1
e, en Allemagne et en France : quelques mois et j’
étais
acclimaté. J’oubliais que le pays n’était pas le mien. C’était l’Euro
2
is et j’étais acclimaté. J’oubliais que le pays n’
était
pas le mien. C’était l’Europe. C’est ici l’Amérique, et je n’ai pas f
3
us dire, tout ce que l’on peut en dire en général
sera
vrai selon les temps et les lieux, et tout sera contradictoire et rie
4
l sera vrai selon les temps et les lieux, et tout
sera
contradictoire et rien ne sera suffisant. New York a les plus hauts g
5
les lieux, et tout sera contradictoire et rien ne
sera
suffisant. New York a les plus hauts gratte-ciel du monde, c’est vrai
6
chitecte, répondit, m’assure-t-on : « Les maisons
sont
trop basses. » Et c’était vrai, car la plupart ont trois étages. Ains
7
i religieux n’a guère le sens du spirituel ; on y
est
tour à tour plus formaliste et plus sans façon qu’en Europe : plus av
8
l’Amérique dans ces photos et ces livres où elle
est
. Et quand j’y ai débarqué, je n’ai rien reconnu de ce qu’une douzaine
9
autre chose — une autre civilisation. L’Amérique
est
un continent dont je tiens pour possible et même facile de parler for
10
et même facile de parler fort correctement sans y
être
jamais allé : la plupart des lieux communs qui circulent à son sujet
11
upart des lieux communs qui circulent à son sujet
sont
justifiés, de même que les critiques à la Duhamel et les enthousiasme
12
entement les passes de l’Hudson vers Manhattan, d’
être
saisi par l’émotion d’une nouveauté qui, dans mon cas, après cinq ans
13
ne, comme celle du mythe politique et planétaire,
est
un immense glissement à travers le temps et l’espace. Tout glisse et
14
u fond du Pacifique. Je pense aussi à celle qui s’
était
remariée croyant son mari tué en Chine. On le retrouve. Elle déclare
15
n le retrouve. Elle déclare aux reporters : « Jim
est
simplement épatant, mais c’est Joe que j’aimais, je l’attends, je vai
16
s, je l’attends, je vais me séparer de Jim, et je
suis
sûre qu’il comprendra très bien… » Un mois plus tard. Jim et Joe boiv
17
aissant, dans le rêve du bonheur d’un autre… Tout
est
possible. Il y en a pour tout le monde. La jalousie n’est pas américa
18
ible. Il y en a pour tout le monde. La jalousie n’
est
pas américaine. Comment décrire ces légers déplacements d’accent vers
19
e aisance générale. L’Américain ne supporte pas d’
être
gêné aux entournures, matériellement ou moralement. Dès l’enfance, il
20
ur tout dire, moins vu qu’en Europe. Parce qu’ils
sont
moins conscients de leur vie et d’autrui, ils me tolèrent davantage.
21
vie et d’autrui, ils me tolèrent davantage. Ce n’
est
pas qu’ils m’ignorent ou le feignent, mais ils m’acceptent avant tout
22
d’efforts gaspillés pour se faire remarquer, pour
être
différent, car ici différent veut dire original ; et crazy, qui veut
23
inal ; et crazy, qui veut dire toqué, loufoque, n’
est
pas un adjectif dépréciatif, bien au contraire, qu’on l’applique à un
24
et sortaient sans saluer, sans dire pourquoi ils
étaient
venus ; ils se versaient à boire, et, les pieds sur une chaise, me po
25
e la main, so long ! un bye bye ! négligent… Je m’
étais
à peine habitué, non sans plaisir, à cette suppression générale de no
26
rien. Mais personne ne paraît s’en étonner, tant
est
puissant le sens des conventions publiques dans ce peuple qui, par ai
27
. Giraudoux a écrit quelque part que l’Amérique n’
est
pas une nation comme les autres, mais un club. Cette remarque expliqu
28
oxe qu’on vient de relever. L’entrée dans le club
est
un acte public qui s’accompagne tout naturellement d’opérations conve
29
l’orgueil d’y appartenir. Mais aussitôt que vous
serez
un membre régulier, vous aurez tous les droits, on ne s’occupera plus
30
e qu’on ne dit pas dans les dépêches, de ce qui n’
est
pas matière d’enquête et de reportages, de ces nuances de sentiments
31
le. Car celle-ci dépend de deux peuples — l’autre
est
le russe — dont toutes les réactions intimes et sautes d’humeur vont
32
rêve américain (9 novembre 1945)b L’Amérique n’
est
pas un pays de rêve quand on y vit, mais c’est un pays de rêveurs. Je
33
ide. Peu ou point de plaisanteries échangées. Ils
sont
ici pour rêver, pour danser. Ils rêvent dans toutes les salles de cin
34
avec un sourire de rêve heureux. Je crois qu’ils
sont
bien moins conscients que nous. À quoi rêvent-ils ? À la vie large, t
35
t pas même admettre qu’elles existent, sinon pour
être
