une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’a
858
ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture,
d’
un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C
859
d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre
de
l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romant
860
ublic. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur
d’
Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantisme nouveau
861
e, un Nerval sans pudeur, un Musset ivre non plus
de
vin de France, mais d’alcools pleins de démons, de drogues peut-être
862
erval sans pudeur, un Musset ivre non plus de vin
de
France, mais d’alcools pleins de démons, de drogues peut-être mortell
863
r, un Musset ivre non plus de vin de France, mais
d’
alcools pleins de démons, de drogues peut-être mortelles. ab. Rouge
864
non plus de vin de France, mais d’alcools pleins
de
démons, de drogues peut-être mortelles. ab. Rougemont Denis de, «
865
e vin de France, mais d’alcools pleins de démons,
de
drogues peut-être mortelles. ab. Rougemont Denis de, « [Compte ren
866
ogues peut-être mortelles. ab. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Louis Aragon, Le Paysan de Paris », Bibliothèque u
867
enis de, « [Compte rendu] Louis Aragon, Le Paysan
de
Paris », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, janvie
868
an de Paris », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, janvier 1927, p. 123-124.
869
ladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet
de
roman, écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans de vie conjuga
870
ujet de roman, écrit Gide, au bout de quinze ans,
de
vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive et récip
871
, écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans
de
vie conjugale, la décristallisation progressive et réciproque des con
872
ait que Beyle appelait cristallisation une fièvre
d’
imagination qui orne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais le
873
cristallisation une fièvre d’imagination qui orne
de
beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce tem
874
magination qui orne de beautés illusoires l’objet
de
l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fi
875
lusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens
de
ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait
876
vre. Et comme la morale ne sait plus leur imposer
de
feindre encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques
877
encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit
de
quelques mois aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre de le
878
plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux
de
la Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit e
879
aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre
de
leurs rêves. Un malentendu grandit entre eux dans leur isolement, ine
880
e qu’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié
de
la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. M
881
ais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés
d’
eux-mêmes pour que ce mot, ce geste, soient possibles. C’est d’Armande
882
our que ce mot, ce geste, soient possibles. C’est
d’
Armande surtout qu’on les attendrait, plus franche d’allure. On ne sai
883
rmande surtout qu’on les attendrait, plus franche
d’
allure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour
884
e sait ce qui la retient : son amour ? son manque
d’
amour ? Pour Jacques, il souffre d’une incurable adolescence, d’un déf
885
r ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre
d’
une incurable adolescence, d’un défaitisme sentimental qui l’empêtre d
886
Jacques, il souffre d’une incurable adolescence,
d’
un défaitisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et le fait joue
887
scence, d’un défaitisme sentimental qui l’empêtre
de
réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… «
888
es, et le fait jouer bien maladroitement son rôle
d’
homme… « Captif de sa propre jeunesse. » C’est ici un autre sujet du r
889
er bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif
de
sa propre jeunesse. » C’est ici un autre sujet du roman, qui se mêle
890
tte analyse trahit Barbey : son art est justement
de
voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un ge
891
st justement de voiler les intentions du récit et
de
les exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image
892
es moyens qu’il parvient à une certaine puissance
de
l’effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange h
893
iolence, autour de ces êtres dont la détresse est
d’
autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des dehors trop polis. U
894
us des dehors trop polis. Une fois fermé le livre
de
Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer plus que
895
s fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse
de
son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se condense le sen
896
os, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre
d’
une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arb
897
uvrant le manoir perdu, des fumées sur un paysage
d’
hiver et soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de p
898
s sur un paysage d’hiver et soudain sous la lueur
d’
un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est admirable,
899
sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus
de
passion. Cette fin est admirable, dont la brutalité si longtemps dési
900
la brutalité si longtemps désirée délivre Jacques
d’
un passé obsédant, d’une jeunesse trop complaisante à son tourment.
901
emps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant,
d’
une jeunesse trop complaisante à son tourment. ac. Rougemont Denis
902
mplaisante à son tourment. ac. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Bernard Barbey, La Maladère », Bibliothèque univer
903
La Maladère », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, février 1927, p. 256.
904
mmes, écrire ne soit que le recensement passionné
de
leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse.
905
ensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé
d’
une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’auteur de vers
906
action qu’elle leur laisse. Montclar est l’auteur
de
vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comprend que ce
907
u’elle leur laisse. Montclar est l’auteur de vers
de
jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comprend que ce journal
908
joindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon
de
ne pas y tenir, qu’il manifeste en toute occasion de sa vie est peut-
909
ne pas y tenir, qu’il manifeste en toute occasion
de
sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Offic
910
ux ? » pour lui, comme pour Barnabooth, il s’agit
de
« déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que phil
911
our Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot
de
la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour
912
r la souffrance indispensable au perfectionnement
de
son âme. Et qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour n
913
isir, un peu plus viennois que naturel s’il parle
de
choses d’art comme on fait dans Proust, si les passions qu’il nous pe
914
eu plus viennois que naturel s’il parle de choses
d’
art comme on fait dans Proust, si les passions qu’il nous peint sont i
915
Il se connaît assez pour savoir ce qui est en lui
de
l’homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous trompe
916
pour savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou
de
l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se c
917
s tromper là-dessus. Il se connaît avec une sorte
de
froideur que l’on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de
918
n dirait désintéressée si elle n’avait pour effet
de
souligner, plus que ses succès, certaines faiblesses qu’il recherche
919
faiblesses qu’il recherche secrètement, parce que
de
ces « ratages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la conditi
920
e que de ces « ratages » naît le perpétuel besoin
d’
évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il c
921
e perpétuel besoin d’évasion qui est la condition
de
son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans une impercepti
922
, non sans une imperceptible satisfaction, l’aveu
d’
une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vie volup
923
etites blessures. Ce n’est pas le moins troublant
d’
une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en dégage, sagesse qu
924
r est un lien sans durée. Seules la souffrance ou
de
secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me s
925
ouffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir
d’
éternité. » Il est juste, ce me semble, d’insister sur ce qui forme da
926
pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me semble,
d’
insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme une arrière
927
semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit
de
cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que l
928
e inquiète et un peu hautaine. Que la composition
de
cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on hésite à en fa
929
site à en faire reproche à l’auteur. Cette espèce
de
modestie de l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps q
930
ire reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie
de
l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’i
931
ant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre
d’
une résonance si humaine, est mieux que charmant, — douloureux et dési
932
involte, glacé, passionné. ad. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Guy de Pourtalès, Montclar », Bibliothèque univers
933
s, Montclar », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un mo
934
927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau
de
phrase dans l’édition originale.
935
1927)af M. Edmond Jaloux offre l’exemple rare
d’
un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans sa maturité, de
936
té, des jeunes générations, en sorte que l’espèce
de
romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement d
937
ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer
de
son autorité de critique et surtout de son expérience déjà riche de r
938
emporains, et qu’il vient appuyer de son autorité
de
critique et surtout de son expérience déjà riche de romancier. Son re
939
nt appuyer de son autorité de critique et surtout
de
son expérience déjà riche de romancier. Son regard se promène sur le
940
critique et surtout de son expérience déjà riche
de
romancier. Son regard se promène sur le même monde où se plaisent nos
941
s, mais il garde une certaine discrétion, cet air
de
rêverie d’un homme qui en sait long… Et, certes, il faut être un peu
942
garde une certaine discrétion, cet air de rêverie
d’
un homme qui en sait long… Et, certes, il faut être un peu mage pour p
943
es avec cette mélancolique grâce. Si quelques-uns
de
ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux, j’y vois un signe ch
944
uelques-uns de ses bijoux sont taillés comme ceux
de
Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de l’aîné au plus jeun
945
mme ceux de Giraudoux, j’y vois un signe charmant
d’
amitié de l’aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages
946
de Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié
de
l’aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour reme
947
mitié de l’aîné au plus jeune, lequel envoie l’un
de
ses personnages pour remercier ; (pouvait-il mieux trouver qu’un René
948
va pas s’attabler au café en face des personnages
de
Jaloux. Et peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul M
949
dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée
de
lui faire ces confidences qu’elle livre si facilement au héros plus c
950
t au héros plus confiant et secrètement incertain
de
ce roman. À la veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste pari
951
et secrètement incertain de ce roman. À la veille
de
se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre une femme
952
incarne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend
de
l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il ai
953
sa femme, « mais comme on aime une petite maison
de
province quand on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’imag
954
tite maison de province quand on a failli hériter
de
Chenonceaux ». Peu à peu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gag
955
ailli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’image
d’
Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une merveilleuse o
956
Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance
d’
une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans les
957
ssance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit
de
longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’a
958
rd’hui un réalisme discret mais précis et le sens
de
ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos actes avant
959
et mais précis et le sens de ce qu’il y a en nous
d’
essentiel, de ce qui détermine nos actes avant que la raison n’intervi
960
s et le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel,
de
ce qui détermine nos actes avant que la raison n’intervienne, mouveme
961
tes avant que la raison n’intervienne, mouvements
de
nos passions à nous-mêmes inavoués, rêves éveillés. Tout un système d
962
s-mêmes inavoués, rêves éveillés. Tout un système
de
valeurs lyriques et sentimentales que la raison ignore ou tyrannise a
963
ère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril
d’
un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équilibre qu’il
964
itent des personnages spirituellement dessinés un
de
ces drames tout intérieurs dont il dit : « Personne ne peut juger du
965
, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans l’Âge
d’
or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mélancoli
966
d’or, un désenchantement profond prend le masque
d’
une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses qui vous
967
dues, aveux incompris, et peut-être, un quiproquo
de
destinées… Le tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières
968
ut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases
de
Sylvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si l
969
onde et délicieuse, gagnera à son auteur beaucoup
d’
amis inconnus. af. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond Jalo
970
beaucoup d’amis inconnus. af. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… », Bibliot
971
usse aimée… », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mars 1927, p. 387-388.
972
rise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état
de
velléités contradictoires que son intelligence très nuancée maintient
973
intelligence très nuancée maintient en une sorte
d’
instable équilibre, les tendances que ses contemporains ont poussées à
974
contemporains ont poussées à l’extrême avec moins
de
prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras s
975
ées à l’extrême avec moins de prudence mais aussi
de
lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans l’aimer ; saluant e
976
ré par les thèses extrémistes mais non dépourvues
d’
une sombre grandeur, des surréalistes, et en même temps par cette solu
977
ette inquiétude qui fait la grandeur et la misère
de
l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte
978
irections générales. « Hamlétisme », pouvoir aigu
d’
analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’approfondissement du
979
sion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif
de
tout et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’absolu à la
980
dissement du moi, soif de tout et pourtant mépris
de
tout, procédant d’un goût de l’absolu à la fois mystique et anarchiqu
981
oif de tout et pourtant mépris de tout, procédant
d’
un goût de l’absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien le
982
t et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût
de
l’absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands t
983
ue et anarchique : ce sont bien les grands traits
de
notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé le rôle
984
e extérieur, que je crois décisif, des conditions
de
la vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l
985
les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens
d’
aujourd’hui. Il constate que l’une (celle de Gide) ne fait que différe
986
gens d’aujourd’hui. Il constate que l’une (celle
de
Gide) ne fait que différer notre inquiétude, tandis que l’autre « ne
987
angoisse qu’en y substituant ce qui ne vient que
de
Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible,
988
ient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur
d’
un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans remède. Mai
989
, M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à la tentation
de
créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconsciente ruse d’un i
990
emmes irréductibles, suprême et inconsciente ruse
d’
un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer
991
foi. Dès lors sont-elles vraiment les deux termes
d’
un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la fo
992
ue le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît
de
l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiét
993
utre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que
de
la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité…
994
autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas
de
M. Rops lui-même, cette phrase qui formule admirablement les exigence
995
ui formule admirablement les exigences conjointes
de
l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le
996
ement les exigences conjointes de l’inquiétude et
de
la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… »
997
te à le chercher encore… » ag. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Daniel-Rops, Notre inquiétude », Bibliothèque univ
998
inquiétude », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, avril 1927, p. 563-564.
999
ci un livre dur et sans grâces, qui ne manque pas
d’
une beauté assez brutale, pour nous choquer et s’imposer pourtant. M.
1000
un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a
d’
ambition que pour ses enfants. Jacob, l’aîné se révolte. Sensualité, i
1001
ité : les caractères se résument dans son avidité
de
puissance. C’est par l’argent qu’on domine notre âge : il devient gra
1002
ssure sa fortune au prix du peu cynique reniement
de
ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On v
1003
niement de ses origines. Le vieux père s’effondre
de
honte et de douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Ma
1004
es origines. Le vieux père s’effondre de honte et
de
douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a r
1005
père s’effondre de honte et de douleur. « On vend
de
l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non
1006
eu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension
de
Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulga
1007
on de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre
de
platitudes et de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, viol
1008
s luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et
de
vulgarités pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont le
1009
, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner
d’
être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin
1010
être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et
de
suivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de
1011
que vous m’avez assigné à force de m’humilier et
de
me craindre. » ah. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard Le
1012
ilier et de me craindre. » ah. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Bernard Lecache, Jacob », Bibliothèque universelle
1013
ache, Jacob », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1927, p. 689-690.
1014
Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu
de
tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétude actue
1015
e tout dire est une des plus tragiques inventions
de
l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’a
1016
é qu’on y apporte, l’on en vient à une conception
de
la sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment
1017
inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’exigence
d’
une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute joie comme il
1018
sincérité ne serait-elle à son tour que le masque
d’
un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on voit commen
1019
le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond
de
ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son
1020
écrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce
de
Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur
1021
nd l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées
de
Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche
1022
féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou
de
Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force
1023
lle les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes
d’
Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de
1024
’Arthur, le roman vit et nous touche par la force
de
ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur le
1025
vit et nous touche par la force de ce tourment ou
de
ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur le détail dégoûtant e
1026
elle s’acharne sur le détail dégoûtant et mesquin
de
certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’auteur n’est pas en
1027
n voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché
de
la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mai
1028
ore détaché de la matière pour en tirer une œuvre
d’
art. La sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa
1029
mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur
de
document humain, nuit à sa valeur littéraire. Je n’aime guère ce styl
1030
ttéraire. Je n’aime guère ce style abstrait, semé
de
redites et d’expressions toutes faites qui trahissent une écriture hâ
1031
’aime guère ce style abstrait, semé de redites et
d’
expressions toutes faites qui trahissent une écriture hâtive. Mais il
1032
ent une écriture hâtive. Mais il y a dans l’œuvre
de
René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui forcent la
1033
. Mais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens
de
la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Roug
1034
qui forcent la sympathie. ai. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] René Crevel, La Mort difficile », Bibliothèque uni
1035
t difficile », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1927, p. 690.
1036
Paul Éluard, Capitale
de
la douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme cer
1037
resses coupantes comme certaines herbes. Capitale
de
la douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette vill
1038
rtaines herbes. Capitale de la douleurak, ce sont
de
belles syllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus séd
1039
s noctambules. Rêves éveillés, entre deux gorgées
d’
un élixir dont il voudrait bien nous faire croire que le diable est l’
1040
faire croire que le diable est l’auteur. Beaucoup
d’
oiseaux volètent, se balancent au bord des verres, se posent sur les c
1041
cent au bord des verres, se posent sur les cordes
d’
une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’air, becquèt
1042
l’accord, une patte en l’air, becquètent le cœur
d’
une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèc
1043
mme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont
de
jolies flèches empoisonnées. Quelque chose, tout de même, de laqué, d
1044
lèches empoisonnées. Quelque chose, tout de même,
de
laqué, d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici
1045
oisonnées. Quelque chose, tout de même, de laqué,
d’
élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tac
1046
Quelque chose, tout de même, de laqué, d’élégant,
de
« bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache de coule
1047
çais » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache
de
couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai la beauté facile et c’est
1048
sque pas sa blessure. Mais c’est ici qu’il s’agit
de
ne pas confondre inexplicable avec incompréhensible. aj. Rougemont
1049
ble avec incompréhensible. aj. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Paul Éluard, Capitale de la douleur », Bibliothèqu
1050
Denis de, « [Compte rendu] Paul Éluard, Capitale
de
la douleur », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, m
1051
la douleur », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’édition o
1052
chelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al «
De
quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafistoler ? » Entre ces deux tent
1053
s les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ?
de
détruire ou de rafistoler ? » Entre ces deux tentations, cédant à l’u
1054
i 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou
de
rafistoler ? » Entre ces deux tentations, cédant à l’une autant qu’à
1055
un ? Non, enfin un. Tous les autres y ont apporté
de
secrètes complaisances, ou une arrière-pensée d’apologie, ou même sim
1056
de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée
d’
apologie, ou même simplement un besoin d’être aimés qui faussaient leu
1057
e-pensée d’apologie, ou même simplement un besoin
d’
être aimés qui faussaient leurs voix pour les rendre plus touchantes.
1058
une saine rudesse. « Il s’examine jusqu’au ventre
de
sa mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonn
1059
te » qui révèle encore dans le fond quelque chose
de
solide, d’authentique. J’aime cette violence de redressement où je di
1060
vèle encore dans le fond quelque chose de solide,
d’
authentique. J’aime cette violence de redressement où je distingue bie
1061
e de solide, d’authentique. J’aime cette violence
de
redressement où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’i
1062
où je distingue bien autre chose que les « éclats
de
l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceau
1063
hique. Et puis, tout de même, on est bien heureux
de
rencontrer chez les jeunes écrivains français un homme qui ait à ce p
1064
ains français un homme qui ait à ce point le sens
de
l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Oc
1065
de l’époque, une vision si claire et si tragique
de
la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs d
1066
ision si claire et si tragique de la civilisation
d’
Occident. Les questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par
1067
nce par quelques jeunes gens. Il faut louer Drieu
d’
avoir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la
1068
u surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe
de
la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour
1069
ue le triomphe de la littérature sur la vie, mais
d’
avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu’au boutisine
1070
ion, — et je sais bien que c’est là un des signes
de
sa décadence. Il y a du chirurgien chez ce soldat devenu « scribe » e
1071
utal : mais faisons-lui confiance, voici un homme
d’
aujourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser le bluff. al.
