1 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
1 rt… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de parti
2 ues. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terriblement l
3 g. Tout cela s’est purifié dans le Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas nous tromper en n
4 bref soupir s’y résignent, puis tablent sur eux, et d’autres qui tiennent qu’une telle attitude est responsable de ces ca
5 te sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils trouvaient au front. D’une phrase, il j
6 « Ranimons ces horreurs pour les vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’est-ce pas une éclata
7 dre ». N’est-ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de l’auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent »
8 Mais Montherlant se redresse vite, frappe du pied et repart. Vers quels buts ? On verra plus tard. L’urgent c’est d’avance
9 s ? On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contrair
10 Il va chercher le souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuv
11 eaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vérité » qui brûle dans son templ
12 ple intérieur, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de tou
13 humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont.
14 les morts de Verdun  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1925, p. 380-382.
2 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
15 a moins que la significative pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style brillant et elliptique qui tend à deven
16 logique et morale qu’il révèle. Le style brillant et elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne, — si propre à éga
17 une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m
18 ur une grande part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert,
19 feste du surréalisme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1925, p. 775-776.
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
20 onnu bien d’autres de ces jeunes gens prétentieux et sincères qui se croient une vocation, végètent dans des œuvres d’évan
21 choisi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque cho
22 , il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Col
23 Paul Colin, Van Gogh  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1925, p. 1033.
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
24 guère en province liquider des stocks américains. Et ses romans, c’est aussi une liquidation : les faits s’y pressent et s
25 st aussi une liquidation : les faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation d’artiste ou de psycho
26 n en trois volumes sans y laisser des maladresses et des négligences. Mais on ne demande pas non plus au puissant boxeur s
27 en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des capitalistes des villes. Mais dans une de ces provinces du Midi o
28 and roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et brûlant, une intrigue puissante, des personnages d’une belle richesse
29 ois, une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que
30 aire. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou
31 ine puissance. Il reste que Lucien Fabre a tenté, et en somme, réussi, une entreprise bien téméraire de nos jours : un rom
32 abre, Le Tarramagnou  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1151-1152.
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
33 e manifeste son génie méthodique, son universelle et inépuisable curiosité. Mais, de même que la France interrogeant l’Eur
34 erling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, i
35 les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que
36 êtés se font de l’Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’as qu’une valeur de symbole », a dit A
37 dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’
38 l, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à sa logique. » On confond Japon et Arabie, Indes et Chine sous une d
39 e à sa fièvre et à sa logique. » On confond Japon et Arabie, Indes et Chine sous une dénomination qui n’a de sens que par
40 à sa logique. » On confond Japon et Arabie, Indes et Chine sous une dénomination qui n’a de sens que par rapport à l’Europ
41 points de vue semblables, qu’un esprit analytique et organisateur d’occidental se perdra ici dans un ensemble kaléidoscopi
42 rdra ici dans un ensemble kaléidoscopique d’idées et de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l
43 scopique d’idées et de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain
44 utres attribuent cette supériorité au machinisme, et la déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie,
45 eux qui repoussent une Asie ignorante du thomisme et ceux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une
46 ux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’adoucira. Il y a ceux qu
47 ne peut nous donner qu’une supériorité provisoire et qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin c
48 sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinent toutes ces opinions ; et ceux qui avouent n’en point avoir,
49 qui refondent et combinent toutes ces opinions ; et ceux qui avouent n’en point avoir, sincérité trop rare… Presque toute
50 de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des documents. Pour beaucoup, l’Orient n’est qu’un prétexte à variati
51 ormule qui, je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Orient ou cherche
52 difiant ses gratte-ciel comme des tours de Babel, et une Asie immobile dans sa méditation éternelle. e. Rougemont Denis
53 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1152-1154.
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
54 out une démonstration ; mais, puissante de sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Sp
55 sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du styl
56 la densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que fr
57 entative de solitude  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
58 u naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola et Ibsen, Tolstoï, Hauptmann et Maeterlinck. On trouve au tableau des au
59 Fischer publia Zola et Ibsen, Tolstoï, Hauptmann et Maeterlinck. On trouve au tableau des auteurs édités depuis lors les
60 ceux des maîtres du renouveau idéaliste allemand et viennois, Hesse, Hofmannsthal… Les extraits de ces auteurs qui compos
61 e que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons pl
62 erlag, Almanach 1925  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1162-1163.
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
63 osphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’il sait en sortir parfois — M. Otto Flakei a gardé
64 tir parfois — M. Otto Flakei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe
65 to Flakei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parc
66 avoir conservé une vision générale de notre temps et un évident besoin d’impartialité. Son art bénéficie de cette vision.
67 uses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discut
68 mais leurs actions sont les meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de petites touches précises d
69 nge vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, ver
70 assé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège
71 de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pa
72 suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre
73 ison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Flake, Der
74 Flake, Der Gute Weg  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « 
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
75 Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)j M. Valéry Larbaud est vraiment un ét
76 œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplair
77 aux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionnées, Raquel et Catherine, ou cet Alexandro Gomez cynique et p
78 muno sont ces femmes dures et passionnées, Raquel et Catherine, ou cet Alexandro Gomez cynique et puissant de confiance en
79 quel et Catherine, ou cet Alexandro Gomez cynique et puissant de confiance en soi, qu’une volonté presque inhumaine tortur
80 en soi, qu’une volonté presque inhumaine torture et conduit au crime. Et s’ils s’imposent comme types, c’est encore et un
81 té presque inhumaine torture et conduit au crime. Et s’ils s’imposent comme types, c’est encore et uniquement par leur obs
82 me. Et s’ils s’imposent comme types, c’est encore et uniquement par leur obsédante volonté. Car on imagine difficilement u
83 es, d’une classique sobriété mais d’une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désol
84 u] Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
85 aires et un prologue  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1164.
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
86 sa grande étude sur les rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillière cherchait dans l’époque romantique un tém
87 turiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois
88 ant que je crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à gauchir légèrement la pensée de Vinet pour
89  sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas sans gêner M. Seillière. C’est peut-être pourquoi il i
90 té la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudois. Vraiment, tout ce qui semble viable et huma
91 rand vaudois. Vraiment, tout ce qui semble viable et humain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé.
92 ral. Pour notre époque déchirée entre un thomisme et un nihilisme exaspérés, pour notre nouveau mal du siècle, il n’est pe
93 la pensée française  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, octobre 1925, p. 1797-1798.
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
94 i-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? »
95 rlent avec des mots de tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche les morts… « …
96 ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il
97 autes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui
98 vielle, Gravitations  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1560.
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
99 sance d’une littérature nationale à la fois cause et effet de la libération politique. Cause, puisque pour mener à chef ce
100 t produire qu’une littérature très neuve de forme et traditionaliste d’inspiration, comme fut celle des Yeats, Synge, Joyc
101 y ne fait pas. Car elle veut éviter l’emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisienne. C’est un
102 athie malicieuse qui anime ses amusants portraits et ses commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de ren
103 me irlandaise en laquelle s’allient une fantaisie et un réalisme également lyriques. m. Rougemont Denis de, « [Compte r
104 ry, L’Île des bardes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567.
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
105 man quelques mois avant que n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus
106 a révolution dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de
107 t l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et perd connaissance chaque fois que le récit doit sauter quelques semai
108 , tremblait si fort qu’il avait peur de trébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quel
109 moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid que ses dent
110 traîna jusqu’à l’angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans
111 ole, La Cité secrète  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567-1568.
