1 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
1 ant, héritier d’une tradition chevaleresque, mène sa vie comme une ardente aventure. Les épisodes s’appellent : collège, g
2 e, ce regard en arrière. Montherlant est dur pour ses erreurs plus encore que pour celles de l’adversaire, ce qui est beauc
3 ls trouvaient au front. D’une phrase, il justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour les vouloir éviter, et ces grand
4 vers de plus sereines exaltations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’aventure antique, et dans ce
5 que, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la lutte d’un tempér
6 fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la lutte d’un tempérament avec la réalité
7 alité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu.
8 e — le Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu. Une soumission au réel durement consentie, voilà ce que nous
9 de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est ent
10 faudra livrer au « feu de vérité » qui brûle dans son temple intérieur, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment le c
11 s son temple intérieur, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consumateu
2 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
12 assages où il expose directement les principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque terne manuel de
13 unicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette conclusion pratique : inutil
14 oème » cette mystification est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifest
15 es, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui servent d’illustration à
16 — Poisson soluble — qui servent d’illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-el
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
17 se au-dedans de moi. Qu’est-ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont de gauches copies de Millet. Mais son manque de
18 rs dessins sont de gauches copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille.
19 , les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’avoir rien caché des médiocri
20 ités de cette vie : les reproductions qui suivent sa courte biographie fournissent un meilleur motif à l’admiration que to
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
21 re en province liquider des stocks américains. Et ses romans, c’est aussi une liquidation : les faits s’y pressent et s’y b
22 as lui qui se refuserait à écrire — comme le fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude es
23 r, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir les fou
24 n vain de ressaisir les foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-devant des troupes accourues, il
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
25 . L’Europe menant cette immense enquête manifeste son génie méthodique, son universelle et inépuisable curiosité. Mais, de
26 e immense enquête manifeste son génie méthodique, son universelle et inépuisable curiosité. Mais, de même que la France int
27 l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une confron
28 mouvement inverse, le christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera vers ses sources pour s’y retrempe
29 sé de son déguisement gréco-latin retournera vers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyse
30 occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à sa logique. » On confond Japon et Arabie, Indes et Chine
31 ut ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à sa logique. » On confond Japon et Arabie, Indes et Chine sous une dénomi
32 ur Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstraction qui a produit la
33 ner qu’une supériorité provisoire et qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent
34 ovisoire et qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinent toutes ces
35 produit un grand nombre de citations à l’appui de ses sophismes, ne se livre pas moins à des déductions in abstracto qui le
36 , entre une Amérique affolée de vitesse, édifiant ses gratte-ciel comme des tours de Babel, et une Asie immobile dans sa mé
37 mme des tours de Babel, et une Asie immobile dans sa méditation éternelle. e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Les
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
38 : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
39 manach 1925 (septembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation, la nouvelle maison d’édition Fischer passait pour « la cen
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
40 l sait en sortir parfois — M. Otto Flakei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux
41 parfois — M. Otto Flakei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’i
42 ns et son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité,
43 notre temps et un évident besoin d’impartialité. Son art bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses p
44 e ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter toutes les idées qu’elles illu
45 lui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raiso
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
46 r, notation suggestive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une grande œuvre qu
47 sont les vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera la mesure de son a
48 ouer une grande œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouve
49 rouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne susciten
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
50 e, de ce nouveau chapitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur les rapports du christianisme et du romantisme. M. S
51 ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois la substance o
52 tiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant que je crains
53 ir légèrement la pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais par ailleurs Vinet déborde le « sell
54 ailleurs Vinet déborde le « sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas sans gêner M. Seillière. C’e
55 moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de cadre solidement mora
56 ue celle d’un Maurras ou que celle d’un Maritain. Son unité est plus réellement profonde, son point d’appui plus central. P
57 Maritain. Son unité est plus réellement profonde, son point d’appui plus central. Pour notre époque déchirée entre un thomi
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
58 C’est bien la poésie d’une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche sans vertige sur ses abîmes. Simplicit
59 a profondeur, mais qui se penche sans vertige sur ses abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de la trépidation immen
60 où il lui arrive de graviter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’infini au fond de soi qu’au f
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
61 iter l’emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malicieuse qui anime
62 isienne. C’est une sympathie malicieuse qui anime ses amusants portraits et ses commentaires parfois un peu copieux ; mais
