1 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
1 qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du sang. Tout
2 revient souvent lorsqu’on parle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité
2 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
3 ple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette conclusion pratique : inutile de publier des poèmes. Éluar
4 cation est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poiss
5 n à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’ y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuit
6 se de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidenc
7 fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien  ? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’être pa
8 coïncidence entre l’univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’être parfait
9 ends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’ être parfaitement impénétrables. Je crois même voir que M. Breton sera
10 qui devraient m’être parfaitement impénétrables. Je crois même voir que M. Breton serait un très curieux poète s’il ne s’
11 poème doit être une dictée non corrigée du Rêve. Je reconnais à chaque ligne de Poisson soluble cette « vieillerie poétiq
12 une grande part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dè
13 part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’ empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dès lors, tou
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
14 ie lui-même : « Il y a quelque chose au-dedans de moi . Qu’est-ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont de gauches co
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
15 meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtou
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
16 l’Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
17 ’impartialité. Son art bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman san
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
18 iste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’ imagine son étonnement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois la
19 à son propre corps de doctrines critiques. Dirai- je pourtant que je crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inc
20 rps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant que je crains qu’il n’ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à g
21 moral, c’est-à-dire rationnel, dit M. Seillière — me paraît infiniment plus forte que celle d’un Maurras ou que celle d’un
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
22 e tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à l
23 utel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seulement co-génération ? Pour
24 cho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’ avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble
25 l’univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’infini
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
26 ts, Synge, Joyce même… Trois noms qui permettent, je crois, de parler d’un grand siècle littéraire irlandais ; ce que d’ai
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
27 on d’idées en faits ou en situations dramatiques. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou
28 e faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi . Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-être du monde d
29 e est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’ embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne
30  : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empir
11 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
31 trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un Romier, un Bainville, quelques a
32 a bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à la place ? Nos pens
33 aient à l’action, c’est encore pour cultiver leur moi . Ils y cherchent un fortifiant, je ne sais quelle excitation, quelle
34 cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortifiant, je ne sais quelle excitation, quelle révélation ou quel oubli. C’est un
35 listes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de ro
36 n d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur.
37 souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi , pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités ne
38 équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons po
39 rs ». « Pour nous, le salut n’est nulle part… » «  Je comprends la révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu »
40 end en vain sa Révélation : « C’est peut-être que je suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché
41 ne s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’
42 ’est vertu que de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cult
43 e de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultaném
44 n moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’
45 ient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfendable de tout point de vue…
46 ’acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’ avais goûté à l’alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous ch
47 ectuel sur lequel tout apparaît inutile et vain ? Je cite ces phrases, tirées d’un récit d’ailleurs admirable4, de Louis A
48 es, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m
49 pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’empêchero
50 i toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’ empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’orgueil
51 d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’orgueil, sachant une chose si forte, de
52 ien que l’orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si hau
53 la perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité psychologique d’une attitude par aill
54 on sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur
55 d’Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « g
56 lides suffirait à restaurer une élite, efficace. ( Je vois Jean Prévost, deux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois
12 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
57 uer Mme Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai- je que l’abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes l
58 s les femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’ agace un peu ? C’est une vétille. s. Rougemont Denis de, « [Compte
13 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
59 tre qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthéti
60 es fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et
14 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
61 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la dé
62 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale
63 ite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me per
64 ssagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vér
65 je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se re
66 ous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan v
67 de tout ce qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où el
68 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, Mon corps et moi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
69 is de, « [Compte rendu] René Crevel, Mon corps et moi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p.
15 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
70 tence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contemporaine ». Pures géométries de ver
16 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
71 Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)w Je ne crois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil d’essais, M. F
72 e biais l’œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusion. Mais s’il est bien établi que les lois
73 r toute communication directe entre l’œuvre et le moi , comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le
74 l’Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses beaucoup trop absolues. M. Fern
75 st-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une discussion de ces thèses subtiles, d’autant q
76 autant que la position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment l’inter
77 l’homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thème qui revient dans la plupart de ce
78 homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thème qui revient dans la plupart de ces e
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
79 Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)x J’ éprouve quelque gêne à porter un jugement littéraire sur ce nouveau to
80 s prairies espagnoles pleines de simple grandeur, j’ ai supporté mille fastidieux détails techniques et des délires taurolo
81 ctacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’ admire dans ces Bestiaires, presque malgré leur sujet trop pittoresque
82 de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloire future sur des valeurs plus humai
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
83 paraison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence européenne libre peut souscrire aux crit
19 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
84 Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab «  Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne s
85 nvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité d
86 Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi
87 ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glab
88 on d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux
89 sans rire : « À mort ceux qui paraphrasent ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de la persécution, qui se cherche
90 sse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’ empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi
91 la jeune littérature française. Il le proclame «  J’ appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut,
92 un des plus significatifs du romantisme nouveau. J’ ai nommé Rousseau, Nerval Musset : mais voyez un Rousseau sans tendres
20 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
93 ies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme
21 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
94 Edmond Jaloux, Ô toi que j’ eusse aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’exemple rare d’
95 ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux, j’ y vois un signe charmant d’amitié de l’aîné au plus jeune, lequel envo
96 nis de, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Ô toi que j’ eusse aimée…  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
22 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
97 la dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi , soif de tout et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’ab
98 . Rops a-t-il trop négligé le rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini
23 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
99 père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’ oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi.