14 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
112 e bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un
113 s choisir encore entre un ressaisissement profond et la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiè
114 à quelques meneurs aveugles d’une société affolée et ridiculement opportuniste où mène la pente de notre civilisation. Men
115 e où mène la pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des financiers, des industriels. Il y a enco
116 endra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, —  et mettre qui à la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens
117 à répéter que nous vivons dans le chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du siècle, hors un cert
118 vivons dans le chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du siècle, hors un certain « confusionnis
119 profondeur : c’est une unité d’inquiétude. Barrès et Gide : ils ont construit des édifices très différents de style, et do
120 construit des édifices très différents de style, et dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux
121 ébattent les mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et
122 brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération d
123 Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles gén
124 chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieu
125 que convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les séparer. On n’écrit p
126 public. Un livre est une action, une expérience. Et , le plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour
127 . On écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libé
128 t responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison nouvelle de le
129 il en tirait une raison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époq
130 re quelques conséquences. Connaissance intégrale et culture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature m
131 expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisem
132 ilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possi
133 s à cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des
134 été essayé. Dégoût, parce qu’on se connaît trop, et que plus rien ne retient. (Or on ne crée que contre quelque chose, co
135 vilisation qui aboutit logiquement à cet épuisant et forcené gaspillage : la guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût
136 : la guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde en
137 égitime le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour n
138 ulle part… » « Je comprends la révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu », disait Drieu la Rochelle. Mais il
139 ettre à manger, tout de même nous avons un corps, et c’est très beau, Breton, de crier « Révolution toujours » — tant qu’i
140 tant qu’il y a des gens pour vous faire du pain ; et c’est très beau, Aragon, de ne plus rien attendre du monde, mais on v
141 brutaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qu
142 cide, hésite, trébuche, oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du
143 ntre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et , déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitudes fragme
144 nchantement qui l’amène au besoin d’une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus, Marcel Arland, — plus jeune, il
145 idément nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en
146 Il serait temps de faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux posit
147 t dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les pa
148 re et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque
149 ertes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et plus immorale, parce qu’aucune ne s’est autant attachée à chercher da
150 seulement légitime à leurs yeux, mais « tabou » ; et c’est vertu que de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi o
151 iser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il es
152 — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tend
153 ndances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser que de construire. Et l’on y pren
154 enivrant de se laisser glisser que de construire. Et l’on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en
155 es heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’
156 à repousser avec horreur tout argument d’utilité, et bien que nous niions toute vérité, nous étions dominés par le sens d’
157 lan intellectuel sur lequel tout apparaît inutile et vain ? Je cite ces phrases, tirées d’un récit d’ailleurs admirable4,
158 les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises,
159 rt des romans de jeunes qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent le même personnage : un être sans foi, à qui une
160 ité » interdit de commettre aucun acte volontaire et raisonné parce que ce serait fausser quelque chose ; à la merci des c
161 galement ; n’attendant rien que de ses impulsions et contemplant avec une lucidité parfois douloureuse ses propres actes d
162 culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », les pousser
163 une chose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si
164 , n’est pas si bonne que de céder à vous, désirs, et d’être vaincu sans bataille. On voit assez à quel genre de sophismes
165 iversel, désir de violences, gratuité des pensées et des actes, rêves éveillés, tout cela ne dérive-t-il pas d’une fatigue
166 mense. Nous voyons se fausser le rythme des jours et des nuits à mesure que se développe une civilisation mécanicienne. (L
167 eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de l
168 état presque inhumain de celui qui n’a pas dormi et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations, à ses automatismes. En ar
169 n des états les plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellem
170 ; retrouver le sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du corps et de l’âme ; voul
171 es proportions ; rééduquer les instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction comp
172 ations par l’absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup sacrifièrent leur jeunesse. (« Nous so
173 ne conscience à l’époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (mais avant de s’y perdre, quelles r
174 té ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas la culture ; sans autre parti pris que celui de vivr
175 e, c’est-à-dire de construire ; sobres de langage et maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de pensée vala
176 erté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de chois
177 encore dans l’attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait
178 s’en vont « épiant toutes les émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le t
179 res, en compose d’un seul coup une grande misère, et par ce moyen nous met tout d’abord en présence, non de nous-mêmes, ma
180 . En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’est une manière d’agir
181 me moderne nous empêche secrètement de construire et de nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’idéal goethéen 
182 u de tout composer en soi, on veut tout cultiver, et en fait l’on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude.
183 ux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois, et peut-être Drieu la Rochelle, s’il voulait…) o. Rougemont Denis de,
184 u, beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, ma
185 érature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1926, p. 311-319.
15 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
186 ers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une hist
187 re. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, intense et tragique comme un couchant d’automne, émouvante
188 histoire de passion mystique et de crime, intense et tragique comme un couchant d’automne, émouvante encore après tant d’a
189 risé par les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystèr
190 qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la re
191 on de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve
192 Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir h
193 Un chapitre d’observation psychologique ironique et minutieuse, à la Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à un
194 hique. Mais tout cela baigne dans le même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions inconscientes qui don
195 ans le même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions inconscientes qui donnent à tous les actes une sign
196 es comme Rousseau sur les droits de la passion, —  et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque littéralement d’une
197 Paulina semble parfois un peu trop « classique » et prévue, l’originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c
198 ent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] P
199 Jouve, Paulina 1880  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 530-531.
16 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
200 uerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-le aux prises avec u
201 vra portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet
202 moral, avec ses personnages un peu conventionnels et l’invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que
203 ’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui eût gagné à être mise en action plutôt qu’en commentaires. Le tal
204 La Folie de l’espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 531.
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
205 muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est moins fatig
206 qui fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâill
207 t l’Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller en public. On connaît le danger… r. Rougemont
208 , Spicilège ironique  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
209 roman. La profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fati
210 trait commun à presque toutes les femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est une vétille. s. R
211 aire Rivier, L’Athée  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
212 le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret prof
213  : ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans do
214 e faudrait-il préciser ce qu’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour
215 i dépasse de beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exerci
216 ts exercices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont l’audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien
217 e la lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l
218 sse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-o
219 peinture, en musique. Suppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas,
220 x projecteurs convergent sur une machine luisante et tournante. L’esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d
221 arme admirable de précision, d’élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Coc
222 e c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Barrès, sur
223 renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles sont sans
224 au, Rappel à l’ordre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661-662.
20 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
225 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse mo
226 plupart en sont encore à des symboles équivoques et , quoi qu’ils en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus le menson
227 iqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition r
228 ». Cette inversion de tout ce qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une intelligence parv
229 effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorai
230 us la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il le coura
231 Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, Mon corps et moi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926
232 el, Mon corps et moi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 662-663.
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
233 1926)v Nous disons adieu aux charmes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un déc
234 ’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau. Or « la grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujo
235 pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est
236 tion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant « la ville est une image puissante qui actionne notre esprit
237 lace au croisement des préoccupations esthétiques et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation
238 que des dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort qu
239 iles de Rome). Urbanisme est une étude technique et un pamphlet dont l’argumentation serrée éclate parfois en boutades mo
240 xistence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contemporaine ». Pures géométries de
241  ville contemporaine ». Pures géométries de verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel
242 sses. Des perspectives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par les plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l
243 ées ne sont plus que des enceintes transparentes, et minces en regard de leur hauteur, entourant de leurs multiples « rede
244 leurs multiples « redents » des terrains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organis
245 s la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopie ! Oui,
246 idables des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des l
247 ie — la « ville contemporaine ». Un labeur précis et anonyme concourt obscurément à cette parfaite expression du triomphe
248 Corbusier, Urbanisme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1926, p. 797-798.
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
249 ère œuvre importante du mouvement de construction et de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. L
250 ontenue surtout dans ses essais sur Proust, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce la confusion romant
251 n romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter
252 de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Ferna
253 empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais l
254 it nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie
255 M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses
256 x manières de se connaître, à savoir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l’œuvre n’est-elle pas une façon particu
257 emander s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y
258 meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fernandez donne une cr
259 œur » dont Fernandez donne une critique décisive. Et c’est justement par opposition à la conception proustienne de la pers
260 dement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — u
261 ipe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux, il nous propose l’expéri
262 xpérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire d
263 e l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me
264 e une théorie assez proche du cubisme littéraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter les confusions
265 er sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre
266 technique ou obscure, une richesse d’idées neuves et fortes, mais péniblement comprimées. Ce défaut de forme est peut-être
267 sque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop philosophe aux littérateurs. Il manque à M. Fernandez un certain
268 ue son livre manifeste une belle unité de pensée, et qu’il propose quelques directions très nettes de synthèse. Avec une œ
269 e œuvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez
270 Fernandez, Messages  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juillet 1926, p. 124-125.
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
271 de savante sensualité, pour ces insolences jolies et les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de l
272 j’ai supporté mille fastidieux détails techniques et des délires taurologiques avec lesquels, pour communier, il faudrait
273 Elle est tonique comme le spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ces Bestiaires, presque malgr
274 que malgré leur sujet trop pittoresque. « Honneur et longue fidélité aux taureaux braves et simplets d’esprit ! Qu’ils pai
275 « Honneur et longue fidélité aux taureaux braves et simplets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans les prairies c
276 es Fontaines du désir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je co
277 lant, Les Bestiaires  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1926, p. 397-398.