1072
écidé à mépriser le bluff. al. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées
1073
s les idées », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mai 1927, p. 694.
1074
sympathique Paterne. Sous le fallacieux prétexte
d’
une flânerie de saison, vous vous attardez aux terrasses des cafés. Pe
1075
terne. Sous le fallacieux prétexte d’une flânerie
de
saison, vous vous attardez aux terrasses des cafés. Peut-être va-t-el
1076
voici Pierre Girard : lui seul connaît l’adresse
de
Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous venger, vo
1077
aphiques vous fatigue ; que c’est une vraie manie
de
nommer à tout propos d’Annunzio, Pola Negri, Charly Clerc, Mrs. Balfo
1078
que c’est une vraie manie de nommer à tout propos
d’
Annunzio, Pola Negri, Charly Clerc, Mrs. Balfour. Vous parlez de « pro
1079
la Negri, Charly Clerc, Mrs. Balfour. Vous parlez
de
« procédés lassants ». Pierre Girard n’écoute plus : il pense à des V
1080
e globe dans son voyage « est arrivé à un endroit
de
l’éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard e
1081
nnaissez que Pierre Girard est un peu responsable
de
cette douceur de vivre. Déjà vous ne niez plus sa drôlerie, son aisan
1082
re Girard est un peu responsable de cette douceur
de
vivre. Déjà vous ne niez plus sa drôlerie, son aisance. Vous accordez
1083
ance. Vous accordez que s’il force un peu la dose
de
fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherche. Vous
1084
peu la dose de fantaisie, c’est plutôt par excès
de
facilité que par recherche. Vous voilà même tenté de l’en féliciter.
1085
facilité que par recherche. Vous voilà même tenté
de
l’en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une mali
1086
proche M. Piquedon de Buibuis, qui parle toujours
de
Weber… Mais au fait, si vous n’aviez pas lu ce livre ? Ah ! sans hési
1087
vre ? Ah ! sans hésiter, je vous ferais un devoir
de
ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’on n’est pas impunément concito
1088
… Car hélas, l’on n’est pas impunément concitoyen
de
cet oncle Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer le matin,
1089
et oncle Abraham qui interdit à Paterne son neveu
de
fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible
1090
i interdit à Paterne son neveu de fumer le matin,
de
sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer d
1091
ortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible
de
ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela
1092
es désertes glisse un grand souffle oblique plein
de
fraîcheur et de pardon. » am. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
1093
se un grand souffle oblique plein de fraîcheur et
de
pardon. » am. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Girard,
1094
fraîcheur et de pardon. » am. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes
1095
des femmes », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, juillet 1927, p. 114-115.
1096
(août 1927)an Ces trois nouvelles n’ont guère
de
commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, de
1097
uère de commun entre elles que la forme : ce sont
de
lentes réminiscences, des évocations intérieures, — et dans l’abandon
1098
, des évocations intérieures, — et dans l’abandon
de
leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d’une avent
1099
andres, peu à peu, se précisent les circonstances
d’
une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une femme « encore jeun
1100
t demain : Une femme « encore jeune » se souvient
d’
un danseur de ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être… Un homme
1101
e femme « encore jeune » se souvient d’un danseur
de
ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être… Un homme médite à côté
1102
e jeune » se souvient d’un danseur de ses 20 ans,
d’
une aventure qui aurait pu être… Un homme médite à côté du corps de so
1103
i aurait pu être… Un homme médite à côté du corps
de
son ami suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (L’Amie du M
1104
ous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit
d’
un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir viennent
1105
(L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été
de
vacances, quand les premières inquiétudes du désir viennent troubler
1106
premières inquiétudes du désir viennent troubler
de
ravissantes amours d’adolescents. Et c’est Un vieil été. Cette nouvel
1107
du désir viennent troubler de ravissantes amours
d’
adolescents. Et c’est Un vieil été. Cette nouvelle, très supérieure au
1108
eux autres, est une réussite rare par la justesse
de
l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros.
1109
esse de l’observation autant que par la sympathie
de
l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le
1110
i permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi
de
tant d’adresse sous un air de facilité qui serait presque de la nonch
1111
le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant
d’
adresse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance.
1112
esse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air
de
facilité qui serait presque de la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite
1113
dresse sous un air de facilité qui serait presque
de
la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tend
1114
lescences avec une tendre minutie, avec une sorte
d’
amoureuse application du souvenir, d’une séduction certaine. C’est un
1115
ec une sorte d’amoureuse application du souvenir,
d’
une séduction certaine. C’est un art de détails ; mais si délicat et d
1116
souvenir, d’une séduction certaine. C’est un art
de
détails ; mais si délicat et d’une si subtile convenance avec son obj
1117
ine. C’est un art de détails ; mais si délicat et
d’
une si subtile convenance avec son objet qu’il en saisit sans mièvreri
1118
; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie,
de
la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quo
1119
réalité ressuscitée… » Sachons gré à M. Vaudoyer
d’
avoir su donner à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui le «
1120
» reprend quelques droits. an. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours », Bibliothè
1121
ères amours », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, août 1927, p. 244-245.
1122
anique, il faudra opposer l’excellent petit livre
d’
Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers articles et essais, dont cer
1123
ent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil
de
divers articles et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont
1124
rs articles et essais, dont certains — le Message
de
Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait parler mieux q
1125
— le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux,
de
ce Jaloux qui sait parler mieux que personne des poètes scandinaves e
1126
loux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace
de
lui un portrait qu’on dirait, en peinture, très « interprété ». Non p
1127
. Non pas une photographie morale, mais une sorte
de
synthèse de l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être p
1128
e photographie morale, mais une sorte de synthèse
de
l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie qu
1129
morale, mais une sorte de synthèse de l’homme et
de
l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je
1130
enne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît comme une
de
ces âmes mystiques et raffinées telles qu’on en découvre chez certain
1131
e cet univers dont je rêvais n’était pas un objet
de
songe mais d’expérience ». Mais une telle « expérience », je crois, n
1132
dont je rêvais n’était pas un objet de songe mais
d’
expérience ». Mais une telle « expérience », je crois, ne peut être se
1133
religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin
de
preuves. Il reste qu’un livre comme celui-ci tend un merveilleux pièg
1134
in que la sempiternelle « stratégie littéraire »,
de
gazetiers ; au cœur de ces sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actual
1135
« stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur
de
ces sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la m
1136
au cœur de ces sujets qui paraît-il, ne sont pas
d’
actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis d
1137
tude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke », Bibliothèque
1138
Maria Rilke », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1927, p. 787-788.
1139
tion littéraire. Bien sûr, c’est cela, le malaise
d’
écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pas embarrass
1140
ise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein
de
verve, et pas embarrassé du tout pour vous lâcher un beau pavé mathém
1141
ue au milieu d’une effusion « lyrique », histoire
de
n’avoir pas l’air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligean
1142
Mais il a des façons parfois bien désobligeantes
de
voir juste. Et quand son bonhomme se plaint de ce que son œuvre lui a
1143
es de voir juste. Et quand son bonhomme se plaint
de
ce que son œuvre lui apparaît en même temps que « fatale », « si arbi
1144
u phénomène littéraire. La « Promenade » du héros
de
Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peut-être moins convaincantes
1145
. La « Promenade » du héros de Bopp est une sorte
de
pensum. Cela rend peut-être moins convaincantes certaines de ses rema
1146
Cela rend peut-être moins convaincantes certaines
de
ses remarques sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’obje
1147
ues sur l’inspiration. D’autre part la simplicité
de
l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — en
1148
plicité de l’objet était nécessaire à la sécurité
de
cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu
1149
jet était nécessaire à la sécurité de cette sorte
d’
analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’il était de ta
1150
re que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’il était
de
taille à affronter d’autres dédales ! Mais il a su mettre plus de cho
1151
onter d’autres dédales ! Mais il a su mettre plus
de
choses qu’il n’y paraît d’abord dans ces 50 pages. Beaucoup sont exce
1152
même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat
d’
un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme assez insolen
1153
p, c’est le combat d’un tempérament avec l’esprit
de
géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révoltes de s
1154
cientisme assez insolent et les joyeuses révoltes
de
sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presque imperceptible, mai
1155
ète complaisance à se regarder vivre qui est bien
d’
aujourd’hui — entre autres. ap. Rougemont Denis de, « [Compte rendu
1156
ujourd’hui — entre autres. ap. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Léon Bopp, Interférences », Bibliothèque universel
1157
terférences », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1927, p. 791.
1158
C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine
de
le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuel
1159
tion actuelle. On retrouve aux premiers chapitres
de
Catherine-Paris cette magie des sensations et des rêves de l’enfance
1160
ine-Paris cette magie des sensations et des rêves
de
l’enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui
1161
l’enfance et cette féminité du sentiment, du tour
de
pensée même, qui faisaient déjà du Perroquet Vert un petit chef-d’œuv
1162
ient déjà du Perroquet Vert un petit chef-d’œuvre
de
poésie proprement romanesque, naissant des situations mêmes et non de
1163
romanesque, naissant des situations mêmes et non
de
dissertations lyriques à leur propos. Mais dans ce roman, il n’y a pl
1164
lus seulement la femme, avec le miracle perpétuel
de
sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et
1165
e témoin intelligent et un peu ironique des cours
d’
Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résu
1166
et un peu ironique des cours d’Europe à la veille
de
la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le dé
1167
ique des cours d’Europe à la veille de la guerre.
De
cette espèce de collaboration résultent à la fois le défaut de compos
1168
’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce
de
collaboration résultent à la fois le défaut de composition du livre e
1169
ce de collaboration résultent à la fois le défaut
de
composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine à Paris e
1170
de composition du livre et sa richesse. L’enfance
de
Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’Europe
1171
e à Paris est du roman pur ; la tournée des cours
de
l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polona
1172
Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse
d’
un comte polonais, grand seigneur médiatisé, vaguement prétendant au t
1173
seigneur médiatisé, vaguement prétendant au trône
de
Pologne, est plutôt d’un mémorialiste. Madame Bibesco y montre beauco
1174
uement prétendant au trône de Pologne, est plutôt
d’
un mémorialiste. Madame Bibesco y montre beaucoup de liberté d’esprit,
1175
iste. Madame Bibesco y montre beaucoup de liberté
d’
esprit, une pénétration de jugement et une ironie assez amère qui éton
1176
tre beaucoup de liberté d’esprit, une pénétration
de
jugement et une ironie assez amère qui étonnent de la part d’une femm
1177
e roman repart dans une troisième action (l’amour
de
Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à vrai di
1178
à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à l’échelle
de
ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sau
1179
l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances
de
la technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de tr
1180
u roman sont sauvées par un style brillant, plein
de
trouvailles spirituelles, malicieuses ou poétiques ; et ce n’est pas
1181
« pointes » faciles mais cela même ne manque pas
de
naturel… On peut regretter que ce livre ne réalise pas une synthèse p
1182
u roman et des mémoires. Mais si son début permet
de
croire que le Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans
1183
réussite isolée dans l’œuvre purement romanesque
de
la princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémoria
1184
eurs un mémorialiste captivant, dans la tradition
d’
un Ligne par exemple. aq. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Prin
1185
on d’un Ligne par exemple. aq. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Princesse Bibesco, Catherine-Paris », Bibliothèque
1186
erine-Paris », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, janvier 1928, p. 121-122.
1187
é la science parce qu’elle ouvre des perspectives
d’
évasion — où seuls les poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus
1188
se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que
d’
avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lec
1189
le véhicule à la mode pour conduire des millions
de
lecteurs dans un monde purement fantaisiste où les équations tyranniq
1190
ntaisiste où les équations tyranniques deviennent
de
merveilleux calembours, où les savants sont réellement dans la lune,
1191
ndent au fond des mers adorer la Liberté et jouer
de
l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement
1192
la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres
d’
étrennes dans les œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du
1193
d’étrennes dans les œuvres du plus grand créateur
de
mythes modernes, du seul écrivain dont l’influence soit comparable à
1194
ma ! Claretie raconte que les détenus des maisons
de
correction se jetaient sur ces volumes « au travers desquels ils resp
1195
mes dans une civilisation qui, selon l’expression
de
Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans l
1196
ssion de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect
d’
une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela constituait
1197
nte l’aspect d’une nécessité » (et dans la bouche
de
ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous longtemps
1198
n jugement !) Serons-nous longtemps encore dupes
d’
une conception de la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos p
1199
rons-nous longtemps encore dupes d’une conception
de
la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteu
1200
on de la littérature si pédante qu’elle exclut un
de
nos plus grands conteurs sous prétexte qu’il n’est styliste ni psycho
1201
ateau. Pour ce coup, voilà qui ne m’empêchera pas
d’
y monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo soit à bord, je so
1202
’est autre que La Liberté. ar. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Marguerite Allotte de La Fuÿe, Jules Verne, sa vie,
1203
, son œuvre », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, juin 1928, p. 768-769.
1204
tyle (août 1928)as Ce n’est pas le seul talent
de
M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admir
1205
nt de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux,
de
considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 60 parties
1206
yeux, de considération. J’admire autant le talent
de
celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est naturel :
1207
ire autant le talent de celui qui mène 60 parties
d’
échecs simultanément, et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et
1208
avorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens
de
l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il e
1209
cent célébrités locales. (Quant à Goethe, traité
de
clown, cela ne va pas loin.) C’est une belle rage (ô combien partagée
1210
e ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups
d’
exemples qui méritent de l’être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépas
1211
traite du style, à coups d’exemples qui méritent
de
l’être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces
1212
u’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes
de
l’absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou
1213
surde confondu avec le poétique, ou ces disciples
de
Rimbaud, ou enfin ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs l
1214
urne sans cesse pour crier : Lâches, vous refusez
d’
avancer ! Mais il reste à portée de voix du troupeau. C’est sans doute
1215
, vous refusez d’avancer ! Mais il reste à portée
de
voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le tient magnifiqueme
1216
i enfin valent le respect. as. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Aragon, Traité du style », Bibliothèque universell
1217
té du style », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, août 1928, p. 1034.
1218
ers écrits des surréalistes débattent la question
de
savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne doit pas entr
1219
ne doit pas entraîner, à leur point de vue, celui
d’
autrui sur eux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers l’action
1220
mes en France — vers la politique. Or ces ennemis
de
toute littérature voient leurs avances dédaignées par les communistes
1221
eurs avances dédaignées par les communistes, gens
d’
action à jugements simples, qui les trouvent trop littérateurs. Rien d
1222
simples, qui les trouvent trop littérateurs. Rien
d’
étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’esprit sont en pra
1223
d’étonnant à cela dans une époque où les valeurs
de
l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréal
1224
plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent
de
faire la critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche
1225
ient. Certes il était urgent de faire la critique
de
« cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouger », comme d
1226
it urgent de faire la critique de « cette réalité
de
premier plan qui nous empêche de bouger », comme dit fort bien M. Bre
1227
« cette réalité de premier plan qui nous empêche
de
bouger », comme dit fort bien M. Breton. Mais à condition d’aller plu
1228
, comme dit fort bien M. Breton. Mais à condition
d’
aller plus loin et de prendre une connaissance positive de ce qu’il y
1229
M. Breton. Mais à condition d’aller plus loin et
de
prendre une connaissance positive de ce qu’il y a sous cette réalité.
1230
plus loin et de prendre une connaissance positive
de
ce qu’il y a sous cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le
1231
lité. Il est certain que s’ils avaient le courage
de
se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient que le « serv
1232
ils avaient le courage de se soumettre au concret
de
l’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’acco
1233
que le « service dans le temple » s’accommode mal
de
tant de gesticulations, de gros mots et de discours en très beau styl
1234
mple » s’accommode mal de tant de gesticulations,
de
gros mots et de discours en très beau style contre un monde très laid
1235
de mal de tant de gesticulations, de gros mots et
de
discours en très beau style contre un monde très laid dont ils n’ont
1236
à chatouiller le snobisme. at. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels
1237
tellectuels », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, novembre 1928, p. 1410.