63 ie malicieuse qui anime ses amusants portraits et ses commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de rendre
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
64 e roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné de beaux exemples d
65 ndie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman quelques mois avant que n’éclate le sinistre, et s’arrête au mo
66 dans un réduit, Markovitch, l’idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient c
67 ient eu faim toute leur vie… Markovitch, derrière sa vitre, tremblait si fort qu’il avait peur de trébucher et de faire du
68 u monde dans l’appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle le
69 vait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle le plus éloigné du réduit, et se b
70 r. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle peut se muer instantané
71 le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent e
14 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
72 besoin si général de s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception mêm
73 ans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle
74 lus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilité
75 térature. Jacques Rivière s’y appliqua dans un de ses derniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le rom
76 ccompagnât votre ultimatum à Dieu. Mais, secouant son dégoût, un Montherlant s’abandonne au salut par la violence. Une sens
77 it Barrès dans des dilemmes où l’art trouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite. Mais trop lucide,
78 t, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitudes fragmentaires la matière de quelques pamphlets par quoi il
79 me désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ; mais jusqu’au poi
80 rie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ; mais jusqu’au point d’y percevoir comme un appel du Dieu per
81 foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : « C’est peut-être que je suis médiocre entre les hommes 
82 attaché encore à se regarder chercher, absorbant son attention dans une sincérité si voulue qu’elle va parfois à l’encontr
83 rité si voulue qu’elle va parfois à l’encontre de son dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans les profondeurs. Et le
84 mais « tabou » ; et c’est vertu que de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie
85 folle, mais c’est justement de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en mo
86 our marquer l’aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les C
87 éprise toutes également ; n’attendant rien que de ses impulsions et contemplant avec une lucidité parfois douloureuse ses p
88 contemplant avec une lucidité parfois douloureuse ses propres actes dont il s’étonne mais qu’il se garde de juger5. Il y a
89 bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter à son excès toute chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que les excè
90 ulevait contre lui-même, qui lui faisait mépriser son propre intérêt6… » c’est proprement la perversion d’une vertu qui se
91 isme. Mais pousser une vertu particulière jusqu’à ses dernières conséquences suppose qu’on ait perdu le sens des ensembles
92 n de celui qui n’a pas dormi et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations, à ses automatismes. En art, la fatigue est un
93 qui n’a pas dormi et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations, à ses automatismes. En art, la fatigue est un des états l
94 et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations, à ses automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de
95 ent qu’il n’y a de pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans la soumission aux lois naturel
96 toutes les émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira
97 e Vinet, ne voir d’abord que les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre
15 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
98 Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque littéralement d’une anecdot
99 ncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mouvement purement lyrique, sa progression accordée à celle des événe
100 ndéniable : c’est son mouvement purement lyrique, sa progression accordée à celle des événements inconscients. Certaines p
16 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
101 est-ce pas, un amusant sujet de conte moral, avec ses personnages un peu conventionnels et l’invraisemblance assez piquante
102 entionnels et l’invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur l’ait alourdi d’une idéologie,
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
103 igant. « Le paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue e
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
104 n Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin,
105 réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce mas
106 r autant à l’Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle simplement une volonté de construire jusq
107 uille poète. Il ne l’est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est le Secret professionnel, pe
108 à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression
109 l bannit le charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles sont sans parfum, ne se faneront pas. t
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
110 position romanesque le trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de
111 de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire, l’ennemie » — avec une intelligenc
112 lan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiologiques dont
113 ù elle « ne semble avoir rien d’autre à faire que son propre procès », une intelligence qui se dégoûte, tel est le spectac
20 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
114 ditions nouvelles de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000
115 ’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s’est d’ailleurs inspir
116 lini (lequel s’est d’ailleurs inspiré de lui dans son fameux discours aux édiles de Rome). Urbanisme est une étude techniq
117 ivilisation s’avoue trop fatiguée pour créer avec ses moyens matériels formidables des ensembles soumis aux lois de l’espri
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
118 ns l’échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, comme une découve
119 s expériences négatives est contenue surtout dans ses essais sur Proust, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que l’on
120 illeur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fernandez donne une criti
121 aïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de la « garantie des sentiments », où l’on est en droi
122 », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thème qui revient d
123 ut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit
124 les critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfois agaçant de pressentir sous l’expression trop t
125 que à M. Fernandez un certain recul par rapport à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans les positions conquises.