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
278 manifestent, avec un certain manque de conviction et des poses de mannequins, les tendances contradictoires d’un individu.
279 nant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans le rythme des désirs jama
280 a Croisière indécise  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810.
25 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
281 ère trop claire où les cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointai
282 ù la douleur nette d’un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de juifs espagnol
283 ec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse, le fuit, parce que son silen
284 e comprenait pas comment on pouvait tant souffrir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir le livre. Livre charmant e
285 losain se tue pour finir le livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qu
286 à une émotion plus grave, qui transparaît parfois et nous fait regretter que l’auteur ne se soit pas mieux abandonné à son
287 Colling, L’Iroquois  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810-811.
26 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
288 s : le Chinois s’étonne non sans quelque aigreur, et critique avec un mépris tranquille ; le Français riposte sans convict
289 tranquille ; le Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une détresse. C’est encore une vision de l’
290 entivement ordonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conq
291 ction ; notre individualisme en naît logiquement, et toutes nos catégories artificielles et nécessaires. Mais le monde éch
292 giquement, et toutes nos catégories artificielles et nécessaires. Mais le monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel
293 nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifice. Sans dout
294 nne libre peut souscrire aux critiques du Chinois et sympathiser avec son idéal de culture. Il n’y a pas là deux points de
295 ois de telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette
296 upérieure de l’esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à notre tour certaines démences qui enfiè
297 onté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’est-il pas de position plus périlleuse, puisqu’elle risqu
298 er en nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incerti
299 tation de l’Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 811-812.
27 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
300 ont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres
301 e. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus », qui perdraient leur temps à recenser les incohérences
302 . Quant à ceux que certaines envolées magnifiques et hagardes pourraient enthousiasmer il leur réserve mieux encore : aprè
303 « Ils m’ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphrasent ce que je dis ». Il y a ch
304 ersécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion farouche pour la liberté, qui font de cet ombrageux perso
305 stentation de révolte, ce mélange de fanfaronnade et d’intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à q
306 ’intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon d
307 dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « 
308 sants, un écrivain qui s’impose avec des qualités et des défauts pareillement énormes. Il faut remonter loin dans notre li
309 e pour trouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous v
310 ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques sombres délires, des pages d’un lyrisme inouï. Que Louis Ara
311 tieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est l’amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-vous des
312 ffaire, c’est l’amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des ch
313 , Le Paysan de Paris  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1927, p. 123-124.
28 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
314 e vie conjugale, la décristallisation progressive et réciproque des conjoints. » On sait que Beyle appelait cristallisatio
315 gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le
316 andit entre eux dans leur isolement, inexplicable et mal avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meu
317 faitisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa pr
318 t est justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une im
319 e étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se développent. Paysages tristes
320 désolées où ils se développent. Paysages tristes et sans violence, autour de ces êtres dont la détresse est d’autant plus
321 avant l’orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant
322 mbre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumé
323 e manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion.
324 Barbey, La Maladère  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 256.
29 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
325 r de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux
326 end le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… comment bien dire ? inquiet ? aride ? heureux ? » pour lu
327 nce indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir
328 s qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidiennes. Il se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l
329 lui de l’homme même, ou de l’amateur distingué, —  et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se connaît avec une sorte de f
330 ce du cœur qui contraste avec une vie voluptueuse et assez désordonnée. Pourtant, entre Montclar et Ameline, un amour se n
331 se et assez désordonnée. Pourtant, entre Montclar et Ameline, un amour se noue, qui commence où souvent l’on finit. Et peu
332 mour se noue, qui commence où souvent l’on finit. Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve
333 pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle, et peut-être tendre, à se faire souffrir rejette l’un vers l’autre ces ê
334 rir rejette l’un vers l’autre ces êtres égoïstes, et fonde lentement leur amour, à force de petites blessures. Ce n’est pa
335 it de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que la composition de cette réminiscence soit assez
336 mposition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on hésite à en faire reproche à l’auteur. Cette espèce de
337 si humaine, est mieux que charmant, — douloureux et désinvolte, glacé, passionné. ad. Rougemont Denis de, « [Compte re
338 Pourtalès, Montclar  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans do
30 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
339 elever les indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son autorité de critique et surtout de son exp
340 t qu’il vient appuyer de son autorité de critique et surtout de son expérience déjà riche de romancier. Son regard se prom
341 , cet air de rêverie d’un homme qui en sait long… Et , certes, il faut être un peu mage pour porter tant de richesses avec
342 tabler au café en face des personnages de Jaloux. Et peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais
343 u’elle livre si facilement au héros plus confiant et secrètement incertain de ce roman. À la veille de se marier, Jérôme P
344 ’il attend de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aim
345 . Peu à peu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de long
346 es lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit d
347 , seul, il la revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là un sujet qui convient admirablement à
348 ssent aujourd’hui un réalisme discret mais précis et le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos
349 ves éveillés. Tout un système de valeurs lyriques et sentimentales que la raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « no
350 nous tromper sur tout ce qui est profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’
351 M. Jaloux évite le péril d’un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équilibre qu’il maintient entre ces deu
352 maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire
353 z-vous manqués, lettres perdues, aveux incompris, et peut-être, un quiproquo de destinées… Le tragique du peut-être ; (com
354 n personnage épisodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans ob
355 : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décant
356 »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décantée, profonde et délicieuse, gagnera à son auteur beaucoup d’ami
357 ense, sans obscurité, riche et décantée, profonde et délicieuse, gagnera à son auteur beaucoup d’amis inconnus. af. Rou
358 i que j’eusse aimée…  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1927, p. 387-388.
31 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
359 r que ce témoignage sur les générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans l
360 pourvues d’une sombre grandeur, des surréalistes, et en même temps par cette solution universelle, la foi, il résume en lu
361 sume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop
362 e qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, où sa jeunes
363 ration nouvelle » avec une intelligente sympathie et un sens rare des directions générales. « Hamlétisme », pouvoir aigu d
364 ant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’absolu à la fois my
365 rocédant d’un goût de l’absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands traits de notre inquiétude. (Mai
366 tion de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconsciente ruse d’un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solution
367 foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’
368 ablement les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore…
369 ps, Notre inquiétude  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1927, p. 563-564.
32 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
370 Lecache, Jacob (mai 1927)ah Voici un livre dur et sans grâces, qui ne manque pas d’une beauté assez brutale, pour nous
371 pas d’une beauté assez brutale, pour nous choquer et s’imposer pourtant. M. Lecache présente le problème juif avec une obs
372 arais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’aîné se révo
373 e ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob
374 prend une âpre rapidité avec l’ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulgarités pou
375 ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont
376 és pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jac
377 d’être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et
378 tin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard
379 rnard Lecache, Jacob  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 689-690.
33 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
380 ude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conce
381 ait bientôt considérer toute joie comme illusoire et livre l’individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avo
382 te joie comme illusoire et livre l’individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peu
383 encore l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre o
384 re ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; ma
385  ; mais qu’elle s’acharne sur le détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’auteur n
386 dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière po
387 e n’aime guère ce style abstrait, semé de redites et d’expressions toutes faites qui trahissent une écriture hâtive. Mais
388 dans l’œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemont Denis de
389 l, La Mort difficile  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 690.
34 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
390 a douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusemen
391 même, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental qu
392 us sentimental que cruel. « J’ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, mais au filet si a
393 pitale de la douleur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’
35 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
394 udesse. « Il s’examine jusqu’au ventre de sa mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonné à mal » (
395 a mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est pas beau, mais on
396 cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est pas beau, mais on y sent un
397 -t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de rencontrer chez les jeunes
398 e point le sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales po
399 redonner quelque vitalité à notre civilisation, —  et je sais bien que c’est là un des signes de sa décadence. Il y a du ch
400 a du chirurgien chez ce soldat devenu « scribe » et qui s’en exaspère. Souvent maladroit, incertain, brutal : mais faison
401 voici un homme d’aujourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser le bluff. al. Rougemont Denis de, « [Compte rend
402 Suite dans les idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 694.
36 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
403 ver Patsy, l’Irlandaise perdue par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le fallacieux prétexte d’une flânerie de sa
404 vous découvrez dans ses fantoches une malicieuse et fine psychologie. Mais à ce mot, son visage s’assombrit un peu. « Tou
405 e son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et p
406 rer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, car voici «
407 lisse un grand souffle oblique plein de fraîcheur et de pardon. » am. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Girar
408 x le cœur des femmes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juillet 1927, p. 114-115.