100 re sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassem
101 inqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque
102 blient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description
103 t dont le profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui se retourne, méprisant : « Mais oui, je ne n
104 re Jacob qui se retourne, méprisant : « Mais oui, je ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez do
105 retourne, méprisant : « Mais oui, je ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner
106 e ne nie rien, je suis sans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner d’être plus fort que cette bourgeois
107 ans scrupules, on connaît mon orgueil : osez donc me condamner d’être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suiv
108 geoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’ avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. Rougemo
109 ivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’ humilier et de me craindre. » ah. Rougemont Denis de, « [Compte ren
110 e vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard Lecac
24 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
111 ’on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’exigence d
112 e », c’est encore l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de
113 core l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi . Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de
114 de document humain, nuit à sa valeur littéraire. Je n’aime guère ce style abstrait, semé de redites et d’expressions tout
25 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
115 e tache de couleur, plus sentimental que cruel. «  J’ ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragiq
26 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
116 s le fond quelque chose de solide, d’authentique. J’ aime cette violence de redressement où je distingue bien autre chose q
117 entique. J’aime cette violence de redressement où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’impuissance ». Un pl
118 onner quelque vitalité à notre civilisation, — et je sais bien que c’est là un des signes de sa décadence. Il y a du chiru
27 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
119 vous n’aviez pas lu ce livre ? Ah ! sans hésiter, je vous ferais un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’on n’e
28 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
120 une étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’auteur lui-même appelle « ce
121 ire, intermittente, un peu émiettée, éventée, que je trouve dans une ancienne réalité ressuscitée… » Sachons gré à M. Vaud
29 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
122 œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît comme un
123 u nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis R
124 us que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un o
125 poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un objet de songe
126 que je vis Rilke, je compris que cet univers dont je rêvais n’était pas un objet de songe mais d’expérience ». Mais une te
127 is d’expérience ». Mais une telle « expérience », je crois, ne peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somm
30 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
128 « fatale », « si arbitraire et si facultative », je me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette
129 fatale », « si arbitraire et si facultative », je me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette att
31 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
130 logue ? Laisserons-nous Jules Verne aux enfants ? J’ allais oublier que la littérature enfantine est le dernier bateau. Pou
131 est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui ne m’ empêchera pas d’y monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo so
132 ffit que cet obsédant capitaine Nemo soit à bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que La Liberté. ar. Rougemont
32 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
133 seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 6
134 i le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’ admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultan
135 arties d’échecs simultanément, et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne
136 ies d’échecs simultanément, et c’est naturel : je m’ en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne de
137 et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et m’ en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que des
138 s éloigné et m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils les fa
139 ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ ai lu ce livre, malgré son premier chapitre, variation sur un mot bien
140 itte à renaître heureusement) sur des gens qui ne m’ intéressent pas ou bien qui ne sont pas atteints par ces épithètes drô
33 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
141 es chefs (c’est lui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en fais
142 ui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fai
143 u nom de l’auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’éva
144 lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvé
34 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
145 lables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se soit borné à une courte nouvell
35 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
146 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se se
147 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé e
148 Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légè
149 ndre d’un air connaisseur que c’est bien composé. J’ avoue prendre cette autobiographie tellement au sérieux que j’ai été b
150 dre cette autobiographie tellement au sérieux que j’ ai été bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un h
151 doucement comique, si émouvant : « À cette époque je croyais fortement en l’existence d’une espèce de secrète et à peu prè
152 gosses à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’
153 ous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivais presque à
154 ivrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais- je parfois, et il y avait des moments où j’arrivais presque à me convain
155 e disais-je parfois, et il y avait des moments où j’ arrivais presque à me convaincre que si je m’approchais tout à coup pa
156 et il y avait des moments où j’arrivais presque à me convaincre que si je m’approchais tout à coup par-derrière d’un homme
157 ents où j’arrivais presque à me convaincre que si je m’approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou d’une femme quelc
158 s où j’arrivais presque à me convaincre que si je m’ approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou d’une femme quelconq
159 sais “houu !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras
160  !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras dessous e
161 il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous en irions bras dessus, bras dessous en r
162 a contribué davantage que n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrai
163 ont Denis de, « [Compte rendu] Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme  », Bibliothèque universelle et Revue
164 , « [Compte rendu] Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
165 mpte rendu] Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
36 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
166 isme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bien française, hélas. ba.
