1 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
1 blement lucide, ce regard en arrière. Montherlant est dur pour ses erreurs plus encore que pour celles de l’adversaire, ce
2 us encore que pour celles de l’adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de b
3 barie, un assez malsain goût du sang. Tout cela s’ est purifié dans le Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous somme
4 e Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas nous tromper en nous inquiétant de faire, à notre plac
5 nt de faire, à notre place modeste, si peu que ce soit pour la paix », c’est une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup
6 x, et d’autres qui tiennent qu’une telle attitude est responsable de ces carnages ». Naguère il était des premiers ; il s’a
7 ude est responsable de ces carnages ». Naguère il était des premiers ; il s’affirme aujourd’hui des seconds. C’est pour avoir
8 t ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’ est -ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de l’auteur du Songe,
9 ore transparaît un doute, parfois : « On craint d’ être injuste en décidant si… cette absence de haine ; cette épouvante, dev
10 des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïques, peut-être t
11 le souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se d
12 Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que de sacrifi
13  » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vérité » qui brûle dan
2 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
14 sychique pur par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonction
15 equel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la
16 ose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée d
17 sthétique ou morale. » (p. 42). Le surréalisme ne serait -il donc qu’une sorte de méthode des textes généralisée ? Point du tou
18 tes généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est la seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par quelles
19 ittérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules i
20 de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. So
21 êveurs. Toute poésie est incommunicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette
22 e poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit . De ces faits, je tire cette conclusion pratique : inutile de publier
23 ecettes pour faire un poème » cette mystification est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de fa
24 de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient -elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l
25 ds trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’ être parfaitement impénétrables. Je crois même voir que M. Breton serait u
26 t impénétrables. Je crois même voir que M. Breton serait un très curieux poète s’il ne s’efforçait de donner raison aux 75 pag
27 s où il voulut nous persuader que tout poème doit être une dictée non corrigée du Rêve. Je reconnais à chaque ligne de Poiss
28 sonnements. Plaisante ironie, si cette attitude n’ était qu’une protestation contre nos poncifs intellectuels. Mais elle risqu
29 riaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’ est pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont les causes semblent
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
30 de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France sur Van Gogh, depuis 1
31 ntient pourtant des vues assez neuves. M. Colin s’ est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle m
32 s critiques s’en dégagent avec évidence. Van Gogh fut une proie du génie. L’homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu
33 génie. L’homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de ces jeunes gens préte
34 le, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en e
35 ême : « Il y a quelque chose au-dedans de moi. Qu’ est -ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont de gauches copies de
36 Qu’est-ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont de gauches copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute p
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
37 vel. Car si la liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète aussi. On s’étonne de ce que Fabre, discipl
38 quidation des questions traitées est rapide, elle est complète aussi. On s’étonne de ce que Fabre, disciple de Valéry, puis
39 s si bouillonnants, si mal équarris. Certes, ce n’ est pas lui qui se refuserait à écrire — comme le fait son maître : « La
40 quise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indispensable, mais il s’en permet d’autres qui le sont moins
41 ndispensable, mais il s’en permet d’autres qui le sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser des ma
42 nde pas non plus au puissant boxeur sur le ring d’ être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du brasseur d’af
43 e rustique de France ». En effet — le phénomène n’ est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir
44 e n’est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des capitalistes
45 ’y manque-t-il ? Un style ? L’absence de style, n’ est -ce pas le meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois,
46 t et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que le roman soit mal construit, au contraire. Mais
47 ère partie, qui est confuse. Non pas que le roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se relâche parfo
48 f-d’œuvre d’ailleurs, il reste que le Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste que Lucien Fabre a
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
49 cuments. La littérature de ces dernières années n’ est qu’une forme de reportage international. L’Europe menant cette immens
50 t qu’on en parle, la vraie « question asiatique » étant une question politique. On peut prévoir que si le bouddhisme jouit un
51 es pour s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que
52 Schlumberger le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’esprit occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa
53 on qui n’a de sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’une extraordinaire
54 — qui composent ce gros volume. Les points de vue sont si différents, si différentes même les conclusions tirées de points d
55 ment que la question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le christianisme, religion missionnaire, ne peut nou
56 conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’ être pas suffisamment motivées par des faits et des documents. Pour beauco
57 faits et des documents. Pour beaucoup, l’Orient n’ est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massis, par exemp
58 es autres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suf
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
59 e de solitude (septembre 1925)f « Dès que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue q
60 embre 1925)f « Dès que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le c
61 sant raccourci psychologique. « Tout homme normal est fait de plusieurs fous qui s’annulent », écrit-il. Ce fou qui veut êt
62 fous qui s’annulent », écrit-il. Ce fou qui veut être soi purement, qui veut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par
63 oi purement, qui veut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par l’extérieur, — ce fou que nous portons tous en nous, — 
64 ement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée.
65 nt. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’en est pas moin
66 e. Artificielle comme toute expérience, elle n’en est pas moins probante. Une œuvre d’art que ce petit livre ? C’est avant
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
67 Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison pa
68 de entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’ être un peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moi
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
69 personnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation d
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
70 n prologue (septembre 1925)j M. Valéry Larbaud est vraiment un étonnant esprit. Pour présenter au public français cette
71 gement, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer un
72 tive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’ est que dans sa discrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera la mes
73 nalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnag
74 -il pas que les personnages des trois nouvelles «  sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se d
75 ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volonté d’ être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent êtr
76 -mêmes dans leur pure volonté d’être ou de ne pas être … ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une
77 e… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être , subissent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnal
78 o, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils sont , le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une
79 es affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionnées, Raquel et Catherine, ou cet Alexandr
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
80 a pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’ est -il pas trop tard pour parler du Vinet de M. Seillière, de ce nouveau
81 originale de la plupart des idées dont lui-même s’ est fait le moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des roma
82 ques. Dirai-je pourtant que je crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à gauchir légèrement la pe
83 me » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’ est pas sans gêner M. Seillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur
84 otestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’ est plus protestant qu’une telle attitude ? Mais ces réserves sont de peu
85 testant qu’une telle attitude ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si l’on songe au service que M. Seillière nous re
86 ’un Maurras ou que celle d’un Maritain. Son unité est plus réellement profonde, son point d’appui plus central. Pour notre
87 exaspérés, pour notre nouveau mal du siècle, il n’ est peut-être pas de pensée plus vivante, ni de plus tonique que celle de
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
88 ervielle, Gravitations (décembre 1925)l « Quel est celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où
89 passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels ? » Une voix lente aux
90 lente aux méandres songeurs, une simplicité qui n’ est pas familière. C’est bien la poésie d’une époque tourmentée dans sa p
91 anecdote purement poétique dans un monde qu’il s’ est créé. Jamais banal, il est parfois facile : la description du monde q
92 dans un monde qu’il s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile : la description du monde qu’il invente nous lasse qua
93 ter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. Rougem
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
94 de forme et traditionaliste d’inspiration, comme fut celle des Yeats, Synge, Joyce même… Trois noms qui permettent, je cro
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
95 éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus riche pouvait-on rêver pour un
96 la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans
97 it pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et perd connaissance
98 és, à chaque instant, d’explosion. Le géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrasser ou me tuer ?