37 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
409 ntes réminiscences, des évocations intérieures, —  et dans l’abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circons
410 irconstances d’une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une femme « encore jeune » se souvient d’un danseur de ses 2
411 ent troubler de ravissantes amours d’adolescents. Et c’est Un vieil été. Cette nouvelle, très supérieure aux deux autres,
412 sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi d
413 rtaine. C’est un art de détails ; mais si délicat et d’une si subtile convenance avec son objet qu’il en saisit sans mièvr
414 ns mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont f
415 ie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’auteur lui-même
416 er, Premières amours  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1927, p. 244-245.
38 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
417 dmond Jaloux. C’est un recueil de divers articles et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux
418 parler mieux que personne des poètes scandinaves et des romantiques allemands parce qu’il partage avec eux ce goût du rêv
419 hie morale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai,
420 Rilke y apparaît comme une de ces âmes mystiques et raffinées telles qu’on en découvre chez certaines femmes et l’on y vo
421 es telles qu’on en découvre chez certaines femmes et l’on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bi
422 illeux piège sentimental à la raison raisonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempiternelle « stratégie lit
423 , Rainer Maria Rilke  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 787-788.
39 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
424 ommande, une Promenade dans le Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire par endroits, mais pour
425 le Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire par endroits, mais pour rire), des difficultés, hési
426 , le malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pas embarrassé du tout pour vous lâcher un beau pa
427 re. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pas embarrassé du tout pour vous lâcher un beau pavé mathématique au
428 façons parfois bien désobligeantes de voir juste. Et quand son bonhomme se plaint de ce que son œuvre lui apparaît en même
429 aît en même temps que « fatale », « si arbitraire et si facultative », je me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu
430 bord dans ces 50 pages. Beaucoup sont excellentes et leur facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat d’un
431 esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (p
432 uses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presque imperceptible, mais ici décisive), une secrète complai
433 Bopp, Interférences  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 791.
40 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
434 (janvier 1928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans
435 res de Catherine-Paris cette magie des sensations et des rêves de l’enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pen
436 te magie des sensations et des rêves de l’enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui faisaient dé
437 prement romanesque, naissant des situations mêmes et non de dissertations lyriques à leur propos. Mais dans ce roman, il n
438 Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette
439 ltent à la fois le défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tou
440 de liberté d’esprit, une pénétration de jugement et une ironie assez amère qui étonnent de la part d’une femme aussi femm
441 uvailles spirituelles, malicieuses ou poétiques ; et ce n’est pas qu’il ne s’y glisse quelque préciosité ou quelques « poi
442 réalise pas une synthèse plus organique du roman et des mémoires. Mais si son début permet de croire que le Perroquet Ver
443 sco, Catherine-Paris  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1928, p. 121-122.
41 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
444 es Verne passionne. Pour les autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules Verne qu’un précurseur ?
445 est un créateur, dont les inventions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes
446 les poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce
447 d’évasion — où seuls les poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la
448 ien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a vérit
449 ne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus
450 e désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité » ( et dans la bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Ser
451 e, sa vie, son œuvre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1928, p. 768-769.
42 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
452 celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu
453 nt, et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que
454 mier chapitre, variation sur un mot bien français et ses applications faciles à cent célébrités locales. (Quant à Goethe,
455 style, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes
456 gon, Traité du style  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1928, p. 1034.
43 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
457 Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréa
458 ien M. Breton. Mais à condition d’aller plus loin et de prendre une connaissance positive de ce qu’il y a sous cette réali
459 mmode mal de tant de gesticulations, de gros mots et de discours en très beau style contre un monde très laid dont ils n’o
460 e, « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
461 et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1928, p. 1410.
44 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
462 orces caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organi
463 s — et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu de
464 nt la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces
465 sein même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Te
466 de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette fois tout est concrétisé en hommes, en meurtres,
467 eurtres, en décrets. Qu’il décrive la vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et mystérieux d’une
468 instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante de
469 est plus nerveux, sans doute aussi plus sensible. Et il ne se borne pas à des effets pittoresques : ce récit coloré et pré
470 e pas à des effets pittoresques : ce récit coloré et précis, admirablement objectif, est aussi, mais à coups de faits, une
471 -guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout ce qui n’est p
472 n désespoir sec, sans grimace. Cette intelligence et cette sensibilité ont quelque chose de trop aigu, de dangereux. Mais
473 antes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premier rang des romanciers contemporains. a
474 aux, Les Conquérants  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1547-1548.
45 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
475 décembre 1928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès,
476 mi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble idéal d’étudiant assidu aux sociétés de musique… » Barrè
477 bien indécise, que son échec même ne relève pas, et qui tire sa grandeur de celle du décor ? Guy de Pourtalès n’hésite pa
478 e pas à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du
479 rince rêveur n’est pas forcément prince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illu
480 drait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez
481 a su rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont
482 eau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le jeu donne aux nuan
483 sants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de
484 r c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’
485 avière ou Hamlet-Roi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1549.
46 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
486 it se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et entretient autour de sa vie le plus grand mystère. Cependant il aime
487 Il subjugue le jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillen
488 « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusquement le mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du
489 , et brusquement le mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin, le F
490 pathétique confession qui doit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort
491 né à une courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien
492 assez dense, et dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dan
493 s, Le Prince menteur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1553.
47 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
494 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désar
495 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et l
496 e (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un récit comme celui d’Anderson : voici
497 qui raconte sa vie avec une émouvante simplicité et il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur
498 ers tomes, où il décrit des scènes de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant d’apparen
499 simplicité. Le récit s’avance à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu à peu entraîne tout un branle-bas d’
500 e à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu à peu entraîne tout un branle-bas d’évocations hautes en couleur,
501 en couleur, de rêves, de visages, tandis que ç[à] et là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur l’époque. Anderson est
502 t avant tout un poète, un homme qui aime inventer et que cela console des nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de l
503 ricains. Avec cela, un réalisme, plein de verdeur et souvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient le couplet humani
504 s sait encore parler de sa mère avec cette virile et religieuse tendresse ? C’est un Chinois, c’est un Américain qui vienn
505 fortement en l’existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspiration pour insister sur la laideur. “C’
506 ses à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arr
507 à tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivais presque à me convaincre que si j
508 ar-derrière d’un homme ou d’une femme quelconque, et disais “houu !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me s
509 secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras dessous en riant de nous-mê
510 bras dessus, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le s
511 hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan
512 de, « [Compte rendu] Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
513 [Compte rendu] Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
514 et Je suis un homme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1929, p. 123-124.
48 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
515 Il faut s’en approcher avec une douceur patiente, et le laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les
516 mages (à peine quelques « motifs », objets usuels et usés, sur la nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, c
517 lus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur se détache de toi comme une lourde pierre
518 e rêverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’
519 s leur réalité les choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière : « Tout semblait vivre au fond d
520 ; une phrase naturellement grave ; une voix douce et virile ; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essent
521 naturellement grave ; une voix douce et virile ; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de la po
522 tre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et cela fait un vacarme terrible. » ay. Rougemont Denis de, « [Compte
523 Supervielle, Saisir  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1929, p. 762-763.
49 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
524 paru l’année dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué —, Jean Cassou revient à son romantisme, à
525 arle à son chien en mourant, une fille qui chante et des enfants surtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les so
526 nes, — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et l’on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le te
527 est un dévergondage sentimental, plein de malices et d’envies de pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les mais
528 . Mais bien vite un intermède bouffon, impossible et d’une désopilante poésie nous replonge dans une atmosphère autre, où
529 autre, où les personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet air dangereux et tendre que prennent l
530 e et capable de n’importe quoi, cet air dangereux et tendre que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais mé
531 mes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux dernières pages du livre, un peu amers… On voudrait un
532 éré. Mais voici déjà dans l’œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces petites merveilles qui
533 , La Clef des songes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 248-249.
50 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
534 le voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient l
535 le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus
536 est, si l’on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’interprétation proposée
537 aire contre l’interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s’est montré partial en faisant de Rimb
538 e, Rimbaud le voyant  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est i
51 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
539 ieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la
540 beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-même
541 de ce qu’elle « mène loin… dans l’ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne trahit pas.)