126 re dans les positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle unité de pensée, et qu’il propose quelques
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
127 l que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou de perfection form
128 ontherlant beaucoup de défauts bien agaçants pour sa souveraine désinvolture. Elle est tonique comme le spectacle des athl
129 des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloire future sur des valeurs plus humaines. x. Rougemont Denis de
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
130 te dans le rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
131 couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et douloureuse ; enfin Orp
132 aventure incertaine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse, le fuit, parce que son silence devient insupportable : « O
133 e ; enfin Orpha, sa maîtresse, le fuit, parce que son silence devient insupportable : « Orpha ne comprenait pas comment on
134 ter que l’auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique assez neuf. z. Rougemont Denis de, « [Compt
25 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
135 le ; le Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une détresse. C’est encore une vision de l’Occident
136  ». Nous cherchons à conquérir non le monde, mais son ordre. Nous humilions sans trêve notre sensibilité au profit de ce « 
137 rire aux critiques du Chinois et sympathiser avec son idéal de culture. Il n’y a pas là deux points de vue irréductibles, d
138 irréductibles, du moins M. Malraux a fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le rel
139 urope. Tandis que M. Ford expose victorieusement sa méthode pour « réussir » — à quoi, grands dieux ? — nous prenons chaq
26 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
140 n songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta propre détresse ?
141 ue Louis Aragon ne se croie pas tenu de justifier ses visions par le moyen d’une métaphysique aussi prétentieuse qu’incerta
142 ne métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est l’amour, et certain désespoir vaste et profond comme l
27 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
143 franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d’une incurable
144 llure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d’une incurable adolescence
145 réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propre jeunesse. » C’est ici un autre su
146 bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propre jeunesse. » C’est ici un autre sujet du roman, qui se mêle étr
147 emier… Mais combien cette analyse trahit Barbey : son art est justement de voiler les intentions du récit et de les exprime
148 ermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se condense le sentime
149 assé obsédant, d’une jeunesse trop complaisante à son tourment. ac. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard Barbey,
28 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
150 pas y tenir, qu’il manifeste en toute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiel
151 a souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour notre
152 si elle n’avait pour effet de souligner, plus que ses succès, certaines faiblesses qu’il recherche secrètement, parce que d
153 erpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans une imperceptible
29 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
154 Edmond Jaloux offre l’exemple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans sa maturité, des jeunes générat
155 mme que son évolution naturelle a rapproché, dans sa maturité, des jeunes générations, en sorte que l’espèce de romantisme
156 ont lui-même s’est plu à relever les indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son autorité de criti
157 s jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son autorité de critique et surtout de son expérience déjà riche de roman
158 appuyer de son autorité de critique et surtout de son expérience déjà riche de romancier. Son regard se promène sur le même
159 urtout de son expérience déjà riche de romancier. Son regard se promène sur le même monde où se plaisent nos jeunes poètes
160 avec cette mélancolique grâce. Si quelques-uns de ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux, j’y vois un signe charma
161 ié de l’aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remercier ; (pouvait-il mieux trouver qu’un René Dub
162 isien, rencontre une femme qui incarne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de l’amour. Une confidence, un baiser, et i
163 aiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une petite maison de province quand on a
164 de longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la
165 a trouvé là un sujet qui convient admirablement à son art, où s’unissent aujourd’hui un réalisme discret mais précis et le
166 he et décantée, profonde et délicieuse, gagnera à son auteur beaucoup d’amis inconnus. af. Rougemont Denis de, « [Compte
30 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
167 en lui à l’état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée maintient en une sorte d’instable équilibre
168 une sorte d’instable équilibre, les tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins de prudence mais au
169 e préférer à une certitude trop vite atteinte, où sa jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit la « génération nouv
31 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
170 ue, austère et probe, qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’aîné se révolte. Sensualité, intelligence, brutalit
171 ence, brutalité : les caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’argent qu’on domine notre âge : il
172 e notre âge : il devient grand industriel, assure sa fortune au prix du peu cynique reniement de ses origines. Le vieux pè
173 re sa fortune au prix du peu cynique reniement de ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend
174 étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût, le père ajoute :