99 ’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le juif survient avec une méthode simplifiée
14 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
100 saisissement profond et la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète quelques chefs, montre à qu
101 mal. Quant aux meneurs de l’opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général,
102 bien qu’un Romier, un Bainville, quelques autres, sont parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux batail
103 rtance à leurs tentatives morales, si singulières soient -elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou rai
104 vées par une même tempête. L’unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude. Barrès et Gide : ils on
105 nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont tous éperdument égoïstes. Égoïstes avec une profonde conviction ; par
106  ; par vertu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu c
107 projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin si général
108 e est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le héros de son roman, de se
109 our s’amuser : ni pour amuser un public. Un livre est une action, une expérience. Et, le plus souvent, sur soi-même. On écr
110 des possibilités neuves, — pour le libérer. Il n’ est pas question de rechercher ici les origines historiques d’une concept
111 mner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet la
112 e jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’ est trompée, puisqu’elle seule permet la suivante qui peut-être retrouver
113 naissance intégrale et culture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtem
114 n et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possibles. Exaltation méthod
115 hodique de nos facultés de plaisir : déjà nous en sommes à cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances le
116 sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé. Dégoût, parce qu’on se connaît trop, et que plus rien ne reti
117 d. Révolution toujours ». « Pour nous, le salut n’ est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et quelles prières
118 sans la brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’ est complu dans son dégoût ; mais jusqu’au point d’y percevoir comme un a
119 en vain sa Révélation : « C’est peut-être que je suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché enco
120 s médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché encore à se regarder chercher, absorbant son attention d
121 is à l’encontre de son dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, com
122 us sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux qu’il e
123 en finissent pas de peindre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant
124 adoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et plus immorale, parce qu’aucune ne s’est auta
125 lus morale et plus immorale, parce qu’aucune ne s’ est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthi
126 ul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une morale qui « déforme », qui mutile une tenda
127 onnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seulement légitime à leurs yeux, mais « tabou » ; et c’est vertu
128 et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’emportent, il est plus facile et
129 clair que les tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser que de construire.
130 ilité, et bien que nous niions toute vérité, nous étions dominés par le sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre
131 rtyre… Cette lassitude facile à juger du dehors n’ était pas ce qu’il y a vingt ans on nommait blasé. Rien n’était émoussé en
132 s ce qu’il y a vingt ans on nommait blasé. Rien n’ était émoussé en nous, mais pouvions-nous faire abstraction du plan intelle
133 e et Aragon nous montrent le même personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité » interdit de commettre aucu
134 re aucun acte volontaire et raisonné parce que ce serait fausser quelque chose ; à la merci des circonstances extérieures qu’i
135 stera caractéristique de notre époque. Mais Gide est responsable d’une autre méthode de culture de soi, « d’intensificatio
136 déjà une singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni
137 incre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’ est pas si douce encore, n’est pas si bonne que de céder à vous, désirs,
138 si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’ est pas si bonne que de céder à vous, désirs, et d’être vaincu sans batai
139 st pas si bonne que de céder à vous, désirs, et d’ être vaincu sans bataille. On voit assez à quel genre de sophismes conduit
140 par sincérité qu’on mentira, puisque parfois nous sommes spontanément portés à mentir. On en vient naturellement à considérer
141 lisme comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de par
142 part de nos jeunes moralistes. Le mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter à son excès toute chos
143 lique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux,
144 nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La luc
145 de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de celui qui n’a pas dormi et qui « assiste
146 ensations, à ses automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le
147 t de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui, parce que nous somme
148 mplète contre celle d’aujourd’hui, parce que nous sommes à bout. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier l’immense effort
149 quoi beaucoup sacrifièrent leur jeunesse. (« Nous sommes une génération de cobayes » remarque Paul Morand.) Il faut agir, ou b
150 es » remarque Paul Morand.) Il faut agir, ou bien être agi. Donner une conscience à l’époque, ou se défaire avec elle et dér
151 s 9 !) Quelques jeunes hommes l’ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour lutte
152 a soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de choisir parmi leurs i
153 eurs instincts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a l’eau claire
154 uviennent de penser en fonction du temps présent, soit qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer tota
155 u concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’ était développé en nous un goût furieux de l’expérience humaine. » (Aragon)
156 expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les roma
157 ragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous empêche secrètement de construire
158 construire et de nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi, on v
159 quiétude. 8. « Certaines expériences littéraires sont plus dangereuses que des expériences réelles » (Marcel Arland). 9. C
160 des expériences réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins
161 la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Moscou qu’à Montparnasse. D’ailleurs leurs théories nou
15 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
162 prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la pass
163 us les actes une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes de famille
164 d’analyses de démences mystiques ; mais tout cela est sublimé dans un monde poétique où il paraît inconvenant d’introduire
165 lleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Jean Jo
16 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
166 iques et les vieilles dames à principes. Voilà, n’ est -ce pas, un amusant sujet de conte moral, avec ses personnages un peu
167 vent plus généreuse que neuve, et qui eût gagné à être mise en action plutôt qu’en commentaires. Le talent de Mme de Wattevi
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
168 e, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaigne encor
169 n s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. »
170 encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
171 eu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’exemples vivants qu’un véritable r
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
172 iaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’est jamais moins qu’en vers. Sa plus
173 ur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’ est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est
174 en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est le Secret professionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beau
175 iques. Mais quelle intelligence, et dont l’audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les
176 en d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vi
177 e passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture
178 achine luisante et tournante. L’esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance mécanique et de rapidité.
179 e vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles sont sans parfum, ne se faneront pas. t. Rougemont Denis de, « [Compte
20 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
180 ration surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à des symboles équivoques et, quoi qu’ils en disent, « artisti
181 — avec une intelligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monol
182 monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur s
183 e « élan mortel ». Cette inversion de tout ce qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une in
184 e procès », une intelligence qui se dégoûte, tel est le spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu
185 e que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le co
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
186 la grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une catastrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de
187 rd’hui une catastrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usur
188 e use et conduit lentement l’usure des milliers d’ êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles de travai
189 nt l’usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’ est plus adaptée aux conditions nouvelles de travail ou de repos, ni dans
190 te 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant « la ville est une image puissante qui actionne notre esprit » après avoir été créée
191 puissante qui actionne notre esprit » après avoir été créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Ur
192 la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s’est d’ailleurs inspiré de lui dans
193 n plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s’ est d’ailleurs inspiré de lui dans son fameux discours aux édiles de Rome
194 n fameux discours aux édiles de Rome). Urbanisme est une étude technique et un pamphlet dont l’argumentation serrée éclate
195 , du ciment armé. « Notre monde comme un ossuaire est couvert des détritus d’époques mortes. Une tâche nous incombe, constr
196 100 à l’heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et minces en regard de leur hau
197 hitecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie
198 pportunisme anarchique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Crée
199 mineux à la place de nos cités congestionnées, ce serait peut-être tuer au soleil des germes de révolution. Déjà des ingénieur
200 des germes de révolution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « 
201 homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera la passion du siècle ». v. Rougemont De
202 tecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera la passion du siècle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
203 ar les générations précédentes. Parce qu’elles se sont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne les condamne pas d’un «
204 gatives. La critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses essais sur Proust, Pater et Stendhal. Certe
205 essais sur Proust, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie,
206 autre me paraît liée à cette confusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes d
207 Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne s’en sui
208 Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses beaucoup trop absolues. M. Fernandez
209 de prouver par exemple que l’œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après quoi il écrit : « II y a,
210 ncevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l’œuvre n’ est -elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis amorcer ici
211 ions qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont
212 héorie de la « garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait sol
213 orie assez proche du cubisme littéraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter les confusions qui sont en
214 d’adopter, si l’on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le
215 re au genre le plus encombré et le plus impur qui soit . On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à
216 à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfois agaçant de pressentir sous l’expression trop technique ou obs
217 , mais péniblement comprimées. Ce défaut de forme est peut-être inhérent, dans une certaine mesure, au genre de critique pr
218 s de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissement d’une éthique adaptée a
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
219 lesquels, pour communier, il faudrait sans doute être né sous le signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beau
220 s doute être né sous le signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de défauts bien agaçants pour sa souv
221 en agaçants pour sa souveraine désinvolture. Elle est tonique comme le spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