542 si vieux que le monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a un sophiste en M. Benda, un polémist
543 de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer choses et idées en catégories « rationnelles », c’est-à-dire
544 eux que lui ne s’entend définir et classer choses et idées en catégories « rationnelles », c’est-à-dire fausses mais clair
545 elle ne doit pas nous masquer l’audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimoderne, parce que dés
546 humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme
547 en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite et de gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me vienne
548 iennent l’esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que « le petit Benda est un fameux serin ». Mais
549 Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. Rougemont Denis de, « [C
550 La Fin de l’Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1929, p. 638-639.
52 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)
551 uvre sans cesse de nouvelles sources. Il défriche et il fabrique, soit qu’il se décrive comme un lieu de miracles le plus
552 ection la plus poussée. Il invente aussi des mots et en fait de courts poèmes d’une divertissante et parfois émouvante biz
553 s et en fait de courts poèmes d’une divertissante et parfois émouvante bizarrerie (Mort d’un Page). Cependant je préfère s
554 éfère ses proses : il y a ici plus qu’une manière et qu’un ton, il y a une vision du monde véritablement neuve, dans laque
555 agissant à la façon d’une force physique, déforme et recrée le réel à son gré. Seule compte la réalité intérieure, mais el
556 t cela compose une atmosphère poétique très dense et active. Depuis longtemps — depuis les Trivia de Logan Pearsall Smith
557 l y a en nous à la fois de plus « problématique » et de plus quotidien. bd. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Henri
558 haux, Mes propriétés  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1930, p. 384.
53 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Kikou Yamata, Saisons suisses (mars 1930)
559 âtel. Mlle Kikou Yamata a su le voir aussi « gris et ardent sous le soleil caché », ou bien, en un printemps liquide et gl
560 soleil caché », ou bien, en un printemps liquide et glacé, balançant parmi les roseaux d’une baie ses poules d’eaux noire
561 ’eaux noires. Il y fallait cette féminité ingénue et précieuse, toujours prête à épouser tout le sensible d’un paysage pou
562 . On s’émerveille de le voir, dans sa main rapide et minutieuse, décrire la vallée du jeune Rhin ou les pentes de Chésière
563 de Chésières en les parant d’une grâce malicieuse et sensuelle dont nos yeux helvètes les croyaient par trop dépourvues… C
564 onne. Quelle admirable maîtrise de sa technique ! Et qui eût pensé qu’avec un jeu de noirs et de gris l’on pût recréer tou
565 hnique ! Et qui eût pensé qu’avec un jeu de noirs et de gris l’on pût recréer toute la ferveur d’un coucher de soleil. Des
566 s, un relief net, une heureuse alliance de charme et de rigueur, de moelleux et de précision… À la dernière page, l’artist
567 use alliance de charme et de rigueur, de moelleux et de précision… À la dernière page, l’artiste fait une belle grimace :
568 ata, Saisons suisses  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1930, p. 385.
54 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Jullien du Breuil, Kate (avril 1930)
569 chose qu’ils expriment sans doute inconsciemment et qui n’est rien de moins qu’une conception nouvelle de l’amour-passion
570 selon l’auteur un peu ou pas mal de littérature. Et c’est à un tel amour qu’on va demander sa revanche contre la mesquine
571 agique : le conflit de la jeunesse d’après-guerre et des parents. Encore un sujet qui attend son maître. bf. Rougemont
572 lien du Breuil, Kate  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1930, p. 520.
55 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu (septembre 1930)
573 Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu (septembre 1930)bg On ne sait presque rien de Lautréamont, si
574 utréamont, sinon qu’il s’appelait Isidore Ducasse et qu’il composa vers sa vingtième année un vaste poème en prose intitul
575 qu’à la guerre son influence fut « quasi nulle », et peut-être va-t-il rentrer dans l’ombre après avoir été pendant quelqu
576 e après avoir été pendant quelques années l’idole et l’auteur-tabou du surréalisme. M. Pierre-Quint vient d’écrire sur ce
577 ient d’écrire sur ce poète, qu’on a traité de fou et d’ange, un essai remarquable de netteté et souvent, d’indépendance. I
578 de fou et d’ange, un essai remarquable de netteté et souvent, d’indépendance. Il dégage le sujet de l’épopée qu’est Maldor
579 ror — la révolte de l’homme contre son Créateur — et il analyse les principaux thèmes de l’œuvre avec une intelligence que
580 e Caliban littérateur. Dans un chapitre excellent et peut-être plus audacieux que les autres, M. Pierre-Quint montre en qu
581 re-Quint montre en quoi cette révolte est puérile et insuffisante. Une fois de plus, l’intelligence apporte la solution d’
582 vec un Dieu pour rire que Rimbaud est aux prises, et il n’a cure de cette littérature que Ducasse s’épuise à parodier.) Il
583 peu impressionner par le fanatisme des disciples et imitateurs du « comte ». D’autres que lui s’y sont trompés. M. Gide d
584 ne plutôt de la grandiloquence « antilittéraire » et des révoltes au hasard d’un Maldoror. Elle demande une pensée forte e
585 sard d’un Maldoror. Elle demande une pensée forte et orientée plutôt que ces éclats de voix sarcastiques, émouvants comme
586 où certaine bêtise trouve assez bien son compte. Et quant à l’orthodoxie instaurée par les surréalistes, elle appelle not
587 rendu] Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septemb
588 Lautréamont et Dieu  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1930, p. 399-400.
56 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie I (octobre 1930)
589 re. En bas, il y a juste autant de vieilles dames et de ministres en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ai bea
590 mes et de ministres en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau feindre l’intérêt le plus singulier pour ce
591 s, sur un banc humide, — juste de quoi s’étendre, et regarder jaillir sans fin contre soi l’eau de ce beau Danube jaune qu
592 heures à travers ces quartiers si clairs, arbres et jets d’eau ; sans avoir pu retrouver, des conversations de ce bal, au
593 fil de l’eau, entre l’étrange nuit d’un autre bal et cette perspective de voyage au hasard et commencé dans l’insomnie — v
594 utre bal et cette perspective de voyage au hasard et commencé dans l’insomnie — vrai voyage à dormir debout… …………………………………
595 uve d’un soir chaud sur la plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes de reflets, — et déjà nous passons sous de ha
596 es dômes et ses façades exubérantes de reflets, —  et déjà nous passons sous de hauts ponts sonores, au long d’un quai tout
597 i de terrasses ; on nous déverse dans cette foule et ces musiques, deux visages amis me sourient. Ô liberté aérienne des a
598 s le léger étourdissement de l’amitié prochaine). Et la générosité des lumières d’avant le soir, — et cette espèce de tend
599 Et la générosité des lumières d’avant le soir, —  et cette espèce de tendresse pour tous les possibles, qu’on appelle, je
600 quet inouï, cadeau annonciateur d’une miraculeuse et royale Venue. Dans le silence de l’adoration comblée, j’en sortirais
601 oètes essaient de décrire sans l’avoir jamais vu, et dont nous savons seulement que tout y a son écho le plus pur. Le voya
602 e ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sait si tant d’erreurs ne composeront pas un jour une sorte d’inc
603 ute jusqu’à la fin des fins… Mais voici mes amis. Et la question terrible, tout de suite : « Mais qui, mais qu’êtes-vous v
604 je crois y trouver mon salut : « Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’écrié-je, mes frères ! Nous traî
605 arnabooth savait bien ce qu’il ne pouvait perdre, et c’était sa fortune, Peter Schlemihl savait ce qu’il avait perdu, c’ét
606 cherche un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos et qui me voue à toutes les magies ! Les désirs les plus incompréhensibl
607 ns une loterie qui peut-être n’a pas de gros lot, et jamais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à le regretter… » L’
608 parviendrai à le regretter… » L’ironie indulgente et cette pitié à peine jalouse que l’on réserve aux égarements d’une jeu
609 aysages romantiques aux ciels pleins de démesure. Et , de Giorgione, ce « Portrait d’un homme » devant lequel il faut se ta
610 ouchait, nous avons repassé un grand pont vibrant et nous sommes rentrés en Europe. Mais dès le lendemain, m’échappant du
611 de l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèleri
612 n escalier compliqué : c’est plein de colonnettes et de statues dégradées et charmantes. (Vue sur des maisons pauvres un p
613 ’est plein de colonnettes et de statues dégradées et charmantes. (Vue sur des maisons pauvres un peu plus bas, avec du lin
614 de tour peu élevée, à demi recouverte de rosiers, et qu’il paraît impossible de situer dans l’ensemble des constructions.