175 enié ses parents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût, le père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublie
176 nd une âpre rapidité avec l’ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour le
32 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
177 ivrer peut-être. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roma
178 n voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore l’« élan mortel
179 t à sacrifier Diane, son apaisement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps e
180 audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur de document humain, nuit à sa valeur littéraire. Je n’aime guè
181 e à ce livre sa valeur de document humain, nuit à sa valeur littéraire. Je n’aime guère ce style abstrait, semé de redites
33 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
182 mais au filet si acéré qu’on ne sent presque pas sa blessure. Mais c’est ici qu’il s’agit de ne pas confondre inexplicabl
34 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
183 oix pour les rendre plus touchantes. Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse. « Il s’examine jusqu’au ventre de sa m
184 saine rudesse. « Il s’examine jusqu’au ventre de sa mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonné à
185 , — et je sais bien que c’est là un des signes de sa décadence. Il y a du chirurgien chez ce soldat devenu « scribe » et q
35 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
186 asses des cafés. Peut-être va-t-elle revenir avec son Johannes laqué. Ah ! comme vous sauriez lui plaire, maintenant qu’une
187 our vous venger, vous lui dites que, « d’abord », son livre n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que le lyrisme des n
188 lmez. Car il semble aujourd’hui que ce globe dans son voyage « est arrivé à un endroit de l’éther où il y a du bonheur ». V
189 de cette douceur de vivre. Déjà vous ne niez plus sa drôlerie, son aisance. Vous accordez que s’il force un peu la dose de
190 eur de vivre. Déjà vous ne niez plus sa drôlerie, son aisance. Vous accordez que s’il force un peu la dose de fantaisie, c’
191 de l’en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une malicieuse et fine psychologie. Mais à ce mot, son visa
192 ne malicieuse et fine psychologie. Mais à ce mot, son visage s’assombrit un peu. « Tous nos ennuis nous seraient épargnés s
193 douter que rien ne saurait vous ravir autant que ses impertinences. À ce moment s’approche M. Piquedon de Buibuis, qui par
194 toyen de cet oncle Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur
36 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
195 emme « encore jeune » se souvient d’un danseur de ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être… Un homme médite à côté du
196 urait pu être… Un homme médite à côté du corps de son ami suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (L’Amie du Mort.
197 tion autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardi
198 is si délicat et d’une si subtile convenance avec son objet qu’il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu tro
199 ailes intactes ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce
37 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
200 e sorte de synthèse de l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veux dire, plus r
38 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
201 rfois bien désobligeantes de voir juste. Et quand son bonhomme se plaint de ce que son œuvre lui apparaît en même temps que
202 juste. Et quand son bonhomme se plaint de ce que son œuvre lui apparaît en même temps que « fatale », « si arbitraire et s
203 a rend peut-être moins convaincantes certaines de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet ét
204 orte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’il était de taille à affronter d’autres dédales ! Mais il a
205 ntisme assez insolent et les joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presque imperceptible, mais i
39 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
206 seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un
207 nt à la fois le défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tourné
208 plus organique du roman et des mémoires. Mais si son début permet de croire que le Perroquet Vert ne restera pas une réuss
40 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
209 Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)ar Livre passionnant pour tous ceux que
210 rguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)ar Livre passionnant pour tous ceux que Jules Ver
211 seuls les poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour cond
212 endu] Marguerite Allotte de La Fuÿe, Jules Verne, sa vie, son œuvre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
213 rguerite Allotte de La Fuÿe, Jules Verne, sa vie, son œuvre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1
41 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
214 ue chose. C’est pourquoi j’ai lu ce livre, malgré son premier chapitre, variation sur un mot bien français et ses applicati
215 r chapitre, variation sur un mot bien français et ses applications faciles à cent célébrités locales. (Quant à Goethe, trai
216 te à portée de voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plu
42 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
217 es caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisati
218 ître au cœur du monde contemporain l’absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au
219 e qu’elle… » Expérience faite, l’absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de l’a
43 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
220 éduit Barrès, mais ne l’ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Ennemi des Lois — son expression
221 regard de rêve, — lit-on dans l’Ennemi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble idéal d’étudiant assi
222 aux sociétés de musique… » Barrès cherchait dans ses châteaux en Espagne lamentablement réalisés les témoignages de l’éthi
223 trop demander à une existence bien indécise, que son échec même ne relève pas, et qui tire sa grandeur de celle du décor ?