1238
ux, Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit
de
la révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne
1239
oderne : on y voit s’affronter en quelques hommes
d’
action les forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses r
1240
ts qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre
de
ces attitudes. (Elles ne sont pas essentiellement contradictoires : e
1241
ontradictoires : elles représentent deux manières
de
sentir l’unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individu
1242
lles représentent deux manières de sentir l’unité
d’
une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinois nation
1243
x manières de sentir l’unité d’une époque obsédée
d’
action.) Autour de ces individus — Chinois nationalistes ou terroriste
1244
Juifs russes méthodiques — s’émeuvent les masses
de
coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille au sein mê
1245
s méthodiques — s’émeuvent les masses de coolies,
d’
ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille au sein même de la lut
1246
més, toute cette Chine qui s’éveille au sein même
de
la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On ret
1247
etrouvera ici beaucoup des idées que la Tentation
de
l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette
1248
cteurs du drame, l’aspect quotidien et mystérieux
d’
une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante des villes chino
1249
l’aspect quotidien et mystérieux d’une révolution
de
rues, ou la palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fai
1250
iétante des villes chinoises, Malraux fait preuve
d’
un art du détail où se révèle le vrai romancier. On serait parfois ten
1251
révèle le vrai romancier. On serait parfois tenté
de
le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi p
1252
mancier. On serait parfois tenté de le rapprocher
de
Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus sensible. Et
1253
, admirablement objectif, est aussi, mais à coups
de
faits, une discussion d’idées. Il est surtout la description d’une an
1254
est aussi, mais à coups de faits, une discussion
d’
idées. Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme d
1255
discussion d’idées. Il est surtout la description
d’
une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoi
1256
ut la description d’une angoisse que le nihilisme
de
M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître au cœur du m
1257
naître au cœur du monde contemporain l’absurdité
de
ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est lui qui parl
1258
absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un
de
ces chefs (c’est lui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : « Il m
1259
nnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes
de
l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu
1260
raux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu
de
Garine est décisif : « La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est
1261
ainsi que, masqué par l’enchaînement passionnant
de
l’action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Ce
1262
nchaînement passionnant de l’action, il se dégage
de
ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette intelligence et cette
1263
telligence et cette sensibilité ont quelque chose
de
trop aigu, de dangereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer les
1264
cette sensibilité ont quelque chose de trop aigu,
de
dangereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer les forces détermi
1265
’appliquent à distinguer les forces déterminantes
de
l’heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au pr
1266
romanciers contemporains. au. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] André Malraux, Les Conquérants », Bibliothèque uni
1267
Conquérants », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1928, p. 1547-1548.
1268
ère ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av L’histoire
de
Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que ce doux-amer
1269
is ne l’ait point trompé : « Avec son beau regard
de
rêve, — lit-on dans l’Ennemi des Lois — son expression amoureuse du s
1270
ession amoureuse du silence et cet ensemble idéal
d’
étudiant assidu aux sociétés de musique… » Barrès cherchait dans ses c
1271
cet ensemble idéal d’étudiant assidu aux sociétés
de
musique… » Barrès cherchait dans ses châteaux en Espagne lamentableme
1272
n Espagne lamentablement réalisés les témoignages
de
l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demand
1273
entablement réalisés les témoignages de l’éthique
de
cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander à une exis
1274
échec même ne relève pas, et qui tire sa grandeur
de
celle du décor ? Guy de Pourtalès n’hésite pas à baptiser son héros «
1275
rtalès n’hésite pas à baptiser son héros « prince
de
l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcé
1276
as à baptiser son héros « prince de l’illusion et
de
la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rê
1277
rs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité
de
l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare
1278
t qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image
d’
un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pourtalès a
1279
Pourtalès a su rehausser le tableau avec beaucoup
d’
adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons f
1280
u rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse et
de
charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le
1281
de. Louis II, ce chimérique, disposait par hasard
de
moyens d’action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur,
1282
II, ce chimérique, disposait par hasard de moyens
d’
action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a
1283
a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet
de
Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’a
1284
’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et
de
Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amo
1285
t l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence
d’
amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étr
1286
douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus
de
souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’
1287
s de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur
d’
étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à
1288
re raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’amour
de
soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il pr
1289
ans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès
de
ce qu’il préfère parler d’illusion là où nos psychiatres proposeraien
1290
gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler
d’
illusion là où nos psychiatres proposeraient de moins jolis mots ; mai
1291
er d’illusion là où nos psychiatres proposeraient
de
moins jolis mots ; mais ce n’est pas la moindre habileté du biographe
1292
as un problème aisé : Guy de Pourtalès l’a résolu
d’
une façon fort adroite mais non moins franche. av. Rougemont Denis
1293
te mais non moins franche. av. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi
1294
Hamlet-Roi », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1928, p. 1549.
1295
Le Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard
d’
une rencontre, l’auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit
1296
re 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’auteur
de
ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et entretient
1297
il aime à raconter certaines scènes terrifiantes
de
la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traqu
1298
le jeune Français par ces évocations et l’espèce
de
fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent les soupço
1299
e Français reçoit une lettre trouvée sur le corps
de
son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa mort et
1300
inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu
de
semblables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je regrette seu
1301
t connu de semblables mythomanes. Le cas méritait
d’
être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se soit borné à une
1302
le, d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est
d’
être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser
1303
e caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète
de
mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépasse celle d
1304
e celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte
de
la mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde u
1305
ythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux
d’
avant-garde une confusion assez tragique, parce qu’elle constitue une
1306
itue une tentation pour tous les poètes. Le désir
de
« plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie
1307
plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence
d’
une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préférer un mensong
1308
un mensonge qui n’est, hélas, qu’une déformation
de
cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste d
1309
ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire
de
la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien faus
1310
rien fausser, transcender… aw. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Daniel-Rops, Le Prince menteur », Bibliothèque uni
1311
nce menteur », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, décembre 1928, p. 1553.
1312
légèrement absurde en face d’un récit comme celui
d’
Anderson : voici un homme qui raconte sa vie avec une émouvante simpli
1313
te simplicité et il faudrait avoir la grossièreté
de
lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien composé. J’avoue pre
1314
il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre
d’
un air connaisseur que c’est bien composé. J’avoue prendre cette autob
1315
onné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie
d’
un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître s
1316
sage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un homme
de
lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître sous cet asp
1317
ces deux premiers tomes, où il décrit des scènes
de
son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est éto
1318
tomes, où il décrit des scènes de son enfance et
de
sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant d’apparente
1319
on enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art
d’
Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance à une
1320
esse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant
d’
apparente simplicité. Le récit s’avance à une allure libre et tranquil
1321
-saxonne et peu à peu entraîne tout un branle-bas
d’
évocations hautes en couleur, de rêves, de visages, tandis que ç[à] et
1322
out un branle-bas d’évocations hautes en couleur,
de
rêves, de visages, tandis que ç[à] et là s’ouvrent des perspectives s
1323
nle-bas d’évocations hautes en couleur, de rêves,
de
visages, tandis que ç[à] et là s’ouvrent des perspectives saisissante
1324
e des nécessités modernes, dégradantes. Cet amour
de
l’invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — m
1325
nvention romanesque considérée comme une revanche
de
la poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui
1326
mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait
de
lui sans doute le plus méridional des conteurs américains. Avec cela,
1327
onteurs américains. Avec cela, un réalisme, plein
de
verdeur et souvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient le cou
1328
ec cela, un réalisme, plein de verdeur et souvent
d’
amertume. Mais là où d’autres placeraient le couplet humanitariste, lu
1329
autre souvenir. Qui parmi nous sait encore parler
de
sa mère avec cette virile et religieuse tendresse ? C’est un Chinois,
1330
cain qui viennent nous rapprendre que les sources
de
la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait
1331
ces de la poésie sont dans notre maison. Voici un
de
ces passages où il sait être, avec sa verve doucement comique, si émo
1332
cette époque je croyais fortement en l’existence
d’
une espèce de secrète et à peu près universelle conspiration pour insi
1333
je croyais fortement en l’existence d’une espèce
de
secrète et à peu près universelle conspiration pour insister sur la l
1334
pour insister sur la laideur. “C’est une frasque
de
gosses à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”,
1335
e que si je m’approchais tout à coup par-derrière
d’
un homme ou d’une femme quelconque, et disais “houu !” il ou elle se s
1336
approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou
d’
une femme quelconque, et disais “houu !” il ou elle se secouerait enfi
1337
nous en irions bras dessus, bras dessous en riant
de
nous-mêmes et de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais n
1338
as dessus, bras dessous en riant de nous-mêmes et
de
tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le seco
1339
era pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde
de
fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où l’on ne sait plus cr
1340
lles, ce monde qui devient impuissant. Impossible
d’
évoquer un personnage précis pour lui faire endosser le blâme, mais co
1341
endosser le blâme, mais comme l’homme nommé Ford,
de
Détroit, a contribué davantage que n’importe quel autre de mon temps
1342
t, a contribué davantage que n’importe quel autre
de
mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pou
1343
l pas être considéré un jour comme le grand tueur
de
son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de
1344
dre impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle
de
l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéq
1345
sûr tuer. Or on parle de l’élever à la présidence
de
la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spéc
1346
sous lui conservassent la virilité et le respect
de
soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les ancie
1347
servassent la virilité et le respect de soi était
de
son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour
1348
ernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un ho
1349
is un homme », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, janvier 1929, p. 123-124.
1350
pervielle, Saisir (juin 1929)ay Ce petit livre
de
poèmes est comme une initiation au silence. Il faut s’en approcher av
1351
isser créer en nous son silence particulier avant
d’
entendre les signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux s
1352
ropose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu
d’
images (à peine quelques « motifs », objets usuels et usés, sur la nua
1353
tifs », objets usuels et usés, sur la nuance mate
d’
un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de l’
1354
nois). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions
de
l’âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache att
1355
décrit, ce sont des perceptions de l’âme plus que
de
l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur
1356
mmobile et sache attendre que ton cœur se détache
de
toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’âme quitte, redevient
1357
minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés
de
rêverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et l’âme peut enfin «
1358
une autre lumière : « Tout semblait vivre au fond
d’
un insistant regard. » Le poète des Gravitations est ici descendu plus
1359
itre ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel
de
la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisis
1360
e » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’approche
d’
un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le vain débat d
1361
pressenti, qui s’impose, qui apaise le vain débat
de
notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et cela fait un v
1362
ait un vacarme terrible. » ay. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Jules Supervielle, Saisir », Bibliothèque universe
1363
lle, Saisir », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, juin 1929, p. 762-763.
1364
éger, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge
de
la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses
1365
res avec lesquels il n’hésite pas à faire un bout
de
chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien
1366
te pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur
d’
oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui
1367
fait les mêmes, des bonheurs qui signifient plus
de
désespoir qu’ils ne s’en doutent… C’est un dévergondage sentimental,
1368
doutent… C’est un dévergondage sentimental, plein
de
malices et d’envies de pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois da
1369
un dévergondage sentimental, plein de malices et
d’
envies de pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les maisons
1370
gondage sentimental, plein de malices et d’envies
de
pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les maisons des gran
1371
ais bien vite un intermède bouffon, impossible et
d’
une désopilante poésie nous replonge dans une atmosphère autre, où les
1372
es personnages ont cet air un peu ivre et capable
de
n’importe quoi, cet air dangereux et tendre que prennent les hommes e
1373
ages du livre, un peu amers… On voudrait un livre
de
Cassou qui ne serait fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci d
1374
oudrait un livre de Cassou qui ne serait fait que
de
ces intermèdes ; pur de tout souci de vraisemblance extérieure ; qui
1375
ou qui ne serait fait que de ces intermèdes ; pur
de
tout souci de vraisemblance extérieure ; qui ne serait qu’invention,
1376
it fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci
de
vraisemblance extérieure ; qui ne serait qu’invention, qui inventerai
1377
nvention, qui inventerait sa vérité. Ce serait un
de
ces miracles de liberté dont nous avons besoin pour croire que le mon
1378
venterait sa vérité. Ce serait un de ces miracles
de
liberté dont nous avons besoin pour croire que le monde actuel n’est
1379
as un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre
de
Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces petites
1380
re, beaucoup de ces petites merveilles qui valent
de
gros romans « bien faits ». Car il y a toujours assez de vérité dans
1381
romans « bien faits ». Car il y a toujours assez
de
vérité dans une histoire où il y a de la poésie. az. Rougemont Den
1382
jours assez de vérité dans une histoire où il y a
de
la poésie. az. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, L
1383
re où il y a de la poésie. az. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Jean Cassou, La Clef des songes », Bibliothèque un
1384
des songes », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, août 1929, p. 248-249.
1385
eignaient les upanishads et la tentative poétique
de
Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’
1386
ue de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus
d’
un demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie le jour. Cela pou
1387
étation voie le jour. Cela pourrait donner lieu à
de
mélancoliques réflexions sur le génie « poétique » français… Mais non
1388
français… Mais non, nous préférons voir ici l’un
de
ces signes qui de toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans la
1389
signes qui de toutes parts annoncent une rentrée
de
l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que
1390
pirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur
de
cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il es
1391
èse que défend l’auteur de cet essai — la voyance
de
Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réf
1392
ur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une
de
ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps
1393
Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon
de
proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite hont
1394
vidences qu’il est bon de proposer à la réflexion
de
notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui sont encore ca
1395
pour faite honte à ceux qui sont encore capables
d’
une telle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être le plus mo
1396
ceux qui sont encore capables d’une telle honte,
de
leur indifférence à l’endroit de l’être le plus monstrueusement pur q
1397
eusement pur qui se soit révélé par le truchement
de
la poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa pr
1398
é par cet enthousiasme sacré que requiert l’œuvre
de
Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une question
1399
ssi centrale — qui est, si l’on veut, la question
d’
Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’inte
1400
on d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité
de
sectaire contre l’interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rim
1401
baud ? Si Claudel s’est montré partial en faisant
de
Rimbaud, « mystique à l’état sauvage », un catholique qui s’ignore, i
1402
olique qui s’ignore, il n’est pas plus admissible
d’
inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la
1403
il n’est pas plus admissible d’inférer du mépris
de
Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangéli
1404
évélation évangélique. Je ne vois là que l’indice
d’
une confusion bien française, hélas. ba. Rougemont Denis de, « [Com
1405
ion bien française, hélas. ba. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant », B
1406
d le voyant », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conser
1407
Julien Benda, La Fin
de
l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre
1408
ternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure
de
venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées o
1409
les avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs
de
cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse
1410
les lecteurs de cette revue connaissent la thèse
de
la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que
1411
e de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin
de
l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de
1412
t que reprendre la défense contre ses adversaires
de
tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort dés
1413
bords. Je voudrais souligner seulement la beauté
de
l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes
1414
gner seulement la beauté de l’effort désintéressé
de
Julien Benda, et l’obligation où nous sommes tous désormais de répond
1415
da, et l’obligation où nous sommes tous désormais
de
répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure. Je suis loin de partag
1416
emeure. Je suis loin de partager toutes les idées
de
M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me sens bie
1417
son tour quand il tire argument contre une thèse
de
M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans l’ordre moral ». Et quand c
1418
nd il tire argument contre une thèse de M. Marcel
de
ce qu’elle « mène loin… dans l’ordre moral ». Et quand cela serait !
1419
t, de plus impertinents que moi ne manqueront pas
de
faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans l
1420
ne manqueront pas de faire observer que la « fin
de
l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exa
1421
re observer que la « fin de l’éternel », la chute
de
l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que l
1422
a un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue
de
la raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de
1423
nante tout comme si elle n’était pas le contraire
de
la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classe
1424
mme si elle n’était pas le contraire de la Raison
de
Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer choses et i
1425
t-à-dire fausses mais claires, qui lui permettent
de
triompher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de la difficulté e
1426
qui lui permettent de triompher syllogistiquement
de
l’adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que
1427
riompher syllogistiquement de l’adversaire, sinon
de
la difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adres
1428
e. Mais pour gênante que soit souvent son adresse
de
logicien, elle ne doit pas nous masquer l’audace tranquille et admira
1429
pas nous masquer l’audace tranquille et admirable
de
son point de vue radicalement antimoderne, parce que désintéressé. C’
1430
re, c’est l’impossible. Mais justement, la gloire
de
M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui deman
1431
sible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera
d’
avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible.
1432
e croirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme
de
la pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de dro
1433
emporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes
de
droite et de gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui
1434
butte aux sarcasmes des extrémistes de droite et
de
gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent
1435
et de gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms
de
clowns qui me viennent l’esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et D
1436
ons sont exactement celles qu’il fallait attendre
de
ces auteurs. Ce qu’on ne viendra pas disputer à M. Benda, c’est son d
1437
ndra pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour
de
la vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un mon
1438
. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’article
de
M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1
1439
de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse
de
M. Benda (janvier 1928). bc. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] J
1440
de M. Benda (janvier 1928). bc. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de l’Éternel », Bibliothèque
1441
t Denis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin
de
l’Éternel », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, no
1442
e l’Éternel », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, novembre 1929, p. 638-639.
1443
ent riantes, au premier coup d’œil, assez dénuées
de
ces effets faciles qu’on aime à ménager dans un jardin à la française
1444
teur qui n’imite personne court bientôt le risque
de
s’imiter soi-même : il semble au contraire qu’Henry Michaux, en se ca
1445
hement dans ses propriétés, y découvre sans cesse
de
nouvelles sources. Il défriche et il fabrique, soit qu’il se décrive
1446
il fabrique, soit qu’il se décrive comme un lieu
de
miracles le plus souvent malencontreux, ou qu’il invente des animaux
1447
aux dont la complexité ne le cède en rien à celle
de
l’introspection la plus poussée. Il invente aussi des mots et en fait
1448
lus poussée. Il invente aussi des mots et en fait
de
courts poèmes d’une divertissante et parfois émouvante bizarrerie (Mo
1449
nvente aussi des mots et en fait de courts poèmes
d’
une divertissante et parfois émouvante bizarrerie (Mort d’un Page). Ce
1450
vertissante et parfois émouvante bizarrerie (Mort
d’
un Page). Cependant je préfère ses proses : il y a ici plus qu’une man
1451
t neuve, dans laquelle l’âme, agissant à la façon
d’
une force physique, déforme et recrée le réel à son gré. Seule compte
1452
ntérieure, mais elle apparaît toujours sous forme
d’
objets. Ce comique triste, ces imaginations délirantes mais parfaiteme
1453
délirantes mais parfaitement concrètes, ces tours
de
phrases d’une familiarité bourrue mais raffinée, cette ivresse verbal
1454
mais parfaitement concrètes, ces tours de phrases
d’
une familiarité bourrue mais raffinée, cette ivresse verbale jugulée p
1455
rivia de Logan Pearsall Smith — je n’avais pas lu
de
livre où s’exprimât avec une pareille sécurité dans l’insolite, ce qu
1456
ue » et de plus quotidien. bd. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Henri Michaux, Mes propriétés », Bibliothèque univ
1457
propriétés », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mars 1930, p. 384.