37 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
167 la défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Ju
168 de répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philo
169 nda, sur le plan philosophique en particulier, où je me sens bien plus près de M. Gabriel Marcel, qu’il attaque. (M. Benda
170 , sur le plan philosophique en particulier, où je me sens bien plus près de M. Gabriel Marcel, qu’il attaque. (M. Benda tr
171 ahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la c
172 n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent l’esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous app
38 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)
173 Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)bd Si vous avez la curiosité, mieux, le goût
174 r que l’esprit pénètre dans la poésie, vous lirez Mes Propriétés. Il se peut que vous les trouviez médiocrement riantes, au
175 émouvante bizarrerie (Mort d’un Page). Cependant je préfère ses proses : il y a ici plus qu’une manière et qu’un ton, il
176 mps — depuis les Trivia de Logan Pearsall Smith — je n’avais pas lu de livre où s’exprimât avec une pareille sécurité dans
177 ugemont Denis de, « [Compte rendu] Henri Michaux, Mes propriétés  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, m
39 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Kikou Yamata, Saisons suisses (mars 1930)
178 matin plein de mouettes — « Un beau bruit d’ailes me fait un ciel » — la vaporeuse beauté du lac de Neuchâtel. Mlle Kikou
40 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Jullien du Breuil, Kate (avril 1930)
179 e genre de livres — ils se multiplient — vient, à mon sens, de quelque chose qu’ils expriment sans doute inconsciemment et
41 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu (septembre 1930)
180 on un peu hâtive à une « jeunesse » déjà démodée… Je crois que la jeunesse d’aujourd’hui s’éloigne plutôt de la grandiloqu
42 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie I (octobre 1930)
181 de ministres en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau feindre l’intérêt le plus singulier pour ce châtea
182 s en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ ai beau feindre l’intérêt le plus singulier pour ce château sur la riv
183 ur la rive, ils en ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où
184 ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi.
185 re honte de mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi. Le seul refuge est à l’avant, parmi d
186 visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi. Le seul refuge est à l’avant, parmi des cordages, des
187 ue la phrase, l’unique phrase que Richard Strauss m’ aura jamais adressée en cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatig
188 mais adressée en cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatigué, je vais au lit… » C’était au vestiaire, il enfilait une
189 cette vie : « Bonsoir, Monsieur, je suis fatigué, je vais au lit… » C’était au vestiaire, il enfilait une manche de pardes
190 u vestiaire, il enfilait une manche de pardessus, me donnait l’autre à serrer, la main n’étant pas encore sortie… Dormir a
191 ns cette foule et ces musiques, deux visages amis me sourient. Ô liberté aérienne des arrivées, premiers regards aux rues
192 qui font des signes pour demain, présentations de mes Espoirs aux jeunes Promesses nationales (on n’a pas bien compris les
193 tendresse pour tous les possibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme
194 ossibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme aux voûtes sombres, qui
195 ibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi dans une grande maison calme aux voûtes sombres, qui est
196 . La recherche de l’objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en
197 e de l’objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en ce premier
198 on adresse, je n’attends rien d’ailleurs ; tout à ma chance hongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la
199 ce hongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’at
200 ongroise en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’atten
201 z moi je suis la proie de l’angoisse du courrier. J’ attends la lettre, j’attends je ne sais quoi de très important… Trois
202 e de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’ attends je ne sais quoi de très important… Trois déceptions par jour n
203 oisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends je ne sais quoi de très important… Trois déceptions par jour ne peuvent
204 par jour ne peuvent qu’énerver le désir. Parfois j’ imagine que le facteur va m’apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciat
205 ver le désir. Parfois j’imagine que le facteur va m’ apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciateur d’une miraculeuse et roy
206 le Venue. Dans le silence de l’adoration comblée, j’ en sortirais de ces objets sans nom, inutilisables, bouleversants de p
207 us pur. Le voyage trompe un temps cette angoisse. J’ irai chercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes les avances, l
208 n temps cette angoisse. J’irai chercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qu
209 cette angoisse. J’irai chercher moi-même, me suis- je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sait s
210 goisse. J’irai chercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes les avances, les plus exténuantes, et qui sait si tant d
211 choses pouvait offrir asile à l’objet inconnu que je chercherai sans doute jusqu’à la fin des fins… Mais voici mes amis. E
212 ai sans doute jusqu’à la fin des fins… Mais voici mes amis. Et la question terrible, tout de suite : « Mais qui, mais qu’êt
213 u’êtes-vous venu chercher jusque chez nous ? » On me demandera donc toujours des passeports ? Dussè-je les inventer… Ah !
214 me demandera donc toujours des passeports ? Dussè- je les inventer… Ah ! l’embarras de voyager n’est rien auprès de celui d
215 i d’expliquer pourquoi l’on est parti. Cependant, mes regards errant sur une bibliothèque, je crois y trouver mon salut : «
216 pendant, mes regards errant sur une bibliothèque, je crois y trouver mon salut : « Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabo
217 s errant sur une bibliothèque, je crois y trouver mon salut : « Peter Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’éc
218 Schlemihl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’ écrié-je, mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’
219 hl, et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’écrié- je , mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’user, ne
220 et vous, A. O. Barnabooth, vous êtes, m’écrié-je, mes frères ! Nous traînons tous notre sabot, qui, loin de s’user, ne tard
221 vre. Mais combien votre sort, ô grands empêtrés ! me paraît enviable : vous au moins connaissiez ce qui causait votre malh
222 moins connaissiez ce qui causait votre malheur ; moi , non. Barnabooth savait bien ce qu’il ne pouvait perdre, et c’était s
223 ait ce qu’il avait perdu, c’était son ombre. Mais moi qui cherche un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos et qui me voue à
224 e un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos et qui me voue à toutes les magies ! Les désirs les plus incompréhensibles s’em
225 s désirs les plus incompréhensibles s’emparent de moi comme des superstitions. Tout mon avoir se fond dans une loterie qui
226 s s’emparent de moi comme des superstitions. Tout mon avoir se fond dans une loterie qui peut-être n’a pas de gros lot, et
227 rie qui peut-être n’a pas de gros lot, et jamais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à le regretter… » L’ironie indu
228 as de gros lot, et jamais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à le regretter… » L’ironie indulgente et cette pitié à
229 jeunesse démodée se peignirent sur les traits de mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubles distingués.