224 se, que son échec même ne relève pas, et qui tire sa grandeur de celle du décor ? Guy de Pourtalès n’hésite pas à baptiser
225 décor ? Guy de Pourtalès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêve
44 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
226 u qui se dit prince russe et entretient autour de sa vie le plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scè
227 rançais reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa mort et qui
228 suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à
229 s mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vérité trop évi
45 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
230 mme celui d’Anderson : voici un homme qui raconte sa vie avec une émouvante simplicité et il faudrait avoir la grossièreté
231 s deux premiers tomes, où il décrit des scènes de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnan
232 mes, où il décrit des scènes de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant d’apparente sim
233 re souvenir. Qui parmi nous sait encore parler de sa mère avec cette virile et religieuse tendresse ? C’est un Chinois, c’
234 n. Voici un de ces passages où il sait être, avec sa verve doucement comique, si émouvant : « À cette époque je croyais fo
235 de mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré un jour comme le grand
236 as être considéré un jour comme le grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’él
237 assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographie que son désir constant était que tous les hommes vivan
238 ain, mais qui raconte dans son autobiographie que son désir constant était que tous les hommes vivant sous lui conservassen
239 vassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les
46 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
240 une douceur patiente, et le laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les signes qu’il nous propose. U
241 tions est ici descendu plus profond en soi-même ; son art y gagne en densité, en émotion. Des mots simples, mais chacun dan
242 é, en émotion. Des mots simples, mais chacun dans sa mûre saveur ; une phrase naturellement grave ; une voix douce et viri
47 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
243 u’on a trop peu remarqué —, Jean Cassou revient à son romantisme, à notre cher romantisme. La Clef des songes est de nouvea
244 traînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des p
245 an Cassou vagabonde à travers ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait renc
246 ns le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui chante et des enfants surtout, dès le
247 ure ; qui ne serait qu’invention, qui inventerait sa vérité. Ce serait un de ces miracles de liberté dont nous avons besoi
48 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
248 çaise. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa propre démarche, mais inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert
249 férer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’u
49 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
250 l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté
251 mmes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Bend
252 Gabriel Marcel, qu’il attaque. (M. Benda trahit à son tour quand il tire argument contre une thèse de M. Marcel de ce qu’el
253 lté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’audace tranquill
254 nous masquer l’audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimoderne, parce que désintéressé. C’est
255 e qu’on ne viendra pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de la vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchiqu
50 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henri Michaux, Mes propriétés (mars 1930)
256 ’Henry Michaux, en se cantonnant franchement dans ses propriétés, y découvre sans cesse de nouvelles sources. Il défriche e
257 bizarrerie (Mort d’un Page). Cependant je préfère ses proses : il y a ici plus qu’une manière et qu’un ton, il y a une visi
258 d’une force physique, déforme et recrée le réel à son gré. Seule compte la réalité intérieure, mais elle apparaît toujours
51 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Kikou Yamata, Saisons suisses (mars 1930)