615 Gül Baba est racontée sur un papier jauni encadré et fixé au mur. Gül Baba est le dernier héros musulman qui ait fait parl
616 moins théâtral). D’ailleurs le tombeau est vide. Et les babouches ? Pas de babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heu
617 ’est pas fantaisie. Je parle simplement de vérité et de mensonge, opposant une réalité vivante à une duperie commerciale.
618 J’expliquais donc que je ne voyage qu’au hasard, et pour rien ni personne. Sur quoi : « Monsieur a du temps à perdre ! »
619 sieur a du temps à perdre ! » s’écrie le lecteur, et comme il est, lui, de l’autre école, il referme ces pages et vaque à
620 est, lui, de l’autre école, il referme ces pages et vaque à ses devoirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui : je me fe
621 s du plus haut intérêt », le « prix de l’action » et leur morale qui ne parle que d’obligations dont on ne saurait à la lé
622 rrasser sans courir les risques12 les plus graves et provoquer une crise, bref, sans le payer cher. Tout cela est langage
623 poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la face des bouffons qui plongent invariablement les mains dan
624 axiome qui constitue à leurs yeux ma condamnation et celle des minus habentes qui me ressemblent. Au risque de les voir tr
625 de le déjouer au moyen de toutes sortes de ruses et de scepticismes, dont le plus simple consiste à traduire ce que l’on
626 l’on voit. Cette banque à la façade violette, or et bleue, aux grandes lignes verticales peinturlurées — elle n’a rien d’
627 trange, si l’on songe que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que je trouve ce raisonnement fin, encore que juste, mai
628 une grande salle vivement éclairée. Murs chaulés, et de nouveau de hautes voûtes. Une banquette longe trois des parois, la
629 n partie par un poêle immense, à plusieurs étages et marches. Deux ou trois tables avec des verres et des bouteilles sont
630 et marches. Deux ou trois tables avec des verres et des bouteilles sont placées au hasard dans l’espace vide où tourne la
631 s l’attente. Nous sommes assis autour d’une table et nous voyons, au milieu de la salle, un arbre de Noël aux amples branc
632 anches rayonnantes, dans une gloire de dorures, —  et massées tout autour, frileuses dans leurs dessous roses, les filles q
633 es, les filles qui chantent une chanson populaire et regardent tristement les lumières. Il y en a aussi qui se réchauffent
634 nt l’une affreusement belle dans un peignoir noir et blanc… Je ne puis avaler mon verre de ce café trop amer qui pince la
635 inciterait à chercher après coup des transitions, et c’est alors que l’on est tenté de mentir, si fort tenté que l’on cède
636 Hongrie archi-connue, — le lecteur le sent vite, et devient extrêmement exigeant, car le plus beau mensonge atteint à pei
637 t à peine le degré d’intérêt d’une vérité banale, et seulement à condition de lui ressembler, ne fût-ce que de loin, — c’e
638 je parsème ce texte de quelques noms impossibles et de beaucoup de chiffres vraisemblables ? Ainsi le lecteur superficiel
639 e, car on ne choisit pas un sujet : on est sujet. Et tout ceci n’est rien que le voyage du Sujet à la recherche de son Obj
640 consenti de ne pas trouver sur l’heure. (En petit et intéressé, ce geste s’appelle coquetterie ; en grand et gratuit, sacr
641 éressé, ce geste s’appelle coquetterie ; en grand et gratuit, sacrifice.) … feuilletons un peu ma Hongrie. 7. Les magna
642 , solennelle de nudité, entre le Palais du Régent et celui d’un des archiducs, quel décor à rêver le cortège d’un sacre !
643 , ils n’étaient guère qu’une centaine de curieux, et quelques gardes. Traversant dans sa longueur toute l’immense place, l
644 rai sourire, adressé personnellement à l’homme, —  et le mot « affable » reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a la tête
645 assage les Karolyi, les Festetics, les Esterházy, et ces comtes Szechenyi qui construisirent le premier pont sur le Danube
646 es sur le bouchon du radiateur — les voici, pères et fils, revêtus des couleurs familiales. Ils se tiennent très droits, a
647 t dans la cour d’honneur ces reliques incroyables et les encensent à la benzine industrielle. Mais quelle gravité parmi le
648 le Prince Primat, les doigts levés. On se signe. Et voici venir à pied de son palais proche, tout seul, un archiduc. On s
649 s des rangées de décorations sur l’uniforme kaki, et du sabre balancé). Une auto encore, en retard le président du Conseil
650 en retard le président du Conseil, maigre, jaune et rigide dans son costume noir et or. Si le comte Bethlen venait à la S
651 il, maigre, jaune et rigide dans son costume noir et or. Si le comte Bethlen venait à la SDN en tenue de magnat, beaucoup
652 ait cependant pour plus ; elle était seule active et créatrice. Le reste : des porteurs d’eau… Dans l’inextricable confusi
653 e — intemporelle, n’ayant cure des statistiques — et sa douleur aussi, douleur d’orgueil blessé, mais qui emporte la sympa
654 de l’âme à celui de la surproduction des machines et des enfants. C’est parce que les Hongrois n’ont pas perdu le sentimen
655 rne les arguments. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme : la politique des peuple
656 dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme : la politique des peuples ressemble à celle des individus
657 lait abandonner à son malheur ce peuple turbulent et déchu, suffirent à faire d’un affairiste anglais l’idole du nationali
658 aires, brodé aux devantures des magasins de mode, et son nom en lettres géantes sur une montagne chauve, voisine de Budape
659 rtes méritoire, mais plus symbolique qu’efficace. Et sans lendemain. Ce mélange, en toutes choses, d’enfantillage et de gr
660 ain. Ce mélange, en toutes choses, d’enfantillage et de grandeur, d’imaginations absurdes et de souffrances vraies, n’est-
661 antillage et de grandeur, d’imaginations absurdes et de souffrances vraies, n’est-ce point le climat de la passion ? — C’e
662 ètes par le monde. C’est dans l’ordre des choses, et l’on sait qu’il suffit de très peu de sel pour rendre mangeables beau
663 style hongrois. Il y a aussi une extrême gauche, et sa revue Documentum (une sorte d’Esprit nouveau troublé de surréalism
664 nt internationaliste de doctrine, au lyrisme neuf et parfois sauvage, social ou futuriste, et dont la « furia » serait ass
665 sme neuf et parfois sauvage, social ou futuriste, et dont la « furia » serait assez hongroise… Mais l’expression la plus l
666 assez hongroise… Mais l’expression la plus libre et la plus vivante du génie littéraire de cette race me paraît bien avoi
667 , revue fondée par deux grands poètes : André Ady et Michel Babits. Ady, le sombre et pathétique, est mort à 35 ans, mais
668 ètes : André Ady et Michel Babits. Ady, le sombre et pathétique, est mort à 35 ans, mais sa ferveur anime encore ces écriv
669 sensibilité, bien que souvent européens de goûts et de curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef de file.
670 que souvent européens de goûts et de curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef de file. Des amis m’emmène
671 lique élève une coupole d’ocre éclatante, immense et froide, dominant cette plaine onduleuse dont les vagues se perdent da
672 ons jaunes basses, ville sans ombre, sans arbres, et nous montons vers la maison du poète, sur un coteau. Trois chambres b
673 s rides, la petite ville juste au-dessous de soi, et la basilique sur son rocher. Fraîches, sentant bon, avec des livres s
674 s, l’ombre bourdonnante, — trois petites chambres et un pan de toit par-dessus, une baraque à peine visible dans les vigne
675 près-midi est immense. Nous buvons des vins dorés et doux que nous verse Ilonka Babits (elle est aussi poète, et très bell
676 e nous verse Ilonka Babits (elle est aussi poète, et très belle), nous inscrivons nos noms au charbon sur le mur chaulé, G
677 hotos, Gyergyai fouille la plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est, je grimpe au cerisier sauvage, derrière la maison,
678 « Voyage en Hongrie I », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, octobre 1930, p. 405-419.