230 ent sur les traits de mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubles distingués. Peu de sens du réel. Mais
231 ou tout au moins ce qu’il en reste. Sur quoi l’on m’ entraîna dans un musée sans sièges. Le Musée de Budapest enferme quelq
232 andis que nous y rôdions, un soir étouffant, vous m’ avez montré en passant des murs brunis qui rougeoyaient au sommet du R
233 sommes rentrés en Europe. Mais dès le lendemain, m’ échappant du programme, il a bien fallu que je recherche le chemin du
234 in, m’échappant du programme, il a bien fallu que je recherche le chemin du Rozsadomb. « Vous n’y verrez, m’avait-on dit,
235 herche le chemin du Rozsadomb. « Vous n’y verrez, m’ avait-on dit, qu’une paire de babouches dans une mosquée vide que pers
236 stère. Montant au Rozsadomb par ce matin brûlant, je savais bien que j’obéissais à ce que nos psychologues appellent une c
237 ozsadomb par ce matin brûlant, je savais bien que j’ obéissais à ce que nos psychologues appellent une conduite magique. Or
238 justifiable : c’est le plaisir même de l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je fer
239 est le plaisir même de l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au
240 l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinag
241 ma vision d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet incon
242 d’Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. On pas
243 is gravement comme je ferai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. On passe une barrière, une c
244 au est vide. Et les babouches ? Pas de babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heure de visiter : le Père des roses est
245 t devenu le jardinier du Rozsadomb… Mais qu’eussè- je pu contempler de plus « objectivement » étrange que ce lieu — inquiét
246 ntransigeant serait la seule conduite féconde. Il me semble que la servitude de l’homme moderne apparaît ici sous un aspec
247 la sensibilité même qu’on impose une livrée. — «  Je comprends, me dit-on. Vous êtes pour la fantaisie, c’est bien joli !…
248 é même qu’on impose une livrée. — « Je comprends, me dit-on. Vous êtes pour la fantaisie, c’est bien joli !… » — Non, Mons
249 sieur, ce n’est pas joli, ce n’est pas fantaisie. Je parle simplement de vérité et de mensonge, opposant une réalité vivan
250 t, disait-on, du temps que l’on parlait français. J’ expliquais donc que je ne voyage qu’au hasard, et pour rien ni personn
251 que l’on parlait français. J’expliquais donc que je ne voyage qu’au hasard, et pour rien ni personne. Sur quoi : « Monsie
252 devoirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui : je me ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre cons
253 voirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui : je me ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre conserv
254 h bien oui : je me ferai un mérite de perdre tout mon temps, si toutefois perdre conserve ici le sens qu’il a pris dans ce
255 onserve ici le sens qu’il a pris dans ce monde, —  j’ entends : leur monde, avec leurs « problèmes du plus haut intérêt », l
256 payer cher. Tout cela est langage de bourse. Pour moi , je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la fac
257 cher. Tout cela est langage de bourse. Pour moi, je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la face de
258 a est langage de bourse. Pour moi, je poursuivrai mon discours en faveur de l’inutile, et ceci à la face des bouffons qui p
259 es mains dans leurs vastes poches insulaires pour m’ informer de cette irrécusable vérité : les affaires sont les affaires,
260 t les affaires, axiome qui constitue à leurs yeux ma condamnation et celle des minus habentes qui me ressemblent. Au risqu
261 x ma condamnation et celle des minus habentes qui me ressemblent. Au risque de les voir trépigner, je continuerai à cherch
262 me ressemblent. Au risque de les voir trépigner, je continuerai à chercher mon bien de midi à quatorze heures, temps qu’i
263 de les voir trépigner, je continuerai à chercher mon bien de midi à quatorze heures, temps qu’ils réservent à la masticati
264 l’on ose dire, à assurer cette mastication. Mais je m’égare, laissons-là ces moutons. 5. Café amer En Hongrie l’on
265 on ose dire, à assurer cette mastication. Mais je m’ égare, laissons-là ces moutons. 5. Café amer En Hongrie l’on est
266 e que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que je trouve ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je me défends d
267 ve ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je me défends du pittoresque, ce n’est qu’amour jaloux du merveilleux, a
268 ce raisonnement fin, encore que juste, mais si je me défends du pittoresque, ce n’est qu’amour jaloux du merveilleux, avec
269 es presque excusables de ne le point apercevoir.) Je vais cependant dire quelque chose d’une scène pittoresque. Mais c’est
270 scène pittoresque. Mais c’est une autre fois que je l’ai vue, à Pest, lors d’un autre séjour, dans la semaine qui suit No
271 ffreusement belle dans un peignoir noir et blanc… Je ne puis avaler mon verre de ce café trop amer qui pince la gorge. Deh
272 dans un peignoir noir et blanc… Je ne puis avaler mon verre de ce café trop amer qui pince la gorge. Dehors, nous ne parlon
273 mâchoire. 6. Doutes sur la nature du Sujet Je crois qu’il faut que je raconte mon voyage « à la suite », renonçant
274 sur la nature du Sujet Je crois qu’il faut que je raconte mon voyage « à la suite », renonçant à écrire d’abord les cha
275 re du Sujet Je crois qu’il faut que je raconte mon voyage « à la suite », renonçant à écrire d’abord les chapitres qui e
276 t envie, puis ceux qui en auront envie : car cela m’ inciterait à chercher après coup des transitions, et c’est alors que l
277 d’un pays apparaissant en général au voyageur de ma sorte sous ses modalités sentimentales plus que documentaires, peut-ê
278 us que documentaires, peut-être serait-il bon que je parsème ce texte de quelques noms impossibles et de beaucoup de chiff
279 si le lecteur superficiel aurait l’impression que je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon suje
280 el aurait l’impression que je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce q
281 impression que je suis zur Sache, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît
282 che, que je parle de mon sujet, — étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît infiniment baroque, à peine c