259 et glacé, balançant parmi les roseaux d’une baie ses poules d’eaux noires. Il y fallait cette féminité ingénue et précieus
260 e des chamois ». On s’émerveille de le voir, dans sa main rapide et minutieuse, décrire la vallée du jeune Rhin ou les pen
261 es beaux volumes pleins de ces paysages, que dans ses dessins, dont Kikou Yamata a dit ailleurs la précision curieusement n
262 rieusement nipponne. Quelle admirable maîtrise de sa technique ! Et qui eût pensé qu’avec un jeu de noirs et de gris l’on
52 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Jullien du Breuil, Kate (avril 1930)
263 oisie pour une gamine qui lui sert de modèle dans son atelier. Autour de cet incident, assez émouvant, on entrevoit la fami
264 rature. Et c’est à un tel amour qu’on va demander sa revanche contre la mesquinerie morale du milieu… Étrange misère que c
265 guerre et des parents. Encore un sujet qui attend son maître. bf. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Jullien du
53 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Pierre-Quint, Le Comte de Lautréamont et Dieu (septembre 1930)
266 s’appelait Isidore Ducasse et qu’il composa vers sa vingtième année un vaste poème en prose intitulé Les Chants de Maldor
267 Les Chants de Maldoror. De 1870 jusqu’à la guerre son influence fut « quasi nulle », et peut-être va-t-il rentrer dans l’om
268 ée qu’est Maldoror — la révolte de l’homme contre son Créateur — et il analyse les principaux thèmes de l’œuvre avec une in
269 à croire qu’il les sentait moins profondément que ses devanciers. Son sadisme n’est pas beaucoup plus « horrible » que celu
270 es sentait moins profondément que ses devanciers. Son sadisme n’est pas beaucoup plus « horrible » que celui des rêveries d
271 ne paraît pas de taille à le concevoir au-delà de sa tendresse pour les adolescents. Ce qui le caractérise le plus forteme
272 s. Ce qui le caractérise le plus fortement, c’est sa « révolte absolue », forcenée, jusqu’au rire dément, — ses injures de
273 olte absolue », forcenée, jusqu’au rire dément, —  ses injures de Caliban littérateur. Dans un chapitre excellent et peut-êt
274 ereuse. On sent bien ici que le critique a dominé son sujet. Mais pourquoi se refuse-t-il à tirer de ces remarques fort jus
275 mme 93, mais où certaine bêtise trouve assez bien son compte. Et quant à l’orthodoxie instaurée par les surréalistes, elle
54 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie I (octobre 1930)
276 oir pu retrouver le nom de qui l’on a reconduit à sa villa, vers cinq heures à travers ces quartiers si clairs, arbres et
277 angoissé, bienheureux : il se lève, il reconnaît son rêve. Huit heures aux clochers de la capitale qui s’avance dans la lu
278 lumière fauve d’un soir chaud sur la plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes de reflets, — et déjà nous passons s
279 d’un soir chaud sur la plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes de reflets, — et déjà nous passons sous de hauts
280 is vu, et dont nous savons seulement que tout y a son écho le plus pur. Le voyage trompe un temps cette angoisse. J’irai ch
281 avait bien ce qu’il ne pouvait perdre, et c’était sa fortune, Peter Schlemihl savait ce qu’il avait perdu, c’était son omb
282 er Schlemihl savait ce qu’il avait perdu, c’était son ombre. Mais moi qui cherche un Objet Inconnu ! — Ô Destin sans repos
283 croit pas à la vertu des noms reste prisonnier de ses sens ; mais celui-là est véritablement voyageur qui n’a pas renoncé à
284 de l’autre école, il referme ces pages et vaque à ses devoirs. Nous voici plus à l’aise. Eh bien oui : je me ferai un mérit
285 l’intérêt d’un récit de voyage ne réside pas dans sa vérité générale, mais bien se réfugie dans sa particulière véracité,
286 ans sa vérité générale, mais bien se réfugie dans sa particulière véracité, vertu décevante comme ce qui ne ressemble à ri
287 araissant en général au voyageur de ma sorte sous ses modalités sentimentales plus que documentaires, peut-être serait-il b
288 est rien que le voyage du Sujet à la recherche de son Objet, — en passant par la Hongrie. — Mais puisqu’enfin nous y voici,
289 devait à nulle pendeloque insolite l’étrangeté de son éclat. Alors je m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa
290 m’en vais oublier le But de mon voyage, — qui est sa cause. Je vais feindre de prendre au sérieux ce que je vois. Ruse con
291 une place vraiment royale. Vide, elle prend toute sa hauteur. Silencieuse, solennelle de nudité, entre le Palais du Régent
292 e de curieux, et quelques gardes. Traversant dans sa longueur toute l’immense place, les automobiles passèrent lentement,
293 nt à l’homme, — et le mot « affable » reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a la tête de François-Joseph, dont il fut pe
294 fourrure du dolman rouge ou jaune, laisse pendre son petit mouton. Aiguillettes, brandebourgs, aigrettes des bonnets à poi
295 igts levés. On se signe. Et voici venir à pied de son palais proche, tout seul, un archiduc. On salue profondément, en sile
296 résident du Conseil, maigre, jaune et rigide dans son costume noir et or. Si le comte Bethlen venait à la SDN en tenue de m
297 de magnat, beaucoup de gens comprendraient mieux sa politique. 8. Les coussins Rothermere Le nationalisme de la plu
298 mmes d’affaires. Ce qu’on prétend défendre, c’est son droit, ses intérêts. Mais, en Hongrie, le nationalisme est une passio
299 ires. Ce qu’on prétend défendre, c’est son droit, ses intérêts. Mais, en Hongrie, le nationalisme est une passion toute nue
300 devenant l’opprimé sans y perdre le sentiment de sa supériorité de race — sa véritable légitimité — on comprend que le Ho
301 y perdre le sentiment de sa supériorité de race — sa véritable légitimité — on comprend que le Hongrois n’ait point conser
302 « droit » qui autorisèrent ce chaos. Il lui reste sa foi en la grandeur éternelle de la Hongrie — intemporelle, n’ayant cu
303 intemporelle, n’ayant cure des statistiques — et sa douleur aussi, douleur d’orgueil blessé, mais qui emporte la sympathi
304 grie, au moment où l’Europe semblait abandonner à son malheur ce peuple turbulent et déchu, suffirent à faire d’un affairis
305 ffairiste anglais l’idole du nationalisme magyar. Son portrait affiché dans tous les cafés, dans les halls universitaires,
306 es, brodé aux devantures des magasins de mode, et son nom en lettres géantes sur une montagne chauve, voisine de Budapest,
307 yle hongrois. Il y a aussi une extrême gauche, et sa revue Documentum (une sorte d’Esprit nouveau troublé de surréalisme),
308 le sombre et pathétique, est mort à 35 ans, mais sa ferveur anime encore ces écrivains profondément magyars de sensibilit
309 amis m’emmènent le voir à Esztergóm, où il passe ses étés. Esztergóm est la plus vieille capitale de la Hongrie. Attila, m
310 ontrer le poète. Cheveux noirs d’aigle collés sur son large front, belle carrure ruisselante, il nous sourit, dans l’eau ju
311 ille juste au-dessous de soi, et la basilique sur son rocher. Fraîches, sentant bon, avec des livres sur des divans aux ric
55 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hölderlin, La Mort d’Empédocle et Poèmes de la folie (octobre 1930)
312 aux dieux avec orgueil, et finit par succomber à son « hybris » : il se jette dans l’Etna pour mieux communier avec la div
313 le plus peut-être des poètes français, c’est que son lyrisme est l’expression d’une philosophie à l’état naissant ; il est
314 éflexion consciente. (Vers l’époque où il ébauche son Empédocle, note M. Babelon, Hölderlin écrit de nombreux essais philos
315 u’il parviendra de moins en moins à « réfléchir » sa création. De là sa folie, qu’il pressent. Et M. Babelon cite à ce suj
316 moins en moins à « réfléchir » sa création. De là sa folie, qu’il pressent. Et M. Babelon cite à ce sujet des phrases très
317 tempétueux arrache cette flamme trop grande pour son support. Reste une cendre où longtemps encore palpiteront de pâles lu
318 gue fluide mais jamais abstraite qui est celle de ses Noces. Jouve est le plus « germanique » des poètes français d’aujourd
56 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Voyage en Hongrie II (novembre 1930)
319 gne dure de l’horizon s’oppose au ciel qui retire ses lueurs. Ciel blanc, où très peu d’or rose s’évanouit… Le train serpen
320 rtain arrangement des choses qui rende un certain son spirituel… Un objet de musique et de couleurs, mais aussi une forme s
321 is ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde dans sa fumée, on respire une lourde obscurité qui sent l’enfer. Je ne pense