dépassées. C’est contraire à sa tradition. Ses ancêtres ont été amené
36
C’est contraire à sa tradition. Ses ancêtres ont
été
amenés sur les rives de l’Hudson et du Potomac par le rêve d’un pays
37
tomac par le rêve d’un pays sans limites, et il l’
était
vraiment pour ceux qui triomphaient des famines, des moustiques, des
38
conquête ? Ils se tournèrent vers l’industrie. Ce
fut
leur nouvelle « frontière », leur nouveau front, dirait-on de nos jou
39
leur nouveau front, dirait-on de nos jours. Et ce
fut
l’ère des fortunes, et des cités, et des usines colossales, puis des
40
es, puis des gratte-ciel à cent étages. « Le ciel
est
la limite », disait alors leur dicton favori. La terre avait été dure
41
, disait alors leur dicton favori. La terre avait
été
durement conquise. Le ciel fut conquis en trente ans. Encore une limi
42
ri. La terre avait été durement conquise. Le ciel
fut
conquis en trente ans. Encore une limite atteinte. Et les voici, vers
43
une espèce de rancœur. Je ne pense pas que le mot
soit
trop fort. Je parle de la majorité. Je connais beaucoup d’exceptions.
44
ger dans leurs épreuves. Les jeunes Américains se
sont
trouvés mêlés au grand malheur des peuples qu’ils aimaient de loin. I
45
heur des peuples qu’ils aimaient de loin. Ils ont
été
courageux devant l’ennemi, mais non pas devant la misère de leurs ami
46
leurs amis. Ils rentrent en disant que la France
est
sale et en désordre, que tout y est cher pour eux et que les WC sont
47
que la France est sale et en désordre, que tout y
est
cher pour eux et que les WC sont au milieu des places publiques. Ils
48
ordre, que tout y est cher pour eux et que les WC
sont
au milieu des places publiques. Ils demandent qu’on ne leur parle plu
49
lui qui va dominer, nécessairement. Les vétérans
seront
absorbés par la vie quotidienne d’ici quelques années. Ils finiront b
50
, leurs concurrents… L’homme d’affaires américain
est
le petit-fils des pionniers qui luttaient sur la « frontière ». Il pr
51
re ». Il pressent qu’il a fait son plein ou qu’il
est
bien près de le faire dans les limites de son pays, « d’une côte à l’
52
États-Unis, il faut donc en sortir et deux voies
sont
possibles : répandre les produits américains sur tous les marchés du
53
multiplier les échanges culturels. Ces ambitions
sont
étroitement liées, car seule une atmosphère de démocratie mondiale pe
54
le souvenir. Mais ce qui va venir, direz-vous, n’
est
-ce pas tout simplement une grande poussée d’impérialisme américain ?
55
faitement conscients de leurs intérêts… Voilà qui
est
vrai, en apparence du moins. J’essaierai d’exposer, dans un prochain
56
qui m’ont convaincu que l’expansion américaine n’
est
pas du tout à base d’impérialisme au sens européen du mot. Je pense q
57
es, les échos de presse, et même les spectateurs,
sont
unanimes : Hollywood est à court d’inventions. Hollywood achète n’imp
58
t même les spectateurs, sont unanimes : Hollywood
est
à court d’inventions. Hollywood achète n’importe quoi, un roman non t
59
y trouve un germe, le nettoiera. Car Hollywood n’
est
plus qu’une machine. Elle transforme en argent tout ce qu’elle a envi
60
, à première vue. Cette technique trop parfaite n’
est
obtenue qu’au prix de telles dépenses et d’une telle quantité de spéc
61
éjugés hérités de trente ans de triomphe, qu’il n’
est
pas de génie assez coriace pour survivre à pareille torture au ralent
62
tout crépitant d’inventions étonnantes. Le rythme
est
cahotant, trop coupé, mais quand il s’établit sur une ou deux séquenc
63
marche et ronronne comme un moteur de luxe, tout
est
faux, tout le monde est beau, jamais on ne voit percer la trame nue d
64
e un moteur de luxe, tout est faux, tout le monde
est
beau, jamais on ne voit percer la trame nue du réel. Jamais un choc,
65
sent les producers, n’accepte pas que Hedy Lamarr
soit
mal habillée si elle joue une pauvresse, qu’Ingrid Bergman ressemble
66
qu’Ingrid Bergman ressemble à la Suédoise qu’elle
est
, plutôt qu’à une star comme les autres. N’insistons pas : la décadenc
67
raisons mystérieuses ou accidentelles. Ses causes
sont
évidentes et inéluctables : ce sont celles-là mêmes qui firent son su
68
s. Ses causes sont évidentes et inéluctables : ce
sont
celles-là mêmes qui firent son succès, et non pas d’autres. Pour mes
69
res. Pour mes cadets, d’ici dix ans, Hollywood ne
sera
plus qu’une légende : comme l’est déjà Greta Garbo, symbole d’un âge.