283 étant admis que mon sujet soit la Hongrie, ce qui me paraît infiniment baroque, à peine compréhensible, car on ne choisit
284 ndeloque insolite l’étrangeté de son éclat. Alors je m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais f
285 loque insolite l’étrangeté de son éclat. Alors je m’ en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais fein
286 e son éclat. Alors je m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux ce
287 oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux ce que je vois. Ruse connue : c’es
288 use. Je vais feindre de prendre au sérieux ce que je vois. Ruse connue : c’est l’histoire du mot que vous avez sous la lan
289 l’histoire du mot que vous avez sous la langue ; je vous conseille de n’y plus penser quelque temps… Car on ne trouve vra
290 rand et gratuit, sacrifice.) … feuilletons un peu ma Hongrie. 7. Les magnats en taxis La place Saint-Georges, à Bude
291 iducs, quel décor à rêver le cortège d’un sacre ! J’ y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour de l’élection d’un des
292 s instable des huit reflets de leur dignité. Mais je n’oublierai pas le sourire de ce vieux prince : un vrai sourire, adre
293 — et le mot « affable » reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a la tête de François-Joseph, dont il fut peut-être valet,
294 is semaines, à Freudenau, lors du Derby viennois, je les ai vus portant cylindre gris à la terrasse du Jockey-Club. Mainte
295 thes sentimentaux qui gouverne les arguments. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosm
296 ux qui gouverne les arguments. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme : la politique
297 ents. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme : la politique des peuples ressemble à
298 Tendre d’après le traité de Trianon ! Ces choses, je les ai rêvées sur un divan, à cause d’un coussin où s’étalait le sour
299 . Le roi. » 10. Visite à Babits Personne, à ma connaissance, ne se plaint de ce qu’il y a peu de poètes par le monde
300 ts « bien hongrois » dans un style académique qui me paraît être le contraire du style hongrois. Il y a aussi une extrême
301 la plus vivante du génie littéraire de cette race me paraît bien avoir été donnée par le groupe important du Nyugât (l’Occ
302 Babits est aujourd’hui le chef de file. Des amis m’ emmènent le voir à Esztergóm, où il passe ses étés. Esztergóm est la p
303 t la plus vieille capitale de la Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. Aujourd’hui c’est la résidence du Prince Primat. Au-
304 le la plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est, je grimpe au cerisier sauvage, derrière la maison, un peintre tout en bl
305 non point à celle des arrivistes. 14. Parce que j’ « exalte les valeurs de passion » — pour parler comme le seul Clerc qu
306 ler comme le seul Clerc qui n’ait pas trahi — qui me paraissent être la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je sui
307 me paraissent être la grandeur de la Hongrie, on m’ expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin cet état d’esprit
308 re la grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin cet état d’esprit que j’admire est
309 ur la guerre, puisque enfin cet état d’esprit que j’ admire est, entre autres, belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne
310 it que j’admire est, entre autres, belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne pas l’être ? Mais je crois que les pacifis
311 r je suis pacifiste. Comment ne pas l’être ? Mais je crois que les pacifistes qui veulent assurer la paix par la mutilatio
43 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la folie (octobre 1930)
312 Les quatrains sont ici précédés de Fragments dont je me demande s’il était bien légitime de les traduire. On a respecté sc
313 quatrains sont ici précédés de Fragments dont je me demande s’il était bien légitime de les traduire. On a respecté scrup
314 mots isolés, des bribes de phrases… Or, si comme je le crois et voudrais l’établir plus longuement, le sens des poèmes de
315 les d’éveiller le sentiment rare et grandiose que j’ appellerais celui du tragique de la pensée. « Insensé, — penses-tu de
44 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie II (novembre 1930)
316 nnel tu vois que la veilleuse brûle toujours — et moi , parmi les reflets fuyants de toutes sortes de faces et de paysages s
317 de faces et de paysages soudainement invisibles, je distingue le doux feu bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand
318 ment invisibles, je distingue le doux feu bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand je pense à ce qu’en imagineraient
319 u bleu de mon obsession. L’Objet Inconnu, — quand je pense à ce qu’en imagineraient les autres, si je leur en parlais… Il
320 je pense à ce qu’en imagineraient les autres, si je leur en parlais… Il leur suffirait de l’image d’un bibelot d’une sort
321 t inconnu et tellement fascinant à la fois, qu’il me préserve de tout amour pour quelque bien particulier où je serais ten
322 ve de tout amour pour quelque bien particulier où je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le
323 ur quelque bien particulier où je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde dan
324 ticulier où je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde dans sa fumée, on resp
325 je serais tenté de me complaire. Oh ! je sais ! —  Je ne sais plus. — Le train s’attarde dans sa fumée, on respire une lour
326 on respire une lourde obscurité qui sent l’enfer. Je ne pense plus qu’ « au souffle »… Mais alors tout s’allume et voici l
327 ne sont qu’une ivresse aux cent visages, lorsque j’ entre dans l’atelier du peintre. Je ne tarde pas à oublier ce qui est
328 sages, lorsque j’entre dans l’atelier du peintre. Je ne tarde pas à oublier ce qui est lent ou fixe ou pas-à-pas. Tout s’é
329 s la danse, ils incarnent l’allégresse rythmique. Je les vois frapper le sol du talon en levant un bras, la main à la nuqu
330 horizontales, soutenues par un long souffle vif. J’ observe que les paroles autant que les gestes sont gouvernées par la s
331 selon les lois d’une plastique exubérante. Quand je dis que j’observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’
332 lois d’une plastique exubérante. Quand je dis que j’ observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’on en ferme
333 plastique exubérante. Quand je dis que j’observe, je n’observe rien. Il y a des femmes si belles qu’on en ferme les yeux.