1458
accueillir du premier regard, dans un matin plein
de
mouettes — « Un beau bruit d’ailes me fait un ciel » — la vaporeuse b
1459
dans un matin plein de mouettes — « Un beau bruit
d’
ailes me fait un ciel » — la vaporeuse beauté du lac de Neuchâtel. Mll
1460
es me fait un ciel » — la vaporeuse beauté du lac
de
Neuchâtel. Mlle Kikou Yamata a su le voir aussi « gris et ardent sous
1461
mps liquide et glacé, balançant parmi les roseaux
d’
une baie ses poules d’eaux noires. Il y fallait cette féminité ingénue
1462
balançant parmi les roseaux d’une baie ses poules
d’
eaux noires. Il y fallait cette féminité ingénue et précieuse, toujour
1463
cieuse, toujours prête à épouser tout le sensible
d’
un paysage pour peu qu’elle y découvre une secrète parenté de l’âme. K
1464
e pour peu qu’elle y découvre une secrète parenté
de
l’âme. Kikou Yamata peint la Suisse avec un pinceau « fait du poil de
1465
ta peint la Suisse avec un pinceau « fait du poil
de
novembre des chamois ». On s’émerveille de le voir, dans sa main rapi
1466
u poil de novembre des chamois ». On s’émerveille
de
le voir, dans sa main rapide et minutieuse, décrire la vallée du jeun
1467
se, décrire la vallée du jeune Rhin ou les pentes
de
Chésières en les parant d’une grâce malicieuse et sensuelle dont nos
1468
une Rhin ou les pentes de Chésières en les parant
d’
une grâce malicieuse et sensuelle dont nos yeux helvètes les croyaient
1469
s… Cette charmante « japanisation » est rehaussée
d’
une douzaine de lithographies de Meili. Ce peintre se montre plus occi
1470
nte « japanisation » est rehaussée d’une douzaine
de
lithographies de Meili. Ce peintre se montre plus occidental dans les
1471
n » est rehaussée d’une douzaine de lithographies
de
Meili. Ce peintre se montre plus occidental dans les beaux volumes pl
1472
tre plus occidental dans les beaux volumes pleins
de
ces paysages, que dans ses dessins, dont Kikou Yamata a dit ailleurs
1473
curieusement nipponne. Quelle admirable maîtrise
de
sa technique ! Et qui eût pensé qu’avec un jeu de noirs et de gris l’
1474
de sa technique ! Et qui eût pensé qu’avec un jeu
de
noirs et de gris l’on pût recréer toute la ferveur d’un coucher de so
1475
que ! Et qui eût pensé qu’avec un jeu de noirs et
de
gris l’on pût recréer toute la ferveur d’un coucher de soleil. Des fo
1476
oirs et de gris l’on pût recréer toute la ferveur
d’
un coucher de soleil. Des formes purifiées, un relief net, une heureus
1477
is l’on pût recréer toute la ferveur d’un coucher
de
soleil. Des formes purifiées, un relief net, une heureuse alliance de
1478
s purifiées, un relief net, une heureuse alliance
de
charme et de rigueur, de moelleux et de précision… À la dernière page
1479
un relief net, une heureuse alliance de charme et
de
rigueur, de moelleux et de précision… À la dernière page, l’artiste f
1480
t, une heureuse alliance de charme et de rigueur,
de
moelleux et de précision… À la dernière page, l’artiste fait une bell
1481
alliance de charme et de rigueur, de moelleux et
de
précision… À la dernière page, l’artiste fait une belle grimace : le
1482
lecteur ne l’imitera pas. be. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Kikou Yamata, Saisons suisses », Bibliothèque univ
1483
ons suisses », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, mars 1930, p. 385.
1484
ullien du Breuil, Kate (avril 1930)bf Ce récit
d’
une élégante minceur décrit la passion d’une jeune fille de la grande
1485
Ce récit d’une élégante minceur décrit la passion
d’
une jeune fille de la grande bourgeoisie pour une gamine qui lui sert
1486
gante minceur décrit la passion d’une jeune fille
de
la grande bourgeoisie pour une gamine qui lui sert de modèle dans son
1487
a grande bourgeoisie pour une gamine qui lui sert
de
modèle dans son atelier. Autour de cet incident, assez émouvant, on e
1488
amertume vague. Ceux qui ont lu la Mort difficile
de
René Crevel ne s’étonneront ni du sujet ni de la manière de M. Jullie
1489
ile de René Crevel ne s’étonneront ni du sujet ni
de
la manière de M. Jullien du Breuil. L’intérêt de ce genre de livres —
1490
evel ne s’étonneront ni du sujet ni de la manière
de
M. Jullien du Breuil. L’intérêt de ce genre de livres — ils se multip
1491
de la manière de M. Jullien du Breuil. L’intérêt
de
ce genre de livres — ils se multiplient — vient, à mon sens, de quelq
1492
re de M. Jullien du Breuil. L’intérêt de ce genre
de
livres — ils se multiplient — vient, à mon sens, de quelque chose qu’
1493
livres — ils se multiplient — vient, à mon sens,
de
quelque chose qu’ils expriment sans doute inconsciemment et qui n’est
1494
iment sans doute inconsciemment et qui n’est rien
de
moins qu’une conception nouvelle de l’amour-passion : il apparaît ici
1495
ui n’est rien de moins qu’une conception nouvelle
de
l’amour-passion : il apparaît ici sous la forme d’une obsession physi
1496
e l’amour-passion : il apparaît ici sous la forme
d’
une obsession physique, parée d’une sorte de poésie fatale, où se mêle
1497
ici sous la forme d’une obsession physique, parée
d’
une sorte de poésie fatale, où se mêle, selon l’auteur un peu ou pas m
1498
forme d’une obsession physique, parée d’une sorte
de
poésie fatale, où se mêle, selon l’auteur un peu ou pas mal de littér
1499
ale, où se mêle, selon l’auteur un peu ou pas mal
de
littérature. Et c’est à un tel amour qu’on va demander sa revanche co
1500
inerie morale du milieu… Étrange misère que celle
d’
une génération qui, après tant de sarcasmes contre l’enfer bourgeois,
1501
de sarcasmes contre l’enfer bourgeois, n’a trouvé
d’
autre salut que l’abandon à quelques obsessions sexuelles. Qui viendra
1502
obsessions sexuelles. Qui viendra rendre le sens
de
l’amour idéal — celui qui transfigure ? Le roman de M. Jullien de Bre
1503
l’amour idéal — celui qui transfigure ? Le roman
de
M. Jullien de Breuil effleure un autre problème de non moindre valeur
1504
e M. Jullien de Breuil effleure un autre problème
de
non moindre valeur tragique : le conflit de la jeunesse d’après-guerr
1505
blème de non moindre valeur tragique : le conflit
de
la jeunesse d’après-guerre et des parents. Encore un sujet qui attend
1506
indre valeur tragique : le conflit de la jeunesse
d’
après-guerre et des parents. Encore un sujet qui attend son maître.
1507
jet qui attend son maître. bf. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] André Jullien du Breuil, Kate », Bibliothèque univ
1508
reuil, Kate », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, avril 1930, p. 520.
1509
ieu (septembre 1930)bg On ne sait presque rien
de
Lautréamont, sinon qu’il s’appelait Isidore Ducasse et qu’il composa
1510
année un vaste poème en prose intitulé Les Chants
de
Maldoror. De 1870 jusqu’à la guerre son influence fut « quasi nulle »
1511
e poème en prose intitulé Les Chants de Maldoror.
De
1870 jusqu’à la guerre son influence fut « quasi nulle », et peut-êtr
1512
uteur-tabou du surréalisme. M. Pierre-Quint vient
d’
écrire sur ce poète, qu’on a traité de fou et d’ange, un essai remarqu
1513
Quint vient d’écrire sur ce poète, qu’on a traité
de
fou et d’ange, un essai remarquable de netteté et souvent, d’indépend
1514
t d’écrire sur ce poète, qu’on a traité de fou et
d’
ange, un essai remarquable de netteté et souvent, d’indépendance. Il d
1515
n a traité de fou et d’ange, un essai remarquable
de
netteté et souvent, d’indépendance. Il dégage le sujet de l’épopée qu
1516
ange, un essai remarquable de netteté et souvent,
d’
indépendance. Il dégage le sujet de l’épopée qu’est Maldoror — la révo
1517
té et souvent, d’indépendance. Il dégage le sujet
de
l’épopée qu’est Maldoror — la révolte de l’homme contre son Créateur
1518
le sujet de l’épopée qu’est Maldoror — la révolte
de
l’homme contre son Créateur — et il analyse les principaux thèmes de
1519
on Créateur — et il analyse les principaux thèmes
de
l’œuvre avec une intelligence que l’on rencontre bien rarement dans l
1520
consacrés jusqu’ici à Ducasse. Ce « précurseur »
d’
une certaine littérature moderne n’a fait, en somme, que reprendre, qu
1521
beaucoup plus « horrible » que celui des rêveries
de
certaines pubertés ; quant à l’amour, Maldoror ne paraît pas de taill
1522
ubertés ; quant à l’amour, Maldoror ne paraît pas
de
taille à le concevoir au-delà de sa tendresse pour les adolescents. C
1523
or ne paraît pas de taille à le concevoir au-delà
de
sa tendresse pour les adolescents. Ce qui le caractérise le plus fort
1524
», forcenée, jusqu’au rire dément, — ses injures
de
Caliban littérateur. Dans un chapitre excellent et peut-être plus aud
1525
fois de plus, l’intelligence apporte la solution
d’
une hypocrisie que la révolte rend moins sympathique, certes, mais plu
1526
é son sujet. Mais pourquoi se refuse-t-il à tirer
de
ces remarques fort justes les conclusions qu’elles nécessitent ? Cell
1527
e autres, que Lautréamont ne va pas à la cheville
de
Rimbaud. (Ce n’est pas avec un Dieu pour rire que Rimbaud est aux pri
1528
r rire que Rimbaud est aux prises, et il n’a cure
de
cette littérature que Ducasse s’épuise à parodier.) Il semble qu’ici
1529
semble qu’ici M. Pierre-Quint, malgré la liberté
d’
esprit dont il témoigne en maint endroit, se soit laissé quelque peu i
1530
amont « le maître des écluses pour la littérature
de
demain ». Concession un peu hâtive à une « jeunesse » déjà démodée… J
1531
jeunesse » déjà démodée… Je crois que la jeunesse
d’
aujourd’hui s’éloigne plutôt de la grandiloquence « antilittéraire » e
1532
is que la jeunesse d’aujourd’hui s’éloigne plutôt
de
la grandiloquence « antilittéraire » et des révoltes au hasard d’un M
1533
ence « antilittéraire » et des révoltes au hasard
d’
un Maldoror. Elle demande une pensée forte et orientée plutôt que ces
1534
ne pensée forte et orientée plutôt que ces éclats
de
voix sarcastiques, émouvants comme 93, mais où certaine bêtise trouve
1535
ce. Nous adorons ailleurs. bg. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu
1536
ont et Dieu », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, septembre 1930, p. 399-400.
1537
bh à Albert Gyergyai. 1. Le dormeur au fil
de
l’eau Où s’asseoir ? Le pont est encombré de jambes de dormeuses ;
1538
l de l’eau Où s’asseoir ? Le pont est encombré
de
jambes de dormeuses ; il faudrait réveiller tant de beautés redoutabl
1539
Où s’asseoir ? Le pont est encombré de jambes
de
dormeuses ; il faudrait réveiller tant de beautés redoutables pour at
1540
ernière chaise libre. En bas, il y a juste autant
de
vieilles dames et de ministres en retraite que de fauteuils. Et on me
1541
En bas, il y a juste autant de vieilles dames et
de
ministres en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau f
1542
de vieilles dames et de ministres en retraite que
de
fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau feindre l’intérêt le plus sing
1543
en ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte
de
mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dor
1544
ordages, des chaînes, sur un banc humide, — juste
de
quoi s’étendre, et regarder jaillir sans fin contre soi l’eau de ce b
1545
re, et regarder jaillir sans fin contre soi l’eau
de
ce beau Danube jaune qui est le plus inodore des fleuves. Dormir. San
1546
. Sans avoir pu retrouver cette mélodie descendue
d’
un balcon où chantait la Schumann ; sans avoir pu retrouver le nom de
1547
tait la Schumann ; sans avoir pu retrouver le nom
de
qui l’on a reconduit à sa villa, vers cinq heures à travers ces quart
1548
à travers ces quartiers si clairs, arbres et jets
d’
eau ; sans avoir pu retrouver, des conversations de ce bal, autre chos
1549
’eau ; sans avoir pu retrouver, des conversations
de
ce bal, autre chose que la phrase, l’unique phrase que Richard Straus
1550
t… » C’était au vestiaire, il enfilait une manche
de
pardessus, me donnait l’autre à serrer, la main n’étant pas encore so
1551
la main n’étant pas encore sortie… Dormir au fil
de
l’eau, entre l’étrange nuit d’un autre bal et cette perspective de vo
1552
tie… Dormir au fil de l’eau, entre l’étrange nuit
d’
un autre bal et cette perspective de voyage au hasard et commencé dans
1553
’étrange nuit d’un autre bal et cette perspective
de
voyage au hasard et commencé dans l’insomnie — vrai voyage à dormir d
1554
, il reconnaît son rêve. Huit heures aux clochers
de
la capitale qui s’avance dans la lumière fauve d’un soir chaud sur la
1555
de la capitale qui s’avance dans la lumière fauve
d’
un soir chaud sur la plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes
1556
plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes
de
reflets, — et déjà nous passons sous de hauts ponts sonores, au long
1557
ubérantes de reflets, — et déjà nous passons sous
de
hauts ponts sonores, au long d’un quai tout fleuri de terrasses ; on
1558
nous passons sous de hauts ponts sonores, au long
d’
un quai tout fleuri de terrasses ; on nous déverse dans cette foule et
1559
auts ponts sonores, au long d’un quai tout fleuri
de
terrasses ; on nous déverse dans cette foule et ces musiques, deux vi
1560
es qui font des signes pour demain, présentations
de
mes Espoirs aux jeunes Promesses nationales (on n’a pas bien compris
1561
ée, des coups d’œil, dans le léger étourdissement
de
l’amitié prochaine). Et la générosité des lumières d’avant le soir, —
1562
’amitié prochaine). Et la générosité des lumières
d’
avant le soir, — et cette espèce de tendresse pour tous les possibles,
1563
é des lumières d’avant le soir, — et cette espèce
de
tendresse pour tous les possibles, qu’on appelle, je crois bien, jeun
1564
s, qui est un Collège célèbre. 2. La recherche
de
l’objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attends rien d’aill
1565
emier réveil — délivré. Chez moi je suis la proie
de
l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends je ne sais quo
1566
r. J’attends la lettre, j’attends je ne sais quoi
de
très important… Trois déceptions par jour ne peuvent qu’énerver le dé
1567
a m’apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciateur
d’
une miraculeuse et royale Venue. Dans le silence de l’adoration comblé
1568
’une miraculeuse et royale Venue. Dans le silence
de
l’adoration comblée, j’en sortirais de ces objets sans nom, inutilisa
1569
le silence de l’adoration comblée, j’en sortirais
de
ces objets sans nom, inutilisables, bouleversants de perfection, gage
1570
ces objets sans nom, inutilisables, bouleversants
de
perfection, gages d’un monde que les poètes essaient de décrire sans
1571
inutilisables, bouleversants de perfection, gages
d’
un monde que les poètes essaient de décrire sans l’avoir jamais vu, et
1572
fection, gages d’un monde que les poètes essaient
de
décrire sans l’avoir jamais vu, et dont nous savons seulement que tou
1573
vances, les plus exténuantes, et qui sait si tant
d’
erreurs ne composeront pas un jour une sorte d’incantation capable d’i
1574
nt d’erreurs ne composeront pas un jour une sorte
d’
incantation capable d’incliner le Hasard ? Ô décevantes chasses dans l
1575
eront pas un jour une sorte d’incantation capable
d’
incliner le Hasard ? Ô décevantes chasses dans les bazars, aux étalage
1576
lages des fêtes populaires, au fond des boutiques
de
vieux en province, dans les combles d’un château prussien où tissaien
1577
boutiques de vieux en province, dans les combles
d’
un château prussien où tissaient d’incroyables araignées, partout où l
1578
ns les combles d’un château prussien où tissaient
d’
incroyables araignées, partout où le désordre naturel des choses pouva
1579
sseports ? Dussè-je les inventer… Ah ! l’embarras
de
voyager n’est rien auprès de celui d’expliquer pourquoi l’on est part
1580
l’embarras de voyager n’est rien auprès de celui
d’
expliquer pourquoi l’on est parti. Cependant, mes regards errant sur u
1581
in de s’user, ne tarde pas à devenir notre raison
de
vivre. Mais combien votre sort, ô grands empêtrés ! me paraît enviabl
1582
Les désirs les plus incompréhensibles s’emparent
de
moi comme des superstitions. Tout mon avoir se fond dans une loterie
1583
ir se fond dans une loterie qui peut-être n’a pas
de
gros lot, et jamais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à le re
1584
é à peine jalouse que l’on réserve aux égarements
d’
une jeunesse démodée se peignirent sur les traits de mes auditeurs. —
1585
une jeunesse démodée se peignirent sur les traits
de
mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubles disting
1586
mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur
de
troubles distingués. Peu de sens du réel. Mais nous vous montrerons n
1587
on m’entraîna dans un musée sans sièges. Le Musée
de
Budapest enferme quelques paysages romantiques aux ciels pleins de dé
1588
me quelques paysages romantiques aux ciels pleins
de
démesure. Et, de Giorgione, ce « Portrait d’un homme » devant lequel
1589
ges romantiques aux ciels pleins de démesure. Et,
de
Giorgione, ce « Portrait d’un homme » devant lequel il faut se taire
1590
eins de démesure. Et, de Giorgione, ce « Portrait
d’
un homme » devant lequel il faut se taire pour écouter ce qu’il entend
1591
re pour écouter ce qu’il entend. 3. Au tombeau
de
Gül Baba Dans Bude il y a des ruelles qui sentent encore le Turc.