70
, Hollywood ne sera plus qu’une légende : comme l’
est
déjà Greta Garbo, symbole d’un âge. Ô Garbo de notre jeunesse, volupt
71
nt sur des millions de nuits, mythe évasif, que n’
êtes
-vous disparue comme un songe au matin ? Dans ce petit restaurant fran
72
e préféré ne la voir jamais, mais j’avoue qu’elle
est
très jolie, malgré la minceur de ses lèvres. Un peu plus tard, c’est
73
fait parfois des souverains en voyage. Comme elle
est
gaie ! J’ai passé une demi-heure à causer avec elle, sur un sofa, et
74
en dire qui la rende plus réelle qu’une image. Ne
serait
-ce pas là son secret ? Se prêter à la fantaisie de toutes les imagina
75
fantaisie de toutes les imaginations. Comme elle
est
belle et comme elle est absente ! Quelle élégance dans l’irréalité !
76
imaginations. Comme elle est belle et comme elle
est
absente ! Quelle élégance dans l’irréalité ! Comme elle est gaie pour
77
e ! Quelle élégance dans l’irréalité ! Comme elle
est
gaie pour un fantôme… ⁂ Revenons à nos moutons de Hollywood. Je ne vo
78
s qu’il permet : c’est Walt Disney. Les autres en
sont
encore à photographier des comédies, des drames, des ameublements ou
79
, nous donnèrent seuls la sensation du Blitz. Ils
sont
de notre temps d’une manière plus profonde que leur auteur, sans dout
80
ur, sans doute, n’eût osé le soupçonner. Car il n’
est
pas intelligent, s’il est génial. Disney, quand il se trompe, n’y va
81
le soupçonner. Car il n’est pas intelligent, s’il
est
génial. Disney, quand il se trompe, n’y va pas de main morte. Je pens
82
ccuper ! Son mauvais goût me paraît irrémédiable,
étant
celui de l’Américain moyen en matière d’art et surtout de peinture. (
83
a fin de Fantasia, sur l’Ave Maria de Schubert, n’
est
qu’une suite de cartes de bons vœux comme il s’en envoie des millions
84
tée par tous les nouveaux venus, et qui exige des
sommes
fabuleuses. Pour que ces sommes rapportent, il faut le plus grand pub
85
et qui exige des sommes fabuleuses. Pour que ces
sommes
rapportent, il faut le plus grand public possible. Pour satisfaire ce
86
fluer. Quant au public… Eh bien ! pendant que j’y
suis
, un bon conseil : ne croyez pas que le grand public déteste autant qu
87
éens, dès qu’il pourra les voir ? Tous les signes
sont
là. Dépêchez-vous ! Mais peut-être qu’il est trop tard : et qu’ils s’
88
nes sont là. Dépêchez-vous ! Mais peut-être qu’il
est
trop tard : et qu’ils s’en doutent. L’importance des studios de New Y
89
mbre 1945)d Noël ! La ruée vers les magasins s’
est
déclenchée depuis le 1er décembre dans toute l’Amérique, inaugurant o
90
inaugurant officiellement la saison de Noël. Nous
sommes
le 13 et les rayons de jouets sont déjà presque vides à New York. La
91
e Noël. Nous sommes le 13 et les rayons de jouets
sont
déjà presque vides à New York. La conversion des tanks et des fortere
92
ce rationné 1945 se termine en pleine équivoque :
est
-ce la paix déjà ? La guerre encore ? Interférences de disette et de l
93
miques. Trois d’entre eux, à Brooklyn, viennent d’
être
blessés sérieusement en jouant à faire sauter le monde. Les trois Gra
94
aire sauter le monde. Les trois Grands, à Moscou,
seront
-ils plus adroits dans ce même jeu ? On ne le croirait pas à les voir.
95
ia d’annoncer que sa nuit de Nouvel An « promet d’
être
la plus grande nuit de l’histoire de l’hôtel — à partir de vingt doll
96
ransporté avec toutes ses racines d’un parc où il
sera
replanté dès janvier, n’ayant coûté que cent dollars de location à M.
97
gent et mordorés. Pourquoi ces échanges éperdus ?