334 gs coups d’ailes en silence au-dessus du gouffre. Je vole sur place, mais tout se met à fuir, alors il faut voler plus vit
335 vite pour rattraper ces apparences adorables… Si je « lâchais » un instant, toutes choses disparaîtraient… Le vertige (la
336 aisser choir dans le Gris ? Rejoindre ?… Derrière mes paupières, dans ce désordre lumineux, le verrai-je naître à mon désir
337 s paupières, dans ce désordre lumineux, le verrai- je naître à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans No
338 dans ce désordre lumineux, le verrai-je naître à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans Noms, ça ne ser
339 tre à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma tête, Sans Noms, ça ne sera pas encore pour cette fois. 13. Chanso
340 es mains pleines de drôleries ou de supplication. Je ne sais ce que disent les paroles. Je vois des chevauchées sous le so
341 pplication. Je ne sais ce que disent les paroles. Je vois des chevauchées sous le soleil, des campements nocturnes où le s
342 ue, conserve quelque espoir de t’en tirer. Sinon… je t’envierais presque. Celui qui part pour la Hongrie sans talisman, s’
343 borodinesque, mais l’erreur n’est imputable qu’à mon instabilité rythmique. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que j
344 à mon instabilité rythmique. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que j’entends.) La plaine hongroise n’est pas monoto
345 que. (Trop souvent ce que je vois traverse ce que j’ entends.) La plaine hongroise n’est pas monotone, parce qu’elle est d’
346 i fasse répétition. C’est ici le premier pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choi
347 emier pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choisis16. Il y a une grande ville, un
348 pays que je n’ai pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choisis16. Il y a une grande ville, un grand
349 estions sociales. La Puszta est une terre vierge, je veux dire que la bourgeoisie ne s’y est pas encore répandue. Il y a p
350 et artiste de la prodigalité. — « Ah ! répond-il, j’ aimerais bien pouvoir vivre comme je vis ! » Voici les cigognes, dont
351  ! répond-il, j’aimerais bien pouvoir vivre comme je vis ! » Voici les cigognes, dont Andersen assure qu’elles parlent en
352 gue qu’elles apprennent de leurs mères ». Combien j’ aime ces sœurs des Tziganes ! Les Tziganes vinrent en Europe conduits
353 allemand, c’est : Zigeuner ; hongrois : cigány ; mien  : cigognes. D’ailleurs ces Égyptiens venaient des Indes, qui nous app
354 nous n’avons qu’au prix de tout ce qu’à Debrecen je viens admirer. On aime les Hongrois comme on aime l’enfance : or le r
355 ’enfant, c’est de devenir une grande personne. On me l’a dit, c’est vrai : cette ville historique est aussi l’autre « Rome
356 sitaire tout rajeuni dans des jardins luisants ne m’ empêchera pas de m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’E
357 i dans des jardins luisants ne m’empêchera pas de m’ y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’Europe. Le hasard a
358 u bord extrême de l’Europe. Le hasard a voulu que j’ y entende, un soir, une présentation de musiques hongroises, turques e
359 nte et basse, prolongée. Peut-être ce soir-là, ai- je compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches d
360 e compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’ étais aux marches de l’Asie. En sortant du concert, j’ai erré aux terr
361 ais aux marches de l’Asie. En sortant du concert, j’ ai erré aux terrasses des hôtels, dans le grandiose bavardage des Tzig
362 oici qu’une autre vient d’ailleurs, entraînée par je ne sais quel vent sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et d’un
363 de celui qui succombe à l’excès du sommeil) — et me voici plus seul, avec une nostalgie qui ne veut pas de la romance à m
364 vec une nostalgie qui ne veut pas de la romance à mon oreille d’un violoneux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond d
365 as de la romance à mon oreille d’un violoneux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond d’une Inde. Ils l’ont égaré, co
366 ux fades du Balaton Deux jours après, dégrisé, je nageais dans les eaux fades du Balaton. Ces eaux, je crois, s’en vont
367 nageais dans les eaux fades du Balaton. Ces eaux, je crois, s’en vont à la mer Noire, et je n’en connais pas les fées, c’e
368 Ces eaux, je crois, s’en vont à la mer Noire, et je n’en connais pas les fées, c’est pourquoi je nageais à brasses pruden
369 , et je n’en connais pas les fées, c’est pourquoi je nageais à brasses prudentes avec, aux jambes, l’imperceptible angoiss
370 presque belles dans leurs petits sweaters — vais- je pour vous m’arrêter quelques jours ? On ferait connaissance à table d
371 es dans leurs petits sweaters — vais-je pour vous m’ arrêter quelques jours ? On ferait connaissance à table d’hôte, on ira