1592
. « Vous n’y verrez, m’avait-on dit, qu’une paire
de
babouches dans une mosquée vide que personne n’a plus l’idée de visit
1593
ans une mosquée vide que personne n’a plus l’idée
de
visiter. » Mais comment ne pas voir qu’un lieu qui porte un nom parei
1594
ne croit pas à la vertu des noms reste prisonnier
de
ses sens ; mais celui-là est véritablement voyageur qui n’a pas renon
1595
voyageur qui n’a pas renoncé à convaincre le réel
de
mystère. Montant au Rozsadomb par ce matin brûlant, je savais bien qu
1596
pellent une conduite magique. Or il est délicieux
de
réaliser une idée fixe injustifiable : c’est le plaisir même de l’enf
1597
e idée fixe injustifiable : c’est le plaisir même
de
l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravemen
1598
isir même de l’enfance. Je portais donc ma vision
d’
Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de m
1599
mpais gravement comme je ferai, je pense, au jour
de
mon pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. On passe une barrière, u
1600
ai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple
de
l’Objet inconnu. On passe une barrière, une cour vide ; on prend le s
1601
ardins dont les arbustes sèchent, vers une espèce
de
grande villa baroque assez décrépite, décor en pierre brune peu solid
1602
écrépite, décor en pierre brune peu solide, rongé
de
petites roses cramoisies. On longe une galerie couverte, on tourne da
1603
n tourne dans un escalier compliqué : c’est plein
de
colonnettes et de statues dégradées et charmantes. (Vue sur des maiso
1604
scalier compliqué : c’est plein de colonnettes et
de
statues dégradées et charmantes. (Vue sur des maisons pauvres un peu
1605
urs assez hauts dont l’un est peut-être la façade
d’
une chapelle ; mais la porte est fermée. Par une ouverture étroite on
1606
vaste, où il y a quelques arbres devant une sorte
de
tour peu élevée, à demi recouverte de rosiers, et qu’il paraît imposs
1607
t une sorte de tour peu élevée, à demi recouverte
de
rosiers, et qu’il paraît impossible de situer dans l’ensemble des con
1608
recouverte de rosiers, et qu’il paraît impossible
de
situer dans l’ensemble des constructions. C’est là qu’on entre. Murs
1609
ns. C’est là qu’on entre. Murs nus. Un catafalque
de
bois, au milieu, recouvert d’un très beau tapis mince, ou bannière, a
1610
nus. Un catafalque de bois, au milieu, recouvert
d’
un très beau tapis mince, ou bannière, avec des caractères turcs brodé
1611
vec des caractères turcs brodés en or. L’histoire
de
Gül Baba est racontée sur un papier jauni encadré et fixé au mur. Gül
1612
est le dernier héros musulman qui ait fait parler
de
lui en Hongrie. Il s’appelait en vérité Kehl Baba, ce qui signifie le
1613
roses. Moyennant cette naturalisation il continue
de
protéger la ville (en collaboration avec saint Gellert, dont la statu
1614
un rocher, les bras levés, dirige la circulation
de
Pest. Gül Baba est moins théâtral). D’ailleurs le tombeau est vide. E
1615
leurs le tombeau est vide. Et les babouches ? Pas
de
babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heure de visiter : le Père
1616
babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heure
de
visiter : le Père des roses est peut-être allé se promener. Dehors, l
1617
ent » étrange que ce lieu — inquiétant à la façon
de
certains regards lucides qu’il arrive qu’on porte sur la vie, tout d’
1618
lucides qu’il arrive qu’on porte sur la vie, tout
d’
un coup, à trois heures de l’après-midi par exemple, — non sans angois
1619
porte sur la vie, tout d’un coup, à trois heures
de
l’après-midi par exemple, — non sans angoisse… 4. De midi à quator
1620
près-midi par exemple, — non sans angoisse… 4.
De
midi à quatorze heures On voyage de nos jours d’une façon « ration
1621
sse… 4. De midi à quatorze heures On voyage
de
nos jours d’une façon « rationnelle », c’est-à-dire que les Cook’s ti
1622
midi à quatorze heures On voyage de nos jours
d’
une façon « rationnelle », c’est-à-dire que les Cook’s tickets remplac
1623
e conduite féconde. Il me semble que la servitude
de
l’homme moderne apparaît ici sous un aspect bien inquiétant : c’est à
1624
joli, ce n’est pas fantaisie. Je parle simplement
de
vérité et de mensonge, opposant une réalité vivante à une duperie com
1625
t pas fantaisie. Je parle simplement de vérité et
de
mensonge, opposant une réalité vivante à une duperie commerciale. Mai
1626
pensez que tant de mots pour une simple question
de
sentiment… C’est que vous êtes déjà bien malade. Il perd le sentimen
1627
dre ! » s’écrie le lecteur, et comme il est, lui,
de
l’autre école, il referme ces pages et vaque à ses devoirs. Nous voic
1628
lus à l’aise. Eh bien oui : je me ferai un mérite
de
perdre tout mon temps, si toutefois perdre conserve ici le sens qu’il
1629
urs « problèmes du plus haut intérêt », le « prix
de
l’action » et leur morale qui ne parle que d’obligations dont on ne s
1630
rix de l’action » et leur morale qui ne parle que
d’
obligations dont on ne saurait à la légère se débarrasser sans courir
1631
, bref, sans le payer cher. Tout cela est langage
de
bourse. Pour moi, je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile,
1632
ns leurs vastes poches insulaires pour m’informer
de
cette irrécusable vérité : les affaires sont les affaires, axiome qui
1633
oir trépigner, je continuerai à chercher mon bien
de
midi à quatorze heures, temps qu’ils réservent à la mastication, entr
1634
ils réservent à la mastication, entre deux séries
d’
heures de travail consacrées, si l’on ose dire, à assurer cette mastic
1635
vent à la mastication, entre deux séries d’heures
de
travail consacrées, si l’on ose dire, à assurer cette mastication. Ma
1636
n est assailli par le pittoresque, mais il s’agit
de
le déjouer au moyen de toutes sortes de ruses et de scepticismes, don
1637
il s’agit de le déjouer au moyen de toutes sortes
de
ruses et de scepticismes, dont le plus simple consiste à traduire ce
1638
le déjouer au moyen de toutes sortes de ruses et
de
scepticismes, dont le plus simple consiste à traduire ce que l’on voi
1639
s lignes verticales peinturlurées — elle n’a rien
d’
étrange, si l’on songe que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que
1640
erveilleux, avec quoi l’on est trop souvent tenté
de
confondre le bizarre. C’est le faux merveilleux qui a discrédité le v
1641
, moralement microscopique. (Il a tellement l’air
de
rien que nous sommes presque excusables de ne le point apercevoir.) J
1642
l’air de rien que nous sommes presque excusables
de
ne le point apercevoir.) Je vais cependant dire quelque chose d’une s
1643
apercevoir.) Je vais cependant dire quelque chose
d’
une scène pittoresque. Mais c’est une autre fois que je l’ai vue, à Pe
1644
’est une autre fois que je l’ai vue, à Pest, lors
d’
un autre séjour, dans la semaine qui suit Noël, — la plus sombre de l’
1645
, dans la semaine qui suit Noël, — la plus sombre
de
l’année par les rues vides sous la pluie étrangère. Une porte basse s
1646
ne porte basse s’ouvre sur un long corridor hanté
d’
ombres drapées, qui ne sont pas des nonnes, bien que les voûtes soient
1647
pas des nonnes, bien que les voûtes soient celles
d’
un ancien couvent. Nous pénétrons dans une grande salle vivement éclai
1648
le vivement éclairée. Murs chaulés, et de nouveau
de
hautes voûtes. Une banquette longe trois des parois, la quatrième est
1649
à terre, dans l’attente. Nous sommes assis autour
d’
une table et nous voyons, au milieu de la salle, un arbre de Noël aux
1650
e et nous voyons, au milieu de la salle, un arbre
de
Noël aux amples branches rayonnantes, dans une gloire de dorures, — e
1651
aux amples branches rayonnantes, dans une gloire
de
dorures, — et massées tout autour, frileuses dans leurs dessous roses
1652
ignoir noir et blanc… Je ne puis avaler mon verre
de
ce café trop amer qui pince la gorge. Dehors, nous ne parlons pas : l
1653
es transitions, et c’est alors que l’on est tenté
de
mentir, si fort tenté que l’on cède à coup sûr, en se persuadant que
1654
as, au contraire, aggraver le cas ?) Or l’intérêt
d’
un récit de voyage ne réside pas dans sa vérité générale, mais bien se
1655
raire, aggraver le cas ?) Or l’intérêt d’un récit
de
voyage ne réside pas dans sa vérité générale, mais bien se réfugie da
1656
qui ne ressemble à rien, gênante comme un cadeau
de
pauvre, comme un vrai cadeau. Si le conteur ment, — pendant qu’il y e
1657
teur ment, — pendant qu’il y est, il ferait mieux
de
choisir un autre pays que la Hongrie archi-connue, — le lecteur le se
1658
ar le plus beau mensonge atteint à peine le degré
d’
intérêt d’une vérité banale, et seulement à condition de lui ressemble
1659
beau mensonge atteint à peine le degré d’intérêt
d’
une vérité banale, et seulement à condition de lui ressembler, ne fût-
1660
ment à condition de lui ressembler, ne fût-ce que
de
loin, — c’est alors ce qu’on appelait un paradoxe, du temps des petit
1661
temps des petites manières. Cependant, la réalité
d’
un pays apparaissant en général au voyageur de ma sorte sous ses modal
1662
ité d’un pays apparaissant en général au voyageur
de
ma sorte sous ses modalités sentimentales plus que documentaires, peu
1663
, peut-être serait-il bon que je parsème ce texte
de
quelques noms impossibles et de beaucoup de chiffres vraisemblables ?
1664
parsème ce texte de quelques noms impossibles et
de
beaucoup de chiffres vraisemblables ? Ainsi le lecteur superficiel au
1665
l’impression que je suis zur Sache, que je parle
de
mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me par
1666
n’est rien que le voyage du Sujet à la recherche
de
son Objet, — en passant par la Hongrie. — Mais puisqu’enfin nous y vo
1667
’enfin nous y voici, en cette Hongrie… Le tombeau
de
Gül Baba est symboliquement vide. Quant à l’arbre de Noël, il ne deva
1668
Gül Baba est symboliquement vide. Quant à l’arbre
de
Noël, il ne devait à nulle pendeloque insolite l’étrangeté de son écl
1669
ne devait à nulle pendeloque insolite l’étrangeté
de
son éclat. Alors je m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est
1670
é de son éclat. Alors je m’en vais oublier le But
de
mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux
1671
e mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre
de
prendre au sérieux ce que je vois. Ruse connue : c’est l’histoire du
1672
que vous avez sous la langue ; je vous conseille
de
n’y plus penser quelque temps… Car on ne trouve vraiment que ce qu’on
1673
Car on ne trouve vraiment que ce qu’on a consenti
de
ne pas trouver sur l’heure. (En petit et intéressé, ce geste s’appell
1674
e prend toute sa hauteur. Silencieuse, solennelle
de
nudité, entre le Palais du Régent et celui d’un des archiducs, quel d
1675
lle de nudité, entre le Palais du Régent et celui
d’
un des archiducs, quel décor à rêver le cortège d’un sacre ! J’y ai vu
1676
d’un des archiducs, quel décor à rêver le cortège
d’
un sacre ! J’y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour de l’élec
1677
J’y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour
de
l’élection d’un des quatre gardiens de la Couronne de saint Étienne.
1678
ler la Chambre des Magnats, le jour de l’élection
d’
un des quatre gardiens de la Couronne de saint Étienne. Auprès du porc
1679
s, le jour de l’élection d’un des quatre gardiens
de
la Couronne de saint Étienne. Auprès du porche du Palais, ils n’étaie
1680
’élection d’un des quatre gardiens de la Couronne
de
saint Étienne. Auprès du porche du Palais, ils n’étaient guère qu’une
1681
he du Palais, ils n’étaient guère qu’une centaine
de
curieux, et quelques gardes. Traversant dans sa longueur toute l’imme
1682
dent que du bout des doigts, crainte, sans doute,
de
troubler l’équilibre toujours instable des huit reflets de leur digni
1683
er l’équilibre toujours instable des huit reflets
de
leur dignité. Mais je n’oublierai pas le sourire de ce vieux prince :
1684
leur dignité. Mais je n’oublierai pas le sourire
de
ce vieux prince : un vrai sourire, adressé personnellement à l’homme,
1685
reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a la tête
de
François-Joseph, dont il fut peut-être valet, nomme à leur passage le
1686
remier pont sur le Danube, auteurs ainsi du trait
d’
union de Buda-Pest. Il y a trois semaines, à Freudenau, lors du Derby
1687
ont sur le Danube, auteurs ainsi du trait d’union
de
Buda-Pest. Il y a trois semaines, à Freudenau, lors du Derby viennois
1688
se tiennent très droits, appuyés sur leurs sabres
d’
or recourbés dont les poignées entre leurs doigts gantés étincellent.
1689
urs doigts gantés étincellent. Parfois un collier
de
la Toison d’Or, sur la fourrure du dolman rouge ou jaune, laisse pend
1690
ntés étincellent. Parfois un collier de la Toison
d’
Or, sur la fourrure du dolman rouge ou jaune, laisse pendre son petit
1691
Mais, ô pathétique dissonance, tangible absurdité
de
notre époque, beaucoup ont dû louer des taxis démodés, au tarif infér
1692
f inférieur. Des chauffeurs vautrés, la casquette
de
travers sur leurs idées sociales, pareils aux chauffeurs de toutes le
1693
sur leurs idées sociales, pareils aux chauffeurs
de
toutes les villes, conduisent dans la cour d’honneur ces reliques inc
1694
urs de toutes les villes, conduisent dans la cour
d’
honneur ces reliques incroyables et les encensent à la benzine industr
1695
doigts levés. On se signe. Et voici venir à pied
de
son palais proche, tout seul, un archiduc. On salue profondément, en
1696
e profondément, en silence (cliquetis des rangées
de
décorations sur l’uniforme kaki, et du sabre balancé). Une auto encor
1697
or. Si le comte Bethlen venait à la SDN en tenue
de
magnat, beaucoup de gens comprendraient mieux sa politique. 8. Les
1698
8. Les coussins Rothermere Le nationalisme
de
la plupart des États de l’Europe se formule en revendications d’homme
1699
es États de l’Europe se formule en revendications
d’
hommes d’affaires. Ce qu’on prétend défendre, c’est son droit, ses int
1700
de l’Europe se formule en revendications d’hommes
d’
affaires. Ce qu’on prétend défendre, c’est son droit, ses intérêts. Ma
1701
une passion toute nue, qui exprime l’être profond
de
la race. On ne discute pas cet amour, on ne réfute pas cette haine. I
1702
pas cette haine. Ici, la sympathie est un devoir
de
politesse. Comment la mesurer sans mauvaise grâce à qui vous a reçu c
1703
mauvaise grâce à qui vous a reçu comme un cadeau
de
Dieu. (« C’est Dieu qui vous envoie », dit la formule traditionnelle.
1704
oie », dit la formule traditionnelle.) La liqueur
de
pêche rend démonstratif, dont on vide trois verres d’un trait en guis
1705
êche rend démonstratif, dont on vide trois verres
d’
un trait en guise de salut. C’est alors que se déplient les cartes de
1706
de salut. C’est alors que se déplient les cartes
de
« la Hongrie mutilée ». — « Savez-vous qu’on nous a volé les deux tie
1707
. — « Savez-vous qu’on nous a volé les deux tiers
de
notre patrie ? » Ah ! ce n’est pas vous, maintenant, qui allez demand
1708
maintenant, qui allez demander raison à vos hôtes
de
la façon dont ils traitaient, au temps de leur puissance, les allogèn
1709
que les nombres ont tort au regard de l’antiquité
d’
une civilisation ; qu’il s’agit ici de valeurs ; que si les population
1710
l’antiquité d’une civilisation ; qu’il s’agit ici
de
valeurs ; que si les populations des régions perdues étaient parfois
1711
eule active et créatrice. Le reste : des porteurs
d’
eau… Dans l’inextricable confusion d’injustices à quoi devait mener le
1712
des porteurs d’eau… Dans l’inextricable confusion
d’
injustices à quoi devait mener le wilsonisme schématique qui traça les
1713
eur devenant l’opprimé sans y perdre le sentiment
de
sa supériorité de race — sa véritable légitimité — on comprend que le
1714
rimé sans y perdre le sentiment de sa supériorité
de
race — sa véritable légitimité — on comprend que le Hongrois n’ait po
1715
nt conservé une extrême sensibilité aux arguments
de
« droit » qui autorisèrent ce chaos. Il lui reste sa foi en la grande
1716
aos. Il lui reste sa foi en la grandeur éternelle
de
la Hongrie — intemporelle, n’ayant cure des statistiques — et sa doul
1717
e des statistiques — et sa douleur aussi, douleur
d’
orgueil blessé, mais qui emporte la sympathie car l’orgueil hongrois n
1718
e la sympathie car l’orgueil hongrois n’est point
de
ce que l’on gagne sur autrui, mais de ce que l’on est ; non point d’u
1719
n’est point de ce que l’on gagne sur autrui, mais
de
ce que l’on est ; non point d’un parvenu, mais d’un aristocrate. Tous
1720
e sur autrui, mais de ce que l’on est ; non point
d’
un parvenu, mais d’un aristocrate. Tous dangers égaux d’ailleurs, préf
1721
de ce que l’on est ; non point d’un parvenu, mais
d’
un aristocrate. Tous dangers égaux d’ailleurs, préférons cet impériali
1722
gers égaux d’ailleurs, préférons cet impérialisme
de
l’âme à celui de la surproduction des machines et des enfants. C’est
1723
eurs, préférons cet impérialisme de l’âme à celui
de
la surproduction des machines et des enfants. C’est parce que les Hon
1724
erne. Voilà ce qu’on ne dit pas dans les dépêches
d’
agence : les journalistes, une fois de plus, passent à côté de l’essen
1725
rs. Songez à ce qui forme l’opinion, cet ensemble
de
mythes sentimentaux qui gouverne les arguments. Ici je rentre dans me
1726
à celle des individus, pour ce qui est du moins,
de
mentir à soi-même. Mais les Hongrois ne renient pas leur romantisme.