Est
-ce un souvenir du seul cadeau de paix jamais fait à l’humanité ? ou b
98
èvre de rivaliser dans la dépense en fin d’année,
est
-elle comme chez les primitifs la manière de conjurer le sort ? Plus q
99
s, un droit à la chaleur des groupes. Et ceux qui
seront
laissés dehors, ceux qui n’appartiennent pas à une cellule sociale, f
100
Gretchaninoff et le motet de Prætorius, Une rose
est
née… et je me dirai que l’Amérique n’a pas encore très bien compris l
101
une nouvelle victoire sur le temps, comme si ce n’
était
pas lui qui gagne à tous les coups. Qu’apportera cette fin d’année ?
102
ons le meilleur maire de New York. Et Roosevelt n’
est
pas remplacé… Et toutes les utopies prévues par l’avant-guerre entrer
103
endre de sa voiture. Déjà les biches et les daims
sont
amenés dans la forêt de chasse au moyen de taxis aériens. Déjà la tél
104
terre, bonne volonté de Dieu envers les hommes ».
Est
-il besoin de la bombe, et des grèves, et de la famine européenne, et
105
hommes ont fort peu de bonne volonté ? La plupart
sont
involontaires. Ils ne font que subir leur condition. À Times Square,
106
plus objective, du fait même que ses partis pris
étaient
connus et déclarés. Le directeur du journal en question censura cette
107
itique qu’on attribue par erreur à l’autruche. Je
suis
certain qu’il avait tort, comme la suite l’a prouvé d’ailleurs. Le di
108
nion syndicale, dont les déclarations officielles
seront
citées in extenso. Pas de polémique contre un autre journal Ain
109
e un autre journal Ainsi la controverse réelle
est
exposée, pièces à l’appui, devant le lecteur. Mais ce que vous ne ver
110
les positions des parties en présence n’ayant pas
été
déclarées dans les termes exacts où elles s’arrêtent. Ce que l’on tro
111
empion pense ceci, Durand déclare cela, mais l’un
est
radical et l’autre communiste, je le savais bien, parbleu ! comme dir
112
eu ! comme dirait Gide. Et je savais que quel que
fût
le problème posé, ils resteraient attachés « indéfectiblement », comm
113
lieu de quoi Tartempion me ressasse que Durand n’
est
qu’un radical. De quoi donc parlait-on ? Qu’allons-nous faire ? Ce n’
114
uoi donc parlait-on ? Qu’allons-nous faire ? Ce n’
est
pas que les journaux américains craignent la discussion violente, la
115
héâtre, correspondance, jardin, etc. Mais le fait
est
qu’une dépêche de Paris, par un correspondant américain, qui occupe c
116
en a… Le correspondant-américain-à-l’étranger
est
une espèce humaine bien définie. Le grand reporter français cherche à
117
e pain, qu’ils mangent des brioches ! » Le siècle
est
en révolution, l’Europe en ruine, la France en crise pour dire le moi
118
nitor, du New York Times ou du Herald Tribune. Ce
sont
ces grands journaux que j’avais dans l’esprit en écrivant ce qui préc
119
e Middle West, et dont les tares les plus connues
sont
la brutalité de langage, la haine posthume de Roosevelt, l’isolationn
120
vulgarité totale du Journal and American. Mais il
est
difficile d’être à la fois juste et utile, en temps de crise. Et j’ai
121
du Journal and American. Mais il est difficile d’
être
à la fois juste et utile, en temps de crise. Et j’ai voulu courir au
122
a plume d’un fermier du Middlewest que l’Amérique
est
le seul pays décent au monde, et qu’un agent d’assurances du Connecti
123
ats-Unis écrit de son côté : « Notre gouvernement
est
une vaste pétaudière. » Ce fonctionnaire sait à peu près de quoi il p
124
mités successifs pour étudier cette situation. Il
est
concevable qu’un dixième comité ait pour objet d’examiner l’activité
125
e tout, avec pouvoirs dictatoriaux. Le « tsar »
est
un « businessman » Ce tsar ne sera pas choisi parmi la troupe des
126
Le « tsar » est un « businessman » Ce tsar ne
sera
pas choisi parmi la troupe des politiciens sans emploi ou des anciens
127
oi ou des anciens ministres de n’importe quoi. Il
sera
plutôt un homme d’affaires dans la quarantaine, le vice-président d’u
128
oming man va nous sortir. S’il réussit, sa gloire
sera
grande pendant plusieurs semaines au moins, à condition que la presse
129
ndition que la presse l’ait adopté. S’il rate, il
sera
vidé sans autres formes qu’une lettre personnelle du président, qu’il