372 ant qu’ici la vie a parfois moins de hargne… Déjà je suis repris par le malaise que m’infligent les lieux faciles. Ô trist
373 de hargne… Déjà je suis repris par le malaise que m’ infligent les lieux faciles. Ô tristesse des crèmeries et des jardins 
374 s jardins ! C’est devant une glace panachée qu’il m’ arrive de douter de la vie, comme d’autres aux approches du mal de mer
375 d’autres aux approches du mal de mer. À la nuit, j’ ai rôdé dans la campagne aux collines basses, d’apparence rocheuse — c
376 la Lune et toutes lustrées de rêches végétations. J’ ai traversé l’angoisse lunaire des villages vides aux portes aveugles
377 e lunaire des villages vides aux portes aveugles ( j’ avais peur du bruit de mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers da
378 des aux portes aveugles (j’avais peur du bruit de mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers dans les champs de maïs, épi
379 es (j’avais peur du bruit de mes pas). Au hasard, j’ ai suivi des sentiers dans les champs de maïs, épiant la venue d’une j
380 te où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je me heurte, comme réveillé dans l’absurdité d’être n’importe où. Une p
381 où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je me heurte, comme réveillé dans l’absurdité d’être n’importe où. Une pani
382 rdu… Un train dormait devant la gare campagnarde. Je me suis étendu dans un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri
383 … Un train dormait devant la gare campagnarde. Je me suis étendu dans un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri de
384 de la lune. Le contrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube m’éveille dans les faubourgs de Budapest, cheveux
385 ur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube m’ éveille dans les faubourgs de Budapest, cheveux en désordre, pantalon
386 on plissé, et cet abruti de contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j’allais rattraper, comme
387 sé, et cet abruti de contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j’allais rattraper, comme un pan
388 et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j’ allais rattraper, comme un pan de la nuit fuyante, un songe où j’ai dû
389 per, comme un pan de la nuit fuyante, un songe où j’ ai dû voir l’objet pour la première fois — ou bien était-ce un être ?
390 s — ou bien était-ce un être ? 17. Insomnie J’ éteignais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon d’une momie bl
391 Insomnie J’éteignais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon d’une momie bleuâtre, mais peut-on se reposer vraim
392 vraiment à cent à l’heure. Par-dessous le store, je voyais la Lune faire des bonds courts sur la plaine inondée de nuit.
393 e des bonds courts sur la plaine inondée de nuit. J’ essayais de penser par-dessous le rythme obstiné de cette hurlante bou
394 ulade sur place qu’est un voyage en express. Mais je ne trouvais pas la pente de mon esprit, et tout en le parcourant avec
395 e en express. Mais je ne trouvais pas la pente de mon esprit, et tout en le parcourant avec une soif qui annonçait le déser
396 parcourant avec une soif qui annonçait le désert, je traçais des plans d’œuvres sablonneuses. Je composais un traité des v
397 sert, je traçais des plans d’œuvres sablonneuses. Je composais un traité des voyages : les titres en étaient de Sénèque ou
398 les titres en étaient de Sénèque ou de Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré Sterne ou Goethe, mais, sembla
399 ne ou Goethe, mais, semblable à Gérard de Nerval, je sentais qu’il s’agissait d’autre chose… Il s’agit toujours d’autre ch
400 depuis un moment, c’est que la ligne est droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’aime ces heures désorientées 
401 ligne est droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’aime ces heures désorientées ; le sentiment du « non-sens »
402 droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’ aime ces heures désorientées ; le sentiment du « non-sens » de la vie
403 s, naturellement… (Encore un qui se réveille dans ma tête.) — On ne voyage jamais que dans son propre sens ! — Mais il fau
404 er). Se peut-il qu’on cherche le sens de la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable
405 cherche le sens de la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable. Seul au milieu des m
406 e la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’ approcher de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais
407 ais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’avais
408 de mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’ oubliais ma race, j’avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Ide
409 e véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mo
410 le. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’ avais l’illusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre.