222 us les allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans le
25 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
223 oètes, dissertent sur leurs fantaisies ? Ç’aurait été si délicieusement invraisemblable… Mais ce cœur fatigué se reprend à
224 parfois et nous fait regretter que l’auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique assez neuf. z. Ro
26 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
225 urope à un Français qui lui répond de Chine. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes : le Chinois s’étonne non sans quelq
226 où l’idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le monde, ma
227 social « comme une adroite fêlure ». Notre morale est entièrement subordonnée à l’action ; notre individualisme en naît log
228 al de l’Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifice. Sans doute, cette « absurdité essentielle
229 ui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’ est -il pas de position plus périlleuse, puisqu’elle risque de ne laisser
27 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
230 reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerr
231 grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut , voici parmi trop de talents intéressants, un écrivain qui s’impose a
232 itable « mythologie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est pas sans rappeler c
233 est une suite de promenades dont la composition n’ est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui per
234 de nuit, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’ est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plu
28 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
235 les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-mêmes pour que ce mot, ce geste, soient possibles. C’e
236 t délivrés d’eux-mêmes pour que ce mot, ce geste, soient possibles. C’est d’Armande surtout qu’on les attendrait, plus franche
237 ais combien cette analyse trahit Barbey : son art est justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulem
238 ne image qu’on garde comme un pressentiment. Ce n’ est qu’à force de discrétion dans les moyens qu’il parvient à une certain
239 Paysages tristes et sans violence, autour de ces êtres dont la détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous
240 ns violence, autour de ces êtres dont la détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des dehors trop polis
241 ont la détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé le livre de Barbe
242 cendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est admirable, dont la brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’u
29 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
243 L’on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une ins
244 ’une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comp
245 enir, qu’il manifeste en toute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiellement c
246 ait dans Proust, si les passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidiennes. Il se connaît assez pour
247 t, si les passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidiennes. Il se connaît assez pour savoir ce qui
248 gidiennes. Il se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas n
249  ratages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non san
250 nce où souvent l’on finit. Et peut-être l’amour n’ est -il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n’a pas exté
251 à se faire souffrir rejette l’un vers l’autre ces êtres égoïstes, et fonde lentement leur amour, à force de petites blessures
252 nt leur amour, à force de petites blessures. Ce n’ est pas le moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombre q
253 morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres , le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrèt
254 », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes anomalies ont
255 ecrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cet
256 autaine. Que la composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on hésite à en faire reproche à l’auteur.
257 à l’auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’inflation litt
258 oublier que ce livre d’une résonance si humaine, est mieux que charmant, — douloureux et désinvolte, glacé, passionné. a
30 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
259 boutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’ est plu à relever les indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vie
260 d’un homme qui en sait long… Et, certes, il faut être un peu mage pour porter tant de richesses avec cette mélancolique grâ
261 mélancolique grâce. Si quelques-uns de ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié
262 ais elle a dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confidences qu’elle livre si facilement au hé
263 rgueilleuse raison à nous tromper sur tout ce qui est profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré ». M. Jalo
264 tient entre ces deux inconscients : l’époque et l’ être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éclate
265 nne ne peut juger du drame qui se joue entre deux êtres , personne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans l’Âge d’or, un d
266 dans l’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fan
31 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
267 ge sur les générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans la crise moderne. M.
268 de l’absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a
269 ésumer en deux mots : inquiétude ou foi. Dès lors sont -elles vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le che
270 es vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’ étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude au
271 l’inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’ est -elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase qui formule admirablement
32 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
272 rofond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition que pour
273 montant son dégoût, le père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régne
274 ourne, méprisant : « Mais oui, je ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner d’êtr
275 on connaît mon orgueil : osez donc me condamner d’ être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin que
33 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
276 ort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétude actuelle. Sous coul
277 pour s’en délivrer peut-être. Cette sincérité ne serait -elle à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond
278 ilieu bourgeois, et l’on voit bien que l’auteur n’ est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La si
34 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
279 me certaines herbes. Capitale de la douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus
280 es syllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. R
281 il voudrait bien nous faire croire que le diable est l’auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bord des verre
282 ne femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Quelque chose, tout de même, de laqué
35 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
283 pensée d’apologie, ou même simplement un besoin d’ être aimés qui faussaient leurs voix pour les rendre plus touchantes. Celu
284 t infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’ est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encore dans le fond
285 s des morceaux très divers qui composent ce livre sont bien mauvais, à côté d’autres magnifiquement jetés. Mais cette imperf
286 ui la rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de rencontrer chez les jeunes écrivains français un homm
287 s maîtres comme Keyserling, Ferrero, commencent à être prises au sérieux en France par quelques jeunes gens. Il faut louer D
288 eu d’avoir échappé au surréalisme en tant qu’il n’ est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en gard
36 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
289 ger, vous lui dites que, « d’abord », son livre n’ est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que le lyrisme des noms géograph
290 semble aujourd’hui que ce globe dans son voyage «  est arrivé à un endroit de l’éther où il y a du bonheur ». Vous reconnais
291 du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard est un peu responsable de cette douceur de vivre. Déjà vous ne niez plus
292 visage s’assombrit un peu. « Tous nos ennuis nous seraient épargnés si nous ne regardions que les jambes des femmes », dit-il, p
293 oir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’on n’ est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à Paterne
294 es cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, car voici « l’heure des petits arbres pourpres, l’he
37 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
295 ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures, — et dans l’aban
296 nseur de ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être … Un homme médite à côté du corps de son ami suicidé pour une femme qu
297 eux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir viennent troubl
298 vissantes amours d’adolescents. Et c’est Un vieil été . Cette nouvelle, très supérieure aux deux autres, est une réussite ra
299 Cette nouvelle, très supérieure aux deux autres, est une réussite rare par la justesse de l’observation autant que par la
300 avi de tant d’adresse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences av
38 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
301 et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait parler mieux que personne d
302 hèse de l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne
303 que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît comme une de ces âmes mystiques et raffinées
304 ilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’ était pas un objet de songe mais d’expérience ». Mais une telle « expérienc
305 Mais une telle « expérience », je crois, ne peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somme inutile : parce qu
306 ience », je crois, ne peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somme inutile : parce qu’ils possèdent déjà, au
307 e peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somme inutile : parce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurément,
308 zetiers ; au cœur de ces sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont
39 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
309 . Bien sûr, c’est cela, le malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pas embarrassé du tout pour v
310 et si facultative », je me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette attitude scientifique, vis-à-vi
311 ène littéraire. La « Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peut-être moins convaincantes certaine
312 nspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp
313 — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’il était de taille à affronter d’autres dédales ! Mais il a su mettre plus de
314 il n’y paraît d’abord dans ces 50 pages. Beaucoup sont excellentes et leur facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est
315 . Beaucoup sont excellentes et leur facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec l’espr
316 une secrète complaisance à se regarder vivre qui est bien d’aujourd’hui — entre autres. ap. Rougemont Denis de, « [Comp
40 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
317 e ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’ est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve aux premier
318 re et sa richesse. L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle sub
319 iatisé, vaguement prétendant au trône de Pologne, est plutôt d’un mémorialiste. Madame Bibesco y montre beaucoup de liberté
320 sez peu intéressante à vrai dire, parce qu’elle n’ est pas à l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la techniqu
321 récède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouvailles spirituelles, mal
322 spirituelles, malicieuses ou poétiques ; et ce n’ est pas qu’il ne s’y glisse quelque préciosité ou quelques « pointes » fa
41 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
323 oir en Jules Verne qu’un précurseur ? Jules Verne est un créateur, dont les inventions se suffisent et suffisent à notre jo
324 ons se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne f
325 sent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et
326 i sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a
327 iennent de merveilleux calembours, où les savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des mers adorer l
328 ythes modernes, du seul écrivain dont l’influence soit comparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les détenus des m
329 N’en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous sommes dans une civilisation qui, selon l’expression de Jules Verne désabusé
330 e ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons -nous longtemps encore dupes d’une conception de la littérature si péd
331 de nos plus grands conteurs sous prétexte qu’il n’ est styliste ni psychologue ? Laisserons-nous Jules Verne aux enfants ? J
332 s ? J’allais oublier que la littérature enfantine est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui ne m’empêchera pas d’y mon
333 monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo soit à bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que La Liberté. ar.