130
ation. Les circonstances m’obligent, etc. Mais je
serai
toujours heureux de pouvoir compter sur vous en cas de besoin. » Dans
131
tats dont la victoire sur les nazis et le Japon n’
est
que le premier exemple qui me vienne à l’esprit. J’ai dit désordre, p
132
ésordre, mais seulement des complexités.) Le fait
est
que je n’imagine pas un seul de mes contemporains qui soit capable d’
133
je n’imagine pas un seul de mes contemporains qui
soit
capable d’embrasser dans une seule vue les rouages du gouvernement de
134
nt a plus de pouvoir qu’un roi, dit-on. Mais ce n’
est
pas beaucoup dire, de nos jours. Il choisit ses ministres et ses tsar
135
terrain) ; enfin de l’opinion publique, car nous
sommes
en démocratie, et il faut bien que cela se marque quelque part… et en
136
n quelque manière. Les agences d’État à initiales
sont
si nombreuses (quelques milliers) ; si provisoires (elles durent de t
137
moyens intellectuels de s’y retrouver : à peine y
serait
-il parvenu que le tableau changerait en quelques jours. D’où la gabeg
138
es années, devant un comité du Sénat, la question
fut
posée de savoir si quelqu’un au monde connaissait réellement le nombr
139
projets financés par le gouvernement fédéral ont
été
néanmoins mis en œuvre par au moins quinze agences différentes ». Le
140
e article m’apprend qu’un cinquième du territoire
est
propriété du gouvernement, c’est-à-dire de trente-quatre agences et d
141
eurent en partie mystérieuses, mais quelques-unes
sont
formulables. … pas de fonctionnaires Tout d’abord, l’Amérique n
142
en fils. Le personnel des bureaux gouvernementaux
est
sans cesse ventilé et renouvelé, au physique comme au figuré. Peu ou
143
s fonctionnaires d’occasion savent qu’ils peuvent
être
aisément révoqués, et l’acceptent non moins aisément, en principe, ca
144
minorité de fonctionnaires de métier. Le chef en
fut
d’abord un général, puis un commentateur de la radio. Il avait sous s
145
Trente mille en tout. Presque tous, aujourd’hui,
sont
retournés à leurs occupations habituelles. Cet exemple est courant, e
146
rnés à leurs occupations habituelles. Cet exemple
est
courant, et c’est pourquoi je le donne. Si vous prenez, au lieu de l’
147
et l’esprit d’une bureaucratie, pour ceux qui en
sont
comme pour les visiteurs. La mer des paperasses rempart de la libe
148
emps à rédiger de longs rapports prouvant qu’elle
est
indispensable. Ici et là, quelques énergumènes s’aviseront de travail
149
ès peu d’hommes que les choses marchent. Alors un
être
d’exception, comme vous ou moi, se demandera dans un accès de courage
150
clarée. Les bureaux à l’américaine semblent avoir
été
créés pour épargner aux gouvernants cette tragédie. Évitant à la fois
151
L’Amérique
est
-elle nationaliste ? (29 août 1946)h Vont-ils devenir nationalistes
152
se formât une conscience nationale. Le phénomène
est
-il probable ? Et s’il l’est, devons-nous le redouter ? Je répondrai q
153
tionale. Le phénomène est-il probable ? Et s’il l’
est
, devons-nous le redouter ? Je répondrai que le phénomène est non seul
154
-nous le redouter ? Je répondrai que le phénomène
est
non seulement probable, mais en train de s’accomplir sous nos yeux. P
155
début de ce siècle. Ces frontières se trouvaient
être
deux océans au-delà desquels régnaient le Japon et l’Europe ; et deux
156
eil et de volonté de régenter le monde, puisqu’on
est
au surplus victorieux et tout-puissants du premier coup. Imaginez qu’
157
fortement que possible : It’s unamerican, « ce n’
est
pas américain. » Nationalisme, direz-vous. Oui, mais pas à la manière
158
les fait devenir vraiment Américains, quelles que
soient
, par ailleurs, leurs origines. On ne se réfère pas au passé, mais à l
159
un nationalisme « ouvert » et pour qui la nation
est
en avant dans un élan, un rêve, une liberté future. Non pas comme che
160
s et de lui faire subir la loi d’un village qui n’
est
pas le sien. Au contraire, ce qu’il y a de rassurant dans le national
161
n qu’on vient de découvrir pour son compte et qui
seront
bien plus efficaces appliqués à l’échelle mondiale. Ici, l’impérialis
162
humanitaire enlisera nos élans spirituels ; nous
serons