1727
ongrie, sur une Carte du Tendre d’après le traité
de
Trianon ! Ces choses, je les ai rêvées sur un divan, à cause d’un cou
1728
es choses, je les ai rêvées sur un divan, à cause
d’
un coussin où s’étalait le sourire optimiste de Lord Rothermere, en so
1729
se d’un coussin où s’étalait le sourire optimiste
de
Lord Rothermere, en soie blanche sur fond noir. Quelques articles fav
1730
r ce peuple turbulent et déchu, suffirent à faire
d’
un affairiste anglais l’idole du nationalisme magyar. Son portrait aff
1731
universitaires, brodé aux devantures des magasins
de
mode, et son nom en lettres géantes sur une montagne chauve, voisine
1732
lettres géantes sur une montagne chauve, voisine
de
Budapest, témoignent des espérances démesurées qu’il sut entretenir a
1733
espérances démesurées qu’il sut entretenir autour
d’
une action certes méritoire, mais plus symbolique qu’efficace. Et sans
1734
Et sans lendemain. Ce mélange, en toutes choses,
d’
enfantillage et de grandeur, d’imaginations absurdes et de souffrances
1735
. Ce mélange, en toutes choses, d’enfantillage et
de
grandeur, d’imaginations absurdes et de souffrances vraies, n’est-ce
1736
en toutes choses, d’enfantillage et de grandeur,
d’
imaginations absurdes et de souffrances vraies, n’est-ce point le clim
1737
illage et de grandeur, d’imaginations absurdes et
de
souffrances vraies, n’est-ce point le climat de la passion ? — C’est
1738
t de souffrances vraies, n’est-ce point le climat
de
la passion ? — C’est celui de la Hongrie14. 9. Une lettre de Matth
1739
-ce point le climat de la passion ? — C’est celui
de
la Hongrie14. 9. Une lettre de Matthias Corvin « Matthias, par
1740
? — C’est celui de la Hongrie14. 9. Une lettre
de
Matthias Corvin « Matthias, par la grâce de Dieu roi de Hongrie. B
1741
re de Matthias Corvin « Matthias, par la grâce
de
Dieu roi de Hongrie. Bonjour, citoyens ! Si vous ne venez pas tous vo
1742
as Corvin « Matthias, par la grâce de Dieu roi
de
Hongrie. Bonjour, citoyens ! Si vous ne venez pas tous vous présenter
1743
bits Personne, à ma connaissance, ne se plaint
de
ce qu’il y a peu de poètes par le monde. C’est dans l’ordre des chose
1744
ans l’ordre des choses, et l’on sait qu’il suffit
de
très peu de sel pour rendre mangeables beaucoup de nouilles. Mais voi
1745
ais voici, par exemple, ce qu’il faudrait essayer
d’
obtenir : que la grande majorité des gens ne deviennent pas enragés dè
1746
s ne deviennent pas enragés dès qu’ils perçoivent
de
la poésie dans l’air. Espoir sans doute chimérique, mais qu’on peut c
1747
oute chimérique, mais qu’on peut croire bien près
d’
être comblé dans ce pays où les courtiers ne donnent pas encore le ton
1748
nnue à l’étranger que par quelques pièces légères
de
Molnár, qui n’ont de hongrois que l’auteur, d’ailleurs israélite. Il
1749
par quelques pièces légères de Molnár, qui n’ont
de
hongrois que l’auteur, d’ailleurs israélite. Il y a, bien entendu, un
1750
à remplir les revues bien pensantes. Elle traite
de
sujets « bien hongrois » dans un style académique qui me paraît être
1751
extrême gauche, et sa revue Documentum (une sorte
d’
Esprit nouveau troublé de surréalisme), groupée autour de Louis Kassák
1752
ue Documentum (une sorte d’Esprit nouveau troublé
de
surréalisme), groupée autour de Louis Kassák, nettement international
1753
tour de Louis Kassák, nettement internationaliste
de
doctrine, au lyrisme neuf et parfois sauvage, social ou futuriste, et
1754
plus libre et la plus vivante du génie littéraire
de
cette race me paraît bien avoir été donnée par le groupe important du
1755
r anime encore ces écrivains profondément magyars
de
sensibilité, bien que souvent européens de goûts et de curiosités, et
1756
agyars de sensibilité, bien que souvent européens
de
goûts et de curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef
1757
nsibilité, bien que souvent européens de goûts et
de
curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef de file. De
1758
és, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef
de
file. Des amis m’emmènent le voir à Esztergóm, où il passe ses étés.
1759
ses étés. Esztergóm est la plus vieille capitale
de
la Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. Aujourd’hui c’est la résidenc
1760
a résidence du Prince Primat. Au-dessus du palais
de
l’archevêché, sur une colline que le Danube contourne, la basilique é
1761
Danube contourne, la basilique élève une coupole
d’
ocre éclatante, immense et froide, dominant cette plaine onduleuse don
1762
ue nous devons rencontrer le poète. Cheveux noirs
d’
aigle collés sur son large front, belle carrure ruisselante, il nous s
1763
u’à mi-corps, mythologique. Nous sortons ensemble
de
la petite ville aux rues de terre brûlante, aux maisons jaunes basses
1764
Nous sortons ensemble de la petite ville aux rues
de
terre brûlante, aux maisons jaunes basses, ville sans ombre, sans arb
1765
, sur un coteau. Trois chambres boisées entourées
d’
une large galerie d’où l’on voit le Danube gris-jaune, brillant, sans
1766
is chambres boisées entourées d’une large galerie
d’
où l’on voit le Danube gris-jaune, brillant, sans rides, la petite vil
1767
bourdonnante, — trois petites chambres et un pan
de
toit par-dessus, une baraque à peine visible dans les vignes, à peine
1768
isible dans les vignes, à peine détachée du flanc
de
la colline, pour que les vents ne l’emportent pas. L’après-midi est i
1769
orizon est aussi lointain qu’on l’imagine, tout a
de
belles couleurs, le poète sourit en lui-même, il y a une enfance dans
1770
du risque. 13. Il faut ajouter aux autres causes
de
l’incompréhension des journalistes la ruse hongroise qu’ils ne peuven
1771
arrivistes. 14. Parce que j’« exalte les valeurs
de
passion » — pour parler comme le seul Clerc qui n’ait pas trahi — qui
1772
it pas trahi — qui me paraissent être la grandeur
de
la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin
1773
aix par la mutilation des passions sont disciples
d’
Origène. Il doit y avoir d’autres solutions… bh. Rougemont Denis de,
1774
y avoir d’autres solutions… bh. Rougemont Denis
de
, « Voyage en Hongrie I », Bibliothèque universelle et Revue de Genève
1775
en Hongrie I », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, octobre 1930, p. 405-419.
1776
Hölderlin, La Mort
d’
Empédocle et Poèmes de la folie (octobre 1930)bi L’année du centena
1777
Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes
de
la folie (octobre 1930)bi L’année du centenaire du romantisme sera
1778
nnée du centenaire du romantisme sera celle aussi
de
la découverte de Hölderlin par la France. La Mort d’Empédocle et les
1779
e du romantisme sera celle aussi de la découverte
de
Hölderlin par la France. La Mort d’Empédocle et les Poèmes de la foli
1780
la découverte de Hölderlin par la France. La Mort
d’
Empédocle et les Poèmes de la folie ont paru simultanément, et l’on an
1781
par la France. La Mort d’Empédocle et les Poèmes
de
la folie ont paru simultanément, et l’on annonce Hypérion. Il ne manq
1782
ypérion. Il ne manquera plus que les longs poèmes
de
la maturité — mais ceux-là difficilement traduisibles — pour que nous
1783
s — pour que nous puissions contempler l’ensemble
de
l’œuvre de Hölderlin : l’inspirateur de Schelling et de Hegel, le pré
1784
e nous puissions contempler l’ensemble de l’œuvre
de
Hölderlin : l’inspirateur de Schelling et de Hegel, le précurseur de
1785
’ensemble de l’œuvre de Hölderlin : l’inspirateur
de
Schelling et de Hegel, le précurseur de Nietzsche, l’un des plus admi
1786
uvre de Hölderlin : l’inspirateur de Schelling et
de
Hegel, le précurseur de Nietzsche, l’un des plus admirables et des pl
1787
spirateur de Schelling et de Hegel, le précurseur
de
Nietzsche, l’un des plus admirables et des plus mystérieux génies poé
1788
dmirables et des plus mystérieux génies poétiques
de
notre ère. On doit beaucoup de reconnaissance à M. André Babelon pour
1789
traduit et introduit avec tant de justesse, voire
de
profondeur, la Mort d’Empédocle. Cette tragédie difficile, trois fois
1790
ec tant de justesse, voire de profondeur, la Mort
d’
Empédocle. Cette tragédie difficile, trois fois remise à pied d’œuvre
1791
ette tragédie difficile, trois fois remise à pied
d’
œuvre et jamais achevée, donne moins que les Poèmes cette impression b
1792
nne moins que les Poèmes cette impression bizarre
d’
être d’aujourd’hui. C’est qu’elle est de demain plutôt, — tout comme N
1793
ns que les Poèmes cette impression bizarre d’être
d’
aujourd’hui. C’est qu’elle est de demain plutôt, — tout comme Nietzsch
1794
n bizarre d’être d’aujourd’hui. C’est qu’elle est
de
demain plutôt, — tout comme Nietzsche qui en fut obsédé. Empédocle es
1795
comme Nietzsche qui en fut obsédé. Empédocle est
de
ces mythes tels qu’il n’est peut-être pas donné à une race d’en créer
1796
s tels qu’il n’est peut-être pas donné à une race
d’
en créer plus d’un, c’est-à-dire de s’en libérer. Ainsi la France conç
1797
st peut-être pas donné à une race d’en créer plus
d’
un, c’est-à-dire de s’en libérer. Ainsi la France conçut l’homme ratio
1798
nné à une race d’en créer plus d’un, c’est-à-dire
de
s’en libérer. Ainsi la France conçut l’homme rationnel ; Empédocle, a
1799
contraire est celui qui passe toutes les mesures
de
l’esprit humain, parle aux dieux avec orgueil, et finit par succomber
1800
manique ; mythe païen, mais il est bien troublant
de
le voir se mêler, dans la troisième version de ce drame, à des symbol
1801
nt de le voir se mêler, dans la troisième version
de
ce drame, à des symboles nettement messianiques… Ce par quoi Hölderli
1802
français, c’est que son lyrisme est l’expression
d’
une philosophie à l’état naissant ; il est la vibration même d’une pen
1803
phie à l’état naissant ; il est la vibration même
d’
une pensée en travail de mythes, sur lesquels, bientôt après, s’exerce
1804
il est la vibration même d’une pensée en travail
de
mythes, sur lesquels, bientôt après, s’exercera la réflexion conscien
1805
e son Empédocle, note M. Babelon, Hölderlin écrit
de
nombreux essais philosophiques.) Le tragique de Hölderlin, c’est qu’i
1806
t de nombreux essais philosophiques.) Le tragique
de
Hölderlin, c’est qu’il parviendra de moins en moins à « réfléchir » s
1807
Le tragique de Hölderlin, c’est qu’il parviendra
de
moins en moins à « réfléchir » sa création. De là sa folie, qu’il pre
1808
ra de moins en moins à « réfléchir » sa création.
De
là sa folie, qu’il pressent. Et M. Babelon cite à ce sujet des phrase
1809
sein d’une flamme plus grande, l’autre seulement
d’
une plus faible… Le grand poète n’est jamais abandonné par lui-même ;
1810
jamais abandonné par lui-même ; il peut au-dessus
de
lui-même, s’élever aussi loin qu’il le veut. On peut tomber dans la h
1811
génie qui, dans le même temps, figure l’antithèse
de
Hölderlin : l’« économie » d’un Goethe, bien superficiellement qualif
1812
figure l’antithèse de Hölderlin : l’« économie »
d’
un Goethe, bien superficiellement qualifiée de bourgeoise, est en réal
1813
e » d’un Goethe, bien superficiellement qualifiée
de
bourgeoise, est en réalité la garantie spirituelle qui lui permet de
1814
en réalité la garantie spirituelle qui lui permet
de
« s’élever au-dessus de lui-même aussi loin qu’il le veut ». Mais Höl
1815
pirituelle qui lui permet de « s’élever au-dessus
de
lui-même aussi loin qu’il le veut ». Mais Hölderlin est sans doute d’
1816
in qu’il le veut ». Mais Hölderlin est sans doute
d’
une constitution trop faible pour pouvoir longtemps maîtriser l’inspir
1817
Reste une cendre où longtemps encore palpiteront
de
pâles lueurs réminiscentes. Ce sont les quatrains du temps de la foli
1818
urs réminiscentes. Ce sont les quatrains du temps
de
la folie, poèmes véritablement « posthumes », que Pierre Jean Jouve a
1819
langue fluide mais jamais abstraite qui est celle
de
ses Noces. Jouve est le plus « germanique » des poètes français d’auj
1820
ve est le plus « germanique » des poètes français
d’
aujourd’hui ; ce sont les harmoniques éveillées en lui par la voix de
1821
sont les harmoniques éveillées en lui par la voix
de
Hölderlin qui ont dû l’inciter à l’acte recréateur qu’est la traducti
1822
’inciter à l’acte recréateur qu’est la traduction
d’
un poète par un autre poète. Les quatrains sont ici précédés de Fragme
1823
r un autre poète. Les quatrains sont ici précédés
de
Fragments dont je me demande s’il était bien légitime de les traduire
1824
ments dont je me demande s’il était bien légitime
de
les traduire. On a respecté scrupuleusement les « blancs » que Hölder
1825
eine ébauchés, — quelques mots isolés, des bribes
de
phrases… Or, si comme je le crois et voudrais l’établir plus longueme
1826
ais l’établir plus longuement, le sens des poèmes
de
la maturité de Hölderlin est à chercher dans leur rythme seulement, —
1827
lus longuement, le sens des poèmes de la maturité
de
Hölderlin est à chercher dans leur rythme seulement, — si ces mots sé
1828
e seulement, — si ces mots séparés par des suites
de
points ne lui servaient qu’à noter des mètres, il apparaît que la tra
1829
à noter des mètres, il apparaît que la traduction
de
tels fragments est illusoire, car on ne peut songer à remplacer ces m
1830
onger à remplacer ces mots-notes par des syllabes
de
valeur rythmique équivalente. Quoi qu’il en soit, et tels qu’ils nous
1831
nous sont ici livrés, ces fragments sont capables
d’
éveiller le sentiment rare et grandiose que j’appellerais celui du tra
1832
et grandiose que j’appellerais celui du tragique
de
la pensée. « Insensé, — penses-tu de figure en figure — voir l’âme ?
1833
du tragique de la pensée. « Insensé, — penses-tu
de
figure en figure — voir l’âme ? — Tu iras dans les flammes. » Quant a
1834
s les flammes. » Quant aux documents sur la folie
de
Hölderlin que MM. Groethuysen et Jouve ont choisis et traduits à la s
1835
s, ils ne sont pas ce que ce petit livre contient
de
moins bouleversant. bi. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Hölde
1836
ent de moins bouleversant. bi. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la foli
1837
ont Denis de, « [Compte rendu] Hölderlin, La Mort
d’
Empédocle et Poèmes de la folie », Bibliothèque universelle et Revue
1838
e rendu] Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes
de
la folie », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, oct
1839
de la folie », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, octobre 1930, p. 532-533.