334 ne Nemo soit à bord, je soupçonne que ce bateau n’ est autre que La Liberté. ar. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Mar
42 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
335 Aragon, Traité du style (août 1928)as Ce n’ est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de
336 séquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est même un des très rares parmi les jeunes qui ait vraiment donné quelqu
337 des gens qui ne m’intéressent pas ou bien qui ne sont pas atteints par ces épithètes drôles ou quelconques. Mais la seconde
338 s ou quelconques. Mais la seconde partie du livre est admirable ; il suffit. Le titre ne ment pas ; ce livre traite du styl
339 te du style, à coups d’exemples qui méritent de l’ être . Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthod
340 s Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exemple, plus efficace. Aragon
341 bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait , par exemple, plus efficace. Aragon se retourne sans cesse pour crier
43 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
342 naturellement vers l’action, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or ces ennemis de toute littérature vo
343 à cela dans une époque où les valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalistes ont leur
344 onsabilité là-dedans ; leur défense de l’esprit s’ est bornée jusqu’ici à une rhétorique très brillante contre un état de ch
345 participent plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan qui no
346 e positive de ce qu’il y a sous cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’
44 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
347 emps — argent, races — et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y d
348 pour l’une ou l’autre de ces attitudes. (Elles ne sont pas essentiellement contradictoires : elles représentent deux manière
349 forme abstraite et poétique. Mais cette fois tout est concrétisé en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’il décrive la vie i
350 art du détail où se révèle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, s
351 parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus sensible. Et il ne se borne pas à
352 e récit coloré et précis, admirablement objectif, est aussi, mais à coups de faits, une discussion d’idées. Il est surtout
353 mais à coups de faits, une discussion d’idées. Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux
354 écue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’ell
355 rine est décisif : « La Révolution… tout ce qui n’ est pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite, l’absurde retrouve ses
356 sif : « La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite, l’absurde retrouve ses droits. C’es
45 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
357 s de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’ est -ce point trop demander à une existence bien indécise, que son échec m
358 sion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’ est pas forcément prince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien le
359 qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’ est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il
360 Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ; mais à gra
361 ence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusi
362 res proposeraient de moins jolis mots ; mais ce n’ est pas la moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre at
363 réussir un livre attrayant sur une vie manquée n’ était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès l’a résolu d’une façon fort a
46 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
364 aines scènes terrifiantes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il subjug
365 de la révolution : il a été condamné à mort, il s’ est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par c
366 ique confession qui doit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclus
367 connu de semblables mythomanes. Le cas méritait d’ être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se soit borné à une cou
368 exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se soit borné à une courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont le mérit
369 uvelle, d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifier ni préci
370 , d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est d’ être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à l
371 tout, peut conduire à préférer un mensonge qui n’ est , hélas, qu’une déformation de cette réalité détestée. Le mythomane br
47 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
372 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légèremen
373 ette autobiographie tellement au sérieux que j’ai été bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un homme d
374 et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance à une allure libre
375 perspectives saisissantes sur l’époque. Anderson est avant tout un poète, un homme qui aime inventer et que cela console d
376 nent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait être, avec sa
377 notre maison. Voici un de ces passages où il sait être , avec sa verve doucement comique, si émouvant : « À cette époque je c
378 ndardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré un jour comme le grand tueur de son époque ? Rendre impuiss
379 à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’assassinat du corps hu
380 cte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographi
381 te dans son autobiographie que son désir constant était que tous les hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le r
382 ui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford p
383 e rendu] Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, jan
48 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
384 Saisir (juin 1929)ay Ce petit livre de poèmes est comme une initiation au silence. Il faut s’en approcher avec une douc
385 ate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste im
386 saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’ est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière : « Tout semblait vivr
387 ’un insistant regard. » Le poète des Gravitations est ici descendu plus profond en soi-même ; son art y gagne en densité, e
388 uce et virile ; et quel beau titre ! « Saisir » n’ est -ce point l’acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est
389 essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’ est -elle pas proprement « saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ic
49 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
390 ges (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’ est à personne paru l’année dernière — un livre assez troublant et qu’on
391 isme, à notre cher romantisme. La Clef des songes est de nouveau une dérive fantaisiste dans ce monde un peu plus léger, un
392 ard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bizarres avec lesquels il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Han
393 venirs attristés par le temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheurs qui signifient plus de déses
394 e que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux dernières pages du livre, un peu am
395 peu amers… On voudrait un livre de Cassou qui ne serait fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci de vraisemblance extér
396 e tout souci de vraisemblance extérieure ; qui ne serait qu’invention, qui inventerait sa vérité. Ce serait un de ces miracles
397 erait qu’invention, qui inventerait sa vérité. Ce serait un de ces miracles de liberté dont nous avons besoin pour croire que
398 us avons besoin pour croire que le monde actuel n’ est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre de Jean Cassou, et
50 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
399 d l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notr
400 yance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour fai
401 bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût -ce que pour faite honte à ceux qui sont encore capables d’une telle h
402 temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui sont encore capables d’une telle honte, de leur indifférence à l’endroit d
403 elle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’ être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de l
404 roit de l’être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didac
405 rgisse pas plus une question aussi centrale — qui est , si l’on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hosti
406 ée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s’ est montré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à l’état sauvage »,
407 ’état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’ est pas plus admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicis
408 e, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, conformément au texte original.