411 llusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon a
412 tique à mon centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un
413 on centre. Ici, comparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type huma
414 omparé à tant d’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’é
415 ’autres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’étais presque i
416 tres, je perds mes préjugés sur mon apparence, je me découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’étais presque infi
417 découvre localisé dans un type humain. Immobile, j’ étais presque infiniment variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui
418 ent variable, indéterminé. Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert
419 ble, indéterminé. Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puis
420 Et c’est le voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puissances d’évasion
421 Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps, j’ ai découvert mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je presse
422 on me dessine. Mais en même temps, j’ai découvert mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe
423 t mes puissances d’évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe une clef : délivré de moi, j’entrerais en plein
424 nt je pressens qu’il existe une clef : délivré de moi , j’entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettr
425 pressens qu’il existe une clef : délivré de moi, j’ entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait
426 e une clef : délivré de moi, j’entrerais en plein Moi … Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait de combler l’écart ent
427 rais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réal
428 ela » qui me permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un ê
429 ui me permettrait de combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un être ? L
430 que… Une chose ? Un être ? L’Objet ? — Est-ce que je dors dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain d’un éclat bleu
431 e ? Un être ? L’Objet ? — Est-ce que je dors dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain d’un éclat bleu douloureux, le
432 est obstruée par un douanier, tant qu’à la fin on me refoule dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends b
433 un douanier, tant qu’à la fin on me refoule dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends bien qu’il faudrai
434 le dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je comprends bien qu’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ai perdu mes
435 ends bien qu’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ ai perdu mes clefs. L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’
436 u’il faudrait ouvrir ces valises, mais j’ai perdu mes clefs. L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’ai le feu à
437 . L’œil du douanier conseille des aveux complets. J’ ai le feu à la tête, mais je suis innocent puisque enfin il n’est pas
438 e des aveux complets. J’ai le feu à la tête, mais je suis innocent puisque enfin il n’est pas dans ma valise, ce n’est que
439 je suis innocent puisque enfin il n’est pas dans ma valise, ce n’est que trop certain. Cependant, « rien à déclarer » apr
440 e ? Cela va paraître improbable. On a dû voir sur moi que je le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs
441 va paraître improbable. On a dû voir sur moi que je le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans me
442 pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans mes onze poches. Seulement ce papier timbré d’un ministère… mais déjà l’œ
443 is qu’a-t-on jamais pu « déclarer » d’important ? Je ne sais plus parler en vers et la prose n’indique que les choses les
444 est bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre philosophale. Pe
445 bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre philosophale. Peut-
446 ces deux mots suffiraient-ils à l’indiquer quand je m’en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui ex
447 s deux mots suffiraient-ils à l’indiquer quand je m’ en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui exige
448 ’en parle ? Tout en donnant le change à celles de mes pensées qui exigent des apparences positives. Ainsi donc, j’ai cherch
449 qui exigent des apparences positives. Ainsi donc, j’ ai cherché la Pierre des philosophes. D’autres aussi, peut-être, la ch
450 sirer de la voir, apparaît la « Loge » invisible. J’ attends, j’appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi
451 voir, apparaît la « Loge » invisible. J’attends, j’ appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte l
452 isible. J’attends, j’appelle quelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce
453 uelqu’un qui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle m’a donné ? Cette not
454 e quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle m’ a donné ? Cette notion plus vive d’un univers où la présence de l’Obje
455 l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bien n’ai- je su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieur
456 ien n’ai-je su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depuis to
457 su voir autre chose que la Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depuis toujours ce
458 nnaître sont un seul et même acte. Peut-être l’ai- je aimée d’un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et en qui l’
459 cun être ? Et s’il fallait attendre pour aimer !… Je me souviens de ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et
460 être ? Et s’il fallait attendre pour aimer !… Je me souviens de ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et d’
461 rande Plaine encore rougeâtre de soleil couchant. J’ y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et po
462 couchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécu
463 uchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécurit
464 flânant ; je me suis sans doute perdu et pourtant je n’éprouve qu’une étrange sécurité. Présence, présence réelle… Comme j
465 trange sécurité. Présence, présence réelle… Comme j’ ai peine à m’imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière
466 té. Présence, présence réelle… Comme j’ai peine à m’ imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière en ce lieu,
467 le… Comme j’ai peine à m’imaginer que jamais plus je ne la reverrai, cette lumière en ce lieu, secrète et familière. Songe
468 cette minute et à d’autres semblables, en voyage, je me dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncièr
469 te minute et à d’autres semblables, en voyage, je me dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière q
470 blables, en voyage, je me dis que c’est de là que j’ ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive d’éprouver en
471 j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’ arrive d’éprouver en face d’une action purement raisonnable. Ah ! quel
472 tu perds les clefs de tes valises… (Cela encore : m’ arrêter à Vienne à cause des serrures… Peut-être y passer une nuit — r
473 Lune le renvoie sur Terre en forme de pluie. » Si je trouvais un jour l’Objet, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussi
474 de pluie. » Si je trouvais un jour l’Objet, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussitôt je commence à comprendre ce qu’
475 t, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussitôt je commence à comprendre ce qu’il est : cela qui me rendrait acceptable
476 je commence à comprendre ce qu’il est : cela qui me rendrait acceptable ce monde…) Malheur à celui qui ne cherche pas. Ma
45 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Charles Du Bos, Approximations, 4e série (novembre 1930)
477 os, Approximations, 4e série (novembre 1930)bk Je n’ai jamais cherché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en m’iden
478 n’ai jamais cherché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m’était possible, non seul
479 herché rien d’autre que d’approcher mon sujet, en m’ identifiant d’aussi près qu’il m’était possible, non seulement au poin
480 er mon sujet, en m’identifiant d’aussi près qu’il m’ était possible, non seulement au point de vue, mais à la complexion, à
481 nt implicite que, sur le plan de la qualité pure, je persiste à tenir pour le plus efficace. Ce n’est peut-être pas fortui
482 le problème de l’homme dans sa totalité, et c’est je crois l’éloge de choix. Mais de ce problème central, qui déborde le p
483 on pourrait l’appeler une critique des obstacles. Je veux dire par là que M. Du Bos parvient à recréer comme pour son comp