57 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la folie (octobre 1930)
679 Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la folie (octobre 1930)bi L’année du centenaire du roman
680 e de Hölderlin par la France. La Mort d’Empédocle et les Poèmes de la folie ont paru simultanément, et l’on annonce Hypéri
681 et les Poèmes de la folie ont paru simultanément, et l’on annonce Hypérion. Il ne manquera plus que les longs poèmes de la
682 l’œuvre de Hölderlin : l’inspirateur de Schelling et de Hegel, le précurseur de Nietzsche, l’un des plus admirables et des
683 précurseur de Nietzsche, l’un des plus admirables et des plus mystérieux génies poétiques de notre ère. On doit beaucoup d
684 onnaissance à M. André Babelon pour avoir traduit et introduit avec tant de justesse, voire de profondeur, la Mort d’Empéd
685 gédie difficile, trois fois remise à pied d’œuvre et jamais achevée, donne moins que les Poèmes cette impression bizarre d
686 de l’esprit humain, parle aux dieux avec orgueil, et finit par succomber à son « hybris » : il se jette dans l’Etna pour m
687 ir » sa création. De là sa folie, qu’il pressent. Et M. Babelon cite à ce sujet des phrases très frappantes : « L’un garde
688 , des bribes de phrases… Or, si comme je le crois et voudrais l’établir plus longuement, le sens des poèmes de la maturité
689 valeur rythmique équivalente. Quoi qu’il en soit, et tels qu’ils nous sont ici livrés, ces fragments sont capables d’éveil
690 gments sont capables d’éveiller le sentiment rare et grandiose que j’appellerais celui du tragique de la pensée. « Insensé
691 nts sur la folie de Hölderlin que MM. Groethuysen et Jouve ont choisis et traduits à la suite des poèmes, ils ne sont pas
692 ölderlin que MM. Groethuysen et Jouve ont choisis et traduits à la suite des poèmes, ils ne sont pas ce que ce petit livre
693 , « [Compte rendu] Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la folie  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
694 t Poèmes de la folie  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, octobre 1930, p. 532-533.
58 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie II (novembre 1930)
695 r d’Esztergóm Il faut se pencher aux portières et laisser l’air furieux emmêler les cheveux, glacer le masque et appuye
696 air furieux emmêler les cheveux, glacer le masque et appuyer au front comme une caresse indéfinie de la puissance. Soir de
697 is, se masse dans une confusion de violet sombre, et par la seule ligne dure de l’horizon s’oppose au ciel qui retire ses
698 ions une maison dans ce désert aux formes tendres et déjà familières, et le passage des trains chaque soir nous redirait u
699 ce désert aux formes tendres et déjà familières, et le passage des trains chaque soir nous redirait un adieu bref, — chaq
700 tunnel tu vois que la veilleuse brûle toujours — et moi, parmi les reflets fuyants de toutes sortes de faces et de paysag
701 rmi les reflets fuyants de toutes sortes de faces et de paysages soudainement invisibles, je distingue le doux feu bleu de
702 nde un certain son spirituel… Un objet de musique et de couleurs, mais aussi une forme symbolique de tout… Enfin, tellemen
703 orme symbolique de tout… Enfin, tellement inconnu et tellement fascinant à la fois, qu’il me préserve de tout amour pour q
704 plus qu’ « au souffle »… Mais alors tout s’allume et voici la nuit des faubourgs de Pest, au-dessous de nous. 12. Un ba
705 pose alors ses mains sur les épaules du cavalier) et la faire pirouetter un quart de tour à droite, un quart de tour à gau
706 , tandis que les danseuses secouent leurs cheveux et tendent les bras en riant pour qu’on les relève. Elles : des Vénitien
707 ats de rire tournoyants mais non pas désordonnés, et des gestes tendres des bras en balançant vivement la tête. Quand elle
708 e, voluptueuse ; quand elles chantent, les moires et l’ondulation des rubans de vents chauds sur la plaine, avec des éloig
709 vents chauds sur la plaine, avec des éloignements et des retours, des enroulements et déroulements rapides, des vibrations
710 des éloignements et des retours, des enroulements et déroulements rapides, des vibrations tendues, horizontales, soutenues
711 e, jette son petit caillou. Ici, le sens des mots et des choses est celui d’un courant musical qui domine l’ensemble et le
712 celui d’un courant musical qui domine l’ensemble et le compose selon les lois d’une plastique exubérante. Quand je dis qu
713 a plus qu’ici qu’on aime l’ivresse comme un art. Et qu’on soigne sa mise en scène, qu’on sauvegarde sa qualité. Ailleurs,
714 le gâtisme. On trouve que ça n’est pas distingué, et en effet, que serait un lyrisme distingué ? Il faut choisir entre les
715 ingué ? Il faut choisir entre les bonnes manières et les belles manières. Et quant à ceux qui n’ont pas le pouvoir de s’en
716 entre les bonnes manières et les belles manières. Et quant à ceux qui n’ont pas le pouvoir de s’enivrer, ils auront toujou
717 à l’esprit de passer d’une forme dans d’autres, —  et c’est même en ce passage qu’elle consiste — ô Danses ! avènement de l
718 outes choses disparaîtraient… Le vertige (la peur et l’amour du vertige). Qu’est-ce qu’il y aurait de l’autre côté ? Se la
719 Verdi, — elles ont des mouvements vifs du buste, et des mains pleines de drôleries ou de supplication. Je ne sais ce que
720 es ondulations longues… Mais un cheval se cabre ; et c’est la danse qui se lève, et des tambours et des cris modulés, et t
721 cheval se cabre ; et c’est la danse qui se lève, et des tambours et des cris modulés, et toute la frénésie d’un grand sou
722  ; et c’est la danse qui se lève, et des tambours et des cris modulés, et toute la frénésie d’un grand souffle qui se sera
723 qui se lève, et des tambours et des cris modulés, et toute la frénésie d’un grand souffle qui se serait mis à tourbillonne
724 it des couples qui savent être à la fois cocasses et fades. En Italie… Mais l’amour hongrois t’emportera dans une inénarra
725 dans une inénarrable confusion de sentimentalisme et de passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens de la mus
726 rable confusion de sentimentalisme et de passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens de la musique, conserve
727 il a du cœur, n’en revient plus. 15. La plaine et la musique L’ouverture de Stravinsky exécutée par l’express de Tra
728 Il y a une grande ville, un grand lac, une plaine et une seule vigne de véritable Tokay. Et point de ces endroits dépriman
729 une plaine et une seule vigne de véritable Tokay. Et point de ces endroits déprimants, à plusieurs milliers d’exemplaires,
730 , des paysans, des communistes, de grands nobles, et des Tziganes. D’ailleurs, le bourgeois supporterait difficilement l’a
731 ici toutes choses, cette atmosphère de nomadisme, et ces vents vastes ; et cette passion de vivre au-dessus de ses moyens
732 te atmosphère de nomadisme, et ces vents vastes ; et cette passion de vivre au-dessus de ses moyens — c’est-à-dire au-dess
733 venaient des Indes, qui nous apportèrent le tarot et la roulotte, dont descendent le bridge et la bohème, c’est-à-dire un
734 e tarot et la roulotte, dont descendent le bridge et la bohème, c’est-à-dire un symbole de la servitude et un symbole de l
735 a bohème, c’est-à-dire un symbole de la servitude et un symbole de la liberté. Si la Hongrie tout de même a quelque chose
736 quelque chose de « moderne », dans un sens vaste et mystique, elle le doit au charme égyptien du peuple errant qui lui do
737 donna sa musique nationale17. Les signes parlent, et certains sages : nous entrons dans une ère égyptienne. Mais que dire
738 pylônes plantés dans un grand désordre de piétons et de chars à bœufs parmi les trams. Les habitants de Debrecen se plaign
739 te ». Mais d’avoir vu ses profondes bibliothèques et son quartier universitaire tout rajeuni dans des jardins luisants ne
740 une présentation de musiques hongroises, turques et chinoises, commentées et comparées par un folkloriste aux yeux ardent
741 ques hongroises, turques et chinoises, commentées et comparées par un folkloriste aux yeux ardents et au visage mongol. Il
742 et comparées par un folkloriste aux yeux ardents et au visage mongol. Il jouait des phrases simples, tragiques, à peine m
743 giques, à peine modulées, qui donnent le vertige, et dont soudain se cabre le rythme, avant la chute stridente et basse, p
744 dain se cabre le rythme, avant la chute stridente et basse, prolongée. Peut-être ce soir-là, ai-je compris la Grande Plain
745 -être ce soir-là, ai-je compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches de l’Asie. En sortant du conce
746 aînée par je ne sais quel vent sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et d’un coup la subtilise, ne laissant plus qu’
747 ne sais quel vent sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et d’un coup la subtilise, ne laissant plus qu’un long sile