322 saisir la danseuse sous les bras (elle pose alors ses mains sur les épaules du cavalier) et la faire pirouetter un quart de
323 ne certaine manière. En France, chacun parle pour son compte, paraphe son épigramme, jette son petit caillou. Ici, le sens
324 En France, chacun parle pour son compte, paraphe son épigramme, jette son petit caillou. Ici, le sens des mots et des chos
325 rle pour son compte, paraphe son épigramme, jette son petit caillou. Ici, le sens des mots et des choses est celui d’un cou
326 u’on aime l’ivresse comme un art. Et qu’on soigne sa mise en scène, qu’on sauvegarde sa qualité. Ailleurs, on la laisse tr
327 t qu’on soigne sa mise en scène, qu’on sauvegarde sa qualité. Ailleurs, on la laisse traîner dans la sciure ou dans le gât
328 ion de sentimentalisme et de passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens de la musique, conserve quelque espoi
329 s vastes ; et cette passion de vivre au-dessus de ses moyens — c’est-à-dire au-dessus du Moyen — qui est caractéristique du
330 au charme égyptien du peuple errant qui lui donna sa musique nationale17. Les signes parlent, et certains sages : nous ent
331 ssi l’autre « Rome protestante ». Mais d’avoir vu ses profondes bibliothèques et son quartier universitaire tout rajeuni da
332 ». Mais d’avoir vu ses profondes bibliothèques et son quartier universitaire tout rajeuni dans des jardins luisants ne m’em
333 ir-là, ai-je compris la Grande Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches de l’Asie. En sortant du concert, j’ai er
334 r ineffable et se perd avec lui vers le désert et ses mirages. On ne sait d’où tu viens, tu ne sais où tu vas, peuple de pe
335 a pure ivresse que de l’abandon —, car voici qu’à son tour il s’égare au bras d’une erreur inconnue, ton fantôme éternel, t
336 mble à Tihany — elle a l’air d’être en Italie sur sa presqu’île — par cet instable bateau-mouche qui naguère emportait l’i
337 ste licence poétique… (Voici bien la fatigue avec son jeu des définitions)… pas de but. — C’est vous qui le dites ! — Vous,
338 lle dans ma tête.) — On ne voyage jamais que dans son propre sens ! — Mais il faut voyager pour découvrir ce sens ! — Qu’as
339 ous côtés un But dont tu ne sais rien d’autre que sa fuite : n’est-il pas cet Objet qui n’ait rien de commun avec ce que t
57 1930, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Charles Du Bos, Approximations, 4e série (novembre 1930)
340 arles Du Bos a placé cette parfaite définition de sa manière au seuil de la 4e série de ses Approximations ; elles forment
341 finition de sa manière au seuil de la 4e série de ses Approximations ; elles forment, tant par les sujets abordés que par l
342 s « approches », le livre le plus significatif de son tempérament critique. Le style d’abord : on y retrouve, appliqué aux
343 . Et dans l’allure des phrases, le rythme même de sa pensée. Parfois certes, un peu gêné par la lenteur de certains méandr
344 même d’un esprit « critique » dans l’exercice de sa probité ? Défaut combien plus précieux que l’élégance à bon marché qu
345 nte en profondeur. Il la possède. On peut dire de sa critique qu’elle pose le problème de l’homme dans sa totalité, et c’e
346 critique qu’elle pose le problème de l’homme dans sa totalité, et c’est je crois l’éloge de choix. Mais de ce problème cen
347 e rendre la tâche facile. Cernant de toutes parts son sujet, M. Du Bos choisit des bases d’approche parfois si éloignées, e
348 entation dans le monde de l’esprit la sécurité de sa marche vers le centre d’une œuvre. La méthode de M. Du Bos est la plu
349 ar là que M. Du Bos parvient à recréer comme pour son compte, tant il y apporte de pressante intuition, les « problèmes » q
350 oblèmes » qui contraignirent tel génie à produire son œuvre. Le danger de cette méthode, c’est que, donnant un nom à chaque
351 ous laisser l’image d’un auteur plus conscient de ses propres difficultés que ne saurait l’être le créateur. Car une telle
352 onfie à des figures le soin hasardeux de résoudre ses antinomies (Goethe) ; que si elles y échouent, il restera du moins de
353 deur d’un Du Bos, n’est-elle pas précisément dans son refus de sacrifier jamais l’éthique à l’esthétique, et dans ce sens c