51 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
409 da, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’ est plus l’heure de venir prendre position dans un débat où les voix les
410 ntéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure. Je s
411 répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philosophi
412 « mène loin… dans l’ordre moral ». Et quand cela serait  ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de p
413 l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M. Benda disti
414 x que le monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue
415 ue de la raison ratiocinante tout comme si elle n’ était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’ente
416 de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’auda
417 impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’impossibl
418 agon. Et Daudet nous apprend que « le petit Benda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactement celles qu’il
419 enda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactement celles qu’il fallait attendre de ces auteurs. Ce qu’on ne
420 même qui paraît anarchique dans un monde où tout est bon à quelque chose, où rien plus n’est tenu pour vrai que relativeme
421 e où tout est bon à quelque chose, où rien plus n’ est tenu pour vrai que relativement à un rendement. Rien, pas même la rel
52 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)
422 s vous ne tarderez pas à remarquer que tout, ici, est original, indigène, tant l’allure des sentiers qui vous mènent tranqu
423 de nouvelles sources. Il défriche et il fabrique, soit qu’il se décrive comme un lieu de miracles le plus souvent malencontr
53 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Kikou Yamata, Saisons suisses (mars 1930)
424 trop dépourvues… Cette charmante « japanisation » est rehaussée d’une douzaine de lithographies de Meili. Ce peintre se mon
54 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Jullien du Breuil, Kate (avril 1930)
425 ’ils expriment sans doute inconsciemment et qui n’ est rien de moins qu’une conception nouvelle de l’amour-passion : il appa
55 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu (septembre 1930)
426 Maldoror. De 1870 jusqu’à la guerre son influence fut « quasi nulle », et peut-être va-t-il rentrer dans l’ombre après avoi
427 eut-être va-t-il rentrer dans l’ombre après avoir été pendant quelques années l’idole et l’auteur-tabou du surréalisme. M.
428 d’indépendance. Il dégage le sujet de l’épopée qu’ est Maldoror — la révolte de l’homme contre son Créateur — et il analyse
429 ns profondément que ses devanciers. Son sadisme n’ est pas beaucoup plus « horrible » que celui des rêveries de certaines pu
430 res, M. Pierre-Quint montre en quoi cette révolte est puérile et insuffisante. Une fois de plus, l’intelligence apporte la
431 réamont ne va pas à la cheville de Rimbaud. (Ce n’ est pas avec un Dieu pour rire que Rimbaud est aux prises, et il n’a cure
432 (Ce n’est pas avec un Dieu pour rire que Rimbaud est aux prises, et il n’a cure de cette littérature que Ducasse s’épuise
433 té d’esprit dont il témoigne en maint endroit, se soit laissé quelque peu impressionner par le fanatisme des disciples et im
434 et imitateurs du « comte ». D’autres que lui s’y sont trompés. M. Gide déclarait naguère qu’il fallait voir en Lautréamont
56 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie I (octobre 1930)
435 dormeur au fil de l’eau Où s’asseoir ? Le pont est encombré de jambes de dormeuses ; il faudrait réveiller tant de beaut
436 me demandent où je n’ai pas dormi. Le seul refuge est à l’avant, parmi des cordages, des chaînes, sur un banc humide, — jus
437 fin contre soi l’eau de ce beau Danube jaune qui est le plus inodore des fleuves. Dormir. Sans avoir pu retrouver cette mé
438 s adressée en cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatigué, je vais au lit… » C’était au vestiaire, il enfilait une manc
439 pardessus, me donnait l’autre à serrer, la main n’ étant pas encore sortie… Dormir au fil de l’eau, entre l’étrange nuit d’un
440 es, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme aux voûtes sombres, qui est un C
441 s une grande maison calme aux voûtes sombres, qui est un Collège célèbre. 2. La recherche de l’objet inconnu Personne
442 roise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends je
443 emps cette angoisse. J’irai chercher moi-même, me suis -je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sai
444 ion terrible, tout de suite : « Mais qui, mais qu’ êtes -vous venu chercher jusque chez nous ? » On me demandera donc toujours
445 ssè-je les inventer… Ah ! l’embarras de voyager n’ est rien auprès de celui d’expliquer pourquoi l’on est parti. Cependant,
446  Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes , m’écrié-je, mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin d
447 eignirent sur les traits de mes auditeurs. — Vous êtes , me dit-on, un amateur de troubles distingués. Peu de sens du réel. M
448 nous avons repassé un grand pont vibrant et nous sommes rentrés en Europe. Mais dès le lendemain, m’échappant du programme, i
449 nt ne pas voir qu’un lieu qui porte un nom pareil est par là même extraordinaire. Celui qui ne croit pas à la vertu des nom
450 noms reste prisonnier de ses sens ; mais celui-là est véritablement voyageur qui n’a pas renoncé à convaincre le réel de my
451 sychologues appellent une conduite magique. Or il est délicieux de réaliser une idée fixe injustifiable : c’est le plaisir
452 surchauffée, entre des murs assez hauts dont l’un est peut-être la façade d’une chapelle ; mais la porte est fermée. Par un
453 eut-être la façade d’une chapelle ; mais la porte est fermée. Par une ouverture étroite on passe ensuite à une seconde terr
454 ctères turcs brodés en or. L’histoire de Gül Baba est racontée sur un papier jauni encadré et fixé au mur. Gül Baba est le
455 un papier jauni encadré et fixé au mur. Gül Baba est le dernier héros musulman qui ait fait parler de lui en Hongrie. Il s
456 as levés, dirige la circulation de Pest. Gül Baba est moins théâtral). D’ailleurs le tombeau est vide. Et les babouches ? P
457 l Baba est moins théâtral). D’ailleurs le tombeau est vide. Et les babouches ? Pas de babouches. Je sais bien que ce n’est
458 bouches ? Pas de babouches. Je sais bien que ce n’ est pas l’heure de visiter : le Père des roses est peut-être allé se prom
459 n’est pas l’heure de visiter : le Père des roses est peut-être allé se promener. Dehors, les roses crimson sentent le souf
460 . Trente degrés à l’ombre. Ce sanctuaire indigent est plutôt inexplicable que mystérieux. Aussi, la confusion des noms ne c
461 s le quotidien. Car, en somme, le Prophète Chauve est devenu le jardinier du Rozsadomb… Mais qu’eussè-je pu contempler de p
462 u’en tout autre, un non-conformisme intransigeant serait la seule conduite féconde. Il me semble que la servitude de l’homme m
463 ose une livrée. — « Je comprends, me dit-on. Vous êtes pour la fantaisie, c’est bien joli !… » — Non, Monsieur, ce n’est pas
464 aisie, c’est bien joli !… » — Non, Monsieur, ce n’ est pas joli, ce n’est pas fantaisie. Je parle simplement de vérité et de
465 oli !… » — Non, Monsieur, ce n’est pas joli, ce n’ est pas fantaisie. Je parle simplement de vérité et de mensonge, opposant
466 une simple question de sentiment… C’est que vous êtes déjà bien malade. Il perd le sentiment, disait-on, du temps que l’on
467 emps à perdre ! » s’écrie le lecteur, et comme il est , lui, de l’autre école, il referme ces pages et vaque à ses devoirs.
468 er une crise, bref, sans le payer cher. Tout cela est langage de bourse. Pour moi, je poursuivrai mon discours en faveur de
469 former de cette irrécusable vérité : les affaires sont les affaires, axiome qui constitue à leurs yeux ma condamnation et ce
470 à ces moutons. 5. Café amer En Hongrie l’on est assailli par le pittoresque, mais il s’agit de le déjouer au moyen de
471 — elle n’a rien d’étrange, si l’on songe que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que je trouve ce raisonnement fin, encore
472 si l’on songe que nous sommes en Hongrie. Et ce n’ est pas que je trouve ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je m
473 juste, mais si je me défends du pittoresque, ce n’ est qu’amour jaloux du merveilleux, avec quoi l’on est trop souvent tenté
474 st qu’amour jaloux du merveilleux, avec quoi l’on est trop souvent tenté de confondre le bizarre. C’est le faux merveilleux
475 faux merveilleux qui a discrédité le vrai, lequel est quotidien, circonspect, souvent microscopique, moralement microscopiq
476 oscopique. (Il a tellement l’air de rien que nous sommes presque excusables de ne le point apercevoir.) Je vais cependant dire
477 r un long corridor hanté d’ombres drapées, qui ne sont pas des nonnes, bien que les voûtes soient celles d’un ancien couvent
478 , qui ne sont pas des nonnes, bien que les voûtes soient celles d’un ancien couvent. Nous pénétrons dans une grande salle vive
479 ne banquette longe trois des parois, la quatrième est occupée en partie par le comptoir (un écriteau porte simplement ce ta
480 ou trois tables avec des verres et des bouteilles sont placées au hasard dans l’espace vide où tourne la fumée des cigares.