noyés par une civilisation qui ne respecte que la quantité ; le dolla
163
ation qui ne respecte que la quantité ; le dollar
sera
roi, etc. » Toutes ces méfiances sont sans fondements, toutes ces acc
164
; le dollar sera roi, etc. » Toutes ces méfiances
sont
sans fondements, toutes ces accusations injustes, à mon avis. Si nous
165
nous vendons nos âmes contre des frigidaires, ce
sera
notre faute et non pas celle de l’industrie américaine qui aura mis d
166
ation semblent avouer par là que cette dernière n’
est
plus très saine, qu’elle « sent » déjà. Il est grand temps qu’on la m
167
n’est plus très saine, qu’elle « sent » déjà. Il
est
grand temps qu’on la mette dans la glace. De même, le commerce améric
168
rapide met en péril certaines coutumes avares, ce
sera
tant mieux. De même encore, la « sottise humanitaire » des États-Unis
169
essaient le machiavélisme. De même enfin, si nous
sommes
un jour noyés par la quantité, ce ne sera pas la faute de la quantité
170
nous sommes un jour noyés par la quantité, ce ne
sera
pas la faute de la quantité, mais bien de l’abaissement de notre qual
171
ce que l’on nomme en Europe « l’américanisme » n’
est
pas un danger américain, mais européen. Je veux dire par là que si un
172
’une contradiction étrange. Il semble bien que ce
sont
les mêmes personnes qui vitupèrent l’impérialisme commercial de l’Amé
173
de l’Amérique, en Europe, l’accusent à la fois d’
être
là et, pour comble, de n’être pas là. Quand elle fait une crise d’iso
174
ccusent à la fois d’être là et, pour comble, de n’
être
pas là. Quand elle fait une crise d’isolationnisme, on l’accuse de my
175
s d’hommes.) « Eh quoi ! trois mois déjà que nous
sommes
libérés et ils infestent encore nos bars ! » ⁂ Autre exemple de cette
176
ique d’occupation américaine en Allemagne : « Ils
sont
trop doux, ils sont naïfs, ils ne comprennent rien aux problèmes de l
177
éricaine en Allemagne : « Ils sont trop doux, ils
sont
naïfs, ils ne comprennent rien aux problèmes de l’Europe, de quoi se
178
esures proposées ou soutenues par son pays. — Ils
sont
bien maladroits, disait-il en souriant, car à force de nous contrecar
179
ue le nom. h. Rougemont Denis de, « L’Amérique
est
-elle nationaliste ? », Carrefour, Paris, 26 août 1946, p. 1.
180
a production mécanique relève de l’imitation — il
est
clair qu’il ne peut exister d’art dirigé, pas plus qu’on ne peut prév
181
visible. Ce que les communistes veulent diriger n’
est
pas l’art, mais la propagande et la production de cartes postales en
182
o non. 2° Si l’artiste aujourd’hui se préoccupe d’
être
immédiatement accessible au peuple, il faut qu’il se maintienne au ni
183
de la radio (libres ou dirigées) et il cessera d’
être
un artiste. Sinon, il se voit contraint d’inventer son langage, sa rh
184
uctures existantes et d’en inventer de nouvelles,
soit
par son art, soit en tant que citoyen. 3° Tout art implique une « idé
185
et d’en inventer de nouvelles, soit par son art,
soit
en tant que citoyen. 3° Tout art implique une « idéologie » ou pour m
186
ant. Mais les idéologies politiques d’aujourd’hui
sont
aussi stériles pour l’artiste que fureur féconde la théologie au Moye
187
Estimez-vous que l’artiste doive se préoccuper d’
être
immédiatement accessible au plus grand nombre ? 3. L’art peut-il être
188
ccessible au plus grand nombre ? 3. L’art peut-il
être
au service d’une idéologie ? »
189
a contre lui toute l’histoire de l’humanité, qui
est
l’histoire des utopies réalisées. Tout ce qui a compté, tout ce qui a
190
e dont nous vivons pratiquement aujourd’hui, tout
fut
d’abord une utopie : le christianisme et l’aviation, le marxisme et l
191
ne idée en utopie, c’est en fait déclarer « qu’on
est
contre », en évitant d’avouer ses raisons ou de démasquer ses préjugé
192
r ses préjugés. Ensuite on dit que « l’humanité n’
est
pas prête pour un gouvernement mondial ». La timidité d’esprit que ce
193
e cet argument trahit touche à la mauvaise foi. S’
est
-on jamais préoccupé de savoir si les peuples étaient prêts pour la gu
194
’est-on jamais préoccupé de savoir si les peuples
étaient
prêts pour la guerre, par exemple, et pour la mort en grande série ?