748 vent sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et d’un coup la subtilise, ne laissant plus qu’un long silence soutenu,
749 jà fait grésiller les notes basses du cymbalum, —  et maintenant ferme les yeux sous la vague toujours un peu plus haute qu
750 un peu plus haute que profonde ne fut l’attente, et lâche tout. C’est l’âme qui joue aux montagnes russes, mais voici que
751 euse docilité dans les voies d’un amour ineffable et se perd avec lui vers le désert et ses mirages. On ne sait d’où tu vi
752 mour ineffable et se perd avec lui vers le désert et ses mirages. On ne sait d’où tu viens, tu ne sais où tu vas, peuple d
753 aché dans une roulotte sous des chiffons bariolés et des secrets qui feraient peur aux femmes, cet objet dont parfois, au
754 rde de celui qui succombe à l’excès du sommeil) — et me voici plus seul, avec une nostalgie qui ne veut pas de la romance
755 Ils l’ont perdu comme un rêve au matin s’élude, —  et leur musique seule s’en souvient. Trésor si pur qu’on ne doit même pa
756 d’ici, peut-être, mais invisible. Lève-toi, pars, et sans vider ton verre — il n’y a pure ivresse que de l’abandon —, car
757 on. Ces eaux, je crois, s’en vont à la mer Noire, et je n’en connais pas les fées, c’est pourquoi je nageais à brasses pru
758 r connaître un lac, il faut d’abord s’y plonger ; et ensuite, s’il vous a paru beau, en faire le tour, mais voilà qui est
759 sses, verdoyantes, toutes fraîches de musiquettes et de baigneuses ; quais de Balaton-Füred aux élégances bourgeoises et m
760 quais de Balaton-Füred aux élégances bourgeoises et militaires, idylles de jardins publics à l’écart d’un concert du same
761 oir, petits professeurs entourés de leur famille, et toutes ces Magda, toutes ces Maritza rieuses et déjà presque belles d
762 , et toutes ces Magda, toutes ces Maritza rieuses et déjà presque belles dans leurs petits sweaters — vais-je pour vous m’
763 ner ce désir, comme un tendre souvenir de voyage, et partir en croyant qu’ici la vie a parfois moins de hargne… Déjà je su
764 gent les lieux faciles. Ô tristesse des crèmeries et des jardins ! C’est devant une glace panachée qu’il m’arrive de doute
765 ont des restes de volcans — blanches sous la Lune et toutes lustrées de rêches végétations. J’ai traversé l’angoisse lunai
766 es, faiblement ? Ah ! toutes les actions précises et courageuses, tout ce qui t’appelle là-bas, maintenant, maintenant, où
767 là-bas, maintenant, maintenant, où tu n’es pas — et tant d’amour perdu… Un train dormait devant la gare campagnarde. Je m
768 e Budapest, cheveux en désordre, pantalon plissé, et cet abruti de contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors q
769 talon plissé, et cet abruti de contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j’allais rattraper, com
770 un être ? 17. Insomnie J’éteignais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon d’une momie bleuâtre, mais peut-on
771 . Mais je ne trouvais pas la pente de mon esprit, et tout en le parcourant avec une soif qui annonçait le désert, je traça
772 s : les titres en étaient de Sénèque ou de Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré Sterne ou Goethe, mais, sem
773 lés qui explosent, le chômage dans la gendarmerie et les fakirs débordés. L’hypocrisie s’en tire avec une volte-face.) Que
774 ant de parvenir à la Réalité. Entre « déjà plus » et « pas encore »… Bon point de vue pour déconsidérer nos raisons de viv
775 . Si dans ta chambre, en plein jour, tu t’endors, et que, vers le soir, tu t’éveilles dans une lueur jaune, ne sachant plu
776 uiller les horaires ? Le voyage est un état d’âme et non pas une question de transport. Un vrai voyage, on ne sait jamais
777 j’étais presque infiniment variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en mêm
778 ai découvert mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe une clef : délivré de moi, j’entrera
779 » qui me permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un être
780 de la plaine à l’heure A, — l’heure des arrivées et des adieux… Il y a dans tous les réveils une détresse et une délivran
781 adieux… Il y a dans tous les réveils une détresse et une délivrance étrangement mêlées. 18. Les clefs perdues Il fau
782 l’œil s’éteint, le corps se plie, fait demi-tour et puis s’en va. Rien, rien à déclarer, quelle tristesse. Mais qu’a-t-on
783 er » d’important ? Je ne sais plus parler en vers et la prose n’indique que les choses les plus évidentes. C’est bien pour
784 osophes. D’autres aussi, peut-être, la cherchent. Et qui sait si vraiment elle n’existe plus, l’Hermétique Société18  de c
785 faut-il d’abord les découvrir tous par soi-même. Et c’est alors seulement qu’aux yeux de ceux qui surent désirer de la vo
786 nnaît depuis toujours ce qu’une fois l’on aimera. Et les uns disent qu’il faut connaître pour aimer ; les autres, aimer po
787 connaître, alors qu’au point de perfection, aimer et connaître sont un seul et même acte. Peut-être l’ai-je aimée d’un amo
788 nt de perfection, aimer et connaître sont un seul et même acte. Peut-être l’ai-je aimée d’un amour égoïste, comme un être
789 ’un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et en qui l’on chérit surtout ce dont on manque : touchantes annexions,
790 tte vérité générale dont tout le monde se réclame et dont personne ne vit… Et certes un tel amour est un amour mineur. Mai
791 tout le monde se réclame et dont personne ne vit… Et certes un tel amour est un amour mineur. Mais qui saura jamais la vér
792 Mais qui saura jamais la vérité sur aucun être ? Et s’il fallait attendre pour aimer !… Je me souviens de ces terrains de
793 s terrains de sable noir, piqués de petits arbres et d’un désordre de maisons basses, les dernières de la ville de Debrece
794 hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécurité. Présence, présence rée
795 ne la reverrai, cette lumière en ce lieu, secrète et familière. Songeant à cette minute et à d’autres semblables, en voyag
796 eu, secrète et familière. Songeant à cette minute et à d’autres semblables, en voyage, je me dis que c’est de là que j’ai
797 ’une plaine, d’un couchant plus grandiose au ciel et sur la terre plus secret que dans ton pays. Tu attendais une révélati
798 tous les espaces à parcourir encore dans ce monde et dans d’autres, dans cette vie et dans d’autres vies, pour approcher d
799 re dans ce monde et dans d’autres, dans cette vie et dans d’autres vies, pour approcher de tous côtés un But dont tu ne sa
800 nce, — car on ne voit que ce qui est de soi-même, et conscient… C’est à cause d’un pari peut-être fou, et qui porte sur de
801 conscient… C’est à cause d’un pari peut-être fou, et qui porte sur des sentiments indéfinis, à cause de ce pari dont tu n’
802 — nos rêves sont instantanés — que tu es parti ; et maintenant tu joues ce rôle, tu t’intéresses, tu serres des mains, — 
803 par les rues noires aux palais vides mais hantés, et dans les grands cafés du centre… Quelle autre rencontre espérer — mai
804  Voyage en Hongrie II », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1930, p. 577-590.
59 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Charles Du Bos, Approximations, 4e série (novembre 1930)
805 r, — laissant à l’approfondissement psychologique et aux inflexions variables du ton chaque fois adopté le soin de dégager
806 liqué aux mots, ce même sens à la fois scrupuleux et assuré de la qualité, qui est ce qu’avant tout l’on doit admirer chez
807 e qu’avant tout l’on doit admirer chez M. Du Bos. Et dans l’allure des phrases, le rythme même de sa pensée. Parfois certe
808 s autrement qu’il n’aborderait un génie français, et sur un pied véritablement européen. L’envergure en quelque sorte géog
809 lle pose le problème de l’homme dans sa totalité, et c’est je crois l’éloge de choix. Mais de ce problème central, qui déb
810 érature ne constitue pas moins un cas privilégié. Et parce que M. Du Bos ne cesse de la soumettre à des contrôles éthiques
811 ues autant qu’esthétiques, il lui rend l’humilité et la dignité qui tout ensemble lui conviennent. On le conçoit, ce n’est
812 hoisit des bases d’approche parfois si éloignées, et progresse par des voies si subtiles qu’il ne doit qu’à un sens except
813 lle conscience appartient au critique avant tout, et c’est pourquoi il fait de la critique en présence des obstacles qu’il
814 fus de sacrifier jamais l’éthique à l’esthétique, et dans ce sens chez tant d’autres émoussé, et qu’il exerce avec une int
815 ique, et dans ce sens chez tant d’autres émoussé, et qu’il exerce avec une intelligence et une autorité aujourd’hui sans s
816 es émoussé, et qu’il exerce avec une intelligence et une autorité aujourd’hui sans secondes : le sens de la responsabilité
817 oximations, 4e série  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1930, p. 656-658.