481 tte fumée, les yeux à terre, dans l’attente. Nous sommes assis autour d’une table et nous voyons, au milieu de la salle, un ar
482 rès coup des transitions, et c’est alors que l’on est tenté de mentir, si fort tenté que l’on cède à coup sûr, en se persua
483 ersuadant que c’est pour des raisons techniques. ( Est -ce que cela ne devrait pas, au contraire, aggraver le cas ?) Or l’int
484 rai cadeau. Si le conteur ment, — pendant qu’il y est , il ferait mieux de choisir un autre pays que la Hongrie archi-connue
485 e, et seulement à condition de lui ressembler, ne fût -ce que de loin, — c’est alors ce qu’on appelait un paradoxe, du temps
486 s sentimentales plus que documentaires, peut-être serait -il bon que je parsème ce texte de quelques noms impossibles et de bea
487 le lecteur superficiel aurait l’impression que je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soi
488 e je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, —  étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît infiniment baro
489 e parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît infiniment baroque, à peine compréhensib
490 mpréhensible, car on ne choisit pas un sujet : on est sujet. Et tout ceci n’est rien que le voyage du Sujet à la recherche
491 oisit pas un sujet : on est sujet. Et tout ceci n’ est rien que le voyage du Sujet à la recherche de son Objet, — en passant
492 y voici, en cette Hongrie… Le tombeau de Gül Baba est symboliquement vide. Quant à l’arbre de Noël, il ne devait à nulle pe
493 je m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux ce que je vois. Ruse
494 gnats en taxis La place Saint-Georges, à Bude, est une place vraiment royale. Vide, elle prend toute sa hauteur. Silenci
495 saint Étienne. Auprès du porche du Palais, ils n’ étaient guère qu’une centaine de curieux, et quelques gardes. Traversant dans
496 voisin qui a la tête de François-Joseph, dont il fut peut-être valet, nomme à leur passage les Karolyi, les Festetics, les
497 , ses intérêts. Mais, en Hongrie, le nationalisme est une passion toute nue, qui exprime l’être profond de la race. On ne d
498 onalisme est une passion toute nue, qui exprime l’ être profond de la race. On ne discute pas cet amour, on ne réfute pas cet
499 , on ne réfute pas cette haine. Ici, la sympathie est un devoir de politesse. Comment la mesurer sans mauvaise grâce à qui
500 volé les deux tiers de notre patrie ? » Ah ! ce n’ est pas vous, maintenant, qui allez demander raison à vos hôtes de la faç
501 eurs ; que si les populations des régions perdues étaient parfois en majorité roumaines ou slovaques, la minorité hongroise y c
502 é hongroise y comptait cependant pour plus ; elle était seule active et créatrice. Le reste : des porteurs d’eau… Dans l’inex
503 qui emporte la sympathie car l’orgueil hongrois n’ est point de ce que l’on gagne sur autrui, mais de ce que l’on est ; non
504 ce que l’on gagne sur autrui, mais de ce que l’on est  ; non point d’un parvenu, mais d’un aristocrate. Tous dangers égaux d
505 les Hongrois n’ont pas perdu le sentiment qu’ils sont en scandale au monde moderne. Voilà ce qu’on ne dit pas dans les dépê
506 de plus, passent à côté de l’essentiel13. Rien n’ est grave, que le sentiment, — en politique comme ailleurs. Songez à ce q
507 ples ressemble à celle des individus, pour ce qui est du moins, de mentir à soi-même. Mais les Hongrois ne renient pas leur
508 imaginations absurdes et de souffrances vraies, n’ est -ce point le climat de la passion ? — C’est celui de la Hongrie14.
509 te chimérique, mais qu’on peut croire bien près d’ être comblé dans ce pays où les courtiers ne donnent pas encore le ton. La
510 ent pas encore le ton. La littérature hongroise n’ est guère connue à l’étranger que par quelques pièces légères de Molnár,
511 hongrois » dans un style académique qui me paraît être le contraire du style hongrois. Il y a aussi une extrême gauche, et s
512 auvage, social ou futuriste, et dont la « furia » serait assez hongroise… Mais l’expression la plus libre et la plus vivante d
513 nie littéraire de cette race me paraît bien avoir été donnée par le groupe important du Nyugât (l’Occident), revue fondée p
514 y et Michel Babits. Ady, le sombre et pathétique, est mort à 35 ans, mais sa ferveur anime encore ces écrivains profondémen
515 de goûts et de curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef de file. Des amis m’emmènent le voir à Esztergóm,
516 voir à Esztergóm, où il passe ses étés. Esztergóm est la plus vieille capitale de la Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. A
517 ur que les vents ne l’emportent pas. L’après-midi est immense. Nous buvons des vins dorés et doux que nous verse Ilonka Bab
518 dorés et doux que nous verse Ilonka Babits (elle est aussi poète, et très belle), nous inscrivons nos noms au charbon sur
519 fouille la plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est , je grimpe au cerisier sauvage, derrière la maison, un peintre tout e
520 les vignes, ah ! qu’il fait beau temps, l’horizon est aussi lointain qu’on l’imagine, tout a de belles couleurs, le poète s
521 ce dans l’air… 12. Rappelons que notre société est fondée sur la peur du risque. 13. Il faut ajouter aux autres causes
522 se qu’ils ne peuvent pas déjouer, car le Hongrois est ingénument rusé, à la façon des passionnés, non point à celle des arr
523 eul Clerc qui n’ait pas trahi — qui me paraissent être la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre
524 la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin cet état d’esprit que j’admire est, ent
525 rre, puisque enfin cet état d’esprit que j’admire est , entre autres, belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne pas l’êtr
526 que j’admire est, entre autres, belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne pas l’être ? Mais je crois que les pacifistes q
527 elliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne pas l’ être  ? Mais je crois que les pacifistes qui veulent assurer la paix par la
528 nt assurer la paix par la mutilation des passions sont disciples d’Origène. Il doit y avoir d’autres solutions… bh. Rougem
57 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la folie (octobre 1930)