195
exemple, et pour la mort en grande série ? Ce qui
est
vrai, c’est qu’on les y prépare de force, quand on a décidé de faire
196
on jamais demandé l’avis des peuples, et pourquoi
furent
-ils jamais prêts ? L’étaient-ils pour le christianisme ? Pour la terr
197
peuples, et pourquoi furent-ils jamais prêts ? L’
étaient
-ils pour le christianisme ? Pour la terreur ? Pour le capitalisme ? P
198
italisme ? Pour la bombe atomique ? S’ils avaient
été
prêts pour l’une de ces grandes causes ou grandes actions, il n’y aur
199
socialisme, ni d’Histoire en général. L’argument
est
au moins léger. De plus, il est inexact dans le cas particulier. Vous
200
néral. L’argument est au moins léger. De plus, il
est
inexact dans le cas particulier. Vous dites que les peuples ne sont p
201
le cas particulier. Vous dites que les peuples ne
sont
pas prêts à accepter l’idée d’un gouvernement mondial, mais qu’en sav
202
dée. Avouez plutôt que vous, personnellement, n’y
êtes
pas prêt, que vous personnellement y êtes hostile. Car autrement, au
203
nt, n’y êtes pas prêt, que vous personnellement y
êtes
hostile. Car autrement, au lieu de dire : les peuples ne sont pas prê
204
. Car autrement, au lieu de dire : les peuples ne
sont
pas prêts, donc le projet ne vaut rien, vous diriez : le projet paraî
205
à deux types d’argument : le gouvernement mondial
serait
impuissant, ou bien il serait trop puissant. À l’appui de la thèse de
206
ouvernement mondial serait impuissant, ou bien il
serait
trop puissant. À l’appui de la thèse de l’impuissance, on cite bien e
207
ppelle qu’à chaque conflit sérieux les nations se
sont
divisées suivant les lignes de force de la politique ancienne ; les u
208
gnes de force de la politique ancienne ; les unes
sont
simplement sorties de la Ligue qui les condamnait, les autres ont réa
209
ence d’un gouvernement mondial. Ce dernier, pour
être
effectif, capable de prévenir ou de tuer les guerres, devrait être ét
210
pable de prévenir ou de tuer les guerres, devrait
être
établi au-dessus des nations et aux dépens de leur souveraineté. Il n
211
s les pays les usines et les laboratoires, et qui
serait
seul dépositaire des secrets de fabrication actuellement détenus par
212
s États-Unis. Or M. Gromyko, délégué de l’URSS s’
est
aussitôt opposé au projet, pour la raison qu’il comportait « une atte
213
à l’heure avec raison qu’une ligue de gouvernants
est
par définition incapable d’empêcher la guerre, puisque dans un confli
214
re, puisque dans un conflit éventuel les arbitres
seraient
en même temps les chefs des États en conflit. Ils déclarent maintenan
215
ainetés nationales, et armé de la bombe atomique,
serait
au contraire trop puissant. Et, en effet, on peut redouter qu’un tel
216
Et, en effet, on peut redouter qu’un tel pouvoir
soit
tenté d’imposer à tout le genre humain l’idéologie la plus répandue a
217
a plus répandue au moment où il se formerait. (Ce
serait
aujourd’hui, probablement, un dirigisme mitigé, plus ou moins scienti
218
térialiste de l’homme.) Ainsi la paix mondiale ne
serait
établie qu’au prix d’une sorte de paralysie de l’histoire, et d’un ap
219
r. En effet, si les membres de l’exécutif mondial
étaient
désignés par les gouvernements nationaux, on retomberait soit dans l’
220
s par les gouvernements nationaux, on retomberait
soit
dans l’impuissance d’une ligue des nations, soit dans la dictature d’
221
soit dans l’impuissance d’une ligue des nations,
soit
dans la dictature d’une idéologie majoritaire. Si au contraire ils ét
222
d’une idéologie majoritaire. Si au contraire ils
étaient
désignés par les peuples et secondés par un Parlement mondial, la pos
223
opposition non seulement respectée mais organique
serait
sauvegardée. Le gouvernement mondial serait alors de type démocratiqu
224
nique serait sauvegardée. Le gouvernement mondial
serait
alors de type démocratique. (Car il apparaît de plus en plus claireme
225
en plus clairement que la clé des quatre libertés
est
dans la liberté d’opposition, et que celle-ci suffit à distinguer la
226
s.) Quant aux fonctions du pouvoir mondial, elles
seraient
définies par la nécessité même qui nous fait souhaiter qu’il existe :
227
arcie, inégalité économique, les trois phénomènes
sont
liés. Tant que subsistera le régime des États-nations absolument souv
228