1840
n Hongrie II (novembre 1930)bj 11. Le retour
d’
Esztergóm Il faut se pencher aux portières et laisser l’air furieux
1841
e et appuyer au front comme une caresse indéfinie
de
la puissance. Soir de voyage, tout enfiévré d’orgueil errant, de conq
1842
comme une caresse indéfinie de la puissance. Soir
de
voyage, tout enfiévré d’orgueil errant, de conquêtes vagues… Tout ce
1843
ie de la puissance. Soir de voyage, tout enfiévré
d’
orgueil errant, de conquêtes vagues… Tout ce qui est de la terre renon
1844
. Soir de voyage, tout enfiévré d’orgueil errant,
de
conquêtes vagues… Tout ce qui est de la terre renonce à s’affirmer en
1845
ueil errant, de conquêtes vagues… Tout ce qui est
de
la terre renonce à s’affirmer en détails précis, se masse dans une co
1846
er en détails précis, se masse dans une confusion
de
violet sombre, et par la seule ligne dure de l’horizon s’oppose au ci
1847
sion de violet sombre, et par la seule ligne dure
de
l’horizon s’oppose au ciel qui retire ses lueurs. Ciel blanc, où très
1848
el qui retire ses lueurs. Ciel blanc, où très peu
d’
or rose s’évanouit… Le train serpente dans un de ces paysages de nulle
1849
u d’or rose s’évanouit… Le train serpente dans un
de
ces paysages de nulle part qui sont les plus émouvants, entre des col
1850
anouit… Le train serpente dans un de ces paysages
de
nulle part qui sont les plus émouvants, entre des collines basses gra
1851
e heure on sent bien que poursuivre est une sorte
d’
enivrant péché. — Nous aurions une maison dans ce désert aux formes te
1852
cause de l’éloignement en nous-mêmes. À l’entrée
d’
un tunnel tu vois que la veilleuse brûle toujours — et moi, parmi les
1853
rûle toujours — et moi, parmi les reflets fuyants
de
toutes sortes de faces et de paysages soudainement invisibles, je dis
1854
t moi, parmi les reflets fuyants de toutes sortes
de
faces et de paysages soudainement invisibles, je distingue le doux fe
1855
les reflets fuyants de toutes sortes de faces et
de
paysages soudainement invisibles, je distingue le doux feu bleu de mo
1856
inement invisibles, je distingue le doux feu bleu
de
mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand je pense à ce qu’en imaginera
1857
autres, si je leur en parlais… Il leur suffirait
de
l’image d’un bibelot d’une sorte bizarre. Alors que c’est plutôt un c
1858
je leur en parlais… Il leur suffirait de l’image
d’
un bibelot d’une sorte bizarre. Alors que c’est plutôt un certain arra
1859
arlais… Il leur suffirait de l’image d’un bibelot
d’
une sorte bizarre. Alors que c’est plutôt un certain arrangement des c
1860
oses qui rende un certain son spirituel… Un objet
de
musique et de couleurs, mais aussi une forme symbolique de tout… Enfi
1861
un certain son spirituel… Un objet de musique et
de
couleurs, mais aussi une forme symbolique de tout… Enfin, tellement i
1862
e et de couleurs, mais aussi une forme symbolique
de
tout… Enfin, tellement inconnu et tellement fascinant à la fois, qu’i
1863
tellement fascinant à la fois, qu’il me préserve
de
tout amour pour quelque bien particulier où je serais tenté de me com
1864
pour quelque bien particulier où je serais tenté
de
me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde
1865
lors tout s’allume et voici la nuit des faubourgs
de
Pest, au-dessous de nous. 12. Un bal, ou de l’ivresse considérée c
1866
gs de Pest, au-dessous de nous. 12. Un bal, ou
de
l’ivresse considérée comme un des beaux-arts Ils n’ont plus de nom
1867
sidérée comme un des beaux-arts Ils n’ont plus
de
noms, ils ne sont qu’une ivresse aux cent visages, lorsque j’entre da
1868
vant un bras, la main à la nuque ; frapper le sol
de
l’autre talon en changeant de main ; saisir la danseuse sous les bras
1869
ue ; frapper le sol de l’autre talon en changeant
de
main ; saisir la danseuse sous les bras (elle pose alors ses mains su
1870
ules du cavalier) et la faire pirouetter un quart
de
tour à droite, un quart de tour à gauche ; pirouetter seuls sur place
1871
re pirouetter un quart de tour à droite, un quart
de
tour à gauche ; pirouetter seuls sur place ; de nouveau frapper le so
1872
ment ; saisir la danseuse, tourbillonner, pousser
de
grands cris ; tourbillonner en sens inverse ; frapper des talons touj
1873
aux yeux de plaine, comme les autres ont des yeux
de
mer. Des grâces d’amazones avec un coup de talon qui les secoue jusqu
1874
comme les autres ont des yeux de mer. Des grâces
d’
amazones avec un coup de talon qui les secoue jusqu’à la chevelure. Gr
1875
s yeux de mer. Des grâces d’amazones avec un coup
de
talon qui les secoue jusqu’à la chevelure. Graves entre leurs éclats
1876
s chantent, les moires et l’ondulation des rubans
de
vents chauds sur la plaine, avec des éloignements et des retours, des
1877
e les gestes sont gouvernées par la seule logique
d’
un rythme constamment imprévu. Il s’agit moins de comprendre que de s’
1878
d’un rythme constamment imprévu. Il s’agit moins
de
comprendre que de s’abandonner d’une certaine manière. En France, cha
1879
amment imprévu. Il s’agit moins de comprendre que
de
s’abandonner d’une certaine manière. En France, chacun parle pour son
1880
Il s’agit moins de comprendre que de s’abandonner
d’
une certaine manière. En France, chacun parle pour son compte, paraphe
1881
ou. Ici, le sens des mots et des choses est celui
d’
un courant musical qui domine l’ensemble et le compose selon les lois
1882
ui domine l’ensemble et le compose selon les lois
d’
une plastique exubérante. Quand je dis que j’observe, je n’observe rie
1883
anières. Et quant à ceux qui n’ont pas le pouvoir
de
s’enivrer, ils auront toujours raison, mais n’auront que cela, car c’
1884
c’est l’ivresse15 seulement qui permet à l’esprit
de
passer d’une forme dans d’autres, — et c’est même en ce passage qu’el
1885
resse15 seulement qui permet à l’esprit de passer
d’
une forme dans d’autres, — et c’est même en ce passage qu’elle consist
1886
e passage qu’elle consiste — ô Danses ! avènement
de
l’âme aux gestes ! Vous voici, longs coups d’ailes en silence au-dess
1887
ent de l’âme aux gestes ! Vous voici, longs coups
d’
ailes en silence au-dessus du gouffre. Je vole sur place, mais tout se
1888
et l’amour du vertige). Qu’est-ce qu’il y aurait
de
l’autre côté ? Se laisser choir dans le Gris ? Rejoindre ?… Derrière
1889
ise ne rappelle la nostalgie traînante des lieder
de
l’Oberland : ici la mélancolie même est passionnée. Elles chantent av
1890
es mouvements vifs du buste, et des mains pleines
de
drôleries ou de supplication. Je ne sais ce que disent les paroles. J
1891
fs du buste, et des mains pleines de drôleries ou
de
supplication. Je ne sais ce que disent les paroles. Je vois des cheva
1892
uvenir des pays désertés enfièvre encore un désir
de
perdition illimitée… Les Hongrois se sont arrêtés dans cette plaine.
1893
c’est le soir au camp, perpétuel. Une lassitude
de
steppe brûlante, des ondulations longues… Mais un cheval se cabre ; e
1894
ambours et des cris modulés, et toute la frénésie
d’
un grand souffle qui se serait mis à tourbillonner sur place. 14. L
1895
ns ou intellectuels. Les Français aiment par goût
d’
en bien parler. Les Suisses aiment avec une bonne ou une mauvaise cons
1896
ngrois t’emportera dans une inénarrable confusion
de
sentimentalisme et de passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pa
1897
s une inénarrable confusion de sentimentalisme et
de
passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens de la musiqu
1898
, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens
de
la musique, conserve quelque espoir de t’en tirer. Sinon… je t’envier
1899
as le sens de la musique, conserve quelque espoir
de
t’en tirer. Sinon… je t’envierais presque. Celui qui part pour la Hon
1900
us. 15. La plaine et la musique L’ouverture
de
Stravinsky exécutée par l’express de Transylvanie au sortir de la gar
1901
L’ouverture de Stravinsky exécutée par l’express
de
Transylvanie au sortir de la gare de Budapest, devient avec la plaine
1902
ar l’express de Transylvanie au sortir de la gare
de
Budapest, devient avec la plaine une Symphonie-Dichtung borodinesque,
1903
e hongroise n’est pas monotone, parce qu’elle est
d’
un seul tenant. Rien qui fasse répétition. C’est ici le premier pays q
1904
. C’est ici le premier pays que je n’ai pas envie
d’
élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choisis16. Il y a une
1905
i pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas
de
morceaux choisis16. Il y a une grande ville, un grand lac, une plaine
1906
ille, un grand lac, une plaine et une seule vigne
de
véritable Tokay. Et point de ces endroits déprimants, à plusieurs mil
1907
e et une seule vigne de véritable Tokay. Et point
de
ces endroits déprimants, à plusieurs milliers d’exemplaires, tels que
1908
de ces endroits déprimants, à plusieurs milliers
d’
exemplaires, tels que banlieue française, village suisse, gare alleman
1909
çaise, village suisse, gare allemande grouillante
de
questions sociales. La Puszta est une terre vierge, je veux dire que
1910
andue. Il y a peu de bourgeois en Hongrie. Il y a
de
petits nobles déclassés, des juifs, des paysans, des communistes, de
1911
classés, des juifs, des paysans, des communistes,
de
grands nobles, et des Tziganes. D’ailleurs, le bourgeois supporterait
1912
mpleur qu’ont ici toutes choses, cette atmosphère
de
nomadisme, et ces vents vastes ; et cette passion de vivre au-dessus
1913
nomadisme, et ces vents vastes ; et cette passion
de
vivre au-dessus de ses moyens — c’est-à-dire au-dessus du Moyen — qui
1914
ents vastes ; et cette passion de vivre au-dessus
de
ses moyens — c’est-à-dire au-dessus du Moyen — qui est caractéristiqu
1915
rgement ? » demande certaine hargne à cet artiste
de
la prodigalité. — « Ah ! répond-il, j’aimerais bien pouvoir vivre com
1916
yptien, « car c’est la langue qu’elles apprennent
de
leurs mères ». Combien j’aime ces sœurs des Tziganes ! Les Tziganes v
1917
t le bridge et la bohème, c’est-à-dire un symbole
de
la servitude et un symbole de la liberté. Si la Hongrie tout de même
1918
t-à-dire un symbole de la servitude et un symbole
de
la liberté. Si la Hongrie tout de même a quelque chose de « moderne »
1919
berté. Si la Hongrie tout de même a quelque chose
de
« moderne », dans un sens vaste et mystique, elle le doit au charme é
1920
ns une ère égyptienne. Mais que dire des pouvoirs
de
la plaine qui s’agrandit pendant des heures ? — Ce qu’en raconte la m
1921
usique — tu vas l’entendre à toutes les terrasses
de
Debrecen. Debrecen est une sorte de ville indescriptible, à demi mêlé
1922
les terrasses de Debrecen. Debrecen est une sorte
de
ville indescriptible, à demi mêlée aux sables de la plaine du Hortobá
1923
de ville indescriptible, à demi mêlée aux sables
de
la plaine du Hortobágy, aux longues maisons jaunes immensément aligné
1924
ngues maisons jaunes immensément alignées, autour
d’
une place rectangulaire qui ressemble à un jardin public, flanquée d’u
1925
ulaire qui ressemble à un jardin public, flanquée
d’
un temple blanc à deux clochers baroques, d’hôtels modernes, de statue
1926
nquée d’un temple blanc à deux clochers baroques,
d’
hôtels modernes, de statues, de pylônes plantés dans un grand désordre
1927
lanc à deux clochers baroques, d’hôtels modernes,
de
statues, de pylônes plantés dans un grand désordre de piétons et de c
1928
clochers baroques, d’hôtels modernes, de statues,
de
pylônes plantés dans un grand désordre de piétons et de chars à bœufs
1929
tatues, de pylônes plantés dans un grand désordre
de
piétons et de chars à bœufs parmi les trams. Les habitants de Debrece
1930
ônes plantés dans un grand désordre de piétons et
de
chars à bœufs parmi les trams. Les habitants de Debrecen se plaignent
1931
t de chars à bœufs parmi les trams. Les habitants
de
Debrecen se plaignent de n’avoir pas ce faux confort que nous n’avons
1932
les trams. Les habitants de Debrecen se plaignent
de
n’avoir pas ce faux confort que nous n’avons qu’au prix de tout ce qu
1933
les Hongrois comme on aime l’enfance : or le rêve
de
l’enfant, c’est de devenir une grande personne. On me l’a dit, c’est
1934
on aime l’enfance : or le rêve de l’enfant, c’est
de
devenir une grande personne. On me l’a dit, c’est vrai : cette ville
1935
ique est aussi l’autre « Rome protestante ». Mais
d’
avoir vu ses profondes bibliothèques et son quartier universitaire tou
1936
euni dans des jardins luisants ne m’empêchera pas
de
m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’Europe. Le hasard
1937
de m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême
de
l’Europe. Le hasard a voulu que j’y entende, un soir, une présentatio
1938
voulu que j’y entende, un soir, une présentation
de
musiques hongroises, turques et chinoises, commentées et comparées pa
1939
Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches
de
l’Asie. En sortant du concert, j’ai erré aux terrasses des hôtels, da
1940
ent en jouant ? Qu’est-ce qu’ils écoutent au-delà
de
leur musique — car aussitôt donnée la phrase, voici qu’une autre vien
1941
nt sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et
d’
un coup la subtilise, ne laissant plus qu’un long silence soutenu, com
1942
rne avec une vertigineuse docilité dans les voies
d’
un amour ineffable et se perd avec lui vers le désert et ses mirages.
1943
vec lui vers le désert et ses mirages. On ne sait
d’
où tu viens, tu ne sais où tu vas, peuple de perdition, Peuple inconnu
1944
sait d’où tu viens, tu ne sais où tu vas, peuple
de
perdition, Peuple inconnu, — mais c’est toi, c’est toi qui l’as caché
1945
eur aux femmes, cet objet dont parfois, au comble
de
la turbulence de tes jeux, un violon décrit vite quelque chose, d’une
1946
et objet dont parfois, au comble de la turbulence
de
tes jeux, un violon décrit vite quelque chose, d’une ligne nette, ins
1947
de tes jeux, un violon décrit vite quelque chose,
d’
une ligne nette, insaisissable, déjà perdue (comme le rêve pendant que
1948
(comme le rêve pendant que bat la paupière lourde
de
celui qui succombe à l’excès du sommeil) — et me voici plus seul, ave
1949
ici plus seul, avec une nostalgie qui ne veut pas
de
la romance à mon oreille d’un violoneux qui me croit triste. Ils l’on
1950
algie qui ne veut pas de la romance à mon oreille
d’
un violoneux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond d’une Inde.
1951
neux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond
d’
une Inde. Ils l’ont égaré, comme ils égarent tout d’un monde où si peu
1952
une Inde. Ils l’ont égaré, comme ils égarent tout
d’
un monde où si peu vaut qu’on le conserve, au long d’un chemin effacé
1953
n monde où si peu vaut qu’on le conserve, au long
d’
un chemin effacé par le vent sur la plaine… Ils l’ont perdu comme un r
1954
sans vider ton verre — il n’y a pure ivresse que
de
l’abandon —, car voici qu’à son tour il s’égare au bras d’une erreur
1955
don —, car voici qu’à son tour il s’égare au bras
d’
une erreur inconnue, ton fantôme éternel, ton « Désir désiré ». 16.
1956
dentes avec, aux jambes, l’imperceptible angoisse
de
rencontrer une onde trop légère. Mais pour connaître un lac, il faut
1957
eau, en faire le tour, mais voilà qui est affaire
de
pur caprice, tandis que s’y baigner est une règle de savoir-vivre ave
1958
pur caprice, tandis que s’y baigner est une règle
de
savoir-vivre avec la Nature. Lac doré, horizon de collines pointues,
1959
de savoir-vivre avec la Nature. Lac doré, horizon
de
collines pointues, rives basses, verdoyantes, toutes fraîches de musi
1960
ntues, rives basses, verdoyantes, toutes fraîches
de
musiquettes et de baigneuses ; quais de Balaton-Füred aux élégances b
1961
s, verdoyantes, toutes fraîches de musiquettes et
de
baigneuses ; quais de Balaton-Füred aux élégances bourgeoises et mili
1962
fraîches de musiquettes et de baigneuses ; quais
de
Balaton-Füred aux élégances bourgeoises et militaires, idylles de jar
1963
aux élégances bourgeoises et militaires, idylles
de
jardins publics à l’écart d’un concert du samedi soir, petits profess
1964
militaires, idylles de jardins publics à l’écart
d’
un concert du samedi soir, petits professeurs entourés de leur famille
1965
ncert du samedi soir, petits professeurs entourés
de
leur famille, et toutes ces Magda, toutes ces Maritza rieuses et déjà
1966
r quelques jours ? On ferait connaissance à table
d’
hôte, on irait ensemble à Tihany — elle a l’air d’être en Italie sur s
1967
d’hôte, on irait ensemble à Tihany — elle a l’air
d’
être en Italie sur sa presqu’île — par cet instable bateau-mouche qui
1968
plutôt emmener ce désir, comme un tendre souvenir
de
voyage, et partir en croyant qu’ici la vie a parfois moins de hargne…
1969
t partir en croyant qu’ici la vie a parfois moins
de
hargne… Déjà je suis repris par le malaise que m’infligent les lieux
1970
! C’est devant une glace panachée qu’il m’arrive
de
douter de la vie, comme d’autres aux approches du mal de mer. À la nu
1971
evant une glace panachée qu’il m’arrive de douter
de
la vie, comme d’autres aux approches du mal de mer. À la nuit, j’ai r
1972
er de la vie, comme d’autres aux approches du mal
de
mer. À la nuit, j’ai rôdé dans la campagne aux collines basses, d’app
1973
, j’ai rôdé dans la campagne aux collines basses,
d’
apparence rocheuse — ce sont des restes de volcans — blanches sous la
1974
basses, d’apparence rocheuse — ce sont des restes
de
volcans — blanches sous la Lune et toutes lustrées de rêches végétati
1975
olcans — blanches sous la Lune et toutes lustrées
de
rêches végétations. J’ai traversé l’angoisse lunaire des villages vid
1976
vides aux portes aveugles (j’avais peur du bruit
de
mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers dans les champs de maïs,
1977
u hasard, j’ai suivi des sentiers dans les champs
de
maïs, épiant la venue d’une joie inconnue. Joie d’être n’importe où…
1978
sentiers dans les champs de maïs, épiant la venue
d’
une joie inconnue. Joie d’être n’importe où… évadé ? Mais soudain, c’e
1979
e maïs, épiant la venue d’une joie inconnue. Joie
d’
être n’importe où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je me he
1980
que je me heurte, comme réveillé dans l’absurdité
d’
être n’importe où. Une panique balaye la nuit déserte jusqu’à l’horizo
1981
maintenant, maintenant, où tu n’es pas — et tant
d’
amour perdu… Un train dormait devant la gare campagnarde. Je me suis é
1982
un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri
de
la lune. Le contrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube
1983
s cauchemars. L’aube m’éveille dans les faubourgs
de
Budapest, cheveux en désordre, pantalon plissé, et cet abruti de cont
1984
eveux en désordre, pantalon plissé, et cet abruti
de
contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j
1985
rs que justement j’allais rattraper, comme un pan
de
la nuit fuyante, un songe où j’ai dû voir l’objet pour la première fo
1986
ais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon
d’
une momie bleuâtre, mais peut-on se reposer vraiment à cent à l’heure.