529 re 1930)bi L’année du centenaire du romantisme sera celle aussi de la découverte de Hölderlin par la France. La Mort d’Em
530 e moins que les Poèmes cette impression bizarre d’ être d’aujourd’hui. C’est qu’elle est de demain plutôt, — tout comme Nietz
531 ssion bizarre d’être d’aujourd’hui. C’est qu’elle est de demain plutôt, — tout comme Nietzsche qui en fut obsédé. Empédocle
532 t de demain plutôt, — tout comme Nietzsche qui en fut obsédé. Empédocle est de ces mythes tels qu’il n’est peut-être pas do
533 tout comme Nietzsche qui en fut obsédé. Empédocle est de ces mythes tels qu’il n’est peut-être pas donné à une race d’en cr
534 obsédé. Empédocle est de ces mythes tels qu’il n’ est peut-être pas donné à une race d’en créer plus d’un, c’est-à-dire de
535 onçut l’homme rationnel ; Empédocle, au contraire est celui qui passe toutes les mesures de l’esprit humain, parle aux dieu
536 par excellence, germanique ; mythe païen, mais il est bien troublant de le voir se mêler, dans la troisième version de ce d
537 t-être des poètes français, c’est que son lyrisme est l’expression d’une philosophie à l’état naissant ; il est la vibratio
538 pression d’une philosophie à l’état naissant ; il est la vibration même d’une pensée en travail de mythes, sur lesquels, bi
539 tre seulement d’une plus faible… Le grand poète n’ est jamais abandonné par lui-même ; il peut au-dessus de lui-même, s’élev
540 , bien superficiellement qualifiée de bourgeoise, est en réalité la garantie spirituelle qui lui permet de « s’élever au-de
541 i-même aussi loin qu’il le veut ». Mais Hölderlin est sans doute d’une constitution trop faible pour pouvoir longtemps maît
542 ore palpiteront de pâles lueurs réminiscentes. Ce sont les quatrains du temps de la folie, poèmes véritablement « posthumes 
543 s dans la langue fluide mais jamais abstraite qui est celle de ses Noces. Jouve est le plus « germanique » des poètes franç
544 amais abstraite qui est celle de ses Noces. Jouve est le plus « germanique » des poètes français d’aujourd’hui ; ce sont le
545 rmanique » des poètes français d’aujourd’hui ; ce sont les harmoniques éveillées en lui par la voix de Hölderlin qui ont dû
546 erlin qui ont dû l’inciter à l’acte recréateur qu’ est la traduction d’un poète par un autre poète. Les quatrains sont ici p
547 tion d’un poète par un autre poète. Les quatrains sont ici précédés de Fragments dont je me demande s’il était bien légitime
548 ici précédés de Fragments dont je me demande s’il était bien légitime de les traduire. On a respecté scrupuleusement les « bl
549 t, le sens des poèmes de la maturité de Hölderlin est à chercher dans leur rythme seulement, — si ces mots séparés par des
550 , il apparaît que la traduction de tels fragments est illusoire, car on ne peut songer à remplacer ces mots-notes par des s
551 es de valeur rythmique équivalente. Quoi qu’il en soit , et tels qu’ils nous sont ici livrés, ces fragments sont capables d’é
552 ivalente. Quoi qu’il en soit, et tels qu’ils nous sont ici livrés, ces fragments sont capables d’éveiller le sentiment rare
553 t tels qu’ils nous sont ici livrés, ces fragments sont capables d’éveiller le sentiment rare et grandiose que j’appellerais
554 choisis et traduits à la suite des poèmes, ils ne sont pas ce que ce petit livre contient de moins bouleversant. bi. Roug
58 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie II (novembre 1930)
555 ’orgueil errant, de conquêtes vagues… Tout ce qui est de la terre renonce à s’affirmer en détails précis, se masse dans une
556 erpente dans un de ces paysages de nulle part qui sont les plus émouvants, entre des collines basses grattées par les vents,
557 imes qu’à cette heure on sent bien que poursuivre est une sorte d’enivrant péché. — Nous aurions une maison dans ce désert
558 de tout amour pour quelque bien particulier où je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s
559 des beaux-arts Ils n’ont plus de noms, ils ne sont qu’une ivresse aux cent visages, lorsque j’entre dans l’atelier du pe
560 lier du peintre. Je ne tarde pas à oublier ce qui est lent ou fixe ou pas-à-pas. Tout s’épanouit dans un monde rythmé, fusa
561 . J’observe que les paroles autant que les gestes sont gouvernées par la seule logique d’un rythme constamment imprévu. Il s
562 etit caillou. Ici, le sens des mots et des choses est celui d’un courant musical qui domine l’ensemble et le compose selon
563 la sciure ou dans le gâtisme. On trouve que ça n’ est pas distingué, et en effet, que serait un lyrisme distingué ? Il faut
564 ouve que ça n’est pas distingué, et en effet, que serait un lyrisme distingué ? Il faut choisir entre les bonnes manières et l
565 t… Le vertige (la peur et l’amour du vertige). Qu’ est -ce qu’il y aurait de l’autre côté ? Se laisser choir dans le Gris ? R
566 e ! Mais vous, derrière ma tête, Sans Noms, ça ne sera pas encore pour cette fois. 13. Chansons hongroises Les Suisses
567 des lieder de l’Oberland : ici la mélancolie même est passionnée. Elles chantent avec le corps entier — non pas avec les br
568 un désir de perdition illimitée… Les Hongrois se sont arrêtés dans cette plaine. Mais c’est le soir au camp, perpétuel. Un
569 s, et toute la frénésie d’un grand souffle qui se serait mis à tourbillonner sur place. 14. L’amour en Hongrie (généralités
570 t les saucisses ou les catastrophes, selon qu’ils sont techniciens ou intellectuels. Les Français aiment par goût d’en bien
571 nscience. À Vienne on voit des couples qui savent être à la fois cocasses et fades. En Italie… Mais l’amour hongrois t’empor
572 Symphonie-Dichtung borodinesque, mais l’erreur n’ est imputable qu’à mon instabilité rythmique. (Trop souvent ce que je voi
573 traverse ce que j’entends.) La plaine hongroise n’ est pas monotone, parce qu’elle est d’un seul tenant. Rien qui fasse répé
574 laine hongroise n’est pas monotone, parce qu’elle est d’un seul tenant. Rien qui fasse répétition. C’est ici le premier pay
575 ande grouillante de questions sociales. La Puszta est une terre vierge, je veux dire que la bourgeoisie ne s’y est pas enco
576 re vierge, je veux dire que la bourgeoisie ne s’y est pas encore répandue. Il y a peu de bourgeois en Hongrie. Il y a de pe
577 es moyens — c’est-à-dire au-dessus du Moyen — qui est caractéristique du Hongrois. — « Comment peux-tu vivre si largement ?