blèmes qui se posent à son sujet. Car quelles que
soient
les difficultés que rencontre son établissement et les dangers en par
229
ent (comme de toute institution humaine), le fait
est
que cette fédération paraît aujourd’hui le seul remède contre la guer
230
ons souverains dans le carcan de leurs frontières
est
un dangereux anachronisme. Si nous sommes incapables de briser cette
231
frontières est un dangereux anachronisme. Si nous
sommes
incapables de briser cette féodalité et d’adapter nos structures poli
232
tures politiques aux réalités du xxe siècle, qui
sont
d’ores et déjà internationales, on ne voit pas ce qui pourrait empêch
233
cas, nous aurons une dictature dont le Führer ne
sera
pas un homme mais une nation. Alors, mais dans les ruines radioactive
234
crète de la liberté. L’utopie ou la tragédie, tel
est
le dilemme que nous offre le siècle. En nous refusant à l’une, nous d
235
usant à l’une, nous décidons pour l’autre. Ce qui
est
certain, c’est que l’une et l’autre ne peuvent plus être désormais qu
236
rtain, c’est que l’une et l’autre ne peuvent plus
être
désormais qu’aux dimensions de la planète. k. Rougemont Denis de,
237
t la moustache. Tous les hommes qui la portent en
sont
un autre… ça va.) Sartre a raison de dire que la guerre n’est pas fat
238
… ça va.) Sartre a raison de dire que la guerre n’
est
pas fatale, mais en fait l’argument porte surtout contre la théorie s
239
qui amènent à déclarer que telle ou telle liberté
est
dangereuse », elle s’appuie sans doute sur l’exemple soviétique, inco
240
La France
est
assez grande pour n’être pas ingrate (26 novembre 1947)n La honte
241
La France est assez grande pour n’
être
pas ingrate (26 novembre 1947)n La honte de l’Europe, ce n’est pas
242
(26 novembre 1947)n La honte de l’Europe, ce n’
est
pas sa misère, ni l’aide nécessaire de l’Amérique, mais la manière do
243
l me semble entendre un peu partout depuis que je
suis
rentré dans ce vieux monde. Or il ne s’agit pas d’une attitude nouvel
244
il ne s’agit pas d’une attitude nouvelle, ou qui
serait
le seul fait des communistes : il y a trente ans que l’Europe, la bou
245
s que nous les appelons au secours quand l’Europe
est
à feu et à sang (par notre faute, si je ne me trompe) : il y a trente
246
l’argent pour l’acheter, mais croyez-vous que ce
soit
par pure philanthropie ? Soyez sûr qu’ils y trouvent leur intérêt ! »
247
croyez-vous que ce soit par pure philanthropie ?
Soyez
sûr qu’ils y trouvent leur intérêt ! » Que voudrait-on qu’ils y trouv
248
ne tombe pas aux mains des Russes ; c’est qu’elle
soit
forte et donc unique, puisque les autres comptent sur sa faiblesse. M
249
dence, on a l’air d’en vouloir à ces Yankees de n’
être
pas de purs imbéciles, de ne pas donner comme ça, pour le plaisir, n’
250
r fait un grief d’avoir une politique, un crime d’
être
en mesure de l’appliquer, un ridicule d’avoir réalisé sans phrases ce
251
ne leur donnent pas. On va plus loin encore, s’il
est
possible. À croire la propagande des staliniens, c’est nous qui sauve
252
ique, dit-on, qui a besoin de l’Europe ! Car elle
est
à la veille d’une crise épouvantable, Staline l’a dit ; elle ne sait
253
e merci. Mais justement, puisque l’opportunisme n’
est
pas en cause, pour le seul honneur de l’Europe, il serait temps que n
254
as en cause, pour le seul honneur de l’Europe, il
serait
temps que nous prenions un peu de tenue. Si nous étions francs, nous
255
temps que nous prenions un peu de tenue. Si nous
étions
francs, nous dirions : la vraie menace contre l’indépendance européen
256
de l’Amérique, mais de nous-mêmes. La vraie, ce n’
est
pas que M. Clayton morigène les experts du Comité des Seize, mais que
257
L’indépendance économique des nations de l’Europe
est
une fiction. Tout le monde le sait, n’en parlons plus. Quant à l’indé
258
ontinent qu’elle trouvera sa seule garantie. Nous
serons
guéris de notre mauvaise conscience quand nous aurons admis que la tâ
259
and nous aurons admis que la tâche concrète, ce n’
est
pas de défendre l’Europe, mais de la faire. n. Rougemont Denis de,
260
e la faire. n. Rougemont Denis de, « La France
est
assez grande pour n’être pas ingrate », Carrefour, Paris, 26 novembre
261
ont Denis de, « La France est assez grande pour n’
être
pas ingrate », Carrefour, Paris, 26 novembre 1947, p. 1 et 5.