1987
Lune faire des bonds courts sur la plaine inondée
de
nuit. J’essayais de penser par-dessous le rythme obstiné de cette hur
1988
courts sur la plaine inondée de nuit. J’essayais
de
penser par-dessous le rythme obstiné de cette hurlante bousculade sur
1989
’essayais de penser par-dessous le rythme obstiné
de
cette hurlante bousculade sur place qu’est un voyage en express. Mais
1990
yage en express. Mais je ne trouvais pas la pente
de
mon esprit, et tout en le parcourant avec une soif qui annonçait le d
1991
oif qui annonçait le désert, je traçais des plans
d’
œuvres sablonneuses. Je composais un traité des voyages : les titres e
1992
ais un traité des voyages : les titres en étaient
de
Sénèque ou de Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré Ste
1993
des voyages : les titres en étaient de Sénèque ou
de
Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré Sterne ou Goethe,
1994
e à Gérard de Nerval, je sentais qu’il s’agissait
d’
autre chose… Il s’agit toujours d’autre chose que de ce qu’on dit. (L’
1995
u’il s’agissait d’autre chose… Il s’agit toujours
d’
autre chose que de ce qu’on dit. (L’imprudence de penser dans l’insomn
1996
autre chose… Il s’agit toujours d’autre chose que
de
ce qu’on dit. (L’imprudence de penser dans l’insomnie ! Cela tourne t
1997
d’autre chose que de ce qu’on dit. (L’imprudence
de
penser dans l’insomnie ! Cela tourne tout de suite à la débauche. Not
1998
tourne tout de suite à la débauche. Notre liberté
de
penser est absurde au regard des contraintes que subissent nos gestes
1999
élevait la Morale du domaine des actions à celui
de
la pensée, de l’Apparence à l’Essence. D’un coup, tous les refoulés q
2000
rale du domaine des actions à celui de la pensée,
de
l’Apparence à l’Essence. D’un coup, tous les refoulés qui explosent,
2001
à celui de la pensée, de l’Apparence à l’Essence.
D’
un coup, tous les refoulés qui explosent, le chômage dans la gendarmer
2002
eures désorientées ; le sentiment du « non-sens »
de
la vie n’est-il pas comparable à ce que les mystiques appellent leur
2003
Entre « déjà plus » et « pas encore »… Bon point
de
vue pour déconsidérer nos raisons de vivre. La maladie aussi. Rien ne
2004
»… Bon point de vue pour déconsidérer nos raisons
de
vivre. La maladie aussi. Rien ne ressemble au voyage comme la maladie
2005
part, le même dépaysement au retour. « Il revient
de
loin » signifie qu’il vient d’être très malade. Si dans ta chambre, e
2006
tour. « Il revient de loin » signifie qu’il vient
d’
être très malade. Si dans ta chambre, en plein jour, tu t’endors, et q
2007
voyage est un état d’âme et non pas une question
de
transport. Un vrai voyage, on ne sait jamais où cela mène, c’est une
2008
amais où cela mène, c’est une aventure qui relève
de
la métaphysique plus que de la psychologie. — Une vaste licence poéti
2009
e aventure qui relève de la métaphysique plus que
de
la psychologie. — Une vaste licence poétique… (Voici bien la fatigue
2010
ien la fatigue avec son jeu des définitions)… pas
de
but. — C’est vous qui le dites ! — Vous, naturellement… (Encore un qu
2011
voyage on la regarde mieux. — La vie… (une sorte
de
cauchemar de la pensée, qui ne peut plus s’arrêter de penser). Se peu
2012
regarde mieux. — La vie… (une sorte de cauchemar
de
la pensée, qui ne peut plus s’arrêter de penser). Se peut-il qu’on ch
2013
auchemar de la pensée, qui ne peut plus s’arrêter
de
penser). Se peut-il qu’on cherche le sens de la vie ! Je sais seuleme
2014
êter de penser). Se peut-il qu’on cherche le sens
de
la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon êt
2015
e sais seulement que ma vie a un but. M’approcher
de
mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’a
2016
des miens, j’oubliais ma race, j’avais l’illusion
de
n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre. Ici, comparé à tan
2017
Mais en même temps, j’ai découvert mes puissances
d’
évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe une clef : dél
2018
uvent je pressens qu’il existe une clef : délivré
de
moi, j’entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me perm
2019
oi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait
de
combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument
2020
s dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain
d’
un éclat bleu douloureux, le train ralentit. Hegyeshalom, petite gare
2021
Cependant, « rien à déclarer » après des semaines
de
voyage ? Cela va paraître improbable. On a dû voir sur moi que je le
2022
cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas
de
clefs dans mes onze poches. Seulement ce papier timbré d’un ministère
2023
dans mes onze poches. Seulement ce papier timbré
d’
un ministère… mais déjà l’œil s’éteint, le corps se plie, fait demi-to
2024
tristesse. Mais qu’a-t-on jamais pu « déclarer »
d’
important ? Je ne sais plus parler en vers et la prose n’indique que l
2025
us évidentes. C’est bien pourquoi l’Objet n’a pas
de
nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre
2026
ois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte
de
pierre philosophale. Peut-être ces deux mots suffiraient-ils à l’indi
2027
e m’en parle ? Tout en donnant le change à celles
de
mes pensées qui exigent des apparences positives. Ainsi donc, j’ai ch
2028
iment elle n’existe plus, l’Hermétique Société18
de
ceux qui ne désespèrent pas encore du Grand Œuvre ? Cela seul est cer
2029
seulement qu’aux yeux de ceux qui surent désirer
de
la voir, apparaît la « Loge » invisible. J’attends, j’appelle quelqu’
2030
out ce qu’elle m’a donné ? Cette notion plus vive
d’
un univers où la présence de l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bi
2031
ette notion plus vive d’un univers où la présence
de
l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bien n’ai-je su voir autre cho
2032
u bien n’ai-je su voir autre chose que la Hongrie
de
mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depui
2033
s autres, aimer pour connaître, alors qu’au point
de
perfection, aimer et connaître sont un seul et même acte. Peut-être l
2034
ont un seul et même acte. Peut-être l’ai-je aimée
d’
un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et en qui l’on chérit
2035
’il fallait attendre pour aimer !… Je me souviens
de
ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et d’un désordre
2036
ndre pour aimer !… Je me souviens de ces terrains
de
sable noir, piqués de petits arbres et d’un désordre de maisons basse
2037
me souviens de ces terrains de sable noir, piqués
de
petits arbres et d’un désordre de maisons basses, les dernières de la
2038
errains de sable noir, piqués de petits arbres et
d’
un désordre de maisons basses, les dernières de la ville de Debrecen,
2039
le noir, piqués de petits arbres et d’un désordre
de
maisons basses, les dernières de la ville de Debrecen, au bord de la
2040
et d’un désordre de maisons basses, les dernières
de
la ville de Debrecen, au bord de la Grande Plaine encore rougeâtre de
2041
rdre de maisons basses, les dernières de la ville
de
Debrecen, au bord de la Grande Plaine encore rougeâtre de soleil couc
2042
cen, au bord de la Grande Plaine encore rougeâtre
de
soleil couchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sa
2043
autres semblables, en voyage, je me dis que c’est
de
là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive d’é
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me dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment
d’
absurdité foncière qu’il m’arrive d’éprouver en face d’une action pure
2045
le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive
d’
éprouver en face d’une action purement raisonnable. Ah ! quelle raison
2046
ison t’attirait donc ici, sinon l’espoir bien fou
d’
y retrouver l’émotion d’un miracle imminent… ou moins encore : l’image
2047
, sinon l’espoir bien fou d’y retrouver l’émotion
d’
un miracle imminent… ou moins encore : l’image, née en rêve, d’une pla
2048
imminent… ou moins encore : l’image, née en rêve,
d’
une plaine, d’un couchant plus grandiose au ciel et sur la terre plus
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oins encore : l’image, née en rêve, d’une plaine,
d’
un couchant plus grandiose au ciel et sur la terre plus secret que dan
2050
ton pays. Tu attendais une révélation, non point
de
cet endroit, ni même par lui, — mais à cet endroit, en ce temps… Qui
2051
s cette vie et dans d’autres vies, pour approcher
de
tous côtés un But dont tu ne sais rien d’autre que sa fuite : n’est-i
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procher de tous côtés un But dont tu ne sais rien
d’
autre que sa fuite : n’est-il pas cet Objet qui n’ait rien de commun a
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sa fuite : n’est-il pas cet Objet qui n’ait rien
de
commun avec ce que tu sais de toi-même en cette vie ? Mais le voir, c
2054
bjet qui n’ait rien de commun avec ce que tu sais
de
toi-même en cette vie ? Mais le voir, ce serait mourir dans la totali
2055
nière différence, — car on ne voit que ce qui est
de
soi-même, et conscient… C’est à cause d’un pari peut-être fou, et qui
2056
qui est de soi-même, et conscient… C’est à cause
d’
un pari peut-être fou, et qui porte sur des sentiments indéfinis, à ca
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resses, tu serres des mains, — tu perds les clefs
de
tes valises… (Cela encore : m’arrêter à Vienne à cause des serrures…
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eut-être y passer une nuit — rôder à la recherche
de
Gérard par les rues noires aux palais vides mais hantés, et dans les
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e. 15. Toute l’échelle des ivresses : ivresses
de
la faim, de l’alcool, de la foule, de la solitude, de l’extase. 16.
2060
ute l’échelle des ivresses : ivresses de la faim,
de
l’alcool, de la foule, de la solitude, de l’extase. 16. Expression o
2061
des ivresses : ivresses de la faim, de l’alcool,
de
la foule, de la solitude, de l’extase. 16. Expression où va se réfug
2062
: ivresses de la faim, de l’alcool, de la foule,
de
la solitude, de l’extase. 16. Expression où va se réfugier le dernie
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a faim, de l’alcool, de la foule, de la solitude,
de
l’extase. 16. Expression où va se réfugier le dernier vestige de la
2064
. Expression où va se réfugier le dernier vestige
de
la sensualité des érudits. 17. La fameuse marche de Rakoczy est l’œu
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la sensualité des érudits. 17. La fameuse marche
de
Rakoczy est l’œuvre d’une Tzigane. 18. L’or n’était qu’un prétexte.
2066
ts. 17. La fameuse marche de Rakoczy est l’œuvre
d’
une Tzigane. 18. L’or n’était qu’un prétexte. Déjà une blague de pass
2067
18. L’or n’était qu’un prétexte. Déjà une blague
de
passeport. bj. Rougemont Denis de, « Voyage en Hongrie II », Biblio
2068
jà une blague de passeport. bj. Rougemont Denis
de
, « Voyage en Hongrie II », Bibliothèque universelle et Revue de Genèv
2069
n Hongrie II », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, novembre 1930, p. 577-590.
2070
(novembre 1930)bk Je n’ai jamais cherché rien
d’
autre que d’approcher mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m
2071
930)bk Je n’ai jamais cherché rien d’autre que
d’
approcher mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m’était possi
2072
autre que d’approcher mon sujet, en m’identifiant
d’
aussi près qu’il m’était possible, non seulement au point de vue, mais
2073
nt de vue, mais à la complexion, à la nature même
de
l’auteur, — laissant à l’approfondissement psychologique et aux infle
2074
xions variables du ton chaque fois adopté le soin
de
dégager comme par transparence le jugement implicite que, sur le plan
2075
ansparence le jugement implicite que, sur le plan
de
la qualité pure, je persiste à tenir pour le plus efficace. Ce n’est
2076
Charles Du Bos a placé cette parfaite définition
de
sa manière au seuil de la 4e série de ses Approximations ; elles form
2077
cette parfaite définition de sa manière au seuil
de
la 4e série de ses Approximations ; elles forment, tant par les sujet
2078
définition de sa manière au seuil de la 4e série
de
ses Approximations ; elles forment, tant par les sujets abordés que p
2079
des « approches », le livre le plus significatif
de
son tempérament critique. Le style d’abord : on y retrouve, appliqué
2080
mots, ce même sens à la fois scrupuleux et assuré
de
la qualité, qui est ce qu’avant tout l’on doit admirer chez M. Du Bos
2081
Bos. Et dans l’allure des phrases, le rythme même
de
sa pensée. Parfois certes, un peu gêné par la lenteur de certains méa
2082
ensée. Parfois certes, un peu gêné par la lenteur
de
certains méandres, aimerait-on les sentir moins insistants, moins con
2083
certés. Mais n’est-ce pas là un défaut qui relève
de
la nature même d’un esprit « critique » dans l’exercice de sa probité
2084
-ce pas là un défaut qui relève de la nature même
d’
un esprit « critique » dans l’exercice de sa probité ? Défaut combien
2085
ure même d’un esprit « critique » dans l’exercice
de
sa probité ? Défaut combien plus précieux que l’élégance à bon marché
2086
ropéen. L’envergure en quelque sorte géographique
d’
une telle enquête suppose une Weltanschauung correspondante en profond
2087
ndante en profondeur. Il la possède. On peut dire
de
sa critique qu’elle pose le problème de l’homme dans sa totalité, et
2088
peut dire de sa critique qu’elle pose le problème
de
l’homme dans sa totalité, et c’est je crois l’éloge de choix. Mais de
2089
homme dans sa totalité, et c’est je crois l’éloge
de
choix. Mais de ce problème central, qui déborde le plan esthétique, l
2090
otalité, et c’est je crois l’éloge de choix. Mais
de
ce problème central, qui déborde le plan esthétique, la littérature n
2091
n cas privilégié. Et parce que M. Du Bos ne cesse
de
la soumettre à des contrôles éthiques autant qu’esthétiques, il lui r
2092
utes parts son sujet, M. Du Bos choisit des bases
d’
approche parfois si éloignées, et progresse par des voies si subtiles
2093
subtiles qu’il ne doit qu’à un sens exceptionnel
de
l’orientation dans le monde de l’esprit la sécurité de sa marche vers
2094
sens exceptionnel de l’orientation dans le monde
de
l’esprit la sécurité de sa marche vers le centre d’une œuvre. La méth
2095
orientation dans le monde de l’esprit la sécurité
de
sa marche vers le centre d’une œuvre. La méthode de M. Du Bos est la
2096
l’esprit la sécurité de sa marche vers le centre
d’
une œuvre. La méthode de M. Du Bos est la plus propre à dégager l’élém
2097
sa marche vers le centre d’une œuvre. La méthode
de
M. Du Bos est la plus propre à dégager l’élément spécifique des génie
2098
recréer comme pour son compte, tant il y apporte
de
pressante intuition, les « problèmes » qui contraignirent tel génie à
2099
gnirent tel génie à produire son œuvre. Le danger
de
cette méthode, c’est que, donnant un nom à chaque problème, l’« hypos
2100
l’« hypostasiant » en quelque mesure, elle risque
de
nous laisser l’image d’un auteur plus conscient de ses propres diffic
2101
elque mesure, elle risque de nous laisser l’image
d’
un auteur plus conscient de ses propres difficultés que ne saurait l’ê
2102
e nous laisser l’image d’un auteur plus conscient
de
ses propres difficultés que ne saurait l’être le créateur. Car une te
2103
au critique avant tout, et c’est pourquoi il fait
de
la critique en présence des obstacles qu’il rencontre, là où le créat
2104
osant le problème résolu (Racine), fait une œuvre
d’
art. Ou bien encore, l’artiste, usant de cette sorte de désinvolture q
2105
une œuvre d’art. Ou bien encore, l’artiste, usant
de
cette sorte de désinvolture qui lui est naturelle, confie à des figur
2106
. Ou bien encore, l’artiste, usant de cette sorte
de
désinvolture qui lui est naturelle, confie à des figures le soin hasa
2107
naturelle, confie à des figures le soin hasardeux
de
résoudre ses antinomies (Goethe) ; que si elles y échouent, il rester
2108
stera du moins des personnages ! Mais la grandeur
d’
un Du Bos, n’est-elle pas précisément dans son refus de sacrifier jama
2109
Du Bos, n’est-elle pas précisément dans son refus
de
sacrifier jamais l’éthique à l’esthétique, et dans ce sens chez tant
2110
une autorité aujourd’hui sans secondes : le sens
de
la responsabilité de l’écrivain. bk. Rougemont Denis de, « [Compte
2111
’hui sans secondes : le sens de la responsabilité
de
l’écrivain. bk. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Charles Du Bo
2112
ponsabilité de l’écrivain. bk. Rougemont Denis
de
, « [Compte rendu] Charles Du Bos, Approximations, 4e série », Biblio
2113
s, 4e série », Bibliothèque universelle et Revue
de
Genève, Genève, novembre 1930, p. 656-658.