578 ndre à toutes les terrasses de Debrecen. Debrecen est une sorte de ville indescriptible, à demi mêlée aux sables de la plai
579 n me l’a dit, c’est vrai : cette ville historique est aussi l’autre « Rome protestante ». Mais d’avoir vu ses profondes bib
580 compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’ étais aux marches de l’Asie. En sortant du concert, j’ai erré aux terrasses
581 els, dans le grandiose bavardage des Tziganes. Qu’ est -ce qu’ils regardent en jouant ? Qu’est-ce qu’ils écoutent au-delà de
582 iganes. Qu’est-ce qu’ils regardent en jouant ? Qu’ est -ce qu’ils écoutent au-delà de leur musique — car aussitôt donnée la p
583 vague toujours un peu plus haute que profonde ne fut l’attente, et lâche tout. C’est l’âme qui joue aux montagnes russes,
584 ous a paru beau, en faire le tour, mais voilà qui est affaire de pur caprice, tandis que s’y baigner est une règle de savoi
585 st affaire de pur caprice, tandis que s’y baigner est une règle de savoir-vivre avec la Nature. Lac doré, horizon de collin
586 hôte, on irait ensemble à Tihany — elle a l’air d’ être en Italie sur sa presqu’île — par cet instable bateau-mouche qui nagu
587 qu’ici la vie a parfois moins de hargne… Déjà je suis repris par le malaise que m’infligent les lieux faciles. Ô tristesse
588 ne aux collines basses, d’apparence rocheuse — ce sont des restes de volcans — blanches sous la Lune et toutes lustrées de r
589 maïs, épiant la venue d’une joie inconnue. Joie d’ être n’importe où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je me heurte
590 e je me heurte, comme réveillé dans l’absurdité d’ être n’importe où. Une panique balaye la nuit déserte jusqu’à l’horizon. O
591 t’appelle là-bas, maintenant, maintenant, où tu n’ es pas — et tant d’amour perdu… Un train dormait devant la gare campagna
592 n train dormait devant la gare campagnarde. Je me suis étendu dans un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri de la lu
593 i dû voir l’objet pour la première fois — ou bien était -ce un être ? 17. Insomnie J’éteignais la lampe et la veilleuse
594 objet pour la première fois — ou bien était-ce un être  ? 17. Insomnie J’éteignais la lampe et la veilleuse me rendait
595 obstiné de cette hurlante bousculade sur place qu’ est un voyage en express. Mais je ne trouvais pas la pente de mon esprit,
596 e composais un traité des voyages : les titres en étaient de Sénèque ou de Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré
597 t de suite à la débauche. Notre liberté de penser est absurde au regard des contraintes que subissent nos gestes. Imaginer
598 isie s’en tire avec une volte-face.) Quelle heure est -il ? La Lune se tient assez bien depuis un moment, c’est que la ligne
599 t assez bien depuis un moment, c’est que la ligne est droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’aime ces heures dé
600 entées ; le sentiment du « non-sens » de la vie n’ est -il pas comparable à ce que les mystiques appellent leur désert, — cet
601 ur. « Il revient de loin » signifie qu’il vient d’ être très malade. Si dans ta chambre, en plein jour, tu t’endors, et que,
602 hant plus en quel endroit du temps tu vis, — c’en est fait, toutes choses ont revêtu cet air inaccoutumé qui signale que tu
603 naccoutumé qui signale que tu es parti. Voyager — serait -ce brouiller les horaires ? Le voyage est un état d’âme et non pas un
604 er — serait-ce brouiller les horaires ? Le voyage est un état d’âme et non pas une question de transport. Un vrai voyage, o
605 r pour découvrir ce sens ! — Qu’as-tu vu que tu n’ étais prêt à voir ? — Mais il fallait aller le voir ! La vie est presque pa
606 à voir ? — Mais il fallait aller le voir ! La vie est presque partout la même… — Mais en voyage on la regarde mieux. — La v
607 seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’avais l’il
608 iens, j’oubliais ma race, j’avais l’illusion de n’ être rien que… moi-même. Identique à mon centre. Ici, comparé à tant d’aut
609 écouvre localisé dans un type humain. Immobile, j’ étais presque infiniment variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui me f
610 rmettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un être ? L’Objet ?
611 seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un être  ? L’Objet ? — Est-ce que je dors dans mes pensées ? La veilleuse fleu
612 ument tragique… Une chose ? Un être ? L’Objet ? —  Est -ce que je dors dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain d’un é
613 faudrait sortir à l’air frais, mais chaque porte est obstruée par un douanier, tant qu’à la fin on me refoule dans mon com
614 qu’à la fin on me refoule dans mon compartiment. Est -ce encore un rêve ? Je comprends bien qu’il faudrait ouvrir ces valis
615 es aveux complets. J’ai le feu à la tête, mais je suis innocent puisque enfin il n’est pas dans ma valise, ce n’est que trop
616 la tête, mais je suis innocent puisque enfin il n’ est pas dans ma valise, ce n’est que trop certain. Cependant, « rien à dé
617 t puisque enfin il n’est pas dans ma valise, ce n’ est que trop certain. Cependant, « rien à déclarer » après des semaines d
618 r sur moi que je le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans mes onze poches. Seulement ce papier ti
619 en pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre philosophale. Peut-être
620 n’a pas de nom. Parfois je me suis demandé s’il n’ était pas une sorte de pierre philosophale. Peut-être ces deux mots suffira
621 désespèrent pas encore du Grand Œuvre ? Cela seul est certain : qu’il existe des signes. Peut-être faut-il d’abord les déco
622 prendre par la main. Ainsi je quitte la Hongrie. Serait -ce là tout ce qu’elle m’a donné ? Cette notion plus vive d’un univers
623 Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depuis toujours ce qu’une fois l’on aimera. Et
624 ors qu’au point de perfection, aimer et connaître sont un seul et même acte. Peut-être l’ai-je aimée d’un amour égoïste, com
625 t-être l’ai-je aimée d’un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et en qui l’on chérit surtout ce dont on manque : to
626 e et dont personne ne vit… Et certes un tel amour est un amour mineur. Mais qui saura jamais la vérité sur aucun être ? Et
627 mineur. Mais qui saura jamais la vérité sur aucun être  ? Et s’il fallait attendre pour aimer !… Je me souviens de ces terrai
628 e Plaine encore rougeâtre de soleil couchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant
629 ant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécurité. Pr
630 esse, quelque similitude… Oh ! bien peu ! Mais qu’ est -ce que ce voyage, si tu songes à tous les espaces à parcourir encore
631 But dont tu ne sais rien d’autre que sa fuite : n’ est -il pas cet Objet qui n’ait rien de commun avec ce que tu sais de toi-
632 sais de toi-même en cette vie ? Mais le voir, ce serait mourir dans la totalité du monde, effacer ta dernière différence, — c
633 dernière différence, — car on ne voit que ce qui est de soi-même, et conscient… C’est à cause d’un pari peut-être fou, et
634 tu n’as vu l’enjeu qu’un seul instant — nos rêves sont instantanés — que tu es parti ; et maintenant tu joues ce rôle, tu t’
635 — lit-on dans les upanishads. — Or si un homme n’ est pas satisfait dans la lune, celle-ci le libère (le laisse aller chez
636 le laisse aller chez Brahma) ; mais si un homme y est satisfait, la Lune le renvoie sur Terre en forme de pluie. » Si je tr
637 uire. (Aussitôt je commence à comprendre ce qu’il est  : cela qui me rendrait acceptable ce monde…) Malheur à celui qui ne c
638 té des érudits. 17. La fameuse marche de Rakoczy est l’œuvre d’une Tzigane. 18. L’or n’était qu’un prétexte. Déjà une bla
639 de Rakoczy est l’œuvre d’une Tzigane. 18. L’or n’ était qu’un prétexte. Déjà une blague de passeport. bj. Rougemont Denis d
59 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Charles Du Bos, Approximations, 4e série (novembre 1930)
640 mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m’ était possible, non seulement au point de vue, mais à la complexion, à la n
641 , je persiste à tenir pour le plus efficace. Ce n’ est peut-être pas fortuitement que M. Charles Du Bos a placé cette parfai
642 à la fois scrupuleux et assuré de la qualité, qui est ce qu’avant tout l’on doit admirer chez M. Du Bos. Et dans l’allure d
643 sentir moins insistants, moins concertés. Mais n’ est -ce pas là un défaut qui relève de la nature même d’un esprit « critiq
644 a critique européenne, l’ampleur du champ qui lui est naturellement nécessaire suffirait à l’indiquer. Mais ce qui l’établi
645 out ensemble lui conviennent. On le conçoit, ce n’ est pas là se rendre la tâche facile. Cernant de toutes parts son sujet,
646 rs le centre d’une œuvre. La méthode de M. Du Bos est la plus propre à dégager l’élément spécifique des génies qu’elle « ap
647 cient de ses propres difficultés que ne saurait l’ être le créateur. Car une telle conscience appartient au critique avant to
648 ste, usant de cette sorte de désinvolture qui lui est naturelle, confie à des figures le soin hasardeux de résoudre ses ant
649 des personnages ! Mais la grandeur d’un Du Bos, n’ est -elle pas précisément dans son refus de sacrifier jamais l’éthique à l